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Le jour où Marc Schoelcher décida d’envoyer son deuxième fils aux
Amériques pour y faire du commerce de porcelaines, il ne se doutait pas
qu’il allait faire naître une vocation.
1. Le voyage
Janvier 1828.
Le bateau navigue depuis plusieurs jours sur la mer grise et agitée. Victor le
pressent : ce voyage ne sera pas celui que son père a imaginé. Après trente-
cinq jours de traversée – enfin, le cauchemar se termine ! –, la terre
d’Amérique apparaît. C’est le Mexique.
Les passagers débarquent dans le port de Veracruz. Victor n’a qu’une hâte :
expédier aux adresses indiquées les porcelaines dont il a la charge, et
explorer le pays. Il commence par se rendre à Mexico où il observe, écoute,
prend des notes. “Une des plus belles cités qu’on puisse voir”, écrit-il dans
une lettre. Mais, très vite, il y trouve la vie monotone. Alors, il reprend la
route et il visite quelques pueblos, une manufacture de tabac, des mines
d’or…
Puis, voyageur boulimique, impatient de découvrir d’autres contrées, il part
pour l’île espagnole de Cuba.
C’est là que tout va commencer pour ce jeune homme, habitué à la vie
douillette d’un bourgeois aisé. Il découvre le malheur, un univers qu’il ne
connaissait pas, celui où les hommes ne se contentent pas d’exploiter
d’autres hommes, comme en Europe, mais où ils exercent sur eux un
véritable droit de propriété.
Deux jours après son arrivée à La Havane, il assiste à une scène qui va le
marquer à jamais. Chapeau de paille sur la tête, Victor s’apprête à visiter la
ville comme il l’a fait à Mexico. Au détour d’une ruelle, il tombe sur une
grande place grouillante de monde, bruyante, écrasée de soleil. Il est
intrigué par une forte agitation. Il s’approche, se frayant un passage dans la
foule. Plusieurs estrades sont dressées les unes à côté des autres. Sur l’une
d’elles, il la voit, debout. Quinze ou seize ans peut-être. Salement vêtue
mais très belle avec de très grands yeux noirs. Fière, droite, le regard fixe et
dur. À ses côtés, un petit homme – un Blanc – crie en grimaçant :
“Allons, messieurs ! Deux cents piastres la jolie négresse, bonne
blanchisseuse ! Deux cents piastres. Voyez, elle est jeune encore, bien saine,
très douce. Deux cents piastres ! C’est pour rien. Remarquez, messieurs,
comme elle est forte et bien portante !”
La fille ne bouge pas, indifférente à ce qui se passe autour d’elle. Des
hommes de bonne tenue, richement vêtus, s’approchent, montent sur
l’estrade, tâtent ses bras, ses jambes, regardent ses seins, la tournent et la
retournent, lui ouvrent la bouche pour examiner ses dents… L’un d’eux
lance au vendeur : “Cent piastres.” Les deux hommes discutent. Le ton
monte, un chiffre claque : “Cent quatre-vingts !” Puis un autre : “Cent
vingt. – Cent soixante.” Le petit homme cède. La fille part pour cent
cinquante piastres. L’acheteur fait venir un grand Noir qui passe une chaîne
au bras de la jeune fille. L’esclave emmène l’esclave. La fille appartient
désormais à l’homme blanc.
Victor est comme paralysé au milieu de la place brûlante. Il est seul, il se
sent inutile, il se sait impuissant. Ridicule même. “Cette fille, humiliée,
traitée comme un vulgaire objet, comme sur un marché aux chevaux,
vendue comme un bœuf. Comment est-ce possible ?”, pense-t-il. Tête
baissée, gorge nouée, il s’éloigne pour cacher son dégoût et sa honte…
Ce soir-là, dans sa chambre d’hôtel, il écrit sur ses carnets tout ce qu’il a vu,
dans le détail, essayant de ne rien oublier, et en y ajoutant ses
commentaires. La nuit, le sommeil ne vient pas. Alors, à la lueur de la
bougie posée sur sa petite table de travail, il fait le serment, lui, Victor
Schoelcher, fils de Marc et de Victoire, que toute sa vie, il dénoncera
l’esclavage et agira pour qu’il disparaisse. À jamais…
Victor veut comprendre et décide d’en savoir plus. Mais pour cela, il doit
ravaler sa colère et prendre le temps d’écouter ceux qui achètent les
esclaves. Les jours suivants, il se rend dans la bonne société de La Havane
où il rencontre des hommes riches et puissants qui ont bâti leur fortune sur
le commerce humain. Avec le calme et la courtoisie dont il ne veut jamais
se défaire, Victor écoute mais ne peut s’empêcher de leur faire part de ses
réflexions. Et ces hommes, une fois passée la surprise d’entendre un jeune
Blanc de bonne famille parler ainsi, lui répondent, comme une évidence,
que “tel est le destin des nègres” et qu’ils “ne méritent pas d’autre vie tant
ils sont paresseux, lâches, violents, voleurs…”.
Ce que Victor va découvrir quelques jours plus tard dans les campagnes de
Cuba est pire encore. Il va plonger au plus profond de l’horreur.
