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La gestion de patrimoine, une opportunité de

croissance pour les cabinets d'expertise comptable

MARQUES, Keven

Novembre 2015
Bibliotique : la richesse documentaire de la profession !

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commissaires aux comptes, est le seul centre de documentation privé en France spécialisé
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comptables d’accéder à sa base de données sur le site
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professionnelles, du droit social, du droit fiscal, du management et de l’économie et des
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d’expertise comptable. Il permet ainsi à la profession d’accéder à un fonds
documentaire inestimable par sa richesse et son caractère unique.

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Dans la mesure du possible, Bibliotique communique une version numérique identique


en tout point à l’exemplaire déposé par le candidat au diplôme d'expertise comptable.
Toutefois, si à la lecture de ce mémoire des éléments étaient amenés à manquer, nous
vous invitons à les demander à l'équipe de Bibliotique (accueil@bibliotique.com) qui
vous les communiquera dans la mesure du possible.
NOTE A L’ATTENTION DES EXAMINATEURS

NOTE A L’ATTENTION DES EXAMINATEURS

Le décret n°2014-912 du 18 août 2014 modifiant le décret n°2012-432 du 30 mars


2012 relatif à l’exercice de l’activité d’expertise comptable, autorise dorénavant
l’expert-comptable à mener, sous conditions, des actions de promotion et de
démarchage. L’organisation de la section 1 du chapitre 1 de la deuxième partie
« Communication et déontologie » a par conséquent été réorganisée afin d’intégrer
cette évolution réglementaire.

Lors de la rédaction de ce mémoire, il s’est avéré judicieux d’inverser l’ordre des


sections 1 et 2 du chapitre 2 de la troisième partie. « Les préconisations
patrimoniales » sont par conséquent traitées avant « Les états comptables ».

Le jury d’agrément a fait part d’une remarque concernant l’utilité d’aborder la gestion
de la relation client lorsque les options prises et conseillées par lui se révèlent ne pas
avoir été favorables. Les modifications apportées à l’architecture de la section 3 « Le
suivi des préconisations » du paragraphe 2 de la troisième partie ont été faites dans
ce sens.

Enfin, je précise que l’ouvrage ci-dessous n’a pas été supprimé de la bibliographie
de ma première demande d’agrément, mais au contraire y a été ajouté.
« AMIGUES Jean Pascal, Gestion de patrimoine – Tout savoir pour réussir cette
mission auprès de chefs d’entreprise, Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-
Comptables, 2ème édition, 2013, 335 pages »

1
TABLE DES MATIERES

TABLE DES MATIERES

NOTE A L’ATTENTION DES EXAMINATEURS 1

TABLE DES MATIERES 2

TABLE DES FIGURES 8

LISTE DES ABREVIATIONS 9

NOTE DE SYNTHESE 10

INTRODUCTION 12

PREMIERE PARTIE : L’EXPERT-COMPTABLE ET LA GESTION DE


PATRIMOINE 15

CHAPITRE 1 L’EXPERT-COMPTABLE ATTENDU SUR LE MARCHE DE LA GESTION DE PATRIMOINE 16

SECTION 1 LA GESTION DE PATRIMOINE 16

1. Les origines de la gestion de patrimoine 16


1.1 De la Grèce au XXème siècle 16
1.2 Un virage dans les années 1970 16

2. Qu’est ce que la gestion de patrimoine ? 17


2.1 La gestion d’actifs 17
2.2 Le conseil patrimonial 18

3. La gestion de patrimoine en chiffres 18

SECTION 2 UN INTERLOCUTEUR PRIVILEGIE DU CHEF D’ENTREPRISE 19

1. Une image de marque 19


1.1 Science 19
1.2 Conscience 20
1.3 Indépendance 21

2. Les missions traditionnelles, ciment de la relation 22


2.1 Une connaissance de l’activité professionnelle du chef d’entreprise 22
2.2 Des échanges réguliers avec le client 23
2.3 Une relation de confiance 24

3. Une attente exprimée par les clients 25

2
TABLE DES MATIERES

3.1 Sondage proposé à la clientèle 25


3.2 Analyse des résultats 26
3.3 Une tendance confirmée par l’Ordre des Experts-Comptables 26

CHAPITRE 2 L’ACTIVITE DE GESTION DE PATRIMOINE EST-ELLE COMPATIBLE AVEC CELLE DE L’EXPERTISE


COMPTABLE ? 28

SECTION 1 L’ORDONNANCE DE 1945 28

1. La possibilité de donner des consultations et d’effectuer des études 28

2. La manipulation des fonds 29

3. Les honoraires comme unique rémunération 29

SECTION 2 LE CODE DE DEONTOLOGIE 30

1. L’indépendance 30

2. Le secret professionnel et le devoir de discrétion 31

3. Le devoir de conseil 32

CHAPITRE 3 APPREHENDER LES MISSIONS DE GESTION DE PATRIMOINE 33

SECTION 1 DES CONNAISSANCES TECHNIQUES A APPROFONDIR 33

1. La dimension juridique 33
1.1 Les régimes matrimoniaux 33
1.2 Les successions et libéralités 36
1.3 Le démembrement de propriété 39

2. La dimension fiscale 39
2.1 L’impôt sur le revenu 39
2.2 L’impôt sur la fortune 40

3. La dimension financière 40

SECTION 2 DES INVESTISSEMENTS A PREVOIR 40

1. Des outils informatiques 40


1.1 Excel, indispensable mais insuffisant 40
1.2 Les logiciels spécialisés 41

2. Une documentation professionnelle 42


2.1 La documentation de base 42
2.2 La documentation spécifique 42

3
TABLE DES MATIERES

3. Les moyens humains 43


3.1 La formation 43
3.2 Le recrutement 44

DEUXIEME PARTIE : UNE ORGANISATION SPECIFIQUE NECESSAIRE A


L’OFFRE DE PRESTATIONS DE GESTION DE PATRIMOINE 46

CHAPITRE 1 UNE OFFRE A METTRE EN PLACE 47

SECTION 1 COMMUNICATION ET DEONTOLOGIE 47

1. La publicité et le démarchage autorisés sous conditions 47

2. Les outils de communication 48


2.1 L’Ordre et le club de gestion de patrimoine 48
2.2 La plaquette cabinet et le site web 48
2.3 Les articles de journaux 49
2.4 La communication interne 49

SECTION 2 REPONDRE AUX BESOINS ET LES SUSCITER 50

1. Des attentes exprimées 50

2. La veille patrimoniale, outil du désir 50


SECTION 3 QUELLE CIBLE POUR LES MISSIONS DE CONSEIL PATRIMONIAL ? 52

1. La typologie de la clientèle 52
1.1 Age 52
1.2 Revenus 53
1.3 Patrimoine 54

2. La dimension humaine de la relation client 54


2.1 La satisfaction client 54
2.2 Les honoraires vus par le client 55

3. La dimension psychologique 56
3.1 Savoir écouter 56
3.2 Détecter le décisionnaire 57
3.3 Classification du profil psychologique du client 58

CHAPITRE 2 LA GESTION DU RISQUE 60

SECTION 1 LA RESPONSABILITE DU PROFESSIONNEL 60

1. La responsabilité civile 60
1.1 Obligation de moyen 60
1.2 Lorsque l’obligation de moyen devient obligation de résultat 61

4
TABLE DES MATIERES

2. L’assurance responsabilité civile 62


2.1 Une obligation émanant de l’Ordonnance de 1945 62
2.2 Le coût de l’assurance 62

SECTION 2 DES ECRITS POUR FORMALISER LA MISSION 64

1. La lettre de mission 64
1.1 Une norme générale applicable à l’ensemble des missions 64
1.2 Des obligations réciproques énoncées et acceptées 65
1.3 Un outil de gestion du risque ? 67

2. La documentation des travaux 68


2.1 Le dossier permanent 68
2.2 Le dossier annuel 69
2.3 Les rapports remis au client 69

SECTION 3 L’INTERPROFESSIONNALITE 70

1. Les autres professionnels de la gestion de patrimoine 70


1.1 Les notaires 70
1.2 Les avocats 71
1.3 Les Conseillers en Gestion de Patrimoine Indépendants (CGPI) 71
1.4 Les banques et compagnies d’assurances 72

2. L’interprofessionnalité, gage de réussite de la mission 72


2.1 Les pratiques en Europe 72
2.2 Les évolutions en France 73
2.3 Les avantages de l’interprofessionnalité 74

3. L’Expert-comptable, chef d’orchestre du conseil patrimonial 74

TROISIEME PARTIE : LE BILAN PATRIMONIAL, BASE DU CONSEIL


PATRIMONIAL 76

CHAPITRE 1 L’ELABORATION DU BILAN PATRIMONIAL 77

SECTION 1 LE RECENSEMENT PATRIMONIAL 77

1. La situation familiale 77
1.1 Le foyer et le foyer fiscal 77
1.2 Les descendants 78
1.3 Les ascendants 78

2. La situation sociale 79

3. Les libéralités antérieures 79

4. La composition du patrimoine privé 80

5
TABLE DES MATIERES

4.1 Le recensement exhaustif 80


4.2 La récolte d’informations complémentaires 81

5. La composition du patrimoine professionnel 82

6. La fiscalité 83
6.1 Impôt sur le revenu 83
6.2 l’ISF 83

7. Le bilan retraite 83

8. Les objectifs patrimoniaux 85


8.1 Les objectifs financiers 85
8.2 Les objectifs organisationnels du patrimoine 85

9. Les contraintes de gestion 86


9.1 Le budget du ménage 86
9.2 Un cadre légal 86
9.3 Des objectifs à hiérarchiser 87
9.4 Des contraintes propres au client 87

SECTION 2 L’AUDIT PATRIMONIAL 87

1. L’audit patrimonial 88
1.1 Les actifs et passifs de jouissance 88
1.2 Les actifs et passifs professionnels 88
1.3 L’immobilier de rapport 88
1.4 Les actifs financiers 89
1.5 L’évaluation des actifs 89
1.6 La diversification 89

2. L’audit budgétaire 90
2.1 Les différents revenus et dépenses 90
2.2 Le cycle de vie selon Modigliani 90

3. L’audit fiscal 92
3.1 La fiscalité courante 92
3.2 La fiscalité latente 94

4. L’audit social 95
4.1 La prévoyance santé 95
4.2 La prévoyance garantie arrêt de travail, incapacité temporaire de travail, invalidité et
perte d’emploi 96
4.3 Le droit à la retraite 97
4.4 La prévoyance décès 97

6
TABLE DES MATIERES

CHAPITRE 2 LES PRECONISATIONS PATRIMONIALES 99

SECTION 1 LES PRECONISATIONS PATRIMONIALES 99

1. La stratégie élaborée 99

2. La présentation au client 100

SECTION 2 LES ETATS COMPTABLES 102

1. Le bilan patrimonial 102


1.1 La situation aujourd’hui 102
1.2 Le bilan cible 102
2. Le budget patrimonial 102
2.1 La situation aujourd’hui 102
2.2 Le budget cible 103

SECTION 3 LE SUIVI DES PRECONISATIONS 103

1. Les changements liés au client 103

2. Les changements liés à l’environnement externe du client 104

3. La fréquence des mises à jour de notre mission 104

4. Les diligences à accomplir lors de la mise à jour 104

5. La gestion de la relation client en cas de préconisations « malheureuses » 104

CONCLUSION 106

BIBLIOGRAPHIE 108

ANNEXES 113

7
TABLE DES FIGURES

TABLE DES FIGURES

Figure 1 - Encours de placements financiers des ménages résidents en 2014 19

Figure 2 - Fréquence des contacts téléphoniques avec le cabinet 24

Figure 3 - Le cercle vertueux de la satisfaction client 55

Figure 4 - La théorie de l'iceberg 56

Figure 5 - Classification des profils clients 58

Figure 6 - Questionnement des clients en fonction de leur profil 59

Figure 7 - Statistiques des indemnisations de la RCP groupe 63

Figure 8 - Coût et garantie du contrat RCP groupe de l'OEC 64

Figure 9 - Schéma général du référentiel normatif et déontologique du

professionnel de l'expertise comptable 65

Figure 10 - Théorie du cycle de vie (consommation et épargne) 91

Figure 11 - Impact de la composition du foyer fiscal sur l'impôt sur le revenu 93

8
LISTE DES ABREVIATIONS

LISTE DES ABREVIATIONS

BIC Bénéfices industriels et commerciaux


CEP Club expert patrimoine
CGI Code général des impôts
CSN Conseil supérieur du notariat
CSOEC Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables
INSEE Institut national de la statistique et des études économiques
IR Impôt sur le revenu
NPMQ Norme professionnelle « Maîtrise de la qualité des missions au
sein des structures d’exercice professionnel »
OCDE Organisation de coopération et de développement économiques
OEC Ordre des experts-comptables
PERP Plan d’épargne populaire
PERCO Plan d’épargne pour la retraite collectif
RCM Revenus de capitaux mobiliers
RCP Responsabilité civile professionnelle
UNOFI Union notariale financière

9
NOTE DE SYNTHESE

NOTE DE SYNTHESE

Conscient de l’impact des actions menées aujourd’hui sur notre situation de


demain, je me suis, depuis toujours, intéressé à la gestion de patrimoine.
En effet, la définition selon laquelle : « elle consiste à promouvoir un ou plusieurs
produits patrimoniaux en s’appuyant sur une prescription justifiée par la
situation patrimoniale de la personne conseillée »1 illustre parfaitement ma vision
de cette matière.

Notre patrimoine trouve son origine dans deux sources principales que sont les
héritages et les revenus. Chacun a la possibilité d’influer sur la seconde
catégorie, que les revenus proviennent du capital ou du travail.
Or l’expert-comptable est le conseil préféré des clients dans la gestion de leurs
activités. Il est ainsi auprès d’eux dans la gestion des flux et des stocks, autrement
dit des revenus et du patrimoine.

Dans ce contexte, j’ai rapidement perçu l’expert-comptable comme étant l’acteur


principal de la gestion de patrimoine et me suis naturellement dirigé vers ce métier.
La pluridisciplinarité des matières abordées au cours de la formation menant à ce
mémoire a été d’une grande richesse. Néanmoins, la mise en pratique rapide
grâce à l’apprentissage au sein de différents cabinets, a mis en avant un certain
manque en matière de droit civil et plus particulièrement en matière de régimes
matrimoniaux, succession et libéralités. C’est pourquoi j’ai fait le choix du
perfectionnement en intégrant une formation de 3ème cycle en gestion de
patrimoine.
Ce complément en formation, couplé à des expériences professionnelles auprès
d’une clientèle diversifiée et de professionnels aux spécialités diverses, a achevé de
me convaincre que le choix de l’expertise comptable était le bon pour répondre à
mon aspiration de conseil en gestion de patrimoine.

1
P.M. Guillon, La gestion de patrimoine, Economica, 1996.

10
NOTE DE SYNTHESE

Aujourd’hui, l’objectif principal de ce mémoire est, d’une part d’encourager les


futurs professionnels à intégrer le plus tôt possible les problématiques de gestion
de patrimoine dans leur réflexion, et d’autre part de convaincre les
experts-comptables déjà installés que la gestion de patrimoine est non
seulement à leur portée, mais aussi une réelle opportunité de croissance pour
leurs cabinets.

J’ai articulé ma démonstration en trois parties.


La première permettra aux lecteurs de situer l’expert-comptable dans la pratique
de la gestion de patrimoine, notamment vis-à-vis de la déontologie et des
connaissances spécifiques qui devront impérativement être maîtrisées. La
démonstration sera apportée que la gestion de patrimoine fait pleinement partie
du champ des missions ouvertes à la profession.
La deuxième s’attachera à donner les outils de la mise en place de l’offre de la
mission de conseil patrimonial au sein du cabinet. Le lecteur y trouvera les conseils
nécessaires à la bonne pratique de la communication, des supports possibles à
l’analyse psychologique des clients. De plus, la question centrale de la
responsabilité y sera traitée donnant les clefs d’une pratique sécurisée grâce à
des écrits et à l’interprofessionnalité.
La troisième et dernière partie prendra la forme d’un guide méthodologique de la
réalisation d’un bilan patrimonial, du recensement patrimonial au suivi des
préconisations.

En résumé, la gestion de patrimoine sera une opportunité de croissance pour les


cabinets qui se donneront les moyens de fournir une prestation de qualité en
adéquation avec notre image de marque. La qualité, origine de la fidélité dont font
preuve nos clients2, doit rester l’objectif de tous les praticiens.

J’espère que ce mémoire répondra aux attentes des lecteurs et contribuera à


convaincre les plus dubitatifs d’entre-eux.

2
« Plus des deux tiers des entreprises sont ainsi depuis plus de 10 ans chez le même expert-
comptable », Marchés de la profession comptable, CSOEC 2014.

11
INTRODUCTION

INTRODUCTION

La profession se trouve aujourd’hui face à un tournant de son histoire. Les marges


constatées sur le marché traditionnel de l’expertise comptable tendent à se
contracter. De plus, la directive européenne « Services »3 prévoit la fin du
monopole des experts-comptables sur la production de comptes4. Il est par
conséquent urgent de prendre la mesure des choses en diversifiant notre offre de
prestations d’une part et apprenant à mieux vendre nos prestations d’autre part.

Les experts-comptables ont les cartes en main pour réussir cette mutation. Les
études démontrent que nous sommes les interlocuteurs privilégiés des chefs
d’entreprises. Notre compétence pluridisciplinaire est reconnue et s’étend de la
comptabilité à la gestion en passant par les différents domaines du droit. Elle nous
permet d’accompagner nos clients sur des problématiques dépassant les
prérogatives comptables habituelles.

La gestion de patrimoine est, depuis quelques années, un secteur en pleine


croissance. La perspective d’un nombre important de départs à la retraite dans
les prochaines années, conjuguée à un environnement économique qui tend à se
complexifier, place les problématiques de la retraite, de la transmission d’entreprise,
de la dépendance et de la protection de la famille au centre des préoccupations de
nos clients.
La majeure partie des experts-comptables interrogés affirment prodiguer
régulièrement des conseils d’ordre patrimoniaux à leurs clients. Ceci illustre notre
présence sur le marché. Cependant, la part des honoraires relatifs au conseil au
sens large n’atteint pas les 8%5.

3
Directive 2006/123 du Parlement Européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux
services dans le marché intérieur.
4
Une nuance est apportée par l’ordonnance n°2008-507 du 30 mai 2008 portant transposition de la
directive 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications
professionnelles. Elle ne permet l’exercice de la profession d’expert-comptable qu’aux titulaires d’une
qualification professionnelle nécessaire.
5
« Gestion des cabinets d’expertise comptable », CSOEC, octobre 2010.

12
INTRODUCTION

L’enjeu de ce mémoire est double. Il doit permettre dans un premier


temps de convaincre les confrères encore dubitatifs quant à l’opportunité que
représente la gestion de patrimoine pour nos cabinets. Par ailleurs, ce mémoire
propose un guide méthodologique à l’attention des confrères qui souhaitent
proposer des missions de bilan patrimonial, leur permettant d’appréhender au
mieux cette nouvelle mission.

Notre réflexion sera menée selon trois axes, représentant chacun une des parties
de ce mémoire.

Il s’agira dans un premier temps de démontrer que la gestion de patrimoine est le


prolongement naturel de nos mission courantes. En effet, les évolutions récentes
de l’ordonnance de 1945 ont élargi notre champ d’intervention. Il nous est aujourd’hui
possible de donner des consultations sans pouvoir toutefois en faire l’objet
principal de notre activité et donc de proposer le bilan patrimonial à nos clients.
Quelques perfectionnements en droit civil devront compléter nos compétences. Une
maîtrise des différents régimes matrimoniaux et des règles de successions est,
en effet, essentielle.
Proposer une nouvelle mission demande quelques investissements. Un outil
informatique performant, ainsi qu’une documentation spécialisée et actualisée
permettront d’appréhender au mieux la mission. Enfin, la gestion de patrimoine fait
appel à de nombreuses notions techniques. De multiples compétences sont déjà
présentes dans nos cabinets. La formation et le recrutement seront le cas échéant
les deux solutions pour acquérir celles qui nous manquent.

La deuxième partie s’attachera à définir les outils nécessaires au développement


d’une offre sécurisée de gestion de patrimoine.
La communication a été l’un des sujets centraux de la profession ces dernières
années. Une clarification des pratiques autorisées a donc été menée. Aussi, le
développement de la gestion de patrimoine au sein de nos cabinets passera par une
communication auprès de nos clients et des prospects de notre savoir faire. Une
segmentation de la clientèle couplée à une grille de lecture « scientifique »
permettra d’optimiser nos échanges avec le client.

13
INTRODUCTION

Notre devoir de conseil est grand, la responsabilité qui en découle aussi. Alors
sécurisons nos pratiques ! De l’obligation de souscrire une police d’assurance de
responsabilité civile à celle portant sur la documentation des travaux, le cadre
formé par le code de déontologie et les normes professionnelles6 permet de
protéger aussi bien les clients que les praticiens. Par ailleurs,
l’interprofessionnalité permettra d’améliorer l’accompagnement du client et par
là même de se prémunir d’une mise en responsabilité. Notre pluridisciplinarité
nous positionnera naturellement, dans ce cadre, comme le chef d’orchestre du
conseil patrimonial.

Le bilan patrimonial constitue la base du conseil patrimonial. La dernière partie y


sera, à ce titre, entièrement consacrée.
La démarche proposée dans ce mémoire, du recensement de l’information à la
présentation faite au client en passant par la réalisation d’un audit patrimonial,
constitue un guide de travail pour les futurs conseillers en gestion de patrimoine. Il
ne s’agit pas de proposer un dossier de travail type, mais bien une méthodologie.
La mission de conseil patrimonial ne s’achève pas avec la restitution de nos
conclusions. La satisfaction client dépend également de notre capacité à assurer
le suivi de nos préconisations et ce quelle que soit l’évolution du contexte.

6
Notamment la norme professionnelle NPMQ « Maîtrise de la qualité des missions au sein des
structures d’exercice professionnel ».

14
PREMIERE PARTIE : L’EXPERT-COMPTABLE ET LA GESTION DE PATRIMOINE

PREMIERE PARTIE : L’EXPERT-COMPTABLE ET LA


GESTION DE PATRIMOINE

Depuis la Grèce Antique, les époques ont façonné la gestion de patrimoine telle
qu’on la connaît aujourd’hui. De la même façon, le métier de comptable a évolué
jusqu’à l’institution de l’Ordre des experts-comptables le 3 avril 1942 redéfini par
l’ordonnance de 1945 qui reste aujourd’hui le texte principal de notre profession.
La relation forte existante entre les comptables, devenus experts-comptables, est
défendue par notre ordre qui prône une image basée sur le triptyque « Science,
Conscience, Indépendance ».
Cette image de marque est devenue aujourd’hui notre principale force, faisant de
nous l’interlocuteur privilégié des chefs d’entreprises. Chaque étude menée par le
CSOEC sur le marché de la profession montre à quel point nos clients nous
plébiscitent.
Les évolutions de notre environnement, aussi bien économiques que réglementaires,
font que le positionnement des experts-comptables sur le marché de la gestion de
patrimoine est naturel. Saisissons l’opportunité qui est la nôtre !
Notre pluridisciplinarité est déjà grande, notamment grâce à notre formation.
Néanmoins, le conseil en gestion de patrimoine nécessite l’apprentissage de
connaissances complémentaires, notamment en droit civil. Une maîtrise des
règles de succession ainsi que des différents régimes matrimoniaux enrichira
notre boîte à outils nous permettant de répondre efficacement aux problématiques de
nos clients.
Enfin, l’investissement dans des outils informatiques et des Hommes de qualité
achèvera notre prise de position sur un marché d’avenir.

