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Etudes - Expertises
Mars 2007
Le professeur Philippe Sonnet est responsable de l’Unité des sciences du sol au sein du
Département des Sciences du milieu et de l’aménagement du territoire de la Faculté d’ingénierie
biologique, agronomique et environnementale de l'Université catholique de Louvain. Les activités de
recherche de l’Unité des sciences du sol sont centrées sur l’étude du fonctionnement des sols, afin de
répondre à des problématiques agronomiques ou environnementales. Le Prof. Ph. Sonnet y mène des
recherches dans le domaine de la cartographie et de la géochimie des éléments en trace dans les sols en
relation avec le substrat géologique et les contaminations diffuses. Il a dirigé l’exécution de plusieurs
conventions de recherche sur ce thème, dont la convention SPAQuE/UCL /FUSAGx POLLUSOL sur
l’établissement du fond pédogéochimiques des sols de Wallonie.
Ir. Benoit PEREIRA est bioingénieur et assistant de recherche à l'Unité des sciences du sol de
l'UCL. Il travaille sur les thématiques liées à la contamination diffuse des sols par les éléments traces
métalliques (ETM) au sein de l'unité des sciences du sol de l'Université catholique de Louvain. Dans ce
cadre, il a participé à des conventions de recherche avec la DGRNE (convention CAPASOL :
Cartographie de la capacité des sols de la Région wallonne à accepter l’épandage d’amendements
organiques conforme à la réglementation ) et avec la SPAQuE (Rédaction du Cahier de Bonnes Pratiques
N° 10 : Guide pour la définition des concentrations de fond en polluants dans les sols ).
Les Rapports sur “l’état de l’environnement wallon” sont établis par la Direction générale des Ressources naturelles
et de l’Environnement (DGRNE) du Ministère de la Région wallonne, en étroite collaboration avec les universités et
les centres de recherche francophones de Wallonie et de Bruxelles (Art. 5 du Décret du 21 avril 1994 relatif à la
planification en matière d’environnement dans le cadre du développement durable).
Le 31 mai 2002, le Gouvernement wallon a adopté une convention -cadre pour financer la mise en place d’une
coordination inter-universitaire, fondée sur une équipe scientifique permanente et sur un réseau d’expertise. Cette
convention-cadre a été passée avec le Centre d’Etude du Développement Durable (CEDD) de l’Institut de Gestion de
l’Environnement et d’Aménagement du Territoire (IGEAT) de l’Université Libre de Bruxelles (ULB). L’équipe
scientifique est pluridisciplinaire et travaille avec la DGRNE qui assure la coordination générale. Les chercheurs
comme les experts scientifiques sont issus de différentes universités.
http://environnement.wallonie.be/eew
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Table des matières
1 INTRODUCTION................................................................................................................................................ 4
3
1 Introduction
Comme la plupart des sols de l'Union Européenne, les sols de la Région wallonne sont menacés
par les apports diffus en éléments traces métalliques (ETM). Ces apports sont, pour l’essentiel, liés aux
pratiques agricoles et aux retombées atmosphériques (activités industrielles, chauffage domestique,
transports, etc). Les ETM ont tendance à s'accumuler progressivement dans les sols, ce qui peut engendrer,
à terme, un risque pour l'environnement et la santé humaine. A travers le financement de plusieurs
conventions de recherche, la Région wallonne s'est préoccupée de l'état de contamination de ses sols par
ces polluants. Cependant des progrès restent à réaliser pour obtenir une connaissance et une maîtrise
suffisantes de cette problématique afin d'orienter correctement les politiques visant à préserver la qualité
des sols, essentielle pour la protection de la santé publique, des écosystèmes et des ressources en eau.
Dans le contexte de la contamination locale des sols, on regroupe souvent ces différents polluants
sous l’appellation de "polluants inorganiques" car ils peuvent atteindre des niveaux de concentrations qui
font qu’il n’est plus réellement approprié de parler d’élément « en trace ». Nous avons choisi ici de suivre
un usage fréquent dans la littérature scientifique qui est de les désigner par l'appellation "éléments traces
métalliques" parce que, dans les conditions naturelles ou dans le contexte de la contamination diffuse, ces
éléments se trouvent généralement à l’état de trace. Il est à noter que d’autres éléments (le sélénium, le
bore, le molybdène, le vanadium, etc.) peuvent également poser des problèmes environnementaux et sont
souvent repris dans la famille des ETM.
4
noter que la toxicité des éléments en trace est une notion qui n’a pas de valeur absolue, mais qui est à
établir pour un milieu particulier et dans un ensemble de circonstances bien définies.
PERTE APPORT
PROCESSUS PEDOGENETIQUES
PROCESSUS
PEDOGENETIQUES
RETOMBEES ATMOSPHERIQUES
NATURELLES
Fond pédogéochimique
naturel local
RETOMBEES
EXPORTATION PAR ATMOSPHERIQUES
LES RECOLTES ANTHROPIQUES Pollution par
"Contamination
ACTIVITES diffuse"
LESSIVAGE AGRICOLES
Teneurs habituelles
Pollution par "Contamination locale"
POLLUTION LOCALISEE
Figure 1 : Succession des processus naturels ou anthropiques aboutissant aux teneurs mesurables en ETM dans un
sol en l'absence d'anomalie géologique
5
Lorsqu'un sol se forme sur un substrat géologique ("pédogenèse"1), le fond géochimique est
modifié. Outre ces processus pédogénétiques, des apports naturels d'origine externe et souvent fort
lointaine interviennent également : retombées atmosphériques liées aux éruptions volcaniques, aux
embruns marins, feux de forêts, etc. Ces apports représentent des flux annuels infimes mais dont les effets
cumulés ne sont pas négligeables car ils se déroulent sur des longues durées.
