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Théorie des graphes : noyaux et fonctions de Grundy

Les graphes considérés dans ce TD sont orientés, sans boucles.

1 Nombre de stabilité
Définition 1 Soit G = (S, A) un graphe orienté, et X ⊆ S. X est une partie stable ou plus simple-
ment stable si deux éléments distincts de X ne sont jamais adjacents.
Le nombre de stabilité de G est

α(G) = max{|X|, X stable}

Une partie X de S est stable maximale si on ne peut pas lui ajouter un sommet sans perdre la
stabilité, en symboles :

X est stable et ∀x ∈ S − X, X ∪ {x} non stable

Question 1 : Modélisez le problème des n reines comme un problème de stabilité

RÉPONSE : Le graphe est constitué des n2 cases de l’échiquier, il y a une arête entre deux cases si
une reine peut aller directement de l’une à l’autre (et une arête est représentée par un arc dans chaque
sens). Comme les reines sont au plus une par ligne, le nombre de stabilité est au plus n. Pour n ≥ 4,
on connait des placements de n reines. C’est donc que le nombre de stabilité est précisément n.

Question 2 : Si un graphe G possède n sommets, on a bien sûr

1 ≤ α(G) ≤ n

Donnez des exemples de graphes dont le nombre de stabilité atteint ces bornes.

RÉPONSE : Si G est un graphe sans arcs à n sommets, α(G) = n. Par ailleurs, α(Kn ) = 1

Question 3 : Pour chacun des graphes suivants, donnez son nombre de stabilité ou, le cas échéant,
un encadrement de ce nombre : lnm
1. une chaîne à n sommets RÉPONSE :
2 lnm
2. une arborescence à n sommets RÉPONSE : ≤ α(A) ≤ n − 1
2
3. le graphe G1 ci-dessous :

A B

F C

E D
RÉPONSE : 3
Question 4 : Montrez, en donnant un exemple, qu’une partie stable maximale ne comporte pas
nécessairement α(G) sommets.

RÉPONSE : On considère le graphe suivant :

1
A B

D C
Son nombre de stabilité est 4 (la partie {A, B, C, D} est stable, et on ne peut pas ajouter E), et la
partie {E} est stable maximale.

2 Nombre d’absorption
Définition 2 Soit G = (S, A) un graphe orienté, et X ⊆ S. X est une partie absorbante ou plus
simplement absorbante si, pour tout x ∈ S − X, Γ+ (x) ∩ X 6= ∅.
Le nombre d’absorption de G est

β(G) = min{|X|, X absorbant}

Une partie X de S est absorbante minimale si on ne peut pas lui enlever un sommet sans perdre
l’absorption, en symboles :

X est absorbante et ∀x ∈ X, X − {x} non absorbante

Question 5 : Montrez que, si x est un puit de G, il appartient à tous les absorbants de G.

RÉPONSE : Si x est un puit de G c’est que, par définition, on a Γ+ (x) = ∅, donc s’il existait un
absorbant X ne contenant pas x, on aurait Γ+ (x) ∩ X = ∅

Question 6 : Sur un échiquier 8 × 8, on veut placer le nombre minimal de reines pour que toutes les
cases soient en prise. En quoi cela est-il équivalent à trouver le nombre d’absorption d’un graphe ? Et
d’ailleurs, quel est ce graphe ? Et quel est son nombre d’absorption (question difficile) ?

RÉPONSE : Le graphe considéré est décrit à la question 1. Le nombre d’absorption est 5.

Question 7 : Si un graphe G possède n sommets, on a bien sûr

1 ≤ β(G) ≤ n

Donnez des exemples de graphes dont le nombre de stabilité atteint ces bornes.

RÉPONSE :
1. soit G = ({x1 , . . . , xn−1 , xn }, {(x1 , xn ), . . . , (xn−1 , xn )}). On a bien sûr β(G) = 1
2. Si les n sommets de G sont tous isolés (cad que G n’a pas d’arcs), tous les sommets sont des
puits et β(G) = n.

Question 8 : Expliquez pourquoi, si G possède k composantes connexes G1 , G2 , . . . , Gk ,


k
X
β(G) = β(Gi )
i=1

RÉPONSE : Il faut absorber chacune des composantes connexes.