15
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

CHAPITRE 1 L’EXPERT-COMPTABLE ATTENDU SUR LE MARCHE


DE LA GESTION DE PATRIMOINE

Section 1 LA GESTION DE PATRIMOINE

1. Les origines de la gestion de patrimoine

1.1 De la Grèce au XXème siècle


L’écriture a bouleversé notre humanité. Les écrits ont permis de traverser l’épreuve
du temps beaucoup plus facilement que les paroles.
L’apparition des premières monnaies constitue une autre étape déterminante dans
l’évolution de nos économies. On en retrouve des traces remontant à l’Egypte il y a
5 000 ans, mais les premiers à généraliser cet outil ont été les grecs à partir du
VIIème siècle de notre ère, époque de l’apparition des premiers banquiers.
Les Romains apportèrent quant à eux une puissante boite à outils, le droit privé,
garant du transfert de propriété.
L’Eglise a elle aussi apporté sa pierre à l’édifice grâce à la notion de contrat de
mariage et de communauté conjugale.
Il faudra néanmoins attendre le XIVème siècle et la volonté de grandes familles de
protéger leur Nom des aléas de la conjoncture économique pour voir apparaître la
notion de diversification du patrimoine. En effet, le négoce a rendu riche un certain
nombre de familles, mais ne les protégeait pas des cycles économiques. Dès lors, un
investissement massif dans le foncier s’est produit au détriment des activités de
négoce.
Les pratiques évolueront peu pendant les six siècles suivants. Néanmoins, un acteur,
la Banque, verra progressivement son rôle s’accroître jusqu’à devenir un
interlocuteur incontournable pour chaque citoyen.

1.2 Un virage dans les années 1970


La gestion de fortune est depuis longtemps pratiquée par les banques auprès de
leurs clients fortunés. En effet, les banques ont toujours eu un rôle

16
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

d’intermédiaires d’affaires dans les opérations industrielles.


Or, l’avènement des marchés donne naissance à une multitude de produits
financiers à la portée du plus grand nombre, rendant la diversification patrimoniale
possible pour les plus petites bourses.
Dans un contexte devenu complexe et concurrentiel, apparaît la notion d’ « approche
patrimoniale globale »7 et de la « vente conseil » en opposition avec les stricts
vendeurs de produits. Le conseil prend alors une place centrale dans l’approche de
la gestion de patrimoine.
Dès lors, la question de la légitimité de l’expert-comptable conseil en gestion de
patrimoine se pose. Ce mémoire s’attachera à démontrer que nous pouvons
répondre par l’affirmative à cette question.

2. Qu’est ce que la gestion de patrimoine ?


« Elle consiste à promouvoir un ou plusieurs produits patrimoniaux en s’appuyant sur
une prescription justifiée par la situation patrimoniale de la personne conseillée »8.
Deux axes se dessinent, la gestion d’actifs d’une part, et le conseil patrimonial de
l’autre.

2.1 La gestion d’actifs


Les marchés boursier, monétaire et immobilier constituent les trois secteurs
d’investissement principaux.
Contrairement à ce que l’on entend souvent, l’assurance-vie ne constitue pas un
secteur d’investissement mais un mode de détention. Notons d’ailleurs que chacun
des secteurs précités peut être logés dans ce contenant.
La gestion d’actifs consistera à créer une allocation spécifique du patrimoine entre
les trois secteurs précités qui réponde aux exigences de l’investisseur en termes de
rentabilité et de risque.
L’expression « ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier », illustre
parfaitement la nécessité de diversification des actifs pour limiter les risques liés aux
aléas des marchés.

7
Expression déposée à l’origine par la société Patrimoine Management & Technologie mais utilisée
par tous les acteurs du marché. La société sera reprise par les Editions Francis Lefebvre en 2008.
8
P.M. Guillon, La gestion de patrimoine, Economica, 1996.

17
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

2.2 Le conseil patrimonial


Les produits d’investissements sont multiples et disponibles sur un nombre important
de supports. La stratégie à mettre en place et les choix d’investissements
dépendront de l’investisseur (notamment son aversion aux risques), des objectifs
recherchés (rentabilité, horizons de placement) et tiendront compte de
l’environnement externe (situation macroéconomique, politique…).
Dans la plupart des cas, le client n’a pas la compétence et le recul nécessaire pour
définir seul sa stratégie et devra avoir recours à un conseil patrimonial.
Le conseiller patrimonial devra bien entendu maîtriser les produits et supports
existants, s’appuyer sur des connaissances pluridisciplinaires (économie, droit,
fiscalité…) mais aussi faire preuve de psychologie et de pédagogie lors de la
détermination avec le client des objectifs atteignables.

3. La gestion de patrimoine en chiffres


Le taux d’épargne est en France l’un des plus élevés des pays de l’OCDE9.
Le patrimoine des français a fortement augmenté ces dernières années. Cette
progression s’explique en grande partie par l’inflation de l’immobilier. En effet, le
foncier de jouissance ou de rapport représente près de la moitié du patrimoine des
français, contre un tiers de patrimoine financier et 15% de patrimoine professionnel10.
En comparaison avec les autres pays, la part du patrimoine financier est plus faible.
Elle s’explique en partie par l’existence en France du système de retraite par
répartition qui n’est ni plus ni moins qu’un système d’épargne forcée. L’excédent
actuel des différents régimes est lui-même investi en grande partie sur les marchés
financiers. Or ce patrimoine « à recevoir » par chacun n’est pas valorisé dans les
études disponibles, mais laisse à penser qu’en agrégeant l’épargne directe et
l’épargne indirecte des français, la part du financier est en réalité comparable avec
celle relevée dans les autres pays de l’OCDE.
La tendance française est depuis toujours à la prudence avec un investissement
direct en deçà des autres pays puisque la part des valeurs mobilières dans le
patrimoine financier n’atteint pas 20%. De plus, les investissements en assurance-vie

9
Le taux d’épargne est de 9,5% du revenu disponible en France en 2013 contre 9,1% en Allemagne,
3,8% en Italie et 5,0% au Etats-Unis, source https://data.oecd.org/fr/hha/epargne-des-menages.htm .
10
Insee, enquête patrimoine 2010.

18
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

sont essentiellement dirigés sur des fonds en euro.


Par ailleurs, si la diversification du patrimoine semble s’être démocratisée, elle reste
aujourd’hui encore réservée aux ménages les plus aisés.

FIGURE 1 - Encours de placements financiers des ménages résidents en 2014


(Source : Rapport annuel de l’observatoire de l’épargne réglementée 2015)

en milliards d'euros en % du total


Patrimoine financier total 4 259,0 100%
Actifs non risqués 2 674,1 62,8%
Numéraire et dépôts à vue 411,1 9,7%
Livrets 606,2 14,2%
Titres d'OPC monétaires 13,9 0,3%
Comptes à terme 72,4 1,7%
Epargne contractuelle (PEL, PEP) 238,5 5,6%
Assurance-vie en supports euros 1 332,0 31,3%
Actifs risqués 1 584,9 37,2%
Titres de créances 78,8 1,9%
Actions cotées 192,6 4,5%
Titres d'OPC non monétaires 283,9 6,7%
Actions non cotées 770,2 18,1%
Assurance-vie en support UC 259,4 6,1%

Section 2 UN INTERLOCUTEUR PRIVILEGIE DU CHEF D’ENTREPRISE

1. Une image de marque


Le triptyque Science, Conscience, Indépendance, est la devise de l’Ordre des
experts-comptables et explique parfaitement l’origine de l’image positive dont nous
bénéficions dans l’opinion publique.
Cette devise est défendue au quotidien par notre Ordre qui organise l’accès à la
profession, prend part aux débats politiques dès que le besoin s’en fait ressentir et
défend ses membres en faisant respecter les normes de notre métier tout en
travaillant sur leur évolution.

1.1 Science
L’accès au titre d’expert-comptable implique l’obtention du diplôme d’expertise

19
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

comptable (DEC)11. Or ce diplôme est l’aboutissement d’une formation à la fois


technique et professionnelle qui s’étale sur une durée de 8 ans.
Nous entendons souvent parler, à juste titre, de transversalité de la réflexion de
l’expert-comptable. La source de celle-ci provient certainement de l’étendue du
programme à couvrir pour l’obtention du Diplôme Supérieur de Comptabilité et
Gestion (DSCG) et plus encore pour celle du DEC. En effet, notre domaine de
prédilection est la comptabilité. Elle occupe une place prédominante dans notre
formation, mais notre valeur ajoutée provient essentiellement de notre capacité à
utiliser la comptabilité comme un outil de conseil pour nos clients.
Or cette faculté à prendre de la hauteur est rendue possible grâce à notre formation
solide en droit au sens large, mais aussi dans tous les domaines de la gestion.
En effet, au cours de notre cursus, différents pans du droit sont abordés : droit des
sociétés, droit fiscal, droit social, droit du contrat, droit international, droit pénal…
Cette formation ne fait pas de nous des juristes stricto sensu, mais nous permet de
comprendre l’interdépendance entre les matières.
De plus, notre approche de la gestion est large puisque nous abordons certes des
matières qui utilisent les chiffres comme le contrôle de gestion ou la finance, mais
aussi d’autres plus éloignées comme la théorie des organisations, la conduite du
changement ou les systèmes d’information.
Cette diversité des matières abordées permet ainsi à chaque expert-comptable
d’avoir, grâce à une base de connaissances solides, une approche transversale dans
sa réflexion.

1.2 Conscience

Étymologiquement, conscience signifie : faire avec la science. Notre savoir est par

conséquent un outil, une condition sinéquanone, à l’exercice de notre profession.

Laquelle nécessite, en plus de ce fondement, une forte expérience professionnelle.

L’obligation d’effectuer un stage de trois ans préalablement à l’obtention du DEC


montre que l’OEC est en phase avec l’origine étymologique du terme, puisqu’il
souhaite que chaque expert-comptable ait mis en pratique son savoir en conditions

11
Article 1 de l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des
experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable.

20
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

réelles avant de lui conférer le titre d’expert-comptable.


Dès lors, le mot conscience prend tout son sens puisqu’il permet de faire avec sa
science, mais aussi d’appréhender la réglementation imposée à chaque praticien
dans la réalisation de ses missions.
En effet, certaines normes de travail imposées par nos instances pourraient être
perçues comme un frein à notre activité. Néanmoins, il s’avère que ce cadre permet
de normaliser notre pratique. Or sans normalisation et nivèlement par le haut, notre
profession n’aurait pas pu construire son image actuelle.
Enfin, les experts-comptables ont toujours eu à l’esprit que leur démarche devait
s’inscrire dans un cadre général, celui de la Société. Ainsi, par conscience, on
entend également, et surtout, conscience de notre rôle dans la société. C’est
pourquoi chaque expert-comptable prête serment : « Je jure d’exercer ma profession
avec conscience et probité, de respecter et faire respecter les lois dans mes
travaux »12.

1.3 Indépendance
L’indépendance est une notion essentielle à l’exercice de la profession d’expert-
comptable. Elle est inscrite dans l’ordonnance fondatrice de notre ordre et est
rappelée dans le code de déontologie.

 Indépendance financière

Il est interdit aux experts-comptables d’intervenir auprès de société dans lesquelles


ils détiennent des intérêts substantiels13. Cette notion a été précisée depuis par le
Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-comptables qui a fixé à 10% cette
participation pour une PME.
De plus, l’expert-comptable est rémunéré sous forme d’honoraires à l’exclusion de
toute autre forme de rémunération14. Or, ce point est d’un intérêt capital en matière
de gestion de patrimoine lorsque l’on sait que l’essentiel du chiffre d’affaires des

12
Article 3 du Code de déontologie des professionnels de l’expertise comptable.
13
Article 22 de l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des
experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable.
14
Article 24 de l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des
experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable.

21
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

professionnels sur ce marché est constitué de commissions perçues lors de la vente


de produits.
 Indépendance des fonctions

L’expert-comptable ne peut accepter de mission pour une société dans laquelle il


exerce des fonctions de direction.
En outre, nous rappelons que le fait d’être membre de l’Ordre des
experts-comptables interdit le statut de salarié au sein d’une société elle-même non
inscrite à l’Ordre.

 Indépendance affective

L’indépendance affective est la notion prêtant le plus à discussion. En effet, il est


relativement aisé de comprendre l’impossibilité de réaliser une mission auprès d’une
société dans laquelle un membre de notre famille exerce son activité professionnelle,
mais la notion d’indépendance est plus large puisque nous devons aussi être
indépendants en apparence.
En conclusion, il est important d’avoir une réflexion objective lors de l’acceptation
d’une nouvelle mission afin de que notre indépendance ne soit pas remise en
question. Enfin, la question de notre indépendance ne devra pas se poser
uniquement lors de l’acceptation de la mission, mais également à chaque fois que
notre situation propre ou celle de notre client évoluera.

2. Les missions traditionnelles, ciment de la relation


Nos missions comptables traditionnelles nous permettent d’avoir une connaissance
précise de la situation de nos clients grâce à des échanges réguliers permettant
l’instauration d’une relation durable et de confiance.

2.1 Une connaissance de l’activité professionnelle du chef


d’entreprise
Notre position est enviée de beaucoup de professionnels. En effet, nos missions sont
à la source de l’information.
Alors que beaucoup de professionnels s’efforcent de récupérer les informations
financières, nous les produisons.

22
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

Cette position stratégique nous permet clairement d’avoir un temps d’avance sur nos
concurrents et souvent sur nos clients eux-mêmes. En effet, il n’est pas rare que
nous soyons à l’origine de prises de conscience de certaines situations par nos
clients concentrés sur l’activité courante de leurs entreprises.
Nous sommes souvent les premiers à tirer la sonnette d’alarme lors de difficultés,
mais nous le sommes également lorsqu’il s’agit d’identifier les opportunités qui se
présentent.
La production des états comptables nous confère un accès privilégié à l’information
financière qu’il s’agisse des flux ou des stocks. En effet, l’entreprise constitue
souvent la source principale de revenu du dirigeant et une part importante de son
patrimoine.

2.2 Des échanges réguliers avec le client


L’expert-comptable est le conseil le plus sollicité par les clients.
Une étude du CSOEC15 illustre parfaitement la situation puisque nous recevons plus
de 80% de nos clients plusieurs fois par an et près de la moitié chaque mois. Si l’on
tient compte des échanges téléphoniques, la proportion des clients avec qui nous
échangeons plusieurs fois par an monte à plus de 90%.
Ainsi, alors que nos concurrents sur le marché peinent parfois à s’entretenir une fois
l’année avec nos clients, nous avons la chance d’être auprès d’eux toute l’année.
Utilisons l’opportunité qui est la nôtre pour être à l’écoute. En effet, les
problématiques les plus sérieuses sont parfois abordées sur un coin de table lors
d’un passage furtif du client au cabinet. Il est donc de notre responsabilité et dans
notre intérêt de rester toujours à l’écoute de nos clients.

15
Marchés de la profession comptable - CSOEC - septembre 2014.

23
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

FIGURE 2 - Fréquence des contacts téléphoniques avec le cabinet


(Source : "Marchés de la profession comptable", CSOEC - septembre 2014)

2.3 Une relation de confiance


La mission principale des experts-comptables reste la production de comptes.
Comme nous l’avons noté, cette mission nous donne accès à des informations
privilégiées et à la possibilité d’échanger régulièrement avec nos clients. Or la
régularité des échanges est la base de l’instauration d’une relation de confiance avec
nos clients.
En effet, l’activité professionnelle des clients impacte leurs situations personnelles et
inversement. Ainsi, nous ne sommes pas uniquement au cœur de l’activité
économique. Lors des nombreux échanges avec nos clients, les sujets de discussion
dépassent largement le cadre de l’activité pour s’inviter dans la sphère privée. Il ne
s’agit pas là d’une simple familiarité, mais plutôt de la conscience qui est la nôtre, de
déceler et d’appréhender les interactions réciproques entre le professionnel et le
privé.
Une image régulièrement reprise par nos clients est celle de l’expert-comptable
médecin généraliste de l’entreprise. La transversalité de notre réflexion nous permet
d’accompagner au mieux l’entreprise, mais également de nous poser en véritable
conseil du chef d’entreprise dans la recherche de solutions aux problématiques qui
lui sont posées.

24
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

Nos consultations régulières créent un climat de confiance entre nos clients et nous,
permettant plus de liberté dans les discussions. Notre connaissance du client et
notre perception de sa situation globale s’élargissent avec le temps.
Quelques chiffres toujours issus de l’étude sur les marchés de la profession
comptable illustrent cette relation de confiance. Moins de 10% de nos clients mettent
en concurrence leur expert-comptable avec un confrère. Certes la question des
honoraires existe, mais elle est loin d’être l’élément principal dans le choix de
l’expert-comptable puisque la part des PME qui porte ce point en tête de leurs
critères s’établit à 12%. Les critères principaux restant la confiance inspirée et la
proximité géographique. Preuve est donc faite de l’importance d’échanger
régulièrement avec nos clients pour les fidéliser dans le temps.

3. Une attente exprimée par les clients


3.1 Sondage proposé à la clientèle
La réglementation de notre profession évolue, élargissant le champ des missions
accessibles aux experts-comptables. Dès lors se pose la question de l’existence d’un
marché pour ces missions. En effet, avoir les compétences pour faire ne servirait à
rien si nos clients n’étaient pas prêts à faire appel à nous dans le cadre de ces
nouvelles missions.
Notre cabinet a réalisé un sondage auprès de ses principaux clients afin de mieux
cerner leurs besoins sur deux thèmes : la retraite et la succession.
Il a donc été demandé à l’ensemble des équipes de s’entretenir avec leurs clients
respectifs. Le choix de ce procédé informel et participatif a été dicté par la double
volonté de ne pas brusquer des clients déjà très sollicités et de sensibiliser chacun
sur la nécessité de prendre de la hauteur sur les problématiques de ses clients.
À l’issue de chaque rendez-vous, les collaborateurs devaient retranscrire de façon
synthétique les réponses des clients aux questions suivantes :
 Vous êtes vous déjà posé la question de votre retraite ?
 Avez-vous une idée du montant de vos revenus lorsque vous partirez à la
retraite ?
 Avez-vous organisé votre succession ?
 Pensez-vous que nous puissions vous accompagner sur ces problématiques ?
 Si oui, seriez-vous prêt à solliciter une mission complémentaire à cet effet ?

25
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

3.2 Analyse des résultats


Un panel de près de 80 clients s’est prêté au jeu des questions.
Le premier enseignement que nous pouvons tirer de ce travail, est l’enthousiasme
des clients à répondre à des questions qui les concernent.
Par ailleurs, il ressort que l’intérêt aux problématiques posées est directement corrélé
à l’âge du client. En effet, les clients à plus de 20 ans du départ à la retraite, estiment
que ces problématiques sont trop éloignées dans le temps. À l’inverse, les clients
proches de la retraite se posent beaucoup de questions et anticipent tous, sans
pouvoir le chiffrer précisément, une baisse de leurs revenus à cette étape de leur vie.
Certains se sont déjà renseignés notamment grâce à internet. Mais beaucoup
avouent leur incompétence dans la compréhension des éléments en leur possession.
Concernant leur succession, il ressort que peu de clients se sont posés cette
question. Néanmoins, la problématique de la transmission de l’entreprise est très
présente avec notamment la crainte de subir une fiscalité forte.
Tous s’accordent à dire que l’expert-comptable est un conseil en la matière, mais
peu avaient conscience de la possibilité de recourir à lui pour effectuer un bilan plus
complet de leur situation patrimoniale.
La question des honoraires supplémentaires est, quant à elle, envisagée
différemment selon les clients, mais l’approche ne semble pas différente de celle des
honoraires des missions comptables classiques. Certains ne souhaitent en aucun
cas payer plus et d’autres, qui forment heureusement la majorité, sont prêts à payer
plus pour un service de qualité.

3.3 Une tendance confirmée par l’Ordre des Experts-Comptables


Les conclusions de l’étude réalisée au sein de notre cabinet semblent pouvoir être
généralisées à l’ensemble des clients de la profession. En effet, le CSOEC effectue
tous les deux ans une étude statistique sur un large panel de clients de diverses
tailles et domaines d’activité, dont les résultats concordent avec les nôtres.
Comme nous l’avons déjà noté, nos compétences sont reconnues bien que
partiellement connues.
2/3 des entreprises déjà clientes sont demandeuses des conseils de leur expert-
comptable sur des missions complémentaires. Parmi elles, 58% souhaiteraient des

26
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 1
L’expert-comptable attendu sur le marché de la gestion de patrimoine

conseils concernant la gestion de leur patrimoine et 74% sont demandeuses de plus


de conseil en matière de recherche d’informations juridiques, fiscales et sociales.
Les entreprises non clientes sont, elles aussi, demandeuses de conseil, ce qui ouvre
d’autant plus d’opportunités pour les cabinets communiquant sur leurs compétences.
Une enquête du CSOEC sur la profession d’expert-comptable dans l’univers du
patrimoine, présentée lors de son 59ème congrès, a quant à elle étudié le point de vue
des experts-comptables sur leur positionnement sur le marché de la gestion de
patrimoine.
Le constat principal est que beaucoup d’entre nous effectuent des missions de
conseil puisque plus de 95% de la profession est sollicitée au moins périodiquement
sur le sujet et 45% le sont souvent.
Or, la part des honoraires liée à ces prestations ne dépasse pas les 3%. C’est
pourquoi nous verrons à la suite de ce mémoire comment structurer notre offre pour
que ces écarts constatés entre notre travail et notre rémunération s’estompent.
Alors osons !

27
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 2
L’activité de gestion de patrimoine est-elle compatible avec celle de l’expertise comptable ?

CHAPITRE 2 L’ACTIVITE DE GESTION DE PATRIMOINE EST-ELLE


COMPATIBLE AVEC CELLE DE L’EXPERTISE
COMPTABLE ?

Section 1 L’ORDONNANCE DE 1945

L’exercice de la profession d’expert-comptable est régi par l’ordonnance n°45-218 du


19 septembre 1945.
Ainsi, une mission ne peut être réalisée par un expert-comptable que si elle est
prévue par ce texte, ou du moins si sa réalisation ne contredit pas les obligations
énoncées dans celui-ci.

1. La possibilité de donner des consultations et d’effectuer des études


L’article 22 de l’Ordonnance de 1945, tel qu’il est rédigé ce jour, confère aux experts-
comptables la possibilité de « donner des consultations, (d’)effectuer toutes études et
tous travaux d'ordre statistique, économique, administratif, juridique, social ou fiscal
et (d’)apporter leur avis devant toute autorité ou organisme public ou privé qui les y
autorise mais sans pouvoir en faire l'objet principal de leur activité et seulement s'il
s'agit d'entreprises dans lesquelles ils assurent des missions d'ordre comptable de
caractère permanent ou habituel ou dans la mesure où lesdites consultations,
études, travaux ou avis sont directement liés aux travaux comptables dont ils sont
chargés ».
L’expert-comptable a par conséquent la possibilité de proposer une mission de
conseil patrimonial uniquement à titre accessoire d’une mission comptable.
La problématique est donc de déterminer à partir de quel moment notre consultation
est l’accessoire d’une mission comptable.
L’entreprise est souvent la source principale de flux et de stocks pour le dirigeant
d’entreprise. Ainsi, les décisions prises dans le cadre de la gestion de l’entreprise ont
un impact direct sur la situation personnelle du dirigeant. Nous pouvons dès lors
affirmer que le patrimoine professionnel et le patrimoine privé sont interdépendants
et que, par conséquent, il ne peut y avoir de conseil efficace pour l’entreprise sans

28
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 2
L’activité de gestion de patrimoine est-elle compatible avec celle de l’expertise comptable ?

prise en compte de la situation personnelle des dirigeants.


