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Cours International

Francophone de Vaccinologie

Diplôme Universitaire
de Vaccinologie 2015-2016

SUIVI DU STATUT VACCINAL PAR


LE PHARMACIEN D’OFFICINE GRACE A L’ENTRETIEN
PHARMACEUTIQUE

Présenté par
Mme Flavie LEGAT-BURELLE
Née le 06/05/1975

JURY
Président Pr D Malvy
Membres Pr JL Koeck
Pr R Migliani
Pr P Saliou
Table des matières

Liste des abréviations .............................................................................................................................. 3

Introduction............................................................................................................................................. 4

Les nouvelles missions du pharmacien en Santé Publique ............................................................. 4

L’accessibilité : un atout majeur du pharmacien d’officine. ........................................................... 5

Les couvertures vaccinales en France : une marge de progression importante ............................. 6

I. LE CARNET DE VACCINATION ELECTRONIQUE : UN OUTIL D’EXPERTISE ET DE SUIVI VACCINAL


PERSONNALISE A L’OFFICINE................................................................................................................... 7

1. Limites du Dossier Pharmaceutique et nécessité d’un outil numérique adapté ........................ 7

2. Présentation du carnet de vaccination électronique de Mesvaccins.net, prérequis.................. 8

3. Partage des données, implication du patient ............................................................................. 9

II. METHODOLOGIE DU SUIVI VACCINAL SOUS LA FORME D’UN ENTRETIEN PHARMACEUTIQUE... 10

1. Qu’est-ce que l’entretien pharmaceutique ? ............................................................................ 10

2. Premier entretien : l’audit vaccinal personnalisé...................................................................... 11

a) Objectif .................................................................................................................................. 11

b) Méthodologie, déroulement du premier entretien .............................................................. 11

c) Exemple d’audit vaccinal ....................................................................................................... 13

3. Deuxième entretien : création du carnet de vaccination électronique et remise du bilan


vaccinal au patient ............................................................................................................................ 16

a) Objectifs ................................................................................................................................ 16

b) Méthodologie et déroulement du deuxième entretien........................................................ 16

4. Champ d’application : critères d’inclusion de la patientèle à l’entretien pharmaceutique...... 18

Conclusion ............................................................................................................................................. 20

Bibliographie ...................................................................................................................................... 22

2
Liste des abréviations

AVK : antivitamine K

CVE : Carnet de Vaccination Electronique

DMP : Dossier Médical Personnel

DP : Dossier Pharmaceutique

EP : Entretien Pharmaceutique

InVS : Institut de Veille Sanitaire

ROSP : Rémunération sur Objectif de Santé Publique

UNCAM : Union National des Caisses d’Assurance Maladie

URPS : Union Régionale des Professionnels de santé

3
Introduction

Les nouvelles missions du pharmacien en Santé Publique

La pharmacie d’officine est l’établissement affecté à la dispensation au détail des


médicaments. Le pharmacien d’officine est donc garant de la sécurité du circuit du vaccin
(conformité de la prescription, respect de la chaîne du froid, notification des effets
indésirables).

Cependant, depuis le 21 juillet 2009, la loi « hôpital, patients, santé, territoires » [1] donne au
pharmacien une nouvelle mission de prévention. Il doit : « (…) concourir aux actions de veille
et de protection sanitaire organisées par les autorités de santé (…)», « (…) participer à
l’éducation thérapeutique et aux actions d’accompagnement de patients (…) »,
«(…) proposer des conseils et prestations destinés à favoriser l’amélioration ou le maintien
de l’état de santé des personnes(…) ».

L’Académie Nationale de Pharmacie vient appuyer et préciser le rôle du pharmacien


d’officine dans le suivi vaccinal des patients dans son rapport « Le rôle des pharmaciens dans
la prise en charge de la vaccination » de février 2011[2]. « (…) Le pharmacien d’officine est
un professionnel de santé hautement qualifié. Son pré-positionnement sur le territoire, sa
maîtrise d’une logistique très spécifique des vaccins, ses systèmes d’informations
particulièrement performants en font un acteur de choix de la couverture vaccinale (…) ».

L’amélioration de la politique vaccinale en France est définie par le Programme National


d’amélioration de la politique vaccinale 2012-2017 [3]. Tout récemment, dans son rapport sur
la politique vaccinale de janvier 2016 [4], Sandrine Hurel, ancienne députée de Seine
Maritime décrit le pharmacien comme « (…) un acteur essentiel compte-tenu de ses
obligations générales de conseil, d’orientation vers un praticien qualifié et de
pharmacovigilance (…) », « (…) un interlocuteur majeur des patients notamment dans le
domaine de la prévention y compris de la vaccination (…) ».

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L’accessibilité : un atout majeur du pharmacien d’officine.

