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THEME 3.

LES FRONTIERES DANS LE MONDE

ETUDIER LES DIVISIONS POLITIQUES DU


MONDE
PLAN : I. CHAPITRE INTRODUCTIF
AXE 1 (CHAPITRE 1 ) : TRACER DES FRONTIERES
: UNE FONCTION GEOPOLITIQUE
AXE 2 (CHAPITRE 2) : LES FRONTIERES EN
DEBAT : ENTRE EFFACEMENT ET AFFIRMATION
CHAPITRE CONCLUSIF

INTRODUCTION : Les frontières sont des limites


conventionnelles et symboliques, politiques et
juridiques, qui séparent et définissent les Etats. Elles
tendent à la fin du XXe siècle à s'estomper voire
disparaître lorsque la paix, la démocratie libérale et la
mondialisation s’imposent. En fait depuis 2001-2008 en
raison des problèmes migratoires, des enjeux de
sécurité (menace terroriste) et des crises économiques
(2008 puis crise de 2020 liée au Covid19), elles sont
revenues en force. Mais elles sont aussi des divisions
fondamentales depuis 1648, le traité de Westphalie :
elles forment des garde-fous pour les peuples, les
cultures et la diversité. La frontière a au moins une
double fonction, deux visages : Elles est une ligne de
séparation et un interface, lieu de rapprochement entre
des peuples et des sociétés.
Il existe différents types de frontières si on les prend
au sens de limites : elles peuvent être géographiques,
juridiques, économiques ou encore culturelles. Mais la
plus connue et répandue est la frontière politique. On la
définit comme la limite du territoire sur lequel l’Etat
exerce sa souveraineté. Elle peut être abstraite (carte)
ou physiquement visible (check-point, bornes, murs ou
palissade, barrière ou panneaux). Elle est donc reconnue
par les voisins ou la communauté mondiale comme
légitime. Au sens strict, historiquement, elle naît en
Europe, en Occident avec la fondation des Etats royaux
modernes, même si les Grecs comme les Romains
(Limes) avant eux utilisaient des bornes frontières pour
marquer leur empire. Puis ce terme devint un mythe
constitutif des E-U à leur formation. La conquête et la
constitution d’Empires coloniaux européens en
Amérique, Asie et Afrique exportèrent cette notion
occidentale et la frontière s’imposa comme un élément
du contrôle colonial.
• Pbes : A quoi servent les frontières ?
- Quel processus explique la fragmentation croissante
de l’espace politique mondial par des frontières alors
que la mondialisation économique opérée par les FTN
tend à diluer et ignorer les frontières ?
- Va-t-on vers un effacement et une dilution des
frontières en raison de la mondialisation ou vers une
réaffirmation des frontières politiques et culturelles
sans compromettre les échanges de la mondialisation?
Assiste-on à la naissance de nouvelles frontières
maritimes liées au droit de la mer qui obligent à penser
une gestion commune et imaginer une autre
conception des frontières ?
- Que nous apprennent les frontières sur la conception
que les États se font de leur puissance et de leur place
dans le monde ?

Je rappelle la définition de base d'une


frontière : On la définit comme la limite du
territoire sur lequel l’Etat exerce sa
souveraineté.
Rappels (compléments à l'intro du chapitre
introductif) Dans la mythologie romaine, à
l’origine de Rome, vers -753, Romulus, un des
deux fondateurs mythiques de la ville avec
Remus, devenu roi (rex = tireur de traits) aurait
tracé une frontière, le Pomerium (Ety.
« après » ou « à l’intérieur du mur »), pour
délimiter l’espace sacré de la ville (Urbs) face
au reste du territoire romain alentour (Ager).
C’était une limite que nul, en armes, ne
pouvait franchir et enfreindre, même un
candidat à la royauté, sans être puni par les
Dieux et la Justice des Hommes. C’était aussi
pour Romulus un moyen de garantir son
pouvoir monarchique qu’il devait rendre
normalement (royauté alternée) au bout d’un
an à Remus et de l’empêcher de franchir avec
une armée cette frontière de la ville.

Au XVIIe siècle, le géo. Friedrich Ratzel définit


la frontière comme une réalité mouvante,
dont le tracé évolue en fonction du rapport de
force entre les acteurs en présence (évidence
bonne à rappeler).
A) Des frontières de plus en plus
nombreuses

