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Suivi de Hi s t oi r e &
Monument
HENRI SAVEY
L’ÂGE D’HOMME
1
2
MANIE
LIBRE
1.LA FIN COMMENCE 2. SENS
3. DE L’AUTRE CÔTÉ
* LES BOIS *
4. PROPHÈTE BIS REPETITA
5. LA VIE EST ŒUVRE D’ART
6. UNE LONGUE MARCHE
ENFERMÉ
1. L'ENTRÉE EN MATIÈRE
2. EXPLIQUER 3. GOUFFRE
* MOUVEMENT *
4. AMORCE
5. SECRET 6. ROIS SANS ROYAUME
DÉPRESSION
ENFERMÉ
1. PEUR ET HONTE 2. MORNE
3. PIRE 4. VIDE
5. ON PERD 6. FÊLÉ
* CACHETS *
7.EGO 8. MERCI
9. COMPRENDRE 10. REPOS
11. IMPATIENCE 12. D’ENTRE LES MORTS
LIBRE
1. EN LAISSE 2. LES VOIX
3. DE NOUS DEUX 4. VIVRE PETIT
5. LINGE BLANC 6. L’INNOCENCE
* SCÉNARIO *
7. RUPTURE DE STOCK 8. ÊTRE UN AUTRE
`9. FICTIONS 10. THÈSE
11. PERDRE ET GAGNER 12. FIN
EUTHYMIE
S’ENFERMER
1. MIROIR
2. ENTRETIEN D’EMBAUCHE
3.TRAVAIL
*MEDIAN*
4.L'APPÂT DU GAIN
5. LE COURS DU TEMPS 6. LE PASSE
SE LIBÉRER
1. TU SAIS
2. RETROUVER
3. LE CHEMIN PARCOURU
* ALLER RETOUR *
4. JE LES VOIS 5. SANS AMOUR
6. LA VOIX DES ANGES
3
4
MANIE
5
LIBRE
6
1. LA FIN COMMENCE
La fin du doute
Le début de la folie
La fin de la route
Vers l'insomnie
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2. SENS
Clé logique
J’agis
Je pense
Dans plus d’une langue
Dans l’instant
Je cherche le beau
L’effet est immédiat
Je vis un vie
En une nuit
Sur tout
Je parle beaucoup
Par définition
Ma logorrhée
Ne saurait s’arrêter
Jeu d’aliéné
8
3. DE L’AUTRE CÔTÉ
À un moment précis
Je passerai de l’autre côté
Ce moment j’ai beau le chercher
Je ne peux le retrouver
La violence peut-être
De ce jeu peut naître
Plus ça va
Plus je prends
Pour réalité
Le fruit de ma psyché
Paranoïa
Vient
Une nation
D’hallucinations
9
*
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LES BOIS
Forme humaine. Lumière. Poignée de main. Chercher un sens. Les voix me guident. La route
à prendre. Les signes. Un empire de signes. Ignoré. Puis reconnu. Prendre à gauche. La voie
du destin. Des mélodies. On me parle. Je réponds.
Dernier train du soir. Minuit 38. Tirer ma carcasse. Ce qui suit. Mon esprit file. Ma pensée :
un fardeau. J’en sens le poids sur mes épaules. Pèlerinage. Quartier gare. Soif. Une maison.
Petite fontaine. Escalader la barrière. Repartir. La voie rapide traversée. Noir. Je me perds.
Noir. Une bute. Escalader. Tomber. Enfin une route. Noir. Marcher.
Les bois. Un bruit. Un autre. Encore un autre. Je donne à voir : un monstre. Je montre les
crocs. Ce râle. Il vient des entrailles. Je suis une bête. L’humanité m’habite. Sauver ce qui
reste à sauver. Nous mourrons tous. Lentement. Sûrement. Subitement. Violemment.
La forêt me parle. Je dois lui répondre. Face à la peur : dominer. Hurler. Tout s’arrête. Je
m’arrête. Des bruits. Je reprends. Le silence. Dans mon hurlement. Je cherche le silence.
Dans un hurlement.
J’arrête.
Recommence.
Face à moi : le noir. Et un son. Un oiseau répond. Il n’a pas peur. Je n’ai pas peur. Je sens le
vent. Je le sens intensément. Il porte les fantômes du passé. Ces fantômes pleurent. Leur
souffrance est palpable. Les bois reprennent vie. De nouveau. Je suis le seul à faire sens. La
forêt se tait. Sauf cet oiseau. Il entend mes prières. Il faut les répéter. À la nature toute
entière. Je suis venu. J’ai entendu. Et je l’ai faite taire. Pour la libérer. Il y aura un être, un
devenir.
La forêt s’illumine. J’aperçois des nuées dans les branches. Vestiges d’un temps à venir. La
ville est finie. Le bitume périmé. Nous vivrons dans les arbres. Chaque famille aura son
chêne. Je pense. Je hurle. Je sens. La vérité vient dans l’instant. Cet instant est là.
