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Qu’elle soit assistante sociale, domestique, psychologue ou étudiante, la femme est

avant tout malheureuse dans KKD. Quant aux hommes, ils sont présentés sous leur
plus mauvais jour dans KKD. Discutez.
Faïza Guène, née le 7 juin 1985, est une auteure de la région parisienne. Elle publie
son roman ‘Kiffe Kiffe Demain’ en 2004 alors qu’elle n’a que dix-neuf ans à l’époque,
mais qui demeure jusqu'à aujourd'hui, l’une de ses œuvres les plus connues.

Le roman raconte l’histoire de Doria, adolescente de quinze ans, issue d’une famille
marocaine installée en France. Son père l’a quittée avec sa mère dès sa naissance
pour retourner au Maroc, et refaire sa vie là-bas, les laissant dans une situation
économique et sociale des plus difficiles.

On peut souvent considérer que la vie est faite de hauts et de bas, mais dans ‘Kiffe
Kiffe Demain’, les femmes semblent souffrir constamment que ce soit
émotionnellement que physiquement, menant de ce fait, une vie triste et sans
ambition. Des jeunes étudiantes aux quadragénaires, elles sont souvent victimes de
leurs pères, de leurs maris, ou de leurs patrons. Toutefois, la femme est forte, et
trouve parfois de remonter les difficultés auxquelles elle fait face pour s’en sortir et
trouver un peu de bonheur. L’homme, quant à lui, semble être un être dénué de
valeurs et de principes dans le texte, et ce peu importe son statut social, son âge,ou
sa profession. Il est, la plupart du temps, détestable et infâme. Ceci dit, Faïza Guène
tient quand même à inclure, par accoup des preuves que l’homme est tout de même
capable de se respecter et de respecter les autres (et même les femmes).