Pour les sols, la gamme des teneurs qui résulte de l’héritage du matériau parental, des processus
pédogénétiques et des retombées atmosphériques naturelles, en dehors de tout apport d'origine humaine
constitue le "fond pédogéochimique naturel local". Les teneurs résultant de ce fond peuvent être
considérées comme les "teneurs naturelles" du sol. Dans la pratique, il n’est plus possible de nos jours de
retrouver des sols qui possèdent ces teneurs naturelles à cause de l’effet cumulé des apports anthropiques :
contamination locale, retombées atmosphériques liées à l'activité humaine, pratiques agricoles et
sylvicoles, etc…. Les concentrations en éléments traces que l'on peut mesurer aujourd'hui dans un sol sont
plus ou moins éloignées de celles du fond pédogéochimique naturel local selon l’intensité qu’ont eu
localement ces apports.
En l’absence d’une contamination locale (voir ci-après), les teneurs habituellement rencontrées
dans sol seront appelées « teneurs habituelles ». Ces teneurs résultent de la combinaison des influences
de la géologie, de la pédogénèse et des activités humaines. Les teneurs habituelles en ETM ont été
mesurées en Région wallonne dans le cadre de l’étude POLLUSOL (SPAQUE-UCL-FUSAGx, 2000-
2002). Il s’agit de la première étude d'ensemble à l'échelle de la Région qui ait eu pour but de déterminer
et de cartographier les teneurs habituelles. L’étude tient compte des principaux types de matériaux
parentaux ("héritage géologique") des principaux types de sols ("influence de la pédogénèse"), de
l’utilisation des sols et de la distance par rapport à des sources connues de pollution ("impact des activités
humaines").
• les "contaminations locales", qui touchent une aire relativement faible et sont dues à une ou
plusieurs source(s) bien identifiée(s) et souvent très proche(s) (quelques mètres à quelques
kilomètres). Il s'agit généralement d'apports massifs, souvent associés aux exploitations minières,
aux installations industrielles et à d'autres installations, tant en cours d'exploitation qu'après leur
fermeture.
• les "contaminations diffuses", qui affectent tous les sols, plus ou moins faiblement mais de
manière généralisée. Ce type de contamination résulte principalement de dépôts atmosphériques
qui ne peuvent pas être liés à une ou plusieurs source(s) ponctuelle(s) identifiable(s) et des
pratiques agricoles et horticoles (épandage d'engrais, d'amendements, de boues de station
d'épuration, traitements phytosanitaires, etc). Ce type de contamination ne peut être totalement
évitée : elle est la conséquence d'apports involontaires (émissions atmosphériques industrielles, par
exemple) ou d'impuretés indésirables dans des apports volontaires (ETM dans les engrais
minéraux, par exemple).
1
On appelle pédogenèse la somme des processus naturels (chimiques, physiques et biologiques) aboutissant à la
formation du sol.
6
Figure 2 : (A) : la coupe représente l'exemple d'un sol se formant sur un matériau parental (en grisé), développé sur
des roches du substrat géologique. (B) : sur le même sol, présence d'une source d'émission massive de polluants. (C)
: en pointillé : fond pédogéochimique naturel qui serait présent en l'absence de contamination diffuse. En tireté, les
teneurs mesurées dans le sol, qui sont qualifiées d'"habituelles" car on ne peut pas déceler l'influence d'une
contamination locale. (D) : en tireté, les teneurs mesurées sont qualifiées de teneurs sur sol pollué parce qu'elles ont
un niveau élevé résultant d'une contamination locale du sol.
2
Zone superficielle riche en oxydes et hydroxydes de fer d’un gisement métallifère sulfuré.
7
Carte 1 : localisation des structures géologiques à l’origine d’anomalies géochimiques en ETM
Les principaux facteurs de l'environnement influant sur la mobilité d'un ETM dans le sol sont le
pH, le potentiel d'oxydo-réduction et la capacité d'échange cationique (CEC). Ce dernier paramètre est lié
à la quantité et à la qualité de la matière organique ainsi qu'au pourcentage et au type de minéraux argileux
dans le sol. D'autres facteurs, comme le climat ou les interactions entre les différents éléments présents
dans le sol, peuvent aussi modifier la mobilité d'un ETM.
Les racines des plantes prélèvent les éléments-traces presque exclusivement dans la solution du
sol. Seule une faible fraction des éléments traces totaux du sol est donc assimilable par les plantes : celle
qui est présente dans la solution du sol, et celle qui peut rapidement passer de la phase solide du sol à la
solution. La biodisponibilité et la mobilité des ETM dans les sols dépendent donc des échanges entre la
8
solution et les phases solides du sol ainsi que des échanges entre les différents composants de la phase
solide. Un ETM présent dans le sol sous une forme adsorbée possèdera une grande mobilité, car la liaison
qui le retient à la phase solide du sol est de faible énergie ; son potentiel de transfert vers la solution du sol
sera beaucoup plus important que celui d'un ETM inclus dans le réseau cristallin d'un minéral du sol.
Ces bilans montrent qu’actuellement les sols se comportent en accumulateurs d’ETM, c’est-à-dire
que les flux entrants sont supérieurs aux flux sortants. Par exemple, pour le Cd, on constate d’une façon
assez générale en Europe que les apports par les retombées atmosphériques, par les engrais phosphatés et
les épandages de boues de station d’épuration sur les parcelles agricoles sont grandement supérieures aux
sorties (lessivage des particules fines, lixiviation en solution et exportation par les récoltes). Cette capacité
d’accumulation fait que la contamination diffuse des sols par les ETM constitue une dégradation qui peut
être considérée comme irréversible, sauf utilisation de techniques de dépollution (phytoremédiation,
extraction par voie physique ou chimique, etc.) qui, par leurs coûts ne peuvent concerner que de petites
étendues.