Ainsi, dès lors que nous sommes en charge d’une mission comptable, donner
consultation à son dirigeant sur son patrimoine constitue une mission accessoire et
est donc ouverte aux experts-comptables.

2. La manipulation des fonds


La gestion de patrimoine recouvre un large spectre de missions dont certaines
pourraient nécessiter le maniement de fonds de nos clients.
Or, l’article 22 de l’Ordonnance de 1945 stipule que l’expert-comptable peut à titre
accessoire « recevoir, conserver ou délivrer des fonds ou valeurs ou de donner
quittance ». Néanmoins, les fonds devront transiter par un compte ouvert dans les
livres d’un fonds de règlement dans les conditions fixées par un décret non encore
publié à ce jour.
Le décret est semble-t-il sur le point d’être signé par le Premier Ministre, néanmoins
il n’est pas autorisé à l’expert-comptable d’être mandaté par son client comme
intermédiaire.
La seule exception prévue par les textes pour le moment concerne la possibilité
donnée à l’expert-comptable de payer pour le compte de ses clients les dettes
fiscales et sociales sans transiter par le fonds dédié en cours de création.

3. Les honoraires comme unique rémunération


L’article 24 de l’Ordonnance de 1945 stipule que l’expert-comptable reçoit en
rémunération de son travail des honoraires, et ce de façon exclusive.
Ces honoraires restent néanmoins librement convenus avec le client en fonction de
l’importance des diligences à effectuer, de la notoriété de l’expert-comptable ou de la
situation économique du client par exemple.
Lors de nos missions en gestion de patrimoine, nous sommes, par exemple, amenés
à exprimer notre point de vue sur les allocations d’actifs de nos clients ou sur la mise
en place de contrats d’assurance. Ces préconisations ont pour conséquence l’achat
ou la souscription par le client de produits financiers ou de contrats d’assurance.
Or il est d’usage que les intermédiaires dans la vente de ces produits soient
rémunérés sous forme de commissions reversées par les compagnies d’assurance
ou autres fournisseurs proportionnellement aux montants payés par les clients. Cette

29
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 2
L’activité de gestion de patrimoine est-elle compatible avec celle de l’expertise comptable ?

pratique est interdite aux membres de l’Ordre.


Dès lors, nous pouvons en déduire que l’expert-comptable devra borner son
intervention au conseil en excluant la possibilité de se placer comme intermédiaire
ou comme courtier sur les opérations financières préconisées à ses clients.

NOTE EXPERT
Plusieurs publications récentes mettent en avant la possibilité de créer une filiale de
courtage non inscrite à l’Ordre. Selon notre analyse, la création d’une telle structure
est tout à fait envisageable en vertu de l’article 7 de l’ordonnance de 1945.
Cependant, la problématique des commissions perçues par la société en
contrepartie des souscriptions de produits par ses clients reste entière. En effet, «
Les détenteurs d’actions ou de parts sociales dans des sociétés non inscrites à
l’Ordre doivent déclarer annuellement sur l’honneur que cela ne constitue pas un
obstacle à l’accomplissement de leurs devoirs professionnels et respecte le principe
d’indépendance »16. Or, bien que la discussion soit ouverte à ce sujet, nous
considérons que le commissionnement par personne interposée est sujette à
remettre en cause notre indépendance. Nous n’irons par conséquent pas plus loin
sur le sujet dans le cadre de ce mémoire.

Section 2 LE CODE DE DEONTOLOGIE

Comme nous venons de le voir, l’expert-comptable exerce son activité dans le


respect de l’ordonnance de 1945. D’autres règles définissent le comportement des
experts-comptables : le code de déontologie.
La mission de conseil en gestion de patrimoine n’échappe donc pas à ces règles
dont certaines doivent faire l’objet d’une attention particulière.

1. L’indépendance
La notion d’indépendance a déjà été abordée comme une caractéristique des
experts-comptables, garante de l’objectivité des préconisations faites au cours de
nos missions.
En matière de conseil en gestion de patrimoine, l’une des phases essentielles à la

16
« Périmètre et missions, guide pratique », OEC, octobre 2014.

30
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 2
L’activité de gestion de patrimoine est-elle compatible avec celle de l’expertise comptable ?

mission, est l’étude de la composition du patrimoine de notre client afin de pouvoir le


conseiller sur d’éventuels ajustements à effectuer dans l’allocation de ses actifs. Or
si pour une raison ou une autre, nous perdons notre objectivité sur l’opportunité
d’orienter notre client sur une certaine structuration de son patrimoine plutôt qu’une
autre, alors nous risquons de nous exposer à différents problèmes comme un
mauvais ressenti du client ou pire, une mise en responsabilité en cas de dénouement
défavorable d’une de nos prescriptions au client.
Le code de déontologie dans son article 145 est là pour nous le rappeler :
l’expert-comptable exerce son activité avec indépendance d’esprit.
Nous avons noté plus en amont de notre étude l’interdiction d’être rémunéré
autrement que par la facturation d’honoraires non indexés sur l’activité du client et
l’interdiction de recevoir des commissions de la part de tiers.
L’idée sous-jacente à cette restriction est la volonté de garder intacte notre
indépendance ainsi que notre apparence d’indépendance.

2. Le secret professionnel et le devoir de discrétion


L’article 147 du code de déontologie rappelle que l’expert-comptable est soumis au
secret professionnel comme prévu dans l’article 21 de l’ordonnance de 1945.
« La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est
dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une
mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros
d'amende »17. Le manquement au secret professionnel caractérise donc un délit.
La jurisprudence définit la notion de secret. Il prend la forme de toute information non
connue du public, ou de toute confidence faite par le client.
Au-delà du secret professionnel défini par la loi, nous devons également, en tant
qu’expert-comptable faire preuve de discrétion. En effet, quand bien même une
information ne serait pas couverte par la notion de secret professionnel, nous ne
devons pas la diffuser sans l’accord express de notre client.
Rappelons que cette obligation s’étend bien entendu à l’ensemble de nos équipes. Il
est donc essentiel de sensibiliser chaque intervenant sur les devoirs qui nous
incombent.

17
Article 226-13 du Code pénal.

31
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 2
L’activité de gestion de patrimoine est-elle compatible avec celle de l’expertise comptable ?

3. Le devoir de conseil
La notion de devoir de conseil, telle qu’imposée aux experts-comptables en vertu de
l’article 155 du code de déontologie, est large. Il faut se référer à la jurisprudence
pour la définir et appréhender son étendue.
Afin de protéger le client considéré comme un profane, les juges ont élargi la notion
de conseil au-delà des limites fixées par le contrat. L’obligation de conseil va au-delà
du simple domaine de la comptabilité puisqu’elle s’étend à bien d’autres domaines
allant du droit à la gestion administrative en passant par tout ce qui peut avoir un
impact sur les décisions prises par le client dans le cadre de son activité.
La notion de conseil a été définie comme le fait d’attirer l’attention, d’avertir, d’éclairer
et de préconiser une solution.
Notons néanmoins qu’avertir ne signifie pas effectuer, informer n’est pas renseigner.
La différence prendra tout son sens comme nous le verrons dans la deuxième
section de la deuxième partie de ce mémoire « La veille patrimoniale, outil du désir ».
Néanmoins, avant de transformer ce devoir en opportunité, l’expert-comptable doit
bien avoir à l’esprit l’étendue de celui-ci afin de ne pas risquer de voir sa
responsabilité engagée en cas de litige avec le client.
Nous devons par conséquent apprécier au cas par cas les diligences à mettre en
œuvre afin de répondre à notre obligation.
Enfin, les experts-comptables se positionnent depuis peu sur cette nouvelle mission.
Ainsi, l’absence de jurisprudence, notamment en matière de conseil, nécessite une
prudence particulière dans les diligences accomplies au cours de ces missions.

CE QU’IL FAUT RETENIR


Les règles qui nous sont imposées dans l’accomplissement de nos missions ne
doivent pas être perçues comme des freins, mais plutôt comme des garde-fous
crédibilisant notre profession et permettant de maintenir dans le temps nos missions
là où d’autres n’y parviennent pas.

32
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

CHAPITRE 3 APPREHENDER LES MISSIONS DE GESTION DE


PATRIMOINE

Section 1 DES CONNAISSANCES TECHNIQUES A APPROFONDIR

Le conseil en gestion de patrimoine est à la portée de tous les experts-comptables.


Néanmoins, les connaissances requises s’éloignent de celles utilisées dans
l’accomplissement de nos missions traditionnelles et doivent être précisées. Il ne
s’agit pas ici d’en dresser une liste exhaustive, mais plutôt d’attirer l’attention sur
certaines particularités de chacune des matières. Pour plus de précisions, le
professionnel devra se référer aux ouvrages spécialisés dont certains sont
mentionnés dans la bibliographie.

1. La dimension juridique
1.1 Les régimes matrimoniaux
Le Code civil prévoit différentes solutions pour l’organisation de la gestion des foyers
formés par le mariage afin de laisser une grande liberté aux époux : les régimes
matrimoniaux, avec leurs différences mais aussi leur socle commun.

 Le régime primaire

Le régime primaire est défini aux articles 214 à 226 du Code civil. Il prévoit des
règles communes à tous les régimes matrimoniaux sur quelques points clés du foyer
afin de protéger la famille contre l’époux.
Le logement de la famille
Une atteinte au droit de propriété existe en ce qui concerne le logement familial. En
effet, quelle que soit l’origine du bien, propre ou commun, les époux ne peuvent
décider de le vendre sans l’accord de l’autre. Cette interdiction de vendre sans
consentement mutuel ne se limite pas aux murs du domicile, mais également à son
contenu.
Les charges du mariage
Les époux doivent contribuer aux charges du mariage proportionnellement à leurs

33
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

facultés respectives. On ne peut déroger à ce principe, y compris lorsqu’un contrat


de mariage a été établi. La participation de chacun des époux n’est pas uniquement
financière, mais peut également prendre la forme de temps passé à l’entretien du
ménage.
De plus, chaque époux est engagé par les contrats souscrits par l’autre pour
l’entretien du ménage. C’est le principe de solidarité vis-à-vis des tiers.
Deux limites existent à ce principe de solidarité. Lorsque les dépenses engagées
sont manifestement excessives, la dette n’est plus commune, mais personnelle à
l’époux qui l’a contractée. Enfin, lorsque les époux ont choisi un régime séparatiste et
qu’un époux a payé une somme due avec les deniers personnels de l’autre époux,
alors la solidarité vis-à-vis des tiers est maintenue, mais une récompense due par
l’époux contractant à l’autre époux est alors déterminée.
L’exercice d’une profession
Chaque époux est libre de choisir de travailler ou non. Le cas échéant, il est libre de
choisir son activité professionnelle.
L’autonomie bancaire
Chacun des époux est libre d’ouvrir un compte bancaire. Il existe dès lors une
présomption de pouvoir, mais pas une présomption de propriété sur celui-ci. Charge
à lui de prouver, s’il souhaite que le compte soit qualifié de propre, que l’origine des
fonds l’est également.

 Les différents régimes

Deux grandes familles existent, les régimes dits de communauté et les régimes dits
séparatistes. Des schémas synthétiques de chacun des régimes sont présentés en
annexe 1.
Tous les mariages conclus en dehors du régime légal de la communauté d’acquêts
font l’objet d’un contrat signé obligatoirement devant un notaire.

Les régimes de communauté :


 Communauté de meubles et acquêts
Il était le régime légal jusqu’au 1er février 1966. À la date du mariage, l’ensemble des
biens meubles de chacun des époux forme la communauté alors que les immeubles
de chacun restent propres.

34
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

À partir de la date du mariage, l’ensemble des acquisitions entre dans la


communauté.
 Communauté d’acquêts
Il est le régime légal depuis le 1er février 1966. Les biens de chacun des époux à la
date du mariage restent propres.
À partir de la date du mariage, l’ensemble des acquisitions entre dans la
communauté.
 Communauté universelle
À la date du mariage, l’ensemble des biens meubles et immeubles est apporté à la
communauté. Il est néanmoins possible de ne pas apporter certains biens à la
communauté à condition de le mentionner dans le contrat de mariage.

Les régimes séparatistes :


 Séparation de biens
Le mariage ne change pas le caractère propre de chacun des biens. Par la suite,
chacun des biens acquis par les époux restera propre.
Les biens acquis par les deux époux ne forment pas une communauté, mais un
ensemble de biens indivis.
 Participation aux acquêts
C’est le régime mixte par excellence. Tout au long du mariage, il est géré comme le
régime de la séparation de biens, mais se liquide comme un régime communautaire.
En effet, au moment de la liquidation, chacun des époux a droit à la moitié de
l’enrichissement de l’autre qui a eu lieu pendant le mariage.

 Le pacte civil de solidarité (PACS)

Le PACS n’est pas un régime matrimonial à proprement parler, mais doit néanmoins
être appréhendé comme un mode de conjugalité. Sa simplicité séduit de nombreux
couples. En effet, le PACS est matérialisé par une convention enregistrée par le
greffe du tribunal d’instance du domicile conjugal.
Son principe général est la séparation des patrimoines. Néanmoins, le principe de la
solidarité se retrouve en matière de dépenses liées à la vie courante et ce dans les
mêmes limites que celles énoncées pour le mariage.

35
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

1.2 Les successions et libéralités


Il est important de lier les notions de successions et de libéralités qui sont
réciproquement liées. En effet, les libéralités peuvent être des outils de pilotage de la
succession, mais doivent être accordées dans le respect de certains principes de la
succession comme ceux de la réserve héréditaire et son pendant, la quotité
disponible.

 Les successions

La dévolution successorale18 est le partage du patrimoine du défunt au jour de son


décès. Celui-ci a pu souhaiter s’en remettre aux règles légales, mais peut également
l’avoir organisée au travers d’un testament. Le point de départ est la recherche des
héritiers.

La succession en absence de testament


En l’absence de testament et de conjoint, la recherche des héritiers se fait en deux
étapes : la détermination de l’ordre de la succession et du degré de celle-ci.
 Le classement par ordre :
1er ordre : les descendants
2ème ordre : les ascendants privilégiés (père et mère), et les collatéraux privilégiés
(les frères et sœurs)
3ème ordre : les ascendants ordinaires (grands-parents)
4ème ordre : les collatéraux ordinaires (oncles, tantes, cousins et cousines)
5ème ordre : l’Etat
La présence d’un héritier d’un ordre élimine les héritiers des ordres suivants.
 La notion de degré
Une fois l’ordre de la succession déterminé, il s’agira de déterminer quels membres
de cet ordre seront héritiers. La successibilité est, en effet, fonction du degré, c’est-à-
dire le nombre de générations séparant le défunt du potentiel héritier. Tout
représentant d’un degré exclut les représentants des degrés suivants.

18
Par abus de langage, nous parlerons aussi bien de succession que de dévolution successorale.

36
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

 Les tempéraments
Deux règles viennent limiter les notions d’ordre et de degré afin de pallier à certaines
injustices liées à ces mécanismes.
 La représentation
Dans les ordres des descendants et des collatéraux privilégiés, elle permet à un
héritier évincé à cause de son ordre de prendre la place de son ascendant
prédécédé lors de la succession.
 La fente
En l’absence d’héritiers du premier et du second ordre, la fente successorale
s’applique. Elle consiste à une scission de la succession en deux, une moitié pour la
ligne paternelle, l’autre pour la ligne maternelle.
 Les droits du conjoint survivant
Il faut différencier les cas où il y a présence ou non de descendants.
 En présence de descendants
Le conjoint survivant a le choix entre la totalité en usufruit ou le ¼ en pleine
propriété. Le droit à l’usufruit n’est pas donné en présence d’enfants d’un premier lit.
 En présence d’ascendants privilégiés
En l’absence de descendant, chacun des parents du défunt a le droit à ¼ de la
succession en pleine propriété. Ainsi, le conjoint survivant aura droit soit à ½ ou ¾ de
la succession selon que le défunt avait un ou deux parents vivants le jour de son
décès.
 En absence de descendants et d’ascendants
Dans ce cas, le conjoint survivant a le droit à la totalité de la succession hormis la
moitié des biens reçus par le défunt en héritage de ses ascendants. L’autre moitié
revenant aux frères et sœurs du défunt ou à leurs représentants.

La succession selon le testament


Il est possible d’organiser sa succession. Pour ce faire, un testament doit être rédigé.
Néanmoins, la liberté n’est pas totale puisque certains héritiers ne peuvent être
écartés, les héritiers réservataires grâce au mécanisme de la réserve héréditaire. Le
patrimoine pouvant être légué librement est appelé quotité disponible et correspond
donc au patrimoine global minoré de la réserve.
Les héritiers réservataires sont les enfants et le conjoint survivant.

37
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

La réserve des enfants dépend de leur nombre. La quotité disponible est de ½ et ⅓


selon que l’on soit en présence de respectivement 1 ou 2 enfants. A partir de 3
enfants, la quotité disponible est de ¼.
La réserve du conjoint survivant est fixée à ¼. Elle peut néanmoins être augmentée
du droit à l’usufruit sur la réserve.

 Les libéralités

Une libéralité est un acte par lequel une personne se dépossède à titre gratuit de tout
ou partie de son patrimoine. On parle de donation lorsque le donateur est vivant et
de legs lorsque celui-ci est décédé.
Les libéralités accordées peuvent avoir comme objectif de favoriser une personne
par rapport à une autre de notre succession ou non. Quoi qu’il en soit, les règles
concernant la réserve héréditaire restent applicables. Ainsi, lorsque les libéralités
consenties s’avèrent trop importantes, il est possible pour les héritiers réservataires
de voir ces libéralités rappelées ou diminuées lors de la succession.
La donation simple
La donation simple est le fait qu’une personne, le donateur, se dépossède à titre
gratuit d’un élément de son patrimoine au profit d’une autre personne, le donataire.
La donation partage
La donation partage a l’avantage de figer la valeur des biens transmis à la date de la
donation pour le calcul de la future réserve héréditaire, lorsque tous les enfants ont
concouru à celle-ci. En effet, un des problèmes des donations simples est que
lorsqu’elles sont reprises au moment de la succession, elles le sont pour leur valeur
à la date de la succession et non à la date de la donation. Ce qui pose le problème
des plus-values et notamment celles générées grâce au travail du donataire.
De plus, la donation partage, contrairement aux idées reçues n’est pas
obligatoirement égalitaire ni en nature, ni en valeur. Ce qui en fait un outil performant
et souple.
Le testament
Le testament que nous avons abordé plus en amont est la libéralité ouverte à une
personne qui souhaite modifier les règles de la dévolution légale.

38
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

1.3 Le démembrement de propriété


Le droit de propriété est composé du droit d’user du bien, l’usus, du droit de récolter
les fruits, le fructus et du droit de disposer, l’abusus. L’usus et le fructus sont
intimement liés et forment l’usufruit alors que le l’abusus forme la
nue-propriété.
Le démembrement de propriété est souvent au cœur des stratégies de transmission
du patrimoine en transmettant uniquement la nue-propriété.
L’avantage est double. Le premier est le bénéfice d’une fiscalité minorée du fait que
la valeur de la nue-propriété transmise est inférieure à la valeur en pleine propriété
du bien19. Le second réside dans le fait qu’à l’extinction de l’usufruit au décès de
l’usufruitier ou au terme d’un usufruit temporaire, celui-ci revient de plein droit au nu-
propriétaire sans droits supplémentaires à payer.
Ainsi, le donateur conserve les revenus tirés de son patrimoine ou l’utilisation à titre
personnel de celui-ci, tout en le transmettant avec une fiscalité allégée à ses
héritiers.

2. La dimension fiscale
La fiscalité est une matière que nous pratiquons tous régulièrement et que notre
formation balaye largement. Il s’agira dans le cadre de ce mémoire de mettre l’accent
sur les conséquences des points juridiques abordés dans les développements
précédents.

2.1 L’impôt sur le revenu


Le mode de conjugalité qu’il s’agisse du concubinage, du mariage ou du PACS a un
impact sur la composition du foyer fiscal. En effet, les concubins libres déclarent
séparément leurs revenus alors que les mariés et les partenaires remplissent une
déclaration commune.
En matière de démembrement, nous rappelons que l’usufruitier est redevable de
l’impôt sur la totalité des revenus tirés du bien.

19
Cf. Annexe 3 « Valorisation fiscale d’un bien démembré »

39
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

2.2 L’impôt sur la fortune


Quel que soit le mode de conjugalité, y compris pour les concubins libres, une seule
déclaration d’ISF est déposée pour le couple.
Lorsqu’un bien est démembré suite à une donation, il est taxé pour sa valeur totale
chez l’usufruitier.
Enfin, rappelons que lorsque l’on donne, on se dépossède. Ainsi, les biens transmis
à titre gratuit (hormis ceux pour lesquels l’usufruit a été conservé) ne font plus partie
du patrimoine du donateur et entrent le cas échéant dans la base de calcul de l’ISF
du donataire.

3. La dimension financière
Le patrimoine immobilier reste la composante principale du patrimoine des français.
Néanmoins, la part du patrimoine financier dans le patrimoine global s’élevait à un
tiers en 201020. Une connaissance des marchés financiers et des produits financiers
existant est obligatoire lorsque l’on s’intéresse aux problématiques patrimoniales de
nos clients.
L’annexe 2 recence les principaux produits existant classés par niveau de risque.
Gardons à l’esprit la règle d’or de la finance, plus un produit est risqué, plus sa
rentabilité espérée est forte. Dit autrement, plus l’aversion au risque est grande,
moins la rentabilité espérée l’est.

Section 2 DES INVESTISSEMENTS A PREVOIR

1. Des outils informatiques


La nécessité de l’informatique ne fait aujourd’hui plus débat. La diversité des produits
sur le marché offre d’importantes possibilités aussi bien en termes de gains de
productivité, qu’en termes de qualité des travaux rendus aux clients.

1.1 Excel, indispensable mais insuffisant


Excel s’est imposé comme le tableur incontournable de notre quotidien.
Dans le cadre d’une mission de gestion de patrimoine, cet outil trouve parfaitement

20
Insee, enquête patrimoine 2010

40
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

sa place. Le premier avantage est qu’il n’engendre pas de coût supplémentaire pour
le cabinet puisque nous en sommes tous équipés par ailleurs. Le second est sa
souplesse d’utilisation. La création de tableaux personnalisés est accessible à tout
utilisateur régulier du logiciel. Un utilisateur très confirmé sera capable de
programmer des fichiers très poussés et automatisés. Néanmoins, la fiabilité restera
relative et l’ « industrialisation » de son utilisation sera difficile pour cause d’une
maintenance compliquée de ces fichiers.
De plus, créer des tableaux personnalisés prend du temps, diminuant d’autant la
rentabilité de la mission.
Ainsi, Excel s’avérera être un outil performant pour l’expert-comptable qui débutera
son activité spécifique de gestion de patrimoine ou qui continuera de l’exercer de
façon marginale. Néanmoins, à partir du moment où les missions de gestion de
patrimoine deviennent récurrentes au sein du cabinet, l’utilisation de progiciels
dédiés deviendra incontournable.
Un exemple simple de bilan patrimonial est porté en annexe 4 afin de servir de base
de travail pour tout professionnel sollicité par sa clientèle.

