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Espaces vectoriels normés.

PSI

Chapitre 4

I. Normes et boules

I.1. Notion de norme.

Définition. Soit E un K-espace vectoriel. Une norme sur E est une application N de E dans R+ vérifiant :

1. ∀x ∈ E, N (x) = 0 ⇐⇒ x = 0 (Séparation)
2. ∀x ∈ E, ∀λ ∈ K, N (λ.x) = ∣λ∣.N (x) (Homogénéité)
3. ∀x, y ∈ E, N (x + y) ≤ N (x) + N (y) (Inégalité triangulaire)

Un espace vectoriel normé est couple (E, N ) où N est une norme sur le K espace vectoriel E.

Attention ! Quand on montre qu’une expression est une norme, on oublie souvent de montrer l’existence de
l’expression. En d’autre termes, s’il y a un sup ou un max, il faut montrer son existence (Axiome de la borne supérieure/
Fonction continue sur un segment/. . . ), s’il y a une série ou une intégrale généralisée, on montre sa convergence. Ainsi
pour montrer que N est une norme sur E, on montre :
— N (x) existe pour tout x de E et est positif.
— N vérifie les axiomes de séparation, homogénéité et de l’inégalité triangulaire.

Exercice. 1
1. Montrer que la valeur absolue est une norme sur R et que le module est une norme sur C.
2. Montrer que les normes N sur R sont de la forme : ∀x ∈ R, N (x) = λ.∣x∣ avec λ dans R∗+ .
3. Montrer que les normes N sur C sont de la forme : ∀z ∈ C, N (z) = λ.∣z∣ avec λ dans R∗+ .

Remarque. S’il manque la séparation à une application N pour devenir une norme, on l’appelle une semi-norme.

Propriété - Inégalité triangulaire inversée. 2 Si N est une norme sur un K-espace vectoriel E alors :
∀x, y ∈ E, ∣N (x) − N (y)∣ ≤ N (x + y) ≤ N (x) + N (y)

1
I.2. Normes usuelles.

Normes sur Kn . 3 Soit x = (x1 , . . . , xn ) dans Kn et p dans [1; +∞[, on définit :


1 1
n n 2 n p

∥x∥1 = ∑ ∣xi ∣ ∥x∥2 = (∑ ∣xi ∣ ) 2


∥x∥p = (∑ ∣xi ∣ ) p
∥x∥∞ = M ax ∣xi ∣
i=1 i=1 i=1 1≤i≤n

Remarquons que :
1. Si n = 1 alors ∥x∥1 = ∥x∥2 = ∥x∥∞ = ∣x∣.
2. Si p = 2, on retrouve la norme euclidienne ∥...∥2 .
3. Pour tout x de Kn , lim ∥x∥p = ∥x∥∞ d’où son nom.
p→+∞

Normes sur C([a, b], K). 4 Soit f dans C([a, b], K) et p dans [1; +∞[, on définit :

1 1
b b 2 b p

∥f ∥1 = ∫ ∣f ∣ ∥f ∥2 = (∫ ∣f ∣ )
2
∥f ∥p = (∫ ∣f ∣ )
p
∥f ∥∞ = M ax ∣f (x)∣
a a a x∈[a,b]

Remarquons que :
1. Si p = 2, on retrouve la norme euclidienne ∥...∥2 .
2. Pour tout f de C(a, b], K), lim ∥f ∥p = ∥f ∥∞ d’où son nom.
p→+∞
3. Les applications précédentes, autres que la norme infinie, définies sur Cm ([a, b], K) au lieu de C([a, b], K) sont
semi-normes uniquement.
4. La norme infinie quand a elle est définie sur un espace vectoriel plus grand : B(I, K) le K espace vectoriel des
fonctions bornées d’un intervalle I quelconque dans K.
5. Enfin si on remplace le segment [a, b] par un intervalle quelconque, on a des intégrales généralisées qui ne
convergent pas forcément. Les applications précédentes ne sont donc pas des normes. Il y a quand même une
solution en restreignant l’ensemble des applications considérées. Voir le point suivant.

Conséquences du point précédent. 5 Avec I un intervalle quelconque de R, on a 3 espaces vectoriels normés


inspirés du point précédent :

● L1c (I, K) = {f ∈ C (I, K) / ∫ ∣f ∣ converge} muni de la norme : ∥f ∥1 = ∫ ∣f ∣.


I I

● L2c (I, K) = {f ∈ C (I, K) / ∫ ∣f ∣2 converge} muni de la norme : ∥f ∥2 = ∫ ∣f ∣.