Chaque personne est concernée par la vaccination qu’elle soit malade ou bien-portante et de
ce fait une partie de la population échappe au dialogue relatif à la vaccination si elle ne
consulte pas régulièrement son médecin traitant. Le pharmacien d’officine établit un lien
privilégié basé sur la confiance avec la plupart des personnes qui le sollicitent. Il connait
celles-ci d’un point de vue global (famille, profession, milieu de vie, maladies chroniques ou
traitements suivis…) ce qui lui permet de personnaliser ses conseils, une action
particulièrement importante en matière de vaccination (recommandations particulières). Lors
d’une étude réalisée dans le cadre d’une thèse de doctorat en pharmacie [5], le rôle que les
patients voudraient voir jouer par leur pharmacien pour les aider à gérer leurs vaccinations a
été évalué sous la forme d’un questionnaire diffusé dans des pharmacies d’officine du Nord-
Pas-de-Calais et auquel 109 personnes ont répondu. L’une des premières tendances qui se
dégage est la volonté des patients d’une personnalisation des conseils et du suivi de leurs
vaccinations, éventuellement sous la forme d’entretiens avec leurs pharmaciens. D’autre part,
le pharmacien d’officine est le professionnel de santé le plus accessible, sans rendez-vous,
gratuitement, sur de larges plages horaires et avec un maillage territorial harmonieux. Ainsi,
près de quatre millions de personnes poussent chaque jour la porte d’une officine [6]

Enfin, le pharmacien d’officine travaille la plupart du temps en équipe. Il peut alors plus
facilement dégager du temps pour le dialogue. Le travail en équipe favorise également la
discussion entre professionnels de santé, la compréhension et donc l’application des
recommandations. On sait que la vaccination est à l’origine de beaucoup de questions, de
craintes, de réticences de la part du grand public Une étude récente de la London School of
Hygiene and Tropical Medicine [7] montre que la France est le pays au monde le plus hésitant
sur la vaccination. Quatre français sur dix estiment que les vaccins ne sont pas sûrs. Certaines
personnes ne comprennent pas l’intérêt de se faire vacciner alors que certaines maladies ont
disparues. Il faut alors des compétences mais également du temps pour rassurer, motiver,
convaincre. Le travail en équipe permet aussi de dégager du temps pour créer, alimenter et
consulter un outil de suivi vaccinal (CVE, DP, EP…). Il est aussi possible de nommer un
référent vaccination au sein de la pharmacie.

5
Les couvertures vaccinales en France : une marge de progression importante

En ce qui concerne la primovaccination des nourrissons, les niveaux de couverture vaccinale,


analysées par l’Institut de veille sanitaire (InVS) [8] vont dans le sens de résultats tout à fait
satisfaisants pour la diphtérie, la poliomyélite et le tétanos mais ce constat est plus nuancé
pour les infections invasives à méningocoques, la rougeole et la rubéole, l’hépatite B.

Chez les adolescents, les couvertures vaccinales contre les infections à papillomavirus et
méningocoque C qui sont très insuffisantes.

Les recommandations particulières sont déterminées par d’autres facteurs que l’âge ou le
sexe. Les personnes éligibles à ces recommandations présentent un risque plus élevé de
développer la ou les maladies à prévention vaccinales correspondantes ou une forme plus
grave de ces maladies. Dans certains cas, c’est l’entourage de ces personnes qui présente un
risque plus élevé de maladie à prévention vaccinale. Pour ces groupes à risque (personnes
asthmatiques, diabétiques, ayant reçu une chimiothérapie, femmes enceintes, personnes ayant
un nouveau-né ou une personne immunodéprimé dans leur entourage). Les couvertures
vaccinales sont là aussi souvent très insuffisantes ou méconnues. Ces faibles couvertures
vaccinales sont bien souvent liées à un défaut d’informations et non pas à un manque
d’adhésion de la part du patient.

Enfin, les couvertures vaccinales concernant les rappels dTP (ou diphtérie-tétanos-
poliomyélite) chez l’adulte sont également insuffisantes car les traces vaccinales sont souvent
perdues et le recalage sur le nouveau calendrier vaccinal en vigueur depuis 2013 souvent mal
compris et appliqué.

Ainsi, il reste beaucoup à faire pour améliorer les couvertures vaccinales. Le pharmacien
d’officine dans le cadre de ses nouvelles missions peut intervenir dans chaque catégorie de
population où les recommandations vaccinales sont mal ou peu appliquées afin d’informer sur
le statut vaccinal et d’orienter vers une consultation médicale le cas échéant. Le pharmacien
d’officine peut aussi proposer aux personnes d’utiliser une application pour les aider à
conserver leur historique vaccinal et à prendre en main elles-mêmes leurs vaccinations.

