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INTIMITÉ À PROXIMITÉ :

Vers une architecture flexible au service du quartier d’habitation

Essai (projet) soumis en vue de l’obtention du grade de M. Arch.

Audrey Vaillancourt

Superviseur : Éric Pelletier ________________________________

Faculté d’architecture et d’aménagement


Université Laval
2013
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RÉSUMÉ

Le présent essai (projet) porte sur la conception d’un quartier mixte d’habitation. C’est une
réflexion et une exploration sur la façon d’habiter. Plus qu’un simple projet d’habitation, il s’agit
d’une proposition d’ensemble, la vision d’une communauté de proximité et d’échanges. Cet essai
(projet) est développé en deux volets. Il propose d’abord d’approfondir les notions du « chez-soi »
et de l’approbation de l’espace présentes dans la vie quotidienne de chaque individu ou ménage.
Plus précisément, l’exploration et la compréhension des liens entre ces notions et l’architecture
permettront de mettre en place un environnement approprié pour l’individu : un quartier d’habitation
mixte où l’usager occupe une place de choix dans un environnement flexible et appropriable. Le
second volet de cet essai (projet) est donc la création, le projet d’aménagement urbain et
d’architecture de ce quartier. La démarche de recherche-création développée ici aspire à créer un
milieu de vie de qualité dans lequel l’individu se sentira chez lui, la planification et l’aménagement
des espaces étant déterminants pour l’équilibre entre l’intimité et l’esprit communautaire de chacun
de nous (Friedman, 2003a).

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ÉQUIPE D’ENCADREMENT

M. Éric Pelletier, superviseur et directeur de l’essai (projet)


Architecte, Éric Pelletier Architectes

M. Olivier Vallerand, méthodologie et rédaction de l’essai préliminaire


M. arch. et étudiant à McGill University

MEMBRES DU JURY

M. Jan-B Zwiejski
Professeur, École d’architecture de l’Université Laval

Mme Tania Martin


Professeur, École d’architecture de l’Université Laval

Mme Emmanuelle Champagne


Architecte stagiaire, Éric Pelletier architectes

M. Étienne Bernier
Architecte, Hatem+D Architecture

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AVANT PROPOS

Ayant toujours eu un intérêt particulier pour l’individu dans la société ainsi que pour sa plus simple
demeure, son habitation, cet essai (projet) représente l’aboutissement de mon cheminement
universitaire. La réalisation de celui-ci a été possible grâce au soutien et à l’appui de nombreuses
personnes. J’aimerais, dans un premier temps, remercier mon superviseur, Éric Pelletier, pour son
précieux temps alloué à nos rencontres. Merci pour son aide et ses conseils éclairés tout au long
de cette expérience à la fois stressante, fatigante, mais particulièrement passionnante.

Je tiens également à dire merci à mon entourage, à ma famille et particulièrement à Dany Morency
qui a su être mon pilier moral constant malgré les hauts et les bas de cette expérience importante.
Merci à vous tous de m’avoir aidé à grandir et à m’épanouir en tant que future architecte, mais
également en tant que personne. Au terme de ces cinq dernières années passées à l’école
d’architecture de l’Université Laval, je salue aussi mes collègues et ami(e)s qui ont partagé avec
moi les joies et les moments plus difficiles dans les ateliers de l’École d’architecture du Vieux
Séminaire de Québec. Un merci particulier va à Sophie, Maude, Élyse, Emmanuelle, Marie-
Alexandrine, Claudie et Mélissa pour ces bons moments passés ensemble.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ........................................................................................................................................................ iii

ÉQUIPE D’ENCADREMENT ET MEMBRES DU JURY ................................................................................. v

AVANT PROPOS .......................................................................................................................................... vii

TABLE DES MATIÈRES ................................................................................................................................ ix

LISTE DES FIGURES .................................................................................................................................. xiii

1.0 INTRODUCTION ...................................................................................................................................... 1


1.1 Présentation du sujet ............................................................................................................................. 1

1.2 Problématique et hypothèse .................................................................................................................. 1

1.2.1 Changements sociodémographique et évolution des styles de vie ............................................... 1

1.2.2 La culture du « bigger is better » et l’accès à la propriété ............................................................. 2

1.2.3 Hypothèse ..................................................................................................................................... 3

1.3 Voir la propriété autrement : l’exemple de la maison mobile ................................................................. 3

2.0 LE « CHEZ-SOI » : ENTRE SOCIABILITÉ ET INTIMITÉ.................................................................... 4


2.1 La sociabilité .......................................................................................................................................... 4

2.1.1 Les relations humaines et la notion de distance ............................................................................ 4

2.1.2 Les espaces publics : stimulateurs de vie urbaine ......................................................................... 5

2.1.3 L’aménagement : acteur de sociabilité........................................................................................... 6

2.2 L’intimité ................................................................................................................................................ 8

2.2.1 L’intimité par le contrôle ................................................................................................................. 8

2.2.2 L’intimité par l’appropriation ........................................................................................................... 9

2.2.3 L’intimité par la territorialité .......................................................................................................... 10

2.3 Vers un « chez-soi » flexible et appropriable : les espaces de transition............................................. 11

ix
2.3.1 L’espace transitionnel .................................................................................................................. 11

2.3.2 Le caractère des espaces de transitions ...................................................................................... 12

3.0 LA FLEXIBILITÉ ET L’ADAPTABILITÉ ...........................................................................................15


3.1 La flexibilité dans la communauté........................................................................................................ 15

3.2 La flexibilité de l’architecture................................................................................................................ 16

3.2.1 Capacité de transformation .......................................................................................................... 17

3.2.2 Capacité évolutive ........................................................................................................................ 18

3.3 L’adaptabilité des espaces intérieurs................................................................................................... 19

3.3.1 La multifonctionnalité ................................................................................................................... 19

3.3.2 L’interaction : entre transparence et hiérarchie ............................................................................ 21

4.0 RÉSUMÉ DE L’ESSAI : LA CARTE DES CONCEPTS.....................................................................23

5.0 INTIMITÉ À PROXIMITÉ : LE PROJET ..........................................................................................25


5.1 Présentation du projet et de la mission ................................................................................................ 25

5.2 Proposition programmatique................................................................................................................ 25

5.3 Objectifs de design : l’avant-projet....................................................................................................... 26

5.3.1 Échelle « macro » : l’aménagement urbain et la mixité dans la communauté.............................. 26

5.3.2 Échelle « méso » : la rue, la cour et les différentes interfaces ..................................................... 28

5.3.3 Échelle « micro » : les typologies d’habitation et le « chez-soi » équilibré ................................... 29

5.4 Mise en contexte et site d’implantation ................................................................................................ 30

5.4.1 Le contexte du Programme Particulier d’Urbanisme (PPU) de la Ville de Québec – secteur


d’Estimauville ........................................................................................................................................ 31

5.4.2 Préférences résidentielles de la population : élaboration du projet .............................................. 34

x
5.4.3 La démarche méthodologique...................................................................................................... 35

5.5 Développement du projet : de la théorie au quartier d’habitation ........................................................ 36

5.4.1 L’échelle du quartier et de ses espaces urbains .......................................................................... 37

5.4.2 Les espaces de vie extérieurs et l’échelle architecturale ............................................................. 53

5.4.2 La typologie d’habitation et l’aménagement intérieur ................................................................... 59

6.0 CONCLUSION ET REGARD CRITIQUE ........................................................................................69

7.0 BIBLIOGRAPHIE .........................................................................................................................71

8.0 ANNEXES ...................................................................................................................................73


ANNEXE I : Planches finales du projet (telles que présentées le 19 avril 2013) ....................................... 73

ANNEXE II : Photos de la maquette urbaine conceptuelle ........................................................................ 77

ANNEXE III : Photos de la maquette finale d’une tranchée d’habitations .................................................. 79

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xii
LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Échelle des distances (Lawson, 2001) 5

Figure 2 : Rôles de caractérisation des situations spatiales (Lawson, 2001) 6

Figure 3 : Concepts sociofuge et sociopète : exemple du parc Güell (Lawson, 2001) 7

Figure 4 : « The Drop House », d3architectes (précédent architectural) 17

Figure 5: « ItHouse », Taalman Koch Architecture (precedent architectural) 20

Figure 6: Localisation du projet dans la Ville de Québec 30

Figure 7 : Site d’implantation du projet 31

Figure 8 : Utilisation du sol – contexte environnant (PPU, Ville de Québec) 32

Figure 9 : Réseau cyclable (PPU, Ville de Québec) 32

Figure 10 : Réseaux de transport en communs existants (PPU, Ville de Québec) 33

Figure 11 : Affectations au sol prévues (PPU, Ville de Québec) 33

Figure 12 : Concept d’aménagement de l’éco quartier (PPU, Ville de Québec) 33

Figure 13 : Image conceptuelle synthèse du cadre théorique intégrée dans le projet 36

Figure 14 : Schéma conceptuel – connexion du projet avec les quartiers existants 38

Figure 15 : Schéma conceptuel – renforcement bâti le long des axes principaux 39

Figure 16 : Schéma conceptuel – principe de densification décroissante 40

Figure 17 : Schéma conceptuel – densification décroissante selon la hauteur du bâti 40

Figure 18 : Schéma conceptuel – perméabilité piétonne à travers le quartier 41

Figure 19 : Plan masse du projet 42

Figure 20 et 21 : Ambiance place publique (précédent de la revitalisation d’Andenne) 43

Figure 22 : Ambiance place centrale avec fontaines (précédent de YueHawain Com. D.) 43

Figure 23 : Plan conceptuel – aménagement urbain de la Place Publique 44

xiii
Figure 24 : Schéma des pôles urbains 45

Figure 25 : Zoom urbain – Esplanade verte 46

Figure 26 : Place publique Quartier Nodelo, Québec 47

Figure 27 et 28 : Promenade Champlain, Québec 47

Figure 29, 30 et 31 : Bassin de rétention d’eau du quartier Nodelo, Québec 47

Figure 32 : Perspective – bâti le long du boulevard Saint-Anne 48

Figure 33 : Perspective – intersection d’entrée du quartier sur le boulevard Saint-Anne 48

Figure 34 : Distribution typologique du bâti à travers le projet et le secteur 49

Figure 35 : Distribution des hauteurs – principe de densification décroissante 50

Figure 36 : Élévation conceptuelle rue – distribution typologique par densité décroissante 50

Figure 37 : Rue d’accès du quartier en plan 51

Figure 38 : Ambiance conceptuelle – rue d’accès 51

Figure 39 : Schéma en plan – circulation automobile dans le projet 52

Figure 40 : Zone du quartier – développement plus approfondi du projet 53

Figure 41 : Rue partagée en plan avec traitement au sol 54

Figure 42 : Perspective rue partagée 54

Figure 43 et 44 : Espaces semi-privés types en plan avec aménagement potentiel 55

Figure 45 : Coupe schématique relation cour, maison et rue 56

Figure 46 : Perspective espaces semi-privés au sol 56

Figure 47 : Perspective espaces semi-privés à partir de l’étage 56

Figure 48 : Ambiance conceptuelle topographie habitée (côté partagé) 56

Figure 49 : Perspective interface espace semi-privé avec rue d’accès 57

Figure 50 : Ambiance conceptuelle cour privée, relation avec l’extérieur 58

Figure 51 : Élévation de la rue avec matérialité 59

xiv
Figure 52 : Élévation de la cour avec matérialité 59

Figure 53 : Plan rez-de-chaussée typologie #1 61

Figure 54 : Plan étage typologie #1 61

Figure 55 : Coupe intérieure rez-de-chaussée typologie #1 61

Figure 56 : Plan rez-de-chaussée typologie #2 62

Figure 57 : Plan étage typologie #2 62

Figure 58 : Coupe intérieure rez-de-chaussée typologie #2 62

Figure 59 : Plan rez-de-chaussée typologie #3 63

Figure 60 : Plan étage typologie #3 63

Figure 61 : Coupe intérieure 63

Figure 62 : Plan rez-de-chaussée typologie #4 64

Figure 63 : Plan étage typologie #4 64

Figure 64 : Perspective intérieure typologie #2 65

Figure 65 : Perspective intérieure typologie #3 65

Figure 66 : Perspective intérieure typologie #4 66

Figure 67 : Ambiance conceptuelle espace intermédiaire entre les habitations 67

Figure 68 : Ambiance conceptuelle des systèmes de contrôle de l’intimité 67

xv
1.0 INTRODUCTION

La société d’aujourd’hui est de plus en plus mobile et changeante, que ce soit par la mobilité des
biens, des humains ou de l’information. À l’opposé, « la grande majorité de l’architecture
occidentale est statique, monofonctionnelle, avec un mobilier et des équipements standardisés »
(Kronenburg, 2007 :16). Les structures des ménages et les besoins des individus changent et se
complexifient. Ne faisons que penser aux familles nucléaires, éclatées, reconstituées ou
monoparentales qui font partie intégrante des réalités nord-américaines actuelles. Ces
changements rapides et inconstants liés au cycle évolutif des ménages et des individus se
transcrivent à l’échelle du bâti résidentiel par de multiples déménagements ou mécontentements. À
cette nouvelle réalité s’ajoute une augmentation considérable du fardeau financier liée à l’accès à
une propriété (Friedman 2003a). Les besoins de personnalisation et d’adaptabilité des espaces,
ainsi que d’accessibilité à la propriété, sont donc grandissants, engendrant par le fait même un
repositionnement des systèmes habitables conventionnels.

1.1 Présentation du sujet

Cet essai (projet) tente d’explorer une nouvelle façon d’habiter au Québec, une proposition
pouvant répondre aux besoins des individus et des ménages, ceux-ci étant variés et évoluant
au fil du temps. Plus qu’un simple projet d’immobilier, c’est la vision d’un ensemble, d’une
communauté de proximité et d’échanges : un quartier d’habitation mixte où l’usager occupe
une place de choix dans un environnement flexible et appropriable.

1.2 Problématique et hypothèse

1.2.1 Changements sociodémographique et évolution des styles de vie

Plusieurs changements sociodémographiques liés au nombre de ménages et à la


dimension de ceux-ci ont une influence sur l’habitation. Selon Friedman (2003b), les
familles de la société contemporaine ne sont plus homogènes et représentent donc une
grande diversité et une forte dynamique quant à leurs besoins immobiliers : « cette vaste

1
variété implique une tout aussi grande diversité du logement et ce, tant pour ce qui est du
coût et de sa dimension que de son type et de son aménagement. » (Friedman, 2003b :
5). Les systèmes conventionnels d’habitation doivent être questionnés par rapport à leur
pertinence dans la société actuelle. En effet, les habitations offertes au Québec sont pour
la plupart rigides et restrictives entraînant des déménagements ou des mécontentements
des usagers. Selon chaque étape de son cycle de vie, l’individu essaie ainsi de trouver
« chaussure à son pied ». Cette diversification des ménages entraîne, par le fait même,
une plus grande diversité des modes de vie, même au sein d’un seul ménage (Friedman,
2003b). Cette impossibilité de prédire comment les habitants utiliseront l’espace est
évidente selon Friedman : il voit les notions de souplesse et d’adaptabilité de la maison
comme solution à cette problématique.

