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ANALYSE
3e
édition
Xavier GOURDON
les maths
en tête
ANALYSE
les maths
en tête
ANALYSE
3e
édition
Xavier GOURDON
Ancien élève de l’école polytechnique
Du même auteur chez le même éditeur
ISBN 9782340-038561
© Ellipses Édition Marketing S.A., 2020
32, rue Bargue 75740 Paris cedex 15
Avant-propos de la troisième édition
Près de ving-cinq ans après la première édition et douze ans après la seconde édition,
cette troisième édition contient de nouveaux exercices et problèmes, ainsi que des ex-
tensions d’exercices. Ces ajouts sont toujours réalisés au travers de thèmes riches pour
l’étudiant, soit parce que les résultats démontrés sont classiques, soit parce que l’esprit
de leur résolution est intéressant par la méthode qu’il permet d’acquérir. On trouve aussi
quelques corrections de coquilles, qui restaient présentes malgré le soin porté aux retouches
de la deuxième édition.
xavier.gourdon livres@yahoo.fr
Avant-propos de la deuxième édition
Plus de dix ans après la sortie de la première édition, cet ouvrage est encore large-
ment utilisé pour la préparation des concours (grandes écoles, agrégation). Les retours de
mes lecteurs (grâce à internet notamment) sont nombreux et m’ont encouragé à réaliser
cette deuxième édition. Cette dernière contient des corrections de coquilles, quelques re-
touches et améliorations de preuves et solutions, ainsi que quelques exercices et problèmes
supplémentaires dans l’esprit de l’édition précédente. Par ailleurs, le chapitre intégration a
été largement revu pour être plus conforme au programme des classes préparatoires scien-
tifiques. Enfin, une nouvelle annexe (annexe C) propose une démonstration du théorème
des nombres premiers accessible à partir du programme des classes préparatoires.
J’espère que les améliorations de cette deuxième édition seront utiles à mes lecteurs
pour la préparation de leur concours. Je tiens à remercier chaleureusement ceux qui m’ont
aidé, directement ou indirectement, et en particulier les internautes dont les commentaires
ont été nombreux.
Avant-propos de la première édition
Cet ouvrage propose aux étudiants des classes de mathématiques spéciales (programme
M’) des rappels et des compléments de cours complets, ainsi que des exercices et des
problèmes corrigés. Il pourra également intéresser les élèves préparant l’agrégation.
L’ouvrage est orienté dans le même esprit que le tome Algèbre : le lien étroit qui existe
entre le cours et les exercices est mis en avant. En effet, une bonne compréhension du cours
passe nécessairement par la résolution d’exercices, et réciproquement, il est illusoire de
s’attaquer à des exercices difficiles sans avoir une compréhension profonde du cours. Dans
cet esprit, de multiples remarques ponctuent les parties de cours, mettant en avant ses
subtilités, et faisant le lien avec les exercices qui suivent.
Les parties de cours ne sont pas un substitut au cours du professeur, mais plutôt un
résumé exhaustif qui l’éclaire d’une façon différente. Les compléments sont des résultats
très classiques qui ne figurent pas au programme mais dont la connaissance est utile
et parfois indispensable pour mener à bien un exercice ou un problème. Les résultats
présentés sont démontrés lorsqu’ils sont à la limite du programme ou lorsqu’ils constituent
un point important dont la démonstration met en place des techniques instructives que
l’étudiant doit connaı̂tre et savoir maı̂triser.
À la fin de chaque section, on trouve une liste d’exercices de difficultés progressives,
classiques ou parfois originaux, qui constituent une illustration du cours qui les précède.
Je me suis efforcé à chaque fois de passer en revue tous les problèmes qui tournent autour
du thème de l’exercice. Les nombreuses références au cours sont là pour inviter le lecteur
à s’y reporter, le but étant de savoir et de comprendre précisément les résultats que l’on
utilise.
Une liste de problèmes ponctue la fin de chaque chapitre, ces problèmes étant des
exercices plus longs, plus difficiles ou plus originaux que les précédents et faisant appel à
l’ensemble du cours du chapitre. À la fin de certains chapitres, on trouve des sujets d’étude
introduisant des théories élégantes dans le thème du chapitre. Deux annexes présentent
des curiosités mathématiques liées au programme d’analyse.
Les résultats du cours ou les exercices les plus importants sont indiqués par une flèche
dans la marge de gauche.
Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont aidé, Georges Papadopoulo, Ber-
trand Saint-Aubin et Alexia Stéfanou pour la relecture de certains chapitres, Bénédicte
Herbinet à qui je dois une élégante solution, Philippe Flajolet pour sa contribution aux
énoncés de quelques problèmes. Ce travail a pu se concrétiser grâce au projet Algo-
rithmes qui m’a permis de donner à l’ouvrage sa version typographique actuelle et à la
collection ellipses qui l’a accueilli, et je les en remercie.
Je serais reconnaissant à ceux de mes lecteurs qui me feront parvenir leurs remarques
sur cette première édition.
Xavier Gourdon
Table des matières
Index........................................................................................................... 449
CHAPITRE 1
Lanombres
naissance de la topologie est directement liée à l’étude des ensembles de
réels. Un premier signe fut certainement la définition de la notion de
point d’accumulation par Weierstrass vers 1860 (qui démontra que tout en-
semble de nombres réels infini borné admet au moins un point d’accumulation,
résultat admis auparavant).
Ce point de vue un peu étroit tomba ensuite en désuétude. Ce n’est qu’en
1906, à force d’étudier des ensembles de plus en plus abstraits, qu’apparut
la notion de distance, introduite par Fréchet. La notion d’espace topologique
général ne naquit qu’en 1914 grâce à Hausdorff qui définit la notion de voisi-
nage.
Le développement des espaces vectoriels normés (en particulier de dimen-
sions infinies) est d’abord dû à Hilbert ; Banach compléta largement cette
théorie dans les années 1930.
La notion d’ensemble compact, en germe dès 1900, se développa avec Borel
et Lebesgue grâce aux considérations liées à la théorie de la mesure.
La théorie générale des espaces topologiques n’étant pas au programme des classes de
mathématiques spéciales, nous nous limiterons à l’étude des espaces métriques. Les
curieux trouveront cependant leur compte dans les différentes remarques des parties de
cours.
En annexe, sont présentés sous forme de problèmes et d’exercices :
— Le théorème de Baire et quelques applications (annexe A).
— Quelques résultats sur les espaces de Hilbert (annexe B).
Ces curiosités ne sont pas au programme de mathématiques spéciales, mais elles consti-
tuent de forts jolies théories qui nous sont accessibles.
1. Généralités
1.1. Normes et Distances
Normes.
Définition 1. Soit E un K-espace vectoriel (où K = R ou C). Une norme sur E est une
application E → R + x → x telle que
(i) On a x = 0 si et seulement si x = 0.
(ii) Pour tout λ ∈ K, pour tout x ∈ E , λx = |λ| · x.
(iii) Pour tout (x, y ) ∈ E 2 , x + y ≤ x + y (inégalité triangulaire).
Muni d’une norme, E est appelé un K-espace vectoriel normé (en abrégé e.v.n).
Exemple 1. — x → |x| est une norme sur R, z → |z | est une norme sur C.
8 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES M ÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORMÉS
Boules et sphères.
Définition 5. Soit (E, d) un espace métrique. Pour tout x ∈ E et pour tout ρ > 0, on
appelle
— boule ouverte de centre x de rayon ρ l’ensemble B(x, ρ) = {y ∈ E | d(x, y) < ρ},
— boule fermée de centre x de rayon ρ l’ensemble Bf (x, ρ) = {y ∈ E | d(x, y ) ≤ ρ},
— sphère de centre x de rayon ρ l’ensemble S(x, ρ) = {y ∈ E | d(x, y) = ρ}.
Lorsque E est un espace vectoriel normé (muni de la distance issue de la norme) et que
x = 0, ρ = 1, on parle de boule unité ouverte, boule unité fermée et de sphère unité.
Proposition 1. Soit (E, d) un espace métrique, A une partie de E , et x ∈ E . L’ensemble
A est borné si et seulement s’il existe r > 0 tel que A ⊂ B(x, r ).
1.2. Topologie d’un espace métrique
Sauf mention contraire, dans toute cette sous
sous-suite
partie, (E, d) désigne un espace métrique.
Ouverts.
Définition 6. Une partie Ω de E est dite ouverte (ou Ω un ouvert ) si Ω = ∅ ou si
∀x ∈ Ω, ∃ρ > 0 tel que B(x, ρ) ⊂ Ω.
L’ensemble des parties ouvertes de E s’appelle topologie de E.
Exemple 3. Une boule ouverte est un ouvert. En particulier, dans R (muni de la distance
usuelle d(x, y) = |x − y |), les intervalles ouverts ]α, β [ sont des ouverts.
Proposition 2. (i) Les parties ∅ et E sont des ouverts.
(ii) Une réunion d’ouverts est un ouvert.
(iii) Une intersection finie d’ouverts est un ouvert.
Remarque 3. Attention, une intersection infinie d’ouverts peut ne pas être ouverte. Par
exemple, dans R, ∩n∈N∗ ]−1/n, 1/n[ = {0} n’est pas ouvert.
Fermés.
Définition 7. Une partie F de E est dite fermée (ou F un fermé ) si E F est ouvert.
Exemple 4. Une boule fermée est un fermé. En particulier, un singleton {x} = B f (x, 0)
est un fermé. Dans R, les intervalles fermés [α, β] sont des fermés.
Proposition 3. (i) Les parties ∅ et E sont des fermés.
(ii) Une intersection de fermés est un fermé.
(iii) Une réunion finie de fermés est un fermé.
Remarque 4. Attention, une réunion infinie de fermés peut ne pas être fermée. Par
exemple, dans R, ∪n∈N∗ [1/n, 1 − 1/n] = ]0, 1[ n’est pas un fermé.
Voisinages.
Définition 8. On appelle voisinage d’un élément x de E toute partie V de E contenant
un ouvert contenant x. L’ensemble des voisinages de x est noté V (x).
Exemple 5. Un ouvert contenant x est un voisinage de x, une boule fermée de centre x
de rayon ρ > 0 est un voisinage de x.
Remarque 5. Une réunion (resp. une intersection finie) de voisinages de x est un voisinage
de x.
10 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
Frontière.
◦
Définition 12. La frontière d’une partie A de E est l’ensemble A A. On la note Fr(A)
(ou encore ∂A).
Point d’accumulation, point isolé.
Définition 13. Soit A une partie de E .
— On dit que a ∈ E est un point d’accumulation de A si pour tout voisinage V de a,
V ∩ A = ∅ et V ∩ A =
{a}, ce qui s’écrit encore
(∀ε > 0), B(a, ε) ∩ A = ∅ et = {a}.
— On dit que a ∈ A est un point isolé de A s’il existe un voisinage V de a tel que
V ∩ A = {a}, ce qui s’écrit encore
(∃ε > 0), B(a, ε) ∩ A = {a}.
Remarque 8. Si a est un point d’accumulation de A, alors a ∈ A et de plus pour tout
ε > 0, B(a, ε) contient une infinité de points de A.
Exemple 9. Dans R, 0 est point d’accumulation de l’ensemble {1/n, n ∈ N ∗}.
Topologie induite dans un espace métrique. Soit (E, d) un espace métrique et
A ⊂ E . Une manière bien naturelle de faire de A un espace métrique est de le munir de
la restriction de la distance d de E à A × A. Ainsi, (A, d) est un espace métrique dont
la topologie est appelée topologie induite par (E, d). La proposition suivante permet de
caractériser les ouverts, fermés et voisinages de A par rapport à ceux de E.
Proposition 6. Soit A une partie de E .
— Les ouverts de A sont les ensembles de la forme Ω ∩ A, Ω étant un ouvert de E .
— Les fermés de A sont les ensembles de la forme F ∩ A, où F est un fermé de E .
— Si a ∈ A, les voisinages de a dans A sont les ensembles de la forme V ∩ A, V étant
un voisinage de a dans E .
Exemple 10. L’ensemble [0, 1[ est un ouvert de A = [0, 2] (on peut écrire par exemple
[0, 1[ = ] − 1, 1[ ∩A).
1.3. Continuité
Applications continues.
Définition 14. Soient (E, d) et (E , d ) deux espaces métriques, et f : E → E une
application. On dit que f est continue en a ∈ E si pour tout voisinage W de f (a), il
existe un voisinage V de a tel que f (V ) ⊂ W . Lorsque f est continue en tout point de E,
on dit que f est continue sur E.
Proposition 7. Soient (E, d) et (E , d ) deux espaces métriques, et soit f : E → E une
application. Alors f est continue en a ∈ E si et seulement si
(∀ε > 0, ∃α > 0, ∀x ∈ E ), (d(a, x) < α =⇒ d(f (a), f (x)) < ε).
Proposition 8. Soient (E, d), (E , d ), (E , d ) trois espaces métriques, et deux appli-
cations f : E → E et g : E → E . Si f est continue en a ∈ E et g continue en f (a),
alors l’application g ◦ f : E → E est continue en a.
1.5. Limites
Définition 21. Soient (E, d) et (F, δ) deux espaces métriques et une application f : D ⊂
E → F . Soient A ⊂ D et a ∈ A, ∈ F . On dit que f (x) tend vers quand x tend vers a
selon A, et on note lim
x→a
f (x) = , si pour tout voisinage W de , il existe un voisinage V
x∈A
de a tel que f (A ∩ V ) ⊂ W . Ceci s’écrit aussi
∀ε > 0, ∃α > 0 tel que ∀x ∈ A vérifiant d(a, x) < α, on a δ (f (x), ) < ε.
Remarque 17. Si existe, est unique et on a ∈ f (A) ; est alors appelée la limite de
f en a selon A.
Exemple 12. — Limite usuelle. Si a est point d’accumulation de D, si A = D {a},
lim
x→a
est encore noté lim
x→a
.
x∈A x=a
— Limite en +∞. On note R l’ensemble R ∪ {−∞, +∞} (cet ensemble est appelé R
achevé). Sur R, on définit
x
ϕ(x) = si x ∈ R, ϕ(+∞) = 1, ϕ(−∞) = −1.
1 + |x|
On vérifie facilement que d(x, y) = |ϕ(x) − ϕ(y )| définit une distance sur R. Cette
distance fait de R un espace métrique et nous autorise à parler de limite en +∞
ou en −∞. Lorsqu’une fonction de la variable réelle f est définie sur ]c, +∞[, il est
évidemment très lourd de caractériser la limite de f en +∞ grâce à la distance d
sur R. On montre facilement que f (x) tend vers en +∞ si et seulement si
(∀ε > 0, ∃C > c, ∀x > C), d(f (x), ) < ε,
et on note alors limx→+∞ f (x) = . On caractériserait de même la limite en −∞.
Noter que l’on peut de la même manière caractériser la limite d’une suite N →
(E, d) en +∞.
— Limite infinie. Lorsqu’une fonction f est à valeurs réelles, il est possible de ca-
ractériser simplement les limites infinies de f . Par exemple, f tend vers +∞ lorsque
x tend vers a selon A si et seulement si
(∀C > 0, ∃α > 0, ∀x ∈ A), (d(a, x) < α =⇒ f (x) > C).
On note alors lim xx→
∈A
a f (x) = +∞.
— Le lecteur pourra de même caractériser simplement une limite infinie prise à l’infini.
Composition des limites.
Proposition 18. Soient f : D1 ⊂ (E, d) → (F, d ) et g : D 2 ⊂ (F, d ) → (G, d) telles
que f (D1 ) ⊂ D2 . Soient A ⊂ D1, a ∈ A ; B ⊂ D 2 et b ∈ B . On suppose que
f (A) ⊂ B, lim
x→a
f (x) = b et lim g (y ) = c.
y→b
x∈A y∈B
Remarque 18. Lorsque f n’est pas définie en a et lorsque limxx→ a f (x) = , la fonction g
=a
définie sur D ∪ {a} par g (x) = f (x) sur D et g (a) = est continue en a et est appelée
prolongement par continuité de f en a.
◦
Définition 22. Soit f : D ⊂ R → (E, d) et a ∈ D. On dit que
— f est continue à droite en a si lim xx>a
→a f (x) = f (a),
d = lim xx>a
→a f (x) existent, et si = .
g d
1.6. Exercices
Exercice 1. Soit (E, d) un espace métrique.
a) Soit a ∈ E et r > 0. Montrer que B(a, r ) ⊂ Bf (a, r). Peut-on affirmer, dans le cas
général, que B(a, r) = Bf (a, r) ?
b) Si E est un R-e.v.n, montrer que B(0, 1) = Bf (0, 1).
Solution. a) On a B(a, r) ⊂ B f (a, r ). Comme B f (a, r ) est fermé et que B(a, r) est le plus petit
fermé contenant B(a, r), on en déduit B(a, r ) ⊂ B f (a, r).
L’égalité n’a pas lieu dans le cas général, comme nous allons le vérifier sur un contre-exemple.
Si E est muni de sa distance discrète d (définie par d(x, y) = 0 si x = y , = 1 si x = y), on a
B(a, 1) = {a}, fermé, et Bf (a, 1) = E . Ainsi, dès que E possède plus d’un élément, B(a, 1) =
{a} = E = Bf (a, 1).
b) D’après la question précédente, il suffit de montrer l’inclusion Bf (0, 1) ⊂ B(0, 1). Soit x ∈
Bf (0, 1). Si x < 1, alors x ∈ B(0, 1) ⊂ B(0, 1) et c’est terminé. Sinon x = 1, et alors pour
tout ε > 0, il existe y ∈ B(0, 1) tel que x − y < ε (prendre par exemple y = (1 − ε/2)x). En
d’autres termes, x ∈ B(0, 1) d’après la proposition 4, d’où le résultat.
Exercice 2. Soit A ⊂ R tel que tout point de A est isolé dans A. Montrer que A est au
plus dénombrable.
Solution. Nous allons associer à chaque élément de A un rationnel de manière injective. Tout
élément a ∈ A est isolé dans A, donc
∃ra > 0, ]a − ra, a + r a [ ∩ A = {a}. (∗)
Comme Q est dense dans R, il existe qa ∈ Q tel que qa ∈ ]a − ra /2, a + ra/2[.
1. G ÉNÉRALIT ÉS 17
L’application x → d(x, A) étant lipschitzienne, elle est uniformément continue sur E (voir
l’exemple 11), donc continue sur E.
2/a) Rappelons que lorsque F est fermé, on a d(x, F ) = 0 si et seulement si x ∈ F .
d(x, A)
Ceci étant, définissons f : E → R par f (x) = .
d(x, A) + d(x, B)
— L’application f est bien définie, car si d(x, A) + d(x, B ) = 0, alors d(x, A) = d(x, B ) = 0,
donc x ∈ A et x ∈ B (A et B sont fermés), ce qui est impossible à réaliser puisque
A ∩ B = ∅.
— On a f (x) = 0 si et seulement si d(x, A) = 0, i. e. x ∈ A.
— On a f (x) = 1 si et seulement si d(x, A) = d(x, A) + d(x, B ), i. e. d(x, B ) = 0 ou encore
x ∈ B.
— L’application f est continue d’après a) et comme composée d’applications continues.
— Enfin, il est clair que 0 ≤ f (x) ≤ 1 pour tout x ∈ E .
b) Si f est la fonction exhibée à la question précédente, on a
et U et V sont ouverts par continuité de f (voir la proposition 9), disjoints par construction.
Remarque. Il est possible de répondre à la question 2/b) sans utiliser le résultat de la
question 2/a).
Montrer que A est localement fermé si et seulement si A est l’intersection d’un ouvert de
E et d’un fermé de E.
Théorème 0 (du point fixe). Soit (E, d) un espace métrique complet, et une appli-
cation f : E → E telle que
∃k ∈ ]0, 1[ , ∀(x, y ) ∈ E 2, d(f (x), f (y)) ≤ k d(x, y )
(on dit alors que f est k -contractante). Alors f admet un unique point fixe, i. e. il existe
un unique x ∈ E tel que f (x) = x.
Démonstration. Existence. Fixons x0 ∈ E. On définit la suite (xn) par x n+1 = f (x n). Une
récurrence immédiate donne d(x n+1, xn ) ≤ k n d(x1, x0 ) pour tout entier naturel n. Ainsi, lorsque
p<q
kp
d(xp, x q) ≤ d(x p , xp+1 ) + · · · + d(x q−1, x q ) ≤ (k p + · · · + k q−1 ) d(x1 , x0 ) ≤ d(x1, x 0 ),
1−k
ce qui prouve que la suite (xn ) est de Cauchy. Comme E est complet, (x n) converge. Notons x
sa limite. Par continuité de f (f est continue car k-lipschitzienne), on a
f (x) = lim f (xn) = lim xn+1 = x.
n→∞ n→∞
Le point x est donc un point fixe de f .
Unicité. Supposons f (x) = x et f (y ) = y . Alors
0 ≤ d(x, y) = d(f (x), f(y)) ≤ k d(x, y ),
et comme k < 1, ceci n’est possible que si d( x, y) = 0, i. e. x = y .
Remarque 4. Attention Le théorème est faux si l’on suppose seulement d(f (x), f (y)) <
d(x, y ) pour tout x = y . Cependant, dans un compact, une telle condition suffit à montrer
l’existence et l’unicité d’un point fixe (voir l’exercice 4 page 34).
Critère de Cauchy pour les fonctions. à l’aide de la proposition 5, on montre
facilement le résultat qui suit.
Proposition 10. Soit (E, d) un espace métrique et (F, δ) un espace métrique complet.
Soit une application f : D ⊂ E → F , soient A ⊂ E et a ∈ A. La fonction f admet une
limite lorsque x tend vers a selon A si et seulement si
(∀ε > 0, ∃α > 0, ∀(x, y ) ∈ A2 ), (d(a, x) < α et d(a, y ) < α) =⇒ δ(f (x), f (y)) < ε.
2.4. Exercices
Exercice 1. Soit X un ensemble. On note B(X, R) le R-e.v des fonctions bornées de X
dans R. On norme B(X, R) en posant
∀f ∈ B(X, R), f = sup |f (x)|.
x∈X
(iii) Montrons maintenant que (fn ) tend vers f dans B(X, R). Soit ε > 0. Il existe N > 0 tel
que pour tout p, q ≥ N , f p − f q ≤ ε. Ainsi, si on fixe un élément x quelconque de X , on a
∀p ≥ N, ∀q ≥ N, |f p (x) − f q (x)| ≤ fp − fq < ε.
En fixant p dans l’assertion précédente et en faisant tendre q vers l’infini, on en déduit l’inégalité
|fp (x) − f (x)| ≤ ε. Ceci étant vrai pour tout x ∈ X , on a f p − f ≤ ε. Ceci est vrai pour tout
p ≥ N , donc (fp ) converge vers f .
Finalement, toute suite de Cauchy (fn) de B(X, R) converge, donc B(X, R) est complet.
1 1
Exercice 2. On munit l’espace ]0, +∞[ de la distance δ (x, y ) = − .
x y
a) Montrer que δ est bien une distance sur ]0, +∞[.
b) Montrer que cette distance définit sur ]0, +∞[ la même topologie que la topologie
usuelle.
c) Montrer que l’espace métrique ( ]0, +∞[ , δ) n’est pas complet.
d) On restreint la distance δ à l’espace ]0, 1]. Montrer que ( ]0, 1], δ) est complet.
b) Notons d la distance usuelle sur les nombres réels (d(x, y) = |x − y |). Rappelons le fait suivant :
dire que les deux espaces métriques ( ]0, +∞[, δ) et ( ]0, +∞[, d) définissent la même topologie,
c’est dire qu’ils ont les mêmes ouverts. La proposition 10 de la page 12 affirme que ceci équivaut
au fait que l’application identité Id]0,+∞[ : ( ]0, +∞[, d) → ( ]0, +∞[, δ) est un homéomorphisme.
Pour prouver ce dernier point, nous allons utiliser le fait que cette application est la composée
de
1 1
ϕ : ( ]0, +∞[, d) → ( ]0, +∞[, d) x → et ψ : ( ]0, +∞[, d) → ( ]0, +∞[, δ) x → ,
x x
et que ϕ et ψ sont des homéomorphismes.
L’application ϕ est continue (c’est classique puisque d est la distance usuelle), elle est bijec-
tive, et ϕ−1 = ϕ est aussi continue. On a donc bien affaire à un homéomorphisme.
L’application ψ vérifie
1 1
2
∀(x, y ) ∈ ]0, +∞[ ,
δ(ψ (x), ψ(y)) = − = |x − y | = d(x, y ),
ψ (x) ψ (y )
c’est donc une isométrie, donc un homéomorphisme. D’où le résultat.
Remarque. On aurait pu également prouver le résultat “à la main”, en montrant qu’un ouvert
de ( ]0, +∞[, d) est un ouvert de ( ]0, +∞[, δ) et réciproquement.
c) Dans ( ]0, +∞[, δ), la suite (un) n∈N∗ définie par un = n est de Cauchy car δ (u p, u q ) = |1/p −
1/q| tend vers 0 lorsque p et q tendent vers +∞. Il est clair que cette suite ne converge pas
dans ( ]0, +∞[, d) (elle n’est pas bornée), donc elle ne converge pas dans ( ]0, +∞[, δ) puisque ces
deux espaces métriques définissent la même topologie (la notion de convergence est topologique).
Ainsi, ( ]0, +∞[, δ) n’est pas complet.
d) On applique la méthode utilisée dans la solution de l’exercice précédent pour prouver la
complétude souhaitée. Considérons une suite (un) de Cauchy dans ( ]0, 1], δ). Pour tout p, q, on
2. SUITES DANS UN ESPACE MÉTRIQUE 23
a
1 1 up − uq
δ (up , uq ) = − = ≥ |up − u q|,
up uq upu q
ce qui montre que (un ) est de Cauchy dans (R, d). Ce dernier étant complet, (un ) converge dans
(R, d). Soit u sa limite dans cet espace métrique.
La limite u est forcément dans l’adhérence de ]0, 1] dans (R, d), qui est [0, 1]. Si u = 0, alors
δ(1, un ) = |1 − 1/un | tend vers +∞, donc la suite (u n) n’est pas bornée dans ( ]0, 1], δ), ce qui
est impossible car c’est une suite de Cauchy de cet espace. Ainsi, u = 0, donc u ∈ ]0, 1]. Comme
( ]0, 1], d) et ( ]0, 1], δ) possèdent la même topologie (c’est la topologie induite par ( ]0, +∞[, d)
ou ( ]0, +∞[, δ) — qui possèdent la même topologie — sur ]0, 1]), on en déduit que (un ) converge
vers u dans ( ]0, 1], δ).
On a prouvé que toute suite de Cauchy de ( ]0, 1], δ) converge, donc ( ]0, 1], δ) est complet.
d(xλ, xλ ) = d(F (λ, x λ), F (λ , xλ )) ≤ d(F (λ, xλ ), F (λ, x λ )) + d(F (λ, x λ ), F (λ , xλ ))
≤ k d(x λ , xλ ) + d(F (λ, x λ), F (λ , x λ ))
donc
1
d(xλ , xλ ) ≤ d(F (λ, x λ), F (λ , x λ )).
1−k
La continuité de F au point (λ , xλ ) permet maintenant d’affirmer limλ→λ xλ = xλ , d’où le
résultat.
montrer qu’il existe une unique fonction g : E → F , continue, telle que la restriction g|A
de g à A soit égale à f .
b) On suppose cette fois ci que (F, δ) est complet. Soit f : (A, d) → (F, δ) une appli-
cation uniformément continue. Montrer l’existence d’une unique fonction g : E → F
uniformément continue, telle que g|A = f .
Montrons que g est continue sur E. Soit x ∈ E et (xn) n∈N∗ une suite de points de E tendant
vers x. Pour tout n ∈ N∗ , on a limy→x n f (y ) = g (xn ). On en déduit facilement
y∈A
1 1
(∀n ∈ N∗ , ∃y n ∈ A), d(xn , yn ) ≤ et δ (g (x n), f(yn )) < .
n n
1
La relation d(x, yn ) ≤ d(x, xn ) + d(xn , yn ) ≤ n + d(x, xn ) montre que
lim yn = x, et donc lim f (yn) = g (x). (∗)
n→∞ n→∞
Maintenant, les inégalités
1
δ (g (xn ), g(x)) ≤ δ (g (xn ), f(y n )) + δ (f (yn ), g(x)) ≤
+ δ (f (yn), g(x))
n
montrent avec (*) que limn→∞ g (x n ) = g (x). Ceci étant vrai pour tout suite (xn) de E tendant
vers x, on en conclut que g est continue en x, et ceci pour tout x ∈ E .
Unicité. Soient g et h : E → F deux applications continues telles que g|A = h|A .
— Par hypothèse, g (x) = h(x) pour tout x ∈ A.
— Soit x ∈ E A. Comme A est dense dans E , il existe une suite (x n ) de points de A
tendant vers x. Comme g et h sont continues, on a
g (x) = lim g (x n ) = lim f (xn ), de même h(x) = lim f (xn),
n→∞ n→∞ n→∞
ce qui suffit pour conclure g (x) = h(x).
b) L’idée est de se ramener au cas précédent puis de prouver que la fonction g obtenue est bien
uniformément continue.
Soit x0 ∈ E A. Montrons que lim y→x 0 f (y ) existe. Soit ε > 0. Comme f est uniformément
y∈A
continue sur A,
(∃α > 0, ∀(x, y ) ∈ A2 ), d(x, y ) < α =⇒ δ (f (x), f (y)) < ε.
En particulier, si x, y ∈ A vérifient d(x, x 0) < α/2 et d(y, x0 ) < α/2, on a d(x, y ) < α donc
δ (f (x), f(y)) < ε. Comme (F, δ) est complet, d’après le critère de Cauchy pour les fonctions
(voir la proposition 10), on en déduit que lim y→x0 f (y ) existe.
y∈A
D’après le résultat de la question précédente, la fonction g définie sur E par
∀x ∈ A, g (x) = f (x) et ∀x ∈ E A, g (x) = lim
y→x
f (y )
y∈A
est continue sur E. Nous allons prouver qu’elle est uniformément continue sur E . Fixons ε > 0.
Par hypothèse, f est uniformément continue sur A, donc
(∃α > 0, ∀(x, y ) ∈ A2 ), d(x, y ) < α =⇒ δ (f (x), f (y)) < ε.
Donnons nous (x, y) ∈ E 2 avec d(x, y) < α. Comme A est dense dans E, il existe deux suites
(xn) et (y n) de points de A tendant respectivement vers x et y . La distance étant continue, on a
limn→∞ d(x n, yn ) = d(x, y) < α, ce qui montre l’existence de N ∈ N tel que d(xn, y n) < α pour
tout n ≥ N . Ainsi, pour tout n ≥ N , δ (f (xn), f(y n)) < ε et en faisant tendre n vers l’infini,
2. SUITES DANS UN ESPACE MÉTRIQUE 25
on obtient δ (g (x), g(y)) ≤ ε. Ceci est vrai pour tout couple (x, y ) ∈ E2 tel que d(x, y) < α, la
fonction g est donc uniformément continue sur E.
L’unicité découle de l’unicité de la question précédente car une fonction uniformément conti-
nue est continue.
Exercice 5. Soient (E, d) et (F, d) deux espaces métriques. On suppose que (E, d) est
complet. Soient f : E → F continue et (E n)n∈N une suite décroissante de fermés non
vides dont le diamètre δ (En ) tend vers 0. Montrer que
f En = f (En ).
n∈N n∈N
Solution. Comme E est complet, il existe x0 ∈ E tel que ∩n∈NE n = {x0 } (voir la proposition 9).
On en déduit f (∩ n∈NEn ) = {f (x0 )}. Il nous faut donc prouver ∩n∈Nf (E n) = {f (x0 )}.
Pour tout n ∈ N, x0 ∈ E n donc {f (x0 )} ⊂ ∩n∈Nf (En ).
Montrons l’inclusion réciproque. L’application f est continue en x0 , donc pour tout voisinage
V de f (x0), il existe un voisinage U de x 0 tel que f (U ) ⊂ V . Or pour tout n, En ⊂ Bf (x0 , δ(En ))
(car x0 ∈ En ), et comme δ (E n ) tend vers 0,
∃n ∈ N, En ⊂ Bf (x 0, δ(E n )) ⊂ U, donc f (En ) ⊂ f (U ) ⊂ V.
Ainsi, ∩n∈N f (E n ) ⊂ V , et ceci pour tout voisinage V de f (x0). Ceci suffit pour conclure à
l’inclusion ∩ n∈Nf (En ) ⊂ {f (x 0)}, d’où le résultat.
Remarque. Rappelons qu’en général l’égalité f (∩ i∈IX i) = ∩i∈I f (Xi ) est fausse. Par
contre, l’inclusion f (∩i∈I Xi ) ⊂ ∩i∈I f (X i) a toujours lieu.
Solution. 1/ a) Comme R est complet, il suffit de montrer que la suite (d(un , vn )) n∈N est de
Cauchy. Pour tous p, q ∈ N,
d(up , vp ) ≤ d(u p, uq ) + d(uq , vq ) + d(v q, v p)
donc
d(up , vp ) − d(uq , vq ) ≤ d(u p , uq) + d(vp , v q ).
On obtient de même d(u q , vq ) − d(up , v p ) ≤ d(up , uq ) + d(v p , v q ), d’où
|d(uq , vq ) − d(up , vp )| ≤ d(up , uq ) + d(vp, v q).
Les suites U et V étant de Cauchy, on en déduit que la suite (d(un, v n)) est de Cauchy.
b) C’est immédiat par passage à la limite, les propriétés de symétrie et d’inégalité triangulaires
étant vraies pour d.
2/ a) Soit U = (u n) une suite de E convergeant vers α ∈ E . Toute suite convergente est de
Cauchy, donc U ∈ C. Soit V = (vn ) ∈ C. On a
U ∼ V ⇐⇒ δ (U, V ) = 0 ⇐⇒ lim d(u n , vn ) = 0.
n→∞
Les inégalités
d(α, vn ) ≤ d(α, un ) + d(un , vn ) et d(u n, vn ) ≤ d(u n, α) + d(α, vn )
montrent que U ∼ V si et seulement si limn→∞ d(α, v n) = 0. Finalement, la classe de U est
l’ensemble des suites qui convergent vers α.
b) Si U ∼ U et V ∼ V , comme δ satisfait l’inégalité triangulaire, on a
δ (U, V ) ≤ δ (U, U ) + δ (U , V ) + δ (V , V ) = δ (U , V ),
de même δ (U , V ) ≤ δ (U, V ). Donc δ (U, V ) = δ (U , V ).
c) Après le résultat de la question 1/b), il reste à prouver δ(Û , V̂ ) = 0 si et seulement si Û = V̂ .
Ceci est vrai par construction de la relation d’équivalence ∼.
d) Pour tout α ∈ E , on note (α) ∈ C la suite constante égale à α. Soit i : E → Ê α → (α).
On a
δ (i(α), i(β)) = δ((α), (β)) = d(α, β),
c’est-à-dire i est isométrique, et c’est donc une injection.
Montrons que i(E ) est dense dans Ê. Soit Û ∈ Ê , avec U = (un ) n∈N ∈ C. Nous allons
prouver que Û est la limite de la suite (i(un )) n∈N. Soit ε > 0. La suite (u n ) est de Cauchy, de
sorte qu’il existe N ∈ N tel que pour tous p, q ≥ N , d(up , uq) < ε. En fixant p ≥ N , on en déduit
δ(Û , i(up )) = δ (U, (up )) = lim d(un , up ) ≤ ε.
n→∞
Ceci étant vrai pour tout p ≥ N , on en déduit limp→∞ i(up ) = Û . Ainsi, on a montré que tout
élément Û de Ê est limite de points de i(E ), d’où le résultat.
3/ Soit (αn )n∈N une suite de Cauchy de Ê . Comme i(E ) est dense dans Ê, il existe pour tout
n ∈ N∗ un point xn de E tel que δ (αn, i(xn )) < 1/n. L’inégalité
1 1
d(x p , xq ) = δ (i(xp), i(xq)) ≤ δ (i(x p), α p) + δ (αp, α q ) + δ (αq , i(xq )) ≤ δ (α p , αq) + +
p q
montre que la suite (xn ) est de Cauchy dans E . Notons α la suite ( x n)n∈N de Ê.
Montrons que (α n) converge vers α. Comme δ (α n, α) ≤ δ (αn, i(x n)) + δ (i(x n ), α) ≤ 1n +
δ (i(xn ), α), il suffit de prouver que limn→∞ δ (i(x n ), α) = 0. Soit ε > 0. La suite (xn ) étant de
Cauchy dans E ,
∃N ∈ N, ∀p ≥ N, ∀q ≥ N, d(xp, x q ) < ε,
donc si on fixe n ≥ N ,
δ (i(xn ), α) = lim d(x n, xp ) ≤ ε,
p→∞
et ceci pour tout n ≥ N , d’où le résultat.
3. ESPACES COMPACTS 27
4/ Définissons ϕ sur i 1(E ) en posant ϕ(i1 (x)) = i 2(x) pour tout x ∈ E . L’application ϕ restreinte
à i1(E ) est isométrique car
∀(x, y ) ∈ E 2 , d2(ϕ(i1 (x)), ϕ(i1 (y))) = d2 (i2(x), i 2 (y)) = d(x, y) = d1 (i 1(x), i 1 (y)).
Ainsi, ϕ est uniformément continue sur i1 (E ). Comme i1 (E ) est dense dans E1 et que E2
est complet, il existe (voir l’exercice 4) un prolongement de ϕ sur E1 , encore noté ϕ, qui est
uniformément continu sur E 1 . De plus ϕ est isométrique sur i1 (E ), et comme i1(E ) est dense
dans E1 et que ϕ est continue, ϕ est isométrique sur E 1 tout entier. En particulier, ϕ est injective.
Il nous reste à montrer que ϕ est surjective. Soit β ∈ E2 . Comme i2(E ) est dense dans E2 ,
il existe une suite (β n ) = (i2 (xn )) de i2(E ) qui converge vers β. De plus pour tous p, q ∈ N,
d1(i1 (xp), i 1 (xq )) = d(xp , xq ) = d2 (i 2(xp ), i2(x q)) = d2 (β p , βq )
la suite (i1(x n)) est donc de Cauchy dans E 1 . Comme E1 est complet, elle converge. Soit α sa
limite. Comme ϕ est continue,
ϕ(α) = lim ϕ(i 1(x n)) = lim i 2(xn) = lim β n = β,
n→∞ n→∞ n→∞
d’où la surjectivité.
L’application ϕ est unique d’après l’unicité du prolongement continue sur E1 (voir l’exer-
cice 4).
Remarque. Par abus, on identifie souvent E et i(E ) dans Ê. Ainsi, Ê est un espace
complet dans lequel E est plongé, et sa métrique prolonge celle de E.
– La partie 4/ montre que Ê est unique à une isométrie bijective près. On l’appelle le
complété de E.
– On procède de manière similaire pour définir R à partir de Q (R est le complété de Q). La
différence est que, R “n’existant pas encore”, on ne peut pas définir δ(U, V ) pour U, V ∈ C.
On peut par contre définir la classe d’équivalence U ∼ V ⇐⇒ limn→∞ u n − vn = 0. La
notion de limite peut en effet être définie si l’on reste uniquement sur Q (il suffit de
prendre les ε et les α dans Q).
3. Espaces compacts
3.1. Propriété de Borel-Lebesgue
Définition 1. Un espace métrique (E, d) est dit compact si de tout recouvrement de E
par des ouverts de E , on peut en extraire un sous-recouvrement fini. Autrement dit, si
E = ∪i∈I Oi avec O i ouvert pour tout i, il existe J ⊂ I , J fini, tel que E = ∪ i∈J O i .
Exemple 1. — Tout espace métrique fini est compact.
— L’ensemble R des nombres réels n’est pas compact (on ne peut pas extraire un
sous-recouvrement fini du recouvrement R = ∪ n∈N∗ ] − n, n[).
Remarque 1. La notion de compacité peut être définie dans un espace topologique général.
Si E est un espace topologique, E est dit compact s’il est séparé (voir la page 10) et s’il
satisfait les propriétés de la définition 1. Les propositions 2, 3, 4 et 5 de cette partie 3.1
restent vraies pour les compacts d’un espace topologique. Mais attention ! La propriété
de Bolzano-Weierstrass (voir la partie 3.2) n’est vraie que dans les espaces métriques.
Proposition 1. Un espace métrique compact est borné.
Démonstration. C’est immédiat car si E est compact, si x0 ∈ E, en extrayant du recouvrement
E = ∪n∈N∗ B(x0, n) un sous-recouvrement fini, on s’aperçoit que E est borné.
28 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
Ainsi, A = ∪ x∈J (B(x, rx ) ∩ A), réunion finie d’ensembles finis, est fini, ce qui est contradictoire.
L’ensemble A admet donc au moins un point d’accumulation x ∈ E . Ainsi, x est valeur
d’adhérence de la suite (xn ), donc il existe une sous-suite de (xn ) qui converge vers x.
Condition suffisante. (Bolzano-Weierstrass =⇒ Borel-Lebesgue). Nous montrons deux lemmes.
Précompacité (ou ε-recouvrement). Un espace métrique E est dit précompact si pour tout
ε > 0, il existe un recouvrement fini de E par des boules (ouvertes) de rayon ε.
Lemme 1. Tout espace métrique (E, d) vérifiant la propriété de Bolzano-Weierstrass est pré-
compact.
En effet. Raisonnons par l’absurde en supposant l’existence de ε > 0 tel que l’on ne puisse
pas trouver un sous-recouvrement fini de E par des boules de rayon ε.
— Soit x0 ∈ E . Alors B(x0, ε) = E .
— Donc il existe x1 ∈ E tel que d(x 0 , x1 ) ≥ ε.
— De même, comme B(x0 , ε) ∪ B(x 1 , ε) = E, il existe x2 ∈ E tel que d(x0, x1 ) ≥ ε et
d(x0 , x2 ) ≥ ε.
— On recommence . . . x 0, x1 , . . . , xn étant construits tels que ∀i < j ≤ n, d(xi, xj ) ≥ ε, on
sait que ∪ 0≤i≤nB(x i, ε) = E, donc il existe x n+1 ∈ E tel que pour tout i, 0 ≤ i ≤ n,
d(xi , xn+1 ) ≥ ε.
On construit ainsi une suite (xn) de E telle que d(xi , x j) ≥ ε dès que i = j . La suite (xn ) n’admet
donc aucune sous
sous-suite
suite convergente car aucune sous-suite n’est de Cauchy, d’où la contradiction
voulue, d’où notre premier lemme.
Lemme 2. Soit (E, d) un espace métrique vérifiant la propriété de Bolzano-Weierstrass, et soit
(Oi)i∈I un recouvrement de E par des ouverts de E. Alors :
(∃α > 0, ∀x ∈ E, ∃i ∈ I ), B(x, α) ⊂ Oi .
En effet. Raisonnons par l’absurde, en supposant que
(∀α > 0, ∃x ∈ E, ∀i ∈ I ), B(x, α) ⊂ Oi .
En particulier,
∗ 1
(∀n ∈ N , ∃x n ∈ E, ∀i ∈ I ), B xn , Oi .
⊂
n
Soit (xϕ(n)) une sous-suite de (xn ) qui converge. Notons x sa limite. Il existe i ∈ I tel que x ∈ Oi .
Comme Oi est ouvert, il existe r > 0 tel que B(x, 2r ) ⊂ O i. Comme (x ϕ(n) ) converge vers x,
1
∃N ∈ N, ∀n ≥ N, (d(x ϕ(n) , x) < r et ϕ(n) > ).
r
Alors
1
∀n ≥ N, ∀y ∈ B x ϕ(n) , , d(x, y) ≤ d(x, x ϕ(n)) + d(xϕ(n) , y) < r + r = 2r,
ϕ(n)
donc pour tout n ≥ N , B(xϕ(n) , 1/ϕ(n)) ⊂ Oi , ce qui est absurde. D’où le lemme 2.
Achevons notre raisonnement. Soit (E, d) vérifiant la propriété de Bolzano-Weierstrass, soit
(Oi)i∈I un recouvrement de E par des ouverts de E. D’après le lemme 2,
∃α > 0, ∀x ∈ E, ∃i ∈ I, B(x, α) ⊂ Oi .
D’après le lemme 1, on peut recouvrir E par un nombre fini de boules de rayon α, ce qui s’écrit
∃n ∈ N∗ , ∃x 1, . . . , xn ∈ E, E = ∪ ni=1B(x i, α).
Or pour tout j, 1 ≤ j ≤ n, il existe i j ∈ I tel que B(x j, α) ⊂ O ij . On en déduit E = ∪ nj=1O ij ,
d’où le résultat.
Il existe d’autres formulations de ce théorème qui sont les suivantes.
30 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
Corollaire 1. Un espace métrique (E, d) est compact si et seulement si l’une des as-
sertions suivantes est vérifiée
— Toute suite de E admet au moins une valeur d’adhérence dans E .
— Toute partie infinie de E admet au moins un point d’accumulation dans E .
Remarque 5. Comme nous le verrons à la partie 5.3, toutes les normes d’un R-e.v.n de
dimension finie sont équivalentes. Ceci nous permettra d’affirmer que le résultat de cette
proposition reste vrai dans tout R-espace vectoriel normé de dimension finie. Par contre,
il est faux en dimension infinie (voir le théorème de Riesz à l’exercice 9 de la page 56).
Proposition 12. Soit (x n )n∈N une suite convergente d’un espace métrique (E, d), sa
limite. Alors l’ensemble Γ = {x n, n ∈ N} ∪ {} est compact.
Démonstration. Nous sommes dans un des rares cas ou il est plus facile de montrer la compacité
de Γ en prouvant qu’il vérifie la propriété de Borel-Lebesgue (la caractérisation par la propriété
de Bolzano-Weierstrass donnerait ici une preuve bancale et peu satisfaisante). Cette preuve
faisant appel uniquement à la topologie de E montrera qu’en fait le résultat reste vrai dans un
espace topologique séparé général.
Soit (Oi )i∈I un recouvrement de Γ par des ouverts de E . Comme ∈ Γ, il existe i 0 ∈ I tel
que ∈ Oi0 , et comme O i0 est ouvert et que (x n ) tend vers ,
∃N ∈ N, ∀n > N, x n ∈ O i0 .
Pour tout n ≤ N , il existe jn ∈ I tel que x n ∈ Oj n. En notant J = {j n, n ≤ N } ∪ {i0 }, on
s’aperçoit que Γ ⊂ ∪j ∈J O j , et comme J est fini, le résultat est prouvé.
3. ESPACES COMPACTS 31
Remarque 8. On verra (voir le théorème 3 page 41) que si f : R → R est une application
continue, l’image par f d’un intervalle est un intervalle (c’est le théorème des valeurs
intermédiaires). Avec cette dernière proposition, on en déduit que l’image par f d’un
intervalle fermé borné est un intervalle fermé borné.
Théorème 2 (de Heine). Soient (E, d) et (F, δ) deux espaces métriques, E étant com-
pact, et f : E → F une application continue. Alors f est une application uniformément
continue.
3.5. Exercices
Exercice 1. 1/ a) Soient (E, d) et (F, δ) deux espaces métriques et f : E → F une
application continue telle que pour tout compact K de F , f −1(K) est compact. Montrer
que f est une application fermée (rappel : une application f est dite fermée si l’image de
tout fermé par f est un fermé).
b) Existe-t-il des applications continues qui ne sont pas fermées ?
2/ (Application). On fixe un entier naturel non nul n et on note
Rn [X] = {P ∈ R[X ] | deg(P ) ≤ n}.
Montrer que l’ensemble Γn des polynômes unitaires de degré n de Rn [X] dont toutes les
racines sont réelles est un fermé du R-e.v.n Rn [X].
Solution. 1/ a) Soit Γ un fermé de E . Soit (yn ) = (f (xn ))n∈N une suite de f (Γ) qui converge
vers un point y ∈ F . Il s’agit de montrer que y ∈ f (Γ).
L’ensemble K = {yn , n ∈ N} ∪ {y } est un compact de F (voir la proposition 12), l’ensemble
f −1 (K ) est donc compact. La suite (xn) de Γ prenant ses valeurs dans f −1 (K ), on peut en
extraire une sous-suite convergente (x ϕ(n))n∈N . Notons x sa limite. Comme Γ est fermé, x =
limn→∞ xϕ(n) appartient à Γ, et par continuité de f ,
f (x) = lim f (xϕ(n)) = lim yϕ(n) = y,
n→∞ n→∞
donc y = f (x) ∈ f (Γ). L’ensemble f (Γ) est donc bien fermé.
b) Il existe des applications continues non fermées. Par exemple, f : R → R x → e x est
continue et pourtant, f (R) = ]0, +∞[ n’est pas fermé.
32 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
— ...
Ainsi construite, la suite (xψ(p) )p∈N est une sous-suite de (xn ). Si maintenant p ∈ N et q ≥ p, on
a
xψ(q ) ∈ {xψq(n) , n ∈ N} ⊂ {x ψp(n) , n ∈ N} ⊂ B(ap , 1/2p ),
ce qui prouve que
1
∀p, q ∈ N (p ≤ q ), d(xψ(p),ψ (q )) ≤
.
2p−1
La suite (x ψ(p) ) est donc de Cauchy, et comme E est complet, elle converge. D’où le résultat.
Remarque. La réciproque est immédiate : un compact est précompact et complet.
b) L’application x → d(x, F ) est continue (voir l’exercice 4 page 17) sur le compact K, donc
∃x0 ∈ K, d(x0 , F ) = inf d(x, F ) = d(K, F ).
x∈K
Si d(K, F ) = 0, alors d(x0, F ) = 0 donc x 0 ∈ F car F est fermé. Ceci est absurde car K ∩ F = ∅.
Donc d(K, F ) = 0.
Lorsque K est seulement supposé fermé, le résultat est faux. Par exemple, dans R2, les
ensembles K = {(x, y ) ∈ R 2 | y ≤ 0} et F = {(x, y ) ∈ R 2 | y ≥ e x } sont fermés, disjoints, et
pourtant d(K, F ) = 0.
2/ a) C’est classique. Fixons a ∈ F et considérons l’ensemble Γ = {x ∈ F | f (x) ≤ f (a)}. Comme
f est continue, Γ = f −1(]−∞, f(a)]) est un fermé de F , donc de E. Comme lim x→∞ f (x) = +∞,
x∈F
Γ est borné. Finalement, Γ est compact (fermé borné de Rn ). De plus, Γ = ∅ puisque a ∈ Γ.
Donc il existe x ∈ Γ tel que f (x) = infy∈Γ f (y ). Or, par construction de Γ,
inf f (y ) = inf f (y ),
y∈Γ y∈F
c) Le résultat est faux si E est seulement supposé complet. Par exemple, la fonction
1
f : R → R f (x) = 1 si x < 0, f(x) = x + si x ≥ 0,
1+x
(voir la figure ci contre) est continue, sans point fixe et vérifie l’hypothèse (*) (immédiat par
l’inégalité des accroissements finis).
y
y=x
0 x
Exercice 5 (Isom étries d’un compact). Soit (E, d) un espace métrique compact et
f : E → E une application continue, vérifiant
∀(x, y ) ∈ E 2, d(f (x), f (y)) ≥ d(x, y ). (∗)
Solution. a) Soient x, y ∈ E. On définit deux suites (xn)n∈N et (yn ) n∈N par x n = f n (x) et
yn = f n (y ) pour tout n ∈ N ( où fn désigne la composée n fois de l’application f avec elle
même). Nous allons construire deux sous-suites (xψ(n) ) et (yψ(n) ) qui convergent respectivement
vers x et y.
La suite (xn , y n) n∈N prend ses valeurs dans le compact E × E . On peut donc en extraire une
sous-suite convergente (xϕ(n) , yϕ(n) ). Quitte à extraire encore une sous-suite de cette dernière,
on peut même supposer
∀n ∈ N, ϕ(n + 2) − ϕ(n + 1) > ϕ(n + 1) − ϕ(n). (∗∗)
De l’inégalité (*), on tire
∀n ∈ N, d(x, xϕ(n+1)−ϕ(n) ) ≤ d(f ϕ(n)(x), f ϕ(n) (xϕ(n+1)−ϕ(n))) = d(x ϕ(n), xϕ(n+1) )
et comme (xϕ(n)) converge, on en déduit lim n→∞ xϕ(n+1)−ϕ(n) = x. Ainsi, en posant ψ (n) =
ϕ(n + 1) − ϕ(n), (xψ(n) ) est une sous-suite de (xn ) d’après (**), et elle converge vers x. Pour les
mêmes raisons, (yψ(n) ) est une sous-suite de (yn) qui converge vers y .
Ceci étant, pour n ≥ 1, on a d’après (*)
d(x, y) ≤ d(f (x), f(y)) ≤ d(x ψ(n) , yψ(n) ),
36 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
et en faisant tendre n vers +∞, on en déduit d(f (x), f(y)) = d(x, y).
b) L’injectivité résulte de l’hypothèse (*). Pour montrer la surjectivité de f , nous donnons deux
méthodes.
Première méthode. Cette méthode utilise la solution que nous avons donnée à la question a).
Fixons x ∈ E . Si xn = f n (x), nous avons vu plus haut qu’il existe une sous-suite (x ψ(n)) de
(xn) qui converge vers x. Autrement dit, lim n→∞ f (xψ(n)−1 ) = x, donc x ∈ f (E ). Comme E est
compact et que f est continue, f (E ) est compact donc fermé. Donc x ∈ f (E ) = f (E ), et ceci
étant vrai pour tout x ∈ E , f est surjective.
Seconde méthode. Raisonnons par l’absurde et supposons f (E ) = E . Comme f (E ) est fermé (car
compact), E f (E) est ouvert. De plus E f (E ) = ∅ donc il existe une boule ouverte B(x, ρ)
incluse dans E f (E ). Ainsi, pour tout y ∈ f (E ), d(x, y) ≥ ρ. Considérons la suite (f n(x))n∈N .
Pour tout p, q ∈ N, p > q, on a
d(fp (x), f q (x)) ≥ d(f p−q (x), x) ≥ ρ,
donc (f n (x)) n’a aucune sous-suite convergente, ce qui est absurde. On a donc f (E) = E .
c) L’application f est bijective et continue (car 1-lipschitzienne) sur un compact, donc f −1 : E →
E est continue (voir le théorème 14 page 31) et vérifie d’après les hypothèses
∀(x, y ) ∈ E 2, d(f −1 (x), f −1 (y)) ≥ d(f (f−1 (x)), f(f −1 (y))) = d(x, y ).
L’application f −1 vérifie donc les hypothèses de la question a), c’est donc une isométrie. On en
déduit que f est une isométrie.
Exercice 7. Soit [a, b] un segment de R (avec a < b), (E, d) un espace métrique et
f : [a, b] → E une application. On suppose que pour tout x ∈ ]a, b[, les limites à gauche
f (x−) et à droite f (x+) de f en x existent, et que f (a+) et f (b−) existent.
a) Si x ∈ ]a, b[, on note ω(f, x) = max{d(f (x−), f (x)), d(f (x), f (x+))}. Soit ε > 0 et
A ε = {x ∈ ]a, b[ | ω(f, x) ≥ ε}.
Montrer que l’ensemble Aε est fini.
b) Montrer que l’ensemble des points de discontinuité de f est au plus dénombrable.
c) Soit ε > 0 et x ∈ ]a, b[ tel que ω (f, x) < ε. Montrer
∃α > 0, ∀y, z ∈ ]x − α, x + α[ d(f (y ), f (z)) < 2ε.
3. ESPACES COMPACTS 37
d) Soit ε > 0 et ]c, d[ ⊂ [a, b] tel que ω (f, x) < ε sur ]c, d[. Montrer
∃α > 0, ∀x, y ∈ ]c, d[ , d(x, y ) < α, d(f (x), f (y)) < 2ε.
Solution. a) Raisonnons par l’absurde et supposons Aε infini. Comme Aε est inclus dans le
compact I, il en existe un point d’accumulation x ∈ I . Ainsi, il existe une suite (x n) de points
distincts de Aε qui converge vers x.
S’il existe une infinité de valeurs de n pour lesquelles xn < x, on peut, quitte à extraire une
sous-suite de (xn ), supposer xn < x pour tout n. On a x ∈ ]a, b] et d’après les hypothèses, f
admet une limite à gauche en x. Il existe donc α > 0 tel que
∀y ∈ ]x − α, x[, d(f (y), f (x−)) < ε/3. (∗)
Comme (x n ) converge vers x par valeurs inférieures, il existe un entier naturel n, désormais fixé,
tel que x − α < xn < x. D’après (*), on a l’inégalité
∀y ∈ ]x − α, x n [, d(f (y), f (xn )) ≤ d(f (y ), f(x−)) + d(f (x−), f (xn )) < 2ε/3,
et en faisant tendre y vers xn , on en déduit d(f (xn −), f(xn )) ≤ 2ε/3. De même l’inégalité
∀y ∈ ]xn , x[, d(f (xn ), f(y)) ≤ d(f (x n ), f(x−)) + d(f (x−), f (y)) < 2ε/3,
conduit par passage à la limite à d(f (xn), f(x n+)) ≤ 2ε/3. On a donc ω(f, xn ) ≤ 2ε/3. Donc
xn ∈ A ε , ce qui est absurde.
Dans le cas où il existe une infinité de valeurs de n pour lesquelles xn > x, on aboutirait de
la même manière à une absurdité en utilisant la continuité à droite de f en x.
L’ensemble Aε est donc fini.
b) La fonction f est discontinue en x ∈ ]a, b[ si et seulement si ω (f, x) > 0. L’ensemble D des
points de ]a, b[ où f est discontinue est donc égal à ∪n∈N ∗A1/n , réunion dénombrable d’ensembles
finis, donc D est au plus dénombrable. En ajoutant éventuellement les points a et b, on en déduit
que l’ensemble des points de discontinuité de f sur [a, b] est au plus dénombrable.
c) Posons η = ε − ω(f, x) > 0. Comme f est continue à gauche et à droite en x, il existe α > 0
tel que d(f (y), f (x−)) < η pour y ∈ ]x − α, x[ et d(f (y), f (x+)) < η pour y ∈ ]x, x + α[. On a
alors
∀y ∈ ]x − α, x + α[, d(f (y ), f (x)) < ε. (∗∗)
En effet, si x − α < y < x il suffit d’écrire d(f (y), f (x)) ≤ d(f (y ), f(x−)) + d(f (x−), f(x)) <
η + ω (f, x) = ε, et le cas x < y < x + α se traite de la même manière. Lorsque y = x, le résultat
(**) est évident.
On conclue facilement car d’après (**)
∀y, z ∈ ]x − α, x + α[, d(f (y ), f(z)) ≤ d(f (y ), f(x)) + d(f (x), f(z)) < 2ε.
d) Supposons le résultat faux. Alors il existe une suite (x n, yn) de ]c, d[ telle que (x n − yn ) tende
vers 0 et telle que d(f (xn ), f(yn )) ≥ 2ε pour tout n. La suite (xn ) est à valeur dans le compact
[c, d], donc on peut en extraire une sous-suite
sous suite convergente (xϕ(n) ) donc la limite x appartient à
[c, d]. Comme (xn − y n) tend vers 0, la suite (y ϕ(n)) converge également vers x.
Plusieurs cas se présentent, selon que la limite x est dans l’intérieur de [c, d] ou au bord.
(i) Le cas x ∈ ]c, d[ est absurde car (xϕ(n) ) et (y ϕ(n) ) tendent vers x et d(f (xϕ(n)), f(yϕ(n) )) ≥
2ε pour tout n, ce qui est absurde d’après le résultat de la question précédente.
(ii) Si x = c, alors comme f est continue à droite en c il existe α > 0 tel que d(f (y ), f (c+)) < ε
pour tout y ∈ ]c, c + α[. Comme (xϕ(n)) et (y ϕ(n) ) convergent vers c à droite, il existe n tel
que xϕ(n) et y ϕ(n) appartiennent à ]c, c + α[, donc d(f (x ϕ(n) ), f(yϕ(n) )) ≤ d(f (x ϕ(n)), f(c+)) +
d(f (c+), f(y ϕ(n) )) < 2ε, ce qui est absurde car d(f (xϕ(n)), f(y ϕ(n) )) ≥ 2ε.
(iii) Pour le cas x = d, on aboutit également à une absurdité en procédant de la même
manière, en utilisant la continuité à gauche de f en d.
Ainsi, on a aboutit à une absurdité dans tous les cas, donc le résultat est bien vérifié.
38 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
Exercice 8. Soit X un espace métrique compact. On note C(X, R) l’algèbre des appli-
cations continues de X dans R.
a) Soit I =
C (X, R) un idéal de C(X, R). Montrer
∃s ∈ X, ∀f ∈ I, f (s) = 0.
4. Espaces connexes
4.1. Définitions
Proposition 1. Soit (E, d) un espace métrique. Les assertions suivantes sont équiva-
lentes.
(i) Il n’existe pas de partition de E en deux ouverts disjoints non vides.
(ii) Il n’existe pas de partition de E en deux fermés disjoints non vides.
4. ESPACES CONNEXES 39
f (x) = 1 si x ∈ O 2. Elle est continue (l’image réciproque de tout ouvert est un ouvert), ce qui
est contraire aux hypothèses puisqu’elle est non constante. Finalement, E est connexe.
Proposition 4. Soit A une partie connexe d’un espace métrique (E, d). Si une partie B
de E vérifie A ⊂ B ⊂ A, alors B est connexe.
Démonstration. Soit f : B → D = {0, 1} une application continue. Comme A est connexe, f|A
est constante, par exemple f |A = 0. Soit x 0 ∈ B . Il existe un voisinage V de x 0 dans B tel que
1
∀x ∈ V, δ(f (x), f(x0 )) < ,
2
ce qui montre que pour tout x ∈ V , f (x) = f (x0). Or B ⊂ A, donc V ∩ A = ∅. Si on choisit
x1 ∈ V ∩ A, on a f (x 0) = f (x1) = 0. Ainsi, f = 0, d’où le résultat d’après la proposition 3.
Dans le cas général, une réunion de connexes n’est pas connexe (par exemple, {0} et
{1} sont connexes dans R, mais {0, 1} = {0} ∪ {1} n’est pas connexe). On a cependant le
résultat qui suit.
Proposition 5. Soit (Ci) i∈I une famille de connexes d’un espace métrique (E, d) telle
que
∃i0 ∈ I, ∀i ∈ I, Ci ∩ Ci0 =
∅.
Alors ∪i∈I Ci est connexe.
Démonstration. Soit f : ∪i∈IC i → D = {0, 1} une application continue. Pour tout i, Ci est
connexe donc f|C i est constante. En particulier, f|C i est connexe, par exemple f|Ci = 0. Soit
0 0
x ∈ ∪i∈IC i et soit i ∈ I tel que x ∈ C i. Comme C i ∩ C i0 = ∅, on peut trouver x0 ∈ C i ∩ C i0 .
On a alors f (x) = f (x0) = 0 car f |Ci est constante. Ainsi, f est constante sur ∪ i∈I C i, d’où le
résultat d’après la proposition 3.
Proposition 7. Soient (E1 , d 1), . . . , (E n , dn) des espaces métriques (en nombre fini).
L’espace produit E = E1 × · · · × E n est connexe si et seulement si E i est connexe pour
tout i.
Démonstration. Condition nécessaire. Soit i ∈ {1, . . . , n} et soit f : Ei → D = {0, 1} une
application continue. La projection pi de E sur Ei étant continue, l’application f ◦ pi : E → D
est continue, et comme E est connexe, f ◦ pi est constante. Donc f est constante et Ei est
connexe.
Condition suffisante. Soient (x1, . . . , x n ) et (y 1, . . . , yn ) ∈ E et une application continue f : E →
D . L’application f1 : E1 → D x → f (x, x2 , . . . , xn ) est continue, donc constante car E1 est
connexe. En particulier, f (x1 , x2 , . . . , xn ) = f (y1 , x2, . . . , xn ). En itérant le procédé sur chacun
des connexes E2, . . . , E n , on obtient f (x1 , . . . , xn ) = f (y1 , . . . , yn ). L’application f est donc
constante, donc E est connexe d’après la proposition 3.
4. ESPACES CONNEXES 41
Remarque 3. — Une autre manière d’écrire le résultat est la suivante. Si f (a) ≤ f (b)
(resp. f (b) ≥ f (a)) avec a < b, alors pour tout γ tel que f (a) ≤ γ ≤ f (b) (resp.
f (b) ≤ γ ≤ f (a)), il existe c ∈ [a, b] tel que f (c) = γ .
— Avec la proposition 15, on en conclut que l’image d’un segment de R par f est un
segment de R.
42 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
Remarque 4. — La connexité par arcs est surtout une notion pratique pour montrer
qu’un espace est connexe. En termes intuitifs, un espace est connexe par arcs si
on peut toujours relier deux de ses points par une courbe continue, ce qui fait
du concept de connexité par arcs une notion moins abstraite que la notion de
connexité.
— La réciproque du théorème 4 est fausse (voir l’exercice 5 page 44). Elle est cependant
vraie dans un ouvert d’un R-e.v.n (voir le théorème 5).
— La connexité par arcs est, comme la connexité, une notion topologique.
Connexité par lignes brisées dans un espace vectoriel normé. Dans tout ce
paragraphe, E désigne un R-espace vectoriel normé.
Définition 4. Soient (a, b) ∈ E 2 . On appelle segment d’extrémité a et b l’ensemble
{λa + (1 − λ)b, λ ∈ [0, 1]}, et on le note [a, b].
Définition 5. On appelle ligne brisée (ou ligne polygonale) de E joignant deux points a
et b de E tout ensemble de la forme ∪1≤i≤n [x i−1, x i ] où n ∈ N∗ , x0 = a et xn = b et pour
tout i, xi ∈ E.
Définition 6. Une partie A de E est dite connexe par lignes brisées si pour tout (a, b) ∈
A2 , il existe une ligne brisée incluse dans A joignant a et b.
Remarque 5. Il est clair qu’une ligne brisée est un arc. Une partie de E connexe par lignes
brisées est donc connexe par arcs.
Exemple 2. Un R-e.v.n E est connexe par lignes brisées (donc connexe par arcs et connexe)
car pour tout (a, b) ∈ E2 , [a, b] ⊂ E .
Théorème 5. Soit E un R-e.v.n. Une partie ouverte Ω de E est connexe si et seulement
si elle est connexe par lignes brisées.
Démonstration. La condition suffisante découle du théorème 4, une partie connexe par ligne
brisée étant connexe par arcs.
Montrons la condition nécessaire. Soit Ω un ouvert connexe non vide de E . Soit x0 ∈ Ω et
notons T x0 l’ensemble des points de Ω que l’on peut joindre à x 0 par une ligne brisée contenue
dans Ω.
— On a T x0 = ∅ car x 0 ∈ Tx0 .
— L’ensemble T x0 est ouvert. En effet, si x ∈ Tx 0, on a x ∈ Ω donc il existe ρ > 0 tel que
la boule B(x, ρ) soit incluse dans Ω. Ainsi, pour tout y ∈ B(x, ρ), [x, y] ⊂ Ω et comme
x ∈ Tx0 , on en déduit y ∈ T x0 .
4. ESPACES CONNEXES 43
Remarque 6. On en déduit avec la remarque 5 que tout ouvert connexe d’un e.v.n est
connexe par arcs. Attention, ce dernier résultat n’est plus vrai si on remplace E par un
espace métrique quelconque.
4.4. Exercices
Exercice 1. Soient (E, d) un espace métrique, B une partie connexe de E et A une
◦
◦
partie de E telle que B ∩ A = ∅ et B ∩ (E A) = ∅. Montrer que B ∩ Fr(A) =
∅ ( où
Fr(A) désigne la frontière de A).
donc ces images réciproques sont fermées (f −1 ({1}) est fermé dans F car f est continue, donc
dans E car F est fermé dans E ). Il reste à monter que g −1 ({0}) est fermé dans E. Partant de
◦
g−1({0}) = (E F ) ∪ f −1 ({0}) = (EF ) ∪ f−1 ({0}),
◦
(cette dernière égalité est vraie car EF = (E F ) ∪ Fr(F ) et Fr(F ) ⊂ f −1 ({0})), on voit que
g−1 ({0}), union de deux fermés dans E, est fermé dans E .
Finalement on a démontré que g : E → D est continue. Or E est connexe, donc g est
constante, donc f = g|F est constante. Ceci conclut à la connexité de F .
Le résultat est faux si F n’est pas supposé fermé. Par exemple, si E = R et F = R∗ ,
Fr(F ) = {0} est connexe et pourtant F = ] − ∞, 0[ ∪ ]0, +∞[ n’est pas connexe.
– Soit x0 ∈ RQ. Fixons y0 < 0. L’application f étant continue en (x0 , y0) ∈ Γ, on en déduit
comme précédemment que
∃α > 0, ∀x ∈ ]x0 − α, x 0 + α [ ∩(RQ), f (x, y0 ) = f (x0 , y 0 ) = g (x0).
Grâce à (*), on en déduit
∀x ∈ ]x0 − α, x0 + α [ ∩(RQ), f|{x}×]−∞,0[ = g (x0 ).
On en tire g (x) = g (x0) pour tout x ∈ ]x 0 − α, x 0 + α[. (En effet, si x est irrationnel, g(x) =
f|{x}×]−∞,0[ = g (x 0 ). Si x est rationnel, la densité de RQ dans Q permet d’affirmer l’existence
d’une suite (xn ) de ]x 0 − α, x 0 + α [ ∩(RQ) qui converge vers x, et
g (x) = f (x, 0) = lim f (x n , −1/n) = g (x0 ).)
n→∞
– Ainsi, g est localement constante autour des rationnels et des irrationnels, donc sur R, donc
continue sur R. Comme g est à valeurs dans {0, 1} et que R est connexe, on en déduit que g est
constante sur R et le résultat.
b) Raisonnons par l’absurde et supposons Γ connexe par arcs. En particulier, il existe un arc
contenu dans Γ qui relie (0, 0) et un point (x0 , y0) ∈ (RQ)×] − ∞, 0[. En d’autres termes, il
existe une application continue
γ : [0, 1] → R2 t → (γ 1(t), γ 2(t))
telle que γ(0) = (x0 , y0 ) ∈ (RQ)×] − ∞, 0[, γ (1) = (0, 0) et ∀t ∈ [0, 1], γ (t) ∈ Γ.
L’application γ 1 étant continue, l’ensemble γ−1
1 ({x0 }) est un fermé, non vide car il contient
−1
x0. Donc α = sup γ 1 ({x0 }) existe et γ1 (α) = x 0. On a α < 1 car γ 1(1) = 0. En résumé,
γ 1 (α) = x0 et ∀t ∈ ]α, 1], γ1 (t) = x0 . (∗∗)
Comme γ1 (α) = x 0 et que γ (α) ∈ Γ, on a γ2(α) < 0. La continuité de γ 2 assure l’existence
d’un ε > 0 tel que γ 2(t) < 0 pour tout t ∈ [α, α + ε], et comme γ (t) ∈ Γ, on en déduit
∀t ∈ [α, α + ε], γ 1(t) ∈ Q. (∗∗∗)
D’après le théorème des valeurs intermédiaires, γ1 ([α, α + ε]) est un intervalle, non réduit à
un singleton d’après (**). Ceci est absurde d’après (***), d’où le résultat.
Exercice 6 (Espaces bien enchaı̂nés). Soient (E, d) un espace métrique. Soit ε > 0.
On dit que E est ε-enchaı̂né si pour tout (a, b) ∈ E2 , il existe n ∈ N ∗ et des points
x0 , . . . , xn de E tels que x0 = a, xn = b et d(xi, xi−1 ) < ε pour tout i ∈ {1, . . . , n}. On dit
que E est bien enchaı̂né si il est ε-enchaı̂né pour tout ε > 0.
a) Si E est connexe, montrer que E est bien enchaı̂né.
b) Si E est compact et si E est bien enchaı̂né, montrer que E est connexe. Ce résultat
reste-t-il vrai si E n’est pas supposé compact ?
Solution. a) Soit ε > 0. On définit la relation d’équivalence Rε sur E par : x Rε y si et seulement
s’il existe n ∈ N∗ et x0, . . . , x n ∈ E tels que x 0 = x, x n = y et d(xi , x i−1 ) < ε pour tout
i ∈ {1, . . . , n} (on vérifie facilement que l’on a bien affaire à une relation d’équivalence). Soit
x ∈ E . Nous montrons que la classe ẋ de x est ouverte et fermée.
La classe ẋ est ouverte. En effet, soit y ∈ ẋ. Pour tout z ∈ B(y, ε), on a y Rε z donc z ∈ ẏ = ẋ.
Ainsi, B(y, ε ) ⊂ x˙ , et ceci pour tout y ∈ ẋ, donc ẋ est ouvert.
La classe ẋ est également fermée car c’est le complémentaire de l’ouvert ∪y∈ẋ ẏ.
Ainsi, ẋ, ouverte et fermée dans le connexe E, est égale à E . Ceci montre que E est ε-enchaı̂né
pour tout ε > 0, d’où le résultat.
b) Raisonnons par l’absurde en supposant E non connexe. On peut écrire E = F 1 ∪ F2 où F1
et F2 sont deux fermés non vides disjoints. Un fermé dans un compact est compact, donc F1
et F 2 sont compacts. Il existe donc a1 ∈ F1 et a2 ∈ F2 tels que d(a1 , a2 ) = d(F1, F2 ) (voir
46 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
Exercice 7. Soit (E, d) un espace métrique compact et (un) n∈N une suite de E telle
que limn→∞ d(un , un+1 ) = 0. Montrer que l’ensemble des valeurs d’adhérence de (u n) est
connexe.
Solution. Pour tout p ∈ N, on note Ap = {u n , n ≥ p}. On sait que l’ensemble Γ des valeurs
d’adhérence de (un ) est égal à ∩p∈NAp . C’est donc un fermé, et comme E est compact, Γ est
compact.
Supposons Γ non connexe, de sorte que l’on peut écrire Γ = A ∪ B où A et B sont deux
fermés non vides disjoints de Γ. Comme Γ et compact, A et B sont même compacts et donc
(voir l’exercice 3 page 33) α = d(A, B ) > 0 puisque A et B sont disjoints. Notons
α α α
A = x ∈ E | d(x, A) < = B x, et B = x ∈ E | d(x, B) < .
3 3 3
x∈A
Les ensembles A et B sont ouverts donc K = E(A ∪ B ) est fermé dans le compact E, donc
compact. Nous allons montrer que (un ) admet au moins une valeur d’adhérence dans K , ce qui
sera une absurdité car Γ ∩ K = ∅.
Par hypothèse, limn→∞ d(un , un+1 ) = 0 donc
α
∃N0 ∈ N, ∀n ≥ N0 , d(un , un+1 ) < . (∗)
3
α/3
α/3
A α B
E
A
B
K = E (A ∪ B )
K est compact, (u ϕ(n)) admet au moins une valeur d’adhérence dans K , donc (un ) admet au
moins une valeur d’adhérence dans K . Ceci est impossible car Γ ∩ K = ∅. L’ensemble Γ est
donc connexe.
Solution. Notons A l’ensemble {(x, y) ∈ I 2 , x < y}. Cet ensemble est connexe (il est même
convexe). L’application
f (x) − f (y)
F : A → R (x, y) →
x−y
est continue, donc f (A) = Γ, image continue d’un connexe, est connexe.
On a f (I ) ⊂ Γ. En effet, si x ∈ I et si ( xn) est une suite de I qui tend vers x telle que
xn > x pour tout n, on a f (x) = lim n→∞ F (x, xn ).
D’après le théorème des accroissements finis, on a Γ ⊂ f (I). Finalement, Γ ⊂ f (I ) ⊂ Γ,
donc f (I ) est connexe d’après la proposition 4. Les connexes de R étant les intervalles, on en
déduit le résultat.
Remarque. Ce résultat est prouvé avec des moyens différents à l’exercice 4 page 80.
Deux normes équivalentes définissent des distances équivalentes. Sur un plan topologique,
et lorsque l’on travaille avec des suites de Cauchy, il est indifférent de prendre l’une ou
l’autre de ces normes.
L’application x → |x| est une norme sur R, et z → |z | une norme sur C. Plus
généralement, pour tout α ≥ 1, si x = (x1 , . . . , xn ) ∈ Kn (avec K = R ou C),
n 1/α
x α = |x i |α
i=1
n
définit une norme sur K (voir la conséquence de l’inégalité de Minkowsky, page 98), de
même que x∞ = supi |x i|.
Dans un e.v.n, les opérations (x, y ) → x + y et (λ, x) → λx sont continues. La norme
est également une fonction continue.
Si V est un s.e.v. de l’e.v.n E , alors son adhérence V est un s.e.v de E . En particulier,
un hyperplan de E est soit fermé, soit dense dans E.
5.2. Continuité des applications linéaires
Dans toute cette sous-suite
sous partie, E et F désignent deux K-e.v.n (avec K = R ou C).
Théorème 1. Soit f ∈ L(E, F ) une application linéaire de E dans F . Les assertions qui
suivent sont équivalentes.
(i) f est continue sur E ;
(ii) f est continue en 0 ;
(iii) f est bornée sur la boule unité fermée Bf (0, 1) de E ;
(iv) f est bornée sur la sphère unité S(0, 1) de E ;
(v) il existe M > 0 tel que f (x) ≤ M x pour tout x ∈ E ;
(vi) f est lipschitzienne ;
(vii) f est uniformément continue sur E .
Remarque 1. — Dans la pratique, on utilise souvent les assertions (iv) et (v).
— De même, on montre qu’une application multilinéaire de E1 × · · · × En dans F est
continue si et seulement si
∃M > 0, ∀x = (x1 , . . . , xn) ∈ E1 × · · · × En , f (x) ≤ M x1 · · · xn.
Définition 1. L’ensemble des applications linéaires continues de E dans F est noté
Lc(E, F ). On norme Lc (E, F ) en posant
∀f ∈ Lc(E, F ), |||f ||| = sup f (x) = sup f (x),
x=1 x≤1
Remarque 3. Il faut savoir refaire cette démonstration. Retenez en particulier les trois
étapes principales (faites l’exercice 1 page 21 qui est du même type).
Formes linéaires continues. Si E est un K-e.v.n (avec K = R ou C), l’e.v.n L c(E, K)
(ensemble des formes linéaires continues sur E ) est un s.e.v du dual E ∗ de E . On le note
souvent E et on l’appelle dual topologique de E . Comme K est complet, E est un espace
de Banach d’après le théorème 2. Dans un espace de Hilbert, E et E sont isomorphes
(voir l’annexe B, question 3/ a) du problème 1 page 427).
Une forme linéaire f sur E est continue si et seulement si son noyau Ker f est un fermé
de E (voir l’exercice 7 page 55).
L’algèbre normée Lc (E ). On rappelle qu’une algèbre normée A est une algèbre (i. e.
un e.v muni d’une loi de produit interne, distributive par rapport à l’addition, vérifiant
(λu)v = λ(uv) = u(λv) pour tout u, v ∈ A et λ ∈ K) munie d’une norme . vérifiant
uv ≤ u·v pour tout u, v ∈ A. Ceci assure la continuité de l’application (u, v ) → uv .
D’après la proposition 1, l’algèbre Lc (E) = Lc (E, E), munie de la norme ||| . |||, est une
algèbre normée. Si de plus E est un espace de Banach, Lc(E) est un espace de Banach
d’après le théorème 2. Une conséquence importante
est la suivante. Toute série un de
Lc(E) absolument convergente (i. e. telle que |||un ||| converge) est convergente (en effet,
la suite associée est de Cauchy).
Une application importante.
Proposition 2. Soient E un espace de Banach et u ∈ Lc (E ) tel que |||u||| < 1. Alors
Id −u est inversible, son inverse est +∞
n=0 un
∈ L c E ).
(
Démonstration. La série u n converge absolument car |||un ||| ≤ |||u||| n et |||u||| < 1. Or
+∞ +∞ +∞
(Id −u) un = un − un = Id,
n=0 n=0 n=1
+∞
de même ( n=0 un)(Id −u) = Id, d’où le résultat.
précédente permet de montrer que Gc (E) est un ouvert de Lc (E) (voir l’exercice 4
page 52).
— De manière générale, pour toute série entière n an z n (avec a n ∈ R ou a n ∈ C)
de
rayon de convergence R > 0, on peut définir la série entière d’endomorphisme
n
a
n n u dès que |||u||| < R pour u ∈ Lc (E) avec E un espace de Banach. Par
exemple, l’exponentielle
∞ n d’un endomorphisme continu u ∈ Lc (E), est défini par la
série exp(u) = n=0 u /n! (voir le tome Algèbre, partie 4.3). On peut aussi utiliser
les séries entières d’endomorphisme pour démontrer des résultats intéressant. Par
exemple, on prouve l’existence, dès que |||u||| < 1, d’un
endomorphisme continu
v ∈ Lc (E) tel que v2 = 1 + u ;√il suffit de choisir v = n an un où l es (na) sont les
coefficients de la série entière 1 + z = n a nz n.
5.3. Espaces vectoriels normés de dimension finie
Comme nous allons le voir, en dimension finie, “tout est continu”. Les notions de la
sous-suite
sous partie précédente présentent donc moins d’intérêt en dimension finie.
Théorème 3. Dans un e.v.n de dimension finie, toutes les normes sont équivalentes.
Démonstration.Soit E un K-e.v (K = R ou C) de dimension finie, (e1, . . . , en ) une base de E.
Pour tout x = i xi ei , N0 (x) = sup i |xi| définit une norme sur E.
Montrons que toutes les normes sur E sont équivalentes
à N0. Soit N une norme sur E. En
désignant par a le réel i N (ei ), on a pour tout x = i xi ei ∈ E
n
n
N (x) ≤ N (xi e i ) = |xi| N (e i) ≤ a N 0 (x). (∗)
i=1 i=1
Munissons K n de la norme produit (x 1 , . . . , xn )∞ = sup i |xi |. L’application ϕ : (Kn , . ∞ ) →
(E, N0) (x 1 , . . . , xn ) → i xi e i est une isométrie, donc S = {x ∈ E | N 0(x) = 1} est un
compact de (E, N0 ) (image de la sphère unité de K n — qui est compacte car fermée bornée dans
Kn — par ϕ qui est continue car isométrique). D’après (*), on a |N (x) − N (y )| ≤ N (x − y) ≤
a N 0 (x − y), donc N : (E, N0) → R est continue. Comme S est un compact de (E, N0), on en
déduit b = infN 0 (x)=1 N (x) = 0. Ainsi,
x
∀x ∈ E, x = 0, N (x) = N0 (x) · N ≥ b N0 (x).
N0 (x)
Avec (*), on en déduit le théorème.
Ce théorème est important. Il permet de choisir la norme que l’on veut sur un e.v.n
de dimension finie. Voici des corollaires.
Corollaire 1. Toute application linéaire d’un e.v.n de dimension finie dans un e.v.n
(quelconque) est continue.
Corollaire 2. Tout e.v.n de dimension finie est complet.
Corollaire 3. Tout s.e.v de dimension finie d’un e.v.n est fermé.
Corollaire 4. Les parties compactes d’un e.v.n de dimension finie sont les parties
fermées bornées.
Remarque 5. Tous ces corollaires sont faux en dimension infinie. Par exemple:
— Munissons l’espace vectoriel des polynômes réels R[X ] de la norme i ai X i =
supi |ai|. L’application linéaire f : R[X ] → R[X ] P → P n’est pas continue
(en effet, f (X n ) = n et X n = 1 donc l’assertion (iii) du théorème 1 n’est pas
vérifiée).
— Tout e.v.n à base dénombrable n’est pas complet (voir l’exercice 8).
— La boule unité fermée d’un e.v.n de dimension infinie n’est pas compacte (théorème
de Riesz, voir l’exercice 9).
5. ESPACES VECTORIELS NORMÉS (E.V.N) 51
5.4. Convexes
Les parties convexes jouent un rôle important dans les e.v.n, en particulier dans les
espaces de Hilbert (voir l’annexe B, problème 1). Dans toute cette sous-suite
sous partie, E désigne
un K-e.v (avec K = R ou C).
Définition 3. Soit C une partie de E . On dit que C est convexe si pour tout (A, B ) ∈ C2 ,
[A, B ] ⊂ C .
Définition 4. Une partie A de E est dite étoilée s’il existe P ∈ A tel que [P, M ] ⊂ A
pour tout M ∈ A (on dit alors que A est étoilée par rapport à P ). Un tel point P s’appelle
un centre de A.
Enveloppe convexe.
Définition 5. Soit A une partie de E . Il existe une plus petite partie convexe de E
contenant A. On l’appelle enveloppe convexe de A et on la note Conv(A). L’ensemble
Conv(A) est aussi l’ensemble des barycentres des points de A affectés de coefficients
positifs, i. e. Conv(A) est l’ensemble des x tels que
n
n
+
∃x1 , . . . , xn ∈ A, ∃λ 1 , . . . , λn ∈ R , λ i = 1, x= λi xi .
i=1 i=1
5.5. Exercices
Exercice 1. Soient E un R-e.v.n et A, B deux parties de A. On note A + B = {a +
b, (a, b) ∈ A × B }.
a) Si A est ouvert (et B quelconque), montrer que A + B est ouvert.
b) Si A est compact et B fermé, montrer que A + B est fermé. Ce résultat subsiste-t-il si
A est seulement supposé fermé ?
Solution. a) On a A + B = ∪b∈B (A + {b}). Pour tout b ∈ B, il est clair que A + {b} est un
ouvert de E (si B(x, ρ) ⊂ A, B(x + b, ρ) ⊂ A + {b}). Donc A + B , réunion d’ouverts, est un
ouvert.
b) Soit (zn) = (x n + yn)n∈N une suite de A + B , convergente dans E vers z, où ( xn ) est une
suite de A et (yn ) une suite de B. La compacité de A entraı̂ne l’existence d’une sous-suite
(xϕ(n) ) de (xn ) qui converge dans A. Notons x ∈ A sa limite. Comme (zϕ(n) ) converge vers
z, (yϕ(n)) = (z ϕ(n) − xϕ(n) ) converge vers z − x. Comme B est fermé, y = z − x ∈ B . Ainsi,
z = x + y ∈ A + B , d’où le résultat.
Si A est seulement supposé fermé, le résultat est faux. Par exemple, dans le plan, les en-
sembles A = {(x, e x), x ∈ R} et B = R × {0} sont fermés et pourtant A + B = R×]0, +∞[ n’est
pas fermé. On peut donner un autre contre exemple dans R, en considérant les ensembles Z et
xZ (avec x ∈ RQ). Ces ensembles sont fermés, et Z + xZ est dense dans R (voir l’exercice 5
page 205). Si ce dernier était fermé, il serait égal à R tout entier, ce qui est impossible puisque
Z + xZ est dénombrable et que R ne l’est pas.
52 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
Exercice 3. Montrer qu’un e.v.n E est complet si et seulement si toute série un
absolument convergente (i. e. telle que un converge) est convergente.
n nécessaire. Si
Solution. Condition u n converge, alors la suite (Sn ) associée à la série un
définie par Sn = k=0 uk est de Cauchy car
q
q
∀p < q, S p − S q = uk ≤ u k .
k=p+1 k=p+1
Comme E est complet, (Sn) converge donc, c’est-à-dire un converge.
Condition suffisante. Soit (S n) une suite de Cauchy de E . D’après le critère de Cauchy,
— ∃ϕ(0) ∈ N, ∀n ≥ ϕ(0), S n − S ϕ(0) ≤ 1, de même
— ∃ϕ(1) > ϕ(0), ∀n ≥ ϕ(1), S n − Sϕ(1) ≤ 12 ,
— on construit ainsi par récurrence ϕ(k ) > ϕ(k − 1) tel que ∀n ≥ ϕ(k ), S n − Sϕ(k) ≤ 21k .
−k
Pour tout k ∈ N, on pose uk = Sϕ(k+1) − Sϕ( k) . Par construction, u k ≤ 2 donc uk est
n
absolument convergente, donc convergente. Or k=0 uk = S ϕ(n+1) −Sϕ(0), donc (S ϕ(n)) converge.
Une suite de Cauchy admettant une sous-suite convergente converge, d’où le résultat.
Exercice 4. 1/ Soit A une R-algèbre normée (i. e. une algèbre munie d’une norme .
vérifiant xy ≤ x · y pour tout (x, y ) ∈ A 2) unitaire et complète.
a) Si x ∈ A et si x < 1, si 1 désigne l’élément unité de A, montrer que 1 − x est
inversible dans A.
b) Montrer que l’ensemble des inversibles de A est un ouvert de A.
c) Soit ϕ : A → R un morphisme d’algèbre. Montrer que ϕ est continue.
5. ESPACES VECTORIELS NORMÉS (E.V.N) 53
Solution. 1/ a) On ne fait que réécrire la ndémonstration de la proposition 2 dans le cas plus
général d’une algèbre normée. La série x converge absolument car x ≤ xn et x < 1,
n
+∞
+∞
n
(1 − x)y = y − xy = x − xn = 1,
n=0 n=1
+∞ n
de même y(1 − x) = 1. Donc (1 − x) est inversible, son inverse est y = n=0 x .
b) Soit x 0 ∈ A un élément inversible. Si h ∈ A, h < x −1 −1 −1 −1
0 , on a x0 h ≤ x 0 · h < 1.
−1 −1
D’après la question précédente, 1 + x 0 h = 1 − (−x0 h) est inversible. On en déduit que
x0 + h = x 0 (1 + x−1 −1 −1 −1
0 h) est inversible (son inverse est (1 + x0 h) x 0 ). La boule de centre x0
−1
de rayon 1/x0 est donc incluse dans l’ensemble des inversibles, d’où le résultat.
c) Si ϕ est nulle, c’est terminé. Sinon, il existe x ∈ A tel que ϕ(x) = 0. On a alors ϕ(x) =
ϕ(1 · x) = ϕ(1)ϕ(x), donc ϕ(1) = 1. Montrons maintenant que si x = 1, alors |ϕ(x)| ≤ 1, ce
qui montrera la continuité de ϕ (un morphisme d’algèbre est linéaire). Raisonnons par l’absurde
et supposons l’existence de x ∈ A, x = 1, tel que λ = ϕ(x) vérifie |λ| > 1. Alors 1λ x < 1,
donc 1 − λ1 x est inversible, donc λ · 1 − x est inversible. Désignons par y son inverse. On a
ϕ (λ · 1 − x) y = ϕ(1) = 1 = ϕ(λ · 1 − x) ϕ(y ),
Exercice 5. On note 1le R-e.v des suites réelles (un ) telles que |un | converge, muni
∞ ∞
de la norme (un )1 = n=0 |un |. On note le R-e.v des suites réelles (u n) bornées,
muni de la norme (un )∞ = sup n |u n|.
Montrer que le dual topologique (1 ) de 1 (i. e. l’e.v des formes linéaires continues
sur 1 ) s’identifie à ∞ à une isométrie bijective près.
∞
1
Φ k : → R (un ) → k n un
n=0
54 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
(la série kn un converge absolument car (kn ) est bornée et un converge absolument). Il est
clair que Φk est une forme linéaire de 1 . Elle est même continue car
∞
|Φk [(un )]| ≤ |k n| |un | ≤ (k n )∞ · (u n )1 ,
n=0
Comme E est de dimension n, les q ≥ n + 2 éléments (xi )i∈J sont affinements liés, c’est-à-dire
qu’il existe une famille (µi )i∈J d’éléments non tous nuls tels que
µi xi = 0 et µi = 0
i∈J i∈J
5. ESPACES VECTORIELS NORMÉS (E.V.N) 55
(si i0 ∈ J, écrire par exemple que les q − 1 ≥ n + 1 vecteurs (x i − xi 0 )i∈J {i 0} sont liés). Soit
α = inf µi >0 λi /µi , de sorte que λi − αµ i ≥ 0 pour tout i ∈ J (remarquons qu’il existe bien i ∈ J
tel que µi > 0 car les µi sont non tous nuls et leur somme est nulle). On a
x= (λi − αµ i)xi , avec ∀i ∈ J, λ i − αµ i ≥ 0 et (λi − αµi ) = λi = 1,
i∈J i∈J i∈J
et par définition de α , il existe i 0 ∈ J tel que λ i 0 − αµ i 0 = 0. Ainsi, x est barycentre des points
(xi )i∈J {i0} affectés de coefficients positifs. Ceci est absurde par définition de q, d’où le résultat.
n+1
b) Notons ∆ = {(λ 1, . . . , λ n+1 ) ∈ Rn+1 | i=1 λ i = 1 et ∀i, λ i ≥ 0}. Cet ensemble, fermé du
n+1
compact [0, 1] est compact. On considère l’application
n+1
n+1
ϕ : ∆×A →E ((λ1 , . . . , λ n+1), x 1, . . . , x n+1) → λ i x i.
i=1
Comme Conv(A) est l’ensemble des barycentres des points de A affectés de coefficients positifs,
on a d’après le théorème de Carathéodory Conv(A) = ϕ(∆ × An+1 ). Or ∆ × An+1 est compact
(produit de compacts) et ϕ est continue, donc Conv(A) est compact.
est une semi-norme sur l’espace quotient E/F . Que dire si F est fermé ?
b) En utilisant la question précédente, retrouver le résultat de la question 1/.
Solution. 1/ Si ϕ est continue, Ker ϕ est l’image réciproque par ϕ du fermé {0} donc fermé.
Réciproquement, supposons Ker ϕ fermé. Si ϕ n’est pas continue, ϕ n’est pas bornée sur la
sphère unité. Il existe donc une suite (x n) de E telle que
(i) ∀n ∈ N, xn = 1 (ii) lim |ϕ(x n )| = +∞.
n→∞
xn
Fixons u ∈ E tel que ϕ(u) = 1. Pour tout n, posons un = u − . On a ϕ(u n ) = ϕ(u) −
ϕ(xn )
1
ϕ(xn ) = 0, donc un ∈ Ker ϕ. D’après (i) et (ii), (un ) converge vers u, et Ker ϕ étant fermé,
ϕ(xn )
u ∈ Ker ϕ. Ceci est absurde car ϕ(u) = 1. Ainsi, ϕ est continue.
·
2/ a) Soit x ∈ E et λ ∈ R. Rappelons que la classe ẋ de x est ẋ = x + F . De l’égalité λx = λ ẋ,
on tire N (λ ẋ) = |λ|N (ẋ).
Il nous reste à montrer que N vérifie l’inégalité triangulaire. Soient x, y ∈ E . On a
·
∀u, v ∈ F, N( x + y ) ≤ (x + y) + (u + v ) ≤ x + u + y + v,
·
ce qui en passant aux inf à droite donne N (x + y ) ≤ N (ẋ) + N (ẏ).
Ainsi, N est une semi-norme. Comme ẋ = x + F pour tout x, N (ẋ) = inf y∈F x − y est
la distance de x à F . Si F est fermé, on a donc N (ẋ) = 0 si et seulement si x ∈ F , c’est-à-dire
ẋ = 0. Finalement, si F est fermé, N est une norme sur E F .
b) Soit ϕ : E → R une forme linéaire telle que Ker ϕ est fermé. Si ϕ est nulle, il est clair que ϕ
est continue. Sinon ϕ(E) = R. Considérons la factorisation canonique de ϕ suivante
56 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
ϕ
E −→ R
s ψ
E/ Ker ϕ
On a ϕ = ψ ◦ s où s est la surjection canonique de E sur E/ Ker ϕ et ψ : E/ Ker ϕ → R est
linéaire.
— L’application ψ est continue (c’est une application linéaire sur des espaces de dimension
finie).
— La surjection s de (E, . ) dans (E/ Ker ϕ, N ) est continue.
(où N est la norme définie
plus haut avec F = Ker ϕ, fermé), car N (ẋ − ẏ ) = N (x − y ) ≤ x − y .
On en déduit que ϕ = ψ ◦ s est continue.
Remarque. La méthode utilisée au 2/ b) se généralise aisément pour montrer qu’une
application linéaire de rang fini est continue si et seulement si son noyau est fermé.
Exercice 8. Démontrer qu’un espace vectoriel normé E qui admet une base dénombrable
n’est jamais complet.
Solution. Soit (en )n∈N ∗ une base de E . Quitte à normaliser
les en , on peut supposer en = 1
∗
pour tout n ∈ N . Nous allons construire une série λn en absolument convergente à partir
d’une suite (λn ) particulière, et nous allons prouver que λn en ne converge pas (intuitivement,
si une telle série convergeait, sa somme serait combinaison linéaire infinie de (en ), ce qui est
impossible dans un espace vectoriel par définition d’une base).
Notons F0 = {0} et F n = Vect(e 1 , . . . , en ) pour tout n ∈ N∗ . A partir de λ1 = 1/3, on définit
(λn ) par
1 1
λ n+1 = d(λn e n, F n−1) = inf λn e n − x.
3 3 x∈F n−1
Comme Fn est fermé (s.e.v de dimension finie), on sait que d(x, Fn ) = 0 si et seulement si
x ∈ F n. Par récurrence, on en déduit λn > 0 pour tout n ∈ N∗ . Enfin, l’inégalité
1 1 λn
λn+1 = d(λ n en , Fn−1 ) ≤ λn en = ,
3 3 3
assure la majoration
λn ≤ 1/3 n pour tout n.
La série λn en converge donc absolument. Si E est supposé complet, elle converge donc.
∗
Notons
∞x sa limite. Comme n(en) n∈N∗ est une base de E, il existe n ∈ N tel que x ∈ F n. Ainsi,
y = k=n+1 λk ek = x − k=1 λ k ek ∈ Fn, donc
∞
∞
1 3
3λn+2 = d(λ n+1 en+1 , F n ) ≤ λn+1 e n+1 − y ≤ λk ≤ λ n+2 = λn+2,
3k 2
k=n+2 k=0
ce qui est absurde car λ n+2 = 0. L’espace métrique E n’est donc pas complet.
Remarque. Ce résultat est aussi une conséquence immédiate du théorème de Baire (voir
l’annexe A, exercice 1).
il existe x ∈ E tel que x ∈ F . Comme F est un s.e.v de dimension finie, il existe y ∈ F tel que
x − y = d(x, F ) (voir l’exercice 3 page 33). Soit x0 = xx−−yy . On a d(x0 , F ) ≤ x 0 = 1 et
1 d(x, F )
∀z ∈ F, x0 − z = x − (y + x − y z ) ≥ = 1,
x − y x − y
donc d(x0, F ) = 1.
Or x0 ∈ B f (0, 1), donc il existe i tel que x0 ∈ B(xi , 1), de sorte que d(x0 , xi ) < 1, ce qui est
absurde car 1 = d(x 0, F ) ≤ d(x 0, xi ).
Finalement, nous avons démontré que Bf (0, 1) n’est pas précompact, en particulier non
compact.
6. Problèmes
Problème 1. Soient E et F deux espaces métriques, K un espace métrique compact.
Soit f : E × K → F (λ, x) → f (λ, x) une application continue. Pour tout y ∈ F , on
note Ey = {λ ∈ E | ∃x ∈ K, f (λ, x) = y }.
a) Montrer que Ey est un fermé de E .
b) Fixons y ∈ E . On suppose que
∀λ ∈ Ey, ∃!x ∈ K, f(λ, x) = y,
et on note x = ϕ(λ). Montrer que l’application ϕ : E y → K ainsi définie est continue.
Solution. Raisonnons par l’absurde en supposant qu’un tel ouvert n’existe pas. Pour tout n ∈ N∗ ,
1
1
On = x ∈ E | d(x, K) < = B x,
n n
x∈K
Pour tout n, xn ∈ On donc il existe x n ∈ K tel que d(xn, x n ) < 1/n. De même, il existe pour
tout n un point yn de K tel que d(yn , yn ) < 1/n.
La suite [(xn , yn )] n∈N∗ prend ses valeurs dans le compact K2 . On peut donc en extraire une
sous-suite convergente [(xϕ(n), y ϕ(n))] dont nous noterons (x, y) ∈ K 2 la limite. Les inégalités
1 1
d(xn , x) ≤ d(xn , xn) + d(x n, x) < + d(xn , x) et d(yn , y) < + d(y n, y)
n n
montrent que les suites (xϕ(n) ) et (y ϕ(n) ) tendent respectivement vers x et y . Comme f est conti-
nue et que pour tout n, f (xϕ(n) ) = f (yϕ(n) ), on a f (x) = f (y) et comme f|K est injective, x = y .
De plus, il existe par hypothèse un ε > 0 tel que f |B(x,ε) soit injective. Ceci est contradictoire car
il existe N ∈ N∗ tel que x ϕ(N ) et yϕ(N ) appartiennent à B(x, ε), et de plus f (xϕ(N ) ) = f (yϕ(N ) )
avec xϕ(N ) = yϕ(n) par construction.
Il existe donc un ouvert Ω contenant K tel que f|Ω soit injective.
Solution. a) En vertu de la proposition 3 de la page 39, il suffit de montrer que toute application
continue de K dans {0, 1} est constante. Soit f une telle application.
Pour tout x ∈ [0, 1], l’application f(x, ·) : Kx → {0, 1} y → f (x, y ) est continue, et K x
étant connexe (c’est un intervalle), on en déduit que f (x, ·) est constante. Notons g (x) cette
constante. Si on montre que l’application ainsi définie g : [0, 1] → {0, 1} est constante, on aura
prouvé que f est constante.
Comme [0, 1] est connexe, il suffit de prouver que g est localement constante pour montrer
qu’elle est constante. Supposons que ce ne soit pas le cas, de sorte qu’il existe x ∈ [0, 1] et
une suite (x n) de [0, 1] qui tend vers x telle que g (x n) = g (x) pour tout n ∈ N. Supposons
par exemple g(x) = 0 et g (x n ) = 1 pour tout n. Pour tout n, Kxn est non vide donc il existe
yn ∈ K xn . L’ensemble K , fermé du compact [0, 1]2 est compact. On peut donc extraire de la
suite [(xn , y n)]n∈N de K une sous-suite convergente [(xϕ(n), yϕ(n) )]. On a x = lim n→∞ xϕ(n), et
notons y la limite de (yϕ(n) ). Comme f est continue sur K ,
g (x) = f (x, y) = lim f (xϕ(n) , y ϕ(n) ) = lim g (x ϕ(n)).
n→∞ n→∞
6. PROBLÈMES 59
Solution. Il suffit de montrer que la suite (xn) est bornée, car elle prendra alors ses valeurs dans
un compact (les compacts de Rn sont les fermés bornés) et on conclura grâce à la proposition 9
de la page 30.
Raisonnons par l’absurde et supposons (xn) non bornée. Notons a l’unique valeur d’adhérence
de (xn ), et notons K le compact B f (a, 1). Soit N ∈ N. Comme a est valeur d’adhérence de (x n),
il existe n0 ≥ N tel que xn0 ∈ K . De plus, (xn ) n’est pas bornée donc il existe n > n0 tel que
xn ∈ K. Ceci prouve qu’il existe un entier m ≥ n 0 tel que xm ∈ K et x m+1 ∈ K. On a aussi
xm+1 = f (xm) ∈ f (K), donc xm+1 ∈ f (K )K . En résumé, nous venons de montrer
∀N ∈ N, ∃m ≥ N, xm ∈ f (K )K.
Ceci montre qu’il existe une sous-suite (xϕ(n) ) de (xn ) prenant ses valeurs dans f (K )K , en
particulier dans f (K ). L’ensemble f (K ) est compact (image d’un compact par une application
continue), on peut donc extraire de (xϕ(n) ) une sous-suite (xϕ◦ψ(n) ) qui converge. Notons b sa
limite. Pour tout n, xϕ(n) ∈ K donc d(xϕ(n) , a) ≥ 1, on a donc d(b, a) ≥ 1. Ceci est contraire
aux hypothèses car b est une valeur d’adhérence de (xn ) différente de a. La suite (x n) converge
donc vers a.
Problème 6. Soit G un groupe. On suppose que G est muni d’une distance, et que l’ap-
plication ϕ : G × G → G (x, y ) → xy −1 est continue (on parle de groupe topologique).
a) On désigne par e l’élément neutre de G et par C la composante connexe de G contenant
{e}. Montrer que C est un sous-suite
sous groupe de G.
b) On suppose G connexe. Soit H un sous-suite
sous groupe ouvert de G. Montrer que H = G.
Solution. a) En vertu d’un résultat classique d’algèbre, il suffit de montrer que ϕ(C × C )
est inclus dans C . Comme C est connexe, C × C est connexe. De plus, ϕ est continue, donc
ϕ(C × C ) est connexe. Or e ∈ ϕ(C × C ) (par exemple e = ϕ(e, e)). L’ensemble ϕ(C × C ) est
donc un connexe contenant e. Par définition de C , on a donc ϕ(C × C ) ⊂ C , d’où le résultat.
b) Considérons la relation d’équivalence x R y ⇐⇒ xy −1 ∈ H. Les classes d’équivalence sont
de la forme Hx avec x ∈ G. Pour y ∈ G, l’application ψ : G → G x → xy −1 étant continue,
Hy = ψ −1(H ) est ouvert. Ainsi, GH = ∪ y∈H Hy, réunion d’ouverts est ouvert, et donc H est
fermé. Ainsi, H est ouvert et fermé dans le connexe G, donc H = G.