1.2 Les logiciels spécialisés


L’offre de logiciels dédiés à la gestion de patrimoine est fournie. Chaque éditeur ou
presque propose son ou ses logiciels.
L’utilisation d’un logiciel spécialisé représente un coût pour le professionnel
(Cf. annexe 5), mais permettra de standardiser la conduite de la mission et surtout le
rendu final aux clients grâce à des états prédéfinis par chacun des logiciels. De plus,
les simulations sont simplifiées puisque l’ensemble des calculs est automatisé. Enfin,
la maintenance du logiciel est assurée par l’éditeur qui effectuera le cas échéant les
mises à jour nécessaires.
Nous ne procéderons pas ici à un inventaire des logiciels disponibles sur le marché,
mais plutôt à une classification des produits proposés. Deux grandes familles de
logiciels peuvent être identifiées.
Une première est constituée de logiciels axés sur un produit en particulier. L’intérêt
majeur de ce type de logiciels, est la réduction du risque d’erreur de calculs et la
possibilité d’imprimer rapidement des états prévisionnels. Néanmoins, sa
spécialisation pourra rapidement s’avérer être un frein à la réalisation d’une étude

41
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

plus globale de la situation de nos clients.


La seconde est composée des logiciels de gestion globale du patrimoine. Ils
assistent le praticien dans l’élaboration du diagnostic de la situation patrimoniale du
client. Pour ce faire, ces logiciels tiennent compte aussi bien des actifs que des
passifs du patrimoine à un moment donné mais permettent également, et là est toute
leur utilité, d’effectuer des simulations selon les flux prévisionnels de trésorerie d’une
part et les hypothèses retenues de l’autre.

2. Une documentation professionnelle


2.1 La documentation de base
Les missions de gestion de patrimoine nécessitent, comme nous l’avons noté dans
les développements précédents, la mise en œuvre d’une réflexion pluridisciplinaire.
Une grande partie des éléments utiles à la documentation de cette mission ne diffère
pas de ceux que nous utilisons dans le cadre de nos missions traditionnelles. Les
Editions Lefebvre et leurs mémentos sont devenus incontournables. Ils forment une
source détaillée d’informations par domaine.
Les exemplaires à posséder seront au minimum :
 Mémento Fiscal
 Mémento Social
 Mémento Patrimoine
 Mémento Sociétés Commerciales
 Mémento Sociétés Civiles

2.2 La documentation spécifique


Au-delà du besoin d’informations techniques, comblé par l’utilisation de la
documentation de base, une problématique importante dans le conseil patrimonial
est le suivi de l’actualité. En effet, un suivi actif de celle-ci aura le double intérêt de
permettre une certaine réactivité aux modifications législatives ou autres pour le suivi
des missions déjà effectuées21 et d’être un facteur déclenchant à la proposition de
nouvelles missions22.
Là encore, nos cabinets possèdent déjà pour la plupart un ou plusieurs abonnements

21
Cf. Troisième partie, Chapitre 2, Section 3 « Le suivi des préconisations ».
22
Cf. Deuxième partie, Chapitre 1, Section 2 « Répondre aux besoins et les susciter ».

42
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

relatifs aux actualités sociales et fiscales. Les deux les plus représentés dans la
profession sont les « feuillets rapides » des Editions Francis Lefebvre, et les
« feuillets hebdo » de la Revue Fiduciaire. Leur fréquence hebdomadaire permet une
information régulière. De plus, plusieurs numéros spéciaux annuels seront
particulièrement utiles à nos missions de conseil, notamment ceux relatifs à l’impôt
sur le revenu et l’impôt sur la fortune.
La presse spécialisée permettra de s’informer de certaines nouveautés, mais aussi
de connaître les préoccupations du moment. En effet, n’oublions pas que nos clients
ont accès à cette presse, alors devançons-les.
Enfin, les décisions d'allocation des actifs reposent également sur le contexte
macroéconomique (niveau des taux d’intérêt, inflation...). Une attention particulière
devra dès lors être portée à l’actualité économique.

3. Les moyens humains


Nous avons pu nous rendre compte qu’un outil informatique performant et une
documentation de qualité sont des éléments essentiels à la bonne conduite d’une
mission de gestion de patrimoine. Cependant, sans un intervenant qualifié, il sera
impossible de proposer une mission de qualité.
Dès lors, deux solutions s’offrent à nos cabinets pour acquérir les compétences
nécessaires, la formation ou le recrutement externe.

3.1 La formation
La gestion de patrimoine nécessite un complément de formation non dispensé dans
notre cursus classique. Deux cas de figure peuvent se présenter, soit le besoin de
formation est ponctuel, soit il est plus grand et demandera le suivi d’une formation
plus longue.
Pour les formations ponctuelles, différents organismes proposent des séminaires de
formation d’une ou plusieurs journées sur des thèmes particuliers tels que la
transmission d’entreprise, le départ à la retraite, le démembrement de propriété…
Elles sont souvent payantes, mais il en existe également beaucoup ouvertes
gratuitement. Internet sera un outil de recherche d’organismes de formation très
performant. Pensons néanmoins à l’organisme de formation officiel de notre ordre,
l’Asforef qui propose dans son catalogue téléchargeable sur leur site internet, une

43
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

gamme étendue de journées de formation.


Concernant les formations gratuites, pensons également au travail abattu par nos
confrères et nos partenaires, qui nous proposent chaque année aussi bien lors de la
réunion Lois de Finances organisée à Paris, que lors des Universités d’Eté de
l’Ordre, des réunions d’information de qualité.
Lorsque le besoin et l’envie d’une formation plus complète se font ressentir, il sera
conseillé de s’orienter vers une formation diplômante de 3ème cycle en gestion de
patrimoine23. En effet, leur programme complétera parfaitement les compétences
déjà acquises en mettant l’accent sur le domaine où l’on pêche habituellement, le
droit civil.
Néanmoins, il est à noter que ces formations sont doublement coûteuse puisqu’elles
sont payantes d’une part, et parce qu’elles nécessitent un gros investissement en
terme de temps d’autre part.

3.2 Le recrutement
Les cabinets ne trouvant pas de solutions au sein de leurs équipes actuelles ou qui
souhaitent acquérir rapidement les compétences manquantes pourront se tourner
vers l’extérieur en recrutant directement un salarié qualifié.
Ce nouveau collaborateur aura déjà suivi une formation spécialisée et/ou possèdera
une expérience certaine dans l’accomplissement des missions en conseil
patrimonial.
Cependant, recruter un salarié qualifié est souvent coûteux et sera dans la plupart
des cas réservé aux cabinets d’une taille certaine.
Les experts-comptables affectionnant former eux-mêmes leurs collaborateurs
pourront limiter le coût de recrutement en s’orientant vers l’apprentissage. En effet,
accueillir un jeune dans son cabinet demandera certes du temps, mais s’avèrera
souvent une opération gagnant-gagnant. De plus, il existe des formations de haut
niveau de qualification, jusqu’au Master 2, ouvertes à l’apprentissage. Le dynamisme
de la jeunesse s’avère souvent un moteur pour toute l’équipe qui compense le temps
alloué à la formation de celle-ci.

23
L’annexe 6 présente d’une part la liste des formations en gestion de patrimoine proposée par
l’Agefi actif en mai 2010, et d’autre part la liste des 20 meilleures formations selon le classement
SMBG 2015.

44
PREMIERE PARTIE – CHAPITRE 3
Appréhender les missions de gestion de patrimoine

CE QU’IL FAUT RETENIR


Le conseil en gestion de patrimoine entre pleinement dans le champ de compétence
des experts-comptables. L’article 22 de l’ordonnance de 1945 confère la possibilité
aux experts-comptables de « donner des consultations, effectuer toutes études ou
tous travaux d'ordre juridique, fiscal ou social » dès lors qu’elles « sont directement
lié(e)s aux travaux comptables dont ils sont chargés ». Or l’interdépendance entre
les sphères professionnelle et privée fait que le conseil en gestion de patrimoine des
dirigeants est toujours directement lié aux missions comptables traditionnelles.

La formation pluridisciplinaire des experts-comptables est en soi un bagage solide


pour aborder cette nouvelle mission. Néanmoins, des perfectionnements en droit civil
(régimes matrimoniaux, succession et libéralités), en matière d’imposition des
particuliers (IR et ISF) ainsi qu’en culture des marchés financiers devront être
anticipés. La maîtrise de ces matières moins familières pour la profession sera la clef
d’un conseil de qualité et par conséquent de la fidélité de nos clients.

Pénétrer un nouveau marché nécessite quelques investissements. Un outil


informatique adapté, une documentation professionnelle sélectionnée et des moyens
humains de qualité seront les trois centres de dépenses à prévoir.

45
DEUXEME PARTIE : UNE ORGANISATION SPECIFIQUE NECESSAIRE A L’OFFRE DE PRESTATIONS DE GESTION DE PATRIMOINE

DEUXIEME PARTIE : UNE ORGANISATION


SPECIFIQUE NECESSAIRE A L’OFFRE DE
PRESTATIONS DE GESTION DE PATRIMOINE

La première étape de la reconnaissance des clients de notre qualité de conseil


en gestion de patrimoine est que le client sache que nous sommes à même de
l’accompagner sur des problématiques y afférant.
Alors communiquons !
Les possibilités ouvertes, aux experts-comptables, en matière de communication ont
été récemment élargies. Tout un panel d’outils est aujourd’hui à notre disposition. Il
est donc essentiel de les utiliser, mais il l’est autant de bien les utiliser.
Une classification de nos clients permettra de cibler notre communication et ainsi
obtenir un meilleur retour. De plus, la personnalisation des messages envoyés sera
source de satisfaction pour le client qui se sentira accompagné.

La mission de gestion de patrimoine repose sur la notion de conseil. Or, il est


source de nombreuses mises en responsabilité civile en cas de litige avec nos
clients. Dès lors, se pose la question de la diminution de ce risque.
Au-delà de l’obligation de souscrire une assurance responsabilité civile, il est
important de formaliser notre intervention par des écrits à chaque étape de
celle-ci.
Enfin, le marché de la gestion de patrimoine regroupe un grand nombre de
professionnels avec qui l’expert-comptable doit apprendre à travailler. Notre
transversalité dans l’approche des problématiques des clients et nos relations fortes
avec ceux-ci nous positionneront naturellement en chef d’orchestre du conseil
patrimonial.

46
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

CHAPITRE 1 UNE OFFRE A METTRE EN PLACE

Section 1 COMMUNICATION ET DEONTOLOGIE

La déontologie de l’expert-comptable encadre le recours à la communication.


Longtemps la publicité a été interdite à la profession. Pourtant, comme le dit
l’expression, « le savoir n’est rien sans le faire savoir ».
Les récentes évolutions réglementaires24 ont permis de mieux cerner les possibilités
ouvertes aux experts-comptables tout en clarifiant les pratiques à proscrire.

1. La publicité et le démarchage autorisés sous conditions


Les règles régissant le recours à la publicité et au démarchage sont édictées à
l’article 152 du décret n°2012-432, lui-même modifié récemment par le décret
n°2014-912. En effet, afin de se conformer à la directive européenne « Services » de
2006, le code de déontologie a été modifié, autorisant les experts-comptables à
communiquer plus largement.
Si la pratique reste néanmoins encadrée, elle laisse de nombreuses possibilités aux
professionnels.
« Les actions de promotion réalisées par (les experts-comptables) ont pour objet de
procurer au public (…) une information utile. Dès lors il convient de considérer la
pertinence des informations sur lesquelles nous souhaitons communiquer.
En ce qui concerne le démarchage, il doit être réalisé « avec discrétion, de façon à
ne pas porter atteinte à l’indépendance, à la dignité et à l’honneur (…) de la
profession ».
De plus, il est interdit de communiquer sur des éléments comparatifs avec le reste de
la profession.

24
Le décret n°2014-912 du 18 août 2014 modifiant le décret n°2012-432 du 30 mars 2012 relatif à
l’exercice de l’activité d’expertise comptable, autorise dorénavant l’expert-comptable à mener, sous
conditions, des actions de promotion et de démarchage.

47
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

2. Les outils de communication


2.1 L’Ordre et le club de gestion de patrimoine
Les instances de notre profession tentent depuis quelques temps de relever le défi
de la communication. Des spots télévisuels et radiophoniques ont fait leur apparition.
Mais les thèmes abordés restent principalement centrés sur notre cœur de métier, la
production de comptes.
Néanmoins, chaque année, le CSOEC organise une opération « allô impôt ». Elle
permet à tous de s’entretenir gratuitement avec un expert-comptable par téléphone
ou lors d’un rendez-vous, pour remplir sa déclaration de revenus. Largement relayée
dans la presse, cette initiative constitue un réel outil de promotion de la profession et
positionne l’expert-comptable en acteur de référence pour l’assistance aux
particuliers.
Enfin, nos confrères membres du CEP (Club Expert Patrimoine) participent à
promouvoir nos compétences en la matière grâce notamment à leurs articles publiés
en nombre dans la presse.

2.2 La plaquette cabinet et le site web


La création d’une plaquette au nom du cabinet présente un certain nombre d’intérêts.
La plaquette définit la charte graphique du cabinet. Véritable carte d’identité visuelle,
elle sera utilisée dans l’ensemble des communications. Elle se compose d’un
logotype, d’un code couleur, mais aussi du choix d’une calligraphie.
Au-delà de la forme, la détermination du contenu de la plaquette s’avère souvent un
moment de réflexion important. Définir qui nous sommes et ce que nous savons faire
requiert un travail d’introspection qui nous donnera l’occasion de faire le point sur
nos forces et nos faiblesses. L’enjeu sera alors double, communiquer sur nos forces,
mais aussi travailler sur nos faiblesses.
Dès lors le fond et la forme se rejoindront pour former un tout cohérent mais surtout
fidèle à la réalité ! En effet, communiquer de façon trop enjolivée s’avèrera contre
productif car source de déception pour les clients.
Le site internet constitue aujourd’hui un outil de communication qui s’impose à tous
les professionnels. Au minimum, il reprendra la plaquette papier du cabinet et
permettra la prise de contact par l’intermédiaire d’un formulaire dédié en ligne. En

48
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

matière de gestion de patrimoine, il est opportun de créer une rubrique « actualités »


mise à jour régulièrement. Ainsi le client, en parcourant des articles faisant écho à
ses problématiques identifiera de manière directe l’expert-comptable comme un
interlocuteur capable de lui apporter des solutions.
De plus, un site actualisé régulièrement est mieux référencé par les moteurs de
recherche internet, permettant ainsi une meilleure visibilité.

2.3 Les articles de journaux


La presse spécialisée recherche l’expertise nécessaire à la rédaction d’articles
d’actualité juridique. Or, nous avons souvent cette expertise.
Signer un article de presse en mentionnant que nous avons les compétences pour
renseigner le lecteur s’il le souhaite est un moyen de communication efficace à
double titre. En premier lieu, une personne qui lit un article de presse est par
définition intéressée par le sujet. La lecture de l’article pourra aboutir à une prise de
contact par le lecteur. D’autre part, l’association de notre nom et de celui de notre
cabinet à différents articles de presse améliore efficacement le référencement du site
internet par les moteurs de recherche.

2.4 La communication interne


Nous venons de le voir, la communication externe est aujourd’hui ouverte aux
professionnels de l’expertise comptable. Mais n’oublions pas que le premier outil
d’une bonne communication reste la communication interne. En effet, comment
envisager de séduire nos clients et prospects si notre offre n’est pas connue en
interne ? Trop souvent certaines compétences internes restent sous silence, ou
partagées par un cercle restreint. Il est alors impossible aux collaborateurs de
promouvoir nos services auprès des clients.
S’il existe une newsletter interne au cabinet, elle pourra servir de support à cette
promotion. Elle peut également prendre la forme peu coûteuse d’une note
d’information interne envoyée par mail à chaque collaborateur.
L’organisation de réunions internes de formation et d’information périodiques
constitue un autre moyen de diffuser efficacement l’information.
Quel que soit le moyen choisi, le bénéfice de cette communication est double. Elle
permet aux collaborateurs d’une part de connaître l’étendue des prestations offertes

49
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

par le cabinet et d’autre part d’être sensibilisés à l’actualité et aux problématiques de


nos clients.
Enfin, la communication interne est un excellent moyen de fédérer les équipes et de
gagner en productivité.

Section 2 REPONDRE AUX BESOINS ET LES SUSCITER

1. Des attentes exprimées


Les clients sont demandeurs d’informations au-delà des questions relatives à leurs
entreprises. Comme évoqué dans le développement « Une attente exprimée par les
clients »25, les clients ont besoin d’informations sur divers points législatifs, mais
aussi organisationnels.
En effet, tous les clients sont amenés à prendre des décisions d’ordre financier ou
juridique. Une vision globale de la situation ainsi que des connaissances techniques
transversales sont nécessaires à la prise de décision. Or, quand bien même le client
aurait les compétences nécessaires, il est difficile d’être à la fois juge et partie.
Dès lors, les clients se tourneront naturellement vers nous pour demander conseil
nous donnant l’opportunité de communiquer sur notre capacité à les assister dans la
recherche de solutions à leurs problématiques.
Il n’est jamais trop tard pour faire connaître à nos clients nos domaines de
compétences.

2. La veille patrimoniale, outil du désir


En raison de la relation privilégiée qui nous lie à nos clients, nous avons la chance
d’être perçus par ces derniers comme un conseil naturel. Néanmoins, ne serait-il pas
mieux d’adopter une attitude proactive ? En effet, répondre à leurs demandes est un
point essentiel, mais ne serait-il pas préférable d’être en mesure d’anticiper leurs
problématiques ?
La veille patrimoniale constituera dès lors l’outil parfait.

25
Cf. Première partie, Chapitre 1, Section 2.

50
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

Nous pouvons regrouper les problématiques d’ordre patrimonial qui se posent à nos
clients en cinq grandes catégories :
 Le financement d’un projet
 La protection de la famille
 La transmission d’entreprise
 La retraite
 La succession

Un suivi de l’actualité juridique permettra d’une part de maintenir à jour nos


connaissances et constituera un moyen efficace d’attirer l’attention du client. Une
sélection régulière et synthétique des nouveautés dans les domaines précités à
destination des clients aura plusieurs intérêts.
Le premier est de satisfaire à notre devoir de conseil. En effet, alerter le client sur les
modifications de la législation et les impacts potentiels sur sa situation constitue un
moyen de se prémunir du risque de mise en responsabilité de l’expert-comptable.
Le second est de valoriser notre rôle auprès des clients en nous positionnant en
professionnels proactifs et partenaires.
Enfin, cette communication permettra d’échanger efficacement sur l’éventail des
problématiques sur lesquelles nous pouvons intervenir.
Souvenons-nous que si nous sommes aujourd’hui autorisés à communiquer, cette
communication doit être discrète et ne pas porter atteinte à l’image de la profession.
Ainsi, il est opportun d’user de celle-ci, mais de ne pas en abuser.
Le mailing à outrance est donc à proscrire.
La bonne fréquence, s’il en existe une, serait à notre sens celle-ci :
 Une fois par an, en début d’année, un point sur les lois de finances afin de
communiquer sur les nouveautés et leurs impacts potentiels qu’il s’agisse de
nouvelles contraintes ou au contraire d’opportunités.
La communication prendra naturellement la forme d’une revue de textes
législatifs classés par thèmes.
 Une fois par an, après les congés estivaux, une seconde communication, plus
conjoncturelle, prendra la forme d’un retour sur expérience de la période
fiscale précédente. En effet, montrer au client qu’il n’est pas le seul à
rencontrer certaines problématiques permettra souvent de diminuer son

51
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

anxiété face à celles-ci. De plus, ce point permettra de mettre l’accent sur la


complexité réglementaire dans laquelle nous réalisons nos missions, les
valorisant d’autant plus. Enfin, elle sera un bon moyen de faire une piqûre de
rappel sur nos compétences au moment où les clients rentrent de vacances et
se replongent pleinement dans leurs activités.
 Ponctuellement selon l’actualité, une note d’information peut s’avérer
nécessaire.

CONSEIL EXPERT
Les notes d’information sont moins chronophages qu’elles n’y paraissent et
généralement très appréciées des clients. L’accent sera mis sur une réforme en
fonction des caractéristiques de chaque client. Elles seront dès lors sources
d’interrogations de la part des clients et donc d’opportunités pour le cabinet.

Section 3 QUELLE CIBLE POUR LES MISSIONS DE CONSEIL PATRIMONIAL ?

1. La typologie de la clientèle
Une bonne connaissance du client et de ses besoins est le point de départ d’un
conseil de qualité. Or ces besoins évoluent selon l’âge, les revenus et le patrimoine.

1.1 Age
Nos besoins et problématiques patrimoniales ne sont de toute évidence pas les
mêmes à 30 ans, 40 ans, 50 ans…

 La trentaine (plus tôt parfois)

C’est l’âge auquel on se lance dans la vie, on construit son foyer. L’âge moyen du
premier mariage a augmenté ces dernières années pour atteindre la moyenne de 31
ans en 201326. L’acquisition de la résidence principale constitue souvent la priorité.

 La quarantaine

C’est un moment de la vie où l’on est installé. Il est temps de diversifier son

26
Source Insee

52
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

patrimoine. Après le foncier de la résidence principale, place au foncier de rapport et


aux marchés financiers. A cet âge, prendre certains risques mesurés est encore
raisonnable puisqu’il sera encore temps de prendre des mesures correctives.

 La cinquantaine

L’âge de la retraite approche avec son lot de questions. Quels seront mes revenus
lorsque je cesserai mon activité ? Comment puis-je encore rectifier la situation ?
C’est le moment souvent choisi pour faire un point complet de la situation. Où en est-
on ? Où va-t-on ? C’est également le moment de privilégier les investissements
moins risqués afin de ne pas compromettre sa situation au jour du départ à la
retraite.
Les cinquantenaires constituent le cœur de cible évident pour les missions de bilan
patrimonial.

 A partir de 60 ans

La très grande partie de notre vie d’actif est derrière nous. Se pose alors la question
de l’après. Comment transmettre mon entreprise ? Comment aider mes enfants ? La
problématique de la succession devient donc centrale.

1.2 Revenus
Le niveau de revenu des clients est un élément important en gestion de patrimoine. Il
est aisé de comprendre que l’enjeu n’est pas le même lorsque le client a des revenus
annuels de 30 K€ et lorsqu’il en a 150 K€. Les revenus s’avéreront déclencheurs de
missions à partir d’un certain niveau. Un retour sur investissement pour le client se
fera par expérience à partir de revenus annuels environnant les 80 K€.
Au-delà de la simple notion de revenu, il sera important d’analyser la capacité
d’épargne du client qui, certes largement corrélée à ses revenus, dépend aussi de sa
situation personnelle.
Cependant, l’importance des revenus et de la capacité d’épargne doit donc être
relativisée. Contrairement à d’autres acteurs du marché, le niveau de nos honoraires
n’est pas défini en fonction des montants investis mais en rémunération d’une

53
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

prestation de conseil qui reposera sur la seule volonté du client d’être accompagné
dans sa démarche.

1.3 Patrimoine
Qu’il s’agisse de sauvegarde, de croissance ou de transmission, le patrimoine est
source de questionnements pour nos clients. Or, nous avons les compétences pour
les accompagner dans la recherche de solutions à chacune de ces problématiques.
En outre, ces sujets sont peu corrélés à la valeur du patrimoine. Le marché potentiel
est donc très large. Néanmoins, la pratique montre que les clients intéressés par la
réalisation d’un bilan patrimonial sont ceux donc le patrimoine net dépasse les
500 000 euros.

