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Hana ANOUAR. La Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) et son impact sur leur Performance Financière
Mots clés : Responsabilité sociale des entreprises, performance sociale, performance financière, parties prenantes.
Classification JEL : M14
Type de l’article : article théorique.
Abstract
The issue of CSR is more topical than ever. In a perpetual evolution world, the profitability of companies is no longer
the only concern of managers, driven by consumers who are increasingly critical and demanding of companies.
At first glance, financial performance (FP) seems at odds with the logic of CSR. Corporate social responsibility defines
the position of a company in relation to its environment, while the notion of performance questions the sometimes
delicate link between the articulation of resources and the achievement of one or more results. However, the
operationalization of these two constructs has led many authors to identify the same indicators and the same criteria.
Determining the nature of the interaction between corporate social responsibility (CSR) and financial performance has
been the subject of numerous empirical studies.
However, the operationalization of these two concepts leads many authors to identify the same indicators and the same
criteria.
Determining the relationship between corporate social responsibility (CSR) and financial performance has been the
subject of numerous empirical studies. Yet the accumulated evidence on the nature of this relationship is equivocal.
Through this article, we generally aim to review the different theoretical explanations for the relationship between
corporate social responsibility and financial performance. In this respect, we will first clarify the main institutional,
managerial and theoretical definitions of CSR, as well as the definitions of some of the concepts that relate to this notion,
also its genesis. Then, we will clarify and analyze the causal links between corporate social responsibility and financial
performance.
Indeed, there are many theoretical hypotheses linking these two concepts. In 2005, Allouche and Laroche identified nine
such hypotheses, proposing the existence of a positive, negative, mixed, neutral or complex link between these two
constructs. Thus, things become more complicated when considering the direction of causality, i.e., does corporate social
performance influence financial performance or the opposite, or is there a reciprocal impact ?
In addition, the reasons commonly identified to explain the diverse and contradictory results are the difficulty of
measuring the two concepts involved, the sample used, the methodologies adopted and the insufficient consideration of
control variables.
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Introduction
Dernièrement, le monde des affaires s'est de plus en plus mobilisé à propos des efforts
fournis pour la réalisation d'une prise de décision plus socialement responsable, communément
appelée responsabilité sociale des entreprises (RSE). Les entreprises intègrent régulièrement
des objectifs sociaux, environnementaux et de gouvernance dans leurs modèles économiques
en apportant des changements tangibles à tous les aspects de leurs activités (tels que les plans
de production, les méthodes comptables et la recherche et le développement). Reconnaissant
les avantages éventuels de l’amélioration des relations publiques, de nombreuses entreprises
démontrent leur engagement à l’égard de la responsabilité sociale des entreprises, et certaines
fournissent même aux actionnaires un rapport officiel sur leurs pratiques en matière de
responsabilité sociale des entreprises.
L’idée de la RSE est arrivée dans les années 50. Elle propose aux managers de s’orienter, en
plus du profit, vers la portée de leurs entreprises sur la société. L’un des ouvrages fondateurs
de l’idée de la RSE est celui de Howard R. Bowen (Social Responsibilities of the Businessman,
1953). D’après Bowen, il n’est pas possible de réduire l’entreprise à un calcul économique, elle
est influencée par des fondements éthiques (Pierre Le Bourdiec, 2017).
Si la responsabilité sociale des entreprises est désormais vue en tant qu’un outil de
changement positif, beaucoup d’entreprises s’interrogent sur la manière dont elles vont intégrer
les attentes de la société. La réponse est loin d’être claire. Tel que l’indique Pesqueux en 2003,
et qui a considéré que la RSE est un sujet ambigu et controversé que ce soit dans le monde des
affaires que dans le monde académique.
Dans le contexte marocain, la RSE est devenue une thématique d’actualité avec la réception
de la COP 22 à Marrakech en 2016, conférence des Nations unies sur les changements
climatiques, exprimant l’engagement du Royaume dans les politiques de lutte contre le
réchauffement climatique et instituant ainsi les piliers du développement durable et de la
préservation de l’environnement.
