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B. YAMB, M. BIKOUE, B.

NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

Pluriactivité des enseignants des Universités d’Etat au


Cameroun, interaction et rapport de chances : une analyse
log-linéaire des tableaux de contingence des universités
d’Etat de Douala et Dschang

Benjamin YAMB,
ESSEC1Université de Douala, gsyamb@yahoo.fr
Maxime BIKOUE,
ESSEC Université de Douala, maximebikoue@yahoo.fr
Bob NGAMOE,
IUT Université de Douala
Résumé
L’objet du papier est de mettre en évidence les déterminants des emplois
multiples chez les enseignants des Universités d’Etat au Cameroun. La
méthodologie utilisée pour y parvenir, recourt à l’analyse log linéaire sur
données d’enquête auprès des enseignants. Les résultats d’enquête montrent
que, outre les déterminants classiques des emplois-multiples (contrainte horaire
dans l’emploi principal, revenu salarial dans l’emploi principal, revenu salarial
dans l’emploi secondaire), le genre et localisation des Universités y jouent
également un rôle majeur. Les statistiques descriptives révèlent que le
phénomène des emplois-multiples déteint sur la qualité des enseignements
dispensés En définitive, les auteurs préconisent des mesures incitatives
gouvernementales pour essayer d’endiguer le dit phénomène.
Mots clés : pluriactivité, interaction, rapport de chance, modèle loglinéaire,
Classement JEL : J20, J24, J40, I23
Abstract
The paper analyzes the determinant of multiple jobs holding of the
Cameroonian state Universities lecturers using a log linear analysis on
Cameroonian state Universities lecturers sample survey data. The survey results
show that in addition to the classical determinants of multiple jobs holding
(hours constraint in the main employment, salary in the main employment,
salary in the second employment), gender and the University localization are
also likely to play a major role. Some statistics show that the multiple jobs

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BP 1931, Douala, Cameroun
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ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

holding phenomena come off on the quality of the teachings dispensed. The
authors finally suggest some policy economic measures to try to hold back that
phenomena.
Keys words: multiple jobs holding, interaction, odds rations, log linear model
JEL classification: J20, J24, J40, I23

1. Introduction
La pluriactivité est un phénomène caractéristique du marché du
travail des économies contemporaines. Elle traduit le fait d’un individu d’avoir
un emploi principal et un ou des emplois secondaires. Le phénomène prend
alors parfois le nom d’emplois multiples, d’emploi double ou de double
emploi, etc. L’étude de la pluriactivité est digne d’intérêt car le phénomène
traduit le comportement de rationalité des agents économiques soucieux
d’améliorer le bien être matériel ou de développer les stratégies de survie.
Depuis les recherches pionnières de Shishko et Rostker (1976), la
littérature économique retient comme déterminant principal de la
pluriactivité, les contraintes horaires dans l’emploi principal (O’connell, 1979,
Krishnan 1990, Conway et Kimmel 1995, 1998, Theizen 2005). A ce
déterminant majeur, la littérature ajoute d’autres facteurs explicatifs tels le
revenu salarial dans l’emploi principal, le revenu salarial dans l’emploi
secondaire. Le présent papier s’inscrit dans le sillage de ces travaux pionniers
mais, va bien au delà des déterminants classiques, en y ajoutant dans le cadre
des emplois double des enseignants des universités d’Etat du Cameroun deux
autres variables explicatives : le genre (sexe) et le lieu de localisation
(Université de grande métropole ou université de petite ville).
Si la littérature économique utilise pour l’essentiel les modèles
linéaires d’optimisation sous contrainte pour analyser les déterminants des
emplois double, le présent travail quant à lui recourt aux modèles log-linéaire
pour affiner cette analyse.
Alors que le modèle linéaire usuel essaie de prédire ou d’expliquer
une variable Y, mesurée sur une échelle continue, à partir d’un ensemble de K
variables explicatives X1, ...,XK qui peuvent être continues ou catégorielles, le
modèle Log-linéaire est quand à lui plus approprié pour rechercher des
relations entre un certain nombre de variables qualitatives. Il a la particularité
de ne pas nécessiter, a priori, de distinction entre la variable à expliquer et les
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variables explicatives. On parlera plutôt de modèle d’association que de


régression.
Ainsi, considérant que le kième facteur peut prendre un total de Ik
modalités, nous avons construit des tables de contingence à K entrées à partir
de ces K facteurs. Des tableaux de contingence I1×I2×...×Ik ont ainsi été
obtenus. En fait, l’idée des modèles Log-linéaire implantés dans le cadre de ce
travail a tout simplement été d’expliquer les logarithmes des valeurs
attendues des effectifs à l’aide des niveaux correspondants des facteurs et des
interactions entre ces niveaux.
Ainsi appliquée aux emplois double sur échantillon de 169
enseignants du supérieur du public de deux universités d’Etat, l’approche log-
linéaire utilisée nous a révélé que la contrainte horaire dans l’emploi principal,
les revenus issus des emplois secondaires, et le revenu issu de l’emploi principal
seraient des composantes explicatives de la pluriactivité lorsque nous contrôlons
pour certains facteurs tels le genre ou le lieu de localisation de l’université.
La deuxième section du papier présente une brève revue de la
littérature sur les travaux mettant en relief les facteurs explicatifs de la
pluriactivité, tout en faisant un bref rappel historique sur les mobiles sous
jacents à l’activité des emplois double des enseignants des universités d’Etat
du Cameroun. Les données d’enquête utilisées ainsi que certaines statistiques
descriptives sont présentées à la troisième section La description théorique
du modèle log linéaire dans ses différentes variantes et sa justification
constituent le socle de la quatrième partie. La cinquième partie analyse et
discute les résultats obtenus des différentes modélisations log-linéaires
construites en amont. Enfin, La sixième partie conclut l’étude tout en
proposant des mesures incitatives gouvernementales pour essayer d’endiguer
le dit phénomène qui déteint sur la qualité des enseignements dispensés.

2. Revue de littérature et contexte historique

2.1 Revue de littérature


Les recherches pionnières sur les emplois multiples ont reconnu
l'existence possible de plusieurs mobiles, mais les travaux empiriques ont fait
l'hypothèse implicite que tous les individus à double emplois avaient des
contraintes horaires dans l'emploi principal (Shishko et Rostker, 1976;
O'Connell, 1979 ; Krishnan, 1990, 1993). Cependant des travaux plus récents
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mettent en évidence les mobiles des emplois multiples et abordent la question


des implications de ces mobiles pour les modèles économiques de ce type
d'emplois. Par exemple, Conway et Kimmel (1994) ont estimé un modèle
d'offre de travail des hommes à double emploi à la fleur de leur âge utilisant
les données de l'enquête revenu et programme de participation (ERPP). Dans
leur modèle, ils ont recensé plusieurs motifs du double emploi. En particulier,
ils ont noté que les heures dans l’emploi principal sont endogénéisées si
l'individu exerce un double emploi pour des raisons autres que la contrainte
horaire dans l'emploi principal.
En rapport avec ces travaux, Conway et Kimmel (1995) ont utilisé les
données de l’ERPP pour estimer un modèle de durée du double emploi. Ils ont
supposé que les individus à double emploi ayant une contrainte horaire dans
l'emploi principal auront un double emploi de courte durée comparé à ceux
qui exercent des doubles emplois parce que les deux types d'emploi sont
hétérogènes. Levenson (1995) fournit une preuve indirecte des emplois
multiples. Il a noté que durant les 25 ans précédant son étude, les emplois
multiples ont fait des gains en salaires et en emplois aux hommes, mais que la
participation des femmes aux emplois multiples tend à croître plus que celle
des hommes. Ceci peut laisser croire que la participation croissante des
femmes aux emplois multiples serait due aux contraintes autres
qu’économiques. Levenson n’a cependant pas testé formellement cette
hypothèse.
Paxson et Sicherman (1994) examinent la dynamique des emplois
multiples aux Etats-Unis en utilisant les données à la fois de l’Enquête
Courante de la Population (ECP) et une Etude de Panel de Revenus
Dynamiques (EPRD). Les deux auteurs trouvent que la pratique des emplois
est un processus dynamique - la plupart des travailleurs de l'enquête ont
exercé les emplois durant leur vie active. Les données de l’EPRD révèlent
qu'entre 1979 et 1989 presque 65% des hommes et 43% des femmes ont eu
un second emploi. Ils ont noté que les modèles traditionnels d'emplois
multiples supposent que, les individus exercent des doubles emplois
seulement à cause des contraintes horaires dans l'emploi principal, ignorent le
fait qu'au fil du temps, les travailleurs peuvent éviter ces contraintes horaires
en cherchant de nouveaux emplois. Le point focal de leurs recherches
concerne le pourquoi et quand les travailleurs vont vers des emplois
secondaires ou en sortent. Ils ont spécifié un modèle joint de décision
d'exercer un double emploi contre la décision de changer un emploi principal
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qui n’a pas de contrainte horaire. Abdukadir (1992) de son côté a examiné la
possibilité que le double emploi soit dû aux contraintes financières de court
terme.
Ehrlich (1973), Shishko et ¨Post Ker (1976); Conway et Kimmel
(1998), Expliquent les emplois multiples par le différentiel de salaire entre le
secteur formel et le secteur informel, ce dernier donnant plus d’opportunités
de gains pour un niveau donné de risque. Krishnan (1990), Paxson et
Sicherman (1996), Ahn et Rica (1997) analysent les emplois doubles comme
la résultante de l’importance du chômage ou plus généralement les
contraintes horaires dans l’emploi principal. De ce dernier point de vue, ces
auteurs adhèrent à la thèse des travaux empiriques d’autres économistes sur
les mêmes mobiles [O Connell (1979), Krishnan (1990, 1993), Shishko et
Rostker (1976)].
Rose (1994), Kim (2005), Desai et Idson (2000), Braith Waite (1994),
Foley (1997) et Kolev (1998) montrent que les emplois tiennent à deux
mobiles principaux : la survie et l’esprit d’entreprise, notamment dans les
économies en transition, la référence étant faite ici à l’Europe de l’Est.
Guariglia et Kim (2004) insistent sur le fait que la probabilité d’exercer des
double emplois est d’autant plus élevée que le niveau de formation est lui
aussi élevé. Commander et Tolstopiatenko (1997) expliquent la pluriactivité
des individus par la demande des facteurs, en particulier le travail. Selon eux
les firmes auraient le choix soit des emplois à temps partiel dans l’informel (le
travail au noir) soit à plein temps dans l’informel.
Cependant bien que les récentes recherches aient commencé à
examiner plus rigoureusement le comportement de la pluriactivité, on sait
encore peu de choses au sujet des mobiles sous-jacents à ce comportement en
Afrique en général et au Cameroun en particulier. La présente recherche vise
donc à combler ce vide dans la littérature à travers le contexte camerounais en
général et plus particulièrement celui des enseignants des universités d’Etat
du Cameroun.

2.2 Contexte historique et objectifs poursuivis


Au cours des décennies 80 et 90, le Cameroun subit de plein fouet la
crise économique qui va secouer tous les domaines d’activité. Jusqu’en 1990,
l’Etat camerounais avait pu assurer la croissance du budget de l’Enseignement
Supérieur qui atteignait 2,1% du budget de l’Etat en 1990. Par la suite, le
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système Universitaire n’a pu être épargné ; des réductions drastiques des


budgets de fonctionnement vont créer une crise profonde. Ainsi le budget du
Supérieur se trouvera divisé par 8 en 5 ans. La dévaluation du franc CFA qui
intervient en 1994 amplifiera encore cette crise. Il n’est pas surprenant que
l’Université ne puisse plus assurer ses missions de formation et recherche,
dans un contexte de démotivation des enseignants (suppression des primes,
baisse drastique des salaires, conditions de travail déplorables). C’est donc
dans ce cadre difficile qu’interviendra la loi de 1993, qui cherchera à redresser
l’Enseignement Supérieur et dotera l’Université de nouvelles structures,
toujours en vigueur aujourd’hui. Malgré la croissance des budgets observée à
nouveau depuis 1998, les niveaux restent assez bas et ne permettent pas un
fonctionnement correct de ces institutions ; de plus, l’accroissement des
effectifs observé au cours des années 2000 à 2004 reste plus rapide que celui
des budgets. Le budget de fonctionnement de l’Enseignement Supérieur ne
représentait encore en 1999 que 0,8% du budget de l’Etat, à rapprocher des
2,1% de 1990.
Ces conditions de vie et de travail assez difficiles pour les enseignants
des Universités d’Etat ont conduit ces derniers à explorer et à effectuer
d’autres activités en dehors des Universités d’Etat. Ces enseignants, du fait de
la multiplicité de leurs activités, ont eu tendance à accorder moins de temps
et d’intérêt à leur emploi principal, phénomène aujourd’hui qui perdure et
tend à s’amplifier en dépit d’un relèvement relatif du niveau général des
salaires dans la fonction publique2 et d’une prime spéciale de recherche
trimestrielle accordée par l’Etat aux enseignants des Universités d’Etat.
L’objectif principal de la présente étude est donc d’identifier les
facteurs explicatifs de la pluriactivité des enseignants des Universités d’Etat
au Cameroun et à travers un modèle statistique, établir la relation entre la
pluriactivité et certains variables susceptibles d’influencer celle-ci.

2
En Avril 2008, ont eu lieu les émeutes de la faim au Cameroun. Ce qui a conduit
l’Etat à procéder à une augmentation des salaires au niveau de la fonction
publique de l’ordre d’environ 20%.
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3. Données et statistiques descriptives

3.1 Caractéristiques de l’échantillon et description des variables


de l’étude:
La présente étude analyse les facteurs à l’origine de la pluriactivité
des enseignants des universités d’état au Cameroun à travers deux des huit
universités d’état que compte actuellement le pays ; une université urbaine
(Université de Douala) et une université semi urbaine (Université de Dschang)
ont été choisies pour la circonstance. Dans chaque université, une enquête a
été réalisée et un échantillon aléatoire stratifié par zone, genre, revenu, et
contrainte horaire a été constitué sur la base d’environ 240 questionnaires
administrés dont 169 nous ont été retournés, soit un taux de sondage de près
de 70%. Sur les 169 questionnaires reçus, 138 ont été administrés aux
hommes et 31 aux femmes, 94 répondants étant de Douala et 75 de Dschang.
Le Tableau ci-dessous récapitule la répartition des enseignants interrogés par
genre, grade et selon l’université d’origine :
Tableau croisé 3.1 : Université d’Origine "Genre" Grade
Genre
Total
Grade Masculin Féminin
Université 1 1
Douala Effectif
d’Origine 100,0% 100%
Aucun
Effectif 1 1
Total
100,0% 0,59%
Douala Effectif 1 3 4
Université 25,5% 75,0% 28,57%
d’Origine Effectif 6 4 10
ATER Dschang
60,0% 40,0% 71,43%
Effectif 7 7 14
Total
50,0% 50,0% 8,28%
Effectif 52 7 59
Douala
Université 88,1% 11,9% 65,56%
d’Origine 24 7 31
Assistant Dschang Effectif
77,4% 22,6% 35,44%
Effectif 76 14 90
Total
84,4% 15,6% 53,25%
Douala Effectif 18 8 26
Université 69,2% 30,8% 50%
Chargé de
d’Origine Effectif 25 1 26
Cours Dschang
96,2% 3,8% 50%
Total Effectif 43 9 52

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82,7% 17,3% 30,76%


Effectif 4 4
Douala
Université 100,0% 36,36%
d’Origine Effectif 6 1 7
MC Dschang
85,7% 14,3% 63,64%
Effectif 10 1 11
Total
90,9% 9,1% 6,5%
Université Effectif 1 1
Dschang 100,0% 100,0%
d’Origine
Professeur
Effectif 1 1
Total
100,0% 0,59%
138 31 169
Total
81,65% 19,35% 100%
Source : construit par l’auteur à partir des données de l’enquête
La première colonne du tableau représente les variables grade et
université d’origine ; la seconde colonne qui représente le genre se scinde en
deux colonnes à savoir masculin et féminin ; la dernière colonne présente le
total des personnes enquêtées par grade et ceci selon l’université d’origine et
le genre ; les chiffres en dessous des effectifs représentent les proportions
correspondantes ; ainsi par exemple, nous dirons que l’échantillon comporte
52 enseignants chargé de cours (ce qui représente environ 30,8% du total de
l’échantillon) répartis de façon équitable dans les deux universités (50% dans
chaque institution) soit 18 hommes (69,2%) et 8 femmes (30,8%) chargés de
cours à Douala et 25 hommes (96,2%) et une femme (3,8) chargés de cours à
Dschang.
Les variables explicatives utilisées dans ce papier sont celles issues de
la littérature classique sur les emplois multiples. La plupart d’entre elles
permettent de saisir les caractéristiques socio-économiques des enseignants
enquêtés telle que le genre, les contraintes horaires issues de l’emploi
principal, les revenus issus de l’emploi principal et ceux issus de l’emploi
secondaire ainsi que leurs conditions de vie. Le choix de ces variables trouve
ses fondements dans le cadre théorique exposé au niveau de la section 2. La
variable expliquée ici est la pluriactivité.
Nous avons retenu cinq variables explicatives dans le cadre de notre
étude pour caractériser la situation socio économique des enseignants: la
condition salariale actuelle(CSA) avec trois modalités (adéquate, inadéquate,
sans opinion) retenue comme proxy pour le salaire dans l’emploi principal, la
charge hebdomadaire de cours(CHC) avec trois modalités (<10h, >10H, sans
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opinion) retenue comme proxy pour des contraintes horaires dans l’emploi
principal et le revenu salarial dans l’emploi secondaire(RDU) avec quatre
modalités (consistante, moyenne, insignifiante, sans opinion). Le sexe
(homme, femme) et la zone de localisation de l’Université ((UO), (Douala,
Dschang)) ont également été pris en considération comme facteurs explicatifs.
Enfin, pour la variable expliquée nous avons posé aux enquêtés une question à
laquelle il fallait répondre par oui ou non à savoir : exercez vous d’autres
activités en dehors de vos activités d’enseignement et de recherche à
l’université ? Ceci a été retenu comme proxy pour la variable
pluriactivité(PLURI).

3.2 Quelques statistiques descriptives


De prime abord, lorsque nous demandons aux enseignants des
universités de l’enquête leur point de vue par rapport à leur situation salariale
actuelle, que ce soit au niveau du genre que de l’université d’origine, une forte
proportion répond qu’elle est inadéquate (voir tableaux ci-dessous)
Tableau croisé 3.2 : Genre * condition salariale actuelle
Votre condition salariale actuelle vous
semble Total
Adéquate Inadéquate Sans opinion
Effectif 25 90 138 138
Masculin
18,1% 65,2% 81,65% 81,65%
Genre
Effectif 5 12 31 31
Féminin
16,1% 38,7% 19,35% 19,35%
Effectif 30 102 169 169
Total
17,8% 60,4% 100,0% 100,0%
De ce tableau, il ressort que sur les 169 personnes interrogées 102
trouvent leur situation salariale actuelle inadéquate, soit environ 60% de la
taille de l’échantillon et sur les 138 hommes interrogés, 90 sont du même avis,
soit un pourcentage de 65% environ. Les femmes dans l’ensemble sont du
même avis à hauteur de 38,7% sur les 31 interrogées. Cependant, nous
constatons qu’un pourcentage assez considérable (près de 22% du total de
l’échantillon) des enquêtés ne se sont pas prononcés sur la question. Si donc
ce pourcentage n’est pas pris en compte dans nos estimations et même en
agrégeant les deux premières colonnes, nous constatons une forte
augmentation de la proportion des personnes estimant que leur condition
salariale actuelle est inadéquate tant dans l’ensemble (77% environ) qu’au
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niveau du genre (environ 78% chez les hommes et 70% chez les femmes).
Nous pouvons tenir ce même raisonnement par rapport au tableau ci-dessous
sur la zone de localisation de l’université.

Tableau croisé 3.3 : Université d’Origine * condition salariale actuelle


Votre condition salariale actuelle vous
semble
Total
Adéquate Inadéquate Sans opinion
Effectif 13 63 18 94
Douala
Université 13,8% 67,0% 19,1% 55,62%
d’Origine Effectif 17 39 19 75
Dschang
22,7% 52,0% 25,3% 54,38%
Effectif 30 102 37 169
Total
17,8% 60,4% 21,9% 100,0%

En effet, en ignorant la dernière colonne et en agrégeant les deux


premières, 77% d’enseignants interrogés dans l’ensemble trouveront leur
situation salariale inadéquate et au niveau des universités, on obtient le même
résultat à hauteur de près de 70% pour les enseignants de l’université de
Dschang et de 83% pour ceux de Douala.
Au vu de ces statistiques, peut-on conclure que le salaire dans
l’emploi principal, se présente comme l’un des facteurs de taille dans
l’explication de la pluriactivité des enseignants des universités d’Etat au
Cameroun ?

4. APPROCHE METHODOLOGIQUE ET ESTIMATION DU


MODELE

4.1. L’approche loglinéaire : justification théorique


Pour mettre en évidence les facteurs explicatifs de la pluriactivité des
enseignants des universités d’Etat au Cameroun, nous avons considéré six
tableaux de contingence de dimension (I X J X K) ; ces six tableaux de
contingence ont été obtenus à l’aide des variables retenues pour l’analyse à la
sous section 3.1 ceci par croisement de trois variables X , Y , Z. La définition
des paramètres a été conduite en faisant apparaitre des effets principaux
(indice simple) et des interactions (double et triple indices) Le modèle log-
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linéaire général pour chacun des six tableaux de contingence obtenus par
croisement de trois variables catégorielles se présente sous la forme suivante :

log(ijk )    iX   Yj  kZ  ijXY  ikXZ   YZ


jk  ijk
XYZ
(1)

Ce modèle sera appelé le modèle saturé ou encore modèle


d’interaction à trois facteurs. Nous avons par la suite explicité les sous-
modèles obtenus par nullité de certains paramètres qui correspondent à des
structures particulières d’indépendance et une façon classique de nommer les
modèles consistera à ne citer que les interactions retenues les plus complexes.
Les autres, ainsi que les effets principaux seront contenues de part la
structure hiérarchique du modèle. Si on considère l’hypothèse d’une
distribution de poisson ou multinomiale, seul le nombre total d’observations n
est fixé ; ceci imposera simplement la présence de la constante  . Dans ce cas
précis, les termes ijkXYZ sont tous nuls et seules les interactions d’ordre 2
seront présentes : c’est le modèle partiel d’association ou de tout interaction
d’ordre 2 à partir duquel nous avons travaillé et qui se présente comme suit :

log(  ijk )    iX   Yj  kZ  ijXY  ikXZ   YZ


jk
(2)
Dans ce cas précis, µijk représente les fréquences attendues de la
relation entre deux variables lorsque nous contrôlons pour la troisième
variable ; cette relation est généralement vue sous forme d’un tableau de
contingence à triple entrée à partir duquel sont calculés les différents
rapports de chance pour fin d’interprétation. Ainsi, étant en présence des
tableaux de contingence à plusieurs entrées l’approche log linéaire nous
permet d’analyser les différentes relations entre les variables ; cette approche
en fait modélise les effectifs des cellules d’un tableau de contingence à
plusieurs entrées sous forme d’association entre les différentes variables, tout
en faisant ressortir les effets d’interaction, d’où la spécificité du modèle par
rapport à d’autres approches habituellement utilisées dans la littérature
empirique des double emplois ; en plus, le modèle ne fait aucune distinction
entre les variables expliquées et explicatives lors de l’interprétation des
paramètres. Ceci est d’autant plus pertinent que l’ajout des variables de
contrôle au modèle pourra substantiellement changer le sens de la relation
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entre les différentes variables.


Les variables susceptibles d’expliquer la pluriactivité ont été retenues
plus haut à la section 2 de l’étude. Les six tableaux ci après, issus des différents
croisements entre les variables ci-dessus mentionnés présentent chacun huit
modèles par croisement. Les meilleurs modèles avec lesquels nous avons
travaillé sont ceux présentant des probabilités non significatives (p-value)
avec statistiques de ratio de vraisemblance (G 2) les plus petits ; les différentes
simulations obtenues avec le logiciel SAS nous ont montré que ce sont les
modèles de type association homogène qui se sont présentés comme les
meilleurs (voir annexes).

4.2. Présentation et justification empirique des modèles retenus :


les tableaux ANOVA
Les tableaux ci-dessous sont les tableaux d’analyse de la variance
(ANOVA) issus des différents modèles d’association homogène. Ces tableaux
ANOVA, à travers les tests sur les effets partiels, nous font directement
ressortir les interactions significatives.

Tableau 4.1 : Modèle (csasexe, csapluri, uopluri)


Source DF Chi- Square Pr > ChiSq
Csa 2 17,52 0.0002
Sexe 1 52,23 <.0001
pluri 1 15,38 <.0001
(csa)(sexe) 2 8,47 0.0145
(csa)(pluri) 2 3,66 0.1601
(sexe)(pluri) 1 4,85 0.0277
Likelihood Ratio 2 1 ,54 0,46

Nous constatons que l’interaction n’est significative que pour les


paires de variables (csa)(sexe) et (sexe)(pluri). En fait, le test sur les effets
partiels montre une forte dépendance entre le sexe et la catégorie salariale
des enseignants d’une part et d’autre part entre le sexe et la pluriactivité. Par
contre, ce lien disparait entre la condition salariale et la variable pluriactivité.
En d’autres termes, la pluriactivité ne dépend nullement des différentes
catégories salariales.
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Tableau 4.2 : Modèle (csauo, csapluri, uopluri)


Source DF Chi- Square Pr > ChiSq
Csa 2 51.05 <.0001
Uo 1 1.79 0.1810
Pluri 1 12.23 0.0005
(csa)(uo) 2 2.45 0.2933
(csa)(pluri) 2 4.60 0.1004
(uo)(pluri) 1 16.22 <.0001
Likelihood Ratio 2 2 ,06 0,35

Lorsque nous contrôlons par rapport à la variable CSA, seul l’effet


partiel (uo)(pluri) est hautement significatif nous montrant que la
pluriactivité dépendrait fortement de la localisation de l’université d’origine
des enseignants qui la pratique. Les universités étant les universités d’Etat,
l’effet partiel (csa)(uo) ne peut être significatif dans la mesure où quelque soit
l’université où on exerce, la condition salariale reste la même ; l’effet partiel
(csa)(pluri) quant à lui est nettement moins significatif nous montrant aussi
néanmoins que la pluriactivité dépendrait aussi de la condition salariale des
enseignants.
Tableau 4.3 : Modèle (rduuo, rdupluri,uopluri)
Source DF Chi- Square Pr > ChiSq
Rdu 3 9.50 0.0233
Uo 1 0.41 0.5240
Pluri 1 4.00 0.0454
(rdu)(uo) 3 5.67 0.1286
(rdu)(pluri) 3 66.75 <.0001
(uo)(pluri) 1 16.90 <.0001
Likelihood Ratio 3 1 ,33 0,72

Lorsque nous contrôlons par rapport à la variable ‘revenus


issus de la pluriactivité’, nous constatons que l’interaction entre les effets
(uo)(pluri) et (rdu)(pluri) est hautement significative pour le modèle
d’association homogène (rduuo, rdupluri, uopluri). En effet, et selon ces
interactions, la pluriactivité dépendra fortement des revenus issus des
différents emplois (effet (rdu)(pluri)) et aussi de la localisation de l’université
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ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

((effet (uo)(pluri)). Par contre, les revenus des enseignants issus des emplois
secondaires ne dépendent nullement de la région de localisation de
l’université (effet (rdu)(uo)).
Tableau 4.4 : Modèle (rdusexe, rdupluri, sexepluri)
Source DF Chi- Square Pr > ChiSq
Rdu 2 12.50 0.0019
Sexe 1 47.50 <.0001
Pluri 1 0.24 0.6242
(rdu)(sexe) 2 2.21 0.3305
(rdu)(pluri) 2 39.95 <.0001
(sexe)(pluri) 1 3.48 0.0622
Likelihood Ratio 2 1 ,74 0,41

Dans ce modèle, sauf l’effet (rdu)(pluri) est fortement significatif


comme pour le modèle précédent ((rduuo, rdupluri, uopluri)), à savoir la forte
dépendance de la pluriactivité par les revenus issus des emplois secondaires.
L’interaction de l’effet (sexe)(pluri) est également significatif, traduisant le
lien existant entre la pluriactivité et le genre . Par contre, nous notons la non
significativité de l’effet (rdu)(sexe) du modèle, traduisant tout simplement le
fait que les revenus issus des activités secondaires des enseignants ne
tiennent pas compte du sexe de l’enseignant.
Tableau 4.5 : Modèle (chcsexe, chcpluri, sexepluri)
Source DF Chi- Square Pr > ChiSq
Chc 2 30.07 <.0001
Sexe 1 29.68 <.0001
Pluri 1 5.40 0.0201
(chc)(sexe) 2 5.21 0.0738
(chc)(pluri) 1 1.64 0.2001
(sexe)(pluri) 1 1.87 0.1711
Likelihood Ratio 2 2 ,46 0,29

Le modèle d’association homogène (chcsexe, chcpluri, sexepluri) ne


présente qu’un effet significatif ((chc)(sexe)) presqu’à la limite lorsque la
variable contrainte horaire dans l’emploi principal est contrôlée . En effet, la
contrainte horaire dans l’emploi principal représentée ici par le nombre
d’heures de cours par semaine sera différemment exploitée selon le sexe de
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

l’enseignant. Par contre, indépendamment de la charge hebdomadaire de


travail dans l’activité principale, les enseignants des universités d’Etat auront
toujours tendance à exercer des emplois multiples, d’où la non significativité
de l’effet (chc)(pluri) et de l’effet (sexe)(pluri), ce dernier ne traduisant
aucune interaction entre la pluriactivité et le sexe.
Tableau 4.6 : Modèle (chcuo, chcpluri, uopluri)
Source DF Chi- Square Pr > ChiSq
chc 2 62.42 <.0001
uo 1 7.12 0.0076
pluri 1 16.41 <.0001
(chc)(uo) 2 1.40 0.4957
(chc)(pluri) 2 8.85 0.0120
(uo)(pluri) 1 23.06 <.0001
Likelihood Ratio 1 0 ,01 0,91

L’interaction de deux effets est significative dans le modèle (chcuo,


chcpluri, uopluri). il s’agit en effet des effets (chc)(pluri) et (uo)(pluri). En fait,
et par rapport à ces effets, le modèle stipule que les emplois secondaires
dépendent fortement de la charge de travail hebdomadaire des enseignants
des universités d’Etat ((chc)(pluri)) et aussi de la localisation de l’université
((uo)(pluri)). Par contre, la charge hebdomadaire de travail ne dépend
nullement de la région de localisation de l’université.