Le fouet, tout d’abord. Le fouet qu’on utilise à la moindre résistance ou
pour un travail jugé mal fait. Victor entend parler des propriétaires qui font
punir les esclaves dont ils sont mécontents. Conduits dans des geôles
obscures et humides, ils reçoivent chaque matin plusieurs coups de fouet à
gros nœuds, avec une minutieuse régularité. Certains en meurent. Et ceux
qui ne meurent pas gardent dans leur chair à vif d’horribles taillades.
Il y a le fouet, mais aussi la nourriture, insuffisante et dégoûtante, et le
travail qui n’en finit jamais, et les taudis dans lesquels on entasse les
femmes, les enfants, les hommes, avec pour seul lit trois planches et une
couverture sale sur des tréteaux, et les chaînes qui ôtent toute dignité à
l’être humain…
Impossible de garder tout cela pour soi. “Je dois dire à tout le monde ce que
j’ai vu”, note-t-il dans son carnet. Alors il écrit un article qu’il intitule “Des
Noirs”, dans lequel il fait des propositions : il parle d’émancipation
progressive des esclaves (“pas avant quinze ou vingt ans, le temps que les
Noirs acquièrent une instruction suffisante”), de suppression de la traite, et
il proclame une “alliance de tous les peuples qui déclareront la traite abolie
pour toujours”. Il envoie son texte au rédacteur en chef de La Revue de
Paris – un ami – qui le publiera plus tard, en novembre 1830.
Victor est parti depuis maintenant dix-huit mois. C’est long. Il lui faut
rentrer, retrouver l’Europe, sa famille, les porcelaines Schoelcher, affronter
de nouveau l’océan…
Intermède
Victor se met au travail, tous les jours pendant des semaines et des
semaines, avec la frénésie et l’obsession de ceux qui veulent mener à bien
un projet. Sa pensée se construit au fur et à mesure qu’il écrit, au fil des
mots, des pages, des chapitres. Il revient sur les idées des anti-
abolitionnistes anglais, il réaffirme sa préférence pour une abolition
progressive de l’esclavage, seule condition, selon lui, pour éviter une
flambée de violence… Victor consacre aussi de nombreuses lignes à
expliquer qui sont les Noirs. Non, ils ne sont pas mauvais par nature : s’ils
se montrent parfois violents, c’est à cause du traitement infligé par leurs
maîtres. Non, ils ne sont pas paresseux : à la moindre pause non autorisée,
c’est le fouet. Non, ils ne sont pas féroces : s’ils l’étaient, cela ferait bien
longtemps qu’ils se seraient révoltés et qu’ils n’auraient fait qu’une
bouchée de leurs bourreaux… Il le répète, avec force et conviction : les
Noirs sont des hommes et, en tant qu’hommes, ils sont et doivent être nos
égaux !
Mais Victor est un homme réaliste. Il sait que ces belles idées ne suffiront
pas à convaincre les colons esclavagistes. Ces gens-là n’ont que faire des
grandes envolées humanistes. Du coup, Victor avance d’autres arguments,
économiques ceux-là. C’est sur ce terrain qu’il compte bien clouer le bec à
ses adversaires. Réfléchissez bien, leur suggère-t-il : l’esclavage est
contraire à tous vos intérêts. Celui qui a des esclaves n’achète pas de
machines pourtant beaucoup plus productives, il limite donc sa capacité de
production et gagne moins d’argent. L’esclavage est un frein au progrès.
Qui sait ? L’argument peut faire mouche !
– Quel intérêt avez-vous à vous occuper de ces Noirs ? lui demande un soir
son ami Eugène Sue.
– Aucun, cher ami. Aucun intérêt et je m’étonne que vous me posiez cette
question, répond Victor. Si je me bats, c’est que j’ai encore dans les yeux ce
que j’ai vu aux Caraïbes. Ça m’obsède. L’esclavage est la plus grave
atteinte que je connaisse à la dignité de l’homme…
Et Victor se lance dans un long plaidoyer. Eugène ne parvient plus à
l’interrompre.
– La société peut guérir ses plaies ; il faut que chacun se charge d’un mal
pour le combattre pied à pied. J’ai pour ambition de provoquer
l’émancipation de nos frères, les hommes noirs, et je veux travailler à
défendre les intérêts du pauvre, du prolétaire, des classes laborieuses, des
opprimés. Victor reprend à peine son souffle et continue.
– Chaque homme, pour se gouverner dans la vie, se crée une loi, une
doctrine. Il se dote d’une sorte de boussole morale qu’il regarde à mesure
qu’il avance. Ma boussole est dans l’un des deux mots : liberté, justice.
Vous comprendrez, Eugène, que je ne puisse pas rester sans rien faire.
N’êtes-vous pas d’accord ?
Eugène ne dit rien. En fait, il a la tête ailleurs. Il vient de publier sa
Salamandre et il a le nez dans ce qui va être l’œuvre de sa vie. Il a déjà le
titre : Les Mystères de Paris. Alors, les Caraïbes, l’esclavage, la boussole…
Tout cela lui paraît bien loin. Après quelques longues minutes de réflexion,
il le regarde et lui dit :
– Vous me paraissez bien seul, Victor, à défendre ces nègres !
– Détrompez-vous, Eugène. L’idée fait son chemin, et pas seulement dans
ce salon. On parle d’abolition à l’Assemblée, dans les journaux… Eugène
Sue l’interrompt.