Dans ce contexte, les entreprises marocaines se voient de plus en plus interpellées sur leurs
engagements extrafinanciers (sociaux, sociétaux et environnementaux) expliquant ainsi
l’engouement vers les pratiques managériales socialement responsables par les organismes
aussi bien publics que privés (Cherkaoui Adil, 2019).
Ainsi, la CGEM a mis en place en 2006 une charte de RSE pour encourager ses adhérents à
adopter les démarches RSE. Elle a lancé également en 2007 « le Label RSE de la CGEM »
auquel peuvent postuler les entreprises pour concrétiser leur citoyenneté et leur engagement
social.
Cependant, une autre réflexion a été invitée au débat, c'est la réflexion sur la nature du lien
que nous cherchons à établir entre la RSE et la performance financière (PF). Ce débat s’explique
par le fait que les entreprises investissent massivement pour améliorer leur compétitivité dans
un environnement d'hyper-concurrence. L’intégration de la RSE, comme source de
compétitivité, aura un impact plus important sur les finances des entreprises.
Selon Gond (2010), la nature des interactions entre PSE (Performance Sociale des
entreprises) et performance financière reste largement inconnue (Amaazoul H, 2021). Plusieurs
études empiriques n’ont abouti qu’à des résultats ambigus (Allouche et Laroche, 2005 ; Vogel,
2005 ; Margolis et Walsh, 2003 ; Gond, 2001 ; Rowly et Berman, 2000 ; cité par Benlhaj &
Oumari, 2021).
Les explications théoriques visant à clarifier la nature des relations entre performance sociale
et performance financière sont nombreuses. Elles peuvent être organisées en distinguant trois
catégories : les explications postulant l’existence de relations linéaires (lien positif ou négatif)
entre ces deux variables, les explications proposant l’absence d’interaction entre les deux
construits et finalement les explications postulant l’existence de relation non linéaire.
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RSE est l’ensemble des relations que la firme entretient avec toutes ses
Gendron (2002) parties prenantes : les clients, les employés, la communauté, les
actionnaires, les gouvernements, les fournisseurs et les concurrents.
La responsabilité de l’entreprise s’oriente vers tout individu ou groupe
Carroll et Buc-
qui revendique un ou plusieurs différents types d’intérêts vis-à-vis d’une
hholtz (2003)
entreprise.
La RSE s’inscrit dans une représentation de l’entreprise ‘encastrée’ au
Capron et al.
sien d’un réseau de relations avec les acteurs de son environnement
(2004)
social.
La conception axée sur le contenu
La RSE comme intégration de multiples dimensions sociétales
La RSE est l'articulation et l'interaction entre (a) différentes catégories
Carroll (1979) de responsabilités sociétales, (b) des problèmes spécifiques liés à ces
responsabilités et (c) des philosophies de réponse à ces problèmes.
La RSE est l’interaction sous-jacente entre les principes de
Wartick et
responsabilité sociétale, le processus de réceptivité sociétale et les
Cochran (1985)
politiques mises en œuvre pour faire face aux problèmes sociaux.
La RSE est une configuration organisationnelle de principes de
responsabilité sociétale, de processus de réceptivité sociétale et de
Wood (1991)
programmes/politiques/résultats observables liée aux relations
sociétales de l'entreprise.
La RSE est une configuration résultant d’une interaction entre macro-
Swanson (1995) principes, micro-principes de la RSE, d’une part, et culture
organisationnelle et impact social, d’autre part.
La RSE incarne la logique de la contingence, elle serait donc une
fonction d’interaction entre d’une part, les problèmes sociaux, et d’autre
Husted (2000)
part la stratégie et la structure organisationnelle qui sont inhérentes à ces
problèmes.
La RSE renvoie à la nature des interactions entre l’entreprise et la
société, et formalise l’idée selon laquelle l’entreprise, du fait qu’elle
Igalens et Gond
s’agisse dans un environnement qui est à la fois social, politique et
(2003)
écologique, doit assumer un ensemble de responsabilités au-delà de ses
obligations purement légales et économiques.