1.2.2 La culture du « bigger is better » et l’accès à la propriété

« Nous vivons dans une époque d’excès étonnant, quand avoir et vouloir plus est un
mandat culturel. […] La grande maison ou appartement est la récompense visible pour nos
efforts » (Traduction personnelle de Gauer, 2004 :12). Bien que de plus en plus d’études
ou d’écrits démontrent un besoin de changer et d’évoluer vers une habitation plus
minimale, l’architecture fait face à une culture qui met de l’avant la beauté du « grand ».
Même s’ils peuvent être satisfaits de modestie et de simplicité, les gens ont tendance à
choisir des maisons plus grandes qui sont un fardeau par leur excès et leur complexité
(Gauer, 2004). En effet, même si elles sont de moins en moins accessibles, elles
demeurent, encore aujourd’hui, un symbole de réussite sociale et professionnelle ainsi
qu’un épanouissement personnel. Cette quête, selon laquelle la qualité d’un espace
s’évalue selon sa richesse matérielle et sa taille, mène à un fardeau financier qui réduit la
qualité de vie des individus et des ménages. Pour de nombreux québécois, le coût des
maisons est l’obstacle le plus important à l’accession à la propriété et celles-ci deviennent
de plus en plus inabordables pour une grande partie de la population (Friedman, 2003b).
Les paiements de ces grandes maisons représentant souvent entre 30% et 40% des
revenus du ménage, cela oblige ceux-ci à se priver d’autres choses et à être endettés
sans aucun pouvoir financier ni épargne possible (Gauer, 2004).

2
1.2.3 Hypothèse

Devant cette culture bien présente dans la société actuelle et la rigidité du système
résidentiel conventionnel, plusieurs solutions peuvent être envisagées. Comment
l’architecture et l’aménagement urbain peuvent-ils créer un sentiment d’appartenance, un
« chez-soi » aux individus et aux ménages, par la création d’un milieu de vie de qualité, un
nouveau quartier mixte? En s’intéressant aux différentes notions de la flexibilité spatiale et
de l’appropriation de l’espace par l’individu, cet essai (projet) a pour objectif de proposer
un milieu de vie sain qui mise sur la qualité plutôt que la quantité, et ce à travers une
architecture adaptable et appropriable, ainsi que par la recherche d’un équilibre entre les
besoins d’intimité et de sociabilité de chaque individu. Plutôt que de forcer l’humain à
s’ajuster à un espace inapproprié pour lui, ce projet veut que l’espace s’adapte à son
occupant en fonction de ses besoins, de sa personnalité et de ses désirs. Ces espaces
adaptables, transformables, appropriables et interactifs pouvant évoluer et être modulés
au fil du temps au cœur d’une société en mouvement constant. Plus concrètement, cet
essai (projet) tente de définir la flexibilité et l’appropriation de l’espace à différentes
échelles et de l’appliquer dans une nouvelle image de quartier mixte, dans une recherche
de qualité de vie.

3
2.0 LE « CHEZ-SOI » : ENTRE SOCIABILITÉ ET INTIMITÉ

2.1 La sociabilité

L’être humain est un être sociable qui a un besoin primaire d’échanger et d’être avec les autres
(Thibault, 2009). Bien que l’individu ait un besoin de sociabilité, celui-ci est directement relié
avec les besoins d’intimité, tous deux faisant partie intégrante des comportements de chaque
individu. Le langage de l’espace, exploré par Lawson (2001), permet à la fois d’exprimer notre
solidarité et notre individualité, l’architecture ayant le pouvoir de créer des occasions, pour les
occupants d’un lieu, de rencontrer, d’interagir et d’échanger. Ce sont ces échanges qui
viennent créer, selon lui, un sentiment de communauté, d’appropriation à un groupe. La
sociabilité ne venant jamais seule sans l’intimité, cet équilibre peut donc être développé sous
divers angles à travers l’aménagement urbain et l’architecture. Cet essai (projet) se concentre
sur les relations humaines et la notion de distance, ainsi que sur le pouvoir de l’aménagement
comme catalyseur de sociabilité.

2.1.1 Les relations humaines et la notion de distance

« La distance est critique et cruciale, car elle détermine comment nous allons interagir »
(Traduction personnelle de Lawson, 2001 : 110). La notion de distance introduite ici par
Lawson est fondamentale dans la compréhension de la sociabilité des espaces, et ce,
autant dans le domaine de la sociabilité privée que publique. Un quartier étant un lieu de
sociabilité dans lequel on a de multiples occasions de rencontrer des visages connus et
d’échanger, c’est cette interaction qui donne le sentiment d’appartenir à une communauté
(Bernard, 1993). Hall (1971) accorde lui aussi une grande importance à la distance dans le
langage de l’espace. Il définit la notion de celle-ci selon quatre thèmes : la distance intime, la
distance personnelle, la distance sociale et la distance publique. Le croquis de Lawson 2001
(figure 2) permet d’illustrer ces différentes distances entre les individus et les interrelations
entre celles-ci.

4
Figure 1 : Échelle des distances. Source : Lawson (2001 :115)

Cette analyse des distances permet de créer des interactions à différents niveaux dans
l’espace et d’arriver à un équilibre entre les besoins de sociabiliser et de se retirer des
individus de la société. Hall (1971) analyse également ces distances avec son principe de
« proxémie » qui représente selon lui la distance physique qui s’établit entre des personnes
prises dans des interactions. De ces notions diverses par rapport à la distance découle
l’espace de proximité : « le bon espace de proximité est celui où on peut se tenir un
moment, se reposer et choisir de mettre une distance entre les autres et soi » (Harle, 1993 :
409). Toujours selon Harle (1993), les abords du logement sont l’espace premier de la
socialisation, celui où prennent forme et commencent les relations de voisinage et
l’interaction entre les individus. L’espace public de proximité venant ensuite stimuler de
nouveaux comportements entre chez-soi et le travail, entre le privé et le public.

2.1.2 Les espaces publics : stimulateurs de vie urbaine

Les espaces publics sont considérés comme des lieux importants pour la sociabilité et
l’identité d’une communauté ou d’un quartier. Le fait de passer du temps sur la terrasse d’un
café ou de déambuler le long d’une rue commerciale est plus qu’une distraction plaisante.
En effet, selon la psychothérapeute Joanna Poppink, c’est un élément nécessaire à une vie
urbaine saine, car ces activités engendrent des rencontres fortuites avec les gens du
voisinage, qui ne sont souvent pas du tout un groupe de gens homogène. Les espaces
publics affirment une centralité dans leur milieu et deviennent un point de référence dans
l’environnement immédiat. Étant donné que la perception que l’individu se fait de l’espace
est centrée sur lui-même, cette notion de centre peut être étendue et externalisée. Celui-ci
5
comprend donc son environnement comme une hiérarchie de centres qui se superposent et
s’entrecroisent, allant du monde urbain jusqu’à la maison. « C’est la conception, la définition
physique ou le renforcement de ces centres, qui est au cœur des disciplines de
l’architecture, du design et de la planification urbaine » (Moughtin, 2003 : 89).

2.1.3 L’aménagement : acteur de sociabilité

« Chaque société possède des formes de rassemblement sélectif dans un espace


partagé. Chacune possède des règles de résidence qui se manifeste de manières
variées, à des échelles différentes (maison, regroupement de maison), c’est l’ensemble
qui forme unité et identité » (Segaud, 2010 : 89)

L’aménagement urbain et architectural permet de mettre en place la sociabilité de la


communauté. Créer un esprit communautaire fort demande de miser sur les lieux de
rencontre et sur les éléments qui favorisent les contacts sociaux (Friedman, 2003a). Il s’agit
donc de créer un environnement animé à l’échelle humaine qui intègre les notions de
relations et de distances entre les individus. Lawson (2001) présente trois rôles qui
permettent de caractériser les situations spatiales auxquelles les individus peuvent faire face
dans un environnement de proximité avec d’autres : la confrontation, la fréquentation
(collaboration ou conversation) et la coexistence. L’individu choisira donc son niveau de
proximité avec l’autre selon la nature de l’échange et le niveau d’interaction désiré (figure 3).

Figure 2 : Illustration des rôles de caractérisation des situations spatiales : confrontation, collaboration, conversation, coexistence.
Source : Lawson (2001 :141)

Basé sur l’analyse du comportement de l’individu et du caractère semi-fixe d’un espace du


docteur Humphrey Osmond, cité par Lawson (2001) et Hall (1971), l’aménagement est vu
comme un acteur principal de sociabilité. En ressort deux grandes façons d’aménager
6
l’espace appelés les espaces sociofuges et sociopètes : « L’espace sociopète est celui qui
tend à réunir les gens et l’espace sociofuge est celui qui tend à les mettre à l’écart comme
une force centrifuge projette les objets loin du centre de l’axe de rotation » (Traduction
personnelle de Lawson, 2001 : 140).

Figure 3 : Illustration des concepts sociofuge et sociopète : exemple du parc Güell conçu par Gaudi.
Source : Lawson (2001 :142)

Ce schéma de représentation des concepts sociofuge et sociopète (figure 4), tiré de


l’exemple du parc Güell à Barcelone, discuté par Lawson (2001), illustre bien l’interaction
entre les individus. Ainsi, dans l’espace sociofuge les gens ont la possibilité de rester en
retrait, de garder une certaine intimité en coexistant avec les autres à proximité. Dans
l’espace sociopète, à l’inverse, il s’agit de rassembler les gens et de les faire interagir
davantage. Des places publiques conçues avec des espaces sociopètes permettent donc
d’enrichir la vie urbaine et l’esprit de communauté en favorisant cette interaction constante
(Lawson, 2001). Hall (1971) vient toutefois mettre un bémol à l’espace public uniquement
sociopète en affirmant qu’un type d’espace n’est pas meilleur que l’autre. Afin de rassembler
la communauté, il est impératif de promouvoir une flexibilité d’espace. Une variété entre ces
deux types de lieux, favorisant l’appropriation des espaces et la réponse aux attentes des
individus, permet cette flexibilité d’espace (Hall, 1971).

Cette sociabilité et interaction à travers l’aménagement peut se transcrire à plusieurs


niveaux. Friedman (2003a :73) parle ainsi d’espaces ouverts communs et de diversité pour
offrir de la variété : « la planification des espaces ouverts est déterminante pour l’équilibre
entre l’intimité et l’esprit communautaire ». Il transcrit également cette vision
d’aménagement comme acteur de sociabilité dans les échelles réduites en introduisant les
principes d’interaction entre les composants des lots résidentiels (dimensions, volumes
bâtis, cour, ruelle, etc.) afin de maximiser l’espace extérieur et l’interaction. Tous ces

7
principes d’aménagement sont acteurs de sociabilité mais également d’intimité, l’équilibre
étant nécessaire pour la qualité de vie des individus et des ménages.

2.2 L’intimité

L’habitat demande un équilibre complexe entre le besoin de communiquer avec les autres et
le besoin de s’en protéger (Bernard, 1993). Toujours selon Bernard (1993), l’intimité est un
besoin fondamental, le besoin de posséder un espace privé, que l’homme éprouve
temporairement et de manière plus ou moins forte selon sa nécessité de prendre des
distances avec les autres ou de couper la relation avec l’environnement physique et social.
Serfaty-Garzon (1999 :25) vient confirmer cette coupure en décrivant les « expressions de
l’intime » comme « se dérober au regard et au toucher d’autrui, constituer autour de soi un
territoire exclusivement personnel, séparer son corps de celui des autres ». Elle vient
également ajouter le fait que les besoins d’intimité se retrouvent autant dans la sphère
publique qu’à l’intérieur de l’habitat lui-même. Altman (1975), en se basant sur l’analyse de
différents auteurs tels que Rappoport et Westin, définit l’intimité comme étant le contrôle
sélectif de l’accès à l’individu ou à un petit groupe permettant ainsi d’organiser, selon les
désirs de chacun, les interactions avec les autres.

À travers ces différentes définitions, il est possible de remarquer que des dimensions sont à
privilégier lorsqu’on tente de procurer l’intimité : le contrôle, l’appropriation et la notion de
territoire.

2.2.1 L’intimité par le contrôle

La notion de contrôle est une dimension importante qui permet de lier l’architecture et
l’intimité. La définition d’Altman (1975) plus haut démontre que cette dimension est une
partie prenante dans la compréhension globale de l’intimité. Bernard (1993) abonde dans
le même sens en voyant le contrôle comme un élément déterminant dans le sentiment de
possession d’un espace privé. L’architecture est très importante dans la notion du contrôle
de l’espace car elle peut faire intervenir différents éléments de l’environnement bâti, par
exemple en travaillant les éléments architecturaux tels que le mur, la porte ou la fenêtre.

8
Bernard (1993) introduit ces éléments comme des façons de contrôler la relation entre
l’espace privé et le monde extérieur, et ce à différents niveaux. Le mur est alors une
barrière physique qui transforme l’habitation en une limite en soi, en un univers borné
(Serfaty-Garzon, 1999). Bernard (1993) et Lawson (2001) suggèrent que la fenêtre a une
place importante dans l’intimité des gens. Les fenêtres « mettent l’individu à l’abri […] tout
en lui ménageant un accès visuel sur l’extérieur » (Bernard, 1993 :369). Elle devient
élément de perméabilité à l’intérieur de la rigidité des murs (Thibault, 2009). La fenêtre sert
donc à contrôler l’environnement, tout en donnant un sentiment de sécurité, et ce, selon la
nature des pièces. Finalement, Serfaty-Garzon (1999 : 78) introduit la porte dans la notion
de contrôle de l’espace et de limite en citant les paroles de Simmel :

« La porte se fait côtoyer le limité et l’illimité, mais pas sous forme morte,
géométrique d’une simple cloison. Il y a au contraire possibilité d’échange
constant […] les frontières (que l’homme) se fixe ne trouvent leur sens et leur
dignité que grâce au symbole que représente la mobilité de la porte, grâce à la
possibilité d’échapper à tout instant à cette limitation ».

L’habitant doit donc garder en toutes circonstances la maîtrise de l’ouverture et de la


fermeture de la porte (Serfaty-Garzon, 1999). L’image de cette dernière est donc la
représentation d’une dialectique entre l’intérieur, volontairement limité par le besoin de
contrôle, et l’extérieur. L’individu peut donc positionner celle-ci pour suggérer le degré
d’intimité désiré et ainsi s’approprier son espace intime à sa façon selon ses désirs et
besoins.

