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Résumé
Introduction : Les directives anticipées semblent intéressantes en EHPAD car elles permettent
un meilleur respect des volontés de fin de vie et une diminution des hospitalisations en fin de
Méthode : Nous avons réalisé une étude qualitative en interrogeant les soignants d’un EHPAD
sur leurs pratiques concernant les volontés de fin de vie, leurs représentations des directives
Résultats : Les directives anticipées étaient perçues comme utiles, mais présentaient des
difficultés de compréhension et de mise à l'écrit pour les personnes âgées. De même elles
comportaient pour les soignants des difficultés liées au manque de temps et au manque de
formation sur la manière de parler de la mort (et des soins palliatifs). Les discussions en
la prise en compte des volontés de fin de vie. Que ce soit parmi les soignants, les résidents ou
les familles, certaines personnes étaient à l’aise pour parler de la fin de vie tandis que d’autres
étaient très mal à l’aise et ne souhaitent pas aborder ce sujet tabou. Ils proposent concrètement
qu’il y ait des référents formés spécialement pour présenter les directives anticipées aux
Mots clés : Directives Anticipées – EHPAD – Personnes âgées – volontés de fin de vie –
Information
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Summary
residents.
Introduction: Advance directives seem interesting in nursing homes : they improve the respect
of patients’ end-of-life wishes, and reduce hospitalizations. Nevertheless, there are many
Method : We realized a qualitative study in a nursing home : we asked staff members about
their practices regarding patients’ end-of-life wishes, about their representations of advance
directives and about their suggestions on how to use them in nursing homes.
Results: Advance directives are perceived as useful. However they present various
difficulties, related to comprehension and writing for elderly people, and, concerning staff
members, related to the lack of time and training on how to speak about death (and palliative
care). Team discussions and a palliative care nurse intervention also improve the respect of
patients’ end-of-life wishes. There are among staff, residents or families, some people who
feel comfortable to talk about the end of life whereas others experience difficulties and don’t
want to broach this taboo topic. They concretely suggested that a trained “facilitator”
introduce advance directives to residents, even if each staff member should be able to broach
the subject.
Key words : Advance directives - Nursing home - Elderly - End-of-life wishes - Information
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Introduction
Les directives anticipées ont vu le jour dans le droit français en 2005, par la loi relative aux
droits des malades et à la fin de vie, aussi appelée loi Leonetti (1). C’est un texte que tout
citoyen a le droit d’écrire afin d’exprimer ce qu’il souhaite, ou ne souhaite pas, pour sa fin de
Est-il vraiment réaliste d’anticiper la fin de sa vie ? Plusieurs auteurs rapportent « qu’il est
rare que ce qui a été exprimé par un patient s’applique à la situation précise à laquelle il se
trouve confronté. » (2,3). Et quand bien même la situation envisagée arrive, il reste la
possibilité d’un changement d’avis. Des directives rédigées par quelqu'un de relativement
bien portant peuvent changer quand son état de santé se dégrade (2).
Pour que le patient comprenne au mieux les enjeux de sa maladie et les traitements
envisageables, et que médecin entende le souhait réel de son patient, une discussion entre les
partagé par la majorité des auteurs, et en particulier les équipes de soins palliatifs et
autour des directives anticipées sont autant, voir plus importants que la rédaction même (7).
Mais cette conversation n’est pas toujours simple et naturelle. Plusieurs études montrent en
effet que les patients attendent que les médecins évoquent le sujet (8–11) alors que les
médecins, eux, ont des difficultés avec la discussion sur traitement en fin de vie (8). Ils ont
peur de heurter le patient, ont du mal à aborder le sujet (11) et certains préfèrent même éviter
ces sujets (12). On constate bien ici un point de blocage dans la communication entre le
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20% des personnes âgées souhaitent rédiger des directives anticipées (6,13,14), mais un plus
grand nombre accueille volontiers une information sur leurs droits en fin de vie.
systématiquement les patients en EHPAD de leurs droits en fin de vie ? Si oui comment
Nous avons choisi d’interroger les soignants ; d’abord pour connaître les pratiques déjà en
place à l’EHPAD pour respecter les volontés de fin de vie des résidents ; puis savoir si, de
leurs points de vue, les directives anticipées peuvent être utiles dans leur établissement malgré
leurs nombreuses limites ; et enfin savoir qui serait le mieux placé pour aborder ce sujet,
quand et comment.