Dans une conception actuelle, la Responsabilité Sociale de l’Entreprise
intègre trois éléments : honorer des obligations à l’égard de la pluralité
Allouche et
des parties prenantes ; répondre aux demandes sociales émises par
Laroche (2005)
l’environnement socio-économique ; utiliser le concept et son champ
d’application comme outil de gestion.
La RSE renvoie aux modalités de réponse de l’entreprise aux
interpellations sociétales en produisant des stratégies, des dispositifs de
Capron et Quairel- management, de conduite de changement et des méthodes et des
Lanoizelée (2007) méthodes de pilotage, de contrôle, d’évaluation et de reddition
incorporant (du moins en principe) de nouvelles conceptions de
performances.
L’idée de la RSE répond à une représentation élargie de
Dkhili et al. l’environnement des firmes, entendue non seulement dans ses
(2014) dimensions économique et financière, mais aussi sociale, humaine et
écologique.
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Clarkson La PSE est la capacité à satisfaire -Le modèle propose une typologie de
(1995) ses parties prenantes et à les gérer problèmes spécifiques pour chacune des
de manière proactive parties prenantes qu’il distingue :
employés, propriétaires/actionnaires,
consommateurs, fournisseurs, pouvoirs
publics (ex : administrations, agences de
régulation, concurrents…).
- Le niveau de réactivité par rapport à
chaque partie prenante est évalué sur une
échelle comprenant quatre positions :
réactive, défensive, d’accommodation,
proactive.
Source : Mullenbach et Gond (2004) ; cité par Jaouad EL MANZOUDI, 2017
À cet égard, nous pouvons conclure que la performance sociale (PSE) constitue l’ensemble
des obligations que les entreprises s’engagent de manière volontaire envers leurs parties
prenantes aux niveaux économique, légal, éthique, et philanthropique.
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ont fait l’objet de tentatives de vérifications empiriques, sont présentées dans le tableau ci-
dessous :
Tableau 4 : Les hypothèses théoriques relatives aux relations PSE-PF
Nature de la relation entre PSE et PFE
Causalité postulée Relation linéaire
Lien positif Lien négatif
PS PF H.1. Hypothèse de l’impact social H.2. Hypothèse de l’arbitrage.
positif ou du bon management.
PF PS H.3. Hypothèse des fonds H.4. Hypothèse de
disponibles ou slack (jeu) l’opportunisme.
organisational.
PS PF H.5. Hypothèse de la synergie H.6. Hypothèse de la synergie
positive négative
PSE ∅ PFE Absence de relation
H.7. Hypothèse de l’absence de relations entre les deux entités.
PSE ∩ PFE Relations complexes :
H.8. Hypothèse de l’existence d’une relation plus complexe qu’une
relation linéaire.
Source : adapté de Gond (2001), construit par Preston et O’Bannon (1997) ; cité par Gond et Igalens, 2016.
Les explications théoriques qui ont pour objectif d’éclaircir la nature de la relation existante
entre la performance sociale et la performance financière sont très nombreuses.
- Hypothèse de l’impact social (H1)
Les tenants de la théorie des parties prenantes pensent qu’une meilleure prise en compte des
besoins des différentes parties prenantes se traduira finalement par une amélioration de la
performance financière, et vice versa (Freeman, 1984; Ulmann, 1985 ; Clarkson, 1995 ;
Donaldson et Preston, 1995 ; Balabanis et al, 1998).
D’après Cornell et Shapiro (1987), la non-réponse aux attentes des différentes parties
prenantes est susceptible d’engendrer des perturbations au niveau du marché, ce qui peut
entrainer un accroissement de la prime de risque de l’entreprise, et qui se traduira généralement
par une augmentation des coûts et/ou une diminution des profits. Toutefois, la satisfaction des
parties prenantes (employés, clients, fournisseurs…) améliore l’image et la réputation de
l’entreprise, et par conséquent sa performance financière. Inversement, le fait que l’entreprise
ne répond pas à leurs attentes peut influencer négativement sa performance financière. Par
conséquent, cette hypothèse montre qu’il existe une relation de « lead and lags » entre
performance sociale et performance financière. Cela vaut dire que c’est la PSE qui se développe
en premier (en termes d’image et de bonne ou mauvaise réputation) et impacte ensuite
positivement ou négativement la performance financière.