6
I. LE CARNET DE VACCINATION ELECTRONIQUE : UN OUTIL
D’EXPERTISE ET DE SUIVI VACCINAL PERSONNALISE A
L’OFFICINE

1. Limites du Dossier Pharmaceutique et nécessité d’un outil numérique


adapté

L’importance du rôle du pharmacien d’officine dans le suivi vaccinal des personnes est
établie. Pour effectuer cette mission, le pharmacien d’officine doit toutefois disposer d’un
système d’information adapté.

En effet, les recommandations vaccinales en France sont évolutives et complexes. Comment


être sûr de donner un conseil actualisé et personnalisé à chaque personne qui en a besoin,

D’autre part, pour délivrer un bilan vaccinal personnalisé, il faut un support pour accéder de
manière fiable, sécurisée et à long terme, au profil santé et à l’historique vaccinal du patient.
Le DP (Dossier Pharmaceutique) propose l’accès à l’historique de délivrance des
médicaments des 4 derniers mois. Cet historique a été porté à 21 ans pour les vaccins [9].
Cependant, l’enregistrement de la délivrance d’un vaccin par le pharmacien est une donnée
parcellaire qui n’est pas équivalente à l’enregistrement de l’acte vaccinal. Seul le vaccinateur
peut attester de la réalisation effective de la vaccination. Limiter les traces vaccinales à cette
information peut être à l’origine de conseils erronés et finalement contrevenir à l’objectif de
clarification de la situation vaccinale. Le premier type d’erreur serait de considérer qu’une
personne est à jour de ses vaccinations alors qu’elle ne l’est pas (par exemple, inférer qu’un
étudiant est à jour de sa vaccination contre l’hépatite B car le vaccin correspondant a été
délivré, alors qu’en réalité le vaccin n’a pas été administré ou mal administré, par exemple à
un intervalle de temps inapproprié par rapport à une dose précédente). L’autre type d’erreur
est de considérer qu’une personne n’est pas à jour de sa vaccination alors qu’elle l’est. Dans
ce cas, il existe d’une part un risque de sur-vaccination, pouvant être la cause d’effets
indésirables, et d’autre part de dépenses injustifiées. Les deux situations sont entachées d’un
risque juridique. De plus, l’historique vaccinal doit couvrir toute la vie et le DP n’a pas été
conçu pour reconstituer l’historique vaccinal de chaque personne. Par ailleurs, le DP ne
permet pas de confronter l’historique vaccinal du patient avec le calendrier vaccinal en cours,
ni avec son profil santé. Les recommandations ne sont donc ni personnalisées ni actualisées.
7
Enfin, le DP n’est actuellement accessible que par le pharmacien et ne permet pas le partage
des données avec un autre professionnel de santé (médecin, infirmier ou sage-femme). Il ne
permet pas non plus l’accès de la personne à ses données vaccinales ou à des informations
personnalisées, conditions nécessaires pour permettre à chaque personne de prendre en main
sa vaccination et être prévenu des dates des prochaines échéances vaccinales.

2. Présentation du carnet de vaccination électronique de


Mesvaccins.net, prérequis

Le seul carnet de vaccination électronique (CVE) intégrant un système expert mis à jour en
continu est disponible sur la plateforme internet MesVaccins.net. Cette plateforme et le CVE
sont financés de manière indépendante de l’industrie pharmaceutique par des fonds publics et
les abonnements des professionnels de santé. Le CVE bénéficie d’une autorisation de la
Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) et ses données sont hébergées
par une société possédant un agrément du Ministère de la santé pour l’hébergement de
données de santé (société IDS).

Le CVE est un outil innovant qui permet, grâce à un système expert, de faire le lien entre
d’une part l’historique vaccinal du patient et d’autre part son profil santé (âge, sexe et toutes
les données personnelles qui pourraient déterminer les recommandations vaccinales) et ainsi
délivrer un diagnostic vaccinal. Ce diagnostic indique si la personne est à jour ou non de ses
vaccinations, quelles sont les prochaines échéances, quelles sont les vaccins à faire et pour
quelles raisons.

Le CVE conserve les données vaccinales de la personne durant toute sa vie, si elle le souhaite,
et propose des alertes e-mail pour les prochaines échéances vaccinales.

Le pharmacien d’officine peut créer les CVE de sa patientèle, les consulter depuis son tableau
de bord et alerter les personnes si un vaccin doit être réalisé. C’est un outil de suivi du statut
vaccinal des personnes, toujours adapté aux recommandations vaccinales en vigueur en
France puisqu’il est régulièrement mis à jour par un comité d’experts en vaccinologie. Ces
experts rédigent et mettent à jour en temps réel directement, à partir d’une interface dédiée
sécurisée et sans l’intermédiaire d’informaticiens, les règles de calcul des recommandations
vaccinales.

