Vous êtes sur la page 1sur 17

Le Crowdsourcing est un processus d’innovation pour

l’exécution des tâches créatives et des tâches complexes

Sonia Salmi
Enseignate
ESSEC (Tunisie)
Salmi.Sonia@gmail.com

Tarek Abdellatif
Expert Consultant
A.2.W.M Vanves (France)
tarlatif@yahoo.fr

1
Résumé :
A partir d'une vue d'ensemble des différents types de crowdsourcing, nos travaux ont mis en
évidence ceux où la foule est utilisée pour obtenir des idées créatives (crowdsourcing tâches
créatives) ou d'obtenir des solutions aux problèmes (crowdsourcing tâches complexes). Jusqu'à
présent, il y peu de connaissances sur les caractéristiques du processus utilisé pour agréger les idées
de la foule. Par conséquent, cette recherche a examiné les caractéristiques de processus pour les
deux types de crowdsourcing. Une étude qualitative basée sur une analyse sémantique nous a
permis de confirmer les caractéristiques du processus d’innovation du crowdsourcing qui
contribuent à la réalisation des tâches complexes et des tâches créatives.
Mots-clés: Crowdsourcing, Innovation, processus du Crowdsourcing, interaction, rétroaction, la
foule, idées créatives, tâches complexes.
Abstract :
From an overview of the different types of crowdsourcing, our work has highlighted those where
the crowd is used to obtain creative ideas (crowdsourcing creative tasks) or to obtain solutions to
problems (crowdsourcing complex tasks) . So far, there is little knowledge about the characteristics
of the process used to aggregate ideas from the crowd. Therefore, this research has examined the
characteristics of processes for the two types of crowdsourcing.
A qualitative study based on a semantic analysis allowed us to confirm the characteristics of the
innovation process of crowdsourcing that contribute to the achievement of complex tasks and
creative tasks.
Keywords: Crowdsourcing, Innovation, Crowdsourcing process, interaction, feedback, the
crowd, creative ideas, complex tasks.

1.Introduction
L’ensemble de la communauté scientifique et des acteurs de terrain s’accorde aujourd’hui à
reconnaître sans conteste que l’innovation est indispensable à la compétitivité, voire à la survie des
entreprises. Une entreprise qui n’innove pas est condamnée à un terme plus ou moins long à la
disparition (Barsch, Capozzi et Mendonça, 2007; Andrew, Manget, Michael Taylor et Zablit, 2010).
L’innovation apparaît ainsi comme une source d’avantages concurrentiels importants. Elle assure la
croissance de l’entreprise, l’augmentation de sa valeur pour l’ensemble des partenaires et elle peut
être un outil de gestion des ressources humaines, lorsqu’elle articule un projet d’entreprise, ou
encore elle peut modifier la perception symbolique de l’entreprise (Belotti et Temri, 1999).
Une innovation est généralement décrite comme une pratique ou un nouvel objet. En effet, Rogers
définit l'innovation comme " une idée; une pratique ou un objet qui apparait nouveau à un individu
ou à une autre entité qui l'adopte ...Si l'idée semble neuve à l'individu c'est une innovation".
(Rogers, 2003) L'innovation a été comprise comme une… ‘mise en œuvre d'un produit nouveau ou
l’amélioration de façon considérable (bien ou service), ou un processus, une nouvelle méthode de
marketing, ou une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques de gestion, dans
l’organisation du lieu de travail ou dans les relations extérieures. (OCDE, Eurostat 2005).
Après le développement des concepts de l'innovation, ce sont les modèles du processus d'innovation
qui ont vu le jour et qui sont devenus objets de recherche (Carlsson et al, 2002; Godin, 2006). En
effet, certains modèles décrivent le cycle de vie de l'innovation par la forme en S et par la fonction
logistique, qui se compose de trois phases distinctes: l'émergence, la croissance et la maturité
(Howard et Guile, 1992). D'autres études, mettent l'accent sur les caractéristiques de l'innovation
qui sont définies comme étant des étapes de développement. Par ex. Maidique distingue la
reconnaissance de l'invention, le développement, la réalisation et la distribution des phases du
processus d'innovation (Maidique, 1980). De plus, indépendamment du modèle, une innovation est
généralement décrite comme une pratique ou un nouvel objet (Rogers, 2003) et elle commence
évidemment avec de nouvelles idées (Tushman, 1977). Traditionnellement, ces idées ont été
2
générées par des professionnels comme des ingénieurs, des commerçants ou des designers au sein
d'une entreprise (Schulze et Hoegl, 2008; Poetz et Schreier, 2010). Toutefois, il ya eu récemment un
changement dans cette ligne de pensée (Poetz et Schreier, 2010) ce qui a poussé ces deux
chercheurs à pauser la question suivante: Qui est capable de trouver des meilleures idées, les
employés professionnels de l'entreprise ou serait-ce plutôt les clients ou utilisateurs potentiels de ces
idées? Ce n'est que récemment que ces utilisateurs potentiels ont été considérés comme une
alternative utile pour générer de nouvelles idées. Par conséquent, de nombreuses organisations
externalisent maintenant la recherche de nouvelles idées (Surowiecki, 2004).
Cette méthode de la création d'idées, relativement nouvelle, est appelée: le crowdsourcing. Comme
son nom l'indique, c’est l'externalisation vers la foule (Howe, 2006). En effet Howe, 2006 définit le
crowdsourcing comme " Simply defined, crowdsourcing represents the act of company or intution
taking a function once performed by employees and outsourcing it to an undefined (and generally
large) network of people in the form of an open call. this can tacke the form of peer-production (
when the job is performed collaboratively) but is also often undertaken by sole individuals. The
crucial rerequiste is the use of the open call format and the large network of potentiel laborers". Le
concept de crowdsourcing est encore à son début et donc tout à fait nouveau dans le domaine de
l'innovation, aussi les chercheurs ont-ils une connaissance limitée à ce sujet. Les quelques études
qui ont été faites portaient essentiellement sur la motivation de la foule et les différences entre les
types de crowdsourcing (Kleeman et al, 2008; Acar et Van den Ende, 2011). Cependant, d'un point
de vue organisationnel, la recherche dans le processus de crowdsourcing est rare (Geiger, Seedorf,
Schulze, Nickerson et Schader, 2011). Donc, vu que la littérature existante ne couvre pas
suffisamment le processus de crowdsourcing (Geiger et al. 2011), notre article va traiter la question
suivante: Le concept de crowdsourcing constitue-t-il un processus d’innovation pour
l’exécution des tâches créatives et des tâches complexes?
Cette problématique nous conduit à nous poser les deux questions de recherches intermédiaires
suivantes:
1/Comment peut-on considérer le crowdsourcing comme un processus d’innovation?
2/Est ce que les variables du processus d’innovation ont le même effet sur le crowdsourcing tâches
complexes et le crowdsourcing tâches créatives ?
Cette recherche tentera de clarifier le processus d’innovation de crowdsourcing et de préciser l’effet
de ce processus aussi bien sur les tâches créatives que sur les tâches complexes. Ainsi, nous
présenterons brièvement une revue générale de la littérature sur le processus d’innovation et le
crowdsourcing. Puis, nous présenterons les résultats de notre étude sémantique effectuée sur un
échantillon de 23 bénévoles motivés et intéressés par le web, l’E-management, la pratique et le
management des communautés virtuelles qui a été combiné avec une étude déductive.
2. Revue de la littérature:
2.1. Le processus d’innovation:
La littérature décrit le processus d'innovation comme un processus linéaire. Une telle représentation
simple des processus d'innovation peut être trouvée dans les premiers ouvrages tels que celui de
Cooper qui affirme que le processus d’innovation “débute par une idée, développée par des activités
techniques et marketing qui s’effectuent au sein de départements dans lesquels sont prises des
décisions et entre lesquels circulent des informations” (Cooper, 1979). Dans "Marquis" modèle
(Marquis, 1988), le processus commence par la reconnaissance initiale de la faisabilité technique et
l'évaluation du marché potentiel ce qui exige, à son avis, la formulation d’idée, la résolution de
problèmes (recherche, expérimentation et calcul; informations facilement disponibles), solution
(solution par invention; solution grâce à l'adoption), du développement (les bogues et échelles) et de
l'utilisation et de la diffusion (mise en œuvre et d'utilisation).
Kline —Rosenberg (Kline et Rosenberg, 1986) ont refusé le modèle linéaire, et proposé le modèle