5. ANALYSE INTERPRETATION DES RESULTATS

Le tableau 5.1 ci dessus résume les paramètres estimés de tous les


modèles d’association homogène de la forme :
log(  ijk )    i      
X Y
j k
Z XY
ij  XZ
ik  YZ
jk
(3)
a)Tableau des paramètres estimés des effets d’interaction des
différents modèles d’association homogène :

Tableau 5.1 : modèles d’association homogène


modèles de type :
modèle
log(  ijk )    iX   Yj  kZ  ijXY  ikXZ   YZ
jk

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Paramètre valeur Pr >


ChiSq
11( csa )( sexe ) 1.0349 0.0872
Modèle 1
 21( csa )( sexe ) 1.3520 0.0038
(csagenre,csapluri,genrepl 11( csa )( pluri ) 0.4094
uri) 0.4583
21( csa )( pluri ) 0.8027 0.0721
1.0366 0.0377
11( sexe )( pluri )
11( csa )( pluri ) 0.7234 0.2018

21( csa )( pluri ) 0.9333 0.0381


Modèle 2  ( uo )( pluri )
11
1.3624 0.0001
(csauo, csapluri, uopluri)
11( csa )( uo )
-0.4139 0.4273
 21( csa )( uo )
0.2677 0.5122
 ( rdu )( uo ) -1.0492 0.0842
11

 21( rdu )( uo ) 0.3625 0.4357


31( rdu )( uo )
-0.1078 0.8313
Modèle 3 11( rdu )( pluri )
21( rdu )( pluri ) 3.1903 0.0001
(rduuo, rdupluri, uopluri)
31( rdu )( pluri ) 3.4372 0.0001
11( uo )( pluri )
3.3380 0.0001

1.6806 0.0001
 ( rdu )( sexe ) -0.2164 0.7492
11

21( rdu )( sexe ) 0.8797 0.2042


Modèle 4
11( rdu )( pluri )
1.6845 0.0028
(rdgenree,rdupluri,genrep 21( rdu )( pluri )
luri)
11( sexe )( pluri ) 2.4285 0.0001

0.9274 0.0751
Modèle 5 11( chc )( sexe ) 0.4702 0.5165
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

 21( chc )( sexe )


(chcgenre,chcpluri,sexeplu 1.2024 0.0358
ri) 21( chc )( pluri )
11( sexe )( pluri ) 0.7214 0.2125

0.7191 0.1817
 ( chc )( uo ) 0.1111 0.8489
11

 21( chc )( uo ) -0.3248 0.5593


Modèle 6 11( chc )( pluri )
-0.0829 0.8982
(chcuo, chcpluri, uopluri) 21( chc )( pluri )
11( uo )( pluri ) 0.9951 0.0985

1.6920 0.0001

Nous avons juste présenté les paramètres issus des effets d’interaction entre
les différentes variables afin d’illustrer les différentes associations entre ces
variables et la variable pluriactivité ceci étant donné certaines variables de
contrôle. Par exemple pour le modèle d’association homogène de la forme
 ( sexe )( pluri )
qui est de
(csasexe, csapluri, sexepluri), la valeur positive de 11
1.0366 stipule tout simplement que si les variables sexe et pluriactivité avaient
été indépendantes, un enseignant de sexe masculin serait le plus souvent plus
disposé que prévu à exercer des emplois multiples ceci étant donné la
condition salariale actuelle.

b) Rapports de chance conditionnel estimés et Interaction


Pour une meilleure illustration de ces effets d’interaction, nous allons
plutôt utiliser les rapports de chance conditionnels (ou partiels) obtenus à
travers les paramètres estimés du tableau ci-dessus. Le tableau ci-dessous
présente les rapports de chance estimés des différents modèles d’association
homogène :

Tableau 5.2 : Rapports de chance partiels


modèles de type :
modèle
log(  ijk )    iX   Yj  kZ  ijXY  ikXZ   YZ
jk

91
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(csasexe,csapluri,sexepluri (csa)(sexe) (csa)(pluri) (sexe)(pluri)


) 0.72 0.67 2.81
(csa)(uo) (csa)(pluri) (uo)(pluri)
(csauo, csapluri, uopluri) 0.50 0.81 3.90
(rdu)(uo) (rdu)(pluri) (uo)(pluri)
(rduuo, rdupluri, uopluri)
0.27 0.027 5.36
(rdusexe,rdupluri,sexeplu (rdu)(sexe) (rdu)(pluri) (sexe)(pluri)
ri) 0.23 0.47 2.52
(chcsexe,chcpluri,sexeplur (chc)(sexe) (chc)(pluri) (sexe)(pluri)
i) 0.48 0.48 2.05
(chc)(uo) (chc)(pluri) (uo)(pluri)
(chcuo, chcpluri, uopluri)
1.54 0.34 5.43
Colonnes 1 2 3

Nous aurons par exemple pour le modèle (csasexe, csapluri,


sexepluri) que le rapport de chance de l’effet (sexe)(pluri) étant donné la
( sexe )( pluri ) ( sexe )( pluri ) ( sexe )( pluri ) ( sexe )( pluri )
e ( 11  22  12  21
=
condition salariale actuelle est :
( sexe )( pluri )
e ( 11 = e (1 .0 3 6 6 ) = 2.081. En d’autres termes, les enseignants de sexe
masculin ont environ 2.81 fois plus de chance d’exercer les emplois multiples
que leurs homologues de sexe féminin quelque soit leur situation salariale
dans l’emploi principal. De même nous constatons également que quelque soit
la situation salariale au niveau de l’emploi principal, les enseignants de
l’université de Douala ont 3.90 fois plus de chance d’exercer les emplois
multiples que ceux de Dschang. Ainsi, le modèle d’association homogène
(csasexe, csapluri, sexepluri) nous révèle deux composantes assez
importantes dans l’explication de la pluriactivité des enseignants des
universités d’Etat au Cameroun, à savoir le sexe et la région de localisation de
l’université lorsque nous contrôlons par rapport au salaire de l’emploi
principal. Une particularité pour les modèles d’association homogène réside
sur le fait que les rapports de chance estimés seront les mêmes à tous les
niveaux de la variable de contrôle.
Lorsque nous contrôlons par rapport à la variable revenus non issus
de l’emploi principal (modèles (rduuo, rdupluri, sexepluri) et (rduuo, rdupluri,
uopluri)) , nous constatons toujours que quelque soit le niveau de revenu des
enseignants, le genre et la région de localisation de l’université restent les
facteurs explicatifs de la pluriactivité avec respectivement pour rapports de
chance 2.52 et 5.36 en d’autres termes et indépendamment du revenu hors
emploi principal, les enseignants de sexe masculin ont environ 2.52 fois plus
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

de chance d’exercer les emplois multiples que leurs collègues de sexe féminin
d’une part et d’autres part, ceux des enseignants se trouvant à l’université de
douala ont 5.36 fois plus de chance que leurs collègues de Dschang d’exercer
plus d’un emploi ;ce qui n’est sans doute pas surprenant dans la mesure où
Douala étant une ville cosmopolite et en même tant la capitale économique du
Cameroun, il y est plus facile de trouver un emploi secondaire par rapport à
Dschang qui se présente beaucoup plus comme une ville universitaire
présentant moins d’opportunité d’emploi. les effets d’interaction (sexe)(pluri)
et (uo)(pluri) étant significatifs (voir tableaux 3 et 4 d’analyse de la variance).
On peut donc conclure que quelque soit le niveau de revenus non issus de
l’emploi principal, la région de localisation de l’université et le sexe seraient des
facteurs explicatifs significatifs de la pluriactivité
Enfin, lorsque nous contrôlons par rapport à la variable contrainte
horaire dans l’emploi principal (modèle (chcsexe, chcpluri, sexepluri) et
(chcuo, chcpluri, uopluri)) nous constatons toujours une forte propension des
hommes par rapport aux femmes à exercer des emplois multiples et
également une forte dominance des enseignants de Douala par rapport à ceux
de Dschang dans la pluriactivité. Notons par ailleurs que l’effet d’interaction
(genre)(pluri) dans le modèle (chcsexe, chcpluri, sexepluri) n’est pas
significatif en d’autres termes, lorsque nous contrôlons par rapport à la
variable contrainte horaire, la pluriactivité n’est plus fonction du sexe, mais
plutôt de la région de localisation de l’université (voir tableaux 5 et 6 d’analyse
de la variance). Par rapport au sexe, ceci est d’autant plus pertinent que les
charges horaires annuelles indépendamment du sexe se répartissent comme
suit :

Tableau 5.3 : volume horaire annuel selon le grade


Volume horaire
Grade activités
annuel
Assistant 200 Travaux dirigés
Chargé de cours 180 Travaux dirigés et cours
magistraux
Maître de conférence 150 cours magistraux
Professeur 80 cours magistraux

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Nous constatons cependant que la charge horaire annuelle légale de


travail est inversement proportionnelle à l’élévation dans le grade. Ainsi,
l’assistant dont le statut est pourtant précaire, car étant sous contrat (avec un
CDD de deux ans renouvelable en principe deux fois) est aussi celui qui
travaille le plus, ce qui pourrait être préjudiciable à son changement de grade.
La colonne 2 nous présente la relation entre la pluriactivité et
certaines variables explicatives utilisées comme variables de contrôle au
niveau de la colonne 3, ceci lorsque le sexe et la région de localisation de
l’université sont contrôlés. Les résultats issus de cette colonne nous serviront
de vérifier dans le cas des enseignants des universités d’Etat au Cameroun,
certaines hypothèses formulées par le modèle de Shishko et Rostker(1976)
relatives aux facteurs explicatifs de la pluriactivité comme par exemple la
contrainte horaire dans l’emploi principal, le salaire issu de l’emploi principal, le
revenu issu des emplois secondaires.
Ainsi, pour les modèles(chcsexe, chcpluri, sexepluri) et (chcuo,
chcpluri, uopluri) Les rapports de chance entre la contrainte horaire et la
pluriactivité sont inférieurs à 1, traduisant tout simplement le fait que
quelque soit le sexe et la région de localisation de l’université, ceux des
enseignants qui ont une contrainte horaire hebdomadaire (charge de travail)
inférieure à 10h ont tendance à moins exercé les doubles emplois que ceux
des enseignants ayant des contraintes horaires hebdomadaires de 10h et plus.
Nous constatons néanmoins que l’interaction de l’effet chcpluri du modèle
(chcsexe, chcpluri, sexepluri) n’est pas significatif. En d’autres termes, lorsque
nous contrôlons par rapport à la variable sexe, la variable contrainte horaire
dans l’emploi principal n’influence nullement la pluriactivité (voir tableau 5
sur l’analyse de la variance). Par contre, lorsque nous contrôlons par rapport à
la région de localisation de l’université (modèle (chcuo, chcpluri, uopluri)),
l’interaction chcpluri est significative (voir tableau 6 sur l’analyse de la
variance). On peut donc conclure que quelque soit la région de localisation de
l’université la contrainte horaire dans l’emploi principal expliquerait
significativement la pluriactivité.
De même, les modèles (rdusexe, rdupluri, sexepluri) et (rduuo,
rdupluri, uopluri) stipulent que quelque soit le sexe ou la région de
localisation de l’université, plus le revenu des enseignants issu des emplois
secondaires sera élevé, moins ces derniers auront tendance à exercer les
doubles emplois, les effets d’interaction (rdu)(pluri) étant fortement
significatifs pour les deux modèles (voir tableau 3 et 4 sur l’analyse de la
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

variance). On pourra donc conclure que les revenus issus des emplois
secondaires seraient des composantes explicatives de la pluriactivité quelque
soit le sexe ou la région de localisation de l’université.
Enfin, les modèles (csasexe, csapluri, sexepluri) et (csauo, csapluri,
uopluri) nous montre la relation entre pluriactivité et salaire issu de l’emploi
principal, les variables de contrôle étant le sexe et l’université. Ces modèles
prédisent que indépendamment du sexe ou de la région de localisation de
l’université, plus la condition salariale est bonne, moins on aura tendance à
exercer les emplois doubles. Nous constatons cependant que l’interaction
(csa)(pluri) par rapport au modèle (csasexe, csapluri, sexepluri) n’est pas
significative lorsque nous contrôlons pour la variable sexe (voir tests sur les
effets d’interaction du tableau du modèle n°1 sur l’analyse de la variance). Par
contre, le second modèle (csauo, csapluri, uopluri) quant à lui nous montre
une significativité à la marge de l’interaction (csa)(pluri) lorsque nous
contrôlons pour la région de localisation de l’université (voir tests sur les
effets d’interaction du tableau n°2 sur l’analyse de la variance). Nous pouvons
donc conclure qu’il ya un lien entre le revenu issu de l’emploi principal et les
emplois secondaires uniquement lorsque nous tenons compte de la région de
localisation de l’université et non du sexe ; ces résultats à une certaine mesure
corroborent avec ceux de Shishko et Rostker (1976) selon lesquels l’offre de
travail dans l’emploi secondaire diminue avec l’accroissement du niveau de
salaire dans le premier emploi.

6. CONCLUSION

L’objet principal de ce papier était de mettre en évidence les facteurs


explicatifs de la pluriactivité des enseignants des universités d’Etat au
Cameroun, en l’occurrence ceux de Douala et de Dschang. Différentes
modélisations log-linéaire nous ont permis d’appréhender la pluriactivité sous
différents aspects ceci lorsque nous contrôlions par rapport à certains
facteurs tels le genre ou la région de localisation de l’université. Il en ressort
par rapport à toutes ces analyses que les facteurs explicatifs de la pluriactivité
des enseignants d’Etat au Cameroun sont le salaire dans l’emploi principal, la
contrainte horaire dans l’emploi principal et les revenus issus des emplois
secondaires, résultats qui corroborent avec ceux de la théorie. Ajoutés à ces

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facteurs nous avons constaté que certaines variables de contrôle tels le genre
et la région de localisation de l’université ont également une influence
significative dans l’explication des doubles emplois. Ceci est d’autant plus
révélateur que la plupart des études sur la pluriactivité ne tiennent souvent
pas compte de ces variables. La particularité de notre étude a été de mettre en
relief les effets d’interaction entre la variable pluriactivité et d’autres variables
susceptibles de l’expliquer ceci à travers les rapports de chance. Les données
d’enquête nous emmène à penser que les emplois multiples des enseignants
des Universités d’Etat ont pour effet de détériorer la qualité des
enseignements dispensés. Pour essayer de réduire l’ampleur de ce
phénomène d’emplois multiples, l’Etat devrait mettre en place un système
d’incitations qui peut se décliner en trois volets. D’abord, créer un cadre de
travail attractif, notamment des bureaux équipés avec Internet haut débit et
climatiseurs, notamment à Douala. En effet, à Douala comme à Dschang, seule
une minorité d’enseignants ayant des responsabilités administratives,
bénéficient de bureaux dans les campus universitaires. La conséquence en est
que la majorité des enseignants rasent les murs dans les campus à la fin d’un
cours ou entre deux cours, et ont tendance à aller vendre leur savoir et savoir-
faire ailleurs dans le secteur privé. Ensuite, une révision des taux horaires de
rémunération datant du début des années 1970, c'est-à-dire il y’a de cela
quatre décennies. Les taux actuellement pratiqués ne tiennent pas compte de
l’évolution du coût de la vie, certains biens de première nécessité ayant vu
leurs prix décupler en quatre décennies. Il y a donc urgence à adapter ce taux
au coût actuel de la vie. Enfin, une revalorisation substantielle des salaires de
base des enseignants qui pourraient être rapprochés de ceux des pays
africains de niveau de développement comparable.

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Annexe 1 : Tableaux croisés des différentes variables susceptibles


d’expliquer la pluriactivité Condition salariale actuelle * Sexe *
pluriactivité3

Condition salariale Pluriactivité


Sexe
actuelle (C.S.A) Oui Non
M 10 (10,03) 15 (14,96)
Adéquate
F 01 (0,96) 04 (4,03)
M 46 (44,87) 44 (45,12)
Inadéquate F 02 (3,12) 10 (8,87) (2)
(1)
Sans opinion M 06 (7,08) 17 (15,91) (2)
(1)
F 03 (1,91) 11 (12,08) (3)
(1)

condition salariale actuelle* Université d’origine * Pluriactivité.


Condition salariale Pluriactivité
actuelle Université d’origine Oui Non
(C.S.A)
Douala 07(7,04) 06 (5,05)
Adéquate
Dschang 04 (3,95) 13 (13,04)

3
Les chiffres entre parenthèses de la variable pluriactivité représentent les
fréquences attendues, utilisées également dans le calcul des rapports de chance
estimés.
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

Douala 36 (37,38) 27 (25,61)


Inadéquate
Dschang 12 (10,61) 27 (28,38)
Douala 08 (6,56) 10 (11,43)
Sans opinion
Dschang 01 (2,43) 18 (16,56)

condition salariale actuelle* Université d’origine * Pluriactivité.


Rémunération en Pluriactivité
Sexe
dehors de l’Université Oui Non
M 07 (7,73) 06 (5,26)
Consistantes
F 03 (2,26) 05 (1,23)
Moyennes M 31 (30,54) 08 (4,45)
F 02 (2,45) 01 (0,54)
Insignifiantes M 20 (19,72) 07 (7,27)
F 05 (0,77) 0,5 (0,22)
M 04 (4) 55 (55)
Sans opinion
01 (1) 24(24)

Rémunération en dehors de l’université * Université d’origine *


Pluriactivité.
Rémunération en Pluriactivité (Pluri)
Université
dehors de l’Université Oui Non
Origine (VE)
(RDU)
Douala 06(5,27) 01(1,72)
Consistantes (Cons)
Dschang 04 (37,72) 09(8,27)
Douala 27 (27,09) 07 (6,90)
Moyennes (Moy)
Dschang 06 (5,90) 08 (8,09)
Douala 15 (14,87) 04(4,17)
Insignifiantes (Ins)
Dschang 05 (5,17) 08 (7,82)

99
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

Douala 03 (3,80) 31(30,19)


Sans opinion
Dschang 02 (1,19) 50 (50,80)

Charge hebdomadaire des cours * Sexe * Pluriactivité.


Charge hebdomadaire Pluriactivité
Sexe
de cours (CHC) Oui Non
M 17(15,84) 28(29,15)
< 10h
F 05(1,65) 10(8,49)
M 42(42,25) 40(39,74)
≥ 10h
F 04(3,74) 10(10,25)
M 08 (3,89) 08(7,10)
N.R
F 02(1,10) 05(5,89)
Charge hebdomadaire des cours * Université d’origine * Pluriactivité.
Charge Pluriactivité
Université
hebdomadaire de Oui Non
d’origine
cours (CHC)
Douala 13(13,07) 17(16,92)
< 10h
Dschang 04(3,92) 21(21,07)
Douala 34(34) 20(20)
≥ 10h
Dschang 12(12) 30(30)
Douala 04(3,92) 06(6,07)
N.R
Dschang 01(1,07) 07(6,92)
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

ANNEXE 2 : RESULTATS D’ESTIMATION DES DIFFERENTS MODELES


LOGLINEAIRES
Condition salariale actuelle(CSA)*Sexe(SEXE)*Pluriactivité(PLURI)
MODELE TYPE DL G24 P-
VALUE
Indépendance complète
(CSA, SEXE, PLURI) 7 23,73 <0,001
log(ijk )    isexe  jpluri  kpluri
Indépendance mutuelle
(CSA*SEXE, PLURI) 5 12,66 <0,02
log(ijk )    isexe   jpluri  kcsa  ik(csa)( sexe)
(CSA*PLURI, SEXE)
5 17,46 <0 ,003
(PLURI* SEX, CSA)
log(ijk )    isexe  jpluri  kcsa  jk(csa)( pluri)
6 16,28 <0,01
log(ijk )    isexe  jpluri  kcsa  ij(sexe)( pluri)
Indépendance conditionnelle
(SEXE*PLURI, 4 5,21 0,26*
SEXE*CSA) log(ijk )  isexe jpluri kcsa ij(sexe)(csa) jk(sexe)( pluri)
4 10,01 0,04
(CSA*PLURI ,
SEXE*PLUR)
log(ijk )  isexe jpluri kcsa jk(csa)( pluri) jk(sexe)( pluri)
3 6,39 0,09
(SEXE*CSA, log(ijk )  isexe jpluri kcsa jk(csa)( pluri) ik(sexe)(csa)
LURI*CSA)
Association homogène
(SEXE*CSA,
SEXE*PLURI,
log(ijk)  jpluri kcsa ij(sexe)(csa) ik(sexe)(csa) jk(pluri)(csa)
i
sexe 2 1 ,54 0,46*

CSA*PLURI )

Condition salariale actuelle(CSA)*Université


d’origine(UO)*Pluriactivité(PLURI)
TYPE P-
MODELE DL G2
VALUE
Indépendance complète
(CSA, UO, 7 28,67 <0,0002
PLURI) log(ijk )    iuo  jpluri  kcsa
Indépendance mutuelle
(CSA*UO, 5 4,55 <0,0002
PLURI) log(  ijk )    isexe   jpluri  kcsa  ik( csa )( uo )
5 22,40 <0,0004
(CSA*PLURI, log(  ijk )    iuo   jpluri  kcsa   jk( csa )( pluri )
UO) 6 10,78 <0,09

4 2
Les meilleurs modèles sont ceux qui présentent la plus petite valeur G
101
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

(PLURI*UO,
CSA)
log(  ijk )    iuo   jpluri  kcsa  ij( uo )( pluri )
Indépendance conditionnelle
(UO*PLURI, 4 6,66 0,15*
UO*CSA) log(ijk )    iuo   jpluri  kcsa  ik(uo)(csa)  ij(uo)( pluri )
4 4,52 0,34*
(CSA*PLURI log(ijk )     i
sexe
 pluri
j  
csa
k
(csa )( pluri )
jk  (uo)( pluri )
ij
, 3 18,28 0,05
UO*PLURI)
log(ijk )     i
sexe
 pluri
j  
csa
k
(uo)(csa)
ik  ( pluri )(csa)
jk
(UO*CSA ,
PLURI*CSA)

(UO*CSA ,
Association homogène 2 2 ,06 0,35*
CSA*PLURI log(ijk )    jpluri kcsa ij(uo)( pluri) ik(uo)(csa) jk( pluri)(csa)
i
uo
,
UO*PLURI)

Rémunération en dehors de l’université (RDU)*Université


d’origine(UO)*Pluriactivité (PLURI)
MODELE TYPE DL G2 P-
VALUE
Indépendance complète
(RDU, UO, PLURI) 10 109,96 <0,00
log(ijk )    iuo   jpluri  krdu 01

(RDU*UO, PLURI)
Indépendance mutuelle
7 94,63 <0,00
log(ijk )    isexe  jpluri  kcsa  ik(csa)(uo) 01
(RDU*PLURI, UO)
7 33,56
(PLURI*UO, RDU)
log(ijk )    iuo  jpluri  kcsa  jk(csa)( pluri) <0,00
9 83,40 01
log(ijk )    iuo  jpluri  kcsa  ij(uo)( pluri)
<0,00
01

(UO*PLURI,
Indépendance conditionnelle
6 68,07 <0,00
UO*RDU) log(ijk )    iuo  jpluri  kcsa  ik(uo)(csa)  ij(uo)( pluri) 01
6 7
(RDU*PLURI,
UO*PLURI)
log(ijk )   isexe jpluri kcsa jk(csa)( pluri) ij(uo)( pluri) 0,32*
4 18,23
(UO*RDU , log(ijk )       i
sexe pluri
j  
csa
k
(uo)(csa)
ik  ( pluri)(csa)
jk <0,00
PLURI*RDU) 1

(UO*RDU ,
Association homogène
3 1 ,33 0,72*
RDU*PLURI, log(ijk ) iuo jpluri kcsa ij(uo)(pluri) ik(uo)(csa) jk(pluri)(csa)
UO*PLURI)
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

Rémunération en dehors de
l’université(RDU)*Sexe(SEXE)*Pluriactivité(PLURI)
MODELE TYPE DL G2 P-VALUE
Indépendance complète
(RDU, SEXE, 9 53,07 <0,0001
PLURI) log(ijk )    isexe   jpluri  krdu
Indépendance mutuelle
(RDU*SEXE, 6 46,91 <0,0001
PLURI)
log(ijk )     i
sexe
 pluri
j  rdu
k  ( rdu )( sexe )
ik
6 18,59 <0,004
(RDU*PLUR,
SEXE) log(ijk )    isexe  jpluri  krdu  jk(rdu)( pluri) 8 23,08 <0,003

(PLURI*SEXE, log(ijk )    isexe  jpluri  krdu  ij( pluri )(sexe)


RDU)
Indépendance conditionnelle
(SEXE*PLURI, 5 19,12 <0,001
SEXE*RDU) log(ijk )  isexe jpluri krdu ik(sexe)(rdu) ij(sexe)( pluri)
5 10,71 <0,05
(RDU*PLURI, log(ijk ) isexe jpluri krdu jk(pluri)(rdu) ij(sexe)(pluri)
SEXE*PLURI) 3 1,81 0,61*

(SEXE*RDU , log(ijk )   i


sexe pluri
j  
rdu
k
(sexe)(rdu)
ik  (rdu)( pluri)
ij
PLURI*RDU)
Association homogène
(SEXE*RDU , 2 1 ,74 0,41*
RDU*PLURI , log(ijk) isexe jpluri krdu ij(sexe)(pluri) ik(sexe)(rdu) jk(pluri)(rdu)
SEXE*PLURI)

103
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

Charge hebdomadaire de
cours(CHC)*Sexe(SEXE)*Pluriactivité(PLURI)
MODELE TYPE DL G2 P-VALUE
Indépendance complète
(CHC, SEXE, 7 18,48 <0,01
PLURI) log(  ijk )    isexe   jpluri  kchc
Indépendance mutuelle
(CHC*SEXE, 5 13,37 <0,02
PLURI) log( ijk )    isexe   jpluri  kchc   jk( chc )( pluri )
5 13,15 <0,02
(CHC*PLURI, log(ijk )    isexe   jpluri  kchc  ij( pluri )( sexe )
SEXE) 6 11,73 <0,06

(PLURI*SEXE,
CHC)
Indépendance conditionnelle
(SEXE*PLURI, 4 6,63 0,15*
SEXE*CHC) log(ijk )   isexe jpluri kchc ik(sexe)(chc) ij(sexe)( pluri)
4 6,40 0,17*
(CHC*PLURI log(ijk )   isexe jpluri kchc jk( pluri)(chc) ij(sexe)( pluri)
SEXE*PLURI) 3 8,04 <0,04
log(ijk )   isexe jpluri kchc ik(sexe)(chc) jk(chc)( pluri)
SEXE*CHC,
PLURI*CHC)
Association homogène
(SEXE*CHC , 2 2 ,46 0,29*
CHC*PLURI , log(ijk)  jpluri kchc ij(sexe)(pluri) ik(sexe)(chc) jk(pluri)(chc)
i
sexe

SEXE*PLURI)
B. YAMB, M. BIKOUE, B. NGAMOE, Pluriactivité des enseignants d’Universités d’Etat…

Charge hebdomadaire de cours (CHC)*Université


d’origine(UO)*Pluriactivité (PLURI)
MODELE TYPE DL G2 P-VALUE
Indépendance complète
(CHC, UO, 6 20,88 <0,001
log(  ijk )    iuo   jpluri  kchc
PLURI)
Indépendance mutuelle
(CHC*UO, 4 20,57 <0,0004
log(ijk )    iuo   jpluri  kchc  ik(chc )(uo)
PLURI)
log(ijk )    iuo   jpluri  kchc   jk(chc)( pluri ) 4 9,38 <0,05
(CHC*PLURI,
UO)
log(ijk )    iuo   jpluri  kchc  ij(uo)( pluri ) 5 4,47 0,48*
(PLURI*UO,
CHC)
Indépendance conditionnelle
(UO*PLURI, 3 3,99 0,26*
log(ijk )   iuo jpluri kchc ik(uo)(chc) ij(uo)( pluri)
UO*CHC)
log(ijk )  iuo jpluri kchc jk( pluri)(chc) ij(uo)( pluri) 3 0,3 0,91*
(CHC*PLURI,
UO*PLURI)
2 6,77 <0,03
(UO*CHC, log(ijk )   iuo jpluri kchc ik(uo)(chc) jk(chc)( pluri)
PLURI*CHC)
(UO*CHC,
Association homogène
CHC*PLURI, 1 0 ,01 0,91*
UO*PLURI) log(ijk) iuo jpluri kchc ij(uo)(pluri) ik(uo)(chc) jk(pluri)(chc)

105
L. B. TCHEKOUMI, The financing of private firms in Cameroon

The financing of private firms in Cameroon1


Louis Bernard TCHEKOUMI
FEAM, the University of Douala, ltchekoumi@yahoo.fr

Abstract: The aim of this article is to show that there exist several sources of
finance for private firms in Cameroon. From a description of the
characteristics of the financing and considering the distribution rate, it seems
that in addition to bank financing, private entrepreneurs can self-finance their
productive investments or resort to informal sources of finance. These are
sources of finance with specific characteristics. They are the sources mostly
used for the creation of SMEs in contrast to large firms which still have access
to bank loans. The diverse nature of these resources expresses the diversity of
firms and channels of financing. This urges banks to invest more in the
production of information, private firms to improve on their governance and,
the state to improve on the business climate of the country.
Key words: Finance, private firm, medium of finance, characteristics.

Classement JEL: G20, L20, L25

Le financement de l’entreprise privée au Cameroun


Résumé
L’objet de cet article est de montrer qu’il existe plusieurs sources de financement
de l’entreprise privée au Cameroun. Ainsi, à côté du financement bancaire, les
entrepreneurs privés peuvent autofinancer leurs investissements productifs ou
alors, ils peuvent recourir au financement informel. Il s’agit des sources de
financement aux caractéristiques manifestes et spécifiques. La diversité de ces
sources est l’expression de la diversité des entreprises et des circuits de
financement.
Mots clés: Financement, entreprise privée, circuit de financement,
caractéristiques.

Classement JEL: G20, L20, L25

1
We thank C. CHI for his remarks and comments. However the author of the
article remains solely responsible for any error.
59
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

1. Introduction
The significant weight of private firms in the economy is a common
characteristic of all developing countries. With the more or less favourable
economic atmospheres and the efforts carried out since 1990 to ameliorate
the macroeconomic environment, private firms in Cameroon continue to play
a major role in the economy. The modern sector made up of firms with
normalised accounting practices contribute about 57% of GDP. This sector
employs about 30% of the population and contributes to more than 30% of
exports (NIS2, 2010). In the last few years, the good performance of private
firms in Cameroon has been noticed through the improvement of economic
returns by about 11.8% (NIS, op cit). The banking sector has also experienced
a significant increase in liquidity. Nevertheless, the cost of loans has remained
high and the supply of credit concentrated on large foreign firms and some
important public firms and this has reduced the amount of bank loans offered
to small private firms in the country.
The reasons for this reduction have been highly discussed in the
literature. Thus according to Martinez Peria (2009), the fact that loans to the
African private sector cannot exceed the ceiling of 18% of GDP is explained by
the excessive risk perceived by local and international financial systems. This
fall in credits is explained by the fact that the access to traditional financing
proposed by credit or funding institutions is difficult due to the lack of
collateral and the weak level activity level of these firms (Fion, 1998). Collier
(2009) holds that African banking systems have long been facing high risks
and transaction costs when financing private firms. These constraints largely
contributed to restrict access to formal credit markets by these private firms.
The difficulty to obtain maturities corresponding to the payback
period of most projects which are often greater than ten years on the one
hand, and the difficulty to find equity partners due to insufficient venture
capital instruments and the volatility of short term assets in local financial
markets, or the absence of long term investment opportunities also hinder the
financing of private firms by banks.
The financial system has difficulties in pooling local and foreign savings
for the financing of profitable projects (Arnold et al., 2011). In the category of

2
National Institute of Statistics
60
L. B. TCHEKOUMI, The financing of private firms in Cameroon

bank financing, Kwenda and Money (2008) believe that the most used sources
for the financing of investments are those of development banks and other
specialised financial institutions whose structures of stable resources are
more appropriate to finance investments. Meanwhile, the Cameroonian
banking industry is essentially made up of commercial banks which are less
motivated in financing investment projects. Development banks do not exist.
This therefore hinders economic initiatives and investment projects and
reveals the dissuasive nature of existing sources of financing as regards the
conditions for obtaining them.
Also, the embryonic nature of the financial market and the lack of
stock exchange culture by social actors and, weak bond financing explain the
weakness in the financing of private firms.
All these studies have something in common. They are interested only
in bank financing whereas there exist other forms of financing with specific
characteristics. This study is aimed at analysing the characteristics of different
types of sources of finance for the Cameroon private enterprise. In other to do
this we are going to begin with the presentation of the structure of enterprises
in Cameroon according to taxation criteria followed by the analysis of the
finance circuits of these enterprises.
Our procedure will be in two steps. The first section analyses the
structure and financing channels of private firms in Cameroon. The second
section will deal with the characteristics of the financing of private firms in
Cameroon.

2. THE STRUCTURE AND MEANS OF FINANCING PRIVATE FIRMS


IN CAMEROON

In this section we are going to examine the different types of firms


and their means of financing.

2.1. Cameroonian enterprises: different forms according to branches

A sole proprietorship does not have the same needs or possibilities of


finance as a firm with several partners or associates. This reality is the same
for firms in the primary and tertiary sectors and the formal and informal
sectors. Be it according to economic or legal criteria, the size or sector of

61
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

activity, the financial problems of an enterprise are different according to how


the enterprise operates or its organisation. As such, it is important to know
the different groups of these sectors and the contribution of each type of
enterprise.
Enterprises are commonly classified on economic basis3, but we will
not consider this since the topic is based only on private firms. We are
voluntarily going to leave out the legal structure of the enterprise 4. The
minimum level of capital does not depend on economic criteria but rather on
legal criteria. This does not facilitate the understanding of the differences
between structures and the production units within the structures.
According to statistics, there exist nomenclatures on the distinction
between formal and informal sectors. The first is said to be structured,
organized, modern, having statistics contrary to the second. This is a
consideration that is not always verified (Oudin, 1985). According to
Engelhard (1988) if modernity is associated to rationality and efficiency, then
the informal sector is modern with regards to these results. Let’s recall that
this sector contributes about 46% of GDP in Cameroon (NIS, 2004). This
position therefore financially loses its raison d’être. In fact, the informal
financing of private firms particularly through gifts and family loans can be
more efficient under certain circumstances than bank loans: they are fast to
obtain, flexible to use, regularity of reimbursement are the qualities of the
modern management of capacities and financing needs (Contamin, 1990;
Juguet, 2011).
In conformity to tax reforms and with the need to examine the different
types of enterprises in Cameroon, we are going to follow the logic of Fauré
(1988), by adopting the tax regime of enterprise as classification criteria. This
method enabled Oudin (op.cit) to propose an estimation of the structure of the
population of firms in Ivory Coast. It has the advantage of not only being based
on the degree of modernity of tax formalities, on the fact of allowing transition
possibilities5 among structures but it also considers tax treatments which do

3
Public and Private
4
Sole proprietorship, company with only one associate and company with several
associates
5
By the medium class
62
L. B. TCHEKOUMI, The financing of private firms in Cameroon

not take into account the homogeneity of structures and economic behaviours
within each category.
According to tax declarations and NIS (2010), 2 963 private enterprises
exist in Cameroon. They are divided into the 31 branches of the nomenclature
of economic activities as follows:

26 enterprises for agriculture, animal husbandry and fishery,


54 enterprises in the forestry sector,
09 enterprises in the extraction industry,
414 enterprises in the manufacturing sector,
2 enterprises for electricity,
1073 Commercial enterprises,
83 restaurants and hotels,
230 Transport enterprises,
77 banks and insurance companies,
774 enterprises in other sectors

On the basis of gross exploitation surplus/gross fixed assets ratio


which expresses the economic returns in each branch of activity, translating
the propensity to resort to credits or not. The NIS classifies the branches of
activities into four groups.

-Branches with negative economic returns: they are made up of enterprises in


the fishery, animal husbandry and forestry sectors. The negative nature of the
results of the fishery sector (-3.3%) is explained by the weight of exploitation
charges with the main ones being petroleum products and personnel charges.
Since 2000, animal husbandry firms have negative results (-5.8%) since they
suffer from a disorganised commercial and production system. The fall in the
exports of timber(-8.2%) as a consequence of the promulgation of forestry
law n° 94/02 of 1994 which in its application lead to the limitation of the
issuing of new exploitation licenses for timber since 1999.

-Branches with low economic returns: in these branches we have enterprises


whose performances have either degraded regularly or accumulated due to
reduction in investments, the stagnation of activities, the competition from
massive importations and reduction in production. In these branches we have

63
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

the plastic and rubber industry (3.3%), banks and insurance companies
(3.0%), grains and the production of floor (6.6%), hotels and restaurants
(5.2%), furniture and services to enterprises (4.7%), electricity water and gas
(2.0%).