En 1494, c’est une frontière qui découpe et partageait


par un coup de crayon le nouveau monde entre la
Castille et le Portugal lors du Traité de Tordesillas.
Les frontières depuis le XVIIe siècle n’ont cessé d’évoluer
à partir du traité de Westphalie en 1648 et le traité des
Pyrénées (1659) qui définit l’Etat souverain et légitime
avec ses frontières. Les guerres, à commencer par les 2
guerres mondiales mais aussi les phénomènes coloniaux
(colonisation, décolonisation de 1945 à 1975) ont accru
les frontières et créé parfois des conflits autour du tracé
de ses frontières. La Guerre froide avait gelé certaines
frontières mais créé aussi des frontières provisoires (les
2 Allemagne, les 2 Yemen) ou durables (les 2 Corée) mais
la défaite de l’URSS a accéléré l’apparition de nouveaux
Etats avec de nouvelles frontières (République tchèque
et Slovaquie, Moldavie)...
• En 1945 : une cinquantaine d’Etats reconnus
• En 2019 : 197 Etats, en plus des proto-Etats
ayant un poste d’observateurs à l’ONU (soit 250
000 km de frontières en tout les séparent).
Alors que la fin de la Guerre froide et du « rideau de fer »
en 1991 laissait présager une disparition ou un recul des
frontières politiques, créatrices parfois de tensions, il
n’en fut rien en ce qui concerne leur nombre officiel.
Elles n’ont jamais été aussi nombreuses depuis 1991.
Depuis la chute de l’URSS, 28 000 km de frontières
tracés. Marché rentable de la sécurité aux frontières.

B) Des frontières plus ou moins


marquées
L’affirmation des Etats royaux au XVIIe siècle puis celle
des Etats-nations au XIXe siècle se sont appuyés sur la
fabrication et la délimitation de frontière naturelles.
Les frontières entre deux ou plus de 2 Etats vont être
plus marquées si elles focalisent ou cristallisent les
tensions et querelles géopolitiques entre ces Etats.
Inversement, la mondialisation qui s’accélère depuis
1975-90 avec ses échanges internationaux croissants, a
pour effet à d’autres endroits, d’atténuer voire de
gommer les frontières même si elles existent encore
politiquement et juridiquement. On parle alors de
« frontières atténuées » ou de frontières ouvertes : c’est
le cas entre les E-U et le Canada, ou entre le Brésil et la
Guyane française en pleine Amazonie (fleuve Oyapock),
entre la France et l’Allemagne, 2 partenaires clés de l’UE.
La globalisation, les ententes régionales avec intégration
des Etats, la gestion des problèmes universels
transfrontaliers (changement clim) contribuent aussi à
un effacement. Les aéroports (smart borders, voir
exercice) et les ports pourraient réinventer les nouvelles
frontières en formant des points de passage obligés
majeurs.

C) La formation d’espace
transfrontaliers
Dans de nombreux cas, les frontières sont devenues de
simples interfaces, zones de contact et d’échange
mettant en rapport les peuples et concentrant les flux.
On parle de région transfrontalière, c.a.d de régions à
cheval sur une frontières favorisant les flux et les
échanges, ouvrant et effaçant presque les frontières. Les
régions transfrontalières de L’UE entre la France,
l’Allemagne, la Suisse et la Belgiques sont les plus
connues (SARLORLUX, TRIRHENA). Mais c’est aussi le
cas entre les E-U et le Mexique malgré la construction de
la palissades et les restrictions faites aux migrants latinos
: les maquiladoras et les Twin-cities concrétisent un
espace frontalier actif depuis 1990. Entre l’Ouganda et la
Répub. Démocratique du Congo, les échanges
transfrontaliers font vivre 80 000 commerçants profitant
notamment des différences de développement. C’est
aussi le cas entre le Kazakhstan et la Chine autour du
vaste projet des « nouvelles routes de la soie ». Parfois,
certains utilisent cette notion pour désigner les trafics
illégaux de drogue ou des migrants entre le pays du Sahel
et les pays du Sahara nord… C’est abusif.

CHAPITRE 1. TRACER DES FRONTIERES :


