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HGGSP : Les frontières

INTRO : En quoi la forme d’une frontière est-elle conditionnée par sa fonction ?

A- Évolution quantitative des frontières

ème
Le monde a enregistré, au XX siècle, une forte croissance du nombre de ses frontières. Ces
dernières ont en effet été multipliée par 4.
Cette évolution s’explique principalement par une multiplication du nombre des États durant cette
période (environ 50 États en 1945 contre 200 aujourd’hui). Les frontières, constituant les limites
territoriales des États, voient leur nombre se multiplier par corrélation.
Le processus de décolonisation que connaissent l’Afrique et l’Asie (des années 1950 aux années 1970)
puis la décomposition de l’URSS (débuts des années 1990) participe très largement de ce phénomène.
Si le nombre d’États (et par conséquent de frontières) est stable depuis les années 2000, la situation
pourrait changer à l’avenir. Certains territoires revendiquent leur indépendance pour des motifs
linguistiques (Québec), d’éloignement (Groenland), nationalistes (Ecosse, Corse) de persécutions
(Sud-Soudan).
À cela s’ajoutent encore les États composer d’une mosaïque ethnique (Chine, Union indienne, Russie)
qui pourraient connaitre une forme de « balkanisation » en cas d’affaiblissement du pouvoir central
(cf. E. ottoman).

B- Évolution fonctionnelle des frontières (couture/coupure)

À l’échelle planétaire, seules les frontières européennes de l’espace Schengen jouent le rôle de
couture tel que nous l’avons observé sur l’espace transfrontalier des « deux rives » entre Strasbourg et
Kehl. En revanche, les frontières de type « coupure » sont fréquentes (murs entre l’Inde et le
Bangladesh, entre l’Afrique du Sud et le Zimbabwe, entre la Hongrie et la Croatie). Cette volonté de
fermeture qui pourrait apparaître comme un paradoxe à l’heure de la mondialisation s’explique par les
mobilités humaines et les rivalités qu’induit cette même mondialisation.
Bien souvent, il s’agit d’arguments politiques en vue de justifier une démarche anti-migratoire (ex.
Hongrie) ou de protectionnisme économique. Cependant, l’existence d’une « frontière coupure »
même équipée d’un mur ne signifie pas pour autant une situation d’étanchéité totale (ex. Ligne verte à
Chypre).
Il convient donc d’étudier le niveau de filtration des frontières.

Jalon 1 :

A - Peut-on considérer le Limes Rhénan comme une frontière de l’empire Romain ?

A son apogée, l’empire Romain s’étend de l’Atlantique à l’Anatolie (Ouest/Est) et de l’Angleterre à


l’Afrique du Nord (Nord/Sud). Il rassemble autour d’une entité politique unique (Imperator, à Rome),
des populations romanisées diverses (Gallo-romains, Égyptiens). Cet empire s’est construit autour de
la Méditerranée qui en constitue le centre. Le Limes Rhénan se situe à l’inverse, à l’extrême périphérie
Nord-Ouest de l’empire.

Limite entre le monde romain et des territoires occupés par des peuples germains hostiles mais aussi
rivaux, le Limes Rhénan ne correspond pas vraiment à la signification contemporaine de « frontière ».
Pour autant, il marque bien le passage d’un monde romain (imperator, lois romaines, pax Romana ;
pas de guerres à l’intérieur du monde romain) à des territoires non romains et donc qualifiés de
« barbares ».

En outre, le limes n’est déployé que sur les espaces où le Rhin n’a pas été établi comme « frontière
naturelle ».

Il s’agit donc bien de sécuriser et de romaniser les confins. (= espace indéfini et non marqué entre 2
territoires.

B - En quoi le Limes Rhénan forme-t-il parallèlement une ligne de protection et une interface
d’échange ?

Afin de fixer une limite aux confins de leur empire, les romains ont souvent emprunté des éléments
naturels (le Rhin). Pour autant, sur des espaces où ces marques naturelles n’existaient pas, ils ont mis
en place un dispositif fortifié appelé « Limes ». Ce dernier, long de 500km à son optimum (fin du 2nd
siècle après EC), est composé de palissades de bois, surveillées par des tours de guet (1000 bâtiments).
En amont se trouvent des Castellum de garnisons (Saalsburg) et des camps légionnaires (Strasbourg).
Chaque fort pouvait accueillir une garnison de 500 auxiliaires (citoyens non-romains)

Le Limes Rhénan n’est pas une frontière dont le bornage a été défini par le droit écrit. Ses limites
varient selon l’influence de la puissance romaine sur ses voisins germaniques. Ainsi, du 1er au 2ème
siècle, le dispositif s’avance toujours plus loin en territoire germain et finit par intégrer au territoire
romain les confins que constituaient les champs Décumates. Au 4ème siècle, la partie occidentale de
l’empire romain s’affaiblit face aux intrusions barbares.