2. La dimension humaine de la relation client


L’expert-comptable se doit d’être un communiquant. Cette capacité à échanger aura
pour finalité la reconnaissance de notre travail et par voie de conséquence la
possibilité de proposer et de facturer des missions complémentaires.

2.1 La satisfaction client


En 2014, 93% de nos clients étaient satisfaits des prestations fournies par leur
expert-comptable27.
Notre capacité à répondre à leurs demandes et la qualité de nos conseils sont les
sources principales de satisfaction de nos clients.
Un autre critère se dégage dans l’appréciation de nos travaux par les clients, leur
relation avec l’ensemble des intervenants du cabinet. Ainsi, il est primordial de
fédérer l’équipe autour de l’enjeu de la qualité de nos interventions.
Afin d’accompagner ses membres dans l’exercice de ses missions, le CSOEC a
rédigé la norme « maîtrise de la qualité des missions au sein des structures
d’exercice professionnel ». Il en ressort un rappel de différents principes
déontologiques présentés dans ce mémoire, l’indépendance, la documentation des
travaux… Le groupement de ces notions sous l’étiquette commune de qualité est la
démonstration que le respect d’une certaine éthique dans l’accomplissement de nos

27
CSOEC, « Marchés de la profession comptable », 2014.

54
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

travaux est la clé d’une prestation de qualité et donc de la satisfaction de nos clients.
Dès lors un cercle vertueux se dessine.

FIGURE 3 - Le cercle vertueux de la satisfaction client


(Source : GMV Conseil Marketing)

2.2 Les honoraires vus par le client


La rentabilité des missions traditionnelles des experts-comptables tend à diminuer
avec le temps. Les gains de productivité engendrés notamment par l’amélioration de
l’outil informatique ne suffisent pas à couvrir la hausse des coûts (augmentation des
rémunérations des collaborateurs, réalisation de travaux supplémentaires
difficilement refacturables en lien avec l’augmentation des obligations légales
imposées par le législateur…).
Néanmoins, la problématique des honoraires n’arrive qu’à la 6ème place des critères
de choix de l’expert-comptable derrière notamment ; « la confiance inspirée », « la
connaissance du secteur d’activité » et « la capacité à vous conseiller »28.
Ainsi, si nous sommes en mesure de prodiguer des conseils de qualité, alors nous
aurons la faculté de facturer notre travail à son juste prix.
Etablir un bilan patrimonial complet demande comme nous l’avons noté des
investissements pour le cabinet, mais aussi du temps. Il s’avère difficile de proposer
cette mission pour moins de 1 500 euros HT29 :
 Collecte des informations : 2h

28
CSOEC, « Marchés de la profession comptable », 2014.
29
« Gestion de patrimoine, tout savoir pour réussir cette mission auprès des chefs d’entreprises »,
Ordre des experts-comptables, 2013, page 39.

55
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

 Synthèse des informations recueillies : 3h


 Saisie des informations dans un logiciel spécialisé : 2h
 Analyse des actes patrimoniaux : 3h
 Contrôle et présentation : 1h
Bien entendu, le niveau de facturation dépendra de l’étendue des travaux et des
compétences requises. Néanmoins, les honoraires communiqués ci-dessus peuvent
être considérés comme des valeurs planchers, et les taux de facturation horaires
retenus comme référents.

3. La dimension psychologique
La réussite d’une mission de gestion de patrimoine ne peut s’envisager sans une
prise de conscience profonde de l’importance de la psychologie du client.
La théorie de l’iceberg illustre parfaitement cet impératif.

FIGURE 4 - La théorie de l'iceberg


(Source Claude Lajugée et Pascal Pineau – Métisse)

Tout l’enjeu de notre mission sera dès lors d’aller à la découverte de la partie
immergée de l’iceberg.

3.1 Savoir écouter


L’écoute ne se réduit pas à l’utilisation de l’ouïe (communication verbale). Elle
consiste également en la compréhension de la communication non verbale.

56
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

La technique P.R.E.C.I.S.30 permet d’appréhender de façon efficace la relation client.


 Position (poignée de main, regard, posture et auto contacts)
 Reformulation (répéter avec ses propres mots les propos du client afin de se
faire confirmer la juste compréhension de ceux-ci)
 Ecoute (se montrer disponible en éteignant son téléphone portable, prendre
des notes, intégrer le silence comme gage d’attention)
 Concision (aller au cœur du message sans étaler son savoir, canaliser ses
propos)
 Interrogation (s’informer plutôt qu’informer, questionner, positionner dans le
temps : présent, projets, freins, ressources)
 Synchronisation (tendre vers un mimétisme raisonnable afin de rassurer son
interlocuteur : sujets abordés, critères de présentation)
Ces quelques préceptes basiques, s’ils sont adoptés dans notre communication,
doivent permettre de créer un sentiment de sérénité chez notre client, clé pour
découvrir la partie immergée de son iceberg.

3.2 Détecter le décisionnaire


Dans le cadre de nos missions, nous adressons un certain nombre de conseils et
recommandations à notre client afin qu’il soit en mesure de prendre les bonnes
décisions.
Or, contrairement aux décisions en lien avec la gestion de l’entreprise qui relèvent
souvent uniquement de notre client dirigeant, celles relatives à la gestion
patrimoniale privée impliquent souvent d’autres intervenants (notamment le conjoint).
Ainsi, il serait inutile, ou du moins non efficient, de bâtir notre raisonnement sur les
informations recueillies auprès d’une seule des parties décisionnaires.
De plus, quand bien même notre interlocuteur serait le décisionnaire effectif,
recevoir, ensemble, les différentes parties présentera un double avantage. Les
échanges plus nombreux seront certes chronophages, mais permettront de travailler
sur des hypothèses qui auront été validées par toutes les parties. Il en ressortira
donc au final un gain de temps, et donc un accroissement de notre rentabilité. De

30
Claude Lajugée et Pascal Pineau, Club des experts-comptables, 8ème séminaire résidentiel
Marseille, mai 2015.

57
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

plus, recevoir l’ensemble des personnes concernées par notre étude permet de
limiter la possibilité de voir notre responsabilité engagée.

3.3 Classification du profil psychologique du client


Chaque individu réagit en fonction d’une construction intellectuelle propre. Certains
seront plus rationnels, d’autres plus prudents, ou encore plus créatifs.
Or nous avons tous tendance à mieux entendre une information diffusée d’une
manière qui fait écho à notre propre façon de penser.
Ainsi, l’expert-comptable se doit d’adapter son discours à la personnalité des clients.
Pour ce faire, encore faut-il appréhender la personnalité du client. La figure
ci-dessous classe en 4 groupes les clients selon des critères que l’on décèlera
rapidement au cours de nos échanges avec ceux-ci.

Figure 5 - Classification des profils clients


(Source Claude Lajugée et Pascal Pineau – Métisse)

Personne ne se retrouve dans une seule des catégories de la figure ci-dessus.


Néanmoins, des dominantes ressortent souvent. Il est alors possible d’anticiper les
besoins spécifiques de chaque client en répondant aux questions induites par sa
construction intellectuelle. La figure ci-dessous illustre ces interrogations en fonction
de chaque dominante.

58
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 1
Une offre à mettre en place

FIGURE 6 - Questionnement des clients en fonction de leur profil


(Source Claude Lajugée et Pascal Pineau – Métisse)

L’ajustement de notre démarche à la personnalité du client devra se faire à chaque


étape de notre mission, de la découverte au suivi des préconisations en passant par
la présentation de nos travaux.

59
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

CHAPITRE 2 LA GESTION DU RISQUE

Section 1 LA RESPONSABILITE DU PROFESSIONNEL

L’expert-comptable engage sa responsabilité quelle que soit la mission effectuée.


Dans le cadre de ce mémoire, ne sera traitée que la problématique de la
responsabilité civile. En effet, les mises en cause des responsabilités pénales et
disciplinaires sont les conséquences d’actions contraires à la loi ou à notre
déontologie. Elles ne prêtent donc pas, ou peu à discussion, et peuvent
théoriquement facilement être évitées par le simple fait de respecter les textes de lois
et les règles déontologiques de la profession.
La responsabilité civile est, quant à elle, beaucoup plus subjective et nécessite à ce
titre un développement particulier.

1. La responsabilité civile
1.1 Obligation de moyen
« Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en
cas d'inexécution de la part du débiteur »31.
« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par
la faute duquel il est arrivé à le réparer »32.
« Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait,
mais encore par sa négligence ou par son imprudence »33.
Ainsi, il ressort de ces trois articles du Code Civil que la responsabilité de
l’expert-comptable nécessite, pour être engagée, la réunion de trois éléments
cumulatifs : une faute, un dommage et un lien de causalité entre le dommage et la
faute.
L’existence d’un aléa inhérent à l’exercice d’une profession intellectuelle nécessitant
la maîtrise d’une législation sujette à interprétation d’une part et la fourniture
d’informations spécifiques par le client d’autre part justifie que notre

31
Article 1142 du Code Civil.
32
Article 1382 du Code Civil.
33
Article 1383 du Code Civil.

60
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

obligation soit une obligation de moyen.


L’expert-comptable doit être en mesure de justifier des diligences effectuées dans le
cadre de chaque mission, comme l’illustre le dicton « les paroles s’envolent, les
écrits restent ». A titre d’exemple, la matérialisation des échanges, la documentation
des travaux ou encore la justification des recommandations aideront à se prémunir
d’un risque de mise en responsabilité.
Enfin, comme nous l’avons vu précédemment34, nous avons vis-à-vis de nos clients
un devoir de conseil qui va au-delà des missions qui nous sont confiées. C’est sur ce
point que notre responsabilité est le plus souvent mise en cause. Or, plus encore que
dans nos missions traditionnelles, le cadre des missions de gestion de patrimoine est
large puisqu’il englobe la sphère privée du client. Encore une fois, nos écrits
permettront de justifier des diligences effectuées ainsi que du cadre contractuel de
notre intervention.

1.2 Lorsque l’obligation de moyen devient obligation de résultat


Les diligences à mettre en œuvre dans l’accomplissement de nos missions peuvent
être si précises qu’elles tendent à transformer notre obligation de moyen en une
obligation de résultat.

 Le temps, facteur peu discutable

Le respect des délais légaux, notamment ceux concernant le dépôt des déclarations
fiscales est impératif.
Il en va de même lorsqu’un professionnel s’engage à fournir ses conclusions dans un
délai imparti et que celui-ci n’est pas respecté.
Un bémol est à apporter à cette obligation de résultat. En effet, l’expert-comptable
est dépendant de son client pour l’obtention de certains éléments nécessaires à
l’exécution de sa mission. Ainsi, lorsque le non-respect de certains délais incombe
au client, la responsabilité de l’expert-comptable ne pourra pas être engagée.

 L’utilisation et la fourniture des bons documents afférents à sa mission

Il va de soi que l’expert-comptable doit le cas échéant renseigner les documents

34
Première partie, Chapitre 2, Section 2.3. , « Le devoir de conseil ».

61
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

adéquats à la réalisation de sa mission. C’est notamment le cas en matière


d’imprimés fiscaux.

2. L’assurance responsabilité civile


2.1 Une obligation émanant de l’Ordonnance de 1945
En vertu de l’article 12 de l’Ordonnance de 1945, les experts-comptables « assument
dans tous les cas la responsabilité de leurs travaux et activités ».
L’article 17 de l’Ordonnance de 1945 prévoit, quant à lui, que tout expert-comptable,
quel que soit son mode d’exercice, en nom propre, en société ou en tant que salarié
doit souscrire un contrat d’assurance garantissant sa responsabilité civile dans le
cadre de son activité professionnelle.
L’existence de cette obligation est un gage de notre sérieux pour les tiers. En effet,
contracter avec un expert-comptable, c’est contracter avec un professionnel dont les
préjudices liés à l’exercice de ses missions sont couverts pour tout ou partie par une
assurance de responsabilité civile.

2.2 Le coût de l’assurance


Chaque expert-comptable est libre d’assurer sa responsabilité civile auprès de
l’assureur de son choix. Ainsi, plusieurs compagnies proposent des contrats plus ou
moins flexibles. Néanmoins, l’augmentation des cas de mises en cause de notre
responsabilité tend à faire diminuer les compagnies d’assurance sur notre marché35.
Le schéma ci-contre illustre cette croissance.

35
Conférence « La responsabilité civile », 62ème congrès de l’Ordre des experts-comptables.

62
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

FIGURE 7 - Statistiques des indemnisations de la RCP groupe


(Source : 62ème congrès de l'OEC, conférence "la responsabilité civile")

L’Ordre des experts-comptables, dans le cadre de sa mission de représentation de


l’ensemble de ses membres a mis en place, en partenariat avec Vespieren courtier
en Assurances un contrat groupe proposé par la compagnie Covea Risks.
Dans le cadre de ces développements, nous ne traiterons que de ce contrat
d’assurance. Charge à chaque expert-comptable souhaitant faire jouer la
concurrence de se rapprocher d’autres compagnies. Néanmoins, les points ci-après
lui permettront d’avoir une idée précise des aspects à valider lors de ses recherches.
Le contrat groupe est ouvert à tout professionnel membre de
l’Ordre des experts-comptables. Il couvre les risques de l’ensemble des missions
réalisées dans le respect des textes applicables à l’exercice de la profession
d’expert-comptable, notamment l’Ordonnance de 1945, le code de déontologie et les
normes professionnelles.
Ainsi, dès lors que les missions de gestion de patrimoine proposées par les experts-
comptables respectent le cadre fixé par les textes précités, le contrat groupe couvre
les risques liés à l’engagement de la responsabilité civile des professionnels dans la
réalisation de ces missions.
Le montant de la prime d’assurance dépend à la fois du chiffre d’affaires de chaque
expert-comptable, mais aussi du montant plafond que l’on souhaite voir couvert. La
figure ci-dessous est un extrait de la notice d’information et des tarifs 2015 du
contrat. L’intégralité du document est quant à lui porté en annexe 7 alors que le

63
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

tableau des garanties est repris en annexe 8. Enfin, le détail des conditions
générales est disponible en téléchargement libre sur le site du courtier à l’adresse
suivante http://extranet.verspieren.com/oec/script/contrat_groupe.asp?id.

FIGURE 8 - Coût et garantie du contrat RCP groupe de l'OEC

Dans le cadre de certaines missions, il peut arriver que les sommes en jeu
dépassent le plafond de garantie du contrat. Il est alors fortement conseillé au
professionnel de souscrire une assurance complémentaire spécifique à cette
mission. En effet, les conséquences d’une couverture partielle des indemnités dues
en cas de litige pourraient être désastreuses.

Section 2 DES ECRITS POUR FORMALISER LA MISSION

1. La lettre de mission
1.1 Une norme générale applicable à l’ensemble des missions
Les missions de conseil en gestion de patrimoine ne font pas partie des missions
normalisées de l’expert-comptable. Dans le référentiel normatif de la profession, elles
appartiennent à la catégorie des « autres prestations fournies à l’entité ».

64
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

FIGURE 9 - Schéma général du référentiel normatif et déontologique du professionnel de


l'expertise comptable

CODE DE DEONTOLOGIE DES PROFESSIONNELS DE L'EXPERTISE COMPTABLE

NORME PROFESSIONNELLE DE MAITRISE DE LA QUALITE PAR LES PROFESSIONNELS DE L'EXPERTISE COMPTABLE ET NORME ANTI-BLANCHIMENT

PREFACE AUX NORMES PROFESSIONNELLES APPLICABLES AUX MISSIONS D'ASSURANCE ET AUTRES PRESTATIONS

CADRE DE REFERENCE DES MISSIONS DU PROFESSIONNEL DE L'EXPERTISE COMPTABLE

MISSIONS
D'ASSURANCE AUTRES MISSIONS MISSIONS SANS
SUR DES D'ASSURANCE ASSURANCE
COMPTES

MISSION SUR LA AUTRES


NORMES BASE DE MISSIONS SANS AUTRES
AUDIT APPLICABLES AUX PROCEDURES ASSURANCE PRESTATIONS
EXAMEN LIMITE PRESENTATION
CONTRACTUEL AUTRES MISSIONS CONVENUES PREVUES PAR LA FOURNIES A
D'ASSURANCE LOI ET LE L'ENTITE
MISSION DE
REGLEMENT
COMPILATION

ATTESTATIONS
PARTICULIERES GUIDE
(légales ou contractuelles) D'APPLICATION
GUIDES GUIDES GUIDES GUIDES GUIDES
ET PRATIQUES
D'APPLICATION D'APPLICATION D'APPLICATION D'APPLICATION D'APPLICATION
INFORMATIONS PROFESSIONNEL
PREVISIONNELLES LES
AUTRES MISSIONS

Quelle que soit la mission effectuée, l’expert-comptable doit appliquer la déontologie


et les normes applicables à la profession. Autrement dit, le fait qu’une mission ne soit
pas normalisée n’exonère pas le professionnel du respect des normes de travail de
la profession.
Or, le code de déontologie prévoit dans son article 141 que les experts-comptables
« passent avec leur client un contrat écrit définissant leur mission et précisant les
droits et obligations des parties ».
Il est par conséquent obligatoire de rédiger pour chacune des prérogatives confiées
par nos clients une lettre de mission spécifique.
Par définition, les « autres prestations fournies à l’entité » ne sont pas normalisées et
constituent autant de possibilités qu’il y a de clients, et donc autant de lettres de
mission possibles. Néanmoins, l’OEC propose quelques modèles adaptables à
volonté, en particulier celle relative à la mission de conseil en investissements
financiers portée en annexe 9.

1.2 Des obligations réciproques énoncées et acceptées


La lettre de mission doit permettre de fixer les prérogatives respectives de l’expert-

65
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

comptable et de son client dans le cadre de la réalisation de la mission. Quelques


points spécifiques doivent être abordés en vue de l’établissement d’une lettre de
mission36 :

 Préalablement à la lettre de mission

Consécutivement au premier entretien, un compte-rendu sera rédigé par l’intervenant


ayant reçu le client. Le contexte du rendez-vous sera noté ainsi que la proposition de
mission qui a été faite au client.
Ce compte rendu servira le cas échéant à la fourniture d’une proposition
commerciale au client le demandant.

 Tableau de répartition des tâches

Ce tableau doit permettre de répondre aux questions : Quoi ? Qui ? Quand ?


Il est souvent annexé à la lettre de mission. Il a l’avantage d’impliquer le client dans
la réalisation de la mission.

 Modalités de réalisation de la mission

En plus de la répartition des tâches, il est important de répondre à la question


Comment ?
La lettre de mission définira l’organisation de la mission en expliquant les
conséquences du non respect de certains points du contrat.

 Présentation des intervenants

L’intervenant qui a reçu le client n’est pas obligatoirement celui qui interviendra par la
suite sur la mission. Ainsi, il est important de clarifier ce point dans la lettre de
mission afin que le client s’engage en connaissance de cause. En outre,
l’identification de l’intervenant dans la lettre de mission a l’avantage de créer un
sentiment de proximité, d’autant plus apprécié en gestion de patrimoine.

36
CSOEC – « La lettre de mission en pratique », édition mars 2014.

66
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

 Honoraires

Qu’ils soient forfaitaires ou facturés au temps passé, il est important d’informer le


client de la grille tarifaire horaire de chaque intervenant ou type d’intervenant.
Cette information présente un double intérêt, puisqu’elle permettra au client de
prendre conscience du temps nécessaire à l’accomplissement de sa mission, et
permettra de justifier d’éventuels dépassements d’honoraires.

 Rupture du contrat

La lettre de mission peut être dénoncée par les deux parties. Quelles qu’en soient les
raisons ou l’initiateur, les modalités de rupture doivent être clairement établies dès le
départ, qu’il s’agisse de délais, de forme ou d’indemnités.

1.3 Un outil de gestion du risque ?


Rappelons que la lettre de mission est un contrat. Ainsi, en cas de litige la présence
ou non de lettre de mission aura des conséquences sur l’appréciation de la situation
par le juge.
En effet, en absence de lettre de mission, le juge disposera d’une grande liberté
dans l’appréciation de la situation et des engagements des deux parties, alors qu’en
présence d’un contrat, le juge ne bénéficiera « plus que » d’une liberté
d’interprétation de celui-ci.
Dès lors, la lettre de mission servira de moyen de preuve de la relation nous unissant
à notre client. En cas de litige, l’essentiel quant à cette relation est la possibilité de
délimiter clairement les diligences confiées par le client à l’expert-comptable.
Rappelons que l’expert-comptable a une obligation de moyens et que par
conséquent, les missions qu’il exécute sont toujours basées sur des informations
fournies par le client. Il est donc essentiel, en plus de définir la mission, de détailler
les hypothèses retenues pour la réalisation de l’étude.
En conclusion, si la lettre de mission n’éteint pas le risque juridique, elle fixe le cadre
de l’intervention de l’expert-comptable et limite les possibilités de mise en cause de
sa responsabilité.

67
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

2. La documentation des travaux


Bien que ne bénéficiant pas d’une norme de travail dédiée, les « autres prestations
fournies à l’entité » doivent être effectuées en respect du code de déontologie et de
la NPMQ. Ainsi la documentation des travaux est obligatoire.

Dans le cadre de ce mémoire, il a été décidé de ne pas présenter de modèles types


de documentations pour les raisons suivantes :
 Les trop nombreuses feuilles de travail Excel ou Word sont peu utilisées dans
la pratique car chronophages et souvent mal perçues par le client qui voit en
elles un manque de personnalisation dans son traitement lorsqu’elles sont
utilisées en rendez-vous.
 Des modèles existent déjà, dans d’autres mémoires notamment. Les copier
n’apporterait pas de valeur ajoutée à nos propos.
 L’organisation de la mission dépend en grande partie de l’organisation du
cabinet, notamment des investissements dans l’outil informatique37. Or, des
documents standards d’aide à la prise d’informations sont prévus dans la
plupart des logiciels présents sur le marché, remplaçant par conséquent
l’utilisation des modèles précités.
Par conséquent, les différents documents de travail seront abordés ici dans le but
d’attirer l’attention du lecteur sur la finalité et le contenu de chacun d’entre eux plutôt
que sur leurs formes laissées au libre arbitre de chaque professionnel.

2.1 Le dossier permanent


Le dossier permanent regroupe l’ensemble des informations relatives à notre mission
et dont l’utilité s’avèrera pluriannuelle. Il est l’outil de base pour la réalisation de nos
missions et le garant de la mémoire de chaque dossier.
Il devra comprendre en plus des informations générales du client (liste non
exhaustive):
 Les informations relatives au suivi interne au cabinet de la mission (lettre de
mission, suivi des temps…)
 Les comptes-rendus de rendez-vous avec le client et autres interlocuteurs

37
Cf. Première partie, Chapitre 3, Section 2 « Des outils informatiques ».

68
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

rencontrés dans la réalisation de la mission (notaires, avocats…)


 Les dernières études patrimoniales réalisées qu’elles proviennent du cabinet
ou d’autres interlocuteurs.
 Les documents juridiques principaux (contrat de mariage, actes de
successions déjà intervenues, testament…)
 Les actes d’acquisitions immobilières ainsi que les derniers rapports
d’évaluation afférents
 Les contrats d’assurance-vie et leurs dernières clauses bénéficiaires

2.2 Le dossier annuel


Lorsque tout ou partie de la mission est récurrente, la constitution d’un dossier
annuel reprenant les informations propres à la période concernée est recommandée.
C’est notamment le cas lorsque l’on est chargé de l’établissement d’un bilan
patrimonial. En effet, qu’il soit ponctuel ou qu’il nécessite une mise à jour
périodique38, le dossier constitué devra contenir :
 Le recensement patrimonial ou le cas échéant sa mise à jour avec tous les
justificatifs correspondants
 La copie de la dernière étude réalisée
 Le détail des diligences accomplies
 La copie du rapport remis au client

CONSEIL EXPERT
Afin de limiter le risque de perte d’informations lors de l’archivage des dossiers
annuels, il est indispensable de sensibiliser l’ensemble des équipes à l’importance de
porter copie dans le dossier permanent de tout document devant s’y trouver.