– Peut-être, mais rien ne bouge vraiment. Il y a toujours des esclaves,
toujours le fouet, toujours la traite.
Pas besoin de le lui dire. Victor le sait : l’abolition est encore loin. Mais ce
n’est pas cela qui va le décourager et, ce même soir, en rentrant chez lui, à
quelques pas d’ici, il prend une décision : publier un deuxième livre, qu’il
veut plus important, plus abouti, plus audacieux encore que le premier.
Enfoncer le clou.
Intermède
Victor Schoelcher s’est confié une mission. Seul ou avec des disciples
(qu’importe !), il va mener à bien cette “grande fortune” pour laquelle il ne
faut que du cœur et du dévouement : l’abolition de l’esclavage. Coûte que
coûte.
3. Le deuxième voyage
Ami de Périnelle, Victor n’a aucun mal à se faire inviter dans les dîners
chic. Un soir, un colon lui lance, une coupe de champagne à la main :
– Nos esclaves ne sont pas si malheureux, vous savez. Les choses se sont
beaucoup améliorées ces dernières années.
– Je vous crois, répond Victor, un bref moment ébranlé par l’argument.
Mais, très vite, il ajoute, impavide et toujours courtois :
– Le principe de l’esclavage, lui, demeure ! Là est tout le crime.
– Et alors ! rétorque le colon avant de tourner les talons. Les Noirs ne sont
même pas conscients de leur état.
C’est à ce moment qu’un autre propriétaire, plus agressif celui-là,
l’apostrophe, le regard brouillé par la haine et par l’alcool dont il a
largement abusé :
– Tous les abolitionnistes – et vous en faites partie, monsieur – sont des
imbéciles ignares ou, pire encore, des fourbes vendus aux betteraviers trop
heureux de trouver des naïfs qu’ils peuvent manipuler pour mettre la main
sur le marché du sucre…
N’ayant plus rien à faire dans ces maisons, Victor rentre chez Périnelle. Une
fois dans sa chambre, il note ce qu’il a entendu sur le cahier à couverture
noire qui ne le quitte jamais. Il y raconte aussi ce qu’il a vu dans les rues de
Saint-Pierre, et ce que les colons ont bien voulu lui montrer de leurs
exploitations. “Les esclaves sont employés par brigades de quinze ou vingt
sous la surveillance de contremaîtres qui les contiennent avec un énorme
fouet toujours agité (…). Voilà la vie d’esclave, froide, machinale,
abrutissante, vile, monotone, sans passé pour réfléchir, sans avenir pour
rêver, n’ayant que le présent toujours armé d’un fouet ignominieux.”
Le fouet. L’image lui revient, la nuit, dans ses cauchemars, comme lors de
son premier voyage à Cuba. Le claquement sec, et les blessures de sang
gravées à jamais dans le dos des femmes. Jusqu’à vingt-neuf coups ici, en
Martinique. Beaucoup plus, sans aucune limite, lui a-t-on dit, en Guyane.
Jusqu’à la mort.
Victor n’en peut plus de cette société d’injustice, de ces colons qui se
complaisent dans leurs certitudes et dans leurs privilèges. Il ne comprend
pas pourquoi les esclaves ne réagissent pas, alors qu’il sent en eux les
germes de la révolte. “Privés de nourriture, épuisés, déchirés sous le fouet le
plus cruel, leur calme, leur œil sec, leur figure impassible, l’expression de
leurs traits infernalement satiriques au milieu des plus atroces douleurs vous
prouvent qu’ils sont plus forts que la barbarie même”, écrit-il.
Intermède
Été 1841. La France est en pleine mutation. Quelque chose est en train de
changer. La classe ouvrière bouge et s’exprime. On découvre à quel point
elle vit dans la misère.
Les années passent. Victor écrit de nouveaux ouvrages et il voyage encore,
en Égypte notamment et, en 1848, au Sénégal.
4. L’abolition
Victor est rentré depuis quelques semaines. Son périple africain n’a pas été
d’une grande utilité. Épié par les gens du gouverneur du Sénégal, suivi pas
à pas dans chacune des villes et chacun des villages qu’il a visités, il n’a vu
que très peu de choses. “Ce voyage était-il bien nécessaire ? se demande
Victor. N’aurais-je pas dû rester en France, être là pour vivre les
bouleversements qui se sont accomplis durant mon absence ?”
Bouleversements. Le mot est bien faible pour évoquer la chute de Louis-
Philippe. La chute du roi.
Le 25 février 1848 au matin, la France a en effet tourné la page de la
monarchie : elle est entrée dans la Deuxième République. La république, cet
idéal auquel Victor aspire depuis si longtemps, est enfin là.
Victor arrive chez lui, rue de Rochechouart, de retour d’une de ces longues
promenades qu’il aime faire sur les boulevards parisiens. Les badauds du
quartier ont pris l’habitude de croiser ce bourgeois solitaire. L’homme est
grand, long, maigre, chauve, le visage en lame de couteau, le nez fin et
recourbé, les lèvres minces, une barbe en collier sous un menton pointu. Ses
éternels vêtements noirs le font ressembler à un pasteur anglais. Dans les
salons où l’on aime parler des autres et de leur apparence, on le dit froid et
dur. Et l’on s’étonne que ce quadragénaire soit encore célibataire…
C’est une apparence qui cache une bonhomie, de la finesse, un humour
mordant. Victor en est conscient. Personne ne le connaît vraiment. Il ne dit
rien de sa vie privée. Et il n’a aucunement l’intention de se dévoiler. Ce qui
compte, c’est son combat. Rien d’autre.