Solution. a) Soit A = {x ∈ [0, 1], x ≤ f (x)}. L’ensemble A est non vide car 0 ∈ A. Soit
a = sup A. Pour tout x ∈ A on a x ≤ f (x) ≤ f (a) car f est croissante, donc f (a) est un
majorant de A donc a ≤ f (a). Comme f est croissante, ceci entraı̂ne f (a) ≤ f (f (a)) donc
f (a) ∈ A par définition de A, donc f (a) ≤ a par définition de a. Donc f (a) = a.
b) Il suffit de considérer l’application g : x → f (x) − x. On a g (0) = f (0) ≥ 0 et g (1) =
f (1) − 1 ≤ 0, donc g change de signe, et comme g est continue elle s’annule au moins en un
point a. On a alors f (a) = a.
c) L’ensemble E des points fixes de f est non vide d’après la question précédente. Si x ∈ E
alors f (g (x)) = g (f (x)) = g (x) donc g (x) ∈ E. Autrement dit, g (E ) ⊂ E . Donc si m = inf E
et M = sup E , on a g (m) ≥ m = f (m) et g (M ) ≤ M = f (M ), donc la fonction continue g − f
change de signe sur [0, 1] donc elle s’annule en un moins un point a, qui vérifie f (a) = g (a).
d) Si f n’admet pas de point fixe, alors la fonction continue x → f (x) − x ne s’annule jamais,
elle garde donc un signe constant, par exemple f (x) − x > 0 sur R. Ainsi pour tout réel x on a
f (x) > x donc f (f (x)) > f (x) > x, ce qui n’est pas compatible avec l’hypothèse de point fixe
de f ◦ f . On généralise aisément : si la composée n fois de f avec elle même admet un point fixe,
alors f admet un point fixe.
–1
–2
f (3/5) = 1 et f (1) = 0, puis on interpole linéairement f sur chaque intervalle [i/5, (i + 1)/5].
Ainsi construite, on vérifie facilement que f (x) > f (x + 2/5) pour tout x ∈ [0, 3/5] (voir la figure
ci-contre).
c) Les Yn sont fermés dans le compact E donc compact, et l’intersection d’une suite décroissante
de compacts non vides étant non vide, on en déduit Y = ∩n Yn ∈ F .
Donnons nous maintenant ε > 0. Par hypothèse, la suite (Yn ) est de Cauchy dans (F , ∆)
donc il existe N ∈ N tel que pour tout p, q ≥ N , ∆(Y p, Yq ) < ε. Nous allons montrer que
∆(Y, Yn ) ≤ ε pour tout n ≥ N .
Fixons n ≥ N . Pour tout p ≥ n, λ(Y n, Yp ) ≤ ∆(Yn , Yp ) < ε. Donnons nous x ∈ Y n. On a
d(x, Yp ) < ε, donc
∀p ≥ n, ∃x p ∈ Yp , d(x, x p ) < ε.
La suite (xp ) prend ses valeurs dans le compact E, on peut donc en extraire une sous-suite
convergente (x ϕ(p) ), dont nous noterons la limite. Pour tout p ≥ n, ∈ Yp car pour tout
m ≥ p, xm ∈ Yp et Yp est fermé. Ainsi, ∈ ∩p≥n Y p = Y . Par ailleurs, pour tout p, d(x, xϕ(p) ) < ε
donc d(x, ) ≤ ε. Comme ∈ Y , on en déduit d(x, Y ) ≤ ε. Ceci étant vrai pour tout x ∈ Yn , on
en déduit λ(Yn , Y ) ≤ ε. Or Y ⊂ Y n , donc λ(Y, Yn) = 0, donc ∆(Y n, Y ) ≤ ε. Ceci étant vrai pour
tout n ≥ N , on en déduit que (Yn ) converge vers Y .
Montrons maintenant que l’espace métrique (F , ∆) est complet. Soit (Y n ) une suite de Cau-
chy de cet espace. Pour tout n ∈ N, on pose Xn = ∪ p≥n Yp. La suite (X n) ainsi définie est une
suite décroissante de (F, ∆).
Soit ε > 0 et N ∈ N tel que pour tous p, q ≥ N , ∆(Yp , Yq ) < ε. Soit n ≥ N . Si x ∈ ∪ p≥nYp ,
il existe p ≥ n tel que x ∈ Y p , donc d(x, Yn ) ≤ λ(Yp , Yn ) < ε. On en déduit que pour tout x ∈
∪p≥n Yp , d(x, Yn ) ≤ ε, donc λ(X n, Yn ) ≤ ε. Comme X n ⊂ Yn, on a λ(Y n , Xn ) = 0. Finalement,
nous venons de montrer que
∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀n ≥ N, ∆(Xn , Yn ) < ε. (∗)
On en déduit maintenant aisément que la suite (X n) vérifie le critère de Cauchy. C’est de plus
une suite décroissante de fermés non vides, donc d’après ce que l’on a vu précédemment, (Xn )
converge vers X = ∩ n∈NXn . La relation (*) montre alors que (Yn) converge vers X .
d) Nous venons de voir que (F , ∆) est complet. En vertu du résultat de l’exercice 2 de la page 32,
il suffit, pour prouver la compacité de cet espace métrique, de montrer qu’il est précompact (i. e.
pour tout ε > 0, il existe un nombre fini de boules de rayon ε qui recouvrent F ).
Soit ε > 0. L’ensemble E est compact donc précompact, donc il existe une famille finie de
boules (B(xi , ε)) 1≤i≤n qui recouvre F . Notons Γ l’ensemble des parties non vides de {x1 , . . . , xn }.
Nous allons montrer que F ⊂ ∪F ∈Γ B∆ (F, ε), où pour tout F ∈ Γ, B∆ (F, ε) désigne la boule
fermée de centre F de rayon ε dans (F , ∆).
Soit A ∈ F. Notons F = {xi | 1 ≤ i ≤ n, d(xi , A) < ε}. Comme la famille (B(xi , ε))1≤i≤n
recouvre E , F est non vide donc F ∈ Γ. Pour tout x ∈ F , d(x, A) < ε donc λ(F, A) < ε.
Soit x ∈ A. La famille (B(xi , ε)) 1≤i≤n recouvrant E, il existe xi (1 ≤ i ≤ n) tel que d(x, xi ) <
ε. On a donc x i ∈ F et d(x, F ) ≤ d(x, xi) < ε, et ceci pour tout x ∈ A, donc λ(A, F ) ≤ ε. On
en déduit ∆(A, F ) ≤ ε, donc A ∈ B ∆ (F, ε).
Nous venons de montrer que F ⊂ ∪F ∈ΓB∆ (F, ε), et comme Γ est fini, on en déduit le résultat.
(oscillation de f en x0), où B(x 0, ρ) désigne la boule ouverte dans (E, d) de centre x0 de
rayon ρ.
a) Montrer que f est continue en x0 ∈ E si et seulement si ω (f, x0 ) = 0.
b) Pour tout ε ≥ 0, montrer que l’ensemble
Aε = {x ∈ E | ω (f, x) ≥ ε}
6. PROBLÈMES 63
en particulier
∀x ∈ E, d(x 0 , x) < ρ, δ (f (x), f(x 0)) < ε,
ce qui montre la continuité de f en x0 .
b) Montrons que Bε = E A ε = {x ∈ E | ω (f, x) < ε} est ouvert. Soit x0 ∈ Bε . On
a ω (f, x0 ) < ε donc il existe ρ > 0 tel que sup x,y∈B(x0,ρ) δ (f (x), f(y)) < ε. Considérons
maintenant x1 ∈ B(x0 , ρ), et r = ρ − d(x0, x 1). On a B(x1 , r) ⊂ B(x0 , ρ) donc ω(f, x 1) ≤
sup x,y∈B(x1,r) δ (f (x), f(y)) < ε, donc x 1 ∈ Bε . Ainsi, Bε est ouvert.
L’application x0 → ω(f, x0 ) n’est pas forcément continue. Par exemple, la fonction f de R
dans R nulle partout sauf en 0 où elle vaut 1, vérifie ω(f, x) = f (x).
c) C’est immédiat car
1
(f est continue en x 0) ⇐⇒ (ω (f, x0) = 0) ⇐⇒ (∀n ∈ N ∗ , ω(f, x 0) < )
n
⇐⇒ (∀n ∈ N∗ , x0 ∈ A 1/n ) ⇐⇒ (x0 ∈ ∪n∈N ∗ A1/n ).
A de R est dite négligeable si pour tout ε > 0, il existe une famille au plus dénombrable
(In)n∈J d’intervalles ouverts bornés de R telle que
(i) A ⊂ ∪ n∈J In . (ii) (I n ) converge et (In ) ≤ ε.
n ∈J
p
Ceci est impossible, car comme [a, b] ⊂ ∪ 1≤i≤nI ni , on a χ [a,b] ≤ i=1 χ In i ( où χP désigne la
fonction caractéristique de P ), donc
p p
χ[a,b] = b − a ≤ χ In i = (Ini ).
R R i=1 i=1
d) Non ! S’il était négligeable, alors R = (RQ) ∪ Q serait négligeable (d’après a) et b)), ce qui
est absurde d’après c) car l’intérieur de R est non vide.
2/ a) On voit facilement (par récurrence sur n) que Kn est la réunion de 2 n intervalles fermés
de longueur 3−n .
Soit ε > 0 et soit N ∈ N∗ tel que (2/3)N < ε/2. Comme on l’a vu, on peut écrire KN =
ε ε
∪1≤n≤2N [a n , bn ] avec bn − an = 3−N pour tout n. En posant In = an − N
, bn + ,
4·2 4 · 2N
on a K ⊂ KN ⊂ ∪ 1≤n≤2N In, et
N N
2 N
ε
2
2 ε
(In ) = (bn − an ) + = + < ε,
n=1 n=1
2 · 2N 3 2
d’où le résultat.
b) Une récurrence facile donne
n n
εk 1 εk
∀n ∈ N, K n = , + . (∗)
3 k 3n 3k
ε1 ∈{0,2},··· ,ε n∈{0,2} k=1 k=1
Ceci étant, soit x ∈ [0, 1[. Considérons son développement en base 3 : x = ∞ k
k=1 αk /3 , avec
αk ∈ {0, 1, 2}, la suite (αk ) n’étant pas stationnaire à 2 à partir d’un certain rang (propriété des
développements tri-adiques). Si les εk sont dans {0, 2}, on a l’équivalence
n
n
εk 1 εk
≤x< n + ⇐⇒ ∀k ∈ {1, . . . , n}, αk = εk ,
3k 3 3k
k=1 k=1
n
et compte tenu du fait que les réels de [0, 1[ de la forme 1/3n + k=1 εk /3
k
(avec εk ∈ {0, 2})
sont aussi ceux de la forme
p
βk
avec p ≤ n, βk ∈ {0, 2} pour 1 ≤ k ≤ p − 1, et βp = 1,
3k
k=1
p
— Si x est de la forme k=1 ε k /3k + 1/3p+1 avec ε k ∈ {0, 2}, alors pour tout n ≥ p + 1,
p n−1
1 εk 2
x− n
= + ∈ K.
3 3k 3k
k=1 k=p+1
(Indication. Se ramener au cas où inf y∈A f (y ) = 1, sup y∈A f (y ) = 2, et prendre g = f sur
1
A et g (x) = inf [f (y)d(x, y )] si x ∈ A.)
d(x, A) y∈A
Solution. Si f est constante, le résultat est évident, sinon en remplaçant f par α f + β avec
α = 0 et β des réels bien choisis, on peut supposer infy∈A f (y ) = 1 et supy∈A f (y ) = 2. Suivons
l’indication et construisons la fonction g : E → R définie par g (x) = f (x) si x ∈ A et
h(x)
∀x ∈ E A, g ( x) = , avec h(x) = inf (f (y)d(x, y )) ( ∗)
d(x, A) y∈A
(cette dernière expression est bien définie, car A étant fermé, on a d(x, A) = 0 si et seulement si
x ∈ A).
Les inégalités 1 ≤ f (x) ≤ 2 pour tout x ∈ A montrent que 1 ≤ g (x) ≤ 2 pour tout x ∈ E .
Comme g|A = f , on a même inf x∈E g (x) = 1 et supx∈E g (x) = 2.
Il nous reste à montrer la continuité de g en tout point x0 de E. Nous allons traiter les cas
◦
x0 ∈ A, puis x 0 ∈ E A, puis x 0 ∈ Fr(A).
◦
(i) Si x0 ∈ A, comme g |A = f et que f est continue sur A, g est continue en x0 .
6. PROBLÈMES 67
(ii) Supposons x0 ∈ E A. Sur l’ouvert E A, l’application g prend la forme (*), et comme
x → d(x, A) est continue (voir l’exercice 3, page 33), il nous suffit de montrer que h est continue
en x 0. Soit r > 0 tel que B(x 0, r) ⊂ E A. Pour tout x ∈ B(x0, r), pour tout y ∈ A,
h(x 0 ) ≤ f (y) d(x0, y) ≤ f (y)(d(x 0, x) + d(x, y)) ≤ 2d(x 0 , x) + f (y) d(x, y),
et ceci étant vrai pour tout y ∈ A, on en déduit, en ne considérant que les termes des extrémités
et en prenant la borne inférieure sur les y ∈ A, que h(x0 ) ≤ h(x) + 2d(x0 , x). De même,
h(x) ≤ h(x0 ) + 2d(x, x 0), donc finalement, |h(x 0) − h(x)| ≤ 2d(x 0 , x), ce qui prouve la continuité
de h en x0 ∈ E A.
(iii) Il reste le cas où x 0 ∈ Fr(A). Soit ε > 0. Comme f est continue en x 0 ∈ A,
∃r > 0, ∀y ∈ A ∩ B(x 0 , r), |f (y ) − f (x0)| ≤ ε.
Si x ∈ E A et d(x0 , x) ≤ r/4, on a, en notant C = A ∩ B(x0 , r) :
3r
∀y ∈ AC, d(x, y) ≥ d(x0 , y) − d(x0, x) ≥ ,
4
donc inf y∈AC f (y )d(x, y) ≥ 3r/4. D’autre part, f (x 0)d(x0 , x) ≤ 2d(x0 , x) ≤ r/2, donc
inf f (y )d(x, y ) = inf f (y )d(x, y),
y∈A y∈C
donc g (x0) − ε ≤ g (x) ≤ g (x 0) + ε pour tout x ∈ E A tel que d(x0 , x) ≤ r/4. Ceci reste vrai
si x ∈ A et d(x, x0 ) ≤ r/4 car c’est vrai pour f. Ainsi, g est continue en x 0 ∈ Fr(A), d’où le
résultat.
On peut alors extraire de la suite (αm) m∈N = (α 1,m, . . . , α n,m )m∈N une sous-suite (α ϕ(m)) telle
que
∀m ∈ N, ∀i, |αi,ϕ(m) − λ| ≥ ε. (∗∗)
Comme la suite (Pm) converge, elle est bornée. Notons M un majorant de (P m ). La suite
(α ϕ(m))m∈N est à valeur dans le compact K n , où K = {z ∈ C | |z | ≤ M } (d’après 1/). On peut
donc en extraire une sous-suite convergente (α ϕ◦ψ(m)) dont nous noterons α = (α1 , . . . , αn ) la
limite. Alors
n n
P = lim P ϕ◦ψ(m) = lim X − αi,ϕ◦ψ (m) = (X − αi ),
m→∞ m→∞
i=1 i=1
donc les αi sont les racines de P , donc il existe k tel que αk = λ. Or d’après (**), pour tout m,
|αk − α k,ϕ◦ψ (m) | ≥ ε. Ceci est contradictoire car (αk,ϕ◦ψ (m)) tend vers α k. D’où le résultat.
b) Nous allons procéder par récurrence sur n ∈ N∗ . Pour n = 1, c’est évident. Supposons le
résultat vrai au rang n − 1 et montrons le au rang n. Considérons la racine λn de P . D’après
la question précédente, on peut écrire P m = (X − αm )Qm pour tout m, où (αm ) converge vers
λn. Notons Q le polynôme de degré n − 1 tel que P = (X − λn )Q. En écrivant chacun des
polynômes Qm comme le quotient de la division euclidienne de Pm par (X − αm ), on s’aperçoit
que les coefficients de Qm s’expriment comme un polynôme en les coefficients de Pm et en α m.
Comme (αm ) tend vers λ et que (Pm ) tend vers P , on en déduit que (Qm) tend vers Q. D’après
l’hypothèse de récurrence, on peut donc écrire Q m = (X − λ 1,m) · · · (X − λ n−1,m ) pour tout m,
avec pour tout i limm→∞ λi,m = λi. Finalement, on a P m = (X − λ 1,m) · · · (X − λ n−1,m )(X − αm)
pour tout m et
∀i ∈ {1, . . . , n − 1}, lim λi,m = λ i et lim α m = λn ,
m→∞ m→∞
ce qui est précisément ce que l’on voulait montrer.
Remarque. On aurait pu répondre à la question 2/ a) sans utiliser la question 1/, en
utilisant le résultat suivant.
Lemme 1. Soit F ∈ C[X ] un polynôme unitaire de degré n et γ ∈ C.
Alors il existe une racine α de F telle que |α − γ| ≤ |F (γ )|1/n .
Le lemme se démontre en notant α 1, . . . , α n les racines de F et en lessupposant ordonnées
de sorte que |γ − α1 | ≤ |γ − αi| pour tout i. Alors on a |γ − α 1 |n ≤ ni=1 |γ − α i| = |F (γ )|
d’où le résultat.
Le fait que (Pm) tende vers P entraı̂ne que Pm(λ) tend vers P (λ) = 0. Le lemme nous
assure pour tout m l’existence d’une racine αm de P m telle que |λ − α m | ≤ |Pm(λ)|1/n .
Comme (Pm(λ)) tend vers 0, on en déduit que (α m ) tend vers λ, ce qui répond à la
question 2/ a).
2/ (Théorème d’Ascoli) Démontrer que les deux propositions suivantes sont équivalentes :
(i) A est relativement compacte (i.e son adhérence est compacte) dans C(X, Y ).
6. PROBLÈMES 69
Solution. 1/ Soit ε > 0. Comme A est équicontinue, pour tout x ∈ X il existe η x > 0 tel que
∀f ∈ F, ∀y ∈ X ; d(x, y) < 2η x ⇒ δ (f (x), f(y)) < ε.
On peut extraire du recouvrement d’ouverts ∪x∈X B(x, ηx ) du compact X, un recouvrement fini.
Autrement dit, il existe n ∈ N ∗ et des éléments x1 , . . . , xn ∈ X tels que X ⊂ ∪ 1≤i≤nB(xi, η x i).
Soit η = min1≤i≤n ηx i . On a η > 0. Soit x, y ∈ X tels que d(x, y ) < η. Soit i tel que d(x, xi ) < ηxi .
On a
d(x, x i) < ηxi < 2η xi donc δ (f (x), f(xi )) < ε
d(y, xi ) ≤ d(y, x) + d(x, xi ) < η + η xi ≤ 2η xi donc δ (f (y ), f(xi )) < ε.
On en déduit δ (f (x), f(y)) ≤ δ (f (x), f(xi ))+δ (f (xi ), f(y)) < 2ε. Ceci est vrai pour tout x, y ∈ X
tels que d(x, y) < η, donc A est bien uniformément équicontinue.
2/ Montrons (i) ⇒ (ii). Soit x ∈ X et ε > 0. Comme A est relativement compact, on peut le
recouvrir par un nombre fini de boules centrées dans A de rayon ε, c’est-à-dire
∃n ∈ N ∗, ∃f 1, . . . , fn ∈ A, A ⊂ ∪1≤i≤n B(fi , ε). (∗)
Chaque fonction fi est continue en x donc
∀i, ∃η i > 0; ∀y ∈ K, d(x, y) < η i ⇒ δ (f i(x), f i (y)) < ε.
Choisissons η = inf 1≤i≤n η i. Soit f ∈ A. D’après (*) , il existe i tel que f ∈ B(fi , ε). Avec ce
choix de η > 0, on a démontré (ii) car pour tous y ∈ K tel que d(x, y ) < η, on a l’inégalité
δ (f (x), f(y)) ≤ δ (f (x), fi (x)) + δ (f i (x), fi(y)) + δ (fi (y ), f(y)) < ε + ε + ε = 3ε.
- Montrons maintenant (ii) ⇒ (i). Suivons l’indication et démontrons que A est précompact
et complet. Montrons d’abord que A est précompact. Pour cela il suffit de montrer que A est
précompact. Soit ε > 0. On va montrer qu’on peut recouvrir A par un recouvrement fini de
boules de rayon 4ε. Pour tout x ∈ X , il existe ηx > 0 tel que
∀f ∈ F, ∀y ∈ X, d(x, y ) < ηx ⇒ δ (f (x), f(y)) < ε.
Du recouvrement d’ouverts ∪x∈XB(x, η x) de X on peut en extraire un sous-recouvrement fini
∪1≤i≤n B(xi , ηx i ), avec les x i ∈ X . Comme Y est compact on peut le recouvrir par un nombre
fini de boules de rayon ε > 0, autrement dit il existe m ∈ N ∗ et z1 , . . . , zm ∈ Y tels que
Y ⊂ ∪1≤j ≤m B(zj , ε). Pour tout n-uplet J = (j 1 , . . . , jn) de {1, . . . , m}n , on note
B J = {f ∈ C(X, Y ) | ∀i = 1, . . . , n, ∀x ∈ B (xi , ηx i ), δ(f (x), z ji ) < 2ε}.
Pour tout J = (j 1, . . . , jn ), BJ est inclus dans une boule de rayon 4ε. En effet, choisissons
arbitrairement fJ ∈ BJ . Soit f ∈ BJ . Pour tout x ∈ X , il existe i tel que x ∈ B(xi, ηxi ) donc
δ (f (x), zji ) < 2ε et δ (fJ (x), zji ) < 2ε. Donc δ (f (x), f J (x)) ≤ δ (f (z ), zji ) + δ (zji , f J(z)) < 4ε.
Ainsi, ∆(f, fJ ) < 4ε (le sup d’une fonction continue est atteint sur un compact donc l’inégalité
reste stricte) donc BJ ⊂ B(f J , 4ε). Par ailleurs, les BJ recouvrent bien A. En effet, soit f ∈ A.
Pour tout i, soit ji tel que f (xi ) ∈ B(zj i , ε). On a
∀x ∈ B (x i, η xi ), δ(f (x), zj i) ≤ δ (f (x), f (x i)) + δ (f (x i), z ji ) < 2ε.
En notant J = (j1 , . . . , jn ), on en déduit que f ∈ BJ .
Il nous reste à montrer que A est complet. Tout fermé dans un complet est complet, il nous
suffit donc de prouver que C(X, Y ) est complet. Pour cela, on considère une suite de Cauchy
(f n)n∈N de C(X, Y ). Pour tout p, q ∈ N et pour tout x ∈ X on a δ (fp (x), f q (x)) ≤ ∆(fp , fq ),
donc la suite (fn(x)) est de Cauchy. Cette suite est à valeur dans le compact Y , donc complet,
donc elle converge. En désignant par f (x) sa limite, on défini une fonction f de X dans Y .
Comme f est la limite uniforme des fonctions continues fn , elle est donc continue. Ainsi (fn )
converge vers f ∈ C(X, Y ).
70 1. TOPOLOGIE SUR LES ESPACES MÉTRIQUES ET LES ESPACES VECTORIELS NORM ÉS
1. Fonctions dérivables
1.1. Dérivabilité
Définition 1. Soient E un R-e.v.n, I un intervalle de R, f : I → E une application et
a ∈ I . On dit que f est dérivable en a si
f (t) − f (a)
lim
t→a
t∈I {a}
t−a
◦
Remarque 1. — Si a ∈ I , f est dérivable en a si et seulement si f est dérivable à
gauche, dérivable à droite en a et fg(a) = f d (a).
— Si f est dérivable en a, f est continue en a.
— Sur l’ensemble D des points où f est dérivable, on peut définir l’application a →
f (a) appelée application dérivée de f et notée f .
— L’application f est dérivable en a si et seulement si
∃ ∈ E, f (x) = f (a) + (x − a) + o(x − a) (x → a).
On a alors = f (a).
— Une fonction dérivée n’est pas forcément continue. Considérons par exemple
f : R → R x → x2 sin(1/x) si x = 0, 0 → 0.
Si x = 0, f est dérivable en x et on a f (x) = 2x sin(1/x) − cos(1/x). En 0, comme
−x2 ≤ f (x) ≤ x 2 pour tout x, on a
f (x) − f (0) f (x) − f (0)
−x ≤ ≤ x donc lim = 0,
x−0 x→0
x=0
x
en d’autres termes, f (0) existe et vaut 0. Cependant, on voit que f (x) n’admet
pas de limite lorsque x tend vers 0.
— Nous verrons cependant qu’une fonction dérivée vérifie toujours la propriété des va-
leurs intermédiaires (théorème de Darboux, voir l’exercice 4 page 80) et est continue
sur un ensemble dense (voir l’exercice 2 page 419). Par contre, il existe des fonctions
dérivées discontinues sur un ensemble dense (voir l’exercice 9 page 244).
— Une fonction dérivée, même bornée, n’est pas nécessairement Riemann-intégrable.
Par récurrence, on peut définir la fonction dérivée n-ième (lorsqu’elle existe) par
f = (f ) , f = (f ) , . . . , f (n) = (f (n−1)), . . . .
Une application f : I → E est dite de classe C n si f (n) existe sur I et y est continue. On
note parfois Cn (I, E) l’ensemble des applications de classe C n de I dans E . Lorsque f est
de classe Cn pour tout n, on dit que f est de classe C ∞ .
Proposition 1. Soient I un intervalle de R, f et g deux applications de I dans E ( où
E est un R-e.v.n), dérivables en a ∈ I . Alors
(i) Pour tout λ, µ ∈ R, λf + µg est dérivable en a et (λf + µg )(a) = λ f (a) + µ g (a).
(ii) Si E est une R-algèbre normée, le produit f g est dérivable en a et
(f g) (a) = f (a)g (a) + f (a)g (a).
(iii) Si E = R ou C et si g (a) = 0, le rapport f /g est dérivable en a et
f f (a)g (a) − f (a)g (a)
(a) = .
g g (a)2
Conséquence : En procédant par récurrence, on en déduit que la somme, le produit, le
rapport de deux fonctions de classe Cn est de classe C n .
Proposition 2 (Formule de Leibniz). Soient I un intervalle de R, f et g deux
applications de I dans une R-algèbre normée E et a ∈ I tel que f (n)(a) et g (n)(a) existent.
Alors le produit f g est n fois dérivable en a et
n
(n)
(f g) (a) = Cnk f (k) (a)g(n−k) (a),
k=0
f (a) = f (b)
x
0 a c b
f (b)
f (a)
x
0 a c b
de sorte que
∀x ∈ ]a, b[, ∃y > x, ∀t ∈ [x, y ], F (t) − F (x) ≤ g (t) − g(x). (∗)
Soit [α, β] ⊂ ]a, b[ et montrons
F (β ) − F (α) ≤ g (β ) − g (α). (∗∗)
Soit Γ = {θ ∈ ]α, β ], ∀t ∈ [α, θ ], F (t) − F (α ) ≤ g (t) − g (α)}. D’après (*), Γ est non vide. Soit
γ = sup Γ. Montrons γ = β , ce qui prouvera (**). Par continuité de F et g , on a F (γ )− F (α ) ≤
g (γ ) − g(α). Si γ < β, d’après (*),
∃δ ∈ ]γ, β ], ∀t ∈ [γ, δ ], F (t) − F (γ ) ≤ g (t) − g (γ ),
donc
∀t ∈ [γ, δ ], F (t) − F (α) ≤ F (t) − F (γ ) + F (γ ) − F (α) ≤ g (t) − g(α).
Ceci montre que δ ∈ Γ, ce qui est absurde car δ > γ = sup Γ.
L’assertion (**) est donc prouvée. En faisant tendre α vers a puis β vers b, on en déduit, en
vertu de la continuité de F et g , l’inégalité F (b) − F (a) ≤ g (b) − g(a).
– Ramenons nous au cas général. Pour tout ε > 0, on définit gε(t) = g (t) + εt. Pour tout ε > 0,
on a F (t) < g ε (t) sur ]a, b[ , donc d’après ce que l’on vient de prouver, F (b) − F (a) ≤
gε (b) − gε (a), d’où le résultat en faisant tendre ε vers 0.
Remarque 5. Lorsque F et g sont de classe C1 sur [a, b], le résultat s’obtient facilement
b b b
par intégration, en écrivant F (b) − F (a) = a F ≤ a F ≤ a g = g (b) − g (a).
Remarque 6. Dans le cas d’une fonction à valeurs réelles, cette inégalité s’obtient direc-
tement à partir de l’égalité des accroissements, sans utiliser le théorème précédent.
Une conséquence importante de l’inégalité des accroissements finis est la suivante.
Proposition 6. Soit F : [a, b[→ E une application continue, dérivable sur ]a, b[ et telle
→a F (t) existe. Alors F est dérivable en a et F (a) = .
que = lim xx>a
Démonstration. Quitte à changer F en F (t) − t on peut supposer = 0. Soit ε > 0. Par
hypothèse, il existe c ∈ ]a, b[ tel que F (t) < ε pour tout t ∈ ]a, c[. L’inégalité des accroissements
finis entraı̂ne
F (t) − F (a)
∀t ∈ ]a, c[, ≤ ε.
t−a
Ceci étant possible pour tout ε > 0, on en déduit que [F (t) − F (a)]/(t − a) converge vers 0
lorsque t tend vers a, d’où le résultat.
Solution. Le principe est le suivant. Lorsque n est grand, chacun des termes k/n 2 pour 0 ≤
k ≤ n est petit, donc au premier ordre, on a l’approximation f ( nk2 ) ≈ f (0)nk2 , de sorte que
n
Sn ≈ fn(0)
2
2
k=0 k ≈ /2f (0). Nous allons mettre rigoureusement en forme cette idée.
L’application f est dérivable en 0, donc f (x) = f (0) + x f (0) + o(x) = x f (0) + o(x). Ainsi,
si on se donne ε > 0,
∃η > 0, ∀x ∈ [0, η[, |f (x) − xf (0)| ≤ εx.
Soit N ∈ N∗ tel que /N < η . Pour tout n ≥ N et pour tout entier k vérifiant 0 ≤ k ≤ n, on a
k n
0≤ 2
≤ 2 = ≤ < η,
n n n N
donc
k k
∀n ≥ N, ∀k, 0 ≤ k ≤ n, f − f
(0) ≤ε k,
n2 n2 n2
de sorte que
n n
k
n
k k k
n
k
∀n ≥ N, f 2
− f (0) 2 ≤ f
2
− f (0) 2 ≤ ε . (∗)
n n n n n2
k=0 k=0 k=0 k=0
Or
n
k 1 n(n + 1) 2
2
= 2
= + ,
n n 2 2 2n
k=0
donc (*) s’écrit aussi
2
2 2 2
∀n ≥ N, Sn − f (0) − f (0) ≤ ε + ≤ 2ε.
2 2n 2 2n
On a donc
2 2 2 2 2
Sn − f (0) ≤ Sn − f (0) − f (0) + f (0) ≤ 2 ε + |f (0)| .
2 2 2n 2n 2n
Si on choisit N1 ≥ N tel que |f (0)|/(2N1 ) < ε, on a donc |Sn − f (0)2 /2| < 2 2ε pour tout
n ≥ N1 , ce qui prouve que (Sn ) converge et tend vers f (0)2 /2.
1. FONCTIONS DÉRIVABLES 79
(ϕ)
x
−2 −1 0 1 2
Solution. a) Il est clair que f est de classe C ∞ sur chacun des intervalles ] − ∞, 0[ et ]0, +∞[.
Il nous reste donc à prouver l’existence de f (n) (0) pour tout n ∈ N ∗ .
Commençons par montrer par récurrence sur n que
(n) −1/x 1
∀n ∈ N, ∃Pn ∈ R[X ], ∀x > 0, f (x) = e Pn . (∗)
x
Pour n = 0 c’est vrai avec P0 = 1. Supposons le résultat vrai au rang n − 1 et montrons le au
rang n. Il suffit d’écrire
(n)
(n−1) 1 −1/x 1 1 −1/x 1 −1/x 1
∀x > 0, f (x) = f (x) = 2 e Pn−1 − 2e Pn−1 =e Pn
x x x x x
avec Pn (X) = X 2 Pn−1 (X ) − X 2Pn−1 (X).
On déduit de (*) que lim x→0 f (x) = 0 pour tout n ∈ N∗ . Or pour x < 0, f (n) (x) = 0,
(n )
x>0
donc
∀n ∈ N∗ , lim f (n)(x) = 0.
x→0
x=0
En utilisant maintenant la proposition 6 page 76 par récurrence sur n, on en déduit que f (n) (0)
existe pour tout n et f(n) (0) = 0. Finalement, f est bien de classe C∞ sur R.
b) Nous allons donner deux manières de construire une telle fonction.
Première méthode. Considérons l’application
f (f (1) − f (x))
g: R→R x → .
f (f (1))
y
(g)
x
0 1
L’application g, composée de fonctions de classe C∞, est de classe C ∞ sur R. Par ailleurs,
f (f (1) − 0)
∀x ≤ 0, g(x) = =1
f (f (1))
∀x ≥ 1, f (1) − f (x) ≤ 0 =⇒ f (f (1) − f (x)) = 0 =⇒ g (x) = 0.
80 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
y
(g)
x
−1 0 1
Solution. 1/ L’application ϕ est clairement continue sur ]a, b], et elle est continue en a par
définition de f (a). Elle est donc continue sur [a, b], ce qui avec le théorème des valeurs in-
termédiaires entraı̂ne
f (b) − f (a)
(ϕ(a), ϕ(b)) = f (a), ⊂ ϕ([a, b]).
b−a
De même,
f (b) − f (a)
(ψ (a), ψ(b)) = , f (b) ⊂ ψ ([a, b]).
b−a
On en déduit
f (b) − f (a) f (b) − f (a)
(f (a), f (b)) ⊂ f (a), ∪ , f (b) ⊂ ϕ([a, b]) ∪ ψ ([a, b]).
b−a b−a
Or y ∈ (f (a), f (b)), donc y ∈ ϕ([a, b]) ∪ ψ([a, b]).
Si y ∈ ϕ([a, b]), deux cas se présentent.
1. FONCTIONS DÉRIVABLES 81
sur ]a, a + η]. On démontrerait de même l’existence d’un α > 0 tel que g (x) > g(b) sur [b − α, b[.
L’application g est continue sur le compact [a, b], donc il existe c ∈ [a, b] vérifiant g(c) =
sup x∈[a,b] g (x). D’après ce que l’on vient de voir, on a c = a et c = b. Donc c ∈ ]a, b[, et on en
déduit que g (c) = 0, d’où le résultat.
b) Considérons l’application g : I → R x → yx − f (x). Quitte à changer f en −f , on peut
supposer f (b) ≥ f (a). Comme y ∈ [f (a), f (b)], on a g (a) = y − f (a) ≥ 0 et g (b) = y − f (b) ≤
0. Le résultat de la question précédente entraı̂ne alors l’existence de c ∈ [a, b] tel que g (c) = 0.
On a donc y − f (c) = 0, donc y = f (c).
Remarque. Si f est de classe C 1 , ce théorème résulte tout simplement du théorème des
valeurs intermédiaires appliqué à la fonction dérivée f . Mais une fonction dérivée n’est
pas forcément continue (voir la remarque 1 page 71).
– Une démonstration de nature plus topologique de ce théorème fait l’objet de l’exercice 9
page 47.
– La réciproque du théorème de Darboux est fausse : une fonction vérifiant la propriété
des valeurs intermédiaires n’est pas forcément une fonction dérivée.
b) Soient a, b ∈ R, a < b, et f : [a, b] → R une application de classe C 5 sur [a, b]. Montrer
b−a a+b (b − a)5 (5)
∃θ ∈ ]a, b[, f (b) − f (a) = f (a) + f (b) + 4f − f (θ ).
6 2 2880
la constante A étant choisie telle que ϕ(α ) = 0. L’application ϕ est trois fois dérivable et on a
2 2 t t4
ϕ(t) = g (t) − g (0) − g (t) + A,
3 3 3 36
3
1 t t
ϕ (t) = g(t) − g (t) + A,
3 3 9
2
t t
ϕ(t) = − g (4) (t) + A.
3 3
Comme ϕ(0) = ϕ(α) = 0 le théorème de Rolle nous assure l’existence de α 1 ∈ ]0, α[ tel que
ϕ (α 1) = 0.
De même, l’égalité ϕ (0) = ϕ (α1) = 0 entraı̂ne l’existence de α2 ∈ ]0, α 1 [ tel que ϕ (α2 ) = 0.
Comme g est impaire, g est impaire donc g (0) = 0, donc ϕ(0) = ϕ (α 2 ) = 0, de sorte
qu’il existe α3 ∈ ]0, α 2[ tel que ϕ (α3 ) = 0.
Finalement, on a trouvé α3 ∈ ]0, α[ tel que
1 (4) g (4) (α3) − g (4) (0)
A= g (α 3) =
α3 α3 − 0
(on a g (4)(0) = 0 car g est impaire), et d’après le théorème des accroissements finis appliqué
à g (4) , on en déduit l’existence de θ ∈ ]0, α3 [ ⊂ ]0, α[ tel que A = g(5) (θ ). Le résultat est ainsi
prouvé car ϕ(α) = 0.
b) On pose α = b−2 a et g : [−α, α] → R x → f (x + a+ b a+b
2 ) − f (−x + 2 ). Ainsi définie, g est
impaire, et après avoir appliqué à g le résultat de la question précédente, on obtient
b−a b−a a+b
∃θ ∈ 0, , f(b) − f (a) = f (a) + f (b) + 4f
2 6 2
5
(b − a) (5) a+b (5) a+b
− f θ+ +f −θ + . (∗)
180 · 25 2 2
L’application f étant de classe C 5, f (5) est continue donc vérifie la propriété des valeurs in-
termédiaires, donc f (5)(]a, b[) est un intervalle. Comme
(5) a+b (5) (5) a+b
f θ+ ∈ f (]a, b[) et f −θ + ∈ f (5) (]a, b[),
2 2
on en déduit
1 (5) a+b (5) a+b
f θ+ +f −θ + ∈ f (5) (]a, b[),
2 2 2
donc
1 (5) a+b a+b
∃θ ∈ ]a, b[, f θ+ +f (5)
−θ + = f (5) (θ ),
2 2 2
d’où le résultat avec (*).
c) En appliquant le résultat de la question précédente à une primitive F de f sur [x 2i−2, x 2i]
pour tout i ∈ {1, . . . , n}, on obtient l’existence de θi ∈ ]x2i−2 , x2i [ tel que
x2i
b−a (x2i − x 2i−2 )5 (5)
f (t) dt − (f (x 2i−2 ) + 4f (x 2i−1) + f (x2i )) = f (θi),
x2i−2 6n 2880
donc
x 2i b−a (b − a)5
f (t) dt − (f (x2i−2) + 4f (x2i−1) + f (x2i )) ≤ M.
x2i−2 6n 2880n 5
Il ne reste plus qu’à sommer cette relation sur i et à utiliser l’inégalité triangulaire pour en
déduire le résultat.
Remarque. Le résultat de la question b) reste vrai si f est seulement supposée 5 fois
dérivable. En effet, le caractère continue de f (5) a été utilisé pour montrer que f (5) vérifie
la propriété des valeurs intermédiaires et on sait d’après le théorème de Darboux (voir
l’exercice 4) que ceci est vérifié pour toute fonction dérivée.
1. FONCTIONS DÉRIVABLES 83
Solution. Les hypothèses vérifiées par f entraı̂nent l’existence d’un plus petit entier p > n tel
que f (p) (0) = 0. La formule de Taylor-Young appliquée à f à l’ordre p donne, lorsque x → 0,
xn (n) xp (p)
f (x) = f (0) + xf (0) + · · · + f (0) + f (0) + o(xp),
n! p!
donc
xn (n) x n (n) xp
f (θ xx) = f (0) + f (p) (0) + o(xp ),
n! n! p!
donc lorsque x → 0, x =
0,
n! (p) n!
f (n) (θx x) − f (n)(0) = x p−n f (0) + o(xp−n ) ∼ x p−n f (p)(0). (∗)
p! p!
L’égalité de Taylor-Young appliquée à f (n) donne, lorsque x → 0, x = 0,
(θx x)p−n (p) (θ x) p−n (p)
f (n) (θx x) − f (n) (0) = f (0) + o(xp−n ) ∼ x f (0).
(p − n)! (p − n)!
Avec (*), on en déduit
1/(p−n) −1/(p−n)
(θx x)p−n x p−n n! (p − n)!n!
∼ donc lim θx = = C np .
(p − n)! x→0
x=0
p! x→0
x=0
p!
c) Montrer que
M
∀i ∈ {1, . . . , n}, |f (xi )| ≤ |xi − xj |.
n! j =i
Que dire si n = 2, a = x1 et b = x 2 ?
84 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Solution. a) S’il existe i tel que x = x i, c’est terminé. Sinon, on considère l’application
n
ϕx : [a, b] → R t → f (t) − A (t − xi ),
i=1
où la constante A est choisie telle que ϕx(x) = 0. Cette application est de classe C n et s’annule
(au moins) en n + 1 points distincts (x et les (xi )1≤i≤n ). En appliquant le théorème de Rolle, on
en déduit que ϕx s’annule en n points distincts. En l’appliquant ensuite à ϕ x, on en déduit en
(n)
ϕx s’annule en n − 1 points distincts. En poursuivant ainsi, on s’aperçoit que ϕx s’annule en
(n)
au moins un point u. On en déduit ϕx (u) = 0 = f (n) (u) − An!, donc A = f (n) (u)/n!, et comme
ϕx (x) = 0, on en déduit le résultat.
b) C’est une conséquence immédiate du résultat de la question précédente.
c) D’après la question précédente, pour tout x = x i on a
f (x) − f (xi) f (x) M
=
x − xi x − x i ≤ n! |x − xj |,
j =i
ce qui entraı̂ne
n−1 n−1
|f (x)| M
|f (x)| ≤ n−1 |x − xj| + |x − xi |
i=1 |x − xi| i=1 j =i
n! i=1
j =n
n−1
n−1
n
M M M
≤ |x − xn | |x − xj | + |x − x i | = |x − xj | .
n! i=1
n! i=1
n! i=1
j =i j =i
j =n
b) Montrer que si limt→+∞ f (t) = limt→+∞ f (n)(t) = 0, alors lim t→+∞ f (k)(t) = 0 pour
tout entier k tel que 0 < k < n.
c) Montrer que pour tout entier m, 1 ≤ m ≤ n, et pour tout entier k, 0 ≤ k ≤ m,
Solution. a) Soit x ∈ R. Pour tout i ∈ {1, . . . , n − 1}, il existe d’après le théorème de Taylor-
Lagrange θi,x ∈ ]0, i[ tel que
n−1
f (k) (x) f (n)
(x + θ i,x)
f (x + i) = f (x) + ik + in ,
k! n!
k=1
ce qui, en posant
in (n) f (k)(x)
Xi (x) = f (x + i) − f (x) − f (x + θi,x ) et Y k (x) =
n! k!
s’écrit Xi (x) = n−1 k
k=1 i Y k (x). En notant X (x) (resp. Y (x)) le vecteur colonne de R
n−1 dont les
composantes sont les Xi (x) (resp. Yi(x)), ceci s’écrit matriciellement X (x) = M Y (x) avec
1 1 ··· 1
2 22 ··· 2n−1
3 3 2 · · · 3n−1
M = .
.. .. ..
. . .
(n − 1) (n − 1)2 · · · (n − 1) n−1
On a det(M ) = Vandermonde(1, 2, . . . , n − 1) =
0, donc M est inversible. L’application linéaire
Rn−1 → Rn−1 X → M −1X est continue (on est en dimension finie) donc il existe A > 0 tel
que M −1 X ≤ AX pour tout X ∈ R n−1 . Les hypothèses sur f entraı̂nent que x → X (x) est
bornée, et comme Y (x) = M −1 X (x) ≤ AX (x), on en déduit que x → Y (x) est bornée,
ce qu’il fallait démontrer.
b) Comme limx→+∞ X (x) = 0, et que Y (x) ≤ AX (x), on en déduit limx→+∞ Y (x) = 0.
c) Comme indiqué, nous commençons par montrer
M 1 ≤ 2M0M 2 . (∗∗)
Soit x ∈ R. Pour tout h > 0,
2
∃θ1 ∈ ]0, 1[ f (x + h) = f (x) + hf (x) + h f (x + θ1 h)
2
2
h
∃θ2 ∈ ]0, 1[ f (x − h) = f (x) − hf (x) + f (x − θ2 h)
2
Ceci entraı̂ne
f (x + h) − f (x − h) h
f (x) = + [f (x − θ 2 h) − f (x + θ1 h)],
2h 4
donc
2M 0 h M0 h
|f (x)| ≤ + 2M 2 = + M2 .
2h 4 h 2
Ceci est vrai pour tout h > 0. On va donc choisir h tel que Mh0 + h2 M2 soit minimal. Une rapide
étude de la fonction ψ : R+ → R, h → Mh0 + h2 M2 montre qu’elle atteint son minimum pour
√
h = 2M M2 , point en lequel elle vaut
0
2M0 M2. Cette majoration étant vraie pour tout x, on en
déduit (**).
86 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Les suites (xn ) et (xn ) tendent vers x0 . Lorsque p ≥ n, les nombres 2p x n et 2pxn sont des entiers,
donc ∆(2p x n) = ∆(2 pxn) = 0. Maintenant, si p < n, on a
n
p
εk
2 p xn =N+ où N = 2 p−k ε k est un entier,
2k−p
k=p+1 k=1
donc
n
n
εk εk 1
∆(2p xn ) = ∆ , et de même ∆(2p xn ) = ∆ + . (∗)
2k−p 2k−p 2n−p
k=p+1 k=p+1
Si ε p+1 = 0, l’encadrement
n
n
εk 1 1 1 1
0≤ + ≤ + =
2 k−p 2 n−p 2k−p 2n−p 2
k=p+1 k=p+2
2. DÉVELOPPEMENTS LIMIT ÉS ET D ÉVELOPPEMENTS ASYMPTOTIQUES 87
montre que dans (*), les valeurs de ∆ sont prises sur un intervalle où ∆ croit, et étant donnée
la forme de ∆, on en déduit finalement
1
si ε p+1 = 0, ∆(2p xn ) − ∆(2p xn) = 2p (x n − xn ) = n−p.
2
On montrerait de même
1
si εp+1 = 1, ∆(2p xn ) − ∆(2 pxn) = − n−p .
2
En résumé, on a ∆(2p xn) − ∆(2 pxn ) = (−1)ε p+1 /2 n−p pour 0 ≤ p < n, donc finalement
n−1
n−1
(−1)ε p+1 f (xn ) − f (xn )
f (xn ) − f (xn ) = ou encore = (−1) εp+1 ,
p=0
2n xn − x n p=0
f (x
n)−f (x n)
ce qui montre que la suite (yn ) définie par y n = x ne converge pas. Si maintenant f
n −x n
est dérivable en x0, on a
f (xn) − f (x 0) = (x n − x 0 )[f (x0) + εn ] et f (xn ) − f (x0) = (x n − x 0)[f (x0) + ε n]
où les suites (εn ) et (ε n ) tendent vers 0. Par différence, on a
f (xn ) − f (xn) = (xn − xn)f (x0) + (x 0 − xn)εn + (xn − x 0 )εn,
et comme x n ≤ x0 ≤ xn , ceci entraı̂ne
|f (xn ) − f (x n) − (xn − x n)f (x0 )| ≤ (x n − x n)(εn + εn ) donc |yn − f (x 0)| ≤ εn + ε n,
donc (yn ) converge vers f (x0 ), ce qui est contradictoire. Donc f n’est pas dérivable en x0 , d’où
le résultat.
Remarque. Une méthode non constructive de la preuve de l’existence d’une fonction
continue jamais dérivable est donnée à l’exercice 4 page 421.
Remarque 8. — Il faut prendre garde au fait que les notations de Landau sont des
abus. Lorsqu’on écrit f (x) = O (g (x)) par exemple, il n’y a pas à proprement parler
d’égalité (si f1(x) = O (g (x)) et f2 (x) = O (g (x)), on ne peut pas dire f1(x) = f 2(x))
— une notation correcte serait f (x) ∈ O (g (x)). Cependant, l’usage est bien établi
et cette notation est très commode, c’est pourquoi on l’utilise beaucoup.
— Dans la pratique, on utilisera souvent cette notation pour des fonctions R → C,
au voisinage d’un point de R ou de l’infini, ou pour des suites réelles ou complexes
(un) lorsque n → +∞.
— Attention ! La relation ∼ se manie avec précaution. En particulier, elle n’est pas
compatible avec l’addition, par exemple
x+2 ∼ x + 1, −x ∼ −x et pourtant 2 ∼ 1.
x→+∞ x→+∞ x→+∞
x2 xn
ex = 1 + x + + ··· + + o(x n)
2! n!
x 3 x5 p x
2p+1
sin x = x− + + · · · + (−1) + o(x2p+2)
3! 5! (2p + 1)!
2 4
x x x2p
cos x = 1− + + · · · + (−1)p + o(x 2p+1)
2! 4! (2p)!
x 3 x5 x2p+1
sinh x = x+ + + ··· + + o(x2p+2)
3! 5! (2p + 1)!
x2 x4 x2p
cosh x = 1+ + + ··· + + o(x2p+1)
2! 4! (2p)!
α α(α − 1) 2 α(α − 1) · · · (α − n + 1) n
∀α ∈ R, (1 + x)α = 1+ x+ x + ··· + x + o(xn )
1! 2! n!
En particulier
1
= 1 − x + x 2 − · · · + (−1)n xn + o(xn )
1+x
√ x 1 1·3 3 1 · 3 · · · (2n − 3) n
1+x = 1+ − x2 + x + · · · + (−1)n−1 x + o(xn)
2 2·4 2·4·6 2 · 4 · · · (2n)
√ x 1 1·3 3 1 · 3 · · · (2n − 3) n
1−x = 1− − x2 − x − ···− x + o(xn)
2 2·4 2·4·6 2 · 4 · · · (2n)
1 1 1·3 2 1 · 3 · · · (2n − 1) n
√ = 1− x+ x + · · · + (−1)n x + o(x n)
1+x 2 2·4 2 · 4 · · · (2n)
1 1 1·3 2 1 · 3 · · · (2n − 1) n
√ = 1+ x+ x + ··· + x + o(xn)
1−x 2 2·4 2 · 4 · · · (2n)
1 1 1 1
En intégrant respectivement les développements limités de 1+x , 1+x2
, 1−x 2
, √1−x 2,
x2 x 3 n−1 x
n
log(1 + x) = x − + + · · · + (−1) + o(x n)
2 3 n
x3 x 5 x 2n+1
arctan x = x − + + · · · + (−1)n + o(x2n+2 )
3 5 2n + 1
x3 x 5 x2n+1
argth x = x + + + ··· + + o(x2n+2 )
3 5 2n + 1
1 3 1·3 5 1 · 3 · · · (2n − 1)
arcsin x = x + x + x + ··· + x2n+1 + o(x 2n+2)
2·3 2·4·5 2 · 4 · · · (2n) · (2n + 1)
1 3 1·3 5 (−1)n · 1 · 3 · · · (2n − 1) 2n+1
argsh x = x − x + x + ··· + x + o(x 2n+2)
2·3 2·4·5 2 · 4 · · · (2n) · (2n + 1)
Enfin, le développement limité de la fonction x → tan x peut être effectué grâce à la
proposition 13. Les calculs sont un peu lourds dès que l’on veut dépasser l’ordre 4, c’est
pourquoi il est bon de connaı̂tre ses premiers termes :
x3 2 5 17 7
tan x = x + + x + x + o(x 8).
3 15 315
92 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Remarque 13. Celui de tan x mis à part, il n’est pas nécessaire d’apprendre par cœur ces
développement limités. Il faut par contre savoir les retrouver rapidement.
2.6. Formes indéterminées
Beaucoup d’exercices exigent de connaı̂tre les développements limités pour trouver la
limite d’une forme indéterminée. Par exemple, nous allons montrer l’existence et donner
tan x − x
la valeur de lim
x→0 sin x − x
. Les développements limités usuels donnent
x=0
x3 x3 x3 x3
+ o(x 3) ∼ −
sin x − x = − et tan x − x = + o(x3 ) ∼ ,
6 6 3 3
tan x − x
et on en déduit lim
x→0 sin x − x
= −2.
x=0
2.7. Exercices
Exercice 1. Donner le développement limité au voisinage de 0 à l’ordre 4 des fonctions
suivantes 1/2
√ sin x
a) x → 1 + 1 + x 2 b) x → log
x
1 1
c) x → (1 + 2x)1/(1+x) d) x → 2
−
x sinπx sinh2 x
e) x → esinh x − log tan + .
2 4
√ 2
Solution. a) Le développement limité 1 + u = 1 + u2 − u8 + o(u2 ) entraı̂ne
1/2
x2 x 4
1/2
√
x2 x 4
1/2
2 4 4
1+ 1+x = 1+ 1+ − + o( x ) = 2 1+ − + o( x ) ,
2 8 4 16
ce qui, par composition des développements limités est égal à
2
√ 1 x2 x4 1 x2 4
√ 1 2 5 4 4
2 1+ − − + o( x ) = 2 1 + x − x + o( x ) .
2 4 16 8 4 8 158
b)
2
sin x x2 x4 4 x2 x4 1 x2
log = log 1 − + + o( x ) = − + − + o(x4 )
x 6 120 6 120 2 6
x2 x4
=− − + o(x 4).
6 180
c) En procédant de même, on trouve
1/(1+x) log(1 + 2x) 10 4
(1 + 2x) = exp = 1 + 2x − 2x2 + x + o(x 4 ).
1+x 3
d) Cette fois, on commence par développer sin x et sinh x à l’ordre 7, ce qui entraı̂ne
−2 −2
1 1 1 x2 x4 x6 6 x2 x4 x6 6
− = 2 1− + − + o( x ) − 1+ + + + o( x ) .
sin 2 x sinh2 x x 6 120 7! 6 120 7!
En utilisant le développement limité (1 + u) −2 = 1 − 2u + 3u 2 − 4u3 + 5u 4 + o(u4) on trouve,
après calculs
1 1 2 4 4
2
− 2
= + x + o(x 4 ).
sin x sinh x 3 189
2. DÉVELOPPEMENTS LIMIT ÉS ET D ÉVELOPPEMENTS ASYMPTOTIQUES 93
e) On commence par calculer le développement de ϕ(x) = log tan(x2 + π4 ) . Le moyen le plus
simple est certainement de remarquer que
1 1 x2
ϕ (x) = = 2 = 1 + + o(x3 )
cos x 1 − x2 + o(x3 ) 2
puis d’intégrer ce développement limité, ce qui donne
x3 x3
ϕ(x) = ϕ(0) + x + + o(x4 ) = x + + o(x 4 ).
6 6
Maintenant, après calculs
x2 x3 5
esinh x = 1 + x + + + x4 + o(x 4 ),
2 3 24
et finalement
x π
sinh x x2 x3 5
e − log tan + =1+ + + x4 + o(x 4).
2 4 2 6 24
Solution. Tout le problème, dans ce type d’exercices, est de sentir à l’avance jusqu’à quel ordre
on va devoir développer pour obtenir le résultat.
a) On développe jusqu’à l’ordre 3
x3 x3 x3 x3
esin x − etan x = − + o(x3 ) ∼ − , sin x − tan x = − + o( x 3 ) ∼ − ,
2 2 2 2
donc l’expression proposée est équivalente à 1, donc a pour limite 1 lorsque x → 0+ .
b) Comme x log x = o(1), on a
x
x x = xexp(x log x) = x 1+x log x+o(x log x) = x · exp (log x(x log x + o(x log x))) ∼ x
et
xx − 1 = ex log x − 1 ∼ x log x,
et on en déduit facilement que la limite recherchée est 1.
c) On écrit
log x/x log x x2 2 log x
(1 + x) = exp log(1 + x) = exp (x − + o(x ))
x 2 x
x x
= exp log x − log x + o(x log x) = x · exp − log x + o(x log x)
2 2
x x2
= x · 1 − log x + o(x log x) = x − log x + o(x 2 log x)
2 2
ce qui montre que le numérateur de l’expression est équivalent à −x 2 log x/2 lorsque x → 0 +.
Le dénominateur vérifie
x(x x − 1) = x(ex log x − 1) ∼ x · x log x = x2 log x,
et finalement, la limite recherchée est égale à −1/2.
d) Lorsque u → 0+ , on a
1 1 1 1 1 1
cot u = = = · = +o
tan u u + o(u) u 1 + o(1) u u
donc
cot x2 1 1 x2 2
(cos x) = exp +o log 1 − + o( x )
x2 x2 2
2
1 1 x 2 1
= exp +o − + o( x ) = exp − + o(1) ,
x2 x2 2 2
√
ce qui montre que la limite recherchée est 1/ e.
e) Il y a une astuce à connaı̂tre.
Posons y = arccos(1 −x). On a 1−x = cos y donc x = 1−cos y =
2
2 sin (y/2), d’où sin y/2 = x/2 et finalement y = 2 arcsin x/2. Cette relation permet de
calculer un nombre de termes quelconque du développement asymptotique de arccos(1 − x)
lorsque x → 0+ (un autre moyen de faire est de calculer un développement asymptotique de la
dérivée de arccos(1 − x) — qui a une forme suffisamment explicite — puis de l’intégrer). En
particulier,
x √
arccos(1 − x) ∼ 2 = 2 x,
2
√
et on en déduit que la limite recherchée est 2.
3. FONCTIONS CONVEXES, FONCTIONS RÉGL ÉES 95
Solution. a) On écrit
log(x + 1) log x + log(1 + 1x ) 1 1
= =1+ +o ,
log x log x x log x x log x
donc
log(x + 1) x 1 1
− 1 log x = exp x log 1 + +o − 1 log x
log x x log x x log x
x 1 1 1
= exp +o − 1 log x = 1 + +o − 1 log x = 1 + o(1),
x log x log x log x log x
et la limite recherchée est 1.
b) Le développement limité
1 x 1 1 1 1
1+ = exp x log 1 + = exp x − 2 +o
x x x 2x x2
1 1 1 1
= exp 1 − +o = e 1− +o
2x x 2x x
montre que
1 x e 1
e− 1+ = +o ,
x 2x x
donc l’expression proposée est égale à
1/x
e 1 1 e 1
+o = exp log +o = eo(1)
2x x x 2x x
et sa limite est donc 1 lorsque x → +∞.
y
(f )
f (b)
f (a)
x
0 a b
Figure 6. Entre a et b, les points du graphe de la fonction convexe f se
trouvent en dessous de la corde reliant les points (a, f (a)) et (b, f (b)).
est croissante.
Conséquence : Si f : I → R est convexe et si a, b, c ∈ I , avec a < b < c, on a (en
appliquant la proposition précédente à ga puis à g c) l’inégalité suivante entre les taux de
variation (voir aussi la figure ci-contre)
f (b) − f (a) f (c) − f (a) f (c) − f (b)
≤ ≤ .
b−a c−a c−b
y (f )
x
0 a b c
Figure 7. La propriété de croissance de la pente des cordes pour une
fonction convexe f .
Théorème 2 (In égalité de H ölder). Soient deux nombres réels p, q > 0 tels que
1
p
+ 1q = 1. Pour tous nombres réels positifs a 1 , . . . , an et b 1, . . . , bn on a
n
n 1/p n 1/q
p q
a ibi ≤ ai bi .
i=1 i=1 i=1
(on peut supposer qu’au moins l’un des ai et l’un des bj sont non nuls, sinon l’inégalité de Hölder
est immédiate) on tire
a b ap bq
ip 1/p · iq 1/q ≤ i p + i q ,
( j aj ) ( j bj ) p( j aj ) q( j bj )
puis en sommant sur i n
p 1/p i=1 a b 1 1
i i q 1/q ≤ + = 1,
( j a j ) ( j bj ) p q
d’où l’inégalité désirée.
et n 1/p 1/q
n
n
yi(xi + yi ) p−1 ≤ y pi (xi + yi ) q(p−1) ,
i=1 i=1 i=1
ce qui par sommation entraı̂ne (sachant que q (p − 1) = p)
1/p n 1/p n 1/q
n
n
p p
(x i + y i) ≤
p
xi + yi (xi + yi) p
donc n 1−1/q n n
p 1/p p 1/p
(xi + yi )p ≤ xi + yi ,
i=1 i=1 i=1
(on peut supposer que les xi et yj sont non tous nuls — sinon l’inégalité est évidente — ce qui
autorise à simplifier) d’où le résultat car 1 − 1/q = 1/p.
Conséquence : Pour tout p ≥ 1, considérons la fonction de Rn dans R définie par
n 1/p
N (x1 , . . . , x n ) = |x i| p .
i=1
L’inégalité de Minkowsky entraı̂ne que N vérifie l’inégalité triangulaire. On en déduit
facilement que N est une norme sur Rn. On la note souvent . p . Remarquons aussi que
sup |xi | = (x1 , . . . , xn)∞ = lim (x 1, . . . , x n)p .
i p→∞
Définition 4. Une application f : [a, b] → E est dite continue par morceaux s’il existe
une subdivision a = x 0 < x 1 < · · · < x n = b de [a, b] telle que la restriction de f à chaque
intervalle ouvert ]x i−1, x i[ soit prolongeable en une fonction continue sur l’intervalle fermé
[xi−1, x i].
Remarque 3. — La condition “prolongeable en une fonction continue sur [xi−1, x i]”
est importante ; elle équivaut à dire que la limite à droite (resp. à gauche) de f (x)
lorsque x tend vers xi−1 (resp. vers x i ) existe.
— L’ensemble C m([a, b], E) des fonctions à valeurs dans E et continues par morceaux
sur [a, b] est un espace vectoriel. Si E est une algèbre, Cm([a, b], E) est une algèbre.
3. FONCTIONS CONVEXES, FONCTIONS RÉGL ÉES 99
Proposition 5. Toute fonction continue par morceaux sur [a, b] est réglée.
Démonstration. On montre d’abord le résultat pour une fonction continue f : [a, b] → E .
Comme [a, b] est compact, f est uniformément continue sur [a, b] d’après le théorème de Heine.
Ainsi, si on se donne ε > 0,
∃α > 0, ∀x, y ∈ [a, b], |x − y | < α, f (x) − f (y) < ε. (∗)
Considérons une subdivision a = x0 < x1 < · · · < x n = b de [a, b] telle que xi − xi−1 < α pour
tout i ∈ {1, . . . , n} et construisons une application ϕ : [a, b] → E de la manière suivante :
xi−1 + x i
∀i, ϕ(xi ) = f (xi ) et ∀i, ∀x ∈ ]xi−1, x i[, ϕ(x) = f .
2
Cette fonction est en escalier et elle vérifie f (x) − ϕ(x) < ε pour tout x ∈ [a, b] d’après (*).
La fonction f est donc réglée.
Considérons maintenant le cas d’une fonction continue par morceaux pour une subdivision
a = x0 < x 1 < · · · < xn = b. Soit ε > 0. La restriction fi de f sur ]xi−1 , x i [ se prolonge en
une fonction continue fi sur [x i−1 , xi], donc on peut trouver une fonction en escalier ϕ i vérifiant
fi −ϕ i < ε sur ]x i−1, xi [. La fonction ϕ construite sur [a, b] par ϕ(x) = ϕ i(x) pour x ∈ ]x i−1 , xi [
et ϕ(xi) = f (x i) est en escalier et par construction, f − ϕ < ε sur [a, b] tout entier. Ainsi f
est une fonction réglée.
Solution. Supposons f non constante, de sorte qu’il existe x, y ∈ R, x < y, avec f (x) =
f (y ).
— Si f (x) < f (y), la convexité de f entraı̂ne
f (z ) − f (y ) f (y ) − f (x)
∀z > y, ≥ = a ou encore f (z ) ≥ f (y) + a(z − y ).
z−y y−x
Comme f (y ) > f(x), on a a > 0 et donc limz→+∞ f (z ) = +∞ ce qui est contraire aux
hypothèses.
— Si f (x) > f (y), on montrerait de même que lim z→−∞ f (z ) = +∞, d’où l’absurdité.
L’application f est donc constante.
Le résultat est faux lorsque les hypothèses ne sont vraies que sur R+ , comme le montre
l’exemple de la fonction f : R + → R x → 1+x 1
.
f (x) − f (0)
Solution. a) Comme f est convexe, la fonction R+∗ → R x → est croissante.
x−0
f (x) − f (0)
Donc lim existe, et cette limite n’est autre que . On a d’ailleurs ∈ R ∪ {+∞}
x→+∞ x
(on peut avoir = +∞ comme le montre l’exemple de la fonction x → x2 ).
b) L’application g : R + → R x → f (x) − x est convexe (somme de deux fonctions convexes),
et elle vérifie limx→+∞ g(xx) = 0.
Montrons que g est décroissante. Soient a, b ∈ R+, a < b. Comme g est convexe, la fonction
g (x) − g (a) g (x) − g (a) g (x)
x → est croissante. Or lim = lim = 0. Donc pour tout x = a,
x−a x→+∞ x−a x→+∞ x
g (x) − g (a)
≤ 0. En appliquant ceci à x = b, on en déduit g (b) ≤ g (a).
x−a
Une fonction décroissante sur R+ admet toujours une limite en +∞, donc limx→+∞ g (x) =
limx→+∞ f (x) − x existe. Cette limite appartient à R ∪ {−∞} (elle peut valoir −∞ comme le
montre l’exemple de la fonction x → − log(1 + x)).
Condition suffisante. Soit [a, b] un sous-intervalle fermé de I . On choisit µ de sorte que ϕ(a) =
ϕ(b), c’est-à-dire que l’on considère l’application
f (b) − f (a)
ϕ : [a, b] → R x → f (x) − x.
b−a
Ainsi on a bien ϕ(a) = ϕ(b). Par hypothèse on a
∀λ ∈ [0, 1], ϕ(λa + (1 − λ)b) ≤ ϕ(a) = ϕ(b)
et en remplaçant ϕ par son expression en fonction de f , on vérifie facilement que ceci s’écrit
aussi
∀λ ∈ [0, 1], f (λa + (1 − λ)b) ≤ λf (a) + (1 − λ)f (b).
Ceci étant vrai pour tout [a, b] ⊂ I, on en déduit que f est convexe.
Remarque. Ce critère rend parfois des services pour démontrer la convexité d’une fonction
(voir les deux exercices qui suivent).
d’où le résultat.
Condition suffisante. Utilisons le critère de l’exercice 3. Si f n’était pas convexe, il existerait un
sous-intervalle fermé [a, b] de I et µ ∈ R tels que l’application ϕ : [a, b] → R x → f (x) + µx
n’admet pas son maximum en a ou en b. L’application ϕ étant continue, il existe c ∈ [a, b]
tel que ϕ(c) = supx∈[a,b] ϕ(x), et par construction, on a ϕ(c) > ϕ(a) et ϕ(c) > ϕ(b). Soit
h = inf{b − c, c − a}. La continuité de ϕ entraı̂ne
c+h c+h
ϕ(t) dt < ϕ(c) dt = 2hϕ(c),
c−h c−h
Solution. a) La condition nécessaire est évidente. Pour montrer la condition suffisante, nous
allons utiliser le critère donné dans l’exercice 3.
Soit [a, b] ⊂ I et µ ∈ R. On vérifie immédiatement que l’application ϕ : [a, b] → R x →
f (x) + µx vérifie les mêmes hypothèses que f . Il s’agit de montrer que ϕ atteint son maximum
sur [a, b] en a ou en b. Comme ϕ est continue sur le compact [a, b], ϕ est bornée et atteint ses
bornes. Si on désigne par M son maximum, l’ensemble Γ = ϕ −1 ({M }) est donc non vide. Soit
c = inf Γ. La continuité de ϕ entraı̂ne que Γ est fermé, donc c ∈ Γ, donc ϕ(c) = M . Si a < c < b,
alors par hypothèse
1
∃h > 0, (a < c − h < c < c + h < b et
ϕ(c) ≤ [ϕ(c − h) + ϕ(c + h)]).
2
Comme ϕ(c) = supx∈[a,b] ϕ(x), cette dernière inégalité entraı̂ne ϕ(c − h) = ϕ(c + h) = ϕ(c) = M ,
ce qui est contradictoire avec la définition de c. Donc c = a ou c = b et le résultat est prouvé.
b) Pour tout α > 0, on définit l’application f α : I → R x → f (x) + αx2 . On a
fα(x + h) + f α(x − h) − 2fα (x) f (x + h) + f (x − h) − 2f (x)
∀x ∈ I, ∀h > 0, = + 2α,
h2 h2
et donc en vertu des hypothèses vérifiées par f ,
◦ fα(x + h) + f α (x − h) − 2fα (x)
∀ε > 0, ∀x ∈ I, ∃h ∈ ]0, ε[, ≥ α > 0,
h2
ce qui entraı̂ne
◦ 1
∀ε > 0, ∀x ∈ I, ∃h ∈ ]0, ε[, f α (x) ≤
[fα(x + h) + f α (x − h)],
2
ce qui prouve la convexité de f α d’après le résultat de la question précédente.
Ainsi l’application f , limite simple de fonctions convexes (les applications fα lorsque α → 0+)
est convexe.
c) L’application f vérifie les hypothèses de la question précédente donc est convexe. Ceci est vrai
également pour −f donc f est concave. Une fonction convexe et concave est forcément affine,
d’où le résultat.
Remarque. Un corollaire du résultat de la question a) est le suivant.
x+y 1
Si f est continue sur I et vérifie f ≤ [f (x) + f (y)] pour tout
2 2
2
(x, y ) ∈ I , alors f est convexe.
Ceci peut être démontré directement, en procédant comme suit :
— On se donne x et y ∈ I .
4. PROBLÈMES 103
4. Problèmes
Problème 1. Soit f : R+ → R une application continue en 0 vérifiant
f (x) − f (kx)
∃k ∈ ]0, 1[, = x→0
lim existe.
x>0
x
104 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Problème 2. Soit f : [0, 1] → R une application dérivable telle que f (0) = f (0) = 0 et
f (1) = 0. Montrer
f (c)
∃c ∈ ]0, 1], f (c) = .
c
Solution. Commençons par donner l’idée de la preuve. L’égalité f (c) = f (c)/c exprime le
f (c)
x
0 c 1
fait que la droite passant par l’origine et le point (c, f (c)) est tangente au graphe de f (voir la
figure ci-contre). En regardant la figure, on s’aperçoit d’ailleurs que le point correspondant est
un extremum relatif de la fonction “pente” x → f (x)/x.
Cette remarque nous invite à considérer l’application
f (x)
g : [0, 1] → R x → si x = 0, g(0) = f (0) = 0,
x
qui est continue sur [0, 1] et dérivable sur ]0, 1], avec
xf (x) − f (x)
∀x ∈ ]0, 1], g (x) = . (∗)
x2
Si f (1) = 0 le résultat est évident en prenant c = 1. Sinon, nous allons prouver que g admet un
extremum en point intérieur à [0, 1]. Quitte à considérer −g, on peut supposer g(1) > 0. Soit
4. PROBLÈMES 105
c ∈ [0, 1] tel que g(c) = supx∈[0,1] g (x) (un tel point c existe car g est continue sur le compact
g (1) − g (x)
[0, 1]). On a c = 1 sinon on aurait g (1) = lim ≥ 0, ce qui est absurde vu que
x→1 1−x
g(1) = −f (1) < 0. On a aussi c = 0 car g (c) ≥ g (1) > 0 = g(0). Ainsi, c est un point intérieur à
[0, 1] où g atteint son maximum, donc g (c) = 0, ce qui donne f (c) = f (c)/c grâce à l’expression
(*).
Problème 3 (e n’est pas algébrique d’ordre 2). Montrer que e n’est pas algébrique
d’ordre 2, c’est-à-dire qu’on ne peut pas trouver trois entiers a, b, c non tous nuls tels que
ae2 + be + c = 0. (Indication : raisonnez par l’absurde en considérant le développement
de Taylor de la fonction f (x) = aex + ce −x).
Solution. a) Tout repose sur le principe suivant : si un polynôme Q ∈ R[X ] a r racines réelles
(comptées avec leur ordre de multiplicité), alors son polynôme dérivé Q a au moins r − 1
racines réelles. En effet, si u1 < · · · < u k sont les racines réelles d’un polynôme Q ∈ R[X ]
106 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Démontrer l’existence d’une suite (xn ) strictement croissante à valeurs positives telle que
f (n) (xn ) = 0 pour tout n ∈ N∗.
Solution. Nous allons construire cette suite par récurrence. Commençons par n = 1. La fonction
f étant nulle à l’origine et tendant vers 0 en +∞, elle n’est pas strictement monotone. Ainsi,
la fonction dérivée f prend des valeurs positives et négatives, ce qui entraı̂ne qu’elle s’annule
en au moins un point x 1 ∈ R+ d’après le théorème des valeurs intermédiaires et en vertu de la
continuité de f . Ainsi, nous avons construit x 1 ≥ 0 tel que f (x 1) = 0.
Pour passer du rang n ≥ 1 au rang n + 1, on généralise la technique utilisée pour n = 1.
Supposons xn construit et montrons l’existence de x n+1 > x n tel que f (n+1)(xn+1) = 0. Pour
cela, raisonnons par l’absurde en supposant f (n+1) (x) = 0 pour tout x > xn . La continuité de
f (n+1) entraı̂ne que f (n+1) garde un signe constant sur ]x n , +∞[, par exemple strictement positif
(quitte à changer f en −f ). Ainsi, f (n) est une fonction strictement croissante sur [xn , +∞].
4. PROBLÈMES 107
On montrerait de même que limx→−∞ g (x) = −∞. Tout ceci permet de conclure que g est une
bijection de R sur R.
b) Par récurrence sur n on obtient
∀n ∈ N ∗, ∀x ∈ R, g n(x) = ng (x) − (n − 1)x. (∗)
En effet, la relation est vraie pour n = 1 ; pour passer du rang n au rang n + 1 on part de la
relation (*) dans laquelle on remplace x par g (x), ce qui donne
∀x ∈ R, g n+1(x) = ng 2(x) − (n − 1)g (x) = n(2g (x) − x) − (n − 1)g(x) = (n + 1)g(x) − nx.
On peut récrire la relation (*) sous la forme
g n(x) − g n (0) x
∀x ∈ R, ∀n ∈ N∗ , = g (x) − g (0) − x + .
n n
Comme g est croissante, gn également donc pour tout n ∈ N ∗
x x
∀x ≥ 0, g(x) − g (0) − x + ≥ 0 et ∀x ≤ 0, g(x) − g(0) − x + ≤ 0.
n n
En fixant x puis en faisant tendre n vers l’infini, on obtient
∀x ≥ 0, g(x) − g (0) − x ≥ 0 et ∀x ≤ 0, g(x) − g (0) − x ≤ 0. (∗∗)
Nous avons démontré à la question précédente que g est une bijection de R sur R. Sa bijection
réciproque g−1 est continue et vérifie
∀x ∈ R, g 2 [g −2(x)] = 2g [g−2 (x)] − g−2 (x) ou encore g −2(x) = 2g −1 (x) − x.
108 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Autrement dit, g−1 vérifie les mêmes hypothèses que g . On en conclut que (**) est vrai pour
g−1 , ce qui s’écrit
∀x ≥ 0, g−1 (x) − g−1 (0) − x ≥ 0 et ∀x ≤ 0, g−1 (x) − g −1 (0) − x ≤ 0.
En utilisant la relation g−1(x) = 2x − g (x) (qui découle de g 2 = 2g − Id après composition à
droite par g −1), on en déduit
∀x ≥ 0, g(x) − g (0) − x ≤ 0 et ∀x ≤ 0, g(x) − g (0) − x ≥ 0. (∗∗∗)
Avec (**), on en conclut que g (x) = x + g(0) pour tout x ∈ R.
Réciproquement, on vérifie facilement que toute fonction de la forme g : x → x + K vérifie
les hypothèses de l’énoncé.
Solution. a) Si f (x) = αxβ , alors f (x) = αβxβ−1 et f −1 (x) = (x/α)1/β = (1/α)1/β x1/β .
Remarquons que f > 0 donc α = f (1) > 0. On a également f = f −1 > 0, donc f (1) = αβ > 0
ce qui entraı̂ne β > 0.
On aura f = f −1 si αβ = (1/α √
)1/β et si β − 1 = 1/β. La dernière équation s’écrit aussi
1+ 5
β2 − β − 1 = 0, dont β = ϕ = 2 est la seule solution positive. L’autre équation admet la
solution α = ϕ−ϕ/(ϕ+1) (comme ϕ + 1 = ϕ 2 on a l’expression plus simple α = ϕ −1/ϕ). Ainsi
choisis, α et β répondent bien au problème.
b) Si f ∈ E alors f −1 > 0 donc f = f −1 est positive. Donc f est croissante, et donc f (x)
converge forcément vers = inf x>0 f (x) lorsque x → 0 (x > 0). Comme f est positive, on a
≥ 0. Par ailleurs, f (x) ≥ pour tout x > 0, et comme f est une bijection dans ]0, +∞[ on
en déduit nécessairement = 0. On montrerait de même que lim x→0,x>0 f−1 (x) = 0 (on peut
également obtenir ce dernier résultat en prolongeant f en une fonction f˜ sur R+ avec f˜(0) = 0.
L’application f˜ est continue et bijective de R+ dans R+ ; sa fonction réciproque est continue,
en particulier en x = 0 ou elle vaut f˜−1(0) = 0).
c) Montrons par récurrence sur n ∈ N ∗ que f est un C n difféomorphisme. Pour n = 1, on sait
par hypothèse que f est C1 . Or f −1 > 0, donc f = f −1 ne s’annule pas. On en déduit, d’après
la proposition 4 page 73 sur les homéomorphismes dérivables, que f −1 est également de classe
C 1 . Supposons maintenant n ≥ 1 et que f est un Cn difféomorphisme (hypothèse de récurrence).
Alors f = f −1 est de classe C n , donc f est de classe C n+1 , et là encore, la proposition sur les
homéomorphismes dérivables implique que f −1 est également de classe C n+1 .
d) Comme f = f −1 , on a lim x→0+ f (x) = limx→0+ f −1(x) = 0. Ainsi, le prolongement f˜ par
continuité de f en 0, défini en 0 par f̃ (0) = 0, est dérivable en 0 et f˜(0) = 0 (voir la proposition 6
page 76). Ceci montre que f (x) = o(x) lorsque x → 0 (x > 0). En particulier, il existe a > 0 tel
que f (a) < a/2, donc f (a) − a < 0.
Par ailleurs, f −1 étant croissante on a f (x) = f −1 (x) ≥ f −1 (α) = 2 pour x ≥ α = f (2).
Lorsque x ≥ α, l’égalité des accroissements finis entraı̂ne f (x) − f (α) ≥ 2(x − α), d’où on déduit
f (x) − x ≥ f (α) + x − 2α. Ainsi, b = 2α vérifie f (b) − b > 0.
Ainsi, nous avons montré que la fonction continue f (x) − x change de signe sur [a, b], elle
s’annule donc en un point c de cet intervalle, qui est un point fixe de f .
Montrons que le point fixe de f est unique. Un dessin nous suggère d’utiliser la convexité
de f . Si f admet deux points fixes c et d (avec 0 < c < d), alors f étant convexe (f = f−1
est croissante), elle vérifie f (x) ≥ f (c) + (x − c)f (c) = c + (x − c)f (c) pour tout x > 0. En
faisant tendre x vers 0 on en déduit 0 ≥ c(1 − f (c)), donc f (c) ≥ 1. On a même f (c) > 1 car
si f (c) = 1, alors f (x) ≥ c + (x − c)f (c) = x, ce qui est incompatible avec f (x) = o(x) lorsque
x → 0. Ceci implique f (d) ≥ c + (d − c)f (c) > d donc d ne peut pas être un deuxième point
fixe de f .
110 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Lemme 1. Soit f ∈ E et λ > 0 le point fixe de f . Alors on a f (x) < x pour 0 < x < λ et
f (x) > x pour x > λ.
En effet, f n’a que le seul point fixe λ, donc f (x) − x garde un signe constant non nul sur
]0, λ[, et comme f (x) = o(x) lorsque x → 0, f (x) − x est forcément négatif sur cet intervalle.
De même, f (x) − x garde un signe constant non nul pour x > λ. Nous avons vu plus haut qu’il
existe µ > 0 tel que f (µ) − µ > 0. On a donc forcément µ > λ, et finalement le signe de f (x) − x
est strictement positif sur ]λ, +∞[.
f g
g −1
f −1
0 c a b
et comme ϕ√2 − ϕ = 1, on trouve que le point fixe des applications de E est le nombre d’or
λ = ϕ = 1+2 5 .
4. PROBLÈMES 111
Solution. a) Soit α, β ∈ R tels que K = [α, β]. L’hypothèse K ⊂ f (I) implique l’existence de
a, b ∈ I tels que α = f (a) et β = f (b). Si α = β le résultat est immédiat, en choissant J = {a}.
Dans le cas α < β, on a a = b.
Commençons par le cas a < b. L’idée est de déterminer des antécédents de α et β, de
sorte qu’entre les deux, il n’y ait pas d’autres antécédents de α et β . On considère l’ensemble
A = {x ∈ [a, b] | f (x) = β }, fermé non vide (il contient b) et minoré par a. On peut donc définir
v = inf A, et on a f (v ) = β . L’ensemble B = {x ∈ [a, v] | f (x) = α} est aussi un fermé non vide
(il contient a) et majoré par v. On peut donc définir u = sup B , et on a f (u) = α et u < v.
Le segment J = [u, v] vérifie bien f (J ) = K : comme f (u) = α et f (v) = β, le théorème des
valeurs intermédiaires assure que K ⊂ f (J ). On a bien l’égalité sinon il existerait w ∈ J tel
que f (w) ∈ K . Si f (w ) > β, alors par continuité de f il existerait x ∈ [u, w [ (donc x < v) tel
que f (x) = β ce qui est en contradiction avec la définition de v ; si f (w ) < α alors il existerait
x ∈ ]w, v] (donc x > u) tel que f (x) = α ce qui est en contradiction avec la définition de u.
On traite le cas a > b de la même manière en prenant cette fois u = sup{x ∈ [b, a] | f (x) = β}
puis v = inf {x ∈ [u, a] | f (x) = α}.
b) On commence par le cas n = 1.Supposons I0 ⊂ f (I0 ) et notons I0 = [α, β ]. Il existe a, b ∈ [α, β ]
tel que f (a) ≤ α et f (b) ≥ β . Ainsi la fonction g (x) = f (x) − x vérifie g(a) ≤ 0 et g(b) ≥ 0.
Cette fonction est continue et change de signe sur I0, il existe donc x0 ∈ I 0 tel que g (x 0 ) = 0,
c’est-à-dire f (x 0) = x0 .
Traitons maintenant le cas n = 2, en supposant que I 0 → I 1 → I0 . On a I 1 ⊂ f (I 0) donc
le résultat de la question précédente assure l’existence d’un segment J ⊂ I0 tel que I1 = f (J ).
Comme I0 ⊂ f (I1 ), on en déduit J ⊂ I0 ⊂ f 2 (J ). Le cas n = 1 appliqué à la fonction f 2 montre
l’existence d’un point fixe x0 ∈ J de f 2 . On a bien x0 ∈ I0 et f (x0 ) ∈ f (J) = I 1, nous avons
donc démontré le cas n = 2.
Voyons maintenant le cas général n ≥ 3. Comme I 1 ⊂ f (I0 ) il existe un segment J1 ⊂ I0
tel que f (J1 ) = I1 . On a alors I2 ⊂ f (I 1) = f 2(J 1 ), donc il existe un segment J2 ⊂ J 1 tel que
f 2 (J2 ) = I2 . On construit ainsi des segments J 3, . . . , J n−1 tels que J n−1 ⊂ . . . ⊂ J 2 ⊂ J1 ⊂ I0 et
f k (Jk ) = Ik pour k = 1, . . . , n− 1. Comme I 0 ⊂ In−1 = f n(Jn−1 ), il existe un segment Jn ⊂ Jn−1
tel que f n (Jn ) = I 0. On a J n ⊂ I 0 = f n (Jn ), et donc f n admet un point fixe x0 ∈ Jn ⊂ I0 . Par
construction on a f k (x0) ∈ I k pour k = 1, . . . , n − 1.
c) Notons a un point 3-périodique de f , et b = f (a), c = f 2 (a). Tous les points a, b et c sont
3-periodiques donc quitte à remplacer a par b ou c, on peut supposer a < b et a < c.
- Supposons b < c, de sorte que a < b < c. Soit I 0 = [a, b] et I1 = [b, c]. Comme b = f (a)
et c = f (b), le théorème des valeurs intermédiaires assure que I1 ⊂ f (I 0), c’est-à-dire I 0 → I1 .
De même, f (b) = c et f (c) = a donc [a, c] ⊂ f (I1) ce qui implique I 1 → I 0 et I 1 → I 1. La
propriété I1 → I1 entraı̂ne l’existence d’un point fixe de f dans I1 . On a I0 → I 1 → I0 et ceci
entraı̂ne l’existence d’un point fixe x 2 ∈ I 0 de f 2 tel que f (x2 ) ∈ I1 . On a bien x2 = f (x2 ) (car
x2 ∈ I0 et f (x2) ∈ I 1, donc x 2 ≤ b ≤ f (x2 ) donc si x2 = f (x 2 ) on aurait x2 = b ce qui est
impossible puisque b est un point 3-périodique de f ). Ainsi, x 2 est un point 2-périodique de f .
Pour n ≥ 4, le cycle I0 → I1 → I 1 → . . . → I 1 → I 0, où l’intervalle I1 figure n − 1 fois, montre
l’existence d’un point fixe xn ∈ I 0 de f n tel que f k (xn ) ∈ I1 pour k = 1, . . . , n − 1. Ici aussi, on
112 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
x x
0 0 1 1
x → f (x) x → g (x)
De telles fonctions f et g existent bien, il suffit par exemple de relier les extrémités
des segments en gras sur la figure par des segments de droite.
On considère ensuite les fonctions
+∞
+∞
f (10n−1 t) g(10n−1 t)
α : R → R t → , β : R → R t →
n=1
2n n=1
2n
et
F : [0, 1] → R 2 t → (α(t), β(t)).
de sorte que
+∞
∗ n−1 tn ti 1
∀n ∈ N , 10 t = Nn + + Rn avec Nn ∈ N et Rn = ∈ 0, ,
10 10 i+1−n 10
i=n+1
(cette dernière assertion est vraie car les t n ne sont jamais stationnaires à 9 à partir d’un certain
rang) donc, les fonctions f et g étant 1-périodiques,
2−n f (10n−1 t) = 2−n f tn + R
1
∗ 10 n
∀n ∈ N , avec Rn ∈ 0, . (∗)
2−n g(10n−1 t) = 2−n g tn + R n 10
10
Ceci étant, donnons nous (x, y ) ∈ [0, 1]2 et écrivons la décomposition diadique de x et y :
+∞
+∞
xk yk
x= , y= , (x k , yk ∈ {0, 1}).
2k 2k
k=1 k=1
Si x = 1 on choisit xk = 1 pour tout k, de même pour y. Nous allons construire t ∈ [0, 1[ à partir
de sa décomposition décimale pour avoir f (10k−1t) = x k et g (10 k−1t) = y k pour tout k , ce qui
montrera que F (t) = (x, y). Soit k ∈ N ∗ ,
— si (x k , yk) = (0, 0), on choisit t k = 1 ;
— si (x k , yk) = (0, 1), on choisit t k = 3 ;
— si (x k , yk) = (1, 0), on choisit t k = 5 ;
1 — si (x k , yk) = (1, 1), on choisit t k = 7.
L’écriture t = +∞ k
n=1 t k/10 est bien un développement décimal, et t vérifie la propriété requise
d’après (*) et d’après la forme des fonctions f et g . Nous venons donc de prouver que [0, 1] 2 ⊂
F ([0, 1]). L’inclusion réciproque est immédiate, donc finalement, F ([0, 1]) = [0, 1] 2.
c) Non ! Raisonnons par l’absurde en supposant qu’une telle fonction existe. Nous allons re-
couvrir F ([0, 1]) par une surface dont l’aire est inférieure à celle du carré [0, 1] 2, d’où découlera
l’absurdité désirée.
On note M = supt∈[0,1] F (t) ( où . désigne la norme du sup : (x, y) = sup{|x|, |y|}).
On considère un entier naturel non nul quelconque n et la subdivision 0 < n1 < · · · < n−1 n
<1
de [0, 1]. Pour tout entier k, 0 ≤ k ≤ n − 1, on a d’après l’inégalité des accroissements finis
k k+1 k + 12 k + 12 M
∀t ∈ , , F (t) − F ≤ M t − ≤ .
n n n n 2n
1
k +
Ainsi, F ([nk , k+1
n
]) est inclus dans le carré de centre F 2
de demi-côté M 2n
, que nous
n
noterons Cn,k . On a donc
k k + 1 n−1
n−1
F ([0, 1]) = F , ⊂ C n,k = Sn .
n n
k=0 k=0
L’aire A(Sn ) de Sn est inférieure à la somme des aires des carrés C n,k , ce qui s’écrit
n−1
M 2 M 2
n−1
A(Sn ) ≤ A(C n,k ) = = .
n n
k=0 k=0
On choisit maintenant n tel que n > M 2. Alors A(S n ) < 1, donc [0, 1]2 ⊂ Sn , et comme
F ([0, 1]) ⊂ Sn on en déduit [0, 1] 2 ⊂ F ([0, 1]). Ceci est impossible, d’où le résultat.
d) C’est dans un cadre légèrement différent la même chose que l’exercice 8 page 47. On raisonne
par l’absurde en supposant qu’une telle bijection F : [0, 1] → [0, 1] 2 existe. L’application F est
continue sur un compact, son application réciproque F −1 : [0, 1] 2 → [0, 1] est donc continue
(voir la proposition 14 page 31). Donnons nous un point quelconque c dans ]0, 1[. L’ensemble
114 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Solution. a) Nous allons montrer que cette étrange fonction est discontinue en tout point
rationnel et continue en tout point irrationnel.
Soit x ∈ [0, 1] un rationnel et supposons (on raisonne par l’absurde) que f soit continue en
x. Comme les irrationnels sont denses dans R, il existe une suite (x n) de points irrationnels de
[0, 1] qui converge vers x. On a alors f (x) = limn→∞ f (xn ), ce qui est impossible car f (x) = 0
et f (xn ) = 0 pour tout n. Ainsi, f est discontinue en tout point rationnel de [0, 1].
Soit x ∈ [0, 1] un irrationnel. Nous allons montrer la continuité de f en x. Donnons nous
ε > 0 et fixons un entier naturel non nul N tel que 1/N < ε. L’ensemble Γ des rationnels de
[0, 1] qui peuvent s’écrire sous la forme p/q avec p ∈ N, q ∈ N∗ et q < N est fini. Comme de plus
x ∈ Γ, le réel α = infy∈Γ |x − y | est non nul. Considérons maintenant un élément quelconque
y ∈ [0, 1] tel que |x − y| < α. Si y est irrationnel, on a f (y ) = 0 donc |f (x) − f (y)| < ε. Si y = p/q
est rationnel, on a q ≥ N car y ∈ Γ par construction de α, donc |f (x) − f (y )| = 1/q < ε. Ainsi,
∀y ∈ [0, 1], |x − y | < α, |f (x) − f (y )| < ε,
ce qui prouve bien la continuité de f en x.
b) Il s’agit de construire une suite de fonctions en escaliers (ϕn )n∈N∗ qui converge uniformément
vers f . Pour tout n ∈ N∗ , on définit ϕn : [0, 1] → R par
ϕn(x) = f (x) si ∃(p, q ) ∈ N × N ∗, p ∧ q = 1, q ≤ n, x = p/q,
ϕn(x) = 0 sinon.
Pour tout n, ϕ n est nulle partout sauf en un nombre fini de points, c’est donc une fonction en
escalier. Par ailleurs, on a
1
∀x ∈ [0, 1], |f (x) − ϕn (x)| < .
n
En effet,
— si x ∈ RQ, ϕ n(x) = f (x) = 0,
— si x = p/q avec p ∧ q = 1 et q ≤ n, on a ϕ n(x) = f (x),
— si x = p/q avec p ∧ q = 1 et q > n, on a ϕ n(x) = 0 et f (x) = 1/q < 1/n.
Ainsi, la suite de fonctions en escaliers (ϕn) converge uniformément vers f , donc f est une
fonction réglée.
Remarque. Comme f est réglée, elle vérifie les assertions du théorème 4 de la page 99,
ce qui entraı̂ne que l’ensemble des points de discontinuité de f est au plus dénombrable.
Ceci est en accord avec le résultat de la question a).
– On peut prouver (en utilisant le théorème de Baire décrit dans l’annexe A) qu’il n’existe
pas de fonction continue en tout point de Q et discontinue en tout point de RQ.
4. PROBLÈMES 115
b) Condition nécessaire. Si f est convexe, alors pour tout (x, y ) ∈ C 2 et pour tout λ ∈ [0, 1],
f (λx + (1 − λ)y ) ≤ λf (x) + (1 − λ)f (y ) ≤ λ + (1 − λ) = 1, donc λx + (1 − λ)y ∈ C.
Condition suffisante. C’est un peu plus délicat. Soit (x, y) ∈ E 2 . Pour tout ε > 0, on a
x y x 1
, ∈ C car f = f (x) < 1 (de même pour y)
f (x) + ε f (y ) + ε f (x) + ε f (x) + ε
(le paramètre ε a été introduit pour éviter de diviser par 0) donc C étant convexe par hypothèse,
λx (1 − λ)y
∀λ ∈ [0, 1], f + ≤ 1. (∗)
f (x) + ε f (y ) + ε
Si on choisit λ tel que
λ (1 − λ) f (x) + ε
= c’est-à-dire λ = ∈ [0, 1] ,
f (x) + ε f (y ) + ε f (x) + f (y) + 2ε
on obtient en remplaçant dans (*)
x+y
f ≤1 donc f (x + y ) ≤ f (x) + f (y ) + 2ε.
f (x) + f (y) + 2ε
116 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
Ceci dernier résultat est vrai pour tout ε > 0, donc f (x + y ) ≤ f (x) + f (y). On en conclut
maintenant avec a) que f est convexe.
c) Comme f est convexe, l’inégalité triangulaire est vérifiée d’après le résultat de la question
a). Il faut maintenant montrer que pour tout x ∈ E et pour tout λ ∈ R, f (λx) = |λ|f (x). Si
λ ≥ 0, ceci résulte du fait que f est positivement homogène de degré 1. Si λ < 0, ceci est une
conséquence de l’hypothèse de parité vérifiée par f car
f (λx) = f ((−λ)x) = (−λ)f (x) = |λ|f (x).
d) Condition nécessaire. Une norme est une fonction positivement homogène de degré 1, est
convexe d’après a) car elle vérifie l’inégalité triangulaire, et est de plus à valeurs positives. On
en conclut grâce à b) que C = BN (0, 1) est convexe. L’intérieur d’un convexe est convexe, donc
◦
C = Ω est convexe. La symétrie de Ω par rapport à 0 est immédiate puisque
∀x ∈ Ω, N (−x) = N (x) < 1 donc − x ∈ Ω.
Condition suffisante. Commençons par définir N . On pose N (0) = 0. Soit x ∈ E , x = 0. Nous
allons définir N (x) comme étant égal à 1/µx , où µx > 0 est tel que µx x appartient à la frontière
de Ω (ceci car N (µx x) = 1) — voir la figure ci-contre.
x
µ xx
Ω
0
On pose Γx = {λ > 0 | λx ∈ Ω}. Comme Ω est ouvert et contient 0 (il est non vide,
symétrique par rapport à 0 et convexe), Γx est non vide. De plus, Ω est borné donc Γ x est
majoré. Ainsi, µx = sup Γ x est bien défini, et on pose N (x) = 1/µ x. Remarquons que Ω étant
fermé, on a µx ∈ Γx .
Ainsi construite, on vérifie facilement que N est positivement homogène de degré 1, paire et
vérifie N (x) = 0 ⇐⇒ x = 0. Par ailleurs,
N (x) ≤ 1 ⇐⇒ µ x ≥ 1 ⇐⇒ 1 ∈ Γx ⇐⇒ x ∈ Ω,
donc C = {x ∈ E | N (x) ≤ 1} = Ω est convexe. En utilisant le résultat de la question c), on en
déduit que N est une norme.
2/ Soit α ≥ 1. Il est immédiat que l’application Nα est positivement homogène de degré 1,
positive et paire, et vérifie Nα(x) = 0 ⇐⇒ x = 0. Pour prouver que c’est une norme, il suffit
de vérifier, en vertu du résultat de la question 1/c), que l’ensemble
C = {x ∈ R n | N α (x) ≤ 1} = {(x1 , . . . , xn ) ∈ Rn | |x 1 |α + · · · + |xn | α ≤ 1}
est convexe. Pour prouver ceci, on remarque que l’application R+ → R x → xα est convexe
(elle est dérivable et sa fonction dérivée x → αxα−1 est croissante), ce qui entraı̂ne pour x, y ∈ C
∀λ ∈ [0, 1], ∀i ∈ {1, . . . , n}, |λxi + (1 − λ)yi | α ≤ (λ|xi | + (1 − λ)|yi |) α ≤ λ|xi | α + (1 − λ)|yi | α,
donc par sommation sur i = 1, . . . , n
n
n n
|λxi + (1 − λ)y i|α ≤ λ |xi| α + (1 − λ) |yi |α ≤ λ + (1 − λ) = 1.
i=1 i=1 i=1
En d’autres termes, λx + (1 − λ)y ∈ C . Ainsi, C est convexe et le résultat est prouvé.
4. PROBLÈMES 117
Solution. a) Soit (x i , αi )1≤i≤n une famille finie de I × R+∗ , y sa moyenne selon f , z sa moyenne
selon g . La fonction f étant croissante, on a
(y ≤ z ) ⇐⇒ (f (y ) ≤ f (z)).
Pour tout i, posons z i = g (xi ), de sorte que f (xi ) = f ◦ g −1 (z i ) = h(zi ). On a
α 1 h(z1 ) + · · · + αn h(z n ) α1 z1 + · · · + αnzn
f (y ) = et f (z) = h .
α 1 + · · · + αn α1 + · · · + αn
Ces deux expressions montrent que f (y) ≤ f (z ) si et seulement si l’inégalité caractérisant la
concavité de h est vérifiée pour la famille (zi , α i )1≤i≤n . On en conclut facilement que la moyenne
selon f est inférieure à la moyenne selon g si et seulement si h = f ◦ g−1 est concave.
Si f est décroissante, la fonction −f est croissante. La moyenne selon f étant la même que
la moyenne selon −f (revoir les définitions), on en conclut que la moyenne selon f est inférieure
à la moyenne selon g si et seulement si (−f ) ◦ g −1 est concave, c’est-à-dire f ◦ g −1 est convexe.
b) Démontrons Nβ ≤ N α. Lorsque x = (x1 , . . . , xn ) ∈ Rn vérifie N α(x) = 1, on a |x i| ≤ 1 pour
tout i et comme α ≤ β ceci entraı̂ne |xi|β ≤ |xi | α pour tout i, donc
n
n
β
|xi | ≤ |xi|α = 1,
i=1 i=1
et donc Nβ (x) ≤ 1. Traitons le cas général. Si x = 0, l’inégalité est triviale, sinon, en notant
λ = 1/Nα (x), on a
1 1
Nα(λx) = 1 donc N β (x) = N β(λx) ≤ = Nα (x).
λ λ
1 1
Démontrons maintenant l’inégalité Nα ≤ n α − β Nβ . Soit x = (x1 , . . . , x n ) ∈ Rn. On remarque
que
Nα (x) |x1 |α + · · · + |xn |α 1/α
=
n 1/α n
est la moyenne de la famille (|x i |, 1)1≤i≤n selon la fonction f : R+ → R x → x α. De même,
Nβ (x)/n1/β est la moyenne de cette même famille selon g : x → xβ . Comme f ◦ g−1 = xα/β
118 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
est une fonction concave (la fonction dérivée x → (α/β )xα/β−1 est décroissante car α ≤ β ), et
que f est croissante, le résultat de la question précédente entraı̂ne que la moyenne selon f est
inférieure à la moyenne selon g , en particulier
Nα (x) Nβ (x)
1/α
≤ 1/β ,
n n
d’où l’inégalité désirée.
Remarque. La dernière inégalité est une égalité pour x = (1, . . . , 1), on ne peut donc pas
remplacer n1/α−1/β par une constante plus petite. Remarquez d’ailleurs qu’il aurait été
difficile de prouver cette inégalité sans utiliser le résultat de la question a).
1/ a) Soit I = [c, d] un segment inclus dans [a, b]. Montrer que la restriction f|I de f à I
est à variation bornée. On peut ainsi définir
d
f = sup Varσ (f|I ).
c σ∈sub([c,d ])
y z z
b) Si a ≤ x < y < z ≤ b, montrer la relation de Chasles f+ f= f.
x y x
c) Si g : [a, b] → R est de classe C1 , montrer que g est à variation bornée et que
b b
g= |g(t)| dt.
a a
Considérons maintenant une subdivision σ de [x, z ]. En lui ajoutant le point y (s’il ne fait
pas déjà parti de σ ), on obtient une subdivision σ de [x, z ] qui vérifie Varσ (f ) ≤ Var σ (f ). On
peut noter σ sous la forme
σ : x = x0 < x 1 < · · · < xp = y = y 0 < · · · < yq = z.
Considérons alors les subdivisions
σ1 : x = x0 < x 1 < · · · < x p = y ∈ sub([x, y ]) σ2 : y = y0 < y1 < · · · < yq = z ∈ sub([y, z ]).
On a z y
Var σ(f ) ≤ Varσ (f ) = Varσ1(f ) + Var σ2 (f ) ≤
f+ f.
x y
z y
Ceci étant vrai pour toute subdivision σ de [x, z], on en déduit x f ≤ x f + zyf , d’où le
résultat avec (*).
c) Soit σ : a = x0 < x1 < · · · < xn = b une subdivision de [a, b]. Pour tout i, on a
xi+1 x i+1
|g (xi+1) − g (x i)| = g (t) dt ≤
|g (t)| dt
xi xi
b
donc par sommation sur i, Varσ (g ) ≤ a |g (t)| dt. Ceci étant vrai pour tout σ ∈ sub([a, b]) on
en déduit que g est à variation bornée et que
b b
g≤ |g (t)| dt. (∗∗)
a a
Il nous faut maintenant prouver l’inégalité réciproque. Si σ : a = x 0 < x1 < · · · < xn = b
est une subdivision de [a, b], on peut écrire pour tout i, en vertu du théorème des accroissements
finis,
g (xi+1 ) − g (xi ) = (xi+1 − xi )g (θi ) avec θi ∈ ]xi, xi+1 [,
de sorte que
n−1
Varσ (g) = (x i+1 − x i )|g (θi )| avec ∀i, θ i ∈ ]xi, xi+1 [.
i=0
Cette dernière expression est une somme de Riemann relative à la subdivision σpour la fonction
b
|g |. En faisant tendre le pas de σ vers 0, on voit donc que Varσ (g) tend vers a |g (t)| dt, d’où
b b
a |g (t)| dt ≤ a g. On en déduit avec (**) le résultat.
2/ a) Condition suffisante. Une fonction croissante ϕ : [a, b] → R est à variation bornée car
pour toute subdivision σ : a = x0 < x1 < · · · < xn = b de [a, b],
n−1
n−1
Varσ (f ) = |f (x i+1) − f (xi )| = [f (xi+1 ) − f (xi )] = f (b) − f (a).
i=0 i=0
La différence de deux fonctions à variation bornée étant à variation bornée (c’est immédiat), on
en déduit que f = g − h est à variation bornée.
Condition nécessaire. Soit g : [a, b] → R x → xa f . D’après le résultat de la question 1/ b), g
est une fonction croissante. Posons h = g − f . La fonction h est croissante car
y y
∀x < y, h(y ) − h(x) = f − [f (y ) − f (x)] ≥ 0 car |f (x) − f (y)| ≤ f
x x
120 2. FONCTIONS D’UNE VARIABLE RÉELLE
(cette dernière assertion est vraie car σ : x < y est une subdivision de [x, y ]). Ainsi, f = g − h
est la différence de deux fonctions croissantes.
b) D’après la question précédente, on peut écrire f = g − h où g et h sont deux fonctions
croissantes. Une fonction monotone est réglée (voir la conséquence du théorème 4 page 99),
donc f , différence de deux fonctions réglées, est une fonction réglée.
3/ Considérons pour tout entier n ≥ 2 la subdivision de [0, 1] définie par
1 1 1 1
σn : 0 < < < ··· < < < 1.
nπ (n − 1)π 2π π
1
Pour tout k on a f ( kπ ) = cos(kπ )/(kπ) = (−1)k /(kπ) donc
n−1
1
1 1
n−1
1 1
n−1
1 2
Varσn (f ) ≥
f (k + 1)π − f kπ = π k+1
+
k
≥
π k+1
.
k=1 k=1 k=1
1
La série k k+1 diverge, donc l’ensemble (Varσ ) σ∈sub([0,1]) n’est pas majoré, ce qui prouve que
f n’est pas à variation bornée.
