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Les quatre discours

 
 
Freud dans Malaise dans la civilisation, nous montre que  
les institutions des sociétés, la manière dont les hommes se
gouvernent, établissent des lois, dirigent leurs échanges – au  
premier rang desquels, comme le montrent les
anthropologues, figurent ceux qui déterminent l'alliance et  
la filiation – ne peuvent aboutir à un résultat pleinement
satisfaisant, malgré les sacrifices pulsionnels exigés. Même  
la sécurité, la permanence de la vie, n'est garantie que dans
des limites étroites et au prix d'efforts constants. Les  
satisfactions libidinales autorisées sont toujours marquées
d'inaccomplissement.  

La logique du signifiant, mise en évidence par Lacan, (1) J. Lacan :


permet de concevoir que ce Malaise n'est pas la l'agressivité en
psychanalyse
conséquence d'une sorte d'imperfection, d'immaturité des
in Écrits. Le Seuil,
hommes, qu'un surcroît de civilisation, d'éducation, de 1966
police, pourrait réduire. Au contraire, cette souffrance de
l'homme est liée à ce qui le cause comme sujet.  

La pacification symbolique dont parle Lacan (1) vient  


tempérer ce que le symbolique crée lui-même. Instituant le
manque et la séparation, l'ordre symbolique permet aussi de  
les contenir dans un sens qui, cependant, ne tient que par le
jeu d'un certain nombre de conditions et de règles que toute  
société doit promouvoir (avec ses manières singulières)
pour que le sujet advienne. Cette opération n'est toutefois  
jamais parfaite : premièrement parce que dans la mesure où
le mot n'étant pas la chose, toute représentation demeure (2) Contrairement
arbitraire et inadéquate (par exemple ce que j'ai n'est jamais aux suppositions
ce que j'ai désiré) ; deuxièmement, parce que la pulsion des théoriciens de
excède le symbolique par ce qu'elle a trait au Réel. Les l'anti-oedipe qui ne
saisissaient pas la
objets et les buts que la civilisation lui désigne pour se fonction
réaliser sont toujours des substituts et de plus on peut dire structurante de
que la poussée pulsionnelle est inconditionnelle, ne dépend l'œdipe, mais
pas de son objet. Elle se différencie ainsi radicalement de prônaient  la
l'instinct qui, lui, vise un objet déterminé. possibilité
d'existence d'une
institution qui ne
Ainsi, la vie sociale ne peut être qu'organisée autour du serait pas
manque et des substituts proposés. Les institutions les plus répressive. 
perfectionnées de la culture sont donc, elles-mêmes,
frappées d'incomplétude, voire de "semblant". Peut-on (3) J.
cependant concevoir l'existence sociale sans institutions ? Lacan, Télévision,
p.25, Le Seuil,
1974
Le "malaise dans la civilisation" s'origine ici. On ne peut se
passer des institutions et de leurs contraintes (2), dont le
paradigme est oedipienne. Ce qu'elles voilent de vérité fait
cependant retour comme manque à savoir. La théorie
psychanalytique – au titre de ce qu'elle sait de la condition
du sujet parlant – peut-elle s'intéresser au lien social dans
lequel tout sujet se trouve pris ? Il nous semble que la
réponse est positive.

Quelle clinique peut s'en fonder ? Ce n'est pas sans risque, y


compris celui de réduire la psychanalyse à une sorte de
sociologie plus ou moins mâtinée de psychologie.
 
"Il est certain que se coltiner la misère du monde (...) c'est
entrer dans le discours qui la conditionne, ne serait-ce
qu'au titre d'y protester." (3)

Cependant, la psychanalyse doit énoncer ce que son travail


lui permet de connaître. Il ne s'agit pas pour elle de
prétendre "réparer" le monde mais de tenter de cerner, avec
des concepts fondés en raison à partir de l'expérience
clinique, ce qui peut être dit qui aurait trait – autant que
faire se peut – avec ce que le langage impose à l'Homme
comme condition. Et comment il peut espérer y faire face.
 

C'est dans la reprise du propos de Lacan dans l'Étourdit que  


nous pouvons trouver au mieux l'expression de ce qui
ressortit de la structure :  
 
       "Qu'on dise reste oublié derrière ce qui se dit dans ce  
qui s'entend. 
        Cet énoncé qui paraît d'assertion pour se produire (4) J. Lacan,
dans une  forme universelle, est de fait modal, existentiel "L'Étourdit"
in Scilicet n° 4, p.
comme tel  : le subjonctif dont se module son sujet, en 5, le Seuil, Paris,
témoignant." (4) 1973

Se reprend ici l'orientation structurale où s'énonce la  


condition du "parlêtre" et se marquent les conséquences de
ce que le langage n'est pas un codage, mais un système de  
signifiants dont l'homme ne se fait pas maître. 
La prise de l'homme dans le langage pourrait cependant  
apparaître comme un point de vérité si l'on admettait
comme certains psychanalystes – dans la fulgurance de  
l'interprétation ou du dévoilement – qu'il y a : "les mots
pour le dire". Or, justement, dans son article Position de
 
l'inconscient (Écrits, p840), Lacan insiste : (5) typologies
  diverses des
"Prenons pour origine cette donnée qu'aucun sujet n'a de "conditions"
raison d'apparaître dans le réel, sauf à ce qu'il y existe des sociales ou
êtres parlants.[...]. Un sujet ne s'y impose que de ce qu'il y culturelles ou
même retour aux
ait dans le monde des signifiants qui ne veulent rien dire et
théories de la
qui sont à déchiffrer" dégénérescence

Tâche à laquelle il est commun de se dérober. C'est de son (6) J. Lacan, Le


refus que se soutiennent, par exemple, les démarches séminaire, Livre
pédagogiques ou politiques qui font l'hypothèse du juste 1 "les écrits
techniques de
sens – si ce n'est du "bon" ! – dans le langage et les
Freud"
institutions. 
 