-Branches with economic returns close to the average; the stable revenue of
consumers, the amelioration of the quality of products, accompanied by a
targeted and aggressive marketing policy and the adjustment of world prices
and many others are the reasons which justify the level of economic returns
close to the average of about ten branches of activities; different
manufacturing industries (12.9%), manufacturing of drinks and tobacco
(12.2%), transformation of agricultural products (11.9%), the chemical
industry (11.3%), grains (10.7%), the manufacture of shoes and leather
industry (10.1%), extractive industry (8.8%), textile industry (8.4%), the
manufacture of mechanical and electrical equipment (8.4%), bakery industry
(8.3%) and the basic metallic industry (7.5%).

-Branches with high economic returns; these are those with the highest rates
of economic returns. Among them we have the construction of transport
material, (34.2%), retail and wholesale trade (23.2%), agricultural industry
and exports (13.1%), manufacture of construction material (20.3%),
transportation, warehousing and public works (19.6%), manufacture of paper
and material with paper (15.0%), services to collectivities, social services
(14.0%). All the branches benefit from a favourable economic environment.
Whatever the branch or level of economic returns, all enterprises
need finance. Thus they have to choose between formal and informal means of
financing.

2.2. Formal medium of finance

In Cameroon there exist modern methods of finance which


entrepreneurs can benefit from. However it should be noted that these
methods necessitate the existence of a credit market. Thus the necessity of the
existence of a financial system that is capable of responding to the
expectations of entrepreneurs. The fact that such a market should have a bank
as its domicile leads to some constraints. The first is linked to the mobilisation
64
L. B. TCHEKOUMI, The financing of private firms in Cameroon

of savings through the banking system, thus the question of the existence of
the bank such as the cost of money, services offered by banks among others.
The second constraint is related to the guarantee of credits. It leads to the
problem of the professionalism of banks in the evaluation of projects and risk.
It supposes some minimum authority in terms of contract enforcement. This is
accompanied by a transparent system of property rights and an efficient
management of these rights6 (Albagli and Henualt, 1996; Neil et Stoyan,
2001).
There are two types of instruments in the credit market. First, bank
loans with the aim of increasing the sales capacity of the enterprise. These
instruments facilitate the financing of exports by simplifying them. Thus, it
favours the national and international expansion enterprises. Second, there is
insurance. An enterprise that does not quickly recover the equivalent of
damages incurred can face serious treasury difficulties and may go bankrupt
(Henni, 1991).
Like all other type of financial markets, the credit market has risks
linked to its operations but much more to its entrepreneurial function. These
risks can also be related to the existence or not of collateral or the nature of
the collateral7.
In Cameroon, bank loans are either local or international. The first
type of financing is from BCAS8 in the form of rediscount of bills within the
framework of medium term credits and by commercial banks. These later
offer credit very selectively based on a certain number of criteria amongst
which we have; financial autonomy, profitability of projects, the good state of
the treasury, collateral and the quality of the manager amongst others (Bloy
and Mayoukou, 1994; OCDE, 2011). Until recently international finances are
carried out through open credit lines with the guarantee of the Cameroonian
state. Thus ADB9 and EIB10 have enabled the finance of some entrepreneurial
projects.

6
Ownership deeds, land survey, etc
7
Treaty, warrant, etc
8
Bank of Central African States
9
African Development Bank.
10
European Investment Bank.
65
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

With regards to the excessive liquidity of banks, it is mostly institutional


and social considerations which retard the development of bank loans for the
creation of private firms in Cameroon.

2.3. Informal means of financing

The difficulties of having access to the bank system in developing


countries in general and in Cameroon in particular have permitted the
informal financial networks to play an important role. The most important in
this network is the Njangi.
A Njangi association is considered as a group of persons who know one
another with the aim of helping themselves (Creusot, 1999). It can take
several forms. It is an association of proximity an association of belonging or
an association of affinity.
The structure of Njangis in Cameroon is based on the law on
associations. Its size varies from one Njangi group to another and depends on
the objectives and the will of the initiators, the strength of the Njangi is in the
strong social meetings, the existence of internal rules and regulations and on
the symbolic nature of money contributed by the members.
Assistance in a Njangi association can be in cash or in kind. They are
among others; Njangis, the solidarity fund and the sinking fund (or saving
fund). The existence of one of these components in the association depends on
the willingness of the members and their objectives.
As concerns Njangis each member contributes during each meeting an
amount which is fixed or varies depending on the Njangi. This amount
strongly depends on the capacity of each member to contribute. In return each
member receives in proportion of what he has contributed in a predetermined
order by draws or by auction sales.
With the solidarity fund, each association member has two types of
contributions to make. The first is ordinary like in the case of the Njangi. Then
another which can be at the beginning of the cycle or by free will during one of
the meetings. The amount of this second contribution is kept and in case of a
sad or happy event the member concerned is given assistance of a pre
established amount mentioned in the statues of the association. In case the
association does not register enough sad or happy events it can grant short
term loans to its members depending on the amounts of funds available.
66
L. B. TCHEKOUMI, The financing of private firms in Cameroon

With sinking funds, in addition to ordinary contributions, the


members of the association can each decide to make savings by putting aside
an amount during each meeting that is decided either by members or the
association. This amount saved is registered in a book that is different from
that of ordinary contributions. It can be lent out under conditions
preliminarily defined by the association. It can also be used to make collective
investments, to prepare back to school and to finance projects considered
viable by the association.
Formal and informal characters of finance networks express the
diversity of possibilities and capacities of the sources of finance of private
enterprises. However, some characteristics of these sources of finance
manifest themselves.

3. THE CHARACTERISTICS OF THE FINANCING OF PRIVATE


ENTERPRISES IN CAMEROON

The variation in financial needs and the diversity of financial


capacities among private enterprises necessitate a multitude of financial
sources. These are sources which have characteristics related to their nature,
origin and type.

3.1. Self-financing: a necessary substitute of traditional financing

Irrespective of the sector of activity in which a firm is created, the


personal financial resources of the entrepreneur constitute the basic capital.
In Cameroon this initial capital is made up of 60% of personal savings of all
the financial resources generated in the informal sector. These resources are
of prime importance (Duhaut, 1981) and are very useful in the SME11 sector.
They are most often the fruit of past salaries. When they emanate
from enterprises in the same branch of activity or in the same category we
talk of spontaneous endogenous development (Lachaud, 1976). These
resources can be used in the sector or branch. On the basis of this, the
entrepreneur can only invest in a sector in which his personal capital is about
30% of his investments.

11
Small and Medium Size Enterprise
67
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

With respect to the informal sector, the amount of personal funds


depends on the sector or branch of activity, the collaterals proposed, the size
of the enterprise or the bank solicited.
Auto finance is a share without which it is difficult to build an
enterprise; it is therefore necessary but not sufficient. It does not eliminate
the traditional model of granting loans to enterprises.

3.2. Bank Loans: low and difficult to obtain


According to the hypothesis that deposits make credits, banks have
the following possibilities; grant part of the savings they collects as loans,
reorientate savings, get liquidity from BCAS by refinancing certain loans not
yet due, and lend to other banks in the BCAS region or abroad (Abena Abena ,
2006). It is from these sources that commercial banks grant loans. In
Cameroon, they are mostly oriented towards private firms. In 2003, they
represented 71.45% that is 569.265 million of CFAF of loans requested.
Short term loans increased by 2.6%; from 643.3 billion CFAF in 2005,
after a fall of 3.4% in 2004. This increase reflects the financing of industrial
and commercial units. Medium term loans increased by 20.6% to 298.2 billion
CFAF in 2005, in relation to the pursuit of public and private investments
notably in the hydrocarbon sector, agriculture, energy, transport, trade,
telecommunication, as well as the construction of houses (BCAS, 2005).
Only two out of ten banks until recently grant long term loans to
private firms; the CCEI bank in 1999 granted long term loans of more than 10
years worth 970 million CFAF which increased to 1260 million in 2000.
Afriland First Bank through CENAIVEST financed projects for the period 2005
for 2 021 million CFAF (Abena Abena, op.cit)
The weight of bank loans to private firms is due to the fact that public
firms still have possibilities of receiving finance through public subventions
when they have treasury difficulties.
With respect to the volume of demand of bank loans access to bank
loans is not easy. Less than 10% of loan requests are satisfied despite the
surplus liquidity of banks. This difficulty has several justifications. First the
fact that those banks are careful with regards to the different risks that they
face when they grant loans. These risks can be related to borrowers since the
bank may not have enough information, on the borrower on his behaviour, on

68
L. B. TCHEKOUMI, The financing of private firms in Cameroon

his project and/or sector of activity. Then credit rationing which is one of
bank activities.
Thus in Cameroon, relationships between banks and entrepreneurs are
characterised by information asymmetry. The lenders of funds do not have
enough information on the activities of borrowers and this is at the origin of
the handicap they have in the calculation of the probability of default of
projects and prefer to reject borrowers instead of taking the risk of engaging
in very risky projects (Caprio and Hononan, 1991). Due to corruption motives
or fiscal distractions firms propose several financial statements and
accounting documents. This often justifies the lack of seriousness and
responsibility by the entrepreneur.
Lets consider the fact that it is difficult to separate the proprietor of
the enterprise and the manager of the enterprise. The loan request can be
rejected. Because of the size of the market it is difficult for the bank to know if
the funds lent are used as required by the objectives or for personal motives.
Under these circumstances it is difficult to evaluate the degree of confidence
attributed to a client.
The loop holes of the information structure make the measurement of
the risk of non reimbursement difficult. But the credit scoring technique
makes it easy (Metenier and Mulot, 1991). Its objective is to identify amongst
the information on the borrower those which enable the better understanding
of its solvability. A score is attributed to all information and the sum of the
score is compared with the score that is initially chosen. It is this score that
will enable to accept or eject loans. All the scores which are inferior to the
reference score are potentially solvable and the loan requests related to these
scores are rejected.
In Cameroon, the forestry industry benefits from bank loans easily.
The main reason is that, the main activities of the enterprises in this sector are
based on exports. It is an activity that generates a lot of foreign currency thus
firms in this sector reimburse commercial banks without a lot of difficulties. It
is apparent from the analysis of banks that they can grant loans with respect
to the opportunities of the firm and its sector of activity.

Access to credit in the BCAS region by private firms is related to a


certain number of rules elaborated by BCAS and applied by commercial banks.
Principles based on the reimbursement, supply and duration of loans, these

69
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

rules satisfy the fundamental credit principles. The non compliance or respect
of one of them can lead to an interruption of the contract, the initiation of the
recovery procedure, a judicial liquidation or a default. In all the cases, the risk
of non recovery makes banks to be very cautious when granting loans.
However, the generally low nature of this mode of finance is at the
origin of informal finance.

3.3. Informal financing: not negligible but underestimated

In addition to personal funds and bank loans, the financial resources


of private firms can also come from the family or acquaintances, from Njangis,
money vendors or from the diaspora. They are therefore essentially
represented by loans and donations.
In practice, the resources from money vendors do not lead to the
creation of enterprises in Cameroon. This limitation is due to the fact that
these resources are not often very important they do not only have a very high
reimbursement rate but their duration is equally very short and their costs
are very high. The reimbursement of such resources often begins one month
after receiving the funds.
Several Njangi associations have led to the creation of firms (Barbier,
Courlet and Tiberhien, 1986). In the absence of statistics, it is difficult today to
give the exact number of enterprises created on the basis of this source of
finance. In the carpentry sector, bakery, pressing, agriculture and artisan
through common initiative groups, investments confirm financial resources
from Njangis. They represent about 30% of the resources of first importance
orientated towards financing initial capital.
Donations and inheritance are not left out in the finance of initial
investments. Several enterprises have benefited from such a source of finance.
Nevertheless, the dominant character of such a source of finance depends on
the type of enterprise, the sector of activity, the degree of family links, type of
knowledge but above all on the convincing and negotiating capacity of the
entrepreneur. The more the project is susceptible of creating employment for
members of the family and acquaintances, the more it receives sympathy; at
that moment it can easily be financed by family and acquaintances even
though in some cases, some donations take the form of loans. However they
would have permitted to create an enterprise.
70
L. B. TCHEKOUMI, The financing of private firms in Cameroon

Since 2000, we have noticed a new enthusiasm with new initiatives in


favour of the contribution of the Diaspora in the local development process in
the world. The reasons for this new interest in the contribution of the
Diaspora are numerous. Amongst others it should be pointed out that the
transfer of funds enables to assist financially and economically the village of
the immigrant. Bokoto (2008) believes that the contribution of the Diaspora is
an alternative source of financing development that needs to be treated with a
lot of considerations. According to the statistics of the organisation of 2007,
the financial transfers of Cameroonians who live abroad were worth 267
million dollars in 2006. Wish represents about 1.5% of the GDP. Only about 4
to 5% of this amount has enabled the creation of SMSEs in the carpentry
sector, services (pressing and secretariat for example), and agriculture. These
weaknesses are due to the fact that these money transfers are aimed at
assisting in the supply of daily needs of members of the family at home and to
sponsor and manage projects realised in the village (Saraba and Le Masson,
2005).
Despite the importance of informal finance, the interest in this source
of finance remains low in Cameroon, leading to an under estimation of its
importance. The major reason is that in its policy of economic reform,
Cameroon has as objective, the growth and modernisation of production
capacities. This motivates authorities to have an eye on informal financing
sources which are in fact finance of proximity.

4. Conclusion

In this work, we have analysed the characteristics of the sources of


financing for private firms in Cameroon. In other to do this we presented the
structure of the firms and their means of financing. Finance; be it formal or
informal is a condition without which the enterprise would not exist. Despite
the significant increase in bank liquidity in Cameroon, the supply of credits
has remained low. It tends to reduce from year to year. Thus, it creates a
particular interest in self- and informal financing. Besides the fact that these
are sources of finance to be encouraged and structured, their volume remains
low and difficult to perceive. This explains the fact that they are mostly used
for the creation of SMEs and not for large scale production.

71
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

In Cameroon, the adequate financing of private firms by banks


requires the intervention of all stakeholders. Therefore, recommendations can
be made directly to banks, private entrepreneurs and public authorities.
-Banks have to invest more in the production of information, and they
need to know the appropriate time, the guarantees proposed by borrowers.
Finally, they should master modern techniques of evaluating credit risk.
-To benefit from bank loans, private entrepreneurs in Cameroon have
to ameliorate their governance structures. They have the obligation to provide
real and trustworthy information about their structures. This will reinforce
their financial capacity and their adoption of orthodox management practices.
-Cameroonian public authorities have to guarantee the stability of the
macroeconomic framework. It is its duty to ameliorate the business climate.
This consolidates the confidence of entrepreneurs and secures their
investments. Also, the state should not only favour the growth of private firms
but also structures of credit guarantee and venture capitals to finance growing
enterprises.

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74
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS / IFRS :


analyse d’une impossible quête de l’universel en matière
comptable
Louis Ndjetcheu1
Résumé :
L’adoption des normes comptables de l’IASB a constitué, pendant cette dernière
décennie, la politique la plus employée par plusieurs pays développés dans le
cadre d’une uniformisation de leur système comptable. Le débat quant au
recours à cette stratégie dans les pays en développement n’a pas fait l’unanimité,
Si certains auteurs pensent à une uniformisation des normes comptables dans le
monde2, il faut toutefois relever que d’autres chercheurs affirment que les
normes IAS / IFRS ne sont pas adéquates aux circonstances des pays en
développement et appellent à l’élaboration de normes plus appropriées. Dans ce
contexte et compte tenu du rôle fondamental de la comptabilité dans la
croissance et le développement d’un pays, l’évaluation de la stratégie d’adoption
des normes comptables internationales par les pays de l’espace OHADA constitue
à n’en point douter une tâche d’une importance capitale. Aussi, la problématique
liée aux effets de l’adoption de ces normes comptables de l’IAS / IFRS sur les
réalités socio-économiques de ces pays demeure sans réponse et mérite, par
conséquent, d’être analysée. Dès lors, l’objectif de cette recherche est donc de
trancher ce débat entre les partisans et les opposants de la convergence vers les
normes comptables de l’IASB en Afrique francophone de l’espace OHADA
Mots Clés : PME - IAS/IFRS - OHADA – Marchés financiers émergents -
Prudence – Culture

Abstract
The adoption of the accounting norms of the IASB within this last ten years
constitute the policy mostly employed by many developed countries in the
framework of their accounting information system. The debate when we turn to
this strategy in these developing countries have not given an unanimity of the

1
Enseignant – Chercheur, Laboratoire de Recherche en Finance et Comptabilité ( LARFIC ) - Faculté
des Sciences Economiques et de Gestion Appliquée ( FSEGA ) - Université de Douala ( Cameroun ) -
Tél : 00.237. 77.32.19.69 / 96.93.73.92 ; E.mail : ndjetcheu@yahoo.fr
2
C’est le cas de plusieurs organismes internationaux tels que la banque mondiale ; l’IFAC ; le FMI et
l’IOSCO, qui soutiennent les actions de l’IASB et qui sont pour l’adoption de ces normes comptables
IAS / IFRS par les pays en développement.
33
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

objective. If certain authors thought of a uniform accounting norms in the world.


it should once be noted that, other researchers confirmed that IAS/IFRS norms
are not circumstances of the developing countries and called for appropriate
elaboration of the norms. In this context, considering the fundamental role of
accounting in the growth and the development of the states, the evaluation of
the strategic adoption of the international accounting norms of OHADA by the
member states does not constitute much doubt on the major important duties.
Also, the problems linked to the effect of the adoptions of the accounting norms
of IAS/IFRS on the realistic sub-economic of these states remain without
response and merits, consequently, need to be analyses. As to the objective of this
research therefore, is to settle the debate between the partisans and the
opponents for the international IASB convergence norms of OHADA in the
Francophone Africa.

Keys words : SME, IAS/IFFRS – OHADA, Financial Markets, Emergence


Prudence – Culture

1. Introduction
Comme tout phénomène politico – économique, la comptabilité s’adapte
toujours à son environnement. Depuis plus d’une décennie, on assiste à une
multiplication des implantations des entreprises à l’étranger et à un
développement des cotations des sociétés étrangères sur les différentes places
financières internationales. Dans cette tendance d’ouverture et d’intégration
économique, il est plus que jamais nécessaire d’harmoniser les pratiques
comptables entre les différents pays. . A cet effet, les normes IAS / IFRS,
d’inspiration américaine, ont été imposées en Europe à partir de l’année 2005
dans l’intention d’arriver à un langage universel en matière de représentation
comptable.
Cependant, les incompatibilités existantes entre les normes IAS / IFRS et les
réalités socioéconomiques et culturelles des pays francophones d’Afrique
peuvent constituer des entraves à cette volonté de la diffusion des normes
internationales sur le plan mondial de manière à rendre possible la
comparabilité des entreprises dans le temps et dans l’espace. Cette entrave a
été relevée en 2011, lors d’une discussion entre le Pr Alain Burlaud de l’INTEC
de Paris et M. Wanssy Pierre alors président de l’Ordre des Experts –
34
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

comptables du Cameroun et dont l’objet portait sur la possibilité d’une


transposition des normes IAS / IFRS en Afrique. J’avais eu le privilège
d’observer une divergence de point de vue entre les deux interlocuteurs. Le
même débat s’est retrouvé dans la conférence débat du Pr Patrick Boisselier,
le nouveau Directeur du département Comptabilité, Contrôle, Audit de l’INTEC
de Paris de passage à l’ONECCA au Cameroun. Un des arguments invoqués
pour contester cet arrimage est que les normes IAS / IFRS constituent un luxe
pour les pays francophones d’Afrique. En dehors des questions techniques que
nous ne pouvons négliger, il faut bien resituer ce débat contradictoire dans sa
seule logique environnementale. De plus, les résultats d’une étude menée par
Feudjo (2010) montrent que l’arrimage du Syscohada aux normes IAS / IFRS
n’est ni une urgence, ni une exigence pour le moment. Il semble que ces
thèses, même si elles reposent sur des éléments de différenciation des cadres
conceptuels comptables en question, restent muettes quant aux raisons
fondamentales de leur scepticisme. Ce dont il est question, en fait, n’est pas la
transparence et la comparabilité des comptes dans l’espace et dans le temps
du fait de la mondialisation des économies, mais d’un affrontement
socioéconomique et culturel. Il nous intéresse d’autant plus qu’il est toujours
d’actualité. Dès lors, la question légitime qui en découle est celle – ci : quelles
sont les raisons qui peuvent handicaper l’arrimage du Syscohada aux normes
internationales de l’IASB ? C’est ce que nous allons tenter d’apporter des
éléments de réponse dans le cas des pays francophones de l’espace OHADA.
Notre objectif, à travers cet article, est de rechercher les raisons de ce
pessimisme sur le terrain des variables socioéconomiques et culturelles d’une
part et de se positionner dans le débat, surtout à l’heure actuelle où les
organismes internationaux tels que la Banque Mondiale, le FMI, l’IFAC
soutiennent les actions de l’IASB et cherchent à imposer les normes IAS / IFRS
aux pays en développement d’autre part. Ainsi, il est opportun de bien
comprendre la relation entre les normes IAS / IFRS et le contexte
socioéconomique et culturel. Dans le cadre de cette étude, nous examinons si
les variables socioéconomiques et culturelles en vigueur dans ces pays
peuvent être des freins à la diffusion de la normalisation comptable
internationale. Cette étude contribue à la littérature dans le domaine de
l’universalité de la normalisation comptable. Elle est, à notre connaissance, la
première étude africaine francophone qui examine empiriquement la relation
entre le contexte socioéconomique et culturel africain et l’adoption des
35
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

normes comptables internationales de l’IASB. L’étude permet d’identifier


certaines caractéristiques sur le plan socioéconomique et culturel qui peuvent
être des facteurs de blocage à la diffusion de ces normes en Afrique.
Cet article commence par une revue de littérature permettant de replacer le
problème de l’adoption et de la diffusion des normes internationales IAS /
IFRS dans son contexte et d’en comprendre les origines. Puis, quelques
possibles raisons socioéconomiques et culturelles de résistance sont discutées
à travers la littérature. La méthodologie de la recherche repose sur une série
d’entretiens semi-directifs auprès des spécialistes du métier du chiffre que
sont les experts – comptables et les universitaires qui dispensent des
enseignements de comptabilité. Ensuite, nous présentons les résultats de nos
entretiens permettant ainsi de mieux appréhender l’origine de la résistance
africaine aux normes IAS / IFRS à travers des questions socioéconomiques et
culturelles. Enfin, nous concluons et discutons des limites de notre
investigation.

2. L’ancrage théorique sur les obstacles socioéconomiques et


culturels à la diffusion des normes IAS / IFRS dans les pays
africains de l’espace OHADA.
Selon Amblard (2004) la comptabilité ne doit pas être considérée comme une
simple technique, mais comme un ensemble de mécanismes qui résulte de
choix humains. Dès lors, il y a lieu de s’intéresser aux influences économiques
et culturelles, aux pressions sociales et aux enjeux politiques s’exerçant sur la
comptabilité.
La comptabilité est un langage utilisé pour révéler les réalités économiques
dont elle est l’instrument de communication et d’information. Une
interrelation existe donc entre l’environnement économique et la
comptabilité. Les objectifs de la comptabilité financière et les processus suivis
pour la mise en place des normes comptables diffèrent, généralement, d’un
contexte à l’autre. Ces différences sont dues, essentiellement, à la relation
étroite entre la comptabilité financière et l’environnement avec toutes ses
composantes. Chaque pays ou groupe de pays définit, compte tenu de ses
conditions environnementales, une série de normes comptables adaptées à sa
spécificité.
36
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

La littérature comptable, à travers les travaux des chercheurs comme


Hofstede (1984) ; Doupnik, T. et Salter (1995) Nobes et Parker, 2006 :
Doupnik et Perera, (2007) ; montre que plusieurs facteurs environnementaux
peuvent expliquer des différences au niveau des modèles comptables,
notamment : le droit, la fiscalité, l’inflation, le niveau de développement
économique, le mode de financement des entreprises, l’organisation sociale, le
statut de l’éducation comptable, le statut de la profession comptable et la
culture.
Il convient d’aller au delà de cette analyse et se concentrer uniquement sur les
variables socioéconomiques et culturelles susceptibles d’handicaper la
diffusion des normes IAS / IFRS en Afrique francophone.

2.1 – L’importance du contexte socio économique comme frein à


la transmission des normes IAS / IFRS en Afrique francophone.
Plusieurs auteurs montrent qu’il existe une relation entre les pratiques
comptables et le niveau de développement économique des pays (Linowes
(1969), Engelmann (1962), Enthoven (1965) et Lowe (1967)). A cet égard,
Doupnik et Salter (1995), ont constaté une liaison entre l’environnement
économique et politique, d’une part, et le développement de la comptabilité
d’autre part. Ces deux auteurs sont à l’origine d’un modèle d’analyse mettant
en relief le rôle des facteurs environnementaux dans le développement de la
comptabilité comme le retrace le graphique 1 ci-dessous :
Graphique 1 : Relation entre les facteurs environnementaux et les pratiques
comptables

37
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

Environnement
Externe
Culture

Culture Événements isolés


Evénements
majeurs

Systèmes éducatifs
Structure
Autres Systèmes Institutionnelle
Système Juridique

Système Comptable

Entreprises

Organismes Professionnels

Pratiques comptables

Source : Adapté de Doupnik T.S. et Salter S.B ( 1995 )

2.1.1 – La présentation du modèle de Doupnik et Salter


Le modèle de Doupnik et Salter (1995) repose sur l’existence d’une structure
institutionnelle qui s’articule autour de plusieurs systèmes, à savoir le
système comptable, le système juridique, le système éducatif, etc. Le système

38
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

comptable est composé de plusieurs sous-systèmes : les agences de


réglementations, les organisations professionnelles, les entreprises, etc.). Les
normes comptables en vigueur dans un espace géographique donné sont
élaborées par le système comptable de ce pays ou groupe de pays. La
structure institutionnelle de la société, incluant le système comptable, est
déterminée par l'environnement externe, les normes et les valeurs culturelles.
Ces dernières sont influencées par l'environnement externe. Cet
environnement crée des événements liés qui agissent comme un stimulant
pour l'action et la structure institutionnelle. Les normes culturelles et les
valeurs se modifient en fonction de l’importance des événements.
Un sous-système comptable interagit pour développer une réponse aux
événements liés. Les normes culturelles et les valeurs affectent l'interaction
parmi les différents systèmes. Le système comptable n'agit pas comme un
évacuateur mais interagit avec d’autres systèmes afin de développer des
réponses appropriées culturellement, face à des événements influençant.
Les événements influençant sont classés dans deux catégories :

o La première catégorie de facteurs regroupe les événements


marquants tels que la colonisation, l'inflation, le passage d'une
économie planifiée à une économie de marché, les exigences en
matière de responsabilité sociale de l’entreprise, la mondialisation,
les regroupements régionaux, etc…

o La deuxième catégorie regroupe les évènements isolés, comme les


dévaluations, les scandales financiers, les crises, etc…

En revenant sur l’analyse faite par Doupnik et Salter (1995), et compte tenu
des spécificités de l’environnement dans les pays de l’espace OHADA, nous
avons retenus cinq facteurs environnementaux pouvant expliquer le blocage à
la transposition des normes IAS/IFRS en Afrique francophone. Ces facteurs
portent sur les variables culturelles, l’environnement économique et politique,
le mode de financement des entreprises, l’organisation sociale, le statut de
l’éducation comptable et le statut de la profession compta.

39
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

2.1.2 – Les facteurs de blocage culturels à la diffusion des normes


IAS/IFRS en Afrique francophone.
II est intéressant de jeter un coup d’œil sur la genèse de la comptabilité pour
montrer que l’évolution de la comptabilité n’est pas due au hasard, mais elle
est le résultat de l’évolution de son environnement culturel. La culture est un
acquis, pas un héritage ; elle provient de l’environnement social d’un individu.
Plusieurs dimensions sont déterminantes, les symboles, les rites, les héros et
les valeurs. En ce qui concerne les valeurs, nous pouvons les décomposer en
des dimensions pouvant avoir une influence certaine sur la diffusion des
normes IAS / IFRS en Afrique francophone, à savoir la variable culturelle, la
faiblesse, voire l’absence de l’ordre des experts comptables dans certains
pays, la culture de l’informel.
S’agissant de la culture, Nobes (1998) considère que le facteur culturel
participe dans le choix du système comptable. Les pays influencés par les
mêmes valeurs culturelles, adoptent le même système comptable. Plusieurs
chercheurs ont montré que les pays influencés par la culture anglo-saxonne
possèdent une comptabilité développée et sophistiquée. Dans ce sens, Zeff
(1998) a considéré que la culture est un facteur d’influence tant pour les
normes et les valeurs des systèmes sociaux que pour le comportement des
groupes qui interagissent à l’intérieur des systèmes. Cet auteur soutient que
depuis quelques années, la culture de type anglo-saxon influence
profondément les cultures nationales. Zèghal et al (2006) arrivent à la
conclusion que les pays développés ayant une culture anglo-saxonne3
adoptent facilement les normes IAS / IFRS basées sur l’individualisme à
travers le destinataire privilégié de l’information comptable qu’est
l’investisseur. Ainsi, en accord avec les conclusions de Gray (1988), les
normes comptables internationales n’ont de sens que dans des pays à plus fort
degré d’individualisme4.
Par contre, la culture du collectivisme, caractéristique des pays francophone
d’Afrique, met l’Etat au centre de la vie de la nation, à telle enseigne que ni

3
Une économie gouvernée par l’individualisme et l’éloge du profit. Ce profit représente une juste
rémunération d’une part du sacrifice par les épargnants en s’abstenant de consommer pour investir, et
d’autre part du « risque » pris par les détenteurs du capital investi en espérant être rémunérés par des
revenus futurs incertains
4
Le rejet de l’Etat en tant qu’instance régulatrice et surtout rédistributrice de revenu.

40
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

même l’application des politiques d’ajustement structurel n’a pas permis leur
affaiblissement.
Raison pour laquelle la question de l’Etat providence et celle de la
souveraineté nationale engagent l’Etat en Afrique à jouer un rôle de premier
ordre dans la vie de la société. En effet, l’Etat est un agent économique aux
multiples casquettes dans la mesure où il est à la fois consommateur,
producteur et régulateur de la vie économique. Le rôle de l’Etat revient donc à
concevoir et à améliorer l’environnement institutionnel, à dynamiser les
institutions du secteur privé, à promouvoir la concertation Etat / secteur
privé, à faire respecter la loi, à collecter et à redistribuer les richesses
nationales et à réguler l’activité économique.
C’est en vue d’assurer la régularité du financement de ses dépenses publiques
que l’État en Afrique a tenté de se doter d’institutions, de textes législatifs et
réglementaires régissant l’activité économique. Dans ce cadre, une multitude
de codes sectoriels et de lois ont été adoptés par les législateurs. Il s’agit, entre
autres, du code des investissements, du code du travail, du code des douanes,
du code des impôts, du code des marchés publics, du code de l’environnement,
du code forestier, du code minier, du code de la pêche, du code de la marine
marchande, du code des assurances, du code de procédure civile, de la loi
bancaire, du droit comptable, etc... Il s’avère que loin de favoriser l’activité
économique, la pléthore de textes vise plutôt à la contrôler. Ce qui traduit à
souhait, la prépondérance de l’Etat dans la société africaine. Ce rôle
transparaît clairement dans l’approche macroéconomique et fiscale attribuée
à l’information comptable et financière en Afrique.
De même, le blocage peut provenir du degré d’appréciation du risque et de
l’incertitude dans les prises de décision. En effet, la norme comptable IAS /
IFRS de la « fair value » ou de la « juste valeur » génère de l’incertitude dans la
comptabilité avec ses effets pro cycliques sur les actifs de l’entreprise
Benabdellah et Teller (2006). Ces deux auteurs s’alignent sur l’option prise
par Colasse (2005) et les pays de l’espace francophone OHADA de se référer
sur le « principe de prudence » à travers l’évaluation des actifs à leur coût
historique5.

