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Electrifier

l’Afrique rurale
Un défi économique,
un impératif humain
Sous la direction de la
Fondation Énergies
pour le Monde

Préfaces de
Jean Louis Borloo
et Lionel Zinsou

Observ’ER
Sous la direction de la
Fondation Energies pour le Monde

Electrifier l’Afrique rurale


Un défi économique,
un impératif humain.

Observ’ER
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BP 52179 - 35221 Châteaubourg Cedex

Conception et mise en œuvre Achevé d’imprimer en octobre 2019


ISBN-978-2-913620-63-6
Cet ouvrage ne peut être vendu.
Éditeur :
Couverture : © Cyril le Tourneur d’Ison

146 rue de l’Université – 75007 Paris


Tél. : 01 44 18 00 80 – Fax : 01 44 18 00 36
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Auteurs : Gérard Madon, Yves Maigne, L’utilisation ou la mise en pratique de tout élément de cet
Etienne Sauvage, Sarah Vignoles ouvrage est de la responsabilité unique de la personne en
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tées, incomplètes ou fausses, la responsabilité de l’éditeur
Mise en page : Alice Guillier ou de l’auteur ne serait pas engagée, y compris pour les con-
Relecture et corrections : Charlotte de L’escale séquences qui pourraient en découler.
Electrifier
l’Afrique rurale
Un défi économique,
un impératif humain.
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Avant-propos
L’ Afrique : une triple révolution

Vouloir faciliter l’accès à l’énergie dans les pays du Sud, et en


premier lieu en Afrique, c’est non seulement garantir la réus-
site de nos politiques climatiques, mais c’est aussi prévenir un
enjeu crucial pour la paix et la stabilité du monde. Pourquoi ?
Parce qu’en Afrique, nous sommes face à une triple  révolu-
tion et chacune d’elle, par sa vitesse et par ses impacts, est
© DR

inédite dans l’histoire de l’humanité.

Première révolution, le choc démographique


La population africaine devrait doubler dans les trente ans qui viennent. Le continent,
dont le nombre d’habitants a été multiplié par dix depuis l’accès à l’indépendance et/
ou la création de nouveaux États, devra nourrir, loger, soigner, former, employer plus
d’un milliard de personnes supplémentaires d’ici 2050. Un milliard de jeunes de moins
de 30 ans – ils ne sont pas encore nés – vont représenter à l’échelle de la planète un
actif sur quatre. Leurs modes de vie – produits de consommation courante, transport,
habitat… – et leurs façons de travailler et de produire seront évidemment déterminants
pour le succès ou l’échec des politiques climatiques engagées ailleurs sur la planète.

Seconde révolution, les communications


La rapidité de diffusion de la téléphonie mobile et des smartphones est tout simplement
hallucinante : on compte aujourd’hui 995 millions d’abonnés au téléphone et 362 mil-
lions d’internautes. Il n’y a que peu de foyers qui sont dépourvus de téléphone porta-
ble alors même qu’il faut marcher des kilomètres pour aller le recharger parce qu’il n’y
a pas encore l’électricité… Toute l’Afrique a fait en moins d’une décennie un saut tech-
nologique et, ce faisant, a vu ses perceptions, ses représentations, ses modes de vie et
de production bouleversés, en moins d’une génération.

C’est à la fois une menace et une opportunité. Désormais, il est vain d’imaginer séden-
tariser des populations qui n’ont pas accès aux services essentiels indispensables
au développement alors qu’elles sont connectées avec le reste du monde et voient
Paris, Addis-Abeba, Londres ou Lagos briller de mille  feux. Et demain, plus encore
qu’aujourd’hui, la jeunesse n’aura de cesse de prendre la route, attirée par les lumières
et la musique de la ville. C’est une chance aussi, car avec la communication, on accède
à la modernité en tous points du territoire. Il est possible d’anticiper les récoltes, de

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connaître les prévisions météo, d’alerter ou de prévenir des risques, de payer ou d’être
payé. Et il est désormais faisable d’acheter de l’électricité à la demande, en fonction de
ses besoins, mais surtout de ses ressources, comme on acquiert déjà des unités de
communication. On appelle cela le pay as you go, une expression qui, à elle seule, illustre
ce monde du nomadisme et de la communication permanente dans lequel nous som-
mes entrés avec tout le village planétaire.

Troisième révolution, l’accès à l’énergie


L’accès à l’énergie est un enjeu universel. C’est ce qui permet d’atteindre les droits fon-
damentaux : l’eau potable, mais aussi l’assainissement des eaux usées, l’éducation et la
santé, l’emploi et la sécurité, la stabilité, en un mot le droit de vivre dignement dans son
bourg ou dans son quartier. Et c’est un des objectifs de développement durable adop-
tés par l’Assemblée générale des Nations unies en 2015, qui entend « assurer à tous un
accès à une énergie abordable, fiable, durable et moderne d’ici 2030 ».

Or l’Afrique est plongée dans le noir alors qu’il serait possible de permettre l’accès à
l’électricité à quelque 620 millions d’Africains qui en sont dépourvus, dont près de 80 %
vivent en milieu rural. Une opération à double dividende puisque les Africains auraient
donc accès au développement et, simultanément, l’Afrique deviendrait le premier con-
tinent faisant massivement appel aux énergies renouvelables, ouvrant ainsi la voie à un
monde décarboné, condition de survie de l’humanité. Ce n’est pas une gageure, c’est
un pari fou peut-être, un défi certainement, mais qui reste à notre portée. Pourquoi  ?
Comme pour la téléphonie, l’absence de réseau est une opportunité à saisir pour dével-
opper un peu partout des minigrids à l’échelle de la commune ou du canton alimentés
par de petites centrales photovoltaïques ou hydrauliques. Les progrès technologiques
et les effets d’échelle font aujourd’hui des énergies renouvelables des sources compé-
titives qui, dans la majorité des cas, sont moins onéreuses que celles produites par de
petits groupes diesel. Les technologies sont robustes et adaptées à ce continent qui
est béni des dieux, ici pour son irradiation solaire, là pour son régime de pluie ou ses
gisements éoliens et partout pour son gigantesque potentiel de biomasse.

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L’urgence d’agir
Cette triple révolution – démographie, communication et accès à l’énergie – est fasci-
nante et doit nous interpeller. C’est évidemment un devoir d’humanité, car on ne saurait
laisser dans le noir un terrien sur quatre, mais c’est aussi un devoir pour l’humanité qui
joue là sa survie. Nous n’avons pas le choix et il est urgent d’agir.

En premier  lieu, les émissions de gaz à effet de serre dont l’Afrique est responsable
sont aujourd’hui quantité négligeable, et pourtant elle paie déjà le prix fort en termes
d’impacts du changement climatique : pénuries en eau ou épisodes cycloniques dévas-
tateurs, recrudescence des maladies, malnutrition et famines à répétition, événements
météorologiques extrêmes…

Second constat, si l’Afrique n’est que peu responsable de ces émissions, ce n’est évidem-
ment pas une situation figée : ces cinq dernières années, 30 % des découvertes de res-
sources fossiles dans le monde l’ont été en Afrique subsaharienne. Pas plus que les pays
du Nord, pendant le siècle passé, les pays du Sud concernés ne pourront résister à cette
manne qui gît dans leur sous-sol si rien n’est fait aujourd’hui pour les en dissuader.

Accompagner, donner un coup de main modeste pour permettre l’émergence du pre-


mier continent décarboné de l’humanité qui fera appel à 100 % d’énergie renouvelable,
c’est jouer un coup d’avance. Il s’agit d’une course contre la montre qu’il nous faut pourtant
impérativement gagner car l’Afrique n’attendra plus.

Jean-Louis BORLOO,
président de la Fondation Énergies pour le Monde

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“Il est temps d’être optimiste”


Entretien avec Lionel Zinsou

Fondem  : Il y a quelques années, vous avez déjà préfacé un


texte de Christine Heuraux sur les défis de l’électrification de
l’Afrique. En quoi ce sujet vous semble-t-il essentiel ?

Lionel Zinsou  : Durant mes années d’exercice au Bénin, nous


avions le projet “ Lumière pour tous ” de distribution de lampes
© DR

solaires pour équiper les ménages, les centres de santé, les


écoles. Ce projet m’a permis de rentrer dans la problématique de
l’accès à l’électricité et il m’a convaincu qu’il fallait faire la démonstration qu’une initiative
de grande envergure était possible et qu’elle était porteuse de nombreux bénéfices de
pouvoir d’achat, de santé publique, d’éducation et de sécurité.

Agir pour l’accès à l’électricité, c’est d’abord une question de crédibilité pour les gou-
vernements. En effet, il ne faut pas se méprendre : l’électrification ne progresse pas et
on prend dix ans de retard chaque année, ce qui fait que 70 % de la population rurale
en Afrique n’a pas accès à l’électricité. S’il existe un fort exode rural, la dynamique
démographique est telle qu’il y a toujours plus d’habitants dans les campagnes, là où il
n’y a pas l’électricité et où la population ne croit plus en l’électrification, alors que c’est
une revendication majeure, un droit social.

Les bienfaits de l’accès à l’énergie sont évidents. Dans les arrondissements les plus
pauvres du Bénin, un accès gratuit à des lampes solaires et à la recharge de téléphones
portables suscite une économie de 100 000 FCFA/an (153 €/an). Loin d’être néglige-
able, cette économie a un effet macroéconomique important en termes de pouvoir
d’achat. C’est un premier  résultat. Mais au-delà de l’impact financier, les bénéfices
immatériels sont aussi extrêmement sensibles. Le lien entre accès à l’électricité et édu-
cation est évident comme l’a montré, encore au Bénin, la distribution de lampes dans
les écoles béninoises qui a suscité une vague d’inscriptions. D’autres impacts existent :
l’autonomie et la vie collective des femmes, la sécurité et la santé publique.

Fondem : Vous dites que les Africains ne croient plus à l’électrification alors que c’est
une revendication majeure. La situation peut-elle évoluer ?

Lionel Zinsou  : Éducation, santé, eau et électricité sont les quatre  revendications
essentielles des populations. Ce sont les biens publics fondamentaux auxquels il est

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aujourd’hui nécessaire d’ajouter la connectivité, désormais incontournable. Auparavant


réservés aux riches, ces services sont devenus des exigences de tous. C’est un phé-
nomène de masse. Inscrits dans une démarche démocratique, les Africains attendent
de plus en plus que les pouvoirs publics satisfassent ces besoins et entendent, s’ils n’y
répondent pas, les sanctionner. C’est une situation nouvelle.

Le programme “  Lumière pour tous  ” que j’évoquais et qui disposait de financements


de plusieurs bailleurs de fonds a été perçu par certains comme une initiative liée à des
ambitions électorales. Cette attitude montrait en fait une profonde indifférence des per-
sonnes qui disposent déjà de l’électricité à l’égard de celles qui ne l’ont pas. Nous som-
mes loin d’une société de péréquation, nous étions même encore dans le déni.

Mais le contexte a profondément changé. Dans mon enfance, le pays n’avait pas
l’électricité, mais on pensait qu’on ne l’aurait jamais. Il n’y avait ni routes ni port… On n’avait
rien et c’était la norme. Aujourd’hui le port de Lomé est le plus grand port d’Afrique. Et
aujourd’hui, la norme, c’est que cette absence de services est intolérable : on ne peut
pas vivre sans électricité. C’est devenu un besoin fondamental, tout comme le télé-
phone. Ce changement radical des attitudes a eu lieu ces quinze  dernières années  :
l’inexistence des biens publics est insupportable. Et c’est cela qui nous avait fait agir en
montant le programme “ Lumière pour tous ”.

À partir de cette notion du droit aux services essentiels, beaucoup de programmes


peuvent se construire avec les populations et bien entendu les ONG qui sont des pion-
nières dans le domaine. Des systèmes innovants et de nouveaux modèles économiques
sont à élaborer. Mais je pense que le mouvement est inexorable et que c’est l’affaire des
dix prochaines années.

Fondem : Le Sénégal, qui réfléchit à l’harmonisation des tarifs pour favoriser l’accès
à l’électricité en zone rurale, n’imagine pas une mécanique de péréquation, difficile à
tenir… Alors, comment satisfaire la demande d’électricité en milieu rural en respectant
à la fois l’accessibilité tarifaire et la viabilité économique ?

Lionel Zinsou : C’est le cœur du problème. En milieu rural, vous ne pouvez pas payer le
vrai coût de l’électricité. Il est donc impossible de développer cette électrification en pas-
sant par le réseau national. En 1980, on disait que l’électrification rurale en Afrique serait
universelle et achevée en 2000. En 1990, on disait que ce serait en 2010, aujourd’hui,
en 2030… En fait, c’est impossible car nous n’avons pas les ressources financières suf-
fisantes – et si c’est une gestion privée encore moins – pour aller jusqu’au dernier village
qui dispose de peu de ressources et consomme peu. C’est pourquoi il faut développer
des systèmes décentralisés et hors réseau pour en réduire les coûts, les pertes en ligne
et pour les rendre accessibles même s’ils nécessiteront toujours une aide et du credit
pour l’investissement venant de bailleurs publics ou privés.

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Fondem : Dans ce processus, quel est le rôle des bailleurs de fonds internationaux ?

Lionel Zinsou : Je pense que les bailleurs de fonds sont dans une période de contrition :
ils n’ont pas vraiment aidé à améliorer la situation du continent et ne sont pour rien dans
l’évolution du mix énergétique car ils ne l’ont pas considérée comme une priorité. Ce n’est
pas surprenant puisque l’agriculture – liée à la problématique de l’électrification –, qui est le
premier secteur d’activité en milieu rural, a été négligée par les bailleurs de fonds pendant
trente ou quarante ans. Alors même que c’est elle qui fixe la population rurale. Le nombre des
interventions de la Banque mondiale sur l’agriculture a été divisé par deux. Pour la Banque
africaine de développement également, l’agriculture représente 8 % du portefeuille, alors
que ce secteur correspond à 25 % du PIB africain et emploie 50 % de la population active.
Depuis la Révolution verte, la problématique de l’agriculture est passée en second plan, ce
qui fait que l’électrification du milieu rural a elle-même été négligée. Cette situation, défavor-
able au monde rural, est aussi liée au modèle de financement des bailleurs de fonds. Ils tran-
sitent par les gouvernements et véhiculent implicitement un modèle intensif : « L’avenir n’est
pas l’agriculture familiale, c’est la transformation, le tertiaire… »

Fondem : Et comment cette situation pourrait-elle évoluer ?

Lionel Zinsou : Le contexte n’est plus le même. Nous sommes en transition démocra-
tique et les populations portent des revendications. Or la démocratie est plus vivante à
l’échelle locale que nationale car il est toujours plus important pour des pouvoirs centraux
de contrôler l’élection présidentielle que celle du maire. Certes, ces derniers sont encore
souvent privés de ressources propres, mais la situation est en train d’évoluer. C’est inté-
ressant parce que les collectivités territoriales sont sous le contrôle direct et vigilant des
citoyens, et la corruption a moins de prise car les ressources à détourner sont moindres.
Ainsi, des problèmes inhérents au montage et à l’exécution de projets en milieu rural vont
pouvoir être réglés et surmontés au niveau des collectivités locales.

Fondem : Dans ce contexte, les acteurs financiers locaux ont-ils une place ?

Lionel Zinsou  : Bien sûr. Je pense que tout va se passer sur le terrain local, de façon
décentralisée. Preuve que cela change, c’est la microfinance qui contribue le plus au
fonds de roulement pour le commerce et les ménages. Elle fait par nature l’objet d’un
contrôle social, et elle affiche des taux de recouvrement qui atteignent 95 % contre 50 %
pour n’importe quel opérateur bancaire classique. De la même manière, les services en
matière d’énergie et d’eau pourront être portés à l’échelle territoriale par des entreprises
locales et des structures de microfinance. Elles sont indissociables. L’abonnement aux
services de l’énergie va fonctionner grâce à cette même logique du microcrédit, contrôlé
par la communauté solidaire, et non pas comme dans les quartiers périurbains où la com-
munauté est solidaire pour ne pas payer les consommations à l’entreprise publique…

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Fondem : Les collectivités locales du Nord ont-elles une carte à jouer ?

Lionel Zinsou : À l’évidence. La coopération décentralisée atteint mieux ses objectifs


que la coopération centralisée, notamment parce qu’elle ne passe pas par les finance-
ments de l’État. Il y a beaucoup moins de pertes en ligne. Je crois également que les col-
lectivités territoriales africaines sont en train de se transformer et de revendiquer leur
identité économique et que la coopération décentralisée peut beaucoup leur apporter.
Elle est assez aisée, fructueuse, saine, pratique et plus éthique que la coopération cen-
tralisée car un projet d’État à État consomme invariablement 50 % des fonds qui lui sont
dédiés. Si on imagine un jumelage entre les petites villes, comme Komé ou Bopa, avec
les collectivités territoriales d’un autre pays, vous verrez beaucoup plus de résultats,
moins de bureaucratie, plus de rendement avec des montants de transaction beau-
coup plus faibles.

Fondem : Ne faudrait-il pas profiter en France du prochain débat parlementaire sur la


loi pour le développement pour recommander d’accélérer cette coopération sur de
petits projets locaux plutôt que de réaliser de grands programmes nationaux ?

Lionel Zinsou : Aujourd’hui, il est plus facile, je crois, de financer des grandes infrastruc-
tures énergétiques que des petites, délocalisées. C’est bien pourquoi ces dernières
méritent d’être considérées en priorité dans la mesure où les mécanismes de marché
sont beaucoup moins rodés. Trouver une réponse à la question du financement des
petites infrastructures électriques n’est pas simple. Les modèles économiques sont à
ajuster selon le contexte local. Certains projets de minigrids locaux doivent être sub-
ventionnés, parce que les recettes issues du paiement de l’électricité ne couvriront que
les frais généraux et la maintenance mais pas le coût du projet, alors qu’ailleurs, parce
qu’il y aura un ou deux consommateurs industriels significatifs, le modèle économique
sera très différent. Mais cela ne veut bien entendu pas dire qu’il faut exclure les cofi-
nancements de projets de grande taille.

Fondem : Et quel serait alors le rôle des bailleurs de fonds institutionnels ?

Lionel Zinsou : Les bailleurs de fonds, pour revenir à eux, n’ont pas d’intérêts person-
nels et de demandes des États souverains pour soutenir les secteurs agricoles et donc
les populations rurales. De plus, ils ne sont pas outillés pour appréhender les projets
de petite taille. La façon dont les banques peuvent intervenir sur un financement de
masse, c’est de refinancer les associations de microfinance, et surtout de ne pas faire
elles-mêmes des microcrédits de 200 € ou 500 € sur lesquels elles perdront de toute
façon de l’argent. Il en va de même pour les bailleurs de fonds : il leur faut trouver des
structures qui refinancent les programmes plutôt que de les financer directement. Ils
gagneront en efficacité et cela à moindre coût.

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Fondem : Comment faudrait-il opérer le changement d’échelle ?

Lionel Zinsou : Il faut regrouper des petits projets pour leur permettre d’être financés.
Et il faut que le secteur privé ou associatif en capacité de monter et gérer de tels projets
en association avec les collectivités locales soit refinancé. Je reste convaincu que l’on va
passer à l’échelle assez vite, que beaucoup de projets sont viables, même si les facteurs
de pérennité - l’environnement local, la nature de la demande, etc -, sont exogènes. Je
pense que le rôle des bailleurs de fonds est tout trouvé. Attijari, par exemple, première
banque commerciale concessionaire du Green Climate Fund, est en train de mobiliser
tout son réseau d’agences pour faire remonter des projets. Ce sera assez intéressant de
voir ce que ça donne. En tant que membre du conseil d’Attijari, je vais m’attacher à suivre
ces questions directement en accord avec le président : voir ce que le réseau remonte, et
si un réseau de banques peut aider à la mise en place de projets, pas seulement d’énergies
renouvelables. A l’image de cette expérience, on devrait avoir des projets et des solutions
de toutes tailles.

Il faut mixer des fonds d’origines différentes, prendre un peu de liquidités privées, un
peu de concours de la Banque mondiale, de l’AFD, etc., pour augmenter les budgets et
ensuite continuer à travailler, à travers ces partenariats avec le secteur privé. Les opéra-
teurs ont besoin de ces concours qui nécessitent des financements hybrides. Je suis
assez confiant et je crois que cette approche va rentrer dans les mœurs. Il est temps
d’être optimiste. Mais il s’agit encore de « sur-mesure », et non de « prêt-à-porter » finan-
cier. C’est un environnement plus complexe, taillé sur mesure, dans lequel les acteurs
qui ne savent pas recouvrer leurs créances doivent refinancer ceux qui le savent.

Fondem  : Le «  sur-mesure  » se ferait-il localement plutôt qu’au niveau central  ? La


complexité va-t-elle en diminuant ?

Lionel Zinsou  : Oui, en effet. Si cela n’existait pas déjà en microfinance, je dirais qu’il
faudrait vingt ans pour y arriver. Mais les outils sont là et nous avons l’expérience. On
pourrait également encourager les institutions de microfinance à avoir des projets de
financement de l’ordre de 100 à 200 000 USD correspondant au traitement d’un projet
d’électrification d’une localité de 500 habitants environ.

Lionel ZINSOU,
économiste, ancien Premier ministre du Bénin

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16 - PARTIE INTRODUCTIVE

Equipe
L’équipe de rédaction
Yves Maigne a passé vingt ans dans l’industrie au sein des sociétés Leroy-Somer et Photowatt, dans
le développement des microcentrales hydrauliques et du solaire photovoltaïque dans les pays du Sud,
avant de rejoindre la Fondation Énergies pour le Monde (Fondem) en tant que directeur. Dans cette
ONG dédiée à l’accès aux services de l’électricité et aux énergies renouvelables, il participe à la con-
ception et la réalisation de projets de terrain associant étroitement l’ensemble des parties prenantes, du
partenaire financier, aux élus locaux et les usagers, sans oublier les opérateurs et les acteurs institution-
nels nationaux et régionaux. C’est de la rencontre de ces partenaires, aux rôles indispensables et com-
plémentaires, que naît l’idée de cet ouvrage. Il est membre de l'Académie des technologies et contribue
aux travaux du Pôle Energie.

Gérard Madon a débuté sa carrière en 1975 comme ingénieur de recherches en énergies renouvel-
ables au Sénégal. Il l’a poursuivie à partir de 1982 en tant que consultant spécialiste du développement
durable, de l’énergie domestique et de l’électrification rurale au sein de bureaux d’études, notamment
en tant que cofondateur et associé à Énergie, environnement et développement durable (MARGE, Tou-
louse). Il est intervenu dans plus de 50 pays, principalement en Afrique. Depuis 2015, il est président
du conseil d’administration d’Enercoop Midi-Pyrénées, coopérative du réseau Enercoop fournisseur
d’électricité d’origine 100% renouvelable en France.

Etienne Sauvage, ingénieur ESPCI/ENSAM, a débuté sa carrière en 2000 aux Comores sur un pro-
gramme d'électrification par kits solaires. Il a ensuite travaillé pour le bureau d'études Transénergie dans
l'ingénierie des programmes d'électrification de la zone Océan Indien, basé à Madagascar. Il poursuivi
à partir de 2005 en tant qu'ingénieur consultant spécialisé dans la problématique de l'accès à l'eau et
l'électricité en zone rurale, principalement dans les territoires insulaires du Pacifique, en Afrique et dans
l'océan Indien. En 2007, il fonde le bureau d'études HACSE qu'il dirige, spécialisé dans l'électrification
rurale décentralisée, partenaire privilégié de la Fondem depuis de nombreuses années.

Sarah Vignoles a assuré la coordination rédactionnelle de cet ouvrage. Depuis 2002, elle met sa for-
mation et son expérience pluridisciplinaires au service de diverses organisations du secteur public et
associatif. Elle a contribué à plusieurs publications sur le thème du Développement durable.

Les auteurs remercient leurs proches. Leur soutien leur a permis de travailler sereinement à cet ouvrage,
en disposant du temps nécessaire et de lieux propices à la réflexion et l’écriture. Leur gratitude va égale-
ment à Vincent Jacques le Seigneur, directeur général de la Fondation Energies pour le Monde, pour son
appui et sa patience tout au long de la réalisation de ce projet.

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PARTIE INTRODUCTIVE - 17

Remerciements
Cet ouvrage collectif a été rendu possible grâce aux conseils, aux témoignages et à l’expertise de
nombreux contributeurs.

Iconographie et coordination graphique


Marion Cubizolles
Contributeurs
Christian de Gromard, Marie-Christine Zelem
Etudes de cas
GRET/Juliette Darlu ; GERES/Marie-Noelle Reboulet ; ESF/Hervé Gouyet ; MARGE / Robert van der
Plas, Maurice Pigaht et Samuel Martin ; FONDEM/ Celia Creff
Interviews
Jean-Louis Borloo et Lionel Zinsou
Camille André-Bataille, Hary Andriantatvy, Jean-Pierre Bresson, Arnaud Chabanne, Samy Chalier, Yann
Chauvelin, Juliette Darlu, Guilhem Dupuy, Bernard Equer, Grégoire Gailly, Hervé Gouyet, Caroline Fron-
tigny, Elodie Hestin, Sarah Holt, Boureima Kabre, Jean-Baptiste Lenoir, Olivier Oriol, Olivier Rasoldier,
Stéphane Redon, Rodolphe Rosier, Vincent Renaud, Mamadou Saidou Diallo, Nicolas Saincy, Boubacar
Sow
Relecteurs
François-Xavier Albouy, Bernard Equer, Abdou Fall, Iris Nicomedi, Bernard Tardieu, Marin de Viry
Experts
Renée Chao-Béroff, Alexandre Chavanne, Jean-Paul Louineau, Gérard Moine
Equipe Fondem
Valentin Benoît, Cyril Durieu, Alice Coureau, Vincent Jacques Le Seigneur, Isaure Marchand, Marie-Es-
telle Grison, Jérémy Ankri, Raphaël Sappey, Tanguy Poupart-Lafarge, Julie Trognon, Emilie Souchaud,
Mehrin Ashraf
Président
Jean-Louis Borloo
Président Fondateur de la Fondation Énergies pour le Monde
Alain Liébard

La Fondation Energies pour le Monde remercie tout particulièrement les partenaires financiers sans
lesquels l’ouvrage n’aurait pas pu voir le jour : l’ADEME, l’IFDD et Synergie Solaire. Elle remercie également
tous les partenaires et les donateurs, grâce auxquels elle peut poursuivre sa mission et développer son
expertise au service de l’accès à une électricité inclusive et durable.

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18 - PARTIE INTRODUCTIVE

Partenaires
ADEME
Presque 20 ans après un premier ouvrage qui soulignait l’intérêt de l’Electrification Rurale
Décentralisée, présentée comme « une chance pour les hommes et des techniques pour
la planète », il nous a paru important de soutenir la Fondation Energies pour le Monde
dans son effort de mesurer les progrès accomplis dans ce domaine, notamment grâce
aux innovations technologiques et sociales.

L’accès à l’énergie représente toujours un enjeu crucial pour le développement humain,


la croissance économique et la protection de l’environnement et du climat. En témoigne
son inclusion parmi les Objectifs du Développement Durable des Nations Unies adoptés
en 2015.

Près d’un milliard d’êtres humains dans le monde n’a pas d’accès à l’électricité. A cela
s’ajoutent plusieurs centaines de millions de personnes dont l’accès à l’électricité n’est
pas satisfaisant puisqu’il repose sur des générateurs fonctionnant aux énergies fos-
siles, chères et polluantes. C’est en particulier le cas en Afrique subsaharienne. En effet,
dans cette région, malgré des progrès encourageants, le taux d’électrification reste le
plus faible au monde, et les projections de l’Agence Internationale de l’Energie indiquent
qu’en 2030 environ 600 millions des 674 millions d’habitants de la planète sans accès à
l’électricité seraient en Afrique subsaharienne, en particulier dans les zones rurales.

S’il est irréaliste d’imaginer étendre les réseaux centralisés à l’ensemble des popula-
tions rurales, l’électrification de ces populations peut être grandement facilitée par le
recours aux solutions renouvelables décentralisées. Grâce au développement du digi-
tal et à la baisse du coût des énergies renouvelables, un changement de paradigme est
désormais possible pour l’accès à l’énergie hors réseaux. Des modèles disruptifs et plus
flexibles émergent, associant l’électrification des villages et le développement d’activités
génératrices de revenus pour les populations. D’après la Banque Mondiale, 210 000 mini-
réseaux pourraient permettre d’électrifier 490 millions de personnes d’ici 2030, particu-
lièrement en Afrique sub-saharienne, pour un investissement de 220 milliards de dollars.

Néanmoins, afin d’assurer un déploiement efficace des solutions hors réseaux, de nom-
breux défis restent à relever, notamment en termes de fiabilité des équipements, de main-
tenance, de solvabilité. Il est aussi crucial de renforcer localement les compétences et

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 19

d’impliquer les communautés afin de définir de manière conjointe les solutions les plus
adaptées, y compris en termes de gouvernance. Les femmes sont parmi les premières
à être concernées, à la fois comme actrices et bénéficiaires de l’électrification rurale, en
luttant contre la déforestation et les changements climatiques. Elles sont très impliquées,
que ce soit en tant qu’élues locales, éducatrices, promotrices de techniques agricoles
respectueuses de l’environnement ou de solutions entrepreneuriales innovantes.

Améliorer l’accès aux financements est un autre enjeu prégnant, dans un contexte où, para-
doxalement, peu de dispositifs existent pour soutenir ce type de projets moins coûteux que
l’extension des réseaux centralisés ou la réalisation de centrales de puissances importantes
alimentées par des énergies renouvelables. D’autres défis sont à relever pour adapter les
politiques publiques de nombreux pays à ces nouveaux modèles. Des solutions innovantes
en termes de plans d’affaire et de modes de financement doivent aussi être déployées, en
associant les acteurs privés, les ONG et les pouvoirs publics nationaux et locaux.

Pour contribuer à relever ces défis, l’ADEME, forte de plus de trente années d’expérience
dans le domaine de l’accès à l’énergie en Afrique, a lancé en 2017 un premier appel à pro-
jets pour soutenir le développement de solutions innovantes en la matière, et a sélec-
tionné 9 projets. Devant le succès rencontré par cet appel, l’ADEME s’est associée à l’AFD
pour lancer un nouvel appel à projets en 2019. Des actions sont par ailleurs menées avec
le Syndicat des Energies Renouvelables et l’ensemble des acteurs français de l’accès à
l’énergie pour renforcer leur mobilisation collective.

A partir d’un état des lieux nourri de nombreuses études de cas, ce guide décrit l’évolution
des dernières années, dresse des perspectives pour l’avenir et propose des recomman-
dations enrichies du retour de terrain de multiples acteurs. Nous espérons vivement que
cet ouvrage servira de référence pour accompagner la dynamique initiée, ainsi que la
mobilisation coordonnée des différents acteurs, permettant à l’ERD de franchir une nou-
velle étape vers le changement d’échelle attendu et nécessaire à l’atteinte des objectifs
fixés d’accès universel à l’énergie en 2030.

Dominique Campana
Directrice Europe et International Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie

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20 - PARTIE INTRODUCTIVE

IFDD
L’électrification rurale décentralisée (ERD) est restée un défi persistant des dernières
décennies au cours desquelles les populations rurales des pays en développement ont
vu se succéder des programmes et projets de pérennités économiques, sociales et
technologiques, inégales dans le temps et dans l’espace.

Depuis la première édition de l’ouvrage ERD, les acteurs du secteur public ont fait
évoluer les environnements réglementaires en vue de résorber le fossé croissant de
l’électrification entre les régions rurales et les centres urbains. Le secteur privé et les
partenaires techniques et financiers ont également contribué à proposer des solutions
innovantes pour accompagner ce combat de l’accès qui concerne des centaines de
millions de personnes dans l’espace rural.

L’IFDD, à l’époque l’IEPF, avait apporté en 2000 son soutien à la première édition de
l’ouvrage ERD déjà conduite sous l’égide de la Fondation Énergies pour le Monde
(FONDEM). L’Institut est heureux de poursuivre ce partenariat pour le renforcement
des capacités de toutes les catégories d’acteurs impliqués dans l’amélioration de la
réalité de l’accès à l’électricité de tous les francophones en zone rurale.

C’est le sens même de la réédition de ce guide technique qui, après un état des lieux très
complet et nourri de multiples expériences de terrain de l’ERD ces dernières décennies
en Afrique, en présente dans une optique de développement durable les nécessaires
mutations souhaitées ou en cours. Je salue le travail de la FONDEM et de tous les parte-
naires qui y ont contribué, et j’encourage les lectrices et les lecteurs à s’approprier les
recommandations de cet ouvrage. Je souhaite que les prochaines décennies voient le
déploiement partout où cela est nécessaire, des modèles d’électrification rurale décen-
tralisée, désirable et durable.

Jean-Pierre Ndoutoum
Directeur de l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD)

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PARTIE INTRODUCTIVE - 21

Synergie Solaire
L’accès aux Energies renouvelables est le fil conducteur qui relie croissance
économique, équité sociale et développement durable. C’est sur cette conviction que le
fonds de dotation Synergie Solaire a été créé pour mobiliser les entreprises des éner-
gies renouvelables autour de projets solidaires d’accès à l’énergie, mis en œuvre par
des ONG françaises puis européennes .