- Hypothèse des fonds disponibles ou slack organisationnel (H2)
Selon les travaux de McGuire et al. (1988) et qui sont confirmés par Preston et al. (1991), ce
modèle stipule que plus une entreprise est performante financièrement plus elle sera
performante sociétalement (Allouche et Laroche, 2005). En d’autres termes, ce modèle
considère que ce n’est pas la RSE qui permet d’obtenir un niveau élevé de la performance
financière, mais au contraire, les entreprises les plus performantes sur le plan financier sont
parfois les entreprises les plus performantes au niveau de la RSE.
Dans ce cas, nous remarquons que la PSE et PFE sont positivement corrélées mais cette fois
c’est la PFE qui exerce un effet sur la PSE. Cela peut être s’expliqué par le fait que seules les
entreprises procurant des profits conséquents ont les moyens matériels d’investir dans des
projets discrétionnaires, ce qui entraine par la suite à l’amélioration de la performance sociale.
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Il existe une autre relation positive, mais cette fois entre la dimension «optimisation des
ressources et relations avec les fournisseurs », la dimension « employé » et le « Q de Tobin » à
Taiwan (Benali et al., 2021).
2.1.2. Implications managériales : construire la relation positive entre PSE et PF
D’un point de vue pratique, beaucoup d’entreprises s’efforcent de construire de telles
justifications avant d’engager des politiques de RSE en évaluant les bénéfices attendus et les
coûts de mise en œuvre de ces programmes. Il s’agit donc d’aller au-delà du questionnement
relatif à l’existence d’une corrélation générale entre PSE et PF pour chercher à comprendre
pourquoi et comment la recherche d'une performance sociale, dans une organisation spécifique,
peut aider à améliorer la performance financière.
Les principaux arguments proposés dans la littérature pour la justification de l’existence d’un
business case sont les suivants (Gond et Igalens, 2016) :
- La PSE contribue directement à la réputation de l’entreprise et lui permet d’obtenir la
légitimité nécessaire pour se procurer le soutien autorisant le déploiement de ses
opérations ;
- La PSE peut changer le jeu concurrentiel en contribuant à l’augmentation des coûts
d’entrée sur un marché et pour des concurrents en contribuant à élever les standards en
matière de réglementation du travail, de l’environnement et/ou de la santé;
- La PSE envoie un signal de qualité des emplois offerts (ex : bon traitement des
employés) qui peut accroître considérablement l’attrait d’une organisation auprès
d’employés potentiels, en particulier pour les emplois les plus qualifiés ;
- La PSE joue un rôle positif dans le processus d’achat des consommateurs et peut
notamment renforcer le caractère distinctif du positionnement d’une marque et être
perçue par les consommateurs comme attribut important du produit, elle peut donc ainsi
contribuer à augmenter le chiffre d’affaires de l’entreprise ;
- La PSE est un outil de maitrise de risques. Les entreprises les plus performantes du point
de vue de la PSE sont aussi celles qui ont les niveaux de risque les moins élevés d’après
de nombreuses études empiriques. Par ailleurs, la PSE peut parfois contribuer à
diminuer les coûts et améliorer l’efficience ;
- La PSE peut aussi être vue comme un outil de gestion des ressources humaines, car elle
peut affecter les perceptions des employés et renforcer positivement des attitudes telles
que la satisfaction au travail, l’engagement au travail.
2.2. Les limites de recherche de la relation PSE/PFE
Plusieurs limites méthodologiques sont présentées par les travaux empiriques traitant la
relation entre performance sociale et performance financière. Ces limites concernent
généralement la nature des échantillons des entreprises considérés (taille et secteur) qui se
diffère d’une étude à l’autre, ainsi que l’opérationnalisation de la PS et de la PF.
D’après El Malki (2010), les diverses limites et difficultés qui découlent de très nombreux
textes abordant la relation PSE/PFE sont essentiellement de nature méthodologique :
➢ Les problèmes liés aux échantillons retenus ;
➢ Des traitements statistiques souvent discutables ;
➢ L’insuffisante prise en compte des variables de contrôle.
