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jésuites

é d i t o r i a l

L’ ouverture des cinquante ans du concile Vatican II nous aide à


relire l’année écoulée sous les signes « des joies et des espoirs »
des hommes de ce temps, dans le dynamisme d’une année de la foi
qui nous invite tant à la dire qu’à la ressourcer, personnellement et
en Église.

Les pages de ce hors-série n’évoquent pas directement ces thèmes


mais chacun y reconnaîtra des traces de ce qu’a écrit Benoît XVI
pour l’ouverture de l’année de la foi : « La foi grandit quand elle est
vécue comme expérience d’un amour reçu et quand elle est com-
muniquée comme expérience de grâce et de joie ».

Espérons ainsi que foi, espérance, charité, joie aient pu grandir


quelque peu autour des lieux et des personnes évoqués ici, et au-
jourd’hui encore grandissent chez celles et ceux qui lisent ces pages.
C’est bien là l’intérêt de nous écrire ! Qu’en lisant nous puissions,
dit Polanco, secrétaire d’Ignace, en tirer une aide pour « mieux faire
face aux plus grands besoins » et pour « rendre grâce davantage et
pour davantage de personnes ».

Vous tous qui lisez ce numéro – compagnons jésuites, membres


de nos familles, amis, partenaires de la mission d’aujourd’hui ou
d’hier, bienfaiteurs… – recevez-le comme présent pour l’action de
grâce de Noël. C’est bien le chemin de l’Enfant, Dieu qui vient aux
hommes, que nous cherchons à suivre dans les communautés, les
œuvres, les relations avec les uns et les autres.

Bonne entrée dans la nouvelle année à chacune et chacun de vous !

Jean-Yves Grenet, sj
Provincial des jésuites de la Province de France

–­­1–
jésuites France

À propos des communautés jésuites


dans la Province
Des changements de communauté se produisent dans la Province
de France, des évolutions se cherchent

U
ne communauté jé- Aix-Marseille
suite est un corps Opération AMDG :
vivant : un jour elle Aix-Marseille Discernement Gagnant !
est ouverte, puis elle se trans-
Trois communautés bien typées (résidence, monde populaire,
forme régulièrement par mo- au sein d’une œuvre) mais deux supérieurs. Deux grandes
dification de ses membres ou villes mais un projet de métropole unique. Trois œuvres
de ses lignes apostoliques, et jésuites (établissement scolaire, centre pour étudiants en
enfin elle peut être fermée. médecine, centre culturel) mais une seule famille ignatienne.
Dans notre Province, cette Deux diocèses dans un département, de multiples apostolats
mais un regard fixé sur Dieu seul. La question est « simple » :
année, ces diverses étapes
quel type et quel style de communauté aimerions-nous voir
sont représentées. à Aix-Marseille dans les six ans, en lien avec quels terrains
apostoliques prioritaires ?
n Mouvements et Trois réunions d’ici avril sont prévues pour discerner et prendre
transformations les premières décisions, en profitant de la venue de la consulte
Une création se cherche : la du provincial les 11 et 12 avril 2013.
communauté de Saint-Denis Thierry Lamboley, sj et Pascal Sevez, sj
Saint-Ouen envisage un dé-
placement et une extension
de Saint-Ouen vers La Plaine maison provinciale à la rue de fait nous poser la question
Saint-Denis conduisant dans Grenelle à Paris. Ailleurs, au de telle ou telle communauté
quelques mois à une nouvelle Maghreb, le discernement sur plus volontairement consti-
communauté. les conditions les plus favo- tuée de membres de nos deux
rables à une mission ouverte Provinces.
Des transformations s’opè- à des jésuites de divers coins
rent : le noviciat à la rue Sala du monde conduit à envisa- Des communautés ferment
en septembre 2011 ; cette ger un transfert de la région à également, ainsi ces derniers
année, une unité médicali- la Province du Proche-Orient. mois pour Cergy, Paris-rue
sée dans la communauté de Dans la même ligne, le rap- Beudant et Paris-rue Mon-
Vanves ; en même temps, prochement en cours avec la sieur. De même, notre départ
l’arrivée de membres de la Province de Belgique Méri- de Nancy est annoncé pour
rue Monsieur mais aussi de la dionale et Luxembourg nous l’été 2013. Tout à la fois

–2–
Lille
mélange d’espoir confiant
pour ce que ces départs per- Jadis, un collège de jésuites signalait la présence d’une com-
munauté. À Lille, l’Icam tient désormais ce rôle, d’où le projet
mettront ailleurs, et de souf-
actuellement étudié par les compagnons du boulevard Mon-
france devant l’abandon de tebello de s’en rapprocher géographiquement pour gagner
lieux chargés d’une histoire en visibilité. Des locaux partagés avec l’Icam et les autres
riche en créativité comme en membres de la famille ignatienne, impliquée dans la réflexion,
relations, devant l’arrêt de permettront d’harmoniser les apostolats des uns et des autres :
collaborations pourtant por- service du diocèse, propositions spirituelles, initiatives liant
justice et foi où s’engageraient des élèves ingénieurs, etc. Pour
teuses d’avenir ou habitées
cette réflexion, comptons sur le soutien enthousiaste des deux
encore de tant d’attentes, ces trentenaires arrivés en septembre, Pierre Molinié et Sébastien
fermetures sont aussi occa- Carcelle. Affaire à suivre !
sion d’action de grâce pour Philippe Robert, sj
ce qui a été vécu dans ces
lieux, pour les fruits qui y
ont mûri et qui y ont nourri dans une intériorité facilitant vie jésuite à des plus jeunes.
de nombreux compagnons et la contemplation, à mieux Ces pages et d’autres articles de
autres personnes. permettre à ses membres de ce numéro donnent un avant-
« vivre l’Évangile ensemble ». goût de ce qui se cherche en
n Mieux comprendre Il s’agit encore de chercher seulement quelques endroits.
la mission un « contact direct avec les Que les lecteurs n’hésitent pas
Quelles que soient ces don- pauvres », de vouloir vivre à interroger les communau-
nées, toute communauté est la mission dans une relation tés jésuites de leur entourage,
marquée par la volonté de étroite avec l’ensemble de la à frapper à leur porte pour
toujours mieux recevoir les Province et avec, en parti- mieux découvrir ce qui habite
orientations des dernières culier, la famille ignatienne, les hommes qui les consti-
congrégations générales et les de mieux s’insérer dans les tuent, à leur exprimer aussi
invitations du Père Général. contextes locaux (ecclésiaux leurs attentes, rêves, proposi-
Il s’agit de chercher à mieux comme sociaux), de porter tions !
se comprendre comme « mis- au cœur une attention parti-
sion », à mieux la recevoir culière à la proposition de la Jean-Yves Grenet, sj

Toulouse
Que pourrait être une présence apostolique plus lisible ? Après le regroupement récent en une
seule communauté, rue Monplaisir et à Bagatelle, nous voici embarqués dans un nouveau
discernement ! Nous souhaitons le vivre en lien étroit avec la famille ignatienne, en partant
des urgences apostoliques perçues, de nos missions actuelles et de notre histoire à Toulouse :
présence instituée au monde des jeunes (Le Caousou, Icam, Purpan), pastorale étudiante (au-
môneries, RJI, MT, équipes Magis), monde populaire (Bagatelle) et apostolat social, apostolat
spirituel avec les Coteaux Païs, l’Apostolat de la prière et Notre Dame du Web. Audace aposto-
lique, vision partagée, réalisme : que saint Ignace nous soit en aide !
Paul Legavre, sj

–­­3–
jésuites France

LOYOLA XXI
« Va, illumine le cœur du monde »
Du 25 au 28 octobre 2012, à Lourdes, a eu lieu le deuxième
rassemblement du Réseau Ignace de Loyola-éducation, Loyola XXI

3
000 personnes étaient même parler de surprise : distribuaient badge et sac du
mobilisées pour vivre l’envie chez nos élèves de pèlerin à l’arrivée des diffé-
cet événement, dont participer à Loyola XXI. Nous rents groupes, j’ai pu obser-
plus de 1700 élèves des 14 avons assisté, assez médusés, ver l’état d’esprit des uns et
établissements sous tutelle à ce mouvement qui peut des autres : souvent joyeux
jésuite en France. Les secrets naître dans un groupe. Au et prêts à rentrer dans la pro-
de la réussite furent l’envie - début, on ne voit rien venir, position, ce n’était pourtant
Ignace parlerait de désir ! - et puis petit à petit, certains pas le cas de tous, fatigués
la capacité de chacun et de signes indiquent que l’adhé- par le voyage sûrement ! Et
chacune à donner pour et à sion à une proposition naît et pourtant, nous avons pu voir
Loyola XXI le meilleur de lui- au final, l’enthousiasme est et sentir le désir, la généro-
même. là, concrètement, un enthou- sité et au final l’ouverture à
siasme tel qu’à Marseille, l’autre avec lesquels jeunes
n Désir et nous avons été obligés de et adultes sont entrés dans la
ouverture refuser des inscriptions ! danse et ont vécu ce rassem-
Ce fut peut-être une de nos Le mouvement fut le même blement !
premières joies, on pourrait à Lourdes. Étant de ceux qui
Le spectacle sur le tour du
monde de saint François-
Xavier et sainte Bernadette
fut un pur moment de bon-
heur qui rendit palpable cette
dynamique, avec une men-
tion toute spéciale aux plus
jeunes acteurs, tous élèves
de primaire de l’école de
Provence, qui nous ont en-
chantés avec un tableau ma-
gnifique de l’Afrique. Faire
réseau c’est aussi cela : inté-
L’Afrique représentée par les enfants de l’école de Provence

–4–
grer toutes les dimensions que leurs jeunes confrères 14 établissements du réseau
de sa réalité, du primaire à vivent. ont travaillé pendant deux
l’enseignement supérieur. ans a été adopté à l’unani-
n De nombreux mité par l’assemblée générale
n Donner le jésuites d’Ignace de Loyola–Éduca-
meilleur de soi-même Enfin, on ne peut oublier tion qui s’est tenue pendant
Tous ceux qui ont participé à la Compagnie de Jésus et le rassemblement. Elle a éga-
Loyola XXI, qui ont travaillé tous les jésuites avec les- lement lancé un troisième
pour que ce rassemblement quels nous collaborons au chantier de travail : après la
puisse exister, pour qu’il soit quotidien. Ils sont venus mise en œuvre des caracté-
réussi, pour que cela soit un nombreux à Loyola XXI : 52 ristiques d’un établissement
temps de fête, de rencontres, scolastiques et bien une tren- jésuite et le choix d’un projet
de choix, de prières et de joie taine de pères. Membres de d’animation pastorale, nous
pourront vous dire qu’ils y ont l’équipe centrale, animateurs sommes invités à réfléchir à
mis le meilleur d’eux-mêmes : ou co-animateurs d’ateliers l’ouverture de nos établisse-
correspondants locaux des 14 et de spectacles, metteurs en ments à la jeunesse défavo-
établissements, animateurs des scène, encadrants des jeunes, risée, notamment celle qui ne
ateliers proposés à Loyola XXI célébrants, ils sont aumô- trouve pas spontanément sa
(plus de 50 au total), orga- niers, chefs d’établissement, place dans le système éduca-
nisateurs des activités pour professeurs, membres de CA tif français.
les jeunes, petites mains qui dans notre réseau. Cette col-
travaillent dans l’ombre. laboration jésuites/laïcs ins- ‘Va, illumine le cœur du
crite dans la tradition de la monde’, tel était le thème
Les professeurs présents à Compagnie de Jésus est, à du rassemblement pour les
Loyola XXI n’ont pas été en mon sens, un des secrets de jeunes à Loyola XXI. Avec
reste. Ils ont travaillé en- la vitalité de notre réseau. eux, à leur côté, découvrons
semble pendant deux jours ensemble de nouvelles fa-
afin de témoigner de leurs n Les chantiers çons d’être au monde, à la
expériences, échanger sur à venir suite d’Ignace.
leur pratique, réfléchir sur Désirer et donner le meil- Alexandra Boissé
une manière de faire en lien leur de soi-même, c’est aussi APS, école de Provence,
avec la pédagogie jésuite. continuer à relire, réfléchir, Marseille.
Les anciens élèves étaient innover. Un projet d’anima- Équipe centrale Loyola XXI
aussi présents, attentifs à ce tion pastorale sur lequel les Équipe nationale de tutelle

–­­5– Flash mob sur le parvis de la basilique du Rosaire


jésuites France

Prospection et initiatives pour


l’apostolat de la jeunesse
Quoi de neuf dans la Province pour l’apostolat de la jeunesse ?
Christian Motsch, chargé de développer et créer de nouvelles
propositions, nous répond

n Un axe de nous mettre en synergie, une proximité avec les jeunes,


mobilisation expérimentation qui met en dont parle le Père Général

E
n cherchant un projet lumière les défis de la Pro- dans une de ses lettres, peut
fédérateur, nous pour- vince. Saurons-nous aller aider à prendre les grandes
rions répondre, trop jusque-là ? décisions. À l’inverse, les
rapidement, les JMJ à Rio, jeunes responsables avec les-
ou mieux formulé, le ren- n Vivre une proximi- quels nous travaillons, nous
dez-vous de la Province aux té avec les jeunes aident aussi, sans le savoir, à
prochaines Journées mon- “Le défi est d’abord d’aider décloisonner entre nous nos
diales de la jeunesse. Ce sera les jeunes à devenir sen- propres positions ecclésio-
l’occasion d’une expérience sibles aux forces et mouve- logiques voire idéologiques
de synergie entre nous, en ments merveilleux que Dieu, et à dépasser les clivages de
participant de manière consé- d’autres personnes, la réa- sensibilités. Avec eux, che-
quente aux JMJ à Rio et en lité, leur propre générosité min faisant, nous pouvons
rassemblant en France à et leur propre vie font naître dépasser ceux qui reviennent
Lalouvesc aux mêmes dates dans leurs cœurs”. Vivre cette souvent : médiations longues
et sous le même thème, des
jeunes de tous les lieux où
nous sommes engagés, y
compris des lycéens ! Certes
oui, mais cela ne suffit pas,
ou nous n’irions pas assez en
profondeur dans ce que cela
implique. Il ne s’agit pas sim-
plement de faire mieux que
les autres fois, mais de choisir
pour cette nouvelle année un
axe de mobilisation pour tout
l’apostolat auprès des jeunes, Lors de la rencontre des 18 jésuites et leurs 25 jeunes associés à Lalouvesc en juillet
une occasion (un kaïros) de 2012, le matin, initiation aux Exercices dans la joie et la bonne humeur

–6–
ou courtes, priorité aux
catholiques confessants
ou au plus grand nombre…
Ils vivent comme un hon-
neur de partager avec
nous le sens de la mission
et de connaître davan-
tage la diversité de notre
apostolat. Nous sommes
nous-mêmes différents
entre nous lorsque nous
sommes avec eux ; nous
nous comportons de
Sur les lignes de crête… du discernement au grand air
manière plus fraternelle.
Les jésuites portugais nous
ont partagé un pareil sen- Mgr Beau. À Paris, elle serait n Appelons-les !
timent lors de notre visite en lien avec l’église Saint- Je retiens avec bonheur ces
des Centres universitaires à Ignace, le Centre Sèvres, les expressions entendues de la
Lisbonne, Porto et Coimbra. Centres Laennec et Saint- bouche de « jeunes associés »
Guillaume, l’équipe aposto- garçons et filles participant
n Une plate-forme lique d’Assas, le RJI, etc., un à l’élaboration d’une vision
de la jeunesse projet apostolique porté par de l’apostolat de la jeunesse
D’où l’importance d’un style une communauté de compa- pour les années à venir, en
« maison » en lien avec les gnons se rendant disponibles parlant avec enthousiasme
institutions porteuses, per- pour les jeunes. de la Compagnie, en un mer-
mettant un accueil, un dyna- veilleux « nous » : « Nous,
misme, une responsabilisa- Deux perspectives la Compagnie… » Appe-
tion, un sentiment d’appar- d’avenir lons-les. Cherchons à
tenance, une familiarité nous associer avec eux,
• La première : Ne cherchons
mutuelle. Il faut des lieux, à partir d’un cercle de
pas uniquement à articuler des
habités, vivants, heureux, projets existants, mais lançons- proches, pour initier,
nourrissants, créatifs et ac- nous dans un projet fédérateur choisir, développer des
compagnants. Des lieux axés d’envergure qui entraînera projets. Ils seront eux-
sur les autres lieux de vie, de la Province. mêmes appelants. Nos
réseaux et d’institutions, des • La seconde : L’apostolat de la premiers cercles, avec
jésuites présents et à l’aise, en jeunesse ne pourra se déployer nous, s’ouvriront sur un
particulier des jeunes jésuites que s’il associe davantage de second, un troisième, etc.
se sentant là bien chez eux. jeunes adultes à sa mission en où le jeune reste le pre-
leur confiant de réelles respon-
C’est ainsi que pourrait naître mier acteur de l’évangé-
sabilités. En les envoyant en
une sorte de « plate-forme » mission et en les accompagnant, lisation de sa génération.
de la jeunesse, « une structure nous les aiderons à « libérer leur
innovante d’accompagne- ADN apostolique ». Christian Motsch, sj
ment » selon la formule de

–­­7–
jésuites France

Les JMJ de juillet 2013

« Allez, de toutes les nations faites des disciples ! ». Cette finale


de saint Matthieu a été retenue par le pape Benoît XVI comme fil
conducteur des JMJ de Rio (23-28 juillet 2013)

A
l’origine de voriser l’été prochain la
notre famille rencontre de jeunes eu-
religieuse, ce ropéens de nos réseaux
qui a été vécu par saint jésuites.
Ignace, saint François-
Xavier et les premiers Et du côté du Brésil ?
compagnons puise à la Les 2 200 pèlerins du
source d’une commu- réseau ignacien de 50
nauté internationale. pays sont attendus le
Le feu de l’Esprit Saint 12 juillet à Salvador
Hubert Hirrien et trois membres du noyau de Magis Brésil,
donné par Jésus à ses à Rio le 19 octobre 2012 de Bahia, lieu d’arrivée
disciples pour qu’ils le des jésuites portugais
portent en tout lieu est bien des collèges (25-28 octobre en 1555. Les 250 Français y
ce que nous espérons de nou- à Lourdes) a permis d’invi- formeront la troisième délé-
veau pour les jeunes apôtres ter les centaines de lycéens gation, juste après les Brési-
du XXIe siècle. présents ainsi que leurs ani- liens (450) et les Américains
mateurs en pastorale scolaire du nord (350). Les institu-
n Un rassemblement (APS). Avec l’aide du MEJ, un tions liées à la Compagnie
Magis ? Non, deux camp d’une semaine accueil- (Icam, centres en médecine,
Comme pour les JMJ de Syd- lera les 15-18 ans auprès de prépas et BTS) se mobilisent,
ney en 2008, le RJI prépare la basilique de saint Jean- tout comme huit diocèses1 et
un festival au village de La- François Régis. À l’instar de la route Chrétiens en grande
louvesc (http://jmj.rji.fr). 500 ce qui se vivra au Brésil, ce école. Ces nouveaux venus
participants y sont espérés, festival se veut internatio- font confiance au RJI et à
avec pour la première fois nal. Avec les « caminos santo Magis pour permettre à des
des lycéens, en particulier Inacio » d’Espagne et un ras- jeunes de vivre une expé-
ceux des établissements du semblement en Slovaquie, rience fondatrice aussi bien
réseau Ignace de Loyola- Lalouvesc est le troisième dans la rencontre, les expéri-
éducation. Le rassemblement lieu européen choisi pour fa- ments que dans l’intériorité.