5
Ces auteurs recommandent de choisir avec sagesse la méthode du coût historique
qui a l’avantage d’entraîner des conséquences beaucoup plus prévisibles

41
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

La différentiation de la variable culturelle transparaît aussi au niveau de la


forte propension à l’informalité des africains. En Afrique francophone on note
une certaine hypertrophie du secteur informel. Les statistiques actuelles
montrent que ce secteur occupe près de 40% de la main-d’œuvre souvent
analphabète et non qualifiée ; et participe pour près de 40% dans le PIB de la
plupart des pays. Il s’agit de domaines où les micro-entreprises individuelles
ou familiales prédominent, car ne nécessitant pas un capital financier
important. C’est le premier refuge des personnes qui ont subi de plein fouet
les conséquences dramatiques de l’application de la politique d’ajustement
structurel en Afrique par les bailleurs de fonds internationaux ( FMI – Banque
Mondiale ) et des populations rurales nouvellement installées dans les centres
urbains. L’entreprise informelle est gérée de façon empirique, sans
comptabilité. L’importance du rôle du secteur informel dans les économies de
ces pays et l’ignorance de sa présence dans les normes IAS / IFRS ne justifient
pas la nécessité d’une diffusion des normes internationales en Afrique
francophone. En effet, La comptabilité est un langage utilisé pour révéler les
réalités économiques dont elle est l’instrument de communication et
d’information. Dès lors, une interrelation devrait donc exister entre
l’environnement économique et la comptabilité. D’ailleurs cette exigence
s’intègre déjà parfaitement dans le droit comptable OHADA qui a prévu un
système minimal de trésorerie pour saisir les activités de ce secteur informel.
Aussi, l’adoption des normes IAS / IFRS dans l’espace francophone OHADA
peut paraître malaisée dans la mesure où l’on observe des différences
culturelles. On peut s’interroger ainsi sur l’opportunité de changer les
pratiques comptables existantes au profit de normes internationales
« exotiques » et peu pratique pour les besoins de fiscalité et de statistique
nécessaires à la couverture des dépenses publiques et des prévisions
macroéconomiques des gouvernements. Cette limite conforte la position de
normes inadaptées à la réalité africaine.
Nous pouvons poser notre première proposition comme suit :
Proposition N° 1 : les spécificités culturelles influent négativement sur la
diffusion des normes IAS/IFRS en Afrique francophone

42
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

2.1.3 Faible développement économique et organisation


professionnelle comptable fragile comme freins à la diffusion des
normes IAS / IFRS en Afrique francophone.
L'impact de l'environnement socioéconomique et culturel sur la comptabilité
est largement discuté dans la littérature comptable (Belkaoui, 1995a, 1995b).
Pour sa part Lowe (1967) note que le développement de la comptabilité est un
processus évolutif qui dépend et s’entrelace avec le développement de
l’économie. En fait, dans les pays ayant un grand niveau de développement
économique, l’activité économique est très importante ce qui influence
positivement le développement de la comptabilité. Selon Hoarau et Teller
(2007), derrière les normes IAS / IFRS se joue aussi le mode de gouvernance
des grandes entreprises. En privilégiant le besoin d’information des
investisseurs, les normes internationales s’incrustent au modèle de
gouvernance dit de l’agence. Ce modèle de gouvernance actionnariale navigue
à contre courant de l’approche partenariale propre aux PME africaines à
capital fortement concentré entre les mains de leurs propriétaires et/ou de
leur famille. Par conséquent, les problèmes d’agence se posent différemment
dans les deux contextes. Pour sa part, Capron (2005) renvoie le
développement économique à la concentration des capitaux et leur
internationalisation, la complexification des modes de financement des
entreprises. Ces situations font apparaître des problèmes nouveaux auxquels
les normes IAS / IFRS font face. Cet auteur affirme que tous les pays ne
connaissent pas simultanément le même stade de développement capitaliste
et chacun, selon sa culture, son histoire économique et sociale, apporte des
solutions comptables spécifiques à un moment donné. Par conséquent, Arpan
et Radebaugh (1985), Doupnik et Salter (1995) n’envisagent pas un niveau
élevé de développement de la comptabilité dans les pays en développement6.
En d’autres termes, dans les pays en développement, la spécificité de l’activité
économique ne demande pas une comptabilité sophistiquée ou très
développée.
L’organisation professionnelle comptable, quant à elle fait référence à l’organe
intervenant dans la gestion et/ou la réglementation comptable. La création de
normes comptables (ou leur acceptation par un pays) oppose souvent les
organismes privés, les organisations comptables professionnelles et le

6
Ces auteurs considèrent que le développement économique est la variable fondamentale qui influence
le développement de la comptabilité puisqu’ il affecte les autres fonctions dans la société.
43
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

gouvernement, dans une lutte d’influence. En effet, dans les pays développés
du Nord, la réglementation de la comptabilité est l’affaire des organisations
professionnelles privées avec une forte participation de la profession
comptable, ce qui demande une profession comptable bien développée et
formée. Pourtant, en Afrique francophone, la réglementation comptable reste
une affaire des pouvoirs publics, et la profession comptable est très mal
formée et mal organisée dans des pays où il existe un ordre national des
experts comptables. Il faut noter pour le regretter que plusieurs décennies
après les indépendances, la formation des comptables en Afrique francophone
reste toujours contrôlée par le colonisateur dans un schéma de formation
complètement extraverti et désuet7 Parmi les experts comptables, très peu ont
des diplômes supérieurs dans le domaine comptable. La plupart sont des
anciens comptables des sociétés et qui ont été tout simplement reversés dans
le corps des comptables agrées lors de la mise en place d’un semblant ordre
des experts comptables. Cette incompatibilité entre cette réalité de
l’environnement comptable et les exigences de maîtrise technique en matière
de normalisation comptable pourrait handicaper la diffusion des normes IAS /
IFRS en Afrique francophone.
Une fois de plus, le niveau de développement économique doublé à la fragilité
de l’organisation des professionnels de la comptabilité, permettent de justifier
sans aucun doute, le choix de toujours recourir au législateur politique pour
faire passer la loi et par conséquent la modification de toute mutation sur le
plan comptable. Ce qui peut justifier la résistance opposée à cette perte de
souveraineté subséquente au passage aux normes internationales.
D’après ce qui précède, nous pouvons en déduire notre deuxième proposition
de recherche :
Proposition n° 2 : un développement économique faible et une organisation
professionnelle comptable fragile influent négativement sur la diffusion des
normes IAS / IFRS en Afrique

7
Dans les pays développés les experts comptables sont aujourd’hui formés dans des universités. En
Afrique francophone, c’est une institution privée en France qui gère la formation des comptables, avec
un contenu centré sur la France et très pauvre en matière de réflexion théorique ou d’épistémologie de la
comptabilité. C’est sans doute ce qui justifie l’absence de ces professionnels dans les instances de
normalisation comptable en Afrique.

44
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

2.1.4– Le degré d’ouverture économique dans le blocage


de la diffusion des normes IAS / IFRS en Afrique
francophone.
Cooke et Wallace (1990) ont introduit les facteurs externes de
l’environnement pour comprendre les systèmes comptables des différents
pays. Parmi ces facteurs, ces auteurs relèvent le degré d’ouverture de
l’économie sur l’extérieur. Ainsi, plus le degré d’ouverture de l’économie est
élevé, plus le pays est exposé à des pressions extérieures. Entre autres ces
pressions, l’obligation d’avoir une comptabilité développée.
Au fait, l’utilisation d’un langage comptable commun par toutes les entreprises
opérant dans un même espace économique permet aux différents utilisateurs
de suivre les activités de ces entités dans le temps et dans l’espace et de
prendre, par conséquent, des décisions raisonnées Karim Mhedhbi ( 2010).
Or, les statistiques sur le plan du commerce mondial ou des investissements
directs à l’étranger (IDE) montrent que l’Afrique noire au sud du Sahara
représente moins de 0,6% du commerce mondial. De plus, la faiblesse des
investissements directs étrangers n’impose pas la nécessité du besoin d’une
information financière de qualité, c'est-à-dire une information fiable,
pertinente, intelligible et comparable. Par conséquent, nous envisageons que
la profession comptable peut se contenter de l’harmonisation comptable
actuelle en vigueur dans cette sous – région. De même, cette faible ouverture
sur l’extérieur se manifeste aussi à travers les facteurs financiers.
Le facteur financier peut influencer le développement de la comptabilité. En
effet, les bourses ont besoin de plusieurs entreprises cotées pour augmenter
leurs bénéfices et leur rentabilité (Barbu, 2005). Or, dans les pays de l’espace
OHADA, on note une coexistence entre les filiales de firmes multinationales
généralement cotées sur les places financières occidentales et les PME locales.
Ces PME trouvent ainsi une très haute barrière à l’entrée des marchés
financiers émergents existants. Les conditions d’accès leur semblent très
prohibitives. De plus, la maîtrise d’une connaissance boursière insuffisante
doublée d’une exigence en matière de qualité et de fiabilité de l’information
financière et comptable publiée rend difficile, voire impossible toute tentative
d’introduction de ces PME à la bourse dès lors qu’elles fonctionnent comme
des boîtes noires dans lesquelles l’information ne saurait être transparente.
D’ailleurs, il n’est pas rare de retrouver près de trois bilans publiés par une
45
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

même entité au cours d’une même période de temps. ( un bilan pour le fisc
dont le résultat est minoré au maximum dans une optique d’optimisation
fiscale, un bilan pour les institutions financières dans lequel on présente de
belles perspectives pour la PME et enfin un bilan pour les associés qui reflète
l’image fidèle de l’entreprise ).
Nous pouvons ainsi avancer notre troisième proposition :
Proposition N° 3 : La faible ouverture de l’économie influe négativement sur la
diffusion des normes IAS / IFRS en Afrique

Tableau 1 : Différence entre les facteurs environnementaux dans les deux


modèles comptables
OHADA IAS / IFRS
Aversion au risque et à Goût du risque
l’incertitude
Etat centralisateur Libéralisme étatique
FACTEURS Faible organisation Organisation
ENVIRONNEMENTAUX professionnelle comptable Professionnelle Comptable
puissante
Marché financier inexistant Marché financier
sinon embryonnaire dynamique
Forte présence de PME Grandes firmes
managériales
Collectivisme Individualisme
Forte dose de l’informel Actes économiques
formalisés
Source : Conçu par l’auteur

Les propositions de recherche ainsi exposées ont permis d’élaborer le modèle


d’analyse présenté dans la figure 1, modèle qui est testé dans la suite des
développements.

46
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

Figure 1 : Modèle d’analyse de l’influence des variables environnementales sur la


diffusion des normes IAS / IFRS en Afrique francophone

Variables
Culturelles

P1

Diffusion des
normes IAS / IFRS
P3 en Afrique
Francophone
P2
Faible développement
économique &
Faible ouverture de organisation
professionnelle
l’économie comptable
fragile

Source : Conception de l’auteur

Le test de ce modèle sera effectué tout au long de nos prochains


développements

3. La méthodologie de recherche
La présente recherche, qui s’inscrit dans le cadre d’une analyse exploratoire,
suit une méthodologie constructiviste. Elle essaie de confirmer ou infirmer les
propositions de recherche émises précédemment. L’approche qualitative
adoptée repose sur l’exploitation d’un guide d’entretien. Une analyse du
contenu permettra de recueillir des données sur les facteurs
environnementaux de blocage de la diffusion des normes IAS / IFRS en
Afrique francophone. Une discussion des résultats sera suivie des implications
managériales.
3.1 – Echantillon des personnes interrogées
L’échantillon de personnes à interroger se recrute parmi les chercheurs
universitaires dans le domaine de la comptabilité, ainsi que parmi les cabinets

47
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

d’expertise comptable contenus dans le répertoire de l’Ordre National des


Experts comptables du Cameroun ( ONECCA )

Tableau 2 : Profil des personnes interrogées


Profil Fonctions Nombre
Maître de Conférences 01
Chercheurs universitaires dans le
domaine comptable Chargé de Cours 01

Salariés dans les entreprises 02


Experts Comptables
Professionnels libéraux 06

TOTAL ////////////////// 10

Source : Conçu par l’auteur

3.2 – le recueil de données


Les données qualitatives ont été recueillies sur la base d’un entretien semi –
directif. Les entretiens ont été menés sur la base d’une grille d’entretien
élaborée à partir de la revue de littérature menée ci-dessus (voir en annexe).
L’analyse de données s’est faite sur la base d’une analyse du contenu. En effet,
il a été question de retranscrire et d’analyser les données de chaque entretien
en mettant particulièrement en lumière les éléments les plus significatifs de
chacun au regard de nos différents items retenus. Cela a été réalisé grâce à une
analyse inductive par thématiques et par le codage de la transcription des
interviews qui permet de saisir de manière précise le sens de chaque entretien
mené sur le terrain.

4. Présentation et discussion des résultats de l’enquête


L’ensemble des thèmes étudiés précédemment ont été évoqués, cependant
certains ont particulièrement attiré l’attention de nos interlocuteurs et feront
ici l’objet d’une analyse plus précise : les variables culturelles, le faible
développement économique et l’environnement institutionnel fort, la faible
ouverture de l’économie sur l’extérieur.

48
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

4.1 – L’impact des variables culturelles sur la diffusion des


normes IAS/IFRS en Afrique francophone
Les personnes interrogées ont particulièrement fait le lien entre la culture du
collectivisme et la primauté de l’Etat dans la vie économique et sociale en
Afrique. Par conséquent, l’adoption des normes IAS/IFRS risquerait de
remettre en cause cette mission régalienne de l’Etat dès lors que la finalité de
l’information comptable et financière est destinée à l’investisseur. Les pays de
l’espace OHADA sont ceux du droit écrit où le modèle comptable subit
profondément l’influence fiscale et macroéconomique.
En ce qui concerne la culture de l’aversion au risque des africains, il ressort de
nos entretiens que les personnes interrogées ont exprimé une préférence
pour le modèle du « coût historique » assorti d’une possibilité de réévaluation
en période inflationniste. Le principe de la « fair value » ne semble pas
opérationnel dans les pays où le marché financier est inexistant et/ou
embryonnaire et dans lesquels la loi du marché défie toute logique 8.
Un autre élément de blocage potentiel se manifeste actuellement par la non
intégration des besoins des petites et moyennes entreprises dans les normes
IAS/IFRS. Pourtant ces micro-entreprises du secteur informel et formel
tiennent une place importante dans le tissu économique de ces pays. Les
résultats des entretiens montrent que les normes IAS / IFRS s’appliquent
beaucoup plus aux grandes entreprises et aux firmes multinationales opérant
sur les marchés financiers. Ce qui rend leur diffusion particulièrement difficile
dans des pays où la propension à l’informalité reste grande et habitués à une
omniprésence de l’Etat dans la vie économique et sociale. Ce qui confirme les
analyses de Zeff (1988) sur l’influence de la culture sur le comportement des
groupes qui interagissent à l’intérieur des systèmes ou de celle de Gray (1988)
qui affirme que les normes internationales n’ont de sens que dans des pays à
plus fort degré d’individualisme. C’est aussi les cas de Benabdellah et Teller
(2006), de Colasse (2006) qui privilégient le « principe de prudence » pour
l'évaluation des actifs au « coût historique ». Dès lors, nos entretiens nous ont
permis de confirmer la proposition selon laquelle les spécificités culturelles
influent négativement sur la diffusion des normes IAS / IFRS en Afrique
francophone.

8
On note une prépondérance pour la spéculation, le marchandage des prix au détriment de la loi de
l’offre et de la demande
49
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

4.2 – Faible développement économique, organisation


professionnelle comptable fragile et diffusion des normes
internationales en Afrique francophone

A la question de savoir si le faible développement économique des pays et la


présence d’un environnement institutionnel fort dans l’espace OHADA
constituent un handicap à la diffusion des normes IFRS, les personnes
interviewées se réfèrent aux piliers des normes internationales que sont la
présence de firmes managériales, la primauté de l’investisseur comme
principal destinataire de l’information comptable et financière, l’existence
d’un marché financier dynamique qui favorise le refinancement des
entreprises, une régulation comptable assurée par un organisme privé, pour
montrer que ces conditions sont étrangères aux caractéristiques de
l’économie africaine. Elles requièrent des conditions peu familières à
l’environnement des pays africains francophones dès lors qu’elles pourraient
engendrer des problèmes d’individualisme, de gouvernance et de légitimité
politique dans des espaces dominés par l’esprit du collectivisme.
De même, les interviewés sont unanimes sur le fait que les normes IFRS ont
des impacts considérables sur les différents métiers du chiffre (experts-
comptables, auditeurs, commissaires aux comptes, directeurs financiers,
concepteurs de systèmes d’information, juristes d’entreprise, analystes
financiers). On peut s’interroger sur la possibilité de transformation de
l’environnement légal des métiers de comptabilité en Afrique. A l’observation,
il semble que la profession comptable en Afrique soit l’apanage de cabinets de
petite taille détenus par les nationaux et qui se confinent aux travaux avec les
PME exclues du périmètre des marchés financiers. Les avis des propriétaires
de ces petits cabinets sont partagés entre les tenants de l’adoption de ces
normes IAS / IFRS et ceux de leur rejet. Les partisans arguent l’idée selon
laquelle la mondialisation avec la forte pénétration de la Chine impose une
sorte d’uniformisation du langage comptable dans une langue compréhensible
par tous les acteurs en présence. Ceux-ci se recrutent généralement parmi les
experts comptables diplômés. Les partisans du rejet se refugient derrière la
place fondamentale que devrait avoir aujourd’hui la profession comptable
dans la régulation comptable. Or, Celle – ci présente de goulots d’étranglement
à plusieurs niveaux, notamment celui du niveau de formation professionnelle

50
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

mais aussi de la taille de leurs entreprises clientes. Les différences au niveau


de la formation professionnelle constituent un facteur discriminant pour la
diffusion des normes IAS / IFRS en Afrique francophone. En effet, les experts
comptables diplômés semblent mieux outillés à la compréhension et à
l’adaptation aux normes internationales. Les autres se recrutent parmi les
anciens comptables (teneurs de comptes) reversés dans le corps pour combler
le déficit en ressources humaines lors de la constitution de l’Ordre. Nous
pouvons aussi relever que si les big four 9 monopolisent la clientèle de filiales
de firmes multinationales et certaines grandes entreprises nationales, les
experts comptables nationaux travaillent avec les micro-entreprises et les
moyennes entreprises dont la majorité ne juge pas nécessaire l’adoption des
normes internationales d’autant plus que celles-ci ignorent l’existence de ces
petites entreprises dans sa présentation.
Il en découle que les experts interrogés ont eu des avis très divisés quant à la
faiblesse du développement et à la fragilité de l’organisation professionnelle
comptable sur le blocage de la diffusion des normes comptables
internationales en Afrique. Ce qui montre que l’hypothèse 2 est partiellement
validée

4.3 – Faible ouverture de l’économie sur l’extérieur et diffusion


des normes internationales en Afrique francophone
La faible ouverture de l’économie sur l’extérieur se manifeste par une
présence massive de micro entreprises et quelques rares filiale de firmes
multinationales présentes en Afrique francophone. Cette dichotomie du tissu
industriel n’est pas sans conséquence sur les arguments développés par les
experts. Différents arguments pour ou contre la diffusion des normes
internationales en Afrique ont été avancés. Les tenants de la diffusion des
normes IAS / IFRS se recrutent parmi les quelques rares filiales des big four
installées en Afrique et qui servent de relais dans le conseil et l’assistance de
filiales de multinationales présentes sur le marché. Ces dernières sont
favorables à l’adoption des normes IAS / IFRS en Afrique dès lors que leur
reporting comptable au siège en vue de la consolidation se fait déjà dans les

9
Il s’agit de: Ernst & Young ; KPMG ; PricewaterhouseCoopers ; Deloitte Touche
Tohmatsu.
51
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
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normes internationales10. Les opposants à la transposition de ces normes sont


beaucoup moins enthousiastes.
A la différence des filiales des big four, les petits cabinets d’expertise
comptable rejoignent ainsi Cooke et Wallace (1990) sur le terrain de l’adage
selon lequel moins le degré d’ouverture de l’économie est élevé, moins le pays
est exposé à des pressions extérieures, notamment l’obligation d’avoir une
comptabilité développée. Ce qui montre que l’hypothèse 3 est partiellement
validée
En définitive, notre recherche a identifié quatre facteurs environnementaux, à
savoir le facteur culturel, le développement économique, la fragilité de
l’organisation professionnelle comptable et l’ouverture de l’économie. Parmi
ces facteurs, il s’avère que seulement deux ont un rôle positif et significatif
dans le blocage de la diffusion des normes comptables en Afrique. Ces deux
facteurs sont le développement économique et la culture. Les autres facteurs
que sont la fragilité de l’organisation comptable professionnelle et la faible
ouverture de l’économie n’auraient que des effets mitigés sur la diffusion des
normes comptables internationales en Afrique.

5. Conclusion

Cet article a cherché à identifier les variables socioéconomiques et culturelles


qui pourraient se dresser en obstacles à la diffusion des normes
internationales en Afrique francophone de l’espace OHADA. Il ressort de notre
analyse que les spécificités culturelles, sociales et économiques de ces pays ne
semblent pas militer pour l’opportunité d’une diffusion des normes IAS / IFRS
dans ces pays. Si l’harmonisation comptable semble possible au sein d’un
sous - groupe, elle peut apparaître particulièrement problématique entre les
différents groupes.
Cet absence de compatibilité entre les groupes humains produit la distorsion
de normes comptables et de I’ incohérence des résultats financiers produits
qui restent subjectifs au regard des spécificités des contextes culturels. Ainsi,

10
De plus, cette transposition des normes IAS / IFRS en Afrique aura pour effet de réduire les coûts de
production de l’information comptable dès lors qu’en Afrique ces filiales sont obligées de tenir leurs
états comptables et financiers dans le référentiel OHADA avant de les traduire dans les normes IAS /
IFRS
52
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

il paraît difficile, voir impossible d'aboutir à un cadre comptable fédérateur


entre occidentaux et africains pour la finalité de l’information financière
produite par les dirigeants d’entreprises.
Nonobstant ce constant de la non universalité des normes IAS/IFRS, cette
recherche comporte quelques limites. La première est le nombre réduit des
facteurs environnementaux. En fait, il y a plus que quatre facteurs qui
pourraient influencer sur la diffusion des normes IAS/IFRS en Afrique. On
pourrait également y ranger les problèmes de l’inflation, de langue, le droit
etc… Nous les avons exclus de notre analyse pour raison de temps. La
deuxième limite repose sur la taille limitée de notre échantillon d’étude. La
troisième à trait à l’unité de terrain d’analyse constitué uniquement du
Cameroun qui n’est qu’un pays parmi les dix sept autres que compte l’espace
OHADA et qui pourraient avoir chacun des spécificités propres sur les
différentes variables retenues dans le cadre de cette analyse. Ce qui pourrait
biaiser la validité externe de nos résultats

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ANNEXE : Le guide d’entretien qualitatif

Préambule

55
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

Nous vous remercions de nous recevoir aujourd’hui et de nous consacrer du


temps. En quelques mots, l'entretien d'aujourd'hui fait partie d'une recherche
que nous menons sur la problématique de transposition des normes IAS / IFRS
dans les pays de l’espace OHADA.
En particulier, cette recherche a pour but de rechercher les facteurs de blocage
de cette diffusion des normes comptables internationales en Afrique
francophone. C'est pour recueillir votre avis, votre perception personnelle
d'homme/de femme confronté(e) dans votre quotidien à la manipulation des
données comptables que nous sommes ici. Les entretiens que nous réalisons en ce
moment sont exploratoires. C'est-à-dire que nous souhaitons recueillir le
maximum d'idées possibles sur les facteurs de blocage de cette diffusion. Bien
entendu, tout ce qui sera dit au cours de cet entretien restera absolument
confidentiel. Si nous vous proposons de l'enregistrer, c'est pour faciliter notre
discussion et éviter des erreurs dans notre prise de notes. Si vous le désirez, nous
vous remettrons cette cassette une fois que nous transcrirons les informations
qui sont nécessaires à notre recherche. La durée de l'entretien ne devrait en
principe pas excéder quarante cinq minutes. Je tiens à dire qu’il n’existe pas de
bonne ou mauvaise réponse, ce que nous cherchons à savoir, c’est bien
l’identification des facteurs de blocage socioculturel, politique et économique à
l’adoption des normes IAS / IFRS en Afrique francophone de l’espace OHADA.
Lien entre les variables environnementales identifiées dans la littérature
et la résistance africaine à l’adoption des normes IAS / IFRS

I - Les variables culturelles propres à l’Afrique francophone

 La culture de l’individualisme à la base des normes IAS / IFRS peut –


elle s’adapter au contexte africain ?

 La culture de l’aversion au risque des africains cadre – t – elle avec les


principes des normes IAS / IFRS ?

 La petite taille ou le degré d’informalité de l’entreprise africaine joue-t-


elle dans le degré d’adoption des normes IFRS ?

 Concernant les plus petites entreprises, considérez-vous que l’adoption


des IFRS est plus difficile ? Si oui, pourquoi ?

56
L. NDJETCHEU, Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS/IFRS

II - Les variables économiques et institutionnelles

 Pensez-vous que le faible développement économique des pays de


l’espace OHADA soit un handicap à la diffusion des normes IFRS ?
Si oui : pourquoi ?
Si non : pour quelles raisons ?

 Pensez-vous que la profession comptable en Afrique francophone soit


bien préparée à l’adoption des normes IAS / IFRS ?

 L’Etat vous semble-t-il un acteur particulièrement résistant à l’adoption


des normes IAS / IFRS en Afrique francophone ? Si oui, pour quelles
raisons ?

 Une organisation professionnelle comptable inexistant par endroits, et


parfois très mal organisée et mal organisée peut – elle réguler la
comptabilité en Afrique ?

 La configuration actuelle de l’ordre des experts comptables dans la


plupart des pays africains basée sur une forte proportion des
comptables agrées reversés au détriment des experts comptables
diplômés ne peut-elle pas freiner la diffusion des normes internationales
en Afrique francophone ?

III - La faible ouverture de l’économie africaine sur l’extérieur

 Du point de vue de l’existence majoritaire des PME pensez-vous que les


pays africains de l’espace OHADA soient capables d’adopter les normes
IAS / IFRS ?

 Le caractère inexistant, sinon embryonnaire des bourses de valeurs en


Afrique francophone n’handicape – t – il pas la diffusion des normes IAS
/ IFRS dans cet espace géographique ?

IV - Questions finales

 Pensez-vous que la langue puisse être une barrière à la bonne


application des normes IAS / IFRS ?

 Nous aimerions aussi savoir si, d'une manière générale, les normes IAS /
IFRS sont des sujets qui vous intéressent personnellement et que vous
57
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

avez plaisir à voir enseignés ou mettre dans des programmes de


formation scolaire et universitaire ?

 Avez-vous quelque chose à ajouter, d'autres renseignements à


transmettre que vous avez sans doute oubliés ?

 Que pensez – vous des questions de ce guide d’entretien ? Pensez – vous


qu’on puisse ajouter ou supprimer des questions ? Si oui lesquels ?

Nous vous remercions pour votre disponibilité.

58
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

IMPACT DE LA POLLUTION SUR LA PRODUCTION DES


CREVETTES AU CAMEROUN

Henri NDAME MAKEMBE,


Faculté des Sciences Economiques et de Gestion Appliquée, Université de
Douala, , BP 4032 Douala , Tel : (+237) 94 44 72 27), E-mail :
hndame@yahoo.fr

Résumé
La pollution des milieux aquatiques empêche l’exploitation durable des crevettes
au Cameroun. Le présent article le démontre à l’aide du modèle de Beverton –
Holt. Ce modèle comporte deux paramètres indiquant respectivement la taille
des mailles de filet et le taux naturel de mortalité des ressources, et une variable
désignant le taux de mortalité par pêche. En y intégrant aussi un indicateur de
l’influence de la pollution de l’environnement sur le rendement des ressources
halieutiques, nous montrons par une série de simulations qui prennent en
compte le taux de pollution de l’eau que, toutes choses restant égales par
ailleurs, le niveau de prélèvement de crevettes est d’autant moins important que
le taux de pollution de l’eau est élevé. Ces résultats valident une politique de
protection contre la pollution, dans une perspective de pêche durable.
Mots clés : crevettes, pollution, exploitation durable, modèle de Beverton –
Holt, externalité.
JEl. : Q2 ; Q5

The impact of pollution on the optimal exploitation of prawns in Cameroon


Abstract
Aquatic pollution prevents the sustainable exploitation of prawns in Cameroon.
This study demonstrates this by employing the model of Beverton-Holt. This
model comprises two parameters representing the size of net holes and the
natural mortality rate of resources, and a variable designating mortality rate
per catch. By integrating an indicator of the influence of environmental
pollution on the output of water resources, we show through a series of
simulations -in which the rate of water pollution is made- that, everything being
equal, the output of prawns reduces as the rate of water pollution increases. The

106
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

state therefore has to look for means to fight this pollution externality, in the
perspective of sustainable fishing.
KeyWords: prawns, pollution, sustainable exploitation, Beverton-Holt model,
externalities.
JEl. : Q2 ; Q5

1. INTRODUCTION

Pour la Banque Mondiale, le produit halieutique est le bien alimentaire le plus


international. « Un tiers de la production mondiale de poisson fait l’objet
d’échanges internationaux, soit la proportion la plus forte enregistrée pour
tous les produits primaires » (Banque Mondiale, 2010, P.161). Pourtant, on
constate de plus en plus une diminution des stocks de ressources halieutiques,
l’une des causes majeures de cette situation étant la dégradation des milieux
aquatiques.
La prise de conscience au niveau mondial de la nécessité de combattre cette
dégradation en vue d’une pêche durable est prouvée par plusieurs textes et
rapports de conférences internationaux régulièrement publiés depuis
plusieurs décennies. Nous citons par exemple la conférence tenue à Rome en
1970 par l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture
(FAO), sur la pollution des mers et ses effets sur les ressources biologiques et
la pêche.
La question de la protection du milieu marin se traduit dans le Golfe de Guinée
par la mobilisation des Etats autour des questions d’importance majeure
concernant l’exploitation des ressources marines. Cela a donné lieu à la
Convention d’Abidjan de 1981 pour la Coopération en matière de Protection
et de Développement du Milieu Marin et Côtier de la Région de l’Afrique de
l’Ouest et du Centre.
Pays du Golfe de Guinée, le Cameroun possède 360 km de côte, 14000 km2 de
plateau continental et 39600 km2 de plans d’eau continentaux. Il est signataire
de nombreux accords internationaux portant sur l’utilisation durable des
ressources marines et prend régulièrement part à des accords de grande
importance sous-régionale. Il a adopté, au plan interne, un texte fondamental
sur la pêche, et surtout un Plan National de Gestion de l’Environnement
(PNGE). Ce dernier mentionne la pollution comme un problème majeur

107
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

pouvant compromettre l’utilisation durable du potentiel annuel exploitable,


estimé à 200 000 tonnes de poissons.
Ce problème concerne particulièrement les crevettes, reconnues très sensibles
à la pollution. Celles rencontrées dans les sociétés de pêche au Cameroun sont
de la famille des peneides. Ce sont des ressources halieutiques d’une grande
valeur d’échange et à demande élevée sur le marché international. Leur
production annuelle représente plus de 95% de celle des crustacés exploités
au Cameroun, et elles constituent la principale ressource halieutique
exportée1.
Souvent au – dessus des 2000 tonnes par an dans les années 1970, la
production annuelle des crevettes décroît régulièrement au – dessous de 500
tonnes depuis le début des années 1990. Cela est de nature à compromettre
leur exploitation économique durable.
Notre préoccupation centrale est ainsi de déterminer comment assurer une
exploitation durable des crevettes, dans cet espace menacé de pollution. Il
s’agit précisément de répondre à deux questions :
- Quel est l’impact de la pollution sur la production des crevettes ?
- Quelle est l’incidence d’un niveau de pollution élevé sur la survie des
crevettes et, par conséquent, sur leur exploitation durable ?
Notons qu’avant le milieu du 20è siècle, il n’existe pratiquement pas d’analyse
économique des ressources renouvelables. En effet, dans la pensée
économique classique, la plupart des ressources naturelles sont des biens
gratuits. Say (1817) déclare ainsi que « les ressources naturelles sont
inépuisables, car sans cela nous ne les obtiendrions pas gratuitement. Ne
pouvant être multipliées ni épuisées, elles ne sont pas l’objet des sciences
économiques ».
La même thèse de gratuité est ensuite renforcée par l’analyse néoclassique
qui, bien qu’ayant servi plus tard de base pour la conception de la théorie des
ressources naturelles et de l’environnement, exclut alors l’ensemble des
ressources naturelles du domaine économique (Faucheux et Noël, 1995, p.69).

1
Cf les Rapports annuels d’activité de la Délégation Provinciale du Littoral du
Ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries Animales, Exercices 1982/83
– 2004.
108
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

Cette pensée néoclassique va être contestée par d’autres écoles de pensée.


C’est ainsi que pour B. de Jouvenel, cité par Barde (1992), «il faudrait que
l’économie politique devienne l’écologie politique ; je veux dire les flux
retracés et mesurés par l’économiste doivent être reconnus pour dérivations
entées sur les circuits de la nature ».
Bien que contestée, c’est la théorie économique néoclassique qui constitue la
base pour la modélisation bioéconomique en halieutique. Les premiers
modèles de pêche intégrant des considérations d’ordre économique datent
des années 1950 et viennent compléter les modèles biologiques de pêche, d’où
le vocable de modèles bioéconomiques. C’est Gordon (1954) et Shaefer (1954,
1957) qui « introduisent un modèle économique simple d’exploitation d’une
zone de pêche. Ils montrent que l’exploitation en accès libre conduit à un
profit net instantané nul à l’équilibre alors que la ressource est susceptible de
dégager un profit positif pour des niveaux d’effort moins importants » (Jouvet
et Rotillon, 2002). Bien qu’issu d’un raisonnement statique qui ne permet pas
de prendre en compte le taux d’actualisation, ce résultat est le théorème
fondamental2 de la théorie économique des ressources renouvelables.
En dynamique, c’est Scott (1955) qui pose le premier le problème de la
gestion inter temporel d’une ressource, problème résolu plus tard par Clark
(1973) dans une approche qui met en évidence le parallèle entre les
problèmes d’exploitation d’une ressource et ceux rencontrés en théorie du
capital : un stock de ressources, capital naturel, a une valeur en raison de son
potentiel productif. Dès lors, les choix d’exploitation s’apparentent à des
décisions d’investissement.
D’autres analyses vont apparaître, pour définir des mesures pouvant orienter,
au moins théoriquement, le comportement du producteur dans un sens
compatible avec la solution optimale. Il en a résulté trois catégories de
mesures : les quotas individuels de capture, les licences de pêche dans
l’objectif de limiter l’effort de pêche, et les redevances sur les captures ou sur
l’effort de pêche (Meuriot, 1987).

2
« Ce résultat (…) peut être considéré comme le second théorème fondamental de l’économie des
ressources (après celui de HOTELLING concernant les ressources épuisables en propriété privée) »
(FAUCHEUX et NOEL, 1995).