3
de la "chaine interconnectée d'innovation" qui met l’accent sur les rétroactions, sur les remontées
des phases situées en aval vers les phases amont, sur l’interactivité de la recherche et des différentes
phases du processus d’innovation. Dans ce modèle, le commencement de l’activité n’est pas
fonction de l’état final de l’activité précédente. Néanmoins, il conserve la phase de prise de décision
à la fin de chaque activité. En ce qui concerne la structure séquentielle (modèle linéaire), elle
permet de diminuer la durée du processus d’innovation, mais augmente en même temps, selon
certains auteurs (Xuereb, 1991), les risques financiers, car l’évaluation d’une étape a lieu alors que
l’étape suivante a déjà commencé.
Ces définitions ne permettent pas d’appréhender la «dynamique» du processus, c’est-à-dire les
règles d’occurrence des activités constitutives du processus, dont chacun des auteurs parle dans sa
définition, même si la plupart des auteurs fondent leur modélisation sur le niveau de linéarité du
processus. (Tomala,Senechal et Tahon, 2001).
En effet cette limite a poussé plusieurs chercheurs à développer d’autres modèles de processus.
Ainsi, Rothwell (Rothwell, 1992) a présenté cinq générations de modèles d’innovation dans un
tableau (voir tableau 1). Il précise que l’innovation est un processus qui implique la présence de
plusieurs acteurs, qui demande un niveau élevé d’intégration tant au niveau inter que intra
entreprise et qui est de plus en plus facilité par la mise en réseau à base des TI (les technologies
informations).
Tableau 1 Evolution de la conceptualisation de l’innovation
Générations Principale caractéristique
1 et 2 Modèle linéaire –necessite push et pull technologie
3 Interaction entre les differents éléments et les boucles de rétroaction entre eux
4 Système intégré et réseau étendu, réponse flexible et personnalisée, innovation continu
D’autres auteurs ont proposé sept générations de modèles d’innovation (voir tableau 2). Le
principal intérêt de ces différentes approches de modélisation réside dans le fait qu’elles peuvent
permettre de situer, de comprendre et d’optimiser la prise de décision par rapport au processus.
Nous venons de voir par exemple qu’une logique de type séquentiel impose des contraintes
temporelles sur la prise de décisions, mais qu’elle permet par contre une diminution du risque. La
logique parallèle quant à elle assure une meilleure exhaustivité dans les contraintes prises en
compte, mais implique un système de décision multicritère. Nous nous rapprocherons davantage de
la dernière approche de modélisation, en considérant qu’une grande partie de la problématique du
pilotage des processus d’innovation consiste à garantir une parfaite adéquation entre un état donné
du système technologique (perçu à travers le modèle produit) et les états du système d’information
et du système de décision correspondant (perçus au travers des modèles de processus). Toutefois
ces modèles changent à chaque fois qu'un nouveau projet d'innovation est démarré.
Tableau 2: modèles d'Innovation évolution dans une perspective historique
Génération Période Auteurs de Modèle d'Innovation Essence du modèle
1 1950-S— fin 1960-s La technologie Processus linéaire
Idées fondamentales Push
Fin des années 1960 —s – Myers et Marquis
2 Marché (besoin) R&D du souhait du client
première .1969 pull
La moitié des 1970-s
Mowery et Attelage du modèle L'interaction des différentes fonctions
Deuxième moitié des Rosenberg,1979
3 années
1970 er fin des Rothwell et L'interaction avec la recherche institution
Modèle interactif
années 1980-s Zegveld, 1985 et marche
Institutions et marché

Fin des années 1980 — Kline et Rosenberg, Processus simultané avec


4 Début 1990-S 1986 Modèle intégré Boucles de rétroaction;«chaine-lié» modèle»

4
Intégration de systèmes et de réseaux
5 1990-S Rothwell, 1992 Modèle en réseau

Innovation et collaboration Exploitation


6 2000-S Chesbrough, 2003 L'innovation ouverte
de plusieurs chemins
7 (Nouvelles, Se concentrer sur l'individu et
Pas encore formées) 2010-S Innovateur ouvert Conditions-cadre en vertu
duquel à devenir innovantes
Source: auteurs» adaptation de Camodall» Orto et Ghiglione (1997) et Rothwell (1992).