L’expertise des ONG en matière d’électrification rurale décentralisée est avérée,


notamment en matière d’ingénierie sociale qui est un facteur-clé de succès cepen-
dant trop souvent méconnu du monde entrepreneurial . Depuis 10 ans les choses ont
évolué dans le bon sens ; cette expérience et expertise, de la Fondem en particulier,
sensibilisent maintenant de plus en plus d’acteurs économiques et l’on voit émerger de
nouveaux partenariats. Ils permettent d’associer 2 facteurs-clé, l’ingénierie financière
et l’ingénierie sociale pour créer des modèles de plus en plus innovants. Il faut se réjouir
que l’électrification rurale décentralisée (off-grid) soit désormais considérée comme
l’indispensable complément des programmes centralisés (grid connected) d’extension
des réseaux électriques nationaux. Les deux vont de pair pour doter les territoires
africains d’un accès cohérent et plus efficient et permettre aux populations les plus rec-
ulées de bénéficier de cet essor.

Le projet d’ouvrage a émergé dans ce contexte de rapprochement des parties pre-


nantes de l’ERD, la volonté de comprendre et de reconnaître la place de chacune
pour avancer plus efficacement dans des projets communs, qu’il s’agisse des états,
des agences rurales d’électrification, des entreprises, des agences internationales
de développement, des ONG, des banques, des fonds d’impacts, des fondations, ou
même des jeunes start-ups locales.

Nous avons été honorés de rejoindre la Fondem, l’ADEME et l’Institut de la Francophonie


pour le Développement Durable et de soutenir la réalisation de cet ouvrage qui promeut
une synergie entre acteurs, seule manière, nous en sommes convaincus, d’aborder le défi
immense de l’Accès à l’énergie et d’espérer avoir un impact réel. Nous sommes appelés à
construire un écosystème d’acteurs et à coordonner nos actions à tous les niveaux.

Hélène Demaegt
Présidente du fonds de dotation Synergie Solaire

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22 - PARTIE INTRODUCTIVE

Résumé
En Afrique subsaharienne, où la population va Pour réussir, il faut mettre en commun les analyses et
doubler d’ici 2050, une transformation rurale les expériences, afin de mobiliser de manière mieux
inclusive et écologique s’impose. Défi plané- coordonnée et plus efficace les ressources, au Sud
taire, la question énergétique est cruciale pour comme au Nord. Le débat sur le sens et les moyens
l’avenir de la région  : pas de développement de l’action devant être relancé, les auteurs proposent
sans infrastructures électriques durables, des pistes de réflexion à chaque acteur concerné.
au service de l’éducation, de la santé et de
l’emploi des communautés rurales, essentiel-
lement agricoles, qui vont devoir nourrir les En Afrique subsaharienne, la fracture éner-
villes. Il y a là un impératif humain. gétique persiste, induisant une électrifica-
tion rurale encore largement informelle
Or, la fracture électrique reste préoccupante La communauté internationale se mobilise pour
dans de nombreux pays subsahariens, qui dispo- promouvoir l’accès à l’énergie, indispensable aux-
sent pourtant d’abondants gisements d’énergies iliaire de développement humain, sous sa forme la
renouvelables. Les politiques nationales priv- plus polyvalente en termes d’usage  : l’électricité.
ilégiant l’électrification urbaine, les populations Malgré cette impulsion, plus de 600 millions de
rurales se tournent naturellement vers les solu- personnes vivent encore sans électricité en
tions marchandes disponibles, de qualité souvent Afrique subsaharienne (soit plus de 70 % de la
médiocre, pour couvrir leurs besoins essentiels population de la région), essentiellement en zone
en électricité. L’expérience acquise depuis 50 ans rurale Or, la demande en électricité va y rester forte,
et les récentes avancées technologiques dans le sous l’effet conjugué des croissances économique
domaine du solaire et du numérique pourraient et démographique. La région doit donc relever un
pourtant permettent de déployer massivement les double défi, social et environnemental  : suivre la
infrastructures électriques durables nécessaires. demande d’électricité selon une trajectoire de crois-
sance sobre en carbone.
Mais la question du modèle économique reste
entière, notamment pour les territoires où les Les pays subsahariens sont justement dotés
opérateurs privés ne peuvent aller en raison des d’importants gisements de sources renouvel-
contraintes de rentabilité, incompatibles avec ables (eau, soleil, vent, biomasse), toutes exploit-
l’objectif d’accès universel. Par la combinaison ables sous certaines conditions. En particulier,
bien pensée des solutions d’électrification col- l’énergie solaire, de loin la plus abondante, suscite
lective (notamment miniréseau) et individuelle, il de nombreux espoirs et la technologie photovolta-
serait pourtant techniquement possible de couvrir ïque, actuellement la plus simple à mettre en œuvre
une part significative des besoins, et d’atteindre en milieu rural pour les petits et moyens systèmes,
l’objectif d’une électrification rurale, sinon univer- se généralise malgré la contrainte liée au stockage*
selle, du moins inclusive. de l’électricité pour satisfaire la demande nocturne.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 23

Ce n’est donc pas la disponibilité de la ressource inclusif et pérenne, n’est évidemment pas une
énergétique qui pose problème. La faiblesse réponse satisfaisante. Par ailleurs, la diffusion
des taux d’électrification rurale des pays sub- exponentielle des systèmes solaires individuels,
sahariens reflète surtout l’absence de desserte parfois présentée comme une avancée majeure
par le réseau. Soutenues par les bailleurs insti- de l’accès à l’électricité, repose essentiellement
tutionnels, les sociétés nationales d’électricité sur celle des lampes portables, très loin de couvrir
ont en effet donné priorité à l’électrification des tous les besoins sociaux et productifs des com-
zones urbaines et périurbaines, plus rentables, munautés rurales.
sans pour autant réussir à dégager la capac-
ité d’investissement nécessaire pour financer
l’extension du réseau vers les zones rurales. Par L’accélération de l’électrification rurale peut
ailleurs, même en présence de stratégie nationale s’appuyer sur les solutions décentralisées,
favorable, la mise en œuvre effective de projets grâce aux innovations et aux leçons de
d’électrification hors réseau par initiative locale l’expérience
ou privée se heurte à plusieurs difficultés d’ordre Les solutions décentralisées apparaissent néces-
politique et institutionnel (notamment le manque saires pour électrifier le milieu rural, en complé-
de moyens des collectivités territoriales et les ment du réseau, dont l’extension, trop coûteuse
conflits de compétences entre agences nation- pour les opérateurs, ne peut être rapidement
ales) mais aussi et surtout d’ordre économique (le généralisée. C’est d’ailleurs ainsi que les cam-
manque d’attractivité des zones rurales pour les pagnes françaises et américaines ont accédé
investisseurs). à l’électricité, grâce à l’impulsion locale (via des
concessions communales accordées à des
Dans le même temps, le besoin d’électricité entreprises privées ou des coopératives rurales
s’exacerbe, sous l’effet de la diffusion massive d’électricité).
de la téléphonie mobile. Lassés d’attendre un
hypothétique raccordement au réseau, les popu- Depuis 50 ans, le sol subsaharien est le terrain
lations se tournent légitimement vers les autres de nombreux projets d’accès à l’électricité hors
solutions disponibles, dont la gamme est de plus réseau, dite aussi « électrification rurale décen-
en plus large. Profitant de la démocratisation tralisée » (ERD). Dans l’esprit humaniste de ses
rapide des équipements de production photo- pionniers, l’ERD est au service du développement
voltaïque et des récepteurs à haute performance humain ; elle doit couvrir le spectre le plus large
(LED notamment), le secteur marchand propose possible d’usages de l’électricité ; dans la conduite
un nombre croissant de services électriques des projets, doivent prévaloir le respect du terri-
très divers, couvrant essentiellement les usages toire, la compréhension des besoins des popula-
domestiques. Cette offre fragmentée, souvent tions et la recherche d’équité. En Afrique subsaha-
de qualité médiocre, sans garantie d’un service rienne, l’ERD (notamment par hydroélectricité) a

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


24 - PARTIE INTRODUCTIVE

ainsi été testée dès avant les indépendances. Elle faibles capacités contributives des usagers
s’est ensuite diffusée dans les années 1970 avec ruraux, les opérations présentent un double hand-
l’aide de la coopération internationale, souvent via icap. D’une part, elles sont peu attractives pour
des projets d’électrification d’infrastructures col- les investisseurs (contraintes opérationnelles
lectives (écoles, centres de santé, pompes…) par au moins aussi fortes qu’en zone urbaine, retour
éolien ou solaire menés par des ONG pionnières. sur investissement beaucoup plus long). D’autre
Depuis le milieu des années 1980, elle connaît une part, dans un contexte où les Etats ne disposent
phase d’extension, caractérisée par une implica- pas des ressources fiscales suffisantes, elles sont
tion plus forte du secteur privé, qui s’est récem- très dépendantes des financements internation-
ment accélérée. aux, y compris dons et aides, qui, quoique de plus
en plus nombreux, restent largement insuffisants
Depuis une dizaine d’années, le secteur de l’ERD
vit une mutation à la fois prometteuse et risquée. Certains types de projet souffrent plus particu-
La prise de conscience d’une urgence écologique lièrement de cette pénurie, comme les mini-
est favorable aux projets promouvant les éner- réseaux ruraux ; pourtant reconnus comme la
gies renouvelables et l’efficacité énergétique. solution décentralisée à privilégier pour attein-
Surtout, un véritable changement de paradigme dre l’accès universel, ils sont pénalisés par leur
technologique - fondé sur la révolution numéri- logique complexe de coopération institutionnelle,
que, la baisse du coût du photovoltaïque, les le coût des actions de renforcement des capaci-
récepteurs basse consommation et les progrès tés locales et les incertitudes sur le plan d’affaires
du stockage  - rend possible l’accélération de (sans données de référence, il est difficile de
l’électrification rurale par énergie solaire. Profit- prévoir précisément l’évolution de la demande
ant de l’ouverture d’un large marché peu régulé d’un service sur plusieurs années). De ce point
et misant sur de meilleures chances de viabilité de vue, parce qu’elle est fondée sur la relation
de l’exploitation, le secteur privé multiplie les durable entre deux collectivités territoriales, la
schémas de distribution innovants à destination coopération décentralisée apparaît comme une
des populations non desservies par le réseau. alternative à promouvoir pour financer et mettre
Soutenues par l’aide internationale en raison des en œuvre des projets d’ERD structurés à l’échelle
bénéfices sociaux qu’elles promettent, ces solu- d’un territoire, socialement ambitieux.
tions relèvent d’une logique marchande pourtant
parfois très éloignée de l’objectif de pérennité du Principale piste pour résoudre cette équation
service et d’autonomisation des communautés complexe du financement, mixte, les collabora-
que porte historiquement l’ERD. tions entre bailleurs privés et publics sont sans
doute amenées à se développer ; pour servir
L’obstacle à la généralisation des solutions l’accès universel à l’électricité, ce renforcement
décentralisées n’est donc pas technique, il est de la mécanique de dons ou de prêts à taux favor-
financier. Electrifier un territoire, rural ou urbain, able devra néanmoins bénéficier prioritairement
est d’abord très consommateur de capitaux aux projets les plus inclusifs.
d’investissement  ; puis l’exploitation doit couvrir
les frais de fonctionnement et de maintenance, Au-delà des évolutions et des incertitudes,
dont le renouvellement du matériel. Du fait des le retour d’expérience croisé des acteurs de

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 25

l’ERD permet d’identifier plusieurs paramètres Par ailleurs, le secteur fait encore face à des pro-
méthodologiques stables pour réussir un projet, blématiques persistantes de qualité des matéri-
qui tous se rejoignent dans un même constat  : els, due à l’absence de normes et de régulateur
le facteur humain est décisif. Pas de bénéfices compétent, et de capacité d’entretien des instal-
sociaux et économiques de l’arrivée de l’électricité lations. Le projet doit donc anticiper, dès sa con-
sans adhésion de la communauté au projet et ception, les facteurs de déshérence des équipe-
prise en main locale des systèmes électriques  : ments et la question de leur prise en charge en fin
il faut faire émerger un écosystème d’acteurs de vie. Même si la qualité est tirée vers le haut par
qui fera durablement fonctionner le service sur les offres récentes en abonnement (l’opérateur
le territoire. Ainsi, la réussite d’un projet dépend a un intérêt certain à limiter les coûts de mainte-
d’abord de la qualité de l’orchestration des par- nance des matériels), la bonne appropriation du
ties prenantes, plus ou moins complexe suivant le service par les usagers reste la meilleure garantie
type de schéma d’électrification, ce qui suppose de pérennité.
un savoir-faire spécifique en maîtrise d’ouvrage. Enfin, quel que soit le schéma mis en œuvre, le
Lorsque la logique de coopération institutionnelle service d’électricité suppose des investisse-
est au cœur de la construction de la solution tech- ments de la part de l’opérateur et une contribution
nique, comme c’est le cas pour un miniréseau, il de l’usager pour accéder à un service pérenne  ;
ne faut pas sous-estimer les contraintes liées à une juste tarification et des modalités de paie-
la différence de compréhension des probléma- ment adaptées sont deux élément-clés d’une
tiques par les différents acteurs (futurs usagers, exploitation viable.
pouvoirs publics, partenaires financiers, fournis-
seurs d’équipements, etc.) et leurs intérêts parfois
divergents.
De la lampe portable au miniréseau, le ter-
Loin d’être seulement technologique, un pro- ritoire rural subsaharien est devenu un labo-
jet d’accès à l’électricité nécessite donc une ratoire de solutions décentralisées
approche sociologique, fondée sur l’écoute du ter- Le secteur de l’accès à l’électricité hors réseau est
rain et la coopération, assortie des budgets pour aussi innovant et dynamique qu’il est fragmenté
assurer l’ensemble des activités de sensibilisa- et désorganisé. Mais qu’ils s’appuient sur un
tion, d’accompagnement et de médiation néces- long processus institutionnel ou sur un échange
saires avant, pendant et après la mise en service marchand quasi instantané, les différents sché-
des infrastructures. Il s’agit notamment d’assurer la mas actuels présentent un point commun  : la
bonne compréhension des conditions d’utilisation technologie photovoltaïque, avantagée par sa
des solutions décentralisées, qui diffèrent en simplicité et son accessibilité quel que soit le type
effet de celles du réseau urbain (puissance* limi- d’usage.
tée, quantité journalière et/ou horaires restreints,
recours aux batteries…), ainsi que de la tarifica- L’électrification des ouvrages publics (écoles,
tion proposée (tarif du kWh plus élevé, choix d’un centres de santé, bâtiments cultuels ou cul-
niveau de service, absence de tarif subventionné) turels) constitue le chantier historique de l’accès
et des modalités de paiement (prépaiement). à l’électricité. Séduits par l’utilité sociale évidente
et la simplicité technique des opérations, les

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


26 - PARTIE INTRODUCTIVE

porteurs de ces projets ont souvent sous-estimé Ni l’acquisition spontanée de SSI, uniquement
les contraintes liées à l’exploitation des systèmes accessible à une frange aisée de la population, ni
installés ; en dehors de ceux réalisés par les pro- la généralisation du PAYG ne permettront donc, à
grammes d’envergure nationale, peu d’ouvrages elles seules, d’électrifier l’Afrique rurale de manière
sont encore en état de fonctionnement. Dans inclusive. D’où l’importance des initiatives élargis-
tous les cas, la collectivité doit cotiser pour sant l’accès à ces systèmes, comme les Sociétés
l’entretien périodique et le renouvellement des de Services Décentralisées, gérée par un opéra-
composants. Autre application historique du PV, teur privé selon des modalités proches de la délé-
le pompage solaire est une solution utile (accès à gation de service public. Autre piste, associer un
l’eau potable, irrigation des cultures, abreuvage de exploitant privé et une institution de microfinance
bétails), économique (ni carburant, ni batteries) et permet à de petits entrepreneurs d’acquérir à
assez mature pour trouver localement la compé- crédit une installation PV de qualité. Dans tous les
tence et les pièces de rechange, ce qui explique cas, le soutien d’un financeur du développement
l’exceptionnelle longévité de certaines infrastruc- est requis, pour couvrir les dépenses d’assistance
tures. Autre exemple d’application communau- technique et/ou de subventionner une partie des
taire, l’éclairage public solaire se développe grâce équipements.
aux avancées technologiques récentes (LED, PV,
stockage). Outre qu’il améliore la sécurité le long En complément de ces initiatives d’électrification
des axes routiers, il élargit le spectre des activités individuelle ou collective, plusieurs schémas
sociales et permet aux plus modestes de disposer innovants tentent de résoudre l’équation de la
gratuitement d’une source lumineuse de qualité. multiplicité des usages sur un territoire. Grâce à
une production d’électricité significative située
Destinés à l’usage domestique, les petits sys- au centre de la localité, le concept générique
tèmes solaires individuels (SSI) se sont consi- de «  kiosque énergie » offre divers services aux
dérablement diffusés ces dernières années. Tra- habitants (recharge de téléphones ou lampes
ditionnellement acquis par l’usager auprès d’un rev- portables, multimédia, froid, etc.). Confié à un
endeur local contre un paiement cash, ils sont aussi gérant local choisi pour son profil commercial et
de plus en plus souvent proposés en abonnement entrepreneurial ainsi que sa bonne implantation
par des opérateurs dits Pay As You Go (PAYG), util- locale, le kiosque reste généralement propriété
isant systématiquement le prépaiement, apparus de l’opérateur privé. Quelques ONG françaises
au milieu de la décennie actuelle. Exemples emblé- pionnières testent également plusieurs concepts
matiques de la démocratisation de l’énergie décen- de plateformes énergétiques.
tralisée, ces systèmes souffrent de plusieurs limites.
La puissance disponible étant faible et la quantité Solution intermédiaire en cours d’expérimen-
d’énergie journalière limitée, ils sont inadaptés à la tation, le nanoréseau organise la production
plupart des usages productifs. Et le PAYG, pour- mutualisée d’électricité au sein d’une habita-
tant soutenu par des aides et libre de toute pres- tion à laquelle 3 à 5 autres foyers sont raccor-
sion réglementaire quant à la qualité du service ou dés, pour un usage essentiellement domestique.
l’équité tarifaire, s’avère économiquement plus frag- Le concept repose sur les économies d’échelle
ile que prévu, obligeant ses promoteurs à réorienter et l’évolutivité du dispositif (interconnexion de
leur action vers les zones périurbaines. nanoréseaux pouvant se relayer entre eux,

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 27

raccordement au réseau) au service d’une électri- facteurs socio-économiques locaux, l’analyse


fication progressive du territoire, concertée avec des autres projets menés à proximité du site.
les autorités locales et cohérente avec les éventu- Pour définir la zone de couverture du miniré-
elles planifications d’extension de réseau. seau, aucune formule qui tienne non plus  : c’est
un exercice ad hoc de diplomatie, ménageant des
Seul le miniréseau permet d’apporter l’électricité intérêts souvent divergents. L’arrivée d’un miniré-
simultanément à tous les membres d’une com- seau dans une localité nécessite une concerta-
munauté rurale, en couvrant la diversité de leurs tion étroite avec l’ensemble des parties prenantes
besoins domestiques, productifs et sociaux. Très (autorités formelles, informelles, structures asso-
bien représenté sur le territoire subsaharien, ce ciatives et communautaires) qui génère des coûts
schéma est en pleine mutation. Si le virage tech- additionnels mais renforcent la pérennité du
nologique pris suite au recours aux EnR et au modèle économique.
numérique est favorable au modèle économique
(prépaiement, pilotage plus fin des consomma- La conception du système repose aussi sur des
tions), il fragilise l’appropriation locale. Par ailleurs, arbitrages qui déterminent le modèle économique.
le secteur privé porte désormais l’essentiel des L’architecture globale du système dépend égale-
projets selon une logique de rapidité plébiscitée ment de l’approche. Une première démarche,
par les financeurs et les populations, tandis que éprouvée, encourage le recours aux compé-
s’efface le modèle originel, fondé sur la mécanique tences locales et le renforcement de capacités
collaborative initiée par les ONG, dont les délais des acteurs locaux. La seconde, innovante tech-
sont souvent décourageants. S’affranchissant nologiquement, s’oriente vers des solutions « con-
souvent des planifications nationales, ces opéra- tainerisées », assemblées par l’industriel, livrées
tions ciblent logiquement les pôles ruraux clés en mains aux porteurs du projet et pilotées à
dynamiques et les usagers susceptibles de payer distance.
un tarif intégrant la rentabilité attendue par les
investisseurs. Si les solutions numériques facilitent le paiement
des services électriques, elles ne le garantissent
Les nombreux projets de miniréseaux ruraux par pas. Elément central du modèle économique, la
EnR sont riches d’enseignements pour la pratique. tarification doit être adaptée et comprise par tous
La plupart d’entre eux, sinon tous, traduisent la quant à ses deux dimensions-clés  : le prix et le
variété des approches possibles et mettent en service. Ces derniers présentant des différences
lumière les limites des outils standardisés. Ils mon- notables par rapport à ceux d’un réseau urbain,
trent également combien il est difficile de concilier il est indispensable de transmettre un minimum
viabilité économique et utilité sociale. de culture de maîtrise et d’usage rationnel de
l’énergie aux usagers.
L’analyse préalable du contexte est décisive  :
adhésion réelle des futurs abonnés, demande Maillon essentiel du dispositif, l’exploitant est
d’électricité, potentiel de progression, capacités le garant de la qualité de service (maîtrise de la
d’appropriation locale, revenus et propension à consommation, entretien des équipements), du
payer le service de l’électricité... En la matière, rien respect des règles et de la collecte des informa-
ne remplace l’expérience, la connaissance des tions indispensables pour satisfaire ses clients,

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


28 - PARTIE INTRODUCTIVE

envisager une extension ou un renforcement de Ces préconisations sont axées sur le développe-
capacité. Son profil doit donc être très polyva- ment des solutions d’électrification collective
lent : capacité technique, réputation de confiance, (notamment miniréseau) qui, couplées aux solu-
capacité d’investissement et de gestion, tem- tions individuelles, apparaissent essentielles
pérament d’entrepreneur social et sensibilité de pour réaliser l’accès universel à l’électricité et
délégataire de service public. devraient donc être au cœur des stratégies. Elles
sont par ailleurs centrées autour de quatre points
Au-delà de ces constats, il apparaît que l’essor de névralgiques pour assurer la pérennité des sys-
accès à l’électricité en milieu rural ne se fera pas tèmes dans le respect des populations bénéfici-
par la seule addition de projets mieux conçus et aires : faire de l’accès à l’électricité en milieu rural
mieux gérés. Il est sans doute aussi conditionné une question de niveau interministériel pour une
par des actions qui excèdent le périmètre des meilleure coordination stratégique, renforcer la
« bonnes pratiques » et l’échelle du « projet »  ; il décentralisation et la déconcentration pour une
passe par des changements sectoriels procé- mise en œuvre de proximité plus efficace, encad-
dant d’une véritable volonté politique, pour garan- rer l’action des acteurs privés pour garantir la
tir la pérennité des systèmes. qualité et le professionnalisme, et, enfin, respecter
le principe d’équité entre usagers à l’échelle d’un
Réaliser l’accès à l’électricité pour tous territoire.
nécessite une coalition d’acteurs mieux
coordonnés, aux méthodes et aux moyens Retrouvez l’intégralité des développements et
plus adaptés. des préconisations en téléchargement libre sur la
Le manque de volonté politique et la multiplica- page web de l’ouvrage  : http://www.fondem.ong/
tion des strates décisionnelles, la défaillance de la electrifierlafriquerurale/
fiscalité et la dépendance aux financements inter-
nationaux, l’insuffisance des cadres juridique et
normatif et de la planification nationale, le manque
de coordination entre bailleurs internationaux et
de compréhension entre secteur financier et non
financier… Les nombreux points de faiblesse sec-
toriels constatés ne relèvent pas du domaine tech-
nique mais de la gouvernance, de l’organisation, de
l’encadrement réglementaire et du financement
des actions, à tous les niveaux. Ces sujets com-
plexes perdurent malgré l’arrivée du numérique,
l’implication de plus en plus forte des acteurs privés
et la diffusion des solutions d’électrification les plus
récentes. L’état des lieux réalisé dans cet ouvrage
conduit ainsi logiquement à poser la question des
actions possibles pour faire évoluer le secteur, et
à formuler des préconisations destinées à chaque
acteur concerné, afin de (re)lancer le débat.

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PARTIE INTRODUCTIVE - 29

Les bouleversements qui traversent le


secteur de l’accès à l’électricité sont porteurs
d’opportunités comme de risques. La voie est
étroite qui n’oublie pas l’impératif humain et
relève le défi économique, au service d’une
transformation rurale inclusive. Elle passe par
la notion de territoire, sur lequel doivent se cen-
trer la réflexion et l’action de toutes les parties
prenantes. Cette question de l’électrification
rurale, dont l’ouvrage propose une analyse
fondée sur l’expérience de praticiens de terrain
du secteur, apparaît ainsi comme paradigma-
tique : la problématique de l’électrification est
aussi celle de tous les réseaux de distribution
des services essentiels au développement
de tous les territoires. Elle soulève la ques-
tion fondamentale des «  communs », et de la
protection dont ils doivent bénéficier pour en
garantir l’accès, même aux plus vulnérables. }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


30 - PARTIE INTRODUCTIVE

Sommaire
07 Avant-propos 39 Partie 1 - Contexte
En Afrique subsaharienne, la fracture
16 Equipe énergétique persiste, induisant une
électrification rurale encore largement
18 Partenaires informelle.
22 Résumé
34 Liste des acronymes 40 Introduction
42 La fracture énergétique reste préoccupante
malgré la richesse en énergies renouvelables. (1.1.)
36 Introduction
44 Malgré une dynamique internationale favorable, l’accès à
l’électricité est loin d’être universel. (1.1.1.)

62 La région dispose pourtant d’un important potentiel


d’électrification à partir des gisements d’énergies
renouvelables. (1.1.2.)

76 L’électrification formelle est d’abord urbaine


et centralisée. (1.2.)

78 Au niveau institutionnel, la priorité est donnée aux zones


urbaines et périurbaines, par défaut. (1.2.1.)

86 L’électrification rurale, affichée comme un objectif, souffre


du manque de moyens et de volonté. (1.2.2.)

94 En conséquence, l’électrification rurale reste en


grande partie informelle. (1.3.)

96 L’offre et la demande d’électrification rurale sont


bouleversées par plusieurs innovations. (1.3.1.)

97 Dans cet environnement en réinvention, l’électricité


pénètre dans les foyers ruraux le plus souvent de manière
informelle et hétéroclite. (1.3.2.)

104 Conclusion

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 31

107 Partie 2 - État des lieux 154 Depuis dix ans, de multiples évolutions
viennent élargir le champ des possibles
L’accélération de pour l’électrification rurale décentralisée.
l’électrification rurale peut (2.3.1.)
s’appuyer sur les solutions
décentralisées, grâce aux 170 Nerf de la guerre, le financement reste
problématique pour la plupart des projets
innovations et aux leçons de d’électrification rurale. (2.3.2.)
l’expérience.
200 Les facteurs-clés de succès
d’un projet d’électrification
rurale décentralisée demeurent
108 Introduction inchangés. (2.4.)

110 Dans sa définition comme dans


ses objectifs, l’électrification
202 Construire un écosystème d’acteurs
qui devienne in fine autonome n’est pas
rurale décentralisée comporte si simple. (2.4.1.)
plusieurs dimensions : territoriale, Pour garantir l’adhésion de la communauté
économique et humaine. (2.1.) 216 rurale, l’ingénierie sociale est essentielle,
à toutes les étapes d’un projet. (2.4.2.)
112 Qu’entend-on par « électrification rurale
décentralisée » ? (2.1.1.) 237 Un des principaux défis consiste
à assurer la présence durable du service
122 Le recours aux solutions décentralisées
par énergies renouvelables est la seule
de l’électricité alors que le secteur local
est encore balbutiant. (2.4.3.)
alternative crédible à l’extension de
réseau pour électrifier les zones rurales
subsahariennes. (2.1.2.)
242 Les enjeux liés à la tarification et au
paiement de l’électricité doivent être
soigneusement anticipés pour assurer la
viabilité et la pérennité du service. (2.4.4.)
132 Les solutions d’électrification hors
réseau reposent sur 50 années 252 Conclusion
d’histoire. (2.2.)

134 Historiquement, l’accès à l’électricité


s’est fait par processus décentralisé dans
les zones rurales des pays industrialisés.
(2.2.1.)

144 L’électrification rurale décentralisée par


énergie renouvelable bénéficie de plus de
quarante ans d’expérimentations. (2.2.2.)
L’électrification rurale, en pleine
152 mutation, manque toujours de
financements adaptés aux enjeux.
(2.3.)

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


32 - PARTIE INTRODUCTIVE

255 Partie 3 - Cahier technique 308 Pompage solaire et éclairage public :


d’autres exemples d’électrification
De la lampe portable au d’infrastructures publiques. (3.3.3.)
miniréseau, le territoire rural
subsaharien est devenu
un laboratoire de solutions 314 De nouveaux schémas
d’électrification collective sont
décentralisées. apparus récemment. (3.4.)

316 Les solutions collectives dédiées aux


usages productifs : modèle pertinent
257 Introduction ou innovation sans lendemain ? (3.4.1.)

258 En l’absence de politique sectorielle 327 Les nanoréseaux : le concept est encore
en exploration (3.4.2.).
structurée, de multiples solutions
coexistent, reposant notamment
sur le photovoltaïque. (3.1.) 332 Le miniréseau, schéma
d’électrification collective historique,
260 Le panorama des solutions d’électrification
rurale décentralisée est très diversifié. (3.1.1.)
est en pleine mutation. (3.5.)

264 Les systèmes photovoltaïques autonomes : 334 Malgré de nombreux échecs et des
postulats économiques complexes,
notions techniques de base. (3.1.2.)
les miniréseaux ruraux séduisent de
nouveaux acteurs. (3.5.1.)
268 Les schémas d’électrification
350 Miniréseaux : rappel des fondamentaux
individuelle démocratisent l’accès techniques (3.5.2.)
à l’électricité, sans résoudre
l’équation de la diversité des 364 Les miniréseaux ruraux par énergies
renouvelables : retours d’expérience
besoins. (3.2.) et pistes de réflexion. (3.5.3.)

271 L’acquisition directe d’un système solaire


individuel. (3.2.1.) 382 Conclusion

278 Les systèmes solaires individuels Pay As


You Go. (3.2.2.)

292 L’électrification par système solaire


individuel au sein d’un projet intégré. (3.2.3.)

298 L’électrification des


infrastructures publiques reste
problématique. (3.3.)
300 Electrifier les infrastructures publiques :
l’évidence sociale à l’épreuve de la réalité. (3.3.1.)

302 L’électrification des infrastructures


publiques : un problème de méthode ?
(3.3.2.)

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 33

385 Partie 4 - Préconisations 418 Conclusion


Réaliser l’accès à l’électricité
pour tous nécessite une
coalition d’acteurs mieux
coordonnés, aux méthodes et 420 Glossaire
aux moyens mieux adaptés. 423 Index
438 Bibliographie
387 Introduction

392 Préconisations aux pouvoirs


publics nationaux, régionaux
et locaux des pays du Sud. (4.1.)

394 Préconisations aux pouvoirs publics


nationaux. (4.1.1.)

397 Préconisations aux pouvoirs publics


régionaux. (4.1.2.)

399 Préconisations aux pouvoirs publics


locaux. (4.1.3.)

402 Préconisations à la communauté


internationale. (4.2.) Tous les termes dont la 1ère occurrence est
suivie d’un astérisque (*) sont repris dans
le glossaire, en p. 420.
406 Préconisations aux financeurs
des projets. (4.3.)
Un certain nombre de termes et
408 Préconisations aux bailleurs de fonds
internationaux. (4.3.1.) d’expressions utiles sont repris en Index,
en p. 423.
411 Préconisations aux investisseurs
internationaux. (4.3.2.)

411 Préconisations au secteur financier dans


les pays du Sud. (4.3.3.)
Une bibliographie complète recense les
sources utilisées dans l’ouvrage en p. 438.

412 Préconisations aux monteurs de


projets et à leurs partenaires directs
Sauf mention contraire, les traductions de
l’anglais vers le français sont des auteurs.
sur le terrain. (4.4.)