2.2.2 L’intimité par l’appropriation

L’appropriation de l’espace par l’individu est également une dimension importante du


besoin d’intimité. L’appropriation est l’intermédiaire du rapport entre le soi et l’espace
(Segaud, 2010). Au niveau de l’habitat, cette appropriation signifie être maître de l’espace,
libre d’agir et de modifier celui-ci, avoir la maîtrise de l’ouverture et de la fermeture de sa
maison aux autres (Serfaty-Garzon, 1999). Cette définition de Serfaty-Garzon démontre
l’importance de s’approprier un lieu pour atteindre un certain niveau de contrôle de celui-ci
et d’intimité désiré. Segaud (2010 :68) abonde dans le même sens en définissant
l’appropriation comme l’action de « rendre propre (sien) l’espace, c’est le singulariser pour
9
le construire selon mes sentiments et ma culture ». Selon Bernard (1993) l’appropriation
est d’abord physique par la reconnaissance des repères, des bâtiments, des commerces
et d’autres indices subtils. Elle peut être également de nature symbolique soit par le
développement d’un sentiment d’appartenance à une identité collective dans laquelle les
individus s’inscrivent. Cette appropriation, qu’elle soit physique ou symbolique, peut se
faire à différentes échelles, en allant de l’espace intérieur du logement jusque vers le
quartier et la ville. Selon Bentley (1985), elle se fait donc autant du côté privé de la maison,
qu’à la frontière entre le public et le privé, par exemple par la décoration des éléments
extérieurs visibles de la rue (balcons, fenêtres porches, etc.). À l’échelle du quartier ou de
la ville, le sentiment d’appartenance à la communauté est celui qui prime, que ce soit par
la reconnaissance physique telle que démontrée plus haut ou par la rencontre de visages
familiers à l’intérieur du quartier. Proshansky (Serfaty-Garzon, 1999) mentionne le
processus d’intégration de l’espace « place identity » selon lequel certains lieux deviennent
partie de soi et débouchent sur un attachement au lieu. « On s’approprie l’espace pour
exercer sur lui une maîtrise, un contrôle, un certain pouvoir; […] l’appropriation est donc
liée à la territorialité, à la proximité, au privé » (Segaud, 2010 : 72).

2.2.3 L’intimité par la territorialité

Pour traiter l’intimité, il est impératif de glisser un mot sur la notion de territoire et de
possession de l’espace. Altman (1975) parle du comportement territorial des individus
comme une sorte de mécanisme utilisé pour atteindre un niveau d’intimité désiré. Ce
comportement se définissant par la personnalisation ainsi que le marquage d’un territoire
ou d’un/des objets se référant au sentiment de propriété. Pour Lawson (2001), la
territorialité n’est pas seulement lié à un espace donné, une propriété, mais évoque aussi
un phénomène social. Segaud (2010), de son côté, introduit la notion de frontière entre les
territoires individuels. Ainsi, chacun essaie de créer ses propres frontières plus ou moins
rigides afin de subvenir à ses besoins de possession et d’intimité. La territorialité est donc
directement liée avec les notions de contrôle et d’appropriation. Chaque individu trouve
donc son équilibre entre l’intimité et la sociabilité à travers un jeu entre le contrôle de son
espace et son appropriation de celui-ci à travers l’établissement de limites et de frontières
sur son territoire.

10
2.3 Vers un « chez-soi » flexible et appropriable : les espaces de transition

« L’intimité c’est se sentir chez soi » (Bernard, 1993 :367). L’équilibre entre les besoins de
socialisation et d’intimité des individus se retrouve dans la notion du « chez-soi », celui-ci se
situant entre le lieu et l’identité. « Le chez-soi est la demeure, le foyer, l’abri, le lieu de l’intime.
Il est à la fois l’objet, l’endroit bâti et l’expérience du lieu que cet objet fonde » (Serfaty-
Garzon, 1999). Le sentiment d’être chez soi est d’abord vécu dans l’espace du logement mais
peut être également ressenti dans un espace public, un quartier ou encore dans une ville ou
un pays lorsqu’on en est éloigné (Bernard, 1993). Serfaty-Garzon (1999) évoque l’importance
du chez-soi dans l’équilibre de l’individu lorsqu’elle le voit comme l’ancrage, la stabilité qui
permet d’aller au dehors, vers le monde. Le chez-soi est le sentiment d’adéquation de la
personne à sa maison. C’est cet espace qu’on peut revendiquer comme le sien propre, celui
qui permet de se construire une image vis-à-vis des autres et de soi-même, car sa maison,
son quartier et son style d’habitation donnent une position identifiable dans la société
(Maugard et Cuisinier, 2010).

2.3.1 L’espace transitionnel

« L’architecture apparaît comme une mise en ordre de l’espace, pour le rendre à la fois
compréhensible et maîtrisable » (David, 2003). C’est la relativité des espaces intérieurs et
extérieurs qui vient renforcer à la fois l’appropriation de l’environnement et le sens de
l’intimité (Moley, 2006). Afin de trouver son équilibre entre sociabilité et intimité, l’individu
doit pouvoir traiter les frontières entre le privé et le public. L’espace architectural a donc un
caractère transitionnel qui permet d’aller d’une étape à une autre. C’est le passage obligé
de l’espace personnel à l’espace social (David, 2003 : 143). L’espace intermédiaire naît de
l’inévitable dualité entre l’intérieur et l’extérieur, engendrés par n’importe quel point de
rencontre ou limite entre deux environnements (Ballesteros cité par Gausa, 2003).
Certaines zones telles que les porches, les terrasses, les balcons et les seuils semblent
spécialement affectées à cette fonction. L’optimisation de ces éléments transitionnels
permet l’harmonie, l’équilibre entre les besoins d’intimité et de sociabilité des individus et
des ménages. Ceux-ci sont donc des endroits où l’usager a le choix et dans lesquels il peu
créer une distance entre les autres et lui-même. Ces espaces doivent avoir le pouvoir de

11
proposer une diversité et une variation d’émotions et d’expériences (Harle, 1993). Il s’agit
de traiter les notions de passage progressif de l’échelle urbaine à l’échelle domestique et
de créer des séquences enchaînées et hiérarchisées menant peu à peu de l’extérieur à
l’intérieur, ou l’inverse (Moley, 2006).

David (2003) voit l’espace transitionnel comme un élément donnant l’accès, lorsqu’on y
pénètre, à des figures sans cesse nouvelles qui se développent selon la progression de
l’individu dans l’espace architectural. Cette progression à dimensions multiples ne devant
pas avoir de limite préétablie. Tous ces espaces d’entre-deux, de chevauchements ou
d’interpénétrations, permettent l’intimité et la sociabilité, et ce, autant par le contrôle,
l’appropriation de l’espace ou les notions de frontière et de limite. Cette large catégorie
d’espaces transitionnels peut se diviser en deux selon Harle (1993), soit les espaces
d’approches et les espaces de prolongements. L’échelle apparaît comme un facteur relatif
dans la définition des espaces architecturaux. Une diminution d’échelle représentant pour
l’individu une augmentation de son pouvoir personnel. Cet effet sécurisant peut souvent
être ressentis dans l’espace architectural de l’édifice par rapport à l’espace urbain (David,
2003).

2.3.2 Le caractère des espaces de transitions

Selon Bachelard, il existe chez l’individu une quatrième dimension qui est celle de
l’intimité. Cette dimension de l’architecture permet de distinguer le dedans du dehors.
« L’architecture commence par poser les limites qui séparent un espace clos d’un espace
ouvert. Entre les deux il existe un faisceau de rapports fonctionnels de nature duale :
séparation/liaison, différenciation/transition, interruption/continuité, frontière/passage »
(David, 2003 : 158). En lien avec cette notion de limite, David (2003) vient définir le seuil
comme une zone d’une nature particulière ayant des habits multiples (marches, perrons,
avant-toits, portails, porches, terrasses, balcons, fenêtres, etc.) qui partagent la même
fonction essentielle de contrôler le passage à travers la limite. L’individu peut ainsi y
décider des éléments permis et ceux interdits en ayant une fonction de filtrage. Le seuil
apparaît plus comme un dispositif psychologique qu’architectural.

12
La différenciation entre les espaces dynamiques et statiques est également primordiale
dans la définition de l’espace architectural transitionnel. « Un espace n’est pas dynamique
ou statique par ses qualités propres mais par celles que nous voulons bien lui conférer »
(David, 2003 : 185). Deux caractères semblent donc jouer un rôle sur les qualités
perceptibles d’un espace soit le confinement et les proportions. La verticalité apparaît donc
comme la dimension dynamique représentant la découverte et le mouvement, tandis que
l’horizontalité est plus liée au caractère statique par ses notions de sécurité et de réconfort
(David, 2003). L’espace transitionnel est donc un espace où l’on s’arrête un peu pour
s’acclimater aux conditions nouvelles de l’espace qu’on prévoit pénétrer. Il est également
un lieu où on ressent le temps et il apparait dynamique en ce sens qu’il ne se contente pas
de susciter le déplacement des sujets qui les franchissent mais qu’il manifeste lui-même
une mobilité quasi-permanente, au gré de son environnement physique et sociologique
(David, 2003). Le balcon, pour sa part, représente le prolongement de l’espace intérieur,
mais confère à l’individu une notion d’intimité et de contrôle différente de la terrasse au
sol. Il devient poste d’observation sur les autres ce qui manifeste une position dominante à
l’observateur. La terrasse quant à elle est l’introduction au monde de la liberté, le
prolongement de la salle de séjour qui se fait emporté à l’extérieur (David, 2003). La
séparation par une grande paroi vitrée permettant ainsi d’unifier l’espace de vie intérieur
de celui extérieur plus que les diviser.

Définir les différents espaces transitionnels permet de mieux comprendre et interpréter leur
importance relative les uns par rapports aux autres et ainsi de pouvoir mettre en place une
hiérarchie polyvalente des espaces permettant à l’individu et au ménage de le moduler
selon ses besoins et envies. Faire cohabiter les lieux de sociabilité avec ceux d’intimité par
l’utilisation de ce type d’espace permet ainsi la flexibilité d’utilisation et met donc de l’avant
la qualité de vie des individus.

13
14
3.0 LA FLEXIBILITÉ ET L’ADAPTABILITÉ

La flexibilité et l’adaptabilité sont des notions souvent présentes dans le discours architectural.
Elles peuvent cependant avoir plusieurs significations. Même si ces notions partagent des bases
communes, il est important de les distinguer. La flexibilité, dans un premier temps, suggère la
qualité de quelque chose qui peut s’adapter aux circonstances; c’est l’aptitude d’un espace à se
plier à une utilisation évolutive ou différente. L’espace physique flexible a donc la capacité d’être
altéré au fil du temps. Selon Steven Groak (1992), plusieurs échelles de flexibilité existent. Ainsi,
elle permet la juxtaposition d’espaces pouvant s’étendre les uns dans les autres, sortant de leur
cadre initial (Groak, 1992). Il introduit également la différenciation entre la flexibilité et l’adaptabilité
en voyant cette dernière comme la capacité d’un espace à être aménagé de plusieurs façons. Il
s’agit donc plus d’une polyvalence à l’intérieur de cadres rigides. Ces changements peuvent être
tantôt externes, tantôt internes, temporaires ou permanents, toujours au choix de l’usager qui
contrôle son environnement (Barabé-Pépin, 2010). Un habitat flexible peut donc également être
adaptable.

3.1 La flexibilité dans la communauté

La flexibilité de l’espace et de l’architecture à l’échelle du quartier se transcrit autant dans


l’aménagement, les circulations et les espaces communs. C’est par une flexibilité et une
perméabilité des espaces communs et des installations que le projet procure un milieu de vie
de qualité, appropriable pour tous et pour tout événement. Comme il a été introduit plus haut
par Groak (1992), la flexibilité peut se transcrire à plusieurs échelles. La flexibilité de la société,
c’est la capacité à s’adapter aux tendances démographiques, économiques ou
environnementales. À cette échelle, elle devient une réponse aux changements constants du
quartier et de ses habitants. Elle augmente considérablement la durabilité de l’espace urbain
grâce à cette capacité évolutive. « La flexibilité est une considération importante dans la
création de communauté et de maisons bien adaptées aux besoins contemporains »
(Friedman, 2003a :4). Kronenburg (2007 : 67) introduit les idées de Rogers et Piano qui
abondent dans le même sens de la flexibilité de l’espace soit « un lieu de rencontre vraiment
dynamique où les activités se regroupent dans des espaces flexibles bien équipés». Une
communauté flexible est donc une communauté capable de créer un sentiment au lieu. Cedric
Price, cité par Kronenburg (2007), apporte l’idée que les bâtiments sont des objets qui

15
définissent l’espace public flexible plutôt que des environnements individuels. La flexibilité des
espaces est donc un élément important dans l’aménagement, car elle favorise une plus grande
variété de comportements sociaux, créant ainsi des espaces qui répondent aux besoins d’une
plus grande clientèle (Lawson, 2001).

« Le lieu de rencontre étant la quintessence de l’espace flexible. Il doit satisfaire aux besoins
multiples des usagers […] Une place de ville peut servir de parc de stationnement pendant la
semaine, de marché le samedi, d’emplacement pour un concert public le dimanche […] C’est
un espace adaptable, dont les limites sont bien définies, mais d’accès néanmoins ouvert. »
(Kronenburg 2007 : 58)

3.2 La flexibilité de l’architecture

Comme il a été défini plus haut, la flexibilité c’est la capacité de s’adapter, de se transformer et
d’évoluer afin de répondre aux besoins des usagers : « L’architecture flexible s’adapte au lieu
de stagner, se transforme plutôt qu’elle ne limite, est motrice plutôt que statique, interagit avec
ses utilisateurs au lieu de les restreindre à une utilisation prédéfinie » (Kronenburg, 2007 : 11).
Plus à l’échelle de l’architecture de l’habitation et de sa parcelle, la flexibilité est une notion tout
aussi importante que pour les espaces publics; le contexte de la société actuelle et les besoins
changeants engendrent la nécessité de créer des systèmes habitables facilement
assemblables et modifiables. Une habitation flexible, c’est une habitation qui s’adapte aux
besoins humains et aux changements personnels, pratiques ou technologiques (Barabé-Pépin,
2010). Cette flexibilité est donc autant spatiale, perceptuelle que matérielle et optimise
l’habitabilité de la parcelle : « peut-être un bâtiment qui répond à vos besoins individuels au
moment présent, mais que vous pouvez investir au cours de votre vie pour ensuite le diviser à
vos enfants pour qu’ils puissent avoir chacun un habitat de départ lorsqu’ils en auront besoin »
(Kronenburg, 2007 :11). En se basant sur les analyses de ce dernier auteur, cet essai (projet)
se concentre sur les capacités de transformation et d’évolution de l’architecture flexible.