Le positivisme progressiste – humaniste –   qui conduit à
ces positions de "divertissement", selon le mot de Pascal,
 
est certes sympathique dans ses premières intentions,
pourtant à cause de ce qu'il dissimule de vérité, on ne (7) Sans aucun
saurait  y souscrire sans autre examen. Vérité qui fait retour doute ce que
dans la résistance au changement ou à la guérison. Point certains prétendent
n'est ici besoin de stigmatiser une incapacité théoriser sous le
constitutionnelle ou sociale(5) ou de "psychologiser" quant vocable "d'alliance
thérapeutique" !
à l'immaturité du client ; comme le disait Lacan : "la
résistance vient de l'analyste"(6).
 
En effet, c'est toujours d'une prise singulière dans le
langage  – chez le praticien – que s'origine la résistance.
 
Si Laplace affirmait qu'il n'avait plus besoin de Dieu dans
ses équations, le praticien aurait par contre vanité à croire
 
pouvoir se dispenser d'inscrire dans son travail la place
du Réel : ce que le langage dans sa structure même laisse
 
choir de silence, d'irreprésentable. C'est bien ce réel que le
thérapeute et le patient s'efforceraient, en ce cas, de
 
méconnaître par l'artifice partagé de la résistance(7).
Comment mieux, en effet, mettre à distance la question du
(8) J.
réel que par l'assurance que le "dernier mot" à trouver existe Lacan, Télévision,
bien et n'est caché que par insuffisance du praticien ou p 22, Seuil
malignité du patient. De modernes mythologies proposent
d'en revenir, faute d'accès à ce dernier mot, à l'évanescence
de l'indicible et de l'harmonie des sphères que nous
proposent les mages, gourous et autres astrologues. Il n'y a
pas, hélas, à craindre pour eux une restriction du marché.
Cependant l'objet de la rencontre analytique n'est justement
pas l'indicible – encore que des auteurs à la suite de 
Ferenczi aient cru pouvoir y tendre par le biais de leurs
interventions non-verbales –, mais bien l'émergence de
signifiants au lieu du réel présentifié dans un dispositif : la
cure. 
 
"c'est le réel qui permet de dénouer effectivement ce dont le
symptôme consiste, à savoir un noeud de signifiants"(8). 

Il faut donc être en mesure de se porter du côté du signifiant


– dans l'énonciation– et non du sens – dans l'énoncé. 

L'entreprise n'est pas aisée, moins par l'effet de quelque


"profondeur d'enfouissement" – métaphore archéologique
trop prompte à se présenter pour ne pas être duperie – que
par nécessité de structure : ce qui a été noué ne peut être
dénoué qu'à grand peine dans la mesure où cette liaison a
pour but d'éviter de considérer le réel. 
Freud l'avait proposé à notre attention en recherchant ce qui
mettait limite à la conclusion des cures et qu'il avait pointé
du terme de "roc de la castration". Bout de Réel sur quoi le
langage se dérobe dans sa fonction de donner
du sens (même s'il permet de mettre de l'ordre, tel que celui
opéré par la distribution de la sexuation, ou d'accéder à un
certain savoir). Le sexe, en effet, prête bien à montrer
qu'il n'a pas de sens, mais qu'il est chiffre. 
C'est pour rendre compte de cette nécessité du traitement
imparfait du réel par l'ordre symbolique que Lacan va
proposer le modèle des discours.
Qu'est-ce qui, et comment, cerne le Réel dans les différents
modes de relations des hommes entre eux ?
La force du modèle lacanien sera de rechercher des
configurations minimales, des combinatoires d'un petit
nombre d'éléments pour formaliser, au delà des apparences
protéiformes des relations empiriques, une logique du lien
social. 

LES QUATRE DISCOURS

Ce modèle vise à formaliser la nature du lien social entendu


comme relation fondée par l'instrument du langage.
Conformément à ce qui a été avancé plus haut, cette
approche ne se fait pas sur le versant du sens, mais du point
de vue d'une combinatoire d'éléments qui en  prenant quatre
positions mutuelles définissent quatre modes d'énonciation :

 Le discours de
l'Hystérique,
 Le discours du Maître,
 Le discours de
l'Université,
 Le discours de
l'Analyste.
Ces quatre discours ne sont pas à considérer du point  
de vue de l'énoncé et résistent ainsi à toute typification
: par exemple, le discours de l'hystérique ne fait pas  
l'inventaire de ce que disent les hystériques – comme
une sémiologie qui épinglerait(9) leurs (9) Épingler... terme bien
"caractéristiques essentielles". Le "discours de spécifique d'un moment
historique qui nous
l'hystérique" vise à montrer comment s'effectue le sujet renvoie aux
dans une constellation particulière dont l'hystérie procédures
pathologique n'est d'ailleurs qu'une singularité "expérimentales" de
construite à la mesure de circonstances particulières et l'Inquisition !
des thématiques variées au gré des conditions
historiques et des conjonctures sociales diverses,  
lesquelles ne manquent certes pas d'avoir leur
importance quant aux modalités d'expression de la  
structure, mais ne la définissent pas.
 