L’intégralité de cet ouvrage, ainsi que de nombreux documents complémentaires (études de cas,
interviews et articles) sont disponibles en libre accès sur le site de la Fondation Énergies pour le
Monde : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


34 - PARTIE INTRODUCTIVE

Liste des acronymes


ACP ASS DFID GIZ
Afrique, Caraïbes, Afrique subsaharienne Department for Gesellschaft für
3DFLŦTXH International Internationale
BAD
Development Zusammenarbeit
ADEME Banque africaine
(Agence de coopération
Agence de de développement ECDPM
allemande pour
l’environnement et de European Centre for
BEI le développement)
la maîtrise de l’énergie Development Policy
Banque européenne
Management GOGLA
ADER d’investissement
Global Off-Grid
Agence pour le ELECTRIFI
BT Lighting Association
développement de (OHFWULŦFDWLRQ
basse tension
Oł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH Financing Initiative GSM
CA (Union européenne) Global System for
AFD
courant alternatif Mobile Communication
Agence française EnR
de développement CAPEX énergies renouvelables GSMA
capital expenditure GSM Association
AFME ERD
Agence française de CC «OHFWULŦFDWLRQUXUDOH GW
la maîtrise de l’énergie courant continu décentralisée gigawatt
AGER CE ESMAP IED
Agence guinéenne Commission Energy Sector Innovation énergie
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH européenne Management développement
Assistance Program
AIE CIRAD IFDD
Agence internationale Centre de coopération EUEI Institut de la
de l’énergie internationale European Union francophonie pour
en recherche Energy Initiative le développement
APD
agronomique pour durable
avant-projet détaillé FAO
le développement
Food and Agriculture IFRI
APS
CNRS Organization Institut français
avant-projet sommaire
Centre national de la of the United Nations des relations
ARE UHFKHUFKHVFLHQWLŦTXH internationales
FCFA
Alliance for Rural (France)
franc CFA IMF
(OHFWULŦFDWLRQ
COP Institut de
FFEM
AREI Conférence des parties PLFURŦQDQFH
Fonds français pour
Africa Renewable
COPERES l’environnement INES
Energy Initiative
Conseil patronal des mondial Institut national
ASER énergies renouvelables de l’énergie solaire
GIEC
Agence sénégalaise du Sénégal (France)
Groupe d’experts
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
DEG intergouvernemental IRENA
ASI Deutsche Investitions- sur l’évolution International
Alliance solaire und Entwicklungsge- du climat Renewable Energy
internationale sellschaft Agency

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 35

KfW ODD RSE UNIDO


Kreditanstalt für objectifs de responsabilité sociétale United Nations
Wiederaufbau développement des entreprises Industrial Development
(Banque publique durable Organization
RTE
de développement
ONG Réseau de transport USAID
allemande)
organisation non d’électricité (France) United States Agency
kVa gouvernementale for International
SE4ALL
kilovoltampère Development
ONU Sustainable Energy
kW Organisation for All USD
kilowatt des Nations unies US dollar
SENELEC
kWc OPEX Société nationale WB
kilowatt crête operational d’électricité du Sénégal World Bank
expenditure
LED SHS Wc
Light-Emitting Diode PAYG solar some system wattcrête
pay as you go
MT SSD ZAE
moyenne tension PMA sociétés de services zone d’activité
pays les moins avancés décentralisées économique
NiMH
Nickel Metal Hybride PME SSI
petites et moyennes système solaire
NOAA
entreprises individuel
National Oceanic and
Atmospheric Agency PNUD STS
Programme des standard transfer
NRECA
Nations unies pour VSHFLŦFDWLRQ
National Rural
le développement
Electric Cooperative TWh
Association (USA) PPER terrawattheure
Programme pilote
OCDE UE
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
Organisation Union européenne
de coopération PTMF
UNDP
et de développement plateforme
United Nations
économiques multifonctionnelle
Development Program
OCEF PV
UNECA
Off-Grid Clean Energy photovoltaïque
United Nations
Facility
RDC Economic commission
République for Africa
Démocratique
UNICEF
du Congo
United Nations
RECP International Children’s
Renewable Energy Emergency Fund
Cooperation Program

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


36 - PARTIE INTRODUCTIVE

Introduction
« L’avenir du monde se joue en Afrique », titrait Comment procurer aux populations rurales les
le journal Le Monde en 2016. Tous les regards moyens de leur développement, si ce n’est en
convergent vers le continent, et notamment s’attaquant méthodiquement aux inégalités qui
vers l’immense territoire subsaharien, grand nourrissent un exode forcé ? Comment réaliser
comme 36  fois la France, et regroupant près cette transformation si les territoires ruraux
de 50 pays, 1 milliard d’habitants en 2017, 2 mil- restent enclavés, dépourvus d’infrastructures et
liards en 2050. de services de base ? Comment relever le défi
alimentaire dans un contexte de changement cli-
Des regards où se mêlent l’espoir et la crainte. Le matique accéléré qui fait peser de fortes incer-
paysage est contrasté : un dynamisme entrepre- titudes sur la production agricole, en quantité et
neurial marqué, une jeunesse nombreuse et con- en qualité ?
nectée, de nouveaux débouchés pour les biens et
les services dans une économie mondiale léthar- La question énergétique, défi planétaire du
gique, mais aussi une démographie atypique, des XXIe siècle, est décisive pour l’avenir de la région,
Etats aux ressources fiscales encore trop faibles et en ce qu’elle porte en elle une partie de la solution :
de nombreuses zones sous forte tension politique pas de développement rural durable sans infra-
ou religieuse. structures rurales énergétiques respectueuses
de l’environnement.
Perçue comme la manifestation la plus symbo-
lique et la plus visible de la mutation qui est en La fracture énergétique est un fait. Elle est mul-
marche, la croissance rapide et quelque peu tiple, au point qu’on pourrait parler de plusieurs
anarchique des métropoles est largement com- fractures énergétiques et non d’une seule : entre
mentée dans les médias. pays du Nord et pays du Sud, entre pays émer-
gents et pays moins avancés au Sud, entre zones
C’est pourtant ailleurs que se joue vraisemblable- rurales et urbaines, entre classes sociales d’une
ment l’avenir de l’Afrique subsaharienne : dans ses même communauté rurale… La première partie de
campagnes, là où « se concentre la majorité des pop- cet ouvrage synthétise les données du problème
ulations qui souffrent de la pauvreté et de la faim ». en brossant à grands traits le portrait de cette
La nécessité d’une transformation rurale inclusive, fracture, de son origine et des habitudes énergé-
respectueuse de l’environnement s’impose, pour tiques qui en résultent.
tout un faisceau de raisons que soulignent de nom-
breux rapports (FAO, IFAD, UNECA). Et qu’on peut Le combat pour réduire la fracture énergétique a
ainsi résumer : il va falloir nourrir et employer une pourtant commencé il y a près de cinquante ans :
population très jeune, qui va doubler en moins de apporter l’électricité aux populations non desser-
cinquante ans, au sein de laquelle les nouveaux tra- vies par les opérateurs nationaux, en s’appuyant
vailleurs seront encore majoritairement ruraux. sur des solutions décentralisées et par énergies

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE INTRODUCTIVE - 37

renouvelables. Depuis quelques années, l’essor Cet ouvrage reflète les constats et les analyses
de la technologie solaire et la révolution numéri- de praticiens de l’électrification rurale décentra-
que lui donnent un nouveau souffle. Mais réus- lisée par énergies renouvelables. S’il ne prétend
sir une électrification rurale réellement inclusive pas à l’exhaustivité des points de vue, il présente
reste complexe dans un environnement où la cependant une vision réaliste de l’existant, issue
rentabilité des projets d’électrification est le plus de leur longue expérience de terrain.
souvent structurellement incertaine, voire impos-
sible. Ce sont ce combat et les leçons de ces cinq Il est délibérément axé sur l’électrification rurale
décennies d’expérience que raconte la deuxième des pays d’Afrique subsaharienne francophone,
partie de l’ouvrage. sujet sur lequel la littérature de capitalisation est
peu abondante. Il se concentre sur l’utilisation
La troisième partie, conçue comme un cahier de la technologie solaire photovoltaïque, qui,
technique accessible aux non-initiés, vise à don- au moment où il est rédigé, est la plus adaptée
ner les clés de compréhension des systèmes pho- au contexte rural subsaharien. Enfin, il focalise
tovoltaïques qui émaillent le territoire subsaharien. l’attention sur les miniréseaux, qui apparaissent
Elle dessine un panorama détaillé des solutions comme le seul schéma d’électrification capable
d’aujourd’hui, avec leurs avantages et leurs limites, de couvrir tous les usages nécessaires au déve-
et esquisse celles de demain. loppement durable des communautés rurales.

Ces trois récits font apparaître de nombreuses Il a été réalisé avec le soutien de l’Agence de
problématiques non résolues, qui concernent l’environnement et de la maîtrise de l’énergie
un large panel d’acteurs, des failles sectorielles (ADEME), acteur pionnier dans le domaine
qui expliquent en grande partie le retard pris par des énergies renouvelables et de l’accès à
l’accès à l’électricité en Afrique subsaharienne. l’électricité, ainsi que celui de l’Institut de la fran-
Adopter les bonnes pratiques de gestion de projet cophonie pour le développement durable (IFDD),
ne suffira pas à les réduire. Un travail approfondi de qui a fait de la formation et de l’information des
coopération et de coordination doit s’enclencher, thématiques centrales, et de Synergie solaire,
pour concevoir, financer et pérenniser un change- fonds de dotation qui permet à de nombreux
ment d’échelle. La quatrième et dernière partie projets d’accès à l’électricité de voir le jour en
de l’ouvrage recense ces actions essentielles, Afrique francophone.
autant de préconisations directement adressées
aux acteurs qui peuvent et doivent changer la
donne. }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


38 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Info

Retour de terrain

'«ŦQLWLRQ

Chronologie

Chiffres-clés

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 39

[ Partie 1 - Contexte ]
En Afrique
subsaharienne,
la fracture énergétique
persiste, induisant une
électrification rurale
encore largement
informelle.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


40 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Introduction
La communauté internationale s’est fixé l’objectif global
d’atteindre en 2030 un accès universel à une énergie propre,
abordable et moderne. Concrètement, cette ambition
recouvre deux chantiers principaux : l’électrification
par énergie renouvelable des territoires non desservis
par les réseaux électriques et la diffusion de modes
de cuisson propres et efficaces.

En Afrique subsaharienne, force est de constater que la fracture


énergétique ne se réduit que très lentement et que les zones rurales
sont encore largement sous-
En 2015, le monde électrifiées ; la sous-région dispose
rural en Afrique pourtant d’un potentiel important
subsaharienne
en énergies renouvelables (1.1.).
représente

62 % de la population Souvent délaissée par les


25 % du PIB (production politiques nationales, qui
agricole)
privilégient l’électrification des
Sources : Sara Mercandalli et Bruno Losch, « Une
Afrique rurale en mouvement - Dynamiques et
centres urbains pour des raisons
facteurs des migrations au sud du Sahara » (FAO et
Le Cirad, 2018).
à la fois économiques et sociales,
FIDA, « Rural Development Report 2016 - Chapter
3: Structural and rural transformation in Africa »
l’électrification rurale souffre
(Rome, 2016), 133.
toujours d’un manque significatif
de volonté et de moyens (1.2.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 41

En conséquence, l’électrification
reste ainsi largement informelle : « L’énergie se trouve au cœur de deux
aspects fondamentaux de l’avenir
les populations rurales n’ont de l’Afrique : le développement
d’autre choix que se procurer économique et social d’une part, et le
changement climatique d’autre part. »
l’électricité hors réseau, par leurs
propres moyens, en combinant Marta Musso et Roberto Cantoni,
les différentes solutions « L’énergie en Afrique : les faits et
les chiffres. Introduction », Afrique
disponibles sur le marché, pour Contemporaine 1-2, no 261-262 (2017) : 9.
couvrir l’ensemble de leurs
besoins (1.3.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


42 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.1.
La fracture énergétique
reste préoccupante malgré
la richesse en énergies
renouvelables.
La communauté internationale s’est mobilisée pour promouvoir
l’énergie sous sa forme la plus polyvalente en termes d’usages :
l’électricité. Mais en Afrique subsaharienne, la fracture énergétique
reste profonde et les perspectives de croissance démographique
et économique prolongent le défi de l’électrification des zones
rurales (1.1.1.).

Le sous-continent subsaharien bénéficie pourtant d’un important


gisement d’énergies renouvelables, et notamment d’énergie
solaire, la plus répandue et la plus simple à utiliser (1.1.2.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 43

© Fondation Énergies pour le monde

Lampe à pétrole.

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44 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.1.1.
Malgré une dynamique internationale favorable,
l’accès à l’électricité est loin d’être universel.
Facteur fondamental de développement hu- compte des impacts sur l’environnement, ni co-
main et enjeu majeur dans la lutte contre le hérence avec la lutte contre les effets du change-
changement climatique, l’accès à l’énergie, ment climatique ; il faut donc privilégier l’accès à
et notamment à une électricité de source re- l’électricité via les énergies renouvelables.
nouvelable, est porté par une dynamique poli-
tique favorable. Malgré cette impulsion, sur le
continent africain, la réalité défie les ambitions
affichées. Dans la sous-région subsaharienne Développement
en particulier, le rythme actuel d’électrification
humain
rurale ne permet en aucun cas de couvrir les
besoins, qui vont croissant. La notion de « développement humain »
SHXWVHG«ŦQLUFRPPHOHSURFHVVXVYLVDQW
L’électrification fait l’objet à élargir au maximum les possibilités
d’ambitieux objectifs offertes aux êtres humains pour améliorer
d’universalité et de durabilité. leurs conditions d’existence et pour
Donner accès à tous à une électricité res- connaître le bien-être sur un territoire
pectueuse de l’environnement : amorcée dès les donné : possibilités d’accéder aux revenus
années 1990 par certaines institutions, comme et à l’emploi, à l’éducation et aux soins
l’ADEME puis l’Union européenne, cette ambition de santé et à un environnement ne
collective et globale se structure dans le sillage du présentant pas de danger, possibilité de
sommet de la terre de Johannesburg (2002). participer pleinement aux décisions de
la communauté et de jouir des libertés
Ce volontarisme politique humaines, économiques et politiques.
s’appuie sur un double constat.
Source : PNUD, « Rapport mondial sur le
Premier constat : réduire la fracture énergétique développement humain 1990 » (New York : PNUD,
est une composante essentielle de la lutte contre 1990), 10.

la pauvreté. L’électricité est un « service élémen-


taire »1, et y accéder est un préalable non suffisant
mais nécessaire pour améliorer les conditions
d’apprentissage et de travail ainsi que la situation
sanitaire (cf.  schéma infra), et pour développer
des activités économiques.
Deuxième constat : cette réduction de la frac-
1. Organisation des Nations unies, « Rapport du Sommet mondial pour le
ture énergétique ne peut se faire sans prise en développement durable » (New York, 2002).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 45

Accès m/ł«OHFWULFLW«VHXOHQłHVWSDVVXIŦVDQWH
pour stimuler la croissance économique
à l’énergie mais elle est nécessaire. En permettant
L’accès à l’énergie correspond à la l’éclairage, la réfrigération, l’utilisation
disponibilité physique des services d’appareils électriques et de nombreux
énergétiques modernes, y compris l’accès équipements et services qui ne
à électricité et à des appareils améliorés pourraient pas être aisément introduits
WHOVTXHOHVIRXUQHDX[DŦQGHU«SRQGUH par une autre forme d’énergie, l’accès
aux besoins humains fondamentaux à des à l’électricité est un élément crucial
prix abordables. de développement humain. »

Source : « Base de données Sustainable Energy for


All, dérivée du SE4ALL Global Tracking Framework »,
Enrique Crousillat, Richard Hamilton
Banque mondiale, AIE et ESMAP, https://donnees. et Pedro Antmann, « Addressing the
banquemondiale.org/indicateur/.
Electricity Access Gap » (Washington, D.C :
Banque mondiale, 2010).
© Remy Delacloche

Accès à l’énergie et développement humain sont liés.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


46 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Principales initiatives internationales en faveur


d’un accès pour tous à une énergie respectueuse
de l’environnement

juillet 2001 septembre 2007


Sommet du G8 à Gênes : les pays membres Lancement de Lighting Africa, programme de
s’engagent à négocier une réduction chiffrée la Banque mondiale et de l’IFC pour favoriser
des émissions de gaz à effet de serre au sein de le développement du marché de solutions
ODFRQYHQWLRQFOLPDW¢DVVXUHUOHŦQDQFHPHQW propres d’éclairage hors réseau dans dix pays
du Fonds pour l’environnement mondial et d’Afrique subsaharienne (objectif : éclairer
à développer des énergies renouvelables. 250 millions de personnes
à horizon 2030).
Site : https://www.lightingafrica.org
septembre 2002
Sommet de la Terre de Johannesburg : dans
OHUDSSRUWŦQDOOHSRLQWFRQVDFUHOłDFFªV septembre 2011
à l’énergie comme un objectif auxiliaire de Lancement du programme Sustainable
développement humain : « L’accès à l’énergie Energy for All YRLUHQFDGU«VS«FLŦTXH 
facilite l’élimination de la pauvreté, en Site : https://www.seforall.org
permettant la production d’autres services
importants. »1
juillet 2013
1. Organisation des Nations unies, « Rapport du Sommet mondial Lancement du programme Power Africa piloté
pour le développement durable » (New York, 2002), 12. par l’Agence américaine pour
le développement international (USAID),
en partenariat avec la Banque africaine de
octobre 2004 développement et la Banque mondiale ; il
Création de la Facilité de dialogue et propose une assistance technique et des
de partenariat de l’Initiative de l’Union ŦQDQFHPHQWVSRXUG«YHORSSHUGHVSURMHWV
européenne pour l’énergie (EUEI PDF), pour durables par le biais d’entreprises américaines.
FRŦQDQFHUGHVSURMHWVYLVDQW¢DFFUR°WUHOłDFFªV¢ Site : https://www.usaid.gov/powerafrica
des services énergétiques modernes et durables
pour les populations pauvres des pays d’Afrique,
GHV&DUD±EHVHWGX3DFLŦTXHHQSDUWLFXOLHUGDQV
les zones rurales et périurbaines.
Site : http://www.euei-pdf.org/fr

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 47

septembre 2015 décembre 2015


Adoption des Objectifs de développement Lancement de l’Initiative africaine pour les
durable (Sustainable Development Goals) par énergies renouvelables (Africa Renewable
l’Assemblée des Nations unies (voir encadré Energy Initiative, AREI) qui rassemble les
infra). 54 pays du continent. Pilotée par l’Union
Site : https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr Africaine, elle a pour objectif « d’accélérer et
d’accroître l’exploitation à grande échelle de
l’énorme potentiel des énergies renouvelables
décembre 2015 de l’Afrique : elle vise à augmenter la capacité
Décision de la 21e Convention des parties à la LQVWDOO«HGłDXPRLQVbJLJDZDWWV *: GłLFL
Convention cadre des Nations unies sur les HWGłDXPRLQVb*:GłLFL3URPXH
changements climatiques de 1992 (COP 21) par les chefs d’Etat et de gouvernement
adoptant l’Accord de Paris et reconnaissant africains, cette initiative a été entérinée par la
la nécessité de promouvoir l’accès universel COP 21 ».2
à l’énergie durable dans les pays en Site : www.arei.org
développement, en particulier en Afrique,
en renforçant le déploiement des énergies 2. Initiative africaine pour les énergies renouvelables, « L’Initiative

renouvelables. Si cette référence à l’énergie de l’Afrique sur les Energies Renouvelables, Résumé » (2016).

durable n’est pas mentionnée dans le texte de


l’Accord, ce dernier prévoit des mécanismes
GłDWW«QXDWLRQGłDGDSWDWLRQGHŦQDQFHPHQW novembre 2016
de renforcement de capacités* et de transfert Création de l’Alliance solaire internationale
de technologies dont la mise en œuvre peut (ASI) à l’occasion de la COP 21. Signé par 58
favoriser le développement de l’énergie SD\VHWUDWLŦ«SDUGłHQWUHHX[OHWUDLW«
durable. vise à rassembler une coalition de pays
VLWX«VHQ]RQHLQWHUWURSLFDOHE«Q«ŦFLDQW
GłXQIRUWHQVROHLOOHPHQWDŦQGHIDYRULVHUOH
changement d’échelle dans le déploiement
de l’énergie solaire par la réduction massive
GHVFR½WV/DFU«DWLRQGłLQVWUXPHQWVŦQDQFLHUV
visant la mobilisation d’un milliard de dollars
US d’investissement dans l’énergie solaire d’ici
2030 doit permettre la mise en œuvre de ces
objectifs.
Site : http://isolaralliance.org

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48 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Ce volontarisme se traduit dans des


objectifs ambitieux d’accès universel Sustainable Energy
à une électricité respectueuse de for All (SE4ALL)
l’environnement.
La mobilisation internationale s’est notamment $ŦQGHWUDQVIRUPHUOHV\VWªPH
concrétisée dans le cadre des Nations unies. énergétique mondial de manière positive,
D’abord en 2011, par le lancement d’une plate- OHSURJUDPPH6($//Ŧ[HWURLVREMHFWLIV
forme mondiale en faveur de l’accès universel à à atteindre d’ici 2030 :
l’électricité et de la promotion de modes de cuis-
son propres et efficaces : Sustainable Energy for 1. assurer un accès universel
All (SE4ALL). à l’énergie et notamment
à l’électricité ;
Dans la lignée de cette initiative, les Objectifs de 2. GRXEOHUOłHIŦFDFLW««QHUJ«WLTXH
développement durable (ODD), adoptés en sep- DŦQGHGLPLQXHUODFRQVRPPDWLRQ
tembre 2015, font de l’accès à l’énergie un objectif totale d’énergie ;
à part entière et reprennent à leur compte les trois 3. doubler la part des énergies
cibles formulées par le programme SE4ALL. renouvelables dans le mix énergétique
mondial, et la porter ainsi à 30 %.

Source : « Sustainable Energy for All : SE4ALL »,


https ://www.seforall.org/.

Le manque d’électricité aggrave des


inégalités déjà existantes
Les ménages pauvres dépensent une part plus importante de leur revenu pour l’éclairage, dont ils
ne peuvent se passer, tout en n’ayant accès qu’à des ressources de substitution plus onéreuses.
En Afrique, les 138 millions de ménages pauvres (composés de personnes vivant avec moins de
2,50 USD (2,23 €)1 par jour) dépensent 20 fois plus que les ménages à revenus élevés raccordés
au réseau.
Au Burkina Faso, une étude a évalué à 3 100 francs CFA (4,70 €) la dépense mensuelle d’éclairage,
jusqu’à 10 % du budget d’un ménage.

Sources : Africa Progress Panel, « Africa Progress Report 2015 » (Genève, 2015), et Lighting Africa, « Lighting Africa Market
Trends Report 2012 » (Nairobi, 2013).

1. Taux de change (mai 2019) : 1 € = 1,1186 $.

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 49

/łLPSDFWE«Q«ŦTXHGHOł«OHFWULŦFDWLRQSDU«QHUJLHVUHQRXYHODEOHVVXUODVDQW«

TYPES DE SERVICES DISPONIBILITÉS ADMINISTRATION


PROPOSÉS DES SERVICES ET LOGISTIQUE

ʼnGLDJQRVWLFV ʼnKRUDLUHVGłRXYHUWXUH ʼnPHLOOHXUHFRPPXQLFDWLRQ


de laboratoires élargis ʼnDP«OLRUDWLRQ
ʼnVRLQVLQWHQVLIV ʼnSOXVODUJH«YHQWDLO des dossiers de gestion
néonatals de services fournis
ʼnIRQFWLRQQDOLW«GHV
dispositifs médicaux
ʼnFKLUXUJLH
ʼnFKD°QHGXIURLG

ÉLECTRIFICATION
RECRUTEMENT SANTÉ ET SÉCURITÉ
PAR ÉNERGIES
DU PERSONNEL
ET ENTRETIEN
RENOUVELABLES
ʼnDP«OLRUDWLRQJ«Q«UDOH
de l’hygiène
ʼnUHFUXWHPHQWHWIRUPDWLRQ ʼnV«FXULW«UHQIRUF«H
ʼnIRUPDWLRQP«GLFDOH ʼnVHQWLPHQWGHV«FXULW«
continue du personnel
ʼnDP«OLRUDWLRQGXPRUDO et des patients
du personnel

Source : IRENA, « Off grid renewable energy solutions to expand electricity access : An opportunity not to be missed » (Abu Dhabi, 2019).

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50 - PARTIE 1 - CONTEXTE

L’Objectif de développement durable (ODD) n° 7


prévoit d’assurer un accès pour tous à une én-
ergie fiable, durable et moderne, à un coût abor-
L’accès universel
dable. Le critère de « durabilité » qu’il énonce à mXQH«QHUJLHŦDEOH
entre en résonance immédiate avec l’ODD n° 13, durable et moderne,
consacré à la lutte contre les changements cli- à un coût abordable »
matiques : la réalisation de l’objectif d’accès uni- est un objectif
versel à l’énergie doit se combiner avec la tran- auxiliaire
sition vers une économie décarbonnée.
de nombreux
L’ODD 7 est assorti de deux cibles pour sa mise
en œuvre à horizon 2030 : autres objectifs
çTGPHQTEGTNCEQQRªTCVKQPKPVGTPCVKQPCNG en vue de développement
de faciliter l’accès à la recherche et aux tech- humain
nologies relatives à l’énergie propre, notamment
de sources renouvelables, l’efficacité énergé- « Qu’il s’agisse d’emploi,
tique et les nouvelles technologies relatives aux de sécurité, de changement
combustibles fossiles plus propres, et promou- climatique, de production de
voir l’investissement dans l’infrastructure éner- nourriture ou d’accroissement
gétique et les technologies relatives à l’énergie des revenus, l’accès de tous à
décarbonnée ; l’énergie est essentiel. Travailler
çFªXGNQRRGT NàKPHTCUVTWEVWTG GV COªNKQTGT NC dans ce sens est particulièrement
technologie afin d’approvisionner en services important car cela a un
énergétiques modernes et durables tous les ha- effet direct sur la capacité
bitants des pays en développement (notamment à atteindre d’autres objectifs
les pays moins avancés, les petits Etats insulai- de développement durable. »
res en développement et les pays en développe-
Source : Sophie Farigoul, « Objectif de
ment sans littoral). développement durable - Energies fiables,
durables et modernes pour tous », ONU, https://
www.un.org/sustainabledevelopment/fr/
Les ODD consacrent également le rôle auxili- energy/.
aire essentiel de l’accès à l’énergie pour atteindre
les autres objectifs de développement humain
(santé, éducation, égalité des sexes, etc.), confir-
mant l’électrification comme un « service élémen-
taire » pour les populations.

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 51

Les principaux liens entre accès à l’énergie et développement humain

PROTECTION DE
L’ENVIRONNEMENT
RÉDUCTION
DE LA PAUVRETÉ Diminution de l’usage
de biomasse non
Développement renouvelable et de
d’activités combustibles fossiles
économiques

MESURES
AMÉLIORATION
TRAVAIL DÉCENT
ET CROISSANCE RELATIVES DE LA SANTÉ
À LA LUTTE
ÉCONOMIQUE Moyens de cuisson
SÉCURITÉ CONTRE LES
CHANGEMENTS propre
ALIMENTAIRE INÉGALITÉS
VIE CLIMATIQUES
RÉDUITES Electrification
TERRESTRE
Amélioration
des dispensaires
de la
PAS DE
production PAUVRETÉ
agricole
Réfrigération

BONNE SANTÉ
FAIM ZÉRO
ET BIEN-ÊTRE

ÉNERGIE PROPRE
ET D’UN COÛT
ABORDABLE

ÉDUCATION
DE QUALITÉ EAU PROPRE ET
ASSAINISSEMENT

CONTRIBUTION ÉGALITÉ ENTRE


À L’ÉDUCATION LES SEXES AMÉLIORATION
DE L’ACCÈS À L’EAU
Eclairage pour
étudier en soirée Pompage électrique
Accès au matériel Potabilisation de l’eau
technologique
(web, etc.)
ÉMANCIPATION DES FEMMES
Création d’activités
génératrices de revenus
Meilleur accès à l’information
et à l’éducation
Source : Fondation Énergies pour le Monde.

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52 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Ces initiatives incitent de manière utile permis de sensibiliser un grand nombre d’acteurs
à la mobilisation et à l’action. et d’accélérer la mise en œuvre de politiques et de
La majorité des instruments des organisations programmes en faveur de l’accès à une électricité
internationales (résolutions, déclarations, recom- respectueuse de l’environnement.
mandations, positions, livres blancs, principes)
relève de la soft law et n’a aucun caractère ju- Dans cet élan, les acteurs financiers se sont saisis
ridiquement contraignant. Ils peuvent néanmoins du sujet, point essentiel car l’électrification néces-
favoriser les engagements politiques et être à site des infrastructures et comporte donc une
l’origine de l’édiction de nouvelles normes de droit importante dimension capitalistique (cf.  chap-
international ou national. itre 2.3.2.). A titre d’exemple, entre 2012 et 2017,
les engagements annuels de l’Agence française
Ainsi, le diagnostic sur la fracture énergétique et du développement (AFD) pour le secteur de
la formulation d’une ambition d’accès universel l’énergie sont passés de 921 M€ à 2 339 M€1. Le fi-
à l’électricité via les énergies renouvelables ont nancement en faveur des énergies renouvelables

Selon l’Agence internationale de l’énergie,


il faudrait investir 32 milliards de dollars par an
jusqu’en 2030 pour garantir l’accès à l’électricité
pour tous

'DQVOłmb(QHUJ\DFFHVVRXWORRNb}SXEOL«HQOł$JHQFHLQWHUQDWLRQDOHGHOł«QHUJLHSURSRVH
différents scénarios pour l’accès à l’énergie en Afrique subsaharienne.
Selon le New Policy Scenario (NPS), dont l’objectif est l’atteinte de 60 % d’accès à l’électricité en
Afrique subsaharienne en 2030, 6 milliards USD (5,36 Mds €) par an d’investissements seraient
nécessaires, soit 84 milliards USD (75 Mds €) sur la période 2017-2030. Pour atteindre un accès
universel à l’électricité en Afrique subsaharienne d’ici 2030, le scénario Energy for All Case indique
que des investissements additionnels à hauteur de 370 milliards, par rapport au NPS, sont requis
sur la période 2017-2030. Ces 454 milliards USD (406 Mds €) d’investissements cumulés,
soit 32 milliards USD (28,6 Mds €) par an jusqu’en 2030, représentent l’équivalent
d’1,7 fois les investissements totaux dans le secteur de l’énergie aujourd’hui. Ces investissements
seront principalement dirigés vers le développement accéléré des miniréseaux et des systèmes
individuels.
A l’échelle mondiale, développer l’accès à l’électricité pour tous d’ici 2030 requiert
des investissements annuels d’un montant de 52 milliards USD (46,5 Mds €).

Source : AIE, « Energy Access Outlook 2017, From Poverty to Prosperity » (Paris, 2017).

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 53

et de l’efficacité énergétique a représenté 60 % de De ce point de vue, toutes les régions du monde


ces engagements tandis que 8 % ont été dédiés à ne partent pas avec le même « handicap » : si la
l’accès à l’énergie, soit un montant de 940 M€. trajectoire de certaines régions (Asie du Sud par
exemple) semble converger favorablement vers
Néanmoins, les objectifs collectifs les objectifs 2030, celle qu’emprunte le continent
que la communauté internationale africain est plus préoccupante.
s’est fixés à horizon 2030 sont,
comme souvent, très ambitieux.
Selon les projections actuelles, il est impos-
sible d’atteindre les 100 % d’accès universel : à
rythme constant d’électrification, plus de 670 mil-
lions de personnes seront toujours sans accès à
l’électricité en 2030. Pour inverser la tendance,
il faudrait investir massivement : multiplier les in-
vestissements actuels par cinq pour atteindre
l’accès universel, et les multiplier par deux ou trois 1. « Agence française de développement, « Accélérer la transition énergétique
en Afrique » (Paris, 2016).
pour atteindre les objectifs relatifs aux énergies
2. Banque mondiale, « State of Electricity Access Report » (Washington, D.C,
renouvelables2. 2017).

© Adam Schultz

Forum SE4ALL septembre 2017.

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54 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Comparaison des consommations annuelles d’électricité en Afrique et dans le monde

AFRIQUE SUBSAHARIENNE
HORS AFRIQUE DU SUD

AFRIQUE SUBSAHARIENNE

BRÉSIL

CANADA

AFRIQUE

RUSSIE

JAPON

Consommation (TWh/an)
INDE

AMÉRIQUE LATINE
ET CARAÏBES

UE

USA

CHINE

0 1 000 2 000 3 000 4 000 5 000 6 000

Source : Schéma réalisé à partir de la base de données de la Banque Mondiale (https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/) et


du rapport « Key World Energy Statistics 2018 » de l’AIE.

L’accès à l’électricité pour tous entretien ou de leur sous-dimensionnement) et,


sur le continent africain est loin surtout, de l’accès limité à l’électricité.
d’être une réalité. L’AFD estime à 5 milliards de dollars les dépenses
60 % des Subsahariens (environ 600 millions de annuelles des ménages et des entreprises afri-
personnes1) n’ont toujours pas accès à un service cains pour pallier l’absence d’accès à un service
électrique. Par ailleurs, quand il existe, le service électrique fiable2.
n’est pas nécessairement fiable.
En 2012, la Banque mondiale évoque une « crise
énergétique » pour 25 des 54 pays africains en 1. « Agence française de développement, « Accélérer la transition énergétique
en Afrique » (Paris, 2016).
raison des dysfonctionnements des installa- 2. Banque mondiale, « State of Electricity Access Report » (Washington, D.C,
tions existantes (du fait de l’insuffisance de leur 2017).