16
3.2.1 Capacité de transformation

« Un édifice transformable est donc celui qui change de forme, de volume,


d’apparence par une altération physique de structure, d’enveloppe extérieure ou
de surface intérieure, entraînant une modification significative dans la manière
dont il est utilisé ou perçu. C’est une architecture qui s’ouvre, se ferme, s’étend
et se contracte. » (Kronenburg, 2007 :146)

La capacité de transformation de l’architecture peut donc prendre la forme d’espaces ou


d’éléments facilement manipulables au jour le jour, ou qui ont la capacité de se transformer
avec un minimum de perturbations et de dépenses pour une période plus longue. Le projet
« The Drop House », gagnant du Modular Architecture Challenge en 2005 est une bonne
illustration de la capacité de transformation de l’architecture. En effet, ce module
rectangulaire possède des unités, volumes, qui peuvent sortir du volume principal comme
on tire un tiroir d’une commode.

Figure 4 : « The Drop House », précédent démontrant la capacité de transformation de l’architecture (Source :
http://d3architectes.fr/drophouse01.htm).

17
Ainsi, cuisine, salle de bain, espace d’entrée et chambre sont des modules qui s’ouvre une
fois l’habitation implantée sur le sol. L’occupant peut donc moduler l’espace selon ses
besoins et ses envies. Il peut ainsi jouer avec son degré d’intimité ou de transparence ou
complètement fermer la résidence pour des absences plus longues. Le plan et les images
en annexe démontrent la capacité de transformation et la possibilité d’appropriation de
cette résidence par l’individu. Cette action physique simple de pouvoir transformer son
habitat peut non seulement modifier l’espace, mais aussi intensifier la relation de l’usager
avec le bâtiment et son environnement changeant (Kronenburg, 2007).

3.2.2 Capacité évolutive

Selon Habraken (1999), l’architecture exige de nouveaux principes de conception qui


puissent rendre effectif le changement. Il propose que les bâtiments consistent en des
structures équipées de branchements auxquelles on ajouterait des pièces et des espaces
en fonction de l’expérience et de l’usage. Ces notions représentent la capacité d’évoluer
de l’architecture. L’évolution, c’est une amélioration, un avancement de qualité de vie.
Suivant les besoins et les changements de la société, il s’agit d’une expansion, d’une
diminution ou d’une segmentation de la maison originale (Friedman, 2003a). Ainsi, la
maison évolue avec le ménage qui l’occupe selon que celui-ci a besoin de plus d’espace,
ou de moins, ou si la structure du ménage change et qu’une subdivision est nécessaire à
la qualité de vie des individus. C’est ce que Friedman (2003a) introduit comme une
« construction discontinue ». « Un projet ne s’achève pas au moment de la livraison au
client, mais fait partie d’un processus d’utilisation continu, d’adaptation et d’évolution sur
lequel influents les usagers et habitants » (Kronenburg, 2007 :58). Selon Friedman
(2003a), c’est la capacité pour une famille de faire l’acquisition d’une maison à coût
abordable et de l’améliorer ou de l’agrandir selon les besoins et le rythme financier en y
ajoutant une construction additionnelle, un garage, un espace à bureau, un logement
supplémentaire ou tout autre besoin qui se fera ressentir au cours des années. La capacité
évolutive d’une habitation permet donc une augmentation de la qualité de vie des habitants
tout en permettant une évolution continue de la communauté selon les changements
sociétaux et mondiaux.

18
3.3 L’adaptabilité des espaces intérieurs

« Il semble que dans la société post-moderne ce sont moins les caractéristiques du logement
comme forme construite qui ont de l’importance, mais plutôt la manière dont les sujets
prennent la liberté de l’aménager » (Bernard, 1993 : 370). La capacité d’adaptation des
habitations est donc primordiale lors de la conception. Brown (2005) abonde dans ce sens en
introduisant que le petit « plus » d’une habitation sans compromis est la possibilité d’adapter la
superficie du logement en fonction de ses besoins. « Concevoir une architecture adaptable,
c’est reconnaître que l’avenir n’est pas défini, que le changement est inévitable, mais qu’un
cadre est un élément important pour permettre à ce changement d’advenir » (Kronenburg,
2010 : 115). Un édifice adaptable est donc celui qui sait répondre à différentes fonctions,
modes d’usage et exigences des usagers. Kronenburg introduit également les notions de
l’« open building » comme moyen de faire une architecture souple qui peut s’ajuster. Ce
concept, introduit initialement par Habraken (1976), est une méthode de conception qui
combine adaptabilité et répétition par l’élaboration de principes de planification selon lesquels
on retrouve une flexibilité de configuration des espaces intérieurs tout en conservant une
structure constante (Friedman, 2003a). Ces stratégies d’aménagement proposent que l’espace
s’adapte à l’occupant, cela permettant à celui-ci de marquer son individualité et de s’approprier
son « chez-soi ». Certaines dimensions de l’adaptabilité sont mises de l’avant dans cet essai
(projet) soit la multifonctionnalité et l’interaction des espaces intérieurs, et ce, par l’utilisation
d’un mobilier intégré flexible, de cloisons amovibles et d’espaces en formule aire ouverte dans
les habitations.

3.3.1 La multifonctionnalité

Tel qu’il a été introduit plus haut par Kronenburg (2010) et Friedman (2003A), les concepts
d’ « open building » mettent de l’avant une multifonctionnalité des espaces. « Chaque
espace dans un petit logement doit gagner sa superficie en jouant plusieurs rôles »
(Traduction personnelle de Gauer, 2004 : 160). Toujours selon Gauer, les notions de
« plan libre » ou d’ « open building » sont directement liées avec la multifonctionnalité car
offrant plusieurs façons d’obtenir le maximum fonctionnel de l’espace minimal : «c’est une
19
opportunité de faire plus avec moins » (Gauer, 2004 : 163). Comme espace limité vient
souvent de pair avec compromis, la multifonctionnalité permet une flexibilité du lieu qui
réduit ces compromis par une meilleure optimisation de l’espace le rendant plus habitable
et confortable pour l’occupant. Brown (2005) dans son ouvrage « The very small home »
introduit de nombreuses solutions efficaces aux petits espaces en intégrant des fonctions
« tiroirs » ou en utilisant des cloisons amovibles. Ces différentes options permettent de
créer une intimité lorsque nécessaire en fermant temporairement des espaces ouverts.
L’itHouse conçue par Taalman Koch Architecture est une illustration de la flexibilité du lieu
par la multifonctionnalité.

Figure 5 : « ItHouse », précédent démontrant la multifonctionnalité (Source : http://tkithouse.com/).

En effet, il s’agit d’un intérieur flexible dans une structure rigide et constante. Des mobiliers
intégrés en bloc sont ainsi insérables pour organiser l’espace et des systèmes de couches
filtres pour l’intimité peuvent être ajoutées et déplacées sur les parois vitrées selon les
besoins des occupants.

20
3.3.2 L’interaction : entre transparence et hiérarchie

Bien que la multifonctionnalité maximise l’efficacité de l’espace et la flexibilité du lieu, il est


important de respecter une certaine hiérarchie entre les différentes pièces de l’habitat. « La
manière dont une pièce interagit, dialogue, avec les autres pièces et avec l’extérieur est
beaucoup plus importante que sa dimension » (Gauer, 2004 : 94). La hiérarchie étant la
façon dont les espaces sont organisés et comment l’occupant circule à travers eux, il est
primordial d’accorder une importance relative aux espaces, et ce, par leur forme, grandeur
ou emplacement à travers la maison. Ainsi la notion de progression et de transparence
entre les pièces apparaît. Selon Gauer (2004), il est important de créer un niveau de
transparence entre certaines pièces selon les interactions désirées entre elles. La
superposition spatiale est un moyen d’assurer la transparence par la création de
panoramas à travers plusieurs couches d’espaces (Gauer, 2004). Hiérarchie,
transparence, progression et échelle sont donc des termes importants selon lui pour une
bonne appropriation de l’espace intérieur par l’occupant. La théorie de Kahn, présentée
par Mastelan (2005) sur les espaces servants et les servis s’applique à l’aménagement de
petits espaces habitables ainsi qu’aux principes d’interaction et de hiérarchie mentionnés
plus haut. La hiérarchie spatiale, proposée par Kahn, définit qu’un espace contient les
services tandis qu’un autre les reçoit. Les « services » contiennent les espaces
fonctionnels dédiés aux usages et doivent donc être en relation directe avec l’espace servi.
Un niveau de transparence sera alloué entre les deux types d’espaces selon la volonté
d’ouverture et d’interaction désirée par l’occupant. Un espace à aire ouverte dont le
mobilier servant est intégré au mur et dont le reste de l’espace est laissé libre d’utilisation
correspond aux théories de Kahn tout en permettant une adaptabilité des espaces selon
les besoins et usages de l’occupant. L’espace servi ayant le caractère renouvelable et
polyvalent de l’espace multifonctionnel décrit précédemment.

21
22
4.0 L’ESSAI EN RÉSUMÉ : LA CARTE DES CONCEPTS

23
24
5.0 INTIMITÉ À PROXIMITÉ : LE PROJET

5.1 Présentation du projet et mission

Le projet présenté se veut un repositionnement des bases et des habitudes d’habiter au


Québec. Les maisons souvent de plus en plus inaccessibles et les condominiums ne
satisfaisant pas tous les besoins des usagers, cet essai (projet) se veut une proposition
d’alternative flexible et abordable à l’idée de la maison unifamiliale. Ce projet d’habitation est
plus qu’un simple quartier résidentiel, il s’agit d’un habitat répondant aux problématiques et au
contexte actuel et futur. Misant sur les notions de flexibilité et d’adaptabilité de l’espace
élaborées dans le cadre théorique, c’est une conception de modules et de typologies pouvant
s’amalgamer de diverses manières afin de permettre à l’individu de s’approprier l’espace.
L’addition de ces habitations autour d’espaces communs riches et flexibles pour la
communauté crée un milieu de vie urbain de qualité. Cet essai (projet) vise donc une nouvelle
image de quartier accessible, appropriable et avec un esprit de communauté fort par
l’utilisation d’une architecture résidentielle pertinente et bien pensée par sa flexibilité, son
interaction et la qualité de vie qu’elle engendre.

5.2 Proposition programmation

Cet essai (projet) comprend plusieurs échelles et s’appuie sur divers précédents de projets
faits au Québec et à l’international afin d’élaborer un programme final réaliste et approprié aux
besoins du site d’implantation du projet. Le présent projet mise sur des espaces individuels
minimaux au profit de grands espaces communs, et ce, à toutes les échelles en se basant sur
les notions de ville durable de Maugard & Cuisinier (2010). Il se composera de :

 Place publique centrale interactive (pouvant accueillir spectacles, marchés, festivals, etc.);
 Commerces accessibles (épicerie, restaurants, cafés, boulangerie, dépanneur, garderie,
etc.);
 Pôle de transport en commun et gare intermodale;
 Espaces à bureaux;
 Grands espaces verts avec jeux d’enfants multifonctionnels et flexibles;
 Parcs;
 Espaces de jeux d’eaux et bassin de rétention;
 Piscines publiques intérieures et extérieures;

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 Espaces locatifs communautaires;
 Centre récréatif

 Une variété de typologies d’habitations (maisons unifamiliales, jumelées, en rangées et de


petits immeubles locatifs);
 Zones piétonnières et piste cyclable;
 Rues partagées
 Stationnement intérieur pour les résidents

Selon les principes de flexibilité et d’interaction, plusieurs éléments de ce programme seront


mis en relation à travers des schémas organisationnels afin de promouvoir les relations
humaines et un esprit de communauté fort. Il est certain que ce programme peut évoluer et
s’adapter à travers le développement du projet.

5.3 Objectifs de design : l’avant-projet

En s’appuyant sur le cadre théorique discuté et élaboré plus haut et la mission du projet, cet
essai (projet) sera basé sur des objectifs de design qui guideront le développement de
chacune des étapes de réalisation de celui-ci. Ces objectifs d’avant-projet permettent de fixer
les bases et les volontés qui permettront d’intégrer les notions théoriques au projet final, et ce
à toutes les échelles de celui-ci. Le projet se transcrit à travers trois échelles distinctes mais
complémentaires passant de l’échelle urbaine à l’échelle de l’individu et de son « chez-soi ».
C’est à travers la mise en pratique du cadre théorique élaboré dans la première section et
l’interaction constante entre les différentes échelles que cet essai (projet) prend place.

5.3.1 Échelle « macro » : l’aménagement urbain et la mixité dans la communauté

[1] Créer des espaces publics flexibles et stimulants pour les habitants par la perméabilité
et l’interaction.

« Là où sont construites les maisons on a envie de voir se développer pendant la journée


une activité économique de proximité. Non loin de là, une médiathèque, un cinéma, deux
ou trois restaurants et quelques bâtiments administratifs seraient les bienvenus »
(Maugard & Cuisinier, 2010 : 19). Il est introduit ici la notion d’intensité de quartier au lieu
26
de densité de quartier. Plus qu’un simple complexe technique, le quartier est conçu
comme un écosystème humain, comme un corps vivant. La présence d’espaces de vie
communs dans un quartier favorise grandement le potentiel d’échange et d’interaction
entre les individus. La notion de centre étant importante pour l’individu (Hall, 1971), il est
important de créer et de mettre en dialogue des points de références afin que celui-ci
comprenne son environnement et se l’approprie. Afin de créer une perméabilité à l’échelle
humaine, les notions de distance développées par Lawson (2001) et les distances de
parcours seront prises en compte afin de relier les différents points de rencontre avec les
typologies d’habitation.

[2] Créer un esprit de communauté fort et d’identification au quartier par la mixité

Afin de créer un esprit de communauté fort, cet essai (projet) mise sur une mixité autant
fonctionnelle que sociale, et ce à différentes échelles. En se basant sur les notions
introduites par Friedman (2003a et 2003b), l’ensemble de la communauté s’inspire des
habitations étroites et rapprochées, d’une organisation autour de noyaux commerciaux et
des transports en commun, d’une mixité sociale et fonctionnelle, d’une variété de
possibilités d’habitations, des nombreux espaces communs et d’un environnement où les
résidents sont indépendants de l’automobile. Pour créer une mixité sociale, plusieurs
typologies d’habitation sont donc proposées et la distribution de ces typologies et fonctions
se fait selon une densité décroissante à partir du centre vers les extrémités. « Les
nouvelles communautés doivent offrir […] un environnement qui rejoint leurs préférences
et qui leur apporte des avantages significatifs pour compenser la densité plus élevée »
(Friedman, 2003a :2). Le nouveau quartier de cet essai (projet) se base sur les stratégies
de ce dernier pour la densification des nouvelles communautés :

 Réduction de la dimension des lots résidentiels;


 Réduction des largeurs de rues;
 Densification initiale ou ultérieure des lots réalisable grâce aux possibilités
d’expansion;
 Maximisation de l’espace.