UNE FONCTION GEOPOLITIQUE
Les motifs et buts des Etats pour tracer des frontières
sont multiples et liés à trois fonctions pouvant apporter
sécurité ou conflits.
• A) Tracer des frontières pour s’approprier ou se
partager un territoire et ses ressources
Un tracé va se matérialiser symboliquement sur une
carte (depuis 17e siècle, utilisation des parallèles ou
méridiens) et physiquement sur le terrain.
Tracer la frontière pour un Etat (ou un autre acteur,
communauté, peuple pré-étatique, tribu ou
confédération) revient à délimiter son territoire.
Certaines frontières s’appuient sur un élément naturel
(comme une rivière, un fleuve le Rhin entre France et
Allemagne, l’Oder-Neisse en Pologne et Allemagne ),
aucune frontière totalement ni vraiment naturelle.
Toute frontière est un construit historique, politique et
social, de l’homme qui fixe arbitrairement et parfois
rationnellement le tracé de cette limite. Même un tracé
« naturel » peut évoluer en raison des
fluctuations/déplacements des éléments naturels
(divagation et chgt de lit d’un fleuve, d’une côte) :
Rivière Narayani entre Inde et Népal (lit et sillons
modifiés par la Mousson et inondations, bornes
déplacées).
En 1885, le traité de Berlin, dans un contexte colonial, a
élaboré des règles de partage sans vraiment tracer
clairement les frontières afin de satisfaire les intérêts
des puissances européennes impériales, et les réserves
des E-U ou de l’Empire ottoman en repli… sans écouter
et en excluant les chefs africains. Puis les puissances
coloniales, exportant l’idée de souveraineté en Afrique
dessinent sur place les tracés, selon les éléments
naturels ou des lignes géométriques, sans véritable
concertation. Ces frontières de fait, empiriques, seront
souvent conservées et légitimées par les Etats
nouveaux indépendants après 1945.
Autres éléments matérialisant physiquement la
frontière : bornes et barrières, Postes de douane,
check-point, ponts. Ces tracés peuvent être acceptés et
faire l’objet d’un traité, pacifiquement (Algérie/Tunisie,
France/Italie, …) ou à la suite d’une guerre
(France/Allemagne, Pologne/All, les 2 Corées). D’autres
peuvent faire encore l’objet de contestations :
Séparation par la « ligne McMahon » délimitant l’Inde
et la Chine décidée par le traité de Simla (1914) mais
contestée par Pékin qui évoque la contrainte coloniale
(Inde sous administration anglaise, Chine affaiblie et
dominée par l’Impérialisme Occidental), et des erreurs
de carte.
B) Des frontières pour se protéger et se
séparer.
Cas du Limes romain : le limes, frontière partiellement
fortifiée de l’Empire romain, servait entre le Ier et le IVe
siècle ap. J-C, à la fois à se protéger des incursions et
pillages des peuples dits «barbares » extérieurs à
l’empire, limitrophes mais aussi à tracer une route, une
voie de commerce et de passage. Il est plus un moyen
de contrôler les flux de population qu’une barrière
militaire efficace. Il n’était pas hermétique et laisser
passer des commerçants contre des droits de douane.
Ainsi le Limes protégeait mais permettait surtout de
gérer et réguler les relations entre les Romains, les
habitants de l’Empire en voie de romanisation et les
autres peuples extérieurs.
• Pour la Chine, la « Grande muraille » certes
inachevée était défensive face aux incursions des
huns et peuples des steppes (Mongols). La grande
muraille de Chine (ou plutôt les murailles) repose
aussi sur ce principe de séparation entre sédentaire
et nomades : près de 21 000 km :• Sous la dynastie
Ming (1368-1644) près d’un million de soldats sont
cantonnés le long de la Grande Muraille.
Aujourd’hui, l’Arabie Saoudite, sous protection militaire
des E-U depuis 1945, après avoir sécurisé sa frontière
nord (expulsion de l’armée irakienne du Koweit en 1991
et affaiblissement de l’Irak grâce à l’OTAN), doit
sécuriser ses raffineries et gisements de pétrole
continental, off-shore mais aussi ses ports et routes de
navigation en Mer Arabo-persique face à la montée de
la puissance iranienne. Ceci explique largement qu’elle
a décidé d’intervenir au Yemen (réunifié en 1992) à la
fois pour frapper les rebelles houthis chiites soutenus
par Téhéran mais aussi pour protéger sa frontière Sud