–8–
Les jésuites du Brésil
Ils sont 560 répartis en trois
Provinces et une Région
« Amazonie ». Parmi eux,
Bernard Lestienne est le seul
Français. Il vit à Brasilia et
poursuit de multiples actions
dans le domaine social. Mau-
rice Parant, actuellement à
Pau, a passé plus de 40 ans
(de 1962 à 2005) à Recife.
Henri de Ternay, mort en
2012, fut professeur de phi-
losophie à Rio pendant une
dizaine d’années.
Des jésuites brésiliens se
sont formés en France : Cour intérieure du Colégio Santo Inacio de Rio qui accueillera les pèlerins de Magis
Geraldo de Mori, professeur
de théologie à Belo-Hori- pour nos compagnons bré- pour parler du Christ et pour
zonte, un semestre au Centre siliens, ce programme Magis améliorer les conditions so-
Sèvres ; Françys Adão, à Rio (www.magis2013.com) est ciales de leur temps. De quoi
après un 1er cycle de théo- une occasion grandeur na- être éveillés à ce monde nou-
logie à Paris ; Cleiton Santara, ture d’œuvrer ensemble dans veau « où régneront la justice
régent au Collège Saint-Jo-
la perspective d’une Province et la paix ». Il germe déjà.
seph de Reims ; Creômenes
Maciel, en fin de 1er cycle de commune en 2014. Des jé-
théologie à Paris. suites des trois Provinces et Hubert Hirrien, sj
Pedro Rubens qui fit son 2nd de la Région « Amazonie »
cycle de théologie et son participent à leur équipe cen- 1. Aix-en-Provence, Gap,
doctorat à Paris est l’actuel Digne et la province de Tours
trale. Les 80 expériments (de (Blois, Bourges, Chartres,
président de l’université de Orléans et Tours).
la Compagnie à Recife. Il 25 à 30 jeunes) seront répar-
vient d’être élu président de tis dans l’ensemble de cet 2. Le cinéaste portugais
la Fédération internationale immense pays. Manoel de Oliveira lui a consacré
« Parole et silence » (2000).
des universités catholiques
(FIUC) dont le siège est à n Rendus frères par
Paris.
une même mission
Site des jésuites brésiliens : À Lalouvesc ou à Salvador
www.jesuitasbrasil.com de Bahia, les jeunes pèlerins
découvriront deux jésuites Pour aider le RJI à préparer
ces JMJ, et à offrir un tarif
C’est du gagnant-gagnant : missionnaires : saint Jean- solidaire, envoyez votre don
d’une part, le RJI rend service François Régis (1597-1640) par chèque à l’ordre de :
à ces diocèses qui n’ont pas et le Père Antonio Vieira Réseau Jeunesse Ignatien
de contact direct au Brésil et, (1608-1697)2. Nés à 11 ans À l’adresse :
d’autre part, davantage de d’intervalle, ils auraient pu se RJI – Dons JMJ
14, rue d’Assas – 75006 Paris
jeunes bénéficieront de ce que rencontrer. En des contextes
Vous recevrez un reçu fiscal.
nous proposons de spécifique fort différents, ils ont débor-
à l’occasion des JMJ. Enfin, dé d’imagination et d’ardeur

–­­9–
jésuites France

ROSAE, UN BOUQUET !
Le CISED a fait des petits. C’est aujourd’hui un réseau de plusieurs
centres qui viennent en aide aux étudiants, surtout étrangers

A
Saint-Denis (93) la français et ont besoin de ren- nistrative, la difficulté d’a-
Compagnie a pris contrer des personnes pour daptation ou un problème de
l’initiative de créer mettre en pratique leur ap- santé.
en octobre 1999 un premier prentissage de la langue par-
centre de soutien aux étu- lée. D’autres, tout aussi nom- n Une initiative
diants en difficulté, le CISED breux, demandent une aide devenue réseau
(Centre d’initiatives et de ser- en méthodologie pour écrire Le succès rencontré par cette
vice des étudiants de Saint- leur mémoire ou leur thèse. initiative a encouragé la
Denis), en collaboration avec D’autres viennent aussi pour création d’autres centres, en
le diocèse, les Sœurs auxi- un soutien en anglais ou en 2004 au Luxembourg (Lieu
liatrices et la CVX. Très vite, bureautique. Mais de telles d’initiatives et de services des
ce sont surtout des étudiants demandes peuvent receler étudiants au Luxembourg)
étrangers qui ont afflué. Les aussi un appel à l’aide contre et en 2007 à Lyon (Coup de
uns sont venus apprendre le la solitude, la détresse admi- pouce université), à Grenoble
(Coup de pouce étudiants
de Grenoble) et à Marseille
(Escale Marseille étudiants).
Car l’enjeu est de taille : ces
étudiants ont un projet pro-
fessionnel et sont appelés à
tenir une place dans leur
pays. Ils resteront marqués
par la qualité de l’accueil
et de leurs rencontres en
France, et en particulier avec
des chrétiens. Pour beau-
coup, c’est la seule fois de
leur vie qu’ils auront ren-
contré des chrétiens. C’est
pourquoi les quelque 300
bénévoles de ces cinq centres
sont convaincus de travailler
Jean-Noël Gindre (à dr.) avec quelques étudiants du CPU

–10–
Ils étaient plus de 3,7 millions dans le monde en 2009, à
poursuivre leurs études hors de leurs pays1. En 30 ans, le
nombre d’étudiants à l’étranger a quadruplé. Mais qui
sont-ils ? D’où viennent-ils ? Quel cursus suivent-ils ?
Selon une récente étude de l’OCDE les pays européens
attirent quant à eux plus de 38% de l’effectif mondial
des étudiants étrangers. Les Asiatiques sont les plus
nombreux à étudier hors de leurs frontières (52%), suivis
des Européens (24%) et des Africains (10%). Avec plus de
280 000 étudiants étrangers en 2010, la France est la troisième
destination mondiale et la première destination non anglophone.
Le nombre d’étudiants étrangers en France a surtout connu un essor considérable à la fin
des années quatre-vingt-dix.
À l’université, les étudiants étrangers représentent 15,2% des inscrits. Cette proportion
augmente fortement avec le cursus : ils représentent 11% des inscriptions en licence, 19%
en master et 41,3% en doctorat. En 2010, les inscriptions ont progressé de 10,7% dans
les formations d’ingénieurs non universitaires, de 10,5% en classes préparatoires aux
grandes écoles et de 8,1% dans les écoles de commerce. Les étudiants africains se dirigent
davantage vers les disciplines scientifiques et sportives (31,1%) ou économiques (24%).
Les étudiants asiatiques s’orientent plutôt vers des formations artistiques et culturelles,
mais avec une orientation marquée vers le marketing.

pour la paix. Quand on cor- fois par an, depuis 2007, n À chaque centre
rige un mémoire en tête à des représentants des cinq sa personnalité
tête, semaine après semaine, centres se retrouvent alterna- Tous ne se déclarent pas
les occasions sont nom- tivement chez l’un ou l’autre « ignatiens », même s’ils le
breuses de témoigner de ses pour une journée de travail. sont souvent dans la pra-
motivations, qu’elles soient Très vite ils ont constitué tique. Lyon et Saint-Denis,
évangéliques ou humani- une association dénommée en particulier, ont rédigé
taires. ROSAE (Réseau des organisa- ensemble un document qui
tions de soutien et d’accueil leur permet de définir leur
Dès 2007, ces institutions se des étudiants). Trois membres caractère ignatien. Plusieurs
sont regroupées en réseau associés les ont rejoints d’Al- ont reçu le soutien actif de la
pour échanger sur leurs ma- ger (Centre culturel universi- CVX et de plusieurs congré-
nières de procéder, pour sou- taire), de Constantine (Dilou) gations de religieuses igna-
tenir celles qui débutent et, et de Casablanca (Maison tiennes. La Compagnie de
si possible, obtenir ensemble de la jeunesse étudiante). Jésus s’est surtout investie à
des subventions publiques. En échangeant sur les pra- Saint-Denis, Lyon, Luxem-
À l’heure où les pouvoirs tiques, on échange aussi sur bourg. Mais elle l’était depuis
publics sont plutôt à la re- les valeurs et principes qui bien longtemps déjà à Alger
cherche des subventions à nourrissent l’action. C’est et Constantine. Presque tous
supprimer, inutile de préci- pourquoi, tout au long des sont également soutenus par
ser que ce dernier objectif est ans s’est forgé entre tous un leur diocèse. Autrement dit,
loin d’avoir été atteint ! Deux langage commun. chacun a sa personnalité et

–­­11–
Ž
jésuites France

leur pays au mo- parfois inviter à dîner dans


ment de rejoindre la une famille française, au
France. Ils ont déposé même titre que les autres
une demande d’asile étudiants.
en préfecture et at-
tendent la réponse de n De l’accueil
l’OFPRA. La durée à la réciprocité
d’instruction de leur La plupart des centres de
dossier et des diffé- soutien aux étudiants ont
rents recours pos- développé au fil des ans un
sibles atteint géné- réseau de familles qui aiment
ralement 12 à 18 accueillir deux ou trois étu-
mois. Un temps pré- diants pour une soirée ou un
cieux que beau- week-end, particulièrement
coup peuvent mettre à Noël et à Pâques. Ces invi-
à profit pour ap- tations dans l’intimité d’une
son histoire, en fonction du prendre le français. Comme famille « indigène » ne sont
lieu où il se trouve. C’est ils n’ont pas les moyens pas seulement un moyen de
ainsi qu’à Marseille, EME se de payer des cours, le CPU lutter contre la solitude. Elles
préoccupe même de distri- de Lyon puis le CISED de sont autant d’initiations à
buer des colis alimentaires Saint-Denis ont proposé aux la vie en France. Combien
aux étudiants les plus dému- organismes qui les accueillent découvrent étonnés qu’un
nis. À Grenoble, la présence de leur envoyer tous les étu- repas en France, c’est un
de plusieurs universitaires diants qui ont un niveau peu comme une dissertation :
dans l’équipe bénévole per- universitaire. C’est ainsi qu’à on n’y dépose pas tous les
met d’organiser de véritables Lyon, l’an dernier, 90 deman- plats ensemble sur la table ;
cours de soutien par des pro- deurs d’asile fréquentaient il y faut successivement une
fesseurs d’université. assidûment chaque matin le entrée, un développement et
CPU pour suivre des cours une conclusion ! Il n’est pas
n Une ouverture de français. Une belle oc- rare non plus que plusieurs
aux demandeurs casion pour eux de sortir bénévoles se regroupent pour
d’asile un peu du huis-clos de leur organiser une conférence
Depuis deux ans, une préoc- situation pour se frotter au culturelle, une visite ou une
cupation nouvelle est appa- monde étudiant auquel beau- sortie. Mais à l’inverse, les
rue à l’égard des demandeurs coup espèrent s’intégrer si étudiants aiment célébrer
d’asile. Beaucoup menaient leur demande aboutit. Une avec les bénévoles les fêtes
des études universitaires dans occasion aussi de se faire de leur pays et leur faire

–12–
connaître leurs spécialités en février 2011, ils étaient ligieux ne pourra pas rester
culinaires, du Pakistan au plus de cinquante, Iraniens, sans fruit. Les étudiants
Chili, de la Chine au Japon Chinois, Thaïlandais, Brési- en témoignent souvent. Les
ou de l’Iran au Maghreb ! liens, pour assurer bénévo- bénévoles aussi.
lement un service souriant
Ces gestes de réciprocité de du vestiaire pendant tout Jean-Noël Gindre, sj
la part des étudiants peuvent un week-end, parce qu’ils Directeur du CPU
aller jusqu’à organiser eux- savaient que le MCC verse- Lucien Descoffres, sj
mêmes des cours de sou- rait une subvention au CPU Directeur du CISED
tien aux autres étudiants ou en échange de ce service !
même à participer à l’entre- Au fil des jours, ce brassage
1. Source : http://www.rfi.fr/
tien de la maison. Lors du international, intergénéra- france/20111012-sont-etudiants-
congrès du MCC à Lyon, tionnel et aussi interre- etrangers-france du 28/08/2012

Pour en savoir plus

SAINT-DENIS GRENOBLE
CISED CPEG

5, rue de la Liberté – 93200 Saint-Denis 53, place Saint-Bruno – 38000 Grenoble


Mail : cised@free.fr – Site : www.cised.fr Mail : cpeg38@yahoo.fr – Site : www.cpeg38.org

LYON
MARSEILLE
CPU
EME
Coup de pouce université
1, rue Bonald – 69007 Lyon
Mail : cpunivers@yahoo.fr Escale Marseille étudiants
Site : www.cpu-lyon.com 54, rue d’Aix – 13001 Marseille
Mail : escale.etudiants13@gmail.com
Blog : http://eme.blog4ever.com

LUXEMBOURG
LISEL
Lieu d’Initiatives et de Services
des étudiants au Luxembourg
5, av. Marie-Thérèse – 2132 Luxembourg
Mail : info@lisel.lu – Site : www.lisel.lu

–­­13–
jésuites France

Le parcours de formation ROC :


cultiver l’appel de Dieu
Des rencontres par petit groupe permettent un approfondissement
où chacun est invité à vivre en vérité devant Dieu

tive d’un Évangile, traver-


sée de l’histoire de l’Église,
approfondissement personnel
de sa relation à Dieu par la
prière et l’accompagnement
spirituel.

Une telle formation pourrait


s’étendre. Un petit groupe
de douze, trois formateurs…
Ceux qui la suivent ont
compris qu’il s’agissait là de
conditions pour que chacun
découvre sa vocation. Im-
possible d’aller vite, il faut
de l’espace personnel, ces
La chartreuse de Sélignac où ont lieu les rencontres
qualités de relation que per-
met le petit nombre. Décou-

N
és à la demande n Trois piliers vrir le dynamisme qui rend
d’étudiants qui en- Au départ de l’aventure, une acteur de sa vie et l’identifier
traient dans la vie conviction de foi. Le Ressus- comme un fruit de l’Esprit
professionnelle il y a une cité n’en finit pas de passer demande un patient appren-
dizaine d’années, les groupes dans nos vies et de susciter tissage. D’autres formations
ROC proposent à des 20- des manières d’être plus hu- existent. À ROC, les « trois
35 ans de se former pendant maines. L’Église témoigne de piliers » sont des moyens
deux ans, au rythme d’un la source de ces aventures, pour soutenir le désir de se
week-end tous les deux mois, elle les recueille, autant dans laisser mener par l’Esprit de
afin de mieux trouver quelle son histoire qu’en nous li- Dieu qui travaille au cœur de
place choisir dans l’Église et vrant les Écritures. Sont don- l’existence humaine. À l’ho-
la société. nés ainsi les « trois piliers » de rizon se cherche ce qui uni-
la formation : lecture atten- fie ma vie et que je ne peux

–14–
découvrir que chemin faisant Jo Deniau, directrice d’une vie professionnelle ont mani-
avec d’autres. école privée catholique dans festé l’envie de poursuivre ce
le Val d’Oise, est témoin de que leur aumônerie leur avait
n L’Esprit se fait cette alliance incroyable que permis de vivre. Quelques-
connaître noue chacun avec l’Esprit uns, hommes et femmes, ont
L’invitation est donc faite à grâce au travail que permet répondu à l’appel, forts de
chacun, pour être en vérité le partage des expériences et l’expérience que la suite du
devant Dieu, de regarder des questionnements. Christ avec Ignace leur avait
comment il vit son rapport donné, confortés par les défis
aux biens, ses relations, Les jésuites n’ont pas eu à relever de nos situations
la manière dont il occupe l’initiative de ce projet. Par ecclésiales et sociales. Cha-
sa place en société et dans les liens d’amitié que nouent cun y apporte sa réponse et
l’Église. Autant de lieux qui les aventures personnelles et tisse ainsi avec d’autres un
sont des appels à la conver- spirituelles, plusieurs se sont fil de l’Église à venir dans le
sion et le terrain où l’Esprit retrouvés associés. Au départ, monde d’aujourd’hui.
travaille. L’Esprit se fait des étudiants au seuil de leur
connaître dans la manière Patrick Goujon, sj
dont chaque génération de
chrétiens vit le rapport
à l’argent, au pouvoir
gratuit, ce réser-
e terme « vocation » désigne ce donné
et aux autres, comme
autant de carrefours où Lvoir sans cesse renouvelé d’énergie qui
guer l’humanité et l’Église au plus pro
ne cesse d’irri-
fond d’elles-mêmes.
se décide la conversion à été mis plutôt sur la
Pendant longtemps, le projecteur a
l’Évangile. le résultat visible en
figure sociale que ce mot représente,
s le secret : « un tel
quelque sorte d’un processus resté dan
n Une équipe », sous-entendu celle
a la vocation, une telle en a une autre
, je n’en ai pas… ».
diversifiée du prêtre ou de la religieuse, « mais moi
son regard avant tout
« Une pastorale de l’en- Or, ne faut-il pas por ter aujourd’hui
substantif ? Derrière
gendrement » en ont dit sur l’expérience qui se cache dans ce
sorte d’« avoir », on
Christoph Theobald et ce mot, qui désigne couramment une
Marie-Jo Deniau, concep- oublie peut-être qu’il y a de l’« agir ».
t Dieu lui-même qui
teurs de ce parcours, avec Dans l’expérience de la vocation, c’es
pel (vocare) – appe-
Édouard Pousset. Faire est le mystérieux sujet d’un acte d’ap
e à chacun de nous
naître des disciples : pro- lé « vocation ». C’est Lui qui s’adress
re, et d’« obéir »
gramme ambitieux qui comme à un « sujet » capable d’entend
nce élémentaire de
échappe aux formateurs, (du latin : oboedire). (…) Cette expérie
doit certes être for-
on s’en doute. La petite notre foi, l’écoute de l’appel de Dieu,
me un « champ »
équipe, composée d’un mée et développée en Église, mais com
atio ns » en attente
jésuite, d’une mère de fa- qui attend d’être cultivé, ou des « fond
de construction.
mille, Brigitte Freté, res- Christoph Theobald
ponsable de pastorale dans 12-13
Vous avez dit vocation ? Bayard, 2010, p.
un établissement scolaire
des Ursulines, et Marie-

