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Lana Ndiaye, Kevin Barba et Logan Dalfarat

DM6 L2GECART Cartes Mal faites pour le 7 avril 2023

Sujet élection présidentielle de 2007

L’élection présidentielle est l’élection la plus suivie et importante de la cinquième République,


puisqu’elle permet de désigner le chef de l’Etat par la voix directe des électeurs. Une élection de ce
type, par son importance et sa valeur politique est forcément sujette a de différentes interprétations
qui peuvent accentuer une victoire ou atténuer une défaite. En effet, on peut manipuler plusieurs
paramètres comme la discrétisation, qui est la manière de classer des données quantitatives relatives
(généralement des moyennes), afin de « jouer » avec les points de vue en gardant les mêmes
données. On peut aussi s’appuyer sur le regroupement des candidats, ce qui va modifier la balance
selon que l’on place l’un d’entre eux plus à gauche ou plus à droite. On joue aussi sur la couleur qui
peut incarner un imaginaire spécifique. L’élection présidentielle de 2007 a vu s’opposer douze
candidats au premier tour, puis deux candidats au Second tour, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal.
Nous avons choisi, afin de bénéficier d’un nombre suffisant de cartes, de traiter les deux tours de
cette élection.

En quoi les cartes des élections peuvent-elles présenter des imperfections volontaires ou non, et
imposer une perspective au lecteur ?

Carte 1 : Premier tour. Opposition droite-gauche par département au premier tour de l’élection
présidentielle de 2007. C’est la Carte 5 de l’article de Stéphane Leroy du 30 avril 2007 : « Les
principaux enseignements du 1er tour de l’élection présidentielle de 2007 en cartes » sur la revue
numérique européenne de géographie Cybergeo. Elle s’appuie sur les données du ministère de
l’Intérieur.

La carte représente les oppositions géographiques dans les résultats du 1er tour de l’élection
présidentielle de 2007 selon les départements qui voté plus à gauche que la moyenne nationale.
L’analyse s’effectue à l’échelle métropolitaine et il y a une implantation zonale qui se base sur les
départements avec la variable visuelle couleur pour montrer la plus ou moins grande adhésion à un
camp politique dans un vote, mais aussi de couleur, pour mettre en évidence un clivage gauche-
droite. C’est une carte choroplèthe qui n’utilise qu’un figuré de surface pour l’entièreté d’un
département. Nous avons un gradient couleur double : le bleu qui symbolise les départements où la
droite était en tête tandis que le gradient rouge montre les départements où la gauche est au-dessus
de la moyenne nationale. Le problème étant que la légende n’indique aucune donnée quantitative
absolue ou relative de score, ce qui fait que l’on ne sait pas vraiment à quel degré se situe
l’implantation de la gauche ou de la droite dans un département.

L’auteur fait donc une carte qui a pour objectif de traiter les différences politiques de l’ensemble des
départements métropolitains, omettant par ailleurs l’outre-mer. Il s’appuie sur une légende qui
manque de données indispensables pour comprendre le message de la carte. Ainsi la clarté de la
carte est compromise, surtout que l’on met deux phénomènes différents qui ne sont pas les mêmes
du tout. En effet, selon l’auteur, les départements en rouge sont ceux où la gauche dépasse la
moyenne nationale, tandis que les départements en bleu sont ceux où la droite est en tête et la
gauche ne dépasse pas la moyenne nationale. Cette différence de paramètres à l’intérieur d’un
même gradient rend impertinente la carte, car on peut constater que les départements du Nord-Pas-
de-Calais sont rouge vif alors que ces départements ont placé N. Sarkozy en tête par exemple
Enfin, il existe un troisième problème, faut-il classer le centriste François Bayrou comme étant de
centre car il est de centre droit ou bien le rattacher à la droite traditionnelle comme le fait cette
carte ? En effet, si F. Bayrou était dans une catégorie à part, cela réduirait un peu le nombre de
départements bleu foncé, ce qui induirait une avance moins importante pour N. Sarkozy et la droite
dans ces départements, et donc davantage de bleu clair.