afin d’empêcher des incursions houthis (guerre 2012-
2021). Ce "gardien des lieux saints" de l'Islam a aggravé
la déstabilisation du M-O et montre ses craintes pour
son l'avenir géopolitique et les perspectives pétrolières
Mais la frontière sert aussi à séparer : soit une
frontière fluctuante de conquête et de « provocation »
sans combat (front pionnier comme la frontière de
l’Ouest aux E-U entre 1800 et 1870 où les colons
étatsuniens WASP au nom de la divine providence et de
la conquête de l’Ouest repoussent peu à peu les tribus
nomades indiennes first natives, ou en Amazonie auj.
pour les pionniers défrichant et exploitant l’Amazonie,
entre le Maroc et le Sahara occidental revendiqué par
les Saharaouis autochtones depuis 1975 ),
- soit un espace de reconquête et de reprise (La
Fronteira en Espagne , séparant les forces et Etats
chrétiens de l’Espagne musulmane entre le 11e (1064
Bataille de Barbastro) et le 15e siècle, date de la
reconquista finale en 1492 après la prise de Grenade )
- Ou un espace très disputé et conflictuel : la Ligne
Maginot (1928-38)
- ou une frontière de séparation et de scission lors de la
Guerre froide entre les deux Corée, à l’issue d’une
terrible guerre de 1950 à 53, le long du 38°//, 60 ans plus
tard, 2 économies et 2 niveau de vie opposés. La
frontière mexicano-états-unienne autrefois semi-
ouverte, participant à la prospérité des deux pays (zone
transfrontalière, maquiladora, ALENA depuis 1994) est
devenue depuis 2000 aussi une frontière de séparation
avec construction d’une barrière à l’ouest du Rio
Grande. Idem entre l’Inde et le Bangladesh ou
Pakistan.
C) Des frontières sources de tensions et de
conflits potentiels voire effectifs
La frontière entre les 2 Corées, héritée de la GF, est un
bon exemple de tensions encore vive entre deux pays,
séparant un même peuple victime de sa situation
géographique (péninsule entre japon et Chine) et de
l’Histoire contemporaine. L’un au Nord, régime
totalitaire implacable, spécialiste du conditionnement
de sa pop, a la bombe A mais peut laisser son peuple
mourir de faim (1980), l’autre a un niveau de vie
remarquable, meilleur que la France mais doit sa
sécurité à la protection US et son parapluie nucléaire.
Depuis l’armistice de Pan munh Jon en 1953, le long des
250 km de frontières qui séparent les 2 Corées, les
soldats nord coréens et sud coréens se font en face, en
certains points sous l’observation de casques bleus de
l’ONU servant à éviter une escalade et à s’interposer si
besoin. Les deux pays, malgré les menaces entre Kim
Jong Un et Donald Trump, tentent un rapprochement
diplomatique depuis quelques années, jusqu’en 2021,
arrivée au pouvoir effective de Joe Biden qui pourrait
revoir une partie de la politique étrangère de Trump.
Sur la longue histoire, les mythes font écho à cette
tension régnant autour du tracé de frontières : Selon la
légende, Rémus, franchit sans en avoir le droit le sillon
tracé par son jumeau Romulus pour délimiter le
territoire de la future Rome (Pomerium) mais celui-ci le
tue. Le fait de vouloir exercer son pouvoir légitime au
bout d’un an ne lui permettait pas de violer cette ligne
sacrée provoque ce meurtre. Frontière et pouvoir
génèrent aussi la violence. Au XVIIe siècle, le géo.
Friedrich Ratzel définit la frontière comme une réalité
mouvante, dont le tracé évolue en fonction du rapport
de force entre les acteurs en présence (évidence bonne
à rappeler).
Chaque frontière a sa propre histoire qui tient autant à
l’histoire des guerres, de la diplomatie, des mariages
princiers (stratégie patrimoniales des dynasties
princières). Mais tracer une frontière peut déclencher
un conflit : ceci révèle un déséquilibre entre les acteurs
sur place, un rapport de force et notamment une prise
en compte insuffisante des peuples ou ethnies sur place
: décisions arbitraires des puissances coloniales avant et
après la conférence de Berlin de 1884-85. Même si
depuis 1945, les grandes puissances et l’ONU sont les
garants de l’intangibilité des frontières, le cas soudanais
(guerre civile interne ou intra-étatique) ou la guerre
russo-ukrainienne débouchant sur l’annexion de la
Crimée en 2014 montre la fragilité relative et persistante
des frontières malgré une meilleure stabilité.