Les mathèmes des discours sont bâtis à partir
d'éléments qui sont apparus dans la recherche de  
Lacan pendant plusieurs années, toutes celles
consacrées à l'étude des effets de l'ordre symbolique  
sur l'Homme, jusqu'à la butée de plus en plus insistante
sur le Réel. On y trouve donc les différents "S" qui  
représentent des signifiants particuliers, le $ ("S
barré") qui représente le Sujet marqué du manque et le  
"petit a" qui représente non pas un signifiant mais un
objet (objet cause du désir).  
Ainsi les quatre éléments constitutifs de tout discours
sont :    

 S1 – Le signifiant maître est à concevoir  


comme ces lettres, petites vocalisations, à
peine marquées de sens, qui pourtant  
gouvernent le sujet.
En position d'agent-semblant dans un discours,  
il sera repérable comme instituant, il
promulgue, définit, dit ce dont il s'agit. "  
C'est… ", " tu es… ". Il nomme et, au sens
large, gouverne au nom d'un ordre dans lequel  
lui-même s'inscrit.
En position d'autre-du-semblant, le S1 sera  
plutôt le signifiant de l'institué. L'énoncé de ce
qui est établi, la norme.  
En position de produit, le S1 apparaît comme
ce qui vient faire butée au défilement sans fin  
des signifiants. Sans aucun doute, dans
certaines configurations, la proximité avec le "  
tu dois… " du Surmoi ne peut pas être écartée.
En position de vérité, nous verrons dans le S1,  
le signifiant fondateur, propre à se laisser
apercevoir comme chiffre. Chiffres et nombres
participent dans notre culture de connotations  
particulières, souvent religieuses (3, 7, 13,
40,..), ce qu'on ne peut croire de hasard. Mais  
le texte aussi se chiffre comme le montre la
Kabbale. Freud ne manqua pas d'en éprouver  
quelque effet en calculant - du temps de son
lien avec Fliess - l'âge prévisible de sa propre  
mort . Ces usages des chiffres sont peut-être
des défenses au regard du chiffre absolu -  
évidemment inconcevable et imprononçable -,
celui que l'on craint de rencontrer dans son  
destin ou qui semble en constituer l'enseigne.
 
 S2 – Le signifiant du savoir quand il est agent-
semblant dans le discours est entendu comme  
Le savoir. En quelque sorte ce qui ne saurait
être mis en cause, mais plutôt le point de départ  
d'une remise en cause. On y reconnaît la forme
moderne du projet scientifique et aussi le credo  
du scientiste.
En position d'autre-du-semblant, S2 est de  
l'ordre du su, du connu. C'est l'ensemble des
connaissances élaborées selon une méthode  
rationnelle et qui peuvent être interrogées
rationnellement. Mais, plus largement, c'est  
tout le champ du sens. C'est ce que l'on sait, y
compris en dehors de la démarche scientifique,  
comme dans l'opinion et l'intuition.
En place de produit, le S2 sera à entendre  
comme ce qui résulte de la quête de savoir. Ce
peut être le secret révélé, une sorte d'autre  
savoir. Alors, pour certains, il est réputéplus "
vrai " que le savoir officiel, il a quelque chose  
d'ineffable qui le rend prestigieux avec ce côté
précieux d'avoir été soustrait au discours établi.  
Particulièrement apprécié dans l'ésotérisme par
les tenants des " connaissances autres ", il peut  
fonder aussi des théories du mystère ou du
complot. (10) On trouvera des
Enfin, en position de vérité, le savoir est celui renseignements précieux
de l'inconscient, le savoir insu. Il ne peut être et fort accessibles sur ces
questions chez : J.
qu'entre aperçu lorsqu'il tient la place de la Dor, Introduction à la
vérité. Les parapsychologies et autres lecture de Lacan,
occultismes séduisent souvent en arguant d'une Denoël, 1985
capacité à transgresser cette limite en révélant
le Tout de cette vérité cachée.  

 $ – L'histoire même de la psychanalyse nous  


montre le $ en position d'agent-semblant  
comme le sujet désirant, aux prises avec son
désir. Désordre, symptôme, si l'on en reste à  
l'appréhension défective, mais aussi critique,
empêcheur de dormir en rond, pourvoyeur de  
grains de sable dans les machines trop bien
huilées. Visiteur inattendu. Question singulière.  
En position d'autre-du-semblant, le $ est celui
dont on prend soin, qu'on gouverne, voire  
qu'on opprime. C'est l'objet des attentions, des
intentions ou des manoeuvres au titre des  
besoins ou des manques qu'on lui suppose. Le
cas dont médecins et autres experts  
(psychologues, sociologues) se saisissent,
maintenant que les maîtres de droit divin ont (11) Le mot mathème
perdu tout à la fois leur " innocence " et leur apparut pour la première
fois dans le discours de
superbe.
Lacan le 4 novembre
Le $ en position de produit, nous semble relatif 1971. Forgé à partir du
à ce qu'on peut appeler le " malaise" dans la mythème de Claude
civilisation. C'est le prix de l'émergence Lévi-Strauss et du mot
subjective en quelque sorte. Freud notait que grec mathêma
plus l'homme progresse dans le voie (connaissance), il
n'appartenait pas au
civilisatrice, plus il peut aussi éprouver la champ de la
nostalgie de l'inachèvement, le sentiment mathématique.  Était
d'incomplétude, le sentiment de sa finitude. posée la question de la
C'est à ce point qu'il est assez loisible de lui possibilité de transmettre
proposer, pour l'en " guérir " de céder sur son un travail qui ``a l'air de
ne pas pouvoir
désir. Que n'accepte-t-il pas les réformes " s'enseigner''. C'est pour
nécessaires ", les manipulations cognitivo- répondre à cette question
comportementales au nom du bien qu'on lui que Lacan inventa, [...],
veut et lui promet, s'il accepte ce marché ! le terme de mathème.
Enfin, le $ en position de vérité renvoie chacun (Roudinesco)
à son " manque à être singulier " dont nul
destin, accident de la vie non plus même que la  
faute d'un autre ne sauraient donner la raison.
 