Une lettre l’attend sur le guéridon de l’entrée. Il repère tout de suite l’en-
tête : “Ministère de la Marine et des Colonies”. Pas de doute, il se passe
quelque chose. Calmement, il se dirige vers son bureau, s’assoit, saisit son
coupe-papier et ouvre délicatement l’enveloppe avec le respect qu’on doit à
un courrier officiel qui, de surcroît, vient d’un ministère de la toute jeune
république. Quelques mots seulement sont griffonnés à la main sur le papier
blanc. Victor lit. “Venez. J’ai besoin de vous.” Signé : François Arago.
Victor connaît Arago. Il l’a déjà croisé dans les salons littéraires qu’il
fréquentait avant ses voyages. Il connaît les convictions républicaines,
sincères et solides de cet astronome, député de gauche des Pyrénées-
Orientales.
De quoi d’autre que de l’abolition pourrait lui parler Arago ? Son heure
serait-elle enfin venue ?
Sans plus attendre, il fait porter un mot au ministre, lui indiquant qu’il se
tient à sa disposition. Par retour, Arago lui donne rendez-vous pour le soir
même.
Arago poursuit. Et Victor note fidèlement : “Il décrète : une commission est
instituée auprès du ministre provisoire de la Marine et des Colonies pour
préparer dans le plus bref délai l’acte d’émancipation immédiat dans toutes
les colonies de la République.”
Chaque jour donc, le petit groupe s’emploie à bâtir le décret d’abolition qui
sera présenté à la signature du gouvernement provisoire le 27 avril. Le texte
est clair et convaincant.
Il veut poser des valeurs fortes et dignes de la jeune république. C’est
Victor lui-même qui les énumère aux ministres.
“L’esclavage est un attentat contre la dignité humaine.”
“L’esclavage est une violation flagrante du dogme républicain : Liberté,
Égalité, Fraternité.”
“L’esclavage sera entièrement aboli dans toutes les colonies et possessions
françaises.”
Comment un gouvernement républicain pourrait-il refuser de signer un tel
document ? Victor est allé le plus loin qu’il lui était possible ; le pas
accompli est considérable : le droit à la liberté est reconnu aux esclaves.
Sans aucune restriction. Mieux : les Noirs deviennent des citoyens à part
entière.
“Tous, nous signons cet acte d’émancipation avec une émotion semblable à
celle qui nous avait saisis quand nous abolîmes la peine de mort en matière
politique”, déclare ce jour-là Louis Blanc à un Victor ému aux larmes.
Reste maintenant à s’assurer que le décret va bien devenir réalité. Victor
sait qu’au-delà de voter des lois, il faut les faire appliquer. En fait, il n’a
aucune confiance dans le personnel administratif installé depuis trop
longtemps dans les colonies et qui a tissé des liens avec les grands
propriétaires. Il décide donc de faire nommer certains des membres de la
commission aux fonctions de gouverneurs des Antilles. À eux de faire
appliquer la loi ! Les colons ne tardent pas à répliquer. Ils le font avec
violence et avec haine. Schoelcher est désormais l’ennemi, l’homme à
abattre. Victor n’en a cure. Il ne faiblit pas, d’autant que tout le
gouvernement le soutient et que François Arago lui rend régulièrement
hommage.
Là-bas, en Martinique, en Guadeloupe, et même plus loin en Guyane, son
nom devient, dès l’été 1848, l’objet d’un culte et d’une vénération que les
femmes et les hommes noirs doivent à leur libérateur.
Victor suit de près ce qui se passe dans les colonies : l’installation lente,
parfois difficile, d’une société sans esclaves. Chaque matin, ses
collaborateurs voient arriver cet homme de quarante-quatre ans, sobrement
mais élégamment vêtu, souriant mais toujours distant. Victor est resté
modeste. Il n’a aucun goût pour le pouvoir et s’il est là, au gouvernement,
c’est pour accomplir son œuvre. Rien d’autre. Il confie un jour à un
journaliste : “Je ne suis pas un grand esprit. Je serais heureux si ma vie
servait à prouver qu’un homme peut être quelqu’un sans posséder une
intelligence au-dessus de la moyenne, par la simple intégrité de sa manière
d’être, par la dignité de sa vie qui force le respect de ses concitoyens.”
Victor veut également consacrer une partie de son temps à la toute nouvelle
république. Il le dit et le répète à ses collègues ministres et à ses
collaborateurs : sa doctrine, c’est l’égalité entre les hommes qu’aucune
distinction physique, sociale ou de classe ne doit séparer. Seule la
république peut apporter aux hommes la solution à leurs problèmes car elle
détient le pouvoir d’accomplir les progrès. Il veut inscrire dans la réalité
politique les valeurs qu’il a toujours défendues : la démocratie et
l’humanisme. “Je veux lutter contre la misère pour que chacun ait une vie
digne, dit-il souvent. Je suis un humaniste qui rêve d’un socialisme du
cœur.”