CHAPITRE 2. LES FRONTIERES EN DEBAT


: ENTRE EFFACEMENT ET AFFIRMATION
On a compris qu’aucune frontière n’est totalement
« naturelle » ( les frontières naturelles relèvent d’un
choix politique, elles sont le résultat d’une volonté
politique ou militaire) car elle est d’abord une
convention politique entre deux Etats. Pourtant la
moitié des tracés de frontière de la planète s’appuie sur
des massifs montagneux ou des fleuves. C’est le cas de
la ligne Oder-Neisse qui matérialise la frontière
germano-polonaise. Depuis 1945, la reconnaissance de
cette frontière est au cœur de la géopolitique de
l’Europe et des relations germano-polonaises. Plus
récemment, sont apparues les frontières maritimes qui
désormais se multiplient conformément à un nouveau
droit de la mer. Mais les intérêts et convoitises des Etats
poussent à un « découpage » inédit des mers et océans
à l’origine de litiges. L’idée d’une gouvernance
internationale des espaces maritimes germe aujourd’hui
pour protéger ces espaces fondamentaux pour les
équilibres planétaires mais aussi régler les litiges entre
Etats, sources de conflits.
Vers la fin des tensions et conflits liés aux frontières? La
non prise en compte ou la non-fixation des Frontières,
facteurs de conflits? la dématérialisation des frontières,
une exception pour les pays riches, libéraux et en paix?
Vers une disparition des frontières terrestres ou
l’apparition de nouvelles frontières?
• Problématiques pour les deux études de cas :
Comment la ligne Oder-Neisse s’est-elle imposée
entre l’Allemagne et la Pologne?
• Quels sont les enjeux géopolitiques autour des
frontières maritimes?
A) Reconnaître la frontière : le cas germano-
polonais de 1939 à 1990
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale en
Europe et le traité de Potsdam, en Mai-Août 1945, la
frontière entre l’Allemagne et la Pologne a été fixée par
les Alliés sur le tracé de deux fleuve : l’Oder et son
affluent le Neisse. Cette ligne correspond à la ligne de
défense et de démarcation de l’Armée rouge en 1945
face à l’Allemagne vaincue : ainsi par rapport à sa
situation de 1919-1939 (date de recréation de ce pays
longtemps rejeté par les Allemands et les Russes) la
Pologne est décalée vers l’Ouest et les Soviétiques
gardent dans l’URSS une grande partie des territoires
annexés de force à la Pologne en 1939, à la suite du
Pacte germano-soviétique (pacte secret Molotov-
Ribbentrop). Ainsi l’URSS est satisfaite de son
agrandissement territorial qui profitent à l’Ukraine et à
la Biélorussie, deux de ses républiques membre de
l’Union (URSS), tandis que les E-U accommodent
provisoirement de ce décalage de la Pologne vers
l’Ouest aux dépens de l’Allemagne car il faut soulager les
Polonais, véritable peuple martyr de la guerre (16% de
tués). Cependant les Alliés notamment occidentaux
laissent la porte ouverte à un accord véritable sur des
frontières définitives entre Polonais et Allemands en
utilisant la terminologie de ligne et non de frontières
pour ne pas trop heurter ou spolier les Allemands. Ce
découpage dramatique de la frontière occidentale de la
Pologne reconnu par les Alliés et imposé aux Allemands
a de multiples effets : deux conséquences
démographiques avec l’expulsion et la migration forcée
de millions d’Allemands (11 Millions environ) situés sur
la nouvelle Pologne et obligés de fuir à l’ouest, vers la
future Allemagne (bientôt divisée en 1949 entre RDA et
RFA). Chassés par l’exil, ils ne reconnaissent pas ce
découpage et souhaitent retourner dans leur ancienne
patrie (Heimat en alld). Mais de l’autre côté, les Polonais
qui quittent les terres de l’Est désormais soviétiques,
vont « poloniser » (« rendre polonais ») la zone
frontalière Oder-Neisse . Toutes les traces de ce passé
allemand (depuis la colonisation vers l’est des allemand
au Moyen-Age du temps des Chevaliers teutoniques)
sont systématiquement détruites. Certaines villes
comme Francfort-Sur-Oder sont coupées en deux.
L’enjeu diplomatique et géopolitique est bien de faire
reconnaître par toutes les parties la valeur juridique et
morale et la permanence temporelle de ce découpage.
C’est tout l’enjeu des relations germano-polonaises à
l’époque de la Guerre froide, en pleine étape de détente
commencée après 1962 et la crise de Cuba. Jusqu’en
1970, la frontière n’est reconnue que par la Pologne et
la République démocratique allemande (RDA) pro-
soviétique car sous influence et domination soviétique.
La République fédérale allemande (RFA) n’accepte pas
ce déracinement forcé et n’a pas reconnu la frontière.