Le Limes recule, ce qui place à nouveau les champs Décumates comme confins.

Jalon 2 :

A- En quoi le processus de colonisation trace-t-il de nouvelles frontières en Afrique ?

Avant 1880, l’Afrique est peu impactée par l’organisme européen. Seuls le Portugal, le Royaume-Uni
et la France s’étaient implantées essentiellement sur les littoraux (vestiges de la traite transatlantique).

Le déclin de l’empire ottoman (l’homme malade de l’Europe), qui dominait l’Afrique du Nord, va
ouvrir, dans le cadre de la « question d’orient », la colonisation de l’Algérie (France dès 1880) et celle
de l’Égypte (Royaume-Uni dès 1882).

Cependant, c’est à partir de 1885 (Conférence de Berlin) que le processus s’accélère au point qu’en
1914, l’essentiel du continent africain se trouve sous statut colonial. De nouvelles frontières sont
tracées aux limites de ces empires coloniaux.

Colonisation : Processus de conquête, de domination et de mise en exploitation d’un territoire


(colonie) par un état ( métropole coloniale).

Empire colonial : Vaste ensemble territorial (colonie) que s’est approprié une puissance ( métropole
coloniale), du fait de sa supériorité démographique, technologique et militaire.
B- La conférence de Berlin visait-elle à partager le territoire Africain entre les puissances
européennes ?

Le texte de Victor Hugo (1879) comme l’acte final de la conférence de Berlin (1885) véhiculent tous
deux l’idée d’une supériorité́ civilisationnelle européenne.
Dès lors la présence des Européens en Afrique relèverait d’une mission civilisatrice ayant entre autre
qualité́ d’unir les nations européennes au sein d’un projet commun.
Ainsi la conférence de Berlin n’avait pas pour vocation le partage du territoire africain entre
puissances européennes.
Il s’agissait davantage d’y organiser le commerce suivant le principe du libre échange. L’objet étant de
limiter les rivalités entre empires coloniaux.
La conférence visait également à convenir de l’interdiction de certaines pratiques comme l’esclavage
et la traite.
Pour autant, le récit de nations européennes se partageant l’espace africain est très largement retenu
par les contemporains de la conférence comme en témoigne la caricature de Draner (doc. 2 p.149).
Cette vision des faits constitue pourtant davantage un récit qu’une réalité.
Ce récit légitime notamment la poursuite de conquêtes auxquelles cette conférence donne un cadre
légal. Dès lors, la nécessité de fixer des frontières (au sens contemporain du terme) s’imposent.

C- En quoi la constitution d’empires coloniaux en Afrique, nécessitent, après la conférence de


Berlin, de tracer des nouvelles frontières ?

Légitimés par la conférence de Berlin (1885), les projets coloniaux en Afrique s’étoffent.
Les Britanniques rêvent de construire un empire du nord au sud du continent ( du Caire au Cap), les
Français espèrent quant à eux réaliser une transverse est-ouest ( de Dakar à Djibouti).
Leurs projets impliquent des situations de concurrence : les Anglais et les Français se sont affrontés au
Soudan à Fachoda.
Le cas de la région du Cameroun et du Congo où étaient présents Français et Allemands est un bon
exemple pour approcher la façon dont se sont construits ces empires et tracées les frontières.
A bien des égards, on peut considérer que le Cameroun ne préexistait pas à l'arrivée des Européens .
Le nom du pays provient d'un mot portugais désignant une rivière où abondaient les crevettes. En lieu
et place du futur État colonial aucune organisation politique unifiée n'existait (document 1).
On trouvait là plusieurs petits États africains et des chefferies dans un contexte où les peuples et les
langues parlées sont multiples.
La France et l'Allemagne font, dans le cadre du tracé de la frontière camerounaise, l'effort d'appliquer
les principes qui ont été définis en 1885 par la conférence de Berlin. Le traité stipule que la rivière
Campo marque la frontière entre les possessions allemandes et françaises et garantit la libre navigation
ainsi que le libre commerce sur la rivière/frontière (document 2).