2.2 Le fondement de Crowdsourcing


Le mot Crowdsourcing est construit à partir du mot anglais «Crowd» qui signifie «la foule» et d’une
contraction du mot «Outsourcing» que l’on peut traduire par «externalisation». Ainsi,
«Crowdsourcing» peut se traduire par «Externalisation vers la foule», par commodité et parce qu’il
est entré dans le langage courant nous utiliserons le terme de Crowdsourcing dans ce texte (Schenk,
2009). Pour Lebraty (2007) le Crowdsourcing n’est qu’un nouveau mode d’externalisation: «Le
crowdsourcing signifie l’externalisation par une organisation, via un site web, d’une activité auprès
d’un grand nombre d’individus dont l’identité est le plus souvent anonyme».
Classiquement le mot «externalisation» signifie créer de la valeur à partir de l’extérieur de
l’organisation. C’est un accord qui stipule qu’une organisation fait effectuer une partie des activités
dont elle assure le traitement par une autre organisation (Arnold, 2000). Le Crowdsourcing
constitue une nouvelle modalité de management des activités par une organisation. Cette modalité
va se développer aux côtés des approches traditionnelles (internalisation et externalisation
classique). Le Crowdsourcing s’inscrit, ainsi, dans la recherche de plus de flexibilité: cette
flexibilité concerne les salariés qui risquent la fragmentation de leur activité en une multitude de
micro tâches les conduisant alors à recevoir plusieurs micro revenus. Elle concerne ensuite les
organisations qui ont recours au Crowdsourcing. En effet, il apparaît plus facile pour elles de
rompre un contrat ou de trouver de nouveaux fournisseurs que de se lier à un partenaire bien
identifié (Lebraty, 2007).
Les opinions concernant les effets potentiels du Crowdsourcing divergent. Ainsi, pour certains le
Crowdsourcing apparaît comme un phénomène ayant des implications positives (Kaufmann,N;
Schulze, T; Viet, 2011 et Brabham, 2008), cependant, d’autres (majoritairement des internautes
non identifiés) estiment qu’il s’agit d’un phénomène négatif qui tend à renforcer l’incertitude (le
risque de perte de compétences pour les organisations et même pour la société dans son ensemble)
et la précarité.
En guise de synthèse des différents commentaires, Lebraty (2007) souligne la convergence
concernant la nature du phénomène du Crowdsourcing, et une divergence d’interprétation quant à
ses effets. Par ailleurs, ces interprétations apparaissent comparables à celles énoncées lors des
grandes vagues d’externalisation des années 80 (Galbraith et Kay, 1986).
Nous remarquons que, relativement peu de littératures scientifiques ont abordé le processus du
crowdsourcing. De plus, la plupart des variables du processus dans cette recherche s’est basée sur la
connaissance de la littérature de l'innovation open source. Enfin, ce type d'innovation est soupçonné
d’avoir la plus grande ressemblance avec le crowdsourcing (Schenk et Guittard, 2009).
2.3. Types de Crowdsourcing
La littérature sur le crowdsourcing distingue plusieurs pratiques de crowdsourcing. Les typologies
les plus utilisées du crowdsourcing sont: la typologie originale par Howe (2008), celle élaborée par
Kleeman, Voss et Reider (2008), Schenk et Guittard (2009) et Brabham (2010) et la typologie du
site «Crowdsourcing.org», une autorité dans le domaine du crowdsourcing, fondée par des
professionnels du domaine. (Crowdsourcing.org, 2011).
Les typologies ont ainsi plusieurs points de similitude. En effet, elles sont fondées sur la nature de
la pratique de l'initiative de crowdsourcing. Le crowdsourcing peut être, de la sorte, utilisé à de
5
nombreuses fins, telles que le marketing, l'externalisation ou la résolution de problèmes. Aussi, la
différence entre les typologies réside-t-elle dans l’absence de pratiques pour certaines typologies.
Certains auteurs à l’instar de Howe (2008), Schenk et Guittard (2009), Brabham (2010) Kleeman et
al. (2008) et Crowdsourcing.org (2011) proposent cinq pratiques ou groupes. Le premier groupe des
typologies est fondé sur les pratiques visant à obtenir des solutions aux problèmes posés. Le
deuxième groupe vise à obtenir des idées créatives de la foule. Le troisième groupe a pour but
d’obtenir l'opinion de la foule, à l’exemple du vote par la foule (le sondage d'opinion). Le quatrième
groupe, quant à lui, a pour objectif l'externalisation des tâches vers la foule et ce à l’image de la
traduction (tâches de sous-traitance). Enfin, il ya aussi une utilisation du crowdsourcing dans le but
de lever des fonds de la foule (collecte de fonds). Nous pouvons, cependant, observer qu’un autre
groupe d’auteurs tels que Schenk et Guittard (2009) a opté pour un autre classement, en
développant trois types de Crowdsourcing à savoir: le crowdsourcing tâches complexes, le
crowdsourcing tâches créatives et le crowdsourcing tâches routinières. Toutefois, comme nous
l’avons précédemment expliqué dans notre étude, nous allons étudier deux types de crowdsourcing
à savoir le crowdsourcing tâches complexes et le crowdsourcing tâches créatives.
En parlant du crowdsourcing des tâches complexes, nous pouvons souligner qu’il est décrit comme
étant la capacité de la foule à trouver des solutions aux problèmes (Schenk et Guittard, 2009), ceci
est en ligne avec ce que Howe (2008) appelle l'accès à la «sagesse de la foule» pour trouver des
solutions à un problème défini et conformément à la typologie de Kleeman et al. (2008) et Brabham
(2010). Brabham (2010) compare, en outre, cette pratique au fait de trouver une aiguille dans une
botte de foin.
En ce qui concerne le crowdsourcing des tâches créatives, Schenk et Guittard (2009) le décrivent
comme une pratique dans laquelle la foule offre une certaine nouveauté et créativité. Ce qui va dans
la continuité avec les typologies de Brabham (2010), Howe (2008) et Crowdsourcing.org (2011). Ce
dernier ajoute que la foule dispose de plusieurs esprits créatifs permettant de développer la
conception et d’augmenter l'originalité.
2.4 Les contributions du crowdsourcing:
Du moment qu’une entreprise décide de réaliser une opération d’externalisation, elle se fonde sur
un certain nombre de facteurs déterminant son choix. L'émergence du crowdsourcing réside, de la
sorte, dans les perspectives suivantes (Arnold, 2000; Lebraty, 2007):
- La réduction des coûts: confie la tâche à des personnes non professionnelles, mais toutefois
qualifiées. L’appel à ces personnes réduit, par conséquent, le coût de la main-d’œuvre étant donné
qu’elles n’exigent point de rémunération ou dans certains cas des sommes modiques.
- L’efficacité: Les tâches de crowdsourcing sont effectuées avec des participants issu du grand
public et ce grâce à l'aide de l'internet permettant ainsi d’économiser un temps considérable. Ces
participants sont des utilisateurs de produits ou de services qui connaissent exactement les besoins
des consommateurs. Grâce à leurs idées, les produits proposés s’avèrent donc plus pratiques et le
processus d'innovation est ainsi plus simple. Enfin, la participation des clients renforce la relation
entre les consommateurs et l’organisation.
- La flexibilité et la mondialisation: Négligeant les contraintes géographiques, politiques ou
autre, le processus du crowdsourcing néglige tout type de frontière grâce au développement de
l’internet et à la propagation de son application, facilitant de la sorte le recrutement d’un personnel
externe.
- L'implication de l'utilisateur: L’aspect majeur du Crowdsourcing concerne l’implication, plus
ou moins directe, du consommateur à la création du produit. En effet, grâce aux TIC, et à l’internet
en particulier, l’acheteur n’est plus en «fin de chaine», en consommant de manière passive un
produit, mais il participe à sa création, à sa promotion ou à sa diffusion, et par conséquent il enlève
le monopole de ces actions à l’entreprise. Au lieu de se contenter tout simplement de recevoir, la
communauté produit, publie et agit.