Mais, en réalité, Victor enrage. Il enrage car il aimerait que tous les
républicains aient la même conception du monde et de la politique que lui.
Il est ulcéré que personne ne semble vouloir combattre les injustices encore
nombreuses. Celles infligées aux ouvriers, notamment.
Alors, ce qui devait arriver arrive. Les socialistes sont battus aux élections :
cent sièges de députés seulement contre trois cents pour les modérés. Victor,
qui s’est présenté à Paris, n’échappe pas à la débâcle. Il est battu. Éjecté du
pouvoir, plus de poste ministériel, pas de siège de député. C’est en simple
spectateur qu’il voit les espoirs de la révolution s’envoler.
Une chose est sûre : il a bien fait d’accélérer l’abolition de l’esclavage qui
n’aurait pas pu avoir lieu avec le nouveau gouvernement. Il a compris
qu’une des règles de toute révolution, c’est d’agir vite, dans les tout
premiers jours…
La défaite est cruelle, donc. De “bonnes âmes” sont là pour le lui rappeler.
Un journaliste, proche des thèses anti-abolitionnistes, a ces mots assassins,
destinés à l’anéantir : “Un abolitionniste sans emploi demande une place de
nègre !” Mais il en faut beaucoup plus pour terrasser Victor Schoelcher.
Intermède
Le mois de janvier est particulièrement froid à Londres. Cela fait près d’une
semaine qu’un épais brouillard s’est installé sur la capitale anglaise. Le
temps n’est pas propice à la promenade sur les bords de la Tamise. Mieux
vaut deviser en prenant le thé, bien au chaud, devant un feu de cheminée.
C’est ce que Victor a choisi de faire, ce jeudi de janvier 1852, à Cedar
House, la jolie maison où il vient d’emménager. Cedar House, “la maison
du cèdre”, en plein quartier de Chelsea, un joli coin de campagne.
Comme presque tous les jours, Victor reçoit. Ses invités apprécient son
hospitalité et la gentillesse d’Elisabeth Walker que Victor a engagée comme
gouvernante. Sa demeure est devenue le rendez-vous incontournable de
tous les réfugiés de Londres : Français, Italiens, Allemands… même si le
plus célèbre d’entre eux, Karl Marx, ne fera jamais partie des proches de
Victor.
Tous aiment cette demeure qui leur rappelle la France. Durant quelques
heures, ils y oublient l’exil. Pour beaucoup, la vie en Angleterre est
difficile. Trop de dépaysement, ce climat humide et triste, cette langue
compliquée, ces coutumes bizarres, et cette nourriture infecte ! Dieu, que la
France paraît loin ! Victor, lui, ne se sent pas étranger dans la capitale
anglaise qu’il connaît bien. Il parle parfaitement anglais et la vie
londonienne ne lui déplaît pas, loin de là. Des Anglais, il a le même aspect
froid, distant, une certaine raideur, de la réserve.
À aucun moment il ne regrette d’avoir choisi cette terre d’asile quand il a
fallu fuir Paris, après le coup d’État de Louis Napoléon. À Londres, il a
trouvé le temps et les appuis pour écrire un nouvel ouvrage-réquisitoire
contre le tyran, Histoire des crimes du Deux Décembre.
“Le 2 décembre est un accident malheureux, funeste, mais ce n’est qu’un
accident. La révolution n’est pas finie. Elle accomplira son œuvre : la
fondation d’une république démocratique, le meilleur des gouvernements”,
y écrit-il.
Victor n’a pas digéré le coup d’État du 2 décembre 1851, ce jour noir pour
la République, humiliée, salie, trahie, le pouvoir confisqué par le prince-
président…
Il a bien tenté de résister, avec Victor Hugo ; il a réclamé le départ de
Napoléon ; il a dressé des barricades dans les faubourgs. Rien n’y a fait. Il a
fallu fuir. Pour ne pas mourir.
De temps à autre, Victor reçoit des nouvelles de Paris. Là-bas, le sort des
exilés ne trouble pas la quiétude de Napoléon III. Solidement installé sur
son trône, il parade, fier de la place prépondérante que la France a reprise
sur la scène européenne, regonflé par l’essor économique que connaît le
pays. Victor en arrive parfois à se demander si l’Empire n’est pas installé
pour de longues années et à se dire que ses compagnons et lui ne sont pas
près de rentrer en France.
1855. Victor a quitté la France depuis déjà quatre longues années. Il décide
de déménager, de quitter Chelsea pour le village de Twickenham où il a
déniché une demeure plus grande qui pourra accueillir tous ceux qui
cherchent un toit.
Il déborde d’activités : il voyage dans toute l’Angleterre, il écrit, il va au
concert. C’est au cours de l’un d’eux qu’il entend pour la première fois la
musique d’un compositeur qui va bouleverser son univers : Georg Friedrich
Haendel, à qui il va consacrer un ouvrage considérable, le premier écrit par
un Français.