2.3 Les rapports remis au client


Les rapports de missions sont les documents qui exposent nos conclusions au client.
Bien qu’aucun rapport type ne puisse être proposé étant donné la diversité des
interventions possibles en gestion de patrimoine, une architecture applicable à la
quasi-totalité des missions existe. En effet, le rapport est constitué de trois parties, le

38
Troisième partie, Chapitre 2, Section 3 « Le suivi des préconisations ».

69
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

rappel des hypothèses retenues, l’exposé des diligences accomplies et les


recommandations ou conclusions.

REMARQUE
Notons d’ores et déjà que la composition du dossier de travail ainsi que l’articulation
des rapports sont les mêmes que les étapes du bilan patrimonial, telles qu’exposées
dans la troisième partie de ce mémoire. Plus de détails sur le contenu de la
présentation des préconisations y seront apportés.

Section 3 L’INTERPROFESSIONNALITE
La gestion de patrimoine regroupe un large champ de compétences et de
prestations. Les professionnels présents sur le marché sont nombreux. Néanmoins,
cette diversité peut être une force pour l’expert-comptable qui tel un chef d’orchestre,
dirigera les compétences de chacun pour répondre au mieux aux attentes de ses
clients.

1. Les autres professionnels de la gestion de patrimoine


1.1 Les notaires
Trouvant son origine dans l’époque romaine, le métier de notaire a évolué avec le
temps. Le Conseil Supérieur du Notariat (CSN) a été créé, au même titre que l’ordre
des experts-comptables, en 1945 par ordonnance39.
Les notaires sont des officiers publics dont la mission principale est l’authentification
et la conservation d’actes juridiques.
Au premier janvier 2013, la France comptait 9 651 notaires répartis dans environ
6 000 offices et bureaux annexes. La profession représente 57 000 emplois et 6,2
milliards de chiffre d’affaires dont 7% généré par des missions de conseil40.
Depuis quelques années, le CSN tente de diversifier les missions proposées par ses
membres. La création de l’Unofi illustre ainsi l’objectif affiché des notaires de
renforcer leur position sur le marché du conseil patrimonial.
Les notaires bénéficient d’une image de confiance et de sécurité. Leurs
compétences en droit, et notamment droit civil sont largement reconnues.

39
Ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat.
40
Source : http://www.notaires.fr/fr/le-notariat-en-chiffres .

70
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

Toutefois, la comptabilité et la finance ne constituent pas leurs domaines de


prédilection, ce qui en fait leurs points faibles. Enfin, au même titre que les
experts-comptables, les notaires font figure de nouveaux entrants sur le marché du
conseil patrimonial et doivent faire évoluer leur propre déontologie afin de clarifier
certaines pratiques.

1.2 Les avocats


Leur champ de compétence est large puisqu’il recouvre l’ensemble des matières
juridiques. La profession emploie 90 000 personnes dont plus de 58 000 avocats.
Elle a généré un chiffre d’affaires de plus de 13 milliards d’euros en 201241.
Les avocats ne participeront généralement pas à l’élaboration de la stratégie
patrimoniale mais pourront être amenés à intervenir sur des problématiques
spécifiques d’ordre fiscal ou juridique (succession, fiscalité relative à la cession d’un
actif,…).
Cependant, leur force réside dans leur capacité à facturer chacune de leur
intervention.

1.3 Les Conseillers en Gestion de Patrimoine Indépendants (CGPI)


Le statut de CGPI, a été créé dans les années 80. On compte aujourd’hui entre
3 000 et 5 000 praticiens qui génèrent un chiffre d’affaires annuel oscillant autour de
350 millions d’euros selon les chiffres publiés par Apredia.
Il regroupe des professionnels dont les pratiques apparaissent hétéroclites comme
l’atteste notamment la co-existence de six associations agrées par l’AMF. Cette
diversité peut constituer un frein pour une profession qui tente de s’organiser.
Initialement, les CGPI se positionnaient en « distributeurs » de produits financiers
rémunérés en fonction de leur collecte et des encours de leurs clients. Or la
réglementation européenne rend dorénavant incompatible la notion d’indépendance
avec ce mode de rémunération.
Ainsi, les professionnels ne souhaitant pas perdre le « I » de leur appellation tentent
d’adapter leurs pratiques en facturant des honoraires de conseil et en limitant les
commissions perçues. Néanmoins, la clientèle ne semble pas prête à ce

41
Source : Observatoire du Conseil National des Barreaux.

71
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

changement, si bien que la majeure partie de la profession semble préférer


conserver son modèle économique au risque de se voir amputer de leur « I ».

1.4 Les banques et compagnies d’assurances


Les banques et compagnies d’assurances sont les principaux acteurs de la
distribution de produits financiers avec plus de 85% de parts de marché42. Elles sont
ici regroupées en raison de leurs liens réciproques étroits.
Leur implantation de longue date sur tout le territoire ainsi que l’obligation pour
chacun de détenir un compte bancaire explique cette position dominante.
Leur image dans l’opinion publique n’est pas celle de conseils, mais plutôt de
vendeurs.
La création de divisions spécialisées dans la gestion des clients les mieux lotis, dites
« banque privée », participe à l’amélioration de cette image. En contrepartie
d’honoraires, le client bénéficie d’un bilan patrimonial et d’un suivi de sa situation. Il
rencontre à cet effet le conseiller qui lui est affecté au moins une fois par an.
Les moyens dont disposent ces organismes en matière de communication en font
des concurrents de poids sur le marché du conseil en gestion de patrimoine.
Néanmoins, leur manque d’indépendance quant à l’allocation d’actifs proposée
constitue leur point faible le plus sérieux.

2. L’interprofessionnalité, gage de réussite de la mission


2.1 Les pratiques en Europe
Le cloisonnement entre les différents professionnels de la gestion patrimoniale
observé en France est beaucoup moins marqué dans d’autres pays européens.
L’offre globale de services est depuis longtemps une pratique répandue au
Royaume-Uni, en Allemagne et en Espagne pour ne citer qu’eux. Le cadre
réglementaire de ces pays offre la possibilité aux professionnels de se regrouper au
sein de structures communes afin de pouvoir proposer à leur clientèle un
« full-service ». Ces structures pluriprofessionnelles répondent à un besoin exprimé
par les clients. Notons que l’offre de services ne se limite pas aux domaines des

42
« La gestion de patrimoine : du retail banking à la gestion de fortune : quelles stratégies face au
durcissement du jeu concurrentiel ? » - Xerfi, mai 2011.

72
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

chiffres et du droit, certaines de ces structures offrent également des prestations


d’accompagnement à l’implantation en proposant la domiciliation, la maintenance
informatique, la vente de matériels et de fournitures administratives, la formation…

2.2 Les évolutions en France


Afin de répondre à une demande du marché, plusieurs tentatives ont vu le jour ces
dernières années avec plus ou moins de succès.
En 2004, est créée la possibilité de constituer une société de participation financière
des professions libérales (SPFPL). Néanmoins, le fait que les liens soient purement
capitalistiques entre les différentes professions n’a pas séduit les professionnels.
En 2006, la directive « Services » impose aux Etats membres de l’Union-Européenne
de s’intéresser à l’interprofessionnalisation dans le but de libéraliser le marché.
La récente « Loi Macron »43, dans son article 65, a répondu à cette attente en
incluant les experts-comptables dans les futures sociétés interprofessionnelles en
disposant « faciliter la création de sociétés ayant pour objet l'exercice en commun de
plusieurs des professions d'avocat, d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de
cassation, de commissaire-priseur judiciaire, d'huissier de justice, de notaire,
d'administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire, de conseil en propriété
industrielle et d'expert-comptable :
a) Dans lesquelles la totalité du capital et des droits de vote est détenue, directement
ou indirectement, par des personnes exerçant l'une des professions exercées en
commun au sein de ladite société ou par des personnes légalement établies dans un
Etat membre de l'Union européenne, dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace
économique européen ou dans la Confédération suisse qui exercent en qualité de
professionnel libéral, dans l'un de ces Etats, une activité soumise à un statut législatif
ou réglementaire ou subordonnée à la possession d'une qualification nationale ou
internationale reconnue et exerçant une ou plusieurs des professions constituant
l'objet social de la société ;
b) Qui ne peuvent exercer une profession que si l'un de leurs associés remplit les
conditions requises pour exercer ladite profession ;
c) En préservant les principes déontologiques applicables à chaque profession ;

43
Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances
économiques.

73
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

d) En prenant en considération les incompatibilités et les risques de conflits d'intérêts


propres à chaque profession ;
e) En préservant l'intégrité des missions des professionnels liées au statut d'officier
public et ministériel dans l'accomplissement de leurs fonctions ;
f) En assurant la représentation d'au moins un membre, en exercice au sein de la
société, de chaque profession exercée par la société au sein du conseil
d'administration ou du conseil de surveillance de la société. »
Les fortes résistances formulées par les différentes instances représentant les autres
professions réglementées laissent présager quelques ajustements. Néanmoins, la
voie de l’interprofessionnalité d’exercice semble tracée.

2.3 Les avantages de l’interprofessionnalité


La gestion de patrimoine, comme nous l’avons vu au cours des développements
précédents, nécessite d’importants investissements. Ainsi, au-delà de
l’interprofessionnalité d’exercice, se constituer un réseau de partenaires
pluridisciplinaire est incontournable :
 L’interprofessionnalité présente l’intérêt de limiter le coût d’entrée sur ce
marché pour les experts-comptables. En effet, travailler de concert avec
d’autres professionnels est un moyen efficace de limiter les investissements
en s’appuyant sur les outils et compétences développés par les autres
professionnels.
 L’interprofessionnalité permet également et surtout d’accroître la qualité de la
prestation fournie à nos clients. En effet, en s’appuyant sur les spécialités de
chacun, les conseils fournis à nos clients n’en seront que meilleurs.

3. L’Expert-comptable, chef d’orchestre du conseil patrimonial


La rédaction de certains actes juridiques nécessitera l’intervention d’un notaire, la
souscription de produits financiers devra se faire par l’intermédiaire d’un autre
professionnel…
La constitution d’un réseau interprofessionnel devient dès lors, et au-delà des
avantages précités, une obligation pour mener à bien notre mission.

74
DEUXIEME PARTIE – CHAPITRE 2
La gestion du risque

La transversalité des compétences de l’expert-comptable lui permet de se


positionner en « leader/animateur » naturel d’une équipe pluridisciplinaire sur une
mission de conseil en gestion de patrimoine.

CE QU’IL FAUT RETENIR


La communication est aujourd’hui incontournable. Les pratiques autorisées en
matière de publicité et de démarchage ont été clarifiées. Le marché de la gestion de
patrimoine est concurrentiel. Il est par conséquent nécessaire d’utiliser tous les outils
à notre disposition pour communiquer sur nos compétences.
Une approche scientifique permet de segmenter la clientèle sur les bases de
données tangibles (âge, revenu et patrimoine) mais aussi d’appréhender l’aspect
psychologique de la relation client. La grille de lecture proposée des différents profils
personnels des clients permettra de découvrir la partie immergée de l’iceberg où l’on
observera les véritables objectifs de nos clients.

Conseiller, c’est prendre position, c’est engager sa responsabilité.


Dès lors il est important de cadrer notre pratique de la gestion de patrimoine.
S’assurer que le contrat d’assurance responsabilité civile souscrit couvre ce domaine
d’intervention est le premier point. Des écrits à chaque étape de la mission
constitueront le cas échéant des moyens de preuve de l’étendue des prérogatives
qui nous ont été confiées par le client et des diligences accomplies.
Enfin, le meilleur moyen de limiter le risque de mise en responsabilité civile reste de
prodiguer des conseils de qualité. Le recours à l’interprofessionnalité est un moyen
efficace d’assurer l’expertise à chaque étape de la mission.

75
TROISIEME PARTIE : LE BILAN PATRIMONIAL, BASE DU CONSEIL PATRIMONIAL

TROISIEME PARTIE : LE BILAN PATRIMONIAL,


BASE DU CONSEIL PATRIMONIAL

Définir une stratégie patrimoniale consiste à déterminer une série d’actions à


mettre en place afin de répondre aux objectifs personnels d’un client.
Cette mission s’effectue en trois étapes aussi importantes les unes que les autres.
Le point de départ est de recueillir auprès du client des informations quantitatives
et qualitatives concernant sa situation patrimoniale. La classification hiérarchique
par le client de ses besoins guidera quant à elle notre réflexion tout au long de notre
mission.
Une fois les hypothèses de travail recueillies, un audit de celles-ci devra être mené
selon les axes patrimonial, budgétaire, fiscal et social. Etant donné l’infinie
diversité des problématiques qui peuvent être rencontrées, il s’agira dans le cadre de
ce mémoire de donner au lecteur une grille de lecture du patrimoine de notre
client.
L’étude structurée effectuée aboutit à l’élaboration de préconisations patrimoniales
qui dans une forme propre à chaque expert-comptable devra retranscrire une
marche à suivre permettant le passage d’une situation présente à une situation
escomptée.
Enfin, notre rôle de conseil ne s’arrête pas à la restitution de nos conclusions. Un
suivi de nos préconisations devra être effectué afin de prodiguer certains
ajustements le cas échéant.

76
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

CHAPITRE 1 L’ELABORATION DU BILAN PATRIMONIAL

Section 1 LE RECENSEMENT PATRIMONIAL

Le recensement patrimonial, contrairement à ce que l’on pourrait penser, est la


phase de la mission la plus importante : sans de solides fondations, la construction
de notre étude ne saurait aboutir à un résultat satisfaisant.
Que l’on connaisse ou non notre client, un préalable consistera à lui poser un certain
nombre de questions. Au-delà de la collecte d’informations, il s’agira d’appréhender
la situation de notre client, définir avec lui les objectifs de la mission et identifier les
zones de risques.
Le recensement patrimonial sera réalisé de préférence au cours d’un entretien
physique pour une meilleure efficacité.

1. La situation familiale
La situation familiale se définit non seulement par la composition du foyer fiscal et
son organisation, mais aussi plus largement par l’identification de la famille au sens
large du fait des interactions possibles entre ses membres.

1.1 Le foyer et le foyer fiscal


Il est important de faire la distinction entre le foyer et le foyer fiscal. Le foyer peut se
définir comme l’ensemble des personnes qui vivent sous le même toit et qui
partagent le quotidien, alors que la composition du foyer fiscal dépend de la nature
des liens administratifs qui unissent des personnes.
Pour exemple le plus simple, un couple pourra former un ou deux foyers fiscaux
selon que les partenaires sont concubins, mariés ou pacsés.
Les premières questions posées au client doivent permettre d’identifier les membres
du foyer et du foyer fiscal.
 Où habitez-vous ? Avec qui ?
 Avez-vous des enfants ? Si oui, vivent-ils sous votre toit ? Déclarent-ils leurs
 revenus avec vous ou séparément ?
 Avez-vous d’autres personnes à charge ?

77
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

 Etat civil de chacun des membres du foyer ?

Dans un second temps, il s’agira de se renseigner sur les relations entre les époux
notamment sur la nature de leur union et les options prises.
 Êtes-vous mariés ? Êtes-vous pacsés ?
 Sous quel régime êtes-vous mariés ? Un contrat de mariage a-t-il été rédigé ?

1.2 Les descendants


Dans la plupart des cas, ce point aura déjà été abordé lors de la délimitation du
foyer. Il est néanmoins important de s’assurer que le client n’a pas omis de nous
parler d’enfants d’un premier lit ou illégitimes par exemple.

CONSEIL EXPERT
Il faut oser poser toutes les questions, aborder tous les sujets. Afin de ne pas heurter
notre client, il est bien entendu nécessaire de faire preuve de psychologie en
dédramatisant la situation par référence à des anecdotes vécues ou entendues par
exemple. Dans tous les cas, il est préférable de poser une question dérangeante
plutôt que de travailler sur de fausses hypothèses qui conduiront à des conclusions
incomplètes ou erronées.

1.3 Les ascendants


Aborder la question de l’ascendance aura plusieurs intérêts. En effet, en présence de
parents vivants, il est important d’envisager le futur héritage à recevoir et/ou l’aide
matérielle à leur apporter en cas de dépendance par exemple. De plus, connaître
l’histoire de ses parents nous permettra souvent de mieux comprendre notre client et
de cerner plus facilement ses attentes et besoins44.
 Où habitent vos parents ?
 Quelles étaient leurs professions ?
 Leurs retraites suffisent-elles à couvrir leurs besoins ?
 Comment s’est déroulée leur succession ?

44
Cf. Deuxième partie, Chapitre 3, Section 3, « La dimension psychologique ».

78
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

2. La situation sociale
Le patrimoine d’une personne ne se limite pas à ce qu’elle possède physiquement ou
à ce qu’elle doit. Il se compose également de toute une série d’actifs et de passifs
intangibles qui n’en sont pas moins essentiels.
L’exercice d’une activité professionnelle à risque est un axe important de notre
étude. Par « risque » nous entendons risque de mise en responsabilité
professionnelle importante et par conséquent engagement possible d’actifs
patrimoniaux dans la couverture de ce risque.
Il est donc nécessaire de se renseigner sur le statut et le régime social de chacun
des membres du foyer.
Il s’agit simplement de savoir si chaque personne est active ou sans activité et de se
renseigner le cas échéant sur son régime social à savoir salarié, mandataire social,
indépendant, retraité…
 Quelle est votre activité ? Comment exercez vous ?
 Votre époux a-t-il une activité ? Et vos enfants ?

Une fois ces informations recueillies, l’étape suivante consiste à se renseigner sur la
protection sociale dont chacun des membres bénéficie.
 Avez-vous souscrit à une prévoyance santé ? Obligatoire ou facultative ?
 Etes-vous couvert par une prévoyance arrêt de travail et incapacité temporaire
de travail ?
Dans l’affirmative, il sera important par la suite de récupérer une copie de chacun de
ces contrats.

3. Les libéralités antérieures


De façon organisée ou non, il est fréquent que différentes libéralités aient été
consenties avant notre intervention. Par libéralités, nous entendons les mutations à
titre gratuit (donations et testament).
En effet, notre mission consistant à préparer l’avenir, il est important de connaître
toutes les actions antérieures pour les intégrer dans notre raisonnement.
Ces libéralités auront toute leur importance lorsque nous aborderons la
problématique de la succession. Certaines libéralités pourront en effet s’avérer
judicieuses alors que d’autres seront contre productives. Mais pour le savoir, encore

79
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

faut-il connaître leur existence.


 Avez-vous consenti une donation au dernier des vivants ? Quelle option avez-
vous retenue ?
 Avez-vous fait des donations à vos enfants ? Tous les enfants ont-ils reçu la
même chose ? Si non, pourquoi ? La donation a-t-elle été faite devant un
notaire ?
 Avez-vous rédigé un testament ? Vous êtes-vous faits assister par un
notaire ?

Une fois les libéralités consenties par notre client répertoriées, il faudra s’intéresser à
celles dont il a éventuellement pu bénéficier.
 Avez-vous hérité ? De qui ? Quand ? Quoi ? Combien ?
 Comment s’est déroulée la succession ? Avez-vous une copie de l’acte
notarié ? (cette question sera d’autant plus pertinente en présence d’un parent
vivant ayant opté pour une quote-part en usufruit)

Dans tous les cas, il est opportun de se renseigner sur l’état de fortune des parents
afin d’anticiper un futur héritage.

4. La composition du patrimoine privé


Le patrimoine privé est composé d’un ensemble d’actifs et de passifs. Il s’agira par
conséquent de faire le bilan à l’instant T du patrimoine de notre client.
Cette partie de l’entretien devra se faire en trois étapes, le recensement exhaustif, la
récolte d’informations complémentaires et l’interrogation du client sur son ressenti.

4.1 Le recensement exhaustif


Le recensement exhaustif consiste à faire l’inventaire de tous les actifs et passifs
détenus.
Le résultat escompté est une classification des actifs et passifs selon les axes
du bilan proposé en annexe 4 ou selon une classification mieux adaptée aux besoins
spécifiques de notre client.
L’inventaire du patrimoine de notre client pourra être facilité si nous avons en notre
possession sa dernière déclaration d’ISF, soit parce que nous l’établissons, soit

80
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

parce qu’il nous l’a apportée.


Il s’agira de la parcourir avec le client en lui posant la question de l’évolution ou de
l’estimation de chacun des actifs et passifs.
Un axe de réflexion complémentaire devra néanmoins être abordé, celui de la
propriété du bien soit en propre, soit commun.
 Sur quelles bases ont été faites les évaluations ? Par qui ?
 A qui appartient le bien ?
Si le client n’a jamais déclaré l’ISF, le travail sera le même sans toutefois disposer
d’un document pouvant servir de base de travail.

4.2 La récolte d’informations complémentaires


Certains éléments du patrimoine nécessitent l’obtention d’informations
complémentaires.

 Parts de SCI

Les comptes annuels des sociétés doivent nous être communiqués si nous ne
sommes pas en charge de leur production. En effet, il est important de pouvoir
valider l’évaluation de ces titres et le bon traitement des comptes courants
d’associés.

CONSEIL EXPERT
Rappeler au client l’importance de la tenue d’une comptabilité d’une société civile
comme moyen de preuve pour l’administration notamment pour le suivi des comptes
courants fait partie de notre devoir de conseil. Néanmoins, gardons à l’esprit ce que
nous avons abordé en deuxième partie au paragraphe « La veille patrimoniale outil
du désir ». En effet, la comptabilité est un moyen de générer une mission
complémentaire en gestion de patrimoine, mais la réciproque est également vraie.

 Contrats d’assurance-vie

Il s’agira de connaître pour chaque contrat : la date de souscription, la date des


versements et la clause bénéficiaire.

81
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

 Autres valeurs mobilières

La détention de valeurs mobilières par le client est une source importante


d’informations :
 L’allocation présente nous renseignera sur son aversion au risque.
 Savoir s’il est assisté dans sa gestion mesurera son goût de l’indépendance.
 Echanger avec lui sur les différentes stratégies possibles et les différents
produits financiers existants nous permettra d’évaluer sa connaissance des
marchés.

 Le ressenti du client

Quelques questions ciblées auront un double objectif. D’une part, elles permettront
d’évaluer le niveau de maturité de notre client quant à l’approche de son patrimoine.
D’autre part, ramener le client au centre de la réflexion afin qu’il ait parfaitement
conscience que cet inventaire a pour unique but de faire un point à un instant donné
afin de préparer l’avenir.
 Pensez-vous que votre patrimoine est suffisamment diversifié ?
 Sur une échelle de 1 à 10 comment estimeriez-vous le risque de votre
allocation d’actifs ? Pourquoi ?
 Ce niveau de risque vous convient-il ?

5. La composition du patrimoine professionnel


Lorsque notre client est propriétaire de tout ou partie de son outil de travail, une
attention particulière doit y être portée, et ce pour plusieurs raisons :
 il est généralement la source principale de revenu du foyer
 il peut avoir une valeur importante
 il fait l’objet d’un traitement particulier en ce qui concerne l’ISF et est l’un des
points de contentieux les plus fréquents en cas de contrôle de l’administration
 il est au cœur de plusieurs problématiques : départ à la retraite, protection du
conjoint survivant...
Pour toutes ces raisons il sera nécessaire de questionner notre client sur la
composition de ce patrimoine professionnel.
 Avez-vous créé votre entreprise ? Quand ? Seul ?