I I

● L∞
c (I, K) = {f ∈ C (I, K) / Sup ∣f (x)∣ existe} muni de la norme : ∥f ∥∞ = Sup ∣f (x)∣.
x∈I x∈I

Remarquons que l’ensemble L∞


c n’est autre que l’ensemble des fonctions continues et bornées sur I. On a donc
L∞
c (I, K) = B(I, K)

2
Normes sur Mpq (K). 6 Soit A = (aij ) dans Mpq (K) et p dans [1; +∞[, on définit :
1 1

⎛p q ⎞ ⎛p q ⎞
p q 2 p

∥A∥1 = ∑ ∑ ∣aij ∣ ∥A∥2 = ∑ ∑ ∣aij ∣2 ∥A∥p = ∑ ∑ ∣aij ∣p ∥A∥∞ = M ax ∣aij ∣


i=1 j=1 ⎝i=1 j=1 ⎠ ⎝i=1 j=1 ⎠ i,j

Remarquons que :
1. Si p = 2, la norme p redonne la norme euclidienne ∥...∥2 .
2. Lorsque K = R, la norme euclidienne s’exprime autrement :

∀A ∈ Mpq (R), ∥A∥2 = tr( tA.A)

3. Toujours si K = R et si ce sont des matrices colonnes (cad q=1), la matrice tA.A est une matrice de taille 1 × 1.
On peut alors assimiler les réels et les matrices 1 × 1. On a alors :

∀X ∈ Mp1 (K), ∥X∥2 = tX.X

On assimilant à présent les matrices colonnes ayant p lignes et les éléments de Rp , la formule précédente redonne
la norme euclidienne classique de Rp .
4. Pour tout A de Mpq (K), lim ∥A∥p = ∥A∥∞ d’où son nom.
p→+∞

Normes sur K[X]. 7


1. On peut considérer un polynôme comme une fonction. Toutes les normes sur C([a, b], K) avec a et b quelconques
sont également des normes sur R[X].

2. On en a d’autres. Par exemple pour P = (ai ) ∈ K[X] : N (P ) = ∑ ∣ak ∣.
k=0

I.3. Le théorème fondamental : l’équivalence des normes.

Définition. Deux normes N1 et N2 sur E sont dites équivalentes et on note N1 ∼ N2 s’il existe λ et µ dans R∗+
vérifiant :
∀x ∈ E, λ.N1 (x) ≤ N2 (x) ≤ µ.N1 (x)

Théorème. 8
1. L’équivalence de normes est une relation d’équivalence.
2. En dimension finie, toutes les normes sont équivalentes.

Exercice. 9
1. Sans le théorème d’équivalence des normes, montrer que les normes ∥...∥1 , ∥...∥2 et ∥...∥∞ sont équivalentes sur Kn .
2. Montrer que ∥...∥1 et ∥...∥∞ ne sont pas équivalentes sur C([a, b], K).

3
I.4. Boules, sphères.

Définitions. Soit ∥...∥ une norme sur E, a dans E et r dans R∗+ .


1. La boule ouverte de centre a et de rayon r est :

B(a, r) = { x ∈ E / ∥x − a∥ < r }

2. La boule fermée de centre a et de rayon r est :

B̄(a, r) = { x ∈ E / ∥x − a∥ ≤ r }

3. La sphère de centre a et de rayon r est :

S(a, r) = { x ∈ E / ∥x − a∥ = r }

4. Si a = 0 et r = 1, les objets précédents sont appelés boule unité ouverte/fermée ou sphère unité.

Remarques.
1. On a B(a, r) = a + r.B(0, 1) (translation + homothétie). Moralité, la géométrie de la boule unité détermine la
géométrie de toutes les autres boules.
2. Sur (R, ∣...∣) les boules ouvertes sont les intervalles du type ]a, b[ et les boules fermés sont les intervalles du type
[a, b] avec a et b dans R tels que a < b.

Exercice. 10 Montrer que les sphères unités pour les normes 1, 2 et ∞ dans R2 sont :

∥..∥1

∥..∥∞

∥..∥2


Exercice. 11 Montrer que On (R) ⊂ S(0, n). On rappelle que :

On (R) = { A ∈ Gln (R) / A−1 = tA }

4
I.5. Un exercice classique : la norme subordonnée.

Exercice. 12 Dans cet exercice on identifie les éléments de Rn aux matrices colonnes. Soient ∥...∥ une norme sur Rn et
S la sphère unité associée. On pose pour A dans Mn (K)

∣∣∣A ∣∣∣ = Sup ∥Ax∥


x∈S

1. Soit (e1 , . . . , en ) la base canonique de Rn , posons M = M ax(∥Ae1 ∥, . . . , ∥Aen ∥). Montrer que :

∀X = t(x1 , . . . , xn ) ∈ Rn , ∥AX∥ ≤ M (∣x1 ∣ + . . . + ∣xn ∣)