Une méthode. La seule méthode. Pour y arriver. Vendre son âme au diable. A la croisée des
chemins. Dans cette forêt. Alors, je marche. Et, je hurle. Bientôt, je le trouverai. Cette route
ne peut être esseulée. Marcher. Hurler. Marcher. Le noir. Les bruits. La forêt. Une autre
route.
Je suis arrivé.
Pas de diable.
11
*
12
4. PROPHÈTE BIS REPETITA
Et si je tenais d’Isaïe
Ou d’Ézéchiel
Combien de religions
Combien de prophètes
De quelle religion
Suis-je le prophète
Je suis mouvement
Jamais je ne mens
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5. LA VIE EST OEUVRE D’ART
Ma Logique
L’Eau Magique
J’écris
...
Avant-hier ma soeur
En pleine journée
Je n’ai pas voulu la faire entrer
Elle ne voulait pas partir
Je l’ai presque frappée
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6. UNE LONGUE MARCHE
J’ai marché
Dans les rues de Paris
Sous la pluie
Aller voir
La Tour Eiffel
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ENFERMÉ
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1. L'ENTRÉE EN MATIÈRE
Je réponds
“Non,
Je ne suis pas fou”
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2. EXPLIQUER
18
3. GOUFFRE
Celle de la réalité
19
*
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MOUVEMENT
Tu sais parler : parle. Ou un autre le fera pour toi. Avec ses mots, avec sa voix. Tu sais parler.
Alors parle. S’il le faut : gratte. Écriture : transpiration. Prière. Prie. Tu seras exaucé.
Une idée passe. Fait la passe. En profondeur. Au réseau d’une pensée. Direction naturelle.
Le passé nous enferme : moments morts impossibles à ressusciter. Vide du sens d’hier :
impossible sens du demain. Recréer le paradis. Les dieux n’ont pas d’yeux. Je suis un
paratonnerre. Force vive.
Je brûle. “Laissez-faire”. Ou il y aura une réponse : violente et lente. L’éclosion d’un rêve
accouche dans la peur. Tout ceci n’est que comédie. Par moment, je tiens dans ma main un
sourire.
Il y a des choses qui ne se font pas. Rire de la mort. On rit bien de l’amour. Ils riment tous
deux avec toujours.
Les idées définissent un homme. Il est passage. Il y a l’expérience. La chance. Il était, il a pu.
Identité identique. Tout nous préexiste. Tout nous survit. J’imagine. Je suis ce que j’imagine.
Taches d’encre sur le papier. Cercle après cercle. Dessins. Un peu de conversation. Lui aussi,
il tourne en rond. Même enfermé, on partage un semblant d’amitié. Fait d’une relative
intimité.
Il faut reprendre.
21
*
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4. SECRET
Un espace d’informations
Se crée
Un devenir en formation
Se crée
Il crée
Secret
Il rêve
Se crée
Un personnage
Secret
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5. AMORCE
Il y a un ralentissement
Un errement
Je crée
Un électrochoc
Une amorce
À la souffrance
Qui domine
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6. ROIS SANS ROYAUME
Enfermé
Soigné
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DÉPRESSION
26
ENFERMÉ
27
1. JE TRÉBUCHE
Je trébuche sur
La Peur
La Honte
De moi-même
De cette tête malade
Sans contrôle
Aucun contrôle
...
Question :
“Pourquoi?”
Réponse :
“Parce que”
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2. MORNE
Moments morts
Journées mornes
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3.PIRE
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4. VIDE
Ils me répètent :
"Qu'est-ce que tu fous ici”
Je réponds :
“Je plonge”
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5. ON PERD
On ne vit pas
On perd
Notre temps
Nos mots
Nos amants
Nos parents
On ne vit
On perd
La raison
Puis sa maison
Ses amis
En une nuit
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6. FÊLÉ
Mon cerveau
Je l’ai recollée
Il y a une fissure
J’en suis sûr
Ça doit être ça
Être fêlé
33
*
34
CACHETS
Pensées noires. Envies morbides. Idées sur orbite. Le diable me tire par les bras. On me
trouvera au bout d’une corde. À marcher sur le fil. Broyé par les rouages du passé.
Quelque part, je comprends Van Gogh. S’amputer d’une oreille, d’une main. S’amputer d’une
idée, d’un tableau peint. S’amputer de son passé. Et le regarder nous rattraper. Imagination
détraquée. Rêves d’enfant. Tout rêve est un enfant.
Si la tête explose. C’est que les sens explosent. Sous le sens on trouve des malentendus.
Au-dessus, les anges modernes et les dieux antiques.
Je ne suis ni intelligent, ni réfléchi. Mais je vis. Je repense à ce que j’ai fait. Je me suis même
fait des amis. Avant la bascule. Et les messages envoyés. On me demande ce que j’ai fait en
crise. L’évoquer. Simplement, l’évoquer. Bloque ma pensée. Sur une image. Je suis tétanisé.
C’est la deuxième fois. Je dois bien l’avouer. Ça vient de moi. Je déraille.
Ça aurait pu être pire. Ça pourrait être pire. J’ai cru en Dieu. Je n’y crois plus. A la place, je
regarde la télé. Elle ne me parle plus. Elle me parle comme à un autre. Seule fenêtre sur le
monde. Condamnez les fenêtres. Réaction lucide contre le suicide.