Méthode
Nous avons utilisé une méthode qualitative pour répondre à cette question. Nous nous
avons interrogé les soignants, c’est-à-dire les médecins, infirmiers, aides soignantes, agents de
service hospitalier (ASH), cadres et psychologue. Pour cela, nous avons mené des entretiens
semi-dirigés, individuels ou en groupe. Tous les entretiens ont été menés par un interne en
médecine générale dans le cadre de son travail de thèse et ont été enregistrés avec l’accord des
participants. Les participants étaient encouragés à s’exprimer librement sur la prise en charge
des résidents en fin de vie et le respect des volontés de fin de vie, et des questions de relances
étaient prévues quand la conversation s’arrêtait. Les entretiens ont été entièrement retranscrits,
puis analysés par une analyse thématique par deux personnes différentes afin d’avoir une
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Résultats
Population interrogée
Six focus groupes et deux entretiens individuels ont été réalisés, avec au total 30 personnes
interrogées. Les focus groupes ont été réalisés après les transmissions entre les équipes du
l’EHPAD et un médecin remplaçant ont été interrogés en entretien individuel pour des raisons
Les soignants se sont exprimés sur la prise en charge des résidents en fin de vie. On a noté
une grande hétérogénéité entre certains qui étaient très intéressés par les soins palliatifs et
formés, et d’autres qui étaient mal à l’aise et avaient peu de notion sur les prises en charge en
fin de vie. « Nous c’est vrai que les gens ils sont vivants, donc on est toujours en train de les
faire participer, enfin voilà on les fait bouger quand même pas mal et dès qu’ils ne vont pas
Deux personnes ont avoué être incapable d’aborder la mort, ou faire des soins en fin de vie,
comme « bloqués » par la notion même de mort qui les mettait extrêmement mal à l’aise.
Tous les groupes ont apporté que des résidents parlaient spontanément de la mort.
« On en a qui nous disent clairement au moment de la toilette, ou des fois en salle à manger :
si un jour, on devient comme ça … Enfin je préfère mourir que de rester comme ça. ».
Certains résidents demandaient à mourir, mais plutôt comme l’expression d’un « ras le bol »,
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d’une colère vis à vis des soins, ou l’impression de ne plus servir à rien. Il était alors difficile
exprimer leur volonté d’en finir sans mots, en refusant systématiquement la nourriture, les
Les soignants demandaient rarement leurs volontés de fin de vie aux résidents qui n’en
parlaient pas spontanément. Parfois, la question était posée au décours d’un épisode aïgu, et
plutôt par le médecin. Une infirmière essayait d’informer les patients de leur droit à refuser
les soins avant un examen, leur permettant ainsi d’exprimer leur volonté.
au résident d’en désigner une. Mais il y a eu des confusions : c’était parfois les familles qui
Une autre pratique en cours à l’EHPAD a été évoqué par tous les soignants : la demande des
protocole a été mis en place pour demander à l’avance l’opérateur funéraire des résidents ; un
document écrit est à remettre au résident pour l’informer de ce fait, demander son opérateur
Plusieurs soignants ont raconté être en difficulté pour aborder ce sujet. Certains préféraient
l’aborder dès l’entrée afin que ça reste un document administratif parmi d’autres, et pour
éviter de poser ces questions au moment de la maladie et de la fin de vie. Mais d’autres
soignants étaient vraiment mal à l’aise pour aborder ce sujet à l’entrée. Ils en parlaient à la
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famille plutôt que au résident, ou évitaient carrément le sujet. « Alors nous c’est vrai que des
fois on essaye, on leur glisse à la fin, on dit « Bah voilà il y a un petit papier, vous prendrez
votre temps et vous nous le redonnerez en temps voulu », c’est vrai que du coup on en parle
pas, on esquive la chose. » Parfois les soignants essayaient de poser ces questions plus tard,
au cours d’une conversation, mais avaient des difficultés à trouver le bon moment et les bons
mots. « Heu, il n’y a pas de bonne chose, je ne suis pas sûre qu’il y ait un bon moment pour
D’une façon générale, les équipes rencontrées souhaitaient respecter la volonté des résidents
mais ce n’était pas toujours possible sur le plan matériel ou en cas de désaccord de la famille.