27
5.3.2 Échelle « méso » : la collectivité et l’échelle humaine

[1] Réinterpréter la rue afin de proposer une interface à l’échelle humaine


En s’appuyant sur les concepts de distances et de sentiment de sécurité de l’individu dans
son milieu, cet essai (projet) tente de redéfinir la rue du quartier à une échelle humaine en
la développant sous le système de rue partagée. Une rue partagée permet un sentiment
de sécurité chez l’individu car celui-ci peut facilement le comprendre et se l’approprier,
l’appropriation de l’espace se faisant par une capacité de contrôle, d’appropriation et de
territorialité (Serfaty-Garzon, 1999). Misant sur la perméabilité piétonne et cycliste, cette
rue partagée pavée est développée en respectant les échelles de distance et d’interaction
entre les individus de Lawson (2001) tout en permettant un accès motorisé contrôlé aux
habitations.

[2] Créer une unité collective dynamique de l’architecture de la communauté tout en


permettant une personnalisation de l’habitation par l’occupant.

Le développement des typologies d’habitations de cet essai (projet) est fait dans un souci
d’unité visuelle et identifiable de la communauté. Avec l’élaboration d’une architecture
flexible et adaptable, l’occupant peut choisir et transformer son habitation selon son
parcours, son cycle de vie. Des options de superficies et de composants permettront de
répondre aux besoins autant spatiaux qu’économiques des différents types de ménages et
ce toujours dans une volonté de ne pas interférer avec l’unité visuelle de la communauté.
Ainsi, des configurations et hauteurs moins contrastantes entre les différentes typologies
assurent une plus grande harmonie. De plus, la conception de modules est faite mettant
de l’avant un système de proportions entre les vides et les pleins, la transparence et
l’opacité. Finalement, un traitement avec la matérialité vient lier la communauté en lui
donnant une unité visuelle collective à laquelle les occupants s’associeront.

[3] Réinterpréter la notion de cour arrière pour créer une diversité d’espaces privés et
semi-privés appropriables par l’individu et les ménages

Afin de permettre à chacun de trouver son « chez-soi », son équilibre, une diversité
d’espaces sont développés dans cet essai (projet) permettant ainsi des lieux d’échanges
28
et de proximité. Une cour arrière privée est quand même toujours traitée pour les
différentes variétés d’habitations afin de permettre à l’occupant de se sentir chez lui. Des
espaces de transition divers sont également mis en place afin que l’individu puisse
s’approprier son espace, que ce soit du côté de la cour et des espaces semi-privés que de
l’espace d’interstice entre les habitations. Plusieurs espaces de prolongements de l’habitat
sont donc développés pour que l’occupant puisse moduler ses besoins d’intimité et de
sociabilité. Il peut ainsi contrôler son environnement extérieur immédiat.

5.3.3 Échelle « micro » : les typologies d’habitation et le « chez-soi » équilibré

[1] Créer une augmentation de la qualité de vie des occupants par la proposition d’une
variété de typologies d’habitations flexibles et appropriables par l’individu ou le ménage.

Cet essai (projet) propose une variété de typologies d’habitations allant de la maison
unifamiliale aux petits édifices locatifs permettant de répondre à la diversité des ménages,
des budgets et des besoins. Ces habitations sont basées sur les principes de flexibilité et
d’appropriation de l’espace afin de donner l’autonomie à l’occupant de faire évoluer sa
maison avec lui selon ses besoins et usages. De plus, le développement de plusieurs
typologies unifamiliales permet d’explorer les notions d’intimité et de maximisation de
l’espace intérieur, et ce, afin de proposer une diversité pour les individus et les ménages.

[2] Aménager l’espace de l’habitat pour créer un équilibre entre les besoins d’intimité et de
sociabilité des occupants par une hiérarchisation des espaces et l’élaboration d’espaces
multifonctionnels et modulables.

Les notions d’espace de transition entre le privé et le public, décrites plus tôt, sont
intégrées à la conception des typologies d’habitations. Plusieurs systèmes sont donc
développés afin que l’occupant puisse contrôler son environnement (ouverture et
fermeture de pièces, contrôle de la transparence et de la fenestration, etc.). Il peut
également s’approprier son espace intérieur en le transformant selon ses besoins et
usages grâce à une conception priorisant l’adaptabilité des espaces et la
multifonctionnalité. Afin de pousser les notions d’intimité de l’habitat plus loin, une réflexion
sur les hauteurs de planchers intérieurs et extérieurs est faite à travers le développement à
cette échelle de l’essai (projet).
29
5.4 Mise en contexte et site d’implantation

Étant donné la nature et les objectifs du projet, plusieurs sites potentiels ont été envisagés.
Une analyse des sites éventuels et le choix final a été fait en coordination avec le
directeur/superviseur de ce projet. Le site d’implantation choisi est situé au coin du boulevard
d’Estimauville et du boulevard Saint-Anne. Ce site est au cœur du Programme Particulier
d’Urbanisme de la Ville de Québec prévu pour le secteur d’Estimauville.

Figure 6 : Localisation du projet dans la Ville de Québec.

Le projet proposé s’implante précisément à l’endroit même où est prévu un quartier résidentiel
et se veut une alternative à celui-ci. Il s’agit donc du site prévu pour la phase 1 du projet d’éco
quartier proposé par la Ville de Québec et en cours de développement par LeBoeuf Société
Immobilière, mais auquel est ajouté le terrain de l’entrepôt Caron & Guay (figure 7). Dans le
cadre de cet essai (projet), ce dernier terrain est inclus pour améliorer la connexion avec les
quartiers existants et unifier le tissu urbain. La relocalisation de cet entrepôt dans un secteur
plus approprié à son usage est ici suggérée. Central dans le plan d’ensemble du PPU du
secteur d’Estimauville, ce site offre plusieurs opportunités s’avérant pertinentes pour le

30
développement de cet essai (projet). Étant donné sa localisation et la restructuration du
secteur prévue, ce site semble pertinent pour la mise en pratique du cadre théorique
développé plus tôt. Le présent projet questionne donc le plan d’ensemble de cette phase,
reprend plusieurs principes de base du PPU et y intègre les objectifs et enjeux visés par le
cadre théorique* .

Figure 7 : Illustration démontrant le site d’implantation du projet.

5.4.1 Le contexte du Programme Particulier d’urbanisme de la Ville de Québec


pour le secteur d’Estimauville et les particularités du site d’implantation

La Ville de Québec désire assumer un leadership concernant l’avenir du secteur


D’Estimauville ce qui l’amène à adopter un programme particulier d’urbanisme (PPU) pour
cette partie de son territoire. Elle veut donc créer un mécanisme d’encadrement afin de
faire une planification particulière et détaillée. Le PPU présente donc les orientations et le
projet d’aménagement et servira de document de référence essentiel à l’atteinte des
objectifs d’aménagement et de développement de la Ville de Québec.
31
Ce secteur occupe un emplacement stratégique à quelques minutes du centre-ville grâce
aux volontés de transport en commun et de l’insertion d’une ligne de tramway.

« L’objectif est la revitalisation d’un quartier devenant, au fur et à mesure de


l’achèvement des interventions, de plus en plus agréable à habiter, travailler et
se divertir, tant pour ses occupants actuels que futurs. Les différents éléments
s’imbriquent les uns dans les autres pour former une nouvelle dynamique de
quartier offrant des lieux de travail et de loisirs à proximité des logements. Ses
constructions et aménagement s’intègrent à la trame urbaine et aux
équipements récréotouristiques, ce qui favorise le transport en commun et la
fréquentation des circuits piétonniers et cyclables. Les aménagements
procurent aux citoyens une bonne qualité de vie. » (R.V.Q. 1919 : 20)

Cet essai (projet) s’appuie donc sur la vision globale du PPU ainsi que sur l’analyse du site
et du secteur afin de développer un projet qui fait une mise en application des principes
théoriques présentés sur le site d’implantation de l’éco quartier prévu.

Utilisation du sol – contexte environnant


L’usage prédominant dans le secteur est le
commercial. De plus, une grande présence
au sol du réseau automobile et
d’équipements de transport est observable.
Une grande proportion de stationnements et
de terrains vacants est aussi présente dans
Figure 8 : Utilisation du sol – contexte environnant (Source :
Ville de Québec – PPU). le secteur.

Réseau cyclable du secteur


Le réseau cyclable du secteur est incomplet.
La proximité de la piste du corridor du littoral
et de la Baie de Beauport est un élément
important et plus particulièrement pour le site
du quartier. Le plan directeur de la ville
propose de compléter le réseau cyclable et
Figure 9 : Réseau cyclable (Source : Ville de Québec – PPU).
d’ajouter des circuits afin de le consolider.

32
Réseaux de transport en commun existants
Il s’agit d’un secteur bien desservi par le
transport en commun. Plusieurs parcours
(métrobus, expres et réguliers) sont présents
et le terminus Beauport est à proximité. Par
contre, les installations pour les usagers sont
déficientes et réduisent le confort des
Figure 10 : Réseaux de transport en commun existants
(Source : Ville de Québec – PPU).
utilisateurs (peu d’abris, pas de mobilier
urbain, etc.)

Affectations prévues du sol dans le PPU


L’affectation principale prévue est
l’affectation mixte (M) qui vise la diversité des
fonctions. Les commerces et services (C)
vise des services qui répondent aux usagers
et individus. L’affectation résidentielle urbaine
(R) vise un développement en hauteur et
Figure 11 : Affectations au sol prévues (Source : Ville de
Québec – PPU).
relativement dense. L’affectation récréation,
parc et espaces verts (PEV) vise autant la
place publique que les parcs et la gestion
des eaux et sont réunis dans un seul endroit.

Concept d’aménagement de l’éco quartier


Une grande esplanade verte linéaire traverse
du nord au sud. Un réaménagement des
artères stratégiques est prévu soit l’avenue
d’Estimauville et le boulevard St-Anne. Il
s’agit d’un développement du secteur selon
quatre axes (affaire, commerce, santé,
Figure 12 : Concept d’aménagement de l’éco quartier
(Source : Ville de Québec – PPU).
récréation). Une densification du territoire sur
les lots vacants et bâtiments désuets est
envisagée.

33
5.4.2 Préférences résidentielles de la population : élaboration du projet

Selon l’étude 2010 sur les préférences résidentielles de la population de la région


métropolitaine de Québec, faite par Léger Marketing, démontre qu’environ 40% de la
population serait intéressée par le concept de quartier mixte et écologique. Cette étude
démontre également que plus de 60% des personnes intéressées par ce genre de quartier
désirent opter pour une maison unifamiliale. Aucune préférence n’a été notée par contre
entre la maison en rangée, la maison jumelée ou la maison isolée. Suite à la lecture de
cette étude, une analyse de la proposition résidentielle du quartier proposé par LeBoeuf
Société Immobilière et prévu sur le site d’implantation choisi a été faite. Cette analyse
révèle donc que 746 logements au total sont prévus sur le site de l’éco quartier. Sur ces
746 logements, 710 seront des condominiums, ce qui représente 95% de l’offre totale. Le
5% restant seront donc 36 maisons en rangées. L’offre résidentielle prévue par l’éco
quartier du secteur d’Estimauville ne répond donc pas aux préférences résidentielles des
intéressés. Cet essai (projet) se concentre, quant à lui, sur l’élaboration d’un quartier mixte
optimisant une offre résidentielle diversifiée incluant une plus grande proportion de
maisons unifamiliales. Avec environ 700 logements, soit un peu moins que ce qui est
prévu actuellement sur le site, ce projet de quartier mixte propose 30% de maisons
unifamiliales et 70% de logements répartis en formule condominium et en formule locative.
Intimité à Proximité est donc un quartier qui optimise la perméabilité piétonne et les
espaces communs, répond mieux aux préférences résidentielles de la population et crée
un milieu de vie de qualité tout en étant aussi dense en terme de nombre total de
logements et de superficie pour les commerces et espaces à bureaux que ce qui est
proposé actuellement.

34
5.4.3 La démarche méthodologique

Cet essai (projet) s’inscrit dans une démarche particulière comprenant plusieurs échelles
telles que le quartier et des espaces communs, l’architecture de l’habitation et
l’implantation sur la parcelle ainsi que l’aménagement intérieur. Se basant sur les enjeux
développés dans le cadre théorique, il s’agit, dans un premier temps, d’une démarche
d’élaboration de propositions d’aménagement urbain. Celle-ci sera basée sur des analyses
de précédents et des études de cas de quartiers ou communautés de même échelle ou
ayant un programme similaire. Il est certain qu’à cette étape l’utilisation de croquis sera
mise de l’avant afin de concevoir la ligne directrice du projet. Ces propositions et croquis
de recherche d’ambiances seront fondés sur une analyse de site et de sa connexion avec
les environs (typologies du bâti, transports en communs, PPU de la ville de Québec, etc.)
ainsi que d’une évaluation des parcours des usagers dans le quartier du site en question.
Cette démarche permettra d’implanter la communauté sur des bases solides dans un souci
constant de connexion avec la ville et les abords du site. L’établissement de parcelles
types d’implantation pour le bâti résidentiel, ainsi qu’une proposition du positionnement des
différentes typologies d’habitations, seront développées en même temps que
l’aménagement urbain global du quartier. La démarche de développement des unités
d’habitation se développera quant à elle beaucoup avec l’utilisation des maquettes et de
modélisations virtuelles afin de tester toutes les opportunités que peuvent proposer les
typologies d’habitations. L’aménagement intérieur sera conçu en dialogue constant avec
les unités dans leur ensemble, l’un n’allant pas sans l’autre. Il est certain qu’à la plus petite
échelle, les modélisations virtuelles et les croquis seront mis de l’avant pour comprendre et
bien ressentir les ambiances.

Cet essai (projet) applique donc les principes de flexibilité et d’adaptabilité, ainsi que les
notions du « chez-soi » et de l’appropriation de l’espace dans le projet de design, et ce à
toutes les échelles, allant du design urbain du quartier à la conception intérieure des
typologies d’habitation. De plus, cet essai (projet) envisageant de s’intégrer en lien avec le
PPU de la Ville de Québec pour le secteur d’Estimauville, une démarche de recherche et
d’information constante sur ce sujet est également développée. Une assistance aux
consultations publiques et autres présentations sur ce sujet d’actualité est primordiale afin
de mener à bien ce projet d’envergure.
35
5.5 Développement du projet : de la théorie au quartier d’habitation

C’est par l’élaboration de systèmes d’habitation et d’espaces mettant constamment en relation


l’intimité et la sociabilité que ce projet priorise la relation de l’individu avec l’extérieur et avec
les autres (figure 13). Il s’agit d’une exploration au niveau des espaces de vie extérieurs, ceux-
ci passant graduellement du privé vers le collectif. L’individu peut ainsi trouver son « chez-
soi », celui qui lui est propre, et former son équilibre à travers une flexibilité et une diversité
d’espaces, et ce, autant dans les espaces privés que communs. Cet aménagement permet à
la fois d’exprimer la solidarité et l’individualité, l’architecture ayant le pouvoir de créer des
occasions pour les occupants d’un lieu de rencontrer, d’interagir et d’échanger.