Les jours sont longs, les nuits interminables. La vie se réduit à des instincts primaires : boire,
manger, dormir. Mon corps se liquéfie. Dissection du lobe frontal. On me sort pour un
encéphalogramme : aucune lésion cérébrale. Je suis à l'hôpital, un flingue sur l’occipitale.
Avaler ses cachets. Avant dîner : faire la queue pour son traitement. Je préfèrerais qu’on me
soigne. Stabiliser les humeurs. Thymorégulateurs. Mes humeurs. On me fait un cours. Un
traitement. À vie. Dormir. Pas de drogues. Alcool, modérément. Je pose des questions. Je
demande comment j’ai le droit de vivre. Ou, si j’ai le droit de vivre. On me dit que oui. J’ai un
doute. Je suis emprisonné. Je vis, enfermé.
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*
36
7. EGO
37
8. MERCI
Mais
“Merci”
À l’infirmier
Au médecin
À la dame de la cantine
Barquettes en plastique
Repas chaud garanti
Psyché élastique
Un psychiatre en rit
Je déambule la nuit
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9. COMPRENDRE
La quête de comprendre
Dites-moi où
Je pourrais comprendre
J’observe en silence
La chimie en moi
Si je ne me trompe
39
10. REPOS
Je ne me souviens plus
Ce qu’il y avait avant
Sinon le repos
Avant le repos
Le repos
Après le repos
Le repos
À cette heure
Si on me demande
Aujourd’hui
Et pour toujours
Je suis le repos
40
11. IMPATIENCE
Patient
Patient
Impatience
La science
D’attendre
Vertiges
Vestiges
Du temps passé
41
12. PIERRE
Je la ramasserai
Et vous la rendrai
Une marque
Je suis du bétail
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LIBRE
43
1. EN LAISSE
44
2. LES VOIX
La réponse du médecin
"Hallucinations sonores
Rien d’étonnant”
Rien d’étonnant
Excusez si je me méprends
Mais
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3. VIVRE PETIT
46
4. LINGE BLANC
47
5. RUPTURE DE STOCK
Pousser un chariot
Dans le supermarché
De sa vie
Il ne reste rien
Elle ne sont là
Que pour être rappelées
48
6. L’INNOCENCE
Solitude palpable
Réalité incapable
J’ai cueilli
Pensées et soucis
49
*
50
SCÉNARIO
Chaque matin, je me réveille. Ce que je fous là. Aucune idée. Douche froide. Pas de travail.
Pas d’appartement. Projets avortés. Le plafond. Il faut sortir du lit.
Ma vie : un tableau.
Revisiter son histoire. On s’imagine faire sens. Avoir des choix réfléchis. On a des traumas.
Mais pas plus qu’un autre. L’existence a une constance. Travail, amis, vacances. On observe
votre vie. Ce choix : irraisonné. Cette peine : démesurée.
Dans l’attente : cerveau bleu. Esprit en ruine. Je le passe à la paille de fer. Avoir une vie
normale. Il y a une généalogie : alcooliques, dépressifs, agonisants.
Jours mornes. Il y a des pensées que je devrais m'interdire. Hier, j’ai pleuré. En années, je
n’ai pleuré. Ce week-end ma sœur viendra.
Je me lève tard, les journées passent plus vite. J’ai le sentiment de creuser un trou. Les deux
pieds dans la merde. Je finirai par fleurir. J’ai échappé au pire. Un siècle plus tôt, je serais
aliéné. En asile.
J’évite de relancer mes amis. Trop peur qu’on me demande comment je vais. Et d’avoir à
mentir. Quelques messages reçus. Le problème : l’historique.
Il faut retrouver un travail. Première phrase à l’esprit : bon à rien. J’ai raté le train. Je n’ai
pas de métier. Sans emploi, on s'enchaîne au vide. Avec, on s'enchaîne à la journée.
La question : réussir sa vie. Ne sera plus posée. Je peux être rassuré. Si on me demande ce
que je fais. Je répondrai : fou. À temps partiel.
51
*
52
7. FICTIONS
Contours du vide
Contours de ma vie
Le nom de l’inconnue
Une impression
53
8. JOURS SANS NUIT
Connaître
Les jours
Sans nuit
J’entends
Je me prépare au pire
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9. THESE
La vie ne serait
Qu’une idée, une thèse
Instruction
Procédure
On se juge
Ce procès terminé
55
10. L’UN ET L’AUTRE
Je suis
Un autre
C’est moi
Je m’entends dire :
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11. PERDRE ET GAGNER
57
12. FIN
Redémarrer de zéro
Serait enviable
58
EUTHYMIE1
1
État psychique sans troubles de l’humeur.
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S’ENFERMER
60
1. MIROIR
Toi le même
61
2. ENTRETIEN D’EMBAUCHE
Je tombe
Je me relève
Plus je tombe
Et plus je me relève
Avec
J’apprends à survivre
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3. TRAVAIL
Je divague
Mon esprit
Sans rame
63
*
64
MÉDIAN
Il faut aller de l'avant. J’ai été embauché comme travailleur handicapé. Handicap invisible.