2. En déduire que l’ensemble {∥Ax∥ / x ∈ S } est majoré, puis que ∣∣∣A ∣∣∣ existe.
3. Montrer que ∣∣∣...∣∣∣ est une norme sur Mn (R).
4. Montrer que pour tout X de Rn : ∥AX∥ ≤ ∣∣∣A ∣∣∣.∥X∥
5. En déduire que pour toutes matrices A et B de Mn (R), on a ∣∣∣AB ∣∣∣ ≤ ∣∣∣A ∣∣∣.∣∣∣B ∣∣∣ . Les normes vérifiant cette
propriété sont appelés des normes matricielles ou des normes d’algèbre.
6. Notons B et B les boules unités respectivement ouverte et fermée. Montrer que :

∥Ax∥
∣∣∣A ∣∣∣ = Sup ∥Ax∥ = Sup ∥Ax∥ = Sup
x∈B x∈B x∈E ∥x∥

I.6. Ensembles bornés.

Définition. Soit (E, ∥...∥) un espace vectoriel normé.


1. Une partie A de E est bornée pour ∥...∥ ssi : ∃M ∈ R, ∀x ∈ A, ∥x∥ ≤ M
2. Une suite (un ) de E est bornée pour ∥...∥ ssi : ∃M ∈ R, ∀n ∈ N, ∥un ∥ ≤ M
3. Une application de X dans E est bornée pour ∥...∥ ssi : ∃M ∈ R, ∀x ∈ X, ∥f (x)∥ ≤ M

Remarque. La notion de "borné" dépend de la norme comme le montre l’exemple suivant. Pour n dans N∗ ,
considérons l’application fn de [0, 2] dans R définie par :

1 2
n n

La suite (fn ) est bornée pour ∥..∥1 mais non bornée pour ∥...∥∞ . Cependant en dimension finie, comme le montre le
théorème suivant, la notion de "bornée" ne dépend plus de la norme.

Théorème. 13
1. Deux normes équivalentes donnent les mêmes ensembles, applications et suites bornées.
2. En dimension finie, être bornée ne dépend pas de la norme choisie.

5
I.7. Parties convexes.

Définitions.
1. Soit x et y dans E. Le segment [x, y] est l’ensemble :

[x, y] = { λ.x + (1 − λ).y / λ ∈ [0, 1] }

2. Une partie A de E est convexe ssi pour tous x, y de A, le segment [x, y] est encore dans A. Ainsi A est convexe
si et seulement si :
∀x, y ∈ A, ∀λ ∈ [0, 1], λ.x + (1 − λ).y ∈ A
3. Un combinaison linéaire convexe (CLC) de x1 , . . . , xn dans E est une expression du type
λ1 x1 + . . . + λn xn avec λ1 + . . . + λn = 1 et λ1 , . . . , λn dans R+ .
4. Un ensemble A est stable par CLC ssi pour tous x1 , . . . xn de A les CLC de x1 , . . . , xn sont encore dans A.
5. Soit A une partie de E. On note Conv(A) le plus petit convexe contenant A. C’est l’enveloppe convexe de A

Exemples. Dans R2 :

Convexe Non convexe

Théorème. 14
1. ∅ est convexe.
2. A est convexe ssi A est stable par CLC
3. L’intersection de convexes est encore un convexe.
4. Les espaces vectoriels et les boules d’un evn sont convexes.
5. Pour toute partie A, l’enveloppe convexe conv(A) est l’ensemble des CLC que l’on peut former avec des éléments
de A.

a b
Exercice. 15 Montrer que A = { [ c d ] / a + b + c + d = 1 } est convexe. Est-ce un espace vectoriel ?

Exercice. 16 Montrer que l’ensemble des polynômes à coefficients positifs est convexe.

Exercice. 17 Montrer que dans R, les convexes sont exactement les intervalles.

Exercice. 18 On dit qu’une matrice est Mn (R) est une matrice stochastique si :
● Tous les coefficients de M sont dans [0, 1],
● La somme des coefficients d’une même ligne fait 1.
1. Posons U la matrice colonne ne contenant que des 1. Montrer qu’une matrice A de Mn (R+ ) est une matrice
stochastique si et seulement si AU = U . Que peut-on en déduire sur le spectre de A ?
2. Montrer que l’ensemble des matrices stochastiques est un convexe de Mn (C).