Solution. a) Il est clair que la classe des fonctions continues périodiques est incluse dans P (il
suffit, dans (*), de choisir Λ égal à la période).
b) Une fonction presque-périodique f est bornée. En effet, en choisissant ε = 1 dans (*) et en
considérant le Λ correspondant, on a pour tout nombre réel x
∃y ∈ [x − Λ, x[, f − fy ∞ < 1
donc f (x − y) − f (x) < 1 ce qui entraı̂ne
f (x) < 1 + f (x − y) ≤ 1 + sup f (t) car x − y ∈ [0, Λ],
t∈[0,Λ]
Considérons alors deux réels x, x tels que |x − x| < η, avec x ≤ x . La fonction f étant presque
périodique,
∃τ ∈ [x − Λ, x[, f − f τ ∞ < ε.
Ceci entraı̂ne
f (x − τ ) − f (x) < ε et f (x − τ ) − f (x ) < ε,
donc comme x − τ et x − τ appartiennent à [0, Λ + 1],
f (x) − f (x ) ≤ f (x) − f (x − τ ) + f (x − τ ) − f (x − τ ) + f (x − τ ) − f (x) < ε + ε + ε = 3ε.
Ceci est vrai pour tout couple (x, x) de réels tel que |x − x | < η, d’où l’uniforme continuité de
f sur R.
c) Condition nécessaire. Soit f ∈ P, ε > 0 et le Λ correspondant dans (*). Comme f est
uniformément continue sur R, on voit que
∃(η1, . . . , ηn ) ∈ [0, Λ] n , ∀y 0 ∈ [0, Λ], ∃i, f y0 − fη i ∞ < ε. (∗∗)
Maintenant, soit y ∈ R. D’après (*), il existe τ ∈ [−y, −y + Λ[ tel que f − f τ∞ < ε. Ceci
s’écrit aussi fy − f ρ ∞ < ε avec ρ = τ + y ∈ [0, Λ[. D’après (**), il existe i ∈ {1, . . . , n} tel que
fρ − fη i ∞ < ε, et on en déduit
f y − f ηi ∞ ≤ fy − f ρ∞ + fρ − f η i ∞ < ε + ε = 2ε.
n
En d’autres termes on a A(f ) ⊂ B(fηi , 2ε), d’où la précompacité de A(f ) dans B.
i=1
Condition suffisante. Soit ε > 0. Par hypothèse, il existe une famille finie (fa i )1≤i≤n de A(f )
telle que
n
A(f ) ⊂ B(f ai , ε). (∗∗∗)
i=1
Posons Λ = 1 + 2µ où µ = sup{|a1|, . . . , |an |} et considérons maintenant un réel quelconque α.
D’après (***),
∃i ∈ {1, . . . , n}, f α+µ − fai ∞ < ε ce qui équivaut à fα+µ−a i − f ∞ < ε.
Ainsi, pour tout réel α, nous avons trouvé y ∈ [α, α+Λ[ (ici y = α + µ − ai) tel que f y − f ∞ < ε.
Ceci suffit pour montrer que f est presque-périodique.
d) D’après la question précédente, A(f ) et A(g ) sont précompacts. Ainsi, si on considère ε > 0,
il existe deux familles finies (f ai ) 1≤i≤m de A(f ) et (gbj ) 1≤j ≤n de A(g ) telles que
m
n
A(f ) ⊂ B(f ai , ε) et A(g ) ⊂ B(g bj , ε).
i=1 j=1
On en conclut
A(f + g) ⊂ A(f ) + A(g ) ⊂ B(f ai + gbj , 2ε),
1≤i≤m
1≤j ≤n
∀x ∈ R, faga (x) − fai gbj (x) ≤ fa g a (x) − fai g a(x) + fai ga (x) − fai g bj(x)
≤ f a(x) − fa i(x) · ga (x) + f ai (x) · g a(x) − gbj (x) ≤ N ε + M ε
montre que
A(f g) ⊂ B(fai gb j , (M + N )ε),
1≤i≤m
1≤j ≤n
e) Soit (fn) n∈N une suite de P qui converge vers f ∈ B. Montrons que f ∈ P. Soit ε > 0 et
N ∈ N tel que f − fN∞ < ε. Comme fN est presque-périodique,
∃Λ > 0, ∀α ∈ R, ∃τ ∈ [α, α + Λ[, (fN ) − (fN ) τ ∞ < ε
donc
f − fτ ∞ ≤ f − f N ∞ + (fN ) − (f N )τ ∞ + (fN ) τ − fτ ∞ < ε + ε + ε = 3ε,
ce qui suffit pour prouver que f ∈ P.
Remarque. Les fonctions presque périodiques ont été introduites par Bohr au début du
vingtième siècle, dans le cadre de l’étude des séries de Dirichlet a n /ns , et généralisent
les séries de Fourier. On peut Tmontrer que pour toute fonction presque périodique f ,
1
la limite M (f ) = limT →∞ T 0 f (t) dt existe (on l’appelle valeur moyenne de f ). Une
fonction complexe f est presque périodique si et seulement si on peut écrire
+∞
f (t) = an eiλ nt , avec ∀n ∈ N an ∈ C, λn ∈ R,
n=0
où la convergence est uniforme sur R (la condition suffisante de ce résultat est une
conséquence
des résultats démontrés dans ce problème), et on a l’équivalent de l’inégalité
de Bessel |a n| 2 ≤ M (f 2 ). Un exemple typique de fonction presque périodique est
t → ζ (σ + it) (avec σ > 1 donné). Ceci entraı̂ne par exemple que pour tout ε > 0 et
pour tout T > 0, il existe t > T tel que ζ (σ ) − ε < |ζ (σ + it)| ≤ ζ (σ ).
CHAPITRE 3
Intégration
Lasurface.
théorie de l’intégration naquit avec la recherche du calcul de l’aire d’une
Archimède savait déjà évaluer l’aire d’une surface délimitée par une
parabole et une droite. Ses calculs furent repris au neuvième siècle par les
savants arabes. Dès 1636, Pierre de Fermat carra les courbes x → axm où m
est un entier naturel.
Au cours de la seconde moitié du XVIIe siècle, Newton et Leibniz fondèrent
le calcul infinitésimal. Newton calcula l’aire d’une courbe y = f (x) en inver-
sant les opérations de dérivation (aujourd’hui on dirait : en utilisant la notion
de primitive). A l’inverse, Leibniz interpréta les aires comme des sommes de
rectangles infinitésimaux.
En 1823, Cauchy rassembla leur résultats et donna le premier une défini-
tion précise de l’intégrale. C’est surtout Riemann qui, en 1854, développa la
théorie de l’intégration. Il définit son intégrale à l’aide des fameuses “sommes
de Riemann”.
Enfin, Lebesgue, dans sa thèse de 1902, présenta des idées révolutionnaires
sur le concept d’intégrale. Il éclaira bien des difficultés des discussions du XIXe
siècle, et fournit un cadre général simplifié à de nombreux théorèmes, alors que
la théorie de Riemann multipliait les hypothèses et les conditions restrictives.
de sorte que pour tout i ∈ {1, . . . , n}, il existe ci ∈ E telle que ϕ(x) = ci sur ]x i−1, xi [. La
valeur
n
I(σ, ϕ) = (x i − x i−1)ci
i=1
est indépendante de la subdivision σ adaptée à ϕ. On la note alors I (ϕ) ou encore [a,b]
ϕ
b
ou a ϕ(x) dx, et on l’appelle intégrale de ϕ.
Remarque 1. — Toute fonction en escalier sur [a, b] à valeurs dans K est combinaison
linéaire de fonctions caractéristiques de segments contenus dans [a, b].
— L’ensemble E ([a, b], E) des fonctions en escalier sur [a, b] est un K-e.v, et l’applica-
tion E → E ϕ → I (ϕ) est linéaire.
— Pour toute fonction en escalier ϕ, ϕ est une fonction en escalier et I (ϕ) ≤
I (ϕ).
— Si ϕ et ψ sont en escalier, à valeurs réelles, et si ϕ ≤ ψ , alors I (ϕ) ≤ I (ψ).
Intégrale d’une fonction continue par morceaux.
Bien qu’on puisse définir l’intégrale de classes de fonctions beaucoup plus générales,
nous nous limiterons à l’intégrale des fonctions continues par morceaux sur un segment
[a, b] ⊂ R dont la définition se trouve page 98.
Définition 4 (Intégrale d’une fonction continue par morceaux). Soit une
fonction f : [a, b] → E continue par morceaux. Alors tout n ∈ N∗ , il existe une fonction
en escalier ϕn : [a, b] → E telle que f − ϕ n < 1/n sur [a, b]. La suite (un ) définie par
b
un = a ϕn (t) dt est alors une suite de Cauchy dans E , donc convergente. Sa limite ne
b
dépend pas du choix des fonctions en escaliers ϕn , on la note a f (t) dt (ou encore [a,b] f )
et on l’appelle intégrale de f .
Démonstration. Comme f est continue par morceaux, c’est une fonction réglée, donc pour tout
n ∈ N∗ il existe bien une fonction en escalier ϕ n vérifiant f − ϕn < 1/n sur [a, b] (voir la
proposition 5 page 99). La suite (un ) vérifie bien le critère de Cauchy car d’après la remarque 1,
et comme ϕp − ϕ q ≤ ϕp − f + f − ϕ q ≤ 1/p + 1/q, on a
∀p, q ∈ N, p, q ≥ n up − u q = I (ϕ p − ϕq ) ≤ I (ϕp − ϕ q ) ≤ I (2/n) = 2(b − a)/n.
Comme E est complet par hypothèse (c’est un espace de Banach), la suite (u n) converge. On
note sa limite.
Unicité de la limite. Soit (ψn ) une autre suite de fonctions en escalier vérifiant f − ψ n < 1/n
sur [a, b]. On note la limite de vn = I (ψn ). L’inégalité
ψ n − ϕn ≤ ψ n − f + f − ϕ n ≤ 2/n
entraı̂ne
∀n, vn − u n = I (ψn − ϕ n) ≤ I (ψ n − ϕ n ) ≤ I (2/n) = 2(b − a)/n
donc limn→∞ u n − v n = 0. Donc = .
où E désigne l’ensemble des fonctions en escalier de [a, b] dans R. Lorsque f est
continue par morceaux, on a I −(f ) = I + (f ), et cette valeur commune est un moyen
équivalent de définir l’intégrale de f . La définition 4 permet de ne pas se limiter
au cadre où E = R et donne une définition intrinsèque de l’intégrale sur tout e.v.n
complet, en particulier sur C et sur tout e.v de dimension finie (voir la remarque 3).
1. INTÉGRALE SUR UN SEGMENT DE R 125
— Lorsque f et g sont deux fonctions continues par morceaux qui diffèrent seulement
en un nombre fini de points, leurs intégrales sont identiques.
— L’intégrale d’une fonction en escalier donnée par la définition 4 est cohérente avec
celle donnée dans la définition
b 3. a
— Lorsque a > b, on définit a f (x) dx = − b f (x) dx.
— La définition précédente s’étend facilement pour définir l’intégrale d’une fonction
réglée. On peut de manière plus générale définir les fonctions Riemann-intégrables,
qui sont les fonctions f telles que pour tout ε > 0, on peut trouver ϕ et µ en
escalier telles que f − ϕ < µ et I (µ) < ε. En faisant tendre ε vers 0, les valeurs
I (ϕ) convergent vers une valeur unique appelée intégrale de Riemann de f . Toute
fonction continue par morceaux, toute fonction réglée, est Riemann-intégrable.
Remarque 3. — En particulier, C est un R-e.v dont (1, i) est une base. L’application
f : [a, b] → C s’écrit sous la formef = f1 + if2 ( où f1 , f2 sont à valeurs réelles) et
b b b
on a a f (x) dx = a f 1 (x) dx + i a f2(x) dx .
— On peut définir l’intégrale d’une fonction f à valeurs dans un R-e.v de dimension
finie E à partir de l’intégrale des fonctions à valeurs réelles, en procédant comme
n
suit : on considère une base B = (e1 , . . . , en ) de E , on
écrit f = i=1 fi ei où l es if
b n b
sont à valeurs réelles, et on pose a f (x) dx = i=1 a fi (x) dx e i. Il faut ensuite
vérifier que cette définition ne dépend pas de la base B choisie. L’avantage de la
définition que nous avons adoptée (voir définition 4) est qu’elle est intrinsèque (i. e
elle ne privilégie pas de base).
1.2. Propriétés des intégrales
Nous commençons par donner pêle-mêle les propriétés les plus élémentaires.
— Relation de Chasles. Soit f : [a, b] → E continue par morceaux et c ∈ ]a, b[. On a
b c b
a
f (x) dx = a f (x) dx + c f (x) dx.
— Linéarité de l’intégrale. L’ensemble Cm ([a, b], E) des fonctions continues par mor-
b
ceaux sur [a, b] est un K-e.v et l’application Cm([a, b]) → E ϕ → a ϕ(x) dx est
linéaire.
— Positivité de l’intégrale. Si f, g : [a, b] → R sont continues par morceaux et si f ≥ g
b b
sur [a, b], alors a f (x) dx ≥ a g (x) dx (le cas de l’inégalité stricte est plus délicat ;
voir la proposition 4).
b b
— Si . est une norme sur E , alors a f (x) dx ≤ a f (x) dx.
Proposition 3. Soit (fn ) une suite de fonctions continues par morceaux de [a, b] dans
E qui converge uniformément sur [a, b] vers une fonction continue par morceaux f . Alors
b b
lim f n(x) dx = f (x) dx. (∗)
n→+∞ a a
126 3. INTÉGRATION
Normes et intégrales.
Théorème 1 (In égalité de Schwarz). Soient f, g : [a, b] → C deux applications
continues par morceaux. Alors
b 2 b b
f (x)g (x) dx ≤ 2
|f (x)| dx · 2
|g (x)| dx .
a a a
Si f et g sont continues et f non identiquement nulle, cette inégalité est une égalité si et
seulement s’il existe α ∈ C tel que g (x) = αf (x) pour tout x ∈ [a, b].
Démonstration. Désignons par C m([a, b]) l’algèbre des fonctions continues par morceaux de [a, b]
dans C, et considérons la forme hermitienne positive Φ : Cm ([a, b]) → R f → ab f (x)f (x) dx,
dont la forme polaire est
b
2
ϕ : Cm ([a, b]) → C (f, g ) → f (x)g (x) dx
a
(voir le tome Algèbre). L’inégalité de Schwarz appliquée à ϕ donne
∀f, g ∈ Cm ([a, b]), |ϕ(f, g)| 2 ≤ Φ(f )Φ(g ),
d’où la première assertion du théorème. La restriction de Φ à l’e.v des fonctions continues sur
[a, b] est définie, et on sait alors que l’inégalité de Schwarz est une égalité si et seulement si f et
g forment une famille liée, d’où la seconde assertion du théorème.
Conséquence : Sur l’e.v C([a, b], K) des fonctions continues sur [a, b], les applications
b b
N1 (f ) = |f (t)| dt, N2 (f ) = |f (t)|2 dt, N ∞(f ) = sup |f (t)|
a a t∈[a,b]
sont des normes. L’inégalité de Schwarz entraı̂ne que N2 vérifie bien l’inégalité triangu-
laire ; la nullité de N1(f ) ou N2 (f ) entraı̂ne bien celle de f d’après la proposition 4.
(i) La norme N1 s’appelle norme de la convergence en moyenne.
(ii) La norme N2 s’appelle norme de la convergence en moyenne quadratique.
(iii) La norme N∞ (encore notée · ∞ ) s’appelle norme de la convergence uniforme.
Ces normes vérifient les inégalités
√
N1 (f ) ≤ b − a N2 (f ) ≤ (b − a)f ∞ .
1. INTÉGRALE SUR UN SEGMENT DE R 127
x
Étude de la fonction x → a
f (t) dt.
Théorème 2. Soit f : [a, b] → E une fonction continue par morceaux sur [a, b]. Alors
x
l’application F : [a, b] → E x → a f (t) dt est C1 par morceaux et continue sur [a, b]. De
plus, F est dérivable à gauche et à droite en tout point x de I , et on a Fg (x) = lim t→x f (t)
t<x
et F d(x) = lim t→x f (t). En particulier, si f est continue sur [a, b] alors F est de classe C1
t>x
sur [a, b] et F (x) = f (x) pour tout x ∈ [a, b].
Corollaire 1. Toute application continue f : [a, b] → R admet au moins une primitive
b b
F , et pour toute primitive F de f, on a a f (x) dx = F = F (b) − F (a).
a
C’est ce dernier résultat qui amène à rechercher des primitives d’une fonction pour
calculer son intégrale. Ce problème sera étudié plus particulièrement dans la partie 2 de
ce chapitre. En l’appliquant à f = uv + u v dont la primitive est F = uv , on obtient le
résultat qui suit.
Théorème 3 (Intégration par parties). Soient u, v : [a, b] → C deux fonctions de
classe C 1 . Alors b b b
u(x)v (x) dx = u · v − u(x)v (x) dx.
a a a
Citons enfin un dernier résultat, particulièrement utilisé lors de calculs de primitives.
Théorème 4 (Changement de variable). Soit ϕ : [a, b] → R une application de
classe C1 et f : I ⊂ R → E une application continue par morceaux telle que ϕ([a, b]) ⊂ I
( où I est un intervalle de R). Alors
b ϕ(b)
f ϕ(t) ϕ (t) dt = f (u) du.
a ϕ(a)
Remarque 6. — Cette formule n’est pas au programme des classes préparatoires mais
elle peut rendre de précieux services (par exemplepour démontrer la convergence
+∞
de certaines intégrales semi-convergentes comme 1 sin(t)/t dt ; voir également
la règle d’Abel formulée dans le théorème 5). Il faut savoir refaire sa démonstration
qui est simple.
— Ce résultat reste vrai si on suppose uniquement f continue (voir l’exercice 8
page 135), et même si f et g sont uniquement supposées Riemann-intégrables.
1.3. Sommes de Riemann
Sommes de Riemann.
Notation. Soient f : [a, b] → E une application bornée, σ : a = x0 < x1 < · · · < x n = b
une subdivision de [a, b] et ξ = (ξ i)1≤i≤n une famille de n réels telle que ξ i ∈ [xi−1 , x i ] pour
tout i ∈ {1, . . . , n}. Le couple (σ, ξ ) s’appelle une subdivision pointée.
On appelle somme de Riemann de la fonction f pour la subdivision pointée (σ, ξ ) la
grandeur notée S(f, σ, ξ) définie par
n
S(f, σ, ξ) = (x i − xi−1)f (ξ i).
i=1
Théorème 7. Soit une application f : [a, b] → E continue par morceaux. Pour tout
ε > 0, il existe α > 0 tel que pour toute subdivision pointée (σ, ξ ) de [a, b] vérifiant
|σ | < α, on ait
b
f (x) dx − S (f, σ, ξ) ≤ ε.
a
Démonstration. Nous allons prouver le résultat en trois étapes.
Étape 1. Supposons que f soit de la forme f = χ[c,d] · e, où χ[c,d] est la fonction caractéristique
1. INTÉGRALE SUR UN SEGMENT DE R 129
d’un segment [c, d] inclus dans [a, b] et e ∈ E . Soit (σ, ξ ) une subdivision pointée de [a, b].
Écrivons
σ : a = x0 < x1 < · · · < xn = b, ξ = (ξ i)1≤i≤n .
On remarque que
n xi b
n xi
S(f, σ, ξ) = f (ξi ) dx donc S(f, σ, ξ) − f (x) dx ≤ (f (ξ i ) − f (x)) dx .
xi−1 a x i−1
i=1 i=1
Parmi les intervalles [xi−1, xi ] (1 ≤ i ≤ n), il y en a au plus deux sur lesquels f ne soit pas
constante. On en conclut facilement
b
S(f, σ, ξ) − f (x) dx
≤ 2|σ| · e,
a
d’où le résultat.
Étape 2. Supposons que f soit une fonction en escalier. On peut écrire f comme une somme finie
de fonctions du type de celles traitées dans l’étape 1, et le résultat s’obtient ensuite facilement
par linéarité de l’intégrale et de l’application f → S (f, σ, ξ).
Étape 3. Traitons maintenant le cas général. Soit f : [a, b] → E une fonction continue par
morceaux. Soient ε > 0 et une fonction en escalier ϕ telle que f − ϕ ≤ ε sur [a, b]. L’étape
précédente nous assure l’existence d’un réel α > 0 tel que pour toute subdivision pointée (σ, ξ)
vérifiant |σ | < α, on ait
b
S(ϕ, σ, ξ) − ϕ(x ) dx < ε,
a
Ainsi, pour une telle subdivision pointée (σ, ξ), on a
b
S(f, σ, ξ) − f (x ) dx
a
b b b
≤ S(f, σ, ξ) − S (ϕ, σ, ξ) + S(ϕ, σ, ξ) −
ϕ(x) dx + ϕ(x) dx − f (x) dx
a a a
b
≤ S(f − ϕ, σ, ξ) + ε + ϕ(x) − f (x) dx
a
≤ (b − a)ε + ε + (b − a)ε = (1 + 2(b − a))ε.
d’où le théorème.
Conséquence : Soit f : [a, b] → E une application continue par morceaux. Alors
n n−1 b
b−a b−a b−a b−a
lim f a+i = lim f a+i = f (x) dx.
n→+∞ n i=1 n n→+∞ n
i=0
n a
1.4. Exercices
Exercice 1 (Int égrales de Wallis). Pour tout n ∈ N, on pose
π/2
In = sinn x dx.
0
b) En remarquant que
π
∗
∀p ∈ N , ∀x ∈ 0, , 0 ≤ sin2p+1 x ≤ sin 2p x ≤ sin 2p−1 x,
2
on tire, par intégration
I2p I2p−1 2p + 1
∀p ∈ N ∗, I2p+1 ≤ I2p ≤ I 2p−1 donc 1 ≤ ≤ = ,
I2p+1 I2p+1 2p
la dernière égalité étant une conséquence de (*). Par conséquent
I2p
lim =1
p→+∞ I 2p+1
et on en déduit la formule de Wallis avec la formule (*).
De la formule de Wallis, on déduit
(2p − 1)(2p − 3) · · · 1 1
∼ √
(2p)(2p − 2) · · · 2 pπ
donc grâce à (*), on tire
1 π 1 π
I 2p ∼ et I 2p+1 ∼ I 2p ∼ .
2 p 2 p
On en déduit l’équivalent demandé.
Exercice 2. Soit f : [a, b] → R une fonction positive et continue sur [a, b].
a) Montrer que
b 1/n
n
lim f (t) dt = M où M = sup f (t).
n→+∞ a t∈[a,b]
1. INTÉGRALE SUR UN SEGMENT DE R 131
b) Soit g : [a, b] → R une fonction continue prenant des valeurs strictement positives sur
[a, b]. Montrer que
b 1/n
n
lim f (t) g (t) dt = M où M = sup f (t).
n→+∞ a t∈[a,b]
Comme limn→+∞ µ1/n = 0 pour tout réel µ > 0, on tire de (*) et (**)
b 1/n
∗ n
∃N ∈ N , ∀n ≥ N, M − 2ε ≤ f (t) dt ≤ M + ε.
a
Ceci étant possible pour tout ε > 0, on en déduit le résultat.
b) La fonction g étant continue sur un compact, elle est bornée et atteint ses bornes. On en
conclut que les réels
k = inf g (t) et K = sup g (t)
t∈[a,b] t∈[a,b]
existent et sont strictement positifs. Par ailleurs, le fait que kf (t)n ≤ g (t)f (t)n ≤ Kf (t) n pour
tout t ∈ [a, b] montre que
b 1/n b 1/n b 1/n
1/n n n 1/n n
k f (t) dt ≤ f (t) g (t) dt ≤K f (t) dt .
a a a
1/n
On conclut avec la question précédente et avec les limites lim k = lim K 1/n = 1.
n→+∞ n→+∞
Exercice 3. Soit f : [a, b] → R une fonction de classe C 1 telle que f (a) = f (b) = 0. Soit
M = supt∈[a,b] |f (t)|.
a) Montrer
b
(b − a)2
f (t ) dt≤ M. (∗)
4
a
ce qui entraı̂ne
b b c b
(b − a) 2
f (t ) dt ≤ | f (t ) | dt ≤ M
(t − a
) dt + (b − t ) dt = M.
4
a a a c
b) Les fonctions en présence étant continues, l’égalité se produira si et seulement si chacune des
inégalités précédentes est une égalité. On a donc
∀t ∈ [a, c], |f (t)| = M (t − a) et ∀t ∈ [c, b], |f (t)| = M (b − t),
ce qui entraı̂ne
∀t ∈ [a, c], f (t)2 = M2 (t − a)2 et ∀t ∈ [c, b], f(t)2 = M2 (b − t)2. (∗∗)
La fonction f 2 est de classe C 1 , elle est donc dérivable en c = (a + b)/2. Les formules (**) donnent
2 2
successivement (f2 ) (c) = 2M 2 b−2 a et (f 2 ) (c) = −2M 2 b−2a , ce qui n’est possible que si
M = 0. Donc f = f (a) = 0. Réciproquement, la fonction nulle est bien solution.
Exercice 5. Soit f : [0, 1] → R une fonction de classe C1 telle que 0 ≤ f (t) ≤ 1 pour
tout t ∈ [0, 1]. Montrer que
1 1 2
3
f (x) dx ≤ f (x) dx .
0 0
1. INTÉGRALE SUR UN SEGMENT DE R 133
b) En déduire que
a b
∀a, b > 0, f (t) dt + f −1(t) dt ≥ ab,
0 0
et que l’égalité se produit si et seulement si b = f (a).
Solution. a) Cette égalité a une interprétation géométrique simple comme le montre la figure
ci contre.
f (x)
f −1(t) dt
0 (f )
f (x)
x
f (t) dt
0
0 x
Figure 1. L’aire xf (x) du rectangle est la somme des surfaces des régions
délimitées par ce rectangle et le graphe de f .
On considère l’application
x f (x)
+
g : R → R x → f (t) dt + f −1 (t) dt − xf (x).
0 0
Cette application est dérivable, et
∀x ≥ 0, g (x) = f (x) + f (x)f −1 (f (x)) − f (x) + xf (x) = 0.
1. INTÉGRALE SUR UN SEGMENT DE R 135
Donc g est constante, et comme g (0) = 0 on en déduit que g est nulle, d’où le résultat.
b) On fixe b > 0 et on considère l’application
a b
+
ϕ : R → R a → f (x) dx + f −1 (x) dx − ab.
0 0
Cette application est dérivable, et ϕ (a) = f (a) − b pour tout a ∈ R. Comme f est strictement
croissante, on a donc
∀a < f −1 (b), ϕ (a) < 0 et ∀a > f −1(b), ϕ (a) > 0.
Comme ϕ(f −1(b)) = 0 d’après la question précédente, on déduit de tout ceci que
∀a < f −1 (b), ϕ(a) > 0, ϕ(f −1(b)) = 0, ∀a > f −1 (b), ϕ(a) > 0.
On a donc démontré l’inégalité désirée, et l’égalité se produit si et seulement si a = f −1 (b),
c’est-à-dire b = f (a), d’où le résultat.
Exercice 8. Démontrer que la seconde formule de la moyenne (théorème 6 page 128) reste
vraie si l’on suppose uniquement f continue. Autrement dit, montrer que si f : [a, b] → R
est une fonction continue, positive et décroissante, et si g : [a, b] → R est continue, alors
il existe c ∈ [a, b] tel que
b c
f (t)g (t) dt = f (a) g (t) dt.
a a
(on utilisera une transformation d’Abel à partir d’une expression approchant une somme
de Riemann)
ce qui donne
n−1
I (σ ) = G(a n )f (an−1) − G(a 0)f (a0 ) + (f (a i−1 ) − f (a i))G(ai ).
i=1
Comme G(an )f (an−1) − G(a 0)f (a 0 ) = G(b)f (an−1 ), cette dernière identité entraı̂ne, compte
tenu de la décroissante de la fonction f
n−1
n−1
G(b)f (an−1 ) + (f (ai−1 ) − f (ai ))m ≤ I (σ) ≤ G(b)f (a n−1) + (f (a i−1 ) − f (ai ))M,
i=1 i=1
136 3. INTÉGRATION
c’est-à-dire
G(b)f (a n−1) + m(f (a0 ) − f (an−1 )) ≤ I (σ) ≤ G(b)f (an−1 ) + M (f (a0 ) − f (an−1 ))
et comme f (an−1 ) ≥ 0 on en déduit
mf (a) ≤ I (σ ) ≤ M f (a). (∗)
b
Maintenant nous allons approcher I (σ ) par une somme de Riemann de a f g. Soit ε > 0.
Comme g est continue sur un segment, elle y uniformément continue d’après le théorème de
Heine, donc il existe α > 0 tel que si |x − y | < α, alors |g (x) − g(y )| < ε. Ensuite, le théorème
sur les sommes de Riemann nous assure qu’on peut choisir la subdivision (σ) de pas |σ | < α
b
telle que |S (σ ) − a f g| < ε, où
n−1
S (σ ) = (ai+1 − ai )f (ai )g (ai ).
i=0
On écrit maintenant
n−1 n−1
a i+1
|I (σ ) − S (σ )| ≤ f (a i)|G(ai+1 ) − G(ai) − (ai+1 − a i)g (a i)| = f (ai ) (g (t) − g (ai )) dt
i=0 i=0 ai
et le pas de la subdivision étant |σ | < α, on a |g (t) − g (ai )| < ε pour t ∈ [ai , ai+1 ] donc l’inégalité
précédente entraı̂ne
n−1
n−1
|I (σ ) − S (σ )| ≤ f (a i )(ai+1 − ai)ε ≤ f (a)(ai+1 − a i )ε = (b − a)f (a)ε.
i=0 i=0
On en déduit
b b
I (σ ) −
f (t)g (t) dt ≤ |I (σ ) − S (σ )| + S (σ ) − f (t)g (t) dt ≤ (b − a)f (a)ε + ε,
a a
et finalement, avec (*) on a
b
mf (a) − (b − a)f (a)ε − ε ≤ f (t)g (t) dt ≤ M f (a) + (b − a)f (a)ε + ε.
a
b
Cette inégalité étant vraie pour tout ε > 0, on en déduit bien mf (a) ≤ a
fg ≤ M f (b), d’où le
résultat.
Remarque. - On aurait également pu se ramener au cas du théorème 6 page 128 en
construisant une suite de fonctions (fn ) décroissantes positives de classe C1 , qui converge
uniformément vers f .
– On peut démontrer que la seconde formule de la moyenne est encore vraie si on suppose
seulement f et g Riemann-intégrables.
2. Calcul de primitives
b
La formule a f (t) dt = f (b) − f (a) (pour f une fonction de classe C 1) nous amène à
calculer les primitives d’une fonction continuepour calculer son intégrale.
Lorsque F est une primitive de f , on note f (t) dt = F (t) + k . Cette notation signifie
que l’ensemble des primitives de f est constitué des fonctions de la forme t → F (t) + k où
k est une constante.
Cette écriture peut même être valable sur plusieurs intervalles. Par
exemple, écrire dt/t = log |t| + k signifie que sur R +∗, les primitives de t → 1/t sont les
fonctions de la forme t → log t + k , et que sur R−∗ elles sont de la forme t → log(−t) + k.
1 1
Il faut alors se garder d’écrire −1 dt/t = log |t| , ce qui n’aurait aucun sens.
−1
2. CALCUL DE PRIMITIVES 137
ax + b 2α(x − p) β
sous la forme + .
(x2 + cx + d)h 2 2
[(x − p) + q ] h [(x − p)2 + q2 ]h
138 3. INTÉGRATION
1−x 1 2x + 1 3 1
=− · 2 + · .
(x2 + x + 1)2 2 (x + x + 1) 2 2 (x + 1 ) 2 + 3 2
2 4
√
1 3
(On pourrait aussi procéder en effectuant le changement de variable x + 2
= 2
tan θ ).
Finalement, on a
1−x x+1 2 2x + 1
2 2
dx = 2 + √ arctan √ + k.
(x + x + 1) x +x+1 3 3
2.3. Primitives des fonctions en sinus et cosinus
Polynômes en sinus et cosinus. On veut calculer les primitives sinm x cosn x dx,
où m, n ∈ N. Deux cas se présentent :
— L’un des entiers m ou n est impair (par exemple n = 2p + 1). On a alors
sin x cos x dx = sinm x(1 − sin2 x) p cos x dx.
m n
En effectuant
m ensuite le changement de variable t = sin x, on se ramène à la primi-
tive t (1 − t 2) p dt qui est facile à calculer.
— Les entiers m et n sont pairs. On linéarise, en exprimant sinm x cosn x comme
combinaison linéaire de fonctions de la forme cos kx et sin kx. Par exemple, pour
calculer une primitive de cos4 x, on écrit
eix + e −ix
cos x = d’où
2
4 1 e4ix + e−4ix e2ix + e −2ix cos 4x cos 2x 3
cos x = +4 +3 = + + ,
8 2 2 8 2 8
d’où on déduit facilement la primitive recherchée.
Fractions rationnelles en sinus et cosinus. On veut calculer une primitive d’une
fonction de la forme R(sin x, cos x) où R est une fraction rationnelle en deux variables.
On s’en sort toujours en effectuant le changement de variable t2 = tan(x/2). Comme
2t 1−t 2 dt
dt = 12 (1 + t2 )dx, le calcul se ramène à celui de R , , c’est-à-dire
1 + t 1 + t 1 + t2
2 2
à celui d’une primitive d’une fraction rationnelle. En procédant de la sorte, on trouve les
primitives suivantes, qu’il faut retenir :
x x π
dx dx
= log tan et = log tan + .
sin x 2 cos x 2 4
Cette méthode est souvent fastidieuse car elle amène à calculer des primitives de
fractions rationnelles dont le dénominateur est de degré élevé. On commence en général
par essayer d’effectuer l’un des changements de variable t = sin x, t = cos x ou t = tan x
qui simplifie parfois les calculs. On peut à ce sujet utiliser la règle de Bioche présentée ci
dessous :
— si R(sin x, cos x) dx reste inchangé en changeant x en π − x, on pose t = sin x ;
— si R(sin x, cos x) dx reste inchangé en changeant x en −x, on pose t = cos x ;
— si R(sin x, cos x) dx reste inchangé en changeant x en π + x, on pose t = tan x.
N’oubliez pas que le terme dx doit faire parti de l’expression invariante !
sin 3 x
Exemple 2. On veut calculer dx. Le terme sous le signe reste invariant
1 + cos2 x
en changeant x en −x (il faut prendre en compte le dx), on pose donc t = cos x. On a
dt = − sin x dx, donc le calcul se ramène à celui de la primitive
1 − t2 2
(−dt) = 1− dt = t − 2 arctan t + k.
1 + t2 1 + t2
140 3. INTÉGRATION
√
Exemple 4. Pour calculer 1 − x2 dx, on fait le changement de variable x = cos θ
de sorte que dx = − sin θ dθ , ce qui ramène le calcul à celui de
2 cos(2θ ) − 1 sin(2θ) θ sin θ cos θ − θ
− sin θ dθ = dθ = − +k = .
2 4 2 2
Donc
√ √
x 1 − x2 − arccos x
1 − x2 dx = + k.
2
√ √
— Si a > 0, on écrit y = ax2 + bx + x sous la forme y = a (x − p)2 − q 2 , puis
on
√ effectue le changement de variable x − p = qε ch t avec ε ∈ {−1, 1} (y devient
q a sh t). On se ramène à calculer les primitives d’une fraction rationnelle en sinus
et cosinus hyperbolique.
— Quel que soit le signe de a, une autre méthode est d’écrire ax2 + bx + c = a(x −
α)(x − β ) où α et β sont deux nombres réels distincts, puis
√ x − β
ax 2 + bx + c = |x − α| a
x−α
Astuces de calcul. √
— Les primitives de la forme ax2 + bx + c peuvent se calculer en intégrant par
parties.
√
Exemple 5. On veut calculer t2 − 1 dt. En intégrant par parties, on a
√ √ 2 √ 2
t (t − 1) + 1
t2 − 1 dt = t t2 − 1 − √ dt = t t2 − 1 − √ dt,
t2 − 1 t2 − 1
d’où
√ √ √ √
1
2 t 2 − 1 dt = t t2 − 1 − √ = t t 2 − 1 − log |t + t2 − 1| + k.
t2 − 1
√ √
— Le calcul des primitives de fonctions de la forme R(x, αx + β, γx + δ) où R
est une fraction
√ rationnelle en trois variables se ramène, après le changement
√ de
2
variable t = γx + δ, à un calcul de primitives de la forme F (t, at + bt + c)
où F est une fraction rationnelle.
dx
— Le calcul des primitives est considérablement simplifié
(x + a)n αx2 + βx + γ
en effectuant le changement de variable t = 1/(x + a).
142 3. INTÉGRATION
b) On a
x+1 1 2x 1
2 2
= · 2 2
+ 2 ,
(x + 1) 2 (x + 1) (x + 1)2
donc
x+1 1 dx
2 2
dx = − 2 + .
(x + 1) 2(x + 1) (x + 1)2
2
Pour calculer la primitive du second membre de cette dernière égalité, on fait le changement de
variable x = tan θ , −π/2 < θ < π/2. On a dx = (1 + tan2 θ) dθ et
dx dθ 2 cos(2θ) + 1 sin(2θ) θ
2 2
= 2
= cos θ dθ = dθ = + +k
(x + 1) 1 + tan θ 2 4 2
2x 1
= 2
+ arctan x + k.
4(1 + x ) 2
Finalement
x+1 1 x 1
dx = − + + arctan x + k, k ∈ R.
(x2 + 1) 2 2(x 2 + 1) 2(1 + x2 ) 2
Finalement, on a
√ x π
dx √
= 2 arctan 2 tan + + 1 + k, k ∈ R.
sin x + cos x + 2 2 8
d) On a
1 1
ch 2x = ch 2x + sh 2x = ch 2x(1 + th 2 x) donc √ = .
ch x ch 2x ch x 1 + th 2x
2
b) Il faut utiliser l’une des astuces décrites à la page 141 : on fait le changement de variable
t = 1/(x + 1). Après calculs, on est ramené à la primitive
dt 1 2
ε √2 = −ε log t − + t − t + 1 + k,
k∈R
t −t+1 2
où ε ∈ {−1, 1} a le signe de t. On en déduit le résultat en remplaçant t par 1/(x + 1).
2. CALCUL DE PRIMITIVES 145
Solution. On commence par rechercher une primitive de la fonction x → 1/(3 + sin x). Pour
cela, posons
x π 3π 2 dt
t = tan , x ∈ ,π ou x ∈ π, , de sorte que dx = .
2 2 2 1 + t2
On trouve, après calculs,
dx 2 dt 1 3t + 1 1 3 tan(x/2) + 1
= = √ arctan √ = √ arctan √ .
3 + sin x 3t2 + 2t + 3 2 2 2 2 2 2
1 3 tan(x/2) + 1
La fonction F : x → √ arctan √ est donc une primitive de x → 1/(3 + sin x),
2 2 2
mais seulement sur chacun des intervalles [π/2, π[ et ]π, 3π/ 2]. Il faut donc se garder décrire
I = F (3π/3) − F (π/2), ce qui n’aurait aucun sens. On va résoudre le problème en écrivant
π 3π/2
dx dx
I= + .
π/2 3 + sin x π 3 + sin x
On a
π X π √
dx dx π arctan 2
= lim = lim F (X ) − F = √ − √ ,
π/2 3 + sin x X →π
X<π π/2 3 + sin x X →π
X<π
2 2 2 2
de même
3π/2 3π/ 2 √
dx dx 3π arctan(1/ 2) π
= lim = lim F − F (X ) = − √ + √ .
π 3 + sin x XX>π
→π
X 3 + sin x X →π
X>π
2 2 2 2
Compte tenu de la classique relation arctan x + arctan(1/x) = π/2 pour x > 0, on en déduit
√ √
π arctan 2 + arctan(1/ 2) π π π
I= √ − √ = √ − √ = √ .
2 2 2 2 2 2 2
Proposition 1. Soit f positive et continue par morceaux sur I . Alors f est intégrable si
et seulement s’il existe une suite croissante
de segments Jn = [an , bn ] inclus dans I telle
que ∪n Jn = I et telle que la suite Jn f soit bornée. Dans ce cas, pour toute suite (J n) de
ce type on a
bn
f = sup f = lim f = lim f (t) dt.
I n Jn n→∞ Jn n→∞ an
Soit ε > 0. Comme f est intégrable sur I, la suite (Un) = ( Jn f ) converge donc il existe
N ∈ N tel que pour tout p, q ≥ N , |Up − U q| < ε. Ceci entraı̂ne, pour p, q ≥ N (et p < q),
u p − u q = f+ f ≤ f + f = Uq − U p < ε.
[a q,ap ] [bp ,bq] [aq ,ap ] [bp ,b q]
Finalement, (un ) est bien une suite de Cauchy dans l’e.v.n complet E, donc elle converge. Notons
sa limite.
Unicité de la limite. Soit (Kn ) une autre suite d’intervalles
vérifiant les mêmes hypothèses
que (Jn ), et notons la limite de la suite vn = Kn f . Construisons la suite de segments
Ln = J n ∪ K n = [c n , dn ], qui est bien croissante et vérifie ∪n Ln = I, et notons la limite de la
suite wn = Ln f . Notons Wn = Ln f . Comme Jn ⊂ Ln on a
wn − un = f+ f ≤ f + f = Wn − U n ,
[c n,an ] [bn ,dn] [c n,a n ] [b n,dn ]
et comme (Un ) et (W n) ont même limite (c’est I f ), on en déduit que limn→+∞ wn − u n = 0.
Donc = . On montrerait de même que = , on a donc bien démontré que = .
◦
Proposition 3. Soit f : I → E une fonction continue par morceaux et soit c ∈ I. Soit
Ig = I ∩ ] − ∞, c] et I d = I ∩ [c, +∞[. Alors f est intégrable
sur I si et seulement si f est
intégrable sur Ig et intégrable sur I d, et on a I f = Ig f + Id f .
et comme t → 1/t2 est intégrable sur [1, +∞[, on en déduit avec l’assertion (i) de la
2
proposition 5 que t → e−t est intégrable sur [1, +∞[. On peut également utiliser des
comparaisons avec les intégrales de Bertrand (proposition 6).
Intégrales de Bertrand. En plus des exemples fondamentaux de l’exemple 1 les inté-
grales de Bertrand fournissent d’autres fonctions de comparaison qui permettent parfois,
à l’aide des propositions précédentes, de décider de la convergence d’une intégrale.
est une norme sur L 1c (I, E), appelée norme de la convergence en moyenne.
Proposition 8 (Norme de la convergence en moyenne quadratique). L’ensemble L2c (I, K)
(K = R ou C) des fonctions continues de I dans K de carré intégrable (i.e. f 2 intégrable)
sur I est un espace vectoriel. L’application
2 2
L c(I, K) → K, (f, g) → f g
I
est un produit scalaire sur L2c (I, K) qui fait de L2c (I, K) un espace préhilbertien. La norme
associée est l’application
N2 : L2c (I, K) → R + f → |f | 2
I
l’intégrale généralisée (ou impropre) a f (t) dt converge (ou qu’elle est convergente) et on
b b
pose a f (t) dt = . Dans le cas contraire, on dit que l’intégrale a f (t) dt diverge (ou
qu’elle est divergente).
b
Remarque 2. — Si f est intégrable sur [a, b[, l’intégrale généralisée a f (t) dt converge
b
(on dit aussi que l’intégrale a f (t) dt est absolument convergente), et la valeur de
l’intégrale donnée par la définition précédente est identique à celle de la définition 3
page 147. La réciproque est fausse ; les intégrales généralisées qui convergent mais
ne convergent pas absolument sont appelées intégrales semi-convergentes. b
— Si f est positive, f est intégrable si et seulement si l’intégrale a f (t) dt converge.
— Lorsque f est continue par morceaux sur ]a, b] (−∞ ≤ a < b < +∞), on définirait
b b
de même a f (t) dt = lim xx>a →a
x
f (t) dt lorsque cette limite existe.
b b
— Pour tout c ∈ [a, b[, les intégrales c f (t) dt et a f (t) dt sont de même nature.
— Les propriétés élémentaires vérifiées par les fonctions intégrables restent vraies pour
les intégrales généralisées (linéarité, positivité, relation de Chasles, . . .).
Remarque 4. Le théorème est faux si f est seulement supposée continue (pour un contre-
exemple, voir le troisième alinéa de la remarque 6 — on peut également construire un
contre-exemple d’une fonction continue positive non bornée dont l’intégrale sur R converge,
en considérant une fonction nulle sauf en certains endroits où elle possède des “pics” de
plus en plus grands et de plus en plus étroits lorsque x → +∞).
3.4. Intégrales semi-convergentes
On appelle ainsi les intégrales qui convergent mais ne convergent pas absolument. Le
résultat qui suit permet souvent de montrer la convergence de telles intégrales.
ce qui entraı̂ne,
y
∀x, y ∈ R, A ≤ x < y, f (t)g (t) dt ≤ f (x) · 2M ≤ f (A) · 2M ≤ 2M ε,
x
Remarque 5. - Ce résultat est une version continue du théorème 7 page 215 sur les séries.
Il repose essentiellement sur la deuxième formule de la moyenne (page 128). Cette dernière
n’est pas au programme (la règle d’Abel pour les intégrales ne l’est pas non plus), mais
nous avions vu que lorsque f est C 1 et g continue, sa preuve s’obtient facilement. La
remarque 6 donne un exemple typique de preuve directe.
– En utilisant la proposition 1 page 125, il est clair que ce théorème reste vrai si g est à
valeurs dans un R-e.v de dimension finie, en particulier sur C.
Conséquence : On considère la fonction g : [a, +∞[ → C t → eiλt ( où a, λ ∈ R). On a
x iλx
e − eiλa
∀x > a, g (t ) dt = ≤ 2 .
λ |λ|
a
En appliquant la règle d’Abel, on en déduit que pour toute fonction f : [a, +∞[, → R
décroissante et tendant vers 0 à l’infini, l’intégrale
+∞
f (t)eiλt dt
a
+∞
converge. En particulier, pour tout α > 0, l’intégrale 1
eit/t α dt converge.
Remarque 6. — On peut prouver facilement la convergence de l’intégrale
+∞ it
e
dt (∗)
1 tα
pour α > 0 sans utiliser la règle d’Abel (qui rappelons le, n’est pas au programme).
Il suffit d’intégrer par parties, en écrivant
X it it X
e e α X eit
∀X > 1, dt = + dt.
1 tα it α 1 i 1 tα+1
On remarque ensuite que le terme de gauche dans le membre de droite de cette
dernière égalité converge lorsque X → +∞; quant à son terme de droite, il converge
+∞
également quand X → +∞ car l’intégrale 1 eit/tα+1 dt converge absolument. De
tout ceci, on en déduit la convergence de l’intégrale (*). En particulier, les parties
réelles et imaginaires de cette intégrale convergent, c’est-à-dire que pour tout α > 0,
on a la convergence des intégrales
+∞ +∞
sin t cos t
dt et dt.
1 tα 1 tα
— Lorsque 0 < α ≤ 1, l’intégrale (*) est semi-convergente (elle est convergente mais
non absolument convergente). Lorsque α ≤ 0, elle est divergente.
+∞
— Grâce au changement de variable u = t2, on montre que l’intégrale 1 sin(t 2) dt a
+∞ √
la même nature que 1 (sin u)/ u du, donc convergente d’après ce que l’on vient
de voir. Ceci est un exemple d’intégrale convergente dont la fonction intégrée ne
tend pas vers 0 à l’infini.
154 3. INTÉGRATION
— Profitons en ici pour rappeler que si deux fonctions sont équivalentes en l’infini
et si elles ne sont pas de signe constant, leurs intégrales ne sont pas forcément de
même nature. Par exemple, les fonctions
e it eit 1
f : [1, +∞[→ C t → √ et g : [1, +∞[→ C t → √ +
t t t
+∞
sont équivalentes en l’infini ; pourtant 1 f (x) dx converge (on vient de le voir)
+∞ +∞ +∞
et 1 g (x) dx diverge (si elle convergeait, 1 g (t) − f (t) dt = 1 dt/t conver-
gerait, ce qui est faux).
3.5. Exercices
Exercice 1. Étudier la nature des intégrales suivantes :
1 +∞ +∞ √
ch t − cos t 1 t sin(1/t 2 )
a) dt b) log cos dt c) dt
0 t 5/2 2/π t 0 log(1 + t)
+∞ +∞
sin t log(1 + t α)
d) α
dt, α ∈ R e) β
dt, (α, β) ∈ R 2 .
0 t 0 t
Solution. a) La fonction f : t → ( ch t − cos t)t−5/2 est continue sur ]0, 1]. Le problème se situe
donc en 0. Au voisinage de 0, on a
t2 2 t2
ch t − cos t = 1 + + o( t ) − 1 − + o(t ) = t2 + o(t2 ) ∼ t2,
2
2 2
donc f (t) ∼ t−1/2 lorsque t → 0+ . On en déduit (grâce à la proposition 5) que l’intégrale
1
0 f (t) dt est absolument convergente.
b) Ici, la fonction f : t → log(cos(1/t)) est continue sur ]2/π, +∞[. Étudions le comportement
de cette fonction aux deux bornes de cet intervalle. Lorsque t → 0 +,
2 π 1 π π2
f + t = log cos · = log cos − t + o( t)
π 2 1 + tπ/2 2 4
2 2 2
tπ tπ π
= log sin + o( t) = log + o(t) = log t + log + o(1) ∼ log t,
4 4 4
1
donc 2/π f (t) dt converge absolument. Lorsque t → +∞,
1 1 1 1 1
f (t) = log 1 − 2 + o 2 = − 2 +o 2 ∼ − 2,
2t t 2t t 2t
+∞
ce qui montre que l’intégrale 1 f (t) dt converge absolument.
L’intégrale proposée est donc absolument convergente.
√
t sin(1/t2 )
c) La fonction f : t → est continue sur ]0, +∞[. En 0+, on a
log(1 + t)
√
t 1 1
|f (t)| ≤ ∼ √ donc f (t) = O √ ,
log(1 + t) t t
1
ce qui montre que 0 f (t) dt est absolument convergente. En +∞, on a
√
t 1 1 1
f (t) ∼ = 3/2 = O 3/2 ,
log t t2 t log t t
+∞
donc 1 f (t) dt est absolument convergente. On en déduit que l’intégrale proposée est absolu-
ment convergente.
3. INTÉGRALE SUR UN INTERVALLE QUELCONQUE 155
+∞
d) La fonction fα : t → t −α sin t est continue sur ]0, +∞[. On sait que l’intégrale 1 fα(t) dt
converge si et seulement si α > 0 (voir la remarque 6). Par ailleurs, lorsque t → 0+ on a
1
fα (t) ∼ 1/tα−1 , donc 0 fα (t) dt converge si et seulement si α < 2. Finalement, l’intégrale
proposée converge si et seulement si 0 < α < 2 (elle est semi-convergente pour 0 < α ≤ 1 et
absolument convergente pour 1 < α < 2).
e) L’application fα,β : x → t −β log(1 + t α) est continue sur ]0, +∞[. En 0 + , trois cas se
produisent :
— Si α > 0, on a f α,β (t) ∼ tα−β donc 01 f α,β(t) dt converge si et seulement si β − α < 1.
— Si α = 0, on a fα,β (t) = (log 2)t−β donc l’intégrale converge si et seulement si β < 1.
1
— Si α < 0, on a fα,β (t) ∼ α(log t)t −β donc 0 f α,β (t) dt converge si et seulement si β < 1
(voir les intégrales de Bertrand, proposition 6).
En +∞, on traite également trois cas :
— Si α > 0, alors f α,β (t) ∼ α(log t)t−β donc 1+∞ fα,β(t) dt converge si et seulement si
β > 1. +∞
— Si α = 0, alors fα,β (t) ∼ (log 2)t−β donc 1 fα,β (t) dt converge si et seulement si β > 1.
— Si α < 0, alors fα,β (t) ∼ t α−β donc 1+∞ f α,β(t) dt converge si et seulement si β − α > 1.
+∞
De tout ceci, on déduit que 0 fα,β (t) dt converge si et seulement si 1 + α < β < 1 ou
1 < β < α + 1.
+∞
Exercice 2. Soit f : [1, +∞[→ R une fonction continue telle que l’intégrale 1
f (t) dt
converge. Montrer que pour tout nombre réel a > 0, l’intégrale
+∞
f (t)
dt
1 ta
converge.
Solution. Il s’agit en fait d’un cas particulier de la règle d’Abel (théorème 5). Nous allons ce-
pendant prouver le résultat directement sans faire appel à cette dernière (la preuve est d’ailleurs
1
tout-à-fait représentative de celle de la règle d’Abel dans x le cas où f est continue et g est C ).
On considère l’application F : [1, +∞[→ R x → 1 f (t) dt. Par hypothèse, cette applica-
tion converge lorsque x → +∞, elle est donc bornée. En intégrant par parties, on a pour tout
a>0
X X
f (t) F (t) X F (t)
∀X > 1, a
dt = a
+a dt.
1 t t 1 1 t1+a
La dernière intégrale converge absolument lorsque X → +∞ car F est bornée et a > 0. Quant
au terme entre crochets, il converge également lorsque X → +∞ toujours parce que F est bornée
et a > 0. On en déduit le résultat.
Solution. a) La nature de cette intégrale ne peut pas être décidée en utilisant “les méthodes
usuelles” de comparaison avec des fonctions dont la nature de l’intégrale est connue. On s’en
sort autrement en utilisant une comparaison série-intégrale. Pour tout n ∈ N, on pose
(n+1)π
1
un= f (x) dx où f (x) = .
nπ 1 + x sin 2 x
4
156 3. INTÉGRATION
+∞
La fonction f étant positive, la série un et l’intégrale 0 f (x) dx ont même nature (en effet,
l’égalité 0nπ f (t) dt = n−1k=0 uk montre que si l’une est bornée l’autre l’est également). Nous
sommes donc ramené à donner la nature de la série u n. Nous allons prouver qu’elle converge.
∗
Pour tout n ∈ N , on a
(n+1)π π π/2
dt dt dt
un ≤ 2
= 2
= 2 = 2In.
nπ 1 + n 4π 4 sin t 4 4
0 1 + n π sin t 0 1 + n4 π4 sin 2 t
La minoration classique sin t ≥ 2t/π sur [0, π/ 2] (que l’on peut obtenir, par exemple, en utilisant
la concavité de la fonction sinus sur cet intervalle) entraı̂ne
π/2 π/2
∗ dt dt
∀n ∈ N , In ≤ 4 4 2 2
= ,
0 1 + n π 4t /π 0 1 + 4n 4π2 t2
ce qui en effectuant le changement de variable u = 4n 2πt entraı̂ne
2n 2π2 +∞
∗ 1 du 1 du
∀n ∈ N , In ≤ 2 2
≤ 2
,
4n π 0 1+u 4n π 0 1 + u2
autrement dit, u n ≤ 2In = O(1/n 2). Ceci suffit pour conclure que la série un converge.
b) Ici, comme précédemment, on ne peut pas s’en tirer en utilisant les méthodes usuelles de
critère de convergence d’une intégrale. On procède également par comparaison série-intégrale.
Pour tout n ∈ N∗ , on pose nπ
un = | sin x| x dx.
(n−1)π
La
fonction intégrée étant positive, nous avons montré précédemment
que l’intégrale et la série
u n avaient même nature. Nous allons montrer cette fois que un diverge. Pour tout n ∈ N∗ ,
on a
nπ π π/2
un ≥ | sin x|4n dx = sin4n x dx = 2 sin4n x dx = 2I n.
(n−1)π 0 0
L’intégrale I n est une intégrale classique : c’est une intégrale de Wallis, dont on sait (voir
l’exercice
1, page 130) qu’elle est équivalente à π/(8 n). Donc In diverge, et comme un ≥ 2In ,
u n diverge. L’intégrale proposée diverge donc.
Exercice 4. Soit f : [0, +∞[→ R une fonction continue par morceaux, positive et
décroissante, et intégrable sur R+ . Montrer que f (x) = o(1/x) lorsque x → +∞.
Solution. Soit ε > 0. Comme f est intégrable, le critère de Cauchy s’applique, donc
2x
∃X > 0, ∀x > X, f (t) dt < ε,
x
et on en déduit, la fonction f étant décroissante,
2x 2x
∀x > X, xf (2x) = f (2x) dt ≤ f (t) dt < ε.
x x
Donc 0 ≤ (2x)f (2x) ≤ 2ε pour tout x > X. Ceci entraı̂ne limx→+∞ xf (x) = 0 d’où le résultat.
Remarque. Ce résultat est une version continue de celui de l’exercice 2 page 219.
1
Exercice 5. a) Soit f : ]0, 1[→ R une fonction croissante telle que l’intégrale 0
f (t) dt
converge. Montrer que
n−1 1
1 k
lim f = f (t) dt.
n→+∞ n n 0
k=1
3. INTÉGRALE SUR UN INTERVALLE QUELCONQUE 157
d’où le résultat en faisant tendre n vers l’infini puisque chacun des termes extrêmes de ces
1
inégalités tend vers 0 f (t) dt.
b) En appliquant le résultat précédent à la fonction f : x → xα−1 , on obtient
n−1 α−1 1 n−1
1 k α−1 1 1 α−1 1
lim = t dt = donc lim k = ,
n→+∞ n n 0 α n→+∞ n α α
k=1 k=1
Soit p l’entier naturel tel que nα + pT ≤ nβ < nα + (p + 1)T (p est la partie entière de
n(β − α)/T ). On peut écrire
nα+pT nβ
1
In = ψ (t) dt + ψ (t) dt
n nα nα+pT
T nβ
1 1 nβ
= p ψ (t) dt + ψ (t) dt = ψ (t) dt,
n 0 nα+pT n nα+pT
et comme 0 ≤ nβ − (nα + pT ) < T ceci entraı̂ne
1 T
|In | ≤ |ψ (t)| dt.
n 0
On en déduit que (**) est bien vérifié pour f .
(ii) Si f est une fonction en escalier sur un segment inclus dans I , f est combinaison linéaire
de fonctions caractéristiques de segments inclus dans I , on en déduit par linéarité que
(**) reste vrai pour f .
(iii) Traitons maintenant le cas où f est continue par morceaux et intégrable sur I . Soit
ε > 0. Comme f est intégrable, il existe un segment J = [c, d] inclus dans I tel que
c b
a |f (t)| dt + d |f (t)| dt < ε. Ensuite, la restriction de f à J étant continue par morceaux,
elle est réglée donc il existe une fonction en escalier g telle que |f − g | < ε/(d − c) sur
J. L’étape précédente nous assure l’existence de N ∈ N tel que pour tout n ≥ N ,
d
| c g (t)ψ (nt) dt| < ε. Ainsi, en notant M = supt∈[0,T ] |ψ (t)| = supt∈R |ψ (t)|, on a, pour
n≥N
d d d
f (t)ψ (nt) dt ≤
|f (t) − g (t)| · |ψ (nt)| dt + g (t)ψ (nt) dt ≤ M ε + ε.
c c c
Ceci entraı̂ne que lorsque n ≥ N ,
b c
d b
f (t )ψ (nt) dt ≤ M | f (t ) | dt +
f (t)ψ (nt) dt + M |f (t)| dt ≤ 2M ε + ε.
a a c d
d’où on déduit +∞
2I n = (f (t) − f (t + π/n))eint dt. (∗∗∗∗)
−∞
L’intégrande de cette intégrale converge simplement vers 0 lorsque n → ∞, mais son module
n’est pas majoré par une fonction intégrable ϕ indépendamment de n. La convergence de (****)
+∞
vers 0 s’obtient en écrivant |I n| ≤ 12 −∞ |f (t) − f (t + π/n)| dt et en procédant comme dans la
solution de la question a) du problème 6 page 180.
3. INTÉGRALE SUR UN INTERVALLE QUELCONQUE 159
Exercice 7. a) Soitf : [0, +∞[→ R une fonction continue par morceaux et décroissante,
+∞
telle que l’intégrale 0 f (t) dt converge et est non nulle. Pour tout t > 0, prouver la
convergence de
+∞
f (nt)
n=1
et donner un équivalent de cette dernière expression lorsque t → 0+.
b) (Application.) Donner un équivalent, lorsque x → 1 −, de la série entière
+∞
2
x → xn .
n=1
Solution. a) La fonction f décroı̂t et son intégrale converge, on en déduit que f tend vers 0 à
l’infini. En utilisant encore la décroissance de f , on en déduit que f est positive.
Ensuite, on procède comme dans l’exercice 5. La fonction f étant décroissante, on a
(n+1)t nt
∗
∀t > 0, ∀n ∈ N , f (x) dx ≤ tf (nt) ≤ f (x) dx. (∗)
nt (n−1)t
autrement dit, les sommes partielles de la série étudiée sont majorées (lorsque t > 0 est fixé).
Les termes de la série étant positifs, on en déduit qu’elle converge, et ceci pour tout t > 0.
Maintenant, par sommation de (*) sur n ∈ N ∗, on obtient
+∞ +∞
+∞
∀t > 0, f (x) dx ≤ t f (nt) ≤ f (x) dx,
t n=1 0
et on en déduit que
+∞
+∞ +∞
+∞
1
lim t f (nt) = f (x) dx donc f (nt) ∼ f (x) dx
t→0+
n=1 0 n=1
t 0
(cette dernière assertion a bien un sens car l’intégrale est non nulle par hypothèse).
2
b) En posant x = e−t , on a
+∞
+∞
+∞
2 2
∀x ∈ ]0, 1[, xn = e−(nt) = f (nt)
n=1 n=1 n=1
−u2
+∞ −u2
avec f : u → e . En posant c = 0
e du, on en déduit grâce au résultat de la question
précédente que
+∞
2 c c c
xn ∼ =√ ∼ √ .
n=1
t − log x 1−x
√
Remarque. On peut montrer que c = π/2 (voir l’exercice 2 page 167).
160 3. INTÉGRATION
Exercice 8. Soit f : [0, +∞[→ R une fonction continue telle que l’intégrale
+∞
f (t)
dt
1 t
converge.
a) Soient deux nombres réels strictement positifs a et b. Montrer que l’intégrale
+∞
f (at) − f (bt)
dt
0 t
converge et calculer sa valeur.
b) (Application.) Si a, b > 0, calculer l’intégrale
+∞ −at
e − e−bt
dt.
0 t
Exercice 9. Soit f : R+ → R une fonction continue par morceaux, positive, telle que
f 2 est intégrable sur R+ . Montrer que lorsque x → +∞,
x
√
f (t) dt = o x .
0
4. INT ÉGRALES DÉPENDANT D’UN PARAM ÈTRE, ÉQUIVALENTS D’INTÉGRALES 161
Alors l’application
b
Φ: A→E x → f (x, t) dt
a
est de classe C 1 sur A et on a
b
∂f
∀x ∈ A, Φ (x) = (x, t) dt.
a ∂x
Démonstration. Soit x ∈ A et (xn ) une suite dans A{x} convergeant vers x. La suite de
fonctions (gn) définie par gn : I → E t → (f (x n , t) − f (x, t))/(xn − x) converge simplement
vers ∂f
∂x
(x, ·) sur I . La fonction g n est bien continue par morceaux et intégrable sur I . De plus,
comme ∂f ∂x (y, t ) ≤ ϕ(t) pour tout y ∈ I , l’inégalité des accroissements finis entraı̂ne que
gn (t) ≤ ϕ(t). Ainsi, on peut
∂fappliquer le théorème
de convergence dominée qui nous assure la
convergence de I gn vers I ∂x (x, ·). Comme I g n = (Φ(x n) − Φ(x))/(xn − x), nous venons de
démontrer que Φ est dérivable en x et que Φ(x) = I ∂f ∂x (x, ·). La dernière intégrande vérifiant
les hypothèses du théorème de continuité sous le signe intégral, on en déduit que Φ est continue.
Remarque 1. - Les résultats des deux théorèmes précédents restent vrais lorsque l’hy-
pothèse de domination est vérifiée uniquement sur un voisinage de tout point de A (la
continuité, la dérivabilité, sont des propriétés locales). C’est en particulier le cas si A ⊂ Rn
et si l’hypothèse de domination est vraie sur tout compact K de A.
– Lorsque les intégrales définissant Φ sont semi-convergentes, les théorèmes
précédents ne
s’appliquent plus. On passe en général par une suite de fonctions f n (x) = K n f (x, ·) où les
Kn sont des segments de I qui tendent vers I , puis on prouve des résultats de convergence
uniforme pour (fn ) (voir un exemple dans la solution 2/b) de l’exercice 4 page 168).
Dans le cas où I est un segment de R (et A un intervalle de R), et f continue,
l’hypothèse de domination n’est plus nécessaire, comme l’exprime le corollaire suivant.
Cette fonction vérifie les propriétés suivantes (démontrées dans le sujet d’étude 1 page 315,
plus largement consacré à l’étude de cette fonction)
4. INT ÉGRALES DÉPENDANT D’UN PARAM ÈTRE, ÉQUIVALENTS D’INTÉGRALES 163
Méthode de Laplace. Nous allons donner un résultat général sur les équivalents d’inté-
grales dont l’intégrande dépend d’un paramètre, qui s’applique aux intégrales de la forme
+∞
I (t) = g (x) e th(x) dx lorsque t → +∞.
0
La démarche utilisée s’appelle la méthode de Laplace. Elle ne figure pas au programme
des classes préparatoires, mais les techniques utilisées sont instructives et permettent de
résoudre les nombreux exercices derrière lesquels se cache cette méthode.
Commençons par l’examen d’un cas particulier.
Lemme 1. Soient α > −1, β > 0, c > 0 et b vérifiant 0 < b ≤ +∞. Alors lorsque
t → +∞,
b
α −tcx β 1 α+1
J (t) = x e dx ∼ Γ (ct)−(α+1)/β ,
0 β β
où la fonction Γ est définie page 162.
Démonstration. Il suffit d’effectuer le changement de variable u = tcxβ , ce qui donne
cb βt
1 −(α+1)/β
J (t) = (ct) u (α+1)/β−1e −u du,
β 0
d’où le résultat lorsque t → +∞.
Nous pouvons maintenant énoncer le résultat principal de cette sous-partie.
Théorème 4. Soient g et h : ]0, +∞[ → R deux applications continues par morceaux
vérifiant
(i) la fonction x → g (x)eh(x) est intégrable sur R +,
(ii) ∃δ0 > 0, ∀δ ∈ ]0, δ0 [, ∀x ≥ δ, h(x) ≤ h(δ ),
+
(iii) Lorsque x → 0 , on a
g (x) ∼ Axα (α > −1) et h(x) = a − cx β + o(xβ ) (c > 0, β > 0).
Alors lorsque t → +∞, on a
+∞
th(x) A α + 1 at
I (t) = g (x)e dx ∼ Γ e (ct) −(α+1)/β .
0 β β
Démonstration. Multipliant par e−at /A, on peut déjà supposer a = 0 et A = 1. Posons d’abord,
pour simplifier l’écriture,
1 α+1
ϕ(t) = Γ (ct) −(α+1)/β .
β β
Nous allons, pour ε ∈ ]0, 1[, montrer successivement
(i) ∃δ ∈ ]0, δ 0[, ∃t 1 > 0 tels que, pour tout t ≥ t 1 ,
δ
2 −(α+1)/β
(1 − ε) (1 + ε) ϕ(t) ≤ g (x)e th(x) dx ≤ (1 + ε)2 (1 − ε) −(α+1)/β ϕ(t);
0
4. INT ÉGRALES DÉPENDANT D’UN PARAM ÈTRE, ÉQUIVALENTS D’INTÉGRALES 165
Démonstration. On coupe l’intégrale en deux : ab = ac + cb, puis on ramène c à 0 en effectuant
un changement de variable affine. On utilise ensuite le théorème précédent. Pour chacun des
deux cas, on a ici
h (c)
α = 0, A = g (c), β = 2, c=− , a = h(c),
2
et l’équivalent est le double de celui du théorème précédent (il y a deux intégrales).
√
Remarque 4. On peut utiliser la valeur Γ(1/2) = π dans le corollaire précédent.
Dans la pratique, l’intégrande n’a pas toujours la forme de celle requise pour appliquer
la méthode de Laplace. On effectue souvent un changement de variable pour amener le
maximum de la fonction apparaissant dans l’exponentielle à une abscisse fixe puis on
applique le corollaire précédent. C’est cette technique qui est utilisée dans l’exemple qui
suit.
Exemple 2. On veut trouver le comportement asymptotique, lorsque x → +∞, de
+∞
Γ(x + 1) = ex log t−t dt.
0
Comme il est dit plus haut, on cherche l’abscisse t du maximum de la fonction h(t) =
x log t − t (c’est ce maximum qui va dicter le comportement de Γ en +∞). On a h (t) =
x/t − 1, le maximum est donc atteint en t = x. Pour se ramener au cas où h atteint
son maximum en une abscisse indépendante de x, on effectue le changement de variable
u = t/x. On trouve
+∞
x+1
Γ(x + 1) = x e x(log u−u) du.
0
La fonction u → log u − u atteint son maximum en u = 1, et on peut appliquer le corollaire,
qui donne
x+1 1 −x 2 √
Γ(x + 1) ∼ x Γ e = 2π x x+1/2e −x .
2 x
Ce résultat est connu sous le nom de formule de Stirling. Elle généralise celle obtenue
dans l’exercice 3 page 219 pour x entier (car Γ(n + 1) = n! pour tout n ∈ N∗ ).
Remarque 5. Dans les exercices qui suivent, on utilisera tels quels les résultats concer-
nant la méthode de Laplace. Néanmoins, le jour du concours, il faut être capable de
tout redémontrer (en appliquant directement aux fonctions concernées les démonstrations
précédentes).
4.3. Exercices
Exercice 1. On considère une application f : [0, 1] → R strictement croissante telle que
f (0) = 0 et f (1) = 1. Montrer que
1
lim f (t) n dt = 0.
n→+∞ 0
+∞ 2
Exercice 2 (Intégrale de Gauss : 0 e −t dt). Le but de l’exercice est de donner
deux méthodes pour calculer l’intégrale de Gauss
+∞
2
I= e −t dt.
0
Solution. 1/ La fonction
2 2
e−(t +1)x
[0, +∞[ ×[0, 1] (x, t) →
t2 + 1
admet une dérivée partielle par rapport à x continue. On en déduit (théorème de dérivabilité
sous le signe intégral, et plus précisément le corollaire 1 page 162) que g est dérivable et que
1 1
−(t 2+1)x2 −x 2 2
∀x ≥ 0, g (x) = −2x e dt = −2xe e−(tx) dt,
0 0
ce qui, après le changement de variable u = tx donne
x x
−x2 −u2 2
g (x) = −2e e du = −2f (x)f (x) avec f : x → e −u du.
0 0
En intégrant, on en déduit
π
∀x ≥ 0, g(x) − g (0) = − f 2(x) − f 2 (0) donc g (x) = − f2 (x). (∗)
4
Les inégalités
1
dt
−x2
0 ≤ g (x) ≤ e 2
entraı̂nent lim g (x) = 0,
0 1+t x→+∞
√ √
En effectuant le changement de variable t = n cos u dans le membre de gauche et t = n cotan u
dans le membre de droite, cette dernière assertion s’écrit aussi
π/2 √n π/2
∗ √ 2n+1 −t2 √
∀n ∈ N , n sin u du ≤ e dt ≤ n sin2n−2 u du. (∗∗)
0 0 0
Remarque. Il existe d’autres moyens de calculer cette intégrale (voir l’exemple 2 page 355
par exemple).
Solution. L’idée est de trouver une équation différentielle vérifiée par chacune de ces intégrales
puis de la résoudre pour exprimer explicitement l’intégrale correspondante.
1/ L’intégrande est bien intégrable sur ]0, +∞[ (elle est égale à x + o(1) lorsque t → 0). La dérivée
de l’intégrande par rapport à x est e−t cos xt, dont la valeur absolue est majorée indépendamment
de x par e−t, intégrable sur ]0, +∞[. En vertu du théorème de dérivation sous le signe intégral,
on en déduit que I est dérivable et que
+∞ +∞
+ −t −t+ixt 1 1
∀x ∈ R , I (x) = e cos xt dt = e dt = = .
0 0 1 − ix 1 + x2
On en déduit x
+ dt
∀x ∈ R , I(x) = I (0) + = arctan x.
0 1 + t2
2/ a) En procédant comme dans la solution de la question précédente, on montre que I est
dérivable et que
+∞
+
∀x ∈ R , I (x) = i e −teixt tα dt.
0
Par ailleurs, une intégration par parties donne
+∞
t α +∞ −1 + ix i+x
∀x ≥ 0, I(x) = e(−1+ix)t · − e−t eixt tα dt = − I (x).
α 0 α 0 α
Cette équation différentielle vérifiée par I s’intègre, compte tenu du fait que
dx x−i 1
= 2
dx = log(x 2 + 1) − i arctan x + k, k ∈ C,
i+x x +1 2
et on tire
1 2
∃C ∈ C, I(x) = C exp −α log(x + 1) − i arctan x = C (x2 + 1) −α/2 eiα arctan x .
2
Or I (0) = C = Γ(α), donc finalement
∀x ∈ R +, I(x) = Γ(α)(x2 + 1) −α/2e iα arctan x .
Pour y > 0, l’existence de I(y ) est immédiate. Pour y = 0, son existence est une conséquence
de la règle d’Abel (voir le théorème 5 page 152). Pour montrer la continuité de I en 0, on va
montrer que I est limite uniforme de fonctions continues. On considère la suite de fonctions (
In )
définie par n
∀n ∈ N ∗, ∀y ≥ 0, In(y) = e−uy eiu uα−1 du.
1/n
170 3. INTÉGRATION
et on en déduit que (
In ) converge uniformément vers I sur R+ . Le théorème de continuité sous
le signe intégral assure la continuité de In en 0 pour tout n ∈ N∗ , donc I, limite uniforme de
fonctions continues sur R+ , est continue sur R+ . En particulier, I est continue en 0 + ce qui
s’écrit aussi
lim xα I (x) = J (α),
x→+∞
et d’après le résultat de la question précédente on en déduit
J (α) = Γ(α)eiαπ/2.
3/ En procédant comme dans la solution de la question 1/, on montre que I est dérivable et que
+∞
+ 2
∀x ∈ R , I (x) = 2iπ te−t e2iπtx dt.
−∞
Par ailleurs, une intégration par parties donne
+∞
1 −t2 2iπxt +∞ 1 2 1 1
∀x ≥ 0, I(x) = e e + 2te −t e2iπxt dt = I (x).
2iπx −∞ 2iπx −∞ iπx 2iπ
En résolvant cette équation différentielle vérifiée par I , on trouve
2 2
I(x) = I (0)e−π x .
∀x ≥ 0,
√
La constante I (0) est calculable : elle vaut π (voir l’exercice 2).
Solution. La convergence de l’intégrale donnant I (t) pour tout t > 0 est immédiate. Pour trouver
son équivalent lorsque t → 0+ il est commode de commencer par effectuer le changement de
variable u = tx (ceci pour localiser la zone qui contribue au terme dominant de l’intégrale), ce
qui donne +∞
e −u
∀t > 0, I(t) = √
3 3
du.
t u + t3
Lorsque t → 0+ , la contribution prépondérante de l’intégrale se produit lorsque u est proche de
t. Dans cette zone, l’intégrande se comporte comme (u3 + t3 )−1/3 . Lorsque u est proche de 0
mais grand par rapport à t, la contribution de ce terme reste significative, et 1il est alors bien
approché par 1/u. On s’attend par conséquent à ce que I (t) soit équivalent à t du/u = − log t.
C’est ce que nous allons montrer rigoureusement dans les lignes qui suivent.
Pour tout t > 0, on écrit
1 1 1 +∞
du 1 1 e−u − 1 e−u
I (t) − = − du + du + du . (∗)
t u t (u3 + t 3) 1/3 u 3
t (u + t )
3 1/3
1 (u3 + t 3)1/3
I1 (t) I2(t) I3(t)
4. INT ÉGRALES DÉPENDANT D’UN PARAM ÈTRE, ÉQUIVALENTS D’INTÉGRALES 171
Nous allons prouver que les intégrales I1 (t), I2 (t) et I3 (t) du second membre de cette égalité
sont bornées lorsque t → 0+ . Pour les deux dernières c’est facile car il suffit d’écrire (compte
tenu de la classique inégalité 1 − e−u ≤ u)
1 1 +∞
u
|I2 (t)| ≤ 3 + t3)1/3
du ≤ du ≤ 1 et | I3 (t )| ≤ e−u du = 1.
t (u t 1
et compte tenu du fait que 1 − (1 + x)−1/3 ≤ x/3 pour tout x ≥ 0 (inégalité que l’on obtient par
exemple en utilisant la convexité de la fonction x → (1 + x)−1/3 ), on a
1
1 t t 1 du 1
∀t > 0, |I1 (t)| ≤ du = = .
t u 3u 3 t u2 3
Ainsi nous avons montré I 1(t) + I2 (t) + I3 (t) = O(1) lorsque t → 0+, donc grâce à (*) on en
déduit
I (t) + log t = O (1) donc I (t) = − log t + O (1) ∼ − log t lorsque t → 0 +.
Solution. 1/ a) On ne peut pas appliquer tel que le théorème 4 car dans l’expression tx = e (log t)x,
la fonction dans l’exponentielle est croissante en x. On procède comme il est indiqué dans le
commentaire du corollaire 2.
On écrit x−αx tx = exp(f (x) ) où f (x) = log t · x − αx log x. Comme f (x) → −∞ lorsque
x → +∞, l’intégrale I (t) converge. Cherchons l’abscisse x du maximum de f . On a
f (x) = log t − α(1 + log x)
donc le maximum de f est atteint au point x = t1/α /e. Pour le ramener à une abscisse fixe, on
effectue le changement de variable x = ut1/α/e. On obtient
+∞
t 1/α
I (t) = s esh(u) du où s = et h(u) = αu(1 − log u).
0 e
La fonction h admet un unique maximum en u = 1, et on a h(1) = α, h (1) = −α. On peut
donc appliquer le corollaire 2 à cette dernière intégrale, ce qui donne
+∞
sh(u) 1 αs 2
e du ∼ Γ e .
0 2 αs
√
Donc, compte tenu de l’expression de s en fonction de t et du fait que Γ(1/2) = π, on trouve
2π 1/(2α) αt1/α
I (t) ∼ t exp .
eα e
172 3. INTÉGRATION
Solution. On traite d’abord le cas µ > −1. Le théorème 3 (page 163) sur les équivalents de
primitives entraı̂ne
x x
g (t) dt
dt ∼ µ autrement dit log g (x) ∼ µ log x.
a g (t) a t
En particulier,
∀ε > 0, ∃X > a, ∀x ≥ X, log g (x) ≥ (µ − ε) log x ou encore g (x) ≥ xµ−ε .
4. INT ÉGRALES DÉPENDANT D’UN PARAM ÈTRE, ÉQUIVALENTS D’INTÉGRALES 173
+∞
En choisissant ε > 0 suffisamment petit pour que µ − ε > −1, on en déduit que a g (t) dt
diverge. Par ailleurs, en intégrant par parties, on a
x x x x
g (t) dt = tg (t) − tg (t) dt donc g (t) + tg (t) dt = xg (x) − ag (a).
a a a a
Or
g (t)
g (t) + tg (t) = g (t) 1 + t ∼ g (t)(1 + µ),
g (t)
donc en vertu du théorème 3, on a
x x
xg (x) − ag (a) = g (t) + tg (t) dt ∼ (µ + 1) g (t) dt.
a a
On en déduit le résultat.
Le cas µ < −1 se traite de la même manière.
Solution. Commençons par analyser intuitivement la situation. Lorsque t est grand, x → eit ch x
tourne très vite autour de l’origine dans C, ce qui a pour effet de rendre l’intégrale petite. Mais
lorsque x est proche de 0, l’application x → ch x varie peu (sa dérivée est nulle en 0), et cette
rotation est très ralentie (on dit que la phase t ch x est stationnaire). La partie de l’intégrale
correspondant à ce voisinage apporte donc une contribution prépondérante. Pour cette raison,
on va travailler au voisinage de 0.
Le développement limité
x2
ch x = 1 + + o( x 2 ) x → 0+
2
nous invite à écrire ch x = 1 + 2 sh 2 (x/2) et d’effectuer le changement de variable u = sh (x/2)
dans l’intégrale. On trouve
α
it 2 1 cos(2 argsh u)
I (t) = 2e J (t), où J (t) = g (u)e2itu du avec α = sh , g(u) = √ .
0 2 1 + u2
La fonction g est de classe C∞ et g (0) = 1. Nous allons montrer, comme on s’y attend suite à la
discussion que nous avons eu plus haut, que
α
2
J (t) ∼ e2itu du lorsque t → +∞.
0
Le changement de variable v = 2tu 2 fournit
α 2tα2 iv +∞ iv
2itu 2 1 e K e
e du = √ √ dv ∼ √ avec K = √ dv. (∗).
0 2 2t 0 v 2 2t 0 v
Par ailleurs, on a
α α
2 2
J (t) − e2itu du = g 1(u)e2itu du avec g1(u) = g (u) − 1. (∗∗)
0 0
La fonction g1 est de classe C∞ et elle est nulle en 0, on peut en déduire facilement que u →
g1 (u)/u se prolonge en une fonction de classe C 1 sur [0, α] (cette dernière est même de classe
C ∞, voir l’exercice 3 page 168). On peut donc écrire
α α
2itu2 1 g1 (u) d 2itu 2
g 1(u)e du = e du
0 4it 0 u du
α
1 g1 (u) 2itu 2 α 1 d g1 (u) 2itu2
= e − e du,
4it u 0 4it 0 du u
ce qui montre, avec (**)
α
2itu2 1
J (t) − e du = O , (t → +∞).
0 t
Avec (*) on en déduit
+∞
it Keit eiv
I (t) = 2e J (t) ∼ √ avec K = √ dv.
2t 0 v
√ iπ/4
Remarque. On a K = Γ(1/2) eiπ/4 = πe (voir la question 2/b) de l’exercice 4).
– Il existe une technique générale appelée la méthode
bde la phase stationnaire qui permet
ith(x)
de donner un équivalent des intégrales de la forme a g (x)e dx lorsque t → +∞.
Solution. Pour n fixé, l’intégrande de In est équivalente à x −na lorsque x → +∞, ce qui montre
que In existe dès que n > 1/a.
En effectuant le changement de variable t = xa, on voit que
1 +∞ tα dt 1 1
In = = Jn où α = − 1.
a 0 (1 + t)(2 + t) · · · (n + t) a a
On s’est ainsi ramené à rechercher un équivalent de Jn lorsque n → +∞. On sent intuitivement
que c’est la partie correspondant aux valeurs de x proches de 0 qui va donner une contribution
prépondérante à l’intégrale. Ceci nous amène à rechercher un équivalent de
1
t α dt
Kn = .
0 (1 + t)(2 + t) · · · (n + t)
Cette dernière intégrale a des bornes d’intégrations finies, ce qui nous simplifiera la tache dans
la suite du calcul. Nous prouverons ultérieurement que l’on a bien K n ∼ Jn.
Poursuivons. On écrit
1
Ln t α dt
Kn = , Ln = ,
n! 0 (1 + t)(1 + t/2) · · · (1 + t/n)
nous ramenant ainsi à trouver un équivalent de L n. Commençons par donner l’idée. On va écrire
n n n
t t t
1+ = exp log 1 + exp exp(t log n).
k k k
k=1 k=1 k=1
donc finalement
1 1
∗ α −t(log n+L)
∀n ∈ N , t e dt ≤ Ln ≤ tα e −t(log n−L) dt. (∗∗)
0 0
Or, de manière générale on a
1 λ
1 Γ(α + 1)
t αe−λt dt = t αe −t dt ∼ , λ → +∞.
0 λα+1 0 λ α+1
176 3. INTÉGRATION
Ainsi, les termes extrêmes des inégalités (**) sont tout deux équivalents à
Γ(α + 1)
(∗∗∗)
(log n) α+1
(car log n − L ∼ log n et log n + L ∼ log n lorsque n → +∞). On en déduit d’après (**) que
(***) est un équivalent de Ln , donc finalement
1 1 Γ(α + 1)
Kn = Ln ∼ , n → +∞. (∗∗∗∗)
n! n! (log n)α+1
Pour achever notre calcul, il reste à montrer que Jn ∼ Kn. Pour cela, on écrit d’abord
+∞
fN (t) dt tα
Jn − Kn = , fN (t) =
1 (N + t) · · · (n + t) (1 + t)(2 + t) · · · (N − 1 + t)
Fixons un entier N > α + 2, de sorte que f N est intégrable sur [1, +∞[. Pour n > N on a
+∞
fN (t) dt (N !) 1+∞ f N (t) dt 1
0 ≤ Jn − Kn ≤ = =O .
1 (N + 1) · · · (n + 1) (n + 1)! (n + 1)!
Avec (****), on en déduit que Jn ∼ K n . Finalement, compte tenu du fait que α = 1/a − 1, on
a montré
1 1 1 1 1
In = Jn ∼ 1/a
Γ .
a a n! (log n) a
Remarque. On peut utiliser la formule de Stirling pour exprimer l’équivalent obtenu sous
une forme ne faisant pas intervenir de factorielle.
5. Problèmes
Problème 1. Soient [a, b] un segment de R non réduit à un singleton et f : [a, b] → C
une application de classe C1 telle que f (a) = 0. Montrer les deux inégalités suivantes et
caractériser l’égalité.
b
2 (b − a)2 b
a) |f (x)| dx ≤ |f (x)| 2 dx
a 2 a
b b
b−a
b) |f (x)f (x)| dx ≤ |f (x)| 2 dx.
a 2 a
La fonction u vérifie
x
x
∀x ∈ [a, b], |f (x)| = f (t) dt ≤
|f (t)| dt = u(x).
a a
En particulier,
b b b b b 2
u2(x) 1
|f (x)f (x)| dx ≤ |f (x)| u(x) dx = u (x)u(x) dx = = |f (x)| dt .
a a a 2 a 2 a
Solution. On ne sait pas exprimer une primitive de t → 1/ log t avec des fonctions usuelles (en
fait, on ne peut pas !). Cependant, lorsque t est voisin de 1, 1/ log t est proche de 1/(t log t) dont
on connaı̂t une primitive. C’est cette idée que nous mettons en forme. Pour tout x ∈ ]0, 1[, on a
x2 1 x
∀t ∈ [x 2 , x], ≤ ≤ ,
t log t log t t log t
donc par intégration
x2 x2
2 dt dt
x ≤ F (x) ≤ x .
x t log t x t log t
Sachant que
x2 x 2
dt
= log(log t) = log 2,
x t log t x
on a donc x2 log 2 ≤ F (x) ≤ x log 2 pour tout x ∈ ]0, 1[. On en déduit lim x→1− F (x) = log 2 et
F (0) = 0.
Donnons maintenant la valeur de I . La fonction F est dérivable sur ]0, 1[ et on a
2x 1 x−1
∀x ∈ ]0, 1[ , F (x) = 2
− = .
log(x ) log x log x
Donc
1 1
t−1
I= dt = F (t) dt = lim− F (x) − F (0) = log 2.
0 log t 0 x→1
178 3. INTÉGRATION
π log 2 π log 2
L’assertion (*) s’écrit donc I = + 2I , donc finalement I = − .
2 2
1
π/2
Remarque. On peut aussi calculer I en l’écrivant sous la forme I = 2 0
log(1−cos2 x) dx
et en développant le logarithme en série au voisinage de 1.
Solution. L’intégrande n’admet pas de primitive exprimable avec les fonctions usuelles. L’idée
est de dériver F par rapport à a et de remarquer qu’ainsi, on se ramène à une intégrale que l’on
sait calculer.
Lorsque a ∈ ] − 1, +∞[, l’intégrande est continue sur [0, π/2[ et elle est prolongeable par
continuité en π/2 car au voisinage de ce point
log(1 + a cos x) a cos x + o(cos x)
= = a + o(1).
cos x cos x
Ainsi prolongée, la fonction f : (a, x) → log(1 + a cos x)/ cos x admet une dérivée partielle par
rapport à a qui est continue sur ] − 1, +∞[ ×[0, π/ 2] et qui vaut (1 + a cos x) −1. Le théorème de
dérivation sous le signe intégral permet donc d’affirmer que F est dérivable et que
π/2
dx
∀a > −1, F (a) = .
0 1 + a cos x
On calcule cette dernière intégrale en effectuant le changement de variable u = tan(t/2), ce qui
donne 1
du
∀a > −1, F (a) = 2 .
0 (1 + a) + (1 − a)u 2
On traite ensuite deux cas selon la position de a par rapport à 1.
— Si a ∈ ] − 1, 1[, on peut écrire a = cos 2θ avec θ ∈ ]0, π/2[. On a alors
1 1 tan θ
du 1 du 2 dv 2θ
F (a) = 2 2 2 = 2 2 2 = 2
= ,
0 cos θ + u sin θ cos θ 0 1 + u tan θ sin 2θ 0 1+v sin 2θ
5. PROBLÈMES 179
et finalement
arccos a
∀a ∈ ] − 1, 1[, F (a) = √ . (∗)
1 − a2
— Si a > 1, on écrit a = ch 2θ avec θ > 0, de sorte que
1 1 th θ
du 1 du 2 dv 2θ
F (a) = 2 2 2 = 2 2 = 2
= .
0 ch θ − u sh θ ch θ 0 1 − u 2 th θ sh 2θ 0 1+v sh 2θ
Donc
argch a
∀a > 1, F (a) = √ . (∗∗)
a2 − 1
Ceci étant, on tire grâce à (*) que pour a ∈ ] − 1, 1[,
a a a
arccos x (arccos x)2 π2 (arccos a) 2
F (a) = F (0) + F (x) dx = √ dx = − = − .
0 0 1− x2 2 0 8 2
La fonction F étant continue en a = 1, cette expression permet de montrer que
π2
F (1) = lim− F (a) = .
a→1 8
On a maintenant avec (**)
a
argch x π2 ( argch a) 2
∀a > 1, F (a) = F (1) + √ dx = + .
1 x2 − 1 8 2
Remarque. On peut également résoudre cet exercice en utilisant une inversion de som-
mations dans les intégrales doubles. On écrit
a π/2 a
log(1 + a cos x) dt dt
dx = donc F (a) = dx,
cos x 0 1 + t cos x 0 0 1 + t cos x
puis on applique le théorème de Fubini qui nous autorise à inverser les sommations :
a π/2
dx
F (a) = dt,
0 0 1 + t cos x
et on poursuit comme plus haut.
Ceci est un fait général : on peut prouver l’interversion de sommation dans les intégrales
doubles grâce au théorème de dérivation sous le signe intégral. Considérons en effet une
fonction continue f : [a, b] × [c, d] → R. On définit l’application
b x
F : [c, d] → R x → f (t, u) dt du.
a c
En appliquant le théorème de dérivation sous le signe intégral, on voit que F est dérivable
et que b
∀x ∈ [c, d], F (x) = f (x, u) du.
a
On en déduit
b d d d b
f (t, u) dt du = F (d) = F (c) + F (x) dx = f (x, u) du dx.
a c c c a
Solution. Nous allons utiliser l’inégalité de Schwarz. Commençons par montrer la convergence
de l’intégrale I1. On intègre par parties, en écrivant, pour tout X > 0,
X X X X
f (x) 2 dx = f (x)f (x) − f (x)f (x) dx = f (X )f(X ) − f (x)f (x) dx. (∗)
0 0 0 0
L’inégalité de Schwarz nous assure que la fonction f f est intégrable sur R+ et que de plus
+∞ +∞ 1/2 +∞ 1/2
2 2 1/2 1/2
|f (x)f (x)| dx ≤ f (x) dx · f (x) dx = I 0 I2 . (∗∗)
0 0 0
X
L’égalité (*) entraı̂ne donc le fait que 0 f (x)2 dx − f (X )f (X ) converge lorsque X → +∞.
Si l’intégrale 0+∞ f (x)2 dx diverge, alors f (X )f (X ) → +∞ lorsque X → +∞, donc f 2 (X) =
2 0X f (x)f (x) dx tend vers +∞, ce qui est impossible car f 2 est intégrable sur R + par hypothèse.
+∞
L’intégrale 0 f (x) 2 dx converge donc, et alors (*) montre que f (X )f (X ) converge lorsque
X → +∞. Notons = limx→+∞ f (x)f (x). Si = 0, on a d’après le théorème 3 page 163
(dernière assertion de (i)),
X
f 2 (X) = 2 f (x)f (x) dx ∼ 2X (X → +∞),
0
Solution. a) On ne peut pas ici appliquer le théorème de convergence dominée car il est im-
possible d’obtenir une majoration du type |f (t + a) − f (t)| ≤ ϕ(t) indépendamment de a. Pour
contourner le problème, on se donne ε > 0 et on considère A > 0 tel que
−A +∞
|f (t)| dt = |f (t)| dt + |f (t)| dt < ε.
|t|≥A −∞ A
B
Lorsque a → 0, l’intégrale −B |f (t + a) − f (t)| dt tend vers 0 car le domaine d’intégration est
un segment de R et la fonction |f (t + a) − f (t)| est continue par rapport à a et nulle lorsque
a = 0. Ainsi B
∃α > 0, (α < 1), ∀a ∈ [−α, α], |f (t + a) − f (t)| dt < ε.
−B
+∞
Avec l’inégalité (*) ceci entraı̂ne ∀a ∈ [−α, α], −∞ |f (t + a) − f (t)| dt ≤ 3ε, d’où le résultat.
b) Lorsque f est une fonction à support compact (i. e. nulle en dehors d’un compact) on voit
+∞
facilement que la limite recherchée existe et vaut 2 −∞ |f (t)| dt. C’est ce que nous allons prouver
dans le cas général.
On
+∞commence par symétriser +∞le problème.
Le changement
de variable u = t + a/2 montre
a a
que −∞ |f (t + a) − f (t)| dt = −∞ f u + 2 − f u − 2 du Ainsi, on est ramené à prouver
l’existence et donner la valeur de
+∞
lim |f (t + a) − f (t − a)| dt. (∗∗)
a→+∞ −∞
On note fa la fonction t → f (t + a). On va montrer que la contribution de l’intégrale précédente
pour t ≥ 0 converge vers R |f |. On écrit, pour a > 0,
|f a − f −a | − |f | = |fa − f−a | − |f−a | = (|fa − f −a| − |f−a |) + |f−a|.
R+ R R+ R R+ R−
Avec l’inégalité |fa − f−a | − |f−a | ≤ |f a| on en déduit
|fa − f −a | − |f | ≤ |fa| + |f−a| = |f (t)| dt.
R+ R R+ R− |t|≥a
Comme f est intégrable
sur R, ceci entraı̂ne que
R+ |f a −f −a| converge vers R |f |. On montrerait
de même que R− |fa − f−a | converge vers R |f |, et par sommation on a finalement démontré
que (**) converge vers 2 R |f | lorsque a → +∞.
Solution. Nous allons montrer que f tend vers 0 en +∞, ce qui montrera le résultat. D’après le
+∞
théorème 4 page 152, comme 0 f (t) dt converge, il suffit de montrer que f est uniformément
continue sur R+.
Soient deux nombres réels x et y tels que 0 ≤ x < y. L’inégalité de Schwarz entraı̂ne
y y 1/2 y 1/2
2 2 √
|f (y ) − f (x)| =
f (t) dt ≤ f (t) dt · 1 dt ≤ (f ) y − x.
x x x R+
Ceci entraı̂ne que f est uniformément continue sur R+ , d’où le résultat.
Problème 8. Soit f : [1, +∞[→ R une fonction continue et croissante. On suppose que
la fonction x
f (t)
F : [1, +∞[→ R x → dt
1 t
vérifie F (x) ∼ x lorsque x → +∞. Montrer que f (x) ∼ x lorsque x → +∞.
Problème 9. On désigne par E l’ensemble des fonctions continues sur [0, 1] à valeurs
dans R +∗. Pour tout f ∈ E , on note
1 1
dt
I (f ) = f (t) dt ·
0 0 f (t)
et on note Γ = I (E ) = {I (f ), f ∈ E }.
a) Déterminer m = inf Γ. Pour quelles fonctions de E a-t-on I (f ) = m ?
b) Déterminer sup Γ.
ce qui montre que I (f ) ≥ 1. L’image de la fonction constante égale à 1 par I est égal à 1, on a
donc m = 1. √Les foncti
√ons f de E étant continues, l’inégalité de Schwarz (*) se produira si et
seulement si f et 1/ f sont proportionnelles, c’est-à-dire si et seulement si
λ
∃λ > 0, ∀x ∈ [0, 1], f (x) = ou encore f (x) = λ.
f (x)
Les fonctions f telles que I (f ) = 1 sont donc les fonctions constantes de E .
b) Pour tout n ∈ N∗ , il est possible de construire une fonction f n de E telle que
1 2
∀x ∈ 0, , f(x) = 1 et ∀x ∈ ,1 , f(x) = n
3 3
(on peut prendre par exemple une fonction définie comme telle sur [0, 1/3] ∪ [2/3, 1] et affine sur
[1/3, 2/3]). On a alors
n 1 n
∀n ∈ N ∗ , I(fn ) ≥ · = ,
3 3 9
donc sup Γ = +∞.
Remarque. On peut également traiter la question a) en écrivant
f (x) f (y )
2I (f ) = + dx dy,
[0,1] 2 f (y ) f (x)
5. PROBLÈMES 183
(on obtient cette expression en appliquant le théorème de Fubini) puis en remarquant que
f (x)/f (y ) + f (y )/f (x) ≥ 2 (en posant α = f (x)/f (y ), on a α + 1/α = 2 + (α − 1)2 /α ≥ 2).
1 n
∀n ∈ N∗ , I(ρ) = n I ρ2 . (∗)
2
— Si |ρ| < 1, la continuité de I en 0 entraı̂ne I (ρ) = 0 (il suffit de faire n → +∞ dans (*)).
— Si |ρ| > 1, c’est un peu plus délicat. On commence par montrer I (ρ) ∼ 2π log ρ lorsque
ρ → +∞. On a
2 2 1 2 2 2 1
∀θ ∈ [0, π], ρ 1 − + 2 ≤ 1 − 2ρ cos θ + ρ ≤ ρ 1 + + 2
ρ ρ ρ ρ
donc par intégration
2 1 2 1
2π log ρ + π log 1 − + 2 ≤ I (ρ) ≤ 2π log ρ + π log 1 + + 2 ,
ρ ρ ρ ρ
ce qui entraı̂ne bien I (ρ) ∼ 2π log ρ lorsque ρ → +∞. En particulier, si on fixe ρ > 1, on
a, lorsque l’entier n tend vers +∞
n
I (ρ2 ) ∼ 2n+1 π log ρ,
et on en déduit en faisant tendre n vers l’infini dans (*) que I (ρ) = 2π log ρ. Si ρ < −1,
on a I (ρ) = I (−ρ). Finalement, on a montré
∀ρ ∈ R, |ρ| > 1, I(ρ) = 2π log |ρ|.
et comme n−1 k=−n(X − ωk ) = X
2n
− 1 (les 2n nombres complexes ω k pour −n ≤ k < n sont des
2n
racines distinctes du polynôme X − 1), on en déduit
n
n−1
ρ − ωn ρ+1
(ρ − ωk )(ρ − ω −k) = (ρ − ωk ) = (ρ2n − 1)
ρ − ω0 ρ−1
k=1 k=−n
et donc 2n
∗ π (ρ − 1)(ρ + 1)
∀n ∈ N , un = log . (∗∗)
n ρ−1
— Si |ρ| < 1, on a facilement lim n→+∞ u n = 0 d’après (**), donc I (ρ) = 0.
— Si |ρ| > 1, on transforme (**) en
π ρ+1 1
un = 2π log |ρ| + log 1 − 2n ,
n ρ−1 ρ
ce qui entraı̂ne I (ρ) = lim n→+∞ un = 2π log |ρ|.
Remarque. On peut montrer que les intégrales I (1) et I (−1) existent et qu’elles sont
nulles.
Problème 11. a) Soit f : [0, 1] → R une fonction continue par morceaux. Montrer que
1 +∞
lim
q→1
I (q ) = f (t) dt où ∀q ∈ ]0, 1[, I(q) = (1 − q) q nf (q n ).
q<1 0 n=0
Solution. a) Pour tout q ∈ ]0, 1[, I (q) est bien définie car f est bornée et on peut écrire
+∞
I (q ) = (qn − q n+1 )f (qn ).
n=0
Cette expression peut s’apparenter à une somme de Riemann infinie pour la subdivision infinie
1, q, q2, . . . , q n , . . .. Le théorème 7 page 128 sur les sommes de Riemann ne s’applique que pour
des subdivisions finies, nous allons donc nous y ramener. Soit ε > 0 On sait qu’il existe α > 0
tel que pour toute subdivision σ : 0 = x0 < x1 < · · · < xn = 1 de [0, 1] vérifiant |σ | < α, on ait
n 1
(xi − x i−1 )f (xi ) − f (t) dt < ε.
0
i=1
Soit q tel que 1 − α < q < 1 et N ∈ N ∗ tel que q N < α. Pour tout n ≥ N , la subdivision
σn : 0 < q n < qn−1 < · · · < q < 1
vérifie |σ n| < α (on a q i − q i+1 = q i (1 − q) ≤ 1 − q < α pour tout i et q n − 0 ≤ q N < α), donc
1
(1 − q )f (1) + (q − q )f (q) + · · · + (q
2 n−1 n
− q )f (qn−1 n n
) + (q − 0)f (q ) − f (t) dt < ε.
0
Ceci est vrai pour tout n ≥ N . En faisant tendre n vers +∞, on en déduit
+∞ 1
(qi − q i+1)f (q i ) − f (t) dt ≤ ε.
0
i=0
Ainsi, pour tout q vérifiant 1 − α < q < 1, on a |I (q) − 01 f (t) dt| ≤ ε. D’où le résultat.
5. PROBLÈMES 185
f (t)
Solution. 1/ La fonction ϕ est de classe C 1 et elle vérifie ϕ(t) = f (t) ϕ(t), elle est donc solution
f
de l’équation différentielle y − f y = 0. Comme f est solution de cette équation différentielle et
que l’espace de ses solutions est de dimension 1, il existe λ ∈ C tel que ϕ = λf . Comme f est 2π -
2π
périodique c’est aussi le cas de ϕ, en particulier ϕ(2π) = ϕ(0) ce qui entraı̂ne 0 ff ((θθ)) dθ ∈ 2iπ Z
donc I (f ) ∈ Z.
2/a) Raisonnons par l’absurde et supposons que P ne s’annule pas sur C. Alors la fonction
2π iθ iθ
+ 1 P (re )re
g : R → C, r → I (f P,r ) = dθ (∗)
2π 0 P (re iθ )
est définie sur R + tout entier. En vertu de la continuité de la fonction intégrée par rapport à r,
le théorème de continuité sous le signe intégral montre que g est continue. Hors elle est à valeur
dans Z d’après le résultat de la question précédente, elle est donc constante. Comme g (0) = 0, on
en déduit que g est identiquement nulle. Regardons maintenant ce qui se passe lorsque r → +∞.
Soit n le degré de P et a son coefficient dominant. Lorsque |z | → +∞, on a P (z ) ∼ az n et
P (z ) ∼ nazn−1 , donc zP (z )/P (z ) converge vers n. Ainsi, lorsque r → +∞, l’intégrande de (*)
converge vers n. De plus cette intégrale est bornée indépendamment de r (car zP (z )/P (z) a une
limite finie lorsque |z| → +∞, donc est bornée sur C), donc d’après le théorème de convergence
dominée on a
2π
1 P (reiθ )reiθ
lim g (r ) = lim dθ = n,
r→+∞ 2π 0 r→+∞ P (reiθ )
ce qui est contradictoire avec le fait que g est identiquement nulle. Ainsi, le polynôme complexe
P doit nécéssairement s’annuler sur C.
186 3. INTÉGRATION
Si aucune racine de P ne se trouve sur le cercle |z | = r , la valeur I (f P,r) est bien définie et
l’identité (**) montre que I (f P,r ) = nk=1 I (f Pk,r ). De la même manière que ce que l’on a vu
pour P précédemment, pour tout k, la valeur r → I (fPk ,r ) est une fonction continue de r sur les
intervalles où elle est définie, donc sur l’intervalle [0, |αk |[ et sur l’intervalle ]|αk |, +∞[ . De plus
elle est à valeur dans Z, donc constante sur chacun de ces intervalles. En particulier, si r < |αk |
on a I (fP k ,r) = I (fP k,0) = 0, et si r > |αk |, alors de la même manière que précédemment on a
I (fP k,r ) = limt→+∞ I (f Pk ,t ) = deg(Pk) = 1. En conclusion, la valeur I (f P,r ) est définie lorsque
qu’aucune des racines de P n’est sur le cercle |z | = r , et égale au nombre de racines de P
(comptées avec leur ordre du multiplicité) dans le disque |z | < r.