8
Pour accéder à la gestion des CVE, le pharmacien devra tout d’abord créer un compte sur le
site pro.mesvaccins.net. Alors que l’accès grand public au CVE est gratuit, l’accès par un
professionnel de santé est payant (30 euros HT par an pour l’abonnement individuel d’un
professionnel de santé). Cependant, l’accès professionnel au CVE a été financé ou est en
cours de financement dans plusieurs régions, notamment dans les régions Nouvelle Aquitaine,
Centre Val de Loire, Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté. L’Union
Régionale des Professionnels de Santé pharmaciens a pris en charge l’abonnement des
pharmaciens d’officine à la plateforme MesVaccins.net dans les régions Nouvelle Aquitaine
et Centre-Val de Loire.

Une fois le compte professionnel créé, le pharmacien pourra accéder à la gestion des CVE
grâce à un système d’authentification forte, notamment la carte à puce de professionnel de
santé (CPS°. Si la CPS n’est pas disponible, l’authentification forte est assurée par
l’installation d’un certificat X.509, fourni par l’hébergeur agréé de données de santé.

Pour créer le CVE d’un patient, le pharmacien doit se rendre sur l’onglet « gestion des
carnets »

3. Partage des données, implication du patient

Une fois le CVE créé, le patient peut l’importer côté grand public et donc se l’approprier en
cliquant sur le lien reçu dans sa boite de courriel. Après avoir créé un compte sur le site
MesVaccins.net, il retrouve le ou les CVE créés par son pharmacien. Il peut ensuite grâce au
code de partage, créé automatiquement dans son compte, partager ce carnet avec le ou les
professionnels de santé de son choix. Il a accès à son statut vaccinal, son historique vaccinal
et à des recommandations vaccinales personnalisées (justification de la recommandation,
rapport bénéfices-risques individualisé pour chaque vaccination) à toute heure et en tout lieu.
Il reçoit les alertes de ses prochaines échéances vaccinales.

9
II. METHODOLOGIE DU SUIVI VACCINAL SOUS LA FORME D’UN
ENTRETIEN PHARMACEUTIQUE

1. Qu’est-ce que l’entretien pharmaceutique ?

L’entretien pharmaceutique est défini à l’article 10.2 de la Convention nationale organisant


les rapports entre les pharmaciens titulaires d’officine et l’assurance maladie [10].

L’entretien pharmaceutique constitue l’un des principaux moyens permettant aux


pharmaciens d’assurer la prise en charge personnalisée et optimale du patient.

Cet entretien est proposé aux patients rentrant dans le champ des programmes d’actions
définis par un comité constitué d’une section professionnelle composée de représentants des
organisations syndicales de pharmaciens et d’une section sociale composée de représentants
de l’UNCAM (article 50 de la Convention).

L’entretien pharmaceutique doit notamment permettre :

- De renforcer les rôles de conseil, d’éducation et de prévention du pharmacien auprès


des patients ;
- De valoriser l’expertise du pharmacien sur le médicament ;
- D’évaluer la connaissance par le patient de son traitement ;
- De rechercher l’adhésion thérapeutique du patient et l’aider à s’approprier son
traitement ;
- D’évaluer, à terme, l’appropriation par le patient de son traitement.

La durée, la fréquence et le contenu spécifique de l’entretien pharmaceutique sont définis par


le comité susmentionné.

L’avenant n°1 à la convention nationale fixe les modalités de mise en œuvre du dispositif
d’accompagnement par le pharmacien des patients sous traitement chronique par antivitamine
K (AVK). Il fixe les étapes, la durée de l’accompagnement et également les critères pour être
éligible au paiement de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP).

10
Des documents sont mis à la disposition du pharmacien par l’Assurance maladie pour l’aider
dans cette tâche (Guide d’accompagnement du patient, Fiche de suivi du patient,
Questionnaire patient, Dépliant d’information patient).

C’est sur la base de cet EP déjà mis en place dans les officines, que nous proposons ici la
construction de la trame d’un entretien pharmaceutique permettant au pharmacien d’officine
d’assurer le suivi vaccinal des personnes à l’aide du CVE. Nous allons voir comment
l’utilisation de cet outil innovant permet de répondre aux objectifs de l’EP : fourniture d’une
expertise actualisée au pharmacien, donnant accès à celui-ci aux bases factuelles nécessaires
pour échanger des informations avec la personne et pour améliorer l’observance et
l’appropriation du traitement par cette personne.

2. Premier entretien : l’audit vaccinal personnalisé

a) Objectif

Cette première rencontre sera l’occasion de faire le point sur les vaccins que la personne
devrait avoir reçus en fonction de son âge, de son sexe et de toutes les données personnelles
qui pourraient modifier ses recommandations vaccinales.