 L'objet "petit a" (a) – En position d'agent-
semblant, le a peut être appréhendé comme ce  
qui est de l'ordre d'une présence difficilement
imaginable et symbolisable. Le a comme on le  
sait est ce qui se dérobe à l'imaginaire et au
symbolique. Le " semblant " le plus près de cet  
aspect sera le rien, le déchet, la/le mort où ce
qui s'y concatène - sans l'être, bien entendu -  
par un côté défectif. Une certaine proximité
avec un " ça, cela " qui existe. Quelque chose  
comme un Dasein muet, toujours énigmatique,
souvent hostile, une présence absurde,  
nauséeuse. Il peut cependant arriver que ce "  
rien " soit élevé à la plénitude - par un
renversement en son contraire dont  
l'inconscient a le secret.
En position d'autre-du-semblant le a tiendra au  
réel en tant qu'il est opaque. Ce sur quoi savoir
ou pouvoir se heurtent, a résiste. Là encore,  
constat d'existence de quelque chose dont
l'image comme la symbolisation ne rendent pas  
compte. Par exemple : point ombilical des
théories de la physique, tel que les constantes  
non-entières, masse manquante en cosmologie,
espace multidimensionnel. Ça peut cependant  
entrer dans le raisonnement, les équations, les
modèles, mais on ne sait pas ce dont il s'agit, ce  
qui le cause ou à quoi " ça " ressemble.
En produit, a sera le " plus-de-jouir ", c'est-à-  
dire ce que l'opération symbolique (S1==>S2)
ou les relations subjectives ($==>S1 ; $  
==>S2) laissent choir. a revient comme
jouissance supplémentaire, souvent en excès,  
affecter l'agent-semblant.
En position de vérité ce sera " l'objet cause " du  
désir. Nous avons déjà évoqué l'impossibilité
de le considérer et de le signifier sans voile. Sa  
présence, même entrevue, confine à l'obscène.
(10)  
Dans la perspective de Lacan, cet objet joue cependant  
un rôle capital puisque c'est autour de lui que tourne la
représentation que "$" imagine de lui-même pour  
obtenir quelque consistance, ce qui est nommé
fantasme : "$<>a" où le poinçon central désigne toutes  
les modalités possibles d'implication de "$" par rapport
à "(a)".  
Les éléments, évoqués ci-dessus, sont  constitutifs de
tout discours et peuvent occuper quatre places  
permutantes :  
 
 Agent,
 Autre,  
 Produit "plus de
jouir",   
 Vérité, 
 

 
que relient deux fonctions situées de part et d'autre
d'une barre qui a la valeur de celle de l'algorithme
saussurien (S/s) : 
   

 "mise au travail"  
marquée d'impossible
==>  
 "résolution marquée
d'impuissance" //  

En suivant la proposition de Lacan, on peut donner  


dans un "mathème"(11) la matrice générale de tout
discours où les éléments s'articulent autour d'une "mise  
au travail" effectuée par l'Agent et d'une
"impuissance" qui sépare le produit du discours de la  
vérité.
 
AGENT  ==>  AUTRE
VÉRITÉ // PRODUIT  

Sous la barre, ce qui est insu, mais est indispensable à  


l'opération et concerne sa vérité. Le plus de jouir
(produit) est cependant incommensurable avec cette  
vérité. En somme la jouissance est "inavouable", mais
existe : ce qui ne peut être ignoré du point de vue  
éthique et doit trouver à se dire de quelque façon.
Au dessus de la barre, se trouve ce qui est  
appréhendable plus empiriquement, puisqu'il s'agit de
ce que l'agent fait en ignorant ce qui est sous la barre (12) S.
et se révèle être la cause comme la jouissance de son Leclaire. Psychanalyser,
acte. démasquer le réel. Points
Cette forme générale permet plusieurs dispositions par
pure substitution de places des éléments constitutifs.
Leur point d'ordonnancement sera relatif à l'élément  
mis en place d'agent.  
Les discours sont des formes logiques mais aussi des
dispositifs qui opèrent un certain traitement du réel.
Des effets en sont tangibles, particulièrement dans la
"civilisation" qui apparaît comme le lieu des liens
sociaux effectués.
Le discours du maître :

S1  ==>  S2
$     //      a

C'est à partir de lui que se déclinent les Quatre


Discours proposés par Lacan . Ce discours est la
conséquence la plus immédiate du fait de structure
selon lequel " un signifiant, c'est ce qui représente le
sujet pour un autre signifiant ". Le signifiant maître est
repérable dans la cure analytique, comme une formule,
un nom, voire quelques lettres. Dans le discours du
maître il apparaît comme ce qui nomme et donc
institue, valide, droit de cité. Chaque fois que le S1
s'applique au S2 – tout le "trésor" des signifiants
disponible –, ce champ est réorganisé. Il y a donc
constitution d'un ordre et aussi de ce qui est exclu de
cet ordre. Simplement, on s'en rend compte en notant
que des mots sont "interdits" : gros mots...
blasphèmes... injures... offenses. On sait aussi que ce
qui est réprouvé, c'est de ne pas "tenir parole", de se
parjurer.