Remarque. - La valeur I (f ) est appelée indice de la courbe f sur [0, 2π ]. On peut montrer
(c’est une conséquence du théorème du relèvement) qu’on peut écrire f (θ ) = ρ(θ )eiϕ(θ) ,
où ρ : R → R+∗ et ϕ : R → R sont de classe C1 . On a ρ = |f | et ϕ représente l’argument
de f obtenu par continuité. Comme f est 2π -périodique, ϕ(0) ≡ ϕ(2π ) (mod 2π ) donc
ϕ(2π ) − ϕ(0) = 2kπ avec k ∈ Z. On peut montrer facilement que k = I (f ) ; ainsi I (f )
représente le nombre de tours autour de 0, effectués dans le sens trigonométrique, que fait
la courbe fermée f restreinte à [0, 2π ].
– Le calcul de l’intégrale correspondant à I (fPk,r) peut aussi se faire directement, à partir
d’une primitive de l’intégrande ou en la développant en série. La méthode que nous avons
présentée est plus élégante dans le cadre du problème.
– Deux autres preuves du théorème de d’Alembert (encore appelé théorème fondamental
de l’algèbre) sont proposées dans le tome Algèbre.
Solution. Si f est dérivable sur R, on a nécessairement f (x) = 0 pour tout x ∈ R. En effet, s’il
existe x ∈ R tel que f (x) = 0, l’équivalent (f (x + t) − f (x))/t 2 ∼ t→0 f (x)/t montre que cette
fonction ne serait pas intégrable sur [0, 1], ce qui est contraire aux hypothèses. Ainsi, si f est
dérivable, sa dérivée s’annule sur R donc f est nécéssairement une fonction constante.
Montrons que ce résultat reste vrai si f est seulement supposée continue. Pour cela raisonnons
par l’absurde et supposons f non constante. L’idée est de déterminer un x tel que au voisinage
de t = 0+ , on puisse écrire |f (x + t) − f (x)| ≥ αt avec α > 0. Comme f est non constante, il
existe a, b ∈ R, a < b, tels que f (a) = f (b). Quitte à considérer la fonction f − f (a), on peut
supposer f (a) = 0. Quitte à considérer −f , on peut supposer f (b) > 0. Quitte à considérer
t → f (a + (b − a)t) on peut supposer que a = 0 et b = 1. En résumé, on peut supposer que
0 = f (0) < f (1). Considérons la fonction ϕ : [0, 1] → R t → f (1)/3 + tf (1)/3, et notons
A = {t ∈ [0, 1] | f (t) ≤ ϕ(t)}. L’ensemble A est non vide puisque 0 = f (0) < ϕ(0) = f (1)/3,
donc 0 ∈ A. Par ailleurs 1 ∈ A car f (1) > ϕ(1) = 2f (1)/3. On peut donc définir c = sup A, et on
a c < 1 par continuité de f et ϕ. Comme A est fermé on a c ∈ A donc f (c) ≤ ϕ(c). Si on avait
f (c) < ϕ(c), alors par continuité de f et ϕ on pourrait trouver d ∈ ]c, 1] tel que f (d) < ϕ(d), ce
qui est en contradiction avec la définition de c. Donc f (c) = ϕ(c). De plus, par définition de c
on a f (t) > ϕ(t) pour tout t ∈ ]c, 1]. On en déduit que
∀t ∈ ]c, 1], f(t) − f (c) > ϕ(t) − ϕ(c) = (t − c)f (1)/3.
5. PROBLÈMES 187
Ainsi on a [f (c + t) − f (c)]/t2 > α/t pour t ∈ ]0, 1 − c] avec α = f (1)/3 > 0, donc l’intégrale
1 2
0 [f (c + t) − f (c)]/t dt diverge. Ceci est contraire aux hypothèses, on en déduit que f est une
fonction constante.
Réciproquement, il est évident que toute fonction constante f vérifie les propriétés de
l’énoncé.
Problème 14. Soit f une application définie sur [0, 1], à valeurs strictement positives,
et continue. Calculer 1 1/α
α
lim
α→0
f (t) dt .
α>0 0
Solution. On note 1
F : [0, +∞[ → R α → f α(t) dt.
0
La fonction ϕ : R+ × [0, 1] → R (α, t) → f α (t) est continue, dérivable par rapport à α et
∂ϕ
∀(α, t) ∈ R+ × [0, 1], (α, t) = log f (t) · f α(t)
∂α
est continue sur R+ × [0, 1]. Donc F est dérivable sur R+ et
1 1
α
∀α ≥ 0, F (α) = log f (t) · f (t) dt, en particulier F (0) = log f (t) dt.
0 0
Or F (0) = 1, donc lorsque α → 0 +,
log F (α) log(1 + αF (0) + o(α))
F (α ) 1/α
= exp = exp = exp(F (0) + o(1)).
α α
Finalement, la limite recherchée vaut
1
exp(F (0)) = exp log f (t) dt .
0
Donc
- si 0 ≤ k ≤ n − 1, h(k) (0) =0 ∈ Z
k!
- si n ≤ k ≤ n + p, h(k) (0) = a = k (k − 1) · · · (n + 1) a k−n ∈ Z
n! k−n
- si n + p < k, h(k) (0) =0 ∈ Z.
Cette dernière intégrale est nulle car fn est une fonction polynôme de degré 2n, donc finalement
(2n) (2n)
f (1) − f (0) f (1) − f (0)
n n
In = a n fn (1) − fn (0) − n n
+ · · · + (−1) n .
π2 π2n
(2k)
D’après le résultat de la question a), on a f n (0) ∈ Z pour tout entier k, et comme f n(1 − x) =
(2k)
fn(x) on a aussi f n (1) ∈ Z. Ceci entraı̂ne, pour tout entier k, 0 ≤ k ≤ n
(2k) (2k) k
fn (1) − fn (0) n b
an 2k
= a k
fn(2k)(1) − f n(2k) (0) = an−k bk fn(2k)(1) − f (2k)
n (0) ∈ Z.
π a
Ainsi, In ∈ Z. Or 0 < I n < πa n/n! et comme a n/n! tend vers 0 lorsque n → +∞ (c’est classique,
on sait même que la série entière z n /n! a un rayon de convergence infini), il existe un entier
n
n pour lequel πa /n! < 1. Ceci entraı̂ne 0 < In < 1, ce qui est impossible puisqu’on a montré
que In était entier.
Le nombre réel π 2 est donc irrationnel (ce qui entraı̂ne que π est irrationnel).
Remarque. On peut montrer que π est transcendant (voir une preuve dans le tome
Algèbre), mais c’est beaucoup plus difficile.
Solution. 1/ Il est commode de supposer que a ≥ b, on se ramène facilement à ce cas car les
valeurs de u1 et v1 ne changent pas si on intervertit a et b. Une récurrence immédiate montre
que toutes les valeurs des termes des suites (u n ) et (vn ) sont strictement positives. On remarque
ensuite que vn ≤ un : pour n = 0 c’est vrai car a ≥ b, et lorsque n ∈ N∗ ceci découle de
1 √ 1√ √ 2
un − v n = un−1 − 2 un−1 vn−1 + vn−1 = u n−1 − v n−1 ≥ 0.
2 2
La suite (un ) décroı̂t, la suite (v n) croı̂t, car
1 vn+1 un
∀n ∈ N, un+1 − u n = (vn − u n) ≤ 0 et = ≥ 1.
2 vn vn
Finalement, nous avons montré
∀n ∈ N, v0 ≤ v 1 ≤ · · · ≤ vn ≤ u n ≤ · · · ≤ u 1 ≤ u 0.
La suite décroissante (un ) est minorée par l’un quelconque des termes de (v n), elle est donc
convergente. De même, (vn) est croissante et majorée par l’un quelconque des termes de (u n),
donc convergente. Enfin, on montre facilement par récurrence que
∀n ∈ N, 0 ≤ u n − vn ≤ (a − b)/2n . (∗∗)
En effet, ceci est vrai pour n = 0, et si on suppose la propriété vraie pour n on a
1 √ √ 2 1 u −v √ √ u − vn
u n+1 − v n+1 = u n − vn = √ n √n un − vn ≤ n .
2 2 un + v n 2
L’encadrement (**) prouve que les limites de (un) et (vn ) sont égales. Nous aurions pu montrer
l’égalité des limites en procédant par continuité : en notant
√ U et V les limites respectives de
(un) et (v n), on a par continuité U = (U + V )/2 et V = U V , donc U = V . Néanmoins (**) est
plus intéréssant car il indique une convergence rapide de (un ) et (v n) vers leur limite commune.
Notons que nous avons prouvé que (un ) et (vn ) sont des suites adjacentes.
2/a) Comme indiqué, on effectue d’abord le changement de variable t = b tan θ. On obtient
+∞
dt
T (a, b) = . (∗∗∗)
0 (t2 + a2 )(t2 + b 2)
On effectue maintenant le changement de variable √ u = (t − ab/t)/2. Les calculs ne sont pas si
faciles à obtenir. En notant c = (a + b)/2 et d = ab, on écrit
(t2 − ab) 2 (a + b)2 t 4 + (a2 + b 2 )t2 + a 2b2 (t 2 + a2 )(t2 + b 2)
u 2 + c2 = + = =
4t 2 4 4t 2 4t2
2
(t − ab) 2 √ 2
4 2
t + 2abt + a b 2 2 2
(t + ab) 2
u2 + d2 = 2
+ ab = 2
= .
4t 4t 4t2
Comme du = (t2 + ab)/(2t 2) dt, on en déduit
1 +∞ du 1 +∞ 4t 2 1 t2 + ab
T (c, d) = = dt,
2 −∞ (u 2 + c 2)(u2 + d 2 ) 2 0 (t2 + a 2)(t 2 + b 2) t2 + ab 2t2
la première égalité provenant de la parité de la fonction intégrée. Dans la dernière intégrale, après
simplification, on reconnait l’intégrande de l’intégrale (***), on en déduit
√ T (c, d) = T (a, b).
Prouvons maintenant l’identité (*). L’égalité T (a, b) = T ( a+2b , ab), entraı̂ne T (un, vn ) =
T (un+1 , vn+1 ) pour tout n ∈ N, donc T (a, b) = T (u0 , v 0) = T (u n , vn) pour tout n ∈ N. La
fonction T (a, b) est l’intégrale d’une fonction continue en (a, b), intégrée sur le segment [0, π/ 2],
190 3. INTÉGRATION
elle est donc continue en (a, b). On peut maintenant passer à la limite dans l’égalité T (a, b) =
T (un , vn ), ce qui donne T (a, b) = T (M (a, b), M (a, b)). On en déduit le résultat car
π/2
dθ π 1
T (M (a, b), M (a, b)) = = .
0 M (a, b) 2 M (a, b)
a) Montrer que la fonction x → Iβ (x) est deux fois dérivable sur R et qu’elle vérifie
β
Iβ (x) − Iβ(x) = .
β2 + x2
b) Démontrer l’identité
+∞
ex F β(x) + e−x Fβ(−x) βe−t
I β (x) = , avec Fβ (x) = dt.
2 x β 2 + t2
Solution. a) Iβ (x) est bien définie car son intégrande est majorée en valeur absolue par e−βt ,
intégrable sur R+ . Notons f (x, t) l’intégrande de Iβ(x). Sa dérivée partielle par rapport à x est
∂f/∂x = −t sin(xt)/(1 + t2)e−βt , donc |∂f/∂x| est majorée sur R+ par la fonction intégrable
t → e−βt , donc I β est bien dérivable et
+∞
t sin(xt) −βt
I β (x) = − e dt.
0 1 + t2
5. PROBLÈMES 191
b) Notons Jβ (x) = 12 (ex Fβ (x) + e−x Fβ (−x)). Nous allons montrer que Jβ vérifie la même
équation différentielle que Iβ . Partant de l’égalité
β
ex Fβ (x) = − 2
β + x2
(qui entraı̂ne en particulier que ex Fβ (x) est paire) on obtient par dérivations successives
2J β (x) = ex Fβ (x) − e −x Fβ(−x) + ex Fβ (x) − e−xF β (−x) = ex Fβ (x) − e −xFβ (−x),
2β
2Jβ (x) = ex Fβ (x) + e −x Fβ(−x) + ex Fβ (x) + e−xF β (−x) = 2Jβ (x) − 2 .
β + x2
En divisant par 2 cette dernière égalité, on voit que Jβ est une solution particulière de l’équation
différentielle linéaire vérifiée par Iβ . La différence Kβ = Iβ − Jβ vérifie l’équation linéaire d’ordre
deux Kβ − Kβ = 0, donc Kβ(x) = λex + µe −x avec λ, µ ∈ R. Ainsi, on a
Iβ (x) = Jβ (x) + K β(x) = J β (x) + λex + µe−x .
+∞ −βt
Or les fonctions Iβ (x) et Jβ (x) sont bornées sur R (on a |I β (x)| ≤ 0 e dt et |ex F β (x)| ≤
+∞ 2 2
−∞ β/(β + t ) dt), on a donc forcément λ = µ = 0 d’où le résultat.
c) Il est immédiat que Iβ est également définie pour β = 0. Fixons x ∈ R. La fonction
cos(xt) −βt
f : [0, +∞[×[0, +∞[→ R (β, t) → e
1 + t2
est continue et |f (β, ·)| est majorée par la fonction intégrable t → 1/(1 + t 2 ). L’hypothèse de
domination est donc bien vérifiée, ce qui montre que la fonction β → Iβ (x) est continue sur R+.
En particulier
C (x) = I0 (x) = lim I β(x).
β→0
β>0
b) Montrer
+∞
I= R(t) dt = 2iπ ResR(ak ).
−∞ a k∈P +
Solution. a) On peut écrire R = P/Q avec P, Q ∈ C[X ]. Comme R est intégrable sur R, on a
deg(Q) ≥ deg(P ) + 2. Pour tout k, 1 ≤ k ≤ n, notons αk l’ordre de multiplicité du pôle ak . On
peut écrire
n
α
k
A k,
R(X ) = Ak, ∈ C et Ak,1 = Res R (a k).
(X − ak )
k=1 =1
b) La fonction R est intégrable sur R donc aucun de ses pôles a k n’est réel. De plus, pour tout
k, on a
+∞ +∞
dt 1
∀ ≥ 2,
= = 0,
−∞ (t − ak ) (1 − )(t − a k)−1 −∞
donc n
+∞ Ak,1
I= dt. (∗)
−∞ t − ak
k=1
5. PROBLÈMES 193
On ne peut pas à ce stade intervertir les signes de sommation. On va s’en sortir en montrant que
T
−T
dt/(t − a k ) converge lorsque T → ∞. Pour tout k, écrivons a k = xk + iy k avec xk, yk ∈ R
(et yk = 0 puisque a k ∈ R). La primitive suivante
dt (t − xk ) + iyk 1 2 2
t − xk
= dt = log (t − xk ) + y k + i arctan + K,
t − ak (t − xk )2 + yk2 2 yk
permet d’affirmer
T
dt 1 (T − x k) 2 + y2k T − xk T + xk
= log + i arctan + arctan
−T t − ak 2 (T + x k) 2 + y2k yk yk
d’ou on déduit
T
dt iπ si yk > 0,
lim =
T →+∞ −T t − ak −iπ si yk < 0.
Donc d’après (*) on a
n
T
dt
I= Ak,1 lim = iπ ResR (ak ) − ResR (ak ) .
T →+∞ −T t − ak yk >0 y k<0
k=1
D’après la question a), on a ResR (a k) = − yk>0 Res R(a k ), donc finalement
yk <0
I = 2iπ ResR(a k ) = 2iπ Res R(ak ).
y k>0 ak ∈P+
Remarque. Ce résultat est en fait une conséquence du théorème des résidus. Ce dernier
s’applique dans le cadre beaucoup plus général de la théorie des fonctions analytiques.
Solution. a) L’intégrande est bien intégrable sur R car son dénominateur ne s’annule par sur
R et à l’infini, elle est équivalente à x2(n−m) et n − m ≤ −1. En vue d’appliquer le résultat du
problème précédent, recherchons les résidus de l’intégrande. Son dénominateur s’écrit
2m−
1
2m (2k + 1)iπ 2k+1 iπ
X +1= (X − ξk ), ξ k = exp =α avec α = exp
2m 2m
k=0
autrement dit, on a 2m résidus A k associés aux pôles ξ k qui sont les valeurs
β 2k+1 2n+1 (2n + 1)iπ
Ak = − , β=α = exp .
2m 2m
194 3. INTÉGRATION
Comme les résidus de R dont les parties imaginaires sont strictement positives sont les A k pour
0 ≤ k ≤ m − 1, le résultat du problème précédent entraı̂ne
m−1
m−1
2iπ 2k+1 iπβ 1 − β2m iπ 2 π
I = 2iπ Ak = − β =− 2
= = 2n+1 .
2m m 1−β m β − 1/β m sin 2m π
k=0 k=0
b) Nous allons exploiter l’idée suivante : si α est de la forme 2m/(2n + 1), le changement de
variable u = t1/(2n+1) nous ramène à une intégrale du type de a).
La fonction fα : t → 1/(1 + t α) est intégrable sur R+ pour tout α > 1. Si a > 1, l’application
α → J (α) est continue sur [a, +∞[ (on a f α ≤ fa pour α ≥ a donc l’hypothèse de domination
est vérifiée). Ceci étant vrai pour tout a > 1, J est continue sur ]1, +∞[.
Fixons maintenant α > 1. Comme Q est dense dans R, on peut trouver deux suites d’entiers
(pn) et (qn ) tendant chacune vers l’infini, telles que (pn/qn) converge vers α. Comme qn → +∞,
la suite (2pn /(2qn + 1)) converge aussi vers α. Le fait que α > 1 assure l’existence d’un rang à
partir duquel pn > qn .
Lorsque p > q sont deux entiers naturels, le changement de variable u = t1/(2q+1) donne
+∞ 2q −1
2p u du 2q + 1 +∞ u2q du 2p π
J = (2q + 1) = =π sin .
2q + 1 0 1 + u2p 2 −∞ 1 + u
2p 2q + 1 2p
2q+1
3/ Soit (fn ) une suite d’éléments de Cm (I, R+) convergeant simplement vers la fonction
nulle sur I , et telle qu’il existe une fonction ϕ ∈ Cm (I, R+ ), intégrable sur I , vérifiant
fn ≤ ϕ pour tout n.
a) Soit n ∈ N. Pour p ≥ n,on pose fn,p = max(fn , fn+1 , . . . , f p). Montrer qu’il existe
pn ≥ n tel que p n ≥ p n−1 et | I fn,p − I f n,pn | < 2−n pour tout p ≥ p n.
b) On pose g n = f n,pn . Montrer que |gn+1 − gn | ≤ 2(fn,pn+1 − f n,p n) + g n − gn+1 .
5. PROBLÈMES 195
c) En déduire que limn→∞ I f n = 0.
4/ Démontrer le théorème de convergence dominée (page 151).
Solution. 1/ Si f est continue c’est évident. Sinon, notons x1 < x2 < · · · < xn les points de
discontinuité de f . Soient deux réels m et M tels que m < inf x∈S f (x) et M > sup x∈S f (x).
Soit α > 0 avec α < 12 min(x i+1 − x i). Considérons la fonction continue ϕ − définie sur S par
|x − x i |
ϕ−(x) = m + (M − m) , si x ∈ J i = [xi − α, x i + α ] ∩ S, ϕ−(x) = M ailleurs.
α
L’application f− = min(f, ϕ−) vérifie f − ≤ f par construction et est continue, car
— si x n’est pas l’un des xi , f est continue en x donc f − = 12 (f + ϕ− − |f − ϕ−|) l’est aussi ;
— pour tout i, f− (x i) = m donc f− = ϕ − sur un voisinage de x i, donc f − est continue en
xi .
Lorsque x n’est pas dans l’un des Ji , on a f− (x) = f (x) car f (x) < M = ϕ −(x). On a donc
n n
(f − f− ) = (f − f−) ≤ (M − m) ≤ 2αn(M − m)
S i=1 Ji i=1 Ji
En choisissant α ≤ ε/(2(M − m)n), on a donc S(f − f −) < ε. On construit de manière analogue
f+ = max(ϕ +, f) avec ϕ+ = M − (M − m)|x − x i |/α sur Ji et ϕ + = m ailleurs.
2/ a) Comme indiqué, nous allons commencer par le cas où f et les u n sont continues. Soit
ε > 0. Pour tout n, considérons l’ensemble
n
Fn = x ∈ S : f (x) ≥ ε + u k(x)
k=0
La suite (Fn ) est une suite décroissante de fermés
de S (donc compacts). On a ∩ n≥0Fn = ∅
car pour tout x ∈ S , il existe n tel que f (x) − nk=0 uk (x) < ε, ce qui entraı̂ne x ∈ Fn. Une
suite décroissante de compacts
non vide est non vide, donc il existe forcément n tel que Fn = ∅,
autrement dit f < ε + nk=0 uk sur S . Ceci entraı̂ne
n ∞
f ≤ (b − a)ε + uk ≤ (b − a)ε + uk .
S k=0 S k=0 S
Cette dernière majoration est vraie pour tout ε > 0 donc on a bien le résultat attendu.
Traitons maintenant le cas général. Soit ε > 0. D’après 1/, il existe une fonction continue g
sur S et une suite (vn ) de fonctions continues sur S telles que
ε
g ≤ f avec f < ε + g, et ∀n ∈ N, un ≤ v n avec vn ≤ n + u n .
S S S 2 S
n
On note Gn = {x ∈ S : g (x) ≥ ε + k=0 vk (x)}, de sorte n que (Gn ) est une suite décroissante
de
n compacts. Leur intersection est vide (car f ( x ) − k=0 u k(x)
< ε entraı̂ne g (x) < ε +
n
v
k=0 k (x)), donc il existe n avec Gn = ∅ . Ceci entraı̂ne g < ε + k=0 v k sur S, donc
n n ∞
f ≤ ε+ g ≤ (1+ b − a)ε + v k ≤ (3+b − a)ε + uk ≤ (3+b − a)ε + uk .
S S k=0 S k=0 S k=0 S
donc ( I f − nk=0 uk)n∈N tendvers 0 lorsque n → ∞. Comme I f − nk=0 I uk ≤ I f −
n ∞
k=0 uk , on en déduit limn→∞ I f = n=0 I un .
3/ a) Fixons n. Remarquons que les fn,p sont dans Cm(I, R) (le maximum de deux fonctions a
et b de Cm(I, R) s’écrit 12 (a + b + |a − b|) donc est dans C m (I, R)) et intégrables car f n,p ≤ ϕ. La
suite (fn,p )p est croissante,
donc la suite (I n,p)p définie par In,p = I f n,p est croissante. Comme
elle est majorée par I ϕ, elle converge, donc c’est une suite de Cauchy, donc il existe p n tel que
|In,p − In,q | < 2−n pour p, q ≥ p n . On peut choisir pn aussi grand que voulu, d’où le résultat.
b) Si gn+1 − gn < 0, c’est immédiat car f n,pn+1 − f n,pn ≥ 0. Sinon il suffit de remarquer que
gn+1 − gn = fn+1,pn+1 − fn,pn ≤ f n,pn+1 − f n,pn .
c) Posons un = g n − gn+1 . L’inégalité précédente entraı̂ne
|un | ≤ 2|In,pn+1 − In,pn | + gn − g n+1 ≤ 2 1−n + gn − gn+1,
I I I I I
par sommation on obtient
p
p
1−n
∀p ∈ N, |un | ≤ 2 + g0 − gp+1 ≤ 4 + g 0.
n=0 I n=0 I I I
Par ailleurs, la suite de fonctions (gn ) converge simplement
vers 0, donc on a k≥n uk = g n .
Finalement nous avons montré que la série de fonctions k≥n uk vérifie les hypothèses de la
partie 2/ du problème, donc
0 ≤ fn ≤ g n =
uk = uk .
I I I k≥n k≥n I
Le dernier terme est le reste d’une série absolument convergente, d’où limn→∞ I fn = 0.
4/ Reprenons les notations du théorème de convergence dominée, page 151. On a f ≤ ϕ donc
f est bien intégrable. Ensuite, il suffit d’appliquer le résultat de la question précédente à la suite
(fn − f ), majorée
par la fonction intégrable 2ϕ, et
qui converge
simplement
vers la fonction
nulle. Donc ( I fn − f ) tend vers 0, et comme I fn − I f ≤ I fn − f , ceci termine la
preuve du théorème de convergence dominée.
Solution. a) Toute partie élémentaire incluse dans A n+1 est incluse dans A n , donc Γ n+1 ⊂ Γn ,
donc αn+1 ≤ αn . Autrement dit, la suite (αn ) est décroissante. Comme elle est minorée par 0,
elle converge. On note sa limite.
Il s’agit de montrer = 0. Pour cela, on raisonne par l’absurde en supposant > 0. On fixe
un nombre réel δ tel que 0 < δ < . Pour tout n, il existe une partie En ⊂ An élémentaire et
fermée, telle que m(En) > αn − δ/2n . Pour tout n, l’ensemble
n
Hn = En
i=1
est élémentaire et fermé, et la suite (Hn ) est une suite décroissante de fermés. Si on montre que
H n est non vide pour tout n, alors ∩n∈N ∗ Hn sera non vide (suite décroissante de compacts non
vides), ce qui sera en contradiction avec le fait que
Hn ⊂ A n = ∅,
n∈N ∗ n∈N∗
et on en conclura le résultat.
Soit n ∈ N ∗ . Fixons une partie élémentaire E ⊂ A n telle que m(E ) > δ. On a
n
n
E Hn = (E E i ) donc m(E Hn ) ≤ m(E E i ). (∗)
i=1 i=1
Or pour tout i, 1 ≤ i ≤ n,
δ
m(E Ei ) + m(E i ) = m(E ∪ Ei) ≤ α i donc m(E Ei ) ≤ α i − m(Ei ) ≤ ,
2i
ce qui d’après (*) entraı̂ne
n
δ
m(E H n ) ≤ < δ.
2i
i=1
Ceci entraı̂ne H n = ∅ car m(E ) > δ par construction. D’où le résultat.
b) Pour tout n ∈ N∗ , posons g n = f − fn . On aura prouvé le résultat si on montre
b
lim gn (t) dt = 0. (∗∗)
n→+∞ a
La suite de fonctions (gn ) converge simplement vers 0, et on a 0 ≤ gn ≤ 2K sur [a, b].
Ceci étant, considérons ε > 0. Pour tout n ∈ N∗, on pose
A n = {x ∈ [a, b] | ∃i ≥ n, g i (x) ≥ ε}.
La suite (An ) est décroissante et on a ∩ n∈NA n = ∅. D’après le résultat de la question a), on peut
donc trouver N ∈ N∗ tel que tout n ≥ N et pour toute partie élémentaire E ⊂ An , m(E ) < ε.
Soit n ≥ N , et soit s une fonction en escalier telle que s ≤ gn .
On pose E = {x ∈ [a, b] | s(x) ≥ ε} et F = [a, b]E . Les ensembles E et F sont élémentaires
(car s est en escalier). Comme E ⊂ An , on a m(E ) < ε donc
b
s(t) dt = s+ s≤ 2K + ε ≤ 2Km(E) + (b − a)ε ≤ M ε, M = 2K + (b − a).
a E F E F
Ceci étant vrai pour toute fonction en escalier s inférieure à la fonction continue par morceaux
gn, on en déduit ab g n (t) dt ≤ M ε. Ceci étant vrai pour tout n ≥ N , on en déduit (**).
198 3. INTÉGRATION
Suites et séries
Lautilisée
notion de suite et de limite naquit avec la méthode d’exhaustion, technique
par les mathématiciens grecs de l’Antiquité pour le calcul de longueurs,
d’aires et de volumes. C’est ainsi qu’Archimède approximait l’aire d’un cercle
en y inscrivant une suite de polygones réguliers.
Jusqu’au début du dix-neuvième siècle, le concept de convergence revêtait
deux formes : numérique et formelle. La conception formelle reposait sur des
règles formelles permettant de sommer des séries divergentes (Euler en fit
beaucoup usage), et occulta au cours du dix-huitième siècle la conception
numérique (qui correspond à celle d’aujourd’hui). Les dysfonctionnements du
point de vue formel dans le domaine des séries entières et des séries trigo-
nométriques provoquèrent au début du dix-neuvième siècle le développement
d’un point de vue purement numérique, marqué par les travaux de Gauss
(1813), Fourier (1807) et Bolzano (1817), puis Cauchy dans son cours d’ana-
lyse de l’École Polytechnique (1821). Les problèmes de convergence furent
approfondis par Abel, Dirichlet, Liouville, Riemann et Weierstrass. Abel, en
exhibant la série de fonctions (−1) n−1 sin(nx)/n, attira l’attention de ses
contemporains sur le fait qu’une limite simple d’une série de fonctions conti-
nues n’est pas forcément continue, résultat que l’on croyait vrai auparavant.
C’est Weierstrass qui donna à la définition de limite sa forme actuelle. Il reprit
aussi la notion de convergence uniforme introduite par son maı̂tre Gudermann
en 1838, et en donna une définition claire et précise dans un article écrit en
1841. Il énonça et démontra correctement les théorèmes sur la continuité,
dérivabilité et intégrabilité de la somme d’une série de fonctions. La notion
de convergence normale fut, elle, introduite par Baire en 1908.
1. Suites numériques
1.1. Rappels sur les suites
Nous avons déjà abordé la notion de suite au cours du chapitre de topologie sur les
espaces métriques. Rappelons en les grandes lignes.
— On appelle suite à valeurs dans un ensemble E toute application u de N dans E.
Le terme u(n) est appelé le n-ième terme de la suite et on le note un . La suite u
est notée (u n )n∈N.
— Une suite (un ) à valeurs dans un espace métrique (E, d) est dite convergente s’il
existe ∈ E tel que
∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀n ≥ N, d(u n , ) ≤ ε.
Dans ce cas, il existe une seule valeur vérifiant cette propriété, et on dit que est
la limite de (un ) ou que (un) converge vers . On note alors = lim n→+∞ u n.
— On appelle sous-suite (ou suite extraite) de (un) toute suite (v n) de la forme v n =
uϕ(n) où ϕ est une application strictement croissante de N sur N.
Avec ces définitions, on a les propriétés qui suivent.
— Toute sous-suite d’une suite convergente est convergente et possède la même limite.
200 4. SUITES ET SÉRIES
— Une suite (un ) à valeurs dans un espace métrique est dite bornée s’il existe M > 0
tel que d(u0 , un ) ≤ M pour tout n ∈ N. Toute suite convergente est bornée.
— Si (un ) est une suite bornée à valeurs dans Rp , on peut en extraire une sous-suite
convergente (voir la proposition 11 page 30).
— Une suite (un ) à valeurs dans un espace métrique (E, d) est dite de Cauchy si
∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀p ≥ N, ∀q ≥ N, d(up, uq) < ε.
Toute suite convergente est de Cauchy, toute suite de Cauchy est bornée. Si E est
complet, toute suite de Cauchy converge. En particulier, toute suite de Cauchy
dans Rp converge.
Suites réelles.
— Une suite réelle (un) est dite majorée (resp. minorée) s’il existe M ∈ R tel que
un ≤ M (resp. un ≥ M ) pour tout n ∈ N. Une suite croissante et majorée converge.
— Les inégalités larges sont conservées par passage à la limite.
— Si trois suites (un ), (vn ) et (wn ) vérifient
∀n ∈ N, v n ≤ u n ≤ wn
et si (vn ) et (wn) convergent vers une même limite , alors (u n) converge vers .
— Deux suites réelles (un) et (v n ) sont dites adjacentes si l’une est croissante, l’autre
décroissante, et si
lim u n − vn = 0.
n→+∞
Dans ce cas, (un ) et (v n ) sont convergentes et convergent vers la même limite.
1.2. Suites récurrentes
Définition 1. Soient (E, d) un espace métrique et h un entier naturel non nul. Une suite
(u n)n∈N à valeurs dans E est dite récurrente d’ordre h si on peut écrire
∀n ≥ h, un = f (un−1 , un−2 , . . . , un−h ) (∗)
où f est une application de E h dans E.
Les premières valeurs u 0, . . . , u h−1 de (u n) étant données, la relation (*) permet de
calculer de manière itérative tous les autres termes de la suite. Le plus souvent, les suites
récurrentes que nous traiterons seront d’ordre 1.
La proposition suivante permet souvent de calculer la limite d’une suite récurrente si
on sait par ailleurs qu’elle converge.
Proposition 1. Soit (E, d) un espace métrique et (un ) une suite récurrente d’ordre
h ∈ N∗ vérifiant
∀n ≥ h, un = f (un−1 , un−2 , . . . , u n−h)
où f : E h → E est une application. Si la suite (un ) converge vers une limite et si
l’application f est continue au point (, . . . , ), alors on a
= f (, , . . . , ).
La preuve est simple, il suffit de faire tendre n vers +∞ dans la relation (*) et d’utiliser
la continuité de f au point (, . . . , ).
Monotonie des suites réelles récurrentes d’ordre 1. Soit un intervalle I de R et
une fonction f : I → R telle que f (I ) ⊂ I . Considérons une suite (un ) vérifiant
u0 ∈ I et ∀n ∈ N, u n+1 = f (u n).
— Si f est croissante, la suite (u n) est monotone et son sens de monotonie est donnée
par le signe de u1 − u0 (immédiat par récurrence).
1. SUITES NUMÉRIQUES 201
Remarque 1. Ces formules permettent de décider s’il existe un entier n qui annule le
dénominateur de h, en quel cas les termes ultérieurs de la suite ne sont pas définis.
– On peut montrer que si (E ) a deux racines distinctes, la valeur k est aussi égale à
k = cβ +d
cα+d
2c
; lorsque (E ) a une racine double, on a l’égalité k = a+ d
.
202 4. SUITES ET SÉRIES
Solution. Pour que la suite (un ) soit bien définie, il faut avoir un ≥ 0 pour tout n, ce qui sera
vérifié si et seulement si 0 ≤ u n < 4 pour tout n.
Ceci étant, on a
1
∀n ∈ N, un+1 = f (un) où f : [0, 4[→ R x → √ .
2− x
1. SUITES NUMÉRIQUES 203
La monotonie de (un ) est dictée par le signe de g (x) = f (x) − x ; un calcul simple montre que
√ √ √ √ √
1+ 5 1− 5
( x − 1) x− 2 x− 2
∀x ∈ [0, 4[, g(x) = f (x) − x = √ ,
2− x
d’où le tableau suivant, donnant le comportement de f et le signe de g :
√
3+ 5
x 0 1 2 4
√
1 3+ 5
f (x) 2 1 2 +∞
1
g (x) 2 + 0 − 0 +
Nous avons vu que forcément, u0 ∈ [0, 4[ pour que la suite (un ) soit définie. Pour étudier (u n),
nous traitons plusieurs cas selon la position de u0 par rapport aux points fixes de f .
(i) u0 ∈ [0, 1[. Le tableau montre que [0, 1[ est stable par f , on a donc u n ∈ [0, 1[ pour tout
n. Par ailleurs, g est positive sur cet intervalle, donc la suite (un ) est croissante. Comme
elle est majorée (par 1), elle converge. Sa limite vérifie f () = , c’est-à-dire g () = 0.
Comme de plus ∈ [0, 1] car la suite prend ses valeurs dans [0, 1[, on a forcément = 1.
En résumé, (un ) tend vers 1 en croissant.
(ii) u0 = 1. Alors√la suite (u n) est stationnaire à 1.√
(iii) u 0 ∈ ]1, (3+ 5)/2[. Comme l’intervalle ]1, (3+ 5)/2[ est stable par f , tous les éléments
de la suite appartiennent à cet intervalle. Comme g y est négative, (un ) décroı̂t. De plus,
(un) est minorée
√ (par 1), on en déduit qu’elle converge. Sa limite vérifie g () = 0 et
1 ≤ < (3 + √ 5)/2, donc = 1. En résumé, (un ) tend vers 1 √ en décroissant.
(iv) u0 = (3 +√ 5)/2. Alors la suite (u n) est stationnaire à (3 + 5)/2. √
(v) u 0 > (3 + 5)/2. Alors la suite (u n ) est croissante (g est positive √ sur ](3 + 5)/2, 4[) ; si
elle était majorée par 4, elle convergerait vers un réel > (3 + 5)/2 point fixe de f , ce
qui n’est pas possible. Ainsi, il existe n tel que un > 4 et la suite (un ) n’est pas définie.
Solution. Une récurrence immédiate montre que chaque terme de la suite est positif, donc la
suite (u n ) est bien définie. La suite (un ) est récurrente d’ordre 2, mais elle n’entre pas dans une
des familles classiques étudiées dans la partie 1.3. Pour se ramener à une récurrence classique,
nous allons considérer la suite (v n) définie par vn = log un. Elle vérifie
v n+1 vn
∀n ∈ N, v n+2 = + + log λ. (∗)
2 2
Pour rendre homogène cette récurrence linéaire, nous commençons par en rechercher une solution
particulière (c’est comme pour les équations différentielles). Aucune suite constante ne convient,
on recherche donc une solution particulière (wn ) sous la forme w n = αn. Elle vérifie (*) si et
seulement si
1 2
∀n ∈ N, α(n + 2) = α n + + log λ, ce qui équivaut à α = log λ.
2 3
Ainsi, la suite (wn) définie par w n = (2 log λ/3)n vérifie (*), ce qui en retranchant à (*) montre
que la suite (xn ) définie par x n = vn − w n vérifie
xn+1 xn
∀n ∈ N, x n+2 = + .
2 2
On sait résoudre ce type de récurrence. L’équation caractéristique correspondante est
1 1 1
r2 − r − = 0 dont les solutions sont r = − , r = 1.
2 2 2
Ainsi, il existe a, b ∈ R tels que
n
1 1 n 2 log λ
∀n ∈ N, xn = a + − b donc ∀n ∈ N, vn = x n + w n = a + − b+ n,
2 2 3
et finalement
n
∀n ∈ N, u n = exp(v n) = A · B (−1/2) · λ2n/3 , A = ea , B = eb .
Pour déterminer A et B , on écrit
1 1/3 2/3 2/3 −2/3 4/9
u0 = AB, u 1 = A · √ λ 2/3 d’où on déduit A = u0 u1 λ−4/9 , B = u0 u1 λ .
B
Finalement, nous avons montré
(2/3)(−1/2)n
1/3 2/3 u0 λ 2/3
∀n ∈ N, un = u0 u 1 λ−4/9 λ2n/3 .
u1
Remarque. Retenez le procédé qui consiste à rechercher une solution particulière pour
résoudre des récurrences linéaires non homogènes du type (*).
1. SUITES NUMÉRIQUES 205
Exercice 4. Soit α > 0 un nombre irrationnel et (rn ) une suite de nombres rationnels
qui converge vers α. Pour tout n, on écrit rn = pn /qn où pn ∈ Z, q n ∈ N ∗ . Montrer que
lim pn = lim q n = +∞.
n→+∞ n→+∞
Solution. Donnons nous un entier naturel non nul N . Notons Γ l’ensemble des rationnels de la
forme a/b qui se trouvent dans l’intervalle [α − 1, α + 1] et vérifient a ∈ Z, b ∈ N, 1 ≤ b ≤ N .
L’ensemble Γ est fini puisque
p
Γ= Γq avec Γ q = r ∈ [α − 1, α + 1] | ∃p ∈ Z, r =
q
1≤q≤N
et que pour tout q ∈ N∗, Γ q est fini (car si p/q ∈ Γ q , on a forcément (α − 1)q ≤ p ≤ (α + 1)q).
Ceci étant, le nombre α est irrationnel donc n’appartient pas à Γ. Comme Γ est fini, on en
déduit que
∃ρ ∈ ]0, 1[ , ∀x ∈ Γ, |x − α| > ρ. (∗)
La suite (rn ) converge vers α, donc il existe n0 ∈ N tel que |rn − α| < ρ pour tout n ≥ n0 .
D’après (*), on a donc rn ∈ Γ pour tout n ≥ n 0 , ce qui entraı̂ne qn > N (si qn ≤ N , comme
rn = p n /qn ∈ [α − 1, α + 1], on a rn ∈ Γqn ⊂ Γ, impossible). Finalement, nous avons prouvé
∃n0 ∈ N, ∀n ≥ n0 , q n ≥ N.
Ceci étant possible pour tout N ∈ N∗ , la suite (qn ) tend vers +∞. Comme pn ∼ αqn, la suite
(pn) tend également vers +∞.
Exercice 8. Soit (un )n≥1 une suite réelle positive majorée. On dit que A ⊂ N est de
densité nulle si limn→+∞ n1 Card(A ∩ [0, n]) = 0. Montrer que (i) et (ii) sont équivalents :
n
1
(i) La suite (Sn ) définie par Sn = u k converge vers 0.
n k=1
(ii) Il existe une partie A ⊂ N de densité nulle telle que n→
lim+∞
un = 0.
n∈A
Solution. Commençons par prouver que (ii) =⇒ (i). Soit ε > 0. Soit M un majorant de (un ) et
soit N ∈ N tel que u n < ε pour tout n > N et n ∈ A. Lorsque n > N on a
N N
1 1 1 1 Card(A ∩ [0, n])
|Sn | ≤ uk + uk + uk < uk + ε + M .
n n N<k≤n n N<k≤n n n
k=1 k=1
k∈A k∈A
Lorque n → +∞ les termes de gauche et de droite de la dernière somme, tendent vers 0. Donc il
existe N ≥ N tel que pour n ≥ N , ces deux termes soient chacuns inférieurs à ε. On en déduit
que |Sn | < 3ε pour n ≥ N , ce qui montre le résultat voulu.
Montrons maintenant (i) =⇒ (ii). La suite (Sn ) converge vers 0 donc la suite (αn ) définie
par αn = supk≥n S k converge également vers 0. On peut se placer dans le cas où la limite de
(un) n’est pas nulle, sinon il suffit de choisir A = ∅ et (ii) est prouvé. Dans ce cas on a α n > 0.
√ √
Définissons A = {n ∈ N∗ | u n ≥ α n }. Lorsque n ∈ A on a 0 ≤ un < α n donc lim un = 0.
n→+∞
n∈A
√ √
Lorsque k ∈ A ∩ [0, n], on a uk ≥ α k ≥ αn ce qui entraı̂ne
n
uk 1 Card(A ∩ [0, n]) S √
Card(A ∩ [0, n]) ≤ √ ≤ √ uk donc ≤ √ n ≤ α n.
αn αn n αn
k∈A k=1
1≤k≤n
2. Séries numériques
2.1. Généralités
Définition 1. Soit (un ) n∈N une suite à valeurs dans un espace vectoriel E . On appelle
série de terme général un la suite (S n)n∈N définie par
∀n ∈ N, Sn = u0 + u1 + · · · + un.
On note cette série un . Pour tout n ∈ N, un s’appelle le terme d’indice n, Sn s’appelle
la somme partielle d’indice n, de la série un .
Lorsque E est un e.v.n, on dit que un converge si lasuite (Sn) converge. Dans ce
cas, la limite s’appelle la somme de la série et on la note +∞ n=0 un . Pour tout n ∈ N, on
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 209
Critère de Cauchy pour les séries. Le critère de Cauchy pour les suites s’étend
aisément pour les séries et donne le résultat suivant.
Proposition 1. Une série un à valeurs dans un espace de Banach converge si et
seulement si
∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀n ≥ N, ∀p ∈ N, un + · · · + un+p < ε.
Corollaire 1. Si un est une série convergente, alors limn→+∞ un = 0.
Remarque
1. La réciproque de ce corollaire est fausse ; par exemple, la série harmonique
1/n diverge (voir la proposition 2).
Séries absolument convergentes. Voyons une autre conséquence importante du cri-
tère de Cauchy pour les séries :
Th
éor ème 1. Soit u n unesérie à valeurs dans un R-espace de Banach. Si la série
un converge, on dit que un est absolument convergente, et dans ce cas, la série
u n est convergente.
Ainsi, on est souvent ramené à prouver la convergence d’une série à termes positifs. Le
but de la partie qui suit est de donner des conditions suffisantes pour assurer la convergence
d’une série à termes positifs.
2.2. Séries à termes positifs
Toute suite réelle croissante et majorée converge, et comme conséquence immédiate,
on a le résultat suivant.
Théorème 2. Une série u n à termes réels positifs converge si et seulement si la suite
(Sn) des sommes partielles est majorée.
On en déduit facilement :
Théorème 3. On considère deux séries réelles un et vn telles que
∀n ∈ N, 0 ≤ un ≤ vn .
Alors si vn converge, un converge ; si un diverge, v n diverge.
210 4. SUITES ET SÉRIES
Théorème 4. Soient u n et vn deux séries
à termes positifs.
(i) Si v n = O (u n ) lorsque n → +∞ et si u converge, alors vn converge ;
n
(ii) si un ∼ vn lorsque n → +∞, alors les séries u n et v n sont de même nature.
Remarque 2. Attention, l’assertion (ii) de ce dernier théorème n’est vraie que pour des
séries à termes positifs (voir l’exercice 7 page 223 pour un contre-exemple avec des séries
à termes non positifs).
n≥1
nα
Équivalents des sommes partielles et des restes. Le résultat qui suit est crucial
dans beaucoup d’exercices. Il complète le théorème 4.
Théorème 5. Soient un et vn deux séries à termes positifs, telles que un ∼ v n
lorsque n → +∞. Alors
(i) si un converge, v n converge et les restes vérifient
+∞
+∞
uk ∼ vk , n → +∞ ;
k=n k=n
(ii) si un diverge, vn diverge et les sommes partielles vérifient
n
n
uk ∼ vk , n → +∞.
k=0 k=0
Démonstration. On sait déjà que les séries un et vn ont même nature (c’est l’assertion (ii)
du théorème 4).
(i). Soit ε > 0. L’équivalence un ∼ vn entraı̂ne
∃N ∈ N, ∀k ≥ N, (1 − ε)u k ≤ vk ≤ (1 + ε)u k ,
donc
+∞
+∞
+∞
∀n ≥ N, (1 − ε) uk ≤ vk ≤ (1 + ε) uk ,
k=n k=n k=n
d’où (i).
(ii). Soit ε > 0. Comme précédemment, on commence par écrire
∃N ∈ N, ∀k ≥ N, (1 − ε)u k ≤ vk ≤ (1 + ε)u k .
On en déduit
N−1
n
n
N−1
n
∀n ≥ N, vk + (1 − ε) uk ≤ vk ≤ v k + (1 + ε) uk .
k=0 k=N k=0 k=0 k=N
Comme un diverge,
n chacun des
termes extrêmes de ces inégalités sont respectivement équiva-
lents à (1 − ε) k=0 uk et (1 + ε) nk=0 uk On en déduit
n
n
n
∃N ≥ N, ∀n ≥ N , (1 − 2ε) uk ≤ vk ≤ (1 + 2ε) uk ,
k=0 k=0 k=0
d’où le résultat.
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 211
c) Poursuivons.
En appliquant la partie (i) du théorème 5, on en déduit un équivalent des
restes de (U n − U n−1 ), ce qui s’écrit
+∞
+∞
1 1
γ − Un = (Uk − Uk−1 ) ∼ − .
2 k2
k=n+1 k=n+1
Finalement, on a démontré
+∞
1 1 1 1 1
Un − γ ∼ ∼ , donc Hn = log n + Un = log n + γ + +o .
2 k=n k 2 2n 2n 2n
Remarque 3. — Il est important de retenir ce résultat. Le nombre réel γ est une
constante classique appelée constante d’Euler. On a γ = 0.577215664 . . ..
— On aurait pu poursuivre ce développement asymptotique en itérant la méthode.
Un développement asymptotique de Hn à un ordre quelconque fait l’objet du sujet
d’étude 3 page 321, par la formule d’Euler-Maclaurin.
212 4. SUITES ET SÉRIES
— Cette
méthode est assez générale. On peut l’utiliser par exemple sur la série
log(n) pour obtenir un développement asymptotique de n! à plusieurs termes
(voir le commentaire de l’exercice 3 page 219 sur la formule de Stirling).
Comparaison série-intégrale.
Proposition 3. Soit f : R+ → R une fonction positive, continue par morceaux et
décroissante sur R +. Alors la suite (Un ) définie par
n
∀n ∈ N, Un = f (0) + f (1) + · · · + f (n) − f (t) dt
0
+∞
est convergente. En particulier, la série f (n) et l’intégrale 0
f (t) dt ont même na-
ture.
Démonstration. La décroissance de f entraı̂ne
k+1
∀k ∈ N, f (k + 1) ≤ f (t) dt ≤ f (k).
k
On en déduit
n−1 k+1
∀n ∈ N, Un = f (k) − f (t) dt + f (n) ≥ f (n) ≥ 0
k=0 k
et n+1
∀n ∈ N, Un+1 − U n = f (n + 1) − f (t) dt ≤ 0.
n
La suite (Un ) est décroissante et minorée, elle converge donc.
Remarque 4. Ce résultat reste vrai si f est seulement supposée décroissante à partir d’une
certaine abscisse X (reprenez la preuve précédente).
– Si f estC1 à valeurs complexes et f est intégrable sur R+ , on peut également montrer que
+∞
la série f (n) et l’intégrale 0 f (t) dt ont même nature (voir l’exercice 12 page 227).
Exemple 2. — On retrouve avec ce résultat celui de la proposition 2 sur les séries de
Riemann.
— Si on applique ce résultat à la fonction f : x → 1/(1 + x), on montre que la suite
(Un) définie par
n−1
1 1 1 1
Un = 1 + + · · · + − f (t) dt = 1 + + · · · + − log n
2 n 0 2 n
converge. En notant γ la limite de (Un) (c’est la constante d’Euler), on retrouve
ainsi le fait que
1 1
Hn = 1 + + · · · + = log n + γ + o(1).
2 n
Séries de Bertrand. On appelle ainsi les séries de la forme
1
α β
, (α, β) ∈ R 2. (∗)
n≥2
n log n
On a vu (voir la proposition 6 page 149 sur les intégrales de Bertrand) que
+∞
dt
converge ⇐⇒ ((α > 1) ou (α = 1 et β > 1)).
2 tα logβ t
Si α ≤ 0, il est clair que la série de Bertrand (*) diverge pour tout β ∈ R (on peut dire
par exemple que le terme général est supérieur à 1/n à partir d’un certain rang). Si α > 0,
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 213
la fonction f (t) = t−α log−β t étant décroissante au voisinage de +∞, on en déduit (voir
la remarque précédente) que
1
α logβ n
converge ⇐⇒ ((α > 1) ou (α = 1 et β > 1)).
n≥2
n
Proposition 6 (Règle de d’Alembert). Soit un une série à termes > 0 telle que
un+1
lim = λ, λ ∈ [0, +∞].
n→+∞ un
Alors
(i) si λ < 1, un converge ;
(ii) si λ > 1, un diverge ;
+
(iii) si λ = 1 (i. e. si un+1 /un tend vers 1 en restant supérieur à 1), un diverge.
Proposition 7 (R ègle de Cauchy). Soit un une série à termes > 0 telle que
√
lim n u n = λ, λ ∈ [0, +∞].
n→+∞
Alors
(i) si λ < 1, un converge ;
(ii) si λ > 1, un diverge ;
(iii) si λ = 1 (i. e. si (un) 1/n tend vers 1 en restant supérieur à 1),
+
un diverge.
Remarque 7. On peut montrer que si un+1 /un → λ, alors (u n)1/n → λ. La réciproque est
fausse (par exemple, la suite u n = 2 + (−1)n vérifie (un) 1/n → 1 mais u n+1/un ne converge
pas).
2.4. Séries semi-convergentes
On appelle ainsi les séries convergentes mais non absolument convergentes.
Séries alternées. Ce sont les séries réelles un dontn les termes changent alternative-
ment de signe. Au signe près, on peut les écrire (−1) a n où an ≥ 0 pour tout n.
Théorème 6. Soit (a n ) une suite à termes positifs, décroissante, tendant vers 0. Alors
la série alternée (−1)na n converge, et les restes
+∞
∀n ∈ N, Rn = (−1)k ak vérifient |Rn | ≤ an+1.
k=n+1
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 215
n k
Démonstration. Pour tout n ∈ N, on note Sn = k=0 (−1) ak . La suite (an ) étant décroissante,
on a
∀n ∈ N∗, S2n − S2n−2 = a 2n − a2n−1 ≤ 0, S2n+1 − S 2n−1 = a 2n − a 2n+1 ≥ 0.
Autrement dit, la suite (S2n) est décroissante, (S 2n+1 ) est croissante. Or S2n+1 − S 2n = −a2n+1 ,
donc limn→+∞ S2n+1 −S2n = 0. Les suites (S2n ) et (S 2n+1) sont donc adjacentes. Elles convergent
donc vers une même limite S . La suite (Sn ) converge donc vers S et
∀n ∈ N, S 2n+1 ≤ S ≤ S 2n.
Ceci entraı̂ne
∀n ∈ N, |R2n | = |S − S 2n| ≤ S2n − S2n+1 = a2n+1 ,
de même
∀n ∈ N∗ , |R 2n−1| = |S − S 2n−1 | ≤ S2n − S2n−1 = a2n ,
ce qui montre |Rn | ≤ an+1 pour tout n ∈ N.
(on peut comparer cette expression à celle de l’intégration par parties, en disant que
αk+1 − α k est la “dérivée” de (α k ) et S n est une “primitive” de (v n)). Grâce à cette
technique, on montre le résultat suivant. C’est la version pour les séries du théorème 5 de
la page 152.
Théorème 7 (Règle d’Abel). Soit un une série à valeurs dans un espace de
Banach. On suppose que pour tout n, un = αn v n où
— (αn) est une suite positive, décroissante et tend vers 0 ;
— la série v n est bornée.
Alors la série u n est convergente.
Démonstration. Pour tout n, notons Sn = v0 + · · · + vn.
Par hypothèse, il existe M > 0 tel que
Sn ≤ M pour tout n. Une transformation d’Abel sur un donne
n
n−1
∗
∀n ∈ N , uk = (αk − α k+1)Sk + αn Sn . (∗)
k=0 k=0
La série k (αk − α k+1 )Sk converge absolument car
n
n
∀n ∈ N, (αk − α k+1)Sk ≤ (αk − α k+1 )M = (α0 − α n+1)M ≤ α 0 M
k=0 k=0
Par ailleurs, (αnS n) tend vers 0 car (Sn ) est bornée et (αn) tend vers 0. On en conclut avec
l’expression (*) que la série un converge.
— Une série de la forme αne niθ , où (αn ) est une suite décroissante tendant vers 0
et où θ ∈ R2π Z, converge. En effet, on a
1 − e(n+1)iθ
2 1
1 + eiθ + · · · + eniθ =
∀n ∈ N, 1 − eiθ ≤ |1 − e iθ | = | sin(θ/2)| ,
donc la série converge d’après la règle d’Abel. On en déduit en particulier que la
série eniθ /n α converge pour tout α > 0.
2.5. Séries commutativement convergentes, produit de Cauchy, séries doubles
Séries commutativement convergentes. On appelle ainsi les séries n∈N un telles
que pour toute bijection ϕ de N dans N, la série n∈N uϕ(n) converge. En particulier, une
série commutativement convergente est convergente.
Théorème 8. Une série un à valeurs dans un espace de Banach et absolument conver-
gente est commutativement convergente. De plus, pour toute bijection ϕ : N → N, on
a
+∞ +∞
un = uϕ(n) .
n=0 n=0
+∞ +∞ N N
+∞
N N
+∞
u n − uϕ(n) ≤ u n − un + u n − u ϕ(n) + uϕ(n) − uϕ(n)
n=0 n=0 n=0 n=0 n=0 n=0 n=0 n=0
+∞
+∞
+∞
+∞
≤ u n + u n + u ϕ(n) ≤ 3 u n < 3ε.
n=N +1 n=N +1 n=N +1 n=N +1
+∞ +∞
Cette inégalité est vraie pour tout ε > 0, on en conclut n=0 un = n=0 u ϕ(n) .
Produit de Cauchy.
Théorème 9 (Produit de Cauchy). Soient p∈N ap et q∈N b q deux séries absolu-
ment convergentes à valeurs dans une algèbre normée complète. Alors la série
n
cn avec cn = akbn−k ,
n∈N k=0
est appelée produit de Cauchy de ap et b q , elle est absolument convergente et on a
+∞
+∞ +∞
cn = ap bq . (∗)
n=0 p=0 q=0
Démonstration. La série c n est absolument convergente d’après la majoration
N N
N
N
c n ≤ ap · bq ≤ ap · b q = ap bq ≤ AB
n=0 n=0 p+q =n 0≤p,q ≤N p=0 q=0
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 217
+∞
avec A = ap et B = +∞
p=0 q=0 b q . Pour montrer (*), remarquons maintenant que
2n
n n
∆n = ck − ap bq = ap bq − ap bq = ap bq + ap b q
k=0 p=0 q=0 0≤p+q≤2n 0≤p,q ≤n p>n q>n
p+q≤2n p+q≤2n
ce qui entraı̂ne
2n
n−1
n−1
2n
∆ n ≤ a p · b q + a p · bq = ap b q + ap bq,
n<p≤2n n<q≤2n p=n+1 q=0 p=0 q=n+1
q<n p<n
2n 2n
donc ∆n ≤ B p=n+1 a p + A q=n+1 b q . Ainsi ∆n converge vers 0, d’où (*).
Séries doubles. On désigne ainsi les séries de la forme (p,q)∈N2 up,q .
Théorème 10. Soit (up,q )(p,q)∈N2 une suite à double entrée, à valeurs dans un espace de
Banach. Alors les deux assertions suivantes sont équivalentes
∞
(i) Pour tout q ∈ N, p up,q est absolument convergente, et q p=0 up,q converge.
∞
(ii) Pour tout p ∈ N, q up,q est absolument convergente, et p q=0 up,q converge.
(1) La famille (u i) i∈I est dite sommable s’il existe S ∈ E tel que
∀ε > 0, ∃J0 ∈ Pf (I ), ∀J ∈ P f (I ), J 0 ⊂ J, ui − S < ε.
i∈J
La grandeur S est alors appelée somme de (ui )i∈I et notée i∈I ui .
(2) Elle est dite absolument sommablesi la famille (ui )i∈I est sommable. Ceci est
équivalent à dire que l’ensemble { i∈J ui , J ∈ Pf (I )} est borné.
Les familles sommables vérifient les propriétés suivantes :
(i) Si (ui)i∈I est sommable, alors l’ensemble {i ∈ I, u i = 0} est au plus dénombrable.
(ii) Une série n∈N un est absolument convergente si et seulement si la famille (u n)n∈N
est absolument sommable.
(iii) Une famille absolument sommable est sommable. La réciproque est vraie si E est de
dimension finie mais fausse si E est de dimension infinie.
(iv) Une série n∈N un est commutativement convergente si et seulement si la famille
(un )n∈N est sommable.
(v) (Associativité) Si (It) t∈T est une partition de I , alors (u i)i∈I est sommable si et
seulement si pour tout t ∈ T , (ui ) i∈It est sommable, de somme st, et la famille
(st) t∈T est sommable.
Les résultats précédents découlent naturellement des propriétés des familles sommables :
le théorème 8 est la conséquence de (ii), (iii) et (iv). Pour le théorème sur les produits de
Cauchy, la convergence absolue de cn découle de (v) appliqué à la famille (u p vq )(p,q)∈N2
avec la partition ({(p, q ), p + q = n})n∈N de N 2, et l’égalité des limites provient de (v)
appliqué à la famille (upvq )(p,q)∈N 2 et à la même partition. L’équivalence des assertions (i) et
(ii) du théorème d’interversion des limites est la conséquence de la propriété d’associativité
appliquée à la famille (up,q )(p,q)∈N 2, et la formule (*) est la conséquence de (iii) et de (v)
appliqué aux partitions (N × {n})n∈N et ({n} × N) n∈N de N2.
2.6. Exercices
Exercice 1. Soit (un ) la suite définie par
u n+1 n+a
u0 = 1, ∀n ∈ N, = ,
un n+b
où a et b sont deux nombres réels positifs fixés. Donner la nature de la série u n en
fonction de a et b et calculer sa somme lorsqu’elle converge.
Solution. Pour la convergence de la série, il suffit de remarquer que lorsque n → +∞,
un+1 1 1
= = ,
un 1 + (b − a)/(n + a) 1 + (b − a)/n + O(1/n2 )
donc d’après la règle de Raab-Duhamel, il existe λ > 0 tel que un ∼ λ/nb−a . Ainsi, un
converge si et seulement si b − a > 1.
Sommons la série lorsque b − a > 1. La relation (n + b)un+1 = (n + a)un entraı̂ne
n
n
n+1
n
(k + b)uk+1 = (k + a)uk donc (k + b − 1)uk = (k + a)uk,
k=0 k=0 k=1 k=0
ce qui s’écrit
n
(b − a − 1) uk + (n + b)u n+1 = (b − 1)u 0. (∗)
k=0
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 219
Exercice 2. Soit (un ) une suite à termes positifs et décroissante. Si la série un
converge, montrer que un = o(1/n) lorsque n → +∞.
Solution. Soit ε > 0. La série un converge donc il existe N ∈ N tel que ∞
n=N +1 un < ε. On
en déduit, la suite (un ) étant décroissante, que
∞
∀p > N, (p − N )up ≤ uN+1 + uN+2 + · · · + up ≤ u n < ε,
n=N +1
donc pour tout p > 2N , (p/2)u p ≤ (p − N )u p < ε. Finalement, nous avons 0 ≤ pu p ≤ 2ε pour
tout p > 2N . Ainsi, (nun ) tend vers 0, d’où le résultat.
Remarque. Ce résultat est la version discrète de celui de l’exercice 4 page 156.
Remarque. Il faut connaı̂tre ce résultat et savoir le prouver. A partir de la série vn, en
procédant comme on l’a fait page 211 pour donner un développement asymptotique des
nombres harmoniques, il est possible de calculer un développement asymptotique de n!.
Une version continue de la formule de Stirling est traitée dans l’exemple 2 page 166.
b) Montrer l’égalité
+∞
ζ (k ) − 1 1 1
= 1 − γ, où γ = lim 1 + + · · · + − log n.
k=2
k n→+∞ 2 n
1 +∞ +∞
1 1 dt 1 1 1
ζ (k ) − 1 = k + k
≤ k+ = k+ ≤ k−1 .
2 n=3
n 2 2 tk 2 (k + 1)2k 2
La série à termes positifs k≥2 (ζ (k ) − 1) est donc convergente. Les séries en présence étant
convergentes et à termes positifs, elles sont absolument convergentes donc on peut donc appliquer
le théorème d’interversion de sommation (voir le théorème 10 page 217) qui entraı̂ne
+∞ +∞ +∞ +∞
+∞
+∞
1 1 1 1
+∞
1
(ζ (k ) − 1) = = = = −
n=2
nk n=2
nk n=2
n(n − 1) n=2 n − 1 n
k=2 k=2 k=2
d’où le résultat.
n
b) Remarquons que si Un = ( k=1 1/k ) − log n, on a
+∞
1
1 1 1
∀n ≥ 2, δ n = Un − U n−1 = − log n + log(n − 1) = + log 1 − =−
n n n knk
k=2
N
N
∀N > 2, δn = (Un − Un−1 ) = UN − U 1 = UN − 1,
n=2 n=2
d’où le résultat.
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 221
Solution. Soit A > 0. Il existe N > 0 tel que pour tout x ≥ N , f (x)/f (x) ≤ −A. Ainsi, si on
se donne un entier n ≥ N , on peut écrire
n+p n+p
f (n + p) f (x)
∀p ≥ n, log = dx ≤ −A dx = −pA,
f (n) n f (x) n
de sorte que f (n + p) ≤f (n)e−pA pour tout p ∈ N ∗. La fonction f étant positive, ceci assure la
convergence de la série f (n). De plus, notre majoration entraı̂ne
+∞
+∞
e−A
∀n ≥ N, 0 ≤ Rn+1 = f (n + p) ≤ f (n) e −pA = f (n).
p=1 p=1
1 − e−A
Comme on peut prendre A aussi grand que l’on veut, nous avons en fait montré que
∀ε > 0, ∃N > 0, ∀n ≥ N, 0 ≤ Rn+1 ≤ εf (n).
Autrement dit, Rn+1 = o(f (n)), donc Rn = f (n) + Rn+1 ∼ f (n) lorsque n → +∞.
2
Remarque. Un exemple d’application de ce résultat est la convergence de
+∞ e−n et le
2 2
fait que p=n e−p ∼ e−n .
Exercice 6. Soit n∈N un une série à termes > 0.
1/ a) Si un diverge, discuter en fonction du paramètre α > 0 la nature de la série
un n
, où Sn = uk.
Sαn k=0
Solution. 1/ a) Ceci dépend de la position de α par rapport à 1, comme on le voit dans le cas
où un = 1 pour tout n (dans ce cas, on a affaire aux séries de Riemann).
— Si α > 1, on écrit
Sn n n Sk Sn
∗ un S n − S n−1 dt uk dt dt
∀n ∈ N , = ≤ donc α ≤ = ,
Snα Snα Sn−1 t
α Sk Sk−1 t
α
S0 t
α
k=1 k=1
222 4. SUITES ET SÉRIES
et
comme α > 1, on en conclut que les sommes partielles de la série à termes positifs
un /Snα sont majorées. Si α > 1, la série un/S αn est donc convergente.
— Si α ≤ 1, nous allons montrer que la série diverge. Par hypothèse, u n diverge, donc il
existe N ∈ N tel que Sn ≥ 1 pour tout n ≥ N . On écrit ensuite
q q
un un up+1 + · · · + uq S q − Sp Sp
∀p ≥ N, ∀q > p, α
≥ ≥ = = 1 − . (∗)
n=p+1
Sn n=p+1
Sn S q S q Sq
Pour tout p ≥ N , il existe q > p tel que Sq ≥ 2Sp . On en déduit avec (*) que
q
un 1
∀p ≥ N, ∃q > p, α
≥ .
n=p+1
Sn 2
Le critère deCauchy n’est donc pas vérifié pour la série un /Snα , elle diverge donc.
α
En résumé, la série un /S n converge si et seulement si α > 1.
b) On va utiliser une comparaison série-intégrale. On écrit
Sn
∗ un S n − S n−1 dt Sn − S n−1 un
∀n ∈ N , α
= α
≤ α
≤ α = α ,
Sn Sn Sn−1 t S n−1 S n−1
et comme un = o(S n), on a S n−1 = Sn − un ∼ Sn lorsque n → +∞, de sorte que notre
encadrement entraı̂ne
Sn
un dt
α
∼ α
. (∗∗)
Sn Sn−1 t
(Noter au passage
que dans le cas ou un = o(Sn ), cet équivalent est un autre moyen de parvenir
au fait que un /S αn converge si et seulement si α > 1.) Supposons α ≤ 1. D’après (**) et le
théorème 5 page 210, on a
n n Sn
uk Sk dt dt
α
∼ α
= α
.
Sk Sk−1 t S0 t
k=1 k=1
On en déduit
n
uk Sn1−α /(1 − α) si 0 < α < 1
∼ .
Sα log Sn si α = 1
k=0 k
Si maintenant α > 1, la série un /S αn converge et d’après (**) et le théorème 5, on a
+∞
un Sk dt +∞ dt
+∞
1
∼ = = .
Sαn
k=n+1 k=n+1Sk−1 tα
Sn tα
(α − 1) Snα−1
(le dernière intégrale converge bien car α < 1). On en déduit que les sommes partielles
de la série étudiée sont majorées, la série converge donc.
— Si α ≥ 1, on commence par fixer un entier N ∈ N tel que R n ≤ 1 pour tout n ≥ N , puis
on écrit
q−1
uk q−1
uk up + · · · + uq−1 Rp − Rq Rq
∀p, q ≥ N, (q > p), α ≥ ≥ = = 1− .
Rk Rk Rp Rp Rq
k=p k=p
L’entier p ≥ N étant fixé, il existe q > p tel que Rq < Rp /2, et la dernière expression
montre alors que notre série ne satisfait pas le critère de Cauchy. Elle diverge donc si
α ≥ 1.
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 223
Finalement, nous avons montré que un/Rαn converge si et seulement si α < 1.
b) En procédant comme dans la solution de la question 1/ b), on montre que sous l’hypothèse
un = o(Rn),
Rn+1
un dt
α
∼ .
Rn Rn tα
En poursuivant le raisonnement comme nous l’avions fait plus haut, on en déduit
n
+∞
uk log(1/Rn) si α = 1, un R1−α
n
∼
α−1 −1
et pour α < 1 ∼ .
R αk (α − 1) R n si α > 1 , R α
n 1 − α
k=0 k=n+1
Exercice 7. a) Discuter en fonction du paramètre α > 0 la nature de la série n∈N∗ un
où
(−1)n−1
∀n ∈ N ∗ , un = α .
n + (−1) n
b) Discuter en fonction des réels θ, ϕ la nature de la série n≥2 un où
eniθ
∀n ≥ 2, un = √ .
n + eniϕ
Solution. a) On a affaire à une série alternée. Attention à ne pas commettre l’erreur d’appliquer
directement le théorème 6 page 214, sous prétexte que la suite (nα + (−1)n) est “pratiquement”
décroissante.
Une bonne manière de procéder est de calculer un développement asymptotique de (un) :
(−1) n−1 1 (−1) n−1 1 1
un = = + 2α + o = vn + wn ,
nα 1 + (−1)n n−α nα n n2α
(−1)n−1 1
vn = α
, w n ∼ 2α .
n n
La série
vn converge d’après le théorème 6 page 214, et comme u n = v n + wn, on en déduit
que un et w n ont même nature. Comme wn ∼ n−2α (et que wn ∈ R), on voit finalement
que un converge si et seulement si α > 1/2.
b) Comme précédemment, le plus sûr est de calculer un développement asymptotique de (u n ) :
eniθ 1 1 eniθ e ni(θ+ϕ)
un = √ √ = v n + w n + O , v n = √ , w n = − .
n 1 + eniϕ / n n3/2 n n
Ceci montre que la série u n − (vn + w n) converge, donc un est de même nature que (vn +
wn). A ce stade, on traite plusieurs cas.
(i) Si θ ∈ 2π Z et θ + ϕ ∈ 2π Z, alors chacune des séries v n et wn converge (c’est
la plus
classique conséquence
de la règle d’Abel, voir l’exemple 3 page 215), donc (vn + w n )
converge, donc un converge. √
(ii) Si θ ∈ 2π Z et θ + ϕ ∈ 2π Z, on a v n + w n ∼ 1/ n, et comme vn + wn ∈ R, (vn + wn )
diverge, donc u n diverge.
(iii)Si l’un et
l’un seulement des réels θ, θ + ϕ est un multiple de 2π, alors parmi les séries
vn et wn , l’une est divergente et l’autre convergente
(ce dernier pointest toujours
justifié par la règle d’Abel). On en déduit que (v n + w n) diverge, donc un diverge.
224 4. SUITES ET SÉRIES
Finalement, nous avons montré que un converge si et seulement si θ ∈ 2πZ et θ + ϕ ∈ 2πZ.
c) On généralise la méthode précédente. L’idée est de calculer un développement asymptotique
de (un ) jusqu’à un terme d’erreur de la forme O (1/na ) avec a > 1.
Si α > 1, la série converge absolument donc converge, sinon 0 < α ≤ 1 et on note p = [1/α] −1
([1/α] est la partie entière de 1/α), de sorte que (p + 1)α ≤ 1 < (p + 2)α. On écrit
e niθ 1 1 ke
ni(θ+kϕ)
un = α = u n,0 + u n,1 + · · · + u n,p + O , un,k = (−1) .
n 1 + e niϕn −α n(p+2)α n(k+1)α
Comme (p + 2)α > 1, ceci montre que
la série u n a même nature que la série (un,0 + · · · + un,p). (∗)
n n
Deux cas se présentent :
(i) Si pour tout k ∈ {0, 1, . . . , p}, θ + kϕ ∈ 2πZ, alors chacune des séries n u n,k converge
(pour 0 ≤ k ≤ p) d’après la règle d’Abel, donc un converge d’après le principe (*).
(ii) Sinon, il existe un plus
petit entier k tel que θ + kϕ ∈ 2π Z. Comme θ + ϕ ∈ 2πZ pour
0
≤ < k, les séries n un, (0≤ < k) convergent, et on en déduit d’après (*) que
n u n est de même nature que n (un,k + · · · + un,p ). Notons vn = un,k + · · · + u n,p. On
a
(−1)k 1
u n,k = (k+1)α et un,k+1 + · · · + un,p = O ,
n n (k+2)α
donc vn ∼ (−1)k /n (k+1)α . A ce stade, on ne peut conclure directement que vn diverge
car vn est un nombre complexe. Pour s’en tirer, on va considérer la partie réelle de vn ,
k (k+1)α
en posant xn = (vn ). Elle vérifie aussi xn ∼ (−1) /n et comme xn est de signe
constant et que (k + 1)α ≤ 1, x n diverge. Donc vn diverge (une suite complexe
converge si et seulement si ses parties réelles et imaginaires convergent), donc un
diverge.
Finalement, nous avons montré que un converge si et seulement si
1
(α > 1) ou 0 < α ≤ 1 et ∀k ∈ N, k ≤ − 1, θ + kϕ ∈ 2πZ .
α
Exercice 8. Soit un une série à termes positifs dont le terme général tend vers 0. On
note Sn la sommepartielle d’indice n de cette série. Montrer que si la suite (S n − nu n)
est bornée, alors un converge. La réciproque est-elle vraie ?
Solution. Raisonnons par l’absurde en supposant la série u n divergente. Alors Sn → +∞
donc l’estimation Sn − nu n = O(1) entraı̂ne
un 1 1 1
nun = Sn + O(1) donc = +O ∼ . (∗)
Sn n nS n n
à ce stade, nous allons utiliser une technique classique : on écrit
Sn un un 1
log = − log 1 − ∼ ∼ .
S n−1 Sn Sn n
On en déduit que la série log(Sn /S n−1) diverge, et on peut sommer terme à terme ces
équivalents (voir le théorème 5 page 210), ce qui donne
n n
Sk 1
log S n − log S0 = log ∼ ∼ log n
S k−1 k
k=1 k=1
(ce dernier équivalent est hyper-classique, voir par exemple page 211), donc log Sn ∼ log
√ n. En
particulier, il existe N ∈ N tel que log(S n) ≥ (log n)/2 pour tout n ≥ N , et donc S n ≥ n pour
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 225
Exercice
9. Soit un une série à termes positifs. Comparer la nature des séries un
et vn , où
1
∀n ∈ N∗ , vn = .
1 + n2 un
Solution. Si un diverge, on ne peut rien conclure quant à la nature de vn . Par
exemple
∗
— si un = 1/n pour tout n ∈ N , u n diverge et vn = 1/(1+ n) ∼ 1/n, donc vn diverge ;
— si un = 1 pour tout n ∈ N ∗ , un diverge
et vn = 1/(1 + n2) ∼ 1/n2 , donc vn converge.
Si un converge, nous montrons que vn diverge. Deux cas se présentent
:
(i) si (n2 u n) ne tend vers pas +∞, alors (vn ) ne tend pas vers 0 donc vn diverge ;
(ii) si (n u n ) tend vers +∞, alors vn ∼ 1/(n u n ), donc (unv n ) ∼ 1/n, et donc (unvn )1/2
2 2 1/2
Exercice 10. Pour tout k ∈ N on note log(k) = log ◦ · · · ◦ log le logarithme itéré k fois,
et on note nk ∈ N un entier tel que log (k) n est défini et ≥ 1 pour tout n ≥ n k .
a) Soit k ∈ N∗ et β > 0. Discuter de la convergence de la série
1
n≥n k
n × log n × · · · × log(k−1) n × (log (k) n) β
226 4. SUITES ET SÉRIES
Lorsque β = 1, une primitive de la fonction fk,β est donnée par (1 − β )−1 (log (k) x)1−β , donc
n
n
(log(k) n)1−β
fk,β (p) = fk,β (x) dx + O(1) = + O (1).
p=n nk 1−β
k
On en déduit que si β < 1, la série diverge et ses sommes partielles sont équivalentes à
(log(k) n)1−β /(1 − β ). Si β > 1 l’estimation précédente montre que les sommes partielles sont
bornées, et comme la série est à termes positifs elle converge (notons que dans ce cas, on mon-
trerait facilement que les restes de la série sont équivalents à (β − 1)−1 1/(log(k) n) β−1).
b) Définissons la suite (ek ) par e0 = 1 et e k+1 = exp(ek ). Pour tout k ∈ N, on considère
la fonction continue décroissante gk : [ek , ek+1] → R, x → 1/(x × log x × · · · × log (k) x),
puis on considère la fonction g : [1, +∞[→ R définie par g(x) = gk (x) sur chaque intervalle
x ∈ [ek , ek+1[ . L’identité log (k) (ek ) = 1 entraı̂ne gk−1 (ek ) = gk (ek ) donc g est continue, et
comme chaque gk est décroissante on en déduit que g est également décroissante. Par ailleurs,
on a n ∈ [ek n , e kn+1 [ donc un = g (n). On peut donc appliquer le résultat la comparaison série-
intégrale, qui entraı̂ne
n n k
n −1
n
Exercice 11. a) Soit (un ) la suite définie par u n = k=1 log k/k . Montrer l’existence
2
d’une constante C ∈ R telle que un = (log n)/2 + C + o(1).
b) Démontrer la convergence de la série n≥1 (−1)n log n/n et utiliser le résultat de la
question précédente pour calculer la somme de cette série.
Solution. a) Le plus simple est d’appliquer la proposition 3 sur la comparaison série-intégrale,
page 212. Ici on a un = f (0) + f (1) + · · · + f (n − 1) avec f (x) = log(x + 1)/(x + 1). La fonction
f est dérivable et f (x) = (1 − log(x + 1))/(x + 1) 2 donc f est décroissante à partir d’un certain
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 227
rang. Comme indiquédans la remarque 4 page 212, le résultat de la proposition 3 reste vérifié,
on conclut que un − 0n f (x) dx = un − 12 log2 (n + 1) = un − 12 log2 n + o(1) converge, d’où le
résultat.
On aurait pu aussi procéder comme on l’a fait à la page 211 pour les sommes harmoniques :
pour montrer la convergence de vn = un− (log2 n)/2, on calcule l’estimation v n − v n−1 =
O (log n/n2 ), entraı̂nant la convergence de (v n − v n−1) donc celle de la suite (v n).
b) Notons an = 2n k
k=1 (−1) log k/k . Pour montrer la convergence de
n
n≥1 (−1) log n/n il suffit
de montrer celle de (an ) car le terme général de la série converge vers 0, et de plus la somme de
la série égale la limite de (an). On récrit a n sous la forme
n
2n
log 2k log k 1
an = 2 − = H n log 2 + u n − u2n , avec Hn = 1 + · · · + .
2k k n
k=1 k=1
En utilisant l’asymptotique des sommes harmoniques H n = log n + γ + o(1) (où γ est la constante
d’Euler, voir la page 211), et celle de (un ), on en déduit
log2 n − log 2 (2n) log2 2
an = log 2 log n + γ log 2 + + o(1) = γ log 2 − + o(1).
2 2
La série n≥1 (−1) n log n/n converge donc et sa somme est égale à (γ − 12 log 2) log 2.
E
xercice 12. 1/ Soit f : ]0, +∞[→ C une application de classe C 1 telle que l’intégrale
+∞
|f (t)| dt converge. n
1
a) Montrer que la série n∈N∗ f (n) a même nature que la suite ( 1 f (t) dt) n∈N .
b) (Application.) Lorsque α > 1/2, donner la nature de la série
√
ei n
α
. (∗)
n∈N∗
n
+∞
dernière intégrale a même nature que 1 eiv /v 2α−1 dv, donc convergente car 2α − 1 > 0 (voir
le début de la remarque 6 page 153).
√
i t α
2/
+∞On pose f (t) = e /t . Ici, la technique précédente ne peut pas s’appliquer car l’intégrale
x
∗
1 |f (t )| dt diverge. On généralise, en appliquant pour tout n ∈ N à la fonction x → n f (t) dt
la formule de Taylor avec reste intégral à l’ordre 2, ce qui donne
n+1 n+1
f (n) (n + 1 − t) 2
f (t) dt = f (n) + + f (t) dt,
n 2 n 2
ce qui entraı̂ne
n+1
n+1
f (n)
∀n ∈ N , ∗ f (t) dt − f (n) − ≤ |f (t)| dt. (∗∗)
2
n n
Ici, on a
√ i√t √
i t i t
e 1 ie e 1
∀t > 0, f (t) = − α+1 − α + + α (α + 1) α+2 = O α+1 ,
4t 4 tα+3/2 t t
+∞ n+1
donc l’intégrale
1
|f (t)| dt converge, donc d’après (**) la série n
f (t) dt − f (n) −
f (n)/2 converge. Or
√ √
∗ ie i n ei n
∀n ∈ N , f (n) = − α ,
2nα+1/2 n 1+α
et en appliquant le résultat de la question précédente, on voit que f (n) converge.
Finalement,
n+1 n
la série n
f (t) dt − f (n) converge, en particulier, la suite 1 f (t) dt et la série f (n)
sont de même nature. En écrivant
n √n iv iv √ n √ n iv
e e 1 − 2α e
f (t) dt = 2α−1
dv = 2α− 1
− dv,
1 1 v iv 1 i 1 v 2α
on s’aperçoit que 1n f (t) dt diverge car α ≤ 1/2. Finalement, nous venons de montrer que la
série (*) diverge pour 0 < α ≤ 1/2.
Remarque. Cette technique de comparaison série-intégrale trouve une généralisation na-
turelle avec la formule d’Euler-Maclaurin (voir le sujet d’étude 3 page 321).
a) Montrer que (un ) tend vers 0 puis donner un équivalent de (un ) lorsque n → +∞.
b) Donner un développement asymptotique à deux termes de (un ).
Solution. Il faut avoir fait au moins une fois dans sa vie ce type d’exercice.
a) L’intervalle ]0, π/ 2] est stable par la fonction sinus, donc un ∈ ]0, π/2] pour tout n. De plus,
on a sin x < x sur cet intervalle, donc la suite (u n) est strictement décroissante. Par ailleurs, elle
est minorée par 0, elle converge donc. Sa limite vérifie sin() = , donc = 0.
Donnons maintenant un équivalent de (un ). On utilise pour cela une jolie astuce (bravo si
vous l’avez trouvée), en écrivant
1 1 1 1 1 1
− = − 2 = 2 − 2
u2n+1 u 2n sin 2 un un 3 4
un − u n /6 + O (un) u n
1 1 1 u 2n 3 1 1
= 2 − 1 = + O (u n) = + O (un ) ∼
un 1 − u2n /3 + O (u3n) u2n 3 3 3
2. S ÉRIES NUM ÉRIQUES 229
(on a bien
le droit de faire ces développements limités car u n → 0). Cet équivalent montre que
la série (1/u2n+1 − 1/u 2n ) diverge, et en sommant les équivalents, on obtient (on a le droit, voir
le théorème 5 page 210)
n−1
n−1
1 1 1 1 1 n
− = − ∼ = ,
u2n u20 u2k+1 u2k 3 3
k=0 k=0
autrement dit 1/u2n ∼ n/3 donc un ∼ 3/n.
b) On procède comme plus haut, en cherchant cette fois ci un développement asymptotique à
deux termes de 1/u2n+1 − 1/u 2n . On a
u3n u5n 5 u2n u4n 4
un+1 = sin un = un − + + o(un ) = un 1 − + + o(un )
6 120 6 120
donc
1 1 u2n u4n 4 1 1 1 u2n 2 u 2n 1
= 2 1+ + + o( u n ) d’où − − = + o ( u n ) ∼ ∼
u 2n+1 un 3 15 u2n+1 u 2n 3 15 15 5n
le dernier équivalent provenant du fait que un ∼ 3/n. Comme précédemment, ces expressions
sont les termes généraux de séries qui divergent, et on peut sommer les équivalents, ce qui donne
n−1
n−1
1 1 n 1 1 1 1 log n
2
− 2 − = 2 − 2 − ∼ ∼ ,
un u0 3 uk+1 uk 3 5k 5
k=0 k=1
et finalement
−1 √
n log n 3 3 3 log n log n
u2n = + + o(log n) d’où un = − √ +o √ .
3 5 n 10 n n n n
La série 1/n2 converge, ainsi que 1/Θ(n) 2 d’après le théorème 8 page 216 (et d’ailleurs, les
sommes de ces deux séries sont égales). L’inégalité (*) montre donc que les sommes partielles
de notre série sont majorées, donc elle converge, et en faisant N → +∞ dans (*), on obtient
∞ 2 ∞ ∞ ∞
1 1 1 1 2 ∞
1 ∞
1
≤ 2 2
= 2
donc ≤ 2
.
n=1
n Θ( n ) n=1
n n=1
Θ(n) n=1
n n=1
nΘ( n) n=1
n
Cette inégalité est la meilleure possible car il y a égalité lorsque Θ est l’identité.
On aurait pu traiter cette question à partir de l’inégalité ab ≤ (a2 + b 2)/2 appliquée à
a = 1/Θ(n) et b = 1/n.
b) La manière la plus immédiate de montrer qu’il y a divergence est certainement de nier le
critère de Cauchy, en écrivant
2N
2N N
Θ(n) 1 1 N +1 1
∗
∀N ∈ N , ≥ Θ(n) ≥ n = ≥ .
n2 4N 2 4N 2 n=1 8N 8
n=N +1 n=N +1
Si maintenant on veut une minoration fine des sommes partielles de cette série, on peut utiliser
(encore !) l’inégalité de Schwarz qui entraı̂ne, pour tout N ∈ N∗
N 2 N 2 N N N N
1 Θ(n) 1 Θ(n) 1 Θ(n) 1
= ≤ 2
≤ 2
,
n=1
n n=1
n Θ(n) n=1
n n=1
Θ(n) n=1
n n=1
n
N
N
Θ(n) 1
donc 2
≥ . Cette minoration est optimale car il y a égalité lorsque Θ est l’identité.
n n
n=1 n=1
c)
On ne peut rien dire dans le cas général. Lorsque Θ est l’identité, la série Θ(n)/n 3 =
1/n 2 converge. Mais on peut construire Θ tel que cette série diverge. Par exemple, notons
A = {(2n)2 | n ∈ N ∗ } et B = N∗ A. On note b1 < b2 < b 3 < . . . les entiers de B rangés dans
l’ordre croissant, et on définit Θ par Θ(2n) = (2n)2 pour n ∈ N∗ et Θ(2n + 1) = b n pour n ∈ N.
Avec ce choix de Θ, on voit que Θ(n)/n3 diverge car
2N
N
N
Θ(n) Θ(2n) 1
∀N ∈ N ∗, ≥ = .
n=1
n3 n=1
(2n)3 n=1
2n
2/ a) C’est un classique. On procède par récurrence sur n. Pour n = 1 c’est évident. Supposons
le résultat vrai pour n − 1 et montrons l’inégalité (*) pour n. Si σ (n) = n c’est évident, car
dans ce cas la restriction de σ à {1, . . . , n − 1} est une permutation de {1, . . . , n − 1} et il
suffit d’appliquer l’hypothèse de récurrence. Sinon, on a k = σ−1 (n) < n et = σ (n) < n, et
on définit la permutation σ de {1, . . . , n − 1} par σ (i) = σ (i) si i = k, et σ (k) = . On a
(an − a k)(b n − b ) ≥ 0 donc a n b + a k bn − a k b ≤ a n bn . On en déduit
n
n−1
n−1
ai b σ(i) = ai bσ (i) + an b + ak b n − akb ≤ a ib σ (i) + a nb n.
i=1 i=1 i=1
n−1 n−1
Le résultat pour n en découle, car d’apres l’hypothèse de récurrence i=1 ai bσ (i) ≤ i=1 a ibi .
b) Soit n ∈ N∗. On note b 1 < . . . < bn les valeurs de Θ(1), . . . , Θ(n) rangées dans l’ordre
croissant. Soit σ ∈ Sn tel que bσ(k ) = Θ(k) pour k = 1, . . . , n. Soit a k = −u k /k . Comme (uk )
est positive et décroissante, (u k /k) également donc on a a1 ≤ . . . ≤ an . On en déduit, d’après le
résultat de la question précédente et après changement de signe, que
n n
uk uk
bσ(k ) ≥ b
k k k
k=1 k=1
et comme bσ(k ) = Θ(k ) et bk ≥ k ceci implique
n
n
uk
Θ(k) ≥ u k.
k
k=1 k=1
3. SUITES ET SÉRIES DE FONCTIONS 231
On en déduit le résultat car u n diverge.
Remarque. L’inégalité de réarrangement (parfois appelée inégalité de réordonnement)
est classique. Nous aurions pu l’utiliser pour obtenir les résultats des questions 1/a) et
1/b). Elle entraı̂ne de nombreuses
n inégalités, comme l’inégalité de Tchébycheff pour les
n n
sommes : i=1 xi yi ≥ ( i=1 x i )( i=1 y i)/n dès que x1 ≤ . . . ≤ xn et y 1 ≥ . . . ≥ yn . On
peut aussi utiliser l’inégalité de réarrangement pour démontrer l’inégalité de Schwarz, ou
pour démontrer que la moyenne géométrique est inférieure à la moyenne arithmétique.
n 2
Exemple 2. La série de fonctions g n définie par
gn : [0, 1] → R x → x /n converge
2
normalement sur [0, 1] car gn ∞ = 1/n donc g n ∞ converge.
Théorème 1. Une série de fonctions gn à valeurs dans un espace de Banach qui
converge normalement sur un ensemble X converge uniformément sur X .
Démonstration. Il suffit de vérifier le critère de Cauchy uniforme (voir la proposition 1), ce qui
est immédiat car pour tout n, p ∈ N et pour tout x ∈ X ,
gn (x) + · · · + g n+p (x) ≤ gn (x) + · · · + gn+p (x) ≤ gn ∞ + · · · + gn+p ∞
et g n ∞ converge.
Une autre solution est de dire que gn est une série absolument convergente dans B (X, E )
qui est un espace de Banach (voir la remarque 2), donc elle converge dans B(X, E ), donc elle
converge uniformément.
Remarque 4. De même qu’il existe des séries convergentes mais non absolument conver-
gentes, il existe des séries de fonctions uniformément convergentes qui ne sont pas nor-
malement convergentes (voir par exemple la question b) de l’exercice 2 page 236).
3.2. Propriétés des suites de fonctions
Continuité de la fonction limite.
Théorème 2. Soient (E, d) et (F, δ) deux espaces métriques et (f n ) une suite de fonctions
de E dans F . Si (f n) converge uniformément sur E vers f : E → F et si toutes les
fonctions f n sont continues en x0 ∈ E , alors f est continue en x0 .
Démonstration. La démonstration est très classique, il faut savoir la refaire. Soit ε > 0. La suite
de fonctions (fn ) converge uniformément vers f , donc
∃n ∈ N, ∀x ∈ E, δ f n(x), f(x) < ε.
Or fn est continue en x0 , donc
∃α > 0, ∀x ∈ E, d(x, x0 ) < α, δ f n (x), fn (x 0) < ε.
On en déduit, pour tout x ∈ X vérifiant d(x, x0 ) < α,
δ f (x), f(x0) ≤ δ f (x), f n(x) + δ fn (x), fn (x0 ) + δ fn (x0 ), f(x 0 ) < ε + ε + ε = 3ε,
d’où le résultat.
Remarque 5. — Il n’est pas difficile d’en déduire que si (fn ) est une suite de fonctions
1
C de I dans E ( où I est un intervalle quelconque de R) qui vérifie les hypothèses
précédentes sur tout segment de I , alors les mêmes conclusions subsistent (sauf la
convergence uniforme de (fn )sur I tout entier).
— Pour une série de fonctions gn , les gn étant declasse C 1 sur [a, b], ce théorème
suit : s’il existe x0 ∈ [a, b] tel que gn
s’énonce comme (x0) converge et si la série de
fonctions gn converge normalement sur [a, b], alors g n converge
∞ normalement
1 ∞
sur [a, b] vers une fonction C sur [a, b] et on a ( n=0 g n) = n=0 gn .
— Le théorème 4 reste vrai lorsque les fonctions (fn ) sont seulement supposées déri-
vables (voir l’exercice 9 page 244).
En utilisant une récurrence fondée sur le théorème précédent, on en déduit le corollaire
suivant qui permet de montrer qu’une fonction limite est de classe C p .
Corollaire 2. Soit p ∈ N∗ et (fn) une suite de fonctions de classe C p d’un segment [a, b]
de R dans un espace de Banach E . On suppose que pour tout k ∈ {0, 1, . . . , p}, la suite
de fonctions (f(nk) )n converge uniformément vers une fonction gk sur [a, b]. Alors la limite
uniforme f = g0 de (f n ) est de classe C p et vérifie f (k) = g k pour tout k ∈ {0, 1, . . . , p}.
Remarque 6. Le corollaire précédent s’étend aisément aux séries de fonctions : si les gn
sont Cp et si g (nk) converge normalement sur [a, b] pour 0 ≤ k ≤ p, alors g = ∞ n=0 g n
p (k)
∞ (k)
est de classe C et g = n=0 gn pour 0 ≤ k ≤ p.
Exemple 3. Considérons une algèbre normée complète E, un élément u ∈ E , et la fonction
∞ n
t n
eu : R → E t → exp(tu) = u .
n=0
n!
3. SUITES ET SÉRIES DE FONCTIONS 235
Chaque terme de la série est de classe C ∞ et la série des dérivées p-ièmes est
t n−p
u n.
n≥p
(n − p)!
Cette série converge normalement sur tout segment S = [a, b] de R (car t n−pu n /(n−p)! ≤
up(M u)n−p /(n − p) ! où M = max{|a|, |b|}). On en déduit que ue est de classe C ∞
sur S et que sa dérivée p-ième est e(up) = upeu . Ceci étant vrai pour tout segment S de R,
c’est vrai également sur R tout entier.
3.3. Complément : le théorème de Weierstrass
Weierstrass démontra le théorème suivant, qui frappa beaucoup ses contemporains.
Solution. a) Remarquons déjà qu’il y a convergence simple. Pour montrer la convergence uni-
forme, nous allons donner deux méthodes.
Première méthode. Nous allons utiliser une technique générale, qui consiste à montrer que
le maximum sur R+ de |f n(x) − f (x)| tend vers 0 en faisant une étude de fonctions. Fixons un
entier n > 1 et posons ϕ : [0, n] → R x → e−x − fn(x). On a, pour tout x ∈ [0, n[
x n−1 x
ϕ (x) = −e−x + 1 − = e−x exp (n − 1) log 1 − +x −1 .
n n
236 4. SUITES ET SÉRIES
Le signe de ϕ (x) est donc celui de ψ (x) = (n − 1) log(1 − x/n) + x. On a ψ (x) = (1 − x)/(n − x),
on en déduit que ψ croı̂t sur [0, 1] et décroı̂t sur [1, n[. Comme ψ(0) = 0 et que ψ (x) → −∞
lorsque x → n− , on en déduit (faites un tableau de variation) l’existence de α ∈ ]1, n[ tel que
∀x ∈ [0, α], ψ(x) ≥ 0, ∀x ∈ [α, n[ , ψ(x) ≤ 0.
Comme ψ a le signe de ϕ, ϕ est croissante sur [0, α] et décroissante sur [α, n]. Comme ϕ(0) = 0
et ϕ(n) = e−n ≥ 0, on en déduit
∀x ∈ [0, n], 0 ≤ ϕ(x) ≤ ϕ(α) avec ϕ (α) = 0.
Il s’agit donc pour nous de majorer ϕ(α). En exploitant le renseignement ϕ (α) = 0, on a
α n−1 α n−1 α α −α
1− = e−α donc ϕ(α) = e−α − 1 − 1− = e . (∗)
n n n n
Un rapide étude de x → xe−x montre que cette fonction atteint son maximum en x = 1,
donc est majorée par 1/e sur R +, de sorte que (*) entraı̂ne ϕ(α) ≤ 1/(ne). Sur [n, +∞[, on a
|fn (x) − f (x)| = |f (x)| ≤ |f (n)| = |fn (n) − f (n)| ≤ 1/(ne), donc finalement
1
∀x ∈ R+ , |fn (x) − f (x)| ≤ ,
ne
d’où le résultat.
– Seconde méthode. Considérons ε > 0, puis M > 0 tel que e−M < ε. Nous commençons par
approcher log fn par −x sur [0, M ]. D’après la formule de Taylor-Lagrange,
1 u2 1
∀u ∈ 0, , ∃θ ∈ ]0, 1[, log(1 − u) = −u + ,
2 2 (1 − θu) 2
donc | log(1 − u) + u| ≤ 2u 2 lorsque u ∈ [0, 1/2]. On en déduit
x 2M 2
∀n ≥ 2M, ∀x ∈ [0, M], n log 1 − + x ≤ ,
n n
donc (log fn ) converge uniformément vers x → −x sur [0, M]. La fonction exponentielle étant 1-
lipschitzienne sur R− (immédiat par l’inégalité des accroissements finis), on en déduit en prenant
l’exponentielle que (fn ) converge uniformément vers f sur [0, M]. En particulier,
∃N ∈ N, ∀n ≥ N, ∀x ∈ [0, M ], |f n (x) − f (x)| < ε. (∗∗)
Or e−M< ε, donc |fn (x) − f (x)| ≤ e −x
≤ e−M< ε sur [M, +∞[, donc finalement l’inégalité
+
(**) est vraie sur R tout entier, d’où le résultat.
b) Ici, les techniques précédentes ne peuvent plus s’appliquer.
Soit C un compact de C et soit M > 0 tel que |z| ≤ M pour tout z ∈ C . L’inégalité
1 n n−1 n−k+1 1 1
∀n ∈ N ∗ , ∀k ≤ n, Cnk k = ··· ≤
n n n n k! k!
entraı̂ne
n
z
n
z
+∞
zk n k
Cn k
1 Ck zk
∀z ∈ C, e − 1 + = − z ≤ − n |z | +
k
n k! nk k! nk k!
k=0 k=0 k=0 k>n
n Mk
1 Cnk k M M n
≤ − M + =e − 1+
k! nk k! n
k=0 k>n
n M
et comme (1 + M/n) → e lorsque n → +∞, on en déduit le résultat.
entraı̂ne
2p
∗ x 1
∀p ∈ N , ∃x > 0, ≥ (prendre x = p dans (*)),
n=p+1
x2 + n 2 5
autrement dit, la série de fonctions un ne vérifie pas le critère de Cauchy uniforme sur R+.
Ceci montre qu’il n’y a pas convergence uniforme sur R +.
Pour montrer la continuité de la limite simple f de un sur R + , il aurait été commode
que la convergence soit uniforme sur R + tout entier, mais ce n’est pas le cas. Pour contourner
le problème, on va montrer que f est continue sur [0, M] pour tout M > 0, ce qui entraı̂nera la
continuité de f sur R+ tout entier. Fixons donc un réel positif quelconque M . On a
M
∀n ∈ N ∗ , ∀x ∈ [0, M], |u n(x)| ≤ 2 ,
n
2
et comme la série M/n converge, un converge normalement, donc uniformément, sur
[0, M]. Ainsi f , limite uniforme d’une suite de fonctions continues sur [0, M], est continue sur
[0, M]. D’où le résultat.
b) Si on fixe x ≥ 0, (−1) n un (x) est une série numérique alternée dont la valeur absolue du
terme général décroı̂t ; la série converge donc (on le savait déjà, car on a montré plus haut qu’elle
converge absolument), et de plus les restes sont majorés en valeur absolue par la valeur absolue
du premier terme qui les compose (voir le théorème 6 page 214), donc
+∞
x x x2 + p2 1 1
∗ n
∀p ∈ N , (−1) 2 ≤ ≤ = ≤ .
x +n 2 2
x +p 2 2
x +p 2 2
x +p 2 p
n=p
Cette majoration des restes est indépendante de x≥ 0, et elle montre que les restes tendent
uniformément vers 0 sur R+. La série de fonctions un converge donc uniformément sur R+ .
+ ∗
Il n’y a pas convergencenormale sur R tout entier, car pour tout n ∈ N , sup x≥0 un(x) ≥
un(n) = 1/(2n) et la série 1/(2n) diverge.
Remarque. Retenez la méthode utilisée pour montrer la continuité de la limite simple
de la série de fonctions un : comme il n’y avait pas convergence uniforme sur R+ tout
entier, nous avons montré la convergence uniforme sur [0, M ] pour tout M > 0. Cette
technique est très classique. On procède aussi souvent ainsi pour montrer la dérivabilité
d’une suite de fonctions lorsqu’il n’y a pas convergence uniforme sur l’intervalle de départ
tout entier.
Exercice 3. Que dire d’une fonction f : R → R limite uniforme sur R d’une suite de
fonctions polynômes (Pn ) ?
Solution. Premier réflexe : f est continue. Mais il y a bien mieux, et nous allons montrer que f
est une fonction polynôme. Le critère de Cauchy uniforme entraı̂ne
∃N ∈ N, ∀n ≥ N, ∀x ∈ R, |Pn(x) − P N (x)| ≤ 1.
238 4. SUITES ET SÉRIES
Ainsi, pour tout n ≥ N , PN − P n est une fonction polynôme bornée sur R, donc constante.
Autrement dit, pour tout n ≥ N , il existe αn ∈ R tel que P n = PN + α n . La suite (Pn (0))
converge, donc la suite (αn)n≥N = (P n(0) − P N (0))n≥N aussi. Notons α la limite de (αn). On a
∀x ∈ R, f (x) = lim Pn(x) = lim PN (x) + αn = P N (x) + α,
n→+∞ n→+∞
a) Montrer que (fn ) converge uniformément vers la fonction nulle sur [0, π/2].
b) On considère la suite de fonctions (gn) définie par g n = (n + 1)f n . Montrer que sur
tout intervalle de la forme [δ, π/2] avec 0 < δ < π/2, (gn ) converge uniformément vers la
π/2
fonction nulle, mais que pourtant, la suite ( 0 gn (t) dt)n ne tend pas vers 0.
Exercice 6. a) Soit (fn) une suite de fonctions d’un segment I = [a, b] de R à valeurs
dans un R-e.v.n E . On suppose qu’il existe K > 0 tel que toutes les fonctions fn soient
K -lipschitziennes. Si (f n) converge simplement vers une fonction f : I → E , montrer que
la convergence est uniforme.
b) Soit (fn ) une suite de fonctions convexes de ]a, b[ dans R ( où ] a, b[ est un intervalle de
R) qui converge simplement vers une fonction f : ]a, b[ → R. Montrer que sur tout segment
[α, β ] ⊂ ]a, b[, la suite (fn ) converge uniformément vers f . La convergence est-elle uniforme
sur ]a, b[ tout entier ?
Solution. a) La technique ressemble assez à celles utilisées dans l’exercice précédent. Remarquons
tout d’abord que f , limite simple de fonctions K -lipschitziennes, est K -lipschitzienne.
Soit ε > 0 et soit a = x0 < x1 < · · · < xp = b une subdivision de [a, b] de pas < ε (i. e.
xi+1 − xi < ε pour tout i). Pour tout i ∈ {0, 1, . . . , p}, la suite (fn (xi )) converge vers f (xi ) donc
(les i sont en nombre finis)
∃N ∈ N, ∀n ≥ N, ∀i ∈ {0, 1, . . . , p}, f n(xi) − f (x i ) < ε.
Si maintenant on considère x ∈ I , il existe i tel que x ∈ [xi, xi+1 ] donc les fonctions en présence
étant toutes K-lipschitziennes, on a pour tout n ≥ N
f n(x) − f (x) ≤ fn (x) − f n (xi) + f n(xi) − f (xi ) + f (xi ) − f (x)
≤ K (x − x i) + ε + K (x − x i) ≤ (2K + 1)ε.
240 4. SUITES ET SÉRIES
donc la fonction polynôme ω n(x) est paire, ce qui fournit ωn (−iα) = ω n (iα). Avec (*) et (**),
on en déduit l’égalité fα (x)/ωn(x) = P n(x)/ωn (x) + 1/(x 2 + α 2)/ω n (iα), d’où le résultat.
b) L’expression de ω n (x) que nous avions obtenu précédemment donne
n−1
n−1
ωn (1) 1 − a2j 1 − a 2j
n
= = (−1)
ωn (iα) j=0 −α2 − a2j j=0
α2 + a 2j
Le dernier terme du membre droit est, au facteur 1/n près, une somme de Riemann de la fonction
2
ϕα (t) = log α1−t2 +t2 pour une subdivision de [0, 1] ; nous sommes ici en présence d’une intégrale
généralisée et on ne peut donc pas appliquer le théorème 7 page 128. On 1 va procéder comme à
l’exercice 5 page 156. Notons d’abord que l’intégrale généralisée I (α) = 0 ϕα(t) dt converge (on
l’obtient facilement en écrivant ϕα(t) = log(1 − t) + log α1+t2 +t2 ). Maintenant, on remarque que
Donc n−1 j=0 ϕα (aj ) = nI (α) + o(n) (on a bien ϕα (a 0) + ϕ α (an−1) = o(n)). Avec (***), on en
déduit finalement, lorsque n → ∞,
1
1 1 − t2
log |fα (1) − P n (1)| = log + n(I (α) + o(1)), avec I (α) = log dt.