Tout d’abord, la femme qui souffre peu importe son origine sociale. Le malheur et la
souffrance peuvent s’exprimer sous différentes formes et cela peut se voir dans
‘Kiffe Kiffe Demain’. Nous avons en premier lieu, les difficultés financières. Dans une
société de consommation et un monde capitaliste, le capital financier joue gros sur
le quotidien des familles. Celles aisées ne trouvent aucun mal à se procurer un toit,
assurer l’avenir des enfants, et se faire plaisir. Quant à celles un peu plus modestes,
elles doivent survivre au lieu de vivre et peuvent même se retrouver délaissées par la
société alors qu’elles n’ont simplement pas eu autant de chances que les autres
dans le passé et ne méritent en aucun cas de vivre une vie plus dure.
Malheureusement, Doria, la protagoniste principale du texte vit bel et bien cette
situation aux côtés de sa mère, Yasmina. Cette dernière vit d’un misérable salaire en
faisant le ménage “dans un hôtel formule 1 à Bagnolet” alors que Doria n’est que
étudiante. Doria grandit donc dans la pauvreté ne pouvant jouer qu’avec “des
poupées de pauvres” achetées “à Giga Store” et se procurant des vêtements à bas
prix au secours populaire ou dans des friperies comme son “pull mauve” avec “sweet
dreams” écrit dessus qui s’avérait être un “haut de pyjama”. Elles ne peuvent que se
résoudre à rêver d’avoir de l’argent, d’être “quelqu’un d’autre”, d’être “ailleurs” afin
d’oublier cette triste vie. La vie peut aussi être dure lorsqu’on est victime de
discrimination, de racisme, de mépris, et de jugement. Le racisme est l’un des maux
de société les plus graves qui puissent exister car après toutes les atrocités qu’il a
pu causer dans l’histoire, l’on aurait tendance à croire que c’est du passé, que
l’humain a évolué, et qu’il n’est plus aussi bas et petit qu’avant. Que nenni! En effet,
cette haine envers les gens qui sont ‘différents’ existe tristement toujours et Doria et
sa mère font, une fois de plus, partie des victimes. Yasmina, tout d’abord, qui est
réduite au niveau d’esclave face à son responsable, M. Schihont. Ce dernier n’hésite
pas à l’insulter jusqu’à ce qu’elle pleure et l’appelle “Fatma” juste parce qu’elle est
musulmane. Elle fait aussi face au mépris des autres telles que Nacéra, “la sorcière”,
qui la prend de haut devant le Secours Populaire: “Tu viens pour… récupérer? Moi, je
viens pour… donner!”, ou encore Mme. Dutruc, l’assistante sociale, qui se comporte
de façon orgueilleuse à se vanter de son bronzage, sa ligne et de son mariage en
ayant conscience de ce que vivent Doria et sa mère. Cela est d’autant plus déprimant
lorsqu’on voit que Yasmina est victime des autres femmes et qu’elles ne soutiennent
donc nullement entre elles. Les femmes sont non seulement malheureuses mais
aussi égoïstes et ne sont pas solidaires. Doria, elle aussi, souffre de ce racisme.
Malgré le cadre scolaire qui est supposé enseigner aux élèves des principes et des
valeurs, c’est le proviseur de son école même, M. l’Oiseau, qui se montre raciste en
insinuant que Doria “se [fout] de sa gueule” quand il apprend qu’elle ne peut pas
manger pendant le ramadan. Il est inculte et plein de préjugés. Ce racisme, Doria le
vit depuis qu’elle est enfant comme lorsqu’aucun “enfant ne voulait jouer avec” elle
au “bac à sable des Français” car elle portrait du “henné sur la paume de la main
droite”. De plus, elle est moquée avec sa mère par les filles de son lycée au vide-
grenier à cause de leurs difficultés: “Téma la fille, habillée encore plus mal que sa
daronne”. Cette méchanceté et cette discrimation lui font mal et la rendent donc
malheureuse. Nous avons, par la suite, le jugement que subit la femme dans la
société. Au lieu d’essayer de comprendre ce qu’elles vivent réellement en leur parlant
et en les écoutant, les gens préfèrent se faire une idée préconçue à leur égard pour
ensuite leur ‘venir en aide’ car elles en auraient soi-disant besoin. Nous voyons cela
avec “la vieille à qui [Doria] demande un sac plastique” qui la “regarde avec ses yeux
mouillés”, M. Werbert, qui “se la joue prophète social” juste pour se donner bonne
conscience ou encore l’assistante sociale qui lui offre un “chèque-lire pour avoir des
bouquins gratos” en lui parlant comme “une assistée”. Ils ne comprennent pas
réellement leur souffrance et ne peuvent pas réellement les aider. La femme est
aussi jugée dans le cadre de la religion. Chacun de ses faits et gestes sont scrutés et
s’ils sont jugés déplacés ou immoraux, elle se crée une mauvaise réputation. Elle
n’est absolument pas libre de faire ce que bon lui semble par peur de se faire
remarquer. Celle qui en fait les frais c’est Samra. Cette dernière est “détenue” dans
sa propre maison, d’après Doria, à cause de son frère qui “la suit partout”, “l’empêche
de sortir”, et la tire même “par les cheveux” jusqu’à leur père pour qu’il la batte. Ainsi,
quand elle se sauve finalement de sa maison étant à bout, “tout le monde ne parle
que de [sa] disparition” dans le quartier. Comme elle n’a pas respecté les règles de
sa maison et de sa famille, on pense qu’elle est fautive, sans vraiment connaître ce
qu’elle vivait et on l’accuse. De plus, si sa fuite se devait de demeurer secrète c’est
qu’elle abordait un thème qui cause encore beaucoup de tort aux femmes: l’amour et
la religion. On pourrait penser que l’amour est l’un des piliers de la religion, ce qui
nous guide au quotidien pour être quelqu’un de ‘bien’ et de respectable.
Conséquemment, nous pourrions nous dire que tomber amoureux serait la plus belle
chose qui puisse arriver car de cet amour pourrait naître un enfant et donc une
famille. Or la religion contient certaines restrictions conservatrices qui limitent le
droit à l’amour. Nous comprenons que Samra ‘n’a pas le droit’ d’être avec l’homme
dont elle est amoureuse car il n’est tout simplement pas musulman comme elle. Elle
se retrouve donc à dire adieu à sa famille au nom de l’amour car elle est pécheresse
aux yeux de sa religion. Voilà le triste sort de Samra qui doit se cacher avec son
amoureux pour être heureuse: “En planque, comme des fugitifs, coupables d’un truc
normal.” D’ailleurs, elle n’est pas la seule à créer des litiges dans sa famille à cause
de la personne qu’elle aime. Lila, d’origine algérienne, a connu les mêmes problèmes,
si ce n’est pire avec le père de Sarah qui était breton. La famille de Lila l’avait
presque reniée en étant que très peu présente le jour de son mariage alors que son
beau-père avait commandé “beaucoup de porc au repas” comme un affront direct à
Lila. Ce manque de considération criant était même une attaque raciste envers elle,
visible aussi à travers les blagues du beau-père sur la religion. Lila n’avait d’autre
choix, par la suite, que de divorcer avec le père de Sarah qui “a dû tout lui prendre” à
part sa fille. La religion a causé la destruction du couple de Lila, la laissant seule et
sans amour. Nous comprenons que la place de la femme dans la religion est
secondaire et qu'elle ne joue qu'un rôle dérisoire. On ne pense nullement à ce qu'elle
pourrait ressentir car elle est plus un outil qu'un être humain. Ainsi, lorsque les
parents de Doria n'arrivent pas à donner naissance à un garçon, le père de décide
tout bonnement de quitter sa femme et sa fille pour retourner au Maroc et fondait
une nouvelle famille: "Papa, il voulait un fils." Cet abandon brise le cœur de Doria et
de sa mère alors que le père ne se sent pas coupable car sa religion ne condamne
pas cet acte. D'après Doria, il n'y a aucun autre moyen pour sa mère que de lui
trouver un nouveau mari tel que Aziz afin de se sortir de ce calvaire: "si maman
l'épousait, on ne serait jamais dans le besoin." La femme ne peut pas s'en sortir
d'elle-même, elle a besoin d'un homme. La triste destinée de la femme dans la
religion. Nous avons aussi la malheureuse Tante Zohra, la mère de Youssef. Son
mari mène une double vie entre la France et l'Algérie : "il fait du mi-temps". Elle doit
élever ses enfants seule mais quand elle apprend que Youssef est condamné à un
an de prison, elle est non seulement triste mais craint la réaction de "son mari le
vieux fou". Ce dernier finit effectivement par la frapper après une "violente dispute".
On a l'impression que c'est toujours de la faute de la femme, et qu'elle doit payer les
pots cassés. Mis à part la femme musulmane qui n'est rien snans un homme, nous
pouvons aussi trouver dans 'Kiffe Kiffe Demain', la femme indépendante, qu'elle soit
mariée ou non. Qu'elle ait réussi sa vie ou pas, elle a surtout réussi dans la vie en
étant psychologue ou assistante sociale. Néanmoins, bien qu’elle soit plus aisée et
possède un haut statut social, cette femme, elle non plus, ne vit pas une vie douce et
heureuse. Nous avons tout d'abord Mme. Dutruc, l'assistante sociale qui semble se
créer une façade de femme heureuse. De plus, elle ne fait que remarquer les aspects
négatifs de la maison de Doria et de sa mère comme sa "mauvaise mine", le "robinet
de la cuisine", le "thé à la menthe" "très sucré". Si elle ne voit que tout ce qui ne va
pas bien, c'est qu'elle-même n'est pas heureuse. Quant à Mme. Burlaud, la
psychologue de Doria, elle ne paraît pas vraiment aimer son métier. Elle peut parfois
être "un peu bizarre" et n'écoute pas Doria "très bien". Voilà ce qui résume en quoi la
femme dans 'Kiffe Kiffe Demain' est malheureuse.