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 55

On constate de fortes disparités entre sous-régions

Pourcentage d’accès
à l’électricité

› 75 % de la population
Entre 50 % et 75 %
de la population

Entre 25 % et 50 %
de la population
‹ 25 % de la population

Source : AIE « World Energy Outlook » (Paris, 2015).

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56 - PARTIE 1 - CONTEXTE

C’est l’Afrique subsaharienne qui


connaît la fracture la plus marquée Afrique
en matière d’accès à l’électricité. subsaharienne
%GVVG UQWUTªIKQP EQPEGPVTG  FG NC RQRW-
lation mondiale dénuée d’accès à l’électricité. L’Afrique subsaharienne s’étend sur
En 2017, deux habitants sur trois n’ont toujours pas 22 millions de kilomètres carrés au sud du
accès à un service électrique. Les chiffres conti- Sahara. En 2017, elle comptait 1,06 milliard
nentaux cachent une réalité très hétérogène : on GłKDELWDQWVGDQVb(WDWV (voir liste
observe de grandes disparités entre pays ou sous- infra.). Elle abrite 33 des 47 pays les moins
régions, mais aussi entre zones rurales et urbaines. avancés (PMA).
La fracture énergétique entre zones rurales et ur-
Afrique du Sud, Angola, Bénin, Botswana, Burkina
baines est particulièrement prononcée. En 2016, le Faso, Burundi, Cap-Vert, Cameroun, Comores, Côte
taux d’électrification rurale est inférieur à 20 % dans d’Ivoire, Erythrée, Ethiopie, Gabon, Gambie, Ghana,
Guinée, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Kenya,
près de deux tiers des pays de la sous-région (hors Lesotho, Libéria, Madagascar, Malawi, Mali, Maurice,
Mauritanie, Mozambique, Namibie, Niger, Nigéria,
Afrique du Sud), et inférieur à 10 % pour 17 d’entre Ouganda, République centrafricaine, République
eux. Seuls 5 pays dépassent les 50 % (alors que le démocratique du Congo, République du Congo,
Rwanda, Sao Tomé-et-Principe, Sénégal, Seychelles,
taux est supérieur à 90 % en Afrique du Nord). Sierra Leone, Somalie, Soudan, Soudan du Sud,
1T RNWU FG  FG NC RQRWNCVKQP FG NC UQWU Swaziland, Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie, Zimbabwe.

région est rurale.


6RXUFHb ONU.

Taux d’accès La région affiche également une faible con-


à l’électricité sommation d’électricité par rapport au reste du
selon la Banque monde. Selon la Banque mondiale, sur la période
mondiale 2010-2014, la consommation moyenne annuelle
par habitant en Afrique subsaharienne équivalait
L’accès à l’électricité correspond au à seulement 4 % de la consommation par habi-
pourcentage de la population disposant tant des Etats-Unis, à 15 % de celle de la Chine et à
d’un accès à l’électricité. Les données sur 21 % de celle du Brésil.
Oł«OHFWULŦFDWLRQVRQWREWHQXHVDXSUªVGH Par ailleurs, la tendance régionale est préoccu-
l’industrie, d’enquêtes nationales et de pante. Entre 2000 et 2014, le nombre de per-
sources internationales. sonnes vivant sans accès à l’électricité a augmen-
té, la forte croissance démographique n’ayant pas
Source : « Base de données Sustainable Energy for
All (SE4ALL) dérivée du SE4ALL Global Tracking
été accompagnée des efforts d’électrification
Framework », Banque mondiale, AIE et ESMAP, https:// nécessaires, notamment en zone rurale.
donnees.banquemondiale.org/indicateur/ .

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 57

On constate de fortes disparités entre milieu urbain (à gauche)


et milieu rural (à droite)

Taux d’accès
à l’électricité

› 80 % de la
population

Entre 60 % et 80 %
de la population

Entre 40 % et 60 %
de la population

Entre 20 % et 40 %
de la population

‹ 20 % de la
population

Source : Analyse Sia Partners d’après l’AIE, « World Energy Outlook » (Paris, 2015).

L’Afrique subsaharienne a une même capacité de production que la France,


pour quatorze fois plus d’habitants

Nombre d’habitants (en millions)

Capacité maximale de production électrique (en GW)

FRANCE

AFRIQUE SUBSAHARIENNE

200 0 200 400 600 800 1000

Source : Schéma réalisé à partir de la base de données de la Banque Mondiale (https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/) et


du rapport « Key World Energy Statistics 2018 » de l’AIE.

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58 - PARTIE 1 - CONTEXTE

La sous-région1 souffre d’une production instal- Capacité de production en Afrique


lée trop faible par rapport aux besoins, largement Subsaharienne par type d’énergie
inférieure à celle d’un pays comme la France, et en 2016 (total = 122 GW)
d’infrastructures de distribution insuffisantes. Alors
que la capacité maximale de production élec- Autres
trique de la France est de 130 GW pour 67 millions Solaire PV renouvelables

d’habitants, celle de l’Afrique subsaharienne est de 2% 3%


122 GW pour plus d’1 milliard d’habitants2.
Hydraulique
Charbon
22% 34%
Or, la demande en électricité
en Afrique subsaharienne va
rester forte, sous l’effet conjugué Nucléaire
des croissances économique 2%
et démographique.
Les projections actuelles prévoient une croissance
économique moyenne entre 3 et 4 % sur la péri- Pétrole Gaz
ode 2019-20203. Cela induit une demande gran- 22% 15%
dissante en électricité pour les usages productifs
Source : AIE, « World Energy Outlook » (Paris, 2015).
(agriculture, artisanat, commerce, industrie) et un
besoin important d’infrastructures pour y répon-
dre. D’autant que le rythme démographique restera
soutenu. A l’horizon 2050, la population d’Afrique la production totale d’électricité6), les énergies
va doubler et dépasser les 2,4 milliards d’habitants, renouvelables non hydrauliques représentant
dont 2,2 milliards au sud du Sahara4. seulement 2,5 % de la production7.
Par ailleurs, la population rurale continuera de Or, les impacts du changement climatique sont
croître numériquement et les nouveaux actifs déjà visibles sur le continent (cf. encadré p.60) :
se trouveront majoritairement en zone rurale raréfaction de la ressource eau, cycle des plu-
(cf.  encadré p.59) ; le rythme d’électrification ac- ies bouleversé, augmentation des températures…
tuel ne permettra pas de couvrir les besoins. La sous-région subsaharienne est et restera une
des zones les plus touchées par le changement
D’où un double défi social et climatique selon le GIEC8, du fait « de sa situation
environnemental : suivre la demande géographique et de ses faibles ressources insti-
d’électricité selon une trajectoire tutionnelles d’intervention pour des raisons poli-
de croissance sobre en carbone. tiques et économiques »9.
Même si le continent africain a aujourd’hui
l’empreinte écologique la moins forte au La question est donc de savoir si les énergies
monde5, la poursuite d’une forte croissance dé- renouvelables, dont l’Afrique subsaharienne
mographique oblige à se poser la question des FKURQUG GP CDQPFCPEG RQWTTQPV XTCKOGPV
modalités de production de l’électricité. En 2016, jouer le rôle fondamental qu’on attend d’elles
la combustion fossile était la principale source RQWTCEETQ¯VTGNàCEE©U¡NàªNGEVTKEKVªVQWVGPCVVª-
de production d’électricité en Afrique (80 % de nuant les effets du changement climatique. }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 59

Population rurale : une dynamique démographique


unique et une croissance sans précédent

L’Afrique subsaharienne a été la dernière région du monde à s’engager dans sa transition


démographique, plus lente que prévu. Alors qu’en Afrique australe et dans certains pays d’Afrique
de l’Ouest côtière, le nombre d’enfants par femme a chuté à moins de trois, la plupart des autres
U«JLRQVDIŦFKHQWGHVEDLVVHVSOXVOHQWHVHWLQFHUWDLQHV(QFRQV«TXHQFHODSRSXODWLRQHVWLP«HGH
l’Afrique subsaharienne en 2050 a été réévaluée à la hausse de 208 millions de personnes, et la
région devrait atteindre 2,2 milliards d’habitants à cette date.

L’Afrique subsaharienne est également unique par l’importance durable de sa population rurale.
En 2015, la proportion moyenne de ruraux était encore estimée à 62 %. Alors que le monde a basculé
progressivement vers les villes et continue de s’urbaniser rapidement, la région reste essentiellement
rurale en raison d’un processus d’urbanisation relativement récent. Elle ne devrait atteindre le point de
EDVFXOHGXUXUDOYHUVOłXUEDLQTXł¢ODŦQGHVDQQ«HV/DSRSXODWLRQXUEDLQHDG«FXSO«GHSXLVOHV
années 1960, mais cette croissance s’est stabilisée aux alentours de 3,5 à 4 % par an du fait de la faible
transformation structurelle de la plupart des économies d’Afrique subsaharienne.

En 2050, on estime que la population rurale subsaharienne sera de 980 millions de personnes,
soit le tiers de la population rurale mondiale. La population rurale connaîtra une augmentation
GHVRLWPLOOLRQVGHUXUDX[VXSSO«PHQWDLUHVLPSOLTXDQWXQHKDXVVHVLJQLŦFDWLYHGHV
GHQVLW«VUXUDOHV/HSOXVJUDQGG«ŦSRXUOł$IULTXHVXEVDKDULHQQHHVWGRQFGHJ«Q«UHUVXIŦVDPPHQW
d’emplois pour absorber une force de travail en plein essor. Sur la base de la répartition actuelle de
la population et des tendances migratoires vers les villes, près de 60 % des nouveaux travailleurs
(soit environ 220 millions) seront très probablement en zone rurale.

Source : Sara Mercandalli et Bruno Losch, « Une Afrique rurale en mouvement - Dynamiques et facteurs des migrations au sud
du Sahara » (FAO et Le Cirad, 2018).

1. Hors Afrique du Sud. 5. « Open Data Platform », Global Footprint Network, http://data.
2. Agence Internationale de l’Énergie, « World Energy Outlook » (Paris, 2015), 78. footprintnetwork.org/#/

3. Banque africaine de développement, « Perspectives économiques en Afrique 6. Agence Internationale de l’Énergie, « Key World Energy Statistics 2016 »
2019 » (Abidjan, 2019). Banque mondiale, « Global Economic Prospects » (Paris, 2016).
(Washington, D.C, 2019). 7. Agence Internationale de l’Énergie, « Key World Energy Statistics 2016 »
4. François Héran, « L’Europe et le spectre des migrations subsahariennes », (Paris, 2016).
Population et Sociétés, n° 558 (2018). 8. Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, « Rapport
spécial du GIEC - Réchauffement planétaire de 1.5 °C » (2018).
9. Marta Musso et Roberto Cantoni, « L’énergie en Afrique : les faits et les
chiffres. Introduction », Afrique Contemporaine 1-2, no 261-262 (2017) : 10.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


60 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Les impacts du changement


climatique en Afrique subsaharienne

L’Afrique subsaharienne, qui représente 14 % de la population mondiale, est la région qui a le


moins contribué au réchauffement climatique. Malgré une augmentation de ses émissions de
CO2 au cours des années précédentes, ces dernières demeurent très faibles (3,6 % des émissions
globales) en comparaison de celles de l’Europe ou des Etats-Unis. La principale contribution
de l’Afrique au changement climatique est liée au rythme accéléré de la déforestation sur le
continent au cours des dernières décennies.

3RXUWDQWOł$IULTXHVXEVDKDULHQQHHVWLGHQWLŦ«HSDUOH*,(&QRWDPPHQWFRPPHOD]RQHODSOXV
vulnérable au changement climatique$YHFGHVDVXSHUŦFLHVHVLWXDQWGDQVOD]RQHWURSLFDOH
OHFRQWLQHQWFRQQD°WXQHPXOWLWXGHGHFKDQJHPHQWVHQYLURQQHPHQWDX[/DG«VHUWLŦFDWLRQHW
la sécheresse affectent certaines zones, tandis que l’élévation du niveau de la mer, les risques
d’inondation ou les phénomènes d’érosion côtière en impactent d’autres. Selon les projections
climatiques, les épisodes d’extrême chaleur ne devraient pas s’atténuer mais, au contraire, devenir
plus fréquents.

Les répercussions de ces changements, multiples, se ressentiront (et se ressentent déjà) tant sur
les modes de vie humains que sur les écosystèmes naturels, en raison d’une forte dépendance à
l’agriculture, d’un niveau de pauvreté élevé et d’une vulnérabilité accrue par une faible capacité
d’adaptation. En effet, les systèmes de production agricole, dont dépend une grande partie de la
SRSXODWLRQVHURQWSDUWLFXOLªUHPHQWSHUWXUE«VSDUODPRGLŦFDWLRQGHVVDLVRQVGHVSOXLHVHWXQH
augmentation des températures plus importante qu’ailleurs.

/H*,(&HVWLPHDLQVLTXHOHVU«FROWHVLQVXIŦVDQWHVODSHUWHGHE«WDLOHWODS«QXULHGłHDXGXHVDX
climat pourraient conduire 250 millions d’Africains à souffrir d’insécurité alimentaire, première
cause d’exode rural.

Sources :
‫ژى‬U-ً‫ژٴژژ‬Þȏȵǹư‫ژ‬-ȄƷȵǒɲ‫‚ژ‬ɓɋǹȏȏǵ‫ژٵژ‬٢¥ƌȵǠȽً‫ו׏׎אژ‬٣ِ
‫ژى‬U-ً‫ژٴژ‬hƷɲ‫ژ‬Þȏȵǹư‫ژ‬-ȄƷȵǒɲ‫ژ‬°ɋƌɋǠȽɋǠƩȽ‫ژٵژו׏׎אژ‬٢¥ƌȵǠȽً‫ו׏׎אژ‬٣ِ
‫ژژى‬ǚȵǠȽɋȏȲǚƷȵ‫ژِژ‬FǠƷǹư‫ژ‬Ʒɋ‫ژ‬ƌǹًِ‫ژٴژ‬ǹǠȂƌɋƷ‫ژ‬ǚƌȄǒƷ‫ژيג׏׎אژ‬UȂȲƌƩɋȽً‫ژ‬ưƌȲɋƌɋǠȏȄً‫ژ‬ƌȄư‫ژ‬ÝɓǹȄƷȵƌƨǠǹǠɋɲِ‫ژ‬¥ƌȵɋ‫ژيژ‬Gǹȏƨƌǹ‫ژ‬ƌȄư‫ژ‬°ƷƩɋȏȵƌǹ‫ژ‬ȽȲƷƩɋȽِ‫ژ‬
Summary for Policymakers. » (Cambridge et New York : GIEC, 2014), 1-32.
‫ژژى‬kƌɓȵƷȄƩƷ‫ژ‬ƌȵƌȂƷǹً‫ژٴژ‬k‫ټ‬ǑȵǠȴɓƷ‫ژ‬ưȏǠɋ‫ژ‬ȲȵƷȄưȵƷ‫ژ‬Ƚƌ‫ژ‬Ȳƌȵɋ‫ژ‬ưƷ‫ژ‬ȵƷȽȲȏȄȽƌƨǠǹǠɋƸ‫ژ‬ưƌȄȽ‫ژ‬ǹƌ‫ژ‬ǹɓɋɋƷ‫ژ‬ƩȏȄɋȵƷ‫ژ‬ǹƷ‫ژ‬ƩǚƌȄǒƷȂƷȄɋ‫ژ‬ƩǹǠȂƌɋǠȴɓƷ‫ژًٵژ‬ǒȵƌȄư‫ژ‬
entretien avec Arona Diedhiou, Le Monde (en ligne), 12 décembre 2018, https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/12/l-
afrique-doit-prendre-sa-part-de-responsabilite-dans-la-lutte-contre-le-changement-climatique_5396144_3244.html.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 61

(OHFWULŦFDWLRQUXUDOHSDU«QHUJLHVUHQRXYHODEOHV
et lutte contre le changement climatique

En dépit d’une absence de preuves empiriques de l’impact de l’accès à l’électricité sur la résilience
des populations au changement climatique, des liens indirects sont relevés. Une étude (Scott et
al., 2017) illustre les effets positifs de l’électricité sur les capacités d’adaptation, d’anticipation et
GłDEVRUSWLRQQ«FHVVDLUHVSRXUODU«VLOLHQFHDXFKDQJHPHQWFOLPDWLTXH/ł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHSDU
énergies renouvelables apparaît comme un moyen pertinent pour réduire la dépendance aux
UHVVRXUFHVIRVVLOHVGRQWOHVFR½WVHQFRQVWDQWHDXJPHQWDWLRQSªVHQWGHID©RQVLJQLŦFDWLYHVXUOH
budget des ménages ruraux. Elle incite également les communautés locales à s’approprier leurs
sources d’électricité et à contribuer à leur gestion. Elle facilite aussi les communications et l’accès
à l’information et améliore la diffusion des alertes en cas d’aléas climatiques graves, permettant
ainsi aux populations, même isolées, de se protéger et de mieux en anticiper les conséquences.

Les systèmes décentralisés renouvelables peuvent également pallier les défaillances des
infrastructures centralisées tant qu’elles ne sont pas restaurées. Les risques de coupures ou de
pannes prolongées s’amenuisent dans le cadre de projets décentralisés de petite échelle, où
les structures locales en charge de l’exploitation peuvent intervenir dans des délais réduits. Les
réseaux de transmission et de distribution traditionnels sont, eux, vulnérables aux phénomènes
météorologiques extrêmes, dont la fréquence risque d’augmenter. Leur perturbation peut, par
ricochet, mettre un terme à d’autres infrastructures essentielles telles que les services de transport
et de santé.

(QŦQOHVDSSOLFDWLRQVDQQH[HVGHOłXWLOLVDWLRQGHOł«QHUJLHVRODLUHWHOOHSRPSDJHVRODLUH
permettent de faciliter l’accès aux ressources en eau et l’augmentation des cultures, renforçant
ainsi la sécurité alimentaire.

Sources :
‫ژى‬U-ً‫ژٴژژ‬Þȏȵǹư‫ژ‬-ȄƷȵǒɲ‫‚ژ‬ɓɋǹȏȏǵ‫ژٵژ‬٢¥ƌȵǠȽً‫ו׏׎אژ‬٣ً‫ِ׎זژ‬
‫ژى‬ȄưȵƷɬ‫ژ‬°Ʃȏɋɋ‫ژ‬Ʒɋ‫ژ‬ƌǹًِ‫ژٴژ‬Oȏɬ‫ژ‬Ƚȏǹƌȵ‫ژ‬ǚȏɓȽƷǚȏǹư‫ژ‬ȽɲȽɋƷȂȽ‫ژ‬ƩȏȄɋȵǠƨɓɋƷ‫ژ‬ɋȏ‫ژ‬ȵƷȽǠǹǠƷȄƩƷ‫ژٵژ‬٢‚%Uً‫ו׏׎אژ‬٣ِ
‫ژژژى‬ÝƌǹƸȵǠƷ‫ژ‬uƌȽȽȏȄ‫ٮ‬%ƷǹȂȏɋɋƷ‫ژ‬Ʒɋ‫ژ‬ƌǹًِ‫ژٴژ‬Gǹȏƨƌǹ‫ژ‬ÞƌȵȂǠȄǒ‫ژ‬ȏǑ‫דِ׏ژ‬۵ِ‫ژ‬Ȅ‫ژ‬U¥‫ژ‬°ȲƷƩǠƌǹ‫¨ژ‬ƷȲȏȵɋ‫ژ‬ȏȄ‫ژ‬ɋǚƷ‫ژ‬ǠȂȲƌƩɋȽ‫ژ‬ȏǑ‫ژ‬ǒǹȏƨƌǹ‫ژ‬ɬƌȵȂǠȄǒ‫ژ‬ȏǑ‫ژ‬
‫דِ׏‬۵‫ژ‬ƌƨȏɫƷ‫ژ‬ȲȵƷ‫ٮ‬ǠȄưɓȽɋȵǠƌǹ‫ژ‬ǹƷɫƷǹȽ‫ژ‬ƌȄư‫ژ‬ȵƷǹƌɋƷư‫ژ‬ǒǹȏƨƌǹ‫ژ‬ǒȵƷƷȄǚȏɓȽƷ‫ژ‬ǒƌȽ‫ژ‬ƷȂǠȽȽǠȏȄ‫ژ‬ȲƌɋǚɬƌɲȽً‫ژ‬ǠȄ‫ژ‬ɋǚƷ‫ژ‬ƩȏȄɋƷɱɋ‫ژ‬ȏǑ‫ژ‬ȽɋȵƷȄǒɋǚƷȄǠȄǒ‫ژ‬ɋǚƷ‫ژ‬
global response to the threat of climate change, sustainable development, and efforts to eradicate poverty. Summary for
Policymakers » (Genève : GIEC, 2018), 32.
‫ژى‬U-ً‫ژٴژ‬hƷɲ‫ژ‬Þȏȵǹư‫ژ‬-ȄƷȵǒɲ‫ژ‬°ɋƌɋǠȽɋǠƩȽ‫ژٵژה׏׎אژ‬٢¥ƌȵǠȽً‫ה׏׎אژ‬٣ِ

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


62 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.1.2.
La région dispose pourtant d’un important
potentiel d’électrification à partir des gisements
d’énergies renouvelables.

L’accès à l’électricité en milieu rural connaît un permettent de produire de l’électricité sur le


regain d’intérêt et d’activités grâce aux nou- lieu même de sa consommation et d’éviter les
velles possibilités offertes par l’utilisation des coûts liés à son acheminement depuis les cen-
sources d’énergies renouvelables (EnR). Dis- trales de production.
ponibles sur tous les territoires, ces sources

Carte des EnR en Afrique : potentiels solaire et biomasse

Densité
de biomasse
(en tonnes/ha)

,UUDGLDWLRQJOREDOH N:KP2) 250

(OHFWULFLW«VRODLUH N:KN:SLF
0.1

Sources : Alan Belward et al., « Renewable Energies in Africa - Current Knowledge » (Luxembourg : Joint Research Centre
(Commission Européenne), 2011).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 63

Or, la majorité des pays présentant un faible taux montagneux d’Afrique de l’Ouest et les cours d’eau
d’électrification rurale se situe entre les tropiques, d’Afrique centrale regorgent de gisements hydrau-
dans la zone subsaharienne en particulier, gé- liques. L’éolien peut être exploité sur les côtes des
néreusement dotée en ressources renouvelables. zones tropicales. La diversité des sources et le
potentiel, très important, du gisement solaire sont
Si la palette des énergies porteurs d’un fort espoir. Toutefois, quelle que soit
renouvelables exploitables est large, la source, la confrontation au réel et les retours
l’énergie solaire est de loin la source d’expérience rappellent que les contraintes asso-
la plus abondante. ciées ne doivent pas être sous-estimées lorsqu’il
L’énergie solaire est abondante dans les zones s’agit d’utiliser les énergies renouvelables pour
tropicales. La biomasse est omniprésente, par- l’électrification hors réseau de sites isolés aux
ticulièrement en Afrique centrale. Les massifs faibles consommations électriques.

Carte des EnR en Afrique : potentiels hydro et éolien

Modélisation des
ressources pico et mini-
hydro et localisation
géographique Densité d’énergie
éolienne en W/m2
L’hydroénergie
peut être l’option > 1 300
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
la plus économique 900
Lieux et villes peuplés
de 1 000 habitants ou
plus 600

Centrales hydroélectriques 300


ayant une capacité de
production totale installée
supérieure à 10 MW 150
0: 0:
0: 0: < 25

Sources : Alan Belward et al., « Renewable Energies in Africa - Current Knowledge » (Luxembourg : Joint Research Centre
(Commission Européenne), 2011).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


64 - PARTIE 1 - CONTEXTE

L’énergie solaire Le gisement solaire excède largement


Pendant longtemps, le gisement solaire n’a pas les besoins en énergie mondiaux
été pris en considération comme source pos-
sible pour la production d’électricité. L’Agence

Réserves mondiales estimées


internationale de l’énergie ne le comptabilise que Uranium
depuis 2012, par exemple. Etant donné le poten-
tiel mondial de ce gisement (23 000 TWh/an), sa Gaz
comptabilisation vient bouleverser la hiérarchie
établie entre les différentes sources (cf. schéma). Pétrole

Le gisement solaire est parfaitement connu sur la Charbon


totalité du territoire africain, grâce aux mesures
disponibles, principalement fournies par l’aviation Consom-
civile, et corroborées par celles de la NASA. Ces mation
mondiale
mesures couvrent une longue période et sont fi- d’énergie
ables. Les ensoleillements relativement constants annuelle

au cours de l’année (de l’ordre de 6 kWh/m2/jour en


Source : Solarpraxis Engineering, https://www.solarpraxis.com/
zone tropicale et de 4 kWh/m2/jour en zone équa- english/.

toriale1) permettent une utilisation efficace des sys-


tèmes solaires photovoltaïques (PV)2.

Dès que la ressource solaire est utilisée seule, son


intermittence journalière (ou l’existence de péri-
odes d’hivernage3), son talon d’Achille, requiert de
lui adjoindre un système de stockage d’électricité
et/ou de réaliser une hybridation (couplage avec
des sources de production pilotables).

Sur la technologie solaire photovoltaïque, voir aussi


le chapitre 3.1., qui en détaille le fonctionnement.
© Fondation Énergies pour le Monde

1. A comparer avec l’irradiation horizontale moyenne en France :


1 100 à 1 700 kWh/m2/an (source : Solargis), soit 3 à 4,6 kWh/m2/jour, mais très
variable d’un jour à l’autre.
2. Il existe d’autres applications, non pertinentes pour la production d’électricité,
comme le solaire thermodynamique.
3. En saison des pluies notamment, qui peut se traduire par une baisse
significative de l’ensoleillement, par exemple dans les pays côtiers comme la
Guinée ou la Sierra Leone.
Les batteries permettent de stocker l’électricité.

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 65

L’énergie éolienne La connaissance de la distribution des vitess-


Le potentiel éolien d’un site étant complexe à es de vent est une information majeure, la puis-
mesurer, cette ressource est moins bien connue. sance électrique délivrée étant proportionnelle au
Il est rarement constant tout au long de l’année cube de la vitesse du vent. On constate souvent
et est influencé par son environnement direct de longues périodes sans vent, ce qui requiert
(microclimat local). l’hybridation des systèmes de production élec-
Aussi est-il nécessaire de réaliser des cam- trique. A l’inverse, l’éventualité de vents violents,
pagnes de mesure du potentiel éolien sur un an tornades ou cyclones pénalise les sites poten-
au moins, puis d’effectuer une corrélation avec tiels, compte tenu des risques de détériorations si
les résultats mesurés par les stations les plus les travaux de mise en sécurité des éoliennes ne
proches. En électrification hors réseau, il est par- sont pas réalisés à temps.
ticulièrement important d’obtenir des données
sur plusieurs années.

Les éoliennes d’Ambondro (Madagascar)

'HX[«ROLHQQHVGHN:FKDFXQHDVVRFL«HV
à un réseau local de distribution électrique,
alimentent la localité d’Ambondro, à l’extrême
sud de Madagascar, depuis novembre 2010.
Moins d’un an après leur mise en service, un
G«IDXWGHVHUUDJHGłXQERXORQŦ[«VXUOHPR\HX
de l’une d’entre elles a détérioré le rotor de la
machine. Encore sous garantie, les pièces ont été
remplacées par le fabricant et réinstallées par
l’installateur, qui disposait d’une base à proximité.
Un serrage convenable a évité que le phénomène
© Fondation Énergies pour le monde

ne se reproduise. Quoi qu’il en soit, les pièces en


mouvement sur des équipements innovants sont
sources de défaillance et de rupture de service.
Dans le cas présent, la redondance des éoliennes
a limité l’impact négatif de la panne.

Source :‫ژ‬FȏȄưƌɋǠȏȄ‫ژ‬.ȄƷȵǒǠƷȽ‫ژ‬Ȳȏɓȵ‫ژ‬ǹƷ‫ژ‬uȏȄưƷً‫ژ‬ȲȵȏDZƷɋ‫¨ژ‬-°‚žOِ

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


66 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Il y a encore une dizaine d’années, l’éolien était La biomasse


une option économiquement compétitive dans La biomasse est omniprésente en Afrique sub-
les zones où le gisement éolien était constant et saharienne. Sous ses formes sèche ou humide,
soutenu. Aujourd’hui, la baisse très significative du la ressource peut être utilisée dans les domaines
coût du photovoltaïque disqualifie souvent l’éolien énergétique, alimentaire et industriel. Toutefois,
pour les faibles puissances. De plus, l’usure des pour satisfaire les besoins de communautés rura-
pièces en mouvement induit des contraintes les, le recours à la biomasse, si prometteur soit-il,
d’exploitation fortes dans un contexte rural. n’a pas, à ce jour, été concluant.
Deux types de contraintes pénalisent cette
solution  : d’une part, les contraintes tech-
niques des petites installations aux régimes de
charge variables, et, d’autre part, les contraintes
Biomasse d’approvisionnement de la ressource sous ses
diverses formes (qualité et quantité suffisantes et
Le dictionnaire donne de la biomasse constantes).
XQHG«ŦQLWLRQJ«Q«UDOHHWLQFRPSOªWH En l’état actuel des technologies, les contraintes
« Masse de matière vivante, animale permettent rarement à la biomasse de fournir
ou végétale, de la surface du globe une électricité fiable et pérenne, quelle que soit la
terrestre. » technique utilisée (unité de gazéification, moteur
En réalité, la biomasse comprend aussi à huile de jatropha, turbine à vapeur, etc.).
l’ensemble de la matière organique
biodégradable produite par le vivant. Si le potentiel existe, des recherches sont encore
Elle englobe les constituants de nécessaires pour l’exploitation de la ressource.
l’alimentation humaine et animale, des D’autres facteurs exogènes peuvent complexi-
matériaux (bois, cuir, papier, carton, fier l’équilibre nécessaire de l’écosystème lo-
cordage), des textiles (coton, lin, soie), cal, comme les facteurs démographiques et le
des composés chimiques (résines, changement climatique.
cosmétiques, médicaments), les
fertilisants naturels (fumure, compost)
et les déchets organiques, ainsi que la
totalité des combustibles biosourcés
(bois de feu, charbon de bois,
biocarburants, biogaz, biocombustibles
industriels).

Source : Christian de Gromard et Roland


Louvel. « De la biomasse à la bioéconomie, une
stratégie énergétique pour l’Afrique ? », Afrique
Contemporaine 1-2, no 261-262 (2017).

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 67

8QLW«GHJD]«LŦFDWLRQ &DPERGJH

Le village de Sambour, dans la province de Kampong Thom, au Cambodge, dispose


GHUHVVRXUFHVGHELRPDVVHHQTXDQWLW«VXIŦVDQWH8QLQVWDOODWHXUGłXQLW«VGHJD]«LŦFDWLRQHVW
bien implanté au Cambodge. Le projet d’installation d’une unité dans le village est né de cette
conjonction. Fonctionnant correctement à plein régime, le groupe électrogène* alimenté au gaz
émis par la pyrolyse de la biomasse préalablement séchée a rapidement montré des signes de
faiblesse, en raison d’un encrassement des cylindres aux bas régimes du moteur. Le démontage
trop fréquent du bloc moteur, provoquant des arrêts intempestifs de fourniture d’électricité
et augmentant les coûts d’exploitation, a eu raison de l’option technique innovante. L’unité de
JD]«LŦFDWLRQD«W«UHPSODF«HSDUXQJURXSHWKHUPLTXHIRQFWLRQQDQW¢OłHVVHQFH

Source : Fondation Énergies pour le Monde, projet Energie Solidarité Mékong II.

© Fondation Énergies pour le monde

Unité de gazéification de Sambour.

