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Les cancers ovariens

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Jean-Paul Guastalla
Isabelle Ray-Coquard

Les cancers ovariens


Jean-Paul Guastalla
Centre Léon-Bérard
28, rue Laënnec, 69008 Lyon
Isabelle Ray-Coquard
Centre Léon-Bérard
28, rue Laënnec, 69008 Lyon

ISBN-10 : 2-287-25168-5 Springer Paris Berlin Heidelberg New York


ISBN-13 : 978-2-287-25168-9 Springer Paris Berlin Heidelberg New York

© Springer-Verlag France, 2006


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SPIN : 11402770

Maquette de couverture : Nadia Ouddane


Avec l’aimable autorisation des docteurs Pascal Pujol et Pascal Roger pour les images de
couverture.
Liste des auteurs
Balleyguier Corinne Camatte Sophie
Service de radiologie diagnostique Service de chirurgie cancérologique
Institut Gustave Roussy Institut Gustave Roussy
36, rue Camille Desmoulins 39, rue Camille Desmoulins
94805 Villejuif 94805 Villejuif
Bay Jacques-Olivier Canis Michel
Centre Jean Perrin Service de gynécologie obstétrique et
58, rue Montalembert – BP 392 médecine de la reproduction
63011 Clermont-Ferrand Centre hospitalier universitaire
Bertrand Pierre Place Henri Dunant
Clinique Clémentville 63003 Clermont-Ferrand
25, rue Clémentville
34070 Montpellier Castaigne Damienne
Service de chirurgie gynécologique
Binon Pierre Institut Gustave Roussy
Centre Léon Bérard 39, rue Camille Desmoulins
28, rue Laënnec 94805 Villejuif
69008 Lyon
Chollet Philippe
Blay Jean-Yves Université d’Auvergne
Unité Inserm 590 49, boulevard François Mitterrand
Centre Léon-Bérard 63001 Clermont-Ferrand
69008 Lyon
Hôpital Édouard Herriot Choufi Bachra
Hospices Civils de Lyon Centre Jean Perrin
Place d’Arsonval 58, rue Montalembert
69008 Lyon BP 392
63011 Clermont-Ferrand
Bobin Jean-Yves
Centre hospitalier Lyon-Sud Claude Line
69495 Pierre-Bénite Département de radiothérapie
Cedex France Centre Léon Bérard
Kuwait Control Cancer Center – 28, rue Laënnec
Hupain Maki Al Juma 69008 Lyon
p.o box : 42 262 – al shuwaikh code
70 653 – state of Kuwait Colombo Pierre-Emmanuel
Borg Christophe Service de chirurgie A1
Centre hospitalier de Besançon CRLC Val d’Aurelle
25000 Besançon Rue de la Croix Verte
34298 Montpellier Cedex 5
Botchorishvili Révaz
Service de gynécologie obstétrique et Coupier Isabelle
médecine de la reproduction Service de génétique oncologique
CHU Polyclinique Institut Curie
Boulevard Léon Malfreyt 26, rue d’Ulm
63033 Clermont-Ferrand 75248 Paris Cedex 5
Curé Hervé Floquet Anne
Centre Jean-Perrin Institut Bergonié
58, rue Montalembert 229, cours de l'Argonne
BP 392 33000 Bordeaux
63011 Clermont-Ferrand
Freyer Gilles
Delnatte Capucine Service d’oncologie médicale
Service de génétique oncologique CH Lyon-Sud
Institut Curie Hospices Civils de Lyon
26, rue d’Ulm Université Lyon I
75248 Paris Cedex 5
Gauthier-Villars Marion
Droz Jean-Pierre Service de génétique oncologique
Centre Léon-Bérard Institut Curie
28, rue Laënnec 26, rue d’Ulm
69008 Lyon 75248 Paris Cedex 5
Dufour Patrick Geay Jean-François
Centre Paul Strauss Département d’hématologie et
3, rue Porte de l'Hôpital d’oncologie médicale
67000 Strasbourg Hôpital Hôtel-Dieu
75004 Paris
Duvillard Pierre
Service d’anatomo-pathologie Giammarile Francesco
Institut Gustave Roussy Service de médecine nucléaire
39, rue Camille Desmoulins Centre Léon-Bérard
94805 Villejuif 28, rue Laënnec
69373 Lyon Cedex 08
Fayette Jérôme
Hôpital Édouard Herriot Gilly François-Noël
Hospices Civils de Lyon Service de chirurgie générale,
Place d’Arsonval thoracique et endocrinienne
69008 Lyon Centre hospitalier Lyon-Sud
Unité Inserm 590 69495 Pierre-Bénite Cedex
Centre Léon-Bérard
69008 Lyon Gladieff Laurence
Centre Claudius Regaud
Ferrero Jean-Marc 20, rue Pont-Saint-Pierre
Centre Antoine Lacassagne 31300 Toulouse
33, avenue Valombrose
06100 Nice Glehen Olivier
Service de chirurgie générale,
Ferron Gwenaël thoracique et endocrinienne
Institut Claudius Regaud Centre hospitalier Lyon-Sud
20, rue Pont-Saint-Pierre 69495 Pierre-Bénite Cedex
31052 Toulouse Cedex 3
Gramont (de) Aimery
Fléchon Aude Oncologie médicale
Centre Léon-Bérard Hôpital Saint-Antoine
28, rue Laënnec 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine
69008 Lyon 75571 Paris Cedex 12
Guardiola Emmanuel Lejeune-Dumoulin Sophie
Centre hospitalier de Besançon Service de génétique oncologique
25000 Besançon Institut Curie
26, rue d’Ulm
Guastalla Jean-Paul 75248 Paris Cedex 5
Centre Léon-Bérard
28, rue Laënnec Lescaut Willy
69008 Lyon Centre Antoine Lacassagne
33, avenue Valombrose
Haie-Meder Christine 06100 Nice
Comité de Gynécologie
Institut Gustave-Roussy Lhommé Catherine
39, rue Camille Desmoulins Service d’oncologie médicale
94805 Villejuif Institut Gustave Roussy
39, rue Camille Desmoulins
Houlle Céline 94805 Villejuif
Service de gynécologie obstétrique et
médecine de la reproduction Litor Magali
CHU Polyclinique Service d’oncologie médicale
Boulevard Léon Malfreyt Centre hospitalier Lyon-Sud
63033 Clermont-Ferrand 69495 Pierre-Bénite Cecex
Jardon Kris
Service de gynécologie obstétrique et Lotz Jean-Pierre
médecine de la reproduction Hôpital Tenon
CHU Polyclinique 4, rue de la Chine
Boulevard Léon Malfreyt 75970 Paris
63033 Clermont-Ferrand
Mage Gérard
Joly Florence Service de gynécologie obstétrique et
Oncologie médicale médecine de la reproduction
Centre François Baclesse CHU Polyclinique
3, avenue Général Harris Boulevard Léon Malfreyt
14076 Caen Cedex 5 63033 Clermont-Ferrand

Largillier Rémy Mathevet Patrice


Centre Antoine Lacassagne Pavillon L
33, avenue Valombrose Hôpital Édouard Herriot
06100 Nice 5, place Arsonval
69437 Lyon Cedex 03
Lasset Christine
Département de santé publique Meeus Pierre
Centre Léon-Bérard Centre Léon-Bérard
28, rue Laënnec 28, rue Laënnec
69008 Lyon 69008 Lyon

Leblanc Éric Mignot Laurent


Centre Oscar Lambret Hôpital Foch
3, rue Frédéric Combemale 40, rue Worth
59000 Lille 92150 Suresnes
Mithieux François Pujade-Lauraine Éric
Centre Léon-Bérard Département d’hématologie
28, rue Laënnec et d’oncologie médicale
69008 Lyon Hôpital Hôtel-Dieu
75004 Paris
Mognetti Thomas
Service de médecine nucléaire Pujol Pascal
Centre Léon-Bérard Service de biologie cellulaire
28, rue Laënnec et hormonale
69373 Lyon Cedex 08 CHU Arnaud de Villeneuve
Morice Philippe 34295 Montpellier Cedex 5
Service de chirurgie cancérologique
Comité de Gynécologie Querleu Denis
Institut Gustave Roussy Institut Claudius Regaud
39, rue Camille Desmoulins 20, rue Pont-Saint-Pierre
94805 Villejuif 31052 Toulouse Cedex 3

Neidhardt Ève-Marie Rabischong Benoît


Centre Léon-Bérard Service de gynécologie obstétrique et
28, rue Laënnec médecine de la reproduction
69008 Lyon CHU Polyclinique
Boulevard Léon Malfreyt
Pautier Patricia 63033 Clermont-Ferrand
Service d’oncologie médicale
Comité de Gynécologie Raudrant Daniel
Institut Gustave Roussy CHU Lyon
39, rue Camille Desmoulins Hôpital Hôtel-Dieu
94805 Villejuif 1, place de l’Hôpital
69288 Lyon Cedex
Penault-Llorca Frédérique
Département de pathologie Ray-Coquard Isabelle
Centre Jean Perrin Centre Léon-Bérard
63011 Clermont-Ferrand 28, rue Laënnec
Plantade Anne 69008 Lyon
Service d’oncologie médicale
Hôpital Saint-Antoine Rey Annie
184, rue du faubourg-Saint-Antoine Comité de Gynécologie
75571 Paris Cedex 12 Institut Gustave-Roussy
39, rue Camille Desmoulins
Pomel Christophe 94805 Villejuif
Service de chirurgie générale
Institut Gustave Roussy Rouanet Philippe
36, rue Camille Desmoulins Département de chirurgie oncologique
94805 Villejuif CRLC Val d’Aurelle
208, rue des Apothicaires
Pouly Jean-Luc 34298 Montpellier Cedex 5
Service de gynécologie obstétrique et
médecine de la reproduction Saba Chadi
CHU Polyclinique Centre Léon Bérard
Boulevard Léon Malfreyt 28, rue Laënnec
63033 Clermont-Ferrand 69008 Lyon
Schneider Marc Thomas Laurence
Centre hospitalier Lyon-Sud Service de radiothérapie
69 495 Pierre Bénite Institut Bergonié
Cedex France Centre régional de lutte contre
le cancer
Stoeckle Eberhard 229, cours de l’Argonne
Institut Bergonié 33076 Bordeaux Cedex
229, cours de l'Argonne
33000 Bordeaux Tournigand Christophe
Service d’oncologie médicale
Stoppa-Lyonnet Dominique Hôpital Saint-Antoine
Service de génétique oncologique 184, rue du faubourg-Saint-Antoine
Institut Curie 75571 Paris Cedex 12
26, rue d’UPM Treilleux Isabelle
75248 Paris Centre Léon-Bérard
Sunyach Marie-Pierre 28, rue Laënnec
Département de radiothérapie 69008 Lyon
Centre Léon Bérard Zinzindohoué Cécile
28, rue Laënnec Clinique Clémentville
69008 Lyon 25, rue Clémentville
34070 Montpellier
This Pascale
Service de génétique oncologique Weber Béatrice
Institut Curie Centre Paul Strauss
26, rue d’Ulm 3, rue Porte de l'Hôpital
75248 Paris Cedex 5 67000 Strasbourg
SOMMAIRE

Préface ....................................................................................................... 15
Jacques Dauplat
Épidémiologie .......................................................................................... 17
Épidémiologie du cancer de l’ovaire ......................................................................... 19
Christine Lasset
Tumeurs ovariennes communes ......................................................... 27
Prédispositions génétiques ........................................................................ 29
Prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire................................................... 31
Isabelle Coupier, Capucine Delnatte, Sophie Lejeune-Dumoulin, Pascale This,
Marion Gauthier-Villars et Dominique Stoppa-Lyonnet
Données biologiques ................................................................................... 45
Hypothèses physiopathologiques dans les tumeurs épithéliales de l’ovaire ............... 47
Christophe Borg et Emmanuel Guardiola
Hormonosensibilité des cancers ovariens épithéliaux ............................................... 57
Pascal Pujol
Anatomopathologie .................................................................................... 71
Les différents types histologiques des cancers ovariens ............................................ 73
Isabelle Treilleux
Techniques d’aide au diagnostic des tumeurs ovariennes.......................................... 99
Frédérique Penault-Llorca
Facteurs pronostiques ................................................................................. 111
Facteurs pronostiques des tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire ........................ 113
Rémy Largillier, Willy Lescaut, Jean-Marc Ferrero et Jean-Paul Guastalla
Le dépistage ................................................................................................ 125
Le dépistage du cancer ovarien ................................................................................ 127
Patrice Mathevet
Imagerie ....................................................................................................... 143
Interaction radiologue-chirurgien pour la prise en charge des cancers de l’ovaire ...... 145
Corinne Balleyguier et Christophe Pomel
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles....................................................... 153
Michel Canis, Révaz Botchorishvili, Kris Jardon, Benoît Rabischong, Céline Houlle,
Jean-Luc Pouly et Gérard Mage
Intérêt de la TEP-FDG dans les cancers de l’ovaire..................................................... 175
Thomas Mognetti et Francesco Giammarile
Les stades précoces ..................................................................................... 183
Chirurgie programmée des cancers ovariens au stade précoce par cœlioscopie ......... 185
Denis Querleu, Éric Leblanc et Gwenaël Ferron
Place de la chimiothérapie adjuvante dans les formes précoces des cancers
épithéliaux de l’ovaire ............................................................................................. 193
Jean-Paul Guastalla et Isabelle Ray-Coquard
Les stades avancés ...................................................................................... 201
Chirurgie.................................................................................................. 203
Chirurgie optimale des formes avancées : techniques chirurgicales ........................... 205
Pierre Meeus et François Mithieux
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques.................................. 217
Pierre-Emmanuel Colombo et Philippe Rouanet
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien dans les cancers
épithéliaux de l’ovaire ............................................................................................. 239
Jean-Yves Bobin et Marc Schneider
Le « second look » un concept dépassé ?.................................................................. 251
Cécile Zinzindohoué et Pierre Bertrand
Réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante ............................ 259
Eberhard Stoeckle et Anne Floquet
Chimiothérapie ............................................................................................ 275
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées des cancers
épithéliaux de l’ovaire ............................................................................................. 277
Isabelle Ray-Coquard et Jean Paul Guastalla
La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle une place en première ligne ? ................. 301
Laurence Gladieff
Le traitement de consolidation .................................................................. 315
Traitement de consolidation dans les cancers de l’ovaire .......................................... 317
Jean François Geay, Isabelle Ray-Coquard, Hervé Curé et Éric Pujade-Lauraine
Radiothérapie de clôture ......................................................................................... 325
Line Claude et Marie-Pierre Sunyach
La chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation ................................................ 335
Christophe Tournigand, Anne Plantade et Aimery de Gramont
Intensification de la chimiothérapie en consolidation ............................................... 341
Hervé Curé, Jacques-Olivier Bay, Bachra Choufi et Philippe Cholet
La chimiothérapie intrapéritonéale avec hyperthermie ............................................. 361
Olivier Glehen et François-Noël Gilly
La radiothérapie .......................................................................................... 373
La radiothérapie dans les cancers ovariens............................................................... 375
Laurence Thomas
La radio-immunothérapie dans les cancers ovariens ................................................. 389
Francesco Giammarile et Thomas Mognetti
Les récidives ................................................................................................ 397
La chirurgie des récidives......................................................................................... 399
Damienne Castaigne et Christophe Pomel
Traitement médical des rechutes (récidives) précoces ............................................... 405
Béatrice Weber
La chimiothérapie des rechutes au-delà de six mois .................................................. 417
Jean-François Geay, Isabelle Ray-Coquard et Éric Pujade-Lauraine
Chimiothérapie intra-ascitique palliative ................................................................. 427
Patrick Dufour
Traitement des cancers ovariens chez la femme âgée de plus de 70 ans. 431
Traitement des cancers ovariens chez la femme âgée de plus de 70 ans..................... 433
Magali Litor, Gilles Freyer
Les tumeurs à malignité atténuée (« bordeline ») ........................ 445
Facteurs pronostiques et traitement chirurgical des tumeurs « borderline » de
l’ovaire ................................................................................................................... 447
Philippe Morice, Sophie Camatte, Catherine Lhommé, Patricia Pautier,
Pierre Duvillard et Damienne Castaigne
Place de la chimiothérapie dans le traitement des tumeurs de l’ovaire
à la limite de la malignité......................................................................................... 465
Catherine Lhommé, Patricia Pautier, Philippe Morice, Damienne Castaigne,
Christophe Pomel, Annie Rey, Corinne Balleyguier, Christine Haie-Meder
et Pierre Duvillard
Les tumeurs ovariennes rares ............................................................. 475
Les tumeurs germinales .............................................................................. 477
Biologie des tumeurs germinales ............................................................................. 479
Aude Fléchon et Jean-Pierre Droz
Traitement des tumeurs germinales de l'ovaire......................................................... 485
Patricia Pautier et Catherine Lhommé
Les autres tumeurs rares ............................................................................. 499
Traitement des tumeurs rares de l’ovaire. Expérience de l’observatoire francophone
des tumeurs malignes rares de l’ovaire..................................................................... 501
Isabelle Ray-Coquard, Pierre Binon, Jean-Yves Blay, Hervé Curé, Aude Fléchon,
Jean-Paul Guastalla, Jean-Pierre Lotz, Pierre Meeus, Laurent Mignot,
Éric Pujade-Lauraine, Daniel Raudrant, Isabelle Treilleux et Christophe Tournigand
Les perspectives ...................................................................................... 513
Les thérapeutiques ciblées ou le traitement des mécanismes moléculaires
de la progression tumorale ...................................................................................... 515
Jean-Yves Blay, Jérôme Fayette et Isabelle Ray-Coquard
L’utilisation des anticorps monoclonaux dans le cancer de l’ovaire............................ 529
Ève-Marie Neidhardt
Nouvelles tentatives médicamenteuses ................................................................... 535
Florence Joly
La surveillance ......................................................................................... 547
Surveillance du cancer de l’ovaire ............................................................................ 549
Chadi Saba
Préface

Le cancer de l’ovaire conserve une réputation redoutable, d’abord parce qu’il est la
quatrième cause de mortalité par cancer chez la femme en France où il provoque
chaque année 3 500 décès (après le sein, le côlon, le rectum et le poumon), ensuite
parce que la plupart des malades rechutent au niveau de la cavité abdominale, ce
qui les conduit à une phase terminale particulièrement pénible dominée par l’oc-
clusion intestinale.
Le challenge est donc toujours d’actualité pour améliorer la prise en charge de
cette maladie et justifie pleinement un ouvrage tel que celui-ci et il faut remercier
Jean-Paul Guastalla de l’avoir initié et coordonné. Dix ans après celui que nous
avions écrit ensemble, il était important de faire le point et d’envisager l’avenir. C’est
avec regret que je constate que d’autres fonctions m’ont sans doute éloigné de la
pointe de la connaissance médicale, mais cela me permet peut-être d’avoir un peu de
recul par rapport à cette pathologie qui me passionne toujours. Il me semble en
réalité que depuis 25 ans, les progrès sont continus et sensibles, et aujourd’hui j’ai le
sentiment que l’espoir est réel qu’ils deviennent décisifs dans les prochaines années.
Un diagnostic trop tardif fait toujours la gravité du cancer épithélial de l’ovaire,
car il impose d’avoir à traiter un volume tumoral considérable parfois mesuré en
kilogramme. Cependant, si en 1996 nous écrivions dans notre « Avant-propos » que
les cancers ovariens étaient diagnostiqués trois fois sur quatre à un stade avancé, des
chiffres plus récents montrent que cette proportion est en réalité, aujourd’hui
réduite à environ 60 %. Il y a donc un progrès dans le diagnostic, sans nul doute
grâce au développement de l’échographie et de la cœlioscopie et même si le dépis-
tage de masse n’est toujours pas préconisé, les expériences anglaises, associant les
dosages du CA 125 et l’échographie selon des algorithmes décisionnels bien
définis, se rapprochent d’une valeur prédictive positive acceptable en particulier
dans des populations à risque. Par ailleurs, le développement des nanotechnologies
laisse entrevoir des possibilités diagnostiques intéressantes par l’étude des profils
protéiques sériques. Enfin, on progresse également dans la compréhension de la
cancérogenèse ovarienne et des éventuels états précancéreux ovariens grâce notam-
ment à l’étude des ovariectomies prophylactiques du risque génétique.
On peut donc raisonnablement espérer une amélioration des possibilités de
diagnostic précoce de cette maladie qui sera décisive puisque plus de 80 % des
stades limités sont curables.
La prise en charge des stades précoces est aujourd’hui bien codifiée : les grands
essais internationaux ICON 1 et ACTION ont montré à la fois l’intérêt de la
chimiothérapie adjuvante et celui d’une stadification chirurgicale adéquate.
Pour les stades avancés, on ne peut plus dire que le traitement est décevant dans la
mesure où l’on assiste à une progression linéaire des médianes de survie qui ont quadruplé
en vingt ans au fil des essais thérapeutiques passant de douze à quarante-huit mois.
Ces progrès sont dus à l’amélioration de la chimiothérapie de première ligne
qui a atteint un haut degré de consensualité : l’association de carboplatine et de
paclitaxel s’est révélée à la fois la plus efficace et la mieux tolérée. Ils sont également
dus à la maturation du concept de chirurgie de réduction tumorale maximale qui
fait aujourd’hui figure de standard bien qu’il ne soit pas passé et qu’il ne passera
sans doute jamais sous les fourches caudines de la randomisation.
Deux idées résument aujourd’hui la conception de la chirurgie du cancer
avancé des ovaires : l’exérèse chirurgicale doit être complète, le résidu tumoral post-
chirurgical optimal est macroscopiquement nul, sinon la chirurgie incomplète
(sub-optimale) est une demi-mesure inutile et peut-être même délétère qui devrait
être proscrite. Mais, cette chirurgie d’exérèse doit être raisonnée et raisonnable et
peut le devenir dans les cas les plus évolués grâce à une préparation par trois ou
quatre cures de chimiothérapie première. Cela suppose une sélection des malades
sur des critères de résécabilité tumorale qui commencent à être bien connus. Cette
chirurgie dite « d’intervalle » semble plus en vogue en Europe qu’aux États-Unis.
Peut-être son bien-fondé sera-t-il démontré par l’essai 55971 de l’EORTC, ce qui
donnera l’occasion à nos collègues d’Outre-Atlantique de monter un contre-essai !
Dans le domaine chirurgical, en France en tout cas, le progrès viendra de l’or-
ganisation des soins qui, sous l’égide de l’Institut national du cancer, réservera cette
prise en charge à des équipes chirurgicales expertes ayant une activité soutenue
dans ce domaine.
Chirurgie de qualité et chimiothérapie efficace contribuent à placer une
proportion croissante de malades en rémission complète donnant ainsi l’impres-
sion au thérapeute de toucher au but. Le problème est bien aujourd’hui de trouver
le moyen de consolider les acquis du traitement de première ligne pour éviter
qu’une proportion toujours importante de malades ne récidive. C’est le domaine
où l’investigation clinique doit être développée pour tester différentes modalités de
consolidation dont le spectre pourrait être très large, allant de la poursuite d’une
chimiothérapie identique à celui des nouvelles biothérapies ciblées dont là comme
ailleurs, la communauté cancérologique attend beaucoup. Il est tentant de privilé-
gier la voie intrapéritonéale pour ces thérapeutiques puisque la plupart des
récidives se font dans cette cavité.
À côté des cancers épithéliaux, cet ouvrage fait le point sur des aspects plus rares
de la maladie et sur l’entité de mieux en mieux comprise des tumeurs à malignité
atténuée. On peut se demander aujourd’hui si ce sujet devrait figurer dans un livre
sur le cancer de l’ovaire puisqu’il est de plus en plus évident que c’est une maladie
complètement différente dans sa genèse et dans son évolution. En effet, elle ne met
pas les malades en danger et ne « fait pas le lit du cancer ». Il importe donc de ne
pas être trop agressif à son égard à condition de savoir la reconnaître avec certitude
ainsi que ses éventuels éléments péjoratifs. C’est encore une affaire d’expertise en
particulier anatomo-pathologique.
Plus que jamais nous devons croire, dans le domaine du cancer de l’ovaire, aux
Bonnes Pratiques médicales qui seront soulignées dans cet ouvrage et qui sont
propres à donner le maximum de chances aux malades, et aux vertus de la recherche
clinique pour améliorer et consolider les résultats acquis en première ligne. Enfin,
nous devons insister sur la nécessité d’une prise en charge globale de qualité de ces
femmes soumises à des traitements agressifs et à une maladie qui les emporte
encore trop souvent dans des circonstances douloureuses.
Professeur Jacques Dauplat
Épidémiologie du cancer de l’ovaire
C. Lasset

Fréquence
En France, avec 4 488 nouveaux cas en 2000 (tableau I), le cancer de l’ovaire
représente 3,8 % de l’ensemble des nouveaux cas de cancers chez la femme et
se place au cinquième rang des cancers féminins (fig. 1). Avec un taux stan-
dardisé annuel de 9,0 pour 100 000, sa fréquence est voisine de celles du cancer
de l’endomètre et du cancer du poumon (respectivement 9,2 et 8,6 pour
100 000). Elle est moindre que celle des cancers colorectaux (24,6 pour
100 000) et beaucoup plus faible que celle du cancer du sein qui reste à la
première place des tumeurs féminines avec un taux annuel de 88,9 pour
100 000 (1).
Le taux d’incidence du cancer de l’ovaire est considéré comme stable et n’a
progressé que de + 0,55 % par an entre 1978 et 2000.
Le taux cumulé 0-74 ans est de 1,08 % pour les femmes nées en 1930, soit
une femme sur 93. Il diminue pour les cohortes plus jeunes. Il est estimé à
0,92 % pour la cohorte 1950.
Le risque dépend fortement de l’âge : le taux d’incidence augmente régu-
lièrement de 15 à 74 ans jusqu’à un taux de 43 pour 100 000, puis il décroît
lentement jusqu'à 36 pour 100 000 après 85 ans (fig. 2 et tableau II).
En 2000, l’âge médian au diagnostic était de 65 ans. Seulement 7 % des cas
de cancer de l’ovaire surviennent avant 40 ans et environ 10 % entre 40 et
50 ans. Le cancer de l’ovaire est donc pour l’essentiel une tumeur de la femme
ménopausée (tableau I).
Comparée aux autres pays européens, la France est un pays à faible risque
de cancer de l’ovaire. La Suède, la Finlande, l’Angleterre et le Danemark

Tableau I – Nombre de cas incidents et de décès par tranches d’âge en 2000.


Âge 0- 15- 20- 25- 30- 35- 40- 45- 50- 55- 60- 65- 70- 75- 80- 85 Total
14 19 24 29 34 39 44 49 54 59 64 69 74 79 84 +
Incidents 7 14 29 53 80 122 185 307 495 432 470 575 595 528 269 327 4 488
Décès 0 1 2 4 10 26 58 120 215 221 304 427 538 588 361 633 3 508
20 Les cancers ovariens

B. Femmes
Nombre de nouveaux cas (2000) Nombre de décès (1999)

42000 Sein
17000 Côlon et rectum
5000 Endomètre
4600 Poumon
4500 Ovaire
Lymphome non hodgkinien
Mélanome
Col utérin
Rein
Thyroïde
Bouche, pharynx et larynx
Leucémies
Estomac
Encéphale
Pancréas
Vessie
Myélome
Foie
Œsophage
Hodgkin
50 000 40 000 30 000 20 000 10 000 0 10 000 Source : Inserm

Fig. 1 – Incidence et mortalité par cancer chez la femme en France.

présentent des taux d’incidence de 67 à 47 % supérieurs à ceux de la France.


L’Espagne est le pays européen qui semble le moins touché par ce cancer (14 %
d’incidence en moins que le taux français).
La très grande majorité des cas sont des tumeurs épithéliales (80 % à 90 %) et
les types histologiques habituels sont les cystadénocarcinomes séreux (50 %) ou
mucineux (5-10 %) et des tumeurs endométrioïdes (10-25 %) et, plus rarement,
des tumeurs à cellules claires (4-5 %), indifférenciées (5 %). Les tumeurs germi-
nales de l’ovaire sont très rares et atteignent plutôt les enfants et adolescentes.

Mortalité
Avec 3 210 décès observés en 2000 (2) pour 3 508 décès estimés (tableau I), le
cancer de l’ovaire se situe au quatrième rang si l’on considère les décès fémi-
nins, après le cancer du sein (10 950 décès), le cancer du côlon-rectum
(7 604 décès) et le cancer du poumon (4 246 décès) (fig. 1). Le taux de morta-
lité standardisé est de 5,4 pour 100 000.
Entre 1978 et 2000, le taux annuel moyen de progression de la mortalité
par cancer de l’ovaire est + 0,93 %. La mortalité du cancer de l’ovaire reste
forte : le ratio mortalité sur incidence est de l’ordre de 0,8 (il n’est que de 0,3
pour le cancer du sein) et près de 6 % des décès par cancer chez la femme sont
dus à cette localisation.
Épidémiologie du cancer de l’ovaire 21

Une femme née en 1940 à une diminution de 19 % du risque de décéder


d’un cancer de l’ovaire par rapport à une femme née en 1930 pour laquelle le
risque cumulé 0-74 ans est de 0,73 %, soit une femme sur 137.
En 2000, le taux de mortalité augmente avec l’âge régulièrement jusqu’à un
taux de 69 pour 100 000 après 85 ans (fig. 2).
La mortalité dans les cinq ans après le diagnostic de cancer de l’ovaire est
estimée à 68 %.

Facteurs de risque
Âge
Comme pour la plupart des cancers, l’âge est un facteur de risque important
puisque l’incidence annuelle est multipliée par six entre 40 et 70 ans (de 5,6 à
39,7 pour 100 000 femmes) (tableau II).

Antécédents familiaux
Les femmes ayant des antécédents familiaux de cancer de l’ovaire apparaissent
plus à risque de développer elles aussi cette tumeur.
Plusieurs études de type cas-témoins ont mis en évidence cette composante
familiale : si l’observation de plusieurs cas de cancers de l’ovaire dans une
famille est rare (moins de 10 % des cas incidents), la fréquence d’un cancer de
l’ovaire chez une parente au premier degré (c’est-à-dire la mère, la sœur ou la

Fig. 2 – Taux d’incidence et de mortalité selon l’âge.


22 Les cancers ovariens

Tableau II – Taux pour 100 000 personnes-années par tranche d’âge en 2000.
Âge 0- 15- 20- 25- 30- 35- 40- 45- 50- 55- 60- 65- 70- 75- 80- 85 Total
14 19 24 29 34 39 44 49 54 59 64 69 74 79 84 +
Incidence 0,1 0,8 1,5 2,6 3,8 5,6 8,6 14,6 23,5 30,4 34,1 39,7 42,6 42,0 40,2 35,8 14,9
Mortalité 0 0,1 0,1 0,2 0,5 1,2 2,7 5,7 10,2 15,5 22,0 29,5 38,5 46,8 54,0 69,1 11,6

fille) est significativement multipliée par quatre chez les femmes présentant un
cancer de l’ovaire par rapport à une population témoin indemne et de même
structure d’âge. Le risque semble le même, qu’il s’agisse de la mère ou de la
sœur. Cette même fréquence est trois fois plus grande si l’on tient compte des
apparentées de premier et de deuxième degré (c’est-à-dire la grand-mère, la
tante, la nièce ou la petite-fille) (3). Le risque cumulé sur la vie passe de 1 %
environ en l’absence d’antécédents à près de 5 % si une personne apparentée au
premier degré a eu un cancer de l’ovaire et atteint 7 % s’il existe deux cas chez
des personnes apparentées au premier degré (3).
Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer l’observation de
contextes familiaux de cancers de l’ovaire. Dans la majorité des cas, ce sont des
modes de vie et d’alimentation « à risque » identiques au sein des mêmes
familles qui semblent en cause. Dans un petit nombre de cas, il existe une
prédisposition héréditaire au cancer de l’ovaire transmise sur un mode autoso-
mique dominant et en relation avec les gènes BRCA1 et BRCA2. Les
concentrations familiales sont alors particulières, permettant d’isoler des
groupes à très haut risque de cancer de l’ovaire (cf. chapitre spécifique).

Facteurs hormonaux endogènes et exogènes


Le cancer de l’ovaire partage avec le cancer du sein certains facteurs de risque
liés à la fertilité et à la reproduction. En effet, le risque de cancer de l’ovaire est
augmenté chez les femmes nullipares (4-6), ainsi que chez celles ayant eu une
puberté précoce et une ménopause tardive (mais les résultats sont discordants).
Il est en revanche clairement établi que le risque de cancer de l’ovaire diminue
à chaque nouvelle grossesse (de l’ordre de 10 à 16 %) (6) et avec un âge plus
avancé à la première naissance (6, 7) ou à la dernière naissance (7). Le risque
de cancer de l’ovaire diminuerait avec l’allaitement (5) et les grossesses gémel-
laires (8), ainsi qu’après une hystérectomie ou une ligature des trompes (4-6).
L’effet des hormones synthétiques exogènes a été beaucoup étudié.
Il est maintenant reconnu que la prise d’une pilule contraceptive pour plus
de cinq ans diminue le risque de cancer de l’ovaire de 30 à 50 % (6, 9). Cet
effet serait expliqué par le blocage de l’ovulation entraîné par ce traitement.
L’effet favorable a été observé dix à quinze ans après la fin de la prise de pilule
(6, 10) et la protection pourrait persister plus longtemps, au-delà de 20-25 ans
(4, 11).
Épidémiologie du cancer de l’ovaire 23

En revanche, des études récentes montrent qu’un traitement hormonal


substitutif de la ménopause prolongé (plus de cinq ou dix ans) augmente le
risque de cancer de l’ovaire de 1,5 à 2 (12, 13).
Le risque de cancer de l’ovaire serait majoré dans le syndrome des ovaires
polykystiques (14) et dans l’endométriose, pour les tumeurs endométrioïdes ou
à cellules claires (15). L’infertilité n’augmenterait le risque de cancer de l’ovaire
que chez les femmes n’ayant jamais eu de grossesse (5, 6). Mais, plusieurs
études récentes, dont une méta-analyse (16), tendent à montrer que les traite-
ments de la stérilité n’augmentent pas le risque de cancer de l’ovaire.

Risques environnementaux

Plusieurs études sur des femmes asiatiques ayant immigré aux États-Unis, en
Australie ou au Canada ont montré qu’elles-mêmes et leur descendance déve-
loppent plus fréquemment un cancer de l’ovaire que les femmes restées en Asie,
même si les risques restent moins importants que ceux des femmes améri-
caines. La comparaison des modes de vie entre les deux pays permet
d’incriminer une alimentation riche en graisses animales (17). Cette hypothèse
a été confortée par des études cas-témoins mettant en évidence une consom-
mation plus forte de graisses d’origine animale et de produits laitiers (6).
L’excès de poids entraîne un risque modérément élevé de cancer de l’ovaire
(18), en particulier à l’adolescence ou chez l’adulte jeune (19).

Hypothèses physiopathologiques

L’explication physiopathologique du lien entre cancer de l’ovaire et facteurs


hormonaux serait le nombre total de cycles ovulatoires. Chaque ovulation
entraîne une rupture de l’épithélium ovarien avec un phénomène secondaire de
cicatrisation. La répétition successive de ces « microtraumatismes » ovariens
pourrait augmenter le risque de transformation maligne à ce niveau.
Comme présenté dans le tableau III, beaucoup de facteurs de risque (ou de
protection) de cancer de l’ovaire sont concordants avec cette hypothèse, alors
que d’autres le sont moins. En particulier, l’effet protecteur des grossesses et de
la pilule est supérieur à celui lié à la seule suppression de cycles ovulatoires.
D’autres mécanismes hormonaux sont donc possibles. Le rôle de taux élevés
d’androgènes et d’estrogènes et de taux bas de progestérone est une hypothèse
actuellement retenue (20). La contribution relative de la synthèse ovarienne et
des taux circulants d’hormones sexuelles dans le développement et la progres-
sion du cancer de l’ovaire doit être étudiée ; de même que l’effet des
gonadotrophines et des IGF (insulin growth factors).
24 Les cancers ovariens

Tableau III – Accord entre l’association de facteurs épidémiologiques avec le cancer de l’ovaire et
l’effet prévu sous différentes hypothèses étiologiques (d’après 20).

Facteur Lien observé Accord entre effet observé


épidémiologique avec le risque et effet prévu selon le facteur hormonal
O G A P E IGF I
↑ Âge puberté ~ - - -
Grossesses ↓↓ + + + -
Grossesses multiples ~↓ - - + -
Allaitement ~↓ + LH +/FS +
H-
Pilule ↓↓ + + + + + +
↑ Âge ménopause ~ - - - -
TSH
Estrogènes seuls ~↑ - + -
TSH combiné ~↑ - ~ (+) +
Excès de poids ~↑ ~ (-) - ~ (+) ~ (+) pre ~ (+) post ~ (+)
Endométriose ↑ +
SOPC ~↑ - + + + +
Ligation tubaire/
hystérectomie ↓ +
↑/ ↓/~ : augmentation du risque / diminution du risque /association faible avec le risque,
+/- : accord / désaccord entre l’association observée avec le risque et l’hypothèse étiologique
O : ovulation ; G : gonadotrophines ; A : androgènes ; P : progestérone ; E : estrogènes ;
IGF : Insulin-growth factor ; I : insuline

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Chimiothérapie intra-ascitique palliative

P. Dufour

Introduction
L’histoire naturelle du cancer de l’ovaire explique la fréquence de l’atteinte péri-
tonéale avec une ascite qui peut être révélatrice ou survenir au terme de
l’évolution après échappement aux thérapeutiques médicales. L’ascite est l’une
des principales causes d’hospitalisation durant les six derniers mois d’évolution
de la maladie (1). Le pronostic d’une patiente avec une ascite réfractaire est
sombre, avec une moyenne de survie de trente à trente-cinq semaines (2). Le
traitement à ce stade est palliatif avec pour but de préserver la qualité de vie
et de faire régresser ou contrôler l’ascite. Différentes thérapeutiques ont été
envisagées : certaines sont purement symptomatiques (paracentèse, diuré-
tiques, shunt péritonéo-veineux), d’autres à visée antitumorale (chimiothérapie
intrapéritonéale, radio-isotopes intrapéritonéaux, immunothérapie, chimio-
hyperthermie intrapéritonéale) (3).
La paracentèse est de loin le geste à visée symptomatique le plus utilisé. Lee
rapporte dans une étude de pratique au Canada qu’elle est le geste préféré dans
98 % des cas (4). La paracentèse, si elle permet un soulagement immédiat de la
patiente, n’a qu’un effet transitoire et elle est souvent techniquement difficile
en raison d’adhérences multiples ; de plus, elle entraîne une déperdition
hydrique et protéique.
L’utilisation de diurétique et en particulier de spironolactone n’a que peu
d’efficacité dans cette situation et aggrave bien souvent l’état hémodynamique
et peut s’accompagner ou se compliquer d’une insuffisance rénale chez des
patientes qui bien souvent ont été prétraitées par des sels de platine (5). Devant
le caractère récidivant de l’ascite, il a été proposé la pose d’un drain peritonéal
ou d’une derivation péritonéo-veineuse. Avec un shunt de type Leveen ou
Denver, un résultat bénéfique est observé dans 70 % des cas ; mais des compli-
cations sont observées dans près de 25 % des cas. Compte tenu de la
complexité de la technique et de la morbidité observée, cette modalité théra-
peutique n’est qu’exceptionnellement utilisée dans le cancer de l’ovaire (6).
428 Les cancers ovariens

Chimiothérapie intra-ascitique palliative

Radio-isotopes intrapéritonéaux

Ils ont été largement utilisés dans les années 60 et 70 avant l’avènement des sels
de platine. Ainsi, Ariel en 1966, dans une série de 34 patientes ayant une ascite
réfractaire traitée par radio-isotopes intra péritonéaux, rapporte un bénéfice
dans 16 cas avec une médiane de survie de huit mois. Le radioisotope utilisé
était, soit l’or 198 (Au198) ou le phospore 32 (P32) (7). Plus récemment, Vergote
rapporte dans une série de 313 patientes ayant un cancer de l’ovaire traité par
P32 en intrapéritonéal avec une masse résiduelle < 2 cm, une survie à cinq ans
de 79 % ; mais il s’agit plus d’un traitement de deuxième ligne que d’une ascite
réfractaire. Il est noté cependant un taux de 7 % de complications digestives à
type de syndrome occlusif (8). Cette technique, malgré son intérêt, est actuel-
lement abandonnée dans le cancer de l’ovaire en raison des contraintes qu’elle
impose chez des patientes en traitement purement palliatif.

Drogues cytotoxiques

L’efficacité de la chimiothérapie intrapéritonéale a été démontrée chez les


patientes ayant une masse tumorale faible. Ceci est explicable par son mode
d’action par cytotoxicité directe au maximum sur six à vingt couches cellulaires
selon la drogue utilisée (9, 10). Howell rapporte une étude de 90 patientes
évolutives sous une chimiothérapie de première ligne et traitées par voie intra-
péritonéale par du cisplatine associé à de la cytarabine seule ou combinée à de
l’adriamycine ou à de la bléomycine. Il observe une survie médiane de huit
mois chez les patientes ayant des masses tumorales supérieures à 2 cm alors
qu’elle est supérieure à quarante-neuf mois dans le cas de lésions tumorales
inférieures à 2 cm. Les toxicités principales étaient hématologiques, rénales et
surtout à type de douleurs abdominales (11). De très nombreuses drogues ont
été utilisées en intrapéritonéal (cisplatine, étoposide, melphalan, 5 fluoro-
uracile, methotrexate, cytarabine, mitoxantrone) (12). Il s’agit à chaque fois
d’étude de phase II en mono- ou polychimiothérapie chez des patientes de
pronostic extrêmement divers (rechute à distance du traitement initial,
patientes résistantes ou réfractaires au traitement classique, masse tumorale
faible ou importante). Les résultats sont donc difficilement comparables d’une
étude à l’autre. L’expérience la plus large concerne le cisplatine. La dose usuelle
par voie intrapéritonéale est de 100 mg/m2 ; elle permet d’obtenir une amélio-
ration chez 30 à 50 % des patientes ayant une masse tumorale faible. La toxicité
locale est modérée, mais, du fait d’une clairance péritonéale élevée, des effets
systémiques sont observés (nausées-vomissements, neurotoxicité) (13).
Chimiothérapie intra-ascitique palliative 429

La chimiothérapie hyperthermie intrapéritonéale


(CHIP)
Cette technique est basée sur l’effet cytotoxique propre de l’hyperthermie et sur
une synergie avec la chimiothérapie (14). Elle est habituellement associée à une
résection étendue du péritoine. Les études rapportées concernent essentielle-
ment les ascites néoplasiques secondaires à des cancers digestifs et la drogue
utilisée est la mitomycine C. Compte tenu de l’agressivité du geste chirurgical
avec une morbidité et une mortalité non négligeables, cette technique n’a guère
sa place dans la prise en charge d’une patiente dans sa phase de traitement
purement palliative.

Immunothérapie intrapéritonéale
L’administration intrapéritonéale d’interferon β ou α n’a pas démontré d’acti-
vité dans cette situation palliative où il existe une masse tumorale importante
(15, 16). Des résultats prometteurs ont été rapportés avec l’OK-432, lyophi-
lisat d’une lignée de faible virulence de Streptococcus du groupe A. Katano a
rapporté les résultats d’une série de 400 patientes. Il est observé une réponse
(régression de l’ascite) chez 60 % des patientes, avec une médiane de survie de
quinze mois chez les répondeurs et de trois mois chez les non-répondeurs ; cette
dernière étant superposable à celle observée avec un traitement purement
palliatif. La toxicité était modérée et comparable à celle observée avec l’utilisa-
tion des cytokines (frissons, fièvre, état pseudogrippal et, plus spécifiquement,
distension abdominale). Le mécanisme d’action évoqué est celui d’une cyto-
toxicité médiée par une activation du système monocyte-macrophages et par le
relargage de cytokines (IFN α, IFN γ, TNF α, IL 1, IL 2, TGIF) ayant une
action cytotoxique directe (17).
Une autre voie s’ouvre avec l’utilisation d’anticorps monoclonaux trifonc-
tionnels (Removab®) qui vont permettre d’établir des liens entre les cellules
tumorales exprimant Ep CAM (epithelial cell adhesion molecule) avec, d’une part,
les lympocytes T et, d’autre part, les cellules présentatrices de l’antigène (18). Une
étude de phase II a inclus 23 patientes avec une ascite réfractaire secondaire à un
cancer de l’ovaire : il a été observé 22 réponses avec disparition de l’ascite sur les
23 patientes évaluables ; à la date de la publication, les 22 patientes répondeuses
étaient toujours en rémission, avec un recul de 37 jours. Les effets secondaires
observés étaient, sur le plan biologique, une élévation transitoire des phospha-
tases alcalines et du taux de γGT et une lymphopénie. Sur le plan clinique, il est
noté quelques nausées et vomissements chez 14 patientes (grade 1-2) et de la
fièvre chez 19 patientes (grade 1-2). Une étude de phase III multicentrique euro-
péenne comparant l’administration intrapéritonéale de Removab® à un placebo
chez des patientes ayant une ascite maligne réfractaire est en cours (19).
430 Les cancers ovariens

En conclusion, la chimiothérapie intrapéritonéale garde une place dans une


situation palliative chez des patientes ayant une espérance de vie supérieure à
trois mois. Elle permet une amélioration du confort de la malade avec un espa-
cement des paracentèses. Les nouvelles approches thérapeutiques utilisant des
immunomodulateurs (OK-432, Removab) semblent très prometteuses, avec
une efficacité chez plus de 60 % des patientes et des effets secondaires limités.

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Chirurgie optimale des formes avancées :
techniques chirurgicales

P. Meeus et F. Mithieux

Introduction
La chirurgie des formes avancées des cancers de l’ovaire doit permettre d’ob-
tenir un résidu tumoral minimal sans aggraver le pronostic. Cette prise en
charge chirurgicale répond donc à des exigences précises en terme d’indication
préopératoire et de réalisation per-opératoire.
Seront abordés successivement l’installation, la voie d’abord, l’intérêt des
résections digestives associées, la place et le temps du curage ganglionnaire et
l’importance d’un compte rendu opératoire type.

Généralités
Parmi les critères pronostiques de survie tels que le grade histologique, le stade
FIGO, l’envahissement ganglionnaire, un critère constant de survie est la
qualité de la chirurgie. L’objectif carcinologique doit donc être une chirurgie
d’exérèse permettant d'obtenir un résidu nul ou inférieur à 1 cm le mieux étant
0,5 cm. Cette chirurgie est (donc) consommatrice de temps et de moyens opéra-
toires. En fonction de sa chronologie au sein de l’arsenal thérapeutique, cette
chirurgie peut être initiale, intervallaire ou de deuxième look. En fonction de
sa qualité, elle est classée en sub-optimale ou en optimale. En fonction de son
extension, elle peut être diagnostique, radicale ou supra-radicale.
Le pronostic des carcinomes ovariens dépend du stade, du grade, du type
histologique et du résidu tumoral en fin d’intervention (1). Si ces notions sont
bien connues depuis les travaux de Giffiths (2, 3) et Hacker (4), elles sont
confirmées depuis par l’ensemble des données de la littérature et la méta-
analyse de Bristow et al. (5).
206 Les cancers ovariens

L’enjeu est donc le résidu tumoral en fin d’intervention. Ceci permet


de définir en postopératoire le résidu tumoral et, par là même, la qualité de
l’exérèse.
Chirurgie Optimale Sub-optimale
Résidu tumoral < à 1 cm voir 0,5 cm > 1 cm voir 0,5 cm

Si la définition de la taille du résidu varie dans la littérature entre 0,5 et


2 cm, il faut retenir le chiffre de 1 cm comme limite supérieure pour parler de
chirurgie complète. La survie des patientes est directement corrélée au volume
tumoral résiduel (6, 7) même si d’autres facteurs influencent le pronostic
comme l’âge, le grade histologique et le nombre de nodules tumoraux.

Installation et préparation
L’installation doit être standardisée. En « double abord », elle permet un accès
au périnée pour une éventuelle suture colorectale. Une préparation digestive est
indispensable devant la probabilité de résection et d’anastomose digestive
colique ou rectale. Les patientes doivent être prévenues de la possibilité d’une
stomie de décharge qui sera le plus souvent une iléostomie en fosse iliaque
droite. Cette stomie sera donc marquée la vieille de l’intervention. Il n’y a pas
d’indication de stomie digestive définitive. Une préparation digestive est
donnée la veille de la chirurgie.

Fig. 1 – Installation en double voie.


Chirurgie optimale des formes avancées : techniques chirurgicales 207

Voie d’abord
Elle s’adapte à la chirurgie. Hors les chirurgies diagnostiques initiales qui se
feront, soit pas cœlioscopie, soit par médiane sous-ombilicale, la voie d’abord
classique doit permettre un accès au pelvis en bas et aux coupoles diaphragma-
tiques en haut. Ce sera donc le plus souvent une laparotomie médiane
xyphopubienne.
L’utilisation d’un écarteur autostatique (type Book Walter) permet un
meilleur confort pour cette chirurgie très souvent longue et laborieuse.

Fig. 2 – Exposition du champ opératoire.

Bilan lésionnel
Le bilan lésionnel doit être complet et méthodique. Avant de pratiquer des
résections qui pourraient être délétères en terme de qualité de vie sans impact
sur la survie, il est impératif de connaître le degré d’extension de l’envahisse-
ment péritonéal.
Ce bilan doit être exhaustif et (doit) comporter l’exploration de tous les
quadrants de l’abdomen.
Il comprend une cytologie péritonéale (en l’absence d’ascite, un lavage péri-
tonéal), l’examen des organes pelviens (utérus, ovaires, trompes, rectum,
vessie), l’examen des structures digestives (côlon, sigmoïde, rectum, grêle,
mésentère, épiploon), l’examen des gouttières et des deux coupoles, l’examen
du foie, du pédicule hépatique et de la rate.
208 Les cancers ovariens

Les trois facteurs influant de façon constante la résécabilité sont l’envahis-


sement du mésentère et du grêle, l’envahissement du pédicule hépatique et
l’envahissement du confluent cavo-sus-hépatique.
La patiente sera donc classée en fin d’exploration en stade avancé, c’est-à-
dire, selon la classification FIGO, stade IIc, III ou IV.
Au terme de ce bilan, si la résection paraît impossible, il faut, avant d'en-
treprendre une chimiothérapie, confirmer le diagnostic par des biopsies de la
masse tumorale et établir un compte rendu opératoire complet, en insistant
notamment sur l’envahissement du pelvis et du mésentère. Le geste à pratiquer
se limitera à des biopsies péritonéales et à un prélèvement d’ascite.
L’annexectomie est inutile et ne facilitera pas le geste ultérieur (8). La dissec-
tion des éléments du pelvis doit être proscrite en l’absence de traitement
complet car elle aggrave la prise en charge ultérieure. La patiente sera opérée
secondairement lors d’une chirurgie intervallaire ou au terme de sa chimiothé-
rapie en fonction des constatations initiales et de l’évolution sous traitement
systémique. Cette chirurgie exploratrice doit permettre le diagnostic sans
retarder le traitement systémique.
Ce bilan peut être réalisé pour des équipes entraînées par laparoscopie ; il
faut alors disposer les trocarts sur la ligne médiane pour éviter les passages trans-
musculaires source de greffes tumorales (9). Il faut également prévoir la conversion,
soit immédiate, soit différée dans la semaine si la patiente est résécable.

Quelle chirurgie ?
Dans une majorité de cas, l'exérèse des lésions tumorales est envisageable, elle
doit être adaptée à l’atteinte lésionnelle et aux objectifs carcinologiques. La
chirurgie d’exérèse est classée en chirurgie standard, chirurgie radicale et chirurgie
supra-radicale (tableau I) (8). Une bonne étude des examens préopératoires est
indispensable. La lecture attentive du scanner peut d’emblée montrer des critères
de non-résécabilité et orienter vers une simple chirurgie d’exploration (20).
L’apport de l’IRM peut être utile dans les volumineuses masses pelviennes.

Tableau I – Chirurgie d’exérèse.

Chirurgie standard Chirurgie radicale Chirurgie supra-radicale


Hystérectomie totale Hystérectomie totale Hystérectomie totale
non conservatrice non conservatrice non conservatrice
Omentectomie Omentectomie Omentectomie
Appendicectomie Appendicectomie Appendicectomie
Curages pelviens et Curages pelviens et Curages pelviens et
lombo-aortiques lombo-aortiques lombo-aortiques
0 Pelvectomie postérieure « Hudson » + résections
type « Hudson » viscérales associées
Chirurgie optimale des formes avancées : techniques chirurgicales 209

Chirurgie des stades avancés


Elle comprend la chirurgie des stades IIb, IIc, III et IV (tableau II).
Tableau II – Classification FIGO.
STADE FIGO TNM EXTENSION TUMORALE
I T1 Tumeur limitée aux ovaires
IA T1A Un seul ovaire avec capsule intacte
IB T1B Deux ovaires, capsules intactes
IC T1C Rupture capsulaire ou tumeur à la surface ovarienne ou cellules
malignes dans le liquide d’ascite ou de lavage péritonéal
II T2 Tumeur ovarienne étendue au pelvis
IIA T2A Extension à l’utérus et/ou aux trompes
IIB T2B Extension aux autres organes pelviens
IIC T2C Extension pelvienne avec cellules malignes dans le liquide d’as-
cite ou le lavage péritonéal
III T3 et/ou N1 Métastases péritonéales au-delà du pelvis et/ou adénopathies
métastatiques régionales
IIIA T3A Métastases péritonéales microscopiques
IIIB T3B Métastases macroscopiques < 2 cm
IIIC T3C et/ou N1 Métastases macroscopiques > 2 cm et/ou adénopathies métasta-
tiques régionales
IV M1 Métastases à distance (autres que les métastases péritonéales)

L’envahissement pelvien est souvent majeur, soit par extension tumorale à


partir des ovaires, soit le plus souvent par une carcinose étendue au Douglas et
à la charnière rectosigmoïdienne en arrière ou au péritoine prévésical en avant.
L’exérèse monobloc permet de répondre aux critères carcinologiques de
qualité. L’abord extra-péritonéal permet l’ablation de tout le péritoine pelvien
tout en facilitant le geste opératoire. En présence d’un envahissement du
Douglas plus ou moins étendu à la face antérieure du rectum, une pelvectomie
postérieure extra-péritonéale répond aux exigences oncologiques en retirant en
monobloc le péritoïne, le rectosigmoïde, le douglas, l’utérus et les ovaires (10-
12). Si la masse pelvienne semble résécable sans sacrifice digestif on optera alors
pour une résection passant dans le plan sous-séreux permettant une « douglas-
sectomie ».
L’atteinte de l’étage sus-méso-colique justifie une chirurgie qui doit être
réalisée dans le même état d’esprit de radicalité que la chirurgie pelvienne, elle
peut comprendre une cholécystectomie, une résection du petit épiploon, une
splénectomie élargie parfois à la queue du pancréas et des résections diaphrag-
matiques.

Chirurgie pelvienne
La décision d’une résection monobloc se fait devant un comblement du
Douglas ne permettant pas une résection macroscopiquement valable. On
débute la dissection par l’amorce du décollement du cæcum et du côlon droit,
210 Les cancers ovariens

puis on effectue un repérage du lombo-ovarien droit et de l’uretère droit avec


ligature de la section du lombo-ovarien. Puis on poursuit la dissection en extra-
péritonéal jusqu’au ligament rond qui est sectionné entre deux ligatures. La
même manœuvre et réalisée à gauche en décollant la boucle sigmoïdienne.
On a alors une bonne exposition des axes iliaques externes et internes. Les
uretères ne sont pas disséqués et laissés au contact du péritoine pelvien. (Respect
de la vascularisation de l’uretère.)
Les curages ganglionnaires comportent les chaînes iliaques externes et le
contingent sous-veineux jusqu'à la face profonde de l’orifice crural. L’artère
iliaque interne est disséquée, permettant la ligature de l’artère utérine à son
origine avant qu’elle ne croise l’uretère.
Le temps digestif porte alors sur le décollement colo-pariétal, le contrôle du
tronc des sigmoïdiennes ou de l’artère mésentérique inférieure. Le méso-côlon
est contrôlé par des ligatures au fil résorbable 00, le sigmoïde sectionné par une
application de pince automatique. On peut alors amorcer la dissection posté-
rieure comme pour une résection antérieure du rectum en dedans du plan des
nerfs hypogastriques qui doivent être respectés.
On décolle ensuite le péritoine vésical antérieur ou on le résèque en fonc-
tion de l’atteinte péritonéale et ceci jusqu’au cul-de-sac vésico-utérin.
Ces manœuvres étant effectuées, on obtient alors une mobilité des filières
génitales et digestives qui autorise une résection dans la quasi-totalité des cas.
Après une désinfection vaginale, une colpotomie antérieure est pratiquée et
prolongée en postérieur en passant sous le niveau du Douglas ; la pièce de
pelvectomie postérieure n’est alors retenue que par le rectum et le mésorectum.
Après coagulation du mésorectum, un agrafage mécanique du rectum permet
l’exérèse du bloc pelvien.
Le rétablissement de la continuité digestive sera pratiqué après libération de
l’angle colique gauche en fin d’intervention. L’omentectomie totale sera prati-
quée au ras de l’arcade gastro-épiploïque, parfois au contact de l’estomac
sacrifiant l’arcade gastro-épiploïque. On peut par ailleurs à ce stade réaliser
l’exérèse de l’épiploon gastro-splénique, avec prudence, car une décapsulation
splénique conduit le plus souvent à une splénectomie.
Le curage lombo-aortique peut alors être réalisé (voir chapitre spécifique) et
le rétablissement de la continuité digestive peut s’effectuer.
L’anastomose colorectale doit se faire sans tension pour une meilleure sécu-
rité. Pour ce faire, il est le plus souvent nécessaire de lier l’artère mésentérique
inférieure proche de son origine sur l’aorte, ainsi que la veine mésentérique
inférieure à sa terminaison au bord inférieur du pancréas. L’analyse des adéno-
pathies du mésorectum peut mettre en évidence des adénopathies positives
témoignant de l’atteinte colorectale par contiguïté (13).
Après préparation du côlon gauche, on réalise le plus souvent une anasto-
mose colorectale trans-suturaire type Knight non protégée. Un test au bleu et
un test à l’air sont systématiquement réalisés pour s’assurer de l’absence de
fuite ; au moindre doute une iléostomie de protection doit être confectionnée.
Chirurgie optimale des formes avancées : techniques chirurgicales 211

Le rétablissement de la continuité digestive est effectué dans un délai de 6 à


8 semaines après contrôle radiologique de l’anastomose.

Fig. 3 – Aspect du pelvis après pelvectomie


postérieure de type Hudson.

Fig. 4 – Pièce opératoire : pelvectomie postérieure.


212 Les cancers ovariens

Péritonectomie pelvienne
Elle débute à la partie basse de la médiane en séparant le péritoine de la vessie
et met donc à nu la musculeuse vésicale ; l'instillation de bleu de méthylène
dans la vessie est utile pour repérer une perforation accidentelle. Lors de la
dissection latérale et basse, il faut préserver les uretères à leur abouchement
dans la vessie ; Cette péritonectomie peut être réalisée en continuité avec la
pelvectomie postérieure précédemment décrite.

Les curages ganglionnaires


Les curages pelviens
L’uretère doit être repéré et parfois mis sur lacs, mais il faut éviter une dissec-
tion fine pour ne pas le léser ou le dévasculariser. L’artère et la veine iliaque sont
repérés et disséquées dans leurs gaines vasculaires. Cette dissection permet en
toute sécurité l’exérèse des chaînes iliaques externes et moyennes d’avant en
arrière jusqu'à la bifurcation avec l’iliaque primitive.
Les limites du curage sous-veineux (chaîne iliaque interne) sont en bas le
nerf obturateur, en haut la veine iliaque externe, en dedans la veine iliaque
interne et en dehors l’anneau crural.

Le curage lombo-aortique
C’est un geste à part entière. Il n’est justifié que si l’exérèse a été complète et
que la masse résiduelle est nulle. À l’origine d’une morbidité supplémentaire,
certaines équipes pratiquent ce curage lombo-aortique lors d’un deuxième
look.

En pratique

On prolonge le décollement du côlon droit vers l’angle en réclinant le bloc


duodéno-pancréatique en monobloc. Cette libération qui suit le fascia de Told
droit permet de visualiser la veine cave inférieure jusqu’aux veines rénales droite
et gauche. En médian, on prolonge le décollement de la racine du mésentère
jusqu'à l’angle de Treitz. L’ensemble des anses digestives grêle et côlon droit est
extériorisé et maintenu par un écarteur auto-statique de type bras de Martin.
Les anses digestives sont au sein de compresses humides et régulièrement
surveillées. Cette manœuvre permet un accès aisé à l’axe aortico-cave infra-
rénal.
Chirurgie optimale des formes avancées : techniques chirurgicales 213

Le curage lombo-aortique doit comporter l’ablation des contingents latéro-


cave, pré cave, inter-aortico-cave, rétro-cave, rétro-aortique et latéro-aortique.
Les vaisseaux lombo-ovariens sont liés à leur terminaison au ras de la veine cave
inférieure à droite et au ras de la veine rénale gauche à gauche.

Le pédicule lombo-ovarien droit est repéré au niveau de sa section réalisée


au moment du temps pelvien, il est séparé de l’uretère qui est refoulé en dehors.
On lie alors le lombo-ovarien sur la veine cave inférieure. Le bord droit de la
veine est donc préparé pour le curage qu’on réalise de bas en haut après avoir
incisé la gaine vasculaire. Il va en arrière jusqu’au psoas en prenant soin de
préserver le nerf sympathique et en clippant systématiquement tous les
éléments lymphatiques et vasculaires. Puis on réalise l’exérèse du contingent
pré-cave qui conduit à la veine rénale gauche dont on repère facilement l’ori-
gine.
Est alors réalisé le curage inter-aortico-cave dont la limite postérieure est
matérialisée par le ligament commun vertébral antérieur. Il faut souvent réaliser
l’hémostase minutieuse de plusieurs vaisseaux lombaires par des clips.

Le curage pré-aortique nécessite le plus souvent la ligature de l’artère


mésentérique inférieure ; on réalise ensuite le curage latéro-aortique dont la
limite externe est le plan de l’uretère. Le ligament lombo-ovarien gauche est lié
sous la veine rénale gauche, sa résection complète nécessite le décroisement
avec le méso-côlon gauche.
L’intervention se termine par le replacement de la masse viscérale et le drai-
nage par deux à quatre drains de Redon.

Veine rénale gauche

Artère rénale droite

Ligt pré vertébral

Uretère

Fig. 5.
214 Les cancers ovariens

La chirurgie sus-mésocolique (14, 15)

Les résections péritonéales

L’atteinte péritonéale fréquente dans les formes avancées impose une résection
pour obtenir une résection optimale. Cette exérèse doit être réalisée quadrant
par quadrant.

Péritonectomie de l’hypochondre gauche

Elle correspond en fait à un véritable stripping du péritoine. On débute ce


stripping au niveau de la portion du péritoine qui constitue le bord de l’inci-
sion de la laparotomie. Des pinces type Kelly sont placées sur la lèvre
péritonéale en traction. La dissection peut être menée au bistouri en fulgura-
tion ou au tampon monté en prenant soin de ne pas perforer le diaphragme, le
pneumothorax créé gênerait la suite de la procédure. Cette résection périto-
néale va exposer le fascia de Gérota et la surrénale en bas. Elle est grandement
facilitée par une splénectomie préalable. Il faut coaguler les nombreux vais-
seaux qui se tendent entre le péritoine et les fibres du muscle pour éviter des
pertes sanguines.

Péritonectomie de l’hypochondre droit

La coupole droite est quasiment toujours atteinte par la carcinose en raison du


flux péritonéal.
Comme à gauche, elle débute par la résection du péritoine sur les berges de
la laparotomie. Des pinces de Kelly sont placées sur le péritoine. La dissection
est menée de haut en bas.
Deux zones justifient une attention particulière : la dissection au contact de
la veine sus-hépatique droite, et la libération du foie après avoir incisé le trian-
gulaire droit. Une bonne résection doit conduire à la veine cave
rétro-hépatique. Il faut pour cela mobiliser le foie sur la gauche. On rejoint
alors la face antérieure du rein.
Les résections péritonéales des coupoles sont des gestes qui nécessitent
environ trente à quarante cinq minutes. Une brèche diaphragmatique n’est pas
rare, nous la traitons le plus souvent par la mise en place d’un drain pleural en
per-opératoire qui est retiré deux à trois jours après ou par une exsufflation
immédiate avec fermeture de la brèche diaphragmatique par un simple surjet
ou une bourse au fil résorbable.
Chirurgie optimale des formes avancées : techniques chirurgicales 215

La splénectomie (14, 16)


Elle rentre dans le cadre de la chirurgie optimale. Il peut s’agir de splénectomie
pour métastase intra-parenchymateuse ou pour atteinte de la capsule. L’atteinte
du hile peut parfois conduire à une splénectomie sans atteinte de la rate elle-
même.
Nous réalisons la splénectomie par contrôle premier de l’artère splénique au
bord supérieur du pancréas après ouverture de l’arrière cavité des épiploons. Les
vaisseaux courts sont clippés puis la veine est liée. Si le hile n’est pas accessible il
faut réaliser une pancréatectomie caudale. La tranche pancréatique est traitée
par des points en U de fil résorbable 000, elle n’est jamais agrafée à la pince
mécanique. Le drainage est assuré par une lame ou deux drains de Redon.
Enfin, signalons quelques splénectomies d’hémostase dues le plus souvent à
des décapsulations lors de l’omentectomie ou de la péritonectomie de la
coupole gauche.
Chaque fois que la splénectomie est planifiée, nous réalisons en préopéra-
toire une vaccination anti-pneumococique.

Les résections digestives associées (9, 11, 17)


L’atteinte du cæcum et du côlon droit est fréquente dans les carcinoses éten-
dues. La résection colique droite se fera à la demande, soit iléocaecectomie, soit
iléocolectomie droite vraie. Elle peut être associée sans problème à une résec-
tion antérieure du rectum. Le rétablissement de la continuité digestive est
réalisé le plus souvent de façon manuelle par anastomose latéro-latérale au fil
résorbable 0000. Les résections coliques doivent être réalisées si possible de la
même façon que pour une tumeur primitive colique, c'est-à-dire en pratiquant
un curage ganglionnaire standard.
La colectomie totale n’est quasiment jamais réalisée dans notre expérience,
elle oblige à une anastomose iléo-rectale voire iléo-sus-anale. Le pronostic sévère
et l’inconfort fonctionnel n’imposent pas des gestes aussi extensifs, d’autant que
l’envahissement du grêle est très souvent associé dans ces tableaux diffus.

Les gestes urologiques (18-20)


Il s’agit, soit d’une suture de plaie vésicale, soit d’une réparation d’une plaie
d’uretère reconnue en per-opératoire, ou d’une complication à distance du
geste. Si le problème est reconnu en per-opératoire, le recours à un confrère
urologue est nécessaire pour effectuer une réparation immédiate (suture, réim-
plantation…). Nous utilisons, lorsque la situation paraît d’emblée difficile, la
mise en place prophylactique de sondes JJ qui facilitent la dissection rétro-péri-
tonéale et pelvienne.
216 Les cancers ovariens

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Chirurgie optimale des stades avancés :
aspects oncologiques
P.-E. Colombo et P. Rouanet

Introduction
La chirurgie des formes évoluées des cancers de l’ovaire (stades III et IV) est
une chirurgie régionale qui touche les trois étages de l’abdomen : l’étage sus-
mésocolique avec les coupoles diaphragmatiques, l’étage sous-mésocolique et le
pelvis. Cette chirurgie régionale se caractérise par sa lourdeur d’exérèse et sa
complexité technique qui nécessitent un chirurgien motivé et compétent pour
la réaliser.
La chirurgie seule n’a pas de prétention curative chez les patientes présen-
tant une maladie avancée, elle reste indissociable des traitements systémiques
définissant le concept de chirurgie de réduction tumorale ou « chirurgie de
debulking ».
Le triptyque pronostique des cancers de l’ovaire associe au stade tumoral,
l’agressivité biologique de la tumeur et le volume de la maladie résiduelle après
chirurgie initiale. Seul ce dernier paramètre peut être modifiable par la prise en
charge thérapeutique. La chimiosensibilité de ces tumeurs n’a pu gommer ce
facteur pronostique prédominant qui est la maladie résiduelle avant chimio-
thérapie. Le volume tumoral laissé après la chirurgie dépend du volume
tumoral initial, de l’état général de la patiente, c'est-à-dire de ses capacités à
supporter une exérèse lourde, mais également de la pugnacité et des capacités
techniques du chirurgien à l’enlever. Si les deux premières notions sont quan-
tifiables, la troisième est rarement objectivée dans les publications.
Nous allons essayer de répondre aux questions soulevées par cette chirurgie :
– Existe-t-il un rationnel pour réduire le volume tumoral avant chimiothérapie ?
– Quel est l’impact pronostique de la maladie résiduelle après chirurgie de
debulking initiale ?
– Après chimiothérapie d’induction, quelles sont les lésions tumorales à résé-
quer ?
– La chirurgie de debulking d’intervalle et de second look ont-elles une valeur
curative ?
218 Les cancers ovariens

– Existe-t-il des stratégies chirurgicales nouvelles qui permettraient d’améliorer


les résultats des stades avancés ?

Bases physiopathologiques et cliniques


de la chirurgie de réduction tumorale des cancers
ovariens
Dès 1934, Meigs a été le premier à observer que l’exérèse des grosses masses
tumorales chez les patientes présentant une carcinose ovarienne à un stade
avancé améliorait l’efficacité de la radiothérapie postopératoire (1). Le concept
de chirurgie de debulking et de maladie résiduelle a été étudié de nombreuses
années plus tard à partir des travaux de Griffiths. Celui-ci démontra dans les
années 70 que la réduction chirurgicale des nodules tumoraux à moins de
1,5 cm suivie de chimiothérapie permettait d’obtenir une amélioration de la
survie (2-4). Depuis, de nombreuses études ont confirmé l’importance de la

Tableau I – Chirurgie de debulking initiale (séries < 1992) : relation entre maladie résiduelle
et pronostic.

Chirurgie optimale Maladie résiduelle Survie


Auteur n définition % Taille n (%) MS TS5
Année (cm) (mois)
Hacker 47 < 1,5 cm 66 % 0 45 (10 %) 40 NC
1983 0 - 1,5 78 (17 %) 18 NC
> 1,5 332 (73 %) 6 NC
Pohl 94 < 2 cm 39 % 0-2 37 (39 %) 45 NC
1984 >2 57 (61 %) 16 NC
Delgado 75 < 2 cm 28 % 0 13 (17 %) 45 NC
1984 0-2 8 (11 %) NC
>2 54 (72 %) 16 NC
Conte 75 < 2 cm 49 % 0-2 37 (49 %) > 40 NC
1986 >2 38 (51 %) 16 NC
Neijt 191 ≤ 1 cm 32 % 0-1 62 (32 %) 40 NC
1987 < 2 cm 51 % >2 129 (68 %) 21 NC
Seifer 79 < 2 cm 44 % 0-2 35 (44 %) 30 NC
1988 >2 44 (56 %) 12 NC
Piver 40 < 2 cm 87 % 0-2 35 (87 %) 48 NC
1988 >2 5 (13 %) 21 NC
Sutton 56 < 2 cm 36 % 0-2 20 (36 %) 44,5 NC
1989 >2 36 (64 %) 16,4 NC
Bertelsen 360 ≤ 1 cm 24 % 0-1 24 % NC 46 %
1990 >1 76 % NC 14 %

(MR : maladie résiduelle ; MS : médiane de survie (mois), TS5 : taux de survie à cinq ans.)
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 219

chirurgie initiale dans le traitement des carcinoses ovariennes (5-12). Le


volume du reliquat tumoral ou maladie résiduelle après chirurgie est reconnu
dans toutes ces études comme un facteur pronostique primordial. Il existe dans
ces séries une relation inverse entre le volume de tumeur résiduelle et le
pronostic. Les taux de survie sans récidive et de survie globale sont significati-
vement diminués chez les patientes laissées avec de larges résidus tumoraux à la
fin de la chirurgie initiale (13-18). Ces différentes études sont résumées dans
les tableaux I et II.
La cytoréduction chirurgicale initiale a de nombreuses bases théoriques et
physiopathologiques. Tout d’abord, l’exérèse des masses tumorales plus ou
moins compressives améliore l’état général et immunitaire des patientes, elle
permet la disparition de l’ascite, des troubles digestifs et une diminution des
douleurs pelviennes. Elle rend possible l’administration aux doses optimales
des protocoles de chimiothérapie. L’exérèse des grosses masses nécrosées
souvent mal vascularisées permet d’éradiquer des clones tumoraux résistants et
d’augmenter la dose de chimiothérapie délivrée aux cellules tumorales. Le
pourcentage de cellules cancéreuses en phase de division dans les lésions rési-
duelles est augmenté, améliorant leur sensibilité aux différentes drogues
cytotoxiques. Enfin, il a été démontré que les plus petites masses tumorales

Tableau II – Chirurgie de debulking initiale (séries récentes). Relation entre pronostic et MR.
Variation du pourcentage de chirurgie optimale.
Chirurgie Survie
optimale
Auteur n pop définition % MR n (%) MS TS4 TS5
MR (cm) (mois)
Del Campo, 91 III - IV < 2 cm 28 % 0-2 25 (27,5 %) 47 NC NC
1994 >2 66 (71,5 %) 22 NC NC
Hoskins, 637 III - IV ≤ 1 cm 54 % 0 97 NC 60 % NC
1994 0-1 246 NC 35 % NC
1 - 2. 31 NC 35 % NC
>2 263 NC < 20 % NC
Mackar, 455 IIIA-IIIC < 2 cm 27 % 0 45 (10 %) NC NC 42 %
1995 >0-2 78 (17 %) NC NC 35 %
>2 332 (73 %) NC NC 10 %
Eisenkop, 163 III - IV < 1 cm 98,80 % 0 139 (85 %) 62 NC 52 %
1998 (17 % de IV) ≠0 24 (15 %) 20 NC 29 %
Scarabelli, 66 IIIC - IV < 2 cm 0 36,40 % NC NC 42 %
2000 (11 % de IV) >0-1 63,60 % NC NC 21 %
>1 - 2 NC NC 0%
Chi, 216 IIIA - IV < 1 cm 26 % 0-1 56 (26 %) 56 NC 50 %
2001 (23 % de IV) 1 - 2. 73 (34 %) 31 NC 28 %
>2 87 (40 %) 28 NC 21 %
Tingulstad, 571 I - IV < 1 cm 58 % 0-1 331 (58 %) NC NC 58 %
2003 (13 % de IV) >1 240 (42 %) NC NC 30 %

(MR : maladie résiduelle ; pop : population étudiée)


220 Les cancers ovariens

nécessitent moins de cycles de chimiothérapie pour être éradiquées. Ces bases


théoriques ont été énoncées à partir des travaux de Goldie et Coldmann (19).
Ces auteurs ont défini un modèle mathématique selon lequel la curabilité
d’une tumeur (absence de clone cellulaire résistant) diminue brusquement
lorsque sa taille atteint une valeur critique déterminée par son taux de muta-
tion intrinsèque spontané. L’implication clinique étant que, lorsque le volume
du reliquat tumoral est réduit, la probabilité d’éradiquer la lésion après chimio-
thérapie augmente. La chirurgie de réduction tumorale améliore donc la
chimiosensibilité de la maladie résiduelle (MR) et doit donc précéder la
chimiothérapie systémique pour obtenir une rémission définitive ou au moins
prolongée.

Résultats cliniques et faisabilité


de la chirurgie de debulking initiale
La chirurgie de debulking initiale va s'efforcer d'enlever toute la maladie tumo-
rale macroscopique. L’évaluation de l’ampleur de la chirurgie à réaliser est
fondamentale. Le chirurgien doit tenir compte de la capacité de la patiente à
supporter un geste lourd, il doit essayer de prédire la morbidité de son geste.
Les facteurs limitants d’une résection tumorale complète se résument à la diffu-
sion de la maladie sur le mésentère et à l’infiltration de la carcinose au niveau
de la veine sus-hépatique droite. Toutes les autres localisations sont théorique-
ment accessibles à une résection carcinologique complète et non mutilante. La
limite fonctionnelle de cette chirurgie est la colectomie totale qui, à notre sens,
ne s’impose que si la maladie résiduelle est vraiment nulle au terme de l’exé-
rèse.
La taille de la maladie résiduelle définit la chirurgie optimale lorsqu’elle est
inférieure à 1 cm et la chirurgie complète lorsque elle est microscopique
(maladie résiduelle macroscopique nulle).
Les patientes ayant bénéficié d’une chirurgie complète ont des survies
prolongées avec des taux de survie à cinq ans estimés aux environs de 50 % et
des médianes de survie supérieures à cinquante mois (20-23). Une cytoréduc-
tion optimale est associée à des pourcentages de réponse complète et de second
look négatif plus élevés après traitement initial et à une amélioration des taux
de survie. À l’opposé, lorsque la chirurgie a été suboptimale avec une maladie
résiduelle supérieure à 2 cm, le pronostic à court terme est mauvais, compa-
rable à celui d’une simple laparotomie exploratrice sans debulking la chirurgie
suboptimale apparaît inutile et délétère.
En l’absence d’essai randomisé, deux grandes méta-analyses résument les
essais cliniques.
Allen et al. ont compilé 16 études rétrospectives regroupant 2 659 patientes
prises en charge pour une néoplasie ovarienne de stades III et IV (24). Les
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 221

patientes ayant une maladie résiduelle après chirurgie ≤ à 2 cm ont un meilleur


taux de survie à deux et cinq ans par rapport aux patientes laissées avec une
maladie résiduelle > 2 cm. Le bénéfice de survie est meilleur pour les patientes
ayant eu une chirurgie complète (maladie résiduelle nulle). Ces données sont
retrouvées au stade III mais aussi au stade IV, confirmant l’intérêt d’un effort
chirurgical maximal lors de la prise en charge initiale des stades avancés.
La méta-analyse de Bristow réunit 53 cohortes rétrospectives et prospectives
publiées entre 1989 et 1998, compilant les données de 6 885 patientes traitées
pour une néoplasie ovarienne évoluée et recevant une chimiothérapie postopé-
ratoire à base de platine (25). Le résultat montre une corrélation étroite entre
le pourcentage de réduction tumorale maximale dans les différentes séries
(dont la définition varie entre maladie résiduelle < 1 cm et maladie résiduelle
< 2 cm) et les scores de survie des patientes, même après contrôle des autres
facteurs pronostiques. Une augmentation de 10 % du taux de chirurgie opti-
male est associée à une augmentation de la survie globale de 5,5 %. Les séries
publiant un taux de chirurgie maximale inférieur à 25 % ont une médiane de
survie de 22,7 mois. À l’opposé, lorsque ce taux est supérieur à 75 %, la
médiane de survie atteint 33,9 mois, réalisant une augmentation de 50 %. Le
résultat de la chirurgie initiale est jugé comme facteur prédictif le plus impor-
tant de l’évolution. Ce facteur est indépendant des doses de platine
administrées. Les autres facteurs pronostiques significatifs retenus dans cette
méta-analyse sont l’âge moyen, l’année de publication et le pourcentage de
stade IV dans les différentes études.
Dans la même optique, Makar et al. ont analysé les facteurs pronostiques de
455 cancers ovariens de stade III (15). Le facteur pronostique principal était la
taille de la maladie résiduelle supérieure ou inférieure à 2 cm. Les autres
facteurs de mauvais pronostic retenus comme significatifs étaient l’âge avancé,
le type histologique (tumeurs mucineuses et à cellules claires), le stade FIGO
(stades IIIB et IIIC) et la présence d’une ascite importante. Les auteurs souli-
gnaient la nécessité d’un bon état général dans les suites de cette chirurgie pour
débuter rapidement la chimiothérapie systémique.
Les travaux d’Eisenkop confirment l’intérêt de la chirurgie de debulking
initiale, soulignant l’importance d’une chirurgie complète par rapport à une
chirurgie optimale ou sub-optimale (20, 22). Dans une étude publiée en 1998,
les paramètres de 166 patientes atteintes d’une maladie avancée de stade III ou
IV ont été analysés. Une maladie résiduelle nulle a pu être obtenue dans 85,3 %
des cas, ce qui est largement supérieur aux taux habituels rapportés dans la
littérature, avec une morbidité et une mortalité opératoires équivalentes
(mortalité de 1,8 %, morbidité globale de 41,8 %, durée d’hospitalisation
moyenne de douze jours). Cette chirurgie complète permet d’obtenir une
médiane de survie globale de cinquante-quatre mois et un taux de survie à cinq
ans de 48 % pour l’ensemble de la cohorte. En analyse multi-variée, les facteurs
pronostiques retenus significatifs en termes de survie sont le caractère complet
ou non de la chirurgie, le stade tumoral (stade III versus stade IV), le volume
222 Les cancers ovariens

de l’ascite et l’âge. Le tableau III illustre l’importance de la chirurgie complète


dans le traitement des cancers ovariens.

Tableau III – Chirurgie de debulking initiale (séries récentes) : importance pronostique d’une
chirurgie complète par rapport à une chirurgie optimale ou suboptimale.

Chirurgie optimale Survie


Auteur n pop Définition % MR n (%) MS TS5
année MR (cm) (mois)
Alberts, 546 III et IV < 2 cm ALL 0 139 76 60 %
1996 > 0 - 0,5 254 42 32 %
>0,5 - 2 153 32 22 %
Brun, 287 II à IIIC 0 cm 42 % 0 121 (42 %) 93 61 %
2000 ≠0 166 (48 %) 11 10 %
Eisenkop, 163 III à IV < 1 cm 98,80 % 0 139 (85 %) 62 52 %
1998 17 % de IV ≠0 24 (15 %) 20 29 %
Scarabelli, 66 IIIC et IV < 2 cm ALL 0 36,40 % NC 42,2 %
2000 11 % de IV >0-1 63,60 % NC 21,3 %
>1 - 2 NC 0%
Eisenkop, 408 IIIC < 1 cm 96 % 0 351 76,2 52 %
2003 >0-1 41 32,2 30 %
>1 16 18,6 0%

(MR : maladie résiduelle ; ALL : tous les patients de la série avaient une MR optimale.)

Particularité des stades IV


De pronostic péjoratif, les stades métastatiques ou de stade IV ont des taux de
survie à cinq ans souvent inférieurs à 10 %. Ils sont associés à des taux de non-
résécabilité plus élevés par rapport aux stades III et sont classiquement devenus
des indications de chimiothérapie néo-adjuvante, voire exclusive. Même après
chirurgie abdominale optimale, la survie des patientes présentant une cytologie
pleurale positive est nettement inférieure à celle des patientes présentant un
stade IIIc (cinquante mois versus trente mois) (26). Cependant, le rôle positif
du debulking initial au stade métastatique a été retrouvé dans plusieurs études
rétrospectives représentées dans le tableau IV (27-30). Les scores de survie des
stades IV ayant pu être opérés de manière optimale sont nettement supérieurs
proches des stades III, même en cas de métastase extrapleurale et parenchyma-
teuse. Ainsi, dans l’étude de Bristow, lorsque la maladie résiduelle péritonéale
et hépatique est optimale (< 2 cm) après chirurgie, la médiane de survie est de
cinquante mois, elle diminue à vingt-sept mois en cas de maladie résiduelle
péritonéale optimale et de maladie résiduelle hépatique non optimale et chute
à 7,6 mois lorsque les deux maladies résiduelles sont non optimales (29). Une
résection hépatique peut devenir utile dans la chirurgie des cancers ovariens si
elle permet d’obtenir une chirurgie complète.
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 223

Tableau IV – Chirurgie de debulking et stades IV.

Stade IV Chirurgie Survie Morbidité


optimale
Auteur n méta MH définition % MR N (%) MS p DC morb. transf.
année ≠ (cm) (mois) Maj.
plèvre
Bristow 84 38 % 44 % ≤ 1 cm 30 % ≤ 1 25 (30 %) 38,4 0,0004 6 % 32 % 69 %
1999 > 1 59 (70 %) 10,3
Munkarah 100 38 % 16 % ≤ 2 cm 34 % ≤ 2 31 (34 %) 25 0,02 1 % 15 % 52 %
1996 > 2 61 (66 %) 15
Liu 47 45 % 17 % ≤ 2 cm 30 % ≤ 2 14 (30 %) 37 0,0295 2,1 % 8,5 % 6 %
1996 > 2 33 (70 %) 17
Curtin 92 58 % 32 % ≤ 2 cm 45 % ≤ 2 41 (45 %) 40 0,0136 NC NC NC
1997 > 2 51 (55 %) 18

(MR : maladie résiduelle ; MS : médiane de survie ; Méta ≠ plèvre : pourcentage de stade IV


avec présence de métastases extrapleurales ou viscérales ; MH : pourcentage de stades IV avec
métastases hépatiques ; DC : mortalité ; morb. Maj. : Morbidité majeure ; transf. : nécessité de
transfusion).

Faisabilité de la chirurgie de debulking.


Importance du chirurgien dans la prise en charge
Le pourcentage de chirurgie optimale est extrêmement variable, s’étalant de 8
à 98 % en fonction des centres et des séries publiées. Ils dépendent de la forma-
tion, de l’expérience et de la motivation du chirurgien (31, 32). Généralement
inférieur à 50 % voire 25 % dans les centres de chirurgie gynécologique ou
générale non spécialisés, des taux de cytoréduction optimale supérieurs à 75 %,
voire à 90 % sont couramment atteints dans les centres experts avec une morbi-
dité inférieure. La spécialité et l’expérience du chirurgien sont couramment
perçues comme facteur pronostique significatif. Dans l’étude d’Eisenkop, le
taux de chirurgie optimale variait de 29 à 81 % lorsqu’un chirurgien oncologue
était présent lors de la laparotomie initiale, permettant un gain de survie de
dix-huit mois (32). Par ailleurs, certaines patientes incomplètement opérées
peuvent bénéficier d’une seconde laparotomie par un chirurgien spécialisé, une
cyto-réduction optimale pouvant être obtenue dans plus de 70 % des cas jugés
initialement non résécables.
La prise en charge optimale des cancers ovariens est également primor-
diale aux stades débutants pour que l’exploration abdominale soit complète,
afin de pas sous-estimer le stade des patientes devant bénéficier d’un traite-
ment adjuvant.
224 Les cancers ovariens

Critiques et remise en question de la valeur


de la chirurgie de debulking initiale
L’importance de la biologie tumorale
Même si l’importance de la chirurgie de réduction tumorale semble admise par
la plupart des auteurs, l’absence de conclusion claire provenant d’essais rando-
misés permet, pour certains, de discuter les bénéfices d’une chirurgie initiale
agressive (33). En outre, le rôle exact de la chirurgie dans l’amélioration des
taux de survie est difficile à évaluer à partir de séries de patientes souvent hété-
rogènes recevant des protocoles de chimiothérapie adjuvante différents en
fonction des périodes et des centres.
Certains privilégient la notion de biologie tumorale intrinsèque pour expli-
quer l’évolution des patientes atteintes d’une carcinose ovarienne (14, 34, 35).
Pour ces auteurs, les malades ayant pu bénéficier d’une chirurgie optimale,
voire complète, ont plus souvent une extension abdominale initiale peu impor-
tante lors de la première laparotomie. Des pourcentages significatifs de stade
IIIA et IIIB (métastases abdominales microscopiques ou inférieures à 2 cm)
sont nombreux dans les séries de patientes retenues comme opérées de manière
optimale. La faisabilité du debulking aux stades évolués et le faible volume de
maladie résiduelle obtenu chez certaines patientes seraient rendus possibles par
un profil biologique tumoral moins agressif. Ces propriétés propres à la tumeur
expliquent le meilleur pronostic de ces patientes, indépendamment du geste
chirurgical et de la compétence du chirurgien (33, 34).
Dans une seconde analyse du protocole 52 du GOG (Gynecologic Oncologic
Group), Hotskin et al. ont étudié de manière rétrospective le pronostic de
349 patientes ayant une maladie résiduelle inférieure à 1 cm et recevant une
chimiothérapie à base de cisplatine et de cyclophos-phamide avec ou sans
doxorubicine (34). Les patientes atteintes d’une maladie extra-pelvienne
évoluée avec notamment plus de 20 implants péritonéaux et nécessitant une
chirurgie lourde pour obtenir une maladie résiduelle < 1 cm, avaient un
pronostic plus mauvais par rapport aux patientes présentant une maladie
initiale de faible volume. Les auteurs concluent que l’étude n’a pas pu prouver
l’hypothèse selon laquelle la chirurgie initiale permettait aux patientes présen-
tant une maladie de fort volume initial d’évoluer de façon comparable aux
patientes présentant une maladie de faible volume. Le rôle de la chirurgie appa-
raissant alors secondaire par rapport aux autres facteurs pronostiques.

La morbidité spécifique
La chirurgie initiale maximale est jugée par certains auteurs trop agressive, à
l’origine d’une morbidité élevée et d’un retard à la réalisation de la chimiothé-
rapie systémique. Morice et al. ont apparié 34 patientes ayant bénéficié d’une
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 225

chirurgie de debulking d’intervalle après deux à six cures de chimiothérapie à


une série comparable de patientes traitées par cytoréduction initiale (36). Les
auteurs ont retrouvé une survie équivalente dans les deux procédures, mais une
morbidité inférieure et une qualité de vie fortement améliorée dans le groupe
chirurgie d’intervalle. La chirurgie maximale initiale est alors remise en ques-
tion chez les patientes présentant un stade avancé au profit d’une chirurgie
secondaire moins délétère. Cependant, les chiffres de morbidité supérieurs à
50 % retrouvés dans le groupe chirurgie première avec notamment 21 % de
reprise chirurgicale et 24 % de colostomie définitive nous paraissent particuliè-
rement élevés, comparés à notre expérience et aux données de la littérature.

Les problèmes de définition de la maladie résiduelle


Malgré sa valeur pronostique primordiale, la définition de maladie résiduelle
reste imprécise et variable en fonction des équipes et des chirurgiens. Il n’existe
pas de technique standardisée ni d’outil de mesure calibré pour mesurer la
maladie résiduelle. Certains illustrent le résultat du debulking initial par le
volume total subsistant, reflet du nombre total de cellules tumorales rési-
duelles, d’autres par le diamètre de la lésion péritonéale résiduelle de taille la
plus grande (33). Le pronostic des patientes présentant en fin de chirurgie une
carcinose péritonéale microscopique diffuse étendue à tout l’abdomen n’est pas
le même que celui de patientes laissées avec seulement une ou deux lésions
centimétriques.
La définition de chirurgie optimale et suboptimale est également variable
en fonction des publications variant d’une maladie résiduelle inférieure à 2 cm
à une maladie résiduelle inférieure à 5 mm. Elle est souvent mal précisée dans
les comptes rendus opératoires. Ces variations dans l’évaluation sont également
retrouvées chez le même opérateur ; ceci explique que 20 à 25 % des patientes
opérées d’une carcinose ovarienne seraient classées de manière erronée à partir
de la valeur de la maladie résiduelle.
Actuellement, le consensus s’établit pour associer un bon pronostic à l’ab-
sence de maladie résiduelle macroscopique, définissant le caractère complet de
la chirurgie.

Les arguments pour la chirurgie de debulking initiale


Ici aussi, l’absence de résultats d’essai prospectif randomisé comparant
chirurgie de réduction tumorale suivie de chimiothérapie et chimiothérapie
d’induction puis chirurgie ne nous permet pas de conclure si l’amélioration du
pronostic des patientes présentant une maladie résiduelle faible est due à la
biologie tumorale ou à la cytoréduction chirurgicale.
226 Les cancers ovariens

Certains tentent de répondre à cette question en prenant en compte le


volume et l’agressivité initiale de la maladie. Plusieurs séries ont ainsi étudié le
pronostic des patientes présentant après chirurgie une maladie résiduelle équi-
valente, mais avec une extension initiale différente de la maladie. Spirtos et al.
démontrent, par exemple, que l’exérèse de ganglions rétro-péritonéaux massi-
vement atteints pour obtenir une chirurgie optimale permet d’obtenir la même
évolution que les patientes n’ayant pas d’envahissement lymphatique macro-
scopique (37). Le et al. ont divisé en trois groupes, 512 patientes atteintes
d’une carcinose ovarienne de stade III (38). Le groupe 1 était constitué de
patientes ayant une maladie extra-pelvienne microscopique classée de stade III
sur le résultat de biopsie systématique. Le deuxième groupe réunissait des
patientes présentant un stade IIIC (métastases abdominales > 2 cm) ayant
bénéficié d’une chirurgie complète (maladie résiduelle microscopique). Le
groupe 3 était constitué des patientes ayant une chirurgie non optimale
(maladie résiduelle > 2 cm). Les taux de survie et les médianes de survie du
groupe 1 et 2 était équivalents, nettement supérieurs à ceux du groupe 3.
L’auteur concluait sur l’intérêt de la chirurgie de réduction tumorale, même
aux stades avancés de la maladie. La notion de chirurgie complète, avec maladie
résiduelle macroscopique nulle, semble particulièrement importante par
rapport à la notion de chirurgie optimale puisque les patientes ayant une
maladie résiduelle macroscopique ont la même évolution péjorative que le
résidu tumoral soit supérieur ou inférieur à 2 cm.
Eisenkop et al. ont évalué l’impact du volume initial de la maladie et des
gestes chirurgicaux agressifs nécessaires pour obtenir une maladie résiduelle
macroscopiquement nulle (23, 39). Six mesures spécifiques dont la nécessité
était corrélée à l’étendue et à l’agressivité de la maladie ont été évaluées : la
résection diaphragmatique, la pelvectomie postérieure, la résection de grêle,
l’exérèse de volumineux ganglions rétropéritonéaux et l’ablation de multiples
implants séreux grêles ou mésentériques (39). Les auteurs retrouvaient une
diminution des scores de survie uniquement dans le groupe de patientes ayant
nécessité une exérèse de multiples implants péritonéaux. Dans une autre étude,
408 patientes au stade IIIC ont été analysées après évaluation du volume
initial. Une maladie de fort volume était évidemment associée à un plus
mauvais pronostic, mais l’impact de la réduction chirurgicale sur la survie était
plus important que l’extension initiale de la maladie. Une chirurgie complète
réalisée dans 351 cas sur 408 permettait d’obtenir une survie à cinq ans de
49 % chez des patientes présentant un stade III C avancé (23).
Le seul grand essai randomisé disponible évaluant la chirurgie de debulking
n’étudie pas la chirurgie initiale, mais la chirurgie d’intervalle après trois cycles
de chimiothérapie chez les patientes n’ayant pas bénéficié d’une chirurgie
initiale complète (40). Les patientes étaient randomisées entre, d’une part, la
poursuite de la chimiothérapie et, d’autre part, un nouveau debulking suivi de
chimiothérapie. La survie globale et l’intervalle sans récidive étaient significati-
vement améliorés chez les patientes opérées, confirmant l’hypothèse et l’intérêt
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 227

d’une chirurgie de réduction tumorale agressive dans la prise en charge des


carcinoses ovariennes.
L’ensemble de ces résultats rend impossible à notre avis l’élaboration d’une
randomisation entre chirurgie permettant une maladie résiduelle nulle et son
abstention, que ce soit pour les patientes ayant une maladie totalement résé-
cable d’emblée ou pour les chirurgiens qui sont capables de tout réséquer au
prix d’une morbidité acceptable. Valider l’idée que certaines femmes puissent
ne pas bénéficier d’une résection optimale sous couvert d’un protocole de
recherche clinique équivaudrait à les sous-traiter en l’état actuel de nos
connaissances.

La chirurgie d’intervalle
Il s’agit d’une laparotomie de cytoréduction précédée et suivie de chimiothé-
rapie systémique. Les motivations pour la réaliser sont multiples :
non-résécabilité complète d’emblée du fait du volume tumoral, de sa diffusion
notamment sur le mésentère, précarité de l’état général de la patiente, risque
élevé de morbidité post-opératoire, compétence chirurgicale limitée, longueur
de l’intervention…
À partir des résultats encourageants de l’essai de l’EORTC publié en 1995,
les possibilités de chirurgie d’intervalle après trois ou quatre cures de chimio-
thérapie ont donc été étudiées dans de nombreuses séries non randomisées (36,
41-45). Ces différentes études sont représentées dans le tableau V. Les taux de
réponse à la chimiothérapie néo-adjuvante sont voisins de 80 % (36, 46, 47).
Ils permettent de parvenir à une chirurgie optimale lors de la laparotomie d’in-
tervalle dans plus de 70 % des cas pour des patientes présentant une maladie
initiale jugée non résécable. Mais la plupart de ces études sont rétrospectives,
elles regroupent des séries de malades en nombre limité, souvent hétérogènes
et traitées différemment, à la fois au niveau des protocoles de chimiothérapie
et de la prise en charge chirurgicale. Le pronostic en terme de survie globale et
sans récidive ne semble pas significativement différent de celui d’un groupe
contrôle traité par chirurgie première et ce avec une morbidité inférieure. De
plus, dans ces études, la cytoréduction première est souvent associée à des taux
faibles de chirurgie optimale et à des chiffres de morbidité particulièrement
élevés. Les modalités de la chirurgie d’intervalle ne sont couramment pas
détaillées dans ces séries, et on ne sait pas si la chirurgie a intéressé uniquement
la maladie résiduelle ou si la résection a porté sur les zones initialement patho-
logiques.
Deux essais prospectifs randomisés sont disponibles et apparemment
contradictoires (40, 48), ils sont schématisés dans les figures 2 et 3. L’essai de
l’EORTC publié en 1995 par van der Burg avait trouvé un avantage significatif
en terme de survie avec un gain de six mois de médiane de survie chez les
patientes bénéficiant d’une chirurgie de debulking d’intervalle après chirurgie
initiale suboptimale (maladie résiduelle > 1 cm). Cette amélioration du
228 Les cancers ovariens

Tableau V – Chirurgie d’intervalle après chimiothérapie néo-adjuvante.


(sélection : critère de non résécabilité ; MR = maladie résiduelle ; CTNA = chimiothérapie néo-
adjuvante ; CDI = chirurgie de debulking d’intervalle ; CD1 = chirurgie de debulking initiale ;
Contrôle : sélection d’un groupe contrôle traitée par CD1 suivie de chimiothérapie adjuvante.)

CDI CD1
Auteur nbr taux MR MS Conclusion
année sélection n de de MR = 0 optimale (mois) CD1 des auteurs
cure réponse
meilleur
Vergote, clinique pronostic dans
1998 + 75 3 48,0 % 87,5 % 42 23 la période ou
cœlioscopie 46 % sont traités
par CTNA
Schwartz, clinique 59 5 12,8 26 pas de différence
1999 + scanner significative
entre CDI et CD1
meilleur pronostic
Kuhn, stades IIIc +
2001 ascite > 500 31 3 32,0 % 84,0 % 42 23 ascite > 500 ml
traitée par CNA +
CDI
CNA permet de
Ansquer, laparotomie sélectionner les
2001 ou 54 4 80 % 72 % 22 patientes pouvant
cœlioscopie bénéficier
d'une CDI
Fayikciog pas différence
Lu, clinique + 45 - 48,9 % 75,6 % 34,1 37,9 pronostique
2001 scanner significative entre
CDI et CD1
pas de différence
significative
Morice, laparotomie 34 3 65,0 % 94,0 % 26 22 entre CDI et CD1,
2002 ou morbidité
cœlioscopie fortement di-
minuée par CTNA
Mazzeo, scanner importance de la
2003 +/- 45 4 93,40 % 53,3 % 68,9 % 29 - MR après CDI
cœlioscopie comme facteur
pronostique
CTNA + CDI
Fanfani, laparotomie 73 3 85 % 37 % 71 % - - bonne option pour
2003 stades avancés
non résécables

pronostic est retrouvée également à long terme plusieurs années après la rando-
misation initiale. Dans l’essai 152 du GOG, ce gain de survie attribuable à la
chirurgie d’intervalle après chirurgie initiale suboptimale (maladie résiduelle
> 1 cm) n’est pas confirmé. Cette différence peut être expliquée après analyse
des différents sous-groupes illustrés dans le tableau VI. Dans l’étude de
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 229

Fig. 1 – Chirurgie des cancers ovariens avancés : notion


de chirurgie chronologique.
(CD1 : chirurgie de debulking initiale ; CT : chimio-
thérapie ; CDI : chirurgie de debulking d’intervalle
(précédée et suivie de CT) ; Second look : laparotomie
de second look à la fin de la séquence thérapeutique
initiale ; CD2 : chirurgie de debulking secondaire :
maladie persistante ou récurrente à la fin du premier
traitement.

l’EORTC, on retrouve un plus grand pourcentage de stade IV et de patientes


en mauvais état général au moment de la laparotomie initiale. Ces paramètres
sont associés à une hétérogénéité importante lors de la chirurgie initiale avec
un fort pourcentage de chirurgie exploratrice (ovaires laissés en place dans 30 %
des cas) et de résidus tumoraux volumineux. À l’inverse, dans l’étude de Rose,
la majorité des patientes ont bénéficié selon les auteurs d’un effort chirurgical
maximal lors de la chirurgie première par un chirurgien spécialisé, bien que la
moitié des femmes conservait une maladie résiduelle supérieure à 5 cm. De
plus, dans cet essai plus récent, les patientes ont reçu une chimiothérapie opti-
misée à base de paclitaxel associé au platine. La chirurgie d’intervalle après trois
cures de chimiothérapie semble donc bénéficier aux patientes ayant été opérées
initialement de façon incomplète, soit par un chirurgien non spécialisé, soit à
cause d’un état général précaire. Par contre, en cas de chirurgie non optimale,
malgré un effort initial maximal, la chirurgie d’intervalle semble inutile. Ces
données ne permettent pas de conclure de façon définitive, elles confirment la

Tableau VI – Comparaison entre les essais de l’EORTC et du GOG 152.

n Stade IV OMS = 2 chimiothérapie MR < 5 cm MR = 1-2 cm


EORTC 140/138 22 % 17 % CDDP + cyclophosph. 20 % 3,5 %
GOG 152 216/208 5% 7% CDDP + Paclitaxel 56 % 12,5 %

(N : effectif groupe chirurgie/groupe sans chirurgie ; MR : taille des lésions résiduelles après
chirurgie initiale ; Chimiothérapie : molécule de chimiothérapie associée au platine en
première ligne.)
230 Les cancers ovariens

Progression Progression

Figs 2 et 3 – Schéma de l’essai de l’EORTC (40) et de l’essai 152 du GOG (48).


CT : chimiothérapie cisplatine 75 mg/m2 + cyclophosphamide 750 mg/m (J1 = J21).
CT : Taxol (paclitaxel) 135 mg/m2 et cisplatine 75 mg/m2 (J1 = J21).

valeur d’un debulking chirurgical initial maximal dans la prise en charge des
carcinoses ovariennes.
Pour les patientes présentant une maladie non résécable d’emblée, la
chimiothérapie néo-adjuvante permet d’éviter une laparotomie inutile, voire
délétère et de débuter sans retard une première ligne de chimiothérapie. La
non-résécabilité doit donc être appréciée avant la chirurgie initiale. Elle peut
être évidente en cas de maladie péritonéale ou métastatique très évoluée ou
alors en présence d’un état général précaire. Elle est le plus souvent difficile à
estimer et la prescription d’une chimiothérapie néo-adjuvante peut constituer
une perte de chance théorique pour une patiente qui aurait pu bénéficier d’un
debulking chirurgical optimal premier. La valeur du Ca-125 au diagnostic,
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 231

reflet de la masse tumorale, a été corrélée pour certains aux possibilités de résec-
tion chirurgicale optimale (49). Un Ca-125 préopératoire supérieur à 500 a été
associé à une probabilité élevée de chirurgie non optimale (chirurgie optimale
dans 73 % des cas si Ca-125 < 500 et 22 % si > 500) (49). Cependant, ces
données ne sont pas toujours retrouvées dans la littérature et l’utilisation
unique d’une valeur seuil de Ca-125 est difficilement applicable en pratique.
L’exploration radiologique par scanner a cherché à définir des critères de résé-
cabilité. Cependant, cette évaluation de la non-résécabilité semble difficile en
l’absence de lésions péritonéales extrêmement volumineuses ou de métastases
parenchymateuses. La cœlioscopie a été utilisée pour évaluer les possibilités
d’un debulking optimal. Pour Vergote et al. (50), une chirurgie d’intervalle
après chimiothérapie néo-adjuvante doit être réalisée en cas de mauvais état
général (WHO à 2 ou 3) ou en présence d’une carcinose avancée à l’explora-
tion cœlioscopique : présence d’implants péritonéaux disséminés ou supérieurs
à 10 g, volume tumoral estimé supérieur à 1 000 g, présence d’une ascite abon-
dante supérieure à 5 l. Les métastases sur les sites de trocarts étant fréquentes,
la mise en place des trocarts sur la ligne médiane a été proposée pour pouvoir
réséquer facilement leurs sites d’insertion lors de la laparotomie d’intervalle.
Les réponses concernant l’intérêt de cette chirurgie d’intervalle pourraient
être connues au terme de l’essai prospectif EORTC 55971. Cette phase III
débuté en septembre 1998 randomise la chirurgie de debulking initiale suivie de
chimiothérapie et la chirurgie d’intervalle après trois cures de cisplatine pacli-
taxel. L’objectif principal est de comparer la survie globale et sans récidive et
parallèlement d’évaluer la morbidité et la qualité de vie entre les deux groupes.

Chirurgie de second look ou de « second regard »


et chirurgie de debulking secondaire
La chirurgie de second look
Par définition, le second look est une chirurgie de réévaluation systématique
réalisée après réponse clinique complète à une première séquence thérapeu-
tique comprenant une chirurgie de réduction tumorale et une première ligne
de chimiothérapie (minimum six cures).
Le principe d’évaluation de la réponse au premier traitement des cancers
ovariens est très ancien. Le premier temps comporte un prélèvement du liquide
péritonéal pour analyse cytologique. Une adhésiolyse complète est nécessaire
pour explorer l’ensemble de la cavité abdomino-pelvienne et de la région rétro-
péritonéale. En l’absence de lésion macroscopique décelable, des biopsies
péritonéales pour analyse histologique sont indispensables (coupoles diaphrag-
matiques, gouttières parito-coliques, pelvis…). Un pourcentage important de
second look était classé positif uniquement sur les résultats de quelques biop-
232 Les cancers ovariens

sies. Le pourcentage de second look positif après rémission clinique augmente


avec la détermination de l’exploration chirurgicale. Dans l’étude de
Friedmann, la réalisation systématique de biopsies multiples (109 biopsies en
moyenne analysées par patientes) est associé à un taux plus élevé de second look
positif (41,4 %) compte tenu d’une chirurgie initiale optimale et à un plus
faible taux de récidive (27,9 %) après second look négatif (51).
La morbidité et les complications de cette chirurgie ne sont pas négligeables
et l’impact sur la qualité de vie de ces interventions itératives justifie la sélec-
tion de ces patientes.
L’utilisation de la cœlioscopie lors du second look est actuellement étudiée.
Son intérêt théorique est d’obtenir une approche peu invasive avec magnifica-
tion par l’optique des surfaces péritonéales explorées. Cependant, son
utilisation est limitée par la présence d’adhérences postopératoires importantes.
Ainsi, dans l’étude de Clough et al., la laparoscopie n’a permis d’obtenir une
exploration complète de la cavité abdominale que dans 41 % des cas contraire-
ment à 95 % après laparotomie (52). La cœlioscopie dans ce contexte est
dangereuse, ses complications propres (de 1 à 10 %) sont principalement des
plaies intestinales secondaires aux adhérences rendant indispensable la réalisa-
tion de la technique d’« open »-cœlioscopie.
Le taux de second look positif (lésions microscopiques ou macroscopiques)
après réponse clinique complète est élevé de l’ordre de 50 % et stable dans le
temps malgré l’amélioration des examens d’imagerie et des chimiothérapies de
première ligne (51, 53, 54). Dans ce cas le pronostic est mauvais, malgré les
possibilités d’une chimiothérapie de deuxième ligne ou d’une chirurgie de
debulking secondaire. La probabilité d’une exploration positive lors du second
look est d’autant plus élevée que la chirurgie initiale a été non optimale.
L’âge > 50 ans, un grade indifférencié et un stade initial élevé sont également
associés à des taux importants de second look positif (53).
En cas de second look négatif ou de rémission pathologique complète
(absence de lésion macroscopique et biopsies négatives), le pronostic est
meilleur, avec une médiane de survie variant de 76 à 149 mois et des taux de
survie à cinq ans dépassant 50 % (53-56). Cependant, malgré une exploration
négative, les risques de récidive à distance sont grands, de l’ordre de 50 % (56).
Ce risque de récidive est d’autant plus élevé que la chirurgie initiale a été
incomplète et que le grade est indifférencié (51, 56).
La réalisation systématique d’une chirurgie de second look ne semble pas
avoir de bénéfice en terme de survie. L’étude de Nicoletto et al. a randomisé en
deux groupes 102 patientes en rémission clinique complète en fonction de la
réalisation ou non d’une chirurgie de second look (57). Après un suivi de
soixante mois, les taux de survie n’étaient pas significativement différents dans
les deux groupes malgré la prescription précoce d’une chimiothérapie de
seconde ligne aux patientes en récidive dans le groupe opéré.
Le protocole 158 du GOG comparant de manière randomisée l’efficacité de
protocoles de chimiothérapie (cisplatine/paclitaxel versus carboplatine/pacli-
taxel) chez 798 patientes stade III opérées de manière optimale a également
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 233

évalué l’intérêt d’une réévaluation chirurgicale systématique. Dans cette étude,


un second look a été réalisé dans 75 % des cas et en présence d’une maladie
persistante un second debulking et une nouvelle chimiothérapie étaient effec-
tués. Aucune différence n’a été retrouvée en terme de survie sans récidive et
globale parmi les patientes ayant eu ou non un second look (58, 59).
Compte tenu des pourcentages élevés de récidive après rémission patholo-
gique complète, de l’absence d’amélioration de la survie par une chirurgie de
debulking secondaire ou par le début précoce d’une chimiothérapie de sauve-
tage, les indications de second look sont donc devenues limitées. Selon le
consensus du NIH (National Institute of Health consensus of ovarian cancer), il
ne doit être réalisé que dans le cadre d’essai clinique ou en cas de modification
potentielle de la prise en charge thérapeutique par les résultats de l’exploration
chirurgicale (60). Les indications possibles de second look se résument aux
protocoles thérapeutiques, aux protocoles de recherche avec intensification
intra-péritonéale de fermeture ou à la réalisation d’une exérèse systématique
non pratiquée auparavant (lymphadenectomies).

Chirurgie de réduction tumorale secondaire (CD2)


La chirurgie de debulking secondaire CD2 est une laparotomie de cytoréduc-
tion réalisée pour une maladie récurrente après une séquence thérapeutique
initiale complète (chirurgie et six cycles de chimiothérapie de première ligne).
L’impact sur la survie d’une chirurgie secondaire chez ces patientes est contro-
versé et les indications de ces gestes sont discutées. Plusieurs séries
rétrospectives (61-65) et prospectives (66) ont étudié les possibilités de
chirurgie des récidives des cancers ovariens ; elles sont résumées dans le
tableau VII. Les taux de debulking optimal varient de 40 à 80 % au prix d’une
morbidité acceptable permettant d’obtenir des médianes de survie globale de
seize à trente-cinq mois après la chirurgie. Le facteur pronostique le plus
important en terme de survie est la taille de la maladie résiduelle après le
second debulking (62, 63-66). Seules les patientes ayant eu une chirurgie
complète peuvent espérer une survie prolongée de l’ordre de quarante mois
après la récidive (62, 66, 67).
L’intervalle libre entre la fin de la première séquence thérapeutique et le
diagnostic de rechute est également important. Les médianes de survie sont
significativement prolongées lorsque cet intervalle est supérieur à douze voire
vingt-quatre mois (61-66). Les patientes candidates à un second debulking
doivent être sélectionnées en fonction du résultat attendu de la chirurgie, des
alternatives thérapeutiques possibles (intensification thérapeutique) et de leurs
conséquences sur la qualité de vie. La chirurgie sera d’autant plus utile et indi-
quée que l’intervalle libre est supérieur à douze mois après la fin du premier
traitement, que l’extension de la maladie permettant une résection tumorale est
complète, que l’ascite est modérée ou absente, que la femme est jeune et en bon
234 Les cancers ovariens

Tableau VII – Principales séries de chirurgie secondaire (CD2) pour récidive de la maladie
après la fin d’une séquence thérapeutique initiale.

Tolérance Chirurgie optimale pronostic


Auteur n survie DC Morb. défi- n% MR MS TS5 facteurs
Année globale nition (cm) (mois) significatifs*
(mois) MR
Tay, 46 23 2% 8,7 % =0 19 0 38 MR nulle,
2002 (41 %) ILR > 12 mois
≠0 11
Scarabelli, 149 20 3,30 % 26,2 % > 1 cm 104 0 - 53 % MR,
2001 (70 %) ILR > 12 mois,
≠0 - 0% protocole de CT = 1
Eisenkop, 106 35,9 1,90 % 15 % =0 87 0 44 ILR > 12 mois,
2000 (82,1 %) MR nulle,
CT de sauvetage = 0
≠0 19 taille récidive <10 cm
Zang, 60 ≤1 23 ≤1 19 ILR ,
2000 (38 %) MR optimale,
>1 8 absence d'ascite
Segna, 61 MR optimale,
1993 100 17 1% 18 % <2 (61 %) < 2 27,1 âge ≤ 55 ans,
<2 9 ILR
Morris, 30 16 0% 40 % <2 17 <2 18 MR optimale,
1989 (57 %) < 2 13,3 ILR

(* : facteurs pronostiques en analyse multivariée ; MR : taille de la maladie résiduelle après


CD2 ; ILR : intervalle libre entre fin du premier traitement et le diagnostic de récidive ; MS :
médiane de survie entre CD2 et décès ; DC : mortalité ; Morb : morbidité majeure.)

état général sans métastase à distance. L’existence d’une grosse lésion tumorale
facilement extirpable permet à la chirurgie de réduire la masse tumorale de
façon importante, sa réalisation semble hypothétique en cas de lésions diffuses.
En outre, les possibilités de chimiothérapie de deuxième ligne après la CD2
doivent être prises en compte, un debulking même complet sera inutile s’il
n’est pas suivi d’un traitement systémique efficace. Ainsi, dans l’étude de Tay
et d’Eisenkop, les patientes ayant déjà été traitées par plusieurs protocoles de
chimiothérapies différents avant la CD2 ont des espérances de survie significa-
tivement diminuées par rapport aux patientes n’ayant été traitées que par un
seule ligne de chimiothérapie (62, 64).

Perspectives
Le pronostic des formes avancées des cancers ovariens reste sombre malgré les
progrès des prises en charge médicamenteuses. La chirurgie garde une place
prépondérante, tant à visée curative que palliative, pour éviter la survenue
Chirurgie optimale des stades avancés : aspects oncologiques 235

rapide d’un syndrome occlusif. L’obtention initiale d’une maladie résiduelle


macroscopiquement nulle est admise comme facteur pronostique déterminant.
Deux cas de figure peuvent être schématisés : une maladie volumineuse acces-
sible à une résection complète, même au prix d’une chirurgie lourde ; une
maladie diffuse non accessible à une résection complète de par une dissémina-
tion micronodulaire, sur le mésentère, par exemple. Dans la première situation,
le chirurgien doit tout enlever, soit initialement, soit après trois cures de
chimiothérapie, en réséquant les zones anatomiques initialement patholo-
giques. Dans la seconde situation, l’exérèse doit être large mais non mutilante
et aussi peu morbide que possible pour laisser la place au terme des traitements
systémiques, aux traitements régionaux d’intensification, que ce soient les
chimiothérapies intra-péritonéales classiques ou chauffées (68-73).
La recherche de facteurs prédictifs de réponse aux traitements médicamen-
teux, l’obtention de marqueurs biologiques d’agressivité permettront peut-être
un jour, de ranger la chirurgie de debulking dans le tiroir des traitements
archaïques. En attendant ces temps nouveaux, les chirurgiens oncologues
devront continuer à améliorer leur technique d’exérèse et de reconstruction
digestive pour assurer à leurs patientes des résections complètes et des suites
opératoires simples. Tant il reste malheureusement d’actualité qu’une chirurgie
initialement incomplète ne se rattrape pas.

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Chirurgie programmée des cancers ovariens
au stade précoce par cœlioscopie
D. Querleu, E. Leblanc et G. Ferron

La chirurgie est un élément essentiel dans la prise en charge des cancers de


l’ovaire. En effet, elle intervient à tous les stades de la maladie : le diagnostic,
la stadification, le traitement, la surveillance du traitement complémentaire et,
enfin, la palliation. Toutefois, les enjeux sont différents selon que l’on s’adresse
à une forme débutante et donc guérissable ou à une forme avancée dont on va
essayer de retarder l’échéance, en améliorant si possible le confort de survie de
la malade. La chirurgie cœlioscopique prend une place dans la restadification
des stades précoces insuffisamment explorés au cours d’une première interven-
tion. Son utilisation dans le traitement de la tumeur primaire reste limitée par
l’impossibilité d’extraire des volumes tumoraux significatifs sans prendre le
risque de malfaçon chirurgicale, soit par inadéquation du geste, soit par
rupture per-opératoire de tumeurs autrement localisées, soit par contamination
de la paroi abdominale au cours de l’extraction de la pièce opératoire (1). Le
risque est multiple : aggravation du stade par le simple effet de la rupture,
aggravation de la maladie péritonéale, survenue de métastases pariétales. C’est
ce rôle limité, ainsi que la prévention de ces risques, qui est exploré dans ce
chapitre, en incluant les impératifs de la chirurgie pour en discuter les possibi-
lités de réalisation par cœliochirurgie.
L’objectif, pour le chirurgien qui se trouve devant une tumeur ovarienne
suspecte ou maligne apparemment débutante, est de prouver sa nature cancé-
reuse, d’en faire l’exérèse complète et d’évaluer son extension microscopique.

Le diagnostic
Le diagnostic et l’exérèse de la tumeur primaire repose sur l’annexectomie
assortie, si possible, de l’examen extemporané de la pièce. Une cytologie périto-
néale débute l’intervention par prélèvement de l’ascite ou par lavage péritonéal.
Elle sera suivie d’une exploration de l’ensemble de la cavité abdominale. Le
complément thérapeutique sera fonction de l’examen extemporané ou, à défaut,
186 Les cancers ovariens

de l’examen anatomo-pathologique. Canis a rapporté une série de 819 masses


annexielles traitées par laparoscopie. La sensibilité du diagnostic laparoscopique
de malignité a été de 100 %, la spécificité de 96,6 %, la valeur prédictive néga-
tive de 100 %, alors que la valeur prédictive positive était de 41,3 % (27 faux
positifs). Parmi les 8 complications, on note 3 ruptures per-opératoires sans
conséquences cancérologiques (2). L’association examen clinique, échographie,
laparoscopie a une sensibilité élevée puisque le risque de faux négatifs est estimé
à 1,5 % des cas dans l’étude multicentrique française comportant 5 307 masses
ovariennes traitées laparoscopiquement (3). L’équipe de Clermont-Ferrand a
complété utilement l’information en concentrant son étude sur les masses
annexielles échographiquement suspectes, dans une série de 141 patientes
évaluées par cœlioscopie et examen extemporané de la pièce opératoire (4). Ce
dernier était fiable dans cette série pour ce qui concerne le diagnostic de mali-
gnité dans 89 % des cas, surtout en cas de kyste de diamètre inférieur à 10 cm,
l'examen extemporané des lésions volumineuses étant aléatoire.
Or, et d’autant plus que le volume est important, une des complications
possibles est la rupture per-opératoire de la pièce. Ses conséquences à long
terme sont diversement appréciées. Pour certains, elle ne semble pas altérer le
pronostic ; en revanche, pour d’autres, l’opinion est à l’opposé, ce qui justifie-
rait, surtout en cas de formes peu différenciées, un traitement complémentaire
comme dans un stade IC (5). Éviter la rupture est donc un enjeu important
dans le diagnostic cœlioscopique. En outre, l’extraction de la pièce opératoire
doit se faire sans morcellement et sans contamination directe de la paroi abdo-
minale par une tumeur possiblement maligne, et la prise en charge doit être
obtenue sans délai car il existe un risque réel et connu de longue date d’aggra-
vation rapide de l’état d’extension de la maladie (1). En tout état de cause,
l’extraction de la tumeur ne peut être conçue que protégée par un sac, sans
ponction ni rupture, ce qui impose de se limiter à un volume tumoral compa-
tible avec les sacs existants, d’une part (4 à 5 cm pour les plus courants, 10 cm
pour certains sacs de grande contenance), et avec une extraction atraumatique,
d’autre part. La voie vaginale, si une hystérectomie est réalisée dans le même
temps opératoire, permet d’extraire des tumeurs de 5 à 6 cm. L’extraction à
travers la paroi abdominale de la composante solide de tumeurs malignes
impose une incision égale au diamètre tumoral, ce qui fait perdre un des inté-
rêts de la cœlioscopie, d’ordre esthétique, mais sans altérer son bénéfice en
termes de suites opératoires. Dans cet esprit, la chirurgie cœlioscopique
manuellement assistée, qui combine la vision cœlioscopique à la palpation à
travers une incision étanche admettant la main, peut trouver une application
intéressante (6).
L’hystérectomie totale intrafasciale avec annexectomie controlatérale, dont
l’objectif est d’évaluer et traiter une extension possible à l’utérus ou à la trompe
controlatérale, surtout en cas de forme endométrioïde, est associée au traite-
ment de la tumeur primitive dans la majorité des cas, tout en connaissant les
possibilités de traitement conservateur chez la femme jeune. Elle est réalisée en
routine par cœliochirurgie ou chirurgie vaginale cœlio-assistée.
Chirurgie programmée des cancers ovariens au stade précoce par cœlioscopie 187

Le bilan d’extension
Le bilan d’extension fait immédiatement suite au geste précédant l’annonce du
résultat de l’examen extemporané ou, à défaut, secondairement, après récep-
tion du résultat anatomo-pathologique définitif. Il vise à rechercher une
extension extra-ovarienne dont la présence modifie le stade FIGO de la
maladie et indique généralement une chimiothérapie adjuvante. Le bilan d’ex-
tension standard comporte une évaluation péritonéale et ganglionnaire. Elle
comporte, outre l’étude cytologique du liquide ou du lavage péritonéal déjà
citée, une exploration de l’ensemble des viscères avec biopsie systématique de
toute lésion suspecte, ainsi que des prélèvements péritonéaux pariétaux
multiples du cul-de-sac de Douglas, des gouttières pariéto-coliques et des
coupoles diaphragmatiques. Ces divers prélèvements et l’observation minu-
tieuse du péritoine sont possibles par cœlioscopie, avec des secteurs plus faciles
à observer que par laparotomie (diaphragme) et des secteurs moins directement
accessibles, mais observables avec une technique adaptée (mésentère). Une
omentectomie infra-colique est systématiquement réalisée. À condition d’uti-
liser des sites de trocarts et une position du chirurgien adaptée à la chirurgie de
l’étage supérieur de l’abdomen, l’omentectomie infra-colique, voire totale, est
possible par cœliochirurgie, en utilisant les diverses méthodes d’hémostase à
disposition. La coagulation bipolaire suivie de section, fastidieuse, est toujours
possible, mais supplantée par l’usage de clips bloquants (Hemolock®) ou des
instruments de fusion-section tissulaire modernes. L’appendicectomie peut
également être associée à ce bilan abdominal. Son indication est plus contro-
versée, en raison d’un rendement très variable d’une série à l’autre.