Bien sûr, il ne perd rien de ce qui se passe aux Antilles. Mais les nouvelles
qui lui arrivent le désolent. Il assiste, impuissant, à la réaction coloniale
encouragée par le nouveau pouvoir. Le 2 février 1852, par exemple, a été
supprimée la représentation parlementaire des îles. C’est la revanche des
colons blancs. Pire : des lois conduisent au travail obligatoire. Victor est
dans l’incapacité de se dresser contre la tentative de destruction de l’œuvre
de sa vie.
Intermède
21 juillet 1893.
Oui, la maison est agréable, avec ses six pièces qu’il a meublées et décorées
avec simplicité, avec le jardin fleuri et ombragé. Les dix mille livres rares
qu’il avait accumulés, il en a fait don à la Martinique pour qu’elle puisse
“constituer une bibliothèque ouverte sur le monde” ; ses partitions de
musique ont été également offertes ; et ses sculptures ont pris la direction de
la Guadeloupe.
Demain, donc, il recevra ses amis républicains, le conseiller d’État
Herbette, le sénateur Gagneur, et Emmanuel, le fils de François Arago,
disparu trop tôt, des amis noirs, aussi, qui ne ratent jamais l’occasion de
venir rendre hommage à ce bon “Monsieur Ché-Ché” comme on dit
familièrement aux Antilles. Ils seront tous là ; enfin presque, car certains,
ceux que Victor trouve grossiers et vulgaires comme ce Zola, ne sont pas
les bienvenus…
Une quarantaine d’invités, toute une journée. Les va-et-vient entre le salon
et le jardin. Le bruit, les bavardages des uns et des autres, les éclats de voix.
Trop de nourriture, trop de vin. Épuisant pour un homme de quatre-vingt-
neuf ans. À dix-huit heures, les convives partent. Les plus proches,
Herbette, Gagneur, trouvent Victor fatigué et, en prenant congé, ils ne
peuvent s’empêcher de penser qu’ils ne le reverront peut-être plus…
Il est dix-neuf heures. Une simple soupe suffira. Et un peu de thé. Rien de
comparable en tout cas avec la table qu’il a proposée à ses invités, avec des
plats succulents, des crus fameux, des alcools d’un autre âge.
Ce soir, Victor n’ira pas faire son tour de jardin. Il est las. Elisabeth lui
apporte une tisane. Victor est assis dans un fauteuil, près de la grande
fenêtre qui donne sur le rosier, un livre à la main. En voyant entrer la
gouvernante, il le pose et ôte ses lunettes.
– Approchez donc, ma bonne Lisbeth ! Et asseyez-vous.
Un silence. Victor regarde la vieille femme avec tendresse.
– Je vais vous dire : je crois que j’ai fait tout ce que j’avais à faire. C’est
terminé maintenant. Je peux partir…
– Que dites-vous là, monsieur ?! Nous avons encore besoin de vous. La
France a encore besoin de vous !
– Besoin de moi ? Quel prétentieux je serais si je le pensais. Mon œuvre est
achevée, maintenant. Je suis un vieil homme, depuis déjà longtemps. Un
homme du passé. Je savais bien, lors des séances au Sénat, combien
j’ennuyais mes collègues. Je les voyais du haut de la tribune lire leur
courrier ou le journal, bâiller, somnoler, chuchoter, alors que moi, je
m’évertuais à lire mon texte comme si de rien n’était…
– Mais, monsieur, il y a eu l’abolition. Ce n’est pas rien !
– Certes. C’est fait, c’est mon œuvre. Mais le reste ? Je n’ai pas réussi avec
la peine de mort. Et les injustices : elles sont toujours là, bien présentes,
indestructibles. Et cette pauvre République ? Où en est-elle aujourd’hui ?
La gouvernante est attristée par le discours de l’homme vieillissant. Mais
elle ne peut s’empêcher de penser que tout ce que dit Victor est la vérité.
– Vous le voyez bien, Lisbeth, je suis de plus en plus souvent exténué. Mes
jambes ne me portent plus comme avant. Chaque jour qui passe, le tour du
jardin me paraît plus difficile…
– Vous exagérez, monsieur…
– Vous avez raison : je n’ai aucun droit de me plaindre. Je suis au
crépuscule de ma vie. Mon corps est fatigué, et c’est normal. Mais j’ai eu
une vie pleine. J’ai toujours fait ce que j’ai voulu faire. Je suis fier de ce que
j’ai accompli. Je suis heureux. Vraiment, je peux partir maintenant…
C’est la fin, toute proche. Victor s’éteint sans souffrance dans la nuit
du 25 au 26 décembre 1893. Le jour de Noël.
Intermède
Pendant des siècles et des siècles, l’esclavage a été considéré comme quelque chose de
tout à fait normal. Personne ne songeait à le contester. Ce fut le cas dans l’Antiquité, ce fut
le cas depuis les années 650 jusqu’au début du XXe siècle où environ 17 millions
d’Africains ont été capturés et vendus par des négriers musulmans. Ce fut enfin le cas avec
la traite des Noirs, entre l’Afrique et l’Amérique : 15 millions d’Africains arrachés à leur pays
et à leur famille pour aller cultiver le coton et le tabac aux Antilles et aux États-Unis.