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68 - PARTIE 1 - CONTEXTE

L’énergie hydraulique
Centrale
En dehors de la zone sahélienne, l’Afrique dispose
d’une très importante ressource d’énergie hy-
hydraulique
draulique : le potentiel est de l’ordre de 1 750 TWh/ d’Antetezambato
an, dont 3 % seulement sont exploités1. (Madagascar)
Si cette énergie semble être la ressource idéale
pour l’électrification de localités proches des Depuis 2002, la centrale hydraulique
cours d’eau, grâce à des coûts d’investissement d’Antetezambato, au centre de
et de fonctionnement intéressants dès que le Madagascar, fournit de l’électricité
contexte est favorable, le potentiel des sites est à 180 abonnés domestiques et
souvent très mal connu en contexte rural. Aussi, économiques grâce à un réseau couvrant
réaliser des études de faisabilité précises est-il un périmètre de 2 kilomètres de rayon. Sur
un impératif : quelles que soient la puissance, la un cours d’eau étroit, à la base d’une chute
technologie et la configuration envisagées, il faut munie d’une petite retenue, la centrale
analyser la pluviométrie de la région, l’hydrologie fournie par la société belge JLA, au génie
du fleuve2, ainsi que la géologie et les contraintes civil restreint, débite une puissance de
géométriques du site. N:3HQGDQWODS«ULRGHGł«WLDJHGH
En ce qui concerne les sites disposant de chutes, trois semaines maximum, les abonnés
de nombreuses informations sont à connaître et ont convenu de revenir aux anciennes
analyser avec soin, alors même que les contextes habitudes pour s’éclairer, sans que cela ne
locaux ne favorisent pas la précision des données pose problème. L’opérateur,
collectées. Notamment : la puissance disponible, un ancien professeur, exploite avec une
la durée de la période d’étiage (niveau d’un cours petite équipe la centrale et
d’eau à son point le plus bas), la distance aux lieux le réseau, depuis dix sept ans, sans autres
de consommation et les coûts du génie civil. Pour arrêts que ceux nécessaires
les sites proches de cours d’eau sans dénivelé à la maintenance. Le remplacement de
mais au courant rapide, les informations hydrau- la courroie, seul composant à changer
liques sont relativement aisées à obtenir ; celles régulièrement, fabriquée en Europe, doit
concernant les matériaux charriés, les baisses de faire l’objet d’anticipations.
niveau, les ancrages doivent être l’objet de la plus
grande attention.
© Fondation Energies pour le Monde

De nouveaux types d’hydroliennes, solution qui ex-


ploite la vitesse de l’eau comme les éoliennes ex-
ploitent la vitesse du vent, permettent aujourd’hui
d’élargir l’éventail de sites susceptibles d’être

1. Organisation des Nations unies pour le développement industriel 2009,


et Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture 2011.
2. Cependant, si la puissance exploitée est inférieure à la puissance disponible
– on n’utilise qu’une partie du débit – les résultats de l’étude hydrologique sont Microcentrale hydraulique d’Antetezambato.
moins critiques.

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 69

Gisement hydraulique à Kouramangui (Guinée)

La localité de Kouramangui est située au cœur du Fouta-Djalon, en Moyenne-Guinée, région


connue pour être le « château d’eau » de l’Afrique de l’Ouest. Des études du gisement hydraulique
PHQ«HVGDQVOHFDGUHGHŦQDQFHPHQWVLQWHUQDWLRQDX[LQGLTXHQWTXłXQHFKXWHGłHDXH[SORLWDEOH
se trouve à 2 kilomètres du bourg. Les informations sont cohérentes et les travaux d’avant-projet
VRPPDLUHFRQŦUPHQWODSHUWLQHQFHGXVLWH
8QSURMHWGł«OHFWULŦFDWLRQGHODORFDOLW«HVWGRQFSURSRV«IDLVDQWDSSHO¢XQV\VWªPHK\EULGH
VRODLUHK\GUDXOLTXH6LOHFRQWH[WHVHPEOHSDUIDLWSRXUXQHU«DOLVDWLRQVDQVGLIŦFXOW«PDMHXUH
les conclusions des travaux d’avant-projet détaillé sont, à l’étonnement des parties prenantes,
contradictoires. Le site de la chute est encaissé, nécessitant des travaux de génie civil d’une
HQYHUJXUHWHOOHTXHOłRSWLRQK\GUDXOLTXHGRLW¬WUHDEDQGRQQ«H/łK\EULGDWLRQVHUDŦQDOHPHQW
VRODLUHJURXSHWKHUPLTXHFRQŦUPDQWODQ«FHVVLW«GłXQHJUDQGHDWWHQWLRQSRUW«H¢Oł«WXGH
préalable du site.

© Fondation Energies pour le Monde

Gisement hydraulique de la localité de Kouramangui.

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70 - PARTIE 1 - CONTEXTE

équipés. Lorsqu’une ressource suffisante et ex- Ces gisements d’énergies


ploitable est disponible toute l’année, l’hydraulique renouvelables sont exploitables
offre un potentiel qui vient concurrencer la filière en électrification rurale, à certaines
PV en termes économiques ainsi qu’en quantité et conditions.
en qualité des services électriques offerts. Le tableau suivant synthétise les atouts et limites des
quatre sources d’énergie renouvelable disponibles
Les autres énergies renouvelables sur le sol subsaharien et leurs conditions d’utilisation
La géothermie, particulièrement présente le long pour un usage en électrification rurale hors réseau.
de la vallée du Rift, est une source intéressante par Il fait apparaître que le solaire présente une simpli-
son caractère stable et constant, mais elle requiert cité et une disponibilité permanente qui, jointes à
des investissements et des moyens techniques qui son accessibilité économique, en font actuelle-
la destinent davantage à participer aux moyens de ment la source d’énergie renouvelable la plus gé-
production centralisée de l’électricité (réseau na- néralisable pour la mise en œuvre de systèmes
tional), aux côtés des centrales conventionnelles, électriques hors réseau (off-grid). Les autres fi-
qu’à l’électrification des zones rurales isolées. lières d’énergies renouvelables ne se déploient
Enfin, même si les gisements peuvent paraître im- massivement qu’en réseau. }
portants au regard de la longueur du littoral africain,
l’utilisation des énergies renouvelables marines
n’est pas encore d’actualité.

Les miniréseaux en développement sont majoritairement des installations


solaires ou solaires hybrides

Diesel
Hydraulique
Solaire et solaire hybride
Autres

INSTALLÉS

PLANIFIÉS

0 20 40 60 80 100
Source : James Knuckles, « State of the minigrid market globally, 5th minigrid Action Learning Event and Summit »
(Washington, D.C : Banque mondiale, 2019).

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 71

Projet de Participation du secteur privé


à l’approvisionnement en électricité d’origine micro-
hydro pour le développement rural
au Rwanda (PSP Hydro)

$YDQWODSROLWLTXHGXJRXYHUQHPHQWUZDQGDLVFRQVLVWDLW¢ŦQDQFHUVXUIRQGVSXEOLFVGHV
projets de microcentrales hydroélectriques, en l’absence de cadre réglementaire approprié pour
des investissements privés à une plus grande échelle. Dans le cadre de ces projets, les installations
étaient livrées « clés en main », sans transfert de compétences à des coopératives publiques ou
communautaires qui en avaient la propriété. Du fait de cette politique, du manque d’expertise
WHFKQLTXHHWGHOłLQFDSDFLW«¢DSSOLTXHUGHVWDULIVGł«OHFWULFLW«UHŧ«WDQWOHVFR½WVOHVPLQLU«VHDX[
gérés par les coopératives ont rapidement échoué.

Tirant les enseignements de cet échec, le projet PSP Hydro, dont l’objectif était d’appuyer
le développement des entreprises privées rwandaises et celui des projets de microcentrales
hydroélectriques, a formé le secteur privé et appuyé les institutions nationales pour élaborer un
cadre politique et réglementaire favorable. Grâce à ces actions, il existe à ce jour au Rwanda plus
de 20 entreprises actives capables de construire et exploiter des microcentrales hydroélectriques,
dont 9 dans le seul secteur des petites centrales. La dizaine de centrales soutenues par le PSP
+\GURHVWUDFFRUG«HDXU«VHDXQDWLRQDOHWVDŦDELOLW«HVWVXS«ULHXUH¢FHOOHGHVFHQWUDOHVH[SORLW«HV
par la société nationale. La plus grande partie de l’énergie produite peut être vendue au réseau,
assurant ainsi la viabilité des centrales. Ce résultat a été obtenu avec seulement 3,4 millions
d’euros provenant des bailleurs de fonds, qui
ont mobilisé environ 2,8 millions d’euros de
ŦQDQFHPHQWVSULY«VGHVRXUFHVORFDOHVHW
internationales.

Le PSP Hydro doit sa réussite à l’association


GHOłDLGHŦQDQFLªUHHWGHODU«IRUPHSROLWLTXH
si un projet peut appuyer le lancement
d’activités, il est d’abord nécessaire de
développer un environnement politique
favorable pour que son impact à long terme
soit tangible.
© Marge

Pour aller plus loin : retrouvez l’étude de cas


intégrale sur la page web de l’ouvrage.
Travaux pour la construction d’une micro centrale hy-
Sources : Etude de cas intégrale ; site internet de MARGE
droélectrique dans le cadre du projet PSP hydro au Rwanda ٢ǚɋɋȲ‫ٖٖي‬ɬɬɬِȂƌȵǒƷِƷɓٖ¥°¥‫ٮ‬Oɲưȵȏ‫ٮ‬ǠȄ‫¨ٮ‬ɬƌȄưƌ٣

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


72 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Rhyvière I et II

Avec un taux d’accès à l’électricité d’environ 17 %, Madagascar est l’un des pays les moins
«OHFWULŦ«VGXFRQWLQHQWDIULFDLQGHVDSRSXODWLRQHVWWRXFK«HSDUOłH[WU¬PHSDXYUHW«SOXV
particulièrement en milieu rural, où le taux d’accès à l’électricité est de 11% seulement. C’est dans ce
contexte que s’est mis en place le projet Rhyvière I (Réseaux hydroélectriques villageois et protection
GHOłHQYLURQQHPHQW GH¢ŦQDQF«SDUOł$JHQFHGHG«YHORSSHPHQWGHOł«OHFWULŦFDWLRQ
rurale (ADER) malgache et l’Union européenne. Ce projet, mené par le Gret en partenariat avec
(QHUJ\$VVLVWDQFHYLVDLWOł«OHFWULŦFDWLRQGHIDPLOOHVGHFRPPXQHVUXUDOHVDXIRUWSRWHQWLHO
agricole, via la mise en place de centrales hydroélectriques rurales en collaboration avec les acteurs
publics et privés, locaux et nationaux.

S’appuyant sur cette expérience, le projet Rhyvière II (2014 à 2019), réalisé en partenariat avec la
CITE, ENEA CONSULTING et l’IRD, a permis d’effectuer un changement d’échelle. Des centrales
hydroélectriques de plus grande envergure ont été installées et la méthode générale d’intervention
a été renforcée sur les 3 derniers volets, sur les 4 qu’elle comporte :
b(QHUJLHFRQVWUXLUHHWS«UHQQLVHUOHVFHQWUDOHVK\GUR«OHFWULTXHVHWOHVVROXWLRQVG«FHQWUDOLV«HVDLQVL
que le service d’électricité dans ce secteur peu rentable ;
b(QYLURQQHPHQWSURW«JHUOHVEDVVLQVYHUVDQWVHWODUHVVRXUFHHQHDXGHVGRPPDJHV
environnementaux (ex : déforestation) ; son altération en qualité et en quantité entraverait en effet
le fonctionnement des centrales ;
b6RFLR«FRQRPLTXHIRUPHUODSRSXODWLRQHWOHVSHWLWHVHQWUHSULVHVDX[RSSRUWXQLW«V«FRQRPLTXHV
liées à l’électricité et favoriser le développement économique des sites ;
b*RXYHUQDQFHLPSOLTXHUOHVDXWRULW«VORFDOHVGDQVOHVFK«PDGHPD°WULVHGłRXYUDJHHQFRXUDJHU
ODIRUPDWLRQGłDVVRFLDWLRQVGłXVDJHUVVłDVVXUHUTXHOHVHUYLFH«OHFWULTXHLQVWDOO«E«Q«ŦFLHELHQ¢
l’ensemble de la population.

(QŦQOHVU«VXOWDWVGHVWUDYDX[GHVXLYL«YDOXDWLRQHWGHFDSLWDOLVDWLRQRQWIRXUQLGHVU«I«UHQFHV
SRXUODSROLWLTXHQDWLRQDOHGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHHWGHVUHFRPPDQGDWLRQVSRXUOHVIXWXUVSURMHWV
(actualisations plus régulières du plan d’affaire,
amélioration du suivi des délégataires et
V«FXULVDWLRQGHOHXUVŦQDQFHPHQWVH[LJHQFHGH
norme de construction etc.), notamment pour
FRUULJHUOHVSRLQWVGHIDLEOHVVHLGHQWLŦ«VFKH]
chacun des intervenants.
© GRET

Pour aller plus loin : retrouvez l’étude de cas


intégrale sur la page web de l’ouvrage.
Le projet Rhyvière 1 a été mené à Madagascar par le Gret Source : étude de cas intégrale ; site internet du GRET (https://
de 2008 à 2015 www.gret.org/publication/le-projet-rhyviere-i-a-madagascar/

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 73

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


74 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Petit éolien

Solaire photovoltaique

%LODQGHVVRXUFHVGł«QHUJLHDGDSW«HV¢Oł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHKRUVU«VHDX

Source d’énergie Condition d’utilisation

Site dégagé de tout relief ou végétation venant masquer le rayonnement


Solaire
solaire

Vent régulier et réparti sur une période


Eolien d’au moins six mois par an
Pas d’obstacles à proximité

Faible distance entre la chute et la localité (selon la puissance installée)


Hydraulique
Période d’étiage aussi courte que possible

Développement contraint par le manque


Biomasse
de maturité des technologies

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 75

Centrale à biomasse Hydroélectricité

Jatropha ÉCO
LE

Atouts Limites

Intermittence journalière
Gisement connu précisément 9DULDWLRQVVDLVRQQLªUHVSDUIRLVVLJQLŦFDWLYHV
(hivernage)

Nécessité de campagnes de mesure


3DVGłLQWHUPLWWHQFHMRXUQXLW d’au moins un an
Intermittence saisonnière fréquente

Nécessité de campagnes de mesure


3DVGłLQWHUPLWWHQFHMRXUQXLW d’au moins un an
Intermittence saisonnière liée à la pluviométrie

Pas d’intermittence journalière


Valorisation de productions locales Aléa lié à la variation de la ressource
en quantité et en qualité
Création d’activités nouvelles pour la collecte
et le conditionnement de la ressource

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


76 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.2.
L’électrification formelle est
d’abord urbaine et centralisée.
La faiblesse des taux d’électrification rurale des pays
subsahariens reflète essentiellement le fait que les populations
rurales de la zone n’ont pas accès au réseau électrique.
Comment s’explique cette absence de raccordement ?

D’abord, les sociétés nationales d’électricité des pays


subsahariens ont donné priorité à l’électrification des zones
urbaines et périurbaines, considérées comme les plus rentables,
sans pour autant dégager la capacité d’investissement nécessaire
pour financer l’extension du réseau vers les zones rurales (1.2.1.).
Ensuite, bien que des stratégies d’électrification rurale soient
souvent formulées et une organisation définie pour les décliner,
elles peinent à être mises en œuvre, par manque de volonté et de
moyens (1.2.2.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 77

© Fondation Energies pour le Monde

Une zone périurbaine électrifiée au Burkina Faso.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


78 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.2.1.
Au niveau institutionnel, la priorité est donnée
aux zones urbaines et périurbaines, par défaut.

Dans les pays d’Afrique subsaharienne, opérateurs privés injectent dans le réseau public
l’électrification formelle repose d’abord sur et vendent l’électricité qu’ils produisent.
des opérateurs publics et l’électrification dite
« centralisée », se déployant autour d’un ré- La priorité donnée au réseau par les
seau national. Connaissant des difficultés sociétés nationales d’électricité est
chroniques pour gérer et entretenir ce réseau plus qu’une priorité : une exclusivité.
concentré sur les zones à forte densité de pop- Compte tenu de l’immensité de la tâche et dans
ulation, ces sociétés nationales ne sont pas en une logique de gestion rationnelle des fonds
capacité de participer de manière significative publics, les gouvernements des pays afric-
à l’électrification rurale. ains ont donné, avec le soutien des bailleurs de
fonds, la priorité à l’électrification centralisée,
L’électrification des pays d’abord celle des grandes villes, puis celle des
subsahariens repose historiquement villes secondaires par extension du réseau et par
sur les sociétés nationales. interconnexion.
Après les indépendances, prenant exemple La priorité donnée au réseau est justifiée par
sur la situation des secteurs électriques eu- l’argument économique.
ropéens des années 60-70 (présentant des L’expérience acquise par de nombreux pays en
taux d’électrification proches de 100 %), atteste, l’électrification centralisée est un choix
l’électrification des pays africains s’est fondée rationnel : la densité plus forte de consommateurs
sur des opérateurs et des financements publics. potentiels en milieu urbain et les besoins associés
Des sociétés nationales ont pris en charge la aux activités économiques permettent des écon-
gestion du service public de l’électricité (produc- omies d’échelle (cf. chapitre 2.1.2.). La priorité ac-
tion, transport et distribution). Après une vague cordée aux zones urbaines et à l’extension de ré-
de privatisations encouragée par les institutions seau est logique.
internationales, notamment la Banque mondiale, Elle a d’ailleurs été soutenue par les bailleurs de
dans les années 90, de nombreuses sociétés ont fonds, comme le montrent par exemple les fi-
été renationalisées ; la plupart de ces sociétés nancements alloués à l’électrification rurale par
sont ainsi encore détenues majoritairement par l’Agence française de développement (AFD - cf.
des entités publiques. chapitre 2.3.2.)1.

Aujourd’hui, seule la production (et non la distri-


bution) d’électricité sort progressivement du do-
maine public : dans le cadre de contrats d’achat-
vente d’électricité dits « PPA » (power purchase
1. Christian de Gromard, « Structuration des investissements et outils de
agreement) signés avec la société nationale, des financement de l’accès à l’énergie » (Conférence, 22 mai 2018).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 79

Exemples de sociétés nationales

Capitaux
Principales Date de
Pays Nom société publics
fonctions création
(%)

Bénin Société béninoise d’énergie Production, transport 1975 100 %


électrique (SBEE) et distribution

Ghana Volta River Authority (VRA) Production 1961 100 %

Electricity Company of Ghana Fourniture et 1967 100 %


Ltd (ECG) distribution au Ghana
du Sud

Northern Electricity Distribution Fourniture et 1987 100 %


&RPSDQ\ 1('&R ŦOLDOHGH95$ distribution au Ghana
du Nord

Kenya Kenya Electricity Generating Production 1998 70 %


Company (KenGen)

Kenya Power (KP) Transport et 1983 50,1 %


distribution

Sénégal Société nationale d’électricité Production, transport, 1998 90,58 %


du Sénégal (Senelec) distribution

Madagascar Jiro sy Rano Malagasy (Jirama) Production, transport 1975 100 %


et distribution

Mali Energie du Mali (EDM SA) Production, transport 1960 66 %


et distribution

Rwanda Rwanda Energy Group (REG) Production, transport 2014 100 %


HWVHVŦOLDOHV(QHUJ\8WLOLW\ et distribution
Corporation Ltd et Energy
Development Corporation Ltd

Tanzanie Tanzania Electricity Supply Production, 2002 b


Company (TANESCO) transmission
et distribution

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


80 - PARTIE 1 - CONTEXTE

En réalité, la limitation des zones de Elles subissent également des pertes commer-
desserte traduit surtout la situation ciales dues aux difficultés de recouvrement au-
financière et technique dégradée près des usagers et aux nombreux raccorde-
des sociétés nationales d’électricité. ments frauduleux.
Ces sociétés sont d’abord pénalisées par la S’y ajoutent enfin des modes de gouvernance
faiblesse des consommations électriques des souvent inadaptés, des modalités de gestion
usagers, environ quarante fois inférieures aux et d’innovation technologique déficientes et
moyennes européennes (cf. schéma), et par le des tarifs régulés subventionnés très inférieurs
coût élevé d’approvisionnement en combustibles aux coûts réels, qui ne leur permettent ni d’être
fossiles des centrales thermiques de production. rentables ni d’investir. Ce manque de capa-
Par ailleurs, elles connaissent des niveaux anorma- cité d’investissement affecte nécessairement
lement élevés de pertes techniques dues à des in- la qualité de service. Les sociétés nationales
stallations de production et des réseaux de trans- d’électricité sont pour la grande majorité « sous
port souvent vieillissants. Ces pertes représentent perfusion » de leur gouvernement et des bailleurs
plus de 15 % de la production dans de nombreux de fonds pour couvrir les pertes d’exploitation.
pays d’Afrique subsaharienne, contre 5 à 7 % en
Europe, en Amérique du Nord ou en Chine.
Les coupures, ou délestages, sont fréquentes. En- 1. « Infrastructures », Banque Mondiale, 2019, https://www.enterprisesurveys.
tre 2010 et 2017, les mesures réalisées par la Banque org/data/exploretopics/infrastructure . Cité par Rebecca Martin, «
Afrique subsaharienne : des matières premières, des hommes… mais
mondiale font état de plus de huit coupures par mois, pas d’électricité », The Conversation, 2018, https://theconversation.com/
afrique-subsaharienne-des-matieres-premieres-des-hommes-mais-pas-
d’une durée moyenne de près de six heures1. delectricite-107478 .

© Cyril Letourneur d’Ison

Consommation d’électricité

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 81

Ordre de grandeur de la consommation moyenne en électricité dans le monde


‫ژ‬OȏȵȽ‫ژ‬ƨƷȽȏǠȄȽ‫ژ‬ƸȄƷȵǒƸɋǠȴɓƷȽ‫ژ‬ȽɓƨȽɋǠɋɓƌƨǹƷȽ‫ژ‬٢ƩǚƌɓǑǑƌǒƷً‫ژ‬ƩɓǠȽȽȏȄً‫ژ‬ȲȵȏưɓƩɋǠȏȄ‫ژ‬ư‫ټ‬Ʒƌɓ‫ژ‬ƩǚƌɓưƷ٣ِ

8 000 kWh/an 4 500 kWh/an 3 000 kWh/an

ÉTATS-UNIS FRANCE CHINE ZONE URBAINE


FAMILLE DE 4 PERSONNES FAMILLE DE 4 PERSONNES FAMILLE DE 3 PERSONNES

500 kWh/an 80 kWh/an

AFRIQUE ZONE URBAINE AFRIQUE ZONE URBAINE


FAMILLE DE 6 PERSONNES FAMILLE DE 10 PERSONNES

Source : Fondation Énergies pour le Monde.

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82 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Les pertes d’électricité en ligne sont encore importantes


en Afrique subsaharienne

% de la
production

40

35

30

25

20

15

10

0
90

00

10

11

12

13

14
20

20

20
20

20
19

20

Nigeria Kenya Gabon


Sénégal Soudan Ethiopie
Tanzanie Côte d’Ivoire Tanzanie

Source : AIE, 2018, « Statistiques sur l’énergie et balances des pays non membres de l’OCDE », et « Statistiques sur l’énergie des pays
membres de l’OCDE et annuaire statistique sur l’énergie de l’ONU », https://www.iea.org/statistics/?country=WORLD&year=2016&cate
gory=Energy%20supply&indicator=TPESbySource&mode=chart&dataTable=BALANCES.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 83

N’ayant pas réussi à achever taux d’électrification urbaine et la persistance de


l’électrification urbaine taux d’électrification rurale très bas (inférieurs
et périurbaine, les sociétés à 20 %) dans la majorité des pays subsahariens
nationales n’ont pas les moyens (cf. graphe).
d’électrifier le milieu rural.
Dans les zones rurales, les densités de popu- Au bilan, les investissements publics dans le
lation et les consommations électriques secteur de l’électricité ont largement contribué à
sont trop faibles au regard des montants l’endettement des pays mais n’ont finalement prof-
d’investissement nécessaires à l’extension du ité qu’en demi-teinte à la population, et essentiel-
réseau électrique. lement à celle des zones urbaines.

Aussi, les sociétés nationales se limitent-elles Certes, la mise en place d’interconnexions région-
à la distribution électrique des capitales et des ales, en Afrique de l’Ouest et centrale, améliore la
grandes villes, d’où une évolution plus rapide des situation. Mais l’augmentation de consommation

Des tarifs décorrélés de la réalité des coûts


Dans de nombreux pays, les tarifs payés par les industriels sont élevés ; ils visent à éviter une
hausse des tarifs de l’électricité pour les ménages. En outre, les ménages ayant une forte
consommation, comme les entreprises, « subventionnent » la consommation, plus faible, des
usagers à faibles revenus via la mise en place de tarifs minimaux (RISE, 2014). Pour autant, dans la
plupart des pays, les structures tarifaires actuelles ne permettent pas de couvrir les coûts. Comme
l’indique l’analyse des données des tarifs de l’électricité réalisée sur 27 pays entre 2004 et 20081,
PRLQVGłXQWLHUVGHVSD\VGHOł«FKDQWLOORQDSSOLTXHQWGHVWDULIVVXIŦVDPPHQW«OHY«VSRXUFRXYULU
la totalité des coûts du service. Cette analyse révèle aussi que les seuils de recouvrement des coûts
ont diminué au cours de la période d’observation. Une étude réalisée récemment par la Banque
mondiale sur 39 pays d’Afrique subsaharienne2 conclut que deux pays seulement, l’Ouganda
et les Seychelles, ont vu leur entreprise d’utilité publique couvrir entièrement leurs dépenses
opérationnelles et leurs dépenses en capital. Le recouvrement des coûts s’avère particulièrement
GLIŦFLOHGDQVOHVSD\VR»OHVFR½WVGHSURGXFWLRQVRQW«OHY«VHQUDLVRQGHOHXUG«SHQGDQFH¢
Oł«JDUGGHVVRXUFHV«QHUJ«WLTXHVS«WUROLªUHV ŦRXOORXUGHWGLHVHO RQ«UHXVHV

Source : Banque mondiale, « Africa’s Pulse : une analyse des enjeux façonnant l’avenir économique de l’Afrique »
(Washington, D.C, 2018).

1. Joern Huenteler, et al., « Cost Recovery and Financial Viability of the Power Sector in Developing Countries » (Banque mondiale, 2017).
2. Trimble, et al., (2016).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


84 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Comparaison de la situation en zone urbaine


et en zone rurale pour 1 kilomètre de ligne

ZONE URBAINE ZONE RURALE


1 km DE LIGNE 1 km DE LIGNE

500 50
USAGERS USAGERS

1 000 10
kWh/JOUR kWh/JOUR

Source : Fondation Énergies pour le Monde.

en milieu urbain, liée à la vitalité de la démographie


urbaine (voir encadré) et à l’augmentation des us-
ages spécifiques de l’électricité (climatisation, in-
formatique, etc.), ne permettra sans doute pas de
réaliser l’extension massive des réseaux vers le
milieu rural. }
© NASA

L’Afrique de nuit : seules les grandes zones urbaines sont


éclairées ; le contraste avec l’Europe, saisissant, traduit aussi
le gaspillage d’énergie au nord.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 85

(Q$IULTXHGHOł2XHVWOHVWDX[Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH«YROXHQWSOXVOHQWHPHQW
TXHFHX[Gł«OHFWULŦFDWLRQXUEDLQH

100 %

80 %

60 %

40 %

20 %

0%
0

6
0

1
20

20

20

20

20

20

20

20

20

Guinée rurale Mali rural Burkina Faso rural


Guinée urbaine Mali urbain Burkina Faso urbain
Sénégal rural Bénin rural
Sénégal urbain Bénin urbain

Sources : « Base de données Sustainable Energy for All (SE4ALL) dérivée du SE4ALL Global Tracking Framework », Banque mondiale,
AIE et ESMAP, https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


86 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.2.2.
L’électrification rurale, affichée comme un objectif,
souffre du manque de moyens et de volonté.

L’électrification rurale n’est pas oubliée des (concession), ou encore, via la privatisation des
politiques. Mais les initiatives pour réduire sociétés publiques (cession à des entreprises lo-
la fracture entre zones urbaines et rurales cales ou, plus souvent, étrangères).
présentent des points de faiblesse signi-
ficatifs : les expérimentations conduites Depuis, malgré de nombreuses renationalisa-
sous l’impulsion des bailleurs institutionnels tions dans les années 2000, les Etats africains
manquent de cohérence, et les stratégies ont modifié leur perception de l’intérêt national.
nationales peinent à être effectivement mises Délaissé par les bailleurs de fonds institution-
en œuvre. nels, recherchant à la fois une meilleure efficacité
(rentabilité des capitaux investis) et de nouveaux
La coopération internationale cadres institutionnels (meilleures garanties), le
a surtout favorisé une mécanique secteur électrique s’est, comme d’autres, pro-
d’expérimentations aux effets gressivement ouvert aux acteurs privés.
limités.
Dans les pays d’Afrique subsaharienne, le mouve- Diversifiant leurs champs
ment des grands investissements publics pour d’intervention, les coopérations
l’électrification centralisée s’est essoufflé dans les institutionnelles et les bailleurs
années 80, compte tenu de l’ampleur des fonds de fonds ont fait de l’électrification
nécessaires pour pallier la précarité financière des rurale un thème prioritaire.
sociétés nationales d’électricité, mais aussi des Auxiliaire fondamental dans la lutte contre la
contraintes imposées par la mise en œuvre des pauvreté, l’objectif majeur de la coopération in-
ajustements structurels pour la sortie de la dette. ternationale, « l’accès à l’électricité en milieu ru-
Les vagues de réformes et de privatisations ral » bénéficie d’une attention accrue de la com-
ont organisé le démantèlement progressif des munauté internationale. Les institutions finan-
monopoles sous diverses formes juridiques cières ont été encouragées à s’impliquer dans
et contractuelles (cf.  schéma). Selon les pays, ce secteur, notamment suite au Sommet mondial
le rôle du secteur privé va de celui de presta- sur le développement durable de Johannesburg
taire contractuel auprès des sociétés publiques en 2002. L’initiative prise lors du sommet par
d’électrification (fourniture, génie civil, assistance l’Union européenne1 de mettre en place la Facilité
technique, etc.) à celui d’opérateur d’électrification ACP-CE pour l’énergie en est un exemple : la pre-
rémunéré par les usagers. Ces opérateurs inter- mière de ses trois composantes vise justement
viennent dans le cadre de contrats de gestion l’amélioration des services énergétiques dans les
privée des actifs publics (affermage), ou de con- zones rurales.
trats de développement des infrastructures et
services d’électrification sur un territoire délimité 1. Initiative européenne pour l’énergie.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 87

Les différentes formes d’intervention du secteur privé dans les projets


Gł«OHFWULŦFDWLRQ

100 % public Affermage

Concession
Contrat de fournitures
« construire exploiter
et/ou de génie civil
transférer »

Contrat Concession « construire


d’assistance technique posséder exploiter »

Sous-traitance Privatisation sous licence

Contrat
100 % privé
de gestion

Source : Banque Mondiale, Rural ElectrificationConcessions in Africa, Introduction, page 3.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


88 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Les principaux instruments de l’Union européenne pour l’accès


à l’énergie en Afrique

Instruments ʼn)DFLOLW«GłLQYHVWLVVHPHQWSRXUOł$IULTXH $),)  


GHŦQDQFHPHQW ʼn)RQGVŦGXFLDLUH8($IULTXHSRXUOHVLQIUDVWUXFWXUHV
ʼn,QLWLDWLYHGHŦQDQFHPHQWSRXUOł«OHFWULŦFDWLRQ ELECTRIFI)
ʼn)DFLOLW««QHUJLH8($&3  Ŀ\FRPSULVOHmSRROP«FDQLVPH}
ʼn3ODWHIRUPHVU«JLRQDOHVGłLQYHVWLVVHPHQWSRXUOł$IULTXHGX3ODQ
GłLQYHVWLVVHPHQWH[W«ULHXU 3,( TXLFRQWLHQWXQHHQYHORSSHVS«FLŦTXHSRXU
les énergies renouvelables (2017-…)
ʼn*OREDO(QHUJ\7UDQVIRUPDWLRQ3URJUDPPH *(7LQYHVW FU««G«EXW

Banque européenne d’investissement (BEI) :


ʼn0«FDQLVPHHQIDYHXUGłXQH«QHUJLHGXUDEOHHQ$IULTXH $6()
ʼn)RQGVGHJDUDQWLHSRXUOł«QHUJLHHQ$IULTXH $(*)
ʼn*OREDO(QHUJ\(IŦFLHQF\DQG5HQHZDEOH(QHUJ\)XQG *((5()

,QVWUXPHQWV%,(HQOLHQDYHFOHVLQVWLWXWLRQVHXURS«HQQHVGHŦQDQFHPHQW
du développement (EDFI) :
ʼn,QWHUDFW&OLPDWH&KDQJH)DFLOLW\
ʼn(XURSHDQ)LQDQFLQJ3DUWQHUV ()3
ʼn0«FDQLVPHGłDSSXL8(('),SRXUOHG«YHORSSHPHQWGXVHFWHXUSULY«
ʼn)RQGVGłLQYHVWLVVHPHQWSRXUODPLFURŦQDQFHHWOłLQYHVWLVVHPHQWGłLPSDFW
(impact investing)

Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD)

Assistance ʼn)DFLOLW«GłDVVLVWDQFHWHFKQLTXH(QHUJLHGXUDEOHSRXUWRXV 6($//


technique ʼn3URJUDPPHGHFRRS«UDWLRQ$IULTXH8(GDQVOHGRPDLQHGHV«QHUJLHV
renouvelables (RECP)

Dialogue ʼn3DUWHQDULDW$IULTXH8(SRXUOł«QHUJLH 3$((


politique ʼn,QLWLDWLYHGHOł$IULTXHVXUOHV«QHUJLHVUHQRXYHODEOHV $5(,
ʼn)DFLOLW«GHGLDORJXHHWGHSDUWHQDULDWGHOł,QLWLDWLYHGHOł8(SRXUOł«QHUJLH
(EUEI-PDF) (2004-2018)
ʼn&RQWULEXWLRQDX[SURJUDPPHVLQGLFDWLIVQDWLRQDX[U«JLRQDX[HWPRQGLDX[
(2,7 Mds d’euros dans le secteur des énergies renouvelables en Afrique
subsaharienne)
ʼn&RQYHQWLRQVGHVPDLUHVHQ$IULTXHVXEVDKDULHQQHSRXUUHQIRUFHUOHU¶OHGHV
autorités locales
ʼnG«FODUDWLRQVFRPPXQHVSRXUXQHFRRS«UDWLRQ«QHUJ«WLTXHUHQIRUF«H

Tableau adapté du document ECDPM de Sebastian Grosse-Puppendahl, San Bilal et Karim Karaki « EU’s Financial Instruments
for Access to Energy. Support in remote and poor areas in Africa » (Maastricht : European Centre for Development Policy
Management, 2017).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 89

Un foisonnement d’initiatives Force est de constater que la plupart des pays n’ont
ponctuelles et disséminées, toutes pas su, ou pas voulu, mettre en place une contre-
différentes dans leurs modalités partie institutionnelle assez forte pour imposer des
organisationnelles, techniques règles du jeu à tous les intervenants (consomma-
et tarifaires, a vu le jour. teurs, investisseurs, opérateurs, collectivités terri-
Les financeurs ont soutenu une large palette toriales et agents de développement).
de solutions d’électrification (détaillées en Face à l’augmentation des aides externes dans un
partie  3), et notamment d’électrification indi- secteur jusqu’ici peu soutenu, les pouvoirs pub-
viduelle, inspirées par une approche libérale* de lics des pays bénéficiaires ont du mal à maintenir
l’électrification (cf. chapitre 2.4.1.), c’est-à-dire un cap politique ferme.
centrée sur la fourniture directe d’un bien ou d’un
service par un opérateur privé à un consomma- L’opérationnalisation des stratégies
teur (cf. chapitres 3.2.1. et 3.2.2.). et des planifications nationales
Des solutions très diverses ont pu être ainsi dé- d’électrification rurale s’avère
ployées au sein d’un même pays, parfois au sein difficile.
d’une même région, selon des logiques com- Aujourd’hui, la très grande majorité des pays sub-
merciales et tarifaires variables  : fourniture sahariens ont mis en place un cadre institutionnel
d’équipements ou de services, subventionnés ou du secteur électrique.
non, accessibles via des institutions de micro- Dans la double perspective de libéralisation du
crédit ou proposés à la vente par des start-up… secteur électrique et de lutte contre la pauvreté,
Ce n’est pas tant l’existence d’une large palette de les bailleurs de fonds, telle la Banque mondiale,
solutions qui pose problème, que l’absence de vi- ont encouragé les Etats à structurer un cadre :
sion d’ensemble. çGP ETªCPV FGWZ V[RGU FàQTICPKUOGU KPFªRGP-
dants de la société nationale d’électricité : une
Non coordonnées, ces commission de régulation du secteur élec-
expérimentations ont mis en lumière trique (qui définit précisément les cadres et li-
les limites de la volonté politique et des mites d’intervention des acteurs publics et
moyens mobilisés pour l’électrification privés) et une agence d’électrification rurale
rurale. dédiée qui gère l’organisation ;
Quoique très riche et dynamique, cette çGP UG FQVCPV FG stratégies nationales
effervescence de projets n’a pas bénéficié de d’électrification rurale.
l’encadrement structuré et coordonné qui au-
rait permis d’en tirer un bilan constructif pour Mais les politiques nationales d’électrification ru-
l’avenir. Ces multiples expérimentations, souvent rale, souvent définies en seule réponse aux at-
sans lendemain durable, ont en effet été pour la tentes de la communauté internationale, présen-
plupart conduites dans un espace rural quasi tent des faiblesses structurelles qui font obstacle
vierge de tout acteur opérationnel expérimenté à leur mise en œuvre efficace.
(hormis quelques ONG) et de toute régulation,
sans réflexion méthodologique ni organisation-
nelle préalable, ni, surtout, souci de cohérence
territoriale.

