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Le français poursuit son déclin au Canada et au Québec, selon

Société
Statistique Canada

De 2016 à 2021, la proportion de Canadiens au pays dont le français est la première langue officielle parlée a diminué de 0,8 point de
pourcentage.
PHOTO : RADIO-CANADA / MARC ANDRE TURGEON

Radio-Canada
Publié le 17 août 2022

Le français est la première langue officielle parlée d'un nombre croissant de Canadiens, mais la proportion
qu'ils représentent à travers le pays a diminué depuis 2016, selon des données du recensement 2021
publiées mercredi par Statistique Canada. Le Québec n'échappe pas à cette tendance.

De 2016 à 2021, le nombre de Canadiens dont le français est la première langue officielle parlée est passé
de 7,7 millions à 7,8 millions, une croissance de 1,6 % sur cinq ans.

Or, cette croissance est inférieure à celle de la population canadienne, qui s'élève à 5,2 %. Le poids du
français s'est donc amoindri au Canada. La proportion des Canadiens pour qui il s'agit de la première
langue officielle parlée a en fait diminué, passant de 22,2 % en 2016 à 21,4 % en 2021.

Cette tendance à la baisse n'est pas nouvelle. Depuis 1971, soit la première année de recensement pour
laquelle des renseignements sont recueillis sur la première langue officielle parlée, le poids démographique
du français au sein du Canada est en baisse. Cette année-là, le français était la première langue officielle
parlée de 27,2 % des Canadiens.

« La plupart des indicateurs de l'évolution du français au Canada suivent cette même


tendance : hausse en nombres absolus et baisse en pourcentage de la population, le nombre
de locuteurs d'autres langues augmentant proportionnellement plus rapidement. »

— Extrait du rapport de Statistique Canada sur le recensement 2021

Et le Québec n'y échappe pas. Si le nombre de personnes utilisant le français y a augmenté, passant de
6,4 millions à 6,5 millions, leur poids démographique a là aussi diminué, passant de 79 % à 77,5 %.

Cette tendance à la baisse est observée depuis 2001 au Québec, selon Statistique Canada.

Les données démontrent aussi que la proportion de personnes dont la première langue officielle parlée est
le français a chuté dans toutes les régions du Québec, sauf celle de la Gaspésie--Îles-de-la-Madeleine. La
baisse est plus marquée au Nord-du-Québec (-3,6 points de pourcentage), à Laval (-3 points de
pourcentage), à Montréal (-2,4 points de pourcentage) et en Outaouais (-2,4 points de pourcentage).

Le nombre de personnes dont l'anglais est la première langue officielle parlée a aussi franchi le cap du
million de locuteurs au Québec pour la première fois au recensement. La proportion de la population que
ces locuteurs représentent est passée de 12 % en 2016 à 13 % en 2021.

Parmi ces locuteurs, plus de 7 sur 10 se trouvaient à Montréal ou en Montérégie.

De façon générale, Statistique Canada explique cette croissance par le fait que les locuteurs de l'anglais
sont en moyenne plus jeunes et ont donc un taux de décès plus faible. Les migrations, notamment en
provenance d'autres provinces, ont aussi une incidence, est-il relevé dans le rapport.

« On sait [en provenance] d'autres sources de données que le nombre de résidents non permanents qui se
sont établis au Québec de façon générale, de 2016 à 2021, a augmenté par rapport à la période
précédente », a affirmé en point de presse le directeur adjoint du Centre de démographie de Statistique
Canada, Éric Caron-Malenfant.

« Les données du recensement sur les langues officielles sont préoccupantes et démontrent ce que notre
gouvernement a déjà dit très clairement », a commenté dans une déclaration écrite la ministre fédérale des
Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor.