Le traité stipule que la rivière Campo marque la frontière entre les possessions allemandes et
françaises et garantit la libre navigation ainsi que le libre commerce sur la rivière/frontière (document
2).
Les frontières du futur Cameroun ont donc d'abord été établies par les diplomates sur des cartes avant
de devenir des réalités de terrain. Il aura fallu pour cela des expéditions conjointes dont le Petit journal
fait le récit en 1913. Elles se tiennent parfois dans un milieu inhospitalier et les tracés théoriques
pensés entre diplomates ont donc parfois été difficiles à mettre en œuvre sur place (documents 4 et 5).

Ces frontières coloniales restent fluctuantes.


Le Cameroun allemand s'est étendu vers le sud en 1911 aux dépens des possessions françaises en
échange de l'abandon des prétentions allemandes au Maroc.
Suite à la défaite de l'Allemagne en 14-18, le Cameroun est devenu pour l’essentiel français. Une
partie du territoire (au Nord-Ouest) conquise durant la guerre est cependant rattachée à l'empire
britannique.

D- L’Afrique contemporaine : Victime de ses frontières ?

Depuis l’accès aux indépendances dans les années 60-70, l’Afrique est demeurée le continent le plus
frappé par les difficultés de développement, l’instabilité politique et les conflits. Les frontières
africaines et les états qui en découlent sont souvent incriminées pour expliquer ces difficultés du
continent.

L’Afrique serait victime de frontières pensées par les colonisateurs au mépris de toutes les réalités
géographiques, sociales et politiques du continent. Ces frontières auraient d’ailleurs été maintenues
après la décolonisation pour ne pas déstabiliser davantage les états nouvellement indépendants.

Ce point de vue est aujourd’hui contesté par une nouvelle génération de chercheurs qui ont montré que
les frontières tracées par les colonisateurs et conservées par les jeunes états Africains correspondent
souvent à des limites internes liées à l’histoire précoloniale du continent.

Peu nombreux, les Européens se sont en outre appuyés sur les peuples locaux pour administrer les
territoires coloniaux. On privilégie donc aujourd’hui l’idée selon laquelle les frontières ont été
coproduites.

Par conséquent, l’image d’une Afrique victime de ses frontières serait essentiellement un mythe de la
décolonisation.

Jalon 3 :

- En quoi la guerre froide est-elle à l’origine de la division territoriale de la Corée ?

A l’image de ce qui se passe en Europe (antagonisme Est-Ouest), la Corée fraichement libérée de


l’occupation japonaise se voit désormais placée sous influence soviétique (au Nord) et étasunienne (au
Sud). Les deux superpuissances de la Guerre froide ne parviennent pas à s’entendre sur l’autonomie à
laisser à ce territoire si bien qu’en 1948, deux états sont fondés : La République populaire de Corée du
Nord et la République Coréenne (au sud). Pour séparer les deux territoires, une frontière se voit
arbitrairement tracée sur le 38ème parallèle.

En juin 1950, l’armée nord-coréenne franchit le 38ème parallèle et met rapidement en déroute les forces
sud-coréennes. Craignant que l’ensemble du territoire ne bascule sous influence communiste, les
Etats-Unis parviennent à obtenir un droit d’intervention auprès du conseil de sécurité de l’ONU. Les
forces internationales débarquent à Incheon le 15 septembre 1950 (environ 550 000 hommes).

Les forces internationales dirigées par les Etats-Unis repoussent rapidement les forces de Corée du
Nord au-delà du 38ème parallèle (prise de Pyongyang) et se rapprochent de la frontière chinoise.
Poussée par les soviétiques, la Chine communiste de Mao Zedong (au pouvoir depuis 1949) décide
d’intervenir dans le conflit (environ 1,35 million de soldats).

L’armé chinoise opère en janvier 1951 une percée au sud avant que les forces internationales ne les
repoussent plus au nord. En milieu d’année 1951, le front se stabilise à proximité du 38ème parallèle. La
signature du « cessez le feu » du 27 juillet 1953 fixe la ligne de front comme zone démilitarisée
(DMZ) en attendant les accords de paix.

Les accords de paix n’ayant jamais été conclus, la DMZ marque toujours la séparation entre 2 états en
guerre. En dépit de la disparition de la Guerre froide (1947-1991), la persistance du régime totalitaire
communiste en Corée du Nord maintient cet état de guerre latente et fait de cette « frontière » une
blessure toujours ouverte.

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