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90 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Avec le soutien des bailleurs La première difficulté est d’ordre


internationaux, voire sous leur pression, politique.
de nombreux pays se sont dotés de Les pouvoirs politiques continuent de privilé-
stratégies d’électrification rurale. gier l’électrification urbaine, notamment pour sa
Les stratégies nationales d’électrification rurale et consolidation. Ne pas améliorer la distribution
leurs plans directeurs élaborés sont souvent in- électrique en ville les expose au mécontentement
fluencés par la vision centralisatrice des services populaire, qui peut se traduire par de graves trou-
techniques des ministères en charge de l’énergie bles à l’ordre public en cas de pannes répétées ou
et des experts de la coopération internationale, de délestages intempestifs.
compagnons de route naturels des sociétés na- De plus, compte tenu du faible pouvoir des col-
tionales d’électricité. lectivités locales (le processus de décentralisa-
Même en présence de stratégies favorables à tion est souvent non abouti), l’intérêt des pouvoirs
l’électrification hors réseau par initiative locale ou publics centraux pour l’électrification rurale se
privée, dans les faits, la mise en œuvre effective de limite souvent aux périodes électorales.
ces stratégies se heurte à trois types de difficultés
combinés.
© studioKalangou

Des manifestations contre les delestages dans la ville de Tanout, au Niger en 2018

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 91

La surconcentration du pouvoir au niveau central,


SUHPLHUREVWDFOH¢Oł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH

« La conception fortement jacobine du pouvoir en Afrique francophone


et la tradition de l’autorité exclusive des opérateurs historiques dans la gestion
des politiques énergétiques constituent un handicap majeur pour la promotion
d’une production décentralisée de nature à impulser l’autonomisation des collectivités,
des communautés, des usagers et des opérateurs à l’échelle des territoires.

Le contexte de surconcentration du pouvoir ainsi que la culture institutionnelle qui


Vł\UDWWDFKHFRQVWLWXHQWOHSUHPLHUJUDQGREVWDFOH¢XQH«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHIRQG«H
sur le développement de capacité d’impulsion d’une véritable production
décentralisée, qui, dans le contexte de nos pays, est le seul moyen d’accélérer
le processus de résorption de fracture énergétique. »

Abdou Fall, ancien ministre d’Etat, président du Conseil patronal des énergies renouvelables
du Sénégal (COPERES)

La deuxième difficulté est d’ordre La création d’autres organismes ajoute par-


institutionnel. fois à la complexité et à la confusion : fonds
Les schémas institutionnels sont souvent inap- d’électrification rurale, agences pour les énergies
propriés, confus ou redondants. renouvelables ou agences de services énergé-
Un certain nombre d’agences nationales tiques ruraux traitant à la fois de l’électrification et
d’électrification rurale ont vu le jour de manière des combustibles domestiques.
opportuniste : placée sous les auspices des Par ailleurs, ces nouvelles agences sont égale-
coopérations institutionnelles, leur création a été ment confrontées à la difficulté de recruter du
perçue comme une condition au déblocage de personnel qualifié et au manque de programmes
financements et non comme une nécessité. Or, de formation continue et d’assistance technique
les agences ainsi mises en place entrent souvent adaptés à l’électrification rurale.
en compétition, voire en conflit de compétences, Enfin, la logique de décentralisation territoriale,
avec les ministères et services déconcentrés également soutenue par les bailleurs internationaux,
en charge de l’énergie, lesquels se sentent alors est à double tranchant : si elle paraît nécessaire pour
dessaisis d’une de leurs principales attributions. répondre à des besoins de proximité, elle complexi-
fie le schéma institutionnel et décisionnel en créant
des espaces et des intervenants supplémentaires.

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92 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Les principales ONG françaises pionnières


de l’accès à l’électricité

En France, quelques ONG ont développé une expertise dans l’accès aux services énergétiques.
$XJU«GHVŦQDQFHPHQWVDOORX«VSDUOHVEDLOOHXUVGHIRQGVHOOHVRQWFKDFXQHFRQVROLG«OHXUV
méthodes d’intervention.

Créé en 1974, le GRET (Groupe de recherche et d’échange technologique) intervient dans le


secteur de l’énergie depuis plus de vingt ans, au départ à travers des projets
de diffusion de foyers améliorés et de séchoirs solaires, aujourd’hui par la mise
HQāXYUHGHSURJUDPPHVGł«OHFWULŦFDWLRQXWLOLVDQWOHV«QHUJLHVK\GUDXOLTXHVRODLUH
et éolienne. En parallèle de ces aspects techniques, le positionnement du GRET
a fortement évolué sur les questions institutionnelles, en mobilisant les acteurs publics et privés,
au service de la pérennisation de l’accès à l’énergie pour les populations.

Le GERES (Groupe Énergies renouvelables, environnement et solidarités), créé en 1976, a


G«YHORSS«VRQH[SHUWLVHVXUOłDFFªV¢Oł«QHUJLHOłHIŦFDFLW««QHUJ«WLTXHOHV«QHUJLHVSURSUHVHW
renouvelables, et la gestion des ressources naturelles et des déchets.
Il propose des solutions énergétiques à la fois comme vectrices de développement économique
et social et comme alternatives aux systèmes existants dommageables
à l’environnement.

Electriciens sans frontières, créée en 1986 sous l’impulsion de salariés d’EDF, s’est donné pour
mission de lutter contre les inégalités d’accès à l’électricité et à l’eau dans le monde. Avec
le soutien de plus de 1 000 bénévoles et en partenariat avec des acteurs locaux, l’ONG mène
des interventions d’urgence et de post-urgence pour aider les populations sinistrées lors de
catastrophes humanitaires. Elle mène également des projets de développement pour mettre
à disposition une énergie propre, sûre et peu chère dans les zones rurales isolées, pour aider
à éradiquer la pauvreté, à améliorer l’éducation, les conditions sanitaires, le développement
économique et la sécurité alimentaire.

Créée en 1990, la Fondation Energies pour le monde (Fondem) promeut et développe l’accès
¢Oł«OHFWULFLW«SDUOHV«QHUJLHVUHQRXYHODEOHVDŦQGłDP«OLRUHUOHVFRQGLWLRQVGHYLHHWOHVUHYHQXV
des populations rurales. Elle a notamment développé une expertise dans les miniréseaux et
l’accompagnement des usages productifs de l’électricité. Elle concentre l’essentiel de son action
là où les besoins sont les plus forts, en Afrique subsaharienne, en collaboration étroite avec ses
partenaires locaux (populations et associations locales, collectivités, institutions…).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 93

Au bilan, en Afrique subsaharienne,


l’électrification formelle est d’abord
urbaine.
© Fondation Energies pour le Monde

Certes, des ONG spécialisées dans l’accès à


l’électricité par énergie renouvelable (cf. encadré)
agissent en concertation avec les pouvoirs in-
stitutionnels et traditionnels pour installer des
équipements permettant d’alimenter un territoire
et son bassin d’activités. Mais ces interventions
restent des cas isolés et marginaux ; le nombre
Réseau urbain. et les moyens de ces ONG sont très insuffisants
pour relever le défi, immense, de l’électrification
La troisième difficulté est d’ordre rurale, et notamment de celle des zones les plus
économique. enclavées et des populations les plus vulnérables.
Même en présence d’une volonté politique et de Ainsi, parfois bénéficiaires de projets leur per-
financements internationaux, rares sont les in- mettant d’accéder à électricité, mais le plus sou-
vestisseurs et les opérateurs privés prêts à par- vent éloignées de tout service fiable et durable,
ticiper au déploiement de projets d’électrification les populations rurales d’Afrique subsaharienne
rurale inclusifs, dans une logique de couverture n’ont d’autre choix que de se procurer l’électricité
de l’ensemble des besoins d’un territoire jusqu’au par leurs propres moyens pour répondre à leurs
« dernier kilomètre ». besoins. }
Ces acteurs sont freinés par le manque
d’attractivité de ce type d’intervention : conditions
difficiles dues à l’éloignement et l’accessibilité
réduite des sites, manque de compétences du
personnel local, manque d’accompagnement et
de couverture des risques pour des investisse-
ments générant un chiffre d’affaires et un taux de
rentabilité interne faibles…

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94 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.3.
En conséquence,
l’électrification rurale reste
en grande partie informelle.
Aujourd’hui, pour les populations rurales subsahariennes, l’accès à
une électricité de qualité, distribuée par le réseau et accessible à
tous tient davantage du concept que de la réalité. Dans le même
temps, leurs attentes évoluent rapidement, sous l’influence des
technologies et des politiques développées au Nord (1.3.1.).

Pour couvrir leurs besoins en électricité, et notamment leurs


besoins domestiques, les populations rurales recourent ainsi
à toute une palette de solutions alternatives disponibles sur
le marché, le plus souvent en dehors de toute initiative formelle
d’électrification (1.3.2.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 95

© Fondation Energies pour le Monde

Lecture à la lumière d’une lampe issue d’un kit solaire, Burkina Faso, 2016.

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96 - PARTIE 1 - CONTEXTE

1.3.1.
L’offre et la demande d’électrification rurale
sont bouleversées par plusieurs innovations.

Les attentes des populations rurales évoluent permis d’incontestables gains économiques et
rapidement, sous l’effet de plusieurs révolu- environnementaux ;
tions en provenance des pays industrialisés, çNGU RQNKVKSWGU ªPGTIªVKSWGU DCU ECTDQPG FGU
qui, en leur apportant des solutions techno- RC[U FW 0QTF KPFWKUGPV NC FªOQETCVKUCVKQP
logiques nouvelles, accroissent leurs besoins technique et économique des systèmes à
en électricité : source d’énergie renouvelable  : jusqu’alors
complexes et onéreuses même associées à des
çNG FªRNQKGOGPV OCUUKH FG NC VªNªRJQPKG OQDKNG récepteurs simples, les solutions techniques
GV FàWPG M[TKGNNG FàCRRNKECVKQPU FªTKXªGU ETªG NC de production d’électricité dites « hors réseau »
demande : facilitant l’information, les échanges et ou « décentralisées » peuvent être réinventées
les transactions, adoptée très rapidement partout (cf.  chapitre 2.3.) ; les systèmes par EnR sont
dans le monde, y compris dans les pays les plus pau- désormais en tête des capacités nouvelles de
vres, l’utilisation de cet ensemble numérique com- production d’électricité installées chaque année.
municant reconfigure en profondeur le tissu socio- En 2018, environ 100 MW de capacités renouve-
économique africain, y compris en zone rurale ; lables ont été installées en Afrique, dont 88 % de
çla technologie LED (light-emitting diode) offre systèmes utilisant l’énergie solaire1.
WPG TªRQPUG PQWXGNNG CW DGUQKP FàªENCKTCIG
alliant lumière de qualité, très faible consomma- Dans cette situation où la demande d’électricité
tion et longue durée de vie, elle s’est démocra- rurale croît sous l’effet des nouveaux usages, et
tisée à l’échelle mondiale (cf. encadré) et a en particulier la téléphonie mobile, les populations
et les acteurs économiques sont naturellement
amenés à rechercher des solutions alternatives
au réseau national qui n’arrive pas jusqu’à eux.

C’est ainsi qu’aujourd’hui, même là où le ré-


UGCW ªNGEVTKSWG PàGUV RCU NàªNGEVTKEKVª GUV DKGP
RTªUGPVGUQWUFGOWNVKRNGUHQTOGU}

1. IRENA, « Statistiques de capacité renouvelable 2019 » (Abu Dhabi : IRENA,


2019).

Différents types d’ampoules LED.

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 97

1.3.2.
Dans cet environnement en réinvention,
l’électricité pénètre dans les foyers ruraux le plus
souvent de manière informelle et hétéroclite.
Eclairage domestique, recharge des téléphones, Au sein du foyer, réduire l’usage des combus-
alimentation électrique des activités produc- tibles traditionnels (pétrole, huile, bougies, bois)
tives… Pour leurs besoins individuels ou collectifs, améliore la qualité de l’air1 et les conditions de vie
les populations rurales non desservies par le ré- domestiques, en plus de dispenser une lumière
seau s’approvisionnent spontanément en servi- plus performante2 et plus homogène pour les ac-
ces électriques de formes et de qualités diverses. tivités nocturnes.

L’éclairage est un besoin


fondamental qui n’attend pas On trouve ainsi sur
l’arrivée du réseau électrique. la quasi-totalité des
L’éclairage est un besoin atemporel et universel, pro- marchés africains :
gressivement confié à la « fée » électricité. Pendant
des millénaires, la lumière dite « artificielle » a reposé
sur une réaction de combustion : les bougies, la lampe ʼnGHVODPSHV/('SRUWDEOHV (conçues pour
à huile ou à pétrole et/ou le traditionnel foyer, qui reste usage intérieur et extérieur) alimentées par :
encore largement utilisé comme source d’éclairage piles jetables, capteur photovoltaïque ou
dans les zones rurales fortement enclavées. batterie intégrée, rechargeable par source de
On observe aujourd’hui une mutation rapide vers courant continu* externe (batterie, capteur
des sources d’éclairage modernes, porteuses de SKRWRYROWD±TXH b
bienfaits pour la santé, l’éducation, l’économie rurale, ʼnGHVSRLQWVOXPLQHX[/('Ŧ[HV (pour
l’environnement, et réduisant la dépendance des po- usage intérieur) alimentés depuis des kits
pulations et de leurs activités aux imports pétroliers. photovoltaïques ou batteries stationnaires,
aux ampoules LED sur culot classique
La technologie LED s’est diffusée pour alimentation sur réseau domestique
largement, avec de nombreux impacts traditionnel.
positifs.
Depuis quelques années, l’éclairage par LED est
entré massivement dans les foyers du sous-conti-
nent subsaharien, diffusion irriguée par les évolu-
1. Chaque année, les effets secondaires des fumées émanant de solutions
tions précitées mais aussi par les défaillances récur- kérosènes causent plus de décès que le paludisme et le VIH combinés – ODI,
Accelerating access to electricity in Africa with off-grid solar, the impact of
rentes des services électriques en zones urbaine et solar household solutions, 2016.
périurbaine. Qu’elle soit appliquée aux usages do- 2. La technologie LED présente l’intérêt d’émettre une lumière très peu sensible
aux variations de tension, contrairement aux ampoules traditionnelles, plus
mestiques ou collectifs, cette technologie présente fatigantes pour les yeux.
d’indéniables bénéfices.

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98 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Par ailleurs, leur coût continuant de baisser, ces


équipements d’éclairage moderne deviennent L’effet polluant
de plus en plus accessibles, permettant aux mé- et toxique de
nages de réaliser des économies substantielles la combustion
sur leurs dépenses énergétiques1. Ces gains peu-
du kérosène
vent être alors réorientés vers d’autres postes de
consommation domestique ou le développement « La combustion du kérosène peut
d’activités génératrices de revenus. altérer les fonctions pulmonaires
et augmenter les risques de cancer
Enfin, à l’échelle collective, la mise en œuvre de ainsi que l’incidence des maladies
lampadaires solaires autonomes de technologie infectieuses et de l’asthme. De très
LED dans les rues ou sur les parcelles agricoles nombreuses études établissent une
accroît la sécurité des biens et des personnes forte corrélation entre problèmes
dans certaines zones enclavées, en dissuadant de santé et pollution intérieure,
les vols. Elle facilite surtout les activités sociales et en particulier chez les enfants,
économiques nocturnes dans des régions où la lu- ainsi qu’entre problèmes de santé
mière du jour disparaît vers 18 heures toute l’année. et présence dans l’environnement
GHSROOXDQWVOL«VDXN«URVªQH(QŦQ
Mais la dissémination des équipements les lampes au kérosène ont un impact
LED a son revers environnemental. important sur l’environnement.
Le succès de certains équipements induit un On estime que ces lampes sont
effet pervers : en quelques années, la consomma- responsables de 7 % des émissions
tion de piles jetables liée à l’utilisation des lampes annuelles de carbone noir dans le
torches et luminaires autonomes à LED s’est mé- monde. »
caniquement envolée.
De qualité très variable et bien loin de toute filière Maximo Torero, « L’impact de
de recyclage, des dizaines de milliers de piles l’électrification rurale : enjeux et
usagées sont laissées à terre chaque jour dans perspectives », Revue d’économie
des écosystèmes biologiques déjà fragiles, où la du développement‫ژًבאژ‬Ȅ۵‫ژבژ‬٢‫ד׏׎א‬٣ِ
préservation des sols s’ajoute à la somme des dé-
fis environnementaux majeurs qu’il reste à relever.
© Eva The Weaver

1. En 2017, selon MKOPA, ses 500 000 clients économisaient plus de 60 millions
d’heures d’éclairage à la lampe au kérosène chaque mois, soit plus de 300
millions de dollars sur quatre ans – Source : Séverine Leboucher, « Le pay-as-
you-go sur les terres du microcrédit », Revue Banque, n°811 (2017). Les piles usagées jetées dans la nature polluent les sols.

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 99

En Afrique subsaharienne, le nombre d’abonnés à la téléphonie mobile


a plus que doublé en moins de dix ans

% de la
population

70 %

60 %

50 %

40 %

30 %

20 %

10 %

0%
10

11

12

13

14

15

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18

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n)
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20

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(p
Source : GSMA, « Économie mobile : l’Afrique de l’Ouest 2018 » (Londres, 2018), et « Économie mobile : l’Afrique de l’Ouest 2019 ».
(Londres, 2019).

Pour satisfaire leurs différents Recharger son téléphone est ainsi devenu,
besoins domestiques et devant l’éclairage, le principal vecteur du proces-
économiques, les individus sus d’électrification, et un marché porteur pour
recourent à une mosaïque des solutions électriques individuelles. D’autant
de solutions. que le téléphone est également, pour nombre de
Le déploiement du numérique et des réseaux de ses utilisateurs subsahariens, un outil de transac-
télécommunication hertziens est un événement tions financières avec l’arrivée du Mobile Money
majeur en Afrique subsaharienne : c’est la région (cf. encadré).
du monde où la téléphonie mobile a crû le plus
rapidement ces dernières années (cf. graphe).
La baisse des coûts1 aidant, près de 500 millions
de personnes, soit un habitant sur deux, dispo- 1. Selon la GSM Association, pour un même équipement, les coûts ont diminué
de -56 % entre 2012 et 2017 sur 27 pays observés. GSM Association,
sent en 2018 d’un abonnement de téléphonie mo- « Économie mobile : l’Afrique de l’Ouest 2018 » (Londres, 2018). La GSM
Association représentant près de 800 opérateurs et constructeurs de
bile, selon la GSM Association (GSMA). téléphonie mobile à travers 220 pays du monde.

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100 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Diverses mécaniques marchandes


Mobile Money : permettant la recharge du téléphone se
G«ŦQLWLRQ sont naturellement mises en place.
et chiffres Certaines lampes portables solaires ou à piles
proposent une prise dédiée à la recharge d’un
Mobile Money, ou Mobile Manking, ou plusieurs téléphones, de même que la plupart
désigne OHVVHUYLFHVŦQDQFLHUV SDLHPHQW des systèmes solaires individuels qui équipent les
retrait, envoi d’argent) effectués foyers aisés ou certaines boutiques.
via l’utilisation d’un téléphone. Ces Des centres de recharge de téléphones
solutions mobiles se sont notamment s’improvisent dans certains bâtiments collectifs
développées rapidement dans les pays électrifiés (dispensaires, centres religieux, écoles,
en développement pour faciliter l’accès mairies), dans certains foyers ou chez des com-
DX[VHUYLFHVŦQDQFLHUVDX[SRSXODWLRQVQH merçants équipés de systèmes solaires ou de
possédant pas de comptes bancaires. Plus groupes électrogènes.
d’un tiers des adultes sont des utilisateurs
actifs du Mobile Money dans 13 pays
africains.

Sur l’année 2017, en Afrique


subsaharienne, on a recensé :
ʼnVHUYLFHVGHMobile Money ;
ʼnPLOOLRQVGHFRPSWHVXWLOLVDWHXUV
actifs ;
ʼnPLOOLDUGGHWUDQVDFWLRQVŦQDQFLªUHV
effectuées par Mobile Money…
… pour une valeur de 19,9 milliards de
dollars.

Source : GSMA, « Économie mobile : l’Afrique de


l’Ouest 2018 » (Londres, 2018), et « State of the industry
report 2018» (Londres, 2019).
© Fondation Energies pour le Monde

Les villageois transportent leur batterie à pied pour aller la


faire recharger (Guinée).

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 101

Pour les usages domestiques, les


systèmes solaires individuels viennent Retour
concurrencer les centres de recharge de terrain
de batteries.
Pour rendre compte de cette électricité, dite « in- Ambondro est une localité secondaire
formelle » mais dont la présence est bien réelle, GXVXGGH0DGDJDVFDU«OHFWULŦ«H
impossible de ne pas évoquer le cas des batteries par miniréseau et centrale hybride
de voiture, utilisées par certains ménages ruraux éolien-solaire depuis 2010, en gestion
aisés qui ne sont pas trop éloignés des centres associative. Lors du jour du marché
urbains électrifiés. hebdomadaire, qui rassemble des milliers
Une batterie de voiture de qualité moyenne per- de personnes des hameaux alentour, on
met de disposer d’un service électrique mini- voit s’improviser des dizaines de points
mal avec quelques jours d’autonomie. Plusieurs de recharge de téléphone. On estime
fois par mois, les usagers rejoignent le groupe que ce sont 500 téléphones chargés
électrogène voisin ou, plus fréquemment, la loca- chaque vendredi, non sans impact sur les
lité électrifiée la plus proche pour « acheter » une équipements de production
recharge. et de stockage de la centrale !

Source : Fondation Énergies pour le Monde.


Dans le nouvel environnement technologique,
l’utilisation de batteries tend à disparaître au
profit de l’acquisition de systèmes solaires indi-
viduels, ce qui revient techniquement à charger
également une batterie, mais en utilisant une
source d’électricité installée sur le toit du foyer
(cf. chapitre 3.2.).

De même, les « kiosques communautaires » de


recharge de batteries alimentés par source ther-
mique ou renouvelable, longtemps soutenus
par  les bailleurs institutionnels, tendent à dispa-
raître face à la multiplication des solutions indivi-
© Fondation Energies pour le Monde

duelles photovoltaïques. Cependant, ces solu-


tions d’électrification solaire individuelle se can-
tonnent à quelques services de base, que l’on peut
qualifier « d’immatériels » (éclairage, téléphone,
radio et éventuellement télévision). Elles ne peu-
vent couvrir tous les usages quotidiens à l’échelle
d’un territoire. Notamment, elles sont impuis-
santes à répondre aux besoins d’électrification Le jour du marché à Ambondro, les habitants
des activités économiques (cf. chapitre 3.2.). rechargent leurs téléphones.

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102 - PARTIE 1 - CONTEXTE

Pour les activités productives,


les entrepreneurs recourent
Recharger
à des groupes électrogènes,
une batterie : solution robuste mais coûteuse.
le parcours Les besoins en énergie mécanique, transforma-
du combattant tion agricole, pompage, outillage, sont nettement
plus énergivores et requièrent une puissance et
A Ifotaka, commune rurale du sud de une énergie difficilement compatibles avec les
Madagascar, avant l’arrivée de l’électricité kits photovoltaïques individuels.
par miniréseau solaire en 2015, beaucoup
de ménages parcouraient chaque semaine Ainsi, lorsque les usagers sont privés du réseau
90 km à vélo dans la journée pour une national mais aussi éloignés de toute initiative
recharge de batterie facturée à la ville la d’électrification rurale collective de type mini-
plus proche près de 5 €, sachant que 90 % réseau, ils recourent à des groupes électrogènes
de la population malgache vit avec moins pour leurs usages productifs. Or les coûts et les
de 2 dollars (1,77 euro) par jour. De plus, conditions d’exploitation de ces générateurs sont
mal chargées et non protégées contre pénalisants pour la rentabilité des activités et
les décharges profondes, les batteries ne donc pour le revenu des familles.
dépassaient pas quelques mois de durée C’est notamment pour cet usage productif que
de vie. l’installation d’un miniréseau prend tout son sens
(cf. chapitre 3.5.). }
Source : Fondation Énergies pour le Monde.

Puissance
et énergie

La puissancePHVXU«HHQZDWWV : 
est une notion instantanée : c’est
ce qui est produit ou consommé
à un instant donné. 1 watt = 1 joule
par seconde.

L’énergie, mesurée en joules (J) ou en


ZDWWKHXUHV :K VHUDSSRUWH¢XQHGXU«H
C’est ce qui a été produit ou consommé
pendant une heure,
un jour, un an. Une énergie est donc
une puissance multipliée par un temps
(1 wattheure = 1 watt × 1 heure).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 1 - CONTEXTE - 103

.RXUDPDQJXLHVWHOOH«OHFWULŦ«H"
Instantané de la situation électrique à Kouramangui, localité
VHFRQGDLUHGH0R\HQQH*XLQ«HG\QDPLTXHQRQ«OHFWULŦ«H

A Kouramangui, la hiérarchie sociale de l’électricité individuelle et le panachage non coordonné


de solutions sont clairement visibles : 80 % des ménages les plus pauvres sont équipés de petites
ODPSHVVRODLUHVSRUWDEOHVDYHFSUªVGHPRGªOHVGLII«UHQWVLGHQWLŦ«VGDQVOHYLOODJHGHV
habitations « en dur » disposent de leur propre système solaire individuel, sans aucune harmonie
technique d’un système à l’autre.
Les artisans présents en bord de route utilisent leur groupe électrogène les jours de marché,
dans des conditions de fonctionnement très dégradées. Les systèmes solaires fournis à la
mairie et l’école par un programme de la Banque mondiale sont hors service après deux ans
d’utilisation, faute de moyens et de compétence dédiés à la maintenance et au remplacement des
équipements. Le dispensaire dispose d’un système photovoltaïque de bonne conception grâce
à l’UNICEF, où la recharge de téléphone est interdite, parfaitement entretenu par un personnel
extrêmement motivé.

Une ONG française sollicitée par l’association de la diaspora de Kouramangui prépare


Oł«OHFWULŦFDWLRQGXIR\HUGHVMHXQHVSDUV\VWªPHSKRWRYROWD±TXH(QŦQVXLWH¢XQmGRQ}1 du
JRXYHUQHPHQWFKLQRLVODORFDOLW«DSXE«Q«ŦFLHUGHOłLQVWDOODWLRQGHODPSDGDLUHVVRODLUHVVXU
l’axe routier principal ; après dix-huit mois d’exploitation, 25 % d’entre eux sont déjà hors service,
GXIDLWGHODTXDOLW«LQVXIŦVDQWHGHVPDW«ULHOVHWGłXQHDEVHQFHGHJHVWLRQVWUXFWXU«H

Cet instantané de la situation électrique de


Kouramangui pourrait être celui
de milliers de localités rurales peu
ou moyennement enclavées en Afrique
de l’Ouest.

Que répondre à la question : Kouramangui


HVWHOOH«OHFWULŦ«H"

1. Équipement fourni et installé gracieusement dans le cadre d’une


politique commerciale et non d’un programme de développement
Commerçant utilisant un groupe électrogène. de long terme.

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104 - PARTIE 1 - CONTEXTE

[ Partie 1 ]
Conclusion
En observant ces nouvelles habitudes énergétiques,
il devient aujourd’hui difficile de conclure de manière certaine
à l’électrification effective d’une localité rurale africaine :
les frontières entre territoire « électrifié » et territoire « non
électrifié » sont devenues floues. Un vaste marché de vente de
services électriques très divers est né de la conjugaison de deux
facteurs : la vulgarisation rapide des équipements de production
photovoltaïque et des récepteurs à haute performance, d’une
part, et la demande croissante des zones rurales, lassées
d’attendre un hypothétique raccordement au réseau, d’autre part.

Les nouveaux acteurs de l’électrification individuelle, dont les


opérations échappent souvent à toute mécanique de régulation
ou d’aménagement structuré du territoire, font de facto partie
du paysage de l’électrification rurale dite « hors réseau » ou
« décentralisée ».

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PARTIE 1 - CONTEXTE - 105

C’est ce paysage, renouvelé, complexe et mouvant, que les chapitres


suivants s’attachent à dessiner, en répondant notamment aux questions
suivantes : Comment définir l’électrification rurale décentralisée (ERD) ?
Comment s’est-elle développée et à quel stade de maturité est-elle
aujourd’hui arrivée ? Quelles sont les évolutions qui viennent bousculer
les schémas traditionnels ? Quelles opportunités et quels risques
sont liés à ces évolutions pour atteindre l’objectif d’accès universel à
l’électricité en milieu rural ? Quels sont les invariants à prendre en compte
pour réussir un projet d’accès à l’électricité en milieu rural subsaharien,
malgré ces bouleversements ?

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106 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Info

Retour de terrain

'«ŦQLWLRQ

Chronologie

Chiffres-clés

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 107

[ Partie 2 - Etat des lieux ]

L’accélération de
l’électrification rurale
peut s’appuyer sur les
solutions décentralisées,
grâce aux innovations
et aux leçons de
l’expérience.

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108 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Introduction
Souffrant d’une fracture énergétique qui semble irréductible
sans des moyens radicalement accrus, dotée de gisements
d’énergies renouvelables, notamment solaires, favorables,
l’Afrique subsaharienne a été le terrain de nombreux projets
d’accès à l’électricité hors réseau, rassemblés sous la bannière
« électrification rurale décentralisée » (ERD).

Que signifie cette expression ? Quelles dimensions recoupe-t-elle ?