109
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

Les modèles bioéconomiques ont permis d’importantes avancées théoriques


dans l’aménagement des pêches, mais les vertus opérationnelles de la
plupart d’entre eux restent faibles (Gilly, 1989).
Tel n’est pas le cas du modèle de Beverton-Holt (1957), qui est couramment
utilisé dans la pratique des pêches (Faucheux et Noël, 1995, p.147). C’est ce
modèle qui a retenu notre attention pour la bonne conduite de ce travail. En
plus de son côté empirique, d’autres raisons soutiennent ce choix : un modèle
de pêche adéquat est celui qui intègre les aspects aussi bien économiques que
biologiques et environnementaux de l’activité halieutique. La plupart des
modèles comportent certes des paramètres économiques et biologiques, mais
ils n’intègrent pas d’indicateur relatif à l’influence du milieu marin sur la vie
des ressources halieutique. Le modèle de Beverton-Holt permet d’intégrer un
tel indicateur.
La section 2 est ainsi consacrée à la présentation du modèle de base de
Beverton-Holt et à ses possibilités d’application dans l’exploitation des
crevettes au Cameroun. La troisième section s’intéresse aux données utilisées
et la méthodologie adoptée. Avant de conclure, nous présentons, dans l’avant-
dernière section, les résultats et leurs implications.

2. Le modèle de base de beverton-holt et ses possibilités


d’application au Cameroun
Il s’agit d’un modèle de pêche fondamentalement dynamique au sein duquel
l’exploitation d’une espèce est donnée en terme de générations et repose sur
une relation stock -recrutement. Pour les auteurs, toute population de
ressources se divise en plusieurs classes d’âges ou générations, chacune
d’entre - elles résultant de la fécondité des générations antérieures. Bien que
datant de plusieurs dizaines d’années, il est encore aujourd’hui « couramment
utilisé dans les problèmes de pêche » (Faucheux et Noël, 1995 p.147).

2.1. Le modèle de Beverton-Holt3


Soit une génération isolée de ressources. L’on désigne par :
 ( ) l’effectif de la génération des ressources en vie en ;
 (0) = l’effectif initial de la génération (ou encore son recrutement) ;

3
Lire aussi Faucheux et Noël (1995, p.148-149).
110
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

 ( ) le poids moyen d’un individu à l’âge ;


 une constante strictement positive qui représente le taux naturel de
mortalité des ressources ;
 une variable positive ou nulle qui représente le taux de mortalité par
la pêche.
L’on suppose que la fonction ( ) satisfait à l’équation différentielle suivante :
( )⁄ = − + ( ).
L’on sait alors que cette équation, appelée équation de survie de Beverton-
( )
Holt, a pour solution ( ) =
Le produit de l’effectif de la génération en vie en t par le poids moyen d’un
individu à l’âge t est égal à la biomasse totale de la génération en vie en t,
notée ( ) :
( )
( )= ( ) ( )= ( ).
S’il n’y a pas de pêche, est nul et ( ) se réduit alors à une biomasse
« naturelle » notée ( ) donnée par :
( )= ( )
Par différentiation de cette dernière relation on trouve :
⁄ = [ ⁄ − ]
A l’optimum, on a ⁄ =0
La Biomasse maximale est ainsi atteinte pour un âge des ressources tel
que :

( )⁄ ( ) = , où ′ = ⁄ .
L’on introduit alors un autre paramètre, w, qui représente la taille des mailles
du filet de pêche. L’on suppose les engins de pêche d’une sélectivité telle que
toute ressource d’âge au moins égal à tw qui rencontre le filet est
automatiquement capturée tandis que toute ressource d’âge n’atteignant pas
tw s’échappe toujours. Par conséquent, l’équation de survie conduit à :
( )
=− ( ) 0< < ( =0 < )
( )
=− + ( ) ≥
Avec pour solution :
( )= 0< <
( )= ( ) ≥

111
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

La biomasse totale donnée par la génération sur sa vie entière est donc :
∞ ∞
= =∫ ( ) ( ) = ∫
( )
( )

Il est intéressant de souligner que l’ «on peut aussi interpréter cette dernière
expression comme la biomasse obtenue annuellement en équilibre d’une
population de poissons consistant en générations d’âges différents. La preuve,
donnée par Beverton et Holt, est que, à l’équilibre, ce que rapporte la ième
génération durant un an est égal à ce que rapporte une génération quelconque
pendant la ième année de sa vie. En faisant les sommes sur i, on voit que ce que
rapporte par an l’ensemble des générations est exactement égal à ce que une
seule génération pendant toute sa vie » Faucheux et Noël, 1995, P. 149). La
fonction ( ) est de la forme suivante :

Y
W0
Y0

Yw

mp
Cette figure montre que pourMpw 0
une taille de maille de filet w donnée, il existe un
niveau de rendement optimal W°(m°pw, Y°w).

2.2. Application du modèle de Beverton-Holt au contexte étudié


Tel quel, le modèle de Beverton – Holt n’est pas centré sur le cas d’étude. Pour
bien en profiter, il est en effet indispensable de l’adapter à l’objet de ce travail.
Par rapport à une génération isolée de crevettes, nous considérons le modèle
de référence, tel que développé dans la sous-section 2.1., tout en apportant

112
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

une spécification sur le taux de mortalité naturel et sur la forme de la fonction


( ), qui correspond au poids moyen de la crevette à l’âge .
Dans le modèle que nous spécifions, représente le taux naturel strict de
mortalité et constitue une composante de , le taux naturel élargi de
mortalité. comporte aussi une composante environnementale notée et
qui désigne le taux de mortalité par la pollution. En effet, le fait qu’il soit
devenu impossible d’effacer complètement toute pollution de l’existence en
fait de nos jours un phénomène naturel. Les deux composantes de jouent
additivement, de sorte que : = + . Personne ne peut influencer la
constante . Par contre, il est possible d’agir sur par des politiques de
protection de l’environnement.
On part donc de l’équation différentielle : ( )⁄ = − + ( ).
On définit ensuite la biomasse ( ) = ( ) ( ) comme dans le modèle de
référence. Comme le poids des ressources animales ne croît pas indéfiniment
dans le temps, nous supposons que ( ) est une fonction croissante et limitée,
avec un taux de croissance du poids, ′⁄ (avec ′ = ⁄ ), qui décroît avec
le temps. Une fonction comportant ces caractéristiques, et que nous
admettons ici, est ( ) = (1 − ) , où , , sont des constantes positives
que nous déterminerons à partir des études faites sur la masse des crevettes
dans la milieu étudié.
Le taux naturel strict de mortalité est alors déterminé en l’absence totale de
toute activité de pêche ( = 0) et en supposant le niveau de pollution
négligeable ( = 0).
est donc toujours obtenu de la même façon que dans le modèle de
référence, en résolvant l’équation ⁄ = 0. Et le résultat est le même :
′ ′
= ( )⁄ ( ), où = ⁄ .
En introduisant une activité de pêche avec des mailles de filet de taille w et
des engins de pêche aussi sélectifs que ceux définis au 2.1., et en supposant
que le milieu marin est relativement pollué, on a le système :
( )
=− ( ) 0< <
( )
=− + ( ) ≥
Et donc :
( )= 0< <
( )= ( ) ≥
113
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

La biomasse totale obtenue à partir de la génération sur sa vie entière est


alors :
∞ ∞
= = ( ) ( ) = ( )
( )

Dans la section suivante, les hypothèses retenues ainsi que la démarche


méthodologique de ce travail sont exposées.

3.HYPOTHESES ET METHODOLOGIE

Deux hypothèses sont retenues.


H1- La pollution a un impact négatif significatif sur la production des
crevettes.
H2- Un niveau de pollution élevé peut entrainer l’épuisement des
crevettes.

Pour les vérifier, la méthodologie suivante comporte deux volets : la collecte


des données et l’application du modèle de Beverton-Holt.
Les données concernent les quantités produites des crevettes d’une part et
l’indicateur de la pollution marine d’autre part. Les quantités sont prélevées
mensuellement dès la deuxième moitié de l’année 1999 jusqu’à la fin de 2006
par la quasi-totalité4 des entreprises de pêche industrielle ayant opéré au
Cameroun sur la période.
D’après les informations reçues sur le terrain, la pêche n’a pas le même
rendement sur toute l’année, et la production issue de l’exploitation des
crevettes doit être conçue suivant quatre saisons, qui correspondent aux
quatre trimestres de l’année. Les données mensuelles obtenues ont ainsi été
réparties en trente périodes trimestrielles, allant du troisième trimestre 1999
au dernier trimestre 2006. Ces données ont ensuite été désaisonnalisées, pour
en éliminer l’influence saisonnière et ne garder que la tendance réelle. Cette
désaisonnalisation s’est faite sur la base d’un modèle multiplicatif car les
données brutes recueillies présentent un mouvement saisonnier qui évolue

4
Seules quelques sociétés ayant cessé d’opérer au début des années 2000 (SCLM,
SOCIAA, MBUTCHO et Cie) n’ont pas été prises en compte.
114
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

avec le temps. La production brute et celle désaisonnalisée sont dans l’annexe


1.
Concernant l’indicateur de pollution, celui retenu est l’indice élémentaire de
dégradation de la mangrove. La mangrove constitue en effet un milieu
nourricier et de reproduction pour les crevettes. Elle se dégrade d’année en
année en milieu côtier camerounais du fait de la pression humaine et des
rejets des industries agroalimentaires (FAO, 2006). Cet indice de dégradation
de la mangrove est calculé à l’aide des données de la FAO5 (2006), et figure
dans l’annexe 2.

4. L’application du modèle de Beverton-Holt aux données


camerounaises
Dans le modèle de Beverton-Holt spécifié au 2.2., le taux naturel élargi de
mortalité est la somme du taux naturel strict de mortalité, , et du taux de
mortalité par la pollution, . La détermination de est vue dans la
résolution du modèle ( = ′ ( )⁄ ( )).
Quant au taux de mortalité par la pollution, , sa détermination nous permet
de vérifier, par la même occasion, l’hypothèse H1. En effet, considérons le
modèle linéaire suivant : = + + ,
avec = 1,2, … ,30 trimestres.
Dans ce modèle, et sont respectivement la
production désaisonnalisée de crevettes et l’indice de dégradation de la
mangrove (pris pour indicateur de pollution) du trimestre t.
, et sont respectivement les paramètres du modèle et le terme
aléatoire.
Le paramètre est la dérivée première de la production désaisonnalisée par
rapport à la pollution, c’est-à-dire l’évolution de la production suite à une
variation infinitésimale du niveau de pollution. Ici, en principe, la valeur
estimée de ce paramètre est négative. Ce signe négatif montre que la pollution
a un impact négatif sur la production des crevettes. L’hypothèse H 1 est bien
vérifiée si , en plus d’être négatif, est significativement non nul.

5
FAO (2006), Evaluation des ressources forestières mondiales. Etude thématique
sur les mangroves, Cameroun, Profil national. FAO, Rome.

115
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

Par ailleurs, en tant que dérivée première, est, par définition, un taux
d’accroissement. Son signe négatif implique une diminution de la production
suite à une augmentation infinitésimale de la pollution. Cette diminution
s’assimile à une perte de ressources. C’est pourquoi représente, en valeur
absolue, le taux de mortalité des crevettes par la pollution sur la période
considérée. On a ainsi = | |.
La valeur de ainsi estimée va servir de point de départ des simulations en
vue de vérifier la seconde hypothèse. Plus précisément, pour vérifier
l’hypothèse H2, nous montrons par une série de simulations qu’en faisant
varier le taux de pollution du niveau = | | vers des valeurs de en plus
élevées, la courbe représentative de la biomasse totale = se
rapproche de l’axe des abscisses, c’est-à-dire du niveau zéro, qui signifie
l’épuisement des ressources. Cela permet de vérifier cette hypothèse.

5. RESULTATS ET IMPLICATIONS
Les résultats sont liés à la vérification des deux hypothèses formulées, et il en
découle certaines implications socio-économiques et environnementales.

5.1.vérification de l’hypothèse H1 et calcul du taux de mortalité


par la pollution

La régression de la production désaisonnalisée des crevettes sur la pollution


d’après le modèle

= + + , où = , ,…,
trimestres, a donné les résultats consignés dans le tableau suivant :
Tableau 1 : Régression de la production désaisonnalisée sur la pollution

Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob.

C 152.4149 6.963461 21.88781 0.0000


POLLUTION -0.147409 0.013415 -10.98862 s0.0000

R-squared 0.811764 Mean dependent var 82.86383


Adjusted R-squared 0.805042 S.D. dependent var 36.01412
S.E. of regression 15.90170 Akaike info criterion 8.435070
116
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun
Sum squared resid 7080.194 Schwarz criterion 8.528483
Log likelihood -124.5260 Hannan-Quinn criter. 8.464953
F-statistic 120.7498 Durbin-Watson stat 1.353814
Prob(F-statistic) 0.000000

Source : résultats obtenus avec le logiciel eviews.


Il ressort de ces résultats le modèle est significatif, avec un coefficient de
détermination égal à 0, 811, et des probabilités critiques des coefficients
égales à 0. On peut donc écrire que :
DESAISONNALISE = 152,4149 − 0,147409POLLUTION .
Ainsi, une augmentation infinitésimale de la pollution entraîne ainsi une
diminution de la production de 14,74%. Ce résultat montre bien que la
pollution a un impact négatif sur la production des crevettes. La première
hypothèse est donc vérifiée.
Ce résultat permet aussi de déterminer le taux de mortalité par la pollution :
= | | = |− , |≈ , .
Nous rappelons que cette valeur va servir comme point de départ des
simulations dans la vérification de l’hypothèse H2.
5.2.Détermination du poids moyen Z(t)et calcul du taux naturel strict de
mortalité (m )
Comme nous le savons, on admet que ( ) = ( − ) , où , , sont des
constantes positives dont nous allons calculer les valeurs. Pour cela, nous
supposons d’abord que le poids moyen maximal d’une crevette est 1 unité de
masse (la limite, lorsque l’âge de la crevette devient de plus en plus grand, de
( ) est égale à 1). Avec cette hypothèse, nous trouvons = .
Nous supposons ensuite que le poids moyen de la crevette est pratiquement
nul pour un âge proche de sa naissance (la limite, lorsque l’âge de la crevette
tend vers 0, de Z(t) est égale à 0). Cette hypothèse permet d’obtenir b = 1.
Nous admettons enfin, avec la FAO (1988), que la crevette peneides exploitée
dans l’Atlantique-Est en général, et au Cameroun en particulier, atteint son
poids maximal à un âge = . Cette dernière hypothèse permet de calculer
= .
En définitive, on aboutit à : ( ) = (1 − ) .
La détermination de Z(t) nous permet alors de calculer le taux naturel strict
de mortalité :

117
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
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( ) ′
= = (1)/ (1), car la crevette atteint son poids maximal à un âge
( )
= =1 .
On obtient alors :

= ′ (1)⁄ (1) = 18 (1 − ) ⁄(1 − ) = 18 ⁄(1 − ) = 18⁄( − 1)


C’est-à-dire ≈ 0,045. En d’autres termes, sur une population de 1000
crevettes, 45 meurent naturellement.
Ce résultat facilite la vérification de la seconde hypothèse.

5.3.Détermination de la biomasse totale ( = ) et vérification de


l’hypothèse H2.

Pour vérifier la seconde hypothèse, nous allons déterminer la biomasse totale


et, par simulation, faire augmenter successivement le niveau de pollution de
l’eau, que nous supposons ici proportionnel au taux de mortalité par la
pollution. On sait que :
∞ ∞
= = ( ) ( ) = ( )
( )

En considérant que ( ) = (1 − ) , le calcul de cette intégrale aboutit


à (voir annexe 3):
1 3 3
= = − +
+ + +6 + + 12


+ + 18
Nous rappelons que dans cette fonction, = + = + 0,045, car
≈ 0,045.
Pour vérifier l’hypothèse H2, nous allons montrer que plus le niveau de
pollution de l’eau augmente, plus le la courbe représentative de la fonction
= tire vers le bas.
Remarquons d’abord que dans le recrutement présent dans la fonction
est une constante positive qui n’a pas d’influence sur la forme de la
courbe de cette fonction. Ici, nous choisissons de façon quasi arbitraire un
recrutement = 51 375 000 crevettes, équivalent à 1000 tonnes de crevettes

118
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

suivant une estimation basée sur le nombre de crevettes par kilogramme à


CAMECRUS6, si l’on suppose une répartition de masse équitable entre les huit
catégories de crevettes de la classification.
Nous supposons ensuite que le taux de pollution de l’eau est proportionnel au
taux de mortalité par la pollution. Dès lors, toute variation du niveau de
pollution entraîne aussi une variation dans le même sens de , le taux de
mortalité par la pollution, qui est une composante de . Etudier le
comportement de = lorsque le taux de pollution de l’eau varie nous
amène ainsi à opérer une série de simulations où nous faisons varier .
Attribuer différentes valeurs à au sein de donne en fait lieu à
différentes fonctions de biomasse. Nous partons de la valeur = 0,147
calculée précédemment, puis nous attribuons arbitrairement à quatre
autres valeurs de plus en plus grandes : 0,3 ; 0,5 ; 1 et 5. Nous obtenons ainsi,
au total, cinq fonctions dont il faut comparer les positions relatives.
Nous supposons une maille de filet de taille telle que toute crevette d’âge
supérieur ou égal à = = 0,25 (ou encore trois mois) soit
automatiquement capturée, et que toute celle d’âge inférieur s’échappe. Nous
savons en effet que des crevettes peuvent être recrutées dans une pêcherie
dès l’âge de trois mois7.
La figure obtenue sur la base de toutes ces informations est la suivante, avec
en abscisse et (en unités de masse) en ordonnée.

6
CAMECRUS : SOCIETE CAMEROUNASE DE CRUSTACES. La
classification à laquelle nous faisons allusion a été notée en 2004. Aujourd’hui,
cette société n’existe plus.
7
Cf. Le Programme National de Recherche Crevettière (PNRC) malgache.
119
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

45000000
40000000
35000000
30000000 y,me =0,147
25000000 y, me = 0,3
20000000 y, me = 0,5
15000000 y, me = 1
10000000
y,me =5
5000000
0
0 2 4 6 8 10 12 14

Figure 2- Positions relatives des biomasses pour = 1⁄4 .


Les positions relatives des différentes courbes de biomasse de cette figure
montrent qu’au fur et à mesure que la pollution augmente, la biomasse
diminue, toute chose égale par ailleurs. Cette diminution de la biomasse se
traduit graphiquement par la tendance de sa courbe de sa courbe
représentative à se rapprocher de l’axe des abscisses, c’est – à – dire du niveau
zéro, synonyme de la disparition des ressources. L’hypothèse H2 est

6. Implications socio-économiques et environnementales


L’application du modèle de Beverton-Holt a des conséquences importantes
tant au plan socio-économique que dans le domaine environnemental. Outre
une maîtrise du niveau de pollution de l’eau susceptible de permettre une
meilleure productivité dans l’exploitation des ressources, ce modèle entraîne
aussi l’adoption d’une taille des mailles de filet, qui traduit une régulation de
l’activité de pêche. Nous savons, en raison du théorème fondamental de la
théorie des ressources renouvelables déjà souligné, qu’ « en l’absence de
mécanisme de régulation, le nombre de pêcheurs et leur efficacité auront
tendance à croître, de telle sorte que chacun d’entre eux essaye d’obtenir une
part plus importante de la richesse créée sur la pêcherie (surplus des

120
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

producteurs). Les coûts par unité d’effort auront alors tendance à diminuer,
alors que les coûts unitaires de l’effort vont augmenter. Cette évolution se fera
jusqu’à dissipation totale du surplus des producteurs, et même au-delà dans la
mesure où les ajustements ne sont pas instantanés (coûts de sortie,
opportunités d’autres activités …) » (Gilly, 1989). L’absence de régulation des
pêcheries entraîne ainsi, entre autres, une diminution de revenu et des pertes
d’emploi pour des pêcheurs, ce qu’on peut éviter en appliquant le modèle
spécifié ici.

7. CONCLUSION

L’objet de ce travail a été de montrer comment exploiter durablement les


crevettes au Cameroun. Pour cela, nous avons dans un premier temps montré
que la pollution qui caractérise le milieu aquatique camerounais a un impact
négatif significatif sur la production des crevettes. En second lieu, nous avons
prouvé que laisser le niveau de pollution augmenter davantage peut
compromettre la survie des ressources et, par conséquent, une pêche durable.
Il est donc indispensable de mettre en œuvre des moyens de lutte contre la
pollution en vue de protéger la pêche sur le territoire national. Cette pollution
devrait s’entendre dans le sens le plus large de dégradation du milieu marin
et, dans la protection de ce dernier, la partie la plus concernée est la frange
littorale, car elle constitue la plus productive et la plus menacée par des
activités humaines. Le littoral camerounais, où se déroule l’exploitation des
crevettes, abrite la plupart des entreprises industrielles du pays. La ville de
Douala, chef lieu de la Région du Littoral, compte de multiples « sociétés
industrielles potentiellement polluantes dont quelques unes seulement
disposent d’équipements de traitement de leurs déchets, lesquels ne
fonctionnent généralement pas »8. Les cours d’eau, qui abondent en milieu
côtier camerounais, sont des réceptacles de ces déchets industriels non
traités. Cet état de choses est néfaste pour la survie des crevettes dont on sait
qu’elles passent les premiers moments de leur existence dans des cours d’eau
de moindre importance, à un âge où elles sont encore plus sensibles à toute
dégradation du milieu (Garcia et le Reste, 1981).

8
Cf. Les Cahiers de Mutations, Cameroun – Périls sur l’environnement, mai 2005.
121
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

Outre la protection des milieux aquatiques, la pêcherie doit être régulée pour
assurer une activité durable à tous les pêcheurs.
Une application de ces mesures entraîne, en plus du maintien des équilibres
écologiques, une incidence positive sur la pêche en général : accroissement
des revenus des principaux acteurs du fait de l’augmentation de la
productivité, maintien voire création des emplois, accroissement des
quantités offertes sur le marché national avec baisse possible des prix,
augmentation probable des exportations et diminution possible des
importations.
A l’Etat donc de jouer son rôle, dans la perspective d’une pêche durable et
rentable au Cameroun.

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Annexe 1: Production (tonnes) de crevettes, celle
désaisonnalisée, tendance et coefficients saisonniers

Source: nos données collectées - tendance et désaisonnalisation (sur la base du modèle


multipllicatif) obtenues avec SPSS

123
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

PRODUCTION Year Quarter Date ERR_1 168,6861 COEFFICIENT TENDANCE


302,494 1999 3 Q3 1999 0,94904 171,8204 1,79324 177,743
61,645 1999 4 Q4 1999 1,10708 125,0958 0,35878 155,2008
87,543 2000 1 Q1 2000 0,89213 128,7664 0,69981 140,2213
147,847 2000 2 Q2 2000 1,02929 116,8446 1,14818 125,1027
209,53 2000 3 Q3 2000 1,04293 83,9243 1,79324 112,0347
30,11 2000 4 Q4 2000 0,82336 107,3009 0,35878 101,9296
75,09 2001 1 Q1 2001 1,09699 88,53576 0,69981 97,81427
101,655 2001 2 Q2 2001 0,89974 96,66098 1,14818 98,40149
173,336 2001 3 Q3 2001 0,94879 128,1581 1,79324 101,8784
45,98 2001 4 Q4 2001 1,27089 86,2337 0,35878 100,841
60,347 2002 1 Q1 2002 0,93494 68,7697 0,69981 92,2348
78,96 2002 2 Q2 2002 0,81297 80,89563 1,14818 84,59032
145,065 2002 3 Q3 2002 0,98096 92,58709 1,79324 82,46593
33,218 2002 4 Q4 2002 1,0965 90,55918 0,35878 84,43894
63,374 2003 1 Q1 2003 1,07243 70,50984 0,69981 84,44309
80,958 2003 2 Q2 2003 0,87192 81,22074 1,14818 80,86779
145,648 2003 3 Q3 2003 1,05537 80,13363 1,79324 76,95981
28,75 2003 4 Q4 2003 1,10197 57,12999 0,35878 72,71881
39,98 2004 1 Q1 2004 0,85388 66,8571 0,69981 66,90628
76,764 2004 2 Q2 2004 1,06548 55,56434 1,14818 62,74861
99,64 2004 3 Q3 2004 0,92062 58,64388 1,79324 60,35502
21,04 2004 4 Q4 2004 0,94579 68,37022 0,35878 62,00523
47,846 2005 1 Q1 2005 1,07684 67,38925 0,69981 63,4918
77,375 2005 2 Q2 2005 1,10287 58,68495 1,14818 61,10332
105,236 2005 3 Q3 2005 1,06337 35,00794 1,79324 55,18774
12,56 2005 4 Q4 2005 0,74168 47,47019 0,35878 47,20066
33,22 2006 1 Q1 2006 1,09948 40,08256 0,69981 43,17506
46,022 2006 2 Q2 2006 1,02628 37,29904 1,14818 39,05635
66,886 2006 3 Q3 2006 1,07496 26,71307 1,79324 34,69822
9,584 2006 4 Q4 2006 0,8956 168,6861 0,35878 29,82699

124
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

Annexe 2 : indice élémentaire de l’évolution de dégradation de la


mangrove au Cameroun.
Trimestre 1 2 3 4 5 6
Indice 100 100 199,66 199,66 199,66 199,66
Trimestre 7 8 9 10 11 12
Indice 299,33 299,33 299,33 299,33 399 399
Trimestre 13 14 15 16 17 18
Indice 399 399 498,67 498,67 498,67 498,67
Trimestre 19 20 21 22 23 24
Indice 598 598 598 598 697,35 697,35
Trimestre 25 26 27 28 29 30
Indice 697,35 697,35 796,68 796,68 796,68 796,68
Source : nos calculs à partir des données de la FAO (2006), Evaluation des ressources
forestières mondiales. Etude thématique sur les mangroves, Cameroun, Profil national.
FAO, Rome.

Annexe 3 : Détermination de la fonction de biamasse


= .

= = ( ) ( )

= ( )
( )

∞ ( )
Si nous posons =∫ ( ) , avec ( ) = (1 −

6 ) , alors :

= ( ) (1 −6 )

125
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013


= (1 − 3 +3 −


= .∫ (1 − 3 +3 −

Si =∫ (1 − 3 +3 − , alors :
∞ ∞
= + −3

∞ ∞
+ 3 + −

= (−1⁄( + ))

+ (3⁄( + + 6))

+(−3 ( + + 12)) + (1 ( + + 18))

C’est – à – dire :

= (1⁄( + )) − (3⁄( + + 6))

+(3⁄( + + 12)) − (1⁄( + + 18))

Comme = . , on a :
= 1⁄ + − (3⁄( + + 6))
+(3⁄( + + 12)) − (1⁄( + + 18))
Finalement, puisque = = . , on a :

126
H. NDAME MAKEMBE, Impact de la pollution sur la production des crevettes au Cameroun

1 3
= = −
+ + +6
3
+ −
+ + 12 + + 18

127
ISSN 1563 – 3756

ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES


Revue Semestrielle
N°07, Juillet – Décembre 2013

APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT


Semestrial Review
N°07, July – December 2013

Presse Universitaire de DOUALA


Février 2014
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES / APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle /Semestrial Review

Directeur de publication : Professeure Marie Thérèse UM-NGOUEM, Doyen


de la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion Appliquée, Université de
Douala.

Comité de rédaction
Professeur Alexis NGANTCHOU, FSEGA, Université de Douala.
Professeur Georges Bertrand TAMOKWE, Université de DOUALA
Dr Georges Dieudonné MBONDO, Université de Douala.

Comité Scientifique de lecture


Y ABESSOLO, Université de Yaoundé II ; E.M. ASSIGA ATEBA, Université de
Douala ; D. AVOM, Université de Yaoundé II ; B. BEKOLO EBE, Université de
Douala ; C. BEKOLO, Université de Douala ; BIGOU-LARE NADEDJO, Université
de Lomé Togo; BIWOLE FOUDA, Université de Yaoundé II ; M. FOUDA
ONGODO, Université de Douala ; J. G. DEGOS, Université Montesquieu
Bordeaux I ; DONTSI, Université de Yaoundé II ; C. EBOUE, Université NancyII ;
S. EVAERT, Université de Bordeaux IV ; J. P.HELFER, Ecole Supérieure de
commerce de Nantes ; C. HIRIGOYEN, Université de Bordeaux IV ; A. GBAKA,
Institut National Polytechnique de Yamoussoukro ; G. GRELLET, Université de
Paris I (Panthéon-Sorbonne) ; E. KAMDEM, Université de Douala ; D. KAMDEM,
Université de Dschang ; F. KAMADJOU, Université de Dschang ; G. KOBOU,
Université de Yaoundé II ; L. KOMBOU, Université de Douala ; F. KOUM
EKALLE, Université de Douala ; J. P. LAFFARGUE, Université deParis I
(Panthéon-Sorbonne) ; D. LEPELLEY ; Université de Caen ; B. MBIH, Université
de Caen ; B. MUKOKO, Université de BUEA ; G. NDJIEUNDE, Université de
Yaoundé II ; NDOUMEESSIGONE, Université Omar Bongo ; A. NGANTCHOU,
Université de Douala ; L. NDJETCHEU, Université de Douala ; C. NJONGANG,
Université de Yaoundé II ; C. OUAPOU, Université de Bangui ; B. SAPORTA,
Université Bordeaux IV; TAFAH EDOKAT Université de Bamenda ; G. B.
TAMOKWE, Université de DOUALA ; B. TIDJANI, Université Anta Diop ; TOUNA
MAMA, Université de Yaoundé II ; V. TSAPI, Université de Ngaoundéré ; M-T.
UM-NGOUEM, Université de Douala ; H. WAMBA, Université de Yaoundé II.
2
ORIENTATION ET OBJECTIFS

Créée en mars 1998, la Revue Economie et Gestion Appliquées


(la REGA) est une tribune internationale bilingue (Français et Anglais)
et semestrielle, axée sur la problématique du développement et
l’exploitation des techniques économiques et de gestion. Elle est
ouverte à toutes les orientations théoriques et stratégiques en
économie et gestion, et publie des recherches originales de bonne
facture scientifique. Particulièrement intéressée par des applications
pratiques des théories économiques et de gestion aux problèmes de
développement, la REGA accepte des articles théoriques, mais accorde
la priorité à ceux issus des recherches empiriques et aux études de cas
ayant pour but d’améliorer la compétitivité des entreprises ainsi que
les performances macroéconomiques et financières des économies du
Sud. Elle accepte également des articles courts présentant une
expérience ou une réflexion personnelle sur un ou plusieurs aspects
des pratiques ou des politiques économiques ou managériales. Les
articles constituant un échange de vues sur un sujet traité dans un
numéro antérieur de la REGA ainsi que des analyses critiques et des
comptes rendus de livres récents ou des actes des colloques sont aussi
considérés.

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5
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet –Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July – December 2013

Contenu/contents
Maurice FOUDA ONGODO
Penser le Management en Afrique à l’ère de la globalisation
des économies …………………………………………………..………….7-32
Louis NDJETCHEU
Les pays de l’espace OHADA et les normes IAS / IFRS : analyse
d’une impossible quête de l’universel en matière comptable
…………………………………………………………………………………33-58

Louis Bernard TCHEKOUMI


The financing of private firms in Cameroon ……………..59-74

Benjamin YAMB, Maxime BIKOUE, Bob NGAMOE,


Pluriactivité des enseignants des Universités d’Etat au Cameroun,
interaction et rapport de chances : une analyse log-linéaire des
tableaux de contingence des Universités d’Etat de Douala et
Dschang ………………………………………………………………………..75-105

Henri NDAME MAKEMBE


Impact de la pollution sur la production des crevettes au
Cameroun…………………………………………………………………106-128

M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO


Développement financier et accélérations de la croissance en Afrique
subsaharienne ………………………………………………………….129-159

6
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

Penser le Management en Afrique à l’ère de la


globalisation des économies
Maurice Fouda Ongodo,
HDR, Agrégé des Sciences de Gestion, Université de Douala - Cameroun
Mail. fongodo@yahoo.fr, B.P. 20141 Yaoundé

Résumé

Abstract

1. Introduction
S’adapter à la mondialisation et à la complexité est aujourd’hui une
exigence pour l’individu, l’entreprise et la société. Dans ce contexte nouveau,

7
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

l’Afrique présente quelques caractéristiques : faible niveau de compétitivité


des économies et des entreprises, faible intégration dans l’économie mondiale,
institutions peu performantes, gouvernance des institutions sujette à caution
et secteur privé de l’économie insuffisamment développé1. C’est ainsi que
l’Afrique en termes de progression du taux de croissance du PIB, malgré
quelques résultats encourageants ces dernières années, se classe derrière les
économies développées et les autres économies en développement 2. Jusqu’ici,
les différentes politiques et les différents programmes mis en œuvre pour
aider ce continent à relancer son économie, créer un climat d’investissement
favorable et mettre en place des institutions performantes et efficaces pour
lutter contre la pauvreté et combattre la corruption (plans d’ajustement
structurels et réforme des institutions) sont loin de fournir les résultats
escomptés. La question demeure donc posée : Comment faire pour aider
l’Afrique à lutter efficacement contre la pauvreté et rendre ses entreprises et
institutions plus performantes et compétitives dans le contexte de globalisation
des économies ? La réponse à cette interrogation appelle à notre avis à
examiner le management des organisations en Afrique en rapport avec les
deux référentiels qui actuellement exercent un impact sur leur
fonctionnement à savoir : le modèle hégémonique capitaliste de gouvernement
des hommes et des organisations et la culture.
Le modèle capitaliste de gouvernement des organisations s’organise
aujourd’hui autour des exigences du développement durable, de la bonne
gouvernance et de l’importance désormais accordée au rôle des institutions
dans la performance des économies et des organisations. Quant à la culture, il
apparaît inopportun de nier qu’en ce début du 21ème siècle, la mondialisation
des affaires fait de toute entreprise un lieu de contact entre les cultures.