Les lymphadénectomies
La réalisation systématique de lymphadénectomies exhaustives reste encore un
sujet controversé dans les stades précoces. Pourtant, cette atteinte n’est pas rare
puisque la fréquence de l’envahissement ganglionnaire para-aortique est de
l’ordre de 14 % dans les stades apparemment I et 28 % dans les stades II. Par
ailleurs, certains pensent que la lymphadénectomie pourrait jouer un rôle
thérapeutique : en effet, l’envahissement ganglionnaire « résisterait » à la
chimiothérapie puisque des ganglions para-aortiques positifs ont été retrouvés
dans 77 % des interventions de second regard après traitement initial complet
(7). Tous ces éléments plaident en faveur d’une lymphadénectomie réglée et
non, une aléatoire « adénectomie » sélective. Il a été montré qu’il n’existe pas
de zone sentinelle dans l’envahissement ganglionnaire des cancers de l’ovaire
avec 50 % environ d’atteinte mixte pelvienne et para-aortique contre 25 %
d’atteinte isolée pelvienne ou para-aortique sans distinction de côté. Au total,
il faut donc, dans les stades précoces, effectuer une lymphadénectomie systé-
matique, exhaustive et réglée, menée de la veine rénale gauche aux anneaux
188 Les cancers ovariens

fémoraux. La lymphadénectomie pelvienne cœlioscopique est publiée et prati-


quée de longue date (8). En 1994, nous avons publié la technique du curage
para-aortique sous-rénal, donc de la lymphadénectomie standard pour initier
l’utilisation de la cœliochirurgie dans la stadification exhaustive des tumeurs de
l’ovaire (9). L’ensemble de ces techniques remplit donc le cahier des charges
d’une stadification complète des tumeurs de l’ovaire par cœlioscopie. Lecuru et
al. ont cependant montré que, dans la pratique réelle, et bien que la survie n’en
soit pas affectée, la qualité de traitement chirurgical des tumeurs de l’ovaire en
condition laparoscopique n’est pas toujours adéquate (10). On doit donc
insister sur le fait que la prise en charge cœlioscopique ne peut se concevoir que
dans le respect absolu des bonnes pratiques de cette technique.
En synthèse, on peut donc envisager, dans certains cas sélectionnés de
tumeur au stade I apparent, d’effectuer le traitement complet par voie laparo-
scopique et vaginale combinée, afin de faire profiter la patiente d’un abord
mini-invasif sans sacrifier la qualité carcinologique du geste. Dans notre expé-
rience, 4 patientes ont été traitées de cette manière. Elles étaient atteintes d’une
tumeur au stade I clinique, 3 étaient épithéliales (tumeur de la granulosa). Le
geste radical et la stadification complète intra- et rétropéritonéale ont été prati-
qués dans tous les cas. La durée opératoire a été de cinq heures en moyenne, la
durée de séjour n’a pas excédé trois jours, et aucune complication péri-opéra-
toire n’est survenue. 2 patientes qui avaient des implants microscopiques
péritonéaux ont reçu une chimiothérapie complémentaire ; avec douze mois de
recul moyen, une d’entre elles a récidivé. Dans la littérature, une publication
déjà ancienne rapporte trois traitements complets laparoscopiques sans compli-
cation pour des durées opératoires de 5 h 30 et de séjour de trois jours (11).
Plus récemment, l’équipe de Iéna a publié une série comportant 13 cas de
tumeur infiltrante de l’ovaire, incluant un nombre non précisé mais majoritaire
de traitements complets laparoscopiques en un temps, sans effet défavorable
carcinologique observé (12). Dans cette série, 5 cas ont fait l’objet d’une
chimiothérapie, après un délai de sept jours seulement, ce qui est un argument
supplémentaire en faveur de l’approche cœlioscopique. Enfin, une intervention
chez 17 patientes porteuses de cancers ovariens précoces utilisant la technique
de chirurgie laparoscopique manuellement assistée a été décrite, avec une
hospitalisation moyenne de 1,8 jour, sans information sur le devenir (6).

Laparoscopie de restadification
La laparoscopie a plus souvent été proposée pour réaliser la stadification secon-
daire de patientes ayant été opérées pour une tumeur ovarienne présumée
bénigne qui s’est révélée être maligne à l’examen définitif. Le geste réalisé est
strictement identique à celui de la laparotomie de restadification et comporte
donc une cytologie péritonéale, une omentectomie infracolique, des prélève-
ments péritonéaux étagés, une appendicectomie, la résection des cicatrices de
la cœlioscopie antérieure et les lymphadénectomies pelviennes bilatérales et
Chirurgie programmée des cancers ovariens au stade précoce par cœlioscopie 189

para-aortique jusqu’en sous-rénal gauche. La revue de la littérature dans ce


domaine est assez pauvre en raison d’une pratique limitée à quelques rares
institutions (9, 13, 14). Une seule publication rapportant un nombre impor-
tant de patientes avec un suivi à long terme est maintenant disponible (15). De
décembre 1991 à décembre 2001, Leblanc et collaborateurs ont restadifié 53
patientes par cœliochirurgie, 42 (31 cancers ovariens dont 4 dysgerminomes et
4 tumeurs de la granulosa, ainsi que 8 tumeurs de la trompe) après la chirurgie
initiale, et 11 après une chimiothérapie de première ligne justifiée par le type
histologique ou la cytologie péritonéale. L’intervention a pu être menée à bien
par cœlioscopie dans tous les cas sauf un. La durée opératoire moyenne a été
de 238 minutes, incluant pour certains cas l’hystérectomie et l’ovariectomie
controlatérale. 20 ganglions ont en moyenne été prélevés dans la région
aortique et 14 dans le pelvis. La durée postopératoire moyenne a été de
3,1 jours. 4 complications directement liées sont survenues : deux lymphocèles,
un hématome par plaie d’une artère épigastrique, et, dans le groupe des resta-
difications post-chimiothérapie, une plaie uretérale sur ganglion adhérent.
Dans le groupe des restadifications primaires, 8 patientes (19 %) ont été clas-
sées aux stades IIA (4 cas), IIIA (1 cas) et IIIC (pN1) (4 cas). Dans le groupe
des restadifications post-chimiothérapie, 4 patientes (36 %) ont été classées au
stade IIIC (3 cas pN1) ou IIA. Le suivi moyen des patientes a été de 54 mois.
Aucune complication tardive n’a été observée. Dans le groupe des 35 patientes
considérées comme au stade IA après stadification cœlioscopique, 3 patientes
ont récidivé après 12, 48 et 60 mois et sont décédées.
Au total, la laparoscopie offre dans les stades précoces l’opportunité de
réaliser, pour des opérateurs expérimentés dans ce type de chirurgie, une stadi-
fication exhaustive et, dans des cas très sélectionnés, un traitement cœliovaginal
complet, à une patiente pour laquelle les séquelles esthétiques et fonctionnelles
seront minimes et la récupération rapide. Des séries et un recul plus importants
sont nécessaires pour légitimer son emploi en cancérologie ovarienne. La sélec-
tion des cas repose donc sur des critères macroscopiques (stade I apparent,
tumeur de petit volume, idéalement de moins de 4 cm) et d’un facteur indé-
pendant de la maladie qui est la disponibilité impromptue rare d’un bloc
opératoire pour plusieurs heures d’intervention et d’un chirurgien exercé aux
techniques d’omentectomie et de curage ganglionnaire. La restadification
cœlioscopique, qui ne relève pas de l’urgence, peut être réalisée par des chirur-
giens expérimentés avec une bonne fiabilité en bénéficiant d’une chirurgie
comparativement moins lourde.

Les tumeurs à malignité limitée


Même si ces tumeurs ne peuvent être au sens strict dénommées cancers de
l’ovaire, leurs circonstances de diagnostic sont analogues et leur aspect macro-
scopique parfois similaire. La distinction entre tumeur invasive et tumeur
190 Les cancers ovariens

frontière n’est souvent attestée à titre définitif qu’à l’examen histopathologique


définitif. Le traitement chirurgical exclusif est la règle, et la qualité de sa réali-
sation n’en est que plus déterminante. Il repose sur les mêmes principes que
ceux appliqués aux tumeurs invasives, à cette différence près que les prélève-
ments ganglionnaires sont considérés comme inutiles. On notera qu’il s’agit là
d’une indication de plus en plus largement acceptée, en traitement primaire, de
la cœliochirurgie (16), sous réserve de respecter les mêmes contraintes volu-
métriques que pour les cancers (17). La restadification est actuellement
considérée comme inutile si l’intervention et l’exploration initiale ont été réali-
sées dans les meilleures conditions de qualité (16), mais elle peut être envisagée
sur les mêmes bases que celles décrites pour les tumeurs invasives (18).

Conclusion
Il existe un consensus sur la nécessité dans les stades précoces, guérissables,
d’une prise en charge rigoureuse pour définir les candidates à un traitement
conservateur et/ou à un traitement complémentaire. La cœliochirurgie peut
s’intégrer dans l’arsenal des techniques chirurgicales au temps diagnostique
seulement, au temps de la stadification seulement, ou rarement dans les traite-
ments complets. Dans les stades avancés, la chirurgie de cytoréduction
secondaire après chimiothérapie néo-adjuvante est un espoir pour les cas où la
cytoréduction optimale ne peut être réalisée d’emblée. Dans ces cas, l’explora-
tion cœlioscopique décisionnelle peut fournir des arguments précis lorsque
l’imagerie pré-opératoire ne permet pas de conclure.

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Facteurs pronostiques
des tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire
R. Largillier, W. Lescaut, J.-M. Ferrero et J.-P. Guastalla

Introduction
La détermination de facteurs pronostiques est une étape essentielle à la mise en
évidence de profils évolutifs variés de tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire
(1, 2) et à leur prise en charge thérapeutique. Elles restent le cancer gynécolo-
gique de plus mauvais pronostic avec seulement 30 à 40 % de survie globale à
cinq ans (3, 4) en raison d’un diagnostic à un stade avancé dans 75 % des cas.
Le traitement associant une prise en charge chirurgicale et une chimiothérapie
à base de sels de platine n’est que partiellement efficace (5). La détermination
de facteurs pronostiques fiables permettrait de sélectionner les patientes béné-
ficiant réellement de traitements coûteux et toxiques.
Un facteur pronostique est défini comme une variable corrélée à la survie
globale. Il doit répondre aux critères habituels de contrôle de qualité (fiabilité,
reproductibilité) et l’information donnée doit influencer la décision thérapeu-
tique. Chaque variable doit être confirmée en analyses multivariées et doit être
indépendante des autres facteurs déjà identifiés (6, 7). Le facteur pronostique
doit être validé par plusieurs études concordantes pour généraliser les résultats.
Quand la variable étudiée répond à cet ensemble de critères, elle est alors utili-
sable en pratique clinique.
Il faut remarquer, dans le cas particulier des tumeurs épithéliales de l’ovaire,
que c’est principalement dans les formes précoces de la maladie, aux stades IA
et IB, que les facteurs pronostiques influencent la décision du traitement adju-
vant à proposer (8).
En effet, dans les stades avancés, toutes les patientes nécessiteront une
chirurgie d’exérèse associée à une chimiothérapie par carboplatine – paclitaxel,
et, dans ce cas, il n’y a donc pas d’alternative thérapeutique entre les patientes
de bon ou de mauvais pronostic, en dehors de protocoles de recherche (5).
Les facteurs pronostiques initiaux influencent donc peu la décision. En
revanche, les variables prédictives de la réponse ou de la résistance aux diffé-
rents traitements peuvent être déterminantes dans les choix thérapeutiques.
114 Les cancers ovariens

Ces informations peuvent également être très utiles pour stratifier les
patientes dans les essais cliniques testant un traitement de maintenance ou de
consolidation.
Les facteurs pronostiques peuvent être subdivisés en trois groupes :
– facteurs liés à la tumeur (stade FIGO, histologie, grade, HER2,
EGFR…) ;
– facteurs liés aux patients (âge, performans status) ;
– facteurs liés au traitement (taille du résidu tumoral après exérèse chirur-
gicale initiale, chimiothérapie à base de platine ou normalisation précoce du
CA125) (9).

Facteurs liés à la tumeur


Stade
Le diagnostic de tumeur épithéliale maligne de l’ovaire se fait dans plus de deux
tiers des cas à un stade avancé de la maladie avec ascite et carcinose péritonéale.
Bien entendu, l’extension de la maladie est un facteur pronostique établi dans
l’ensemble de la littérature. La classification de cette extension utilise les stades
FIGO (Fédération internationale des gynécologues obstétriciens) (10, 11).
Ce facteur pronostique influence fortement la survie à cinq ans avec 80 %
de survie globale dans les stades I et moins de 20 % pour les stades IV (fig. 1).
On comprend alors l’importance de la détermination correcte du stade
d’extension initial de la maladie en termes pronostique et thérapeutique. Elle
implique que la chirurgie initiale soit complète notamment au niveau des
curages ganglionnaires.
Les « sous-stades » de la classification FIGO ont également une valeur
pronostique :
– dans les stases I et II, les sous-stades A (unilatéralité), B (bilatéralité) et C
(cytologie péritonéale positive, tumeur à la surface de l’ovaire ou rupture
capsulaire) ont une valeur pronostique mal établie (12-15), à cet effet la FIGO
suggère de préciser si la rupture capsulaire est per-opératoire ou préexistante à
l’intervention ;
– dans le stade III, il est rapporté par de nombreux auteurs le plus mauvais
pronostic du stade IIIC par rapport aux stades IIIA et IIIB, ces deux derniers
ne présentant pas de différences significatives de survie à cinq ans après
chirurgie initiale (16, 17).
L’importance de l’ascite n’est pas clairement identifiée dans la classification
de la FIGO. Cependant, certains auteurs lui ont accordé une valeur pronos-
tique (18).
Facteurs pronostiques des tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire 115

Stade Ia (n = 421)
Stade Ib (n = 46)
Stade Ic (n = 436)
Stade IIa (n = 55)
Stade IIc (n = 154)
Stade IIb (n = 108)
Pourcentage de survie

Stade IIIa (n = 118)

Stade IIIb (n = 264)

Stade IIIc (n = 1330)

Stade IVc (n = 396)

Nombre d’années après diagnostic

Fig. 1 – Heintz APM, Odicino F, Maisonneuve P et al. (2001) Carcinoma of the ovary. FIGO
Annual Report. J Epid Biostat 6: 107-38

Grade
Le grade histologique concernant les tumeurs épithéliales est un facteur
pronostique important identifié comme indépendant dans de nombreuses
études multivariées (19).
Il est certainement particulièrement déterminant chez les patientes de
stade I. Cependant, le grade est un facteur qui manque de reproductibilité ; il
n’est pas identifié de manière systématique et l’emploi de multiples systèmes de
grading rend son utilisation difficile en pratique (9).

Type histologique
Le type histologique n’est pas retrouvé de manière systématique comme un
facteur pronostique indépendant.
Les tumeurs malignes mucineuses et endométrioïdes sont considérées
comme étant de meilleur pronostic par rapport aux tumeurs séreuses. Les
cancers indifférenciés ont plus mauvais pronostic.
Les adénocarcinomes à cellules claires ont souvent été identifiées en analyse
multivariée comme un facteur indépendant de mauvais pronostic, mais cela
reste controversé. Il serait plus souvent résistant à la chimiothérapie (19).
116 Les cancers ovariens

Facteurs biologiques
Facteurs biologiques sériques (CA125)
Le marqueur sérique CA125 est exprimé dans près de 80 % des cancers
ovariens et son élévation au diagnostic est corrélée avec le stade d’extension et
l’histologie (20).

HER2
Le taux de surexpression d’HER2 en immuno-histochimie (IHC) rapporté
dans la littérature est de l’ordre de 25 %. Dans une étude du groupe GINECO
(21) concernant 117 patientes présentant un cancer ovarien de stade III ou IV,
incluses dans un protocole prospectif (cisplatine, épirubicine, cyclophospha-
mide), il a été retrouvé un taux de surexpression d’HER2 de 16 %. En analyse
multivariée, la surexpression d’HER2 était un facteur de mauvais pronostic
indépendant. Ceci n’a pas été confirmé par une étude multicentrique alle-
mande (22) où le taux de surexpression en IHC était encore plus faible
(25/361 tumeurs, soit 6,9 %) et où l’influence pronostique du statut d’HER2
n’était pas indépendante des paramètres classiques anatomo-cliniques. En
revanche, dans l’étude danoise MALOVA (23) regroupant 181 cas, 13,3 %
était 2+ ou 3+ en IHC, et la surexpression HER2 était corrélée avec la survie
et conservait sa valeur pronostique en analyse multiparamétrique. Dans une
autre étude de 401 carcinomes séreux (24), la présence d’une amplification
(> 5 copies) détectée par CISH (chromogenic in situ hybridization), qui était
rapportée dans 7 % des cas, s’est montrée être un facteur prédictif de plus
mauvais pronostic et de moins bonne réponse thérapeutique que la présence
d’une surexpression révélée par IHC.
Les expériences cliniques avec le trastuzumab sont encore très limitées. Les
résultats d’une étude de phase II d’Herceptin® en monothérapie du GOG
(Gynecologic Oncology Group) ont été récemment publiés dans le Journal of
Clinical Oncology (25). Sur un total de 837 tumeurs testées, 11,4 % (n = 95)
avait une surexpression 2+ ou 3+. Sur les 41 patientes traitées (toutes avaient
reçu une chimiothérapie antérieure), le taux de réponse a été seulement de
7,3 % (1RC, 2 RP).
L’intérêt pronostique de HER2 ne peut donc être reconnu et seules les études
randomisées d’association avec la chimiothérapie en première ligne permettront
d’évaluer l’intérêt potentiel du trastuzumab dans les cancers ovariens.

R-EGF (epidermal growth factor receptor)


La surexpression de REGF est de l’ordre de 32 à 62 % selon les études (26-28).
Tous stades confondus dans une large étude de plus de 700 patientes, il
n’a pas été mis en évidence d’intérêt pronostique pour la survie en analyse
Facteurs pronostiques des tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire 117

multivariée (26). En revanche, dans une étude limitée aux stades I et II de la


FIGO réalisée sur 226 patientes, le REGF posséderait une valeur pronostique
indépendante (27).
La surexpression de REGF dans les cancers ovariens est à l’origine d’études
cliniques, de thérapeutiques ciblées inhibitrice à venir (29).

Récepteurs hormonaux pour les œstrogènes et la progestérone


Dans une étude portant sur 322 patientes opérées au MD Anderson entre
1990 et 2000, les récepteurs aux œstrogènes étaient exprimés dans 77 % des cas
et les récepteurs à la progestérone dans 26 %. Seule la surexpression des récep-
teurs à la progestérone était associée à une évolution favorable en analyse
multivariée et cette expression était liée au type histologique endométrioïde
dans 64 % des cas (30). La valeur pronostique des récepteurs à la progestérone
a été également démontrée en analyse multivariée sur d’autres études (31).

Micro-array et génétique moléculaire


Les altérations génétiques (mutations, amplification ou hyperexpression d’on-
cogènes) tiennent une place importante dans la progression de la maladie
tumorale, mais également dans la réponse aux thérapeutiques. Ils peuvent donc
influencer le pronostic des patientes.
De nombreux gènes ont été étudiés et leur intérêt clinique reste débattu.
La fonction du gène TP53 contribue à la résistance aux sels de platine et à
la sensibilité aux taxanes. Cependant son polymorphisme n’influence pas la
survie globale des patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire (32, 33).
Dans une étude récente utilisant des oligonuclotides micro-arrays à partir
de l’expression de 115 gènes, un profil pronostique a été identifié et cette signa-
ture génétique conserve une valeur pronostique indépendante en analyse
multivariée (34).
Ces techniques récentes prometteuses demandent à être validées par
d'autres études.

Facteurs liés aux patients


Âge et indice de performance
L’âge et l’indice de performance sont souvent corrélés au stade de la FIGO du
fait de l’histoire naturelle de la maladie.
Ils ne sont pas toujours identifiés comme des facteurs pronostiques indé-
pendants dans les études multivariées (35-37).
118 Les cancers ovariens

Pour les stades III de la classification de la FIGO, l’âge moyen de décou-


verte augmente régulièrement avec l’extension de la maladie :
– 40 ans → stade IIIA ;
– 50 ans → stade IIIB ;
– 60 ans → stade IIIC.
Il semblerait que l’extension tumorale soit plus importante en fonction de
l’âge (38). Les patientes de plus de 70 ans seront également moins souvent trai-
tées de manière optimale. La survie spécifique ne serait alors que de 13 % à
cinq ans contre 53 % pour les patientes plus jeunes.
Après ajustement sur les autres variables, les patientes âgées présenteraient
un risque relatif de décès pour cancer de l’ovaire de 1,8 par rapport aux patiente
plus jeunes (39).
L’âge et le performance status doivent impérativement être pris en compte
dans la mesure où ils conditionnent la morbidité opératoire et limitent parfois
les possibilités de l’administration des traitements adjuvants.
Lorsque la mise en œuvre optimale des traitements est compromise, l’effi-
cacité thérapeutique l’est également, avec des conséquences lourdes pour le
pronostic. L’indice de performance resterait un facteur pronostique indépen-
dant (40).

Facteurs liés au traitement


La taille du résidu tumoral après exérèse initiale
La qualité de l’exérèse chirurgicale initiale a été pressentie comme étant de
première importance depuis de nombreuses années. Le rôle de la résection chirur-
gicale lors de la prise en charge initiale a été établi par Griffith en 1975 (41).
Un résidu inférieur à 2 cm est un facteur pronostique indépendant dans de
nombreuses études. Ce résidu est déterminé à la fois par la qualité de la
chirurgie d’exérèse, et donc de l’expérience du chirurgien, mais également par
le volume et l’extension de la maladie (42).
La médiane de survie évolue en fonction de la quantité de résidu tumoral
après la chirurgie initiale : quarante mois en cas de reliquat inférieur à 0,5 cm,
dix-huit mois en cas de reliquat entre 0,5 et 1,5 cm et six mois en cas de reli-
quat supérieur à 1,5 cm (43). La notion d’impact du reliquat tumoral laissé
après chirurgie initiale a été confirmée à l’ère de la polychimiothérapie à base
de platine. L’analyse de 637 cas du Gynecologic Oncology Group confirme
l’impact relatif du reliquat tumoral sur la médiane de survie à quatre ans : 60 %
en cas de reliquat microscopique, 35 % en cas de reliquat macroscopique infé-
rieur à 2 cm et moins de 20 % en cas de reliquat supérieur à 2 cm (44).
L’impact de la cytoréduction chirurgicale maximale sur la survie globale a
été confirmée en analyse multivariée dans une méta-analyse récente publiée par
Bristow portant sur plus de 6 000 patientes traitées entre 1989 et 1998 (45).
Facteurs pronostiques des tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire 119
Cumulative Survival

Survie (mois)
Fig. 2 – Stratification de la survie en fonction du reliquat postopératoire (ligne continue : pas
de reliquat, ligne discontinue : reliquat entre 1 et 10 mm, ligne en pointillé : reliquat supérieur
à 10 mm, (d'après 46).

Dans une série rapportée par Eisenkop de 408 patientes, il a été mis en
évidence que la cytoréduction chirurgicale complète est plus importante sur la
survie que l’extension initiale de la maladie métastatique avant l’acte opératoire
(46) (fig. 2).
Il est à noter que dans une étude de l’EORTC publiée par Van der Burg
(47), une cytoréduction tumorale lors d’une chirurgie d’intervalle après
chimiothérapie améliore également la survie sans rechute et la survie globale.
Cependant, s’il est évident qu’il existe un lien entre la taille du résidu tumoral
après exérèse initiale et la survie, Rose a récemment mis en évidence que l’ad-
dition d’une seconde chirurgie de cytoréduction n’améliorait pas la survie (48).
S'il est donc maintenant clairement démontré que la qualité de l’exérèse
initiale influence la survie, il n’est pas certain que ce soit également vrai lorsque
l’exérèse est pratiquée lors d’une chirurgie d’intervalle.
Parmi les patientes traitées pour un cancer de l’ovaire au stade avancé (au moins
de stade III), avec une réponse complète attestée par une exploration de deuxième
regard, la moitié présente une récidive loco-régionale à cinq ans (46, 49).

Chimiothérapie à base de sels de platine


Les deux méta-analyses regroupent plus de 3 000 patientes dans la série de
Voest et près de 7 000 pour Hunter, identifient la chimiothérapie postchirur-
gicale à base de platine comme un facteur pronostique indépendant (50, 51).
120 Les cancers ovariens

Ce traitement est donc considéré comme indispensable à la prise en charge


initiale associant chirurgie et chimiothérapie.

Facteurs biologiques sériques (CA125)


La décroissance du CA125 peut être utilisée pour prédire la réponse à la
chimiothérapie. Son élévation est associée à une rechute dans un délai moyen
de deux mois.
Récemment, le nadir de décroissance du CA125 en cours de chimiothé-
rapie postopératoire a été corrélé à la survie globale.
Si le nadir de CA125 en fin de chimiothérapie est ≤ 10 UI/ml, la survie est
alors nettement augmentée, 2 968 jours contre 537 si le nadir est > à 11 UI/ml.
Dans cette étude, le nadir de CA125 ≤ 10 UI/ml était la seule variable
pronostique de la survie globale en analyse multivariée (52).

Conclusion
Les facteurs pronostiques indépendants établis ayant un impact sur la décision
thérapeutique sont l’extension tumorale selon le stade de la FIGO, la taille du
résidu tumoral après exérèse initiale, le type histologique et le grade de diffé-
renciation (notamment dans les stades précoces), l’âge et l’indice de
performance.
Pour les patientes traitées par chimiothérapie, on retiendra le rôle bénéfique
des sels de platine et la valeur prédictive de la décroissance du CA125 en cours
de traitement.
La recherche de nouveaux facteurs biologiques reste un impératif afin
d’éviter un traitement inutile ou, au contraire, d’inciter à un traitement plus
agressif ou innovant dans les groupes de mauvais pronostic. Néanmoins, force
est de constater que sur les deux cents dernières publications testant de
nouveaux facteurs pronostiques (P53, HER2, REGF, MDR…), aucune n’a
modifié nos pratiques cliniques (10).
L’avenir est à la détermination de facteur prédictif de réponse aux traite-
ments, et en particulier aux nouvelles thérapies ciblées : anticorps
monoclonaux et inhibiteur des tyrosines kinases.

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Hormonosensibilité des cancers ovariens
épithéliaux
P. Pujol

Introduction
La majorité des tumeurs épithéliales ovariennes exprime les récepteurs des
hormones stéroïdes sexuelles : récepteurs des estrogènes (RE), de la progesté-
rone (RP) et des androgènes (RA, 1). Le faible taux de réponse aux
thérapeutiques anti-hormonales (environ 10 %), proposées initialement dans
les formes avancées après échec de la chimiothérapie, a fait longtemps consi-
dérer ce cancer comme peu hormono-dépendant. Cependant, des données
expérimentales et cliniques récentes confirment que les estrogènes peuvent
promouvoir la progression tumorale dans un sous-groupe de cancers ovariens.
Ces données nouvelles font réexaminer le rôle des estrogènes dans la progres-
sion tumorale ovarienne et envisager de nouvelles stratégies thérapeutiques
anti-hormonales. Nous aborderons successivement les données cliniques et
biologiques sur l'hormono-sensibilité des cancers ovariens.

Aspects cliniques
THS et risque de cancer de l'ovaire : un rôle promoteur des
estrogènes ?
Les études épidémiologiques analysant l'effet du traitement hormonal substi-
tutif de la ménopause (THS) sur le risque de cancer ovarien (cas-témoins,
cohortes ou méta-analyses, fig. 1) ont donné jusqu'à présent des résultats
contrastés (2-15). Trois études prospectives récentes indiquent cependant une
augmentation significative du risque d’incidence ou de mortalité de cancer chez
les utilisatrices (13-15). La première, réalisée sur une population de 211 500
femmes américaines, montre que les estrogènes utilisés en postménopause dans
le cadre d’un THS augmente la mortalité par cancer de l’ovaire (fig. 2a) (13).
58 Les cancers ovariens

Cas contrôle
Weiss, 1982
Booth, 1989
Purdie, 1995
Hempling, 1997
Purdie, 1999
Parrazini, 1994
Riman, 2002
Risch, 1996
Prospective
Hunt, 1987
Adami, 1989
Rodriguez, 1995
Rodriguez, 2001
Lacey, 2002
Anderson, 2003

Fig. 1 – Risque relatif de cancer de l’ovaire dans les études épidémiologiques cas-contrôles ou
prospectives. Les points représentent le risque relatif pondéré par le nombre de patientes. Les
barres indiquent l’intervalle de confiance à 95 %.

L'étude de Lacey et al. (14), qui porte sur une cohorte de 44 241 femmes,
semble confirmer une augmentation de l’incidence et ce, de façon dépendante
de la durée d'utilisation du THS (fig. 2b). Ainsi, chez les femmes qui utilisent
depuis dix-neuf ans ou plus un traitement par estrogènes, le risque relatif est de
3,2. L'étude randomisée du WHI (Women’s Health Initiative) confirme que
l'association estrogènes et progestatifs pourrait augmenter le risque relatif de
cancer de l’ovaire (15). L'étude anglaise portant sur un million de femmes
ayant eu un THS n'a pas encore étudié cette question (16).
Hormonosensibilité des cancers ovariens épithéliaux 59

Fig. 2 – Risque relatif de mortalité (A) et d’incidence (B) par cancer de l’ovaire sous THS en
fonction de la durée d'utilisation des estrogènes.

Hormonothérapie des cancers épithéliaux de l'ovaire


Les progestatifs à forte dose et l'anti-estrogène tamoxifène sont les traitements
hormonaux qui ont été les plus étudiés dans le cancer de l'ovaire (17). Leur
taux de réponse tumorale varie considérablement selon les études (de 0 à 56 %
pour le tamoxifène, tableau I, 18-37). Le taux global de réponse objective a été
estimé à 8 % pour le tamoxifène et à 7 % pour les progestatifs sur l'ensemble
des études (17). Un pourcentage plus important de patientes (20-75 %) béné-
ficient d'une stabilisation de la progression tumorale. Paradoxalement, la
réponse au tamoxifène ne semble pas dépendante du statut en récepteurs
hormonaux dans certaines études (21, 25, 23), ni de la réponse préalable aux
sels de platine (35). Les évaluations de la réponse-dose (33) ou du traitement
séquentiel progestérone/tamoxifène (26, 32) n'ont pas permis d'obtenir des
résultats significatifs. Enfin, les carcinomes endométrioides seraient plus
sensibles aux thérapeutiques hormonales que les autres sous-types histologiques
épithéliaux (20).
Il faut rappeler que le tamoxifène a toujours été évalué en seconde ou troi-
sième ligne, après échec de la chimiothérapie (17, 37, 38). De plus, il n'est pas
clairement établi que le tamoxifène se comporte comme un antagoniste pur au
niveau du tissu ovarien. Un effet agoniste partiel au niveau ovarien, tel que
celui observé au niveau de l’endomètre, n'est pas exclu. Ainsi, de nouvelles stra-
tégies thérapeutiques, pourraient être étudiées in vitro ou en traitement de
formes avancées.
60 Les cancers ovariens

Vers de nouvelles stratégies anti-hormonales ?


De nouvelles thérapeutiques anti-œstrogéniques, telles que les anti-œstrogènes
purs et les inhibiteurs de l’aromatase (IA) sont à l’étude. Après la ménopause,
période habituelle du diagnostic, la conversion des androgènes par l’aromatase
est la source majeure des estrogènes. En outre, l'aromatase intratumorale pour-
rait produire localement des concentrations significatives d’estradiol. Une
activité aromatase a ainsi été mise en évidence dans les cellules épithéliales
ovariennes normales (85, 86) et cancéreuses (87, 88). L’activité aromatase des
lignées épithéliales ovariennes BG-1 (89) et NIH : OVCAR-3 (90) est inhibée
in vivo par les IA. Récemment, nous avons confirmé l'expression de l'aroma-
tase dans un sous-groupe de cancers épithéliaux de l'ovaire et montré que les
IA pouvaient inhiber la prolifération cellulaire de lignées cellulaires exprimant
l'aromatase (42). Deux études cliniques de phase II montrent que le létrozole
peut induire une réponse tumorale (15 %), une réponse biologique (chute du
marqueur CA125, 15 à 50 %) ou une stabilisation du marqueur (18 à 25 %)
(39, 40).

Aspects biologiques
Œstrogènes, récepteurs des œstrogènes et protéines œstro-
géno-induites
L’ovaire a la particularité d'être à la fois un tissu producteur et un tissu cible des
œstrogènes. Comme l’épithélium normal, les cancers épithéliaux ovariens
expriment généralement les RE (67 % des cas dans l'étude poolée regroupant
47 séries de Rao et Slotman) (1). La prolifération épithéliale ovarienne et la
régulation d’un certain nombre de gènes exprimés dans la cellule épithéliale
pourraient donc se trouver sous la dépendance des œstrogènes produit par
l'ovaire lui-même (fig. 3) (41). Après la ménopause, la principale source d'œs-
trogènes est la conversion des androgènes circulants par l'aromatase.
Récemment, nous avons pu confirmer l'expression de l'aromatase par la cellule
épithéliale ovarienne normale et cancéreuse (42).

Les œstrogènes induisent la prolifération des lignées cellulaires


de cancers ovariens
L’effet prolifératif des œstrogènes a été démontré dans différentes lignées de
cancer de l’ovaire exprimant les REs (43, 44) (fig. 4). Cet effet mitogène peut être
inhibé par l’utilisation d’anti-œstrogènes tels que le tamoxifène (45). Le 17b-
œstradiol (E2) pourrait également agir sur d’autres étapes de la carcinogenèse,
Hormonosensibilité des cancers ovariens épithéliaux 61

Estrogènes

Androgènes
Autres hormones
Fibroblates
Cathepsine D
Fibronectine
Laminine
Cellule Fibuline-1
Kallikreine
ovarienne

Fig. 3 – Événements moléculaires impliqués dans la progression tumorale ovarienne et rôle


potentiel des estrogènes.
ECM : matrice extracellulaire, TGFα : transforming growth factor α, EGF : epidermal growth
factor, IGF : insulin-like growth factors, TGFβ : transforming growth factor β, PDGF : plate-let-
derived growth factor, FGF : fibroblast growth factor, VEGF : vascular endothelial growth factor.

Fig. 4 – Polifération cellulaire de lignée de cancer de l’ovaire BG-1 induite par l’estradiol. Les
cellules ont été cultivées 4 jours en l’absence ou en présence d’estradiol [1nM] (x 20. D’après
Cunat et al. 40).
62 Les cancers ovariens

telles que l’invasion et la motilité cellulaire (46, 47). Ce rôle des œstrogènes dans
la progression tumorale ovarienne fait reconsidérer le rôle respectif des REα et
REβ et les gènes cibles impliqués.

Les RE α et β : un mode d’action revisité


La plupart des cancers de l’ovaire expriment les REs au niveau du contingent
cellulaire épithélial (48-50). Cependant, à la différence du cancer du sein, le
taux d'expression des RE dans le cancer de l’ovaire a peu de valeur prédictive
de la réponse à l’hormonothérapie (17).
Le clonage du REβ (51, 52) a fait réexaminer le rôle des REs dans la physio-
pathologie de la cellule épithéliale ovarienne. Le REβ est présent de façon
majoritaire dans les ovaires normaux et les tumeurs bénignes de l’ovaire, alors
que le REα est plus fortement exprimé dans les cancers (50, 53, 47). De façon
plus générale, l’augmentation du rapport d’expression α/β est retrouvée dans
différents cancers, ceux du sein, de la prostate, du poumon et du côlon (54).
Ceci suggère un rôle protecteur du REβ contre l’activité mitogène du REα. Sur
le plan fondamental, l’activité anti-mitogène du REβ a pu récemment être
mise en évidence dans notre laboratoire dans un modèle cellulaire de cancer de
l'ovaire (47). Des observations similaires ont été faites dans le cancer du sein et
de la prostate (54). Des molécules activant spécifiquement le REα ou la réex-
pression du REα dans la cellule cancéreuse ovarienne pourraient donc
permettre d'inhiber la prolifération ou l’invasion cellulaire.

Des protéines œstrogéno-induites interviennent dans la


carcinogenèse ovarienne
La fonction de régulateur transcriptionnel des RE suggère que l’effet de l’œs-
tradiol dans les cellules épithéliales cancéreuses s’exerce par l'intermédiaire de
protéines œstrogéno-régulées. L'étude de la plupart de ces gènes a été envisagée
dans le cancer du sein avant de l’être dans celui du cancer de l’ovaire.
Cependant, on constate que de nombreux gènes sont régulés différemment par
l'estradiol dans ces deux cancers.

Gènes de la réponse classique aux œstrogènes

Environ 50 % des cancers de l’ovaire expriment le RP (1). Comme pour les RE,
les différentes études cliniques disponibles n’ont pas permis de dégager une
valeur pronostique ni prédictive de la réponse hormonale en fonction de l'ex-
pression des RP (17). La synthèse du récepteur à la progestérone (RP) reste
sous le contrôle des œstrogènes dans les lignées de cancers de l’ovaire exprimant
Hormonosensibilité des cancers ovariens épithéliaux 63

les RE (43, 45). Dans les tumeurs ovariennes, le RP est exprimé fortement dans
le compartiment stromal (55).
Le protéine pS2 est régulée par les œstrogènes dans les cellules de cancer
du sein RE-positives et sa présence est corrélée positivement avec les RE dans
les tumeurs mammaires (56). La protéine pS2 est exprimée dans certaines
tumeurs ovariennes (57, 58). En revanche, les œstrogènes ne régulent pas
pS2 dans différentes lignées RE-positives de cancers ovariens, y compris dans
les cellules pour lesquelles les RPs sont induits et la croissance régulée par les
œstrogènes (43).

Gènes impliqués dans la prolifération cellulaire


L’expression du proto-oncogène c-myc, impliqué dans la réponse précoce de la
prolifération cellulaire, est rapidement et transitoirement induite dans les
cellules de cancer du sein par divers mitogènes, dont les œstrogènes (59, 60).
Une surexpression de la protéine c-myc, liée à une amplification génique, a été
retrouvée dans 17 à 37 % des cancers de l’ovaire (61, 62).
La surexpression d’HER2 (human EGF receptor 2 / c-erbB-2 / neu) est
retrouvée dans environ 20 % des cancers de l’ovaire (63). Cette surexpression a
pu être associée à la progression tumorale et à un mauvais pronostic (64, 65).
À la différence des autres gènes régulateurs de croissance induits par les œstro-
gènes, HER2 est régulé négativement par les œstrogènes dans des lignées de
cancers du sein (66). Cependant, de la même façon que pour pS2, les œstro-
gènes ne régulent pas HER2 dans des lignées de cancers de l’ovaire (67). Les
gènes cibles de l’induction par les œstrogènes dans la cellule épithéliale
ovarienne sont donc différents de ceux mis en jeu dans la cellule épithéliale
mammaire.

Gènes impliqués dans la motilité et l’invasion


Notre laboratoire s’est particulièrement intéressé à une protéine de la matrice
extracellulaire (MEC), la fibuline-1 (68). Son interaction avec d’autres
composants de la MEC, comme la fibronectine, la laminine et le nidogène,
suggère qu’elle ait un rôle dans la morphologie, l’adhésion et la motilité cellu-
laire. Notre équipe a montré que la sécrétion de la fibuline-1 par les cellules
épithéliales de cancer ovarien est régulée par les œstrogènes (68, 69). Par
ailleurs, les niveaux d’expression de la fibuline-1 augmentent au cours de la
carcinogenèse ovarienne, la protéine sécrétée s’accumulant au niveau du
stroma ovarien (70) (fig. 5). Quatre variants d’épissage de la fibuline-1
humaine sont connus : les variants A, B, C et D. Nous avons montré que le
variant C est impliqué dans l’augmentation de l’expression de la forme totale
de la fibuline 1, alors que l’expression du variant D reste stable (69, 71). Cette
observation suggère un mécanisme d’épissage différentiel de la forme C ou
de dégradation de la forme D propre au cancer (71). La forme C pourrait
64 Les cancers ovariens

Fig. 5 – Expression de la fibuline-1 dans le cancer de l’ovaire. Expression de l’ARNm dans


l’épithélium tumoral par hybridation in situ (A) et expression protéique dans le stroma par
immuno-histochimie (B). D’après Roger et al. (70).

constituer un marqueur de diagnostic précoce ou de pronostic du cancer de


l’ovaire, lié aux œstrogènes.
La cathepsine D est une enzyme lysosomale sécrétée en excès par les cellules
épithéliales de cancer du sein et impliquée dans le processus métastatique (72).
Comme dans les lignées de cancers du sein, son expression est induite par les
œstrogènes dans les lignées de cancers de l’ovaire RE-positives (44, 67). Des
études montrent que la cathepsine D est détectée dans le cytosol de tumeurs
ovariennes, mais non corrélée à la présence du RE ou du RP (73, 74). Son
expression est plus élevée dans les métastases péritonéales que dans la tumeur
primaire correspondante (73, 74).
Les kallikréines sont une famille de protéines à activité sérine protéase
pouvant intervenir dans le processus d'invasion cellulaire. Certaines kalli-
kréines sont exprimées dans de nombreux cancers et sont sous la régulation des
stéroïdes (75). Ainsi, la kallikréine 4 qui est induite par les œstrogènes est asso-
ciée à la progression tumorale du cancer de l’ovaire (76). De nombreuses et
récentes études portant sur l’expression tissulaire ou circulante des kallikréines
(formes 5, 6, 8, 9, 10 et 11) ont également montré une association au pronostic
du cancer de l’ovaire (75).
Hormonosensibilité des cancers ovariens épithéliaux 65

Des modulateurs de l’action des RE : les cofacteurs


transcriptionnels
Au cours des dix dernières années, les mécanismes par lesquels les RE contrô-
lent l’expression des gènes cibles ont été précisés par la caractérisation d’une
nouvelle classe de molécules appelée cofacteur transcriptionnel. Ces cofacteurs
se lient directement sur les récepteurs et agissent généralement comme média-
teurs du signal d’activation (coactivateurs) ou de répression (corépresseurs) de
la transcription. Ainsi, les effets tissu-spécifiques que présentent certains
ligands des récepteurs des œstrogènes (anti-œstrogènes tels que le tamoxifène)
pourraient s’expliquer par des différences d’expression des cofacteurs.
Le gène AIB1 a été identifié comme un coactivateur des récepteurs
nucléaires. Sa surexpression contribuerait au développement de cancers
hormono-dépendants (77). Dans les cancers de l’ovaire, l’amplification d'AIB1
est corrélée à la présence des RE (78) et associée à un mauvais pronostic (79).
Les mutations constitutionnelles qui affectent le gène BRCA1 sont impli-
quées dans prés de 70 % des formes héréditaires de cancer du sein et de l’ovaire
(80). Le gène BRCA1 participe au mécanisme de réparation des lésions de
l’ADN. Il peut être induit par les œstrogènes (81). Il a, de plus, été montré que
la protéine BRCA1 est un modulateur négatif de l’activité des RE (82). BRCA1
interagit directement avec la protéine coactivatrice BRG1 exprimée dans les
cancers de l'ovaire et avec certains membres de la famille de SRC1 (83). Les
mutations constitutionnelles de BRCA1 sont associées à une perte de l’allèle
sauvage dans plus de 90 % des cancers héréditaires, confirmant son rôle
suppresseur de tumeur. L’incidence des mutations somatiques retrouvée dans
les tumeurs sporadiques est très faible (environ 8 %), mais l’inactivation soma-
tique de BRCA1 pourrait se produire par des mécanismes différents, tels que
la microdélétion ou la méthylation (84).

Conclusion
Les études épidémiologiques récentes (tableau I), qui portent sur de grandes
cohortes, semblent confirmer l’augmentation du risque de cancer ovarien sous
THS. Parallèlement, des données expérimentales montrent que des protéines
œstrogéno-induites interviennent dans les différentes étapes de la progression
tumorale de ce cancer, telles que la prolifération, la motilité et l’invasion.
Certaines de ces protéines sont proposées comme marqueurs de diagnostic
précoce ou de pronostic. Ainsi, la perte d’expression du REβ et la surexpression
de la fibuline-1 pourraient constituer des marqueurs précoces de la cancéroge-
nèse ovarienne ou d'agressivité. Des études en cours devraient permettre de
préciser la valeur clinique de ces marqueurs.
Le cancer de l’ovaire a longtemps été considéré comme peu hormonosen-
sible, en raison notamment du faible taux de réponses cliniques observé après
66 Les cancers ovariens

traitement par le tamoxifène. La connaissance des mécanismes moléculaires de


la carcinogenèse ovarienne liée aux œstrogènes permet d’envisager de nouvelles
stratégies thérapeutiques antihormonales, dont pourrait bénéficier un sous-
groupe de cancers ovariens.

Tableau I – Traitement par tamoxifène dans le cancer de l'ovaire avancé.

Auteur (réf.) Tamoxifène Nombre de Réponse tumorale*


(dose mg/j) patientes (%)
Quinn (18) 20 40 9(23)
Rolski (19) 40 47 3(6)
Marth (20) 20 65 4(6)
Schwartz (21) 20 13 1(8)
Landoni (22) 40 55 0
Shirey (23) 20-40 22 0
Slevin (24) 40 22 0
Weiner (25) 20 31 3(10)
Belinson (26) 20 19 0
Hatch, Markman (27) 40 102 17(17)
Osborne (28 40 53 1(2)
Pagel (29 non précisé 29 8(28)
Hammerlynck (30) 40 36 2(6)
Cambell (31) 20 13 1(8)
Jakobsen (32) 30 17 0
Ahlgren (33) 40 29 5(17)
Jäger (34) 30 37 0
Van Der Velden (35) 40 30 2(7)
Gennatas (36) 40 50 28(56)
Tropé (37) 30-40 66 4(6)
Total 776 88(11)

*Réponse partielle + complète. Seules les études comprenant 10 patientes ou plus ont été
incluses.

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Hypothèses physiopathologiques
dans les tumeurs épithéliales de l’ovaire
C. Borg et E. Guardiola

Les tumeurs épithéliales de l’ovaire représentent la première cause de mortalité


par cancer gynécologique chez la femme. Le cancer de l’ovaire représente en
France, chaque année, 4 000 patientes dont 70 % des cas sont diagnostiqués à
des stades tardifs. Le traitement des tumeurs épithéliales de l’ovaire de stade III
ou IV, essentiellement basé sur la chirurgie et l’administration de chimiothéra-
pies associant le plus souvent des sels de platine et des taxanes, ne permet la
guérison que de 20 % à 30 % des patientes.
90 % des cancers de l’ovaire sont décrits comme ayant une origine épithé-
liale. L’ovaire est une structure complexe constituée de nombreux types
cellulaires, assurant les fonctions de l’ovulation et une production hormonale.
L’épithélium ovarien se différencie à partir de l’épithélium cœlomique, au
cours de la phase précoce de l’embryogenèse.
De nombreuses études ont permis de mieux comprendre les processus de
l’oncogenèse des cancers. Les travaux de Fearon et Volgenstein ont permis
d’établir un modèle de cancérogenèse multi-étapes, montrant que la transfor-
mation de lésions bénignes de l’épithélium colique en cancer est le fait de
l’accumulation d’altérations génétiques (1). Cependant, si ces travaux ont
suscité de nombreux progrès dans la biologie du cancer, les mécanismes spéci-
fiques de l’oncogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire restent méconnus et
ces cancers sont toujours actuellement de mauvais pronostic. Une meilleure
compréhension des mécanismes de l’oncogenèse des tumeurs épithéliales de
l’ovaire reste nécessaire pour l’introduction de thérapies ciblées dans cette
pathologie. Néanmoins, l’étude de la biologie de ces cancers est entravée par
leur découverte clinique tardive, la diversité des présentations histologiques et
l’absence de modèles animaux.
Ainsi, ce chapitre est dédié à la synthèse des données qui permettent l’iden-
tification des principaux gènes impliqués dans la genèse des cancers de l’ovaire.
Dans un premier temps, nous rapporterons quels sont les gènes « candidats »
identifiés dans les principales formes de cancers héréditaires de l’ovaire, puis
nous exposerons quelles sont les anomalies génétiques récurrentes dans les
formes sporadiques de cancers de l’ovaire, et enfin, nous décrirons les modèles
48 Les cancers ovariens

murins élaborés récemment où sont analysées les différentes étapes impliquées


dans l’oncogenèse des cancers de l’ovaire.

Existe-t-il des lésions ovariennes tumorales


de différents stades de malignité ?
L’histoire naturelle des tumeurs épithéliales de l’ovaire explique en partie la
complexité de l’étude des mécanismes oncogénétiques. On distingue cinq types
histologiques distincts : les tumeurs séreuses papillaires, les tumeurs endomé-
trioïdes, les tumeurs mucineuses, les tumeurs à cellules claires, les carcinomes
à cellules transitionnelles.
Par ailleurs, on peut également distinguer plusieurs catégories de tumeurs
de l’ovaire correspondant à des lésions de différents stades de malignité : les
tumeurs bénignes, les tumeurs « borderline » et les tumeurs malignes. Une filia-
tion entre une prédisposition à des lésions pré-cancéreuses ou à faible degré de
malignité et des lésions malignes invasives n’a jamais été démontrée. Resta et al.
ont étudié une cohorte de 200 patientes opérées de cancers ovariens unilaté-
raux et observé la présence de lésions hyperplasiques ou métaplasiques de
l’épithélium de surface des ovaires controlatéraux dans 92 % des cas, suggérant
la possibilité de l’existence de lésions prédisposant aux cancers ovariens (2).
L’analyse comparative des remaniements génétiques des tumeurs ovariennes
de différents stades de malignité pourrait permettre l’identification des anoma-
lies communes aux différentes entités nosologiques. Cette approche pourrait
orienter la recherche des altérations génétiques impliquées dans l’oncogenèse
des cancers ovariens.
Ainsi, l’étude génétique des cancers ovariens à l’échelle chromosomique par
technique d’hybridation génomique comparative (CGH) a mis en évidence des
gains ou des pertes de matériel génétique récurrents dans les grandes entités des
tumeurs épithéliales.
Cheng et al. ont montré qu’il existait une perte d’hétérozygotie affectant le
bras q du chromosome X, dans les tumeurs « borderline ». L’étude de la méthy-
lation de l’ADN a montré que cette perte d’hétérozygotie affectait le
chromosome X inactivé (3). Ce profil de CGH différait des observations élabo-
rées à partir de l’analyse de tumeurs épithéliales invasives, suggérant que ces
entités ont des histoires naturelles distinctes. Ainsi, les techniques d’analyse des
remaniements chromosomiques n’ont pas abouti à l’identification d’altérations
génétiques communes aux tumeurs ovariennes de différents stades de mali-
gnité. Les mécanismes de l’oncogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire sont
longtemps restés méconnus.
La caractérisation des mécanismes physiopathologiques des cancers ovariens
a nécessité la synthèse de données émanant de trois axes différents :
– l’étude des anomalies génétiques germinales prédisposant aux cancers de
l’ovaire ;
Hypothèses physiopathologiques dans les tumeurs épithéliales de l’ovaire 49

– l’observation anatomo-pathologique par immuno-histochimie ou


biologie moléculaire des altérations moléculaires récurrentes, dans les tumeurs
sporadiques ;
– les données apportées par les modèles murins.

Les formes héréditaires de cancers ovariens.


L’étude des cancers ovariens familiaux permet d’identifier des candidats impli-
qués dans l’oncogenèse de ces tumeurs. En effet, si 90 % des tumeurs
épithéliales de l’ovaire sont sporadiques, 10 % d’entre elles sont héréditaires.
On distingue, parmi ces dernières, deux maladies héréditaires à transmission
autosomique dominante.

Syndrome des cancers héréditaires du sein et de l’ovaire.


Les cancers du sein et de l’ovaire héréditaires sont associés le plus souvent à des
mutations des gènes BRCA1 (Breast Cancer 1) et BRCA2 (respectivement
dans 65 % et 75 % des cancers ovariens héréditaires). BRCA1 (chromo-
some 17q) et BRCA2 (chromosome 13q) sont deux gènes suppresseurs de
tumeurs. La probabilité de développer un cancer de l’ovaire pour des patientes
porteuses de mutations de ces gènes est de 10 à 63 %. La variabilité de cette
pénétrance rend compte de l’importance de facteurs environnementaux,
hormonaux ou de l’acquisition d’événements génétiques supplémentaires (4).
Des mutations de BRCA1 sont aussi identifiées dans les formes sporadiques de
cancer de l’ovaire, suggérant une fonction suppressive de tumeur dans ce
contexte (5). BRCA1 et BRCA2 ont majoritairement une activité d’activateur
transcriptionnel et de régulateur de la réparation de l’ADN. BRCA1 est une
protéine impliquée dans la détection des anomalies nucléotidiques, des cassures
simple-brin et double-brin. BRCA1 intègre le complexe de l’ARN polymérase
II pour identifier précocement les anomalies de la réplication de l’ADN.
BRCA2 pourrait interagir avec la protéine RAD51 impliquée également dans
la réparation de l’ADN.

Le syndrome des cancers colorectaux non polypoïdes hérédi-


taires (HNPCC)
Le syndrome HNPCC (hereditary non polyposis colorectal cancer) est caractérisé
par l’apparition de cancer du cadre colique droit, de l’endomètre et des ovaires.
Ce syndrome implique des anomalies des gènes codant pour le système de
réparation des mismatch (MMR) (6). La plupart des cancers ovariens de ces
50 Les cancers ovariens

syndromes héréditaires sont des tumeurs séreuses. Les tumeurs « borderline »


et mucineuses sont rarement observées dans ce contexte. Ces données suggè-
rent encore une distinction dans l’initiation de l’oncogenèse entre ces
différentes entités. Le syndrome HNPCC implique une anomalie germinale
d’un gène impliqué dans la réparation de l’ADN comme MSH2, MLH1,
MSH6, PMS1 ou PMS2. La perte de fonction de ces gènes est associée à une
instabilité du génome tumoral, caractérisée par l’insertion ou la délétion de
nucléotides dans des loci du génome comprenant des séquences répétées. Cette
instabilité génétique favorise l’accumulation de mutations favorables à l’évolu-
tion maligne des processus tumoraux. L’altération des fonctions contrôlées par
ces gènes pourrait être importante pour l’oncogenèse ovarienne.

Anomalies génétiques observées dans les cancers


sporadiques de l’ovaire
D’une manière générale, l’oncogenèse associe des remaniements génétiques
permettant la perte de la fonction d’un gène suppresseur de tumeur, l’activa-
tion d’un oncogène et l’apparition d’un phénotype d’instabilité génétique
favorisant l’accumulation de mutations au sein de certains gènes qui peuvent
conférer aux cellules tumorales les capacités de prolifération, d’invasion, de
migration, d’angiogenèse et de résistance à l’apoptose.

Perte de gènes suppresseurs de tumeur

L’étude de marqueurs polymorphiques permettant l’analyse de la perte d’allèles


dans les tumeurs a révélé de fréquentes pertes d’hétérozygotie affectant les
régions chromosomiques 6p, 11p, 13q, 14q, 17p, 17q, 18q, 22q et Xp. Cela
peut signifier l’implication de nombreux gènes suppresseurs de tumeurs dans
l’oncogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire ou une instabilité chromoso-
mique (3, 7). On note la fréquence des altérations du bras court du
chromosome 17 dans la séquence codant pour p53 dans les tumeurs épithé-
liales de l’ovaire à fort potentiel de malignité, contrairement aux formes
bénignes ou « borderline » (8). De même, les altérations du locus 17q22-23
codant pour BRCA1 sont fréquentes. Pieretti et al. ont montré que l’absence
du chromosome 17 dans des tumeurs épithéliales séreuses de l’ovaire était asso-
ciée à un haut grade nucléaire. Ces données suggéreraient que la perte du
chromosome 17 pourrait conférer aux cellules tumorales un avantage sélectif
lors de la progression tumorale correspondant à un phénotype tumoral plus
agressif (9). A l’inverse, les pertes du chromosome 17 ne sont pas fréquentes
dans les tumeurs mucineuses de l’ovaire.
Hypothèses physiopathologiques dans les tumeurs épithéliales de l’ovaire 51

Les pertes d’hétérozygotie observées sur d’autres chromosomes ont permis


de suspecter que la perte d’autres gènes suppresseurs de tumeur pourrait être
impliquée dans l’oncogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire. Ainsi, PTEN,
une phosphatase codée par un gène sur le locus 10q23.3, est mutée dans un
certain nombre de cancers endométrioïdes. PTEN contrôle négativement l’ac-
tivation de la voie AKT/mTOR.
On a également observé des mutations des gènes codant pour les protéines
contrôlant négativement les cyclines, qui permettent la progression du cycle
cellulaire. Ainsi, il est possible d’observer des délétions homozygotes de P16
dans 15 % des tumeurs épithéliales de l’ovaire (10). P16 est une protéine de la
famille INK4 (cyclin-dependent kinase-4 inhibitor genes), qui contrôle négative-
ment la progression du cycle cellulaire. D’autres inhibiteurs du cycle cellulaire
comme P15, P18 et P19 peuvent être altérés dans les cancers ovariens.
Disabled homolog 2 (DAB2) est une protéine impliquée dans l’organisation
des cellules épithéliales ovariennes. Des études immuno-histochimiques ont
montré la perte de l’expression de DAB2 dans 80 % des cancers ovariens (11).

Gain d’un oncogène


Les oncogènes codent pour des molécules favorisant la transformation et la
progression des cellules cancéreuses. Ces molécules peuvent être des peptides
ou protéines interagissant avec des récepteurs aux facteurs de croissance, des
molécules de signalisation intracellulaire ou des facteurs de transcription favo-
risant la prolifération, la survie ou la migration des cellules tumorales.
Le récepteur c-erb2 est surexprimé dans moins de 25 % des cancers de
l’ovaire. Cependant, une étude comparant les tumeurs primitives et les lésions
obtenues au décours de la progression de ces cancers sous forme d’ascite,
montre que la majorité des maladies évolutives expriment c-erb2 (12). Ceci
peut signifier que l’acquisition de c-erb2 est corrélée à un avantage sélectif pour
la prolifération de certaines cellules tumorales. Néanmoins, l’implication de
l’expression de c-erb2 dans le pronostic et la prédiction de la réponse théra-
peutique est toujours un point controversé.
La protéine RAS est une protéine intracytoplasmique liée à la membrane
plasmique. RAS a une activité GTPasique. Certaines mutations de RAS indui-
sent une activation constitutive de cette molécule qui engendre la
phosphorylation de la sérine thréonine kinase sous-jacente et l’activation chro-
nique des voies de signalisation intracellulaire. Des mutations activatrices des
gènes de la famille RAS ont été observées dans les tumeurs mucineuses de
l’ovaire (13). Ortiz et al. ont étudié les mutations survenant dans le gène
codant pour K-RAS dans une cohorte de tumeurs à faible potentiel de mali-
gnité et de tumeurs épithéliales séreuses invasives survenant secondairement.
Ces auteurs décrivent des mutations de K-ras différentes dans ces deux entités.
Ces données suggèrent que l’oncogenèse des tumeurs séreuses « borderline » et
52 Les cancers ovariens

invasives est distincte et confirment l’absence de filiation évidente entre ces


deux maladies (14).
AKT1 et 2 sont des serine threonine kinases activées en réponse à des facteurs
de croissance et stimulées par la PIK3C (phosphatidyl inositol kinase 3C).
L’expression de AKT1 et 2 est augmentée dans les cancers ovariens et associée
à un haut grade nucléaire et à un mauvais pronostic (15).
Certains oncogènes codant pour des facteurs de transcription peuvent
également être impliqués dans l’oncogenèse des cancers ovariens. Ainsi, les
oncogènes de la famille MYC peuvent être surexprimés ou amplifiés dans 25 à
35 % des tumeurs épithéliales de l’ovaire (16).
Une autre voie potentiellement impliquée dans l’oncogenèse des tumeurs
épithéliales de l’ovaire est la voie de signalisation de WNT induite par la libé-
ration de la β-catenin, qui interagit normalement avec la E-cadhérine. La
β-catenin est codée par le gène CTNNB1. La voie de signalisation induite par
WNT permet la transcription d’élément génomique du groupe TCF (T-cell
factor). Ces éléments comprennent, entre autres, APC et la cycline D1. Dans
les cancers de l’ovaire de type endométrioïde, des mutations de CTNNB1 et
une localisation nucléaire de la β-catenin ont été observées (17).

Les anomalies géniques associées aux tumeurs


ovariennes peuvent être liées aux mécanismes
d’inactivation du chromosome X
Il existe une répartition inégale des protéines codées par les gènes des chromo-
somes X entre les hommes (XY) et les femmes (XX). Des mécanismes
d’inactivation du chromosome X permettent la régulation du dosage génique
des molécules codées par le chromosome X. Ces mécanismes impliquent la
reconnaissance d’un des chromosomes X par un ARN non codant (Xist), qui
se lie à un chromosome X pour initier des remaniements épigénétiques. Ainsi,
l’inactivation du chromosome X repose sur des processus de méthylation et
l’intervention d’histones spécialisés (Macro H2A) qui bloquent l’expression de
nombreux gènes sur ce chromosome X. Ganesan et al. ont montré que BRCA1
pouvait interagir spécifiquement avec le chromosome X inactif. Les cellules
dépourvues de BRCA1 perdent l’expression de Xist et de MacroH2A, ce qui
signifie l’absence du mécanisme permettant l’inhibition d’un chromosome X et
l’altération possible du contrôle du dosage génique des allèles portés par les
chromosomes X (18). Ainsi, les femmes portant des mutations de BRCA1
pourraient être exposées préférentiellement au développement de cancers liés à
une augmentation de l’expression de protéines oncogéniques portées par le
chromosome X (19).
Cheng et al. (3) ont rapporté que les pertes d’hétérozygotie observées dans
les cancers ovariens affectent préférentiellement le chromosome X inactivé.
Hypothèses physiopathologiques dans les tumeurs épithéliales de l’ovaire 53

Ainsi, l’étude des fonctions antioncogéniques des gènes portés par le chromo-
some X et spécifiquement régulés par les mécanismes d’inactivation pourrait
permettre de mieux comprendre la biologie des cancers de l’ovaire.

Contribution des modèles tumoraux à la définition


des mécanismes de l’oncogenèse ovarienne
Des modèles physiopathologiques suggérant une origine inflammatoire ou
traumatique du cancer de l’ovaire ont longtemps résumé nos connaissances
dans le domaine de l’oncogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire (20, 21).
Les données permettant la démonstration formelle de l’implication d’onco-
gènes ou de gènes suppresseurs de tumeurs sont récentes et reposent sur
l’élaboration de modèles murins. Ces modèles constituent une avancée majeure
dans la compréhension de l’oncogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire et
dans le développement des thérapies ciblées.
Orsulic Sandra et al. ont utilisé un modèle murin exprimant un récepteur
pour un Rétrovirus aviaire. Les cellules ovariennes de souris wild type ou défi-
cientes pour p53 furent infectées ex vivo avec les oncogènes c-myc, K-ras, AKT
seuls ou en combinaison, puis réinjectées à des souris. Ces auteurs rapportent
d’abord que la perte de fonction de p53 est nécessaire à l’initiation de la trans-
formation en tumeur épithéliale ovarienne. L’intégrité de p53 prévient la
transformation en cancer ovarien quelle que soit la combinaison d’oncogènes
transférée aux souris. Ces travaux incluent l’oncogenèse des tumeurs ovariennes
dans le cadre du modèle de cancérogenèse multi-étapes décrit par Volgenstein.
La transformation en cancer de l’ovaire nécessite, dans ce modèle, l’absence de
p53 et l’augmentation de l’expression de deux oncogènes (c-myc, K-ras ou
AKT) (22).
Dans les cancers endométrioïdes, Dinulescu DM et al. ont identifié le rôle
de PTEN et K-ras. Ces auteurs ont modulé l’expression du gène suppresseur
de tumeur PTEN ou de l’oncogène K-ras par injection d’Adénovirus dans l’en-
vironnement ovarien murin (23). Dans ce modèle, la perte de PTEN ou
l’augmentation de l’expression de K-ras engendre des lésions dysplasiques.
L’association de la perte de la fonction de PTEN et de l’activité oncogénique
de K-ras induit l’apparition de tumeurs malignes endométrioïdes.
Le développement de tels modèles est indispensable pour analyser au mieux
l’intérêt des thé-rapeutiques ciblées.
Ainsi, les délétions de PTEN étant associées à une augmentation de l’acti-
vité PI3K, AKT, mTOR, les tumeurs endométrioïdes pourraient être des cibles
de la rapamycine. Des inhibiteurs de PI3K peuvent également cibler ces voies
de transduction.
D’autres molécules inhibant le récepteur à l’EGF (epidermal grow factor) et
le VEGF sont en cours de développement clinique.
54 Les cancers ovariens

Conclusion
Les récents progrès émanant de l’élaboration de modèles murins pertinents
montrent que l’oncogenèse des tumeurs de l’ovaire répond à un modèle multi-
étapes. L’altération de la fonction de p53 est probablement un événement
oncogénique précoce, suivi de l’activation d’un oncogène. Ces modèles vont
permettre de rechercher et d’évaluer des thérapeutiques ciblées. L’analyse
protéomique des tumeurs épithéliales de l’ovaire permettra la description fonc-
tionnelle des voies de signalisation activées et la prescription adaptée de ces
thérapeutiques ciblées. L’inhibition de la transduction des signaux moléculaires
d’activation peut également se concevoir en association avec les traitements
cytotoxiques pour prévenir les mécanismes de chimiorésistance.

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Imagerie et cœlioscopie des masses
annexielles

M. Canis, R. Botchorishvili, K. Jardon, B. Rabischong, C. Houlle,


J.-L. Pouly et G. Mage

Introduction
Au moment où il termine le traitement d’une masse annexielle, le chirurgien
doit avoir répondu à un certain nombre de questions. Les réponses doivent
permettre un traitement adapté à chaque lésion et à chaque patiente. Pour cela,
le chirurgien dispose d’éléments cliniques, d’éléments fournis par l’imagerie et
de la macroscopie chirurgicale.
Toute cette démarche doit préciser au mieux la macroscopie ovarienne dont
l’interprétation dépend des données cliniques (âge, activité ovarienne, taille de
la lésion, antécédents familiaux, signes de dissémination péritonéale, etc.). Le
chirurgien accède facilement aux données extra-kystiques, mais doit initiale-
ment se référer aux données de l’imagerie pour la macroscopie intra-kystique.
Le chirurgien doit décider :
– si l’intervention est indispensable ;
– dans quel délai elle doit être programmée ;
– où et par quel type de chirurgien elle doit être pratiquée ;
– quelle voie d’abord doit être utilisée pour accéder à l’abdomen ;
– si une ponction de la lésion est possible ou formellement contre-indiquée ;
– si le traitement de la tumeur doit être une kystectomie ou une annexectomie ;
– si un examen histologique extemporané est nécessaire ;
– si des gestes complémentaires permettant le staging de la lésion doivent être
réalisés immédiatement ;
– si l’annexectomie controlatérale et l’hystérectomie sont indispensables.
154 Les cancers ovariens

Qui opérer et quand ?


Prise en charge préopératoire
Les signes cliniques qui conduisent à la découverte d’une masse annexielle sont
banals (tableau I). La conduite chirurgicale se décide quasiment toujours à la
suite d’un premier examen échographique. Deux situations sont possibles : la
patiente consulte pour un syndrome douloureux aigu de l’abdomen ou le
tableau clinique est chronique.

Tableau I – Signes cliniques révélateurs d’une masse annexielle dans une série continue de
840 patientes opérées par cœlioscopie.

Signes cliniques Lésions bénignes Lésions malignes


N = 808 N = 32
N % N %
Aucun 428 52,9 16 50,0
Douleurs chroniques 276 34,2 10 31,3
Troubles menstruels 56 6,9 2 6,3
Augmentation du volume de l’abdomen 15 1,8 3 9,8
Autres 5 0,6 0 0,0
Syndrome abdominal aigu 28 3,5 1 3,1

Les syndromes aigus de l’abdomen (diagramme 1)


Devant un syndrome douloureux aigu, trois situations sont possibles :
– les complications de l’évolution d’une tumeur maligne évidente (occlusion,
compression…) ;
– les complications d’une masse annexielle le plus souvent bénigne (torsion,
grossesse extra-utérine) ;
– les complications hémorragiques d’un kyste fonctionnel.
La conduite à adopter devant un cancer évident qui se complique d’un
syndrome douloureux aigu de l’abdomen est discutée dans d’autres parties de
cet ouvrage.
La prise en charge d’un syndrome aigu de l’abdomen associé à une masse
annexielle a priori bénigne impose d’éliminer une grossesse extra-utérine
(dosage de βHCG) et une torsion d’annexe.
La torsion, véritable urgence chirurgicale, est difficile à affirmer et à distin-
guer d’une complication hémorragique. La valeur du Doppler dans ce cadre
fait l’objet de publications quelques fois contradictoires (1-5). L’intérêt de
l'évaluation de la vascularisation de l’ovaire paraît logique dans une pathologie
qui aboutit à une occlusion des vaisseaux. Mais les anomalies du Doppler sont
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 155

Diagramme 1 – Syndrome douloureux aigu.

inconstantes, probablement parce que toutes les torsions n’induisent pas une
ischémie aiguë. Le diagnostic de torsion reste difficile. Si le Doppler affirme
l’absence de flux vasculaire dans l’annexe, le diagnostic est probable et il faut
faire la cœlioscopie en urgence. Dans les cas où le diagnostic n’est pas affirmé
par le Doppler, l’évolution clinique peut aider au diagnostic. Si la douleur
diminue au repos de manière nette, il s’agit plus probablement d’une hémor-
ragie due à un kyste fonctionnel et la cœlioscopie peut être évitée. Si la douleur
reste identique après un délai d’une heure, il faut faire la cœlioscopie en
urgence. En cas de doute, la cœlioscopie est indispensable.
Une fois la grossesse extra-utérine et la torsion éliminées, il s’agit le plus
souvent d’un kyste fonctionnel hémorragique dont l’aspect échographique
peut être inquiétant, en raison de l’aspect de pseudo-végétations souvent réalisé
par les caillots intrakystiques (fig. 1). Ces lésions, parfois volumineuses,
peuvent paraître inquiétantes. L’évolution clinique et échographique répond
rapidement aux questions du chirurgien. L’image se transforme en huit à dix
jours (fig. 1). Du fait des modifications spontanées du caillot, une image
pseudo solide de végétation intrakystique devient huit à dix jours plus tard un
kyste à contenu liquide échogène, puis un kyste liquidien pur qui disparaît
spontanément quelques semaines plus tard. Si le tableau clinique initial n’im-
pose pas une intervention chirurgicale immédiate, l’évolution des images
échographiques permet de rassurer rapidement ces patientes.
156 Les cancers ovariens

Fig. 1 – Aspects échographiques de kystes fonctionnels hémorragiques.


a) caillot réalisant un aspect hypo-échogénique non liquidien ;
b) et c) aspect de pseudo-végétation intra kystiques ;
d) liquide à contenu échogène qui témoigne de la résolution du caillot de la figure 1c.

Si, au bout de dix jours, les images ne se modifient pas comme attendu, le
diagnostic doit être remis en cause. Les végétations reprennent leur caractère
inquiétant et les images en nid d’abeille peuvent correspondre à ce que l’on
observe dans une tumeur de la granulosa, dont le contenu jaunâtre peut être
difficile à distinguer d’un corps jaune, même au moment de l’intervention
chirurgicale (fig. 2).

Conduite à tenir devant un tableau clinique chronique


Le rôle diagnostique de la cœlioscopie est incontournable
Dans le cadre des masses annexielles, l’échographie reste la principale technique
d’imagerie. Mais il n’est pas possible de réaliser une sélection préopératoire
parfaite qui permettrait par exemple de réserver la cœlioscopie aux seules masses
quasi certainement bénignes comme le proposait récemment Vergote à la suite
de son étude qui montre que la ponction d’un cancer de stade I influe sur le
pronostic des patientes (6). La ponction doit être évitée autant que possible,
mais refuser la cœlioscopie à toute lésion qui n’est pas absolument non suspecte
à l’échographie, c’est faire de nombreuses laparotomies inutiles. De même,
refuser toute ponction à ces lésions lors d’une intervention chirurgicale, c’est
accepter de nombreuses annexectomies inutiles chez les patientes de moins de
40 ans (7).
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 157

Fig. 2 – Tumeur de la granulosa.


a) aspect échographique ;
b) aspect cœlioscopique ;
c) aspect macroscopique de la tumeur après section en deux parties.

De nombreux scores échographiques ou modèles mathématiques ont été


proposés pour permettre un diagnostic histologique préopératoire précis.
Malheureusement, le diagnostic histologique préopératoire n’est pas encore
possible. En effet, les scores échographiques sont moins fiables lorsqu’ils ne
sont pas utilisés par le groupe qui les a mis au point (8). De plus, Boll et al. ont
comparé la valeur diagnostique des scores échographiques à l’impression
clinique de différents types de chirurgiens, impressions établies au vu des
données cliniques, échographiques et du dosage du CA 125 (9). La fiabilité
diagnostique des modèles les plus sophistiqués n’est pas meilleure que celle de
l’impression des cliniciens. De plus, les conséquences de l’impression clinique
d’un résident, d’un gynécologue et d’un oncologue ne sont pas statistiquement
différentes (9). Tous feraient de nombreuses laparotomies inutiles pour des lé-
sions bénignes et tous opéreraient quelques cancers par incision de
Pfannenstiel.
Ces données montrent qu’il reste une place pour le diagnostic chirurgical.
La cœlioscopie apparaît comme la méthode de choix dans cette indication, elle
permet une inspection de la cavité péritonéale, de la tumeur et du pelvis avant
de décider de la voie d’abord chirurgicale que l’on va utiliser pour le traitement.
Si elle est conçue comme une intervention qui comporte un temps diagnos-
tique et un temps thérapeutique, la cœlioscopie paraît incontournable dans la
plupart des situations. Un diagnostic cœlioscopique n’impose pas un traite-
158 Les cancers ovariens

ment endoscopique (7). De même, la ponction n’est souvent pas utile au


diagnostic de la nature de la lésion et doit autant que possible être évitée dans
les masses suspectes.

La conduite à tenir en préopératoire


À la suite de l’échographie, on peut distinguer plusieurs situations : la lésion
paraît quasi certainement bénigne à l’échographie, le cancer paraît très
probable, la lésion est complexe, mais le cancer n’est pas évident.

La lésion paraît quasi certainement bénigne à l’échographie (diagramme 2)


Avant la ménopause
Cela correspond aux lésions liquidiennes pures dont le liquide peut être écho-
gène, aux lésions qui comporte moins de trois cloisons, et/ou dont les cloisons
font moins de 3 mm d’épaisseur (10, 11). Dans cette situation, le taux de
lésions malignes ou à malignité atténuée est très faible, inférieur ou égal à 1 %.
En pratique, l’échographie est prise en défaut (faux négatifs du diagnostic de
malignité) du fait de lésions végétantes de petite taille situées en dehors ou à
distance de la lésion kystique ou de végétations intra-kystiques de moins de
1 mm de diamètre (7).
Cette situation est simple. Il faut s’assurer que la lésion n’est pas fonctionnelle et
ne va pas disparaître dans les jours qui viennent, puis organiser l’exérèse par voie
cœlioscopique. L’intervention peut être réalisée sans prévoir d’examen extemporané.
Une compétence oncologique n’est pas indispensable. La laparotomie est très impro-
bable, mais le consentement éclairé doit comporter cette possibilité.

Diagramme 2 – Lésion non suspecte à l’échographie.


Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 159

Seule l’évolution de la lésion dans le temps peut confirmer qu’elle n’est pas
fonctionnelle (diagramme 2). Pour cela, un délai de trois mois paraît néces-
saire. Deux questions restent posées. Quelle surveillance pendant ce délai ? Un
blocage de l’activité ovarienne est-il indispensable pendant cette période ? La
réponse est complexe, partagée entre les données de la médecine factuelle et la
réalité clinique qui nous confronte à des patientes qui ne se font pas toujours
suivre de manière très soigneuse, et à l’évolution rapide et surprenante de
lésions malignes initialement très peu inquiétantes à l’échographie. Deux
études, dont un travail prospectif randomisé, montrent que le fait d’utiliser un
blocage ovarien ne favorise pas la disparition des kystes fonctionnels (12, 13).
Mais ne pas donner de traitement expose, si les échographies ne sont pas
mensuelles, à opérer une image « persistante » qui serait en fait une nouvelle
lésion fonctionnelle apparue entre les deux examens. Par ailleurs, donner un
traitement peut aussi faciliter le suivi de la patiente, plus encline à revenir pour
l’échographie de contrôle si on lui prescrit un traitement. Enfin, un délai de
trois mois peut être très long dans l’histoire naturelle d’une tumeur maligne de
l’ovaire. Pour cela, nous utilisons l’attitude suivante :
– en dehors des situations d’urgence, éviter les échographies diagnostiques
prémenstruelles pour éviter le diagnostic en excès de kystes fonctionnels ;
– prescrire un blocage ovarien pour une durée de trois mois ;
– faire une échographie de contrôle au bout d’un mois de traitement et, si la
lésion persiste et n’augmente pas de volume, refaire l’examen à trois mois ;
– opérer les patientes dont la lésion augmente de volume à un mois ;
– opérer les patientes dont la lésion persiste à trois mois.
Le contrôle à 1 mois permet d’arrêter rapidement le traitement des
patientes dont la lésion a disparu dans ce délai, et d’opérer plus vite les lésions
qui augmentent rapidement de volume.

Après la ménopause
Une même attitude reste valable chez les patientes qui sont ménopausées
depuis peu de temps, à condition de réaliser une échographie mensuelle. Les
kystes fonctionnels ne sont pas rares chez ces patientes, ils sont souvent accom-
pagnés de signes fonctionnels typiques qui évoquent, chez la patiente, ceux
qu’elle éprouvait lorsqu’elle était réglée. De nombreuses études montrent que
les lésions liquidiennes pures disparaissent le plus souvent spontanément même
chez les patientes ménopausées (14). Par exemple, parmi 256 masses
annexielles entièrement kystiques identifiées chez des patientes de plus de
50 ans dans le cadre d’un programme de dépistage de cancer de l’ovaire, 125
disparaissent spontanément en quatre à six semaines. Le pourcentage de réso-
lution spontané dépend de l’âge des patientes dans cette étude, il était de 54 %
avant 60 ans et de 23 % après cet âge (14).
Les lésions qui persistent et dont le diamètre est supérieur à 3 cm doivent
être opérées et traitées au moins par annexectomie bilatérale. L’intervention peut
être réalisée sans prévoir d’examen extemporané. Une compétence oncologique n’est
160 Les cancers ovariens

pas indispensable. La laparotomie est très improbable, mais le consentement éclairé


doit comporter cette possibilité.

Le cancer paraît évident ou très probable (diagramme 3)


L’intervention doit être programmée aussi rapidement que possible dans un centre
où l’examen extemporané est possible et ou un staging chirurgical complet pourra
être réalisé dans le même temps. Le bilan préopératoire va avoir trois buts prin-
cipaux :
– faire le bilan d’extension de la lésion ;
– guider le chirurgien dans le « debulking » en identifiant les lésions les plus
volumineuses, en particulier dans la région rétropéritonéale ;
– évaluer l’opérabilité de la carcinose, afin de savoir si une chirurgie optimale
est possible au prix de gestes chirurgicaux incluant une seule résection
digestive.
L’échographie abdominale peut participer à ce bilan, mais il faut aussi une
imagerie en coupe pour répondre à ces questions. Le scanner reste la méthode
la plus employée, la grande vitesse d’acquisition des images permet d’obtenir
une meilleure définition et un diagnostic plus fiable des végétations périto-
néales. Mais la définition de l’IRM s’améliore et elle permet une meilleure
évaluation de la tumeur ovarienne et du pelvis (15, 16). Un bilan urologique
est possible avec ces méthodes pour dépister une atteinte urétérale.
Les marqueurs sont prélevés la veille de l’intervention. Ils sont essentiels pour
suivre la réponse de la patiente aux traitements postopératoires. Il est également
de bonne clinique de stocker des prélèvements sanguins pour réaliser des dosages
particuliers (hormones, neuro-médiateur…) dans le cas où la tumeur ne serait pas
une tumeur épithéliale.

Diagramme 3 – Lésion suspecte à l’échographie.


Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 161

La lésion est plus complexe, mais n’est pas un cancer évident (diagramme 3)
Cette situation plus difficile est fréquente. Dans une série de 1808 patientes
opérées dans le service par cœlioscopie après une échographie, 756 avaient une
image solide ou complexe à l’échographie, parmi lesquelles 76 étaient des
lésions invasives ou à malignité limite (10 %). Cette situation comporte des
lésions très suspectes avec de volumineuses végétations (figs 2, 3, 4) et des
situations simples ou le diagnostic de kyste dermoide est probable après l’écho-
graphie.
Quelle que soit la technologie que l’on emploie, l’apport du Doppler n’est
pas ce que l’on avait espéré au début des années 90. Il peut s’agir d’un élément
supplémentaire de suspicion si les vaisseaux sont situés au centre de la tumeur
et si les index mesurés à ce niveau sont bas (17).
Dans cette situation, l’accès à une technique d’imagerie en coupe est très
importante pour répondre à trois questions :
– s’agit-il d’un kyste dermoïde ?
– quel est le degré de suspicion de cette lésion, où et par qui doit-elle être
opérée ?
– existe-t-il des signes de dissémination péritonéale ?

Fig. 3 – Tumeur séreuse à malignité limite.


a) aspect échographique ;
b) couleur trouble brunâtre du liquide ;
c) aspect cœlioscopique ;
d) aspect intrakystique après ouverture de la pièce opératoire.
162 Les cancers ovariens

a c

Fig. 4 – Tumeur mucineuse à malignité limite.


a) aspect échographique ;
b) liquide filant visqueux typique de cette pathologie ;
c) aspect cœlioscopique ;
d) aspect intrakystique après ouverture de la pièce opératoire.

Le scanner répond bien et facilement à la première question si les mesures


de densité de la graisse sous-cutanée et de la tumeur sont effectuées correcte-
ment. Mais il est moins performant que l’IRM dans le bilan des autres tumeurs
pelviennes (15). Pour cette raison, l’IRM devient l’examen de référence dans
cette situation. Elle fait le diagnostic de kyste dermoïde, si des clichés en
suppression de graisse sont réalisés, et elle permet un bilan plus précis de la
masse annexielle. Le principal problème reste l’accès aux machines d’IRM
encore rares dans notre pays.
La plupart de ces patientes doivent être opérées rapidement, avec la crainte
de ne pas laisser évoluer un cancer. Cependant, il faut savoir que, parmi
250 masses annexielles non liquidiennes pures découvertes, dans le cadre d’un
programme de dépistage du cancer de l’ovaire chez la femme ménopausée, 135
(55 %) ont disparu spontanément en moins de soixante jours (14). Parmi les
114 masses opérées, seulement 7 étaient des lésions malignes. Dans ce
programme de dépistage, en cas d’anomalie échographique, une deuxième
échographie était prévue seulement quatre à six semaines après l’examen initial.
En dehors des lésions très volumineuses ou très suspectes, il n’y a pas lieu
d’opérer en urgence.
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 163

En pratique, plusieurs situations sont possibles :


– le degré de suspicion est très important, on programme l’intervention avec
examen extemporané et compétence oncologique, on essaie d’obtenir une
IRM dans l’intervalle ;
– la lésion n’est pas retrouvée lors d’un deuxième examen réalisé quelques jours
plus tard, un nouveau contrôle est prévu à un mois, les images solides ou
complexes peuvent être difficiles à retrouver à l’échographie ;
– la deuxième technique d’imagerie confirme le diagnostic de kyste dermoïde,
l’intervention est prévue sans urgence, mais la patiente doit être informée du
risque de torsion et de la conduite à tenir dans ce cas. Le chirurgien essayera
de réaliser une kystectomie en plaçant le kyste dans un sac avant la dissection
et en évitant la rupture pour limiter la contamination péritonéale et la forma-
tion d’adhérences post-opératoires (7). L’intervention ne requiert pas de
compétence oncologique ;
– la suspicion est importante, la deuxième imagerie n’apporte pas d’élément
décisif, l’intervention doit être prévue aussi rapidement que possible. Il est
souhaitable qu’elle se déroule dans un centre où examen extemporané et
staging d’un cancer sont possibles.
Ces deux conditions semblent indispensables si la patiente est ménopausée,
dans la mesure où plus de 20 % des lésions seront malignes (7) et où l’on sait
qu’un pourcentage non négligeable de patientes peuvent refuser le restaging si
celui-ci n’a pas été réalisé lors de la première intervention (18). De même,
l’examen extemporané est capital chez les femmes jeunes opérées pour une
lésion suspecte et qui ont déjà subi une ovariectomie ou qui ont une lésion
suspecte bilatérale. Dans ce cas, l’examen extemporané peut guider le chirur-
gien quant à la possibilité de préserver une partie de l’ovaire. Dans cette
dernière situation, le groupe oncologique qui prend en charge la patiente doit
pouvoir entrer en contact avec un centre de procréation médicalement assistée
pour décider les modalités du traitement conservateur.

L’information préopératoire

L’information qu’il faut donner aux patientes est complexe vu la multiplicité


des situations possibles. Mais il faut informer les patientes d’une possible lapa-
rotomie et d’un traitement radical comprenant tous les gestes du staging d’un
cancer de l’ovaire. En pratique, deux contextes sont possibles. Tout en avertis-
sant la patiente de l’ensemble des traitements possibles, on insistera
différemment en fonction du contexte :
– les femmes de moins de 40 ans qui ont une lésion unilatérale, où le traite-
ment conservateur peut être envisagé même en cas de cancer, avec qui il faut
discuter la possibilité d’une ré-intervention qui serait réalisée quelques jours
plus tard au vu des résultats de l’examen anatomo-pathologique définitif ;
164 Les cancers ovariens

– les patientes de plus de 40 ans avec qui on envisage le traitement en un seul


temps, en incluant le traitement radical de l’appareil génital et le staging
complet.
Cette étape est capitale sur le plan médico-légal, mais elle est surtout très
importante pour la bonne organisation et la bonne observance du traitement.
Un restaging prévu avant l’intervention sera quasiment toujours accepté par la
patiente et réalisable dans des délais brefs, un restaging dont la patiente est
prévenue huit jours après l’intervention est mal accepté et réalisé dans des
délais beaucoup plus longs.

L’intervention chirurgicale
Dans notre pratique, elle débute quasiment toujours par une cœlioscopie
diagnostique. Ce diagnostic chirurgical concerne la lésion, son extension éven-
tuelle, elle vient le cas échéant compléter le bilan d’opérabilité d’une carcinose
péritonéale.

La mise en place de la cœlioscopie


La mise en place de la cœlioscopie s’adapte à chaque situation. Les buts sont :
– permettre une évaluation correcte de la lésion et du péritoine ;
– éviter la ponction aveugle de la lésion ;
– éviter autant que possible les risques de métastases pariétales sur les trajets de
trocart.
La technique traditionnelle de cœlioscopie (création du pneumopéritoine
et mise en place du premier trocart dans l’ombilic) n’est utilisée que pour les
lésions de moins de 7 cm de diamètre. Si le diamètre est plus important, la
création du pneumopéritoine, ou les deux gestes sont réalisés dans l’hypo-
chondre gauche, surtout si la distance ombilico-pubienne est courte. Dans ce
cas, nous utilisons un cœlioscope de 5 mm de diamètre, ce qui limite les consé-
quences d’un point de vue esthétique.
Si la masse est très suspecte et ou si une carcinose est présente, il semble
souhaitable de réaliser une open laparoscopie qui permet de fermer l’aponé-
vrose en fin d’intervention, ce qui, d’après un travail de van Dam, permet de
diminuer le risque de greffe tumorale sur la cicatrice de trocart (19). Cette
technique peut, en cas de volume tumoral très important, être réalisée dans
l’hypochondre gauche. Il est souhaitable, là aussi, de disposer d’un cœlioscope
de 5 mm qui peut être introduit dans plusieurs trocarts, ce qui facilite le bilan
de la cavité péritonéale si la masse est très volumineuse ou si existent des adhé-
rences étendues.
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 165

Le diagnostic chirurgical (diagramme 4)


La cœlioscopie est une méthode de diagnostic chirurgical (10, 11). Le
diagnostic chirurgical comporte deux temps opératoires : une étape d’inspec-
tion de la cavité péritonéale et de l’ovaire, puis éventuellement une étape
d’inspection endokystique, qui complète au besoin l’évaluation endokystique
débutée avant l’intervention grâce à l’imagerie.

Diagramme 4 – Cœlioscopie.

Le bilan de la cavité péritonéale et des annexes


Ce bilan débute par la cytologie péritonéale, qui comporte à la fois l’aspira-
tion du liquide présent dans la cavité et le lavage-aspiration avec un faible
volume, du pelvis et des gouttières pariéto-coliques. Ce temps essentiel, au
moment de la prise en charge des tumeurs malignes, ne doit pas être oublié.
Pour cela, il est bon de demander aux infirmières du bloc de rappeler ce geste
aux chirurgiens.
Le deuxième temps est l’inspection de la cavité péritonéale et des annexes.
La cœlioscopie dans ce cadre a un avantage majeur, c’est l’effet loupe que l’on
obtient si l’on approche l’extrémité du coelioscope à moins de 1 cm de la
surface du péritoine. Cette loupe permet de voir des végétations que l’on ne
voit pas en laparotomie (fig. 5). Par ailleurs, Possover a montré que, malgré ces
166 Les cancers ovariens

Fig. 5 – Aspects de péritoine.


a) taches blanches à la surface d’un péritoine normal ;
b) microvégétations correspondant à de l’endométriose chez une patiente opérée pour une
tumeur à malignité limite ;
c) microvégétations correspondant à des métastases d’un cancer ovarien lors d’une intervention
de second look.

limites dans l’évaluation du mésentère, l’inspection cœlioscopique est fiable


dans le diagnostic de dissémination d’une tumeur de l’ovaire (20). En effet, il
est exceptionnel de rencontrer des métastases mésentériques chez une patiente
qui n’a aucune métastase sur le péritoine pariétal ou sur l’épiploon.
Le troisième temps est l’inspection des annexes, qui doivent être mani-
pulées avec précaution pour prévenir toute rupture involontaire. Si des
végétations ou des zones suspectes sont identifiées, elles sont biopsiées et adres-
sées à l’examen extemporané.

L’évaluation intra-kystique
L’inspection péritonéale va permettre d’identifier des situations simples.
– les lésions non ovariennes (séquelles postopératoires, kystes péritonéaux,
séquelles infectieuses…) qui peuvent être complexes et suspectes à l’échogra-
phie, mais qui sont quasiment toujours bénignes. Leur diagnostic chirurgical
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 167

est généralement simple, en se méfiant des associations possibles, et leur trai-


tement peut le plus souvent être réalisé par voie endoscopique (fig. 6). Dans
notre expérience, elles sont significativement plus fréquentes parmi les
lésions complexes à l’échographie (10, 11) ;

Fig. 6 – Pyosalpinx chez une patiente ménopausée.


a) aspect initial de l’annexe ;
b) microvégétations diaphragmatiques vues lors de l’inspection du péritoine ;
c) aspect de pseudovégétations intrakystiques dues à la muqueuse de la trompe et qui expli-
quait l’image échographique très suspecte.

– les lésions ovariennes qui sont apparues complexes à l’échographie, mais dont
le diagnostic macroscopique est simple et élimine tout doute quant à la béni-
gnité de la lésion. Ce sont les kystes hémorragiques associés à des adhérences
et les endométriomes qui peuvent contenir des débris solides qui ont un
aspect de pseudo-végétations à l’échographie (figs 1 et 7). Pour ces situations,
le traitement peut être conservateur et la ponction comporte peu de risque.
Il est important de connaître la séméiologie chirurgicale qui permet de
distinguer kyste organique et kyste fonctionnel (tableau II) ;
– les cancers évidents devant la présence d’une carcinose péritonéale et d’un
gâteau épiploïque et qui posent malheureusement peu de problèmes diagnos-
tiques (fig. 8) ;
168 Les cancers ovariens

Tableau II – Comparaison kyste fonctionnel/kyste organique.

Organique Fonctionnel
Ligt Ut. Ovarien Allongé Normal
Paroi Epaisse Fine
Vaisseaux Peigne au niveau du hile Coraliforme
Aspect liquide Variable Safran
Paroi interne Lisse Rétinoide
Kystectomie Possible « Impossible »

– les lésions a priori bénignes au vu de l’ensemble des données opératoire et


préopératoire (fig. 9) pour lesquelles le traitement peut être conservateur et
la ponction ne comporte pas a priori de risque particulier. La fréquence des
lésions malignes dans ce groupe échographique est inférieur à 1 % ;
– les images complexes à l’échographie pour lesquelles l’imagerie en coupe a
montré du tissu graisseux intra-ovarien et posé le diagnostic quasi certain de
kyste dermoïde qui sera traité dans un sac par kystectomie sans ponction si
le diamètre est inférieur à 8 cm. La kystectomie transpariétale reste une
méthode utile si le kyste est plus volumineux (10).

Fig. 7 – Endométriome ovarien : zones solides intrakystiques dues à des pigments d’hémosi-
dérine qui peuvent réaliser des aspects de végétation à l’échographie.
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 169

Fig. 8 – Ponction à l’aiguille d’un kyste d’aspect échographique et cœlioscopique bénin.

Fig. 9 – Carcinose péritonéale.

À côté de ces situations simples, il reste des masses a priori bénignes lors de
l’inspection endoscopique initiale, mais pour lesquelles l’imagerie préopéra-
toire suggérait la présence de zones suspectes intra-tumorales et où se pose la
question de faire ou de ne pas faire une ponction, d’envisager un traitement par
kystectomie ou par annexectomie.
Dans cette situation, la ponction est décidée au cas par cas en fonction de
l’ensemble des données fournies par la clinique, l’imagerie et l’inspection
chirurgicale. Schématiquement, il existe deux extrêmes :
170 Les cancers ovariens

– les lésions qui comportent de nombreuses végétations intra-kystiques ou des


végétations très volumineuses et très vascularisées, ou une image très
complexe pour laquelle un traitement conservateur de l’ovaire n’est pas envi-
sageable et où la ponction est inutile et dangereuse (figs 2, 3, 4) ;
– les lésions essentiellement liquidiennes qui comportent une seule végétation
intra-kystique de petite taille. Granberg a montré que le taux de lésions
malignes est inférieur à 10 % dans ce groupe, et un traitement conservateur
de l’ovaire est possible (21). La ponction qui va permettre de confirmer les
données de l’échographie et d’envisager le traitement conservateur, après
examen extemporané, de la végétation est logique.
La ponction ne doit pas être un geste automatique, mais elle ne doit pas être
redoutée par le chirurgien. Chez les femmes âgées de moins de 40 ans, la
crainte de la ponction ne doit pas faire pratiquer une annexectomie systéma-
tique. Les données publiées par Vergote, qui suggèrent un risque pronostique
de la ponction, ont des limites déjà évoquées (6). Elles ne démontrent pas un
risque pronostique lié à une ponction cœlioscopique bien faite.
Actuellement, la ponction est réalisée après avoir chaque fois que cela est
possible placé l’ovaire dans un sac. Nous utilisons un système de 5 mm avec
aspiration-lavage pour toutes les lésions volumineuses et nous refermons le site
de ponction avec une endoloop après l’inspection endokystique toutes les fois
que le contenu du kyste paraît suspect. Il est illusoire de dire que cela évite
toute contamination péritonéale, mais ces précautions limitent au maximum la
contamination (figs 10, 11). De la même manière, il serait illusoire de proposer
une tentative de kystectomie sans ponction. En effet, si la lésion est un cancer,
elle infiltre le plan de clivage et la kystectomie sans rupture est quasi certaine-
ment impossible.

Utilisation de l’examen extemporané


Cet examen est le dernier instrument du chirurgien dans sa décision opératoire.
Cet examen est fiable, mais il comporte un certain nombre de faux négatifs
dans le diagnostic de cancer et des cas où le diagnostic histologique per-opéra-
toire est difficile et ne permet pas de guider le geste chirurgical.
Les faux négatifs du diagnostic de malignité sont plus souvent les consé-
quences de prélèvements inadaptés que de difficultés d’interprétation des lames
histologiques (22, 23).
L’examen histologique per-opératoire ne doit donc pas être utilisé pour
décider du traitement de l’annexe. Si une annexe est macroscopiquement
suspecte, le traitement chirurgical sera l’annexectomie. Cette règle, comme
toutes les règles, a des exceptions. La première est l’existence d’une végétation
unique chez une femme jeune. Si l’inspection est complète et fiable, la zone
qu’il faut biopsier est unique, le risque de faux négatif quasi nul. Dans cette
situation, l’examen extemporané de la zone suspecte peut permettre de réaliser
une kystectomie si la lésion est effectivement bénigne, ce qui est le cas dans plus
Imagerie et cœlioscopie des masses annexielles 171

Fig. 10 – Kyste dermoïde très suspect à l’échographie, les végétations sont visibles à travers la
paroi du kyste avant la ponction et correspondent aux dépôts de sébum.

Fig. 11 – Techniques de ponction cœlioscopique.


a) ponction dans un sac placé dans le péritoine ;
b) ponction dans un sac dont l’extrémité a été extériorisée, il est important de bien voir la
surface du kyste pour ponctionner dans le sac et non à travers le sac ;
c) et d) ponction au trocart d’un kyste trop volumineux pour être placé dans un sac, après
kystoscopie, fermeture du site de ponction avec une endoloop.
172 Les cancers ovariens

de 80 % quand la végétation est unique et de petite taille (21). La deuxième


exception se rencontre chez les femmes jeunes qui ont une lésion suspecte bila-
térale ou unilatérale, mais avec une annexe unique. Dans cette situation, la
décision d’annexectomie est particulièrement lourde de conséquences et ne
doit être prise qu’après un examen extemporané.
L’examen extemporané est surtout utilisé pour confirmer qu’il s’agit d’une
lésion maligne et qu’un staging immédiat est indispensable. Là encore, les déci-
sions doivent être plus prudentes chez les femmes jeunes et, dans le doute, il
faut savoir différer les gestes radicaux. Cette attitude, qui suppose un traite-
ment en deux temps opératoires, peut même être envisagée en cas de cancer
confirmé. En effet, le décision définitive d’un traitement conservateur n’est
possible qu’en fonction du type histologique précis de la tumeur et du grade
histologique. Ces données ne sont souvent établies qu’après les résultats histo-
logiques définitifs. Cette démarche conservatrice doit aussi prendre en compte
les possibilités des techniques de procréation médicalement assistée.
Cette attitude n’est acceptable qu’à la condition absolue que la tumeur ait
été enlevée complètement et immédiatement lors de la première intervention.

Conclusion
Le diagnostic chirurgical d’une tumeur annexielle est un problème fréquent,
qui est souvent très simple. Cependant, la plus grande vigilance est toujours
indispensable, car certaines situations sont très complexes et les erreurs de
diagnostic peuvent conduire à des retards thérapeutiques importants ou à des
disséminations postopératoires graves pour la patiente. Les complications de la
cœlioscopie ont confirmé les données observées après laparotomie et on sait de
manière certaine que la ponction ou la biopsie d’une lésion maligne qui est
laissée en place expose à un risque de dissémination postopératoire (7).
Pour résoudre ces situations difficiles et éviter ces complications, le chirur-
gien doit tenir compte des données de l’imagerie. Tous les chirurgiens espèrent
que les progrès de l’imagerie faciliteront leur travail dans le futur. Mais, pour
le moment, le diagnostic histologique préopératoire n’est pas fiable. Il est
possible dans des situations évidentes que le chirurgien pourrait gérer seul,
mais il répond mal aux questions complexes qui rendent le chirurgien perplexe.
Les arbres de décisions que nous proposons visent à limiter les risques de ponc-
tions, tout en ne multipliant pas les indications d’annexectomie inutiles chez
les femmes jeunes.

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Intensification de la chimiothérapie
en consolidation

H. Curé, J.-O. Bay, B. Choufi et P. Chollet

Résumé
La chimiosensibilité du cancer de l’ovaire est reconnue depuis plus de trente
ans. Pourtant, les résultats à long terme de cette pathologie restent médiocres
avec moins de 20 % de survie à cinq ans pour les formes évoluées. C’est pour-
quoi l’intensification de la chimiothérapie dans cette maladie extrêmement
chimiosensible doit être considérée. Les auteurs rapportent ici les expériences
française, européenne et américaine de la chimiothérapie à haute dose en situa-
tion de consolidation après obtention d’une réponse complète ou d’une bonne
réponse partielle après la chimiothérapie de première ligne. Les résultats défi-
nitifs de l’essai multicentrique français prospectif de phase III randomisée de
chimiothérapie de consolidation (intensif versus standard) sont présentés dans
cet article. Même si une tendance se dégage pour le bras intensif, les auteurs ne
recommandent pas l’intensification de la chimiothérapie en consolidation pour
compléter l’effet anti-tumoral obtenu après quatre à six cycles d’une chimio-
thérapie à base de platine.
Mots-clés : cancer de l’ovaire, stade avancé, chimiothérapie intensive.

Introduction
Le cancer de l'ovaire, en raison d'une extension longtemps asymptomatique,
est découvert chez plus de deux tiers des femmes à un stade évolué (stades III
et IV de la classification de FIGO, Fédération internationale des gynécologues
et obstétriciens). Malgré la réelle efficacité du traitement multidisciplinaire mis
en œuvre après le diagnostic, la durée médiane de survie des patientes atteintes
d'un cancer avancé est de vingt à trente-huit mois dans la plupart des études et
le taux de survie globale à cinq ans n'excède pas 15 % (1).
342 Les cancers ovariens

Ces résultats ne se sont guère améliorés dans les dernières décennies.


Pourtant, la chirurgie d'exérèse est aujourd’hui mieux réglée : soit agressive
d’emblée, soit après une chimiothérapie première (2) en cas de non-résécabi-
lité immédiate (3) avec comme objectif d’obtenir, le plus tôt possible dans la
prise en charge thérapeutique des malades, le résidu tumoral minimum
admis par tous comme un facteur de bon pronostic. Par ailleurs, la chimio-
thérapie complémentaire s'est améliorée grâce à l’association d’un
organo-platine et du paclitaxel : dans l’usage, Taxol®-carboplatine, devenu le
standard depuis la publication de l’essai 111 du Gynecology Oncology Group
(GOG) en 1996 (4).

Malgré cela, la médiane de survie n'est que de douze à seize mois chez les
patientes présentant encore des lésions tumorales actives au cours de l'opéra-
tion dite de « second look » (SLO). Et même lorsque la SLO est négative, la
probabilité de rechute de la maladie est évaluée à 10 % par an, avec un taux de
survie à cinq ans, de l’ordre de 50 % (5).

Face à un devenir aussi sombre, plusieurs stratégies ont été envisagées pour
compléter ou consolider l'effet antitumoral obtenu par le traitement de
première ligne. Parmi ces moyens, la chimiothérapie intensive, en augmentant
la concentration intracellulaire des agents anticancéreux, pourrait augmenter la
cytotoxicité vis-à-vis des cellules tumorales et surmonter les résistances poten-
tielles des cellules aux drogues (6).

Justification des intensifications thérapeutiques

Les données expérimentales

Le concept d'intensification thérapeutique a émergé progressivement des


données expérimentales, montrant l'existence d'une relation dose-effet pour la
plupart des agents cyto-toxiques. La forme de la courbe dose-réponse est habi-
tuellement de type sigmoïde, avec un seuil, une phase linéaire, puis une phase
en plateau. Skipper a bien mis en évidence chez l'animal l'importance de la
dose en cancérologie en montrant qu'une réduction de dose dans la phase
linéaire de la courbe dose-réponse entraînait une chute du taux de guérison
avant même que l'on note une diminution significative du taux de rémission
complète (7). Norton et Simon ont élargi le modèle en émettant l'hypothèse
que le taux de régression tumorale était directement proportionnel à la dose de
chimiothérapie administrée et au taux de croissance de la tumeur (8). Enfin,
Goldie et Goldman ont suggéré que plus la réponse thérapeutique est longue à
se dessiner, plus le taux de mutation et de résistance aux drogues s'accroît (9).
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 343

Le cancer de l'ovaire est chimiosensible


La chimiothérapie de première ligne du cancer épithélial de l’ovaire comprend,
depuis l’essai 111 du GOG, six cycles d’une combinaison Taxol® et sel de
platine (4). Le cancer est bien une maladie chimiosensible dès lors que la
première ligne thérapeutique permet d’obtenir un taux de réponse clinique
complète de 75-85 % avec 40 % de SLO négative et 25 % de réponse complète
pathologique pour les patientes atteintes d'un stade avancé FIGO III-IV (10).

Le concept de dose-intensité s'applique au cancer de l'ovaire


L'effet de l'intensité de dose d'une chimiothérapie majeure sur l'issue clinique
a été analysé rétrospectivement par Hryniuk et Levin dans le cancer ovarien.
Cette analyse rétrospective, certes un peu ancienne car publiée en 1987, mais
à ce jour non contestée, a porté sur 75 essais randomisés. Elle a comparé la
dose-intensité relative des drogues administrées par rapport à celles d’un proto-
cole de référence de l’époque, le CHAP de Gréco (11). Un lien étroit entre la
réponse clinique ou la médiane de survie et la dose-intensité du cisplatine a été
observé. L’effet de la dose-intensité du platine en monochimiothérapie sur la
réponse est statistiquement significatif (p < 0,02) ; l’effet dose-intensité relatif
du platine en polychimiothérapie s’atténue au-delà d’un seuil situé vers 25 à
30 mg/m2 de cisplatine par semaine ; et il n’a pas été observé de différence
statistiquement significative entre platine en association et platine seul pour
une dose-intensité donnée de platine, mais l’association CAP ou CHAP
entraîne un taux de réponse significativement plus élevé que le platine seul.
Quant à l’effet dose-intensité du cyclophosphamide et l’effet dose-intensité de
l’adriamycine, ils sont apparus à la limite de la significativité statistique. Un
seuil de l’effet dose-intensité est également retrouvé pour le carboplatine (12) :
chez 128 malades traitées par carboplatine seul, dont deux tiers ont reçu 300 à
400 mg/m2 (extrêmes 40-1 000 mg/m2), on observe que le taux de réponse
n’augmente plus significativement au-delà d’une AUC de 5 à 7 mg/ml x min,
alors que les toxicités augmentent (près de 100 % de leucopénie et thrombo-
pénie pour une AUC ≥ 10 mg/ml x min).

L'effet-dose du cisplatine est toutefois limité


Méta-analyse
Une méta-analyse portant sur 61 essais prospectifs (4 118 patientes), rando-
misés ou non, publiés entre 1976 et 1993, a étudié le rôle relatif de la
dose-intensité du sel de platine, de la dose-intensité des drogues associées et de
la dose globale administrée (13). Il n’y a pas de lien entre la survie médiane et
la dose-intensité du cisplatine à chaque cycle ou la dose-intensité globale du
344 Les cancers ovariens

cisplatine (tenant compte de la totalité des cures administrées). En revanche, la


dose-intensité globale de chimiothérapie (tenant compte de l’ensemble des
drogues et des cures administrées) a une forte valeur pronostique : une dose-
intensité globale inférieure à six cures de cisplatine 75 mg/m2 associée au
cyclophosphamide 750 mg/m2 toutes les trois semaines est associée à un risque
de rechute significativement plus élevé.

Études randomisées
De nombreuses études randomisées prospectives testant la dose-intensité de
platine et, pour certaines d’entre elles, la dose totale de platine ont été réalisées.
Si l’on ne retient que les essais ayant comporté une dose-intensité minimale de
50 mg/m2 toutes les quatre semaines (ou équivalent carboplatine), même si
l’augmentation de la dose-intensité de platine est souvent modeste, de l’ordre
d’un facteur deux au maximum, la médiane de survie des malades est toujours
améliorée par des doses plus fortes de platine. Cependant, les différences de
survie ne sont pas toujours statistiquement significatives du fait d’effectifs de
malades parfois trop faibles. Seuls quatre essais sont statistiquement significa-
tifs (14-17) (tableau I). Parmi ceux-ci, l’étude de Kaye (14) a montré que le
bénéfice sur la survie de la dose-intensité du platine s’estompait avec le temps,
surtout pour le groupe de malades à résidu tumoral inférieur à 2 cm (à quatre
ans survie du bras cisplatine 100 = 44 % versus 41 % pour le bras cisplatine 50),
le bénéfice se maintenant mieux dans le groupe où le résidu est supérieur à
2 cm (survie à quatre ans de 24 % versus 14 %). L’étude de Murphy à
Manchester (16) a diminué la dose-intensité de moitié tout en conservant la
même dose totale ; le taux de réponse est de 76 % dans le bras pleine dose-

Tableau I – Études randomisées statistiquement significatives de dose-intensité de platine.


Références Dose n Nombre Intervalle Dose totale Taux de réponse Survie médiane
(mg/m2) de cyles (sem.) identique objective (%)
Ngan CDDP 50 --- 3-4 non 55 SG à 3 ans
1989 120 vs vs 60 % vs 30 %
(15) vs 3-4 30 (différence
60 significative)
Kaye CDDP 159 6 3 non 61 114 vs 69 sem.
1996 100 vs vs vs SG à 4,9 ans
(14) vs 6 3 34 32.4 %
50 vs 26,6 % (NS)
Bella CDDP 99 (3) x 2 1 oui 55 SG à 8 ans
1994 100 vs vs vs p = 0,03
(17) vs 6 3 48
100
Murphy CBDCA 99 6 8 oui 76 recul insuffisant
1993 300 vs vs vs
(16) vs 12 12 48
150
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 345

intensité versus 48 % dans le bras mi dose-intensité (p = 0.009) et le taux de


progression en cours de chimiothérapie est respectivement de 8 % versus 42 %
(p = 0,0003). Enfin, l’étude de Bella (17) qui a étudié l’augmentation de la
dose-intensité sans modifier la dose totale du cisplatine, décrit un bénéfice à
très long terme (à huit ans, p = 0,03).
Quant à l'essai du GOG qui a traité 485 patientes, soit dans un bras intensif
(100 mg/m2 de cisplatine et 1 000 mg/m2 de cyclophosphamide, quatre fois),
soit dans un bras conventionnel (50 mg/m2 de cisplatine, 500 mg/m2 de cyclo-
phosphamide, huit fois), il n'a montré aucune amélioration de survie (18).
De plus, les tentatives d'intensification de dose de platine sont freinées par les
effets secondaires, notamment la neurotoxicité. C'est ainsi que la majorité des 50
malades traitées sous l'égide du National Cancer Institute par le cisplatine à la
dose double de 40 mg/m2 et le cyclophosphamide à la dose de 200 mg/m2,
pendant 5 jours, toutes les quatre à six semaines, n'ont pu recevoir que trois
cycles en raison de l'apparition d'une neuropathie périphérique invalidante (19).
Une autre voie possible est celle de l’association de cisplatine et de carboplatine.

Association cisplatine-carboplatine
La toxicité très différente du cisplatine (neurologique et rénale) de celle du
carboplatine (hématologique) rend possible l’association de ces deux médica-
ments en vue d’une intensification des doses totales de platine. Plusieurs essais
ont démontré la faisabilité de cette association. La toxicité est surtout hémato-
logique (leucocytes et plaquettes) et neurologique, notamment auditive (20-22).
Une étude randomisée comparant cisplatine 100 et cyclophosphamide 600 à
l’association cisplatine 100, carboplatine 300 et cyclophosphamide 300 a été
réalisée par le groupe gynécologie de la Fédération nationale des centres de lutte
contre le cancer (FNCLCC). De février 1992 à décembre 1996, 195 patientes
conservant une maladie résiduelle après chirurgie de première intention ont été
incluses dans cette étude. L’intensification de la dose de platine obtenue par la
combinaison des deux sels de platine a permis d’augmenter la médiane et la
probabilité de survie sans rechute à trois ans (17,4 mois et 22 % versus treize
mois et 11 %) d’une façon significative (p = 0,01) mais sans impact sur la survie
globale, au prix d’une toxicité hématologique et auditive qui aboutit à ne pas
recommander cette combinaison de deux sels de platine pour le traitement ulté-
rieur des patientes atteintes de cancer de l’ovaire (23).

La chimiothérapie intensive avec support de cellules souches


hématopoïétiques peut s'appliquer au cancer de l'ovaire (24)
La chimiothérapie intensive a été principalement étudiée dans les lymphomes
non hodgkiniens, la maladie de Hodgkin, le cancer du testicule et, plus récem-
ment, le cancer du sein. Dans ces pathologies, un taux élevé de réponse
346 Les cancers ovariens

complète a été observé chez les patientes en réponse partielle d'une chimiothé-
rapie de première et de deuxième ligne, démontrant ainsi l'augmentation de la
cytotoxicité antitumorale obtenue par cette approche.
Le cancer de l'ovaire est un bon modèle pour étudier le bénéfice de l'inten-
sification thérapeutique : il s'agit d'une tumeur chimiosensible, spécialement
aux agents alkylants, et où une relation dose-effet est démontrée, en particulier
avec les organo-platines. Il s'agit également d'un cancer où les facteurs de
pronostic et les résultats à long terme des traitements standards sont bien
établis, et où une contamination de la moelle et du sang périphérique par les
cellules malignes n'est pas détectée par les moyens conventionnels (25). Ce
point mérite cependant d'être tempéré par la détection, par des méthodes
immuno-histochimiques plus fines, de micro-métastases médullaires et
sanguines circulantes dans trois études assez récentes (25-27). En fait, les méta-
stases circulantes n’ont jamais freiné la pratique de l’autogreffe dans les tumeurs
solides ; et la purge des cellules souches hématopoïétiques n’a jamais été réelle-
ment validée.
Dans le cancer de l’ovaire, l’analyse des données de la chimiothérapie inten-
sive de rattrapage permet d’affirmer que cette procédure permet d’obtenir un
taux élevé de réponses voisin de 70 %, dont 30 % de réponse complète, alors
que la probabilité de réponse à une chimiothérapie de deuxième ligne n’excède
pas les 30 %. Cependant, la morbidité précoce est forte (5-20 %) dans cette
population prétraitée et la durée de réponse est courte, de l’ordre de 3 à
8,5 mois (28). C’est pourquoi la chimiothérapie intensive dans le cancer
épithélial de l’ovaire ne s’est développée qu’en situation de consolidation.

Résultats cliniques des intensifications


thérapeutiques en situation de consolidation
L’expérience française (29)
L'expérience rétrospective du centre anticancéreux de Clermont-Ferrand
Entre août 1984 et décembre 1999, 80 greffes ont été réalisées au centre anti-
cancéreux de Clermont-Ferrand chez 77 patientes (3 doubles greffes à plus
d'un an d'intervalle pour rechute). Toutes les malades (âge moyen : 49 ans ;
extrêmes : 23 et 65 ans) étaient atteintes de cancer évolué de l'ovaire (60 au
stade III, 16 au stade IV et 1 au stade IIC multirécidivant).
Elles avaient toutes reçu la même thérapeutique initiale comprenant une
tentative de chirurgie cytoréductrice première (15 complètes, 26 optimales, 22
sub-optimales, 14 incomplètes) suivie de six séquences en moyenne de chimio-
thérapie à base d'un sel de platine (un tiers des patientes environ avait reçu du
paclitaxel).
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 347

La SLO a été réalisée 71 fois car il y a eu six refus mais la chirurgie initiale
était alors, soit complète (3), soit optimale (3). 43 sur 71 SLO étaient positives
(60,5 %), permettant de plus, et le plus souvent, une deuxième réduction
tumorale satisfaisante. 26 SLO étaient négatives (39,5 %), mais les patientes
présentaient alors des facteurs bien connus de mauvais pronostic : grade histo-
pronostique élevé et/ou masse résiduelle après chirurgie première ≥ 2 cm
faisant redouter une probable récidive.
Si bien qu'avant chimiothérapie intensive, la grande majorité des patientes
présentait la maladie résiduelle la plus réduite possible (28 SLO négatives,
37 lésions complètement excisées ou ≤ 2 cm, seulement 6 ≥ 2 cm et 6 non
évaluées, mais ces 6 patientes étaient en rémission complète clinique).
La chimiothérapie intensive a comporté, soit du melphalan haute dose à la
posologie de 140 mg/m2 (26/80 greffes), soit la combinaison de carboplatine
(1 000 à 1 500 mg/m2/cure) et cyclophosphamide (6 000 mg/m2/cure) frac-
tionnée sur quatre jours (54/80 greffes).
Le support hématologique à cette chimiothérapie à haute dose n’a
comporté que des cellules souches hématopoïétiques. Il n’a pas été utilisé de
facteurs de croissance hématopoïétique en post-autogreffe. Jusqu’en 1992, le
prélèvement de la moelle osseuse sous anesthésie générale au niveau des ailes
iliaques postérieures (environ 1 litre de moelle par malade) a été couramment
utilisé (37 fois/80). Depuis 1992, les cellules souches hématopoïétiques sont
recueillies au niveau du sang périphérique par cytaphérèses (en moyenne 2 par
patiente) après une mobilisation comportant une chimiothérapie par cyclo-
phosphamide 3 gr/m2 en J1 ou combinant etoposide 200 mg/m2/j en J1 et J2
et cyclophosphamide 2 g/m2/j en J3 et J4 suivie de G-CSF à la posologie de
5 µg/kg/j jusqu’au jour de la dernière cytaphérèse (39 fois/80). Pour quatre
patientes, un prélèvement de moelle osseuse a dû compléter le greffon sanguin
périphérique insuffisant.
Aucun échec de prise de greffon n'a été observé. La restauration hématolo-
gique complète (polynucléaires neutrophiles ≥ à 1 x 109/l et plaquettes
≥ 50 x 109) après moelle osseuse a nécessité un délai médian de trois semaines
avec un support transfusionnel de 5 culots globulaires et 5 concentrés unitaires
de plaquettes en moyenne par patiente ; avec les CSP, ce délai s'est raccourci à
onze jours et les besoins transfusionnels ont été divisés par deux ou trois. Il faut
toutefois signaler trois thrombopénies prolongées (avec le régime melphalan
haute dose). Au cours de cette aplasie obligatoire, il ne sera enregistré que
quatre épisodes infectieux sévères sans séquelle : trois méningites à cytoméga-
lovirus et une cellulite périnéale à entérocoques. Toutefois, il faut déplorer un
décès toxique cinq jours après la fin de la chimiothérapie intensive par
défaillance multiviscérale (taux de décès toxique de 1,25 %) et deux cardio-
myopathies aiguës dues à l'Endoxan® haute dose, fort heureusement
complètement résolutives.
Quant aux résultats à long terme : avec un recul médian après greffe de plus
de sept ans (87 mois exactement, extrêmes : de 2 à 186 mois), 16 patientes
(21 %) sont toujours vivantes en rémission complète apparente sans traitement
348 Les cancers ovariens

complémentaire avec une bonne qualité de survie, 7 patientes (9 %) ont


rechuté, mais sont toujours vivantes, et 54 patientes (70 %) sont décédées par
progression tumorale sauf 3 (un décès toxique et deux leucémies aiguës secon-
daires au melphalan). À signaler que la rechute (58 patientes/77) apparaît en
moyenne dix-neuf mois après la greffe, laquelle n'empêche pas la reprise du
traitement spécifique qui permet d'obtenir une survie de dix-huit mois en
moyenne également, avec même de nouvelles réponses complètes.
Au total, avec une médiane de survie globale de quarante-quatre mois et de
survie sans rechute de dix-neuf mois après greffe, la survie globale à cinq ans
est de 39 %, la survie sans rechute est de 18 % (fig. 1). Si la survie est calculée
à partir du diagnostic, à cinq ans la survie globale est de 51 % avec une médiane
de 60,5 mois et la survie sans rechute est de 23 % avec une médiane de trente
et un mois. Parmi les facteurs pronostiques, le plus significatif est l'état de la
maladie constaté au second look : lorsque la rémission complète pathologique
est obtenue (SLO négative), la survie à cinq ans est de 54 % avec une médiane
de soixante-deux mois ; elle n'est plus que de 27 % avec une médiane de trente
et un mois lorsque la SLO est positive (fig. 2). Les résultats actualisent les
données précédemment publiées par M. Legros† et al. en 1997 (30).