De quelles valeurs et de quels objectifs est-elle porteuse ?
C’est en disséquant ces mots, qui tendent aujourd’hui à être remplacés
par ceux d’« accès à l’électricité hors réseau », qu’on prend la mesure
de la complexité du sujet. Cette deuxième partie s’attache d’abord
à circonscrire la notion d’« électrification rurale décentralisée » (ERD) et sa
raison d’être, mettant à l’occasion en lumière son rôle majeur pour réussir
une électrification rurale de qualité dans la région subsaharienne (2.1.).

Comment la pratique de l’ERD


mb,OQł\DFODLUHPHQWSDVGHPLUDFOHb
s’est-elle construite ? Quels Oł«OHFWULFLW«G«FHQWUDOLV«H
projets ont été menés au Sud ? HVWXQHSLVWHLQFRQWRXUQDEOH
Nées en Europe de la volonté des PDLVWUªVDUGXHb}

collectivités locales, les solutions Pierre Jacquemot et Marie-Noëlle Reboulet,


« Options technologiques et modèles d’organisation
décentralisées ont germé sur le de l’électrification rurale en Afrique », Afrique
Contemporaine 1-2, n° 261-262 (2017) : 155.

continent africain dans les années


1970 (2.2.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 109

Où va l’ERD ? Aujourd’hui, traversée par de multiples lignes de


rupture technologique et les nouvelles logiques commerciales
en découlant, elle recherche toujours son équilibre entre viabilité
économique et équité sociale (2.3.).

Quelles sont les « balises » qui permettent de se repérer dans cet


environnement mouvant ? Les cinq décennies d’expérience des
pionniers de l’ERD permettent de recenser de nombreux invariants
opérationnels et de dessiner les contours d’une pratique efficace
de la mise en œuvre de projets d’accès à l’électricité par énergies
renouvelables en milieu rural (2.4.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


110 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.1.
Dans sa définition comme dans
ses objectifs, l’électrification
rurale décentralisée comporte
plusieurs dimensions :
territoriale, économique
et humaine.
L’« ERD » n’est pas, contrairement à ce que l’utilisation d’un
acronyme pourrait laisser croire, une notion froide, purement
technique et strictement définie. Sa « dissection » terminologique
ouvre plus de questions qu’elle n’apporte de réponses.
Malgré cela, elle est construite sur un socle ferme de principes
liés à l’esprit pionnier, expérimental et humaniste des premiers
projets : le respect du territoire, la compréhension des besoins
des populations, la recherche d’équité (2.1.1.).

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 111

Essentiel dans cette expression, le terme « décentralisé »


permet de lier le destin de l’électrification rurale à celui du réseau
national, de faire comprendre comment elle en est l’indispensable
complément (2.1.2.).
© Fondation Energies pour le Monde

Un projet d’ERD mené à Madagascar.

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112 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.1.1.
Qu’entend-on par « électrification rurale
décentralisée » ?
Il n’existe pas de définition unanime et offi- çNàCEE©U CW UGTXKEG GUV RGTOCPGPV GV PQP
cielle de cette expression, essentiellement ponctuel ;
utilisée par ses praticiens. Elle tend par ail- çNG UGTXKEG EQWXTG NàGPUGODNG FGU DGUQKPU FG
leurs à être progressivement remplacée par OCPK©TG ªXQNWVKXG, en accompagnant les trans-
celles d’«  accès à l’électricité hors réseau  », formations des usages dans le temps.
transposition d’une terminologie de tradition Aujourd’hui, ce double critère relève davantage de la
anglophone. Cette dernière témoigne d’une cible que de l’existant. Derrière cette apparente sim-
autre manière de poser le sujet, en distinguant plicité, se cachent des questions plus complexes.
le « connecté au réseau » (grid connected) et le Comme on l’a vu, il est parfois difficile d’affirmer qu’un
« hors-réseau » (off-grid). L’ERD est une moda- territoire est ou non électrifié. La diversité des solu-
lité de « l’accès à l’électricité » : pas d’accès uni- tions et la multiplicité des niveaux de service corres-
versel à l’électricité en milieu rural sans recours pondants (cf. chapitre 1.3.) déjouent toute tentative
aux solutions décentralisées d’électrification. de définition simple et unitaire de l’électrification
Les paragraphes suivants proposent, en analy- dans les zones rurales.
sant tour à tour chacun des trois termes qui
composent l’expression « électrification rurale Peut-on dire d’un territoire qu’il est
décentralisée  », d’en restituer les différentes « électrifié » si tous les usages ne sont
dimensions et les concepts sous-jacents. pas couverts, ou pas de manière fiable ?
Si on considère qu’il n’y a pas d’électrification
Quand peut-on dire d’un territoire lorsque le service ne répond pas à tous les besoins
qu’il est électrifié ? sur un territoire donné, alors peu de solutions – si
On considère communément qu’électrifier, c’est ce n’est aucune  – peuvent entrer dans le champ
doter un espace d’un accès durable à l’électricité de l’ERD. La restriction en quantité d’énergie d’un
pour divers usages, domestiques, mais aussi col- système solaire individuel (cf.  chapitre 3.2.), par
lectifs ou économiques (cf. tableau). exemple, le disqualifie immédiatement, contraire-
ment à un miniréseau permettant de brancher li-
L‘électrification désignerait donc d’abord le pro- brement tout type d’appareil (cf.  chapitre 3.5.).
cessus par lequel on dote de manière pérenne un De même que le réseau national, qui, avec ses
territoire d’une électricité accessible à l’ensemble fréquents délestages, ne remplit pas nécessaire-
des activités humaines qu’il accueille. Cette dé- ment le critère de qualité de service.
finition serait en tout cas cohérente avec l’idée d’un Le champ « pratique » de l’ERD ne peut donc exclure
accès universel à l’électricité. les solutions proposant une couverture partielle
Dans ce cas, l’expression « ERD » est assortie d’un des besoins, quand bien même son objectif reste
double objectif de durabilité et d’utilité du service l’universalité des usages.
d’électricité :

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 113

Les usages de l’électricité

Usages domestiques (FODLUDJHW«O«SKRQLHDXGLRYLVXHOU«IULJ«UDWLRQ


Ménages FRQJ«ODWLRQYHQWLODWLRQFOLPDWLVDWLRQHWDXWUHVXVDJHV
P«QDJHUVPXOWLSOHV

Usages collectifs ([KDXUHGHOłHDX«FODLUDJHSXEOLF«FODLUDJHGHV


Secteur tertiaire public ou privé E¤WLPHQWVSXEOLFV «FROHVSRVWHVGHVDQW«E¤WLPHQWV
DGPLQLVWUDWLIVOLHX[GHFXOWHHWF W«O«SKRQLH,QWHUQHW
SKRWRFRSLHLPSUHVVLRQ«TXLSHPHQWVHWDSSDUHLOV
P«GLFDX[HWF

Usages économiques (FODLUDJHVLJQDOLVDWLRQHWFRQVHUYDWLRQGHVSURGXLWVSRXU


Secteur industriel et artisanal OHVFRPPHUFHVVFLDJHVRXGXUHPRXOLQDJHFRXWXUH
V«FKDJHWUDYDX[VXUPDFKLQHVRXWLOVHWF

Peut-on dire d’un territoire qu’il est l’ERD, dans les pays du Sud comme avant eux dans
« électrifié » si tous ses habitants n’ont ceux du Nord1, visent le développement d’une ré-
pas accès à des services électriques ? gion et cherchent à améliorer les conditions de vie
L’électrification partielle d’un espace au bénéfice de ses habitants. Autrement dit, l’ERD consiste
des seuls habitants capables de payer le service, OQKPU¡ªNGEVTKăGTWPVGTTKVQKTGSWàWPGEQOOW-
laissant de côté les foyers les plus vulnérables, PCWVª JWOCKPGa  UK QP ªNGEVTKăG EàGUV RQWT CR-
entre-t-elle dans le champ de ce qu’on appelle porter un service essentiel. C’est cette attention
l’« ERD » ? Derrière cette question de l’accessibilité primordiale portée aux personnes, à leurs activités
du service, s’en cache une autre : l’ERD comporte-t- et à leurs organisations collectives qui fonde histo-
elle une dimension sociale ? riquement l’ERD, au Nord comme au Sud. C’est pour
cela que l’usage de l’électricité occupe une place
Portée initialement par des pionniers du déve- centrale dans le raisonnement de ses praticiens.
loppement durable, l’ERD n’est pas seulement
un «  secteur  » économique ou un «  marché  »  : Cette approche, qui repose sur la conviction qu’il y a
c’est d’abord un mouvement. Selon sa perspec- un « droit universel à l’électricité », se trouve renforcée
tive, électrifier n’est pas seulement apporter une par le recours aux énergies renouvelables : l’énergie
solution énergétique dans un espace donné, et renouvelable, offerte à tous sans distinction par la
l’électrification ne peut être réduite à un processus. nature, acquiert encore plus logiquement le carac-
L’ERD renvoie à une conception particulière du tère de « bien commun ». Un bien dont la jouissance
développement humain, qui ne peut se contenter de peut et doit être garantie à tous sans restrictions.
la dimension technique de l’apport d’un service élec- Néanmoins, la nécessaire conversion de l’énergie
trique à un territoire.
La plupart des projets menés sous la bannière de
1. Sur l’histoire de l’ERD française et américaine, voir chapitre 2.2.

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114 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

RCTVKGNNGOGPVNàGPUGODNGFGUWUCIGUUWTNGVGT-
mb(OHFWULŦHUGXUDEOHPHQWXQWHUULWRLUH ritoire considéré.
FłHVW«WDEOLUGDQVODGXU«HXQVHUYLFH
«OHFWULTXHPDUFKDQGPXOWLXVDJHSRXU Dès lors, que recouvre exactement
GHVXVDJHUVSOXULHOVHWGLVSHUV«VGDQV un « taux d’électrification » ?
XQHVSDFHSOXVRXPRLQVU«JXO«b} Etant donné la dispersion et la variété des solutions
d’électrification rencontrées dans les zones rura-
Christian de Gromard, référent énergie, les des pays en développement, il est difficile de
Agence française du développement. distinguer de manière certaine celles qui seraient
« électrifiées » de celles qui ne le sont pas. Bien que
certains pays, comme l’Inde, aient tenté de définir
selon des critères normatifs ce qu’est un territoire
en électricité fait d’emblée entrer cette dernière «  électrifié  », les chiffres et les indicateurs relatifs
dans un univers différent. En effet, de même que la au « taux d’électrification » doivent être considérés
potabilisation de l’eau, la conversion de l’énergie en avec prudence. Ce taux ne fait en effet souvent
électricité induit un traitement et des équipements aucune distinction entre les différents niveaux de
(de production, de transport, de distribution, de service proposés par les systèmes de production
stockage, de régulation…) qui ont un coût. Dès lors, et de distribution de l’électricité disponibles sur le
on peut considérer que l’électricité perd sa qualité territoire considéré (cf. encadré).
de « bien commun » pour devenir un « service ».
De là, surgissent d’autres questions. Ce « service »
est-il nécessairement « marchand » ? Si c’est le cas,
doit-il être laissé hors du champ de la profitabilité
pour lui conserver son caractère de service essen- 7DX[GłDFFªV¢
tiel, accessible à tous ? Ecole française intervention- l’électricité en
niste et tradition libérale anglo-saxonne proposent PLOLHXUXUDOb
des argumentations différentes.
un taux variable…
Le débat sur la nature de bien commun ou de service /HVSURWRFROHVXWLOLV«VSRXUG«ŦQLUOłDFFªV
marchand de l’électricité, et sur la légitimité de confi- à l’électricité varient.
er l’accès à ce service essentiel à un opérateur privé, 'DQVFHUWDLQVFDVOHUDFFRUGHPHQWDX
n’est pas l’objet du présent ouvrage. Ce que l’on ob- U«VHDXGłXQVHXOP«QDJHGDQVXQYLOODJH
serve en pratique aujourd’hui, c’est que les services VXIŦW¢FRQVLG«UHUTXHOłHQVHPEOHGX
proposés aux communautés rurales relèvent des YLOODJHHVW«OHFWULŦ«'DQVGłDXWUHVOłDFFªV
deux logiques, interventionniste ou libérale (cf. cha- HVWG«ŦQLSDUOłH[LVWHQFHGHUDFFRUGHPHQWV
pitre 2.4.2.), et qu’il ne faut exclure aucun d’eux pour SK\VLTXHVP¬PHVLDXFXQH«OHFWULFLW«Qł\
rendre compte de la réalité de l’ERD (cf. partie 3). FLUFXOHU«HOOHPHQW
Sans pour autant occulter l’universalité du service
6RXUFHb Banque mondiale, « Africa’s Pulse : une
comme objectif essentiel vers lequel tend l’ERD, cet analyse des enjeux façonnant l’avenir économique
ouvrage propose de faire entrer dans son champ de l’Afrique » (Washington, D.C, 2018).

VQWV UGTXKEG ªNGEVTKSWG SWK EQWXTG O«OG

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 115

7DX[Gł«OHFWULŦFDWLRQXUEDLQHb
XQP¬PHPDQTXHGHŦDELOLW«
4XRLTXłLOVŁDJLVVHGł«OHFWULŦFDWLRQXUEDLQH HWQRQUXUDOH OłH[HPSOHVXLYDQWSURSRV«SDU
XQHFKHUFKHXVHGHOł,QVWLWXWIUDQ©DLVGHVUHODWLRQVLQWHUQDWLRQDOHV ,)5, LOOXVWUHFRPELHQ
l’évaluation quantitative et qualitative d’un service électrique, même dans une zone où les
VWDWLVWLTXHVVRQWWK«RULTXHPHQWSOXVVLPSOHV¢U«DOLVHU FDSLWDOHQDWLRQDOH TXHVXUXQWHUULWRLUH
GLIŦFLOHGłDFFªVHVWXQHJDJHXUH

mb/HWDX[Gł«OHFWULŦFDWLRQWHOTXHFDOFXO«¢OłKHXUHDFWXHOOH VHORQOHQRPEUHGłLQWHUFRQQH[LRQV
GXU«VHDX QHGRQQHTXłXQHYLVLRQODFXQDLUHGHODVLWXDWLRQ/HVSUREOªPHVGHPDLQWHQDQFH
FRXSO«VDX[FRQQH[LRQVLOO«JDOHV¢XQHPDXYDLVHJHVWLRQGHODGHPDQGHRX¢GHVUXSWXUHVGH
FRPEXVWLEOHQHVRQWHQHIIHWSDVSULVHQFRPSWH
$LQVLOł218DU«Y«O«TXHGDQVODYLOOHGH.LQVKDVDR»OHWDX[Gł«OHFWULŦFDWLRQFDOFXO«VHORQOHV
P«WKRGHVFODVVLTXHVDWWHLQWbODVLWXDWLRQHVWHQU«DOLW«EHDXFRXSSOXVFRPSOH[H$LQVLb
GHODSRSXODWLRQSURŦWHGHOł«OHFWULFLW«PRLQVGHKXLWKHXUHVSDUMRXUHWbGHODYLOOHQłDDFFªV
TXł¢GHODWUªVEDVVHWHQVLRQb}

6RXUFHb Gabrielle Desarnaud, « L’électrification rurale en Afrique : comment déployer des solutions décentralisées ? »
(Paris : IFRI, 2017).
© Remy Delacloche

Les nombreuses coupures d’électricité perturbent


la vie quotidienne et contraignent les populations
à s’éclairer à la bougie ou à la lampe à pétrole.

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116 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Généralement, est considéré comme « zone rurale »


mb/HVSURFHVVXVGł«OHFWULŦFDWLRQVH tout espace qui n’est pas une agglomération urbaine
G«SORLHQWGDQVODGXU«HHWVłLQVFULYHQW ni sa zone périurbaine. La distinction se fonde par-
GDQVGHVKLVWRLUHVVS«FLŦTXHVVHORQ fois sur un critère quantitatif : le nombre d’habitants
OHV(WDWVHWOD]RQHGłDSSOLFDWLRQ d’une localité. En France, par exemple, les agglo-
GHVV\VWªPHVGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH mérations de moins de 2 000 habitants sont consi-
/HWDX[Gł«OHFWULŦFDWLRQ QRPEUH dérées comme rurales.
GHYLOODJHV«OHFWULŦ«VQRPEUHWRWDO
GHYLOODJHVGDQVOłHVSDFHFRQVLG«U«  Il n’y a donc pas de définition communément
HWOHWDX[GHFRQQH[LRQV QRPEUHGH acceptée de ce qu’est une «  zone rurale  », d’abord
P«QDJHVHWDXWUHVXVDJHUV«OHFWULŦ«V définie par défaut, par référence à la zone urbaine…
QRPEUHWRWDOGłXVDJHUVSRWHQWLHOV dont il n’y a pas davantage de définition simple
UHFHQV«VGDQVOłHVSDFHFRQVLG«U«  (cf. encadré).
FDUDFW«ULVHQWOHQLYHDXGł«OHFWULŦFDWLRQ
GHFHWHUULWRLUHHWVDSURJUHVVLRQb} En Afrique subsaharienne, ces zones corres
pondent néanmoins à un certain paysage  : un
Christian de Gromard, habitat dispersé (hameaux et villages) ou de pe-
référent énergie, Agence française tites agglomérations, où les activités de subsis-
du développement. tance, principalement centrées sur l’agriculture,
l’élevage et l’exploitation forestière, sont souvent
saisonnières. Les échanges, fluctuant en fonction
des volumes et des prix du marché, sont issus de
L’accès à des services limités, tels que les lampes ou la vente des produits agricoles sur les marchés à
les systèmes individuels solaires, est d’ailleurs par- des grossistes intermédiaires ou à des industries
fois appelé « préélectrification », ce qui témoigne du agroalimentaires. Les revenus des populations
fait qu’un service n’offrant qu’une couverture partielle sont ainsi souvent instables et limités.
des usages n’est qu’une électrification imparfaite. Ce sont ces caractéristiques qualitatives (habi-
tat dispersé, activités primaires prépondérantes,
Où commence et où s’arrête saisonnalité, instabilité et faiblesse des revenus…)
l’électrification « rurale » ? qui sont retenues pour définir l’ERD, telle que cette
Si l’électrification se définit comme un processus expression sera utilisée tout au long de cet ouvrage.
d’apport d’un service (l’électricité) dans un espace
donné, alors l’électrification rurale correspondrait à Pourquoi distinguer électrification rurale
ce processus appliqué à une certaine catégorie de et urbaine ?
territoire. Or, un espace dit « rural » présente finale- Le milieu rural se caractérise par une densité
ment des frontières assez floues. faible d’usagers potentiels, dont la demande
d’électricité est limitée en raison de leurs faibles
A quoi reconnaît-on un espace « rural » ? ressources financières et qui sont géographique-
Dans chaque pays, les administrations en charge ment dispersés. Electrifier un espace rural en
de l’aménagement du territoire et des collectivités Afrique subsaharienne suppose des inves-
territoriales ont leur propre définition du «  rural  ». tissements plus importants, sans réalisation

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 117

([HPSOHVGHFULWªUHVGLVWLQJXDQWXUEDLQHWUXUDO
pour quelques pays d’Afrique subsaharienne

6RXYHQWG«ŦQLHVFRPPHOłDEVHQFHGH]RQHVXUEDLQHVOHV]RQHVUXUDOHVVRQWGRQF
de facto une catégorie résiduelle. /HVG«ŦQLWLRQVXWLOLV«HVSDUOHVLQVWLWXWVGHVWDWLVWLTXHVYDULHQW
GłXQSD\V¢OłDXWUHFHUWDLQVFRQVLG«UDQWXQVHXOFULWªUH bGHVSD\V GłDXWUHVSOXVLHXUV
b SRXUG«ŦQLUOHV]RQHVXUEDLQHVUHŧ«WDQWOHVGLII«UHQWHVU«DOLW«VJ«RJUDSKLTXHVHW
VRFLR«FRQRPLTXHV
%«QLQbXQH]RQHXUEDLQHHVWG«ŦQLHFRPPHb
ʼnWRXWFKHIOLHXGHFRPPXQHGłDXPRLQVKDELWDQWVHWD\DQWDXPRLQV
XQHGHVLQIUDVWUXFWXUHVFLDSUªVbEXUHDXGHSRVWHHWW«O«FRPPXQLFDWLRQEXUHDXGHUHFHWWH
GHSHUFHSWLRQGXWU«VRUSXEOLFV\VWªPHGłDGGXFWLRQGłHDXGł«OHFWULFLW«
FHQWUHGHVDQW«FROOªJHb
ʼnWRXWDUURQGLVVHPHQWD\DQWDXPRLQVTXDWUHGHVLQIUDVWUXFWXUHVFLGHVVXV
HWDXPRLQVbKDELWDQWV ,16$( 
*KDQDbOHV]RQHVUXUDOHVUHFRXYUHQWOłHQVHPEOHGHVORFDOLW«VGHPRLQV
GHSHUVRQQHV *KDQD6WDWLVWLFDO6HUYLFH 
1LJHULDbHVWFRQVLG«U«HFRPPH]RQHUXUDOHWRXWHORFDOLW«GHPRLQVGHKDELWDQWVGRQWOHV
DFWLYLW«VVRQWSULQFLSDOHPHQWDJUDLUHV

6RXUFHb OIT, « Rural-urban labour statistics » (Genève, 2018).

/łDEVHQFHGłXQHG«ŦQLWLRQLQWHUQDWLRQDOHPHQW
reconnue des zones rurales

Bien que les zones rurales aient été historiquement la matrice du développement économique
HWVRFLDOHWVRLHQWWRXMRXUVDXFHQWUHGXG«EDWVXUOHG«YHORSSHPHQWHOOHVQłRQWSDVGHG«ŦQLWLRQ
SRVLWLYHbHVWUXUDOFHTXLQłHVWSDVXUEDLQ/DGLYLVLRQGHVVWDWLVWLTXHVGHOł218LGHQWLŦHOD
SRSXODWLRQUXUDOHFRPPHOHVROGHDSUªVVRXVWUDFWLRQGHODSRSXODWLRQXUEDLQH¢ODSRSXODWLRQWRWDOH
0DLVXQHGLIŦFXOW«VXSSO«PHQWDLUHHVWTXHOHVYLOOHVHOOHVQRQSOXVQłRQWSDV
GHG«ŦQLWLRQQRUPDOLV«H/DG«ŦQLWLRQGHV]RQHVXUEDLQHVYDULHODUJHPHQWGłXQSD\V
¢OłDXWUH/HSULQFLSDOFULWªUHXWLOLV«HVWODWDLOOHGHODSRSXODWLRQDYHFXQVHXLO
DXGHVVXVGXTXHOXQHDJJORP«UDWLRQGHYLHQWXUEDLQH0DLVGłDXWUHVFULWªUHVVRQWDXVVLSULVHQ
FRPSWHWHOVTXHODSDUWGHVP«QDJHVDJULFROHVOHVOLPLWHVDGPLQLVWUDWLYHV
RXOłH[LVWHQFHGHFHUWDLQVVHUYLFHVbXQHDSSURFKHPXOWLFULWªUHHVWSDUIRLVDGRSW«H

6RXUFHb Sara Mercandalli et Bruno Losch, « Une Afrique rurale en mouvement - Dynamiques et facteurs des migrations au sud
du Sahara » (FAO et CIRAD, 2018).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


118 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

des mêmes économies d’échelle que pour la production d’électricité locale pour répondre à la
construction d’un réseau électrique urbain. Ce qui demande en électricité en « circuit court ».
explique en partie l’absence de service en milieu
rural subsaharien et l’écart de tarif entre électri- Les options décentralisées sont nombreuses
cité urbaine et rurale (cf. chapitre 2.1.2.). (cf.  partie 3)  : petites centrales de production (par
De ce fait, l’ERD suppose de concevoir, grâce groupe électrogène ou énergie renouvelable) ali-
à une planification appropriée, des périmètres mentant un miniréseau local de distribution, sys-
d’électrification rurale relativement étendus, tèmes autonomes photovoltaïques, dispositifs
mêlant localités à fort potentiel et espaces à faible portables… Combinées sur un même périmètre
densité de population. Ce «  mix  » territorial est d’électrification, elles peuvent répondre à divers be-
une des dimensions essentielles à considérer soins d’électricité et apporter un service à presque
pour asseoir la viabilité économique d’un projet toutes les populations d’une communauté rurale.
de type miniréseau rural (sur cette solution, voir
chapitre 3.5.). Les concepteurs sont également L’ERD n’est pas antinomique
amenés à rechercher des mécanismes de sub- des solutions centralisées.
vention à l’investissement et à l’exploitation, car il Un réseau national et un réseau local ne reposent
est impensable de faire peser sur l’usager tout le pas sur des fondamentaux techniques différents
poids du financement d’une installation. (cf. encadré)  ; ils se distinguent par le dimen-
Si la distribution de service électrique individuel sionnement des équipements et les postulats
par le secteur marchand (lampes, kits domes- économiques, aboutissant à des logiques de tari-
tiques) ne rencontre pas exactement les mêmes fication très différentes (cf. chapitre 3.5.1.).
contraintes, elle ne peut cependant pas passer Néanmoins, ces deux approches sont complé-
outre la nécessité d’optimiser et mutualiser les mentaires pour penser l’électrification d’un terri-
coûts. Les arbitrages se font donc rarement en toire national (cf. chapitre 2.1.2.).
faveur des zones les plus enclavées, et ces solu- Les systèmes décentralisés ne sont d’ailleurs pas
tions restent réservées à une partie seulement de l’apanage des zones rurales : lampes et systèmes
la population (cf. chapitre 3.2.) individuels solaires se diffusent en complément
d’un réseau national défaillant, ainsi que dans
Qu’entend-on par électrification les foyers urbains ou périurbains n’ayant pas les
« décentralisée » ? moyens de se raccorder au réseau.
L’électrification rurale par extension progressive C’est d’ailleurs cette dimension «  hors ré-
d’un réseau centralisé, organisé en étoile aut- seau  », sans référence au type de territoire, que
our d’un ou plusieurs centres de production in- l’expression anglaise off-grid met à l’honneur.
terdépendants gérés par une même structure
(société nationale par exemple), n’est pas viable Le caractère décentralisé de la solution
économiquement (cf. chapitre 2.1.2.). Atteindre les se lit d’abord comme une différence
objectifs d’une électrification pour tous en 2030 de méthode.
nécessite donc de faire appel à des solutions tech- S’affranchissant des contraintes de cohérence
niques alternatives, dites « décentralisées », c’est- d’un réseau unique, les solutions décentrali-
à-dire, par opposition à l’organisation du réseau sées présentent des traits spécifiques  : elles
national, faisant appel à leurs propres moyens de sont potentiellement conçues «  sur mesure  »

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 119

8QV\VWªPHGł«OHFWULŦFDWLRQG«FHQWUDOLV«UHSRVHVXUOHVP¬PHVIRQGDPHQWDX[
TXłXQV\VWªPHFHQWUDOLV«

Tout système d’électrification, centralisé ou décentralisé, comporte quatre sous-ensembles :

1 LA PRODUCTION
2 L’USAGE

TXLFRPSUHQGXQRXSOXVLHXUV GHOł«OHFWULFLW«VHIDLW¢WUDYHUV
J«Q«UDWHXUVTXLFRQYHUWLVVHQW GHVU«FHSWHXUV W«O«SKRQH
HQ«OHFWULFLW«XQHRXGLII«UHQWHV W«O«YLVLRQODPSHRUGLQDWHXU
VRXUFHVGł«QHUJLH IXHOJD] PRWHXUSRPSHUDGLDWHXU
K\GUDXOLTXHVRODLUHŊ IRXUŊ

3 4 5
L’ÉQUIPEMENT LE SYSTÈME
/(6',6326,7,)6
DE TRANSPORT DE RÉGULATION
DE STOCKAGE
ET DE DISTRIBUTION

UHJURXSHOłHQVHPEOHGHV
VRQWQ«FHVVDLUHVSRXU DSSDUHLOVTXLFRQFRXUHQW
TXLUHOLHGDQVOłHVSDFH ¢SLORWHUFRQWU¶OHU
DFFRUGHUGDQVOHWHPSV
OHVJ«Q«UDWHXUVHWOHV LQWHUURPSUHRXU«WDEOLU
SURGXFWLRQHWXVDJHV
U«FHSWHXUV«OHFWULTXHV OHVŧX[«QHUJ«WLTXHV
GHOł«OHFWULFLW«
HW«OHFWULTXHV

&RXSXUH
«WDEOLVVHPHQW
U«WDEOLVVHPHQW
GHVŧX[«OHFWULTXHV
PHVXUHFRPSWDJH
SLORWDJHGHVŧX[
«OHFWULTXHV

6RXUFHb Christian de Gromard, référent énergie, AFD.

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120 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

pour un territoire ou une catégorie donnée Décentralisation du service électrique


d’usagers, et impliquent une plus grande diversité et décentralisation politique ne sont pas
d’intervenants. sans lien.
Là où l’extension de réseau procède plutôt d’une
La mise en œuvre d’un schéma d’électrification col- vision top-down, l’ERD parie sur une approche
lective (cf. chapitre 3.4.) repose ainsi sur un triptyque bottom-up. Dès lors, il apparaît logique que la mise
méthodologique qui fait également écho aux deux en œuvre des solutions décentralisées incite les
valeurs fondatrices de l’ERD que sont la centralité autorités nationales à décentraliser les services
de l’usage et l’objectif d’universalité du service : techniques en charge de l’électrification rurale et
çWPG CRRTQEJG RCT NC FGOCPFGa  c’est la con- à transférer aux collectivités territoriales de fortes
naissance des besoins des futurs usagers qui va compétences dans ce domaine.
déterminer les caractéristiques du service élec-
trique1 et la conception des infrastructures de A l’heure actuelle, cette décentralisation est en-
production ; core imparfaite. Le fait que les projets soient
çWPG RCTVKEKRCVKQP GĂGEVKXG FG NàGPUGODNG portés par des acteurs de proximité dotés des
des parties prenantes au processus d’élec- moyens appropriés permettrait pourtant de :
VTKăECVKQPa la pérennité du service dépend de la çFªRNQ[GT RNWU GąECEGOGPV EGVVG OªVJQFG
capacité de la société civile et de ses institutions URªEKăSWG ¡ Nà'4& en donnant des garanties
(collectivités nationales ou régionales, autorités supérieures en termes de connaissance de la
administratives, élus, populations locales, tissu demande, d’appropriation collective et de mon-
associatif et économique) à s’approprier et à tirer tée en compétences des exploitants locaux
profit de l’arrivée de l’électricité ; (cf. les préconisations émises au chapitre 4.1.) ;
çWPG GZRNQKVCVKQP RCT WP QRªTCVGWT ªNGEVTKSWG çTGPHQTEGT NC ETªCVKQP FàGORNQKU par
NQECN EQPVTCEVWGNNGOGPV ECFTªGa  préexistan- l’intégration de l’électrification dans la logique
te ou créée ad hoc, la structure exploitante doit d’aménagement des territoires.
devenir compétente dans tous les métiers d’un
opérateur électrique (technique, gestionnaire, L’ERD apparaît ainsi comme un ensemble de so-
commercial… ; cf. chapitre 3.5.). lutions développées pour répondre à la demande
On peut ajouter à cette vision méthodologique des communautés rurales non desservies ou mal
un SWCVTK©OGRKNKGTaNCOKUGGPÈWXTGFGUQNW- servies par les réseaux nationaux, dans un souci
VKQPU TGURGEVWGWUGU FG NàGPXKTQPPGOGPV qui d’apporter un service électrique le plus large
se traduit par l’utilisation des gisements d’énergie possible au plus grand nombre de personnes
disponibles localement, dès que les équipements possible. De ce fait, l’ERD se définit aussi par ré-
l’ont permis. Le recours aux énergies renouve- férence au réseau national, dont elle est devenue
lables, notamment au solaire, fournit la réponse un complément indispensable. En quelque sorte,
la plus pertinente à la logique de production systèmes centralisés et systèmes décentralisés
d’électricité en circuit court. sont les deux faces d’une même pièce. }

1. L’hypothèse généralement vérifiée est que le potentiel des ENR est


supérieur à la demande.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 121

mb/DSOXSDUWGHV«WXGHVSODQLŦDQWOł«OHFWULŦFDWLRQGHOD*XLQ«HDFFRUGHQWODSULRULW«¢XQH
«OHFWULŦFDWLRQSDUOHU«VHDXFHQWUDOLV«FRPPHOHIRQWOH3URJUDPPHQDWLRQDOGłDP«OLRUDWLRQ
GHOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«HQ*XLQ«HHWVRQ3URVSHFWXVGłLQYHVWLVVHPHQW«ODERU«VHQ

$PRQDYLVOHVPLQLU«VHDX[HWVROXWLRQVLQGLYLGXHOOHVGHYUDLHQW¬WUHSULRULV«VDŦQGHVHUYLU
«TXLWDEOHPHQWODSRSXODWLRQUXUDOHHQDWWHQGDQWOłDUULY«HGXU«VHDXFHQWUDO'DQVFHFDV
OHVPLQLU«VHDX[GRLYHQWVLPSOHPHQWLQW«JUHUGHVVS«FLŦFLW«VWHFKQLTXHVFRPSDWLEOHV
DYHFOHU«VHDXSXEOLFHQYXHGHOHXUUDFFRUGHPHQWIXWXU3DUDLOOHXUVLOIDXWDXVVLSU«YRLU
GHVP«FDQLVPHVGHFRPSHQVDWLRQDŦQGłDVVXUHU¢OłRS«UDWHXUGXPLQLU«VHDXGHU«FXS«UHU
HQWLªUHPHQWVRQLQYHVWLVVHPHQWb}

Mamadou Saidou Diallo, ingénieur électro-énergéticien de formation, travaille depuis quinze ans
dans le domaine du développement de l’électrification rurale en Guinée ;
il est directeur général adjoint de l’Agence guinéenne d’électrification rurale (AGER). Retrouvez
l’intégralité de l’interview sur la page web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

0RGªOHVGł«OHFWULŦFDWLRQHWXVDJHVDVVRFL«V

1. Kits solaires

1.1. Lampes solaires 1.2. SHS 2. Miniréseaux 3. Extension du réseau national

Efficacité
énergétique Eclairage, recharge de téléphone, radio, TV

Efficacité énergétique Ventilation, réfrigération BtoC

Efficacité
énergétique
Climatisation

Agriculture (irrigation)
BtoB
Efficacité
énergétique
Industries

6RXUFHb AIE, « Energy Access Outlook 2017, From Poverty to Prosperity » (Paris, 2017).