2
Question 9 : Soit G un graphe à n sommets et m arcs. Montrez que

β(G) ≥ n − m

RÉPONSE : Soit X un absorbant minimal. Il contient β(G) sommets. Ces sommets sont reliés aux
n − β(G) autres sommets, il faut donc au moins n − β(G) arcs pour ça, cad m ≥ n − β(G), d’où le
résultat.

3 Noyaux
Définition 3 Dans un graphe G = (S, A), un noyau est une partie N ⊆ S à la fois stable et absor-
bante.

Question 10 : Trouvez un noyau du graphe ci-dessous :

A B

G E C

F D

RÉPONSE : Par exemple {A, F, D}

Question 11 : Trouvez un graphe qui ne possède pas de noyau

RÉPONSE : Un cycle impair

Question 12 : Trouvez un graphe qui possède plusieurs noyaux

RÉPONSE : Un cycle pair

Question 13 : La fonction caractéristique d’un ensemble E ⊆ F est la fonction notée φE de F


dans {0, 1} telle que, pour tout x ∈ F , φE (x) = 1 ssi x ∈ E. Soit G = (S, A) un graphe, et N ⊆ S ;
montrez que N est un noyau si et seulement si φN vérifie

∀x ∈ S, φN (x) = 1 − max{φN (y), y ∈ Γ+ (x)}

(si Γ+ (x) = ∅, on prend le max égal à 0)

RÉPONSE :
=⇒ : on doit montrer que, si N est un noyau,

∀x ∈ S, φN (x) = 1 − max{φN (y), y ∈ Γ+ (x)}.

Soit x ∈ S, de deux choses l’une :


1. x ∈ N : alors φN (x) = 1 ; comme N est un noyau, il est stable, cad qu’aucun des successeurs
de x n’est dans N , cad encore que, pour tout y ∈ Γ+ (x), φN (y) = 0
2. x 6∈ N : alors φN (x) = 0 ; comme N est un noyau, il est absorbant, cad qu’un des successeurs
y0 de x est dans N , cad encore que φN (y0 ) = 1 = max{φN (y), y ∈ Γ+ (x)}

3
⇐= : on suppose que
∀x ∈ S, φN (x) = 1 − max{φN (y), y ∈ Γ+ (x)}
et on doit montrer que N est un noyau.
1. N est stable : soit x ∈ N : alors φN (x) = 1, cad d’après la propriété
max{φN (y), y ∈ Γ+ (x)} = 0,
cad encore qu’aucun des successeurs de x n’est dans N
2. N est absorbant : soit x 6∈ N : alors φN (x) = 0 ; d’après la propriété,
max{φN (y), y ∈ Γ+ (x)} = 1,
cad que l’un des successeurs de x est dans N

Question 14 : Montrez que, si N est un noyau, alors il est stable maximal

RÉPONSE : Soit x 6∈ N ; comme N est absorbant, Γ+ (x) ∩ N 6= ∅ : on ne peut donc pas ajouter x
à N sans perdre la stabilité.

Question 15 : Montrez que, si N est un noyau, alors il est absorbant minimal

RÉPONSE : Soit x ∈ N ; comme N est stable, Γ+ (x) ∩ N = ∅. Ainsi N − {x} ne peut pas être
absorbant.

Question 16 : On rappelle qu’un graphe G = (S, A) est symétrique ssi, pour tous x, y ∈ A,
(x, y) ∈ A ⇐⇒ (y, x) ∈ A
Montrez que, dans un graphe symétrique, tout stable maximal est absorbant. En déduire que si un
graphe est symétrique alors il admet un noyau.

RÉPONSE : Soit G = (S, A) un graphe symétrique, X un stable maximal ; on doit montrer que
X est absorbant, cad que pour tout x ∈ S − X, Γ+ (x) ∩ X 6= ∅. Par l’absurde : soit x ∈ S − X tel
que Γ+ (x) ∩ X = ∅. Comme G est symétrique, Γ+ (x) = Γ− (x). Mais alors x n’est adjacent à aucun
sommet de X, et X ∪ {x} est stable, en contradiction avec la maximalité de X. Comme tout graphe
admet un ensemble stable (éventuellement réduit à un seul sommet), donc un stable maximal, on en
conclut que tout graphe symétrique admet un noyau.