6
- La focalisation sur le cœur de métier: Les plateformes sont généralement utilisées pour des
prestations de service jugées non essentielles, non stratégiques, ou nécessitant une expertise
particulière. Le Crowdsourcing permet donc de déléguer certaines tâches, permettant ainsi de se
focaliser sur son cœur de métier ou sur d’autres priorités.
- La motivation des participants: Ce type de communauté se caractérise par le fait de porter un
intérêt très important à un domaine, ou à un produit. Généralement, les membres de ce type de
communauté ne cherchent pas à être rémunérés et leurs motivations se focalisent sur une volonté
individuelle d’améliorer le centre d’intérêt qui les rassemble.
- La qualité de service: Le Crowdsourcing permet aux entreprises d’améliorer la qualité de leurs
produits et services en se référant aux avis du public.
- La création de la valeur: Selon Lebraty: «le développement du Crowdsourcing peut
s'expliquer par sa contribution à la création de valeur dans l'organisation». Dans cette optique, nous
observons qu’à travers le Crowdsourcing, la firme incorpore la foule dans la chaine de la création
de valeur surtout dans la phase de développent des idées. ( Lebraty, 2007)
3. Méthodologie
Pour répondre à notre objectif nous avons adopté une étude sémantique, à l’aide du logiciel
«Tropes», permettant, en premier lieu, de traiter les idées, les opinions et les jugements
exprimés par les interviewés et d’étudier, en second lieu, les mécanismes qui permettent
d'améliorer les compétences de la foule dans le processus de crowdsourcing. Dans le cadre
de cette étude, nous avons opté pour le «focus groupe» en nous basant sur un échantillon
de 23 bénévoles motivés (dont treize femmes) intéressés par le Web, l’E-management et la
pratique ainsi que par le management des communautés virtuelles. Ce groupe se compose
de doctorants dans notre domaine de spécialité avec une moyenne d’âge comprise entre 28
et 30 ans (minimum 24 ans et maximum 35 ans). Ils ont des comptes, des groupes dans
divers réseaux sociaux et aussi ils ont souvent visité des plateformes de crowdsourcing (au
moins une fois tous les trois mois) ; ce qui indique qu'ils peuvent être, dans une certaine
mesure, représentatifs des acteurs modèles du crowdsourcing. Ce sont aussi des « acteurs »
connaisseurs du vocabulaire du marketing aussi bien que de celui du Web; ce qui implique
que notre échantillon est représentatif des « professionnels » plus que des consommateurs
classiques. De plus, il est intéressant de signaler que notre guide d’entretien qualitatif a été
bâti au fil de nos discussions.
Pour mener à bien cette expérience, nous avons préparé notre échantillon en répartissant le
travail sur deux phases et sur deux groupes différents.
Phase 1 : Présentation du projet et des objectifs Dans cette étape, nous avons réuni
l’ensemble des contributeurs à qui nous avons expliqué nos objectifs concernant nos
recherches relatives aux crowdsourcing. Nous avons, aussi, fourni aux contributeurs un
dossier contenant les deux articles (sur le crowdsourcing) et un ensemble de liens de sites
de crowdsourcing. Nous avons, de plus, invité les membres à nous parler de ce qu’ils ont
compris tout en les poussant avoir e à développer un regard critique.
Phase 2 : Débat et échanges Cette phase a été réalisée pour faciliter les échanges entre les
membres et éclaircir les différentes interrogations et zones d’ombre.
3.1. L’approche sémantique amont : Phase de création des scénarios
Afin de mener à bien cette expérience, nous avons créé un « scénario »1, à partir des
« références utilisées » sur le plan sémantique bâti à partir des thèmes essentiels évoqués.
Cette « grille d’analyse », permet de bien visualiser l’essentiel des préoccupations autour

1
Un « scénario » de Tropes® est une sorte de grille d’analyse automatique des textes permettant
l’émergence du graphe des acteurs dans l’ensemble, des graphes pour chaque thème avec la proximité des
autres thèmes évoqués. Le scénario est une construction ad hoc à partir de nos objectifs et de l’analyse des
termes utilisés.
7
des systèmes de recommandation. De plus, le modèle Tropes applique le scénario en tant
que grille « automatique » sur les textes qualitatifs recueillis et extrait les « phrases
représentatives »; aidant à sélectionner les propositions ou affirmations qui serviront pour
les exercices de quantification avec les « cartes » et le « tapis de jeu » pour nos recherches
et expérimentations ultérieures sur le même sujet. Naturellement, les phrases réelles des
exercices cognitifs devront être le plus souvent réécrites pour des raisons de style, de
grammaire…
Les textes produits par les discussions et les avis individuels, ont représenté une dizaine de
pages reprises pour pouvoir être traitées par un logiciel spécialisé dans les études
sémantiques Tropes® nécessitant une mise en place de corrections orthographiques et de
ponctuation.
3.2. Recueil des expressions et création du scénario
Nous avons sollicité notre échantillon de 23 personnes à la fois sur un réseau social et sur
Skype. Les textes ont été repris sur un fichier Word avec correction des textes pour créer
des phrases comprises par l’ordinateur (expressions, ponctuation) ; sans modifier au fond
l’avis exprimé. Le texte d’une dizaine de pages a été ensuite passé sous le modèle progiciel
Tropes ®. En clair, nous recherchons une structure de compréhension qui dépend en partie
de nos attentes. Celles-ci donnant lieu à des créations de thèmes. Si cette démarche
apparaît justifiée par l’analyse brute des références obtenues, les Scénarios sont conçus
pour enrichir et filtrer les classes d’équivalents en fonction d’une stratégie d’analyse. Ce
sont des ontologies spécifiques, qui permettent de :
-a/ définir les propres classifications ; en fonction du vocabulaire correspondant à
l’environnement d’étude.
-b/ modifier ou restructurer les dictionnaires du logiciel Tropes ®
-c/ définir une grille d’analyse pour générer automatiquement un rapport.
Des Scénarios ont été constitués à partir d’un certain nombre de groupes sémantiques,
c’est-à-dire de regroupements de mots et/ou de classes d’équivalents. La plupart des
regroupements peut être réalisée à la souris, à l’intérieur de l’outil scénario ou en
interaction avec la fenêtre principale de Tropes. Il suffit de créer un groupe et de mettre
quelque chose dedans.