–­­15–
jésuites France

La Compagnie et Vatican II aujourd’hui


Cinquante ans après, le concile Vatican II continue à nous interpeller
et à nous interroger comme le cardinal Martini qui nous a quitté fin août

Le Centre Sèvres et l’anniversaire de Vatican II

L
e Centre Sèvres – Fa- d’hui confrontés. La mati- min proposa un diagnostic
cultés jésuites de Paris née du 13 octobre fut consa- sur les résistances actuelles
a voulu s’associer, du- crée à trois questions qui au concile Vatican II ; puis, à
rant cette année, au 50e anni- illustrent particulièrement le partir de l’expérience vécue
versaire du concile Vatican II. renouveau conciliaire et sa dans son diocèse de Saint-
Il l’a d’abord fait par son col- « réception » ultérieure : l’an- Denis, Mgr Pascal Delannoy
loque de rentrée, qui a réuni nonce de l’Évangile, abor- montra comment ce Concile
plus de 200 participants les dée par Michel Fédou à par- était « une boussole pour
12 et 13 octobre 2012. tir de l’exhortation Evan- vivre et annoncer l’Évangile
gelii nuntiandi de Paul VI ; au sein de la diversité cultu-
n commencement l’engagement dans le dia- relle et religieuse » ; enfin, le
d’un commencement logue œcuménique, dont Frère Émile de Taizé ressaisit
Le thème était : « Vatican II, Anne-Marie Petitjean retraça des intuitions majeures du
le commencement d’un com- les évolutions ; la nouvelle Concile et indiqua les che-
mencement. Envisager l’ave- compréhension du dialogue mins qu’elles ouvrent « pour
nir de l’Église avec le Con- interreligieux, qui fut pré- une Église fidèle à l’avenir ».
cile ». La soirée du 12 oc- sentée par Agnès Kim. Dans Les temps de débat donnèrent
tobre, ouverte par Henri l’après-midi, Laurent Ville- lieu à d’excellentes réactions
Laux, permit de revoir quel-
ques images de l’assemblée
conciliaire à la basilique
Saint-Pierre ; puis Chris-
toph Theobald montra en
quoi Vatican II avait été
un « événement » et déga-
gea la « vision d’avenir »
dont ce Concile était por-
teur, avant de formuler les
questions nouvelles aux-
quelles nous sommes aujour- Lors du colloque de rentrée au Centre Sèvres

–16–
ou questions de la part de s’ouvriront par une interven- Plusieurs enseignants du
l’auditoire ; ces interventions tion de François Boëdec sur le Centre Sèvres, par ailleurs,
attestaient par elles-mêmes thème « Pourquoi Vatican II ? ont écrit ou préparent diverses
comment l’anniversaire du Un événement d’Église pour publications sur le Concile.
Concile peut permettre à notre temps ». Les interven- Les interventions du récent
des chrétiens de formuler tions suivantes aborderont colloque seront elles-mêmes
avec profondeur leurs expé- plusieurs thèmes majeurs du publiées, durant le printemps
riences, leurs difficultés ou Concile : l’Écriture dans la vie 2013, aux Éditions Facul-
leurs attentes. de l’Église (Miguel Roland- tés jésuites de Paris. Il faut
Gosselin) ; le peuple de Dieu espérer que tous ces travaux
n Pour mieux (Christoph Theobald) ; la ré- pourront, à leur manière,
connaître Vatican II forme de la liturgie (Pierre contribuer à la réception d’un
Le Centre Sèvres proposera Faure) ; l’Église dans son concile qui devra encore por-
en outre, en partenariat avec rapport au monde (Alain ter de nombreux fruits.
l’église Saint-Ignace, une sé- Thomasset) ; l’Église catho-
rie de sept conférences sur le lique et « les autres » (Michel Michel Fédou, sj
Concile. Ces conférences, qui Fédou) ; la liberté religieuse
seront données le mercredi (Henri Madelin).
soir du 13 mars au 24 avril,

Martini, ou le Concile
en pratique

L
e cardinal Martini, sj, va bien au-delà des disputes
ne fut pas un Père sur le rapport entre tradition
du Concile – il avait et innovation.
environ 35 ans à l’époque –
mais il en a vécu l’esprit. Martini nous a quittés à la
Avec liberté intérieure, fruit veille des célébrations des
d’une confrontation constan- 50 ans du Concile. Avec la
te avec la Parole, il fut un finesse qui toujours l’a ca- Le cardinal Danneels (à g.) et le cardinal Martini
pasteur attentif à lire les ractérisé, en véritable maître,
« signes des temps », à saisir il ne nous laisse pas de re- flamme de l’amour ? ». Cher-
les indices d’espérance ; il fut cettes : il nous confie la Pa- cher aujourd’hui, ensemble, à
maître de dialogue avec les role comme guide et il nous y répondre c’est la meilleure
non croyants et les membres pose des questions, comme façon de célébrer autant le
d’autres confessions chré- dans son dernier entre- Concile que la mémoire de
tiennes ou d’autres religions. tien : « Je vois dans l’Église Martini.
Son action pastorale mani- aujourd’hui tellement de
feste une manière prophé- cendres sur la braise… Com- Giacomo Costa, sj
tique d’envisager la présence ment peut-on libérer la braise Directeur
de l’Église dans la société, qui de la cendre pour raviver la d’Aggiornamenti Sociali

–­­17–
jésuites France

Laïcs et jésuites
à Rome
Du 12 au 16 juillet 2012 à Rome, une
soixantaine de laïcs et huit jésuites
ont (re)découvert les sources de la
Compagnie de Jésus et de l’Église

Dans la chapelle de la Curie décorée par le Père Marko Ivan Rupnik, sj

A
près Loyola et Ja- réseau de communication à La visite des locaux d’accueil
vier les deux années travers le monde entier. des réfugiés (JRS), accompa-
passées, il s’agissait gnée du témoignage émou-
de s’enraciner dans l’his- Nous avons visité la Grégori- vant de Fabiana, nous a rap-
toire. Les participants étaient enne, où nous avons été très pelé que même si les jésuites
des responsables ou acteurs bien accueillis par son Recteur ont eu la réputation de savoir
d’institutions ou d’œuvres où le Père François-Xavier Du- former des élites, ils ont tou-
se vit un partenariat avec les mortier. Nous avons apprécié jours aussi été au service des
jésuites. le témoignage du Père jésuite plus pauvres.
espagnol José-Luis Ladaria
n Nombreuses qui nous a parlé de la Con- Nous n’oublions pas les
visites grégation pour la doctrine de nombreuses visites d’édifices
La chambre-bureau de saint la foi, chargée des problèmes religieux baroques comme
Ignace, dont le tableau “la de discipline dans l’Église. l’église Saint-Ignace ou le
Vierge et l’Enfant” est fas- Entre autres, il nous a dit « je Gesù. Grâce aux explications
cinant, fut un temps fort. Le n’ai pas le temps de penser au du Père Thierry Lamboley,
film du Père Michel Farin “Le passé et le futur est toujours nous avons mieux compris
pouvoir et les larmes” nous plus intéressant » et « comme le rapprochement entre l’art
permet de bien comprendre on règle des problèmes sen- baroque où tous les person-
l’importance de ce lieu, la sibles, on fait les choses avec nages sont en mouvement et
manière que saint Ignace a de beaucoup de prudence et de la spiritualité jésuite qui est
diriger la Compagnie, la né- calme ». Le dîner final, avec une mise en mouvement au
cessité de rendre compte des les petits drapeaux français cœur de la vie.
missions confiées aux jésuites du 14 juillet, fut un grand
par la rédaction de lettres qui moment.
servent à constituer un vrai

–18–
Sur la terrasse de la Curie générale, avec Saint-Pierre de Rome dans le fond

n Richesse no ou de la Curie, où la vue Le Père Jean-Yves Grenet


de la lecture est magnifique sur Rome. nous a demandé de réserver
Nous ne voudrions pas non Terrasses où nous pouvions le week-end du 15 août à
plus omettre tous les textes boire l’apéritif d’accueil ou Bruxelles en 2014. En atten-
remis qui nous ont aidés à effectuer en petits groupes la dant, notre prochain week-
mieux connaître la spiri- relecture du soir. end du 14 juillet 2013 nous
tualité ignatienne, quelques paraîtra bien vide à côté de
phrases peuvent nous être Rome a été riche également ce que nous avons connu en
utiles : des rencontres entre nous : 2011 et 2012. Tant pis, on se
« Combien il est important nous étions heureux de re- consolera avec le défilé, ou le
d’aimer les étudiants, de les voir les invités de Loyola Tour de France…
connaître personnellement et 2011 et, même au sein du
de développer avec eux une groupe Icam, nous retrouver Isabelle et
respectueuse familiarité. » à Loyola, Javier ou Rome Jean-Louis Bigotte
« Qui a peur et reste à la mai- nous donne à présent une Icam, Nantes
son attrapera le choléra plus certaine complicité entre
aisément que ceux qui vont nous…
servir les pauvres malades… »
« Ce que l’on écrit doit être Nous étions invités à retrouver ce qui a été au cœur des
beaucoup plus mûri que ce principes mis en place par Ignace avec ses premiers com-
que l’on dit ». pagnons : présence aux pauvres, vœu d’obéissance pour la
mission du Christ, mode de gouvernance avec obligation de
n Rencontres à « rendre compte » sous forme de lettres, mise en valeur des
talents spécifiques de chacun… Les rencontres qui nous ont
table et ailleurs
été proposées ont pu nous démontrer la permanence de ces
Pour finir, nous avons remar-
orientations de la Compagnie reprises par Jean-Yves Grenet
qué que les Français aiment dans sa lettre aux jésuites de la Province en avril 2012. Nous
parler et rester à table, au sommes repartis encore plus conscients de nos responsabi-
grand étonnement des Ita- lités avec une connaissance plus grande des richesses de la
liens qui mangent plus rapi- Compagnie.
dement ! Nous avons aussi Yves et Odile Boccon-Gibod
apprécié les moments passés La Baume, Aix-en-Provence
sur les terrasses du Bellarmi-

–­­19–
jésuites France

Regards sur le monde


Par Olivier de Dinechin, sj

« Maintenant,
rois comprenez,
reprenez-vous juges
de la terre »
Ps 2,10

–20–
Crise, déprise, surprise

–­­21–
jésuites France

Grec et jésuite : Théodoros Kodidis


Prêtre catholique dans un pays orthodoxe,Théodore constate les progrès
et les difficultés d’un pays à vivre la modernité

Tu es arrivé au noviciat en À l’Arbaletière, il y avait sont d’une grande finesse


1983 et tu as été ordonné en une excellente communauté et vraiment généreux. Pen-
1988, trois ans après le no- d’accompagnement. J’ai été sez que quand on parle cette
viciat. Cela fait un parcours beaucoup aidé au niveau langue, on véhicule un héri-
rapide. humain et spirituel. Je pense tage culturel vieux de trois
Je suis arrivé au noviciat avec grande reconnaissance millénaires. On nomme le
après un parcours philo- et amitié à tous mes compa- ciel, la mer, la terre, l’amour,
sophique et théologique, gnons. la haine, la guerre, la paix, la
d’abord à la Grégorienne, à vie et la mort avec les mots
Rome, comme séminariste de Comment l’apostolat de la d’Homère et des évangiles.
l’Église grecque catholique. Compagnie s’exerce dans un
Né dans une tradition orien- pays en crise comme la Grèce Mais ce pays n’arrive pas à
tale, mon premier contact aujourd’hui ? trouver ou à faire sa place
avec l’Église et la liturgie la- Le pays est dans une crise dans la modernité et dans
tines a eu lieu quand j’avais profonde, économique, poli- la communauté des nations.
douze ans. Tout était neuf tique, culturelle. Des pro- Nous ne réussissons pas à
pour moi à Rome, après ma blèmes n’ont jamais été réso- trouver notre chemin et à
scolarité à Athènes faite à lus comme l’administration former une société avec un
l’époque du régime des colo- d’un état moderne, l’état minimum d’organisation et
nels. Fatigué des séminaires de droit, le fonctionnement de respect du droit.
et des écoles ecclésiastiques, démocratique des partis, le
j’ai tenté ma chance en Bel- respect des lois, la corrup- Pourtant la Grèce est le ber-
gique, où j’ai dû travailler tion et le clientélisme poli- ceau de notre civilisation…
pour vivre. J’y ai fait, en tique, l’application d’un pro- Certes, mais la Grèce est
1978-1982, un premier cycle gramme économique. Dans plus orientale qu’occiden-
en théologie. L’année sui- le contexte actuel de crise ces tale : la culture occidentale
vante je suis entré au novi- maladies chroniques pèsent y est superficielle. En France
ciat de Lyon. lourd. et ailleurs on ne réalise pas
à quel point des institutions
Le noviciat était de loin su- La vie dans ce pays a un côté fondamentales comme l’État,
périeur à tous les milieux de riche et fascinant. La nature l’administration, la liberté de
formation que j’avais connus. est magnifique, les Grecs conscience, sont des acquis

–22–
et des réussites de la civilisa- francs (comme on appelle ici nellement, je m’intéresse aux
tion occidentale qui ne fonc- les chrétiens d’occident) ou évolutions sociales. Dans
tionnent bien que dans ce contre le capitalisme. mon travail dans les revues
contexte. Ici, nous n’avons que nous publions, j’ai cher-
pas vécu la Renaissance, les Ce malaise face à la moder- ché à avoir un regard libre
Lumières et les révolutions nité nourrit quelque chose et réaliste. La guerre de You-
démocratiques ; nous n’avons de dangereux, un ressenti- goslavie a été un révélateur
pas eu de révolution indus- ment contre les autres pays, de l’attitude de la société
trielle, de classe bourgeoise, qui rend difficile toute col- grecque et de celle de l’Église
de mentalité capitaliste ou laboration et tout rapport de orthodoxe, prisonnières de
libérale. Le pays est divisé confiance. blocages intérieurs, d’anciens
jusque dans son âme entre fantasmes, de ressentiments
l’orient et l’occident. Depuis Quelle est ta mission dans ce violents au point de perdre
le douzième siècle dans contexte ? contact avec la réalité et le
l’empire byzantin, certains Dans un tel contexte notre sens de la justice. Notre mis-
se tournent vers l’occident mission s’exerce par une sé- sion devrait être une appli-
et d’autres le rejettent. Cette rie d’œuvres comme la revue, cation de Caritas in veritate.
division persiste encore au- la paroisse, le centre spiri- Les deux mots sont impor-
jourd’hui. Il arrive que les or- tuel, le pèlerinage du cœur tants. Être charitable et être
thodoxes et les communistes de Jésus, et nos contacts par attaché à la vérité est essen-
parlent d’une même voix en la bibliothèque, sans oublier tiel, mais pas du tout facile.
temps de troubles, mais c’est tout récemment le travail de
le même esprit anti-occiden- soutien scolaire pour enfants Théodoros Kodidis, sj
tal qui les unit, contre les fait par Pierre Hong. Person-

Rencontre à notre maison de retraites avec des amis et le curé orthodoxe du village voisin (Théodore Kodidis à droite)
jésuites France

La Maison Soins et Repos de Vanves


Une aile de la résidence de Vanves, rue Raymond Marcheron,
a été transformée pour offrir un nouveau lieu d’ accueil pour les
pères et frères âgés ou malades

n Une longue
préparation
L’architecte Alexandre Herault
et son cabinet IMO 55 tra-
vaillent les plans ; le Père
Bruno Régent et Monsieur
Henri Lefort montent les dos-
siers complexes de demande
d’autorisation ; le finance-
ment se trouve ; le maire de
Vanves, qui avait peur que
les jésuites quittent sa com-
mune, soutient le projet ; une
entreprise générale de bâti-
ment, Paris Ouest Construc-
La nouvelle façade : de droite à gauche, un siècle de constructions
tion, est prestement choisie ;
et les jésuites sur place, très

C
es dernières années, ont souhaité un accueil en motivés eux aussi, entre-
la Compagnie de région parisienne. Plusieurs voient quand même les désa-
Jésus en France recherches n’ont rien donné. gréments à venir…
accueillait ses pères et frères Les études se sont tournées
âgés dans quatre maisons : vers le site de Vanves avec n Trous, grue
Pau, Lyon, Lille et Paris-rue ses nombreux avantages : et bétons
de Grenelle. Mais la partie proximité de Paris et ses Durant l’été 2010, divers son-
Soins et Repos de la rue de moyens de communication, dages (sols, murs) ont lieu et
Grenelle à Paris ne répon- une communauté jésuite déjà avant Noël, la communauté
dait plus aux exigences liées sur place, un environnement est priée de vider un des trois
à ce genre d’établissement verdoyant et de l’espace bâtiments ! Printemps 2011,
et a dû être fermée en 2008. constructible. La décision est les murs tremblent sous les
Les provinciaux successifs alors prise, ce sera Vanves ! coups du démolisseur ; un