82
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

 Quel est l’organigramme de votre groupe ? A-t-il toujours été structuré de la


sorte ? Pourquoi cette organisation ?

6. La fiscalité
Au stade du recensement il ne s’agit pas de faire l’audit des éléments, mais
uniquement de les collecter.

6.1 Impôt sur le revenu


La récupération de la dernière déclaration ainsi que du rôle de l’impôt correspondant
est un minimum. Il est néanmoins recommandé de se faire communiquer les trois
dernières années et ce pour les raisons suivantes :
 apprécier la volatilité des revenus de notre client
 s’assurer le cas échéant du bon suivi des déficits
 détenir les déclarations pouvant faire l’objet d’un contrôle de l’administration
ou de déclarations rectificatives par notre client

6.2 l’ISF
Lors de l’inventaire du patrimoine de notre client, nous avons déjà noté que la
communication des dernières déclarations facilitait le travail. A ce stade, il est
obligatoire d’en avoir connaissance pour apprécier l’évolution du patrimoine et des
valorisations de tous les actifs et passifs afin de garder une certaine cohérence dans
les méthodes d’évaluation par la suite. Or si l’on ne sait pas de quelle base nous
partons, il existera un fort risque de variation des valeurs déclarées.

7. Le bilan retraite
Depuis 1945, la France a opté pour un système de retraite basé sur la solidarité des
générations : la retraite par répartition.
En conséquence notamment d’une conjoncture économique difficile et de
l’augmentation de l’espérance de vie, l’équilibre entre les cotisations des actifs et les
pensions versées aux retraités n’est plus assuré à long terme. Plusieurs réformes
successives de ce régime ont été faites afin de garantir la pérennité du système. Les
conséquences de ces réformes passées et probablement futures résident dans le

83
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

recul de l’âge de départ à la retraite et une diminution des pensions versées.


Dans ce contexte, l’Etat encourage l’épargne retraite collective et individuelle par des
mesures incitatives (notamment le dispositif Madelin détaillé en annexe 17).
Le montant de la future pension de retraite du client dépend de plusieurs facteurs :
les différents régimes auxquels il a cotisé, le nombre d’années de cotisation, son âge
ainsi que celui de départ à la retraite, les rémunérations perçues tout au long de la
carrière et enfin la législation.
Etant donné ce grand nombre de variables, la question ne devra être abordée que
face à un client dont le départ à la retraite est prévu dans les 15 ans au plus. En
effet, des projections plus en amont reposeraient sur un nombre trop important
d’hypothèses et rendraient les résultats inexploitables.
Quoi qu’il en soit, il est d’ores et déjà important d’avoir à l’esprit un ordre de grandeur
du taux de remplacement du salaire par la retraite que l’on peut estimer entre 65% et
75%45.
Si notre client est proche de la retraite et l’enjeu significatif, une projection plus
précise devra être faite. Chaque professionnel pourra alors, selon son appétence
pour la matière et son équipement en logiciels spécialisés, se charger lui-même de
cette étude ou orienter son client vers un membre de son réseau46.
Cette étude pourra déjà avoir été réalisée, il suffira alors d’en récupérer une copie.
Dans tous les cas les questions à poser sont les suivantes :
 Avez-vous demandé un relevé de carrière à la CNAV ?
 A quels régimes de retraite avez-vous cotisé au cours de votre carrière ?
 Avez-vous cotisé de façon continue, ou avez-vous des périodes pendant
lesquelles vous n’avez pas cotisé ?
Notre client peut aussi avoir pris les devants et avoir souscrit à des produits
d’épargne supplémentaires. Il s’agira de faire avec lui un inventaire des outils utilisés
et de récupérer les dernières évaluations des différents contrats en plus des contrats
eux-mêmes :
 Votre entreprise a-t-elle mis en place un PPE ou un PERCO ?
 Bénéficiez-vous de contrats relevant des articles 39 et 83 du CGI ?

45
Conseil d’orientation des retraites, Séance plénière du 21 novembre 2012 « Pénibilité. Transition
emploi-retraite. Elaboration de cas-types pour les projections. ».
46
Cf. Deuxième partie, Chapitre 2, Section 3 « L’interprofessionnalité ».

84
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

 Avez-vous souscrit à un contrat Madelin ?


 Avez-vous un PERP ?

8. Les objectifs patrimoniaux


La définition des objectifs patrimoniaux est l’étape la plus compliquée de l’étude. En
effet, dans la plupart des cas, notre client n’a pas conscience, ou du moins n’exprime
pas clairement ses objectifs.
Tout l’enjeu de notre mission sera dès lors de chercher à découvrir la partie
immergée de l’iceberg47. Ecouter le client permettra d’orienter nos questions afin de
le pousser à s’interroger sur des sujets auxquels il n’avait parfois pas pensé.
Derrière la remarque classique du client « je paie trop d’impôts », se cache toujours
une problématique plus profonde à laquelle nous devrons essayer d’apporter une
solution. La façon la plus simple de découvrir les aspirations non avouées, au
premier abord, de notre client sera alors de poser la question « Que feriez-vous avec
cette somme si elle n’était pas due ? ».
Deux grandes familles d’objectifs peuvent être identifiées, ceux d’ordre financiers et
ceux propres à l’organisation du patrimoine.

8.1 Les objectifs financiers


Lorsque le client exprime un besoin quantifiable, on parle d’un objectif financier.
C’est le cas lorsqu’il définit comme objectif (la liste est bien entendu non exhaustive):
 La constitution d’un capital en vue de concrétiser un projet quel qu’il soit
(acquisition d’un bien immobilier, d’un objet de consommation, d’une voiture,
d’un bateau, d’une œuvre d’art...) Tout est envisageable.
 La constitution d’un capital retraite
 Le financement des études des enfants
 Le besoin de revenus complémentaires

8.2 Les objectifs organisationnels du patrimoine


La problématique du client peut ne pas être simplement matérielle. On parle alors
d’un objectif organisationnel du patrimoine.

47
Cf. Deuxième partie, Chapitre 1, Section 3 « La dimension psychologique ».

85
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

Tel est le cas dans les exemples suivants :


 Transmission d’entreprise
 Succession
 Protection d’un enfant handicapé
 Protection du conjoint survivant

9. Les contraintes de gestion


Une fois les objectifs patrimoniaux définis, il est important d’échanger avec le client
afin de lui rappeler qu’un cadre légal existe, l’aider à hiérarchiser ses objectifs et
l’interroger sur son approche personnelle des choses.

9.1 Le budget du ménage


Chaque ménage dispose de revenus et a des dépenses. La prise de connaissance
de ces éléments nous permet d’appréhender l’épargne disponible ou les besoins de
notre client.

9.2 Un cadre légal


Le cadre légal est le garant de la sécurité. Il peut parfois être un frein à l’atteinte d’un
objectif.
Ainsi, lorsqu’un client exprime un objectif contraire à la loi (fuir à tout prix l’impôt ou
déshériter un enfant par exemple), il est obligatoire de lui rappeler les limites de notre
intervention. Nous sommes là pour l’aider à profiter de toutes les possibilités
autorisées par la réglementation et non pour l’aider à l’enfreindre.
Ce rappel du cadre juridique aidera d’ailleurs souvent le client à mieux définir ou à
préciser ses objectifs.

CONSEIL EXPERT
Dire non à un client peut se révéler, contrairement à ce que l’on pourrait penser
vecteur d’une réelle reconnaissance de sa part. En effet, s’opposer peut être à court
terme source de conflit, mais à long terme on gagne en crédibilité. De plus, savoir
refuser c’est aussi se protéger en n’acceptant pas certaines pratiques parfois
cavalières.

86
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

9.3 Des objectifs à hiérarchiser


Comme le dit l’adage « Choisir c’est renoncer ». Or, il est fréquent que notre client
exprime des objectifs contradictoires. En effet, certains objectifs ne se situant pas sur
la même échelle temporelle, deviennent contradictoires lorsqu’on les met en
parallèle. Par exemple, un client peut souhaiter accroître sa consommation à court
terme tout en capitalisant pour sa retraite.
Notre rôle sera alors d’aider le client à hiérarchiser ses objectifs par ordre
d’importance pour lui, pour le cas échéant, l’aider à choisir.
Une méthode simple sera de noter sur une feuille l’ensemble des objectifs exprimés
et de demander au client de les classer.

9.4 Des contraintes propres au client


Comme nous l’avons soulevé à plusieurs reprises, la psychologie est un outil
essentiel du conseil. En effet, en revenant toujours à l’image de l’iceberg, le
patrimoine d’une personne est avant tout constitué de son histoire, de sa philosophie
de la vie, ce qui ne se voit pas au premier abord et qui n’est pas quantifiable.
La conséquence de l’omission de cette facette de notre client pourra être de
présenter une stratégie qui semble répondre à ses objectifs mais qui sera rejetée en
bloc car l’outil utilisé ne lui correspond pas : proposer une allocation d’actifs qui ne
serait en pas phase avec son aversion au risque, par exemple.
Il n’est pas rare en effet de voir un conseiller oublier qu’il s’agit des objectifs de son
client et non des siens. On peut être tenté de conseiller au client ce que nous ferions
à sa place, ce qui serait une erreur car nous ne sommes pas le client.
Afin de ne pas tomber dans ce piège, la solution réside dans l’écoute. Elle doit être
permanente et efficace. La communication non verbale au cours des différents
entretiens sera d’ailleurs aussi importante, voire plus importante que les mots.

Section 2 L’AUDIT PATRIMONIAL


Les informations nécessaires à notre réflexion nous ont été communiquées au cours
du premier entretien ou éventuellement pour les éléments manquants à la suite de
celui-ci.
Cette phase de l’étude consistera à structurer notre réflexion et se déroulera en
dehors de la présence du client afin de pouvoir réfléchir sereinement.

87
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

1. L’audit patrimonial
Le patrimoine est constitué de différentes catégories de biens définies par leur
utilisation. On parlera alors d’actifs de jouissance, d’actifs immobiliers de rapport,
d’actifs financiers ou d’actifs professionnels.
L’audit patrimonial consistera d’une part à évaluer et classer les actifs et passifs par
catégories afin de présenter de manière visuelle au client son patrimoine, et d’autre
part, analyser la pertinence des choix d’allocations en termes de rendement et de
diversification.

1.1 Les actifs et passifs de jouissance


Lorsqu’un bien est utilisé personnellement par le client, on parle d’actif de
jouissance. Il s’agit pour l’essentiel de la résidence principale, des résidences
secondaires et du mobilier.
Pour acquérir ces biens, des dettes ont pu être contractées. Elles constitueront alors
des passifs de jouissance.
A ce stade, il est opportun de se poser la question de l’utilité de ces actifs. En effet,
les biens détenus aujourd’hui ne correspondent pas nécessairement à nos besoins
actuels et futurs. Cette classification nécessitera bien entendu d’avoir au préalable
bien identifié les objectifs du client.

1.2 Les actifs et passifs professionnels


L’administration fiscale définit les biens professionnels comme « les biens
nécessaires à l’exercice sous forme individuelle d’une profession industrielle
commerciale, artisanale, agricole ou libérale et les droits sociaux : parts ou actions
de sociétés ». Cette notion est élargie à l’ensemble des participations directes ou
indirectes au capital de sociétés dans lesquelles est exercée l’activité
professionnelle.
1.3 L’immobilier de rapport
L’ensemble des biens immobiliers non utilisés à titre personnel constitue le
patrimoine immobilier de rapport qu’il s’agisse de terrains, de bois ou de
constructions.

88
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

1.4 Les actifs financiers


Ils sont constitués de l’ensemble des avoirs disponibles et des titres transmissibles et
négociables.
1.5 L’évaluation des actifs
Comme nous l’avons abordé plus en amont48, la lettre de mission détaille les
diligences à accomplir au cours de notre intervention. L’expert-comptable pourra être
amené à réaliser l’évaluation de certains biens du patrimoine (biens immobiliers,
titres des participations non côtés…). A ce titre, il est important de rappeler quelques
notions de base en matière d’évaluation.
 Il n’y a pas une valeur mais une fourchette de valeurs
 Plusieurs méthodes peuvent être utilisées (doivent l’être dans certains cas).
Les méthodes les plus couramment utilisées sont : les méthodes
patrimoniales, les méthodes actuarielles et les méthodes par comparaison.
 Le choix des méthodes d’évaluation dépend souvent du type de biens ainsi
que de l’utilisation qui en est faite. Ainsi, il est d’usage de privilégier les
méthodes comparatives pour les actifs de jouissance, alors que les méthodes
actuarielles et patrimoniales sont essentiellement utilisées pour valoriser les
autres catégories de biens.
 Il est important d’avertir le client sur les limites d’une valorisation en attirant
notamment son attention sur les écarts significatifs de valeur en fonction de la
méthode utilisée et sur la sensibilité importante de la valeur à certaines
variables.

1.6 La diversification
La diversification du patrimoine doit être appréciée au niveau global, c'est-à-dire la
répartition des actifs en fonction des catégories précitées, mais aussi au sein de
chacune de celles-ci.
C’est notamment le cas en ce qui concerne les actifs financiers. En effet, il en existe
une telle diversité aux caractéristiques propres, qu’il est important de les regrouper.
Les axes de regroupement à privilégier sont la liquidité des actifs d’une part et leur
risque respectif d’autre part.

48
Cf. Deuxième partie, Chapitre 2, Section 2, « La lettre de mission ».

89
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

2. L’audit budgétaire
L’audit budgétaire consiste à réaliser l’inventaire des revenus et dépenses du foyer
puis à les confronter pour déterminer les excès et besoins de trésorerie.

2.1 Les différents revenus et dépenses


L’inventaire des revenus et dépenses du foyer pourra être réalisé par le client ou
faire l’objet d’une mission complémentaire de la part de l’expert-comptable49.

 Les revenus

Les revenus à retenir sont les revenus encaissés. En effet, si l’on basait notre étude
uniquement sur les revenus déclarés, nos valeurs seraient biaisées par l’existence
de revenus taxables non encaissés et à l’inverse par l’absence de revenus non
taxables mais encaissés.
Les revenus encaissés devront alors être classés en fonction de leur caractère
récurrent ou exceptionnel.

 Les dépenses

Les dépenses devront, quant à elles, être classées dans un premier temps selon
qu’elles concernent l’entretien du ménage ou qu’elles se rapportent au patrimoine de
rapport.
Cette différenciation permettra de mesurer la rentabilité réelle de chaque actif. Elle
permettra qui plus est au client de prendre conscience de l’importance de certaines
dépenses et de corriger la situation le cas échéant.

2.2 Le cycle de vie selon Modigliani


Cet audit doit non seulement être réalisé au jour de l’étude, mais doit également être
la projection dans un état futur, souvent celui du jour du départ à la retraite.
En effet, l’objectif principal de cet audit est de chiffrer les excédents ou les besoins
au fur et à mesure du temps.

49
Cette mission complémentaire n’est pas développée dans le cadre de ce mémoire car elle pourrait
à elle seule faire l’objet d’un mémoire d’expertise comptable. L’OEC a néanmoins proposé une
nomenclature de plan comptable spécifique portée en annexe 10 et pouvant servir de base de
réflexion quant à l’approche de la comptabilité des particuliers.

90
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

La figure ci-dessous illustre l’importance de cette projection.

FIGURE 10 - Théorie du cycle de vie (consommation et épargne) selon Modigliani

Comme nous pouvons le noter sur la figure ci-dessus, les courbes de consommation
et de revenu se croisent par deux fois au cours de notre vie. Ainsi 3 phases
successives se dessinent. Au cours de la première (A), nous nous endettons pour
couvrir nos besoins qui sont supérieurs à nos revenus. C’est notamment la période
d’acquisition de la résidence principale, parfois celle de l’investissement dans
l’entreprise. La deuxième (B) correspond à la phase de la maturité de notre vie
active. Nos revenus nous permettent alors à la fois de couvrir l’augmentation de
notre train de vie et de rembourser nos dettes. Enfin, une fois ces dettes
remboursées, notre excédent de revenus forme notre épargne et donc notre
patrimoine. Puis arrive la dernière phase (C) correspondant à notre retraite pendant
laquelle nos besoins excèdent nos revenus. Nous puisons alors dans notre
patrimoine pour couvrir ce delta.

91
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

CONSEIL EXPERT
Notre cœur de cible pour la mission de bilan patrimonial sera naturellement les
clients en phase d’activité selon la définition donnée par Modigliani et éventuellement
certains retraités. Réfléchir à une organisation du patrimoine impose que celui-ci soit
déjà constitué ou en cours de constitution. Néanmoins, gardons à l’esprit que la
gestion de patrimoine est une matière large et que l’expert-comptable a sa place au
côté du client quel que soit son âge et son patrimoine. En effet, certaines
problématiques se présentent à nos clients dès le début de leur activité. Qu’il
s’agisse de conseil sur le choix de leur régime matrimonial ou de choix de la forme
d’exercice de leur activité, nous devons être présents auprès d’eux en proposant nos
services.

3. L’audit fiscal
3.1 La fiscalité courante
 L’impôt sur le revenu

L’audit de l’impôt sur le revenu nous permettra de valider la bonne déclaration des
revenus afin de valoriser un éventuel risque fiscal. En outre, la composition des
revenus des déclarations passées peut donner des pistes de réflexion sur les
préconisations à formuler pour l’avenir, notamment par une utilisation efficace des
réductions et crédits d’impôt.
En matière patrimoniale, une bonne connaissance des règles de l’impôt sur le revenu
est impérative.
Les taux moyens et marginaux d’imposition
Le barème de l’impôt sur le revenu est progressif. Le taux d’imposition d’un revenu
est d’autant plus élevé que les tranches hautes de l’impôt sont atteintes
(Cf. annexe 11 : barème de l’impôt sur le revenu).
L’incidence du quotient familial
L’impôt sur le revenu est calculé au niveau du foyer fiscal. Sa composition
déterminera le quotient familial, multiple à appliquer au barème de l’impôt (hors
plafonnement du quotient familial).
Chaque époux compte pour une part, les deux premiers enfants pour une demi-part
chacun et chaque enfant supplémentaire comptera pour une part entière.

92
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

FIGURE 11 - Impact de la composition du foyer fiscal sur l'impôt sur le revenu


Composition du foyer Nombre de Montant de l'IR pour un revenu Taux moyen Taux marginal
fiscal parts imposable de 160 000 euros d'imposition d'imposition
1 adulte 1 52 390 33% 45%
1 couple 2 38 536 24% 41%
1 couple 1 enfant 2,5 37 028 23% 30%
1 couple 5 enfants 6 26 472 17% 14%
Remarque 1 : l'application du barème progressif génère une différence entre le taux moyen d'imposition
et le taux marginal de celle-ci
Remarque 2 : un même revenu sera taxé différemment en fonction de la composition du foyer fiscal
Remarque 3 : le plafonnement du quotient familial à 1 508 € pour chaque 1/2 part supplémentaire peut
amener à se retrouver face à un taux marginal d'imposition inférieur au taux moyen d'imposition

Les réductions et crédits d’impôt


Certains dispositifs peuvent être encouragés par le législateur avec la mise en place
d’avantages fiscaux, sous formes de réductions et de crédits d’impôt.
La différence entre les deux avantages réside dans le fait que les crédits d’impôt sont
remboursables lorsque l’impôt à payer est inférieur au crédit d’impôt alors que les
réductions ne le sont pas.
Le plafonnement des niches fiscales
Le plafonnement des niches fiscales, est la limitation des avantages fiscaux procurés
par les réductions et crédits d’impôt. Le plafonnement était de 10 000 euros pour
l’impôt sur les revenus 2014 (18 000 euros si le contribuable investit en Outre-mer).
En revanche, notons que sont exclus de ce mécanisme de plafonnement, les
avantages fiscaux liés à une situation personnelle tels que les frais d’établissements
pour personnes dépendantes ou les avantages liés à la poursuite d’objectifs d’intérêt
général.

 L’impôt sur la fortune

Comme en matière d’impôt sur le revenu, l’audit de l’ISF permettra de soulever un


éventuel risque fiscal. Les cas les plus fréquemment rencontrés sont le non dépôt de
déclaration alors que le seuil requis est dépassé, l’omission de certains actifs sur la
déclaration ou la sous-évaluation d’autres.
Un rappel de quelques principes fondamentaux permettra d’appréhender cette partie
de l’audit.
La progressivité de l’ISF
L’ISF touche l’ensemble des ménages dont la valeur du patrimoine net dépasse

93
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

1 300 000 euros au 1er janvier de l’année.


Comme l’impôt sur le revenu, l’ISF est progressif selon le barème présenté en
annexe 12.
Les biens professionnels
Les biens concourant à l’exercice de l’activité professionnelle ne sont pas soumis à
l’ISF. Une définition précise de ces biens est donnée par le bulletin officiel des
finances publiques-impôts BOI-PAT-ISF-30-30-20130614
Les réductions d’ISF
Le montant de l’ISF à payer peut être minoré à hauteur de 50% des investissements
effectués dans les PME (plafond de déduction de 45 000 €) et de 50% des
investissements en FIP et FCPI (plafond de déduction de 18 000 €).
Les dons effectués au bénéfice de certains organismes d’intérêt général ouvrent droit
à une déduction de 75% des montants donnés (plafond de déduction de
50 000 €).
Le plafonnement de l’ISF
La loi prévoit un plafonnement de l’ISF. En effet, le montant cumulé des impôts
payés par un contribuable l’année précédent celle du calcul de l’ISF, ajouté au
montant de l’ISF ne peut pas dépasser 75 % des revenus de l’année précédente.

3.2 La fiscalité latente


L’étude de la fiscalité latente liée à la situation de notre client sera opportune selon
les problématiques soulevées lors du recensement patrimonial.
 Les plus-values latentes

Certains biens possédés par notre client ont pu s’apprécier depuis leur acquisition et
peuvent présenter aujourd’hui une importante plus-value latente. Le jour où le bien
est cédé à titre onéreux, cette plus-value est susceptible d’être taxée.
Il est important d’identifier les plus-values latentes significatives et évaluer l’impôt
correspondant car celui-ci pourra avoir un impact significatif sur la valeur nette du
patrimoine, sur le niveau des revenus futurs et influencer la stratégie patrimoniale à
mettre en place.

94
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

 Les droits de succession

Le coût fiscal de la transmission du patrimoine et plus particulièrement de la


succession est une préoccupation majeure pour nombre de nos clients. Dans le
cadre de l’établissement d’un bilan patrimonial, il conviendra d’évaluer avec précision
le montant des droits de succession. Les annexes 13 à 16 présentent les différents
abattements et taux applicables en fonction de la qualité de l’héritier.
Une des solutions souvent utilisée dans le cadre de l’optimisation de la succession
est la transmission à titre gratuit de son vivant. Les droits appliqués sont les mêmes
qu’en matière de succession.

4. L’audit social
Le patrimoine social est constitué de l’ensemble des droits acquis pouvant ouvrir
accès à un capital ou à une rente à un moment déterminé. Ces droits sont issus de
cotisations versées de façon obligatoire ou volontaire tout au long de la vie d’un
individu. Quatre grandes familles peuvent être identifiées, la prévoyance santé, la
prévoyance perte d’activité, le droit à la retraite et la prévoyance décès. Afin de
préparer le bilan patrimonial de notre client, il conviendra dès lors d’identifier ses
droits et par la suite de lui en faire une synthèse.
Pour cela il est nécessaire de connaître les principales assurances existantes.