4. Analyse des résultats et interprétations


Le logiciel que nous avons utilisé, dans cette présente étude, nous offre l’avantage de
quantifier les données dans un cadre global et détaillé.
Pour le cadre global, nous pouvons aussi traiter la concentration relationnelle entre les
thèmes aussi bien que la densité2 relationnelle et le poids des thèmes. La concentration de
relations est calculée en divisant, pour chaque référence, le nombre total de relations par le
nombre de relations différentes.
Nous pouvons aussi parler d’une autre possibilité utilisée avec Tropes pour le cadre
détaillé et qui est l’analyse de l’environnement des références:
—La représentation des références par des sphères les rend proportionnelles aux nombres
d’occurrences.
— La distance entre deux références représente les proximités recensées au sein des
différentes phrases du texte.
— Le graphe permet d’analyser l’environnement d’une référence avec les autres thèmes exprimés.
— Le graphe est orienté: à gauche, nous trouvons les références qui sont en quelque sorte les sujets
des verbes (actants) et à droite nous avons les objets (actés). Ceci permet de détecter ce qui est à

2
« La densité relationnelle est la fréquence du thème divisée par le nombre de relations » Tropes, Manuel de
référence.
8
l’origine de la formation d’une référence ou à l’inverse; ce qui est le résultat.
4.1 Les scénarios concernant le Crowdsourcing:
Dans cette étape, le processus d’externalisation est évoqué, sans allusion aux moyens techniques
utilisés avec des zooms sur «Externalisation» et «entreprise», puis sur le groupe des deux
références.
a/ Le scénario Crowdsourcing: Au niveau de l’externalisation classique et sans aborder la notion
d’internet, les gens participent et s’intéressent beaucoup à l’externalisation; qui est le facteur le plus
cité par les contributeurs. Tous les autres facteurs sont de petite taille, très dispersés sur toute la
carte, et ils ne sont pas très reliés entre eux. Ils sont par conséquent de moindre importance. Par
exemple, on trouve dans la première analyse (en bleu) l’externalisation, la procédure, le
scientifique, les gens, monde, le temps et les travaux externe: Nous pouvons aussi remarquer la
présence de plusieurs facteurs qui ont été cités dans la deuxième analyse (en vert) et qui sont:
l’externalisation, l’entreprise, le scientifique, le travail, le modèle, le développement, la qualité, le
concept, l’opinion, la manière, l’organisation, la sous-traitance et le public (des facteurs qui se
répètent, mais il y a aussi de nouvelles variables). Dans ce contexte, selon McConnon (2006) le
Crowdsourcing nécessite une certaine standardisation dans les procédures pour atteindre et toucher
le plus grand nombre de personnes.
b/ Le Scenario Crowdsourcing /Externalisation: Les facteurs les plus importants sont
«l’externalisation» et «le crowdsourcing» se trouvant au centre de la carte avec des tailles variant
entre les grandes et les moyennes et ce aussi bien dans la première que dans la dernière phase de
l’étude. Les deux facteurs étant cités avec les mêmes proportions.

Graphique 1: Relation Crowdsourcing/Externalisation


Le facteur Crowdsourcing englobe d’autres variables telles que «modèle», «concept»,
«émergence», «qualification», «risque», «problème», «qualité», «public», «travail», «organisation».
Nous remarquons la présence de nombreux autres facteurs très dispersés sur tout le graphique, ainsi
que la présence d’une importance relationnelle entre eux (présence de petites distances entre ces
facteurs) avec des sphères de taille moyenne. Des facteurs ont été évoqués par un petit nombre de
contributeurs. A titre d’exemple, nous pouvons évoquer quelques facteurs comme: la définition, le
capital social, le raisonnement, l’opinion.
En se référant aux différentes études de (Arnold, 2000; Bonaccorsi et Rossi, 2003; Krogh et al.
2003; McConnon, 2006; Tiemann, 2006; Dahlander et Wallin, 2006 ; Lebraty, 2007), le
Crowdsourcing est défini comme étant l’externalisation «ouverte» à la foule des «amateurs
passionnés». Ces concepts émergents permettent la résolution des problèmes en s’adressant aux
compétences publiques via le web. Le Crowdsourcing est un nouveau mode d’externalisation. Il
constitue une alternative réaliste à une externalisation classique et ayant moins de risques.
4.2 Les scénarios concernant les Facteurs déterminants du Crowdsourcing:
Dans la seconde étape de notre étude, nous avons introduit les caractéristiques du Crowdsourcing
avec un resserrement autour des notions de Compétence et de Qualité.

9
a/ Le scénario Crowdsourcing/Compétence: Avec l’introduction du web et des réseaux sociaux,
plusieurs facteurs ont été cités, par rapport à l’étape précédente et parmi lesquels nous pouvons
citer : l’externalisation, la compétence, l’organisation, la qualification, la procédure et le
développement qui se trouvent au centre avec la présence d’importantes relations entre eux. Les
variables, telles que le travail, le concept, l’opinion et la manière ont été plus évoquées par les
contributeurs de la première à la dernière analyse de l’étude avec une densité relationnelle entre ces
facteurs. Toutefois, nous déduisons l’existence d’autres facteurs de moindre importance par rapport
aux premiers et ce loin du centre et avec d’importantes distances entre ces variables.

Graphique 2: Relation Crowdsourcing/compétences

Le concept de compétence appréhende la manière dont les organisations acquièrent, exploitent et


renouvellent leur avantage concurrentiel. Les frontières de l’entreprise sont alors déterminées de
façon à maximiser la valeur du portefeuille de ressources. Via le web l’entreprise externalisatrice
peut bénéficier des compétences élevées et très ciblées d’un individu pour une micro-tâche donnée
et ceci à moindre coût. Aussi pouvons-nous parler de l’adéquation entre le problème posé et les
compétences obtenues. Cette relation multilatérale est susceptible de présenter un certain nombre
d’avantages au regard de la création de valeur.
b/ Le scénario Crowdsourcing/Qualité: Dans la carte ci-dessous, tous les facteurs sont aussi
importants, étant donné qu’à travers la contribution au Crowdsourcing, nous remarquons que les
notions ont quasiment toutes le même poids et la même importance. Nous sommes aussi en mesure
d’observer la présence de relation entre elles. (Les facteurs sont très proches, voire confondus entre
eux).