2.2.1. Les problèmes liés aux échantillons retenus
Selon Cottrill (1990) et Fry et Hock (1976), les principaux déterminants de l’investissement
socialement responsables sont la taille des entreprises et leur visibilité sur le marché (Allouche
et Laroche, 2005). À cet égard, il est essentiel de prendre en considération les caractéristiques
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des entreprises dans les études visant à mieux comprendre la nature d’interaction entre la PS et
PF.
La majorité des études examinant cette relation PSE/PFE utilisent des données
intersectorielles, tandis que de nombreuses études recommandent de réaliser davantage des
recherches sur des secteurs d’activités spécifiques. En conséquence, 78% des études ont
sélectionné des populations appartenant à des secteurs différents plutôt que de se concentrer sur
un seul secteur (El MALKI.T et M’ZALI. B, 2014).
2.2.2. Des traitements statistiques souvent discutables
Les études analysant le lien entre PSE et PF ont utilisé deux grands types de traitement
statistiques (El Malki et M’Zali, 2014). Le premier type est celui de recherches qui comparent
la performance financière moyenne de plusieurs entreprises qui ont des niveaux de PSE
différents. Le second est celui de recherches visant à évaluer leniveau d’association entre la
PSE et la PF à travers des analyses de corrélation ou à travers des modèles de régression
multiple.
Ainsi, dans plusieurs recherches, la sophistication des traitements statistiques employés n’est
pas sans commune mesure liée à la qualité des données utilisées. En outre, face à la complexité
des objets de recherche, les moyens méthodologiques retenus sont le plus souvent insuffisants.
En plus, l’interaction entre la PSE et la PF est examinée, dans certaines études à travers
l’utilisation de tris croisés et de corrélations simples (Moskowitz, 1972 ; Heinze, 1976 ; Kedia
et Kuntz, 1981), tandis que dans d’autres études à travers des modèles d’équations structurelles
(Johnson et Greening, 1999).
2.2.3. L’insuffisante prise en compte des variables de contrôle
Trotman et Bradley (1981) considèrent que la relation entre la PSE et la PF peut être
impactée par d’autres facteurs (El Malki et M’Zali, 2014). Il s’agit, par exemple, de la taille des
entreprises, du secteur d’activité, du risque financier ou de l’investissement en R&D. Afin
d’appréhender la relation entre la PSE et la PF, il est essentiel de prendre en compte ces variables
de contrôle. Ainsi, la comparaison entre les résultats devient difficile et leur généralisation est
impossible parce qu’il n’existe pas un consensus entre les chercheurs sur la nature et le nombre
de variables de contrôle à prendre en compte. Cependant, ces variables ne sont pas prises dans
le modèle empirique de certaines études, ce qui peut mener à des résultats trompeurs.
En effet, la performance financière, la performance sociale ainsi que la relation entre ces
deux performances peuvent être affectées par la taille de l’entreprise (Orlitsky, 2001 ; cité par
El Malki et M’Zali, 2014). En d’autres termes, plus l’entreprise est grande, plus elle dispose
des ressources financières et donc elle peut investir dans des programmes sociaux (Fikri, 2015).
À cet égard, sa prise en compte comme variable de contrôle dans les modèles empiriques permet
alors de modifier les résultats d’une manière significative.
De la même manière, l’investissement en R&D a été considéré comme une variable qui peut
impacter la relation entre la PSE et la PF (McWilliams et Siegel, 2000 cité par Malki et M’Zali,
2014). Ainsi, l’étude menée par Graves et Waddock (1997) a déjà montré qu’il existe une
corrélation entre la qualité du management et la performance financière des entreprises. En
conséquence, la prise en compte de cette variable, lorsque cela est possible, dans les études
évaluant le lien d’interaction entre la PSE et PF est nécessaire.
Enfin, la nature de l’activité de l’entreprise (exportatrice ou non exportatrice) influence sa
performance sociale du fait que les entreprises exportatrices doivent respecter l’ensemble des
exigences de leurs clients potentiels dans les marchés étrangers, y compris la conformité à des
normes sociales et/ou environnementales.
