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6. Groupe des sept pays les plus 7. www.interieur.gouv.fr Elle est également membre de
industrialisés au monde, auxquels il 8. Consultante spécialisée en l’Electronic Privacy Information
faut ajouter la Russie. Il est composé matière de vie privée et politique Centre (EPIC) de Washington et
de l’Allemagne, le Canada, d’information. Coordinatrice de travaille avec d’autres organismes
les États-Unis, la France, la Grande- la recherche pour le projet internationaux au Canada et dans
Bretagne, l’Italie, le Japon et la Russie. « Anonymity » à l’université d’Ottawa. le monde.
Le profil des cyberescrocs. La majorité de ces escrocs du Net est issue des
milieux défavorisés de la capitale économique ivoirienne. On retrouve parmi eux
des étudiants, des élèves, des chômeurs, et même quelques jeunes travailleurs
qui veulent arrondir leur fin de mois. En général, même s’ils n’appartiennent
pas à de gros réseaux mafieux internationaux comme les Nigérians qui sont
également nombreux à sévir depuis Abidjan, ils sont tout de même très bien
organisés en petits réseaux (trois ou quatre personnes). Selon la police ivoi-
rienne, l’arrestation d’un membre du réseau permet le plus souvent de déman-
teler tout le réseau. D’après l’agence de régulation des télécommunications en
Côte d’Ivoire, la majorité de ces arnaqueurs est âgée de 12 à 25 ans. Ils sont
donc très jeunes pour la plupart et travaillent le plus souvent pour leur propre
compte. Selon l’ATCI, les premiers réseaux de cybercriminels sont arrivés du
Nigeria. Ils fuyaient la répression orchestrée contre cette activité illicite. En
effet, le Nigeria se donne les moyens juridiques de lutter contre ce type de délit
grâce aux dispositions de la section 419 de leur code pénal. C’est ainsi que se type
d’arnaque est appelé depuis quelque temps « scams 419 » ou « fraudes 419 ».
Cependant, très vite on va assister à une contagion des jeunes Ivoiriens,
au point qu’aujourd’hui la jeunesse estudiantine et scolaire s’adonne de plus en
9. Parmi les manifestations les plus 20 novembre 2008 à Yamoussoukro la cybercriminalité en collaboration
marquantes, on peut citer le forum en partenariat avec l’Organisation avec la police nationale, la société
national sur la cybersécurité, internationale de la francophonie civile, les fournisseurs d’accès
organisé les 18 et 19 juin 2008 en (OIF) et l’Union africaine (UA). Internet et le ministère de tutelle.
collaboration avec l’Internet Society 10. L’agence a participé à la mise en 11. En argot ivoirien, « se chercher »
Chapitre Côte d’Ivoire et la place d’une équipe pour proposer signifie « se débrouiller ».
conférence régionale africaine sur une stratégie nationale de
la cybersécurité organisée du 18 au cybersécurité et un texte de loi contre
12. Le 19 septembre 2002 une 13. République de Cote d’Ivoire 16. Ouestafnews (2008).
tentative de coup d’État avortée se (2008). 17. Conseiller technique chargé des
transforme en rébellion. Cette 14. Président de l’Internet NTIC à l’ATCI.
situation aura pour corollaire Society-Côte d’Ivoire (ISOC-CI),
la partition du pays en deux jusqu’à www.isoc.ci
la signature d’un accord de paix à 15. Avis juridique prononcé par un
Ouagadougou (Burkina Faso) mufti, un ouléma ou un faqîh dans la
le 4 mars 2007. religion musulmane.
Conclusion
En définitive, les problèmes de criminalité et d’insécurité s’adaptent à l’évolu-
tion de la société, avec les technologies de l’information et de la communica-
tion. On assiste juste à une modernisation des méthodes et les mêmes maux
Le paradoxe des TIC en Afrique Les protestations des FAI ont été infrastructures et de l’offre de
réside dans le rapport entre unanimes, et celle du Ghana a connectivité peut amener à une
la faiblesse actuelle des connexions réussi à faire baisser le prix de remise en cause des monopoles et
technologiques aux réseaux la connexion après deux ans de à une baisse des prix. Mais ce que
de communications mondiaux lutte contre l’opérateur national. l’on constate sur le marché
et les stratégies récentes de Avec la mise en service du câble des téléphones mobiles ne s’observe
construction d’infrastructures Seacom 2 en Afrique de l’Est, en pas dans le secteur d’Internet
qui conduiront à une surcapacité. juillet 2009, les propriétaires de qui continue d’être uniquement
Au XXI e siècle, le seul câble sous SAT 3 ont baissé les prix de 50 %. soumis aux logiques propres à
marin, SAT 3, qui reliait depuis Outre la concurrence, une autre l’offre. La spirale « vertueuse » qui
2003-2004 douze pays de manière de faire baisser les prix veut que les opérateurs adaptent
la façade Atlantique à l’Europe et est d’avoir un accès plus ouvert leurs services aux utilisateurs et à
à l’Asie, était en effet utilisé très aux infrastructures de base. l’évolution des modalités d’usage
en deçà de ses capacités (20 % à À la suite du SMSI 3 , la société des technologies de l’information
peine). Certes, les prix de SAT 3 civile est devenue un nouvel et de la communication n’a pas
étaient très élevés mais quand on acteur pour promouvoir l’accès et encore cours en Afrique.
