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Axe 1 :

Extrait1 : « Persuader le monde» ; prouver que « les États-Unis étaient un « bon médecin», soucieux de
tenir ses promesses, sachant prendre des risques, et, sans crainte du sang versé, prêt à frapper durement
l'ennemi » ; faire « d'un petit pays arriéré» dépourvu de toute importance stratégique, « un test de la
capacité des États-Unis à aider une nation à affronter une guerre communiste de "libération" » (c'est
nous qui soulignons); sauvegarder l'image de la toute puissance, « notre leadership mondial » ;
démontrer «la volonté et la capacité [des États-Unis] d'imposer leur point de vue en matière
internationale » ; prouver « la crédibilité des engagements que nous avons contractés vis-à-vis de nos
alliés et de nos amis » ; en résumé, « nous comporter (c'est nous qui soulignons) comme la plus grande
puissance du monde » pour la seule raison qu'il nous faut convaincre le monde de ce « simple fait »
(comme le déclarait Walt Rostow)", tel fut le seul objectif poursuivi en permanence, et qui, dès le début
de la présidence de Johnson, a rejeté tous les autres à l'arrière-plan, ainsi que toutes les théories, la
théorie des dominos et celle de la stratégie anticommuniste des premiers stades de la guerre froide, aussi
bien que la stratégie anti-insurrectionnelle tant prônée par l'équipe du président Kennedy. L'objectif
primordial n'était en fin de compte ni la puissance, ni le profit. Ce n'était pas même d'accroître
l'influence des États-Unis dans le monde pour la mettre au service d'intérêts précis et tangibles qui
avaient besoin du prestige, de l'image de «la plus grande puissance mondiale » Hannah Arendt, Le
mensonge en politique p 29

Extrait2 :
Eh ! depuis quand, mon ami, vous effrayez-vous si facilement ? Ce Prévan est donc bien redoutable ?
Mais voyez comme je suis simple et modeste ! Je l'ai rencontré souvent, ce superbe vainqueur ; à peine
l'avais-je regardé ! Il ne fallait pas moins que votre lettre pour m'y faire faire attention. J'ai réparé mon
injustice hier. Il était à l'Opéra, presque vis-à-vis de moi, je m'en suis occupée. Il est joli au moins, mais
très joli ; des traits fins et délicats ! il doit gagner à être vu de près. Et vous dites qu'il veut m'avoir !
Assurément il me fera honneur et plaisir. Sérieusement, j'en ai fantaisie, et je vous confie ici que j'ai fait
les premières démarches. Je ne sais pas si elles réussiront, Voilà le fait…..

Il (Prévan) était à deux pas de moi, à la sortie de l'Opéra et j'ai donné, très haut, rendez-vous à la
marquise de*** pour souper le vendredi chez la maréchale. C'est, je crois, la seule maison où je peux le
rencontrer. Je ne doute pas qu'il m'ait entendue…

Étranger dans ma société, qui ce soir-là était peu nombreuse, il me devait les soins d'usage ; aussi, quand
on alla souper, m'offrit-il la main. J'eus la malice, en l'acceptant, de mettre dans la mienne un léger
frémissement, et d'avoir, pendant ma marche, les yeux baissés et la respiration haute. J'avais l'air de
pressentir ma défaite, et de redouter mon vainqueur. Il le remarqua à merveille ; aussi le traître
changea-t-il sur-le-champ de ton et de maintien. Il était galant, il devint tendre. Ce n'est pas que les
propos ne fussent à peu près les mêmes ; la circonstance y forçait : mais son regard, devenu moins vif,
était plus caressant : l'inflexion de sa voix plus douce ; son sourire n'était plus celui de la finesse, mais du
contentement. Enfin dans ses discours, éteignant peu à peu le feu de la saillie, l'esprit fit place à la
délicatesse. Je vous le demande, qu'eussiez-vous fait de mieux ?