« Le français est menacé au Canada, y compris au Québec. »

— Ginette Petitpas Taylor, ministre fédérale des Langues officielles

Elle en a d'ailleurs profité pour souligner l'importance de l'adoption rapide du projet de loi C-13 qui vise à
moderniser la Loi sur les langues officielles. Elle a aussi promis que les données orienteraient ses décisions
en vue du prochain Plan d'action pour les langues officielles.
Déclin du français : faut-il s'inquiéter? Comment renverser la tendance? Entrevue avec le chercheur et statisticien Charles Castonguay.

On a eu raison d'agir, soutient Legault

La publication du recensement intervient alors que le Québec intensifie ses efforts pour protéger le
français dans la province, sa dernière loi linguistique adoptée cette année restreignant l'emploi de l'anglais
dans les services gouvernementaux.

« De ce que je vois, c’est inquiétant, et on a eu raison d’agir avec le projet de loi 96 », a commenté le
premier ministre François Legault en mêlée de presse, à l'entrée du Conseil des ministres mercredi,
précisant qu'il devait encore « prendre connaissance de l'étude ».

La nouvelle loi, qui régit l'utilisation du français au sein des instances gouvernementales, des entreprises
et dans l'espace public, doit entrer en vigueur le 1er septembre prochain. Elle prévoit notamment que
toutes les entreprises de 25 à 49 employés soient assujetties à la Charte de la langue française, de même
que les entreprises de compétence fédérale, comme les banques.

En entrevue à Midi info, Jean-Pierre Corbeil, qui est professeur associé au Département de sociologie de
l'Université Laval et ancien responsable du programme de la Statistique linguistique pour Statistique
Canada, a relativisé l'incidence que pourrait avoir la réforme de la Charte de la langue française en lien
avec les données du recensement révélées mercredi.

« Ce qui frappe, c’est bien sûr que l’anglais continue de gagner du terrain, mais dans la sphère privée. [...] Il
faut bien comprendre que la politique linguistique du Québec porte sur l’espace public », a-t-il commenté.

On aura les chiffres concernant la langue de travail en novembre, a précisé M. Corbeil.

En 2021, Statistique Canada a recensé 189 000 personnes ayant au moins une langue
maternelle autochtone et 183 000 qui en parlent une à la maison au moins régulièrement. Les
langues cries et l'inuktitut sont les principales langues autochtones parlées au Canada.
L'anglais, langue de choix des immigrants

Inversement, le poids de l'anglais comme première langue officielle parlée augmente dans l'ensemble du
Canada depuis 1971. De 2016 à 2021, il est passé de 74,8 % à 75,5 %.

« Comme par le passé, l'immigration a contribué à cette tendance, puisque c'est vers l'anglais
que se tourne une majorité d'immigrants après leur arrivée au pays. »

— Extrait du rapport de Statistique Canada sur le recensement 2021

« Par exemple, en 2021, 80,6 % des Canadiens dont la langue maternelle est autre que le français ou
l'anglais [...] avaient l'anglais comme première langue officielle parlée, comparativement à 6,1 % qui
avaient le français », détaille l'agence fédérale.

M. Caron-Malenfant a souligné que Statistique Canada dévoilera des données spécifiques à l'immigration
et aux déplacements de population interprovinciaux en octobre prochain. « On va avoir un aperçu
beaucoup plus complet », a-t-il dit.

Par ailleurs, le nombre de Canadiens qui parlent une autre langue que l'anglais ou le français de manière
prédominante à la maison est lui aussi en hausse, passant de 4 millions en 2016 à 4,6 millions en 2021.

Ces personnes représentent 12,7 % de la population canadienne, une proportion en hausse depuis 30 ans;
elle était de 7,7 % en 1991, au moment où les niveaux d'immigration augmentaient.

En dehors du français et de l'anglais, le mandarin et le pendjabi étaient les langues les plus parlées au pays
en 2021. Les langues qui ont connu la plus forte poussée de croissance entre 2016 et 2021 sont celles
originaires d'Asie du Sud, dont le pendjabi.

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Avec les informations de La Presse canadienne

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