Graphique 3: Relation Crowdsourcing/qualité


La majorité absolue des sites de crowdsourcing exige un minimum de qualité pour valoriser les
membres du site et refléter l’objectivité du site en question. En effet, en examinant le service offert
par la foule, on constate le soin avec lequel il est fait ce qui mène à conclure que ce sont des
spécialistes qui sont derrière cette qualité. A ce niveau nous pouvons soulever la disparition du
souci de l’entreprise de rechercher des experts dans le domaine lui épargnant de la sorte le coût

10
énorme des recrutements. Mais, en vérifiant la distance de cet actant du centre, nous remarquons
que malgré son poids important, il est situé loin du centre. Cet emplacement peut être expliqué par
le fait que malgré l’existence de spécialistes dans la foule, il est tout à fait possible que le service
fourni par cette dernière soit de mauvaise qualité souvent causée par une présence massive de
contributeurs non qualifiés. Ces derniers sont généralement attirés par les rémunérations proposées
par la plateforme. La présence de ces éléments dans la foule impose, ainsi, à l’entreprise des coûts
de filtrage supplémentaires.
En outre, la qualité des contributeurs est également importante (Howe, 2008). Selon Howe (2008),
cette qualité est importante, vu que toutes les idées générées par le crowdsourcing ne sont pas par
définition bonnes. Selon Schenk et Guitard (2009), cette qualité concerne la variété des
contributions. Cette variété des contributions reflète ainsi la diversité des options proposées pour
résoudre le problème de l'entreprise cliente (Shenk et Guitard, 2009). Par conséquent, la qualité de
la contribution du crowdsourcing dépend de la prise en compte de la variété (Shenk et Guitard,
2009). En outre, Poetz et schreier (2010) dans leur étude de comparaison entre les idées générées
par des professionnels et les idées du crowdsourcing, stipulent que la facilité de l’utilisation de
l’idée est une mesure importante pour la qualité. Par conséquent, une contribution n’a de valeur que
si elle peut être éventuellement appliquée dans la pratique. Des recherches ultérieures menées par
Acar et Van de Ende (2011) ont également utilisé la convivialité des idées comme une mesure de la
qualité des conditions du crowdsourcing.
En guise de conclusion, il apparaît nécessaire de mettre en perspective l’utilité de cet outil qui est le
crowdsourcing. Intrinsèquement lié au développement de l’internet, cet outil de «libération» du
talent de la «foule» peut donner lieu au meilleur comme au pire.
4.3 Les scénarios concernant le processus de crowdsourcing:
Dans la troisième étape, on introduit le processus du Crowdsourcing. Avec un resserrement autour
des notions de l’interaction et de l’apprentissage (rétroaction):
a/ Le scénario Crowdsourcing/Apprentissage: Nous sommes en mesure de remarquer que le
concept d’apprentissage est au centre avec une taille moyenne et avec un rapprochement entre sa
distance avec l’externalisation et la qualification. Mais on constate que le facteur Crowdsourcing a
la taille la plus grande et qu’il est plus loin du centre. Les autres facteurs, qui sont très éloignés
entre eux, ont quant à eux des poids faibles.

Graphique 4: Relation Crowdsourcing/Apprentissage

L’apprentissage est jugé nécessaire afin d’exclure les réponses non spécifiques et non pertinentes.
En effet, la compétence réside essentiellement dans la capacité à puiser les bonnes informations
dans ses différentes ressources et à utiliser d’une façon adéquate ces connaissances et habiletés dans
l’action. Leimeister, Huber, Bretschneider et Krcmar (2009) dans leur recherche de concours d'idées
ont constaté que les informations de l'organisation initiatrice avaient un effet positif sur la
motivation des participants. Également, la recherche antérieure menée par Jeppesen et Frederiksen
(2006) a constaté que les utilisateurs de communautés en ligne sont motivés par le désir d'obtenir la

11
reconnaissance de l'organisation (entreprise cliente).
L’apprentissage organisationnel se réfère aux activités qui mènent à la création, à l'acquisition et au
transfert d'expériences, d'idées et d'informations au sein d'une organisation qui développe sa
capacité. En effet, Nambisam (2002), Shah (2006) dans leur recherche sur des projets open source,
mentionnent la rétroaction aux participants comme une condition qui pourrait augmenter le
développement des produits, étant donné que les évaluations donnent aux participants le sentiment
que le travail qu'ils ont fait, est très apprécié et est utile aux autres (Shah, 2006).
A titre récapitulatif, nous pouvons dire que les entreprises peuvent notamment bénéficier de
ressources sans pour autant que ces ressources ne soient officiellement détenues par elles. Cela sera
notamment le cas lors du recours au crowdsourcing. La foule constitue alors une ressource
particulière (pas forcément spécifique) non possédée par l’entreprise. En effet, la vision de
l’entreprise basée sur les ressources met également en avant l’importance de la capacité
d’intégration des ressources externes apportées par la foule. Néanmoins, la foule n’est pas
uniquement constituée d’individus compétents. Une grande majorité de ces individus présente un
grand problème de manque de savoir et de savoir-faire. Cette incompétence de cette partie de la
foule risque de poser un problème pour la conquête des actants, clients potentiels des acteurs
prestataires. Une gestion efficiente de ces compétences s’avère, donc nécessaire.
—b/ Le Scenario Crowdsourcing/Interaction
Dans la première analyse, les facteurs les plus importants sont «le crowdsourcing» et «l’interaction»
se trouvant au centre de la carte avec des sphères de grande à moyenne taille. Nous remarquons que
tous les autres facteurs sont de petite taille et très dispersés sur la carte, donc ils ne sont pas très
reliés entre eux et ils sont de moindre importance. Citons à titre d’exemple: la combinaison, le
résultat, la motivation, l’information etc.