Pour moi, je sonnai mes femmes, je me déshabillai fort vite, et les renvoyai de même. Me voyez-vous,
Vicomte, dans ma toilette légère, marchant d'un pas timide et circonspect, et d'une main mal assurée
ouvrir la porte à mon vainqueur ? Il m'aperçut, l'éclair n'est pas plus prompt. Que vous dirai-je ? je fus
vaincue, tout à fait vaincue, avant d'avoir pu dire un mot pour l'arrêter ou me défendre.…

Il voulut ensuite prendre une situation plus commode et plus convenable aux circonstances. Il maudissait
sa parure, qui, disait-il, l'éloignait de moi, il voulait me combattre à armes égales : mais mon extrême
timidité s'opposa à ce projet, et mes tendres caresses ne lui en laissèrent pas le temps. Il s'occupa d'autre
chose. Ses droits étaient doublés, et ses prétentions revinrent : mais alors : « Ecoutez-moi, lui dis-je ; vous
aurez jusqu'ici un assez agréable récit à faire aux deux comtesses de P***, et à mille autres : mais je suis
curieuse de savoir comment vous raconterez la fin de l'aventure. » En parlant ainsi, je sonnais de toutes
mes forces. Pour le coup j'eus mon tour, et mon action fut plus vive que sa parole. Il n'avait encore que
balbutié, quand j'entendis Victoire accourir, et appeler les gens qu'elle avait gardés chez elle, comme je le
lui avais ordonné. Là, prenant mon ton de reine, et élevant la voix :« Sortez, Monsieur, continuai-je, et ne
reparaissez jamais devant moi. » Là-dessus, la foule de mes gens entra.

Choderlos de Laclos : Lettre LXXIV (74), La Marquise de Merteuil au Vicomte de Valmont

Extrait3

La chambre à coucher de Lorenzo. LORENZO, SCORONCONCOLO, faisant des armes.

SCORONCONCOLO SCORONCONCOLO, s'essuyant le front.


Maître, as-tu assez du jeu ? Tu as inventé un rude jeu, maître, et tu y vas en
LORENZO vrai tigre ; mille millions de tonnerres ! Tu rugis
Non, crie plus fort. Tiens, pare celle-ci ! tiens, comme une caverne pleine de panthères et de
meurs ! tiens, misérable ! lions.
SCORONCONCOLO
À l'assassin ! on me tue ! on me coupe la gorge ! … LORENZO
LORENZO Je te le dis en confidence, – je ferai le coup dans
Meurs ! meurs ! meurs ! Frappe donc du pied. cette chambre ; et c'est
SCORONCONCOLO précisément pour que mes chers voisins ne s'en
À moi, mes archers ! au secours ! on me tue ! étonnent pas que je les
Lorenzo de l'enfer ! accoutume à ce bruit de tous les jours. Écoute
LORENZO bien, et ne te trompe pas. Si je l'abats du premier
Meurs, infâme ! Je te saignerai, pourceau, je te coup, ne t'avise pas de le toucher. Mais je ne suis
saignerai ! Au cœur, au cœur ! il est éventré. – pas plus gros qu'une puce, et c'est un sanglier.
crie donc, frappe donc, tue donc ! Ouvre-lui les S'il se défend, je compte sur toi pour lui tenir les
entrailles ! Coupons-le par morceaux, et mains ; rien de plus, entends-tu ? C'est à moi
mangeons, mangeons ! J'en ai jusqu'au coude. qu'il appartient. Je t'avertirai en temps et lieu.
Fouille dans la gorge, roule-le, roule ! Mordons, SCORONCONCOLO
mordons, et mangeons ! Il tombe épuisé. Amen.