Survie Médiane (mois) 3 ans 5 ans


globale 44 58 % 39 %
sans rechute 19 27 % 18 %

Fig. 1 – Chimiothérapie de consolidation (n = 80 ptes) à Clermont-Ferrand.


Survie à partir de la date de la greffe : survie globale versus survie sans rechute.
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 349

Survie Médiane (mois) 3 ans 5 ans


SLO négative 62 78 % 54 %
SLO positive 31 44 % 27 %
p value 0,004 0,045

Fig. 2 – Chimiothérapie de consolidation à Clermont-Ferrand.


Survie globale en fonction du résultat au second look (n = 71 ptes) = négatif versus positif.

L'expérience rétrospective française (hôpital Saint-Louis, hôpital Tenon et


institut Curie, Paris; institut Paoli-Calmettes, Marseille; centre Léon-
Bérard, Lyon; centre Jean-Perrin, Clermont-Ferrand)
181 dossiers de patientes greffées de 1982 à 1995 ont été colligés dans les six
centres mentionnés ci-dessus (âge médian : 47 ans, 137 stades III, soit 76 % et
44 stades IV, soit 24 %). Cette étude rétrospective complète et actualise les
données de l'expérience française en matière de greffe dans le cancer de l'ovaire
publiée en 1993 (31). La date d'arrêt de cette étude en 1995 a été décidée par
rapport à la date d'initiation en juillet 1995 de l’étude prospective de phase III
randomisée de chimiothérapie de consolidation (intensif versus standard) du
GINECO (Groupe des investigateurs nationaux pour l’étude des cancers
ovariens).
350 Les cancers ovariens

Même s'il est difficile de tirer des conclusions précises de ce travail du fait
des indications de greffe variables d'un centre à l'autre (consolidation versus
rattrapage) et du fait de la multitude des conditionnements utilisés (dix au total
avec toutefois deux régimes principaux, le melphalan et l'association carbopla-
tine-Endoxan®) et même pour 23 % des patients une irradiation (uniquement
réalisée à l'hôpital Saint-Louis), cette étude fournit certaines données intéres-
santes :
– un taux de décès toxique de 2,5 %, donc acceptable, considérant la gravité de
la pathologie et la lourdeur du traitement intensif ;
– 3 décès à soixante-dix, quatre-vingt-deux et cinquante-quatre mois après
greffe par second cancer (1 cancer du sein et 2 leucémies aiguës) ;
– un recul médian après greffe de cent deux mois (61-209 mois) ;
– une médiane de survie globale et de survie sans rechute de trente-trois mois
et seize mois respectivement (quarante-six mois et vingt-huit mois après
diagnostic) ;
– une survie globale et une survie sans rechute à cinq ans de 37 % et 21 %
respectivement (41 % et 23 % après diagnostic) ; à dix ans la survie globale et
sans rechute est à 14 % après greffe (fig. 3).

Survie globale

Survie sans progression

mois
Fig. 3 – Expérience française (n = 181 ptes).
Survie globale et survie sans progression à partir de la date de la chimiothérapie intensive.

Une analyse des facteurs pronostiques a été réalisée parallèlement et seuls


ressortent, comme critères statistiquement significatifs influençant favorable-
ment la survie globale à cinq ans, la qualité de la chirurgie initiale, l'obtention
d'une réponse clinique complète avec la chimiothérapie de première ligne et la
constatation d'une réponse histologique complète au SLO. Ces mêmes facteurs
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 351

pronostiques sont déterminants également pour la probabilité de survie sans


rechute à cinq ans.
Trois groupes pronostiques peuvent être ainsi distingués :
– les formes de bon pronostic (46 pts) chez qui le second look est complète-
ment négatif : la survie à cinq ans est de 54 % et la survie sans rechute de
43 %. Il n'y a pas de différence quelle que soit la qualité de la chirurgie
initiale (optimale : survie à cinq ans de 58 % versus sub-optimale : 50 %). Par
contre, parmi les 18 patientes intensifiées par melphalan, 76 % étaient encore
vivantes à cinq ans, contre 39 % pour les autres conditionnements (fig. 4) ;
– les formes à chirurgie initiale optimale, mais dont le second look est positif
(48 pts) : la survie à cinq ans reste encore de 44 % mais la survie sans rechute
n'est plus que de 25 % ;
– les formes à chirurgie initiale sub-optimale et second look positif (71 pts) : la
survie globale et sans rechute est à 18 % et 6 %, respectivement.

pCR / MPH+ (n = 18)

pCR / MPH- (n = 28)

non pCR / MPH- (n = 92)


non pCR / MPH+ (n = 27)

p=

mois

pCR : réponse complète pathologique


MPH + : conditionnement par melphalan haute dose
MPH- : conditionnement par une chimiothérapie intensive autre que par melphalan haute
dose.

Fig. 4 – Expérience française (n = 181 ptes).


Survie sans progression à partir de la date de la chimiothérapie intensive en fonction de la
réponse pathologique au second look et du type de chimiothérapie intensive.

L’étude prospective de phase III randomisée de chimiothérapie


de consolidation (intensif versus standard)
Dans la prise en charge des cancers épithéliaux évolués de l'ovaire, la chimio-
thérapie intensive de consolidation avec support hématopoïétique est une
option à considérer qui permet d'espérer un taux de survie à cinq ans de 40 %
352 Les cancers ovariens

dans les formes les plus graves de ces cancers. Cependant, ces résultats encou-
rageants se devaient d’être confirmés. C'est pourquoi une étude contrôlée a été
initiée au cours de l'été 1995 au sein du GINECO. Cette étude a fédéré
le GINECO, la FNCLCC (Fédération nationale des centres de lutte contre
le cancer) et la SFGM-TC (Société française de greffe de moelle et thérapie
cellulaire).
Il s'agit d'une étude multicentrique française (+ Naples) de phase III de
chimiothérapie de consolidation randomisant trois cycles de carboplatine-
cyclophosphamide à dose conventionnelle (300 et 600 mg/m2 respectivement)
contre un cycle à haute dose (1 600 mg/m2 de carboplatine et 6 000 mg/m2 de
cyclophosphamide) avec autogreffe de cellules souches périphériques (CSP) à
une concentration de 2 x 106 cellules/kg. Cette randomisation intervient après
second look pour les tumeurs ayant fait preuve de leur sensibilité à la chimio-
thérapie de première ligne. Après 111 inclusions, l’étude a été stoppée en
novembre 2000 par défaut de recrutement faisant suite à l’affaire Bezwoda,
alors même que l’analyse statistique initiale prévoyait 124 patientes éligibles
pour observer une augmentation de survie sans rechute à trois ans de 25 % :
50 % pour le bras contrôle et 75 % pour le bras expérimental (avec une puis-
sance de 80 % et un test bilatéral avec un α à 0,05).
Les caractéristiques des 111 patientes selon le bras de randomisation (I pour
intensif et S pour standard) sont mentionnées dans le tableau II. Cette étude a
donc concerné des patientes jeunes (49 ans d’âge médian dans le bras intensif
et 50 ans dans le bras standard), ce qui représente environ 10 % des malades
atteintes d’un cancer évolué de l’ovaire. La grande majorité des patientes de
l’étude avait un stade IIIC, séreux, de grade élevé 2-3, lorsque le grading histo-
logique était connu. Toutes avaient reçu une chimiothérapie de première ligne
avec platine, mais seulement 50 % d’entre elles avec du Taxol® du fait que
l’étude a débuté en 1995 avant la publication de l’essai 111 du GOG (4). Et
certains investigateurs ont conservé leur pratique de chimiothérapie de
première ligne par cyclophosphamide-cisplatine (CP) avec parfois même
adjonction d’anthracyclines (CAP ou CEP) au-delà de la fin des années 1990
ce qui explique la prescription d’Endoxan® chez près de 50 % des patientes et
d’anthracyclines chez presque un tiers d’entre elles. Le second look chirurgical
ou cœlioscopique a permis de confirmer que la procédure de chimiothérapie
complémentaire a bien été réalisée en situation de consolidation puisque seules
9 patientes sur 57 (bras intensif ) et 10 patientes sur 53 (bras standard) avaient
des résidus tumoraux supérieurs à 2 cm, lesquels ont été réduits au cours de
la SLO.
Quant à la faisabilité de l’étude, elle est de 75 %, soit 43 patientes inten-
sifiées car : 7 échecs de mobilisation des CSP, 3 refus secondaires de
traitement, une rechute précoce et deux décès par la procédure, l’un de
myocardite et l’autre d’insuffisance rénale aiguë. Ce taux de faisabilité de
75 % est tout à fait satisfaisant considérant la lourdeur et la complexité du
bras expérimental et le caractère multicentrique de l’étude. D’ailleurs, l’essai
américain initié par le South-Western Oncology Group de chimiothérapie
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 353

Tableau II – Caractéristiques des patientes dans l’étude de phase III randomisée du


GINECO–FNCLCC-SFGM-TC.

Patientes Intensif Standard


Nombre 57 53
Âge médian (extrêmes) 48 (26-59) 50 (28-60)
Stade FIGO
III A-B 9 6
III C 43 42
IV 5 5
Type histologique
Séreux 43 43
Endométrioïde 9 5
Autres 5 5
Grade
1 6 9
2-3 40 38
Inconnu 11 6
Performance Status
0 37 34
1-2 20 19
Première ligne
platine 57 53
paclitaxel 29 26
cyclophosphamide 27 26
anthracyclines 17 19
Stadification (au SLO)
Stade III
pas de lésion 19 20
microscopique 12 8
< 2 cm 12 11
> 2 cm 9 10
Stade IV 5 4

intensive de consolidation pour maladie résiduelle après une chimiothérapie


d’induction à base de sel de platine (SWOG 9106) a été stoppé prématuré-
ment pour défaut d’inclusions.
La toxicité observée, quant à elle, est habituelle à celle attendue aussi bien
en cas de poursuite de trois cycles de chimiothérapie à dose conventionnelle
que dans le bras intensif : hospitalisation d’une durée médiane de vingt et un
jours (extrêmes : 17 à 30 jours) pour une récupération hématologique
(neutrophiles > 1 x 109 L et plaquettes > 20 x 109/l) en 11 jours en médiane
de temps avec un support transfusionnel médian de 3 culots plaquettaires (1
à 20) et une poche de sang (0 à 6). Il est observé bien sûr plus de nausées-
vomissements de grade 3-4 (42 % versus 12 %) et de mucites (25 % versus
2 %) avec la chimiothérapie intensive. Mais pas plus de neuropathie malgré
la dose de 1 600 mg/m2 de carboplatine (16 % versus 12 %). Quant aux deux
décès toxiques sur les 43 patientes intensifiées (4,6 %), ils ont été déplorés
354 Les cancers ovariens

dans deux équipes pourtant entraînées à l’autogreffe de longue date. Ces


deux décès représentent un taux inférieur à 5 % admis par tous comme
acceptable dans les études d’intensification thérapeutiques avec support de
CSP. Les résultats préliminaires en 2001, avec une recul médian de trente-six
mois (fig. 5), semblaient indiquer la supériorité du bras intensif en terme de
médiane de survie sans rechute pour les 102 premières patientes analysées :
22 mois versus 11 mois pour le bras standard (32). Avec un recul plus long,
proche du double (65 mois), et sur la population totale de 110 patientes,
l’avantage statistiquement significatif en terme de survie sans rechute s’est
estompé (fig. 6), même s’il persiste un gain de cinq mois pour les patientes
du bras intensif (17,5 mois versus 12,2 mois). En survie globale (fig. 7),
malgré douze mois de différence (54 mois versus 42 mois) à l’avantage de la
chimiothérapie intensive de consolidation, les courbes de survie de Kaplan-
Meier ne s’écartent pas d’une façon statistiquement significatives (p = 0,47).
Les résultats définitifs ont été présentés au congrès de l’ASCO 2004 (33) et
sont sur le point d’être publiés.

Survie sans rechute


Survie (%)

mois

Traitement Nombre Survie sans rechute p


(médiane)
Dose standard 50 10 mois 0,033
Haute dose 52 22 mois

Fig. 5 – Essai du GINECO/FNCLCC/SFGM-TC. Trois cures de carboplatine/Endoxan® à la


dose standard versus une cure de carboplatine/Endoxan® haute dose. Résultats préliminaires –
recueil médian de 36 mois.
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 355

mois

Fig. 6 – Essai du GINECO/FNCLCC/SFGM-TC. Trois cures de carboplatine/Endoxan® à la


dose standard versus une cure de carboplatine/Endoxan® haute dose. Résultats définitifs –
médiane de survie de 65 mois.

mois

Fig. 7.
356 Les cancers ovariens

L’expérience européenne
Les données de l'European Bone Marrow Transplant Solid Tumour Registry ont
été publiées par Jonathan Ledermann à Londres (34). Il s'agit d'un collectif de
254 patientes, d'âge moyen de 46 ans (de 22 à 63) issues de 39 centres euro-
péens et traitées de 1982 à 1996 essentiellement pour des stades III (70 %) ou
des stades IV (21 %). 105 patientes ont été intensifiées en rémission complète
ou en très bonne rémission partielle, 27 en deuxième rémission et plus de 50 %
des patientes présentaient une maladie macroscopique avant chimiothérapie
intensive. La médiane de survie des patientes intensifiées en rémission
complète et bonne rémission partielle est de trente-trois mois versus quatorze
mois pour les autres. Avec une médiane de suivi de soixante-seize mois à partir
du diagnostic, la médiane de survie sans rechute et globale est de quarante-
deux et cinquante-neuf mois respectivement pour les stades III, et de vingt-six
et quarante mois pour les stades IV.

L’expérience américaine
E. Shpall a rapporté au congrès de 1995 de l'American Society of Clinical
Oncology, à Los Angeles, l'expérience américaine de chimiothérapie intensive
pour cancer ovarien (35). Grâce aux données fournies par l'ABMTR
(Autologous Blood and Marrow Transplant Registry), 249 greffes étaient recensées
en janvier 1995 dans 51 centres américains. Dans seulement 17 % des cas, l'in-
tensification thérapeutique a été réalisée en consolidation (soit 83 % des cas
avec maladie présente). 9 % de décès sont déplorés. La probabilité de survie à
deux ans est de 68 % pour les patientes greffées en rémission complète et de
33 % pour celles intensifiées avec maladie évidente. E. Shpall avait également
indiqué qu'il était débuté un essai de phase II par le South-Western Oncology
Group de chimiothérapie intensive de consolidation pour maladie résiduelle
après une chimiothérapie d'induction à base de sel de platine (SWOG 9106).
Les patientes devraient être randomisées pour recevoir, soit thiotepa/cyclo-
phosphamide/cisplatine (conditionnement de Duke University of Colorado),
soit mitoxantrone/cyclophosphamide/carboplatine (conditionnement de la
Loyola University) (36). Cet essai a été stoppé prématurément par défaut d'in-
clusions.
En fait, on doit à P. Stiff la seule étude rétrospective américaine publiée à ce
jour (37). Elle porte sur 100 patientes (âge médian 48 ans, extrêmes 23-65)
traitées de 1989 à 1996 pour 66 de stades III et 16 de stades IV. Au moment
de l'intensification, 13 malades étaient considérées comme étant « sans
maladie », 6 avaient une maladie microscopique, 20 un résidu de moins de
1 cm et 61 un résidu de plus de 1 cm. Les durées de médianes de survie sans
rechute et de survie globale ont été respectivement de sept et treize mois pour
l'ensemble de la population ; pour les patientes sensibles au platine et avec un
Intensification de la chimiothérapie en consolidation 357

résidu ≤ 1 cm, les médianes de survie sans rechute et de survie globale sont de
dix-neuf et trente mois.

Conclusion
Les intensifications thérapeutiques en consolidation de la chimiothérapie de
première ligne du cancer épithélial évolué de l’ovaire sont encore limitées à de
petites séries de patientes sélectionnées. Globalement, environ 180 malades ont
été incluses dans ces études en France (29), 132 en Europe (34), 100 aux États-
Unis (37) et environ le même nombre au Japon (38). L'analyse des données
permet toutefois d'affirmer que la chimiothérapie de consolidation pour cancer
de l'ovaire chimio-sensible permet d’espérer une survie globale et une survie
sans rechute à cinq ans qui avoisinent les 40 % et 20 % respectivement, sans
pour autant couper les ponts à une chimiothérapie ultérieure en cas de rechute.
Ces résultats paraissent supérieurs à ceux des traitements conventionnels, mais
ils demandaient à être confirmés dans des études contrôlées. Cela vient d’être
réalisé par l’étude prospective multicentrique française de phase III randomisée
du GINECO-FNCLCC-SFGM-TC qui s’est terminée en novembre 2000. Les
résultats définitifs sont maintenant disponibles (33) et ne semblent pas établir
la place des hautes doses de chimiothérapie pour compléter l’effet anti-tumoral
obtenu après le traitement de première ligne. Même si une différence de douze
mois en terme de médiane de survie globale (cinquante-quatre versus quarante-
deux mois) est constatée au bénéfice de la consolidation intensive, les courbes
de survie ne s’écartent pas d’une façon statistique.
Aussi, le problème encore trop fréquent des rechutes pour une maladie
pourtant très chimio-sensible n’est pas réglé par cette approche de chimiothé-
rapie intensive. De toute façon, elle n’aurait concerné qu’environ 10 % des
patientes atteintes d’un cancer évolué de l’ovaire (malades âgés de moins de 65
ans et en réponse après la chimiothérapie de première ligne). Il convient donc
de s’intéresser à toute thérapeutique innovante pouvant éradiquer définitive-
ment la « dernière cellule tumorale » (39) : immunothérapie cytokinique par
Interféron gamma par voie intra-péritonéale (40) ou interleukine 12, immu-
nothérapie cellulaire adoptive par monocytes, macrophages activés par voie
intrapéritonéale (41), vaccinations, agents anti-angiogéniques…

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Interaction radiologue-chirurgien pour
la prise en charge des cancers de l’ovaire
C. Balleyguier et C. Pomel

Introduction
Le bilan diagnostique et d’opérabilité est essentiel pour une prise en charge
optimale du cancer de l’ovaire, en particulier dans les stades avancés. Il
implique donc une excellente coopération entre le radiologue et le chirurgien.
Ce travail d’équipe doit intervenir à deux niveaux : au cours du bilan diagnos-
tique initial, où l’imagerie peut tenter de caractériser une masse annexielle, de
différencier une lésion bénigne d’une lésion maligne et d’orienter ainsi le
chirurgien vers une prise en charge chirurgicale ou non, puis, dans un
deuxième temps, dans le cadre d’un bilan d’extension, pour préciser au chirur-
gien les critères de non-résécabilité des lésions.

Caractérisation d’une lésion ovarienne


La détermination de suspicion de malignité d’une masse ovarienne est l’étape
la plus difficile après l’identification de la masse. On estime que 5 à 10 % des
femmes qui ont une lésion annexielle sont opérées, mais que seulement 13 à
21 % de ces lésions sont malignes (1). Ainsi, le nombre de lésions bénignes
suspectes est beaucoup plus élevé que le nombre de lésions réellement
malignes.

Échographie
La plupart des lésions annexielles ne nécessitent pas d’examens invasifs. Dans
un premier temps, les patientes ayant des masses annexielles suspectes bénéfi-
cient d’une échographie pelvienne, par voies sus-pubienne et endovaginale.
L’examen est non invasif, peu coûteux, et facilement disponible. Les critères
146 Les cancers ovariens

morphologiques pour distinguer les lésions bénignes des lésions malignes sont
nombreux. Cependant, la combinaison des différentes techniques échogra-
phiques semble plus importante que les critères morphologiques ou Doppler
pris isolément (2). La sensibilité de l’échographie avec analyse morphologique
pour déterminer la malignité varie de 85 à 97 %, alors que la spécificité est de
56 à 95 % (3, 4).
Les critères morphologiques de malignité à rechercher en échographie sont
les suivants :
– composant solide intra kystique (fig. 1) ;
– épaississement de la paroi kystique de plus de 3 mm ou irrégularité pariétale ;
– présence de septas irréguliers et épais ;
– perte du caractère trans-sonore d’un kyste ovarien ;
– présence d’un niveau hétérogène dans le kyste ovarien, kyste échogène et/ou
hétérogène ;
– présence de calcifications pariétales grossières, etc.
Les lésions bénignes développent plutôt des vaisseaux en périphérie des
vaisseaux prééxistants, alors que les lésions malignes initient des néovaisseaux
en position centrale (5). L’analyse des spectres se base sur le fait que les vais-
seaux des lésions malignes sont morphologiquement anormaux : ils ont un
défaut de muscle lisse dans leur paroi, ont des trajets irréguliers et forment des
shunts artério-veineux (6). De plus, les vaisseaux des lésions malignes ont géné-
ralement une impédance faible, avec des diastoles élevées et de faibles variations
systole-diastole (6). Deux index Doppler sont utilisés pour analyser les
spectres : l’index de pulsatilité et l’index de résistance. Un index de résistance
de 0,4-0,8 et un index de pusatilité inférieur à 1 sont généralement considérés
comme des signes de malignité (7).
L’échographie peut cependant être d’interprétation difficile, lorsque l’épais-
seur de la paroi est importante ou lorsque l’examen est gêné par la présence de
gaz digestifs ou de fibromes atténuants. Dans ce cas, l’IRM est l’examen de
choix à réaliser pour tenter de caractériser une masse annexielle et d’orienter le
chirurgien. La décision de la réalisation ou non de l’IRM doit se prendre en
équipe, idéalement lors
des concertations multi-
disciplinaires.

Fig. 1 – Échographie endova-


ginale. Masse d’échostructure
mixte, liquidienne et tissulaire
avec des végétations, corres-
pondant à un adénocarcinome
ovarien.
Interaction radiologue-chirurgien pour la prise en charge… 147

IRM
Le principal avantage de l’IRM est que cet examen combine les avantages de
l’échographie et du scanner. La performance de l’IRM pour les lésions
annexielles bénignes est bien établie grâce à sa résolution en contraste et ses
possibilités de caractérisation tissulaire (8, 9). La valeur prédictive positive de
l’IRM pour la caractérisation d’une masse ovarienne maligne varie de 60 à
97 % selon les études (10, 11). Les séquences doivent être réalisées dans au
moins deux plans différents. Les séquences pondérées en T1 sans injection sont
utiles pour visualiser les adénopathies et pour caractériser le signal hémorra-
gique ou graisseux. Les images pondérées en T2 sans suppression de graisse
permettent de caractériser les liquides et d’obtenir la meilleure étude des
contrastes entre les différents organes, de caractériser une lésion annexielle et
d’en préciser l’extension loco-régionale (12).
Les lésions solides et kystiques sont hypo-intenses en séquences pondérées en
T1 et hyperintenses en T2. En général, les lésions ovariennes épithéliales
bénignes sont principalement kystiques, alors que les lésions malignes ont plus
souvent un contenu mixte. L’injection de chélate de gadolinium permet la
détection de septas internes et est utile pour différencier des lésions kystiques des
lésions solides, et les lésions malignes des lésions bénignes. L’injection de produit
de contraste peut également permettre de détecter des végétations sur la paroi
d’un kyste, ce qui est fortement évocateur d’une lésion maligne de l’ovaire. Les
lésions mucineuses sont très souvent des kystes multiloculés, alors que les lésions
séreuses sont uniloculées. Les lésions mucineuses ont également un signal
interne variable en fonction du contenu protéique, mucineux ou hémorragique
et sont fréquemment associées à des pseudomyxomes péritonéaux.

Bilan d’extension du cancer de l’ovaire


La place de l’imagerie est fondamentale pour le bilan d’extension du cancer de
l’ovaire. Les conclusions des examens d’imagerie déterminent la chronologie de
la prise en charge thérapeutique, et il est donc essentiel que le radiologue et le
chirurgien revoient ensemble les images et discutent ensemble la pertinence de
l’interprétation.
Trois territoires intéressent particulièrement le chirurgien car ils sont à eux
seuls des éléments justifiant une chimiothérapie de première intention.
– Premièrement l’intestin grêle : une atteinte diffuse des tuniques de l’intestin
grêle nécessitant une résection digestive avec moins de 2 mètres de grêle rési-
duel ne peut se concevoir en première intention (fig. 2).
– Deuxièmement le pédicule hépatique : la dissection objective une carcinose
infiltrante et rend illusoire toute exérèse complète, en particulier lorsque le
bloc tumoral fait « masse » vers le tronc cœliaque.
148 Les cancers ovariens

Fig. 2 – Cœlioscopie. Carcinose


d’origine ovarienne avec atteinte
diffuse des tuniques du grêle, non
résécable en première intention.

Fig. 3 – Cœlioscopie. Atteinte


diffuse et rétractile de l’hypo-
chondre droit. L’épaisseur reste
inférieure à 5mm.

– Troisièmement, le confluent cavo-sushépatique : dans les carcinoses dites


recouvrantes et peu infiltrantes, et ce quels que soient leurs volumes, la
dissection sus-hépatique est réalisable. Dans certaines carcinoses infiltrantes
et rétractiles, cette dissection peut s’avérer impossible (fig. 3).
Ce n’est donc pas le volume des lésions qui conditionnent la non résécabi-
lité mais plutôt l’infiltration en profondeur non dissécable. En effet à volume
égal la carcinose est parfois très facilement résécable (fig. 4).
L’épiploon, le pelvis et les autres régions de l’abdomen sont résécables dans
l’extrême majorité des cas. La difficulté pour l’imagerie est de reproduire l’im-
pression à la fois visuelle et tactile du chirurgien.
Aujourd’hui, c’est le scanner et surtout le scanner multibarrettes qui est
l’examen clé du bilan d’extension du cancer de l’ovaire. L’échographie est insuf-
fisante pour la détection des petites lésions de carcinose. L’IRM est, quant à
elle, plus performante que le scanner pour évaluer l’extension tumorale
pelvienne à l’utérus, à la vessie, au rectum ou à la paroi pelvienne et pour
déterminer si la lésion peut être facilement « débulkée » à ce niveau (13). Mais
en cas d’artefacts techniques comme les mouvements intestinaux, l’IRM peut
être moins sensible que le scanner pour la détection d’implants péritonéaux ou
Interaction radiologue-chirurgien pour la prise en charge… 149

Fig. 4 – Cœlioscopie. Carcinose


de l’hypochondre gauche facile-
ment résécable.

Fig. 5 – Scanner multibarrettes. Reconstruc-


tion sagittale. La carcinose pelvienne est bien
visible au niveau du péritoine antérieur
(flèche) sur cette reconstruction.

mésentériques (13). La TEP et


surtout la TEP couplée au scanner
peuvent permettre aujourd’hui de
détecter avec une haute spécificité les
récidives locales ou péritonéales des
cancers ovariens (14). Cependant, le
risque de faux négatifs pour des
lésions de moins de 10 mm est élevé.
Le scanner est donc plutôt réalisé dans le cadre du bilan d’extension d’une
tumeur pour détecter l’extension locale des lésions ou des nodules de carcinose
péritonéale et rechercher des métastases extra-abdominales (15). Les critères
scannographiques de non-résécabilité sont les suivants : atteinte splénique,
nodules mésentériques supérieurs à 2 cm, atteinte de la capsule ou du hile du
foie, du diaphragme, des ganglions suprarénaux et de la plèvre (16). Le radio-
logue doit donc s’astreindre à une analyse et une description très précises de ces
localisations dans son compte rendu. Aujourd’hui, les scanners de dernière
génération permettent d’obtenir des coupes millimétriques du thorax au pelvis
en moins de 40 secondes. Ces scanners multibarrettes permettent également
de fournir au chirurgien des reconstructions multiplanaires, en particulier
dans les plans coronal et sagittal (fig. 5) ; ces reconstructions permettent de
s’amender de l’imagerie en coupe et sont souvent plus faciles à appréhender par
les chirurgiens.
150 Les cancers ovariens

Fig. 6 – IRM. Séquence sagittale pondérée


en T2. Récidive pelvienne d’une carcinose
ovarienne visible en avant et en arrière de
l’utérus (flèches).

Les signes d’extension à distance de


la maladie ovarienne peuvent aussi être
détectés en TDM. La présence d’ascite
est un des signes de l’atteinte périto-
néale, facilement visible en TDM. Les
implants péritonéaux doivent être
recherchés. Si leur taille est supérieure
à 10 mm, ils peuvent être discrètement
nodulaires en projection des surfaces
péritonéales. Ces implants peuvent se
rehausser après injection de produit de
contraste iodé. Les sites métastatiques
peuvent également être kystiques. Les cystadénocarcinomes séreux contiennent
des calcifications dans 30 % des cas et la TDM peut détecter des métastases péri-
tonéales ou des adénopathies calcifiées dans ces cas-là (17). Il faut également
rechercher des adénopathies rétropéritonéales ou iliaques.
Pour le diagnostic de récidive de cancer ovarien, des explorations non inva-
sives sont actuellement recommandées. L’IRM a dans cette indication un rôle
important, surtout pour la re-cherche de récidive pelvienne (fig. 6). La perfor-
mance de l’IRM pour le diagnostic de réci-dives de moins de 2 cm est
généralement faible (< 40 %), mais est, en revanche, bonne pour des lésions de
plus de 2 cm (> 82 %). Ces performances s’améliorent par ailleurs constamment
en raison de l’amélioration des machines et des techniques. Si la récidive peut être
détectée de façon fiable, l’indication de la chirurgie est alors évidente. La TEP-
TDM a un rôle à jouer pour affirmer une suspicion de récidive, surtout lorsque
l’IRM est normale. Cependant, le nombre de faux négatifs pour des lésions de
moins de 10 mm, ou de faux positifs générés en particulier par le péristaltisme
intestinal, est important (14).

Conclusion
L’interaction radiologue-chirurgien dans le cancer de l’ovaire intervient à
plusieurs niveaux. Le radiologue doit connaître les principes du traitement
chirurgical, ainsi que les critères de non-résécabilité des lésions. Le chirurgien
doit avoir des notions techniques d’imagerie et s’initier à l’imagerie en coupes.
Il doit également pouvoir faire confiance à l’imagerie, en particulier l’IRM
pour la caractérisation des masses annexielles, et éviter ainsi parfois la program-
mation inutile d’une chirurgie radicale non réalisable.
Interaction radiologue-chirurgien pour la prise en charge… 151

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Intérêt de la TEP-FDG dans les cancers
de l’ovaire
T. Mognetti et F. Giammarile

Introduction
La TEP-FDG (Tomographie par Émission de Positons après injection de 18F-
Fluoro-2-Déoxy-Glucose) est un des examens d’imagerie les plus récemment
mis à disposition des cliniciens.
Il s’agit d’un examen scintigraphique, qui consiste donc, comme toute scin-
tigraphie, à injecter un traceur (en l’occurrence le FDG), à le laisser circuler
dans l’organisme pendant le temps nécessaire à sa métabolisation, puis à dresser
une cartographie de ses zones d’accumulation et, enfin, à en tirer des conclu-
sions sur le fonctionnement de l’organisme. Chaque traceur a sa distribution
physiologique spécifique et ses variations pathologiques.
Il se distingue des examens conventionnels de médecine nucléaire par le
type de rayonnements émis par le radionucléide (β+ au lieu de γ), ce qui
impose le recours à des appareils de détection spécifiques, les caméras TEP,
encore peu répandues en France (75 caméras projetées pour 2005).
En outre, les caméras TEP les plus récentes sont couplées à un scanner
TDM classique, ce qui permet la fusion des images de la modalité scintigra-
phique et de la modalité radiologique, pour profiter à la fois de l’information
métabolique de l’une et de la précision anatomique de l’autre. Il est à noter
que, pour des raisons qui sortent du cadre de cet exposé, ces examens sont
réalisés le plus souvent sans injection de produit de contraste iodé et ne
peuvent donc pas remplacer l’examen TDM classique dans les situations où
l’injection de produit de contraste est indispensable.
Le FDG est le premier et, à ce jour, le seul traceur émetteur de positons
disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) en France, ce qui
explique que l’on assimile souvent TEP et FDG, alors que le premier désigne
une technologie et le second un traceur exploitant cette technologie. Dans un
avenir relativement proche, de nouveaux traceurs émetteurs de positons
verront sans doute le jour. Afin d’éviter toute confusion, nous désignerons
l’examen par son traceur (« scintigraphie au FDG » ou « TEP-FDG ») plutôt
176 Les cancers ovariens

que de parler seulement de « TEP ». De la même façon, ce chapitre traite de


l’intérêt de la scintigraphie au FDG et non de l’intérêt de la TEP en général.
Le FDG est un analogue du glucose, qui s’en distingue seulement par la
substitution du radical -OH en position 2 par un isotope du fluor. Cette déna-
turation chimique, si elle lui permet bien de diffuser librement dans les cellules
et de subir la première étape du métabolisme glucidique, lui interdit en
revanche aussi bien de suivre les étapes ultérieures du métabolisme glucidique
que de ressortir des cellules. Il s’accumule donc dans toutes les cellules de l’or-
ganisme, de façon proportionnelle à leur consommation de glucose, par un
mécanisme d’impasse métabolique. C’est tout le paradoxe de ce traceur qui,
tout en étant parfaitement ubiquitaire, permet de repérer les cellules tumorales
grâce à leur métabolisme habituellement très supérieur à celui des cellules
saines. Ce mécanisme explique aussi les faux positifs liés à des foyers inflam-
matoires ou infectieux et les faux négatifs liés à des tumeurs d’évolution lente,
un traitement anti-tumoral trop récent ou encore des perturbations du méta-
bolisme glucidique.

Méthodologie et réalisation de l’examen


L’accès à l’examen se fait après concertation entre le clinicien demandeur et le
médecin nucléaire qui réalisera l’examen, afin de valider la pertinence de la
demande, l’adéquation entre le bénéfice attendu et les indications de l’examen.
La réalisation de la scintigraphie au FDG est soumise à trois types de
contraintes :
– celles des traceurs émetteurs de positons en général (demi-vie courte, environ
deux heures pour le 18F, coût, approvisionnement en flux tendu donc soumis
à des aléas logistiques) ;
– celles spécifiques du FDG (interférence possible des perturbations du méta-
bolisme glucidique, tout particulièrement dans les situations d’hyper-
insulinisme) ;
– celles de la caméra TEP (difficulté d’accès à l’examen, risque de panne d’un
matériel de haute technologie donc très sensible).
En pratique, le patient doit se présenter à jeun de six heures (seules les bois-
sons non sucrées sont autorisées, mais thé et café sont déconseillés pour limiter
les manifestations du stress). La grande majorité des traitements médicamen-
teux est compatible avec cette scintigraphie. Il faut toutefois prendre des
précautions en cas de traitement interférant avec le métabolisme du glucose,
donc tout particulièrement les traitements du diabète. Dans ce cas, il n’y a alors
pas d’attitude systématique et il faudra discuter au cas par cas avec le médecin
nucléaire.
Comme pour tous les examens d’imagerie, le patient doit se munir de ses
examens les plus récents, particulièrement des examens TEP, TDM ou IRM, et
si possible de son dossier clinique complet. Un entretien médical préalable à
Intérêt de la TEP-FDG dans les cancers de l’ovaire 177

l’examen permet de vérifier le respect du jeûne, de rechercher des sources


possibles de faux positifs ou faux négatifs, de dépister une claustrophobie, d’ex-
pliquer le déroulement de l’examen, de réaliser l’information sur les
rayonnements ionisants. Le risque de grossesse doit être écarté (mais c’est une
préoccupation assez théorique dans les cancers ovariens !). Enfin, la plupart des
centres ne fournissent aucun résultat immédiat car les temps de traitement
informatique et d’interprétation sont souvent longs. Le patient doit absolu-
ment en être avisé avant l’examen. Les résultats sont transmis au médecin
demandeur sous vingt-quatre heures.
Une période de repos allongé est observée 15-20 minutes avant injection IV
du FDG et 60 minutes après. Ce produit est totalement dénué d’effet phar-
macologique et ne produit aucune sensation désagréable. Comme l’objectif est
de permettre au patient de se détendre, d’éviter les sollicitations musculaires
source de faux positifs, il n’est pas possible de lire ou de se déplacer pendant ce
temps-là, mais il est envisageable d’utiliser un baladeur musical. Après cette
période d’attente et après une miction, l’examen dure environ 40-45 minutes.
La caméra se présente extérieurement comme un gros scanner. Elle ne produit
guère que le bruit des ventilateurs de refroidissement et ne cause aucune sensa-
tion perceptible.

Indications
Le travail de synthèse le plus systématique et le plus complet concernant les
indications de la TEP-FDG dans le cancer de l’ovaire a été réalisé par la
Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer en 2002 et mis à jour
en novembre 2003 (1). Il est basé sur l’étude de la littérature internationale. Il
nous servira donc de base et nous le compléterons des données publiées depuis
ce rapport.

Diagnostic initial et bilan d’extension


Les techniques d’imagerie conventionnelle ne sont pas suffisamment sensibles
et spécifiques pour effectuer le diagnostic de cancer de l’ovaire et le bilan d’ex-
tension tumorale.
Dans les études qui ont servi de support à l’établissement des SOR, la sensi-
bilité de la TEP-FDG variait de 55 à 100 %, la spécificité de 50 à 100 %, la
valeur prédictive positive de 80 à 100 % et la valeur prédictive négative de 17
à 100 %. Ces valeurs très disparates s’expliquent notamment par la forte inci-
dence de la carcinose péritonéale, dont les granulations microscopiques ne sont
détectées que dans 7 cas sur 16 (sensibilité 44 %) (2). Ainsi, la scintigraphie au
FDG ne présente à ce jour pas d’intérêt pour le diagnostic initial ou le bilan
178 Les cancers ovariens

d’extension des cancers ovariens. L’immuno-scintigraphie pourrait constituer


une piste pour améliorer cette sensibilité (3).
Cependant, une étude récente et modeste (15 patientes) suggère que l’ajout
de la TEP-FDG au bilan d’extension initial par TDM fait passer la sensibilité
de 46 à 68 %, la spécificité de 90 à 92 %, la corrélation avec le stade chirurgical
de 53 à 87 % (4). Cette étude mérite d’être confortée par une autre plus signi-
ficative.

Évaluation de la réponse thérapeutique


La chirurgie de deuxième regard est la méthode de référence dans l’évaluation
de la réponse au traitement initial et pour la recherche de maladie résiduelle.
Deux études prospectives récentes ont évalué l’apport de la scintigraphie au
FDG dans cette indication par rapport à la chirurgie.
La première (5), portant sur 55 patientes qui ont été évaluées par l’une seule
des deux méthodes, a montré que la TEP-FDG et la chirurgie de second regard
avaient des valeurs pronostiques similaires après chirurgie et chimiothérapie
adjuvante, au point de proposer de substituer la TEP-FDG à la chirurgie
(30 malades ont bénéficié d'un « second look » et 25 d'une TEP-FDG, la
survie sans récidive n'est pas significativement différente entre les deux
groupes, respectivement 40,5 +/- 11,6 mois, et 48,6 +/- 12,1 mois).
La seconde (6), portant sur 31 patientes évaluées par les deux méthodes, a
montré une bonne corrélation entre les données histologiques et TEP-FDG,
avec notamment une sensibilité de 78 %, une spécificité de 75 % et une valeur
prédictive positive de 89 %. Toujours selon cette étude, toutes les lésions non
vues correspondaient à des lésions de moins de 5 mm, ce qui semble bien
constituer le seuil de détection de la TEP-FDG. Des lésions pathologiques
peuvent être mises en évidence même lorsque le CA-125 est normal, mais
l’étude n’a pas approfondi ce point.
Si des études similaires (réalisées sur des échantillons comparables ou supé-
rieurs) venaient conforter ces résultats, il s’agirait probablement d’une
évolution stratégique significative pour la prise en charge de ce cancer.
En revanche, il n’y a pas actuellement d’utilité de la TEP-FDG dans l’éva-
luation de la réponse au traitement au-delà du traitement initial, en dehors
d’études prospectives.

Recherche de récidive
Plusieurs études, mais portant sur de petits effectifs, ont montré la supériorité
en terme de sensibilité et de spécificité de la scintigraphie au FDG par rapport
à l’imagerie conventionnelle (7-9). La sensibilité semble également augmenter
Intérêt de la TEP-FDG dans les cancers de l’ovaire 179

lorsque le taux de CA-125 est élevé (10), mais l’analyse de la littérature ne


permet pas de retenir de seuil du CA-125 justifiant le recours à la TEP-FDG.
L’intérêt de la TEP-FDG pour le diagnostic de récidive locale ou métasta-
tique semble ainsi validé par ses performances supérieures à celles de l’imagerie
conventionnelle. La carcinose péritonéale microscopique est la principale
source de faux négatifs, la chirurgie de second regard restant ici plus sensible.

Exemples
Cas n° 1
Élévation du CA-125 de 60 à 280 en l'espace de six mois chez une patiente
aux antécédents d'adénocarcinome de l'ovaire qui a déjà reçu deux lignes de
chimiothérapie. La TEP-FDG retrouve plusieurs foyers pelviens, dont certains
(fig. 1) étaient difficilement discernables des anses digestives.

Fig. 1 – Cas n° 1.

Cas n° 2
Adénocarcinome ovarien avec carcinose péritonéale initiale, ayant bénéficié
d'une CHIP associée à une résection rectale, une hémicholectomie droite et
une splénectomie en 07/2004. Actuellement, réascension rapide du CA 125.
TDM thoraco-abdomino-pelvienne considérée comme normale. Mise en
évidence en TEP-FDG d’une récidive de localisation atypique de l’angle
cardiophrénique (fig. 2).
180 Les cancers ovariens

Fig. 2 – Cas n° 2.

Conclusion
La principale indication de la TEP-FDG dans la prise en charge du cancer de
l’ovaire (et la conclusion actuelle des SOR) est que la scintigraphie au FDG
peut être proposée en cas de suspicion de récidive locale ou métastatique, géné-
ralement devant une élévation confirmée du CA-125.
Le remplacement de la chirurgie de deuxième regard par la TEP-FDG est
une indication dont on peut raisonnablement espérer la validation dans un
avenir proche.

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La chimiothérapie des rechutes
au-delà de six mois

J.-F. Geay, I. Ray-Coquard et É. Pujade-Lauraine

Introduction
En l’absence de dépistage efficace, le cancer épithélial de l’ovaire est détecté à
un stade avancé (1, 6). Le traitement de première ligne standard de ces
patientes associe une chirurgie d’exérèse maximale avec six cycles de l’associa-
tion de paclitaxel (175 mg/m2 en perfusion de trois heures) et de carboplatine
(AUC 5 à 7,5) (7-11).
Bien que la majorité des patientes vont répondre à ce traitement de chimio-
thérapie et être en rémission complète clinique à l’issue de la stratégie initiale,
la survie à cinq ans n’est que de 25 à 35 %, reflétant le haut taux de rechute
survenant au cours du suivi (12, 13).
Dans la mesure où les rechutes dans les cancers de l’ovaire avancés survien-
nent avec un intervalle libre médian de quatorze à dix-huit mois, celles-ci sont
le plus souvent considérées comme tardives, c’est-à-dire survenant au moins six
mois après le dernier traitement.

Modalités de surveillance
Les recommandations de surveillance des patientes atteintes d’un cancer de
l’ovaire avancé comprennent un examen clinique complet, y compris un
examen pelvien, et le prélèvement du marqueur tumoral sérique, le CA 125.
Les examens cliniques et sérologiques sont répétés tous les trois mois
pendant deux ans, puis tous les six mois jusqu’à cinq ans, et enfin régulière-
ment tous les ans.
Des examens d’imagerie comme le scanner abdomino-pelvien ou l’IRM ont
une mauvaise rentabilité clinique et financière lorsqu’ils sont réalisés systéma-
tiquement au cours du suivi. Ils ne devraient être réalisés que lorsqu’une
418 Les cancers ovariens

rechute est suspectée sur la base de l’examen clinique ou devant une augmen-
tation significative du taux du CA 125.

Définitions de la rechute
La définition traditionnelle de la rechute est basée sur l'apparition ou l’aug-
mentation de la taille des lésions que l’on peut mesurer à l’examen clinique ou
sur les examens radiologiques. Les critères RECIST1 définissent la progression
comme étant une augmentation de 20 % de la somme des plus longs diamètres
de toutes les lésions prises comme cible par rapport à la somme la plus petite
enregistrée au cours du suivi (14).
Les critères RECIST incluent également dans la définition de la progression
l’apparition de nouvelles lésions, qu’elles soient mesurables ou non mesurables.
Point important, une augmentation incontestable de lésions non mesurables
peut suffire pour affirmer la progression de la maladie. Ceci est souvent le cas
dans les cancers de l’ovaire où la progression peut n’être détectée que par une
augmentation du volume de l’ascite ou d’un épanchement pleural, voire une
augmentation de taille de lésions non mesurables au scanner, comme des épais-
sissements péritonéaux, voire des lésions tumorales kystiques.
La grande fréquence avec laquelle le taux du CA 125 augmente avant l’ap-
parition de toute lésion détectable a amené le Gynecogic Cancer InterGroup
(GCIG) à proposer une définition complémentaire aux critères RECIST et
basée sur la cinétique du CA 125 (15), au minimum à un doublement par
rapport, soit à la limite supérieure de la normale si le taux du CA 125 s’était
normalisé, soit au taux le plus bas enregistré au cours de la période de suivi si
le CA 125 ne s’était pas normalisé.
De plus, le taux de CA 125 doit être confirmé par un deuxième prélève-
ment à au moins une semaine d’intervalle. Il est important de signaler que le
taux du CA 125 n’est pas évaluable si le prélèvement a été réalisé moins de
quatre semaines après une intervention chirurgicale, après une ponction d’as-
cite ou d’épanchement pleural ou après une radiothérapie. En effet, on peut
observer dans ces cas des augmentations du CA 125 qui ne sont pas corrélées
au volume tumoral.
Dans certains cas, c'est une altération isolée de l'état général de la patiente
qui suggère une évolution de la maladie, bien que les examens soient insuffi-
sants à la confirmer selon les critères précédents. Pour tenir compte de cette
notion clinique, le Gynecologic Oncology Group (GOG) a proposé une défini-
tion de la progression qui inclut la notion de détérioration de l’état de santé
attribué à la maladie.
Enfin, dans les essais cliniques, tout décès, quelle que soit sa cause, est
considéré comme une progression.

1. RECIST = Response Evaluation Criteria In Solid Tumors.


La chimiothérapie des rechutes au-delà de six mois 419

Considérations chez les patients en rechute tardive


Les buts du traitement à la rechute
Étant donné que les patientes en rechute ne guérissent que très rarement, le
traitement de la rechute a été longtemps considéré comme purement palliatif,
sans référence à la survie. Dans la mesure où les résultats récents d’essais rando-
misés chez les patientes en rechute tardive ont montré que certains traitements
pouvaient augmenter la durée de survie des patientes, les buts des traitements
de la rechute ont été révisés au cours de la 3e Conférence de consensus sur les
cancers de l’ovaire qui s’est tenue en septembre 2004 à Baden-Baden (en cours
de publication). Dans ce sous-groupe de patientes en rechute tardive, les buts
des traitements sont maintenant le contrôle de la maladie, c’est-à-dire la
prolongation de la durée de vie, associé à la palliation des symptômes et l’ob-
tention de la meilleure qualité de vie possible.

Facteurs pronostiques : importance de l’intervalle libre sans


traitement
Le choix d’un traitement de rechute dépend largement de la longueur de l’in-
tervalle libre sans traitement qui sépare la dernière administration de
chimiothérapie et la rechute. Les patientes qui progressent sous le traitement
de première ligne ont une maladie réfractaire au platine. Celles qui rechutent
dans les six mois après la fin de la première ligne sont considérées avoir une
maladie résistante au platine. Par contre, celles qui rechutent avec un intervalle
libre supérieur à six mois sont dites avoir une maladie potentiellement sensible
au platine.
Effectivement, la probabilité de répondre à une chimiothérapie comprenant
du platine dépend en grande partie de la longueur de l’intervalle libre sans
platine. Dans une étude de 82 patientes en rechute, Markman M et al. ont
montré que les patientes avec un intervalle libre sans platine de cinq à douze
mois ont un taux de réponse à une 2e ligne avec platine de 27 %, tandis que
celles qui ont un intervalle libre sans platine de 13 à 24 mois ont un taux de
réponse de 33 %, qui peut atteindre 59 % lorsque l’intervalle libre dépasse
vingt-quatre mois (16).
L’importance de l’intervalle libre dans les résultats des traitements de
rechute a été bien soulignée par une large étude de 583 patientes traitées en
rechute par le groupe GINECO (tableau I) (17).
Une des hypothèses émises pour expliquer cette relation forte entre la
réponse au traitement de la rechute et l’intervalle libre sans traitement est liée
à la résistance tumorale. Au cours de la résistance acquise, les tumeurs devien-
nent résistantes à de multiples drogues sous l’effet de la pression sélective d’une
drogue particulière. Néanmoins, ce phénotype de résistance acquise est instable
420 Les cancers ovariens

Tableau I – Taux de réponse (R) à la chimiothérapie, survie sans progression (SSP) et survie
globale (SG) de 583 patientes atteinte de cancer de l’ovaire en rechute selon l’intervalle libre
(Int Libre) et la réponse au traitement précédent.

N° Int Libre (mois) Patientes Résultats du traitement de la rechute


Réponse à la chimiothérapie précédente (n) R (%) SSP (jours) SG (jours)
1 0 - 3 & maladie progressive 60 9 90 217
2 0 - 3 & maladie non progressive 91 24 176 375
3 3-12 199 35 174 393
4 12-18 79 52 275 657
5 > 18 154 62 339 957

et peut être perdu au cours du temps. Ainsi, plus l’intervalle libre sans traite-
ment est long, plus les cellules tumorales ont de chance de perdre leur
résistance acquise.
D’autres facteurs pronostiques ont été également décrits, et notamment la
taille des tumeurs détectables (inférieure ou supérieure à 5 cm), le nombre de
sites tumoraux et l’index de performance de la patiente.

Considérations liées aux patientes


La moitié des patientes atteintes de cancer de l’ovaire ont plus de 60 ans.
L’évaluation de la fragilité des patientes est donc très importante avant de fixer
la stratégie thérapeutique. Ce sujet reste l’objet de recherches très actives et à ce
jour des critères spécifiques de fragilité n’ont pas encore été validés.
Néanmoins, l’âge n’est pas le seul facteur à considérer. D’autres facteurs impor-
tants à prendre en compte sont les co-morbidités, l’index de performance,
l’autonomie des patientes et leur état psychique incluant l’existence d’un état
dépressif.
Les toxicités induites par les traitements augmentent avec le nombre de
lignes que la patiente a préalablement reçues. Les toxicités résiduelles des trai-
tements antérieurs doivent donc être analysées avec soin. La neurotoxicité
résiduelle est particulièrement handicapante chez les patientes en rechute de
cancer de l’ovaire. C’est une séquelle de longue durée des traitements par
taxane ou platine (cisplatine ou oxaliplatine) et la neurotoxicité est un facteur
limitant très fréquent de la réintroduction de ces drogues lors des rechutes. La
survenue antérieure d’une hématotoxicité sévère, et particulièrement d’une
thrombopénie, peut limiter l’utilisation de drogues majeures comme le carbo-
platine, le topotecan ou la gemcitabine. Certaines patientes peuvent avoir
présenté des réactions d’hypersensibilité aux dérivés du platine, aux taxanes ou
à la doxorubicine liposomale pégylée. Malgré l’existence de protocoles pour
prévenir ou contrôler ces réactions d’hypersensibilité, l’utilisation d’un ou
La chimiothérapie des rechutes au-delà de six mois 421

plusieurs de ces médicaments peut être interrompue au cours de l’évolution de


la prise en charge des patientes.
Étant donné le faible taux de guérison en rechute, la qualité de vie et tout
particulièrement les choix spécifiques des patientes vis-à-vis de leur confort
doivent être évalués. Les patientes peuvent exprimer des désirs particuliers
concernant l’éventuelle perte des cheveux due au protocole choisi, ou vis-à-vis
de la contrainte du traitement (nombre de séances nécessitant un passage à
l’hôpital), ou concernant l’intensité de la fatigue induite par les médicaments.
Tous ces facteurs peuvent altérer l’activité professionnelle des patientes, leur
activité sociale, les relations avec leur famille et/ou leur conjoint et, au total,
leur qualité de vie. Autant que possible, le choix du traitement prendra en
compte les désirs particuliers des patientes.

Quand traiter ?
Une rechute symptomatique justifie de débuter le traitement sans retard. Une
ponction d’ascite ou d’épanchement pleural peut être nécessaire avant de
démarrer le traitement afin de soulager les symptômes dus à ces épanchements.
La question la plus débattue concerne le moment optimal de l’initiation de
la chimiothérapie devant une augmentation isolée du CA 125 chez une
patiente asymptomatique dont les examens cliniques et radiologiques ne
montrent pas de lésion détectable. Faut-il attendre les symptômes ou au
contraire débuter le traitement pour prévenir l’apparition de ces symptômes ?
Cette question fait l’objet d’un essai randomisé en cours du MRC et de
l’EORTC. En attendant les résultats de cet essai, la cinétique d’augmentation
du CA 125, ainsi que le souhait de la patiente, peuvent aider à la décision dans
la pratique courante.

Les modalités de chimiothérapie chez les patientes


en rechute tardive
Les patients atteintes de cancer de l’ovaire qui présentent une réponse
prolongée à une combinaison à base de platine ont de grandes chances de
répondre de nouveau à un traitement à base de platine (16, 18-23).
Contrairement aux patientes en rechute précoce (inférieure à six mois),
l’utilisation en monothérapie de drogues qui ne sont pas des dérivés du platine
ne semble pas être une bonne indication chez les patientes en rechute tardive
(≥ à six mois). Le taux de réponse (20-45 %) de tous ces médicaments est en
effet inférieur à ce qui est rapporté pour les associations à base de platine (40-
90 %). L’efficacité comparée d’un médicament non dérivé du platine (le
paclitaxel) avec une association à base de platine (protocole CAP associant
422 Les cancers ovariens

cyclophosphammide, doxorubicine et cisplatine) a été évaluée par une étude


italienne randomisée chez 97 patientes qui avaient un intervalle libre sans trai-
tement d’au moins douze mois. Malgré la petite taille de l’essai, les patientes
traitées par la combinaison à base de platine ont présenté un taux de réponse
supérieur, et surtout une survie sans progression et une survie globale signifi-
cativement allongée (24).
La question la plus importante posée ces dernières années chez ces patientes
en rechute tardive est de savoir si la polychimiothérapie peut donner de
meilleurs résultats qu’un traitement par platine en monothérapie.
L’objectif principal des essais ICON4-OVAR 2.2 a été de répondre à cette
question. Il s’agissait en fait de deux essais randomisés parallèles qui compa-
raient un minimum de six cycles d’une chimiothérapie conventionnelle à base
de platine (Plat) avec une association de paclitaxel-platine (Pac-Plat) chez
802 patientes en rechute de cancer de l’ovaire (25). Un intervalle libre sans trai-
tement de six mois ou plus était nécessaire pour rentrer dans l’étude. Après
randomisation, 71 % des patientes dans le bras de traitement conventionnel
avaient reçu du carboplatine comme dérivé de platine.
Après un suivi médian de quarante-deux mois, le hazard ratio (HR) pour la
survie sans progression était de 0,76 (p = 0004), en faveur de Pac-Plat. Le HR
pour la survie globale était de 0,82 (p = 02) correspondant à une différence
absolue de survie à deux ans de 7 % (57 % versus 50 %) et une différence de
médiane de survie de cinq mois (29 versus 24 mois), toujours en faveur de la
combinaison Pac-Plat. Ces résultats suggèrent fortement que, comparée à un
traitement conventionnel à base de platine, l’association Pac-Plat augmente la
survie sans progression et la survie globale des patientes atteintes d’un cancer
de l’ovaire en rechute tardive. Les données d’efficacité de cet essai, qui est le
plus large jamais réalisé chez les patientes en rechute, justifient que l’associa-
tion carboplatine-paclitaxel soit considérée comme un nouveau « standard »
chez cette sous-population de patientes en rechute tardive.
Cependant, l’augmentation de survie dans le bras Pac-Plat a été obtenue au
prix d’une toxicité neurologique supérieure (20 % versus 1 %) et d’un taux élevé
d’alopécie (86 % versus 25 %). Or ce sont deux types de toxicités que l’on
souhaiterait éviter chez les patientes en rechute.
L’essai du Gynecologic Cancer Intergroup (GCIG) a été également conçu
pour évaluer si une association à base de platine pouvait être utilisée de façon
préférentielle à une monothérapie par carboplatine chez les patientes en
première rechute tardive (délai inférieur à six mois) (26). Dans cet essai de
357 patientes, la combinaison associe le carboplatine et la gemcitabine, deux
drogues réputées faiblement neurotoxiques et alopéciantes. Les résultats
montrent que, comparée au carboplatine seul, la combinaison carboplatine-
gemcitabine augmente significativement la survie sans progression (8,6 mois
versus 5,8 mois) avec un HR de 0,72 (95 % CI, 0,50-0,90 mois) (p = 003). Il
n’y avait pas de différence de survie globale entre les deux bras, mais le nombre
de patientes n’avait pas été calculé pour détecter une différence de survie
globale. Comme prévu, le taux de neurotoxicité et d’alopécie a été faible dans
La chimiothérapie des rechutes au-delà de six mois 423

les deux bras, mais la toxicité hématologique et particulièrement la thrombo-


pénie ont été significativement plus fréquentes dans le bras avec gemcitabine,
pouvant limiter la large utilisation de cette combinaison dans la pratique
courante.
Au total, les résultats de ces deux essais sont suffisants pour conclure que la
polychimiothérapie à base de platine est supérieure à la monothérapie par
carboplatine chez les patientes atteintes de cancer de l’ovaire en rechute tardive.
Néanmoins, reste à préciser la combinaison à base de platine qui offre la
meilleure efficacité tout en minimisant les toxicités et en préservant la qualité
de vie.
Des résultats récents d’essais phase II ont montré une activité intéressante
pour d’autres combinaisons à base de platine, et notamment l’association de
carboplatine et de doxorubicine liposomale pégylée (27). Bien que la popula-
tion des 105 patientes incluses dans cet essai comporte des facteurs de
pronostic moins favorables que celles des essais ICON4/OVAR 2.2 et GCIG,
la survie sans progression et la survie globale rapportées pour la combinaison
carboplatine-doxorubicine liposomale pégylée semblent similaires à celles
décrites pour l’association carboplatine-paclitaxel. Par contre, les toxicités
hématologiques et non-hématologiques sont peu fréquentes avec moins de
15 % de patientes souffrant d’alopécie grade 2 ou d’infection, mucite,
syndrome main-pied et neurotoxicité de grade 2-3. Ces résultats encourageants
ont stimulé le GCIG à lancer un essai randomisé où l’efficacité et la tolérance
du carboplatine associé à la doxorubicine liposomale pégylée sont comparées à
l'association usuelle carboplatine-paclitaxel chez les patientes atteintes de
cancer de l’ovaire en rechute tardive (supérieure à six mois).

Conclusion
Des progrès significatifs ont été récemment réalisés pour mieux définir la stra-
tégie thérapeutique optimale chez les patientes atteintes de cancer de l’ovaire
en rechute tardive (> 6 mois).
L’association de paclitaxel et de carboplatine est considérée comme un stan-
dard dans cette population de patientes en rechute. Des protocoles remplaçant
le paclitaxel par la gemcitabine ou la doxorubicine liposomale pégylée dans les
associations avec le carboplatine peuvent peut-être permettre d’offrir aux
patientes des combinaisons comportant un meilleur ratio efficacité-toxicité et
une meilleure qualité de vie.
424 Les cancers ovariens

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La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle
une place en première ligne?
L. Gladieff

Introduction
« Intraperitoneal therapy for stage III ovarian cancer : a therapy whose time has
come ! » Malgré l’enthousiasme manifesté dans cet éditorial du Journal of
Clinical Oncology d’octobre 2002 (1) par les plus grands spécialistes nord-
américains de la chimiothérapie intrapéritonéale, cette modalité thérapeutique
peine à trouver sa place. Plusieurs essais de phase III en première ligne ont été
conduits, et les résultats des principaux d’entre eux sont en faveur de la voie
péritonéale. Malgré cet avantage, la complexité apparente de la technique et les
problèmes de toxicités restent des obstacles majeurs à son développement.

Les bases rationnelles d’utilisation


de la voie péritonéale
Tout l’intérêt de l’administration intrapéritonéale des médicaments anticancé-
reux réside dans l’obtention de fortes concentrations locales, donc directement
au site de la maladie, associées à des concentrations plasmatiques au moins
équivalentes à celles qui sont obtenues après administration intraveineuse et
conditionnant la toxicité systémique.

Données pharmacologiques
Le rationnel pharmacocinétique d’utilisation des médicaments par voie intra-
péritonéale a été établi dés la fin des années 70 par Dedricks et ses
collaborateurs (2). Dans ce modèle mathématique bi-compartimental, le
gradient de concentration entre les deux compartiments est conditionné par le
302 Les cancers ovariens

rapport des clairances et/ou des aires sous la courbe (AUC) : plus un médica-
ment est lentement éliminé de la cavité péritonéale et rapidement éliminé de
l’organisme, plus le gradient sera élevé et meilleur sera le gain pharmacociné-
tique. Le médicament « idéal » pour cette voie d’administration doit être
hydrosoluble, de poids moléculaire suffisant, avoir une faible clairance périto-
néale et une forte clairance plasmatique, être rapidement et totalement
métabolisé en métabolites non toxiques par le foie. Les cellules cancéreuses
présentes dans la cavité péritonéale peuvent alors être exposées à des concen-
trations dix à mille fois supérieures à celles de la circulation générale (tableau I)
(3). Une autre caractéristique importante est l’absence de toxicité locale du
médicament, ce qui peut autoriser une incrémentation de dose jusqu’à obten-
tion d’une toxicité limitante systémique. Ainsi, sont combinés l’augmentation
d’exposition locale et le maintien d’une concentration plasmatique efficace (4).

Tableau I – Avantage pharmacocinétique de l’administration intrapéritonéale de certains


médicaments anticancéreux.
Drogues Rapport des pics de concentration cavité péritonéale/plasma
Carboplatine 18
Cisplatine 20
Mitomycine 71
Methotrexate 92
Melphalan 93
5-fluoro-uracile 298
Doxorubicine 474
Mitoxantrone 620
Paclitaxel 1 000

Volume de distribution
Un médicament administré par voie péritonéale gagne les sites tumoraux par
deux voies : capillaire, secondaire au passage systémique par diffusion passive à
travers la membrane péritonéale, et directe, par diffusion à partir de la péri-
phérie tumorale. Pour que cette diffusion, qui fait tout le sens de cette voie
d’administration, soit possible, il faut que le médicament administré arrive
partout au contact de la tumeur, ce qui peut être rendu difficile par les volumes
tumoraux eux-mêmes et par l’existence fréquente d’adhérences post-chirurgi-
cales. Cette répartition intra-cavitaire n’est possible que si cette administration
se fait dans un volume liquidien suffisant. La plupart des auteurs recomman-
dent un volume d’au moins 2 litres (3, 4).

Pénétration intra-tumorale et exposition péritonéale


La diffusion intra-tumorale des médicaments à partir de la périphérie reste
limitée : la plupart des études expérimentales suggèrent que cette pénétration
La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle une place en première ligne ? 303

ne concerne que les premières couches cellulaires, sur une épaisseur maximale
de 1 à 3 mm (3). On conçoit donc aisément que cette modalité thérapeutique
n’a pas d’intérêt dès lors qu’il existe des volumes tumoraux importants.
Les données manquent chez l’homme, mais certaines études expérimentales
chez l’animal suggèrent une exposition incomplète de la surface péritonéale
lors d’une dialyse péritonéale (5) et il s’agit là certainement d’une question à
prendre en considération.

Accès à la cavité péritonéale


Les modes d’accès les plus usuels sont le cathéter de Tenckhoff ou le cathéter
avec chambre implantable. Tous deux nécessitent une mise en place chirurgi-
cale. L’utilisation de cathéter à usage unique, ou tout simplement d’une
aiguille, est plus rare. L’utilisation du cathéter de Tenckhoff s’accompagne
d’une péritonite dans 7 % des cas, d’une obstruction dans 6,5 % des cas, d’une
perforation digestive dans 2 % des cas et de complications pariétales dans 3 %
des cas, en compilant les différents résultats rapportés dans la littérature (6).
Dans l’expérience du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, rapportée par
Makhija (7), sur 301 patientes porteuses d’un cathéter avec chambre implan-
table de type Bardport® pour administration intrapéritonéale, le taux
d’obstruction est de 6,3 % et d’infection de 3,6 %. Seulement 7 % des patientes
ont vu leur traitement interrompu du fait de ces complications.
L’utilisation de matériel à usage unique ne s’accompagne dans des mains
entraînées que d’un taux très faible de complications : péritonite : 0 à 4 %,
perforation : 0 à 1,3 %, diffusion pariétale de liquide ou hématome de paroi :
15 % (6, 8, 9).

Les médicaments
De nombreux médicaments ont été étudiés par voie péritonéale, mais nous
nous limiterons volontairement à ceux qui constituent actuellement le stan-
dard de première ligne par voie intraveineuse.

Cisplatine
Si le cisplatine (CDDP) est largement supplanté par le carboplatine en admi-
nistration intraveineuse, il n’en reste pas moins une molécule clé, en particulier
pour l’utilisation intrapéritonéale. Ses caractéristiques pharmacocinétiques
sont adaptées à cette voie de prescription : avec une clairance plasmatique de
23,3 ± 15,2 l/m2/h et une clairance péritonéale de 2,6 ± 1,4 l/m2/h, le rapport
des AUC est proche de 12,5. Sa concentration intra-tumorale après adminis-
304 Les cancers ovariens

tration intrapéritonéale est supérieure à celle obtenue après administration


intraveineuse : à la diffusion centrale par voie capillaire, s’associe une pénétra-
tion périphérique sur environ 1,5 mm (10). Sa tolérance locale est bonne, et
les toxicités dose-limitantes sont liées aux effets systémiques de la molécule. À
la dose de 100 mg/m2, l’AUC plasmatique du platine ultrafiltrable est tout à
fait comparable à celle obtenue après administration intraveineuse de la même
dose de CDDP (11). Enfin, l’utilisation d’un agent complexant, le thiosulfate
de sodium, autorise la délivrance de 270 mg/m2 toutes les trois semaines sans
toxicité rénale, les toxicités auditive et neurologique deviennent alors limi-
tantes. La dose maximale recommandée est de 200 mg/m2 (12).
En monochimiothérapie, le taux de réponse chirurgicalement documenté
est de 20 à 30 %, après une chimiothérapie de première ligne et en présence de
résidus tumoraux minimes. De façon plus précise, 30 à 40 % des patientes sont
en réponse histologique complète si la taille des résidus est au maximum de
5 mm, contre seulement moins de 10 % si la taille d’au moins un des résidus
est supérieure à 10 mm (3).

Carboplatine
Le carboplatine (CBDCA) est également utilisable par voie intrapéritonéale,
l’avantage pharmacocinétique alors observé étant à peu prés semblable à celui
du CDDP. Si on compare expérimentalement l’exposition en platine ultrafil-
trable après administration intrapéritonéale d’une dose équimolaire de
CBDCA et de CDDP, le rapport des AUC péritonéale et plasmatique est en
faveur du CBDCA, mais la concentration intra-tumorale est sept fois supé-
rieure pour le CDDP. Ceci s’expliquerait par la très faible pénétration
intra-tumorale du CBDCA. Pour l’obtention d’une même activité intra-tumo-
rale, il faudrait administrer par voie intrapéritonéale cinq fois plus de CBDCA
que de CDDP (13).
Sa tolérance locale est bonne et, comme on pouvait s’y attendre, la toxicité
dose-limitante est hématologique. Le taux de réponse chirurgicalement docu-
menté dans les essais de phase II est de l’ordre de 25 % (3).

Paclitaxel
Le paclitaxel est à ce jour la molécule pour laquelle l’avantage pharmacociné-
tique lié à l’administration intrapéritonéale est le plus évident, avec une
exposition cavitaire mille fois supérieure par rapport à la voie intraveineuse
(14). Avec ce schéma d’administration toutes les trois semaines, la dose limi-
tante est la douleur abdominale aux doses supérieures à 175 mg/m2. La
tolérance locale semble meilleure avec un schéma hebdomadaire, la dose
recommandée étant de 60 mg/m2/semaine. Selon ce schéma, non seulement le
La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle une place en première ligne ? 305

pic de concentration péritonéale reste élevé, mais des concentrations périto-


néales significatives persistent une semaine après l’injection, suggérant une
forme d’exposition continue au médicament (15). Selon ce schéma d’adminis-
tration, un taux de réponse chirurgicalement documenté de 25 % est observé,
taux qui atteint 61 % si on considère uniquement la sous-population des
patientes présentant un résidu microscopique à l’initiation du traitement intra-
péritonéal (16).

Les résultats cliniques


Les études rétrospectives
Fujiwara (17) rapporte l’expérience de trois équipes japonaises utilisant le
carboplatine par voie péritonéale, quel que soit le stade de la maladie. Entre
1990 et 2000, 165 patientes ont ainsi été traitées. Les doses de carboplatine
étaient variables selon les institutions et associées dans 70 % des cas à du cyclo-
phosphamide intraveineux. Des complications locales liées au cathéter
péritonéal et obligeant à l’arrêt du traitement sont survenues chez un peu
moins de 10 % des patientes. La médiane de survie des stades FIGO III/IV est
de cinquante et un mois si la chirurgie a été optimale et si la dose de carbopla-
tine administrée est au moins de 400 mg/m2 versus vingt-cinq mois si elle est
inférieure.

Les études de phase II


Le premier essai a été publié par Howell (18) en 1990. Cet essai porte sur
23 patientes porteuses d’un cancer de l’ovaire de stade FIGO III ou IV, dont
56 % ont un résidu tumoral infra-centimétrique. Six cycles de CDDP,
200 mg/m2 et de VP 16, 350 mg/m2 sont délivrés par voie péritonéale exclu-
sive tous les vingt-huit jours. Les auteurs ne rapportent ni péritonite ni
adhérence. La toxicité principale reste hématologique (39 % de neutropénie
grade 3, 16 % de grade 4), la toxicité rénale est rare grâce à l’utilisation systé-
matique de thiosulfate de sodium par voie intraveineuse et 35 % des patientes
ont développé une neurotoxicité grade 1-2. Le taux de réponse clinique
complète est de 56 %, et la survie estimée à vingt-sept mois de 68 %.
En 2002, Hofstra (19) rapporte l’expérience hollandaise d’un protocole
associant par voie intraveineuse du CBDCA prescrit selon la formule de
Calvert avec une AUC cible de 5 à J1, du cyclophosphamide, 750 mg/m2 à J1
et, par voie intrapéritonéale, du paclitaxel, 75 mg/m2 à J1 et J8. Le traitement
est renouvelé toutes les quatre semaines pour un total de six cycles. Les
25 patientes incluses dans cet essai sont porteuses d’une maladie de stade
FIGO Ic à IV ; 60 % d’entre elles ont un résidu de moins de 10 mm. Le taux
306 Les cancers ovariens

de réponse clinique complète est de 72 %, au prix d’une toxicité locale accep-


table, avec 8 % de douleurs abdominales de grade 3-4 et seulement 4 % de
complications infectieuses liées au cathéter. Les toxicités systémiques sont celles
attendues, avec 74 % de leucopénie de grade 3-4, 20 % de neurotoxicité de
grade 1-2. La survie médiane est de vingt-huit mois pour les patientes ayant eu
une chirurgie initiale optimale contre seulement treize mois en cas de résidus.
L’objectif de la phase II rapportée par Rothenberg (20) est d’évaluer la faisa-
bilité et la survie obtenue à deux ans avec une association de CDDP
intrapéritonéal, 100 mg/m2 J1, et de paclitaxel par voie péritonéale, 60 mg/m2
à J8, et intraveineuse, 135 mg/m2/24 h à J1, chez des patientes ayant bénéficié
d’une chirurgie optimale pour un carcinome ovarien de stade FIGO III. Pour
les 68 patientes évaluables, la médiane de survie sans rechute est de trente-trois
mois et de survie globale de cinquante et un mois. La toxicité locale reste accep-
table, avec des douleurs de grade 2-4 chez 35 % des patientes et 16 %
d’infection liée au cathéter. La toxicité principale reste hématologique avec
79 % de neutropénie de grade 2-4, les autres toxicités les plus fréquentes de
grade 3-4 étant les nausées (50 %), les vomissements (34 %) et la fatigue
(24 %).
Enfin, sur une population plus ciblée de stade FIGO IIIc, Zylberberg (21)
propose un schéma associant par voie intrapéritonéale, du paclitaxel à
125 mg/m2 à J1 et du CDDP 200 mg/m2 administré en trois jours avec protec-
tion rénale par thiosulfate de sodium intraveineux, et par voie intraveineuse de
l’ifosfamide, 1 300 mg/m2 en trois jours. Les cycles sont renouvelés tous les
vingt-huit jours jusqu’à dix cycles. L’accès à la cavité péritonéale se fait par
ponction à l’aiguille. Vingt-six patientes ont été traitées selon ce protocole :
77 % avaient eu une chirurgie initiale incomplète et 30 % n’ont eu qu’une
biopsie. Malgré le nombre de cycles réalisés, la tolérance locale est excellente,
sans aucune infection locale et avec seulement 23 % de douleurs abdominales.
L’administration d’un anesthésique local est systématique, et un protocole anti-
douleur basé sur le paracétamol est systématiquement appliqué en cas de
douleurs, et préventivement ensuite. La toxicité hématologique est très
modérée, avec seulement 35 % de leucopénie grade 3-4. Le taux de réponse
clinique complète est de 81 %, la médiane de survie sans rechute est de
quarante mois, et la médiane de survie globale non atteinte à cinquante-trois
mois.
Que nous apprennent ces phases II ?
Si la voie péritonéale est source de complications supplémentaires, celles-ci
ne sont jamais rédhibitoires. Zylberberg (21) et Howell (18) ne rapportent
aucun arrêt de traitement pour toxicité locale, et lorsque une réévaluation
chirurgicale a pu être réalisée, leur taux d’adhérences intra-abdominales
majeures sont respectivement de 13 et 30 %. Dans l’expérience hollandaise
(19), le traitement n’a dû être interrompu pour complications locales que chez
2 patientes sur 25 (péritonite : 1 cas ; douleurs abdominales grade 3 : 1 cas) et
dans l’essai intergroupe américain (20), 71 % des patientes ont pu recevoir les
six cycles prévus.
La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle une place en première ligne ? 307

L’administration de 200 mg/m2 de CDDP est faisable, sous couvert d’une


néphroprotection par thiosulfate de sodium intraveineux, ceci même en asso-
ciation avec d’autres médicaments, administrés par la même voie (18) et/ou par
voie intraveineuse (21). L’intérêt de cette intensification est toutefois actuelle-
ment remis en question par certains résultats de la littérature, en particulier
cette méta-analyse récente montrant que la survie des cancers de l’ovaire de
stade FIGO III/IV était significativement influencée par la qualité de la cyto-
réduction chirurgicale initiale, mais pas par la dose-intensité du platine (22).
L’utilisation de la voie péritonéale ne paraît d’ailleurs pas de nature à
« compenser » une cytoréduction initiale insuffisante : à l’exception de la série
de Zylbelberg (21), les résultats de survie sont, dans les trois autres séries (18,
19, 20), meilleurs si la cytoréduction initiale est optimale. Les résultats les plus
prometteurs sont rapportés par Rothenberg (20), avec une survie à deux ans de
100 % en cas de résidus microscopiques versus 85 % en cas de résidus macro-
scopiques.
Enfin, chacun des protocoles étudiés paraît efficace, mais doit être
confronté au traitement de référence par voie intraveineuse dans le cadre d’un
essai de phase III, comme l’ont été les protocoles de Howell (18) et de
Rothenberg (20).

Les essais de phase III


Nous disposons actuellement de sept essais randomisés. Nous insisterons plus
particulièrement sur trois d’entre eux : l’essai du SWOG rapporté par Alberts
en 1996 (23), l’essai intergroupe SWOG/GOG/ECOG rapporté par
Markman (24) en 2001 et l’essai GOG 172 présenté en communication orale
au congrès de l’American Society of Clinical Oncology en 2002 (25).
Les quatre autres essais sont résumés dans le tableau II. Aucune différence
de résultats n’est observée dans la première série randomisée publiée par
l’équipe de Howell (26) en 1994, faisant suite à leur essai de phase II (18). La
dose-intensité du cisplatine par voie péritonéale est pourtant le double de celle
par voie intraveineuse (47,4 mg/m2/semaine versus 24,6 mg/m2/semaine), mais
nous avons déjà évoqué le rôle controversé de la dose de cisplatine. Un autre
facteur interférant dans les résultats pourrait être le choix du VP 16 dans le bras
expérimental, et il faut également tenir compte du très petit nombre de
patientes incluses dans cet essai.
Aucune différence statistiquement significative n’est observée non plus dans
l’expérience italienne (27), malgré une différence de dix-sept mois pour la
survie sans rechute et de seize mois pour la survie globale en faveur de la voie
intrapéritonéale. La leçon certainement la plus intéressante de cette publication
est la difficulté à mener un essai incluant un bras avec chimiothérapie intrapé-
ritonéale : seulement 113 patientes ont été incluses sur les 330 théoriquement
nécessaires pour mettre en évidence une réduction de mortalité de 33 %, avec
308 Les cancers ovariens

Tableau II – Les essais de phase II.

Stade Nombre Protocole Taille RCC SLL RH SSR SG


patientes résidus % % mois mois
CDDP100 iv 10 mm
33 CPM600 iv 52 19/25 58 14 -
Kirmani J1 = J21 x 6 > 51 %
IIc à IV
(26) CDDP200 ip 10 mm
29 VP16350 ip 48 16/21 56 12 -
J1 = J21 x 6 >38 %
56 Epi60 iv
(sur 165 CPM600 iv macro : - 33/58 43 25 51
prévues) CDDP50 iv 78,9 %
Gadduci II à IV J1 = J28 x 6
(27) r < 20 mm 57 Epi60 iv
(sur 165 CPM600 iv macro :
prévues) CDDP50 ip 71,4 % - 34/57 39 42 67
J1 = J28 x 6
CPM600 iv > 20 mm
III 46 CBDCA350 iv 46 % 48 6 0 19 25
Polyzos mesurable J1 = J21 x 6
(28) ou CPM600 iv >20 mm
évaluable 44 CBDCA350 ip 41 % 45 4 2 18 26
J1 = J21 x 6
CPM500 iv
63 Anthra50 iv - - 24 38 - 48
CDDP50 iv
Yen III J1 = J21 x 6
(29) r < 10 mm CPM500 iv
55 Anthra50 iv - - 20 36 - 43
CDDP50 ip
J1 = J21 x 6
RCC : réponse clinique complète ; SLL : laparotomie de « second look » ; RH : réponse histo-
logique complète ; SSR : survie sans rechute ; SG : survie globale.
CPM : cyclophosphamide ; Epi : épirubicine ; Anthra : anthracyclines.

seulement un tiers des centres déclarés actifs, avant que l’essai ne soit finale-
ment interrompu.
Les résultats des voies intrapéritonéale et intraveineuse sont tout à fait simi-
laires dans la série grecque de Polyzos (28). Dans les deux bras, environ 40 à
45 % des patientes ont un résidu tumoral supérieur à 20 mm à l’inclusion.
Tenant compte des données expérimentales (13), cette taille tumorale pourrait
être un obstacle à l’efficacité du carboplatine administré par voie locale, par
défaut de pénétration directe.
Enfin, aucune différence n’est observée non plus dans la série de Yen (29).
L’essai du SWOG, conduit en collaboration avec le GOG (23) a comparé
le cisplatine administré par voie intrapéritonéale ou intraveineuse, à la même
dose, et associé à du cyclophosphamide administré par voie intraveineuse dans
La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle une place en première ligne ? 309

les deux bras (tableau III). Entre juin 1986 et juillet 1992, 546 patientes
atteintes d’un adénocarcinome ovarien de stade FIGO III ont été éligibles, les
deux tiers d’entre elles avaient un résidu tumoral à l’inclusion inférieur à 5 mm.
Une réévaluation chirurgicale était protocolairement prévue pour les patientes
en réponse clinique complète à l’issue du traitement. Sur les 400 réévaluations
qui auraient dû être faites, 103 ne l’ont pas été ou l’ont été de façon incorrecte.
Les taux de réponse histologique complète ne sont donc donnés qu’à titre indi-
catif, sans possibilité de comparaison statistique : 36 % dans le bras
intraveineux et 47 % dans le bras intrapéritonéal. La survie médiane est signi-
ficativement plus longue dans le bras expérimental : quarante-neuf versus
quarante et un mois, avec une réduction du risque de décès de 24 %. En consi-
dérant uniquement le sous-groupe des femmes ayant un résidu tumoral de
moins de 5 mm, la survie est de cinquante et un mois dans le bras intrapérito-
néal et de quarante-six mois dans le bras intraveineux, le risque de décès restant
inférieur dans le bras expérimental avec un hazard ratio de 0,8.

Tableau III – Les trois principaux essais de phase III.


RANDOMISATION

GOG 104 Cancer de l’ovaire Cisplatine 100 mg/m2 IV


Stade III Cyclophosphamide 600 mg/m2 IV
SWOG 8501 J1 = J21 x 6
Stratification Cisplatine 100 mg/m2 IP
(23) ≤ 5 mm Cyclophosphamide 600 mg/m2 IV
5 à 20 mm J1 = J21 x 6
Cisplatine 75 mg/m2 IV
Paclitaxel 135 mg/m2/24h IV
RANDOMISATION

J1 = J21 x 6
Carboplatine AUC 9 IV
Cancer de l’ovaire J1 = J28 x 2
GOG 114 puis
(24) Stade III Cisplatine 100 mg/m2 IP
Résidu < 10 mm Paclitaxel 135 mg/m2/24h IV
J1 = J21 x 6
Cancer de l’ovaire Cisplatine 75 mg/m2 IV
RANDOMISATION

Stade III Paclitaxel 135 mg/m2/24h IV


GOG 172 Résidu < 10 mm J1 = J21 x 6
(25) Paclitaxel 135 mg/m2/24h IV J1
Stratification Cisplatine100 mg/m2 IP J2
Taille résidu Paclitaxel 60 mg/m2 IP J8
Réévaluation chir. J1 = J21 x 6

Ces résultats ont été « balayés » par ceux du GOG 111, rapportés quelques
mois plus tôt dans la même revue (30), l’association cisplatine-paclitaxel
permettant un gain de survie globale de quatorze mois par rapport à la clas-
sique association cisplatine-cyclophosphamide. L’absence de paclitaxel est donc
la critique qui a été immédiatement faite à cet essai. Le SWOG s’est ensuite
associé au GOG et à l’ECOG pour mettre en place un nouvel essai, comparant
cette fois l’association cisplatine-paclitaxel selon le schéma de McGuire (30) à
310 Les cancers ovariens

la même association avec administration intrapéritonéale du cisplatine et


précédée de deux cycles de carboplatine « haute dose » (24). Le schéma initial
de l’essai prévoyait un troisième bras cisplatine-cyclophosphamide intravei-
neux, qui a été fermé dès l’obtention des résultats du GOG 111 (tableau III).
Cet essai s’adressait à des patientes porteuses d’un adénocarcinome ovarien de
stade III FIGO, avec une maladie résiduelle n’excédant pas 10 mm. Afin d’op-
timiser l’efficacité de la voie péritonéale, deux cycles de carboplatine « haute
dose » (AUC 9) étaient administrés en premier, l’idée étant de faire suivre la
cytoréduction chirurgicale d’une « cytoréduction chimique ». Mais la toxicité
générée par ce traitement a diminué la compliance à la chimiothérapie périto-
néale lui faisant suite, puisque 18 % des patientes n’ont reçu qu’au plus deux
cycles. Et s’il existe un gain significatif de six mois pour la survie sans rechute
en faveur du bras expérimental, cette significativité ne se retrouve pas pour la
survie globale, qui est de soixante-trois mois pour le bras intrapéritonéal versus
cinquante-deux mois pour le bras contrôle.
Tenant compte des résultats des essais de phase I-II, une autre façon d’op-
timiser les résultats de la série d’Alberts était de faire appel au paclitaxel
intrapéritonéal. Le schéma proposé par Rothenberg (20) est ainsi confronté au
traitement de référence intraveineux qu’est devenu l’association cisplatine-
paclitaxel, mais toujours selon le schéma nord-américain, dans lequel le
paclitaxel est administré à la dose de 135 mg/m2 sur vingt-quatre heures
(tableau III). Les critères d’inclusion concernant le stade et la taille des résidus
post-chirurgicaux sont les mêmes que dans l’essai de Markman (24). Les résul-
tats préliminaires ont été communiqués durant le congrès l’American Society
of Clinical Oncology en 2002 (25). Outre les données de toxicité, seuls les
résultats de survie sans rechute ont été rapportés : la médiane est de 24,3 mois
pour les patientes recevant le traitement intrapéritonéal versus 19,3 mois pour
le bras contrôle, et cette différence est statistiquement significative.
Si on analyse de façon globale les toxicités observées dans l’ensemble de ces
essais (tableau IV), il est clair que la voie péritonéale rajoute des toxicités
locales, mais qui ne sont jamais rédhibitoires. Alberts (23) rapporte moins de
toxicité auditive et neuromusculaire par voie péritonéale. Les toxicités systé-
miques, qu’elles soient hématologiques ou extra-hématologiques, sont au
contraire plus importantes par voie péritonéale dans les séries de Markman
(24) et d’Armstrong (25).
Que nous apprennent ces phases III ?
La toxicité locale n’est pas un obstacle à la compliance du traitement : le
pourcentage de patientes ayant reçu les six cycles de traitement programmés
par voie péritonéale est de 60 % dans la série de Kirmani (26), 58 % dans celle
d’Alberts (23), 81 % dans celle d’Armstrong (25) et 71 % malgré les deux cycles
précessifs de carboplatine dans l’essai GOG 114 (24), versus respectivement
76 %, 58 %, 87 % et 86 % pour la voie intraveineuse. À titre comparatif, les six
cycles planifiés ont pu être administré chez 87 % des patientes recevant l’asso-
ciation cisplatine-paclitaxel et chez 78 % de celles recevant du cisplatine et du
cyclophosphamide dans le GOG 111 (30).
La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle une place en première ligne ? 311

Tableau IV – Toxicités locales et générales observées dans les essais de phase III. Les résultats
sont exprimés en pourcentage.
Kirmani Alberts Gadduci Polyzos Yen Markman Armstrong
(26) (23) (27) (28) (29) (24) (25)
Toxicité locale
Douleurs abdominales - 18 22 - 42 - -
Infections - - 2 (peau) - 9 (peau) - -
Obstruction cathéter
Toxicité hématologique
≥ G III
(ip/iv)
Leucopénie 19/21 40/50 24/13 11/39 18/33 77/62 31/14
Thrombopénie 0/5 8/9 0/2 7/22 13/16 49/3 12/4
Anémie 3/7 26/25 9/6 0/0 13/19 - -
Toxicité
extra-hématologique
≥ GII (ip/iv)
Gastro-intestinale 47/67 - 37/26 - - 37/17 46/24
Rénale 15/27 - 0/2 - - 5/2 6/1
Auditive 12/25 5/15 0/0 - - - -
Neurologique 12/28 15/25 2/2 - - 12/9 19/9

La question de l’impact de la dose-intensité par voie péritonéale reste


complètement ouverte. La plupart des séries, incluant celle d’Alberts (23),
comparent strictement le même protocole, la seule variable étant la voie d’ad-
ministration du cisplatine. La dose-intensité des médicaments est donc la
même dans les deux bras. Dans trois essais, les protocoles ne sont pas stricte-
ment superposables dans les deux bras ; nous avons déjà évoqué le doublement
de la dose du cisplatine et l’utilisation inhabituelle en première ligne du VP16
dans la série de Kirmani (26). La dose-intensité du paclitaxel est la même dans
les deux groupes dans l’essai de Markman (24), dans lequel il est plus difficile
de comparer celle du platine, tenant compte de ces deux cycles de carboplatine
« semi-intensif ». Si on considère le seul cisplatine, la dose intensité est légère-
ment supérieure dans le bras péritonéal : 33,3 mg/m2/semaine contre
25 mg/m2/semaine par voie veineuse. La différence est la même dans le dernier
essai du GOG (25), mais s’y ajoute une différence également pour le pacli-
taxel : 45 mg/m2/semaine dans le bras intraveineux et 65 mg/m2/semaine dans
le bras intrapéritonéal. Cependant, comme pour le CDDP, il n’est pas
prouvé actuellement que l’augmentation de la dose délivrée du paclitaxel soit
bénéfique. Omura (31) a montré que si l’administration intraveineuse de
250 mg/m2 de paclitaxel toutes les trois semaines augmente le taux de réponse
par rapport à 175 mg/m2 et ceci n’a aucun impact, ni sur la survie sans rechute
ni sur la survie globale.
Si la réévaluation chirurgicale est discutable en pratique quotidienne par
son absence d’impact pratique en termes de décision thérapeutique, elle reste
une des meilleures façons d’apprécier l’efficacité thérapeutique par l’évaluation
de la réponse histologique. L’ensemble de ces essais nous montre la difficulté de
312 Les cancers ovariens

réalisation de ce geste, et donc la difficulté d’interpréter les résultats rapportés


en termes de réponse histologique, qui varient de 36 (29) à 56 % (26) pour la
voie péritonéale et de 38 (29) à 58 % (26) pour la voie veineuse. Les résultats
ne sont donnés qu’à titre indicatif par Alberts (23), aucune analyse statistique
n’a été faite pour éviter le biais lié à 103 chirurgies non ou mal faites sur les 400
prévues : 47 % pour la voie péritonéale et 36 % pour la voie veineuse. Quant à
Markman (24), il a essuyé plus de refus que prévu de cette chirurgie – 15 % des
patientes traitées par voie veineuse et 22,6 % par voie péritonéale – et préfère
donc ne communiquer aucun résultat. Il n’est donc pas possible de dire claire-
ment si cette voie péritonéale permet ou pas d’augmenter le taux de réponse
histologique, et il faut espérer que l’étude GOG 172 (25) apportera une
réponse à cette importante question.
Enfin, à l’heure où la significativité statistique fait loi dans l’interprétation
des résultats, rappelons qu’elle est atteinte dans deux essais. Alberts (23)
rapporte un gain en survie globale de huit mois, soit une réduction de 24 % du
risque de décès (hazard ratio : 0,76 [0,61- 0,96], p = 0,02). Le gain est certes
moins significatif que dans l’essai de McGuire (30) (p < 0,001 pour la survie
globale), mais incontestable. Dans l’essai le plus récent du GOG (25), il existe
un gain significatif pour la survie sans progression, avec une réduction du
risque de rechute de 33 % dans le bras expérimental, p = 0,029. Dans l’essai de
Markman (24), seule la survie sans progression est significativement supérieure
pour le bras péritonéal (risque relatif : 0,78, p = 0,01). Au moment de l’ana-
lyse, la différence observée en survie globale pour le bras expérimental
n’atteignait pas la significativité (p = 0,05).

Conclusion
Trois essais randomisés de bonne qualité ont montré un avantage pour la voie
intrapéritonéale chez des patientes ayant eu une réduction chirurgicale opti-
male. Même si le bénéfice obtenu n’atteint pas celui observé avec l’introduction
du paclitaxel intraveineux, il paraît difficile d’ignorer ces résultats.
L’expérience aidant, la manipulation des cytotoxiques par voie péritonéale
n’est pas si complexe que d’aucuns veulent bien le croire. L’utilisation de ponc-
tions itératives à l’aiguille et l’adaptation des traitements antalgiques
d’accompagnement peuvent faciliter l’observance par la diminution des
complications locales.
Les données pharmacologiques et cliniques permettent de limiter l’indica-
tion de cette voie aux seules patientes porteuses de résidus tumoraux de très
petite taille, au moins inférieurs à 1 cm, et n’ayant pas ou peu d’adhérences
intra-abdominales. Si l’idée de tenter d’améliorer l’exposition péritonéale, par
exemple par l’utilisation de vasodilatateurs, est intellectuellement séduisante,
son application en clinique paraît limitée.
La chimiothérapie intrapéritonéale a-t-elle une place en première ligne ? 313

Enfin, la meilleure association médicamenteuse à privilégier reste à déter-


miner, et devra être confronté au protocole de référence actuel associant
carboplatine et paclitaxel 175 mg/m2 en trois heures. L’association cisplatine
par voie intrapéritonéale-cyclophosphamide par voie intraveineuse a ouvert la
voie, mais n’a plus sa place. L’utilisation du paclitaxel par voie péritonéale pour-
rait être optimisée, par exemple avec un schéma hebdomadaire, de même que
pourrait être discutée une association exclusivement intrapéritonéale. Les résul-
tats de survie globale de l’essai GOG 172 (25) et des essais en cours des groupes
coopérateurs américains (GOG, SWOG) devraient nous aider à définir enfin
la place exacte de cette modalité thérapeutique en première ligne.

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La chimiothérapie intrapéritonéale
avec hyperthermie
O. Glehen et F.-N. Gilly

Introduction
Le cancer épithélial ovarien constitue une des principales causes de décès par
cancer chez la femme après le cancer du sein et du côlon et est souvent diagnos-
tiqué à un stade évolué (1). La stratégie thérapeutique standard pour une
maladie limitée à la cavité péritonéale associe la chirurgie de cytoréduction lors-
qu’elle est possible, suivie d’une chimiothérapie systémique associant paclitaxel
et dérivé du platine. Cette stratégie permet d’obtenir 60 à 80 % de rémission
complète pour une médiane de survie comprise entre 35 et 38 mois (2, 3). La
radicalité de la chirurgie de cytoréduction constitue sans doute le principal
facteur pronostique comme l’a rapporté une méta-analyse sur plus de
7 000 patientes présentant un cancer ovarien de stade III ou IV (4).
Toutefois, en plus des patients ne répondant pas complètement à la stratégie
thérapeutique initiale, un certain nombre de patientes récidivent. Elles consti-
tuent une population au pronostic beaucoup plus réservé et pour laquelle une
prise en charge thérapeutique à visée curative devient beaucoup plus aléatoire.
Plusieurs modalités thérapeutiques ont été proposées comme la chirurgie de
cytoréduction de deuxième intention, les chimiothérapies de deuxième ligne,
ou encore les chimiothérapies avec intensification de dose, la chimiothérapie
intrapéritonéale, la radiothérapie, l’immunothérapie, l’hormonothérapie. Mais
aucune de ces modalités thérapeutiques ne s’est réellement imposée dans la
prise en charge des cancers ovariens récidivants ou chimio-résistants.
Au cours des quinze dernières années, plusieurs équipes ont développé un
nouveau concept de traitement loco-régional (pour une maladie dont l’exten-
sion est essentiellement loco-régionale) : la chimiohyperthermie intrapéritonéale
(CHIP). Elle peut être envisagée :
– à titre palliatif devant une carcinose péritonéale avérée et non accessible à une
chirurgie de cytoréduction macroscopiquement complète ;
– à visée curative en association à une chirurgie de cytoréduction macroscopi-
quement complète ;
362 Les cancers ovariens

– à visée adjuvante pour prévenir la récidive d’une carcinose après réponse


macroscopique complète dans les suites d’une chimiothérapie systémique.
Le développement de cette nouvelle modalité thérapeutique s’est fait essen-
tiellement dans le traitement des carcinoses péritonéales d’origine digestive au
cours des dix dernières années et constitue pour certains le traitement de réfé-
rence pour des patients strictement sélectionnés dans le pseudomyxome et le
mésothéliome péritonéal (5, 6) dans les carcinoses d’origine colorectale (7, 8)
et gastrique (9).

Rationnel et principe de la CHIP


La chimiothérapie délivrée par voie intrapéritonéale a l’avantage de mettre les
tissus tumoraux intrapéritonéaux (pas ou peu vascularisés au début de leur
croissance) en contact avec des concentrations élevées d’agents cytotoxiques en
limitant les concentrations systémiques et donc le risque de toxicité. Les avan-
tages pharmacologiques de la chimiothérapie intrapéritonéale reposent sur
l’existence d’une barrière anatomique responsable d’un gradient de concentra-
tion entre la cavité péritonéale et la circulation sanguine (10). Le gradient de
concentration varie de 20 à plus de 600 selon l’agent considéré. Il dépend prin-
cipalement du poids moléculaire et de la lipophilie de l’agent considéré (11,
12).
L’effet cytotoxique direct de la chaleur à 42,5 °C a été démontré in vitro
(13). Cet effet se produit à plusieurs niveaux : au niveau cellulaire où elle induit
une destruction des lipides membranaires, une désorganisation du cytosque-
lette, une dénaturation des protéines intracellulaires et la formation de radicaux
libres (14, 15) ; au niveau tissulaire où elle induit des micro-thromboses qui
perturbent la vascularisation (16) et activent les défenses immunitaires anti-
tumorale (17). L’hyperthermie a également démontré qu’elle augmentait
l’efficacité de certaines molécules (mitomycine C, cisplatine, oxaliplatine), soit
en augmentant leur cytoxicité, soit en augmentant leur pénétration dans les
tissus tumoraux (18, 19). Son action n’est cependant pas constante et varie
selon les drogues. Pour les platines, principalement utilisés dans le traitement
des cancers ovariens, plusieurs mécanismes peuvent expliquer la potentialisa-
tion par la chaleur : l’augmentation de l’alkylation de l’ADN, de la formation
de métabolites actifs, de l’activité à pH bas (moins de 6,5) (20, 21), de la
production de radicaux libres (22). L’hyperthermie réduit ainsi les mécanismes
de résistance cellulaire au cisplatine (23, 24). Le maintien d’une température
dépassant 41 °C dans toute la cavité péritonéale semble essentiel car la dimi-
nution d’un degré de température divise par deux l’efficacité de l’hyperthermie
(25).
La CHIP est un « lavage péritonéal post-chirurgical » qui se déroule en fin
d’acte opératoire, sous anesthésie générale et qui véhicule la chimiothérapie
intrapéritonéale et la chaleur à l’aide d’un vecteur liquidien. La première CHIP
La chimiothérapie intrapéritonéale avec hyperthermie 363

chez l’homme a été décrite par Spratt et al. (26) en 1980 pour le traitement
d’un pseudomyxome péritonéal. Au cours des années 80, elle a principalement
été développée au Japon en association aux techniques de cytoréduction pour
le traitement des CP d’origine gastrique sous l’impulsion de Koga (27) et
Fujimoto (28). C’est au centre hospitalier Lyon-Sud, en 1989, que la première
CHIP a été réalisée en Europe (29), pour une jeune patiente présentant une
carcinose massive d’origine gastrique. Par la suite, en France, en Europe, en
Asie et en Amérique du nord, sous l’impulsion de quelques chirurgiens comme
Gilly (30), Elias (25), Zoetmulder (31), Yonemura (32) et Sugarbaker (33), un
nouvel intérêt dans le traitement des CP est apparu, de la même façon que se
sont développées et améliorées les techniques de CHIP et de chirurgie de cyto-
réduction. En 2000, on dénombrait plus de trente centres dans le monde ayant
rapporté l’utilisation des techniques de CHIP (34).

Modalités techniques de la CHIP


Plusieurs modalités techniques de CHIP ont été décrites (18). Il y a, dans la
littérature, autant de techniques que d’équipes, ce qui suggère que nous
sommes encore au stade de la standardisation de la technique de CHIP, et loin
du stade de validation réelle par des essais prospectifs comparatifs. Les particu-
larités techniques concernent : a) le circuit d’instillation ; b) la procédure sur le
péritoine (fermeture pariétale, exposition de la séreuse péritonéale, quantité de
liquide, température, durée) ; c) les molécules utilisées ; d) les gestes chirurgi-
caux associés.

Le circuit d’instillation du liquide et des molécules de chimio-


thérapie
Après des études de standardisation technique, le circuit actuellement retenu
par la majorité des équipes est le circuit stérile fermé à l’aide d’une pompe qui
permet de maintenir des températures intra-péritonéales entre 42 et 43 °C
(fig. 1). La température d’entrée est de 46-48 °C. Le débit est homogène, les
risques septiques sont évités (34, 35).

La procédure de CHIP (18, 34-37)


Plusieurs techniques de CHIP ont été utilisées : technique « à ventre fermé »
(fermeture complète de la paroi ou simple fermeture cutanée) et deux tech-
niques « à ventre ouvert » (technique du « Coliseum » de Sugarbaker avec
expandeur du péritoine, technique de suspension pariétale). Dans toutes les
364 Les cancers ovariens

Fig. 1 – CHIP à circuit stérile fermé.

techniques des drains tubulaires sont placés dans les différents cadrans et
permettent d’instiller et de recueillir le liquide chauffé contenant les molécules
de chimiothérapie. Des capteurs thermiques sont aussi disposés pour contrôler
la température intrapéritonéale réelle. Elias et al. (37) ont mené une étude
prospective de phase I-II comparant sept techniques différentes chez
32 patients. Les conclusions de cette étude étaient les suivantes : la technique
fermée ne permet pas une diffusion homogène de la température et des
produits de chimiothérapie ; la technique ouverte avec un expandeur cutané
donne une homogénéité thermique parfaite, mais l’expandeur plaqué contre la
paroi (et empêchant l’effet de la CHIP à ce niveau) a été à l’origine de récidives
pariétales ; la technique ouverte avec suspension cutanée s’est avérée être la
technique la plus efficace, le brassage répété des anses par la main du chirur-
gien permettant de les faire baigner dans le liquide et d’avoir une parfaite
homogénéité thermique. Elle pose par contre comme les autres techniques « à
ventre ouvert », le problème de l’exposition du personnel soignant. Les défen-
seurs de la technique « à ventre fermé » ont réalisé des études expérimentales
de modélisation pour optimiser l’homogénéité thermique en fonction du débit
qui doit être élevé (0,9 l/mn) (38). Ensuite, il a été rapporté que la réalisation
d’une chimiothérapie intrapéritonéale à pression positive augmentait la péné-
tration intra-tissulaire et intra-tumorale de certaines drogues (39). Par ailleurs,
a été mis au point un prototype (le Cavitherm) capable de programmer, d’au-
toréguler et de recueillir les variables débit-température-pression
intra-abdominale, ce qui limite les problèmes techniques, facilite la reproduc-
tibilité entre les équipes chirurgicales, et permet de standardiser la CHIP et son
La chimiothérapie intrapéritonéale avec hyperthermie 365

contrôle (18). Le choix de la technique la plus adaptée reste donc encore


discuté.
La quantité de liquide utilisée dans les différents protocoles est adaptée à la
surface corporelle des patients : 2 l/m2 en perfusion continue grâce à la pompe
branchée sur le circuit fermé pendant soixante à quatre-vingt-dix minutes. La
plupart des équipes utilisent un liquide isotonique, une étude de pharmacociné-
tique ayant suggéré qu’un liquide hypotonique n’améliorait pas la diffusion des
molécules de chimiothérapie et était même à l’origine d’hémorragies intrapérito-
néales inexpliquées (40). Mais de récentes études menées par l’équipe du
Washington Cancer Institute de Sugarbaker ont montré que l’utilisation d’un
liquide hypertonique pourrait augmenter l’exposition des surfaces péritonéales et
donc des cellules tumorales résiduelles aux molécules de chimiothérapie (41, 42).
La température doit être maintenue à 42-43 °C (niveau de cytotoxicité
optimum) dans tous les cadrans de la cavité abdominale.

Les molécules de chimiothérapie


Le rationnel du choix d’une molécule est fondé sur sa pharmacocinétique dans
la séreuse péritonéale. Les molécules les plus adaptées doivent avoir un poids
moléculaire élevé, être hydrosolubles, être rapidement éliminées de la circulation
systémique, et surtout avoir une efficacité améliorée par l’hyperthermie (35).
La mitomycine C est la molécule la plus adaptée. Son activité est multipliée
par 40 quand elle est associée à une hyperthermie à 43 °C. Son absorption
pendant la première heure atteint 75-90 % selon les études (43). La dose
rapportée par la majorité des équipes est de 10 mg/l.
Le cisplatine est la deuxième molécule utilisée (34). Elle est administrée
seule ou en association à la mitomycine C.
D’autres molécules ont aussi été testées (oxaliplatine, TNFa, doxorubicine,
carboplatine, irinotecan, gemcitabine, etc.) (18, 25, 34, 40).
Cependant, à l’exception de la mitomycine C et du cisplatine, peu de proto-
coles thérapeutiques ont été validés par des études de phase II-III et aucune
dose de référence n’a été définie, d’autant que plusieurs paramètres peuvent
modifier la pharmacocinétique de la molécule et interviennent dans l’efficacité
de la CHIP (concentration, volume total, durée, température).

Les gestes chirurgicaux de réduction tumorale


Pour être efficace, la CHIP doit être précédée par une chirurgie de réduction
tumorale optimale. Les molécules de chimiothérapie, lorsqu’elles sont associées
à l’hyperthermie, ne peuvent pénétrer des nodules mesurant plus de 3 à 6 mm
(30). Le principe est de réséquer ou de coaguler tous les implants tumoraux
supra-millimétriques. Cela peut aboutir à des résections du péritoine pariétal
366 Les cancers ovariens

ou gestes de péritonectomie décrits par Sugarbaker (péritonectomies pariétales,


résection de la capsule hépatique, douglassectomie) (44) et à des résections
viscérales étendues d’organes pleins (épiploon, rate) ou de tube digestif
(intestin grêle, côlon, rectum). La principale limite de cette approche est le
risque de retentissement sur la qualité de vie postopératoire du fait de résec-
tions étendues (grêle court, etc.) et le risque de mortalité et morbidité,
intimement lié à l’agressivité du geste chirurgical (45). La durée moyenne de
ces procédure peut atteindre neuf heures (46, 47).

Mortalité et morbidité de la CHIP


La toxicité de la CHIP associée à une chirurgie de réduction tumorale est
d’ordre chirurgical (désunion anastomotique, complications septiques intrapé-
ritonéales) ou médical (toxicité hématologique, insuffisance rénale).
L’hétérogénéité des séries (carcinose d’origine multiple parfois dans la même
série sans analyse en sous-groupes), la multiplicité des protocoles et des gestes
chirurgicaux associés, et la variation de la présentation des résultats rendent
l’analyse et l’interprétation des données difficiles.

Mortalité péri-opératoire
La mortalité opératoire varie de 0 % (dans les séries de faible effectif ) à 9,3 %
(48). Elle était significativement liée dans une analyse univariée à l’âge des
patients et à la température intra-abdominale (49). Après analyse multivariée,
seul l’âge pouvait être considéré comme facteur indépendant.

Morbidité « chirurgicale »
Il s’agit surtout de lâchage anastomotique, perforation digestive, hémorragie
intrapéritonéale, pancréatite aiguë, éviscération. Cette morbidité survenait
dans les grandes séries chez un patient sur trois environ. La gastroplégie est très
fréquente, imposant souvent une aspiration gastrique de plusieurs jours, et est
vraisemblablement liée à la résection complète systématique du grand épiploon
parfois associée à celle du petit épiploon, entraînant une dévascularisation et
une dénervation partielle de l’estomac. Trois analyses multivariées (49-51) ont
montré que les facteurs indépendants de morbidité étaient : la durée de la
chirurgie, l’importance et l’étendue de la péritonectomie et le nombre d’ana-
stomoses. Il semble que c’est plus le geste chirurgical de réduction tumorale qui
est à l’origine de cette morbidité, mais la CHIP a vraisemblablement son
influence sur ces complications. Le stade et l’étendue de la carcinose périto-
néale a également été retrouvé comme facteur prédictif de morbidité (47, 52).
La chimiothérapie intrapéritonéale avec hyperthermie 367

Les patients présentant une carcinose évoluée ont plus de complications que les
patients présentant une carcinose limitée.

Morbidité « médicale » ou toxicité de la CHIP


Elle est essentiellement hématologique, avec une toxicité de grades 3-4 pouvant
survenir dans 8-31 % des cas, en particulier chez des patientes ayant été traitées
par de multiples cycles de chimiothérapie systémique. Les autres complications
sont essentiellement pulmonaires (jusqu’à 56 % dans la série d’Elias et al.) (47),
mais aussi cardiaques et digestives. L’absence d’homogénéité des protocoles de
chimiothérapie (CHIP ouverte ou fermée, dosage de la mitomycine C, autres
molécules) ne permet pas cependant de comparer les résultats des séries et d’in-
terpréter ces données avec un bon niveau de preuves.

Résultats carcinologiques
Les études ayant évalué l’association d’une chirurgie de cytoréduction à une
CHIP dans le traitement des carcinoses ovariennes sont principalement des
études de phase I-II et de faible effectif (tableau I). Les patientes incluses au
sein de ces études étaient le plus souvent strictement sélectionnées, mais la
plupart présentaient des carcinoses le plus souvent soit évoluées, soit chimio-
résistantes, soit récidivantes, autrement dit des carcinoses de mauvais pronostic
pour lesquelles aucun traitement aujourd’hui n’a réellement fait la preuve de
son efficacité. Les résultats carcinologiques ont été publiés selon des critères
variés (médiane de survie, taux de survie à 1-3 ans) qui ne permettent pas de
comparer leurs résultats, d’autant que tous les patients n’étaient pas contrôlés,
que peu de séries ont évalué leurs résultats selon la qualité de la chirurgie de
cytoréduction (complète ou incomplète) et que le recul moyen est très variable.
La multiplicité des protocoles rend l’interprétation encore plus difficile. La
qualité de vie a été rarement évaluée dans les études.
Les médianes de survie obtenues après l’association d’une chirurgie de cyto-
réduction et d’une CHIP sont comprises entre dix-neuf et quarante-six mois
avec des taux de survie à deux ans proches ou supérieurs à 50 %. Les résultats
sont encore plus encourageants lorsque la chirurgie de cytoréduction précédant
la réalisation de la CHIP a pu être complète ou sub-complète. Zanon et al. (53)
ont rapporté des médianes de survie et de survie sans récidive respectivement
de 37,8 et 24,4 mois sur une population de patientes présentant des carcinoses
ovariennes récidivantes, lorsque la chirurgie avait permis un debulking
optimum ne laissant en place que des nodules de moins de 2,5 mm. Dans
notre expérience non encore publiée, avec un recul médian de trente-sept mois,
la médiane de survie en cas de chirurgie macroscopiquement complète atteint
368 Les cancers ovariens

Tableau I – Résultats carcinologiques des carcinoses ovariennes chimiorésistantes ou récidi-


vantes traitées par CHIP.

Auteurs Année Nombre Chimiothérapie Recul Médiane Survie


médian de survie
Hager et al. (59) 2001 19 Cisplatine - 19 mois 65 % à 1 an/
16 % à 5 ans
Deraco et al. (60) 2001 27 Cisplatine – - - 55 % à 2 ans
- chirurgie complète mitomycine C 77 % à 2 ans
De Bree et al. (61) 2003 19 Doxitaxol 30 mois 79 % à 1 an/
63 % à 3 ans
Look et al. (62) 2003 28 Cisplatine – 27 mois 46 mois 55 % à 3 ans
- chirurgie complète doxorubicine 55 mois
Piso et al. (63) 2004 11 Cisplatine – - 33 mois 15 % à 5 ans
- chirurgie complète mitoxantrone 44 mois
Zanon et al. (53) 2004 30 Cisplatine - 28 mois
- chirurgie complète 37 mois
Série du CHLS (non 2005 60 Cisplatine 37 mois 21 mois 49 % à 2 ans/
publiés) 55 mois 12 % à 5 ans
- chirurgie complète 70 % à 2 ans/
35 % à 5 ans

cinquante-cinq mois. La radicalité de la chirurgie de cytoréduction avant la


CHIP apparaît donc être un facteur pronostique majeur.
En cas d’importants résidus tumoraux, l’intérêt de la CHIP est très discu-
table. Sa place comme traitement palliatif de confort de l’ascite néoplasique a
été peu évaluée. Deux études (54, 55) ont suggéré que la CHIP améliorait le
confort de fin de vie et la qualité de vie des patients ayant une ascite néopla-
sique. Elle semble permettre un tarissement de l’ascite néoplasique d’origine
gastrique dans près de 70 % cas (56). Une étude récente rapporte chez
17 patients, survivant à long terme après chirurgie de cytoréduction et CHIP,
une bonne qualité de vie, aucun patient ne regrettant la lourde séquence théra-
peutique subie (57). Mais des études prospectives de toxicité-bénéfice doivent
être menées pour confirmer ces résultats.
Au sein d’une étude rétrospective non contrôlée, Ryu et al. (58) ont
comparé deux groupes de patientes présentant un cancer ovarien : un groupe
contrôle de 57 patientes traitées par l’association conventionnelle d’une
chirurgie et d’une chimiothérapie systémique et un groupe expérimental de
60 patientes bénéficiant en plus d’une chirurgie de cytoréduction et d’une
CHIP au carboplatine et à l’interféron. Une analyse multivariée a permis
d’identifier la CHIP comme facteur indépendant de bon pronostic avec, pour
les cancers ovariens de stade III, un taux de survie à cinq ans de 53,8 % dans le
groupe CHIP et de 33,3 % dans le groupe contrôle (p = 0,0015). Bien que la
méthodologie de cette étude et donc son interprétation restent très discutables,
elle suggère une évaluation nécessaire de cette modalité thérapeutique au sein
d’études de phase III.
La chimiothérapie intrapéritonéale avec hyperthermie 369

Quelle place pour la CHIP en 2005 ?


Nous disposons vraisemblablement aujourd’hui de suffisamment d’arguments
scientifiques sur l’intérêt potentiel de la CHIP, et les centres spécialisés dans la
prise en charge des carcinoses péritonéales maîtrisant la technique de CHIP
sont suffisamment nombreux pour que l’on puisse envisager à courte échéance
d’évaluer cette modalité thérapeutique au sein d’études contrôlées de phase III.
Une étude de phase II évalue actuellement la CHIP avec oxaliplatine en conso-
lidation du traitement de première ligne et devrait être suivie d’une étude de
phase III. Un projet d’étude de phase III pour les récidives tardives comparant
une chimiothérapie de deuxième ligne à la même chimiothérapie plus CHIP
est en cours.

Conclusion
La CHIP associée à une chirurgie de cytoréduction optimale est un outil théra-
peutique en voie de développement dans la prise en charge des carcinoses
ovariennes. Les modalités techniques (mode d’instillation, chimiothérapie) de
la CHIP, tout comme les gestes chirurgicaux de cytoréduction et les indica-
tions, ne sont pas pour le moment standardisées. Les résultats des séries
provenant de centres spécialisés sont prometteurs, mais demandent à être
confirmés par des études prospectives de phase III de bonne qualité méthodo-
logique. La morbidité reste lourde et semble surtout le fait de la chirurgie
extensive de réduction tumorale, ce qui souligne l’importance et la nécessité
d’une stricte sélection des patients. Reste à souligner que la prise en charge des
carcinoses ovariennes demande des équipes pluridisciplinaires (chirurgiens,
anesthésistes-réanimateurs, oncologues médicaux, radiologues, anatomo-
pathologistes et pharmaco-cinéticiens) et qu’à ce jour, ceci ne peut être réalisé
qu’en centre spécialisé.

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La chimiothérapie intrapéritonéale
de consolidation
C. Tournigand, A. Plantade et A. de Gramont

Le concept
La chimiothérapie intrapéritonéale a été étudiée depuis plus de cinquante ans.
Ce traitement régional a été essentiellement développé chez les patientes
atteintes d’une tumeur épithéliale de l’ovaire avancée (stade III-IV). Le
rationnel est solide :
– environ 75 % des patientes ayant une tumeur de l’ovaire ont une maladie
disséminée au péritoine lors du diagnostic ;
– le principal site de rechute est péritonéal chez les patientes ayant une réponse
pathologique complète à la fin de la séquence chirurgie puis chimiothérapie
systémique, avec un taux de récidive élevé (de 30 à 50 %) ;
– la voie intrapéritonéale augmente l’exposition des cellules tumorales aux
médicaments cytotoxiques, sans augmenter la toxicité générale, et le cancer
de l’ovaire est chimiosensible, avec un large éventail de médicaments actifs.

Historique
Les premiers essais de chimiothérapie intrapéritonéale, réalisés au milieu des
années 1950, ont utilisé des moutardes azotées ou de l’or colloïdal radioactif.
L’objectif était d’obtenir un effet direct sur les masses tumorales (1, 2). En
1978, Dedrick pose les principes de la chimiothérapie intrapéritonéale. À
partir de modèles mathématiques, il observe que, pour certaines drogues, la
clairance du péritoine est inférieure à la clairance du plasma (3). Il émet déjà
l’hypothèse selon laquelle la pénétration d’une drogue de la périphérie de la
tumeur vers le centre est limitée. Les patientes « ayant une maladie résiduelle
microscopique sans masse tumorale macroscopique, après un traitement systé-
mique efficace » seraient donc les plus à même de bénéficier de la
chimiothérapie intrapéritonéale.
336 Les cancers ovariens

Diffusion de la chimiothérapie intrapéritonéale


La diffusion de la chimiothérapie intrapéritonéale au sein de la tumeur est
effectivement limitée, et l’efficacité est inversement proportionnelle à la taille
tumorale. Ceci a été démontré par les travaux de Los chez le rat (4) : du cispla-
tine marqué était injecté, soit dans la cavité péritonéale, soit par voie
intraveineuse. Les concentrations de platine étaient ensuite mesurées au sein de
fragments tumoraux péritonéaux. Les résultats confirment que, par voie intra-
péritonéale, des concentrations nettement plus importantes de platine sont
obtenues, mais que cet avantage ne s’observe que sur une épaisseur de 1 à
2 mm. La pénétration de la chimiothérapie à la surface des lésions tumorales
est donc ténue. Ceci est l’une des principales limites de la chimiothérapie intra-
péritonéale puisque une concentration efficace ne sera obtenue que pour des
lésions microscopiques ou des résidus tumoraux de petite taille. En outre, la
clairance péritonéale permet d’avoir un effet systémique non négligeable.

Chimiothérapie de consolidation chez les patients


ayant une réponse complète pathologique
Sept études de phase II ou études rétrospectives ont été publiées à ce sujet.
Menczer et al. ont traités 17 patientes avec trois cycles de cisplatine intrapéri-
tonéal à forte dose (200 mg/m2), associé) à du thiosulfate. La médiane de survie
sans progression était de quarante et un mois (5). En 1993, Tarraza et al. ont
publié les résultats de 56 patients traités par une administration intrapérito-
néale, soit de cisplatine (80 mg/m2), soit de mitoxantrone, à la suite d’un
second look négatif. La médiane de survie sans récidive était de dix-huit mois
dans les deux groupes de malades (6). L’étude de Dufour et al. A consisté à
traiter 50 patientes ayant un stade II-IV avec six cycles de mitoxantrone en
intrapéritonéal en consolidation. À cinq ans, la survie globale estimée est de
59,8 %, avec 47,3 % de patientes sans récidive à cinq ans (7). Toujours dans la
même indication, Barakat et al. ont comparé 36 patients traités par cisplatine
et VP16 en consolidation, à une série contrôle de 46 patientes n’ayant pas reçu
de traitement de consolidation. Dans le groupe traité, 39 % des patients ont eu
une récidive, contre 54 % dans le groupe contrôle. La survie sans maladie
médiane n’était pas atteinte dans le groupe intrapéritonéal, et il était de
28,5 mois dans le groupe contrôle (8). La même équipe a également étudié le
devenir à long terme de 89 patientes traitées par chimiothérapie intrapérito-
néale en consolidation. La survie globale médiane était de 8,7 ans (9). Plus
récemment, une étude de phase II chez 30 patientes en réponse complète
pathologique traitées par trois cycles de cisplatine intrapéritonéal rapporte une
survie sans progression de cinquante mois et une survie globale non atteinte à
trente-sept mois (10). Enfin, le groupe GERCOR a rapporté les résultats à long
La chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation 337

terme de la chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation par cisplatine et


étoposide. Sur une population de 219 patientes traitées pour un cancer de
stade III ou IV par une association cisplatine-anthracycline, 68 patientes
étaient en réponse complète pathologique à l’issue de la chimiothérapie intra-
veineuse. Trois cycles de chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation ont
été administrées. La survie sans progression médiane a été de trente-quatre
mois et la survie globale de soixante-treize mois, avec 58 % des patientes en vie
à cinq ans (11). De plus, 21 patientes ont également été traitées par six cycles
de chimiothérapie intrapéritonéale en consolidation, alors qu’elles avaient un
résidu tumoral microscopique au second look. La survie sans progression n’a
été que de seize mois et la survie globale de quarante-neuf mois (12).
En 1988, l’EORTC a initié un essai de phase III comparant, chez des
patientes en réponse complète pathologique après chimiothérapie systémique,
quatre cycles de cisplatine intrapéritonéal (90 mg/m2/trois semaines) à une
surveillance (13). Malheureusement, l’étude a été interrompue avant la fin
prévue, en raison d’un faible recrutement : 153 patientes incluses entre 1988
et 1997 sur les 312 patientes prévues initialement. Les résultats des patientes
incluses ont néanmoins été publiés récemment. Sur les 77 patientes du bras
intrapéritonéal, 56 % ont pu recevoir la totalité du traitement prévu. Les prin-
cipales raisons d’interruption étaient la neuropathie (15 % de grade 2-3) ou le
refus des patientes de poursuivre. Après un suivi médian de huit ans, 55 % des
patientes non traitées ont eu une rechute, contre 49 % dans le groupe traité.
On ne peut que regretter que l’étude n’ait pas pu aller jusqu’à son terme, car
elle aurait pu répondre à une question importante sur l’intérêt de la chimio-
thérapie intrapéritonéale.