Graphique 5: Relation Crowdsourcing/Interaction


Dans la deuxième analyse, nous observons la présence de plusieurs facteurs qui ont été cités tels
que la participation et la facilité et qui ont une relation importante entre eux (les deux sphères sont
très proches). Nous observons de même l’existence d’autres variables dispersées dans sur la carte et
dont l’importance est moindre. Pour ne citer que quelques unes, nous pouvons énumérer la foule, la
variable, le type, le travail etc. Nous remarquons également une relation importante entre la
diversité et l’interaction (les deux sphères sont très proches).
Ces résultats sont conformes avec les travaux de Nambisan (2002) dans lesquels il explique que
l'interaction entre les clients dans le développement de nouveaux produits leur permet de ressembler
à une communauté. Ce «community feeling» contribue à la participation active des participants,
ayant par conséquent son impact sur le succès du développement des produits (Fichter, 2009;
Nambisan 2002). Pour le crowdsourcing, cette interaction pourrait signifier que, grâce à ce
«sentiment de communauté» la foule finira par trouver une sorte d'inspiration grâce aux autres
membres ( de la foule) et elle sera donc plus apte à participer. L'interaction pourrait ainsi être la
source d’une importante motivation sociale pour la foule l’incitant de la sorte à une meilleure
contribution (idées, solutions, produits,...) (Leimeister et al. 2009). A ce niveau, nous pouvons
remarquer la présence de la variable motivation sur notre graphique dans la première phase de

12
l’étude. La recherche faite par Bayus (2010) sur l'apparition d'idées créatives par des groupes de
personnes, confirme que lorsque les gens sont exposés à des idées déjà proposées, ils sont plus
susceptibles d'avoir des idées créatives que les personnes qui ont peu ou pas de prise de conscience
de la contribution des autres.
5.Discussion et apports
Pour résumer et d’après les résultats auxquels nous sommes parvenus, nous pouvons dire que les
entreprises peuvent bénéficier de ressources sans pour autant que ces ressources soient
officiellement détenues par elles. Cela sera notamment le cas lors du recours au crowdsourcing, la
foule constituant alors une ressource particulière (pas forcément spécifique) non possédée par
l’entreprise. En effet, la foule constitue une nouvelle source de compétence externe pour l'entreprise
qu’il faut d’ailleurs essayer de bien intégrer. Néanmoins, il serait utile de rappeler que la foule ne
peut pas être uniquement constituée d’individus compétents.
Il faut souligner également l’importance de l'interdépendance entre les membres de la foule. En
effet, Surowiecki (2005), affirme que deux éléments sont essentiels pour la constitution d'une foule
sage. Le premier élément étant la diversité des interprétations (disposant de compétences variées,
locales et/ou globales, les individus vont créer un sens variable par rapport à un même fait ou à une
même question). Le deuxième élément étant, quant à lui, l'indépendance des membres de la foule.
Aussi l’interaction entre les membres de la foule offre-t-elle une bonne contribution en termes de
diversité, de quantité et de facilité. Nous on pouvons constater ce résultat sur le graphique 6 où nous
avons traité le scénario interaction/travail. Sur ce graphique nous remarquons clairement que les
variables quantité, diversité et participation sont très proches et que les variables usage et facilité
(sphère de taille importante par rapport aux autres) sont importantes.
Nous avons récapitulé nos résultats dans un graphique qui met en évidence et qui explique
l’environnement du processus du crowdsourcing comme un processus dynamique entre les
différents intervenants à savoir, l’actant (Le donneur d’ordres pour l’externalisation) et l’acteur (le
receveur d’ordres) et ce indépendamment des types du crowdsourcing, de la finalité de
l’externalisation (tâches complexes, tâches créatives) et des contributions (output). Ainsi ce
graphique proposé montre bien que le crowdsourcing est un processus qui n’est pas un modèle
linéaire traditionnel d’innovation (première génération) où elle est représentée par une conduite de
processus séquentiel qui débute par la science pure et se termine par une application commerciale
(A.J. Berkhout et al. 2006).
De plus, le crowdsourcing n’est pas un modèle d’innovation de deuxième génération. Aussi le
processus d’innovation n’est-il pas constitué d’étapes séquentielles comme il l’était dans la
première génération, mais il est plutôt renversé. Dans ce cas la science est remplacée par le marché
qui est devenu la source d’innovation.
La figure 6 montre que le modèle proposé décrit un processus dynamique où l’interaction entre les
membres de la foule et la rétroaction (apprentissage) entre la foule et l’entreprise (actant) a son
impact sur la sortie de deux types de crowdsourcing. En d’autres termes, elle a son influence sur la
contribution du crowdsourcing.
En effet, cette qualité est déterminée aussi bien par la quantité des solutions ou idées proposées par
la foule, que par la variété qui reflète la diversité des options proposées pour résoudre les problèmes
(Schenk et Guitard 2009) et la facilité d’utilisation qui se réfère a l’utilité des idées.

13
Graphique 6: Environnement du processus de l’innovation du Crowdsourcing

La réussite de ce processus dynamique et interconnecté du crowdsourcing suscite une interaction


créative entre l’infrastructure des capacités d’innovation et celle des compétences spécifiques d’un
grand nombre d’internautes. Cette réussite qui va se concrétiser aussi bien par la qualité que par la
quantité d’idées et de solutions proposées à l'entreprise, va générer une valeur ajoutée et une
réduction des coûts. En effet, Lebraty et lobre (2009) affirment que le développement du
crowdsourcing peut s’expliquer par sa création de valeur pour l’organisation. A ce niveau, nous
pouvons souligner que si nous prenons en considération les créativités et les idées puisées dans la
foule, nous créerons déjà une valeur supplémentaire pour la firme.
D’autre part Dujarier (2008) précise que le crowdsourcing n’est autre que le travail de l'amateur
bénévole. Cette idée a été aussi soutenue par (Lebraty, 2007) qui précise que les individus qui
proposent leurs services ont une activité salariée principale. Pour eux le crowdsourcing est ainsi une
«micro-tâche» générant un «micro-revenu» et à laquelle ils accordent une petite partie de leur
temps. Dans le cas du crowdsourcing, l’externalisation est «ouverte» à la foule des «amateurs
passionnés».
Conclusion
L’objectif de cet article est de fournir de nouveaux éclairages et de mieux cerner le concept du
processus de Crowdsourcing (tâches créatives et tâches complexes). Dans le but d’atteindre cet
objectif et de répondre à la question de recherche nous avons choisi d’effectuer une analyse
sémantique sur un échantillon de 23 bénévoles (dont treize femmes) motivés et intéressés par le
web, par l’E-management et par la pratique et le management des communautés virtuelles. En
prenant la littérature comme un point de départ, un cadre théorique a été élaboré et des questions
pour un nombre de sujets ont été posées. Au moyen d'une analyse qualitative, les configurations
dominantes ont été trouvées. Les données des entrevues ont fourni des explications pour les
configurations rencontrées. Cette conclusion donne une réponse à la question de recherche posée au
début de cet article: Le concept de crowdsourcing constitue-t-il un processus d’innovation pour
l’exécution des tâches créatives et des tâches complexes? La réponse à cette question est donnée par
la conclusion des résultats pour les trois scénarios sur la compétence, l’apprentissage (rétroaction),
et l’interaction dans le processus de crowdsourcing.
Ainsi, en nous basant sur notre étude, en adoptant une approche déductive et en prenant la foule
comme critère de base, nous sommes en mesure de considérer que le crowdsourcing est un
processus d’innovation qui n’est issu ni de la première ni de la deuxième génération. Ce processus
d’innovation comporte même des variables qui ont le même effet sur le crowdsourcing tâches
complexes et le crowdsourcing tâches créatives.
Limites
Les résultats de cette recherche permettent de mieux comprendre le processus de crowdsourcing.
Cependant, notre étude présente un certains nombre de limites. Du point de vue de l’analyse