Ce sera également l’occasion d’expliquer à chaque personne les raisons pour lesquelles une
protection vaccinale contre ces maladies est indispensable, de manière à favoriser son
implication dans la prise en main de ses vaccinations.

b) Méthodologie, déroulement du premier entretien

• Une fois connecté au site pro.mesvaccins.net, le pharmacien se rend sur l’onglet


« Recommandations ». Il complète le questionnaire santé avec la personne et le valide.

Le questionnaire santé aborde de manière exhaustive toutes les données personnelles


du patient qui pourraient modifier les recommandations vaccinales. Elles sont classées
en 11 catégories.

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En cliquant sur la catégorie concernée, on obtient la liste de toutes les données qui pourraient
déterminer les recommandations vaccinales.

Par exemple, l’item « antécédent de maladies infectieuses »va détailler toutes les maladies
contractées qui peuvent générer des recommandations vaccinales particulières. De la même
manière la catégorie « Profession ou activité » liste les professions ou les conditions de travail
pour lesquelles il existe des recommandations spécifiques.

• Le système expert MesVaccins.net propose alors un tableau avec toutes les


recommandations vaccinales personnalisées ainsi que leur justification, le schéma
12
vaccinal à appliquer et le nom des spécialités concernées. Le pharmacien prendra donc
le temps de détailler chaque maladie et l’intérêt de la protection vaccinale dans le
contexte donné.

c) Exemple d’audit vaccinal

Prenons l’exemple d’un homme de 25 ans sous chimiothérapie pour tumeur solide.

Le pharmacien renseigne l’âge, le sexe et précise que le patient est sous chimiothérapie dans
la rubrique « Traitements en cours ».

13
Après validation, le pharmacien accède au tableau suivant :

C’est la liste des maladies contre lesquelles la personne devrait être protégée.

Le pictogramme G (à droite) indique qu’il s’agit d’une recommandation en population


générale (ne tient compte que de l’âge et du sexe), le pictogramme P indique qu’il s’agit
d’une recommandation particulière en lien avec les éléments cochés dans le profil santé
(ici la chimiothérapie).

Le pharmacien devra donc expliquer à son patient :

• La nécessité d’un rappel dTcaP trois mois après l’arrêt de la chimiothérapie ;


• L’intérêt des vaccins contre la grippe saisonnière et le pneumocoque dans ce contexte.

En cliquant sur le bouton +, il peut accéder aux justifications de ces recommandations et


aux schémas vaccinaux.

On sait qu’une recommandation vaccinale est mieux appliquée si elle est personnalisée et
si le patient a compris l’intérêt de cette vaccination.

14
Le pharmacien peut également mettre en garde contre des vaccins qui seraient contre-
indiqués, ici les vaccins vivants car le patient est immunodéprimé.

• A la fin de l’entretien, afin de connaitre le statut vaccinal et de prévoir les prochaines


échéances, le pharmacien propose à la personne de fixer un deuxième rendez-vous. La
personne apportera, pour ce deuxième entretien, son historique vaccinal. Ce peut être
le carnet de santé (pages vaccination), un carnet de vaccination papier ou encore un
historique vaccinal délivré par le médecin traitant.

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3. Deuxième entretien : création du carnet de vaccination électronique
et remise du bilan vaccinal au patient

a) Objectifs

Au cours de cette deuxième rencontre, le pharmacien crée un CVE qu’il partage avec la
personne lui permettant ainsi de conserver à vie son historique vaccinal, de le consulter à
toute heure en tout lieu, de le partager avec d’autres professionnels de santé et d’être
averti par courriel des prochaines échéances vaccinales (un message est adressé à la
personne 15 jours avant et deux mois après la date prévue de la prochaine vaccination).

Cette deuxième rencontre permet également au pharmacien de délivrer à la personne un


bilan vaccinal lui indiquant si elle est à jour ou au contraire en retard de ses vaccinations
et le cas échéant quelles sont les vaccins à faire et pourquoi. Le pharmacien oriente alors
la personne vers son médecin traitant. Le partage du CVE entre la personne et les
différents professionnels de santé concernés participe ainsi à l’amélioration du parcours de
santé de la personne.

b) Méthodologie et déroulement du deuxième entretien

Création du carnet de vaccination électronique

Une fois connecté au site pro.mesvaccins.net, le pharmacien se rend dans l’onglet