1
Dans le rapport de la SFI 2005 on peut lire ce qui suit : «Le taux de croissance de l’Afrique s’est établi
à 4,4% durant l’année civile 2004, contre 3,1% en 2003. La région a bénéficié de la reprise de
l’économie mondiale, de la hausse des cours des produits de base, du renforcement de la stabilité
macroéconomique et de l’évolution dans différents pays. Ce taux reste néanmoins inférieur à l’objectif
de 7% jugé nécessaire pour atteindre les objectifs du développement pour le millénaire 2015. L’Afrique
doit surmonter des obstacles considérables pour assurer le développement du secteur privé et est en
butte notamment à un climat d’investissement peu porteur, à l’insuffisance des infrastructures, au
VIH/SIDA, à des conflits et à la pénurie du capital humain » voir rapport :
http://www.ifc.org/ifcext/publications.nsf
2
Voir rapport Africa Competitiveness 2004.

8
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

Le nouveau contexte de réformes économiques et sociales que vit


l’Afrique avec notamment l’importance accordée à la bonne gouvernance des
institutions et des entreprises, l’approche du développement durable qui
appelle à une pensée globale, les impératifs de «l’entreprise durable 3» et,
surtout, la nécessité de concilier cultures africaines et gestion des
organisations dans le contexte de globalisations des économies4, amènent à
penser à l’orientation à donner au management organisations en Afrique à
l’aube du 21e siècle. En effet, le management japonais ou américain a permis
le développement de la grande entreprise et par conséquent celui de
l’économie. La main visible du manager comme dirait Chandler a eu un effet
sur la transformation de la société (le management a changé la face du monde,
pour utiliser l’expression de Drucker). A cet effet, penser comme Drucker qu’il
n’y a pas de pays sous développés mais seulement des pays sous -managés
peut par conséquent se justifier. Sortir du sous développement implique donc
le développement d’outils de gestion ancrés dans les traditions nationales
africaines et adaptés à l’évolution des institutions et de la société.
Cette préoccupation, appelle d’une part à comprendre le nouveau
contexte de la gestion en Afrique (1), d’autre part à envisager des méthodes
appropriées pour la compréhension et le développement des outils de gestions
adaptés au contexte (2).

2. Le nouveau contexte de la gestion et axes d’orientation du


management en Afrique
Caractériser l’environnement socioculturel dans lequel évoluent les
entreprises situées en Afrique en cette période de globalisation des économies
revient, à notre avis, à prendre en considération l’impact de la Bonne
Gouvernance et du Développement Durable dans la gestion des organisations
et de la société de façon générale, à souligner l’importance des thèses
institutionnalistes et néo-institutionnalistes en matière de développement et
de management des entreprises, et surtout, à rechercher comment concilier

3
Cette expression ou cette terminologie selon Détrie (2005) «désigne l’aptitude d’une entreprise/entité
à satisfaire conjointement les quatre finalités suivantes : l’utilité à la société, la satisfaction des clients,
la performance pour les propriétaires, l’accomplissement du travail des salariés» (P. XIII).
4
La question de la symbiose entre tradition et modernité apparaît comme question centrale de la
gouvernance, question encore mal résolue dans le contexte africain où les structures modernes et
traditionnelles se superposent (Dia, 1996 ; Kamdem, 2002 ; Terence, 2004).

9
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

cultures nationales africaines et gestion des organisations. Sortir de la


pauvreté et emprunter le chemin du développement impliquent que soient
associés : meilleur climat d’investissement, qualité des institutions,
conception nouvelle et plus adaptée des outils et théories de développement
et bonne gestion de la diversité culturelle.

2.1. Climat d’affaires et bonne gouvernance des


institutions
La globalisation des économies appelle l’aménagement du cadre
institutionnel. Les institutions nouvelles et adaptées doivent en effet
accompagner le vaste mouvement d’expansion de l’entreprise privée 5
capitaliste.
Dans cette perspective la Banque Mondiale et les autres organismes
de financement internationaux œuvrent désormais pour «Un Meilleur Climat
d’Investissement pour Tous»6. Le climat d’investissement, selon la Banque
Mondiale, renvoie à l’ensemble des facteurs propres à la localisation de
l’entreprise, qui influent sur les opportunités de marché ou le désir des
entreprises d’investir à des fins productives, de créer des emplois et de
développer leurs activités. La promotion d’un meilleur climat
d’investissement met en phase : l’importance marché, de la concurrence du
droit de propriété et surtout le rôle régulateur de l’Etat. A travers cette option,
les institutions internationales consacrent ainsi les thèses libérales et les
théories néo-institutionnalistes [en occurrence la théorie des coûts de
transaction]. Mais aujourd’hui, l’ethos libéral des affaires est soumise à des
critiques profondes et de plus en plus l’homme d’affaires est d’abord
considéré comme être humain et membre de la société, ayant le sens de
l’éthique et répondant à une demande sociale (Woller, 1996)
En outre, dans le cadre de la globalisation, c’est le processus de
transformation de la société qui est objet de débat. Dans le débat à venir sur
les limites de la globalisation, il ne sera pas seulement question d’efficacité

5
Le terme entreprise dans la conception du meilleur climat d’investissement désigne selon la Banque
Mondiale «tout l’éventail des agents économiques privés, depuis les agriculteurs et les micro-
entrepreneurs jusqu’aux entreprises manufacturières et aux multinationales, et ce quels que soient leur
taille, leur activité et leur statut juridique ou formel»
6
Voir Titre rapport Banque Mondiale 2005
10
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

économique mais également de responsabilité et de valeurs (Ernst-Moritz


Lipp, p. 94). De la même manière, comme le suggère P. de Woot (p. 164),
définir l’entreprise dans ce contexte en termes purement financier, c’est la
réduire considérablement et couper court à toute discussion politique, sociale
ou culturelle concernant son action. On note ici un passage de la conception de
l’entreprise comme objet à celle de l’entreprise comme institution centrale de
la société ou encore de la considération de l’entreprise comme affaire de
société (Sainsaulieu, 1992).
Compte tenu de son importance dans le débat sur les questions de
développement, la notion de gouvernance, qui s’est développé depuis les
années 90, apparaît fondamentale aujourd’hui tant dans la gestion des affaires
publiques que dans celle des entreprises privées. Elle se retrouve au cœur du
nouveau consensus sur le développement et oriente de manière décisive la
nouvelle initiative de développement en Afrique (NEPAD). La notion de
gouvernance occupe aussi une place centrale dans le cadre de la coopération
bilatérale et multilatérale. A cet effet, les agences de coopération bilatérale et
multilatérale font de la bonne gouvernance une question centrale de leur
projet.
Toutefois, si la bonne gouvernance peut être considérée comme la
nouvelle conditionnalité indispensable pour l’efficacité de l’aide au
développement et si la gouvernance est utilisée comme mesure fondamentale
de la qualité de la performance de tout système politique et administratif
(Commission des Communautés Européennes) ; il y a lieu de s’interroger sur
la capacité et l’aptitude de ce nouveau modèle de développement à permettre
en Afrique l’exécution d’une formule de développement basée sur un secteur
privé national performant, un Etat fort et le respect des impératifs du
libéralisme économique. En effet, malgré quelques résultats encourageants
ces dernières années sur le plan économique (Rapport SFI, 2005), l’Afrique
qui apparaît comme le cadre idoine d’application et d’expérimentation des
principes et des doctrines de la bonne gouvernance reste caractérisée par un
faible taux de croissance économique par rapport aux autres régions, une
performance des institutions médiocre, une gestion de l’Etat qualifiée de néo-
paternaliste, une participation insignifiante au commerce mondial et un
niveau de compétitivité faible des entreprises dans tous les secteurs de
l’économie mondiale.

11
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

Si l’insistance pour le meilleur climat d’affaires et l’instauration de la


bonne gouvernance militent en faveur de l’application des principes du
modèle capitaliste de gestion des affaires, et si ce modèle présente aujourd’hui
des limites et des insuffisances, le développement économique de l’Afrique
peut-il s’inscrire dans la perspective du développement durable ?

2.2. Gestion de l’entreprise, variables institutionnelles et


développement durable
L’intérêt pour la bonne gouvernance en Afrique intervient au moment
où l’entreprise fait l’objet d’une demande institutionnelle. Dans cette
perspective, la variable institutionnelle apparaît désormais indispensable
dans le processus de redynamisation des économies africaines, surtout après
l’échec des politiques basées sur le triplet : Stabilisation, libéralisation et
privatisation, politiques issues du Consensus de Washington. Il est désormais
question de passer du paradigme «get your prices right» à celui du «get your
institutions right» (Shirley, 2003).
De façon générale, l’attention portée au concept d’institution comme
concept fondateur des sciences sociales est à l’origine de nouvelles approches
institutionnelles. Aussi, depuis la «behavioral revolution», révolution qui
marque un intérêt grandissant pour l’usage des concepts transversaux, aucun
autre concept n’a offert un terrain d’échanges et de débats entre disciplines
que celui d’institutions. Il existe ainsi autant de théories néo-
institutionnalistes que de disciplines en sciences sociales (Powell et DiMaggio,
1991, p.1). Le nouvel institutionnalisme dans l’analyse des organisations est de
façon générale l’œuvre des sociologues néo-institutionnalistes. Les thèses néo-
institutionnalistes en sociologie mettent en exergue la dimension sociale de
l’économie et réfutent le nouvel impérialisme économique fondé sur la
«théorie standard étendue» ainsi que la conception de l’économie comme
grammaire des sciences sociales telle que préconisée par J. Hirshleifer. Tout
comme le vieil institutionnalisme («Old institutionalism»), le néo-
institutionnalisme7 récuse la conception de l’organisation comme acteur
rationnel, insiste sur la relation entre les organisations et leurs
environnements et veut démontrer comment la culture façonne la réalité

7
Pour les comparaisons entre ancien institutionnalisme et néo-institutionnalisme on peut se référer aux
textes de Powell et Dimaggio, 1991, pp. 11-15, de Nee, 2003, p. 21-36)
12
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

organisationnelle ainsi que l’intérêt d’une approche sociologique des objets


centraux de l’économie (Granovetter, 1985, 2000).
Le PNUD estime être à l’avant-garde de ceux qui ont forgé un
consensus international sur le fait que la bonne gouvernance et le
développement humain sont indissociablement liés 8. L’importance de la
bonne gouvernance pour la matérialisation du développement humain peut
être mieux compris au regard des objectifs et des impératifs du
développement durable9.
Dans le cadre du développement durable, un rôle majeur est
désormais reconnu à l’entreprise (la notion de développement durable n’est
plus étrangère à l’entreprise). Aussi, comme le soutiennent Férone et al
(2001), «il ne peut y avoir de développement durable sans mobilisation des
entreprises» (p. XIII). Déjà, face à la nécessité d’épouser le contexte de
mondialisation et dans le souci de regagner une certaine légitimité dans son
environnement sociétal, l’entreprise vit désormais une situation paradoxale 10.
Dorénavant acteur décisif du développement durable, l’entreprise doit
concilier la logique strictement financière, généralement de court terme et
celle d’un développement à long terme qui équilibre les intérêts des différents
partenaires participant désormais à la vie de l’entreprise. Ainsi, dans le cadre
du développement durable l’entreprise doit «conjuguer dynamiquement trois
systèmes : l’économique, l’humain, l’environnement, articulés par une approche
dite de «gouvernance»» (Dubigeon, 2002, 2005)
Le DD introduit aussi des changements dans la conception du
management des organisations. Dans cette perspective, il peut être constaté
que la pensée linéaire qui a dominé les réflexions en sciences de gestion

8
Dans le document de politique générale du PNUD de 1997, on peut lire ce qui suit sur les
interrelations entre la bonne gouvernance et le développement durable : «La gouvernance et le
développement sont indissociablement liés. Le développement humain ne saurait être durable sans la
bonne gouvernance. La gouvernance ne peut être judicieuse que si elle soutient le développement
humain.»
9
Ces objectifs transparaissent dans la définition que le PNUD donne au concept du développement
durable : «par développement humain durable, on entend l’élargissement des choix offerts à toutes les
personnes qui constituent la société, ce qui signifie que les hommes et les femmes – en particulier les
pauvres et les personnes vulnérables – sont placés au centre du processus de développement.
L’expression fait également référence à la protection des possibilités des générations futures et des
systèmes naturels dont dépend toute forme de vie»
10
Comme le relèvent Capron et Quairel-Lanoizelée (2005) : «On est donc aujourd’hui face au paradoxe
suivant : l’effacement des Etats et des organismes supranationaux conduit à conférer aux entreprises un
rôle accru dans la conduite des affaires du monde, alors même qu’elles subissent une crise de légitimité
et de confiance et qu’elles doivent faire des efforts très important pour regagner cette confiance auprès
de la société.»
13
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

jusqu’à la fin des années 70 et la pensée systémique venue par la suite avec
pour objectif de modéliser les interactions sans toucher aux allocations de
ressources semblent aujourd’hui supplantées par une pensée de nature
globale, poussée par l’approche du développement durable (Dubigeon, 2002,
2005). Aussi, la demande d’actions favorables au DD et les risques associés à
la pratique du management dans les entreprises avec les programmes qui
intègrent la préoccupation du DD appellent à l’émergence d’un «Sustainability
Management Model» (d’Humières, 2005). De l’avis de d’Humières, «le
management durable se caractérise par l’addition de plusieurs démarches
constitutives de la recherche d’une combinaison de performances économique,
sociale et environnementale, en relation avec les enjeux généraux de
l’environnement international, dans lequel l’entreprise est immergée. C’est donc
une intégration complexe des démarches récentes d’amélioration de la conduite
des entreprises : prospective stratégique, démarche qualité, gestion du risque,
bonne gouvernance, à laquelle s’ajoute la responsabilité sociétale dont on a
tendance à considérer qu’elle englobe désormais toutes les autres, tant elle
résume par son intention l’objectif de la satisfaction de tous les publics de
l’entreprise : citoyens, consommateurs, capital et collaborateurs » (d’Humières,
2005). Ainsi, de l’avis de Stephany, (2003) «le développement durable
consiste pour une entreprise à assurer un développement, par une approche
globale de la performance, maintenu dans le temps et résistant aux aléas,
respectueux d’un système de valeur explicité, impliquant différents acteurs
internes et externes, dans une logique de progrès continu». Dans le contexte
de la prise en compte des impératifs du DD dans les entreprises, divers
facteurs et acteurs nouveaux vont s’imposer à l’entreprise et exercer des
pressions externes qui vont inexorablement influencer son fonctionnement et
son évaluation.
Aussi par le biais du DD, la problématique de la RSE est désormais
inscrite dans la logique d’évolution du modèle capitaliste. De l’avis de David et
al. (2005), la problématique de la RSE est en phase avec trois caractéristique
du capitalisme contemporain : En premier lieu, il apparaît clairement que la
RSE s’ajuste assez bien à la dynamique du capitalisme contemporain poussé
par l’économie de la connaissance ; en second lieu, la thématique du
management responsable semble s’accorder avec les nouvelles pratiques de
l’après-taylorisme dans l’entreprise ; troisièmement enfin, le management
responsable constitue une pratique en phase avec la montée de nouvelles

14
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

aspirations comme l’«accountability ». Finalement selon ces auteurs : « la RSE


reflète moins les arrangements institutionnels d’une économie dans laquelle les
décisions des firmes sont prises pour satisfaire les objectifs (principalement
financiers) des actionnaires (shareholder economy), mais plus ceux d’une
économie nouvelle (stakeholders economy) où d’autres agents sont des
partenaires naturels de l’entreprise : les salariés, les consommateurs, les
fournisseurs, etc. » (p.13).
L’introduction dans le référentiel capitaliste des notions nouvelles
appelle à inscrire le management en Afrique dans une approche
anthropologique et multidisciplinaire.

2.3. Le référentiel capitaliste et perspectives anthropologique


et multidisciplinaire du management en Afrique
Depuis la chute du mur de Berlin, le triomphe des idées capitalistes
dans l’administration et la gestion des affaires n’est plus à démontrer. Comme
le relève Chanlat (1998, p. 18) : «L’hégémonie à laquelle nous assistons dans
nos sociétés est, celle d’une certaine logique : la logique capitaliste. Fondée sur la
propriété privée, le jeu des intérêts personnels, la recherche du profit et
l’accumulation»
L’idée de capitalisme triomphant, en mettant l’entreprise au cœur de
toute dynamique économique et sociale a fait émerger une société qui
pourrait être qualifiée, selon Chanlat, de managériale à l’intérieur de la
laquelle le gestionnaire ou l’homo administrativus 11 est devenu la figure
dominante (Chanlat, 1998). La conséquence immédiate de cette situation se
traduit, du point de vue de l’organisation, par l’introduction des notions et des
principes administratifs issus de l’entreprise privée (efficacité, productivité,
performance, compétence, entrepreneurship, qualité totale, client, produit,
marketing, excellence, reingéniérie, etc.) dans toutes les formes
d’organisations (écoles, universités, musées, hôpitaux, administrations,
services sociaux, théâtres, sociétés musicales, organismes à but non lucratif.).
Le «managérialisme», terme choisi par Chanlat pour décrire
l’envahissement des organisations par les principes et méthodes de gestion
privés et qu’il définit comme «le système de description, d’explication du monde

11
Expression que Chanlat emprunte à son collègue Déry, (voir p. 19)
15
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

à partir des catégories de gestion», est bel et bien inscrit dans l’expérience
sociale contemporaine et vise, en tant que produit d’une société de
gestionnaire, à rationaliser toutes les sphères de la vie sociale. Conçu de cette
manière, le «managérialisme» atteste d’une situation où le rapport entre
sciences sociales et gestion est plus que jamais d’actualité. Cette mise en
perspective des rapports entre gestion et sciences sociales, suscite quelques
interrogations12 et amène Chanlat à plaider pour l’élaboration d’une
anthropologie générale. L’anthropologie des organisations à laquelle Chanlat
invite à contribuer «est une anthropologie adiscplinaire. Elle se veut une
synthèse de connaissances fondamentales que nous avons sur l’humanité ou,
pour parler comme Mauss, elle renvoie au «total des sciences qui considèrent
l’homme comme être vivant, conscient et sociable» (1968, p. 285). Une telle
anthropologie repose, d’une part, sur une certaine ouverture disciplinaire et,
d’autre part, sur le retour de dimensions centrales souvent oubliées par le monde
de la gestion» (op. cit. p. 78). Le recours à l’anthropologie pour une meilleure
compréhension des sciences de gestion apparaît aussi comme une nécessité
pour chez Airaudi (1994) qui invite à «faire de l'anthropologie le fondement des
sciences de la gestion, de la science économique et de la sociologie. Les grandes
sciences de l'homme universel (science de gestion, de l'économie et de la société)
doivent être réinterprétées à partir de l'anthropologie, c'est-à-dire de la science
de l'homme concret, «formé au sein d'une culture, d'une société spécifique».
Ainsi, pour cet auteur, placer l'anthropologie à la base des sciences de
l'organisation permet non seulement le dépassement du dualisme entre
stratégie générale et opérations spécifiques, pensée globale et action locale ;
mais aussi de comprendre que la culture est indissociable de toute forme
d'existence des hommes, de toute constitution du monde et a fortiori de toute
mondialisation. Il importe donc de comprendre le fonctionnement et le
management des organisations en Afrique, organisations qui évoluent dans un
contexte complexe, en adoptant une approche multidisciplinaire et en
intégrant les dimensions oubliées par les approches dominantes dans la
conception des théories managériales.

12
Les interrogations suscitées par les rapports entre gestion et sciences sociales : Quelles formes prend
ce rapport ? Quelle est la contribution des sciences sociales dans la compréhension du management et
quelle place doivent-elles occuper dans la formation en gestion aujourd’hui ? (Chanlat, op. cit. p. 21)
16
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

Les perspectives anthropologiques et institutionnelles appellent


indubitablement à inscrire le management en Afrique dans les approches
inter-culturelle et cross-culturelle (transculturelle).
2.4. Le référentiel culturel : les approches inter-culturelle et
cross-culturelle du management des organisations africaines
«Ce serait une erreur en dépit de tout ce que les sociétés modernes ont
de commun de rejeter les variantes nationales en les jugeant sans importance»
pense MORGAN. «Au cours de l’histoire, poursuit-il, nous pouvons observer de
nombreuses variations entre les sociétés quant à leurs caractéristiques sociales,
aux façons de voir la vie et à leur conception de l’organisation et de la gestion».
[Morgan, 1989]
Toutefois, jusqu’à une date récente, soutient Adler (1994), dans
chaque pays, chacun étudiait le fonctionnement des organisations dans son
contexte, mettait au point des modèles et des théories pour rendre compte du
comportement du personnel et de la direction au sein des organisations de
son pays. Et de surcroît «chacun prenait implicitement pour acquis que ce qui
était «vrai» pour les travailleurs de son pays l’était également pour les autres.
Chacun tenait pour universel le comportement des gens en matière
d’organisation » (Adler, 1994). C’est d’ailleurs cette approche ethnocentrique
de la gestion des organisations qui a conduit à considérer les méthodes de
gestion américaines comme universelles et imposer l’approche managériale
américaine comme rationnelle surtout avant la crise pétrolière de 1973. Mais
aujourd’hui, on se rend compte qu’en adoptant cette approche on s’est
trompé. C’est pourquoi, diverses raisons invitent à dépasser cet esprit de
clocher et à regarder le monde en totalité.
La prise en compte du caractère ethnocentrique des réflexions sur le
management des organisations a amené les différents intervenants sur le
thème du management de demain13 à insister sur les principes de la relativité
des pratiques de gestion et notamment sur la prise en compte des variables
culturelles. Dans cet ordre d’idées, Drucker (1972), dans son cinquième
postulat relatif au nouveau rôle du management écrit ce qui suit :

13
Voir l’ouvrage collectif : L'Entreprise de demain (1994), Paris, Nouveaux Horizons, Éditions Village
Mondial.

17
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

«Il y a des outils et des techniques du management. Il y a des concepts et


des principes du management. Il y a même une discipline universelle du
management. Il y a un langage commun du management. Il y a certainement à
l'échelle mondiale une fonction désignée sous le terme de management et qui
sert les mêmes objectifs dans toutes les sociétés développées. Mais le
management est aussi un ensemble culturel, un système de valeur et de
croyance. Ce sont les moyens à travers lesquelles une société donnée exploite ses
propres valeurs et ses propres croyance». Toujours de l’avis de Drucker, « le
management doit devenir l'instrument grâce auquel la diversité des cultures
peut servir les objectifs communs de l'humanité». Dans la même veine, Everaert
(1998) pense qu'on ne saurait se contenter de leçons sous forme statistique
sur les comportements des autres peuples. «Nous devons, écrit-il, apprendre à
apprécier les différences culturelles qui caractérisent les habitants et autres
contrés du monde. Nous devons respecter leurs traditions et chercher à
interpréter leurs attitudes et comportements». De même, l'ensemble des
auteurs réunis sous l'initiative du "GROUPE INNOVATION"(1994) pense que : «Au-
delà de leurs préoccupations spécifiques sur les ingrédients à rassembler pour
faire naître l'organisation de demain, les organisations doivent mettre en œuvre
des solutions novatrices, plus conformes à la nouvelle donne locale et
internationale». Sur le même sujet, Sérieyx rappelle que «les modes
d'organisation ne sont jamais rien d'autre que la traduction de notre conception
du monde, de nous même et de nos rapports individuels».
A travers ces différentes interventions, on comprend pourquoi le
recours aux approches interculturelles et "cross-culturelles" du management
gagne en importance. C'est à partir de l'intégration d'une gestion
interculturelle qu'on peut, selon Kamdem (1993), songer à un renouveau dans
la science du management en Afrique et pour Jackson (2004), un management
efficace dans le contexte africain ne peut s’inscrire que dans une approche
cross-culturelle.
Les réalités du contexte amènent à concevoir le management en
Afrique dans la perspective du développement et à intégrer les variables
culturelles et institutionnelles pour une meilleure appréhension du
management des organisations dans ce continent. Toutefois il reste à préciser
le niveau d’analyse des organisations et les approches méthodologiques
permettant de mieux saisir les réalités du contexte en vue de les intégrer dans
les pratiques de gestion.
18
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

3. Niveau d’analyse et approches méthodologiques


Le caractère multidisciplinaire et multiparadigmatique des sciences
de l'organisation est avéré. Dans ce domaine, «S'y côtoient, comme l'indique
Friedberg, des démarches technicistes et positivistes et des approches
"compréhensives" ou interprétatives, des démarches purement formelles de
calcul et de modélisation et des approches expérimentales qui procèdent par
expérience de laboratoire et extrapolation de ces expériences, des démarches
purement descriptives à visée classificatrice, des approches empirico-analytiques
qui cherchent à comprendre et à expliquer les phénomènes observés, et enfin des
démarches prescriptives qui ont pour objet de guider le praticien en lui
fournissant des préceptes sur la bonne organisation et les meilleures façons de
les réaliser». Cette situation va entraîner indubitablement certaines
conséquences : D'abord, par son caractère multidisciplinaire, on n'a pas
encore réussi à fonder ce qu'on pourrait appeler une théorie de l'organisation,
c'est-à-dire un corpus unifié des propositions concernant l'organisation. "Il n'y
a donc pas, comme le déclarent Séguin et Chanlat, une science de l'organisation
mais des sciences de l'organisation, c'est-à-dire des sciences telles que
l'économie, la science politique, la psychologie, la sociologie, dont un des objets
d'étude est l'organisation ou certaines de ses composantes". Ensuite, du fait de
l'existence de multiples paradigmes à l'intérieur de chaque discipline dont
l'organisation est l'objet d'étude14, on va constater la prédilection pour
certains paradigmes au détriment d'autres. Il en résulte ainsi une "unanimité
artificielle" qui a pour conséquence une incapacité d'appréhender certains
phénomènes économiques, psychologiques et sociaux (Séguin et Chanlat, op.
cit. p. 5). Dans ces circonstances, on peut concevoir que la théorie des
organisations connaisse une forte composante idéologique et que toute
théorie sur les organisations prenne appui sur une philosophie de la science
ou sur une théorie de la société.
L’étude des organisations étant inscrite dans celle des sciences
sociales, la pluralité des grilles observées dans ce domaine relève donc d’un
ensemble d’hypothèses. Les hypothèses qui sous-tendent les paradigmes en
sciences sociales, si on se réfère à Burrell et Morgan, relèvent de la nature de

14
"La diversité de regards disciplinaires se conjugue avec les débats internes ou les clivages qui ne
manquent d'exister au sein de telles ou telle discipline" (Desreumaux, 1998, p.10)
19
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

la société d’une part et, de la science d’autre part. Pour rendre compte de la
structuration du champ social, Burrell et Morgan proposent une typologie
reposant sur deux dimensions : la première oppose les approches
objectivistes et subjectivistes, quant à la seconde elle sépare les démarches
qui privilégient le changement radical à celles qui mettent l’accent sur la
régulation. Dans le cadre de la première dimension on va observer des
oppositions d’ordre épistémologique (positivisme contre anti-positivisme),
ontologique (nominalisme contre réalisme), méthodologique (méthodes
idiographiques contre méthodes nomothétiques) ou encore relevant de la
nature humaine (volontarisme contre déterminisme). Dans le cadre de la
seconde dimension, la vision de la société sous l'angle de l'intégration ou de
l'ordre s’appose à celle de la société sous l’angle des conflits ou de la
coercition. Les oppositions manifestes peuvent ainsi relevées entre : stabilité
et changement ; intégration et conflit ; coordination et désintégration ;
consensus et coercition. Au regard de cette conceptualisation de la réalité
sociale, quatre paradigmes, reposant sur des principes tellement différents
sont ainsi censées expliquer la réalité sociale : l’humanisme radical, le
structuralisme radical, l’interprétativisme et le fonctionnalisme. Mais jusqu’ici,
le paradigme qui a rencontré le plus de faveur en sciences des organisations
est celui du fonctionnalisme15.
Face à cette pluralité d’approches, il se pose un double problème celui
de l’étude de l’organisation et celui de la méthodologie à adopter pour saisir la
réalité complexe dans les organisations. La compréhension du phénomène
organisationnel en Afrique peut ainsi se situer par rapport à certaines
approches (néo-institutionnalisme et théories de contrôle externe), épouser le
cadre des niveaux d’analyse tels que proposé par Belhing (1978) et appeler à
la nécessité de concilier approches méthodologiques qualitatives et
quantitatives.

15
En effet, "le paradigme fonctionnaliste qui a dominé la sociologie en général, a fortement imprégné la
sociologie des organisations. Ce phénomène a été amplifié par l'existence d'une idéologie managériale
qui a trouvé dans l'approche fonctionnaliste des organisations un courant de pensée lui permettant de
valoriser l'équilibre, le statu quo et le maintien des structures organisationnelles existantes. Si la
sociologie et la gestion n'ont pas au départ des orientations similaires, la première étant orientée vers
l'analyse, la seconde vers l'action, il y eut entre l'analyse fonctionnaliste des organisations et la pensée
managériale un mariage de raison, peut-être même d'amour, fructueux puisqu'il a permis d'appréhender
certaines dimensions de l'organisation." (Séguin et Chanlat, op. cit. p. 6).