–24–
grand trou laisse entrevoir pagnateurs de mouvements
la place du parking sou- ignatiens et de retraites ;
terrain ; les canalisations d’autres travaillent dans les
souffrent ; la grue prend revues ou en bioéthique.
pied ; le chantier avance ! Au total, neuf nationalités
Une pose de première se côtoient. Les archives
pierre réunit les mocas- jésuites de la Province de
sins des élus, archi- Le directeur, Christian Gillardeau, France sont, sur le même
et l’infirmière, Ghislaine Petetin lieu, ouvertes à de nom-
tectes, entrepreneurs,
voisins, jésuites et du breux chercheurs. La
Père Jean-Yves Grenet,
provincial, sur du sable Le directeur, Christian Gillardeau, est communauté accompa-
  âgé de 54 ans, marié et père de deux gne la Maison Arrupe,
enfants. Son expérience est grande dans
fin fraîchement déposé. pavillon de banlieue voi-
le domaine des établissements sani-
Le directeur, Monsieur sin, où six jeunes adultes
taires et médico-sociaux où il est éga-
Christian Gillardeau, est lement consulteur et formateur. À titre passent un an dans une
embauché en mars 2012 personnel, il apprécie les voyages, la lec- vie communautaire et de
et recrute le personnel ture des auteurs actuels ainsi que l’art service, tout en poursui-
nécessaire. Le chantier contemporain. vant leurs études ou vies
se termine à l’automne professionnelles avant
2012, non sans être pas- de faire un choix qui
sé à la moulinette des règle- Dorénavant, la construction engage leur vie. Beaucoup de
ments, contraintes adminis- est communautaire : habiter pères rendent aussi des ser-
tratives et vérifications de ces beaux lieux ; prier avec vices dans les paroisses alen-
toute sorte. Septembre 2012 : un Christ, dernière œuvre tour.
les pompiers sont contents de Jean-Marie Tézé, jésuite
et autorisent l’ouverture. La décédé depuis ; se réjouir À tout âge, quelle que soit
commission de l’Agence ré- des liens avec les jeunes jé- sa situation, tout jésuite,
gionale de la santé (ARS) se suites en étude dans la même tout homme, toute femme,
montre plus pointilleuse. communauté ; profiter de la peut reprendre ainsi ces mots
présence des archives de la d’Etty Hillesum dans son
n Un beau cadre Province et de ses visiteurs ; journal : « Je me sens dépo-
et une communauté accueillir amis et connais- sitaire d’un précieux frag-
Le projet a donc abouti : la sances ; vivre ses activités ment de vie, avec toutes
Maison Soins et Repos (offi- apostoliques… les responsabilités que cela
ciellement un EHPAD, Éta- implique. Je me sens respon-
blissement d’hébergement Depuis début novembre, sable du sentiment grand et
pour personnes âgées dépen- la communauté jésuite de beau que la vie m’inspire et
dantes) accueille 25 rési- Vanves se compose de 45 jé- j’ai le devoir de le transporter
dents, dont deux religieuses, suites dont une vingtaine dans intact à travers cette époque
à des degrés divers d’autono- la partie médicalisée ; 12 font pour atteindre des jours meil-
mie, dans un très beau cadre leurs études de philosophie et leurs ».
intérieur et extérieur aux de théologie à Paris ; certains
excellentes fonctionnalités. sont professeurs, accom- Michel Joseph, sj

–­­25–
jésuites France

Jacques Sommet (1912-2012)


De Dachau au Centre Sèvres, une vie consacrée
à la réflexion sur l’homme et à la défense
de la liberté

L
e Père Jacques Sommet avec Laval, premier ministre,
est décédé à Lille le et c’est à ce moment qu’il
22 octobre dernier, entre en Résistance. La ma-
près du terme de sa centième ladresse d’un concierge fait
année qu’il aurait atteint qu’il est arrêté en 1944. Il est Jacques Sommet à Lourdes en 2010
ce 30 décembre. Il est né à envoyé en prison, à Fresnes
Lyon dans une famille de d’abord puis à Dachau. tance de l’aide sociale. Il s’in-
sept enfants en 1912. Son téresse en même temps à Té-
père est soyeux, tisseur de n Croire en la vie, moignage chrétien dont il va
soie. Il pense d’abord à suc- là où c’est la mort soutenir le développement.
céder à son père, ce qui lui qui règne Jacques Sommet est ensuite
fait fréquenter une école de Il y restera un an, de mai 1944 nommé à Lyon où il sera rec-
commerce. En 1934 il entre à mai 1945. L’expérience est teur de Fourvière de 1953 à
au noviciat jésuite d’Yzeure, fondatrice pour toute sa vie. Il 1959. Les temps furent dif-
près de Moulins. Il manifeste y voit un mépris de la vie, un ficiles avec les ‘visiteurs’,
intérêt et capacité pour la mépris de l’homme, alors que le Père Dannis et surtout le
philosophie. Sa fréquenta- le respect de l’autre, le respect Père Plaquet, au milieu des
tion des travailleurs le porte de la vie lui apparaissent fon- soupçons et des suites à gérer
vite à s’intéresser aux ques- damentaux. Il rappellera ce après les mesures romaines
tions sociales, et à ce qui fait temps dans un article sur Da- de 1950 sur la théologie.
la justice dans ses relations. chau dans les Études en 1945
Cela marque ses premières puis dans l’ouvrage d’entre- En 1959, il est recteur du col-
études de morale à Jersey, où tiens en 1987 avec Charles lège de Marseille où il va ten-
il se trouve lorsqu’éclate la Ehlinger, sous le titre « L’hon- ter d’harmoniser les maisons
guerre. Mobilisé, il est démo- neur de la liberté ». de la ville, collège et mission
bilisé quand finit la « drôle de ouvrière jésuite. Il s’occupe
guerre » et va à Paris, pour Après son ordination presby- de l’accueil des Français
étudier aux Sciences poli- térale, il commence l’ensei- d’Algérie. Il est responsable
tiques. Il a tôt fait cependant gnement à Chantilly en 1950 de la mission ouvrière pour
de découvrir les équivoques où, travaillant avec les plus la France. Le fils du soyeux
de Pétain, largement vérifiées pauvres, il découvre l’impor- de Lyon est attentif à ceux

–26–
qui sont exploités, en monde sous le nom de « Cerp », dont Grenelle qu’il doit quitter en
ouvrier. il est le directeur. Après le 2009 pour aller à Lille, rue
déménagement de la théo- des Stations.
n Évolution logie de Lyon Fourvière à
des études jésuites Paris en 1974, il devient le On peut être surpris, surtout
C’est le 12 octobre 1962 premier directeur des Facul- dans les dernières années de
que s’ouvre à Chantilly, tés jésuites de Paris, connues sa vie, par des déplacements
dans l’Oise, ce qui devenait sous le nom de Centre Sèvres. qui sont comme une vérifi-
l’unique faculté de philo- Les cycles du programme de cation de l’homme habitant
sophie pour les quatre Pro- formation sont refondus, en du monde. Quelque chose
vinces jésuites françaises, collaboration entre philoso- s’entend là dans la foi faite
le jour même où s’ouvrait à phie et théologie. à l’homme. Ce qui était éton-
Rome le deuxième concile nant aussi chez lui était la
du Vatican, voulu par Jean n Incroyance et foi place faite au sourire. Peut-
XXIII. Jacques Sommet ve- En 1979, il part à Vanves on sourire quand on est passé
nait d’être rappelé de Mar- et dans la tradition de ses par Dachau ? Si la question
seille, dans un contexte rencontres de guerre avec est légitime, la réponse est
difficile du fait de grandes le monde incroyant, il sera positive : sans doute l’homme
tensions entre les Provinces
jésuites françaises, et surtout
de la présence du P. Plaquet,
visiteur venant de la curie
romaine qui est resté quatre
ans avec des pouvoirs consi-
dérables. Jacques Sommet
joue alors un grand rôle. Il
met en place une transfor-
mation des études, soutenue
par André Coste, provincial,
et fortement appuyée par le
Père Général, le P. Arrupe.

De 1962 à 1979, dates où Fin de la messe dite pour Jacques Sommet le 8 novembre 2012 à l’église
Saint-Ignace, avec le drapeau des anciens déportés de Dachau
Jacques Sommet est aux
commandes, un changement chargé du service Incroyance peut être mauvais, et pour-
total se met en place, qui et foi, pour l’épiscopat fran- tant un sourire peut lui être
concerne les enseignements çais. Il poursuivra cette mis- adressé, signe envoyé que la
et les formes de vie com- sion, rue Monsieur de 1986 bonté est possible, toujours ;
mune. D’importants chan- à 2002, alors qu’il reste au- c’est une espérance, sans
gements immobiliers ont mônier national de l’Union réserve.
lieu également. La faculté de chrétienne des déportés. À
philosophie de Chantilly dé- partir de 2002, il est à la François Marty, sj
ménage rue Blomet en 1970 maison de repos de la rue de

–­­27–
jésuites France

150 ans de présence des jésuites


à l’île Maurice
Les jésuites de l’île Maurice ont voulu célébrer largement cet anniver-
saire de l’histoire de la Compagnie dans cette île des Mascareignes

A
près un temps de dis- n Pour l’intégra- siècle. Les autorités de l’Église
cernement commu- tion des Indiens locale ont alors demandé
nautaire, un calen- Deux jésuites, Laurent Puc- à tous les prêtres de se sen-
drier d’activités est arrêté : le cinelli, italien et Francis Roy, tir responsables de tous les
jubilé débutait le 3 décembre indien, arrivent à l’île Mau- catholiques de leur territoire
2011 pour s’achever le 31 rice en 1861 pour poursuivre pastoral, amenant du coup
juillet 2012. Deux dates im- l’évangélisation des Indiens, l’intégration progressive des
portantes qui nous rappellent tout en les aidant à s’intégrer Indo-mauriciens catholiques.
des amis dans le Seigneur qui dans la société mauricienne.
ont été habités par la même La mission indienne prend Les activités anniversaires
flamme apostolique et mis- naissance et se poursuivra ont débuté par la visite des
sionnaire. pendant un peu plus d’un paroisses où nos compagnons
jésuites ont servi comme
animateurs de la Mission
indienne, ou servent encore
aujourd’hui comme membres
de l’équipe pastorale parois-
siale. Des paroissiens ont été
heureux de faire mémoire de
l’engagement des nôtres dans
leur formation tant humaine,
académique que spirituelle.
Une exposition itinérante a
rappelé l’histoire et les étapes
de la mission jésuite à Mau-
rice.

n Des ouvertures
à la société
Ce temps de jubilé a été
Statue de saint Ignace dans le jardin de la communauté, à Rose Hill enrichi par la présence de

–28–
quatre compagnons jésuites. n Bilan du jubilé le Christ et à mieux structu-
Michael Amaladoss et Patrick Que pouvons-nous retenir de rer leur vie humaine et spi-
Verspieren ont été invités par ce jubilé ? En revisitant notre rituelle en vue d’être plus
le diocèse de Port-Louis dans passé, nous avons pu nous solides dans les mouvements
le cadre de la formation à arrêter sur nos forces et nos ou services où ils sont déjà.
l’Institut Cardinal Jean Mar- ressources personnelles tout Ce jubilé a été une bonne oc-
géot. Jean-Luc Fabre a don- en apprenant de nos erreurs casion de susciter auprès de
né une session de trois jours et de nos échecs. Cette relec- la famille ignatienne un désir
sur la spiritualité ignatienne ture dans la durée ne peut de collaborer autour des pro-
tandis que Pierre de Cha- que nous être bénéfique pour jets communs.
rentenay s’est adressé aux envisager l’avenir plus serei- Ce jubilé ne nous a pas seu-
cadres chrétiens et a donné nement. lement tourné vers le passé,
des conférences publiques mais nous a permis d’associer
sur « Vatican II » et « Église Ensuite, ce jubilé a permis, à de nouveaux collaborateurs
et medias ». Les échos ont été travers les medias, de rendre jeunes et moins jeunes, à
positifs car nos compagnons visible l’activité apostolique notre joie d’être fils d’Ignace.
ont permis aux participants de la Compagnie de Jésus
de s’ouvrir sur des questions dans le pays pendant toutes Steves Babooram, sj
de société et d’avoir des pistes ces années. « Magis Maurice
de réflexion, voire d’action, 2012 » qui a été bien répercu- Magis Maurice 2012
dans l’articulation entre leur té dans la presse, a donné une
vie de foi et leur vie concrète. certaine lisibilité de ce qu’est • 17 au 19 juillet,
la spiritualité ignatienne à lancement et accueil
n Magis Maurice travers les témoignages des des délégations à
Un autre temps fort de ce jeunes et le contenu pédago- Trou d’Eau Douce ;
jubilé a été la réalisation de gique du programme décrit. • 19 - 24, « expériments »
« Magis Maurice 2012 » qui Enfin, ce jubilé a été, pour répartis sur quatre sites
s’est tenu du 17 au 31 juillet. nous, un exercice de mé- (écologie et culture,
L’idée a germé à la suite de la moire et de reconnaissance chantier social et art/
participation de la délégation envers nos aînés et nos col- et créativité, social et
mauricienne à Magis 2011 laborateurs avec qui nous spiritualité, art et créa-
pendant les JMJ de Madrid. avons travaillé comme servi- tivité dans un contexte
La centaine de jeunes venus teurs de la mission du Christ. interculturel) ;
des îles Rodrigues, Réunion, Le jubilé nous a aussi ouverts • 24 - 27, reprise des
Seychelles, Madagascar et sur l’avenir. Magis a été une expériments et temps
de Maurice, sans oublier activité bénie pour permettre de retraite ;
ceux de France et d’Alle- à des jeunes de découvrir • 27 - 31, hébergement
magne, ont vécu une expé- et de vivre de l’intérieur la dans des familles mauri-
rience forte tant sur le plan spiritualité ignatienne. C’est ciennes et participation
humain que spirituel. L’Inde un héritage qu’on ne peut à la messe de clôture
était aussi présente grâce au garder pour soi ! La pédago- du jubilé lors de la
Père délégué de la Province gie d’Ignace pourra aider les fête de saint Ignace.
du Maduré. jeunes à mieux se centrer sur

–­­29–
jésuites p o rt
Monsieur Michel Croc
« Des ponts, pas des murs ! », c’est le cri d’un réseau d’associations qui
proclame que les migrations créent des ponts entre les sociétés, et qu’il
est à tous points de vue absurde d’ériger des murs au débouché de ces
ponts.
Mais pourquoi mon portrait commence-t-il par « des ponts » ?
C’est parce que j’ai consacré toute ma carrière aux ouvrages d’infra-
structures de transport. Tout d’abord la conception et la construction
du nouveau port d’Arzew, en coopération en Algérie. Mon épouse1
comme professeur de mathématiques et moi-même y avons connu
une riche expérience : vivre dans une autre culture de la vie, mais
dans la même culture professionnelle et un mélange de langues, « une difficulté à la fois ». Un
premier signe ?
J’ai ensuite participé à la construction d’un certain nombre de ponts, de vrais et solides
ouvrages ; ils ne défient pas la pesanteur, mais au contraire l’utilisent pour surplomber le vide.
La voûte tient grâce au poids de sa clef : « pas de grâce sans pesanteur ». Et avec les ouvrages
de soutènement, et encore plus les ouvrages maritimes, on apprend qu’il est vain de cher-
cher à s’opposer aux forces de la nature,
qu’il faut plutôt s’allier à elles : « on ne se
change pas, mais on peut se convertir ». J
RS France a créé le réseau Welcome,
réseau de familles et de communautés
qui offrent à des demandeurs d’asile à la
J’ai beaucoup travaillé à la construction
fois un hébergement et un accueil pour
du métro de Marseille, au creusement de
une durée convenue à l’avance.
tunnels sous la ville - tunnels creusés par Welcome fonctionne très bien depuis trois
des ouvriers algériens et marocains pour la ans à Paris, il a démarré à Lille, Nantes
plupart… un deuxième signe ? Là j’ai appris et Marseille, il est en projet à Lyon,
que lorsqu’on creuse un tunnel, on ne dit Rennes, Cannes, Brest…
pas « il ne reste plus que 50 mètres », mais : Bienvenue sur jrsfrance.org !
« il reste encore 50 mètres ! ». Enfin, de mes
contributions aux routes, aux métros, aux tramways, aux trains, j’ai gardé un certain vertige et
l’envie de dire : « moins on se transporte et mieux on se porte ». Mais ne le répétez pas.
Alors, pourquoi ai-je rejoint, depuis que je suis à la retraite, JRS France, le service des réfu-
giés ? Pas vraiment d’explication, mais plutôt un appel, que j’illustrerai volontiers par une
référence : un extrait de l’épître aux Hébreux (He 11,13-16), que vous saurez trouver. Si nous
croyons que nous sommes spirituellement des étrangers et des voyageurs sur la terre, que nous
aspirons à une patrie céleste, et que Dieu nous a préparé une ville, comment ne pas nous sentir
concernés par le sort de ceux qui sur terre n’ont plus de patrie ?
Michel Croc
Président de JRS France

1. Nous nous réjouissons encore ensemble de nos cinq enfants, de nos huit petits-enfants,… et de nos activités à
la Baume-lès-Aix !

–­­30–
r a i t s
Père Michel ROGER
Que dire en quelques mots, sinon remercier pour le bonheur reçu et,
je l’espère, partagé !

Oui, heureux celui qui a reçu tant d’amour dans sa famille, comme
dans ses amis, heureux celui qui a été entouré par la patience, la
bonté, la vérité, à la maison, au collège, au lycée, et a été accepté
dans sa médiocrité, son mensonge souvent, sa réticence aux études
et à l’autorité… et qui a fait l’expérience de la liberté, conquise,
mais surtout reçue, de la confiance accordée par les autres, du
pardon sans cesse redonné, des responsabilités confiées au fil des
années !

Oui, heureux aussi, celui qui a eu la joie d’aider tant d’enfants et de jeunes à
grandir sur les bancs de l’école, les sentiers de grande randonnée des Alpes, des Pyrénées, de
Corse, en jouant au foot, en montant des pièces de théâtre, et qui a reçu de tous ceux-là, de
toutes celles-là, tant d’affection et d’amitié ! Heureux est-il de les avoir accompagnés, conseil-
lés parfois, encouragés toujours dans leurs études, lui qui était si mauvais élève !

Plus encore, heureux est-il des appels répétés de Dieu à Lui donner sa vie, à la suite du Christ,
des appels reçus à travers le sourire et la confiance
d’hommes et de femmes, telle expérience vécue, le
M ichel Roger est le délégué
du provincial pour l’Apos-
tolat spirituel qui est porté par
partage de la prière avec les jeunes, la parole et
l’interpellation de l’un ou l’autre. Oui, la béatitude
existe, quand enfin le « oui » répond à l’appel de
30 groupes diocésains, 14 centres Celui qui est Vie !
spirituels, des congrégations,
la CVX, plus d’un millier de colla- Heureux enfin celui qui a vécu le temps de Vati-
borateurs, avec une même inspira- can II : au-delà des difficultés, des déchirures, il
tion : Ignace de Loyola. Une même y a la confiance que le Seigneur reste présent au
mission : suivre et imiter le Christ. monde, encourage chacun à vivre en renouvelant
son désir de servir, de témoigner humblement,
pauvrement, chastement, et d’aider notre monde
à être un lieu de respect. Utiliser les formidables avancées techniques au service de l’homme,
faire croître la solidarité, aider chacun à regarder le monde avec le regard du Christ, à écouter
et servir comme Lui, dans la liberté et dans la vérité, voilà le programme !