J’ai un secret. Mes collègues l’ignorent. Ce n’est pas écrit sur ma gueule. Je mens. Camoufle
les mois d’inactivité. Les changements de direction. Je suis un infiltré. Je suis double. Le
temps passe.
Je me métamorphose.
En insecte.
Quand je rentre chez moi, je peins. J’avais enterré ce projet. Lâcher prise. Et prise sur le
cours de mes pensées. J’ai des remontées. Sensations, souvenirs. C’est passager. Mais ça
m’effraie. Dans ces moments-là, j’écris. Ce qui me passe par la tête. Une conclusion. Si ça
sonne notamment.
Je collectionne des phrases. Courtes, les plus courtes possibles. Sans rechercher de mètre.
Un rythme. À contre temps. Il reste des choses qu’on ne peut pas raconter. Certains
connaissent une partie de l’histoire. Mais personne sa totalité. Même moi. Acteur aveugle. La
raconter. Des écrits me hantent. J’en ai perdu. Il en reste. Je les ai relus. Vue sur des strates
profondes.
Raconter autre chose. Ce qui me manque. Il faudrait trouver des images. Être factuel. Et ne
pas l’être. La somme de mes relations passées. Qui se répondent. Un amour normal. Changer
de regard. Mentir. Les mots sont impuissants. Mais, ils restent. L’âge adulte lui. Il commence
par la folie. On veut vous enfermer. Vous refusez. On vous enferme. Vous-vous enfermez.
J’en viens à regretter l’HP. La vie était chiante mais simple. On commémore les victoires, pas
les échecs. Je tiens même en échec l’échec. Cours de vie médian. Je ne finirais pas clochard.
Ou pas tout de suite. J’ignore si ce sera suffisant pour tordre l’existence.
J’ai les yeux rivés sur un écran. En fond, il y a le ciel. Une journée de plus : à compter les
heures, à rêver de vacances. Une journée de plus, à subir. Errance. Le café est moins
dégueulasse que la veille.
65
*
66
4. L'APPÂT DU GAIN
L’appât du gain
Moteur profond
De tout à rien
Une raison au fond
L’amour du prochain
Refrain lointain
67
5. LE COURS DU TEMPS
Le cours du temps
Le comptable de la violence
Le sens de la lutte
Conter la romance
68
6. RETROUVER
Solitude habitée
On s’oublie
On se perd
Je me suis retrouvé
Entouré
D’objets imaginés
69
SE LIBÉRER
70
1. TU SAIS
Ai-je entendu
Un soir
Remonter de dépression
Et se prendre un skud
Sans pression
Passe un orage
71
2. LE PASSÉ
Le passé s’en va
Et me suit
Le faire mentir
72
3. LE CHEMIN PARCOURU
Une idée
Me traverse le crâne
À la perceuse
Puis
73
*
74
ALLER RETOUR
J’enjambe les voies toutes tracées. Pas de petite amie, quelques amis. Un travail alimentaire.
Pour alimenter une fraction élémentaire de mon temps. Le reste : excroissances de ma
conscience.
Souffrir de maladie. Vivre avec une maladie. Et, entre les deux ? Je ne souffre plus, je souffle.
Une bougie de plus d’année passée en liberté. C’est déjà ça de pris.
Ce que j’ai trouvé : des formes inventées. J’ai le hasard logique. La logique est un jeu. Ce jeu
est fait de trajectoires qu’il faut cueillir en bouquet. Ces trajectoires déracinées, elles perdent
leur feuilles, on les jette. Il reste une tête à dévisager.
La vie est absurde. La vie est belle. Entre les deux, la vie est un aller-retour. Tiroirs de la
mémoire, maison de la raison. Apprentissage. Quel que soit notre âge. Viendra le printemps.
On fleure la misère. Par moments, j’ai l’impression de rattraper le temps. Je le sens. Je le
vois. Ne plus s’arrêter. Ne plus rêver. Si ce n’est éveillé.
Ce que j’ai en tête : les myriades d’accolades. L’amitié retrouvée. Parler avec d’autres que moi
ce dont nul autre que moi ne peut comprendre. Ce que je suis, pour l’un son père l’était. Pour
l’autre, sa mère l’est. On se sent seul, on est entouré d’êtres fragiles. Et de leur humanité.
Se demander quelle est la prochaine déchirure à venir. Tout ce que j’ai n’est qu’une ébauche.
Il faut croire.
Je ressens comme un vide. La folie a imprimé son circuit dans ma pensée. Par moments, je le
reconnais. Je n’ai plus peur de rien. Si ce n’est le bruit d’un grille-pain. Et des uns, que j’ai
effrayé. Et qui ne l’ont pas oublié.
Mon esprit est poli. Je rêve de légèreté. Je fais un vœu : ne plus revivre l’ennui. Alors je le
décris. Et l’ennui prend une autre vie. Rayer un mot, une phrase. Elle n’est pas sur les rails.
Trop dans l’emphase. Remplir la feuille. Avaler la mer. J’appelle le service client. Réponse :
ce n’est que de l’eau.