Ceci dit, la femme peut vivre, par moment un peu de bonheur dans toute cette
tristesse. Nous pouvons dans un premier temps être heureux lorsque nous aimons
et lorsque nous nous sentons aimés. Cette relation de confiance et de soutien, nous
la retrouvons dans le texte à travers Doria et sa mère. Laissées pour compte par le
père de famille, elles sont seules mais affrontent chacune des difficultés main dans
la main. Doria est d'abord fière de sa mère et de sa "dignité". Elle voit en sa mère un
exemple à suivre et est donc heureuse de voir qu'elle lui inculque des valeurs: "c'est
comme ça que je voudrais être." Doria rêve aussi de lui faire plaisir comme lui payer
une "manucure" une fois riche. En attendant les beaux jours, Doria voit le verre à
moitié plein et reste optimiste. Cela lui permet de garder le sourire. Nous notons
aussi l'amour profond que Doria éprouve pour sa mère. Quand cette dernière lui
annonce qu'elle a "trouvé un nouveau travail" grâce à la formation avec joie, Doria est
tout aussi heureuse car le bonheur de sa mère résulte en son bonheur à elle. Cette
affection est réciproque et nous retrouvons cet amour maternel lorsque Yasmina
réconforte sa fille avant que Doria ne se rende au lycée pour la première fois. Elle lui
repasse ses "habits les moins moches", lui brosse les cheveux "avec de l'huile
d'olive", et lui passe du "khôl" autour des yeux. Ces petites attentions renforcent ce
lien mère-fille et leur remontent le moral à toutes les deux. Mère et fille ne sont pas
les seules à jouir de l'amour. Nous découvrons aussi l'amour sentimental entre Lila
et Hamoudi. Après toutes les souffrances qu'elle a dû vivre dans le passé, Lila
rencontre en Hamoudi l'amour de sa vie avec qui elle a "des projets de mariage".
Nous rencontrons, finalement, une Doria plus mature et pleine d'espoir. Elle ne veut
plus broyer du noir et s'apitoyer sur son sort et blâmer le "mektoub". Elle décide
d'oublier tous ses malheurs et dit avec un sourire: "c'est pas grave". La femme a droit
au bonheur.