1 + α2 0 α2 + t 2
c) Nous allons montrer que I est définie et continue en 0. Lorsque α ∈ [0, 1] et 0 < t ≤ 1, on a
2 2 1 1 2 2 1 2
α + t ≤ 2 et 2 2
≤ 2 donc | log(α + t )| ≤ max log 2, log 2 ≤ log 2 .
α +t t t t
Comme la fonction t → log(2/t2 ) est intégrable sur ]0, 1], l’hypothèse de domination est vérifiée
donc la fonction α → 01 log(α 2 +t2) dt est bien définie et continue pour α ∈ [0, 1]. En particulier,
I est définie et continue en α = 0, et comme I (0) = 2 log 2 > 0, on en déduit l’existence de α0 > 0
tel que I (α) > 0 pour 0 ≤ α < α0 . D’après le développement asymptotique obtenu à la question
précédente, lorsque 0 ≤ α < α0 , on a donc limn→+∞ log |fα (1) − P n (1)| = +∞. Ainsi il n’y a
pas convergence simple (et donc pas uniforme) de (Pn ) vers f lorsque 0 ≤ α < α 0 .
Remarque. On peut obtenir la forme explicite I (α) = 2 log 2 − α arctan(1/α) −log(1+ α 2).
On peut montrer que I (α) > 0 pour α < α0 ≈ 0, 5255249.
– Pour éviter de passer par les sommes de Riemann d’une intégrale généralisée dans
b), on aurait pu obtenir le comportement de log |ω n(1)| par la formule de Stirling. Le
comportement de log |ωn (iα)| s’obtient directement à partir d’une somme de Riemann
d’une fonction définie et continue sur le segment [0, 1].
– Ainsi, une suite de polynômes interpolants ne converge pas forcément vers une fonction f
à approcher. Cependant, certaines conditions de majoration des dérivées de f permettent
de garantir qu’un polynôme interpolant est une bonne approximation (voir question b)
de l’exercice 7 page 83).
242 4. SUITES ET SÉRIES
b) (Théorème de Bernstein) Pour tout f ∈ C, montrer que la suite de fonctions (Bn (f ))n∈N
converge uniformément vers f sur [0, 1]. En déduire le théorème de Weierstrass (théorème 5
page 235).
c) Donner une condition nécessaire et suffisante pour que f ∈ C soit limite uniforme sur
[0, 1] de fonctions polynômes à coefficients entiers.
d) Si f est une fonction lipschitzienne, montrer que f − Bn (f )∞ = O (n−1/2 ).
e) Considérons la fonction f : [0, 1] → R définie par f (x) = |x − 1/2|. Donner un
équivalent de Bn (f )(1/2) − f (1/2) lorsque n → ∞ (on pourra utiliser l’égalité kCnk =
k−1
nCn−1 et la formule de Stirling).
Solution.
a) En notant par abus 1, x, x2 les fonctions x → 1, x → x et x → x 2, on a pour tout n ∈ N∗
n 2 n 2
k k k k
−x bn (x) = − 2x + x b kn(x) = B n (x2 ) − 2xB n(x) + x2 Bn(1).
2
(∗)
n n2 n
k=0 k=0
On se ramène ainsi à exprimer Bn(1), Bn (x) et Bn (x2 ). Pour cela, on part de l’identité bien
connue
n
∗ 2
n
∀n ∈ N , ∀(a, b) ∈ R , F (a, b) = a + (1 − b) = Ckn ak (1 − b) n−k .
k=0
On en déduit Bn (1) = F (1, 1) = 1,
n
1 k x ∂F x
B n(x) = C n k x k(1 − x) n−k = (x, x) = n x + (1 − x))n−1 = x
n n ∂a n
k=0
et après un petit calcul
n
2 1 k 2 k n−k x ∂ ∂F x(1 − x)
Bn (x ) = 2 C n k x (1 − x) = 2 a (x, x) = x 2 + .
n n ∂a ∂a n
k=0
En remplaçant ces expressions dans (*), on obtient
n 2
k x(1 − x)
− x b kn(x) = .
n n
k=0
La seconde partie de la question s’obtient maintenant en écrivant
n 2
k 1 k 1 x(1 − x) 1
bn (x) ≤ 2 − x bkn (x) = 2 ≤ 2. (∗∗)
η n η n nη
k,|k/n−x|≥η k=0
Précisons. Donnons nous ε > 0. La fonction f est continue sur le compact I. Elle est donc
bornée de sorte qu’il existe M > 0 tel que |f (x)| ≤ M sur I . Elle est aussi uniformément continue
d’après le théorème de Heine donc
∃η > 0, ∀(x, x ) ∈ I 2 , |x − x | < η, |f (x) − f (x )| < ε.
On écrit maintenant
n
k k
∗
∀x ∈ I, ∀n ∈ N , |B n(f )(x) − f (x)| = |B n (f )(x) − f (x)Bn(1)| ≤ f − f (x ) b n (x)
n
k=0
n
2M 2M
≤ ε bkn (x) + 2M b kn (x) ≤ ε b kn(x) + 2 = ε + 2 .
nη nη
k,|k/n−x|<η k,|k/n−x|≥η k=0
∗ 2
Ainsi, si N ∈ N est choisi tel que 2M/(N η ) < ε, on a montré
∀n ≥ N, ∀x ∈ I, |Bn (f )(x) − f (x)| < 2ε.
La suite de fonctions (Bn (f )) converge donc uniformément vers f sur [0, 1].
Les Bn(f ) sont des fonctions polynômes, on vient donc de montrer que toute fonction conti-
nue sur [0, 1] est limite uniforme de fonctions polynômes sur [0, 1]. On en déduit facilement par
changement de variable affine le théorème de Weierstrass (si f : [a, b] → C est continue, on se
ramène à [0, 1] en considérant g (x) = f [a + (b − a)x]).
c) Montrons que f ∈ C est limite uniforme sur [0, 1] de fonctions polynômes à coefficients entiers
si et seulement si f (0) et f (1) sont des entiers.
La condition est nécessaire : en effet, si f est limite uniforme de fonctions polynômes (Pn )
à coefficients entiers, alors f (0) (respectivement f (1)) est la limite de la suite d’entiers (Pn (0))
(respectivement (Pn (1))). Une suite d’entiers convergente a pour limite un nombre entier, donc
f (0) et f (1) sont des entiers.
La condition suffisante s’obtient à partir du résultat de la question précédente. Supposons
f (0) et f (1) entiers. On considère la suite de polynômes à coefficients entiers (Zn (f )) définie par
n
k
Zn(f ) : [0, 1] → R x → f Cn xk (1 − x)n−k ,
k
n
k=0
où [ t] désigne la partie entière de t. Pour x ∈ [0, 1], on a
n−1
k f kn C kn
B n (f )(x) − Zn(f )(x) = f − bkn (x)
n C kn
k=1
(les termes de la somme pour k = 0 et k = n sont nuls car f (0) et f (1) sont entiers), et comme
0 ≤ f (k/n) − [f (k/n)Ckn]/Cnk < 1/Cnk ≤ 1/n pour 1 ≤ k ≤ n − 1 on en déduit
n−1
n
1 k 1 k B (1) 1
0 ≤ Bn (f )(x) − Zn (f )(x) ≤ bn (f )(x) ≤ bn(f )(x) = n = ,
n n n n
k=1 k=0
et ceci pour tout x ∈ [0, 1]. Comme (Bn (f )) converge uniformément vers f on en déduit que
(Zn(f )) converge uniformément vers f .
d) Considérons une fonction λ-lipschitzienne f sur [0, 1]. Soit n ∈ N ∗ et ε = n−1/2 . Pour x ∈ I ,
on a
k k k k
|Bn (f )(x) − f (x)| ≤
f n − f (x) bn(x) + f n − f (x) bn (x)
k,|k/n−x|≤ε k,|k/n−x|>ε
2
λ k
≤ λεbkn (x) + − x b kn(x)
ε n
k,|k/n−x|≤ε k,|k/n−x|>ε
n
n
2
λ k λ x(1 − x) λ 2λ
≤ λε bkn (x) + − x b kn (x) = λε + ≤ λε + = √ .
ε n ε n nε n
k=0 k=0
244 4. SUITES ET SÉRIES
où on a utilisé la relation de symétrie C nn−k = Cnk. Grâce à la relation kCnk = nC k−1
n−1 on en déduit
2n un = Ckn − 2 k−1
Cn−1 .
0≤k<n/2 1≤k<n/2
k−1
Il reste à utiliser la relation du triangle de Pascal Ckn = Cn−1 k
+ Cn−1 qui entraı̂ne
[(n−1)/2]
2nun = 1 + (C kn − Cn−1
k−1
)− k−1
Cn−1 = C kn−1 − k−1
Cn−1 = C n−1 ,
1≤k<n/2 1≤k<n/2 0≤k<n/2 1≤k<n/2
où [ ( n − 1)/2] désigne la partie entière de (n − 1)/2. La formule de Stirling permet facilement
[(n−1)/2] √
d’obtenir l’équivalent Cn−1 ∼ 2n / 2πn. Finalement on a obtenu l’équivalent
1 1 1
u n = Bn (f ) −f ∼ √ .
2 2 2πn
Ainsi, l’estimation obtenue à la question précédente est la meilleure possible dans l’hypothèse
d’une fonction lipschitzienne.
Remarque. Le résultat de la question b) de cet exercice est une version constructive du
théorème de Weierstrass, mais la convergence est lente, comme le montre le résultat de
la question e). Le meilleur approximant polynomial peut s’obtenir par l’algorithme de
Remez.
Solution. a) Ici, on ne peut pas procéder comme dans la preuve du théorème 4 page 234 car
une fonction dérivée n’est pas forcément continue (ni Riemann-intégrable).
Nous montrons d’abord que (fn ) vérifie le critère de Cauchy uniforme. Soit ε > 0. D’après
les hypothèses,
∃N ∈ N, ∀p, q ≥ N, ( f p (x0 ) − fq (x0) < ε et ∀x ∈ I, f p(x) − fq (x) < ε).
Ainsi, on obtient grâce à l’inégalité des accroissements finis que pour tout p, q ≥ N et pour tout
x ∈ I,
f p(x) − fq (x) ≤ (f p − f q)(x) − (f p − fq )(x0) + (f p − f q)(x 0) < ε|x − x0 | + ε ≤ 2ε.
Autrement dit, la suite de fonctions (fn ) à valeurs dans un espace de Banach vérifie le critère
de Cauchy uniforme, elle converge donc uniformément vers une fonction f sur I .
Il nous reste à montrer que f est dérivable et que f = g. Fixons x ∈ I et ε > 0. La suite
(f n) vérifie le critère de Cauchy uniforme donc
∃N ∈ N, ∀p ∈ N, ∀t ∈ I, f N (t) − fN +p (t) ≤ ε. (∗)
3. SUITES ET SÉRIES DE FONCTIONS 245
Exercice 10 (Th éorème de Helly). Soit (fn ) n∈N une suite de fonctions croissantes
d’un intervalle ouvert I de R dans R telle que, pour tout x ∈ I , la suite (fn (x))n∈N
est bornée. Démontrer qu’il existe une sous-suite (f ϕ(n))n∈N et une fonction croissante
f : I → R, telle que cette sous-suite converge simplement vers f .
246 4. SUITES ET SÉRIES
Solution. L’idée est de procéder par densité, en montrant d’abord le résultat sur les rationnels
(dénombrables) de I , puis d’utiliser la croissance des fonctions fn pour étendre sur I tout entier.
Notons QI = I ∩ Q l’ensemble dénombrable des rationnels de I , et notons x0 , x1 , . . . , xn , . . .
les éléments de QI . On utilise le procédé diagonal, déjà employé dans la solution de l’exercice 2
page 32. De la suite bornée (fn(x0 )) n on extrait une sous-suite convergente (f ϕ0 (n)(x0 ))n . De la
suite bornée (fϕ 0 (n) (x 1))n , on extrait une sous-suite convergente (f ϕ0◦ϕ1 (n) (x1 )) n . En procédant
par récurrence, on peut ainsi construire, pour tout entier naturel p, une sous-suite convergente
(f ϕ0 ◦···◦ϕp (n) (xp ))n∈N . La fonction ψ : N → N définie par ψ (n) = ϕ0 ◦ · · · ◦ ϕn (n) est strictement
croissante, et pour tout entier naturel p, la suite (fψ(n) (x p))n converge (car (fψ(n) (xp )) n≥p est
une sous-suite de (fϕ0 ◦···◦ϕ p(n) (x p))n∈N qui converge).
Construisons maintenant la fonction g définie sur QI par g (x) = limn→∞ fψ(n) (x) pour tout
x ∈ QI. Pour x < y, on a f ψ(n) (x) ≤ fψ(n)(y), et en passant à la limite on voit que g est croissante
sur QI. On étend g sur I tout entier de la manière suivante : pour x ∈ I QI , on définit
g (x) = sup G x, avec Gx = {g (y ) | y ∈ Q I , y < x}
(Gx est non vide car I est ouvert, et majoré car g étant croissante, tous les éléments de Gx sont
inférieurs à g (z ) pour un z > x fixé dans Q I). Ainsi définie, g est croissante sur I , comme on le
vérifie facilement en montrant, g (x) ≤ g (y ) lorsque x < y, d’abord pour x ∈ I QI et y ∈ QI ,
puis pour x ∈ QI et y ∈ I Q I , puis pour x et y dans I QI .
Montrons que pour x dans l’ensemble C ⊂ I des points de continuité de g , la suite (fψ(n)(x))
converge vers g (x). Étant donné ε > 0, comme g est continue en x, il existe a et b dans Q I tels
que a < x < b et
|g (x) − g (a)| < ε, |g (x) − g (b)| < ε donc g (b) − ε < g(x) < g(a) + ε.
Les suites (fψ(n) (a))n et (f ψ(n) (b))n convergent vers g (a) et g (b) respectivement, donc il existe
N > 0 tel que pour tout n ≥ N , |fψ(n) (a) − g (a)| < ε et |fψ(n) (b) − g (b)| < ε, donc
fψ(n) (b) − 2ε < g(b) − ε < g(x) < g(a) + ε < f ψ(n) (a) + 2ε
Comme fψ(n) est croissante, on en déduit fψ(n) (x) − 2ε < g(x) < f ψ(n)(x) + 2ε. Ceci est vrai
pour tout n ≥ N , donc la suite (fψ(n) (x)) converge bien vers g (x), et ceci pour tout x ∈ C .
Il reste le cas des points de discontinuité D = I C de g . La fonction g est croissante donc D
est au plus dénombrable (car une fonction monotone est réglée et l’ensemble des discontinuités
d’une fonction réglée est au plus dénombrable, voir le théorème 4 page 99. On peut aussi obtenir
ce résultat directement, en associant à chaque discontinuité x de g un nombre rationnel différent
en le choisissant dans ]g (x−), g(x+)[). En procédant de la même manière que plus haut, on en
déduit qu’il existe une sous-suite (fψ◦θ (n) ) de (fψ(n) ) telle que (f ψ◦θ (n) (x))n converge pour tout
x ∈ D (attention, cette limite n’est pas forcément égale à g(x)).
Ainsi, pour tout x ∈ I , la suite (fψ◦θ (n)(x))n converge. La fonction f : I → R définie par
f (x) = limn→∞ f ψ◦θ (n) (x) est croissante, et ceci clos la démonstration.
Exercice 11. Soit p ∈ N∗ et (fn )n∈N une suite de fonctions réelles de classe C p sur un
segment [a, b] de R. On suppose que la suite de fonctions (fn(p) )n∈N converge uniformément
vers une fonction g sur [ a, b], et qu’il existe p points distincts x1 , . . . , xp de [a, b] tels que
pour tout i (1 ≤ i ≤ p), la suite (fn(x i))n∈N converge. Montrer que (f n )n∈N converge
uniformément sur [a, b] vers une fonction f de classe C p telle que f (p) = g .
Solution. C’est une généralisation du théorème de dérivation de la limite d’une suite de fonctions.
Notre point de départ est la formule de Taylor avec reste intégral qui donne
∀n ∈ N, ∀x ∈ [a, b], fn (x) = P n(x) + I n(x)
avec
x
(x − a)p−1 (p−1) (x − t) p−1 (p)
Pn (x) = fn(a) + (x − a)f n(a) + · · · + f (a) et In (x) = f (t) dt.
(p − 1)! n a (p − 1)! n
4. SÉRIES ENTI ÈRES 247
Si h est continue sur [a, b], notons h∞ = supx∈[a,b] |h(x)| la norme de la convergence uni-
forme. La fonction g est continue, car c’est la limite uniforme d’une suite de fonctions continues.
x t) p−1 (b−a)p (p)
Considérons la fonction I (x) = a (x(−p− 1)! g (t) dt. On a I − In ∞ ≤ p! f n − g ∞ donc (In )
converge uniformément vers I . Pour tout i, on a Pn (xi ) = f n(xi) − I n (xi ) donc la suite (Pn(xi ))n
p
converge. Notons yi sa limite, et notons P (x) = i=1 y ifi (x) le polynôme d’interpolation de
Lagrange égal à yi en xi . Posons f (x) = P (x) + I (x). La formule
p
f − f n∞ ≤ P − P n ∞ + I − In ∞ ≤ |yi − P n(xi )| · f i∞ + I − I n ∞
i=1
montre que f − fn ∞ converge vers 0, donc (f n ) converge uniformément vers f . Une récurrence
facile montre que pour 1 ≤ k ≤ p − 1, f est de classe C k et vérifie
x
(k) (k) (x − t)p−k−1
∀x ∈ [a, b], f (x) = P (x) + g (t) dt
0 (p − k − 1)!
x
En particulier, f est de classe C p−1 et vérifie f (p−1)(x) = P (p−1) (x) + 0 g (t) dt, donc f est de
classe C p et f (p) = g (car deg(P ) ≤ p − 1), d’où le résultat.
4. Séries entières
4.1. Définitions
Définition 1. On appelle série entière toute série de fonctions de la forme n∈N an z n
où z est une variable complexe et où (an ) est une suite complexe.
Rayon de convergence. Il est naturel de s’interroger sur le domaine des nombres com-
plexes z pour lesquels une série entière converge.
Proposition 1 (Lemme d’Abel). Soit a z n une série entière et z ∈ C tel que la
n 0
suite (an zn0 )n∈N soit bornée. Alors
(i) ∀z ∈ C, |z | < |z0 |, la série an zn est absolument convergente ;
n
(ii) pour tout r, 0 < r < |z0 |, la série de fonctions an z est normalement conver-
gente dans {z ∈ C | |z | ≤ r }.
Démonstration. Si M est un majorant de (|an| |z 0| n), la preuve est simple à partir de la majo-
ration n n
z z
|an z | = |an | |z0| ≤ M .
n n
z0 z0
Le lemme d’Abel justifie la définition suivante.
Définition 2 (Rayon de convergence). Soit an z n une série entière. Le nombre
R = sup{r ≥ 0 | la suite (|an | rn ) est bornée}
n
s’appelle rayon de convergence de an z . D’après le lemme d’Abel,
— pour tout z ∈ C tel que |z | < R, an zn converge absolument ;
— pour tout z ∈ C tel que |z | > R, an zn diverge ;
— pour tout r tel que 0 ≤ r < R, la série entière an z n converge normalement sur
{z ∈ C | |z | ≤ r }.
248 4. SUITES ET SÉRIES
Le disque ouvert {z ∈ C | |z| < R} est appelé disque de convergence de la série entière.
Remarque 1. — On peut avoir R = 0 ou R = +∞. Si R = +∞, an z n converge
pour tout z ∈ C et la somme de cette série entière définit une fonction de C dans
C appelée fonction entière.
— Sur le cercle |z | = R, la série entière
peut ou non converger.
n
— Les séries entières a n z et |an| z n ont même rayon de convergence.
Calcul pratique du rayon de convergence. Il existe quelques recettes qui permettent
parfois de calculer explicitement le rayon de convergence d’une série entière. Celles ci sont
des conséquences directes des règles de d’Alembert et de Cauchy que l’on a vu pour les
séries numériques.
Proposition 2 (Règle de d’Alembert). Si limn→ +∞ |a n+1 /a n| = λ avec λ ∈ [0, +∞],
alors le rayon de convergence de la série entière an zn est R = 1/λ (en convenant
1/0 = +∞ et 1/ + ∞ = 0).
1/n
Proposition 3 (Règle de Cauchy). Si lim n→+n∞ |an| = λ avec λ ∈ [0, +∞], alors le
rayon de convergence de la série entière an z est R = 1/λ (en convenant 1/0 = +∞
et 1/ + ∞ = 0).
Exemple 1. Grâce à larègle de d’Alembert, on montre facilement que
— la série entière zn /n! a un rayon deα convergence infini ;
n
— pour tout α ∈ R , la série entière n z a un rayon de convergence égal à 1 ;
n
— la série entière n! z a un rayon de convergence nul.
Remarque 2. — Attention, les règles de d’Alembert oude Cauchy ne s’appliquent pas
toujours (essayez de les appliquer, par exemple, à z2n ).
— On peut montrer, pour une série entière donnée, que si la règle de d’Alembert
s’applique alors la règle de Cauchy s’applique (la réciproque est
fausse).
— Dans tous les cas, on montre que le rayon de convergence de an zn est 1/ρ avec
1/p
ρ = lim n→+∞(supp≥n |ap | ).
Somme et produit de séries entières. Soient an z n et bn zn deux séries entières
de rayon de convergence respectivement égal à R > 0 et R > 0. Notons f et g les sommes
de ces séries entières sur leurdisque de convergence D et D .
Somme. La nsérie entière cn z n définie par c n = an + bn est appelée somme des séries
entières an z et b n zn . Son rayon de convergence Rn de vérifie R ≥ inf {R, R } et
sur D ∩ D , f + g est la somme denla série entière cn z .
Produit. La série entière cn z définie par
∀n ∈ N, c n = a 0 bn + a 1bn−1 + · · · + an−1 b1 + a nb0
est appelée produit de Cauchy des séries entières a n z n et bn z n. Son rayon de conver-
gence Rvérifie R ≥ inf {R, R } et sur D ∩ D , le produit f g est la somme de la série
entière cn z n (conséquence du théorème 9 page 216 sur le produit de Cauchy de deux
séries absolument convergentes).
Remarque 3. On ne peut rien dire de plus en général sur les rayons de convergence de la
somme
n oudu produit de Cauchy de deux séries entières. Par exemple, les séries entières
z et −z n ont leur rayon de convergence égal à 1 mais la somme a un rayon de
convergence infini.
4.2. Propriétés des séries entières
Dans toute cette sous-partie, a n zn désigne une série entière de rayon de convergence
R > 0.
4. SÉRIES ENTI ÈRES 249
Continuité.
+∞
Théorème 1. L’application z → an z n est continue sur le disque de convergence
n=0
{z ∈ C, |z | < R}.
Démonstration. Pour tout r ∈ ]0, R[, a n zn converge normalement sur |z| ≤ r , sa somme est
donc continue sur |z| ≤ r (chaque somme partielle est continue), et ceci pour tout r < R, d’où
le résultat.
Dérivation.
+∞ n 1
Théorème 2. L’application f : ]−R, R[ → C x →
an x n est de classe C . La
n=0
n−1
série entière nan z a même rayon de convergence que a n z , et on a
+∞
∀x ∈ ]−R, R[ , f (x) = nan x n−1 .
n=1
Démonstration. Notons R le rayon de convergence de nan z n−1 . Soit r, 0 ≤ r < R. La suite
(nan r n ) est bornée, donc (an rn ) est bornée donc r ≤ R . Ceci étant vrai pour tout r < R, on
en déduit R ≤ R. Maintenant, soit r < R. Si on fixe r0 tel que r < r0 < R, la suite (an r n0 ) est
bornée, donc la suite (nan rn ) tend vers 0 car nan r n = n(an r n0 )(r/r0 ) n avec r/r0 < 1. On en
conclut r < R , et ceci pour tout r < R donc R ≤ R . Finalement, on a donc R = R .
La dérivabilité de f et la valeur de f sont une conséquence du théorème de dérivabilité des
suites de fonctions.
En appliquant ce théorème par récurrence, on obtient le résultat qui suit.
Corollaire 1. La somme f de la série entière an z n est de classe C ∞ sur ] − R, R[.
De plus, pour tout p ∈ N, f (p) est la somme sur ] − R, R[ d’une série entière de rayon de
convergence R > 0. En outre,
+∞ (p)
f (p) (0) f (0) p
∀p ∈ N, ap = donc ∀z ∈ C, f(z) = z .
p! p=0
p!
Conséquence : an
— La série entière z n+1 a pour rayon de convergence R et si F désigne la
n+1
somme de cette dernière, on a F = fsur ] − R, R[.
— Si g est la somme d’une série entière b n zn sur {z, |z | < R } (avec R > 0) et si f
et g coı̈ncident sur un voisinage de 0 dans R, alors pour tout n, bn = g (n)(0)/n! =
f (n)(0)/n! = an . Ceci reste valable si f et g coı̈ncident sur un intervalle de la forme
]0, α[.
Remarque 4 (Dérivation par rapport à la variable complexe). On montre que les fonctions
f définies par des séries entières sont dérivables par rapport à la variable complexe
sur leur
disque de convergence D , c’est-à-dire que pour tout z0 ∈ D, la limite de f (z 0 + u) −
f (z0 ) /u existe lorsque u tend vers 0 dans C en restant non nul.
Comme on s’y attend, la dérivée de la restriction f de f à l’axe réel et celle de f (au
sens complexe) coı̈ncident sur R.
La condition de dérivabilité par rapport à la variable complexe est très forte. Il ne
suffit pas qu’une fonction de C dans C soit différentiable pour qu’elle soit dérivable par
rapport à la variable complexe (voir l’exercice 8 page 333), mais la réciproque est vraie.
On peut montrer qu’une fonction g : D = {z, |z | < R} → C continûment dérivable par
rapport à la variable complexe sur D (on dit alors que g est holomorphe) est la somme
d’une série entière sur D (voir l’exercice 13 page 265).
250 4. SUITES ET SÉRIES
D’après les hypothèses, g (zp ) = 0 pour tout p, et comme g est continue en 0 (c’est la somme
d’une série entière de rayon de convergence R > 0), on a
Théorème 4 (Formule de Cauchy). Soit an z n une série entière de rayon de
convergence R > 0, et f la somme de cette série entière sur son disque de convergence.
Alors
2π
n
∀r ∈ ]0, R[ , ∀n ∈ N, 2π r an = f (reiθ )e−niθ dθ.
0
(on a le droit d’inverser les signes de sommation car la série de fonctions p ap rp e i(p−n)θ est
normalement convergente sur [0, 2π ], ceci parce que |ap | r p converge, le réel r vérifiant 0 ≤
r < R). On conclut à partir de (*) en remarquant que 02π ei(p−n)θ dθ = 0 si p = n, = 2π si
p = n.
Égalité de Parseval. Le résultat qui suit est la version “série entière” du théorème 1
page 270 (en l’appliquant à la série trigonométrique f (reiθ )).
Théorème 5. Soit an zn une série entière de rayon de convergence R > 0, et f la
somme de cette série entière sur son disque de convergence. Alors pour tout r ∈ ]0, R[, la
série |an | 2 r2n converge et on a
+∞
1 2π 2
2 2n
|a n | r = f (reiθ ) dθ.
n=0
2π 0
4. SÉRIES ENTI ÈRES 251
Par produit de Cauchy, on voit donc que pour tout p ∈ N∗, 1/(z − z 0 ) p est développable
en série entière. Pour obtenir son développement en série entière, on dérive (p − 1) fois
1/(x − z0 ) sur ] − |z0 |, |z0 |[, ce qui donne
+∞
n−p+1
1 (−1)p n! x
∀x ∈ ] − |z0|, |z 0 |[, p
= p ,
(x − z0) z0 (p − 1)! n=p−1 (n − p + 1)! z0
et comme ces deux expressions coı̈ncident sur un voisinage de 0 dans R, elles coı̈ncident
sur tout le disque de convergence |z | < |z0 | (voir la conséquence du corollaire 1).
Ainsi, toute fraction rationnelle complexe F dont 0 n’est pas un pôle est développable
en série entière au voisinage de 0. On peut montrer que le rayon de convergence de cette
dernière est égal au plus petit des modules des pôles de F .
Développement en série entière d’une fonction à variable réelle. Soit f une
fonction complexe de la variable réelle définie sur un voisinage de 0. Si f est développable
en série
entière, il existe α > 0 tel que sur ] − α, α[, f coı̈ncide avec la somme d’une série
entière an z n de rayon de convergence ≥ α. Ceci implique que f est de classe C∞ sur
] − α, α[ et que a n = f (n) (0)/n! pour tout n. Ceci constitue la condition nécessaire de la
proposition qui suit.
Dans la pratique, pour montrer que (Rn ) tend simplement vers 0, on peut utiliser la
formule de Taylor qui permet d’écrire Rn (x) comme l’une des expressions
x
xn+1 (n+1) (x − t) n (n+1)
f (θ x), (θ ∈ ]0, 1[) ou f (t) dt
(n + 1)! 0 n!
(reste de Lagrange, reste intégral). Le reste intégral donne en général des résultats plus
fructueux.
Remarquez que pour montrer que f est développable en série entière, il est inutile de
f (n) (0) n
commencer par montrer que n!
z a un rayon de convergence non nul. À l’inverse,
si on montre que ce rayon de convergence est nul, alors cela montre que f n’est pas
développable en série entière.
f(n) (0) n
Remarque 5. La série entière n!
z peut avoir un rayon de convergence non nul et
sa somme peut être différente de f (dans ce cas f n’est pas développable en série entière).
Par exemple, la fonction
e −1/x si x > 0
f : R → R x →
0 si x ≤ 0
est de classe C∞ sur R (voir l’exercice 3 page 79), et vérifie f (n) (0) = 0 pour tout n. La
f (n) (0) n
série entière n!
z a donc un rayon de convergence infini, et pourtant pour tout
α > 0, f ne coı̈ncide pas avec la somme de cette série entière sur ] − α, α[.
f(n) (0) n
– La série entière n!
z peut également avoir un rayon de convergence nul bien que
∞
f soit de classe C sur R. On peut montrer par exemple que la fonction
+∞ −t
+ e
ϕ : R → R x → dt,
0 1 + xt
+∞
est de classe C∞ sur R + et vérifie ϕ(n)(x) = (−1) n n! 0 e−t /(1 + xt)n dt. En particulier
ϕ(n)(0) = (−1)n n!Γ(n +1) = (−1) n (n!)2 . La fonction paire f (x) = ϕ(x 2) est C ∞ sur R tout
f (n) (0) n ϕ(n) (0) 2n
entier, et n!
z = n!
z a un rayon de convergence
nul. Plus généralement,
n
pour n’importe quelle suite (an ) (en particulier telle que an z a un rayon de convergence
∞
nul) il existe une fonction f de classe C sur R telle que f (n) (0)/n! = an (théorème de
réalisation de Borel, voir le problème 16 page 295).
donc |Rn (x)| ≤ |x| n+1 e|x| /(n + 1)!. On en tire Rn (x) → 0, i. e. (Rn
) tend simplement vers
0 sur R, et on en déduit grâce à la proposition précédente que z n/n! a un rayon de
convergence infini et que
+∞ n
x x
∀x ∈ R, e = .
n=0
n!
Cette expression nous inviteà prolonger la fonction exponentielle sur C tout entier par le
biais de la fonction entière z n/n!. Ceci fait l’objet de la sous-partie suivante.
4. SÉRIES ENTI ÈRES 253
x2 xn
∀x ∈ R, ex = 1+x+ +··· + +···
2! n!
x3 x5 x2p+1
∀x ∈ R, sin x = x− + + · · · + (−1)p +···
3! 5! (2p + 1)!
x 2 x4 x2p
∀x ∈ R, cos x = 1− + + · · · + (−1)p +···
2! 4! (2p)!
x3 x5 x2p+1
∀x ∈ R, sh x = x+ + +··· + +···
3! 5! (2p + 1)!
x 2 x4 x2p
∀x ∈ R, ch x = 1+ + +··· + +···
2! 4! (2p)!
α α(α − 1) 2 α(α − 1) · · · (α − n + 1) n
∀x ∈ ] − 1, 1[, (1 + x) α = 1+ x+ x +··· + x +···
1! 2! n!
Le dernier développement est valable pour tout réel α fixé. En particulier, pour tout
x ∈ ] − 1, 1[,
1
= 1 − x + x 2 − · · · + (−1) n xn + · · ·
1+x
√ x 1 1·3 3 1 · 3 · · · (2n − 3) n
1+x = 1+ − x2 + x + · · · + (−1)n−1 x +···
2 2·4 2·4·6 2 · 4 · · · (2n)
1 1 1·3 2 1 · 3 · · · (2n − 1) n
√ = 1− x+ x + · · · + (−1) n x +···
1+x 2 2·4 2 · 4 · · · (2n)
1 1
En intégrant respectivement les développements en série entière de 1+x , , 1 , √1−x
1+x 2 1−x 2
1
2
,
√ 1 (qui sont connus grâce aux formules précédentes), on obtient
1+x 2
x2 x3 xn
∀x ∈ ] − 1, 1[, log(1 + x) = x − + + · · · + (−1)n−1 +···
2 3 n
x3 x5 x2n+1
∀x ∈ R, arctan x = x− + + · · · + (−1)n +···
3 5 2n + 1
x3 x5 x 2n+1
∀x ∈ ] − 1, 1[, argth x = x+ + +··· + +···
3 5 2n + 1
1 3 1 · 3 · · · (2n − 1)
∀x ∈ ] − 1, 1[, arcsin x = x+ x +··· + x 2n+1 + · · ·
2·3 2 · 4 · · · (2n) · (2n + 1)
1 3 1 · 3 · · · (2n − 1)
∀x ∈ ] − 1, 1[, argsh x = x− x + · · · + (−1)n x2n+1 + · · ·
2·3 2 · 4 · · · (2n) · (2n + 1)
Remarque 6. Les fonctions circulaires sont en fait correctement définies à partir des séries
entières (voir la partie qui suit).
254 4. SUITES ET SÉRIES
Comme l’a vu, cette fonction coı̈ncide sur R avec la fonction exponentielle “classique”.
Comme sur R, on a e z1 +z2 = ez 1 ez 2 pour tout z1 , z2 ∈ C. Elle permet de définir la puissance
complexe d’un nombre a > 0, par az = exp(z log a) pour tout z ∈ C.
Les parties paire et impaire de ez sont les fonctions cosinus hyperbolique et sinus
hyperbolique définies sur C par
+∞ +∞
e z + e−z z2n ez − e−z z 2n+1
ch z = = et sh z = = .
2 n=0
(2n)! 2 n=0
(2n + 1)!
Fonctions circulaires. On définit les fonctions circulaires cosinus et sinus sur C par
+∞ +∞
eiz + e−iz z 2n eiz − e−iz z 2n+1
cos z = = (−1)n et sin z = = (−1)n .
2 n=0
(2n)! 2i n=0
(2 n + 1)!
∀z ∈ C, cos z + i sin z = e iz .
4.5. Exercices
Exercice 1. a) Soit a n z n une série entière de rayon de convergence R > 0 telle que
an > 0 pour tout n . Discuter en fonction du paramètre α ∈ R le rayon de convergence R
α n
de la série entière a nz .
b) Soient an z et bn zn deux séries entières de rayon de
n
convergence respectifs R et
n
R . Que dire du rayon de convergence R de la série entière an bnn z ? (Cette dernière
n
série entière est appelée produit de Hadamard de an z et bn z .)
Exercice 2. Après avoir donné leur rayon de convergence R, sommer les séries entières
suivantes :
xn
2 n
a) n x b) (pour x > 0)
n∈N n∈N
2n + 1
xn xn
c) pour x ∈ R d) cos(nθ ).
∗
n(n + 2) n!
n∈N n∈N
Cette formule reste valable pour tout x ∈ C, |x| < 1 car on sait qu’une fraction rationnelle est
développable en série entière pour la variable complexe, et les coefficients sont déterminés si l’on
connaı̂t la somme de la série sur un voisinage de 0 dans R.
b) Toujours grâce à la règle de d’Alembert, on trouve R = 1. On note f la somme de la série
entière proposée. On a
+∞
+∞
x2n+1 1
∀x ∈ [0, 1[, g(x) = xf (x 2) = et g (x) = x2n = ,
2n + 1 1 − x2
n=0 n=0
d) Comme | cos(nθ )/n!| ≤ 1/n!, on a R = +∞. Par ailleurs, on a cos nθ = (eniθ + e −niθ)/2 pour
tout n, donc
+∞
+∞ +∞
xn 1 (xe iθ ) n (xe−iθ )n exp(xeiθ ) + exp(xe−iθ )
∀x ∈ C, cos nθ = + = .
n=0
n! 2 n=0
n! n=0
n! 2
256 4. SUITES ET SÉRIES
Cette dernière égalité est vraie sur ] − 1, 1[ tout entier, on en déduit par identification des
coefficients (on peut, voir la conséquence du corollaire 1 page 249)
n2
2a 2 = 2 et ∀n ∈ N ∗, an+2 = an . (∗)
(n + 1)(n + 2)
Par ailleurs, a0 = f (0) = 0 et a1 = f (0) = 0. Avec (*), on trouve finalement
2
∗ 22n−2 (n − 1)!
∀n ∈ N, a 2n+1 = 0 et ∀n ∈ N , a2n = .
n(2n − 1)!
Les coefficients d’indice impair sont nuls, ceci est
cohérent car f est paire. Remarquez aupassagen
que le rayon de convergence de la série entière a 2n z 2n est égal à 1 (ceci car le rayon de a2n z
est égal à 1 par la règle de d’Alembert).
b) On sait que
la fonction impaire arcsinus admet un développement en série entière sur ] − 1, 1[
de la forme an x 2n +1 . Donc
√ +∞ +∞
arcsin x 1 1 √ 1
∀x ∈ ]0, 1[, f(x) = = √ √ an ( x)2n+1 = √ an xn,
x(1 − x) 1 − x x n=0
1 − x n=0
et comme x → (1 − x)−1/2 coı̈ncide avec la somme d’une série entière sur ]0, 1[, on en déduit par
un produit de Cauchy que c’est aussi le cas pour f .
Il existe donc une série entière bn xn dont la somme coı̈ncide avec f sur ]0, 1[ (au passage,
elle a forcément un rayon de convergence ≥ 1). Recherchons
√ une équation différentielle vérifiée
par f . Par dérivation de x(1 − x)f (x)2 = (arcsin x)2 , on tire
√
2 2 arcsin x 1
∀x ∈ ]0, 1[, 2x(1 − x)f (x)f (x) + (1 − 2x)f (x) = √ √ = f (x),
1−x 2 x
donc
∀x ∈ ]0, 1[, 2x(1 − x)f (x) + (1 − 2x)f (x) = 1,
4. SÉRIES ENTI ÈRES 257
et finalement
+∞
∀x ∈ ]0, 1[, b0 + (2n + 1)b n − 2nbn−1 xn − 1 = 0.
n=1
D’après le principe des zéros isolés, tous les coefficients de cette série entière sont nuls, ce qui
s’écrit
2n 2 · 4 · · · (2n)
b0 = 1, ∀n ∈ N∗ , bn = bn−1 donc ∀n ∈ N ∗ , bn = .
2n + 1 3 · 5 · · · (2n + 1)
Exercice 4. Soient an xn et b n xn deux séries entières
de rayon de convergence ≥ 1.
On supposeque bn > 0 pourtout n et que la série bn diverge. Pour tout n ∈ N, on
pose An = nk=0 ak et Bn = nk=0 bk.
a) S’il existe ∈ C tel que
an An
lim = ou lim = ,
n→+∞ bn n→+∞ Bn
montrer que ∞
an x n
lim n=0
∞ n
= .
n=0 bn x
x→1
x<1
b) Si on suppose simplement
A0 + · · · + A n−1
lim = avec ∈ C,
n→+∞ n
montrer que lim x→1 ∞ n
n=0 a n x = .
x<1
c) (Application.) Lorsque x tend vers 1 par valeurs inférieures, montrer les équivalents
+∞ √ +∞
n +∞
n2 π a log(1 − x) 1
x ∼ √ , x ∼− (a ∈ N, a ≥ 2), (−1) n x4n+1 ∼ .
n=0
2 1−x n=0
log a n=0
2
Solution. a) Supposons tout d’abord lim n→∞ an/b n = . Soit ε > 0 et n 0 ∈ N tel que |an −bn | <
εbn pour tout n ≥ n 0 . Pour tout x ∈ [0, 1[, on a
n −1 +∞
+∞ +∞ n0 −1
0
n n n n
(an − b n ) x ≤ |an − b n |x + |a n − bn |x ≤ |an − bn | + ε b n x . (∗)
n=n0
n=0 n=0 n=0 n=0
Or b n est une série à termes positifs divergente, donc lim x→1− ∞ n
n=0 bn x = +∞ (en effet,
∞
pour tout N ∈ N, limx→1 − n=0 bn xn ≥ limx→1− N n
n=0 bn x =
N
n=0 b n), on en déduit
+∞ n −1
0
et par ailleurs,
+∞
+∞
n n−1 d 1 x
∀x ∈ [0, 1[, nx = x nx =x = .
n=1 n=0
dx 1−x (1 − x)2
n2 √
c) Pour la série entière an xn = x , on a avec les notations précédentes An = 1 + [ n]
(où la notation [t] désigne la partie entière de t). Or
+∞
1 · 3 · · · (2n − 1)
1
√ =1+ xn
1−x 2 · 4 · · · (2n)
n=1
Exercice 5 (Théorème de Liouville). Soit an zn une série entière dont le rayon
de convergence est infini. Soit f : C → C la somme de cette série entière.
a) Si la fonction entière f est bornée sur C, montrer que f est constante.
b) Plus généralement, s’il existe un polynôme P à coefficients positifs tel que |f (z )| ≤
P (|z |) pour tout z ∈ C, montrer que f est un polynôme.
Solution. a) C’est immédiat si l’on connaı̂t la formule de Cauchy (voir le théorème 4 page 250).
En désignant par M un majorant de |f | sur C, on a en effet
2π
n 1
∀n ∈ N, ∀r > 0, anr = f (re iθ ) e−niθ dθ donc |an | rn ≤ M.
2π 0
Si n ∈ N∗ , la majoration |a n| ≤ M/rn est vraie pour tout r > 0 et on peut donc faire r → +∞,
ce qui entraı̂ne an = 0 pour tout n ∈ N∗ , d’où le résultat.
b) Notons m = deg(P ). Si m = 0, la réponse a été apportée dans la résolution de la question
précédente. Sinon, on pose
+∞
g (z ) = anz n−m,
n=m
f (z ) − a 0 − a 1 z − · · · − am−1 z m−1
∀z ∈ C∗ , g(z) = ,
zm
et comme m = deg(P ), ceci montre que g est bornée sur C tout entier. Comme on l’a vu plus
haut, g est donc constante, donc an = 0 dès que n > m, d’où le résultat.
Remarque. On aurait pu aussi résoudre la question a) de l’exercice en utilisant la formule
de Parseval au lieu de la formule de Cauchy.
– La considération des valeurs complexes de la variable permet seule de comprendre des
phénomènes qui seraient surprenant si on se confinait à la variable réelle. Par exemple, la
fonction sinus est développable en série entière sur R, bornée sur R, mais elle n’est pas
constante.
– Le théorème de Liouville (question a)) admet une généralisation étonnante, connue
sous le nom de théorème de Picard : toute fonction entière f qui évite deux valeurs est
forcément constante. Autrement dit, s’il existe deux valeurs distinctes a et b de C telles
que f (z ) =
a et f (z ) =
b pour tout z ∈ C, alors f est constante.
Exercice 6. Soit Φ la somme d’une série entière a n z n dont le rayon de convergence
R est non nul.
a) Montrer que la série entière an zn /n!
a un rayon de convergence infini.
b) On note ϕ la somme de la série entière anz n /n!. Montrer
+∞
∀z ∈ C, |z | < R, Φ(z) = ϕ(zx)e −x dx.
0
Solution. a) Fixons r0 tel que 0 < r0 < R, de sorte que la suite (a n r0n) est bornée (elle tend
même vers 0). Pour tout r > 0, on a an rn /n! = (a n n n
n r0 )(q /n!) (avec q = r/r 0 ), et comme (q /n!)
est bornée (le rayon de convergence de la série z n /n! est infini), on en déduit que la suite
n
(anr /n!) est bornée.
260 4. SUITES ET SÉRIES
b) Soit z ∈ C tel que |z | < R. Commençons par montrer l’existence de l’intégrale. On fixe r tel
|z | < r < R. La suite (an r n) est bornée, donc si M désigne un majorant de (|an |rn ), on a
an (zx)n n n
∀x ≥ 0, ∀n ∈ N, = |a n r n| |zx/r | ≤ M (qx) , q=
|z |
< 1, (∗)
n! n! n! r
ce qui par sommation entraı̂ne |ϕ(xz )| ≤ M eqx pour tout x ≥ 0. Ainsi, |ϕ(xz)e−x | ≤ M e(q−1)x
pour tout x ≥ 0 et comme q < 1, l’intégrale proposée converge bien.
Il suffit maintenant d’écrire
+∞ +∞ +∞ an (xz )n
an z n +∞
+∞ +∞
−x −x n −x
ϕ(xz)e dx = e dx = x e dx = an zn,
0 0 n! n! 0
n=0 n=0 n=0
+∞ n −x
car 0 x e dx = Γ(n + 1) = n! pour tout n ∈ N. Nous avons bien le droit d’inverser les
signes de sommations car d’après (*) les sommes partielles de la série vérifient la majoration
N
a (zx)n N
(qx) n −x
n
∀N ∈ N∗ , e−x ≤ M e ≤ e(q−1)x
n! n!
n=1 n=1
Exercice 7. Soient α1 , . . . , αp des entiers naturels non nuls premiers entre eux dans
leur ensemble. Pour tout n ∈ N, on note S n le nombre de solutions (n1 , . . . , np ) ∈ Np de
l’équation
α1 n1 + · · · + αp np = n.
Donner un équivalent de Sn lorsque n → +∞. (Indication : interpréter S n comme le
coefficient d’une série entière qui s’exprime simplement en fonction de α1, . . . , α p.)
Solution. Considérons la série entière définie par le produit de Cauchy des séries entières
zα 1n 1 , . . . , zαp np .
n1 ∈N np ∈N
Toute l’astuce est de remarquer que le coefficient de z n dans ce produit de Cauchy est le nombre
de manière de combiner les puissances de z de chaque terme du produit pour que leur somme
fasse n. En d’autres termes, on a
+∞
+∞
+∞
1 1
F (z ) = Sn z n = z α1 n1 · · · zαp np = α
··· ,
n=0 n =0 n =0
1−z 1 1 − zαp
1 p
et toutes les séries entières correspondantes ont leur rayon de convergence égal à 1. La fonction
F (z ) est une fraction rationnelle, dont les pôles se trouvent aux racines α1-ièmes,. . .,αp -ièmes
de l’unité. Le pôle z = 1 est de multiplicité p, et tous les autres pôles ont une multiplicité < p
(en effet, si ωα 1 = · · · = ωα p = 1 avec ω = e 2iaπ/b une racine de l’unité et a ∧ b = 1, alors b
divise α1 a, . . . , αp a donc b divise α1 , . . . , αp d’après le théorème de Gauss, donc b = 1 car les αi
sont premiers entre eux dans leur ensemble). On peut donc écrire la décomposition en éléments
simples de F sous la forme
A a 1,ω ap−1,ω
F (z ) = + G(z ), G(z) = +··· + , ( ∗)
(1 − z) p ω−z (ω − z ) p−1
ω∈Π
où Π désigne un sous-ensemble fini des racines de l’unité et les ak,ω des constantes complexes
(notez que 1 ∈ Π). On trouve la constante A par les techniques usuelles, en écrivant
p 1 1
(1 − z) F (z ) = ··· ,
1 + z + · · · + zα 1−1 1 + z + · · · + z αp−1
4. SÉRIES ENTI ÈRES 261
(voir la page 251), on en déduit que si |ω | = 1, le coefficient de z n dans cette série entière est
un O (nk−1). Ainsi, d’après (*), le coefficient de z n dans la série entière définissant G(z ) est un
O (np−2 ). On en déduit, avec (*) et (**) que
A 1 np−1
Sn = (n + p − 1)(n + p − 2) · · · (n + 1) + O (np−2 ) ∼ .
(p − 1)! α1 · · · αp (p − 1)!
Solution. Il suffit de montrer que pour tout b ∈ ]0, a[, la fonction f est développable en série
entière sur ]−b, b[ (en effet, les coefficients du développement en série entière sur ] − b, b[ ne
dépendent pas de b). Fixons donc b ∈ ]0, a[.
Suivons l’indication et commencer par développer la fonction F : x → f (x) + f (−x). Cette
fonction est paire donc pour tout k ∈ N, F (2k+1) (0) = 0, donc en appliquant la formule de Taylor
avec reste intégral, on obtient, pour tout n ∈ N et pour tout x ∈ [0, b]
x
x2 x2n (x − t)2n+1 (2n+2)
F (x) = F (0)+ F (0)+· · ·+ F (2n)(0)+R n(x), R n(x) = F (t) dt.
2! (2n)! 0 (2n + 1)!
Remarquons que pour tout k ∈ N, F (2k)(0) = 2f (2k) (0) ≥ 0, donc la formule précédente entraı̂ne
0 ≤ Rn (b) ≤ F (b) pour tout n. Pour montrer que Rn(x) tend vers 0 lorsque 0 ≤ x < b, nous
comparons sa valeur à R n(b) en écrivant
x x 2n+1 x (b − t)2n+1
x − t 2n+1 (b − t)2n+1 (2n+2)
0 ≤ Rn (x) = F (t) dt ≤ F (2n+2) (t) dt
0 b − t (2n + 1)! b 0 (2n + 1)!
x 2n+1 x 2n+1
≤ Rn (b) ≤ F (b)
b b
(on a utilisé la majoration (x − t)/(b − t) ≤ x/b < 1 pour tout t ∈ [0, x], qui provient du caractère
décroissant de t → xb−−tt sur [0, x]). Comme 0 ≤ x/b < 1, on en déduit lim n→∞ Rn (x) = 0, ce qui
s’écrit aussi
+∞
x2n
∀x ∈ [0, b[ , F (x) = F (2n)(0).
n=0
(2 n)!
La fonction F est paire, ce résultat vaut donc sur ]−b, b[.
Il nous reste à montrer le résultat pour f . Fixons x ∈ ]−b, b[. Pour tout n ∈ N, on écrit
x
x 2n+1 (2n+1) (x − t)2n+1 (2n+2)
f (x) = f (0) + · · · + f (0) + rn (x) avec rn (x) = f (t) dt.
(2n + 1)! 0 (2n + 1)!
262 4. SUITES ET SÉRIES
Comme 0 ≤ f (2n+2) (t) ≤ f (2n+2) (t)+f (2n+2) (−t) = F (2n+2) (t) pour tout t, on a |rn (x)| ≤ Rn (|x|)
donc limn→∞ rn (x) = 0. Ainsi, en notant
p
xk
∀p ∈ N, Sp (x) = f (k)(0),
k!
k=0
nous venons de montrer que
lim S2n+1 (x) = f (x). (∗)
n→∞
Or
x2n (2n) 1 x2n (2n)
S2n (x) − S2n−1 (x) = f (0) = F (0) donc lim S2n (x) − S2n−1 (x) = 0,
(2n)! 2 (2n)! n→+∞
et on en déduit avec (*) que lim n→+∞ S2n (x) = f (x). Donc d’après (*), on a limn→∞ Sn (x) =
f (x) c’est-à-dire
+∞
f (n)(0)
∀x ∈ ]−b, b[ , f (x) = xn .
n=0
n!
D’où le résultat.
Remarque. Considérons la fonction f : ]−π/2, π/2[ → R x → tan x. La fonction f
satisfait les hypothèses précédentes comme on le vérifie facilement, et on en déduit que
f , donc f , est développable en série entière sur ]−π/2, π/2[.
Exercice 9 (Inverse d’une série enti ère). Soit 1 + n≥1 an zn une série entière
de rayon de convergence non nul, et S la somme de cette série entière sur son disque de
convergence. Montrer que 1/S est développable en série entière autour de l’origine.
Solution. Commençons par montrer le lemme suivant.
Lemme 1. Une série entière un z n a un rayon de convergence non nul si et seulement s’il
existe q > 0 tel que |un| ≤ q pour tout n ∈ N ∗ .
n
En effet :
Condition nécessaire. Notons r le rayon de convergence de un z n. Soit r tel que 0 < r < r.
n n
On a un r → 0, donc il existe M ≥ 1 tel que |un r | ≤ M pour tout n ∈ N∗ , donc
n
∗ 1 M
∀n ∈ N , |u n | ≤ M ≤ qn avec q = .
r r
Condition suffisante. La suite |un (1/q)n| est bornée d’après les hypothèses donc le rayon de
convergence de un z n est supérieur à 1/q, d’où le résultat.
Résolvons maintenant l’exercice. L’hypothétique développement en série entière bn z n
vérifie, s’il existe +∞
+∞
n n
1+ anz bn z = 1, (∗)
n=1 n=0
donc par un produit de Cauchy
b 0 = 1, ∀n ∈ N ∗, bn = −a1b n−1 − · · · − an−1b 1 − a nb 0.
Définissons (bn ) comme l’unique suite vérifiant ces récurrences. D’après le lemme précédent, il
existe q > 0 tel que |an | ≤ qn pour tout n ∈ N ∗. Posons r = 2q. On va montrer par récurrence
sur n que |bn| ≤ r n pour tout n. Pour n = 0 c’est vrai car b0 = 1, et pour passer du rang n − 1
au rang n, on écrit
n n
n
1 n
|bn| ≤ |ak| |b n−k| ≤ q k r n−k = r ≤ r n.
2k
k=1 k=1 k=1
4. SÉRIES ENTI ÈRES 263
Ainsi, bn z n a un rayon de convergence non nul d’après le lemme. Les relations vérifiées
par (bn ) montrent que sur l’intersection des disques de convergence, l’égalité (*) est bien vérifiée,
d’où le résultat.
Remarque. Si S s’annule, on peut montrer que le rayon de convergence du développement
en série entière de 1/S est égal au plus petit des modules des zéros de S. N’essayez pas
de prouver ce résultat, il ne s’obtient de manière naturelle que dans le cadre général des
fonctions analytiques (voir la remarque de l’exercice 13 page 265).
Exercice 10 (Théor ème d’Abel). Soit an zn une série entière de rayon de conver-
gence ≥ 1 telle que a n converge. On note f la somme de cette série entière sur le disque
unité. On fixe θ0 ∈ [0, π/2[ et on pose
∆θ 0 = {z ∈ C, |z | < 1 et ∃ρ > 0, ∃θ ∈ [−θ0 , θ 0 ], z = 1 − ρeiθ }
(voir la figure
sous-suite
ci dessous). Montrer que
+∞
lim f (z ) =
z→1
an .
z∈∆θ
0 n=0
∆θ 0 −→
0 1
n
Solution. Notons S = +∞ n=0 an , Sn = k=0 ak et Rn = S − S n pour tout n ∈ N. Pour majorer
|f (z ) − S |, on va effectuer une transformation d’Abel en écrivant a n = Rn−1 − Rn pour tout n.
Soit z ∈ C∗, |z | < 1. Pour tout N ∈ N ∗, on a
N N N−1 N
n n n+1
anz − Sn = (R n−1 − R n)(z − 1) = R n (z − 1) − Rn (z n − 1)
n=0 n=1 n=0 n=1
N−1
N−1
= R n (zn+1 − z n) − R N (z N − 1) = (z − 1) Rn zn − R N (z N − 1),
n=0 n=0
et en faisant tendre N vers +∞ on en déduit
+∞
f (z ) − S = (z − 1) Rn z n. (∗)
n=0
Fixons maintenant ε > 0, puis N ∈ N tel que |Rn | < ε pour tout n > N . D’après (*), pour tout
z ∈ C, |z | < 1,
N +∞ N
|z − 1|
|f (z ) − S| ≤ |z − 1| Rn z n + ε|z − 1| |z |n ≤ |z − 1| |R n| + ε (∗∗)
1 − |z|
n=0 n=N +1 n=0
Si on choisit maintenant α > 0 tel que α N n=0 |Rn | < ε, on voit donc que si z ∈ ∆θ0 et
|z − 1| ≤ inf {α, cos θ0 } la majoration (**) entraı̂ne
2 2
|f (z ) − S| ≤ ε + ε =ε 1+ ,
cos θ 0 cos θ 0
d’où le résultat.
Remarque. En appliquant ce résultat à la série (−1)n /(2n + 1), on en déduit
+∞
+∞
(−1) n
(−1)n π
= lim xn = x→1
lim arctan x = arctan 1 = .
n=0
2n + 1 x→1
x<1 n=0
2n + 1 x<1
4
De même, on montrerait ∞ n=1 (−1)
n−1
/n = log 2.
– Si la série a n converge absolument, le résultat est évident (en effet, an z n converge
alors normalement sur |z| ≤ 1, donc est continue sur |z| ≤ 1, donc en 1).
– La réciproque de ce théorème est fausse. Par exemple, on a
+∞
1 1
lim (−1) n z n = lim =
z→1
|z|<1 n=0
z→1
|z|<1
1+z 2
et pourtant, (−1)n diverge. Cependant, si a n = o(1/n) (voir l’exercice suivant) ou
mieux, si a n = O(1/n) (voir le problème 27 page 308), la réciproque est vraie.
Exercice 11 (Théor ème taubérien faible). Soit an z n une série entière de rayon
de convergence 1 et f la somme de cette série entière sur le disque unité. On suppose que
∃S ∈ C, lim
x→1
f (x) = S.
x<1
+∞
Si an = o(1/n), montrer que an converge et que n=0 an = S.
n
Solution. Pour tout n ∈ N, on note Sn = k=0 ak . On a
n
+∞
∀n ∈ N∗ , ∀x ∈ ]0, 1[ , Sn − f (x) = ak (1 − xk ) − ak xk
k=1 k=n+1
k k−1
et comme (1 − x ) = (1 − x)(1 + x + · · · + x ) ≤ k(1 − x) pour 0 < x < 1, on en déduit
n
+∞
k |ak | k sup k>n k |ak |
|Sn − f (x)| ≤ (1 − x) k |a k| + x ≤ (1 − x)M n + ,
n n(1 − x)
k=1 k=n+1
où M désigne un majorant de la suite (k |ak |) (elle est bien majorée car elle tend vers 0). Fixons
maintenant ε > 0 tel que ε < 1. L’inégalité précédente entraı̂ne
ε supk>n k |ak |
∀n ∈ N∗ , S
n − f 1 − ≤ Mε + ,
n ε
donc si N0 est choisi tel que supk>N 0 k |a k | < ε2 (on peut car kak → 0), on en déduit
ε
∀n ≥ N0 , S
n − f 1 − ≤ M ε + ε = (M + 1)ε.
n
D’après les hypothèses, f (x) tend vers S lorsque x → 1−, donc il existe N 1 ≥ N0 tel que
|f (1 − ε/n) − S | < ε pour tout n ≥ N 1. Ainsi,
ε ε
∀n ≥ N 1, |S n − S| ≤ Sn − f 1 − + f 1 − − S ≤ (M + 1)ε + ε = (M + 2)ε.
n n
On en déduit que (Sn ) converge vers S, d’où le résultat.
4. SÉRIES ENTI ÈRES 265
Remarque. Ce résultat est une réciproque partielle du théorème d’Abel (voir l’exercice
précédent). Il reste vrai en supposant seulement an = O(1/n) (cf. problème 27 page 308).
Exercice 12. Soit f la somme d’une série entière an z n de rayon de convergence ≥ 1
telle que a n ∈ Z pour tout n ∈ N. On suppose que f est bornée sur le disque unité.
Montrer que f est une fonction polynôme.
Solution.
Tout découle de l’égalité de Parseval qui entraı̂ne, pour tout r ∈ ]0, 1[, la convergence
de |an |2 r2n et
+∞
2π
2 2n 1
∀r ∈ ]0, 1[ , |an| r = |f (reiθ )|2 dθ.
n=0
2π 0
Exercice 13. Pour tout r ∈ ]0, +∞], on note D (r ) = {z ∈ C | |z| < r}. Soit R ∈ ]0, +∞]
et f : D (R) → C une application dérivable par rapport à la variable complexe sur D (R)
et telle que f (z) soit continue sur D (R) (on rappelle que f est dérivable par rapport à
la variable complexe en z0 si (f (z0 + u) − f (z0))/u converge lorsque u ∈ C tend vers 0 en
restant non nul ; la limite est alors notée f (z 0)).
1/ a) Soit I un intervalle de R et γ : I → D (R) une application de classe C 1 . Montrer
que f ◦ γ est de classe C 1 sur I et calculer (f ◦ γ ).
b) Soit r > 0 et g une fonction définie et continue de {z ∈ C, |z | = r } dans C. Montrer
que l’application
2π
r g(reit ) e it
D (r) → C z → dt
2π 0 reit − z
est la somme d’une série entière qui converge sur D (r ).
2/ Montrer que
2π
r f (re it) eit
∀r ∈ ]0, R[ , ∀z ∈ D (r ), f (z) = dt. (∗)
2π 0 re it − z
En déduire que f est la somme d’une série entière qui converge sur D (R) (Indication :
r
2π f (z +λ(reit−z )) eit
montrer que la fonction λ → 2π 0 reit −z
dt est constante sur [0, 1]).
Solution. 1/ a) On procède comme pour la dérivation par rapport à la variable réelle. Soit
t ∈ I . La fonction f est dérivable par rapport à la variable complexe en γ (t), ce qui s’écrit
f (γ (t) + u) = f (γ (t)) + uf (γ (t)) + o(u) lorsque u → 0 (u ∈ C).
On en conclut que lorsque v est un nombre réel tendant vers 0
donc f ◦ γ est dérivable en t et (f ◦ γ )(t) = γ (t)f (γ (t)). On déduit de cette dernière expression
que (f ◦ γ ) est continue, donc f ◦ γ est de classe C 1.
b) Il suffit d’écrire que pour tout z ∈ D (r ) on a
2π 2π +∞
1 g(reit ) 1 zn
dt = g(reit ) e −int dt
2π 0 1 − z/(re it) 2π 0 n=0
r n
+∞ +∞ 2π
1 n 1 2π
it −int
n 1
= z g(re )e dt = an z , an = g(re it )e−int dt (∗∗)
2π n=0 rn 0 n=0
2πr n
0
où le coefficient an est indépendant de z . itOn na bien le droit d’échanger les signes de sommation
car si |z | < r, la série de fonctions g(re )(z /r )e n −int (de la variable t) converge normalement
sur [0, 2π ] puisque g est continue, donc bornée, sur le compact |z | = r.
2/ Montrons (*). Fixons r ∈ ]0, R[ et z ∈ D (r). On considère la fonction
2π
r f (z + λ(reit − z )) eit
ϕ : [0, 1] → C λ → dt.
2π 0 reit − z
Il s’agit de montrer que ϕ(1) = f (z ). La valeur ϕ(0) est un cas particulier de la formule (**)
lorsque t → g (reit ) est la fonction constante égale à f (z), donc
r
2π
f (z )eit f (z ) 2π
+∞
−int
ϕ(0) = f (z ) it − z
dt = n
e dt z n = f (z ),
2π 0 re n=0
2πr 0
2π
car 0 e −int dt = 0 si n = 0, égal à 2π si n = 0. Il faut donc montrer ϕ(0) = ϕ(1). D’après la
question 1/a), ϕ est dérivable et
2π
r
∀λ ∈ [0, 1], ϕ (λ) = f (z + λ(re it − z )) e it dt. (∗∗∗)
2π 0
Or, toujours d’après la question a), on a
∂
f (z + λ(re it − z) = iλreitf (z + λ(re it − z )),
∂t
donc d’après (***)
1 2π
∀λ, 0 < λ < 1, ϕ (λ) = f (z + λ(reit − z)) = 0.
2πiλ 0
Ce développement en série entière est donc valable sur D (R) tout entier.
Remarque. (Petite digression sur les fonctions analytiques.) Les séries entières rentrent
dans le contexte plus général de l’élégante théorie des fonctions analytiques.
Définition 1. Une fonction f : Ω → C (où Ω est un ouvert de C) est dite analytique
dans Ω si pour tout z0 ∈ Ω, il existe un disque ouvert ∆ : |z − z0 | < r contenu dans Ω
tel que
+∞
∀z ∈ ∆, f (z) = cn (z − z 0)n ,
n=0
où le second membre est une série entière en z − z0 convergente dans ∆.
Elle est dite holomorphe dans Ω si elle est continûment dérivable par rapport à la
variable complexe dans Ω.
5. S ÉRIES DE FOURIER 267
Par exemple, la fonction f : z → 1/z est analytique dans C∗. En effet, pour tout
z0 ∈ C ∗ , et pour tout z que |z − z0 | < |z 0|, on a
+∞
1 1 1 1 n
f (z ) = = − (z − z0 ) n .
z0 1 + (z − z 0)/z0 z0 n=0 z0
Le résultat de l’exercice montre que toute fonction f holomorphe sur un ouvert Ω de
C est analytique sur Ω. En effet, si z0 ∈ Ω et si r > 0 est tel que D (z0 , r) (disque ouvert
de centre z0 de rayon r ) vérifie D(z0 , r) ⊂ Ω, la fonction g : D(r ) → C z → f (z 0 + z )
est holomorphe sur D (r) donc g est développable en série entière sur D(r ) d’après 2/.
Réciproquement, on montre que toute fonction analytique est holomorphe (c’est plus
facile).
En particulier, la somme d’une série entière est analytique sur son disque de conver-
gence (résultat non évident a priori).
On montre facilement que la composée de deux fonctions holomorphes est holomorphe.
En particulier, si f est la somme d’une série entière qui converge dans un disque D(r ) et
ne s’y annule pas, alors 1/f est holomorphe dans D (r ), donc développable en série entière
sur D (r) d’après le résultat de l’exercice. On obtient ainsi une version plus forte que celle
obtenue à l’exercice 9 page 262, car on a des renseignements sur le rayon de convergence
r de l’inverse (r est le plus petit des modules des zéros de f ).
5. Séries de Fourier
5.1. Séries trigonométriques
Polynômes trigonométriques.
Définition 1. On appelle polynôme trigonométrique de degré ≤ N (N ∈ N) de la variable
réelle x toute fonction de la forme x → N n=−N c n e
inx
(c n ∈ C).
inx
Compte tenu de la relation e = cos nx + i sin nx, il revient au même de dire qu’un po-
lynôme trigonométrique est une fonction de la forme x → 2 + N a0
n=1 (an cos nx + bn sin nx)
où l es a
n , bn sont des nombres co m pl exes reliés aux coefficients cn par
Proposition 1. Si n∈N |cn | et n∈N |c −n | (resp |an | et |bn|) convergent, la série
trigonométrique
a0
inx
cn e resp. + (an cos nx + b n sin nx) (∗)
2 ∗
n∈Z n∈N
Dans la suite de cette partie, la période sera toujours T = 2π mais les résultats se
généralisent aisément par normalisation pour toute période T > 0.
L’espace D. Nous aurons besoin de la définition suivante.
Définition 4. Une application f : [a, b] → C ( où [ a, b] est un segment de R) est dite de
classe C n par morceaux sur [a, b] s’il existe une subdivision a = x0 < x1 < · · · < xp = b de
[a, b] telle que pour tout i ∈ {0, . . . , p − 1}, la restriction de f à l’intervalle ]xi , xi+1 [ est
prolongeable par continuité sur [xi , xi+1 ] en une fonction de classe Cn sur [xi , xi+1 ].
Une application f : R → C est dite de classe C n par morceaux si la restriction de f a
tout segment de R est de classe C n par morceaux.
Une fonction f de classe C n par morceaux admet donc en tout point x une limite à
gauche et à droite, que nous notons respectivement f (x−) et f (x+).
Notation. On note D l’e.v des fonctions de R dans C, 2π-périodiques, continues par
morceaux, et telles que
f (x−) + f (x+)
∀x ∈ R, f (x) = .
2
5.3. Convergence en moyenne quadratique
Structure préhilbertienne de D . Sur l’e.v D, l’application
2π
1
(f, g ) → f, g = f (t)g (t) dt
2π 0
définit un produit scalaire
et fait de D un espace préhilbertien complexe, muni de la norme
hermitienne f 2 = f, f .
270 4. SUITES ET SÉRIES
et de plus
2π n
1
inf f − g 22 = f − s n 22 = 2
|f (t)| dt − |ck(f )| 2 . (∗)
g∈Pn 2π 0 k=−n
Démonstration. Cette proposition est en fait une conséquence directe des résultats généraux sur
les espaces préhilbertiens (voir tome Algèbre) appliqués à D . Nous le redémontrons dans notre
cas.
On remarque que ck(f ) = e k, f = ek , s n si −n ≤ k ≤ n, donc ek , f − s n = 0 pour
−n ≤ k ≤ n. Autrement dit, f − sn ∈ Pn ⊥ . Comme f = sn + (f − s n) avec sn ∈ Pn (et que
est vrai pour tout f ∈ D ), on en déduit D = Pn + P ⊥
ceci ⊥
n . Par ailleurs Pn ∩ Pn = {0} car si
g = −n≤k≤n λk ek ∈ P n , alors λ k = g, e k = 0. Finalement on a bien D = Pn ⊕ Pn⊥.
⊥
En fait, cette inégalité est une égalité (dans ce cas on parle d’égalité de Parseval),
comme il est énoncé dans le théorème qui suit.
Égalité de Parseval.
Théorème 1 ( Égalité de Parseval). Soit f : R2 → C une fonction
2π-périodique et
2 2
continue par morceaux. Alors les séries n∈Z |c n (f )| , |a n (f )| , |b n(f )| convergent
et on a
+∞ +∞ +∞ 2π
2 |a 0(f )| 2 1 2 1 2 1
|cn (f )| = + |an (f )| + |bn(f )| = |f (t)|2 dt.
−∞
4 2 n=1 2 n=1 2π 0
Démonstration. Quitte à changer la valeur de f en ses discontinuités, on peut supposer f ∈ D (la
valeurs
des intégrales faisant intervenir f ne change pas). Il suffit de prouver le résultat sur la série
2 2 2
n∈Z n (f )| car les relations liant les a n(f ), b n (f ) aux cn (f ) entraı̂nent |cn (f )| + |c −n(f )| =
|c
(|an (f )| 2 + |bn (f )|2)/2 pour tout n ∈ N ∗ et |c0 (f )|2 = |a0 (f )|2 /4.
La proposition précédente donne
2π +∞
1
|f (t)| 2 dt − |cn (f )| 2 = inf f − g 22 , (∗∗)
2π 0 −∞
g∈P
5. S ÉRIES DE FOURIER 271
Remarque 6. — On peut montrer que l’égalité de Parseval reste vraie pour toute
fonction f 2π -périodique, continue par morceaux et intégrable sur ]0, 2π [.
— Si f est une fonction 2π -périodique et continue par morceaux, on a lim |n|→+∞ cn(f ) =
0 (conséquence de la convergence de n∈Z |cn (f )| 2). On retrouve ainsi le lemme de
Lebesgue dans ce cas particulier (voir l’exercice 6 page 157).
— L’égalité de Parseval entraı̂ne qu’une fonction continue 2π -périodique qui a tout
ses coefficients de Fourier nuls est nulle.
— Soit f : R → C une fonction continue et 2π -périodique. D’aprèsl’égalité de
Parseval et la proposition 3, on a limn→+∞ f − s n 2 = 0 où sn = n−n ck (f )ek .
On en déduit que si la série de Fourier de f converge uniformément sur R, alors
f est égale à sa série de Fourier (sa fonction limite g vérifie f − g 2 = 0 et g est
continue — limite uniforme de fonctions continues — donc f = g ).
5.4. Le théorème de Jordan-Dirichlet
Le résultat qui suit est le résultat principal sur les séries de Fourier.
On en déduit finalement
π π
(2n + 1)t
2πun = (f (t) + f (−t) − f (0+) − f(0−)) D n (t) dt = g (t) sin dt,
0 0 2
où g(t) = (f (t) + f (−t) − f (0+) − f (0−))/ sin(t/2) est continue par morceaux sur ]0, π] et bornée
sur un voisinage de 0 d’après les hypothèses. La fonction g est donc intégrable sur ]0, π] et le
lemme de Riemann-Lebesgue (voir l’exercice 6 page 157) entraı̂ne limn→+∞ 2πun = 0, d’où le
résultat.
Remarque 7. L’hypothèse C 1 par morceaux est importante. Il existe en effet des fonctions
continues dont la série de Fourier diverge (voir l’exercice 4 page 275).
Convergence uniforme de la série de Fourier.
Lemme 1. Soit f : R → C une fonction 2π-périodique, continue et C1 par morceaux. On
définit ϕ : R → C par ϕ(t) = f (t) si f est dérivable en t et ϕ(t) = (f (t+) + f (t−))/2
sinon. Les coefficients de Fourier de ϕ vérifient cn (ϕ) = in c n(f ) pour tout n ∈ Z.
Démonstration. Soit 0 = x 0 < x 1 < · · · < x p = 2π une subdivision de [0, 2π ] telle que f soit C1
sur [xk−1 , xk] pour tout k . En intégrant par parties, on a pour tout k
xk x xk
−int −int k
ϕ(t) e dt = f (t)e + in f (t) e−int dt,
x k−1 x k−1 xk−1
5.5. Exercices
Exercice 1. Soit f : R → R la fonction 2π -périodique égale à 1 − x 2 /π2 sur [−π, π].
Calculer les coefficients de Fourier de f . En déduire les valeurs de
+∞
+∞
+∞
1 1 1
, , .
n=1
n2 n=1
(2 n − 1) 2
n=1
n 4
Solution. La fonction f est paire. Les coefficients bn = bn (f ) sont donc nuls. Par ailleurs,
1 π t2 4
a0 = a 0(f ) = 1 − 2 dt =
π −π π 3
5. S ÉRIES DE FOURIER 273
et
π
π
∗ 1 t2 2 4
∀n ∈ N , an = a n(f ) = 1 − 2 cos nt dt = − 3 t 2 cos nt dt = (−1) n+1 2 2
π −π π π 0 nπ
(après une double intégration par parties).
La fonction f est continue et C 1 par morceaux. Sa série de Fourier converge donc simplement
(et même uniformément) vers f , ce qui s’écrit
+∞ +∞
x2 a0 2 4 cos nx
∀x ∈ [−π, π], f(x) = 1 − 2 = + a n cos nx = − 2 (−1) n . (∗)
π 2 n=1
3 π n=1 n2
donc
+∞
+∞ +∞
1 1 1 (−1) n 1 π2 π2 π2
2
= 2
− 2
= + = .
n=1
(2n − 1) 2 n=1
n n=1
n 2 6 12 8
b) Montrer alors
+∞
t2
∞
N
∀t ∈ ]−π, π[ , sin t = t 1− 2 2 où = lim .
n=1
nπ n=1
N→+∞
n=1
c) Montrer
+∞
1 1
∀t ∈ ]−π, π[ , t =
0, 2
= .
sin t −∞ (t − nπ ) 2
274 4. SUITES ET SÉRIES
Solution. a) L’application f α est paire donc bn (f α ) = 0 pour tout n ∈ N∗. Par ailleurs,
1 π 1 π
∀n ∈ N, an (f α ) = cos αt cos nt dt = [cos(α + n)t + cos(α − n)t] dt
π −π π 0
1 sin(α + n)π sin(α − n)π 2α sin απ
= + = (−1)n .
π α+n α−n π (α2 − n2)
La fonction fα est continue et de classe C1 par morceaux, donc la série de Fourier de f α converge
simplement (et même uniformément) vers fα sur R, ce qui entraı̂ne
+∞
sin αt 2α sin απ
∀t ∈ [−π, π], cos αt = + (−1)n 2 − n2 )
cos nt,
απ n=1
π (α
Ceci est vrai pour tout α ∈ RZ, d’où le résultat en remplaçant α par t/π.
b) Soit x ∈ ]0, π[. On définit f : [0, x] → R par f (t) = cotan t − 1/t si t = 0, f (0) = 0. La
formule établie à la question précédente montre que
+∞
2t
∀t ∈ [0, x], f (t) = .
n=1
t2 − n 2 π 2
Comme cette série de fonctions converge normalement sur [0, x], on peut écrire
x x
+∞ +∞
2t sin x x2
f (t) dt = 2 − n 2π 2
autrement dit log = log 1 − 2 2 .
0 n=1 0 t x n=1
nπ
En prenant l’exponentielle de part et d’autre de cette dernière égalité, on voit que le produit
infini existe bien et que
sin x
+∞
x2
= 1− 2 2 ,
x n=1
n π
d’où le résultat pour 0 < x < π. Comme les fonctions en présence sont impaires et nulles en 0,
on en déduit le résultat pour tout x ∈ ]−π, π[.
c) L’égalité
2t 1 1 d 2t 1 1
2 2 2
= + entraı̂ne 2 2 2
=− 2
− .
t −n π t − nπ t + nπ dt
t −n π (t − nπ ) (t + nπ )2
d 2t
Ainsi, si on fixe x ∈ ]0, π[, la série de fonctions converge normalement sur
dt t 2 − n2π 2
n≥1
[0, x]. En appliquant le théorème de dérivabilité des séries de fonctions, on en conclut que
+∞
2t 1
t → 2 − n2 π2
est dérivable sur [0, x], sa dérivée est t → − .
t (t − nπ ) 2
n=1 n∈Z ∗
Ceci vaut pour tout x ∈ ]0, π[. Les fonctions en présence étant paires, cette relation vaut sur
]−π, π [ {0} d’où le résultat
5. S ÉRIES DE FOURIER 275
Exercice
2π 3. Soit f : R → C une fonction 2π -périodique de classe C1. On suppose que
0
f (t) dt = 0. Montrer
2π 2π
2
|f (t)| dt ≤ |f (t)|2 dt,
0 0
et caractériser l’égalité.
2π
Solution. Le coefficient de Fourier c0 (f ) est nul car 0 f (t) dt = 0. En appliquant l’identité
c n(f ) = in cn (f ), avec l’égalité de Parseval appliquée aux fonctions f et f , on trouve donc
2π 2π
1 2 1
2
|f (t)| dt = 2
|c n (f )| ≤ 2 2
n |cn(f )| = |cn (f )| = |f (t)|2 dt, (∗)
2π 0 ∗ ∗
2π 0
n∈Z n∈Z n∈Z
Calculer explicitement les a n,ν , montrer que sq,ν ≥ 0 pour tout (q, ν ), et montrer l’existence
d’une constante B > 0 telle que s ν,ν > B log ν pour tout ν ∈ N ∗ .
c) Montrer que la série de Fourier de f diverge en 0.
Solution. a) La série converge normalement sur [0, π], f est donc bien définie et continue sur
[0, π]. On la définit sur [−π, 0[, par f (x) = f (−x). La fonction f est continue sur [−π, π]. De
plus f (−π ) = f (π ), on en déduit que le prolongement de f en une fonction 2π -périodique f sur
R est continu sur R.
b) Le calcul des a n,ν est facile, on a
1 π 2ν + 1 2ν + 1
a n,ν = sin + n t + sin − n t dt
2 0 2 2
1 1 1 ν + 1/2
= + = .
2 ν + n + 1/2 ν − n + 1/2 (ν + 1/2)2 − n 2
Ainsi, on a a n,ν ≥ 0 pour n ≤ ν , donc s q,ν ≥ 0 pour q ≤ ν.
Pour le cas q > ν, on remarque que les an,ν , sont, au facteur 2/π près, les coefficients de
1
Fourier an (g ν ) de la fonction paire gν (t) = | sin((ν +1/2)t)|. Cette dernière est continue
∞et C par
morceaux, sa série de Fourier converge donc vers gν . En particulier, on a a0,ν /2 + n=1 an,ν =
π
2 gν (0) = 0, donc la suite (sq,ν ) q∈N converge vers a 0,ν /2. Or an,ν est positif pour n ≤ ν , négatif
pour n > ν, donc (sq,ν )q est décroissante à partir de l’indice q = ν . Comme elle converge vers
a0,ν /2, on en déduit que s q,ν ≥ a 0,ν /2 ≥ 0 pour tout q > ν.
276 4. SUITES ET SÉRIES
(on a le droit de changer les signes de sommation car la série converge normalement sur [0, π]),
donc
+∞ n +∞
2 1 π 1
∀n ∈ N, a n (f ) = a p3 −1 , donc S n = ak (f ) = s 3 .
2 n,2 p −1
π p=1 p2 n,2 2 p=1
p
k=0
Comme les sq,ν sont positifs, et que s ν,ν ≥ (log ν )/2, on en déduit
1 1 p 3−1 p3 − 1
∀p ∈ N, S 2p 3−1 ≥ s p3 −1 p3−1 ≥ log(2 ) = log 2.
p2 2 ,2 2p2 2p 2
Ceci montre que S 2p 3−1 → +∞ lorsque p → +∞, donc la série an(f ) diverge. Autrement dit,
la série de Fourier de f en 0 diverge.
Remarque. Cet exemple d’une fonction continue 2π-périodique dont la série de Fourier
diverge en 0 est dû à Fejér. On peut montrer de manière non constructive que de telles
fonctions existent à partir du théorème de Banach-Steinhaus (voir l’exercice 8 page 425).
donne
sin nx π 1 1 π 1 π 1
≤ − = ≤ .
n 2 x n 2 (n + 1)2 x (N + 1) 2 x N 2
n>N n>N
Avec (*) on en déduit
π f (x) 2
N
1 π
∀x ∈ 0, , ≥ − .
2N x π n=1
n N 2 x2
N 1
Ainsi, en posant x N = π/(2N), on a f (xN )/xN ≥ π2 n=1 n − 4π . La suite (xN ) tend vers 0 et
1
comme n diverge, (f (x N ) − f (0))/(xN − 0) = f (x N )/xN diverge lorsque N → +∞. D’où la
non-dérivabilité de f en 0.
Exercice 6 (Phénom ène de Gibbs). On considère le signal carré ϕ, qui est la fonc-
tion 2π -périodique, égale à 1 sur ]0, π[, à 0 sur ]π, 2π[, et qui vaut 1/2 en ses points de
discontinuité.
a) Calculer la série de Fourier de ϕ, montrer qu’elle converge simplement vers ϕ et même
uniformément sur tout intervalle fermé ne contenant pas les discontinuités de ϕ.
b) Montrer que les sommes partielles d’indice impair s2n−1(t) de la série de Fourier de ϕ
admettent la représentation intégrale
1 1 t sin 2ns
s2n−1 (t) = + ds.
2 π 0 sin s
c) Calculer les points critiques de s2n−1 sur [0, π] et la valeur de son maximum.
d) Montrer que ce maximum converge lorsque n tend vers l’infini vers le nombre
1 1 π sin s
M= + ds,
2 π 0 s
puis conclure (on admet qu’une valeur approximative à 10−3 près est M ≈ 1, 089).
Solution. a) Le signal carré ϕ est C1 par morceaux, et comme ϕ(x) = 12 (ϕ(x−) + ϕ(x+)) en ses
discontinuités, la série de Fourier de ϕ converge simplement vers ϕ. Elle se calcule facilement et
on obtient
+∞
1 2 sin(2ν − 1)t
ϕ(t) = + , t ∈ R.
2 π 2ν − 1
ν=1
Les coefficients de Fourier formant une suite décroissante, la convergence est uniforme sur tout
intervalle fermé ne contenant pas les discontinuités de ϕ d’après la proposition 2 page 268.
t
b) Partant de la représentation intégrale sin(2 ν−1)t
2ν−1 = 0 cos(2ν − 1)s ds, on peut écrire
t n
1 2
s 2n−1(t) = + Cn (s) ds, Cn (s) = cos(2k − 1)s. (∗)
2 π 0
k=1
On calcule Cn(s) à partir de la partie réelle d’une somme d’exponentielles complexes,
n
i2ns
i(2k−1)s is e −1 ins sin ns cos ns sin ns sin 2ns
C n(s) = e = e = e = = .
e2is − 1 sin s sin s 2 sin s
k=1
On en déduit le résultat en remplaçant cette dernière expression dans (*).
c) La représentation intégrale précédente donne s2n−1 (t) = π1 sin(2nt)/ sin t (et s 2n−1 (0) = 2n/π
par continuité), donc s2n−1 s’annule sur [0, π] en t = xk = kπ/(2n), 0 < k ≤ 2n. Montrons que
son maximum est atteint en x 1. Pour 1 ≤ k ≤ n, on a
1 x 2k sin 2ns
s2n−1(x 2k ) − s2n−1 (x2k−1 ) = ds,
π x2k−1 sin s
278 4. SUITES ET SÉRIES
et comme l’intégrande est négative sur [x2k−1 , x 2k ] on en déduit s 2n−1 (x2k ) < s2n−1(x 2k−1).
Le maximum est donc atteint sur l’un des s2n−1 (x2k−1) pour 1 ≤ k ≤ n. Maintenant pour
1 ≤ k < n, on a
1 x2k 1 1
s 2n−1(x 2k+1 ) − s2n−1(x2k−1 ) = sin 2ns − π ds
π x2k−1 sin s sin(s + 2n )
x x x
expression que l’on obtient en découpant en deux l’intégrale x 2k+1 = x 2k + x 2k+1 et en
2k−1 2k−1 2k
effectuant le changement de variable s → s + π/(2n) dans la deuxième. La fonction sinus étant
croissante sur [0, π], et comme sin 2ns est négatif sur [x2k−1 , x 2k ], la dernière intégrande est
négative, donc s2n−1 (x2k+1) < s2n−1 (x2k−1 ). Finalement, ceci montre que le maximum est atteint
en t = x1 = π/(2n) et vaut
1 1 π/(2n) sin 2ns
sup s2n−1 (t) = Mn = + ds.
0≤t≤π 2 π 0 sin s
et comme e inh − e −inh = 2i(sin nh), ceci montre que les coefficients de Fourier de fh vérifient
c n(fh ) = 2i(sin nh)cn (f ). On conclut en appliquant l’égalité de Parseval à f h.
b) En appliquant l’égalité précédente à h = π/2ν+1 , on a
+∞
π π
nπ 1 1 C2 π2α
ρ2n 2
sin ν+1 = 2
|f (x + h) − f (x − h)| dx ≤ (C(2h)α) 2 dx =
n=1
2 8π −π 8π −π 4 22αν
et comme
nπ π 1 C 2 π2α
∀n, 2 ν−1 < n ≤ 2ν , sin2 ν+1
≥ sin2 = , on en déduit ρ 2n ≤ 2 .
2 4 2 4 22αν
2ν−1 <n≤2ν
d’où le résultat.
c) Si α > 1/2, la majoration précédente montre que la série
à termes positifs ρ n converge, et
comme |cn(f )| ≤ ρ|n| pour tout n ∈ Z, on en déduit que n∈Z |cn (f )| converge. Ainsi, la série
de Fourier de f converge normalement sur R, et on sait alors qu’elle ne peut converger que vers
f (voir le dernier alinéa de la remarque 6 page 271).
Solution. a) On sait d’après la proposition 2 page 268 qu’il y a convergence uniforme sur
[α, 2π − α] pour tout α ∈ ]0, π[. On conclut qu’il y a convergence simple sur ]0, 2π [, et que la
fonction limite f est continue sur [α, 2π − α] pour tout α > 0, donc continue sur ]0, 2π [.
Il y a bien convergence simple en 0 (la série est nulle lorsque x = 0), il y a donc convergence
simple sur [0, 2π [, donc sur R car les fonctions en présence sont 2π-périodiques.
b) C’est un peu technique. Comme les fonctions en présence sont 2π-périodiques et impaires, il
suffit de prouver la convergence uniforme sur [0, π]. Le problème est en x = 0 car on a vu plus
haut qu’il y avait convergence uniforme sur [α, 2π − α] pour tout α > 0.
Commençons par remarquer que
+∞
πλN
inx
∀x ∈ ]0, π] , ∀N ∈ N, λ n e ≤ . (∗)
x
n=N
280 4. SUITES ET SÉRIES
6. Problèmes
Problème 1. Donner un équivalent, lorsque n → ∞, d’une suite réelle (u n) vérifiant
1
u 0 > 0, ∀n ∈ N, un+1 = un + α , (α > −1).
un
Solution. On remarque déjà que (u n) diverge vers +∞. En effet, (un ) est croissante. Si elle était
majorée, elle convergerait et sa limite vérifierait = + a/α, ce qui est absurde. La suite (u n )
est donc croissante et non majorée, donc diverge vers +∞.
Pour rechercher un équivalent de (un ), on va appliquer une méthode classique (déjà utilisée
dans l’exercice 7 page 207). On cherche s’il existe β > 0 tel que la suite (uβn+1 − uβn) converge.
Comme α + 1 > 0 et que (u n ) diverge vers +∞, on peut écrire
β
β 1 β 1
un+1 = un 1 + α+1 β
= u n 1 + α+1 + o donc u βn+1 − u βn ∼ βuβn−(α+1) .
un un uα+1
n
On choisit β = α + 1, de sorte que uα+1 α+1 ∼ α + 1. En sommant ces équivalents (on peut,
n+1 − un
voir le théorème 5 page 210), on obtient
n−1
uα+1
n − u α+1
0 = (u α+1 α+1
k+1 − uk ) ∼ n(α + 1),
k=0
Solution. 1/ En remarquant que τ (n) = m|n 1 (on somme 1 sur les entiers m qui divisent n),
une inversion de sommation donne
F (x) = 1= 1. (∗)
1≤n≤x m|n 1≤m≤x n≤x
m|n
Or n≤x,m|n 1 est le nombre d’entiers naturels inférieurs à x divisibles par m. Ces éléments
sont m, 2m, . . . , [x/m]m ( où [ y ] désigne la partie entière de y ), donc au nombre de [x/m]. Donc
finalement x
F (x) = .
1≤m≤x
m
En utilisant l’encadrement x/m − 1 < [x/m] ≤ x/m, en déduit
1 1
x − x < F (x) ≤ x ,
1≤m≤x
m 1≤m≤x
m
et comme 1≤m≤x 1/m = log x + O (1) (c’est classique, voir la page 211), on en déduit F (x) =
x log x + O (x), en particulier F (x) ∼ x log x.
2/ Pousser l’asymptotique dans le raisonnement précédent ne permet pas d’obtenir le résultat.
On effectue le changement de variable k = n/m dans la dernière somme de (*), qui donne
F (x) = 1= 1. (∗∗)
1≤m≤x 1≤k 1≤km≤x
1≤km≤x
Comme
√ suggéré, découpons cette dernière somme en fonction de la position de k, m par rapport
à x. On peut écrire
√ x √
F (x) = 1+ 1− 1=2 1 − [ x]2 = 2 − [ x] 2.
√ √ √ √ √ m
1≤k≤ x 1≤m≤ x 1≤k,m≤ x 1≤m≤ x 1≤m≤ x
1≤km≤x 1≤km≤x 1≤km≤x
Ici aussi on utilise l’encadrement y − 1 < [y ] ≤ y, qui permet d’obtenir, à partir de la dernière
expression
x √ √ 1 √
F (x) = 2 + O ( x) − ( x + O (1))2 = 2x − x + O( x). (∗∗∗)
√ m √ m
1≤m≤ x 1≤m≤ x
L’asymptotique d’ordre 3 des nombres harmoniques (voir page 211) permet d’écrire
1 √ √ 1 √
= log x + γ + O(1/ x) = log x + γ + O(1/ x).
√ m 2
1≤m≤ x
+∞ 2
Problème 3 (Deux techniques originales pour calculer n=1 1/n ). 1/ Pour
tout m ∈ N∗, on définit la fonction
sin(2m + 1)θ
fm : ]−π, π[ {0} → R θ → .
sin2m+1 θ
Solution. 1/ a) En écrivant que sin(2m + 1)θ est la partie imaginaire de (cos θ + i sin θ )2m+1 ,
on trouve
m
∀θ ∈ R, sin(2m + 1)θ = C 22km+1 k
+1 (−1) sin
2k+1
θ cos2(m−k) θ,
k=0
2
m 2k+1 k m−k
donc fm (θ) = Pm (cotan θ ) avec Pm (X) = k=0 C2m+1 (−1) X .
2m+1
b) L’expression fm (θ) = sin((2m + 1)θ )/ sin θ montre que
kπ 2 kπ
∀k ∈ N, 1 ≤ k ≤ m, fm =0 donc Pm cotan = 0.
2m + 1 2m + 1
On a ainsi trouvé m racines distinctes du polynôme Pm, et comme deg(P m) = m, on a trouvé
toutes les racines de Pm . La somme des racines de Pm est l’opposé du rapport du coefficient de
X m−1 par celui de X m, donc
m
kπ C3 2m(2m − 1)
cotan 2
= 21m+1 = . (∗)
2m + 1 C2m+1 6
k=1
Pour en déduire la valeur de 1/n 2 , nous allons comparer cotan 2x et 1/x2 . Montrons
π 1
∀x ∈ 0, , cotan 2x ≤ 2 ≤ 1 + cotan 2 x. (∗∗)
2 x
L’inégalité des accroissements finis donne tan x ≥ x sur ]0, π/2[, d’où la première inégalité de
(**). Pour la seconde, on utilise la majoration sin x ≤ x sur ]0, π/2[ (qui s’obtient aussi avec
l’inégalité des accroissements finis) qui entraı̂ne 1 + cotan 2x = 1/ sin 2 x ≥ 1/x2 .
De (*) et (**), on tire
m
2m(2m − 1) (2m + 1) 2 2m(2m − 1)
≤ ≤ +m
6 k2 π2 6
k=1
donc
m
2m(2m − 1) π 2 1 2m(2m − 1) π2 m
2
≤ 2
≤ 2
+ π2 .
(2m + 1) 6 k (2m + 1) 6 (2m + 1)2
k=1
Ceci est vrai pour tout m ∈ N ∗. En faisant m → +∞, on en déduit +∞ 2 2
k=1 1/k = π /6.
2/ a) On sait que la fonction arcsinus est développable en série entière sur ] − 1, 1[, plus
précisément
+∞
1 1 · 3 · · · (2n − 1)
∀x ∈ ]−1, 1[ , arcsin x = x + un x2n+1 avec un = . (∗∗∗)
n=1
2n + 1 2 · 4 · · · (2n)
L’idée est ensuite de remplacer x par sin t dans cette expression.
284 4. SUITES ET SÉRIES
On pourrait montrer la convergence normale de u n x2n+1 sur [−1, 1] en utilisant la règle
de Raab-Duhamel pour estimer un , mais ici, on peut mieux faire. La positivité des un entraı̂ne
pour tout N ∈ N∗ , d’après (***)
N
π
∀x ∈ ]−1, 1[ , x+ un x2n+1 ≤ arcsin x ≤ arcsin 1 = ,
2
n=1
faisant tendre x vers 1 on en déduit 1 + N
et en n=1 un ≤ π/2. Ceci est
vrai pour tout N ∈ N ,
∗
donc un est majorée, et comme les termes de cette série sont positifs, un = |un | converge.
2n+1
Ainsi, un x converge normalement sur [−1, 1]. Sa somme définit donc une fonction conti-
nue sur [−1, 1]. L’égalité (***) vaut sur ] − 1,1[, elle vaut donc sur [−1, 1] par continuité.
Finalement, nous avons montré que x + u nx2n+1 converge normalement vers la fonction
arcsinus sur [−1, 1]. On en déduit le résultat demandé en remplaçant x par sin t (t ∈ [−π/2, π/2]).
b) La convergence normale de la série de fonctions nous autorise à l’intégrer terme à terme, ce
qui donne
π/2 π/2
+∞ +∞
+∞
π2 2n+1 2 · 4 · · · (2n) 1
= t dt = 1 + un sin t dt = 1 + un =1+
8 0 n=1 0 n=1
3 · 5 · · · (2n + 1) n=1
(2n + 1)2
où nous avons utilisé la valeur de l’intégrale de Wallis 0π/2 sin 2n+1 t dt (voir l’exercice 1 page 130).
Pour en déduire S = +∞ 2
n=1 1/n , il suffit de séparer les termes d’indices pairs et impairs
+∞
+∞
1
1 π2 S π2
S= 2
+ 2
= + d’où S = .
n=0
(2n + 1) n=1
(2n) 8 4 6
(on a bien le droit d’intervertir les signes de sommation car la série de fonctions définissant F
converge uniformément sur [0, 1] comme on l’a vu ; par ailleurs, la dernière intégrale converge
absolument au vu des conditions de croissance satisfaites par f ). Comme de plus F est de classe
C 1 , sa série de Fourier converge uniformément vers F , d’où la formule sommatoire de Poisson.
2
b) Soit α > 0. Nous appliquons la formule sommatoire de Poisson à la fonction f : x → e−αx .
Les coefficients f ∗ (n) sont donnés par
+∞ +∞
1 √ π −π 2n2/α
∗ −αt2 −2iπnt −u2 −2iπnu/ α
∀n ∈ Z, f (n) = e e dt = √ e e du = e
−∞ α −∞ α
(où on a utilisé le résultat de la question 3/ de l’exercice 4 de la page 168). En appliquant la
formule sommatoire de Poisson avec x = 0, on déduit
π −π2n2 /α
−αn2
e = e .
α
n∈Z n∈Z
Ceci est vrai pour tout α > 0, et en changeant α en πs , on obtient le résultat désiré.
Remarque.
La dernière identité est non-triviale. En considérant la série entière Θ(x) =
n2
√
n∈Z x , (fonction thêta de Jacobi) elle s’exprime en écrivant s Θ(e−sπ ) = Θ(e−π/s).
Ainsi, le comportement de Θ(x) en x = 1 est relié à son comportement en x = 0.
Problème 5. Soit (un )n∈N une suite complexe vérifiant une récurrence linéaire d’ordre
h ∈ N∗ , c’est-à-dire
∃a1 , . . . , ah ∈ C, ∀n ≥ h, un = a 1un−1 + · · · + ah un−h . (∗)
En considérant la série entière un zn , démontrer la proposition 3 page 202.
Solution. Si la série entière un zn a un rayon de convergence non nul (on ne sait pas encore
si c’est le cas), la récurrence (*) entraı̂ne, après produit par zn et sommation sur n (lorsque z
est dans le disque de convergence) que sa somme f vérifie
f (z ) − Ph (z) = a1 z [f (z ) − P h−1(z)] + · · · + a h−1 z h−1 [f (z ) − P1 (z)] + ah zhf (z ) (∗∗)
où pour tout k, 1 ≤ k ≤ h, Pk (z) = u0 +u1 z + · · ·+ uk−1 z k−1. Ceci s’écrit aussi f (z )Q(z) = P (z )
où
Q(z ) = 1 − a 1 z − · · · − ah z h et P (z) = Ph (z ) − a 1 zPh−1(z ) − · · · − a h−1 zh−1 P 1 (z ).
Ainsi, f (z ) = P (z )/Q(z ) est une fraction rationnelle. Par ailleurs, 0 n’est pas un pôle de f (z )
donc P (z )/Q(z ) est développable en une série entière vn zn dont le rayon de convergence est
non nul (voir page 251). Sa somme g vérifie Q(z )g (z ) = P (z ) sur son disque de convergence,
autrement dit g vérifie la même égalité que f dans (**), donc la suite (vn ) vérifie la récurrence
(*). Par ailleurs, l’égalité (**) vérifiée par g montre que pour tout k, 0 ≤ k < h, le coefficient
de zk dans g (z ) − Ph(z) est nul. Autrement dit, v k = uk lorsque 0 ≤ k < h. Finalement, la suite
(v n) vérifie la même récurrence que (u n) avec lesn mêmes conditions initiales. Ces suites sont
donc égales, ce qui montre finalement que u n z a bien un rayon de convergence non nul et
que sa somme f vérifie f (z ) = P (z )/Q(z ) sur son disque de convergence.
286 4. SUITES ET SÉRIES
Le polynôme P vérifie deg(P ) < h = deg(Q) par construction, on peut donc écrire la décomposi-
tion en éléments simples de P /Q sous la forme
p αi
P (X ) ci,j
= (ci,j ∈ C).
Q(X ) (X − 1/x i )j
i=1 j=1
On en déduit (voir page 251) que le développement en série entière de f (z) = P (z )/Q(z ) s’écrit
+∞
p αi j j
(−1) c i,j x i (n + j − 1)! n n
f (z ) = xi z .
i=1 j=1
(j − 1)! n=0
n!
√
Problème 6 (Nombres de Pisot). a) Montrer que la série sin(π (2+ 3)n ) converge.
b) Plus généralement, on considère un polynôme P de degré d, unitaire, à coefficients
entiers, et on suppose que ses racines ξ1, . . . , ξ d vérifient |ξ1| > 1 et |ξ k| < 1pour tout
k ∈ {2, . . . , d} (on dit que ξ1 est un nombre de Pisot). Montrer que la série sin(πξ n1)
converge.
√ √
Solution. a) Il suffit de remarquer que pour tout n ∈ N, (2 + 3)n + (2 − 3)n est un entier (on
s’en convainc
√ en développant chacun
√ des deux termes par la formule du binôme).
√ Ceci entraı̂ne
√
| sin(π(2 + √3)n )| = | sin(π(2 − 3)n )| pour tout n ∈ N. Comme | sin(π(2 − 3)n )| ≤ π(2 − 3) n
et que |2 − 3| < 1, on en déduit que notre série converge absolument, donc converge.
b) Le polynôme P est unitaire à coefficients entiers, on en déduit que pour tout n ∈ N, Sn =
ξ n1 + · · · + ξ nd est un entier (S n s’exprime comme un polynôme à coefficients entiers, symétrique
en les ξi, donc s’exprime comme un polynôme à coefficients entiers en les fonctions symétriques
6. PROBLÈMES 287
des racines de P , et ces dernières sont entières donc S n ∈ Z. On peut aussi retrouver ce dernier
résultat grâce aux formules de Newton — voir le tome Algèbre). Ceci entraı̂ne
| sin(πξ 1n )| = | sin (π (ξ2n + · · · + ξnd)) | ≤ π |ξ n2 + · · · + ξnd | ≤ π (|ξ2 |n + · · · + |ξd |n )
et comme |ξ k| < 1 pour k ≥ 2, on en déduit la convergence de la série proposée.
Solution. a) C’est classique. Nous allons utiliser une méthode connue sous le nom de principe des
tiroirs. Pour tout x ∈ R, notons [x] sa partie entière. On considère les nombres uk = kα − [kα]
pour k = 1, 2, . . . , N + 1. Chacun des uk est élément de [0, 1[, et pour tout k, il existe un unique
i ∈ {0, . . . , N − 1} tel que u k ∈ [ Ni , i+1N [. Autrement dit, nous rangeons les N + 1 nombres uk
dans les N “boites” [0, N [, [ N , N [, . . . , [ N−1
1 1 2
N
, 1[. Il existe donc une boite contenant au moins
deux des nombres uk , ce qui entraı̂ne
1
∃a, b ∈ {1, . . . , N + 1}, a < b, |u b − u a| < ,
N
ce qui s’écrit encore |(b − a)α − ([bα] − [aα])| < 1/N . En posant p = [bα] − [aα] et q = b − a, on
a donc (p, q) ∈ N2 , 1 ≤ q ≤ N et |qα − p| < 1/N, d’où le résultat.
b) La question précédente entraı̂ne l’existence, pour tout n ∈ N∗, d’un couple (p n , qn ) ∈ N2 tel
que 1 ≤ qn ≤ n et |π − pn/q n | ≤ 1/(nq n) ≤ 1/q2n . La suite de rationnels (pn /qn ) tend vers le
nombre irrationnel π , donc (pn) et (q n) tendent vers +∞ (voir l’exercice 4 page 205). Ensuite,
pour tout n ∈ N ∗, on a |p n − πqn | ≤ 1/q n donc
sin 2 pn = sin 2(p n − πqn ) ≤ (pn − πqn )2 ≤ 1/q n2 ,
donc p2n sin2 pn ≤ p2n /q2n , et comme (p n /qn ) converge, la suite (p2n sin 2 pn ) est majorée. Donc la
suite de terme général (p2n sin2 pn )−1 est minorée par une constante > 0. On en déduit que le
terme général de la série proposée ne tend pas vers 0, donc la série diverge.
Problème 8. Soit g : R+ → R une fonction continue, convexe, avec lim x→+∞ g (x) = 0.
a) Montrer que la fonction suivante est bien définie
+∞
S : ]0, +∞[ → R h → (−1) n g (nh).
n=0
g(0)
b) Montrer que lim+ S (h) = .
h→0 2
Solution. a) Si on montre que g est décroissante sur R+, alors g sera positive (car g(x) → 0
quand x → +∞) et la série (−1)n g (nh) sera convergente pour tout h > 0 (série alternée dont
la valeur absolue du terme général décroı̂t et tend vers 0), ce qui prouvera le résultat.
