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Agressions sexuelles et harcèlement : nouveaux


scandales dans l’industrie
Dans les studios, la parole a encore du mal à se libérer

À la n du mois d'août, une nouvelle série de témoignages de


harcèlement et d'agressions sexuelles a jeté une lumière crue
sur le climat sexiste largement répandu dans l'industrie du jeu
vidéo. De plus, des hordes de joueurs particulièrement
virulents ont enseveli les victimes sous les menaces de mort
et les insultes. De toute évidence, les mouvements #MeToo et
#BalanceTonPorc ont échoué à faire bouger les lignes dans ce
secteur où les femmes demeurent ultra minoritaires.

Par Izual | le 1 octobre 2019

T
out commence le 26 août 2019 avec une accusation de viol
contre Jeremy Soule, célèbre compositeur de musique de
jeux vidéo. Dans un long article de blog, Nathalie Lawhead,
une développeuse indépendante de Californie, explique comment en
2008 elle s'était liée d'amitié avec le compositeur phare des Elder
Scrolls, qui l'aurait ensuite violée après avoir menacé de lui faire perdre
son emploi si elle le rejetait. Peu après ce témoignage, Aeralie
Brighton, chanteuse sur la bande-son de Ori and the Blind Forest et
Minecraft, révèle via Facebook qu’en 2014 Jeremy Soule lui aurait
envoyé une vidéo de lui en train de se masturber. Approché par le site
américain Kotaku, le compositeur nie en bloc ces accusations et ferme
son compte sur les réseaux sociaux. « Profondément ébranlée » par le
texte de Lawhead à propos d'une « légende de l'industrie qui a empoisonné
sa carrière », Zoë Quinn, développeuse indépendante qui fut la première
victime du Gamergate en 2014, sort à son tour du silence. Cette nuit-là,
elle publie un texte sur Twitter qui détaille le comportement toxique
qu'aurait eu à son encontre une gure du jeu vidéo indépendant, Alec
Holowka. Face aux récits de séquestration et de harcèlement moral
subis par Quinn – vite corroborés par d'autres personnes du milieu –,
l'équipe de Night in the Woods, le jeu le plus connu de Holowka,
annonce couper les ponts avec lui.
Alec Holowka, gure du jeu vidéo indépendant, s’est suicidé après avoir été accusé de multiples
comportements abusifs. (Crédits photo : Trish Tunney, CC-BY-2.0)

Les victimes ne choisissent pas souvent de porter plainte. (Crédits photo : Benoît Prieur, CC-
BY-SA 4.0)

L'arbre qui gâche la forêt. À son tour, le témoignage de Quinn


encourage d'autres développeuses à dénoncer des abus subis dans
l'industrie. Le 28 août, le co-fondateur d'Oculus, Michael Antonov, est
accusé d'avoir glissé ses mains sous la jupe d'une femme qui portait
un casque de réalité virtuelle alors qu'il lui montrait une démo à la
Game Developers Conference en 2016. Joint par Business Insider une
semaine après ces révélations, Antonov s'excuse et explique ne pas se
souvenir d'avoir eu un comportement inapproprié. Le même jour,
Alexis Kennedy, pilier du développement de Fallen London et Cultist
Simulator, est à son tour accusé de manipuler des femmes et de les
menacer pour qu'elles gardent le silence : la narrative designer du jeu 80
Days, Meg Jayanth, révèle qu'une partie de l'industrie le voit comme
un prédateur. Vingt minutes plus tard, sur son compte Twitter,
Kennedy précise avoir eu « quelques relations pleinement consenties avec
des gens de l'industrie » et nie les accusations contre lui en annonçant
qu'il envisage des poursuites judiciaires contre ce qu'il considère
comme « une campagne de harcèlement ».