6
II. Suites d’un espace vectoriel normé.

II.1. Limite d’une suite

∥...∥
Définition. La suite (un ) de E tend vers l de E pour la norme ∥...∥, et on note un n→+∞
l, si et seulement si :

∀ε ∈ R∗+ , ∃N ∈ N, ∀n ≥ N, ∥un − l∥ ≤ ε

Caractérisation. 19 On peut toujours se ramener à la convergence d’une suite réelle puisque :


∥ ∥
un n→+∞
l ⇐⇒ ∥un − l∥ Ð→ 0
n→+∞

Remarques.
1. C’est la définition de la limite d’une suite réelle en remplaçant la valeur absolue par la norme.
2. La convergence et même la limite d’une suite dépendent de la norme ∥...∥ choisie (Pour un exemple, voir le
prochain exercice)

II.2. Limite de suites et normes équivalentes.

Propositions. 20
1. Deux normes équivalentes définissent les mêmes suites convergentes. De plus, les limites sont les mêmes.
2. En dimension finie, il n’y a pas besoin de préciser la norme utilisée puisque toutes les normes sont équivalentes.

Méthode - comment montrer que deux normes ne sont pas équivalentes ? La contraposée de
la proposition précédente permet facilement de montrer que deux normes ne sont pas équivalentes. Il suffit de trouver
une suite qui converge pour une norme et qui ne converge pas pour l’autre (ou qui converge vers une autre limite).

Exercice. 21 Pour tout polynôme P = (ak ) dans R[X], notons :


+∞
∣ak ∣
N1 (P ) = Max ∣P (x)∣ N2 (P ) = ∣P (1)∣ + ∑
x∈[0, 12 ] k=1 k

1. Montrer que N1 et N2 sont des normes.


2. Montrer la suite (X n )n∈N est converge vers 0 pour la norme N1 , et converge vers 1 pour la norme N2 .
3. Les normes N1 et N2 sont-elles équivalentes ?

7
II.3. Propriétés de la limite

Propriétés classiques. 22
1. La limite d’une suite pour une norme donnée est unique si elle existe.
2. Toute suite convergente pour une norme est bornée pour cette norme.
3. Toute suite extraite d’une suite convergente est convergente.
4. Toute CL de suites convergentes converge vers la CL des limites.

Propriétés - Limite en dimension finie. 23 Si E est un espace vectoriel de dimension finie. Une suite de
vecteur (xk ) de E converge vers x ssi les coordonnées de xk dans une base converge vers les coordonnées de x. En
appliquant ceci à différents espaces vectoriels normés de DF, on trouve :
1. Une suite de vecteurs (xk ) de Rn converge vers un vecteur x ssi les coordonnées des vecteurs de xk convergent
vers les coordonnées de x.
2. Une suite de matrice (Ak ) converge vers la matrice A si et seulement si les coefficients de Ak converge vers ceux
de A.
3. Une suite de polynômes (Pk ) de Rn [X] (donc les degrés des polynômes Pk sont majorés par n) converge vers le
polynôme P si et seulement si les coefficients de Pk convergent vers les coefficients de P .

Exemples.
1 n2 + 1 π 2
1. arctan(n)X 2 + X− 2 Ð→ X −1
n n − 1 n→∞ 2

1 ⎛ (−1) n+1 ⎞
n
⎛ 0 1 ⎞
2. Ð→
n ⎝ n sin ( n )
2 1
1 ⎠ n→+∞ ⎝ 1 0 ⎠

Remarque. Le point 3 de la dernière propriété est faux si les degrés des polynômes ne sont pas majorés (on est donc
en DI). Par exemple, la suite (X n ) ne converge pas vers le polynôme nul pour la norme infinie sur [0, 1] et pourtant
chaque coefficient de X n converge vers 0. On pourra trouver un autre contre-exemple dans l’exercice suivant.


Exercice. 24 Soit P dans R[X] de coefficients (an ). On note ∥P ∥ = ∑ (k + 1)∣ak ∣
k=0
1. Montrer que ∥...∥ est une norme sur R[X].
1
2. Montrer que la suite de polynôme ( X n + X + 1) ne tend pas vers X + 1.
n+1 n∈N

II.4. Espaces vectoriels avec un produit.

Problématique. On considère E un K-espace vectoriel normé muni d’une 2ème LCI × distributive par rapport à
+. Par exemple on peut prendre K, Mn (K), K[X], C([a, b], R), L(E) (avec la composition pour 2ième LCI). . . On
prend ensuite deux suites (xn ), (yn ) de E. A-t-on :

⎪ lim xn = x
⎪ n→+∞ ?
⎨ Ô⇒ lim xn yn = xy

⎪ lim yn = y n→+∞
⎩ n→+∞
Comme le montre l’exemple suivant, la réponse est non.

8

∣ak ∣
Exercice. 25 Soit P dans R[X] de coefficients (an ). On note N (P ) = ∑
k=0 + 1
k
1. Montrer que N est une norme sur R[X].

2. Posons Pn = n + 1.X n . Montrer que la suite (Pn ) converge vers le polynôme nul pour cette norme.
3. Montrer que (Pn2 )n∈N ne tend pas vers 02 pour N .