Que demander de plus ? C’est ma joie.

Michel Roger, sj

–­­31–
contempler
et méditer

D e nos jours, beaucoup de chrétiens aiment à se recueillir devant une


icône pour prier. Ce ne sont pas seulement les orthodoxes ou ceux qui
sont attachés aux formes traditionnelles de la vie spirituelle, mais souvent des
personnes actives dans notre monde moderne. La raison de cet attrait doit se
trouver dans la nature de ces ‘images’. Elles sont l’expression d’une spiritua-
lité différente de celle du christianisme occidental. On le comprend quand on
assiste à une liturgie orientale où les icônes font partie de la célébration.

Les icônes semblent, par leur splendeur, être loin de notre monde avec toutes
ses souffrances. Quel est donc leur message ? Qu’au-dessus de nous, il y a une
autre réalité, celle de la majesté de Dieu, qui était toujours et qui sera toujours
présente. L’icône est le reflet de cette transcendance.

Car une icône n’est pas la création d’un artiste. Elle dépend de la Révé-
lation, dont elle fait partie par son lien avec l’Écriture et la vie de l’Église.
Ainsi elle n’est possible que par l’Incarnation du Fils du Père. Par l’Incarna-
tion, la matière est devenue capable de dire Dieu, et mieux encore d’être lieu de
présence de son amour.

L’ange, icône d’Egon Sendler, interprétation d’un ange sur la coupole de S. Prassede, Rome, Xe s.

–­­33–
la nativité

L’ icône de la Nativité montre comment le Fils Éternel du Père s’unit à notre


monde. En haut de l’icône on voit les Rois mages qui suivent l’étoile.
Comme eux, Dieu conduit les hommes à la crèche pour adorer le Nouveau-Né,
entouré des esprits célestes. La partie centrale de cette icône est consacrée à
la manifestation de l’amour de Dieu : sous les rayons de l’étoile de Bethléem
apparaît l’Enfant dans la crèche. Elle est représentée par un tombeau, car le
Fils devient homme pour mourir pour le monde. Ainsi Il est représenté comme
un mort dans son tombeau. Ce monde pour lequel il se donne est exprimé par
les ténèbres de la grotte. Il n’y a ni lumière, ni vie, tel est le sens de ce fond
noir. C’est le néant, où apparaît encore la haine de son peuple. Le prophète
Isaïe avait dit : « Le bœuf a connu son propriétaire et l’âne la mangeoire de son
maître, Israël ne connaît rien, mon peuple ne comprend rien ».
Le geste de la Mère veut dire qu’elle offre son Enfant au monde.

Depuis le cinquième siècle, depuis le concile d’Éphèse, qui avait défini Marie
comme « Mère de Dieu », les icônes jouent un grand rôle dans la vie de l’Église.
À Rome il y avait six icônes très vénérées par les nombreux pèlerins. Pour eux,
l’image n’était pas seulement un souvenir, une illustration, mais un véritable
lieu de présence, source de grâces et de consolation. Aujourd’hui nous faisons
aussi cette expérience quand nous voyons l’icône de la Vierge de Vladimir
vénérée dans le monde entier, de l’Amérique jusqu’au fond de l’Asie. Tous les
chrétiens sont unis devant elle. Elle est devenue symbole de l’union de tous les
chrétiens.

Egon Sendler, sj

La Nativité, icône d’Egon Sendler, interprétation d’une mosaïque de la Capelle Reale, Palerme, XIe s.

–34–
jésuites France

La revue Études change


de tête
Après plus de huit ans comme rédacteur en chef de la revue Études,
Pierre de Charentenay passe la main à François Euvé début janvier 2013

ma place à François Euvé, ples réseaux, participer à des


professeur de théologie au rencontres, faire des confé-
Centre Sèvres, qui faisait déjà rences, écrire des articles ou
partie du comité de rédaction des livres, animer les comités
de la revue. Il sera donc en de rédaction, et les comités
pays connu. de théologie.

n Des tâches Mais rien de tout cela ne se


multiples fait seul enfermé dans un
Le rédacteur en chef est une bureau : Études a la chance
sorte de vigie et de chef d’or- d’avoir une équipe de rédac-
chestre qui voit tout et touche tion très compétente, des ré-
à tout : j’ai veillé au nombre seaux d’auteurs et de recen-
des abonnés qui atteint plus seurs, un milieu porteur où
de 11 000 aujourd’hui, célé- la Compagnie a un rôle fon-
bré les 150 ans de la revue damental notamment avec le
à l’Unesco, développé le site Centre Sèvres, un environne-
François Euvé, sj, nouveau rédacteur en chef
Internet (avec tout ce que ment professionnel très com-
cela comporte, blogs, billets), pétent et efficace à l’intérieur

D
epuis 1856, année obtenu de la Bibliothèque na- de la SER (Société d’édition
de sa fondation, la tionale la numérisation de la de revues), au 14 de la rue
revue Études a vu totalité de la revue qui donne d’Assas.
se succéder à sa direction un accès gratuit à tous les ar-
nombre de jésuites, tous dif- ticles de la revue pour les in- Rien de cela n’a de sens sans
férents les uns des autres. Ce- ternautes (seules les trois der- le travail quotidien du suivi
lui qui est resté le plus long- nières années sont payantes), de la revue : relire tous les
temps est le Père du Passage lancé les Hors-série annuels. articles, contacter des au-
(sic) qui a dirigé la revue teurs, discuter des contenus,
entre 1919 et 1935. Après un Il faut animer aussi et garder refuser des textes, travailler à
peu plus de huit ans, je laisse des contacts avec de multi- la lisibilité. Que d’histoires à

–36–
raconter sur les egos de cer- un de ces lieux d’élabora- grande attention comme
tains auteurs ! tion d’une pensée chrétienne toutes les facettes de la bio-
sur la société moderne et ses éthique : ils ont d’ailleurs
n Dans le débat évolutions. Il faut ainsi la donné lieu à un numéro
public diffuser par les médias, no- Hors-série en 2009. Les sujets
Derrière ce quotidien, il faut tamment les radios qui nous sociaux ne sont pas absents :
maintenir un travail intellec- invitent. le domaine de l’environne-
tuel par la lecture et l’écri- ment et du réchauffement
ture. L’impératif du suivi de n Quelques climatique a été largement
la presse et de publications thématiques discuté. Les thématiques de
multiples invite à se fami- La revue Études est donc la justice et des prisons ont
liariser avec les débats de la amenée à suivre différents donné l’occasion d’un Hors-
société française. Il oblige à dossiers d’actualité plus série en 2012.
approfondir personnellement ou moins brûlants. Le plus
quelques sujets, ce que j’ai pu récent, c’est la question du Les thématiques théolo-
faire à travers des livres sur mariage homosexuel en lien giques sont aussi présentes :
les médias, la laïcité, l’Eu- avec le projet de loi corres- Vatican II a été commenté et
rope, etc. pondant. Ce débat suit de travaillé, dans cette période
nombreux textes autour de d’anniversaire mais bien
Une telle revue donne le la famille en général, du rôle avant, notamment sur le
moyen de s’intégrer dans le des hommes ou des femmes, moment même avec les très
débat public : c’est une voix de la place des enfants, de la remarquables chroniques du
des chrétiens dans la discus- discussion sur le genre. De Père Rouquette. Des essais
sion intellectuelle nationale. manière permanente depuis théologiques permettent d’ap-
Elle est repérée comme telle 25 ans, les questions de la fin profondir les expressions
et attire l’attention comme de vie ont fait l’objet d’une de la foi pour l’homme mo-
derne. Des regards sur le
éTUDES monde nous emmènent aussi
en Afrique du sud, au Cam-
Fondation en 1856 par le Père Gagarine bodge, en Haïti et sur de mul-
• 415 tomes de 800 pages en moyenne tiples rivages où la condition
(2 tomes par an) des hommes mérite notre
• Chaque année 11 numéros de 44 pages attention.

• 120 recenseurs de livres


Revue généraliste s’il en est,
• 80 auteurs d’articles par an Études permet de suivre ce
• 1 hors-série annuel monde où s’incarne la Parole
de Dieu.
• 11 000 abonnés pour un tirage
de 15 000 exemplaires
Pierre de Charentenay, sj
Site : www.revue-etudes.com
Abonnement sur la boutique du site
ou 14 rue d’Assas – 75006 Paris

–­­37–
jésuites France

La revue Projet prend


des couleurs
Passage au numérique, couleur, photos, questions qui interpellent…
voilà qui pourrait déboussoler plus d’un lecteur de la revue Projet !
Mais les premières réactions sont enthousiastes. Retour sur
un renouveau

C’
est en 1903 qu’est
née « l’Action po-
pulaire » – qui
deviendra le Centre de re-
cherche et d’action sociales
(Ceras). Dès 1907, le Père
Leroy, fondateur du Ceras,
lançait la Revue de l’Action
populaire, avec l’ambition
d’accompagner la réflexion et
Le site www.revue-projet.com
l’engagement des chrétiens,
et de bien d’autres, sur les
terrains sociaux, politiques, Économie » en 1966, la revue n « Éclairer
économiques, caritatifs. connaît un nouvel essor sous l’avenir »
la direction du Père Laurent. La baseline de la revue résume
n Un siècle Un temps publiée par Assas sa visée. Au moment où notre
nous contemple Éditions (puis par la Société humanité fait face à des défis
La revue connaît le succès d’éditions de revues - SER) – notamment écologiques et
dans l’entre-deux-guerres, comme Études, Christus et sociaux – sans précédent, elle
mettant l’accent sur le droit Croire aujourd’hui, elle traite semble le moins en capacité
du travail et l’agriculture alors d’immigration, d’exclu- de décider de son destin com-
(c’est à l’Action populaire sion et de communication. La mun. Dans ce contexte diffi-
que sont fondées la Joc et la revue revient en 2005 sous cile à décrypter, beaucoup se
Jac). Après la Libération, elle la responsabilité directe du réfugient dans l’immédiateté.
prend parti en faveur de la Ceras, qui s’installe dans le Certains répondent par l’acti-
décolonisation, et s’interroge « 9-3 » et s’intéresse davan- visme militant, d’autres par
sur le marxisme et l’URSS. tage aux banlieues, à la finan- une expertise pointue. Le dé-
Devenue « Projet », sous-ti- ciarisation de l’économie, aux bat public devient technique,
trée « Civilisation – Travail – pays émergents, à l’écologie. idéologique ou terre à terre,

–38–
Au sommaire de la revue Projet

• N° 329 / Août 2012 : La fraternité, une contre-culture ?


Avec Jean-François Petit, Jacques Le Goff, Daniel Maciel,
Atanase Périfan, Alain Richard, Étienne Pinte, François Soulage,
Christoph Theobald, Alain Grandjean, Étienne Grieu…

• N° 330 / Octobre 2012 : Donner la parole


aux générations futures ?
Avec Jean Caron, Gilles Hériard Dubreuil, Dominique Bourg,
Jean-Charles Hourcade, Michel Griffon, Pierre Calame,
Bernard Perret, Gaël Giraud…

quand il ne se résume pas à montée de l’abstention, nous Avec Revue-Projet.com, nous


l’invective. Quels horizons avons ouvert le débat « Pour- avons choisi de mettre à la
ouvre-t-il ? La revue Projet quoi vote-t-on encore ? ». portée de tous, gratuitement
se donne pour ambition de Pour accompagner la dé- pour les contenus récents,
contribuer, modestement, à marche Diaconia 2013, nous des analyses de qualité aupa-
éclairer l’avenir : aider cha- avons interrogé la notion et ravant réservées aux seuls
cun à comprendre ce monde la réalité de la fraternité. Le abonnés. Internet favorise
en mutation, à se situer pour réseau européen des centres aussi le temps du débat. Fal-
agir. sociaux jésuites nous a permis lait-il pourtant abandonner
de produire un numéro très la revue papier ? Elle reste un
Afin de cibler le débat, tout riche sur « À quel prix sauver outil précieux d’animation et
le processus d’élaboration de l’euro ? ». Des numéros spé- de formation pour nos par-
la revue prend sa source dans ciaux peuvent aussi répondre tenaires. Conçue comme un
les attentes et interrogations aux demandes de la CVX bel objet, gai, aéré, écolo, elle
exprimées par les acteurs ou des Semaines sociales de apporte aussi le confort de
présents sur le terrain social France. Sur chaque question, lecture. Enfin, sans être une
(monde associatif, syndical, sociologues, historiens, poli- entreprise commerciale, la re-
éducatif, politique), en les tologues, philosophes, éco- vue a besoin de se financer !
confrontant aux apports des nomistes, théologiens ou ju- Elle mise sur une démarche
sciences humaines. La dé- ristes croisent les regards des d’adhésion large (abonne-
marche permet aux acteurs de praticiens, militants ou res- ments, partenariats, dons) à
lever la tête du guidon et aux ponsables politiques. Et ceci cet ambitieux « Projet ».
chercheurs de sortir de leur dans un format et un langage
« tribu », en gardant le souci abordables pour le plus grand Jean Merckaert
de poser la question du sens, nombre. Rédacteur en chef
avec, entre autres, l’éclairage de la revue Projet
du discours social de l’Église. n Le choix du numé-
rique et du papier Contact : CERAS
Ainsi, devant la perplexité des S’inscrire dans le débat public 4, rue de la Croix Faron
93217 La Plaine Saint-Denis
jeunes du réseau « La politique et le tirer vers le haut suppose Tél. : 01 48 22 40 18
une bonne nouvelle » face à la l’accessibilité des contenus. secretariat@ceras-projet.org

–­­39–
jésuites France
La nouvelle évangélisation
à la sauce NDWeb
En 2001 est né Notre Dame du Web, le centre spirituel en ligne de la fa-
mille ignatienne. Qu’en est-il onze ans plus tard ? Quelle est la spécificité
de ses propositions dans ce contexte d’appel à la nouvelle évangélisation ?

U
n centre spirituel en de jeunes intrépides s’étaient porter sa pierre au travers de
ligne, des retraites déjà lancés dans l’aventure plusieurs propositions en es-
que d’aucuns qua- en créant il y a onze ans le sayant d’utiliser au mieux ce
lifieraient de virtuelles, et site Notre Dame du Web. que nous offre le multimédia
sans accompagnement de (son, image, vidéo).
surcroît ! Où est passé le n La Parole de Dieu
corps, élément si central de au quotidien n Des retraites
la spiritualité ignatienne ? Aujourd’hui l’Église appelle à spirituelles
Où est l’écoute attentive, la une nouvelle évangélisation. numériques
conversation spirituelle si Si cette notion se cherche, En quoi consiste une retraite
chère à notre Père Ignace ? elle semble se diriger vers en ligne ? D’une certaine
Priera-t-on aux prochaines un encouragement à creuser manière c’est donner à l’in-
ordinations « Notre Dame du la relation avec la Parole de ternaute de la matière pour
Web » me glissait un tantinet Dieu, parole qui est la base nourrir sa prière personnelle
moqueur un compagnon ? de toute expérience de ren- (passages bibliques, com-
« Why not ? » lui répondrai- contre avec le Christ. Sur mentaires, œuvres d’art…).
je car si Notre Dame du Web cet immense aréopage qu’est C’est aussi l’aider à choisir ce
n’est pas né d’une appari- Internet, NDWeb essaie d’ap- qui lui convient dans la mul-
tion, ce site est le fruit tiplicité des propositions
d’une constatation : un et l’aider à trouver un
nouvel espace est ap- rythme d’oraison qui lui
paru avec Internet, une soit propre, le tout an-
nouvelle socialisation y cré dans son quotidien,
a vu le jour. Nos exis- à la maison, au bureau,
tences sont maintenant dans les transports en
hybrides, se déployant commun. C’est au cœur
dans le monde numé- de ce monde que nous
rique. L’accompagne- essayons de faire vivre
ment de la vie spiri- des Exercices spirituels
tuelle serait-il donc le adaptés, pour aider à
dernier bastion à résis- « chercher et trouver
ter ? Certes non, puisque Dieu en toutes choses ».
Le site www.ndweb.org

–40–
Ces retraites accueillent le
tout venant et n’ont pas
prétention à remplacer une
retraite plus classique dans
un centre spirituel « en dur ».
C’est autre chose, un autre
rythme (plusieurs semaines),
ancré dans la vie de tous les
jours, mais toujours dans le
but de se mettre à l’école du
Christ. De plus, comme Za-
chée du haut de son arbre,
l’internaute peut s’approcher
sans être vu, dissimulé der-
rière un pseudonyme ou une NDWeb premiers pas
adresse mail, et être rejoint
par le Christ. L’autre caracté- Quels projets pour le futur ? cas en Angleterre, au Portugal
ristique de ces retraites est du Revoir de fond en comble et en Espagne ? Enfin, du côté
côté des chiffres : entre 300 notre site et nos proposi- des relations avec les centres
(retraites « premiers pas » et tions pour devenir réelle- spirituels plus classiques,
« venez et voyez ») et 6000 ment le portail de la famille centraliser les propositions de
participants (retraite de Ca- ignatienne et de la spiritua- retraites « en dur » afin d’en
rême ou de l’Avent). lité ignatienne. Du côté des faciliter l’accès : l’internaute
retraites, offrir des proposi- n’aura plus qu’à choisir en
n Une nouvelle tions ciblées (« campus » pour fonction du type de retraite,
équipe pour les aumôneries d’étudiants ; de la durée, du lieu ou de la
refondre NDWeb famille et enfants). S’ouvrir date qu’il souhaite.
Depuis cette année, NDWeb davantage aux réseaux so-
est porté au quotidien par un ciaux (facebook, twitter…). La nouvelle évangélisation
trinôme de choc : Marie-Thé- Pourquoi ne pas proposer au a donc déjà commencé. Elle
rèse Deprecq (religieuse du quotidien un fichier audio vous attend au bout de votre
Sacré-Cœur), Michèle Jeu- de huit minutes pour écouter clavier !
net (religieuse du Cénacle) l’évangile du jour et des pistes
et Grégoire Le Bel (jésuite). d’oraison comme c’est déjà le L’équipe NDWeb
Cela dit, c’est toute la famille
ignatienne qui contribue à
la vie de NDWeb, en propo- Comment suivre une retraite sur NDWeb ?
sant de nouvelles retraites
Aller sur le site www.ndweb.org, et choisir le lien
(sur l’écologie ou la justice), inscription. Après avoir renseigné un identifiant et
en rédigeant de nouvelles votre mail, vous pourrez choisir votre retraite. Faites
méditations bibliques ou en l’essai, et donnez-nous vos impressions ou vos idées :
modérant des espaces de par- info@ndweb.org
tages durant les retraites.