Source : Stéphane Leroy, « Les principaux enseignements du 1er tour de l’élection présidentielle de
2007 en cartes », Cybergeo : European Journal of Geography, Débats, Elections en France, mis en
ligne le 30 avril 2007. URL : http://journals.openedition.org/cybergeo/5827
Carte 2 : Evolution de l’abstention entre 2002 et 2007 Source ministère de l’Intérieur. Conception,
réalisation : Céline Colange et Jean-Paul Gosset, Laboratoire MTG, Université de Rouen, carte de 2007
réalisée à partir des données du ministère de l’intérieur

La carte cherche à représenter l’évolution de l’abstention au premier tour de l’élection présidentielle


au sein des différents cantons de France selon le découpage avant 2015. Il y a trois types
d’implantations qui correspondent à trois données différentes :

- Pour l’implantation linéaire, nous avons les limites départementales qui sont des données
qualitatives nominales, représentées en noir.
- Concernant l’implantation ponctuelle, on retrouve les principales villes françaises qui sont
des données qualitatives nominales représentées par une variable visuelle de forme ronde
- Pour l’implantation zonale, on dispose du taux d’évolution de l’abstention entre 2002 et
2007, à l’échelle cantonale qui est une donnée quantitative relative, qui est représentée par
la variable visuelle valeur avec un gradient de couleur double composé de rouge et de bleu.

L’utilisation de l’échelle cantonale a pour but d’obtenir un nombre de commune suffisamment


restreint pour que la classification soit la plus pertinente possible sans compromettre la lisibilité du
lecteur. On constate cependant que la discrétisation met en avant les classes les plus extrêmes, qui
montrent la plus grande et la plus faible baisse de l’abstention entre le 1er tour des élections de 2002
et de 2007. La carte ne relève toutefois pas d’erreur de sémiologie graphique et sa lecture est
logique

http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/articles/elections-presidentielles-1er-
tour-2007-nouveaux-candidats-nouvelle-geographie-des-votes-une-analyse-de-levolution-2002-
2007-par-canton
Carte 3 : Rapport Gauche-droite dans la ville de Bordeaux. Publiée sur le site de Cartele en 2012 de
l’université de Rouen. Données tirées du ministère de l’Intérieur.

Cette carte a été réalisée par M. Bussi, C. Colange, S. Freiré-Diaz et les membres de l’équipe Cartelec
en 2012. Elle est publiée sur le site de Cartelec, et représente le clivage gauche-droite dans la ville de
Bordeaux et aux alentours au cours du second tour de l’élection présidentielle de 2007. et s’appuie
sur les données du ministère de l’Intérieur.

Nous avons sur la carte plusieurs implantations présentes. Tout d’abord, il y a une implantation
zonale qui est incarnée par plusieurs données, il y a d’abord la donnée quantitative relative illustrée
par un variable valeur avec un gradient double rouge-bleu, qui exprime la part du vote Sarkozy dans
un bureau de vote pour Bordeaux, ou une commune. Il y a aussi des données qualitatives nominales
avec les zones forestières et les espaces verts, et les espaces non-habités.

Il y a aussi une implantation linéaire avec deux données qualitatives ordonnées. On a d’abord la
commune, centre qui désigne le territoire administratif de Bordeaux. On a aussi en dehors de la ville
de Bordeaux les limites communales et à l’intérieur de la ville de Bordeaux les champs d’action des
bureaux de vote de la ville. La variable visuelle utilisée est la variable taille pour distinguer ces
figurés.

La discrétisation est spéciale, car on se base sur le seuil de 50 % comme limite de classe, ce qui est
cohérent dans l’optique de ce que veut montrer la carte. Cependant, le découpage des classes, ne se
réfère ni à un écart-type, ni à une moyenne spécifique (la moyenne des pourcentages des voix du
secteur ne peut être de 50 %) l’amplitude à l’intérieur des classes est quasi-identique en dessous de
50 % de voix pour N. Sarkozy. Cependant, au-dessus de 50 % l’augmentation de l’amplitude à
l’intérieur des classes n’est ni linéaire, ni géométrique.

Les variables sont bien choisies et ne révèlent donc pas d’erreur flagrante de sémiologie graphique.
Cependant, nous pouvons nous interroger sur la pertinence d’afficher les espaces verts et inhabités
dans une carte censée représenter le clivage gauche-droite à l’élection présidentielle de 2007.
Toutefois, le découpage des classes dans la discrétisation pose question. Cette dernière empêche
d’avoir une lecture claire du phénomène et l’arbitraire est bien trop exacerbé.