Immunothérapie intrapéritonéale
L’immunothérapie peut être grossièrement divisée en trois catégories : spéci-
fique, non spécifique et adoptive. Les traitements sont dits spécifiques lorsque
leur but est d’augmenter une réponse immunitaire spécifique dirigée contre la
tumeur par les lymphocytes B et T. Ceci se fait par l’intermédiaire d’anticorps
monoclonaux. L’immunothérapie non spécifique consiste à utiliser des cellules
NK, des cellules T-LAK (T lymphocytes activated killer) ou des monocytes-
macrophages activés. L’immunothérapie adoptive consiste à utiliser des cellules
immunitaires autologues activées et multipliées in vitro. Il s’agit de lympho-
cytes activés (LAK), de TIL (tumor infiltrating lymphocytes) ou de cellules
dendritiques.
L’interleukine-2 stimule les voies spécifiques et non-spécifiques.
L’interféron stimule essentiellement la voie non spécifique, mais a aussi un effet
anti-prolifératif. L’interféron-α a été testé en intrapéritonéal chez des patients
ayant un faible volume tumoral résiduel après une chimiothérapie cytotoxique.
Le plus souvent, il ne s’agit donc pas d’un véritable traitement de consolida-
338 Les cancers ovariens

tion, puisque certaines patientes sont traitées avec une tumeur macroscopique
en place. Lorsqu’une évaluation est faite à l’issue de l’interféron-a, les taux de
réponse sont de l’ordre de 30 à 50 % (14, 17). Des résultats équivalents ont été
obtenus avec l’interferon-g dans des situations comparables (18). Une étude de
phase III a comparé du carboplatine seul à une association carboplatine/inter-
féron-α en intrapéritonéal chez des patientes ayant une persistance de la
maladie à l’issue de la chimiothérapie de première ligne (19). Les survies
globales ne sont pas significativement différentes (respectivement vingt-deux et
vingt-neuf mois en médiane), mais la tolérance de l’interféron est médiocre
(fièvre, syndromes pseudo-grippaux).
L’Interleukine-2 a également été largement testée dans les cancers de
l’ovaire, par voie intra-péritonéale, seule ou en association avec des LAK
(lymphocytes activés) (20, 21) ou des TIL (22). La toxicité de l’IL-2 est impor-
tante d’un point de vue général (fièvre, nausées, vomissements, diarrhées) et
s’associe souvent à une fibrose intra-abdominale importante. Bien que sédui-
sants en théorie, ces essais d’immunothérapie adoptive ont été décevants en
pratique clinique, avec une technique lourde et toxique, sans réel bénéfice pour
les patientes.
Un essai d’immunothérapie adoptive en consolidation a également été
effectué à partir de macrophages autologues activés (MAK) par IFN-γ ainsi
qu’un anticorps bi-spécifique dirigé contre HER2-neu chez les patientes surex-
primant la protéine (23). 14 patientes ont été incluses lors du second look,
8 patientes avec un résidu microscopique et 6 avec des nodules macrosco-
piques. 11 patientes ont eu un troisième look pour juger de l’efficacité du
traitement : 5 avaient une réponse complète pathologique, 2 avaient toujours
des biopsies positives, 2 avaient toujours des nodules péritonéaux et 2 avaient
progressé. Avec un recul de trente-trois mois depuis le début de l’immunothé-
rapie, la survie à 2 ans est de 64 %. Malheureusement, le suivi à long terme a
montré que la totalité des patientes a rechuté et dans des délais peut-être même
plus courts que les patientes traitées par chimiothérapie intrapéritonéale.

Conclusion
Il n’y a aucune preuve que la chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation
puisse guérir les patientes ayant une maladie résiduelle microscopique. Il n’y a
pas de preuve non plus que la chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation
puisse augmenter la survie des patientes en réponse complète pathologique.
Pour ces raisons, malgré un rationnel solide, les auteurs ont abandonné le
concept de la chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation, préférant inté-
grer la chimiothérapie intrapéritonéale à la stratégie initiale après une
réévaluation chirurgicale précoce, afin de réserver la technique aux patientes
sans maladie résiduelle après trois cycles seulement, et d’éviter une procédure
délicate et des cycles supplémentaires après la chimiothérapie intraveineuse.
La chimiothérapie intrapéritonéale de consolidation 339

Références
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340 Les cancers ovariens

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La chirurgie des récidives

D. Castaigne et C. Pomel

Près des deux tiers des cancers de l’ovaire sont découverts à un stade avancé.
Malgré un traitement de première ligne adapté incluant chirurgie et chimio-
thérapie, trois quarts des patientes de ce groupe récidivent. Le traitement est
souvent une reprise de la chimiothérapie. Une reprise chirurgicale peut être
envisagée. Il peut s’agir d’une intervention réalisée à titre palliatif pour une
situation chirurgicale aiguë, mais, dans ce dernier cas, le bénéfice de la
chirurgie sur la survie est très modeste. Néanmoins, la chirurgie à visée pallia-
tive peut être bénéfique en terme de qualité de vie chez des patientes en
maladie chronique sous chimiothérapie au long cours.

Nous ne traiterons dans ce chapitre que de la chirurgie à visée curatrice. Les


résultats de cette chirurgie en terme de survie doivent être largement discutés
par rapport au bénéfice d’une chimiothérapie seule (1). D’autant que les
volumes cibles détectés par imagerie sont un excellent outil permettant d’éva-
luer l’efficacité d’une chimiothérapie de rattrapage. Cependant, si les patientes
platino-sensibles traitées par chimiothérapie exclusive ont une survie accep-
table de vingt-quatre à quarante-deux mois sans apport de la chirurgie, ces
résultats sont inférieurs à ceux observés chez des patientes bénéficiant d’une
chirurgie de rattrapage complète associée à une chimiothérapie (2-4).

Localisation des récidives

Les sites de récidives sont variables et concernent le pelvis, le parenchyme splé-


nique où la récidive peut être isolée (tableau I) les ganglions rétro-péritonéaux
(8) ou toute autre région de l’abdomen. Le cas malheureusement le plus
fréquent est la carcinose péritonéale qui, de notre avis, exclut la chirurgie.
400 Les cancers ovariens

Modalités de la chirurgie.
Il s’agit d’une chirurgie souvent lourde qui nécessite dans plus de 50 % des cas
une résection digestive (9, 12, 15) avec un taux de stomies digestives variant
entre 5 et 20 %.
Au niveau du pelvis, la radicalité des gestes pour réaliser une exérèse satis-
faisante entraîne souvent :
– l’exérèse de la charnière recto-sigmoïdienne ;
– une cystectomie partielle, une urétérectomie pelvienne avec réimplantation
urétéro-vésicale. La pelvectomie antérieure est exceptionnelle.

Tableau I – Chirurgie des récidives spléniques isolées.

Auteurs Année Nombre de patientes Récidives


Farias (5) 1992 4 1 récidive en vie (3 à 36 mois)
Nicklin (6) 1994 7 3 décès apparus après : 9, 9 et 20 mois
Gemignani (7) 1998 6 0 (28 à 88 mois)

La morbidité per- et postopératoire rejoint celle déjà connue pour la


chirurgie radicale de première intention (10 à 30 % suivant les séries). Cette
morbidité n’est acceptable que chez les patientes où la chirurgie de rattrapage
permet d’obtenir un reliquat postopératoire proche de zéro. Le taux de réussite
de la chirurgie de rattrapage varie suivant les équipes de 35 à 70 % (tableau II).

Tableau II – Chirurgie des récidives des cancers de l’ovaire : reliquat tumoral, survie.

Auteur Année N Reliquat Survie (mois)


postopératoire
Segna (12) 1993 61 > 2 cm 27 p < 0.0001
39 < 2 cm 9
1995 14 < 0,5 cm 41
Vacarello (11) 24 > 0,5 cm 23 p < 0.0001
19 Chir = O 9
Morris (10) 1998 18 < 2 cm 18 p < 0.2
1 > 2 cm 13
Eisenkop (9) 2000 87 Micro 44 p < 0.007
19 Macro 19
Scarabelli (14) 2001 149 < 1 cm 70 % - -
Zang (13) 2004 117 < 1 cm 62 % 26 -
La chirurgie des récidives 401

Facteurs pronostiques de la chirurgie des récidives


Le délai
Le facteur le plus fréquemment objectivé est le délai de survenue de la récidive
(14,16,17). Le bénéfice est d‘autant plus important que la récidive est tardive.
Pour Eisenkop le délai pour envisager une chirurgie est au minimum de six
mois (18). Dans la plupart des séries, le délai minimal est de douze mois.

La localisation
Le nombre de sites impliqués influence la survie. Plus ce nombre est faible,
meilleure est la survie (13, 16). Seule la présence d’une carcinose ou la présence
d’une ascite aggrave le pronostic (13, 18).

Le reliquat post-chirurgical
Le volume résiduel après chirurgie de rattrapage est déterminant et l’absence de
reliquat tumoral s'accompagne de façon statistiquement significative d'une
meilleure survie des patientes. (tableau II).

Indications de la chirurgie des récidives


Une chirurgie de réduction secondaire ne peut s’envisager que chez des
patientes en rechute intra-abdominale isolée. Toute métastase extra-abdomi-
nale doit faire renoncer à la chirurgie.
L’association CT-Scan et PET-Scan semble être le meilleur outil de détec-
tion et d’évaluation pré-opératoire de la récidive et de la résécabilité.
Chez 18 patientes en situation de récidive, Bristow a montré que l’associa-
tion CT-Scan-Pet-Scan permet de détecter des tumeurs de plus de 1 cm dans
82 % des cas avec une sensibilité de 83 % et une valeur prédicitive positive de
94 % (p = 0,046). Une chirurgie à reliquat nul a pu être obtenue chez 72 % des
patientes (19).
La présence d’une carcinose péritonéale avec implants tumoraux de petit
volume est rarement détectée par imagerie et, dans ce cas, la laparoscopie
première est sans doute le meilleur outil pour évaluer la résécabilité des
patientes en situation de récidive. Elle est réalisable sur des ventres multi-
opérés (20).
Le bénéfice de la chirurgie étant incertain, le clinicien doit évaluer au mieux
les patientes éligibles à une approche chirurgicale.
402 Les cancers ovariens

L’indication opératoire est posée sur les critères suivants :


– délai suffisant entre la fin du traitement initial et la récidive (si possible supé-
rieur à douze mois) ;
– état général conservé ;
– absence d’extension extra-abdominale ;
– absence de carcinose péritonéale ;
– absence d’irradiation abdominale totale ;
– tumeur limitée à un ou deux sites et dont l’exérèse apparaît techniquement
possible.
Une chimiothérapie doit pour voir être proposée dans des délais raison-
nables après la chirurgie.
L’effort chirurgical est d’autant plus efficace que le territoire concerné par la
récidive n’a pas été initialement intéressé par la chirurgie de première intention.
C’est le cas par exemple des récidives lombo-aortiques chez des patientes qui
n’avaient pas eu de curage.

Conclusion
Le traitement des récidives de cancers de l’ovaire peut nécessiter un acte chirur-
gical.
Dans les standards, options et recommandations (SOR) de la FNCLCC,
l’alternative chirurgicale peut être retenue dans les circonstances suivantes
(21) :
– masse unique ou quelques masses dont l’exérèse peut être complète ;
– maladie ne progressant pas sous chimiothérapie ;
– rechute tardive.
Nous pensons que, chez des patientes bien sélectionnées, une récidive
tardive doit être prise en charge de la même manière que de première intention
par une chirurgie complète suivie d’une chimiothérapie (2).
Actuellement, deux essais prospectifs randomisés évaluent l’impact de la
chirurgie chez les patientes en situation de récidive :
– EORTC 55963 : rechute minimum un an après la fin du traitement initial,
six cures de platine versus trois cures-chirurgie-trois cures (environ
700 patientes) ;
– GOG 213 : rechute minimum six mois après la fin du traitement ;
– chirurgie versus chimiothérapie sans chirurgie.
Dans l’attente des résultats de ces essais, la chirurgie doit être appliquée à
des patientes rigoureusement sélectionnées par une équipe multidisciplinaire.
La chirurgie des récidives 403

Références
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La radio-immunothérapie dans les cancers
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F. Giammarile et Th. Mognetti

Introduction
L’utilisation thérapeutique des radioéléments en source non scellée est fondée
sur l’action destructrice des cellules tumorales par les rayonnements ionisants
émis par un radiopharmaceutique concentré sur les sites de fixation.
La radiothérapie métabolique ou interne est donc un traitement systé-
mique qui peut agir à la fois sur la tumeur primitive et sur ses métastases,
mais qui ne peut être proposé que dans les cas de rétention élevée, sélective
et prolongée du radiopharmaceutique par la tumeur. Son objectif est d’ad-
ministrer une irradiation maximale des cellules tumorales, en garantissant un
minimum de toxicité au niveau des cellules saines. Les prérequis d’un tel trai-
tement sont la présence d’une haute affinité entre radiopharmaceutique et
cible avec liaison rapide et internalisation du produit jusqu’aux étapes de
dégradation dans les lysosomes, une activité hautement spécifique au site
récepteur, une stabilité du radiomarquage guidant le choix du chélateur et du
vecteur et un rayon d’action des particules radioactives adapté à la dissémi-
nation tumorale (1).
Le principe est le même que celui de l'exploration in vivo (explorations
fonctionnelles ou scintigraphiques) et repose sur la spécificité des radiophar-
maceutiques vis-à-vis d'un organe ou d'une pathologie. La différence
fondamentale réside dans le type d'émetteur considéré. Alors que le diagnostic
in vivo impose, pour des raisons liées aux impératifs de détection externe, le
recours à des radioéléments qui émettent des rayonnements pénétrants de type
gamma (ou β+), la radiothérapie doit mettre en œuvre des rayonnements dont
le parcours moyen est faible, afin de déposer l'essentiel de leur énergie au
contact du tissu cible, c'est-à-dire généralement des émetteurs β- (tableau I).
La radiothérapie métabolique ne se limite pas aux traitements thyroïdiens
par l’iode radioactif et bien d’autres applications existent actuellement ou sont
en voie de développement : traitement des tumeurs neuro-endocrines non
opérables par la MIBG iodée ou par l’Octreotide marqué à l’yttrium, traite-
390 Les cancers ovariens

Tableau I – Caractéristiques physiques des radioéléments utilisés en radiothérapie métabolique


(en gras les principaux radioéléments utilisés dans le cancer de l’ovaire).

R T D E P G
M m M m
32
P 14,3 β- 1,71 0,70 8,7 1,85 -
67
Cu 2,58 β- 0,57 - - 0,27 92,185
89
Sr 50,5 β- 1,49 0,58 8,0 - -
90
Y 2,67 β- 2,28 0,94 12,0 2,76 -
117m
Sn 13,6 β- 0,16 - - - 159
125
I 60,3 E.C 0,4 KeV - 10 nm - -
131
I 8,04 β- 0,61 0,20 2,4 0,4 364
153
Sm 1,95 β- 0,81 0,23 3,0 0,53 103
177
Lu 6,7 β- 0,50 0,13 - - 208
186
Re 3,77 β- 1,08 0,35 5,0 0,92 137
188
Re 0,71 β- 2,12 - 10,8 2,43 155
211
At 0,3 α 6 + 7,5 - < 0,1 - 670
212
Bi 60 min α 6+9 - < 0,1 - 727
213
Bi 45 min α 8 - <0,1 - 440

R = radio-isotope
T = demi-vie (en jours si non spécifié)
D = mode de décroissance
E = énergie (en MeV), maximale (M) et moyenne (m)
P = parcours énergétique (en mm), maximal (M) et moyen (m)
G = énergie d’émission gamma éventuellement associée (en KeV)

ment des métastases osseuses douloureuses par le strontium ou l’HMDP


marqué au samarium, prévention des récidives des cancers hépatocellulaires par
le lipiodol radio-iodé administré par cathétérisme, ciblage des cancers par anti-
corps marqués spécifiques…
En couplant un anticorps monoclonal avec un isotope radioactif, il est
possible de cibler de manière très sélective certaines tumeurs. L’important déve-
loppement de nos connaissances en immunologie et l'isolement de nouvelles
substances médiatrices de l'immunité, dont la majorité peut être obtenue grâce
au génie génétique, expliquent le regain d'intérêt porté par les chercheurs dans
ce domaine (1).
Les utilisations des anticorps radiomarqués en cancérologie sont multiples,
allant de la détection des marqueurs sériques circulants à l’imagerie, selon le
concept de la radio-immunoscintigarphie, qui permet de cibler in vivo la
tumeur et ses métastases exprimant l’antigène tumoral et de la visualiser à l’aide
d’une gamma-caméra.
La radio-immunothérapie dans les cancers ovariens 391

Plus récemment introduite, la radio-immunothérapie utilise un anticorps


monoclonal, ou un fragment humanisé, dirigé contre une tumeur et lié à un
radioélément qui a la propriété d’irradier les cellules tumorales dans lequel l’an-
ticorps ira s’accumuler, ainsi que les cellules voisines, dans un rayon dépendant
de la nature de l’atome radioactif (tableau I). C’est pourquoi, même certaines
tumeurs hétérogènes (c'est-à-dire ne présentant pas toutes les mêmes caracté-
ristiques antigéniques) peuvent être traitées en utilisant des radioéléments
émetteurs de rayonnements β- d’énergie moyenne (2).
Malgré un principe séduisant et l’existence de nombreux anticorps mono-
clonaux, le développement de la radio-immunothérapie s’est heurté à plusieurs
facteurs limitants, liés aux antigènes tumoraux (qui ont rarement une spécifi-
cité tumorale absolue et qui sont exprimés de façon hétérogène par les
tumeurs) et aux anticorps monoclonaux (qui sont des molécules de grande
taille parfois peu diffusées aux tissus à partir du secteur vasculaire et qui sont
pour la plupart d’origine murine donc responsables d’une réponse immunitaire
de type human anti mouse antigen, ou HAMA, dans 30 à 50 % des patients).
Différentes solutions ont été proposées pour résoudre ces problèmes : l’utilisa-
tion d’anticorps humains ou humanisés, les injections locales d’anticorps
monoclonaux radiomarqués, les techniques de marquage in vivo, l’utilisation
des anticorps bispécifiques (1, 2).

La radio-immunothérapie du cancer ovarien


Généralités
Dans le carcinome ovarien épithélial, la radio-immunothérapie peut être
utilisée afin de délivrer de façon spécifique un rayonnement ionisant à l’aide
d’anticorps monoclonaux. Les radionucléides sont des émetteurs β- comme
l’iode 131, l’yttrium 90, le rhénium 188 ou le rhénium 186, le lutécium 177
et le samarium 153, des émetteurs α comme l’actinium 211 et le bismuth 212
ou des émetteurs d’électron Auger comme l’iode 125. L’iode 131 a le désavan-
tage d’une déshalogénation in situ, d’une durée de vie relativement longue
(huit jours) et d’une émission γ associée qui contribue à augmenter la dose de
rayonnement aux organes et l’exposition du personnel. L’avantage de l’yttrium
90 est lié à sa durée de vie plus courte (2,7 jours), à son marquage plus stable
chimiquement et à l’absence de rayonnement γ associé (3).
Les anticorps les plus utilisés dans ce contexte ont été l’ACE, marqué à
l’iode 131, l’HMFG marqué à l’iode 131, à l’yttrium 90, au rhénium 186 et
au lutécium 177 (efficace surtout sur les lésions de petite taille). Plus récem-
ment, l’anticorps B72.3, utilisé dans le staging immuno-histochimique du
cancer ovarien, a été utilisé avec succès comme agent de radio-immunoscinti-
graphie, marqué à l’indium 111, et de radio-immunothérapie, marqué à
l’yttrium 90 (3, 4).
392 Les cancers ovariens

Les caractéristiques dosimétriques de la radio-immunothérapie permettent


un traitement de la maladie résiduelle après chirurgie première et chimiothé-
rapie pour des lésions inférieures à 0,5 cm de diamètre.

Un des principaux problèmes de la radioimmunothérapie, à part le faible


indice de pénétration dans le tissu tumoral et le faible ratio tumeur-tissu sain,
est représenté par la réponse HAMA qui peut compromettre l’efficacité théra-
peutique de l’anticorps administré. Dans ces conditions, l’utilisation
d’anticorps humanisés et une immuno-suppression permettent de réduire l’in-
cidence des HAMA tout en gardant la spécificité initiale de l’anticorps (1-4).

Voies d’administration du traitement

Les anticorps monoclonaux marqués dirigés vers les antigènes associés aux
tumeurs permettent une irradiation tumorale sélective en réduisant la toxicité
aux tissus normaux. Le cancer ovarien épithélial récidivant est généralement
confiné à la cavité péritonéale, ce qui explique la possibilité d’administration
intrapéritonéale du traitement. La modalité d’administration influence de
façon importante la concentration tumorale du radiopharmaceutique. En
effet, plusieurs études ont montré que la voie d’administration intrapérito-
néale de la radio-immunothérapie présentait une efficacité en terme de
concentration locale nettement plus importante par rapport à la voie intra-
veineuse et une absorption mineure au niveau du comportement vasculaire
(5). Ces études ont été en partie démenties par un travail récent qui ne
montrait aucun avantage évident de l’administration intrapéritonéale en
terme de captation tumorale. Par contre, l’administration intrapéritonéale
réduit de façon notable la toxicité médullaire, bien que, dans les deux jours
qui suivent le traitement, la clairance hématique était similaire dans les deux
types d’administration (6).

Les activités injectées sont néanmoins trop basses pour espérer une réponse
thérapeutique majeure de ces types de cancer qui sont généralement assez
radiorésistants. En effet, l’escalade de doses est limitée par les effets indésirables
du traitement. Ils sont essentiellement de type hématologique et en particulier
représentés par une thrombocytopénie et une neutropénie prolongées, l’anémie
observée est de grade moyen et la granulocytopénie est associée à la dose de
rayonnement. La co-administration d’un agent chélateur (EDTA) a un effet
myéloprotecteur en réduisant le compartiment médullaire sans modifier la
pharmacocinétique de l’anticorps, permettant ainsi l’administration d’une acti-
vité plus importante. Dans le même but, il a été proposé une stratégie
d’injection à deux ou trois pas, des anticorps monoclonaux bispécifiques, ou
bien une immuno-absorption extra-corporelle (7).
La radio-immunothérapie dans les cancers ovariens 393

Résultats cliniques (tableau II)


Malgré les récentes avancées thérapeutiques, le pronostic du cancer ovarien de
type épithélial reste sombre, principalement en raison de l’impossibilité de
contrôler de façon efficace les localisations intra-abdominales de la maladie.

Tableau II – Principaux résultats publiés.

R P I Mo Ab A D T CR-
PR SD MR PD
8 38 90Y biotine 10-100 mCi 5% 9 % 32 % 18 % 41 %
4 20 90Y CC49+IF+CT (max) 24,2 mCi/m2 22 %
9 17 177Lu CC49+IF 40 mCi/m2 24 %
2 22 90Y ACE (max) 22 mCi/m2 66-1670 (tumeur) 23 % 9 % 14 % 46 %
10 21 90Y HMFG 1 10mCi/m 2
78 %
11 6 131I OC 125 120mCi 50 % 33 %
max 25 mCi
3 38 90Y B 72.3 max 40 mCi (avec 11 %
EDTA)
12 14 131I ACE max 50 mCi 20 % 7 % 7%
13 27 177Lu CC 49 45 mCi/m 2

14 16 131I MOv18 100 mCi 5 % 31 % 38 % 31 % 0


15 17 186Re NR-LV-10 max 150 mCi/m 2
15 % 24 %
16 28 131I OC 125 max 30 mCi 36 %
max 150 mCi 71 %
17 25 90Y HMFG1 max 25 mCi 10-30 (moelle) 4% 4%

18 20 131I OC 125 max 120 mCi 15 %


19 28 131I Mo Ab max 120 mCi 500 (péritoine) 18 % 29 %
6 90Y max 15 mCi 17 %
20 36 131I Mo Ab max 160 mCi 14 % 22 %
21 10 131I Mo Ab max 92 mCi 2 900-11 000 70 % 30 % 0 0
(tumeur)

R = référence bibliographique
P = nombre de patients inclus dans l’étude
I = radio-isotope utilisé
Mo Ab = anticorps monoclonal utilisé
A = activité (en mCi ou mCi/m2)
D = dose reçue (en cGy)
T = toxicité hématologique (grade III-IV)
Réponses : CR = complètes ; PR = partielles ; SD = maladies stables ; MR = mixtes ; PD =
progression tumorale.
394 Les cancers ovariens

Dans ces conditions, la place de la radio-immunothérapie connaît actuellement


un plein essor dans le cadre du contrôle à long terme des patientes.
Le premier traitement de type radioisotopique a été proposé en 1980 par
Leichner qui avait administré le phosphore 32 par voie intrapéritonéale chez
l’animal et conclu que la distribution hématologique du radiopharmaceutique
était faible (22).
La première étude concernant la radio-immunothérapie, administrée
toujours par voie intrapéritonéale, remonte à 1987 lorsque Epenetos (23) avait
traité 24 patientes présentant un cancer ovarien épithélial persistant après
chimiothérapie (avec ou sans radiothérapie externe) en utilisant les anticorps
monoclonaux HMFG1, HMFG2, AUA1, H17E2, tous marqués à l’iode 131
avec une activité jusqu’à 140 mCi. Les résultats de ce travail initial étaient tout
à fait encourageants pour les patients présentant un cancer ovarien de stade III
et de petit volume.
En 1988, Stewart proposa le marquage à l’yttrium de l’anticorps mono-
clonal injecté par voie intrapéritonéale en associant à ce traitement
l’administration d’agents chélateurs comme l’EDTA pour éviter la fixation
osseuse de l’yttrium libre et limiter ainsi la dépression ostéo-médullaire (24).
L’utilisation de rhénium 186, marquant un anticorps monoclonal (NR-LU-
10) a été évaluée dans une étude d’escalade de doses, en 1993, par Jacobs. Les
résultats étaient prometteurs avec une toxicité acceptable, en administrant
jusqu’à 150 mCi par m2 (15).
Le lutécium 177 a été également utilisé dans ce contexte, associé à l’anti-
corps monoclonal 177-CC49 chez 12 patientes, avec des résultats
encourageants (25).
En 1997, deux études expérimentales ont proposé la voie d’administration
intraveineuse de la radio-immunothérapie, une en utilisant l’ACE marqué à
l’iode 131 (12), l’autre en utilisant l’oncoprotéine HER2 marquée au plomb
212 qui décroît en bismuth 212 et donc permet une irradiation de type α et
β (26). Dans les deux cas, la toxicité était essentiellement de type médullaire
avec des activités limitées à 50 mCi/m2 pour l’iode 131 et à 25 µmCi pour le
plomb 212.
À noter que les radionucléides émetteurs α n’ont été proposés que chez
l’animal : récemment l’équipe d’Anderson a proposé l’anticorps MOv18
marqué à l’astatine 211 montrant que le traitement intra-péritonéal retardait la
production de l’ascite (27, 28).
En synthèse, les différentes études rapportent une efficacité clinique initiale
satisfaisante de la radio-immunothérapie, même si aucune réponse majeure n’a
été observée, la réduction de la taille tumorale chez un certain nombre de
patients, ainsi que les estimations de la dose reçue par la tumeur sont encoura-
geants dans cette série de patientes, généralement déjà massivement traitées et
avec des pronostics défavorables.
La radio-immunothérapie dans les cancers ovariens 395

Conclusion
Dans un proche avenir, on peut espérer que la radio-immunothérapie va repré-
senter, grâce aux récents développements, un agent important du traitement
des cancers ovariens. En effet, il existe un important essor afin d’améliorer le
potentiel thérapeutique de cette méthode en fonction du type d’anticorps, du
type de nucléide et la stratégie thérapeutique utilisée.
Les efforts futurs se concentreront sur la réduction du pouvoir immunogé-
nique de l’anticorps à travers les anticorps humanisés et sur l’utilisation de
molécules plus petites, d’adhérence plus rapide.
On pourra augmenter également le potentiel thérapeutique de la méthode
en utilisant les auto-greffes de moelle qui permettent l’administration d’une
activité plus importante, ou en associant cette stratégie thérapeutique avec des
chimiothérapies qui potentialisent l’efficacité des rayonnements.

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396 Les cancers ovariens

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La radiothérapie dans les cancers ovariens
L. Thomas

Introduction
La place de la radiothérapie dans le traitement des cancers ovariens reste
controversée. Cette question est-elle encore d’actualité ?
Son utilisation sous ses deux moyens, curiethérapie isotopique et radiothé-
rapie externe, a longtemps été palliative, pour assécher les ascites. Le
développement des hautes énergies et la mise au point par Delclos (1) de tech-
niques particulières pour irradier l’abdomen, a permis de transformer les
indications de la radiothérapie. La radiothérapie est restée longtemps un trai-
tement largement utilisé après la chirurgie. Elle s’est intégrée dans le cadre
d’une stratégie thérapeutique pluridisciplinaire où la chirurgie constituait la
pièce maîtresse.
Progressivement, à partir du milieu des années 80, sa place n’a fait que
décroître, d’une part du fait de l’éclosion des sels de platine et plus encore de
l’arrivée des taxanes, d’autre part, devant la mise en avant de sa toxicité immé-
diate et à long terme, considérée comme inacceptable.
La place de la radiothérapie reste controversée pour deux raisons :
La première raison est d’ordre technique, tant pour la curiethérapie isoto-
pique que pour la radiothérapie externe. La curiethérapie isotopique utilise le
phosphore 32 et pose des problèmes de distribution au sein de la cavité abdo-
minale et donc des problèmes de dosimétrie. La radiothérapie externe, du fait
de l’importance du volume cible et de la présence d’organes critiques pour
lesquels le seuil de la dose toxique est relativement bas, ne peut être réalisée à
une dose théoriquement efficace sur la maladie résiduelle. La dose délivrée est
une dose de compromis entre dose efficace et dose toxique qui entraîne des
interrogations, tant sur l’efficacité elle-même de la radiothérapie que sur sa
toxicité.
La deuxième raison concerne l’absence d’étude randomisée permettant d’as-
seoir la validité de la radiothérapie dans le traitement des cancers ovariens
(problèmes méthodologiques, études anciennes, faible nombre de patientes
incluses). De plus, les études randomisées évaluant la radiothérapie par rapport
aux références chimiothérapiques aujourd’hui utilisées sont actuellement
376 Les cancers ovariens

absentes, ni en cours de réalisation ni en prévision, du fait de la diminution de


l’utilisation de la radiothérapie par de nombreuses équipes.

Rationnel de la radiothérapie
À partir de la tumeur ovarienne, l’extension naturelle se fait par voie intrapéri-
tonéale, par migration cellulaire et par extension ganglionnaire lombo-aortique
et pelvienne, iliaque externe. Cette extension explique que la localisation des
rechutes après chirurgie soit située dans 85 % des cas dans la cavité abdomino-
pelvienne. La curiethérapie isotopique, du fait de la nature du radioélément
utilisé, est potentiellement efficace sur une maladie microscopique superfi-
cielle. La radiothérapie externe est également théoriquement efficace sur une
maladie microscopique résiduelle, mais non sur des résidus inférieurs à 2 cm
ou résidus minimes, sauf s’ils sont situés dans le pelvis où des doses de l’ordre
de 45 Gy peuvent être délivrées. Les différentes techniques d’irradiation vont
être successivement décrites ainsi que leurs résultats.

La curiethérapie isotopique
Elle a été utilisée dès les années 1950 dans le traitement des ascites malignes.
Actuellement, elle fait appel au phosphore 32, émetteur β pur, dont le trajet
d’action se situe entre 2 à 3 mm. L’or 198, émetteur β et γ, a été abandonné
du fait des problèmes de radioprotection. Le lieu d’action du P32 est constitué
par une cavité abdomino-pelvienne libre d’adhérences pour assurer une bonne
répartition du produit. Du fait des propriétés physiques inhérentes au radio-
élément utilisé, cette action ne peut s’exercer que sur une maladie
microscopique superficielle.

Technique d’administration
• Création d’une ascite de 2 litres.
• Vérification par injection de technétium 99 m de la bonne répartition du
produit.
• Injection de la dose de P32 variant de 12 à 20 mCi.
• Demander à la patiente une mobilisation active, alternativement sur chaque
côté de l’abdomen, afin de bien répartir le produit.
Les inconvénients de cette technique sont :
– une dosimétrie imprécise et imprévisible ;
– une dose considérée comme négligeable ;
La radiothérapie dans les cancers ovariens 377

– une répartition assez hétérogène du radioélément même en l’absence de cloi-


sonnement.
Dans la littérature, la distribution du P32 est jugée inadéquate dans 3 à
35 % des cas (2, 3). Pour Goodman (4), une étude tomodensitométrique avec
injection intrapéritonéale du produit de contraste hydrosoluble réalisée chez
13 patientes a montré une distribution complète du produit chez une patiente,
sans zone d’exclusion ni floculation.
La toxicité immédiate existe, mais elle est peu rapportée dans la littérature.
Pour Tharp (5), elle est de 21 %. La toxicité à long terme est d’ordre digestif.
Le taux d’occlusions digestives sévères (nécessitant une chirurgie) varie dans la
littérature de 5 à 25 % (5, 8). Deux points sont à noter : la toxicité digestive
sévère est majorée en cas d’irradiation pelvienne associée (2, 5) ; elle n’est pas
majorée lorsque le P32 est administré après deux laparotomies (7, 9).
Pour Peters (8), la toxicité serait dose-dépendante (dose conseillée de
12 mCi) et, pour Spanos (6), le délai d’administration après chirurgie devrait
être inférieur à douze heures.

Résultats
Concernant les formes localisées, nous avons à notre disposition quatre essais
randomisés (tableau I). Les trois premiers essais comparent après chirurgie
Tableau I – Traitement des cancers ovariens par phosphore 32 (essais randomisés).

Références Young (10) Vergote (12) Klaassen (2) Vergote (3)


Type d’étude Phase III Phase III Phase III Phase III
Nombre de n = 140 n = 347 n = 257 n = 50
patientes
Ia G2 G3
Extension Ia/II/III Ib → III
tumorale Ib G3/Ic/II I/II sans résidus limite pelvis pas de résidus
chir. initiale
Type de traitement Melphalan (1) P32 (1) RAP (1) (n = 107) P32 (1)
après chirurgie ® ® chimiothérapie ® pelvis + cisplatine LAP 2° – ®
initiale P32 (2) cisplatine 50 mg/m2 (2) melphalan (2) (n = 106) surveillance (2)
bras non R → RAP (3) pelvis + P32 (3) (n = 44)
Recul M (mois) 72 62 96
81 % (1) 83 % (1) 62 % (1) 73 % (1)
Survie actuarielle à 5 ans à 5 ans (81 % (2)) à 5 ans (61 %) à 5 ans
78 % (2) 94 % (3) 66 % (3) 73 % (2)
Tolérance et 5 % complic. dig. sévères (1) 7 % occlusion (1)
complications NP 11 % d’occlusion (1) 4 % leucémies (2) 0,6 % → DC
25 % complic. dig. sévère (3)
Équivalence des Équivalence des Équivalence des traitements Équivalence des
Bénéfice global traitements traitements Bras (3) arrêté pour toxicité traitements
Toxicité ++ (1)
378 Les cancers ovariens

initiale le P32 à du melphalan ou à une chimiothérapie à base de platine ou à


une irradiation abdomino-pelvienne. Ces essais montrent une équivalence des
traitements, les taux de survie actuarielle à cinq ans allant de 62,6 à 82 % avec
des taux de toxicité variables.
Concernant l’utilisation du P32 après chirurgie de contrôle, nous avons à
notre disposition dans la littérature un essai randomisé pour des stades limités
et des études rétrospectives.
L’essai randomisé de Vergote (3) a comparé après laparotomie de contrôle
un traitement par P32 contre une simple surveillance. Les résultats étaient
équivalents. La conclusion possible de cet essai est de dire que lorsqu’il n’existe
pas de résidus à l’issue de la chirurgie initiale, un seul traitement adjuvant est
suffisant (tableau I).
L’essai randomisé de Young (11) publié en 1999 a comparé après chirurgie
pour des stades I-IIA de haut risque, de grade 2 et grade 3, phosphore 32 intra-
péritonéal et chimiothérapie adjuvante avec cyclophosphamide et cisplatine. Il
n’existe pas de différence au niveau de la survie sans rechute à cinq ans, avec
66 % pour le premier bras avec phosphore 32 et 77 % dans le groupe avec
chimiothérapie adjuvante. Néanmoins, 2 patientes sur 98 ont présenté une
perforation intestinale dans le premier groupe.
Les études rétrospectives concernant l’utilisation du P32 après laparotomie
de contrôle ont intéressé des stades variables initialement allant du stade I au
stade III. Les patientes après chirurgie initiale, chimiothérapie et laparotomie
de contrôle négative ont reçu du P32. Les résultats sont discordants avec des
taux favorables de survie à cinq ans de 90 et 100 % pour Rogers (7) et Spencer
(9) et de 40 % pour Peters (8). Cette discordance peut être expliquée par une
plus forte proportion de stades III dans l’étude de Peters.
Au total, les résultats obtenus avec le P32 dans les formes localisées ne
permettent pas d’être catégorique quant à son efficacité et ce avec des toxicités
sévères de l’ordre de 11 %.
Après laparotomie de contrôle négative, l’intérêt du P32 reste à démontrer
dans le cadre d’essais randomisés.
Il faut souligner que le P32 ne doit jamais être associé à une irradiation
pelvienne et que certaines règles d’administration doivent être suivies scru-
puleusement, afin de maintenir un taux de toxicité digestive grave de l’ordre
de 5 %. De plus, l’efficacité potentielle du P32 est amoindrie par une dis-
tribution jugée le plus souvent inadéquate, même en l’absence de cloisonne-
ment (4).
En conclusion, la curiethérapie isotopique n’est pas recommandée (niveau
de preuve B) (13, 14).
La radiothérapie dans les cancers ovariens 379

La radiothérapie externe
Dès 1912, les rayons X ont été utilisés dans le traitement des cancers ovariens,
mais, du fait de la faible énergie du rayonnement 200 KV, son utilisation était
palliative.
En 1960, Delclos (1) à Houston, en utilisant les hautes énergies et en inven-
tant la technique dite « en bandes mobiles » (moving strip) pour irradier
l’abdomen, a permis le développement de la radiothérapie externe dans le trai-
tement des cancers ovariens, car les appareils de radiothérapie de l’époque ne
permettaient pas de traiter des grands volumes en un seul champ.
L’histoire naturelle des cancers ovariens (dissémination péritonéale et
lombo-aortique) et l’essai de Dembo (15) ont définitivement indiqué que le
volume à irradier consistait en l’ensemble de la cavité péritonéale allant du cul-
de-sac de Douglas jusqu’aux coupoles diaphragmatiques en haut avec une
marge de sécurité de 2 cm.
La dose théorique qu’il faudrait administrer pour traiter une maladie micro-
scopique est de l’ordre de 45 Gy (16). La dose maximum tolérable pour
l’ensemble de l’intestin grêle est de 30 Gy. On sait donc que la probabilité de
contrôler la maladie microscopique peut être estimée à 60 % environ.
Un autre compromis entre efficacité et toxicité au niveau de la dose est
réalisé en cachant certaines zones, en particulier le foie et les reins, d’où une
hétérogénéité de dose et un sous-dosage par rapport à la dose prescrite délivrée
en zone non protégée.
La radiothérapie externe, du fait de l’importance du volume à irradier et de
la présence d’organes critiques est donc nécessairement un compromis entre
efficacité et toxicité, et n’est donc pas au maximum de son efficacité potentielle.

Techniques à notre disposition pour irradier la cavité


abdomino-pelvienne
La technique initiale est celle de Delclos (1), dite « en bandes mobiles » (moving
strip), nécessitant un étalement important de l’irradiation. De plus, pour
Dembo (17), sa toxicité est plus importante que la technique des grands
champs.
La technique des grands champs utilise deux ou quatre faisceaux. La tech-
nique princeps est celle réalisée par Dembo, utilisant deux faisceaux opposés,
sans cache hépatique et des caches rénaux postérieurs à 15 Gy. La dose délivrée
est de 22,5 Gy, les patientes recevant systématiquement au préalable 22,5 Gy
en dix fractions sur le pelvis.
Certaines variantes sont utilisées, comme par l’équipe de l’institut Gustave-
Roussy qui délivre 20 Gy sur l’abdomen, sans aucun cache (18).
La cavité abdomino-pelvienne peut également être irradiée par quatre fais-
ceaux orthogonaux. Cette technique décrite par Delouche (19) a été modifiée
380 Les cancers ovariens

à l’institut Bergonié (20). Le volume d’irradiation est le même que celui décrit
par Dembo avec caches hépatique, rénaux et au niveau du rachis dorso-
lombaire et du sacrum.
Par cette technique, il est délivré une dose de 30 Gy en zone non protégée
à raison de 1,5 Gy par jour, cinq fois par semaine.
Du fait de la présence de caches, nécessaires pour la tolérance des organes
critiques (foie et reins), il existe une hétérogénéité de la distribution de dose.
Par la technique des quatre faisceaux, la dose délivrée en zone protégée au
niveau du lobe droit du foie varie de 3 Gy en arrière à 14 Gy en avant ; le rein
reçoit une dose de 10 Gy.
Ces différentes techniques ne parviennent donc pas à éviter le problème du
sous-dosage des zones protégées et ne délivrent à la plus grande partie de l’ab-
domen qu’une dose de 20 Gy, même si la dose prescrite est de 30 Gy.
L’irradiation de l’abdomen avec la modulation d’intensité en arc-thérapie a
été utilisée et rapportée (21). Cette technique d’irradiation a été réalisée en
13,8 minutes pour une dose de 1,5 Gy par fraction. La dose prescrite au niveau
PTV (du volume cible de planification) était de 33 Gy et il a été constaté que
le V90, c’est-à-dire le volume de PTV recevant plus de 90 % de la dose pres-
crite, était supérieur à celui obtenu par des plans plus conventionnels avec
quatre faisceaux. De plus, la distribution de dose était plus homogène que celle
obtenue avec une technique d’irradiation conventionnelle, avec une protection
équivalente des organes critiques tels que les reins et le foie.

Tolérance et complications

La majorité des patientes (93 % des cas) présentent une intolérance digestive à
type de nausées et vomissements motivant exceptionnellement l’arrêt du trai-
tement. Actuellement, ces troubles sont bien calmés par la prise de
médicaments antagonistes de la sérotonine.
Les interruptions transitoires sont liées en majorité à une intolérance héma-
tologique (thrombopénie) : le taux varie dans la littérature de 8 à 37 % (22,
23), survenant le plus souvent chez des patientes traitées par chimiothérapie
antérieure.
L’interruption définitive est rapportée de façon variable dans la littérature
(de 1,4 à 30 %). Elle est liée à une intolérance hématologique (thrombopénie)
dans la majorité des cas. Le taux d’arrêt définitif varie de 1,4 à 10,5 % pour les
patientes traitées par chirurgie et radiothérapie (22-24), alors qu’il varie de 13,3
à 30 % lorsqu’une chimiothérapie a précédé l’irradiation (22, 23, 24).
La radiothérapie dans les cancers ovariens 381

Complications tardives
Elles sont essentiellement d’ordre digestif. Les complications telles que l’hépa-
tite radique ou la néphrite radique sont rarissimes du fait des protections mises
en place et des niveaux de dose délivrés. Les taux d’occlusion digestive sévère
nécessitant une chirurgie varient dans la littérature de 1,4 à 14 % (23, 24). Le
taux moyen rapporté dans la littérature est de 5 % si les patientes sont traitées
par chirurgie et radiothérapie et de 10 % si une chimiothérapie et deux laparo-
tomies ont précédé la radiothérapie (23, 24).
Pour certains, le nombre d’interventions chirurgicales est un facteur favori-
sant dans la genèse des complications digestives graves (24, 25). Le rôle
favorisant de la surimpression pelvienne a été rapporté par Whelan (24) et
Thomas (20). Whelan rapporte également qu’une dose totale au niveau de
l’abdomen supérieure à 22,5 Gy est un facteur favorisant. Les complications
intestinales dépendent de la dose totale, de la dose par fraction et du nombre
d’interventions antérieures (24).
Une étude récente de Firat (26) a montré qu’en augmentant la dose au
niveau de l’abdomen, à plus de 36 Gy, on augmentait l’efficacité mais égale-
ment les complications de façon notable : pour cet auteur, une dose
abdominale supérieure à 30 Gy et une dose sur le pelvis supérieure à 50 Gy
étaient associées à une augmentation significative des complications intesti-
nales type occlusion (21 % des patientes ont développé des complications
digestives intestinales de grade 3 ou 4 et 11 % ont présenté des occlusions
nécessitant une chirurgie).

Résultats
Après chirurgie initiale, nous avons à notre disposition dans la littérature cinq
essais randomisés.
L’essai princeps de Dembo (15) a montré la supériorité de l’irradiation
abdmino-pelvienne (RAP) par rapport à l’irradiation pelvienne associée ou non
à du chlorambucil. Cet essai a comparé, pour 190 patientes porteuses de stades
IB à III avec résidus minimes, les trois types de traitement précités. Il existe une
différence significative au niveau de la survie actuarielle à cinq ans (p = 0,006)
et une survie à 78 % pour les patientes traitées par RAP après chirurgie
complète et 51 % avec une irradiation pelvienne + chlorambucil. Le bénéfice
avec la RAP était donc démontré pour des patientes opérées, même avec des
résidus minimes, c’est-à-dire inférieurs à 2 cm, mais situés dans le pelvis.
Les essais de Klaasen (2) et Sell (27) n’ont pas montré de supériorité de la
RAP par rapport à l’irradiation pelvienne + melphalan ou P32, ou à l’irradia-
tion pelvienne + endoxan. Les survies à cinq ans variaient de 62 et 66 % pour
Klaasen et de 63 à 65 % pour Sell, mais ces études ont montré la toxicité des
associations irradiation pelvienne + P32 et irradiation pelvienne + endoxan.
382 Les cancers ovariens

Le dernier essai de Chiara, plus récent, a comparé pour des stades I et II à


haut risque (28), après chirurgie première, une RAP versus une polychimiothé-
rapie de type CP (cisplatine 50 mg/m2 et cyclophosphamide 600 mg/m2). Il n’y
a pas de différence de survie significative à cinq ans (p = 0,16) : 71 % pour le
bras chimiothérapie et 53 % pour le bras RAP. Aucune conclusion ne peut être
tirée de cet essai quant à la supériorité de la polychimiothérapie par rapport à
la RAP. Cependant, l’étude de Chiara est critiquable avec un faible effectif dans
chaque bras de traitement (36 et 34 patientes), des violations protocolaires et
également une toxicité importante dans le bras radiothérapie puisque 28 % des
patientes ont présenté une diarrhée.
L’étude randomisée de Kojs (29) a comparé une chimiothérapie à base de
sels de platine (cisplatine, doxorubicine, cyclophosphamide) à une radiothé-
rapie abdmino-pelvienne (30 + 20 Gy) après chirurgie initiale pour des stades
Ib de grade 2, grade 3, Ic et IIA sans résidus. Il existe une équivalence des deux
traitements complémentaires, avec un taux de survie sans rechute de 80 % à
cinq ans et un taux de complications digestives graves de 3 % dans le bras
radiothérapie. 71 patientes ont été incluses dans chaque bras.
Au total, au vu de l’ensemble de ces études, celles-ci montrent une effica-
cité indiscutable de l’irradiation abdomino-pelvienne comparée à une
chimiothérapie à base de sels de platine, montrant tout au plus une équivalence
des traitements avec cependant 3 % de complications digestives graves avec la
radiothérapie. Pour les stades précoces, au vu des derniers essais publiés
– ICON 1 (30) et ACTION (31) – les SOR (14) ont basé leurs recommanda-
tions : pour les tumeurs de stades I et IIA, la chimiothérapie apporte un
bénéfice en terme de survie sans récidive dans les deux études et en terme de
survie globale à cinq ans dans l’étude ICON 1. Le bénéfice de la chimiothé-
rapie par rapport à une surveillance n’est plus retrouvé lorsque les patientes ont
une stadification chirurgicale complète (ACTION). Les SOR recommandent
une chimiothérapie complémentaire à base de sels de platine pour les stades
précoces : les tumeurs de grade 3, les tumeurs à cellules claires, les stades IC et
IIA.
La radiothérapie abdomino-pelvienne n’a pas été évaluée par rapport à une
chimiothérapie à base de taxanes. Dans le cadre des SOR, la radiothérapie
abdomino-pelvienne reste une option à ne réaliser que dans le cadre d’essais
thérapeutiques et en prévenant les patientes de la toxicité spécifique de la radio-
thérapie abdomino-pelvienne.
Le Swedish Council préconise qu’il n’y a pas d’indication de radiothérapie
pour les stades précoces à bas risque, qu’il n’y a pas d’essai comparant une
radiothérapie à l’abstention thérapeutique dans les stades précoces à haut risque
et qu’il n’y a pas de preuve scientifique de la différence d’efficacité entre
chimiothérapie adjuvante et radiothérapie, mais sans étude ayant comparé la
radiothérapie abdomino-pelvienne à des chimiothérapies à base de taxanes et
sans référence par rapport à des effets à long terme de l’irradiation (32).
Dans les formes avancées :
– la radiothérapie n’est pas indiquée après chirurgie (SOR) ;
La radiothérapie dans les cancers ovariens 383

– après chirurgie initiale et polychimiothérapie à base de sels de platine, des


chirurgies de second regard ont permis d’évaluer l’action de la chimiothé-
rapie. La survie est corrélée à la présence de résidus ou non et de leur taille.
Après chirurgie de contrôle, se pose la question ou non d’un traitement de
consolidation. La valeur d’un traitement de consolidation et son type ne sont
pas clairement définis, chimiothérapie intrapéritonéale (33), chimiothérapie
par voie systémique, radiothérapie abdomino-pelvienne, voire abstention
thérapeutique (34, 35). On sait en effet que, même après laparotomie de
contrôle négative, avec des rémissions complètes histologiques, les taux de
rechute varient de 40 à 60 % (36).

Dans quelle situation la radiothérapie abdomino-pelvienne est-


elle considérée comme efficace ?
Les études rétrospectives ont montré des survies de 76 et 63 % pour des
patientes en rémission complète histologique ou avec des résidus millimé-
triques (22, 37). En cas de résidus macroscopiques inférieurs à 2 cm, la survie
varie de 18 à 30 %, ce qui peut être expliqué par les doses limitées qu’il est
possible de délivrer au niveau de l’ensemble de la cavité abdomino-pelvienne.
Thomas (38), colligeant 713 cas provenant de 28 séries différentes, a constaté
une survie liée à l’existence ou non de résidus avant consolidation : pas de reli-
quat : survie de 76 % ; microscopiques inférieurs à 5 mm : 49 % ;
macroscopiques : 17 %. Ceci permet de constater que la radiothérapie abdo-
mino-pelvienne ne peut être appliquée en consolidation que s’il n’existe pas de
résidus macroscopiques (14).

Quelle est sa place par rapport aux autres traitements de


consolidation ?
Les essais randomisés ont comparé, après laparotomie de contrôle négative ou
avec résidus dits « minimes » (inférieurs à 2 cm), la RAP versus une polychi-
miothérapie à base de platine pour Bruzzone (39) et de carboplatine pour
Lambert (40) (tableau II). L’essai de Bruzzone a été arrêté prématurément du
fait d’une différence significative en faveur du bras polychimiothérapie
(p = 0,02) : 9 décès sur 20 dans le bras RAP, et 3 décès sur 21 dans le bras
chimiothérapie. Pour Lambert, il y a équivalence des traitements. Quant à
l’essai de Mangioni (41), il est d’interprétation difficile en raison d’un manque
de données statistiques. L’essai randomisé de Sorbe publié récemment (42) a
comparé en consolidation, après second look négatif, pour des stades III, une
irradiation abdomino-pelvienne à une chimiothérapie versus abstention théra-
peutique. La survie sans rechute à cinq ans est significativement meilleure dans
le bras radiothérapie (56 % versus 36 % et 35 % dans le bras chimiothérapie-
384 Les cancers ovariens

Tableau II – Radiothérapie abdomino-pelvienne des cancers ovariens après chirurgie, chimio-


thérapie et laparotomie de second look (essais randomisés).
Références Bruzzone (39) Lambert (40)
Type d'étude Phase III Phase III
Nombre de patientes n = 41 n = 117
Extension tumorale III/IV IIbc/III/IV
Pas de résidus ou résidus Pas de résidus ou résidus
< 2 cm à la laparotomie (2°) < 2 cm à la laparotomie (2°)
RAP n = 20 (1) RAP n = 58 (1)
Type de traitement LAP 2° ® LAP 2° ®
Polychimiothérapie Carboplatine n = 21 (2)
cisplatine (2) n = 21
Technique RAP « Grand champ » 30 Gy « Grand champ » 24 Gy
(2 faisceaux) (2 faisceaux)
+ SI pelvis 14 Gy + SI pelvis 16 Gy non systématique
Recul M (mois) 22 48 (MIN)
Survie actuarielle Décès liés à la maladie
9/20 (45 %) (1) RC HISTO ou micro ≈ 40 %
3/21 (14,2 %) (2) Résidus < à 2 cm : 15 %
p = 0,02
Tolérance 5 % complic. digestive sévère 94 % ttt complet
et (chirurgie) (1) 1 % † par fistule digestive (1)
Complications 5 % neuropathie périphérique (2)
Bénéfice global Avantage chimiothérapie Équivalence des traitements
– Inefficacité de la RAP Une consolidation est-elle
→ arrêt de l'essai nécessaire ?

abstention ; p = 0,032). Cependant, il existe 10 % de complications digestives


sévères à type d’occlusion dans le bras radiothérapie. La radiothérapie abdo-
mino-pelvienne comportait une irradiation de l’ensemble de la cavité
abdomino-pelvienne à la dose de 20 Gy, suivie d’une surimpression de 20,4 Gy
au niveau du pelvis.
La place du traitement de consolidation, quel qu’il soit, reste à définir dans
le cadre d’essais randomisés à plusieurs bras en cas de second look négatif.
L’essai randomisé de Sorbe (42) a conforté le rôle de l’irradiation abdomino-
pelvienne en cas de second look montrant une rémission complète
histologique.

Évolution
Une étude rétrospective de Debby (43) a rapporté des taux de survie de 78,7 %
à cinq ans et une survie actuarielle de 63,3 % à dix ans, avec un traitement pour
des stades II à IV de cancer ovarien, ayant reçu une chirurgie initiale et une
La radiothérapie dans les cancers ovariens 385

chimiothérapie à base de sels de platine et pour lesquels, après second look


négatif, une irradiation abdominale totale avait été réalisée à une dose unique
de 8 Gy. Des complications modérées ont été observées chez 9,4 % des
patientes, avec simplement des diarrhées persistant pendant quatre mois chez
deux patientes et un épisode de cystite persistant pendant six mois.

Conclusion
La radiothérapie externe abdomino-pelvienne a une efficacité certaine dans les
cancers ovariens en cas d’absence de résidus. Actuellement, les données la
concernant sont le plus souvent anciennes, sans comparaison avec les chimio-
thérapies à base de taxanes et sels de platine. De plus, la radiothérapie
abdomino-pelvienne est redoutée du fait des complications digestives obser-
vées. Néanmoins, les facteurs de risque de complications digestives sont
actuellement bien délimités. Son rôle ne pourra perdurer que si des études
randomisées sont effectuées, permettant de valider sa place par rapport aux
molécules de chimiothérapie actuellement utilisées.

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epithelial carcinoma: a long-term survival analysis. Int J Gynecol Cancer 14: 794-8
Le dépistage du cancer ovarien
P. Mathevet

Dans le cadre de la médecine préventive, de nombreux outils de dépistage ont


été mis en place pour des pathologies graves (cancéreuses ou autres).
Le cancer ovarien a la particularité d’être malheureusement très souvent
diagnostiqué à un stade avancé (70 à 75 % des cancers ovariens sont diagnos-
tiqués au stade III ou plus), or à ce stade, le pronostic du cancer ovarien malgré
les progrès de la chimiothérapie reste catastrophique (1,2). Il semble donc
logique et intéressant d’essayer de dépister les cancers ovariens en vu d’en dimi-
nuer la mortalité et éventuellement d’en réduire l’incidence. Ainsi, il a été
estimé que la mise en place d’un dépistage permettant d’améliorer la détection
des cancers ovariens (en passant de 25 % de stade I à 75 % de ces mêmes
stades), le nombre de décès par cancer ovarien serait réduit de moitié (3).
Cependant, comme tout programme de dépistage, un certain nombre d’impé-
ratifs et de contraintes sont incontournables pour assurer l’efficacité et la
rentabilité de ce dépistage.

Quels sont les critères qui permettent d’espérer un


dépistage efficace ?
La pathologie à dépister doit être assez fréquente et sévère pour que le dépis-
tage soit d’une part rentable pour la société, et permette d’autre part à l’échelon
individuel, l’amélioration de la qualité de vie des patientes. On touche déjà une
des limites du dépistage du cancer ovarien. La fréquence du cancer ovarien est
relativement faible (risque de cancer ovarien égal à 1 % par femme pour toute
sa vie) dans la population générale et on risque donc de mobiliser des moyens
financiers importants pour un bénéfice absolu faible en nombre de patientes
bénéficiaires du dépistage.
Les bénéfices du dépistage pour une pathologie cancéreuse se font habi-
tuellement dans le sens d’une réduction du stade. La détection de la maladie à
un stade plus précoce doit permettre d’améliorer la survie et la qualité de vie
de la population dépistée. Cependant, il est nécessaire que l’histoire naturelle
128 Les cancers ovariens

de la pathologie permette de détecter celle-ci à un stade précoce (voire précan-


céreux), stade où un dépistage permet de guérir la patiente par un traitement
facilement accessible.
Le dépistage doit donc se traduire par une amélioration de la survie spéci-
fique dans la population dépistée.

Quels sont les tests de dépistage utilisables ?


Les critères essentiels d’un bon test de dépistage sont connus : ce test doit être
simple, reproductible, peu coûteux, le moins invasif possible (et donc accep-
table pour la patiente). Il doit assurer une sensibilité et une spécificité les plus
élevées possibles.
Les deux principales méthodes étudiées ont été le dosage du CA 125 et
l’échographie pelvienne (de préférence par voie endovaginale) (4). Les perfor-
mances limitées de ces méthodes ont amené à l’utilisation conjointe du CA 125
et de l’échographie selon un mode simultané ou séquentiel.

Dosage isolé du CA 125


Deux études relativement anciennes ont étudié a posteriori le taux de CA 125
chez des patientes présentant un cancer ovarien. Ces études ont été réalisées en
Suède (5) et dans l’état du Maryland (6) à partir de banques de sang : les
femmes présentant un cancer ovarien avaient une détermination du CA 125
sur les prises de sang réalisées antérieurement et conservées dans des banques.
Dans l’étude suédoise (5), 12 patientes avec cancer ovarien avaient eu un
dosage du CA 125 dans les dix-huit mois précédant ; ce dosage était supérieur
à la normale dans six cas (50 %). Si, on élargissait l’intervalle jusqu’à cinq ans
avant l’apparition du cancer, 14 patientes sur 59 (25 %) avaient un dosage
anormal. Dans l’étude américaine (6), le dosage du CA 125 dans les trois ans
précédant l’apparition de 37 cancers ovariens, était positif dans 21 cas (57 %)
et aurait permis de dépister le cancer. Reprenant de manière prospective l’étude
suédoise, et explorant cliniquement et radiologiquement les patientes avec un
CA 125 élevé, Einhorn (7) a évalué la valeur du CA 125 chez 5 500 femmes
asymptomatiques. Six cancers ovariens ont été détectés pour 175 taux élevés de
CA 125, et trois autres ont été manqués par le dépistage (taux de CA 125
normal).
A la suite de ces études, il apparaît que le dosage isolé du CA 125 présente
de nombreuses limites. Il existe de nombreux faux positifs, plus particulière-
ment en préménopause (8) : lors d’endométriose, de menstruations… De
plus, ce dosage est source d’un taux élevé de faux négatifs : près de deux tiers
des cancers ovariens au stade I ont un taux de CA 125 normal (9). On ne peut
Le dépistage du cancer ovarien 129

donc espérer obtenir une diminution efficace du stade des cancers ovariens
dépistés par le dosage isolé du CA 125.
Ces notions ont amené des auteurs à évaluer, plutôt qu’un dosage isolé du
CA 125, les variations de dosages séquentiels. Ainsi, en reprenant les résultats
de l’étude d’Einhorn, Skates (10) a construit un algorithme qui permet d’amé-
liorer grandement la valeur prédictive du CA 125. Le principe de cet
algorithme est qu’en cas de pathologie ovarienne cancéreuse le taux du CA 125
a tendance à augmenter, alors qu’en l’absence de cancer et/ou en présence de
pathologie bénigne le taux du CA 125 reste stable ou diminue. Plus précisé-
ment, en prenant en compte des dosages faits à plusieurs intervalles de temps,
Skates détermine une courbe d’évolution du taux du CA 125. L’algorithme est
constitué de deux données principales : le taux basal du CA 125 et la pente de
la courbe d’évolution. Ainsi, l’algorithme classe comme patientes à risque de
cancer ovarien, celles présentant un taux basal de CA 125 élevé ou une pente
positive de la courbe d’évolution du CA 125 (accroissement de ce taux). Avec
cet algorithme, Skates obtient une sensibilité de 85,7 % pour le dépistage des
cancers ovariens avec une spécificité excellente (99,7 %). Ainsi, dans le cadre
d’un dépistage multimodal, l’utilisation de l’algorithme de Skates permet d’en-
visager la réalisation de dosages du CA 125 comme modalité première de triage
des patientes.

Échographie endopelvienne
Les premières études consacrées à cette technique utilisaient une approche
échographique par voie abdominale. Les études récentes utilisent l’échographie
par voie endovaginale dont on sait la plus grande performance.
L’étude principale utilisant cette technique échographique est celle de Van
Nagell Jr (11). Elle s’est déroulée dans le Kentucky. Cette étude a concernée
14 469 femmes entre 1987 et 1999. Un dépistage était considéré comme
positif lorsque le volume ovarien était augmenté (> 10 cm3 après la ménopause
et > 20 cm3 avant la ménopause). En cas de dépistage positif, un contrôle écho-
graphique était réalisé 4 à 6 semaines plus tard ; si ce contrôle était positif, une
évaluation échographique plus poussée avec étude Doppler et dosage du
CA 125 était pratiquée puis une éventuelle exploration chirurgicale. Les résul-
tats de cette étude sont relativement décevants puisque 17 cancers ovariens ont
été détectés dont 11 au stade I ; mais l’analyse des cancers de stade I montre
que : 6 tumeurs étaient des lésions borderline (3) ou des tumeurs de la granu-
losa (3). Aussi, on peut estimer que ce dépistage n’a probablement été
bénéfique que pour les 5 véritables cancers ovariens détectés au stade I
(patientes n’ayant pas présenté de récidive), données qui sont à mettre en
balance avec quatre cas de faux négatifs (cancers ovariens apparus entre deux
dépistages) et trois cancers ovariens stade III apparus entre quatorze et vingt
mois après un dépistage négatif. Ces données sont d’autant plus médiocres qui
s’agissait globalement de patientes sélectionnées puisqu’elles étaient âgées de
130 Les cancers ovariens

plus de 50 ans (n = 11 370) ou avaient une histoire familiale de cancer ovarien


(n = 3 299) pour augmenter la fiabilité de l’examen échographique. Cette
étude a le mérite de donner plusieurs éléments d’information : le coût du
dépistage échographique est estimé à 35 dollars par examen, la valeur prédic-
tive positive de l’échographie pour le dépistage est très basse (< 10 %), la valeur
prédictive négative est moyenne (les cancers ovariens à ovaire de taille normale
et les tumeurs à dissémination péritonéale ne sont pas détectées), et l’intervalle
optimal entre les examens de dépistage est à déterminer. En conclusion, les
auteurs reconnaissent que l’utilisation seule de l’échographie endovaginale est
insuffisante pour le dépistage et proposent de combiner échographie et dosage
des marqueurs tumoraux.
La deuxième étude importante est celle réalisée par l’équipe de Sato (12)
dans la préfecture d’Aomori au Japon. De 1989 à 1999, 51 550 femmes de plus
de 30 ans ont bénéficié d’une échographie pelvienne annuelle (initialement par
voie abdominale, puis par voie endovaginale). En cas de résultat positif (masse
ovarienne > 30 mm), une démarche similaire à l’étude américaine était réalisée.
22 tumeurs ovariennes ont été détectées (+ 2 tumeurs métastatiques) dont 18
de stade I. En excluant les tumeurs borderline et les lésions de type tumeur de
la granulosa, il n’a finalement été dépisté que 13 cancers ovariens véritables au
stade I. Cependant, pendant la même période, les auteurs n’ont observé aucun
faux négatif du dépistage échographique.
Les résultats principaux de ces deux études ont été confirmés par d’autres
études, avec cependant des effectifs plus faibles (13-19). Deux notions ressor-
tent : l’échographie endovaginale permet de réduire le stade des cancers
ovariens détectés et ainsi améliore le pronostic de ces cancers (tendance à une
diminution de la mortalité par cancer ovarien dans le groupe dépisté), mais au
prix d’un taux élevé de faux positifs (environ 12 femmes opérées de lésions
bénignes pour 1 cancer ovarien dépisté) (4).
Une estimation du coût de dépistage a été réalisée par Pavlik (20). A partir
des données de cette étude, en prenant un coût de 25 € par examen, et avec
une rentabilité du dépistage de 1/1000, on peut estimer à 25 000 € le coût de
chaque cancer dépisté. À ce chiffre, il faut ajouter les dépenses créées par l’éva-
luation complémentaire des résultats positifs du dépistage et le coût de la prise
en charge des faux positifs, soit 50 000 €, ainsi que le coût du traitement d’un
cancer ovarien au stade I : 20 000 €. Le total s’établit donc à 95 000 € par
cancer ovarien dépisté. Cependant cette valeur est très largement inférieure au
coût de la prise en charge d’un cancer ovarien au stade III (coût de plus de
200 000 €).
Les données de l’histoire naturelle du cancer de l’ovaire sont relativement
limitées (21). Ces données sont importantes pour déterminer les caractéris-
tiques optimales du dépistage : tranche d’âge des patientes à dépister, rythme
des explorations… Ces données confirment une incidence non négligeable du
cancer ovarien chez la femme avant la ménopause et elles ne permettent donc
pas de restreindre le dépistage aux patientes de plus de 50 ans. Elles permettent
Le dépistage du cancer ovarien 131

d’estimer que, pour certaines formes de cancer ovarien, le temps de progression


est rapide, imposant donc un intervalle de dépistage raccourci.
Comme nous l’avons vu dans les deux études précédentes (11-12), l’utilisa-
tion de l’échographie pour le dépistage était cantonnée à la détermination de
la taille ou du volume des ovaires. Afin de réduire le taux de faux positifs, et
augmenter la spécificité du dépistage échographique, plusieurs auteurs (22-26)
ont proposé la création d’un index morphologique (pour différencier tumeurs
bénignes et malignes) ou l’adjonction d’une étude Doppler couleur (27-37),
voire, plus récemment l’utilisation de l’échographie 3D (38). Concernant les
index morphologiques, de nombreuses variations ont été proposées (39). Ces
scores échographiques prennent en compte différents critères dont : l’existence
de cloisons intrakystiques, de végétations, un contenu ovarien échogène, des
parois épaisses et irrégulières… Plusieurs auteurs (22, 25, 26) montrent ainsi
une amélioration de la spécificité et de la valeur prédictive positive. Cependant,
cette amélioration se fait au détriment d’une baisse faible mais notable de la
valeur prédictive négative. L’index semblant le plus fiable (mais aussi le plus
complexe) est celui proposé par Tailor (26). Mais cet index n’a pas été étudié
dans le cadre du dépistage, et encore moins dans des séries importantes de cas
et de témoins. L’utilisation du Doppler couleur semble a priori intéressante. En
effet, les tumeurs malignes ont une néo-vascularisation qui pourrait être distin-
guée par Doppler au sein des masses ovariennes ; de plus, ces néo-vaisseaux ont
une résistance abaissée par rapport aux vaisseaux normaux et à ceux observés
dans les tumeurs bénignes. Si les premières études menées par Kurjak (28-30)
retrouvaient une bonne sensibilité (96,4 %) et une excellente spécificité
(99,8 %) pour la différenciation bénin-malin, des publications ultérieures (31-
33) n’ont pas retrouvé d’aussi bons résultats. Aussi plusieurs auteurs (30,
34-36) ont proposé d’intégrer les résultats de l’évaluation Doppler aux données
d’un score échographique afin d’en améliorer la spécificité et la sensibilité.
Leurs résultats montrent une amélioration de la spécificité, avec cependant la
persistance de faux négatifs. La principale lacune des ces études est leurs faibles
effectifs, requérant une validation sur une grande échelle par des études pros-
pectives avant d’envisager l’utilisation de cette approche en tant qu’outil de
dépistage.
Ainsi, les données actuelles concernant l’utilisation des index morpholo-
giques échographiques et du Doppler couleur sont trop restreintes pour
pouvoir préconiser leur utilisation en tant que méthode de dépistage des
cancers ovariens (40).

Le dépistage multimodal
C’est un peu artificiellement qu’ont été opposés le dépistage échographique et
le dosage du CA 125. Nous avons vu que, dans les études de Van Nagell (11)
et de Sato (12), un dosage du CA 125 était réalisé lors d’un test échographique
positif, et dans l’étude d’Einhorn (7) lors d’un taux de CA 125 élevé, une écho-
132 Les cancers ovariens

graphie était pratiquée. Jacobs (41) a formalisé ce dépistage à deux niveaux, il


propose d’utiliser le dosage du CA 125 comme premier test de dépistage, puis,
en cas de positivité du dosage, de faire pratiquer une échographie pelvienne. Il
définit donc une stratégie de dépistage à deux niveaux qu’il dénomme dépis-
tage multimodal.
Jacobs (41) a mené une étude sur 22 000 femmes ménopausées de plus de
45 ans, en utilisant le dosage annuel du CA 125, puis en seconde ligne l’écho-
graphie pelvienne. Ainsi, 11 cancers ovariens ont été détectés chez 41 femmes
opérées du fait de tests positifs. En comparaison, 8 cancers ovariens sont
apparus chez les femmes ayant eu un dosage du CA 125 normal. La sensibilité
du dépistage est de 78,6 % et sa spécificité de 99,9 %. Cette étude a le mérite
de montrer que la réalisation d’un dépistage du cancer ovarien est réalisable,
que le taux d’adhésion des femmes au programme est élevé (mais il s’agit de
femmes motivées qui avaient accepté de participer à l’étude), et que les résul-
tats sont encourageants.
Pour mieux déterminer l’impact du dépistage, Jacobs a réalisé une étude
randomisée (42) comparant chez des femmes ménopausées de plus de 45 ans,
un groupe dépistage selon les modalités précitées (10 997 femmes) et un
groupe sans dépistage (10 958 femmes suivies). Les patientes du groupe dépis-
tage ont eu trois tests annuels et l’ensemble des femmes a été suivi sept ans.
Dans le groupe dépistage, 6 cancers ovariens ont été détectés (pour 29 femmes
opérées, soit une valeur prédictive positive de 20,7 %) et 10 cancers sont
apparus dans les sept ans du suivi, pour un total de 16 tumeurs malignes. Dans
le groupe sans dépistage, 20 cancers ovariens ont été observés. Il est à noter que
les tumeurs « borderline » ont été exclues. Les résultats de cette étude compa-
rative permettent de retrouver une amélioration significative de la survie des
cas de cancers ovariens du groupe détecté par rapport aux cancers du groupe
sans dépistage (survie médiane de 72,9 mois versus 41,8 mois). Cette amélio-
ration est obtenue grâce à un grade tumoral plus faible des cancers dans le
groupe dépistage, alors qu’il n’y a pas de différence significative pour les stades
tumoraux (4 stades I dans le groupe avec dépistage contre 1 stade I dans le
groupe sans dépistage). Les auteurs concluent donc à l’efficacité de cette stra-
tégie et en son rapport coût-bénéfice favorable par l’utilisation du dosage du
CA 125 comme première ligne du dépistage. La confirmation du bénéfice du
dépistage multimodal passe par la réalisation d’études de plus grande enver-
gure, c’est ce que propose Jacobs en mettant en place une étude randomisée
chez 200 000 femmes en Angleterre (43).
L’efficacité du dépistage multimodal peut être optimisée par l’utilisation de
l’algorithme de Skates (10). L’application de cet algorithme, a posteriori, sur la
première étude de Jacobs (41), permet de détecter 16 cancers ovariens sur les
19 cas observés. La sensibilité obtenue est de 86 %, bien supérieure à celle du
dosage du CA125 isolé (44). Une réduction importante du nombre de faux
négatifs peut être obtenue avec une spécificité conservée. Jacobs (45) propose
d’appliquer au programme de dépistage du cancer de l’ovaire qu’il vient de
mettre en place, l’algorithme de Skates sur le dosage annuel du CA 125 ; en cas
Le dépistage du cancer ovarien 133

de positivité du dosage, une échographie endovaginale serait préconisée. Cet


essai est en cours et va inclure 200 000 femmes à travers le Royaume-Uni.
Cette étude randomisée comporte trois bras : un bras sans dépistage corres-
pondant à un groupe contrôle de 100 000 femmes, un bras avec dépistage par
un dosage annuel du CA 125 et application de l’algorithme de Skates pour la
prise en charge des patientes, et un troisième bras utilisant l’échographie endo-
vaginale comme méthode de dépistage de première ligne. La période
d’inclusion est actuellement terminée, les résultats de cet essai seront connus
prochainement. Jacobs espère montrer qu’il est rentable de réaliser un dépistage
du cancer ovarien, et que la méthode de dépistage présentant le meilleur
rapport coût-efficacité est le dosage du CA 125. Le protocole de dépistage du
cancer de l’ovaire préconisé par I. Jacobs repose sur un dosage du CA 125
annuel, avec un dosage de contrôle dans le cas où le taux de base est élevé ou
dans tous les cas où il existe une élévation du taux du CA 125 (selon l’algo-
rithme de Skates). Ensuite, une échographie endovaginale est pratiquée si le
test biologique est positif, et finalement une cœlioscopie est réalisée en cas
d’anomalie échographique (volume ovarien augmenté et/ou masse ovarienne
présentant des caractéristiques échographiques anormales). Par contre, si
l’échographie est normale, il est préconisé une surveillance trimestrielle par
dosage du CA 125 et étude échographique pelvienne.
Une autre étude de grande envergure a été initiée aux États-Unis (46). Ce
projet initié par le National Cancer Institut (NCI) américain se dénomme
PLCO. Il s’agit d’une étude ayant pour but d’évaluer le dépistage des cancers
de l’ovaire, mais aussi des cancers de la prostate, du côlon et du poumon. Il est
prévu que cet essai inclut pour le dépistage des cancers ovariens 74 000 femmes
entre 55 et 74 ans. Ces femmes sont randomisées entre deux bras :
– un groupe contrôle sans dépistage ;
– un groupe avec dépistage comportant à la fois un dosage du CA 125 et
une échographie annuelle pendant trois ans, puis ensuite simplement un
dosage du CA 125 annuel pendant deux ans.
Il est prévu que ces patientes aient ensuite une surveillance pendant treize
ans, si bien que les résultats définitifs de cet essai ne seront pas connus avant
2012.
Le but de cet essai est de démontrer avec une puissance de 90 % que ce type
de dépistage permet de réduire la mortalité par cancer de l’ovaire. Les objectifs
accessoires de cette étude seront l’évaluation du coût de la procédure et, bien
sûr, la détermination du rapport coût-bénéfice.

Utilisation d’autres marqueurs tumoraux


Plusieurs études récentes (47-50) font état de l’intérêt de la recherche de
nouvelles molécules dans le sérum de patientes présentant un cancer de l’ovaire
débutant. Dans ce domaine, cinq publications peuvent être retenues du fait de
résultats préliminaires intéressants.
134 Les cancers ovariens

Skates (47) a proposé d’associer au CA 125, 3 autres marqueurs afin d’amé-


liorer la sensibilité et la spécificité du dosage du CA 125. Les marqueurs étudiés
par Skates sont le CA 15-3, le CA 72-4 et MCSF (macrophage colony-stimula-
ting factor). Pour cette évaluation, Skates a repris les données de plusieurs
études dont celles de Jacobs, avec cependant des effectifs assez réduits
(60 cancers ovariens de stade I ou II et 98 sujets sains). Skates a pu montrer
qu’en combinant l’utilisation du CA 125 au CA 72-4 et au MCSF, on pouvait
augmenter la sensibilité pour la détection du cancer ovarien de 45 % (corres-
pondant au dosage du CA 125 seul) à une valeur de 70 %, tout en maintenant
une spécificité de plus de 98 %. L’intérêt essentiel de l’association de ces
marqueurs est de pouvoir détecter des cancers de l’ovaire à un stade précoce,
cancer qui était mal détecté avec le dosage du CA 125 seul. Skates propose
d’utiliser ces trois marqueurs comme test de triage dans le programme de dépis-
tage de cancer de l’ovaire avec, en cas de positivité de ce test, la réalisation d’une
échographie endovaginale.

Des conclusions identiques peuvent être proposées au vu des résultats


obtenus avec deux autres marqueurs étudiés par Saito (CA 602 et CA 546)
(48). La combinaison de ces deux marqueurs semble donner une excellente
sensibilité pour le dépistage du cancer de l’ovaire. L’intérêt principal de cette
étude est qu’elle a été réalisée sur des effectifs importants de patientes. Ainsi
une évaluation du marqueur a été faite initialement sur 1189 patientes présen-
tant une tumeur ovarienne (diagnostic histologique définitif : 645 cas de
lésions bénignes et 544 cas de tumeurs cancéreuses). Puis une validation de ce
marqueur a été réalisée de manière prospective sur 21 374 sujets asymptoma-
tiques participant à un programme de détection du cancer ovarien. Un cancer
ovarien a été détecté chez 9 de ces femmes (dont 4 stades précoces). Ces résul-
tats semblent prometteurs mais ils nécessitent confirmation par d’autres
équipes.

De même, récemment, une équipe américaine (49) a présenté les résultats


d’un nouveau marqueur dénommé YKL-40. Ce nouveau marqueur serait inté-
ressant pour le dépistage des cancers de l’ovaire car il est souvent élevé dans les
stades débutants (65 % de positivité pour le YKL-40 en comparaison de 35 %
de positivité pour le CA 125). Cependant, les résultats de cette étude sont très
préliminaires : ils portent sur 50 cancers ovariens débutants et 140 sujets
contrôles (sains ou avec pathologie gynécologique bénigne) et nécessitent bien
sûr des investigations sur des effectifs plus importants pour pouvoir être
validés.

L’équipe de Skates (50) a identifié récemment un marqueur tissulaire et


sérique qui serait très spécifique du cancer ovariens : l’ostéopontine. Mais il
s’agit pour le moment d’une étude préliminaire portant sur 51 patientes
porteuses d’un cancer ovarien et 107 témoins sains.
Le dépistage du cancer ovarien 135

Utilisation des techniques de biologie cellulaire et moléculaire


La voie de recherche plus prometteuse fait intervenir les développements les
plus récents des techniques de biologie cellulaire.
Il s’agit des techniques de protéomique et de génomique.
La technique de protéomique consiste, par des moyens technologiques
sophistiqués, à évaluer le contenu en protéines du sérum (ou tout autre liquide
biologique) de patientes porteuses ou non de cancer ovarien. Grâce à une spec-
troscopie laser, il est possible d’évaluer le contenu protéomique du sérum, la
différenciation des protéines se faisant par leur poids moléculaire et leur charge
électrique. On obtient ainsi un profil sérique de protéines, et l’on compare le
profil des patientes ayant une tumeur de l’ovaire avec des patientes témoins
(normaux ou présentant une pathologie ovarienne bénigne ou tout autre
pathologie gynécologique). Selon ce principe, Petricoin (51) a, sur un premier
groupe de 100 patientes présentant pour moitié un cancer ovarien et pour
moitié une pathologie bénigne ou une absence de pathologie, déterminé un
profil sérique qui était caractéristique et tout à fait spécifique des patientes
présentant un cancer ovarien. Il a ensuite appliqué de manière prospective ce
profil protéomique un autre groupe de 116 patientes. Celui-ci comportait 50
cancers ovariens (dont 18 cancers au stade I), 25 tumeurs ovariens bénignes,
10 pathologies gynécologiques bénignes, et 31 patientes à risque (antécédents
familiaux comportant des cancers ovariens ou antécédents personnels de cancer
du sein). L’application de ce profil protéomique à ce groupe de patientes a
permis de dépister tous les cas de cancer ovarien sauf un (sensibilité = 94 %)
pour une spécificité de 100 % (aucun résultat faussement positif dans le groupe
sans cancer). Ces résultats apparaissent donc particulièrement intéressants du
fait du caractère très discriminant du profil protéomique et aussi des conditions
particulières du groupe contrôle (patientes particulièrement à risque de résul-
tats faussement positifs comme cela pourrait être observé avec le CA 125 dans
ce groupe). Cependant, l’effectif reste relativement faible.
À la suite de ces données, un test de dépistage sanguin dénommé OvaCheck
a été élaboré. Ce test est en cours d’évaluation sur des effectifs de population
plus importants en vue d’un agrément par la FDA américaine. Cependant, des
analyses préliminaires semblent montrer des résultats moins favorables que sur
l’étude initiale de Petricoin, et il n’est pas certain que le test OvaCheck soit
assez efficace et rentable pour être commercialisé.
Une équipe autrichienne (52), en utilisant les principes de la protéomique,
a identifié dans le liquide kystique et dans le sérum des patientes porteuses
d’une tumeur ovarienne la présence de protéines très spécifiques de cette
tumeur cancéreuse puisque non détectable dans un autre groupe de patientes
porteuses de lésion bénigne. Ces protéines dénommées calgranulines semblent,
sur les effectifs relativement réduits de cette étude, pouvoir discriminer
complètement les patientes porteuses d’une tumeur maligne de l’ovaire de
patientes porteuses de kystes bénins. Les effectifs sont faibles (11 patientes dans
chaque groupe) mais les résultats prometteurs doivent permettre d’envisager
136 Les cancers ovariens

d’autres études pour évaluer l’intérêt des calgranulines dans le dépistage des
cancers de l’ovaire
Une étude récente a aussi utilisé des techniques de biologie moléculaire
pour évaluer la présence d’anomalies génétiques dans le sérum de patientes
présentant un cancer ovarien, en particulier débutant (53). C’est ainsi que ces
auteurs ont retrouvé un déséquilibre allèlique qui pourrait être beaucoup plus
fiable que le dosage du CA 125. L’étude portait sur 54 cas de cancers ovariens
et 31 sujets contrôles.

Dépistage dans les populations à risque accru


Situation actuelle du dépistage
Du fait de la faible incidence dans la population générale du cancer ovarien, il
pourrait apparaître intéressant de limiter le dépistage aux populations à risque
accru. Ainsi l’efficacité du dépistage serait optimisée avec un coût économique
diminué. Actuellement les populations à surrisque clairement identifiable de
cancer ovarien sont les femmes ayant des antécédents familiaux de cancer de
l’ovaire et/ou du sein (54). Ainsi, il est estimé qu’environ 5 % des cancers
ovariens surviennent dans un contexte de mutation délétère constitutionnelle
(55). Les principales mutations entraînant un risque accru de cancer ovarien
sont les mutations de BRCA1 et BRCA2 (55, 56). La fréquence des patientes
porteuses d’une mutation constitutionnelle délétère est estimée à 1/300 pour
BRCA1 et 1/800 pour BRCA2 (55). Le risque de cancer de l’ovaire est évalué
à 39 % pour une mutation de BRCA1 (risque associé de cancer du sein estimé
à 65 %), et 11 % pour BRCA2 (avec un risque de cancer du sein à 45 %) (54,
55). De plus les mutations de BRCA1 sont associées à un surrisque de cancer
tubaire (risque x 50 par rapport à l’absence de mutation) et, bien que les
données soient manquantes, il est probable que le surrisque existe aussi pour
les mutations de BRCA2 (55). En revanche, les mutations de BRCA1 et
BRCA2 ne semblent pas être associées à un surrisque de tumeur ovarienne à
malignité atténuée.
Une recherche de corrélation génotype-phénotype a été menée pour savoir
si le risque de cancer ovarien était rattaché à certaines mutations. Cette étude
n’a pas donné de résultat pour BRCA1 mais pour BRCA2, certaines études ont
retrouvé que des mutations situées dans la zone OCCR (Ovarian Cancer
Cluster Region) étaient probablement associées à un risque accru de cancer
ovarien. Il s’agit de données préliminaires qui nécessitent d’être confirmées par
des évaluations sur de plus grands effectifs.
D’autres syndromes génétiques associés à un risque de cancer ovarien ont
été décrits (57), ils sont très rares et leur individualisation ne semble pas être
utile, à l’exception du Syndrome de Lynch II ou HNPCC (Hereditary Non
Polyposis Colorectal Cancer). Ce syndrome associe un risque très accru de cancer
colorectal, de cancer endométrial et un surrisque modéré de cancer ovarien ou
Le dépistage du cancer ovarien 137

tubaire. Le syndrome de Lynch II est lié à des mutations d’un des gènes inter-
venant dans le contrôle de l’appariement de l’ADN. Sur le plan gynécologique,
le risque est surtout endométrial, aussi le dépistage de cette tumeur doit être
préconisé. De même, certains auteurs conseillent une hystérectomie prophy-
lactique dont on doit privilégier le caractère non conservateur du fait du
surrisque de cancer tubo-ovarien.
Chez les patientes à risque accru de cancer ovarien, des protocoles de dépis-
tage ont été proposés, avec cependant une efficacité médiocre (58-61). Le
dépistage par imagerie, éventuellement associé au dosage du CA 125, a montré
un intérêt réduit dans ces populations à risque avec un taux élevé de faux posi-
tifs et des tumeurs de stade évolué apparaissant dans l’intervalle des examens de
dépistage (55). Les différents protocoles proposés utilisaient l’échographie
pelvienne (de préférence endovaginale) associée éventuellement au Doppler
pulsé et couplée au dosage du CA 125. Aucun des différents protocoles
proposés n’a montré une efficacité satisfaisante dans une population à risque
génétique de cancer ovarien. Il n’en reste pas moins qu’en l’absence d’alterna-
tive efficace, certains auteurs continuent de préconiser un dépistage
échographique et biologique (60). La recommandation la plus souvent
proposée est un dépistage double semestriel (échographie endovaginale et
dosage du CA 125 tous les six mois. Il reste à noter qu’aucune étude n’a évalué,
dans ces populations à risque, les nouveaux marqueurs cités précédemment
(profil protéomique, déséquilibre allélique plasmatique…).
Dans cette population de patientes à risque accru de cancer ovarien, le NCI
a mis en place une étude prospective visant à évaluer la mini-laparoscopie en
tant qu’outil de dépistage des cancers ovariens et péritonéaux (46).

Prophylaxie
Devant l'insuffisance des moyens de dépistage, la prévention revêt un intérêt
particulier dans les populations où le risque est majeur du fait d'une mutation
génétique prédisposante.
La contraception orale est associée à une réduction du risque de cancer
ovarien dans la population générale. Cet effet bénéfique semble être retrouvé
chez les patientes porteuses d’une mutation de BRCA (54, 55). Cependant les
données de la littérature sont trop parcellaires pour préconiser de manière
systématique cette thérapeutique.
C'est la chirurgie prophylactique (annexectomie bilatérale) qui a le plus
retenu l'attention chez ces patientes. Le niveau de protection atteint est environ
de 90 % (61). Les critères de réalisation de cette chirurgie prophylactique sont
assez bien définis (55) :
– Approche chirurgicale par cœlioscopie dont on sait la faible morbidité et un
taux de mortalité voisin de zéro.
– En raison du surrisque de cancer tubaire, une annexectomie bilatérale doit
être réalisée et non une simple ovariectomie.
138 Les cancers ovariens

– Des études récentes ont montré un intérêt à la réalisation de coupes semi-


sériées sur les trompes et les ovaires afin de détecter des cancers
microscopiques ; cependant les données actuelles sont insuffisantes pour
préconiser la réalisation de ces techniques histologiques de manière systéma-
tique sur toute pièce d’annexectomie prophylactique.
– Une cytologie péritonéale doit être pratiquée lors du geste chirurgical.
– Il n’y a pas d’indication à réaliser de manière systématique une hystérectomie
associée à l’annexectomie, en raison d’une morbidité accrue et d’un bénéfice
très réduit.
– L’indication doit avoir été validée par une réunion de concertation pluridis-
ciplinaire (comportant au moins un oncologue, un oncogénéticien, un
chirurgien et un psychologue).
– Le bénéfice de la chirurgie prophylactique est présent dès qu’il y a un risque
de cancer ovarien de l’ordre de 2 à 3 %, ce qui inclut bien sûr les patientes
porteuses d’une mutation de BRCA1 et BRCA2.
– L’espérance de vie de la patiente doit être d’au moins 15 ans.
– Le projet parental doit être terminé, ce qui, associé à l’estimation du risque
d’être atteint par un cancer ovarien, amène à recommander l’intervention à
partir de 40 ans et de toute façon pas avant 35 ans.
– Une information complète sur les avantages, les risques et les alternatives doit
avoir été donnée à la patiente.
– Une consultation avec une psychologue est conseillée en préopératoire.
– Un suivi clinique, gynécologique et psychologique doit être offert.
– Cette chirurgie prophylactique doit ne pas altérer la qualité de vie.
Une des conséquences de l'annexectomie bilatérale est l'induction d'une
ménopause précoce et un sur-risque d’ostéoporose, de progression d’athéro-
sclérose et probablement de cancer colique. Cependant, malgré les effets
secondaires potentiels du traitement hormonal substitutif (THS), celui-ci
peut raisonnablement être prescrit jusqu’à l’âge de 50 ans.
D’autres données sont en faveur de l’annexectomie bilatérale prophylac-
tique chez les patientes à risque. Ainsi il a été démontré qu’il existe une
réduction très probable du risque de cancer du sein lors d’une ovariectomie
prophylactique chez les patientes porteuses d’une mutation de BRCA1 (63).
De plus, bien qu’un pronostic défavorable du cancer du sein soit en théorie une
limitation aux indications de l’annexectomie prophylactique, l’impact de cette
chirurgie sur la survie du cancer du sein semble être positif (63).
Aussi, chez les patientes à risque de cancer ovarien (porteuses d’une muta-
tion de BRCA1 ou BRCA2), en l’absence actuelle de techniques de dépistage
performantes, l’annexectomie bilatérale prophylactique doit être recommandée
dès que le projet parental est terminé.
Le dépistage du cancer ovarien 139

Conclusion
Le cancer ovarien présente un taux de mortalité important, qui pourrait,
malgré la relative faible incidence de ce cancer, justifier un programme de
dépistage efficace. Les études les plus abouties ont utilisé un dépistage par le
dosage sérique du CA 125, puis par une échographie endovaginale. Elles ont
pu démontrer une réduction de la mortalité par cancer ovarien dans le groupe
dépisté par rapport à un groupe contrôle sans dépistage. Cependant, le rapport
coût-efficacité est peu favorable et la spécificité de ces tests de dépistage reste
médiocre, avec un taux élevé de faux positifs débouchant sur une morbidité
non négligeable. L’avenir semble prometteur avec l’apparition et le développe-
ment de nouveaux marqueurs et tests sériques (génomiques, protéomiques…)
qui devraient permettre d’obtenir de meilleures spécificité et sensibilité. Mais,
dans l’état actuel de nos connaissances, le dépistage dans les populations à
risque accru de cancer ovarien doit être privilégié en place des programmes de
dépistage dans la population générale. Chez ces patientes à haut risque, une
surveillance accrue et surtout une chirurgie prophylactique (annexectomie
bilatérale laparoscopique) doivent être préconisées.

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Le « second look » un concept dépassé?
C. Zinzindohoué et P. Bertrand

Introduction
Le concept de la chirurgie de second look (CSL) ou chirurgie de réévaluation
a été appliqué aux tumeurs épithéliales de l’ovaire à partir des années 1960 (1).
À l’époque, la notion de maladie cliniquement occulte prit de l’importance
avec l’apparition des traitements médicaux adjuvants. Le traitement de réfé-
rence des carcinomes ovariens faisait appel aux agents alkylants et la détection
chirurgicale d’une maladie résiduelle occulte entraînait la poursuite de ces trai-
tements en dépit de leur potentielle toxicité, tandis que l’absence de maladie
résiduelle autorisait au contraire leur arrêt (2). La CSL a été intégrée à la stra-
tégie thérapeutique des cancers de l’ovaire pour évaluer le statut tumoral des
patientes, réséquer si possible d’éventuelles lésions résiduelles non décelées par
les examens para-cliniques et adapter la suite des traitements (3). Ainsi, la CSL
se définit comme une réévaluation chirurgicale de patientes asymptomatiques
en l’absence de signe clinique, biologique ou radiologique de récidive après une
chirurgie initiale optimale, suivie d’un traitement médical de première ligne
comportant au moins six cures de chimiothérapie habituellement à base de sels
de platine (4, 5). La CSL est à différencier de la chirurgie de réduction tumo-
rale « intermédiaire » ou « de l’intervalle » qui est réalisée plus précocement,
après trois cures de chimiothérapie néo-adjuvante, mais aussi de la chirurgie de
réduction tumorale « secondaire » qui concerne les patientes en rechute avérée.
Les difficultés à démontrer un bénéfice en terme de survie pour les patientes
soumises à une CSL par rapport aux patientes qui n’y étaient pas soumises ont
modifié les pratiques. Depuis une dizaine d’années, la CSL a cessé d’être
proposée en routine et hors essai clinique (4, 5). Cependant, à la lumière des
récentes évolutions diagnostiques et thérapeutiques dans la prise en charge des
tumeurs ovariennes, la CSL est-elle réellement un concept dépassé ?
Les objectifs théoriques de la CSL sont diagnostiques et thérapeutiques :
diagnostiques pour identifier les patientes en réponse complète pathologique
qui pourraient bénéficier d’un traitement de consolidation et pour identifier les
patientes porteuses d’une maladie résiduelle occulte qui pourraient bénéficier
d’un traitement de rattrapage précoce ; thérapeutiques lorsqu’il s’agit de réaliser
252 Les cancers ovariens

une réduction tumorale chirurgicale précoce en cas de lésions résiduelles


occultes et résécables.
En 2005, quel est pour les patientes le bénéfice de cette procédure diagnos-
tique invasive et comment peut-on évaluer l’impact d’une cytoréduction
précoce pratiquée lors d’un second look en cas de maladie résiduelle occulte ?
Nous tenterons de définir le cadre des indications actuelles de la CSL sans
aborder les conditions techniques de sa réalisation qui seront développées dans
un autre chapitre.

Intérêt diagnostique de la CSL


À l’issue d’un programme thérapeutique initial complet, les patientes jugées en
réponse clinique complète sur les résultats du dosage des marqueurs, d’une
radiographie pulmonaire et d’une échographie ou d’un examen scannogra-
phique abdomino-pelvien peuvent être réparties en plusieurs groupes de
pronostic différent. Il est clairement établi que le devenir des patientes en
réponse clinique complète sur la base des examens précédemment cités dépend,
entres autres facteurs pronostiques, du statut réel de la maladie constaté lors du
second look. Leurs chances de survie vont décroissant selon qu’elles sont en
réponse complète pathologique, en réponse partielle avec résidu microsco-
pique, en réponse partielle avec un résidu macroscopique inférieur à 2 cm ou
avec un résidu macroscopique supérieur à 2 cm (2, 3, 6-11). Le recueil d’in-
formations pronostiques, à l’issue d’un traitement primaire, a pour principal
objectif de poser l’indication d’un traitement de consolidation pour les
patientes en rémission complète confirmée ou d’un traitement de rattrapage
pour les patientes en réponse partielle. Aujourd’hui, aucune option thérapeu-
tique n’a fait la preuve d’une efficacité suffisante dans ces situations pour être
admise comme un standard. Certaines stratégies comme la chimiothérapie
intra-péritonéale avec ou sans hyperthermie semblent prometteuses et sont en
cours d’évaluation (12-18). Si l’efficacité de ces thérapeutiques se confirmait
dans ces situations de rattrapage ou de consolidation, la détermination du
statut tumoral réel des patientes traitées redeviendrait essentiel et pourrait justi-
fier une CSL.
Les alternatives à la CSL dans ces indications diagnostiques sont peu
nombreuses.
On sait depuis de nombreuses années que le dosage du CA 125 ne reflète
pas la réalité de l’extension intra-abdominale de la maladie chez les patientes en
réponse clinique complète. Si la valeur prédictive positive du Ca125 est grande
(entre 80 et 90 %), en revanche sa valeur prédictive négative est médiocre, car
les taux de faux négatifs peuvent atteindre 70 % chez les patientes en réponse
clinique complète. Un taux de CA 125 normal ne garantit pas l’absence de
résidu tumoral (19-22).
Le « second look » un concept dépassé ? 253

L’échographie a une sensibilité et une spécificité très insuffisantes et c’est un


examen inadapté pour décrire l’extension intra-abdominale de la maladie après
un traitement initial (23).
Les examens scannographiques sont également peu performants avec une
sensibilité de seulement 40 à 61 % pour détecter une maladie résiduelle ou
diagnostiquer une récidive. Avec des taux de faux négatifs de l’ordre de 25 %,
le scanner est mal adapté à la détection de lésions infra-centimétriques (3, 24,
25).
L’imagerie par résonance magnétique ne semble guère donner de meilleur
résultat dans cette indication (3).
L’imagerie métabolique des tumeurs par TEP-FDG pourrait être particu-
lièrement performante dans ce contexte où les repères anatomiques sont
souvent perturbés et remaniés du fait des traitements médico-chirurgicaux
initiaux. La TEP-FDG a une meilleure valeur prédictive négative que le
scanner (89 % versus 33 % pour le TDM). La TEP-FDG aurait une sensibilité
de 83 à 91 % versus 45 à 91 % et une spécificité de 66 à 93 % versus 46 à 84 %
pour le TDM respectivement (26).
Récemment, Picchio et al. (27) ont étudié la valeur de la TEP-FDG
combinée au scanner et l’ont comparé au scanner seul, dans l‘évaluation des
patientes après traitement initial, en confrontant les résultats de ces examens à
ceux de la CSL. Pour le scanner seul, la sensibilité était de 69 %, la spécificité
de 83 % et la concordance de 74 %. Pour la TEP-FDG combinée au scanner la
sensibilité était de 82 %, la spécificité de 91 % et la concordance de 85 %. La
valeur prédictive négative n’était que de 58 % pour le scanner seul, mais attei-
gnait 73 % combiné avec la TEP-FDG.
Quelques études ont évalué le rôle de la TEP-FDG comme alternative à la
CSL. Casey et al. (28) font état de résultats encourageants sur une série de
seulement 7 patientes avec un taux nul de faux négatif. Kim et al. (29), ont
publié une étude rétrospective comparative entre TEP-FDG et CSL diagnos-
tique pour des carcinomes ovariens avancés en réponse clinique complète. Ils
n’ont pas trouvé de bénéfice en terme de survie à réaliser une CSL. Dans cette
étude où le second look n’avait pas d’objectif thérapeutique propre et ne
donnait pas lieu a une réduction tumorale, les médianes de survie sans récidive
étaient de 40 et 48 mois respectivement pour la TEP-FDG et la CSL
(p = 0.12). Pour ces auteurs, la TEP -FDG détecte mal les lésions infra-centi-
métriques et sa valeur prédictive négative n’est que de 70 %, mais, en l’absence
de traitement complémentaire efficace, cette carence n’a pas de traduction en
terme de survie.
Au total, malgré les récents progrès diagnostiques et notamment les perfor-
mances de la TEP-FDG, la CSL reste la procédure ayant la meilleure sensibilité
et la meilleure spécificité pour affirmer une réponse complète pathologique et
pour caractériser d’éventuels résidus tumoraux occultes. Cependant, en l’ab-
sence de thérapeutiques de consolidation ou de rattrapage validées, la
performance diagnostique de la CSL ne se traduit par aucun bénéfice signifi-
254 Les cancers ovariens

catif sur la survie des patientes traitées. Elle n’a donc de légitimité que dans le
cadre d’études cliniques évaluant des traitements de deuxième ligne.

Valeur thérapeutique d’une cytoréduction


lors de la CSL
La valeur thérapeutique d’une réduction tumorale pratiquée lors d’une CSL a
été fréquemment étudiée mais reste controversée.
Il n’existe à ce jour qu’une étude prospective randomisée évaluant le béné-
fice en terme de survie attribuable à la réalisation d’une cytoréduction au
second look. Nicoletto et al. (30) ont étudié 102 patientes de stades III et IV
en rémission complète clinique après une chirurgie initiale et une première
ligne de chimiothérapie. Ces patientes ont été randomisées entre surveillance
simple (n = 48) et CSL (n = 54). Bien que les patientes porteuses d’une maladie
résiduelle occulte aient été soumises à une chimiothérapie de deuxième ligne,
la survie globale était de 65 % et de 78 % à 5 ans pour le bras surveillance et le
bras CSL respectivement (p = 0.14) Ils concluent qu’en l’absence de bénéfice
significatif sur la survie, cette procédure invasive devrait être abandonnée. Il
faut cependant constater la faible puissance statistique de cette étude.
Plusieurs auteurs confirment ces résultats par des études rétrospectives et
n’attribuent aucun bénéfice de survie à la cytoréduction du second look (31-
33). Tuxen et al. (6) ont repris 308 cas de patientes ayant eu une CSL avec un
suivi médian de douze ans. Parmi ces patientes, seulement 101 porteuses d’une
maladie résiduelle, ont subi une réduction chirurgicale. Ce groupe de patientes
n’a pas eu d’avantage en terme de survie comparé au groupe de patientes avec
résidu macroscopique qui n’ont pas eu de réduction chirurgicale. Les patientes
sans résidu après la cytoréduction du second look avaient une survie moindre
que les patientes en réponse complète pathologique ou avec résidu microsco-
pique au moment du second look.
Dans la série d’Obermair et al. (34), les patientes dont la maladie résiduelle
était nulle, microscopique ou macroscopique avaient une médiane de survie de
66, 57 et 19 mois respectivement (p = 0,0001) et les patientes qui, après CSL,
avaient un résidu tumoral nul, < 2 cm ou > 2 cm avaient une médiane de survie
de 22, 17, et 15 mois respectivement (p = 0.3). Ainsi, dans le groupe des
patientes qui avaient eu une réduction tumorale au moment de la CSL, l’im-
portance du résidu tumoral après CSL et donc la qualité de la réduction
tumorale pratiquée au second look n’influençaient pas la survie.
D’autres auteurs font état d’un bénéfice significatif sur la survie grâce à la
cytoréduction du second look (35, 36). Ainsi Lippman et al. (37), sur une série
de 70 patientes, rapportaient une survie prolongée pour les patientes qui subis-
saient une réduction tumorale maximale lors de la CSL par rapport aux
patientes qui n’en subissaient pas (p < 0,001). Hoskins et al. (38) ont publié
Le « second look » un concept dépassé ? 255

des résultats allant dans le même sens. Sur une série de 67 patientes, ils ne trou-
vaient pas de différence de survie à cinq ans entre un groupe de patientes qui
avaient un résidu microscopique lors de la CSL et un groupe de patientes dont
le résidu était rendu microscopique par la cytoréduction de la CSL (62 % versus
51 % respectivement ; p = 0,55).
Williams et al. (39) rapportent, avec une série de 153 patientes dont le
second look était positif, une médiane de survie comparable pour des patientes
dont la maladie était microscopique au second look et des patientes dont la
maladie était réduite à un statut microscopique par le second look (médiane de
survie : 26 versus 23 mois respectivement ; p > 0,05).
Récemment, Dowdy et al. (2) ont publié une étude rétrospective portant
sur 150 patientes avec un suivi médian de plus de quinze ans. Dans cette série,
les résidus tumoraux avant et après CSL étaient des facteurs pronostiques
déterminants pour la survie, mais seules les patientes dont les résidus tumoraux
étaient inférieurs ou égaux à 1 cm au second look avaient un bénéfice signifi-
catif à subir une cytoréduction réduisant la maladie à un résidu microscopique.
Il faut noter que, dans cette série de 150 patientes majoritairement de stades
III et IV, seulement 21 patientes avaient un résidu de moins de 1 cm complè-
tement réductible et donc seulement 14 % des patientes avaient un bénéfice
significatif en terme de survie à subir une CSL. Comme dans toutes ces études
rétrospectives, il est difficile de déterminer si le bénéfice ainsi démontré était
attribuable à la réduction chirurgicale du volume tumoral ou si la résécabilité
de ces tumeurs était l’élément pronostique déterminant témoignant de leur
moindre agressivité.
Il semble que la chirurgie de réduction tumorale secondaire prolonge la
survie des patientes et que le bénéfice en terme de survie qu’on peut en attendre
augmente avec la durée de l’intervalle libre qui sépare ce debulking secondaire
de la chirurgie initiale (2, 34, 40, 41). Il est possible qu’en ce qui concerne la
CSL, la date à laquelle elle intervient puisse également influencer significative-
ment son efficacité. Or le délai varie de moins de six mois à plus de douze mois
selon les publications et ces variations pourraient être responsables de la dispa-
rité des résultats rapportés (2, 42).
Quoi qu’il en soit, les difficultés à mettre en évidence un bénéfice signifi-
catif en termes de survie chez ces patientes proviennent également de notre
incapacité actuelle à consolider ce résultat chirurgical par un traitement
médical de rattrapage efficace.
Au total, on ne peut exclure qu’un petit nombre de patientes puissent béné-
ficier d’une réduction tumorale maximale pratiquée lors d’une CSL, mais la
caractérisation précise de ces patientes reste problématique. En l’absence de
stratégie thérapeutique de rattrapage validée, il ne paraît pas raisonnable de
proposer cette procédure dont la morbidité n’est pas négligeable et dont on ne
parvient pas clairement à démontrer le bénéfice en termes de survie.
256 Les cancers ovariens

Quelles indications
pour une chirurgie de second look en 2005 ?
Il existe un consensus sur la valeur diagnostique de la chirurgie de second look
qui reste la procédure la plus fiable pour caractériser la réponse tumorale réelle
des patientes en réponse clinique complète. Mais la valeur thérapeutique de
cette procédure est controversée. Les indications de la CSL ne peuvent donc
être que diagnostiques et confinées aux situations où les informations pronos-
tiques recueillies conduiront à des adaptations thérapeutiques, c’est-à-dire dans
le cadre d’essais cliniques.

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Les différents types histologiques
des cancers ovariens
I. Treilleux

Introduction
Les types histologiques découlent directement des types cellulaires qui consti-
tuent la gonade indifférenciée après la cinquième semaine de gestation :
épithélium cœlomique, mésenchyme/mésonéphros et cellules germinales
(1-3). Le développement de l’ovaire et du testicule étant très voisins jusqu’au
quatrième mois de gestation, des éléments plus spécifiques de la gonade mascu-
line sont observés dans des tumeurs ovariennes, et inversement.
On classe habituellement les tumeurs de l’ovaire en fonction de la structure
normale qu’elle reproduit : épithélium de surface (tumeur épithéliale avec
différents sous-types), cordons sexuels/stroma (tumeur de la granulosa,
fibro-thécome, tumeur de Sertoli ou de Sertoli/Leydig, tumeur à cellules stéroï-
diennes) et cellules germinales (dysgerminome, tumeur vitelline, carcinome
embryonnaire, choriocarcinome et tératome). Certaines tumeurs telles que les
tératomes matures sont toujours bénignes et, bien qu’assez fréquentes (25 %
des tumeurs de l’ovaire), seront exclues de ce chapitre.
Les tumeurs épithéliales qui représentent environ 60 % des tumeurs de
l’ovaire sont classées selon trois critères :
– leur potentiel évolutif : adénomes de comportement bénin (60 %),
tumeurs « borderline » ou proliférantes mais non infiltrantes ou à malignité
atténuée de bon pronostic (10 à 15 %) ou carcinomes infiltrants de comporte-
ment plus agressif (25 à 30 %) ;
– la présence d’une composante stromale d’accompagnement (adénofi-
brome sans autre précision qui est bénin, adénofibrome « borderline » à
malignité atténuée, carcinosarcome agressif ) ;
– le type de différenciation épithéliale : séreuse, mucineuse, endométrioïde,
à cellules claires, à cellules transitionnelles ou indifférenciée (4-6).
Les tumeurs primitives du revêtement péritonéal de description plus récente
sont rattachées aux tumeurs ovariennes épithéliales en raison de leur parenté
morphologique et de leur origine cœlomique commune. Pour les identifier, on
74 Les cancers ovariens

utilise les mêmes critères que pour les tumeurs de l’ovaire qui sont représentés
par leur caractère infiltrant (carcinome) ou non (tumeur « borderline ») et leur
ligne de différenciation. Ces tumeurs péritonéales étant prises en charge comme
des tumeurs ovariennes (bien que les ovaires soient peu ou pas atteints), elles ne
seront pas abordées de façon spécifique.
Seront aussi traitées, dans ce chapitre, les tumeurs des cordons sexuels/stroma
qui sont parfois malignes, mais pour lesquelles il n’y a pas de critères diagnos-
tiques fiables permettant de déterminer le pronostic, ainsi que les autres tumeurs
germinales (dysgerminomes, tumeurs vitellines, carcinomes embryonnaires,
choriocarcinomes et tératomes immatures) qui sont toujours malignes. Enfin,
nous regrouperons un certain nombre de tumeurs exceptionnelles.

Tumeurs fréquentes :
les tumeurs épithéliales/stromales
C’est à cette catégorie de tumeurs qu’appartiennent 90 % des cancers ovariens.
Comme nous l’avons déjà signalé, les tumeurs « borderline » sont deux à trois
fois moins fréquentes que les adénocarcinomes. Elles ont des caractéristiques
histologiques (prolifération épithéliale) et cytologiques (atypies cytonucléaires)
intermédiaires entre celles d’une tumeur bénigne et celles d’une tumeur
maligne, et leur distinction repose sur le caractère non infiltrant et non destruc-
teur de la prolifération épithéliale. Les carcinomes intra-épithéliaux et les
carcinomes micro-invasifs sont donc classés avec les tumeurs « borderline » et
non avec les carcinomes infiltrants (7).
Parce que les tumeurs malignes et les tumeurs « borderline » avaient une
évolution clinique très différente et qu’elles n’étaient pas nécessairement asso-
ciées, on les a longtemps considérées comme des entités différentes sans forme
de passage de l’une vers l’autre. Les données plus récentes montrent que
certaines tumeurs « borderline » s’accompagnent de carcinome infiltrant ou
peuvent récidiver sous une forme infiltrante souvent au-delà de dix ans. Les
études moléculaires de I. Shih et R. Kurman (8), mais aussi de G. Singer et al.
(9) permettent de distinguer des adénocarcinomes de type I de bas grade qui
se développeraient progressivement à partir de précurseurs « borderline » et des
adénocarcinomes de type II de haut grade qui se développeraient de novo sans
précurseur. Les anomalies moléculaires dans les tumeurs de type I seraient, soit
des mutations de BRAF, KRAS, bêta-caténine ou PTEN, soit une activation de
KRAS avec délétion de PTEN (10), alors que des mutations de p53 seraient en
cause dans les tumeurs de type II.
Sur le plan morphologique aussi, il existe un continuum lésionnel entre les
tumeurs bénignes et les tumeurs malignes passant par les tumeurs « border-
line » et les carcinomes intra-épithéliaux avec ou sans micro-invasion. Comme
ce continuum lésionnel se manifeste à l’intérieur de chaque groupe de diffé-
Les différents types histologiques des cancers ovariens 75

renciation et que les critères diagnostiques ne sont pas les mêmes, les différents
types histologiques de tumeurs épithéliales seront présentés selon leur
fréquence, en commençant dans chaque catégorie par les moins agressives.

Tumeurs séreuses
Parmi les tumeurs épithéliales/stromales, les tumeurs à différenciation séreuse
sont et de loin les plus fréquentes puisqu’elles représentent environ 50 % des
tumeurs épithéliales (1-3). Elles se répartissent de la façon suivante : 70 % de
tumeurs bénignes, 10 % de tumeurs « borderline » et 20 % d’adénocarcinomes.
Par définition, les cellules dans ces tumeurs ressemblent à celles du revêtement
tubaire et comportent souvent des cils. Les tumeurs dites séreuse sont volon-
tiers bilatérales, souvent associées à des localisations péritonéales (implants ou
« gâteaux péritonéaux ») et comportent des végétations à leur surface.

Tumeurs séreuses « borderline »


Elles s’observent entre 40 et 50 ans et sont bilatérales dans un tiers des cas (7,
11, 12). Au moment du diagnostic, elles sont confinées aux ovaires dans 70 %
des cas. Cependant lorsqu’un diagnostic de tumeur séreuse « borderline » est
porté, il est impératif de procéder à une exploration chirurgicale complète de
la cavité pelvienne et abdominale. S’il faut réséquer tout ce qui est macrosco-
piquement suspect, la place des curages ganglionnaires reste discutée. En
revanche, des biopsies péritonéales multiples devront être réalisées : elles seront
orientées en cas de lésions visibles et systématiques dans tous les cas afin de
préciser le stade anatomique. En effet, dans 30 à 40 % des cas, les tumeurs
ovariennes séreuses s’accompagnent d’implants péritonéaux. Certains d’entre
eux correspondent probablement à des foyers tumoraux primitifs indépendants
concomitants, développés dans le cadre d’une maladie du péritoine (implants
non invasifs situés à la surface péritonéale), d’autres à de possibles greffes méta-
statiques à point de départ ovarien (implants invasifs qui infiltrent les
structures normales sous-péritonéales). Seuls les implants invasifs auraient une
valeur pronostique péjorative (rechutes sous une forme plus agressive, décès).
Malheureusement, comme le montrent les différentes études, les pathologistes
parviennent difficilement à faire la distinction entre ces deux types d’implants.
Ainsi, selon les séries, les taux d’implants invasifs varient de 10 % à 30 % et la
valeur pronostique péjorative n’est pas toujours retrouvée, ce qui pose
problème pour proposer un traitement complémentaire.
Macroscopiquement, les tumeurs séreuses « borderline » sont souvent
kystiques, d’assez petite taille (moins de 10 cm) et comportent toujours des végé-
tations papillaires intrakystiques. Elles s’accompagnent aussi de végétations
76 Les cancers ovariens

exokystiques dans 50 % des cas, ce qui leur donne parfois un aspect macrosco-
pique inquiétant que l’on ne peut distinguer d’un carcinome infiltrant (figs. 1-2).

Fig. 1 – Vue macroscopique d’une pièce d’hystérectomie totale non conservatrice comportant
une tumeur ovarienne séreuse « borderline » bilatérale avec nombreuses végétations exokystiques.

Fig. 2 – Vue macroscopique d’une pièce d’hystérectomie totale non conservatrice comportant
un adénocarcinome séreux ovarien bilatéral solide avec végétations exokystiques.
Les différents types histologiques des cancers ovariens 77

Histologiquement, ces tumeurs sont caractérisées par une prolifération de


papilles plus moins arborescentes revêtues de cellules modérément atypiques
qui se détachent dans la lumière. Dans certains cas, la prolifération épithéliale
est plus marquée, se traduisant par des branchements complexes de micropa-
pilles très fines sur les axes papillaires principaux. Lorsque ces zones
micropapillaires mesurent plus de 5 mm dans une tumeur « borderline »
séreuse par ailleurs typique, un diagnostic de carcinome micropapillaire doit
être porté. Cette tumeur correspond à l’équivalent séreux du carcinome intra-
épithélial bien connu dans les tumeurs mucineuses. Elle est souvent associée à
des implants péritonéaux invasifs et à un risque de transformation sous la
forme d’un carcinome séreux infiltrant. Dans un carcinome micropapillaire, le
pathologiste doit échantillonner largement la tumeur (au moins deux blocs par
centimètre de tumeur) à la recherche de foyers invasifs associés. C’est une
micro-invasion (foyer infiltrant sans remaniement stromal important mesurant
moins de 10 mm2) qui est le plus souvent retrouvée, parfois sous la forme de
plusieurs foyers (la taille de chacun doit rester inférieure à 10 mm2). La micro-
invasion ne semble pas aggraver le pronostic. Dans certains cas cependant,
grâce à un échantillonnage plus important de la tumeur, le diagnostic initial de
tumeur « borderline » devra être infirmé au profit de celui de carcinome séreux
de faible grade.
Le pronostic des tumeurs séreuses « borderline » est en général très favorable
puisque les taux de rechute à dix ou quinze ans sont de l’ordre de 7 % et les
décès liés à une transformation carcinomateuse de moins de 1 %. Dans les
séries antérieures, les décès étaient d’ailleurs plus souvent dus aux complica-
tions du traitement adjuvant par chimiothérapie qu’à l’évolution de la maladie.

Tumeurs séreuses malignes


ou adénocarcinomes séreux
Ce sont de loin les tumeurs malignes les plus fréquentes puisqu’elles représen-
tent 50 % des cancers de l’ovaire (1-3). Elles s’observent entre 50 et 60 ans et
sont bilatérales dans les deux tiers des cas. Malheureusement, leur diagnostic est
le plus souvent fait à un stade avancé de la maladie (73 % de stades III et IV).
Macroscopiquement, il s’agit de tumeurs solides et kystiques avec de
nombreuses végétations intra- et extra-kystiques dont les caractères friable,
nécrotique et hémorragique sont évocateurs.
Histologiquement, les adénocarcinomes séreux sont infiltrants par défini-
tion, mais l’architecture de la prolifération carcinomateuse et l’importance des
atypies cytonucléaires varient en fonction de la différenciation. Les adénocar-
cinomes séreux bien différenciés sont volontiers papillaires, riches en
calcosphérites et faits de petites cellules régulières : le psammocarcinome repré-
sente une de ces formes, ainsi que les autres adénocarcinomes séreux dits de
78 Les cancers ovariens

faible grade. Les tumeurs peu ou non différenciées, dites de haut grade, sont
d’architecture solide, renferment peu de calcosphérites et comportent des
atypies cytologiques marquées, parfois responsables d’aspects pseudo-syncitio-
trophoblastiques.
Le pronostic de ces tumeurs est mauvais dans l’ensemble avec des taux de
survie de 40 % à cinq ans tous stades confondus. Le taux de survie à cinq ans
est de l’ordre de 10 à 20 % dans les stades III et IV contre 80 % dans les stades
I. Le grade histologique des adénocarcinomes séreux intervient aussi dans le
pronostic pour les stades localisés de la maladie. Le psammocarcinome carac-
térisé par sa richesse en calcosphérites et sa pauvreté en cellules tumorales a un
pronostic voisin de celui des tumeurs séreuses « borderline ». Le pronostic des
carcinomes séreux de faible grade est meilleur que celui des tumeurs de haut
grade, mais il reste moins bon que celui des psammocarcinomes.