Théorème. 26 Cependant, si l’une des proposition suivantes est vrai :


1. La norme N vérifie :
∃β ∈ R, ∀x, y ∈ E, N (xy) ≤ βN (x)N (y)
2. E est de dimension finie.
3. E = C([a, b], R) muni de la norme ∥...∥∞
alors la limite du produit est égale au produit des limites.

III. Distance et topologie induite par la norme.

III.1. Distance

Définition. Une distance sur un ensemble A est une application d de A2 dans R+ vérifiant pour tous x, y, z de A :
d(x, y) = 0 ⇐⇒ x = y (Sépération)
d(x, y) = d(y, x) (Symétrie)
d(x, z) ≤ d(x, y) + d(y, z) (Inégalité triangulaire)

Proposition. 27 Pour toute norme ∥...∥ sur E, on peut définir une distance d par :
∀x, y ∈ E, d(x, y) = ∥x − y∥

Remarque. 28 Il existe des distances qui ne proviennent pas de norme. Par exemple, sur R, l’application d définie de
R2 dans R+ par :
∀x, y ∈ R, d(x, y) = ∣ arctan(x) − arctan(y)∣
est une distance. Mais, à partir de maintenant, on va les ignorer (HP).

9
III.2. Points intérieurs et ouverts.

Définitions. Soit A un sous-ensemble d’un K-espace vectoriel normé (E, ∥...∥)


1. Un vecteur x de E est un point intérieur de A s’il existe une boule ouverte centrée en x qui soit encore dans A.
o
On note A l’ensemble des points intérieurs de A. Ainsi :

x ∈ A ⇐⇒ ∃r ∈ R∗+ , B(x, r) ⊂ A
o

2. Un sous ensemble O de E est un ouvert de E ssi O ne contient que des points intérieurs c’est-à-dire si et seulement
o
si O = O . Ainsi :
O ouvert ⇐⇒ ∀x ∈ O, ∃r ∈ R+ , B(x, r) ⊂ O

Exemples. Soient a et b de (R, ∣ ∣) avec a < b.


1. Les ensembles ∅ , R , ]a, b[ , ]a, +∞[ et ] − ∞; a[ sont ouverts.
o o
2. [a, b] =]a, b[ , ]a, b] =]a, b[ .

Remarques.
o o
1. Pour tout sous-ensemble A de E, on a : A ⊂ A. De plus A est toujours ouvert.
2. Dans la définition d’un ouvert, r dépend de x.
3. La définition de B(x, r) dépend de la norme ! Si on change de norme, on change les ouverts.

Exercice. 29 Notons E = B(R, R). Montrer que :


O = { f ∈ E / f (0) ≠ 0 }

est un ouvert de (E, ∥...∥∞ )

III.3. Points adhérents, fermé d’un espace vectoriel normé.

Définitions. Soit A un sous-ensemble de (E, ∥...∥)


1. E. Un vecteur x de E est un point adhérent de A si toute boule centré en x rencontre A. On note A l’ensemble
des points adhérents de A. Ainsi :

x ∈ A ⇐⇒ ∀r ∈ R∗+ , B(x, r) ∩ A ≠ ∅

2. Un sous ensemble F de E est un fermé ssi tous les éléments de F sont des points adhérents c’est-à-dire si et
seulement si F = F . Ainsi :

F fermé ⇐⇒ ∀x ∈ F, ∀r ∈ R∗+ , B(x, r) ∩ F ≠ ∅

Exemples. Soient a et b de (R, ∣ ∣) avec a < b.


1. Les ensembles ∅ , R , [a, b] , [a, +∞[ et ] − ∞; a] sont fermés.
2. ]a, b[ = [a, b] , ]a, b] = [a, b] ,. Par contre ]a, +∞[ = [a, +∞[.
3. Attention R = R ∪ {±∞} n’est pas l’adhérence de R dans l’evn R.

10
Remarques.
1. Pour tout sous-ensemble A de E, on a : A ⊂ A. De plus A est toujours fermé.
2. Il existe des ensembles ouverts et fermés. Il y a E et ∅ (ce sont les seuls, cf TD). Il y a aussi des ensembles ni
ouverts, ni fermés. Par exemple ]0, 1].
3. La définition de B(x, r) dépend de la norme ! Si on change de norme, on change les fermés.

III.4. Caractérisations des fermés.

Théorème - Caractérisation des fermés. 30


1. Un vecteur x est un point adhérent de A si et seulement s’il existe une suite de A qui converge vers x. Ainsi A est
l’ensemble des limites possibles des suites de A.
2. Un sous ensemble F de E est fermé si et seulement si toute suite convergente de F converge dans F c’est-à-dire
si et seulement si :
∀l ∈ E, ∀(un ) ∈ F N, un Ð→ l Ô⇒ l ∈ F
n→+∞

C’est le théorème de caractérisation séquentielle des fermés.


