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POINT RECHERCHE : La chimie des gaz rares

On connait plus de 20 millions de molécules. Cette profusion est une conséquence de la capacité des atomes à se
lier et à former des molécules stables. De ce point de vue, les gaz rares (nommés aussi nobles ou inertes)
constituent un défi. Après leur découverte, les chimistes se sont vites aperçus de leur caractère inerte : il était
impossible de former des molécules. Néanmoins, dès 1933, le chimiste Linus Pauling émit l’hypothèse que dans
certains cas, des liaisons faisant intervenir des éléments inertes sont possibles. En 1962, les travaux de Neil Barlett
et de ses collègues canadiens ont débouché sur la synthèse de l’hexafluoroplatinate de xénon (composé ionique).
C’était
L A leGR premier
ANDE composéQUEformé avec
T Eun DE
élément inerte,
LA 05
le xénon. Très rapidement, les chimistes ont obtenu de
STABILITE
nombreuses molécules contenant du xénon, du krypton ou du radon. Presque toutes ses molécules (XeF 2, KrF2,
RnF2, …) reposent sur la forte électronégativité* du fluor). Vers 2002, l’équipe de Räsänen a obtenu les molécules
HXeCCH et HXeCCXeH par irradiation d’acétylène (C 2H2) mélangé à du xénon solide, à basse température
1. Le cas des gaz rares
(inférieure à -112°C). Le domaine de la chimie des éléments inertes a pris son essor. Les chimistes ont découvert
de nombreuses liaisons covalentes telles les liaisons entre l’hydrogène et un élément inerte. De nombreuses
questions restent à explorer. L’hélium et le néon sont actuellement du monde moléculaire, mais pour combien de
1.1. ? Quant
temps encore Configuration électronique
à la question des applications, il s’agira de savoir à quoi ces nouvelles molécules peuvent
servir.
Nous l’avons vu dans un chapitre précédent que les gaz rares sont les éléments de la colonne
* L'électronégativité est la capacité d'un noyau à attirer un électron de valence.
XVIII de la classification périodique. On trouve entre autres les éléments suivants avec leur
Auteur :
configuration électronique :
Robert Berny GERBER professeur au département de chimie de l’université de Californie à Irvine

2 He : 1s ;
2 Pour la Science, Mars 2006
- Elément hélium

- Elément néon 10 Ne : 1s2 2s2 2p6 ;

- Elément argon 18 Ar : 1s2 2s2 2p6 3s2 3p6.
On constate facilement que toutes les couches électroniques de ces éléments contiennent le
maximum d’électrons permis. En particulier leur couche électronique de valence est saturée.
1.2. Stabilité un caractère de famille
Les gaz rares existent sous la forme de gaz monoatomique. Ils présentent tous une très grande
stabilité chimique c’est-à-dire qu’ils :
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
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-
-
-
ne forment pas d’ions monoatomiques ;
- ne participent pas à la formation de molécules.
Cette grande stabilité est liée au fait que leur couche de valence est saturée.
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La quête de la stabilité

Xenon
tetrafluoride
 Que se passe-t-il alors pour les autres atomes ?
1.3. Règles de stabilité
Les atomes n’appartenant pas à la famille des gaz rares possèdent une couche électronique de
valence non saturée, ils ne sont donc pas stables. Comment alors acquérir cette fameuse
stabilité ?

Au cours d’une transformation chimique, les atomes tendent à obtenir la


Règle

même configuration électronique que celle du gaz rare le plus proche. Ils
cherchent donc à obtenir une couche électronique de valence saturée.

2. Les ions monoatomiques


2.1. Rappels

Un ion monoatomique dérive d’un atome ayant perdu ou gagné un ou


Définitio

plusieurs électrons. Lors de la formation d’un ion monoatomique, la


composition du noyau est inchangée.
n

 Comment peut-on déterminer la formule de l’ion monoatomique à partir de la configuration


électronique d’un atome ?

2.2. Formation d’un ion monoatomique


Nous travaillerons sur quelques exemples dans un premier temps puis dans un second temps
nous tirerons une règle.
 Elément lithium :
L’atome de lithium (Z = 3) a pour configuration électronique : 1s2 2s1. Le gaz rare le plus proche
est l’hélium qui a pour configuration électronique 1s 2. Pour acquérir cette configuration
électronique l’atome de lithium va devoir perdre l’électron de la sous-couche 2s. De ce fait, il va
former un cation portant une charge positive de formule Li+ (ion lithium).

 Elément Magnésium :
L’atome de magnésium (Z = 12) a pour configuration électronique : 1s2 2s2 2p6 3s2. Le gaz rare le
plus proche est le néon qui a pour configuration électronique 1s 2 2s2 2p6. Pour acquérir cette
configuration électronique l’atome de magnésium va devoir perdre les deux électrons de la sous-
couche 3s. De ce fait, il va former un cation portant deux charges positives de formule Mg 2+ (ion
magnésium).

 Elément Fluor :
L’atome de fluor (Z = 9) a pour configuration électronique : 1s2 2s2 2p5. Le gaz rare le plus proche
est le néon qui a pour configuration électronique 1s 2 2s2 2p6. Pour acquérir cette configuration
électronique l’atome de fluor va devoir gagner un électron dans la sous-couche 2p. De ce fait, il va
former un anion portant une charge négative de formule F - (ion fluorure).
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 Elément soufre :
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L’atome de soufre (Z = 16) a pour configuration électronique : 1s2 2s2 2p6 3s2 3p4.Le gaz rare le
plus proche est l’argon qui a pour configuration électronique 1s 2 2s2 2p6 3s2 3p6. Pour acquérir
La quête de la stabilité
cette configuration électronique l’atome de soufre va devoir gagner deux électrons dans la sous-
couche 3p. De ce fait, il va former un anion portant deux charges négatives de formule S 2- (ion
sulfure).