Tumeurs mucineuses
Les tumeurs mucineuses sont beaucoup plus rares que les tumeurs séreuses puis-
qu’elles ne représentent que 25 % des tumeurs épithéliales ovariennes (1-3,
13-18). Elles se répartissent de la façon suivante : 80 à 85 % de tumeurs
bénignes, 10 à 15 % de tumeurs « borderline » et 10 % d’adénocarcinomes. Elles
sont caractérisées par la présence de cellules mucosécrétantes qui ressemblent le
plus souvent (neuf fois sur dix) à celles de l’épithélium intestinal (type intestinal)
parfois à celles de l’épithélium endocervical (type endocervical ou müllérien).
Ces tumeurs, qu’elles soient bénignes, malignes ou « borderline », sont
unilatérales et en général de grande taille. Elles ont une surface externe lisse
sans végétation (figs. 3-4). Elles s’accompagnent rarement de localisation péri-
tonéale en dehors de l’exceptionnel pseudo-myxome péritonéal qui est décrit
comme une accumulation de mucus acellulaire disséquant le péritoine. Dans le
pseudomyxome péritonéal ou maladie gélatineuse du péritoine, la tumeur
ovarienne est bilatérale et correspond à la localisation métastatique d’une
tumeur mucineuse d’origine appendiculaire : il ne s’agit donc pas a priori d’une
tumeur ovarienne primitive.
Le pathologiste n’a en général pas trop de mal à identifier la différenciation
mucineuse d’une tumeur ovarienne. En revanche, en dehors des tumeurs muci-
neuses bénignes, il est confronté à une double difficulté :
– prendre à tort un adénocarcinome mucineux pour une tumeur « border-
line » car les critères d’invasion sont souvent ténus sans réaction stromale et
qu’ils nécessitent un échantillonnage large de la tumeur (deux blocs par centi-
mètre de tumeur) ;
– méconnaître le caractère métastatique de la tumeur mucineuse et la
prendre pour une tumeur mucineuse primitive de l’ovaire, certaines métastases
revêtant un aspect histologique peu inquiétant comme celles d’origine pancréa-
tique ou appendiculaire. Pour toutes ces raisons, lorsqu’une tumeur ovarienne
Les différents types histologiques des cancers ovariens 79

Fig. 3 – Vue macroscopique d’une tumeur mucineuse « borderline » de type intestinal consti-
tuée de kystes multiloculaires avec une surface externe lisse.

Fig. 4 – Vue macroscopique d’un adénocarcinome mucineux fait de kystes multiloculaires à


surface externe lisse, mais avec des remaniements nécrotico-hémorragiques et des cloisons plus
épaisses.
80 Les cancers ovariens

est étiquetée mucineuse, il conviendra au cours du geste chirurgical d’explorer


la cavité abdominale à la recherche d’une autre tumeur (tube digestif,
pancréas…), mais surtout de rechercher l’appendice. Même si son aspect macro-
scopique est normal, une appendicectomie sera systématiquement pratiquée en
cas de tumeur ovarienne bilatérale ou lorsque la tumeur ovarienne s’accompagne
d’un pseudomyxome péritonéal. Récemment, K. Lee et R. Young (15), d’une
part, et J. Seidman et al. (16), d’autre part, ont défini les critères permettant de
mieux dinstinguer les tumeurs mucineuses primitives de l’ovaire des tumeurs
mucineuses métastatiques. Les arguments en faveur d’une tumeur mucineuse
ovarienne primitive sont cliniques (unilatéralité, taille de plus de 10 cm) et
anatomo-pathologiques (absence de végétation à la surface de la tumeur, aspect
kystique prédominant avec très peu de stroma, architecture peu infiltrante,
coexistence d’aspects mucineux bénins et « borderline »). Les immuno-
marquages avec les anticorps anti-cytokératines 7 et 20 sont de peu d’utilité en
cas de tumeur mucineuse (17, 19). En revanche, l’expression d’ACE, de Dpc4
ou de MUC2, mais pas de MUC5AC, plaiderait pour une origine métastatique.

Tumeurs mucineuses « borderline »


Elles s’observent entre 35 et 45 ans (7, 14, 17, 18) et sont souvent diagnosti-
quées à un stade localisé (82 % de stade I). Leur pronostic est excellent quel que
soit le sous-type avec 96 % de survie à dix ans, y compris en cas de micro-inva-
sion lorsque la maladie est confinée aux ovaires. Les stades II, III et IV décrits
dans la littérature correspondent vraisemblablement, soit à des localisations
métastatiques avec ou sans pseudomyxome péritonéal, soit à des adénocarci-
nomes mucineux ovariens méconnus. Deux entités anatomo-cliniques de
tumeurs « borderline » ont été décrites : celles de type intestinal qui sont les
plus fréquentes (90 %) et celles de type endocervical ou müllérien (10 %).

Tumeurs mucineuses « borderline »


de type intestinal
Elles sont unilatérales dans 90 % des cas et leur taille est importante, en général
de plus de 17 cm. Leur surface externe est lisse et elles sont constituées de
kystes multiloculaires contenant un mucus peu épais. L’échantillonnage macro-
scopique de la tumeur doit être large (au moins deux blocs par centimètres de
tumeur) en prélevant les parois kystiques les plus épaisses et les zones solides.
Histologiquement, ces tumeurs sont caractérisées par des kystes et des
glandes bordées par un épithélium de type intestinal (présence de cellules cali-
ciformes et de cellules de Paneth) avec des stratifications cellulaires limitées à
deux ou trois assises et des atypies cytologiques modérées. Lorsque la stratifi-
Les différents types histologiques des cancers ovariens 81

cation nucléaire est supérieure ou égale à quatre assises ou que les atypies cyto-
nucléaires sont trop marquées, un diagnostic de carcinome mucineux
intra-épithélial doit être porté. La micro-invasion est retenue lorsque de véri-
tables foyers infiltrants avec stroma réactionnel sont observés, à condition que
la taille de chacun de ces foyers soit inférieure à 10 mm2. À la différence des
tumeurs séreuses, un diagnostic de micro-invasion pourra être retenu lorsque
les kystes ou glandes sont tassés les uns contre les autres sans interposition de
stroma et en cas d’architecture épithéliale complexe (forme expansive), mais il
faut que la taille de chacun de ces foyers soit inférieure à 10 mm2. La présence
de plusieurs foyers de ce type dans une tumeur est habituelle, mais ne la fait
pas pour autant considérer comme un carcinome infiltrant.

Tumeurs mucineuses « borderline »


de type endocervical
Ces tumeurs ont une présentation clinique et anatomo-pathologique différente
de celle des tumeurs mucineuses « borderline » de type intestinal et partagent
certains aspects des tumeurs séreuses « borderline ». Elles sont bilatérales dans
40 % des cas, de petite taille (environ 8 cm), comportent des végétations intra-
kystiques et s’accompagnent de greffes péritonéales.
Histologiquement, les stratifications nucléaires sont très marquées, pouvant
aller jusqu’à vingt assises sans que ce critère puisse être retenu pour porter un
diagnostic de carcinome intra-épithélial. Enfin, un infiltrat inflammatoire à
polynucléaires neutrophiles est souvent présent dans le mucus et dans les
projections papillaires.

Tumeurs mucineuses malignes


ou adénocarcinomes mucineux
Ces tumeurs s’observent souvent au-delà de 60 ans et sont diagnostiquées dans
80 % des cas à un stade I. Sur le plan macroscopique et clinique, ces tumeurs
partagent les mêmes caractéristiques que les tumeurs mucineuses « borderline »
(unilatéralité, grande taille, surface lisse), mais les zones solides seraient plus
étendues et les remaniements nécrotiques et hémorragiques plus fréquents.
Histologiquement, le caractère invasif de la tumeur est souvent difficile à
mettre en évidence. Il peut prendre deux aspects :
– de type infiltrant, de plus mauvais pronostic, qui se caractérise par des
remaniements du stroma au contact de cellules carcinomateuses disposées sans
ordre ;
82 Les cancers ovariens

– de type expansif plus difficile à identifier, mais de meilleur pronostic, se


présentant sous la forme de glandes et kystes tassés les uns contre les autres avec
une architecture épithéliale complexe, la taille de chaque foyer dépassant 10 mm2.
Par rapport aux adénocarcinomes séreux, le pronostic des adénocarcinomes
mucineux est en général favorable car leur diagnostic est souvent porté à un
stade précoce. Des rechutes métastatiques sont cependant observées pour les
stades I dans environ 20 % des cas. Lorsque les patientes sont prises en charge à
des stades avancés, elles décèdent le plus souvent de l’évolution de leur maladie.

Tumeurs endométrioïdes
Elles sont beaucoup plus rares que celles des deux groupes précédents, ne repré-
sentant que 5 % des tumeurs épithéliales (1-3, 20). Elles se répartissent de la
façon suivante : 20 % de tumeurs bénignes et « borderline » et 80 % d’adénocar-
cinomes. Dans ce groupe endométrioïde, le pronostic des tumeurs « borderline »
est aussi bon que celui des tumeurs bénignes. Par définition, les tumeurs endo-
métrioïdes sont constituées de cellules qui ressemblent à celles de l’épithélium
endométrial. Elles s’observent volontiers dans un contexte d’endométriose extra-
utérine (40 %) ou d’hyperplasie, voire d’adénocarcinome de l’endomètre (40 %).
Quel que soit le degré de malignité de la tumeur ovarienne, il est donc conseillé
de contrôler l’endomètre par échographie et/ou par curetage utérin et, en cas de
traitement conservant la fertilité, de vérifier l’ovaire controlatéral.

Tumeurs endométrioïdes « borderline »


Les tumeurs endométrioïdes « borderline » sont souvent en partie solide car elles
comportent volontiers une composante conjonctive (adénofibrome) (7, 20).
Elles ressemblent aux hyperplasies atypiques de l’endomètre et renferment
souvent des foyers de métaplasie malpighienne. Il y a des formes micro-invasives
qui se caractérisent par des aspects infiltrants mesurant moins de 10 mm2. Le
pronostic des tumeurs endométrioïdes « borderline » est excellent, mais il existe
un risque accru de développer un adénocarcinome du même type dans l’ovaire
controlatéral et/ou dans l’endomètre.

Tumeurs endométrioïdes malignes


ou adénocarcinomes endométrioïdes
Les adénocarcinomes endométrioïdes se voient entre 50 et 60 ans et sont bila-
téraux dans 30 % des cas. Au moment de leur diagnostic, ces tumeurs peuvent
être plus ou moins évoluées : 31 % de stade I, 20 % de stade II et 49 % de
Les différents types histologiques des cancers ovariens 83

stades III et IV. Dans 25 % des cas, elles s’accompagnent d’un adénocarcinome
de l’endomètre qui correspond en général à une deuxième tumeur primitive
dont le pronostic est meilleur.
Macroscopiquement, il s’agit de tumeurs solides avec des excroissances
friables et hémorragiques (fig. 5).

Fig. 5 – Vue macroscopique d’un adénocarcinome endométrioïde d’architecture solide développé


dans un foyer d’endométriose hémorragique.

Histologiquement, ces tumeurs ressemblent aux adénocarcinomes endomé-


trioïdes de l’utérus. Elles sont difficiles à différencier d’un adénocarcinome
métastatique d’origine digestive. L’étude immuno-histochimique peut
permettre de les distinguer : les tumeurs ovariennes n’expriment que la cytoké-
ratine 7, les tumeurs digestives uniquement la cytokératine 20 (19).
Le taux de survie à cinq ans est d’environ 80 % pour le stade I, 60 % pour
le stade II, 25 % pour le stade III et 5 % pour le stade IV. Ce taux de survie
serait meilleur pour les grades 1 et 2 que pour les grades 3 qui sont moins bien
différenciés et plus atypiques.

Tumeurs à cellules claires


Les tumeurs à cellules claires de l’ovaire sont rares (moins de 5 % des tumeurs
épithéliales) et volontiers associées à des lésions d’endométriose (1-3). Elles
sont malignes dans plus de 90 % des cas, les tumeurs « borderline » et les
84 Les cancers ovariens

tumeurs bénignes représentant les 10 % restants. Par définition, ces tumeurs


sont faites de cellules claires dites en clou de tapissier. Il s’agit le plus souvent
de tumeurs unilatérales se développant entre 50 et 70 ans.

Tumeurs « borderline » à cellules claires


Macroscopiquement, elles sont en général d’architecture solide car leur compo-
sante conjonctive est assez marquée (7). Histologiquement, elles sont
caractérisées par la présence de cellules claires groupées sous la forme de nids,
glandes ou kystes dans un stroma fibreux, mais sans caractère infiltrant destruc-
teur. Leur pronostic est excellent après résection s’il n’y a pas de contingent
d’adénocarcinome à cellules claires associé.

Tumeurs à cellules claires malignes


ou adénocarcinomes à cellules claires
Au moment de leur diagnostic, les adénocarcinomes à cellules claires se répar-
tissent de la façon suivante : 33 % de stade I, 19 % de stade II et 38 % de stades
III et IV (1-3). Macroscopiquement, ils se présentent sous forme d’un kyste
uniloculaire à paroi épaisse contenant du mucus ou de kystes multiloculaires,
parfois de tumeurs solides de couleur jaune (fig. 6). À stade égal, ces tumeurs
ont un plus mauvais pronostic que celui des adénocarcinomes séreux.

Fig. 6 – Vue macroscopique d’un adénocarcinome ovarien à cellules claires d’architecture


solide, de couleur jaune, mais focalement mucoïde.
Les différents types histologiques des cancers ovariens 85

Tumeurs à cellules transitionnelles


Par définition, les cellules qui composent ces tumeurs ont un aspect voisin de
celui des cellules urothéliales ou transitionnelles qui tapissent la vessie (cellules
en raquette avec des incisures nucléaires) (1-3). Ce groupe de tumeur englobe
une majorité de tumeurs bénignes, appelées tumeurs de Brenner, qui sont le
plus souvent de découverte fortuite.
Les tumeurs « borderline », encore appelées tumeurs de Brenner prolifé-
rantes, représentent 5 % des tumeurs à cellules transitionnelles (7). Elles sont
unilatérales et s’observent chez des femmes ménopausées. Leur pronostic est en
général favorable après annexectomie unilatérale.
Deux entités anatomo-cliniques résument les tumeurs malignes de ce
groupe (1-3). On distingue, d’une part, les tumeurs de Brenner malignes
comportant un contingent bénin de tumeur à cellules transitionnelles qui,
parce qu’elles sont diagnostiquées à un stade localisé dans 80 % des cas, sont de
bon pronostic, et d’autre part, des carcinomes à cellules transitionnelles qui
n’ont pas de contingent de tumeur de Brenner bénin et sont de plus mauvais
pronostic car leur diagnostic est porté à un stade avancé dans plus de 80 % des
cas. Cependant, il semblerait que ces derniers répondent mieux à la chimio-
thérapie que les autres tumeurs épithéliales.

Tumeurs épithéliales indifférenciées ou carcinomes


indifférenciés
Par définition, les carcinomes indifférenciés de l’ovaire n’ont pas de ligne de diffé-
renciation clairement identifiable permettant de les rattacher aux groupes décrits
ci-dessus (1-3). 75 % des tumeurs indifférenciées de l’ovaire sont vues à un stade
avancé et étendues au-delà du pelvis. Elles peuvent revêtir des aspects sarcoma-
toïdes à grandes cellules et peuvent alors être confondues avec un sarcome ou
avec une tumeur mixte müllérienne maligne de type carcino-sarcome. Parfois,
elles ressemblent à un carcinome à petites cellules, avec flexion neuro-endocrine.
Pour le pathologiste, elles posent un problème de diagnostic différentiel avec un
sarcome ou un lymphome. Les immuno-marquages montrant une expression de
cytokératine et d’EMA permettent le plus souvent de trancher.

Tumeurs mixtes müllériennes


Par définition, ces tumeurs ont une double composante tumorale, épithéliale
et conjonctive (2, 3). Deux types de tumeurs sont décrits dans ce groupe :
– les tumeurs mixtes müllériennes malignes appelées encore carcinosar-
comes ou carcinomes métaplasiques ;
– les adénosarcomes.
86 Les cancers ovariens

Ces tumeurs sont très rares puisque la plus fréquente (carcinosarcome)


représente moins de 1 % des cancers de l’ovaire. Les tumeurs mixtes müllé-
riennes malignes dont les deux contingents (épithélial et conjonctif ) sont
malins peuvent comporter, en outre, des éléments hétérologues de type chon-
drosarcome ou rhabdomyosarcome. Elles sont habituellement de très mauvais
pronostic (25 % de survie à cinq ans). Leur prise en charge thérapeutique est
identique à celle des carcinomes. Les adénosarcomes ont une composante
épithéliale bénigne et une composante conjonctive maligne. Ils seraient de
meilleur pronostic avec des taux de survie de 64 % à cinq ans.

Valeur pronostique des types histologiques


de carcinomes ovariens
Comme on a pu le voir, les aspects histologiques que revêtent les carcinomes
ovariens sont variés (1-3). Cependant, certains types histologiques prédomi-
nent largement : les adénocarcinomes séreux (50 %) et endométrioïdes (20 %).
Les autres types histologiques sont représentés par les carcinomes indifférenciés
(de 10 à 15 %), les carcinomes mucineux (10 %), et les carcinomes à cellules
claires (5 %). Les 5 % restant englobent tous les autres sous-types.
La revue de 8 000 adénocarcinomes ovariens publiés dans la littérature a
montré que le pronostic des adénocarcinomes mucineux et endométrioïdes
était meilleur que celui des adénocarcinomes séreux et que les carcinomes
indifférenciés étaient les plus agressifs, tandis que le pronostic des adénocarci-
nomes à cellules claires restait indéterminé (21).
Plus récemment, C. Gilks (22) a fait une nouvelle proposition de classifica-
tion des tumeurs épithéliales de l’ovaire (carcinomes et tumeurs « borderline »)
en prenant en compte les sous-types histologiques usuels et les anomalies molé-
culaires, ce qui permettait d’identifier six catégories de tumeurs épithéliales de
pronostic différent. Le groupe le plus représenté et qui a aussi le plus mauvais
pronostic inclut les adénocarcinomes séreux et endométrioïdes de hauts grades
et les carcinomes indifférenciés. Ces tumeurs, qu’elles soient familiales ou spora-
diques ont en commun un taux élevé de mutations de p53 et une inactivation
de BRCA1 et/ou de BRCA2 aboutissant à un défaut de réparation de l’ADN
double brin endommagé. Le deuxième groupe de tumeurs comporte les adéno-
carcinomes séreux de faible grade et les tumeurs séreuses « borderline » qui
partagent le même profil d’expression génétique et ont une évolution clinique
voisine (faible évolutivité, mauvaise réponse à la chimiothérapie), avec des
formes de passage de l’une à l’autre. Leurs anomalies moléculaires sont caracté-
risées par des mutations fréquentes de BRAF et de KRAS, mais il n’y a pas de
mutation de p53. Le troisième groupe inclurait les adénocarcinomes mucineux
et les tumeurs mucineuses « borderline » de type intestinal qui ont souvent la
même présentation clinique, répondent tous deux mal à la chimiothérapie et
Les différents types histologiques des cancers ovariens 87

dont les aspects histologiques coexistent souvent. Les mutations de KRAS


seraient précoces dans l’évolution (taux élevés de mutations dans les tumeurs
« borderline »). Le quatrième groupe est représenté par les adénocarcinomes
endométrioïdes et les tumeurs « borderline » endométrioïdes qui surviennent
dans un contexte d’endométriose et sont caractérisées par des mutations du gène
de la bêta-caténine. Leur pronostic serait favorable. Dans le cinquième groupe,
il y a les carcinomes à cellules claires qui surviennent surtout sur des terrains
d’endométriose et chez des patientes porteuses de mutations BRCA1 ou
BRCA2. À stade égal, leur pronostic serait moins bon que celui des autres types
histologiques. Le sixième groupe correspond aux carcinomes à cellules transi-
tionnelles pour lesquels des taux de réponse à la chimiothérapie seraient plus
élevés. Leur caractérisation moléculaire n’est pas connue.

Grades histologiques des carcinomes ovariens


Depuis les années 1970, plusieurs grades histologiques ont été proposés pour
les tumeurs épithéliales de l’ovaire (21). Ils restent difficilement comparables,
non seulement parce qu’ils analysent des paramètres différents et/ou des
combinaisons variées de paramètres, mais aussi parce que certains grades s’ap-
pliquent aux carcinomes tandis que d’autres s’appliquent aux carcinomes et aux
tumeurs « borderline ». Parmi les différentes propositions de grade histolo-
gique, trois étaient plus particulièrement utilisées :
– le grade de la FIGO (International Federation of Gynecology and Obstetrics)
utilisant des critères architecturaux ;
– le grade de la WHO (World Health Organization) s’appliquant aux
tumeurs « borderline » et aux carcinomes et utilisant des critères architecturaux
et cytologiques ;
– le grade du GOG (Gynecologic Oncology Group) utilisant les grades histo-
logiques propres à chaque type de différenciation épithéliale (endométrioïde,
cellules transitionnelles...), s’ils existent (absence de grade pour les tumeurs à
cellules claires).
Plus récemment, S. Silverberg (21) a proposé un nouveau grade histolo-
gique qui s’appliquerait uniquement aux carcinomes, indépendamment du
type de différenciation épithéliale, à la manière du grade de Scarff-Bloom-
Richardson dans les carcinomes mammaires infiltrants. Trois paramètres sont
évalués : l’architecture, le pléomorphisme nucléaire et l’activité mitotique. Un
score de 1 à 3 est attribué pour chacun des paramètre, puis les trois scores
obtenus sont additionnés. Ceci permet de définir des tumeurs bien différen-
ciées (scores de 3 à 5 inclus), moyennement différenciées (scores de 6 et 7) et
peu différenciées (scores de 8 et 9). En ce qui concerne le premier paramètre,
un score de 1 est attribué pour une architecture glandulaire, de 2 lorsqu’elle
est papillaire et de 3 pour les formes solides. Le pléomorphisme nucléaire est
évalué dans les régions les plus atypiques selon le schéma suivant : scores de
88 Les cancers ovariens

1 (pas d’anisocaryose), 2 (variations de taille nucléaire de 1 à 2) ou 3 (varia-


tions de taille nucléaire de 1 à 4). L’activité mitotique est comptée en
périphérie de la tumeur dans dix champs consécutifs à l’objectif x 40 trois fois
de suite et le plus haut compte est retenu. Les scores suivants sont attribués en
fonction du chiffre obtenu : 1 (moins de 9 mitoses), 2 (entre 10 et 24 mitoses
incluses) ou 3 (de 25 mitoses et au-delà). Dans une série de plus de 400 carci-
nomes ovariens, les paramètres précédents pris isolément ont permis de classer
efficacement les tumeurs en fonction de leur pronostic, quel que soit le stade
pour l’architecture et le pléomorphisme, mais seulement dans les stades I et II
pour l’activité mitotique. De plus, le grade combinant ces trois paramètres
était corrélé à la survie, quels que soient le stade de la tumeur et son type
histologique (à l’exception des adénocarcinomes à cellules claires). Comme
pour les carcinomes mammaires, ce grade histologique prédisait mieux le
pronostic des tumeurs que la détermination du sous-type histologique. Dans
cette étude, le type histologique était plutôt corrélé à la réponse à la chimio-
thérapie : les tumeurs séreuses et endométrioïdes de haut grade, ainsi que les
carcinomes à cellules transitionnelles, avaient bien répondu à des chimiothé-
rapies à base de cyclophosphamide/doxorubicine/cisplatine contrairement aux
tumeurs mucineuses.

Autres marqueurs pronostiques


dans les carcinomes ovariens
Parmi les quelques études pronostiques analysant l’expression de certains gènes
dans les carcinomes ovariens, nous n’avons retenu que celles concernant les
membres de la famille HER car elles offrent des perspectives thérapeutiques. La
surexpression de HER2 retrouvée dans 7 % des tumeurs par E. Riener et al. (23),
n’était par corrélée à la survie dans sa série. En revanche, elle représentait un
facteur pronostique péjoratif dans la série de S. Camilleri-Broët et al. (24) qui
objectivait une surexpression de HER2 dans 16 % des tumeurs. Les résultats
concernant l’expression d’EGFR sont, elles aussi, contradictoires, l’une
montrant que l’expression de ce récepteur est un facteur pronostique péjoratif
(25), l’autre non (26).

Tumeurs rares :
tumeurs des cordons sexuels/ stroma
Elles représentent environ 6 à 7 % des cancers de l’ovaire (1-3). Ces
tumeurs comportent en proportion variable des cellules stromales fibro-
blastiques ou thécales, des cellules de la granulosa, des cellules de Sertoli et
Les différents types histologiques des cancers ovariens 89

des cellules de Leydig. Elle sont classées en fonction du type cellulaire le


plus différencié en quatre groupes : les tumeurs de la granulosa, les tumeurs
fibro-thécales, les tumeurs de Sertoli+/-Leydig et les tumeurs à cellules
stéroïdiennes produisant des hormones. Bien souvent, ces tumeurs ont une
présentation morphologique suffisamment typique, mais, dans certains cas,
elles peuvent être confondues avec des tumeurs épithéliales comme les
adénocarcinomes endométrioïdes ou les adénocarcinomes de type séreux.
Toute une batterie d’anticorps permet actuellement de mieux individualiser
ces tumeurs qui expriment en général l’inhibine et le MelanA/MART1 et,
de façon moins spécifique, la calrétinine et le CD99 (19). Les cytokératines
sont souvent présentes dans les tumeurs des cordons sexuels/stroma, mais,
à la différence des carcinomes, l’EMA (epithelial membrane antigen) n’est
pas exprimé.

Tumeurs de la granulosa
Par définition, les cellules composant ces tumeurs ont l’aspect des cellules
situées dans les follicules ovariens autour des cellules germinales (1-3). Ce sont
les plus fréquentes des tumeurs des cordons sexuels/stroma. Elles se divisent en
deux entités anatomo-cliniques :
– les tumeurs de la granulosa de type adulte ;
– les tumeurs de la granulosa de type juvénile.

Tumeurs de la granulosa de type adulte


Elles représentent 95 % des tumeurs de la granulosa et se voient chez des
patientes ménopausées qui présentent des signes d’hyperœstrogénie. Elles
sont découvertes dans 80 % des cas à un stade I. Ces tumeurs souvent unila-
térales sont à la fois solides et kystiques et comportent des remaniements
hémorragiques (fig. 7). Les cellules qui les composent sont caractérisées par
des incisures nucléaires. Les facteurs pronostiques péjoratifs sont représentés
par une taille tumorale de plus de 5 cm, par des atypies cytonucléaires et
surtout par une activité mitotique supérieure à cinq mitoses pour dix champs
à l’objectif x 40. Le pronostic de ces tumeurs est habituellement bon si elles
sont diagnostiquées au stade I avec une survie de 90 % à dix ans, mais des
récidives au-delà de trente ans ont été décrites. Pour les stades avancés de la
maladie ou lorsqu’il y a eu une rupture de la tumeur au cours du geste chirur-
gical, le pronostic est plus péjoratif, avec des taux de survie à dix ans de
seulement 36 %.
90 Les cancers ovariens

Fig. 7 – Vue macroscopique d’une tumeur de la granulosa de type adulte d’architectures solide
et kystique avec importants remaniements hémorragiques.

Tumeurs de la granulosa de type juvénile


Elles sont beaucoup plus rares que les formes adultes, ne représentant que 5 %
des tumeurs de la granulosa. Elles s’observent souvent avant la puberté et sont
alors responsables de pseudo-puberté précoce. Elles sont caractérisées histolo-
giquement par l’absence d’incisures nucléaires et par un nombre élevé
de mitoses. Dans 80 % des cas, comme elles sont diagnostiquées à un stade I,
elles ont un pronostic favorable. Les rechutes sont rares et précoces (moins de
trois ans) et le taux de mortalité de 1,5 % seulement. Cela n’est pas vrai à un
stade plus évolué.

Tumeurs fibro-thécales
Les tumeurs de ce groupe sont composées d’un mélange en quantités variables
de fibroblastes et de cellules thécales (1-3). Ces tumeurs surviennent en général
chez des femmes ménopausées et elles sont unilatérales. En fonction de leur
teneur en cellules lutéïnisées, elles peuvent s’accompagner d’une hyperœstro-
Les différents types histologiques des cancers ovariens 91

génie. La majorité d’entre elles a un comportement bénin. La seule tumeur


maligne de ce groupe est le fibrosarcome. Il se différencie du fibrome par une
forte cellularité, des atypies cytonucléaires et surtout par la présence de plus de
quatre mitoses pour dix champs à l’objectif x 40.

Tumeurs de Sertoli-Leydig
Ces tumeurs comportent en proportion variable des cellules de Sertoli, des
cellules de Leydig, des cellules stromales de la gonade primitive et parfois des
composantes hétérologues telles que des glandes mucosécrétantes, des éléments
chondroïdes ou rhabdomyoblastiques (1-3). Dans ce groupe, les tumeurs de
Sertoli sont presque toujours bénignes. En revanche, ce n’est pas le cas des
tumeurs de Sertoli-Leydig à proprement parler qui surviennent principalement
entre 25 et 35 ans et sont unilatérales dans 97 % des cas. Dans 50 % des cas,
elles s’accompagnent de manifestations endocriniennes, virilisation pour plus
de la moitié des cas ou hyperœstrogénie. Histologiquement, ces tumeurs sont
classées en fonction du degré de différenciation tubuleuse de la composante
sertolienne. Seules les tumeurs moyennement et peu différenciées peuvent
donner des métastases, respectivement dans 11 % et 59 % des cas. Outre l’ab-
sence de différenciation, seraient aussi en faveur d’une évolution métastatique,
une rupture intra-abdominale de la tumeur et l’existence d’un contingent hété-
rologue. Il existe une forme particulière de tumeur de Sertoli-Leydig dite
rétiforme qui se voit dans des tumeurs moyennement à peu différenciées et
dont le diagnostic est difficile car elle ressemble à un adénocarcinome séreux.
Des évolutions métastatiques ont été rapportées dans 25 % des cas pour ce type
de tumeur.

Tumeurs à cellules stéroïdiennes


Par définition, ces tumeurs sont faites à plus de 90 % par des cellules produi-
sant des hormones stéroïdiennes. Dans ce groupe, le lutéome stromal et les
tumeurs à cellules de Leydig sont bénignes. Seul un tiers des tumeurs à cellules
stéroïdiennes sans autre précision sont malignes. Elles surviennent le plus
souvent chez des femmes en période d’activité génitale et peuvent s’accompa-
gner de manifestations endocriniennes androgéniques, d’un syndrome de
Cushing ou parfois d’une hyperœstrogénie. Les formes malignes se traduisent
par une taille tumorale de plus de 7 cm et par des remaniements hémorragiques
et nécrotiques. Histologiquement, il n’existe pas de critère formel permettant
de séparer les formes malignes des formes bénignes. Cependant, les atypies
cytonucléaires sont en général plus marquées et les figures mitotiques plus
nombreuses (plus de deux mitoses pour dix champs à l’objectif x 40) dans les
formes malignes.
92 Les cancers ovariens

Tumeurs des cordons sexuels à cellules mixtes


ou non classées
Ce groupe de tumeur englobe des tumeurs des cordons sexuels qui n’ont
pas pu être classées dans les trois groupes précédents. Le gynandroblastome
et les tumeurs des cordons sexuels inclassées qui appartiennent à ce groupe
ont en général un comportement bénin. En revanche, les tumeurs des
cordons sexuels à tubules annelés, lorsqu’elles ne s’intègrent pas dans un
syndrome de Peutz-Jeghers, sont malignes dans 25 % des cas. Bien qu’il
n’existe pas de critère histologique formel, les tumeurs ayant une activité
mitotique de plus de trois à quatre mitoses pour dix champs à l’objectif x 40
et des aspects franchement invasifs auraient plus souvent un comporte-
ment agressif.

Tumeurs très rares : tumeurs germinales malignes


Un peu moins du tiers des tumeurs ovariennes est d’origine germinale et 95 %
d’entre elles correspondent à des tératomes matures. Les tumeurs germinales
malignes ne représentent en fait que 2 à 3 % des cancers de l’ovaire. Elles sont
observées dans 60 % des cas avant 21 ans ou chez des femmes jeunes de moins
de 30 ans.
Elles se présentent en général comme des tumeurs unilatérales de grande
taille, souvent solides, avec des remaniements nécrotiques et hémorragiques.
Contrairement aux tumeurs testiculaires, les différents types de tumeurs
germinales coexistent rarement au niveau de l’ovaire (à peine 10 %). Ces
tumeurs ont des caractéristiques morphologiques assez spécifiques qui
permettent de les identifier le plus souvent. Pour les cas plus délicats, il est
possible de s’aider des techniques immuno-histochimiques avec la batterie
d’anticorps suivante (19) : cytokératines, PLAP (Placental-Like Alkaline
Phosphatase), AFP (Alpha Foeto Protein), bêta-hCG (human Chorionic
Gonadotrophin), CD117, CD30 et récemment OCT-4. Les profils immuno-
histochimiques sont variables selon le type de tumeur germinale, mais le point
commun est l’absence d’expression de l’EMA. Ce marqueur permet donc de
distinguer les tumeurs germinales qui expriment les cytokératines des carci-
nomes qui sont, en règle générale, EMA+.
Comme pour les tumeurs testiculaires, les tumeurs germinales de l’ovaire
sont agressives (élévation des LDH) et peuvent être suivies par le taux sérique
des marqueurs tumoraux (AFP, hCG). Des rémissions prolongées, voire des
guérisons, y compris à des stades évolués, peuvent être obtenues en raison de
leur chimiosensibilité.
Les différents types histologiques des cancers ovariens 93

Dysgerminomes ou séminomes
Ce sont les tumeurs germinales malignes les plus fréquentes (50 % environ des
tumeurs de ce groupe) (1-3). Elles se voient plutôt entre 20 et 30 ans et se
présentent comme des masses ovariennes unilatérales dans 90 % des cas.
L’ovaire controlatéral peut cependant, dans 20 % des cas, comporter une
atteinte macroscopique ou microscopique. Histologiquement, elles sont faites
de cellules germinales primitives souvent mêlées à des lymphocytes et à des
granulomes épithélioïdes et gigantocellulaires. Leur phénotype immuno-histo-
chimique est le suivant : PLAP+, CD117+, CD30-, AFP- et parfois
cytokératine focalement +. Ces tumeurs très radio-sensibles, comme le sémi-
nome testiculaire, ont des taux de survie à cinq ans de l’ordre de 80 %. Les
critères pronostiques péjoratifs sont représentés par le stade anatomique
surtout.

Tumeurs vitellines ou tumeurs du sac vitellin


ou tumeurs du sinus endodermique
Elles représentent le deuxième type de tumeur germinale maligne de l’ovaire
(environ 20 %) et s’observent aussi entre 20 et 30 ans. Elles associent des taux
sériques très élevés d’AFP et une masse abdomino-pelvienne de croissance
rapide. Histologiquement, ces tumeurs sont faites de cellules germinales qui
récapitulent les différents stades de développement du sac vitellin au cours de
l’embryogenèse. De ce fait, elles prennent des aspects très variés et parfois
trompeurs (diagnostic différentiel avec des adénocarcinomes endométrioïdes
ou à cellules claires). L’identification de corps de Schiller-Duval, de « boules
hyalines » colorées par le PAS (Periodic Acid Schiff ) et d’une architecture réti-
culée sont typiques de ce type de tumeur. Le diagnostic peut être conforté par
des immuno-marquages qui montrent que les cellules tumorales sont PLAP+/,
cytokératine+ et AFP+. Les taux de survie à cinq ans après chimiothérapie sont
de 80 % pour les stades I/II et de 60 % pour les stades III/IV.

Carcinomes embryonnaires
Ces tumeurs sont exceptionnelles (environ 3 % des tumeurs germinales
malignes) et se voient chez des enfants, la moyenne d’âge étant de 12 ans. Le
tableau clinique inclut une masse tumorale volumineuse, des signes endocri-
niens à type de pseudo-puberté précoce ou de virilisation et des taux sériques
augmentés d’AFP et/ou d’hCG. Histologiquement, ces tumeurs sont faites de
grandes cellules très indifférenciées qui ressemblent à celles du disque
94 Les cancers ovariens

embryonnaire. Leur profil immuno-histochimique est le suivant : PLAP+/-,


cytokératine+, CD30+ et parfois AFP+. Parce qu’elles répondent bien à la
chimiothérapie, ces tumeurs comme les tumeurs vitellines peuvent être guéries
à un stade avancé.

Choriocarcinomes non gestationnels

Ils représentent moins de 1 % des tumeurs germinales malignes de l’ovaire et


s’observent chez des enfants ou des adultes jeunes. Les taux sériques d’hCG
sont toujours élevés, responsables d’une pseudo-puberté précoce chez l’enfant,
de virilisation ou de symptômes évocateurs d’une grossesse extra-utérine chez
l’adulte. Cette tumeur très hémorragique et nécrotique se compose de cellules
syncitiotrophoblastiques, cytotrophoblastiques et trophoblastiques intermé-
diaires intimement mêlées. L’expression d’hCG par les éléments
syncitiotrophoblastique est pathognomonique. Ces tumeurs dites non gesta-
tionnelles sont de moins bon pronostic que les choriocarcinomes de type
gestationnel et sont donc traitées par des chimiothérapies plus agressives.

Tératomes immatures

Ils représentent environ 20 % des tumeurs germinales malignes de l’ovaire et


s’observent en général entre 10 et 20 ans. Il n’est pas rare que ces tumeurs s’ac-
compagnent de taux sériques d’AFP ou de bêta-hCG modérément élevés. Par
définition, les tératomes comportent des tissus issus des trois feuillets embryon-
naires. Ces éléments tumoraux divers peuvent être, soit matures, soit
immatures et ils ressemblent alors aux tissus de l’embryon avant le troisième
mois de gestation. Les tératomes dits immatures sont en général mixtes et
comportent un mélange des deux types d’éléments (fig. 8). La nature de la ou
des composantes immature(s) est variable, mais, le plus souvent, il s’agit d’un
contingent de type neuro-ectodermique L’évaluation de son importance
permet de classer ces tumeurs en trois grades. Les tumeurs de grade 1 qui
comportent un contingent immature très focal ont une survie globale à cinq
ans de 82 % et ne reçoivent pas de chimiothérapie si elles sont confinées à
l’ovaire. En revanche, une chimiothérapie pourrait être proposée pour les
tumeurs de grades 2 et 3 dans lesquelles le contingent immature est plus
étendu. Ce type de prise en charge aurait fait passer les taux de survie des grades
2-3 de 30-60 % à 90-100 %, mais cela reste discuté.
Les différents types histologiques des cancers ovariens 95

Fig. 8 – Vue macroscopique d’un tératome multitissulaire mature et immature de l’ovaire avec
du sébum, des poils et des éléments nerveux.

Tumeurs exceptionnelles
Ce paragraphe regroupe des tumeurs tellement rares qu’elles n’ont fait l’objet
que de très petites séries dans la littérature. Elles représentent en tout 5 à 6 %
des cancers de l’ovaire. Parmi elles, nous ne détaillerons que le carcinome à
petites cellules hypercalcémique qui est une tumeur agressive de la jeune fille
pouvant être confondue avec une tumeur de la granulosa de type juvénile. Les
autres tumeurs appartiennent aux carcinomes (carcinome à petites cellules de
type pulmonaire, carcinome neuroendocrine à grandes cellules, cylindrome,
carcinome hépatoïde), d’autres à la cancérisation d’un tératome sous la forme
d’un carcinome (adénocarcinome, carcinome malpighien, carcinoïde, goitre
ovarien malin), d’un mélanome, d’un sarcome ou d’une tumeur neuro-ecto-
dermique. Des sarcomes du stroma endométrial ont aussi été décrits, ainsi que
des sarcomes comme ceux des parties molles, des mésothéliomes malins, des
lymphomes ou des leucémies. Enfin, on rattache aux tumeurs ovariennes les
adénocarcinomes du rete ovari.
96 Les cancers ovariens

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Les résultats de la chimiothérapie initiale
des formes avancées des cancers épithéliaux
de l’ovaire
I. Ray-Coquard et J.-P. Guastalla

Introduction
Les cancers épithéliaux de l'ovaire sont redoutés à juste titre. L'évolution des
formes avancées, les plus fréquentes, est en effet le plus souvent défavorable,
mais en même temps, dans un faible pourcentage de cas, des survies très
prolongées apparentées à des guérisons sont observées après chimiothérapie.
Ceci justifie tous les efforts de recherche de nouvelles molécules efficaces.
Devant la relative rareté des cancers ovariens, les essais cliniques font de plus
en plus appel à des collaborations nationales et internationales afin d'évaluer
rapidement les nouvelles thérapies ; en ce sens la création du GCIG1 est une
réussite pleine d'avenir.
Dans la suite de l'exposé, les doses en mg/m2 des molécules composant les
associations de chimiothérapie sont indiquées en indice2.

Trente années de recherche en chimiothérapie


Ce sont les études réalisées ces trente dernières années qui ont abouti au stan-
dard actuel, l'association carboplatine-paclitaxel.
À l'ère des alkylants, la première avancée dans les années 1970 a été la
découverte des sels de platine dont la molécule de référence, le cisplatine, a
cédé définitivement la place au carboplatine, également efficace dans les
cancers épithéliaux de l'ovaire et mieux toléré, et les taxanes, le paclitaxel,

1. GCIG (Gynecologic Cancer InterGroup) : associe les principaux groupes mondiaux de recherche clinique sur les cancers
ovariens (AGO, ANZGOG, EORTC-GCG, GEICO, GINECO, GOG, JGOG, MRC/NCRI, NCI-US, NCIC-CTG,
NSGO, RTOG, SGCTG).
2. Exemple : A50C500 : adriamycine 50 mg/m2 - cyclophosphamide 500 mg/m2.
278 Les cancers ovariens

secondé par le docetaxel, représentent le dernier progrès réalisé. Aujourd'hui, le


traitement standard associe le carboplatine et le paclitaxel, association qui a
significativement amélioré la survie des malades avec une tolérance convenable,
tout en reléguant au second plan les alkylants et les anthracyclines.

Ce raccourci abrupt des deux principaux progrès réalisés en trente ans


masque la vivacité d'une recherche clinique bouillonnante, brouillonnante
diraient certains. Il faut saluer avant tout l'amélioration au fil du temps de la
qualité des essais réalisés de part et d'autre de l'Atlantique, ainsi que la généra-
lisation du professionnalime anglo-saxon axé sur l'« evidence-based medicine »
qui représente désormais le fondement de la décision médicale cancérologique
institutionnelle et individuelle.

Dans cette optique, changer de traitement standard exige un niveau de


preuve qui ne peut résulter que d'études randomisées. Les méta-analyses,
comme celle de l’Advanced Ovarian Cancer Trialists Group pour les platines
(AOCTG), qui regroupe des études randomisées similaires, sont précieuses et
démonstratives, mais reflètent avant tout l'insuffisance de puissance propre à
chaque essai. Pour le paclitaxel, deux études de qualité et de puissance suffi-
sante, l'une réalisée aux États-Unis, l'autre en Europe et au Canada, ont suffi
pour introduire le nouveau standard sans qu'il ait été besoin de méta-analyse.

Des études ultérieures également de qualité sont cependant venues contro-


verser ce résultat et nuancer la place respective des taxanes et des platines, les
discordances observées s'expliquent par des différences de schéma d'étude et de
bras de référence, ainsi que de possibles biais méthodologiques.

En effet, la chimiothérapie de première ligne est déterminante pour la


survie, cependant on sait que les rechutes restent sensibles à des « lignes » ulté-
rieures de chimiothérapie qui influent sur la survie. Fâcheusement, au moment
des rechutes, les traitements sont très variables, ce qui rend délicat l'analyse de
l'impact d'une première ligne expérimentale sur la survie. C'est particulière-
ment vrai quand les malades du groupe contrôle bénéficient au moment de la
récidive de la nouvelle drogue : l'avantage éventuel est gommé et devient même
parfois impossible à mettre en évidence. Parallèlement, le recueil des multiples
traitements reçus par les malades après la rechute est un obstacle supplémen-
taire dans l'analyse de la survie après la première ligne. Pour cette raison, le
jugement principal repose souvent sur la survie sans récidive, ce qui ne va pas
sans difficulté d'interprétation non plus.

Pour considérer le futur, notons que les essais actuels testent l'adjonction à
l'association standard platine-taxane de nouvelles molécules de chimiothérapie
(topotecan, doxorubicine liposomiale, gemcitabine…), l'étape suivante devrait
être l'étude des thérapies ciblées.
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 279

Principaux résultats avant les taxanes


Les platines
Le rôle du cisplatine et du carboplatine a été établi par la méta-analyse de
49 essais réalisée par l'AOCTG3, regroupant les données individuelles de
8 763 malades et mise à jour par le groupe Cochrane en mai 2001. Les princi-
pales conclusions sont les suivantes :
Les associations sans platine ne démontrent pas d'avantage par rapport à
une monochimiothérapie non platine : 16 essais, 3 146 malades, 2 817 décès,
RR = 0,98 [0,91-1,05], p = 0,42.
Les associations avec platine apportent par rapport à une monochimiothé-
rapie non platine, un bénéfice absolu de survie de 3 % à cinq ans (de 25 % à
28 %) non significatif : 11 essais, 1 329 malades, 1 169 décès, RR = 0,93 [0,83-
1,05], p = 0,23 ; les doses de platine dans ces études sont moindres que celles
actuelles.
L'adjonction de platine à une association sans platine améliore significati-
vement la survie de 5 % à cinq ans (de 25 % à 30 %) : 9 essais, 1 704 malades,
1 428 décès, RR = 0,88 [0,79-0,98], p = 0,02 ; remarques : ce résultat est défi-
nitif, les doses sont souvent inférieures à celles actuelles et beaucoup de malades
ont reçu un platine lors des rechutes, ce qui suggère que l'administration
immédiate de platine est supérieure à une administration retardée.
Les associations avec platine apportent, par rapport à un platine seul, un
bénéfice de survie, non significatif, de 3 % à cinq ans (de 25 % à 28 %) :
9 essais, 1 095 malades, 894 décès, HR = 0,91 [0,79-1,05], p = 0,21 ; les essais
avec cisplatine sont plutôt en faveur des associations (HR = 0,86, p = 0,07)
alors que ceux avec carboplatine pourraient plutôt favoriser le carboplatine seul
(HR = 1,05, p = 0,21).
La comparaison cisplatine carboplatine ne montre pas de différence signifi-
cative entre les deux drogues, 2 219 malades, 1 745 décès, RR = 1,02, p = 0,74 ;
les 12 essais sont concordants ; globalement on note un modeste bénéfice de
2 % pour le cisplatine par rapport au carboplatine mais dans le détail le béné-
fice absolu est de 3 % à deux ans pour le cisplatine et de 4 % à cinq ans pour
le carboplatine ; les « cross-over » sont comparables pour chaque drogue et la
comparaison porte en réalité sur cisplatine en premier ou carboplatine en
premier.
La future mise à jour de l'AOCTG inclura les essais associés aux taxanes.
Conclusion : les platines ont amélioré de façon significative la survie des
malades par rapport au standard empirique et historique à base d'alkylants.

3. AOCTG : Advanced Ovarian Cancer Trial Group.


280 Les cancers ovariens

Doses de carboplatine en fonction de l’AUC


Aujourd'hui, les doses de carboplatine à administrer sont déterminées non pas
selon la surface corporelle, mais à partir de l'AUC, ce qui prend en compte
rationnellement la pharmacocinétique du carboplatine.
La toxicité du carboplatine est corrélée à la fonction rénale : l’aire sous la
courbe de décroissance de la concentration sérique4 du carboplatine est d’autant
plus élevée que la filtration glomérulaire rénale est basse, ce qui témoigne d'une
élimination plus lente. Cette relation linéaire permet d’adapter la posologie du
carboplatine à la fonction rénale de chaque patiente. Calvert a établi, à partir de
la filtration glomérulaire (FGR) mesurée par EDTA, la formule5 déterminant la
dose de carboplatine à administrer (1) ; les doses conventionnelles de carbopla-
tine correspondent à des AUC cibles variant de 5 mg/ml.mn à 7,5 mg/ml.mn.
Cependant, la mesure de la FGR par [51Cr]-EDTA étant contraignante, de
nombreux cliniciens la remplacent par la clairance de la créatinine calculée à
partir de la créatininémie ; en France, la formule de Cockroft et Gault6 tend à
s'imposer, alors que d'autres sont disponibles, celle de Jelliffe7 (2), de Wright8
qui tient compte de la mesure de la créatinine kinase et de la technique de
dosage de la créatininémie (méthode de Jaffe ou méthode enzymatique) (3), la
formule de Martin9 et Chatelut (4) et la formule de Egorin qui tient compte
du taux de plaquettes circulantes (5) ; des écarts notables sont constatés selon
que l'on utilise la FGR mesurée ou bien calculée par telle ou telle formule,
surtout dans les valeurs extrêmes (tableau I) (6).
Dans une étude rétrospective chez des malades de plus de 70 ans traités
pour cancer, la clairance de la créatinine obtenue par la formule de Wright se
révèle plus précise que celles de Cockcroft-Gault et que celle de Jelliffe (7).
Commentaire : le calcul de la dose de carboplatine à partir de la fonction
rénale pose de sérieux problèmes de standardisation.

Place des anthracyclines


L'adriamycine
Plusieurs essais ont comparé l’association cisplatine-cyclophosphamide (CP) à
l’association cisplatine-cyclophosphamide-adriamycine (CAP). L'analyse
groupée de ces essais par l'OCMP (Ovarian Cancer Meta-analysis Project), sur

4. Aire sous la courbe de décroissance de la concentration sérique, en abrégé AUC (Area Under the Curve).
5. Formule de Calvert : dose de carboplatine (mg) = AUC cible x (FGR + 25) mg où FGR est la filtration glomérulaire rénale.
6. Formule de Cockroft et Gault chez la femme [sexe : femme = 1, homme = 0] : clairance de la créatinine (ml/min) =
(140 – âge) x poids (kg) x [1 – (0,15 x sexe)]/(0,814 x créatininémie (µmol/l).
7. Formule de Jelliffe : clairance de la créatinine (ml/min) = [98 – 0,8 x (âge – 20)] x [1 – (0,01 x sexe)] x (surface corpo-
relle/1,73)/[créatininémie (µmol/l) x 0,0113]
8. Formule de Wright (créatinine sérique dosée par la méthode de Jaffe) : FGR = [6580 – (38.8 x âge)] x surface corporelle x
[1 – 0,168]}/ créatininémie (µmol/l).
9. Formule de Martin et Chatelut (sexe : homme = 0, femme = 1) : FRG (ml/min) = 163 x poids (kg) x [1 – (0,00496 x âge)]
x [1 – (0,252 x sexe)]/créatininémie (µmol/l).
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 281

Tableau I – Écarts observés du taux de filtration glomérulaire selon la méthode de calcul


utilisée (6).
FRG par EDTA < 50 50-100 > 100
(ml/min)
Nombre de patientes total 122 9 83 30
Formule ∆ (%)* p ∆ (%)* p ∆ (%)* p ∆ (%)* p
Wright +2 0,11 + 39 0,03 +5 0,15 –18 < 0,001
Martin et Chatelut +1 0,14 + 30 0,05 +4 0,33 –16 < 0,001
Cockcroft et Gault - 10 < 0,001 + 11 0,38 –7 0,002 –24 < 0,001
Jelliffe – 17 < 0,001 + 14 0,34 –15 < 0,001 –32 < 0,001

FRG = filtration glomérulaire rénale.


* ∆ (%) = différence en pourcentage par rapport à la FRG mesurée par EDTA.

données individuelles, montre un gain de survie à six ans de 7 % pour les


malades du groupe CAP : 4 essais, 1 194 malades, p = 0,02 ; le bénéfice est
surtout net dans le sous-groupe de malades n'ayant pas de résidu tumoral post-
opératoire (8). Dans trois essais sur quatre, l’adriamycine est additionnée à
l’association CP, créant une disproportion dans l’intensité globale de chimio-
thérapie d'autant plus remarquable que les doses de cisplatine dans ces études
sont non optimales et, au total, ces résultats ne permettent pas de conclure clai-
rement sur l'avantage de la molécule adriamycine.
Cependant, dans la méta-analyse globale de l’AOCTG, l'étude de tous les
essais ayant randomisé l’adriamycine, y compris les quatre essais précédents,
confirme un bénéfice sur la survie : 10 essais, 1 702 malades, gain à cinq ans
= 5 %, p = 0,003 (9) ; les auteurs, en suggérant que la chimiothérapie de réfé-
rence aurait du être adriamycine-platine (AP), laissent planer un doute sur
l'association cyclophosphamide-platine (CP) choisie comme référence dans les
études ultérieures.
Il faut noter cependant qu'une étude a justement comparé AP à CP chez
216 malades, 3 cycles de A60P contre C800P, avec une dose de P (cisplatine)
identique dans les deux groupes, de 1 mg/kg/semaine pendant sept semaines :
il n'y a pas de différence de survie à cinq ans 32 % versus 31 % (10), mais la
puissance statistique de cette étude est relativement faible.
Commentaire : l'adriamycine est bénéfique quand elle est associée à des
doses « sub-optimales » de platine, ce qui n'est pas démontré pour des doses
« optimales ».

Comparaison épirubicine – adriamycine


Trois essais randomisés ont comparé épirubicine et adriamycine (11-13). Une
toxicité cardiaque est moins fréquemment observée avec l'épirubicine aux
doses utilisées ; cette différence est significative dans l’étude de Homesley (13).
282 Les cancers ovariens

Cependant les effectifs de ces études sont insuffisants pour conclure valable-
ment sur la supériorité de l'une ou l'autre de ces deux anthracyclines.
Conclusion : la place des anthracyclines associées au platine reste contro-
versée. Les études ultérieures montreront l'absence de bénéfice pour
l'épirubicine associée au standard carboplatine-paclitaxel (voir plus loin).

À la recherche d'un standard : l'errement avant les taxanes


En l'absence d’étude randomisée comparant chimiothérapie versus rien, on ne
connaît pas l’impact de la chimiothérapie sur l'évolution naturelle des stades
avancés. Les premiers cytotoxiques, les alkylants tel le melphalan per os en
monothérapie, ont servi de standard comparatif pour étudier les molécules
découvertes ultérieurement, notamment le cisplatine, mais divers chemins ont
été empruntés.

Expérimentation du « Gynecologic Oncology Group » (GOG10)


Le GOG a comparé en trois bras (formes avec résidu tumoral ≥ 3 cm,
233 malades) melphalan seul versus melphalan-hexaméthylmélamine versus
adriamycine-cyclophosphamide (A50C500), administrés pendant dix-huit mois ;
la survie des trois groupes n’est pas différente ; l’association AC fut adoptée par
la suite comme référence en raison d'un taux de réponse complète plus élevé
(14) (tableau II).
L'étude suivante a randomisé chez 227 malades l'adjonction de cisplatine
(50 mg/m2) à l'association adriamycine-cyclophosphamide précédente
(8 cycles) ; le taux de réponse est significativement amélioré dans le groupe avec

Tableau II – Comparaison melphalan versus melphalan-hexaméthylmélamine versus cyclo-


phosphamide-adriamycine, traitement de dix-huit mois, étude du GOG (14).
Chimiothérapie Nombre Dose Jours Intervalle RC RP Survie
de (mg/m2) semaines (%) (%) médiane
malades (NS*)
Melphalan 64 7 PO J 1-5 4s 20,3 17,2 12,3 mois
Melphalan + 7 PO J 1-5 4s
Hexaméthylmélamine 97 150 PO J 1-14 4s 27,8 23,8 13,5 mois
Adriamycine + 50 IV J1 3s
Cyclophophamide 72 500 IV J1 3s 31,9 16,7 14,2 mois
PO = per os
RC = réponse complète
RP = réponse partielle
NS = différence non significative entre les trois groupes

10. GOG : Gynecologic Oncology Group, groupe de recherche clinique aux États-Unis.
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 283

cisplatine (76 % contre 48 %) ainsi que la survie médiane dans le sous-groupe


de malades avec maladie mesurable (19,7 mois contre 15,7 mois) ; bien que la
survie globale ne soit pas significativement améliorée (19,3 mois contre
16,4 mois) et que la toxicité soit plus importante (hématologique, digestive et
rénale), l'association C500A50P50 devint la référence pour les études suivantes
(tableau III) (15).

Tableau III – Comparaison cyclophosphamide-adriamycine versus cyclophosphamide-adria-


mycine-cisplatine, étude du GOG, traitement de six mois (huit cycles) (15).
Chimiothérapie Nombre Dose Jours Intervalle RC RP Médiane
de (mg/m2) semaines (%) (%) de survie
malades (NS)
Cyclophophamide 120 500 J1 3s
Adriamycine 50 J1 3s 25,8 % 21,7 % 16,4 mois
Cyclophophamide 107 500 J1 3s
Adriamycine 50 J1 3s 51,4 % 24,3 % 19,3 mois
Cisplatine 50 J1 3s
RC = réponse complète
RP = réponse partielle
NS = différence non significative entre les trois groupes

L’intérêt de l’adriamycine restant douteux, la dernière étude compare l'as-


sociation CAP (8 cycles) à cisplatine-cyclophosphamide (malades stades III,
résidu tumoral < 1 cm) ; la dose de cisplatine est la même dans les deux bras,
mais celle de cyclophosphamide est plus élevée (1 000 mg/m2) dans CP par
souci d'équitoxicité hématologique (tableau IV) ; bien qu'il n'y ait pas de diffé-
rence de réponse ni de survie, l’association C50P1000 est devenue le standard en
raison du risque cardiaque attribué à l'adriamycine (16).

Tableau IV – Doses utilisées dans la comparaison des associations cisplatine-adriamycine-


cyclophosphamide (CAP) versus cisplatine-cyclophosphamide (CP) équitoxiques, huit cycles,
étude du GOG (16).
CAP CP
Cisplatine 50 mg/m 2
50 mg/m2
Cyclophosphamide 500 mg/m2 1 000 mg/m2
Adriamycine 50 mg/m2 -

Commentaire : la démarche du GOG est exemplaire : le changement de


standard repose sur une étude randomisée dont le bras de référence résulte de
l'étude précédente. Cependant, comme nous allons le voir, l'étude de l'associa-
tion cisplatine-paclitaxel prendra bien comme référence l'association cisplatine
284 Les cancers ovariens

cyclophosphamide, mais avec une posologie différente de l'étude précédente,


C75P750 et non pas C50P1000.

Expérience hollandaise
Par un cheminement différent l'association CP devint également le standard de
certains centres européens.
Avant les platines, une étude du National Cancer Institute ayant montré la
supériorité11 de l'Hexa-CAF12 au melphalan seul (17), l'Hexa-CAF fut choisi
comme référence pour tester le cisplatine dans l'association CHAP-513
(172 malades randomisées, stades III et IV, jusqu’à 12 cycles) ; dans l'associa-
tion CHAP-5, le cisplatine (100 mg/m2) est administré en perfusion de cinq
jours, le cyclophosphamide, ainsi que l'HMM sont prescrits per os pendant
quatorze jours et les cycles durent trente-neuf jours ; le taux de réponse et la
survie sont significativement améliorés par la chimiothérapie avec platine, au
prix d’une toxicité hématologique digestive rénale et neurologique plus
marquée (18) (tableau V).

Tableau V – Résultats de la comparaison Hexa-CAF versus CHAP5 (18).


Hexa-CAF CHAP5 p
Nombre de malades 88 84
Réponse complète pathologique 19 % 40 % < 0,05
Maladie microscopique 7% 10 % < 0,05
Réponse partielle 24 % 30 %
Médiane sans progression 6,8 mois 19,5 mois < 0,0001
Médiane survie 19,6 mois 30,7 mois < 0,002

L'étude suivante, dans le but de réduire la toxicité, compara l'association


CHAP-5 à l’association C75P750, plus commode à administrer en un seul jour
toutes les trois semaines (191 malades randomisées, 9 à 12 cycles) (tableau VI) ;
devant un taux de réponse, une survie sans récidive et une survie globale iden-
tiques, l’association C75P750 devint la référence pour sa facilité d’administration
et sa meilleure tolérance (sauf une toxicité rénale supérieure) (19).

Commentaire : ces études ont eu le mérite de montrer la supériorité d'une


chimiothérapie avec platine, d'écarter l'adriamycine dont on redoutait la
cardiotoxicité et de parvenir à un schéma d'administration simplifié, J1 toutes
les trois semaines.

11. Ce fut la seule étude positive de ce type : rappelons que la méta-analyse de l'AOCTG est négative sur la comparaison
d'une poly-chimiothérapie à une mono-chimiothérapie sans platine, voir plus haut.
12. Hexa-CAF = hexaméthylmélamine-cyclophosphamide-méthotrexate-5-fluoro-uracile.
13. CHAP-5 = cisplatine 20 mg/m2 J1-5, adriamycine 35 mg/m2 J1, cyclophosphamide 100 mg/m2 J15-29 PO, hexamé-
thylmélamine 150 mg/m2 J15-29 PO, reprise des cycles à J 39.
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 285

Tableau VI – Doses utilisées dans la comparaison des associations cisplatine-hexaméthylméla-


mine-adriamycine-cyclophosphamide (CHAP5) et cisplatine-cyclophosphamide (CP) (19).
CHAP5 / J 36 CP / J21
Cisplatine 20 mg/m 2
J 1-5 75 mg/m2 J1
Adriamycine 35 mg/m2 J1
Cyclophosphamide 100 mg/m2 J 15-29 PO 750 mg/m2 IV J1
Hexaméthylmélamine 150 mg/m2 J 15-29 PO
PO = per os

Expérience du groupe ICON14


Avec les mêmes préoccupations de tolérance, ce groupe international compara
toutes les trois semaines l'association C500A50P50 au carboplatine seul
(1 526 malades où une chimiothérapie était indiquée) ; les survies sont iden-
tiques, la CAP entraîne plus d'alopécie, de leucopénie et de
nausées-vomissements, le carboplatine plus de thrombopénie (20). Le carbo-
platine AUC5 devint un standard, la dose étant calculée directement par la
formule de Calvert quand la filtration glomérulaire rénale est établie par la
formule de Cockroft et Gault, et réduite de 10 % quand la clairance rénale est
obtenue par méthode isotopique.
Ces résultats sont inattendus : la méta-analyse de l'OCMP montre que
CAP (cyclophosphamide - adriamycine - cisplatine) est supérieur à CP (cyclo-
phosphamide cisplatine) et la méta-analyse de l'AOCTG montre que cisplatine
et carboplatine ne sont pas différents en efficacité : on attendrait que CAP soit
supérieur au carboplatine seul. Cependant, une confirmation de ce résultat
imprévu a été donnée par la comparaison indirecte des données individuelles
de ICON2 et de l'AOCTG (21), étude dont nous rapportons schématique-
ment les principales conclusions en terme de survie dans le tableau VII :
Tableau VII – Comparaison indirecte des résultats du carboplatine seul aux associations CAP
et CP (21).
CAP (AOCTG) > CP (AOCTG) RR = 0,84 ; p = 0,009
CAP (ICON2) = CAP (AOCTG) courbes superposées
Carboplatine (ICON2) = CAP (ICON2) RR = 1,00 ; p = 0,98
Carboplatine (ICON2) > CP (AOCTG) p < 0,01
> : survie supérieure
= : pas de différence de survie
(AOCTG) : résultats de la méta-analyse de l'AOCTG
(ICON2) : résultats de l'étude ICON2

La conclusion est déroutante, mais logique et cohérente : le carboplatine


seul est supérieur à l'association cisplatine-cyclophosphamide. La comparaison

14. ICON = International Collaborative Ovarian Neoplasm regroupant 132 centres mondiaux.
286 Les cancers ovariens

est indirecte, mais confortée par une référence commune, l'association CAP,
dont les résultats sont superposables dans l'étude ICON2 et la méta-analyse
réalisée dix ans plus tôt (21).
L'explication pourrait relever d'une dose de cisplatine insuffisante par
rapport à celle du carboplatine ; en effet, il a été constaté que la dose-intensité
de platine est corrélée à la réponse tumorale jusqu'à un certain seuil : pour le
cisplatine en association, il existe un maximum d'efficacité aux alentours de 25
à 30 mg/m2/semaine soit 75 à 90 mg/m2 toutes les trois semaines (22, 23), et,
pour le carboplatine en monochimiothérapie, la dose seuil toutes les trois
semaines correspond à une AUC de 5 à 7 mg/ml x mn (24).
Dans la méta-analyse les associations CP comportent des doses de cisplatine
de 50 à 60 mg/m2 administrées toutes les trois semaines, inférieures à la dose
seuil ; dans l'étude ICON2, au contraire, le carboplatine est administré à la
dose-intensité correspondant à la dose seuil.
Remarque : l'étude ICON2 comporte presque dix fois plus de malades que
les études précédentes et ouvre l'ère moderne des essais collaboratifs de grande
puissance statistique.
Conclusion : au moment où va être introduit le paclitaxel, il n'y a pas de
protocole de référence garanti, ce qui ne manquera pas d'embarrasser l'inter-
prétation des essais suivants.

Le paclitaxel améliore
la survie des formes avancées
Comparaison cisplatine-paclitaxel à cisplatine-cyclophosphamide
Dans deux essais, le paclitaxel associé au cisplatine améliore la survie des
malades.
L'étude GOG 111 (25) a comparé chez 410 patientes de stade III avec un
résidu postopératoire ≥ 1 cm ou de stade IV, l'association cisplatine 75 mg/m2
et paclitaxel 135 mg/m2 en perfusion de vingt-quatre heures (Px135P75) à
C750P75, six cycles à intervalle de trois semaines ; la médiane de survie sans réci-
dive est améliorée de treize à dix-huit mois (p < 0,001) et la survie de
vingt-quatre à trente-huit mois (p < 0,001) ; le nombre de malades du groupe
contrôle ayant reçu du paclitaxel lors de la rechute n'est pas connu avec préci-
sion, mais considéré comme faible, le paclitaxel n'ayant été commercialisé que
très tard (de l'ordre de 30 %).
L’essai OV-10 (26) a comparé chez 680 patientes, de stades IIb-c III et IV,
résidu < 1 cm ou > 1 cm, l’association cisplatine 75 mg/m2 et paclitaxel
175 mg/m2 en perfusion de trois heures (Px175P75) à la même association
C750P75 que l'étude GOG111, de six à dix cycles (médiane 6). La médiane de
survie sans récidive est améliorée de 11,5 mois à 15,5 mois (p < 0,0005) et de
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 287

survie de 25,8 mois à 35,6 mois (p < 0,001) ; au moment de la rechute, 48 %


des malades du groupe CP ont reçu du paclitaxel (26).
Dans ces deux études, la tolérance de l'association cisplatine-paclitaxel est
convenable par rapport à celle de CP, avec cependant une neurotoxicité plus
forte dans le groupe paclitaxel à 175 mg/m2 (il est préférable en cas de toxicité
neurologique de perfuser le paclitaxel associé au cisplatine, à 135 mg/m2 en
vingt-quatre heures (27)).
Conclusion : à la suite de ces deux études concordantes et démonstratives,
l'association cisplatine-paclitaxel devint la chimiothérapie standard des formes
avancées, aux États-Unis et dans une majorité de pays européens.

L'association carboplatine-paclitaxel
En association au paclitaxel, trois études ont comparé carboplatine et cispla-
tine, toutes trois confirmant l'équivalence d'efficacité des deux drogues (28)
(29, 30).
Les doses utilisées et les résultats sont rapportées dans le tableau VIII.

Tableau VIII – Études comparant carboplatine-paclitaxel à cisplatine-paclitaxel.

Référence GOG-158 (28) (29) (30)


Nombre patientes 798 213 786
Chimiothérapie
Carboplatine AUC 7,5 * AUC 5 ** AUC 6 *
/paclitaxel 175 mg/m2/3 h 175 mg/m2/3 h 175 mg/m2/3 h
Cisplatine 75 mg/m2 75 mg/m2 75 mg/m2
/paclitaxel 135mg/m2/24 h 175 mg/m2/3 h 175 mg/m2/3 h
Résultats
SSR cisplatine 19,4 mois HR = 1,07 19,1 mois (16,7-21,5)
SSR carboplatine 20,7 mois NS° [0,78-1,48] NS° 17,2 mois (15,2-19,3) NS°
SG cisplatine 48,7 mois HR = 0,85 44,1 mois (40,2-49,4)
SG carboplatine 57,4 mois NS° [0,59-1,24] NS° 43,3 mois (37,2-47,8) NS°
* Filtration glomérulaire rénale calculée par la formule de Jelliffe
** FGR mesurée par EDTA ou la formule de Cockcroft-Gault
° NS = non significatif

Commentaire : on constate qu'à la fois la dose de carboplatine à utiliser


(AUC de 7,5 à 5 mg/ml x mn) et la méthode d'évaluation de la filtration
glomérulaire rénale (formules de Jelliffe, de Cockcroft-Gault ou mesurée par
EDTA) ne sont pas standardisées.
288 Les cancers ovariens

Dans ces trois études, la tolérance de l'association carboplatine-paclitaxel est


globalement meilleure que celle de cisplatine-paclitaxel, et la qualité de vie est
significativement meilleure dans l'étude de l'AGO (30).

Intérêt du docetaxel :
l'association carboplatine-docetaxel
L'étude SCOTROC15 a montré l'intérêt de remplacer le paclitaxel par un autre
taxane, le docetaxel : l'association docetaxel 75 mg/m2 – carboplatine AUC5
(FGR mesurée par EDTA) a été comparée au standard paclitaxel 175 mg/m2 –
carboplatine AUC5, six cycles, chez 1 077 malades de stade Ic à IV (80 % de
stades III/IV ; résidu < 2 cm = 63 %, > 2 cm = 37 %).
Après un suivi médian de vingt-trois mois, la survie sans récidive est simi-
laire dans les deux groupes, respectivement quinze mois contre quatorze mois
et huit jours, HR = 0,97 [IC 95 % = 0,83-1,13, p = 0,707], ainsi que la survie
médiane 64,2 % contre 68,9 %, HR = 1,13 [IC 95 % = 0,92-1,39, p = 0,238].
L'association docetaxel-carboplatine entraîne significativement plus de
neutropénie grade 3-4 : 94 % contre 84 %, p < 0,001 et moins de neuropathie
sensitive grade ≥ 2, 11 % contre 30 % p < 0,001 et de neuropathie motrice
grade ≥ 2 : 3 % contre 7 % p < 0,001 ; la qualité de vie est meilleure avec doce-
taxel sans toutefois atteindre la significativité statistique (31).
Commentaire : il est précieux en pratique clinique de disposer de deux
taxanes de même efficacité avec des toxicités différentes.

L'addition d'épirubicine à l'association


carboplatine-paclitaxel n'améliore pas les résultats
Deux études non encore publiées mais abouties montrent l'absence d'avantage
à l'addition d'épirubicine à l’association carboplatine-paclitaxel.
L'étude AGO-GINECO (30) compare chez 1 230 malades de stades IIb à
IV, l'association carboplatine AUC5 (formule de Jelliffe)-paclitaxel 175 mg/m2
(CbPx) à la même association, à laquelle est ajoutée épirubicine 60 mg/m2
(CbEPx), six cycles ; la survie médiane est de quarante et un mois [38,2-46,1]
pour CbPx contre quarante-cinq mois et huit jours [39,9-49,6] pour CbEPx,
HR = 0,93 [IC 95 % = 0,83-1,07], Test Logrank : p = 0,365 ; dans la strate
≤ 1 cm la survie est respectivement de cinquante-sept mois [48,7-62,5] contre
cinquante-neuf mois et huit jours [51,7- x] HR = 0,91 [0,73-1,12], p = 0,369
et dans la strate > 1 cm de vingt-huit mois et un jour [25,3-33,7] contre vingt-

15. SCOTROC = Scottish Randomised Trial in Ovarian Cancer.


Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 289

huit mois et sept jours [24,9-33,7] HR = 0,96 [0,79-1,17], p = 0,691.


L'association avec épirubicine entraîne significativement plus de toxicité héma-
tologique de grades 3-4, anémie (18 % contre 5 %), neutropénie (74 % contre
54 %) et thrombopénie (17 % contre 4 %) et plus de neutropénies fébriles (6 %
contre 1 %), ainsi que de nausées et vomissements (10 % contre 4 %).
L'étude intergroupe NSGO-EORTC-NCIC-CGC (32) respecte chez
807 malades le même schéma CbP versus CbEP, sauf que la dose d'épirubicine
est de 75 mg/m2 contre 60 mg/m2 dans l'étude précédente : la survie sans réci-
dive médiane est de dix-sept mois avec CbEPx contre seize mois pour CbPx
(p = 0,99) ; et dans le groupe de malades avec un résidu tumoral ≤ 1 cm respec-
tivement vingt-cinq mois contre vingt-quatre mois (p = 0,94) et le groupe avec
résidu > 1 cm quinze mois contre quatorze mois (p = 0,75) ; plus de neutropé-
nies fébriles sont observées avec CbEPx (18 % contre 4 %) et de stomatite (4 %
contre 1 %).
Conclusion : il n'y a pas de bénéfice à l'administration épirubicine-carbo-
platine-paclitaxel par rapport à l’association carboplatine-paclitaxel.

L'apport des taxanes est relativisé


Le cisplatine reste la molécule de référence
L'étude GOG 132, à la suite de l'étude GOG 111, prit comme bras de réfé-
rence l'association paclitaxel 135 mg/m2 en vingt-quatre heures-cisplatine
75 mg/m2 (Px135P75) et compara en trois bras chez 648 malades avec résidu
tumoral non optimal (> 1 cm) cette association au cisplatine seul (100 mg/m2)
et au paclitaxel seul (200 mg/m2 en perfusion de vingt-quatre heures), six
cycles. Le cisplatine seul se révèle significativement plus efficace en terme de
survie sans récidive que le paclitaxel seul et aussi efficace que l'association
cisplatine-paclitaxel (tableau IX) (33).

Tableau IX – Événements observés dans l'étude GOG 132 (suivi à soixante et un mois) (33).

Nombre de Nombre de Médiane Nombre Médiane


malades rechutes SSR mois de décès SG mois
Cisplatine 100 mg/m2 200 175 16,4 158 30,2
p = 0,001 NS
Paclitaxel 200 mg/m
2
213 200 11,2 213 25,9
Cisplatine 75 mg/m2
Paclitaxel135mg/m2 24 h 201 179 14,0 201 26,3
p = 0,310
290 Les cancers ovariens

On constate dans cette étude l'importance des traitements administrés


après la « première ligne » de chimiothérapie, recueillis ici a posteriori : 52 %
des malades du groupe cisplatine ont reçu du paclitaxel, 69 % des malades du
groupe paclitaxel ont reçu un platine (cisplatine ou carboplatine) et 39 % des
malades du groupe cisplatine-paclitaxel ont reçu une chimiothérapie ne
comportant ni platine ni paclitaxel ; plus important encore, respectivement
47 %, 46 % et 48 % des malades ont reçu la « deuxième ligne » de chimiothé-
rapie avant progression de la maladie en déviation par rapport au protocole
d'étude.
On peut dire que, pour une majorité de malades, a été comparé un traite-
ment séquentiel, cisplatine suivi de paclitaxel versus paclitaxel suivi de
cisplatine, ces deux attitudes se révélant équivalentes en terme de survie globale
à l'association cisplatine paclitaxel d'emblée.
La toxicité est différente pour les trois traitements : les toxicités digestive,
érythrocytaire et plaquettaire sont plus fréquentes et plus sévères avec le cispla-
tine en général ; dans le groupe paclitaxel seul, l'alopécie et les épisodes de fièvre
en aplasie sont plus fréquents et plus sévères qu'avec l'association cisplatine-
paclitaxel (p = 0,008) ; les toxicités digestive, rénale et neurologique sont plus
sévères dans le groupe cisplatine seul.
Commentaire : cette étude confirme le cisplatine comme molécule de réfé-
rence en efficacité, révèle que la dose efficace du cisplatine est excessivement
toxique et montre que l'association cisplatine-paclitaxel a la meilleure tolérance
digestive, rénale et neurologique ; en outre, l'association est moins longue à
administrer que les deux drogues en séquentiel.

Une étude discordante : le carboplatine seul se révèle aussi


efficace que l'association carboplatine paclitaxel
Dans l'étude ICON 3 qui comporte 2 074 malades, l'association paclitaxel
175 mg/m2-carboplatine (710 malades ont reçu cette association) est comparée
à la chimiothérapie de référence résultant de l'étude ICON 2, les centres inves-
tigateurs ayant le choix entre C500A50P50 (653 malades ont reçu cette
association) et carboplatine seul (943 malades) ; la dose de carboplatine, seul ou
en association, est AUC5 si la mesure de la filtration rénale glomérulaire est
déterminée par EDTA et AUC6 si est utilisée la formule de Cockroft et Gault.
La randomisation a été effectuée indépendamment dans quatre pays, dans un
rapport 2/1 au Royaume-Uni et en Italie, et 1/1 en Suisse et au Danemark ; une
stratification identique dans les quatre centres a porté sur l'intervalle depuis la
chirurgie, le choix de la chimiothérapie contrôle, le stade FIGO et le résidu
tumoral postopératoire.
Cette étude, après un suivi médian de 51 mois, ne montre aucune diffé-
rence de survie entre le bras contrôle et l'association carboplatine-paclitaxel :
HR = 0,98 [IC 95 % = 0,87–1,10] p = 0,74, ni de survie sans récidive :
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 291

HR = 0,93, [IC 95 % 0,84–1,03] p = 0,16 ; la survie médiane est de 36,1 mois


pour carboplatine-paclitaxel et 35,4 mois pour le groupe contrôle, la survie
sans récidive respectivement de 17,3 mois et 16,1 mois ; le résultat est retrouvé
dans tous les sous-groupes étudiés : âge, stade FIGO, type et grade histolo-
giques, résidu tumoral, centre de traitement.
L'association paclitaxel-carboplatine entraîne plus d'alopécie, de fièvre et de
neuropathie sensitive que le carboplatine seul et plus de neuropathie que CAP ;
l'association CAP entraîne plus de fièvre que l’association paclitaxel-carboplatine.
Commentaire : cette étude vient contredire les deux études de référence
GOG111 et OV10 : l'association paclitaxel-carboplatine n'est pas supérieure à
une chimiothérapie à base de platine et, pour les auteurs, le carboplatine est
une option raisonnable du traitement de première ligne. Le traitement reçu au
moment de la récidive est connu pour 1 218 malades, 287 malades du groupe
contrôle (18 %) ont reçu du paclitaxel au moment de la progression de la
maladie et il est improbable que l'effet « séquence » explique le résultat négatif
de l'essai.
La comparaison statistique des quatre essais GOG111, OV10, GOG132 et
ICON3 montre une hétérogénéité significative des résultats (34) : une explica-
tion plausible serait que le protocole de référence des études GOG111 et OV10,
l'association C750P75, serait inférieur en terme d’efficacité au carboplatine seul
AUC5-6, ou à C500A50P50, ou au cisplatine seul 100 mg/m2 (tableau X).

Tableau X – Hétérogénéité des résultats selon les protocoles de référence (34).


Hétérogénéité entre groupes Protocole de référence Survie sans récidive Survie globale
GOG111 C750P75
A versus p = 0,42 p = 0,28
OV10 C750P75
ICON3 CarboplatineAUC 5-6
B versus ICON3 C500A50P50 p = 0,51 p = 0,99
versus GOG132 Cisplatine100
A versus B p = 0,023 p = 0,009
Il n'y a pas d'hétérogénéité entre les études « positives » GOG111 et OV10 où le protocole de réfé-
rence est l'association C750P75, ni entre les études « négatives » ICON3 et GOG132 où les protocoles
de référence sont carboplatineAUC 5-6 ou C500A50P50 ou cisplatine100 ; par contre, il y a une hétérogé-
néité significative entre le groupe des études positives et le groupe des études négatives : le protocole
C750P75 apparaît comme sous-optimal.

Adoption d'un standard consensuel : l'association


carboplatine-paclitaxel
La conférence de consensus d'experts qui s'est tenue du 3 au 5 septembre 2004
sous l'égide du GCIG a retenu comme protocole standard de référence pour les
formes avancées (stades IIb-IV), l'association carboplatine AUC 5 à
7,5 mg/ml.mn paclitaxel 175 mg/m2/3 h toutes les trois semaines, six cycles.
292 Les cancers ovariens

Cette décision permet d’aborder l'avenir avec un protocole de référence


reconnu par tous, évitant ainsi un écueil récurrent en cancérologie.

Nombre de cycles à administrer en première ligne


Cette question a été peu étudiée.
Une étude rétrospective suggère un bénéfice sur la survie sans progression
avec douze cycles par rapport à six cycles (35).
Trois études randomisées ne montrent pas de différence en terme de survie
lorsque l’on augmente la durée du traitement au-delà de cinq ou six cycles (36-
38) (tableau XI).

Tableau XI – Études comparant des nombres de cycles de chimiothérapie différentes.


Référence Traitement Nombre de Nombre RC Cycles Médiane p
cycles de histologique supplém. survie (mois)
randomisés patients
Hakes CAP 5 / 10 41 / 37 48 / 55 10 c / 9 * 25 /40 0,34
Bertelsen CAP 6 / 12 136 / 66 23 / 25 12 c / 34 ** 23 / 27 NS
Lambert Cb /P 5/8 118 / 115 NP NP 23 0,48
* 9 malades des 41 du groupe « 5 cycles » de chimiothérapie ont reçu en réalité 10 cycles.
** 34 malades sur les 136 du groupe « 6 cycles » de chimiothérapie ont reçu en réalité 12 cycles.
NP : non précisé.

La durée de six cycles est considérée par certains comme optimale (39, 40)
en tout cas c'est le nombre minimal de cycles admis dans les essais randomisés
internationaux.
Commentaire : le nombre optimal de cycles de chimiothérapie à adminis-
trer reste mal défini. Ce point important est ravivé par la question d'un
traitement d'entretien (voir ci-dessous).

Traitement d'entretien :
la chimiothérapie de maintenance
Comme nous venons de le dire, il n'y a pas d'avantage démontré à poursuivre
la chimiothérapie initiale au-delà de cinq à six cycles, et nous avons insisté sur
la qualité insuffisante des études pour définir précisément la durée du traite-
ment. En même temps, le pronostic des formes avancées reste très mauvais
après chimiothérapie standard : une majorité de malades récidivent rapidement
de leur maladie, la médiane de survie est de trente-six mois et seulement une
malade sur quatre est vivante à cinq ans. Par ailleurs, même si la chimiothérapie
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 293

des rechutes améliore sensiblement la survie, c'est d'emblée que les traitements
ont le plus de chance d'être efficaces, ce qui conduit, pour les malades n'ayant
pas progressé sous chimiothérapie, au concept empirique de traitement de
« maintenance ». Ce concept encore flou est en concurrence avec ceux tout
aussi vagues de traitement d'« entretien », de « consolidation », de « clôture »
qui ont eux-mêmes justifié des essais thérapeutiques variés. Nous considérerons
ici la seule chimiothérapie de « maintenance », le lecteur est prié de se reporter
aux chapitres traitant de la chimiothérapie intensive, la chimiothérapie intra-
péritonéale, la radiothérapie de clôture, la radiothérapie métabolique,
l'utilisation des anticorps monoclonaux où sont abordés d'autres possibilités de
traitement complémentaire après chimiothérapie de première ligne.
Deux types de chimiothérapie de maintenance peuvent être proposés,
chacun ayant des avantages et des inconvénients :
– soit utiliser une molécule différente de celles de la première ligne, avec la
perspective d'une absence de résistance croisée (plus souvent présupposée
que démontrée cliniquement) et d'une toxicité différente, mais avec une
incertitude sur l'efficacité réelle ;
– soit poursuivre les mêmes drogues initiales, avec l'avantage d'en connaître
l'efficacité, mais avec un risque de toxicité cumulative rédhibitoire.
Dans le premier cas, nous disposons de deux essais où les malades n'ayant
pas progressé après six cycles de carboplatine-paclitaxel sont randomisées
chimiothérapie de « maintenance » versus contrôle.
L'une montre que quatre cycles supplémentaires d'épirubicine 120 mg/m2
n'améliorent pas la survie sans récidive ni la survie globale (41).
L'autre montre de même, chez 273 malades, que quatre cycles supplémen-
taires de Topotecan 1,5 mg/m2/j pendant cinq jours toutes les trois semaines,
n'améliorent pas la survie sans récidive : HR = 1,18 (0,86 - 1,63), test log-rank
p = 0,83, médiane 18,2 mois avec topotecan contre 28,4 mois, ni la survie
globale : test log-rank p = 0,30 (42).
Ce résultat est à rapprocher d'une étude similaire également négative,
comportant quatre cycles supplémentaires de topotecan versus contrôle, mais
où la randomisation a lieu sur la population avant toute chimiothérapie et non
sur les malades sélectionnées après six cycles de carboplatine-paclitaxel (43), ici
les quatre cycles de topotecan font partie intégrale du traitement initial et ne
réalisent pas vraiment une « maintenance ».
Les études ci-dessus comportent une « maintenance » très brève, quatre
cycles de chimiothérapie ; une étude positive a testé une chimiothérapie plus
prolongée pendant douze mois, ce qui correspond mieux à un concept de
maintenance : après six cycles de carbopatine-paclitaxel, les patientes non en
progression ont été randomisées douze cycles supplémentaires de paclitaxel
175 mg/m2/3 h toutes les quatre semaines versus trois cycles complémentaires
seulement. L'analyse intermédiaire programmée a montré un bénéfice signifi-
catif pour la survie sans rechute en faveur du traitement de maintenance
prolongé : médiane de vingt-huit mois contre vingt et un mois, HR = 2,31
[1,08-4,94], p = 0,0023 ; il n'y a pas de différence pour la survie globale, mais
294 Les cancers ovariens

avec peu d'événements au moment de l'analyse (17 décès). Ce résultat a


conduit le comité scientifique indépendant à recommander l'arrêt de l'étude
pour permettre aux malades de recevoir les douze cycles de paclitaxel de main-
tenance (44). La toxicité neurologique est un frein à l'utilisation du paclitaxel
en maintenance (tableau XII), d'autant que l'arrêt prématuré de l'étude ne
permettra pas de préciser l'impact du traitement sur la survie.

Tableau XII – toxicité neurologique de douze cycles de paclitaxel administrés après six cycles
de carboplatine-paclitaxel (44).

Neuropathie périphérique sensitive


Neuropathie 3 cycles (n = 109) 12 cycles (n = 97)
Grade 2 14 % 18 %
Grade 3 1% 5%

Pour cette raison, une étude confirmative est programmée sur le même
schéma par le groupe GINECO-AGO, la survie globale étant un objectif.
Conclusion : ces résultats ne permettent pas de recommander un traitement
de maintenance après les six cycles de chimiothérapie standard, mais sont très
encourageants et invitent à approfondir cette voie thérapeutique où une bonne
tolérance est le préambule à tout traitement prolongé. À côté de la chimiothé-
rapie classique, les nouveaux agents biologiques devraient trouver ici une place
de choix.

Chimiothérapie néo-adjuvante
Rationnel de la chimiothérapie néo-adjuvante
Plusieurs auteurs ont attiré l'attention sur l'intérêt qu'il pourrait y avoir à
administrer une chimiothérapie avant tout geste chirurgical. Cette proposition
repose sur le constat que le geste chirurgical est non optimal dans de nombreux
cas (lésions résiduelles > 1 cm).
On a pu remarquer dans des études pilotes que les malades ayant eu une
laparotomie exploratrice sans aucune réduction tumorale avaient, après
chimiothérapie, une survie similaire à celle de patientes traitées par réduction
tumorale et chimiothérapie (45-48).
Ces études pilotes suggèrent que dans certaines situations une chimiothé-
rapie exclusive pourrait suffire ou bien que le geste chirurgical gagnerait à être
proposé après que la maladie a été améliorée par chimiothérapie. Les enjeux de
cette stratégie, chimiothérapie suivie de chirurgie, sont importants en termes
de résultats et de morbidité.
Les résultats de la chimiothérapie initiale des formes avancées… 295

Randomisation de la chirurgie après chimiothérapie


On ne dispose pas d’étude randomisée fiable de chimiothérapie néo-adju-
vante ; par contre, dans deux études, une chirurgie a été randomisée après une
brève chimiothérapie pour des malades dont le résidu tumoral après la
chirurgie initiale n’était pas optimal : concept d'une « chirurgie de l'intervalle »
insérée dans le cours de la chimiothérapie.
L’essai de l’EORTC montre l’intérêt d’une réduction tumorale chirurgicale
en cours de chimiothérapie : 278 malades dont la première chirurgie était non
optimale (résidu > 1 cm) ont reçu trois cycles de chimiothérapie cisplatine75-
cyclophophamide750 ; les malades n’ayant pas progressé sont randomisées entre
chirurgie d'intervalle ou poursuite de la chimiothérapie ; dans tous les cas, les
malades ont reçu au total six cycles de chimiothérapie et une laparotomie de
« second look » a été réalisée pour toutes les malades en réponse complète
clinique (troisième laparotomie pour le groupe ayant bénéficié de la laparo-
tomie intermédiaire) ; la survie sans progression et la survie globale sont
significativement meilleures dans le groupe « chirurgie intermédiaire »
(p = 0,01), la médiane de survie est améliorée de six mois ; la réduction du
risque de décès est de 0,33 [ 0,10 - 0,50, p = 0,008] ; il n’a pas été noté de
morbidité sévère de cette chirurgie supplémentaire (49).
Un essai analogue a été réalisée aux États-Unis par le groupe GOG16 avec
cependant deux différences avec l'étude européenne, d'une part l'effort de
réduction chirurgicale initiale se devait d'être optimal et maximal, d'autre part
la chimiothérapie était une association cisplatine75-paclitaxel135/24 h au lieu de
cisplatine-cyclophosphamide : dans cet essai la survie médiane n'est pas modi-
fiée par la chirurgie de l'intervalle, trente-deux contre trente-trois mois (50).
En conclusion : ces deux essais randomisés ne permettent pas de répondre
à la question du concept de chimiothérapie néo-adjuvante.
Cependant, quand une chirurgie non optimale a d'emblée été réalisée par
un opérateur entraîné, un nouvel effort chirurgical après chimiothérapie est
inutile. En ce qui concerne les résultats positifs de l’étude de l’EORTC, ils
peuvent s'interpréter en faveur du concept de chimiothérapie néo-adjuvante
ou, au contraire, inviter à une exérèse radicale immédiate en considérant que
le bénéfice observé relève d'une plus grande efficacité de la chimiothérapie
quand le résidu tumoral est faible.
La véritable question reste donc posée de savoir si un effort maximal doit
être demandé au chirurgien quand le résultat, de façon certaine, sera non
optimal ou, au contraire, s’il faut retarder la chirurgie après chimiothérapie
néo-adjuvante. Une étape préliminaire serait de codifier les critères prévision-
nels d'une chirurgie inadéquate, critères non parfaitement définis à ce jour.
Au total, le concept de chimiothérapie néo-adjuvante repose sur des bases
empiriques fragiles. Une étude randomisée en cours à l'EORTC permettra de
préciser sa place.
296 Les cancers ovariens

Conclusion
La chimiothérapie améliore la survie des malades atteintes de cancer ovarien
avancé, l'administration intrapéritonéale, bien qu'elle procure un bénéfice
supplémentaire, n'est pas un standard recommandé du fait des difficultés
de mise en œuvre et des effets secondaires liés à la technique elle-même
(cf. chapitres suivants). Les platines (cisplatine et carboplatine) sont les molé-
cules de référence et sont utilisées de préférence en association. L'association
carboplatine-paclitaxel, six cycles, est un standard consensuel.

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or chromic phosphate (32P). G.I.C.O.G.: Gruppo Interregionale Collaborativo in
Ginecologia Oncologica. Ann Oncol 6(9): 887-93
55. Trope C, Kaern J, Hogberg T et al. (2000) Randomized study on adjuvant chemotherapy in
stage I high-risk ovarian cancer with evaluation of DNA-ploidy as prognostic instrument.
Ann Oncol 11(3): 281-8
Place de la chimiothérapie adjuvante
dans les formes précoces des cancers
épithéliaux de l’ovaire

J.-P. Guastalla, I. Ray-Coquard

Introduction
Le pronostic des formes précoces de cancer ovarien épithélial qui regroupent
les stades I et IIA est meilleur que celui des stades avancés qui concernent les
stades IIB, C III et IV. Cependant, en dehors des tumeurs bien différenciées au
stade I qui sont guéries dans plus de 90 % des cas par la seule chirurgie, le
risque de rechute est non négligeable, de 10 % à plus de 50 % selon les études,
ce qui soulève la question d'une chimiothérapie adjuvante.
Les résultats statistiques sont rapportés dans la suite de l'exposé en expri-
mant le risque relatif par le « Hazard Ratio » (HR = 0,..) et entre crochet
l'intervalle de confiance à 95 % suivi du degré de significativité p [IC = 0,.. -
0,.. ; P = 0,..] ; les doses en mg/m2 des molécules composant les associations de
chimiothérapie sont indiquées en indice.

Études randomisées initiales


Les premières études randomisées réalisées n'ont pas montré de bénéfice de la
chimiothérapie adjuvante, mais elles sont peu démonstratives par le faible
nombre de malades incluses. Ces essais ont utilisé des chimiothérapies
variables :
– du melphalan : 81 malades, aux stades Ia et Ib, bien ou moyennement diffé-
renciés ont reçu per os, à quatre semaines d'intervalle, 12 cycles de melphalan
0,2 mg/kg/j x 5 j, ou ont été surveillées ; aucune différence de survie sans réci-
dive n'a été observée à six ans (91 % vs 98 % ; p = 0,41) ni de survie globale
(94 % vs 98 % ; p = 0,43) (1) ;
194 Les cancers ovariens

– du cisplatine : 41 malades, aux stades IA-B, G2-G3 ont reçu six cycles de
cisplatine 50 mg/m2 tous les vingt-huit jours et 42 aucun traitement ; à cinq
ans, la survie sans récidive est similaire, respectivement 83 % et 65 % (p =
0,117), ainsi que la survie globale, 88 % et 82 % (p = 0,712) (2) ;
– du carboplatine : 81 malades, aux stades I grade 1 aneuploïde ou grade 2 ou
3, à cellules claires ou non, ont reçu six cycles de carboplatine AUC 7 tous
les vingt-huit jours et 81 pas de traitement ; à cinq ans il n'y a pas de diffé-
rence de survie sans récidive (respectivement 70 % et 71 %) ni de survie
globale (86 % et 85 %) (3).

Études ICON1 et ACTION


Plus récemment, l'étude ICON-1 et l'étude ACTION ayant rassemblé
conjointement 923 malades ont apporté une contribution majeure sur la place
de la chimiothérapie adjuvante dans les formes précoces.

Étude ICON-1
Dans l'étude ICON-11 (4), le critère d'inclusion, très pragmatique, correspond
aux cancers ovariens opérés où l'investigateur doute de l'intérêt d'une chimio-
thérapie complémentaire2. Trois centres ont participé à cette étude, l'Istituto
Mario Negri à Milan, le Swiss Group for Clinical Cancer Research à Berne et le
Clinical Trials Unit of the Medical Research Council à Londres.
La chimiothérapie recommandée consistait toutes les trois semaines en
6 cycles de carboplatine seul AUC-5, ou de cisplatine seul 70 mg/m2 ou de l'as-
sociation C500A50P500 (d'autres associations à base de platine ont rarement été
utilisées).
2 000 malades auraient du être incluses pour démontrer une amélioration
de survie hypothétique de 60 % à 67 %. Entre 1991 et 2000, 477 malades ont
été incluses dans 84 centres, 241 traitées par chimiothérapie (171 carboplatine
seul, 32 chimiothérapie non précisée et 12 non traitées), 236 dans le groupe
contrôle (6 malades ayant reçu une chimiothérapie). L'étude a été interrompue
devant le faible taux d'inclusion.
Répartition des malades (voir tableau I) : l'âge médian est de 55 ans ;
473 malades (99 %) ne présentaient aucun résidu tumoral, 4 (1 %) un résidu
inférieur à 2 cm et aucune supérieur à 2 cm ; stade I = 13 malades (3 %),
Ia = 186 (39 %), Ib = 52 (11 %), Ic = 190 (40 %), II = 29 (6 %), III = 6 (1 %)
et par type histologique : séreux = 144 malades (32 %), mucineux = 103 (23 %),

1. « ICON-1 » : International Collaboration on Ovarian Neoplasms.


2. Si la chimiothérapie était nécessaire, la malade se voyait proposé de participer à l'étude simultanée ICON2 comparant
carboplatine seul à l'association CAP : voir chapitre chimiothérapie des formes avancées.
Place de la chimiothérapie adjuvante dans les formes précoces des cancers épithéliaux de l’ovaire 195

Tableau I – Caractéristiques des malades de l'étude ICON-1 (4).


n %
stade FIGO
I 13 3
Ia 186 39
Ib 52 11
Ic 190 40
II 29 6
III 6 1
type histologique
séreux 144 32
mucineux 103 23
endométrioïde 103 23
cellules claires 67 15
indifférencié 8 2
autres 26 6
Résidu tumoral postchirurgical
aucun 473 99
< 2 cm 4 1
> 2 cm 0 0

endométrioïde = 103 (23 %), à cellules claires = 67 (15 %), tumeurs indifféren-
ciées = 8 (2 %), autres = 26 (6 %).
La survie sans récidive à cinq ans est significativement améliorée de 62 % à
73 % par la chimiothérapie, HR = 0,65 [IC = 0,46 - 0,91, p = 0,01], ainsi que
la survie globale de 70 % à 79 %, HR = 0,66 [IC = 0,45 - 0,97, p = 0,03].
Conclusion : la chimiothérapie adjuvante améliore la survie sans récidive et
la survie globale des stades précoces.

Étude ACTION
Dans l'étude ACTION de l'EORTC (5), les critères d'inclusion sont précisé-
ment définis : tumeurs stade FIGO Ia-Ib et de grade II ou III, tous stades Ic et
IIa, et tous stades I et IIa à cellules claires.
Entre novembre 1990 et janvier 2000, 448 malades ont été randomisées
dans 40 centres sur les 1 000 prévues, 224 dans le groupe chimiothérapie et
224 dans le groupe observation ; six cycles à base de platine étaient recom-
mandés, avec une dose de cisplatine de 75 mg/m2, ou de 350 mg/m2 pour le
carboplatine.
La stadification était considérée :
– « optimale » quand étaient réalisés : une inspection et palpation de la cavité
péritonéale, des biopsies des lésions suspectes, un lavage péritonéal, une
omentectomie infracolique, des biopsies à l'aveugle du diaphragme droit, des
gouttières para-coliques droites et gauches, des parois pelviennes, du péri-
toine vésical et du cul-de-sac de Douglas et des prélèvement ganglionnaires
iliaques et péri-aortiques ;
196 Les cancers ovariens

– « minimale » en cas seulement d'inspection et palpation de la cavité périto-


néale, de biopsies des lésions suspectes, de lavage péritonéal et d'une
omentectomie infracolique ;
– « Intermédiaire » entre « optimale » et « minimale » et « inadéquate » si seules
étaient réalisées une inspection et une palpation de la cavité péritonéale et des
biopsies des lésions suspectes.
Les caractéristiques des malades sont décrites dans le tableau II.
Après un suivi médian de 5,5 ans, la différence de survie globale n'est pas
significativement différente HR = 0,69 [IC = 0,44 – 1,08 ; p = 0,10], alors que
la survie sans récidive est meilleure dans le groupe chimiothérapie, HR = 0,63
[IC = 0,43 – 0,92 ; p = 0,02].
En l'absence de chimiothérapie, la survie globale et la survie sans récidive
sont significativement meilleures chez les 151 malades où la stadification était
optimale par rapport à celles où elle était sous-optimale, respectivement
HR = 2,31 [IC = 1,08 – 4,96 ; p = 0,03] et HR = 1,82 [IC = 1,02 – 3,24 ;
p = 0,04] ; à l'inverse, chez les malades ayant reçu une chimiothérapie, la survie
n'est pas différente, que la stadification ait été optimale ou non. Par contre,
dans le groupe où la stadification est non optimale, la chimiothérapie améliore
significativement la survie globale et la survie sans récidive, respectivement
HR = 1,75 [IC = 1,04 – 2,95 ; p = 0,03] et HR = 1,78 [IC = 1,15 – 2,77 ;
p = 0,009] et il n'y a pas de différence de survie dans le groupe qui n'a pas reçu
de chimiothérapie.
Conclusion : le bénéfice de la chimiothérapie adjuvante pourrait être limité
au groupe de malades où la stadification chirurgicale n'a pas été optimale, c'est-
à-dire quand le résidu tumoral est imprécis.

Tableau II – Caractéristiques des malades de l'étude ACTION (5).


n %
Stade FIGO
Ia 155 34
Ib 37 8
Ic
tumeur à la surface de l'ovaire 50 12
capsule rompue 116 26
cellules malignes dans l'ascite ou liquide de lavage 55 13
IIa 31 7
Type histologique
séreux 156 34
mucineux 77 17
endométrioïde 120 26
cellules claires 63 15
indifférencié 8 2
autres 16 4
Type de stadification
optimal 151 34
intermédiaire 138 30
minimal 114 25
inadéquat 43 10
Place de la chimiothérapie adjuvante dans les formes précoces des cancers épithéliaux de l’ovaire 197

Analyse combinée
Ces deux études parallèles ont donné lieu à une analyse regroupant toutes les
malades ; les caractéristiques sont décrites dans le tableau III (6) : dans 13 pays
et 124 centres, 925 malades au total ont été incluses, 465 ont reçu une chimio-
thérapie adjuvante à base de platine et 460 représentent le groupe contrôle qui
a reçu une chimiothérapie seulement en cas de rechute. Avec un recul médian
de 4,5 ans, 245 malades ont rechuté et 181 sont décédées. La chimiothérapie
améliore significativement la survie sans récidive HR = 0,64 [IC = 0,50 – 0,82 ;
p = 0,001) et la survie globale HR = 0,67 [IC = 0,50 – 0,90 ; p = 0,008] ; grâce
à la chimiothérapie, la survie sans récidive à cinq ans passe de 65 % à 76 %
(différence absolue = 11 % [IC = 5 % à 16 %]) et la survie globale de 74 % à
82 % (différence absolue = 8 % [IC = 2 % à 12 %]). Le bénéfice de la chimio-
thérapie ne diffère pas dans les sous-groupes étudiés : âge, stade et type
histologique, sous réserve que le nombre de malades dans chacun de ces sous-
groupes est faible. Il est intéressant de noter que les différences de survie sont
similaires dans chacun des deux essais : survie sans récidive HR = 0,65

Tableau III – Caractéristiques des malades des études ICON-1 et ACTION regroupées (6).

Chimiothérapie adjuvante Oui (n = 465) Non (n = 460)


n % n %
âge < 55 233 50 233 51
55 - 65 126 27 147 32
> 65 105 23 80 17
médiane 55 55
stade I 9 2 4 <1
Ia 168 36 173 38
Ib 46 10 43 9
Ic 208 45 205 45
II 31 7 29 6
III 2 <1 4 1
type histologique séreux 161 36 139 31
mucineux 90 20 90 20
endométrioïde 94 21 129 29
cellules claires 68 15 62 13
indifférencié 9 2 7 2
autres 23 5 19 4
grade histologique I 97 22 100 23
II 210 47 203 46
III 139 32 141 32
non précisé 19 16
type chimiothérapie carboplatine seul 242 57
cisplatine seul 12 3
cisplatine assoc. 115 27
carboplatine assoc. 23 6
CAP 8 2
non administrée 25 6
donnée manquante 40
198 Les cancers ovariens

[IC = 0,46 – 0,91] pour ICON1 et HR = 0,63 [IC = 0,44 – 0,92] pour
ACTION, survie globale HR = 0,66 [IC = 0,45 – 0,97] et HR = 0,69
[IC = 0,44 – 1,08] respectivement, ce qui témoigne de la cohérence des résultats.

Méta-analyse des essais comportant un platine


Les auteurs de l'analyse combinée ont également réalisé une méta-analyse des
quatre essais randomisés disponibles utilisant une chimiothérapie à base de
platine, méta-analyse que nous reproduisons dans le tableau IV : la survie sans
récidive est améliorée significativement par la chimiothérapie : 128/587 rechutes
dans le groupe chimiothérapie contre 177/583 dans le groupe contrôle, HR
= 0,664 [IC = 0,530 – 0,831 ; p < 0,001], ainsi que la survie globale : 93/587
décès contre 123/583, HR = 0,722 [IC = 0,552 – 0,942 ; p = 0,017].
Tableau IV – Méta-analyse des études randomisées comportant une chimiothérapie à base de
platine d'apès (6).

Suivi Nombre d’événements


Essai Éligibilité Chim. mois Survie / nombre de patients p
Chim. Contrôle HR
(2) Ia, Ib Cisp. 71 SSR 7/41 14/42 0.48 0,095
Gr 2,3 SG 9/41 8/42 1.15 0,773
(3) I, Gr 2,3 SSR 20/81 19/81 0,98 0,9
anp/c.c. Cbp. 46 SG 9/81 9/81 0,94 0,9
I, II intérêt SSR 55/241 78/236 0,65 0,01
(4) Chim. Platine 51
incertain SG 42/241 61/236 0,66 0,03
(5) Ia, b
Gr 2,3 ; Platine 59 SSR 46/224 66/224 0,63 0,02
Ic, IIa ; SG 33/224 5/224 0,69 0,104
c.c.
Total SSR 128/587 177/583 0,664 <0,001
SG 93/587 123/583 0,722 0,017

anp = aneuploïde ; c.c. = cellules claires ; Cisp. = cisplatine ; Cbp. = carboplatine ; Gr = grade ;
Chim. = chimiothérapie ; HR = Hazard Ratio ; SSR = survie sans récidive ; SG = survie globale

Quelle chimiothérapie utiliser ?


La question reste posée de savoir quel type de chimiothérapie administrer et
combien de cycles. Lors de la conférence de septembre 2004 à Baden-Baden,
le consensus du GCIG3 a été précautionneux : « La chimiothérapie standard

3. GCIG Gynecologic Cancer InterGroup : associe les principaux groupes mondiaux de recherche clinique sur les cancers
ovariens (treize groupes: AGO, ANZGOG, EORTC-GCG, GEICO, GINECO, GOG, JGOG, MRC/NCRI, NCI-US,
NCIC-CTG, NSGO, RTOG, SGCTG).
Place de la chimiothérapie adjuvante dans les formes précoces des cancers épithéliaux de l’ovaire 199

recommandée dans les stades précoces (FIGO I à IIA), quand elle est indiquée,
devrait comporter au moins du carboplatine AUC 5 à 7,5. »
Le nombre de cycle n'est pas précisé, 4 à 6 ont été administrés dans les
études rapportées ci-dessus.
Notons qu'une étude du GOG dont les résultats sont attendus prochaine-
ment a comparé dans les stades précoces 3 à 6 cycles de l'association
carboplatine-paclitaxel.

Conclusion
Une chimiothérapie adjuvante à base de platine dans les formes précoces de
cancer ovarien améliore significativement la survie sans récidive et la survie
globale. Le bénéfice absolu est de 11 % pour la survie sans récidive à cinq ans
(65 % à 76 %) et de 8 % pour la survie globale, il n'est pas différent selon les
sous-groupes étudiés ; toutefois les effectifs dans ces sous-groupes sont faibles ;
dans l'étude ACTION, aucun bénéfice n'apparaît quand la stadification a été
optimale, c'est-à-dire en l'absence indiscutable de tout résidu microscopique.
La chimiothérapie doit comporter du carboplatine pour 4 à 6 cycles.

Références
1. Young RC, Walton LA, Ellenberg SS et al. (1990) Adjuvant therapy in stage i and stage ii
epithelial ovarian cancer. results of two prospective randomized trials [see comments]. N Engl
J Med 322(15): 1021-7
2. Bolis G, Colombo N, Pecorelli S et al. (1995) Adjuvant treatment for early epithelial ovarian
cancer: results of two randomised clinical trials comparing cisplatin to no further treatment
or chromic phosphate (32P). G.I.C.O.G.: Gruppo Interregionale Collaborativo in
Ginecologia Oncologica. Ann Oncol 6(9): 887-93
3. Trope C, Kaern J, Hogberg T et al. (2000) Randomized study on adjuvant chemotherapy in
stage I high-risk ovarian cancer with evaluation of DNA-ploidy as prognostic instrument.
Ann Oncol 11(3): 281-8
4. ICON1, EORTC ACTI (2003) International Collaborative Ovarian Neoplasm Trial 1 and
Adjuvant ChemoTherapy In Ovarian Neoplasm Trial: Two Parallel Randomized Phase III
Trials of Adjuvant Chemotherapy in Patients With Early-Stage Ovarian Carcinoma. JNCI
Cancer Spectrum 95(2): 105
5. Trimbos JB, Vergote I, Bolis G et al. (2003) Impact of Adjuvant Chemotherapy and Surgical
Staging in Early-Stage Ovarian Carcinoma: European Organisation for Research and
Treatment of Cancer-Adjuvant ChemoTherapy in Ovarian Neoplasm Trial. JNCI Cancer
Spectrum 95(2): 113
6. Trimbos JB, Parmar M, Vergote I et al. (2003) Inter-national Collaborative Ovarian
Neoplasm trial 1 and Adjuvant ChemoTherapy In Ovarian Neoplasm trial: two parallel
randomized phase III trials of adjuvant chemotherapy in patients with early-stage ovarian
carcinoma. J Natl Cancer Inst 95(2): 105-12
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique
et pelvien dans les cancers épithéliaux
de l’ovaire
J.-Y. Bobin et M. Schneider

Le but du curage lombo-aortique et pelvien dans les curages invasifs épithé-


liaux de l’ovaire est double : obtenir une évaluation précise du stade et obtenir
une cytoréduction tumorale optimale (1).

Curage lombo-aortique et pelvien et stadification


L’évaluation exacte du status ganglionnaire (N) est particulièrement intéres-
sante dans les stades de début (stades IA et IB). En effet, pour ceux-ci
l’indication de chimiothérapie cytotoxique dépend du status ganglionnaire.
L’envahissement d’une adénopathie pelvienne et/ou lombo-aortique faisant
changer de stade I à stade III (TNM : T3 N1) (1, 2).
De nombreux auteurs ont étudié le risque d’invasion ganglionnaire dès les
stades de début. Ce risque varie de 6,5 % (8/123) pour Negishi et al. (3) à 23 %
(9/40) pour Petru et al. (4). Dans une série personnelle, l’envahissement
ganglionnaire dans les stades IA et B était de 13,3 % (1 ; 5). Pour Morice et al.
(6) cet envahissement est de 20 % (15 % au stade IA et 25 % au stade IB, 40 %
au stade IC) (tableau I). L’envahissement ganglionnaire rétro et/ou sous-péri-
tonéal est donc précoce dans l’évolution des tumeurs épithéliales de l’ovaire (10
à 15 % pour les stades IA et IB) (3, 4, 6-10) (11).
Morice et al. (6) remarquent qu’aucune patiente (0/15) ayant un stade IA
grade I et qu’aucune patiente atteinte d’une tumeur mucineuse de stade I n’a
présenté de métastase ganglionnaire. Cependant, ces informations ne pouvant
être acquises par un examen extemporané (histologie, grade, stade), le curage
doit être réalisé dans tous les stades de début, quelle que soit l’histologie.
L'atteinte ganglionnaire peut être controlatérale à la tumeur de l’ovaire
(11 %) pour Morice et al. (6) et Negishi et al. (3) ou bilatérale (26 %) (3). Les
localisations métastatiques ganglionnaire étant, soit lombo-aortiques, soit
pelviennes, soit les deux.
240 Les cancers ovariens

Tableau I – Envahissement ganglionnaire lombo-aortique et/ou pelvien au stade I.


Nombres Envahissement ganglionnaire au stade I
de malades Total IA IB IC
Petru et al. (5) 9/40 23 %
Baiocchi et al. (7) 32/242 13,2 % 12,9 % 14,7 % 13,6 %
Le et al. (11) 16/138 12 %
Morice et al. (6) 17/85 20 % 15 % 25 % 40 %
Negishi et al. (4) 8/123 6,5 %
Meier et al. (8) 7% 7% 14 %
Sakurai et al. (9) 10,6 % 55,6 % 18,1 %
Bobin et al. (2004) 2/15 13,3 % ➥ 13,3 % ➥

En conclusion, un stade I présumé n’est pas un facteur prédictif indépendant de


l’envahissement ganglionnaire sous et/ou rétro-péritonéal. Ne pas réaliser de curage
revient donc à sous-stadifier environ 20 % des stades IA et IB (12, 13).

Réduction tumorale optimale


et curage lombo-aortique et pelvien
Depuis plus de vingt ans, il est démontré que le volume résiduel tumoral après
la chirurgie de cytoréduction a un impact direct sur la survie (1).
Quand une cytoréduction optimale (Ro) est obtenue, la médiane de survie
est supérieure de vingt-deux mois en moyenne par rapport à celle obtenue
après cytoréduction tumorale suboptimale, que ce soit lors de la chirurgie de
première intention ou après chimiothérapie néo-adjuvante (1, 5, 14-17). Les
métastases ganglionnaire sont d’autant plus fréquentes que le stade FIGO est
élevé (15), mais, comme nous l’avons déjà précisé, dès les stades I, le risque
d’envahissement ganglionnaire est important.
Pour les stades II, l’envahissement ganglionnaire varie de 23 % à 40 % (11,
18, 19) et pour les stades III il est supérieur à 50 % (6, 11, 13, 18, 19).
Dans notre série, il est de 69 %. Pour les stades IV, cette atteinte ganglion-
naire est de 77,7 % pour Dire et al. (11), de 100 % pour Spirtos et al. (20).

Peut-on prévoir l’envahissement ganglionnaire selon l’histo-


logie et le grade de la tumeur ?
La littérature démontre clairement que le type histologique comme le grade
ne permettent pas d’évaluer le risque ganglionnaire avec précision (6, 13).
L’envahissement ganglionnaire semble moins fréquent pour les tumeurs
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 241

mucineuses par rapport aux tumeurs séreuses, indifférenciées ou endomé-


trioïdes (6, 11, 20).
Morice et al. (6) comme Dire et al. (11) trouvent un envahissement
ganglionnaire entre 50 et 60 %, quel que soit le grade de la tumeur. Les grades
I ont un risque d’environ 50 % (6).
En conclusion, quel que soit le stade, le type histologique de la tumeur et son
grade, le risque d’invasion ganglionnaire est important. Le curage ganglionnaire
radical rétro- et sous-péritonéal est donc nécessaire pour obtenir une cytoréduction
tumorale optimale.

Est-ce que le curage lombo-aortique et pelvien doit être radical


sur les deux sites ? Peut-on se contenter de biopsie ganglion-
naire sélective ?
À la suite des travaux anatomiques de Rouvière (21) et des travaux de Burke
(22), Onda et al. (19) proposent le prélèvement de deux groupes ganglion-
naires principaux, le groupe supra-mésentérique et le groupe obturateur.
Cette technique permet de connaître le statut ganglionnaire avec une sensi-
bilité de 94 % avec une valeur prédictive négative de 95 %. Cette étude, qui ne
se base que sur les 48 curages positifs, ne permet pas de limiter le curage à ces
deux sites dans le but d’une cytoréduction optimale. L’ensemble de ces travaux
de la littérature démontre que les sites d’envahissement ganglionnaire lombo-
aortiques et/ou pelviens restent imprévisibles quel que soit le stade de la
tumeur. Bien que les sites le plus souvent atteints soient situés sous la veine
rénale gauche et dans la région iliaque externe sous-veineuse (ganglions obtu-
rateurs) (6, 11, 13, 19, 23)), le risque d’envahissement ganglionnaire
lombo-aortique isolé ou pelvien isolé se rencontre dans environ 30 % des cas et
l’atteinte lombo-aortique et pelvienne est d’environ 40 %. Il n’est donc pas
logique de se contenter d’un curage lombo-aortique ou pelvien, le curage doit
être radical sur les deux sites rétro- et sous-péritonéal.

Quelle est la valeur de la biopsie ganglionnaire guidée par la


palpation du chirurgien pour connaître le statut ganglionnaire ?
La palpation ganglionnaire des chaînes lombo-aortiques et pelviennes est très
trompeuse même quand elle est réalisée par des chirurgiens entraînés, et ceci
surtout après une chimiothérapie néo-adjuvante.
D'ailleurs, dans l’étude de Tangjitgamol et al. (24) à partir d’un échantillon
de 2 069 ganglions pelviens, les auteurs démontrent que la différence de taille
entre un ganglion normal histologique et un ganglion métastatique n’est que
de 4 mm (10 mm versus 6 mm). Cette différence est évidemment non exploi-
table par le chirurgien.
242 Les cancers ovariens

En outre, 94,5 % des adénopathies métastatiques mesurent moins de


20 mm et 35,5 % sont des micro-métastases (< 3 mm).
Le risque de micro-métastases isolées dans les ganglions lombo-aortiques et
pelviens, sans aucune adénopathie palpable, est évalué à plus de 30 % dans
toutes les séries de la littérature (6, 20, 24-26).
En conclusion, la biopsie orientée par la palpation est inadaptée à la stadifica-
tion dans les cancers de l’ovaire.

Existe-t-il une technique non invasive capable de prévoir l’en-


vahissement ganglionnaire ?
La lymphographie est actuellement un examen très rarement pratiqué, bien
que dans les cancers de l’ovaire sa spécificité soit proche de 100 %, mais avec
une sensibilité inférieure à 70 %. La tomodensitométrie comme l’IRM ont des
limites de détection qui ne permettent pas de définir avec précision l’invasion
ganglionnaire. Enfin, le PeT-scan a une valeur peu contributive dans la détec-
tion des métastases ganglionnaires rétro-péritonéales et pelviennes dans les
cancers de l’ovaire (27-29).

À quel moment le curage lombo-aortique doit-il être réalisé ?


Chaque fois que la cytoréduction tumorale intra-péritonéale est satisfaisante, le
curage radical doit être réalisé, que ce soit au cours de la chirurgie primaire ou
après chimiothérapie néo-adjuvante. Si le curage n’a pas été réalisé quand l’en-
semble du programme de chimiothérapie est terminé, le curage peut être
envisagé à ce moment-là, à condition que l’ensemble des investigations pré-
opératoires élimine une poursuite de l’évolution intra-péritonéale. Avant la
réalisation de la laparotomie, on peut proposer une exploration intra-périto-
néale par cœlioscopie. Cette intervention ne peut être réalisée que par des
chirurgiens entraînés car la cytoréduction tumorale entraîne des adhérences
intra-péritonéales le plus souvent serrées (30, 31).

Après chimiothérapie néo-adjuvante ou après que l’ensemble


du programme de chimiothérapie ait été réalisé, est-il logique
de proposer un curage lombo-aortique et pelvien ?
En d’autres termes, est-ce que la chimiothérapie a permis la stérilisation des
ganglions éventuellement envahis ?
La chimiorésistance des métastases ganglionnaires rétro- et sous-périto-
néales est un argument avancé par les partisans du curage radical (6, 13) (11).
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 243

L’incidence d’invasion ganglionnaire après chimiothérapie reste élevée.


Celle-ci reste très voisine de l’incidence d’invasion démontrée au cours des
curages de première intention.
Dans notre série personnelle, après quatre cures de chimiothérapie néo-
adjuvante comprenant un sel de platine et du paclitaxel, il persistait 63,2 %
(12/19) d’invasion ganglionnaire. L’envahissement ganglionnaire avant
chimiothérapie par les curages primaires était de 44,4 % (28-63). Ces résultats
sont confirmés par de nombreux auteurs. Pour Joulie et al. (32), l’envahisse-
ment ganglionnaire au cours des curages de première intention est de 35 %
(35/100) contre 54 % (18/28) au cours d’une chirurgie de révision et de 36 %
(28/77) au cours d’une chirurgie de l’intervalle. Pour Wu et al. (26), 64 % des
métastases ganglionnaire sont encore présentes après chimiothérapie et pour
Scarabelli et al. (25) 70 %. Cette chimiorésistance pourrait s’expliquer selon
Kimball et al. (33) par la persistance de lignées cellulaires diploïdes et d’une
faible proportion de cellules en phase S. Toutefois, il faut souligner que ces
études sont rétrospectives et qu’il y a de nombreux biais, en particulier de sélec-
tion des patientes.
En conclusion, il est logique de réaliser un curage ganglionnaire radical après
chimiothérapie même si les lésions intra péritonéales sont apparemment stérilisées (34).

Quelle technique chirurgicale doit-on recommander ?


La stadification chirurgicale des cancers de l’ovaire est actuellement parfaite-
ment codifiée (1, 2). La lymphadénectomie lombo-aortique et pelvienne est
réalisée après la cytoréduction tumorale optimale par la même voie d’abord,
c’est-à-dire par une médiane sous-ombilicale dépassant l’ombilic vers le haut
sur 3 cm.
Le curage lombo-aortique est conduit par voie trans-péritonéale ou par voie
sous-péritonéale après avoir décollé le côlon droit (ouverture du fascia de toldt
droit) et, dans des cas difficiles, en décollant aussi le côlon gauche.
L’axe lombo-aortique est totalement exposé jusque sous les veines rénales
droite et gauche et vers le bas en dessous de la bifurcation aortique.
La veine ovarienne gauche est sectionnée sous la veine rénale gauche et la
veine ovarienne droite au ras de la veine cave inférieure. L’artère mésentérique
inférieure est en général préservée. Sa section au ras de l’aorte est toutefois
nécessaire dans les cas difficiles de dissection lombo-aortique.
Le curage lombo-aortique est conduit de bas en haut, en partant de dessous
les veines rénales. Il résèque les ganglions latéro-cave, rétro-cave, pré-cave,
inter-aortico-cave, pré-aortique et latéro-aortique, au-dessus et en dessous de la
mésentérique inférieure, jusqu’à la bifurcation aortique. Les ganglions de la
bifurcation et du promontoire sont aussi réséqués. L’hémostase est assurée par
la pince bipolaire ou par clips. La lymphostase est en règle illusoire. Le curage
pelvien est alors réalisé avec exérèse des ganglions iliaques primitifs et externes
sus-, pré- et sous-veineux ; l’absence de péritonisation prévient les lymphocèles
244 Les cancers ovariens

post-opératoires. Les différents sites ganglionnaires prélevés sont précisés sur


un schéma pour les anatomo-pathologistes.
Le curage lombo-aortique et pelvien par cœlioscopie a été proposé par
quelques équipes dans des cas particuliers (30, 31, 34-36). On pourrait
discuter l’indication de curage par voie cœlioscopique dans les cas où le curage
n’est fait qu’après l’ensemble des traitements médicaux et s’il n’y a pas de geste
de cytoréduction tumorale intra-péritonéale à envisager. Ce sont donc des cas
exceptionnels.