–­­41–
jésuites Europe

Réseau européen de recherche


sur la spiritualité ignatienne
Un réseau d’échange de professeurs et de travaux en spiritualité
ignatienne s’est constitué entre les divers centres européens
de formation jésuite

ceux qui viennent d’autres


pays est importante. On
pourrait en dire autant des
Français qui partent hors de
l’hexagone. Les professeurs,
eux, sont plus naturellement
sédentaires, attachés qu’ils
sont au centre dans lequel
ils enseignent. En revanche,
leurs propres recherches les
conduisent à s’intéresser aux
travaux effectués en d’autres
Le campus Cantoblanco de l’université Comillas, à Madrid, lieux et langues et les ren-
où se trouve l’institut de spiritualité
dent sensibles à la différence

C
es dernières années, ignatienne, sont proposés des des accents que donnent
grâce à un travail de enseignements, recherches et aux recherches en théolo-
concertation entre publications de niveau uni- gie spirituelle les contextes
les établissements supérieurs versitaire ; ainsi des étudiants dans lesquels elles nais-
de la Compagnie de Jésus peuvent-ils y préparer mas- sent et mûrissent. Les divers
en Europe et au Liban, il a ters ou doctorats en théologie départements et instituts de
été possible d’identifier huit spirituelle. spiritualité doivent mieux se
centres de formation comme connaître et entretenir des
lieux de spécialisation en n Des échanges liens plus suivis. La facilité
« Théologie et spiritualité » : de travaux des contacts entre Provinces
Varsovie, Madrid, Londres, Les étudiants circulent déjà de la Compagnie est un atout
Bruxelles, Naples, Rome, Mill- à travers l’Europe : au Cen- de poids, même pour ceux et
town en Irlande, et le Centre tre Sèvres, parmi ceux qui celles qui, n’appartenant pas
Sèvres. En ces divers instituts, sont engagés dans un tra- à la Compagnie, travaillent
en fidélité au souci d’offrir vail de spiritualité en 2nd et dans le domaine de la tradi-
une formation à la spiritualité 3e cycles, la proportion de tion spirituelle ignatienne.

–42–
n Contacts chercheurs en matière de religieuse de Pascual Cebol-
individuels et spiritualité ignatienne, qui lada ; d’autre part, pour les
institutionnels ont pu se vivre à Barcelone étudiants de 2nd et 3e cycles,
Ainsi, des contacts à la fois à l’été 20093, et, en amont un séminaire de recherche
intellectuels et amicaux se ou en aval de ces manifesta- franco-britannique d’une
sont peu à peu noués. Nous tions, les divers contacts in- journée à Londres en février
avons pris goût à ces ren- dividuels. La communication 2013 sur le thème « Com-
contres, plus ponctuelles d’articles entre les revues de ment interpréter les textes
ou informelles mais parfois spiritualité ignatienne Chris- spirituels aujourd’hui ? » et
d’une certaine ampleur : un tus, Manresa et The Way est qui sera animé par Patrick
colloque du Centre Sèvres maintenant aussi assez fré- Goujon et des collègues cher-
sur la mystique ignatienne quente. Mais nous souhai- cheurs de Grande-Bretagne.
ou sur l’amitié spirituelle1, où tions aller plus loin.
se sont mêlées les voix euro- Outre l’agrément des relations
péennes, une intervention n Des réalisations fraternelles entre chercheurs,
française lors du colloque qui concrètes l’intérêt de telles mises en
célébrait les 25 ans de l’Insti- En cette année universitaire commun et confrontations
tut de spiritualité de l’univer- 2012-2013, la collaboration des travaux est manifeste :
sité Comillas à Madrid2�, ou s’intensifie grâce à deux réa- celles-ci sont riches d’une ou-
bien les rencontres vécues à lisations, modestes, début verture et d’une fécondation
l’occasion des congrès inter- d’une collaboration plus mutuelles. Elles sont un gage
nationaux qui ont marqué les régulière : d’une part, un de vitalité pour nos centres.
anniversaires, à Loyola puis échange de professeurs entre Elles sont précieuses pour as-
à Rome en 2006, ou encore l’Institut de spiritualité de surer l’avenir de la recherche
les « synergies ignatiennes », Comillas à Madrid et le Centre en matière de théologie spi-
partage des recherches entre Sèvres, avec un enseigne- rituelle autant que pour le
ment de deux jours : « Théo- développement du patrimoine
rie et pratique des Exercices ignatien qui est le nôtre.
spirituels de saint Ignace »,
donné en décembre par Sylvie Robert, sa
Pascual Cebollada, et un autre Responsable du département
du même volume horaire, spiritualité et vie religieuse
« La spiritualité ignatienne : du Centre Sèvres
histoire et interprétation »,
assuré en avril par José Gar-
1. Les actes en sont publiés dans les
cia de Castro, tandis que j’in- Cahiers de spiritualité Médiasèvres
terviendrai moi-même trois n° 1 « Actualité de la mystique igna-
tienne » (2001) et 138 « L’amitié spiri-
jours en avril à Madrid, pre- tuelle » (2006).
nant en charge une partie du
2. Cf. Pascual Cebollada (éd.)
cours de théologie de la vie Experiencia y mysterio de Dios,
Madrid, San Pablo-Comillas, 2009.

Heythrop college, centre de 3. Le n° 122 du CIS (XL, III, 2009) en


formation de la Compagnie à Londres rend compte.

–­­43–
jésuites Europe

Le Centre spirituel La Pairelle


La Pairelle, près de Namur, offre des formules très variées d’Exercices
spirituels, y compris pour les jeunes

L
e Centre spirituel temps de ressourcement spi- La Pairelle
ignatien, La Pairelle, rituel. L’animation est assurée « hors les murs »
a vu le jour en 1971. par une équipe de jésuites, de Aujourd’hui, les contraintes
Situé à quelques kilomètres religieuses et de laïcs reliés de temps, d’engagements
de Namur, à Wépion, sur les par la spiritualité ignatienne. professionnels ou autres,
hauteurs de la Meuse, dans limitent les possibilités de
un parc et un cadre de ver- n Des propositions se déplacer. Il s’agit donc
dure de dix-sept hectares, pour tous de rejoindre les personnes
il offre une capacité de 72 Les Exercices spirituels don- là où elles vivent. Le Centre
a donc développé hors de
chambres d’hôtes réparties nés sous des formes très diver-
ses murs les « Exercices
dans trois bâtiments. sifiées demeurent au cœur de spirituels dans la vie cou-
l’activité du Centre. Exercices rante », les « Semaines de
Le Centre accueille tout au de 30 jours ou de huit jours, prière accompagnée » et
long de l’année ceux qui, en mais aussi de nombreuses les « Chemins de prière
groupe ou dans un chemine- possibilités d’entrer dans la contemplative ».
ment individuel, cherchent à prière ignatienne selon des
faire une halte dans leur vie formules plus courtes de un « initiation » aux Exercices
quotidienne et à vivre un à cinq jours. Depuis peu, une spirituels en cinq jours. Un
accompagnement individuel
est toujours proposé (jésuite,
religieuse ou laïc) même si la
démarche se fait en groupe.
Il est aussi possible de faire
à tout moment une retraite
individuelle accompagné par
une personne de l’équipe
d’animation du Centre. Sont
également proposées des for-
mules de retraite avec des
Un parc propice approches diverses comme
à l’intériorité
l’expression artistique, la lit-
térature, la marche.

–44–
n Week-ends,
sessions, parcours
De nombreux week-ends
sont offerts notamment pour
les fiancés, les couples et les
familles.

Les sessions se multiplient où


s’abordent les questions es- L’espace Béthanie pour les jeunes
sentielles de nos contempo-
rains en recherche de sens : Béthanie - spécifique pour Chaque année, près de cent
souffrances, solitudes, par- les jeunes. L’accueil est per- animateurs différents sont
don, difficultés relationnelles, manent et différentes activi- partie prenante des retraites,
mais aussi tensions entre tés s’y déroulent tout au long sessions, parcours, forma-
vie professionnelle engagée de l’année. tions, accompagnements
et vie intérieure, service et individuels. Ce chiffre veut
rentabilité, développement Signalons en particulier les simplement indiquer une réa-
de l’économie et croissance parcours d’intégration de lité quotidienne de la vie de
de l’homme, etc. Les par- l’Écriture par l’enseignement, La Pairelle qui est notre joie :
cours, rencontres régulières la prière et le partage ; les pé- jésuites, religieuses et laïcs
réparties sur plusieurs mois, riodes « Souffler, prier, mû- de plus en plus nombreux
veulent aider à approfondir rir un choix » où les jeunes collaborent aujourd’hui à
ou à redécouvrir la sève pro- peuvent faire une expérience part égale et en équipe pour
fonde de la foi chrétienne. de retraite personnellement l’animation de l’ensemble des
Le Centre organise aussi di- accompagnée afin d’orien- activités du programme du
verses formations : à la spi- ter leur vie avec Dieu ; le Centre. Ce partenariat est un
ritualité ignatienne (parmi week-end « Comment faire immense cadeau pour tous.
celles-ci, ‘discernement’ et des choix dans sa vie » pour Il nous fait vivre une com-
‘accompagnement spirituel’ apprendre à choisir autour de munauté d’Église où chacun
attirent de plus en plus de la question des études, de la a sa place pour exprimer et
laïcs), à l’animation d’écoles profession, des relations. communiquer la richesse de
de prière contemplative ; sa vocation propre.
sans oublier les journées de n Une équipe
formation pour les assistants plurielle Stany Simon, sj et
paroissiaux et animateurs À La Pairelle vivent deux Michel Danckaert
pastoraux. communautés : la commu-
nauté jésuite (quatorze com-
n Un lieu pour les pagnons), ainsi qu’une com-
Centre Spirituel Ignatien
jeunes : « Béthanie » munauté de trois religieuses La Pairelle
En 1992, les bâtiments d’une de saint André, installée sur Rue Marcel Lecomte, 25,
ferme située sur le site de La le site depuis 1999. Tous ne 5100 Wépion, Belgique
Tél.: 00 32 81 46 81 11
Pairelle sont réaménagés afin sont pas engagés dans les centre.spirituel@lapairelle.be
d’offrir un espace - nommé activités du Centre. www.lapairelle.be

–­­45–
jésuites Monde
Rapprochement entre Maghreb
et Proche-Orient
Ignace de Loyola avait déjà envoyé dès 1551 les Pères Nuñez et Bogado à
Tetouan, au Maroc. Qu’en est-il aujourd’hui des personnes et des régions ?

L
a « Région Maghreb »
de la Province de
France a été consti-
tuée en 1986 ; le Père Géné-
ral Peter Hans Kolvenbach
demandait de travailler « en
lien avec la Province du
Proche-Orient et les Pro-
vinces voisines ».

n Les personnes
Les trois quarts des jésuites
présents au Maghreb ont ef-
fectué des séjours au Proche-
Orient durant des périodes
allant de quelques mois à Les jésuites du Maghreb lors de la réunion de Région à Ben Smen (Alger)
le 2 septembre 2011
deux ans. Pour remplacer les
jésuites français qui se re- autre étudie encore la théo- des candidats à la Compagnie
nouvellent lentement, le Père logie, et plusieurs songent au de Jésus, qui sont entrés par
Général a fait appel - au mi- Maghreb ; ils devront s’initier la suite au noviciat au Caire.
lieu des années 90 - à deux à l’arabe et à l’islamologie au Il est aussi fait appel à des
Provinces d’Amérique latine : Proche-Orient. volontaires : Caroline, CVX
le Mexique et la Colombie. Depuis 1986 l’enseignement syrienne, a passé six mois
Les régents se succèdent par se fait en arabe dans les à Ben Smen - les Algériens
deux, et l’un d’eux, mexi- écoles, collèges et lycées al- apprécient les Proche-orien-
cain – Ricardo Jimenez -, a gériens ; de même les études taux. La Région souhaiterait
terminé son troisième an et universitaires en sciences un arabophone « de souche »
devient directeur du Centre humaines. De ce fait, la com- dans chaque communauté
culturel universitaire à Alger. préhension de la langue fran- pour s’arabiser et pour le suc-
Un jésuite espagnol - Jesús çaise diminue. Depuis 2004, cès de ses activités.
León Blanco l’avait précédé : des scolastiques du Proche- Les chrétiens en Algérie sont
il est supérieur de la com- Orient sont venus de manière en majorité des étudiants
munauté de Constantine. Tel régulière en stage ainsi que d’Afrique subsaharienne, et

–46–
Les status de la Région Maghreb de 1986 - dépendante de la
Province de France -, ont été dissous pour trois ans en juillet 2010 ;
le supérieur majeur est le provincial de France. Son délégué pour conscience des chrétiens
le Maghreb a pour tâche d’animer la Région, de l’aider à prévoir présents sur le sol algérien.
l’avenir juridique de cette Région dans le cadre des modifications Un petit nombre d’Algériens
de gouvernement de la Compagnie souhaitées par la 35e Congré- frappent à la porte pour en-
gation générale. trer, et il convient de leur
répondre.
des travailleurs de diverses sociaux, culturels et religieux
nationalités ; l’appel à des semblables, quoiqu’avec leurs Toutes ces données concou-
jésuites d’Afrique est néces- spécificités. rent à un rapprochement de
saire. Ces Provinces sont in- la Région Maghreb vers la
téressées par les relations is- Ces mouvements donnent à Province du Proche-Orient.
lamo-chrétiennes en Afrique réfléchir aux chrétiens orien- Avec la révolution culturelle
du Nord, et les échanges taux : s’ils ne participent pas à de l’électronique, de l’Inter-
devraient se développer. Les la construction de leur société net et des réseaux sociaux, le
centres d’intérêt des jésuites avec les musulmans, ils seront monde arabe regarde les sites
se déplacent vers l’Est, même exclus de leur pays. Tout les Web chrétiens en arabe. Mais
si des relations vers le Nord incite à modifier leur rapport à une présence « en chair et en
restent importantes en rai- l’Islam ; la situation, le dernier os » permet de vérifier que ce
son de l’histoire, du nombre synode du Moyen-Orient, les qui est perçu à travers le vir-
encore majoritaire de jésuites discours du pape… De même, tuel est bien réel. Cette pré-
français, de groupes comme l’Algérie sort lentement de son sence réelle est un signe pour
« Les deux rives ». idéologie unitaire et reconnaît ceux et celles qui ne peuvent
des différences à l’intérieur du dire leur foi dans le milieu où
n Les régions pays : la langue amazighe est ils vivent ; ils viennent nous
Machreq devenue « langue nationale » le confier parfois explicite-
et Maghreb dans la constitution ; la liberté ment.
Les régions Machreq et Ma- de religion pourrait évoluer
ghreb montrent des diffé- lentement. Les jésuites de la Jean Désigaux, sj
rences qui ont laissé croire Région Maghreb prennent Délégué pour le Maghreb
à l’impossibilité de travailler
ensemble : la géographie, le Rencontre de la Province du Proche-Orient à Tanaïl, en août 2011,
où quatre jésuites du Maghreb participaient
rapport à l’Islam, les dispa-
rités de culte, le nombre de
fidèles, la taille des institu-
tions, les langues. Mais le
mouvement des révolutions
récentes dans les pays arabes
- appelé « printemps arabe »
par les pays occidentaux -
met en évidence une géopo-
litique arabo-musulmane : le
Maghreb et le Machreq vivent
des changements politiques,

–­­47–
jésuites Monde

Pierre Ceyrac (1914-2012)


Pierre Ceyrac, qui s’est éteint le 30 mai 2012
à Chennai en Inde, a laissé une trace profonde
chez de nombreux amis. Maurice Joyeux évoque
sa mémoire

V
isitant Pierre dans justice et justesse d’action Ce ne fut pas sans angoisses
le camp de réfugiés vis-à-vis des plus abandon- ni graves inquiétudes mais
cambodgiens de nés, victimes innocentes c’était à ses yeux le prix
SITE II, l’année où fut enfin des « forces d’en haut » qui à payer pour être au plus
signé le Traité de paix de épuisent le monde, dirait proche de milliers d’enfants
Paris (octobre 1991) qui per- saint Paul ! indiens. Le soutien de nom-
mettait le retour, sous pro- breux amis de l’association
tection de l’ONU, de tous les De retour du Cambodge, Pierre Ceyrac ou de l’Inde
habitants restants des camps Pierre traversa un désert même, de compagnons jé-
vers leur pays d’origine, j’ai d’action et d’identité qui fut suites qui le comprenaient,
vu combien Pierre avait le rude. Son séjour en Afrique fut précieux.
sens de l’action politique par au nom du JRS fut austère
l’amitié et le respect des ins- et sans lendemain possible. À dire vrai l’aventure d’Am-
titutions en place. Il partageait alors le sort de bukanragal (« Aux mains
nombreux acteurs humani- ouvertes », en Tamoul) au
n Tous acteurs, taires ayant à tout refonder cœur des bidonvilles et vil-
tous frères de leur existence et du sens lages aurait pu tourner au
Nous avons dansé avec les de leur action. drame plusieurs fois. Mais on
plus pauvres du camp mais connaît pire encore dans ces
nous avons aussi sabré le n Proche conditions sous-humaines !
champagne qu’il avait en des enfants Pierre marchait dans la
réserve avec les chefs de par- Il rebondit vite cependant et force du pain des pauvres.
tis actifs dans ces camps, les ne se laissa pas happer par la Pas n’importe quel pain. Le
hauts responsables d’ONG, désolation. Il revint en Inde, pain eucharistique à la table
des membres du HCR et de tâtonna depuis Loyola Col- duquel publicains et pécheurs
l’ONU. lege et s’allia bien vite avec sont invités.
un ancien enfant des rues de
Tous acteurs, tous frères po- Chennai entouré d’enfants Qui a vu le très beau film
tentiels d’une plus grande abandonnés et sans avenir. « Pierre Ceyrac, frère des in-

–48–
touchables » réalisé par Paul
de Sinéty, avec l’aide gé-
néreuse d’un grand réalisateur
allemand, comprendra toute
cette période de grand enga-
gement pour Pierre, pério-
de de grâce pour des milliers
d’enfants abandonnés.

n « Tout ce qui
n’est pas donné
est perdu ! »
Cette phrase tellement répé-
tée par Pierre et ses fans a
tellement marqué qu’on en Pierre Ceyrac avec des veuves cambodgiennes, dans un camp
oublie l’origine exacte. C’est
un proverbe sanscrit que frontement et renvoi à sa Xavier, jusqu’aux portes de
Pierre vit un jour au fronton différence, altérité radicale la Chine.
d’une léproserie indienne. « Il au-delà de tous les efforts
y a plus de bonheur à donner d’empathie et d’inculturation Pierre, c’est la liberté de
qu’à recevoir » dira un jour par la langue ou les modes l’esprit dans la fidélité aux
Jésus à l’homme riche que de vie. Ce fut le lieu de son pauvres, en soif de vérité, de
nous sommes tant ! combat sous la Croix, com- tendresse, de libération. Cette
me celui de son « souverain liberté éprouve les peurs, les
Si Pierre s’honorait d’être Maître et Seigneur de toutes paralysies, transcende jalou-
et de se sentir « intoucha- choses », écrit saint Ignace ! sies et jugements. Elle est
ble, dalit avec les dalits », Pierre revint souvent dans Loi nouvelle d’amour et de
il n’en confessait pas moins ce climat des Exercices qui charité.
sa solitude de missionnaire. forgèrent la « rude pâte »
Celle-ci, disait-il en confi- de l’apôtre et premier com- Maurice Joyeux, sj
dence, est un perpétuel af- pagnon d’Ignace, François

Les fruits d’une rencontre


Anita est une grande danseuse de Mohini Attam à Chennai. Elle rêve de danser sur des
textes bibliques. De la fenêtre baissée de son taxi dans l’immense capitale du Sud, elle
observe un homme chétif qui se penche vers des gueux en bord de trottoir. Il les touche,
leur parle avec affection, leur donne quelques roupies. Anita demande à descendre de son
véhicule et découvre Pierre, prêtre, religieux, français parlant Tamoul. Bouleversée, elle
échange avec ce vieil homme un peu fou à ses yeux. Mais c’est qu’il parle très bellement
ce vieil homme et cite les écritures judéo-chrétiennes !... Ils se reverront et deux années
plus tard, les JMJ de Paris offrent l’occasion d’aider Anita à accomplir son rêve : elle
dansera devant 3500 personnes Porte de Versailles, au cœur du spectacle Loyola XXI,
avec un jésuite avocat, dalit d’origine, sur fond du texte du sacrifice interdit d’Abraham.