3. Un sous ensemble F de E est fermé si et seulement si son complémentaire est un ouvert. In

Remarque. Le théorème de caractérisation séquentielle des fermés est très utile. En pratique, on préfèrera l’utiliser
plutôt que la définition pour montrer qu’un ensemble est fermé. De plus pour montrer qu’un ensemble est un ouvert,
on montrera que son complémentaire est fermé à l’aide de ce théorème.

Exercice. 31 Notons

] / a, b, c, d ∈ R∗ }
a b a b
A={[ B ={[ ] / a, b, c, d ∈ [0, 1]}
c d c d

Montrer que A est ouvert et B est fermé dans Mn (R)

III.5. Propriétés, notion de topologie.

Propriétés. 32
1. Si N1 et N2 sont des normes équivalentes alors les ouverts/fermés pour N1 sont les ouverts/fermés pour N2 .
2. En dimension finie, les ouverts ne dépendent pas de la norme choisie. On peut donc parler d’ouverts/fermés sans
préciser la norme.
3. Les boules ouvertes sont des ouverts, les boules fermées et les sphères sont des fermés. De plus l’intérieur d’une
boule fermée est la boule ouverte, l’adhérence de la boule ouverte est la boule fermée.

11
Définitions (HP).
1. Définir une topologie sur un ensemble E, c’est choisir parmi les sous-ensembles de E, ceux qu’on appellera des
ouverts. Ainsi une topologie est un sous ensemble de P(E). Ces ouverts doivent vérifier :
● ∅ et E sont ouverts
● Une réunion quelconque d’ouverts est un ouvert.
● Une intersection finie d’ouverts est un ouvert.
2. Un sous-ensemble F est alors fermé ssi son complémentaire dans E est ouvert.

Proposition. 33 L’ensemble des ouverts définis dans le paragraphe précédent dans l’espace vectoriel normé (E, ∥...∥)
est une topologie. C’est la topologie associée à la norme ∥...∥. En particulier :
1. Une réunion quelconque d’ouverts est un ouvert.
2. Une intersection finie d’ouverts est un ouvert.
3. Une réunion finie de fermés est un fermé.
4. Une intersection quelconque de fermés est un fermé.

Remarques.
1. Ainsi se donner une Norme, c’est également se donner une distance et une topologie.
2. Pour se souvenir que l’intersection d’ouverts doit être fini penser aux intervalles ]− n1 , n1 [.

III.6. Les sous-espaces vectoriels de E sont-ils ouverts/fermés ?.

Exercice. 34 Pour tout P de R[X], on définit :

N1 (P ) = Sup ∣P (x)∣ N2 (P ) = Sup ∣P (x)∣


x∈[0, 12 ] x∈[0,1]

1. Montrer que N1 et N2 sont des normes sur R[X].


2. Considérons la suite fn (x) = xn . Montrer que (fn ) converge vers 0 pour N1 , mais pas pour N2 .
3. Notons :
F = {P ∈ R[X] / P (1) = 0}
Montrer que F est fermé pour N2 , mais pas pour N1 .

Exercice. 35 Soit (E, N ) un espace vectoriel normé. Montrer que :


1. Tout espace vectoriel de E contenant une boule est égal à E.
2. en DQ, E est ouvert et fermé.
3. en DQ, tout sev distinct de E n’est pas ouvert.
4. en DF, tout sev de E est fermé.
5. en DI, il existe des sev qui ne sont pas fermé.

12
III.7. Densité.

Définition. Un ensemble D est dense dans E ssi D = E.

Ø D est dense dans E


Ú
Ú
Ú D=E
Ú
Ú
Propriétés. 36
Ú E ∖ D est d’intérieur vide
Ú
Ú
Ú
Ú Il existe des éléments de D dans chaque boule ouverte de E.
Ú
Ú
Ù Tout élément de E est limite d’une suite de D.

Exercice. 37 Montrer que Q et R ∖ Q sont denses dans R. En déduire l’adhérence et l’intérieur de Q

Exercice. 38
1. Soit A dans Mp (K) pour p dans N∗ . Montrer que la matrice : An = A + n1 In est inversible à partir d’un certain
rang.
2. En déduire que Glp (K) est dense dans Mp (K).