La morbidité des curages lombo-aortiques et pelviens dans les


cancers épithéliaux de l’ovaire est-elle acceptable ?
En règle générale, pour les cancers de pronostic sévère, comme pour les
tumeurs épithéliales de l’ovaire, toute chirurgie risquant d’entraîner une
morbidité sévère immédiate ou à long terme est inacceptable.
La mortalité post-opératoire des curages est voisine de zéro (6, 13, 20) (11).
La morbidité est plus en rapport avec la chirurgie de cytoréduction intra-péri-
tonéale qu’avec le curage.
Les plaies de gros vaisseaux rétro- et sous-péritonéaux (en règle les veines)
sont rares. Elles sont dues à la difficile dissection d’adénopathies envahies. Elles
sont réparées sans difficulté (6, 13) (2,4 % dans notre série).
Quant aux plaies urétérales ou digestives elles sont exceptionnelles (13).
La principale morbidité post-opératoire est le retard à la reprise franche du
transit après quatre à cinq jours (environ 15 % des patientes). Les hématomes
rétro-péritonéaux imposant une reprise chirurgicale pour drainage sont rares si
l’hémostase a été minutieuse. Les complications médicales (phlébites, accidents
cardio-vasculaires, complications emboliques pulmonaires) doivent être préve-
nues par un lever précoce, la physiothérapie des membres inférieurs, la
prophylaxie systématique par l’héparinothérapie (2 % de phlébite dans notre
série).
Les lymphocèles rétro- et sous-péritonéales symptomatiques imposant un
drainage sont devenues exceptionnelles (1 cas/82 dans notre série) (10, 13, 18).
Dans la littérature, 5 à 10 % de celles-ci se compliquent de fièvre, de
douleurs, d’iléus paralytique ou de thrombophlébites des membres inférieurs
(37, 38).
La découverte de petites lymphocèles suspendues asymptomatiques (12 %
dans notre série, 10 à 25 % dans la littérature) (6, 13, 37, 38) ne doit pas être
considérée comme une complication.
Les cruralgies transitoires post-opératoires sont dues aux dissections diffi-
ciles pour des adénopathies envahies et adhérentes (< 1 %) (37).
Quant aux rares ascites chileuses post-opératoires (2,7 % à 8 %), elles
guérissent grâce à l’alimentation parentérale totale sans lipide pendant une
dizaine de jours. 4,5 % (37) sont symptomatiques.
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 245

La morbidité à court terme et à long terme, uniquement due à la lympha-


dénectomie est difficile à étudier car, dans la majorité des cas, elle est associée
à un geste intra-péritonéal majeur, mais elle est certainement mineure. Les
études faites par Giannici et al. (39) et Gol et al. (40) montrent que la morbi-
dité de ces lymphadénectomies n’est pas plus grande chez les femmes âgées que
chez les femmes de moins de 65 ans, malgré des co-morbidités supérieures.
La lymphadénectomie lombo-aortique et pelvienne radicale n’est pas
contre-indiquée après 65 ans, sauf s'il existe des morbidités sévères non
contrôlées.
Chez les femmes jeunes désirant des grossesses, la chirurgie conservatrice
peut être proposée pour les stades IA et IB de grades 1 et 2 non à cellules claires
(41-43). Le curage lombo-aortique et pelvien peut être réalisé par voie sous- et
rétro-péritonéale sans entraîner de stérilité, à condition que le pédicule lombo-
ovarien du côté où l’ovaire est conservé soit préservé. Quatre patientes de notre
série désirant une grossesse (4/15 stade I) atteintes de stade IAB ont eu une
conservation utérine et d’un ovaire et un curage lombo-aortique et pelvien. Ces
quatre patientes ont eu des grossesses normales, aucune n’a rechuté à cinq ans.
Une seule a demandé qu’une hystérectomie ovariectomie soit réalisée après le
deuxième enfant.

Valeur thérapeutique des lymphadénectomies dans les tumeurs


épithéliales malignes de l’ovaire
Comme dans la majorité des tumeurs malignes lymphophiles, le rôle curateur
des évidements ganglionnaires est difficile à mettre en évidence. Toutefois, la
lymphadénectomie radicale participant à la cytoréduction optimale, il est
logique de penser qu’elle a un impact bénéfique sur la survie globale et sans
rechute (34, 42). Ceci est d’autant plus logique que certains auteurs considé-
rent que l’envahissement ganglionnaire rétro- et sous-péritonéal est un site
chimiorésistant (6, 11, 13, 20, 25, 32, 33).
De nombreux travaux ont cherché à démontrer un rôle curateur des
curages.
Burghardt et al. (24) montrent que la survie est améliorée dans les stade III
où un curage radical a été réalisé (53 % de survie cinq ans pour les cas avec
curage et 13 % pour les cas sans curage).
Pour Di Re et al. (11), les patientes qui ont bénéficié d’un curage au cours
d’une chirurgie optimale pour des stades II, III, IV ont un taux de survie à cinq
ans de 46 % (médiane 56 mois) contre 30 % (médiane 41 mois) pour celles
n’ayant pas eu de lymphadénectomie. Cette différence est à la limite de la signi-
ficativité (p = 0,05). Il y a une différence significative (p < 0,005) pour la survie
(24 versus 14 mois) pour les patientes ayant eu une lymphadénectomie malgré
une cytoréduction suboptimale. Dans cette étude rétrospective, les critères de
sélection pour les patientes devant avoir un curage ne sont pas précisés et, à
246 Les cancers ovariens

côté des curages radicaux, il y a des biopsies ganglionnaires « sélectives » guidées


par la palpation.
Spirtos et al. (20) comme Onda et al. (19) remarquent que la survie des
patientes ayant eu un curage avec ganglions envahis est équivalente à la survie
de celles sans envahissement ganglionnaire.
L’étude de Onda et al. (19) est certainement la plus informative. Le taux de
survie des patientes stade III du fait de l’envahissement ganglionnaire (groupe
A) a été comparé à celui des patientes de stade III indépendamment du status
ganglionnaire (groupe C). 103 curages radicaux ont été associés à une cytoré-
duction intra-péritonéale optimale. La survie à cinq ans est de 84 % dans le
groupe A versus 26 % dans le groupe C. Le groupe A a par ailleurs une survie
équivalente à un groupe B (stade I et II) (84 % versus 96 % - p = 0,042).
La valeur thérapeutique des curages radicaux est aussi évoquée par
Scarabelli et al. (25) et par Saygili et al. (44) après chirurgie de cytoréduction
suboptimale dans les stades III.
Dans notre série de 82 cas ayant tous eu une chirurgie péritonéale optimale
et un curage radical, le taux de survie à cinq ans tous stades confondus est de
84 %. La survie actuarielle à cinq ans des stades III est de 78 % (IC : 0,63-0,94)
avec un recul moyen de 47 mois. Ces chiffres sont intéressants bien que le
nombre de patientes soit réduit.
En conclusion, toutes les études qui essayent de démontrer le rôle thérapeutique
des lympha-dénectomies radicales dans les tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire
sont des études rétrospectives, non randomisées.
Deux biais importants sont à souligner, tous les deux dépendent du poten-
tiel évolutif variable des tumeurs :
– les possibilités de réaliser un curage radical et une cytoréduction intra-péri-
tonéale optimale sont certainement dues à une moindre agressivité de la
tumeur et donc correspondent à des tumeurs au pronostic plus favorable ;
– l’amélioration de la survie par stade est due à une stadification plus précise
grâce au curage radical. La survie des stades I est améliorée car les « faux
stades I » qui correspondent aux stades I intra-péritonéaux mais avec inva-
sion ganglionnaire sont classés dans les stades III. De même, les stades III
sont améliorés dans leur survie puisqu’ils comprennent des stades III unique-
ment par invasion ganglionnaire, parfois microscopique dans un ganglion
sans envahissement intra-péritonéal.
Seules des études randomisées pourraient clarifier la valeur thérapeutique
réelle des curages radicaux pour les stades III et IV. Celles-ci sont de réalisation
difficile car elles demandent à être réalisées dans des centres où les chirurgiens
ont des compétences particulières dans le traitement chirurgical des tumeurs
ovariennes (2, 41, 43).
En conclusion, jusqu’à preuve du contraire, le curage lombo-aortique et
pelvien fait partie du traitement chirurgical optimal des cancers épithéliaux
malins de l’ovaire dès que la cytoréduction tumorale intra-péritonéale est satis-
faisante (optimale ou suboptimale avec des résidus tumoraux < 1 an et en
nombre réduit).
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 247

Ce curage permet une stadification précise de la maladie particulièrement


intéressante dans les stades IAB.
En effet, dans les stades de début, la chimiothérapie cytotoxique n’est pas
proposée par la majorité des oncologues.
Il permet une cytoréduction tumorale optimale des stades III et IV qui a
probablement un impact sur la survie des patientes.
Cette chirurgie précise impose des équipes chirurgicales particulièrement
entraînées dans le traitement des cancers ovariens.

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Prédispositions génétiques
aux cancers de l’ovaire

I. Coupier, C. Delnatte, S. Lejeune-Dumoulin, P. This,


M. Gauthier-Villars et D. Stoppa-Lyonnet

Résumé
Les prédispositions génétiques aux tumeurs épithéliales de l’ovaire peuvent se
présenter sous deux formes : (1) les formes familiales de cancer du sein et/ou
de l’ovaire, (2) les formes familiales de cancers du côlon, de l’endomètre et de
l’ovaire ou syndrome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer).
Plus rarement, il s’agit de cas familiaux de dysgerminomes ovariens, de tumeurs
des cordons sexuels survenant dans le syndrome héréditaire de Peutz-Jeghers,
de carcinomes ovariens à petites cellules ou de rares syndromes génétiques, qui
peuvent être associés à un risque de cancer de l’ovaire comme le complexe de
Carney.
Les gènes BRCA1 et BRCA2 sont impliqués dans les formes familiales de
cancer du sein et/ou de l’ovaire. Leurs altérations sont associées à un risque
cumulé à l’âge de 70 ans de cancer de l’ovaire de l’ordre de 39 % pour BRCA1
et 11 % pour BRCA2. Les altérations de ces deux gènes pourraient rendre
compte d’environ 5,5 % (2 %-7 %) des cas de cancers de l’ovaire.
Les altérations des gènes hMLH1, hMSH2, et hMSH6 sont impliquées
dans le syndrome HNPCC, celles des deux premiers étant responsables de la
majorité des cas étudiés. Le risque cumulé à l’âge de 70 ans de cancers de
l’ovaire est estimé à 10 %. Le syndrome HNPCC pourrait rendre compte de 1
à 2 % des cas de cancers de l’ovaire.
Les tests génétiques restent limités à certaines indications prenant en
compte l’histoire personnelle et familiale du patient. Leur prescription a lieu
dans le cadre d’une consultation d’oncogénétique.
La prise en charge du risque de cancer de l’ovaire dépend de la situation de
prédisposition dans laquelle on se trouve, allant de la surveillance échogra-
phique jusqu’à l’annexectomie prophylactique, notamment en cas de mutation
des gènes BRCA1/2.
32 Les cancers ovariens

Introduction
En France, le risque cumulé à 74 ans de cancer de l’ovaire pour une femme est
de 1,1 % (1). Le risque relatif pour une apparentée au premier degré d’une
femme atteinte d’un cancer de l’ovaire est de 2,8 (1,8-4,2) (2). Nous verrons
que ces risques sont plus importants en cas de prédisposition héréditaire. Les
cas héréditaires de cancer de l’ovaire représentent 5 à 10 % des cas. Il s’agit le
plus souvent de formes familiales de carcinomes épithéliaux seuls ou associés à
des cancers du sein, ou à des cancers du côlon ou de l’endomètre, et dont la
distribution des cas est compatible avec un mode de transmission autosomique
dominant (fig. 1). Plus rarement, il s’agit de cas familiaux de dysgerminomes
ovariens associés à des cancers testiculaires (3), de tumeurs des cordons sexuels
survenant dans le syndrome héréditaire de Peutz-Jeghers (4) ou encore de cas
familiaux exceptionnels de carcinomes ovariens à petites cellules (5). Enfin,
quelques rares syndromes génétiques peuvent être associés à un risque de
cancer de l’ovaire, comme le complexe de Carney (6) ou de rares maladies
génétiques associées à des dysmorphies qui ne seront pas développées dans ce
texte.

Prédisposition au cancer de l’ovaire


associée à un risque de cancer du sein
Les études de liaison génétique menées dans des formes familiales sévères de
cancer du sein ont conduit à l’identification de deux gènes de prédisposition
aux cancers des ovaires et/ou du sein BRCA1 (BReast CAncer 1) et BRCA2
localisés respectivement sur les chromosomes 17 et 13 (17q21 et 13q14) (7, 8).
Les études de liaison génétique menées dans des familles réunissant au moins
quatre cas de cancer du sein diagnostiqués avant 60 ans et un cas de cancer de
l’ovaire et appartenant à la même branche parentale ont permis de retenir que
BRCA1 et BRCA2 sont impliqués dans respectivement 80 % et 15 % de ces
familles (9). Il n’y a donc pas ou peu de place pour d’autres gènes conjuguant
une prédisposition au cancer du sein et au cancer de l’ovaire. De plus, les
formes familiales de cancer de l’ovaire seul sont liées dans la quasi-totalité des
cas à BRCA1 (10). La fréquence des mutations de ces gènes dans la population
générale, estimée à partir de l’analyse de cas consécutifs de cancer du sein, est
pour BRCA1 de 0,102 % (IC : 0,042 %-0,25 %), soit 1 individu porteur sur
974 (IC : 1/2381-1/400), et pour BRCA2 de 0,136 % (IC : 0,066 %-0,282 %),
soit 1 individu porteur sur 734 (IC : 1/1515-1/354) (11). Ainsi, une personne
sur 420 serait porteuse d’une altération d’un gène BRCA1/2. En retenant
qu’une femme sur 974 et une femme sur 734 sont porteuses respectivement
d’une mutation BRCA1 et BRCA2, et en retenant que le risque moyen de
cancer de l’ovaire à 70 ans est de 39 % (18 %-54 %) pour BRCA1, de 11 %
Prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire 33

Homme indemne Homme avec un cancer

Femme indemne Femme avec un cancer

Couple

A : Famille sein/ovaire
B : Syndrome HNPCC
Frère et sœur T = tumeur, âge au diagnostique du cancer

Figure 1 – Exemples caractéristiques de prédisposition aux tumeurs épithéliales de l’ovaire.


34 Les cancers ovariens

(2,4 %-19 %) pour BRCA2 et de 1 % dans la population générale, on peut


estimer que la contribution1 des altérations des gènes BRCA1/2 aux cas de
cancer de l’ovaire est de l’ordre de 4 % (1,8 %-4,4 %) pour BRCA1 et 1,5 %
(0,3 %-2,5 %) pour BRCA2, soit, pour l’ensemble des deux gènes, 5,5 % (2 %-
7 %). Cette estimation théorique des mutations BRCA1 chez les femmes
atteintes de cancer de l’ovaire est compatible avec celle observée par Stratton à
partir de l’analyse de 374 cas consécutifs de cancer de l’ovaire : 3 % (2 %-6 %)
(12). Une seconde étude qui a porté sur 515 cas a cependant observé un taux
plus élevé de mutations BRCA1/2 : 11,7 % (9,2 %-14,8 %), 7,5 % pour
BRCA1 et 4 % pour BRCA2 (13). Dans cette seconde étude, par ailleurs,
134 cas de tumeurs borderline ont été analysés et aucune mutation n’a été iden-
tifiée. Enfin, au risque ovarien est associé un risque d’adénocarcinome des
trompes de Fallope. Il a été estimé dans la seule étude réalisée que la contribu-
tion des mutations BRCA1 et BRCA2 au cancer des trompes est
respectivement de l’ordre de 11 % et 5 % (14).
Les gènes BRCA1 et BRCA2 codent pour des protéines impliquées physio-
logiquement dans la réparation des lésions de l’ADN. BRCA1 est une protéine
clé dans la détection de lésions de différentes natures : cassures simple et
double-brin, anomalies nucléotidiques. Au-delà de la détection de ces lésions,
BRCA1 a un rôle clé dans l’adaptation du cycle cellulaire à la phase de répara-
tion. BRCA2 apparaît avoir un rôle plus spécifique dans la recombinaison
homologue. En effet, cette macromolécule semble contrôler la localisation de
RAD51 (protéine-clé de la réparation des cassures double-brin par recombi-
naison homologue) sur les sites de cassure double-brin de l’ADN.
Les premières estimations des risques tumoraux ont été faites à partir des
familles qui avaient contribué à l’identification des gènes BRCA1 et BRCA2.
Les critères de recensement des familles ont été pris en compte dans l’estima-
tion des risques, limitant ainsi les biais de recensement et la surestimation des
risques (tableau I) (9, 15, 16). Les risques ont été ré-estimés à partir d’études
dites de population, c’est-à-dire de cas consécutifs de cancers de l’ovaire. Les
estimations des risques se sont avérées un peu plus faibles, mais avec des inter-
valles de confiance chevauchant entre les études familiales et les études de
population. Une méta-analyse de 22 études de population a estimé que le
risque de cancer de l’ovaire cumulé à l’âge de 70 ans est de 39 % (IC 22 %-
51 %) pour BRCA1 et de 11 % (4,1 %-18 %) pour BRCA2. Le risque associé
aux altérations de BRCA2 est plus faible et retardé (1 % avant 50 ans). Avant
l’âge de 40 ans, le risque est très faible pour les deux gènes ; avant 30 ans, il
est quasi nul (tableaux I et II) (16). Ces différences d’estimation des risques
entre les études de familles et les études de population peuvent refléter l’in-
fluence de facteurs modificateurs. Ces facteurs modificateurs peuvent être

1. Estimation de la contribution des gènes BRCA au cas de cancer de l’ovaire : Pr (mutation


BRCA si cancer ovaire) = Pr (mutation BRCA) x Pr (cancer ovaire si mutation BRCA) /
Pr (mutation BRCA) x Pr (cancer ovaire si mutation BRCA) + Pr (pas mutation BRCA) x
Pr(cancer ovaire si pas mutation BRCA).
Prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire 35

Tableau I – Risques de cancer de l’ovaire estimés dans différentes études.


() intervalle de confiance.

BRCA1 BRCA2 BRCA1 BRCA2


(Ford 94)15 (Ford 98)9 Méta-analyse de Méta-analyse de
22 études de population 22 études de population
(Antoniou 2003) 16 (Antoniou 2003) 16
Risque à 29 % (16-40) 0,4 % (0-1) 13 % (8-18) 1 % (0-3)
50 ans
Risque à 44 % (28-56) 27 % (0-47) 39 % (22-51) 11 % (4-18)
70 ans

Tableau II – Risques de cancer de l'ovaire par an en pourcentage (‰) chez une femme
porteuse d'une mutation BRCA1 ou BRCA2, d'après la méta-analyse d'Antoniou et al., 16.

Âge (ans) BRCA1 BRCA2


20-24 0,001 0,001
25-29 0,002 0,002
30-34 0,18 0,004
35-39 0,28 0,01
40-44 0,87 0,08
45-49 1,49 0,14
50-54 0,96 0,6
55-59 1,19 0,75
60-64 2,26 0,38
65-69 2,49 0,42

environnementaux (en prenant aussi en compte les facteurs hormonaux) et/ou


génétiques (17).
Les caractéristiques histologiques et histopronostiques des cas liés à BRCA1
ou BRCA2 n’apparaissent pas différentes de l’ensemble des cas de cancers de
l’ovaire (18). Il s’agit le plus souvent de formes séreuses. Notons qu’il y a une
sous-représentation des formes mucineuses 18-20. La seule étude réalisée a
rapporté un meilleur pronostic des cancers de l’ovaire survenant chez des
femmes porteuses d’une mutation BRCA1. Cela n’a pas été observé chez les
femmes porteuses d’une mutation BRCA2 18. Rappelons cependant que,
globalement, les cancers de l’ovaire restent de mauvais pronostic.

Prédisposition au cancer de l’ovaire


et syndrome HNPCC
L’observation de formes familiales de cancers du côlon, de l’endomètre, de
l’ovaire, de l’estomac, des voies biliaires et des voies urinaires, distribuées dans
la même branche parentale (compatible avec une transmission dominante) a
36 Les cancers ovariens

conduit Henry Lynch à définir, en opposition à la polypose adénomateuse, le


syndrome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer) ou encore
syndrome de Lynch (21). On assimile souvent le diagnostic d'un syndrome
HNPCC à la réunion des critères (22) d'Amsterdam2. Aujourd’hui, les critères
d’Amsterdam ont été redéfinis : ils incluent des tumeurs non coliques3 (23). Le
cancer de l’ovaire n’est pas au devant du tableau dans ce syndrome de prédis-
position.
C'est l'approche « gène-candidat » qui a permis l’identification des gènes
impliqués dans ce syndrome. En effet, en 1993, recherchant des régions chro-
mosomiques remaniées dans les adénocarcinomes du côlon ou de l'endomètre
développés dans le cadre de cas de familles répondant aux critères du syndrome
HNPCC, deux équipes ont observé qu'il existait une instabilité du génome
tumoral (24, 25). Cette instabilité est caractérisée par des erreurs de réplication
de l'ADN (RER : Replication ERror) conduisant dans des zones de répétitions
de nucléotides (locus microsatellites, par exemple) à la délétion ou à l'insertion
d'une unité répétée ou de plusieurs et, ainsi, à la génération de nouveaux
allèles. Lorsque la région répétée est située dans la partie codante d'un gène
dont la protéine est impliquée dans le contrôle de la division cellulaire, cette
instabilité est à l'origine de mutations contribuant au processus tumoral. De
façon surprenante, cette instabilité était analogue à une anomalie génétique
déjà caractérisée chez des mutants de bactéries présentant l'altération d'un gène
de réparation des mésappariements de l’ADN (gène RecA). Cette observation
conduisit à la recherche du gène homologue dans la levure, puis chez l'homme.
Le génome humain étant plus complexe, plusieurs gènes différents ont été
identifiés. Ces derniers devenaient des candidats pour être responsables du
syndrome HNPCC. Trois gènes, hMLH1 (human Mutant L Homologue1),
hMSH2, hMSH6 ont pu être effectivement incriminés, des mutations consti-
tutionnelles ayant été identifiées (26). On désigne souvent ces gènes comme
gènes du système MMR (MisMatchRepair). hMLH1 et hMSH2 sont à l’ori-
gine de 50 à 70 % des cas familiaux répondant aux critères d’Amsterdam ;
hMSH6 est à l’origine de moins de 5 % des cas (27). Bien que ces estimations
n’aient pas pris en compte la sensibilité incomplète de détection de mutations
et que, par là, la contribution de ces gènes soit sous-estimée, d’autres gènes sont
encore à identifier dans le cadre du syndrome HNPCC. La recherche au niveau
de la tumeur d’une instabilité des microsatellites ou phénotype RER tumoral
(ou MSI = MicroSatellile Instable) ou celle de la perte d’expression en immuno-

2. Critères d'Amsterdam : trois sujets atteints d'un cancer colorectal, dont l’un est uni par un
lien de premier degré aux deux autres, appartenant au moins à deux générations et au moins
un cas dont le diagnostic a été fait avant l'âge de 50 ans ; exclusion du diagnostic de polypose
adénomateuse.
3. Nouveaux critères d’Amsterdam : trois sujets atteints d'un cancer du spectre HNPCC
(côlon, rectum, endomètre, grêle, uretère et bassinet), dont l’un est uni par un lien de premier
degré aux deux autres, appartenant au moins à deux générations et au moins un cas dont le
diagnostic a été fait avant l'âge de 50 ans ; exclusion du diagnostic de polypose adénomateuse.
Prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire 37

histochimie des protéines hMLH1, hMSH2 ou hMSH6 est une aide à l’indi-
cation de l’étude moléculaire des gènes MMR.
Dans des familles présentant les critères d’Amsterdam stricts ou élargis, trois
études ont évalué le risque relatif de cancer de l’ovaire. Ce risque varie entre 3.5
et 13. L’âge moyen au diagnostic a été estimé à 47 ans (28). Les risques cumulés
à 70 ans varient entre 10 % et 12 % (28, 29).
La contribution du syndrome HNPCC aux cas de cancer de l’ovaire a été
peu examinée jusqu’à maintenant. Mentionnons néanmoins l’étude de
Stratton qui a porté sur 101 femmes atteintes avant l’âge de 30 ans de formes
épithéliales de cancer de l’ovaire et qui a recherché des altérations des gènes
BRCA1, BRCA2, hMLH1 et hMSH2 (30). Les deux seules patientes porteuses
d’une mutation présentaient une mutation hMLH1 (2 %, IC 1-8 %).
La prise en compte des risques de cancer de l’ovaire chez les femmes prédis-
posées et non prédisposées et la fréquence dans la population des altérations
des gènes hMLH1 et hMSH2 permet de calculer la fréquence des mutations
attendues dans les cancers de l’ovaire. En retenant que le risque de cancer de
l’ovaire est de l’ordre de 10 % en cas de syndrome HNPCC et de 1 % dans la
population générale et en retenant que la fréquence du syndrome HNPCC est
de 1 pour 1000 à 1/500 dans la population générale (31,32), on peut estimer
que la contribution4 des altérations des gènes MMR aux cas de cancer de
l’ovaire est de 1 à 2 %.

Prédispositions aux cancers de l’ovaire :


situations peu fréquentes
Nous pouvons retenir quatre autres formes de prédispositions au cancer de
l’ovaire :
– les dysgerminomes ovariens seuls ou associés à des cancers testiculaires ;
– les tumeurs de l’ovaire survenant dans le syndrome de Peutz-Jeghers ;
– les cas familiaux exceptionnels de carcinomes ovariens à petites cellules ;
– le complexe de Carney.

Dysgerminomes ovariens associés à des cancers testiculaires


Les cancers des cellules germinales de l’ovaire sont très rares (moins de 5 % des
cancers de l'ovaire). La probabilité qu’une femme développe au cours de la vie
ce type de cancer est de l’ordre de 0,05 %. Ces cancers se développent chez les

4. Estimation de la contribution des gènes MMR au cas de cancer de l’ovaire : Pr (mutation HNPCC si cancer ovaire) = Pr
(mutation HNPCC) x Pr (cancer ovaire si mutation HNPCC) / Pr (mutation HNPCC) x Pr (cancer ovaire si mutation
HNPCC) + Pr (pas de mutation HNPCC) x P(cancer ovaire si pas de mutation HNPCC).
38 Les cancers ovariens

enfants ou les adultes jeunes. Quelques cas familiaux de part le monde ont été
décrits avec une association de tumeurs des cellules germinales des ovaires (33).
Ces familles se présentent, soit sous la forme d’une association familiale de
cancer des cellules germinales de l’ovaire, soit sous forme d’une association de
cancers des ovaires chez la femme et de cancer du testicule chez l’homme. Les
tumeurs des ovaires retrouvées sont de type tératome immature ou choriocar-
cinome ; les tumeurs du testicules sont de type séminome ou tératome,
dysgerminome. Le (ou les gènes) responsable(s) de ces formes familiales de
cancer de l’ovaire ou formes familiales cancer de l’ovaire et des testicules n’est
(ne sont) pas encore identifié(s).

La maladie de Peutz-Jeghers ou lentiginose péri-orificielle


La maladie de Peutz-Jeghers est une pathologie très rare touchant de l’ordre
d’1 personne sur 100 000. Elle est transmise selon le mode autosomique domi-
nant. Elle est caractérisée par la présence de taches pigmentées de 1 à 5 mm
touchant les muqueuses buccales, vulvaires, anales, les doigts et les genoux. Ces
taches ont tendance à s’atténuer avec l’âge. Il existe des polypes hamartomateux
du tractus digestif siégeant le plus souvent sur le grêle, le duodénum, l’estomac
et parfois le côlon. Ces polypes volumineux sont à l’origine de syndromes
occlusifs et d’hémorragies souvent distillantes. Il existe un risque de tumeurs
digestives, pancréatiques, mammaires et de tumeurs ovariennes. Les tumeurs
ovariennes peuvent être de type épithélial ou de type stromal (34). Il existe des
tumeurs de la granulosa. La tumeur ovarienne la plus fréquente est la tumeur
des cordons sexuels avec tubes annulaires (SCTAT pour Sex Cord Tumours with
Annular Tubules). Il s’agit d’une tumeur de type histologique intermédiaire
entre les tumeurs de la granulosa et les tumeurs des cellules de Sertoli chez
l’homme. Les SCTAT sont des tumeurs sécrétrices et calcifiantes. Parmi les
patientes avec une SCTAT, 36 % ont une maladie de Peutz-Jeghers.
Un gène a été identifié, STK11, gène codant pour une kinase dont les
protéines cibles ne sont pas encore connues. Les mutations de STK11 rendent
compte de seulement 50 % des cas de Peutz-Jeghers, suggérant l’existence
d’une hétérogénéité génétique (35).

Cancer de l’ovaire à cellules claires avec hypercalcémie


Le cancer de l’ovaire à cellule claire associé à une hypercalcémie a été décrit
pour la première fois en 1982 (36). Ces tumeurs sont dans deux tiers des cas
unilatérales, de mauvais pronostic, et se développent chez des femmes très
jeunes. De rares formes familiales ont été décrites avec un mode de transmis-
sion qui semble être autosomique récessif (5). Le ou les gènes impliqués ne sont
pas encore identifiés.
Prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire 39

Complexe de Carney
Le complexe de Carney décrit en 1985 est une association de lentiginose
pigmentaire, de mixomes subcutanés, de fibro-adénomes mixoïdes
mammaires, de mixomes cardiaques et de néoplasies gonadiques et endocrines
(37). Le complexe de Carney existe sous deux formes, sporadique ou familiale
et alors compatible avec une transmission autosomique dominante. Le tableau
clinique est identique dans les deux formes. Les patients sont prédisposés à
certaines tumeurs bénignes et malignes, comme les polypes et les cancers du
côlon, de l’estomac, de la thyroïde et des ovaires. L’atteinte ovarienne se
présente le plus souvent sous forme de lésions bénignes : cysadénomes séreux,
kystes complexes, kystes dermoïdes ou tératomes. Dans de rares cas elle se
présente sous forme de lésions malignes, adénocarcinomes endométrioïde ou
séreuse. L’atteinte ovarienne, quel que soit son caractère (bénin ou malin), est
présente dans 58 à 67 % des cas. Il n’y a pas plus de kyste et de cancer des
ovaires dans les formes familiales que dans les formes sporadiques. Une analyse
rétrospective de 178 cas de complexe de Carney a mis en évidence que le risque
de cancer épithélial de l’ovaire est de 1,12 % (2/178) (6). Les deux cas de cancer
de l’ovaire sont survenus dans la cinquième décade.
Le risque de cancer de l’ovaire est trop faible pour justifier une surveillance
régulière, mais l’échographie pelvienne à la recherche de lésion ovarienne pour-
rait faire partie du bilan initial de la maladie. Si une lésion ovarienne est
identifiée, alors une surveillance régulière est mise en place (6).
Il existe une hétérogénéité génétique du syndrome de Carney avec des
formes liées au chromosome 17p et d’autres liées au chromosome 2p. Des
mutations inactivatrices ont été identifiées dans le gène PRKARIA localisé en
17p22 (38). PRKARIA est un gène codant pour la sous-unité régulatrice de
type Ia de la protéine kinase A (PKA).

Diagnostic moléculaire des deux formes majeures


de prédisposition
Les mutations des gènes BRCA1/2 et MMR associées à un risque tumoral sont
de type inactivateur. Il s’agit dans la majorité des cas de mutations conduisant
à une protéine tronquée : mutations stop, délétions ou insertions de quelques
nucléotides rompant le cadre de lecture, anomalies d’épissage ou, enfin, réar-
rangements de grande taille. Ces mutations sont distribuées sur l’ensemble de
la séquence codante des différents gènes.
Devant la diversité des mutations et leur distribution, la première recherche
de mutation dans une famille est particulièrement difficile et laborieuse
(plusieurs semaines de travail). La signification d’un résultat négatif lors d’une
première étude reste limitée, n’éliminant pas le diagnostic de prédisposition.
40 Les cancers ovariens

En effet, nous avons vu que les altérations de ces différents gènes ne rendent
pas compte de 100 % des prédispositions héréditaires. De plus, la sensibilité
des techniques de détection de mutation est estimée à 80 %.
En revanche, la recherche de mutation effectuée chez les apparentés après
identification de la mutation dans la famille est simple car ciblée sur l’altération
identifiée et expérimentalement rapide (quelques jours). La signification d’un
résultat négatif est claire : si l’altération identifiée dans la famille n’est pas
détectée, ceci élimine le diagnostic de prédisposition. C’est afin de pouvoir
donner un résultat de qualité chez les apparentés que la première étude génétique
dans une famille est réalisée chez la personne la plus susceptible d’être prédis-
posée, c’est-à-dire en général une personne qui a été malade ou « cas index ».

Indications d’études moléculaires


Les indications des études des gènes BRCA1/2 et MMR sont fonction de la
probabilité d’identifier une mutation. Le seuil d’une probabilité supérieure ou
égale à 10 % a été retenu en 2004 par le groupe d’experts réunis par la DGS
pour la mise à jour de l’expertise collective INSERM-FNCLLC sur la prise en
charge des femmes à risque de cancer du sein et de l’ovaire et, par le second
groupe d’experts pour une expertise collective sur la prise en charge du
syndrome HNPCC (39,40).
Concernant les études des gènes BRCA1/2, une probabilité d’identifier une
mutation supérieure ou égale à 10 % correspond, à titre d’exemple, aux situa-
tions suivantes :
– au moins trois cas de cancers du sein ou de l’ovaire chez des femmes appa-
rentées par un lien de premier ou second degré et appartenant à la même
branche parentale ;
– deux cas de cancers de l’ovaire chez deux femmes apparentées au premier
degré ;
– un cas de cancer du sein et un cas de cancer de l’ovaire chez deux femmes
apparentées au premier degré ;
– une femme ayant été atteinte d’un cancer du sein et d’un cancer de
l’ovaire, les deux tumeurs étant primitives.
Concernant les études des gènes MMR, la situation est un peu différente. En
effet, en plus des critères familiaux, des critères liés aux caractéristiques des
tumeurs sont une aide aux indications des études moléculaires : phénotype RER
et tests immuno-histochimiques. Les indications peuvent être résumées en trois
situations : devant la présence des nouveaux critères d’Amsterdam, des critères
d’Amsterdam élargis associant deux apparentés au premier degré ayant un
cancer du spectre HNPCC avec un cas dont le diagnostic a été fait avant 50 ans,
de critères individuels (comme un cancer du côlon avant 40 ans ou à un cancer
du côlon avec un antécédent personnel de cancer du côlon ou de l’endomètre).
En dehors de ces trois situations, devant un tableau clinique incomplet, la
Prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire 41

présence d’une instabilité tumorale (phénotype RER) ou la perte d’expression


d’une protéine hMLH1, hMSH2 ou hMSH6 (test immuno-histochimique)
conduira à l’indication d’une analyse moléculaire des gènes MMR.
Enfin, rappelons que toute situation familiale doit être discutée dans le cadre
d’une consultation de génétique et que c’est le médecin consultant qui retiendra
en dernier lieu l’indication d’une étude génétique. Les études génétiques sont
réalisées après une consultation d’information et l’obtention du consentement
libre et éclairé des patients. Un soutien psychologique doit être proposé.

Prise en charge
La prise en charge dépend de la situation de prédisposition dans laquelle on se
trouve. Dans le cas d’une mutation BRCA1/2 avérée, qu’il y ait ou non un cas
de cancer de l’ovaire dans la famille, l’expertise collective INSERM-FNCLCC
recommande une annexectomie prophylactique à partir de 40 ans ou dès
35 ans, si le projet parental a été accompli (39). Dans notre pratique, à l’ins-
titut Curie, l’annexectomie est recommandée dans les mêmes conditions
devant une altération du gène BRCA1 ou devant une altération de BRCA2 et
la présence d’un cas de cancer de l’ovaire dans la famille. L’annexectomie est
différée vers l’âge de 50 ans devant une altération de BRCA2 en l’absence d’an-
técédents de cancer de l’ovaire dans la famille (tableau II). Lorsque, à l’issue des
études moléculaires, aucune altération BRCA1/2 n’a été mise en évidence, il
reste licite, sous réserve d’une histoire familiale vérifiée, de discuter dans
certains cas l’annexectomie prophylactique comme, par exemple, chez une
femme apparentée au premier degré avec une femme atteinte de cancer de
l’ovaire, voire chez une apparentée de second degré lorsque l’intermédiaire est
un homme. L’annexectomie prophylactique est une décision pluridisciplinaire.
Ce geste est assez bien accepté par les femmes. Néanmoins, il peut exister, en
dehors des répercutions physiologiques des répercutions psychologiques qui
doivent être anticipées et prises en compte. La surveillance des ovaires par
échographie pelvienne annuelle à partir de l’âge de 35 ans est proposée.
Cependant, l’efficacité de la surveillance par échographie étant discutable, l’ex-
pertise collective INSERM-FNCLCC laisse à l’appréciation du clinicien
l’indication de cette surveillance (39). En dehors de la prise en charge du risque
ovarien, une surveillance mammaire doit être mise en place par un examen
clinique des seins deux à trois fois par an à partir de l’âge de 20-25 ans, asso-
ciée à une mammographie plus ou moins échographie annuelle à partir de l’âge
de 30 ans, voire avant 30 ans lorsqu’un cas est apparu avant l’âge de 35 ans
(cinq ans avant l’âge du diagnostic de cancer du sein le plus précoce dans la
famille). Il est important de mentionner que l’annexectomie prophylactique
diminue, non seulement le risque de cancer de l’ovaire, mais également le
risque de cancer du sein (diminution de l’ordre de 50 %) (41). Après une
annexectomie prophylactique chez une femme qui n’a pas développé de cancer
42 Les cancers ovariens

du sein se discute la place d’un traitement hormonal substitutif (THS). Le


THS est indiqué si la femme présente des effets secondaires invalidants de la
ménopause (troubles importants du climatère altérant la qualité de vie). Le
THS est possible jusqu’à l’âge physiologique de la ménopause, soit environ
50 ans. Après 50 ans, son indication est plus discutable, la patiente discutera
avec son gynécologue pour évaluer le rapport bénéfice/risque d’un THS ; cette
évaluation doit être réalisée tous les ans.
Dans un contexte HNPCC, l’expertise collective ne retient pas de
surveillance ovarienne car le risque de cancer de l’ovaire est jugé faible (40).
L’attitude retenue par l’expertise est différente de la surveillance proposée par
Lynch et al., qui recommandent une échographie annuelle dès l’âge de 30 ans
et un dosage sérique du CA125 (42). Dans tous les cas, l’ovariectomie seule
n’est pas recommandée ; en revanche, elle est discutée à l’occasion d’une inter-
vention chirurgicale abdomino-pelvienne. Par ailleurs, le diagnostic de
syndrome HNPCC conduit également à la mise en place, d’une part, d’un
suivi annuel de l’endomètre par échographie ou hystéroscopie à partir de l’âge
de 30 ans et, d’autre part, d’un suivi biennal du côlon par coloscopie débuté
entre 20 et 25 ans. Il est recommandé de compléter la coloscopie en utilisant
un colorant de type indigo-carmin afin de détecter des polypes qui seraient
passés inaperçus lors de la coloscopie standard.

Conclusion
Des progrès considérables ont été faits au cours de ces dix dernières années sur
la compréhension des prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire.
Il existe une variabilité inter- et intrafamiliale des risques tumoraux chez les
patients porteurs d’une mutation d’un gène BRCA1/2 ou MMR. Cette variabi-
lité pourrait être due à l’existence de facteurs modificateurs dont des facteurs
génétiques. L’identification de ces facteurs génétiques est difficile mais d’un grand
intérêt. En effet, elle devrait permettre une meilleure compréhension des risques
tumoraux et par-là l’amélioration de la prise en charge des femmes à risque.
La prise en charge du risque ovarien chez les femmes porteuses d’une muta-
tion d’un gène BRCA1/2 peut aller jusqu’à l’annexectomie prophylactique. Il
s’agit d’un geste mutilant qui n’est pas satisfaisant. Des études récentes par
spectrométrie de masse ont permis de mettre en évidence des profils protéiques
spécifiques des cancers de l’ovaire à des stades I (43). Ces études très promet-
teuses permettraient, chez les patientes à risque, de faire des diagnostics à des
stades très précoces qui sont de meilleur pronostic que les formes de cancer de
l’ovaire dépistées par une surveillance échographique.

Remerciements
Les auteurs remercient le Dr Anne Vincent-Salomon pour le partage de ses
connaissances en anatomo-pathologie.
Prédispositions génétiques aux cancers de l’ovaire 43

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Radiothérapie de clôture
L. Claude et M.-P. Sunyach

Radiothérapie externe
La radiothérapie a été utilisée comme traitement adjuvant jusque dans les
années 1970. Elle se limitait alors le plus souvent à la région pelvienne, alors
que le risque de récidive intéresse la totalité de la cavité péritonéale. De plus, la
dose totale de radiothérapie est limitée par la radiosensibilité des organes à
risque, principalement l’intestin grêle, les reins et le foie. Depuis l’apparition
de chimiothérapies efficaces à base de sels de platine, de nombreuses équipes
ont abandonné la radiothérapie en tant que traitement adjuvant des tumeurs
ovariennes. Une revue des indications, des doses et des volumes est proposée en
fonction des données de la littérature.

Indications
Stades I et II
Cinq études randomisées ont été publiées pour évaluer la place de la radiothé-
rapie dans le cancer de l’ovaire. Elles ont été colligées dans une revue
systématique des traitements adjuvants conduite par Elit et al. (1).

Radiothérapie adjuvante postopératoire versus abstention thérapeutique


Deux de ces études comparent la radiothérapie avec l’abstention (2, 3). Elles
ont été menées antérieurement à l’arrivée de la chimiothérapie par sels de
platine. L’étude du Gynecologic Oncology Group (GOG) a randomisé le trai-
tement postopératoire des patientes traitées pour des cancers de stade I :
surveillance, radiothérapie pelvienne ou melphalan étaient proposés. Les
conclusions sont difficiles à tirer en raison d’un staging initial médiocre et de
l’analyse possible de 50 % des patientes environ seulement (2). La seconde
étude randomisait 54 patientes traitées pour stade I entre irradiation pelvienne
326 Les cancers ovariens

postopératoire (45 Gy en 20 fractions) et surveillance (3). Les deux études


suggèrent une diminution des rechutes pelviennes en faveur de la radiothé-
rapie, mais aucune incidence ni sur la survie ni sur la survie dans progression
(toutes formes confondues) n’a été mise en évidence, du fait des localisations
péritonéales des rechutes le plus souvent.

Radiothérapie adjuvante postopératoire (pelvienne ou abdominale totale)


versus chimiothérapie postopératoire
Trois études randomisées comparent la chimiothérapie et la radiothérapie (2,
4, 5). Seule la plus récente de ces études comporte un bras incluant des sels de
platine (36 patientes), comparé à un bras proposant une radiothérapie abdo-
minale totale (34 patientes recevant 43,2 Gy en 24 fractions sur le pelvis et
30,2 Gy sur l’abdomen total) (4). Les deux autres études incluant respective-
ment 65 et 57 patientes de stade I ont randomisé une radiothérapie pelvienne
versus une chimiothérapie sans platine. Aucune de ces trois études ne dégage un
bénéfice en terme de survie de la radiothérapie en tant que traitement adjuvant
du cancer de l’ovaire de stade I.
Cependant, plusieurs réserves doivent être émises : d’une part, la radiothé-
rapie est inadéquate dans les deux dernières études (pelvis seul). D’autre part,
seule l’étude de Chiara et al. répond aux critères de bonnes pratiques chirurgi-
cales. Les deux autres études randomisées sont en effet antérieures à la
publication par l’European Organization for Reasearch and Treatment of
Cancer (EORTC) des critères de qualité de résection chirurgicale optimale
dans les cancers de l’ovaire (1). Ceux-ci sont définis par une hystérectomie par
voie abdominale, associée à une annexectomie bilatérale avec curage lombo-
aortique, un examen minutieux de la cavité péritonéale avec palpation et
biopsie des lésions suspectes éventuelles, un lavage péritonéal et un examen de
la capsule tumorale. En l’absence de ces recommandations chirurgicales, le
stade peut être sous-évalué et biaiser les conclusions des études.
Aucune étude de la littérature ne compare la chimiothérapie seule et la
chimiothérapie suivie d’une irradiation abdominale in toto dans cette indication.

Au total, d’après les données actuelles, il n’y a pas d’indication de radiothé-


rapie adjuvante dans les cancers de stades I et II de l’ovaire.

Stades III et IV
Le traitement standard du cancer de l’ovaire de stades III ou IV comporte une
chimiothérapie et une chirurgie. Le taux de récidives après chirurgie et chimio-
thérapie reste très élevé, même en cas de maladie résiduelle évaluable minime
ou nulle. Plusieurs études rétrospectives ont retrouvé un intérêt pour la radio-
thérapie de « consolidation » chez les patientes présentant une tumeur de
l’ovaire à un stade avancé, mais ces résultats sont controversés. Dans toutes ces
Radiothérapie de clôture 327

études, la présence d’un résidu microscopique ou macroscopique est un facteur


pronostique particulièrement défavorable. Dès le milieu des années 1980, il a
été suggéré dans des études rétrospectives que l’irradiation abdominale totale
pourrait avoir un intérêt en cas de résidu nul ou minime (6-9). Plusieurs études
prospectives randomisées récentes corroborent cette hypothèse.

Radiothérapie après chimiothérapie versus chimiothérapie exclusive


après chirurgie
Lambert et al. ont publié une étude randomisée sur 117 patientes traitées pour
cancers ovariens (stades IIB à IV), présentant une maladie résiduelle nulle ou
minime (< 2 cm) après chirurgie, ayant reçu cinq cures de chimiothérapie à
base de carboplatine (400 mg/m2 par cure). La randomisation proposait, soit la
poursuite du carboplatine (cinq cures supplémentaires à la même dose), soit
une radiothérapie abdominale totale (24 Gy). Aucune différence en terme de
survie globale ou en survie sans récidive n’a été démontrée (10).
Une autre étude prospective randomisée multicentrique à été réalisée entre
1988 et 1993 dans les pays scandinaves : parmi 742 patientes inclues présentant
un carcinome épithélial de l’ovaire de stade III traité par chirurgie première et
chimiothérapie de type CAP (cisplatine, doxorubicine, épirubicine), 172
présentent une maladie résiduelle nulle ou minime (résidu microscopique). Le
traitement de « consolidation » de ces 172 patientes a été randomisé entre irra-
diation abdominale totale (20 Gy en 20 fractions + boost pelvien de 20,4 Gy
en 12 fractions), chimiothérapie (CAP aux mêmes doses que précédemment)
et surveillance. Dans le sous-groupe des patientes présentant une rémission
histologique complète, la survie sans récidive est significativement meilleure
dans le groupe radiothérapie (médianes de survie sans récidive respectives de
116 mois, 37 mois et 32 mois ; p = 0,034), sans retentissement sur la survie
globale. En revanche, aucune différence n’a été observée dans le sous-groupe de
patientes présentant un résidu microscopique (11).

Chimiothérapie versus radiothérapie


En traitement de consolidation après chirurgie de second look, quatre essais
randomisés ont comparé chez des patientes sans résidu ou avec des résidus infé-
rieurs à 2 cm, la radiothérapie externe abdomino-pelvienne à une
chimiothérapie à base de platine (tableau I). Un seul essai, ayant inclus peu de
malades, était en faveur de la chimiothérapie en termes de survie globale (statis-
tiquement non significatif ) (12) (cf. tableau I) ; les trois autres ont observé des
résultats similaires pour les deux traitements (10, 13, 14). L’essai de Berlie n’a
été publié que sous forme d’abstract.
– Les critères d’inclusion dans ces études sont variables (stades, sans résidu ou
avec résidus minimes).
– Le staging chirurgical est hétérogène.
328 Les cancers ovariens

Tableau I – Essais randomisés de radiothérapie externe versus chimiothérapie en traitement de


consolidation dans les formes avancées

Références Traitement N Caractéristiques SSR p SG p Toxicité et Suivi


observance médian
(13) II, III, IV NP NP à 5 ans NP NP 72
publié RAP 43 RsdSL 18 % mois
uniquement (TGC) vs < 2 cm vs
sous forme vs 38 13 %
d’abstract CT
(12) RAP 20 III-IV à 2 NP à 3 ans 0,08 Occlusion : 5 % 22
(TGC) vs RsdSL < 2 cm ans : Leuco Gr4 mois
vs CT 21 38 % 50 % 7,2 % vs
vs vs 10 %
76 % 92 %
(14) RAP 53 IIB, III, IV NP NP 3 ans 0,32 NP vs NP
(TBM) vs Observance =
vs 56 32,1 % 55 %
CT vs MyélotoxicitéGr3
12,5 % 9,5 %
Occlusions 9,5 %
(10) RAP 58 IIB-IV RsdSL à 5 0,92 à 5 ans NS Occlusion (décès) 48
(TGC) vs < 2 cm ans (SL) 1,7 % mois
vs 59 18 % (SL) 24 % Leucopénie 5,1 %
CT vs vs vs
12 % 30 % Neurosév : 25,4 %
Neutrosév : 8,4 %
(11) RAP 32 RCp SSR 0,03 5 ans : NS Plus effets 10
vs vs Après SL 116 69 % secondaires dans le ans
CT 35 vs vs bras radiothérapie
vs vs 37 m 57 %
Obs 31 vs vs
32 m 55 %

SG = survie globale RsdSL = résidu après second look


SSR = survie sans récidive CT = chimiothérapie
RAP = radiothérapie abdomino-pelvienne Neurosév = neuropathie sévère
pCR = réponse complète pathologique Neutrosév = neutropénie sévère

Radiothérapie versus surveillance après chimiothérapie et second look


chirurgical
Pickel et al. ont inclus dans une étude randomisée 64 patientes présentant une
tumeur ovarienne (stades IC à IV) traitées chirurgicalement avec une chimio-
thérapie adjuvante (carboplatine et adriamycine). Les 32 patientes qui n’avaient
pas de résidu postopératoire ont été randomisées entre surveillance et radiothé-
rapie abdominale totale (30 Gy sur l’abdomen + 21,6 Gy sur le pelvis et 12 Gy
en lombo aortique). La survie globale et la survie sans progression à cinq ans
sont significativement améliorées par la radiothérapie (49 % versus 26 % pour la
survie globale et 59 % versus 33 % pour la survie sans progression (15).
Radiothérapie de clôture 329

Au total, dans les stades avancés de cancers ovariens, la radiothérapie


externe parait être efficace en l’absence de résidu tumoral post-chirurgical, en
terme de survie sans récidive. La survie globale n'est pas améliorée dans ces
études par l’irradiation, mais la petitesse des effectifs ne permet pas de
conclure.
Dans les situations où persiste un résidu tumoral, la limite principale de
l’irradiation est probablement la dose-intensité : l’existence d’une maladie rési-
duelle rend nécessaire des doses élevées d’irradiation, qu’il est impossible de
délivrer sur de grands volumes abdominaux et pelviens compte tenu de la toxi-
cité radique.

Volumes et doses de radiothérapie externe

Voir également le chapitre général sur la radiothérapie, de Laurence Thomas.

L'irradiation doit intéresser la totalité de la cavité abdominale

Il a été démontré que le volume cible de l’irradiation doit être étendu à la cavité
péritonéale en totalité et ne doit pas se limiter à la région pelvienne (6, 16). Le
volume comprend donc l’ensemble de la cavité péritonéale, du cul-de-sac de
Douglas jusqu’aux coupoles diaphragmatiques, avec une marge de sécurité de
2 cm. Ainsi, dans une série rétrospective de 106 patientes, traitées pour cancers
ovariens de stades I à IIIA, opérées sans résidu post-chirurgical ou avec résidu
minime, la survie sans récidive à dix ans est de 40 % en cas d’irradiation loca-
lisée contre 70 % en cas d’irradiation de l’abdomen in toto (6, 17).

Effet dose

Certains auteurs ont émis l’hypothèse d’un effet-dose, que ce soit au niveau du
pelvis ou au niveau de l’abdomen. Par exemple, dans la série rétrospective de
Kapp et al., 46 patientes traitées pour cancer ovarien de stade III par chirurgie
puis chimiothérapie, suivie d’une irradiation externe de la cavité péritonéale, la
dose totale de radiothérapie (plus de 30 Gy versus moins de 30 Gy sur la cavité
abdominale) est un facteur prédictif de survie sans progression en analyse
univariée. Quoi qu’il en soit, la tolérance des organes critiques est le facteur
limitant principal à l’escalade de dose, la dose maximum tolérable d’irradiation
sur l’ensemble de l’intestin grêle est de 30 Gy environ, alors qu’il est nécessaire
de délivrer au moins 45 Gy pour espérer contrôler un résidu macroscopique
carcinomateux (18).
330 Les cancers ovariens

Intérêt d'une irradiation bifractionnée


Plusieurs équipes ont réalisé des irradiations bifractionnées de façon à tenter de
limiter la toxicité aiguë et tardive (19, 20). Dans une étude rétrospective,
34 patientes traitées par chirurgie première, chimiothérapie (à base de platine),
puis laparotomie seconde, ont reçu une irradiation abdominale totale de
30 Gy, à raison de deux fractions quotidiennes de 1 Gy, en split-course (deux
séries de 15 Gy avec trois semaines de repos entre les séquences). Outre des
résultats décevants (médianes de survie de 11,7 mois et 5,5 mois pour des
patientes opérées avec respectivement des résidus microscopiques ou entre 0,5
et 2 cm), la toxicité reste importante, en particulier les sténoses du grêle (38 %
des patientes), y compris en l’absence de récidive (19).
Randall et al. ont publié plus récemment une étude prospective de phase II
incluant 52 patientes traitées pour cancers ovariens de stade III, par chirurgie
optimale (résidu < 1 cm), chimiothérapie à base de sels de platine, deuxième
laparotomie, puis radiothérapie abdominale totale bifractionnée (30,4 Gy en
38 fractions bi-quotidiennes +/-surdosage pelvien (63 % des patientes) de
14,4 gy en 18 fractions sur neuf jours) (20). Seules 35 patientes ont pu rece-
voir la radiothérapie. Après radiothérapie, la survie globale est jugée
intéressante à quarante-six mois, pour une survie sans progression à vingt-
quatre mois. Dans cette étude, la toxicité est acceptable, essentiellement
digestive (occlusion intestinale chez 8,3 % des patientes en l’absence de rechute
tumorale, malabsorption plus rarement), significativement plus importante en
cas de surdosage pelvien. La toxicité hématologique est également fréquente
(29 % de grades III et IV) mais gérable.
Au total, il n’y a pas de preuve actuelle de l’intérêt de l’irradiation bifrac-
tionnée. En cas d’irradiation de la cavité péritonéale, il apparaît néanmoins
licite d’utiliser de faibles fractions de doses (1,8 Gy probablement) pour limiter
les toxicités.

Radio-isotopes : curiethérapie isotopique


Principe d’administration
La curiethérapie métabolique représente une autre méthode d’irradiation de la
cavité abdomino-pelvienne. Elle utilise majoritairement le phosphore 32
(P32*), émetteur bêta pur, qui possède un trajet d’action court (2-3 mm),
susceptible en conséquence d’agir sur une maladie microscopique superficielle
au sein de la cavité abdominale. L’injection intrapéritonéale de P32*
(12-20 mCie) est effectuée en présence d’une ascite abondante (2 litres
environ), suivie d’une mobilisation de la patiente alternativement en décubitus
latéral droit et gauche pour optimiser la répartition du produit. La dosimétrie
est imprévisible et la répartition de la dose est difficile à contrôler, probablement
Radiothérapie de clôture 331

très hétérogène. L’intérêt de cette technique reste controversé, et a fait l’objet


de plusieurs études randomisées, soit dans un contexte de maladie localisée,
soit dans le cadre de cancers ovariens de stade III sans résidu lors de la laparo-
tomie de contrôle.

Résultats
Cinq études randomisées sont disponibles dans la littérature.

Maladie localisée : stades I, II ou III limités au pelvis


Trois études randomisées ont étudié l’intérêt d’une curiethérapie isotopique au
P32* isolée après chirurgie première, versus :
– une chimiothérapie (melphalan (21) ou platine (22)) ;
– une radiothérapie externe abdomino-pelvienne (22, 23).
L'étude de Klaasen comportait trois bras :
– curiethérapie isotopique au P32* ;
– radiothérapie externe pelvienne + melphalan (23) ;
– radiothérapie externe pelvienne + curiethérapie au p32* (23).
Aucune différence en terme de survie globale ou de survie sans progression
n’a été mise en évidence dans l’ensemble de ces essais.

Cancers ovariens de stade III sans résidu chirurgical


Deux études randomisées sont disponibles.

Vergote et al. ont proposé une surveillance versus une curiethérapie au P32*
après laparotomie seconde de contrôle négative (pas de résidu) chez
50 patientes porteuses de cancers ovariens de stade initial I-III. La survie actua-
rielle à cinq ans est identique dans les deux bras de traitement (24).
Dans une étude rétrospective, sur 57 patientes traitées pour cancer ovarien
de stade III, en rémission complète lors de la laparotomie de contrôle, 45 ont
reçu du P32. La survie sans maladie dans ce groupe (89 % à quatre ans) est
meilleure que dans le groupe des 14 patientes non traitées (67 %) (25). Une
étude randomisée a donc été menée chez 202 patientes présentant une tumeur
de stade III traitées par chimiothérapie puis chirurgie, sans résidu postopéra-
toire. Cette étude n’a pas confirmé les résultats obtenus en rétrospectif puisque
ni la survie globale ni la survie sans récidive (42 % avec curiethérapie versus
36 %) ne sont significativement augmentées dans le groupe comportant une
curiethérapie isotopique (26).
Au total, aucune étude randomisée dans la littérature d’étude ne met en
évidence de bénéfice à l’utilisation de P32* par rapport à la chimiothérapie,
que ce soit en comparaison aux traitements adjuvants connus (chimiothérapie
332 Les cancers ovariens

et/ou radiothérapie abdomino-pelvienne), ou en consolidation après laparo-


tomie seconde négative.

Conclusion
La radiothérapie externe, aujourd'hui délaissée par la majorité des équipes,
pourrait avoir un intérêt en « consolidation », dans le groupe de malades
présentant une maladie microscopique résiduelle ou en rémission histologique
complète après chimiothérapie.

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Réduction tumorale différée
après chimiothérapie néo-adjuvante

E. Stoeckle et A. Floquet

Introduction
La réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante est égale-
ment appelée chirurgie d’intervalle (ou « interval debulking surgery » selon le
terme anglais). Elle s’inscrit dans le cadre général de la chirurgie de réduction
tumorale des cancers de l’ovaire avancés, déjà abordée dans ce livre (voir
chirurgie de réduction tumorale). La chirurgie d’intervalle est censée réaliser
cette réduction tumorale précocement, après quelques cycles (en général trois)
de chimiothérapie d’induction, chez des patientes inopérables d’emblée. Elle
s’adresse donc à des tumeurs de l’ovaire très avancées, en général de stades IIIC
et IV, dont l’inopérabilité initiale est définie par l’impossibilité d’obtenir une
réduction tumorale optimale.
En ayant comme objectif de réaliser un effort d’exérèse chirurgical dès
qu’une réponse à la chimiothérapie s’amorce, la chirurgie d’intervalle se
distingue de la chirurgie de second regard (« second look surgery »), couramment
réalisée dans les années 1970-1980 et dont la vocation était diagnostique en
réalisant un inventaire abdominal en fin de chimiothérapie chez des patientes
en rémission complète.
Le concept de la chirurgie d’intervalle après chimiothérapie d’induction est
donc plus récent (1-5), avec comme objectifs, à l’instar de traitements néo-
adjuvants dans d’autres pathologies (sein, digestif, ORL, sarcome…) de réduire
l’extension tumorale et permettre secondairement une chirurgie moins agres-
sive, moins mutilante, plus fonctionnelle. Dans le cancer de l’ovaire, il s’appuie
sur les arguments régissant l’indication de la chirurgie d’exérèse initiale (faci-
liter la chimiothérapie par la remise en cycle des cellules, l’amélioration de la
vascularisation tumorale et l’élimination des clones chimiorésistants) en repor-
tant simplement la chirurgie à un moment où la tumeur devient opérable. Ceci
implique sur le plan théorique qu’elle ne survienne pas trop tard au cours du
traitement, avant l’apparition de clones chimiorésistants. Deux conditions sont
260 Les cancers ovariens

nécessaires à cette approche : une certaine efficacité de la chimiothérapie d’in-


duction et l’obtention d’une exérèse optimale.
Cela soulève plusieurs questions :
– comment définir et établir l’opérabilité ?
– qu’est-ce une chirurgie optimale ?
– que faire en cas de progression sous chimiothérapie ?
– combien d’opérations ?
– qui opérer ?
– quand opérer ?
Certaines de ces questions, notamment la définition de l’opérabilité et de la
chirurgie optimale, ont déjà été abordées dans cet opuscule. Nous allons tenter
de répondre aux autres après revue de la littérature ayant trait à la chirurgie
d’intervalle dans le cancer de l’ovaire.

Études de faisabilité (tableau I)


Les résultats thérapeutiques de neuf études, cumulant 370 patientes traitées par
chimiothérapie néo-adjuvante en vue d’une chirurgie d’intervalle, sont résumés

Tableau I – Chirurgie d’intervalle dans les cancers de l’ovaire stade III/IV - études de faisabilité.

Auteur Patientes Chimio néo-adj. Chirurgie Survie


Époque N % % nb. critère chir. % RC chirurgie médiane
StadeIV taxane cycles optimale OP d’emblée complète optimale
Lawton (3) 36 22 % 0 3-4 2 cm 78 % NP 57 % 89 % NP
1984-1986
Lim (6) 30 33 % 0 3-6 NP 37 % NP 18 % NP 10,2 m
1986-1988
Surwit (7) 29 28 % 0 2-3 1 cm 86 % NP NP 66 % 22,5 m
1987-1993
Vergote (8) 31 41 % 30 % 3 0,5 cm 63 % NP NP 84 % NP
1993-1997
Tate (9) 50 16 % 2% 4 1 cm 91 % NP 64 % 92 % 59 %
1993-1999 /3 ans
Recchia (10) 34 100 % 29 % 4 NP 82 % 32 % 100 % 100 % 28 m
1993-2000
Ansquer (11) 54 15 % 54 % 4 2 cm 85 % 9% 50 % 85 % 22 m
1996-1999
Mazzeo (12) 45 20 % 80 % 4 2 cm 87 % 0 62 % 79 % 29 m
1995-2002
Le (13) 61 2% 100 % 3 2 cm NP NP 26 % 80 % 41,7 m
1997-2002
RC : rémission complète
NP : non précisé
Réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante 261

dans le tableau I. Il s’agit d’études rétrospectives, incluant des tumeurs


ovariennes avancées, de stades III et IV, jugées inopérables d’emblée de façon
optimale. Les critères de chirurgie optimale ont été variables selon les séries
(définis selon la taille des nodules résiduels, allant de 0,5 à 2 cm) et les indica-
tions de la chimiothérapie néo-adjuvante ont varié dans le temps. Dans les
séries plus anciennes (3, 6), l’inclusion dans un protocole de chimiothérapie
néo-adjuvante résultait d’un échec de l’opération initiale, n’ayant pas permis
d’obtenir de cytoréduction satisfaisante. Une seconde intervention après
chimiothérapie était censée tenter une nouvelle réduction tumorale plus satis-
faisante. Par la suite, des critères d’inopérabilité cliniques et paracliniques
(stades IV, extension au scanner, taux de CA 125), aidés le cas échéant par des
laparotomies exploratrices, ont fait indiquer une chimiothérapie première (7,
9). Plus récemment encore, l’indication d’opérabilité a été basé essentiellement
sur les résultats de la laparoscopie exploratrice (8, 10-13) en plus des explora-
tions radiologiques. Dans ces deuxièmes approches, les patientes étaient
amenées d’emblée vers un programme de chimiothérapie première sur des
critères d’inopérabilité initiale, sans tentative d’exérèse chirurgicale première.
La chirurgie d’intervalle, partie intégrante du programme, était prévue après
trois cycles de chimiothérapie en l’absence de progression tumorale.
Ce délai, en fait, a été souvent légèrement dépassé, avec la réalisation de la
chirurgie d’intervalle plutôt après quatre cycles qu’après trois. Cette tendance
se confirme dans les séries récentes. Serait-ce dû à la constatation d’une
meilleure opérabilité après un supplément de chimiothérapie ? Ansquer et al.
(11) constatent qu’après six cycles de chimiothérapie le taux de rémissions
complètes obtenues est meilleur qu’après trois cycles (61 versus 45 %), sans que
cela n’ait d’impact sur la survie.
Les résultats de ces séries sont variés. Ainsi, le taux de stades IV inclus va de
2 à 100 % et la proportion de patientes ayant réellement une chirurgie d’inter-
valle après chimiothérapie s’échelonne entre 37 et 91 %. Ces résultats sont
probablement liés davantage aux critères de sélection des patientes qu’aux
réponses à la chimiothérapie, tous les protocoles faisant appel à un dérivé de
platine. En moyenne, 50 % environ des patientes ont une chirurgie complète
(incluant les rémissions complètes d’emblée et secondaires à la chirurgie d’in-
tervalle) avec de larges extrêmes de 18 à 100 %, tandis que le taux de chirurgie
optimale se situe autour de 85 % (extrêmes : 66 - 100 %).
Quant aux résultats thérapeutiques, on remarque qu’ils paraissent davan-
tage corrélés à la période de prise en charge des patientes qu’aux résultats de la
chirurgie obtenus (taux de chirurgies complètes ou optimales), avec des survies
médianes entre dix et vingt mois dans les années 1980 et entre vingt et trente
mois dans les années 1990.
Dans l’ensemble, ces études confirment la bonne faisabilité d’une chirurgie
d’intervalle après chimiothérapie néo-adjuvante, avec une tendance à la
moindre morbidité de la chirurgie d’intervalle par rapport à ce qui est
rencontré lors de la chirurgie première (3, 7-8, 11-12). Cette réduction de la
262 Les cancers ovariens

morbidité proviendrait d’une diminution des gestes digestifs lors de la


chirurgie d’intervalle (7).
L’efficacité de l’approche néo-adjuvante par rapport à la prise en charge
standard comportant chirurgie de réduction tumorale suivie de chimiothérapie
ne peut être établie d’après ces études rétrospectives, hétérogènes et d’interpré-
tation difficiles. Les auteurs dans leur ensemble remarquent que seules les
patientes dont les tumeurs répondent à la chimiothérapie initiale retirent un
bénéfice de cette approche (7, 9, 11-13), permettant de définir un sous-groupe
de patientes au pronostic défavorable, avec une maladie stable ou progressant
sous chimiothérapie et pour qui la chirurgie d’intervalle n’a pas d’indication.
Quant aux stades IV, qui ne constitueraient pas une bonne indication à la
chirurgie d’intervalle pour certains (13, 25), sont pour d’autres (8, 10, 12) l’in-
dication princeps de la chirurgie d’intervalle. La part des stades IV dans la
majorité de ces études de faisabilité est élevée, confirmant la tendance d’inclure
ces stades dans l’approche néo-adjuvante (tableau I).

Comparaisons historiques (tableau II)


Les premières comparaisons entre l’approche néo-adjuvante avec chimiothé-
rapie première suivie de chirurgie d’intervalle et le traitement standard avec
chirurgie première ont été faites avec des séries historiques. Les constatations

Tableau II – Chirurgie d’intervalle dans les cancers de l’ovaire stade III/IV – comparaisons
historiques.
Auteur Époque N Stades Chimiothérapie Chirurgie Survie (p)
IV type nb. complète optimale morbidité
cylces (définition)
Neijt (15) (< 1 cm) (S)
Intervalle 1981 30 NP CHAP/CP NP NP 64 % NP # 23 m
Primaire 1979 62 NP CHAP/CP NP NP NP NP # 56 m
Schwartz (14) (< 2 cm) (NS)
Intervalle 1991-1992 11 54 % PC 6 NP NP NP # 15 m
Primaire 1989-1992 18 28 % PC 6 0 0 NP # 28 m
Morice (16 )* (< 2 cm) (NS)
Intervalle 1996-1999 34 12 % TC 3+5 65 % 94 % 12 % 26 m
Primaire 1985-1993 34 12 % CP/CAP 6 22 % 94 % 53 % 22 m
* étude cas – témoin
CHAP : cyclophosphamide – hexamethylmélamine – doxorubicine – cisplatine
CP : cyclophosphamide – cisplatine
PC : carboplatine – cyclophosphamide
CAP : cyclophosphamide – doxorubicine - cisplatine
TC : paclitaxel – carboplatine
S: significatif
NS : non significatif
NP : non précisé
Réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante 263

sont contradictoires. Pour Neijt et al. (15) la chirurgie d’intervalle apporte des
résultats inférieurs à ceux de la chirurgie primaire. Ceci en particulier en cas de
chirurgie optimale (reliquats < 1 cm) avec une survie significativement moins
bonne chez 30 patientes opérées lors d’une chirurgie d’intervalle en compa-
raison avec 62 patientes opérées d’emblée. Ces mêmes auteurs soulignent que
la chirurgie d’intervalle est probablement utile uniquement chez les patientes
chez qui aucune tentative de réduction tumorale n’a été réalisée initialement.
Pour les autres (14, 16), la survie après chirurgie d’intervalle est la même
qu’après chirurgie initiale, mais il y a moins de complications. Dans l’étude de
Schwartz et al. (14), la chirurgie d’intervalle est réalisée après six cycles de
chimiothérapie. L’étude de Morice et al. (16), qui est une étude cas - témoin,
montre qu’à résultats carcinologiques comparables, le taux de résection diges-
tive nécessaire est nettement inférieur en cas de chirurgie d’intervalle que lors
de la chirurgie primaire (6 résections digestives versus 24 résections respective-
ment).
Les comparaisons historiques comportent un double risque de biais : celui
de la sélection des patientes, différentes dans les cohortes respectives par inclu-
sion rétrospective et celui des modifications diagnostiques et thérapeutiques
intervenues dans le temps, rendant ces comparaisons aléatoires. Une améliora-
tion des résultats dans le temps est constamment rapportée dans les
comparaisons historiques (8, 17).

Comparaisons contemporaines (tableau III)


Il existe une littérature relativement abondante dans laquelle sont comparés les
résultats de la chirurgie d’intervalle à ceux de la chirurgie primaire. Ces compa-
raisons, toutes rétrospectives, impliquent évidemment un biais important lié à
la sélection des patientes dans les deux catégories, sélection habituellement
consécutive à des indications différentes. Les résultats sont donc à interpréter
avec prudence. Néanmoins, l’avantage des comparaisons contemporaines sur
les comparaisons historiques est d’utiliser des protocoles thérapeutiques simi-
laires et d’effacer l’influence du décalage de période de traitement sur les
résultats thérapeutiques.
Comme on peut le voir dans le tableau III, il existe une tendance à l’amé-
lioration des survies aux périodes de traitement plus récentes avec des survies
médianes passant de vingt mois environ dans les années 1980 à trente mois
dans les années 1990. À l’exception de deux études avec des résultats contra-
dictoires (26, 16), la plupart des études ne montrent pas de différences
significatives en terme de survie entre les groupes de patientes avec chirurgie
primaire versus chirurgie d’intervalle. Ainsi, les auteurs concluent en général
que l’approche par chimiothérapie néo-adjuvante suivie d’une chirurgie d’in-
tervalle n’est pas délétère pour les patientes. Lorsqu’un troisième groupe de
patientes, celles des « non opérées » après chimiothérapie première est comparé
264 Les cancers ovariens

Tableau III – Chirurgie d’intervalle dans les cancers de l’ovaire stade III/IV – comparaisons
contemporaines.

Auteur Époque N Stades Chimiothérapie Chirurgie Survie (p)


IV type nb. complète optimale morbidité
cylces (définition)
Griffiths (18) 1974-1977 (< 1 cm)
Intervalle 9 0 CC NP NP 78 % 0 6m
Primaire 15 13 % CM NP NP 80 % 13 % 18 m
Jacob (4) 1977-1988 CDDP+ (< 2 cm) (NS)
Intervalle 22 12 % 3+6 9 % 77 % 23 % 16 m
Primaire 18 11 % 6 5% 39 % 33 % 19,3 m
Primaire suboptim. 22 12 % 7 0 36 % 18 m
Wils (2) 1980-1984 25 % CAP (< 1,5 cm)
Intervalle 18 3+3 29 % NP 0 50 % 3 ans
Primaire 38 6 50 % NP 0 60 % 3 ans
Non opérée 32 6 0 0 0 25 % 3 ans
Onnis (19) 1965-1995 P/A/C (< 2 cm) (NS)
Intervalle 88 28 % NP 19 % 42 % NP 27 % 3 ans
Primaire 284 NP NP 13 % 29 % NP 31 % 3 ans
Schwartz (20) 1979-1996 CDDP+ (< 2 cm) (NS)
Intervalle 59 68 % 5 NP NP NP 13 m
Primaire 206 20 % 6 7% 51 % NP 26 m
Shibata (21) 1987-1996 CDDP+ (< 2 cm) (NS)
Intervalle 23 22 % 6 NP 81 % NP 23 m
Primaire 96 14 % 6 NP NP NP 20 m
Ushijima (22) 1986-2000 CDDP+ (< 1 cm) (NS)
Intervalle 45 22 % T : 24 % 3,7+3 24 % 36 % NP 21 m
Primaire 63 22 % 6 NP NP NP 23 m
Kayikçiog (23) 1991-2000 (< 2 cm) (NS)
Intervalle 45 53 % T : 69 % 3+x 49 % 76 % NP 34 m
Primaire 158 35 % T : 49 % 6 14 % 64 % NP 38 m
Ursic Vrscaj (24)1996-1998 CDDP+ (< 1 cm) (NS)
Intervalle 20 15 % 4+2 40 % 60 % NP 25 m
Primaire 55 13 % 6 11 % 22 % NP 26 m
Deval (25) 1995-2000 100 % T : 100 % (< 1 cm)
Intervalle 15 TC NP NP NP NP 30 m
Primaire 54 TC NP NP NP NP 24 m
Non opérée 33 TC NP NP NP NP 17 m
Kuhn (26) 1996-2000 0 T : 100 % (< 2 cm) (S)
Intervalle 30 TC 3+3 32 % 84 % 27 % 42 m
Primaire 32 TC 6 13 % 63 % 56 % 23 m
Morice (27) 1996-2001 T : 100 % (< 2 cm) (S)
Intervalle 57 17 % TC 3+5 51 % 84 % 11 % # 29 m
Primaire 28 18 % TC 6 54 % 100 % 39 % # 44 m

CP : cyclophosphamide – cisplatine A: doxorubicine


CM : cyclophosphamide - melphalan C: cyclophopshamide
CDDP+ : combinaison à base de cisplatine T: paclitaxel
CAP : cyclophosphamide – doxorubi- TC : paclitaxel - carboplatine
cine – cisplatine NP : non précisé
P: cisplatine NS : non significatif
Réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante 265

aux autres groupes, la survie de ces patientes s’avère inférieure à celle des autres
patientes (2, 25), soulignant le caractère défavorable de ces groupes où les
conditions initiales nécessaires (chimiothérapie efficace, chirurgie optimale)
n’ont pas été réunies.
Le moment de réalisation de la chirurgie d’intervalle est habituellement fixé
après trois cycles de chimiothérapie (2, 4, 16, 23, 26), mais certains la réalisent
après quatre cycles (22, 24), voire après cinq ou six cycles (20, 21).
La majorité des auteurs, sauf deux (2, 16), rapportent des taux supérieurs
d’exérèse complète lors de la chirurgie d’intervalle que lors de la chirurgie
primaire, avec des taux compris entre 9 et 51 % ; une même supériorité est
retrouvée pour les taux de chirurgie optimale, bien que les définitions en soient
très variables.
Lorsqu’elle est rapportée, la morbidité s’avère constamment inférieure pour
la chirurgie d’intervalle que pour la chirurgie primaire (4, 16, 18, 26). De
façon générale, les auteurs insistent sur la meilleure faisabilité de la chirurgie
d’intervalle en comparaison avec la chirurgie initiale, permettant d’obtenir des
survies semblables avec moins de complications que lors de la chirurgie initiale.
Il ne faut pas oublier, néanmoins, que ces comparaisons rétrospectives
portent sur des populations différentes. Il est vrai que les patientes ayant béné-
ficié d'une chirurgie d'intervalle n’étaient pas opérables d’emblée et a priori
porteuses de maladies plus avancées ; cependant il serait imprudent de conclure
à la supériorité de l’approche néo-adjuvante sur l’approche standard du fait de
l’égalité des résultats, l’exclusion des patientes non opérées, majoritairement
celles progressant sous chimiothérapie, venant biaiser les résultats.

Études randomisées (tableau IV)


Trois études randomisées ont été réalisées à notre connaissance. Il s’agit d’une
étude anglaise (28), une émanant de l’EORTC (29) et une du GOG américain
(30), détaillées dans le tableau IV. Ces trois études ont été réalisées successive-
ment, celles du GOG étant la plus récente. Il s’agit dans tous les cas d’études
multicentriques. Les critères d’inclusion dans les trois études comportaient des
cancers de l’ovaire de type épithélial, de stades III et IV, ayant eu une chirurgie
première s’avérant non optimale suivie d’une chimiothérapie « néo-adjuvante »
ne montrant pas de progression tumorale. La chimiothérapie a comporté un sel
de platine dans tous les cas, associé au paclitaxel seulement dans l’étude de Rose
et al. La randomisation a comparé la réalisation d’une chirurgie d’intervalle
après trois cycles de chimiothérapie suivie de trois autres cycles à une chimio-
thérapie exclusive par six cycles de la même chimiothérapie. La durée globale
de traitement dans les trois études a été prolongée entre deux et quatre
semaines dans les bras chirurgie avec une dose - intensité de chimiothérapie
non affectée par cette prolongation. Le suivi médian a été d’environ quatre ans
dans les trois études.
266 Les cancers ovariens

Tableau IV – chirurgie d’intervalle dans les cancers de l’ovaire stades II/IV - essais randomisées.
Redman Van de Burg Rose
(28) (29) (30)
Époque 1986-1990 1987-1993 1994-2001
Critères de sélection : chirurgie suboptimale initiale, absence de progression tumorale sous chimio-
thérapie
définition chirurgie suboptimale > 2 cm > 1 cm > 1 cm
effort de cytoréduction initiale oui +/- oui
par chirurgien spécialisé 10 % peu (NP) 95 %
randomisation avant chimio après chimio après chimio
nombre de cycles avant chirurgie 3 3 3
Patientes :
N initial (335) 425 550
randomisées 86 319 448
éligibles et évaluées : 79 278 424
âge 50-60 ans 59 ans 57 ans
carcinome séropapillaire 41 % 58 % 76 %
stade IV 14 % 22 % 6%
grade 3 47 % 58 % 51 %
ascite initiale NP 75 % 79 %
lésions ≤ 2 cm 0 5% 12 %
Chimiothérapie : CP/PAB CP TP
accomplissant 6 cycles initiaux (8 cycles) 84 % 95 %
chimiothérapie consolidation 0 35 % 11 %
Chirurgie d’intervalle :
Randomisées 37 pts 140 pts. 216 pts.
Réalisées 25 (68 %) +1 cas 127 (91 %) 201 pts (93 %)
par chirurgien spécialisé 50 % NP 99 %
Etat lésionnel :
RC d’emblée 4 (15 %) 22 (17 %) NP
RC post-opératoire 5 (20 %) 48 (38 %) NP
Chirurgie optimale 14 (53 %) 33 (26 %) 168 (84 %) *
Chirurgie suboptimale 7 (27 %) 46 (36 %) 33 (16 %)
Complications chirurgie d’intervalle :
plaie viscérale 2 (8 %) 6 (5 %) NP
transfusion 11 (42 %) 28 (22 %) NP
complications postopératoires 9 (35 %) 18 (14 %) NP
dont sévère 4 (15 %) 4 (3 %)
Chirurgie second look 0 37 % 2%
Prolongation de durée de traitement dans le groupe chirurgie
14 j 24 j 24 j
Suivi médian 48 mois 50 % > 42 mois 47 mois
Survie globale médiane :
Survie chirurgie d’intervalle 15 mois ** 26 mois ** 36,2 *** mois
Survie chimiothérapie seule 12 mois ** 20 mois ** 35,7 ***mois
p NS 0,012 NS

CP : cisplatine – cyclophosphamide
PAB : cisplatine - doxorubicine - bléomycine
TP : cisplatine - paclitaxel
* incluant les RC postopératoires
** survie calculée à partir du début de la chimiothérapie
*** survie calculée à partir du troisième cycle de chimiothérapie
Réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante 267

À côté de ces similitudes, plusieurs différences sont constatées :


La première concerne les critères d’inclusion initiale. La chirurgie optimale
a été définie selon la taille des nodules péritonéaux résiduels, inférieure à 2 cm
pour Redman et al., mais inférieure à 1 cm dans les deux autres études. De ce
fait, l’étude anglaise inclut davantage de patientes avec des lésions de gros
volumes, mais aucune avec des lésions de 1 à 2 cm qui représentent, par contre,
12 % des cas de l’étude du GOG.
L’inclusion des stades IV a été la plus importante dans l’étude de l’EORTC
avec 22 % des cas, suivi de l’étude anglaise avec 14 % des cas (uniquement
stades IV pleuraux) et seulement 6 % dans l’étude du GOG.
La seconde différence concerne « l’effort » de cytoréduction initial. Il peut
être supposé maximal dans l’étude du GOG, car l’intervention a été réalisée
dans 95 % des cas par un chirurgien spécialisé, ce qui influence directement les
résultats chirurgicaux (31, 32). L’effort chirurgical initial a également été
maximal dans l’étude anglaise, car il s’agissait d’un critère d’inclusion. Les
patientes ayant eu une chirurgie initiale jugée non maximale n’ont pas été
incluses dans cette étude (27 exclusions). Dans l’étude de l’EORTC, par
contre, la chirurgie initiale, réalisée par des chirurgiens toutes spécialités
confondues, n’a certainement pas été maximale pour toutes les patientes,
comme en témoigne le taux de 30 % d’ovaires laissés en place (33). De plus, on
note au moment de la chirurgie d’intervalle un taux d’exérèses optimales de
62 % dans l’étude EORTC contre 73 % et 84 % dans les études anglaise et
américaine respectivement (tableau IV).
Il n’y a pas eu de traitement de clôture au terme du traitement initial après
la sixième cure de chimiothérapie dans l’étude anglaise. Dans l’étude de
l’EORTC, 37 % des patientes dans l’ensemble du groupe ont eu une chirurgie
de second look, suivie fréquemment d’un traitement de clôture (35 % des cas,
plus fréquent dans le bras chimiothérapie que dans le bras chirurgie). Des trai-
tements de clôture, également répartis dans les deux bras, ont été réalisés hors
protocole dans 11 % des patientes de l’étude du GOG.
Sur le plan méthodologique, dans l’étude anglaise, la randomisation a été
réalisée initialement en intention de traiter, ce qui la distingue des deux autres
études et qui explique que seulement 25 des 37 patientes (68 %) allouées à la
chirurgie d'intervalle ont été réellement opérées (plus une patiente dans le bras
controlatéral) ; surtout, les faibles effectifs ne permettent pas de distinguer les
deux stratégies. Dans les études de l’EORTC et du GOG, la randomisation
après le troisième cycle de chimiothérapie a permis la réalisation de la chirurgie
d’intervalle dans 91 % et 93 % des cas ; cependant, dans ces deux études, les
exclusions de patientes ont eu lieu avant randomisation, essentiellement du fait
de progression tumorale, ne laissant respectivement que 278/425 (65 %) et
424/550 (77 %) éligibles et évaluées. Dans une mise à jour de l’étude de
l’EORTC à 6,3 ans (33), finalement 142 patientes ont été opérées (sur 159
patientes randomisées dans ce bras) et 160 patientes ont été incluses dans le
bras chimiothérapie, aboutissant à un taux d’inclusion dans l’étude de 71 %
(302/425 patientes).
268 Les cancers ovariens

Au terme des analyses, l’étude de l’EORTC est positive, montrant une


prolongation significative de la survie sans rechute et de la survie globale dans
le bras chirurgie d'intervalle, alors que les deux autres études ne montrent pas
cette différence. L’amélioration du pronostic dans l’étude de l’EORTC est attri-
buée en premier lieu au sous-groupe de patientes ayant pu avoir une chirurgie
de réduction tumorale optimale. Au contraire, dans l’étude du GOG, ce sous-
groupe de patientes ne retire pas de bénéfice de l’intervention : identité de
survie entre 79 patientes ayant une cytoréduction < 1 cm et 33 patientes
gardant des lésions résiduelles > 1 cm malgré l’effort de cytoréduction parmi
112 patientes présentant initialement des lésions > 1 cm au moment de
commencer la chirurgie d’intervalle.
L’amélioration significative de la survie dans le bras chirurgie de l’étude
EORTC a été confirmée dans la mise à jour à 6,3 mois avec 24 % de survie à
cinq contre 13 % dans le bras chimiothérapie (p = 0,0032) ; (33). De plus, l’au-
teur signale qu’au terme d’une analyse multivariée des risques, il ne leur a pas
été possible d’identifier un sous-groupe de patientes ne bénéficiant pas de la
chirurgie d’intervalle (29, 33).
Comment analyser ces résultats ?
Il convient d’abord de souligner le faible effectif de l’étude anglaise avec
79 patientes incluses, et le petit nombre de patientes randomisées effectivement
opérées (25/37 patientes = 68 %), rendant l’étude insuffisamment puissante
pour mettre en évidence une différence de survie. Il peut s’agir d’une étude
faussement négative.
Les deux autres études, du fait de leur effectif, risquent moins ce problème
de puissance. Néanmoins, toutes les patientes initialement prévues n’ont pas
été incluses ou analysées, ce qui peut biaiser les résultats du fait de la sélection
des patientes. Cependant, la répartition des caractéristiques entre patientes est
équilibrée dans les deux bras des deux études.
Est-ce que la différence entre l’étude de l’EORTC et celle du GOG
proviendrait de l’utilisation du paclitaxel dans l’étude du GOG ? On note dans
cette étude de meilleurs taux de survie que dans les autres. Le paclitaxel peut y
avoir contribué, mais alors de façon égale dans les deux bras car la dose inten-
sité y a été comparable. De plus, cet argument ne peut expliquer les résultats
comparables de l’étude anglaise.
Par contre, l’effort chirurgical, initial et secondairement, ne semble pas
avoir été le même dans ces différentes études. Cet effort a été important de
façon explicite dans l’étude anglaise, car il s’agissait d’un critère d’inclusion. Il
a été important de façon implicite dans l’étude du GOG, étant donné la
spécialisation des chirurgiens avec 95 % de spécialistes lors des interventions
initiales et 99 % lors des interventions secondaires, ce qui témoigne de l’im-
portance de l’effort chirurgical d’ailleurs souligné par l’auteur (30). Par contre,
l’étude de l’EORTC, du fait du type de recrutement, a inclus des patientes
jugées non opérables essentiellement par des équipes chirurgicales non spécia-
lisées.
Réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante 269

Si l’on retient cette hypothèse, il est force de constater que lorsque l’effort
chirurgical a été porté lors de l’intervention initiale (études anglaise et améri-
caine), un second effort lors de la chirurgie d’intervalle n’apporte pas de
bénéfice supplémentaire. Par contre, chez les patientes n’ayant pas eu l’effort de
cytoréduction maximale lors de la chirurgie initiale (étude EORTC), le
deuxième geste de cytoréduction semble bénéfique.

Dans cette deuxième situation, est-ce que toutes les patientes peuvent béné-
ficier de la chirurgie d’intervalle ? ME van der Burg et al. semblent le penser en
insistant sur le bénéfice ubiquitaire pour toutes les patientes du groupe
chirurgie et sur la faible morbidité de la chirurgie d’intervalle (29, 33). Ceci
corroborait l’idée que la chirurgie d’intervalle, quel que soit son résultat, quel-
qu'ait été l’effort chirurgical initial, améliorerait le pronostic des patientes par
rapport à celles non opérées, toujours de mauvais pronostic (2, 25). À l’analyse
des résultats de l’EORTC, cette affirmation ne peut pas être retenue : parmi
127 patientes opérées, 22 étaient d’emblée en rémission complète, sans cytoré-
duction nécessaire. 46 patientes n’ont pas eu de chirurgie optimale < 1 cm et
leur survie s’avère médiocre, comparable à celle justement des patientes non
opérées, et l’utilité de la chirurgie pour ces 68 patientes (54 %) paraît discutable.
Seules les 59 patientes (46 %) restantes ayant eu une chirurgie devenue complète
ou optimale semblent réellement avoir tiré bénéficie de cette opération.

Discussion - Conduite pratique

Chirurgie d’intervalle ou chirurgie primaire ?

Cette question ne peut être résolue par la littérature analysée. Celle-ci peut
simplement confirmer que la chirurgie d’intervalle est faisable, avec, chez des
patientes sélectionnées, une morbidité inférieure à celle observée lors de la
chirurgie première. Les études randomisées citées posaient la question de la
place de la chirurgie d’intervalle à l’intérieur d’une approche de traitement néo-
adjuvant. Elles n’ont pas comparé cette approche néo-adjuvante à la prise en
charge standard par chirurgie suivie de chimiothérapie. Cette question est
actuellement traitée dans un essai de l’EORTC (étude 55971) en cours, qui
permettra, nous l’espérons, après l’échec d’un premier essai américain (GOG
80) faute d’inclusion, d’apporter des éclaircissements sur la meilleure stratégie
à adopter face à une tumeur ovarienne avancée de stades IIIC et IV.

D’ici là, la chirurgie première suivie de chimiothérapie reste de règle dans


la prise en charge des tumeurs de l’ovaire avancées mais opérables.
270 Les cancers ovariens

Qui opérer ?
La chirurgie d’intervalle s’adresse aux tumeurs de l’ovaire avancées inopérables
d’emblée. L’inopérabilité est définie par l’impossibilité de réaliser une chirurgie
optimale. La chirurgie non optimale laisserait en place une carcinose périto-
néale importante en nombre de nodules péritonéaux (34) et en taille (17), la
taille limite des nodules se situant entre 1 et 2 cm.
L’évaluation de l’opérabilité, que nous n’avons pas traitée dans ce chapitre,
repose sur des critères cliniques, radiologiques, biologiques et biopsiques. Ces
critères peuvent actuellement être supportés par la cœlioscopie exploratrice (8,
10, 11, 13), permettant d’obtenir un inventaire abdominal détaillé, probable-
ment la meilleure source pour évaluer l’opérabilité.
Le bilan cœlioscopique est surtout utile pour définir l’opérabilité des stades
III. Sauf exception (13, 25), les stades IV constituent, pour la plupart des auteurs,
l’indication idéale de la chirurgie d’intervalle. En effet, dans ces stades, les
exérèses optimales sont des plus rares, mais la morbidité est majeure.
Fréquemment, la chimiothérapie postopératoire ne peut être réalisée dans les
délais, expliquant en partie le faible taux de survies dans ces stades (< 10 % en
cinq ans). L’approche néo-adjuvante dans les stades IV permettrait de réaliser une
chirurgie d’intervalle dans de meilleures conditions avec plus de chance de succès.

Que faire en cas d’échec de la chimiothérapie néo-adjuvante ?


Cette question est d’importance car l’approche néo-adjuvante sélectionne des
patientes répondeuses à la chimiothérapie. Environ 30 % des patientes sont en
échec thérapeutique avec une progression tumorale ou une maladie stable sous
chimiothérapie. La stabilité tumorale a été dans quelques études (29) une indi-
cation à la chirurgie d’intervalle. Cependant, nous voyons mal comment une
maladie initialement inopérable et qui reste stable, soit devenue opérable
secondairement. Seuls d’autres modes d’explorations ou un nouveau regard sur
l’opérabilité (appréciée par un chirurgien spécialisé par rapport à un chirurgien
non spécialisé) peuvent encore inciter à ré-opérer dans cette situation. Il s’agit
de situations d’exception et rarement suivies de succès. Pour notre part, nous
considérons qu’une maladie stable sous chimiothérapie classique est un échec
thérapeutique et une contre-indication à la chirurgie d’intervalle.
Est-ce qu’il y a eu perte de chances pour ces 30 % de patientes en échec
thérapeutique et chez qui une chirurgie potentiellement bénéficiaire n’a pu être
réalisée ? Cette hypothèse paraît peu probable, car la chirurgie première se serait
soldée par une exérèse sub-optimale, donc non utile sur le plan carcinologique.
Éviter à ces patientes une opération inutile mais potentiellement morbide et les
amener précocement à une chimiothérapie de deuxième ligne, ou à une alter-
native thérapeutique (traitements ciblés) dans un cadre d’essai thérapeutique,
est probablement plus avantageux pour ces patientes. Tout est dans la qualité
Réduction tumorale différée après chimiothérapie néo-adjuvante 271

de l’évaluation d’opérabilité initiale, devant faire appel à la cœlioscopie explo-


ratoire en cas de doute pour éviter la perte de chance.

Combien d’interventions ?
L’enthousiasme suite aux résultats de l’étude de l’EORTC (29), préconisant
l’indication large de la chirurgie d’intervalle du fait de sa faible morbidité et du
supposé bénéfice pour toutes les patientes sélectionnées a clairement été à l’ori-
gine d’un excès chirurgical chez ces patientes de mauvais pronostic,
rappelons-le. L’addition de la morbidité d’une nouvelle intervention, même
inférieure, à celle d’une première intervention, n’est pas négligeable et certai-
nement dommageable si l’indication n’a pas été bonne. Les résultats des trois
études randomisées juxtaposées nous permettent d’affiner les indications : pas
de chirurgie d’intervalle après échec d’une première intervention si cette
dernière a comporté un effort d’exérèse maximale par un chirurgien spécialisé.
Dans cette situation, c’est la biologie tumorale qui prend le dessus sur l’action
thérapeutique chirurgicale. Par contre, la chirurgie d’intervalle paraît effective-
ment indiquée lorsque l’effort chirurgical initial a été insuffisant, situation plus
fréquente après intervention par un chirurgien non spécialisé dans cette patho-
logie.
La meilleure approche serait certainement d’éviter la chirurgie initiale
lorsque le bilan conclut à l’inopérabilité et de réaliser la chirurgie d’intervalle
après chimiothérapie néo-adjuvante : « Mieux vaut opérer une fois bien que
deux fois ! »

Quand opérer ?
Les arguments qui sous-tendant l’indication de la chirurgie d’intervalle repren-
nent ceux de la chirurgie première : réduire la masse tumorale pour faciliter la
chimiothérapie de lésions résiduelles moindres en volume, mieux vascularisées,
comprenant moins de clones chimiorésistants. Dans ces conditions, il faut
opérer précocement, dès que la tumeur devient opérable et avant l’apparition
de la chimiorésistance. Ainsi, il a été préconisé de réaliser cette intervention au
bout de trois cycles de chimiothérapie (8, 29). Ce délai a été respecté dans la
majorité des études, mais des interventions plus tardives, après quatre cycles
(voir tableaux I et III) ou cinq (14), voire six cycles de chimiothérapie (20, 21)
ont été réalisées. Ce délai supplémentaire semble ajouter de la résécabilité
supplémentaire (11), sans qu’on puisse déterminer, à partir de ces études rétros-
pectives, si le report de la chirurgie a fait exclure de la chirurgie d’intervalle
davantage de patientes qui n’ont pas pu bénéficier alors de la chirurgie.
Aucune donnée de la littérature actuelle ne supporte les arguments théo-
riques en faveur de la précocité de la chirurgie d’intervalle.
272 Les cancers ovariens

Au contraire, outre une meilleure faisabilité de la chirurgie d’intervalle


retardée, d’autres constatations plaideraient plutôt en faveur d’une intervention
après six cycles qu’après trois :
(1) certitude de pouvoir délivrer toute la série de chimiothérapie, en évitant
les interruptions dues aux complications postopératoires ;
(2) confort des patientes. Contrairement aux postulats de la chirurgie
première, argumentant en faveur d’une amélioration du confort des patientes
par la réduction tumorale chirurgicale, l’expérience au quotidien montre que,
dans ces formes très avancées de tumeurs de l’ovaire, l’amélioration du confort
est assurée chez 70 % des patientes par la chimiothérapie initiale efficace,
permettant alors de réaliser la chirurgie d’intervalle dans des conditions de vie
(« performance status ») meilleures. Lors de la chirurgie d’intervalle, logique-
ment moins agressive (moins de résections digestives, moins de colostomies,
moins de transfusions), la morbidité est moindre que ce qui est observé habi-
tuellement après chirurgie première (cf. tableaux II et III). La qualité de vie
dans l’approche néo-adjuvante a été évaluée dans une seule étude (35), confir-
mant son amélioration sous chimiothérapie. D’autres études sont cependant
nécessaires, car cette étude, calquée partiellement sur une autre (36), ne permet
pas d’apporter la conviction de la justesse de ses résultats.
Le meilleur moment d’opérer reste encore à déterminer.

Conclusion
Il existe une place certaine pour la chirurgie d’intervalle dans les tumeurs de
l’ovaire. Cette chirurgie d’intervalle doit prendre en compte la biologie tumo-
rale, fréquemment agressive, et la sensibilité tumorale à la chimiothérapie,
fréquente aussi. Elle est indiquée au mieux devant une tumeur de l’ovaire
avancée, inopérable de façon optimale. Il s’agit soit de stades IV, soit de stades
III où l’inopérabilité a été confirmée de préférence par des investigations mini-
invasives, évitant ainsi de multiplier les laparotomies potentiellement
morbides. L’objectif est de ne réaliser qu’une intervention, mais la plus
complète possible, au meilleur moment. Classiquement, la chirurgie d’inter-
valle est réalisée après trois cycles de chimiothérapie, mais il n’y a pas
d’argument dans la littérature contre-indiquant sa réalisation plus tardive, par
exemple après six cycles.

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Techniques d’aide au diagnostic
des tumeurs ovariennes
F. Penault-Llorca

Généralités
Les tumeurs ovariennes représentent un ensemble complexe de tumeurs carac-
térisées par une grande variété de groupes tumoraux et de types
histopathologiques. Pour les tumeurs épithéliales, il existe plusieurs catégories
de tumeurs : les tumeurs bénignes, à malignité limite et les adénocarcinomes.
L’immuno-histochimie (IHC) et les colorations spéciales peuvent aider à
résoudre de nombreux problèmes de diagnostic différentiel. La microscopie
électronique n’est pratiquement plus utilisée, pour des raisons techniques. Elle
apportait cependant une aide précieuse dans certaines situations.
Les situations dans lesquelles les techniques spéciales peuvent aider le
pathologiste sont les suivantes :
– un diagnostic différentiel entre une tumeur primitive et une métastase
ovarienne ;
– un diagnostic de groupe tumoral (tumeur épithéliale, tumeur germinale,
tumeur du stroma et des cordons sexuels…) ;
– au sein d’un même groupe tumoral, un diagnostic du type de tumeur
(tumeur endométrioïde ou séreuse, tumeur du sac vitellin ou choriocarcinome…).
En revanche, l’immuno-histochimie et les colorations spéciales ne seront
d’aucune aide pour différencier une tumeur bénigne d’une tumeur maligne
(comme d’ailleurs pour pratiquement tous les autres types tumoraux, à l’ex-
ception de la pathologie prostatique).

Marqueurs utilisés
Marqueurs épithéliaux communs
L’utilisation des pan-cytokératines (AE1/AE3) n’a d’intérêt que dans quelques
situations particulières comme l’identification d’une différenciation épithéliale
dans une tumeur indifférenciée, la distinction entre une tumeur germinale
100 Les cancers ovariens

séminomateuse et une tumeur germinale non séminomateuse (qui exprimera


diffusément les pan cytokératines à l’opposé des tumeurs séminomateuses dans
lesquelles l’expression est absente ou bien focale et faible [1]).

L’expression de l’EMA (antigène épithélial de membrane) est utile pour


distinguer une prolifération épithéliale d’une tumeur du stroma et des cordons
sexuels mimant une tumeur épithéliale. L’EMA est beaucoup plus spécifique
d’une prolifération épithéliale que les pan cytokératines qui peuvent être expri-
mées dans les tumeurs épithéliales primitives et secondaires, les tumeurs de la
granulosa, les tumeurs de Sertoli-Leydig et les tumeurs germinales à l’exception
des séminomes (ou dysgerminomes (2)).

D’autres marqueurs peuvent être utilisés (CK7-CK20, CD15…), ils seront


développés plus loin dans la section « diagnostic différentiel entre tumeurs
épithéliale ovarienne primitive et métastatique » (3).

Marqueurs associés aux tumeurs germinales

Alpha-fœto-protéine : ce marqueur est exprimé principalement par les tumeurs


du sac vitellin, mais aussi par les tumeurs à différentiation hépatoïde comme la
tumeur du sac vitellin hépatoïde, l’exceptionnel carcinome ovarien hépatoïde
et les hépatocarcinomes métastatiques à l’ovaire (4). Bien qu’exceptionnelle-
ment positif focalement dans des carcinomes embryonnaires, un marquage par
l’alphafœto-protéine signe en général un tumeur du sac vitellin (utile pour le
diagnostic différentiel avec une tumeur endométrioïde présentant des aspect
du tumeur vitelline) (5).

β HCG : son expression est limitée aux cellules syncytiotrophoblastiques et


à une population de trophoblastes extravilleux. L’expression de β HCG est
donc caractéristique des tumeurs renfermant des cellules syncytiotrophoblas-
tiques comme les choriocarcinomes (par définition), certains séminomes et
carcinomes embryonnaires. En revanche, une expression de β HCG peut être
retrouvée de façon non spécifique dans de nombreux carcinomes indifférenciés
en l’absence de tout caractère germinal (6, 7).

PLAP (phosphatase alcaline placentaire) : son expression est reconnue


comme spécifique d’une tumeur séminomateuse (où son absence d’expression
est inhabituelle). Cependant, des tumeurs non séminomateuses, et de
nombreux carcinomes peuvent exprimer la PLAP.
Techniques d’aide au diagnostic des tumeurs ovariennes 101

Marqueurs des cellules du stroma et des cordons sexuels


La réticuline : son aspect est caractéristique dans les tumeurs de ce groupe puis-
qu'elle enserre chaque cellule tumorale (8).

Inhibine : marqueur spécifique des tumeurs de ce groupe tumoral marque


naturellement les cellules lutéinisées du stroma ovarien accompagnant certains
carcinomes ce qui impose lors de l’interprétation de l’IHC de bien distinguer
le type cellulaire impliqué par le marquage (9).

Le CD99 ou MIC2 bien que non spécifique de ces tumeurs est exprimé
dans les tumeurs de la granulosa et les tumeurs de Sertoli et Leydig, de même
que le Melan A qui est plutôt exprimé dans les tumeurs à cellules de Sertoli
(10).

Autres marqueurs
Ils seront développés dans les sections appropriées de diagnostic différentiel
(marqueurs lymphoïdes, marqueurs de mélanome malin, marqueurs endocri-
niens, marqueurs musculaires…).

Diagnostic différentiel entre un adénocarcinome


ovarien primitif et une métastase
Problématique des tumeurs séreuses
Elles posent un diagnostic différentiel avec une métastase sauf dans le cas où le
diagnostic clinique s’oriente plutôt vers un mésothéliome malin avec extension
ovarienne (contexte d’exposition à l’amiante). Le profil immuno-histochi-
mique « de base » étant commun (KL1, EMA, Vimentine positivité), c’est

Tableau I – Panel suggéré d’anticorps distingant adénocarcinome ovarien et mésothéliome


malin.

Anticorps Adénocarcinome ovarien Mésothéliome malin


CD15 +/- -
BerEP4 + -
B72.3 + -
CK5/CK6 - +
Calrétinine Rares cellules + +
102 Les cancers ovariens

l’utilisation d’un panel d’anticorps tels que CD15 (LeuM1), BerEP4, B72.3
pour la différentiation épithéliale, et les cytokératines CK5/CK6 et la calréti-
nine pour la différentiation mésothéliale qui permet de trancher (11).

Tumeurs mucineuses ou endométrioïdes


Le diagnostic différentiel se pose fréquemment pour ces tumeurs, en particu-
lier lorsqu’elles sont bilatérales (en faveur d’une métastase). Les métastases
peuvent provenir principalement du tractus digestif : côlon, estomac, pancréas,
de la glande mammaire, du poumon. Tous les aspects histopathologiques
peuvent s'observer au niveau d’une métastase ovarienne d’un carcinome muci-
neux, notamment les aspects de tumeur « borderline » et de cystadénome. Les
aspects de nécrose glandulaire en guirlande sont assez évocateurs d’un
processus métastatique. Les panels immuno-histochimiques les plus utilisés
renferment les cytokératines 7 et 20, l’ACE monoclonal, les récepteurs hormo-
naux, le TTF1 (3, 12-15).

Tableau II – Panel suggéré d’anticorps pour distinguer tumeurs mucineuses et endométrioïdes.

Anticorps Ovaire Ovaire Côlon Pancréato- Sein Poumon


mucineux non biliaire
mucineux Estomac
CK7 + + - +, +/-,-/+,- + +
CK20 + /- - + +, +/-,-/+,- - -/+
ER/PR +/- + /- - - + /- -
mACE + /- -/+ + + Quelques cell + +
GCDPF - - - - +/- -
TTF1 - - - - - + /-

CK7-
CK7- CK20+
CK20+ Côlon
Côlon

RE/RP+
RE/RP+ Ovaire
Ovairemucineux
mucineux
CK20+
CK20+

RE/RP-
RE/RP- Pancréato-biliaire
Pancréato-biliaire
CK7+ Estomac
Estomac
CK7+
CK20-
CK20- mACE+
mACE+ Poumon
Poumon

mACE-
mACE- Ovaire non
Ovaire nonmucineux
mucineux

Fig. 1 – Algorythme diagnostique adénocarcinome primitif ovarien - métastase d’un adéno-


carcinome.
Techniques d’aide au diagnostic des tumeurs ovariennes 103

La négativité de CK7 exclut a priori un primitif ovarien par rapport à un


carcinome digestif.
Le profil immuno-histochimique des métastases des carcinomes gastriques
et pancréatobiliaires sont le plus souvent non contributifs car toutes les combi-
naisons CK7/CK20 sont possibles ; par exemple, les tumeurs gastriques
présentent des profils variables : 40 % des cas : C7/CK20+, 10 % : CK7-/
CK20-, 30 % CK7 +/CK20+, 20 % : CK7+/CK20-. Une diffusion tumorale
importante fait penser à un processus métastatique, par exemple devant des
métastases hépatiques, associées à une tumeur mucineuse ovarienne bilatérale
de phénotype non digestif (en particulier, avec une positivité du CK7 et une
faible positivité du CK20).
Certains anticorps comme le WT1 (16), la bêta caténine (17), HAM56
(18) ont été rapportés dans la littérature comme plus ou moins spécifiques
d’une origine ovarienne primitive. Cependant, ils restent peu utilisés en
routine.

Tumeurs à cellules claires


Les adénocarcinomes primitifs ovariens à cellules claires (CCC) expriment
fortement et de manière diffuse les cytokératines, l’EMA et le CD15. Ils sont
cytokératine 7 positive et cytokératine 20 négative. L’ACE est positif dans 38 à
63 % des cas et le CA125 dans 50 à 72 % des cas selon les auteurs. L’alpha-fœto-
protéine (AFP) est rarement positive. Le CD10 est toujours négatif (19, 20). Le
diagnostic différentiel se porte principalement dans les cas suivants :
Tumeurs germinales (tumeur vitelline, dysgerminome) : cliniquement, ces
tumeurs touchent des femmes jeunes à l’inverse des carcinomes à cellules claires
qui sont observés après 50 ans et la tumeur vitelline s’accompagne d’une
augmentation de l’alpha-fœto-protéine sérique :
– comme les tumeurs du sac vitellin, les carcinomes à cellules claires
peuvent avoir une architecture papillaire ou réticulaire, des cellules claires et
des globules hyalins. L’AFP est exprimée dans toutes les tumeurs vitellines et
rarement dans les carcinomes à cellules claires et c’est l’inverse pour le CD15
(21) ;
– certains carcinomes à cellules claires possèdent un stroma inflammatoire
séparant des amas de cellules claires comme les dysgerminomes ou séminomes ;
cependant, il s’agit d’un infiltrat à prédominance plasmocytaire. Les dysgermi-
nomes ont un profil immuno-histochimique caractéristique PLAP+
(phosphatase alcaline placentaire) et CD119+ et n’expriment pas l’EMA et peu
ou pas la kératine à l’inverse des carcinomes à cellules claires (22).

Métastases de carcinome à cellules claires d’origine rénale ou digestive (variété à


cellules en « bague à châton ») : elles sont rares (11 cas de métastases ovariennes
de carcinomes à cellules claires rénaux) et peuvent précéder, parfois de plusieurs
années, la découverte du primitif. Les métastases sont généralement bilatérales,
104 Les cancers ovariens

alors que seuls 2 à 4 % des carcinomes à cellules claires primitifs ovariens


de stade I le sont. La coexistence d’une endométriose plaide pour une origine
primitive. L’utilisation d’un panel d’anticorps (dont les CK7 et 20) est très
utile (23).
Tableau III – Panel suggéré d’anticorps pour distinguer cancer à cellules claires (CCC) ovarien,
CCC rénal et carcinome digestif en bague à chaton.

Anticorps CCC ovarien CCC rénal Carcinome digestif


en bague à chaton
CK7 + - -
CK20 - - +
CytoK 903 + - -
CD10 - + +
RE/RP + 80 % - -
CA 125 + 60-70 % - -

Tumeurs stéroïdes : elles peuvent renfermer un abondant cytoplasme clair,


riche en lipides ; mais elles sont plus petites que les carcinomes à cellules claires,
bien limitées, leurs noyaux sont d’aspect bénin ou de bas grade nucléaire et elles
expriment fortement l’alpha-inhibine (9).

Carcinome endométrioïde de type sécrétoire : les deux types de carcinomes,


endométrioïde et à cellules claires, peuvent être associés, on peut observer des
foyers de métaplasie malpighienne dans l’adénocarcinome endométrioïde et il
n’y a pas de différence immuno-histochimique permettant de trancher.

Tumeurs à différenciation urothéliale


Un diagnostic différentiel entre une tumeur de Brenner maligne et une méta-
stase ovarienne d’un carcinome urothélial ne se pose qu’en absence de
contingent Brenner bénin. Le profil immuno-histochimique d’une Brenner
maligne est différent du carcinome urothélial : CK7 et CA125 positifs, CK20,
CK 13, thrombomoduline et uroplakine négatifs (24).

Aide au diagnostic d’un groupe tumoral


Les différents groupes tumoraux ont des caractéristiques immuno-histochi-
miques qui leur sont particulières et qui sont en rapport avec leur origine
embryologique. Un recours à l’immuno-histochimie est rarement nécessaire
pour faire un diagnostic de groupe tumoral car la morphologie des types
Techniques d’aide au diagnostic des tumeurs ovariennes 105

épithéliaux, germinaux et cordons sexuels est en général très caractéristique.


Néanmoins, l’immuno-histochimie est utile dans les tumeurs présentant des
aspects évocateurs de tumeurs germinales ou des cordons sexuels en l’absence
d’un contexte clinique évocateur et dans le cas de tumeurs indifférenciées à
petites cellules rondes, pour lesquelles de nombreuses hypothèses diagnostiques
sont possibles et où la prise en charge thérapeutique est différente.

Carcinome ovarien primitif versus tumeur du stroma ou des


cordons sexuels
Les tumeurs endométrioïdes peuvent assez souvent présenter des aspects de
tumeurs du stroma et des cordons sexuels. Ces dernières sont immuno-réac-
tives pour l’inhibine et le CD99 ou MIC2 et le mélan A (9, 10, 25). De
même, une tumeur de la granulosa peut en imposer pour une tumeur carci-
noïde (la chromogranine doit être négative et CK 8-18 positive dans les
tumeurs de la granulosa). Une tumeur de Sertoli-Leydig peut présenter de
nombreuses variantes histopathologiques de diagnostic positif souvent diffi-
cile, aidé par un panel d’anticorps incluant, outre les anticorps présentés dans
le tableau ci dessous, la chromogranine, la synaptophysine, l’A103 et l’alpha-
fœto-protéine (24).

Tableau IV – Panel suggéré d’anticorps permettant de distinguer cancer de l'ovaire épithélial,


thécome, tumeurs de la granulosa et de Sertoli-Leydig.
Anticorps Ovaire épithélial Thécome Granulosa Sertoli-Leydig
EMA + - ou qq cell + - -
Inhibine - ou qq cell + + + +/-
CD99 (MIC2) - ? + +
MelanA - ? +/- +

Carcinome ovarien primitif versus tumeur germinale


Les problèmes diagnostiques peuvent se poser pour des tumeurs très indiffé-
renciées avec un carcinome embryonnaire, pour un carcinome endomé-
trioïde prenant dans certains cas des aspects de tumeur vitelline et devant des
aspects de cellules claires avec un dysgerminome (CD117 ou cKit +) comme
exposé précédemment. Le CD 30 est discrimant pour le diagnostic positif du
carcinome embryonnaire (26). Récemment, l’utilisation de l’anticorps
OCT4 a été préconisée comme marqueur des séminomes et des carcinomes
embryonnaires (27).
106 Les cancers ovariens

Tableau V – Panel suggéré d’anticorps.

Anticorps Ovaire Séminome Vitelline Carcinome Chorio-


épithélial embryonnaire carcinome
Cytokératine + - ou qq cell + + + +
AFP - - + -/+ -
BHCG -/+ - ou qq cell + - ou qq cell + - ou qq cell + +
CD 30 - - ou qq cell + - ou qq cell + + -

Tumeur ovarienne à petites cellules (24)


Il existe plusieurs hypothèses diagnostiques différentes :
Tumeurs à petites cellules avec hypercalcémie (CPC) : le profil immuno-
histochimique n’est pas spécifique : les carcinomes à petites cellules expriment
généralement l’EMA et, de manière variable, la vimentine, la cytokératine, la
NSE et la chromogranine, mais pas l’inhibine (28). De rares tumeurs sont
marquées par l’anticorps anti-PTH, mais le marquage n’est pas spécifique (28).
Les carcinomes à petites cellules possèdent des caractéristiques ultrastructurales
de tumeurs épithéliales : des jonctions intercellulaires (desmosomes), des
membranes basales, des microvillosités, un réticulum endoplasmique abondant
et dilaté avec formation de grosses vésicules remplies d’un matériel protéique
caractéristique, mais pas de granule de neurosécrétion (29).

Tumeurs de la granulosa adulte (TGA) et juvénile (TGJ) : elles représentent


le principal piège diagnostique. Cependant, les aspects cytologiques diffèrent et
d’un point de vue immunohistochimique, elles expriment l’inhibine et l’EMA
au contraire des carcinomes à petites cellules avec hypercalcémie (9).

Tumeurs germinales : dans la tranche d’âge des carcinomes à petites cellules


avec hypercalcémie, on peut également évoquer une tumeur du sinus endo-
dermique, un dysgerminome ou un carcinome embryonnaire. Les aspects
histologiques diffèrent le plus souvent et l’étude immunohistochimique et les
marqueurs tumoraux (bêta-HCG, alpha-fœto-protéine, ACE) établissent faci-
lement le diagnostic.

Autres tumeurs posant des problèmes diagnostiques : lymphomes, tumeurs


à cellules rondes de l’enfant primitives ou métastatiques (PNET, neuroblas-
tome, tumeur desmoplasique intra-abdominale à cellules rondes, Ewing,
rhabdomyosarcome alvéolaire), métastase de mélanome : toutes ces tumeurs
ont des caractéristiques histologiques et surtout immunohistochimiques et
ultrastructurales qui les différencient du carcinome à petites cellules avec
hypercalcémie. On peut s’aider d’un panel d’anticorps : ALC, PS100, CD99,
Desmine, HMB45 (24).
Techniques d’aide au diagnostic des tumeurs ovariennes 107

Tableau VI – Panel suggéré d’anticorps permettant de distinguer carcinome, lymphome, méla-


nome, granulosa, cancer à petites cellules pulmonaire, cancer à petites cellules avec
hypercalcémie, tumeur desmoplastique.
Anticorps Carcinome Lymphome Mélanome Granulosa CPC CPC Tumeur
pul Ca + desmoplastique
m +
CK + - - +/- + +/- +
EMA + -/+ - - + +/- +
CD45 - + - - - - -
S-100 -/+ - + -/+ R+ - R+
Inhibine R+ - - + - - -
Chromogranine -/+ - - - +/- - -/+
Desmine - - - -/+ - - +/-
CD99 - -/+ - +/- -/+ -/+ -/+

R+ : de rares cellules peuvent être positives.

Métastase de CPC pulmonaire ou extrapulmonaire et CPC de type neuro-


endocrine primitif de l’ovaire (30) :
Ces tumeurs atteignent des femmes plus âgées, après la ménopause et sont
souvent associées à une tumeur épithéliale de surface. Elles expriment classi-
quement la NSE et, plus rarement, la chromogranine A.

Conclusion
Les techniques spéciales et tout particulièrement l’immuno-histochimie sont
d’une grand aide au diagnostic positif de certaines tumeurs ovariennes primi-
tives. Elles sont également très utiles au diagnostic différentiel des tumeurs
mucineuses de l’ovaire pour lesquelles un diagnostic de primitif ovarien est un
diagnostic d’élimination. Ces techniques apportent dans la plupart des cas un
diagnostic de certitude permettant une prise en charge adaptée de la patiente.
L’immuno-histochimie est également utilisée en recherche pour la détermina-
tion du pronostic ou de marqueurs biologiques utiles pour la prise en charge
« ad hoc » des patientes.

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Traitement de consolidation
dans les cancers de l’ovaire

J.-F. Geay, I. Ray-Coquard, H. Curé et É. Pujade-Lauraine

Pourquoi un traitement de consolidation ?


Le standard de traitement de première ligne d’une patiente atteinte d’un cancer
de l’ovaire de stade IC-IV est une chirurgie d’exérèse maximale suivie ou enca-
drée par six cycles de chimiothérapie à base de platine.
Cette stratégie permet d’obtenir une rémission complète clinique chez 75-
80 % des patientes. Malheureusement, ce bon résultat initial ne se maintient
pas dans le temps et globalement 70 % des patientes atteintes d’un cancer de
l’ovaire avancé vont rechuter dans les cinq ans, avec une médiane de durée de
survie sans progression de seulement dix-huit mois.
C’est cette frustration née du contraste entre un résultat thérapeutique
initial de qualité et un résultat global médiocre qui explique la recherche dans
les cancers de l’ovaire d’un traitement de consolidation efficace, complémen-
taire au traitement d’induction.

Traitement de consolidation
ou traitement de maintenance ?
Actuellement les deux termes, consolidation ou maintenance, sont employés
indifféremment. L’imprécision sémantique souligne celle de la notion de
consolidation. En effet, sous ce terme, se cache diverses conceptions.
Le renforcement du traitement initial comprenant six cycles de chimiothé-
rapie peut se faire par :
– la prolongation ou l’intensification du traitement chimiothérapique initial.
Dans ces cas, le traitement de consolidation reprend l’essentiel des médica-
ments efficaces de la chimiothérapie de départ ;
318 Les cancers ovariens

– l’administration de traitements cytotoxiques différents du traitement initial :


drogues différentes de chimiothérapie, ou radiothérapie, ou traitement biolo-
gique, dans l’espoir d’agir directement sur les clones tumoraux résistants ;
– L’administration de traitements d’immunothérapie pour moduler les
défenses de l’hôte vis-à-vis des cellules tumorales
La variété des concepts du traitement de consolidation se retrouve égale-
ment dans la durée de ce traitement qui varie entre un cycle (intensification) et
plusieurs mois étalés jusqu’à la progression.
Nous prendrons les définitions suivantes : la maintenance est un traitement
prolongé administré jusqu’à progression, tandis que la consolidation est un
traitement de durée limitée. Dans les deux cas, le traitement est indiqué après
une réponse à la première ligne de chimiothérapie.
Les différentes traitements utilisés en maintenance/consolidation seront
présentés successivement.