Soient a, b ∈ R, 0 ≤ a < b. Comme g est convexe, son graphe à droite de b est au dessus de
la corde reliant (a, g(a)) à (b, g (b)) ce qui s’écrit
g (b) − g (a)
∀t > b, g (t) ≥ g (b) + (t − b) .
b−a
288 4. SUITES ET SÉRIES
Comme g (t) tend vers 0 à l’infini, ceci n’est possible que si (g (b) − g (a))/(b − a) ≤ 0, donc
g (b) ≤ g (a). Donc g est bien décroissante.
b) On remarque que R : h → S (h) − g(0)/2 vérifie
+∞
1
∀h > 0, R(h) = (−1) nA n (h) avec A n(h) = g (nh) − g((n + 1)h).
2 n=0
Comme g est décroissante, on a A n(h) ≥ 0 pour tout n et pour tout h > 0. De plus la convexité
de g entraı̂ne
∗ (n − 1)h + (n + 1)h g ((n − 1)h) g ((n + 1)h)
∀h > 0, ∀n ∈ N , g(nh) = g ≤ +
2 2 2
c’est-à-dire g (nh) − g((n + 1)h) ≤ g((n − 1)h) − g(nh). Autrement dit, la suite (An (h)) décroı̂t
pour tout h > 0.
Finalement, (−1) n A n (h) apparaı̂t comme une série alternée dont la valeur absolue du
terme général décroı̂t et tend vers 0. On peut donc écrire (voir le théorème 6 page 214)
+∞
∀h > 0, |2R(h)| = (−1)nA n(h) ≤ A0(h) = g (0) − g (h).
n=0
On en déduit que R(h) tend vers 0 lorsque h → 0+ (g est continue), donc S (h) → g (0)/2 lorsque
h → 0+ .
Problème 10 (Une série enti ère semi-convergente sur tout son cercle de
convergence). 1/ Soient(a n)n∈N∗ et (bn) n∈N∗ deux suites complexes. On pose σ0 = 0
∗ n
et pour tout n ∈ N , σn = k=1 ak . Montrer que anbn converge dans les cas suivants :
a) (i) (σn ) √
est bornée, (ii) |bn− bn+1 | converge,
√ (iii) limn→+∞ bn = 0. √
b) (i) (σn/ n) est bornée, (ii) |bn − bn+1| n converge, (iii) lim n→+∞ bn n = 0.
6. PROBLÈMES 289
( où [ x] désigne la partie entière de x) est convergente en tout point de son cercle de
convergence |z | = 1, mais n’est absolument convergente en aucun point de ce cercle
(traiter séparément les cas z = 1 et z = 1).
Solution. 1/ Dans les deux cas, on utilisera la relation suivante, conséquence d’une transforma-
tion d’Abel :
n
n
n−1
∀n ∈ N ∗, ak b k = (σk − σ k−1 )bk = σk (b k − bk+1 ) + σ nbn . (∗)
k=1 k=1 k=1
a)
Si M désigne un majorant de la suite (|σn |), on a |σ n(bn − bn+1 )| ≤ M |bn − b n+1|, donc
σ n (bn − b n+1 ) converge absolument d’après (ii),
et comme |σn bn | ≤ M |b n| tend vers 0 d’après
(iii), on en conclut avec (*) la convergence de akbk.
√ √
b) Soit M un majorant √ de (|σn/ n|), de sorte que |σ n| ≤ M n pour tout n. On a |σn(bn −
b n+1 )|√≤ M |bn − bn+1 | n donc σ n(bn − bn+1) converge absolument d’après (ii). Or |σ nbn | ≤
M |bn | n tend vers 0 d’après (iii), d’où le résultat avec (*).
√
2/ Commençons par le cas z = 1. D’après la question 1/b) appliquée avec an = (−1)[ n] et
√
[ n]
b n = 1/n, la conver gence de (−1) /n sera assurée si on montre que les sommes partielles
√
[ n] √
σn de (−1) sont majorées en valeur absolue par un terme de la forme M n. Montrons
donc ce point.
Pour tout entier naturel impair p on a
(p+2)2 −1 (p+1)2 −1 (p+2) 2−1
√ √ √
[ n] [ n]
(−1) = (−1) + (−1) [ n]
= (−1) p(2p + 1) + (−1) p+1(2p + 3) = 2.
n=p2 n=p 2 n=(p+1)2
Donnons nous maintenant N ∈ N∗ et notons N 0 le plus grand entier tel que (2N0 + 1)2 ≤ N .
On a
(2N 0+1)2 −1 N 0−1 (2k+3) 2 −1 N
0−1
√ √ √
(−1) [ n] = (−1)[ n] = 2 = 2N0 ≤ N − 1,
n=1 k=0 n=(2k+1) 2 k=0
(ii). Pour montrer que |bn − bn+1| converge, on remarque d’abord
1 1 1 1
si ∃p ≥ 2 (p ∈ N), n + 1 = p 2 alors |bn − b n+1 | = + = 2 + 2
n n+1 p −1 p
1 1 1
si ∃p ∈ N∗ , p2 ≤ n < n + 1 < (p + 1) 2 alors |bn − bn+1 | = − = .
n n+1 n(n + 1)
On en déduit
√
N N [ N+1]
1 1 1
∗
∀N ∈ N , |b n − b n+1| ≤ + 2
+ 2 ,
n(n + 1) p −1 p
n=1 n=1 p=2
2
et
comme les séries 1 / (n(n + 1)), 1 / (p − 1) et 1/p2 convergent, on en déduit que
|b n − b n+1 | est bornée donc converge.
(iii) est trivialement vérifiée.
√
Ainsi, pour tout z ∈ C tel que |z | = 1, la série (−1)[ n]zn /n converge, mais ne converge pas
absolument. En d’autres termes, notre série entière est semi-convergente en tout point de son
cercle de convergence.
n
Problème 11. a) Montrer que la série entière z /(n!) 2 a un rayon de convergence
infini. Soit f sa somme.
b) Pour tout x > 0, comparer f (x) et
π/2
√
I (x) = exp(2 x sin t) dt.
−π/2
Solution. n
a) C’est facile, car on a l’encadrement 0 ≤ 1/(n!) 2 ≤ 1/n! et la série z /n! a un rayon de
convergence infini.
√
b) Fixons x > 0. La série√ de fonctions (2 x sin t) n/n! de la variable t converge
√ normalement
sur [−π/ 2, π/2] (car 2 x sin t y est bornée) vers la fonction t → exp(2 x sin t), donc on est
autorisé à intervertir les signes de sommation en écrivant
π/2
+∞
2n xn/2
+∞
2n xn/2 π/2
I (x) = sin n t dt = I n, où ∀n ∈ N, In = sinn t dt. (∗)
−π/2 n! n! −π/2
n=0 n=0
Lorsque n = 2k + 1 est impair, l’intégrande de I2k+1 est impaire donc I2k+1 = 0. Lorsque n = 2k
est pair, I2k s’exprime au moyen des intégrales de Wallis (voir l’exercice 1 page 130)
π/2
(2k − 1)(2k − 3) · · · 1 π (2k )!
I 2k = 2 sin2k t dt = = 2k π,
0 2k(2k − 2) · · · 2 2 2 (k!)2
et donc (*) s’écrit
+∞
+∞
2 2k xk 1 xk f (x)
I (x) = I 2k = 2
= .
(2k )! π (k!) π
k=0 k=0
c) Il s’agit de donner un équivalent de l’intégrale I (x) lorsque x → +∞. On pourrait s’en tirer
en appliquant directement la méthode de Laplace (voir le théorème 4 page 164). Comme cette
dernière n’est pas au programme de mathématiques spéciales, nous allons nous mettre dans les
conditions du concours et en faire abstraction.
6. PROBLÈMES 291
Chaque
a k(n) converge vers 1 lorsque n → +∞, ce qui suggère que A n (α) converge vers
k K
k≥0 1/α . Prouvons ce résultat. Soit ε > 0. Fixons K ∈ N tel que 1/α < ε et N > K
tel que a K (N ) > 1 − ε. Pour 0 ≤ k ≤ K et n ≥ N , on a ak (n) ≥ a K(N ) > 1 − ε, donc
1 K 1 n
1 − 1/α K+1
1 + (1 − ε) = 1 + (1 − ε) < An (α) ≤ .
1 − 1/α αk αk
k=1 k=1
α α
On en déduit (1 − ε)2 < An(α) ≤ , et ceci pour tout n ≥ N . Donc A n (α) converge
α−1 α−1
vers α/(α − 1) lorsque n → ∞. Avec la formule de Stirling, on trouve
e n 1 α α (αe) n
Pn (α) ∼ (αn)n √ = √ et Rn (α) = eαn − Pn (α) ∼ e αn.
n 2πn α − 1 α − 1 2πn
(on a utilisé l’inégalité eα ≥ αe, la fonction concave e x étant au dessus de sa tangente en x = 1).
292 4. SUITES ET SÉRIES
– Cas α = 1. C’est plus délicat. On va d’abord estimer An (1) − Bn (1) ; pour cela, on coupe la
somme sur k jusqu’a un entier m = [nλ ] , où λ ∈ ]0, 1[ sera fixé plus tard ([x] désigne la partie
entière de x). On écrit
m
n−1
+∞
An (1)−Bn(1) = 2+α n+βn , avec αn = (ak (n) −bk (n)), βn = ak (n) − b k (n).
k=1 k=m+1 k=m+1
On a m3 /n 2 ≤ n 3λ−2, on va donc choisir λ < 2/3 de sorte que m 3 /n2 = o(1). Ceci assure
l’existence d’une constante M > 0 telle que
|ak (n) − bk (n)| = ak (n) |1 − exp(yk (n) − xk (n))| ≤ M ak(n) |y k(n) − x k (n)| ≤ 4M n 3λ−2 ak (n)
donc
|αn | ≤ 4M n3λ−2 A n(1).
Par ailleurs ak (n) ≤ b k (n) (car ak (n)/bk (n) = 1≤j ≤k (1 − j2 /n2 ) ≤ 1) donc
n−1
+∞
+∞
+∞
1
k
n
|βn | = (bk(n) − ak (n)) + bk (n) ≤ bk (n) ≤ bm (n) ≤ bm(n) .
1 + m/n m
k=m+1 k=n k=m+1 k=1
Or
2λ−1
b m(n) = e−sm(n)+y m (n) = O (e−s m(n) ) = O (e−m(m+1)/(2n)) = O (e −n /2
).
1
On choisit λ = 2 (1/2 + 2/3) = 7/12 de sorte que 2λ − 1 > 0 et λ < 2/3. Avec ce choix de λ, les
estimations précédentes deviennent
1/6/2
|α n | ≤ 4M n−1/4 An (1) et |β n | = O (e−n n 5/12) = o(1).
Comme An (1) ≥ 1 on a β n = o(A n (1)), donc A n (1) − Bn (1) = 2 + αn + βn = 2 + o(An(1)).
Ceci entraı̂ne Pn (1) − Rn (1) = (n n/n!)(A n (1) − Bn (1)) = 2nn /n! + o(P n(1)) = o(en ). Comme
Pn (1) + Rn(1) = en on en déduit P n(1) ∼ Rn (1) ∼ 12 en.
6. PROBLÈMES 293
Problème 13. Soit a
n une série complexe absolument convergence. On suppose que
pour tout entier k ∈ N , +∞
∗ k
n=0 an = 0. Montrer que la suite (an ) est nulle.
Solution. On va raisonner par l’absurde en supposant que la suite (an) n’est pas nulle, de sorte
que M = supn∈N |an | > 0. Remarquons que (an) converge vers 0 (puisque k an converge) et
donc si k ∈ N∗ et pour n assez grand, |an |k ≤ |a n| ce qui prouve que an converge. Comme
(an) tend vers 0, il existe n 0 ∈ N tel que |a n | < M/2 pour n ≥ n0 , donc il n’existe qu’un nombre
fini de valeurs de an qui vérifient |an | ≥ M/2, on en déduit que I = {n ∈ N | |a n | = M } est
non vide. Quitte à diviser tous les termes de la suite (an ) par M , on peut même supposer que
k
M = 1. On va mettre de coté les termes an pour n ∈ I , en montrant que Sk = n∈I an tend vers
0. Soit ε > 0 ; on fixe n1 ≥ n0 tel que n≥n 1 |an | < ε. Soit q = supn∈I,n≤n 1 |a n|. Par définition
de I, on a q < 1. et on écrit
|S k | ≤ |an |k + |an | ≤ n1 qk + ε.
n∈I,n≤n1 n≥n 1
Solution. a) D’après le théorème de Weierstrass, il existe une suite de polynômes (Qk ) qui
converge uniformément vers f sur [0, 1]. L’idée est de perturber légèrement les Qk pour que
ceux ci prennent les mêmes valeurs que f sur les points (ai )1≤i≤n . Pour cel à on considère les
polynômes d’interpolation de Lagrange (voir le tome Algèbre) définis par
x − aj
L i(x) = .
ai − a j
j =i
Ils vérifient
nL i(xj ) = 0 si i = j , Li (xi) = 1. Pour tout k, on définit maintenant P k(x) =
Qk (x) + i=1(f (ai ) − Q k (a i))Li (x). La fonction P k est un polynôme qui prend les mêmes
valeurs que f sur les points (a i )1≤i≤n , et en utilisant la notation de la norme de la convergence
294 4. SUITES ET SÉRIES
uniforme g ∞ = supx∈[0,1] |g (x)| pour toute fonction réelle continue g sur [0, 1], on a
n
n
f − Pk ∞ ≤ f − Q k∞ + |f (a i) − Qk (ai )| · Li ∞ ≤ M f − Q k ∞ , M = 1+ |Li∞ .
i=1 i=1
( où εi = f (a i − δ )/|f (a i−δ)| ∈ {−1, 1} a le signe de f (a i−δ ) et εi = f (a i+ δ )/|f (ai + δ )| ∈ {−1, 1}
a le signe de f (ai + δ)). On définit ensuite, pour tout i
(x − ai ) mi εi
∀x ∈ ]ai − δ/2, ai + δ/ 2[ , g k(x) = .
(δ/2) mi k
Ainsi g est définie sur [0, 1], continue sur cet intervalle, a les mêmes zéros que f et de plus
f − gk ∞ < 1/k . On définit maintenant hk (x) = gk (x)/P (x) si x ∈ {a1 , . . . , an} et hk (ai ) =
εi/(k (δ/2) mi ). Ainsi définie, h k est une fonction continue qui ne s’annule pas sur [0, 1] et qui
verifie gk = P hk . Comme on l’a vu au début de la solution de cette question, on peut donc
trouver un polynôme Qk ne s’annulant pas sur [0, 1] tel que h k − Qk ≤ 1/k .
1 + P ∞
f − P Qk ∞ ≤ f − P hk ∞ + P hk − P Qk ∞ ≤ f − gk ∞ + P ∞ · Q k − hk ∞ ≤ .
k
Ainsi, les Pk = P Qk sont des polynômes qui convergent uniformément vers f sur [0, 1] et qui
ont les mêmes zéros que f .
Problème 15. Pour tout entier naturel n, on note ν2(n) le nombre de “1” dans l’écriture
ν2 (n)
binaire de n. Montrer que la série converge et calculer sa somme.
∗
n(n + 1)
n∈N
Solution. Soit n ∈ N∗ et n = pk=0 ε k 2k son écriture binaire (εk ∈ {0, 1} pour tout k et εp = 1).
On a ν (n) = pk=0 ε k ≤ p + 1. Par ailleurs, 2 p = ε p2p ≤ n donc p ≤ log 2 n, donc finalement
√ √
ν2 (n) ≤ 1 + log2 n. Comme 1 + log2 n = O ( n) lorsque n → +∞, on en déduit ν 2(n) = O ( n),
ν2 (n)
donc nν(2n(+1)
n)
= O (n −3/2 ). La série à termes positifs n(n+1) est donc convergente.
6. PROBLÈMES 295
Pour calculer sa somme S, on remarque que pour tout entier naturel n, ν2 (2n) = ν2 (n) et
ν2 (2n + 1) = ν2 (n) + 1. En séparant les termes pairs et impairs de la série, ceci entraı̂ne
+∞
+∞
+∞
+∞
ν2 (2n) ν 2 (2n + 1) ν2 (n) ν2(n) + 1
S= + = +
n=1
2n(2n + 1) n=0 (2n + 1)(2n + 2) n=1 2n(2n + 1) n=0 (2n + 1)(2n + 2)
+∞
+∞
1 1 1
= ν2(n) + +
n=1
2n(2n + 1) (2n + 1)(2n + 2) n=0
(2n + 1)(2n + 2)
+∞
2ν2 (n) 1
+∞
1
+∞
S (−1) n−1
= + − = + .
n=1
2n(2n + 2) n=0 2n + 1 2n + 2 2 n=1 n
+∞ (−1)n−1
Il est bien connu que n=1 n = log 2 (voir par exemple la remarque de l’exercice 10
page 263), donc finalement, on a S = S/2 + log 2, donc S = 2 log 2.
Problème 16 (Théor ème de réalisation de Borel). Soit (a n)n∈N une suite com-
plexe quelconque.
Soit ϕ : R → R une application de classe C∞ telle que ϕ(x) = 1 pour x ∈ [−1, 1] et
ϕ(x) = 0 pour |x| ≥ 2 (une fonction de ce type est construite dans l’exercice 3 page 79).
(n−1)
On pose ϕn (x) = x n ϕ(x), on note Mn un majorant de |ϕn |, |ϕn|, . . . , |ϕn | sur R, et on
choisit
une suite réelle (λn)n∈N vérifiant λn ≥ 1 pour n ∈ N, tendant vers +∞, et telle
que |an|M n /λn converge.
Montrer que la fonction f : x → +∞ n
n=0 anx ϕ(λn x) est bien définie, de classe C
∞
sur
(n)
R et vérifie f (0)/n! = an pour tout n ∈ N.
Solution. Notons d’abord que Mn existe bien car ϕ n est à support compact, et qu’on peut choisir
par exemple λn = 1 + n2 (1 + |an|Mn ). La fonction f est bien définie en x = 0, et pour x = 0
également car les termes de la série sont nuls à partir d’un certain rang (dès que |λnx| > 2).
Montrons maintenant par récurrence sur p ∈ N que f est de classe Cp sur R et que
+∞
(p)
f (x) = a nλ pn−n ϕ(np) (λn x). (∗)
n=0
Pour p = 0, l’écriture (*) découle de la définition de ϕn , et la série (*) converge normalement car
pour n ≥ 1, |anλ −n n ϕ n (λn x)| ≤ |an|Mn /λn , d’où la continuité de f sur R. Supposons maintenant
le résultat vrai au rang p et montrons le au rang p + 1. La série des termes dérivés de (*)
(p+1)
a nλ pn+1−n ϕ n (λn x) converge bien normalement car pour n ≥ p + 2, on a la majoration
p+1−n (p+1)
|an λ n ϕn (λn x)| ≤ |an|M n /λn . On en déduit que f (p) est de classe C1 (donc f de classe
C p+1) et que la formule (*) est bien vraie au rang p + 1.
Il suffit maintenant de remarquer que ϕn (x) = x n pour x ∈ [−1, 1] donc ϕ(pp) (0) = p! et
(p)
ϕn (0) = 0 si n = p. Avec la formule (*), on en déduit que f (p) (0) = p!ap .
Problème 17. Soit (an )n∈N une suite strictement croissante d’entiers, avec a0 > 0. Pour
tout n ∈ N, on pose bn = ppcm (a 0 , a1 , . . . , a n). Étudier la nature de la série 1/bn .
Solution. Nous allons montrer que la série converge. La suite (bn) est croissante. Soit ϕ la
fonction strictement croissante de N dans N telle que
∀n ∈ N, b ϕ(n) = bϕ(n)+1 = · · · = b ϕ(n+1)−1 < b ϕ(n+1) .
Comme bϕ(n) divise b ϕ(n+1), on a bϕ(n+1) ≥ 2bϕ(n), donc b ϕ(n) ≥ 2n pour tout n ∈ N.
296 4. SUITES ET SÉRIES
Par ailleurs,
ϕ(n+1)−1
1 ϕ(n + 1) − ϕ(n)
∀n ∈ N, Pn = = . (∗)
bk b ϕ(n)
k=ϕ(n)
Si bk = bk+1 , cela signifie que ak+1 | bk . En particulier, les entiers a ϕ(n)+1, . . . , aϕ(n+1)−1 divisent
√
b ϕ(n) pour tout n. Or tout entier N a au plus 2 N diviseurs, car l’application
∗
√ N
{d ∈ N | d | N } → {1, 2, . . . , N } d → inf d,
d
est telle que tout élément de l’image d’arrivée a au plus deux antécédents. Donc b ϕ(n) a au plus
2 bϕ(n) diviseurs, donc ϕ(n + 1) − ϕ(n) ≤ 2 bϕ(n). On en déduit avec (*) que
2 2
Pn ≤ ≤ n/2 ,
bϕ(n) 2
donc Pn converge, et comme les séries considérées sont à termes positifs, 1/bn converge.
p
p
∀p, n ∈ N (∆ u)n = (−1)p−kCpk un+k .
k=0
b) On suppose que la série (−1)n un converge (on ne suppose rien de plus sur (u n)) et
on note S sa somme. Montrer que pour tout n ∈ N on a
n n+1 ∞
(−1)p p 1 p
S− (∆ u)0 = n+1 C n+1 Rp, où Rp = (−1)k uk. (∗)
p=0
2p+1 2 p=0 k=p
p −p−1
c) En déduire que la transformée d’Euler, définie par la série p (−1) 2 (∆ pu) 0 , est
convergente et que
+∞
+∞
(−1) p p
(∆ u)0 = (−1) n un .
p=0
2 p+1 n=0
2/ a) Appliquer ce résultat à la série (−1)n /(n + 1) en explicitant les termes de la
transformée d’Euler correspondante.
b) Faire de même pour la série (−1)n /(2n + 1).
Solution. 1/a) On procède par récurrence sur p. Pour p = 0 c’est immédiat. Supposons le
résultat vrai pour p ∈ N et montrons le pour p+1. Il suffit d’écrire (∆p+1 u)n = (∆p u)n+1 −(∆p u)n
6. PROBLÈMES 297
D’après le résultat de la question a), la dernière somme est égale à (−1)n+1 (∆n u)0 , on a donc
n
n+1
n n p
(−1) (∆ u)0 = 2 C np Rp − Cn+1 R p. (∗∗)
p=0 p=0
En remplaçant (−1) n (∆n u)0 par l’expression à droite de (**), on en déduit l’identité (*), ce qui
achève la preuve par récurrence.
−n
n k
c) Compte tenu du résultat de la question précédente, il suffit
de prouver que 2 k=0 Cn R k
n
tend vers 0 lorsque n → +∞. Soit ε > 0. Comme la série (−1) u n converge, la suite de ses
restes (R k) converge vers 0. Soit N ∈ N ∗ tel que pour tout k ≥ N , |R k| < ε. Comme la suite
(Rk) converge vers 0, elle est bornée, donc ∃M > 0 tel que |R k | ≤ M pour tout k. Pour tout
n ≥ N on a
n N−1 n N−1 n
1 M k ε k M k ε k N nN−1
n Cnk R k ≤ n Cn + n Cn ≤ n n + n Cn ≤ M + ε.
2 2 2 2 2 2n
k=0 k=0 k=N k=0 k=0
N−1 n
Comme N est un entier fixé, N n /2 tend vers 0 lorsque n → +∞ donc lorsque n est
suffisamment grand, tout ceci est majoré par 2ε. On en déduit le résultat.
2/ a) Dans notre cas, on a un = 1/(n + 1). La formule de la question 1/a) donne
n k 1 n
1
n n−k Cn n k k k n (−1) n
(∆ u)0 = (−1) = (−1) (−1) Cn x dx = (−1) (1 − x)n dx = .
k+1 0 0 n+1
k=0 k=0
298 4. SUITES ET SÉRIES
2/a) On choisit comme suite de polynômes Pn (x) = (1 − x)n . Expliciter S n et donner une
majoration de |S n − S | en fonction de I et n.
b) Répondre à la même question avec la suite de polynômes P n(x) = (1 − 2x)n .
c) Montrer l’existence et l’unicité d’une suite de polynômes (P n)n∈N vérifiant deg Pn = n
et Pn(sin2 t) = cos(2nt) pour tout t ∈ R. Avec ce choix de polynômes, majorer |S − S n |.
6. PROBLÈMES 299
3/a) Montrer que l’on peut apliquer les processus d’accélération de convergence
des ques-
tions précédentes aux séries (−1) n /(n + 1)s , où s > 0, et à la série (−1)n (log n)/n.
b) En utilisant l’accélération fondée surles polynômes de la question 2/c) de degré 4, cal-
culer une approximation numérique de +∞ n
n=1(−1) (log n)/n et en déduire une approxima-
+∞
tion numérique de la constante d’Euler γ (on s’appuiera sur l’égalité n=1(−1) n (log n)/n =
(γ − 12 log 2) log 2 établie à l’exercice 11 page 226).
n k
Solution. 1/ a) Ecrivons Pn sous la forme P n(x) = k=0 ak (−x) . On a
n
n
k−1
n−1
n
Pn (−1) − Pn (x) = ak 1 − (−x)k = (1 + x) ak (−x)j = (1 + x) ak (−x)j .
k=0 k=1 j=0 j=0 k=j +1
it −it
Pn (−1). L’équation sin t0 = i équivaut à e 0−e 0
= i, ou encore (e it0 ) 2 + 2eit0 − 1 = 0, vérifiée
√ 2i √
si on choisit eit0 = 2 − 1, ce qui est le cas avec t0 = −i log( 2 − 1). On a alors
√ √ √ √
e 2int0 + e−2int0 ( 2 − 1)2n + ( 2 + 1) 2n (3 + 8) n + (3 − 8)n
Pn (−1) = cos(2nt 0) = = = .
2 2 2
√ n
Finalement on obtient la majoration |S − Sn | ≤ 2I/(3 + 8) .
3/a) On part du résultat classique suivant, obtenu avec le changement de variable u = nx
+∞ +∞
∗ −nx s−1 1 Γ(s)
∀n ∈ N , e x dx = s e−u us−1 du = s
0 n 0 n
où Γ( s) est la valeur de la dernière intégrale. Le changement de variable t = e−x dans la première
intégrale, entraı̂ne
1 1
Γ(s) n−1 s−1 1 n logs−1 (1/t)
= t log (1 /t) dt donc = t w s(t ) dt, w s(t) = .
ns 0 (n + 1) s 0 Γ(s)
La fonction ws (t) est intégrable
sur ]0, 1], nous sommes bien dans le cadre des séries de l’exercice
donc la convergence de ( −1) n /(n + 1)s peut être accélérée avec les méthodes précédentes.
Passons maintenant à (−1) n log n/n. En dérivant par rapport à s en s = 1 l’expression
précédente de 1/(n + 1)s (la dérivabilité est facile à partir du théorème de dérivation sous le
signe intégral des fonctions intégrables), on obtient
1 1
log(n + 1) Γ (1) 1 n 1
− =− 2
t dt + n
t log log(1/t) dt = t n log log(1/t) − Γ(1) dt.
n+1 Γ(1) 0 Γ(1) 0 0
Ainsi
nous sommes bien dans le cadre des séries de l’exercice et la convergence de la série alternée
(−1)n log(n + 1)/(n + 1) peut être accélérée avec les méthodes précédentes.
b) En utilisant l’expression (**) du polynôme P4 (x) défini dans la question 2/c), on obtient
P4 (x) = x 4 − 28(1 − x)x 3 + 70(1 − x) 2 x2 − 28(1 − x)3 x + (1 − x)4 = 1 − 32x + 160x 2 − 256x 3 + 128x4
et P4 (−1) = 577. Pour l’accélération de S = +∞ n
n=0 (−1) log(n +1)/(n + 1), on en déduit, compte
tenu de l’expression (*),
1 log 2 log 3 log 4 1
S4 = −544 + 384 − 128 = (−336 log 2 + 128 log 3) ≈ −0, 159922 . . .
577 2 3 4 577
1
Pour majorer I = 0 | log log(1/t) − Γ(1)|/(1 + t) dt, on commence par majorer Γ (1). On a
+∞ 1 +∞
−t
Γ (1) = e log t dt donc |Γ (1)| ≤ | log t| dt + e−t t dt = 2.
0 0 0
−x
Ensuite le changement de variable t = e donne
1 +∞ 1 +∞
−x
| log log(1/t)| dt = | log x|e dx ≤ | log t| dt + e−t t dt = 2.
0 0 0 0
On déduit de tout ceci la majoration I ≤ 4. Avec le résultat de la question 2/c) , on a donc
√
|S − S4 | ≤ 8/(3 + 8) 4 ≤ 0, 007.
Donc S ≈ 0, 159 à 0, 007 près. Or −S = +∞ n 1
n=1 (−1) log n/n = (γ − 2 log 2) log 2 donc γ =
1
−S/ log 2 + 2 log 2 ≈ 0, 577 à 0, 007/ log 2 ≈ 0, 01 près.
Remarque. - L’accélération de convergence de séries alternées obtenue par le choix de
polynômes de la question 2/a) correspond à la transformée d’Euler, rencontrée dans le
problème précédent.
– La majoration de l’erreur obtenue en 3/b) est très grossière, car à partir de S4 on obtient
l’approximation γ ≈ 0, 577292 ce qui est précis à 8 × 10−5 près.
– La fonction Γ introduite dans la solution de 3/a) est étudiée dans le sujet d’étude 1
page 315. Dans la question 3/d) de ce sujet d’étude on montre que Γ (1) = −γ.
6. PROBLÈMES 301
– Les polynômes Pn définis dans la question 2/c) vérifient Pn (x) = T n(1 − 2x) où les
Tn sont les polynômes de Tchébycheff de première nespèce (voir le tome Algèbre). On
peut montrer qu’ils ont la forme explicite P n(x) = k=0 n+k Cn2k+k 4 k(−x) k , ce qui permet
n
Problème 20. Soit an zn une série entière de rayon de convergence ≥ 1, telle que
sa somme f se prolonge en une fonction continue (toujours notée f ) sur le disque unité
fermé. On suppose que
∃α ∈ R, ∃θ > 0, ∀t ∈ [α, α + θ ], f (eit ) = 0. (∗)
Montrer que f est la fonction nulle.
+∞ n
Problème 21 (Th éorème de Bieberbach, cas réel). Soit f (z ) = n=0 a n z la
somme d’une série entière de rayon de convergence 1, à coefficients réels, telle que a0 = 0
et a1 = 1. On suppose que f est injective sur le domaine D = {z ∈ C : |z | < 1}. On veut
montrer que |an | ≤ n pour n ≥ 1.
a) Montrer que pour tout r tel que 0 < r < 1, on a
π
πan rn
= (f (reiθ)) sin nθ dθ. ((u) désigne la partie imaginaire de u)
2 0
b) Lorsque θ ∈ [0, π], étudier le signe de (f (reiθ )), puis montrer l’inégalité | sin(nθ)| ≤
n| sin θ |. En déduire |an | ≤ n pour tout n ∈ N∗.
c) Montrer que l’inégalité précédente est la meilleure possible.
Solution. a) Soit r ∈ ]0, 1[. On a ak ∈ R pour tout k ∈ N donc (f (reiθ )) = +∞ k
k=0 ak r sin kθ , et
comme cette série est normalement convergente, on peut l’intégrer terme à terme ce qui donne
π +∞
π
iθ k
(f (re )) sin nθ dθ = ak r sin kθ sin nθ dθ.
0 k=0 0
302 4. SUITES ET SÉRIES
1
Il
π suffit ensuite de remarquer que sin kθ sin nθ = 2 (cos( π k − n)θ − cos(k + n)θ ), et comme
0
cos pθ dθ = 0 si p =
0, = π sinon, on en déduit 0
sin kθ sin nθ dθ = 0 si k = n, = π/ 2
si k = n, d’où le résultat demandé.
b) On a f (z ) ∈ R si et seulement si f (z ) = f (z ) = f (z ), et comme f est injective, ceci
n’est possible que si z = z, c’est-à-dire z ∈ R. Ainsi, (f (z)) ne s’annule pas sur le connexe
D + = {z ∈ D, (z ) > 0} et comme l’image d’un connexe par une application continue est un
connexe, (f (z )) garde un signe constant sur D +. Comme f (z) = z + o(z) lorsque z → 0, on en
déduit que (f (z )) > 0 sur un voisinage de 0 dans D +, donc dans D + tout entier.
L’inégalité | sin(nθ )| ≤ n| sin θ| pour θ ∈ R se montre facilement par récurrence sur n à partir
de l’identité sin(n + 1)θ = sin nθ cos θ + sin θ cos nθ .
On utilise maintenant l’identité démontrée dans la question précédente, qui implique
π π
2 iθ 2
|an| ≤ |(f (re ))| · | sin nθ| dθ ≤ n (f (reiθ )) n sin θ dθ = na1 = n
πrn 0 πr 0
où nous avons une nouvelle fois utilisé l’identité de a) pour n = 1.
+∞ n
c) L’inégalité est bien la meilleure possible, car on vérifie facilement que n=0 nz = z/(1 − z)2
est injective sur D.
Remarque. Le théorème de Bieberbach dans le cas général s’exprime sans la condition
que les coefficients an soient réels. Il a été annoncé comme une conjecture en 1916 par
Ludwig Bieberbach, qui avait démontré uniquement |a 2| ≤ 2. Après de nombreux résultats
partiels, le cas général n’a été démontré qu’en 1984 par Louis de Branges.
a) Montrer que ζ définit une fonction de classe C∞ sur ]1, +∞[ et exprimer ses dérivées
successives.
b) Montrer que ζ converge en +∞ et que lorsque s → 1+ , ζ (s) = 1/(s − 1) + γ + o(1) (où
γ désigne la constante d’Euler).
c) On note (pn )n∈N ∗ la suite des nombres premiers rangés dans l’ordre croissant. Montrer
la formule (identité due à Euler)
+∞
1
+∞ N
∀s > 1, ζ(s) = −s
= lim .
n=1
1 − p n n=1
N→+∞
n=1
d) Montrer que la série 1/pn diverge.
Solution. a) Pour démontrer que ζ est de classe C ∞ sur ]1, +∞[ , il suffit de montrer qu’elle est
de classe C∞ sur [a, +∞[ pour tout a > 1.
Fixons donc a > 1. La fonction ζ est limite simple de la sériede fonctions 1/ns sur
∗ p p s
]1, +∞[. Pour tout p ∈ N , montrons que la série des dérivées p-ièmes (−1) log n/n converge
uniformément sur [a, +∞[. Pour p ∈ N∗ fixé, on a, en écrivant a = 1 + 2h (h > 0)
logp n logp n logp n 1 1
lim = 0 donc = =o ,
n→+∞ nh na nh n1+h n1+h
donc la série logp n/na converge. Comme logp n/n s ≤ log p n/n a pour tout s ≥ a, on en déduit
que (−1) p logp n/n s converge normalement donc uniformément sur [a, +∞[. Ainsi (voir le
premier alinéa de la remarque 5 page 234), la fonction ζ est de classe C ∞ sur [a, +∞[ et sur cet
6. PROBLÈMES 303
intervalle, on a
+∞
∗ (p) logp n
∀p ∈ N , ζ (s) = .
n=1
ns
Or
n+1 n+1
1 1 s dt dt
∀s ∈ [1, 2], 0 ≤ u n (s) ≤ s − s
= s+1
≤2 .
n (n + 1) n t n t2
On en conclut que la série de fonctions un converge normalement sur [1, 2], donc que sa somme
est continue sur [1, 2], en particulier en 1+ . On en déduit
n
1 1 1
lim ζ (s) − = lim u k (1) = lim 1 + + · · · + − log(n + 1) = γ,
s→1+ s−1 n→∞ n→+∞ 2 n
k=1
d’où le résultat.
c) Si s > 1, on a log(1 − p−sn )
−1
∼ p−s
n ≤ 1/n
−s
lorsque n → +∞, donc n log(1 − p−s n )
−1
converge, ce qui assure l’existence du produit infini pour tout s > 1. L’idée +∞dans ce qui suit
−s −1 −ns
repose sur le fait que pour tout k et pour tout s > 1, on a (1 − pk ) = n=0 pk .
Pour tous les entiers naturels non nuls m et M , pour tout s > 1, on a
m M
1 1
ik s
= . (∗∗)
k=1 i =0 k
(p ) 0≤i ,...,i ≤M
(p1 · · · pimm ) s
i1
k 1 m
Cette expression est valable pour tout m ≥ m0 et pour tout M ≥ M 0 . En faisant tendre M puis
m vers +∞, on en déduit
N
1
+∞
+∞
1
+∞
1
∀s > 1, ≤ = ≤ ζ (s).
ns
n=1
(p ikk )s
k=1 i k =0
1 − p−s
k k=1
Cette expression est valable indépendamment de N ∈ N ∗, on peut donc faire tendre N vers +∞,
ce qui fournit l’égalité voulue.
304 4. SUITES ET SÉRIES
d) Raisonnons par l’absurde. Si 1/p n converge, l’équivalent log[(1 − 1/pn )−1 ] ∼ 1/pn montre
+∞ −1
que n=1(1 − 1/p n) converge. Notons la valeur de ce produit infini. Pour tout s > 1,
+∞
1
+∞
1
ζ (s) = ≤ = ,
n=1
1 − p −s
n n=1
1 − 1/p n
ce qui montre que ζ est majorée sur ]1, +∞[. Ceci est impossible puisque l’on a montré ζ (s) ∼
1/(s − 1) lorsque s → 1+, d’où le résultat.
Remarque. Le résultat de c) est généralisé au domaine complexe dans l’annexe C, et
constitue une des clés permettant de démontrer le théorème des nombres premiers.
– On peut montrer que nk=1 (1 −1/p
−γ
k ) ∼ e / log n où γ est la constante d’Euler (formule
n
de Mertens). On en déduit k=1 1/pk ∼ log(log n) lorsque n → +∞. Cette dernière
estimation est aussi une conséquence du théorème des nombres premiers (voir annexe C)
puisque ce dernier entraı̂ne pn ∼ n log n.
– A partir du développement en série entière de la fonction x → un (1+ x) et de l’expression
(*) on peut montrer que pour tout x > 0 on a le développement en série entière
+∞ p
1 (−1)pγ p p log (1) log p(k ) logp+1 k
ζ (1 + x) − = x, γ p = lim + ··· + − .
x p=0 p! k→+∞ 1 k p+1
Solution. 1/ a) La distributivité par rapport à l’addition de la loi est immédiate. Pour prouver
qu’elle est commutative, il suffit d’effectuer le changement de variable u = x − t dans l’intégrale
définissant f g.
b) Fixons ε > 0. La fonction f est continue et nulle en dehors d’un compact, elle est donc
uniformément continue sur R, donc
∃η > 0, ∀(x, y ) ∈ R2 , |x − y| < η, |f (x) − f (y )| ≤ ε.
Désignons par M un majorant de |f | sur R. Choisissons N ∈ N tel que |t|≥η χn (t) dt < ε pour
+∞
tout n ≥ N . Comme −∞ χ n(t) dt = 1, et que les fonctions χ n sont positives, on a pour tout
n≥N
+∞
∀x ∈ R, |f χn (x) − f (x)| = f (x − t) − f (x) χn (t) dt
−∞ η
≤ |f (x − t) − f (x)| χn (t) dt + |f (x − t) − f (x)| χ n(t) dt
|t|≥η −η
η +∞
≤ 2M ε + ε χ n(t) dt ≤ 2M ε + ε χn (t) dt = (2M + 1)ε.
−η −∞
1
π 1
π
Solution. a) On a 2π
e (t) dt
−π k
= 0 pour tout k ∈ Z ∗ et 2π
e (t) dt
−π 0
= 1. On en conclut
n π
1 π
1 π
1 1
∀n ∈ N, Sn (t) dt = 1 et n (t) dt =
C Sk (t) dt = 1.
2π −π 2π −π n+1 2π −π
k=0
Pour montrer le résultat demandé sur la convergence uniforme de Cn , on calcule d’abord Sn .
On reconnaı̂t le noyau de Dirichlet, son calcul est classique et pour x ∈ R2π Z on a
(2n+1)ix
e −1 sin((n + 1/2)x)
∀n ∈ N, Sn(x) = e−inx = ,
e ix − 1 sin(x/2)
et comme
n
e(n+1)ix − 1 sin((n + 1)x/2)
∀n ∈ N, e(k+1/2)ix = eix/2 ix
= e(n+1)ix/2 ,
e −1 sin(x/2)
k=0
et comme (C n ) converge uniformément vers 0 sur [−π, π ][−α, α], il existe N ∈ N tel que
C (t) dt ≤ ε pour tout n ≥ N , de sorte que |f (x) − C n (x)| ≤ (M/π )ε + ε pour tout
α≤|t|≤π n
x ∈ R et pour tout n ≥ N . D’où le résultat
Remarque. Le théorème de Fejér s’exprime en disant que la série de Fourier de toute
fonction continue 2π -périodique converge uniformément en moyenne de Césaro vers f .
En particulier, toute fonction continue 2π -périodique est limite uniforme de polynômes
trigonométriques sur R.
308 4. SUITES ET SÉRIES
Problème 26. a) Soit α ∈ RQ. Montrer que pour toute fonction f : R → C continue
et 2π-périodique, on a
n
1 2π
1
lim S n(f ) = f (t) dt où Sn(f ) = f (2παk). (∗)
n→+∞ 2π 0 n k=1
(Indication. Utiliser le fait que f est limite uniforme de polynômes trigonométriques sur
R — voir le problème précédent.)
b) En déduire que si α ∈ RQ, l’ensemble Γ = {nα − [nα], n ∈ N} ( où [ x] désigne la
partie entière de x pour tout x ∈ R) est dense dans [0, 1].
1
2π
ce qui montre que Sn (ep) tend vers 0 = 2π 0 ep (t) dt lorsque n → +∞. L’assertion (*) est donc
vraie pour f = ep lorsque p ∈ Z ∗. Elle est trivialement vraie pour e 0.
Finalement, (*) est vraie pour toute les fonctions ep . Par linéarité, on en déduit qu’elle est
vraie pour tout polynôme trigonométrique.
Considérons maintenant une fonction f : R → C, continue et 2π -périodique. Soit ε >
0. On sait qu’il existe un polynôme trigonométrique P (voir le problème précédent) tel que
|f (x) − P (x)| < ε pour tout x ∈ R. Par ailleurs, nous avons montré que (*) était vrai pour P ,
1
2π
donc il existe N ∈ N tel que |S n (P ) − 2π 0 P (t) dt| < ε pour tout n ≥ N . On en déduit
2π
1
∀n ≥ N, Sn (f ) − f (t) dt
2π 0
2π 2π
1 1
≤ |S n (f ) − Sn (P )| + Sn (P ) − P (t) dt + P (t) − f (t) dt ≤ ε + ε + ε = 3ε.
2π 0 2π 0
D’où le résultat.
b) Raisonnons par l’absurde. Si Γ n’était pas dense dans [0, 1], il existerait a, b ∈ R, 0 < a <
b < 1, tels que Γ ∩ [a, b] = ∅. Il est facile de construire une fonction f positive, continue et
2π-périodique sur R telle que f (x) > 0 sur ]2πa, 2πb [ et f (x) = 0 sur [0, 2πa] ∪ [2πb, 2π ]. Comme
pour tout n ∈ N on a nα − [nα] ∈ [a, b], on a f (2παk ) = 0 pour tout k ∈ N donc Sn (f ) = 0 pour
2π
tout n ∈ N∗ . Ceci est en contradiction avec (*) car la fonction f vérifie 0 f (t) dt > 0.
Remarque. On retrouve facilement, avec la question b), que αN − N est dense dans R
si α ∈ RQ. C’est en substance le résultat démontré (par des moyens différents) dans la
question c) de l’exercice 5 page 205.
Problème 27 (Théorème taub érien fort). Soit (an) unesuite réelle telle que
an = O(1/n) lorsque n → +∞. On suppose que la série entière an z n a un rayon de
convergence ≥ 1 et que sa somme F vérifie limx→1− F (x) = 0. Notre propos est de montrer
que la série an converge et que sa somme est nulle.
On note Φ l’ensemble des fonctions ϕ : [0 , 1] → R telle que
1. pour toutx ∈ [0, 1[, la série an ϕ(xn ) converge ;
2. lim x→1 − +∞ n
n=0 a n ϕ(x ) = 0.
6. PROBLÈMES 309
Comme g (x) = x + x(1 − x)h(x) sur [0, 1], on en conclut que les polynômes p1 et p2 définis par
p1 (x) = x+x(1−x)u 1(x), p2 (x) = x+x(1−x)u 2(x) vérifient p 1(0) = p 2 (0) = 0, p1(1) = p 2 (1) = 1,
p1 ≤ g ≤ p 2 et
1
p2 (x) − p1 (x)
le polynôme q (x) = = u 2 (x) − u 1(x) vérifie q (x) dx < 5ε.
x(1 − x) 0
D’où le résultat.
b) Soit ε > 0 et des polynômes p1 , p2 , q vérifiant les conditions (i), (ii) et (iii) de la question
précédente.
1. La convergence de a n g (xn) pour tout x ∈ [0, 1[ est immédiate car le terme d’indice n
de cette série est nul dès que x n < 1/2.
2. Soit M > 0 tel que |an | ≤ M/n pour tout n ∈ N∗ . Comme p 1 ≤ g ≤ p 2 , on a par ailleurs
+∞ +∞ +∞
n
n
∀x ∈ [0, 1[ , an g (x ) − a n p1 (x ) ≤ |an|(p 2 − p1 )(x n )
n=0 n=0 n=1
+∞
+∞
xn(1 − x n) n
≤M q (x ) ≤ M (1 − x) x nq (xn) (∗)
n=1
n n=1
Ceci est possible pour tout ε > 0, donc g vérifie bien la condition 2 des éléments de Φ.
3/ La forme de g montre que
+∞ [− log 2/ log x]
n
∀x ∈ [0, 1[ , ang (x ) = an,
n=0 n=0
et comme g ∈ Φ, on en conclut en faisant tendre x vers 1− que la série an converge et que sa
somme est nulle.
Le théorème de Hardy-Littlewood s’en déduit facilement en considérant (an) définie par
a0 = b 0 − et an = b n pour tout n ∈ N∗ .
Remarque. Ce résultat est la version forte du théorème taubérien vu dans l’exercice 11
page 264. La preuve est intéressante car elle fait appel au théorème de Weierstrass là on
ne s’y attendait pas a priori.
Si les bn sont positifs, ce résultat est beaucoup plus facile à prouver.
On peut montrer que le théorème Taubérien d’Hardy-Littlewood reste vrai si la suite
(nbn) est seulement minorée (et non pas bornée comme dans le cadre de l’exercice).
Le but de ce problème est de donner une condition nécessaire et suffisante sur une
suite strictement croissante (αn ) à valeurs positives, pour que Vect n∈N(x αn ) soit dense
dans C (par abus, xm désigne la fonction de C définie par x → x m pour m ≥ 0). On
pourra utiliser le théorème de Weierstrass (voir le théorème 5 page 235).
1/ Soit (αn )n∈N ∗ une suite à termes strictement positifs et strictement croissante.
a) Soient m ∈ R+∗ et N ∈ N∗. On note E N = Vect1≤i≤N (xα i). Exprimer en fonction des
αi et de m, la valeur ∆ N (m) = inf f ∈E N xm − f 2 . (Indication. On pourra utiliser les
déterminants de Gram — voir le tome Algèbre).
b) En déduire une condition nécessaire et suffisante sur la suite (αn ) pour que Vectn∈N (xα n)
soit dense dans C pour la norme . 2 (théorème de Müntz).
2/ Soit (αn) n∈N une suite à termes positifs, strictement croissante, avec α0 = 0 et
vérifiant limn→+∞ αn > 1. Donner une condition nécessaire et suffisante sur (αn ) pour
que Vectn∈N (x αn ) soit dense dans C pour la norme . ∞.
1
Solution. 1/ a) Munissons C du produit scalaire f, g = 0 f (t)g (t) dt, dont . 2 est la norme
euclidienne associée. Le nombre réel ∆N (m) s’interprète comme la distance (au sens de . 2)
de xm à EN = Vect 1≤i≤N (xαi ). On sait (voir le tome Algèbre) que ceci peut s’exprimer au
moyen des déterminants de Gram. Plus précisément, en notant, pour tout (x1 , . . . , xn ) ∈ Cn ,
G(x1 , . . . , xn ) le déterminant de la matrice (x i, x j ) 1≤i,j ≤n, on a
G(x α1 , . . . , xαN , xm )
∆N (m)2 = . (∗)
G(x α1 , . . . , xαN )
Ici on a xa, x b = a+1b+1 . On trouve dans le tome Algèbre que la valeur d’un déterminant de
1
Cauchy det a i +b j i,j
est donnée par
(a − a ) · (b − b )
1 1≤i<j ≤n i j 1≤i<j ≤n i j
det = .
ai + b j 1≤i,j ≤n 1≤i,j ≤n (a i + b j )
En particulier, pour toute famille (pi )1≤i≤n de nombres réels, G(xp1 , . . . , xpn ) est un déterminant
de Gram car xp i, xp j = ai +b
1
j
avec a i = pi et bj = p j + 1, et on a donc
2
p1 pn 1≤i<j ≤n (pi − p j )
G(x , . . . , x ) = .
1≤i,j ≤n (pi + p j + 1)
b) On note E = Vect(xα i )i∈N∗ . Nous allons montrer qu’une condition nécessaire et suffisante
pour que E = C (où l’adhérence est prise au sens de la norme . 2) est que la série 1/αn
diverge.
312 4. SUITES ET SÉRIES
Condition nécessaire. Il existe bien sûr m > 0 tel que αn = m pour tout n. La fonction xm
appartient à E = C , donc la suite (∆N (m)) N∈N ∗ tend vers 0, ce qui entraı̂ne, d’après (**)
N
αi − m
lim = 0. (∗∗∗)
N→+∞
i=1
αi + m + 1
— Si la suite (αn ) est majorée, la série 1/αn diverge.
— Sinon, (αn ) tend vers +∞. Soit N 0 ∈ N tel que αn > m pour tout n ≥ N0 . Alors, dès
que n ≥ N0,
αn − m 2m + 1 2m + 1
un = log = log 1 − ∼− (n → +∞), (∗∗∗∗)
αn + m + 1 αn + m + 1 αn
et comme d’après (***), n≥N0 un diverge, on en conclut que 1/αn diverge.
Condition suffisante. Réciproquement, si 1/α n diverge, montrons E = C . Pour cela, en vertu
du théorème de Weierstrass, il suffit de montrer que pour tout m ∈ N, x m ∈ E.
Soit m ∈ N. Il s’agit de montrer que (***) est vérifié.
— Si (αn ) est majorée, c’est évident.
— Sinon, (α n) tend vers +∞, et l’équivalent (****) montre que u n diverge vers −∞, et
on conclut que (***) est vérifié.
2/ Si E = C au sens de la norme . ∞ , on vérifie facilement que E = C au sens de la norme
. 2 , donc d’après 1/b), n∈N∗ 1/αn diverge.
Réciproquement, supposons que n∈N∗ 1/αn diverge. Comme lim n→+∞ αn > 1, il existe
N ∈ N tel que αN > 1. Quitte à retirer des termes à (αn ), on peut donc supposer α1 > 1.
En vertu du théorème de Weierstrass, pour montrer E = C, il suffit de montrer que pour toute
fonction
polynôme P sur [0, 1], P ∈ E . Soit P une fonction polynôme. Soit ε > 0. La série
n∈N ∗ (α n − 1)
−1
diverge, donc d’après 1/b), il existe g ∈ Vect i∈N∗ (xα i −1) tel que P − g 2 < ε.
Soit h la primitive de g sur [0, 1] vérifiant h(0) = P (0). On voit xfacilement que h ∈ E . En posant
Q = h − P , on a Q(0) = 0, donc pour tout x ∈ [0, 1], Q(x) = 0 Q (t) dt, donc d’après l’inégalité
de Schwarz,
x 1/2
√
∀x ∈ [0, 1], |Q(x)| ≤ 2
Q (t) dt x ≤ Q 2 = P − g 2 < ε,
0
donc h − P ∞ = Q ∞ < ε. Finalement, pour tout ε > 0, nous avons trouvé h ∈ E tel que
h − P ∞ < ε. On en conclut P ∈ E , et finalement, E = C .
Finalement, on a E = C pour la norme . ∞ si et seulement si la série n∈N ∗ 1/α n diverge.
Probl
ème 29 (Théorème de Cantor sur les séries trigonométriques). 1/ Soit
a n une série à termes complexes, convergente et de somme nulle. On pose
∗ ∗ ∗ sin nt 2
U0 : R → C t → 1 et ∀n ∈ N , Un : R → C t → .
nt
Pour tout t = 0, montrer que S (t) = +∞ n=0 a n U n(t) existe, puis montrer lim t→0 S (t) = 0.t=0
3/ (Théorème de Cantor.) Soit (cn )n∈Z une famille de nombres complexes telle que
N
∀x ∈ R, lim cn einx = 0.
N→+∞
n=−N
de même an → 0 et b n → 0, ce qui montrera que les suites (cn) et (c−n ) tendent vers 0).
Pour tout t ∈ R, on sait que lim n→+∞(an cos nt + bn sin nt) = 0. En posant ρn = a2n + b 2n ,
il existe pour tout n un nombre réel θn ∈ [0, 2π ] tel que an cos nt + b n sin nt = ρ n cos(nt − θ n )
pour tout t ∈ R. Ainsi, nous nous sommes ramené au problème suivant : si pour tout t ∈ R,
limn→+∞ ρn cos(nt − θ n ) = 0, il faut montrer que la suite (ρn) tend vers 0.
Supposons le contraire. Alors il existe δ > 0 et une suite strictement croissante (nk ) k∈N
d’entiers telle que ρ nk ≥ δ pour tout k . Quitte à restreindre la suite (nk ), on peut même
supposer nk+1 ≥ 6n k pour tout k.
Ensuite, on pose
1 π 1 π
I1 = θn1 − , θn 1 + ,
n1 3 n1 3
de sorte que pour tout t ∈ I1 , cos(n1t − θn1 ) ≥ 1/2. Lorsque t parcourt I1, n 2t − θn2 parcourt un
intervalle de longueur n2 · 2π/(3n1 ) ≥ 4π . On peut donc trouver un segment I2 ⊂ I1 de longueur
2π/(3n2 ) tel que cos(n 2t − θn 2) ≥ 1/2 pour tout t ∈ I2 . En itérant le procédé, on construit ainsi
pour tout k un segment Ik ⊂ Ik−1 de longueur 2π/(3nk ) tel que
1
∀t ∈ Ik, cos(n k t − θnk ) ≥ .
2
D’après la proposition 9 page 20, on sait qu’il existe ξ ∈ R tel que ∩k∈N I k = {ξ }. Pour tout k,
on a ρn k cos(n k ξ − θk ) ≥ δ/ 2, ce qui est absurde car limn→+∞ ρ n cos(nξ − θ n ) = 0. La suite (ρn )
converge donc vers 0.
3/ a) Pour tout x, on a limN→+∞ N −N cn e
inx
= 0, donc pour tout x, limn→+∞(cn einx +
c −ne−inx ) = 0. D’après la question précédente, les suites (cn) et (c −n ) convergent donc vers 0.
Elles sont donc bornées, et si M désigne un majorant du module de leur terme général, on a
pour tout n ∈ Z ∗ la majoration |c n /(in)2 | ≤ M/n 2 , ce qui assure l’existence et la continuité de
F.
b) Un calcul donne immédiatement, pour tout x ∈ R et pour tout h = 0
+∞
F (x + h) + F (x − h) − 2F (x) inx −inx
sin(nh/2) 2
= c0 + cn e + c−ne ,
h2 n=1
(nh/2)
x2 cn
∀x ∈ R, F (x) = αx + β = c 0 + 2
e inx .
2 n∈Z∗
(in )
Nous avons vu plus haut que la famille (cn)n∈Z est bornée, la série trigonométrique de l’égalité
précédente converge donc normalement sur R. Elle est donc égale à sa série de Fourier, et comme
c’est une constante, on en déduit cn /(in)2 = 0 pour tout n ∈ Z∗. Finalement, on a cn = 0 pour
tout n ∈ Z.
Remarque. Ce résultat a été démontré pour la première fois par Cantor en 1871. Cantor
a ensuite affaibli les hypothèses, en recherchant des ensembles dit exceptionnels, tels que
si une série trigonométrique converge vers 0 sauf peut être sur un tel ensemble, alors ses
coefficients sont nuls. Ces considérations l’amenèrent peu à peu à construire la théorie des
ensembles, en particulier la notion de puissance d’un ensemble (théorie de l’équipotence)
que l’on connaı̂t.
7. SUJETS D’ÉTUDE 315
7. Sujets d’étude
Sujet d’étude 1 (Intégrales eul ériennes : fonction gamma, fonction bêta).
Le but de ce sujet d’étude est d’étudier et de donner quelques propriétés des fonctions
gamma et bêta définies respectivement par
+∞ 1
−t x−1
Γ(x) = e t dt (x > 0), B(x, y ) = tx−1 (1 − t)y−1 dt (x, y > 0).
0 0
1/ (Fonction gamma.) a) Montrer que Γ est de classe C∞ et convexe sur R +∗.
b) Montrer que Γ est logarithmiquement convexe (i. e. que log Γ est convexe).
c) Montrer
∀x > 0, Γ(x + 1) = xΓ(x) et ∀n ∈ N, Γ(n + 1) = n!.
c) Montrer que pour x, y > 0 fixés, B(x + n + 1, y) ∼ Γ(y )/ny lorsque n → +∞. En
déduire la formule
Γ(x)Γ(y)
∀x, y > 0, B(x, y ) = .
Γ(x + y )
d) Calculer Γ(1/2).
3/ a) Démontrer la formule de Weierstrass :
+∞
1 γx
x −x/n
∀x > 0, = xe 1+ e ,
Γ(x) n=1
n
N
où γ est la constante d’Euler (le produit infini +∞ n=1 signifie lim N→+∞ n=1 ).
b) Montrer la formule de duplication
2x−1 1 √
∀x > 0, 2 Γ(x)Γ x + = π Γ(2x).
2
d) Montrer la relation
+∞
Γ (x) 1 x
∀x > 0, = −γ − + .
Γ(x) x n=1 n(x + n)
+∞
En déduire 0
(log t)e−t dt = −γ .
316 4. SUITES ET SÉRIES
Solution. 1/ a) Remarquons tout d’abord que l’intégrale qui définit Γ est bien convergente
lorsque x > 0. Nous allons démontrer que la fonction Γ est de classe C ∞ et que
+∞
(p)
∀p ∈ N, ∀x > 0, Γ (x) = (log t)p e−t tx−1 dt. (∗)
0
On remarque que lorsque x est dans un segment [a, b] ⊂ ]0, +∞[, l’intégrande de (*) vérifie
p −t x−1 | log t| p ta−1 si t ∈ ]0, 1]
|(log t) e t | ≤ ϕp (t), ϕp (t) =
(log t) p e −tt b−1 si t > 1
et que la fonction ϕ p est intégrable sur ]0, +∞[ puisque lorsque t → 0+ , on a ϕp (t) = o(ta/2−1 )
(car | log t| pt a/2 = o(1)) et ϕp (t) = O (e−t/2 ) lorsque t → ∞.
Soit [a, b] un segment inclus dans ]0, +∞[. Nous allons prouver par récurrence sur p ∈ N que
Γ est de classe C p sur [a, b] et que Γ(p) vérifie la relation (*) sur cet intervalle. Comme ceci sera
vrai pour tout segment inclus dans ]0, +∞[, on aura prouvé le résultat sur ]0, +∞[ tout entier.
Pour p = 0, il s’agit de montrer que Γ est continue sur [a, b]. La majoration |tx−1 e−t | ≤ ϕ0 (t)
avec ϕ0 intégrable sur ]0, +∞[ assure que l’hypothèse de domination du théorème de continuité
sous le signe intégral est bien vérifiée. Comme par ailleurs l’intégrande de Γ est continue, ceci
assure la continuité de Γ sur [a, b].
Supposons maintenant l’hypothèse de récurrence vraie au rang p et montrons là au rang
p + 1. L’intégrande de (*) est bien continûment dérivable par rapport à x et sa dérivée est égale
à fx (t) = (log t)p+1 tx−1 e−t. Grâce à la majoration |fx (t)| ≤ ϕp+1 (t) lorsque x ∈ [a, b], avec ϕp+1
intégrable, on peut appliquer le théorème de dérivation sous le signe intégral qui nous assure
(p) 1
que Γ est de classe C sur [a, b] et que sa dérivée est égale à R+∗ f x . Ainsi, l’hypothèse de
récurrence est vraie au rang p + 1. Ceci termine la preuve que Γ est bien de classe C∞ .
Pour montrer la convexité de Γ, il suffit de montrer que Γ est positive, ce qui est immédiat
car la relation (*) montre que Γ a son intégrande positive.
b) Posons g : x → log Γ(x). On a g = (ΓΓ − Γ 2 )/Γ2 , il s’agit donc de montrer que Γ 2 ≤ ΓΓ .
Pour tout x > 0, l’inégalité de Schwarz donne
+∞ 2 +∞ +∞
(x−1)/2 −t/2 (x−1)/2 −t/2 x−1 −t
t e t log t e dt ≤ t e dt · (log t)2 t x−1e−t dt,
0 0 0
La seconde
+∞formule s’en déduit facilement par récurrence sur n ∈ N, compte tenu du fait que
−t
Γ(1) = 0 e dt = 1.
d) Lorsque x → 0+ , xΓ(x) = Γ(x + 1) ∼ Γ(1) = 1, autrement dit Γ(x) ∼ 1/x lorsque x → 0+ .
Le comportement de Γ au voisinage de 0+ nous donne un premier renseignement sur l’allure
de son graphe. Notons que Γ(1) = Γ(2) = 1, ce qui entraı̂ne l’existence d’un point c de ]1, 2[
où Γ s’annule d’après le théorème de Rolle. Comme Γ est convexe, la fonction Γ croı̂t sur
[c, +∞[, et comme Γ(n + 1) = n! → +∞, on en déduit que Γ tend vers +∞ en +∞. De plus,
Γ(x + 1)/x = Γ(x), donc Γ(x)/x tend vers +∞ lorsque x → +∞, donc Γ admet une branche
parabolique dans la direction verticale en +∞. On en déduit l’allure du graphe de Γ (voir la
figuresous-suite
ci dessous).
2/ a) L’égalité B(x, y) = B(y, x) s’obtient en effectuant le changement de variable u = 1 − t
dans l’intégrale définissant B(x, y ).
7. SUJETS D’ÉTUDE 317
(Γ)
0 1 2 3
et ceci converge vers 1/Γ(x) d’après 2/b), d’où le résultat (remarquez que du même coup on a
la convergence du produit infini).
b) Fixons x > 0. D’après la question 2/b), on a, lorsque n → +∞,
1 n 2x+1/2(n!) 2 2 2n+2n2x+1/2 (n!)2
Γ(x)Γ x + ∼ =
2 x(x + 1/2) · · · (x + n)(x + n + 1/2) (2x)(2x + 1) · · · (2x + 2n + 1)
Γ(2x) 2n+2 2x+1/2 2 Γ(2x)22n+2 n1/2(n!) 2 Γ(2x)2 2n+1−2x (n!)2
∼ 2 n (n!) ∼ = .
(2n + 1)2x(2n + 1)! 2 2x (2n)!(2n) n1/2 (2n)!
Or d’après la formule de Stirling,
(n!) 2 n2n e −2n(2πn) (πn)1/2
∼ =
(2n)! (2n)2n e−2n(4πn) 1/2 2 2n
(on peut aussi montrer ce résultat avec la formule de Wallis), et on en déduit finalement
1−2x √
Γ(x)Γ(x + 1/2) ∼ Γ(2x)2 π, d’où le résultat.
c) Toujours en utilisant 2/b) on a, pour x ∈ ]0, 1[ fixé et lorsque n → +∞,
1 x(1 + x)(1 + x/2) · · · (1 + x/n) (1 − x)(1 − x/2) · · · (1 − x/n)(1 − x + n)
∼ ·
Γ(x)Γ(1 − x) nx n1−x
n
x(1 − x + n) 2 x2 xn x2
= (1 − x ) 1 − 2 · · · 1 − 2 ∼ x 1− 2
n 2 n k
k=1
Ceci est vrai sur ]0, A] pour tout A > 0, donc sur R+∗ . C’est en particulier vrai pour x = 1, ce
qui fournit, compte tenu du fait que Γ(1) = 1,
+∞
1 1
+∞
1
Γ (1) = −1 − γ + = −γ − 1 + − = −γ − 1 + 1 = −γ.
n=1
n(n + 1) n=1
n n+1
Comme Γ(1) = 0+∞ (log t)e−t dt (voir 1/a)), on en déduit le résultat.
(ii). L’idée est de dériver terme à terme l’expression qui définit les polynômes de Bernoulli.
Pour montrer que l’on a bien le droit de procéder ainsi, on fixe ρ ∈ ]0, r[ et on utilise la formule
de Cauchy (voir le théorème 4 page 250) qui donne
2π
Bn (x) zezx
∀x ∈ R, 2πρn = f (ρeiθ , x)e−niθ dθ où f (z, x) = z .
n! 0 e −1
L’intégrande est continûment dérivable par rapport à x sur R, on peut donc dériver sous le signe
intégral ce qui donne, pour tout x ∈ R,
2π 2π
n Bn (x) ∂f iθ −niθ Bn−1 (x)
2πρ = (ρe , x)e dθ = ρeiθ f (ρe iθ , x)e−niθ dθ = 2πρn ,
n! 0 ∂x 0 (n − 1)!
d’où on déduit Bn = nB n−1 .
(iii). On procède de manière analogue à (i). Soit x ∈ C. Pour tout z ∈ C, 0 < |z | < r, on a
+∞
+∞ n
+∞
zez (x+1) zx zezx Bn (x + 1) n x n B n(x)
= ze + donc z = z + zn
ez − 1 ez − 1 n=0
n! n=0
n! n=0
n!
n
et on conclut en identifiant les coefficients de z de part et d’autre de cette expression.
(iv). C’est une conséquence immédiate de (iii) appliqué à x = 0.
(v). C’est une conséquence de (ii) et (iv).
(vi). L’assertion (i) entraı̂ne B 2n+1(0) = −B2n+1(1), donc d’après (iv), B2n+1 (0) = 0. Il suffit
ensuite de remarquer que Bk (0) = bk pour tout k par définition des b k et des Bk (x).
b) Un produit de Cauchy donne, pour tout x ∈ C et pour tout z ∈ C∗ , |z | < r,
+∞
+∞ +∞ +∞ n
B n(x) z bn xn b n−k x k
zn = z ezx = zn zn = zn
n=0
n! e − 1 n=0
n! n=0
n! n=0
(n − k )! k!
k=0
donc en identifiant les coefficients de zn de part et d’autre
n
∀n ∈ N, ∀x ∈ C, Bn (x) = Cknb n−k xk .
k=0
Ainsi, nous avons prouvé (*). Avec les relations liant les coefficients de Fourier an ( B̃p), b n(B̃ p)
aux cn (B̃ p), on en déduit a 0( B̃p ) = 0 pour tout p ∈ N∗, et pour tout k, n ∈ N ∗ ,
(−1)k+1 2(2k)! (−1)k2(2k − 1)!
a n(B̃2k ) = , bn (B̃ 2k ) = 0, an (B̃ 2k−1 ) = 0, bn ( B̃2k−1 ) = .
(2nπ) 2k (2nπ) 2k−1
On en déduit le résultat car nous avons vu plus haut que les fonctions B̃p sont égales à leur série
de Fourier.
b) En faisant x = 0 dans la première relation établie à la question précédente, on a
+∞
b 2k 1 (−1) k+1b 2k
∀k ∈ N ∗, = 2 · (−1) k+1 donc ζ (2k) = (2π)2k. (∗∗)
(2k )! n=1
(2nπ)2k 2(2k)!
On en déduit 1 ≤ ζ (2k) ≤ 1 + 1/(2k − 1), donc ζ (2k ) → 1 lorsque k → +∞. Grâce à la relation
(**), on en déduit
√ 2k+1/2
2(2k)! 4 π k
b2k ∼ (−1)k+1 ∼ (−1)k+1 en utilisant la formule de Stirling .
(2π)2k (eπ )2k
Remarque. On ne connaı̂t presque rien sur la somme de lasérie 1/np lorsque p est
impair (le seul résultat connu à ce jour sur le sujet est que +∞ 3
n=1 1/n est irrationnel —
démontré par Apéry en 1978).
– Les nombres de Bernoulli jouent un rôle important et assez mystérieux dans des parties
aussi diverses des mathématiques que l’analyse, la théorie des nombres et la topologie
différentielle. Citons par exemple l’étonnant théorème de Von Staudt : si pour tout n ∈
N∗ , s n désigne la somme des inverses des nombres premiers p tels que p − 1 divise 2n,
alors sn + b2n est un entier. Le sujet d’étude qui suit propose également une intéressante
application des nombres et des polynômes de Bernoulli.
Solution. a) On va procéder par récurrence sur r ∈ N∗ . Pour r = 1, compte tenu du fait que
B1 (x) = x − 1/2 sur ]0, 1[, une intégration par parties donne pour tout entier k , m ≤ k ≤ n − 1,
k+1 k+1 k+1 k+1
f (k + 1) + f (k )
B̃ 1(t)f (t) dt = B̃ 1 (t)f (t) − f (t) dt = − f (t) dt,
k k k 2 k
322 4. SUITES ET SÉRIES
∂f
Remarque 5. — La dérivée partielle ∂x i
(a) est aussi la dérivée de l’application partielle
t → f (a1 , . . . , ai−1 , ai + t, ai+1 , . . . , an ) en t = 0.
— à plus forte raison que dans la remarque précédente, il se peut que toutes les
dérivées partielles de f existent en a sans que f soit différentiable en a, ni même
continue en a (voir cependant le théorème qui suit).
∂f
— Si f : U ⊂ Rn → R est une application différentiable en a ∈ U , alors (a) existe
∂xi
pour tout i, et on a
n n
∂f ∂f
dfa = (a) dxi , grada f = (a) e i ,
i=1
∂x i i=1
∂x i
où ( dxi) est la base duale dans (Rn )∗ de la base canonique de Rn (conséquence de
la proposition 4) — Rn est muni de son produit scalaire standard.
Démonstration. La fonction g : [0, 1] → F t → f (a + t(b − a)) est continue sur [0, 1], dérivable
sur ]0, 1[, et
∀t ∈ ]0, 1[ , g (t) = dfa+t(b−a) (b − a)
(voir la remarque 8). On a donc g (t) ≤ M b − a sur ]0, 1[, donc d’après le théorème 5 page 75,
f (b) − f (a) = g(1) − g(0) ≤ M b − a.
Conséquence :
— Si U est convexe, si f est différentiable sur U et si |||dfx||| ≤ M pour tout x ∈ U ,
alors
∀(a, b) ∈ U 2, f (b) − f (a) ≤ M b − a.
— Si U est un ouvert connexe et dfx = 0 pour tout x ∈ U , alors f est constante sur
U (en effet, U est connexe par lignes brisées — voir le théorème 5 page 42 — et
f (a) = f (b) pour tout segment [a, b] ⊂ U ).
Remarque 9. Si f prend ses valeurs dans R, si [a, b] ⊂ U , si f est continue sur [a, b] et
différentiable sur ]a, b[, alors l’égalité des accroissements finis est valable et s’écrit
∃c ∈ ]a, b[ , f (b) = f (a) + dfc(b − a).
Comme nous l’avons vu dans la remarque 2 page 74, ceci est faux dès que la dimension
de l’espace d’arrivée est > 1 et on utilise alors l’inégalité des accroissements finis.
Formules de Taylor. Notation. Soit f : U ⊂ R q → R p ( où U est un ouvert de Rq )
une application de classe C k sur U . Par analogie avec le fait que
n!
∀(a 1 , . . . , aq ) ∈ Rq , (a1 + · · · + aq) n = ai11 · · · a iqq
i +···+i =n
i 1 ! · · · iq !
1 q
Exemple 2. Si f : R2 → R est de classe C2 , alors pour tout (h, k) ∈ R2, il existe θ ∈ ]0, 1[
tel que
∂f ∂f
f (h, k) = f (0, 0) + h (0, 0) + k (0, 0)
∂x ∂y
1 2 ∂ 2f ∂2f 2
2∂ f
+ h (θh, θk) + 2hk (θh, θk) + k (θh, θk) + o((h, k )2 ).
2 ∂x2 ∂x∂y ∂y2
Remarque 10. Attention, comme pour l’égalité des accroissements finis, ceci n’est vrai que
pour des fonctions à valeurs réelles. Pour des fonctions à valeurs dans Rp , on peut par
contre utiliser la formule de Taylor avec reste intégral.
Théorème 5 (Formule de Taylor avec reste intégral). Soient f : U ⊂ Rq →
Rp ( où U est un ouvert de Rq ) une application de classe Ck sur U , x ∈ Rq et h =
(h 1, . . . , h q ) ∈ R q tels que [x, x + h] ⊂ U . Alors
q q [2]
∂f 1 ∂f
f (x + h) = f (x) + hi (x) + hi (x) + ···
i=1
∂xi 2! i=1 ∂xi
q [k−1] q [k]
1 ∂f 1
(1 − t) k−1 ∂f
··· + hi (x) + hi (x + th) dt.
(k − 1)! i=1 ∂xi 0 (k − 1)! i=1
∂x i
1.4. Exercices
Exercice 1. a) Montrer que la fonction f : R2 → R définie par f (x, y ) = y2/x si x = 0,
f (0, y) = y, est dérivable selon tout vecteur au point (0, 0), mais n’est pas continue en
(0, 0).
b) On considère l’application
x 2 − y2
f : R 2 → R f (x, y ) = xy si (x, y ) = (0, 0), f (0, 0) = 0.
x 2 + y2
∂2 f ∂2 f
Montrer que les dérivées partielles ∂x∂y
(0, 0) et ∂y∂x
(0, 0) existent mais ne sont pas égales
(exemple dû à Péano).
∂f
En faisant tendre y vers 0, on en déduit si x = 0 que ∂y (x, 0) existe et vaut x ; si x = 0, on voit
de même que ∂f
∂y
(0, 0) existe et vaut 0. Finalement, on a ∂f
∂y
(x, 0) = x pour tout x ∈ R. On en
∂2 f
conclut que ∂x∂y (0, 0) existe et vaut 1.
Maintenant, on en déduit, grâce à la relation d’antisymétrie f (y, x) = −f (x, y) le fait que
∂2 f
∂y∂x (0, 0) existe et vaut −1. D’où le résultat.
Pour p = 1, c’est évident car ϕ1 est linéaire. Supposons le résultat vrai au rang p et montrons
le au rang p + 1. On a ϕp+1 = ϕ1 ϕ p = Ψ(ϕ1 , ϕ p), donc composée d’applications différentiables,
donc ϕp+1 est différentiable et dϕ p+1,M = dΨ ϕ 1(M ),ϕ p (M )[dϕ1,M , dϕ p,M ] c’est-à-dire
dϕp+1,M (H) = dϕ 1,M (H ) ϕp (M ) + ϕ1 (M ) dϕp,M (H )
p−1
p
= HM p + M M iHM (p−1)−i = M iHM p−i ,
i=0 i=0
d’où le résultat.
Solution. a) On commence par écrire la formule de Taylor avec reste intégral à l’ordre 1, qui
s’écrit ici, pour tout x = (x1, . . . , x n) ∈ Rn ,
1 n
n
1
∂f ∂f
f (x) = xi (tx) dt = xi gi(x) avec g i(x) = (tx) dt.
0 ∂x i 0 ∂xi
i=1 i=1
Il suffit ensuite de remarquer, grâce au théorème de dérivation sous le signe intégral, que les
fonctions gi ainsi définies sont de classe C ∞.
∂f
b) Si de plus df0 = 0, alors ∂x i
(0) = g i(0) = 0 pour tout i. Comme les fonctions g i sont de classe
∞
C , on peut leur appliquer le résultat précédent qui montre que pour tout i, on peut trouver des
fonctions (hi,j )1≤j ≤n de classe C ∞ telles que g i (x) = nj=1 xj h i,j (x) pour tout x ∈ Rn . Ainsi,
n n
∀x = (x 1, . . . , xn ) ∈ R n, f(x) = xi xj hi,j (x) = xi x j hi,j (x),
i=1 j=1 1≤i≤n
1≤j ≤n
d’où le résultat.
Remarque. On aurait pu aussi démontrer le résultat de la question b) directement en
utilisant la formule de Taylor avec reste intégral à l’ordre 2.
u−1 soient continus. La norme utilisée sur Lc (E ) est |||u||| = sup x=1 u(x). On rappelle
(voir l’exercice 4 page 52) que Gc (E) est un ouvert de L c (E).
a) Montrer que l’application Inv : Gc (E ) → Gc (E ) u → u−1 est différentiable au point
IdE et calculer la différentielle de Inv en ce point.
b) Montrer que Inv est différentiable en tout point de Gc(E ) et calculer sa différentielle.
Solution. 1/ a) Remarquons tout d’abord que Gn (R) est un ouvert de Mn (R) (c’est l’image
réciproque de l’ouvert R∗ par l’application déterminant, qui est continue).
Pour tout M ∈ G n(R), on a M −1 = (det M )−1 tM où M désigne la comatrice de M . Cette
expression montre que les coefficients de M −1 sont des fractions rationnelles en les coefficients
de M , ce qui prouve que Inv est de classe C∞ .
b) On désigne par (Ei,j )1≤i,j ≤n la base canonique de Mn (R) (Ei,j est la matrice dont tous
les termes sont nuls sauf celui d’indice (i, j) qui vaut 1). En notant les matrices sous la forme
M = (mi,j )1≤i,j ≤n , calculons
∂Inv 1
(I n ) = lim (In + tE i,j )−1 − I n .
∂mi,j t→0 t
Si i = j , on a
1 1 1 1 ∂Inv
[(In + tEi,i )−1 − In ] = − 1 E i,i = − Ei,i donc (In) = −E i,i.
t t t+1 t+1 ∂mi,i
Si i = j , la matrice Ei,j vérifie E2i,j = 0 donc pour tout t ∈ R, (In + tE i,j) −1 = In − tEi,j
∂Inv
(car (In − tEi,j )(In + tEi,j ) = In − t 2 E2i,j = In ), et on en déduit ∂m i,j
(I n ) = −Ei,j .
∂Inv
En résumé, nous avons montré ∂m i,j
(In ) = −Ei,j pour tout (i, j ). On en déduit que la
différentielle DInvIn de Inv au point In vérifie
∂Inv
∀M = (mi,j )1≤i,j ≤n ∈ Mn (R), DInv In (M ) = mi,j (In ) = −M,
i,j
∂m i,j
d’où le résultat.
c) Soit M ∈ Gn (R). Lorsque H ∈ Mn (R) tend vers 0, on a M + H ∈ Gn(R) pour H suffisam-
ment petit (car G n (R) est ouvert) et
Inv(M + H ) = (M + H ) −1 = (In + M −1 H)−1 M −1 = [In + DInv In (M−1 H ) + o(H )]M−1
= [I n − M −1 H + o(H )]M −1 = Inv(M ) − M −1 HM −1 + o(H )
On en déduit DInvM (H) = −M−1 HM −1 pour tout H ∈ Mn (R).
2/ a) Pour tout h ∈ L c (E), |||h||| < 1, on sait (voir la proposition 2 page 49) que Idn+h est
inversible et que (Id +h)−1 = Id −h + h2 − h3 + · · · + (−1)n hn + · · · . Comme ||| +∞ n=2(−1) h n ||| ≤
+∞ n 2
n=2 |||h||| = |||h||| /(1 − |||h|||), on en déduit que lorsque h → 0, Inv(Id +h) = Id −h + o(|||h|||).
Ainsi, Inv est différentiable au point Id et DInvId (h) = −h.
b) On procède comme dans la question 1/c). Soit u ∈ Gc (E ). Comme Gc (E ) est ouvert (voir
l’exercice 4 page 52), on a u + h ∈ G c(E) lorsque h est suffisamment petit, et lorsque h → 0,
(u + h)−1 = (Id +u−1 h)−1 u −1 = (Id −u −1h + o(|||h|||)) u−1 = u −1 − u −1hu −1 + o(|||h|||).
De plus, l’application linéaire h → −u −1hu −1 est continue car pour tout h ∈ L c (E), |||u−1 hu−1 ||| ≤
|||u−1||| |||h||| |||u −1|||. En définitive, Inv est différentiable au point u et D Invu (h) = −u −1hu−1 pour
tout h ∈ Lc(E).
Solution. Le déterminant d’une matrice est un polynôme en ses coefficients, on en déduit que
l’application M → det M est de classe C∞ .
Soit M ∈ Mn (R). Pour calculer D det M (différentielle de det au point M ), nous allons
calculer les dérivées partielles de det au point M . Désignons par (E i,j )1≤i,j ≤n la base canonique
de Mn(R). En notant A = (a i,j )1≤i,j ≤n les éléments de Mn (R), il s’agit donc de calculer les
∂ det
∂ai,j (M ). En désignant par C = (Ci,j )1≤i,j ≤n la comatrice de M (de sorte que Ci,j est le cofacteur
de l’élément d’indice (i, j ) de M ), la n-linéarité du déterminant entraı̂ne, pour tout (i, j) et pour
tout t ∈ R,
∂ det det(M + tE i,j) − det M
det(M + tEi,j ) = (det M ) + t Ci,j donc (M ) = lim = Ci,j .
∂a i,j t→0
t=0
t
Lorsque M est inversible, on peut obtenir une autre expression de D det M en utilisant
l’identité t C = (det M )M −1 qui entraı̂ne D det M (H) = (det M ) tr(M −1H ) pour tout H ∈
Mn (R).
Solution. a) Si x = y , on a
y 1
1
F (x, y) = f (u) du = f [x + t(y − x)] dt, (∗)
y−x x 0
égalité qui reste évidemment vraie pour x = y . Comme f est de classe C 1, la dernière intégrale
de (*) a son intégrande qui est continue en (x, y ) sur R2 , donc d’après le théorème de continuité
sous le signe intégral, F est continue sur R2.
b) Notre point de départ est toujours la relation (*). L’intégrande f (x + t(y − x)) est continûment
dérivable par rapport à x, on peut donc appliquer le théorème de dérivation sous le signe intégral
qui montre que F admet une dérivée partielle par rapport à x sur R 2 qui vérifie
1 1
∂F ∂
2
∀(x, y ) ∈ R , (x, y) = f [x + t(y − x)] dt = (1 − t)f [x + t(y − x)] dt,
∂x 0 ∂x 0
fonction de (x, y ) qui est bien continue sur R 2. De même, F admet une dérivée partielle par
rapport à y continue sur R2. On en conclut que F est de classe C 1 .
Remarque. On peut également résoudre l’exercice sans exprimer F par l’intégrale (*),
mais c’est plus difficile.
réelles, telles que f (x + iy ) = u(x, y ) + iv (x, y ). On dit que f est holomorphe sur D si elle
est continûment dérivable par rapport à la variable complexe z, c’est-à-dire si
(i) pour tout z0 ∈ D, (f (z 0 + h) − f (z 0))/h converge lorsque h ∈ C ∗ tend vers 0 (cette
limite est notée f (z 0)),
(ii) l’application z → f (z) est continue sur D.
a) Montrer que f est holomorphe si et seulement si les applications u et v sont de classe
C1 sur D et vérifient les conditions de Cauchy
∂u ∂v ∂u ∂v
= , =− .
∂x ∂y ∂y ∂x
Solution. 1/ a) On remarque tout d’abord que les conditions de Cauchy sont équivalentes à
l’identité ∂f ∂f
∂x + i ∂y = 0.
Supposons f holomorphe. Soit z = x + iy ∈ D (avec x, y ∈ R). Lorsqu’on fait tendre le
nombre réel s vers 0 dans l’expression
f (z + s) − f (z ) f (x + s, y) − f (x, y)
=
s s
le membre de gauche converge vers f (z), donc celui de droite converge, ce qui montre l’existence
de ∂f ∂f
∂x (x, y) et de plus, f (z) = ∂x (x, y). Lorsque cette fois ci, on fait tendre le nombre réel t vers
0 dans l’expression
f (z + it) − f (z ) 1 f (x, y + t) − f (x, y)
=
it i t
on aboutit à l’existence de ∂y (x, y ) et à l’égalité f (z) = −i ∂f
∂f ∂f
∂y (x, y ). Ainsi, on a montré ∂x (x, y)+
i ∂f ∂f ∂f
∂y (x, y ) = 0. Par ailleurs, f étant continue, les égalités ∂x = f et ∂y = if , entraı̂nent que les
dérivées partielles de f sont bien continues, donc f (et donc u et v ) est de classe C 1 .
Réciproquement, supposons f = u + iv de classe C 1 et vérifiant ∂f ∂f
∂x + i ∂y = 0. Soit z ∈ D .
L’application f est différentiable en z = x + iy donc la formule de Taylor-Young entraı̂ne, lorsque
les nombres réels s et t tendent vers 0
∂f ∂f
f (x + s, y + t) − f (x, y) = s (x, y) + t (x, y) + o(|s + it|).
∂x ∂y
∂f
Comme ∂y
= i ∂f
∂x
ceci entraı̂ne
∂f ∂f ∂f
f (x + s, y + t) − f (x, y) = s (x, y) + it (x, y) + o(|s + it|) = (s + it) (x, y) + o(|s + it|).
∂x ∂x ∂x
Ceci montre que la limite (f (z + h) − f (z ))/h converge vers ∂f ∂x (x, y) lorsque h = s + it tend vers
0. Donc f est dérivable par rapport à la variable complexe z et de plus, f (z) = ∂f ∂x (x, y). Cette
dernière égalité entraı̂ne la continuité de f , donc f est bien holomorphe.
b) Les conditions de Cauchy et l’indépendance des dérivées partielles à l’ordre de dérivation
entraı̂nent
∂ 2u ∂ ∂u ∂ ∂v ∂ 2v ∂ ∂v ∂ ∂u ∂ 2u
2
= = = = = − = − 2.
∂x ∂x ∂x ∂x ∂y ∂xy ∂y ∂x ∂y ∂y ∂y
2. EXTREMUMS RELATIFS 335
2. Extremums relatifs
Dans toute cette section, U désigne un ouvert de Rn.
Proposition 1. Si f : U ⊂ Rn → R admet un extremum relatif en un point a de U et
∂f
si f est différentiable en a, alors dfa = 0 (en d’autres termes, ∂xi
(a) = 0 pour tout i).
336 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
Un point a pour lequel dfa = 0 est appelé point critique de f . Ce résultat nous
dit qu’un extremum relatif est nécessairement un point critique (notez que U doit être
ouvert : c’est comme dans R, un extremum relatif est un point critique lorsque c’est un
point intérieur à l’ensemble de définition). La réciproque est fausse dans le cas général.
Cependant, moyennant un développement limité de f à l’ordre 2, il est possible d’obtenir
une condition suffisante d’existence d’un extremum.
Théorème 1. Soit f : U ⊂ R n → R une fonction de classe C 2 et supposons qu’il existe
a ∈ U tel que dfa = 0, de sorte que d’après la formule de Taylor-Young, f (a + h) =
f (a) + Q(h)/2 + o(h2), où Q est la forme quadratique
n [2]
∂f ∂2 f ∂ 2f
Q(h) = hi (a) = h2i (a) + 2 hihj (a).
i=1
∂x i i
∂x 2i i<j
∂x i ∂xj
Alors
(i) si f admet un minimum (resp. un maximum) relatif en a, Q est une forme qua-
dratique positive (resp. négative) ;
(ii) si Q est une forme quadratique définie positive (resp. définie négative), f admet
un minimum (resp. un maximum) relatif en a.
Démonstration. Si f admet un minimum relatif en a, on a, sur un voisinage de 0 pour h,
1
f (a + h) = f (a) + Q(h) + o(h 2) ≥ f (a) donc Q(h) + o(h2 ) ≥ 0.
2
Fixons h ∈ Rn . Lorsque t ∈ R tend vers 0, on peut donc écrire
Q(th) + o(th2 ) = t2(Q(h) + o(1)) ≥ 0 donc Q(h) + o(1) ≥ 0
En faisant tendre t vers 0, on en déduit Q(h) ≥ 0. Ceci est vrai pour tout h ∈ Rn , d’où (i).
Si Q est une forme quadratique définie positive, alors pour tout h ∈ R n, h = 0, Q(h) > 0.
Comme la sphère unité de R n est compacte, on en déduit α = inf h=1 Q(h) > 0. Ainsi, lorsque
h tend vers 0,
1 2 h 2 h h2
f (a + h) − f (a) = [Q(h) + o(h )] = Q + o(1) ≥ (α + o(1)).
2 2 h 2
Comme α + o(1) ≥ 0 sur un voisinage de h = 0, on en déduit f (a + h) ≥ f (a) sur ce voisinage,
d’où (ii).
Solution. La fonction f est de classe C ∞ . Commençons par rechercher les extremums relatifs de
f . Pour cela, on recherche ses points critiques (x, y), qui vérifient df(x,y) = 0, c’est-à-dire
∂f ∂f
0= = 4x 3 − 4(x − y) et 0= = 4y 3 + 4(x − y).
∂x ∂y
Ce système de deux équations s’écrit aussi
x3 + y3 =0 (x + y)(x 2 − xy + y2) =0
3
ou encore .
x − (x − y) = 0 x3 − x + y =0
Ce système admet la solution triviale (x, y) = (0, 0). Si (x, y) = (0, 0), alors x2 − xy + y 2 =
(x − y )2 /2 + x2 /2 + y 2 /2 > 0 n’est pas nul, donc le système équivaut dans ce cas à
x+y =0 √ √ √ √
3
dont les solutions non nulles sont (x, y) = 2, − 2 et − 2, 2 .
x − 2x = 0
√ √ √ √
Finalement, f a trois points critiques : (0, 0), ( 2, − 2) et (− 2, 2).
— Au point (0, 0), on voit facilement que la matrice hessienne de f est négative mais non
définie négative (on a r = t = −4 et s = 4). On ne peut donc pas conclure en utilisant le
théorème 1 page 336. On s’en sort en remarquant que f (x, −x) = 2x 4 − 8x 2 = −2x 2(4 −
x2 ) < 0 pour 0 < |x| < 2. Par ailleurs f (x, x) = 2x4 > 0 pour tout x = 0. Ainsi, f ne
présente ni maximum ni minimum relatif en (0, 0) (on a affaire à un point col ).
338 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
√ √ ∂2f ∂ 2f ∂ 2f
— Au point ( 2, − 2), comme ∂x2
= 12x2 − 4, ∂x∂y = 4, = 12y 2 − 4, on a r = 20,
∂y2 √ √
s = 4 et t = 20. Donc rt − s2 > 0 et r > 0. La matrice hessienne de f en ( √2, − √ 2) est
donc définie positive, donc f admet un minimum relatif en ce point (égal à f ( 2, − 2) =
−8). √ √
— Le résultat est identique en (− 2, 2) car f vérifie la relation f (x, y) = f (−x, √ −y √).
√Ainsi,
√ les seuls extremums relatifs de f sont des minimums, atteints aux points ( 2, − 2) et
(− 2, 2). Nous allons prouver, par une technique générale, que ces minimums relatifs sont en
fait des minimums absolus (c’est bien sûr faux dans le cas général). Il suffit pour cela de prouver
que f admet bien un minimum absolu, car tout minimum absolu est un minimum relatif (et la
valeur des deux minimums relatifs est la même dans notre cas).
L’idée est de dire que lorsque |x| et |y | sont grands, 2(x − y )2 est petit par rapport à x4 + y4 .
Pour cela, on utilise la norme (x, y) = sup{|x|, |y|} et les inégalités
2
x4 + y 4 ≥ (x, y ) 4, 2(x − y )2 ≤ 2 2 (x, y ) = 8 (x, y ) 2
qui entraı̂nent f (x, y) ≥ (x, y )4 − 8 (x, y ) 2 . Ainsi, lim (x,y)→+∞ f (x, y) = +∞. On en déduit
qu’il existe un compact K de R2 tel que f (x, y) ≥ 0 dès que (x, y) ∈ K . La fonction f est
continue sur le compact K , donc il existe (a, b) ∈ K tel que f (a, b) = inf (x,y)∈K f (x, y). Comme
√ √ √ √
f (− 2, 2) = −8, on a (− 2, 2) ∈ K , et donc f (a, b) ≤ −8. Comme f (x, y ) ≥ 0 pour
(x, y ) ∈ K , on a en fait f (x, y ) ≥ f (a, b) pour tout (x, y ) ∈ R2 . Ainsi, f admet un minimum
absolu sur R2, qui est donc un minimum relatif, donc égal à −8.
Remarque. Pour montrer que f admet bien un minimum absolu égal à −8, on aurait pu
montrer directement (en utilisant de bonnes minorations), que f (x, y ) ≥ −8 pour tout
(x, y ) ∈ R2. L’avantage de la méthode que nous avons présentée est qu’elle est générale.
est négative. En particulier, la trace de A est négative (c’est la somme de ses valeurs propres),
ce qui s’écrit ∆f (x) ≤ 0. Ceci est contraire aux hypothèses, d’où le résultat.
b) Nous montrons que pour tout x ∈ D , f (x) ≤ maxy=1 f (y ), l’autre inégalité s’en déduisant
ensuite en considérant −f . n
Soit ε > 0. Considérons la fonction g : Rn → R définie par g (x) = f (x) + ε 2
i=1 xi . On a
∆g = ∆f + 2nε, ce qui montre que ∆g > 0 sur D . D’après la question précédente, on en déduit,
pour tout x ∈ D ,
n n
2 2
g (x) < max g (y ) donc f (x) + ε xi < max f (y ) + ε max yi .
y=1 y=1 y=1
i=1 i=1
Ceci étant vrai pour tout ε > 0, on en déduit que f (x) ≤ maxy=1 f (y ). D’où le résultat.
Remarque. Le résultat se généralise aisément sous la forme suivante : si f est continue
sur un compact K et harmonique sur l’intérieur de K , alors f atteint son maximum et
son minimum sur la frontière de K .
Solution. a) La fonction f étant continue sur le compact Γ, f|Γ admet un maximum global
atteint en un point a de Γ. Si on note g : R n → R (x1 , . . . , xn) → x 1 + · · · + x n − s et
γ = {x ∈ Rn | g (x) = 0}, alors a ∈ Ω = γ ∩ (R+∗ ) n ⊂ Γ (car f (x) = 0 si l’un des xi est nul, et
f (x) > 0 si x ∈ γ ). Par construction, f |Ω admet un extremum global en a, et comme Ω est un
ouvert de γ , f|γ atteint un extremum local en a. De plus, si a ∈ γ , alors dga = 0, on peut donc
appliquer le théorème des extremums liés qui entraı̂ne l’existence de λ ∈ R tel que dfa = λdga .
On a donc
∂f ∂g f (a)
∀i ∈ {1, . . . , n}, (a) = λ = λ c’est-à-dire = λ.
∂xi ∂x i ai
Or f (a) = 0, on en déduit que tous les a i sont égaux. Comme ni=1 ai = s, on a ai = s/n pour
tout i. La valeur du maximum recherché est donc (s/n) n.
340 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
Exercice 5. Soit n ∈ N∗ . On munit Mn (R) de la norme M 2 = ( i,j m2i,j )1/2 , où les
mi,j sont les coefficients de la matrice M . Montrer que le groupe des matrices orthogonales
directes SOn (R) est l’ensemble des éléments de SLn (R) = {M ∈ Mn (R) : det(M ) = 1}
de norme minimale.
(i). Nous voulons montrer que f a un inverse local. Plus précisément, nous allons prouver
que pour tout y ∈ Br/2 , il existe un unique x ∈ Br vérifiant f (x) = y.
Fixons donc y ∈ Br/2 et considérons la fonction h : Br → E x → y + x − f (x). Elle
est de classe C1 , et pour tout x ∈ Br , |||dh x||| = ||| IdE −df x||| ≤ 1/2, donc d’après l’inégalité des
accroissements finis,
2 1
∀(x, x ) ∈ B r , h(x) − h(x ) ≤ x − x. (∗∗)
2
En particulier, pour tout x ∈ B r, x − f (x) = h(x) − h(0) ≤ x/2 donc
1 r r
∀x ∈ B r, h(x) ≤ y + x − f (x) ≤ y + x < + = r.
2 2 2
Ainsi, h est une fonction de B r dans Br , donc dans B r . Comme de plus h vérifie (**), on
peut appliquer le théorème du point fixe qui entraı̂ne l’existence et l’unicité de x ∈ B r tel que
h(x) = x, et comme h est à valeurs dans Br , x ∈ B r . On a donc f (x) = y.
Résumons. Nous avons montré, pour tout y ∈ Br/2 , l’existence et l’unicité de x ∈ Br tel que
f (x) = y . En notant V = f −1(B r/2) ∩ B r (c’est un ouvert qui est un voisinage de 0 car f (0) = 0
et f est continue en 0), ceci s’interprète en disant que f|V : V → W = B r/2 est une bijection.
(ii). Notons g : W → V l’application inverse. Désignons par h l’application h : x → x − f (x)
(c’est l’application h précédente avec y = 0), de sorte que x = h(x) + f (x) pour tout x. Pour
montrer que g est continue, il suffit de remarquer que
1
∀x, x ∈ B r , x − x ≤ h(x) − h(x ) + f (x) − f (x) ≤ x − x + f (x) − f (x )
2
donc x − x ≤ 2f (x) − f (x). On en déduit
∀y, y ∈ W, g (y ) − g (y ) ≤ 2f (g (y)) − f (g (y )) = 2y − y, (∗∗∗)
autrement dit g est lipschitzienne, donc continue.
(iii). Fixons x ∈ V et posons y = f (x) ∈ W . Soit w tel que y + w ∈ W . On note v =
g (y + w) − g(y ). On a v ≤ 2w d’après (***), et
∆(w) = g (y + w) − g (y ) − dfx−1(w )
= (x + v ) − x − df −1 −1
x [f (x + v ) − f (x)] = −df x [f (x + v ) − f (x) − dfx (v)].
(Inv est même différentiable d’après l’exercice 5 page 331) l’application y → dgy = df −1
g(y )
est
1
continue comme composée d’applications continues, donc g est de classe C .
3. INVERSION LOCALE, FONCTIONS IMPLICITES 343
Remarque 2. D’après le théorème de Banach (voir exercice 6 page 423), une application
linéaire continue bijective de E dans F a son inverse continu. Dans les résultats précédents,
on peut donc remplacer l’hypothèse “dfx est inversible et bicontinu” par “dfx est inversible”
(dfx est forcément continu par définition d’une différentielle).
Cas des fonctions définies sur Rn.
Définition 1. Soient U et V deux ouverts de Rn et une application f : U → V . On dit
que f est un C k-difféomorphisme (k ≥ 1), si f est bijective, de classe Ck et si f −1 est de
classe Ck.
Une autre conséquence du théorème d’inversion locale est la suivante.
Corollaire 3. Soit f : U ⊂ Rn → Rn ( où U est un ouvert de Rn ) de classe Ck (k ≥ 1).
S’il existe a ∈ U tel que dfa soit inversible (en termes équivalents, si le jacobien de f en
a n’est pas nul), alors il existe un voisinage ouvert V de a et un voisinage ouvert W de
f (a) tels que f |V soit un C k-difféomorphisme de V sur W . On a alors d(f|V−1 )f (x) = df−1
x
pour tout x ∈ V .
Démonstration. L’endomorphisme dfa est inversible, donc bicontinu (on est en dimension finie).
Le théorème d’inversion locale assure alors l’existence de deux voisinages ouverts V de a et W
−1
de f (a) tels que f|V soit un C1 difféomorphisme de V sur W , et donne d(f|V )f (x) = df x−1 pour
tout x ∈ V . Il nous reste à montrer que g = f −1 k
|V est de classe C .
344 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
Jx . Les dérivées partielles du premier ordre de g au point f (x) s’expriment donc comme des
fractions rationnelles en les dérivées partielles du premier ordre de f en x. Ainsi, les fonctions
∂g k−1 ∂g
∂xi ◦ f sont de classe C . On conclut par récurrence sur k que les ∂x i
sont de classe C k−1, donc
g est bien de classe C k.
De la même manière que le corollaire 2, on peut montrer le corollaire suivant :
Remarque 3. Il se peut que df x soit inversible pour tout x ∈ U et que f ne soit pas
injective (prendre par exemple f : R2 → R 2 (x, y ) → (e x cos y, ex sin y)).
3.2. Fonctions implicites
Nous commençons par énoncer le théorème des fonctions implicites pour une fonction
à variable dans un espace de Banach, avant de passer à la dimension finie. Nous aurons
besoin pour cela de la définition qui suit (qui généralise la notion de dérivée partielle).
Définition 2. Soient E1, . . . , E n , F des e.v.n et une application f : Ω ⊂ E = E 1 × · · · ×
En → F , où Ω est un ouvert de E . Soit a = (a1 , . . . , an ) ∈ Ω. Pour 1 ≤ i ≤ n, la fonction
fi : x → f (a1 , . . . , ai−1, x, a i+1 , . . . , an ) est définie sur un voisinage de ai dans E i. Si elle
est différentiable en ai , on dit que f admet une différentielle partielle d’indice i, et on
appelle différentielle partielle d’indice i la différentielle dfi,ai , notée ∂i f(a1 ,...,an ) .
Remarque 4. — Lorsque Ei = R pour tout i, E = Rn , les différentielles partielles
∂f
s’expriment en fonction des dérivées partielles par la relation ∂ ifa (h) = h ∂xi
(a).
— Il résulte de la définition de la différentielle que si f est différentiable en a =
(a1 , . . . , an ), alors ∂i f(a 1,...,an ) existe pour tout i et de plus
∀h ∈ E i, ∂i f(a 1 ,...,an ) (h) = dfa(0, . . . , 0, h, 0, . . . , 0),
ce qui entraı̂ne
n
∀(h 1, . . . , hn ) ∈ E1 × · · · × E n, df a(h 1, . . . , h n) = ∂i fa(h i).
i=1
Remarque 5. — Le théorème que nous venons d’énoncer peut sembler obscur. Es-
sayons de l’éclaircir : deux points x et z étant donnés, on recherche y tel que
f (x, y ) = z . A condition de prendre y proche de b (exprimé par la condition
(x, y ) ∈ Ω), y existe et est unique, et on peut écrire y = ϕ(x, z ) où ϕ est de
classe C1 .
— On peut calculer la différentielle de ϕ en différentiant la relation f (x, ϕ(x, z )) = z.
Après calculs, on trouve
dϕ (x,z )(h 1, h 2 ) = ∂2 f(x,ϕ(x,z ))) −1 h1 − ∂ 1f (x,ϕ(x,z )) (h2 ) .
Remarque 6. On utilise souvent le théorème des fonctions implicites lorsque z est fixé,
menant ainsi au corollaire suivant :
Sous les hypothèses du théorème, si c = f (a, b), alors il existe un voisinage ouvert U
de a, un voisinage ouvert Ω de (a, b) et une fonction ψ : U → V de classe C1 vérifiant
— pour tout x ∈ U , y = ψ (x) est l’unique solution de f (x, y) = c telle que (x, y ) ∈ Ω
(avec les notations du théorème, on a ψ (x) = ϕ(x, c)). On obtient la différentielle de ψ en
calculant la différentielle des deux membres de l’égalité f (x, ψ (x)) = c, ce qui donne
0 = df(x,ψ(x)) ◦ (Id E , dψx ) = ∂1 f(x,ψ (x)) + ∂2 f(x,ψ(x)) ◦ dψx ,
donc dψ x = −∂2 f(−1
x,ψ(x)) ◦ ∂1 f (x,ψ(x)) .
Remarque 7. Là encore, on utilise souvent ce résultat lorsque z est fixé, ce qui mène au
corollaire suivant :
sous les même hypothèses, on peut trouver un voisinage ouvert U de a, un voisinage
ouvert Ω de c = f (a, b), et une fonction ψ : U → R q de classe C k telle que pour tout
x ∈ U , y = ψ (x) est l’unique solution de f (x, y) = c vérifiant (x, y) ∈ Ω.
En termes intuitifs, ceci s’énonce en disant que q contraintes (de classe C k ) sur q varia-
bles mènent localement à une solution de classe C k en les autres variables. Ceci permet,
sous de bonnes hypothèses, de voir les sous-ensembles de Rn définis implicitement par
f (x1, . . . , x n) = 0 comme des nappes paramétrées.
On peut obtenir la matrice jacobienne (resp. les dérivées partielles) de ψ en écrivant
que la matrice jacobienne (resp. les dérivées partielles) de f (x, ψ (x)) est nulle (resp. sont
nulles).
On utilise beaucoup le corollaire énoncé dans la remarque précédente lorsque p = q = 1
ou lorsque p = 2, q = 1. Dans ces cas particuliers, ceci s’énonce comme suit.
Corollaire 6. Soit f : R2 → R ( où A est un ouvert de R2 ) une fonction de classe C k,
(k ≥ 1). Soit (a, b) ∈ A et supposons
∂f
f (a, b) = 0 et (a, b) = 0.
