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OTALGIES

1. Innervation sensitive de l'oreille externe :

- Elle est assurée en majorité par le plexus cervical : racines C2 et


C3 (great auricular nerve) ainsi que le nerf V-3 (nerf
auriculotemporal).
- Une innervation mineure est assurée par le X et le VII par le biais
de sa composante sensitive.
- Une partie de l'oreille externe appartient à la zone de Ramsay-
Hunt.

2. Innervation sensitive de l'oreille moyenne :

- La membrane du tympan est innervée par :


o le nerf auriculotemporal (branche du nerf mandibulaire V-3,
relais = ganglion de Gasser).
o le rameau auriculaire (d'Arnold) du nerf vague X, relais =
ganglion jugulaire.
- La corde du tympan (branche du VII – zone de Ramsay Hunt).
- L'innervation au niveau de la muqueuse de la caisse du tympan est
assurée par le nerf tympanique (de Jacobson) annexé au nerf
glossopharyngien, relais = ganglion pétreux, ainsi que par le plexus
carotido-tympanique (sympathique).

La zone de Ramsay-Hunt correspond à l'innervation du contingent


sensitif (intermédiaire) du nerf facial (VII bis de la VIIe paire crânienne).
Elle comprend :
 le tympan
 la paroi postérieure du conduit auditif externe
 une partie du pavillon de l'oreille (la conque)
 les 2/3 antérieurs de la langue (sensibilité gustative)

3. Certaines douleurs otologiques peuvent donc être des douleurs


réflexes par convergence :

- à partir du pharynx, amygdales, larynx, langue, œsophage et


thyroïde via le nerf de Jacobson (IX) et d'Arnold (X)
- à partir des dents, ATM (y penser en 1er), nez, sinus, nasopharynx
via le nerf auriculotemporal (V-3)

4. Etiologies des otalgies selon leur origine (tableau 2.1 page 37


polycop)

5. Interrogatoire pour otalgie :

- La douleur : intensité, durée, récurrence, déclenchement


- Recherche de symptômes otologiques :
o hypoacousie
o acouphènes
o vertige
o prurit
- Recherche de symptômes non-otologiques :
o dysphagie
o odynophagie
o perte de poids
o masse du cou
o raucité de la voix

6. Examen clinique face à une otalgie :

- Systémique : température
- Inspection du scalp
- Otoscopie : CAE, tympan
- Perméabilité de la trompe d’Eustache :
o manœuvre de Valsalva : Normalement : tympan bombe à
l'extérieur
o manœuvre de Toynbee (avaler avec bouche fermée) :
Normalement : tympan bombe à l'intérieur
 Si anomalie : pression négative dans l'OM
- Examen tête et cou :
o nez
o cavité orale
o oropharynx
o hypopharynx
o examen poussé du larynx en cas de tabagisme/alcoolisme
o examen de l'ATM ‘articulation temporo-mandibulaire’
- Audiométrie +/- selon contexte. Elle peut être utile suite à une otite
compliquée (méningite) pour évaluer les dégâts cochléaires.

7. Prise en charge urgente d'une otalgie :

- OMA ou sinusite compliquée de méningite, atteinte de nerf crânien,


signes neurologiques de localisation, labyrinthite, mastoïdite,
thrombose du sinus caverneux.
- Syndrome de Gradenigo (otorrhée chronique avec paralysie
ipsilatérale de l'abducens et douleur orbitaire ipsilatérale  méningite)
- Septicémie.
- Infection chez un patient diabétique ou immunodéprimé
- Abcès : péri tonsillaire, rétro pharyngien, cervical, dentaire
- Cellulite péri auriculaire résistante aux AB
- Otalgie / Otorrhée résistante au traitement : évoquer cancer ORL

Les otalgies dues à des otites (externe ou moyenne) aigües


sont très mal tolérées et poussent le patient à consulter dans
l'espace de 48h. Une otalgie plus trainante ne peut
correspondre à une otite aigüe.