20
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

3.1. Les théories du contrôle externe et de la sociologie des


organisations comme cadre théorique de
compréhension du management en Afrique 16

Considérer aujourd’hui que l’entreprise est un système ouvert, qui


devrait vivre en accord avec son environnement dans un contexte de plus en
plus concurrentiel est devenu un impératif depuis la mise en évidence par les
écoles des systèmes et de la contingence structurelle de l’impact de certains
aspects de l’environnement sur l’organisation. Aussi conçoit-on que les
organisations soient composées d’individus et opèrent dans les systèmes. Dès
lors, les individus, les organisations, et les systèmes constituent les principales
unités d’analyse des sciences de management et d’organisation. Pour chaque
unité d’analyse, l’attention peut-être portée soit sur le plan interne (à
l’intérieur de l’organisation), soit sur le plan externe (sur l’environnement ou
sur les interactions avec l’environnement). Situer d’abord les organisations en
Afrique dans le cadre de leur environnement peut permettre de mieux
appréhender les réalités qui gouvernent leur fonctionnement interne.
Dans la première conception de l’environnement de l’entreprise,
celui-ci apparaît comme source d’influences, de pressions, ou de contraintes
plus ou moins forte qui pèsent sur l’entreprise. Dans cette optique, qui est
celle de l’analyse stratégique (choix stratégique), l’organisation peut soit
s’adapter à l’environnement en choisissant les moyens de le faire, soit tenter
de le modifier ou de l’influencer avec plus ou moins de succès (les choix
stratégiques de l’entreprise façonnent l’environnement). Désormais avec
l’avènement des théories du contrôle externe de l’organisation par
l’environnement, à savoir l’écologie des populations et la dépendance sur les
ressources, l’environnement va être perçu comme jouant un rôle totalement
dominant par rapport à l’organisation.
Contrairement à la théorie de l’organisation conventionnelle,
l’écologie organisationnelle dont l’écologie des populations d’organisations est
une des composantes, ne considère pas l’organisation comme seule unité
d’analyse face à l’environnement. La contribution la plus importante des
chercheurs en écologie des populations réside dans le fait qu’ils conçoivent
d’abord que les principes de l’écologie humaine peuvent s’appliquer

16
Les théories post-modernes et de la sociologie de l’action (voir Rojot, 2003, pp. 439-457) peuvent
aussi contribuer à la compréhension du phénomène organisationnel en Afrique.
21
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

fructueusement à l’étude des organisations. Ensuite ils ont attiré


systématiquement l’attention sur la manière dont les processus de sélection
jouent dans le monde changeant des organisations. Pour ce faire, ils se sont
placés à différents niveaux : au niveau de l’organisation, à celui de l’ensemble
des organisations (les populations), enfin à celui d’agrégats des populations
(les communautés). En adhérant aux principes élaborés dans le cadre de
l’écologie organisationnelle, nous ne partageons pas l’argument écologique
fort qui veut que c’est l’environnement qui sélectionne, les organisations ne
pouvant véritablement influer sur leurs chances de survie, mais plutôt celui de
l’argument écologique faible (ou argument de sélection faible), plus proche de
la réalité, qui veut que sélection et adaptation se produisent en même temps
(sélection et adaptation constituent des processus complémentaires). De la
même manière, il est important pour nous, comme chez les chercheurs en
écologie de populations, d’adhérer à une perspective historique de l’étude des
organisations en Afrique (analyser les effets de l’environnement actuel, ceux
de l’environnement au moment où les organisations ont été créées et les effets
des éléments historiques qui sont survenus).
Dans le cadre de la théorie de la dépendance des ressources
l’emphase est aussi mise sur le rôle essentiel et l’impact de l’environnement.
Dans la perspective de la théorie de la dépendance sur les ressources, il est
affirmé que la pérennité de l’organisation (entreprise, administration,
association…) dépend de son aptitude à gérer les demandes des acteurs
sociaux dont dépend sa survie. Les organisations doivent en effet acquérir et
entretenir des ressources dont elles n’ont pas le contrôle et pour l’obtention
desquelles elles dépendent d’autres organisations qui constituent leur
environnement (Rojot, p. 393). Ainsi, dans le cadre de la théorie de la
dépendance des ressources, Capron et Quairel-Lanoizelée affirment que la
qualité de la stratégie d’une entreprise et l’intégration des critères sociétaux
dans cette stratégie sont appréciées à l’aune des critères posés par les acteurs
externes, fournisseurs de ressources pour son activité. De l’avis de ces mêmes
auteurs, la théorie de la dépendance des ressources est élargie à celle des
parties prenantes : «Tout en restant compatible avec une logique de rentabilité,
on voit donc que la théorie de la dépendance à l’égard des ressources implique,
contrairement à la théorie néo-classique, une responsabilité sociale, c’est-à-dire
la prise en compte des attentes de certaines parties prenantes dans l’activité de
l’entreprise : celle-ci doit s’engager dans la responsabilité sociale lorsqu’elle est
22
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

contrainte de l’assumer pour répondre aux pressions et aux attentes des


apporteurs de ressources dont elle a besoin. Cette perspective est élargie dans le
cadre de la théorie des parties prenantes». Dans l’optique de la théorie de la
dépendance vis-à-vis des ressources, l’organisation efficace, selon Rojot, est
celle qui satisfait aux demandes de l’environnement qui lui accorde son
soutien, qui lui-même conditionne sa survie. Aussi tant pour les entreprises
africaines que pour celles évoluant dans d’autres contextes, la première étape
à franchir dans la quête de l’efficacité est la connaissance de son
environnement.
Les apports des théories du contrôle externe de l’organisation par
l’environnement méritent donc d’être pris en considération dans la recherche
d’un meilleur fonctionnement des organisations en Afrique, surtout dans le
contexte de libéralisation des économies.
Face à l'échec du modèle de l’ajustement structurel et à son
inadaptation au contexte africain (Akindes, 1998), il est apparu nécessaire de
penser la performance institutionnelle en Afrique dans la perspective d'une
meilleure adaptation des institutions au contexte socioculturel. C'est dans
cette mouvance (ou logique) que sera initiée et menée l'étude de la Banque
Mondiale sur la réforme institutionnelle en Afrique "AM90S". Si dans cette
perspective c’est le cadre néo-institutionnaliste en économie qui est mobilisé,
celui-ci, quoique mettant en évidence des nombreux aspects pertinents reste
tout aussi limité car reposant lui aussi sur des thèses néo-classiques (Stein
1994). Pour Stein, si les gouvernements africains veulent promouvoir les
réformes dans l’optique de l’économie du marché, ils devraient plutôt
s’inspirer des enseignements des thèses du vieil institutionnalisme.
Dans cet ordre d’idées, l’approche néo-institutionnaliste des
sociologues peut apparaître pertinente dans le cadre de la prise en compte du
néo-institutionnalisme dans la gestion des organisations en Afrique car
insistant sur l’intégration des aspects formels et informels et la conception des
institutions comme structures sociales17. En effet, l’approche néo-

17
A ce sujet voici ce que relève V. Nee (2003) «For a new economic sociology to make advances in
explaining the role of institutions and institutional change, it is important to have a definition of
institutions appropriate for analysis from the sociological perspective which emphasizes the causal
effect of social structure. Institutions are not simply the formal and informal constraints that specify the
structure of incentives, as defined by North (1981), or discrete institutional elements – beliefs, norms,
organizations and communities – of a social system (…), but fundamentally they involve actors,
whether individuals or organizations, who pursue real interests in concrete institutional structure. An
23
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

institutionnaliste des sociologues «repose sur une représentation de


l’organisation qui est totalement insérée dans la société, ses valeurs et sa
culture. Elle assure que les conditions de l’environnement ne peuvent être
séparées des perceptions qu’en ont les acteurs. Les attentes des parties
prenantes reflètent les valeurs dominantes du contexte sociétal dans lequel
s’exerce les activités de l’entreprise. Ses dirigeants vont donc mettre en œuvre
des stratégies d’image et de conformité symbolique ou effective avec ces valeurs
afin d’assurer la légitimité de l’entreprise.»
3.2. Le cadre des niveaux d’analyse de Belhing (1978) et
analyse des organisations en Afrique
Comme soutient Koenig (2006, p. 25), «une situation de gestion est
toujours le produit de multiples dynamiques». Une des perspectives préconisée
pour saisir le phénomène organisationnel tout en résolvant les antagonismes
et autres conflits entre théories est de recourir à une approche par
classification des cadres conceptuels («The classification of conceptual
frameworks»). A cet effet, l’approche par niveaux hiérarchiques proposée par
Behling (1978) dans le cadre de ce que les anglo-saxons appellent
«Organizational Studies» semble pertinente. Pour les besoins de l’analyse des
organisations, Behling propose en effet une structure hiérarchique d’un
système arbitraire à quatre niveaux d’analyse :
- les individus ;
- les groupes primaires : ensemble d’individus interagissant
fréquemment à l’occasion de leur travail et partageant certaines croyances
quant à la façon de le mener ;
- les organisations : unités composées d’un ensemble de groupes
primaires, poursuivant des objectifs et ayant des structures explicites ;
- les sociétés : ensembles complexes d’individus, de groupes
primaires et d’organisations ayant des intérêts et des comportements
communs.

institution in this view is defined as a system of interrelated informal and informal elements – custom,
share beliefs, conventions, norms, and rules – governing social relationships within which actors
pursue and fix the limits of legitimate interests. In this view, institutions are social structure which
provide a conduit for collective action by facilitating and organizing the interests of actors and
enforcing principal agent relationship” (p. 23)
24
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

La figure ci-après est une illustration du modèle d’analyse des


organisations proposé par Belhing18. Pour Belhing, le caractère particulier de
la «Organizational Studies» (OS) se situe au niveau de l’importance accordée à
l’explication entre niveau d’analyse. De l’avis de A. Desreumaux (1992), les
apports des gestionnaires à la compréhension de ces relations entre niveaux
d’analyse sont multiples. Aussi, en reprenant les exemples cités par Belhing
peut-on présenter quelques cas classiques19 : Les travaux sur le management
comparatif («Comparative Mangement») se situe au niveau de la relation
[SOC-ORG] (société et organisation) où il est question de montrer en quoi les
réponses des individus à des pratiques organisationnelles diffèrent d’un pays
à l’autre. Le travail de McClelland (1961) quant à l’influence des pratiques
d’éducation sur l’émergence et l’intensité du «besoin d’accomplissement» des
individus constitue une illustration de l’impact des données sociétales en
matière de comportement individuel [SOC-IND] (société et individu).
L’essentiel des travaux du célèbre mouvement dit des «Relations humaines»
concerne l’influence des pratiques organisationnelles sur la structure, les
normes et les comportements des groupes de travail [ORG-GRP] (organisation
et groupe). R. Likert (1961, 1967) développe une série d’hypothèses quant au
poids des données relatives aux groupes comme déterminant de la
performance de l’organisation [ORG-GRP] (organisation et groupe). L’école
dite de «Garnegie» a par ailleurs traité du rôle des conflits entre groupes en
matière de formation des buts de l’organisation [ORG-GRP] (organisation et
groupe).
L’orientation des travaux sur le management en Afrique peut par
conséquent épouser le cadre des niveaux d’analyse tel que proposé par
Belhing (1978) parce qu’il est question ici de mieux articuler les explications
entre niveaux d’analyse. En adoptant cette orientation et en souscrivant à la
perspective de la théorie anthropologique des organisations telle que
construite par Chanlat (1990) nous sommes amenés à dépasser le découpage

18
Au sujet des différents arcs et liens établis dans la figure 01, O. Belhing fait le commentaire ci-
après : «Figure indicates the between levels nature of OS. The four boxes represent the four hierarchical
levels […]. The head of each arrow indicates the levels the level at which the phenomenon to be
explained is conceptualized, and the butt-end the level at which the explanation of that phenomenon is
sought. Thus, for example, link BB (ORG-IND) indicates an attempt to explain individual behaviour or
characteristics by reference to organizational practices or states. Link H (IND-GRP) represents an
attempt to explain the nature of actions or groups in terms of the nature or behaviour of the people who
make them up” (p. 198)
19
Ces exemples sont aussi repris par Desreumaux (1992, pp. 18-19)
25
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

classiquement opéré au sein des sciences de gestion dans l’explication des


performances des organisations.
Au-delà du cadre d’analyse et des orientations théoriques pouvant
aider orienter la réflexion sur le phénomène organisationnel en Afrique, il
importe de faire usage des outils méthodologiques aptes à saisir réalités de
terrain.

A C D SOCIETIES G I L
SOC

SOC
 ORG

 ORG
SOC

SOC
D G
 GRP

 GRP
ORGANIZATIONS
B E H K
SOC

SOC
ORG

SOC
 IND

 IND
 GRP

 ORG

ORG
ORG

C E H J
GROUPS

 IND
 IND

F I
SOC
GRP

 ORG
 IND

A B F INDIVIDUALS I K L

Fig 01: « Among-Level » emphases in Organizational Studies.


Source : Orlando Behling (1978), “Some Problems in the Philosophy of Organizations”, The Academy of Management Review, Vol. 3, No. 2,
p. 198

3.3. L’étude du management des organisations en Afrique et la


nécessaire complémentarité entre approches méthodologiques
quantitatives et approches qualitatives

26
M. FOUDA O., Penser le management en Afrique

Les approches objectivistes et subjectivistes ont mis en évidence une querelle


de méthodes :
- Compréhension et explication : relation entre le sujet et l’objet de
la connaissance sociologique. L’idée défendue avec plus ou moins de nuances
et d’esprit de système par les auteurs comme Dilthey, Rickert, Jaspers ou Max
Weber est que la sociologie procéderait par voie de compréhension
(Vertehen) et les sciences de la nature par explication (Erktähen) ;
- La spécifité de l’humain : débat sur une méthode spécifique des
sciences sociales donc de la sociologie du fait que l’homme soit capable de
désir, de projet, d’anticipation, d’attente de calcul ;
- La querelle de la totalité : la spécificité des sociétés comme objet
de recherche.
Ces querelles, de l’avis de Boudon (1991), n’ont pas de raison d’être.
Cette position est aussi celle de Weber lorsqu’il exprime son point de vue sur
le débat idéalisme/matérialisme et celui qui oppose les sciences de la nature
et les faits sociaux20.
Dans le contexte de l’Afrique, nous estimons que les méthodes aussi
bien qualitatives que quantitatives ont leur raison d’être et doivent être
complémentaires.
Les méthodes quantitatives se justifient dans le cadre des sciences
sociales par le besoin de formalisme. En effet, dans la quête de la formalisation
des réalités sociales, les théoriciens en sciences sociales vont appliquer le
formalisme mathématique aux sciences de l'homme. Toutefois, il convient de
relever que, si le formalisme mathématique s'impose désormais en sciences
sociales, celui-ci revêt tout simplement une fonction heuristique. Cette
fonction en effet rend indispensable la formulation claire des propositions
imprécises et prend le relais de l'intuition, lorsque celle-ci est incapable
d'apercevoir toutes les conséquences d'un ensemble de propositions (Boudon,
1970, p. 18). Les différents modèles et méthodes mathématiques utilisés en
sciences sociales ne sont pas une application du formalisme mathématique
aux phénomènes sociaux, mais l'usage de ces méthodes visent plutôt à forger
des instruments capables de résoudre les problèmes d'analyse rencontrés au
contact de la recherche empirique.

20
Weber repris par Grawitz, p .97

27
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

Le travail dans le contexte organisationnel africain, compte tenu de


nombreuses variables et dimensions à prendre en compte invite à un certain
formalisme car il y a lieu, d’une part, de déterminer les indices culturels
relatifs aux dimensions culturelles et à d’autres phénomènes organisationnels
(les problèmes relatifs à la traduction des concepts en indices, à l'analyse
dimensionnelle et à l'analyse des processus) et, d’autre part, d'analyser les
rapports entre variables (les problèmes des relations entre attributs ou
variables issus d'une situation d'observation et les problèmes relatifs à
l'analyse empirique de la causalité).
S’agissant des études qualitatives, le contexte des études sur le champ
organisationnel en Afrique amène aujourd’hui à insister sur les axiomes du
paradigmes naturalistes à savoir (1) reconnaître le fait qu’il existe une
multitude de réalités qui ne peuvent s’étudier de façon holistique ; (2)
accepter le fait qu’il existe une interaction entre le chercheur et son sujet de
recherche ; (3) viser à décrire les faits non généralisables (idiographiques)
hautement dépendant des notions de contexte et de temps ; (4) considérer les
différentes variables comme ayant une influence simultanée et mutuelle, et
qu’il est donc impossible de distinguer causes et effets ; et finalement (5)
accepter le fait qu’une recherche est influencée par les valeurs, et qu’elle ne
peut donc jamais être totalement objective21. Les axiomes du paradigme
naturaliste commandent la nécessité d’adopter la «Grounded theory» ou
théorie enracinée comme méthodologie de recherche complémentaire pour
appréhender le phénomène organisationnel dans le contexte africain.
Il s’agit donc, in fine, de chercher à mieux articuler : environnements
socioculturels, modèles de gouvernance des organisations, logiques des acteurs
et fonctionnement ou management des organisations (Etat, entreprises,
institutions) dans une perspective intra et cross-culturelle et sur la base à la fois
des approches qualitatives et quantitatives. La figure ci-dessous illustre toute
notre problématique et notre analyse sur le management et la performance
des organisations en Afrique dans le contexte de globalisation des économies.

21
Lincoln et Guba, 1985, repris par Marchildon, 2002.
28
CONTEXTE DE
GLOBALISATION RÉFÉRENTIEL DURABLE
DES ÉCONOMIES

RÉFÉRENTIEL CULTUREL Développement


Bonne Gouvernance durable (DD)

Pluralité Multiculturalisme G G RS ETH STA


Ethnique dans l’organisation E I E

CADRES D’ANALYSE
- Cross- Culturel CADRES
- Interculturel MÉTHODOLOGIQUES
- Genre
- Quantitatif
- Institutionnalisme (NEO)
- Qualitatif
- Théorie du contrôle externe
- Grounded-Theory
- Système et contingence
- Anthropologie Générale
(Chanlat)
- Classification conceptual
frameworks (Behling)

MANAGEMENT ET PERFORMANCE
DES ORGANISATIONS EN AFRIQUE

Légende : GE (Gouvernance d’entreprise) ; GI (Gouvernance des institutions) ; RSE


(Responsabilité Sociale de l’Entreprise), ETH (Ethique), STA (Stakeholders)
Figure 02 : Modèle d’analyse et d’étude du management dans les entreprises en Afrique dans
le contexte de globalisation des économies
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/ APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle N°07, Juillet – Décembre 2013/Semestrial Review N°07, July –December 2013

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32
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET ACCELERATIONS DE LA CROISSANCE EN
AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Mathurin TCHAKOUNTE NJODA


Université de NgaoundéréTél. : (237) 99 87 12 21
Email: mtchakou@yahoo.frB.P.: 454, FSEG,
Mohammadou NOUROU
Université de Ngaoundéré
B.P.: 454, FSEG, Tél. : (237) 99 16 53 97 / 99 36 43 06
Email: nourouacademy@yahoo.fr
Georges D. MBONDO
Groupe de Recherche en Economie Théorique et Appliquée
Université de Douala Cameroun, BP 4032 Douala
E. mail : georges.mbondo@yahoo.com

RESUME
Ce papier examine la relation entre le développement financier et la
croissance, pour un échantillon de pays d’Afrique subsaharienne, en
considérant l’hypothèse de l’effet d’une accélération du second par le premier.
Si cette influence existe, ce n’est certainement pas par le biais de l’épargne,
maillon essentiel du rôle positif que peut provoquer le développement des
banques sur la croissance économique, grâce à l’allocation d’une plus grande
quantité de ressources qu’elle permet de canaliser vers les investissements.
Les résultats prouvent également qu’il importe de donner plus de flexibilité à
la politique monétaire (masse monétaire M2 et taux d’intérêt) afin de lever le
frein à la croissance.

Mots clés : Développement financier, croissance, Afrique subsaharienne,


politique monétaire.

Financial Development and Growth Accelerations in Sub-Saharan Africa

ABSTRACT
This paper examines the relation between the financial development and the
growth, for a sample of country of sub-Saharan Africa, while considering the

129
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle n07, Juillet-Décembre 2013 / Semestrial Review n07 July-December 2013

hypothesis of the effect of an acceleration of the second by the first. If this


influence exists, it is not certainly by the slant of the saving, essential link of the
positive role that the development of the banks can provoke on the economic
growth, thanks to the allowance of a bigger quantity of resources that it permits
to canalize toward the investments. The results also prove that it imports to give
more flexibility to the monetary politics (mass monetary M2 and interest rate) in
order to raise the brake to the growth.

Key word: Financial development, growth, Sub-Saharan Africa, Monetary


policy.

INTRODUCTION

Les systèmes bancaires en Afrique en général et ceux de l’Afrique


subsaharienne1 (ASS) en particulier ont accompli d’énormes progrès depuis
les années 90, période de crises économiques et financières. Aujourd’hui, la
plupart des systèmes bancaires sont solvables, ont d’abondantes liquidités, et
de fonds propres suffisants. Malgré tout, l’ASS se caractérise dans sa grande
majorité par le sous-développement et la fragilité de son système financier.
Les secteurs financiers des pays à faible revenu d’ASS fonctionnent de
manière imparfaite. La gamme d’institutions est étroite et les actifs détenus
dans nombre de pays sont moins importants que ceux d’une seule banque
moyenne dans un pays industrialisé. Une fraction importante des agents
économiques n’a pas accès aux services de paiement de base ou à un compte
d’épargne, et le crédit est hors de portée pour la plus grande partie du secteur
productif. Outre que le manque de crédit est une entrave sérieuse à la
croissance, le développement limité de la finance abaisse le niveau de vie et
empêche la lutte contre la pauvreté. Selon l’Agence Française de
Développement et al. (2005), près de la moitié de la population d’Afrique

1
L’Afrique subsaharienne telle que considérée dans cet article se compose des nations suivantes :
Angola, Bénin, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Cap-Vert, République Centrafricaine,
Tchad, Comores, République Démocratique du Congo, République du Congo, Côte d'Ivoire, Guinée
Equatoriale, Erythrée, Ethiopie, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Kenya, Lesotho,
Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Maurice, Mauritanie, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria,
Rwanda, Sao Tomé et Principe, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Afrique du Sud, Swaziland,
Tanzanie, Togo, Ouganda, Zambie, Zimbabwe.
130
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
subsaharienne vit en dessous du seuil de pauvreté. Il a été établit que si l’ASS
veut réduire de moitié la pauvreté monétaire d’ici à 2015, il lui faut
enregistrer une progression du PIB réel par habitant d’environ 5 %. Même si
les facteurs d’une croissance vigoureuse et durable dans cette région sont
encore mal connus, il est intéressant d’analyser les évolutions récentes.

Après avoir stagné pendant plusieurs décennies, la croissance économique


semble recommencer en ASS, atteignant par exemple 3,9 % en 2003, 5,6 % en
2004, plus de 5 % en 2005 et 2006 (World Bank, 2005). Entre 1960 et 2003,
la progression annuelle du PIB réel par habitant a été en moyenne de 1,1 % en
ASS. Le revenu réel par habitant n’a donc que peu évolué entre le milieu des
années 70 et 2003, la région ayant été régulièrement distancée par les autres
pays en développement. Mais, depuis le milieu de la décennie 90 et même
avant, la croissance s’est accélérée. Dans bien des pays, le PIB réel par tête a
enregistré une hausse moyenne de 2 % entre 1998 et 1999, contre – 1,1 %
entre 1990 et 1994. Toutefois, de 2000 à 2003, tout en restant soutenue, la
croissance a fléchi dans la plupart des pays, sauf dans les pays producteurs de
pétrole et ceux dotés d’abondantes ressources.

On peut se demander dans quelle mesure le système financier des pays


africains contribue activement à la croissance, notamment lorsque celle-ci
subit des accélérations. En effet, Hausmann et al. (2004) estiment que
l’utilisation de modèles de croissance axée sur le long terme peut masquer des
aspects importants de l’évolution de la croissance nationale. Il y a accélération
de la croissance lorsque, pour une année donnée, le taux de croissance par
tête sur cinq ans dépasse d’au moins 2 points celui des cinq années
précédentes et s’il est égal ou supérieur à 2 %. Selon Pattillo et al. (2005),
l’Afrique subsaharienne aurait connu 34 accélérations de la croissance depuis
1980 dont la plupart se situe au cours des années 90. Parmi les facteurs
explicatifs de ces accélérations, on note de meilleures politiques économiques,
la hausse des investissements et l’absence de pressions inflationnistes. Il est
donc possible que les secteurs financiers influencent les épisodes de
croissance au moins à travers l’investissement ou l’inflation. Toutefois, les
secteurs financiers ou bancaires fonctionnent mal, au moins dans les pays
d’ASS à faible revenu (Gulde et al., 2006).

131
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle n07, Juillet-Décembre 2013 / Semestrial Review n07 July-December 2013

L’objet de cet article est d’analyser la relation qui existe entre la situation du
secteur financier et l’accélération de la croissance qui semble se manifester
dans plusieurs pays d’ASS. Pour ce faire, on présente une revue critique de la
littérature sur la question (section 1). Ensuite, on analyse les chiffres de la
croissance en situation de fragilité financière (section 2). Enfin, on construit
un petit modèle implicite (section 3), que l’on estime (section 4).

1. REVUE CRITIQUE DE LITTERATURE

Les premiers travaux sur le lien entre développement financier et croissance


remontent à Bagehot (1873). Ce dernier donne une vision prématurée sur la
question, en soulignant l’importance du développement financier pour la
croissance. Pour lui, la caractéristique distinctive du marché financier anglais
fut la facilité relative dans la mobilisation des épargnes vers le financement de
différents projets d'investissement à long terme. Cet accès facile de
l'entrepreneur au financement externe était d'une importance cruciale dans
l'implémentation de nouvelles technologies dans le Royaume-Uni.
L’industrialisation rapide de l'Angleterre a donc été pour beaucoup le fait de
l'intermédiation financière. D’après Hicks (1969), le système financier a
exercé une influence directe dans le développement industriel en Angleterre
par la facilitation de la mobilisation du capital2.

Les études entreprises par Schumpeter (1912) ont permis de voir un plus
clair. D’après Schumpeter, les services financiers sont primordiaux dans la
promotion de la croissance économique. Le bon fonctionnement des services
financiers en particulier les banques stimule l’innovation technologique et la
croissance économique par l’identification et la recherche des entreprises
avec toutes les chances d’œuvrer avec succès pour l’innovation des produits et
les processus de production, lesquels sont capables de générer des niveaux de
productivité élevés. Quelques décennies plus tard, Robinson (1952) soutient
l’idée que le développement économique crée une demande d’un certain

2
Hicks écrit que « [l’invention et le développement des machines-outils a été] un épisode qu’on doit
considérer comme d’une importance majeure dans l’histoire économique de l’Angleterre, mais qui
apparaît quelque peu secondaire lorsqu’on l’envisage dans un contexte plus large » (J. Hicks, Une
Théorie de l’Histoire Economique, Seuil, Paris, 1973, p. 157).
132
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
nombre de services financiers fournis automatiquement par le système
financier. Selon cet auteur, « where entreprise leads finance follows ». Ainsi, le
système financier répond passivement à la croissance économique et ne peut
donc jouer un rôle même fonctionnel dans le développement économique. Ce
point de vue implique le fait que le développement financier soit juste un
enchaînement du développement économique.

Ce débat conduit à la recherche du lien de causalité entre développement


financier et croissance. Ainsi, est-ce que le développement financier
encourage la croissance économique, ou alors la croissance économique influe
le développement financier? Pour répondre à cette question, Patrick (1966)
propose de distinguer entre deux phases. Dans la première c’est le
développement financier qui entraîne la croissance économique (supply-
leading) alors dans la deuxième c’est plutôt la croissance économique qui
induit le développement financier (demand-following). En référence à cette
seconde hypothèse, toute augmentation de la demande des services financiers
peut induire une expansion dans le secteur financier quand l’économie réelle
s’accroître, c'est-à-dire que le secteur financier répond passivement à la
demande de services (Gurley et Shaw,1967 ; Goldsmith,1969). La phase de
supply-leadingimplique une causalité univoque du développement financier
vers la croissance économique. Ceci signifie que la création délibérée des
établissements et des marchés financiers augmente l’offre des services
financiers ce qui entraîne, par conséquent, une croissance économique réelle
(Mc kinnon, 1973). Les études faites dans les pays africains par Saint Marc
(1972) et Bhatia et Khatkhate (1975) semblent indiquer que la première
phase l’emporte sur la seconde, quoi que son impact soit faible.

L'idée de l'existence des relations entre le secteur financier et le secteur réel a


été émise à partir des années 70, en particulier, dans les études de Mc kinnon
(1973) et Shaw (1973), sur lesquelles se base la nouvelle littérature. En effet,
depuis les travaux de GoldSmith (1969), il est bien connu qu’il existe une
relation positive entre les deux secteurs. Pour leur part, Mc kinnon (1973),
Shaw (1973), largement inspiré par le succès des économies des pays du sud-
est asiatique, ont insisté sur le rôle joué par le développement du système
financier sur l’accroissement de l’épargne ainsi que sur l’investissement. Ces
auteurs soulignent le rôle crucial des politiques publiques dans la mobilisation

133
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle n07, Juillet-Décembre 2013 / Semestrial Review n07 July-December 2013

des épargnes destinées au financement de l'investissement. Toutes les formes


de contrôle publique sur le marché financier, achevées par des instruments
quantitatifs (des crédits dirigés vers des secteurs stratégiques sélectionnés,
des ratios de réserves élevés) ou par des instruments de prix (le plafond du
taux d'intérêt) engendrent une situation de répression financière caractérisée
par de taux réel d'intérêt négatifs, des niveaux réduits des épargnes,
d'investissements et, donc, de croissance.

A la fin des années 80, des auteurs comme Jung (1986) ont soutenu qu’il est
possible de penser que la meilleure explication du développement des
systèmes financiers, outre des contraintes réglementaires ou des
interventions publiques, serait le développement de la sphère réelle. Le sens
de causalité de la finance vers la croissance ne s’exerce que dans les périodes
initiales de développement, puis il s’inverse avec la maturité de l’économie.
Dans cette optique Greenwood et Jovanovic (1990) précisent que durant l'état
initial de développement où l'échange n'est pas encore organisé, la croissance
économique est faible. A mesure que le revenu national augmente, les
structures financières s'installent progressivement et la croissance
économique devient plus rapide. Arrivée à son stade de maturité, une
économie dispose de structures financières complètement développées et
d'un taux de croissance plus élevé par rapport au stade de développement
initial. Ainsi, plus un système financier est développé grâce à la croissance
économique, plus la croissance économique est susceptible de développer la
finance. Compte tenu de cette opinion partagée, peut-on penser avec Lucas
(1988) que les économistes surchargent le rôle de facteurs financiers dans le
processus de croissance économique ?

À partir des années 90, la recherche de la relation entre le développement


financier et la croissance économique a reçu une nouvelle source d’inspiration
suite à l’expansion rapide de la littérature sur les théories de la croissance,
notamment la croissance endogène (Greenwood et Jovanovic, 1990) ;
Bencivenga et Smith, 1991, 1993 ; Roubini et Sala-I-Martin, 1992). Ainsi,
Bencivenga et Smith (1991) montrent que les intermédiaires financiers, par
l’allocation de l’épargne aux actifs peu liquides, et par la réduction de la

134
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
liquidation prématurée d’investissements rentables, améliorent la
productivité du capital, et stimulent donc la croissance économique. Cet
aspect du débat a été examiné dans de nombreux travaux empiriques dont
celui de King et Levine (1993a). Un niveau de développement financier plus
élevé est significativement corrélé avec le taux de croissance économique, le
taux d'accumulation du capital physique et l'amélioration des performances
économiques. Rousseau et Wachtel (1998) montrent que le développement du
secteur financier et la quantité non-négligeable de services d'intermédiation
financière sont associés à la croissance économique. Les modèles de Pagano
(1993), Berthelemy et Varoudakis (1996), mettent l’accent sur le fait que le
taux de croissance dépend positivement du pourcentage d’épargne converti à
l’investissement ; c’est-à-dire que l’important canal à travers le quel
l’approfondissement financier affecte la croissance, c’est la quantité d’épargne
transformée en investissement.

King et Levine (1993b) testent également l'effet en retour de la croissance sur


le développement financier. Cet effet a été vérifié partout sauf dans les pays
pauvres d'Afrique et d'Amérique latine. Malgré toutes les faiblesses du
système financier des pays africains, ainsi que son évolution contrastée, la
majorité des travaux de recherche s’accorde néanmoins sur l’existence d’un
effet modeste du développement financier sur la croissance en Afrique
(Spears, 1992 ; Odedokun, 1996). Plus récemment, Gelbard et Leite (1999),
Collier et Gunning (1999a), et Ndikumana (2001) arrivent à la même
conclusion que le développement financier a un impact positif sur la
croissance économique de long terme en Afrique.

En se référant à la situation spécifique des pays en développement, certains


auteurs considèrent qu'il existe des effets de seuil. En deçà d'un certain niveau
de développement financier, la croissance est souvent plus lente et le
rattrapage plus difficile. Chez Berthelemy et Varoudakis (1994), des pièges de
pauvreté apparaissent. Une croissance très faible ralentit le développement
du système financier qui, à son tour, ralentit la croissance. A l’inverse, une
croissance forte est à l’origine d’un mécanisme vertueux. Par conséquent,
l’existence possible de pièges de pauvreté justifie de considérer une causalité
inverse, voire même une relation inverse. En effet, le développement du
secteur financier peut exercer un effet négatif sur la croissance, notamment

135
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle n07, Juillet-Décembre 2013 / Semestrial Review n07 July-December 2013

dans les études qui se servent de régressions en données de panel (De


Gregorio et Guidotti, 1995 ; Berthelemy et Varoudakis, 1998). Le signe de la
relation n’est pas non plus nécessairement stable même lorsque la dimension
temporel est ajoutée au panel.

La littérature s’est également focalisée sur l’importance des coûts financiers


d’intermédiation (Khan, 2000 ; Harrisson, Sussman et Zeira, 1999). Par
exemple, Khan (2000), s’appuyant sur l’approche empirique de Rajan et
Zingales (1998) a développé un modèle dynamique d’équilibre général
calculable dans lequel le développement financier réduit les coûts financiers
d’intermédiation, accroît la rentabilité des investissements et la croissance.
Des études additionnelles montrent qu'il y a d'autres caractéristiques du
développement financier qui sont associées aux taux élevés de croissance. Il
s'agit, par exemple, de la liquidité du marché boursier (Rousseau et Wachtel,
2000) et d'amélioration des règles comptables, des procédures de faillite et de
gouvernance (Levine, Loayza et Beck, 2000).
Dans notre travail, nous abandonnons la recherche du lien de causalité entre
développement financier et croissance au profit de la vérification de
l’hypothèse d’une accélération du second par le premier. En effet, si le système
financier agit sur la croissance, cela devrait être perçu un tant soit peu lorsque
celle-ci s’accélère. Cet aspect important n’a pas encore exploré dans la
littérature. Nous commençons par une étude descriptive de la situation de la
croissance ainsi que l’état du développement financier dans les ASS.

2. SITUATION DE LA CROISSANCE ET DU SYSTEME BANCAIRE EN


AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Il ne fait aucun doute qu’au cours des quatre décennies passées, les pays d’ASS
ont souffert d’une part, de faibles taux de croissance réalisée par rapport aux
autres régions du monde, et d’autre part de l’instabilité du taux de croissance.
La stagnation, et parfois le déclin, du PIB moyen a conduit à une pléthore de
recherche donnant lieu à des interprétations toutes aussi diverses (voir
notamment Arcand et al. (2001) ; Collier et Gunning, 1999a, 1999b). Mais avec
l’application dans certains de pays de mesures politiques et économiques

136
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
appropriées et à la faveur de la conjoncture internationale, les signes positifs
de croissance sont de nouveau apparus. On peut remarquer à la figure 1 une
tendance nette vers une croissance soutenue à partir de la fin des années 90,
tendance qui se prolonge jusqu’en 2003. Selon Nduluet O'Connell (1999),
(2000), le taux de croissance moyen du PIB par tête pendant ces années en
ASS était plus élevé que dans les autres pays en voie de développement.

10
8
6
4
Taux
2
0
1961
1964
1967
1970
1973
1976
1979
1982
1985
1988
1991
1994
1997
2000
2003
-2
-4
Année
Taux de croissance…
Figure 1 : Evolution du taux de croissance moyen dans les pays d’ASS (1961-
2003)
Source de données : World DevelopmentIndicators, 2008.

Nous convenons avec Hausmann et al. (2004) que la recherche empirique sur
la croissance traditionnellement axée sur le long terme peut masquer des
aspects importants de l’évolution de la croissance d’une économie. En
regardant de près les rebonds de la croissance à moyen terme, il est possible
de mettre à jour ou de déterminer l’origine des accélérations ou à-coups de la
croissance. De tels à-coups de la croissance sont difficiles à prévoir et, les
changements dans la politique économique et l’évolution des conditions
extérieures n’ont pas suffi à améliorer les choses, sauf dans des cas extrêmes.

A la lumière des observations empiriques condensées à la figure 1 et détaillées


au tableau 1, nous pouvons légitimement affirmer que durant les années 90, la
croissance s’est accélérée en Afrique. Mais ce n’est pas le seul cas

137
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
Revue Semestrielle n07, Juillet-Décembre 2013 / Semestrial Review n07 July-December 2013

d’accélération de la croissance. Pendant la décennie 80, et au plus fort de la


crise économique dans les pays d’ASS à faible revenu, la croissance a connu
dans certains pays, une nette accélération. Pour mieux illustrer cette situation,
il est utile d’isoler les cas d’accélérations de la croissance. A ce sujet, nous
avons résumé au tableau 1 les épisodes de croissance accélérée dans les pays
concernés au cours de ces deux décennies. Malgré des conditions
économiques globalement défavorables (enclavement ou absence de
ressources naturelles notamment), un nombre relativement important de
pays obtient donc des résultats satisfaisants au cours de la période
d’observation. Par exemple, le Mozambique et l’Ouganda ont réalisé des taux
de croissance supérieur à la moyenne après des longues années de conflits
armés. Leur modèle peut inspirer des pays qui ont récemment amorcé un
redressement politico-économique à l’instar de la République Démocratique
du Congo, le Liberia et la Sierra Leone. Si l’on excepte les cas les plus souvent
cités (Botswana et Maurice), d’autres pays ont aussi accompli de bonnes
performances : Bénin, Burkina Faso et Ghana. Au total, dix-neuf pays ont
enregistré une accélération de la croissance au cours la décennie 90 alors
qu’ils n’étaient que quinze dans les années 80. En plus, on note que d’une
décennie à l’autre, le nombre de cas où la croissance s’est accélérée au-delà de
10 ans est presque identique. On voit donc que l’Afrique, continent
marginalisé sur le plan international, peut donc aussi connaître des épisodes
d’accélération de la croissance au moins à moyen terme. Il reste maintenant à
voir dans quelle mesure ce phénomène peut être relié à la sphère financière.