Si les femmes jouent un rôle principal dans 'Kiffe Kiffe Demain', les hommes sont
eux aussi très présents dans le texte. Dans la plupart de leurs apparitions, ils sont
présentés comme des personnages pleins de vices et de défauts qui font même du
mal aux femmes. Le premier homme qui nous est présenté est le père de Doria. La
première impression que nous nous faisons de lui est celle d'un égoïste et d'un lâche
qui abandonne sa famille: “Il est parti loin”. Il nous offre donc, ainsi qu’à Doria, une
piètre paternelle qui crée un vide dans la vie de sa fille. La famille est la chose la plus
sacrée qui puisse exister et ce lien de sang est supposé se transformer en lien
d’amour garant d’une éducation et d’un apprentissage de la vie et de valeurs. Le
départ du père démontre qu’il fuit ses responsabilités faisant de lui un père indigne.
Pire, la raison de son départ est qu’il doit absolument avoir un fils “pour sa fierté, son
nom”. En disparaissant sans rien dire, il fait Doria se créer un complexe à propos de
son sexe qui s’en veut d’être une fille et pense même à la mort; “j’y pense à la mort
des fois”. Plus qu’un père indigne, cet homme est aussi un bourreau de mari qui
n’apportait aucune considération aux sentiments de sa femme, lorsqu’il était encore
là. Il lui imposait de rester à la maison car “il n’était même pas question qu’elle
travaille”. Sa fierté masculine lui montait à la tête et il refusait d’accepter une
potentielle aide financière de la part de sa femme alors qu’ils étaient “grave en galère
de thune”. Cette mentalité patriarcale est le symbole d’un homme qui vit dans le
passé avec des idéaux et principes archaïques. Plus que l’infâme gestion de sa vie
de famille, que dire de sa relation à sa propre religion. Musulman, il ne respecte
aucune règle de l’islam si ce n’est celle qui permet la polygamie. Il est donc
alcoolique et boit jusqu’à ne plus se souvenir “comment rentrer” chez lui. Il le fait
même pendant le mois sacré du ramadan où il va se cacher, sans amour propre,
dans “la boîte à recyclage” pour boire de la bière. Par ailleurs, le père de Doria n’est
malheureusement pas le seul homme à être dépourvu de vertu dans ‘Kiffe Kiffe
Demain’. Le mari de Tante Zohra est tout aussi horrible. En apprenant l’arrestation de
son fils, Youssef, il frappe Tante Zohra, sans scrupule, jusqu’à ce qu’il en ait “des
palpitations au coeur”. Il ose même, par la suite, faire comme si de rien était en lui
demandant “un verre d’eau pour se désaltérer”. On y retrouve ici les mêmes défauts
qu’au mari de Yasmina; des maris violents et dangereux. Outre le mauvais mari et
père de famille, l’homme est aussi un adolescent ou un jeune adulte. Il reste malgré
tout bourré de défauts. Nous avons par exemple Hamoudi. Doria semble se voiler la
face en portant en haute estime Hamoudi alors qu’il “passe son temps à fumer des
pétards”. Il vit dans la drogue au quotidien, source des plus grands dangers pour les
jeunes. Il banalise cette arme fatale qui est la drogue en réinventant le dicton ‘haut
comme trois pommes’ en “haute comme une barrette de shit”. Ce drogué a même
fait de la prison pour une sombre affaire mais reste bien entendu mystérieux à ce
sujet: “c’est pas de ton âge”. Il est donc l’archétype du jeune de banlieue, un
délinquant qui n’a plus aucun avenir. À savoir qu’il “vit du deal” et qu’il est
probablement impliqué dans un trafic de voitures car “il [en] change souvent”. Nous
avons finalement Shérif, qui représente chez l’homme la paresse et le manque
d’ambition. Ce “mec de la cité" dépense tout son argent dans le jeu en jouant “tous
les jours au tiercé”. L’homme est cette fois-ci un accro qui ne sait pas se contrôler et
gérer son porte-monnaie. Il préfère croire les paroles d’une “voyante” qui lui a promis
qu’il “deviendrait bientôt très riche” que de se trouver un travail et de mener une vie
saine sans jeu. Ainsi, ces hommes dans le texte sont tout ce qu’il y a de plus
détestable et Faïza Guène fait en sorte d’exposer le maximum de facettes négatives
qu’un homme peut avoir.
Toutefois, l’homme peut aussi montrer des qualités dans ‘Kiffe Kiffe Demain’. Nous
pouvons commencer par Aziz, l’épicier. Alors que le rêve français des Maghrébins ne
devient pas toujours réalité comme ce que vivent Yasmina et sa cousine Bouchra qui
pensaient s’être “trompé[e]s de pays” en arrivant en France, Aziz, lui, a réussi son
pari. Gérant de son propre commerce le “Sidi Mohamed Market”, on peut dire qu’il
est un homme d’affaires à succès et “beaucoup de gens l’aiment bien ici”. Aziz
prouve donc que les hommes peuvent avoir une bonne hygiène de vie et travailler de
façon licite pour subvenir à leurs besoins. Ensuite, nous avons Hamoudi. Certes, il vit
dans le monde de la drogue, mais cela est presque contre son gré et lui-même
souhaite en sortir et cherche “une nouvelle vie”. Son évolution au fil du texte avec sa
rencontre avec Lila exprime son désir de changer, de devenir meilleur. Après toutes
ces années où il a déçu sa famille, sa mère peut enfin “être contente” de son
“mariage”. Même si les exemples se font rares ils existent quand même et montrent
que les hommes sont capables de se montrer humains.