considère le coût de tels projets le service universel. Les grandes Annie Chéneau-Loquay
on ne peut que s’interroger sur ONG comme APC 4 ou PANOS 5
leur utilité et sur le gaspillage ont exercé un efficace lobbying 1. Un consortium de trente-six partenaires
de ressources qu’ils induisent. pour réclamer un accès ouvert aux dont certains gros investisseurs comme
Dans les pays desservis, les prix infrastructures, en particulier là où France Telecom (12,08 %), Nitel (8,39 %)
pour la bande passante de SAT 3 il y avait un chaînon manquant, du Nigéria, TCI, un sous traitant de AT&T
allaient de 4 500 à 12 000 dollars le long des côtes de l’Afrique de l’Est. (12,42 %) et VSNL (8,93 %), le principal
par Mbit/s/mois en 2007, soit Depuis 2003, un projet existait, opérateur indien.
2. Seacom est financé par le secteur
cinquante fois plus que les prix l’East African Submarine Cable
privé et détenu aux trois-quarts par
de la bande passante aux États- System (EASSY), qui a fait des Africains. Il devrait aussi fournir
Unis, en raison du monopole des l’objet d’âpres négociations, la bande sur la base d’un accès ouvert
membres du consortium1. en particulier entre l’Afrique et égal pour tous les opérateurs.
Un pays côtier comme le du Sud et le Kenya et avec 3. Sommet mondial sur la société
Sénégal, connecté au câble et le NEPAD, nouveau partenariat de l’information (www.itu.int).
4. APC est l’association pour le progrès
dont l’opérateur (national) est pour l’Afrique. Toutes les parties
des communications. « Fondé en 1990,
partie prenante et en position concernées (gouvernement,
APC est à la fois un réseau international
stratégique, bénéficie d’avantages experts, régulateurs, société et une organisation à but non lucratif
que ses voisins mauritanien et civile, juristes, compagnies de qui croit en un accès libre et ouvert pour
malien n’ont pas. En 2007, télécommunications et bailleurs tous » (www.apc.org).
un fournisseur d’accès à Internet de fonds) se sont mises d’accord 5. L’Institut PANOS Afrique de
(FAI) mauritanien payait presque pour que sa gestion intègre l’Ouest est une organisation non-
gouvernementale qui œuvre, par
trois fois plus pour 1 Mbit/s plusieurs principes équitables 6 .
l’information et la communication,
qu’un FAI sénégalais. De même, EASSY est détenu et géré par « à la construction d’une culture de
la Namibie et le Lesotho utilisent un groupe d’opérateurs la démocratie, de la citoyenneté et de
toujours des liaisons satellitaires, Africains (92 %) et d’opérateurs la paix » (www.panos-ao.org).
alors qu’ils ont accès à la fibre mais internationaux (8 %). La com- 6. Un accès ouvert et non
à des coûts de transit si élevés plexité de cette organisation a discriminatoire, une propriété collective
que la liaison par satellite ne leur entraîné beaucoup de retard. En et équitable de l’infrastructure du
réseau à travers la région, la séparation
revient pas plus cher. 2010, le câble est en cours de
de la propriété de l’infrastructure
Ces distorsions ne sont plus déploiement 7. de celle de son utilisation et
atténuées par une politique En attendant, la surcapacité un fonctionnement sur le principe d’un
d’équipement à l’échelle régionale n’empêche pas des projets recouvrement des coûts mais pas pour
comme ce fut le cas pour concurrents. Le Kenya, acteur faire du profit.
le réseau mixte (téléphonique et principal en Afrique de l’Est, 7. À la date du 14 février 2010, Telma
télévision) panafricain Panaftel a passé contrat avec d’autres (Telecom malagasy) rapporte que l’Île
de Batz, le navire en charge de la pose
déployé sur le continent avant opérateurs, comme sur
de câble est arrivé à Muntzini en Afrique
la vague libérale. Or, la plupart des le projet TEAM, partenariat du Sud. De là, il va entreprendre de
pays africains n’ont pas le choix entre le gouvernement Kenyan rallier les derniers segments du câble,
car ils sont dépendants d’un seul et des sociétés privées. qui arrivera à Tulear en mars selon
fournisseur d’accès international. Certes, l’accroissement des les prévisions de la société.