« Parce que en fait quand tu réfléchis bien à chaque fin de vie que tu as, la plupart du temps
c’est les souhaits de la famille, hein, qu’on respecte. » Les situations de fin de vie pouvaient
être très complexes, avec de nombreux de avis différents et notamment des difficultés avec les
familles, ou au contraire une absence de décision. Dans ses cas, une discussion
Tous les groupes de soignants m’ont parlé de l’infirmière formée aux soins palliatifs depuis
peu, et travaillant sur une seule des deux unités de l’EHPAD. Les soignants percevaient son
travail comme une aide et un progrès dans la prise en charge des fins de vies. « Bah disons
qu’avant tout le monde avait des idées mais il n’y avait rien de concret. Que là maintenant
voilà, on suggère, et puis du coup (…) c’est elle qui s’occupe de prévenir le médecin, de
prévenir la famille, … Elle met en place les réunions (…) (Avant) chacun faisait un petit peu
de son côté, alors que là on est en équipe, et quand on est en équipe, on a déjà plus ce poids
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qu’on porte tout seul sur les épaules, vraiment là c’est toute l’équipe, on veille vraiment …
tout le monde à la parole. ». Ce n’était pas la même chose dans l’autre unité, elle
Les soignants ont aussi souligné l’importance du travail en équipe pour prendre en charge les
fins de vie : ils y voyaient la possibilité de s’entraider, de parler ensemble des sujets délicats.
Ils appréciaient l’aspect pluridisciplinaire avec l’apport des compétences de chacun. Dans
plusieurs groupes, la communication avec les médecins était décrite comme difficile. Des
difficultés qui pouvaient être liées à une relation de type paternaliste, au manque de
Tous les groupes ont estimé que les directives anticipées pouvaient être utiles. Presque tous
ont évoqué une utilité pour aider les soignants à prendre une décision en fin de vie. Surtout
résident.
Ils ont également suggéré que les directives anticipées pouvaient être utiles pour
déculpabiliser les familles. En effet, tous les soignants interrogés avaient déjà rencontré des
difficultés avec des familles de personnes en fin de vie. Ces difficultés pouvaient survenir au
moment de prendre des décisions : classiquement, c’est quand un résident refusait des
explorations ou des traitements, la famille insistait pour qu’il les ait. Parfois, plusieurs
membres d’une même famille n’étaient pas d’accord sur les soins à prodiguer à leur proche,
ce qui donnait lieu à des conflits qui pouvaient être très violents.
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Les soignants avaient conscience qu’il était difficile pour les familles d’avoir un proche en fin
de vie. S’ils n’avaient pas envie de le voir souffrir, ils n’avaient pas non plus envie de le voir
partir. C’était difficile quand on leur demandait de prendre une décision. En se concentrant
sur la volonté des résidents, les directives anticipées pourraient aider à déculpabiliser les
familles dans les décisions de fin de vie, voire même éviter les conflits dans la famille.
Les soignants ont également confié que la fin de vie, la mort, est un sujet tabou, difficile à
aborder. Quelques uns pensaient qu’une information sur les directives anticipées pourrait être
l’occasion d’amorcer un dialogue sur la fin de vie. C’est d’ailleurs ainsi que faisait un des
médecins interrogés, utilisant la discussion sur les directives anticipées comme un moyen de
Enfin, un groupe a évoqué la notion de protection juridique que les directives anticipées
confèrent au médecin. Un week-end, un patient en fin de vie, en phase agonique, a été envoyé
aux urgences par le médecin de garde qui ne souhaitait pas « être attaqué par la famille ». Les
soignants ont pensé que si le patient en question avait rédigé des directives anticipées, ça
aurait peut-être rassuré le médecin et permis au patient de finir ses jours à l’EHPAD.
Plusieurs soignants ont soulignés le temps que prend cette démarche. Or les soignants avaient
déjà l’impression de ne pas avoir assez de temps pour s’occuper correctement des résidents, et
ce d’autant que la charge de travail a augmenté ses dernières années avec des résidents
institutionnalisés de plus en plus tard, donc des pathologies plus lourdes et une autonomie
moindre.