En résumé, nous avons pu voir, dans un premier temps que la femme est
malheureuse dans ‘Kiffe Kiffe Demain’ et cela indépendamment de sa situation
financière, familiale, ou de son âge. La femme souffre est cela est symptotique de la
société dans laquelle Faïza Guène vivait en 2004 et dans laquelle nous baignons
encore aujourd’hui. Dix-huit ans après, rien ne semble avoir vraiment changé, les
femmes sont toujours les victimes de ce monde patriarcal. Ce monde patriarcal,
présent dans le texte, que nous avons aussi pu décortiquer. Les hommes font
grosso modo ce qu’ils désirent sans jamais être réprimandés car c’est les ‘rois’. Ils
abusent de ce pouvoir, parfois même inconsciemment, et mènent des vies
déséquilibrées et sans éthique. Néanmoins, la beauté de la littérature nous permet
toujours de trouver un peu de lumière même lorsque tout paraît si sombre. Par
conséquent, nous avons aussi pu trouver, bien entendu, en nombre réduits des
exemples prouvant aussi bien le bonheur de la femme dans ‘Kiffe Kiffe Demain’ que
l’homme présenté d’un aspect positif. Ces exemples ne font, malgré tout pas le
poids face aux deux idée initiales, ce qui nous indique clairement que la femme est
bel et bien malheureuse dans ce texte tandis que l’homme est un être vil qui a tout
pour déplaire.