Ce discours produit aussi une jouissance : celle de


pouvoir nommer. Il n'est pas d'emblée affaire de
morale . Certainement, il est nécessaire "qu'au moins
un" se tienne à une place est donnée d'où on peut tenir
parole : parent, responsable... C'est seulement si la
jouissance l'emporte sur le "service" que le discours du
maître tourne à l'oppression.

Un cas, particulièrement favorable à cette issue


funeste, se présente lorsque celui qui tient la place d'où
s'énonce le signifiant-maître ignore par trop la part de
son implication désirante dans la position qu'il tient.
C'est cette négation qui en quelque sorte réduit à
ignorer la vérité de la cause du discours. Se renforce
alors le semblant de ne le tenir que par "amour de
l'humanité" comme disait Don Juan...

Le discours de l'hystérique est conditionné par celui


du maître. Il le renverse en quelque sorte. À celui qui
prétend dire le Tout et le Vrai est posée une question
qui se décline sous diverses formes : quel est ton désir
de tenir ce discours ? Pour quel objet me tiens-tu en
me l'adressant ? Que dois-je te répondre ? Quelle est la
part de vérité dans ce que tu dis ?
On imagine aisément que ces questions, le maître n'a
nulle désir de les entendre et qu'il est plutôt porté à les
ignorer – en les disqualifiant – ou à les réduire par la
force de l'ordre qu'il entend établir. Au tournant du
XXe siècle naissant, c'est à la science médicale
naissante – qui a supplanté l'autorité des clercs tout en
gardant la même position de pouvoir – et à la
condition faite aux femmes que ces questions sont
posées. Et ce sont les femmes elles-mêmes qui la
posent en se dérobant aux savoirs comme à l'autorité.
C'est à ce moment que les médecins et l'opinion
dominante créent l'hystérie comme mode de
déconsidération de ces paroles de " femmes malades ".
La découverte freudienne vient rompre cette quiétude
rassurante en montrant que les hommes peuvent être
hystériques et que cela n'a rien à voir avec ce que la
médecine est capable de dire sur une " nature
hystérogène " des femmes et que cela n'a rien de
pathologique a priori, puisque tous les mécanismes
engagés dans la constitution des symptômes sont ceux-
là mêmes qui gouvernent aussi la vie psychique
normale.

$   ==>  S1
a     //    S2

En mettant au travail le signifiant maître l'hystérique


ne contribue pas peu à la marche de l'histoire. À tout le
moins, celle de la psychanalyse qui a pu naître de ce
que son discours ait été entendu d'une autre oreille :
imprévue.

Le discours de L'Université a pour agent le savoir qui


s'applique à un objet d'étude. Celui-ci est élevé à la
hauteur d'objet digne de connaissance ce qui tend à
restreindre le champ d'exploration que le savoir se
donne : la tentation peut être de n'étudier que... ce qui
est déjà connu ! La tendance à la "glose" en est une
illustration.
Ce traitement d'un réel par le savoir est cependant
porteur d'un "reste", il produit le $ (mathème pointant
le sujet en tant que divisé par le signifiant) et accroît
ainsi le "malaise dans la civilisation". Comme le dit si
bien la langue : cela laisse à désirer. On remarque que
ce désir n'est pas sans pouvoir faire retour sur le
savoir. Il constitue alors le désir de savoir.
Cependant, ce désir de savoir est supposéne pas exister
dès lors qu'on prétend au savoir "pur". Quel que soit le
savant, le savoir est le même. On remarque que ce
n'est pas si absolument vrai : on ne consacre pas sa vie
à n'importe quelle recherche et il arrive même que les
savants les plus rigoureux n'acceptent pas certaines
conséquences de leur propre travail, car – d'un certain
point de vue – cela ne leur plaît pas. Ce fut le cas pour
Einstein au regard de l'expansion de l'univers ou
encore de la dimension stochastique de la mécanique
quantique. On lui prête d'avoir dit : "Dieu ne joue pas
aux dés".
Enfin, on peut remarquer que le discours de
l'Université a, en place de vérité – selon le schéma
général des discours – le signifiant-maître. Aussi bien,
le savoir ignore ce qui est ainsi "sous la barre". Il n'en
demeure pas moins que ce signifiant est présent et,
comme le pointe la psychanalyse, d'autant plus à
œuvre qu'on prétend l'ignorer. Dans les sciences dures
– mathématiques et physique – le S1 agit plutôt
comme garant du formalisme de l'usage rigoureux des
"petites lettres" des équations, dans les sciences dites
humaines, le savoir littéraire ou philosophique son
effet est bien moins satisfaisant puisqu'il impose le
règne de la déférence et de la citation : "Aristote l'a
dit".

S2   ==>  a
S1    //     $

Notons ici cependant, qu'il ne s'agit pas de mettre en


cause l'activité scientifique véritable, la recherche,
mais le "scientisme" qui est une idéologie par quoi l'on
prétend donner à la science un statut "naturel" et
s'appliquant à tout objet en négligeant de considérer ce
qui la conditionne. Ainsi, chacun serait contraint de
n'avoir d'autre possibilité que d'adhérer à ce discours
comme si sa contestation revenait à méconnaître les
découvertes de la science véritable. Les "sciences" du
soin, de l'éducation, du gouvernement, de l'économie,
ne cessent d'user de cette pression pour s'imposer avec
force, tant auprès su public non averti, qu'hélas, parmi
les acteurs impliqués dans ces secteurs.
Le discours de l'analyste se distingue de tous les
autres en ce que son agent n'est pas un signifiant mais
"l'objet a" qui présentifie le réel. 
Dans ce dispositif, la notion de "communication" ou
de "relations humaines" – aujourd'hui promue au rang
de nécessité pour expliquer et régler la souffrance
humaine – se trouve singulièrement mise en cause... 
La caricature qui montre l'analyste absent de la séance,
ou endormi, en pressent la dimension scandaleuse – il
n'y a personne ! On n'est pas là pour "bavarder". Ce
qui est cependant ignoré, c'est qu'il y quelque-chose
qui est semblant de Réel. Ce presque rien, il est du
devoir du psychanalyste d'en maintenir la fonction
énigmatique pour mettre le sujet désirant ($) au travail.
C'est pourquoi le psychanalyste ne répond pas dans les
termes attendus du savoir, du conseil, de la
prescription ou de la consolation.