75
*
76
4. TRANSPARENT
Arrivée en départ
Il se délite
Se déforme
Derrière
Rien
Devant
Un océan
Bientôt
Il sera transparent
77
5. APOSTROPHE
Changer de décor
Je lâche du leste
Garde le reste
78
6. COMME ELLES
Je souris
Je me relève
79
80
.
*
H istoire&
Monument
.
.
.
.
.
81
82
*
H istoire
83
ACTE 1 - LA RENCONTRE
1.La fête
2. Au son des oiseaux
3. L’automne
* CONTACT *
4. Danger
5. Impression
6.Le possible / L’interrogation
ACTE 2 - SE REVOIR
1.Le rendez-vous
2. L’hiver
3.Divin
* CONNEXION *
4. Mirage 5. L’inconnu
6. Pensées
ACTE 3 - L’AMOUR
1. Au commencement
2. Au féminin
3. Tension
4. Valse
5. Une fleur
6. Tendre
* LANGUE *
7. Tempête
8. Science
9. Tes bras
10. Empire
11. Demain
12. Or
84
85
ACTE 1 - LA RENCONTRE
86
87
1. Fête
88
2. Miroirs
Entre en chantier
89
3. À terre
Matin
Rien ne bouge
Ciel austère
Les gestes
Sont à taire
90
*
91
CONTACT
Hasard. Une fête. Je n’ai rien demandé. J'étais là. Un regard. Surprise. Réciprocité. Trois
mots. Rien d’explicite. Un autre endroit. Trois mots de plus. Un autre regard. Plus appuyé.
Une phrase. Tout est sonore.
La fête s’enfonce. On hésite. Tomber d’accord. Descendre les escaliers. Là, s’arrêter. Marcher.
Une porte. Elle s’ouvre sur un :
“Au revoir.”
Puis, sur un corps. Une décoration. Des rires. Un rythme. En trois temps. Reconnaître une
plasticité. Vérité. Constat. Aveu. Rétine. Images.
Il reste une impression, des couleurs, plus de trois dimensions. Le temps s’est compressé. Il y
avait quatre mains. Des anches. Être prêt. Demain est advenu. C‘était hier.
Je pense : danger.
Ce livre. Ce livre dont j’ai parlé. Italien, Renaissance. Je l’ai lu il y a des années. Le titre…
Oublié. Le Courtisan de Castiglione.
Baldassare, si tu m’entends…
- Que faire?
- Jouer.
- Ignorer les sens interdits?
- Et avouer.
- Ce livre : c'est Castiglione.
92
*
93
4. Parenthèse
Oublier
Mais,
Il fait sens
94
5. Objets trouvés
Une greffe
Ici, un cœur
Des mots
En cas de besoin
Je les reconnais
Aux objets trouvés
95
6. Interrogation
Je suis
Sur un rond bouclé
Vide
L’interrogation
Plein
Le possible
Je les fixe
Comme on fixe le manque
Ils échangent chacun leurs noms
Profondeur
Temps
Ça y est
96
ACTE 2 - SE REVOIR
97
1. Bonjour
Recevoir en atterrissage
Une interrogation
Une littérature
On la croit vieille
En réalité
Se jeter à la mer
Icare ne s’en souciait
98
2. Désert
Un lit exempt
Des mots exsangues
Soyons snobs
Noyons nous dans le désert
99
3. Le rendez-vous
Pour plaisanter
Pas même
En un sourire
Ou bien
En silence
100
*
101
CONNEXION
Restaurant. Réservation. Jour convenu. A son arrivée. Elle dessine sur la nappe en papier :
tête de mort et nuages. Je n’ai plus les codes. Habituellement, je fais tout très vite. J’ai été
bouffon. Elle rit. Me regarde avec des yeux ronds. Semble intéressée.
Bien sûr, la comédie est un art. Elle a sa poésie. Elle dit la vérité, dans des mensonges. Des
blancs, des roses. On en fait un mur de brique. Ils donnent une image à voir. Ils proposent.
Je ne suis pas d’ici. Je donne l’air. Je ne donne rien d’autre. Elle ne voudra plus me voir.
Croquemort loufoque.
Elle l’a deviné, je suis fou. Les digues ont cédé. La marée monte. Même les fous ont le droit
d’aimer. Il y a des risques évidemment. Évitons d’y penser. Autant arrêter de vivre. Cette
folie est acceptée.
Je l’ai à la tête. Et au cœur. Ils se disent des choses que j’ignore. Après examen, permis de
rêver. Sentiments étranges. La langue des sentiments. Celle des relations. Je cherche une
connexion. Me rattraper. Cette fille est un poème. Lui écrire un poème. Sauf que je ne suis
pas poète.
Je n’oserais écrire : “Dieu s’en est mêlé”. De peur de lire. “Pas la piété par pitié”. C’est
dommage. Du ciel, il pleuvrait du vin. Je peux continuer. Ton corps : un musée. Oeuvres du
passé : sculptures des formes, paysages des pensées. Normes dont il faut abuser.
L’art est fait pour être dépassé. Je suis dépassé. Je serais une œuvre d’art.