«Gestion des carnets ».
Clique ensuite sur le bouton « Créer un carnet »
Puis il complète la fiche avec les renseignements administratifs (nom, prénom, sexe, date
de naissance, pays de naissance, département de naissance, commune de naissance, code
postal du lieu de résidence, adresse de courriel). Si toutefois le patient ne possède pas
d’adresse internet, le pharmacien peut créer le CVE mais il sera exploité en local depuis le
tableau de bord du pharmacien et ne pourra pas être partagé avec le patient.
Dans la première rubrique « Vaccins reçus », le pharmacien clique sur « +vaccin » et saisi
un à un tous les vaccins reçus d’après les preuves documentaires disponibles.
16
Pour chaque vaccin, il renseigne, la date d’administration du vaccin, le nom de la
spécialité, s’il s’agit d’un rappel et si possible le numéro de lot puis clique sur « Je valide
cet acte sur présentation d’un certificat ou du carnet de vaccination », puis sur « Valider ».
Dans la deuxième rubrique « Profil santé », il complète le questionnaire comme pour
l’audit vaccinal, afin de personnaliser les recommandations vaccinales.
Enfin, en cliquant sur l’onglet « Diagnostic », il accède au bilan vaccinal personnalisé de
la personne.
Explication et remise du bilan vaccinal, orientation

Le pharmacien imprime et remet au patient le bilan vaccinal.

Si des vaccins sont à faire, il oriente la personne vers une consultation médicale et contacte
éventuellement, avec son accord, son médecin traitant. On peut imaginer dans ce cas-là, un
troisième entretien sur rendez-vous, pour vérifier que les vaccins ont effectivement été
réalisés et pour mettre à jour le CVE en le complétant avec le ou les derniers vaccins reçus.

Pour les personnes à jour de leurs vaccinations, le pharmacien indique les dates des
prochaines échéances et informe la personne qu’elle recevra un courriel d’alerte.

17
Le pharmacien s’assure que la personne a bien compris l’intérêt de chaque vaccination et
peut, à l’aide de la fonction « justification » (en bleu dans le diagnostic vaccinal) expliquer
pourquoi la personne doit être protégée contre ces maladies.

Partage du carnet de vaccination électronique

Le pharmacien prend le temps d’expliquer à la personne comment accéder à son CVE côté
grand public. La personne se rendra sur sa boîte de courriel et cliquera sur le lien « créer
gratuitement un compte MesVaccins.net » pour être redirigé vers une page de création de
compte. Une fois le compte créé à partir de ce lien, la personne accède directement à une
version anonymisée de son CVE.

4. Champ d’application : critères d’inclusion de la patientèle à


l’entretien pharmaceutique.

Assurer le suivi vaccinal à l’aide de l’entretien pharmaceutique pour l’ensemble de la


population parait illusoire car la charge de travail serait bien trop importante pour les
pharmaciens. Sélectionner des cohortes de population pour lesquelles la couverture vaccinale
fait défaut parait plus judicieux. La Caisse nationale d’assurance maladie pourrait alors,
comme c’est le cas pour la prise en charge de la vaccination anti-grippale saisonnière,
adresser un courrier nominatif à une population cible, sélectionnée selon un facteur de risque
particulier, les informant qu’ils peuvent bénéficier d’un entretien pharmaceutique leur
permettant de mettre à jour leur vaccinations.

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Ces populations cibles pourraient être :

• L’ensemble des personnes qui présentent une maladie chronique entraînant une
recommandation vaccinale particulière : personnes asthmatiques, diabétiques
(vaccination anti-pneumococcique, anti-grippale).
• L’ensemble des personnes suivant un traitement chronique impliquant une
recommandation particulière : personnes sous immunosuppresseurs
(recommandations particulières et contre-indications).
• L’ensemble des personnes exerçant une profession entraînant des
recommandations particulières : par exemple les assistantes maternelles ou les
professionnels de la petite enfance (stratégie du cocooning).
• L’ensemble des personnes d’une tranche d’âge donnée pour lesquelles il pourrait
être intéressant de faire le point. Par exemple, les jeunes adultes (18/24 ans) pour
vérifier si la vaccination anti-méningococcique C a bien été réalisée (en rattrapage
jusqu’à 24 ans révolus) ou encore vérifier si les deux doses de vaccin ROR ont
bien été administrées, vérifier l’application de la stratégie de vaccination dTcaP à
âge fixe chez les personnes âgées de 25 ans. Ce peut également être l’ouverture
d’un CVE pour chaque nouveau-né.

Le critère d’inclusion pourrait également être choisi selon les priorités vaccinales. Si les
autorités de santé estiment que c’est la vaccination rougeole qui fait le plus cruellement défaut
provoquant des flambées épidémiques, on pourrait alors proposer un entretien
pharmaceutique à toutes les personnes pour lesquelles la recommandation de vaccination par
le ROR s’applique.