Figure 13 : Image conceptuelle synthèse du cadre théorique intégrée dans le projet.

Bien que cet essai (projet) se veut une proposition de quartier mixte, il mise avant tout sur les
relations entre le « chez-soi » (l’habitation) et le milieu de vie extérieur, ainsi que sur leur
dialogue constant. Il se concentre donc plus précisément sur les relations humaines, la notion
de distance et les espaces de transitions, ainsi que sur le pouvoir de l’aménagement comme
catalyseur de sociabilité. En réfléchissant le quartier à l’échelle de l’individu et de ses besoins,
cet essai (projet) se veut un quartier où l’usager occupe une place de choix dans un
environnement flexible et appropriable.

36
5.5.1 L’échelle du quartier et de ses espaces urbains

Cet essai (projet) se voulant une exploration d’une façon d’habiter au Québec à travers un
quartier mixte, une communauté de proximité et d’échanges, l’échelle du quartier et des
espaces urbains est primordiale. Intimité à proximité est donc un projet d’ensemble
priorisant des espaces publics et urbains forts et rassembleurs à travers une
programmation proposant une mixité de fonctions. En désirant mettre constamment
l’intimité et la sociabilité en relation, le projet à l’échelle urbaine du quartier priorise
l’interrelation entre les espaces et le dialogue constant entre l’aménagement et
l’architecture.

Ce projet propose donc plusieurs principes architecturaux et d’aménagement urbain qui


viennent transcrire ces enjeux théoriques. Ces principes permettent une stimulation de la
vie urbaine et une hiérarchisation des espaces, ceux-ci passant graduellement du collectif
vers l’individuel. Les espaces publics sont considérés comme des lieux importants pour
stimuler la vie sociale et l’identité d’une communauté et d’un quartier. Ce projet met donc
en place des principes conceptuels prônant des espaces de rencontres stimulants et
diversifiés permettant à chacun de trouver la centralité relative qui est propre à ses
besoins et ses désirs. Chaque échelle d’espace affirme une certaine centralité dans son
milieu et devient un point de référence pour son environnement immédiat, et ce à l’intérieur
du quartier.

37
Lignes directrices à la base de la forme et de l’organisation du quartier

1) Connexion du projet avec les quartiers existants

Afin de consolider le tissu urbain, des liens connecteurs avec le quartier existant sont mis
en place (figure 14). Une porte d’entrée piétonne au quartier est donc créée afin de lier
l’axe récréatif du boulevard Montmorency en étant son prolongement. De plus, cette porte
d’entrée publique mène à une place publique et crée une brèche entre l’axe d’affaire de
l’avenue d’Estimauville et le centre névralgique du nouveau quartier qui permet un
dialogue entre les deux et un espace public stimulant. Un axe nord-sud est créé partant de
la place de la gare multimodale et traversant le quartier. Cet axe lie le transport en
commun avec le cœur du quartier et donne accès aux différentes zones de celui-ci. Cet
axe peut être prolongé pour une phase 2 d’expansion du quartier. Finalement, le
prolongement d’une rue résidentielle existante permet l’accès au cœur du quartier et vient
consolider le nouveau quartier avec l’environnement existant.

Figure 14 : Schéma conceptuel de la connexion du projet avec les quartiers existants

38
2) Renforcement bâti le long des axes principaux

Renforcer les limites du quartier le long des axes publics principaux vient cintrer le quartier
d’habitation (figure 15). Une densification en forme de « L » est donc mise en place afin de
créer une mixité le long de l’avenue d’Estimauville et du boulevard Saint-Anne. Ces axes
d’affaire et de commerce représentent la « sociabilité intense », soit des espaces publics
très passants où l’intimité individuelle est peu possible. La densification et le renforcement
bâti crée ainsi une première barrière et hiérarchisation de l’espace transformant l’axe nord-
sud en un espace semi-public. On y retrouve alors une densité plus élevée et une mixité
avec des commerces grande surface et de proximité, des restaurants, des bars, des cafés,
des espaces à bureaux, des organismes publics et de transport en commun ainsi que des
habitations en condominiums et en locations.

Figure 15 : Schéma conceptuel du renforcement bâti le long des axes principaux.

39
3) Densification décroissante du bâti

Un principe de densification décroissante à travers le quartier a été développé. Cette


décroissance s’effectue en partant des limites du quartier jusqu’au cœur (figure 16). En
analogie avec la théorie développée sur l’intimité et la sociabilité, la densité est plus
importante dans les zones plus publiques, sociables, du quartier. Elle est donc moins
importante au cœur du quartier et dans les zones plus intimes. Le projet se voulant une
maximisation de l’occupation au sol, cette densification décroissante s’opère en hauteur
(figure 17). Chaque individu ou chaque ménage peut donc trouver son équilibre propre,
son « chez-soi », entre ses besoins de sociabilité et d’intimité grâce à cette densification
décroissante qui permet une diversité et une mixité de l’offre autant pour le type
d’habitation que pour le type d’espace extérieur qu’elle génère.

Figure 16 : Schéma conceptuel du principe de densification allant des limites jusqu’au cœur du quartier.

Figure 17 : Schéma conceptuel de la densification décroissante selon la hauteur des bâtiments.

40
4) Perméabilité piétonne à travers le quartier

Une perméabilité piétonne est mise de l’avant afin de poursuivre le principe de


hiérarchisation des espaces et de consolider l’esprit d’appartenance à la communauté
(figure 18). Elle permet ainsi une circulation stimulante des espaces collectifs jusqu’aux
espaces privés des habitations. En étant le lien entre le public et le privé, ces espaces
perméables viennent créer un équilibre à travers le quartier. De plus, ce principe
conceptuel permet d’offrir la diversité d’espaces publics, semi-publics et semi-privés
désirée dans le projet afin que chacun puisse se créer son propre équilibre à travers un
quartier d’échanges et de proximité.

Figure 18 : Schéma conceptuel démontrant la volonté de perméabilité piétonne à travers le quartier.

Ces quatre grands principes conceptuels ont guidés l’organisation et la distribution du


quartier afin de lier les notions théoriques avec le projet à l’échelle urbaine. Un plan
d’ensemble a été mis de l’avant (figure 19) représentant la mise en pratique des notions
théoriques et a été la base de développement de cet essai (projet). Ce plan d’ensemble
intègre et met en place plusieurs concepts qui définissent divers espaces et volontés
d’aménagement.
41
Figure 19 : Plan masse du projet

42
La place publique et les liens piétons

Figure 20-21 : Ambiance de la Place Publique tirée du projet de revitalisation de la Ville d’Andenne.
Figure 22 : Ambiance de la place centrale avec fontaines tirée du projet YueHawain Commercial District.

La place publique est le point focal du quartier,


le lieu d’échange et de référence par
excellence. Située dans le prolongement de
l’axe récréatif du boulevard Montmorency et en
lien direct avec la gare intermodale, cette place
devient la porte d’entrée du quartier à l’échelle
piétonne. Un tissu bâti dense et mixte l’entoure
et la consolide ce qui en fait un espace public
stimulant et interactif (figures 20 à 22). Cette
grande place se veut un espace flexible
pouvant accueillir plusieurs évènements et
fonctions allant du marché extérieur au
spectacle extérieur. Entourée de cafés,
restaurants, de bureaux et du pôle de service en commun, cette centralité du quartier est
dynamique et représente le point de sociabilité le plus fort du quartier (figure 23). Du côté
de l’avenue d’Estimauville est placée une sculpture, un point de référence pour les

43
habitants et utilisateurs du secteur ce qui en confirme sa fonction d’échange, d’interaction
et de rencontres. Tel que développé dans le cadre théorique tout individu a besoin d’un
point de référence afin de comprendre et de s’approprier son environnement. En plus de la
sculpture, un plan d’eau avec des fontaines est placé en son centre créant ainsi le pôle
public et le départ de l’esplanade verte qui donne accès au reste du quartier. Cette grande
place publique flexible devient donc un élément primordial du projet et ouvre ses portes
aux divers liens piétons qui pénètrent et parcourent le quartier.

Figure 23 : Plan conceptuel de l’aménagement urbain de la grande place publique.

44
Les pôles urbains

Dans le projet ont été intégrés deux pôles majeurs qui créent une interaction et un
dialogue constant entre le haut et le bas du quartier d’habitation (figure 24). Au nord, le
pôle du transport en commun avec la gare intermodale crée une porte d’entrée et un
mouvement constant à travers le quartier. La gare intermodale consolide celui-ci en
permettant un transport rapide et accessible pour se rendre au centre-ville et partout dans
la ville de Québec. La gare est en lien avec la place du transport sur le boulevard Saint-
Anne d’un côté et avec la grande place publique piétonne de l’autre. Un rez-de-chaussée
en transparence permet un dialogue constant entre la rue publique et active et la place
publique du quartier. Le deuxième pôle, situé au sud du quartier, est un centre récréatif.
Celui-ci en lien direct avec les pistes cyclables, le domaine Maizerets et l’accès à la Baie
de Beauport devient une centralité des activités
récréatives. Ayant une fonction opposée mais
complémentaire au pôle de transport en commun au
nord, cette centralité crée un mouvement continu à
travers le quartier et une consolidation du tissu
urbain. Chaque individu ou ménage se déplace vers
le pôle qui lui convient selon ses besoins et ses
activités. Une famille pourra ainsi aller travailler la
semaine en transport en commun en laissant leurs
enfants à la garderie, faire leurs commissions au
retour aux différents commerces du quartier et faire
des activités récréatives la fin de semaine, le tout
sans avoir à utiliser leur voiture. Ces deux pôles
permettent une mixité d’usage et de fonction
importante et un flux d’échanges et de vie sociale. Ils
sont également les points focaux qui créent la
richesse de l’esplanade verte et la vie urbaine active
du quartier.
Figure 24 : Schéma des pôles urbains.

45
L’esplanade verte

L’interaction des deux pôles urbains rend possible le développement d’une esplanade
verte stimulante. Il s’agit d’une diversité d’espaces semi-publics qui s’additionnent et
s’unissent à travers un grand espace vert qui traverse le quartier et trouve sa finalité au
nord par la place publique et la gare intermodale et au sud par le pôle récréatif (figure 25).
C’est sur cette esplanade qu’on trouve une diversité d’ambiances et de types d’espaces
ainsi que plusieurs services de proximité allant des commerces aux espaces
communautaires. Parsemée de terrasses,
de parcs, de plans d’eaux, de jeux
extérieurs, d’espaces de détente, d’un grand
bassin de rétention d’eau, de jardins et de
potagers reliés par une grande promenade,
cet immense espace semi-public crée une
intensité à l’intérieur du quartier. En y
trouvant tout ce qu’il a besoin, l’individu peut
s’approprier ce grand espace en se fixant
ses points de références et ses préférences
à travers la multitude de lieux que permet
cet axe vert et récréatif. Il s’agit donc du
développement d’un lien interactif et
unificateur du quartier qui consolide la
perméabilité piétonne. Bordé du côté de
l’avenue d’Estimauville par l’axe d’affaire
avec des bâtiments denses et mixtes,
l’esplanade verte mène aux espaces semi-
privés plus intimes du quartier. Elle est donc
le lien entre le public et le privé dans la
hiérarchisation des espaces extérieurs et
profite à toute la communauté.
Figure 25 : Zoom urbain : l’Esplanade verte.

46
L’échelle de l’espace semi-public du quartier a été développée en fonction de la hauteur
des bâtiments et des proportions appropriées permettant un espace à l’échelle humaine,
c’est-à-dire un espace où l’individu se sent à sa place, où il ressent l’envi d’y passer du
temps et qui augmente sa qualité de vie. Cette esplanade n’étant pas le sujet principal de
cet essai (projet), l’utilisation d’images de certains précédents analysés lors des études
préliminaires du projet permet de mieux cerner les volontés d’aménagement et d’espaces.

Précédents démontrant l’ambiance désirée sur la promenade et le long des terrasses :

Figure 26 : Quartier Nodelo, Québec Figure 27 et 28 : Promenade Champlain, Québec

Précédents démontrant l’ambiance et la flexibilité d’utilisation désirées près du bassin de


rétention d’eau et des parcs verts :

Figure 29, 30 et 31 : Quartier Nodelo, Québec

Les axes principaux bordant le quartier

Les axes principaux qui cintrent le quartier sont primordials et doivent permettre une
intensité urbaine. Un dialogue entre le quartier et ceux-ci est mis en place par des
percements permettant des accès autant piétons que motorisés. Le bâti le long est
densifier et permet une consolidation du tissu urbain par l’implantation de bâtiments mixtes
allant de 4-5 étages jusqu’à 7-8 étages. Selon le contexte et les bases du PPU de la Ville
de Québec l’axe de l’avenue d’Estimauville n’a pas la même échelle et fonction que celui
du boulevard Saint-Anne et les expériences qui y sont vécus par l’individu sont différentes.
47
Sur l’axe d’affaire de l’avenue d’Estimauville on retrouve donc une circulation automobile
accrue avec des bâtiments de plusieurs étages dans lesquels se trouvent en grande
majorité des espaces à bureaux du gouvernement et de compagnies privées. Celui du
boulevard Saint-Anne est par contre développé à une échelle plus humaine. En effet, la
présence forte du transport en commun amène une circulation piétonne importante et un
dynamisme de quartier (figure 32).
Sur cet axe, des bâtiments mixtes
comportant des commerces de
proximité au rez-de-chaussée et de
l’habitation aux 3 ou 4 étages au-
dessus créent une densité et un
niveau de confort plus grand pour
l’individu qui y circule et/ou y vit.
Figure 32 : Perspective du bâti le long du boulevard Saint-Anne.

Le traitement architectural des bâtiments de cet axe et la matérialité sont donc traités de
façon à ouvrir le dialogue entre les habitations aux étages, les commerces au rez-de-
chaussée et les utilisateurs de la rue. De plus, comme la rue d’accès menant au quartier
donne sur cet axe, le traitement de l’intersection s’avère très important. Ainsi, cette entrée
est un prolongement d’une rue existante et y est donc placé une épicerie et un
restaurant/café ce qui vient créer une vie urbaine active à ce point focal (figure 33).

Figure 33 : Perspective de l’intersection d’entrée du quartier sur le boulevard Saint-Anne.