Dans les pays en développement, télécommunications sont devenir l’ordinateur pour tous
la Banque mondiale est le plus les premiers contributeurs fiscaux. dans un futur proche ? Il serait
grand investisseur multilatéral Actuellement, le marché de l’outil de communication, le portail
dans les TIC. Son action la téléphonie mobile génère 7 % pour Internet, le livre scolaire,
s’accompagne d’un discours des recettes fiscales totales en l’album photo familial, la carte
qui diffuse au niveau mondial Afrique. de paiement et de crédit, la radio
le credo selon lequel les TIC Mais les TIC peuvent-elles et bien d’autres choses si
seraient un formidable vecteur de échapper à cet éternel problème les adaptations nécessaires sont
développement des économies du développement économique réalisées (Selanikio, 2008).
du Sud. Une large littérature et surtout social, qui fait souvent La question du développement
soutient ce discours. Ces études de l’Afrique un tonneau des TIC en Afrique est à considérer
économétriques montrent qu’il des Danaïdes ? Les participants au dans toutes ses dimensions
existe un impact positif de séminaire de Bamako « Internet, interreliées : des stratégies
la croissance de la téléphonie passerelle du développement » des opérateurs internationaux à
fixe et de la pénétration de (2000) avaient bien perçu celles des fournisseurs de service
la téléphonie mobile sur le problème en demandant que et des usagers locaux. Mais dans
les revenus nationaux dans les pays. les infrastructures routières, ce jeu d’acteurs, l’État a un rôle
D’après Guy Zibi d’AfricaNext, les services postaux, bancaires éminent à jouer. Choix techniques,
une société indépendante de et sociaux soient améliorés, car financiers, modes de régulations,
conseil axée sur le secteur des à quoi sert de faire du commerce répartition territoriale sont de
télécommunications, des médias électronique si les produits ne son ressort, même si les petits
et des technologies (TMT) peuvent pas être acheminés ? pays aux marchés étroits ont
en Afrique, les recettes La téléphonie mobile à haut débit moins de marges de manœuvre.
des services de télécommunication est décrite par l’UIT comme Les différences constatées dans
représentent près de 5 % du PIB étant la solution pour pallier le développement du réseau
des États africains, et celles-ci l’absence d’infrastructures en et des usages entre les pays
peuvent aller jusqu’à 7 % dans oubliant la nécessaire synergie africains tiennent plus encore
certains pays. « Un gain de entre les réseaux, et que à la volonté politique des États
dix points en pénétration de le rôle des infrastructures dans qu’aux stratégies des firmes ou
téléphonie mobile entraîne une le développement d’un pays est à l’aide internationale.
hausse additionnelle de à 0,6 % crucial. Renoncer à avoir Annie Chéneau-Loquay,
pour le PIB/habitants », note une infrastructure stable au sol et Nicolas Courtin
Christine Zhen-Wei Qiang. Cela passer par la voie des airs, c’est
s’explique par les importantes oublier que la fibre optique est
économies de coût de transport le meilleur vecteur pour le haut débit 1. Joel Selanikio est un physicien
engendrées, la création d’emplois et aussi qu’une interconnexion cofondateur de DataDyne.org, une
(en 2007, près de 3,5 millions de des réseaux est la caractéristique start-up qui crée des logiciels en open
personnes en Afrique travaillaient des territoires développés. source pour la santé publique et le
de manière indirecte dans Peut-on croire, comme l’a affirmé développement international.
le secteur des télécommunications). Joel Selanikio 1 à la BBC, que
De plus, les opérateurs en le téléphone portable pourrait
Bibliographie
Lee, S., Levendis, J., Gutierrez, L. Sridhar, K.S., Sridhar, V. (2004), Zhen-Wei Qiang, C. (2009), “Mobile
(2009), “Telecommunications and Telecommunications Infrastructure Telephony. A Transformation Tool for
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The invisible Computer Revolution”, Development. Expending Reach and Sector & Development, Proparco’s
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