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La question de la capacité cognitive des résidents s’est posée. Si pour certains soignants
l’information sur les directives anticipées ne concernait que les patients sans troubles
cognitifs, d’autres décrivaient bien des patients ayant des altérations cognitives mais toujours
capables de décrire leurs ressentis et dire ce qu’ils veulent. « Ce qui est difficile c’est quand
(…) cette barrière entre « elle a été capable » et « elle n’est plus capable » n’est pas
complètement franchie. »
Les soignants ont également évoqué la possibilité que les patients changent d’avis. Par
exemple une directive écrite par une personne en pleine santé pourrait changer si son état de
santé se dégrade. C’est un élément de complexité qui questionnait parfois les équipes : « On
la remet en question (la directive anticipée). Alors à quoi ça sert de les demander ! » Les
soignants se sont également demandés comment bien cerner le souhait du patient. Ils
craignaient que sa volonté de ne plus se battre pour vivre soit temporaire, ou lié à des
La conversation qui doit précéder la rédaction des directives anticipées a été considérée
comme une difficulté par certains. Encore une fois on a observé une hétérogénéité parmi les
expliquer, ou que la mort était un sujet tabou, difficile à aborder. Beaucoup n’était pas à
l’aise, certains ne souhaitent pas en parler. Pourtant ils s’accordaient à dire que les résidents
étaient lucides et parlaient facilement de la mort, plus facilement en tout cas que leurs
familles. Certains soignants par contre se sentaient à l’aise, la mort étant quelque chose de
naturel, ils en parlaient facilement, et régulièrement. « Je pense que c’est la manière dont on
aborde le sujet qui fait la réponse. Ça c’est sûr et certain, on le voit avec les soignants. Si
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nous on n’est pas à l’aise avec ça, sûr ça va mal se passer. Si nous on est à l’aise avec, ça
Enfin, les soignants ont évoqué que la mise à l’écrit pouvait-être compliqué avec les
personnes âgées. « Y a les directives anticipées, orales, mais pas écrites. On en est dans
l’oral … ». Les personnes âgées étant fragiles et influençables, l’écrit ne semblait pas être
une forme appropriée pour recueillir leurs volontés. Leur présenter un document à signer
écrit. « Mais après quand on dit pas d’acharnement, où s’arrêter ? » Pour pallier à ces
difficultés, un des médecins avait l’habitude de retranscrire dans le dossier les conclusions de
Avant tout, les soignants ont estimé qu’une formation leur était nécessaire pour aborder les
directives anticipées. Une formation portant sur les soins palliatifs, sur le relationnel et sur
comment parler de la mort. Certains groupes ont réfléchit à la formation qui serait la plus
adaptée, et ils ont conclu l’analyse de cas concrets en groupe pourrait être la formule la plus
intéressante.
Plusieurs propositions ont été faites. Certains ont estimé que les résidents devaient pouvoir
aborder le sujet avec n’importe qui, avec le soignant avec lequel ils se sentent à l’aise. Mais
d’autres ont souligné que certains soignants ne pourraient pas aborder le sujet, car ils étaient
trop mal à l’aise pour parler de la mort. Ils ont donc proposé de former des volontaires dans
chaque service qui pourraient proposer les directives anticipées aux résidents.
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La psychologue a été désignée comme une personne de choix pour aborder ce sujet, et le
médecin ayant un rôle important pour expliquer l’évolution de la pathologie et les possibilités
thérapeutiques.
Quand ?
Sur la question du meilleur moment pour aborder le sujet, les avis divergeaient. Certains
préféraient en parler dès l’entrée pour que ça reste administratif, mais d’autre estimaient
qu’une discussion sur la mort n’était pas la bienvenue au moment d’accueillir quelqu'un dans
son nouveau lieu de vie. Plusieurs propositions ont été faites : le sujet pourrait être aborder
lorsqu’une maladie incurable se déclare, lors d’un épisode aigu, quand on aborde la personne
de confiance ou quand le résident en parle spontanément. « Je ne suis pas sûre qu’il y ait un
Comment ?
Enfin, nous avons demandé aux soignants comment aborder ce sujet. La grande majorité des
soignants a imaginé une discussion avec les résidents. Une personne, mal à l’aise avec la
Plusieurs soignants ont estimés qu’il était délicat, voir agressif de faire remplir un document
écrit aux résidents. Ils ont proposé que le médecin retranscrive dans le dossier médical les
volontés de fin de vie énoncées par le patient. Une soignante s’imaginait au contraire faire
rédiger ses directives directement au résident : « Je lui donnerais une feuille, et lui dire ben
voilà, vous pouvez, vous savez, vous avez des droits, vous pouvez marquer … Voilà »
Un des médecins interrogés nous a mis en garde sur l’inefficacité d’un formulaire à cocher.