L’entretien pharmaceutique pourrait également s’appliquer à des personnes éligibles à des


recommandations vaccinales récentes, encore peu connues et appliquées (vaccination contre
le zona par exemple) ou encore pour lesquelles la politique vaccinale a échoué à cause d’une
mauvaise communication et d’un manque d’adhésion de la population. C’est par exemple le
cas de la vaccination contre les papillomavirus chez les jeunes filles. Le pharmacien aurait
alors l’occasion d’expliquer l’intérêt de cette vaccination et de communiquer des informations
rassurantes sur la tolérance des vaccins anti-HPV.

Enfin, le haut niveau de traçabilité et de structuration des données du CVE de MesVaccins.net


permet de déterminer très précisément la contribution de chaque pharmacien d’officine à la
mission de suivi vaccinal (nombre de CVE créés ou importés, nombre de vaccins enregistrés,

19
nombre de vaccins délivrés, nombre et nature des conseils administrés). Une étude d’impact
pourrait être réalisée dans le cadre de la convention signée avec l’Agence nationale de santé
publique, qui réserve à celle-ci l’exploitation des données anonymisées des CVE pour la
mesure de la couverture vaccinale et d’autres indicateurs de performance de la vaccination.

Conclusion

Depuis quelques années, au gré des lois successives de financement de la Sécurité sociale, le
gouvernement fait évoluer le mode de rémunération des pharmaciens d’officine d’un
honoraire de dispensation forfaitaire «à la boîte» vers une rémunération de missions de
conseil et de suivi du pharmacien pour les patients atteints de certaines affections de longue
durée (entretien pharmaceutiques pour les patients sous AVK ou pour les patients
asthmatiques). Le modèle économique de la pharmacie d’officine est en pleine mutation, et il
est de l’intérêt de la santé publique de le faire évoluer en confiant au pharmacien d’officine de
nouvelles missions utilisant ses connaissances et ses compétences scientifiques et médicales.
Les pharmaciens d’officine considèrent que le suivi vaccinal serait une nouvelle mission
adaptée à leurs compétences et à leurs pratiques professionnelles. Selon un sondage publié en
2014 dans Le Pharmacien de France, plus de 85% des pharmaciens d’officine sont d’accord
pour tenir à jour le carnet de vaccination électronique des patients.

D’autre part, la politique vaccinale en France est elle-même en pleine réflexion, et sans doute
mutation, pour améliorer les couvertures vaccinales qui ne cessent de s’éroder. La grande
conférence citoyenne actuellement en cours dont les conclusions seront rendues à la fin de
l’année, réévaluera sans doute le concept d’obligation vaccinale. En effet, les personnes
souhaitent, aujourd’hui, être informées et comprendre les recommandations vaccinales qui
leur sont faites. Cela prend du temps, les professionnels de santé et notamment les médecins
ne l’ont pas toujours.

Grâce à l’entretien pharmaceutique de suivi vaccinal, le pharmacien pourra pallier ce manque


d’information, faire office de « gare de triage »en orientant si nécessaire les personnes vers
une consultation médicale pour la prescription et l’administration des vaccins

20
Le CVE créé lors de l’entretien pharmaceutique, importé par le patient, lui permet de prendre
en main et de s’impliquer dans sa vaccination en bénéficiant de toutes les informations
nécessaires et adaptées à ses caractéristiques individuelles pour prendre la bonne décision.

Le partage du CVE avec le pharmacien et le médecin permet une complémentarité des tâches
entre chacun d’eux et participe ainsi à l’amélioration du parcours de santé.

Mais l’appropriation de cet outil innovant nécessite du temps car il bouleverse les habitudes
du pharmacien comme du citoyen. Il faut que le pharmacien accepte de consacrer du temps à
la mise en place de la gestion du CVE au sein de son équipe. De son côté, la personne doit
oser prendre en main sa vaccination et s’approprier son CVE, notamment grâce à l’application
mobile dédiée.

21
Bibliographie

[1] JORF. Loi n°2009-879 du 21/07/2009 portant sur la réforme de l’hôpital et relative aux
patients, à la santé et aux territoires. [Consulté le 11/07/2016]. Disponible sur :

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000020879475&categor
ieLien=id

[2] Académie Nationale de Pharmacie. Le rôle des pharmaciens dans la prise en charge de la
vaccination , 02/2011. [Consulté le 11/07/2016]. Disponible sur :

http://www.acadpharm.org/dos_public/RAPPORT_FINAL_Role_des_pharmaciens_vaccinati
on_ver_6_2011.02.07_VF_JPC_2.pdf

[3] Direction Générale de la santé. Programme nationale d’amélioration de la politique


vaccinale, 06/2012. [Consulté le 11/07/2016]. Disponible sur :

http://social-
sante.gouv.fr/IMG/pdf/programme_national_d_amelioration_de_la_politique_vaccinale_2012
-2017_2_.pdf