Tableau 1 : Episodes d’accélération de la croissance dans les pays d’ASS


PAYS Croissance dans les années 80 PAYS Croissance dans les années90
Début Pendant Après Début Pendant Après
épisode épisode épisode épisode
Botswana 1986 7,7 1,2 Angola 1993 4,9 2,6*
Burkina Faso 1983 3,3 2,9* Bénin 1993 2,2 2,0*
Burundi 1983 2,4 -0,1 Botswana 1996 4,7 …
Rép. du Congo 1984 5,2 -2,7 Burkina Faso 1994 4,7 3,2*
Gabon 1986 2,9 0,5 Cap-Vert 1992 4,5 5,1*
Ghana 1983 2,9 2,0* Côte d’Ivoire 1993 2,3 -4,2
Kenya 1984 2,5 -1,6 Ethiopie 1992 3,8 1,4
Lesotho 1986 4,2 2,8* Gambie 1995 2,2 …

138
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
Maurice 1984 7,3 5,6* Guinée 1994 2,3 0,0
Mozambique 1986 6,0 2,4* Guinée 1994 29,7 18,5*
équat.
Ouganda 1986 3,9 4,1* Malawi 1994 4,8 -3,5
Seychelles 1987 5,7 2,6* Mozambique 1994 7,1 5,1*
Tanzanie 1985 2,3 -1,6 Rwanda 1996 2,6 …
Tchad 1983 3,3 1,4 Sénégal 1994 2,2 1,5
Zimbabwe 1986 2,6 -1,2 Seychelles 1995 7,5 …
Sierra Leone 1999 10,9 …
Tanzanie 1999 4,0 …
Tchad 1999 8,3 …
Zambie 1999 2,1 …
Notes : * épisodes ayant duré au moins 10 ans.… données indisponibles.Source :
Pattillo, Gupta, et Carey (2005).

D’après Pattillo, Gupta et Carey (2005), les accélérations de la croissance vont


de pair avec la baisse de l’inflation, les faibles déficits budgétaires, une
dépréciation réelle de la monnaie, la hausse des exportations, la libéralisation
économique, l’amélioration de la qualité des institutions, la hausse de la
productivité globale des facteurs et de l’investissement. En d’autres termes,
ces études mettent au premier plan le rôle de politiques économiques
rigoureuses, mais aussi celle de la libéralisation économique. Cette dernière
expliquerait dans 10 % des cas la probabilité d’une accélération dans les deux
décennies 80 et 90. Il n’est pas exclu que le système financier puisse y jouer un
rôle, car les facteurs tels que la libéralisation, l’inflation ou l’investissement
apparaissent au premier plan.

La croissance économique en ASS, qu’elle soit accélérée ou non, se heurte à un


obstacle de taille : la fragilité du système financier, qui demeurent la moins
développée dans le monde (Gulde et al., 2006). Lorsqu’on sait que des
secteurs financiers solides, profonds et efficients sont indispensables à
l’amélioration du climat des affaires et la création des conditions favorables au
soutien du secteur privé, l’accélération de la croissance qui s’est déjà
manifesté dans un tiers des cas risque de se heurter à un cet obstacle. Une
première manifestation de la faible financiarisation dans les pays d’ASS est la
large place occupée par le secteur bancaire dans le secteur financier en
général : 80 % des actifs en moyenne chez les pays les plus pauvres d’ASS. Les
secteurs comme l’assurance, la bourse, l’intermédiation financière non

139
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Revue Semestrielle n07, Juillet-Décembre 2013 / Semestrial Review n07 July-December 2013

bancaire ou la micro finance restent marginaux. Moins les pays sont


diversifiés, plus ils seront vulnérables aux chocs externes pouvant
transformer les prêts bancaires en créances irrécouvrables. Une autre
manifestation du faible degré de financiarisation dans les pays d’ASS, et plus
particulièrement ceux à faible revenu, se perçoit au niveau de l’intermédiation
financière3 qui y est moins développé que dans les autres pays du monde (voir
tableau 2). Dans les pays à faible revenu d’ASS, les dépôts bancaires
constituaient seulement 19 % du PIB contre 38 % en moyenne dans les autres
régions, tandis que les prêts au secteur privé ne représentaient que 13 % du
PIB (Gulde et al., 2006). En particulier, les dépôts et les crédits semblent
stagner dans les pays de la zone franc depuis l’avènement des crises bancaires
au cours des années 80.

Tableau 2 : Indicateurs de financiarisation dans les pays d’ASS en moyenne


1990-1999 2000-2004
Dépôts Crédit au M2* / PIB Dépôts Crédit M2/ PIB
bancaires / secteur Dépôts bancaires au Dépôts
PIB privé / bancaires / PIB secteur bancaires
PIB / PIB privé / / PIB
PIB
M2 / PIB
Pays à faible 16 45 30 19 53 39
revenu d’ASS
Pays à revenu 12 50 37 15 62 40
intermédiaire
d’ASS**
Autres pays à 21 50 78 26 59 96
revenu
intermédiaire
Notes : * M2 = monnaie au sens large (monnaie détenue en dehors des banques, et
dépôts à terme, d’épargne et à vue).
**De 2000 à 2004, le poids moyen de l’Afrique du Sud parmi les pays à revenu
intermédiaire a été de 84,5 %.
Source : FMI, International Financial Statistics.

3
L’intermédiation financière, activité principale des banques, consiste en la mobilisation des dépôts des
agents en excédent de financement en vue de les prêter par la suite aux agents en déficit de financement.
140
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
Tableau 3 : Indicateurs de l’efficience dans les pays d’ASS en moyenne (2000-
2003)
Population Nombre Ratio de Prêts Marge Frais
détenant un d’agences fonds (% improd d’intérêts générau
compte pour des actifs uctifs (% des x (% des
bancaire 100 000 pondérés (% du actifs) actifs)
officiel (%) habitants en total des
fonction prêts)
des
risques)
Afrique 12,6 2,6 15,5 14,7 8,2 7,4
subsaharienne
Pays à faible 7,0 1,2 15,7 17,5 8,5 7,7
revenu d’ASS
Pays à revenu 25,3 5,6 16,5 6,8 6,7 6,4
intermédiaire
d’ASS
Sans l’Afrique 21,9 5,6 16,9 7,5 6,6 5,2
du sud
Source : Beck, Demirguc-kunt, et Peria (2005) ; Claessens (2005),
FMI, Profils des secteurs financiers ; calculs à partir des données bancaires de la BID.

Il faut quand même signaler que dans les pays à revenu intermédiaire d’ASS
(Afrique du Sud, Angola, Botswana, Cap-Vert, Gabon, Guinée Equatoriale,
Maurice, Namibie, Seychelles et Swaziland) les secteurs financiers sont plus
vastes et plus diversifiés. Il n’est donc pas surprenant que presque tous ces
pays ait enregistré au moins une croissance accélérée au cours des deux
décennies 80 et 90. La gamme des établissements y est étendue par rapport à
ceux des pays à faible revenu. Au tableau 2, on remarque que le crédit au
secteur privé tout comme la masse monétaire au sens large (en % du PIB) des
pays riches d’ASS sont demeurés supérieurs à ceux des pays pauvres d’ASS de
1990 à 1999 et de 2000 à 2004. Les mêmes écarts se perçoivent lorsqu’on
examine les indicateurs d’efficience des pays d’ASS (tableau 3). Grâce à leur
grande taille, les secteurs financiers des pays à revenu intermédiaire offre aux
populations un important accès aux services financiers plus qu’ailleurs. Il
convient de prendre en compte le poids de l’Afrique du Sud qui dispose d’un
système financier particulièrement développé. Il convient surtout de séparer
les pays qui tirent l’essentiel de leur richesse du pétrole à savoir l’Angola, le
Gabon et la Guinée Equatoriale dont la situation se rapproche de celle des
pays à faible revenu. Étant donné la rareté des possibilités de prêts dans le
secteur non pétrolier, le crédit au secteur privé y reste limité et le nombre
d’agences est faible.
141
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En plus de la faible financiarisation et du manque d’efficience des systèmes


bancaires, s’ajoute le non respect des normes minimales de fonds propres
traduisant ainsi les carences au niveau du contrôle bancaire. Gulde et al.
(2006) font observer que rares sont les pays d’ASS qui fixent le ratio minimal
de fonds propres au-dessus de la norme de 8 %. Il en va de même des autres
ratios prudentiels régulièrement enfreint, le nombre de clients solvables
n’étant pas élevé. La faible efficience se traduit par d’importants frais
généraux et des marges nettes d’intérêts élevés par rapport aux autres pays à
faible revenu (tableau 4). Quoi qu’il en soit, les banques des pays d’ASS sont
rentables. Cette rentabilité vient en grande partie d’intérêts tirés d’emprunts
et se justifient par la structure non concurrentielle des marchés.

Tableau 4 : Indicateurs de rentabilité dans les pays d’ASS


Marge nette d’intérêts Frais généraux Bénéfices avant impôt
1996-1999 2000-2003 1996-1999 2000-2003 1996-1999 2000-2003

Afrique 8,0 8,2 7,4 7,4 3,0 3,0


subsaharienne
Pays à faible 8,2 8,5 7,6 7,7 3,3 3,2
revenu d’ASS
Autres pays à 5,5 4,9 5,3 5,3 1,1 1,1
faible revenu
Autres pays à 7,1 6,6 7,0 7,1 0,2 1,1
revenu
intermédiaire /
faible
Source : Gulde et al. (2006).

Si le degré de concentration du système bancaire varie d’un pays à l’autre, on


note quand même une certaine concurrence ici et là. Le degré de
concentration4 a diminué après les restructurations et les privatisations
bancaires des années 90, mais aujourd’hui il évolue positivement. Dans les
pays comme le Ghana, le Cameroun, ou le Sénégal, le nombre de banques est

4
Selon Detragiache, Gupta, et Tressel (2005) et Gulde et al. (2006), l’inflation, la corruption et la
concentration sont néfastes à l’efficience des banques.
142
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
important par rapport à la population et au revenu. Dans d’autres, comme
l’Ethiopie, une seule banque commerciale domine.
Par ailleurs, l’activité bancaire donne parfois lieu à d’énormes prêts
improductifs (voir tableau 3 pour les chiffres globaux et figure annexe 1 pour
les détails par pays). En 2004, la part moyenne des prêts improductifs était
évaluée à 15 % du total des prêts. Dans 11 pays sur plus de 40 recensés, cette
part se situait au-delà de 20 %. De tels prêts sont accordés en marge des
considérations économiques, par exemple : raisons politiques, complaisances
des contrôleurs, etc. Parallèlement, les banques disposent de liquidités
excédentaires et la présence des marchés interbancaires ne favorise
malheureusement pas les transactions. Toujours en 2004, le coefficient moyen
des réserves obligatoires sur le total des dépôts atteignait 13 % (figure annexe
1). Les pays à haut taux de réserves comme la Guinée Equatoriale (plus de 40
%) ou le Tchad ont récemment enregistré une hausse de leurs recettes
pétrolières. L’Ethiopie, la Guinée-Bissau, le Comores bénéficient quant à eux
de l’aide étrangère.

Manifestement, il est clair qu’une bonne partie des systèmes financiers dans
les économies d’ASS souffrent de nombreux maux. Plusieurs facteurs se
dressent sur le chemin du développement financier dans cette région :
déficiences de l’environnement juridique, entraves à la supervision,
insuffisance d’instruments de politique monétaire, etc. Par ailleurs, et assez
surprenant que cela puisse paraître, ces économies ont connu une croissance
accélérée, au moins pour certaines d’entre elles. C’est la raison pour laquelle
un réexamen empirique de la relation qui existe entre le développement
financier et la croissance s’impose.

3. MODELE ET DONNEES
Nous admettons qu’à chaque période il existe des activités économiques
considérées comme des fuites et notées Yit (i = indice pays, t = indice temps)
qui empêchent l’ajustement de la croissance réelle (ou d’équilibre) git* à une
croissance dite optimale git .

(1)  git*  git    Yit , où  représente le coefficient d’ajustement.

143
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Le modèle économétrique suppose que la croissance économique désirée est


amplifiée par le développement financier et le relâchement de la contrainte de
liquidité (Bencivenga et Smith, 1991; Roubini et Sala-i-Martin, 1992 ; Boulila
et Trabelsi, 2003). En particulier, les opérations du système financier X it
expliquent le taux de croissance d’équilibre :

(2) git*   X it   it ;

où  est un coefficient d’élasticité de la croissance par rapport au facteurs


financiers : c’est aussi un paramètre d’amplification (   ),  regroupe les
coefficients associés au vecteurs de variables financières et monétaires,  it
est le terme d’erreur (  it ~ N  0,  2  ).
En substituant (2) dans (1), on trouve l’expression abrégée de la croissance
accélérée

(3) git   X it   Yit   it .

D’après la relation (3), les phénomènes financiers amplifient la croissance


(lorsque   1 ), tandis que les phénomènes exogènes (nuisances)la freinent.
Si   0 , on obtient une relation de croissance super-accélérée (
git   X it   it ) dans laquelle les phénomènes exogènes sont absents. Si
l’on prend le logarithme de la croissance super-accélérée, il vient :

(4) Log  git   Log      Log  X it   it ; avec it  Log   it  .

L’accélération de la croissance est captée par la variable endogène « taux de


croissance du PIB réel par habitant ». Une croissance est dite accélérée au sens
de Hausmann et al. (2004) si pour une année donnée, le taux de croissance
par tête sur cinq ans dépasse d’au moins 2 points celui des cinq années
précédentes et s’il est égal ou supérieur à 2 %. Une première difficulté

144
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
apparaît car les pays d’Afrique subsaharienne ne sont pas homogènes en ce
qui concerne l’accélération de la croissance. Cela oblige à identifier pour
chaque pays les épisodes d’accélération de la croissance et à faire recourt aux
techniques d’estimation de panel (pour l’ensemble des périodes) et de coupes
transversales (pour chacune des sous-périodes). La vérification empirique
porte sur les 29 pays d’ASS5 qui ont connu une accélération de leur
croissance pendant l’une ou l’autre des sous-périodes6 et pour lesquels nous
disposons d’informations statistiques : Angola, Bénin, Botswana, Burkina
Faso, Burundi, Cap-Vert, Tchad, République du Congo, Côte d'Ivoire, Guinée
Equatoriale, Ethiopie, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Kenya, Lesotho, Malawi,
Maurice, Mauritanie, Mozambique, Rwanda, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone,
Tanzanie, Ouganda, Zambie, Zimbabwe. D’autre part, si la taille de
l’échantillon l’avait permis, il serait possible de travailler avec les groupes de
pays, par exemple les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire.
Au rang de variables exogènes, nous utilisons l’épargne en % du PIB,
l’investissement en % du PIB, la masse monétaire M2 en % du PIB, les crédits
domestiques au secteur privée en % du PIB, le ratio des IDE sur le PIB, le ratio
des dépenses publiques sur le PIB, le taux d’inflation, le taux d’intérêt réel, le
taux de change effectif réel, le PIB par tête, l’indicateur de bonne gouvernance.
Les informations statistiques viennent de la banque de données World
DevelopmentIndicators de 2010 publiée par la Banque Mondiale. Elles ont été
complétées par les données de la gouvernance produites par « Freedom
House »7.

4. ANALYSE DES RESULTATS

Au terme des régressions, nous avons identifié des variables qui accélèrent ou
décélèrent la croissance et celles qui n’ont aucune influence sur la croissance

5
Gelbard et Leite (1999) ou Allen et Ndikumana (2000) ont suggéré de ne pas inclure dans l’échantillon
les pays d’Afrique subsaharienne à systèmes financiers relativement bien développés comme l’Afrique
du Sud et l’Ile Maurice. Ces deux pays ne semblent pas être touchés par l’accélération de la croissance.
Par conséquent, ils ne rentrent pas dans notre échantillon.
6
C’est notamment au cours des décennies 80 et 90 que la croissance s’est accélérée dans chacun des
pays de l’échantillon (Cf. tableau 1).
7
En l’absence d’indicateur sur les variables de l’environnement légal, de la qualité de supervision et de
régulation des banques pour les pays africains, on utilise comme proxy l’indice de liberté civile de la
base de données de Freedom House. Cet indice est compris entre 1 (pour les pays à degré de liberté
civile élevé) et 7 (pour les pays à faible degré de liberté civile).
145
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(voir tableau annexes 1, 2, et 3 pour les résultats détaillés des différentes


simulations). Les résultats relatifs à chacune des sous-périodes, que l’on voir
au tableau 5 ci-dessous, ne sont pas concordants.

Tableau 5 : Variables (1) accélérant (+), décélérant (-), ou n’influençant


pas (/) la croissance
Sous-période 1 Sous-période 2 Ensemble
Epargne / / /
Investissement / + +
M2 + - -
Crédits + + +
IDE + + +
Dépenses publiques / / /
Taux d’inflation - / /
Taux d’intérêt réel / - -
Taux de change / / /
PIB moyen - / +
Gouvernance - + +
Notes : (1) La variable endogène est le taux de croissance du PIB réel par
habitant.
Source : Résultats des différentes régressions figurant en annexe.

Par rapport au paradigme originel de l’approfondissement financier


(financialdeepening) qui repose sur la séquence taux d’intérêt  épargne-
investissement  croissance8, on remarque à partir de nos résultats une
cassure concernant l’épargne. Cette dernière ne serait pas à l’origine de
l’accélération de la croissance, quelle que soit la période d’étude. Pourtant, si
l'intermédiation financière agit sur la croissance, c'est en améliorant le taux de
transformation de l'épargne en investissement grâce à l'assurance de
liquidités qu'elle fournit aux agents. Or précisément, cette assurance n’est pas

8
Les travaux de Beck, Levine et Loayza (2000) portant sur un panel de 63 pays sur la période 1960-
1995 apportent encore la confirmation d’une relation de long terme, très robuste entre le développement
financier et la croissance de la productivité globale des facteurs, mais aussi avec le taux d’épargne, et le
taux d’accumulation du capital.
146
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
toujours évidente dans les pays d’ASS. Les faibles revenus chez les ASS conduit
à des faibles taux d’épargne et par ricochet à des contraintes de liquidité
fortes. Si l’on exclut les cas notables de la République du Congo (46,39 %
d’épargne en % du PIB en 1984) et du Botswana (41,31 % en 1996), la plupart
des pays de l’échantillon ont réalisé des performances d’épargne en dessous
de 30 %. On a pu observer au tableau 2 que les dépôts bancaires qui
représentent l’épargne intermédiée constituaient seulement 15 % du PIB, ou
19 % dans le meilleur des cas, contre 38 % en moyenne dans les autres
régions. Ce constat semble s’éloigner du canal de croissance endogène avec
intermédiation financière décrit par De Gregorio et Guidotti (1995) et
modélisé par Bencivenga et Smith (1991).

Aucun effet émanant du taux d’intérêt n’est perceptible pendant les années
1980. Par contre, tant sur l’ensemble de la période d’étude que sur la seconde
période, le taux d’intérêt décélère la croissance. Ces années ont été marquées
en Afrique par la répression financière dont les conséquences d’après King et
Levine (1993b) se résument à une réduction des services proposés par le
système financier aux épargnants, entrepreneurs et producteurs, l’entrave de
toute innovation, et l’affaiblissement du taux de croissance de l’économie. Les
études empiriques ont depuis longtemps souligné l'impact incertain du taux
d'intérêt sur le niveau de l'épargne. Selon les partisans de la théorie de la
libéralisation financière, l’épargne financière constitue le préalable à
l’investissement, ce dernier étant à l’origine de la croissance. Dans cette
perspective, si la croissance est insuffisante dans les pays sous-développés,
c’est parce que l’épargne financière se révèle insuffisante pour permettre le
financement des projets d’investissement rentables. Comment alors expliquer
l’influence exercée sur l’accélération de la croissance par l’investissement et le
taux d’intérêt au cours de la décennie 90 ? En suivant la thèse de la
libéralisation financière9, celle-ci est supposée permettre un accroissement du
volume et de la qualité de l’investissement.

9
Dans le schéma explicatif, cette influence positive s’exerce d’abord à travers un changement structurel
de l’économie : la hausse des taux d’intérêt réel permet l’unification du marché des capitaux grâce à
l’absorption du marché financier informel. D’autre part, des taux d’intérêt plus élevés provoquent une
augmentation des taux de rendements marginaux de l’investissement. Enfin l’intermédiation financière
centralisatrice de l’épargne s’exerce dans le cadre d’un marché des capitaux parfaits ; un tel système
permet à l’économie de bénéficier d’externalités qui sont supposées ne pas pouvoir être atteintes lorsque
le marché des capitaux est fragmenté à cause de la répression financière (Levine et King, 1993b ; Fry,
1995).
147
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L’application des régressions sur la deuxième sous-période confirme


l’influence positive postulée de l’investissement sur l’accélération de la
croissance alors qu’elle l’infirme sur la première sous-période. Mais, sur
l’ensemble des deux sous-périodes, on note une influence positive de cet
agrégat. Les économies ont plus investi pendant la décennie 90.
L’investissement domestique a parfois été complété par l’investissement
direct étranger (IDE) dont le signe positif apparaît nettement sur la période
étudiée. Ce résultat met en exergue le rôle joué par les flux d’investissement
étrangers en matière de croissance. Leur proportion s’est constamment
accrue durant ces dernières années, mais leur magnitude et leur importance
restent inégales à travers les économies, les pays pétroliers étant
généralement plus sollicités.

La prise en compte du taux d’inflation comme variable explicative de la


croissance peut se justifier à travers le concept de la répression financière. En
effet, un taux d’inflation élevé caractérise les économies où la répression
financière est forte, ce qui donne lieu à un taux d’intérêt réel négatif, réduisant
ainsi le poids de la dette gouvernementale. Or, une forte inflation défavorise
les investissements à long terme et exerce en retour un effet nuisible à la
croissance. Le signe attendu pour cette variable est donc négatif. Sans aucune
surprise, l’inflation freine la croissance, tout comme le taux d’intérêt du reste.
Mais contrairement à ce dernier, l’influence porte sur une période (la
première) marqué par la crise économique et la hausse des prix sur le
continent. Le taux d’inflation reflète sans doute mieux, de manière plus
synthétique, la situation macroéconomique. Fischer (1993) a établi une
relation négative entre la croissance et l’inflation (prise comme indicateur de
la répression financière). Allant dans le même sens, De Gregori (1992) a mis
également en évidence, pour les pays d’Amérique du Sud, l’existence d’un lien
négatif entre le niveau de l’inflation et la croissance. Dans de nombreux pays
africains, le manque de discipline fiscale a entraîné une forte inflation et une
hausse des taux d’intérêt nominaux. Mais, parmi les pays de l’échantillon,
seule l’Angola réalise une hyperinflation (en 1993) et, en plus, l’inflation a été

148
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
en moyenne plus élevée dans les années 80 qu’en 90 : d’où son impact négatif
sur la croissance.

D’après nos résultats, l’agrégat monétaire M2 rapporté au PIB influencerait


positivement la croissance (comme chez Bhatia et Khatkhate, 1975 ; et
Spears, 1992) au cours de la première décennie, et négativement au cours de
la seconde décennie, ainsi que dans l’ensemble des deux périodes. Le degré de
monétarisation des économies des pays d’ASS demeure faible par rapport à
ceux des pays de même niveau de développement (tableau 2). Ce constat
s’étend à l’ensemble du continent, selon que le pays est à faible revenu ou à
revenu intermédiaire, et traduit parfaitement le faible degré de
financiarisation des systèmes financiers.

Le ratio crédit au secteur privé / PIB possède un net avantage par rapport aux
agrégats monétaires M2 ou M3 parce qu'il représente plus clairement l'actuel
volume de fonds canalisés vers le secteur privé. Ce ratio est ainsi plus
directement lié à l'investissement et à la croissance économique. Lorsque le
crédit au secteur public y est exclu, il illustre d'une manière plus appropriée le
rôle des intermédiaires financiers dans la canalisation des fonds vers les
participants privés au marché. Si le crédit au secteur privé apparaît être
l'indicateur le plus approprié pour le degré d'intermédiation financière qui se
produit à travers le système bancaire, il peut être un faible indicateur de
développement financier en sens large, puisqu'une partie significative du
développement financier dans les pays développés 10 se produit au-delà du
système bancaire. Son influence dépend donc du degré de développement des
économies. Les régressions font valoir que ce ratio accélérerait la croissance,
car il permet de relâcher un peu la contrainte de liquidité.

La variable « dépenses publiques en % du PIB» qui est une mesure habituelle


de l’influence du gouvernement dans l'activité économique permet d’illustrer
le rôle de la politique fiscale dans le processus d’accélération de la croissance.
Il n’y a pas de consensus dans la littérature le rôle de la consommation

10
Cette situation est plus caractéristique des pays industrialisés qui ont connu de fortes innovations
financières non-bancaires. Dans les pays africains, au contraire, la plupart du développement financier a
eu lieu dans le système bancaire. Pour cette raison le crédit au secteur privé capte bien le
développement financier en sens large.
149
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
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publique (Berthelemy et Varoudakis, 1996). D’après Campos et Coricelli


(2002), les différents types de dépenses de l’Etat auraient des effets différents
sur la croissance économique. Nos résultats attestent dans l’ensemble l’idée
d’un rôle non-significatif. Il en va d’ailleurs de même du taux de change. Cela
est peut être dû au fait que la plupart des monnaies sur le continent ne sont ni
flexible, ni cotées en bourse. Normalement, la politique de change fixe très
perceptible en Afrique augmente l’exposition des aux chocs extérieurs qui
peuvent en retour provoquer une augmentation des taux d’intérêt ou un
déficit de la balance des paiements, et donc un ralentissement de la
croissance. Hormis le cas du Ghana dont l’indice du taux de change effectif réel
dépasse les 1 500 en 1983 associé à un taux d’inflation de 122,87 % et un taux
d’intérêt réel négatif record de -46,65 %, la situation des autres pays est
restée relativement stable.

Les autres variables de contrôle tels que le PIB moyen et la gouvernance


apparaissent également pertinentes dans l’ensemble. Premièrement, l’activité
croissante des intermédiaires financiers conduit à une augmentation du
produit par tête qui, en retour favorise l’expansion de l’activité économique
générale. Deuxièmement, plus un pays présente un index élevé de liberté
civile au sens de Freedom House (c’est-à-dire un degré réduit de liberté
économique), plus sa croissance économique est faible. Les résultats montrent
que d’une part la qualité de l’environnement légal stimule la croissance, et
d’autre part que la faiblesse de l’environnement légal est une cause non
négligeable de la faible contribution du développement financier à la
croissance dans les pays africains. Introduites séparément, elles sont donc
significatives avec le signe attendu, à l’exception de la décennie 80 où elles
retarderaient la croissance.

CONCLUSION

Le débat sur le lien entre développement financier et croissance reste à l’ordre


du jour ; en effet, de nombreuses recherches ont été entreprises sur ce sujet.
Dans cet article, nous avons entrepris d’examiner cette relation en référence
aux pays d’Afrique subsaharienne (ASS). Ces pays se caractérisent par le sous-

150
M. TCHAKOUNTE NJODA, M. NOUROU, G.D. MBONDO, Développement financier…
développement et la fragilité du système financier, auxquels s’ajoute un
fonctionnement bancaire imparfait. Mais au cours de la décennie 90, les
systèmes bancaires sont devenus solvables, ont engrangé d’abondantes
liquidités, et l’insuffisance des fonds propres a été comblée. D’autre part, on
note un regain de croissance ; celle-ci s’est même accélérée dans certains pays
d’ASS. Il importe donc de voir si l’influence du système bancaire aurait facilité
ces accélérations.

La plupart des études théoriques ou appliquées reconnaissent l’effet


bénéfique du développement financier dans la croissance économique. Mais,
avant que les modèles de croissance endogène ne voient le jour, la question de
la causalité entre les deux phénomènes est restée pendante durant de nombre
années. Il semble que le sens de la causalité dépend du niveau de
développement. Ce problème peut être résolu en se demandant simplement si
la croissance peut être freinée ou accélérée par le secteur financier. Deux
sources d’accélération de la croissance sont mises en évidence : le
développement financier à travers son rôle de canalisation de l’épargne vers
des investissements productifs et le relâchement de la contrainte de liquidité
qui s’en dégage.

Les vérifications empiriques ont été conduites sur un échantillon de 29 pays


d’ASS qui ont tous connu des épisodes d’accélération de leur croissance du PIB
réel au cours de l’une des deux décennies précédentes. Les résultats diffèrent
selon que les régressions sont faites en considérant chaque sous-période à
part ou l’ensemble de la période. Tout en confirmant le rôle positif des
facteurs traditionnels que sont l’investissement domestique et étranger, des
crédits, et de la gouvernance dans l’accélération de la croissance les résultats
globaux infirment celui de l’épargne, des dépenses publiques, et des taux
d’inflation et de change. La masse monétaire M2 et le taux d’intérêt (variable
essentielle de la politique monétaire) interviennent comme un frein à la
croissance. Au terme de cette étude, nous pouvons dire que la croissance ne
saurait être accélérée en situation de sous-développement financier.
Cependant, le développement financier sera d’autant plus favorable à la
croissance que le secteur bancaire formel accumulera effectivement plus
d’épargne et la canalisera vers le secteur productif afin de remédier à la
contrainte financière des agents dans les ASS.

151
ECONOMIE ET GESTION APPLIQUEES/APPLIED ECONOMICS AND MANAGEMENT
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ANNEXES

Zimbabwe
Zambie
Ouganda
Togo
Tanzanie
Swaziland
Afrique du Sud
Sierra Leone
Seychelles
Sénégal
Sao Tomé et Principe
Rwanda
Nigeria
Niger
Namibie
Mozambique
Maurice
Pays Mali
Malawi
Madagascar
Liberia
Lesotho
Kenya
Guinée-Bissau
Guinée
Ghana
Gambie
Gabon
Ethiopie
Erythrée
Guinée Equatoriale
Cote d'Ivoire
République du Congo
République Démocratique du…
Comores
Tchad
République Centrafricaine
Cap-Vert
Cameroun
Burundi
Burkina Faso
Botswana
Benin
Angola Taux
-20excédentaires
Réserves 0 20 40
/ Total dépôts 60 80

Figure annexe 1 : Taux des prêts improductifs et des réserves excédentaires par pays
en 2004
Source: FMI, Profils des secteurs financiers ; et Saxegaard (2006)

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Tableau annexe 1 : Résultats des estimations sur la sous-période 1


I II III IV
Constante 2,724** 14,108*** 5,041* 7,929**
M2 0,063** - - -
Crédits 0,017* - -
IDE 0,695** - -
Taux d’inflation -0,011** - -
PIB moyen (1) -0,749** -
Gouvernance -1,046**
Nombre de pays 15 15 15 15
R2 ajusté 0,249 0,889 0,466 0,677
Statistique de Fisher 3,989** 9,640*** 4,807** 5,591**
Notes: (1) Variable exprimée en logarithme. Les étoiles ***,** et * indiquent
respectivement les taux de 1 %, 5 % et 10 % du niveau de signification. Toutes les
estimations sont réalisées avec correction de White.

Tableau annexe 2 : Résultats des estimations sur la sous-période 2


I II III IV V
Constante 1,668 1,467 0,014 5,512* 1,556
Investissement 0,315*** 0,317*** 0,188** 0,060** 0,683***
M2 -0,102* -0,181** - - -
Crédits 0,082* - - -
IDE 0,740* - -
Taux d’intérêt réel -0,219* -
Gouvernance 1,795**
Nombre de pays 19 19 19 19 19
R2 ajusté 0,625 0,706 0,640 0,686 0,196
Statistique de Fisher 12,534*** 11,221*** 14,261*** 9,876*** 4,152**
Notes: les étoiles ***,** et * indiquent respectivement les taux de 1 %, 5 % et 10 % du
niveau de signification. Toutes les estimations sont réalisées avec correction de White.

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Tableau annexe 3 : Résultats des estimations sur l’ensemble de la période


I II III IV V
Constante 1,648 1,304 -0,018 -0,586 0,603
Investissement 0,229*** 0,112** 0,253*** 0,283*** 0,223***
M2 -0,09** - - - -
Crédits 0,043* - - - -
IDE - 0,781*** - - -
Taux d’intérêt réel -0,071* - -
PIB moyen (1) 2,875** -
Gouvernance (2) 0,660**
Nombre de pays 29 29 29 29 29
R2 ajusté 0,431 0,520 0,524 0,482 0,418
Test de Hausman 12,568** 10,905** 9,336** 5,201** 5,987**
(chi2)
F test 8,245*** 7,986*** 11,544*** 6,023** 7,028**
Notes: (1) Variable exprimée en logarithme. (2) Variable exprimée en variation. Toutes
les estimations sont réalisées avec correction de White. Les étoiles ***,** et * indiquent
respectivement les taux de 1 %, 5 % et 10 % du niveau de signification.

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