Entre 1969 et 1974, la « nouvelle politique vers l’Est »
(Ostpolitik) du Chancelier allemand Willy Brandt permet
un rapprochement transfrontalier entre les Allemagne
et une reconnaissance mutuelle de la frontière entre les
deux pays, RFA et Pologne en 1970. La réunification de
l’Allemagne en 1990 entraîne la reconnaissance de
l’intangibilité des frontières entre l’Allemagne réunifiée
et la Pologne. Un pacte de réconciliation et de « bon
voisinage » entre les deux pays est mis en place. Le 17
juin 1991, un traité de bon voisinage est signé entre les
deux pays voisins. En 1970-91, cette ligne fixée à
Potsdam est finalement confirmée et officialisée comme
frontière légitime. ceci entérine vraiment la fin de la
Seconde Guerre mondiale et l’installation d’une paix
véritable en Europe centrale et occidentale.
B) Dépasser les frontières terrestres : le
nouveau droit de la mer
• Pendant longtemps, la mer n’a appartenu à
personne. Le droit de la mer reposait juste à partir
des XVIIIe-XIXe siècles sur le principe de la libre
navigation et de la libre exploitation.
Au cours du XXe siècle, les Etats ont cherché à accaparer
puis délimiter les espaces maritimes afin de mettre la
main sur de nouvelles ressources maritimes (pêche,
pétrole off-Shore, gisements miniers) et de les exploiter
en monopole. Ils ont ainsi voulu étendre leur
souveraineté au-delà de leurs frontières terrestres. Une
sorte de « territorialisation des mers » s’est donc
imposée (appropriation des mers comme s’il s’agissait
de terres).
Ainsi, en 1982, la Convention des Nations Unies sur le
droit de la mer est signée à Montego Bay, en Jamaïque.
Entrée en vigueur en 1994, elle est reconnue aujourd’hui
par 166 Etats. Mais les E-U, 1ère puissance maritime
mondiale, ne l’ont toujours pas ratifiée. Elle garantit la
sauvegarde du milieu marin par les Etats signataires.
Mais elle définit surtout un cadre juridique uniforme.
Ainsi, un zonage de l’espace maritime à partir des côtes
est établi. Ainsi, la mer devient une extension des
territoires souverains d’un pays. On y distingue d’abord
les eaux territoriales jusqu’à 12 milles marins (environ
20 km) dans lesquelles l’Etat exerce sa totale
souveraineté. Au-delà, la zone contiguë permet de se
protéger d’éventuelles incursions ou attaques en
contrôlant un détroit. Ensuite, on trouve la Zone
économique exclusive (ZEE) qui s’étend sur 370 km (200
milles marins) accorde aux Etats riverains de la mer des
droits souverains sur les ressources maritimes et leur
exploitation en monopole. Ce découpage renforce la
double volonté étatique de contrôler les mers et
d’affirmer la liberté de circulation.
Néanmoins, il n’est pas aisé d’appliquer le droit de la
mer. La multiplicité des litiges et des revendications
reflètent la difficulté d’établir des frontières sur un
espace ouvert à tous. Les différends peuvent porter sur
la délimitation de la ZEE, notamment en cas de mers
semi-fermées (Mer des Caraïbes vers le Golfe du
Mexique, Mer de Chine) ou d’archipels (Iles Spratleys).
En cas de zone de moins de 200 milles de mer séparant
2 Etats, le principe d’équidistance est la règle mais
parfois les appétits de conquête l’emportent comme en
témoignent les incidents en Mer de Chine du Sud entre
la Chine et la ZEE. Mais, les revendications peuvent aussi
porter sur l’extension de la ZEE jusqu’à 350 milles
marins. C’est le cas de la France qui s’est lancée avec
succès dans un programme d’extension raisonnée de
son domaine maritimes. Le cas le plus épineux et
alarmant est la volonté pour trois pays de profiter de la
fonte de la banquise dans l’Océan glacial arctique et de
s’approprier ces espaces : le but est d’exploiter les
ressources de cet océan et surtout de contrôler des
éventuelles futures routes maritimes. Mais ces projets
sont de nature à menacer l’équilibre écologique et
climatique de cet océan.
Un nouveau Droit de la mer au XXIe siècle doit surgir et
s’appliquer pour répondre à des défis et buts
importants: protection de l’environnement, limitation
du dérèglement climatique (les océans sont des
régulateurs climatiques), exploitation raisonnée des
ressources notamment halieutiques (pêche), lutte
contre les trafics et la piraterie, la sécurité en mer et la
sauvegarde des vies humaines. Ces buts dépassent la
logique de souveraineté impliquée par les délimitations
frontalières. Ainsi ces découpages reconnus ou
revendiqués par les Etats pourraient être relativisés et
remis en cause. Aujourd’hui, les Nations Unies songent
à une gouvernance internationale des océans.