La radiothérapie
Radiothérapie abdominale totale
L’analyse de la radiothérapie en consolidation des cancers de l’ovaire souffre du
faible nombre d’essais randomisés et du petit nombre de patientes dans les
études. C’est la conclusion de la méta-analyse de G.M. Thomas réalisée à partir
de 28 essais réunissant un total de 713 patientes traitées par radiothérapie après
laparotomie de deuxième regard (1). Le tableau I montre la corrélation entre le
résidu à la laparotomie de deuxième regard et le pronostic, ce qui ne donne pas
d’indication sur l’efficacité de la radiothérapie. Selon l’auteur, les données ne
sont pas en faveur d’un rôle curatif de la radiothérapie. Néanmoins, les
patientes qui pourraient bénéficier le plus d’une évaluation de la radiothérapie
de consolidation sont celles qui n’ont plus de résidu ou seulement des résidus
microscopiques.

Tableau I – Résultats de la méta-analyse de la radiothérapie en consolidation après la chimio-


thérapie dans les cancers de l’ovaire (1).
Taille du résidu Survie sans progression Nombre de patientes
Pas de résidu 76 % (83/113)
< 5 mm 43 % (77/158)
> 5 mm 17 % (34/202)

Plus récemment, Sorbe et al. ont rapporté les résultats d’une étude rando-
misée comparant radiothérapie abdominale totale, chimiothérapie ou absence
de traitement chez 172 patientes FIGO de stade III en rémission complète
chirurgicale après le traitement initial (2). Les 98 patientes en rémission
Traitement de consolidation dans les cancers de l’ovaire 319

complète histologique ont été randomisées entre radiothérapie (n = 32),


chimiothérapie (n = 35) et absence de traitement (n = 31), tandis que les 74
patientes qui avaient des lésions microscopiques recevaient de la radiothérapie
ou de la chimiothérapie. La survie sans progression des patientes en rémission
complète histologique traitées par radiothérapie (116 mois) était supérieure à
celle des patientes traitées par chimiothérapie (37 mois) ou par simple obser-
vation (32 mois). Le faible effectif des bras comparés incite à garder quelques
réserves sur ces résultats néanmoins encourageants en faveur de la radiothérapie
de consolidation chez les patientes en rémission complète histologique à la
laparotomie de deuxième regard. À noter une incidence de 10 % de toxicité
intestinale sévère, principalement des occlusions.

Radiothérapie par voie intrapéritonéale


La radiothérapie sous forme de 32P administré par voie intrapéritonéale a été
évaluée au cours d’une large étude de 267 patientes atteintes d’adénocarcinome
ovarien de stade III en rémission complète chirurgicale à la laparotomie de
deuxième regard (3). Aucune différence n’a été observée, aussi bien en terme de
survie sans progression (43,3 mois pour le 32P versus 32,9 mois pour la
surveillance) qu’en terme de survie à cinq ans.
Une autre technique de radiothérapie consiste à administrer par voie intra-
péritonéale un anticorps monoclonal anti-mucine (antigène MUC1) pour
pouvoir mieux cibler l’administration d’yttrium-90 couplé à l’anticorps
(HMFG1). L’étude SMART de Seiden et al. comprenant 447 patientes n’a pas
montré de différence en terme de survie et de qualité de vie entre les patientes
traitées par HFMG1-Y-90 par voie intrapéritonéale ou celles soumises à une
simple surveillance (4).

Au total, un seul essai avec seulement 32 patientes dans le bras expérimental


a démontré une augmentation de la survie sans progression grâce à la radiothé-
rapie abdominale totale chez les patientes en rémission complète histologique à
la laparotomie de deuxième regard. Ces données restent insuffisantes pour que
la radiothérapie soit un standard en consolidation des cancers de l’ovaire.

La chimiothérapie
Poursuite de chimiothérapie
Huit essais randomisés ont exploré la prolongation de la chimiothérapie au-
delà des six cycles standards (tableau II). Dans quatre essais, le traitement de
consolidation a consisté à poursuivre la chimiothérapie à base de platine à
raison de trois à six cycles supplémentaires (5-7, 11). Le platine pouvait être
320 Les cancers ovariens

Tableau II – Corrélation entre le résidu à la laparotomie de deuxième regard et le pronostic.

Référence Nombre Traitement Résultats


de patientes
Hakes et al. 78 5 versus 10 cycles de CAP Pas de différence avec 10 cycles
(5)
Bertelsen et al. 202 6 versus 12 cycles de CAP Pas de différence en réponse,
(6) médiane de survie
Lambert et al. 233 5 versus 8 cycles de cisplatine Pas de différence de survie sans
(7) ou carboplatine progression et globale
Scarfone et al. 162 Observation versus epirubicine x 4 Pas de différence de survie
(8)
Pfisterer et al. 1,308 Observation versus topotecan x 4 Pas de différence de survie sans
(9) progression et globale
Pignata et al. 273 Observation versus topotecan x 4 Pas de différence de survie sans
(10) progression
Piccart et al. 153 4 cycles de cisplatine intrapéri- Pas de différence de survie sans
(11) toneal (90 mg/m2) ou observation progression et globale
Markman et al. 277 3 or 12 cycles de paclitaxel Survie sans progression en
(12) tous les 28 jours faveur de 12 cycles (28 m versus
21 m ; p < 0,005)

administré en monothérapie par voie intraveineuse, ou par voie intrapérito-


néale, ou en association avec l’administration de doxorubicine et de
cyclophosphamide. Aucun de ces essais n’a démontré de bénéfice en faveur de
la prolongation de la chimiothérapie avec platine. Néanmoins, en raison du
faible nombre de patientes incluses dans ces essais (de 78 à 233), il est difficile
d’affirmer que la question est parfaitement close.
Dans deux essais, les patientes ont été randomisées après six cycles de carbo-
platine-paclitaxel pour recevoir quatre cycles de topotecan ou être soumises à
une simple surveillance (9, 10). L’essai AGO-GINECO est l’essai de consoli-
dation le plus important à ce jour (1 308 patientes). Aucun avantage n’a été
observé chez les patientes traitées par quatre cycles de topotécan supplémen-
taires. Un autre essai de taille modeste (n = 162) n’a pas montré de gain à
l’addition de quatre cycles d’epirubicine (8).
Contrairement à tous les essais précédents dont les résultats étaient négatifs,
l’essai randomisé du SWOG a montré une différence significative de survie
sans progression pour les patientes traitées par douze cycles de paclitaxel à la
dose de 135 mg/m2 par mois par rapport à celles traitées par seulement trois
cycles supplémentaires (11). Les 277 patientes incluses dans cet essai étaient en
rémission clinique complète après les cinq à six cycles initiaux de carboplatine-
paclitaxel. Le traitement prolongé par paclitaxel a entraîné une plus grande
fréquence de neurotoxicité, mais a permis un retard significatif de la rechute
(28 mois versus 21 mois ; p < 0,005). Malheureusement, étant donné que l’ob-
jectif principal était atteint, le Comité indépendant de surveillance a arrêté
Traitement de consolidation dans les cancers de l’ovaire 321

l’essai avant que le nombre de patientes nécessaires pour détecter une différence
de survie aient pu être incluses. En l’absence de données sur la survie, l’intérêt
de traiter par paclitaxel les patientes douze mois supplémentaire pour retarder
la rechute de sept mois reste discuté en regard des effets secondaires du pacli-
taxel (alopécie, neurotoxicité).
Au total, un seul essai randomisé de poursuite de la chimiothérapie au-delà
des six cycles standards a montré un bénéfice significatif en terme de survie sans
progression. Ce résultat est à ce jour insuffisant pour que la poursuite de la
chimiothérapie au-delà de six cycles soit considérée comme un standard.

Chimiothérapie de consolidation à hautes doses


Dans cet essai du GINECO-FNCLCC-SFGM, H. Curé et al. ont inclus
110 patientes très sélectionnées (moins de 60 ans, répondeurs à la chimiothé-
rapie, résidus > 2 cm à la laparotomie de deuxième regard) pour recevoir, soit
un cycle à hautes doses de carboplatine (1600 mg/m2)-cyclophosphamide
(6g/m2) avec support de cellules souches, soit trois cycles de la même associa-
tion à dose standard. La survie sans progression (17, 5 mois versus 12,2 mois)
et la survie globale (54 mois versus 42 mois) sont supérieures chez les patientes
traitées par la chimiothérapie à hautes doses, mais la différence n’est pas signi-
ficative (13).

Traitement de maintenance par immunothérapie


La modulation des défenses immunitaires ou la stimulation des défenses diri-
gées contre les cellules tumorales sont deux voies particulièrement séduisantes
pour tenter de maintenir la réponse anti-tumorale obtenue par l’association de
la chirurgie et de la chimiothérapie.
Dans un premier essai randomisé, 300 patientes en rémission complète
clinique ou stable après la chimiothérapie ont été randomisées entre
surveillance ou traitement par interféron alpha administré trois fois par
semaine en sous-cutané jusqu’à progression (14). Aucun bénéfice en termes de
survie sans progression ou de survie globale n’a été observé chez les patientes
traitées par interféron.
L’activité de l’anticorps MAab B4313 dirigé contre le CA 125 a été évaluée
en traitement de maintenance au cours d’un essai randomisé qui a inclus 345
patientes en rémission complète clinique après la chirurgie et la chimiothérapie
initiale (15). Le MAab B4313 est un anticorps monoclonal de souris qui
génère chez les patientes des anticorps antisouris (HAMA) dont on peut
espérer qu’il vont cibler les cellules tumorales où s’est fixé le MAab B4313. Le
MAab B4313 est administré par voie intraveineuse aux semaines 0, 4, 8, 12,
puis toutes les douze semaines jusqu’à la progression. Aucune différence signi-
322 Les cancers ovariens

ficative de survie sans progression n’a été détectée entre les patientes traitées par
le MAab B4313 ou celles soumises à une simple surveillance. Néanmoins, dans
la branche immunothérapie, les patientes (60 %) qui ont généré des HAMA
ont un temps jusqu’à rechute significativement supérieur à celles qui n’ont pas
eu de réponse immunologique au MAab B4313.
Au total, il n’existe pas à ce jour de données positives en faveur d’une effi-
cacité d’un traitement de maintenance par immunothérapie.

Nouvelles molécules ciblées


L’efficacité de l’inhibition des métalloprotéinases, impliquées dans les processus
d’invasion et de métastases, a été évaluée dans un essai randomisé de 243
patientes où les patientes dans le bras expérimental étaient traitées par le BAY
12-9566 per os et celles dans le bras standard recevaient un placebo (16).
Aucune différence de survie sans progression n’a été détectée entre les deux
bras.
Tous les espoirs actuels des traitements de maintenance dans les cancers de
l’ovaire sont portés par les molécules qui ciblent les voies initiées par les facteurs
de croissance ou les voies de l’angiogenèse.
Au cours des années 2005-2006, devraient être activés plusieurs essais. Un
essai EORTC/GINECO doit évaluer deux ans de traitement par erlotinib
(Tarceva™) versus surveillance chez des patientes atteintes de cancer ovarien
FIGO stade III en rémission complète clinique après la chirurgie et la chimio-
thérapie initiale.
Par ailleurs, le GOG et les groupes européens rassemblés sous l’étiquette
ICON (essai ICON 7) devraient explorer l’association de l’anticorps mono-
clonal bevacizumab (Avastin™) avec la chimiothérapie dans différents
schémas, y compris l’évaluation d’un traitement de maintenance.

Conclusion
Le désir des patientes et de leurs médecins de disposer d’un traitement permet-
tant de consolider ou de maintenir dans le temps les bons résultats, mais
éphémères, de la stratégie thérapeutique initiale des cancers de l’ovaire avancés
n’est actuellement pas exaucé.
Aucune thérapeutique (radiothérapie, chimiothérapie, immunothérapie,
molécules ciblées) n’a pu atteindre à ce jour le standard scientifique nécessaire,
c’est-à-dire deux essais randomisés de haute qualité démontrant les mêmes
résultats.
Lors de la Conférence de consensus sur les cancers ovariens qui s’est tenue
en septembre 2004 à Baden-Baden (en cours de publication), le constat a été
Traitement de consolidation dans les cancers de l’ovaire 323

le suivant : les données actuelles ne sont pas en faveur d’une recommandation


d’un traitement de maintenance/consolidation dans le bras standard des futurs
essais thérapeutiques.

Références
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(Multicenter Italian Trials in Ovarian Cancer) study. Proc Am Soc Clin Oncol 22: 446 (abstr
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11. Piccart MJ, Floquet A, Scarfone G et al. (2003) Intraperitoneal cisplatin versus no further
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324 Les cancers ovariens

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15. Berek J, Ehlen T, Gordon A et al. (2001) Interim analysis of a double blind study of Ovarex
mAB B43.13 (OV) versus placebo (PBO) in patients with ovarian cancer. Proc Am Soc Clin
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(OVCA) responsive to primary surgery-paclitaxel + platinum containing chemotherapy
(CT). Proc Am Soc Clin Oncol 20: 211a (abstr 843)
Traitement des cancers ovariens
chez la femme âgée de plus de 70 ans
M. Litor et G. Freyer

Introduction
Le traitement des cancers ovariens des femmes âgées de plus de 70 ans est une
question d’actualité importante à plusieurs titres.
En effet, on assiste actuellement à un vieillissement de la population occi-
dentale et à un accroissement de la population âgée de plus de 65 ans, avec une
espérance de vie à 70 ans d’une quinzaine d’années, ce qui pose incontestable-
ment le problème de la prise en charge de personnes âgées « en bonne santé »,
c’est-à-dire autonomes, dont l’espérance de vie spontanée – en dehors de la
maladie cancéreuse – est longue. Or l’incidence du cancer de l’ovaire, qui
représente la quatrième cause de décès par cancer chez la femme et la première
par cancer gynécologique (cancer du sein exclu), augmente avec l’âge, avec un
pic entre 70 et 80 ans. Cela situe son importance du point de vue épidémiolo-
gique, importance qui ne peut que croître dans les prochaines décennies.
Lors de la prise en charge initiale, on observe des stades cliniques plus
avancés du fait d’un diagnostic plus tardif, d’où un pronostic d’emblée plus
péjoratif. Pour améliorer la survie, il convient de faire, comme pour les plus
jeunes, un diagnostic précoce. C’est un « challenge » relativement difficile
compte tenu du caractère pauci-symptomatique des néoplasies ovariennes au
stade précoce et de la médiocre efficience des moyens de diagnostic.
Cependant, il n’est jamais inutile d’insister sur l’indispensable examen clinique
du médecin généraliste. Trop de patientes âgées atteintes de cancer de l’ovaire
arrivent à nos consultations avec des symptômes existant depuis de nombreux
mois et un diagnostic jamais remis en cause de colopathie fonctionnelle. Il
convient en particulier de rappeler que la survenue du couple douleurs abdo-
mino-pelviennes/troubles du transit chez une personne âgée jusque-là
asymptomatique n’est jamais un trouble fonctionnel jusqu’à preuve du
contraire.
Bien que les deux principales options thérapeutiques soient la chirurgie et
la chimiothérapie, celles-ci ne sont pas proposées de façon optimale aux
434 Les cancers ovariens

patientes de plus de 70 ans. Cette variabilité thérapeutique, avec une nette


tendance au sous-traitement, paraît uniquement liée à l’âge, à l’exclusion de
tout autre facteur objectif de décision.
Une place particulière doit être faite à la chimiothérapie néo-adjuvante et il
ne faut pas hésiter à récuser la chirurgie première lorsque l’imagerie et/ou la
présence d’une ascite ou d’un épanchement pleural signent indubitablement
l’existence d’une pathologie avancée, et débuter le traitement par une chimio-
thérapie. Sur la base des résultats du GINECO1, nous estimons que le concept
de laparotomie différée trouve ici son application la plus convaincante : 20 %
de chances de debulking initial optimal contre 70 % de chances de mener à son
terme une chimiothérapie efficace et bien tolérée.
La problématique est la suivante : l’âge avancé justifie-t-il à lui seul un
« allégement » des thérapeutiques ? Quel est alors le traitement optimal des
cancers ovariens des femmes âgées de plus de 70 ans et sur quels critères les
choix thérapeutiques doivent-ils être opérés ?

Épidémiologie
L’incidence et la mortalité du cancer de l’ovaire augmentent avec l’âge : le pic
d’incidence se situe entre 75 et 79 ans et il est de 54/100 000 aux États-Unis et
dans les pays de l’Europe de l’Ouest. Il se déplace au fil du temps vers les classes
d’âges plus élevées. Le pic de mortalité est de 48/100 000 et se situe entre 80 et
84 ans. La mortalité augmente chez les femmes de plus de 65 ans, alors qu’elle
diminue ces dernières années chez les femmes les plus jeunes (1-4).

Présentation clinique et histologie


Sur le plan histologique, on observe également quelques différences, avec
disparition des tumeurs germinales et augmentation de l’incidence des tumeurs
épithéliales (tableau I) (5).
Tableau I – Distribution histologique en fonction de l’âge (%), d’après Yancik (5).
Type histologique N < 64 ans 65-74 ans 75-84 ans > 85 ans
Epithélial 19 897 59,1 23,9 13,7 3,3
Mixte 364 41,1 36,3 17,9 4,7
Stromal 396 53,2 17,2 8,6 1,0
Sarcome 60 53,3 26,7 16,7 3,3
Germinal 555 93,8 4,5 1,6 0
Autres 156 57,7 26,3 12,2 3,8

1. GINECO : groupe des investigateurs nationaux pour l'étude de cancers ovariens.


Traitement des cancers ovariens chez la femme âgée de plus de 70 ans 435

Le grade histologique est lui aussi différent : il est plus élevé avec l’âge et on
n’observe pratiquement pas de tumeur à faible potentiel de malignité (ou
« borderline ») (6).
Pour ce qui est du stade tumoral, on observe un plus fort pourcentage de
stades tumoraux avancés (stades FIGO III et IV) au diagnostic, d’où un
pronostic plus péjoratif chez les personnes âgées (tableau II) (5). Cela est
probablement dû à un retard de diagnostic du fait d’une symptomatologie
moins typique et d’un examen gynécologique moins fréquent que chez la
femme jeune.

Tableau II – Stades tumoraux en fonction de l’âge (%), d’après Yancik (5).


Stades FIGO N < 65 ans 65-74 ans 75-84 ans > 85 ans
I 5503 73,7 15,8 8,8 1,7
II 819 63,4 22,6 11,7 2,3
III-IV 14 863 54,8 26,3 15,3 4,2
Inconnu 1 037 38,5 23,5 22,7 15,2

Prise en charge thérapeutique


Les principales raisons évoquées pour un traitement « allégé » chez les patientes
âgées, ce que l'on peut constater dans le tableau III pour les stades précoces, (1,
3-5, 7, 8) sont les suivantes :
– stades plus avancés au diagnostic ;
– âge chronologique, par crainte de la iatrogenèse ;
– un moins bon état général du fait de la présence de co-morbidités qui sont
fréquentes chez les patientes âgées (55 % ont trois pathologies en plus du
cancer, 37 % en ont une ou deux, 8 % seulement n’ont pas de co-morbidité
significative) (9,10).
Mais il est impossible de se baser uniquement sur ces deux paramètres
– l’âge et l’état général, dont l’appréciation est totalement subjective et

Tableau III – Traitement des cancers de l’ovaire au stade précoce en fonction de l’âge, d’après
les données du NIH (8).
Stades I et II Chirurgie Chimiothérapie Chimiothérapie Chirurgie + Chirurgie +
2 143 cas seule (%) seule (%) + radiothérapie chimiothérapie chimiothérapie
(%) (%) + radiothérapie (%)
< 45 ans 66,4 0,4 4,1 27,8 0,8
45-54 51,1 0 7,5 39,4 2
55-64 52 0,7 7,8 37,9 1,4
65-74 55,1 1,8 6,9 34,6 1,6
> 75 ans 79 1,2 3,5 15,4 0,4
436 Les cancers ovariens

médecin-dépendant – pour définir quelle catégorie de patientes peut bénéficier


d’un traitement optimal. L’ensemble des auteurs s’intéressant actuellement au
domaine de la géronto-oncologie considère qu’il est nécessaire de faire une
évaluation gériatrique complète pour définir au mieux le projet thérapeutique
adapté à chaque patiente.

Traitement chirurgical
Une chirurgie de cytoréduction maximale est un des facteurs les plus détermi-
nants pour la survie des patientes ayant un cancer de l’ovaire avancé. Selon les
données du SEER (Surveillance, Epidemiology and End Results programm),
43,7 % des patientes de moins de 60 ans ont un traitement chirurgical optimal
contre 29,5 % et 21,7 % pour respectivement celles de 60 à 79 ans et celles de
plus de 80 ans (1-4).
Les principales raisons évoquées sont des stades au diagnostic plus avancés,
mais aussi et surtout le risque de morbidité et de mortalité plus important en
raison de la présence de co-morbidités (plus nombreuses que chez les sujets
jeunes). Susini et al. (11) ont publié une étude rétrospective s’intéressant à la
morbidité et à la mortalité de la chirurgie chez les patientes âgées avant et après
l’introduction de nouvelles techniques chirurgicales et de nouvelles prises en
charge péri-opératoires : celles-ci consistaient en une mobilisation postopéra-
toire précoce, des transfusions sanguines autologues, une antibiothérapie
per-opératoire prophylactique, le rétropéritoine laissé ouvert, l’absence d’utili-
sation de drains après lymphadénectomie pelvienne et aortique, l’utilisation de
clips et de forceps hémostatiques pour une coagulation méticuleuse. Les prin-
cipaux résultats significatifs avec les techniques actuelles, sont la réalisation plus
fréquente d’une chirurgie optimale (p < 0,01), une réduction des morbidités
sévères (p < 0,002) avec un taux de mortalité de 2 %, alors que près de la moitié
des patientes étaient à haut risque chirurgical.
Un geste chirurgical optimal est tout à fait possible chez les personnes âgées
s’il existe une prise en charge péri-opératoire adaptée, comme le soulignaient
déjà Lichtinger et al. (12) : la mise en place de soins intensifs péri-opératoires
a permis de réduire la mortalité de 8,9 % à 3,2 % chez des patientes âgées de
plus de 75 ans hospitalisées pour traitement chirurgical de pathologies gyné-
cologiques.

Chimiothérapie
Le cancer de l’ovaire est chimiosensible. Or l’utilisation de la chimiothérapie
diminue avec l’âge par crainte d’un surcroît de toxicités, ceci pouvant compro-
mettre la survie des patientes.
Traitement des cancers ovariens chez la femme âgée de plus de 70 ans 437

Malheureusement, très peu d’études incluent des patientes âgées : les prin-
cipales informations viennent, soit de séries rétrospectives dont la fiabilité est
limitée, soit de l’analyse en sous-groupes d’essais prospectifs. Or il existe mani-
festement une sélection des patientes âgées participant à de tels essais, de sorte
qu’elles ne représentent pas la réalité de la population gériatrique (13).
Dans la plupart des études, les personnes de plus de 65 ans ne forment
qu’un seul groupe dont l’hétérogénéité en termes « d’âge physiologique » et de
co-morbidités n’est jamais prise en compte. Pour pallier ce problème et en
attendant de disposer de facteurs plus discriminants que le seul âge civil, on
pourrait établir une catégorisation arbitraire, comme par exemple 65-74 ans,
75-84 ans et plus de 85 ans, pour pouvoir proposer des traitements plus
adaptés. Ces catégories d’âge ont été proposées notamment par le National
Institute of Aging : « old », « older old », « oldest old » et traduisent sans doute
le fait qu’il existe une corrélation entre l’âge chronologique et la fragilité intrin-
sèque des patients, mais la pratique clinique quotidienne nous enseigne les
limites d’une telle approche.
Le traitement actuel du cancer de l’ovaire en première ligne repose princi-
palement sur les sels de platine, les taxanes et, à un moindre degré, les alkylants
ou les anthracyclines.
En ce qui concerne la tolérance, aucune différence n’est retrouvée entre les
patientes âgées et les plus jeunes dans les principales séries publiées.
Cependant, il faut garder en mémoire les limitations méthodologiques que
nous avons précédemment évoquées : ces séries se rapportent à des patientes
âgées sélectionnées, autonomes, présentant peu de co-morbidités, ayant un
accès favorisé aux soins. Il s’agit par conséquent de patientes dont les caracté-
ristiques les rapprochent des plus jeunes, quand elles ne sont pas
éventuellement encore plus solides du fait d’un excellent état physiologique,
expliquant le vieillissement dit « en bonne santé ». Chiara et al. (14) ont évalué
la toxicité de plusieurs schémas à base de cisplatine chez des patientes âgées de
plus de 65 ans présentant un cancer de l’ovaire au stade avancé : aucune diffé-
rence significative n’a été retrouvée entre les patientes âgées et les patientes les
plus jeunes, en ce qui concerne les toxicités digestive et hématologique.
Zaheer et al. (15) ont étudié la tolérance du paclitaxel chez les sujets âgés :
il s’agissait d’une étude rétrospective qui comparait deux groupes, les moins de
65 ans et les plus de 65 ans. La toxicité fut strictement comparable entre les
deux groupes. Ceccaroni et al. (16) ont publié un essai qui avait pour but prin-
cipal la faisabilité d’un traitement par chimiothérapie à doses standards chez
148 patientes âgées de plus de 70 ans et atteintes d’un cancer gynécologique :
l’âge médian était de 73 ans ; le traitement standard a été administré dans
97,3 % des cas. Seules 10 patientes ont arrêté leur traitement à cause d’une
toxicité hématologique de grades 3 et 4. La conclusion des auteurs est que l’âge
ne doit pas être un facteur limitant pour un traitement conventionnel. La prin-
cipale critique que l’on peut faire à cette étude est l’âge relativement « jeune »
des patientes. Les âges variaient de 70 à 84 ans et 37,2 % seulement des
patientes avaient plus de 75 ans. Il aurait été plus intéressant d’avoir un âge
438 Les cancers ovariens

médian plus avancé. G. Freyer et al. (17) ont rapporté les résultats d’une étude
prospective conduite par le Groupe d’investigateurs nationaux pour l’étude des
cancers de l’ovaire (GINECO), originale de par son analyse pronostique de
l’impact de l’évaluation gériatrique (EG) sur la faisabilité d’un traitement stan-
dard chez des patientes âgées de plus de 70 ans ayant un cancer de l’ovaire
avancé (FIGO III et IV) : sur les 83 patientes incluses dans l’étude, 20 % seule-
ment ont eu un traitement chirurgical initial optimal et 72 % ont reçu six
cycles de chimiothérapie sans toxicité sévère. Une des conclusions principales
des auteurs est qu’un traitement standard par bithérapie (en l’occurrence cyclo-
phosphamide-carboplatine) est tout à fait possible chez certaines patientes
âgées que l’évaluation gériatrique permet de discriminer. Au total, le traitement
peut être administré jusqu’à six cycles chez plus de 70 % des patientes sans
progression de la maladie et sans toxicité sévère. Les résultats de l’analyse
pronostique sont présentés plus loin.
Au total, une chimiothérapie paraît réalisable chez certaines personnes âgées
et ce, sans réduction de doses (18,19).
Mais, répétons-le, les personnes âgées forment un groupe très hétérogène :
certaines toléreront un traitement par chimiothérapie aussi bien que les
patientes plus jeunes, mais d’autres, à doses identiques, développeront des toxi-
cités sévères, surtout d’ordre hématologique, et cela se vérifie quel que soit le
modèle tumoral (20). Pour pallier ces différences, il faudrait trouver des outils
pour identifier au mieux les personnes pouvant bénéficier d’un traitement
optimal. C’est le cas de l’évaluation gériatrique (EG) qui est en cours d’évalua-
tion. Ainsi, l’indication de chimiothérapie, et plus particulièrement d’une
polychimiothérapie, ne se baserait plus uniquement sur l’âge chronologique et
sur une appréhension souvent contestable de « l’état général ».

Évaluation gériatrique
Son but est de définir pour chaque patiente le meilleur programme thérapeu-
tique, en tenant compte de son état physique, psycho-cognitif et fonctionnel,
et de son environnement social (21, 22). Elle comprend cinq phases :
La première étape est le recueil des informations ; pour cela, le clinicien
dispose d’échelles et d’inventaires dont nous fournissons ci-dessous une liste
d’exemples non exhaustive :
– évaluation physique (examen clinique complet tenant compte des spécificités
gériatriques (23, 24), reconstitution de l’histoire de la maladie, évaluation de
l’état nutritionnel par le Mini Nutritionnal Assessment (MNA) (25), évalua-
tion de l’état buccal, des fonctions sensorielles, de la marche et de l’équilibre
par des tests cliniques comme le performance-oriented mobility assessment de
Tinetti (26), évaluation des fonctions sphinctériennes, de la prise médica-
menteuse et de la fonction rénale par calcul de la filtration glomérulaire
(27) ;
Traitement des cancers ovariens chez la femme âgée de plus de 70 ans 439

– évaluation thymique et cognitive (par les tests suivants : la geriatric depression


scale (28) et le mini-mental state de Folstein (29) ;
– évaluation environnementale ;
– évaluation fonctionnelle (évaluation des activités de base de la vie journalière
ou basal activities of daily living définies par Katz (30), les activités instru-
mentales ou instrumental activities of daily living définies par Lawton (31), les
activités habituelles ou advanced activities of daily living définies par Reuben
(32).
Il va de soi que les instruments que nous avons cités ne représentent en
aucun cas le « standard » de l’évaluation gériatrique. S’ils sont les plus couram-
ment cités et validés au niveau international, d’autres questionnaires ou
échelles paraissent tout aussi acceptables. Il faut surtout souligner qu’aucune
échelle ne remplace une réflexion approfondie à partir de l’interrogatoire et de
l’examen clinique.
La deuxième étape est l’élaboration du programme de soins médico-social
individualisé.
La troisième étape est la mise en place de ce programme.
La quatrième étape consiste à transmettre les informations aux personnes
référentes (médecin de famille et médecins spécialistes).
Et la cinquième étape est le suivi des patientes pour un maintien le plus
prolongé possible à domicile.

Extermann a réalisé une revue des essais étudiant l’intérêt de cette évalua-
tion en oncologie (33). Peu d’études ont été publiées et elles ne portent que sur
des séries limitées de patients. Les points principaux qui en ressortent sont : la
détection de syndromes gériatriques passés inaperçus lors de l’évaluation stan-
dard (33, 34) et une valeur pronostique de certaines variables étudiées à la fois
sur la survie et sur la tolérance de la chimiothérapie. L’intérêt d’une telle évalua-
tion serait de pouvoir classer les patients en plusieurs groupes et pour chaque
groupe attribuer une attitude thérapeutique. Repetto et al. (22) ont confirmé
qu’une évaluation gériatrique « raisonnable » – reposant sur un petit nombre
d’échelles – apporte davantage de renseignements sur l’état de santé global
d’une personne âgée atteinte de cancer que la seule évaluation du PS. Il appa-
raît en particulier qu’un PS en apparence favorable (0 ou 1) peut masquer
d’importants facteurs de risque gériatriques chez 20 % des patientes, celles
précisément qui recevront un traitement standard alors qu’elles ne sont pas à
même de le tolérer.
Une évaluation gériatrique complète et complexe est difficilement appli-
cable en routine en oncologie, faute de temps et de moyens. Il faudrait utiliser
des outils simples et rapides pour dépister les patients en mauvais état qui ne
bénéficieraient que de soins de support (best supportive care), les autres relevant
d’une EG complète. Les outils en cours d’évaluation sont les mini-EG (35) ou
des outils encore plus simples (36-38) comme le physical performance test ou
PPT (39, 40), qui permet de mesurer objectivement les capacités fonction-
440 Les cancers ovariens

nelles de chaque patient. Ce test a l’avantage d’être réalisé en moins de dix


minutes et de n’utiliser que quelques accessoires très simples.
Il faut cependant bien préciser que ces différents outils ont une certaine
validité méthodologique dans le contexte gériatrique, mais qu’ils restent encore
largement à évaluer dans le contexte cancérologique. La plus grande difficulté
reste l’établissement d’algorithmes de décision thérapeutique en fonction de tel
ou tel critère gériatrique ayant un impact démontré sur la tolérance des traite-
ments et la survie des patients.
Balducci et al. (41) ont proposé une classification en trois groupes destinée
à fonder les attitudes thérapeutiques en pratique quotidienne : le premier
groupe comprend toutes les personnes fonctionnellement indépendantes, sans
co-morbidité, et qui peuvent donc recevoir un traitement standard ; le
deuxième groupe comprend les personnes les plus fragiles (dépendantes pour
au moins une des activités quotidiennes au sens de l’ADL2 de Katz, ayant trois
comorbidités ou plus, un ou plusieurs syndromes gériatriques tels que dénu-
trition, troubles de la marche avec chutes, altération intellectuelle, ostéopénie
avec fracture ou tassement vertébral…) qui ne relèvent que d’un traitement
palliatif ; le troisième groupe ou groupe intermédiaire comprend les patientes
dont le traitement devrait être adapté (par exemple, réduction de doses initia-
lement puis, suivant la tolérance, ré-escalade ultérieure).
Dans notre étude mentionnée plus haut (17), nous avons évalué la capacité
d’une évaluation gériatrique à prédire l’efficacité et la tolérance de l’association
cyclophosphamide-carboplatine et ainsi de déterminer quel sous-groupe de
patientes âgées pouvait bénéficier d’un traitement à doses standards ou à doses
réduites et quel sous-groupe n’en tirerait aucun bénéfice. Les paramètres
étudiés étaient : l’autonomie des patientes, les co-morbités (cardio-vasculaires,
respiratoires, biologie hépatique et rénale, diabète), les comédications (nombre
de médicaments pris par jour), l’état nutritionnel (BMI3, protidémie, albumi-
némie, cholestérol total), les fonctions cognitives avec le mini-mental test et la
présence ou non de signes dépressifs. Cette étude a porté sur 83 patientes de
plus de 70 ans ayant un carcinome ovarien avancé. En analyse multi-variée, les
facteurs pronostiques indépendants associés à une survie globale obérée sont la
dépression (p = 0,003), le stade IV de la FIGO (p = 0,007) et la prise de plus
de 6 médicaments par jour (p = 0,04).
Sont retrouvés comme facteurs prédictifs d’une toxicité sévère la dépression
(p = 0,006), un performance status ≥ 2 (p = 0,026) et l'état de dépendance
(p = 0,048).
L’utilisation de paramètres simples pourrait ainsi permettre de choisir la
meilleure prise en charge thérapeutique pour chaque patiente, en allégeant par
exemple la chimiothérapie (carboplatine seul) lorsqu’il existe un risque majeur
de toxicité, voire en ne proposant pas de traitement anticancéreux spécifique
pour le sous-groupe de pronostic le plus défavorable.

2. ALD :
3. BMI : Body Mass Index.
Traitement des cancers ovariens chez la femme âgée de plus de 70 ans 441

Conclusion
Le cancer de l’ovaire de la femme âgée n’est pas très différent, du point de vue
biologique, de celui de la femme jeune ; en tout cas, il n’est pas moins évolutif.
Compte tenu d’un profil de tolérance favorable chez les patientes du groupe
I de Balducci, cette population ne doit pas être sous-traitée et la prise en charge
thérapeutique doit être optimale.
La tolérance d’une chimiothérapie optimale est cependant variable car la
population des femmes âgées est hétérogène. Pour appréhender cette hétérogé-
néité, il faudra trouver des outils permettant d’évaluer de façon objective et
globale chaque patiente, pour ne pas tenir compte uniquement de l’âge chro-
nologique et définir au mieux le programme thérapeutique : c’est le but de
l’évaluation gériatrique multidimensionnelle. Mais sa réalisation est longue et
complexe, d’où l’intérêt d’établir des évaluations gériatriques réduites (comme
le Physical Performance Test).
Tous ces outils sont en cours d’évaluation et ne sont pas encore validés. Il
conviendrait de faire davantage d’essais prospectifs incluant une évaluation
gériatrique multidimensionnelle pour dégager des paramètres pronostiques. En
particulier, le programme « patientes âgées » du GINECO se poursuit actuel-
lement avec la réalisation d’un nouvel essai prospectif testant la combinaison
carboplatine-paclitaxel pour les cancers de l’ovaire avancés (stades III et IV).
Les résultats de cette étude, close après inclusion de 75 patientes, devraient être
disponibles dans les mois à venir et enrichir les données dont nous disposons
aujourd’hui pour améliorer la prise en charge des femmes âgées atteintes de
cancer de l’ovaire.

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Traitement médical des rechutes (récidives)
précoces
B. Weber

Quelques définitions
La rechute ou la récidive d’un cancer de l’ovaire se traduit par une ou des
masses tumorales cliniques et/ou radiologiques avec ou sans symptômes
(douleurs, occlusion intestinale…), voire uniquement par l’élévation persis-
tante du taux de Ca-125 (élévation du marqueur à plus de deux fois la normale
confirmée par un deuxième prélèvement un mois plus tard (1). La progression
tumorale peut s'observer en cours de chimiothérapie.
La définition du caractère précoce de la rechute n’est pas univoque : moins
de douze, six, quatre ou trois mois après la dernière cure de chimiothérapie
selon les auteurs. Ceci rend particulièrement difficile l’interprétation des
données de la littérature.
La rechute précoce est interprétée comme une résistance à la chimiothé-
rapie. Il s’agit d’une résistance au platine et/ou aux taxanes qui sont le plus
souvent utilisés en association lors du traitement initial, même si on parle
abusivement de « résistance au platine ».
Il faut noter qu'une poursuite évolutive sous traitement ou une reprise évolu-
tive moins de six mois après le dernier cycle de chimiothérapie n’ont pas la
même signification surtout si, dans ce dernier cas, une réponse partielle clinico-
radiologique ou biologique (décroissance du taux de Ca 125) a été observée.
La population des patientes « rechutant précocement » est donc hétérogène
sur le plan tumoral.
On distingue un peu artificiellement : les tumeurs dites « réfractaires » au
platine qui progressent sous traitement, les « résistantes » qui ne répondent pas
ou récidivent moins de trois ou quatre mois après la dernière cure de chimio-
thérapie et les tumeurs de « sensibilité intermédiaire » qui répondent de façon
fugace au traitement, la récidive survenant entre quatre et six voire douze mois
après la dernière cure.
Cette terminologie n’est pas utilisée dans toutes les publications et la
nuance entre réfractaire et résistante n’est pas toujours établie, les termes sont
parfois synonymes.
406 Les cancers ovariens

Pour résumer, les rechutes dites précoces concernent les tumeurs résistantes ou
réfractaires au platine regroupant les situations cliniques suivantes : progression
d'emblée sous platine, ou absence totale de réponse, ou réponse fugace et progres-
sion, ou réponse tumorale suivie d'une rechute dans un délai de moins de six mois.

Réversion de la résistance au platine


De nombreux travaux ont été réalisés dans le but de lever ou contourner la
résistance au platine (2) et au paclitaxel (3) en sachant que les mécanismes de
cette résistance ne sont pas totalement élucidés : la glycoprotéine 170 de la
pompe MDR a été impliquée, conduisant à des tentatives thérapeutiques d'in-
hibition (voir chapitre « Nouvelles tentatives médicamenteuses »).
Certains produits ont été proposés pour contourner la résistance au platine :
gemcitabine (4), topotecan (5), celocoxib (6), mifepristone (7). L’association
du tamoxifène au carboplatine ne permet pas de lever la résistance MDR (8).
D’autres produits sont en expérimentation (9, 10).
On a également proposé pour contourner une résistance relative de modifier
le rythme d’administration du cisplatine ou du paclitaxel (en hebdomadaire par
exemple) ou d'augmenter la dose de cisplatine (200 mg/m2 toutes les trois
semaines (11)) Ces moyens se révèlent peu efficaces et souvent très toxiques.

Quels médicaments en cas de rechute précoce ?


Le traitement de la première rechute d’une tumeur résistant au platine et/ou
paclitaxel fait appel à des molécules en principe sans résistance croisée avec le
platine : en particulier, il ne semble pas y avoir de résistance croisée entre platine
et paclitaxel comme en témoigne l’efficité du paclitaxel après échec du platine
(12) et l’efficacité du platine après échec du paclitaxel en monothérapie (13).
Il n’y a pas de standard reconnu pour le traitement des tumeurs « résistant »
au platine. Les produits les plus fréquemment utilisés sont : topotecan, pacli-
taxel, etoposide, gemcitabine doxorubicine liposomale pégylée et docetaxel.
Topotécan, paclitaxel et doxorubicine liposomale pégylée ont montré leur
intérêt dans des essais randomisés de phase III (17, 36) : à ce sujet on peut citer
les recommandations anglaises du National Institute for Health and Clinical
Excellence (http://www.nice.org.uk) : le paclitaxel est recommandé en mono-
chimiothérapie en cas de tumeur réfractaire ou résistante au platine ou en cas
d'allergie au platine, la doxorubicine liposomale pégylée est recommandée en
option en cas de tumeur réfractaire, résistante ou partiellement sensible (inter-
valle libre de 6 à 12 mois) au platine ou en cas d'allergie au platine, le
topotécan est recommandé en cas de tumeur réfractaire ou résistante au platine
ou en cas d'allergie au platine pour les malades où paclitaxel et doxorubicine
liposomale sont considérés inappropriées.
Traitement médical des rechutes (récidives) précoces 407

Les taux de réponse à différentes molécules sont rapportés dans le tableau I,


où a été précisé chaque fois que possible : le type de résistance au platine ou
Tableau I – Taux de réponse à différentes drogues selon l'état de résistance au platine.

PRODUIT Chimio Nb Réfr. Rés. Délai RÉPONSE Réf


thérapie ptes Rechut. /DURÉE
Docetaxel Pt Px 30 + <3 10 % dr 3-6 m 14
Doxo liposomale pégylée Pt Px 49 + 9% 15
Doxo liposomale pégylée Pt Px 78 + 13,7 % 16
Doxo liposomale pégylée Pt 130 + 12 % ssp 9 sem 17
Doxo liposomale pégylée Pt 14 + 23 % 18
Capecitabine Pt 29 + multi- 29 % ssp 3,7 m
traitées sg 8 m 19
Capecitabine Pt 35 + 9% ssp 2,3 m
sg 7,1 m 20
Oxaliplatine* Pt 23 + + 4,3 % 6m 29
Oxaliplatine Pt +/- Px 29 + 5,6 % 30
Oxaliplatine Pt + 6% 31
Etoposide PO Pt 41 + + <6 26,8 % ssp 5,7 m
(Pt Px) (25) sg 10,8 m 21
Gemcitabine Pt Px 51 + <3 16 % dr 4 m 22
Gemcitabine Pt Px 35 + 42,9 % ssp 6 m
dr 11 m sg 12 m 4
Gemcitabine Pt 21 + multi- 9,5 % RC 23
traitées 38 % R CA125
Hexaméthylmélamine Pt 30 + + 10 % 24
Hexaméthylmélamine Pt 26 + <6 9,7 % ssr 10 sem 25
sg 34 sem
Ifosfamide Pt 32 + + 28 % 26
Irinotecan Pt 31 + + 17 % 27
Melphalan Pt 22 + <6 0 28
Paclitaxel Pt 1000 + (3 lignes) 22 % ssp 4,5 m 12
Paclitaxel hebdomad. Pt Px 51 + + 25 % 32
Tamoxifène 568, multi- 10 % 33, 34
623 traitées
Topotecan Pt Px 43 + 11,6 % ssp 2,7 m 35
sg 6 m
Topotecan Pt 124, + 6% ssp 19 sem 17
113 sg 63 sem 36
Topotecan hebdo. Pt 10 + 52 % ssp 4,9 m 37
Vinorelbine** Pt 28 + + < 12 21 % ssp 3 m 38
* testé sur patientes considérées résistantes au platine après plusieurs lignes (39).
** testé sur patientes multitraitées (40).
408 Les cancers ovariens

l’association platine-paclitaxel (réfractaire ou résistante), la durée de l’intervalle


libre de chimiothérapie, le taux de réponse, la durée de réponse, la survie sans
progression et la survie globale de la population.
Les taux de réponse ne dépassent pas 20 à 30 % pour une durée générale-
ment inférieure à douze mois, les taux de réponse sont les plus bas pour les
tumeurs réfractaires progressant sous chimiothérapie.
Après monothérapie (topotecan, doxorubicine liposomale pégylée, gemcita-
bine, docetaxel), les patientes n'ayant pas répondu au traitement ou rechutant
moins de trois mois après la dernière cure ont une médiane de survie de six mois
(1-37 mois) avec exceptionnellement des survivantes à « long terme » (un an)
dont il est difficile de dire si cela traduit l’efficacité des chimiothérapies ou « l’in-
dolence » de la maladie (41).

Mono- ou polychimiothérapie ?
Le taux élevé de rechutes des cancers aux stades III-IV incite à considérer cette
maladie comme chronique. Des traitements successifs utilisant différents
produits sur un mode séquentiel sont une option envisageable, l'objectif étant
de contrôler le mieux possible les effets secondaires de la chimiothérapie et de
préserver la qualité de vie des malades : doxorubicine liposomale pégylée puis
docetaxel (42), topotecan puis doxorubicine (43)…
Mais l’occlusion intestinale par évolution de la carcinose péritonéale est une
menace fréquente qui encourage l'utilisation des drogues en associations pour
augmenter la probabilité de réponse, comme on peut le constater dans le
tableau II, ceci souvent au prix d’une augmentation de la toxicité. Cependant,
rares sont les études randomisées (44), encore plus rares les preuves de la supé-
riorité d'une association sur une monochimiothérapie, la plupart des
comparaisons étant indirectes. À titre d’exemple de l'absence de supériorité
d'une association on peut citer l’association de VP16 et d’ifosfamide (45).
La toxicité de ces protocoles est souvent importante (48 à 58 % de neutro-
pénie de grade III-IV) (54, 55), voire rédhibitoire (ifosfamide + topotecan aux
doses conventionnelles en monothérapie) (62).

Évaluation de l'effet de la chimiothérapie


L’efficacité des produits de chimiothérapie et de leurs associations est jugée sur
le taux de réponses objectives (complètes et partielles) définies par les critères
WHO ou, plus récemment, RECIST. Mais il semble que la stabilisation de la
maladie ait, elle aussi, une valeur pronostique indépendante de la survie, le
bénéfice en terme de survie est comparable à celui des tumeurs en réponse
partielle (63). Habituellement les tumeurs ne progressant pas sous traitement
ni ne régressant ont une cinétique lente. En réalité, le groupe des tumeurs
« stables » comporte aussi des tumeurs dont la régression est inférieure à celle
Traitement médical des rechutes (récidives) précoces 409

Tableau II – Principales associations utilisées en deuxième ligne dans les rechutes précoces.
Association Chimio. Nombre Type résistance Réponse/survie Auteur
Carboplatine hebdo 53 %
+ paclitaxel hebdo 18 <6m ssp 10 m 46
sg 13 m
Docetaxel 24 %
+ vinorelbine 41 Rés ssp 4,5 m 47
sg 9,3 m
Oxaliplatine Pt 20 <6m 25 % 48
+ FuFol -
Fol FOX-4 Pt Px 38 ? 29 % RO
ssp 4,8 m 49
sg 10 m
Oxaliplatine PtPx 5 Réfr 0%
+ Gemcitabine 9 0-3 m 44 % 50
33 0-6 m 42 %
Oxaliplatine Pt 17 Rés 26 % 51
+ Gemcitabine 3 Réfr
Oxaliplatine Pt 18 Rés 30 % 52
+ Paclitaxel
Etoposide po 32 4-12 m 91 % 53
+ cisplatine hebdo* ssp 8 m sg 16 m
28 Réfr/ 46 %
<4m ssp 5 m sg 13 m
Gemcitabine + 64 %
Cisplatine J1&8/21 22 <6m ssp 3,9 m 54
sg 11,4 m
Gemcitabine + 40 %
Paclitaxel hebdo PtPx 33 Rés ssp 5,7 m 55
sg 13,1 m
Gemcitabine PtPx 16 Réfr 25 % (R globale) 56
+ etoposide Pt 11 Rés 2 lignes dr 6 m
Topotecan IV PtPx 24 multitraitées 8% 57
+ etoposide PO
Topotecan IP 22 Rés 38 % 58
+ etoposide PO
Topotecan Pt 24 Rés 30 % 59
+ Ifosfamide
Irinotecan Pt 13 Réfr ? 31 % 60
+ Mitomycine ssp 24 sem
sg 36 sem
Pt = platine, Px = paclitaxel Rés = résistant, Réfr = réfractaire, Rechut = rechute
D(m)rep = durée mediane de réponse
ssp = médiane de survie sans progression
sg = médiane de survie globale
m = mois
sem = semaines
* association testée en 1991 (61).
410 Les cancers ovariens

qui définit une réponse partielle clinico-radiologique. Elles ne sont pas totale-
ment résistantes au traitement. Parfois la réponse est évaluée sur la diminution
du taux de Ca-125 qui pourrait remplacer les critères d’évaluation de la taille
tumorale (64).
L'étude randomisée ICON4/AGO-OVAR 2.2 a démontré dans les rechutes
au-delà de six mois, la supériorité d'une association platine-paclitaxel (carbo-
platine-paclitaxel chez 80 % des malades) par rapport à une chimiothérapie à
base de platine sans paclitaxel (carboplatine ou cisplatine seuls chez 77 % des
malades) ; si l'on considère dans cette étude le sous-groupe de malades ayant
rechuté le plus « précocement », entre six et douze mois, on constate qu'il n'y
a pas de différence d'efficacité entre l'association platine-paclitaxel et la chimio-
thérapie sans paclitaxel (progression : 75/92 malades traitées par PlPx contre
88/111 malades traitées par platine seul, p = 0,21 (68) ; ces résultats, insuffi-
sants pour départager définitivement mono- versus polychimiothérapie, sont en
défaveur d'une association en cas de rechute précoce.

Proposition de stratégies thérapeutiques


En cas de rechute moins de six mois après la dernière cure de chimiothérapie,
le traitement fera appel à des produits sans résistance croisée avec les platines.

Intérêt d'un intervalle libre de platine


Lorsque une rechute a été traitée par une ou plusieurs lignes sans platine, il a
été observé que la maladie devenait à nouveau sensible au platine : d'une part,
la durée de survie sans maladie est corrélée à la probabilité de réponse à un
retraitement par platine (25, 26) et, d'autre part, l’allongement de l’intervalle
sans platine est corrélé à la probabilité de réponse à un traitement ultérieur à
base de platine (66). Ces observations ont conduit à proposer d’augmenter l’in-
tervalle sans platine en utilisant des médicaments sans résistance croisée pour
reprendre plus tardivement du platine, de préférence en association (67).

Les platines gardent-ils un intérêt dans les rechutes précoces?


Les platines ne sont pas à éliminer dans tous les cas de rechute précoce. Une
étude rétrospective non randomisée (69) a observé la supériorité (en taux de
réponse, de temps jusqu’à progression et de survie globale) de l’association
contenant un sel de platine par rapport aux traitements sans platine dans les
rechutes inférieures à six mois, que l’intervalle soit de 0-3 mois ou de 3-6 mois.
Ces résultats sont corroborés par un autre travail (70) qui confirme l’efficacité
d’un re-traitement par platine et l’absence de valeur prédictive de l’intervalle
libre à la réponse ; néanmoins, dans cette étude, les patientes qui n’ont pas
répondu initialement au platine ou ont reçu plus de trois lignes de chimiothé-
Traitement médical des rechutes (récidives) précoces 411

rapie ont peu de chance de répondre à un traitement par platine. Le retraite-


ment par platine doit donc tenir compte de la sensibilité, si minime soit-elle,
au traitement par platine.
Au total, le choix des produits et de leur mode d’administration doit
prendre en compte : le délai écoulé depuis la dernière cure de chimiothérapie,
la nature des produits administrés au préalable, la réponse ou non au précédent
protocole, l’âge de la patiente, le degré d’urgence de la réponse tumorale et le
sous-type histologique particulier (mucineux ou à cellules claires).
L’existence d’un seul des facteurs suivants : jeune âge, progression sous
chimiothérapie, absence de réponse à la chimiothérapie, grade histologique
élevé (grade III), sous-type histologique à cellules claires ou urgence thérapeu-
tique (carcinose péritonéale diffuse radiologique…) incite à administrer un
protocole à forte dose-intensité, sans résistance croisée, en combinaison, en
séquentiel ou alterné (hebdomadaire par exemple).

En résumé
En cas de progression en cours de traitement par platine + paclitaxel (ou en
présence de l’un des autres facteurs sus-cités) le choix portera sur des drogues
sans résistance croisée, en association, à un rythme de type « dose-dense »
(hebdomadaire ou tous les quinze jours).
En cas de rechute dans un intervalle de moins de six mois, on envisagera la
reprise d’une polychimiothérapie avec platine (si réponse partielle antérieure-
ment) ou de drogues sans résistance croisée, de préférence en association ;
l'augmentation de l’intervalle libre sans platine pour réutiliser celui-ci ultérieu-
rement est une stratégie séduisante dont l'intérêt reste à démontrer.

NB
– La durée de la réponse diminue au fil des lignes de chimiothérapie.
– Le nombre de cures et la durée du traitement ne sont pas standardisés.

Participation aux essais thérapeutiques


Il est souhaitable, dans la mesure où il n’y a pas d’occlusion intestinale, de
proposer aux malades de participer à des essais thérapeutiques de phase I ou II.

Soins palliatifs et traitement des symptômes


Les patientes n’ayant pas répondu à deux monothérapies successives ont une
probabilité de répondre à une troisième ligne quasiment nulle, et seuls les
symptômes seront traités éventuellement dans le cadre d'essais thérapeutiques
412 Les cancers ovariens

d’antalgiques, de molécules pour tarir les épanchements ascitiques ou pleuraux


ou de techniques de gestion de l’occlusion intestinale.

Conclusion
En cas de rechute précoce, l'absence d'étude spécifique ne permet pas de
définir une stratégie thérapeutique adaptée. Le choix des chimiothérapies
repose sur le bon sens empirique qui recommande d'utiliser des drogues diffé-
rentes, idéalement sans résistance croisée avec la première ligne, en
monochimiothérapie ou en association en fonction de l'urgence thérapeutique
et de l'état des malades. Les résultats de ces traitements divers restent extrême-
ment décevants et d'utilité incertaine.

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Facteurs pronostiques et traitement chirurgical
des tumeurs « borderline » de l’ovaire
P. Morice, S. Camatte, C. Lhommé, P. Pautier, P. Duvillard
et D. Castaigne

Introduction
Les tumeurs ovariennes à la limite de la malignité (TOLM) ou « bordeline1 »
représentent 10 à 20 % des tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire. Leur inci-
dence est évaluée à 4,8/100 000 par an (1). L’âge moyen de survenue est de dix
ans plus jeune que celui des carcinomes. Pendant des décennies, ces tumeurs
ont été considérées comme une étape intermédiaire, dans l’oncogenèse, entre
les tumeurs bénignes et les tumeurs malignes. Leur traitement a donc long-
temps été basé sur la chirurgie « radicale » (hystérectomie associée à une
annexectomie bilatérale). Ces dernières années, ces dogmes ont été largement
bousculés. Néanmoins la stratégie thérapeutique de ces tumeurs dépend large-
ment de différents critères histologiques qui ont été précédemment détaillés et
des facteurs pronostiques.

Facteurs pronostiques
Les tumeurs ovariennes à la limite de la malignité peuvent récidiver sous la
forme de tumeur à la limite de la malignité ou, exceptionnellement, sous forme
de carcinome invasif. Dans ces derniers cas, il est toujours difficile de savoir s’il
s’agit d’une méconnaissance de diagnostic initial (avec une insuffisance de
coupes histologiques) ayant négligé un secteur invasif sur la ou les pièces opéra-
toires, ou d’une véritable dégénérescence secondaire d’une lésion péritonéale.
Différents facteurs influençant la survenue de ces récidives ont été discutés
dans la littérature. Les tumeurs ovariennes à la limite de la malignité étant des
tumeurs rares, il n’y a pas d’études prospectives et moins d’une dizaine d’études

1. Les terminologies identiques sont utilisées indifféremment dans le texte.


448 Les cancers ovariens

rétrospectives (incluant plus de 150 patientes) ont été publiées. L’analyse de


l’impact pronostique des différents paramètres étudiés est donc difficile.
Néanmoins, certains facteurs semblent pronostiques (2).

Stade d’extension

La classification de la FIGO (1987) établie pour les adénocarcinomes ovariens


est également utilisée pour les tumeurs à la limite de la malignité. Le stade de
découverte des tumeurs à la limite de la malignité est souvent précoce (stade I :
78 à 84 % ; stade II : 4,6 à 11 % et stade III : 10 à 13 %). Le stade de la tumeur
est le facteur pronostique le plus important (3, 4). Dans la littérature, le taux
de récidive pour les patientes ayant une tumeur de stade I est de l’ordre de 3 %
à 4 % et le taux de survie globale à cinq ans de 99 % à 100 % (5). Concernant
les tumeurs avec localisations péritonéales (stades II et III), les taux de récidive,
de dégénérescence et de décès en phase évolutive cancéreuse sont respective-
ment de 25 %, 13 % et 3,4 %. Leake retrouvait une différence de survie globale
à cinq ans entre les tumeurs à la limite de la malignité de stades II (96 %) et III
(73 %) (6). Néanmoins, dans d’autres séries il n’y a pas de différence de survie
notable entre les stades II et les stades III (2, 5).

Type d’implants

Lorsqu’il existe des localisations péritonéales, c’est leur caractère invasif ou non
qui influence le pronostic et donc la survie. Les études analysant l’impact sur
la survie selon le type des implants sont assez rares (2, 6-13). Dans la littéra-
ture, chez les patientes ayant des implants non invasifs, le taux de récidive et de
dégénérescence en cancer sont respectivement de 18 % et 4 %. Chez les
patientes ayant des implants invasifs, ces taux sont de 36 % et 25 %. Les
tumeurs à la limite de la malignité avec des implants péritonéaux invasifs appa-
raissent donc comme les tumeurs à la limite de la malignité ayant le pronostic
le plus péjoratif.

Existence d’un pseudo-myxome péritonéal

Tout comme pour les tumeurs à la limite de la malignité séreuses avec implants
péritonéaux invasifs, le pronostic des tumeurs mucineuses associées à un pseu-
domyxome péritonéal (PMP) est lui aussi péjoratif. Le taux de décès lié au
pseudomyxome péritonéal varie dans la littérature entre 20 % et 82 %
(moyenne de 50 %) (1, 14, 15).
Facteurs pronostiques et traitement chirurgical des tumeurs « borderline » 449

Modalités du traitement chirurgical


Le traitement chirurgical des tumeurs à la limite de la malignité peut être
radical (annexectomie bilatérale +/- hystérectomie) ou conservateur (de l’utérus
et d’une partie au moins d’un ovaire). Lors d’un traitement conservateur on
peut réaliser une kystectomie (ablation du seul « kyste » de l’ovaire), une
ovariectomie ou une annexectomie (ablation de l’ovaire et de la trompe).
Aucune différence significative n’est observée en terme de survie entre annexec-
tomie unilatérale et traitement radical en cas de tumeur de stade I (16).
Néanmoins, après kystectomie, le taux de récidive est plus important et varie
de 12 % à 37 % (16-18). En cas de stade plus avancé, les données de la littéra-
ture sont rares. Néanmoins le traitement conservateur semble augmenter le
risque de récidive, sans influencer la survie (2, 11, 12).

Résidu tumoral
Plusieurs auteurs s’accordent pour considérer le résidu tumoral postopératoire
comme un facteur important prédictif de récidive et de survie. Ainsi, Tropé (1),
sur 59 stades II et III, trouve un taux de survie à quinze ans de 90 à 95 % en
cas de résidu nul et de 35 % en cas de résidu tumoral macroscopique.
Tamakoshi (4) établit une relation linéaire entre résidu tumoral (RT) et survie
globale à cinq ans : 88 % en cas de RT nul, 50 % en cas de RT < 2 cm, 33 %
en cas de RT > 2 cm. Néanmoins, lorsqu’il existe des implants de cette taille,
l’échantillonnage est difficile et peut faire méconnaître un implant invasif.

Composante micropapillaire
Cette entité histologique particulière des tumeurs à la limite de la malignité
séreuses a été décrites pour la première fois en 1996 par Seidman et Kurman
(13). Cette lésion sera étudiée plus spécifiquement dans le chapitre concernant
l’histologie des tumeurs à la limite de la malignité. L’une de ses caractéristiques
est d’être associée fréquemment à une extension extra-ovarienne (en particulier
avec des implants invasifs). Lorsque la tumeur reste limitée à l’ovaire (stade I),
son pronostic semble comparable à celui des autres tumeurs à la limite de la
malignité séreuses (19, 20).

Autres facteurs pronostiques


Ils sont plus discutés : l’âge, le type histologique, l’existence d’une micro-inva-
sion stromale, l’existence d’une rupture capsulaire et certains facteurs
biologiques (ploïdie). Mentionnons le cas particulier de l’atteinte ganglion-
450 Les cancers ovariens

naire. En effet, il existe une atteinte ganglionnaire (pelvienne et/ou lombo-


aortique) dans 15 % à 22 % des tumeurs à la limite de la malignité (4, 21-23).
Pour Leake et al. (22) et Yazigi et al. (24), le curage ganglionnaire a permis de
sur-stader 21 à 31 % des stades IA et 33 % des stades II. Cependant, l’inter-
prétation de cette extension est difficile : réelle métastase ou métaplasie
d’inclusions bénignes ? En effet, Prade (25) rapporte deux cas d’atteinte
ganglionnaire inguinale et rétropéritonéale de type « borderline » présentant
des zones de transition entre endosalpingiose, « borderline » et adénocarci-
nome, mais en l’absence de tumeur ovarienne ou de tumeur péritonéale (25).
D’ailleurs, le statut ganglionnaire, en cas de tumeurs à la limite de la malignité,
n’influence pas la survie (21, 22, 26). Néanmoins, des récidives ganglionnaires
à distance ont été rapportées (22, 26). Tan et al. décrivent deux récidives
ganglionnaires cervicales quatre et sept ans après traitement initial. Ces deux
patientes sont en vie sans récidive à deux et quatre ans après le traitement de la
rechute ganglionnaire.

Chirurgie
Le traitement des tumeurs à la limite de la malignité est chirurgical. La
chirurgie permet de confirmer le diagnostic (en s’aidant si besoin de l’examen
histologique extemporané), d’évaluer l’extension de la maladie et de réaliser le
traitement adapté aux constatations per-opératoires. On distingue trois temps
dans l’acte chirurgical : exploration, bilan d’extension et traitement de la
tumeurs à la limite de la malignité.
L’intervention chirurgicale débute donc par une exploration minutieuse de
la tumeur ovarienne et de toute la cavité péritonéale (pelvienne et abdominale).
Ce temps est fondamental et ne peut être réalisé en quelques secondes. Avant
de manipuler la tumeur une cytologie péritonéale est réalisée. Comme le
diagnostic de tumeur à la limite de la malignité est souvent rétrospectif et est
rarement évoqué avant une chirurgie pelvienne (en dehors des cas où les
patientes ont déjà été traitées pour une tumeur à la limite de la malignité), les
étapes précédemment décrites devrait être idéalement réalisée lors de toute
chirurgie pratiquée pour une tumeur annexielle même si celle-ci est « a priori »
d’aspect très rassurant.
Lorsqu’il existe une tumeur macroscopiquement suspecte, un examen
extemporané per-opératoire est pratiqué. Cet examen extemporané peut être
effectué sur une pièce d’annexectomie ou bien de kystectomie. Néanmoins, la
sensibilité de l’examen extemporané est moins bon pour les tumeurs à la limite
de la malignité que pour les adénocarcinomes et les cystadénomes : sensibilité
de 45 à 60 %, spécificité de 98,6 % avec seulement une valeur prédictive posi-
tive de 61 à 75 % et une valeur prédictive négative de 97,3 % (27-30). La
sensibilité est encore plus mauvaise pour les tumeurs mucineuses qui sont
souvent de grande taille, polylobées, rendant la sélection d’échantillons plus
Facteurs pronostiques et traitement chirurgical des tumeurs « borderline » 451

difficile (27, 28, 30). Aussi, chez une patiente jeune, lorsque l’examen extem-
porané ne permet pas de confirmer le diagnostic, le traitement chirurgical doit
être le plus conservateur possible dans l’attente des résultats anatomo-patholo-
giques définitifs. Si l’examen histologique confirme l’existence d’une tumeur à
la limite de la malignité, le traitement chirurgical classique est l’annexectomie
du côté de la tumeur. Chez une femme de plus de 40 ans ne souhaitant plus
de grossesse, l’annexectomie bilatérale est préférable, associée ou non à une
hystérectomie totale.
Le bilan d’extension chirurgical est fondamental (dite chirurgie de « stadi-
fication »). En effet, deux études américaines montrent que seules 12 à 29 %
des patientes bénéficient d’un bilan d’extension complet, alors même que le
diagnostic extemporané de tumeur à la limite de la malignité est donné, et que
34 % n’ont aucune biopsie péritonéale systématique (23, 31). Or le résultat
histologique d’une évaluation complète majore le stade FIGO dans 24 à 47 %
des cas. Ce bilan doit comporter classiquement une omentectomie ou, au
minimum, des biopsies épiploïques et des biopsies péritonéales multiples (péri-
toine pelvien, gouttières pariéto-coliques, coupole diaphragmatique droite).
Cette chirurgie permet de modifier 13 à 22 % des stades I par l’existence d’im-
plants microscopiques (24, 32). Une appendicectomie doit classiquement être
effectuée dans les tumeurs à la limite de la malignité mucineuses. Les aires
ganglionnaires pelviennes et lombo-aortiques doivent être explorées et, en cas
d’adénomégalie, une adénectomie sera réalisée. Néanmoins la lymphadénec-
tomie systématique n’est plus réalisée.
Quatre études récentes ont été publiées et semblent montrer que même si
cette chirurgie de stadification est « rentable » (car elle permet de surstadée un
sixième à un quart des patientes), son impact sur la survie est pratiquement nul
(33-36). En effet, dans la très grande majorité des cas, cette surstadification est
réalisée lors de l’analyse histologique de la cytologie péritonéale ou de l’épi-
ploon (tableau I). La « surstadification » sur une cytologie péritonéale n’a pas
la même signification que dans les tumeurs épithéliales malignes. En effet, dans
les tumeurs à la limite de la malignité, il s’agit simplement d’une « desquama-
tion » de la tumeur ovarienne et non pas du reflet d’une maladie péritonéale
infra-clinique. Cette cytologie péritonéale « positive » ne change donc pas la
prise en charge. Lorsque que des implants sont retrouvés sur l’épiploon (plus
rarement sur des biopsies péritonéales systématiques), ceux-ci sont pratique-
ment toujours des implants non invasifs. Leur découverte, là encore, ne
modifie pas la prise en charge ultérieure. Le seul cas de figure ou la chirurgie
de restadification change la prise en charge thérapeutique ultérieure est la
découverte d’implants invasifs sur des biopsies systématiques sans lésions
macroscopiquement visibles (épiploon et/ou péritoine). Cette situation est
exceptionnelle et n’a été rapportée que deux fois en cas de tumeur à la limite
de la malignité de type histologique « habituelle » (mucineuse ou séreuse) (36,
40). La seule entité histologique très particulière où une telle situation doit être
recherchée est la tumeur à la limite de la malignité séreuse avec composante
452 Les cancers ovariens

Tableau I – Revue de la littérature sur la « rentabilité » de la chirurgie de (re)stadification.


Séries n n(%) Caractéristiques de la surstadification
patientes surstadée Localisation Macro- Micro- Implants Implants
stade I scopique scopique non invasifs invasifs
Nation 55 NP Epiploon = 2 NP* NP NP NP
(37) Nodes = 3
Helewa 9 1 (12 %) NP NP NP NP NP
(38)
Yazigi 25 6 (24 %) Cytologie péritonéale = 2 NP NP 0 0
(24) Ganglions = 4
Hopkins Ovaire conservé = 2
(39) 15** 7 (47 %) Péritoine = 3 5 2 NP NP
Epiploon = 2
Snider Ovaire controlatéral = 1
(40) 27 5 (18 %) Péritoine = 3 0 5 4 1 (péritoine)
Epiploon = 1
Winter III Epiploon = 2
(36) 31 8 (26 %) Appendice = 2 NP NP NP 1 (péritoine)
Séreuse utérine = 1
Ganglions = 3
Querleu Cytologie péritonéale = 5
(41) 30 8 (26 %) Epiploon = 1 NP NP 2 0
Péritoine = 1
Ganglions = 1
Cytologie péritonéale = 2
Land (42) 56 4 (7 %) Trompe controlat = 1 NP 4 NP NP
Ovaire controlat = 1
Camatte 48 8 (17 %) Cytologie péritonéale = 6 0 8 2 0
(35) Epiploon = 2
Fauvet 47 8 (17 %) Ovaire controlat = 3 NP NP NP NP
(33) Autres = 5 (NP)
Cytologie péritonéale = 28
Rao (34) 143 40 (28 %) Epiploon & péritoine = 10
Ganglions seuls = 2

* Non précisé
** Mélange des stades (I & II).

« micropapillaire », où l’extension péritonéale avec des implants invasifs n’est


pas exceptionnelle, comme nous l’avons vu.
C’est pour ces différentes raisons que certains auteurs préconisent de
surseoir à une chirurgie de restadification systématique en cas de chirurgie
initiale incomplète (cas fréquent des femmes jeunes ayant bénéficié d’une
kystectomie laparoscopique simple) sous réserve d’un certain nombre d’impé-
ratifs à respecter : 1. type histologique de la tumeur mucineux ou séreux mais
sans composante micropapillaire ; 2. péritoine bien exploré et décrit lors de la
première intervention ; 3. patiente parfaitement compliante à un suivi ulté-
rieure régulier (identique a celui réalisé en cas de chirurgie conservatrice). Si un
de ces trois critères n’est pas rempli, la chirurgie de restadification reste la règle.
Elle peut alors être réalisée par cœlioscopie (41).
Facteurs pronostiques et traitement chirurgical des tumeurs « borderline » 453

Cas particuliers
Traitement conservateur
Les tumeurs ovariennes à la limite de la malignité surviennent chez des
patientes beaucoup plus jeunes que celles ayant un cancer de l’ovaire. Le trai-
tement conservateur doit donc être envisagé même si le « gold standard »
demeure l’annexectomie bilatérale (associée ou non à une hystérectomie). Le
risque de récidive est significativement augmenté après traitement conservateur
d’une tumeur à la limite de la malignité (environ 10 % à 15 %). La réalisation
d’une kystectomie augmente significativement ce taux de récidive (jusqu’à
30 % dans certaines séries) (tableau II). D’après Lim-Tan et al., la résection non
Tableau II – Résultats des traitements conservateurs de tumeurs à la limite de la malignité.
Séries Nombres de cas
Stade I Conservateur * Kystectomie Récidive Décès
Julian et al. (43) 34 15 0 0 0
Hart & Norris (44) 97 43 0 1 0
Tazelaar et al. (45) 61 20 4 3 0
Tasker et al. (46) 52 10 2 0 0
Bostwick et al. (47) 87 24 2 3 0
Lim Tan et al. (17) 33 33 33 4 0
Rice et al. (48) 64 30 10 0 0
Massad et al. (32) 18 1 1 0 0
Leake et al. (6) 135 53 16 5 0
Manchul et al. (10) 63 13 2 0 0
Piura et al. (49) 46 17 5 0 0
Barnhill et al. (50) 146 21 0 0 0
Kennedy et al. (9) 38 18 2 0
Tamakoshi et al. (4) 125 58 4 0 0
Darai et al. (16) 24 18 8 4 0
Gotlieb et al. (51) 35** 21 4 0
Morris et al. (52) 43 9 11 1
Camatte et al. (53) 50 15 7 0
Zanetta et al. (54) 283 164 20 1
Seracchioli et al. (55) 19 19*** 11 1 0
Donnez et al. (56) 67 14 5 3 0
Prat & De Nictolis (19) 76 21 2 0
Chan et al. (57) 24 25 6 0 0
Maneo et al. (58) 62 28 18 0

* Conservateur = salpingo-oophorectomie ou kystectomie


** Stade I + patientes « non stadifiées »
*** Chirurgie laparoscopique.
454 Les cancers ovariens

in sano de la tumeur à la limite de la malignité kystique et la multiplication des


kystectomies sur un même ovaire sont les principaux facteurs de risque de réci-
dive après un tel geste (17). Ce geste est très souvent nécessaire en complément
d’une annexectomie controlatérale, rendant compte du caractère volontiers
bilatéral de ces tumeurs, notamment les tumeurs de type séreux, les plus
fréquentes. Par ailleurs, pour être in sano, la kystectomie, dans le cadre d’une
tumeur à la limite de la malignité nécessite souvent une ovariectomie partielle
en regard de la paroi adhérente au cortex ovarien. Mais, quelle que soit la
qualité du geste, ce taux de récidive élevé dans la littérature traduit la fréquente
multifocalité de la tumeur à la limite de la malignité au sein d’un même ovaire.
Ce risque élevé de récidive après kystectomie doit faire considérer l’annexec-
tomie unilatérale comme le traitement conservateur idéal d’une tumeur à la
limite de la malignité. La kystectomie doit être réservée à l’ovaire le moins
atteint dans les formes bilatérales, ou aux tumeurs à la limite de la malignité
survenant sur ovaire unique (antécédents de tumeur à la limite de la malignité
sur l’ovaire controlatéral). Pourtant, nous ne recommandons pas une annexec-
tomie complémentaire secondaire à la découverte fortuite postopératoire d’une
tumeur à la limite de la malignité sur une pièce de kystectomie réalisée dans le
cadre d’un kyste d’allure bénigne macroscopiquement. Cette annexectomie ne
s’impose, nous l’avons vu, qu’en cas de restadification, si l’exploration de la
cavité abdominale était incomplète lors de l’intervention initiale.
En cas de traitement conservateur chez une patiente ayant une tumeur
macroscopiquement unilatérale, certains auteurs recommandent la biopsie
systématique de l’ovaire controlatéral sain. Néanmoins, plusieurs auteurs ont
rapporté des récidives ovariennes homolatérales à une biopsie normale lors du
traitement initial (45, 47, 52). Ces biopsies systématiques peu rentables sont
source d’adhérences et d’éventuelle infertilité postopératoire. Elle doivent donc
être proscrites si l’ovaire contralatéral à la tumeur paraît macroscopiquement et
radiologiquement (échographie pré-chirurgicale) sain.
Le taux de récidive très élevé après traitement conservateur ne doit cepen-
dant pas remettre en question ce dernier. En effet, comme le rapportent de très
nombreuses séries de la littérature (tableau II), les décès secondaires à une
évolution tumorale après traitement conservateur d’une tumeur à la limite de
la malignité de stade I sont très exceptionnels. La très grande majorité des réci-
dives surviennent sur un mode « borderline » et sont donc très accessibles à un
traitement chirurgical simple. Ces récidives ne mettent donc pas en jeu le
pronostic vital. Par ailleurs, ces « récidives » sont parfois très tardives (72 mois
dans la série de Gotlieb et al. et 240 mois dans notre propre série) (51, 53).
Dans de tels cas, il peut s’agir plus de « seconde » tumeur que de « récidive »
vraie de la première tumeur traitée plus de cinq ans auparavant.
En cas de récidive ovarienne isolée, un traitement conservateur pourra
d’ailleurs de nouveau être proposé, en fonction du désir de grossesse de la
patiente. Dans la série de l’IGR, 4 grossesses ont été observées après traitement
conservateur pour une récidive de tumeur à la limite de la malignité (53). Les
récidives sous forme d’adénocarcinome ovarien sont très rares (51, 53, 56).
Facteurs pronostiques et traitement chirurgical des tumeurs « borderline » 455

Certaines d’entre elles ont été rapportées très précocement après le traitement
de la tumeur à la limite de la malignité (cinq mois dans la série de Gotlieb et
neuf mois dans la série de Zanetta) (51, 54). On peut alors se demander si cette
tumeur est réellement une « récidive » ou bien une tumeur invasive présente
déjà lors du traitement de la tumeur à la limite de la malignité, mais alors
méconnue.
Le traitement conservateur est donc une option acceptable (si ce n’est un
standard) chez une patiente jeune présentant une tumeur à la limite de la mali-
gnité de stade I compliante à un suivi régulier. La seule limite technique à ce
traitement conservateur est le cas de tumeur de stade IB avec envahissement
massif des deux ovaires ne permettant pas de préserver une portion de paren-
chyme macroscopiquement sain dans un des ovaires. Dans ces cas,
l’annexectomie bilatérale doit être réalisée, mais avec préservation de l’utérus et
tentative de cryopréservation ovarienne.
Les résultats du traitement conservateur des tumeurs ovariennes à la limite
de la malignité avec lésions péritonéales sont moins bien documentés dans la
littérature (tableau III). En cas de tumeur à la limite de la malignité mucineuse
avec pseudo-myxome péritonéal, le traitement conservateur est contre-indiqué

Tableau III – Résultats des traitements conservateurs en cas de tumeurs à la limite de la mali-
gnité séreuses avec implants péritonéaux.

Nombre de cas
Séries Patientes Type Récidive Récidive Traitement Grossesses
d’implants ovarienne conservateur
invasive (kystectomie)
des récidives
Zanetta et al. 25 7 invasif/ 5 (ovaire 1 ? ?
(54) 18 non-invasif controlatéral) (+ péritoine)
Beiner et al. (59) 4 NP 3 (borderline/ 0 2 ?
ovaire controlatéral)
2 (1 borderline/
Morris et al. 3 NP ovaire controlatéral 0 ? 1
(52) + 1 péritonéal)
Tamakoshi et al. 4 NP 3 (2 décès) NP ? ?
(4)
Miller et al. (60) 1 non-invasif 0 0 0 1
Donnez et al. 2 non-invasif 0 ?
(56)
Camatte et al. 17 3 invasif/ 9 (7 borderline/ 7 chez 6 pa-
(61) 14 non-invasif ovaire contro- 0 3 tientes (3 après
latéral + traitement
2 péritonéal) 0 conservateur
récidive)
Chan et al. (57) 1 NP 0 0 0 1
Maneo et al. 1 NP NP 0 NP ?
(58)
456 Les cancers ovariens

et la chirurgie doit être radicale, avec résection des lésions péritonéales. En cas
de tumeurs à la limite de la malignité séreuses avec implants, seules deux séries
ont rapporté un nombre de cas dépassant le simple « cas clinique » (54, 61).
Dans notre étude, parmi nos 18 patientes traitées de manière conservatrice, 3
présentaient des implants invasifs (61). Deux de ces 3 patientes ont récidivé :
une sur l’ovaire controlatéral isolément, une est en poursuite évolutive mais
présentait d’emblée une carcinose diffuse. Parmi les 15 tumeurs à la limite de
la malignité avec implants non invasifs, une seule a récidivé sous la forme d’im-
plants invasifs. La qualité des prélèvements péritonéaux initiaux a été remise en
question (biopsies trop superficielles méconnaissant des implants d’emblée
invasifs) car cette évolution est rare (2 %) dans notre expérience (2). Zanetta
rapportait quant à lui une série de 25 patientes (dont 7 avec implants invasifs).
5 récidives ont été observées sur un mode « borderline » sur l’ovaire contrala-
téral et une sur un mode invasif (associée à une atteinte d’un ganglion
obturateur) (54). Mais aucune patiente n’est décédée.
Compte tenu de ces résultats il semble possible de proposer un traitement
conservateur chez les femmes jeunes ayant une tumeur à la limite de la mali-
gnité avec implants non invasifs. Pour les tumeurs avec implants invasifs,
même si nos résultats ne montrent pas un risque de récidive plus important
(tableau III), nous ne conseillons pas ce traitement qui est à discuter au cas par
cas avec la patiente.

Fertilité et infertilité après traitement conservateur


L’objectif du traitement conservateur est de promouvoir la fertilité ultérieure.
L’infertilité est un facteur fréquemment associé tant aux tumeurs à la limite de
la malignité qu’aux cancers de l’ovaire. Cette association pose bien évidemment
le problème de la prise en charge médicale de ces patientes après traitement
conservateur. Plusieurs séries ont rapporté un taux de grossesses spontanées
important (51-53). Ainsi, Gotlieb rapporte 22 grossesses sur une série de 39
patientes ayant bénéficié d’un traitement conservateur (51). Dans notre série,
nous rapportons 15 grossesses chez 42 patientes. Parmi les 12 patientes qui
avaient une tumeur de stade II ou III, 4 grossesses ont été obtenues (53). Après
l’obtention d’une (ou des) grossesse(s) souhaitées, certains auteurs proposent
d’enlever l’ovaire conservé. Chez des patientes qui sont suivies régulièrement,
nous ne pratiquons pas cette « totalisation » de manière systématique. Celle-ci
n’est effectuée qu’en cas de suspicion de récidive sur l’ovaire controlatéral.
Par contre, en cas d’infertilité persistante, l’utilisation des techniques de
procréation médicalement assistée (PMA) reste discutée. En effet, certaines
études incriminent l’hyperstimulation ovarienne dans la genèse des tumeurs
« borderline » comme dans celles des cancers ovariens. Cependant, des études
récentes semblent remettre en question ce « dogme » historique, le risque accru
de néoplasie ovarienne observé après stimulation étant plutôt en relation avec
Facteurs pronostiques et traitement chirurgical des tumeurs « borderline » 457

le terrain (infertilité, pauci-ovulation) que secondaire à un effet direct des


substances utilisées pour induire la poly-ovulation.
Malgré ces résultats divergents, plusieurs « cas cliniques » ou courtes séries
ont été rapportées concernant l’utilisation des techniques de PMA chez des
patientes traitées pour une tumeur à la limite de la malignité (tableau IV).
Nijman et al., Mantzavinos et al. et Hoffman et al. rapportent un total de
5 patientes traitées pour une tumeur à la limite de la malignité séreuse avec
implants péritonéaux non invasifs qui ont bénéficié d’une FIV avec succès (62,
63, 65). Une étude multicentrique rétrospective réalisée en 1998 dénombre
26 cas de stimulation ovarienne après traitement conservateur pour tumeur à
la limite de la malignité (16 cas : 14 de stade I, 1 de stade II et 1 de stade III)
ou adénocarcinome ovarien de stade I de faible grade (66). Quatre stimulations
ont été initiées en postopératoire immédiat et 22 après un délai d’observation
moyen de 42 mois (1 à 88 mois) (66). Aucune récidive n’a été observée avec
un recul moyen de 46,7 mois après stimulation et de 114,7 mois après traite-
ment initial. Cinq grossesses ont été obtenues chez les 16 patientes traitées
pour une tumeur à la limite de la malignité (66).

Tableau IV – Revue de la littérature concernant les traitements par procréation médicalement


assistées chez des patientes traitées pour une tumeur à la limite de la malignité.

Séries Nombre Induction N FIV Stade II/III Grossesses Récidive (après


de cas ovarienne stimulation ou FIV)
Nijman et al. 1 0 1 1 1 0
(62)
Mantzavinos 2 0 2 2 1 0
et al. (63)
Hershkovitz 2 1 1 1 2 (1 spontanée après 0
et al. (64) tentative par stimulation)
Hoffman et al. 1 0 1 1 1 0
(65)
Madelenat et al. 16 0 16 2 5 0
(66)
Beiner et al. (59) 7 0 7 2 5 2
Camatte et al. 5 1 4 2 2 2 (borderline/
(61) ovaire préservé)
Attar et al. (67) 1 0 1 1 (III C) 6 grossesses Progression périto-
chez 3 patientes néale rapide
Fasouliotis 7 0 5 0 3 récidives de TOLM
et al. (68) chez 1 patiente

Les techniques de PMA semblent acceptables pour les patientes infertiles


traitées pour un stade I, le nombre de cycles de stimulation devant alors rester
limité. Nous restons plus réticents pour son utilisation après traitement d’un
stade avancé en raison du peu de recul disponible et de l’éventualité d’une
458 Les cancers ovariens

transformation maligne. Notons qu’un « cas clinique », publié récemment par


Attar et al., rapportait une progression tumorale rapide péritonéale chez une
patiente ayant bénéficié d’un cycle de FIV pour une tumeur à la limite de la
malignité séreux de stade IIIC et de composante micropapillaire (67). Cette
observation souligne que ce type de traitement devrait être contre-indiqué
(sous réserve d’évaluation ultérieure) chez des patientes ayant une tumeur à la
limite de la malignité de stade avancé et peut-être aussi chez des patientes ayant
une tumeur séreuse de composante micropapillaire. Notons d’ailleurs, qu’il n’y
a aucune série publiée dans la littérature rapportant les résultats des traitements
conservateurs dans cette dernière entité histologique.
Chez les patientes qui présentent des récidives itératives ou, d’emblée, une
tumeur exophytique bilatérale, nécessitant la réalisation d’un ovariectomie bila-
térale (ou unilatérale sur annexe unique), on peut envisager, comme nous
l’avons précédemment évoqué, une conservation utérine et proposer une cryo-
conservation d’une partie d’ovaire sain dans le but d’une réimplantation qui,
actuellement, fait l’objet d’expériences restreintes. Néanmoins, très récemment,
Donnez et al. ont rapporté la première grossesse observée dans l’espèce humaine
après cryopréservation ovarienne (69). Cette technique devrait donc être
proposée systématiquement lorsqu’une annexectomie bilatérale (ou unilatérale
sur ovaire unique) est envisagée chez une patiente traitée pour une tumeur à la
limite de la malignité. Trois équipes rapportent par ailleurs également une gros-
sesse après don d’ovocytes ou réimplantation d’embryons préalablement
congelés chez des patientes ayant eu une annexectomie bilatérale avec conserva-
tion utérine pour une tumeur à la limite de la malignité (70-72).

Traitement chirurgical des stades II et III


L’existence d’un reliquat tumoral en fin d’intervention est un facteur de plus
mauvais pronostic. En cas de tumeurs à la limite de la malignité avec localisations
péritonéales (y compris le pseudomyxome péritonéal), l’intervention chirurgicale
doit comporter une exérèse des implants péritonéaux macroscopiquement
visibles afin d’obtenir un reliquat nul. Ce point est d’autant plus crucial que,
comme nous allons le voir dans le prochain chapitre, elles sont peu sensibles aux
traitements adjuvants. La régression spontanée d’implants péritonéaux non inva-
sifs après ablation de la tumeur ovarienne a été rapportée dans la littérature (73).

Traitement cœlioscopique des tumeurs ovariennes à la limite


de la malignité
Quelques séries ont été rapportées de traitement cœlioscopique d’une tumeur
à la limite de la malignité et sont synthétisées dans le tableau V. L’avantage
théorique de l’utilisation de cette voie d’abord est surtout de réduire le risque
Facteurs pronostiques et traitement chirurgical des tumeurs « borderline » 459

Tableau V – Revue de la littérature concernant le traitement cœlioscopique des tumeurs à la limite de la malignité.

Nombre de cas
Séries Patientes Traitement Conversion Stade initial Chirugie de Médiane Récidives Grossesses
cœlioscopique en (cœlioscopie) second-regard de suivie
laparotomie ultérieure
Darai Radical : 4 24 stade I 5 41 mois 4 NS
et al. (16) 25 Conservateur : 13 7 1 stade III (borderline
Biopsie : 1 sur ovaire
préservé)
17 stade IA 4 NS
Candiani 34 Radical : 7 8 2 stade IB NP 48 mois (3 borderline
et al. (74) Conservateur : 19 6 stade IC sur ovaire
1 stade II préservé ;
1 sur le
péritoine)
Seracchioli 19 Conservateur : 19 0 17 stade IA 0 42 mois 1 3
et al. (55) 2 stade IB (borderline
sur ovaire
préservé)
Camatte Radical : 3 33 stade I 7
et al. (75) 74 Conservateur : 45 20 6 stade II 26 42 mois (5 borderline 10
6 stade III sur ovaire
préservé;
2 sur le
péritoine)
Maneo 30 Biopsie : 6 6 stade IA 11
et al. (58) Ovariectomie : 11 0 2 stade IB NP 61 mois (ovaire dans ?
Kystéctomie : 19 21 stade IC 8 cas +/-
1 stade IIC péritoine
dans 6 cas –
dont 2
avec implants
invasifs)

adhérentiel, source d’une éventuelle infertilité ultérieure, chez des patientes


jeunes traitées de manière conservatrice. Ces différentes séries suggèrent que le
traitement cœlioscopique des tumeurs à la limite de la malignité de stade I est
faisable, sans a priori prendre de risque carcinologique. Le taux de récidive
observé n’est pas supérieur à celui rapporté après laparotomie. Néanmoins,
cette chirurgie laparoscopique ne doit être réservée qu’aux cas les plus « favo-
rables » : tumeur de taille < 6 à 7 cm et/ou à composante liquidienne
prédominante (et non pas solide). Ces deux critères permettent de réduire le
risque de morcellement et de contamination péritonéale lors de l’extraction de
la pièce. Il n’y a qu’une seule série rapportant des traitements laparoscopiques
exclusifs de tumeurs à la limite de la malignité avec implants péritonéaux (76).
Cette intervention semble être faisable sans prendre de risque chez des
patientes ayant des implants non invasifs de petite taille. Néanmoins, d’autres
séries sont nécessaires avant de préconiser définitivement cette voie d’abord.
Des « localisations » d’implants « borderline » sur orifice de trocart ont été
rapportées après cœlioscopie (77-79). Néanmoins, à la différence des « méta-
460 Les cancers ovariens

stases » sur orifice de trocart rapportées dans les autres pathologies néopla-
siques, cette complication ne met pas en jeu le pronostic vital et peut être
traitée aisément avec une résection simple (79). Pour réduire ce risque, les
spécimens chirurgicaux doivent être retirés dans des sacs endoscopiques.

Surveillance après traitement


Elle est basée sur une surveillance clinique, biologique (marqueurs : ACE, CA
125 et 19,9 selon le type histologique) et radiologique (échographie abdomi-
nale et pelvienne). Ce dernier examen est le plus important chez les patientes
ayant bénéficié d’un traitement conservateur (80). Le rythme de cette
surveillance est régulier (par exemple de quatre mois pendant un an, puis six
mois pendant deux ans, puis annuelle). Chez les patientes ayant bénéficié d’un
traitement radical, on peut proposer une surveillance de six mois pendant deux
ans puis annuelle. Cette surveillance sera poursuivie au-delà de cinq ans car des
récidives tardives peuvent survenir. Ainsi, dans la série de Kaern, 20 % des réci-
dives surviennent au moins cinq ans après le traitement de la tumeur à la limite
de la malignité (3). Les tumeurs à la limite de la malignité ne sont pas une
contre-indication en elles-mêmes aux traitements hormonaux substitutifs.

Conclusion
Les tumeurs à la limite de la malignité sont des tumeurs rares. Elles sont carac-
térisées, par rapport aux adénocarcinomes ovariens, par un âge de survenue en
moyenne de dix ans inférieur à celui des tumeurs malignes, un très bon
pronostic global et des possibilités de récidive tardives (au-delà de vingt ans).
Les facteurs pronostiques les plus importants sont le stade, le type d’implants
péritonéaux et l’existence d’un reliquat tumoral postopératoire. Le traitement
est essentiellement chirurgical. La chirurgie de référence est l’annexectomie
bilatérale avec une stadification péritonéale (cytologie, biopsies multiples et
omentectomie). Néanmoins, cette chirurgie peut (et même doit) être conser-
vatrice en cas de tumeur limitée survenant chez une femme jeune.

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Place de la chimiothérapie
dans le traitement des tumeurs de l’ovaire
à la limite de la malignité

C. Lhommé, P. Pautier, P. Morice, D. Castaigne, C. Pomel, A. Rey,


C. Balleyguier, C. Haie-Meder et P. Duvillard

Introduction
Les tumeurs de l’ovaire à la limite de la malignité représentent 10 à 20 % des
tumeurs malignes de l’ovaire (1). Leur présentation clinique, leur pronostic et
leur traitement différent de ceux des adénocarcinomes ovariens. Elles survien-
nent chez des patientes plus jeunes (de dix ans en moyenne) et la majorité
d’entre elles (80-92 %) sont diagnostiquées au stade I (classification de la
FIGO) (2). Leur pronostic est excellent, les taux de survie à cinq ans et à vingt
ans étant respectivement de 95 % et de 80 % (3, 4). Leur traitement repose de
façon quasi exclusive sur la chirurgie.
Cependant, si les taux de survie à cinq ans sont supérieurs à 95 % pour les
stades I, ils diminuent dans les études rétrospectives à 40-75 % pour les stades
II et à 56-65 % pour les stades III (5). Il faut signaler que certaines études plus
récentes ne confirment pas ces chiffres, rapportant des taux de survie plus
élevés (survie sans maladie de 89 % pour les stades III (suivi médian de
soixante-dix mois) (6). Néanmoins, ils continuent à décroître régulièrement
après cinq ans. Ainsi, Leake rapporte des taux de survie à cinq, dix, quinze et
vingt ans de 97 %, 95 %, 92 % et 89 % respectivement (tous stades confondus)
(7). Une minorité de patientes décèdent donc de leur maladie. La place des
traitements postopératoires des tumeurs à la limite de malignité demeure
complexe et controversée dans certaines situations. Les cliniciens craignent en
effet de sous-traiter certaines patientes ou, à l’opposé, d’en surtraiter d’autres
(comme cela a été souvent le cas dans le passé, le traitement dans les stades
évolués étant alors calqué sur celui des adénocarcinomes) (8, 9). Au total, la
question se pose actuellement de savoir si un traitement adjuvant peut être
bénéfique pour certaines malades.
466 Les cancers ovariens

Un traitement adjuvant
est-il réellement nécessaire ?
De nombreux arguments peuvent être évoqués pour tenter de répondre à cette
question.

Arguments allant à l'encontre des traitements adjuvants


– Le pronostic global des tumeurs à la limite de malignité est excellent (y
compris pour les stades les plus évolués) (6-8, 10, 11).
– Les récidives ne sont pas fréquentes (de 10 % à 30 %) et sont dans l’immense
majorité des cas sous forme de tumeurs à la limite de malignité, exception-
nellement sous forme de carcinome invasif et peuvent s'observer très
tardivement. Leur fréquence est fonction des modalités de la chirurgie
initiale pour les petits stades (kystectomie simple, annexectomie unilatérale
ou annexectomie bilatérale) (6, 12-14) et du stade d’extension de la maladie
(8). Les données concernant l’impact de la nature des implants péritonéaux
(invasifs ou non) sur la fréquence des récidives sont contradictoires. Ainsi,
dans les publications de Gershenson, la fréquence des récidives est identique,
que les implants péritonéaux soient invasifs (15) ou non invasifs (16), et la
plupart des patientes présentaient une récidive sous forme de maladie inva-
sive progressive. Au contraire, dans notre expérience (17), l’évolution vers
une maladie invasive évolutive est observée principalement chez les patientes
ayant initialement des implants péritonéaux invasifs : 31 %, contre 2 % en
cas d’implants non invasifs (p < 0,002).
– Les récidives sont le plus souvent curables par la chirurgie seule (6, 14, 18).
– Les tumeurs à la limite de malignité sont des tumeurs peu chimiosensibles et
peu radiosensibles. Ceci est probablement à rapprocher de leur faible activité
mitotique (10, 19, 20).
– La nécessité de préserver la fertilité ultérieure des patientes jeunes est un
point d’importance capitale. En effet, très souvent les femmes affectées par
les tumeurs à la limite de malignité sont en âge de procréer, et des traitements
conservateurs sont proposés, y compris en cas tumeurs de stades évolués (21).
Par ailleurs, certaines d’entre elles sont nullipares, la pauciparité et l’inferti-
lité étant des facteurs de risque de développer une tumeur à la limite de
malignité (11).
– Il faut également prendre en compte les risques de complications iatrogé-
niques immédiates et tardives. Ont été rapportés dans les différentes séries
des sarcomes radio-induits, des grêles radiques, ainsi que des leucémies
secondaires à la chimiothérapie, complications létales dans un certain
nombre de cas (3, 10, 17, 22, 23). De plus, il est important de souligner que
plusieurs publications rapportent plus de décès secondaires aux traitements
adjuvants qu’à la progression de la maladie (10, 17). Par exemple, Kurman et
Place de la chimiothérapie dans le traitement des tumeurs… 467

Trimble (10) dans une compilation des données de 22 publications portant


sur 953 patientes rapportent 46 décès dont 9 par complication de la chimio-
thérapie, 3 par complication de la radiothérapie, 8 par occlusion intestinale,
8 par progression de la maladie et 18 de cause inconnue.
– Dans certaines séries, il n’y a pas de différence globale entre les taux de survie
des patientes ayant reçu une chimiothérapie et ceux des malades n’ayant pas
reçu de traitement adjuvant après la chirurgie (6).

Arguments en faveur des traitements adjuvants


– Bien que certaines patientes aient une survie prolongée malgré une maladie
initialement évoluée avec des sites tumoraux extra-ovariens, certains cas de
tumeurs évolutives malgré une chirurgie de cytoréduction agressive suivie de
chimiothérapie sont rapportés (24, 25). Ainsi, si les taux de survie à vingt ans
(tous stades confondus) atteignent 89 %, les taux de mortalité sont de 4,2 %
pour les stades II et 26,8 % pour les stades III (7).
– Surtout, si le risque global de transformation maligne est très faible (0,7 %
(10) ; 2 % (6)), le pronostic devient alors défavorable, identique à celui des
adénocarcinomes ovariens. L’incidence de cette progression sous forme de
carcinome invasif augmente avec le stade d’extension (FIGO), et dans notre
expérience lorsqu’il existe des implants péritonéaux invasifs. Pour les stades
II et III, à cinq ans les taux de dégénérescence sont de 31 % en cas d’implants
invasifs et de 2 % (p < 0,002) chez les patientes ayant des implants non inva-
sifs (17).

L’impact sur la survie des traitements adjuvants


est difficile à évaluer
– Il n’existe pas d’étude randomisée ayant comparé un traitement postopéra-
toire à une simple surveillance chez une population importante de patientes.
De nombreux essais ont rapporté chez peu de malades ayant une tumeur à la
limite de malignité des résultats de chimiothérapie adjuvante (mono- ou
polychimiothérapies) ou de radiothérapie externe (pelvienne ou abdomino-
pelvienne) ou de radiothérapie intrapéritonéale (colloïdes radioactifs). Les
protocoles, les modalités et les indications des traitements sont très différents
d’un article à l’autre et au sein de la plupart d’entre eux. Une compilation des
données constitue souvent la seule voie pour essayer d’évaluer la place des
traitements adjuvants (3, 8).
– Un très long recul est nécessaire pour évaluer l’impact réel des traitements sur
la survie. Dans l’article de Leake, les taux de survie à cinq, dix, quinze et
vingt ans sont respectivement de 97 %, 95 %, 92 % et 89 % (tous stades) (7).
468 Les cancers ovariens

– Enfin, quelques régressions spontanées d’implants péritonéaux après ablation


des tumeurs ovariennes ont été rapportées (26, 27).

Certaines tumeurs à la limite de malignité


ont un comportement biologique agressif
Il existe peut-être seulement une petite population de malades ayant des
facteurs de mauvais pronostic et pouvant bénéficier d’une chimiothérapie (7).
Cependant, la détermination des patientes à haut risque nécessitant un traite-
ment adjuvant reste problématique.
Le stade d’extension FIGO (facteur pronostique le plus important) (3, 5, 7,
28), le volume tumoral résiduel après chirurgie (1, 5, 22, 29), et l’existence
d’un pseudomyxome péritonéal en cas de tumeurs mucineuses (9, 30) ont un
impact sur la survie. Tropé et al. ont montré que l’association d’une tumeur
séreuse, de petit stade, survenant chez une jeune patiente confère un pronostic
particulièrement favorable (11).
Il n’y a pas d’impact indépendant sur la survie de l’envahissement ganglion-
naire (31-33), des modalités de la chirurgie (conservatrice ou non) (13, 14), de
la rupture capsulaire (34, 35), de l’existence de végétations exophytiques à la
surface de l’ovaire (36), d’une micro-invasion stromale (37-39), de l’hyperex-
pression de la p53 (40) ou de Her-2/neu (41) ou de mutations de K-ras (4, 42).
Les données sont contradictoires concernant la signification pronostique de
l’âge des patientes, du type histologique de la tumeurs à la limite de malignité
(2), et de la ploïdie du DNA (3, 43, 44). Seules 5 à 14 % des tumeurs à la
limite de malignité sont aneuploïdes, mais en cas d’aneuploïdie les taux de
survie à cinq ans des tumeurs à la limite de malignité ne sont que de 15 % (4).
Cependant, il n’existe pas de preuve que l’aneuploïdie soit un facteur de risque
indépendant. L’impact des caractéristiques des implants péritonéaux (invasifs
ou non) a également été discuté (17, 22, 45, 46), mais actuellement la majo-
rité des équipes s’accorde pour leur attribuer un impact péjoratif.
Les tumeurs à la limite de malignité séreuses avec composante micropapil-
laire sont fréquemment associées à des extensions extra-ovariennes, souvent à
type d’implants péritonéaux invasifs. Le pronostic de ces tumeurs est iden-
tique, à extension tumorale similaire, à celui des tumeurs à la limite de
malignité séreuses sans composante micropapillaire (47, 48). Leurs traitements
sont similaires.
Au total, peu de facteurs sont reconnus comme ayant un impact sur le
pronostic. De toutes ces données découlent les indications actuelles de la
chimiothérapie.
Place de la chimiothérapie dans le traitement des tumeurs… 469

Indications des traitements adjuvant


Stades I
Dans les études rétrospectives, la grande majorité des patientes ayant une
tumeur à la limite de malignité de stade I n’ont pas reçu de traitement adju-
vant et les taux de survie à cinq ans sont excellents. Une comparaison
historique entre 134 patientes ayant reçu un traitement adjuvant et
450 patientes n’en ayant pas reçu (8) et l’analyse des données d’une étude de
phase III du GOG qui avait inclus des patientes ayant une tumeur à la limite
de malignité (diagnostic fait rétrospectivement lors de la relecture des lames
histologiques) (49) et les résultats d’un essai de phase III incluant 55 patientes
(50), n’ont pas mis en évidence de bénéfice à la réalisation d’un traitement
adjuvant (irradiation pelvienne, melphalan ou P32 intrapéritonéal).
Conclusion : aucun traitement adjuvant n’est indiqué pour les tumeurs à la
limite de malignité de stade I.

Stades II ou III
Il existe de nombreuses controverses concernant le meilleur protocole théra-
peutique à proposer à ces patientes.
Dans la compilation des données de la littérature publiée par Chambers (8),
les pourcentages de décès et de récidives étaient inférieurs dans le groupe traité.
Il faut souligner qu’il s’agit d’une étude rétrospective et que les modalités théra-
peutiques étaient multiples. Par ailleurs, 10 % des patientes n’avaient reçu
aucun traitement adjuvant.
Le pronostic pour les patientes ayant des implants péritonéaux non invasifs
est très bon (17). En conséquence, aucun traitement adjuvant est indiqué en
cas tumeurs de stade II ou III avec implants péritonéaux non invasifs et résé-
quées en totalité (51). Un traitement adjuvant n’est pas non plus nécessaire en
cas d’atteinte ganglionnaire, ni s’il existe une rupture tumorale (17).
Il n’existe pas de consensus concernant les traitements adjuvants en cas
d’implants péritonéaux invasifs et/ou de tumeur résiduelle macroscopique.
Etant donné le taux plus élevé de maladie évolutive en cas d’implants péri-
tonéaux invasifs, leur agressivité (similaire à celle des adénocarcinomes
ovariens) (22, 44) et les faibles taux de survie reportés dans certaines séries,
beaucoup d’auteurs préconisent un traitement adjuvant dans cette situation
(17, 52). Pour d’autres, un traitement adjuvant n’est proposé que si les
implants invasifs sont aneuploïdes (46) car ces derniers sont associés à un
mauvais pronostic. Cependant, il n’y a pas de preuve que les traitements adju-
vants aient un impact sur la survie de ces patientes (4). La majorité des équipes
utilise la chimiothérapie, et non la radiothérapie, le plus souvent en utilisant
des protocoles incluant un sel de platine (2, 18, 22, 43, 53). Cependant, les
470 Les cancers ovariens

poly-chimiothérapies à base de cisplatine sont peu actives dans les traitement


des tumeurs à la limite de malignité (53 ; 54) et le rôle des chimiothérapies à
base de platine dans le management des tumeurs à la limite de malignité des
stades évolués est discuté encore actuellement. Il existe peu de publications
concernant l’utilisation du paclitaxel. Une réponse complète chirurgicale a été
reportée chez 3 patientes avec une association cisplatine-paclitaxel après
chirurgie de réduction tumorale maximale (maladie résiduelle microscopique)
(55).
Il est encore plus difficile de décider si un traitement postopératoire est
nécessaire ou non en cas de volumineux résidu tumoral non résécable. Les taux
de survie à huit ans pour les malades ayant une maladie résiduelle sont de 60 %
alors qu’ils sont proches de 100 % en l’absence de maladie résiduelle (56). Plus
à distance, les taux de survie à quinze ans sont respectivement de 35 % et de
90-95 % (1). Dans l’étude de Tamakoshi (5), la survie globale pour les
patientes ayant une maladie résiduelle < 2 cm était significativement meilleure
que celle des patientes dont le résidu tumoral était, soit de 2 à 5 cm, soit
> 5 cm (p < 0,05), mais la chimiothérapie à base de cisplatine n’avait qu’un
faible impact chez les patientes ayant une volumineuse maladie résiduelle et ce
spécialement en cas de tumeur mucineuse. Plusieurs auteurs n’ont observé
aucun bénéfice avec la chimiothérapie (57-60) alors que d’autres ont rapporté
des réponses avec la chimiothérapie chez des patientes ayant une maladie de
stade évolué et une tumeur résiduelle (61). 12 sur 15 (62), 8 sur 20 (29) et 9
sur 17 (63) malades étaient en rémission complète histologique lors d’une
chirurgie de second regard. Cependant, l’administration d’un traitement adju-
vant n’a pas augmenté la durée de survie des patientes dans ces études.
Au total, même si quelques réponses ont été publiées chez des malades
ayant de volumineuses maladies résiduelles, le rôle de la chimiothérapie en cas
de maladie résiduelle non invasive et non résécable n’est pas élucidé. Il est
nécessaire de prendre en compte la toxicité des traitements, et le fait que
certaines patientes ayant une maladie résiduelle après la chirurgie demeurent
asymptomatiques dix ans plus tard, sans aucun traitement adjuvant. Une des
solutions est peut-être de ne proposer de chimiothérapie qu’en cas de maladie
non résécable, évolutive et/ou symptomatique (64).
Certains auteurs proposent un traitement adjuvant pour les patientes ayant
des implants péritonéaux invasifs aneuploïdes, car ces derniers sont associés à
un mauvais pronostic. Cependant, il n’y a pas de preuve que les traitements
adjuvants aient un impact sur la survie de ces patientes (4).

Les pseudomyxomes péritonéaux


Ils sont à part. Leur pronostic est particulièrement défavorable avec des taux de
décès en rapport avec la maladie de 50 % (moyenne) (9, 30). La chimiothérapie
systémique n’est pas efficace (65) et quelques équipes proposent une chimio-
Place de la chimiothérapie dans le traitement des tumeurs… 471

thérapie hyperthermique intrapéritonéale per-opératoire à la fin d’une


chirurgie de réduction tumorale (66).

Conclusion
Actuellement, nous savons à quelles patientes ayant une tumeur à la limite de
malignité il ne faut pas proposer de traitement adjuvant. Des réponses à la
chimiothérapie ont été rapportées chez quelques malades ayant des implants
péritonéaux invasifs et/ou une maladie résiduelle macroscopique, mais le béné-
fice global pour ces patientes n’est pas clair (survie, qualité de vie, toxicités des
traitements). Seules quelques malades ayant des facteurs de mauvais pronostic
bénéficient peut-être de la chimiothérapie, mais ces facteurs à ce jour ne sont
pas clairement définis, qu’ils soient cliniques, histologiques ou biologiques. La
question reste ouverte : à quelles patientes un traitement adjuvant peut-il vrai-
ment être bénéfique pour les malades ayant une tumeur à la limite de
malignité ?

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Biologie des tumeurs germinales
A. Fléchon et J.-P. Droz

Introduction
Les tumeurs germinales de l’ovaire sont très rares par rapport à l’origine testi-
culaire plus commune. Elles représentent 2 à 5 % de toutes les tumeurs de
l’ovaire et moins de 5 % de toutes les tumeurs germinales. L’incidence annuelle
est inférieure à 1/100 000. Le fait important est que la médiane d’âge de
survenue est de 20 ans. Leur aspect histologique est riche puisque plusieurs
composantes sont décrites et diversement associées. La classification utilisée est
celle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (1). Le séminome (ou
dysgerminome) est le plus fréquent (45 %), suivi de la tumeur du sinus endo-
dermique (ou tumeur vitelline) et du tératome immature (20 % des cas
respectivement), puis des tumeurs mixtes (10 %). Sont beaucoup plus rares le
carcinome embryonnaire, le choriocarcinome et le polyembryome. Le tératome
mature est une tumeur bénigne dont la présentation est particulière : il est
observé très rarement chez la petite fille, mais est courant chez la femme âgée où
il représente un quart de toutes les tumeurs de l’ovaire ; rarement il peut évoluer
vers une tumeur maligne de la lignée épithéliale. Dans ce chapitre, nous traite-
rons des seules tumeurs germinales malignes dont ont été décrits quelques cas
familiaux (2) et qui paraissent plus fréquentes en cas de dysgénésie gonadique.
Des marqueurs sériques sont souvent présents au cours de l’évolution.

Marqueurs
Deux marqueurs principaux sont liés aux tumeurs germinales : l’AFP (alpha-
fœto protéine) et l’hCG (hormone chorionique gonadotrope). L’AFP est une
glycoprotéine d’origine embryonnaire (chez le nourrisson elle disparaît du sang
en quelques mois) qui peut être élevée au cours de certaines hépatites virales et
de l’hépatocarcinome. Elle est souvent élevée dans les tumeurs germinales non
séminomateuses, jamais au cours du séminome. Elle est sécrétée par la compo-
sante dénommée tumeur vitelline et certains carcinomes embryonnaires. Sa
480 Les cancers ovariens

demi-vie d’élimination plasmatique est de sept jours. La valeur normale dans


le sang est variable (elle est inférieure à 6 ou à 30 ng/ml selon les techniquess
de dosage immuno-enzymatique qui sont nombreuses). L’hCG est une
hormone sécrétée physiologiquement par le placenta au cours de la grossesse.
Dans les tumeurs germinales, elle est sécrétée par la composante de choriocar-
cinome et par les cellules syncytio-trophoblastiques isolées. Elle peut être élevée
dans certains autres cancers, comme le cancer à petites cellules du poumon, le
cancer du pancréas et le cancer de vessie. Elle est modérément élevée dans 20 %
des cas de séminome pur. Sa demi-vie plasmatique est de trois jours. Elle est
constituée de deux sous-unités : α et β. Dans les tumeurs germinales, on
observe une sécrétion de la molécule entière ou des sous-unités β libres. Le
dosage dénommé βhCG, le plus couramment utilisé, est un dosage radio-
immunologique qui concerne à la fois la molécule complète et l’hCG-β libre
(on doit donc dénommer ce dosage hCG total, hCGt). La valeur normale de
l’hCGt dans le sang est en général inférieure à 2 mUI/ml selon l’anticorps
utilisé. La valeur pronostique du seul taux d’hCG-β libre, exprimé en ng/ml,
n’est pas clairement établie, alors que le taux d'hCGt a une valeur pronostique
certaine. Enfin, la LDH (lactico-dehydrogenase) est un marqueur, non spéci-
fique, de volume tumoral. Le taux des trois marqueurs (AFP, hCGt, LDH) a
une valeur pronostique dans les tumeurs germinales non séminomateuses : plus
la valeur est élevée, plus grave est la maladie. Toutefois, si les taux de ces
marqueurs sériques ont été intégrés dans les modèles pronostiques des tumeurs
d’origine testiculaire, ils n’ont pas été validés dans les tumeurs d’origine
ovarienne. Ils ont une grande valeur dans la surveillance. Le dosage du CA-125
n’a pas, dans ce cas, l’intérêt qu’il a dans les tumeurs épithéliales. Aucun autre
marqueur n’a un intérêt démontré.

Cytogénétique
Toutes les tumeurs germinales sont caractérisées par une anomalie cytogéné-
tique pathognomonique : la présence d’un isochromosome du bras court du
chromosome 12 l’i(12p) (3). Cette anomalie n’est retrouvée dans aucune autre
pathologie. Dans 80 % des cas, elle est mise en évidence par une analyse caryo-
typique classique, et dans 20 % elle est retrouvée par la technique plus fine
d’hybridation in situ (FISH) (4). On retrouve dans toutes les tumeurs germi-
nales ovariennes l’i(12p) (5), excepté dans le tératome immature. Mais, comme
dans leur contrepartie testiculaire, il existe dans les tumeurs ovariennes d’autres
anomalies cytogénétiques : en particulier le gain des chromosomes 1, 6p, 8,
12q, 21 et 22q et la perte du 13q (comme cela a été démontré par la
Comparative Genomic Hybridation, CGH) (6). Néanmoins, dans le tératome
immature, c'est le gain des chromosomes 14 et 16q que l'on retrouve le plus
souvent (6), ce qui suggère une biologie un peu différente. En fait, il semble
que, plus la tumeur a un potentiel malin, plus les anomalies chromosomiques
Biologie des tumeurs germinales 481

soient fréquentes. Cela est d’ailleurs corroboré par l’étude de la ploïdie. Les
tératomes (matures et immatures) sont diploïdes et ont un caryotype normal
46 XX, seuls les tératomes immatures de grade 3 sont aneuploïdes (7). Par
contre, les séminomes et les tumeurs vitellines sont aneuploïdes ou tétraploïdes
(7). Cependant, la connaissance des anomalies est considérablement plus grande
pour les tumeurs testiculaires : en particulier, on a mis en évidence un grand
nombre d’anomalies chromosomiques à côté de la présence de l’i(12p) (8).

Biologie moléculaire
La perte d’hétérozygotie a été bien étudiée dans les tumeurs germinales testi-
culaires, testant plusieurs dizaines de marqueurs sur un grand nombre de
tumeurs (9), et il a été dénombré de nombreuses anomalies. Une telle étude a
été menée sur 32 tumeurs germinales ovariennes avec 62 marqueurs microsa-
tellites (10). La fréquence des pertes alléliques est plus grande dans les tumeurs
non séminomateuses que dans les séminomes. La répartition des pertes allé-
liques est aussi différente, ce qui suggère d’ailleurs une progression du
séminome vers les tumeurs non séminomateuses, en particulier la tumeur vitel-
line d’une part et le carcinome embryonnaire et le tératome d’autre part (11).
Une instabilité des microsatellites est retrouvée dans 33 % des cas, mais elle
concerne moins de 10 % des loci testés (10). L’instabilité est d’autant plus
fréquente que la tumeur est maligne et plus près du début de son développe-
ment : 57 % des séminomes, 21 % des tératomes immatures.
En revanche, peu de gènes (gènes suppresseurs ou oncogènes) ont été
étudiés dans les tumeurs germinales ovariennes : il a été seulement montré l’ab-
sence d’anomalie quantitative et qualitative de p53 (12). Cela fait contraste
avec le grand nombre de données concernant les tumeurs testiculaires (13).

Histogenèse
Il faut d’abord envisager l’histogenèse normale de la gonade, et remarquer l’im-
portance du fait que les cellules germinales de l’ovaire stoppent leur
développement au stade pré-méïotique. L’embryogenèse est la formation et la
différentiation des différents organes (cellules somatiques) de l’embryon. Les
cellules totipotentes sont appelées cellules germinales au début de l’embryoge-
nèse et vont prendre le nom de gamètes après maturation dans les gonades. La
séparation entre cellules somatiques et cellules germinales maintient la stabilité
du patrimoine génétique.
Les gonades apparaissent chez l’embryon à la quatrième semaine du déve-
loppement embryonnaire sous la forme de deux crêtes génitales. Elles viennent
d’un épaississement de la somatopleure de part et d’autre du mésentère dorsal
482 Les cancers ovariens

à côté des ébauches rénales, et sont situées de chaque côté de la ligne médiane,
entre le mésonéphros et le mésentère dorsal.
Les cellules des crêtes génitales à l’origine des cordons médullaires dérivent
du mésoblaste intermédiaire. Les cellules germinales primordiales apparaissent,
lors de la quatrième semaine de gestation, dans le mésenchyme extra-embryon-
naire au niveau du sac vitellin tapissant la paroi postérieure du lécithocèle, au
voisinage de l’allantoïde. Durant la cinquième semaine, elles migrent du sac
vitellin vers les crêtes génitales, le long du mésentère dorsal de l’intestin. À la
sixième semaine, elles pénètrent dans les crêtes génitales qui, chez l’embryon,
s’étendent de la sixième vertèbre cervicale à la quatrième vertèbre lombaire.
Parallèlement, l’épithélium des crêtes génitales prolifère activement et le tissu
mésenchymateux issu du blastème mésonéphritique s’organise en cordons
sexuels primitifs qui entourent progressivement les cellules germinales primor-
diales et restent en connexion avec la surface épithéliale. À ce stade du
développement, il est impossible de distinguer la gonade mâle de la gonade
femelle : c’est le stade de la gonade indifférenciée. Les cellules germinales exer-
cent ensuite une influence inductrice sur les tissus gonadiques qui se
développent selon le sexe génétique en ovaire ou en testicule. C'est l’absence de
chromosome Y qui détermine la différentiation ovarienne, ou lorsque la déter-
mination sexuelle masculine liée au gène SRY du chromosome Y est anormale.
Les cellules germinales primordiales colonisent le mésenchyme de la gonade
primitive et continuent à se diviser. Dans une première étape, les cordons
sexuels se fragmentent en amas cellulaires contenant peu de cellules germinales
primordiales, puis régressent. Une deuxième poussée de cordons sexuels corti-
caux se développe alors, renfermant les cellules germinales ou ovogonies qui
subissent un certain nombre de divisions mitotiques. De la seizième à la dix-
huitième semaine de gestation, elles se disposent en amas entourés de cellules
épithéliales plates, les cellules folliculaires, et stoppent leur division en
prophase de la première division méiotique. Il semble bien que les tumeurs
germinales ovariennes aient une origine préméiotique à partir des cellules
germinales primordiales (14). Par contre, les tératomes matures et certains téra-
tomes immatures pourraient dériver par parthénogenèse de cellules après la
meïose I (14). Les études dans les tumeurs testiculaires sont en faveur d’une
évolution clonale à partir de la tumeur germinale primordiale, d'abord vers le
séminome (précédé d’une forme non invasive de carcinome in situ), puis, le
carcinome embryonnaire et ,soit le tératome immature (différentiation), soit la
tumeur vitelline, soit le choriocarciome (8). L’origine préméiotique de la trans-
formation maligne pourrait expliquer le rôle éventuel des perturbateurs
endocriniens qui pourraient être incriminés dans la genèse de ces tumeurs (15,
16). Cela fait l’objet de recherches qui concernent la morphogenèse gonadique
et les tumeurs germinales du testicule, qui sont sans doute applicables à
l’ovaire.
Biologie des tumeurs germinales 483

Références
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Traitement des tumeurs germinales
de l'ovaire

P. Pautier et C. Lhommé

Introduction
Les tumeurs non épithéliales de l’ovaire sont des tumeurs rares. Parmi elles, les
tumeurs germinales sont les plus fréquentes, représentant 15 à 20 % des
tumeurs de l'ovaire. Elles se composent de tumeurs bénignes (kystes
dermoïdes), de kystes dermoïdes cancérisés qui sont des tumeurs malignes déri-
vant de différents contingents de kystes dermoïdes et, enfin, de tumeurs
germinales malignes primitives. Ces dernières représentent moins de 5 % de
l’ensemble des tumeurs malignes de l’ovaire, et 95 % des tumeurs germinales
sont des tératomes kystiques bénins ou kystes dermoïdes.
Avec un ratio de 1 pour 10, les tumeurs germinales malignes primitives chez
la femme sont également beaucoup moins fréquentes que chez l’homme.
Ces tumeurs se différencient des adénocarcinomes par de nombreux
points : âge de survenue beaucoup plus précoce, puisqu'il s'agit de tumeurs de
la fillette et de la jeune femme (moyenne d'âge comprise entre 18 et 21 ans,
selon les séries) (1-4), diagnostic à un stade plus précoce (environ 70 à 80 % de
maladies de stade I), bien meilleur pronostic, très grande chimiosensibilité (ce
sont des tumeurs le plus souvent chimiocurables), marqueurs spécifiques et
différents selon le type histologique et modalités thérapeutiques particulières
(chirurgie le plus souvent conservatrice et protocoles de chimiothérapie
adaptés). La classification histologique sépare les dysgerminomes (dysgermi-
nomes purs) des tumeurs non dysgerminomateuses (principalement : tumeurs
du sac vitellin, tératomes, carcinomes embryonnaires, choriocarcinomes).
Chaque type histologique de tumeur peut avoir des particularités cliniques,
biologiques et/ou thérapeutiques qu’il est important de connaître. Le pronostic
des tumeurs germinales de l’ovaire est bon, transformé ces dernières années par
les nouveaux protocoles de chimiothérapie, notamment depuis l’introduction
du cisplatine.
486 Les cancers ovariens

Classification et stadification
La classification histologique comprend des tumeurs bénignes (tératomes
matures), des tumeurs bénignes transformées en tumeurs malignes (tératomes
matures cancérisés) et des tumeurs malignes primitives. Elle sépare les dysger-
minomes (dysgerminomes purs) des tumeurs non dysgerminomateuses
(tumeurs du sinus endodermique (ou tumeurs du yolk sac), carcinomes
embryonnaires, tératomes (matures et immatures), tumeurs germinales mixtes,
choriocarcinomes). Cette distinction est également importante d’un point de
vue clinique et thérapeutique.
La stadification de la Fédération internationale des gynécologues obstétri-
ciens (FIGO) (5) définie pour les adénocarcinomes ovariens s’applique aux
tumeurs non épithéliales de l’ovaire. La grande majorité des tumeurs germi-
nales malignes sont découvertes à un stade localisé (stade I). Le diagnostic est
fait de façon exceptionnelle à un stade II, à un stade III dans 20 à 30 % des cas
et dans moins de 10 % des cas à un stade IV (les métastases pulmonaires ou
hépatiques sont les plus fréquentes). Une ascite n’est décelée que chez 20 % des
patientes. Le volume tumoral explique sans doute la fréquence des ruptures
tumorales avant l’intervention (20 % des cas) (6).
Le pronostic des tumeurs germinales malignes primitives a été transformé
ces dernières années par les nouveaux protocoles de chimiothérapie, notam-
ment depuis l’introduction du cisplatine. Les taux de survie à cinq ans sont
actuellement proches de 100 % pour les dysgerminomes et de 85 % pour les
tumeurs germinales non dysgerminomateuses, les tumeurs du sinus endoder-
mique étant classiquement de plus mauvais pronostic lorsqu'il s'agit de formes
avancées (7).

