Devoir Maison : Commentaire guidé

Sujet : Vous ferez le commentaire de l’extrait de Julie ou la Nouvelle Héloïse de Jean-

Jacques Rousseau.

Vous pourrez vous appuyer sur le parcours de lecture suivant :

- Vous analyserez la volonté de Julie de convaincre Saint-Preux de l’impossibilité de
leur amour
- Vous étudierez comment la lettre de Julie fait apparaître une vision très pure de
l’amour

Dans ce roman épistolaire, Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) relate l’amour impossible

entre Julie et son précepteur Saint-Preux en raison de leur différence de statut social. La
jeune femme épouse alors M. de Wolmar selon la volonté de son père. Elle écrit à Saint-
Preux pour mettre fin à leur amour devenu coupable.

Je vous dirai plus. Tout est changé entre nous ; il faut nécessairement que votre cœur
change. Julie de Wolmar n’est plus votre ancienne Julie ; la révolution de vos sentiments
pour elle est inévitable, et il ne vous reste que le choix de faire honneur de ce changement
au vice ou à la vertu. J’ai dans la mémoire un passage d’un auteur que vous ne récuserez 1
5 pas : « L’amour, dit-il, est privé de son plus grand charme quand l’honnêteté l’abandonne.
Pour en sentir tout le prix, il faut que le cœur s’y complaise et qu’il nous élève en élevant
l’objet aimé. Ôtez l’idée de la perfection, vous ôtez l’enthousiasme ; ôtez l’estime, et l’amour
n’est plus rien. Comment une femme honorera-t-elle un homme qu’elle doit mépriser ?
Comment pourra-t-il honorer lui-même celle qui n’a pas craint de s’abandonner à un vil
10 corrupteur ? Ainsi bientôt ils se mépriseront mutuellement. L’amour, ce sentiment céleste, ne
sera plus pour eux qu’un honteux commerce2. Ils auront perdu l’honneur, et n’auront point
trouvé la félicité ». Voilà notre leçon, mon ami ; c’est vous qui l’avez dictée. Jamais nos
cœurs s’aimèrent-ils plus délicieusement, et jamais l’honnêteté leur fut-elle aussi chère que
dans le temps heureux où cette lettre fût écrite ? Voyez donc à quoi nous mèneraient
15 aujourd’hui de coupables feux nourris aux dépens des plus doux transports qui ravissent
l’âme ! L’horreur du vice, qui nous est si naturelle à tous deux s’étendrait bientôt sur le
complice de nos fautes ; nous nous haïrions pour nous être trop aimés, et l’amour
s’éteindrait dans les remords. Ne vaut-il pas mieux épurer un sentiment si cher pour le
rendre durable ? Ne vaut-il pas mieux en conserver au moins ce qui peut s’accorder avec
20 l’innocence ? N’est-ce pas conserver tout ce qu’il eut de plus charmant ? Oui, mon bon et
digne ami, pour nous aimer toujours il faut renoncer l’un à l’autre. Oublions tout le reste, et
soyez l’amant de mon âme. Cette idée est si douce qu’elle console de tout.

Jean-Jacques Rousseau Julie ou la Nouvelle Héloïse (1761)

1
Récuserez : rejetterez
2
Commerce : relation
Problématique : Dans cette lettre, comment la détermination de Julie offre-t-elle une
réflexion sur la conception de l’amour et l’importance de la morale ?

Plan détaillé :
I) La volonté de Julie de convaincre Saint-Preux de l’impossibilité de leur
amour
a) Observez l’usage des pronoms personnels dans la lettre. En quoi renforcent-ils la
dimension argumentative du texte ?

b) Observez l’emploi des temps verbaux. Comment Julie marque-t-elle une séparation
entre le passé et le présent ?

c) De quelle manière Julie se désigne-t-elle dans la lettre ? Sur quel événement met-
elle ainsi l’accent ?

d) Pour quelle raison Julie invoque-t-elle la citation d’un auteur pour défendre sa
conception de l’amour ?

e) Quel est l’effet produit par l’emploi répété de l’impératif ainsi que de phrases
exclamatives et interrogatives ?

II) La lettre de Julie fait apparaître une vision très pure de l’amour
a) Comment Julie associe-t-elle l’amour aux valeurs morales ?

b) Quelles sont les images antithétiques employées par Julie pour défendre sa vision
d’un amour pur ?

c) Selon la jeune femme, quels risques semblent peser sur elle et Saint-Preux ?

d) Observez l’emploi des verbes au futur et au conditionnel. Comment l’amour se

métamorphoserait-il selon Julie ?