Personnellement, ma première lecture de ‘Kiffe Kiffe Demain’ m’a beaucoup frappé.


C’était comme un plongeon direct dans ce monde de la banlieue parisienne qui jouit
de sa population cosmopolite, mais qui souffre de cette même multitude qui crée
des inégalités. C’est ensuite la condition féminine qui m’a fortement attristé. Ce n’est
pas le premier ouvrage qui contient de la violence physique ou non que je lis mais
celle présente dans ‘Kiffe Kiffe Demain’ me donne l’impression d’être d’une toute
autre nature. Que ce soit la violence des coups de la femme battue ou la violence
verbale du racisme, la violence des larmes et des pleurs et tout cela associé à un
sentiment d’injustice, je ne peux que ressentir de la tristesse et de la compassion
pour Doria et pour toutes ces femmes qui méritent tellement plus. Quant aux
hommes, je me sens parfois presque mal à l’aise de me dire que je fais partie de
cette catégorie d’être humains lorsque je vois les atrocités dont il est capable. Bien
sûr, nous savons tous que l’homme peut très souvent être une ordure. Par contre, je
trouve que Faïza Guène abuse quelque peu sur la piètre image de l’homme qu’elle
veut dépeindre. Je comprend que ce texte représente le point de vue d’une jeune
adolescente qui s’est fait delaisser par son père et qui ne peut donc s’empêcher de
voir en l’homme un ennemi, mais la création d’un paradoxe plus flagrant entre ce que
Doria pense de l’homme et ce que l’homme peut réellement être dans la vie, aurait
peut-être rendu l’oeuvre encore plus iconique. La rendre plus réaliste, et de ce fait
plus parlante aux yeux de tous et surtout aux yeux des jeunes. Je tiens aussi à
souligner un fait marquant qui est l’omission de noms pour les horribles
personnages qui sont les pères de Doria, de Youssef, de Lila, et de Samra, qui ont
tous à leur façon délaissé leur progéniture. Faïza Guène a tenu à garder leur identité
secrète comme s’ils étaient si odieux que leurs noms ne méritaient pas de figurer
dans cet ouvrage.
‘Kiffe Kiffe Demain’ est loin d’être la seule œuvre de Faïza Guène. Plus qu’une
romancière, elle est une véritable artiste qui utilise toutes sortes de moyens pour
s’exprimer et faire vivre des émotions. Ainsi, nous retrouvons Ahlem dans le roman
‘Du rêve pour les oufs’ qui, un peu à la façon de Doria dans ‘Kiffe Kiffe Demain’ est
originaire du Maghreb mais vit en banlieue parisienne. Nous retrouvons alors le
thème de la vie en banlieue et de ses difficultés. Faïza Guène sait aussi se réinventer
comme dans ‘Les gens de balto’ où elle nous offre une agréable lecture d’un roman
policier. Nous pouvons finalement noter que Faïza Guène se transforme en
scénariste à la réalisation du film ‘Sol’ sorti en 2020. Nous y retrouvons cet amour
maternel entre la grand-mère et son petit-fils “Jo”. Cette véritable tendresse entre
mère et fille ou grand-mère et petit-fils est une vraie touche signée Faïza Guène.

Somme toute, la femme passe un vrai calvaire dans ‘Kiffe Kiffe Demain’. Cependant,
avec l’essor du féminisme et du combat pour l’égalité des genres sur les années
récentes, la femme n’a probablement jamais été plus épanouie, heureuse, et
représentée qu’aujourd’hui. Pouvons-nous donc insinuer que ‘Kiffe Kiffe Demain’
porte un regard démesurément sombre sur la place de la femme dans la société et
ses sentiments?

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