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Conclusion
Dans un environnement caractérisé par une concurrence de plus en plus acharnée, par une
interaction de plus en plus intensive entre les parties prenantes et les organisations, l’avantage
compétitif peut être développé pour inclure la PSE et la performance financière. En
conséquence, dans cet environnement, exigeant une performance financière et une grande
efficacité en termes de réactivité vis-à-vis des parties prenantes, les entreprises essayent
d’élaborer des stratégies qui leur permettront de survivre et de s’épanouir. Autrement dit, une
entreprise peut désormais être obligée d’atteindre des performances élevées en maintenant la
qualité des produits, en respectant l’environnement naturel et en répondant aux besoins des
communautés où elle opère et des employés qu’elle emploie.
Dans ce travail, nous avons poursuivi deux objectifs principaux. Le premier était de définir
le concept RSE, en mettant l’accent sur ses principales définitions institutionnelles et
académiques, ainsi que les définitions des différents concepts qui se rapportent à la RSE à
savoir : la performance sociale des entreprises et leur performance financière. Le deuxième
objectif était de représenter la relation existante entre la performance sociale et la performance
financière. L’étude de cette relation a attiré l’attention de nombreux chercheurs dans différents
domaines gestion, finance, stratégie et organisation des entreprises, etc.).
Face à l’institutionnalisation contemporaine des pratiques, la question des retombées
financières de la RSE sera toujours posée par les gestionnaires, les dirigeants ou les financiers
des entreprises. À cet égard la clarification de l’impact de la responsabilité sociale des
entreprises sur leur performance financière a fait l'objet de nombreuses études préalables. En
1953, Bowen a analysé les arguments économiques remettant en question la RSE.
Ces travaux se sont consacrés pour la détermination de la nature des interactions existante entre
l’aptitude des entreprises à obtenir un haut niveau de RSE et leur performance financière en
examinant les interactions entre, d’une part, la performance sociale de l’entreprise (PSE) et
d’autre part, sa performance financière (PF). Trois niveaux d’analyse à travers lesquels ces
interactions ont été étudiées (Gond et Igalens, 2016). Un niveau théorique recherchant à
débrouiller les mécanismes explicatifs des liens entre ces variables, un niveau empirique
recherchant à expliquer la nature de l’interaction entre les indicateurs de mesure de ces concepts
et en s’appuyant sur des méthodes statistiques, et enfin un niveau plus pragmatique et
managérial, visant à clarifier pourquoi la PSE et la PF peuvent converger, en construisant un
business case de la RSE.
Des résultats divergents et contrastés ont été obtenus par plusieurs recherches. Cette
divergence entre les résultats peut avoir plusieurs origines dont notamment des problèmes liés
aux échantillons retenus, des traitements statistiques souvent discutables et l’insuffisante prise
en compte des variables de contrôle.
Les partisans de la théorie instrumentale des parties prenantes considèrent qu’une meilleure
prise en compte des parties prenantes est un prérequis pour l’amélioration de la performance
financière de la firme, et donc la PS et PF sont positivement corrélées. Les opposants de cette
théorie suggèrent qu’il existe un lien négatif entre la PS et la PF.
Bien que d’autres auteurs suggèrent qu’il y a aucune relation entre ces deux construits, par
contre d’autres signalent qu’il existe une relation non linéaire.
Pour conclure, et en raison de l’intérêt récent accru pour la RSE, les recherches doivent
fournir des explications plus globales de la PSE et de ses implications financières. Ces
recherches peuvent présenter un intérêt aussi bien pour les dirigeants des entreprises que pour
les agences de notation sociétale. Elles peuvent contribuer à convaincre le top management des
entreprises de l’utilité de l’investissement en matière de RSE dans l’hypothèse du lien positif
entre la performance sociale des entreprises et leur performance financière. Autrement dit, une
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bonne compréhension de la nature d’interaction entre PSE et PF aidera les chefs d'entreprise et
les investisseurs dans leur processus de décision.
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