–­­49–
jésuites Monde

Centre de Pékin pour les études


chinoises
Le Beijing Center est dirigé depuis l’été 2012 par un jésuite français,
Thierry Meynard. Il nous introduit à ce centre qui travaille dans
la tradition de présence des jésuites en Chine

D
ébut août 2012, n Accueil • Immersion dans la culture
j’ai pris mes fonc- des étudiants chinoise grâce à des
tions de directeur Une des tâches importantes “roomates” (chaque étu-
du Centre de Pékin pour les du TBC, est d’accueillir des diant vit avec un étu-
études chinoises (The Beijing étudiants (souvent améri- diant chinois pendant
Center for Chinese Studies, cains) qui veulent découvrir son séjour), tuteurs (aussi
ou TBC). Mon arrivée au TBC la Chine pour un ou deux se- des étudiants chinois), et
correspond à un désir d’inté- mestres grâce au programme “host students”, possibilité
grer davantage le centre dans dit « undergraduate ». Le de vivre dans une famille
la vie académique et intellec- groupe formé ainsi est très chinoise.
tuelle chinoise. international car même par- • Suivi individualisé des étu-
mi ceux qui viennent des diants grâce à des petits
États-Unis, bon nombre sont groupes : de 6 à 10 étu-
Préparé français, mexicains, coréens, diants en classe de chinois,
pour ce poste etc. Pour eux, venir au TBC de 5 à 20 en classe dite
Thierry Meynard a été est une expérience de contact culturelle (marketing, bu-
accueilli par le centre à avec la Compagnie, par la siness, politique, philoso-
son ouverture en 1998, pédagogie et par le nombre phie, histoire,...).
puis il y a donné des de jésuites impliqués dans la • Exigence intellectuelle : les
cours lors de ses études structure. Il y a entre le TBC cours dits “culturels” et de
de doctorat à l’Université et d’autres institutions jé- chinois sont validés par
de Pékin. suites des “traits de famille” : l’Université de Chicago
Enseignant à l’université • Approche globale de la Loyola, et les enseignants
d’État Sun Yat-Sen à Chine (linguistique et viennent des meilleures
Canton depuis 2006,
culturelle, théorique avec universités pékinoises.
titularisé par l’administra-
les enseignements et pra-
tion chinoise au rang
tique avec les voyages, la n Programmes
de professeur, il est habilité
à conduire des travaux vie quotidienne à Pékin, les à la carte
de thèse. possibilités de stage). Le TBC a aussi créé des pro-
grammes de courte durée, une

–50–
La bibliothèque du tbc
Elle comprend aujourd’hui plus de 25 000
livres. C’est la plus importante collection
en langue étrangère sur la Chine, sur le ter-
ritoire chinois. C’est la troisième bibliothèque
jésuite en Chine, après celle de l’église du
nord de Pékin, fondée au dix-septième siècle
et maintenant à la Bibliothèque nationale,
et celle des jésuites de Shanghai, maintenant
à la Bibliothèque municipale de cette ville.
La bibliothèque attire un grand nombre de
chercheurs, journalistes, écrivains, à la fois
chinois et étrangers. La collection de Jesuitica
Visite au TBC de Herman Van Rompuy
et de José Manuel Barroso, ici à la bibliothèque Sinica comporte une quarantaine de titres,
comme le journal de Matteo Ricci, publié
à Lyon en 1616, ou bien le Confucius Sinarum Philosophus, publié par la Bibliothèque
Royale en 1687. La dernière acquisition consiste dans l’encyclopédie sur la Chine
de Jean-Baptiste Du Halde, publiée en 1736, en quatre gros volumes.

à deux semaines. Le public est toire de l’interaction cultu- d’environnement (programme


divers : enseignants, profes- relle et religieuse entre la China Green) : comment la
sionnels de la santé, hommes Chine et l’Occident, notam- Chine gère-t-elle le défi du
d’affaire, groupes catho- ment avec les jésuites. Une développement durable ?
liques, etc. Le réseau du nouvelle édition des cartes
TBC permet d’organiser des de la Chine du géographe Le TBC est un espace de
séjours sur mesure, que ce Jean Baptiste d’Anville, va rencontre entre étudiants
soit pour les exposés, les être publiée. Le TBC est aussi étrangers et chinois, un mi-
visites, ou les rencontres de associé à la publication par lieu de collaboration aca-
partenaires locaux. Ainsi, les Belles Lettres de l’édition démique entre chercheurs.
lorsqu’un groupe de jésuites bilingue, critique et annotée, En s’engageant sur des pro-
ou proche de la Compagnie en chinois et en français du jets concrets, étrangers et
souhaite venir en Chine, le Sens du Seigneur du Ciel, de chinois apprennent à mieux
TBC est en mesure d’offrir des Matteo Ricci. Le centre sou- se connaître. Malgré les bar-
séjours adaptés à ce groupe. tient aussi des projets de re- rières, l’estime et l’amitié
Héritier de Matteo Ricci et de cherche sur Teilhard de Char- peuvent naître. Qu’on se le
ses compagnons, le TBC se din. Ces recherches et ces dise, le TBC à Pékin est la
fait une joie de favoriser ces publications sur l’histoire des maison des jésuites et de leurs
échanges culturels dans une jésuites en Chine sont bien amis : quiconque souhaite
perspective ignatienne. accueillies par les autorités venir en Chine ou découvrir
gouvernementales. cette culture y est le bienvenu.
n Un espace
de rencontre Le TBC aborde aussi des sujets Thierry Meynard, sj
Le centre encourage égale- liés à la réalité contemporaine, Directeur du Beijing Center
ment la recherche sur l’his- par exemple les questions

–­­51–
jésuites Monde

La Province du Zimbabwe
Cette Province fait l’expérience d’une transition entre les missionnaires
étrangers et les nationaux alors que les charges apostoliques sont
nombreuses

L’
histoire de notre n Un autre com- n Autosuffisance
Province commence mencement au XIXe Un peu plus d’un siècle plus
avec Gonçalo da Ce royaume a dû attendre tard, la Province du Zim-
Silveira, jésuite portugais, qui plus de 300 ans pour en- babwe compte aujourd’hui
a été envoyé en Inde en 1556 tendre de nouveau le mes- 120 membres, dont la moitié
pour être supérieur de cette sage chrétien, annoncé par sont des missionnaires (an-
mission. Mais se révélant d’autres jésuites, un curieux glais et allemands), et l’autre
peu doué pour cette tâche, mélange de Belges, d’Italiens, moitié des autochtones. Nous
il a fallu l’envoyer ailleurs. d’Allemands, d’Anglais et sommes en pleine transi-
C’est ainsi qu’il est venu en un du Liechtenstein. Ils sont tion, alors que les rênes du
Afrique, à Tété sur la côte de venus en 1879, deux mois pouvoir passent des mains
Mozambique. Il s’est alors di- après que le pape ait confié des missionnaires aux au-
rigé vers le Zimbabwe jusqu’à la Mission de Zambezi à la tochtones. Il faut apprendre
la cour du roi Munamatapa (à Compagnie. Onze ans avant d’autres manières de faire,
l’est du Zimbabwe). Il a réussi que Cecil John Rhodes n’ait centrées sur l’autosuffisance.
à convertir le roi et sa mère, réclamé le territoire pour lui- Deux écoles s’opposent sur
mais poussés par la jalousie, même et son entreprise, cette les questions financières de
certains commerçants mu- fondation marque les débuts nos œuvres : l’une soutient
sulmans ont persuadé le roi de notre Province. que les missionnaires doi-
d’exécuter da Silveira. vent introduire les nouveaux

Le visage de la Province
du Zimbabwe
responsables autoch- M. Mugabe, au pou-
tones à leurs bienfai- voir depuis l’indé-
teurs. D’autres disent pendance en 1980, la
que le rapport entre un Compagnie ne peut
missionnaire allemand pas rester neutre et
et ses donateurs est muette en raison des
très particulier et ne souffrances du peuple
peut pas être transmis du Zimbabwe. En
à un autre. Ils propo- Distribution de couvertures aux prisonniers par leur aumônier même temps, elle se
sent que les autoch- rend compte que se
tones tissent des liens avec gement du travail de nos débarrasser de Mugabe n’est
des bienfaiteurs locaux, une collaborateurs qui ignorent pas la seule solution : il res-
source de soutien qui n’est tout de notre spiritualité et tera un travail énorme de ré-
guère utilisée. Une chose est de nos objectifs. C’est pour- conciliation et de reconstruc-
sûre : nous aurons à lutter quoi le provincial a fait de tion. Sans nous mêler à des
contre la mentalité de dépen- la formation de nos collabo- bagarres partisanes, il faut
dance que notre gestion des rateurs une priorité absolue. que nous trouvions une ma-
affaires financières peut en- Il envisage de fusionner le nière d’être présent au peuple
traîner. L’idée que nous pou- centre social et le centre spi- dans son besoin d’éclaircisse-
vons devenir auto-suffisants rituel pour créer une syner- ment et de réconciliation. La
est encore étrangère à beau- gie autour de la priorité de la tâche est loin d’être simple,
coup de nos œuvres. formation de ceux avec qui mais nous ne pouvons pas
nous travaillons. nous dérober devant la né-
n Des communautés cessaire reconstruction du
très petites n Quelle position pays sur des valeurs de res-
En raison du nombre de nos politique ? pect de chaque individu et de
activités, nous vivons dans Le pays se préparant à des sa dignité humaine.
des communautés dont les élections en mars 2013,
effectifs dépassent rarement nous nous trouvons face à Isaac-El J. Fernandes, sj
trois. Si la CG 351 a reconnu un autre défi : comment dis- Scolastique zimbabwéen
que la communauté est aussi cerner notre rôle dans la vie étudiant au Centre Sèvres
un aspect de notre mission, politique du pays ? Face au
nous avons du mal à créer totalitarisme du président, 1. 35e Congrégation générale.
des communautés dyna-
miques qui soient une source
Apostolat de la Province
de vie pour les nôtres.
• 8 paroisses,
• 16 écoles,
n La formation des • un centre social et plusieurs initiatives dans le champ social,
collaborateurs • un centre spirituel et plusieurs centres pour les jeunes,
Vu le nombre de nos apos- • l’aumônerie de tous les établissements de l’éducation supérieure,
tolats pour un nombre réduit • un orphelinat,
de jésuites, la majorité de • un centre de communication
nos œuvres dépendent lar-

–­­53–
jésuites Monde

ABÉCÉDAIRES D’UN 3e AN AU CHILI


« Dieu le traitait comme un maître d’école se comporte avec un enfant »
(Récit n°27). Pour Ignace, l’ultime étape de la formation jésuite est
« l’école du cœur », sorte de « laboratoire » pour retravailler sa disponi-
bilité intérieure et repérer appels et illusions. Dans mon cas, cette expé-
rience s’est vécue au Chili

C
e furent d’abord trois mois pour contexte
apprendre la langue, me poser (ce Arica, ville tout au Nord
n’était pas la grande forme), partici- où j’ai séjourné deux fois
per aux missions jésuites sur place (dont un Ballets religieux, mélange de Carnaval
trekking andin avec des étudiants) et enfin dé- et de Lourdes, une inculturation réussie
Chili, « extrémité de la terre » (Ps 18,5)
couvrir un pays qui partage bien des saveurs
Dorian, jésuite américain avec
avec ma Martinique natale. Puis avec les 11
qui on a bien partagé et ri
autres tertiaires de dix nationalités, ce fut six
Église locale, grande vitalité mais
mois de recul avec les 30 jours, des sessions
rude crise de crédibilité
sur les vœux et de décapants temps de service
Foot, une vraie religion
(personnes âgées, migrants, prison). Parmi les
Gabriela Mistral et Pablo Neruda,
questions traversées : qu’est-ce qui a été le plus prix Nobel de littérature
marquant durant ces 15 ans de Compagnie ? Hans, patient et courageux dans sa lutte
Où en suis-je de mon engagement ? Qu’est-ce contre ses addictions
qui me structure ou au contraire doit mourir Illapu, mon groupe de musique préféré
car « tout n’est pas profitable » (1 Co 6,12) ? Juan Diaz, el señor instructor,
Jésus-Christ est-il toujours mon « poto mitan » ex-maître des novices et ex-provincial
(« mur porteur » en créole) ? Comment être Kenel, jésuite haïtien, mon binôme
religieux et prêtre dans un contexte si sécula- de mission
risé ? Où allons-nous comme Province et aussi Langue : parler et prier dans une autre langue
comme Congrégation ? Comment vivre l’inter- oblige à se simplifier
générationnel au quotidien ? Durant ces neuf Mapuchés, indigènes toujours en lutte
mois, il a été en fait question de réapprendre pour récupérer leur terre
à lire l’action de Dieu dans ma vie et à l’écrire Nature variée : mer, désert et montagne
et aussi lama, condor et pingouin !
pour mieux en rendre compte. Oui, je suis re-
Océan pas si Pacifique que cela
tourné à l’école, d’où ces deux abécédaires.
Pinochet : no comment
Ainsi le chemin de conversion s’approfondit à
Qualité de l’accueil reçu
travers ces deuils, ces tâtonnements et ces joies
Roberto et Roman, jésuites chiliens
et avec comme horizon en todo, amar y servir.
anciens étudiants du Centre Sèvres,
Manuel Grandin, sj qui ont facilité ma venue

–54–
Kénose, itinéraire à suivre (Ph 2)
Lazare, comme lui, j’ai entendu
« sors de ton tombeau »
Marie, celle « qui ravit le cœur
de Dieu » et nous accompagne
Nouveauté de Dieu (Ap 21,1)
à découvrir sans cesse
Oracion : grandir dans l’intimité
avec Lui
Père Duval, modèle de fragilité,
de musique et de foi
Crise de la Quarantaine
Renoncements nombreux
et nécessaires « au Service de
la mission du Christ »
Les refrains de Taizé m’ont
Ballets religieux, une inculturation réussie
bien inspiré
Unité intérieure à rechercher
sans volontarisme
Santiago, capitale contrastée entre « Va, quitte ton pays » m’a-t-il été dit
ses buildings et ses bidonvilles comme à Abraham
Tremblements de terre, expérience familière « Wouvé zyé mwen » (« ouvre mes yeux »),
Universalité du groupe : riche et exigeant chant liturgique créole
Valparaiso, le grand port François-Xavier, apôtre infatigable
Pas de Wagons là-bas, trajets qu’en bus « Mystique aux Yeux ouverts » : apprendre
ou en avion à chercher Dieu dans un réel complexe
Xavier et Anne-Laure, expats français Zen : accueillir la paix au cœur des combats.
devenus mes amis
Youtube, mine d’or musicale
Zidane, plus connu que Sarkozy.