Ce n’est qu’à partir du milieu du XVIIIe siècle que l’on a pu percevoir un changement dans
les mentalités. À cette époque, en France, les philosophes des Lumières dénoncent
l’esclavage avec plus ou moins de conviction et de virulence. Diderot le décrit comme “un
crime bafouant la dignité humaine”. Montesquieu est moins radical : il juge l’esclavage
Voltaire aborde la dure existence des esclaves dans Candide (1759). Les philosophes des
Lumières inspirent les révolutionnaires de 1789... mais pas sur le thème de l’esclavage.
Pas une ligne ne l’évoque dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Le 4 février 1794, sur décret rédigé par l’abbé Grégoire, la Convention au pouvoir décide
Mais le 20 mai 1802, sous pression du lobby sucrier, le consul à vie, Napoléon Bonaparte,
rétablit l’esclavage, la traite et le Code noir. Ce retour en arrière provoque des mouvements
de révolte, notamment à Saint-Domingue sous l’impulsion de Toussaint Louverture qui veut
L’armée française intervient. Louverture est arrêté. Il meurt en 1803 au fort de Joux, en
Franche-Comté. Mais la révolte se poursuit et vient à bout des Français. L’île est finalement
Le combat sera encore très long pour aboutir en 1848 à l’abolition, grâce à Victor
Schoelcher.
En Grande-Bretagne, les choses sont allées plus vite. Le député William Wilberforce fait
abolir la traite négrière sur les navires anglais en 1807 puis voter l’abolition de la traite
l’année suivante. Mais le trafic clandestin se poursuit encore plusieurs années. Il faut
attendre une révolte des esclaves de Jamaïque, en 1831-1832, pour que les partisans de
l’abolition totale de l’esclavage gagnent. L’esclavage est aboli dans les colonies
Aux États-Unis, c’est une guerre civile qui permettra au pays de mettre fin à l’esclavage.
À la fin du XVIIe siècle, des protestants installés en Pennsylvanie, les quakers, militent pour
l’abolition de l’esclavage dans les colonies anglaises d’Amérique du Nord. Dès 1688, ils
Malgré les idéaux qu’elle propose, la constitution de 1787 ne met pas fin à l’esclavage.
Peut-être parce que, parmi ses auteurs, on trouve quelques propriétaires d’esclaves. Mais
après l’indépendance, l’esclavage disparaît peu à peu des États du Nord pour se
La campagne pour l’abolition est relancée au XIXe siècle. En 1851, l’écrivain Harriet
Beecher-Stowe publie un roman, La Case de l’oncle Tom, qui soulève l’indignation d’une
partie de l’opinion américaine. Dans les États du Nord, des gens prennent conscience de
en 1860. Il décide d’interdire l’esclavage. Le 8 février 1861, sept États du Sud (dont la
l’Union. C’est la guerre de Sécession qui oppose le Nord au Sud. Elle ne se termine que
le 9 avril 1865 avec la victoire du Nord. Cette guerre civile fait plus de 600 000 morts.
L’esclavage est aboli sur tout le territoire par le 13e amendement de la Constitution. Après
avoir été réélu en 1864, le président des États-Unis est assassiné en 1865 par un fanatique
sudiste.
Les uns après les autres, presque tous les pays abolissent l’esclavage : le Portugal
Adoptée par les Nations unies, la Déclaration des droits de l’homme de 1948 interdit
Et pourtant… Aujourd’hui encore, dans certains pays, des enfants et des femmes surtout
doivent travailler pour rien ou pour très peu. L’esclavage n’a pas disparu. Ses formes
contemporaines – trafic de personnes, enfants-soldats et utilisation des enfants dans le
travail forcé. 1,2 million d’enfants sont victimes de la traite qui s’accompagne de
l’exploitation commerciale sexuelle. Ils sont vendus comme prostitués ou à des fins de
pornographie infantile, tant dans les pays développés que dans les pays en
développement. Ils ont été vendus par leurs parents qui vivent dans la misère, ou ont été
enlevés. Ces situations sont favorisées par les guerres. Le terme d’esclavage peut être
employé en ce qui les concerne parce qu’ils travaillent pour très peu et vivent dans des
conditions déplorables.
Par ailleurs, l’Organisation internationale pour les migrations estime que, chaque année,
700 000 femmes, filles, hommes et garçons font l’objet d’une traite transfrontalière et sont
Enfin, il y aurait plus de 250 000 enfants exploités comme enfants-soldats dans une
Victor Schoelcher. Des femmes, des hommes, des associations luttent contre l’esclavage
jusqu’en 2008, ainsi que l’écrivaine réunionnaise Françoise Vergès, ont redoublé d’énergie
et de conviction pour mener à bien un grand projet : faire que l’esclavage soit enfin reconnu
et durablement inscrit dans le récit national de la France. Dans cette perspective, elles se
sont battues pour que le projet de loi qualifiant la traite négrière et l’esclavage de crime
contre l’humanité soit adopté par le Parlement français. Mission réussie : la loi “Taubira” a
vu le jour le 10 mai 2001. Et ce jour est devenu une date de commémoration de l’abolition.