Lorenzaccio, Alfred de Musset : Acte III Scène première

Axe B :

Extraits : 1

« Un des traits marquants de l'action humaine est qu'elle entreprend toujours du nouveau, ce qui ne
signifie pas qu'elle puisse alors partir de rien, créer à partir du néant. On ne peut faire place à une action
nouvelle qu'à partir du déplacement ou de la destruction de ce qui préexistait et de la modification de
l'état de choses existant. Ces transformations ne sont possibles que du fait que nous possédons la faculté
de nous écarter par la pensée de notre environnement et d'imaginer que les choses pourraient être
différentes de ce qu'elles sont en réalité. Autrement dit, la négation délibérée de la réalité - la capacité de
mentir -et la possibilité de modifier les faits - celle d'agir - sont intimement liées; elles procèdent l'une et
l'autre de la même source: l'imagination. Car il ne va pas de soi que nous soyons capables de dire: « le
soleil brille », à l'instant même où il pleut (certaines lésions cérébrales entraînent la perte de cette
faculté); ce fait indique plutôt que, tout en étant parfaitement aptes à appréhender le monde par les sens
et le raisonnement, nous ne sommes pas insérés, rattachés à lui, de la façon dont une partie est
inséparable du tout. Nous sommes libres de changer le monde et d'y introduire de la nouveauté. Sans
cette liberté mentale de reconnaître ou de nier l'existence, de dire «oui» ou «non» - en exprimant notre
approbation ou notre désaccord non seulement en face d'une proposition ou d'une déclaration, mais aux
réalités telles qu'elles nous sont données, sans contestation possible, par nos organes de perception et de
connaissance, il n'y aurait aucune possibilité d'action; et l'action est évidemment la substance même
dont est faite la politique. » : Hannah Arendt, Mensonge en politique pp13-14

« le menteur est acteur par nature, il dit ce qui n’est pas parce qu’il veut que les choses soient différentes
de ce qu’elles sont- c'est-à-dire qu’il veut changer le monde » Vérité et politique, section IV. P 42

Extrait 2 :

Enfin je le sais par cœur, ce beau héros de roman ! il n'a plus de secret pour moi. Je lui ai tant dit que
l'amour honnête était le bien suprême, qu'un sentiment valait mieux que dix intrigues, que j'étais moi-
même, dans ce moment, amoureux et timide ; il m'a trouvé enfin une façon de penser si
conforme à la sienne, que dans l'enchantement où il était de ma candeur, il m'a tout dit, et m'a juré une
amitié sans réserve. Nous n'en sommes guère plus avancés pour notre projet. D'abord, il m'a paru que
son système était qu'une demoiselle mérite beaucoup plus de ménagements qu'une femme, comme ayant
plus à perdre. Il trouve, surtout, que rien ne peut justifier un homme de mettre une fille dans
la nécessité de l'épouser ou de vivre déshonorée, quand la fille est infiniment plus riche que l'homme,
comme dans le cas où il se trouve. La sécurité de la mère, la candeur de la fille, tout l'intimide et l'arrête.
L'embarras ne serait point de combattre ses raisonnements, quelque vrais qu'ils soient. Avec un peu
d'adresse et aidé par la passion, on les aurait bientôt détruits ; d'autant qu'ils prêtent au ridicule, et
qu'on aurait pour soi l'autorité de l'usage. Mais ce qui empêche qu'il n'y ait de prise sur lui, c'est qu'il se
trouve heureux comme il est. En effet, si les premiers amours paraissent, en général, plus honnêtes, et
comme on dit plus purs ; s'ils sont au moins plus lents dans leur marche, ce n'est pas, comme on le pense,
délicatesse ou timidité, c'est que le cœur, étonné par un sentiment inconnu, s'arrête pour ainsi dire à
chaque pas, pour jouir du charme qu'il éprouve, et que ce charme est si puissant sur un cœur neuf, qu'il
l'occupe au point de lui faire oublier tout autre plaisir. Cela est sivrai, qu'un libertin amoureux, si un
libertin peut l'être, devient de ce moment même moins pressé de jouir ; et qu'enfin, entre la conduite de
Danceny avec la petite Volanges, et la mienne avec la prude madame de Tourvel, il n'y a
que la différence du plus au moins. Il aurait fallu, pour échauffer notre jeune homme, plus d'obstacles
qu'il n'en a rencontrés ; surtout qu'il eût eu besoin de plus de mystère, car le mystère mène à l'audace. Je
ne suis pas éloigné de croire que vous nous avez nui en le servant si bien ; votre conduite eût été
excellente avec un homme usagé, qui n'eût eu que des désirs : mais vous auriez pu prévoir que pour un
homme jeune, honnête et amoureux, le plus grand prix des faveurs est d'être la preuve de l'amour ; et
que par conséquent, plus il serait sûr d'être aimé, moins il serait entreprenant. Que faire à présent ? Je
n'en sais rien ; mais je n'espère pas que la petite soit prise avant le mariage, et nous en serons pour nos
frais; j'en suis fâché, mais je n'y vois pas de remède.