CHAPITRE CONCLUSIF : LES FRONTIERES


INTERNES ET EXTERNES DE L’UE
INTRO (Rappels) : L’Union européenne s’est construite
par étapes depuis 1951 (création de la CECA) jusqu’à
former un espace intégré en 1992, l’Union européenne
disposant à partir de 2002 d’une monnaie unique. En
2018, l’UE représentait 512 millions d’habitants. A
chaque étape, en particulier lors de la création du
marché commun en 1957 (circulation des marchandises
sans taxes douanières) puis en 1985 avec la mise en
place d’un espace dit de Schengen (libre circulation des
personnes entre 26 Etats-membres, soit 422 millions
d’hab., et suppression des contrôles aux frontières
internes), elle a voulu abaisser le rôle et la fonction des
frontières entre les Etats-membres notamment.
Problématique : Pourquoi l’UE est-elle un laboratoire
des recompositions et des fonctions frontalières? Va-t-
on vers une stabilisation de ses frontières ou vers une
remise en cause?
A) Des limites fluctuantes et instables voire
chancelantes
L‘Union européenne associe depuis 1992-2013 28 Etats
autour d’un double projet d’unification continentale et
d’intégration économique (voire politique) sans
précédent ni équivalent dans le monde. Jusqu’à présent,
cet espace de paix s’était surtout préoccupé de
supprimer les barrières et frontières pour les
marchandises, les capitaux, les hommes et les
informations entre les pays-membres. Peu à peu, les
frontières s’effaçaient économiquement. Mais c’est une
Europe à géométrie variable qui s’est construite, avec
certains pays membre de l’espace de Schengen et
d’autres dans la zone Euro. Ceci crée des régimes
juridiques variés pour le passage des frontières et les
échanges.
Or, ce processus se manifeste aussi comme une
succession d’élargissements de l’UE avec l’entrée de
nouveaux pays-membres. On est passé de 6 membres
historiques (France, RFA, Italie et Benelux) à 28 en 2013,
qu’il faut réviser à la baisse, à 27 avec le départ du RU en
janvier 2020. C’est probablement un tournant
historique, soit l’inversion d’un mouvement d’extension
soit un point d’inflexion pour construire une autre
Europe. A chaque étape, les frontières de cette
construction communautaire se sont modifiées.
Plusieurs pays sont encore candidats à l’admission dans
l’UE, comme la Serbie ou la Turquie à condition de
respecter les critères d’adhésion de Copenhague
(démocratie, droits de l’Homme, économie de marché,
capacités administratives et politiques à appliquer les
traités européens). C’est aussi le cas lorsqu’un pays se
retire, cas inédit du R-U posant le problème du statut de
la frontière entre l’Irlande du Nord, partie du R-U et la
République d’Irlande, membre de l’UE : frontière dure
ou souple, risque de retour des tensions en Irlande du
Nord à cause de ce changement de statut ?
L’euroscepticisme comme l’empressement à étendre les
limites de l’Europe créent des difficultés politiques de
gestion des frontières. Beaucoup pensent devant la crise
actuelle créée par le départ du R-U qu’il faille désormais
fixer clairement les limites définitives de l’UE, pour en
faire un bassin de stabilité, se concentrer sur
l’harmonisation interne des politiques sociales, fiscales
et contrer l’euroscepticisme. Comme alternative à
l’élargissement, une politique européenne de voisinage
verrait alors le jour pour répondre en partie aux attentes
des pays extérieurs sans les intégrer. Mais les relations
de l’UE avec la Turquie sont durablement dégradées.
B) Des frontières extérieures plus ou moins
contrôlées et tendues
Les Accords de Schengen signés en 1985 ont créé dix ans
plus tard un espace de Schengen constitué par 22 pays-
membres (26 au départ) et qui ne coïncide pas
totalement avec l’UE. Ils visent notamment à protéger
et renforcer les frontières extérieures de cet espace, au
contact avec les pays étrangers à l’UE. L’Irlande, par ex,
membre de l’UE a préféré ne pas faire partie de cet
espace de Schengen. Il s’étend aussi aux territoires
ultramarins des pays-membres comme les Canaries
(Espagne), Mayotte (France), très attractifs
régionalement pour les migrants des pays voisins. Ces
accords ont mis en place des politiques migratoires
communes et un contrôle conjoint sur les frontières
extérieures. Ils s’appuient sur le Système d’information
Schengen (SIS) qui permet un échange des données
(réseau Eurasur) entre pays et une coopération policière
plus efficace. Ils mettent aussi en place une agence
européenne de garde-frontières et de garde-côtes
appelée Frontex. Celle-ci se charge notamment de
délimiter les espaces de surveillance et d’opération
terrestre et maritime, notamment pour contrer les
entrées illégales. Devant l’incapacité de l’UE à réguler et
canaliser les flux humains extérieurs, des moyens plus
coercitifs et dissuasifs ont été développés comme des
systèmes de surveillance et d’internement dans les
aéroports (Smart Borders comme à Roissy), parfois
même des murs ou barrières (Hongrie, Slovénie…),
conduisant à une certaine fermeture des frontières au
Sud-Est de l’Europe. Les points d’entrée stratégiques
(détroit de Gibraltar, Îles grecques ioniennes comme
Lesbos), les aéroports internationaux et certains ports
(Calais) mobilisent quelques 10 000 agents pour leur
surveillance.
Des accords de coopération associent les pays voisins à
la surveillance et la réception des migrants en échange
d’aide : la coopération est satisfaisante avec le Maroc
mais très malsaine et conflictuelle avec la Turquie qui
constitue le verrou entre l’Europe et le Moyen-Orient,
place stratégique (vue dans le thème 2 de la Puissance)
dans une zone centrale de « l’arc de crise ».
Avec la crise pandémique du covid19 qui s’est répandue
assez vite en 2020 de la Chine à l’Europe et au monde,
le débat sur les frontières nationales et les frontières
extérieures de l’Europe est encore plus d’actualité et
prend plus de relief. Beaucoup de citoyens ont ressenti
un besoin de protection et d’une plus grande
souveraineté pour mieux gérer les questions de sécurité
sanitaire ou alimentaire. Or, la crise pandémique liée à
une grande circulation humaine dans le cadre de la
mondialisation a vite conduit à la fermeture partielle ou
totale des frontières pour la juguler. Avant 2020,
certains redoutaient une « Europe forteresse » qui
favoriserait les naufrages et le drame de migrants noyés
au large. D’autres pointent du doigt une « Europe
passoire », avec des frontières très perméables,
inefficaces et non respectées par les migrants
clandestins, pris en charges par des associations qui
dénoncent ce désastre humanitaire, recueillent des
rescapés, sauvent des vies mais participent à cet effet
d’appel de nouveaux migrants vers l’UE. Cette situation
est de nature à favoriser le sentiment europhobe, les
réflexes nationaux voire des replis ultra-nationalistes. Le