La French Touch.
Si l’ensemble des témoignages récents concernent le monde
anglophone, la France n'est pas épargnée par les affaires, comme l'a
montré en 2018 la longue enquête sur les conditions de travail dans
l'industrie du jeu vidéo menée par Canard PC en association avec
Médiapart. Nous avions notamment révélé comment de nombreux
photomontages injurieux et sexistes mettant en scène des employés
avaient pu circuler librement au sein du studio Quantic Dream*. Or,
dans un article du 16 septembre 2019 intitulé « Sexisme, harcèlement,
agression… Pourquoi y a-t-il une telle omerta dans l’industrie du jeu
vidéo en France ? », le site 20 Minutes a publié des témoignages
anonymes qui dressent un portrait glaçant de l'industrie du jeu vidéo
français. On y apprend notamment que pour se protéger, des
travailleuses se passent depuis plusieurs mois une liste où gurent les
noms d'une dizaine de personnes de l'industrie réputées « toxiques
voire très dangereuses ». Pourtant, les révélations publiques sont plutôt
rares dans une industrie française qui compte à peine 6 000 personnes,
le plus souvent dans de très petites entreprises**. Pour le STJV, ce
silence n'est pas dû à un état d’harmonie exceptionnel mais à « la
concentration du pouvoir dans les studios et à l'entre-soi de la
communauté française du jeu vidéo, plus petite et concentrée qu'en
Amérique du Nord », où les agresseurs s'entraident plus facilement,
aidés par des studios qui protègent l'image d'un milieu jeune et sans
con its. « Réagir et reconnaître le sexisme au travail, ce serait briser
cette image de "pays des Bisounours", que les lobbies patronaux
travaillent depuis des années. » Contacté par Canard PC, le SNJV*** a
tenu à rappeler que les victimes pouvaient saisir l’inspection du travail
ou les services de police. Le délégué général du syndicat, Julien
Villedieu, a également précisé pour la première fois que le SNJV était
disposé à recueillir des témoignages en garantissant l’anonymat des
victimes, en accompagnant leurs démarches et « en assurant leur
avenir professionnel dans l’industrie », c’est-à-dire « en facilitant leur
mise en relation avec les entreprises désirées ».

* À la suite de ces révélations, le studio et ses dirigeants ont porté


plainte en diffamation contre Le Monde et Médiapart. Canard PC, qui
n'a pas été visé par ces plaintes, maintient évidemment ses
informations.
** En 2018, le Syndicat national du jeu vidéo dénombrait 911 entreprises
de jeu vidéo françaises, dont 4 dans les DOM-TOM.
*** SNJV: Syndicat national du jeu vidéo, qui défend principalement
les intérêts des entreprises de développement de jeux vidéo.

La mort aux trousses. Les témoignages auraient sans doute continué à


s'enchaîner si le 31 août, cinq jours après les premières accusations
publiques contre lui, Alec Holowka ne s'était pas donné la mort. Sa
sœur Eileen annonce son suicide en précisant que son frère s'était
battu toute sa vie contre la dépression et des troubles de la
personnalité, et qu'il ne faut pas utiliser sa mort « comme un prétexte
pour harceler des gens ». Zoë Quinn, déjà cible de multiples accusations
de mensonges depuis son témoignage contre Holowka, est aussitôt
bombardée de tweets haineux ou appelant à son emprisonnement,
notamment avec le hashtag #ZoeBodyCount (#TuésParZoë). Malgré de
très nombreux messages de soutien, elle décide de fermer l'accès à
son compte Twitter après avoir reçu un barrage de tweets comme «
bravo, je ne pensais pas que tu pouvais devenir encore plus une dégénérée »,
« son sang est sur tes mains » et « n'oublie pas salope, tu as une adresse, on
peut te repérer dans la foule, tu n'es pas dure à trouver »Note : 1. Sur des sites
comme 4chan ou le subreddit KotakuInAction, des ls de discussion
nourris de centaines de réactions indignées informent la nébuleuse
du Gamergate que Zoë Quinn a, pour citer un commentaire plébiscité
sur KotakuInAction, « désormais tué plus de gens que l'immense majorité
des joueurs toxiques et violents ».

Note 1 : Trois authentiques tweets publiés le 1er septembre 2019.


Le développeur de Cultist Simulator serait connu dans le milieu comme une personne à éviter.

Infographie : baromètre du jeu vidéo en France par le SNJV en 2018.

Dommages et Internet. En plus des insultes, les différentes prises de


parole des victimes suscitent une myriade de réactions plus calmes
mais tout aussi hostiles, qui exigent des preuves avant de pouvoir
exprimer de l'empathie. Ces rejets en bloc des témoignages, arc-
boutés sur la présomption d'innocence, rappellent certaines thèses de
la nouvelle extrême-droite américaine, qui voit les réseaux sociaux
comme un système panoptique où chaque mot est inspecté et peut
conduire à une mise au ban de la société si on y décèle la moindre
notion politiquement incorrecte. Que les faux témoignages
d'agressions sexuelles soient rarissimes n'y change rien : dans ces
cercles, Twitter, Facebook et consorts passent pour des outils
dangereux, que les féministes radicales manient a n de briser des
vies. Un fantasme qui occulte les quelques critiques légitimes à
adresser à la call-out culture, cette pratique courante sur les réseaux
sociaux qui consiste à attirer l'attention sur les comportements
inappropriés a n que leur auteur mesure leur gravité ou soit boycotté.
Parmi ces critiques, la plus évidente questionne le fait de livrer un
nom à une foule en colère plutôt qu'à un système judiciaire supposé
impartial.