Question 17 : Montrez que si un graphe est sans circuit, il admet un noyau, et que ce noyau est
unique.

RÉPONSE : Soit G = (S, A) un graphe sans circuit. On construit un noyau N par l’algo suivant :
début
N ← ∅;
P ← ∅;
V ← S;
B ← A;
tant que V 6= ∅ faire
pour chaque x puit de (V, B) faire
Ajouter x à N ;
Ajouter Γ− (x) à P ;
Enlever x et Γ− (x) de V ;
pour chaque y ∈ Γ− (x) faire
Enlever (y, x) de B;

retourner N ;

4
L’algorithme s’arrête puisque, à chaque tour de boucle, on enlève au moins un sommet de V : en
effet, tout graphe sans circuit possède au moins un puit. Sa correction résulte des faits suivants :
— le graphe (V, B) au début de chaque tour de boucle est sans circuit (enlever des arcs à un graphe
sans circuit ne crée pas de circuit !) ;
— à l’arrêt de l’algorithme :
— N est stable : soit x1 , x2 ∈ N , et supposons qu’il existe un arc (x1 , x2 ) dans G ; de deux
choses l’une :
1. c’est x1 qui a été placé dans N en premier : c’est donc que x1 était un puit lorsqu’il a été
placé dans N , cad que x2 a été placé dans P lors d’un tour de boucle précédent, absurde.
2. c’est x2 qui a été placé dans N en premier : alors x1 , prédécesseur de x2 , est placé dans
P , absurde.
— N est absorbant : à la fin de l’algorithme, N ∪ P = S ; soit y ∈ P ; au tour de boucle où on
ajoute y à P , on enlève l’arc (y, x) de B et on ajoute x à N ; c’est donc, que dans G, l’un
des successeurs de y est dans le noyau.
L’unicité du noyau découle de ce que, à chaque tour de boucle, l’algorithme ne fait aucun choix sur
les sommets placés dans N .

4 Fonctions de Grundy
Soit G = (S, A) un graphe. Une fonction g : S −→ N est dite de Grundy ssi, pour tout x ∈ S,
g(x) est le plus petit entier qui n’est pas dans l’ensemble {g(y) | y ∈ Γ+ (x)}. Si x est un puits, on a
bien sûr, d’après la définition, g(x) = 0.
Question 18 : Donnez deux fonctions de Grundy pour le graphe suivant :

F B C D

RÉPONSE :
A B C D E F
0 2 1 0 0 1
1 0 1 0 1 0

Question 19 : Montrez que, si G = (S, A) admet une fonction de Grundy, alors il possède un noyau.

RÉPONSE : On prend N = {x ∈ S | g(x) = 0} :


— N est stable : soit x ∈ N ; si g(x) = 0, c’est que, pour tout y ∈ Γ+ (x), g(y) 6= 0 cad y ∈
6 N
— N est absorbant : soit x ∈ S − N , cad tel que g(x) 6= 0 ; si g(x) 6= 0, c’est que, pour un
y ∈ Γ+ (x), g(y) = 0 cad y ∈ N et donc Γ+ (x) ∩ N 6= ∅

Question 20 : Montrez qu’un graphe sans circuit admet une fonction de Grundy unique. Montrez que
pour tout sommet x, g(x) est au plus égal à la longueur du plus long chemin partant de x.

RÉPONSE : S’il y avait deux fonctions de Grundy possibles, il y aurait 2 noyaux, or on sait qu’un
graphe sans circuit admet un noyau unique.
Notons, pour tout sommet x, ∆(x) la longueur du plus long chemin partant de x, cad la plus grande
distance de x à un puit (∆ est bien définie puisque le graphe est sans circuit). Montrons par induction
sur ∆(x) que g(x) ≤ ∆(x) :

5
— ∆(x) = 0 : alors x est un puit, et g(x) = 0
— ∆(x) > 0 : pour tout y ∈ Γ+ (x), ∆(y) < ∆(x) et, par hypothèse d’induction, g(y) ≤ ∆(y). La
plus grande valeur possible pour g(x) est lorsque g(Γ+ (x)) = {0, 1, . . . , ∆(x) − 1}.

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