• Les micro-organismes du sol sont les premiers organismes vivants à subir l’impact de la
contamination par les ETM : ralentissement de leurs activités, diminution de leur diversité et de
leurs interactions. Or ceux-ci jouent un rôle important dans le recyclage biogéochimique des
éléments nutritifs du sol (décomposition de la matière organique) et dans la dégradation de
polluants (micropolluants organiques) ;
• Une augmentation des teneurs en éléments toxiques dans le sol impliquera un prélèvement accru
de ces éléments par les plantes cultivées et le bétail. Le sol ne pourra alors plus produire des
aliments de qualité suffisante pour satisfaire aux normes de santé publique ;
• Si les concentrations des ETM deviennent très élevées, la fertilité même du sol peut être
compromise en raison de la toxicité des éléments pour les plantes, la faune et la microfaune du
sol ;
• Les sols jouent, vis-à-vis des eaux d’infiltration et de ruissellement, un rôle de filtre épurateur qui
est le corollaire de leur capacité à fixer les ETM et à les accumuler. Malheureusement cette
capacité d'accumulation n'est ni immuable, ni illimitée. La libération des ETM et leur entraînement
par les eaux de ruissellement ou d’infiltration peut causer une dégradation des milieux aquatiques
et réduire la qualité des eaux, qui peuvent devenir impropres à la consommation sans traitements
préalables.
9
5 Sources de contamination diffuse par les ETM
Si les ETM sont présents naturellement à des teneurs généralement très faibles dans les sols (fond
pédogéochimique naturel), des quantités plus ou moins importantes viennent s'ajouter à celles-ci, suite aux
actions anthropiques. On distingue deux catégories principales de sources de contamination diffuse par les
ETM : les sources atmosphériques et les sources liées à l'utilisation agricole des sols. Dans ce qui suit,
nous n'allons envisager que les sources actuelles de contamination diffuse par les ETM. Il convient de
réaliser que les concentrations mesurées actuellement dans les sols wallons résultent de l'effet cumulé des
contaminations du passé. Les flux ont pu être très différents durant les deux siècles passés et probablement
beaucoup plus élevés qu’actuellement en raison des émissions d'origine industrielle (cokerie, métallurgie
des non ferreux, etc), de l'absence du filtrage des fumées, de l'utilisation de l'essence au plomb, de la
combustion domestique du charbon, etc.
D'un point de vue général, si l'on se base sur les études de flux réalisées dans des pays voisins (Pays-Bas
et Pologne, Dach & Starmans, 2005 ; Angleterre et Pays de Galles, Nicholson et al., 2003 ; France,
Académie des sciences, 1998), les retombées atmosphériques constituent vraisemblablement aussi en
Wallonie la principale source de contamination des sols par les ETM. Pour le mercure et le plomb, la
contamination des sols par cette voie constitueraient l’essentiel des apports (80 % ou plus, selon les
études). Pour le nickel, l'arsenic et le cadmium, les retombées atmosphériques constitueraient les
principaux apports (50 % ou plus, selon les études), bien que les pratiques culturales puissent également
être responsable d'une part importante des flux entrants de ces éléments dans les sols (voir tableaux ci-
dessous).
10
Tableau 1 : Contribution en pourcent des différentes sources aux flux entrants dans les sols agricoles aux Pays-bas
pour l'année 2003 (Zware metalen op landbouw grond. Centraal Bureau voor de Statistiek, Voorbrug :
http://www.cbs.nl)
Zn Cu Cd
Retombées atmosphériques 80 20 1
Effluents d'élevage 1250 425 3
Fertilisants minéraux 50 35 1
Autres sources 140 15 0
Total 1520 495 5
Tableau 2 : Contribution en pourcent des différentes sources aux flux entrants dans les sols agricoles de l'Angleterre
et du Pays de Galles pour l'année 2000 (Source : Nicholson et al., 2003)
Zn Cu Ni Pb Cd Cr As Hg
Retombées atmosphériques 49 39 60 78 53 25 56 85
Effluents d'élevage 37 40 18 6 11 11 26 2
Boues de STEP 8 17 9 14 4 24 5 8
Fertilisants phosphatés minéraux 4 2 7 0 25 32 12 1
Autres sources 2 3 6 2 8 8 1 4
Total 100 100 100 100 100 100 100 100
Tableau 3 : Estimation de la contribution de différentes sources aux flux entrants dans les sols en France (Source :
Académie des Sciences, 1998).
Éléments Zn Cu Cd Pb
Quantité totale 3 200 t /an 5 300 t /an 68 t /an 8 300 t /an
Déchets urbains 28 % 5% 7% 3%
Déchets agricoles 70 % 19 %
Engrais et phytosanitaires 76 % 89 %
Retombées atmosphériques 2% 4% 97 %
11
Tableau 4 : Exemples de teneur moyenne (en g/t MS) en ETM des fumiers, lisiers, engrais en France.
Cd Cr Cu Hg Ni Pb Se Zn
Boues de station d'épuration 2,5 50 330 2,3 40 90 10 800
Engrais phosphaté (Super 45) 48 230 35 * * 2,5 * 380
Engrais azoté (Ammonitrate) 0,5 7 0,5 * * 0,2 * 0,8
Engrais potassique (Chlorure de
Potassium) * 11 5 * * * * 11
Fumiers de bovins 0,7 11 28 * 21 10 * 150
Lisiers de porcs 0,3 18 300 * 14 12 * 700
* les colonnes vides correspondent le plus souvent à des valeurs nulles, parfois des valeurs manquantes
Sources : Les boues de stations municipales et leur utilisation en agriculture : Dossier technique, élaboré par le
Comité National des Boues (France), avec la collaboration de l'ADEME. Données : Synthèse des sources ADEME,
BNAME, UNIFA, ATV, ITCF, ACTA, MAP. URL :http://www.ademe.fr/partenaires/Boues/)
L'épandage agricole de boues de stations d'épuration constitue une source de contamination des
sols à prendre en compte. Les boues présentent des concentrations en ETM relativement élevées (cfr.
Tableau 5), bien qu'elles ne puissent pas dépasser les valeurs seuils imposées par la réglementation (cfr.
Tableau 6).
Si l'on considère la quantité annuelle de boues de station d'épuration utilisées par l'agriculture à
l'échelle régionale, l'épandage de boues devrait constituer un apport global d'ETM relativement faible dans
les sols wallons, mais dont l'importance relative par rapport aux différentes sources reste encore à
quantifier.