Ma peau aime
Ta peau
Ta peau aime
Ma peau
Nos peaux
Aiment
Ce simple poème
J’ai déconné.
102
*
103
4. Evidence
Extérieur nuit
Calme apparent
Une évidence
104
5. Vague
Nouvelle fréquence
Il y a une vague
Je coupe
Une relation
Que j’avais
Avec moi
105
6. L’hiver
Dehors
C’est l’hiver
Le ciel pleure
À la rigueur
J’oppose la rigueur
D’une alcôve
D’un boudoir
Au sol
Des vêtements
106
ACTE 3- L’AMOUR
107
1. Rééducation sentimentale
Ma peau fleurit
Il faut me rappeler
De respirer
Rééducation
Sentimentale
Facile
Félicité
Les entendre
Apaise
108
2. Au féminin
Livres idiots
Membres idiomes
Totalité
Hors du monde
Imperfection au féminin
Donne
Une perfection
109
3. Accords
L’infrastructure de ce monde
Et
Changements mineurs
Conséquences majeures
110
*
111
LANGUE
Le bonheur frappe à ma porte. Je le laisse entrer. Il s’assied. Je lui demande ce qu’il veut. Il
sourit. C’est connu : le bonheur sourit. Je lui sourit. Soudainement, le ciel est plein.
Depuis que je la connais. La vie a certaines qualités. Elle donne à cette vie certaines de ses
qualités. Avant, j’étais en défaut et la vie me faisait payer. Depuis, il y a des regards
complices. Des paupières lourdes. Qu’on plisse sous l’égarement d’un jeune éléphant. Nous
ne faisons rien de mal. Sinon de la géométrie.
C'est un train qui entre en gare en retard. On attend. Impatient. En colère contre la terre
entière. Contre soi aussi. Patience : impatience diluée. On ne cherchait plus de sens.
Pourquoi toujours trouver un sens?
Alors, on commande de l’amour. L’amour ne se commande pas. C’était avant elle. Enfin, le
train. Le voilà.
Plus rien n’a d’importance. Pas plus que l’heure qu’il est à tout moment d’une journée d’été
où on ne fait rien si ce n’est farniente.
Bien sûr, je suis fou, si ce n’est d’elle. Une passagère, ses bagages. Ils sont faits d’histoires, de
mots inventés.
Il faudrait une langue neuve. Pas pour la terre entière. Non. Cette langue n’aurait pas de
mots. Encore moins de sonorités. Elle serait faite d’images. Et chaque sentiment aurait son
image.
Bien sûr c’est impossible. Mais l'impossible brasse les possibles. J’ai des insomnies. Dans
mon œil, ton corps naît. J’effleure ton corps, sage.
Je t’embrasse
Il est tard.
112
*
113
4. Danse
Temps absent
Laisse-moi te draguer
Hors des eaux boueuses
Je lui parle
Elle danse
114
5. Tempête
Des lèvres
Un livre ouvert
Y déchiffrer
Tu serais déesse
Moi
Apôtre tourmenté
Je nommerai celle-là
115
6. Tendre
Charge symbolique
Zone franche
Tentative vaine :
“Je te sens
Dans mes veines”
Poétique du Tendre
Déraison
Au diapason
116
MONUMENT
117
ACTE 1 - LA DÉRIVE
1. Objet
2. Nous
3. Parfait
4. Mer
5. Attente
6. Narration
* PARADIGME *
1. Le quotidien
2. Puis
3. Amer
4. Rouge et vert
5. Fatigue
6. Je suis
ACTE 2 - LA CHUTE
1. Statu quo
2. La prière
3. Erreur quatre-cent-quatre
* IMMOBILE *
4. La quiétude
5. Rêve
6. Sans mesure
ACTE 3 - L’ABSENCE
1. Réveil
2. Deuil et Requiem
3. Echéance
* EPUISÉ *
4. Le sens
5. Vent
6. Fini de jouer
118
119
ACTE 1- LA DÉRIVE
120
1. Temps
Sur le cadran
Le temps est fixe
Bien qu’en mouvement
Que le temps
121
2. Le quotidien
La vie du quotidien
Vient à bout
De tout
Douce implosion
Qui naît
Dans l’attente
122
3. Amer
Soleil éteint
Ce bonheur
Sans constance
Mais
Un sucre à la mer
Dissout
Est amer
123
*
124
PARADIGME
Je ne suis qu’un objet dans le décor. J’essaie encore. Le film est sorti du cadre. Absence de
sublime. Il se résume par : être ensemble, parce qu’on a rien à faire de mieux. Jusqu’à ce
qu'on devienne vieux.
Une définition de l’amour : faire passer son intérêt après. Mais tu restes en retrait. Et je suis
loin derrière.
Changements systémiques.
Nouveaux paradigmes.
La terre s’est fendue. Une à une, les fissures se sont déshabillées. Je les vois. Dans leur
nudité.
Regards. Sourires. Caresses. Tout est superficiel. On se trompe parfois. Alors, on décale. On
ne se demande pas si on s’aime. On demande ce qu’on aime. Comment nous aimer. On
trompe l’amour. On joue des rôles. Tu sembles heureuse. Je suis content.