48
La mixité des fonctions et la distribution typologique

Tel qu’introduit précédemment, une mixité des fonctions est mise de l’avant afin de créer
une intensité de quartier par une proximité et un dialogue entre les individus et les
ménages de la communauté. Ce projet propose donc une diversité de commerces de
proximité permettant une accessibilité piétonne à tous les services nécessaires à une
qualité de vie chez l’individu. Les différentes fonctions sont mises en dialogue et disposées
à travers le quartier selon l’intensité et le niveau de sociabilité recherché (figure 34). Les
commerces de grandes surfaces, les bureaux et les organismes gouvernementaux se
retrouvent donc le long de l’axe d’Estimauville et près de la place publique. Les petits
commerces de proximité tels que fruiterie, café du coin, dépanneur, boulangerie, etc., se
retrouvent plus près du transport en commun et de l’intersection d’accès au quartier. La
mixité des fonctions est donc faite en tenant compte de l’échelle humaine, des notions de
distances et de déplacements ainsi que de l’ambiance désirée dans l’aménagement.

Figure 34 : Distribution typologique du bâti à travers le projet et le secteur.

La distribution typologique est faite, quant à elle, en suivant le principe de densification


décroissante partant des axes principaux jusqu’au cœur du quartier. Nous retrouvons donc
les habitations en condominiums et en formule locative plus sur les axes forts et près de
l’espace semi-public. Les habitations unifamiliales se retrouvent plus en se dirigeant vers
49
le cœur du quartier. Une différenciation entre la densité des habitations unifamiliales est
également faite en passant de la maison en rangée à l’unifamiliale isolée. Dans les
différentes rues du quartier on retrouve donc visuellement cette dynamique de
densification décroissante partant de l’esplanade verte et allant jusqu’à la rue d’accès
(figure 35 et 36).

Figure 35 : Distribution des hauteurs selon le principe de densification décroissante.

Figure 36 : Élévation conceptuelle démontrant le concept de distribution typologique par densité décroissante.

50
La rue d’accès et la circulation interne du quartier

La hiérarchie d’échelle s’opère autant au niveau des accès motorisés que des espaces de
vie extérieurs collectifs. La rue d’accès du quartier se trouve donc à être à une échelle plus
humaine que le boulevard Saint-Anne. Lorsqu’on passe l’intersection de ces deux rues,
l’ambiance change alors graduellement pour mener à l’échelle de la rue d’accès. Cette rue
asphaltée permet la circulation dans les deux sens ainsi que du stationnement sur rue d’un
côté. Des bandes de végétation sont disposées de chaque côté de la rue afin de séparer
la circulation piétonne donnant accès aux résidences de l’allée d’accès automobile.

Figure 37 : Rue d’accès du quartier.

Figure 38 : Ambiance conceptuelle de la rue de l’échelle de la rue d’accès.

Cette rue principale mène aux rues secondaires qui permettent une circulation complète à
travers le quartier. Ces rues secondaires étant à sens unique, un système de circulation a
été mis en place qui se distribue à travers le quartier. Ces petites rues se relient par des
voies d’accès qui passe sous des sections des bâtiments locatifs. L’accès au
stationnement souterrain pour les résidents, situé sous la section des bâtiments locatifs et
des condominiums se fait également par ces rues secondaires avec l’utilisation de

51
d’entrées et de sorties ponctuelles qui dirigent vers différentes sections souterraines. Le
quartier est ainsi divisé en zones qui ont des emplacements spécifiques pour un accès
pratique et dans un rayon de marche raisonnable. Des sorties piétonnes ponctuelles à
travers des halls sont donc placées afin de permettre à chacun d’atteindre son habitation
dans un rayon de marche de 150 mètres. Ce système permet une bonne distribution tout
en ayant une échelle locale de rue plus intime pour les résidents.

Figure 39 : Schéma de la circulation automobile dans le projet.

Prônant l’utilisation du transport en commun, de la marche et du cyclisme comme


circulation principale dans le quartier et dans la ville, ce système limite l’intérêt de l’usage
des modes actifs. Comme il existe une relation très forte entre l’accès au stationnement, la
motorisation des ménages et l’utilisation dominante de l’automobile pour les
déplacements, le stationnement du quartier doit être majoritairement couvert. L’accès à
celui-ci est donc plus difficile que directement devant la maison ce qui favorise l’emploi du
transport collectif et des modes passifs ainsi que l’animation des divers espaces du
quartier.

52
5.5.2 Les espaces de vie extérieurs et l’échelle architecturale

Cet essai (projet) est une exploration d’une façon d’habiter au Québec par le
développement de l’architecture de l’habitation et des espaces de vie extérieurs. Intimité à
proximité étant un projet à la base de développement d’une communauté de proximité et
d’échanges, cet essai (projet) mise avant tout sur les relations entre le « chez-soi » et le
milieu de vie extérieur et leur dialogue constant. Une zone du quartier a donc été choisie et
développée plus en profondeur à l’échelle de l’architecture et des espaces de vie
extérieurs semi-privés et privés. Cette échelle du projet se concentre sur les relations
humaines, les espaces de transitions ainsi que le pouvoir de l’aménagement dans
l’appropriation de l’espace par l’individu.

Figure 40 : Zone du quartier choisie pour le développement plus approfondi du projet.

Le développement du dialogue entre les besoins d’intimité et de sociabilité se fait à


plusieurs échelles, et ce, dans divers éléments de la zone développée. Des principes et
systèmes viennent transcrire les notions du cadre théorique autant dans les espaces
extérieurs que dans l’architecture du bâtiment.

53
La rue partagée

La rue partagée est un système qui a été appliquée aux rues secondaires du quartier car
elle représente une réponse pertinente aux notions d’appropriation de l’espace et de
contrôle de l’environnement du cadre théorique. Cette rue à sens unique a un traitement
différent de la voie d’accès en étant pavée.

Figure 41 : Rue partagée type du quartier avec traitement au sol.

La voie est déviée aléatoirement afin de ralentir la circulation. Des stationnements sur rue
sont instaurés pour permettre un accès facile aux habitations pour les visiteurs ainsi que
pour les nécessités. Des traitements au sol différents pour les espaces sont les seuls
limites de l’espace de la rue contrairement à une rue habituelle nord-américaine où le
trottoir est divisé de la rue. Une végétation est également très présente afin de donner une
échelle plus intime à la rue partagée. De plus, afin de créer un dynamisme, la marge de
recul avant des maisons a été réduite ce qui renforce le contact et le dialogue entre
l’habitation et la rue. Cette
échelle de rue locale permet
donc une plus grande intimité
et une relation différente de
l’individu avec celle-ci. Il peut
donc se l’approprier selon
ses besoins et désirs.
Figure 42 : Perspective de la rue partagée.

54
La cour et les espaces semi-privés

Dans le principe de hiérarchisation des espaces de vie extérieurs présent de la grande


échelle à la plus petite, il y a également des espaces semi-privés et des espaces privés.
Les espaces semi-privés sont la continuité de la perméabilité piétonne, le lien entre
l’esplanade verte et la cour privée des ménages. En réduisant l’échelle de la rue locale et
la marge entre la devanture de l’habitation et celle-ci, tel que présenté précédemment, un
plus grand espace côté cour devient possible. Une optimisation du côté des espaces de
vie extérieurs à l’arrière de la maison est mise en place. Les espaces semi-privés sont
donc le prolongement de la cour privée.

Figure 43 : Espace semi-privé avec aménagement potentiel des espaces collectifs (entre des habitations).

Figure 44 : Espace semi-privé avec aménagement potentiel des espaces collectifs (entre habitation et axe commercial).

Dans ces espaces se trouvent plusieurs petits lieux communs à petite échelle. En étant à
une échelle plus petite que l’esplanade semi-publique, ils proposent des espaces collectifs
plus intimes et qui sont fréquentés uniquement par ceux qui résident autour. Y sont
intégrés des potagers, des espaces de rencontres, des jeux d’enfants, des petits parcs,
des jeux d’eaux et autres afin que l’individu et les ménages puissent y trouver tout ce dont
ils ont besoin. L’individu peut donc s’approprier son espace par un aménagement flexible
et diversifié. Il s’agit ici de l’idée d’une ruelle verte où tout le monde du voisinage se
55
rencontre et passe de bons moments, où les enfants se réunissent et jouent ensemble et
où il fait bon prendre l’air et cultiver son petit coin de jardin. Prônant des espaces
individuels réduits au profit d’espaces communs généreux, ces cours semi-privées
prennent tout leur sens et deviennent le prolongement de la cour privée, et ce, à différents
niveaux selon les besoins d’intimité et de sociabilité de chacun.

Fig. 45 : Coupe schématique démontrant la relation entre la cour, la maison et la rue ainsi que leur échelle relative.

Fig. 46 : Perspective des espaces semi-privés vus du sol. Fig. 47 : Perspective des espaces semi-privés vus d’un balcon.

La création d’une topographie habitable, faite à partir de la terre d’excavation de la


construction des habitations sur le site, permet de définir et de mieux encadrer les lieux de
rencontres des espaces plus privés. Cette topographie vient hiérarchiser naturellement les
espaces plus sociables de ceux plus intimes et crée ainsi une barrière plus psychologique
que physique pour l’individu afin qu’il puisse contrôler et comprendre son environnement.
De plus, ces buttes viennent moduler l’espace et permettent aux ménages de conserver
une certaine intimité de leur cour sans être obligé de se cacher totalement des autres. Le
versant partagé de ces topographies se
transforme çà et là en grands bancs de
bois où il est possible de s’asseoir, de
discuter ou de s’allonger comme chacun
en a envi sans avoir l’impression d’être
chez le voisin.
Fig. 48 : Ambiance conceptuelle de la topographie côté partagé.

56
Ces espaces semi-privés viennent se refermer au contact de la rue d’accès par des
constructions secondaires tel que cabanons/rangements ou pièces annexes pour les
unités de coin de rue. La présence d’une topographie et de végétation vient également
cintrer l’espace. Cette fermeture renforce le caractère semi-privé de l’espace. Ainsi en
n’étant pas ouvert, cela renforce aussi l’ambiance sécurisante car aucun jouet, ballons,
enfants ne peut se retrouver en plein milieu de la rue d’accès.

Fig. 49 : Perspective de l’interface des espaces semi-privés avec la rue d’accès.

La cour privée, quant à elle, n’est pas physiquement délimitée dans l’espace. C’est par
l’aménagement des espaces communs et la topographie douce que la cour privée apparaît
pour l’individu qui la possède. Elle est le lien primordial dans cet essai (projet) entre
l’intérieur de la maison et le monde extérieur. Espace de transition pour l’occupant de
l’habitation, elle est l’intermédiaire qui permet à celui-ci de s’adapter à l’environnement
externe. Toujours dans l’optique de mettre de l’avant des espaces communs riches au
détriment d’espaces individuels réduits, la notion de cour se transforme plutôt en grande
terrasse extérieure appropriable et contrôlable afin de maximiser son utilisation par
l’aménagement. Pour l’individu, la cour privée extérieure est le prolongement de l’espace
de vie intérieur. Elle doit donc être confortable et permettre un sentiment de sécurité pour
l’occupant. Il est proposé ici d’aménager cet espace avec des revêtements chaleureux et
malléables tels que le bois afin d’optimiser son utilisation et marquer une différence entre
l’espace semi-privé communiquant. Cette terrasse peut être implantée à des niveaux
différents selon la hauteur du niveau du rez-de-chaussée et ainsi créer des relations plus

57
ou moins intimes avec les espaces communs. Elle peut également être plus refermée ou
plus ouverte selon les besoins et le mode de vie des occupants de l’habitation, et ce, à
différentes périodes de la journée ou de l’année. Bien qu’une proposition d’aménagement
soit faite dans cet essai (projet), une flexibilité de l’aménagement est également possible
pouvant utiliser d’autres manières d’utiliser le sol de façon à répondre adéquatement à
chacun.

Fig. 50 : Ambiance
conceptuelle cour
privée et relation avec
espace semi-privé.

58
Dynamisme des façades et matérialité

Afin de promouvoir un quartier dynamique et appropriable par l’individu, plusieurs


typologies d’habitation ont été développées. Différents volumes et jeux de façades ont été
conçus afin de créer une certaine uniformité tout en proposant une dynamique, et ce, par
l’utilisation de proportions similaires dans les pleins et les vides ainsi que dans le style de
la fenestration.

Figure 51 : Élévation de la rue avec matérialité.

Figure 52 : Élévation de la cour avec matérialité.

Le développement de la matérialité du projet a donc également été touché. Suivant


toujours la ligne directrice de l’équilibre entre la sociabilité et l’intimité à travers les
différentes échelles du projet, le choix des matériaux s’est fait dans la même volonté. La
brique a ainsi été choisie pour représenter la sociabilité pour sa force, sa dureté, sa
durabilité et son caractère plus froid. Elle est donc intégrée majoritairement dans les
édifices à logements et à condominiums, s’agissant de bâtiments plus passants et plus
denses. Sur l’axe du boulevard Saint-Anne, par exemple, la brique composera la grande
majorité de la façade. Ce matériau va également être présent au rez-de-chaussée de
certaines unités lorsque les chambres s’y situent ou si un besoin d’intimité est ressenti. Le
revêtement de bois a été choisi, au contraire, pour représenter l’intimité par sa chaleur, sa
maniabilité et sa capacité d’appropriation. Il peut être modifié, teint et utilisé de plusieurs
façons. Il est donc utilisé en majorité sur les habitations unifamiliales et par insertion
ponctuelle dans les façades des autres édifices. Le revêtement en panneaux d’acier a,
quant à lui, été choisi pour sa durabilité, sa maniabilité et son style contemporain. C’est
avec ce matériau que les jeux de volumes et de façades sont faits majoritairement afin de
donner une dynamique aux façades.

59
5.5.3 La typologie d’habitation et l’aménagement intérieur

L’exploration d’une nouvelle façon d’habiter au Québec ne peut se faire sans le


développement de l’échelle de l’architecture de l’habitation unifamiliale et de
l’aménagement intérieur. Cet essai (projet) met de l’avant les relations entre le « chez-
soi » intérieur et le milieu de vie extérieur ainsi que leur dialogue constant. Des typologies
d’habitation ont donc été développées afin de mieux comprendre la notion d’équilibre entre
l’extérieur et l’intérieur, entre la sociabilité et l’intimité, et ce jusque dans l’aménagement
intérieur de l’unité d’habitation. Cette échelle du projet se concentre sur la relation de
l’individu avec son espace intérieur, les espaces transitoires ainsi que la flexibilité et la
multifonctionnalité de l’espace.