[4] Rapport sur la politique vaccinale, Mme Sandrine HUREL, 01/2016. Consulté le
11/07/2016]. Disponible sur :

http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_sur_la_politique_vaccinale_janvier_2016_.pdf

[5] Thèse pour le diplôme d’état de docteur en pharmacie soutenue publiquement le


10/12/2015 par Mlle Marion Duhaut. Analyse de la perception de la vaccination par une
patientèle du Nord-Pas –de-Calais : une redéfinition de la place du pharmacien dans la
politique vaccinale, [Consulté 05/2016]. Disponible sur :

http://moodle.univ-
lille2.fr/pluginfile.php/135678/mod_resource/content/3/These%20Marion%20Duhaut.pdf

[6] Le Quotidien du Pharmacien. « Officine : quatre millions de personnes par jour ».


10/03/2016. [Consulté le 30/09/2016]. Disponible sur :

http://www.lequotidiendupharmacien.fr/actualite/article/2016/03/10/officines-4-millions-de-
personnes-par-jour_235916

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[7] Heidi J. Larson, PhD, Alexandre de Figueiredo, MSc, Zhao Xiahong, BSc, William S.
Schulz, MSc, Pierre verger, PhD, Iain G. Johnston, PhD, Alex R. Cook, PhD, Nick S.Jones,
PhD. The State of vaccine Confidence 2016 : Global Insights Through a 67-Country Survey.
EBioMedicine. 26/08/2016

[8] InVS Communiqué de presse. La couverture vaccinale en France. 24/04/2013. [Consulté


le 27/09/2016]. Disponible sur :

http://invs.santepubliquefrance.fr/fr/Espace-presse/Communiques-de-presse/2013/La-
couverture-vaccinale-en-France

[9] JORF n°0048 26/02/2015. Décret n°2015-208 du 24 février 2015 portant sur les durées
d’accessibilité et de conservation dans le dossier pharmaceutique des données relatives à la
dispensation des vaccins et des médicaments biologiques. [Consulté le 11/07/2016].
Disponible sur :

https ://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2015/2/24/AFSP1429629D/jo

[10] JORF n°0107 du 06/05/2012. Arrêté du 04/05/2012 portant approbation de la convention


nationale organisant les rapports entre les pharmaciens titulaires d’officine et l’assurance
maladie. [Consulté le 26/09/2016]. Disponible sur :

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000025804248

23
RESUME : Suivi du statut vaccinal par le pharmacien d’officine grâce à l’entretien
pharmaceutique.
Le pharmacien d’officine, de par son accessibilité, ses compétences et ses nouvelles missions
en matière de Santé Publique est l’un des professionnels de santé les plus à même de
participer à l’amélioration des couvertures vaccinales qui ne cessent de s’éroder en France.
Mais il se heurte à plusieurs obstacles. D’une part, les recommandations vaccinales sont
versatiles, complexes et difficiles à appliquer. D’autre part, la traçabilité des actes vaccinaux
est mal organisée en France et plus d’un adulte sur deux a perdu toute trace de son historique
vaccinal.
Le Carnet de Vaccination Electronique est un outil innovant permettant de faire le lien entre
l’historique vaccinal du patient et son profil santé et délivrer un diagnostic vaccinal
personnalisé et adapté aux recommandations vaccinales en cours. Il permet également de
conserver à vie son historique vaccinal.
L’objet de ce mémoire est de proposer au pharmacien d’officine une méthodologie de suivi
vaccinal de ses patients à l’aide de l’entretien pharmaceutique au cours duquel le pharmacien
créera le CVE de son patient et s’appuiera sur le diagnostic vaccinal du système expert pour
proposer la mise à jour de son statut vaccinal.

ABSTRACT : Follow-up of the vaccinal status by the pharmacist thanks to the


pharmaceutical interview.
The pharmacist, due to his accessibility, his skills and his new missions regarding Public
health is one of the healthcare professionals most to participate in the improvement of the
vaccinal covers which do not stop decreasing in France.
But he comes up against several obstacles. On one hand, the vaccinal recommendations are
fikle, complex and difficult to apply. On the other hand, the traceability of the vaccinal acts is
badly organized in France and more than an adult on two lost any track of his vaccinal
history.
The electronic vaccination record is an innovative tool allowing to make the link between the
vaccinal history of the patient and its profile health and to establish a vaccinal diagnosis
personalized and adapted to the current vaccinal recommendations. He also allows to keep for
life his vaccinal history.
The object of this report is to propose to the pharmacist a methodology of vaccinal follow-up
oh his patients by means of the pharmaceutical interview during which, the pharmacist create
the CVE of his patient and will build on the vaccinal diagnosis of the expert system to
propose the update of his vaccinal status.
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