Ce discours produit le "S1" à quoi le sujet s'est pris, le


signifiant maître qui le gouverne. Quelque chose qui a
affaire avec le refoulement originaire et comme tel ne
peut être cerné autrement que comme jeu de lettres
"hors sens". Serge Leclaire a donné à ce sujet des
exemples remarquables.(12). Une telle découverte
n'est pas sans violence. Il faut, comme le disait déjà
Freud, opérer par une sorte "d'épluchage" des couches
successives de significations qui entourent ce noyau.

a   ==>  $
S2   //   S1

Le sujet n'est cependant pas sans en savoir quelque-


chose. S'il n'en sait pas Tout, il n'en sait pas Rien. Mais
c'est un savoir "insu", c'est celui qui l'affecte comme
"formations de l'inconscient" : rêves, lapsus, actes
manqués et surtout – ce pour quoi il vient en analyse –
symptômes. Par un progressif épuisement du sens de
ces formations – à quoi s'arrêtent les psychothérapies,
si elle ne viennent pas en déverser en surplus ! – le
travail de l'analyse s'oriente vers l'énonciation de ce
qui a produit le sujet par un nouage d'un signifiant à un
bout de réel (l'objet a). Cela tient à la part de hasard
qui gouverne toute vie.

On conçoit aisément que nul être parlant n'a le désir de


se confronter – sans y être contraint de quelques
façon : ce sera la souffrance qui sera l'origine de la
démarche – à une telle découverte, ni ne veut en
reconnaître la portée. Pour se soustraire à cette vérité,
le sujet dispose d'une possibilité. C'est le fantasme par
lequel il lui est loisible d'imaginer toutes sortes de
scénarios qui permettent de se croire maître de son
désir, de son histoire et de s'accommoder plus ou
moins de ce qui du sort semble lui échoir. Ce jeu de
miroir où le sujet se mire en même temps qu'il
s'aveugle a pourtant sa limite : celle du Réel qui en
grève l'apparente liberté. Comme l'évoquait Freud,
vers la fin de son œuvre, il faut faire avec le "roc de la
castration". Autrement dit, il y aura toujours du
manque à la satisfaction et du Réel qui résiste au sens.
La psychanalyse ne peut rien promettre d'autre que de
côtoyer ce point irréductible. Ce qu'en fera le sujet est
alors de "surcroît" la mesure de sa liberté au regard de
ce qu'il a découvert de l'ordre qui le contraint.

La psychanalyse se fait-elle sociologie par cette approche des discours ?

Son objet, comme son dispositif, ne sont pas ceux de la sociologie. Elle ne se
pratique qu'au singulier. Cependant, elle ne considère pas " l'individu" qui se
compterait comme partie d'un tout et ses objets ne sont pas le nombre, ni les
comportements. Elle s'adresse au sujet qui ne peut se concevoir que " pour un
autre sujet " par la médiation du langage. En ce sens, la dimension de l'altérité
– donc du lien – est toujours présente. " L'inconscient, c'est la politique ",
affirmait Lacan le 10 mai 1967 dan son séminaire sur " La logique du
fantasme " (inédit).

Le psychanalyste pourtant ne saurait ignorer la prévalence de tel ou tel


discours dans le bavardage du monde. La demande qu'on lui adresse en porte
forcément la marque. Elle n'est pas née hors de l'histoire et on sait qu'elle ne
peut pas s'exercer dans certaines sociétés – comme les théocratiques ou les
dictatoriales. Elle ne saurait pourtant contribuer, non plus, au maintien de
l'ordre où elle est possible.

C'est à cette condition – de renoncement à sa propre définition – que


l'Amérique avait accepté d'embrasser la psychanalyse pour mieux l'étouffer.
Cette tentation est permanente. L'intervention éducative ou médico-sociale,
qui se réfère si souvent dans ses formations et institutions à la psychanalyse,
en représente bien, nous semble-t-il les termes ambigus, champ tendu entre
une intervention normative, réductrice des questions subjectives et politiques
et une représentation idéale de son acte qui se veut éclairé, respectueux de
dignité, de liberté du sujet.

Ce que la psychanalyse peut apporter là, n'est certainement pas un apaisement


des contradictions. Tout au contraire, il lui appartient de maintenir la tension
du champ où elle appelée à se prononcer en identifiant ce qui lui est demandé
– quel peut être pour elle le tribut à payer – et ce qui doit être dit sous la
forme proprement inouïe d'une parole singulière..

En fait, ça tient à peu de chose, le petit espace qui fait que "ça" ne collera pas,
soit : qu'aucun discours ne se reconnaîtra assez dans un autre pour s'y abîmer.
On voit que notre société n'a guère d'appétence pour cette dimension de
l'écart, de la part faite à la surprise. Tout au contraire, pressent les références
à la gestion, la normalisation, l'application du savoir – souvent défini comme
celui des "experts" –, qui génèrent une sorte de fétichisme de la prévision et
de l'évaluation, là où devrait se constater quelque-chose de l'ordre du manque.