Tableau 5 : Teneurs moyennes des boues de station d'épuration utilisées en agriculture pour l'année 2004 (source :
données DGRNE/OWD/DPS)
Quantités
Teneurs moyennes en mg/kg matière sèche
produites
Secteurs
(tonnes de m.s.) N P Cd Cr Cu Hg Ni Pb Zn
Abattoir 656 61.230 42.861 0,2 37 83,6 0,1 13,8 6,65 301,3
Alimentaire 2.704 45.193 30.257 0,5 25,4 34,4 0,2 12,8 7,28 462,3
Boisson 181 41.171 24.918 0,9 109 124 0,3 36,4 25,3 392
Brasserie 3.362 39.590 20.338 0,1 30,2 51,7 0,1 13,3 9,83 106,3
Calcaire 1.664 604 3.219 0,3 11,1 6,55 0,1 5,71 6,89 32,5
Laiterie 1.038 48.097 35.523 0,4 13,8 18,3 0,2 10,3 12,7 110,8
Papeterie 35.734 4.499 6.087 0,7 10,3 34,4 0,1 9,87 13,6 56,42
Pomme de terre 1.494 49.090 43.764 1 26,6 46,2 0,1 13,1 8,63 200,2
Potabilisation 3.053 2.453 4.384 0,4 14,6 12,5 0,1 16,5 13,7 66,74
Tannerie 744 35.406 4.816 0,2 21,4 37,8 0 3,38 8,96 62
Total/moyenne 50.630 30.204 21.379 0,5 23,6 38,4 0,1 12,8 11 183,4
12
Tableau 6 : Teneurs maximales en métaux lourds dans les boues (source : arrêté du Gouvernement wallon du 12
janvier 1995)
Les principales bases de données qui permettent de dresser une cartographie des teneurs
habituelles en ETM dans les sols en Région wallonne sont les suivantes :
Signalons aussi l'existence de la base de données comprenant les résultats des analyses des berges
des cours d’eau, acquises entre 1981 et 1984 à des fins de prospection minière dans le cadre de
l’Inventaire des ressources métallifères de la Région wallonne (DGRNE-UCL, Prof. Martin). Celle-ci
compte plus de 10 000 échantillons de berges de cours d’eau, qui ont été analysés pour 20 éléments
chimiques (éléments traces et majeurs). Bien que cet inventaire puisse aider à détecter une éventuelle
contamination du bassin versant des cours d’eau pour lesquels les berges ont été analysées, la composition
chimique des berges ne reflète que partiellement celle des sols avoisinants. Cette base de données ne peut
donc pas être utilisée pour cartographier les teneurs habituelles en ETM dans les sols de la Région.
3
Décret wallon du 1er avril 2004 relatif à l’assainissement des sols pollués et aux sites d’activités économiques à
réhabiliter
13
6.1 L’étude POLLUSOL
L’étude POLLUSOL (réalisée par la SPAQUE-UCL-FUSAGx) a été finalisée en 2002. Elle visait
la connaissance des teneurs habituelles en ETM dans les sols de la Région wallonne. Cette étude était
basée sur une campagne d'échantillonnage concernant 161 sites sur sols de culture, prairie et forêt, répartis
dans 21 catégories de sol définies sur base de critères géologiques (matériau parental du sol) et
pédologiques (texture, profil et drainage). Des échantillons ont été prélevés à plusieurs profondeurs dans
chacun des profils4. Les sites ont été choisis en dehors de toute zone de contamination locale liée à des
sources connues. Cette étude répond à la nécessité pour l'administration de connaître les niveaux de
teneurs habituelles dans les sols afin de statuer sur l’intensité de la contaminations d'un sol donné.
Dans l’étude POLLUSOL, la méthode d'analyse des teneurs en ETM comprend une mise en
solution des constituants du sol par une attaque à l'eau régale (HNO3 + HCl). Cette méthode est la plus
communément utilisée au niveau européen. Il s'agit aussi de celle qui figure dans les différentes
dispositions administratives et règlements de la Région wallonne. Les teneurs renseignées dans la base de
données POLLUSOL correspondent aux "teneurs extractibles à l'eau régale". Elles ne peuvent donc pas
être qualifiées de "teneurs totales", car la méthode d'attaque utilisée ne permet en général pas une
dissolution complète de toutes les formes sous lesquelles se trouve l'élément mesuré. Ainsi, la partie du
chrome présent dans le sol dans le réseau cristallin du minéral chromite, n'est pas mise en solution par une
attaque à l'eau régale, ce qui amène à sous-estimer la teneur totale en chrome du sol.
L'étude a établi des cartes de teneurs habituelles dans l'horizon de surface à l'aide d'un modèle
géostatistique (BME) basé sur (1) une cartographie obtenue par krigeage des 161 points échantillonnés et
(2) une cartographie obtenue par un modèle prédictif basé sur des caractéristiques du sol (teneur en argile,
teneur en C organique, …). Ces cartes sont présentées dans la suite du texte. Dans le cadre de la
préparation par la SPAQuE du "Cahier de Bonnes Pratiques relatif à la définition des concentrations de
fond en polluants", un outil prédisant les teneurs habituelles en tout point de la Région a été réalisé sur
base de ces cartes.
4
Pour chaque site échantillonné, les analyses portent sur un échantillon composite de surface (prélevé avec une
sonde manuelle) et sur, en moyenne, deux échantillons plus profonds (prélevés dans la colonne extraite grâce à une
sondeuse à percussion) . Ainsi, il y a dans la grande majorité des cas 3 échantillons analysés par site. Le nombre total
d'échantillons analysés dans le cadre de cette étude est de 484.