A. OTALGIE ET OREILLE EXTERNE


Causes :
- Trauma :
o aigu : hématome
o négligé donne au pavillon un aspect en chou-fleur par
nécrose du cartilage, stase et surinfection (chondrite)
o donc incision rapide de l'hématome et packing antérieur et
postérieur pour empêcher sa reconstitution.
- Chondrite auriculaire : infection ne prenant pas le lobule. Risque de
pavillon en chou-fleur. S. pyogenes
- Périchondrite : dans les maladies auto-immunes. Ne prend pas le
lobule.
- Cellulite auriculaire : prend le lobule.
- Corps étranger : à enlever à la curette, aux pinces ou par aspiration.
Le lavage ne donne pas de résultat. Un animal vivant (insecte) est
tué à l'huile minérale ou à la lidocaïne avant son extraction.
- Infections…

 Infections de l'oreille externe


Otite externe bactérienne diffuse :
- Facteurs favorisants : humidité, chaleur : oreille du nageur
- œdème, douleur d'augmentation progressive avec celle de l'œdème,
obstruction et hypoacousie, prurit intense, lésions secondaires de
grattage
- Germes : P. aeruginosa +++, S. aureus, Proteus spp,
Streptoccoccus spp
- Stades :
o 1- Légère : rougeur du CAE
o 2- Modérée : rougeur du CAE + pus, obstruction partielle du
CAE
o 3- Sévère : obstruction totale, nécessité d'une éponge (wick)
pour l'imbibition profonde du CAE par les AB
o 4- Avec cellulite : traitée par AB locaux et systémiques
- Traitement : AB local : quinolones avec hydrocortisone. La
néomycine n'est plus utilisée car irritante dans 20% des cas.
Note : Pas de résistance possible contre les AB locaux.
- Prévention +++ : S'assurer que tympan intact. Recours aux
bouchons, acidification du CAE, éviction des traumatismes.

Otite externe nécrosante (maligne / granulomateuse)


- Diabétiques et immunodéprimés
- Tissu de granulation poussant à la jonction ostéocartilagineuse du
CAE.
- Ce tissu ne pousse pas chez les sidéens  toute otite externe
nécrosante est donc considérée comme maligne.
- Toute otite externe chez un diabétique ou immunodéprimé est à
traiter par AB locaux et oraux, +/- O2 hyperbare Risque de
paralysie faciale, cellulite, chondrite, ostéite temporale et infections
intracrâniennes par diffusion à travers les fissures de Santorini.
- CT Scan nécessaire pour voir les complications
- P. aeruginosa +++
- (acidité tue pseudomonas, humidité et alcalinité  prolifération)

Otite externe mycotique :


- Immunodéprimés ou usage prolongé d'AB locaux
- Humidité chronique du CAE
- Candida albicans, Aspergillus
- Douleur sévère au début de la maladie
- Présence de mousse blanche (ou grise si A. niger), micelles.

Furoncles :
- Partie latérale au CAE (follicules pileux)
- Douleur, ravivée à l'insertion de l'otoscope ou à la mobilisation de
l’oreille
- Petit œdème fluctuant
- Possible adénopathie mastoïdienne ou mandibulaire
- Staphylocoques +++
- Risque de cellulite
- Traitement = AB locaux, systémiques en cas d'écoulement de pus

B. OTALGIE ET OREILLE MOYENNE

Causes :

- Perforation du tympan :
o douleur atroce au moment de la perforation
o en absence d’infection : 90% de cicatrisation spontanée au
bout de 4 semaines, sinon, tympanoplastie
o en cas de vertige, nausée, vomissement, nystagmus : évoquer
une disruption de l'étrier, peut nécessiter une chirurgie
- Barotraumatisme :
o aviation, plongée
o douleur +/- acouphènes +/- effusions
o résolution spontanée
o prévention : éviter aviation/plongée lors d'une infection
respiratoire haute, chewing-gum, Valsalva…
o Plus important en descente qu'en montée
- Infections