La psychanalyse reste peut-être le discours, qui à se tenir si près de (a), peut


encore se soucier de la pulsion de mort dans la civilisation, en dire au moins
quelque chose – ne pas la nier –, pour autant qu'on la comprend comme l'effet
même de la rencontre imparfaite du symbolique et du réel, que toute prise
signifiante et littérale échoue à réduire.

Porteur de cette éthique, le psychanalyste ne saurait être d'un commerce trop


mondain ! Sans doute est-ce ce que suggérait S. Leclaire :
"Peut-être pourrons formuler maintenant en quoi consiste le fait d'être
psychanalyste, c'est-à-dire de se mettre en situation de ne pas être partie
prenante dans la structure des fantasmes où se règle l'économie des désirs de
chacun..
Être psychanalyste c'est être capable d'entendre les intervalles qui séparent les
harmoniques du son produit, de distinguer l'ombre de son modèle comme de
son support : dans l'ensemble évoqué, ne pas prendre le souvenir pour argent
comptant et la miche pour du bon pain..."(13)

Gilles Herlédan

Pour Jacques Lacan, le lien social se caractérise par la possibilité pour le sujet d'occuper
diverses positions dans le discours. Occuper tour à tour la position d'agent du discours de
l'hystérique, du discours du maître, du discours de l'universitaire, du discours de l'analyste.
Dans son enseignement1, Lacan envisage toutefois que le monde occidental dominé par
l'idéologie capitaliste soit pris dans un nouveau discours qu'il nomme discours du
capitaliste, subversion du discours du maître.

Sommaire

 1Les quatre discours


o 1.1Le discours du maître
o 1.2Le discours de l'hystérique
o 1.3Le discours de l'analyste
o 1.4Le discours universitaire
 2Le discours du capitaliste
o 2.1Le sujet en position d'agent : l'individu
 3La science
o 3.1Discours scientifique
o 3.2Discours de la science
 4Notes et références
 5Voir aussi
o 5.1Bibliographie
o 5.2Articles connexes
o 5.3Liens externes
Les quatre discours[modifier | modifier le code]
La chaîne logique que représente la division subjective ($), le signifiant maître (S1), le
signifiant savoir (S2), l'objet a peut se disposer sur quatre positions (vérité, agent, autre,
produit) et ainsi déterminer la modalité de discours qui caractérise le sujet.

Le discours du maître[modifier | modifier le code]


Du fait de sa division subjective (en place de vérité), le maître (l'agent) adresse sa maîtrise
à l'autre (dont Hegel remarquait déjà que le propre de l'esclave, c'est de savoir) caractérisé
par son savoir. Un manque-à-jouir (objet a) est produit.

Le discours de l'hystérique[modifier | modifier le code]


L'hystérique (comme agent du discours de l'hystérique) adresse au maître (en position
d'autre) sa division subjective. La vérité, cause de cette division, c'est que l'hystérique est
dirigé par l'objet a. L'effet produit sur l'autre sera qu'il retournera à l'hystérique un savoir
(S2) nécessairement impropre à satisfaire sa nature désirante et à combler sa division.

Le discours de l'analyste[modifier | modifier le code]


Lorsque Freud reçut d'une patiente hystérique l'ordre de se taire, il entra en position
d'agent du discours de l'analyse. Son silence, son manque-à-répondre (objet a) est
adressé au sujet en tant qu'il est divisé, qu'il est une énigme pour lui-même. Cela aura pour
effet que l'analysant produit des signifiants S1 qu'il renvoie au silence de l'analyste.

Le discours universitaire[modifier | modifier le code]


Au nom du maître (S1 en position de vérité du discours universitaire), l'universitaire, le
professeur adresse un savoir S2 à l'autre. Cet autre est pris comme un manque, un vide à
combler , l'effet étant que ce manque nourrit la nature désirante de l'autre qui retourne au
savoir.

Le discours du capitaliste[modifier | modifier le code]


Le sujet en position d'agent : l'individu[modifier | modifier le code]
Le discours du capitaliste est centré sur la personne. Le consommateur est le moteur,
l'agent de ce discours. Il est sans cesse invité à souscrire à l'idéologie dominante dévoilée :
le signifiant maître S1 du marché. La particularité de ce discours est l'ontologie particulière
du sujet. Celui-ci est conçu en tant qu'il serait non-divisé (entièrement définissable par un
discours scientifique désubjectivisé/désubjectivisant). La lumière est faite sur son désir, qui
ne serait que désir de consommation. Les objets qu'il consomme ont pour but de le
parfaire, de le compléter. C'est bien la division subjective (que Lacan note $) qui est visée.

La science[modifier | modifier le code]
Discours scientifique[modifier | modifier le code]
On peut considérer que le discours scientifique trouve son essor avec Galilée, Newton et
Descartes, même si la démarche grecque le préfigure. Il s'agit d'une approche du réel par
la mathématisation, par la mise en chiffres et en lettres des phénomènes qui nous
parviennent de la nature. D'un point de vue psychanalytique, ce discours se soutient d'une
exclusion du sujet désirant, et vise une symbolisation ultime du réel (la grande théorie de
l'unification, par exemple).

