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INTRODUCTION
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Malimouna vit à Boritouni, à 800 kilomètres de la capitale, et tous les
habitants de ce petit village perdu au milieu de nulle part vivent dans le
respect des traditions. Il ne viendrait à personne l'idée d'en contester le
caractère inéluctable. Le fait d'échapper aux affres de l'excision
représente donc pour Malimouna un événement tout à fait inattendu.
Mais le soir de ses noces, cette entorse aux us et coutumes ne passe pas
inaperçue et son mari découvre « horrifié » (p.39) que sa jeune épouse
n'a pas subi les mutilations rituelles auxquelles nulle femme de la région
n'a jamais pu se soustraire. Toutefois, avant que le vieil homme soit
revenu de sa surprise, Malimouna l'assomme avec une statuette qui se
trouve à portée de main et elle s'enfuit aussi vite que possible. Ainsi
commence un long périple semé d'embûches.
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en face d'une femme » [1]. Il s'agit là d'un sujet tabou dont on ne parle
d'habitude qu'à mots couverts, comme de tant d'autres, et Malimouna se
retrouve à la rue. Sa situation est d'autant plus précaire qu'elle se trouve
en France – où elle a accompagné ses patrons pour s'occuper de leurs
enfants – au moment de son agression et de sa fuite.
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« L'ambiance noire » (p.77) qu'elle retrouve dans le quartier populaire de
la capitale où elle s'installe, entourée d'immigrés africains de toutes les
nationalités, lui permet de retrouver son équilibre. Son travail de
coiffeuse et de nettoyeuse lui garantit l'indépendance économique et
financière à laquelle elle aspire mais ce petit morceau d'Afrique au cœur
de Paris s'avère être lui aussi le théâtre de vilenies et de comportements
avilissants qui ravivent le souvenir douloureux des manières d'être et de
penser dont elle avait elle-même été victime quelques années
auparavant. Elle n'a qu'à regarder autour d'elle pour retrouver l'univers
des mariages arrangés, des jeunes Africaines enfermées chez elles, des
épouses rudoyées par un mari qui leur fait une ribambelle de gosses, des
familles qui font exciser leurs filles et celles qui leur refusent le droit à
l'éducation et à l'émancipation. L'exemple de sa voisine de palier Fanta
en est l'exemple le plus éloquent. Elle donne naissance à quatre enfants
au cours des quatre premières années de son séjour en France, ce qui
réduit à néant son rêve d'aller à l'école, et lorsque son mari découvre
qu'elle a été voir un docteur qui lui a prescrit la pilule, il la bat
violemment. Le cauchemar atteint son paroxysme lorsque Fanta accepte
de faire exciser sa fille aînée – qui s'y oppose violemment et meurt aux
mains de ses tourmenteurs.
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bouger les choses. Ses efforts sont couronnés de succès lorsqu'elle
obtient son diplôme et un poste de travail dans un Centre qui s'occupe de
femmes immigrées. Comme sa propre expérience le lui a appris, la
liberté passe par « l'instruction qui, au bout du compte, aide à mieux s'en
sortir financièrement, et donc à être moins dépendante de son
compagnon » (p.105). Toutefois, cette idée lui attire les foudres des
maris concernés « que la seule idée d'indépendance de leurs femmes
horripilait » (p.106). Et comme pour rendre son travail plus précaire
encore, elle commet l'irréparable, aux yeux de ses compatriotes, en
tombant amoureuse d'un Blanc. C'est donc au moment-même où elle
devrait célébrer l'amour et la réussite professionnelle, qu'elle renoue
avec les doutes et les incertitudes.
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rabâchent qu'« elle est différente des autres Africains » (p.134) pour
justifier sa présence parmi eux. Rien, semble-t-il, ne peut être accompli
à l'intersection de deux mondes qui refusent de se rencontrer et de se
mélanger. Il faut choisir son camp et ce malheureux constat marque la
fin de la vie commune de Malimouna et de Philippe. Bien qu'auréolées
de sincérité et de sentiments partagés, leurs amours, romantiques à
souhait, ne résistent pas au regard des autres. Le destin de Malimouna
est scellé: pour avancer, elle doit partir.
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CONCLUSION