Exercice. 39 Montrer que :


1. Montrer que toute matrice triangulaire supérieure est limite de matrices triangulaires supérieures avec des éléments
distincts sur la diagonale.
2. En déduire que l’ensemble des matrices ayant n valeurs propres distincts sur C est dense dans Mn (C). Puis qu’il
en est de même pour l’ensemble des matrices diagonalisables sur C.
3. Montrer que l’ensemble des matrices diagonalisables sur R n’est pas dense dans Mn (R).
4. En déduire le théorème de Cayley-Hamilton. On admettra que si :

Mn Ð→ M Ô⇒ χMn (Mn ) Ð→ χM (M )
n→+∞ n→+∞

IV. Limite et continuité d’une application entre evn.

IV.1. Limite d’une application

Définition. Soient (E, ∥...∥E ) et (F, ∥...∥F ) des espaces vectoriels normés, D un sous ensemble de E et x0 un point
adhérent de D. Une application f de D dans F admet une limite l en x0 si et seulement si :

∀ε ∈ R∗+ , ∃η ∈ R∗+ , ∀x ∈ Df , ∥x − x0 ∥E ≤ η Ô⇒ ∥f (x) − l∥F ≤ ε

13
Remarques.
1. C’est la définition de la limite d’une fonction réelle en remplaçant les valeurs absolues par des normes.
2. Si on arrive à montrer que pour tout x de E, on a :
β
∥f (x) − l ∥F ≤ α∥x − x0 ∥E
1
avec α et β réels positifs, l’application f admet l pour limite en x0 (on prend η = ( αε ) β ). En pratique, comme
par exemple dans l’exercice suivant, on essaie de retrouver cette inégalité.

Exercice. 40 Montrer que l’application f de (R2 , ∥...∥∞ ) dans (R, ∣...∣) suivante admet une limite en 0 :
x2 y 2
f (x, y) =
x2 + y 2

IV.2. Caractérisation séquentielle

Théorème - caractérisation séquentielle. 41



⎪ Pour toute suite (un ) de A


lim f (x) = l ⇐⇒ ⎨ ∥...∥E ∥...∥F
x→x0 ⎪


⎩ un n→+∞ x0 Ô⇒ f (un ) n→+∞
l

42
Méthode - comment montrer qu’une fonction n’a pas de limite ? Comme pour les fonctions
de R dans R, on se sert souvent de la caractérisation séquentielle pour montrer qu’il n’y a pas de limite.

Pour montrer qu’une application f Pour montrer qu’une application f


ne converge par vers l en x0 n’a pas de limite en x0
On cherche une suite (xn ) On cherche deux suites (xn ) et (yn )
qui converge vers x0 qui convergent vers x0
et telle que (f (xn )) et telles que (f (xn )) et (f (yn ))
ne converge pas vers l. ne convergent pas vers la même limite.

Exercice. 43 Montrer que la fonction de R2 dans R suivante n’a pas de limite en (0, 0) :
xy
f (x, y) =
x2 + y 2

Théorème. 44
1. Des normes équivalentes dans les espaces de départ et d’arrivée définissent les mêmes fonctions convergentes. De
plus les limites sont les mêmes.
2. En dimension finie (espaces de départ et d’arrivée), il n’y a pas besoin de préciser les normes utilisées puisque la
notion de convergence est indépendante des normes choisies.

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IV.3. Propriétés de la limite

Définition. Soit f dans F(E, F ). Si F est de dimension finie, les coordonnées de f (x) dans une base β sont appelées
les fonctions composantes de f dans β.

Propriétés. 45
1. Toute application convergente en x0 est bornée au voisinage de x0 .
2. Toute CL d’applications convergentes converge vers la CL des limites.

⎪ f (x) x→x
⎪ Ð→ x1
3. Si ⎨ 0
alors g(f (x)) Ð→ l

⎪ g(x) Ð→ l x→x0
⎩ x→x1

4. Si E est de DF alors toute application à valeurs dans E converge vers l ssi toutes ses fonctions composantes de f
converge vers les coordonnées de l.

Exemples.
(ex − 1)
1. ( x ln(x) , , x sin ( x1 ) ) Ð→ (0, 1, 0)
x x→0

1 ⎛ sin(x) tan(x) ⎞ ⎛ 1 1 ⎞
2. Ð→
x ⎝ arctan(x) arcsin(x) ⎠ x→0 ⎝ 1 1 ⎠

IV.4. Continuité

Définitions. Soient (E, ∥...∥E ) et (F, ∥...∥F ) des evn, f ∈ F(E, F ), x0 ∈ E et A ⊂ E.


1. f est continue en x0 ssi : lim f (x) = f (x0 )
x→x0
2. f est continue sur A ssi f est continue en tout point de A. On note C(A, F ) l’ensemble des applications continues
de A dans F .
3. f est lipschitzienne sur A ssi il existe λ dans R telle que :

∀x, y, ∈ A, ∥f (x) − f (y)∥F ≤ λ∥x − y∥E

Propriétés. 46
1. Des normes équivalentes dans les espaces de départ et d’arrivée définissent les mêmes fonctions continues.
2. En dimension finie (espaces de départ et d’arrivée), il n’y a pas besoin de préciser les normes utilisées puisque la
notion de continuité est indépendante des normes choisies.
3. Toute application lipschitzienne sur A est continue sur A.