 Infections et oreille moyenne

Otite moyenne aigüe

- Diagnostic :
o Symptômes :
 otalgie brutale (moins de 48 h) (elle peut manquer
avant 2 ans  signes abdominaux sont un signe
indirect dans ce cas)
 otorrhée en cas de brèche tympanique
 autres signes moins spécifiques : révélateurs chez
l'enfant < 2ans
 frottement du pavillon
 irritabilité
 pleurs inhabituels
 présence d'une rhinite
 diarrhée/vomissement
o Otoscopie :
 Il faut s'assurer de voir tout le tympan
 examen bilatéral car 40% de bilatéralité de l'OMA.
Idéalement au microscope binoculaire
 Chez l'enfant, tirer le CAE en postérieur, latéral et
vers le bas (alors que chez l'adulte, vers le haut)
 tympan rouge souvent. il peut être blanchâtre par
compression des capillaires par le pus, AVEC un
aspect bombant (accumulation purulente) : élément
important pour distinguer l'OMA de l'OM
phlycténulaire (ou myringite bulleuse)
NB : une rétraction tympanique peut être douloureuse.
Elle est secondaire à la pression négative et non pas à
une infection bactérienne
o Paracentèse (myringotomie)
 devant toute OMA compliquée dans le but de réduire
la pression et la douleur, avec pose de tube.
 échecs thérapeutiques ( culture)
o Evolution
 l'évolution naturelle est le plus souvent favorable 
remise en question de l'ABthérapie

- Epidémiologie
o Pic d’incidence : 6 – 13 mois
o La plupart des enfants < 5 ans font une OMA au moins
o nette augmentation de l'incidence au cours des 20 dernières
années.

- Pathogénie
o Dysfonctionnement tubaire
 Rappel : rôle de la trompe :
 équilibre des pressions nasopharynx / OM
 protection contre les infections ascendantes
 éliminations des sécrétions muqueuses par la
clairance mucociliaire
 Immaturité anatomique de la trompe chez l'enfant < 6
ans :
 plus courte
 plus souple
 plus horizontale
 Autres anomalies associées retentissant sur la trompe :
 malformations du voile / base du crane
 infections virales
 RGO
o Réponse immunitaire
 Protection normale = anneau lymphoïde de Waldeyer
(végétations adénoïdes ou tonsilles pharyngées),
afflux de lymphocytes des tissus voisins, production
locale d’Ac (IgA empêche l’adhérence des germes)
défense contre les germes du nasopharynx.
 Chez les enfants chez lesquels l'OM récidive on note
parfois :
 déficit en IgA
 déficit en IgG2 contre la capsule
polysaccharidique
 Rôle des cytokines :
 IL-1 beta et IL-8 sont sécrétés dans les
infections virales et majorent l'inflammation
donc les lésions épithéliales
 TNF alpha favorise la synthèse du mucus
o Prédisposition génétique :
 Atopie
 HLA-A2, gènes de la mucine (adhérence des micro-
organismes)
o Facteurs favorisants
 Age, sexe et facteurs anténataux :
 Nourrisson +++. Pic avant l'entrée en
maternelle
 Garçons > filles
 Facteurs anténataux : RPM (rupture prématurée
des membranes), accouchement prolongé,
méconium dans le LA, prématurité, petit poids
de naissance
 OMA plus précoce (< 6 mois +++)  récidive
plus probable
 OSM : prématurité, faible poids à la naissance.
 Environnement
 Allaitement maternel prolongé : protecteur
avant 1 an
 Tabagisme parental favorise l'OMA
 Collectivité : fratrie, crèche : favorise l'OMA
 Biberon en position couchée
 Succion prolongée de la tétine :
dysfonctionnement tubaire ?
 Hiver : infections virales
 Aspects particuliers
 Tympan congestif isolé (sans purulence rétro
tympanique)
o CE N'EST PAS UNE OMA
CONFIRMEE. Il peut la révéler (pré-
OMA) mais n'en est pas synonyme
o en cas de doute, revoir l'enfant dans 24-
48h.
 Otalgie isolée :
o n'est pas toujours synonyme d'OMA.
o chez le grand enfant, il s'agit
fréquemment de douleurs ORL référées.
o ne pas oublier l'otite externe.
 Otite phlycténulaire ou myringite bulleuse :
o aspect de bulles sérosanglantes sur le
tympan
o devrait être considérée comme variante
de l'OMA car fréquemment associée à un
épanchement rétro tympanique et mêmes
germes incriminés
 Otorrhée :
o même si purulente, se rappeler qu'elle
peut aussi se trouver dans les OMC et les
OE.

o Complications de l’OMA :
 Intracrâniennes : abcès cérébral, méningite
 Infection de l'apex pétreux
 Sepsis, endocardite
 Labyrinthite
 Occlusion du sinus sigmoïde (latéral)
 compression par l'abcès
 thrombophlébite hématogène
 Mastoïdite
 Signes :
o pavillon décollé
o érythème rétro-auriculaire
o disparition du sillon rétro-auriculaire
o chute du mur postérieur
 Bilan :
o FNS, CRP
o CT-scan céphalique injecté
 Traitement :
o chirurgical : fraiser la corticale mastoïde
et évacuer le pus pour diminuer la
pression qui lyse l’os ; avec mise d'un
aérateur transtympanique pour favoriser
la décompression. Antibiothérapie IV.