Mauvais procès. C'est pourtant ce même système judiciaire qui force


les témoignages à avoir lieu sur Twitter plutôt que dans les tribunaux.
En France comme aux États-Unis, les associations et les victimes
pointent du doigt des processus trop longs qui aboutissent rarement à
une condamnation ainsi qu'une police souvent mal formée, qui traite
d'abord les victimes en coupables : lors d'une enquête de l'association
Mémoire Traumatique et Victimologie en 2014, 82 % des sondé(e)s
rapportaient avoir mal vécu leur dépôt de plainteNote : 2. « Lorsque les
personnes accusées sont célèbres, c’est encore pire », nous a indiqué le
Rassemblement Inclusif du Jeu Vidéo (RIJV), une association qui lutte
pour faire progresser l'industrie du jeu vidéo vers plus de diversité et
d'égalitéNote : 3. « Dans ces cas-là, les victimes sont accusées de mentir pour
obtenir de la célébrité et de l’argent. Tout ce qu’elles obtiennent, ce sont des
frais de justice élevés lorsqu’elles ont le courage de porter plainte », à ajouter
aux dif cultés professionnelles et au harcèlement des fans. « Il n’y a
pas assez de moyens donnés à la protection des victimes et surtout la
formation de toutes les personnes pouvant avoir a aire à elles (policiers,
gendarmes, soignants, RH, personnel judiciaire). Ces violences spéci ques
doivent avoir une prise en charge et une réponse spéci ques », que le
système judiciaire est rarement capable d'apporter.

Note 2 : Enquête menée en France auprès de 1 214 victimes de violences sexuelles dont, ici, les

380 répondant(e)s ayant porté plainte suite à leur agression.

Note 3 : Au travers d’ateliers, d’interventions et de game jams organisées par ses bénévoles.
Dans le jeu vidéo, les héroïnes sont rares (ici, celle de Mirror’s Edge).

Night in the Woods

Le journal de déférence. Outre la justice, les victimes pourraient se


tourner vers les médias : dans d'autres secteurs, ce sont eux qui ont
révélé des cas de harcèlement, notamment celui concernant Harvey
Wenstein – affaire à l'origine du mouvement mondial #MeToo. Hélas,
le journalisme d'investigation n'est pas toujours le point fort de la
presse de jeux vidéo car elle a plutôt tendance à réagir à l'actualité,
sans se pencher de sa propre initiative sur des sujets épineux.
Omission qui ne trouve pas sa source dans une absence de conscience
civique, mais dans un manque du temps et des ressources que les
enquêtes sur les agressions sexuelles exigent – on se souvient que
celle du New York Times sur Harvey Wenstein a mobilisé deux
journalistes pendant six mois. Médias sans moyens, procédures
judiciaires douloureuses et laborieuses : dans ces conditions, il n'est
pas étonnant que des victimes décident de se faire entendre grâce
aux réseaux sociaux, ne serait-ce que pour diffuser autour d'elles le
nom d'un agresseur et éviter ainsi à d'autres personnes de vivre la
même expérience traumatique.

Cheat code du travail. Pourtant, analyser l'avalanche récente de


témoignages comme un incident sporadique, qui concernerait des
individus à sortir un par un du monde du travail a n de l'assainir,
serait occulter une partie du problème. Si les dénonciations d'abus
sexistes se multiplient au sein d’une industrie qui emploie en France
86 % d'hommes dans ses studiosNote : 4 et met principalement en scène
des héros masculins, ce n'est pas un simple hasard mais le signe d'un
problème endémique. « Nous estimons qu’une industrie plus équilibrée et
plus proche de la parité aura moins de soucis de sexisme », con rme Audrey
Leprince, présidente du studio The Game Bakers (Furi, Haven) et de
l’association Women in Games FranceNote : 5. Elle indique d’ailleurs que
ces problèmes paraissent moindres dans les studios « où la mixité est
grande et qui œuvrent pour la diversité ». Mais ces entreprises ne sont pas
nombreuses. Le Syndicat des Travailleurs et Travailleuses du Jeu
Vidéo (STJV) nous a con rmé recevoir régulièrement « des plaintes et
témoignages, par mail ou en direct, sur les conditions de travail et la vie en
entreprise de manière générale, et sur le sexisme et le harcèlement sexuel en
particulier. Pourtant, il est extrêmement rare que des a aires soient rendues
publiques ». Et ce n'est pas parce qu'elles connaissent une n heureuse
: d’après le syndicat, les agresseurs occupent fréquemment des postes
de pouvoir qui les protègent des sanctions. Conséquence : les femmes,
déjà largement minoritaires, préfèrent souvent partir. « Les entreprises
ne parviennent pas à les garder, note le RIJV. Beaucoup, épuisées et
dégoûtées, changent de domaine. »

Note 4 : Étude réalisée en 2018 par le SNJV.