Aménagement des typologies d’habitation


Les typologies d’habitation ont été travaillées dans un souci constant des diverses notions
du « chez-soi ». L’individu peut ainsi choisir la typologie qui lui convient le mieux et
l’adapter par la suite selon ses besoins et désirs afin de créer son équilibre et sa propre
intimité par rapport aux autres et à son environnement. Les unités d’habitation, s’insérant
dans une volonté de maximisation de l’utilisation de l’espace au sol, ont été aménagées
efficacement afin de promouvoir des pièces flexibles et multifonctionnelles. Une réflexion
et un développement des typologies en tenant compte de l’importance de la hauteur du
plancher de l’habitation en rapport avec la perception qu’à l’individu du monde extérieur a
également été faite. Selon la hauteur de l’observateur, la relation avec la rue et avec
l’espace cour ne se fera pas de la même façon. Des jeux avec les niveaux et les escaliers
sont donc présents afin de proposer plusieurs niveaux d’intimité et de confort à l’intérieur
du « chez-soi ».

- Typologie #1
La typologie #1 est une unité d’habitation avec un escalier droit à une seule volée. Par ce
choix d’escalier, l’unité d’habitation se trouve à être plus près sur sol. Un palier d’entrée du
côté de la rue est mis en place afin d’augmenter le niveau d’intimité de l’occupant par
rapport à la circulation extérieure. Un changement de niveau s’opère à l’intérieur de l’unité
afin de permettre une terrasse extérieur directement au sol du côté de la cour. Étant donné

60
la présence de topographie naturelle et de végétation, l’intimité est plus grande du côté de
la cour privée arrière. Le changement de niveau à l’intérieur de l’unité permet de jouer
avec les hauteurs de plafond et le niveau de sécurité de l’occupant. Un plafond plus bas
pour les pièces du salon et du vestibule d’entrée renforce le sentiment de confort et de
sécurité de l’individu. Un plafond plus haut dans la salle à manger et la cuisine permet une
meilleure relation avec la lumière et l’environnement invitant l’individu à passer à
l’extérieur. De plus, un rangement est intégré dans la section haute de la cuisine
permettant une optimisation de l’utilisation de l’espace ainsi que la possibilité d’utiliser un
éclairage plus adéquat pour la cuisine. Des mobiliers intégrés ont été conçus et des
panneaux coulissants ont également été utilisés dans l’objectif de maximisation de
l’espace habitable.

Figure 53 : Plan du rez-de-


chaussée

Fig. 54 : Plan de l’étage

Fig. 55 : Coupe intérieure


rez-de-chaussée

61
- Typologie #2
La typologie #2 est une unité d’habitation avec un escalier à palier et dans laquelle l’entrée
se fait sur le niveau entre le rez-de-chaussée et le sous-sol. Ce type d’entrée élève le
niveau du rez-de-chaussée par rapport au sol ce qui augmente l’intimité de l’intérieur par
rapport à la rue. Cette hauteur nuit à l’intimité du côté de la cour étant donné que la
terrasse se retrouve à être surélevée par rapport au sol. Les gens dans l’espace semi-
privé ont donc plus une vue directe sur ce qui se passe sur la terrasse. L’individu habitant
cette unité sentira peut-être plus le besoin de contrôler son intimité avec des systèmes et
éléments architecturaux par rapport à celui implanter au sol. Un changement de niveau à
l’intérieur de l’habitation permet de réduire cette sensation, mais on peut ressentir l’effet
quand même. Selon les envies et besoins du ménage, il peut ainsi choisir sa préférence
entre les deux types d’escaliers, chacun ayant ses avantages et inconvénients. L’intérieur
soutient les mêmes principes d’aménagement que la typologie #1.
Figure 56 : Plan du rez-de-
chaussée

Figure 57 : Plan de l’étage

Figure 58 : Coupe intérieure


rez-de-chaussée

62
- Typologie #3
La typologie #3 est une unité d’habitation particulière car elle se trouve à être inversée par
rapport à l’aménagement classique. Les pièces de vie sont donc placées à l’étage. Cette
inversion crée des espaces de vie plus intime car plus élevés que les autres. Au rez-de-
chaussée on retrouve donc l’entrée et les chambres. Une fenestrations en bandeaux
horizontaux en hauteur permet de conserver l’intimité dans les chambres. L’étage est en
retrait par rapport au rez-de-chaussée ce qui permet une terrasse extérieure cachée de
l’espace semi-privé et plus intime. En lien avec la notion de balcon vue plus tôt dans le
cadre théorique, l’individu qui se trouve sur cette terrasse se sent sécurisé car il a une
situation dominante sur l’environnement.
Figure 59 : Plan du rez-de-
chaussée

Figure 60 : Plan de l’étage

Figure 61 : Coupe intérieure

63
- Typologie #4
La typologie #4 a été développée pour créer une unité d’habitation particulièrement
pensée pour la situation de coin de rue. Étant donné que l’intimité est plus difficile à
trouver pour l’individu dans une unité de coin de rue, elle a certaines dispositions
différentes. Dans un premier temps, l’escalier à palier a été privilégié pour son niveau
d’intimité par rapport à la rue. Plus grande en superficie, cette habitation s’ouvre sur deux
terrasses extérieures (une sur rue et une sur cour). Une petite pièce annexe qui peut servir
de rangement ou de petit bureau a également été ajoutée à l’unité de manière à venir
encadrer et refermer sa cour privée. Le même jeu de niveau à l’intérieur permet que la
terrasse du côté de la cour soit plus en connexion directe avec le sol que celle du côté de
la rue d’accès. L’aménagement intérieur a quand même été développé selon les mêmes
principes que les autres typologies.

Figure 62 : Plan du rez-de-chaussée

Figure 63 : Plan de l’étage

64
Figure 64 : Perspective intérieure typologie #2

Figure 65 : Perspective intérieure typologie #3

65
Figure 66 : Perspective intérieure typologie #4.

Systèmes de contrôle de l’intimité et d’appropriation de l’espace extérieur

La notion du « chez-soi » développée dans la cadre théorique représente l’équilibre de


l’individu et son bien-être. Cet équilibre se trouve dans le mariage parfait des besoins de
sociabilité et d’intimité de chaque individu, chacun étant différent. À l’échelle de l’unité
d’habitation le contrôle de l’espace par son occupant est primordial afin d’atteindre le
« chez-soi ». Des systèmes de contrôle de l’intimité et d’appropriation ont été développés
afin que chacun puisse gérer sa relation et ses échanges avec les autres. Ces systèmes
sont également mobiles afin que l’occupant puisse les moduler de façon permanente ou
temporaire selon l’environnement extérieur et ses besoins intérieurs.

Dans un premier temps une structure en bois vient encadrer et protéger la terrasse
extérieure. Des lattes de bois inclinables (brises-soleils) sont intégrées sur le toit afin que
l’individu puisse les moduler comme il le souhaite et contrôler l’apport de lumière naturel et
son contact avec l’environnement. À cette structure peuvent venir s’ajouter des panneaux
coulissants sur rail. Ces panneaux sont conçus avec des lattes de bois disposées de façon
ajourée sur un cadre en aluminium. Un système ajouré permet ainsi à l’occupant de se

66
sentir en sécurité tout en percevant l’environnement. En étant mobiles, ce système peut
répondre aux besoins changeants des usagers selon la période de la journée ou de
l’année, la température, l’activité qui y est pratiquée, etc. Ce mécanisme de panneaux
ajourés coulissants est également repris au niveau des fenêtres extérieures permettant
ainsi aux occupants de contrôler le regard des autres vers l’intérieur de l’habitation ainsi
que l’apport de lumière naturelle.

Afin de créer une entrée principale intime pour l’habitation, des panneaux semblables
ajourés mais cette fois fixes sont installés de manière à cacher la porte d’entrée tout en
permettant un regard sur le palier et l’adresse de la maison. Ce traitement se poursuit à
l’intérieur au niveau du vestibule d’entrée en séparant celui-ci des aires de vie afin de créer
une progression dans la découverte de l’habitation. Cette séparation intérieure permet
également à l’occupant de contrôler l’accès à son habitation et ne laisser entrevoir que ce
qu’il désire au visiteur qui franchit sa porte.

Appropriation de l’espace d’interstice entre les habitations


Afin de maximiser l’utilisation des espaces au sol, une réflexion sur les lieux d’interstice
entre les habitations a été faite. Toujours dans un souci d’intimité et de proximité, l’espace
libre entre les habitations a donc été réutilisé et réhabiliter en un espace multifonctionnel
flexible qui peut être utilisés à plusieurs fonctions (espace de détente, rangement à vélos,
cabanon, spa, petit potager, etc.). Cet espace peut être plus fermé ou plus ouvert selon les
besoins des individus. Étant donné que cet espace intermédiaire a été positionné en recul
autant par rapport à la rue qu’à la cour, il se trouve à devenir un espace plus intime par le
fait même que la terrasse extérieure du côté des espaces semi-privés. Il est également
possible de séparer cet espace en deux afin que deux ménages puissent le partager.

Figure 67: Ambiance espace intermédiaire entre les habitations. Figure 68 : Ambiance systèmes de contrôle de l’intimité.

67
Multifonctionnalité et mobilier intégré
Afin de développer la flexibilité et de l’espace et son appropriation totale par l’occupant,
l’aménagement intérieur a été réfléchi dans un souci de multifonctionnalité. Chaque pièce
peut ainsi avoir plusieurs fonctions et être utilisés selon les besoins du ménage qui y
habite. Cette multifonctionnalité s’est transcrite par l’élaboration de plusieurs mobiliers
intégrés à la maison et ceux-ci ont sont utilisés dans les diverses unités d’habitation.
L’élément du foyer, symbole de réconfort et de chaleur à l’intérieur de l’habitation permet
également un rangement intégré en devenant un buffet dans la salle à manger, celle-ci
étant en contrebas par rapport au salon. Au foyer peut également être adossé une
banquette-rangement dans laquelle des tiroirs sont insérés ainsi que des petits bancs
transportables pouvant accueillir les invités ou les enfants. La table de salle à manger,
quant à elle, peut être intégrée de deux manières différentes. Elle peut donc être intégrée
à l’intérieur d’un mobilier vaisselier ou dans le comptoir de cuisine. Elle s’ouvre également
en plusieurs sections pouvant être utilisée soit pour 2 à 3 personnes ou soit pour 6 à 8
personnes. Du côté du salon, un mobilier multifonctionnel a également été élaboré. On y
retrouve donc une bibliothèque, un espace bureau, un divan et même un lit double.
Chacune des fonctions pouvant être rangée, cette pièce peut donc autant servir de bureau
de travail que de salon ou de chambre pour des invités temporaires. Plus qu’un
aménagement intérieur conventionnel, tous ces mobiliers permettent une flexibilité et une
multifonctionnalité efficace des pièces qui enrichissent l’appropriation son espace par
l’individu. La qualité de l’espace prend donc le devant par rapport à la quantité et invite
l’individu à changer sa mentalité culturelle.

68
69
6.0 CONCLUSION ET REGARD CRITIQUE

La question de l’habitation en architecture est à la fois riche et complexe. Domaine longtemps


laissé de côté par les architectes et dans lequel il est plus difficile de trouver sa place en tant que
professionnel, les quartiers d’habitations sont une préoccupation primordiale dans le
développement de notre société. Ayant toujours eu un intérêt personnel pour l’individu et son bien-
être, cette problématique m’a particulièrement interpellée. L’objectif premier de cet essai (projet)
était donc d’explorer une nouvelle façon d’habiter au Québec, une alternative d’aménagement qui
amènerait l’individu à modifier sa mentalité culturelle et sa vision de la maison. La démarche de
recherche-création a permis de mettre en place un cadre théorique élaboré qui a servi de base
pour tout le développement du projet, et ce, à toutes les échelles. En se basant sur l’individu et sa
perception quotidienne, le projet présente une mise en application de la notion d’appropriation et
de transformation du « chez-soi ». Tel un vêtement, l’habitation proposée s’ajuste à son occupant,
qui module son espace à son goût et en fonction de ses usages. Cet essai (projet) propose donc
un habitat flexible et appropriable dans un environnement communautaire de qualité où l’usager
pourra posséder son « chez-soi » dans un milieu de vie interactif et adaptable. En touchant à
toutes les échelles d’un quartier, du design urbain à l’aménagement intérieur de l’habitation, ce
projet a été développé dans un souci de constance et de conception assidue afin de réussir à
atteindre les objectifs de design et à mettre en pratique les notions théoriques à travers toutes les
ficelles d’un quartier mixte.

REGARD CRITIQUE SUR LE PROJET


Le projet a généralement été très bien reçu chez les jurys lors des différentes critiques et
particulièrement à la critique finale. L’effort et le travail assidu mis sur ce projet de grande
envergure ainsi que la qualité de présentation ont d’ailleurs été soulignés. Les jurys ont
particulièrement apprécié l’esprit de synthèse de la théorie ainsi que la réflexion de l’échelle macro
à l’échelle micro. Une appréciation de la qualité sensible et humaine du projet a également été
ressentie. Une viabilité de ce nouveau mode d’habiter au Québec a été mentionnée par les
différents jurys permettant démontrant la réussite de l’objectif de cet essai (projet).

Quelques interrogations ont tout de même été soulevées et pourraient mériter plusieurs
développements, ce projet n’étant pas la seule alternative possible d’aménagement. Notamment,

70
une réflexion sur la notion de porte principale a été introduite par rapport à la relation à la rue et à
la cour, ainsi qu’une interrogation sur le besoin d’aménagement des espaces communs semi-
privés.

Le nombre d’aspects et d’échelles à gérer, allant de l’intégration urbaine à la résolution


architecturale et l’aménagement intérieur, ont constitué un grand défi dans cet essai (projet) et
plusieurs pistes auraient pu être davantage développées. Étant donné le temps alloué au projet
dans le programme présent d’essai (projet), son évolution et son niveau d’avancement représente
bien les efforts et la minutie dont j’ai fait preuve tout au long de ce processus. Les notions
théoriques et leur mise en pratique dans le projet ont su être un apprentissage riche pour ma
profession d’architecte, et ce, tant au niveau du design urbain que de l’architecture de l’habitation.

71
7.0 BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages

ALTMAN, Irwin (1975), The environment and social behaviour. Monterey: Brooks / Cole Publication
Company.

BENTLEY, Ian (1985), Responsive Environments: A Manual for Designers. Londres: Architectural
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décennie de transition. Montréal : Société d’habitation du Québec.

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72
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Périodiques

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Québec : Université Laval.

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VILLE DE QUÉBEC – PROGRAMMES PARTICULIERS D’URBANISME (2012)


http://www.ville.quebec.qc.ca/environnement/urbanisation/ppu_destimauville/index.aspx

QUARTIER NODELO (2011) http://www.quartiernodelo.com/

73
8.0 ANNEXES

ANNEXE I – PLANCHES FINALES DU PROJET

74
ANNEXE II – PHOTOS DE LA MAQUETTE URBAINE CONCEPTUELLE

78
79
ANNEXE III – PHOTOS DE LA MAQUETTE FINALE – TRANCHE D’HABITATIONS

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