- Microbiologie :
o Enfant avant 3 mois
 H. influenza et S. pneumoniae : ensemble : 55 à 75%
des cas
 Branhamella catarrhalis (Moraxella catarrhalis) 5 à
15%
 Staph doré, strepto A (S. pyogenes) : 5%
 Chlamydia pneumoniae, Mycoplasma pneumoniae :
exceptionnels
o Enfant après 3 mois
 Mêmes germes
 En plus : S. aureus, P. aeruginosa, Streptococcus
agalactiae
o Adulte
 L'OMA est exceptionnelle
 H. influenzae et S. pneumoniae
o Résistance aux AB :
 H. influenza :
 bêta-lactamase : clavulanate sensible
 modifications PBP : C3G sensible
 S. pneumoniae :
 modifications PBP : amoxicilline haute dose et
C3G sensibles
 B. catarrhalis :
 bêta-lactamase : clavulanate sensible
o Culture pour OMA ?
 Chez les nouveau-nés, les immunodéprimés et face à
l'échec thérapeutique de 2ème ligne (exceptionnel)
 Deux moyens pour obtenir le spécimen :
myringotomie ou via le nasopharynx.

o Traitement de l'OMA non compliquée :


 Qui traiter ?
 enfant < 2 ans. Nourrisson de < 3mois à
hospitaliser.
 enfant > 2 ans avec symptômes bruyants (fièvre
>= 39, pleurs nocturnes incessants.)
 en dehors de cela, résolution spontanée dans
75% des cas. une réévaluation dans 48h est à
faire.
 Quels AB ?
 De 1ère ligne : plusieurs protocoles acceptés,
tous sont à donner per os : (10j)
o Amoxicilline 80mg/kg/j
o Augmentin dose standard 50mg/kg/j
o C2G (Cefuroxime [Zinnat ®]) ou C3G
(Cefpodoxime [Orelox ®])
o Macrolides JAMAIS. Seulement en cas
d'allergie aux beta-lactamines 
érythromycine.
ème
 De 2 ligne si pas d'amélioration en 48h :
o Augmentin forte dose 90mg/kg/j p.o
o C3G Ceftriaxone [Rocéphine ®] IV ou
IM, hôpital

Otite moyenne chronique séreuse

- Persistance de la collecte liquidienne suite à une OMA, plus


fréquemment chez l'enfant. Il faut que ceci persiste pour > 3 mois
pour envisager un traitement, car avant, résolution spontanée dans
95%. Entre temps elle peut provoquer une hypoacousie. (toujours
interroger en cas de surdité sur les infections récentes). Si retard du
langage, on peut être amené à traiter avant 3 mois.
- Adulte : L'otite séreuse en dehors de l'OMA peut être trouvée chez
l'adulte et doit évoquer un cancer du cavum obstruant la trompe.
- Diagnostic difficile, plusieurs formes : tympan normal, rétracté,
partiellement bombant.
- causes : œdème muqueux, dysfonction tubaire, traitement
inadéquat, reflux gastro-œsophagien.
- souvent perforation du tympan s'associe
- parfois polype dans l'oreille externe, peut devenir OC
choléstéatomateuse (plutôt chez l'adulte) : rentrée de la couche
épithéliale du tympan dans l'OM, acquisition d'un pouvoir érosif
avec lésions de l'OI (surdité de perception, vertige) et de la base du
crâne, paralysie faciale. A réséquer ou aspirer.
- traitement : élimination de l'œdème muqueux, aération, traiter
l'infection
- complications : mastoïdite aigüe, chronique (otorrhée chronique),
intracrânienne (abcès par voie directe (thrombophlébite) ou
hématogène)

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