Choderlos de Laclos : Lettre 57 Le Vicomte de Valmont à la Marquise de Merteuil

Extrait 3 : LE DUC
Vous voilà, cardinal ! Asseyez-vous donc, et
Chez le duc. LE DUC, à souper, GIOMO. Entre prenez donc un verre.
LE CARDINAL CIBO. LE CARDINAL
LE CARDINAL Prenez garde à Lorenzo, duc. Il a été demander
Altesse, prenez garde à Lorenzo. ce soir à l'évêque de Marzi la permission d'avoir
des chevaux de poste cette nuit. SIRE MAURICE
LE DUC Altesse, défiez-vous de Lorenzo. Il a dit à trois de
Cela ne se peut pas. mes amis, ce soir, qu'il voulait vous tuer cette
LE CARDINAL nuit.
Je le tiens de l'évêque lui-même. LE DUC
LE DUC Et vous aussi, brave Maurice, vous croyez aux
Allons donc ! je vous dis que j'ai de bonnes fables ? Je vous croyais plus homme que cela.
raisons pour savoir que cela ne se peut pas. SIRE MAURICE
LE CARDINAL Votre Altesse sait si je m'effraye sans raison. Ce
Me faire croire est peut-être impossible ; je que je dis, je puis le prouver.
remplis mon devoir en vous avertissant. LE DUC
LE DUC Asseyez-vous donc, et trinquez avec le cardinal. –
Quand cela serait vrai, que voyez-vous Vous ne trouverez pas mauvais que j'aille à mes
d'effrayant à cela ? Il va peut-être à Cafaggiuolo. affaires. (Entre Lorenzo.) Eh bien, mignon, est-il
LE CARDINAL déjà temps ?
Ce qu'il y a d'effrayant, monseigneur, c'est qu'en LORENZO
passant sur la place pour venir ici, je l'ai vu de Il est minuit tout à l'heure.
mes yeux sauter sur des poutres et des pierres LE DUC
comme un fou. Je l'ai appelé, et, je suis forcé d'en Qu'on me donne mon pourpoint de zibeline.
convenir, son regard m'a fait peur. Soyez certain LORENZO
qu'il mûrit dans sa tête quelque projet pour cette Dépêchons-nous ; votre belle est peut-être déjà au
nuit. rendez-vous.
LE DUC LE DUC
Et pourquoi ces projets me seraient-ils dangereux Quels gants faut-il prendre ? ceux de guerre, ou
? ceux d'amour ?
LE CARDINAL LORENZO
Faut-il tout dire, même quand on parle d'un Ceux d'amour, Altesse.
favori ? Apprenez qu'il a dit ce soir à deux LE DUC
personnes de ma connaissance, publiquement, sur Soit, je veux être un vert-galant
leur terrasse, qu'il vous tuerait cette nuit. Ils sortent.
LE DUC SIRE MAURICE
Buvez donc un verre de vin, cardinal. Est-ce que Que dites-vous de cela, cardinal ?
vous ne savez pas que Renzo est ordinairement LE CARDINAL
gris au coucher du soleil ? Que la volonté de Dieu se fait malgré les hommes.
Entre sire Maurice. Ils sortent.

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