14
Nombre
As Cd Co Cr Cu Hg Ni Pb Zn
d'échantillons
Moyenne générale 12,0 0,47 10,1 30,9 13,1 0,11 17,3 46,2 77,8 161
Horizon de
Suface
Moyenne sur culture 9,3 0,43 10,9 31,7 12,8 0,08 18,4 25,9 75,0 66
Moyenne sur prairie 12,7 0,62 11,7 36,6 14,6 0,08 22,8 35,1 108,7 42
Moyenne sur forêt 14,7 0,40 7,9 25,4 12,3 0,17 11,7 80,4 56,7 53
Moyenne générale 12,4 0,07 16,1 36,6 15,5 0,03 30,0 16,9 60,4 160
Horizon
Profond
Moyenne sur culture 10,2 0,05 16,1 33,5 13,0 0,02 27,5 13,9 57,7 66
Moyenne sur prairie 14,4 0,12 17,2 41,6 17,9 0,04 37,3 18,9 67,2 41
Moyenne sur forêt 13,6 0,05 15,1 36,5 16,7 0,04 27,4 19,0 58,4 53
Seuil de Quantification 0,070 0,070 0,070 0,070 0,070 0,033 0,070 0,070 0,070
Horizon de surface:
Valeurs < seuil de 1 4
quantification
Horizon profond :
Valeurs < seuil de 122 1 103
quantification
Tableau 7 : Moyennes des teneurs habituelles en ETM (mg/kg m.s.) en Région wallonne déterminées par l'étude
POLLUSOL (SPAQuE).
Note : La partie supérieure du tableau se trouve les moyennes dans l'horizon de surface (20 premier centimètres5)
pour 3 occupations du sol : sol de prairie, sol de culture et sol forestier. La seconde partie du tableau présente les
moyennes des teneurs pour l'horizon profond (80-120 cm de profondeur, lorsque cette profondeur est atteinte). La
partie inférieure du tableau donne les seuils de quantification (en mg/kg m.s.) et le nombre d'échantillons qui
présentent des teneurs inférieures à ce seuil pour chaque ETM. Les teneurs situées en dessous du seuil de
quantification ont été ramenés à la moitié de la valeur de celui-ci pour le calcul des moyennes. La dernière colonne
du tableau indique le nombre d'échantillons analysés.
L'As présente des teneurs habituelles qui ont une valeur moyenne de 12 mg/kg m.s., tant dans les
horizons de surface que dans les horizons profond. Au sein d'un même profil, les valeurs dans les horizons
de surface ont tendance à être très proches de celles des horizons profonds. L’As est le seul ETM qui
montre cette constance des teneurs entre l’horizon de surface et l’horizon profond. Il y a une influence de
la nature géologique du matériau parental (zone à teneur plus élevée dans le massif de Stavelot). L'étude
POLLUSOL ne permet pas de faire apparaître l'effet des retombées atmosphériques pour cet élément.
5
Horizon de surface : 20 premiers centimètres trouvés dans le premier horizon minéral sous-jacent à la litière, si
celle-ci existe ; il correspond à l’horizon A : "horizon organo-minéral". En pratique :
- sur sol forestier, cet horizon peut être très mince, et l'horizon de surface peut être élargi à l’horizon de transition AB
ou AE afin d'obtenir un échantillon représentatif de cet horizon.
- sur un sol labouré ou remanié, l'horizon de surface comprendra les 20 premiers centimètres de l'horizon minéral ou
organo-minéral sous-jacent à la litière, si elle existe.
15
16
14
As
12
10
8
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
Figure 3 : Moyenne des teneurs habituelles en As rencontrées en Région wallonne en fonction de l'occupation du sol (en mg/kg
m.s.). Les moyennes pour les horizons de surface sont représentées par des points noirs et les points blancs représentent les
moyennes pour les horizons profonds. Source : étude POLLUSOL (SPAQuE)
0.8
0.6
Cd
0.4
0.2
0
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
Figure 4 : Moyenne des teneurs habituelles en Cd rencontrées en Région wallonne en fonction de l'occupation du sol (en mg/kg
m.s.). Les moyennes pour les horizons de surface sont représentées par des points noirs et les points blancs représentent les
moyennes pour les horizons profonds. Source : étude POLLUSOL (SPAQuE)
16
6.1.3 Le cobalt (Co)
La moyenne des teneurs habituelles en Co rencontrées en Région wallonne est de 10 mg/kg m.s.
dans les horizons de surface et de 16 mg/kg m.s.dans les horizons profonds. Les zones où les teneurs dans
les sols sont plus élevées se disposent suivant des bandes allongées est-ouest parallèles à l'allure générale
des formations géologiques en Wallonie, ce qui traduit l'influence de la nature géologique du matériau
parental. Les apports anthropogènes peuvent être considérés comme assez faibles pour cet élément. Les
processus naturels de formation des sols jouent vraisemblablement un rôle prépondérant dans les
abondances et la distribution verticale du Co dans les sols. Ceci se traduit par des concentrations
systématiquement plus faible dans les horizons de surface que celles mesurées dans les horizons profonds.
20
15
Co
10
5
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
Figure 5 : Moyenne des teneurs habituelles en Co rencontrées en Région wallonne en fonction de l'occupation du sol (en mg/kg
m.s.). Les moyennes pour les horizons de surface sont représentées par des points noirs et les points blancs représentent les
moyennes pour les horizons profonds. Source : étude POLLUSOL (SPAQuE)
17
18
16
Cu
14
12
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
Figure 6 : Moyenne des teneurs habituelles en Cu rencontrées en Région wallonne en fonction de l'occupation du sol (en mg/kg
m.s.). Les moyennes pour les horizons de surface sont représentées par des points noirs et les points blancs représentent les
moyennes pour les horizons profonds. Source : étude POLLUSOL (SPAQuE)
La moyenne des teneurs habituelles en Cr rencontrées dans les sols en Région wallonne est de 31
mg/kg m.s. dans les horizons de surface et de 37 mg/kg m.s. dans les horizons profonds. Le Ni présente
des teneurs habituelles qui ont une valeur
moyenne de 17 mg/kg m.s. dans les horizons
de surface, et de 30 mg/kg m.s. dans les
horizons profonds. Les commentaires
concernant le Cr et le Ni ont été regroupés ici
car ces deux ETM ont des comportements
similaires. En effet, ces deux éléments ont des
teneurs en surface qui sont systématiquement
inférieures à celles en profondeur, ce qui
suggère que les processus naturels de
formation du sol jouent un rôle prépondérant
dans la distribution verticale. De plus, la
répartition géographique des teneurs montre
une appartenance forte au même type de
substrat géologique. Cependant, alors que le
Ni montre toujours des différences
importantes entre la surface et la profondeur, ce n'est pas le cas pour le Cr et ceci permet de penser que des
contaminations diffuses ne sont pas à écarter.