Note 5 : Soutenue par le SNJV et des studios majeurs comme Ubisoft.


Les locaux de Quantic Dream en 2017.

Le RIJV organise des ateliers pour apporter plus de diversité et d’inclusivité à l’industrie du jeu
vidéo. Ici, un jeu de la game jam « self care », organisée début septembre. Une façon pour le
RIJV de remettre l’humain au centre de la création des jeux. (Crédits photo : RIJV)

Capitaine crunch. Malgré l’engagement de Women in Games France,


qui depuis 2017 mène diverses actions pour aider les femmes à entrer
dans l’industrie et soutenir celles qui y font carrière, en France le
climat reste pesant (voir encadré). « On en parle dans les médias, mais
cela ne change pas dans les entreprises, martèle le RIJV. Ça donne
l’impression que le féminisme et les objectifs de diversité sont simplement à la
mode sans réelle volonté d’améliorer les choses. » En effet, si l'industrie du
jeu vidéo n'est pas le seul secteur professionnel à souffrir de sexisme,
certaines de ses particularités contribuent à aggraver le problème et à
empêcher la situation de s'améliorer. Les bas salaires, la rareté des
offres d'emploi et le taux de syndicalisation très réduit produisent un
milieu très compétitif, où rester dans le rang sans s'indigner des
pratiques misogynes relève de la survie. Pour le STJV, la dif culté à
éradiquer le sexisme dans l'industrie du jeu vidéo vient en partie de
conditions de travail déplorables, où « la culture du crunch épuise les
travailleur·ses, leur vole du temps et les maintient sous pression permanente »
tandis que le silence est « imposé par un chantage à l'emploi » ef cace,
tant les candidats à l'embauche sont nombreux. « Dans le monde du
travail "normal" des contre-mesures ont été conquises par les luttes sociales
sous la forme de délégués (du personnel) et de syndicats, qui sont censés
représenter un contre-pouvoir à toutes formes d'oppressions », note un
groupe composé majoritairement de femmes travaillant dans
l'industrie depuis plusieurs années et d'un syndicaliste de Solidaires
Informatique, contacté par Canard PC. « Dans les petites structures, (cette
absence) crée des ambiances malsaines où lorsque les con its explosent,
notamment à cause de l'absence de facilitateurs de dialogue compétents, ce
sont les personnes les plus marginalisées qui en sou rent, et donc
généralement des femmes, surtout racisées, des personnes LGBTI+ et
handicapées. »

Radicalisés sur Internet. Dans ce contexte, les réseaux sociaux


forment d'après le RIJV l’un des rares espaces « où les victimes sont
libres non seulement de témoigner, mais aussi de se regrouper », de se
prévenir mutuellement et de se soutenir. Un « palliatif », mais qui n'est
pas dénué de dangers : il peut aussi constituer « un lieu où les
harceleurs prospèrent », comme ce dernier mois l'a encore démontré.
En effet, depuis la montée du Gamergate en 2014, témoigner de
sexisme dans l'industrie du jeu vidéo en public ne signi e plus
seulement mettre en danger sa carrière, mais aussi s'exposer à du
harcèlement de la part d'internautes bien organisés. Virulents et
capables de se mobiliser rapidement, ils tentent de décrédibiliser la
parole des victimes ou de les réduire au silence avec des menaces de
viol, de meurtre ou d'attaques terroristesNote : 6. Les messages hostiles
reçus par Zoë Quinn, Nathalie Lawhead et Meg Jayanth ne sont donc
pas des incidents isolés mais les signes d'un problème global. À
Canard PC, nous avons cherché à comprendre comment une partie de
la communauté des jeux vidéo avait pu se radicaliser au point de
devenir l'un des principaux obstacles aux lanceuses d'alerte. Le mois
prochain, le second volet de notre enquête sera consacré à cette
question épineuse.

Note 6 : Anita Sarkeesian, qui questionne la représentation des femmes dans les jeux vidéo, fut

ciblée plusieurs fois par des alertes à la bombe ou des menaces de fusillades de masse lors

d'événements où elle devait prendre la parole.


Le 26 août, le compositeur de The Elder Scrolls V : Skyrim a été accusé de viol.

Zoë Quinn a été la cible de nombreux messages haineux après son témoignage en tant que
victime d’agressions sexuelles. (Crédits photo : Ian Linkletter, CC-BY-SA-4.0)
Par Izual
le 1 octobre 2019
publié dans le n°399 - octobre 2019

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