4.1 La prévoyance santé


L’assurance maladie obligatoire est la première assurance santé. En effet, les
cotisations obligatoires versées ouvrent droit à la prise en charge de tout ou partie
des frais de santé engagés par un assuré. Or, pour équilibrer les comptes de la
Sécurité Sociale, les frais de santé tendent à être de moins en moins remboursés.
Le recul des remboursements de l’assurance maladie a pour conséquence un reste
à charge pour l’assuré qui selon la pathologie à traiter pourra être significatif.
Un moyen de couvrir ce risque est de souscrire un contrat d’assurance privé
communément dénommé mutuelle.
Ces contrats peuvent être collectifs ou individuels, obligatoires ou facultatifs.
Les contrats obligatoires et collectifs ont depuis longtemps été encouragés par les
pouvoirs publics jusqu’à les rendre obligatoires pour tous les salariés du secteur

95
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

privé à compter du 1er janvier prochain50.


Les actifs non salariés, bénéficient également de mesures incitatives grâce à la loi
dite Madelin51 leur permettant de cotiser en franchise d’impôt sur le revenu. La
déductibilité de ces cotisations est soumise à des plafonnements spécifiques
détaillés en annexe 17.

4.2 La prévoyance garantie arrêt de travail, incapacité temporaire de


travail, invalidité et perte d’emploi
Notre client, s’il est encore actif, perçoit une rémunération. Or quelle serait cette
rémunération s’il ne pouvait plus exercer son activité, temporairement ou
définitivement, suite à un accident, un problème de santé, la rupture de son contrat
de travail ou à la fin de son mandat social ?
Le régime général d’assurance maladie ne couvre que partiellement la perte de
revenu liée à ces situations. Néanmoins, les indemnités versées sont très en deçà de
la rémunération habituelle puisqu’elles sont égales à un pourcentage de celle-ci
d’une part, et qu’elles sont plafonnées d’autre part (Cf annexes 18 et 19).
Lorsque l’arrêt de l’activité est dû à une perte d’emploi, un licenciement ou non
renouvellement d’un mandat social, là encore le niveau de rémunération sera
sensiblement affecté. En fonction de son statut juridique, notre client sera couvert ou
non par l’assurance chômage.
Comme en matière de prévoyance santé, des assurances privées complémentaires
existent qui couvrent la perte de rémunération occasionnée par l’arrêt temporaire ou
définitif de l’activité professionnelle. Ces contrats peuvent également bénéficier du
cadre de la loi Madelin et des avantages fiscaux afférents.
Quel que soit le contrat souscrit, deux points devront être analysés. Le premier
concernera le montant des versements en cas de recours à l’assurance ainsi que
leur durée dans le temps. Le second sera de lire les conditions générales pour
connaître les règles d’application de l’assurance d’une part et les éventuels délais de
carence d’autre part.

50
Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi.
51
Loi n° 94-126 du 11 février 1994.

96
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

4.3 Le droit à la retraite


Lors de notre recensement, le client nous a indiqué les droits acquis au titre du
régime général et les différents produits auxquels il a souscrit.
Notre rôle sera dès lors d’ordonner ces éléments en familles de produits en fonction
des marges de manœuvre et leviers existants.

 L’impact de la carrière sur les régimes obligatoires

Qu’il s’agisse de la retraite de base obligatoire ou de la retraite complémentaire


obligatoire, nous ne sommes pas maîtres du calcul puisqu’il est fixé par la loi.
Néanmoins, nous pouvons influer sur trois paramètres : l’âge de départ à la retraite,
le niveau de rémunération et le nombre de trimestres validés. Jouer sur ces variables
permettra d’ajuster le niveau des futures pensions de retraite.
Pour ce qui est du nombre de trimestres, les deux leviers existants sont l’âge de
départ à la retraite et le rachat de trimestres (Cf. annexe 20).

 Les régimes et contrats supplémentaires

L’objectif étant d’attirer l’attention du lecteur sur l’existence de régimes et contrats


supplémentaires, ceux-ci ne seront pas détaillés ici. Néanmoins, les mentionner
permettra à chacun d’appréhender la diversité des solutions existantes.
Lorsque notre client a le statut de salarié, la loi prévoit deux régimes dits « article
83 » et « article 39 » qui autorisent l’entreprise à cotiser au-delà des régimes
obligatoires et complémentaires.
De plus, l’épargne salariale est également encouragée avec le PEE et le Perco
détaillés en annexes 21 et 22.
Le cadre réservé aux travailleurs non salariés est celui des contrats dits « Madelin »
déjà mentionnés dans les développements précédents et détaillés en annexe 17.
Notre rôle est dès lors de chiffrer l’ensemble des droits ouverts par ces différents
contrats et d’orienter le client sur d’éventuels arbitrages, le cas échéant, en fonction
des objectifs définis.

4.4 La prévoyance décès


La prévoyance décès est une assurance garantissant le versement d’un capital à

97
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 1
L’élaboration du bilan patrimonial

une ou plusieurs personnes en cas de décès de l’assuré.


Il sera opportun de se poser la question de ce type de contrat lorsque notre client est
le principal contributeur au budget de la famille par exemple.
Il s’agit par conséquent d’un outil puissant de protection de la famille.

98
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 2
Les préconisations patrimoniales

CHAPITRE 2 LES PRECONISATIONS PATRIMONIALES

L’aboutissement de notre mission est la restitution de notre analyse au client. Celle-ci


s’appuie sur des états chiffrés permettant d’illustrer nos préconisations52. Enfin,
l’accompagnement du client doit également se faire dans le temps en faisant
périodiquement le point, avec lui, sur sa situation.

Section 1 LES PRECONISATIONS PATRIMONIALES

1. La stratégie élaborée
Lors de la collecte des informations, nous avons défini avec le client les objectifs et
les avons classés par ordre de priorité. L’audit du patrimoine selon la démarche
proposée en section 2 de cette partie, nous permet d’élaborer une stratégie
permettant de répondre au mieux aux attentes exprimées.
La stratégie définie sera l’application de notre savoir transversal complété des
notions propres à la gestion de patrimoine53.
Il s’agira d’utiliser tous les outils nécessaires à la mise en place d’actions visant à
atteindre les objectifs fixés et dont nous disposons.
Qu’il s’agisse d’un « simple » arbitrage entre des classes d’actifs, de produits
financiers, ou au contraire de changement de régime matrimonial ou de conseil en
rédaction des clauses bénéficiaires des contrats d’assurance, l’expert-comptable
devra optimiser l’organisation du patrimoine en terme de rentabilité espérée au
regard de l’aversion au risque du client, de protection de la famille en anticipant les
besoins de chacun des membres de celle-ci et de transmission du patrimoine.
La fiscalité est volontairement écartée de la liste des objectifs à atteindre par la
stratégie. Bien qu’elle soit une composante essentielle de notre réflexion et qu’elle
cristallise à elle seule une grande partie des craintes exprimées par les clients, elle
ne doit pas être portée au rang d’objectif. En effet, la fiscalité n’est en réalité qu’une

52
Un modèle est présenté en annexe 4. Comme son nom l’indique, il ne s’agit que d’un modèle qui
doit être ajusté aux besoins du client d’une part, et à notre équipement informatique d’autre part (Cf.
Première partie, Chapitre 2, Section 2 « Des outils informatiques ».
53
Cf. Première partie, Chapitre 1, Section 1, 2.1.1. « Science » et Première partie, Chapitre 3,
Section 1 « Des connaissances techniques à approfondir ».

99
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 2
Les préconisations patrimoniales

donnée à intégrer à nos calculs. Néanmoins, il est évident qu’il faudra savoir se
montrer opportuniste.
De plus, la notion de stratégie est directement liée aux objectifs exprimés par le
client. Ainsi, il serait erroné de penser qu’il existe une stratégie commune à toutes les
situations. Dans l’ouvrage « Gestion de patrimoine » publié par le CSOEC54,
65 stratégies, répondant aux objectifs les plus courants, sont présentées en fonction
des problématiques. Notons toutefois que le lecteur y trouvera les illustrations de
chacune des problématiques soulevées dans notre partie « L’audit patrimonial ».
Enfin, la stratégie doit comprendre un échéancier des actions à mettre en place.
Celui-ci devra comprendre les actions à mener et les éventuels interlocuteurs à
rencontrer55.

2. La présentation au client
La présentation de nos travaux au client constitue une étape décisive de la mission.
En effet, quelle que soit la qualité de la stratégie déterminée, celle-ci ne sera
concrétisée qu’à condition d’être favorablement perçue par le client. Une liste des
points les plus importants est proposée au lecteur afin qu’il puisse appréhender au
mieux cette étape.
 La présentation doit se préparer
Il convient de consacrer le temps nécessaire à la préparation de la présentation au
client. Celle-ci ne se limite pas à une simple lecture de nos conclusions, il faut être
capable d’expliquer et de justifier nos positions.
 Le client n’est pas un expert de la gestion de patrimoine
Il est important d’adapter nos explications à notre client. En effet, de nombreuses
notions familières pour les praticiens que nous sommes sont inconnues ou peu
maîtrisées par nombre de nos clients. Ainsi, sans aller jusqu’à la vulgarisation de
notre exposé qui serait contre-productive en terme d’image, il convient d’illustrer nos
propos. Des schémas plutôt que des tableaux complexes, ou des métaphores bien
choisies, sont deux moyens efficaces pour faire passer nos idées.

54
Pour plus de détails sur l’ouvrage, se référer à la bibliographie.
55
Cf. Deuxième partie, Chapitre 2, Section 3 « L’interprofessionnalité ».

100
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 2
Les préconisations patrimoniales

CONSEIL EXPERT
En termes de responsabilité, il est important de pouvoir justifier que nous avons pris
toutes les dispositions nécessaires pour s’assurer de la bonne compréhension par le
client des conclusions de notre étude.

 Les rapports de plusieurs dizaines de pages sont à proscrire


Puisqu’il n’existe pas de problématique standard, il n’y a pas de taille pour le rapport
non plus. Le professionnel doit faire preuve de synthèse. Chacun a déjà pu mesurer
les conséquences d’un rapport excessivement long. La plupart du temps, il n’est pas
lu. Or comment peut-on espérer que la stratégie proposée soit correctement mise en
place si elle n’est pas lue ?
 Un support écrit, oui, mais un entretien oral aussi !
Le rapport écrit n’est qu’un support utilisé pour rendre audible notre conseil. La
lecture d’un rapport peut laisser place à l’interprétation. Il peut donc être utile de
préciser notre pensée. Par ailleurs, la communication se fait par différents canaux
utilisant chacun un signal différent. Alors n’en négligeons aucun.
 Préciser la différence entre les différents choix possibles
Lorsque notre audit conclue à plusieurs solutions possibles, il est important d’être en
mesure d’expliquer cette pluralité au client afin qu’il ait tous les éléments nécessaires
à sa prise de décision.
 Le client est le décisionnaire final
Le client attend de son expert-comptable qu’il puisse répondre à ses objectifs et
uniquement aux siens. Ainsi, l’empathie est une qualité essentielle à tout expert-
comptable souhaitant développer une activité de gestion de patrimoine. Aucun
jugement de valeur ne doit interférer dans notre réflexion. Il est évident que chaque
professionnel a ses propres préférences et aversions, mais celles-ci devront être
mises de côté afin de répondre efficacement aux besoins de nos clients.

101
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 2
Les préconisations patrimoniales

Section 2 LES ETATS COMPTABLES


1. Le bilan patrimonial
1.1 La situation aujourd’hui

Plusieurs présentations du bilan patrimonial peuvent être envisagées. La plus


courante est similaire à celle utilisée en comptabilité des entreprises avec un état
présentant l’actif et le passif. Lors de la présentation au client, il est recommandé de
l’illustrer avec des graphiques, plus visuels.
Qu’elle soit structurée sous forme de tableaux ou sous forme de diagrammes, la
présentation devra classer les éléments selon leur nature et leur origine (propre ou
commune).
Les actifs pourront être regroupés au sein de quatre catégories : l’immobilier, les
actifs professionnels, le mobilier et le financier.
Les sous-catégories choisies dépendront de la situation propre de chaque client et
des besoins définis lors de notre audit. A titre d’exemple, concernant les actifs
financiers, il pourra être opportun selon les cas de ne pas organiser le bilan par type
de produits mais plutôt par secteurs d’investissement ou zones géographiques.
Par ailleurs, nos clients n’auront pas forcément connaissance de la répartition de leur
patrimoine entre les époux (qui dépend largement du régime matrimonial choisi).
Ainsi, notre bilan devra faire ressortir la propriété du bien, propre à un époux ou
commun.

1.2 Le bilan cible


Le bilan cible présente la répartition des actifs et passifs à une date donnée qui
résulterait de l’application de nos recommandations. L’horizon de l’étude dépend
donc des objectifs du client, mais correspond souvent dans la pratique au départ à la
retraite.
Quoi qu’il en soit, le bilan cible reprend la présentation du bilan initial en y intégrant
les impacts du temps et les éventuels arbitrages à opérer.

2. Le budget patrimonial
2.1 La situation aujourd’hui
Le budget patrimonial est construit sur le même format qu’un compte de résultat

102
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 2
Les préconisations patrimoniales

d’entreprise. Les produits correspondent aux revenus de notre client, les charges à
ses dépenses.
Les produits devront être classés en fonction de leur nature : salaires, pensions,
revenus de l’outil de travail, pensions, revenus fonciers, RCM non professionnels…
De plus, il conviendra de distinguer les revenus courants et les revenus
exceptionnels.
Deux grandes familles de dépenses doivent être identifiées, les dépenses d’entretien
du ménage et celles engagées pour l’entretien du capital. Cette distinction permet de
chiffrer et d’illustrer les masses en question d’une part, et de déterminer la rentabilité
réelle des actifs de rapport d’autre part.

2.2 Le budget cible


L’horizon du budget cible est identique à celui retenu pour le bilan cible.
Son organisation reprendra celle choisie pour le budget initial.
Comme le bilan cible, le budget cible servira d’illustration de la situation à l’issue de
nos recommandations.

CONSEIL EXPERT
Afin d’illustrer le besoin d’agir, il peut être opportun de présenter la situation future
dans l’hypothèse où rien ne serait fait.
Enfin les bilans et budgets cibles peuvent être multipliés selon différentes
hypothèses, notamment pour illustrer la situation en cas de décès de chacun des
conjoints.

Section 3 LE SUIVI DES PRECONISATIONS


L’accompagnement du client dans la gestion de son patrimoine ne s’arrête pas à la
présentation de nos travaux. En effet, les compétences reconnues dans nos
missions traditionnelles le seront de la même manière en matière de conseil en
gestion de patrimoine si nous accompagnons le client dans le temps.

1. Les changements liés au client


Nos préconisations sont valables à un instant T. Elles seront amenées à évoluer en
fonction des besoins du client.

103
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 2
Les préconisations patrimoniales

Qu’il s’agisse de changements dans la composition de la cellule familiale, de


modifications inattendues significatives du patrimoine ou tout simplement d’une
hiérarchisation différente des objectifs du client, la stratégie initiale devra être ajustée
et adaptée.

2. Les changements liés à l’environnement externe du client


Les évolutions de l’environnement économique, fiscal ou juridique peuvent
également remettre en question certaines de nos préconisations. La veille
patrimoniale56 est l’outil de détection de ces changements. Elle permettra au
professionnel d’être réactif dans la proposition d’ajustements de la stratégie
préalablement définie.

3. La fréquence des mises à jour de notre mission


La fréquence des mises à jour dépendra des évolutions de la situation de notre client
et des évolutions économiques fiscales et réglementaires.
Ainsi, un nouveau bilan patrimonial devra être proposé chaque fois qu’un fait
significatif se présentera.
Nos échanges réguliers avec les clients57 constituent autant d’occasions de
s’entretenir des changements intervenus dans leur sphère privée. Notre écoute doit
être permanente58.

4. Les diligences à accomplir lors de la mise à jour


Les nouvelles diligences à accomplir sont fonction de l’ampleur des changements
intervenus. Elles pourront dès lors se limiter à la mise à jour de certains éléments de
l’audit ou nécessiter la mise en œuvre d’un nouveau bilan patrimonial complet.

5. La gestion de la relation client en cas de préconisations


« malheureuses »
L’environnement de la gestion de patrimoine n’est pas figé dans le temps. Ainsi, qu’il
s’agisse de la conjoncture ou de la réglementation, des changements peuvent

56
Cf. Deuxième partie, Chapitre 1, Section 2 « La veille patrimoniale ».
57
Cf. Première partie, Chapitre 1, Section 2, 2.2. « Des échanges réguliers avec le client » et
Deuxième partie, Chapitre 1, Section 2 « La veille patrimoniale ».
58
Cf. Deuxième partie, Chapitre 2, Section 3, 3.1. « Savoir écouter ».

104
TROISIEME PARTIE – CHAPITRE 2
Les préconisations patrimoniales

intervenir avec le risque que leur impact soit négatif pour notre client.
Deux risques existent pour l’expert-comptable, la mise en responsabilité et
l’insatisfaction du client.
Le risque de voir notre responsabilité engagée est en grande partie résolu par le
respect des différents points abordés par ce mémoire, notamment le chapitre traitant
de la gestion du risque.
Néanmoins, notre protection civile préservée n’empêche pas le ressenti du client. Or,
notre fonds de commerce repose sur notre image.
Il existe heureusement des solutions qui permettront de calmer la tension dans la
plupart des cas :
 La discussion
La discussion constitue en gestion de patrimoine, comme ailleurs, un moyen simple
et efficace d’apaiser les tensions. Ceci réside souvent dans le fait que le problème
perçu par le client est amplifié par son propre ressenti. Replacer la discussion dans
un contexte général peut alors suffire à faire relativiser le client.
 Le rappel des faits
Si la démarche exposée tout au long de ce mémoire a été suivie, et plus
particulièrement les développements de la troisième partie, alors il sera possible de
démontrer au client que les choix effectués ne sont pas les nôtres mais les siens. La
stratégie définie lors de notre intervention ayant été validée par notre client.
 La réactivité
Essuyer un revers n’est pas une fin en soi. Ainsi, une fois la démarche de
l’explication des faits réalisée, l’expert-comptable devra réfléchir à une nouvelle
stratégie tenant compte des changements environnementaux intervenus.
Cette démarche permettra au client de repartir sur une dynamique positive avec de
nouveaux objectifs.

105
CONCLUSION

CONCLUSION

L’expert-comptable est un interlocuteur quotidien pour les chefs d’entreprises.


A ses côtés dans sa gestion professionnelle, nous devons dorénavant l’être dans
la gestion de son patrimoine personnel.

La déontologie de la profession, résumée par le triptyque « Science, Conscience,


Indépendance », a aidé à façonner l’image de marque dont jouissent les experts-
comptables, ce qui représente un avantage certain face à la concurrence présente
sur le marché de la gestion de patrimoine.

Le devoir de conseil impose de s’intéresser aux impacts des décisions prises


dans le cadre de l’activité professionnelle sur la situation personnelle des
dirigeants. De là à proposer le conseil patrimonial à nos clients il n’y a qu’un pas.

Les développements présentés démontrent, à ceux qui en doutaient encore, que la


gestion de patrimoine fait pleinement partie des prérogatives de l’expert-
comptable. En effet, nous avons les qualités nécessaires à la réalisation de ces
missions, un savoir transversal et un cadre d’exercice défini. En outre, notre
clientèle est principalement constituée de dirigeants d’entreprises. Or, ils forment le
cœur de cible du conseil patrimonial.

L’Ordre des experts-comptables encourage les professionnels à franchir le pas de la


diversification. La gestion de patrimoine est chaque année évoquée lors du
congrès annuel de la profession et des universités d’été qu’il organise. Ainsi,
l’expert-comptable conseil en gestion de patrimoine n’est pas seul !

Il est normal qu’envisager une nouvelle mission soit source d’inquiétudes. Suivre les
méthodologies proposées dans ce mémoire en matière d’organisation du cabinet
d’une part et de plan de mission pour l’élaboration de la stratégie patrimoniale
d’autre part, permettra au professionnel de surmonter ses craintes.
En effet, l’organisation du cabinet doit être adaptée selon la méthodologie proposée

106
CONCLUSION

qui permet au professionnel de:


 limiter son offre aux prérogatives autorisées aux experts-comptables
(vendre le conseil et uniquement le conseil)
 appréhender le complément de formation nécessaire (régimes
matrimoniaux, succession…)
 concevoir une stratégie de communication, « le savoir n’est rien sans le
faire savoir »
 anticiper les investissements nécessaires (informatiques et humains)
 appréhender le profil de ses clients de manière objective (âge, revenu,
patrimoine) mais aussi psychologique (théorie de l’iceberg).
 protéger notre pratique de la mission (des écrits et l’interprofessionnalité)

Le guide méthodologique du bilan patrimonial proposé :


 démontre que son architecture globale est proche de nos pratiques
habituelles : recensement, audit des informations, élaboration de la
stratégie
 met en avant les points essentiels de chacune de ces étapes
 donne les clefs d’un suivi efficace des préconisations

L’enjeu est important, la rentabilité des missions traditionnelles se contracte,


l’environnement évolue rapidement, la concurrence s’accroît. Saisissons
l’opportunité qui est la nôtre de relancer notre croissance tout en continuant à
faire ce que nous faisons le mieux, accompagner le client. Continuer à
l’accompagner dans son activité professionnelle comme hier, et dans son
organisation personnelle demain grâce à la gestion de patrimoine.

107
BIBLIOGRAPHIE

BIBLIOGRAPHIE

TEXTES OFFICIELS

Ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des


experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable
Version consolidée au 8 août 2015

Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006,


relative aux services dans le marché intérieur publiée au Journal officiel L 376 du
27/12/2006

Ordonnance n° 2008-507 du 30 mai 2008 portant transposition de la directive


2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la
reconnaissance des qualifications professionnelles, qui ne permet l’exercice de la
profession d’expert-comptable qu’aux titulaires d’une qualification professionnelle
nécessaire

OUVRAGES

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mission auprès de chefs d’entreprise, Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-
Comptables, 2ème édition, 2013, 335 pages

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enjeux de demain, Arguments Patrimoine, octobre 2011

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Développons les missions de conseil, Ouverture, septembre 2011

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TOKARZ Julien, Le rôle de l’expert-comptable au côté du dirigeant se renforce,


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Les experts-comptables doivent s’investir en gestion de patrimoine, Paroles


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La gestion de patrimoine : du retail banking à la gestion de fortune : quelles


stratégies face au durcissement du jeu concurrentiel ?, mai 2011

Les conseillers en gestion de patrimoine indépendants : de l’âge d’or à l’âge de


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Les cabinets d’audit et d’expertise comptable : défis et stratégies à l’heure du


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www.experts-comptables.fr : Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables
www.oec-paris.fr : Ordre des Experts-Comptables Ile de France
www.gestiondepatrimoine.org : Site commercial CGPI
www.unionfinancieredefrance.fr : Union Financière de France
www.legifrance.gouv.fr : Service public de la diffusion du droit
www.lesechos.fr : Les Echos

CENTRES DE DOCUMENTATION
 Centre de documentation des experts-comptables et des commissaires aux
comptes
19, rue Cognacq Jay, 75007 PARIS
Site général : www.bibliotique.com
Bibliobase : www.bibliobaseonline.com
 Bibliothèque Nationale de France
Quai François Mauriac, 75013 PARIS
Site général : www.bnf.fr
Catalogue : www.catalogue.bnf.fr

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