45
40
Cr
35
30
25
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
Figure 7 : Moyenne des teneurs habituelles en Cr rencontrées en Région wallonne en fonction de l'occupation du sol (en mg/kg
18
m.s.). Les moyennes pour les horizons de surface sont représentées par des points noirs et les points blancs représentent les
moyennes pour les horizons profonds. Source : étude POLLUSOL (SPAQuE)
40
30
Ni
20
10
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
Figure 8 : Moyenne des teneurs habituelles en Ni rencontrées en Région wallonne en fonction de l'occupation du sol (en mg/kg
m.s.). Les moyennes pour les horizons de surface sont représentées par des points noirs et les points blancs représentent les
moyennes pour les horizons profonds. Source : étude POLLUSOL (SPAQuE)
La moyenne des teneurs habituelles en Hg rencontrées en Région wallonne est de 0,1 mg/kg m.s.
dans les horizons de surface et de 0,02 mg/kg m.s. dans les horizons profonds. Le Pb présente des teneurs
habituelles qui ont une valeur moyenne de 46
mg/kg m.s. dans les horizons de surface, et de
16 mg/kg m.s. dans les horizons profonds.
19
0.2
Hg
0.1
50
les points blancs représentent les moyennes pour les
horizons profonds. Le dernier graphique illustre la forte
affinité du Pb et du Hg pour la matière organique en
0 montrant en parallèle les valeurs moyennes des teneurs
en C (en % m.s.) des sols analysés.
(Source : résultats de l'étude POLLUSOL (SPAQuE))
10
5
C
0
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
La moyenne des teneurs habituelles en Zn rencontrées en Région wallonne est de 78 mg/kg m.s.
dans les horizons de surface et de 60 mg/kg m.s. dans les horizons profonds. Le Zn est le seul élément
pour lequel les teneurs observées dans les
horizons de surface cultivés sont
significativement inférieures à celle trouvées en
prairie. Les plus fortes teneurs retrouvées sur
les horizons de surface de prairies pourrait
s'expliquer par l'utilisation du Zn comme
complément alimentaire pour le bétail, qui se
retrouve ensuite en concentration importante
dans le lisier. La répartition géographique des
teneurs en Zn dans les sols wallons montre une
forte ressemblance avec celle du Cd. Dans la
littérature, ces deux éléments sont généralement
associés lorsqu'il y a contamination des sols par
retombées atmosphériques autour de centre de
métallurgie des non ferreux. Cela semble être le
cas autour du bassin industriel de Liège et dans
le pays de Herve.
20
120
100
Zn 80
60
40
Culture Prairie Forêt
Occupation du sol
Figure 10 : Moyenne des teneurs habituelles en Zn rencontrées en Région wallonne en fonction de l'occupation du sol (en mg/kg
m.s.). Les moyennes pour les horizons de surface sont représentées par des points noirs et les points blancs représentent les
moyennes pour les horizons profonds. Source : étude POLLUSOL (SPAQuE)
La convention POLLUSOL (SPAQUE - UCL - FUSAGx) comporte un second volet portant sur
l'état de contamination des sols wallons par les micropolluants organiques. Une première partie de cette
étude visait à déterminer les teneurs habituelles. A la différence des ETM, les micropolluants organiques
n’existent pas dans le matériau parental du sol. Ils sont principalement6 apportés aux sols lors de
différentes activités humaines (agriculture, transports, industries....).
Pour établir les teneurs habituelles en micropolluants organiques en Région wallonne, cette étude
s'est basée sur l’analyse de 20 échantillons, répartis géographiquement sur les principaux types de sols en
tenant compte de trois types d'occupation du sol : culture, forêt et prairie. Cette étude prend en compte
sept familles de micropolluants organiques. Les résultats montrent que les teneurs en micropolluants
organiques se situent soit à des niveaux de concentrations très faibles (hydrocarbures aromatiques
polycycliques (HAP), huiles minérales), soit sous les limites actuelles de quantification de ces molécules
(polychlorobiphényls (PCB), pesticides organochlorés, cyanures, hydrocarbures mono aromatiques
(HAM) et solvants halogénés).
Dans une seconde partie, l’étude s’est attachée à déterminer l’état de contamination des sols sur
des sites où l'on soupçonnait l'existence d'une pollution (métallurgie, industries chimiques, cimenteries,
carrières, échangeur autoroutier et incinérateur d’ordures ménagères). Les familles de micropolluants
organiques mesurés étaient identiques à celles considérées dans la première partie de l’étude. Dans ses
conclusions, cette étude suggère que, parmi les sept familles de micropolluants organiques étudiés, seules
deux familles devraient faire l'objet d'un suivi en Région wallonne :
• Les HAP : des pollutions peuvent être suspectées près des zones industrielles (cokeries) et le long
des routes et autoroutes.
• Les huiles minérales : des pollutions des sols peuvent être suspectées près des zones industrielles.
6
Certains micropolluants organiques peuvent néanmoins avoir une origine naturelle, comme les HAP qui sont
formés lors des feux de forêts.