contrôle des frontières s’est renforcé depuis 2015
lorsque l’accueil des migrants est devenu un sujet
politique, y compris en Allemagne. Ainsi, la
matérialisation des frontières s’est accentuée : des murs
sont apparus le long des frontières Grèce/Turquie,
Hongrie/Serbie, dans les enclaves espagnoles de Ceuta
et Melilla au Maroc. Les gardes côtes de Frontex
sillonnent la Méditerranée et les centres de rétention de
migrants se sont multipliés.
Les Etats méditerranéens du Sud de l’Europe (Grèce,
Italie, Maroc), ont été vite débordés par ces flux
migratoires. Ils doivent affronter en premier cet afflux
de migrants d’origine variée, poussés par la guerre et le
chômage ou attirés par des fantasmes d’Europe,
réfugiés ou clandestins, qui peuvent dissimuler leur âge,
leur identité et leurs véritables motifs d’entrée dans
l’UE. Ainsi, Grèce et Italie exigent une redéfinition des
règles d’accueil des migrants, notamment le règlement
de Dublin II qui prévoit que le 1er pays d’accueil d’un
migrant est responsable de l’examen de sa demande
d’asile.
C) Des frontières intérieures ouvertes?
Inversement et conformément aux accords de
Schengen, l’intégration régionale européenne semble
ouvrir les frontières intérieures entre les Etats
signataires. Elles couvrent environ 20 000 km et abritent
37 agglomérations transfrontalières. Chaque année, les
Européens (travailleurs, frontaliers, étudiants, touristes)
effectuent plus de 1 milliards de déplacements à
l’intérieur de l’espace Schengen. On est loin de l’époque
du « rideau de fer » en Europe.
DESCRIPTION : Depuis les années 1980, des espaces
transfrontaliers de coopération appelés euro-régions se
mettent en place, supprimant la fonction de rupture des
frontières. Elles reçoivent l’aide de l’UE à travers des
programmes (Interreg) et sont traversées par des
réseaux de transport (TGV et autoroutes mais aussi
tramway) qui font oublier l’idée de frontière. On observe
ici des migrations pendulaires dans ces bassins de vie et
d’emploi. La vitalité des échanges dynamiques crée ces
régions transfrontalières.
Ces réseaux comprennent des « nœuds
transfrontaliers » comme l’aéroport franco-suisse Bâle-
Mulhouse. Ainsi, la frontière franco-belge, invisible dans
le paysage, est devenue une interface parcourue par des
flux de travailleurs journaliers (40 000 Français), de
capitaux et de marchandises permettant d’enrichir la
région. Or les régions transfrontalières de l’Europe des
28 abritent près de 32% de la population totale (soit 1/3)
et plus de 40% du territoire européen.
La 1ère Euro-région est apparue en 1958 à la frontière
entre la Belgique et l’Allemagne. Aujourd’hui, il en existe
une centaine, certaines évoluent vers des Groupements
européens de coopération territoriale (GECT), apparus
en 2006, dotés de la personnalité juridique et de
compétences financières.
INTERPRETATION : Ces relations entre les deux côtés de
la frontière sont très souvent asymétriques et reposent
sur des différentiels : le travail qualifié ou non manque
d’un côté de la frontière au contraire d’en face
(différentiel du marché du travail), des populations
choisissent de traverser quotidiennement la frontière
proche pour effectuer des achats moins coûteux
(différentiel de niveau de prix). L’organisme Eurostat a
évalué à 2 millions le nombre de résidents d’un pays
européen travaillant au moins une fois par semaine dans
un autre pays, dont un grand nombre de Français (438
000, soit 20 % du total environ, mais aussi 286 000
Allemands, 155 000 Polonais, des Bulgares, des Baltes).
Mais la sortie du R-U de l’UE va un peu changer la donne
pour cette destination de nombreux ressortissants
d’Europe centrale ou de l’est mais l’avenir de la frontière
irlande/R-U reste à dessiner. Les projets de coopération
transfrontalière restent nombreux dans des domaines
variés : économie d’abord avec l’existence de filières
transfrontalières à succès (la lunetterie et l’horlogerie
dans les Juras français et suisse), mais aussi
l’environnement (protection et assainissement du Rhin
dans la TriRhéna), la culture (Orchestre de la Grande
Région regroupant musiciens luxembourgeois, français,
allemands, belges). L’Europe dépense une petite partie
de son budget total (3%) pour soutenir et stimuler ces
projets transfrontaliers avec les Etats et les collectivités
territoriales pour environ 6,5 milliards d’euros dans la
période 2014-2O20.
Des limites toutefois : tous les pays de l’UE (28 puis 27
désormais) ne font pas partie de l’espace Schengen (22).
Par ailleurs, ces frontières intérieures s’ouvrent
inégalement. Des contrôles persistent à l’entrée de
certains pays (Roumanie). Quelques frontières restent
litigieuses et conflictuelles, à l’instar de la frontière
chypriote appelée « ligne verte » (zone démilitarisée)
qui coupe Chypre en deux depuis 1974, date de
l’occupation unilatérale par l’armée turque. D’autres
formes de limites ou frontières fiscales ou sociales
demeurent étonnamment alors que les « frontières »
linguistiques, culturelles se comprennent mieux et sont
préservées, gage de diversité européenne sans
empêcher l’échange et même la synthèse culturelle
(Alsace-Sarre) . Certains mouvements séparatistes
militent pour l’établissement de nouvelles frontières
avec un tracé correspondant à leurs revendications
régionales et identitaires au sein d’Etats européens
souverains (Catalogne en Espagne, Flandre aux Pays-
Bas). Enfin deux crises sérieuses ont provoqué un retour
aux frontières intérieures soit par manque de
concertation et d’entente européenne soit par la nature
même de la crise : en 2015-2019, « crise des migrants »
provoquée par un afflux brutal de migrants venus
d’Afrique, d’Asie centrale (Afghanistan) ou du Moyen-
Orient et Afrique du Nord en plein « Printemps arabe »
(2010-2012) et en guerre civile (Syrie) alors que le risque
terroriste anti-occidental s’amplifiait en Europe. A cette
occasion, des pays perméables comme les pays
scandinaves ont rendu plus visibles leurs frontières par
des contrôles et mesures restrictives; un « groupe de
Visegrad » de pays au sein de l’UE prône une politique
migratoire plus ferme et un « retour aux frontières »,
donc une dénonciation de l’espace de Schengen. Puis en
2020, la crise pandémique du covid19 qui a nécessité la
fermeture progressive, totale ou partielle des frontières
pour limiter ou stopper la propagation du virus venu de
Chine, entré en Europe dès janvier voire décembre.
CONCLUSIONS : Des frontières d’abord protectrices,
affaiblies et ébranlées par une économie capitaliste
mondialisée jusqu’en 2008-2020 mais qui gardent
encore de nombreuses fonctions même si l’Europe
semble avoir plus de mal à contrôler ses frontières.

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