∂y
Alors il existe α, β > 0 tel que pour tout x ∈ ]a − α, a + α[, l’équation f (x, y ) = 0 possède
une et une seule solution y = ϕ(x) dans l’intervalle ]b − β, b + β [. La fonction ϕ est de
classe C k sur ]a − α, a + α[, et on a
∂f
∂x
(x, ϕ(x))
∀x ∈ ]a − α, a + α[ , ϕ (x) = − ∂f
.
∂y
(x, ϕ(x))
Démonstration. L’existence de α, β > 0 et de ϕ sont assurés par le corollaire énoncé dans la
remarque précédente. Pour calculer ϕ, on dérive la relation f (x, ϕ(x)) = 0 qui entraı̂ne
∂f ∂f
(x, ϕ(x)) + ϕ(x) (x, ϕ(x)) = 0,
∂x ∂y
d’où la valeur de ϕ (x).
On démontrerait de même le corollaire suivant
Corollaire 7. Soit f : A ⊂ R2 × R → R ( où A est un ouvert de R3 ) une fonction de
classe C k (k ≥ 1). Soit (a, b, c) ∈ A et supposons
∂f
f (a, b, c) = 0 et (a, b, c) = 0.
∂z
Alors il existe α, β, γ > 0 tels que pour tout (x, y ) ∈ ]a − α, a + α[ × ]b − β, b + β [,
l’équation en z : f (x, y, z ) = 0 admette une unique solution z = ϕ(x, y ) dans ]c − γ, c + γ [.
La fonction ϕ est de classe Ck et
∂f ∂f
∂ϕ (x, y, ϕ(x, y)) ∂ϕ ∂y
(x, y, ϕ(x, y))
(x, y) = − ∂x
∂f
, (x, y) = − ∂f .
∂x ∂z
(x, y, ϕ(x, y)) ∂y ∂z
(x, y, ϕ(x, y))
3. INVERSION LOCALE, FONCTIONS IMPLICITES 347
Preuve du théorème des extremums liés. Munis du théorème des fonctions impli-
cites, nous sommes maintenant en mesure de démontrer le théorème des extremums liés
énoncé à la page 337. On utilise les mêmes notations que celles de l’énoncé.
Soit s = n − r . Identifions R n à R s × R r . On écrit les éléments de R n sous la forme (x, y) =
(x1 , . . . , xs ; y1, . . . , yr ). Écrivons a = (α, β), α ∈ Rs et β ∈ R r.
Commençons par faire la remarque suivante. On a nécessairement r ≤ n car les formes
linéaires dgi,a forment une famille libre et la dimension du dual de Rn est n. Par ailleurs, si
r = n, le théorème est évident car les dgi,a forment une base de (R n)∗ . On peut donc supposer
r ≤ n − 1, c’est-à-dire s ≥ 1.
Les formes linéaires (dgi,a )1≤i≤r forment une famille libre, la matrice
∂g1
∂x1
(a) · · · ∂g
∂xs
1
(a) ∂g 1
∂y 1
(a) · · · ∂g 1
∂y r
(a)
.. .. .. ..
. . . .
∂gr ∂g r ∂g r ∂g r
∂x1 (a) · · · ∂xs (a) ∂y 1 (a) · · · ∂y r (a)
est donc de rang r . On peut donc en extraire une sous-matrice r × r inversible. Quitte à changer
le nom des variables, on peut supposer que
∂gi D (g1 , . . . , gr)
det (a) = (a) = 0.
∂y j 1≤i,j ≤r D (y1 , . . . , yr)
D’après le théorème des fonctions implicites (plus précisément la remarque 7), on peut donc
trouver un voisinage ouvert U de α dans R s , un voisinage ouvert Ω de a = (α, β) dans Rn et
une fonction ϕ = (ϕ 1, . . . , ϕ r ) : U → Rr de classe C 1 tels que (en notant g = (g 1, . . . , gr ))
(g (x, y) = 0 avec x ∈ U et (x, y ) ∈ Ω) ⇐⇒ (y = ϕ(x)).
En d’autres termes, sur un voisinage de a, les éléments de Γ = {z | g (z) = 0} s’écrivent
(x, ϕ(x)). Posons h(x) = f (x, ϕ(x)). La fonction h admet donc un extremum local en x = α (car
(α, ϕ(α)) = a et (x, ϕ(x)) ∈ Γ), ce qui entraı̂ne
r
∂h ∂f ∂ϕj ∂f
∀i, 1 ≤ i ≤ s, 0= (α) = (a) + (α) (a). (∗).
∂xi ∂xi j=1
∂xi ∂yj
Par ailleurs, en écrivant les dérivées partielles par rapport aux xi de g(x, ϕ(x)) = 0, on tire
r
∂ϕj
∂g k ∂gk
∀k, 1 ≤ k ≤ r, ∀i, 1 ≤ i ≤ s, 0= (a) + (α) (a). (∗∗)
∂xi ∂xi ∂yj
j=1
3.3. Exercices
Exercice 1. Soit f : R 2{(0, 0)} → R 2 (x, y ) → (x2 − y 2, 2xy )
a) Montrer qu’en tout point de R2 {(0, 0)}, f est un C ∞ difféomorphisme local.
b) L’application f est-elle un C ∞ difféomorphisme global ?
348 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
Solution. a) La fonction f est clairement de classe C∞ . Soit (a, b) ∈ R2 {(0, 0)}. Le jacobien
de f en (a, b) est égal à
2a 2b
2 2
−2b 2a = 4(a + b ) = 0.
Donc, d’après le théorème d’inversion locale (corollaire 3), il existe un ouvert U contenant (a, b),
un ouvert V contenant f (a, b), tel que la restriction de f à U soit un C ∞ -difféomorphisme de U
sur V . Autrement dit, f est un C ∞ -difféomorphisme local en (a, b).
b) On remarque que f (−x, −y) = f (x, y ), la fonction f n’est donc pas injective, et donc ce n’est
pas un C∞ difféomorphisme global.
En fait, en identifiant R2 et C, f s’écrit f (z) = z 2 pour tout z ∈ C∗ . On en conclut que les
ensembles Uα = {(x, y ) ∈ R 2 | x cos α + y sin α > 0} sont des ouverts maximaux sur lesquels
f est injective. Avec le corollaire 4, on en conclut que f un C ∞ -difféomorphisme de U α sur
f (Uα) = R2 {−r (cos 2α, sin 2α), r ≥ 0} (avec α ∈ R quelconque).
∂f
Solution. a) La fonction f est de classe C ∞, elle vérifie f (0, 0) = 0 et ∂y (0, 0) = 1 = 0. On en
déduit le résultat en appliquant le théorème des fonctions implicites.
b) On a bien sûr ϕ(0) = 0 puisque f (0, 0) = 0. On pourrait calculer le développement limité de
ϕ en utilisant la relation exprimant ϕ, puis en la dérivant successivement. Cette technique est
cependant fastidieuse puisque l’on veut aller jusqu’à l’ordre 10 !
Nous utilisons une autre technique, classique (et à retenir). On a vu ϕ(0) = 0, donc
ϕ(x) = O (x) lorsque x → 0 (puisque ϕ est dérivable en 0). Maintenant, à partir de la rela-
tion f (x, ϕ(x)) = 0, l’idée est d’exprimer ϕ(x) en fonction de termes ne faisant intervenir ϕ(x)
qu’avec un ordre supérieur. Ici, on a
ce qui nous donne déjà le développement limité à l’ordre 2. Partant maintenant de l’information
ϕ(x) = −x2 + O (x 3), on itère le procédé, ce qui donne
ϕ(x)3
ϕ(x) = (ϕ(x) − sin ϕ(x)) − xϕ(x) 4 − x2 = + O (ϕ(x)4 ) − x2
6
(−x 2 + O (x 3 )) 3 x6
= + O (x 8 ) − x2 = −x2 − + O (x 7 ).
6 6
On obtient le résultat demandé en réinjectant encore une fois,
Solution. a) Normons L(E ) avec la norme |||u||| = supx=1 u(x) pour tout u ∈ L(E). On a
|||dfx ||| = 1 pour tout x ∈ E , donc d’après l’inégalité des accroissements finis,
∀(x, y ) ∈ E 2 , f (x) − f (y ) ≤ x − y . (∗)
Ceci étant, soit a ∈ E . Comme dfa est une isométrie, dfa est inversible. D’après le théorème
d’inversion locale, il existe un ouvert V a contenant a tel que f|Va soit un C 1 -difféomorphisme de
Va sur W a = f (V a). Notons g : W a → Va le difféomorphisme inverse. Pour tout y = f (x) ∈ Wa ,
dgy = (df x)−1 est une isométrie, donc |||dgy ||| = 1. Quitte à restreindre Va en un ouvert plus petit
Ua, on peut supposer que W a = f (U a) est convexe (prendre par exemple U a = g (B) où B est une
boule ouverte centrée en f (a) incluse dans f (Va ), de sorte que Wa = f (g (B)) = B). On peut donc
appliquer l’inégalité des accroissements finis à g sur W a , ce qui entraı̂ne g (x) − g (y ) ≤ x − y
pour tout (x, y) ∈ Wa2. On en conclut
∀(x, y ) ∈ Ua2 , x − y = g (f (x)) − g (f (y )) ≤ f (x) − f (y ).
Avec (*), on en déduit f (x) − f (y ) = x − y pour tout (x, y ) ∈ Ua2 .
b) Le résultat de la question précédente s’écrit aussi
∀(x, y ) ∈ Ua2 , f (x) − f (y ), f(x) − f (y ) = x − y, x − y .
En différentiant cette égalité par rapport à x selon le vecteur h ∈ E , on obtient
dfx (h), f(x) − f (y ) + f (x) − f (y ), dfx (h) = h, x − y + x − y, h,
350 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
et par symétrie du produit scalaire, ceci s’écrit aussi dfx(h), f(x) − f (y ) = h, x − y . Par
différentiation de cette dernière égalité par rapport à y selon un vecteur ∈ E , on en déduit
−dfx (h), df y () = −h, . Autrement dit nous venons de montrer le premier résultat voulu.
Donnons nous maintenant x, y ∈ Ua et h ∈ E . On a
dfx (h) − dfy (h)2 = dfx (h) 2 − 2dfx (h), dfy (h) + dfy (h)2 = h 2 − 2h, h + h2 = 0,
donc dfx (h) = dfy (h). Ceci étant vrai pour tout h ∈ E , on a donc dfx = dfy .
c) D’après le résultat de la question précédente, l’ensemble Γ = {x ∈ E | df x = df 0} est un
ouvert de R n. De plus, f est de classe C 1 donc Γ est aussi un fermé de Rn. En résumé, Γ est un
ouvert et un fermé de E . Or E est connexe (car convexe), donc Γ = E . En posant u = df0 , on a
donc dfx = u pour tout x ∈ E . Ainsi la fonction x → f (x) − u(x) a sa différentielle nulle sur E
tout entier, donc c’est une fonction constante. Si on note α ∈ E sa valeur, on a f (x) = u(x) + α
pour tout x ∈ Rn . Comme u = df0 est une isométrie, on en déduit que f est une isométrie affine.
Définition 3. Soit f : Rn → R une fonction bornée, à support compact (i. e. f est nulle
en dehors d’un compact). Soient les deux ensembles
E+ = {I (v ), f ≤ v et v est en escalier} et E − = {I (u), u ≤ f et u est en escalier}.
Les ensembles E + et E − sont non vides car f est bornée, donc I + = inf E + et I − = sup E −
existent.
On a toujours I− ≤ I + . Si I − = I +, f est dite Riemann-intégrable, et le réel
−
R n f (x) dx = I = I + est appelé intégrale de f sur Rn.
Remarque 1. Lorsque n = 1 et que f est continue par morceaux, cette dernière définition
de l’intégrale est cohérente avec celle d’une fonction à variable réelle. Pour tout n ∈ N∗ ,
elle est également cohérente avec l’intégrale
d’une fonction en escalier définie plus haut.
L’intégrale de f est parfois notée · · · Rn f (x1 , . . . , xn ) dx1 · · · dx n (avec n signes d’inté-
gration).
Ensembles mesurables, intégrale sur un ensemble mesurable.
Définition 4. Une partie bornée A de Rn est dite
mesurable si χA est Riemann-intégrable.
On appelle alors mesure de A le réel mes(A) = Rn χA(x) dx.
Remarque 2. Si n = 2, A est dite quarrable, et mes(A) est appelé l’aire de A. Si n = 3, A
est dite cubable, et mes(A) est appelé le volume de A.
Exemple 1. — Tout pavé de R n est mesurable.
— Une partie bornée A de R2 est dite élémentaire si elle admet les deux définitions
suivantes
A = {(x, y ) ∈ R2 : a ≤ x ≤ b, ϕ1(x) ≤ y ≤ ϕ2 (x)}
A = {(x, y ) ∈ R2 : c ≤ y ≤ d, ψ 1(x) ≤ x ≤ ψ2 (x)}
où [ a, b] et [c, d] sont deux segments de R et ϕ1 , ϕ 2, ψ 1 et ψ 2 sont des fonctions
continues, vérifiant ϕ1 < ϕ2 sur ]a, b[ et ψ 1 < ψ2 sur ]c, d[. Une partie de R2 est
dite simple si elle est la réunion finie de parties élémentaires dont les intérieurs
sont deux à deux disjoints. Toute partie élémentaire, toute partie simple de R2 , est
mesurable.
— Une partie A de Rn est dite négligeable (au sens de Riemann) si A est mesurable
et si mes(A) = 0. On peut montrer qu’une partie bornée A de Rn est mesurable
si et seulement si sa frontière Fr(A) est négligeable. On peut en déduire le résultat
suivant :
Si ϕ est un C 1 -difféomorphisme de U ⊂ Rn sur ϕ(U ) ( où U est un ouvert de
R n ), si A est mesurable et si A ⊂ U , alors ϕ(A) est mesurable.
Par exemple, tout disque du plan, toute sphère de Rn est mesurable.
Nous nous limiterons désormais aux cas des fonctions continues sur les ensembles
mesurables compacts.
Définition 5. Soit A ⊂ Rn un ensemble mesurable compact et f : A → R une applica-
tion continue. Le prolongement f˜ de f à Rn (obtenu en posant f˜(x) = f (x) six ∈ A, = 0
sinon) est Riemann-intégrable, et on appelle intégrale de f le réel A f (x) dx = Rn f˜(x) dx.
Propriétés élémentaires. Les intégrales multiples possèdent les mêmes propriétés que
les intégrales simples. Nous désignons par A un ensemble mesurable compact de R n.
(i) Linéarité. L’ensemble C(A, R) des fonctions continues de A dans R est un R-e.v et
l’application C (A, R) → R f → A f (x) dx est linéaire.
(ii) Positivité. Si f ≥ 0, alors A f (x) dx ≥ 0 ; si f ≤ g , A f (x) dx ≤ A g (x) dx.
(iii) On a | A f (x) dx| ≤ A |f (x)| dx.
4. INTÉGRALES MULTIPLES, INTÉGRALES CURVILIGNES 353
(égalité qui exprime les intégrales multiples en fonctions d’intégrales simples, ce qui permet
de les calculer dans la pratique). Ce dernier terme est parfois noté
b1 b2 bn
dx1 dx2 · · · f (x1 , . . . , xn ) dxn .
a1 a2 an
L’ordre d’intégration (sur les xi) est indifférent, et dans la pratique, on s’arrange pour
intégrer dans un ordre qui facile les intégrations.
Citons un corollaire important de ce théorème :
Corollaire 1. Soient P et Q deux pavés compacts de Rp et Rq , et soient g : P → R et
h : Q → R deux fonctions continues. Alors
g (x)h(y ) dx dy = g (x) dx · h(y ) dy .
P ×Q P Q
Le théorème 1 ne permet de calculer des intégrales multiples que sur des pavés. Pour
calculer des intégrales multiples sur d’autres ensembles, on utilise les deux théorèmes qui
suivent.
Sommation par piles, sommation par tranches.
xn xn
x n = ϕ 2(x)
b
xn
x n = ϕ 1(x) a
x B x A(xn )
Remarque 5. — Le résultat de ces deux théorèmes reste évidemment vrai si l’on rem-
place la variable xn par l’une des autres variables xi .
— Ainsi, on dispose de deux méthodes pour réduire le calcul d’intégrales multiples.
Selon les cas, l’une peut s’avérer plus pratique que l’autre. Si n = 2, ces résultats
sont équivalents, et peuvent s’exprimer comme suit.
Soit K un compact de R2 de la forme
K = {(x, y ) ∈ [a, b] × R | ϕ1 (x) ≤ y ≤ ϕ2 (x)},
où ϕ1 et ϕ2 sont des applications continues de [a, b] dans R. Alors K est
mesurable, et pour toute fonction continue f : K → R, on a
b ϕ2 (x)
f (x, y ) dx dy = f (x, y ) dy dx.
K a ϕ 1(x)
prolongent continûment sur U . Alors V = ϕ(U ) est un compact mesurable et pour toute
fonction continue f : V → R, on a
f (v ) dv = f ϕ(u) |J (ϕ)(u)| du.
V U
Exemple 2. Comme conséquence de ce résultat, nous allons donner une méthode classique
+∞ 2
pour calculer l’intégrale de Gauss −∞ e−x dx. Pour tout a > 0, on note
2 2 2 2 2 2 2
Da = {(x, y ) ∈ R | x + y ≤ a }, C a = [−a, a] et I a = e−(x +y ) dx dy.
Da
En passant en coordonnées polaires puis en appliquant le corollaire du théorème de Fubini,
on a
−r2 −r2 2
∀a > 0, Ia = e r dr dθ = e r dr dθ = π(1 − e −a ).
[0,a]×[0,2π ] [0,a] [0,2π]
−(x2 +y2 )
En notant Ja = Ca
e dx dy, on a (toujours d’après le théorème de Fubini),
a 2
−x2 −y 2 −x2
Ja = e dx e dy = e dx .
[−a,a] [−a,a] −a
Or Da ⊂ C a ⊂ D√ √
2 a , et la fonction intégrée étant positive, on en déduit Ia ≤ Ja ≤ J 2 a ,
ce qui s’écrit encore
a 2
−a2 −x2 2
∀a > 0, π(1 − e ) ≤ e dx ≤ π(1 − e−2a ).
−a
+∞ 2 √
En faisant tendre a vers +∞, on en déduit −∞
e −x dx = π.
Passage en coordonnées cylindriques dans l’espace. Nous nous plaçons dans l’es-
pace R3, dans lequel on écrit (x, y, z) = (r cos θ, r sin θ, z) avec r ≥ 0 et θ ∈ [0, 2π ]. Avec
les notations précédentes, on a
f (x, y, z ) dx dy dz = f (r cos θ, r sin θ, z) r dr dθ dz.
D ∆
356 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
On définit ainsi une relation d’équivalence sur les arcs paramétrés. Chaque classe est
appelée arc géométrique de classe Ck , tout représentant de classe un paramétrage admis-
sible de l’arc géométrique. Deux paramétrages admissibles d’un même arc géométriques
ont même support, on parle donc de support d’un arc géométrique.
Remarque 8. L’application θ est soit strictement croissante, soit strictement décroissante.
Définition 10. Deux paramétrages admissibles (I, f) et (J, g ) d’un arc géométrique de
classe C k sont dit de même sens s’il existe un C k-difféomorphisme croissant de J sur I tel
que g = f ◦ θ .
On définit ainsi une relation d’équivalence sur un arc géométrique (dont il y a au plus
deux classes d’après la remarque précédente) ; les classes sont appelées arcs géométriques
orientés de Rn de classe C k .
Formes différentielles de degré 1.
Définition 11. Soit Ω un ouvert de Rn . On appelle forme différentielle de degré 1 sur
Ω toute application α de Ω sur le dual (Rn ) ∗ de Rn.
On peut écrire la forme différentielle α sous la forme α (x) = ni=1 ai(x) dx i pour x ∈ Ω
(où les ai sont à valeurs réelles et (dx i ) est la base duale de la base canonique de Rn ).
S’il existe une fonction ϕ : Ω → R de classe C 1 telle que α = dϕ, la forme différentielle
α de degré 1 est dite exacte.
Si α est de classe C 1 (i. e. si les ai sont C 1), α est dite fermée si pour tout (i, j),
∂a i
∂xj
= ∂a j
∂xi
.
Remarque 9. Si une forme différentielle de classe C 1 est exacte, elle est fermée (conséquence
du théorème de Schwarz). La réciproque est vraie lorsque Ω est un ouvert étoilé mais est
fausse dans le cas général (voir un contre exemple à l’exemple 3).
Définition
d’une intégrale curviligne. On se donne une forme différentielle α =
i ai (x ) dx i de degré 1, définie et continue sur un ouvert Ω de R n .
Définition 12. Soit γ = ([a, b], f ) (avec f = (f1 , . . . , fn)) un arc paramétré de R n de
classe C 1 dont le support est contenu dans Ω. On appelle intégrale curviligne de α le long
de γ le réel
b b
n
α= α[f (t)] f (t) dt = ai(f (t)) f i(t) dt.
γ a a i=1
Remarque 10. Si γ = ([a, b], f ) est un chemin continu de classe C 1 par morceaux, c’est-à-
dire s’il existe une subdivision a = t0 < t1 < · · · < t p = b de [a, b] telle que f|[ti−1 ,t i] soit de
classe C1 pour tout i ∈ {1, . . . , p}, on définit de même l’intégrale curviligne de α le long
de γ par l’expression
p−1
α= α.
γ i=0 ([ti ,t i+1],f )
Définition 13. Soit Γ un arc géométrique de classe C 1, orienté, à support dans Ω. Les
+
C3
P1 → b
C1 f 1(t)
K
a
C2 P
4.6. Exercices
Exercice 1. Calculer les intégrales doubles D
f (x, y ) dx dy dans les cas suivants :
2
a) f (x, y ) = xy et D = {(x, y ) ∈ R | x ≥ 0, y ≥ 0, x + y ≤ 1} ;
b) f (x, y ) = x2 et D = {(x, y ) ∈ R2 | x2 ≤ y ≤ x} ;
c) f (x, y ) = (x2 − y 2)exy et D = {(x, y ) ∈ R 2 | x2 + y 2 ≤ 1, x + y ≥ 1, x ≥ y } ;
d) f (x, y ) = x cos x + y et D = {(x, y ) ∈ R2 | x ≥ y ≥ 0, x 2 + y2 ≤ π }.
2 2
Solution.
a) On peut écrire D = {(x, y) ∈ R2 | 0 ≤ x ≤ 1, 0 ≤ y ≤ 1 − x}, et en 1 D
appliquant le théorème de Fubini, on a
1
1−x
1 0 1
(1 − x) 2 1
xy dx dy = xy dy dx = x dx = .
D 0 0 0 2 24
Exercice 2. Calculer les intégrales triples I = D
f (x, y, z ) dx dy dz dans les cas sui-
vants.
a) f (x, y, z ) = x2 + y 2 + z 2 et D = {(x, y, z ) ∈ R3 | |x| + |y | + |z | ≤ 1} ;
b) f (x, y, z ) = |z | et D = {(x, y, z ) ∈ R3 | x2 + y 2 + z2 ≤ 1} ;
c) f (x, y, z ) = (x2 + y 2 + z 2)e z et D = {(x, y, z ) ∈ R3 | |x| ≤ 1, |y | ≤ 1, |z | ≤ 1} ;
d) f (x, y, z ) = xyz et D = {(x, y, z ) ∈ R 3 | x ≥ 0, y ≥ 0, z ≥ 0, x2 + y 2 + z2 ≤ 1}.
Solution. a) Vue la symétrie de D et de l’intégrande par rapport aux plans Oxy, Oxz et Oyz ,
on a
I =8 (x2 +y2 +z2) dx dy dz où D = {(x, y, z ) ∈ R3 | x ≥ 0, y ≥ 0, z ≥ 0, x+ y + z ≤ 1}.
D
De même, la symétrie de D et de x2 + y 2 + z2 par rapport aux plans x = y , x = z et y = z
entraı̂ne
I = 24 z 2 dx dy dz.
D
z
L’intégrande ne dépend plus que de z, nous allons donc effectuer une 1 D (z )
sommation par tranches. Si (x, y, z ) ∈ D , on a 0 ≤ z ≤ 1, et l’inter-
section de D avec le plan horizontal de côte z est D (z) = {(x, y ) ∈ y
2
R | x ≥ 0, y ≥ 0, x + y ≤ 1 − z}, par conséquent 0 1
1 1
1 2
x
(1 − z) 2
I = 24 z2 dx dy dz = 24 z2 dz = .
0 D (z ) 0 2 5
et en appliquant une nouvelle fois le théorème de Fubini, on trouve que le premier terme du
produit est 1 1 1
2 2 2 2 8
(x + y ) dy dx = 2x + dx = ,
−1 −1 −1 3 3
8
donc finalement J = 3 (e − 1/e).
Pour calculer K, on effectue une sommation par tranches (l’intégrande ne dépend que de z ),
ce qui donne
1 1
2 z 2 z 5
K= z e dx dy dz = 4 z e dz = 4 e − .
−1 [−1,1]2 −1 6
4. INTÉGRALES MULTIPLES, INTÉGRALES CURVILIGNES 361
20 52 1
Finalement, on trouve I = J + K = e− .
3 3 e
d) La forme de D nous invite à passer en coordonnées sphériques. Dans ces coordonnées, D est
le pavé [0, 1] × [0, π/2] × [0, π/ 2], donc d’après le théorème du changement de variable,
I= (r cos θ cos ϕ)(r sin θ cos ϕ)(r sin ϕ)r 2 cos ϕ dr dθ dϕ
[0,1]×[0,π/2]×[0,π/2]
= r 5 (cos θ sin θ )(cos3 ϕ sin ϕ) dr dθ dϕ,
[0,1]×[0,π/2]×[0,π/2]
et d’après le théorème de Fubini,
1 π/2
π/2
11 1 1
I= r 5 dr cos θ sin θ dθ cos 3 ϕ sin ϕ dϕ = = .
0 0 0 62 4 48
Solution.
a) Il suffit d’utiliser le théorème de Green-Riemann, plus précisément
l’application
qui le suit à la page 358, qui exprime l’aire de K par A =
1 2 0 a
2 ∂K + r dθ, ce qui ici donne
1 π/4 2 a2
A= a cos 2θ dθ = .
2 −π/4 2
b) On utilise comme précédemment, la formule A = 12 ∂K+ r2 dθ. Le
tout est de déterminer ∂K+ . Le paramètre r s’annule lorsque cos(2θ) =
0, donc pour θ = ±π/4. Un paramétrage de la frontière de K est donc
r = −a cos(2θ )/ cos θ , −π/4 ≤ θ ≤ π/4. L’orientation est bien directe, −a 0 a
on peut donc écrire
1 π/4 2 cos2 2θ
A= a dθ
2 −π/4 cos2 θ
et comme cos(2θ ) = 2 cos2 θ − 1,
a2 π/4 2 1 a2 π/4 a2
A= 4 cos θ − 4 + dθ = (2θ + sin 2 θ ) − 4 θ + tan θ = (4 − π ).
2 −π/4 cos2 θ 2 −π/4 2
a) Exprimer F (t) de deux manières différentes (l’une en fonction de f (t), l’autre par
passage en coordonnées polaires).
T
b) Pour T > 0, on pose I (T ) = T1 0 F (t) dt. Montrer que I (T ) converge lorsque T → +∞
et calculer sa limite. En déduire la valeur de l’intégrale de Fresnel
+∞
2
ϕ= e ix dx.
0
2+y 2) 2 2
Solution. a) La relation ei(x = e ix eiy entraı̂ne, par application du théorème de Fubini,
t t
ix 2 iy 2
F (t) = e dx e dy = f (t)2 .
0 0
Calculons maintenant F (t) de manière différente. Tout d’abord, la symétrie du domaine et
de l’intégrande par rapport à la droite x = y permet d’affirmer
2 2
F (t) = 2 ei(x +y ) dx dy,
∆t
on est amené à passer en coordonnées polaires. En polaires, le compact ∆t est représenté par
l’ensemble π
Kt = (r, θ ) ∈ R+ × [0, 2π ] | 0 ≤ r cos θ ≤ t et θ ∈ 0, ,
4
5. PROBLÈMES 363
Le théorème de Fubini nous autorise à échanger l’ordre des signes d’intégration (puisqu’on a
affaire à l’intégrale sur [0, T ] × [0, π/ 4]), donc
π/4 T
iπ i t2 iπ i π/4 T
I (T ) = − exp i dt dθ = − cos θ f dθ. (∗∗∗)
4 T 0 0 cos2 θ 4 T 0 cos θ
Or l’intégrale ϕ = 0+∞ eix dx converge (en effectuant le changement de variable u = x2 , on
2
+∞
remarque que f est de même nature que 0 (e iu )u−1/2 du, qui converge — voir la remarque 6
page 153), donc la fonction t → f (t) est bornée en +∞. Avec (***), on en déduit que I (T )
converge vers iπ/4 lorsque T → +∞.
Par ailleurs,
T la première relation trouvée à la question précédente entraı̂ne, pour tout T > 0,
I (T ) = 1T 0 f 2 (t) dt. Or la fonction t → f 2(t) converge vers ϕ2 lorsque t → +∞. On en déduit
que I (T ) converge vers ϕ2 lorsque T → +∞ (si une fonction ψ converge vers α en +∞, sa
T
moyenne de Césaro 1T 0 ψ converge vers α). On en déduit finalement ϕ2 = iπ/4. On a donc
+∞
déterminé ϕ au signe près. Or s = (ϕ) = 12 0 sin(x)x −1/2 dx ≥ 0 car
+∞
2(n+1)π (2n+1)π
sin u sin u 1 1
s= un , où un = √ du = √ −√ du ≥ 0,
2nπ 2 u 2nπ 2 u u+π
n=0
√
iπ/4 π
on en déduit facilement ϕ = e .
2
Remarque. Un autre moyen de calculer ϕ est d’utiliser le résultat de la question 2/b) de
l’exercice 4 page 168.
5. Problèmes
Problème 1. Déterminer les fonctions f : R2 → R (x, y ) → f (x, y ), de classe C2 , telles
que
∂ 2f ∂ 2f ∂2 f
+ 2 − 3 = 0. (E )
∂x2 ∂x∂y ∂y 2
(Indication : on pourra effectuer le changement de variable u = x + y , v = αx − y , où α
est un réel à déterminer).
donc
∂ 2f ∂ ∂F ∂F ∂ ∂F ∂F ∂2 F ∂2 F 2
2 ∂ F
2
= +α +α +α = + 2α + α
∂x ∂u ∂u ∂v ∂v ∂u ∂v ∂u2 ∂u∂v ∂v2
∂ 2f ∂ ∂f ∂ ∂f ∂2 F ∂2 F ∂2 F
= +α = 2
+ (α − 1) −α 2
∂x∂y ∂u ∂y ∂v ∂y ∂u ∂u∂v ∂v
2 2 2 2
∂ f ∂ F ∂ F ∂ F
= −2 + 2,
∂y 2 ∂u2 ∂u∂v ∂v
et on en déduit
∂2 f ∂ 2f ∂2 f ∂2 F 2 ∂2 F
+ 2 − 3 = 2 α + 2( α − 1) + 6 + (α − 2α − 3) .
∂x2 ∂x∂y ∂y2 ∂u∂v ∂v 2
2 2
L’idée est de faire disparaı̂tre le terme en ∂∂vF2 , pour se ramener à résoudre ∂u∂v ∂ F
= 0 (ce qui
2
s’intègre facilement). On va donc choisir α tel que α − 2α − 3 = 0, c’est-à-dire α = 3 ou α = −1.
Comme on doit avoir α = −1 (pour que la transformation soit bijective), on choisit α = 3.
∂ 2F
L’équation (E ) est donc équivalente à ∂u∂v = 0, où f(x, y) = F (x + y, 3x − y ). Ceci s’écrit
∂ ∂F
1 ∂F
aussi ∂u ∂v = 0, donc la fonction C ∂v est indépendante de u. Il existe donc une fonction
ϕ : R → R de classe C 1 telle que ∂F ∂v (u, v) = ϕ ( v) pour tout (u, v ) ∈ R 2 . Notons ψ une primitive
∂ (F −ψ )
de ϕ. On a ∂v = 0, donc la fonction C 2 F − ψ est indépendante de v , de sorte qu’il existe
θ : R → R telle que F (u, v) = ψ (v ) + θ (u) pour tout (u, v) ∈ R2. Finalement, nous avons montré
que si f vérifie (E ), alors il existe deux fonctions ψ, θ : R → R de classe C 2 telles que
∀(x, y ) ∈ R 2 , f(x, y) = F (u, v) = F (x + y, 3x − y ) = θ (x + y) + ψ(3x − y ).
Réciproquement, si f a cette forme, on vérifie facilement qu’elle satisfait l’équation (E ).
Solution. Soit f ∈ G ∞
0 . Comme f − f (0) s’annule en 0, on peut écrire, d’après le lemme
d’Hadamard
n
∀x = (x1 , . . . , xn ), f(x) = f (0) + xi ϕi(x),
i=1
où pour tout i, ϕi est définie et de classe C ∞ sur un voisinage de 0, c’est-à-dire ϕi ∈ G∞ 0 . En
notant par abus xi la fonction (x 1, . . . , xn ) → xi , la linéarité et la propriété (iii) de L entraı̂nent
n
n
L(f ) = f (0)L(1) + L(xi ϕ i) = L(xi ϕi ).
i=1 i=1
∂f
Or, d’après (ii), L(xi ϕ i) = 0 L(ϕ i ) + L(xi )ϕi(0) = L(x i )ϕi (0), et comme ϕi (0) = ∂xi (0), on en
déduit
n
∂f
L(f ) = L(xi) (0).
i=1
∂x i
En notant ξ = (L(x 1), . . . , L(xn )), ceci s’écrit aussi L(f ) = f ξ(0) = df 0(ξ ), et ceci pour tout
f ∈ G∞
0 , d’où le résultat.
5. PROBLÈMES 365
Solution. 1/ Soit x 0 ∈ C. Commençons par montrer que J est dérivable selon tout vecteur
en x 0. Soit un vecteur ξ ∈ R n , et l’application de la variable réelle ϕ : t → J (x0 + tξ). Cette
application est définie sur un voisinage de 0 dans R, et elle de plus convexe car J est convexe.
On sait donc, d’après la théorie des fonctions convexes de la variable réelle, que ϕ est dérivable
à droite en 0, c’est-à-dire que J est dérivable selon le vecteur ξ en x0 .
Prouvons maintenant la continuité de J en x0 (attention, ce n’est pas parce que J est
dérivable selon tout vecteur en x0 qu’elle y est continue — voir un contre exemple à l’exercice 1
page 329). Quitte à considérer la fonction J (x + x0 ) −J (x0 ), on peut supposer x0 = 0et J (0) = 0.
La norme sur Rn utilisée dans la suite de cette question sera (x 1, . . . , xn ) 1 = i |xi |. L’en-
semble C est ouvert, donc il existe ρ > 0 tel que la boule B(0, ρ) soit incluse dans C . Quitte à
considérer la fonction J (ρx/2), on peut même supposer ρ = 2, de sorte que la boule unité fermée
est incluse dans C.
Commençons par montrer que J est majorée sur la sphère unité. Notons (ei ) la base cano-
nique de Rn et considérons u = ni=1 xi ei tel que u = 1. Pour tout i, il existe εi ∈ {−1, 1} tel
que x i = |x i | ε i. Comme u = i |xi | = 1, on a facilement (comme pour les fonctions convexes
à variables réelles)
n n n
J (u) = J |x i | εi ei ≤ |xi| J (ε i ei ) ≤ M |xi | = M, avec M = sup J (ε ei).
1≤i≤n
i=1 i=1 i=1 ε∈{−1,1}
— Supposons (i) vraie. En écrivant l’inégalité (i) pour le couple (x, y ), pour le couple (y, x),
puis en additionnant, on obtient (ii).
— Supposons (ii) vérifiée. Si on fixe (x, y) ∈ C 2, la fonction ϕ : [0, 1] → R δ → J (x +
δ (y − x)) a pour dérivée ϕ (δ) = J (x + δ (y − x)), y − x et vérifie donc
1
∀δ ∈ ]0, 1] , ϕ (δ ) − ϕ (0) = J (x + δ (y − x)) − J (x), δ(y − x) ≥ α y − x 2δ,
δ
(inégalité qui reste évidemment vraie pour δ = 0) d’où (i) car par intégration, on obtient
1
α
ϕ(1) ≥ ϕ (0) + α y − x 2 δ dδ = ϕ(0) + ϕ(0) + y − x 2.
0 2
(ii) ⇐⇒ (iii).
— Supposons (ii) vérifiée. Soit w ∈ R n . Lorsque ρ est un nombre réel non nul suffisamment
proche de 0, on a d’après (ii)
2 2 J (x + ρw ) − J (x)
J (x + ρw ) − J (x), ρw ≥ αρ w ou encore , w ≥ α w 2 ,
ρ
d’où (iii) en faisant tendre ρ vers 0 (remarquer que J (x) est la matrice jacobienne de
x → J(x)).
— Supposons (iii) vérifiée. Fixons (x, y) ∈ C 2 , et considérons la fonction ψ : [0, 1] → R
définie par ψ (x) = J (x + δ (y − x)), y − x). On a
∀δ ∈ [0, 1], ψ (δ) = J (x + δ (y − x))(y − x), y − x ≥ α y − x2 ,
donc par intégration ψ (1) − ψ (0) ≥ α y − x2 , d’où (ii).
3/ a) L’inégalité d’α-convexité, appliquée avec x = 0 donne
α
∀y ∈ Rn , ∀δ ∈ [0, 1], J(δy ) ≤ (1 − δ )J (0) + δJ (y ) − δ (1 − δ ) y 2
2
ce qui s’écrit encore
J (δy) − J (0) α
∀y ∈ R n , ∀δ ∈ ]0, 1], J(y ) ≥ J (0) + + (1 − δ) y 2.
δ 2
En appliquant cette dernière inégalité aux y tels que y ≥ 2 avec δ = 1/y , on a
y α 1 α
J (y) ≥ J (0) + J − J (0) y + 1− y 2 ≥ J (0) + K y + y 2 ,
y 2 y 4
où K est un minorant de J (u) − J (0) sur la sphère unité (K existe car J est continue et la
sphère unité est compacte). On en déduit limy→+∞ J (y) = +∞.
Ainsi, l’ensemble Γ = {x ∈ Rn | J (x) ≤ J (0)} est borné. Or Γ est fermé (J est continue), donc
Γ ⊂ Rn est compact. Il existe donc x0 ∈ Γ tel que J (x0 ) = inf x∈Γ J (x) (ceci car J est continue).
Par construction de Γ, on a J (x) ≥ J (x 0 ) pour tout x ∈ Rn, donc J (x 0 ) = inf x∈Rn J (x).
b) L’inégalité d’α-convexité donne, pour tout m, n ∈ N,
α 2 J (un) + J (u m) un + um J (un ) + J (um )
un − um ≤ −J ≤ − J (x0 ),
8 2 2 2
et on en conclut que limm,n→+∞ α8 un − u m 2 = 0. Donc (un ) est une suite de Cauchy. Comme
Rn est complet, elle converge. Soit u sa limite. Par continuité de J on a J (u) = J (x0), et d’après
l’inégalité d’α-convexité
α 2 J (u) + J (x0 ) u + x0
u − x0 ≤ −J ≤ 0,
8 2 2
donc u = x0 . D’où le résultat.
Remarque. Les résultats des questions 2/ et 3/ restent vrais dans un espace de Hilbert.
Par contre, le résultat de 1/ est faux en dimension infinie.
368 5. FONCTIONS DE PLUSIEURS VARIABLES
Solution. 1/ a) On sait que G n(R) est un ouvert de M n(R) (image réciproque de la fonction
déterminant, qui est continue, de l’ouvert R∗ ), donc Ω = F ∩ Gn (R) est un ouvert de F .
La fonction ϕ est de classe C ∞ car les coefficients de ϕ(U ) s’expriment comme des polynômes
en les coefficients de U .
On a bien sûr In ∈ Ω. Calculons dϕ In , la différentielle de ϕ en In . Si In + H ∈ Ω, on a
ϕ(In + H ) − ϕ(In ) = tHA + AH + tHAH = tHA + AH + o(H ),
donc dϕI n (H) = tHA + AH pour tout H ∈ F .
Montrons que dϕI n : F → S est un isomorphisme de F sur S , ce qui permettra de conclure
que ϕ est un C ∞ -difféomorphisme local en In d’après le théorème d’inversion locale.
— La différentielle dϕIn : F → S est injective. En effet, si dϕI n(H) = tHA + AH = 0, alors
comme tHA = AH (puisque H ∈ F), on a AH = 0, donc H = 0 car A est inversible.
— La différentielle dϕIn est surjective. En effet, pour tout S ∈ S la matrice H = 12 A−1 S
est bien dans F (car comme A ∈ S , on a tHA = 12 tS tA −1A = 12 S = AH ) et dϕIn (H) =
t
HA + AH = 2AH = S .
b) Il existe donc un voisinage ouvert W de I n dans Ω, un voisinage ouvert V de ϕ(I n) = A
dans S tel que ϕ|W soit un C ∞-difféomorphisme de W sur V . Si on note h : V → W son
difféomorphisme inverse, h est de classe C ∞, à valeurs dans G n (R) (car W ⊂ Gn (R)) et pour
tout B ∈ V , ϕ(h(B )) = B = th(B ) A h(B).
c) Notons (p, q) la signature de la forme quadratique X → tXAX (X ∈ Rn ). On sait que p +q = n
(car A est inversible) et que A est congrue à la matrice diagonale D dont les p premiers termes
diagonaux sont égaux à 1, les q = n − p derniers égaux à −1, autrement dit, il existe P ∈ Gn (R)
tel que A = tP DP . On définit maintenant l’application g : V → G n(R) par g(B) = P h(B).
Elle est de classe C∞ et elle vérifie
t
∀B ∈ V, g (B ) D g(B) = th(B ) tP DP h(B ) = th(B ) A h(B) = B.
(x) = 12 [hi,j (x)+h j,i (x)] pour tout (i, j ), les fonctions ai,j sont de classe C ∞ sur Rn ,
Si on pose a i,j
on a f (x) = i,j xi x j ai,j (x), et pour tout x, la matrice A(x) = (a i,j(x))1≤i,j ≤n est symétrique.
Résumons. Il existe une application A : Rn → M n(R), de classe C ∞, telle que
5. PROBLÈMES 369
∈ Rn , A(X)
— pour tout X t
est symétrique et f (X ) = XA(X )X ;
∂ 2f
— A(0) = H = ∂xi∂xj (0) est inversible.
i,j
Soit (r, n − r ) la signature de la forme quadratique X → tXHX. D’après 1/c), il existe un
voisinage V de H = A(0) dans S et une fonction g : V → Gn (R), de classe C∞ , telle que
tg (B )Dg(B ) = B pour tout B ∈ V , où D est la matrice diagonale dont les r premiers éléments
b) Soit T 0 > 0. Construire une fonction Φ continue sur RT0 telle que
∂ 2 Φ ∂Φ
(i) Φ est de classe C 2 sur RT 0 et − = 0 sur R T0 ;
∂x2 ∂t
(ii) pour tout t ∈ [0, T0], Φ(0, t) = Φ(π, t) = 0 ;
(iii) pour tout x ∈ [0, π], Φ(x, 0) = ϕ(x).
2/ On veut montrer qu’il n’existe qu’une seule fonction Φ vérifiant (i), (ii) et (iii). Soit f
une fonction à valeurs réelles, continue sur RT0 et de classe C2 sur RT0 .
2
a) Si ∂∂x f2 − ∂f∂t
> 0 sur RT 0 , montrer que f atteint son maximum sur CT 0 (on pourra
commencer par prouver le résultat sur RT et CT pour tout T ∈ ]0, T 0 [).
2
b) Si ∂∂xf2 − ∂f∂t
≥ 0 sur R T0 , montrer que f atteint son maximum sur C T0 .
2
c) Si f est nulle sur CT0 et si ∂∂xf2 − ∂f∂t
= 0 sur RT 0, montrer que f est nulle.
d) En déduire que la fonction Φ construite à la question 1/b) est la seule fonction vérifiant
(i), (ii) et (iii).
pour tout x ∈ ]−π, π ]. Ainsi construite, la fonction ϕ est 2π -périodique sur R, impaire, de classe
C 1 par morceaux et continue sur R car ϕ(0) = ϕ(π ) = 0. On en déduit que sescoefficients de
Fourier a n(f ) sont nuls, que ses coefficients de Fourier bn = b n (f ) sont tels que |bn | converge
(voir le théorème 3 page 272), et que de plus
+∞
∀x ∈ R, (x) =
ϕ b n sin nx.
n=1
(x) pour tout x ∈ [0, π].
On en déduit le résultat car ϕ(x) = ϕ
2t ∂ 2f ∂f
b) Remarquons que la fonction f : (x, t) → (sin nx)e−n vérifie ∂x2
− ∂t = 0. On pose donc
+∞
2
Φ : R T0 → R (x, t) → b n (sin nx) e −n t .
n=1
La série est normalement convergente sur RT0 , donc Φ est bien définie et continue sur RT0 . Par
ailleurs, les conditions (ii) et (iii) sont vérifiées.
2
Il nous reste à vérifier (i). Soit p ∈ N. Pour tout a > 0, on a lim n→+∞ e −n a n p = 0, donc les
p 2 2
séries de fonctions n b n(sin nx)e −n t et n pbn (cos nx)e−n t convergent normalement pour
(x, t) ∈ [0, π] × [a, T 0]. On en déduit facilement, grâce au théorème de dérivation des séries de
fonctions que Φ est de classe Cp sur ]0, π[ × ]a, T0[, et ceci pour tout a > 0, donc de classe C p
sur R T0 , et que les dérivées partielles de Φ s’obtiennent en dérivant formellement chacun de ses
termes. Comme ceci est vrai pour tout p ∈ N, Φ est de classe C ∞ . En particulier, Φ est de classe
C 2 et
+∞
+∞
∂2 Φ 2 −n 2t ∂Φ 2
∀(x, t) ∈ R T0 , 2
= − n (sin nx ) e , = − n2 (sin nx)e−n t .
∂x n=1
∂t n=1
∂2Φ ∂Φ
Ainsi, ∂x2
− ∂t = 0 sur RT0, d’où (i) et le résultat.
2/ a) Montrons d’abord que pour tout T ∈ ]0, T0 [, la restriction de f à RT atteint son maximum
en un point de CT (on sait déjà que f atteint son maximum sur RT car R T est compact et f est
continue). Raisonnons par l’absurde : si ceci n’est pas vrai, le maximum est atteint en un point
(x0 , t0) de RT ou de Λ T .
— Si (x 0, t 0) ∈ RT , alors comme (x0 , t 0) est un point intérieur à R T , on a
∂f ∂f
(x0 , t 0 ) = (x 0, t0 ) = 0
∂t ∂x
et la forme quadratique
∂2 f ∂2 f 2
2 ∂ f
x2 (x0 , t 0 ) + 2xt (x 0 , t 0 ) + t (x0 , t0)
∂x 2 ∂x∂t ∂t2
2
2
est négative, en particulier ∂∂xf2 (x0 , t0) ≤ 0. On a donc ∂∂xf2 − ∂f ∂t (x0 , t0) ≤ 0, ce qui est
contraire aux hypothèses.
— Si (x 0, t 0) = (x 0, T ) ∈ ΛT , alors
∂f
— ∂t (x0 , T ) ≥ 0 puisque t → f (x 0, t) atteint son maximum en t =T ;
∂ 2f
— ∂x2 (x 0 , T ) ≤ 0 puisque x → f (x, T ) atteint son maximum en x = x 0, point intérieur
à [ 0, π].
2
On a donc ∂∂xf2 − ∂f ∂t (x0 , t0 ) ≤ 0, ce qui est contraire aux hypothèses.
Nous avons donc montré le premier résultat annoncé (on ne pouvait pas procéder directement
avec T = T0 car f n’est pas supposée C 2 sur un voisinage de ΛT0 ).
Achevons notre raisonnement. Soit (T n) une suite croissante de points de ]0, T [ qui converge
vers T . Comme nous venons de le montrer, il existe pour tout n un point (xn, tn ) de CTn ⊂ CT tel
que f (xn , tn ) = sup(x,t)∈R T f (x, t). Comme CT est compact, on peut extraire de la suite (xn, t n )
n
une sous-suite qui converge vers un point (x∗ , t∗ ) de CT . Quitte à retirer des termes de la suite
et à la réindicer, on peut même supposer que (x n, t n ) converge vers (x ∗, t∗ ). Par continuité de
5. PROBLÈMES 371
xn2 x2n π2
f (x ∗, t∗) ≥ f (x n , t n) = fn (xn , tn) − = sup f n(x, t) − ≥ sup f (x, t) − .
n (x,t)∈RT 0
n (x,t)∈RT
n
0
∗
Ceci étant vrai pour tout n ∈ N , on en déduit, en prenant en compte les deux termes extrêmes
des inégalités, que f (x∗, t ∗ ) ≥ sup(x,t)∈R T f (x, t). Ainsi, f atteint son maximum en (x∗, t∗ ) ∈
0
CT0 .
c) La fonction f vérifie les hypothèses de la question précédente, donc son maximum est atteint
sur CT0 . Comme f est nulle sur CT0 , on en déduit f ≤ 0. Le même raisonnement s’applique à
−f , donc f ≥ 0. On en déduit que f est la fonction nulle.
d) Supposons trouvée une fonction Φ 1 vérifiant les assertions (i), (ii) et (iii). Alors f = Φ − Φ1
satisfait les hypothèses de la question précédente, donc f = 0, donc Φ = Φ1.
Pour tout x ∈ R n , dfx est inversible, donc f est une application ouverte (voir le corollaire 1
page 343). En particulier, f (Rn) est un ouvert de Rn .
Enfin, nous avons vu que pour tout compact K de Rn, f −1 (K ) est compact. On sait alors (ou
alors on le retrouve, voir l’exercice 1 page 31) que f est une application fermée. En particulier,
f (Rn ) est fermé.
c) Commençons par montrer que les points de f −1({y }) sont isolés. Soit x 0 ∈ f −1 ({y }), de sorte
que f (x0 ) = y. Comme dfx0 est inversible, on peut appliquer le théorème d’inversion locale qui
nous dit que f est un C 1-difféomorphisme local autour de x0 . En d’autres termes, il existe un
ouvert V contenant x0 tel que f |V soit une bijection de V sur f (V ). En particulier, f est injective
sur V , donc pour tout x = x 0 et x ∈ V , f (x) = f (x0 ) = y, c’est-à-dire V ∩ f −1({y }) = {x0 }.
Or d’après a), f −1({y }) est compact. Un compact dont tous les éléments sont des points
isolés est un ensemble fini (s’il était infini, il contiendrait un point d’accumulation, qui n’est pas
isolé), donc f−1 ({y }) est fini.
d) Raisonnons par l’absurde. Si le résultat était faux, alors
−1 1
∀p ∈ N, f B y, p ⊂ B(x i, ε).
2
1≤i≤m
En d’autre termes, il existe pour tout p ∈ N un élément zp vérifiant f (zp ) − y ≤ 1/2p tel que
zp ∈ B(xi , ε) pour tout i. La suite (z p ) est à valeurs dans le compact f −1 (Bf (y, 1)), on peut
donc en extraire une sous-suite convergente (z ϕ(p)), de limite z . Comme f est continue, et que
f (zp) − y ≤ 1/2p pour tout p, on a f (z ) = y . Il existe donc i, 1 ≤ i ≤ m, tel que z = xi , et
comme (zϕ(p)) converge vers z = x i , il existe P ∈ N tel que zϕ(p) ∈ B(x i, ε) pour tout p ≥ P .
Ceci est impossible par construction des z p, d’où le résultat.
e) Nous allons nous servir du résultat de la question précédente. Pour cela, il faut choisir
correctement ε > 0.
Pour tout i, dfx i est inversible, donc d’après le théorème d’inversion locale, il existe ε i > 0 tel
que f soit injective sur B(xi , εi). Si ε = inf 1≤i≤m ε i, on a donc ε > 0 et f est injective sur chaque
B(xi , ε). Quitte à diminuer ε > 0, on peut supposer que les boules B(x i , ε) sont disjointes.
D’après la question précédente, on peut trouver un voisinage ouvert V de y tel que f −1(V ) ⊂
∪1≤i≤m B(xi , ε). Posons alors W = V ∩ Γ, où Γ = ∩1≤i≤mf (B(x i, ε)). L’ensemble W est un
voisinage ouvert de y (car nous avons montré à la question b) que f est une application ouverte).
Par ailleurs,
— pour tout z ∈ W , on a z ∈ Γ donc pour tout i, 1 ≤ i ≤ m, il existe x i ∈B(xi, ε) tel que
z = f (xi). Comme les B(x i, ε) sont disjoints, on en déduit Card f −1(z ) ≥ m.
— Pour tout z ∈ W , on a z ∈ V donc f −1({z }) ⊂ f −1(V ) ⊂ ∪1≤i≤m B(xi , ε), et comme f
−1
est injectivesur chaque B(xi, ε), on a Card f ({z }) ≤ m.
−1
On en déduit Card f ({z }) = m pour tout z ∈ W .
f ) D’après la question précédente, l’ensemble Γm = {z ∈ R n | Cardf −1 ({z }) = m} est un ouvert.
Or f est surjective et f −1 ({z }) est fini pour tout z ∈ R n , donc
Rn = Γm = Γ m0 Γm , où m0 = Cardf −1 ({0}).
m∈N∗ m=m o
m>0
Ainsi, Rn est la réunion des deux ouverts Γ m0 et ∪ m=m0 Γm. Comme Rn est connexe, que ces
∅ (car 0 ∈ Γ m0 ) on en tire Γ m0 = R n. En d’autres termes,
ouverts sont disjoints et que Γm0 =
Cardf ({z }) = m 0 pour tout z ∈ Rn.
−1
g) Les hypothèses s’écrivent aussi f −1 ({0}) = {0}. Donc m0 = 1, donc d’après la question
précédente, Cardf −1 ({z }) = 1 pour tout z ∈ Rn . Autrement dit, f est bijective. On conclut
avec le corollaire 4 page 344 (inversion globale) que f est un C 1-difféomorphisme global.
CHAPITRE 6
Équations différentielles
1. Généralités
1.1. Définitions
Une équation différentielle est une équation portant sur les dérivées d’une fonction.
Plus précisément :
Définition 1. Soit n ∈ N∗ et E un espace de Banach. Soit une application F : Ω ⊂
R×E n → E (où Ω est un ouvert de R×E n). On appelle solution de l’équation différentielle
d’ordre n
y (n) = F (t, y, y , . . . , y(n−1) ) (∗)
toute application ϕ : I → E ( où I est un intervalle de R), n fois dérivable et vérifiant
(i) pour tout t ∈ I, (t, ϕ(t), . . . , ϕ(n−1)(t)) ∈ Ω ;
(ii) pour tout t ∈ I, F (t, ϕ(t), . . . , ϕ(n−1) (t)) = ϕ(n)(t).
Dans la suite de cette partie, nous utiliserons les notations de cette définition.
374 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
bornée sur V , mais même en dimension infinie, comme F est continue en (t0 , x0 ), on peut choisir
V telle que F soit bornée sur V ). Notons M un majorant de F sur V . On peut choisir r > 0 et
α > 0, désormais fixés, tels que Iα × B r ⊂ V et αM < r (on dit que Iα × B r est un cylindre de
sécurité pour F en (t 0, x0)).
La fonction F est continue, toute solution est donc de classe C 1. Ainsi, une application
n
t : Iα → R est solution si et seulement si pour tout t ∈ I , (t, ϕ(t)) ∈ Ω et ϕ(t) = x 0 +
ϕ
t0 F (u, ϕ(u)) du.
Notons Γ l’ensemble des fonctions continues ψ : Iα → Rn telles que ψ (Iα ) ⊂ Br . Pour tout
ψ ∈ Γ, l’application t
ψ : I α → Rn t → x 0 + F (u, ψ(u)) du (∗)
t0
vérifie t
∀t ∈ I α,
ψ (t) − x0 ≤ F (u, ψ(u)) du ≤ αM < r,
t0
donc ψ ∈ Γ. On est donc autorisé (et c’est là l’utilité du cylindre de sécurité) à définir la suite
de fonctions (ψn ) par
ψ 0 : I α → Rn t → x0 et ∀n ∈ N, ψ n+1 = ψn.
Montrons que pour tout t ∈ Iα et pour tout n ∈ N, ψn+1 (t) − ψn (t) ≤ r kn |t − t0 |n /n!. Pour
n = 0, c’est immédiat d’après (*). Pour passer du rang n − 1 au rang n, il suffit d’écrire, pour
tout t ∈ Iα ,
t t
ψn+1 (t) − ψn (t) ≤ F (u, ψ n (u)) − F (u, ψ n−1(u)) du ≤ k ψn(u) − ψn−1 (u) du
t0 t0
t
k n n
≤r |t − t 0| n−1 dt = r k |t − t 0 |n.
(n − 1)! t0 n!
La série de fonctions (ψn+1 − ψn) converge donc normalement sur I α , par conséquent la suite
de fonctions (ψn ) converge uniformément sur Iα . Notons ψ la fonction limite. On a ψ ∈ Γ et
t
∀n ∈ N, ∀t ∈ Iα, ψn+1 (t) = x0 + F (u, ψ n(u)) du,
t0
et en faisant tendre n vers +∞ on en déduit ψ (t) = x0 + tt0 F (u, ψ(u)) du, c’est-à-dire que ψ est
solution au problème de Cauchy en (t0 , x0 ) sur l’intervalle Iα .
Unicité. Soient ϕ : I → R n et ψ : J → R n deux solutions au problème de Cauchy en (t0 , x0 ).
En notant, pour tout t ∈ I ∩ J , Mt = supu∈(t 0,t) ψ (u) − ϕ(u), une récurrence sur n donne
t
|t − t0 | n n
∀t ∈ I ∩ J, ∀n ∈ N, ϕ(t) − ψ (t) ≤ F (u, ϕ(u)) − F (u, ψ(u)) du ≤
k Mt .
t0 n!
Ceci étant vrai pour tout n ∈ N, on en déduit ϕ(t) = ψ (t) pour tout t ∈ I ∩ J .
Solution. Raisonnons par l’absurde. S’il existe t1 ∈ R tel que f (t 1 ) ≥ g (t1 ), alors comme f et
g sont continues (elles sont même de classe C 1 ), d’après le théorème des valeurs intermédiaires,
2. ÉQUATIONS DIFF ÉRENTIELLES LINÉAIRES 377
il existe u ∈ R tel que f (u) = g (u). Mais alors, d’après le théorème de Cauchy-Lipschitz (qui
s’applique car F est de classe C 1) il y a unicité au problème de Cauchy au point u, donc f = g .
Ceci est absurde car f (t0 ) = g (t0 ), d’où le résultat.
Solution. Comme ϕ est solution, la relation (*) montre que la fonction ϕ T : t → ϕ(t + T ) est
aussi une solution. Trois cas se présentent.
(i) Si ϕ(0) < ϕ(T ) = ϕ T(0), alors d’après l’exercice précédent, on a ϕ(t) < ϕ T (t) pour tout
t ∈ R. On en conclut ϕ(kT ) < ϕT (kT ) = ϕ((k + 1)T ) pour tout k ∈ N, autrement dit, la
suite (ϕ(kT )) k∈N est strictement croissante.
(ii) Si ϕ(0) > ϕ(T ), on montrerait en procédant de la même manière que la suite (ϕ(kT )) k∈N
est strictement décroissante.
(iii) Si ϕ(0) = ϕ(T ) = ϕT (0), alors d’après le théorème de Cauchy-Lipschitz (qui donne
l’unicité au problème de Cauchy), ϕ = ϕT , c’est-à-dire que ϕ est T -périodique, et en
particulier, la suite (ϕ(kT )) est constante.
passe de Kn à K np ). Pour cette raison, nous nous limiterons à l’étude des équations
différentielles linéaires d’ordre 1.
Remarque 1. Lorsque l’équation différentielle linéaire porte sur des fonctions à valeurs
dans Kn (avec n ≥ 2), on parle aussi de système différentiel linéaire. Si n = 1, on parle
d’équation différentielle linéaire scalaire.
Solutions des équations différentielles linéaires. Les solutions maximales des
équations différentielles linéaires ont la propriété d’être définies sur tout l’intervalle I
où les fonctions de l’équation sont définies. Plus précisément, on a le résultat suivant,
dont une preuve est donnée au corollaire 1 page 400.
Théorème 1. Soit une équation différentielle linéaire
Y = A(t) Y + B (t), (L1)
n
où A : I → Mn(K) et B : I → K sont des fonctions continues. Alors pour tout t0 ∈ I
et pour tout X 0 ∈ K n , il existe une unique solution V de (L1 ) définie sur I tout entier,
telle que V (t0) = X 0.
Remarque 2. La version de ce théorème pour les équations différentielles linéaires d’ordre
p est la suivante : pour tout t 0 ∈ I , pour tout X0 , . . . , X p−1 ∈ Kn , il existe une unique
solution ϕ de (L) définie sur I tout entier, telle que ϕ(t0 ) = X 0, . . . , ϕ(p−1)(t0 ) = Xp−1 .
Les Vi étant indépendants, ceci apparaı̂t comme un système de Cramer dont les inconnues
sont les λi(t). Par résolution puis intégration, on trouve les λi (voir l’exercice 1 pour des
calculs pratiques).
Regardons en particulier comment mettre en œuvre cette méthode pour les équations
différentielles linéaires d’ordre 2 sur K.
Supposons connues deux solutions linéairement indépendantes u et v de (H ) : y =
a(t) y + b(t) y, et recherchons la solution générale de (L) : y = a(t) y + b(t) y +c(t).
y
On se ramène d’abord à un système différentiel d’ordre 1 : en posant Y = y , les
équations différentielles (H ) et (L) deviennent respectivement (H1 ) : Y = A(t) Y et
(L1) : Y = A(t) Y + C (t) où
0 1 0
A(t) = et C (t) = .
b(t) a(t) c(t)
Il s’agit donc de trouver les solutions de (L1 ). On pose W (t) = λ(t) U (t) + µ(t) V (t) , où
U (t) = uu((tt)) et V (t) = vv((tt)) . Comme on l’a vu plus haut, W est solution de (L1 ) si et
seulement si λ(t)U (t) + µ (t)V (t) = C (t) pour tout t ∈ I , donc t → λ(t) u(t) + µ(t) v (t)
est solution de (L) si et seulement si
λ u + µv = 0
,
λ u + µ v = c(t)
relations utiles dans les exercices (voir l’exercice 1).
Abaissement de l’ordre dans une équation différentielle linéaire sur K. On
considère une équation différentielle de la forme (L) : y (n) = an−1 (t) y (n−1)+· · ·+a1 (t) y +
a0(t) y, où les a i sont des fonctions continues de I dans K. Si l’on connaı̂t une solution ϕ
de (L), il est possible d’abaisser l’ordre de (L) en procédant comme suit : on recherche les
solutions de (L) sous la forme f = gϕ, où g est une fonction de classe Cn encore inconnue.
En remplaçant dans (L), on voit que f est solution si et seulement si
n
n−1
Cnk g(k) ϕ(n−k) = an−1 (t) k
Cn−1 g (k)ϕ(n−1−k) + · · · + a 1 (t) (gϕ + g ϕ) + a 0 (t) gϕ,
k=0 k=0
et comme ϕ est solution de (L), tous les termes contenant g s’éliminent, ce qui entraı̂ne
n
n−1
Cnk (k)
g ϕ (n−k)
= an−1 (t) C kn−1 g(k)ϕ (n−1−k) + · · · + a 1 (t) (g ϕ).
k=1 k=1
Autrement dit, g est solution d’une équation différentielle d’ordre n − 1 : nous venons
d’abaisser l’ordre de l’équation.
Cette technique est particulièrement sympathique dans le cas des équations du second
ordre (L 2) : y = a(t) y + b(t) y. Si on connaı̂t une solution ϕ, f = gϕ sera solution de
(L2) si et seulement si (2g ϕ + g ϕ) = a(t) gϕ, équation linéaire d’ordre 1 en g que l’on
sait intégrer, ce qui permet de connaı̂tre toutes les solutions de (L 2).
Démonstration. La fonction V prend bien la valeur V0 en 0 car l’exponentielle de lat nmatrice nulle
est la matrice identité. Par ailleurs, on peut écrire V sous la forme V (t) = +∞
n=0 n! (A n V ). Par
0
les techniques usuelles sur les séries de fonctions, on montre que V est de classe C 1 sur R et que
+∞
+∞
tn−1 tn
n n
∀t ∈ R, V (t) = (A V 0) = A (A V0 ) = A V (t).
n=1
(n − 1)! n=0
n!
b) Les solutions de l’équation homogène associée sont les fonctions t → λ cos t + µ sin t avec
(λ, µ) ∈ R2. Pour trouver une solution de (L) : y + y = tan 2 t, on applique la méthode de
variation des constantes. Une fonction de la forme t → λ(t) cos t + µ(t) sin t sera solution de (L)
si et seulement si
λ cos t + µ sin t = 0 sin3 t sin2 t
2 ⇐⇒ λ (t) = − 2 et µ (t) = ,
λ (− sin t) + µ cos t = tan t cos t cos t
et par intégration on en déduit
1 π t
λ(t) = α − cos t − , µ(t) = β − sin t + log tan + , (α, β) ∈ R 2 .
cos t 4 2
La solution générale de (L) est donc
π π
π t
− , →R t→ α cos t + β sin t − 2 + sin t log tan + , (α, β) ∈ R2 .
2 2 4 2
La méthode de variation des constantes va une fois de plus nous permettre de trouver une
solution de (L) : y − 2y/t 2 = 3. La fonction t → λ(t) t2 + µ(t)/t sera solution si et seulement si
2
λ t + µ/t = 0 1
⇐⇒ λ = et µ = −t2 ,
2t λ − µ /t 2 = 3 t
ce qui équivaut à λ(t) = α + log |t| et µ(t) = β − t3 /3 (α, β ∈ R), d’où les solutions de (L) :
β1 t2
t → α1 t2 + + t2 log |t| − sur ] − ∞, 0[, α 1, β 1 ∈ R
t 3
β t 2
2
t → α 2 t 2 + + t 2 log t − sur ]0, +∞[, α 2 , β2 ∈ R.
t 3
Pour que ces solutions puissent se prolonger pour donner une solution sur R tout entier, il faut
avoir β1 = β2 = 0 (pour avoir une limite finie en 0). Dans ce cas, on remarque que le raccord est
dérivable en 0, n’est pas deux fois dérivable en 0 (à cause du terme en t 2 log |t|). Il n’y a donc
pas de solution sur R.
Remarque. La méthode utilisée dans la question 2/ a) se généralise comme suit. Soit
(L) : y(n) + a 1 y (n−1) + · · · + an−1 y + a n y = eλt P (t) une équation différentielle linéaire,
où l es ai et λ sont des constantes et P un polynôme de degré q . Soit χ le polynôme
caractéristique X n + a 1 X n−1 + · · · + a n , et soit m l’ordre de multiplicité de la racine
éventuelle λ de χ (en convenant m = 0 si χ(λ) = 0). Alors l’équation (L) admet une
unique solution de la forme t → tm eλtQ(t) , où Q est un polynôme de degré q.
1 0 1
Solution. a) Soit A la matrice 0 −1 −1 , de sorte que le système s’écrit X = AX , avec
x 0 2 1
X = z . Pour déterminer les solutions, nous diagonalisons A. On calcule facilement son
y
polynôme caractéristique PA = −(X − 1)(X 2 + 1) = −(X − 1)(X + i)(X − i), et après calculs,
les sous-espaces propres sont
1 1+i 1−i
Ker(A − I ) = C 0 , Ker(A − iI ) = C 1 − i , Ker(A + iI ) = C 1 + i .
0 −2 −2
Remarquons que A se diagonalise dans C3 . On va donc trouver des solutions complexes, puis on
déterminera les solutions réelles en prenant les parties réelles et imaginaires.
Soit λ ∈ {1, i, −i}. Si X : R → C3 t → X (t) est solution et vérifie X (t) ∈ Ker(A − λI ) pour
tout t, on a X = AX = λ X, donc X = e λt X(0), où X (0) ∈ Ker(A − λ I). Réciproquement, on
vérifie facilement que ainsi définie, X est bien solution. Par linéarité, on en déduit donc que les
fonctions
1 1+i 1−i
t → α e t 0 + β eit 1 − i + γ e −it 1 + i , (α, β, γ ∈ C)
0 −2 −2
sont des solutions. L’espace des solutions étant de dimension 3 (voir le théorème 2), on en déduit
que ceci est la solution générale (complexe). Pour obtenir la solution réelle générale, on prend
384 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
les parties réelles et imaginaires. On en conclut facilement que la solution réelle générale est
x(t) 1 cos t − sin t sin t + cos t
t → y (t) = λ et 0 + µ cos t + sin t + ν sin t − cos t , λ, µ, ν ∈ R.
z (t) 0 −2 cos t −2 sin t
b) Notons (i) la première équation du système et (ii) la seconde. En additionnant (i) et (ii), on
obtient (x + y ) + (x + y ) = 0, donc x + y est solution de l’équation différentielle z + z = 0,
donc il existe λ ∈ R tel que x + y = λe−t. Par intégration, on en déduit l’existence de deux
constantes α, β ∈ R telles que x + y = α + βe−t. En remplaçant cette égalité dans (ii), on obtient
(iii) : y − 3y + 2y = −α − βe −t. L’équation homogène associée est (iv) : y − 3y + 2y = 0.
Son polynôme caractéristique est (X − 1)(X − 2), les solutions de (iv) sont donc de la forme
t → γet + δe2t , avec γ, δ ∈ R. On recherche une solution particulière de (iii) sous la forme
t → a + be−t . En remplaçant et après identification, on obtient a = −β/2, b = −α/6, et on en
déduit que la solution générale de (iii) est
β α −t
− e + γe t + δe2t ,
t → − γ, δ ∈ R.
2 6
Or on a vu plus haut que x = β + αe−t − y, donc la solution générale du système est
x(t) 3 −t 7 t 1 2t 1
t → =β +α e +γ e +δ e , (α, β, γ, δ) ∈ R4 .
y (t) −1 −1 −1 −1
Remarque. Dans la question a), on aurait aussi pu trouver les solutions en passant par
les exponentielles de matrice. D’ailleurs, la méthode que nous avons utilisée ne s’applique
plus lorsque la matrice n’est pas diagonalisable.
Dans la question b), la technique que nous avons employée n’est pas toujours ap-
plicable : parfois, des transformations linéaires simples sur les équations du système ne
permettent pas de le réduire facilement. On peut utiliser une méthode systématique, qui
consiste a transformer le système en un système
d’ordre 1.
Ici, le
système b) s’écrit aussi
X + AX + BX = 0 avec X = xy , A = 10 −43 et A = −11 −33 , et on le transforme en
X 0 I X
= ,
Y −B −A Y
système que l’on sait désormais résoudre.
Exercice 3. Déterminer l’ensemble des fonctions f : ]0, +∞[ → R qui sont dérivables
et qui vérifient (E) : f (t) = f (1/t) pour tout t > 0.
Solution. Si f vérifie (E ), alors f est dérivable sur ]0, +∞[ (car f (t) = f (1/t)), et en dérivant
(E), on voit que
1 1 1 1 f (t)
∀t > 0, f (t) = − 2 f = − 2f =− 2 ,
t t t 1/t t
autrement dit, f est solution sur ]0, +∞[ de l’équation différentielle (L) : t2 y + y = 0. Ce
type d’équation différentielle est classique et s’appelle équation d’Euler. On peut la résoudre sur
chacun des intervalles ] − ∞, 0[ et ]0, +∞[ en effectuant le changement de variable t = ±ex, nous
ramenant ainsi à une équation différentielle linéaire homogène d’ordre 2 à coefficients constants
(voir la remarque à la fin de l’exercice). Ici, nous allons utiliser une technique différente.
On veut résoudre (L) sur ]0, +∞[. Nous allons commencer par en rechercher les solutions
complexes. La forme de (L) nous invite à rechercher des solutions particulières sous la forme t →
tα , où α est une constante complexe. Ceci sera le cas si et seulement si t2(α(α − 1)t α−2 ) + tα = 0
pour tout t > 0, ce qui équivaut à α(α − 1) + 1 = 0. Ainsi, si α est racine du polynôme
P = X (X − 1) + 1 = X 2 − X + 1, l’application t → tα est solution de (L) sur ]0, +∞[. Le
2. ÉQUATIONS DIFF ÉRENTIELLES LINÉAIRES 385
√ √
polynôme P a deux racines distinctes qui sont α1 = 12 + i 23 et α2 = 12 − i 23 = α 1 , on a donc
trouvé deux solutions de (L) qui sont linéairement indépendantes. L’ensemble des solutions de
l’équation linéaire homogène (L) formant un C-espace vectoriel de dimension 2, on en déduit
que la solution générale de (L) est
t → a t α1 + b t α2, a, b ∈ C. (∗)
Finalement, nous venons de montrer que si f est une solution complexe de (E ), elle est de la
forme (*). Réciproquement, une fonction de la forme (*) est solution si et seulement si
∀t > 0, aα1 t α1 −1 + bα2 tα2 −1 = a t−α1 + b t −α 2 ,
ce qui en remplaçant α 1 et α 2 par leurs valeurs s’écrit aussi
√ √
1 3 √ 1 3 √ √ √
−1/2+i 3/2
∀t > 0, a +i t +b −i t −1/2−i 3/2 = a t −1/2−i 3/2+b t −1/2+i 3/2.
2 2 2 2
Ceci sera vérifié si et seulement si
√ √
1 3 1 3
a +i = b et b −i = a, ou encore a eiπ/3 = b et b e−iπ/3 = a.
2 2 2 2
Ces deux équations sont liées, et elles sont équivalentes à l’existence d’un nombre complexe c tel
que a = ce−iπ/6 et b = ceiπ/6 . Finalement, f est une solution complexe de (E ) si et seulement si
elle est de la forme
√
√ √ 3 π
t → c e −iπ/6 t1/2+i 3/2 + eiπ/6 t1/2−i 3/2 = c t 1/2 cos log t − , c ∈ C.
2 6
On en déduit que la solution réelle générale de (E) est la même que la précédente, où la constante
c doit être prise dans R.
Remarque. De manière générale, on appelle équation d’Euler les équations linéaires ho-
mogènes du type
tn y (n) + a1 t n−1 y (n−1) + · · · + an−1 t y + an y = 0, (∗∗)
où l es ia sont des constantes complexes. En effectuant le changement de variable t = ε e x ,
(ε ∈ {−1, 1}), on ramène cette équation à une équation linéaire homogène à coefficients
constants d’ordre n que l’on sait résoudre.
La technique que nous avons utilisée dans l’exercice pour résoudre ce type d’équations
est de rechercher des solutions particulières sous la forme t → tα . En remplaçant dans
(**), on trouve que ceci donne une solution si et seulement si α est racine d’un certain
polynôme P de degré n. Si P a ses n racines distinctes, alors cette méthode nous donne n
solutions linéairement indépendantes, et on en déduit toutes les solutions puisque l’espace
des solutions est de dimension n. Par contre, si P a une ou plusieurs racines multiples,
ceci ne nous donne qu’un nombre < n de solutions indépendantes, et on ne peut donc
pas en déduire toutes les solutions par cette méthode. Il faut procéder comme décrit
précédemment.
Solution. Nous faisons tout de suite la remarque suivante, qui nous sera utile :
∀P, Q ∈ C[X ], P Q(D)(y) = P (D)[Q(D)(y)] = Q(D)[P (D)(y)].
Remarquons aussi que pour tout polynôme P , toute solution de P (D)(y ) = 0 est de classe C ∞.
a) On regarde D comme l’endomorphisme de C ∞(R, C) (e.v des fonctions de classe C ∞ de R
dans C) qui a tout u associe u. Soit P ∈ C[X ]. Dire que u est solution de l’équation différentielle
P (D )(u) = 0, c’est dire que u ∈ Ker P (D ). Autrement dit, SP = Ker P (D).
Maintenant, si les polynômes P1 , . . . , Pk sont premiers entre eux deux à deux, on a d’après le
théorème de décomposition des noyaux (voir le tome Algèbre) Ker P1 · · · P k (D ) = Ker P1(D ) ⊕
· · · ⊕ Ker Pk (D). En d’autres termes, SP1 ···Pk = SP 1 ⊕ · · · ⊕ SPk .
b) L’intuition nous guide et nous fait pressentir que les solutions de Pn (D)(y ) = 0 sont les
fonctions t → eαt F (t) où F est un polynôme complexe de degré < n. Montrons donc ce résultat
par récurrence sur n ∈ N∗.
Pour n = 1, c’est facile car P1 (D)(y) = 0 équivaut à y = αy, dont les solutions sont les
fonctions t → λ eαt , λ ∈ R.
Supposons le résultat vrai au rang n − 1 et montrons le au rang n. L’équation P n(D)(y) = 0
s’écrit aussi Pn−1 (D)[P 1(D)(y)] = 0, ce qui équivaut à dire que P1 (D)(y) a la forme t → eαy F (t),
où F ∈ C[X ], deg(F ) < n − 1. Or l’équation y − αy = eαt F (t) s’écrit aussi (ye −αt) = F (t), ce
qui équivaut à y = e αtG(t) où G est une primitive de F , c’est-à-dire G ∈ C[X ] et deg(G) < n.
On en déduit le résultat au rang n, donc pour tout n ∈ N∗ .
c) Soit P = λ ki=1(X − α i )n i la décomposition de P en facteurs irréductibles de C[X ]. D’après
le résultat de la question a), on a
SP = S (X −α1 )n1 ⊕ · · · ⊕ S(X −αk )n k ,
et comme d’après b), S(X −α i)ni est le s.e.v des fonctions de la forme t → e αi t Fi (t) avec F i ∈ C[X ]
et deg(Fi ) < ni , on en déduit que S P est l’ensemble des fonctions de la forme t → eα 1t F1 (t) +
· · · + e α kt F k (t) où pour tout i, F i est un polynôme complexe de degré < ni .
Solution. a) Soit ε > 0 et soit A > 0 tel que |f (t) + αf (t)| < ε pour tout t ≥ A. En notant
a = (α), on a
d αt
∀t ≥ A, [e f (t)] = eαt [f(t) + αf (t)] = eat f (t) + αf (t) ≤ ε e at,
dt
2. ÉQUATIONS DIFF ÉRENTIELLES LINÉAIRES 387
donc
ε
∀t ≥ A, |f (t)| ≤ e a(A−t)|f (A)| + 1 − e a(A−t) .
a
Comme a > 0, on en déduit l’existence de B > A tel que |f (t)| ≤ 2ε/a pour tout t ≥ B , d’où le
résultat.
b) La relation P Q(D)(f ) = P (D)[Q(D)(f )] pour tout P, Q ∈ C[X ] va nous permettre de
montrer que la condition nécessaire est suffisante recherchée est que toutes les racines de P aient
une partie réelle strictement négative.
Condition nécessaire. Nous montrons le résultat par récurrence sur n ∈ N∗. Pour n = 1, c’est
précisément le résultat démontré dans la question
précédente. Supposons le résultat vrai au rang
n − 1 et montrons le au rang n. Écrivons P = λ ni=1(X − αi ) (λ ∈ C∗ ), et supposons que toutes
les racines αi de P vérifient (αi ) < 0. On peut écrire P = Q(X − αn) , où Q est un polynôme
de degré n − 1 dont toutes les racines ont une partie réelle < 0. Soit f : R+ → C une fonction de
classe C n telle que lim t→+∞ P (D )(f )(t) = 0. On a P (D )(f ) = Q(D)[(D − α n Id)(f )] = Q(D )(g ),
où g = f − αn f , et comme lim t→+∞ Q(D )(g )(t) = 0, on en déduit d’après l’hypothèse de
récurrence que lim t→+∞ g (t) = 0. En d’autres termes, lim t→+∞ f (t) − αn f (t) = 0, et d’après la
question a), on en déduit que limt→+∞ f (t) = 0.
Condition suffisante. Supposons que P ait une racine α dont la partie réelle vérifie (α) ≥ 0.
On peut écrire P = Q(X − α) , où Q ∈ C[X ]. La fonction f : t → αt e ne tend pas vers 0 en
+∞, et comme f − αf = 0, on a P (D)(f ) = Q(D)[f − αf] = 0. Ainsi, nous avons trouvé une
fonction f ne tendant pas vers 0 à l’infini telle que limt→+∞ P (D )(f ) = 0. Ceci est absurde,
donc toutes les racines de P ont nécessairement leur partie réelle < 0.
∃λ ∈ C, ∀t ∈ R, V (t + T ) = λ V (t).
∃C ∈ G n (C), ∀t ∈ R, M (t + T ) = M (t) C.
Solution. a) On sait (voir le théorème 2 page 378) que l’ensemble S des solutions de (E ) est
un C-e.v de dimension n. Comme A est T -périodique, on voit que pour toute solution V de
(E), l’application VT : t → V (t + T ) est aussi une solution. On construit ainsi une application
Φ : S → S V → V T . Cette application est évidemment un endomorphisme de S . Comme S
est un C-e.v de dimension finie, Φ admet au moins une valeur propre λ ∈ C. Si V ∈ S est un
vecteur propre non nul associé, on a Φ(V ) = λV , ce qui s’écrit aussi V (t + T ) = λ V (t) pour
tout t ∈ R.
b) Comme S est un espace vectoriel de dimension n, (V 1, . . . , V n) est une base de S. Notons
B = (bi,j ) la matrice de l’endomorphisme Φ dans cette base, de sorte que
n
n
∀i ∈ {1, . . . , n}, Vi,T = bi,j Vj ou encore ∀t ∈ R, Vi(t + T ) = bi,j Vj (t).
j=1 j=1
388 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Comme M (t) est la matrice dont l’élément d’indice (i, j) est Vj,i (t), ceci s’écrit aussi tM (t + T ) =
B tM (t), donc M (t + T ) = M (t) tB pour tout t ∈ R. La matrice B étant inversible (car Φ est
inversible, puisque si VT = 0, alors V = 0 donc Ker Φ = {0}), la matrice C = t B est aussi
inversible.
Solution. a) Posons W (t) = wronskien(u, v )(t) = (uv − u v )(t). L’idée est de rechercher une
équation différentielle vérifiée par W . Pour tout t ∈ I , on a W (t) = (uv −u v )(t). En multipliant
par u l’égalité v + p(t) v + q (t) v = 0 et par v l’égalité u + p(t) u+ q (t) u = 0, puis en retranchant,
on obtient uv − u v + p(t)(uv − u v ) = 0. Autrement dit, W + p(t)W = 0. On en déduit en
résolvant cette équation différentielle linéaire d’ordre 1 que
t
∀t ∈ I, W (t) = W (a) exp − p(u) du .
a
b) On pose W (t) = wronskien(f1 , . . . , fn )(t) = det(f1, . . . , fn )(t). Nous allons comme plus haut
rechercher une équation différentielle satisfaite par W .
La formule de dérivation d’un déterminant (qui peut s’obtenir facilement à partir de son
développement en fonction de ses coefficients — voir le tome Algèbre) entraı̂ne
n
∀t ∈ I, W (t) = det(f1 , . . . , fi−1 , f i, f i+1, . . . , fn )(t)
i=1
n
= det(f1 (t), . . . , fi−1 (t), A(t)f i(t), fi+1(t), . . . , fn(t)).
i=1
est une forme n-linéaire antisymétrique, donc alternée, donc proportionnelle à l’application
déterminant (voir le tome Algèbre). On peut donc trouver λ ∈ R tel que Φt (v1 , . . . , vn) =
λ det(v1, . . . , vn ) pour tous vecteurs v 1, . . . , v n ∈ Cn . Or, en désignant par (e1 , . . . , en ) la base
canonique de Cn , on a facilement
n
Φt (e 1, . . . , e n) = det(e1 , . . . , e i−1 , A(t)e i, e i+1 , . . . , en) = tr A(t),
i=1
On en déduit finalement
t
∀t ∈ I, W (t) = W (a) exp tr A(u) du .
a
Remarque. Ce résultat peut être utile, surtout le cas particulier de a) car beaucoup
d’exercices portent sur les équations linéaires d’ordre 2.
En transformant les équations différentielles linéaires sur C d’ordre n en un système
différentiel sur Cn, un corollaire du résultat de la question b) est que le wronskien W de n
solutions d’une équation différentielle sur C du type y (n) + a1 (t) y (n−1) + · · · + an (t) y = 0
vérifie t
∀t ∈ I, W (t) = W (a) exp − a1(u) du .
a
Solution. Commençons par donner quelques rappels d’algèbre (voir le tome Algèbre). On a
Cn = N1 ⊕ · · · ⊕ Nk, et pour tout i, N i est stable par f ce qui fait de fi = f |Ni un endomorphisme
de Ni . Pour tout i, on peut aussi écrire fi sous la forme f i = λi IdN i +n i, où ni est nilpotent (et
plus précisément nαi i = 0).
Soit u une solution de X = f (X). Pour tout i, notons πi la projection sur Ni parallèlement
à ⊕j =i Nj , puis ui = π i(u), de sorte que u = u 1 + · · · + uk et pour tout i, ui = f i (ui). Nous allons
montrer que pour tout i, ui ∈ S Ni ,αi ,λi . Posons vi = e−λ i tui . On a
vi = −λi vi + e −λi t u i = −λivi + e−λi t fi(u i ) = −λivi + f i (vi) = n i (vi ),
(r)
et une récurrence immédiate donne ensuite vi = nri (v i) (on peut bien dériver autant de fois
que l’on veut puisque la relation vi = n i(v i) entraı̂ne le fait que vi est de classe C ∞ ). Or n αi i = 0,
(α )
on a donc v i i = 0. Autrement dit, vi = P est un polynôme de degré < α i , à coefficients dans
Ni , et comme ui = e λi tvi , on en déduit ui ∈ SNi ,α i,λ i .
On a donc montré S ⊂ SN 1,α 1,λ 1 + · · · + SNk ,α k ,λ k . De plus, il est immédiat que les SN i,αi ,λi
sont en somme directe, d’où le premier résultat demandé.
Comme il y a inclusion, il y aura égalité si et seulement si les dimensions des sous-espaces
correspondants sont égales, c’est-à-dire dim S = ki=1 dim SNi ,αi ,λ i . Or dim S = n = k i=1 α i et
2
pour
2 tout i , dim S Ni ,α i,λi = α i dim Ni = αi . Il y aura donc l’égalité si et seulement si i αi =
α
i i , ce qui équivaut à dire α i = 1 pour tout i , ou encore que les valeurs propres de f sont
toutes distinctes.
Remarque. Ce résultat reste évidemment vrai, par isomorphisme, pour les systèmes
linéaires du type X = AX, où A ∈ Mn(C). Dans la pratique, pour résoudre (S) : X =
AX, on ne cherche pas directement les sous-espaces N i. On écrit qu’une solution V s’écrit
nécessairement sous la forme V = ki=1 eλ i t Pi (t) , où Pi est un polynôme de degré < αi
à valeurs dans Cn , puis on trouve la forme des coefficients des Pi par identification en
remplaçant dans (S ).
390 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Solution. On a affaire à une équation homogène du premier ordre. Soit y une solution maximale
de (E ) sur un intervalle I coupant R+∗ . Alors x → y (−x) est aussi solution, on va donc se limiter
dans un premier temps à étudier y sur J = I ∩ R+∗. √
Lorsque x ∈ J , on pose t = y/x, et l’équation (E ) devient (E ) : t = 1x 1 + t2 . On a donc
dt dx
√ = ,
1 + t2 x
ce qui par intégration donne argsh t = log(x/λ), avec λ > 0. Donc
x 1 x λ
x2 − λ2
∀x ∈ J, t(x) = sh log = − donc y (x) = x t(x) = .
λ 2 λ x 2λ
La fonction x → (x2 − λ2 )/(2λ) est aussi solution sur R, et comme la fonction y est une solution
maximale, on en déduit J = R+∗ , puis K = I ∩ R−∗ = ∅ (mais attention, a priori, cela ne veut
3. ÉQUATIONS DIFF ÉRENTIELLES NON LIN ÉAIRES 393
pas dire que ce soit la seule solution maximale égale à y sur R+∗ ). Par symétrie, on a
x 2 − µ2
∃µ ∈ R, ∀x ∈ K, y(x) = .
2µ
Comme précédemment, on en déduit que K = R−∗ . Ainsi, I est un intervalle vérifiant I ∩ R+∗ =
R+∗ et I ∩ R−∗ = R −∗ , donc I = R. Comme y est continue, les limites à gauche et à droite de y
en 0 coı̈ncident, ce qui entraı̂ne −µ/2 = −λ/2, donc µ = λ.
Finalement, nous avons montré que toutes les solutions maximales de (E) sont définies sur
R et qu’elles sont de la forme
x 2 − λ2
y : x → .
2λ
4. Quelques compléments
Dans cette section sont présentés les compléments de cours suivant :
— quelques résultats sur les équations différentielles linéaires d’ordre 2 ;
— le lemme de Gronwall ;
— la dépendance des solutions d’une équation différentielles par rapport aux condi-
tions initiales ;
— le principe de majoration a priori, résultat qui donne des renseignements sur le
comportement des solutions maximales aux extrémités de leurs intervalles de défi-
nition.
4.1. Équations différentielles linéaires du second ordre
Les équations différentielles linéaires du second ordre sont les plus simples des équations
différentielles linéaires que l’on ne sache pas en général intégrer. Elles interviennent en
outre dans de nombreux problèmes de mécanique et de physique. Il parait donc normal
de les étudier plus particulièrement.
On désigne par K l’un des corps R ou C.
On s’intéresse à l’équation différentielle linéaire homogène
y + p(t) y + q (t) y = 0 (L)
où p et q sont deux fonctions continues de I dans K, où I est un intervalle ouvert de R,
et où on étudie les solutions à valeurs dans K.
Rappel. Les équations différentielles du type (L) sont un cas particulier d’équations
différentielles linéaires homogènes, pour lesquels on a les résultats suivant (voir la partie 2.1
de ce chapitre) :
— toute solution maximale de (L) est définie sur I tout entier ;
— l’ensemble S des solutions maximales de (L) est un K-e.v de dimension 2. De plus,
pour tout t0 ∈ I, l’application S → K 2 f → (f (t0), f (t0 )) est un isomorphisme ;
— tous les éléments f ∈ S sont de classe C∞ ;
Wronskien. Le wronskien d’un couple de solutions maximales (u, v ) de (L), défini par
wronskien(u, v) = uv − u v vérifie
t
∀t0 ∈ I, ∀t ∈ I, wronskien(u, v )(t) = wronskien(u, v )(t0 ) exp − p(s) ds
t0
(voir l’exercice 7 page 388). En particulier, on retrouve le résultat du corollaire 1 page 379.
Par ailleurs, si p est identiquement nulle, le wronskien de (u, v ) est constant.
Astuces de calcul. On peut toujours ramener (L) au cas où p = 0 en procédant comme
suit. Posons y = z · x, où z et x sont deux fonctions de classe C2 de I dans K encore
inconnues. En remplaçant dans (L) on obtient :
zx + (2z + pz )x + (z + pz + qz )x = 0.
Il suffit donc de choisir z tel que 2z + pz = 0, et le tour est joué (on doit supposer p de
classe C1 pour que z soit C 2 ).
Si p = 0, (L) s’écrit y + qy = 0, et par produit par y on a y y + qyy = 0, ou encore
d
dt
(y 2 ) + q (t) dt
d
(y 2) = 0. Cette expression peut parfois rendre des services.
4. QUELQUES COMPL ÉMENTS 395
+
+∞différentielle (L) : y + q(t) y = 0, où q : R → R
Exercice 1. On considère l’équation
est une fonction continue telle que 0 |q (t)| dt converge.
a) Soit y une solution bornée de (L). Étudier le comportement de y en +∞.
b) Montrer que (L) admet des solutions non bornées.
+∞ +∞
Solution. a) Comme y est bornée et que 0 |q (t)| dt converge, on voit que 0 q (t)y (t) dt =
− 0+∞ y(t) dt converge. On en conclut que y converge
x en +∞x. Notons α = lim t→+∞ y (t). Si
α = 0, y (t) ∼ α en +∞, donc lorsque x → +∞, 0 y (t) dt ∼ 0 α dt = α x, donc y (x) ∼ αx, ce
qui absurde car y est bornée. On en déduit α = 0, donc y tend vers 0 en +∞.
b) Raisonnons par l’absurde en supposant que (L) n’admette que des solutions bornées. Soit
(u, v) une base des solutions de (L). On a vu dans la question précédente que u et v tendent
vers 0 en +∞, donc wronskien(u, v) = uv − u v tend vers 0 en +∞. Or la forme de l’équation
différentielle (L) montre que le wronskien de u et v est constant (voir plus haut la sous-partie
sur le wronskien), et comme sa limite est nulle, il est identiquement nul. Ceci est absurde car
comme (u, v) est une base des solutions de (L), on a wronskien(u, v )(t) = 0 pour tout t.
(t1 < t2 ) deux zéros consécutifs de f . Montrer qu’il existe un unique point t 0 ∈ ]t1 , t 2[ tel
que g (t0) = 0.
2/ a) Soient I un intervalle de R, et r, s : I → R deux fonctions continues telles que r ≤ s
sur I . Soit x une solution non nulle de (L1 ) : x + r (t) x = 0, y une solution non nulle de
(L2) : y + s(t) y = 0. Soient t1 et t2 (t 1 < t2 ) deux zéros consécutifs de x. Montrer que
si x et y ne sont pas proportionnelles sur ]t1 , t2 [, il existe t0 ∈ ]t1 , t 2[ tel que y (t0 ) = 0.
b) Si q est une fonction continue sur I qui vérifie q (t) ≤ µ2 pour tout t (avec µ >
0), montrer que deux zéros consécutifs t 1 et t2 (t1 < t2 ) d’une solution non nulle de
(L) : y + q (t) y = 0 vérifient t 2 − t1 ≥ π/µ.
c) Si q est une fonction continue sur I qui vérifie q (t) ≥ λ2 pour tout t (avec λ > 0),
montrer que toute solution de (L) : y + q (t) y = 0 s’annule au moins une fois dans tout
intervalle fermé de longueur π/λ.
Solution. 1/ a) On sait déjà (voir l’exercice 2 page 376), que les zéros de f sont isolés.
Supposons que f ait une infinité de zéros dans un segment [a, b] ⊂ I . Comme [a, b] est
compact, il existe un élément x ∈ [a, b] qui est un point d’accumulation des zéros de f . Par
continuité de f , on a f (x) = 0, autrement dit x est un zéro de f . Ceci est absurde car x est un
point d’accumulation des zéros de f et les zéros de f sont isolés.
b) La fonction f ne s’annule pas sur ]t1 , t2 [. Quitte à changer f en −f , on peut donc supposer
f > 0 sur ]t 1, t2 [. Comme f (t 1) = 0, on a
f (t) − f (t1) f (t)
f (t1) = lim = lim ≥ 0,
t→t1
t>t1
t − t1 t→
t>t
t1 t − t1
1
Solution. La fonction y est continue sur [a, b], donc il existe c ∈ [a, b] tel que y (c) = supt∈[a,b] y (t).
Comme de plus y (a) = y (b) = 0 et que y > 0 sur ]a, b[, on a c ∈ ]a, b[. On écrit maintenant, pour
tout α, β tels que a < α < β < b,
b b b
y (t)
|q (t)| dt = dt > 1 |y (t)| dt ≥
1
|y (β ) − y (α)|.
y (t) y (c) y (c)
a a a
Or, d’après le théorème des accroissements finis, on peut trouver α ∈ ]a, c[ et β ∈ ]c, b[ tels
que
y (c) − y (a) y (b) − y (c)
= y (α) et = y (β ).
c−a c−b
On en conclut
b
1 1 y (c) − y (a) y (b) − y (c)
|q (t)| dt > |y(β ) − y (α)| = − = 1 + 1
y (c) y (c) c−a b−c c−a b−c
a
(car y (a) = y (b) = 0). Une rapide étude de la fonction c → c−1 a + b−1
c
montre qu’elle atteint son
minimum pour c = (a + b)/2, point en laquelle elle vaut 4/(b − a). Donc finalement
b
1 1 4
|q (t)| dt > + ≥ ,
a c−a b−c b−a
d’où le résultat.
Démonstration. Il s’agit du lemme de Gronwall dans le cas particulier où ϕ est la fonction
constante égale à c, on a donc pour tout t ∈ [a, b]
t t t s=t t
y (t) ≤ c + cψ(s) exp ψ (u) du ds = c − c exp ψ (u) du = c exp ψ (s) ds .
a s s s=a a
Entraı̂nez vous à démontrer ce corollaire directement, sans utiliser le lemme de Gron-
wall général.
Citons enfin une application intéressante du lemme de Gronwall, utile dans les majo-
rations d’erreurs sur les solutions d’équations différentielles.
Corollaire 2. Soit y : [a, b] → Rn une fonction de classe C 1 vérifiant
∃α > 0, ∃β ≥ 0, ∀t ∈ [a, b], y (t) ≤ β + αy (t).
Alors
β α(t−a)
∀t ∈ [a, b], y (t) ≤ y (a)eα(t−a) + e −1 .
α
Démonstration. Il suffit d’écrire, pour tout t ∈ [a, b],
t t
y (t) ≤ y (a) + y (t) − y (a) ≤ y (a) + y (t) dt ≤ y (a) + β (t − a) + α y (s) ds,
a a
puis on applique le lemme de Gronwall et on conclut en intégrant par parties.
Exercices.
Démonstration. Commençons par un rappel. Pour tout t ∈ R et pour tout α > 0, on pose Iα(t) =
]t − α, t + α[. Pour tout x ∈ Rn et pour tout r > 0, on pose Br (x) = {y ∈ Rn | x − y < r}.
Nous avons vu, au cours de la démonstration du théorème de Cauchy-Lipschitz page 374 que si
U = Iα (t) × Br (x) est un cylindre de sécurité pour F en (t, x), (i. e. F est lipschitzienne en la
seconde variable sur U et il existe un majorant M > 0 de F sur U tel que αM < r), alors il
existe une solution ϕ de y = F (t, x) définie sur I α (t) et vérifiant ϕ(t) = x.
Soit U ⊂ Ω un voisinage compact de (t0 , x0 ) tel que F soit lipschitzienne en la seconde
variable sur U . Notons M un majorant de F sur U , et choisissons α > 0 et r > 0 tels que
I α(t0 ) × Br (x0) ⊂ U et αM < r (ainsi I α (t0 ) × Br (x 0 ) est un cylindre de sécurité pour F en
(t0 , x0)).
Posons I = Iα/3 (t0) et V = Br/3 (x0 ). Soit (t 1 , x) ∈ I × V . Alors I2α/3 (t 1) × B 2r/3(x) est
un cylindre de sécurité pour F en (t 1, x) (en effet, I2α/3 (t 1) ⊂ I α (t0 ), B 2r/3(x) ⊂ Br (x0 ), et
(2α/3)M < 2r/3 < r), donc il existe une solution ϕ de y = F (t, y) définie sur I 2α/3(t 1 ) et
vérifiant ϕ(t1 ) = x. Comme I ⊂ I 2α/3 (t1 ), on en déduit le résultat.
Nous sommes maintenant en mesure de démontrer le théorème suivant.
Remarque 1. — Dans le cas O = Rn, ce résultat s’écrit : si β < b, alors lim t→β ϕ(t) =
+∞.
— Une fonction localement lipschitzienne F : Rn → R n y → F (y ) peut être vue
comme une fonction de R × R n → Rn (en posant F (t, y) = F (y )). Le théorème
précédent s’énonce alors comme suit : si ϕ : ]a, b[ → Rn est une solution maximale
de y = F (y ), et si b < +∞, alors lim t→b ϕ(t) = +∞.
— Il existe une version faible du principe de majoration a priori dont la preuve est
plus simple et ne repose pas sur le lemme précédent (voir l’exercice 1).
Grâce au principe de majoration a priori, nous pouvons maintenant démontrer le
théorème 1 page 378 (la version faible — exercice 1 — permet aussi de le démontrer).
Corollaire 1. Soit (L) : X = A(t) X + B (t) une équation différentielle linéaire sur
Rn , où A : ]a, b[ → Mn (R) et B : ]a, b[ → Rn sont continues.
Alors les solutions maximales de (L) sont définies sur ]a, b[.
4. QUELQUES COMPL ÉMENTS 401
Exercices.
Solution. Soit ϕ : ]a, b[ → Rn une solution maximale de X = f (X). Supposons b < +∞. Alors
si t0 ∈ ]a, b[, en notant M un majorant de F sur Rn , on a d’après l’inégalité des accroissements
finis
∀t ∈ [t0 , b[, ϕ(t) ≤ ϕ(t 0) + ϕ(t) − ϕ(t 0) ≤ ϕ(t 0 ) + M (t − t0 ) ≤ M (b − t0).
402 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Si X0 < 1 c’est évident par continuité de ϕ en 0. Sinon, X0 = 1, donc dtd [ϕ(t) · ϕ(t)]t=0 =
2ϕ(0) · ϕ(0) = 2F (X0 ) · X0 < 0, c’est-à-dire ddt(ϕ(t)2 )t=0 < 0, d’où (*).
Montrons maintenant que ϕ(t) < 1 pour tout t ∈ ]0, β[. Notons Γ = {t0 ∈ ]0, β[ | ∀t ∈
]0, t0 [ , ϕ(t) < 1}. D’après (*), Γ est non vide, donc γ = sup Γ existe. Supposons γ < β. Alors
d
on a ϕ(γ ) = 1 par continuité de ϕ, et dt [ϕ(t) · ϕ(t)]t=γ = 2ϕ (γ ) · ϕ(γ) = 2F (ϕ(γ )) · ϕ(γ ) < 0,
d
c’est-à-dire dt (ϕ(t)2 )t=γ < 0. On en déduit qu’il existe δ ∈ ]0, γ[ tel que ϕ(δ ) > ϕ(γ ) = 1.
Ceci est absurde par définition de γ . On a donc γ = β .
Terminons. La fonction ϕ est bornée au voisinage de β, donc d’après le principe de majoration
a priori (ou le résultat de l’exercice 1), on a β = +∞. D’où le résultat.
on peut ainsi définir une application Φ de W dans Rn par Φ(t0, X 0; t) = ϕ t 0,X 0(t). Ainsi,
Φ(t0 , X0 ; . ) est la solution maximale de X = F (t, X ) passant en X0 au temps t 0.
Un problème nouveau (et intéressant) se pose alors : celui de l’étude de la dépendance
de Φ par rapport à ses paramètres. Ce changement de point de vue s’avère d’ailleurs très
fécond dans la théorie des équations différentielles.
Dans le cas général, on peut montrer que W est ouvert (cela découle essentiellement
du lemme 1 page 399) et que Φ est continue sur W . La démonstration est assez technique.
Nous allons démontrer ces résultats dans certains cas particuliers.
Systèmes différentiels linéaires. On considère le système différentiel homogène sur
Rn (H) : X = A(t) X où A : I → Mn(R) est continue (et I un intervalle ouvert de R).
Soit (e1 , . . . , en ) la base canonique de R n . Fixons t0 ∈ I . On sait que pour tout i, il
existe une unique solution Xi de (H ) définie sur I et telle que Xi (t0) = ei. Pour tout
4. QUELQUES COMPL ÉMENTS 403
t ∈ I , on note Mt 0 (t) la matrice dont les vecteurs colonnes sont les X i (t), de sorte que
d
Mt = A(t) Mt 0 et Mt 0 (t0 ) = In .
dt 0
Soit X0 ∈ Rn . La fonction ϕ : t → Mt 0 (t) X 0 est donc solution de (H ) et vérifie ϕ(t 0) =
X0. Avec les notations précédentes, on a donc, pour tout t ∈ I , l’égalité ϕ t 0,X0 (t) =
Φ(t0 , X0 ; t) = Mt0 (t)X0 . La matrice Mt 0 (t) est souvent notée R(t, t0 ).
Définition 1. L’application I 2 → Mn (R) (t, t ) → R(t, t ) est appelée la résolvante de
(H). Elle vérifie les propriétés suivantes.
— Pour tout (t0, X0) ∈ I × R n , la solution ϕt0 ,X0 de (H ) vérifiant ϕ t 0,X0 (t 0) = X0
s’écrit ϕt0 ,X0 (t) = R(t, t0 ) X 0 = Φ(t 0, X0; t) ;
— par construction, on a
∀(t, t, t ) ∈ I 3, R(t, t ) ◦ R(t , t ) = R(t, t) et ∀t ∈ I, R(t, t) = I n.
d
— pour tout t0 ∈ I fixé, on a dt
R(t, t0 ) = A(t) ◦ R(t, t 0).
Proposition 1. Pour tout (t, t) ∈ I 2 , on a R(t, t ) ∈ Gn (R) et R(t, t)−1 = R(t, t).
Démonstration. Il suffit de remarquer que R (t, t) ◦ R(t , t) = R(t, t) = I n .