21
6.2 L’étude CAPASOL
La Convention CAPASOL (DGRNE-UCL) vise la cartographie des teneurs en ETM dans les sols
agricoles de la Région wallonne. La Région wallonne a collecté depuis une douzaine d’année plus de
6 000 résultats d'analyses d'éléments traces métalliques (Cd, Cr, Cu, Hg, Ni, Pb, Zn) dans les horizons
superficiels de sols agricoles dans le cadre de la réglementation pour l’épandage de boues de station
d’épuration comme fertilisant des sols agricoles. Ces analyses sont géoréférencées et les contours des
parcelles dont ces analyses sont représentatives ont été numérisées (Carte 2). La convention intitulée
"Cartographique de la capacité des sols de la Région wallonne à accepter l’épandage d’amendements
organiques conforme à la réglementation" (CAPASOL), établie entre la Région wallonne et l'UCL, a pour
objectif de valoriser la base de données ainsi constituée afin notamment d’obtenir une cartographie des
teneurs en ETM dans les sols agricoles essentielle pour estimer et gérer leur capacité à accepter sans
inconvénient l’épandage d’amendements organiques.
Les premiers travaux de valorisation de cette base de données sont en cours de finalisation. Par
rapport à la campagne d'échantillonnage et d'analyse réalisée dans le cadre de l’étude POLLUSOL, conçue
spécifiquement pour la problématique des ETM dans les sols, les données CAPASOL résultent de la
compilation de données rassemblées à des fins administratives. Bien que basée sur un très grand nombre
d'analyses, l’étude se heurte à des difficultés : par exemple, la répartition géographique des points
d'échantillonnages n’est pas uniforme ; les sols qui ne remplissent pas les normes réglementaires pour
l'épandage de boues ne font pas l’objet d’une demande et leurs analyses ne parviennent pas à
l’administration. Cette base de données ne donne donc pas de renseignements sur les sols agricoles qui
présenteraient des teneurs qui dépassent les normes réglementaires pour l’épandage agricole de boues de
station d’épuration. Néanmoins, la très grande quantité d'analyses disponible et le géoréférencement de
celles-ci font de cette base de données une source d'information particulièrement intéressante pour
progresser dans l’étude de la contamination des sols par les ETM en Région wallonne.
Carte 2 : Base de données « CAPASOL » (DGRNE, 2006-2007) : proportion des surfaces agricoles analysées par
commune
22
6.3 Le suivi pédologique de l’inventaire forestier
L'inventaire permanent des ressources ligneuses de Wallonie (DGRNE-FUSAGx) se base sur un
échantillonnage aux nœuds d’une grille (1 000m x 500m), chaque point des 11 000 points considérés étant
au centre d’une surface rectangulaire constante de 50 ha. Un dixième des points fait l’objet d’une
campagne de suivi annelle ce qui fait que chaque point est revisité tous les dix ans en moyenne. La base de
données actuelle comprend 246 échantillons de sol (Colinet, Bock et Toussaint, 2006). Comme pour
POLLUSOL et CAPASOL, les teneurs mesurées correspondent aux teneurs extractibles à l'eau régale
(HNO3 + HCl). Les échantillons sont prélevés sur une profondeur conventionnelle de 0 à 20 cm. Les
premiers résultats confirment ceux qui ont été obtenus dans l’étude POLLUSOL pour les sols forestiers :
les niveaux de teneurs et la répartition géographique des valeurs suivent les mêmes tendances.
6.3.1 Accumulation des ETM dans l’horizon de surface des sols forestiers
Les ETM, et en particulier le plomb et le mercure, ont tendance à s'accumuler dans les horizons
organiques de surface.. Ceci est plus particulièrement vrai pour les forêts dans lesquelles la végétation se
comporte comme un filtre pour l’air. Les poussières et les aérosols sont captés par les feuilles et les troncs
et sont entraînés vers le sol par la pluie. Certains ETM sont alors piégés par la matière organique
(complexation/chélation), de sorte qu'ils se concentrent à la base de l’horizon humifère. L’accumulation
des ETM dans l’humus peut provoquer, dans certaines conditions, un ralentissement de l’activité des
micro-organismes du sol et donc de la vitesse de décomposition de la matière organique. En conséquence,
la couche d’humus enrichie en ETM tendrait à devenir permanente et à s’épaissir.
Cet aspect des sols forestiers est encore largement méconnu en Wallonie. En effet, la méthode
classique d’échantillonnage qui a été utilisée jusqu’à présent pour les campagnes d’analyses consiste à
prélever les premiers 20 cm du sol minéral
ou organo-minéral situés immédiatement Lauzelle (Sol sableux podzolique)
sous la couche d’humus. Ce mode Teneur en Pb (mg/kg)
d’échantillonnage amène précisément à 0 50 100 150 200 250 300
rejeter la couche de sol dans laquelle 20
s’accumulent les ETM. Or du point de vue
des risques pour la santé humaine, cette
couche est particulièrement importante 0
23
comparable à la valeur de moyenne de 58,2 ppm déterminée dans le cadre de l’inventaire des ressources
ligneuses. L’accumulation du Pb (et probablement également du Cd et du Hg) dans l’horizon de surface
des sols forestiers en Région wallonne est un aspect de la contamination des sols qui est encore peu étudié
et largement méconnu, malgré l'enjeux environnemental que cela pourrait représenter.
Bien que la directive ne prévoie pas de façon directe des actions concernant la contamination
diffuse des sols par les ETM et les autres types de micropolluants, la Commission européenne entend
procéder en 2007, une fois la directive adoptée et traduite dans des arrêtés d’application par les différents
états, à la révision de directives déjà existantes et qui concernent la contamination diffuse des sols. Il s'agit
par exemple de la directive réglementant l'utilisation des boues d'épuration en agriculture (Directive n° 86-
278 du 12 juin 1986). Celle-ci fixe notamment des limites de concentrations de certaines substances dans
ces boues, des valeurs relatives aux concentrations en ETM dans les sols recevant des boues, et des
quantités maximales annuelles de ces ETM pouvant être introduites dans les sols à destination agricole.