L’expérience en elle-même
Affectivité à laisser convertir tous les jours
« Par ses Blessures, nous sommes guéris »
des nôtres (Is 53,5)
Combat spirituel : il est réel car
l’adversaire ne dort pas (1 P 5,8)
David et ses psaumes (surtout le 90)
m’ont souvent habité
Église à aimer sans l’idéaliser
ni la caricaturer
« Un Feu qui en engendre d’autres »,
expression de saint Alberto Hurtado, sj
Générosité : elle ne suffit pas pour durer
Hogar de Cristo, sorte de Secours Catholique
fondé par Hurtado et où j’ai pas mal sévi
Ignace, le maître
Joie, la base de tout Quitter son pays et traverser en confiance le désert

–­­55–
jésuites Monde

Célébrer le rétablissement
de la Compagnie en 1814
Diverses institutions préparent la commémoration
du deuxième centenaire du rétablissement
de la Compagnie de Jésus dans le monde

Sceau du Père Brzozowski,


Général de la Compagnie en Russie

n Décentralisation celle-ci qui ont pu déformer


Les commémorations de- son message ?
vraient être décentralisées
dans les différentes régions Les Provinces sont donc ren-
du monde : dans chaque lieu, voyées à leur propre histoire,

L
e Père Général, Adolfo les spécialistes, historiens même s’il est prévu, sous une
Nicolás, a envoyé et théologiens, sont invités forme assez légère, un événe-
une lettre à tous les à examiner les raisons par- ment à Rome, le 7 août 2014,
supérieurs de la Compagnie ticulières de cette suppres- jour anniversaire. Il s’agit de
de Jésus le 1er janvier 2012 sion et ses conséquences provoquer une nouvelle in-
pour évoquer la commémo- plus ou moins graves dans telligence spirituelle de notre
ration du 7 août 1814, date ce contexte national ou tradition, plutôt que de faire
où la Compagnie a été réta- régional. Certains pays ont de grandes commémorations
blie par Pie VII, par la bulle particulièrement souffert de d’un événement passé.
« Sollicitudo omnium eccle- la disparition des missions
siarum ». et des nombreuses écoles n Des initiatives
tenues par les jésuites. Com- déjà connues
Elle avait été supprimée par ment l’Inde et la Chine ont- Pour approfondir toutes ces
Clément XIV en 1773, mais elles réagi ? Comment la questions, divers colloques
avait survécu notamment en Colombie ou le Brésil ont-ils et rencontres sont organi-
Russie où, à partir de 1801, vécu le départ des jésuites ? sés dans le monde entier. Un
les Pères Gruber et Brzo- Quelle fut la part prise par grand colloque qui devrait se
zowski furent Supérieurs les politiques et les « philo- tenir à Rome est déjà prévu
généraux (voir l’article du sophes » dans la suppression entre Paris (EHESS), la Gré-
Père Lécrivain dans Jésuites de la Compagnie en Europe ? gorienne et l’École française
automne 2012). Quelles furent les erreurs de de Rome. Une autre réunion

–56–
étudiera en Suisse à Brigue,
du 3 au 5 septembre 2014, ce
qu’était l’environnement de
cette époque pour les jésuites
et ceux qui ont été disper-
sés. L’Institut de spiritualité
de l’Université Grégorienne
a déjà lancé pour l’année
2012-2013 une série de six
conférences. Pareillement
l’Université de Louvain et les
jésuites du Benelux organi-
seront des colloques durant
l’année à venir. Bref « Catholicae fidei » de Pie VII, approuvant la Compagnie en Russie en 1801
(Archives de la Compagnie de Jésus, Rome)
Beaucoup de Provinces qui
avaient de nombreux col- publieront aussi un livre sur tiellement en russe. Mais des
lèges avant la suppression, leur histoire et organisent des historiens comme Marek In-
s’efforceront de retrouver les conférences. glot, un jésuite polonais, ont
traces de ces lieux d’ensei- déjà travaillé cette période. Il
gnement pour créer un pont C’est probablement l’Espagne reviendra ensuite aux Pro-
avec les nouvelles institu- qui a le programme le plus vinces particulières de tirer
tions. Le même effort de re- diversifié avec des activités les conclusions de tous les
cherche des figures du passé dans les collèges, des publi- travaux menés localement.
sera accompli par les Pro- cations, une exposition am- Car, comme le dit le Père
vinces d’Autriche, de Hon- bulante, un agenda annuel, Général dans sa lettre, « ap-
grie et de Slovaquie sur leur des conférences à Comillas, prendre du passé est l’une
appartenance à une Province etc. À Boston College, aux des façons de reconnaître
commune à la fin du XVIIIe. États-Unis, aura lieu éga- notre place dans l’histoire du
lement un colloque en juin salut comme compagnons de
Les initiatives sont diverses : 2014. À Mexico, il en sera de Jésus, ce Jésus qui rachète
les jésuites anglais ont de- même. À Malte, les jésuites toute l’histoire humaine ». La
mandé à un artiste de faire organiseront aussi des ren- Province de France est invi-
les portraits de douze jésuites contres. tée à faire le même travail,
éminents. Les jésuites alle- prenant un regard large sur
mands vont faire une grande n Un travail à faire ces événements de la sup-
exposition à Munich, plus Pour ce qui concerne la Com- pression. Le Père Lécrivain,
une exposition ambulante ; pagnie universelle, il faudra qui publiera deux ouvrages à
il y aura également la publi- étudier la période intermé- cette occasion, a été nommé
cation des trois volumes de diaire où la Compagnie s’est par le Père Provincial pour
l’histoire des Provinces ger- maintenue en Russie, avec la coordonner ces efforts.
maniques de 1810 à 1983 par difficulté que les documents
Klaus Schatz, sj. Les Hongrois de cette période sont essen- Pierre de Charentenay, sj

–­­57–
jésuites Monde

Le FACSI : un fonds de solidarité


Créé par le Père Arrupe, ce fonds permet des soutiens à des projets
dans l’éducation, le social ou la pastorale dans des situations
de grands besoins

L
ors de la 32e Congré- gnie. Ce fonds est un moyen de donner 5% des donations,
gation Générale1, con- par lequel les jésuites se legs, héritages ou renoncia-
voquée par le Père remettent en mémoire cette tions reçus, de même que le
Pedro Arrupe en septembre dimension de leur vie qu’est produit de la vente de cer-
1973, fut voté un décret sur « la solidarité avec chacun tains immeubles.
la pauvreté. Il cherchait à en- dans la mission » comme le
courager une plus grande at- rappelait le Père Adolfo Ni- Le FACSI contribue ainsi à
tention au partage des biens colás dans une lettre du mois des programmes ou projets
« pour que notre pauvreté de décembre 2011. mais ne peut les soutenir
se fasse plus authentique ». qu’une seule fois car il ne
Aussi fut créé « un Fonds n Une solidarité peut assurer le fonctionne-
caritatif et apostolique, non des communautés ment ordinaire.
capitalisé, en faveur des et des Provinces
communautés et œuvres de Chaque communauté est en- n Quarante projets
la Compagnie » mais aussi couragée dans la mesure de dans le monde
pour subvenir aux besoins ses ressources à être géné- Au cours de l’année 2011, une
extérieurs éventuels. reuse avec les plus pauvres quarantaine de projets, dont
et à le manifester en faisant le budget varie entre 6 000 et
Le FACSI (Fonds aposto- un don. Le FACSI est ainsi 50 000 €, ont été soutenus :
lique et caritatif de la Com- alimenté par les apports des une dizaine au service de
pagnie) était né, un moyen Provinces, des communau- l’éducation et de l’apostolat
dont la Compagnie se dotait tés, des bienfaiteurs et, dans intellectuel, qui représentent
pour aider financièrement les limites de leurs possibili- un peu moins de la moitié de
les œuvres qui sont dans le tés, des œuvres apostoliques. l’ensemble des projets (équi-
besoin. L’administration de Chaque Province apporte au pements pour les collèges en
ce fonds est laissée à la libre minimum l’équivalent des Tanzanie, Haïti, Inde, Liban) ;
disposition du Père Général dépenses moyennes d’une également une dizaine de
et de l’économe général ainsi journée de tous les membres projets dans le domaine pas-
qu’à une commission spéciale de la Province. Elles peuvent toral (construction ou réno-
comprenant des membres de aussi être plus généreuses. Il vation de centres de retraite
diverses parties de la Compa- leur est demandé également spirituelle, en Pologne, au

–58–
Paraguay, en Roumanie, en rapport 2011 du FACSI, un moyens financiers. Le Père
Russie) ; puis sept dans le do- tiers pour l’Amérique latine, Général Adolfo Nicolás ne
maine social, achat de maté- un quart pour l’Asie et un cesse pourtant d’inciter les
riels (véhicules, moulin à cé- sixième pour l’Afrique. Les jésuites à « renouveler l’élan
réales pour le Mozambique, le fonds proviennent à plus de et la solidité » de ce fonds de
Pérou). Ils représentent cha- 80% de l’Europe et de l’Amé- solidarité afin de « réduire
cun un quart des fonds attri- rique du Nord. toujours davantage l’isole-
bués. L’ensemble des projets ment de ceux qui mènent
financés représentent près de Depuis 2005, les contribu- leur combat avec peu et
800 000 € et se répartissent tions au FACSI n’ont cessé luttent aux frontières ».
ainsi : un tiers pour des pro- de diminuer tandis que les
jets européens comme le sou- demandes ont augmenté. Franck Delorme, sj
ligne le Père Général dans Beaucoup de projets n’ont pu 1. Elle se déroula du 1er décembre
sa lettre qui accompagne le être acceptés par manque de 1974 au 7 mars 1975.

Solidarité de la Province de France

La cour de l’école maternelle créée par le JRS à Casablanca, au Maroc,


pour les enfants des migrantes sub-sahariennes

La Province de France, en 2010-2011, en plus de sa participation au FACSI, a soutenu


grâce aux dons des communautés - près de 80 000 € - des projets tels que le Jesuit
Refugee Service au Maroc et en Somalie, les Jeunes Volontaires Internationaux (finan-
cement des billets d’avion des volontaires), et des programmes concernant l’éducation
et la formation des jeunes avec Magis (proposé lors des JMJ de Madrid 2011). Enfin
deux soutiens ont été effectués pour l’Afrique, l’un à Bangui en République Centrafri-
caine pour aider à la préparation de la congrégation provinciale début 2012, l’autre au
Tchad pour l’hôpital de Goundi dirigé par le Frère jésuite chilien Leopoldo Labrin, un
projet coordonné par le Père jésuite italien Angelo Gherardi.

–­­59–
jésuites

Derniers vœux
de Karl Lauricourt

Le 3 décembre 2011, Karl Lauricourt


a prononcé ses derniers vœux en présence
de Jean-Yves Grenet, provincial, et de
Mgr Aubry, évêque de la Réunion, en l’église
Saint-François-Xavier de Saint-Denis
de la Réunion.

Karl apportant
des « pluies d’or »
à la Vierge

–60–
petite bibliothèque jésuite
La Petite bibliothèque jésuite (pbj) des éditions Lessius publie ses
trois premiers ouvrages, fruits d’une collaboration étroite entre les deux
Provinces de France et de Belgique méridionale et Luxembourg :

« Les Exercices spirituels :


le secret des jésuites »,
par Mark Rotsaert,
96 p. 12 euros

« Les jésuites et la Chine :


de Matteo Ricci à nos jours »,
par Benoît Vermander,
152 p. 12 euros

« Mathématiques, astronomie, biologie


et soin des âmes : les jésuites et les sciences »,
par François Euvé,
152 p. 12 euros

Contact : info@editionslessius.be
Éditions Lessius - Boulevard Saint Michel 24 - BE-1040 Bruxelles
Tél. : +32(0)2 739 34 90 – Fax : +32(0)2 739 34 91

–­­61–
jésuites

Jésuites défunts
Octobre 2011 – Septembre 2012

Le jour viendra où,


dans ma propre chair,
je verrai Dieu,
mon Rédempteur

- P. Alain ABEILLE, né en 1925 à Sarrebruck. De santé fragile, il a été au service du


secrétariat des provinciaux et de diverses communautés.
- P. Jean-Claude BADENHAUSER, né en 1934 à Mulhouse. Aumônier d’étudiants,
puis provincial, responsable des maisons d’accueil du Châtelard et de Chantilly ;
puis à Mulhouse et enfin Nancy.
- Mgr Xavier BARONNET, né en 1927 à Nantes. Spécialiste de sociologie religieuse
en France, en Afrique et dans l’Océan Indien ; aumônier national scout ; évêque des
Îles Seychelles.
- P. Georges BLANC, né en 1929 à Lyon. Professeur de lycée et aumônier, à Marseille
surtout (collège, Roucas, résidence), mais aussi à Dijon, Aix-en-Provence et Lyon.
- P. Pierre BRUNETTI, né en 1924 à Paris. Service apostolique en milieu populaire de
la région parisienne, auprès des migrants, notamment des Portugais ; et au service
de ses frères à la Chauderaie.
- P. Pierre CEYRAC, né en 1914 à Meyssac (Corrèze). 70 ans de labeur ininterrompu
au service de l’Inde, auprès des étudiants, des dalits, des réfugiés du Cambodge, des
enfants orphelins.
- P. Calixte COUFFIN, né en 1922 à Colombies (Aveyron). Enseigne 40 ans à l’école
d’agriculture de Purpan (Toulouse), et y fonde le laboratoire d’informatique et
d’économie financière.
- P. Georges COUTURIER, né en 1927 à Paris. 48 ans au service du Maroc : à partir
du collège agricole de Temara, il devient pour les gens des environs toubib dyalna,
« notre docteur à nous ».
- P. Yves DANIEL, né en 1927 à Flaux (Gard). Son pays ? Le Tchad. Sa priorité
apostolique ? Les jeunes. Ses moyens ? L’aumônerie de lycée, des centres culturels,
l’enseignement de l’histoire.

–62–
- P. Roger DARDE, né en 1930 à Paris. Il s’est dévoué aux tâches d’administration
et d’économat en France (Paris, Lyon, Vanves) et en Afrique (Abidjan, Ndjamena,
Ouagadougou, Douala).
- P. Robert DUBOIS, né en 1917 à Dinard (Ille-et-Vilaine). Plus de 60 ans à
Madagascar : pastorale, étude de la spécificité malgache, catéchèse, publications,
accompagnement spirituel.
- P. Jean DUMORT, né en 1926 à Paris. Il a été aumônier à l’École Polytechnique
(élèves et anciens), du Secours Catholique, responsable de « Soins et Repos » rue de
Grenelle.
- P. Pierre FÈVRE, né en 1918 à Neuilly (Hauts-de-Seine). Écarté de l’enseignement
de la philosophie en scolasticat, il travaille comme cadre d’entreprise, dont dix ans
à Abidjan en Côte-d’Ivoire.
- P. Louis FONTAN, né en 1922 à Lourdes. Enseignant de philosophie à Montpellier,
Bordeaux et Tananarive, puis aumônier à Bordeaux, enfin à Pau père spirituel de
la communauté.
- P. Albert HANRION, né en 1912 à Grenay (Pas-de-Calais). Appelé d’abord à la
mission de Chine, il est chargé à Vanves des CARS, puis est un des fondateurs de
l’INADES à Abidjan.
- P. René HATINGUAIS, né en 1928 à Yvetot (Seine-Maritime). Prêtre ouvrier (après
les difficiles débuts des années 50), avec un engagement syndical, fidèle jusqu’au
bout au monde ouvrier.
- P. André HERBULOT, né en 1912 à Épernay (Marne). Engagé dans la Mission
Ouvrière autant qu’il le put, curé de Longueau, puis ministre et économe dans
plusieurs communautés.
- P. Gaëtan de LA FAGE, né en 1921 à Toulouse. Plus de 50 ans dans sa ville
de Toulouse, comme (entre autres) aumônier d’étudiants, directeur, supérieur,
accompagnateur spirituel, ami plein d’humour.
- P. Paul de LA GUÉRIVIÈRE, né en 1920 à La Rochelle. 67 ans en Inde, entièrement
consacrés aux universités catholiques du pays, et à l’Institut social indien de
Bangalore et de Delhi.
- P. Jean MAMBRINO, né en 1923 à Londres. Professeur de lettres au collège de
Metz, puis critique littéraire et de théâtre à la revue Études, surtout poète, il a publié
plusieurs œuvres et cultivé d’étroites relations avec romanciers ou poètes.
- P. Jacques de MAUROY, né en 1921 à Arnas (Rhône). Aumônier au collège de
Marseille, il se consacre ensuite pendant 45 ans au ministère des Exercices Spirituels
et de l’accompagnement.
- P. Pierre MESSIÉ, né en 1924 à Bourg-Saint-Andéol (Ardèche). Aumônier du MEJ
à Toulouse et Marseille, puis en paroisse à Marseille encore et à Bastia jusqu’à la
fermeture de la résidence.
- P. Louis NEYRAND, né en 1915 à Saint-Maurice l’Exil (Isère). Professeur de lettres
et aumônier aux collèges de Dole et Saint-Étienne, il travailla ensuite jusqu’à la fin
aux Sources Chrétiennes.

–­­63–
jésuites

- P. Joseph PARAMELLE, né en 1925 à Bourg-en-Bresse (Ain). Chercheur au CNRS


et à l’École pratique des hautes études, il publie aux Sources Chrétiennes Syméon
le Nouveau Théologien.
- P. Michel PELTEREAU-VILLENEUVE, né en 1924 à Nancy. 60 ans consacrés à
Madagascar, d’abord sur l’île elle-même, ensuite comme aumônier des communautés
malgaches en France.
- P. Xavier du PENHOAT, né en 1927 à Cleder (Finistère). En Bretagne, d’abord
missionnaire de l’intérieur, puis travail en paroisses et aux Centres diocésains
d’information.
- P. Christian RIGARD-CERISON, né en 1952 à La Tronche (Isère). Au service de ses
frères en communauté, sa vie fut un long combat contre la maladie.
- P. Éric de ROSNY, né en 1930 à Fontainebleau (Seine-et-Marne). Au Cameroun et
à Abidjan (INADES), il fut provincial et s’est imprégné de la culture africaine et des
pratiques des guérisseurs traditionnels.
- P. Jean SAINT-RÉMY PELLISSIER, né en 1924 à Marseille. D’abord au Liban, comme
“arabisant”, ministre et économe, il continua les mêmes tâches administratives dans
le sud de la France.
- P. Henri SPRINGER, né en 1926 à Heidelberg (Allemagne). Professeur de chimie
à Sainte-Geneviève puis Purpan, il fut aussi curé de paroisse près de Toulouse, et
“habitué” d’un funérarium à Montpellier.
- P. Henri d’Aviau de TERNAY, né en 1940 à Brélès (Finistère). Professeur de
philosophie à l’université catholique de Rio de Janeiro, puis, à Paris, à l’Institut
catholique et au Centre Sèvres.
- P. Jean-Marie TÉZÉ, né en 1919 à Thouars (Deux-Sèvres). À Paris, et presque
toujours dans la communauté de la rue de Sèvres, il fut « initiateur » à l’esthétique.
Il fut surtout sculpteur.
- P. Paul VEYRON, né en 1916 à Les Eglisottes (Gironde). Directeur du collège de
Saint-Étienne, puis animateur de retraite et supérieur à Annecy, Besançon, Dijon,
et père spirituel de la communauté d’Athènes.
- P. Henri VILLIERS, né en 1927 à Lyon. Après sept ans au Japon et de graves ennuis
de santé, il partage la vie du monde ouvrier de la banlieue de Lyon jusqu’à six mois
avant son décès.
- P. Jean VOUTSINOS, né en 1921 à Varis (Grèce). Chargé pendant plus de 30 ans des
jeunes (le MEJ) à Syros et surtout à Tinos, il s’occupa ensuite à Athènes d’économat
et de diverses aumôneries.

–64–

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