Sans relâche, Françoise Vergès cherche aussi à comprendre et à expliquer comment des
États peuvent organiser un système esclavagiste et le faire durer longtemps malgré les
révoltes et les résistances. Comment, aujourd’hui, chaque pays et chaque individu peut être
complice de ce crime. Elle prend un exemple : “Je sais que le Nigeria est le plus gros
producteur de pétrole d’Afrique, mais sa population gagne moins d’un dollar par jour et par
“Il s’agit de savoir dans quel monde nous vivons, dans quel monde nous voulons vivre et
On l’a vu, Christine Taubira a donné en 2001 son nom à la loi française qui reconnaît
C’est en 1998 que son combat a pris toute son ampleur. Cette année-là, la France célèbre
Guyane, qu’il manque dans ces cérémonies officielles la voix des victimes de l’esclavage
ou plutôt celle de leurs descendants, là-bas dans les anciennes colonies. Elle comprend
que, pour guérir de leur passé, ces gens ont besoin de nommer le crime. Une loi devient
vite indispensable. Et c’est à elle de la proposer. Elle doit se battre plus de deux années, à
Dominique Torrès, elle, fait partie de ces journalistes qui, un jour, décident de franchir le pas
et de s’engager. De ceux qui ne veulent plus être seulement observateurs mais aussi
acteurs. Pour Dominique Torrès, grand reporter à la télévision, le fléau qui lui a fait sauter le
moderne” (CCEM) qui a pour objectif de lutter contre toutes les formes de servitude,
Il convient également de rendre hommage à Aimé Césaire, disparu en avril 2008. Toute
l’œuvre du poète antillais est hantée par les souvenirs de la traite et de l’esclavage, sa
découverte du racisme, son combat pour que le peuple noir retrouve ses racines et sa
fierté. Il écrit à ce sujet : “Pendant la Seconde Guerre mondiale, j’ai fondé une revue,
Tropique. Elle présentait un aspect poétique mais, en même temps, elle décrivait la société
martiniquaise, elle rappelait les origines de l’île. Il y avait des articles sur la traite des
Noirs – chose extrêmement malsonnante : personne n’en parlait et voulait moins encore
s’en souvenir. L’esclavage était une tare, une chose honteuse… On tenait là des ancêtres
peu glorieux. Or, ma revue parlait précisément de la traite, rendait hommage à l’Afrique.
(…) C’était révolutionnaire. Affirmer qu’on est nègre était un postulat révolutionnaire.”
Son combat pour la reconnaissance de l’esclavage et pour la défense de tous les opprimés
de la terre, Aimé Césaire l’a poursuivi après la guerre en se lançant dans la politique.
À lire :
bibliothèque).
• Mathilde Giard, L’Esclavage, de l’Antiquité à nos jours (Père Castor – Flammarion, coll.
• Nimrod, Aimé Césaire : “Non à l’humiliation” (Actes Sud Junior, coll. “Ceux qui ont dit non”,
2012, 2015).
À voir :
À consulter :
Parmi elles :
• Anti-Slavery International, créée en 1839 en Grande-Bretagne : plus ancienne
organisation de défense des droits de l’homme. Elle se bat sans relâche pour dénoncer
www.antislavery.org
Soudan.
www.christian-solidarity-international.org
www.freetheslaves.net
01 44 52 88 90
www.esclavagemoderne.org
CHRONOLOGIE
retour en France.
• 1840 : Il voyage aux Caraïbes puis en Afrique et publie des articles et des ouvrages qui
font référence au Parlement lors des débats sur les colonies et l’esclavage.
• 1848 : Sous-secrétaire d’État aux colonies, il parvient à faire signer le décret d’abolition.
• 3 décembre 1851 : Il est sur les barricades au lendemain du coup d’État de Louis
• 1871 : Il est élu député de la Martinique. Pendant la Commune, il tente de trouver des
conciliations.
• 1876 : Élu sénateur, il poursuit son action en faveur des colonies et dépose une
Incapable de se taire devant les injustices, Gérard Dhôtel, journaliste, a choisi de s’adresser
aux jeunes, car pour lui, les enfants d’aujourd’hui seront aptes, demain, à changer l’ordre
• Comment parler de l’histoire de France aux enfants (Le Baron Perché, 2014).
• Louise Michel : “Non à l’exploitation” (Actes Sud Junior, coll. “Ceux qui ont dit non”, 2010,
2014).
• Non à l’indifférence, nouvelles (Actes Sud Junior, coll. “Ceux qui ont dit non”, 2013).
• Israël-Palestine : une terre pour deux (Actes Sud Junior, 2013). Pépite du documentaire
• Non à l’individualisme, nouvelles (Actes Sud Junior, coll. “Ceux qui ont dit non, 2011).
• La Révolution française à petits pas (Actes Sud Junior, coll. “À petits pas”, 2011).
• Ados… crise : quelle crise ? 20 idées reçues sur les ados (Thierry Magnier, 2010).
• Bedirya la volontaire : l’éducation des filles en Afrique (Syros, coll. “J’accuse”, 2004,
disponible en bibliothèque).
• L’Esclavage ancien et moderne (Milan, coll. “Les essentiels Milan Junior”, 2004, disponible
en bibliothèque).
• Les Enfants dans la guerre (Milan, coll. “Les essentiels Milan”, 1999, disponible en
bibliothèque).
• Les Réfugiés du bâtiment A : le droit d’asile menacé (Syros, coll. “J’accuse”, 1995,
Olympe de Gouges :
“Non à la discrimination des femmes”
Elsa Solal