Ce jeu dure un temps. Il faut faire des efforts. Essayer. S’accrocher. Même un je t’aime est
métallique. Il faut y croire. Avoir la foi. Comme on croit en Dieu. Sans aucune preuve.
L’amour est un miracle. Si tu m’entendais : tu lèverais les yeux au ciel. Et pas pour
remercier. Tu me dirais : ton amour est crucifié. Je répondrais : une croix est un T, muni
d’un appui tête. Le voilà ressuscité. Pour trois jours.
Les projets d’avenir deviennent flous. Entre nous, l'espace s’étend. Le soir, on échoue dans
un lieu de repos sensuel et triste. L’ennui prédomine. On est victime de ses certitudes. Elles
ont des conséquences. Injustes. Tu me demandes de me justifier. Bonheur d’hier. Le plaisir a
cessé. La souffrance a commencé. Aucun médicament pour nous soigner.
Tu t’es endormie.
J’éteins.
Bonne nuit.
125
*
126
4. La prière
Qui a oublié
La prière
Un regard
Touche
Une parole
Blesse
Une bouche
Embrasse
Une parole
Confesse
127
5. Petites preuves
Perdre foi
En nos habitudes
128
6. Je fuis
Au commencement
Il y avait le verbe aimer
Puis
129
ACTE 2 - LA CHUTE
130
1. Statu quo
“Battez-vous”
Lorsque nous avions cessé de nous battre
Et
131
2. Fatigue
Il reste
132
3. Défilé
Et je vois défiler
Ce qui était ma raison de vivre
133
*
134
IMMOBILE
Ma solitude est un fait. Je ne suis qu’un dans mon corps. Et si je voulais t’accueillir. Nous
serions deux solitudes en devenir. Tu ne verras jamais la même chose que moi. Et je ne verrai
jamais la même chose que toi. Mes yeux sont à moi. Tes yeux sont à toi.
Nous ne parlons plus la même langue. Aucune traduction n’est possible. Le seul message qui
filtre est agressif. Cette personne que tu aimes, je ne l’aime pas. Ce vêtement que tu portes, je
ne l’aime pas. Le ton que tu as, je ne l’aime pas.
Reproches. Éviter les traits d’humour. Ils pourraient être interprétés. Rester factuel. Phrases
usuelles. Mots usés. Nous avons usé la langue. Une figure, dévisagée. La tension entre nous
est silence. Je ne sais par quel angle te prendre.
C’est de ma faute. J’aime trop les mots. Je n’écrirai pas de livre sur cette histoire. Ou ce sera
un pamphlet. On nous demande de nous accoupler. Faites des enfants, faites un prêt. Famille
nucléaire muselée. Ne vous demandez rien. À part ce qui passe à la télé.
Je regarde ton ombre. Souvenirs. C’est tout ce qu’il reste. Bons souvenirs. Les seuls qu’on
voudrait garder. Mais, non. Seuls à deux. Dernier souvenir amoureux.
Je ne veux plus souffrir. Ni te faire souffrir. Bien sûr nous étions ignorant. Ce n’est pas de
notre faute. Ni celle d’un autre. Nous l’avons voulu. Nous l’avons eu. Nous nous sommes
lassés. Enfantillages.
Par inadvertance. Tuer ce qu' on aime. Sans s’en rendre compte. Inconsciemment. J’avais
l’impression de perdre mon temps. Et ne pouvais repasser les plis du temps perdu.
135
*
136
4. Erreur
Statut
Non résolu
Dossier
Trop lourd
Connexion
Impossible
137
5. Réel
Saisir l’aperçu
Et tout perdre
Si j’avais su
La muse
S’excuse
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6. Sans mesure
Stopper l’hémorragie
Oeil violet
Derniers sentiments
Culpabilité
Et
Soulagement
139
ACTE 3 - L’ABSENCE
140
1. Réveil
Amour
Rêve éveillé
Rupture
Réveil assommé
141
2. Vent
Images violentes
Propos violents
Sentiments violents
Qu’en est-il?
Sinon du vent
142
3. Échéance
Tomber amoureux
Tentative salutaire
Rêve utilitaire
Pour
Une déchéance
A courte échéance
143
*
144
ÉPUISÉ
Je zone. Je trébuche sur un cadre sans image. Un soupir. L’amour est mort et la mort prend
sa place. Elle ne frappe pas. Elle entre. Elle est omniprésente. Chaque pas fait. Chaque parole
dite. Il y a un prix à payer. Je n’ai pas les moyens. Le résultat est là. Je n’ai plus aucune
obligation. Envers qui que ce soit.
Une vision de l’enfer. N’avoir honte de rien. Je suis vide. Pensées arides. Coeur desséché. Des
membranes. Sans rien dedans. Même la mort pleure. Elle n’est pas seule. L’amour meurt :
bien ou mal. Surtout mal.
Amputé.
Ce que je tiens dans mes mains : rien. Au-dessus de mon épaule : une absence. Joies perdues,
rires enterrés, espoirs vaincus.