14
empirique, de nombreuses questions n’ont pas été abordées et restent à traiter afin de mieux cerner
le processus du crowdsourcing, et parmi lesquelles nous pouvons citer : Que se passe-t-il
exactement après un processus de crowdsourcing? A quelle génération appartient le processus de
crowdsourcing? Comment les idées sont-elles sélectionnées ? Qu’est ce qui provoque finalement
l’adoption et l’utilisation des contributions? Combien d’entreprises, grandes & PME, ont-elles
recours à cette pratique? Quel est le Chiffre d’Affaires réalisé ces dernières années?
Du point de vue méthodologique, nous nous sommes fondés sur les participants à un blog. La
question de la légitimité de ces acteurs mérite d’être posée. Aussi, avons-nous eu tendance à guider
les contributeurs et à les orienter dans la discussion virtuelle lors de cette expérimentation. Aurions-
nous trouvé les mêmes résultats si nous n’avions pas orienté les contributeurs à cette
expérimentation? Aurions-nous les mêmes facteurs avec la même importance? Ainsi, dans le cadre
d’une première approche de ce concept de processus de crowdsourcing, nous estimons ces
spécialistes, passionnés d’internet, suffisamment représentatifs et avertis pour que leurs
témoignages puissent être utilisés dans une communication scientifique.

15
Références Bibliographiques:
 Berkhout A.J., Hartmann D, Duin P. and Roland O., «Innovating the innovation process » Int. J.
Technology Management, Vol. 34, Nos. 3/4, 2006
 Acar O., & Van den Ende, J. (2011), «Motivation, reward size and contribution in idea
crowdsourcing proceedings of the DIME-DRUID», Academy Winter Conference 2011. Retrieved
May 20, 2011,
 Arnold U.(2000), «New dimensions of outsourcing: a combination of transaction cost economics
and the core competencies concept», European Journal of Purchasing and Supply Management,
No.6, p. 23-29.
 Bayus B.L. (2010), «Crowdsourcing and Individual Creativity Over Time: The Detrimental
Effects of Past Success, (Working paper)»Retrieved April 12, 2011, from
http://ssrn.com/abstract=1667101
 Bellon B. (1994), Innover ou disparaître, Economica, Paris.
 Bonaccorsi A. & C. Rossi (2003). « Why Open Source can succeed », Research Policy, 32(7)
p.1243-1258.
 Brabham D.C.(2008), «Crowdsourcing as a model for problem solving: An Introduction and
cases,convergence», The international journal of research into new media technplogies,14 (1), p.75-
90
 Dahlander L. and Wallin, M W. (2006), «A man on the inside: Unlocking communities as
complementary assets.», Research Policy, No 35, p.1243-1259
 Dujarier A.M.(2008), «l’économie du crowdsourcing et ses alternatives» séminaire: politiques et
technologies de l’amateur, université de Lille 3.
 Fichter K. (2009)., «Innovation communities: the role of networks of promoters in Open
Innovation». R&D Management, No.39(4), p. 357-371. 70.
 Tomala, F., Senechal, O. et Tahon,C. (2013), «Modèle de processus d'innovation», avril 2001 3e
Conférence Francophone de Modélisation et Simulation.
 Galbraith C. S.et Kay, N. M.(1986), «Towards a theory of multinational enterprise», Journal of
Economic Behavior & Organization, No. 1, p. 319.
 Howe J.(2008), «Crowdsourcing: How the power of the crowd is driving the future business.»,
London: Random House Business Books.
 Tidd J.(2006), « innovation models», Tanaka Business school, imperial college London
 Kleemann, F., Voss, G.G., & Rieder, K. (2008). «Un(der)paid Innovators: The Commericial
Utilization of Consumer Work through Crowdsourcing. »,Science, Technology and Innovation
Studies , 4(1), 5-26.
 Krogh, V. G., Spaeth, S., Lakhani, K. R., (2003), «Community, joining, and specialization in
open source software innovation: a case study», Research Policy, Vol. 32, n. 7, pp. 1217— 1241.
 Lebraty J.F (2007), «Vers un nouveau mode d’externalisation: le crowdsourcing, 12ème
conférence de l'AIM, Lausanne: Switzerland (2007).
 Lebraty J.and Lobre K. (2010), Creer de la valeur par le crowdsourcing: la dyade innovation-
authenticité», système d'information et management 15,3 (2010).
 Lebraty,J and Lobre, K. 2008, value creation and crowdsourcing: the two paths. », Aims, Dec
2008
 Leimeister, J.M., Huber, M., Bretschneider, U., & Krcmar, H. (2009), «Leveraging
Crowdsourcing: Activation-Supporting Components for IT-based Idea Competitions.», Journal of
Management Information Systems, No 26(1), p.197-224.
 Mathieu G. (2004), Méthodologie de la recherche, Ellipses.
 Maxim Kotsemir, Dirk Meissner, conceptualizing the innovation process- trends and outlook
 Nambisan, S. (2002)., «Designing virtual customer environments for new product development:
toward a theory. Academy of Management Review, 27(3), 392-413.
16
 Omar Aktouf méthodologie des sciences sociales et approche qualitative des organisations 1987
 Poetz, M.K, & Schreier, M. (2010) The value of crowdsourcing: can users really compete with
professionals in generating new product ideas? Journal of Product Innovation Management.
(Forthcoming).
 Schenk, E., & Guittard, C. (2009), « Crowdsourcing: What can be Outsourced to the Crowd, and
Why? (Working paper 00439256_v1). Retrieved November 12, 2010, from:
http://ideas.repec.org/p/hal/wpaper/halshs-
 Surowiecki, J.2005. La sagesse des foules. Paris: Dunod.
 Tarek, Abdellatif. (2010), «Le crowdsourcing: une strategie pour le choix d’une approche KM
pour l’optimisation des compétences de la foule. SIIE 2010
 Temri, L.(2000), «Les processus d'innovation: une approche par complexité. IX éme conférence
internationale de management stratégique AIMS 2000.
 Tiemann, M. (2006), «An objective definition of open standards, Computer Standards &
Interfaces, Vol. 28, n. 5, pp. 495507.
 Tomala, F, Senechal, O et Tahon C. (2001), «Modèle de processus d'innovation. 3e conférence
francophone de modélisation et simulation.
 Xuereb J.-M. (1991), «Une redéfinition des processus d’innovation», Revue Française de
Gestion, No 84.

17

Vous aimerez peut-être aussi