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Enfin deux groupes ont suggéré qu’il n’y a pas de règle absolue, et qu’il faut s’adapter à
chacun. « On n’aura jamais de protocole, quelque part, on est toujours dans la situation
singulière. »
DISCUSSION
A) Méthodologie
Nous avons fait le choix de concentrer le travail sur un établissement unique. Cela implique
que les résultats ne seront pas forcement représentatifs de ce qui se passe dans les autres
EHPAD. Le mode de recrutement a aussi pu induire un biais : les soignants étant libres de
s’inscrire aux focus groups, on peut imaginer que ceux qui sont venus sont plus sensibilisés à
cette thématique que les autres. Ce biais a été limité par l’insistance des cadres qui a motivé
B) Des discussions en équipe et un référent en soins palliatif pour respecter les volontés de fin
de vie.
grâce à la formation d’une infirmière aux soins palliatifs. Ce point nous semble
particulièrement important à souligner. Pour que les soignants soient à même de respecter les
volontés de fin de vie des résidents, encore faut-il qu’ils puissent les entendre, qu’ils soient
familiers avec la notion de limitation thérapeutique. Les auteurs d’une étude multicentrique
américaine sur les directives anticipées en EHPAD affirment qu’une bonne communication
dans l’équipe permettrait un meilleur respect des volontés des résidents (16). C’est également
Pour améliorer la prise en charge des patients en fin de vie et la qualité de travail des
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soignants en EHPAD, il semble incontournable d’instaurer des discussions pluridisciplinaires
régulières autour des patients en fin de vie, idéalement en présence d’un référent formé aux
soins palliatifs.
En demandant aux soignants l’utilité des directives anticipées, nous avons retrouvé des
éléments présents dans la littérature et discutés dans l’introduction. On retrouve également les
limites identifiées dans l’article un article australien ayant travaillé sur les directives
confiance pour en discuter avec les patients ; l'engagement de l'organisation pour soutenir leur
mise en place ; et s'assurer que les médecins comprennent et soutiennent les directives
anticipées » (18).
Des difficultés avec des médecins peu formés aux soins palliatifs sont en effet signalés par les
soignants, au point qu’ils concluent que les directives anticipés pourraient « rassurer » le
Quand on demande aux professionnels travaillant à Saint Aignan quel serait le meilleur
moment pour aborder les directives anticipées, les avis divergent. Dans la littérature par
contre, les recommandations vont dans le même sens, conseillant d’aborder le sujet « si
Une fois abordé une première fois, il faudra probablement y revenir plusieurs fois. C’est ce
que recommande la Société Française d’Anesthésie Réanimation (SFAR) (10) et les patients
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interrogées dans l’étude anglaise de Barnes (9). C’est ainsi qu’ont procédé les référents
E) Comment aborder les directives anticipées : une discussion sur la fin de vie
- Personnaliser le dialogue sur la fin de vie en fonction des besoins exprimés par le patient
Les besoins et les attentes en matière de fin de vie varient d’un patient à l’autre. C’est ce que
constate une revue de littérature sur la communication en fin de vie. Le dialogue sur autour de
la fin de vie « doit être personnalisé, en tenant compte expressément des besoins exprimés
par les patients eux- mêmes, qui se caractérisent par une grande diversité suivant l’âge, le
sexe ou la pathologie, ce qui pose bien évidemment des problèmes spécifiques et éthiques en
cas de vulnérabilités telles que les altérations cognitives » (11). C’est ce que confirment les
Cependant, le fait que certains ne veuillent pas en parler ne doit pas inquiéter le soignant qui
voudrait délivrer une information. L’information sur les directives anticipées est moins
anxiogène que l’on ne l’imagine (22) et dans la récente revue de littérature sur les directives
anticipées : « Les patients ou familles qui ont participé aux ACP n’ont pas présenté plus de
stress, anxiété ou dépression que les patients qui n’y avaient pas participé. » (23).