Elle interdit aussi l'usage de ces boues dans certains cas et réglemente leur traitement
24
8 Enjeux et perspectives
Jusqu’à présent, les bases de données régionales sur les ETM dans les sols (POLLUSOL,
CAPASOL, "Inventaire des ressources ligneuses" ) ont souvent été constituées dans un objectif de gestion,
afin de rencontrer les obligations et les échéances fixées par la législation wallonne et les directives
européennes. Les données partielles actuellement disponibles permettent de conclure qu'en général, les
sols wallons ne présentent pas une contamination en ETM préoccupante. Elles ne donnent cependant
qu’une image incomplète des ETM dans les sols, essentiellement parce que le mode d'échantillonnage et
d'analyse a conduit à oblitérer plusieurs aspects importants :
1) La plupart des données actuellement disponibles ont été collectées en des endroits éloignés de toute
source de contamination locale des sols. Or des teneurs élevées dans les sols, donnant lieu à des
diagnostics de danger pour la santé publique et pour l'environnement, pourraient exister notamment
dans les zones de pollutions historiques autour des sources anciennes (pays de Herve, vallée de la
Meuse entre Huy et Liège, bassin industriel de Charleroi, etc). La présence et la fréquence de ces
situations de danger sur le territoire wallon n’est pas suffisamment connue et recensée. La convention
POLLUSOL a très sommairement abordé cet aspect. A titre exploratoire, plusieurs zones proches de
sources de pollution ont été échantillonnées non seulement pour les micropolluants organiques (voir
encart ci-dessus) mais également pour les ETM. Ces zones potentiellement contaminées ont montré
fréquemment des teneurs anormales en Cd, Cu, Hg, Pb et Zn.
2) L'étude de la contamination des sols par les ETM sur base d'échantillons prélevés sur une profondeur
de sol conventionnelle (par exemple : la tranche allant de 0 à 20 cm de profondeur) n'est pas
nécessairement adaptée à tous les types de sol.. Dans les sols forestiers par exemple, il conviendrait
d'étudier la teneur en ETM à la base de l’horizon humifère, qui est généralement écartée lors de
l'échantillonnage. En prairie permanente, où le sol n'est pas retourné, on trouvera aussi cette
accumulation à la base du tapis racinaire. Or du point de vue des risques pour la santé humaine et pour
l'environnement, cette accumulation superficielle est particulièrement importante puisqu'elle est la
source des expositions directes (contact et inhalation de poussières par l'homme, ingestion par le
bétail, le gibier, etc.).
3) Les données actuellement disponibles ne concernent que les "teneurs totales" dans le sol (teneurs
extractibles à l'eau régale) Or, ces teneurs ne sont pas révélatrices des véritables propriétés de mobilité
et de biodisponibilité des éléments traces dans les sols. Les risques environnementaux que présentent
les ETM dans le sols dépendent des formes sous lesquelles se trouvent les ETM : un sol peut présenter
une teneur totale élevée pour un élément essentiellement présent dans une forme très stable (inclus
dans le réseau cristallin de minéraux, par ex.) ; le risque de mobilité et de biodisponibilité de cet
élément peut alors être très faible, à l'inverse d'un autre sol présentant une teneur faible en cet élément
mais sous une forme hautement biodisponible et mobile ! Pour des questions de savoir faire analytique
et de facilité d'interprétation, la réglementation en Région wallonne ne tient compte que de ces teneurs
totales. Il importe donc de mieux connaître les différentes formes dans lequel se trouve les ETM dans
les différents sols wallons et d'étudier les risques environnementaux associés afin d'adapter nos
réglementations en conséquence.
Bien que chaque ETM présente un comportement spécifique dans les sols en termes de mobilité et
de biodisponibilité, les pertes par lessivage/lixiviation et les exportations d’ETM par les récoltes sont
toujours inférieures à la quantité apportée par les retombées atmosphériques et certaines pratiques
agricoles. La plupart des sols présentent donc un potentiel d'accumulation important, quel que soit l'ETM
considéré. Ceci pourrait avoir des conséquences à long terme sur la qualité des sols, incluant les
problèmes de phytotoxicité pour la plante à des concentrations élevées, sur l'activité et la survie de la
25
microfaune du sol dont une des fonctions est de dégrader les micropolluants organiques, et sur la qualité
des aliments via l'augmentation du transfert vers les plantes cultivées et le bétail. C'est pourquoi réduire
les flux entrants d'ETM doit être une priorité stratégique pour la protection des sols. Un inventaire
quantitatif des flux est nécessaire pour déterminer l'échelle et l'importance relative des différentes sources
d'ETM, en ce compris les retombées atmosphériques et certaines pratiques agricoles. Cet inventaire est
essentiel pour estimer le taux d'accumulation des ETM dans l'environnement et définir des politique
ciblées afin de préserver la qualité des sols pour les générations futures.
Les connaissances scientifiques sur les ETM sont en constante évolution. Ceci est encore plus vrai
à propos des micropolluants organiques, pour lesquels on assiste à l’arrivée de nouvelles familles de
polluants dont l'impact sur l'environnement était encore insoupçonnée il y a une dizaine d’années. Face
aux nombreux défis que représente la protection de ses sols, il serait souhaitable que la Région wallonne
s'oriente vers la création d’un groupe scientifique qui rassemblerait les administrations, les pararégionaux
et les différents partenaires des milieux universitaires autour de ces problématiques ; ce groupe
présenterait annuellement un ensemble de propositions d’actions scientifiques qui rencontrent les
préoccupations et les tâches de l’administration. Pourraient être concernés l’ensemble des sols, non
seulement les sols agricoles, mais également les sols sous forêt, les sols de SAED (sites d’activité
économique désaffectés), les sols urbains ainsi que les berges et sédiments des cours d’eau. La discussion
scientifique entre partenaires, le partage des tâches au point de vue des moyens en personnel, la mise en
commun des compétences et des équipements sont à notre avis la seule façon de garantir une approche
optimale des différentes problématiques concernant la protection des sols et dont l’intérêt pour la
Région soit garanti par un consensus scientifique.
26
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27