Lien PDF vers la carte : http://cartelec.univ-rouen.fr/wp-


content/uploads/2012/04/05_Bordeaux_deuxieme_tour_Sarko_exp_2007.pdf

Lien vers la bibliothèque de la carte : http://cartelec.univ-


rouen.fr/?cat=8%2C49%2C98&search_type=in&order&paged=7
Partie 3

La première carte présente plusieurs problèmes. Le premier problème est l’absence de données dans
la légende qui puisse justifier le gradient de couleur double. Ce qui fait que l’on ne sait pas à quel
point le vote d’un département est plus ou moins à gauche ou à droite. Deuxièmement, le titre ne
mentionne pas explicitement la France métropolitaine, on peut donc se poser la question de la
représentation des DOM-TOM et des COM de l’époque qui ont aussi participé à cette élection. Il y a
donc une volonté de se concentrer uniquement sur la métropole à minima, voire occulter l’outre-
mer. Ensuite, on constate que les données représentées ne sont pas exactement les mêmes selon
que le département soit rouge ou bleu. C’est-à-dire que les départements rouges sont ceux où la
gauche dépasse la moyenne nationale tandis que les départements bleus sont ceux où la droite est
en tête sans que la gauche ne dépasse la moyenne nationale. De plus, on ne comprend pas du tout à
quoi correspond la différence de couleur entre le rouge et le rouge vif car il n’y a pas de donnée
chiffrée dans la légende ni nominée. Par ailleurs, choisir une variable de valeur avec des gradients
pour ce genre de situation n’est pas correct, dans la mesure où une partie des données du gradient
dépend directement d’une autre partie. Il eût été préférable d’utiliser une variable valeur avec un
gradient double en s’appuyant sur les scores regroupés des candidats en plusieurs groupes et
d’additionner les points de pourcentage des voix. De plus, pour marquer la force du vote de gauche
dans certains départements, il eût été plus judicieux d’utiliser un figuré ponctuel qui illustre cette
progression ainsi qu’éventuellement une variable de taille pour marquer la plus ou moins grande
force de la gauche dans ces départements. Enfin la dernière remarque que l’on peut formuler vis-à-
vis de cette carte est la dimension extrêmement binaire de la carte avec un clivage droite gauche
marqué alors que François Bayrou avait revendiqué son centrisme, ce qui modifie considérablement
la vision que l’on veut donner d’une carte politique selon que l’on place soit à droite, soit à part, soit
avec la gauche.

Dans la seconde carte, le cartographe ne se trompe pas dans le choix des variables utilisées pour
représenter les données. En revanche, pour représenter le taux d’abstention, l’auteur a choisi la
méthode de discrétisation d’amplitude égale. Cela engendre un problème d’échelle et de proportion,
car il y a une grande différence de valeur au sein d’une donnée. En effet, la valeur bleu foncé possède
une plage de valeur de 10 points de pourcentage, alors que la donnée au centre du gradient comme
la valeur blanche, qui doit symboliser la moyenne nationale de la baisse de l’abstention, possède une
plage de valeur de seulement 1,13 point. On préfèrera donc utiliser la méthode de moyennes
emboîtées, ce qui va permettre en premier lieu de clairement mettre en évidence la moyenne
nationale en tant que donnée centrale, puis on pourrait alors avoir un meilleur découpage des
différentes tranches, en parts égales et surtout liées à la moyenne originelle.

Enfin, dans la troisième carte, l’absence d’erreur sémiologie graphique n’empêche cependant de
trouver certaines manipulations. Tout d’abord, la présence de figuré de surface pour les espaces
verts et inhabités dans un carte qui traite une élection est impertinent et n’apporte pas grand-chose
en terme de réflexion politique, car la légende n’introduit pas de lien. Deuxièmement, la
discrétisation est arbitraire et ne relève d’aucune méthode de classement sur la base d’un
quelconque calcul mathématique. On observe cet arbitraire notamment sur le nombre et l’amplitude
des classes selon qu’il s’agit d’un candidat ou de l’autre. En effet, alors que N. Sarkozy bénéficie de
quatre classes où son vote est majoritaire, S. Royal n’en bénéficie que de deux classes. Visuellement,
cela va faire ressortir davantage les zones ou S. Royal est majoritaire, car il y a moins de dégradé de
couleur. De plus on observe des grandes amplitudes de valeur chez S. Royal qui dépasse les 15 points
sur les deux classes ou elle est majoritaire. Au contraire N. Sarkozy possède une classe avec une
faible amplitude de 1 point seulement, puis une autre de 3 points et une autre de 8 points, avant que
l’extrême se démarque avec une amplitude de 17 points. Ce parti pris délibéré en faveur de Mme
Royal dans la discrétisation semble atténuer grandement le rapport gauche droite dans la mesure où
l’on ne pas voir si les communes ou les bureaux de vote l’ayant mise en tête ont connu des scores
plus serrés que la tranche ne le laisse comprendre.

L’analyse des cartes politiques montre qu’elles peuvent donc présenter des imperfections, qui
génèrent donc à partir des mêmes données (en l’occurrence celles du ministère de l’Intérieur), des
interprétations différentes selon qu’on cherche à représenter des tendances politiques différentes,
ou bien des mouvements de fonds ou manipuler la perception d’un résultat.

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