Remarque 1. — Les colonnes de la matrice R(t, t0) sont des solutions de (H ), donc
det R(t, t0) est un wronskien. En particulier, d’après le résultat de la question b)
de l’exercice 7 page 388, on a
t t
det R(t, t 0) = [det R(t 0, t0 )] exp tr A(s) ds = exp tr A(s) ds .
t0 t0
Solution. D’après l’exercice précédent, les solutions maximales de (E) sont définies sur R. De
plus, en notant t → Φ(a, t) la solution maximale de (E ) prenant la valeur a en t = 0, la fonction
Φ : R2 → R ainsi définie est continue.
Remarquons maintenant le fait suivant. Si ϕ : R → R est solution de (E ) et s’il existe
t0 ≥ 0 tel que ϕ(t0 ) > 1, alors ϕ(t) > 1 pour tout t ≥ t0 . En effet, supposons qu’il existe t1 > t0
tel que ϕ(t1 ) ≤ 1. Alors il existe u ∈ ]t0 , t1] tel que ϕ(u) = 1 d’après le théorème des valeurs
intermédiaires. Autrement dit, le fermé ϕ −1 ({1}) a une intersection non vide avec ]t0 , t1 ]. Notons
t2 = inf ϕ −1({1}) ∩ [t0 , t1 ]. On a ϕ(t2 ) = 1 et t2 = t 0 (car ϕ(t0 ) > 1), et ϕ(t) > 1 pour tout
t ∈ ]t0, t2 [, donc ϕ (t2 ) ≤ 0, ce qui est absurde puisque ϕ(t2 ) = f (t 2 , ϕ(t 2)) = f (t 2, 1) > 0. On
montrerait de même que s’il existe t 0 ≥ 0 tel que ϕ(t0 ) < −1, alors ϕ(t) < −1 pour tout t ≥ t0 .
Ceci étant, notons
A+ = {y ∈ [−1, 1] | ∃t ∈ R + , Φ(y, t) > 1} et A− = {y ∈ [−1, 1] | ∃t ∈ R +, Φ(y, t) < −1}.
Comme Φ est continue, on voit facilement que A+ et A− sont des ouverts de [−1, 1]. Par ailleurs,
A+ = ∅. En effet, si ϕ : R → R est la solution de (E) vérifiant ϕ(1) = 1, on ne peut pas avoir
ϕ(0) > 1 (sinon ϕ(t) > 1 sur R + d’après le principe énoncé plus haut), et de même, on ne peut
pas avoir ϕ(0) < −1. Donc ϕ(0) ∈ [−1, 1], et comme ϕ(1) = 1 et ϕ(1) = f (1, 1) > 0, on a
ϕ(t) > 1 sur un voisinage à droite de 1, d’où y = ϕ(0) ∈ A+. De même, A − est non vide.
On a A+ ∩ A− = ∅. En effet, raisonnons par l’absurde en supposant que A + ∩ A− contienne
un élément y . Notons ϕ : t → Φ(y, t ), et soient t1 , t2 > 0 tels que ϕ(t1) > 1 et ϕ(t 2) < −1. On a
ϕ(t1) > 1 donc ϕ(t) > 1 pour tout t > t 1 d’après le principe énoncé plus haut, d’où t2 < t1 . On
montrerait de même t 1 < t 2, ce qui est absurde. Donc A+ ∩ A − = ∅.
Comme [−1, 1] est connexe et que A+ et A − sont deux ouverts disjoints et non vides de
[−1, 1], on ne peut pas avoir A + ∪ A− = [−1, 1]. Il existe donc y 0 ∈ [−1, 1] tel que y0 ∈ A + ∪ A−.
On voit alors que la fonction ϕ = Φ(y0 , . ) vérifie |ϕ(t)| ≤ 1 pour tout t ∈ R+. Si |ϕ(t 0 )| = 1 pour
un t0 ≥ 0, par exemple ϕ(t 0) = 1, le fait que ϕ (t0) = f (t 0 , 1) > 0 montre que sur un voisinage à
406 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
droite de t0, ϕ(t) > 1, donc y 0 ∈ A+ ce qui est absurde. Finalement, ϕ est une solution de (E)
sur R qui vérifie |ϕ(t)| < 1 pour tout t ∈ R+ .
Solution. a) Notons (yi) les composantes de Y et (ai,j ) celles de A et supposons le résultat faux.
Alors c = inf{t ∈ R+ | ∃i, yi (t) = 0} existe. Comme Y est continue, il existe i tel que yi(c) = 0,
et par ailleurs, Y (t) ≥ 0 pour tout t ∈ [0, c]. On a donc yi (t) = nj=1 ai,j (t) y j (t) ≥ 0 pour tout
t ∈ [0, c], donc yi est croissante sur [0, c], donc yi (c) ≥ yi (0) > 0, ce qui est absurde.
b) Donnons l’idée. Lorsque p est grand, et si X vérifie X = A(t) X avec X (0) ≥ 0, alors
Y : t → X (p − t) est solution de (L). Comme X (t) ≥ 0 sur [0, p], on a Y (t) ≥ 0 sur [0, p].
Ensuite, notre but sera de faire tendre p vers +∞ et d’en tirer parti.
Soit R(t, s) la résolvante de (L) (voir la définition 1 page 403), de sorte que pour tout s ∈ R+
fixé, dR
dt (t, s) = −A(t) R (t, s) et R (s, s) = In .
Notons E le vecteur de Rn dont toutes les composantes sont égales à 1, et pour tout p ∈ N,
notons Cp = R(0, p) E. Pour tout p ∈ N, nous notons Y p(t) = R(t, 0) C p = R(t, p) E. On
a Yp (t) ≥ 0 pour tout t ∈ [0, p]. En effet. Considérons l’application ϕ : [0, p] → Rn t →
R(p − t, t) E = Yp (p − t). On a
dϕ dR
∀t ∈ [0, p], (t) = − (p − t, p) E = A(p − t) R(p − t, p) E = A(p − t) ϕ(t),
dt dt
5. PROBLÈMES 407
et comme ϕ(0) = E > 0, on en déduit d’après la question précédente que ϕ(t) ≥ 0 pour tout
t ∈ [0, p], c’est-à-dire Yp (t) ≥ 0 pour tout t ∈ [0, p].
Pour tout p ∈ N, on note ensuite Ap = C p/Cp . La suite (Ap ) est à valeurs dans la sphère
unité de Rn qui est compacte, on peut donc en extraire une sous-suite convergente (A ϕ(p) ).
Notons A sa limite. Posons Y (t) = R(t, 0) A = limp→+∞ R(t, 0) Aϕ(p) . Alors Y est solution de
(L) et on a
1
∀p ∈ N, R(t, 0) A ϕ(p) = Y (t),
C ϕ(p) ϕ(p)
donc R(t, 0) Aϕ(p) ≥ 0 pour ϕ(p) > t. En passant à la limite lorsque p → +∞ (avec t fixé), on
en déduit Y (t) ≥ 0, et ceci pour tout t ∈ R+ , d’où le résultat.
5. Problèmes
Problème 1. Résoudre sur R+∗ l’équation différentielle (E) : y log t + 2ty2 − y/t = 0.
Étant donné y0 ∈ R, étudier l’existence de solutions y de (E ) définies sur R+∗ telles que
y (1) = y0.
Solution. L’équation différentielle (E) est résolue sur chacun des intervalles ]0, 1[ ou ]1, +∞[.
Nous nous plaçons donc sur l’un de ces intervalles.
La forme de (E) nous invite à poser y = z log t. En remplaçant dans (E), on obtient fa-
cilement (E ) : z + 2tz 2 = 0. Il s’agit d’une équation de Ricatti. Le théorème de Cauchy-
Lipschitz nous dit qu’en dehors de la solution nulle, aucune solution z de (E ) ne s’annule.
Ainsi, si z n’est pas la solution nulle, (E ) peut s’écrire z /z2 = −2t, donc par intégration, on a
1/z = −t2 + c, où c est une constante réelle. Autrement dit, les solutions de (E ) sont celles de
la forme z (t) = (t2 − c) −1 ou la fonction nulle.
Ainsi, si y est une solution de (E ) sur R+∗ , en notant I1 = ]0, 1[ et I 2 = ]1, +∞[, on a pour
tout k ∈ {1, 2}
log t
∃c k ∈ R, ∀t ∈ Ik , y(t) = 2 , (∗)
t − ck
ou bien y est identiquement nulle sur Ik .
Si y est du type (*) sur Ik, on doit nécessairement avoir c 1 ≥ 1 ou c1 ≤ 0 (pour k = 1), et
c 2 ≤ 1 (pour k = 2).
(i) De plus, si c 1 = 1 (resp. c2 = 1), on a y(1) = 0 et la dérivée à gauche (resp. à droite) de
y en 1 est yg(1) = (1 − c 1) −1 (resp. yd(1) = (1 − c 2 )−1 ).
(ii) Si c 1 = 1 (resp. c2 = 1), on a facilement y(1) = 1/2.
Traitons maintenant plusieurs cas selon la forme de y sur I1 .
— Si y est identiquement nulle sur I 1 , alors nécessairement y est identiquement nulle sur I2
(d’après (i) et (ii)), donc y est identiquement nulle sur R+∗ .
— Si y est du type (*) avec c 1 = 1, alors nécessairement (d’après (i) et (ii)), y est du type
(*) sur I2 avec c 2 = 1 et l’égalité des dérivées à gauche et à droite de f en 1 donne
c1 = c2 , et vues les conditions imposées à c 1 et c 2 , on a nécessairement c1 = c2 ≤ 0.
— Si y est du type (*) avec c 1 = 1, alors y est nécessairement du type (*) sur I2 avec c2 = 1.
Dans ce cas, on a y (t) = log t/(t2 − 1) pour tout t = 1, y (1) = 1/2, et on vérifie facilement
que y est dérivable en 1.
Finalement, les solutions sur R+∗ de (E) sont
— la fonction nulle ;
— les fonctions de la forme t → log t/(t2 − c), c ≤ 0 ;
— la fonction t → log t/(t2 − 1) si t = 1, 1 → 1/2.
Si y 0 ∈ R est donné, on en déduit qu’il n’y a de solution y sur R+∗ vérifiant y (1) = y 0 si et
seulement si y0 ∈ {0, 1/2}. Si y 0 = 0, il y a une infinité de solutions ; si y0 = 1/2, il n’y a qu’une
seule solution.
408 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Solution. Raisonnons par l’absurde, en supposant f (t) = 0 pour tout t ∈ R. Comme f est
continue, f garde alors un signe constant sur R, par exemple f (t) > 0 pour tout t ∈ R.
Ainsi, pour tout t ∈ R, ϕ (t) = f (ϕ(t)) > 0. Donc ϕ est strictement croissante. De plus
ϕ est bornée, elle converge donc en +∞. Soit sa limite. En faisant tendre t vers +∞ dans
ϕ (t) = f (ϕ(t)), on en déduit, par continuité de f , que ϕ converge vers = f () > 0 en +∞. La
fonction ϕ est continue et vérifie ϕ (t) ∼ , donc par intégration des équivalents, on en déduit
que lorsque t → +∞, ϕ(t) − ϕ(0) ∼ t. Ceci est impossible car = 0 et ϕ est bornée sur R.
D’où le résultat.
(l’intégrale
est bienconvergente car au voisinage de x− 0 , F (x 0) − F (u) ∼ (x 0 − u)f (x0 ) donc
√
F (x 0 ) − F (u) ∼ f (x0) x0 − u). Par ailleurs, l’intégrale
x0
du
T0 =
−x0 2(F (x0 ) − F (u))
converge (la fonction F est paire), et comme son intégrande est positive et que |x(t)| < x 0 pour
tout t ∈ ]0, t0[, (***) entraı̂ne t < T 0 pour tout t ∈ ]0, t0[, donc t 0 ≤ T 0. Ainsi, t0 est fini. Par
continuité de x on a x (t0 ) = 0, donc F (x(t 0 )) = F (x0 ) d’après (**), et comme F est paire,
strictement croissante sur R+ , ceci entraı̂ne |x(t0 )| = x0 . De plus, x est strictement décroissante
sur ]0, t0[, donc x(t0 ) < x0 , donc la seule possibilité est x(t0 ) = −x0. En faisant maintenant
tendre t vers t 0 par valeurs inférieures dans (***), on en déduit t 0 = T0 .
Considérons maintenant la fonction y : t → −x(t + T0). On a y (0) = −x(t 0 ) = x0, y (0) =
−x (t0) = 0, et comme f est impaire, y est solution de (E). D’après le théorème de Cauchy-
Lipschitz, il y a unicité au problème de Cauchy, et comme x et y ont les mêmes conditions
initiales en 0, on a x = y sur R. En d’autres termes, x(t) = −x(t + T 0) pour tout t ∈ R. On en
déduit x(t) = −x(t + T0) = x(t + 2T 0). Donc x est 2T0 -périodique. La fonction x n’admet pas
de période plus petite, car nous avons montré x(t) < x(0) sur ]0, T0 ] et sur ]T0 , 2T 0[, |x(t)| =
|x(t − T0 )| < x(0), donc finalement, x(t) = x(0) sur ]0, 2T 0[.
Remarque. On traite de la même manière l’équation du penduleLθ +g sin θ = 0. Partant
θ
d’une vitesse nulle en θ = θ0, le pendule a sa période égale à 2 L/g −θ00 √ dθ .
2(cos θ−cos θ0)
410 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Problème 5. Déterminer les solutions à valeurs réelles définies sur R, deux fois dérivables,
de l’équation différentielle (E) : yy y = 0.
Solution. Soit ϕ : R → R une fonction deux fois dérivable vérifiant ϕϕϕ = 0. On va montrer
(on s’en doutait) que ϕ = 0, c’est-à-dire que ϕ est une fonction affine.
Pour cela, raisonnons par l’absurde et supposons l’existence de t0 ∈ R tel que ϕ (t 0) = 0.
Quitte à considérer la fonction t → ϕ(t + t0 ), on peut même supposer t 0 = 0, de sorte que
ϕ (0) = 0.
Dans un premier temps, nous montrons l’existence d’un α > 0 vérifiant ϕ (t) = 0 pour tout
t tel que 0 < |t| < α. Si ϕ (0) = 0, c’est évident par continuité de ϕ . Sinon, ϕ (0) = 0, et il suffit
d’écrire ϕ (t) = ϕ(0) + tϕ (0) + o(t) = t[ϕ (0) + o(1)] pour conclure.
Ensuite, nous montrons l’existence de β > 0 vérifiant ϕ(t) = 0 pour tout t tel que 0 < |t| < β.
Si ϕ(0) = 0, c’est immédiat par continuité de ϕ. Sinon, ϕ(0) = 0. Si ϕ (0) = 0, il suffit d’écrire
2
ϕ(t) = t[ϕ(0) + o(1)], et si ϕ (0) = 0, on écrit ϕ(t) = t2 [ϕ(0) + o(1)] pour conclure.
En posant maintenant γ = inf{α, β }, on a donc ϕ(t)ϕ (t) = 0 pour tout t tel que 0 < |t| < γ.
Comme ϕ est solution de (E), on en déduit ϕ(t) = 0 pour tout t vérifiant 0 < |t| < γ.
Pour montrer ϕ (0) = 0, on pourrait maintenant conclure avec le théorème de Darboux. On
peut s’en tirer autrement, en procédant comme suit. Comme ϕ = 0 sur ]0, γ[, ϕ est constante
sur ]0, γ[. De même, ϕ est constante sur ] − γ, 0[. Par continuité de ϕ en 0, ϕ est donc constante
sur ] − γ, γ[, donc ϕ (0) = 0. Ceci est contradictoire, d’où le résultat.
donnée.
b) On suppose que pour toute valeur propre λ de A ou de B , (λ) < 0. Montrer que
pour toute matrice C ∈ Mn (R), il existe une unique matrice X ∈ Mn (R) telle que
AX + XB = C , puis exprimer X en fonction de A, B et C .
3/ Soit A ∈ Mn (R). Montrer que l’équation matricielle t AS + SA = −C admet une
solution S ∈ Mn (R) symétrique positive pour toute matrice symétrique positive C si
et seulement si pour toute valeur propre λ de A, on a (λ) < 0. (Indication. Pour la
condition nécessaire, on pourra étudier les variations de la fonction u → t (e uAX )S (e uAX),
où X ∈ Cn ).
Solution. 1/ On sait que l’on peut écrire A = D + N , où D est une matrice diagonalisable
dont les valeurs propres sont λ 1, . . . , λn et N une matrice nilpotente vérifiant DN = N D (voir
le tome Algèbre sur la décomposition de Dunford).
Soit P ∈ Gn (C) telle que D = P −1D 1 P où D1 est la matrice diagonale dont les coefficients
diagonaux sont λ1 , . . . , λn . Pour tout t ∈ R, e tD1 est la matrice diagonale dont les coefficients
diagonaux sont les etλi . En désignant par . ∞ la norme (ai,j) ∞ = supi,j |ai,j | sur M n(C),
on a etD1 ∞ = supi |etλ i| = e −ct, où c = − supi (λ i ) > 0. Comme toutes les normes sont
équivalentes en dimension finie, on en déduit l’existence de K1 > 0 tel que e tD1 ≤ K 1 e−ct
pour tout t ∈ R. Comme etD = P −1e tD1 P pour tout t ∈ R, on en déduit
Par ailleurs, les hypothèses sur les valeurs propres des matrices A et B permettent d’affirmer,
grâce au résultat de la question 1/, l’existence de α > 0 et M > 0 telles que etA ≤ M e−αt et
etB ≤ M e−αt pour tout t > 0. La forme de Y (t) entraı̂ne donc
Unicité. Pour montrer que X ainsi défini est unique, il suffit de montrer que l’application
Φ : Mn (R) → M n(R) X → AX + XB est injective. Nous venons de montrer dans la partie
existence que Φ est surjective. Comme Φ est un endomorphisme en dimension finie, ceci entraı̂ne
l’injectivité de Φ, d’où le résultat.
412 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
3/ Condition nécessaire. Par hypothèse, il existe une matrice symétrique positive S telle que
tAS + SA = −I . Soit X ∈ C n un vecteur non nul, et considérons l’application
n
VX : R → Cn u → t(euA X ) S (euA X ).
On a
∀u ∈ R, VX (u) = t(AeuA X ) S (euA X) + t(e uAX ) S (AeuA X)
= tX t euA (tAS + SA)e uA X = −t (euA X )(euA X ) < 0
(le terme t (e uA X )(euA X) est le carré de la norme hermitienne de euA X qui est non nul, car
X = 0 et e uA est inversible — toute exponentielle de matrice est inversible, l’inverse de e M étant
e−M ).
Ceci étant, soit λ une valeur propre de A et X ∈ Cn un vecteur propre non nul associé. Pour
tout n ∈ N, An X = λn X donc e uAX = e λuX, et en passant au conjugué, e uAX = eλu X, donc
∀u ∈ R, V X (u) = t (eλu X ) S (eλ u X ) = e(λ+λ)u tXSX.
On en déduit VX (0) = (λ + λ)V X(0) = 2(λ)VX (0). Or on a vu plus haut que VX (0) < 0 et
comme S est positive, on a VX (0) = t XSX ≥ 0. Donc nécessairement (λ) < 0, et ceci pour
toute valeur propre λ de A.
Condition suffisante. Supposons que (λ) < 0 pour toute valeur propre λ de A. Comme tA a
les mêmes
+∞ valeurs propres A, la résultat de la question 1/b) s’applique et montre que la matrice
t t
S = 0 eu A C euA du vérifie tAS + SA = −C . Pour tout u, la matrice S (u) = euA CeuA est
congrue à la matrice C , donc symétrique positive. Comme S est l’intégrale de S (u) sur R +, on
en déduit que S est symétrique. Par ailleurs, pour tout X ∈ Rn, on a
+∞
t t
XSX = XS(u)X du ≥ 0
0
car XS(u)X ≥ 0 pour tout u. Finalement, S est symétrique positive et vérifie tAS + SA = −C ,
t
d’où le résultat.
Problème 8. Soit A : R → M n(R) une application continue telle que pour tout t ∈ R, la
matrice symétrique B (t) = t A(t) + A(t) est négative. On considère le système différentiel
(L) : Y = A(t) Y (Y ∈ Rn ).
a) Si Y 1 et Y2 sont deux solutions de (L) sur R, montrer que t Y1 (t)Y2 (t) converge lorsque
t → +∞.
b) Montrer que (L) admet une solution non identiquement nulle Y qui tend vers 0 en
+∞ si et seulement si t
lim tr(A(s)) ds = −∞.
t→+∞ 0
Solution. a) Commençons par remarquer que si Y est une solution de (L), alors la fonction
V : t → Y (t)2 = t Y (t) Y (t) vérifie
∀t ∈ R, V (t) = t Y (t)Y (t) + tY (t)Y (t) = t Y (t) B (t) Y (t) ≤ 0,
donc V est décroissante, et comme elle est positive, V (t) = Y (t) 2 converge nécessairement
lorsque t → +∞.
Maintenant, si Y1 et Y2 sont deux solutions de (L), on a t Y1 Y2 = 12 (Y1+Y 2 2 −Y1 2 −Y22 ),
donc d’après ce que l’on vient de voir, tY1 Y 2 converge en +∞.
b) On sait que l’ensemble S des solutions de (L) est un espace vectoriel de dimension n. Soit
(Y1 , . . . , Yn) une base de S . Pour tout t ∈ R, on note R(t) la matrice de M n (R) dont les vecteurs
colonnes sont les Yi (t), et on note M (t) = t R(t)R(t). Le coefficient d’indice (i, j ) de M (t)
5. PROBLÈMES 413
est t Yi(t)Y j (t), donc d’après la question précédente, M (t) converge lorsque t → +∞. Notons
M = limt→+∞ M (t).
Comme (Y1 , . . . , Yn) est une base de solutions de S , toute solution de (L) peut s’écrire sous la
forme t → R(t) X0 , où X0 ∈ R n est un vecteur fixé. Comme R (t)X0 2 = t (R(t)X0 )(R(t)X0 ) =
t
X 0M (t)X 0, on voit donc que l’existence d’une solution non nulle de (L) qui tend vers 0 en
+∞ équivaut à l’existence d’un vecteur X0 = 0 tel que t X 0M (t)X0 tend vers 0 en +∞. Comme
M (t) converge vers M , ceci équivaut aussi à l’existence de X0 = 0 tel que t X 0 M X0 = 0.
Comme M est positive (limite de matrices positives), ceci équivaut à det M = 0, et comme
l’application déterminant est continue, ceci équivaut aussi à limt→+∞ det M (t) = 0. Comme
M (t) = t R(t)R(t), ceci s’écrit aussi limt→+∞ det R (t) = 0. On conclut facilement puisque d’après
la question b) de l’exercice 7 page 388,
t
∀t ∈ R, det R (t) = wronskien(Y 1, . . . , Yn )(t) = det R(0) · exp tr A(u) du .
0
Problème 9. Soit y : R + → R une solution de l’équation
+∞différentielle (L) : y + q(t)y =
+
0, où q : R → R est une fonction continue telle que 0 t|q (t)| dt converge.
Montrer que y converge en +∞.
Solution. La formule de Taylor avec reste intégral donne l’existence de deux constantes réelles
a et b telles que
t t
∀t ≥ 1, y(t) = at + b + (t − s)y (s) ds = at + b − (t − s)q (s)y (s) ds.
1 1
Ceci entraı̂ne t
y (t) |b| y (s)
∀t ≥ 1, ds,
t ≤ |a| + t + s |q (s)|
s
1
donc d’après le lemme de Gronwall (voir le théorème 1 page 397),
t t
y (t) |b|
∀t ≥ 1,
t ≤ |a| + t + (|a|s + |b|) |q (s)| exp u |q (u)| du ds.
1 s
+∞
Comme 0 t|q (t)| dt converge, on en déduit facilement que |y (t)/t| est bornée sur [1, +∞[.
En d’autres termes, y (t) = O (t) au voisinage de +∞. Comme
t t
∀t ∈ R +, y(t) = y (0) + y (s) ds = y (0) − q (s)y (s) ds,
0 0
on en déduit que y (t) converge lorsque t → +∞.
Problème 10. On s’intéresse aux solutions sur R+∗, à valeurs réelles, de l’équation
différentielle
2 2 1
t y + (a + 1)t y + t + y = 0, (L)
4
où a ≥ 1.
a) Montrer que sur R +∗ , (L) admet au moins une solution de la forme t → tαϕ(t) où
α ∈ R et où ϕ est la somme d’une série entière de rayon infini avec ϕ(0) = 0.
b) Donner le comportement asymptotique en 0+ de la solution générale sur R+∗ de (L).
(Indication. Distinguer deux cas, selon que a2 − 1 soit le carré d’un entier ou non.)
2
c) (Application.) Montrer que l’équation différentielle (E) : t4 y − 23 t3 y + (1 + t4 ) y = 0
admet une unique solution f sur R+∗ qui vérifie f (t) ∼ t1/6 lorsque t → +∞, et donner
un développement asymptotique à trois termes de f en +∞.
414 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Solution. a) Nous recherchons une solution f de (L) la forme tα ϕ(t) , où ϕ(t) est la somme d’une
série entière un tn dont le rayon de convergence est infini. Supposons qu’une telle solution f
existe ; on aura
+∞
α
∀t > 0, f(t) = t ϕ(t) = un tn+α. (∗)
n=0
La fonction f est de classe C ∞ sur R+∗, et compte tenu de l’expression de la dérivée d’une
fonction définie par une série entière, on a, pour tout t > 0,
+∞
+∞
+∞
f (t) = αtα−1 ϕ(t) + tα ϕ (t) = αt α−1 un tn + tα nun tn−1 = (α + n)un tn+α−1 .
n=0 n=0 n=0
En d’autres
termes, on peut dériver terme à terme l’expression (*). De même, on montrerait
f (t) = +∞
n=0 (α + n)(α + n − 1) tn+α−2
. Maintenant, f vérifie l’équation différentielle (L), donc
+∞
+∞
+∞
n+α n+α 2 1 n+α
∀t > 0, (α+n)(α+ n−1)un t +(a+1) (α+n)u n t + t + un t = 0.
n=0 n=0
4 n=0
Après division par tα, nous sommes en présence d’une série entière en t dont la somme est nulle
pour tout t > 0. On en déduit que ses coefficients sont nuls (voir la conséquence du corollaire 1
page 249), ce qui s’écrit
1
α(α − 1) + (a + 1)α + u0 = 0
4
1
(α + 1)α + (a + 1)(α + 1) + u1 = 0
4
1
(α + 2)(α + 1) + (a + 1)(α + 2) + u2 + u 0 = 0
4
......
1
(α + n)(α + n − 1) + (a + 1)(α + n) + u n + un−2 = 0.
4
Autrement dit, si P est le polynôme P = X (X − 1) + (a + 1)X + 1/4 = X 2 + aX + 1/4, on a
P (α ) u 0 = 0,
P (α + 1) u 1 = 0 et ∀n ≥ 2, P (α + n) un + u n−2 = 0. (∗∗)
√ √
Les racines de P sont α1 = − a2 + 12 a2 − 1 et α2 = − a2 − 12 a2 − 1.
Maintenant, choisissons α = α1 , de sorte que P (α) = 0 et P (α + n) = 0 pour tout n ∈ N∗ .
Partant de u 0 = 1, l’unique suite (u n) vérifiant (**) est donnée par
1
∀n ∈ N, u2n = n et u2n+1 = 0.
k=1 (α + 2k)
P
La série entière u n t n = u2n t2n a un rayon de convergence infini car u2n/u 2n−2 = 1/P (α +
2n) donc limn→+∞ u 2n/u2n−2 = 0 (voir la règle de D’Alembert, page 248). De plus, elle vérifie
par construction la relation de récurrence (**), donc si ϕ désigne sa somme, t → tα ϕ(t) vérifie
l’équation différentielle (L) et ϕ(0) = u0 = 1 = 0.
b) Si a2 − 1 n’est pas le carré d’un entier, alors les deux racines √ α1 et α2 du polynôme P
exhibé plus haut ne diffèrent pas d’un entier (car α1 − α 2 = a2 − 1), et l’opération effectuée
plus haut en remplaçant α par α1 peut être reprise telle quelle en remplaçant α par α2 (car
P (α2) = 0 et P (α 2 + n) = 0 pour tout n ∈ N ∗). Ainsi, nous avons prouvé l’existence de
deux séries entières dont les sommes ϕ et ψ sont non nulles en 0 et telles que t → t α1 ϕ(t) et
t → tα2 ψ (t) sont solutions de (L). Ces deux solutions sont linéairement indépendantes, car si
λ tα1 ϕ(t) + µ tα 2 ψ (t) = 0 pour tout t > 0, alors λ t α 1−α 2ϕ(t) + µ ψ(t) = 0, et en faisant tendre
t vers 0+ , on obtient µψ (0) = µ = 0 (car α2 < α1 ), puis on conclut facilement λ = 0. On sait
par ailleurs que l’ensemble des solutions de (L) sur R +∗ forme un e.v de dimension 2, et on en
conclut que la solution générale de (L) est t → λ tα1 ϕ(t) + µ tα2 ψ (t). Nous connaissons α1 , α2 ,
5. PROBLÈMES 415
et nous savons donner des relations de récurrence permettant de calculer les coefficients de ϕ et
ψ. Ceci nous permet d’obtenir un développement asymptotique de la solution générale de (L).
Traitons maintenant le cas où a2 − 1 = m 2 , avec m ∈ N. Soit Φ : t → tα ϕ(t) la solution
de (L) trouvée à la question précédente. Munis de cette solution de (L), nous allons déterminer
la solution générale de (L) grâce à la méthode d’abaissement de l’ordre décrite à la page 380 :
on cherche la solution générale f de (L) sous la forme f (t) = g (t) Φ(t) , où g est une fonction
de classe C 2 encore inconnue (la fonction Φ est > 0 sur R+∗ donc ne s’y annule pas, car par
construction, tous les coefficients de ϕ sont strictement positifs on nuls). En remplaçant dans
(L), on obtient
1
0 = t2 (g Φ + 2g Φ + g Φ) + (a + 1)t (g Φ + gΦ ) + t2 + (g Φ)
4
1
= g t2 Φ + (a + 1)t Φ + t2 + Φ + t t g Φ + g (2tΦ + (a + 1)Φ)
4
et comme Φ est solution de (L), on voit que f = g Φ sera solution de (L) si et seulement si
g est solution de l’équation différentielle (L ) : t y Φ + y(2tΦ + (a + 1)Φ) = 0. Les solutions
de (L) sont les fonctions de la forme t → λ exp(−F (t)), où λ est une constante réelle et F
une primitive de 2Φ /Φ + (a + 1)/t sur R+∗ . On peut prendre pour F la fonction définie par
F (t) = 2 log Φ + (a + 1) log t, donc finalement, la solution générale de (L) est
1 −(a+1) t−2α1 −a−1 t−m−1
t → λ t = λ = λ , λ ∈ R. (∗∗∗)
Φ(t)2 ϕ(t)2 ϕ(t)2
La fonction t → 1/ϕ(t)2 est de classe C ∞ sur R+. On considère son développement limité en 0
jusqu’à un ordre p ≥ m :
1
= a0 + a1 t + a2 t2 + · · · + ap t p + o(tp )
ϕ(t) 2
(on connaı̂t les coefficients de ϕ, on peut donc calculer les coefficients du développement limité de
1/ϕ2), de sorte qu’un développement asymptotique de (***) en 0 + à la constante multiplicative
λ près est
a0 a a a
+ m1 + · · · + m−1 + m + am+1 + · · · + ap tp−m−1 + o(tp−m−1).
tm+1 t t2 t
Comme g est solution de (L ), on en déduit par intégration qu’un développement asymptotique
de g est, à une constante multiplicative près,
a0 1 am−1 a p p−m
c− m
−··· − + am log t + am+1 t + · · · + t + o(tp−m ),
m t t p−m
où c est une constante réelle. Maintenant, il ne reste plus qu’à écrire que la solution générale
de (L) est le produit de g par Φ, pour obtenir un développement asymptotique de la solution
générale de (L). (Le point remarquable ici est la présence d’un logarithme dans le développement
asymptotique).
c) Pour étudier le comportement asymptotique en +∞, on va effectuer le changement de variable
u = 1/t pour se ramener en 0. Posons donc z (t) = y (1/t), de sorte que y (t) = z (1/t). Comme
1 1 1 1 2 1
y (t) = − 2 z et y (t) = 4 z + 3z ,
t t t t t t
on voit que y est solution de (E ) sur R+∗ si et seulement si
1 8 1 t2 1
∀t > 0, 0 = z + t z + 1+ z .
t 3 t 4 t
En posant u = 1/t, ceci est équivalent à dire que z est solution de l’équation différentielle
(E) : u2 z + 83 u z + (u 2 + 14 ) z = 0. On s’est ramené à une équation différentielle du type
précédent avec a = 5/3, et il s’agit de montrer qu’il existe une unique solution g de (E ) sur R+∗
telle que g (u) ∼ u−1/6 au voisinage de 0.
416 6. ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES
Cette annexe présente, sous forme d’une série d’exercices, le théorème de Baire, suivi
de plusieurs applications, notamment le théorème de Banach-Steinhaus. Ces notions ne
sont pas au programme des classes de mathématiques spéciales, mais elles constituent
une fort jolie théorie tout à fait accessible. Certains résultats sont surprenants, comme
par exemple
— l’ensemble des points de continuité d’une fonction dérivée est dense (exemple his-
torique dû à Baire lui-même, voir l’exercice 2 page 419) ;
— l’ensemble des fonctions continues nulle part dérivables est dense dans l’ensemble
des fonctions continues. Cette “plaie lamentable” dont se détournait Hermite est
plus étendue que l’on ne pourrait le penser (voir l’exercice 4 page 421) ;
— un endomorphisme bijectif et continu sur un espace de Banach a son inverse continu
(théorème de Banach, voir l’exercice 6 page 423).
Le théorème de Baire
Définition 1. On dit qu’un espace métrique (E, d) est un espace de Baire si toute
intersection dénombrable d’ouverts denses dans E est dense dans E , autrement dit si
(i) pour toute suite d’ouverts (On )n∈N telle que ∀n ∈ N, On = E, ∩n∈N On = E.
Solution. 1/ a) (i) =⇒ (ii). Soit (Fn ) n∈N une suite de fermés d’intérieurs vides. Pour tout n,
◦
l’ouvert On = E F n est dense dans E car E F n = EF n = E. Ainsi, d’après (i),
On = (E Fn ) = E Fn
n∈N n∈N n∈N
et on en déduit facilement que A est maigre si et seulement si E A est un résiduel. (Au passage,
remarquons par définition d’un espace de Baire, qu’un ensemble maigre est d’intérieur vide et
qu’un résiduel est dense dans E .)
2/ Soit (E, d) un espace métrique complet et (On ) n∈N une suite d’ouverts denses dans E. Pour
montrer que ∩n∈N On est dense dans E, il faut montrer
∀V ouvert non vide de E, V ∩ O n = ∅.
n∈N
Donnons nous donc un ouvert non vide V de E . Par récurrence, on va construire une suite (Bn )
de boules fermées de E telles que
(I) ∀n ∈ N, Bn est une boule fermée de rayon non nul et inférieur à 1/2n .
◦
(II) B0 ⊂ O0 ∩ V et ∀n ∈ N, Bn+1 ⊂ O n+1 ∩ B n.
L’ouvert O0 est dense dans E donc O 0 ∩ V = ∅. Or O 0 ∩ V est ouvert, il existe donc une boule
ouverte B(x0 , r) ⊂ O 0 ∩ V . Si B 0 est la boule fermée de centre x0 et de rayon inf{r/2, 1}, on a
donc B0 ⊂ O0 ∩ V .
Supposons les boules B0, . . . , Bn construites et vérifiant (I) et (II). L’ouvert O n+1 est dense
◦
dans E , donc On+1 ∩ Bn est un ouvert non vide. Il existe donc une boule ouverte B(x, r ) incluse
◦
dans On+1 ∩ Bn . Si B n+1 désigne le boule fermée de centre x et de rayon inf {r/2, 1/2 n+1} on a
◦
donc Bn+1 ⊂ O n+1 ∩ B n. Ainsi, B n+1 vérifie (I) et (II).
Par construction, (Bn )n∈N est une suite décroissante de fermés non vides de E dont le
diamètre tend vers 0. De plus E est complet, il existe donc x ∈ E tel que ∩n∈NB n = {x} (voir
la proposition 9 de la page 20). Or B0 ⊂ V , donc x ∈ V . D’après (II), on a aussi B n ⊂ On pour
tout n, donc x ∈ On pour tout n. Ainsi, x ∈ ∩ n∈NOn . Finalement, nous avons prouvé que V et
∩n∈N On ont au moins un point commun, d’où le théorème.
◦
3/ Soit G le fermé E(∪n Fn ). Il s’agit de montrer que G est d’intérieur vide.
◦
◦
Pour tout n ∈ N, le fermé G ∩ Fn est d’intérieur vide car G ∩ F n ⊂ G ∩ Fn = ∅, donc (E, d)
étant un espace de Baire,
(G ∩ Fn ) = G ∩ Fn = G ∩ E = G
n∈N n∈N
Applications
Les exercices qui suivent sont indépendants les uns des autres, mais il est nécessaire
d’avoir fait l’exercice 0 pour les traiter.
Exercice 1 (Un e.v.n à base dénombrable n’est pas complet). Prouver, en
utilisant le théorème de Baire, qu’un espace vectoriel normé E admettant une base
dénombrable n’est pas complet.
Solution. Soit (en ) n∈N une base de E . Pour tout entier naturel n, on pose F n = Vect(e0 , . . . , e n).
Le s.e.v Fn est un fermé (car s.e.v de dimension finie), d’intérieur vide car si une boule ouverte
B(x, r) est incluse dans Fn (avec r > 0), alors x ∈ Fn donc B(0, r) = B(x, r) − {x} est inclus
dans Fn , et Fn étant invariant par homothétie, E ⊂ Fn ce qui est absurde.
Supposons maintenant E complet. D’après le théorème de Baire, ∪n∈N F n est d’intérieur vide
dans E, ce qui est absurde car ∪ n∈NFn = E. D’où le résultat.
Remarque. Ce même résultat est prouvé sans utiliser le théorème de Baire à l’exercice 8
de la page 56.
Exercice 2 (Une fonction dériv ée est continue sur un ensemble dense).
1/ Soient (E, d) et (F, δ ) deux espaces métriques. On suppose que (E, d) est complet. On
considère une suite (fn ) d’applications continues de E dans F , convergeant simplement
vers une application f de E dans F .
a) Pour tout ε > 0, pour tout n ∈ N, on pose
Fn,ε = {x ∈ E | ∀p ≥ n, δ(fn(x), f p (x)) ≤ ε}.
◦
Montrer que Ωε = ∪ n∈N Fn,ε est un ouvert dense dans E et que
∀x0 ∈ Ω ε , ∃V voisinage de x0 , ∀x ∈ V, δ(f (x0 ), f (x)) ≤ 3ε.
b) Posons R = ∩ n∈N∗ Ω1/n et montrons que f est continue en tout point de R. Soit x0 ∈ R et
ε > 0. Fixons n ∈ N∗ tel que 1/n ≤ ε/3. Comme x 0 ∈ Ω1/n , d’après le résultat de la question
précédente, il existe un voisinage V de x0 tel que
3
∀x ∈ V, δ f (x), f(x0 ) ≤ ≤ ε.
n
Ceci suffit à prouver que f est continue en x0 .
L’ensemble des points de continuité de f contient donc R. C’est donc un résiduel, en parti-
culier dense dans E d’après le théorème de Baire.
2/ Pour tout n ∈ N∗ , on considère la fonction
f x + n1 − f (x)
fn : R → R x → 1 .
n
La suite (fn ) est une suite de fonctions continues qui converge simplement vers f sur R. On en
déduit d’après 1/b) que l’ensemble des points de continuité de f est un résiduel, en particulier
dense dans R puisque R est complet.
Remarque. On sait qu’il existe des fonctions dérivées discontinues sur un ensemble dense
(voir l’exercice 9 page 244).
Ceci est en particulier vrai pour un entier N fixé supérieur à n0 et à α/(β − α). Donc d’après
(*), on a |f (x)| ≤ ε pour tout x ≥ N α, d’où le résultat.
b) Fixons n ∈ N∗ et posons Ωn = {x > 0 | ∃p ≥ n, px ∈ Ω}. L’ensemble Ω n est ouvert. Il
est même dense dans R+ . En effet, considérons un intervalle ouvert ]α, β [ inclus dans R+ . En
procédant comme dans la question précédente, on montre que
∃N ≥ n, ]pα, pβ[ = ]N α, +∞[ .
p≥N
Comme Ω n’est pas borné, on en déduit ∪p≥N ]pα, pβ [ ∩ Ω = ∅, donc ]α, β [ ∩ Ω n = ∅.
Ainsi Ωn est un ouvert dense dans R + pour tout n ∈ N∗ . Comme R+ est complet, on en
déduit d’après le théorème de Baire que ∩n∈N∗ Ωn est dense dans R+ . Ce dernier contient donc
au moins un élément x0 > 0, et il est clair qu’un tel réel x0 répond à la question.
APPLICATIONS 421
On a en particulier
2π 4π f (y ) − f (x) δ N δN
≤ |x − y | ≤ donc |x − y | < α donc < ·
N N y−x 4 2π = 8π .
De plus,
δ sin(N y) − δ sin(N x) δ δN
≥ ≥ ,
y−x | y − x| 4π
donc
g (y ) − g (x) δN δN δN
y − x > 4π − 8π = 8π > n, avec 0 < |y − x| < α < ε.
Donc g ∈ Uε,n , et comme f − g ∞ = δ, on en déduit le résultat.
c) Posons R = ∩n∈N∗ U1/n,n . Soit f ∈ R. Pour tout n, f ∈ U 1/n,n donc si on se donne x ∈ I ,
1 f (x) − f (xn )
∗
∀n ∈ N , ∃xn ∈ I, 0 < |x − xn | < et > n.
n x − xn
f (x n)
Donc (x n) tend vers x et lim n→+∞ f (xx)−−x n = +∞, ce qui montre que f n’est pas dérivable
en x. Ceci étant vrai pour tout x ∈ I , f est nulle part dérivable.
Ainsi, tout élément de R est nulle part dérivable. Comme R est une intersection dénombrable
d’ouverts denses dans le complet C, l’ensemble des éléments de C nulle part dérivables est un
résiduel, en particulier dense dans C d’après le théorème de Baire.
Remarque. Une construction explicite d’une application continue nulle part dérivable fait
l’objet de l’exercice 9 page 86.
Solution. a) Quitte à prendre une sous-suite de (xp ), on peut supposer cette suite strictement
monotone, par exemple strictement croissante. Pour tout p, on a ϕ (n0 )(x p ) = ϕ(n 0 )(x p+1 ) donc
d’après le théorème de Rolle, il existe y p ∈ ]x p , x p+1[ tel que ϕ (n0 +1)(yp ). Ainsi construite, la
suite (yp) est une suite de points distincts tendant vers x et annulant ϕ (n 0+1) . En itérant le
procédé, on peut ainsi construire pour tout n ≥ n 0 une suite de points distincts de R tendant
vers x et annulant ϕ(n) . Par continuité de ϕ(n) , on en déduit ϕ(n) (x) = 0 pour tout n ≥ n0 .
b) Soit ]a, b[ une composante connexe de l’ouvert Ω et soit [c, d] un segment inclus dans ]a, b[.
◦
Soit x0 ∈ ]c, d[. Il existe n ∈ N tel que x 0 ∈ F n donc il existe α > 0 tel que ϕ (n) s’annule sur
]x 0 − α, x 0 + α[. On peut donc trouver un polynôme P tel que ϕ = P sur ]x 0 − α, x0 + α[. Ainsi,
l’ensemble
Γ = {t ∈ ]x 0, d] | ∀x ∈ [x0, t], ϕ(x) = P (x)}
est non vide, donc β = sup Γ existe bien.
Supposons β < d. Comme β ∈ ]c, d[ ⊂ Ω, il existe un voisinage V = ]β − η, β + η [ de β et
un polynôme Q tels que ϕ = Q sur V (même raisonnement que précédemment). Donc P = Q
sur l’ouvert V ∩ ]x 0, β[=
∅, donc P et Q sont identiques, donc β + η ∈ Γ. Ceci est absurde, donc
APPLICATIONS 423
β = d, c’est-à-dire ϕ = P sur [x0 , d]. On montrerait de même que ϕ = P sur [c, x0 ]. Ainsi, ϕ = P
sur tout segment de la composante connexe ]a, b[, donc ϕ = P sur ]a, b[ tout entier.
c) Raisonnons par l’absurde et supposons que F admette un point isolé x0 , de sorte qu’il existe
ε > 0 tel que ]x0 − ε, x0 + ε[ ∩ F = {x 0 }. On a ]x0 − ε, x 0[ ⊂ Ω et d’après la question b), il
existe un polynôme P tel que ϕ = P sur ]x0 − ε, x0 [. De même, il existe un polynôme Q tel que
ϕ = Q sur ]x0 , x0 + ε[. Par continuité des dérivées successives de ϕ et de P, Q, on a ∀n ∈ N,
P (n) (x0 ) = ϕ(n)(x0 ) = Q(n) (x 0 ). La formule de Taylor pour les polynômes en x = x0 montre
alors que P et Q sont identiques, donc ϕ = P sur ]x0 − ε, x0 + ε[. Si n = deg(P ), on a donc
◦
]x 0 − ε, x0 + ε[ ⊂ F n+1 ⊂ Ω. Ceci est absurde car x0 ∈ Ω, d’où le résultat.
d) Supposons le fermé F non vide. Par hypothèse, ∪n∈NFn = R, donc F = ∪ n∈N (F ∩ Fn ). Pour
tout n, F ∩ Fn est fermé dans F et F est complet (car fermé de R). D’après le théorème de
Baire, il existe donc n0 ∈ N tel que l’intérieur de F ∩ F n0 (pour la topologie induite par F ) soit
non vide, c’est-à-dire
∃n 0 ∈ N, ∃a, b ∈ R, ]a, b[ ∩ F =
∅ et ]a, b[ ∩ F ⊂ F n0 . (∗)
Soit x ∈ ]a, b[ ∩ F . D’après c), on peut trouver une suite de points distincts (xp )p∈N de ]a, b[ ∩ F
tendant vers x. D’après (*), on a ϕ(n0 )(xp ) = 0 pour tout p, donc d’après a), ϕ(n) (x) = 0 pour
tout n ≥ n0 .
Si maintenant x ∈ ]a, b[ ∩ Ω, alors comme ]a, b[ ∩ F = ∅, la composante connexe Ωx de Ω
contenant x possède au moins une extrémité x 0 dans ]a, b[. D’après b), il existe un polynôme
P tel que ϕ = P sur Ωx . Or x0 ∈ F donc pour tout n ≥ n0 , ϕ (n) (x0 ) = P (n) (x 0) = 0, ce qui
montre que deg(P ) < n0 . Donc ϕ(n 0 )(x) = P (n 0)(x) = 0.
◦
En résumé, on a prouvé ϕ(n 0)(x) = 0 pour tout x ∈ ]a, b[. Donc ]a, b[ ⊂ F n 0, ce qui est
absurde car ]a, b[ ∩ F = ∅. Donc F = ∅, donc Ω = R, et d’après b), ϕ est polynomiale sur R
tout entier.
Finalement, on a
ρ 1 1
B 0, = B(0, ρ) ⊂ F2n = T [B(r)],
2n 2n 2n
d’où le résultat.
b) Soit y1 ∈ T (V1 ). Comme T (V2 ) est un voisinage de 0 d’après la question précédente, on a
T (V1 ) ⊂ T (V1 ) + T (V2) donc ∃x1 ∈ V1 , ∃y 2 ∈ T (V2 ), y1 − y 2 = T (x1).
En itérant le procédé, on construit ainsi deux suites (yn ) de F et (xn ) de E telles que
∀n ∈ N, y n ∈ T (V n ), xn ∈ Vn
et y n − y n+1 = T (xn).
Pour tout n, xn ∈ Vn donc xn < r/2n ,
donc xn converge, donc E étant complet,
x n converge. On note x = ∞n=1 xn . En écrivant
N N N
∗
∀N ∈ N , T xn = T (xn ) = (y n − yn+1 ) = y 1 − yN+1
n=1 n=1 n=1
et en faisant tendre N vers +∞, on obtient T (x) = y1 (ceci parce que T est continue et que
yN → 0 lorsque N → +∞, ce dernier fait étant aussi une conséquence de la continuité de T ).
Comme pour tout n, xn < r/2 n, on a x < r. Finalement, y1 ∈ T (V0 ).
c) En combinant les résultats des deux questions précédentes, on s’aperçoit que T [B(r )] est un
voisinage de 0 pour tout r > 0. Donc si U est un voisinage de 0, T (U ) est un voisinage de 0.
Considérons maintenant un ouvert Ω de E et x ∈ Ω. L’ensemble Ω − x est un voisinage de
0, donc T (Ω − x) est un voisinage de 0, donc T (Ω) = T (Ω − x) + T (x) est un voisinage de T (x),
et ceci pour tout x ∈ Ω, donc T (Ω) est ouvert.
2/ Soit U = T −1. D’après le théorème de l’application ouverte, pour tout ouvert Ω de E,
U−1 (Ω) = T (Ω) est un ouvert de E. L’image réciproque par U de tout ouvert est un ouvert, on
en conclut que U = T −1 est continue.
L’ensemble Ωk est ouvert. En effet, si x0 ∈ Ωk , il existe f ∈ H tel que f (x0 ) > k. Comme f
est continue, il existe ρ > 0 tel que f (x) > k pour x − x0 < ρ. Donc la boule B (x 0 , ρ) est
contenue dans Ωk .
Si chaque Ωk est dense dans E , alors E étant complet, le théorème de Baire assure que
∩k∈N Ωk est dense dans E, en particulier non vide. Si on choisit x ∈ ∩ k∈NΩk , on a alors
sup f ∈H f (x) = +∞.
APPLICATIONS 425
Sinon, il existe un entier k tel que Ωk ne soit pas dense dans E. En d’autres termes,
∃x0 ∈ E, ∃ρ > 0, B(x0 , ρ) ∩ Ωk = ∅,
de sorte que pour tout x ∈ B(x0 , ρ), supf ∈H f (x) ≤ k. On en déduit
∀x ∈ B(0, ρ), ∀f ∈ H, f (x) = f (x + x0 ) − f (x0 ) ≤ f (x + x0) + f (x 0) ≤ 2k.
Par continuité de chaque f ∈ H , cette inégalité reste vraie sur la boule fermée Bf (0, ρ). Ainsi,
1 2k 2k
∀f ∈ H, ∀x ∈ E, x = 1, f (x) = f (ρx) ≤ donc ∀f ∈ H, |||f ||| ≤ ,
ρ ρ ρ
d’où le résultat.
2/ La fonction f , limite simple de fonctions linéaires, est clairement linéaire.
Il reste à montrer la continuité de f . Appliquons le théorème de Banach-Steinhaus avec H =
{fn , n ∈ N}. La suite (fn ) converge simplement, donc pour tout x ∈ E , sup n∈N fn (x) < +∞.
D’après la question précédente, ceci entraı̂ne l’existence de M > 0 tel que |||f n||| ≤ M pour tout
n ∈ N. Si x = 1, on a donc fn (x) ≤ M pour tout n, donc f (x) ≤ M . Ceci est vrai pour
tout vecteur normé x, donc f est continue.
3/ Considérons l’ensemble
H = {B (·, y), y = 1} ⊂ Lc (E1 , F ).
D’après les hypothèses, pour tout x ∈ E 1, l’application y → B (x, y) est continue. Ceci entraı̂ne
sup y=1 B(x, y) < +∞, autrement dit on a sup f ∈H f (x) < +∞ pour tout x ∈ E 1. L’e.v.n
E1 est complet, donc d’après le théorème de Banach-Steinhaus,
∃M > 0, ∀y ∈ E2 , y = 1, |||B (·, y)||| ≤ M.
Autrement dit, pour tout (x, y) ∈ E 1 × E2 vérifiant x = y = 1, on a B(x, y) ≤ M . Donc
B est continue sur E1 × E 2 (c’est classique à partir de cette dernière inégalité !)
donc si f ∞ = 1, on a
1 π sin[(2n + 1)t/2]
|n (f )| ≤ dt. (∗)
2π sin(t/2)
−π
426 A. THÉORÈME DE BAIRE ET APPLICATIONS
Autres applications
Le lecteur amusé par les applications précédentes du théorème de Baire pourra s’exer-
cer sur les suivantes :
— il n’existe pas de partition dénombrable de [0, 1] en fermés ;
— il n’existe pas d’application f : R → R continue en tout point de Q et discontinue
en tout point de RQ (par contre, il existe des fonctions continues en tout point
de RQ et discontinues en tout point de Q, voir le problème 11 page 114) ;
— si E 1 et E2 sont deux espaces métriques complets et si une fonction f définie sur
E1 × E 2 a toutes ses applications partielles continues, alors f est continue sur un
ensemble dense.
Remarque sur le théorème de Banach-Steinhaus
Il existe une version plus forte de ce théorème, valable sur des espaces vectoriels appelés
espaces de Fréchet. Ce ne sont pas des espaces normés, mais des espaces métriques dont
la distance n’est pas issue d’une norme.
ANNEXE B
Espaces de Hilbert
Cette annexe présente, sous forme d’un problème, les résultats généraux relatifs aux
espaces de Hilbert. Ce problème est suivi de deux exercices indépendants :
— le premier porte sur la topologie faible dans un espace de Hilbert,
— le second sur les opérateurs compacts et leur théorie spectrale dans les espaces de
Hilbert.
Cet appendice suppose connue la théorie des espaces préhilbertiens.
b) On dit que H est séparable s’il existe une suite (e n)n∈N de vecteurs de H de norme 1,
deux à deux orthogonaux, telle que Vect(en) n∈N soit dense dans H (on parle alors de base
hilbertienne).
Montrer que si H est séparable, tout élément v de H s’écrit v = +∞
n=0 λn e n où pour
2 ∞ 2
tout n, λ n = v, en , et que v = n=0 λn .
Solution. 1/ a) Posons δ = d(x, C ) = inf z ∈C x − z . Il existe une suite (yn ) de C telle que
limn→+∞ x − yn = δ. En utilisant le fait que H est un espace de Hilbert, nous allons montrer
que ceci entraı̂ne la convergence de (yn ). Comme H est complet, il suffit de montrer que (yn )
est de Cauchy.
Comme la norme . est issue d’un produit scalaire, elle vérifie l’identité du parallélogramme,
donc
∀p, q ∈ N, (x − yp ) + (x − yq)2 + yp − y q 2 = 2 x − yp 2 + x − yq 2 . (∗)
y +y
Or C est convexe, donc (yp + y q )/2 ∈ C pour tout p, q ∈ N, donc x − p 2 q ≥ δ, ou encore
(x − y p) + (x − y q)2 ≥ 4δ 2. Avec (*), on en déduit
∀p, q ∈ N, yp − yq 2 ≤ 2 (x − yp 2 − δ 2 ) + (x − y q 2 − δ2) ,
et comme x − yn tend vers δ , on voit que (yn ) est bien une suite de Cauchy.
Soit y la limite de (yn ). Comme C est fermé, on a y ∈ C et x − y = limn→+∞ x − yn =
δ = d(x, C ).
Il nous reste à montrer que y est unique. Supposons x − z = δ avec z ∈ C, et définissons
une suite (yn ) de C par yn = y si n est pair, y n = z si n est impair. Cette suite vérifie x − yn = δ
pour tout n, en particulier x − yn tend vers δ , donc d’après ce que nous avons prouvé plus
haut, (yn ) converge. Ceci entraı̂ne z = y, d’où l’unicité.
b) Supposons d’abord que pour y ∈ C , on ait
∀z ∈ C, z − y, x − y ≤ 0.
Alors pour tout z ∈ C ,
z −x2 = (z −y )−(x− y )2 = z − y 2 +x−y 2 −2z − y, x − y ≥ z −y 2 +x−y 2 ≥ x −y 2 ,
donc z − x ≥ y − x pour tout z ∈ C . De plus y ∈ C , donc y − x = d(x, C), et d’après la
question précédente, y = xC.
Montrons maintenant que la propriété est vérifiée pour y = xC . Pour tout z ∈ C , on a
x − z 2 ≥ x − xC 2, et en développant x − z 2 = (x − xC ) − (z − xC ) 2, on obtient donc
∀z ∈ C, −2x − xC , z − x C + z − xC 2 ≥ 0. (∗∗)
1. RÉSULTATS G ÉNÉRAUX SUR LES ESPACES DE HILBERT 429
donc
∀λ ∈ ]0, 1], −2x − xC , z0 − x C + λz 0 − x C 2 ≥ 0,
et en faisant tendre λ vers 0 dans cette dernière inégalité, on obtient −2x − xC , z0 − x C ≥ 0,
et ceci pour tout z0 ∈ C, d’où le résultat.
2/ a) Le fait que A⊥ soit un s.e.v de H est immédiat. Pour montrer que A⊥ est fermé, on
considère une suite (xn ) de A ⊥ qui converge vers un point x de H. Pour tout y ∈ A, on a
xn, y = 0, et par continuité du produit scalaire (qui provient de l’inégalité de Schwarz), on en
déduit, en faisant n → +∞, que x, y = 0. Ceci est vrai pour tout y ∈ A, donc x ∈ A ⊥ .
b) Montrons (i). Il est clair que F ∩ F ⊥ = {0}, car si x, x = 0, on a x = 0. Montrons maintenant
F ⊕ F ⊥ = H. Soit x ∈ H . Comme F , s.e.v fermé de H, est un convexe fermé de H , on peut
appliquer les résultats de 1/. Donc il existe un unique élément x F ∈ F tel que x − xF = d(x, F ),
et on a
∀z ∈ F, z − x F , x − xF ≤ 0.
Comme F est un s.e.v, il est symétrique par rapport à x F ∈ F , et cette dernière inégalité est
donc une égalité. On en tire
∀z ∈ F, z, x − xF = z − x F , x − xF − 0 − xF , x − xF = 0,
Par ailleurs, F ⊂ F ⊥⊥, et comme un orthogonal est fermé, F ⊂ F ⊥⊥ . Avec (***), on en déduit
F = F ⊥⊥ .
d) Comme F = F ⊥⊥ et que H = F ⊥ ⊕ F ⊥⊥ (car F ⊥ est un s.e.v fermé), on a H = F⊥ + F ,
donc F = H si et seulement si F ⊥ = {0}.
3/ a) Remarquons tout d’abord que ϕa est bien une forme linéaire, et elle est continue d’après
l’inégalité de Schwarz.
L’application H → H a → ϕ a est clairement linéaire. Elle est injective car si ϕa = 0, alors
0 = ϕa (a) = a, a = a2, donc a = 0.
Il nous reste à montrer (c’est plus délicat) qu’elle est surjective. Soit L ∈ H . Si L = 0,
L = ϕ0 et c’est terminé. Sinon, L = 0, et Ker L = L −1 ({0}) est un s.e.v de H , fermé car L est
continue. Donc d’après 2/a), (Ker L) ⊕ (Ker L) ⊥ = H. Si L était nulle sur (Ker L)⊥, alors L
serait nulle sur H ce qui est absurde par hypothèse. Donc il existe a ∈ (Ker L) ⊥ tel que L(a) = 0.
Montrons que (Ker L)⊥ = Vect(a). Soit v ∈ (Ker L)⊥ . On pose
L(v ) L(v ) L(v )
w=v− a qui vérifie L(w ) = L(v ) − L a = L(v ) − L(a) = 0,
L(a) L(a) L(a)
430 B. ESPACES DE HILBERT
donc w ∈ Ker L. Par ailleurs, w est combinaison linéaire de deux éléments de (Ker L)⊥, donc
w ∈ (Ker L)⊥ . Finalement, w ∈ (Ker L) ∩ (Ker L)⊥ = {0} donc w = 0, c’est-à-dire v = L (v)
L(a)
a∈
Vect(a). On a donc bien (Ker L) ⊥ = Vect(a).
Ceci étant, posons b = L(a)
a 2
a. Nous allons montrer ϕ b = L.
L(a)
— Pour tout x ∈ Ker L, on a ϕ b(x) = a2
a, x = 0 car a ∈ (Ker L)⊥.
— Si x ∈ (Ker L)⊥, alors il existe λ ∈ R tel que x = λa, donc
L(a)
ϕ b(x) = λ ϕb (a) = λ a, a = λL(a) = L(λa) = L(x).
a 2
Finalement, nous avons montré que L et ϕb coı̈ncident sur les deux espaces supplémentaires
Ker L et (Ker L) ⊥. Donc L = ϕ b , d’où la surjectivité désirée.
b) Soit y ∈ H . L’application x → u(x), y est une forme linéaire continue, donc d’après 3/a),
∃!ay ∈ H, ∀x ∈ H, u(x), y = ay , x.
L’unicité de ay entraı̂ne que y → a y est linéaire. Notons v l’endomorphisme de H défini par
v (y ) = ay , de sorte que
∀x, y ∈ H, u(x), y = x, v(y ).
L’unicité de ay entraı̂ne celle de v. Il nous reste à montrer que v est continu. Pour tout y ∈ H ,
on a
v (y )2 = v (y ), v(y ) = u[v (y)], y ≤ u[v (y )] · y ≤ |||u||| · v (y ) · y ,
donc v (y ) ≤ |||u||| · y. Ceci étant vrai pour tout y ∈ H , on en déduit que v est continu et que
|||v ||| ≤ |||u|||.
Nous avons donc prouvé l’existence et l’unicité de u∗ , et on a |||u∗ ||| ≤ |||u|||. De même,
|||u ||| ≤ |||u∗|||. L’unicité de l’adjoint entraı̂ne u ∗∗ = u, donc |||u||| ≤ |||u∗ |||, et finalement, on a
∗∗
Solution. 1/ a) Soit x ∈ H tel que pour tout y ∈ H , limn→+∞ x n, y = x , y. Alors pour tout
y ∈ H , x, y = limn→+∞ xn , y = x , y, donc x − x , y = 0 pour tout y ∈ H. En particulier
x − x, x − x = x − x 2 = 0, donc x = x .
Si xn ≤ M pour tout n, alors pour tout n, |x n , x| ≤ x n ·x ≤ M x. Comme (xn, x)
converge vers x, x = x2 , on en déduit x2 ≤ M x donc x ≤ M .
b) C’est évident car pour tout y ∈ H , |xn , y − x, y| = |xn − x, y| ≤ xn − x · y.
Par contre, la réciproque est fausse. Par exemple, dans un espace de Hilbert séparable dont
(e
n∈N
n ) est une base hilbertienne (par exemple H = 2 , espace des suites réelles (xn ) telles que
x n < +∞), la suite (en )n∈N converge faiblement vers 0 car si y ∈ H , on a y = +∞
2
n=0 y, en en
et y, e n 2 converge, donc lim n→+∞ y, e n = 0, Bien sûr, il est clair que (en ) ne converge pas
fortement (si c’était le cas, sa limite forte serait sa limite faible donc 0, ce qui est impossible
puisque en = 1 pour tout n).
c) Il suffit d’écrire xn − x 2 = x2 + xn 2 − 2x, xn.
2/ a) Comme (xn ) est bornée, la suite réelle (xn , x1 )n∈N∗ est bornée. On peut donc extraire
une sous-suite (xϕ 1(n) ) de (xn) telle que la suite (xϕ1(n) , x1 ) n∈N∗ converge.
De même, la suite réelle (xϕ1 (n), x2 )n∈N ∗ est bornée, on peut donc extraire une sous-suite
(xϕ1 ◦ϕ2(n) (n))n∈N∗ de (x ϕ1 (n)) telle que la suite (x ϕ 1◦ϕ 2(n), x2 )n∈N ∗ converge.
En procédant par récurrence, on construit ainsi pour tout k une sous-suite (xϕ1◦···◦ϕ k (n) )n∈N∗
telle que la suite (xϕ1 ◦···◦ϕ k (n) , xk ) n∈N∗ converge.
On définit alors la suite (yn ) par y n = x ϕ1 ◦···◦ϕn (n) pour tout n (procédé d’extraction diago-
nal). Pour n ≥ k , la suite (yn ) est une sous-suite de (xϕ 1◦···◦ϕk (n) )n∈N∗ , donc la suite (yn , xk )n∈N∗
converge, et ceci pour tout k ∈ N ∗ .
b) Pour tout k , la suite (yn , xk )n∈N ∗ converge. Il est donc clair que pour tout v ∈ F =
Vect(x k )k∈N∗ , la suite (yn , v)n∈N ∗ converge.
Montrons que cette propriété reste vraie si v ∈ E = F . Soit v ∈ E . Soit ε > 0 et w ∈ F tel
que v − w < ε. La suite (yn , w) n∈N∗ converge. Elle est donc de Cauchy, ce qui entraı̂ne
∃N ∈ N, ∀p, q ≥ N, |yp, w − y q , w| < ε.
432 B. ESPACES DE HILBERT
On en déduit
∀p, q ≥ N, |yp , v − yq , v| ≤ |yp , v − w| +|yp, w − yq , w| + |yq , v − w| ≤ M ε + ε + M ε,
où M est un majorant de (xn) (donc de (yn )). Donc (yn , v) n∈N∗ est une suite de Cauchy,
donc elle converge car H est complet.
Pour tout v ∈ E , on note (v) la limite de la suite (yn , v)n∈N∗ . Il est clair que l’application
: E → R ainsi définie est linéaire. Elle est continue car (yn) est bornée. Le s.e.v E, fermé
dans un complet, est complet. Muni du produit scalaire sur H, c’est donc un espace de Hilbert,
donc d’après le théorème de représentation de Riesz, il existe un unique vecteur u de E tel que
(v ) = u, v pour tout v ∈ E . Ceci s’écrit aussi
∃!u ∈ E, ∀v ∈ E, lim yn , v = u, v .
n→+∞
de [g (xϕ(n) )]n∈N une sous-suite convergente [g (xϕ◦ψ(n) )]n∈N. Les deux suites [f (x ϕ◦ψ(n))] n∈N et
[g (x ϕ◦ψ(n))] n∈N sont donc convergentes, donc la suite [(f + g)(xϕ◦ψ(n) )] n∈N est convergente.
D’après l’équivalence (iii) ⇐⇒ (i) de la question précédente, on en déduit que f + g est
un opérateur compact.
Montrons maintenant que Lcomp (E) est un fermé de Lc(E). Soit (fn ) une suite de Lcomp (E )
qui converge vers f ∈ Lc (E). Soit ε > 0. Choisissons n ∈ N tel que |||f n − f ||| < ε/2. Comme
fn est un opérateur compact, d’après 1/b)(ii), on peut recouvrir f n(B) par un nombre fini de
boules ouvertes de rayon ε/2. Alors f (B ) est recouvert par les boules de même centre et de
rayon ε, donc f est compact d’après 1/b)(ii).
b) Soit f ∈ Lc (E) de rang fini. Comme f est continue, f (B ) est bornée. Par ailleurs, f (E ) est
fermé (c’est un sous-espace de dimension finie), donc f (B ) ⊂ f (E ). Finalement, f (B ) est un
fermé borné de f (E ). Comme f (E ) est de dimension finie, f (B ) est donc un compact de f (E ),
donc de E puisque f (E ) est fermé.
II. 1/ a) Soit ε > 0. D’après I.1/b)(ii), il existe un nombre fini de boules de rayon ε recouvrant
f (B ) : f (B ) ⊂ ∪1≤i≤n B(yi, ε). Soit F = Vect(y 1, . . . , yn) et p F le projecteur orthogonal sur F .
On a |||f − pF ◦ F ||| < ε. En effet, si x ∈ B , on sait qu’il existe i tel que f (x) − y i < ε.
De plus, on sait que f (x) − pF ◦ f (x) = infy∈F f (x) − y , et comme yi ∈ F , on en déduit
f (x) − pF ◦ f (x) ≤ f (x) − y i < ε.
En résumé, pour tout ε > 0, nous avons trouvé un opérateur g continu de rang fini (ici
g = p F ◦ f qui est bien de rang fini car F est de dimension finie), tel que |||g − f ||| < ε. D’où le
résultat.
b) Remarquons déjà que si f ∈ Lc (E) est de rang fini, alors f ∗ aussi. En effet. La relation
x, f ∗ (y ) = f (x), y pour tout x, y ∈ E entraı̂ne f∗ (E ) ⊂ (Ker f )⊥. Par ailleurs, la restriction
de f à (Ker f ) ⊥ est un isomorphisme de (Ker f )⊥ sur f (E), donc (Ker f ) ⊥ est de dimension
finie. Donc f ∗(E) est de dimension finie.
Ceci étant, soit f ∈ Lcomp (E). D’après la question précédente, il existe une suite (fn) d’opéra-
teurs continus de rang fini qui converge vers f . Or pour tout n, |||fn∗ −f ∗ ||| = |||(fn −f )∗ ||| = |||fn−f |||,
donc (f ∗n ) converge vers f ∗ . Or tous les fn∗ sont continus et de rang fini, donc compacts (voir
I.2/b)), et comme Lcomp(E ) est fermé, on en déduit f ∗ ∈ Lcomp (E).
c) Supposons le contraire. Alors il existe α > 0 et une sous-suite de (e n), encore notée (en ), telle
que f (en ) ≥ α pour tout n. Comme f est compact, il existe une sous-suite (eϕ(n) ) de (en ) telle
que (f (eϕ(n) )) converge. Notons x sa limite. On a x ≥ α , et
∀y ∈ E, x, y = lim f (eϕ(n)), y = lim eϕ(n) , f ∗ (y ),
n→+∞ n→+∞
et le dernier membre est nul en vertu de l’inégalité de Bessel (voir le problème 1, question 4/a)).
On en déduit x, y = 0 pour tout y ∈ E , donc x = 0. Ceci est absurde car x ≥ α > 0.
2/ a) Supposons que Ker(f − λ Id) soit de dimension infinie. Alors on peut trouver une suite
orthonormale (en) de vecteurs de Ker(f − λ Id) (en partant d’un vecteur e 0 de norme 1, construire
les en par récurrence). Pour tout n ∈ N, on a f (en ) = λ en, donc f (e n) = λ = 0. Ceci est
absurde d’après le résultat de la question précédente.
b) Soit (λn ) une suite de valeurs propres distinctes de f , convergeant vers une valeur λ. Il
s’agit de montrer que λ = 0. Pour tout n ∈ N, on note xn un vecteur propre associé à la valeur
propre λn . Le procédé d’orthonormalisation de Schmidt permet de construire une suite orthonor-
male (y n )n∈N qui vérifie Vect(y0, . . . , yn ) = Vect(x0, . . . , x n) pour tout n. D’après II.1/c), on a
limn→+∞ f (yn) = 0. Pour tout n, on a (f − λ n Id)(yn ) ∈ Vect(x0 , . . . , x n−1) = Vect(y0 , . . . , yn−1 ).
Donc λn yn et (f − λ n Id)(yn) sont orthogonaux, et comme f (y n ) = λn yn + (f − λ n Id)(y n),
on en déduit f (y n) ≥ |λ n| y n = |λn |. Comme (f (yn)) tend vers 0, on en déduit que (λ n )
tend vers 0. Ainsi, 0 est le seul point d’accumulation possible de Λ(f ). D’après le théorème de
Weierstrass, on en déduit que pour tout n, Λ(f ) ∩ [1/n, n] est fini, donc
1
Λ(f ) ∩ R+∗ = Λ(f ) ∩ ,n
∗
n
n∈N
2. QUELQUES PROPRI ÉTÉS DES ESPACES DE HILBERT 435
est au plus dénombrable. On montrerait de même que R−∗ ∩ Λ(f ) est au plus dénombrable.
Donc Λ(f ) est au plus dénombrable.
III. 1/ a) Montrons déjà
sup |f (x), y| = |||f |||. (∗)
x=y=1
Si x = y = 1, on a |f (x), y| ≤ f (x) y ≤ |||f |||.
Par définition de la norme intrinsèque |||f |||, il existe une suite (xn) de vecteurs de norme 1
qui vérifie limn→+∞ f (xn ) = |||f |||. En posant yn = f (xn )/f (xn ) pour tout n, on a yn = 1
et f (xn ), yn = f (x n), donc limn→+∞ f (x n ), yn = |||f |||, d’où (*).
Ceci étant, posons M = sup x=1 |f (x), x| et montrons M = |||f |||. Tout d’abord, il est clair
que pour tout vecteur x de norme 1, |f (x), x| ≤ f (x) x = f (x) ≤ |||f |||, donc M ≤ |||f |||.
Montrons l’inégalité réciproque. Si x = y = 1, le caractère autoadjoint de f permet
d’écrire, pour ε ∈ {−1, 1}, f (x + εy ), x + εy = f (x), x + f (y ), y + 2εf (x), y donc
4 f (x), y = f (x + y ), x + y − f (x − y ), x − y
ce qui entraı̂ne
4 |f (x), y| ≤ |f (x + y ), x + y| + |f (x − y ), x − y|.
Or, par normalisation on a |f (x + y ), x + y | ≤ M x + y 2 et |f (x − y ), x − y| ≤ M x − y 2 ,
donc finalement
4 |f (x), y| ≤ M x + y 2 + x − y 2 = 2M x 2 + y 2 = 4M.
Finalement, nous avons montré |f (x), y| ≤ M dès que x = y = 1. Avec (*), on en déduit
|||f ||| ≤ M .
Nous venons de montrer |||f ||| = supx=1 |f (x), x|, on conclut facilement qu’il existe une
suite (xn ) de vecteurs normés telle que f (x n), xn converge vers |||f |||.
b) Il est clair que l’on peut trouver une sous-suite de la suite (x n) construite précédemment,
encore notée (xn ), et α ∈ {−1, 1} tels que lim n→+∞ f (xn ), xn = α |||f |||.
Comme f est compact, on peut en extraire de (xn ) une sous-suite, encore notée (x n), telle
que (f (xn )) converge. Soit y sa limite. Posons λ = α |||f |||. Pour tout n, on a
f (xn) − λ x n 2 = f (xn ) 2 + λ2 x n2 − 2λx n, f(xn) ≤ 2λ 2 − 2λf (xn), x n ,
donc limn→+∞ f (xn ) − λ xn = 0. Comme y − λ xn = (y − f (x n)) + (f (xn ) − λ xn), on en déduit
que lim n→+∞ y − λ x n = 0. De plus λ = α |||f ||| = 0, on a donc limn→+∞ xn = y/λ, et comme
xn = 1 pour tout n, on a y = 0.
Le fait que limn→+∞ f (x n) − λ x n = 0 permet alors d’affirmer f (y) = λ y, donc λ est valeur
propre non nulle de f .
2/ a) C’est comme en dimension finie. Si f (x) = λx et f (y) = µy avec λ = µ, alors
λx, y = f (x), y = x, f (y ) = µx, y ,
donc x, y = 0.
b) Montrons que G⊥ ⊂ Ker f . L’ensemble G⊥ est stable par f . En effet, considérons x ∈ G⊥.
Pour tout vecteur propre y de f associé à une valeur propre λ = 0, on a f (x), y = x, f (y ) =
λx, y = 0, donc par linéarité f (x), y pour tout y ∈ G, c’est-à-dire x ∈ G⊥ .
La restriction g de f à G ⊥ est donc un endomorphisme (qui reste bien sûr compact et
autoadjoint) de G⊥ , qui est un espace de Hilbert (car fermé dans E ). Comme G ∩ G⊥ = {0}, g
n’a aucune valeur propre non nulle. Donc d’après III.1/b), g = 0, autrement dit, f (x) = 0 pour
tout x ∈ G⊥. Donc G⊥ ⊂ Ker f .
Montrons maintenant l’inclusion réciproque. Soit x ∈ Ker f , soit y un vecteur propre de f
associé à une valeur propre λ = 0. Alors
0 = f (x), y = x, f (y ) = λ x, y ,
donc x, y = 0, et par linéarité, x ∈ G⊥ .
Donc Ker f = G ⊥. Or G⊥ = (G)⊥ = F ⊥ , d’où le résultat.
436 B. ESPACES DE HILBERT
c) Si Λ(f ) n’est pas fini, d’après II.2/b), Λ(f ) est dénombrable. Notons (λn) n∈N les éléments
non nuls de Λ(f ). Pour tout n, le sous-espace propre E λn = Ker(f − λ n Id) est de dimension
finie, et on note (en,1 , . . . , e n,pn ) une base orthonormale de Eλn . Alors (e n) = (en,i ) n∈N est une
1≤i≤p n
base orthonormale de G (d’après III.2/a)). Tout élément de F = G s’écrit donc sous la forme
x = +∞ 0 x, e n en et comme F ⊕ F ⊥ = E, on en déduit le résultat d’après III.2/b).
Si Λ(f ) est fini, en notant Λ(f ){0} = {λ1 , . . . , λ p}, G = Eλ 1 ⊕ · · · ⊕ Eλp est de dimension
finie, donc F = G, donc
Eλ1 ⊕ · · · ⊕ Eλp ⊕ Ker f = F ⊕ F ⊥ = E,
la somme directe étant orthogonale.
Remarque. Rappelons que la boule unité d’un e.v.n n’est compacte qu’en dimension finie
(théorème de Riesz, voir l’exercice 9 page 56). L’opérateur IdE n’est donc compact qu’en
dimension finie.
ANNEXE C
Cette annexe propose une preuve du théorème des nombres premiers, qui exprime que
π (x), le nombre de nombres premiers inférieurs à x, vérifie
x
π (x) ∼ , x → +∞ π (x) = Card {p premier, p ≤ x}.
log x
Ce célèbre résultat, conjecturé à la fin du dix-huitième siècle, résista aux mathématiciens
jusqu’à la fin du dix-neuvième siècle.
La preuve que nous proposons est classique et utilise la fonction ζ (s) = +∞ n=1 1/n
s
dans le domaine complexe. Nous utilisons une démonstration qui n’emploie pas la théorie
des fonctions analytiques (qui est le cadre standard de cette preuve) et qui nous est donc
accessible à partir du programme des classes préparatoires.
La preuve fait l’objet du problème 3. Elle est précédée de deux problèmes qui four-
nissent les ingrédients nécessaires à la démonstration : on démontre d’abord l’absence de
zéro de ζ (s) sur la ligne (s) = 1, puis on montre la formule de Perron, qui nous permet
d’exploiter l’expression de ζ (s) en fonction des nombres premiers.
La dernière partie de cette annexe présente une histoire de la preuve du théorème des
nombres premiers.
1. Préliminaires
Problème 1 (Propriét és de la fonction ζ (s)). 1/ (La fonction ζ (s)) On considère
la fonction Zêta de Riemann, définie pour la variable complexe s par la série
+∞
1
ζ (s) = , s ∈ D = {s ∈ C | (s) > 1}
n=1
ns
a) Montrer que cette série est bien définie pour s ∈ D et que ζ (s) est continue sur D.
Montrer de plus que pour s = σ + it ∈ D (σ, t ∈ R), on a |ζ (s)| ≤ σ/(σ − 1).
b) Pour tout N ∈ N∗ , montrer que
N +∞
1 1/2 − {x} N 1−s N −s
∀s ∈ D, ζ(s) − = s dx + − , (∗)
n=1
ns N xs+1 s−1 2
où {x} = x − [x] désigne la partie fractionnaire de x.
c) Montrer que ζ (s) est prolongeable en une fonction continue sur D {1}, où D = {s ∈
C | (s) ≥ 1}, et qu’il existe une fonction η (s) continue sur D tout entier tel que
1
∀s ∈ D{1}, ζ(s) = η (s) + .
s−1
(Λ(n) s’appelle la fonction de Mangoldt). Montrer l’identité ζ (s)Z (s) = −ζ (s) pour tout
s ∈ D.
3/ a) Montrer l’existence de M0 > 0 et de M1 > 0 tels que
∀σ ∈ [1, 2], ∀t ∈ R, |t| ≥ 2, |ζ (σ + it)| ≤ M0 log |t|, |ζ (σ + it)| ≤ M1 log 2 |t|
b) Montrer que si p > 1,
+∞
cos(nτ log p)
∀s ∈ D, s = σ + iτ, log |1 − p−s | = − . (∗∗)
n=1
np nσ
Après avoir montré 3 + 4 cos θ + cos 2θ ≥ 0 pour θ ∈ R, démontrer ensuite l’inégalité
∀σ > 1, ∀τ ∈ R, |ζ (σ )| 3|ζ (σ + iτ )| 4|ζ (σ + 2iτ )| ≥ 1.
c) En déduire que ζ (s) ne s’annule pas sur D {1}. Montrer ensuite l’existence de m0 > 0
tel que
m0
∀σ ∈ [1, 2], ∀t ∈ R, |t| ≥ 2, |ζ (σ + it)| ≥
log7 |t|
(considérer séparément les cas σ ≥ σt = 1 + ε/ log 9|t| et 1 ≤ σ < σ t. Pour ce dernier,
σ
utiliser 3/b) et l’inégalité |ζ (σ + it)| ≥ |ζ (σt + it)| − σ t |ζ (x + it)| dx).
d) Montrer que la fonction F (s) = ζ (s) − Z (s) est prolongeable en une fonction continue
sur D tout entier, et qu’il existe M F > 0 et A > 0 tels que
∀σ, t : 1 ≤ σ ≤ 2, |t| ≥ A, |F (σ + it)| ≤ MF log 9 |t|.
où Fm,M désigne l’ensemble des entiers n ∈ de la forme n = pi11 · · · pimm avec 0 ≤ ik ≤ M .
N∗
Maintenant, donnons nous N ∈ N∗ . Soit pm0 le plus grand nombre premier pi et M 0 la plus
grande des puissances ik apparaissant dans toutes les décompositions en facteurs premiers des
N premiers entiers 1, . . . , N. Considérons m ≥ m 0 et M ≥ M0 . Tous les entiers compris entre 1
et N sont dans Fm,M donc
m M
1 1 1
ζ (s) −
= ≤ .
ik s s σ
k=1 i k=0
(pk ) n∈N∗ ,n∈F m,M n>N n
n
Cette expression est valable pour tout M ≥ M 0 . En faisant tendre M vers +∞, on en déduit
m
1 m
+∞
1 1
ζ (s) − = ζ (s ) − ≤ .
1 − p−s
k
(pik ) s nσ
k=1 k=1 ik =0 k n>N
σ
Comme on peut choisir N pour rendre n>N 1/n arbitrairement petit pour σ ≥ σ 0 > 1 et que
l’inégalité précédente vaut pour tout m ≥ m0 , on en déduit que le produit infini de l’identité
d’Euler converge uniformément vers ζ (s) sur Dσ0 dès que σ 0 > 1. Ceci étant vrai pour tout
σ0 > 1 on en déduit que l’identité d’Euler vaut sur D tout entier.
b) Fixons s = σ + it ∈ D. Remarquons d’abord que 1 − p −s
k est non nul pour tout k et que
1 − p−σ −s −σ
k ≤ |1 − p k | ≤ 1 + pk donc log(1 − p −σ −s −σ
k ) ≤ log |1 − p k | ≤ log(1 + pk ).
Nous avons vu plus haut que pour σ > 1 fixé, la série j p−s −s
j log p j /(1 − pj ) converge normale-
ment sur Dσ . Comme de plus P n (s) converge uniformément vers ζ (s) sur D σ (voir 2/a)) et que
|ζ (s)| ≤ σ/(1 − σ) est bornée sur ce domaine, on en déduit que P n(s) converge uniformément
sur Dσ , donc forcément vers ζ (s). En faisant tendre n vers l’infini dans la dernière identité on
obtient
p−s
+∞
j log p j
ζ (s) = −ζ (s) = −ζ (s)Z (s).
j=1
1 − p−s
j
3/a) Commençons par montrer l’estimation sur ζ (σ + it), pour 1 ≤ σ ≤ 2 et |t| ≥ 2. L’identité
(*) entraı̂ne
N
1−s −s
1 +∞ N
|ζ (s)| ≤ 1 dx + N +
n s + |s | 2xs+1 s − 1 2
n=1 N
N
1 +∞
1 1 1
≤ + |s |
dx + + ≤ (1 + log N ) + |s| + 1.
n=1
n N 2x 2 s−1 2 2N
En choisissant N = [|t|] +1, on en déduit |ζ (σ + it)| ≤ 2 +log(|t| +1)+2|t|/2N ≤ 4+ log |t|. Ainsi,
on a montré ζ (σ + it) = O(log |t|) uniformément pour 1 ≤ σ ≤ 2 et |t| ≥ 2, d’où la première
estimation.
On s’y prend de manière similaire pour l’estimation de ζ(s). On commence par dériver
l’identité (*) (nous avions montré que nous pouvions bien dériver sous le signe intégral en 1/d)),
ce qui donne, pour tout N ∈ N ∗
N +∞
log n 1/2 − {x} N 1−s log N N 1−s N−s log N
ζ (s) = − + (1 − s log x ) dx − − + .
n=1
ns N x s+1 s−1 (s − 1)2 2
N +∞
log n 1 + |s| log x log N 1 log N
|ζ (s)| ≤ + 2
dx + + +
n=2
n N 2x 2 4 2N
N
log x 1 |s| +∞ log x 1
≤ dx + + 2
dx + log N + .
1 x 2N 2 N x 4
Or 1N log x/x dx = 12 log 2 N et N+∞ log x/x2 dx = (1 + log N )/N , donc finalement
est toujours négative, donc |1 − p−σ |3 · |1 − p−σ−iτ |4 · |1 − p −σ−2iτ | ≤ 1. Compte tenu de l’identité
d’Euler (question 2/a)) appliquée à ζ (σ), ζ (σ + iτ ) et ζ (σ + 2iτ ), ceci entraı̂ne bien le résultat
attendu.
c) On a déjà démontré que ζ (s) ne s’annule pas sur D , donc il s’agit ici de montrer que ζ (s) ne
s’annule pas pour (s) = 1. Raisonnons par l’absurde et supposons ζ (1 + iτ ) = 0, avec τ = 0.
La dérivabilité en σ = 1 de l’application [1, +∞[ → C, σ → ζ (σ + iτ ), établi en 1/d), entraı̂ne
ζ (σ + iτ ) = O (σ − 1) lorsque σ → 1+. Par ailleurs, ζ (σ) = O (1/(σ − 1)) lorsque σ → 1 +. Comme
de plus ζ (σ + 2iτ ) = O(1), tout ceci entraı̂ne
donc cette expression peut être rendue arbitrairement proche de 0, ce qui est incompatible avec
l’inégalité établie à la question précédente. Donc ζ (1 + iτ ) ne s’annule jamais.
Donnons maintenant une minoration de |ζ (σ +it)|. Soit ε > 0. L’inégalité établie à la question
précédente entraı̂ne, lorsque σt = 1 + ε/ log 9 |t| ≤ σ ≤ 2 et |t| ≥ 2
1/4
1 3/4 1/4
2M0 log1/4 |t| log7 |t|
≤ |ζ (σ )| 3/4|ζ (σ + 2it)| 1/4 ≤ σ (M0 log |2t|) ≤ = ,
ζ (σ + it) (σ − 1)3/4 (ε log−9 |t|)3/4 Aε 3/4
1/4
avec A = 1/(2M0 ). Lorsque 1 ≤ σ < σ t et |t| ≥ 2, on écrit
σt
Aε 3/4 ε 3/4(A − ε 1/4M1 )
|ζ (σ + it)| ≥ |ζ (σt + it)| − |ζ (x + it)| dx ≥ 7
− (σt − σ )M1 log2 |t| = .
σ log |t| log7 |t|
En choisissant ε > 0 suffisamment petit, on peut supposer que m 0 = ε 3/4(A − ε 1/4M 1) est
strictement positif. Ainsi choisi, m0 vérifie |ζ (σ + it)| > m 0 / log7 |t| pour 1 ≤ σ ≤ 2 et |t| ≥ 2.
d) Il est immédiat que F , comme ζ et ζ , est prolongeable en une fonction continue sur D{1}.
Lorsque s ∈ D {1} on a, vu que Z (s) = −ζ (s)/ζ (s),
et le dernier terme converge lorsque s → 1 (vers 2η (1)) donc F est bien prolongeable en une
fonction continue sur D tout entier.
La majoration de |F (s)| est immédiate à partir des majorations démontrées précédemment
pour |ζ (s)| et |ζ (s)| et de la minoration obtenue pour |ζ (s)|.
Remarque. L’expression (***) permet de définir ζ (s) pour (s) > 0 (sauf en s = 1).
Dans le cadre des fonctions analytiques (ce qui est le cas pour ζ (s)), ce prolongement
est unique. On peut même poursuivre le procédé (l’identité (***) est issue de la formule
d’Euler-Maclaurin au premier ordre, que l’on peut utiliser à un ordre supérieur) pour
prolonger la fonction ζ (s) sur C{1} tout entier.
442 C. THÉOR ÈME DES NOMBRES PREMIERS
b) Montrer que
+∞
1 x1+σ+it (x − 1) (x > 1)
∀x > 0, ∀σ > 0, Qσ (x) = dt =
2π −∞ (σ + it)(1 + σ + it) 0 (0 < x ≤ 1)
Solution. a) En coupant l’intégrale en deux pour se ramener sur l’intervalle [0, T ], on trouve
T σ+it T σ+it T
x x xσ−it σ 2σ cos(t log x) + 2t sin(t log x)
dt = + dt = x dt
−T σ + it 0 σ + it σ − it 0 σ 2 + t2
σT σT
cos(σu log x) u sin(σu log x)
= 2x σ du + du
0 1 + u2 0 1 + u2
où on a effectué le changement de variable t = σu. Lorsque T → +∞, les deux dernières
intégrales convergent respectivement vers les intégrales C (σ log x) et S (σ log x) de la question c)
du problème 17 page 190. On en déduit que Pσ (x) existe bien et que
xσ
Pσ (x) = (C (σ log x) + S (σ log x)).
π
Les valeurs de C (v ) et S (v ) sont connues avec la question c) du problème 17 page 190. Elles
entraı̂nent C (v ) + S (v ) = πe −v si v > 0, C (0) + S (0) = π/2 et C (v) + S (v ) = 0 si v < 0.
σ
On en déduit que si x > 1 alors σ log x > 0 donc Pσ (x) = xπ (πe−σ log x ) = 1, si x = 1,
Pσ (x) = π1 (π/2) = 1/2, et si 0 < x < 1 alors Pσ (x) = 0.
b) L’idée est de montrer que Qσ (x) = Pσ (x). L’hypothèse de domination n’étant pas vérifiée
pour l’intégrande dérivée, on procède autrement. On considère pour tout n ∈ N∗
n
1 x1+σ+it
fn (x) = dt.
2π −n (1 + σ + it)(σ + it)
L’intégrande est continûment dérivable par rapport à x donc fn (x) est dérivable et
n σ+it
1 x
fn (x) = dt.
2π −n σ + it
On intègre par parties en supposant x > 0 et x = 1 ce qui donne
in n
xσ x x−in ixit
f n (x) = − + 2
dt .
2iπ log x σ + in σ − in −n (σ + it)
σ +∞ it
Comme Pσ (x) = limn→∞ f n(x) on en déduit P σ (x) = 2iπxlog x −∞ (σix +it) 2 dt, et donc
−n +∞
xσ 2 1 1 2xσ
|fn(x) − Pσ (x)| ≤ + dt + dt = .
2π log x n −∞ t
2
n t2 πn| log x|
Cette inégalité entraı̂ne la convergence uniforme de (fn ) vers Pσ sur tout segment de la forme
[a, b] avec 0 < a < b < 1 ou 1 < a < b. On en déduit que Qσ , limite simple de (f n ), est dérivable
sur tout segment de cette forme, donc sur ]0, 1[ ∪ ]1, +∞[ et que Qσ = Pσ sur cet intervalle.
2. PREUVE DU TH ÉOR ÈME DES NOMBRES PREMIERS 443
Maintenant on a Qσ (x) = O (x1+σ ) donc limx→0,x>0 Qσ (x) = 0 et comme Qσ (x) = P σ(x) = 0
pour 0 < x < 1, on en déduit Q σ (x) = 0 pour 0 < x < 1. Comme Qσ est continue sur R+ (son
intégrande est continue et majorée en valeur absolue par une fonction intégrable lorsque x est
dans tout segment inclus dans ]0, +∞[), on a aussi Qσ (1) = 0. Comme de plus Qσ (x) = P σ(x) = 1
pour x > 1, le théorème des accroissements finis entraı̂ne Qσ (x) = x − 1 pour x > 1.
c) Soit δ > 0. Par hypothèse, il existe M > 0 tel que |a n | ≤ M nδ/2 pour tout n ∈ N ∗ , donc pour
s 1+δ/2
tout
s ∈s D1+δ = {z ∈ C | (z ) ≥ 1 + δ} on a |an /n | ≤ M/n . Ainsi, la série de fonctions
a n/n converge normalement sur D 1+δ, elle est donc continue (et bornée) sur ce domaine.
Ceci étant vrai pour tout δ > 0 on en déduit que G(s) est bien définie et continue sur D.
Montrons la formule de Perron. Soit σ > 1. Comme an/n s converge normalement sur Dσ ,
en particulier sur (s) = σ , on peut inverser les signes de sommation ce qui donne
+∞ 1+σ+it +∞ +∞ x
1 x G(σ + it) 1 +∞ x1+σ+it an /n σ+it
dt = dt = na n Qσ .
2π −∞ (σ + it)(1 + σ + it) 2π −∞ (σ + it)(1 + σ + it) n
n=1 n=1
Compte tenu de la valeur de Qσ (x) obtenue à la question précédente, ceci entraı̂ne
+∞ 1+σ+it
1 x G(σ + it)
dt = (x − n)an . (∗)
2π −∞ (σ + it)(1 + σ + it)
1≤n≤x
Par ailleurs, pour 0 ≤ y ≤ x on peut écrire ϕ(y) = 1≤n≤x an χ n(y) où χn(y) = 0 si y < n,
χn(y ) = 1 pour y ≥ n. Ceci montre que
x x x
ϕ(y ) dy = anχ n(y ) dy = an dy = (x − n)an .
0 1≤n≤x 0 1≤n≤x n 1≤n≤x
Solution. 1/a) Nous sommes dans les hypothèses de la formule de Perron établie au problème
précédent, on en déduit que pour tout σ > 1 on a
x x +∞
1 F (σ + it)x1+σ+it
(ψ (y ) − [y]) dy = (Λ(n) − 1) dy = dt. (∗)
0 0 2π −∞ (σ + it)(1 + σ + it)
1≤n≤y
La borne sur |F (σ + it)| pour |t| suffisamment grand, établie à la fin du problème 1, entraı̂ne
qu’il existe M > 0 tel que |F (σ + it) ≤ M log9 (2 + |t|) pour 1 ≤ σ ≤ 2 et pour tout t ∈ R. On
en déduit que pour tout x > 1 on a
F (σ + it)x1+σ+it 9 3
∀σ ∈ [1, 2], ∀t ∈ R, ≤ M log (2 + |t|)x .
(σ + it)(1 + σ + it) 1+t 2
La dernière fonction étant intégrable sur R, l’hypothèse de domination est bien vérifiée donc
l’intégrale de droite dans (*) est bien une fonction continue de σ ∈ [1, 2], en particulier en σ = 1.
L’égalité (*) a donc lieu également lorsque σ = 1, d’où le résultat.
b) Posons G(t) = F (1 + it) × (1 + it) −1 × (2 + it)−1, fonction continue et intégrable sur R. La
formule établie à la question précédente s’écrit
x +∞
2 1
(ψ (y ) − [y]) dy = x FG (log x), F G (α) = G(t)e iαt dt.
0 2π −∞
D’après le lemme de Riemann-Lebesgue (voir l’exercice 6 page 157), on a limα→+∞ F G (α) = 0,
x x
donc
x ceci entraı̂
x ne 0 (ψ (y ) − [y])dy = o(x2 ). Comme y − 1 < [y ] ≤ y on a 0 (y − 1) dy ≤
0
[y ] dy ≤
x 0 y dy d’où on déduit 0x[y ] dy = x 2 /2 + o(x2 ), et finalement 0x ψ (y ) dy = 0x (ψ (y ) −
[y]) dy + 0 [y ] dy = x /2 + o(x2 ).
2
c) Soit ε > 0 (ε < 1/2). De ce qui précède, on déduit, la fonction ψ étant croissante
x x(1+ε)
x2 x 2 (1 − ε)2 2 x2 (1 + ε)2 x2
− + o(x ) ≤ ψ (y ) dy ≤ εxψ (x) ≤ ψ (y ) dy ≤ − + o(x 2)
2 2 x(1−ε) x 2 2
d’où, en divisant par εx on tire (1 − ε/2)x + o(x) ≤ ψ(x) ≤ (1 + ε/2)x + o(x). Comme on
peut avoir les petits o(x) plus petits que ε2 x en valeur absolue pour x suffisamment grand, ceci
entraı̂ne (1 − ε)x ≤ ψ (x) ≤ (1 + ε)x pour x assez grand.
2/a) On peut écrire
ψ (x) = log p ,
p≤x k≥1,p k ≤x
et comme le nombre d’entiers k ≥ 1 tels que pk ≤ x est égal à [log x/ log p], on en déduit la
formule voulue pour ψ (x).
Pour tout nombre réel u ≥ 1, l’inégalité [u] ≤ u < [u] + 1 ≤ 2[u] entraı̂ne [log x/ log p] log p ≤
log x ≤ 2[log x/ log p] donc ψ (x) ≤ π (x) log x ≤ 2ψ (x).
b) On a déjà montré 0 ≤ π (x) log x − ψ (x), majorons maintenant cette quantité. On a
log x
log x
x
π (x) log x−ψ (x) = log x − log p = log x − log p + log
p≤x
log p √ log p √ p
p≤ x x<p≤x
√
car
lorsq ue x < p ≤ x on a 1 ≤ log x/ log p < 2 donc [log x/ log p] = 1. Maintenant l’inégalité
log x
log p
≥ log x
log p
− 1 et le fait que π (n) − π(n − 1) = 1 si n est premier, = 0 sinon, entraı̂ne
x
π (x) log x − ψ (x) ≤ log p + (π (n) − π (n − 1)) log ,
√ √ n
p≤ x x<n≤x
Pour x ≥ 1 on a log(x/[x]) < log(2), et on sait que π(x) ≤ 2ψ (x)/ log(x) = O(x/ log x). Par
n+1
ailleurs log xn − log n+1
x
= log n+1
n = n dt/t, donc tout ceci entraı̂ne
n+1 x
dt x π (t) x
π (x) log x − ψ (x) ≤ π (n) +O ≤ dt + O .
√ n t log x 1 t log x
x<n≤x−1
x x
Comme π (x) = O (x/ log x), on a 1 π (t)/t dt = O ( 1 dt/ log t) = O (x/ log x) (voir le théorème 3
page 163), donc on a finalement démontré 0 ≤ π (x) log x − ψ(x) ≤ O (x/ log x). Ainsi, on a bien
π (x) = ψ (x)/ log(x) + O (x/ log2 x). On en déduit facilement le théorème des nombres premiers
car ψ (x) = x + o(x) donc π (x) = x/ log x + o(x/ log x).
depuis 1901 que si cette hypothèse est vraie, alors l’approximation de π (x) par Li(x) est
très précise et vérifie
π (x) = Li(x) + O (x1/2 log x).
Ainsi, l’hypothèse de Riemann est reliée à la régularité de la répartition des nombres
premiers.
Dans la continuité des travaux de Riemann, en 1896, Hadamard et La Vallée-Poussin
démontrent indépendamment et presque en même temps le théorème des nombres pre-
miers. Leur preuve (de même nature que celle proposée dans cette annexe) repose es-
sentiellement sur la démonstration que ζ (s) ne s’annule pas sur la droite (s) = 1.
Cette preuve du théorème des nombres premiers accélère le développement de la théorie
analytique des nombres dont elle est issue. On a longtemps pensé que le théorème des
nombres premiers était profondément lié aux méthodes de l’analyse complexe et qu’il
était impossible de le démontrer en dehors de ce cadre. Ces considérations furent rendues
caduques lorsqu’en 1949, Erdös et Selberg produisirent la première preuve élémentaire
(au sens ou elle n’utilise pas la théorie de l’analyse complexe) du théorème des nombres
premiers. Bien qu’élémentaire, la preuve est très difficile. Pour ses travaux, Selberg a
obtenu la médaille Fields en 1950 (la médaille Fields a été crée en 1936 après une pro-
position d’un mathématicien canadien John Fields, pour pallier l’absence de prix No-
bel de mathématiques ; elle est décernée tous les quatre ans. Depuis 2003, le prix Abel
récompense également les mathématiciens et est décerné annuellement).
L’hypothèse de Riemann. L’hypothèse de Riemann, qui exprime que les seuls zéros de
ζ (s) de la bande 0 ≤ (s) ≤ 1 sont sur la droite (s) = 1/2 a fait l’objet de nombreuses
études. La première avancée fut celle obtenue par Hadamard et La Vallée-Poussin, qui
montrèrent que ζ (s) ne s’annule pas sur (s) = 1. En 1900, Hilbert inclut l’hypothèse
de Riemann dans sa célèbre liste de 23 problèmes non résolus. En 1914, Hardy montra
qu’il y a une infinité de zéros de ζ (s) sur la droite critique (s) = 1/2. Selberg prouva en
1932 qu’il y a une proportion non nulle de zéros sur la droite critique. Le meilleur résultat
est celui de Conrey qui en 1989 prouva qu’au moins 40,219% des zéros sont sur la droite
critique.
De très nombreux mathématiciens, et même parfois les plus éminents d’entre eux,
ont proposé une preuve de l’hypothèse de Riemann. Jusqu’à présent (2019), toutes se
sont avérées fausses, ou pas dignes d’intérêt pour être étudiées par la communauté des
mathématiciens. En 2000, le Clay Mathematics Institute proposa un million de dollars
pour qui démontrerait ou infirmerait l’hypothèse de Riemann.
On a également cherché à calculer numériquement les zéros de ζ (s) pour vérifier qu’ils
sont bien sur la droite critique. On sait aujourd’hui que les 10 13 premiers zéros sont bien
sur la droite critique, mais ceci n’apporte rien à la preuve. Il suffirait d’en trouver un en
dehors de cette droite pour démontrer qu’elle est fausse !
Index des notations
Les numéros en fin de ligne indiquent les pages où apparaissent les notations corres-
pondantes.
abaissement de l’ordre (dans une équation Bieberbach, théorème de – (cas réel), 301
différentielle linéaire), 380 Bioche (règle de –), 139
Abel Bolzano-Weirstrass (théorème de –, propriété
règle d’–, 152, 215 de –), 28
théorème d’–, 263 Borel (théorème de réalisation de –), 295
transformation d’–, 215 Borel-Lebesgue (propriété de –), 27
accroissements finis bornée (partie –), 8
généralisés (théorème des –), 74 boule (ouverte, fermée), 9
inégalité des –, 76, 327 Brouwer (théorème de –), 52
théorème des –, 74
accumulation (point d’–), 11 Cantor
adhérence (d’une partie), 10 ensemble triadique de –, 63
adjacentes (suites –), 200 th. de – sur les séries trigonométriques, 312
algèbre normée, 14 Cantor-Lebesgue
analytique (fonction –), 266 escalier de –, 66
application théorème de –, 312
– ouverte (théorème de l’–), 423 caractéristique (fonction –), 351
application partielle, 14 Carathéodory (théorème de –), 54
arc, 42 Cauchy
arc géométrique, 357 critère de –
arc paramétré, 356 – pour les fonctions, 21
arithmético-géométrique – pour les suites, 20
inégalité –, 97 formule de –, 250
arithmético-géométrique problème de –, 374
moyenne –, 188 suite de –, 20
arithmético-géométrique Cauchy-Lipschitz (théorème de –), 374
suite –, 201 Césaro (moyenne de –), 203
chaleur (équation de la –), 369
Baire (espace de –), 417 changement de variable (th. du –), 127, 150, 354
Banach chemin, 42, 356
espace de –, 20, 21 Clairaut (équation de –), 392
théorème de –, 423 classe C n (fonction de –), 72
Banach-Steinhaus (théorème de –), 424 compact (espace –), 27
base hilbertienne, 428 compact (opérateur –), 432
Bernoulli compact à bord, 358
équations de –, 391 complet (espace métrique –), 20
nombres, polynômes de –, 319 complété (d’un espace métrique), 25
Bernstein concave (fonction –), 95
polynômes d’approximation de –, 242 connexe
Bernstein S., théorème de – – par arcs, 42
– sur les séries de Fourier, 278 – par lignes brisées, 42
– sur les séries entières, 261 composante –, 41
Bertrand espace – , 39
intégrales de –, 149 continue
séries de –, 212 – à gauche. à droite (fonction –), 16
Bessel (inégalité de –), 270, 428 application uniformément –, 12, 31
bêta (fonction –), 315 fonction –, 11
449
450 Index
ANALYSE
Cette nouvelle édition contient des exercices et problèmes supplé -
mentaires dans l’esprit de l’édition précédente.
C’est l’outil idéal de l’élève des classes préparatoires scientifiques
pour la révision des concours.
Il pourra également intéresser les candidats à l’agrégation.
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