Propriétés - Opérations sur les applications continues. 47


1. Une CL, la composée d’applications continues est continue.
2. En DF, une application f est continue en x0 ssi ses fonctions composantes le sont.
3. Pour les fonctions à valeurs dans R, le produit d’applications continues est continue.

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Exemple. L’application f de R2 dans R3 définie par
f (x, y) = (xy , sin(x)ey , y arctan(x))

est continue sur R car les fonctions composantes sont des produits de fonctions continues.

Exercice. 48 Montrer que l’application de R2 dans R définie par :



⎪ x3 + xy 2 + 3x2 y + 7y 3


⎪ si (x, y) ≠ (0, 0)
f (x, y) = ⎨ x2 + y 2




⎩ 0 sinon

est continue en (0, 0).

Exercice. 49 Montrer que la norme d’un espace vectoriel normé E est continue sur E.

Exercice. 50 Considérons l’application définie de C([0, 1], R) dans R définie par : δ(f ) = f (0).
1. Montrer que δ est lipschitzienne pour ∥...∥∞ et par pour la norme ∥...∥1
2. Montrer que δ est continue pour ∥...∥∞ et par pour la norme ∥...∥1

IV.5. Préimage d’un ouvert/fermé par une application continue.

Propositions. 51 Soit E et F des K espaces vectoriels normés.


1. La préimage d’un ouvert de F par l’application continue est un ouvert de E.
2. La préimage d’un fermé de F par l’application continue est un fermé de E.

Remarques.
1. En particulier si f est continue de E dans R alors :
● f −1 (R∗ ), f −1 (]0, +∞[) et f −1 (] − ∞, 0[) sont ouverts.
● f −1 ({0}), f −1 ([0, +∞[) et f −1 (] − ∞, 0]) sont fermés.
2. Ces propositions sont les "vraies" définitions des applications continues. Ainsi la topologie est la structure minimale
pour parler d’applications continues. Mais ceci est une autre histoire. . .

IV.6. Application continue sur un compact.

Définition. En dimension finie les ensembles fermés et bornés sont appelés des compacts.

Théorème - théorème des bornes atteintes. 52 Toute application continue sur un compact d’un espace
vectoriel de dimension finie et à valeurs dans R est bornée et atteint ses bornes.

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Remarques.
1. Ceci est une généralisation de "toute application continue sur un segment est bornée et atteint ses bornes".
2. On peut aussi se placer en dimension quelconque à condition de donner une autre définition aux compacts. . . Largement
hors programme.

Exercice. 53 Soit (E, ∥...∥) un espace vectoriel normé. Justifier en utilisant le théorème précédent l’existence du Sup
dans la définition de la norme subordonnée :
∣∣u∣∣ = Sup ∥u(x)∥
x∈S 1

avec u dans L(E).

IV.7. Cas des applications linéaires, multilinéaires et polynômiales.

Rappels.
1. Une application multilinéaire est une application qui est linéaire par rapport à toutes ses variables.
2. Une application monomiale de Kn dans K est une application f du type :

f (x1 , . . . , xn ) = xα1 α2 αn
1 x2 . . . x n

avec α1 , . . . , α1 dans N.
3. Une application polynômiale est une CL d’applications monomiales.

Théorème. 54
1. Toute AL d’un evn de DF dans un evn de DQ est continue.
2. Toute application multilinéiaire d’un produit d’evn de DF dans un evn de DQ est continue.
3. Toute application polynômiale de Kn dans K est continue.

Exemples.
1. La trace, la transposée sont des applications continues.
2. Le produit scalaire d’un eve (donc de DF) est continue.
3. Le produit matriciel est continue.
4. Le déterminant est une application continue.

Méthode - comment montrer qu’un ensemble est ouvert/fermé ? Étant donné le théorème
précédent, on a facilement des applications continues. Ainsi pour montrer qu’un ensemble est ouvert (resp. fermé), on
montre souvent que c’est la préimage d’un ouvert (resp. fermé) par une application continue.

Exercice. 55 Montrer que


1. L’ensemble des matrices de trace nulle, An (K) et Sn (K) sont des fermés de Mn (R).
x2 y2
2. Une ellipse {(x, y) ∈ R2 / a2
+ b2
= 1 } est un fermé de R2 .
3. L’ensemble de polynômes de degré 2 ayant 2 racines réelles distinctes est un ouvert de R2 [X]
4. Montrer que Gln (K) est un ouvert de Mn (K).

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