Nous l’avons vu dans l’introduction, c’est plutôt aux soignants d’initier la conversation (8–
11). Un résultat intéressant de notre étude est l’hétérogénéité des soignants à cet égard :
certains n’ont pas de problème pour aborder ce sujet, qui même les intéresse, alors que pour
phénomène, on réalise que la solution de simplicité qui consisterait à demander aux soignants
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administratif à remplir, n’est pas la bonne. Certains soignants ne pourront pas aborder le sujet,
Les soignants nous proposent autre chose. Que les personnes intéressées par le sujet puissent
se former. Qu’ils puissent se détacher pour aborder le sujet à un moment qui paraisse
opportun à l’équipe et au résident. Cette idée, spontanément proposée par les soignants, est
celle utilisée dans plusieurs études interventionnelles qui ont montré de bons résultats. Dans
une étude anglaise, plusieurs référents (ACP Facilitators) sont formés par maison de retraite,
diminuer le nombre de mort à l’hôpital de 25% (24). Dans l’article de K. Detering obtenant de
très bons taux de remplissage des directives anticipées, de respect des volontés de fin de vie et
de satisfaction des familles, c’est également un référent formé qui abordait les directives
anticipées avec les patients, leurs familles, les médecins et le reste de l’équipe (18). D’autres
études formant des référents ont obtenu des résultats significatifs (20).
Les soignants interrogés éprouvaient le besoin d’être formés pour aborder les directives
anticipées. C’est une nécessité retrouvée dans la littérature (9,11). Pour permettre ce dialogue
sur ce sujet délicat, il est besoin de compétences relationnelles et de communication, qui sont
très peu présentes dans la formation médicale et devraient faire l’objet d’un apprentissage,
Une formation, oui, mais laquelle ? A l’étranger, des programmes spécifiques existent pour la
Framework in Care Homes » (GSFCH) en Angleterre. Ces formations aident les professions à
16
s’approprier les techniques de communications à l’aide de jeux de rôle et d’enregistrements
(26,27). Une telle formation, spécifique sur les directives anticipées, n’existe pas en France à
F) Comment aborder les directives anticipées : une documentation des dires du patient
Un médecin interrogé dans notre étude nous mettait en garde contre les « formulaires à
cocher ». Ses réticences sont confirmées par la littérature, des études américaines montrent
depuis plus de quinze ans que ce type de formulaire a une faible pertinence contextuelle, et est
souvent peu efficace pour guider la décision médicale (10,28). Aux Etats-Unis où les
portant sur les traitements et un autre sur les valeurs du patient. Le volet portant sur les
valeurs du patient permet au patient de se présenter comme une personne dans son entièreté et
sa singularité (10). Il argumente ses choix au regard de son vécu, ses croyances et convictions.
C’est une des étapes essentielles pour formaliser des directives anticipées d’après une étude
quantitative menée auprès de patients et de familles (29). Une autre orientation nous semble
intéressante : plutôt que demander au patient le détail des traitements qu’il veut ou ne veut
pas, on s’intéresse à objectif souhaité : des traitements qui maintiennent en vie ou des
traitements qui favorisent le confort (10,18). Ses notions sont maintenant intégrées dans le
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Conclusion
A l’EHPAD de St Aignan, la fin de vie est un moment délicat auquel tous les soignants
accordent de l’importance. Notre étude n’apporte pas de grande nouveauté sur l’utilité des
directives anticipées : on y retrouve les avantages et les limites présents dans la littérature.
Par contre elle nous éclaire sur le contexte plus global dans lequel elles doivent d’inscrire : un
bon développement des soins palliatifs, avec des limitations thérapeutiques, des réunions
nécessaires pour avoir une équipe formée et à l’écoute des volontés des patients.
Ainsi certaines questions trouvent des réponses, ou des pistes à explorer. D’autres difficultés
persistent : mettre en place une formation française pertinente ; trouver le bon moment, qui
doit être « précoce », certes, mais néanmoins à trouver ; trouver le temps, et donc aussi
éventuellement les financements pour ces formations et temps dédiés ; s’adapter aux
difficultés cognitives des résidents ; et enfin réussir à élaborer une conversation suffisamment
Car il semble que ce soit là le véritable enjeux des directives anticipées : ouvrir un espace de
parole autour de ce sujet tabou qu’est la mort, pour que ensemble, résidents, professionnels et
Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation
18
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