Pour généraliser, on peut imaginer le tableau périodique comme un jeu de l’oie.

- Si en partant de la case contenant l’atome choisi, on doit se déplacer vers la gauche, on


obtiendra un anion, le nombre de case dont il a fallu se déplacer pour arriver à la case du
gaz rare détermine le nombre de charge négative.
- Dans le cas où l’on se déplace vers la droite, on obtiendra un cation et le nombre case pour
arriver au gaz rare indiquera le nombre charge positive.

Remarques :

- Les atomes, des éléments d’une même famille, forment des ions monoatomiques de même
charge.
- Les atomes des éléments appartenant aux colonnes XIV et XV ne forment pas d’ions
monoatomiques dans les conditions usuelles.
- Seuls les atomes des colonnes I et II forment des cations.
- Le nom d’un cation découle directement du nom de l’atome correspondant :
atome de bore → ion bore
- Le nom des anions est spécifique.
atome d’oxygène → ion oxyde

tableau récapitulatif des ions monoatomiques


colonne
période I II … … XIII XIV XV XVI XVII XVIII

H+
ion
1
hydrogène
*

Li+ Be2+ B3+ O2- F-


2 ion ion ion bore ion ion
lithium béryllium oxyde fluorure
Na+ Mg2+ Al3+ S2- Cl-
ion ion ion ion Ion
3
sodium magnésiu aluminiu sulfure chlorur
m m e
ions cation cation cation anion anion
* L’ion hydrogène porte aussi le nom d’hydron.

3. Les molécules
3.1. Liaison covalente et doublet non-liant

Une liaison covalente est la mise en commun de deux électrons de valence


Définitio

appartenant à deux atomes distincts. On représente cette liaison covalente


n

par un tiret entre les deux atomes considérés.


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A1 ▬ A2
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 Les deux électrons de la liaison covalente entre les atomes A1 et A2 appartiennent aussi
bien à l’atome A1 qu’à l’atome A2.
La quête de la stabilité
d'électrons entre deux atomes, idée
développée aussi par le physico-chimiste
américain Irving Langmuir.
De 1912 à sa mort, il fut professeur de
chimie physique à l'Université de
Les électrons de valence d’un atome ne participant pas aux Californie à Berkeley.
liaisons covalentes sont répartis en doublets d’électrons (2 C'est lui qui, en 1926, proposa le terme
« photon » pour le quantum d'énergie
électrons) appelés doublets non-liants.
rayonnante introduit par Einstein en 1905.
Pour un atome donné, un doublet non-liant est représenté
par un tiret placé sur l’atome.

A1 ▬ A2
 Comment déterminer le nombre de liaison covalente d’un
atome ?
Dans ce cas, les atomes ne peuvent qu’augmenter leur
d’électrons puisqu’ils récupèrent les électrons des atomes
entrant dans la liaison. Cette méthode s’applique pour les
atomes des colonnes XIV à XVII en plus de l’atome
d’hydrogène. Il suffit de déterminer le nombre d’électrons
manquant pour arriver au gaz rare le plus proche (on
déplace uniquement vers la droite).
Prenons l’exemple de l’oxygène, il a pour configuration
électronique 1s2 2s2 2p4 . Le gaz rare le plus proche est le
néon de configuration électronique 1s2 2s2 2p6. Il faut donc
se déplacer de deux cases vers la droite, l’atome d’oxygène
formera 2 liaisons covalentes. Il a donc deux électrons de la sous couche 2p engagés dans les
liaisons covalentes, il reste donc 4 électrons dans la couche n = 2. Ces quatre électrons vont donc
former 2 doublets non-liants.
3.2. Formule de Lewis
Le schéma de Lewis d’une molécule est une modélisation de
l’enchainement des atomes, représentés par leur symbole, dans la molécule
avec leur liaison covalente et les doublets non-liants.

Exemple :
La molécule d’ammoniac a pour formule NH3. Il y a :
- Un atome d’azote de configuration électronique : 1s2 2s2 2p3 ;
- Trois atomes d’hydrogène de configuration électronique : 1s1 de chacun.
L’atome d’azote se trouve à trois cases du gaz rare néon, il va donc former 3 liaisons covalentes. Il
va partager ces électrons de valence avec les atomes d’hydrogène. On obtient dans un premier
temps :
H▬ N ▬H

H
Or sur cette représentation, on peut constater que l’atome d’azote est entouré par 3 liaisons
covalentes donc par 6 électrons. Dans la couche n = 2, l’atome d’azote apporte 5 électrons
auxquels il faut ajouter les 3 électrons apportés par les trois atomes d’hydrogène. Au total, il y a 8
électrons autour de l’atome d’azote, par conséquent il en manque deux qui n’interviennent pas
dans les liaisons covalentes, il forme alors un doublet non-liant sur l’atome d’azote.
On a donc finalement ce que l’on nomme la représentation de Lewis : H▬ N ▬H

H
Remarque :
La représentation de Lewis est une représentation à plat des atomes et de leurs liaisons dans la
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molécule. Il n’y a donc aucune information sur la répartition des atomes dans l’espace. Les
molécules sont généralement tridimensionnelles.
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La quête de la stabilité
molécule d'ammoniac

3.3. Energie de liaison


En se liant par une liaison covalente, deux atomes gagnent en stabilité énergétique cela se traduit
par le fait que la molécule est plus stable que les atomes qui la constituent.

E (J)
L’énergie de liaison entre deux A1 A2
atomes, A1 et A2, est l’énergie
nécessaire pour rompre cette
Définition

liaison. L’énergie s’exprime en énergie de


joule (J). liaison
A1 ▬ A2
A1 A2

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La quête de la stabilité

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