Discours de la science[modifier | modifier le code]


Il existe un discours voisin du discours scientifique, dont les effets sont véritablement
ravageants pour le sujet: il s’agit du discours de la science. Cet avatar du discours
scientifique se trouve lié au développement des sociétés industrielles, et particulièrement à
l’organisation économique capitaliste en Occident. La situation actuelle est que le discours
de la science, qui se spécifie de mettre à l’écart toute question subjective, a peu à peu
envahi l’ensemble des discours sociaux qui règlent le vivre ensemble des sociétés
modernes. Ce n’est pas la science ni les scientifiques qui sont à remettre en cause, mais
cette prolifération d’un type de discours qui vise à éliminer dans les relations sociales la
part de subjectivité. Il semble que la société organisée par ce discours de la science, que
l’on peut résumer des deux adjectifs, capitaliste et marchande, ait gravement déstabilisé
les modes de transmission entre humains, que ce soit dans l’ordre de la filiation, de
l’éducation ou de l’apprentissage.

Notes et références[modifier | modifier le code]


1. ↑ Cf. Jacques Lacan, Du discours psychanalytique, Conférence à l'université de Milan, 1972, in
Lacan in Italia-Lacan en Italie, éd. La Salamandra, 1977.

Voir aussi[modifier | modifier le code]


Bibliographie[modifier | modifier le code]
 Sigmund Freud, Malaise dans la civilisation [1929], Presses Universitaires de
France, 1971.
 Jacques Lacan :
o Du discours psychanalytique, Conférence à l'université de Milan, 1972, in
Lacan in Italia-Lacan en Italie, éd. La Salamandra, 1977.
o Séminaire XVII, L’envers de la psychanalyse [1969-1970], éd. du Seuil,
Paris, 1991.
o Séminaire XX, Encore [1972-1973], éd. du Seuil, Paris, 1975.
o Télévision, éd. du Seuil, coll. « Le champ freudien », Paris, 1973.
 Christian-Arthur Laval, , L'homme économique, essai sur les racines du
néolibéralisme, éd. Gallimard, 2007.
 Jean-Claude Milner, L’Œuvre claire : Lacan, la science et la philosophie, Le Seuil,
collection « L’Ordre philosophique », 1995
 Dominique Jacques Roth, Economie et psychanalyse. Le progrès en question,
L'Harmattan, 2011.
 Marie-Jean Sauret, Malaise dans le capitalisme", Editions P.U.M., 2009
 François Terral, Sur le lien social capitaliste, Ramonville Saint-Agne, Erès, coll.
« l’en-je lacanien », p. 139-150.

Selon Lacan, le discours va au-delà de la parole et constitue une forme de lien social.


Dans le séminaire « L’envers de la psychanalyse », il introduit quatre discours : du
maître,  de l’universitaire,  de l’hystérique et de l’analyste. Les discours du maître et de
l’universitaire existent depuis longtemps. Lacan accorde à Freud l’introduction du
discours de l’hystérique, mais souligne qu’il n’a pas su définir celui de l’analyste. En
introduisant et articulant le discours de l’analyste, Lacan a amené un apport original à
la psychanalyse.

Construction des quatre discours


Le discours se construit à partir de la formulation de la définition du signifiant,
notamment « le signifiant représente un sujet pour un autre signifiant » qui,
concrètement signifie cela. Si je parle à quelqu’un, celui-ci peut comprendre ce que je
dis parce qu’il comprend ma langue, c’est-à-dire qu’il a à disposition des signifiants qui
lui permettront de comprendre ce que je dis et, en même temps, que ce que je dis me
représente. Cela s’écrit de cette manière :

 
S1 représente l’agent (ce que je dis), $ moi qui parle, S2 c’est le signifiant avec lequel
l’autre auquel je m’adresse (l’autre) me comprend. Si maintenant, nous désignons $
comme la place de la vérité, c’est-à-dire ce qui est impliqué dans ce que je suis en train
de dire, et  nous mettons en dessous de S2 une lettre a qui désigne une jouissance qui se
produit en celui auquel je m’adresse et bien nous aurons  :

   
Cette formule correspond au discours du maître (voir vidéo : Lacan et Hegel : Maître et
Esclave) c’est le discours qui fonctionne le plus naturellement parce qu’il se modèle,
comme nous l’avons vu, directement sur le mécanisme du signifiant. A partir de ce
discours, les autres s’ensuivent : de l’universitaire, de l’hystérique et de l’analyste.

Voici à quoi correspondent les termes et les places :


Explication des quatre discours :

Discours du maître
 
Comme dans la dialectique du maître et esclave de Hegel, où le maître met au travail
l’esclave et tente de s’accaparer de la plus-value, dans le discours du maître, le S1 met
au travail S2 qui produit un surplus de jouissance (plus de jouissance). Le discours du
maître donne l’illusion à l’autre de parvenir, s’il pouvait devenir maître, à une position
subjective sans division.

 
Discours universitaire
 
Dans le discours universitaire, le savoir occupe la position dominante. Le discours
universitaire représente l’hégémonie de la connaissance. A la place de la vérité, nous
avons le signifiant maître. Celui qui parle énonce un savoir qui représente quelques
notions (signifiant maître) qui ne peuvent pas être mis en discussion. Le discours
universitaire donne l’illusion à celui auquel il s’adresse de retrouver une unité dans ce
savoir qui produit lui-même une division.

 
Discours de l’hystérique
 
Dans le discours de l’hystérique, le sujet divisé occupe la position dominante qui
s’adresse à l’autre pour produire un savoir.  Et à la place de la vérité, nous avons l’objet
a. Le discours hystérique s’adresse à un maître qui détient le savoir mais lui manquerait
la vérité donnée par l’objet a que l’hystérique détient.

 
Discours de l’analyste
 
Dans le discours de l’analyste, l’objet a occupe la position dominante, qui est l’objet que
l’analyste représente pour l’analysant. Et à la place de la vérité, nous avons S2,
notamment le savoir du psychanalyste.

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