Après l’éruption
J'avais laissé ma liberté à tes pieds. Je l’ai ramassée. Tu as dit quelques mots. J’ai préféré ne
pas écouter. Nous nous sommes aimés. Maintenant, il faut cicatriser. Continuer. Ne pas
s’arrêter. Faire semblant. Ce sont des choses qui arrivent. Elles sont arrivées. Je ne suis pas
le seul. Mais je me sens seul. Je sais qu’il n’y a plus rien à faire. J’attends l’oubli.
Sentiments hors-sols
Le soleil
Ils entrent là-dedans
S’en remettre au hasard. Il était là avant le verbe. On l’avait enfermé. Dans une vie normée.
Écarts radicaux. Sémantique brûlée. Folie, lucide. Modernité inventée. Plus cent ans ont
passé.
Rendez-nous la langue.
Je suis particulier.
145
*
146
4. Duel
Devenir un autre
Duel
Recommencer
147
5. La quiétude
Faire un tour
De la question
Il fait froid
La pluie tombe
Je m’élève
148
6. Sourire
Tête vidée
Crâne évidé
Je redémarre
Ça gangrène
Un sourire
Se suicide
149
150
UN PAS DE CÔTÉ
On ne perd pas la raison. On fait un pas de côté sur le commun de l’entendement. Nous portons tous
en nous la déraison, certains la connaissent de manière plus intime que d’autres.
Notre cerveau d’être humain est intrinsèquement fragile. Nous avons tous perçu en nous la colère
sourde, le soulagement divin, l’amour fou.
Avant tout, cette différence est une histoire. Un soignant se basera sur ce matériel élémentaire : l’acte
de parole précède l’acte de guérison.
DE L’AUTEUR
Je n’ai pas écrit pour guérir
Je n’ai pas écrit ce livre pour guérir, ni pour me libérer. Je l’ai écrit parce que je le pouvais : les mots
étaient là, il n’y avait qu’à les saisir, les relire, les agencer.
Le seul réel travail a été de trouver une forme. Une fois cette forme trouvée, il a fallu combler des
vides. Puis de nouveau modifier la forme. Trouver une nouvelle narration. Revenir en arrière et
recommencer.
La perte de sens
Les troubles psychiques sont perçus comme une perte de sens. Dans mon expérience, elle s'apparente
à une recherche de sens qui répond à une logique interne, perturbée d’hallucinations. Le sujet ne
cherche pas le sens : il le trouve. L’altération des facultés cognitives rend ce raisonnement - de
l’extérieur - illogique.
L’histoire amoureuse est un trop plein de sentiments. Il y a l’impression d’avoir enfin saisi la vie, puis
celui de tout perdre. C’est ce qu’on ressent en crise : on se connecte à soi, cet autre contenu en nous,
puis on chute. L’un comme l’autre sont une expérience du plein et du vide : du certain à l’incertain.
S’ensuit la mélancolie, symptôme d’une rupture profonde : avec l’autre ou avec l’image que l’on se
faisait de soi.
Bien sûr, ces récits ont un dénominateur commun. Mais, je ne suis pas une personnalité fixe, ni dans
le drame, ni dans l’extase.
151
Mon histoire est celle d’un autre qui n’a pas essayé de la mettre en mots. Nous sommes faits de
failles, auxquelles on ajoute le trou béant du silence. Ce silence est une plaie, souffrir en silence c’est
souffrir une fois de trop.
DU RÉCIT
Un angle clinique
J’ai abordé la crise sous un angle clinique selon les étapes du trouble encadré par l’acte
d’enfermement médical à l’enfermement social.
J’ai tenté de simplifier sans travestir. J’ai cherché à définir plus qu’à raconter et cette définition s’est
mue en narration.
Le récit amoureux tend également vers une essentialisation de l’amour en fuite. Il est le résultat du
dialogue entre trouble amoureux et psychique.
La question de la forme
La poésie implique de poser la question de la forme. La poésie contemporaine l’a libérée. Pour faire
un parallèle avec la peinture, on pourrait dire que des formes abstraites sont venues remplacer les
canons figuratifs.
Cependant, l’abolition de la forme engendre aussi une perte : on ne peut jouer avec ce qu’on a perdu.
C’est ce jeu que j’ai voulu retrouver : créer un objet, qui détient sa logique singulière.
J’ai créé par tâtonnements, une nature sui generis, propre à cet ouvrage qui emprunte à l’un pour
donner à l’autre. Une dynamique de flux, qui se tient puis se relâche.
Un caractère cyclique
Parmi les émotions rencontrées dans ces textes, on retrouve la colère et l'apaisement ; un coupable qui
est aussi une victime. Ces évocations ont un caractère cyclique, que traduit l’agencement des deux
recueils. On débute par une histoire de déraison qui se conclut par l’impossibilité du sentiment
amoureux. Puis, on entame une histoire d’amour qui pourrait annoncer une crise.
152
La matière des sentiments
Un jour viendra où l’on découvrira la matière des sentiments, dans l’attente ils nous paraissent
impalpables. Pour les comprendre, il ne nous reste que les mots, les gestes et les images.
153