Présentation clinique
Dans 80 à 90 % des cas, la maladie est révélée par des douleurs abdominales
ou pelviennes qui font découvrir une masse qui est déjà palpable. Les autres
symptômes révélateurs sont : un syndrome abdominal aigu pouvant faire
évoquer une appendicite (lié à une rupture, une hémorragie ou une torsion de
la tumeur), une augmentation de volume de l’abdomen, des métrorragies, une
pseudo-puberté précoce (liée à la sécrétion d'hCG), exceptionnellement des
manifestations androgéniques. Un certain nombre de ces tumeurs sont décou-
vertes pendant la grossesse (en particulier les dysgerminomes) ou dans le
post-partum immédiat. Les dysgerminomes purs sont de croissance souvent
lente et le début des symptômes est parfois difficile à faire préciser. Moins
souvent, la masse est asymptomatique et découverte de façon fortuite lors
d’un examen gynécologique ou d’une échographie réalisée pour une autre
indication.
Traitement des tumeurs germinales de l’ovaire 487

Examens complémentaires
L’échographie abdomino-pelvienne est un examen important. Elle permet de
mieux préciser les caractéristiques de la tumeur (volume, aspect solido-liquide
ou solide), de rechercher un épanchement péritonéal, et d’explorer l’ovaire
controlatéral, l’utérus et le foie. Les aires ganglionnaires sont au mieux explo-
rées par le scanner abdomino-pelvien (cela est spécialement important lorsqu’il
existe une composante dysgerminomateuse). La radiographie de thorax fait
partie du bilan systématique, éventuellement complétée, en fonction du type
histologique de la tumeur, par un scanner thoracique systématique. La place de
l’imagerie par résonance magnétique et du PET-scan reste à définir dans ces
pathologies.
Un ou plusieurs marqueurs tumoraux peuvent être exprimés par ces
tumeurs. Le dosage sanguin doit donc être fait de façon systématique et, si
possible, en pré-opératoire et le plus tôt possible après la chirurgie. Les chorio-
carcinomes produisent de l’HCG (human chorionic gonadotrophin) et de la
bêta-HCG, et les tumeurs du sinus endodermique de l’alphafœtoprotéine.
L’élévation d’un ou de ces deux marqueurs peut être également observée en cas
de carcinome embryonnaire ou de tumeur germinale mixte. Dans l’immense
majorité des cas, les tératomes immatures ne sécrètent aucun marqueur
tumoral (exception faite de quelques cas décrits de production d’alphafœto-
protéine). Il n’y a pas de marqueur tumoral spécifique des dysgerminomes.
Dans de rares cas, des élévations d’HCG ont été rapportées. Par contre, ont été
décrits des taux élevés de LDH (hormone lactico-déshydrogénase) dans cette
pathologie. En cas d’élévation initiale, le dosage de LDH, reflet du volume
tumoral, peut aider à la surveillance des patientes sous traitement (8). Les
marqueurs tumoraux dosés avant l’intervention initiale peuvent orienter le
diagnostic. Par ailleurs, les résultats de ces dosages peuvent avoir une incidence
sur le traitement après la chirurgie. Enfin, l’évolution de la maladie (pendant
le traitement et lors de la surveillance ultérieure) est au mieux suivie à l’aide des
marqueurs initialement élevés.

Traitement des tumeurs germinales primitives


Objectifs du traitement

Le pronostic des tumeurs germinales de l’ovaire a été transformé, tout d'abord


par l'introduction de la chimiothérapie, puis par les nouveaux protocoles de
chimiothérapie à base de cisplatine. Le but du traitement est quadruple : guérir
les patientes tout en préservant la fonction hormonale ovarienne et la fertilité
et en minimisant la toxicité des traitements.
488 Les cancers ovariens

Chirurgie initiale (6)


À l’opposé des adénocarcinomes ovariens, la chirurgie est conservatrice dans
l’immense majorité des cas pour les tumeurs germinales. Le pronostic est la
plupart du temps excellent pour ces patientes jeunes, et pour lesquelles on
souhaite conserver une fertilité. Tout comme pour les adénocarcinomes, le but
de la chirurgie est triple : thérapeutique (ablation de la tumeur), diagnostique
(détermination du type histologique de la tumeur) et aide à la détermination
du stade d’extension. Le geste consiste donc au minimum en une annexec-
tomie unilatérale, une exploration complète du pelvis et de toute la cavité
abdominale, un lavage péritonéal et/ou un prélèvement de toute ascite présente
lors de l’ouverture de l’abdomen, des biopsies péritonéales systématiques (y
compris au niveau de l’épiploon) et un prélèvement de tout élément suspect.
Dans les rares cas où une annexectomie bilatérale est indiquée, il est préconisé
de conserver l’utérus (pour un don d’ovocytes ultérieur).

Trois points ne font pas l’objet de consensus


L'évaluation de l’extension ganglionnaire
Il n’y a pas d’indication à un curage systématique pelvien et lombo-aortique en
l’absence d’anomalie ganglionnaire. Certains proposent des prélèvements
ganglionnaires systématiques, mais il n’y a pas dans la littérature d’arguments
probants pour proposer ce geste en l’absence d’anomalie. Un consensus semble
se dessiner pour ne proposer de gestes ganglionnaires qu’en cas d’anomalie
visible sur le scanner ou palpable lors de l’exploration chirurgicale. En cas de
dysgerminomes, des anomalies ganglionnaires ne sont pas une indication aux
curages, ces atteintes étant très radiosensibles et chimiosensibles. La plupart des
tumeurs non dysgerminomateuses ont une faible extension ganglionnaire et les
taux de rechute ganglionnaire après chimiothérapie sont extrêmement bas, ces
tumeurs étant très chimiosensibles.

L'attitude par rapport à l'ovaire controlatéral


Le but chez ces jeunes patientes est de préserver la fonction hormonale
ovarienne et la fertilité. Il n’est plus réalisé d’annexectomie bilatérale systéma-
tique. Par contre, il est indispensable que soit réalisée une inspection soigneuse
de l’ovaire controlatéral. Si cet ovaire est normal, il n’y a pas d’indication à
réaliser des biopsies systématiques en cas de tumeurs non dysgerminomateuses.
En cas de dysgerminomes, il existe un risque de maladie occulte controlatérale.
Certains auteurs proposent donc de réaliser dans de tels cas une biopsie contro-
latérale, mais il n’y a pas de preuve que cette attitude transforme le pronostic.
Par contre, elle risque d’être source de stérilité (formation d’adhérences).
Traitement des tumeurs germinales de l’ovaire 489

En cas d’anomalie constatée sur l’ovaire controlatéral, la biopsie ou l’exci-


sion de ces zones doit être réalisée (tumorectomie si possible). Lorsqu’un kyste
tératomateux est constaté sur l’ovaire controlatéral, une kystectomie doit être
pratiquée.
Par contre, une annexectomie bilatérale est indiquée lors de la découverte
d’une dysgénésie gonadique en pré- ou en per-opératoire.

La place de la chirurgie de réduction tumorale


Jusqu'à récemment, la chirurgie de réduction tumorale était appliquée aux
adénocarcinomes, ainsi qu’aux tumeurs non épithéliales. Plusieurs essais
cliniques du Gynecologic Oncology Group (GOG) ayant évalué différents
protocoles de chimiothérapie ont montré des différences de survie en faveur
des patientes ayant eu une réduction tumorale complète, mais ces différences
ne sont pas toujours significatives (9-11, 26). Dans une autre étude multifac-
torielle, la présence de reliquats tumoraux après la chirurgie initiale est le seul
facteur pronostique ayant un impact sur la survie (12).
Les tumeurs germinales sont beaucoup plus chimiosensibles que les adéno-
carcinomes, ce qui remet en question ces chirurgies de réduction tumorale. Il
faut donc, pendant l’intervention, que le chirurgien pèse les avantages et les
risques de l’intervention de réduction tumorale réalisée.
Dans certains cas, la chirurgie initiale a été incomplète. Il n’est pas néces-
saire alors de réintervenir si une chimiothérapie est indiquée. Par contre, en cas
de tératome mature pur dont le traitement est uniquement chirurgical, une
nouvelle chirurgie est nécessaire pour réaliser une exérèse complète des lésions
et s’assurer qu’il n’existe pas une autre composante tumorale (13).

Peut-on proposer une chirurgie conservatrice en cas de tumeur évoluée?


Les tumeurs germinales sont le plus souvent des tumeurs unilatérales et de
stade I, ce qui permet de proposer un traitement conservateur chirurgical pour
préserver la fertilité ultérieure de ces jeunes patientes. Qu’en est-il en cas de
tumeurs plus évoluées, avec atteinte bilatérale (10 % à 15 % des dysgermi-
nomes ovariens purs) ou atteinte péritonéale, ganglionnaire ou à distance ?
Certaines équipes ont rapporté leurs résultats après traitement conservateur
pour une tumeur germinale de stade supérieur à 1. En cas d’atteinte bilatérale,
il est possible de proposer un traitement conservateur associant une chirurgie
radicale d’un côté et conservatrice (kystectomie) de l’autre, du côté de la
tumeur de plus petite taille, tout en conservant l’utérus (14). Low et al. ont
réalisé une chirurgie conservatrice chez 74 patientes traitées pour une tumeur
germinale, y compris chez celles qui avaient une maladie évoluée (dysgermi-
nomes (42 %), tératomes immatures (22 %), tumeurs du sinus endodermique
(18 %), tumeurs germinales mixtes (15 %) et carcinomes embryonnaires
(4 %)). La majorité des patientes avaient une tumeur de stade I (76 % dont
490 Les cancers ovariens

29 % de stade Ic), 11 (15 %) une tumeur de stade III (13,5 % au stade IIIc) et
4 une tumeur de stade IV. La chirurgie a consisté en une annexectomie unila-
térale (92 %), une kystectomie unilatérale (7 %), une annexectomie unilatérale
et kystectomie controlatérale (1,5 %). 13 (18 %) biopsies systématiques de
l’ovaire controlatéral ont été réalisées : toutes étaient négatives. Seules
2 patientes avaient une atteinte bilatérale (dysgerminome de stade IIIc, tumeur
du sinus endodermique de stade IV). 36 % des patientes ont été traitées par
chirurgie seule (toutes avaient une tumeur de stade I). Les autres patientes ont
reçu une chimiothérapie adjuvante (30 sur 47 ont reçu une chimiothérapie de
type BEP). La médiane de suivi est de cinquante-deux mois. 7 récidives (9,5 %)
et 2 décès (2,7 %) sont rapportés. Il n’y a pas eu de récidive chez les 5 patientes
qui avaient bénéficié d’une simple kystectomie unilatérale, ni chez celles trai-
tées par annexectomie unilatérale associée à une kystectomie controlatérale. La
survie globale est de 98 % pour les patientes ayant une tumeur de stade I et de
94,4 % en cas de tumeur évoluée. Le taux de survie globale est de 97 %.
Zanetta et al. ont traité de manière conservatrice 138 patientes ayant une
tumeur germinale de stade I (64 %), II (10 %), III (34 %) ou IV (2 %). Les taux
de survie en fonction de l’histologie sont respectivement de 98 % pour les
dysgerminomes (54 patientes), 90 % pour les tumeurs du sinus endodermique
(22 patientes), 100 % pour les tératomes immatures (44 patientes) et les
tumeurs mixtes (18 patientes) (15).

Radiothérapie initiale
La radiothérapie a été très longtemps le traitement de référence des dysgermi-
nomes ovariens, très radiosensibles, comme le sont aussi les séminomes
testiculaires. La plupart des équipes recommandaient une irradiation prophy-
lactique des chaînes iliaques homolatérales ou de l'hémipelvis et para-aortique
à la dose de 20 à 30 grays. Cette irradiation pouvait être étendue en médias-
tinal et sus-claviculaire ou en abdominal in toto pour les stades avancés. Les
doses pouvaient aller jusqu'à 35-40 grays en cas d'irradiation à visée curative.
Dans la série française rapportée par Gerbaulet (19), 65 patientes ont béné-
ficié de ce traitement, 52 de stade I (43 de stade Ia), 3 de stade II et 10 de
stade III. 13 patientes ont présenté une rechute, dont 1 seule en territoire
irradié et 5 patientes une rechute métastatique. La survie globale est de 86 %.
Les autres séries de la littérature rapportent globalement les mêmes résul-
tats (20).
Le problème essentiel est celui de la conservation d'une fonction ovarienne
et de la fertilité. Depuis les années 1980, différentes équipes ont rapporté la
grande sensibilité des dysgerminomes aux sels de platine, en particulier après
échec de la radiothérapie. C'est pourquoi, à partir de cette époque, une chimio-
thérapie a été proposée d'emblée dans le traitement des dysgerminomes
ovariens, avec d'excellents résultats en terme de survie, mais aussi et surtout de
fertilité et de fonction ovarienne.
Traitement des tumeurs germinales de l’ovaire 491

Chimiothérapie initiale
Modalités
Le pronostic des tumeurs germinales a tout d’abord été transformé par l’avè-
nement de la chimiothérapie, en particulier pour les tumeurs non
dysgerminomateuses. En effet, après chirurgie seule, la survie de ces patientes
était de 10 à 20 %, malgré la présence de stades I (21), puis elle s’est considé-
rablement améliorée grâce à l’arrivée des polychimiothérapies. Il s'agit de
tumeurs rares, ce qui explique le peu d'études prospectives réalisées et l'absence
d'essais randomisés. Les traitements ont été la plupart du temps calqués sur
ceux des tumeurs germinales du testicule, qui ont des similitudes anatomo-
pathologiques, biologiques, et de réponse à la chimiothérapie. La plupart des
séries publiées sont donc rétrospectives.
La première polychimiothérapie clairement efficace associait vincristine,
dactinomycine D et cyclophosphamide (VAC). Ainsi, dans l’étude du GOG,
le protocole VAC a permis d’obtenir un taux de survie sans récidive de 75 %
chez les patientes ayant bénéficié d’une chirurgie complète et ce, au prix d’une
toxicité acceptable. Cependant, 70 % des patientes qui avaient une maladie
évoluée sont décédées de leur maladie (9).
La deuxième amélioration est survenue grâce à l’introduction du cisplatine
(tableau I). Le premier protocole PVB associait cisplatine, vinblastine et bléo-
mycine. La survie sans récidive à quatre ans avec ce protocole est d’environ
70 %, mais pour les stades III et IV elle n’est respectivement que de 60 et 56 %
(11). Dans l’expérience de l’institut Gustave-Roussy, des résultats similaires ont
été observés avec une association cisplatine, vinblastine, cyclophosphamide et
bléomycine (22). Par analogie avec les TGNS testiculaires, le protocole de réfé-
rence est actuellement le BEP. Il doit être utilisé aux doses efficaces et associe

Tableau I – Chimiothérapie à base de platine des formes avancées (d'après 8).

Auteurs Protocole Survie sans progression/total (%)


Williams, 1989 PVB 33/54 (61)
Segelov, 1994 multiple 42/46 (91)
Mayordomo, 1994 PVB ou BEP 15/19 (79)
Gershenson, 1986 PVB 7/11 (64)
De Palo, 1992 PVB 7/14 (50)
Gershenson, 1990 BEP 5/6 (83)
Bower, 1996 POMB/ACE 51/59 (86)
Mitchell, 1999 PVB, BEP, CEB 24/30 (80)

POMB/ACE : cisplatine, vincristine, méthotrexate, bléomycine, actinomycine D, cyclophos-


phamide, étoposide.
492 Les cancers ovariens

bléomycine (30 unités IV ou IM par semaine), étoposide (100 mg/m2/j J1 à 5)


et cisplatine (20 mg/m2/j J1 à 5). Il est moins toxique que le PVB et lui est
supérieur chez l'homme en cas de tumeur avec forte masse tumorale (24). Il
s’agit d’un protocole très efficace, puisque chez 93 patientes ayant une
chirurgie complète et dont la tumeur était diagnostiquée aux stade I, II ou III,
91 sont vivantes à long terme sans récidive (10). Par ailleurs, la survie à long
terme est de 60 à 80 % en cas de maladie évoluée (25).
Le protocole BEP est donc actuellement le protocole standard pour les
tumeurs germinales malignes primitives. Il est important de débuter la chimio-
thérapie le plus tôt possible après la chirurgie et de respecter la dose intensité
du traitement (respecter l’intervalle de trois semaines entre les cures et ne pas
faire de réductions « intempestives » des doses).
Les modalités de la surveillance des patientes est fonction du type histolo-
gique et du stade d’extension. Elles reposent sur l’examen clinique, le dosage
des marqueurs et les examens radiologiques.

Indications
Tumeurs non dysgerminomateuses
En situation adjuvante (résection complète des lésions lors de l’inter-
vention chirurgicale)
La chimiothérapie est indiquée, sauf si l’examen histologique conclut à un téra-
tome mature (tumeur bénigne) ou à un tératome immature pur, de grade I et
de stade I. En effet, le traitement chirurgical est souvent suffisant chez ces
patientes, et en cas de récidive la chimiothérapie est très efficace. Par contre, les
tératomes immatures, peu à moyennement différenciés, les tumeurs du sinus
endodermiques et autres tumeurs mixtes présentent un risque de récidive de
75 % sans traitement adjuvant. L'étude du GOG, proposant 3 cycles de BEP
en adjuvant après exérèse complète chez 93 patientes présentant une TNDO
de stade I à III, a permis le contrôle sans récidive chez 91 patientes.

En cas de reliquat tumoral (chirurgie initiale incomplète) ou rechute


après un traitement initial n’ayant pas comporté de chimiothérapie ou
stade IV métastatique et quel que soit le type histologique de la tumeur
Une chimiothérapie par BEP doit être instituée. La majorité des auteurs préco-
nisent 4 cures. Des taux de réponse de l’ordre de 80 % ont été rapportés par le
GOG dans ces situations, mais sur un faible nombre de patientes (25).
L’augmentation des doses de platine ne semble pas apporter de bénéfice (22).

Dysgerminomes purs
Ces tumeurs sont très chimiosensibles, mais aussi très radiosensibles. Jusqu’à
très récemment, les patientes ayant un dysgerminome diagnostiqué à un stade
Traitement des tumeurs germinales de l’ovaire 493

précoce recevaient une radiothérapie sur les aires ganglionnaires iliaques homo-
latérales et lombo-aortiques après transposition de l’ovaire restant (19). Des
taux de survie à long terme compris entre 80 et 100 % et une toxicité minime
ont été rapportés. La chimiothérapie a donc été évaluée initialement en situa-
tion métastatique, où elle a permis d’obtenir des taux de guérison de 50 à 60 %
(7, 21). Actuellement, elle est aussi proposée le plus souvent dans les stades
précoces (afin de réduire la toxicité sur la gonade restante).

En situation adjuvante
Beaucoup d’auteurs ne proposent pas de traitement adjuvant pour les tumeurs
de stade IA, les taux de rechute dans cette situation étant de 15 à 25 %, et ces
rechutes étant très chimiosensibles et curables. Le volume de la tumeur a
souvent été une indication à une chimiothérapie adjuvante pour les stades IA
(diamètre supérieur à 10 cm). Il n’y a actuellement pas de consensus à ce sujet.
Pour toutes les autres patientes ayant donc une tumeur à un stade IB ou plus
évolué, une chimiothérapie est proposée (3 cures de BEP). La survie sans réci-
dive est proche de 100 %. Le GOG a étudié l'intérêt d'un protocole moins
toxique, associant carboplatine et etoposide pour les tumeurs de stade IB à III
(26). Dans cette étude, cette association est une bonne alternative au protocole
BEP, avec une moindre toxicité et un nombre de jours de traitement inférieur.
D’autres auteurs, par analogie avec les séminomes testiculaires, proposent une
chimiothérapie moins toxique (sans bléomycine) pour les stades I.
Il ne faut pas oublier que la radiothérapie garde des indications pour ce type
histologique de tumeurs, en particulier en cas de contre-indication à la chimio-
thérapie ou chez les patientes proches de la ménopause.

En cas de reliquat tumoral


Trois à quatre cures de chimiothérapie par BEP (selon le volume tumoral et les
résultats des examens après trois cures de BEP) sont indiquées.

Existe-t-il une place pour une seconde intervention chirurgicale


après chimiothérapie ? (28)
Il n’y a pas d’indication à proposer de seconde intervention après la chimio-
thérapie, lorsque les taux de marqueurs sont normaux et que l’imagerie ne
montre pas de lésion résiduelle. Elle est, par contre, souvent préconisée quand
les taux de marqueurs sont normaux, alors que persistent des masses résiduelles
cliniques et/ou radiologiques.
Une seconde intervention est proposée chez les patientes qui avaient initia-
lement une composante tératomateuse, et chez qui les examens radiologiques
montrent la persistance de lésions, ou chez qui les lésions étaient initialement
de stade III, étant donné le peu de fiabilité de la surveillance radiologique dans
ces cas. Il faut, en effet, réaliser la résection de toutes les lésions dans un but
494 Les cancers ovariens

thérapeutique. Dans la majorité des cas, le tératome immature s’est transformé


en tératome mature, lésion ne nécessitant pas de traitement complémentaire,
puisque bénigne (7). Dans de rares cas, ces tumeurs bénignes donnent nais-
sance, comme chez l'homme, à un growing teratoma qui, bien que bénin, a une
évolutivité locale et nécessite des interventions chirurgicales à répétition
lorsque la résection n’est pas complète (13). Une annexectomie controlatérale
est malheureusement parfois nécessaire (dans des cas heureusement exception-
nels) quand le tératome se situe sur le second ovaire et que son volume ne
permet pas une chirurgie localisée (tumorectomie laissant en place du paren-
chyme sain). Il faut penser à le rechercher lorsqu'il existe une composante
tératomateuse et que survient une progression d'une des lésions ou l'apparition
d'une nouvelle lésion en cours de traitement. Pour les autres types histolo-
giques, et lorsque persistent des lésions actives (marqueurs élevés), cette
seconde intervention peut avoir pour but de faire un debulking secondaire afin
de favoriser l’action d’une deuxième ligne de chimiothérapie. Le bénéfice de
cette attitude n’a pas été démontré (12).

Chimiothérapie de rattrapage
Il n’existe pas de protocole standard pour ces situations. On différencie les
tumeurs sensibles au platine (rechute survenant plus de deux mois après la
chimiothérapie initiale) des tumeurs résistantes (progression initiale ou rechute
très précoce). Des taux de réponses complètes et durables ont été observés avec
des protocoles contenant cisplatine et ifosfamide. Des protocoles d’intensifica-
tion et des protocoles de chimiothérapie de maintenance ont été évalués, mais
sur un petit nombre de malades. On utilise la plupart du temps les protocoles
de rattrapage proposés dans les tumeurs testiculaires en rechute (VeIP après
BEP notamment).

Fertilité et fonction ovarienne après traitement


Comme il s’agit le plus souvent de tumeurs unilatérales permettant la conser-
vation d’un ovaire, l’hystérectomie n’est pas nécessaire. Globalement, les
résultats sur les fonctions hormonales ovariennes et sur la fertilité des patientes
ayant été traitées par chirurgie conservatrice et chimiothérapie sont bons. Dans
l’étude de Low (14), durant la chimiothérapie (47/74 patientes ; protocole
BEP : 30 patientes), 61 % des patientes avaient une aménorrhée, mais, chez
91 % d’entre elles, des cycles normaux sont réapparus à distance du traitement.
Parmi les 47 patientes qui avaient reçu une chimiothérapie, 20 étaient dési-
reuses de maternité. Une patiente a eu une stérilité définitive (mais a refusé
toute investigation pour cette infertilité) et une seconde patiente a présenté une
infertilité transitoire. Au total, 19/20 patientes désireuses de maternité et ayant
Traitement des tumeurs germinales de l’ovaire 495

reçu une chimiothérapie ont obtenu une grossesse : 14 enfants sont nés à terme
sans anomalie congénitale décelée. 5 autres grossesses étaient en cours lors de
la rédaction de l’article.
Dans la série de Gershenson (40 patientes traitées par chirurgie conservatrice
+ chimiothérapie), aucune malformation n’a été observée chez 22 enfants vivants
nés de 11 patientes (28). Dans la série de Zanetta, les résultats sur la fertilité ne
sont pas différents, selon qu’il y ait eu ou non une chimiothérapie (15).

Conclusion
Les caractéristiques des tumeurs germinales ovariennes sont très importantes à
connaître, au vu des conséquences thérapeutiques qui en découlent. Il ne faut
pas hésiter en cas de doute diagnostique à prendre des avis spécialisés.
Lorsqu’une tumeur ovarienne est découverte chez une femme jeune, si les
dosages de marqueurs ne sont pas réalisés (contexte d’urgence) et si l’examen
extemporané est impossible, il est préférable de réaliser uniquement une
annexectomie, quitte à réintervenir rapidement s’il s’agit d’un adénocarcinome
(on évitera ainsi des chirurgies mutilantes qui ne sont pas nécessaires chez les
patientes ayant des tumeurs germinales). Au sein des tumeurs germinales, les
modalités diagnostiques et les indications thérapeutiques sont fonction du type
histologique et du stade d’extension de la maladie. Il s’agit de tumeurs qui, le
plus souvent, sont de très bon pronostic, à condition d’être traitées par un
protocole adapté et sans perte de temps.

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Traitement des tumeurs rares de l’ovaire.
Expérience de l’observatoire francophone
des tumeurs malignes rares de l’ovaire
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J.-P. Guastalla, J.-P. Lotz, P. Meeus, L. Mignot, É. Pujade-Lauraine,
D. Raudrant, I. Treilleux et C. Tournigand

Principes de la chirurgie avant chimiothérapie


Le geste chirurgical initial est primordial dans les tumeurs rares ovariennes
puisqu’il permet le diagnostic, le bilan d’extension de la maladie et le premier
acte thérapeutique. Il n’est pas différent techniquement de celui des autres
tumeurs malignes ovariennes ; cependant certaines particularités doivent être
soulignées qui modifient l’esprit dans lequel la chirurgie doit être abordée :
– les tumeurs germinales malignes de l’ovaire sont des néoplasmes à croissance
rapide qui peuvent atteindre des dimensions volumineuses en peu de temps ;
– la première intervention est souvent pratiquée par un chirurgien non spécia-
lisé en cancérologie gynécologique. En effet, soit la pathologie a été
considérée comme bénigne, soit la patiente a été opérée en situation d’ur-
gence (torsion ou rupture du néoplasme) ;
– les tumeurs rares malignes de l’ovaire surviennent le plus souvent chez des
femmes jeunes (âge médian : 20 ans) avant même la première grossesse et il
est primordial de respecter au maximum l’appareil génital pour préserver la
fertilité.

Tumeurs des cordons sexuels et du stroma


Approximativement, 8 % des tumeurs ovariennes dérivent du stroma et/ou des
cordons sexuels. Ces tumeurs sont généralement fonctionnelles puisque la
plupart peuvent synthétiser des hormones (œstrogènes, androgènes, corti-
coïdes). Leur pronostic est difficile à établir, certaines étant de comportement
presque toujours bénin (tumeurs de Sertoli, tumeurs de Leydig…), d’autres de
502 Les cancers ovariens

comportement malin, mais avec des récidives loco-régionales plus ou moins


tardives. Les critères histologiques d’agressivité sont mal connus, de telle sorte
qu’il est difficile de proposer une classification anatomo-pathologique dichoto-
mique bénin/malin et, s’il n’y a pas de critères cliniques de « malignité », ces
tumeurs sont classées comme étant de pronostic incertain. Dans ce groupe de
tumeurs, celles qui auraient plutôt un comportement « malin » sont les
suivantes : les tumeurs de la granulosa, les androblastomes (ou tumeurs de
Sertoli-Leydig), les tumeurs des cordons sexuels avec tubules annelés, les
tumeurs à cellules stéroïdiennes sans autre précision et les fibrosarcomes (1).

Tumeurs de la granulosa
Les tumeurs de la granulosa concernent environ 2 à 3 % des tumeurs de
l’ovaire. Ce sont les tumeurs malignes les plus fréquentes dans le groupe des
tumeurs des cordons sexuels et du stroma. Elles sont souvent lentement évolu-
tives, pouvant rechuter tardivement (six ans en moyenne). Les publications
portent le plus souvent sur des cas cliniques ou des études rétrospectives étalées
sur de nombreuses années où les malades ont reçu des traitements multiples et
variés (2, 3). La stadification FIGO doit être utilisée même si un doute persiste
sur l’analogie évolutive entre tumeurs de la granulosa et tumeurs épithéliales.
On distingue deux formes histologiques, une forme juvénile et une forme
adulte qui est la plus fréquente (95 % des tumeurs de la granulosa). Les
données de la littérature concernant ces deux entités anatomo-cliniques sont
contradictoires. Des études anciennes rapportent un meilleur pronostic des
formes juvéniles qui n’a pas été retrouvé dans une série plus récente (4). Les
facteurs pronostiques sont connus par des études rétrospectives anciennes,
univariées, où souvent la stadification chirurgicale n’était pas aussi précise que
celle recommandée actuellement. Le stade FIGO, la rupture tumorale intrapé-
ritonéale et la bilatéralité des tumeurs sont les facteurs pronostiques dont la
valeur est le plus souvent rapportée ; l’âge des malades et la taille de la tumeur
(> 5 cm) ont une valeur pronostique moins certaine (4). Parmi les facteurs
cytologiques, le nombre de mitoses a la plus grande valeur pronostique
(pronostic péjoratif au-delà de 5 ou 10 mitoses pour 10HPF selon les auteurs) ;
les atypies cellulaires et la mauvaise différenciation (rareté des corps de Call-
Exner), un peu moins (5). Les marqueurs de prolifération cellulaire (ploïdie,
contenu en ADN, cytométrie de flux) ainsi que l’expression de p53, c-myc ou
C-erb-2 se sont révélés sans valeur pronostique évidente (6-8).

Chirurgie
L’exérèse des lésions tumorales reste la base du traitement et de la stadification.
La chirurgie peut être conservatrice en cas de désir de grossesse, dans le cas
contraire il est préférable de réaliser une hystérectomie totale avec annexec-
Traitement des tumeurs rares de l’ovaire… 503

tomie bilatérale. L’épiploectomie, le curage ganglionnaire et des biopsies péri-


tonéales à l’aveugle ont un intérêt à titre d’étude. Dans la mesure où 70 % des
patientes présentent un stade I (survie globale à cinq ans de 85 %), la chirurgie
représente l’arme thérapeutique la plus importante (4). Pour les femmes jeunes
pour lesquelles une chirurgie conservatrice peut être proposée, compte tenu de
l’association fréquente avec une hyperplasie endométriale (55 %) voire un
adénocarcinome endométrial (4-20 %), un curetage utérin doit être réalisé
avant la chirurgie (9, 10). Enfin, l’histoire naturelle prolongée de la maladie
plaide pour une chirurgie itérative en cas de récidive (11).

Radiothérapie

Les tumeurs de la granulosa sont radiosensibles mais le rôle de la radiothérapie


n’est pas défini : le volume à irradier n’est pas déterminé, les doses d’irradiation
ne sont pas précisées, aucune donnée sur la survie après radiothérapie n’est
disponible. Les études publiées n’apportent aucun élément décisif en faveur
d’un traitement par radiothérapie, le volume à irradier n’est pas défini ; dans
les publications, les doses utilisées, lorsqu’elles sont rapportées, sont très
variables. La radiosensibilité des tumeurs de la granulosa est attestée par les
réponses observées en situation palliative, mais les durées de réponse sont
brèves ou non rapportées. Il n’y a pas de données en faveur d’un bénéfice éven-
tuel de la radiothérapie adjuvante (10, 12).

Chimiothérapie

La chimiosensibilité est attestée par les nombreuses réponses observées en


situation palliative : réponse de brève durée aux alkylants, réponse fréquente
aux associations adriamycine-bléomycine, actinomycine-fluoro-uracile-
cyclophosphamide ou à base de cisplatine ; le taux de réponse le plus élevé
rapporté est de 80 % avec l’association cisPlatine Velbé bléomycine (PVB)
(13), dont certaines réponses complètes très prolongées (2). Le protocole PVB
est le même que celui qui était utilisé dans les tumeurs testiculaires, aujour-
d'hui avantageusement remplacé par l'association BEP (Bléomycine
Etoposide cisPlatine), Parallèlement, les résultats de l'association BEP chez
75 patientes de stade II et au-delà, entraînent une survie globale à cinq ans de
69 %, ce qui justifie le choix de cette chimiothérapie pour le traitement des
patientes atteintes de tumeurs de la granulosa de l’adulte, mais aussi de type
juvénile (14).
504 Les cancers ovariens

Surveillance
Le bon pronostic de certaines patientes, et la possibilité d’un deuxième geste
chirurgical curatif (15) rendent la surveillance nécessaire pour ces patientes. En
plus d’un suivi clinique, les marqueurs biologiques peuvent jouer un rôle
important dans le cadre du suivi. Deux marqueurs sériques sont utiles dans la
surveillance du traitement : l’œstradiol en cas de tumeur sécrétante (16) et l’in-
hibine, hormone peptidique stimulée par FSH (17). L’œstradiol a été proposé
comme marqueur de surveillance de la rechute, sachant que 30 % des tumeurs
de la granulosa ne sécrètent pas cette hormone (16). L’inhibine, protéine
sécrétée par les cellules de la granulosa, paraît est un marqueur de rechute inté-
ressant (18). Enfin, le risque de cancer du sein associé semble non négligeable
(notamment pour la forme juvénile), ce qui doit faire proposer un suivi
clinique et mammographique réguliers (19).

Tumeurs à cellules de Sertoli-Leydig


Une majorité de tumeurs à cellules de Sertoli-Leydig sont bénignes, mais
environ 20 % récidi-vent ou donnent des métastases qui peuvent à terme avoir
une évolution fatale. Des formes familiales sont souvent décrites et doivent être
recherchées (20). Les récidives sont précoces dans les tumeurs de Sertoli-Leydig
malignes (de deux à trois ans), contrairement aux tumeurs de la granulosa.
Enfin, cliniquement 50 % des patientes présentent des signes de virilisation
(4). Ces tumeurs comportent en proportion variable des éléments sertoliens et
leydigiens. Les tumeurs ne comportant que le contingent sertolien (tumeurs de
sertoli) sont rattachées à ce groupe et sont bénignes. Les tumeurs à deux
contingents sont classées en trois groupes en fonction du caractère plus ou
moins différencié des deux constituants :
– formes bénignes différenciées (androgéniques, sécrétantes dans 60 % des
cas) ;
– formes à différenciation intermédiaire (cellules de Sertoli immatures) ;
– formes peu différenciées (sarcomatoïdes ou rétiformes) ; avec des éléments
hétérologues associés dans les formes peu ou moyennement différenciées
(épithéliaux surtout ou mésenchymateux).
L’expérience thérapeutique dans ces tumeurs très rarement malignes est
encore moindre que dans les tumeurs de la granulosa. Les facteurs pronostiques
ont été rapportés dans une seule série de 207 cas (21). Ils sont représentés par
le stade, le grade histologique (différenciation), la rupture tumorale, et la
présence d’éléments hétérologues mésenchymateux. Le nombre de mitoses est
un facteur pronostique pour certain (20, 22), mais semble être corrélé à la
différenciation. La survie de la maladie à cinq ans au stade I est de 84 % voire
100 % pour les stades IA1. La survie des tumeurs bien différenciées est de
100 %, mais de 89 % pour les formes à différenciation intermédiaire et de 81 %
Traitement des tumeurs rares de l’ovaire… 505

pour les formes avec éléments hétérologues. Dans le groupe des tumeurs peu
différenciées, le taux de survie est seulement de 52 %. Les tumeurs avec
éléments hétérologues mésenchymateux (os et cartilage) auraient un pronostic
extrêmement péjoratif, 8 patientes sur 10 étant décédées de leur maladie dans
les sept mois suivant la chirurgie (22).

Chimiothérapie

Un certain nombre de protocoles de chimiothérapie ont été utilisés dans les


tumeurs de Sertoli-Leydig : alkylants, adriamycine, CAP, B + VAC, PVB. Dans
la majorité des cas, l’effet n’est pas évaluable. Actuellement elles sont traitées
par le même programme que les tumeurs de la granulosa.

Surveillance

Elle est identique à celle des tumeurs de la granulosa. Les patientes présentant
des signes de virilisation, c’est-à-dire présentant une tumeur sécrétante,
peuvent bénéficier d’un suivi biologique (DHEAS, œstrogène, 17OH proges-
térone, cortisol) au moment du diagnostic afin d’éliminer une anomalie
surrénalienne, puis pour suivre la bonne efficacité du traitement, et enfin dans
le cadre de la surveillance post-thérapeutique.

Autres tumeurs rares

Gynandroblastomes

Ce sont des tumeurs extrêmement rares (< 1 %) dont l’origine cellulaire est
controversée, probablement issue du mésenchyme indifférencié, expliquant le
potentiel bisexuel de ces tumeurs (23). Les signes de virilisation sont générale-
ment prédominants sur les effets œstrogéniques. Dans la majorité des cas, ces
tumeurs sont bénignes et seul un traitement chirurgical adapté est re-
commandé. Cependant, certaines tumeurs malignes sont décrites dans la
littérature et il s’agit généralement de grosses tumeurs de 7-10 cm de diamètre
touchant la femme de 30 à 50 ans. Une hyperplasie endométriale est souvent
associée et doit être recherchée (24). Les indications de chimiothérapie sont
proposées pour les tumeurs de pronostics péjoratifs et en rechute. Aucun
facteur pronostique n’est décrit.
506 Les cancers ovariens

Tumeurs à cellules stéroïdiennes sans autre précision


Sont regroupées au sein des tumeurs à cellules stéroïdiennes, le lutéome
stromal, les tumeurs à cellules de Leydig et les tumeurs à cellules stéroïdiennes,
sans autre précision. Seules ces dernières, qui ont un potentiel malin donc
métastatique, seront évoquées dans ce chapitre (25). Cliniquement elles
peuvent s'accompagner de signe de virilisation ou de manifestation d'hyper-
œstrogénie.
Le stade, l’âge, la taille tumorale, la présence de nécrose, d'atypies nucléaires
et le nombre de mitoses sont rapportés comme ayant un impact sur la survie
des patientes. Le traitement rejoint les principes du traitement des tumeurs de
la granulosa, notamment concernant les indications de chirurgie (26). La
chimiothérapie est proposée pour les tumeurs de pronostics péjoratifs et en
rechute, bien qu’aucune donnée scientifique ne soit publiée (27).

Autres tumeurs rares


Ces autres tumeurs rares sont classées de façon pragmatique et non nosolo-
gique par opposition aux tumeurs du revêtement épithélial qui sont
majoritaires. Des lésions très dissemblables sont ainsi répertoriées : les tumeurs
des tissus mous non spécifiques, les lymphomes, les tumeurs non classées, et les
tumeurs secondaires, parmi lesquelles les tumeurs de Krükenberg.

Tumeurs des tissus mous


Les tumeurs des tissus mous non spécifiques peuvent affecter l'ovaire : le rhab-
domyosarcome embryonnaire, l’angiosarcome, le leïomyosarcome, le sarcome
stromal fibroblastique à cellules fusiformes, enfin, exceptionnellement, le fibro-
sarcome dont le diagnostic différentiel est difficile à faire avec le syndrome de
Demons Meigs (association d'une tumeur solide et bénigne de l'ovaire
(fibrome, thécome, ou fibrothécome) (32). De surcroît, certaines situations de
double localisation ovarienne et utérine posent des problèmes complexes
d'éthiopathogénie : si les métastases ovariennes de leïomyosarcomes utérins
sont exceptionnelles, celles des tumeurs mixtes mésodermales (ancien mulléro-
blastome) et du sarcome stromal endométrial le sont moins. Les techniques
immuno-histochimiques et les confrontations entre pathologistes spécialisés de
la sphère gynécologique et des sarcomes des tissus mous apportent une aide au
diagnostic. Concernant les léïomyosarcomes ovariens, l'origine proviendrait
des parois vasculaires, en particulier veineuses, ou des reliquats des canaux
wolffiens.
Le contrôle de la tumeur primitive et la prévention des rechutes locales dans
le lit opératoire et en marge de celui-ci nécessitent d'abord une exérèse chirur-
Traitement des tumeurs rares de l’ovaire… 507

gicale complète. Les difficultés du traitement local viennent de la difficulté


pour chaque cas d'apprécier, au-delà des volumes tumoraux, souvent impor-
tants, les volumes de tissus apparemment sains mais susceptibles d'être déjà
affectés par une atteinte microscopique de la maladie, de la nécessité de tenir
compte des rapports contractés par la tumeur avec les organes de voisinage et
aussi de la diversité des sites tumoraux. Ce contrôle tumoral loco-régional doit
aussi respecter autant que possible la fonction. Le traitement loco-régional doit
donc intégrer aux possibilités chirurgicales les apports de la radiothérapie et de
la chimiothérapie. Concernant l’analyse des données de survie ou de rechute,
les résultats déjà rapportés dans la littérature sont très explicites (33, 34) : il est
établi que, si la chirurgie n’est pas optimale carcinologiquement, la rechute
locale est plus fréquente. Le traitement chirurgical des sarcomes ovariens s'ap-
puie sur les règles établies pour l'ensemble des sarcomes, à savoir chirurgie
monobloc, complète macroscopiquement et microscopiquement. L'intérêt du
curage ganglionnaire est encore moins clairement établi que dans le cadre des
cancers épithéliaux, il doit être réservé aux tumeurs lymphophiles.
L'extension ganglionnaire est rare dans les sarcomes des tissus mous : 5,8 %
de N + pendant toute la durée d'évolution de la maladie chez 3 000 malades
regroupés dans l'étude de Weingrad, 3,2 % de N + au début de la maladie chez
6 000 malades recensés par Lawrence (35). L'incidence d'envahissement
ganglionnaire est plus élevée pour certaines formes histologiques : sarcome
épithélioïde, sarcome synovial, sarcomes à cellules claires, rhabdomyosarcome
(36).
L'intérêt de traitements complémentaires comme la chimiothérapie ou la
radiothérapie pelvienne est difficile à établir. Les recommandations actuelles
reposent sur des résultats établis pour différents types de sarcomes dans de
nombreuses localisations différentes (tronc, membres, viscéraux…). La place
de la radiothérapie externe dans le traitement des sarcomes ovariens n’est pas
clairement définie. Il n’existe pas dans la littérature d’études randomisées
susceptibles de préciser les indications de la radiothérapie externe. Une chimio-
thérapie adjuvante systématique peut être recommandée uniquement dans le
cadre d'essais thérapeutiques. Les données publiées indiquent toutefois un
bénéfice probable de la chimiothérapie adjuvante, associant au moins une
anthracycline à l’ifosfamide en terme de survie sans rechute et de survie globale
pour des malades sélectionnés porteurs de tumeurs à haut risque. Il est recom-
mandé que de telles indications soient discutées dans le cadre de comités
multidisciplinaires dédiés (37).

Lymphomes
Les lymphomes peuvent se développer dans les sites extra-ganglionnaires, qu'ils
possèdent ou non des structures lymphoïdes à l'état normal (c'est le cas des
ovaires) (34). Ils sont plus rares que les lymphomes testiculaires. La cotation de
l'extension peut se faire selon deux classifications. Cependant, la classification
508 Les cancers ovariens

d'après Ann Harbor semble préférable à la classification FIGO utilisée en prin-


cipe pour les tumeurs de l'ovaire (35). Il est important de différencier le
lymphome ovarien primaire du lymphome ovarien secondaire à un LNH dont
l'atteinte génitale peut être présente d'emblée ou lors d'une rechute (36). Cette
extension secondaire aux organes génitaux féminins oscille entre 4 et 40 % des
séries publiées. L'extension aux ovaires précède celle de l'utérus et du vagin.
Pour retenir le diagnostic de lymphome primaire de l'ovaire, quatre critères
sont exigés :
– localisation ovarienne au moment du diagnostic ;
– absence d'extension simultanée à un autre organe ;
– absence de leucémie ;
– suivi de plusieurs mois permettant d'éliminer une récidive extra-génitale.
Le pronostic dépend du type histologique et de l'extension de la maladie.
Quoique imprévisible, l'évolution semble plus favorable en cas de lymphome
ovarien primaire qu’en cas de lymphome ovarien secondaire. La thérapeutique
comporte une exérèse chirurgicale (annexectomie bilatérale ± hystérectomie
totale) et une polychimiothérapie.
Au cours des leucémies lymphoïdes et myéloïdes, l'atteinte ovarienne
surviendrait dans un tiers des cas (37). La découverte d'une tumeur ovarienne
au cours de la leucémie aiguë myéloblastique (LAM) fait évoquer le diagnostic
de sarcome granulocytaire. Il peut précéder l'émergence d'un syndrome myélo-
prolifératif ou succéder à une phase de rémission, constituant alors une rechute
isolée ou associée à une localisation neurologique. Le traitement relève de la
chimiothérapie, l’aracytine et l’anthracyclines étant les drogues prédominantes.
La chirurgie de réduction tumorale pourrait diminuer les complications nécro-
tiques sous traitement médical.

Tumeurs ovariennes secondaires


L'ovaire est plus souvent atteint de métastases que les autres organes génitaux
pelviens. Les métastases ovariennes représentent 3 à 5 % des tumeurs malignes
de l'ovaire (38). Ces métastases affectant plus volontiers la femme en période
d'activité génitale sont bilatérales dans 80 % des cas et s'accompagnent d'une
ascite dans 50 % des cas. Toutes les tumeurs malignes, y compris celles du
système nerveux central, sont susceptibles de coloniser l'ovaire. Cependant, les
tumeurs primitives les plus fréquemment impliquées appartiennent au tractus
génital (trompe, utérus, sein) et au tractus gastro-intestinal (estomac, voies
biliaires, côlon, rectum).

Les métastases ovariennes d'origine endométriale


Elles concernent essentiellement les carcinomes indifférenciés infiltrant le
myomètre en profondeur. La localisation simultanée d'une tumeur ovarienne
Traitement des tumeurs rares de l’ovaire… 509

et endométriale est un entité ambiguë, bien illustrée par le type histologique


endométroïde. Il peut s'agir d'une conjonction de deux tumeurs primitives
indépendantes ou d'une dissémination métastatique de l'une ou de l'autre.
Plusieurs critères non formels plaident en faveur de la nature secondaire de la
tumeur : aspect multi-nodulaire, bilatéralité, envahissement de la lumière
tubaire, stigmates d'invasion vasculaire et pénétration intramyométriale de la
tumeur utérine.

Les métastases ovariennes d'origine mammaire


Leur fréquence serait de 20 à 30 % avec une atteinte bilatérale dans 60 % des
cas. Ces métastases sont rarement révélatrices de la tumeur mammaire, mais
sont souvent découvertes lors des castrations chirurgicales. Les études consa-
crées aux différences de comportement métastatique entre le carcinome
canalaire invasif et le carcinome lobulaire ont montré de façon univoque le
tropisme dominant du lobulaire pour les organes gastro-intestinaux et génitaux
internes (43).

Les métastases ovariennes d'origine digestive


Les métastases d'origine colique seraient cinq fois plus fréquentes que les méta-
stases d'origine gastrique et seraient observées au cours de l'évolution de 3 à
14 % des cancers colorectaux. La tumeur primitive siège une fois sur deux au
niveau du côlon sigmoïde et correspond à un stade C ou D de Duke, ce qui
rendrait compte d'un envahissement par contiguïté. Des métastases ovariennes
de tumeurs des voies biliaires, du pancréas, des carcinomes appendiculaires, des
tumeurs carcinoïdes sont aussi décrites dans la littérature.

La tumeur de Krükenberg
Elle est caractérisée par la présence de cellules mucosécrétantes en bague à
chaton enchâssées dans le stroma très cellulaire dérivé du stroma ovarien. Cette
entité spécifique à composante mucineuse représente 1 à 2 % des tumeurs de
l'ovaire. La grande majorité des cas est représentée par les tumeurs secondaires.
L'âge moyen est de 40 ans ou moins. Le cancer de l'estomac est le plus souvent
responsable de cette tumeur (76 à 100 % des cas). Mais les métastases de
cancers coliques ou mammaires peuvent présenter des aspects identiques (39).
De très rares cas ont été rapportés pour des cancers de la vésicule, du col utérin,
de la vessie. Le pronostic est sombre, la survie médiane est inférieure à deux
ans. L'exérèse chirurgicale palliative vient compléter parfois la chimiothérapie.
L'ovariotropisme et l'ovariotactisme pourraient être partiellement expliqués
par les particularités physico-chimiques et hormonales du micro-environne-
ment ovarien : faible tension superficielle, alcalinité du PH, hyperœstrogénie
locale (40).
510 Les cancers ovariens

Observatoire francophone pour la prise ne charge


des tumeurs rares de l'ovaire
En 2002, un site Internet www.ovaire-rare.org a été élaboré dans le but
d'éclairer les patientes ou les familles concernées par les tumeurs malignes rares
de l'ovaire, d’informer le grand public des données scientifiques sur le sujet et
de tenir à jour les données bibliographiques. Pour les professionnels de santé,
il s’agit de prendre en charge de manière homogène le traitement des tumeurs
rares de l’ovaire de l’adulte (tumeurs germinales et des cordons sexuels), aux
différents stades de la maladie : un forum de discussion est disponible on line,
ainsi qu’un protocole de recherche clinique (essai thérapeutique) avec inclusion
directement sur le site Internet. Les cas enregistrés sont suivis afin d'établir les
facteurs pronostiques de ces maladies rares.
En effet, depuis les années 1980, les plus grandes séries de la littérature
scientifique, sur les tumeurs des cordons sexuels, comportent moins de
100 patientes suivies sur des périodes de plus de dix ans, avec dans chacune de
ces séries, des gestes chirurgicaux non homogènes (même à stade tumoral iden-
tique), des chimiothérapies de première ligne et de deuxième ligne multiples et
variées et des taux de survie à dix ans souvent prolongés, ce qui rend l'analyse
des résultats hasardeuse et difficile à interpréter. En effet, le peu d’événements
(rechute, décès) à dix ans et l’âge jeune des patientes entraînent un taux de
perdues de vue important. À la suite de ce constat, il est apparu important de
proposer un moyen de prise en charge adapté dans le cadre d'une recherche
prospective reproductible et prolongée. Malheureusement, l'extrême rareté de
ces tumeurs rend difficile la mise en place d'une recherche centralisée, d'autant
que les praticiens sont confrontés à une gestion immédiate complexe de cas a
priori de bon pronostic avec le souci de préserver le capital de fertilité de
patientes jeunes.
Le principe du site Internet avec mise à disposition de l’information scien-
tifique disponible et inclusion immédiate nous a paru un moyen
particulièrement adapté à cette problématique ; le nombre important d’inclu-
sions après deux ans de fonctionnement confirme les capacités du site à
favoriser la recherche clinique.

Conclusion
Au travers de cette revue générale, il paraît difficile de proposer des recom-
mandations thérapeutiques spécifiques s’appuyant sur des essais randomisés
s’appliquant à tous les malades. Les tumeurs non épithéliales malignes de
l’ovaire et les tumeurs ovariennes secondaires d'origine diverse sont des cancers
rares dont l’histoire naturelle est mal connue et dont les facteurs pronostiques
ne sont pas précisés. Ce regroupement lésionnel est hétérogène. Le pronostic
Traitement des tumeurs rares de l’ovaire… 511

de chaque tumeur est inégal et le traitement spécifique, difficilement protoco-


laire. Pour ces raisons, toutes les malades devraient être adressées à des centres
spécialisés ayant un intérêt spécifique pour ce type de tumeur et disposant d’un
département d’anatomo-pathologie adéquate. Un site Internet dédié à la prise
en charge de ces tumeurs rares a été élaboré et mis à la disposition de tous, pour
des avis concernant la prise en charge chirurgicale et oncologique en première
ou deuxième ligne de traitement par l’intermédiaire d’un forum de discussion.

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Les thérapeutiques ciblées ou le traitement
des mécanismes moléculaires
de la progression tumorale

J.-Y. Blay, J. Fayette et I. Ray-Coquard

Résumé
Le terme « thérapeutique ciblée » est potentiellement ambigu en oncologie.
Toute thérapeutique active agit de fait sur une cible moléculaire précise, béta
tubuline, récepteurs hormonaux, guanine de l’ADN, nucléotides et enzymes
régulant leur synthèse, etc. Le terme « thérapeutique ciblée » employé depuis
peu désigne en fait des thérapeutiques dirigées contre des cibles moléculaires
correspondant à des produits d’oncogènes, supposées jouer un rôle dans la
transformation néoplasique de la cellule cancéreuse. Les thérapeutiques ciblées
peuvent être classées en plusieurs catégories : 1) les thérapeutiques ciblées sur
des anomalies moléculaires causales, directement responsables de la transfor-
mation néoplasique, par exemple, l'imatinib pour les leucémies myéloïdes
chroniques, pour les GIST, pour les sarcomes de Darier et Ferrand. Ces théra-
peutiques donnent en général un taux de réponse élevé en monothérapie.
2) Les thérapeutiques ciblées sur des anomalies moléculaires plus en aval, qui
contribuent à la progression tumorale, mais qui ne constituent pas l'étape
initiale de la transformation, par exemple, le trastuzumab pour l'adénocarci-
nome du sein avec amplication de HER2. Ces thérapeutiques donnent des
taux de réponse limités en monothérapie, mais ont une activité antitumorale
additive avec la chimiothérapie dans les modèles actuellement disponibles.
3) En revanche, les thérapeutiques ciblées, lorsqu'elles sont évaluées sur des
cibles moléculaires ne jouant pas un rôle direct dans la transformation maligne,
n'ont en général pas ou très peu d'activité antitumorale clinique. On peut enfin
individualiser une quatrième catégorie, les anticorps monoclonaux dirigés
contre des cibles moléculaires ne jouant pas un rôle direct dans la transforma-
tion tumorale, par exemple CD20 dans les lymphomes B, dont le mécanisme
d’action fait, entre autres, intervenir le système immunitaire, via l’ADCC,
réalisant ainsi une immunothérapie passive.
516 Les cancers ovariens

Introduction
Le terme « thérapeutique ciblée » désigne des thérapeutiques dirigées contre des
cibles moléculaires présentes et supposées jouer un rôle dans la transformation
néoplasique de la cellule cancéreuse ciblée. Il ne s'agit pas d'un concept
nouveau en oncologie. Les traitements hormonaux des cancers du sein et de la
prostate correspondent à des thérapeutiques ciblées selon cette définition, et
sont étudiés de longue date.
Depuis trente ans, la mise en évidence d'anomalies caractéristiques de
certaines cellules néoplasiques, telles que des translocations spécifiques, des
mutations activatrices ou des amplifications géniques, a considérablement
modifié les classifications nosologiques des maladies néoplasiques. Cette clas-
sification moléculaire de certains cancers a débouché depuis cinq ans sur la
mise à disposition et/ou l'évaluation de médicaments capables de bloquer,
plus ou moins spécifiquement, la fonction de ces protéines activatrices. Ces
nouvelles thérapeutiques ciblées, « modernes », peuvent être classées en
plusieurs catégories :
– les thérapeutiques ciblées sur des anomalies moléculaires causales, directe-
ment responsables de la transformation néoplasique ;
– Les thérapeutiques ciblées sur des anomalies moléculaires plus tardives, qui
contribuent à la progression tumorale, mais qui ne constituent pas l'étape
initiale de la transformation ;
– les thérapeutiques ciblées sur des cibles moléculaires qui ne jouent pas un
rôle direct dans la transformation ;
– Les thérapeutiques ciblées par anticorps dirigées contre des antigènes
membranaire, réalisant une immunothérapie passive, amenant à la destruc-
tion cellulaire via une reconnaissance par le système immunitaire.
Dans cet article, nous décrirons quelques exemples de ces différentes situa-
tions.

Les thérapeutiques ciblées sur des anomalies


moléculaires causales
Dans cette première catégorie de maladies, les anomalies moléculaires ciblées
sont directement responsables de la transformation néoplasique. On peut citer
comme exemples de telles altérations génétiques le gène de fusion bcr-abl des
leucémies myéloïdes chroniques, les mutations activatrices du gène Kit dans les
tumeurs stromales gastro-intestinales, le gène de fusion EWS-Fli1 des sarcomes
d'Ewing. Pour les deux premières affections néoplasiques mentionnées, un
inhibiteur de la fonction des enzymes tyrosine kinase impliqué dans la trans-
formation néoplasique, bcr-abl et kit, l'imatinib mesylate (ou Glivec®), a été
Les thérapeutiques ciblées… 517

développé et possède une activité tumorale établie. Nous prendrons l'exemple


des GIST pour illustrer cette première catégorie de maladies (1-9).
Les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) sont des tumeurs rares,
pouvant se localiser à tous les étages du tractus digestif, dont l'incidence
estimée est voisine de 2 nouveaux cas pour 100 000 habitants par an. Les GIST
représentent une entité nosologique particulière depuis la découverte de leur
lien avec les cellules de Cajal, les cellules pacemakers de la motricité digestive.
Sur le plan phénotypique, les cellules tumorales de GIST sont caractérisées par
l'expression du marqueur CD34, commun aux cellules de Cajal, et par l’ex-
pression du récepteur tyrosine kinase kit (CD117) sous une forme mutée et/ou
activée dans 85 % des cas, et de la chaîne alpha du récepteur du platelet derived
growth factor (PDGF)- PDGFRα dans 5 % des cas environ. Ces mutations sont
de survenue précoce et constituent même possiblement l'événement oncogé-
nétique initial de la maladie (10-13).
La protéine kit, produit du proto-oncogène kit, est un récepteur trans-
membranaire à activité tyrosine kinase dont le ligand naturel est le facteur de
croissance stem cell factor (SCF) (14). Le gène kit est situé sur le bras long du
chromosome 4 (14). Ce récepteur appartient à la famille des récepteurs tyro-
sine-kinase de type III, et présente d'importantes homologies structurales avec
les récepteurs du macrophage colony stimulating factor 1 (M-CSF-1) du PDGF.
Les mutations de kit sont classées en deux catégories (14) :
– les mutations dans les zones régulatrices portant sur les portions extracellu-
laires de la molécule ou sur les zones trans-membranaires et
juxtamembranaires impliquées dans la dimérisation ;
– les mutations dans le domaine kinase, souvent peu sensibles à l'imatinib.
Ces mutations impliquent possiblement des voies de signalisations intracel-
lulaires différentes qui sont actuellement à l’étude (11-20). Dans les GIST, les
mutations de ce gène, observées dans 85 à 90 %, sont responsables d’une acti-
vation spontanée de kit indépendamment de sa liaison avec son ligand
spécifique. Ces mutations sont rencontrées dans la lignée germinale dans les
rares cas familiaux de GIST, et dans la majorité des tumeurs à un stade précoce
ou avancé. Dans les GIST dépourvues de mutations détectables de kit, une
activation constitutionnelle de la kinase est observée (13). Les mutations de kit
et, d'une manière plus générale, son activation, pourraient jouer un rôle onco-
génique initial dans le développement de cette maladie.
Dans les GIST, les mutations sont le plus souvent situées dans l’exon 11 de
kit, plus rarement dans l’exon 9 et exceptionnellement dans les exons 13, 17 et
14 (14-20). La grande majorité de ces mutations se trouvent de part et d’autre
de la région transmembranaire du récepteur, impliquée dans la dimérisation de
la kinase après fixation de son ligand. La nature des mutations semble
influencer le devenir des GIST, y compris avant l'ère de l'imatinib (21-28). La
mise en évidence de ces mutations dans des GIST de petite taille (< 1 cm) et
dans des GIST familiaux souligne la précocité, voire la causalité de cet événe-
ment génétique, dans la carcinogenèse des GIST (11, 20). D'autres anomalies
génétiques apparaissent secondairement cependant, notamment des altérations
518 Les cancers ovariens

et des pertes de segments du chromosome 14, 22, 1 (18, 29). Une analyse
récemment effectuée par micro-array d'expression identifie d'autres gènes
surexprimés et potentiellement activés in vivo dans les GIST (30). Leur rôle
dans la progression tumorale reste à établir.
Avant l'introduction de l'imatinib (STI571, Glivec®), la chirurgie était le
seul traitement efficace de cette pathologie, la chimiothérapie restant globale-
ment inopérante et la radiothérapie non applicable.
En 2001, ont démarré les premières études de phase I, puis II et III,
évaluant l’efficacité de l'imatinib dans le traitement des GIST en phase avancée
ou métastatique. Les données disponibles actuellement montrent que l'ima-
tinib induit 60 à 70 % de réponses objectives avec l’imagerie conventionnelle
(TDM/IRM), 15 à 20 % de maladies stabilisées et 10 à 15 % de résistance
primaire. L'imagerie fonctionnelle par PET-scan est probablement la meilleure
méthode d'évaluation de l'efficacité de l'imatinib dans cette affection. Des
résistances secondaires (re-progression après réponse initiale) sont désormais
rapportées chez 30 % à 50 % des patients. Certains de ces patients vont
répondre à d'autres inhibiteurs de tyrosine kinase plus actifs, et à plus large
spectre, tels que le SU11248, bloquant également VEGFR2 notamment.
La survie à un an des formes avancées était voisine de 35 % avant l'imatinib.
Elle est désormais voisine de 90 %. La survie globale, sans progression et la
réponse au traitement sont influencées par la nature des mutations de kit sur
les cellules tumorales, les mutations de l'exon 11 étant associées à un pronostic
plus favorable. L'imatinib n'a, en revanche, pas d'activité antitumorale établie
dans les autres sarcomes non-GIST CD117 négatifs et/ou dépourvus de muta-
tions activant une boucle autocrine PDGF. Deux études de phase III majeures,
conçues et menées en moins de deux ans et rassemblant respectivement 946 et
756 patients ont été réalisées et publiées : elles comparaient deux doses d'ima-
tinib, 400 mg et 800 mg par jour pour le traitement des GIST avancés. L'étude
rapportée par Benjamin et al. (ASCO 2003, abstract 3272) ne met pas en
évidence de différence entre les deux doses, en terme de taux de réponse, de
survie sans progression et de survie globale. En revanche, l'étude de Verweij et
al. (31), avec un nombre de patient supérieur et une durée de suivi légèrement
supérieure met en évidence une amélioration significative de la survie sans
progression dans le bras 800 mg. À vingt-quatre mois, la survie sans progres-
sion est de 55 % dans le bras 800 mg versus 40 % dans le bras 400 mg. Ces deux
études étaient destinées dès leur conception à être réunies et analysées ensemble
dans une méta-analyse « programmée ». Cette analyse est plus que jamais
nécessaire. L'anatomie moléculaire des mutations de kit reste l'élément essen-
tiel corrélé au pronostic et à la réponse à l’imatinib. Heinrich et al. ont
démontré que les GIST porteurs de mutation de l'exon 11 ont un taux de
réponse, une survie sans progression et une survie globale supérieurs à celle des
patients porteurs de mutations situées dans l'exon 9, ou dans dans d'autres
parties de la molécule. La nature des mutations du PDGFRα et la réponse à
l'imatinib, dans les sites de la publication dans Science de l'article du même
groupe, démontrent la présence de mutations du PDGFRα chez 36 % des
Les thérapeutiques ciblées… 519

GIST indemnes de mutations de kit. Ici, la présence de mutations de


PDGFRα dans l'exon 18, notamment la mutation D842V, est associée à une
absence de réponse au traitement par imatinib (29). Récemment rapportée à
l’ASCO 2005, l’analyse moléculaire réalisée par M. Debiec Richter réalisée sur
337 patients de l’étude de Verweij et al. a permis d’affiner considérablement
cette analyse, démontrant la corrélation entre le site des mutations de l’exon
11, au nucléotide près, et la qualité de la réponse à l’imatinib, et démontrant
que certains sous-types moléculaires répondent mieux à une dose de 800 mg/j
(33, sous presse, ASCO 2005), tandis que pour la thérapeutique de deuxième
ligne SU11248, un taux de contrôle tumoral identique est obtenu quel que soit
le sous-type moléculaire (34).
Les GIST constituent désormais un modèle en oncologie solide, représen-
tant la première tumeur solide traitée par une thérapeutique ciblée sur une
anomalie moléculaire causale. On s’achemine d’ailleurs vers une thérapeutique
ciblée variable selon la nature et la topographie des mutations des récepteurs
tyrosine kinase, la biologie moléculaire, et le séquençage devenant dans cette
perspective, un outil décisionnel essentiel pour le praticien.
Les modèles tumoraux rentrant dans cette catégorie sont en nombre limité :
on peut citer le Glivec® dans les LMC, les leucémies myélomonocytaires chro-
niques associées à une translocation impliquant le récepteur du PDGF, les
dermatofibrosarcomes de Darier et Ferrand, caractérisés par une translocation
impliquant la chaîne bêta du récepteur du PDGF, certains syndromes hyper-
éosinophiliques (35-39).
Lorsque l'oncogène ciblé intervient dans les étapes initiales de la transfor-
mation, la thérapeutique ciblée possède une activité antitumorale importante
en monothérapie, et cette activité antitumorale est détectable ou démontrable
dès les études de phase I/II.

Les thérapeutiques ciblées sur des anomalies


moléculaires plus tardives
Ce sont les anomalies moléculaires qui contribuent à la progression tumorale,
mais qui ne constituent pas l'étape initiale de la transformation. Ces anomalies
moléculaires ne sont pas observées dans toutes les tumeurs d'un même type
histologique, elles ont volontiers une valeur pronostique, généralement défa-
vorable. Les amplifications du gène erb-B2 dans les adénocarcinomes du sein
constituent un exemple de ce type de pathologie. Retrouvées dans 15 à 20 %
des tumeurs, elles sont associées à un pronostic défavorable et à une moins
bonne réponse aux traitements antinéoplasiques (40). Le trastuzumab est un
anticorps humanisé dirigé contre la partie extracellulaire de cette molécule.
Administré de manière hebdomadaire, il donne des taux de réponse voisins de
10 % en monothérapie, mais permet d'augmenter significativement le taux de
520 Les cancers ovariens

réponse et la survie chez les patientes dont les tumeurs sont porteuses de l'ano-
malie moléculaire précitée recevant une chimiothérapie par paclitaxel (41, 42).
Dans cette situation de thérapeutique ciblée sur un oncogène inconstamment
exprimé, et jouant ainsi un rôle potentiellement plus tardif dans l’oncogenèse,
la thérapeutique ciblée sur l’oncogène possède généralement une activité anti-
tumorale plus modeste en monothérapie, avec un taux de réponse limité et peu
ou pas de longs survivants sans progression, mais permet d'améliorer la survie
sans progression, la survie globale et le taux de réponse en combinaison avec
une chimiothérapie conventionnelle.
Le traitement par médicament anti-angiogénique constitue un autre
exemple de thérapeutique ciblée sur un événement moléculaire tardif (43). La
fabrication de néo-vaisseaux sanguins est une étape indispensable à la crois-
sance tumorale lorsque le volume de cellules tumorale doit dépasser 2 mm3. La
densité des néovaiseaux, évaluée par immunohistochimie par l'évaluation de
l'expression du facteur VIII ou de CD31, est un facteur pronostique pour la
rechute et la survie dans de nombreuses affections néoplasiques, notamment
l'adénocarcinome du sein, du côlon, du poumon, de la prostate, les sarcomes.
La néo-angiogenèse est en outre nécessaire à la croissance des cellules tumorales
dans les sites distants, pour donner des métastases. La néo-angiogenèse est sous
la dépendance de cellules tumorales qui, en réponse à une situation d'hypoxie
ou à l'accumulation d'anomalies moléculaires supplémentaires (p53), vont
produire des facteurs de croissance des néovaisseaux qui vont permettre le
bourgeonnement, la mise en place, la maturation des néovaisseaux et plus tard
assurer la survie des cellules endothéliales. Le vascular endothelial growth factor
(VEGF) est le premier facteur contrôlant la fabrication de ces néovaisseaux : il
permet notamment l'augmentation de la perméabilité vasculaire, la proliféra-
tion et la migration des cellules endothéliales et, lorsque la néo-vascularisation
est installée, la survie des cellules endothéliales qui les composent. Le PDGF,
FGFb, les angiopoïétines sont d'autres facteurs importants pour le processus de
fabrication, de maturation et de maintien des néovaisseaux. Jusqu'à récem-
ment, les thérapeutiques anti-angiogéniques testées, principalement des
inhibiteurs des récepteurs tyrosine kinases des facteurs de croissance, n'avaient
pas encore démontré d'efficacité clinique (43).
Deux études récentes ont démontré l'intérêt thérapeutique d'inhibiteurs du
VEGF.
La première étude, rapportée dans le New England Journal of Medecine par
Yang et al. était une étude randomisée de phase II comparant deux doses de
l'anticorps anti-VEGF bevacizumab, à un traitement par placebo chez 114
patients porteurs d'adénocarcinome du rein métastatique (44). Les patients
traités avec une dose de 10 mg/kg/15 j présentaient une survie sans progression
significativement supérieure au bras placebo et au bras faible dose avec une
survie sans progression à huit mois de 30 % versus 14 % et 5 % dans les deux
autres bras. Cette étude démontre l'activité antitumorale d'un inhibiteur de
l'angiogenèse et sa capacité à retarder la progression tumorale dans une tumeur
pour laquelle la production de VEGF est un facteur pronostique établi (45).
Les thérapeutiques ciblées… 521

La deuxième publication importante est celle de Hurwitz et al. (46) qui


rapportent une étude multicentrique randomisée, comparant chez 815 patients
présentant un cancer colorectal mé-tastatique un traitement de première ligne
par 5-FU, leucovorine et CPT11 à la même chimiothérapie associée au beva-
cizumab (Avastin®). Le bras expérimental s'avère significativement supérieur,
en terme de réponse (45 % versus 35 %, p = 0,0029) aussi bien qu'en terme de
survie (médiane 20,3 mois versus 15,6 mois, p = 0,00003 et survie sans progres-
sion 10,6 mois versus 6,24 mois, p < 0,00001). Une hypertension est observée
plus fréquemment avec le bevacizu-mab. Il s'agit de la première étude positive
démontrant un gain en survie avec un traitement anti-angiogénique (46).
L'ensemble des études évaluant le bevacizumab, la toxicité générale du traite-
ment paraît limitée, avec une possible augmentation de l'incidence des
hémorragies et d'accidents vasculaires qui reste inférieure à 1 %.
Au total, ces études établissent le bevacizumab comme traitement de réfé-
rence possible dans le cancer du rein et du côlon, soit en monothérapie, soit en
combinaison avec la chimiothérapie standard de l'affection. Ces données
établissent que les traitements anti-angiogéniques peuvent avoir une activité
antitumorale significative et constituent le deuxième exemple de thérapeutique
ciblée sur un événement moléculaire tardif permettant d'améliorer significati-
vement la survie dans deux affections.
D’autres inhibiteurs de l’angiogenèse sont en développement. Des inhibi-
teurs des récepteurs tyrosine kinase du VEGF, BAY439006, SU11248,
PTK787 sont actuellement étudiés dans plusieurs pathologies, notamment le
cancer du rein, le GIST, le cancer du sein et le cancer du côlon, avec des résul-
tats également très encourageants, proches de 20 à 60 % de réponse ou de
contrôle tumoral prolongé en monothérapie (47-49). Une prolongation de la
survie a été rapportée par rapport au placebo pour le SU11248 dans une étude
de phase III portant sur les GIST réfractaires à l’imatinib lors de l’ASCO2005.
Le troisième exemple que l'on peut citer dans cette catégorie est celui du
gefitinib ou de l’erlotinib (Iressa®, Tarceva®) dans le traitement des cancers
pulmonaires non à petites cellules de stade avancé. L'expression de la tyrosine
kinase HER1, ou récepteur de l'epidermal growth factor (EGF), est là encore
inconstante sur les cellules tumorales. En deuxième ou troisième ligne théra-
peutique, après échec des médicaments conventionnels, l'administration de
gefitinib ou d’erlotinib permet d'obtenir un taux de réponse voisin de 10 % et
une amélioration significative de la qualité de vie pour certains patients (50-
54) ; en revanche, en combinaison avec la chimiothérapie en première ligne,
ces molécules n’ont pas permis d'améliorer significativement les paramètres de
survie ou la réponse au traitement dans quatre grands essais de phase III.
L’absence de corrélation entre l’expression du récepteur en IHC et la réponse
au traitement, ainsi que la constatation d’un phénotype particulier des patients
répondeurs à ces thérapeutiques (non fumeurs, adénocarcinomes, femmes,
japonais…) laissait penser que certains sous-types moléculaires mal caractérisés
pourraient plus particulièrement bénéficier de ces thérapeutiques. Plusieurs
études ont démontré cette hypothèse en 2004, retrouvant la présence de muta-
522 Les cancers ovariens

tions activatrices, sensibles à ces inhibiteurs chez 8 à 10 % des cancers du


poumon, plus particulièrement dans les populations précitées (55-58). Il faut
noter que des mutations portant sur d’autres gènes, HER2, dont la protéine est
susceptible de se dimériser avec HER1 pour transmettre un signal, ont été
rapportées, associées à une réponse à ces inhibiteurs de HER1 (59). Ce modèle
se rapproche ainsi du premier cadre décrit des thérapeutiques ciblées sur les
anomalies moléculaires initiales dans le processus de transformation.
De manière tout à fait notable, la combinaison de deux thérapeutiques
ciblées peu efficaces peut s’avérer synergique ; ceci a été démontré dans le
cancer du rein, où la combinaison bevacizumab et erlotinib a permis d’obtenir
un taux de réponse de 20 % dans une étude de phase II (60). La combinaison
de différentes thérapeutiques de cette classe mérite ainsi d’être étudiée.
De multiples essais cliniques d'autres inhibiteurs de l'EGF sont en cours ou
ont été rapportés, utilisant des inhibiteurs de tyrosine kinase et des anticorps.
Les critères de sélection des patients comportent plus fréquemment l'expres-
sion de la cible à la surface des cellules tumorales. Par ailleurs, il semble de plus
en plus établi que la toxicité cutanée est corrélée à l'activité antitumorale en
clinique, quelle que soit la pathologie considérée. Le cetuximab, un anticorps
anti-HER1, est une des premières molécule de cette classe commercialisée.
Cunningham et al. ont rapporté les résultats d'une étude de phase III multi-
centrique randomisée chez 329 patients présentant un cancer colorectal
EGFR + échappant à un traitement comportant du CPT11 comparant
CPT11 + cetuximab versus cetuximab en monothérapie. Le taux de réponse
avec le bras combiné est significativement supérieur (22,9 % versus 10,8 %,
p = 0,0074) ainsi que la survie sans progression (4,1 mois versus 1,5 mois,
p < 0,0001). L'incidence des diarrhées ainsi que des neutropénies de grade
3-4 est plus importante dans le bras combiné. La survenue d'effets secondaires
classiques du cetuximab (rash cutané ou acnéiforme) est un facteur prédictif de
bénéfice, tant pour la réponse que pour la survie sans progression. En combi-
naison avec le FOLFIRI, le cetuximab est bien supporté et confère un taux de
réponse encourageant en première ligne, avec surtout un nombre limité de
progressions immédiates sous traitement (60). Des résultats encourageants ont
également été rapportés en combinaison avec la radiothérapie dans les cancers
ORL (61, 62). D'autres anticorps ou inhibiteurs de récepteurs anti-HER1
et/ou HER2 sont en cours de développement (EMD72000, 2C4, GW572016,
ABX).
Dans ces différents modèles, l'activité antitumorale de la thérapeutique
ciblée n'est pas observée chez tous les patients. Il reste donc essentiel d'identi-
fier les paramètres moléculaires (ou d’autres, plus simples, tels que la toxicité)
corrélés à la réponse au traitement, afin, d'une part, de mieux sélectionner les
patients, et, d'autre part de mieux comprendre les modalités d'action de ces
médicaments pour améliorer leur index thérapeutique. C'est l'enjeu de ces
prochaines années.
Les thérapeutiques ciblées… 523

Les thérapeutiques ciblées sur des cibles


moléculaires qui ne jouent pas un rôle direct
dans la transformation
Deux cas de figure peuvent être envisagés dans ces modèles.
1. Lorsque la thérapeutique ciblée est dirigée contre une enzyme qui n'est
pas nécessaire pour la survie d'une cellule, cette thérapeutique va être en
général inopérante. Ceci explique que les essais de Glivec® contre des tumeurs
kit+, ou PDGF R+ ont globalement été négatifs, à quelques exceptions près,
sur des observations cliniques marginales. Ceci a été particulièrement bien
illustré dans l'étude 62001 de l'EORTC où les patients porteurs de GIST ou
d'autres types de sarcomes recevaient de l'imatinib à la dose de 800 mg/j. En
dépit de l'expression constante du récepteur du PDGF (une des cibles de l'ima-
tinib) sur les cellules tumorales conjonctives, aucune réponse n'a été observée
pour les tumeurs autres que les GIST (9). La présence de la cible moléculaire
n'est donc pas suffisante : il faut que celle-ci contribue à la transformation pour
que les thérapeutiques ciblées puissent être efficaces.
2. En revanche, l'immunothérapie adoptive par anticorps monoclonaux
peut être dirigée contre des déterminants antigéniques, généralement de
surface, qui ne sont pas nécessairement des molécules de survie pour la cellule
tumorale. Parmi les cibles utilisées ou actuellement en évaluation, on peut citer
les antigènes CD20 ou les mucines exprimées à la surface des cellules épithé-
liales. Le rituximab, un anticorps anti-CD20, a ainsi permis d'améliorer
significativement la survie des patients porteurs de lymphomes B à grandes
cellules CD20 + en combinaison avec une chimiothérapie par CHOP, deve-
nant ainsi un standard thérapeutique dans cette affection. Ces anticorps
déclenchent alors l'apoptose des cellules tumorales en impliquant des effecteurs
du système immunitaire, complément ou cellules effectrices de l'ADCC (62-
64), ou par le biais de molécules cytotoxiques ou radioactives qui leur sont
associées. Des anticorps anti-CD22, CD30, CD33, CD80 sont ainsi en déve-
loppement en hématologie, tandis que des anticorps anti CA125, mucine,
PSA, G250 sont en évaluation dans les tumeurs solides.

Conclusion
Les thérapeutiques ciblées sont désormais des standards thérapeutiques pour
plusieurs affections néoplasiques (LMC, GIST, adénocarcinome du sein,
lymphomes) et plusieurs molécules disposent dès à présent d'une autorisation
de mise sur le marché. Plusieurs dizaines de médicaments dirigés vers de
nouvelles cibles sont en évaluation. Les inhibiteurs de tyrosine kinase et de
leurs ligands auront de toute évidence une place importante dans le traitement
524 Les cancers ovariens

des tumeurs solides dans les années à venir. Il reste à identifier les paramètres
biologiques corrélés à la réponse et à l'efficacité de ces thérapeutiques pour
mieux sélectionner les patients. Les techniques d'analyse moléculaire à haut
débit, de type micro-arrays d'expression ou protéomique, auront probablement
un rôle majeur à jouer dans ce cadre.

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L’utilisation des anticorps monoclonaux dans
le cancer de l’ovaire
È.-M. Neidhardt

Introduction
Le cancer de l’ovaire est un cancer sensible à de nombreux agents de chimio-
thérapie, mais malgré l’amélioration de la prise en charge initiale à la fois sur le
plan chirurgical et sur celui des traitements de chimiothérapie, la survie à cinq
ans de cette affection dans les phases avancées reste seulement de 20 à 30 % (1).
Des approches innovantes sont actuellement développées afin d’essayer de
contrôler la maladie résiduelle après la première ligne de traitement dans le but
de diminuer l’incidence des rechutes. L’immunothérapie paraît représenter une
alternative intéressante, en particulier l’utilisation des anticorps monoclonaux
qui connaissent actuellement un développement très important dans différents
types de cancers (en particulier le rituximab dans les lymphomes malins non
hodgkiniens, et le trastuzumab dans le cancer du sein). Des essais de phase II
et de phase III ont d’ores et déjà montré que ces agents étaient parfaitement
tolérés et capables d’induire une réponse immunologique chez des patientes
porteuses de cancer de l’ovaire.

L’utilisation d’anticorps monoclonaux anti-CA125


Le CA125 est une glycoprotéine de surface mucine like exprimée sur plus de
95 % des carcinomes épithéliaux de l’ovaire de stade III/IV et retrouvé sous
forme circulante dans le sang périphérique (2). Des taux sériques élevés de
CA125 sont observés dans d’autres types tumoraux (cancer du pancréas, du
poumon, du côlon et autres tumeurs digestives), mais également dans des
tumeurs bénignes. Le CA125 peut être retrouvé dans certaines sécrétions
comme le liquide amniotique, le lait maternel et les sécrétions cervicales. Il est
normalement exprimé durant la vie fœtale et a donc à ce stade un rôle physio-
logique dans la croissance et le développement cellulaire. La structure du gène
530 Les cancers ovariens

du CA125 vient récemment d’être découverte, mais sa fonction reste encore à


déterminer (3, 4).
De nombreuses études ont montré l’intérêt du CA125 dans la surveillance
de patientes traitées pour un cancer de l’ovaire, une augmentation du CA125
sérique pouvant précéder de quelques mois des signes cliniques de réévolution
tumorale. De même, en cours des traitements de chimiothérapie, le taux de
CA125 est un bon indice de réponse clinique.
Oregovomab (OvaRex) est un anticorps monoclonal actuellement déve-
loppé par Unither Pharmaceutical. Le composant actif est l'anticorps
monoclonal murin modifié B43.13, une IgG1k se liant avec une haute affinité
au CA-125 (1.16 x 1010/M).
L'oregovomab induit à la fois une réponse immunitaire de type humoral
avec induction d’anticorps humain anti-souris (HAMA), d’anticorps anti-idio-
typique (Ab2) et d’anticorps anti-CA-125, et aussi de type cellulaire T helper
et cytotoxique (5, 6). En effet, le complexe CA125-B43.3 est capable de se lier
à des cellules présentatrices d’antigènes (macrophages activés ou cellules
dendritiques) de manière beaucoup plus efficace que l’anticorps ou l’antigène
seul (7). De multiples récepteurs on été impliqués dans ce processus d’interna-
lisation, en particulier la partie Fc■ du CD64 et du CD32, le CD35 récepteur
du complément et le mannose récepteur CD206. Il existe une présentation
croisée de ce complexe non seulement dans le contexte des molécules du CMH
de classe I mais également de classe II conduisant à l’induction d’une réponse
T de type CD4 + et CD8 + à la fois contre B43.13 et le CA 125.
Une étude récente a montré, chez des patientes porteuses de cancer de
l’ovaire en rechute en phase avancée, l’émergence d’une réponse immunitaire
humorale de type HAMA et Ab2, ainsi qu’une réponse immunitaire cellulaire
contre le CA-125 et/ou la tumeur autologue qui a pu être corrélée à un béné-
fice significatif en terme de survie (8).

Études précliniques et données in vitro


L’équipe de Schultes a pu démontrer à partir du modèle murin NIH :
OVCAR-3 cell-SCID/bg de cancer ovarien un effet protecteur d’un anticorps
B43.13 en utilisant une technique de reconstitution de l’immunité par des
lymphocytes T humains du sang périphérique (9).

Études cliniques chez l’homme


L’intérêt thérapeutique chez l’homme de l’anticorps monoclonal B43.13 a été
suggéré initialement de façon indirecte, par une étude diagnostique qui utili-
sait cet anticorps couplé au technetium-99m pour détecter par scintigraphie de
L’utilisation des anticorps monoclonaux dans le cancer de l’ovaire 531

possibles récidives chez des patientes porteuses de cancer de l’ovaire. Un effet


net sur la survie a pu être constaté chez certaines patientes (10).
L’anticorps monoclonal B43.13 a pu être utilisé en traitement de consoli-
dation après chirurgie et chimiothérapie de première ligne, dans une situation
de masse tumorale résiduelle. Elhen rapporte les résultats d’une étude multi-
centrique randomisée portant sur 342 patientes porteuses d’un cancer de
l’ovaire de stade III-IV en rémission complète après une première ligne de trai-
tement (11). Une perfusion d’anticorps ou de placebo était réalisée tous les
trois mois jusqu’à la rechute. L’émergence d’une réponse immunitaire de type
humoral (HAMA et anti-Ab2) était constatée chez plus de la moitié des
patientes et associée de manière significative à une évolution clinique favorable.
En prenant la population dans sa totalité, aucune différence statistiquement
significative en terme de survie sans progression n’a été constatée entre le bras
traitement et le bras placebo. Par contre, en prenant la sous population ayant
eu la meilleure réponse après la première ligne de traitement, la survie sans
progression a été de 20,2 mois pour l’anticorps B43.13 contre 10,3 mois pour
le placebo (p = .029). Le traitement n’a pas entraîné d’altération de la qualité
de vie et aucun effet secondaire significatif n’a été constaté.
L’étude randomisée en double aveugle placebo/oregovomab la plus récente
a porté sur une population de 145 patientes présentant un cancer de stade III-
IV, en rémission complète après une première ligne de traitement comportant
chirurgie et chimiothérapie à base de sels de platine (traitement de consolida-
tion) (12). Les patientes ont reçu une perfusion intraveineuse de vingt minutes
toutes les quatre semaines pendant deux mois, puis tous les trois mois avec un
maximum de 11 injections. L’anticorps était administré à la dose de 2 mg. Il
n’a pas été constaté de différence significative entre les deux bras concernant
l’objectif principal : le temps jusqu’à progression a été de 13,3 mois dans le
groupe traitement et 10,3 mois pour le groupe placebo avec un p = .71. Par
contre, un sous-groupe de 67 patientes considérées comme « bonnes répon-
deuses au traitement intial » a été isolé avec des résultats plus favorables puisque
le temps jusqu’à la progression a été de vingt-quatre mois avec l’anticorps
contre 10,8 mois avec le placebo. Ces patientes présentaient les caractéristiques
suivantes : traitement chirurgical initial optimal, réduction du taux de CA125
à 65 U/ml ou moins au troisième cycle de chimiothérapie et une normalisation
du taux de CA125 au moment de la randomisation. Une réponse immunitaire
de type humoral (HAMA et Ab2) a été constatée chez plus de 60 % des
patientes, avec une corrélation en particulier dans le sous-groupe de pronostic
favorable entre l’émergence d’une réponse de type Ab2 et le temps jusqu’à
progression (28,2 mois contre 6,4 mois). Là aussi, dans cette étude, peu d’ef-
fets secondaires ont été notés, et la qualité de vie était préservée.
D’autres études de phase II ont pu être menées chez des patientes en
rechute. Une réponse immunitaire cellulaire T a pu être constatée et corrélée à
un bénéfice significatif en ce qui concerne le temps jusqu’à la progression et la
survie globale (13). Une étude publiée récemment a montré chez des patients
532 Les cancers ovariens

en rechute une corrélation entre la survie et l’induction d’une réponse immu-


nitaire humorale de type HAMA, anti-idiotype et anti-CA125 (14).

L’utilisation de l’anticorps monoclonal B43.13 en première ligne de traite-


ment en association avec la chimiothérapie n’a pas été encore envisagée,
probablement du fait de l’idée acquise que la chimiothérapie entraîne une
immunosuppression qui empêcherait tout effet immunostimulant d’un traite-
ment par anticorps monoclonal. De plus en plus d’études rapportent au
contraire un effet bénéfique de la chimiothérapie qui permettrait l’élimination
d’une sous-population de lymphocytes T aux propriétés immunosuppressives
qui empêcherait le développement d’une réaction immunitaire antitumorale.

D’autres anticorps dirigés contre des antigènes tumoraux spécifiques sont


en développement. Il est ainsi possible d’envisager la possibilité de traiter les
patientes avec plusieurs types d’anticorps dirigés contre différents antigènes
permettant une augmentation du spectre de la réponse immunologique et de
la réponse thérapeutique.

L’utilisation de l’anticorps HMFG1

HMFG1 est un anticorps murin de type IgG1 présentant une spécificité contre
un épitope de MUC1, glycoprotéine de surface glycosylée de façon aberrante
et hyperexprimée par plus de 90 % des cancers de l’ovaire et retrouvée égale-
ment dans d’autres types tumoraux (en particulier cancer du sein et du
pancréas) (15). Des essais de phase I/II utilisant HMFG1 couplé à l’Ytrium 90
ont montré que cet anticorps est particulièrement bien toléré lorsqu’il est admi-
nistré par voie intrapéritonéale (16). La survie des patientes en première
rémission complète semble augmentée comparée à une série historique
contrôle.

Un essai récent de phase I, réalisé chez une population hétérogène de


26 patientes à différents stades de la maladie, a confirmé la parfaite tolérance
et l’absence d’effets secondaires notables au cours de l’administration répétée
d’HMFG1 initialement en intaveineux ou en intrapéritonéal, puis en intra-
dermique, avec essentiellement la détection d’anticorps anti-idiotype et une
faible émergence d’anticorps anti-MUC1 (17). Aucun effet notable sur la
survie n’a pu être observé dans cette étude. Très récemment (SMART study
ASCO 2004), une étude de phase III (722 patientes) évaluant cet anticorps en
situation de consolidation, n'a pas montré de bénéfice pour le traitement d'en-
tretien versus observation, alors que la qualité de vie des patientes traitées par
l'anticorps était altérée (Seiden et al.).
L’utilisation des anticorps monoclonaux dans le cancer de l’ovaire 533

L’utilisation de l’anticorps anti-HER2


Il est maintenant établi que l’anticorps monoclonal anti-Her2/neu
(Herceptin®) représente une arme thérapeutique importante en association
avec le paclitaxel chez des patientes en rechute de cancer du sein. Son utilisa-
tion semble restreinte chez les patientes porteuses de cancer de l’ovaire du fait
de son expression beaucoup moins fréquente, avec des taux de réponse très
faible, de moins de 10 % (communication du groupe d’Oncologie
Gynécologique, Society of gynecologic Oncologists, 2000). Les expériences
cliniques avec le Trastuzumab sont encore très limitées. Les résultats d’une
étude de phase II d’Herceptin en monothérapie du GOG (Gynecologic
Oncology Group) ont été récemment publiés dans le Journal of Clinical
Oncology (18). Sur un total de 837 tumeurs testées, 11.4 % (n = 95) avait une
surexpression 2 + ou 3 +. Sur les 41 patientes traitées (toutes avaient reçu une
chimiothérapie antérieure), le taux de réponse a été seulement de 7,3 % (1RC,
2 RP). Cet agent est actuellement en évaluation associé à de la chimiothérapie
à base de platine ou de taxanes.

Conclusion
Les études actuelles avec des anticorps monoclonaux ont montré, en particu-
lier avec l'oregovomab dirigé contre le CA125, une très bonne tolérance
clinique et l'induction d'une réponse immunitaire de type à la fois humorale et
cellulaire. Leur intérêt en terme de survie reste à établir, l'administration en
consolidation chez des patientes en rémission complète semble être la meilleure
indication.

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Nouvelles tentatives médicamenteuses
F. Joly

Introduction
Malgré les progrès des techniques chirurgicales et de la chimiothérapie, le taux
de survie à cinq ans du cancer de l’ovaire reste inférieur à 30 %. Une des causes
d'échec est, certainement, l'apparition rapide d'une chimiorésistance et, en cas
de récidive, la réponse attendue aux traitements par chimiothérapie conven-
tionnelle n’excède pas 35 % (1).
D'importants et récents progrès dans la connaissance du fonctionnement
moléculaire et génétique de la cellule ont ouvert la porte à de nouvelles pers-
pectives thérapeutiques. Ainsi, dans le cancer de l’ovaire, ont pu être identifiées
des modifications spécifiques de la structure du génome, des altérations des
récepteurs des facteurs de croissance, ainsi que l’identification d’oncogènes (2).
Plusieurs nouvelles molécules ont été évaluées ou sont en cours d’étude.
Elles ont pour cibles :
– la restauration de la sensibilité de la tumeur à la chimiothérapie ;
– la modulation et l’induction d’une réponse immunitaire ;
– le remplacement d’une mutation d’un gène ;
– une action directe sur une cible cellulaire impliquée dans la régulation cellu-
laire (récepteur à des facteurs de croissance, voie de la signalisation,
inhibition de l’angiogenèse) (tableau I).
Ce chapitre est une revue des principales nouvelles approches médicamen-
teuses dans le cancer de l’ovaire.

Résistance à la chimiothérapie
Après une phase initiale, habituelle, de chimio-sensibilité, l’apparition d’une
résistance secondaire acquise aux agents cytotoxiques est une des causes d'échec
de la chimiothérapie, dans le cancer de l’ovaire (1, 3, 4).
Les protéines membranaires, surexprimées, comme la glycoprotéine 170,
sont des pompes entraînant un reflux du cytotoxique, du milieu intracellulaire
536 Les cancers ovariens

Tableau I – Principales nouvelles approches médicamenteuses dans le cancer de l’ovaire.

Classes thérapeutiques Cibles Principales molécules


Mécanismes de résistance 1. Glycoprotéine GP 170 1. PSC 833 (Valspodar®)
à la chimiothérapie 2. Gluthatione-S-transferase 2. TLK 286 (Telcyta®)
Thérapie génique 3. Cellules P53 mutées 3. Gène P53 non muté ; vecteur : Adénovirus
4. Gène régulant HER2/neu 4. Gène E1A ; vecteurs liposomiques
5. Lyse des cellules P53 mutées 5. Gène E1B, Adénovirus ONYX - 015
6. Cellules exprimant la 6. Gènes suicides
thymidine kinase- effet bystander
Immunothérapie 7. Cytokines 7. Interleukines 2, interféron α et gamma
8. Anticorps monoclonaux 8. Oregovomab (Ovarex®) anti CA125
HMFG1, anti human Milk Fat globule
Membrane
Trastuzumab (Herceptine®), anti HER-2/neu
Petites molécules ciblées 9. Récepteurs à l’EGF 9. Gefitinib (ZD1837, Iressa®)
Erlotinib (OSI-774, Tarceva®)
Cetuximab (Erbitux®)
10. C-Abl, cKIT, PDGF 10. STI 571 (Gleevec®)
11. Antiangiogénique 11. Bevacizumab (Avastin®), Thalidomide
12. Oligonucléotides antisens 12. [anti BCL2] : G3139 (Oblimersen®)
[anti protéine kinase C] : ISIS 3521 (Affitak®)
[anti-gène raf ] : ISIS 5132
13. Inhibiteurs des protéasomes 13. Bortezomide (Velcade®)

vers le milieu extracellulaire. La concentration intracellulaire du médicament


est donc diminuée, réduisant ainsi son efficacité. Le gène MDR (multi-drug
resistance), codant pour la glycoprotéine 170, est amplifié dans la cellule cancé-
reuse ayant acquis une résistance à la chimiothérapie, aboutissant à la
surexpression de cette protéine membranaire (5). Plusieurs études ont été
menées avec le PSC 833 (Valspodar®), analogue des cyclosporines, ayant
démontré une action inhibitrice de la glycoprotéine 170 (6, 7). Basée sur l’hy-
pothèse que l’association du PSC 833 à une chimiothérapie initiale par
platine-taxane pouvait réduire l’émergence de clones cellulaires résistants à la
chimiothérapie, une étude multicentrique, internationale de phase III a
comparé en première ligne de traitement l’association carboplatine-paclitaxel
plus ou moins PSC 833 chez 762 patientes présentant un cancer avancé de
l’ovaire (8). Cette étude est négative, aucune différence de survie sans progres-
sion n'a pu être mise en évidence entre le groupe traité par chimiothérapie
associée à PSC 833 et le groupe chimiothérapie seule (médiane 13,2 versus
13,5 mois) avec des toxicités digestives, hématologiques et cérébelleuses
augmentées dans le bras avec le PSC 833.
Ces résultats décevants ont conduit à rechercher d'autres cibles parmi les
autres mécanismes de résistance à la chimiothérapie comme celle relevant de la
gluthation transférase : la résistance aux sels de platine est corrélée à une
concentration élevée de gluthation intracellulaire, en rapport avec une hyper-
expression de l’enzyme gluthation-S-transférase (9). Le TLK 286 (Telcyta®), est
un agent anti-cancéreux qui, une fois activé par le gluthation-S-Transférase,
Nouvelles tentatives médicamenteuses 537

induit une apoptose cellulaire (10). Dans les premières études, un taux de
réponse de 15 % a été observé chez des patientes réfractaires aux sels de platine
(11, 12). Une étude internationale de phase III, l'étude ASSIST-1 (Assessment
of Survival in Solid Tumours-1) compare actuellement le TLK 286 en mono-
thérapie au topotecan ou à la doxorubicine pégylée chez des patientes ne
répondant pas aux sels de platine (10).
D’autres mécanismes de résistance ont été identifiés, portant sur les méca-
nismes de réparation de l'ADN. Par exemple, certains gènes codant pour des
protéines réparatrices de l'ADN sont amplifiés, ce qui accélère la restauration
des lésions créées sur l'ADN par les anticancéreux, réduisant leur effet théra-
peutique. La protéine P53 a un rôle central dans cette réparation de l'ADN, en
modulant la régulation du cycle cellulaire et en induisant l’apoptose (13).
Environ 60 % des patientes ayant un cancer avancé de l’ovaire présentent des
mutations de la protéine P53. Il a été démontré que ces mutations ont une
valeur pronostique péjorative et sont associées à une résistance accrue aux sels
de platine (14, 15). Plusieurs études de thérapies géniques visent à restaurer la
fonction naturelle de la P53, par l’intermédiaire de vecteurs viraux (les prin-
cipes et les résultats en sont développés dans le chapitre suivant).

Thérapie génique
Le but de la thérapie génique est de corriger les altérations géniques de la
cellule tumorale, afin de restaurer une fonction cellulaire normale et d’inhiber
la croissance tumorale. Les actions peuvent être dirigées directement au niveau
du gène, soit en corrigeant la mutation d’oncogènes ou en bloquant l’expres-
sion d’anti-oncogènes, soit en induisant la mort cellulaire par l'utilisation de
« gènes suicides ». Les méthodes actuelles pour introduire les gènes correcteurs
dans les cellules tumorales utilisent des vecteurs viraux (Adénovirus,
Rétrovirus) ou non viraux (plasmides liposomiques) (16). Les rétrovirus infec-
tent les seules cellules en division, et induisent une expression de longue durée.
Les Adénovirus infectent aussi bien les cellules en division que celles qui ne
sont pas en cycle, mais n’incorporent le matériel génétique que de façon tran-
sitoire. L’avantage des vecteurs non viraux est l’absence d’immunogénicité,
mais leur utilisation à forte dose entraîne une toxicité cellulaire qui limite cette
technique. Les premières études ont été conduites avec des Adénovirus avec
pour objectif le transfert soit d’anti-oncogènes non mutés (comme le gène
codant pour la P53), soit des gènes exprimant la protéine anti-HER-2/neu, soit
des gènes suicides.
Plusieurs études préliminaires ont montré que la restauration de l’expres-
sion non mutée de la protéine P53, par l’intermédiaire d’un vecteur viral,
permettait une induction de l’apoptose et un arrêt du cycle cellulaire ainsi
qu’une augmentation de la sensibilité à la chimiothérapie (17, 18). Des résul-
tats prometteurs ont été obtenus chez des patientes réfractaires à la
538 Les cancers ovariens

chimiothérapie (18 % de taux de réponse partielle et 36 % de stabilisation) (19)


et une étude internationale de phase III a été conduite chez des patientes en
première ligne de traitement. Après un traitement chirurgical optimal (résidus
tumoraux inférieurs à 2 cm), les patientes recevaient, soit 6 cures de chimio-
thérapie intraveineuse par carboplatine-paclitaxel, soit la même chimiothérapie
associée à 5 cycles de thérapie génique administrés par voie intra-péritonéale.
Le traitement consistait à délivrer par l’intermédiaire d’un Adénovirus le
gène P53, cinq jours consécutifs, en même temps que les cures 2 à 6 de chimio-
thérapie. Cette étude a été interrompue après la première analyse
intermédiaire, en raison de l’absence d’efficacité et de l’augmentation de
la morbidité en rapport avec le traitement génique (19, 20). Pour expliquer
cette absence d’efficacité, plusieurs hypothèses ont été émises, dont la multi-
tude de gènes mutés et le nombre important d’interactions moléculaires
impliquées. Les auteurs conseillent de poursuivre des études en agissant sur
plusieurs cibles géniques.
Le gène E1A intervient dans la régulation de l’activité HER2/neu, laquelle
est surexprimée dans 15 à 20 % des cancers de l’ovaire. L’administration intra-
péritonéale de ce gène lié à des vecteurs non viraux liposomiques a été testée
dans des études de phase 1 chez 18 patientes, avec une tolérance acceptable, et
une diminution des marqueurs tumoraux sériques a été observé chez
5 patientes (21). Des études en association avec la chimiothérapie sont en
cours. En se basant sur la capacité de réplication des Adénovirus, Vasey et al.
(22) ont développé un Adénovirus (Onyx-015) qui présente une délétion du
gène E1B avec la particularité de se répliquer et d’induire une lyse tumorale
sélective des cellules cancéreuses ayant une mutation de P53. Les effets secon-
daires ont été essentiellement des syndromes grippaux, des douleurs
abdominales et des vomissements. Sur 16 patientes, 4 ont eu une stabilisation
de la maladie, 2 patientes réfractaires aux sels de platine sont redevenues
sensibles au carboplatine.
Des études de phase I ont montré la faisabilité d’une thérapie par gènes
suicides. Le principe consiste à transférer un gène dont la fonction est de sensi-
biliser les cellules cancéreuses à un agent ordinairement non toxique
aboutissant à la mort cellulaire. Le gène de la thymidine kinase du virus Herpès
simplex peut être transfecté par un vecteur adénoviral par voie intra périto-
néale. La forme virale de la thymidine kinase a une expression sélective dans les
cellules cancéreuses et peut activer de façon spécifique le ganciclovir, utilisé
usuellement comme agent antiviral. L’introduction de ce dernier induit une
toxicité dans les cellules tumorales qui expriment la thymidine kinase, et
entraîne même, par un mécanisme de « bystander », la destruction de cellules
cancéreuses de voisinage n’exprimant pas la thymidine kinase. In vitro, la trans-
fection de 5-15 % de cellules tumorales par le gène suicide permet d’obtenir 80
à 100 % de mort cellulaire tumorale lors de l’introduction du ganciclovir. (23,
24). Les premiers essais de traitements ont été bien tolérés, mais les réponses
tumorales restent modestes (38 % de stabilisation parmi 13 patientes en réci-
dive) (25). D’autres études de phase II sont en cours.
Nouvelles tentatives médicamenteuses 539

Immunothérapie
L’immunothérapie a pour but d’induire une réponse immunitaire humorale et
cellulaire de l’organisme contre les cellules cancéreuses, soit par des agents
immuno-stimulants non spécifiques, soit par des anticorps spécifiques dirigés
contre un récepteur ou un antigène ayant une fonction particulière. Dans le
cancer de l’ovaire, la recherche sur l’immunothérapie s’est principalement déve-
loppée selon plusieurs axes : les cytokines, les anticorps monoclonaux et les
vaccins.
L’interleukine 2, l’interféron alfa et gamma administrés par voie intrapéri-
tonéale ont fait l'objet de plusieurs études de phases II dans le cancer de l’ovaire
(26). L’interféron alfa et gamma, administrés en consolidation chez des
patientes avec des tumeurs résiduelles de faible volume, obtiennent des
réponses histologiquement prouvées de 30 à 50 %, au détriment d’une toxicité
non négligeable (27, 28). Les réponses ont surtout été observées en cas de
résidus tumoraux minimes (19). Le bénéfice éventuel d’une association inter-
féron-chimiothérapie en première ligne de traitement est en cours d’étude (29).
L’efficacité de l’interféron gamma sous-cutané associé à une première ligne de
chimiothérapie intraveineuse par cisplatine-cyclophosphamide a été évaluée
dans une étude de phase III. Les patientes traitées par inferféron gamma et
chimiothérapie avaient une survie sans progression significativement supé-
rieure à celles ne recevant que la chimiothérapie (51 % versus 38 %, p = 0.031),
mais sans amélioration de la survie globale (30). Une nouvelle étude de phase
III évalue actuellement, l’association de l’interféron gamma 1b au standard
actuel de chimiothérapie, carboplatine-paclitaxel.
Les anticorps monoclonaux sont la seconde façon d'induire une réaction
immunitaire. Ils n’affectent pas les cellules saines et ne s’attaquent qu’aux
cellules malades ; ils provoquent, donc moins d’effets secondaires que les cyto-
kines ou que la chimiothérapie classique. Une fois introduits dans l’organisme,
ils sont capables de bloquer l’action d’une substance chargée de stimuler la
croissance tumorale. Mab B43.13 (oregovomab, Ovarex®) est un anticorps
murin, dirigé directement contre l’antigène CA125, exprimé par plus de 95 %
des patientes présentant un cancer de l’ovaire à un stade avancé. Ovarex® agit
en induisant une réponse immunitaire cellulaire par la formation de complexes
immuns avec l’antigène CA125 (31). Son intérêt en traitement de consolida-
tion, après chimiothérapie initiale, a été évalué dans une première étude
randomisée qui comparait Ovarex®, administré en intraveineux, à un placebo,
chez 145 patientes en réponse clinique complète après la première ligne de
chimiothérapie. L’adjonction d’Ovarex® a été très bien tolérée, mais n’a pas
permis d’augmenter le délai sans récidive qui était l’objectif principal (médiane
de survie sans récidive : 13,3 dans le bras Ovarex® versus 10,3 mois dans le bras
placebo, p = 0,71) (32). Les résultats en terme de survie globale ne sont pas
encore disponibles. D’autres études randomisées sont en cours dans la même
indication ainsi que dans des situations de rechutes (26).
540 Les cancers ovariens

Un autre anticorps murin, le HMFG1 (Human Milk Fat Globule


Membrane, R1549), a été également évalué. Cet anticorps reconnaît de façon
spécifique un antigène, associé à une glycoprotéine tumorale, codée par le gène
MUC-1, qui est exprimé dans plus de 97 % des tumeurs ovariennes. Associé à
de l’Ytrium 90, le HMFG1 a été administré par voie intrapéritonéale avec un
bon profil de tolérance (33). L'étude européenne SMART (Study of
Monoclonal Antibody RadioimmunoTherapy) a comparé un traitement de
consolidation par HMFG1 une seule injection intra-péritonéale versus un trai-
tement standard chez des patientes en réponse clinique complète après une
première ligne de chimiothérapie et une chirurgie de « second look » sans lésion
macroscopique. 848 patientes ont été incluses, 702 randomisées et finalement
224 ont reçu le HMFG1 versus 223 le traitement standard. L’objectif principal
était l’amélioration de 15 % de la survie globale. Il y a eu deux fois plus de toxi-
cité hématologique transitoire dans le groupe avec immunothérapie ; il y a eu
également plus de rash, de nausées et vomissements, de douleurs articulaires et
abdominales et d'asthénie. Avec un suivi médian de trente-cinq mois, aucune
différence n'a été mise en évidence sur la survie sans progression et la survie
globale (34).
D’autres modalités d’immunothérapie sont en voie de développement
comme la vaccination avec différents antigènes dérivés de peptides HER-
2/neu. Des vaccins contenant des peptides provenant de HER-2/neu associés
à du GM-CSF (granocyte-macrophage colony-stimulating factor) peuvent être
administrés, par voie sous-cutanée, et induisent, dans plus de 95 % des cas, une
réponse immunitaire avec une prolifération de lymphocytes T (35). Des appli-
cations sont envisagées pour le cancer de l’ovaire (36).

Molécules ciblées
Traditionnellement, les agents cytotoxiques manquent de spécificité et ne
distinguent pas les cellules tumorales des cellules non tumorales, entraînant
une toxicité parfois importante. Au contraire, les molécules ciblées sont de
petites molécules qui agissent de façon spécifique sur un récepteur membra-
naire extra- ou intracellulaire régulant la prolifération cellulaire, l’apoptose,
l’angiogenèse ou la mobilité cellulaire. De par leur nature, elles sont très spéci-
fiques à un mode d’action de la cellule et induisent peu de toxicité. Plusieurs
classes de thérapies ciblées sont actuellement à l’étude dans le cancer de l’ovaire
Les études les plus avancées concernent les inhibiteurs du signal de transduc-
tion avec inhibiteurs des EGFR-thyrosine kinases, le STI571, les
anti-angiogéniques, les oligonucléotides antisens, les inhibiteurs de raf-kinases
et les inhibiteurs des protéasomes (37).
Les inhibiteurs des tyrosine kinases ont été les plus étudiés : plus de 70 %
des cancers de l’ovaire expriment un niveau élevé des récepteurs aux epidermal
growth factors (EGFR). Le gefitinib (ZD1837, Iressa®), l’erlotinib (OSI-774,
Nouvelles tentatives médicamenteuses 541

Tarceva®), et le cetuximab (Erbitux®) sont les inhibiteurs des EGFR les plus
développés (38). Ces drogues sont administrées par voie orale et bloquent la
transduction du signal impliqué dans la prolifération cellulaire. Plusieurs
études de phases II ont évalué l’efficacité et la tolérance du gefitinib en situa-
tion de récidive, seul ou associé à une chimiothérapie. Le taux de réponse
observé chez les patientes réfractaires aux sels de platine varie de 3 % à 25 %
(39-41). Les principales toxicités sont des diarrhées de grade 3 à 4 dans environ
20 % des cas, ainsi que des rashs cutanés acnéiformes, dans plus de 35 % des
cas. L’expression de l’EGFR semble nécessaire mais pas suffisante pour obtenir
une réponse, et l’efficacité paraît être corrélée à l’intensité de la réaction cutanée
(42). In vitro, sur des cellules surexprimant EGFR, le gefitinib a montré une
action inhibitrice en présence ou non d’EGF exogène (43). Actuellement, des
études complémentaires sont en cours pour identifier des marqueurs biolo-
giques pouvant prédire la réponse au traitement (44). Le trastuzumab
(Herceptin®) est un anticorps monoclonal humanisé qui agit sur le domaine
extracellulaire de HER-2 et inhibe la croissance tumorale des cellules cancé-
reuses qui surexpriment HER-2. Seulement 11 % des tumeurs ovariennes
surexpriment HER-2 et, chez les patientes en récidive d’un cancer de l’ovaire,
les taux de réponse de l’Herceptin® en monothérapie sont modestes (7 % de
réponse globale) (45). L’association de l’Herceptin® avec la chimiothérapie reste
à évaluer. Le STI 571 (Glivec® imatinib) est une petite molécule, active dans la
leucémie myéloïde chronique où elle inhibe BCR-Abl. Elle inhibe également le
récepteur des platelet-derived growth factor (PDGFR) et le cKit (46). On
retrouve une expression de C-Abl, cKit et ou PDGFR dans plus de 70 % des
cellules séreuses ovariennes normales ou tumorales (47). L’efficacité du STI
571 est actuellement à l’étude, en phase II, dans le cancer de l’ovaire.
Bloquer la formation de néovaisseaux est une autre voie d’approche.
Plusieurs molécules sont en développement. Le bevacizumab (Avastin®) est un
anticorps humanisé, agissant contre un facteur pro-angiogénique, le vascular
endothelial growth factor (VEGF). Administré en intraveineux tous les quinze
jours, la tolérance est excellente et des résultats encourageants ont été observés
dans le cancer du côlon et du rein (48, 49). Il est en cours d’évaluation, dans
une étude du GOG, chez les patientes en récidive d’un cancer de l’ovaire.
L’atrasentan est une petite molécule qui bloque spécifiquement les récepteurs à
l’endothéline. Administré par voie intrapéritonéale en association avec du
paclitaxel, il bloquerait la prolifération tumorale ovarienne (50). La thalido-
mide est une vieille molécule avec une utilisation nouvelle du fait de la
découverte récente de son action anti-angiogénique. Elle a été testée chez des
patientes présentant des cancers de l’ovaire réfractaires à la chimiothérapie, avec
des taux de réponse variant de 0 à 50 % (51, 52).
Les oligonucléotides antisens sont une autre voie d’action ciblée. Ils inter-
fèrent sur la transcription de proto-oncogènes et d’oncogènes dans les cellules
cancéreuses, en diminuant leur expression et rendant la cellule plus sensible à
la chimiothérapie. Plusieurs molécules ont montré une activité antitumorale :
le G3139 (Oblimersen®) dirigé contre BCL-2 ; Isis 3521 (Affitak®) dirigé
542 Les cancers ovariens

contre la protéine Kinase C ; Isis 5132 qui peut, en agissant par hybridation
dans la région C-ras mRNA, réduire une expression du gène raf qui agit sur des
protéines régulatrices de la prolifération cellulaire (53-55). Les études cliniques
précoces avec Isis 5132 ont confirmé son mode d ’action, et ont conduit à
proposer une administration en infusion continue, par pompe, à la dose de
2 mg/kg/j sur vingt et un jours suivis de sept jours de repos. Les toxicités notées
sont des troubles de coagulation, une thrombopénie, une asthénie et de la
fièvre. Les deux molécules Isis sont à l’étude en phase II dans le cancer de
l’ovaire en association avec la chimiothérapie, soit en première ligne, soit en
situation de récidive.
D’autres molécules ciblées pourraient trouver, à l'avenir, une place impor-
tante dans le traitement du cancer de l’ovaire. Le Bay 43-9006 est une petite
molécule qui bloque l’enzyme RAF kinase, dans la voie de signalisation de
RAS. Il agit aussi contre plusieurs récepteurs des tyrosine kinases, impliqués
dans la néovascularisation (56, 57). Il peut être administré par voie orale et des
réponses ont été observées chez des patientes ayant un cancer de l’ovaire réfrac-
taire à la chimiothérapie (58). D’autres études vont, prochainement, débuter.
Le PS-341 (bortezomide, Velcade®) est un inhibiteur des protéasomes, enzymes
complexes qui participent à la régulation de la division cellulaire. La voie des
protéasomes est aussi responsable de la régulation de la transcription et de l’ad-
hésion cellulaire (59). Administré de façon bi-hebdomadaire, Velcade® montre
peu de toxicité. Dans le cancer de l’ovaire, en association avec des sels de
platine, des résultats préliminaires encourageants ont été observés chez des
patientes en récidive (60).

Conclusion
L’amélioration des connaissances dans les mécanismes moléculaires du fonc-
tionnement de la cellule, des voies de signalisation et de régulation cellulaire,
ainsi que dans les mécanismes de chimiorésistance, ont permis l'identification
de nouvelles cibles et l’émergence de nouvelles thérapeutiques dans le cancer de
l’ovaire.
De nombreuses molécules ciblées sont en à l’étude, en phases 1 et 2, avec
des résultats encourageants. La combinaison de ces thérapies ciblées entre elles
et/ou avec les drogues cytotoxiques est un axe de développement futur.
La thérapie génique, immunologique, et la vaccination ont montré leur
faisabilité, avec une toxicité acceptable. Même si les premières grandes études
cliniques n’ont pas apporté les résultats attendus, elles représentent des voies
intéressantes. Il reste à mieux connaître les paramètres biologiques, corrélés à la
réponse pour mieux cibler leur indication.
La place de ces nouvelles thérapeutiques dans la stratégie du traitement du
cancer de l’ovaire doit être définie dans des études contrôlées. En situation de
récidive, l’association de ces nouvelles thérapeutiques à la chimiothérapie
Nouvelles tentatives médicamenteuses 543

conventionnelle permettra, peut-être, une diminution de la résistance aux


drogues cytotoxiques classiques, et une augmentation de la survie sans récidive.
En première ligne de traitement, leur place pourra s’intégrer dans une stratégie
de consolidation pour traiter la maladie résiduelle, ou en association avec la
chimiothérapie initiale dans le but d’augmenter la survie.

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Surveillance du cancer de l’ovaire
C. Saba

Surveillance sous traitement :


bilan de fin de chimiothérapie
Le bilan de fin de chimiothérapie repose sur l’examen clinique, les dosages des
marqueurs sériques tumoraux, en particulier le CA 125, et l’examen tomoden-
sitométrique abdomino-pelvien (niveau de preuve B) qui recherchent une
éventuelle masse résiduelle (standard).
En cas de métastases hépatiques ou spléniques initiales, l’examen tomoden-
sitométrique est complété par une échographie. En cas de doute sur la
persistance d’implants tumoraux en région sous-diaphragmatique, une
imagerie par résonance magnétique complémentaire peut localiser les résidus
tumoraux. Un taux de CA 125 normal après six cures de chimiothérapie n’est
pas la preuve d’une réponse histologique complète, alors qu’un taux élevé à
l’issue des six cures signe l’absence de réponse histologique complète.

Surveillance des rémissions complètes et


diagnostic des récidives
Plus l'extension tumorale était limitée, plus l'exérèse a été complète et
meilleures sont les chances de survie et de guérison.
Au cours de ces dernières années, les progrès thérapeutiques ont été consi-
dérables, notamment grâce aux importants progrès de la chimiothérapie.
Toutefois, malgré l'efficacité des traitements, un suivi s'impose pour s'as-
surer qu'il n'y a pas de reprise, locale ou à distance, du processus tumoral, et
au cas ou il y en aurait une, pour s'assurer de la prendre en charge aussi préco-
cement que possible.
Il n’existe pas d’algorithme standard pour la surveillance du cancer de
l’ovaire après un traitement adjuvant (1).
Barnhill et al. (2) ont conduit une étude auprès des gynécologues et ont
répertorié une variété de schémas de surveillance de patients après un traite-
550 Les cancers ovariens

ment adjuvant. Ils ont conclu à l’absence de consensus concernant la stratégie


de surveillance.
Le CA125 est une glycoprotéine qui est exprimée par les tissus adultes d’ori-
gine épithéliale cœlomique. Plus de 80 % des carcinomes ovariens
non-mucineux expriment le CA125 et les taux sériques sont élevés. Par contre,
les carcinomes ovariens mucineux, les tumeurs germinales et les tumeurs stro-
males ne sont pas associés a des taux élevés de CA 125 ; dans les tumeurs
mucineuses, c'est le CA 19-9 qui est le plus souvent élevé.
Le dosage des taux sériques de CA125 a été approuvé par la FDA dans le
suivi des traitements. Cependant, le dosage du CA125 n’est pas un bon test de
dépistage puisqu’il est élevé dans une multitude de pathologies, y compris de
pathologies bénignes comme l’endométriose et le léiomyome.
En l’absence de signe d’appel, la surveillance repose sur l’examen clinique
standard. Il n’existe pas de consensus sur la nécessité et la fréquence du dosage
du CA125 sérique en cours de surveillance étant donné l’absence de traitement
curatif lors des rechutes. Examen tomodensitométrique et échographie ne sont
indiqués que pour les cas ou la biologie n’est pas fiable. La surveillance par réso-
nance magnétique n’est pas recommandée à ce stade de la maladie. Il n’y a pas
de données permettant de définir le rythme de surveillance.
En cas de réaugmentation du CA125 après normalisation, il est recom-
mandé de réaliser un second dosage après deux ou trois semaines afin de
confirmer l’augmentation et calculer le temps de doublement ou la pente de
progression (accord d’experts). En cas de suspicion de récidive sur la présence
de signes cliniques et/ou d’une élévation confirmée des marqueurs tumoraux
sériques, le premier examen à réaliser est la tomodensitométrie abdomino-
pelvienne, puis, en cas de négativité, l’échographie abdomino-pelvienne.
L’immunoscintigraphie n’est indiquée que si ces deux premiers examens sont
négatifs (3) (niveau de preuve B). Dans le cas d’un protocole d’essai thérapeu-
tique, examen tomodensitométrique et échographie abdomino-pelvienne
peuvent être inclus pour diagnostiquer plus précocement les récidives et
permettre l’évaluation (accord d’experts).
De nouvelles données concernant l’utilisation du PET-Scan dans la
surveillance après un traitement adjuvant sont en cours d’évaluation. Le seul
inconvénient est l’impact sur le coût de la santé (4).

Références
1. Markman M (1994) Follow-up of the asymptomatic patient with ovarian cancer. Gynecol
Oncol 55: S134-S137
2. Barnhill D, O'Connor D, Farley J et al. (1992) Clinical surveillance of gynecologic cancer
patients. Gynecol Oncol 46: 275-80
3. Powell MC, Perkins AC, Pimm MV (1987) Diagnostic imaging of gynaecological tumors
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4. Tammela J, Lele S (2004) New modalities in detection of recurrent ovarian cancer. Curr Opin
Obstet Gynecol. 2004 Feb; 16 (1): 5-9

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