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122 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.1.2.
Le recours aux solutions décentralisées
par énergies renouvelables est la seule alternative
crédible à l’extension de réseau pour électrifier
les zones rurales subsahariennes.

Accéder à un service électrique est devenu base, qui nécessite de lourdes dépenses maté-
un enjeu politique national et local majeur, rielles et organisationnelles (cf. chapitre 2.3.).
car les communautés rurales n’acceptent
plus l’absence de l’électricité et réclament L’extension des réseaux
l’égalité de traitement entre villes et cam- est une option trop coûteuse
pagnes. Elles souhaitent légitimement pouvoir pour être rapidement généralisée.
améliorer leurs conditions de vie, s’informer et Apporter l’électricité en zone rurale se heurte à
communiquer facilement et développer des plusieurs difficultés qui rendent l’extension de
activités pour accroître leurs revenus. réseau très difficile à amortir, limitent la réalisa-
tion des plans d’électrification rurale d’envergure
Pour répondre à cette demande sociale, et expliquent in fine les faibles taux d’accès à
l’extension des réseaux urbains n’est pas une op- l’électricité en milieu rural :
tion de court/moyen terme. Les investissements çNC FKURGTUKQP KORQTVCPVG FGU NQECNKVªU UWT WP
requis (cf. encadré) sont au-delà des capacités fi- VGTTKVQKTGa les longues distances accroissent le
nancières des sociétés nationales d’électricité, qui coût du transport des lignes moyenne tension
sont souvent déjà exsangues (cf.  chapitre 1.1.2.). de 30 000 €/km ;
Quant aux pouvoirs publics de la région, pour la çNC HCKDNG FGPUKVª FG NàJCDKVCV CW UGKP FàWPG NQ-
plupart d’entre eux, ils ne disposent pas du sys- ECNKVªa tirer une ligne basse tension suppose un
tème fiscal permettant de financer ce service de investissement de l’ordre de 15 000 €/km ;

Montant d’investissement requis pour


«OHFWULŦHUOł$IULTXHVXEVDKDULHQQHUXUDOH

6HORQOł,($SRXUDVVXUHUXQDFFªV¢Oł«QHUJLHXQLYHUVHOHQ$IULTXHVXEVDKDULHQQH WRXWHV]RQHV
FRQIRQGXHVXUEDLQHVHWUXUDOHV GłLFLPLOOLDUGVGHGROODUVGłLQYHVWLVVHPHQWVDGGLWLRQQHOV
VHUDLHQWQ«FHVVDLUHVVXUODS«ULRGHVRLWHQYLURQPLOOLDUGVGHGROODUVVXSSO«PHQWDLUHV
SDUDQ

6RXUFHb AIE, « Energy Access Outlook 2017, From Poverty to Prosperity » (Paris, 2017).

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 123

Coût du transport d’électricité en fonction du nombre de foyers raccordés


SDUNLORPªWUHHWGHOHXUFRQVRPPDWLRQDQQXHOOH

€/kWh

0
km

km

km

km

km

km

km

km

km

km

km

km
/

/
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fo

fo

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fo
4

12

16

20

24

28

32

36

40

44

48

50 kWh/an 150 kWh/an 500 kWh/an

100 kWh/an 300 kWh/an 1 000 kWh/an

6RXUFHb Christian de Gromard, référent énergie, AFD.

çNGU HCKDNGU EQPUQOOCVKQPU ªNGEVTKSWGU des Il faut noter que la dynamique démographique ob-
abonnés ruraux, de l’ordre de 80 à 100 kWh/an et servée en Afrique subsaharienne pourrait avoir
par foyer, en lien avec la faiblesse de leurs revenus ; un impact sur certains de ces facteurs et modi-
çNGU KPEGTVKVWFGU UWT WPG ªXQNWVKQP HCXQTCDNG fier la donne pour l’analyse comparative entre ex-
FGUEQPUQOOCVKQPUFàªNGEVTKEKVªa les activités tension de réseau et mise en place de solutions
sont globalement stables sur les territoires ru- décentralisées.
raux en raison de leur faible attractivité.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


124 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Du côté de la société d’électricité, systématique dans les localités rurales, loin s’en
le surinvestissement par localité faut. Le développement d’activités lié à l’arrivée de
et par abonné rural limite l’électricité requiert donc, pour créer une dynamique
le nombre de zones électrifiées. locale favorable, des actions soutenues de sensibili-
L’extension de réseau vers une zone rurale sup- sation, d’incitation et d’accompagnement… ce qui a
pose l’investissement dans des équipements sup- bien évidemment un coût. Par ailleurs, ces actions
plémentaires pour augmenter les capacités de débordent le cadre naturel d’intervention des socié-
production, assurer le transport de l’électricité et le tés nationales d’électricité, qui ne recherchent pas
raccordement des usagers. Il faut également antici- une approche multisectorielle de l’électrification ni
per un rendement entamé par les pertes techniques n’impliquent les collectivités locales, ou les services
(dans les transformateurs et les câbles) et les pertes administratifs décentralisés de ministères.
commerciales (les impayés et branchements pi-
rates peuvent atteindre jusqu’à 30  %1). Ces deux Du côté des abonnés, coûts
types de pertes, bien connus des sociétés nation- de raccordement et tarifs sociaux
ales d’électricité (cf. chapitre 1.2), affectent encore pénalisent directement ou
davantage les installations rurales que les urbaines. indirectement l’accès au service
La présence d’activités économiques forte- du plus grand nombre.
ment consommatrices d’électricité n’est pas A la charge de l’usager, les coûts de raccordement
sont inaccessibles aux plus démunis, qui habitent
le plus souvent en périphérie des localités. C’est
un des obstacles majeurs à l’augmentation du taux
L’exemple du de desserte par réseau national. Les données dis-
*KDQDbODUªJOH ponibles indiquent que, dès que la distance entre
des 20 km le réseau et le bâtiment à électrifier dépasse 200
mètres (ce qui est fréquent dans les périphéries
$X*KDQDOHVmbDJHQFHVb} FRPSDJQLHV des villes africaines), les conditions financières de
SXEOLTXHV GHGLVWULEXWLRQGł«OHFWULFLW« raccordement sont rédhibitoires pour la majorité
VHFRQFHQWUHQWSULQFLSDOHPHQWVXU des habitants.
OłDP«OLRUDWLRQGHOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW« En parallèle, ceux qui ont la capacité de se rac-
GDQVOHV]RQHVXUEDLQHVHWS«ULXUEDLQHV corder au réseau, quelle que soit leur localisation,
G«M¢FRXYHUWHVSDUOHU«VHDXDLQVLTXH peuvent bénéficier de tarifs sociaux. Favorables
GDQVOHV]RQHVUXUDOHVVLWX«HV¢XQH aux petits consommateurs, ces tarifs dépassent
GLVWDQFHUDLVRQQDEOH LQI«ULHXUH¢NP  rarement les 100 FCFA/kWh (0,15 cts €). Un état
GXU«VHDXH[LVWDQW de fait qui impacte l’équilibre financier de la socié-
té d’électricité et ne l’incite pas à multiplier les ex-
6RXUFHb Francis Kemausuor, Edwin Adkins, Isaac
Adu-Poku, Abeeku Brew-Hammond et Vijay Modi.
tensions de réseau. Paradoxalement, l’existence
« Electrification planning using Network Planner de ces tarifs sociaux pénalise ainsi indirectement
tool: The case of Ghana », Energy for Sustainable
Development, no 19 (2014). l’accès à l’électricité des populations rurales.

1. Christine Heuraux, « L’électricité en Afrique ou le continent des paradoxes »


(Paris : Institut français des relations internationales, 2011).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 125

Taux de desserte vs. taux de connexion

/Htaux de desserteLQGLTXHOHUDWLRGHVSRSXODWLRQVGHVYLOODJHVFRQQHFW«VVXUODSRSXODWLRQ
WRWDOHGHOD]RQH RXOHQRPEUHGHYLOODJHV«OHFWULŦ«VVXUOHQRPEUHWRWDOGHYLOODJHV 

,OQHIDXWSDVOHFRQIRQGUHDYHFOHtaux de connexion UDWLRGHODSRSXODWLRQHIIHFWLYHPHQW


FRQQHFW«HVXUODSRSXODWLRQWRWDOH /HWDX[GHGHVVHUWHFDUDFW«ULVHOł«WHQGXHGHODFRXYHUWXUH
GXVHUYLFHDORUVTXHOHWDX[GHFRQQH[LRQLQGLTXHOł«WHQGXHHIIHFWLYHGXVHUYLFH

([HPSOHbYLOODJHVIR\HUVYLOODJHSHUVRQQHVIR\HUVRLWXQWRWDOGHbbKDELWDQWV
6LYLOODJHVVRQW«OHFWULŦ«VDORUVOHWDX[GHGHVVHUWHHVWGHb
6LOHWDX[PR\HQGHFRQQH[LRQSDUYLOODJHHVWGHb IR\HUVUDFFRUG«V OHWDX[
GHFRQQH[LRQVXUOD]RQHHVWGHb[b b IR\HUVRXbSHUVRQQHV 

&RPSRVLWLRQGHVFR½WVmbFDFK«Vb}HQ
$IULTXHVXEVDKDULHQQH KRUV$IULTXHGX6XG

Pertes
Sous- d’encaissement
/DVRXVWDULŦFDWLRQHVWOł«O«PHQW
tarification 20 %
OHSOXVLPSRUWDQWGHVG«ŦFLWVTXDVL
40 %
EXGJ«WDLUHVGHVVHUYLFHVSXEOLFV
GHOł$IULTXHVXEVDKDULHQQHVXLYLHSDUOHV
SHUWHVHQPDWLªUHGHWUDQVPLVVLRQHWGH
GLVWULEXWLRQ

6RXUFHb Banque mondiale, « Africa’s Pulse : une analyse


des enjeux façonnant l’avenir économique de l’Afrique »
(Washington, D.C, 2018).

Pertes
transport et
Sureffectif
distribution
10 %
30 %

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


126 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

/ł$IULTXHWHUUDLQWUªVG\QDPLTXHSRXU
OHVVROXWLRQVGł«OHFWULŦFDWLRQG«FHQWUDOLV«HV
par énergie renouvelable, notamment solaire.

6XUOHFRQWLQHQWODSRSXODWLRQWRXFK«HSDUOHVVROXWLRQVG«FHQWUDOLV«HVHVWSDVV«H
GHPLOOLRQVHQ¢PLOOLRQVHQ&HVRQWHVVHQWLHOOHPHQWOHVODPSHVVRODLUHV
HWQRWDPPHQWFHOOHVGLIIXV«HVPDVVLYHPHQWHQ$IULTXHGHOł(VW TXLWLUHQWFHWWHFURLVVDQFHb
HQHOOHV«TXLSHQWSUªVGHPLOOLRQVGHSHUVRQQHVWDQGLVTXHPLOOLRQVGLVSRVHQW
GłXQ6RODU+RPH6\VWHPHWTXHSOXVGłPLOOLRQVRQWDOLPHQW«HVSDUPLQLU«VHDXVRODLUH

/DFDSDFLW«FXPXO«HGHVVROXWLRQVG«FHQWUDOLV«HVHVWSDVV«HGH0:¢SUªVGH
*:HQWUHHWGRQWODWHFKQRORJLHVRODLUHUHSU«VHQWHSOXVGHVGHX[WLHUV 0: 
/DFDSDFLW«GHVPLQLU«VHDX[K\GUDXOLTXHVHVWSDVV«HGH0:HQ¢0:HQ
PDLVHOOHSªVHGHPRLQVHQPRLQVORXUGGDQVOHPL[«QHUJ«WLTXHbHOOHUHSU«VHQWHPRLQV
GHbGHODFDSDFLW«WRWDOHGHVVROXWLRQVG«FHQWUDOLV«HVSDU«QHUJLHUHQRXYHODEOHHQ
FRQWUHbHQ

6RXUFHb IRENA, « Off-Grid renewable energy solutions, Global and Regional Status and Trends » (Abu Dhabi, 2018)

Pour électrifier les communautés rurales, In fine, ces initiatives n’ont pas été généralisées à
l’extension du réseau national est donc, en pra- des communes de moindre importance, compte
tique, envisageable dans un nombre limité de si- tenu du coût (notamment d’approvisionnement
tuations  ; l’essentiel de la réponse à la demande en carburant) et des contraintes d’exploitation
d’électrification de ces communautés est ailleurs, (cf. chapitre 3.5.).
dans le déploiement des solutions décentralisées. C’est l’apparition de solutions décentralisées par
énergies renouvelables qui a permis :
Les solutions décentralisées par çFàGPXKUCIGTWPGªNGEVTKăECVKQPINQDCNGFGURC[U
énergies renouvelables permettent d’Afrique subsaharienne et de tester cette hy-
d’envisager une réponse adaptée pothèse dès les années 1970 ;
à la demande rurale. çRWKU SWCTCPVG CPU CRT©U NQTUSWG EGU UQNWVKQPU
Dans l’impossibilité de réaliser l’électrification ru- décentralisées sont devenues compétitives, de
rale par extension du réseau national (pour des sélectionner l’option technique la plus pertinente
raisons économiques), les sociétés d’électricité en fonction du contexte local.
ont tenté de décentraliser leur production  : pre- Les pays bénéficiant d’importants gisements
nant en charge les investissements et une partie d’énergies renouvelables (cf. chapitre 1.1.2.) sont
des coûts d’exploitation, elles ont électrifié par autant de terrains favorables à la mise en œuvre
miniréseau diesel les centres urbains secon- de solutions solaires (le plus souvent) ou hydrau-
daires trop éloignés du réseau pour lui être reliés. liques (quand le contexte s’y prête), qui évitent le

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 127

recours aux groupes thermiques, incompatible accessible : une lampe coûte environ 10 €, contre
avec la lutte contre le changement climatique1. 200 € à 500 € pour un système solaire individuel.

La diffusion de ces solutions Or, la diffusion de lampes solaires ne permettra


décentralisées par énergie pas d’atteindre l’objectif d’universalité des usages
renouvelable est un succès que vise l’ERD. C’est donc moins l’électrification
de la préélectrification, que la «  préélectrification  » qui a progressé
plus que de l’électrification. rapidement.
Entre 2011 et 2016, le nombre d’Africains ayant
accès à l’électricité par solutions décentralisées Pour réaliser une électrification couvrant da-
de source renouvelable a été multiplié par vingt- vantage d’usages, le miniréseau solaire apparaît
cinq  ; les capacités de production ont quintuplé comme la solution la plus intéressante en relais
depuis 2008, grâce notamment au déploiement de l’extension de réseau (cf. encadré page suiv-
de la technologie solaire (cf. encadré). ante) mais le financement de ce type d’installation
Cette progression repose sur la diffusion rapide n’est pas évident (cf. chapitre 2.3.2.). Par ailleurs,
des solutions individuelles (et non des solutions la pérennité d’un miniréseau suppose la prise en
collectives de type miniréseau), favorisée par la compte de nombreux facteurs (cf. chapitres 3.5.3).
baisse très significative des coûts de la technol-
ogie photovoltaïque (cf. chapitre 2.3.1.). Elle est
1. Le recours aux groupes électrogènes doit être strictement réservé à
RQTVªGGUUGPVKGNNGOGPVRCTNCFKĂWUKQPOCUUKXG l’hybridation des solutions ENR, pour limiter le recours aux batteries (cf.
FG NCORGU UQNCKTGU RQTVCDNGU solution la plus chapitre 3.1.).
© José Nicolas soutenu par Synergie solaire

Lampe solaire portable.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


128 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Le miniréseau solaire comme solution


intermédiaire utile

,OVHPEOHELHQSOXVVWUDW«JLTXHHWDYDQWDJHX[GHFRPPHQFHUSDU«WHQGUHOHU«VHDXYHUVOHV]RQHV
¢KDXWSRWHQWLHOGł«OHFWULŦFDWLRQHWGHG«YHORSSHPHQWGłDFWLYLW«VSURGXFWLYHVWRXWHQPDLQWHQDQW
DXG«SDUWODIRXUQLWXUHGłDOWHUQDWLYHV¢SOXVSHWLWH«FKHOOHGDQVGłDXWUHV]RQHV

/HVPLQLU«VHDX[XWLOLVDQWOł«QHUJLHVRODLUHRQW«JDOHPHQWE«Q«ŦFL«GHVSURJUªVUDSLGHVHW
FRQVLG«UDEOHVGHVWHFKQRORJLHVGł«QHUJLHVRODLUH3DUFRQV«TXHQWLOVFRQVWLWXHQWXQHVROXWLRQ
LQWHUP«GLDLUHSRWHQWLHOOHPHQWWUªVLQW«UHVVDQWHSRXUUHQIRUFHUODGLVSRQLELOLW«GHOł«OHFWULFLW«GDQV
OHV]RQHVR»OłH[WHQVLRQGXU«VHDXHVWRQ«UHXVHRXQHSHXW¬WUHPHQ«H¢ELHQGDQVXQDYHQLUSURFKH

&HSHQGDQWLOQłH[LVWHMXVTXł¢SU«VHQWTXHSHXGłH[HPSOHVGłLQYHVWLVVHPHQWVFRQVDFU«V¢ODPLVHHQ
SODFHGHPLQLU«VHDX[HQ$IULTXHVXEVDKDULHQQH/łDFFHVVLELOLW«ŦQDQFLªUHSHXWUHVWHUXQG«ŦSRXU
OłH[SDQVLRQGHVPLQLU«VHDX[TXLQ«FHVVLWHQWJ«Q«UDOHPHQWXQmbDFKHWHXUGHU«I«UHQFHb}FRPPH
XQXWLOLVDWHXUFRPPHUFLDORXXQHSHWLWHHQWUHSULVHLQGXVWULHOOHHQSOXVGHVFOLHQWVU«VLGHQWLHOVSRXU
¬WUHŦQDQFLªUHPHQWYLDEOHV8QJUDQGG«ŦSRXUVXVFLWHUOHVLQYHVWLVVHPHQWVGXVHFWHXUSULY«GDQVOHV
PLQLU«VHDX[HVWODFRQŦDQFH¢Oł«JDUGGHODWDULŦFDWLRQHWGHVREOLJDWLRQVGłDFKDWGHVFOLHQWVDLQVL
TXHGXVRUWGHVDFWLIVGHVPLQLU«VHDX[ORUVTXHOHU«VHDXFRPPHQFH¢S«Q«WUHUGDQVVRQWHUULWRLUH
GHGHVVHUWH,OSRXUUDLW¬WUHWUªVXWLOHGłHIIHFWXHUGHQRXYHDX[LQYHVWLVVHPHQWVGDQVXQFDGUH
H[S«ULPHQWDOSRXUDSSURIRQGLUOHVFRQQDLVVDQFHVUHODWLYHV¢Oł«FRQRPLHHW¢ODJRXYHUQDQFHGHV
PLQLU«VHDX[HQ$IULTXHVXEVDKDULHQQH

6RXUFHb Banque mondiale, « Africa’s Pulse : une analyse des enjeux façonnant l’avenir économique de l’Afrique » (Washington,
D.C, 2018).

Plusieurs critères plaident en faveur Néanmoins, les solutions décentralisées par


de l’électrification hors réseau par énergie renouvelable présentent plusieurs avan-
énergies renouvelables malgré un tarif tages comparatifs par rapport à l’extension de
élevé pour l’usager réseau :
Le prix payé par l’usager d’une solution décentralisée çQRVKOKUCVKQPFGNàKPXGUVKUUGOGPVa pour un bud-
est aujourd’hui supérieur à celui payé par un usager get donné, on peut électrifier un certain nombre
urbain, car il reflète fidèlement l’ensemble des coûts de localités et d’abonnés et ajuster le service en
induits par la fourniture du bien ou du service élec- fonction des capacités contributives réelles des
trique. Ainsi, pour un miniréseau local, qui se trouve usagers potentiels ;
de facto hors périmètre de la société d’électricité et çQĂTG CLWUVªG ¡ NC FGOCPFGa  la puissance et
du système de péréquation nationale, la grille tarifaire l’énergie disponibles sont définies en fonc-
est spécifique et n’intègre pas les subventions dont tion des besoins des différents usages (do-
bénéficie l’usager urbain raccordé au réseau national. mestiques, productifs, communautaires) dans

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 129

chaque localité et de leur évolution probable ;


çXCTKªVªFGUUQNWVKQPUa de la lampe portable au Choisir une
miniréseau local, la palette est large (cf. par- RSWLRQWHFKQLTXHb
tie 3) et permet d’ajuster le coût de l’accès et de l’approche
l’usage de l’électricité à la capacité financière de par les coûts
chaque usager ;
çTCRKFKVªFàKPVGTXGPVKQPamême dans le cas d’un
miniréseau, les composants d’une unité de pro- 'HPDQLªUHJ«Q«UDOHOHFKRL[GHOD
duction décentralisée sont modulaires et sim- WHFKQRORJLHGHOł«OHFWULFLW«GDQVOHFRQWH[WH
ples à installer ; GHOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHHVWLQŧXHQF«SDU
çOC¯VTKUG FG NàªPGTIKGa  la solution technique in- GLYHUVDFWHXUVHWIDFWHXUVĿbOHVSROLWLTXHVHQ
tègre des récepteurs performants (LED, TV YLJXHXUHWOHVDJHQFHVJRXYHUQHPHQWDOHV
très basse consommation, réfrigérateur super OHVGLVWULEXWHXUVOHVVRFL«W«VGHVHUYLFHV
isolé…). OHVLQVWLWXWLRQVGHŦQDQFHPHQWHWOHV
FDUDFW«ULVWLTXHVVRFLR«FRQRPLTXHVGHV
Entre extension de réseau et solution P«QDJHV
décentralisée, l’arbitrage se fait par
les coûts, ce qui place l’usage de %LHQTXHOHVRSWLRQVDXWRQRPHVHWFHOOHV
l’électricité au centre FRQQHFW«HVDXU«VHDXSU«VHQWHQWFKDFXQH
de l’analyse. GHVDYDQWDJHVHWGHVLQFRQY«QLHQWVle
Si on fait abstraction des considérations poli- principe de base consiste à adopter,
tiques et des contraintes de financement qui dans la mesure du possible, les options
peuvent venir paramétrer la décision, le choix technologiques les moins coûteuses
technique rationnel entre une solution conven- HWOHVPRLQVH[LJHDQWHVHQPDWLªUHGH
tionnelle d’extension de réseau et des solutions maintenance. /DIDLVDELOLW«WHFKQLTXHSHXW
décentralisées faisant appel aux gisements lo- G«SHQGUHGHSOXVLHXUVIDFWHXUVWHOVTXHOHV
caux d’énergie doit procéder d’une analyse com- FDUDFW«ULVWLTXHVSK\VLTXHVGXWHUUDLQOD
parative des coûts d’installation, de distribution et GLVWDQFHSDUUDSSRUWDXU«VHDXH[LVWDQWOD
d’exploitation (cf. encadré). QDWXUHGHODGHPDQGHORFDOHGł«OHFWULFLW«
Ces coûts dépendent notamment de : HWODGLVSRQLELOLW«GHVUHVVRXUFHVVXUOHVLWH
çla distance entre la zone à électrifier et le réseau ;
6RXUFHb Francis Kemausuor, Edwin Adkins, Isaac
çNàªPGTIKG ªNGEVTKSWG que la population de cha- Adu-Poku, Abeeku Brew-Hammond et Vijay Modi.
cune des localités sera amenée à consommer. « Electrification planning using Network Planner
tool: The case of Ghana », Energy for Sustainable
Development, no 19 (2014).
Ce choix technique rationnel ne peut reposer
uniquement sur une modélisation abstraite et bu-
reaucratique. Il nécessite une approche qualitative
fine, une observation patiente du terrain qui permet
de déterminer la valeur des différents usages de
l’électricité, qui doit guider la démarche : elle seule
permet de déterminer les applications prioritaires

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


130 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

/HFRQFHSWGHSU««OHFWULŦFDWLRQ
et l’initiative Lighting Africa

$XGHO¢GHVG«PDUFKHVSDUWLFXOLªUHVGłDQDO\VHHWGłRSWLPLVDWLRQGHODGHPDQGHPLVHVHQāXYUH
GDQVOHFDGUHGHSURMHWVVS«FLŦTXHVQRWDPPHQWVRODLUHVOł$)0( DXMRXUGłKXL$'(0( DODQF«HQ
OHFRQFHSWGHSU««OHFWULŦFDWLRQSURSRVDQWXQHDXWUHID©RQGł«OHFWULŦHUGHV]RQHVUXUDOHVTXH
FHOOHFRQYHQWLRQQHOOHPHQWPLVHHQāXYUHSDUH[WHQVLRQGHVU«VHDX[XUEDLQV

7HOVVRQWOHVSULQFLSHV¢ODEDVHTXHFHFRQFHSWVłDWWDFKH¢FRPELQHUb
ʼnOłHIŦFDFLW««QHUJ«WLTXHGHV«TXLSHPHQWVGłXVDJHGHOł«OHFWULFLW«DYHFXQDFFHQWSDUWLFXOLHUPLV
VXUOł«FODLUDJH OHSULQFLSDOSRVWHGHFRQVRPPDWLRQGDQVGHQRPEUHXVHV]RQHVUXUDOHV HWOH
G«YHORSSHPHQWGHODPSHVSRUWDEOHVUHFKDUJHDEOHVSHUIRUPDQWHVb
ʼnGHX[PRGHVGHGLVWULEXWLRQGHOł«OHFWULFLW«bmbOLQ«LTXHb} DYHFPLFURU«VHDXORFDO 
HWmbYROWD±TXHb} DYHFWUDQVSRUWGłDFFXPXODWHXUVRXNLWVVRODLUHVLQGLYLGXDOLV«V b
ʼnGLII«UHQWVW\SHVGHVRXUFHVGHSURGXFWLRQGHSHWLWHVSXLVVDQFHVV«OHFWLRQQ«VVHORQ
OHVVLWHVHQSULYLO«JLDQWOHV«QHUJLHVUHQRXYHODEOHV VRODLUHHWSHWLWHK\GURHQSDUWLFXOLHU 

/HFRQFHSWGHSU««OHFWULŦFDWLRQDGRQQ«OLHX¢GHX[LPSRUWDQWVSURJUDPPHVGł(5'
DX0DURF,OD«W«UHSULVVRXVGłDXWUHVDSSHOODWLRQVQRWDPPHQWFHOOHVGH66'VRFL«W«VGHVHUYLFHV
G«FHQWUDOLV«HVSURPXHVSDU(')HWOł$'(0(HQ$IULTXHVXEVDKDULHQQH
/łH[SUHVVLRQ(5'SOXVGXUDEOHOłDPDLQWHQDQWUHPSODF«

/HYROHWmbODPSHVSRUWDEOHVSHUIRUPDQWHVb}GHODSU««OHFWULŦFDWLRQTXLH[SORLWDLWOHVWHFKQRORJLHV
GHVDQQ«HVD«W«UHSULVYLQJWDQVDSUªVSDUOD%DQTXHPRQGLDOHGDQVOłLQLWLDWLYH/LJKWLQJ$IULFD
HQXWLOLVDQWOHVWHFKQRORJLHVTXLVHVRQWGLIIXV«HVFHVTXLQ]HGHUQLªUHVDQQ«HV /('SRXUOł«FODLUDJH
HWSULQFLSDOHPHQWOLWKLXPLRQSRXUOHVDFFXV &HVSURJUªVWHFKQRORJLTXHVVRXWHQXVSDUFHWWH
LQLWLDWLYHRQWFRQWULEX«¢VHQVLEOHPHQWDP«OLRUHUODTXDOLW«HWODVRXSOHVVHGłXWLOLVDWLRQGHOł«FODLUDJH
«OHFWULTXHKRUVU«VHDX

6RXUFHb https://www.lightingafrica.org.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 131

de l’électricité (actuelles et futures) sur un territoire


considéré et de s’assurer de la volonté de payer
des usagers potentiels (cf. chapitre 2.4.1.).
L’essor de l’électrification hors réseau par énergies
renouvelables a ainsi été l’occasion de revisiter les
questions relatives aux usages de l’électricité. Là
où l’extension du réseau préempte généralement
des niveaux de consommation similaires à ceux
du milieu urbain (ce que démentent les constats de
terrain), l’ERD part des besoins pour définir les so-
lutions, collectives ou individuelles, capables de les
satisfaire.
L’approche bottom-up que privilégie l’ERD s’est
progressivement définie puis consolidée au fil
des expériences. C’est cette «  histoire  » dont les
prochains paragraphes font le récit, en mettant
l’accent sur les différentes phases et les facteurs
d’évolution qui l’ont scandée. }
© Kellie Jo Brown/Lighting Africa/2012.

Quelques produits testés par l’initiative Lighting Global

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


132 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.2.
Les solutions d’électrification
hors réseau reposent sur
50 années d’histoire.
Les développements qui suivent proposent plusieurs immersions
dans le passé de nature à éclairer le présent.

Tout d’abord, deux détours tant géographiques qu’historiques


par la France et les Etats-Unis donnent des clés utiles pour
appréhender la logique de fourniture d’électricité par un réseau
local. En effet, dans ces deux pays, l’électrification rurale s’est faite
de manière fondamentalement décentralisée, par impulsion du
niveau local, avec le soutien de l’administration centrale (2.2.1.).

Ensuite, il est utile de faire une incursion chronologique en


remontant depuis les années 1970, pour comprendre dans quels
contextes successifs et selon quelles logiques s’est construite la
pratique de l’ERD dans les pays du Sud (2.2.2.), avant d’entrer dans
la période de rupture que le domaine connaît aujourd’hui et
à laquelle cet ouvrage consacre des développements détaillés
(cf. chapitre 2.3.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 133

© Fondation Energies pour le Monde

Le Programme Pilote d’Electrification Rurale au Maroc, pionnier de l’ERD.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


134 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.2.1.
Historiquement, l’accès à l’électricité s’est fait
par processus décentralisé dans les zones
rurales des pays industrialisés.

L’analyse comparative avec l’histoire de En France, l’initiative locale


l’électrification des pays industrialisés donne a été le déclencheur et le moteur
des repères utiles pour comprendre ce qui principal du développement
se joue dans l’électrification rurale contem- de l’électrification.
poraine en Afrique. Nombre d’Européens de Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, et comme
plus de 75 ans sont nés dans des campagnes dans la plupart des pays industrialisés, l’accès à
qui, comme le milieu rural subsaharien actuel, l’électricité s’est d’abord développé de façon dé-
étaient peu ou pas pourvues en infrastructures centralisée, sous l’impulsion d’un ou plusieurs
(routes, canaux, chemins de fer, adduc- acteurs  : une collectivité territoriale, une coo-
tions d’eau, télégraphie, etc.), dans des mai- pérative, un groupe d’usagers, une entreprise
sons sans électricité ni eau courante, où les d’électrification, une industrie autoproductrice
lampes à paraffine et les bougies étaient les d’électricité… L’interconnexion des réseaux élec-
principales sources d’éclairage domestique. triques locaux décentralisés n’est intervenue
L’électrification de la France et des Etats-Unis, que plus tard et progressivement, en fonction de
tout juste achevée dans les années 1970, a l’évolution du maillage territorial. L’Etat y a toute-
démarré et s’est développée à une époque où fois toujours joué un rôle indispensable, d’abord
ces deux pays étaient beaucoup plus ruraux et en réglementant le secteur, puis en facilitant
agricoles qu’aujourd’hui, à la bascule du XIXe et l’accès aux financements.
du XXe siècle.

Pourquoi évoquer l’électrification rurale fran-


çaise et américaine ? Parce que ces deux cas
témoignent du rôle premier que joue l’impulsion
locale (collectivités locales ou coopératives rura-
les) dans l’accès à l’électricité d’un territoire. Ces
deux exemples montrent que l’électrification ru-
rale est un processus décentralisé et qu’il y a une
logique à penser l’électrification rurale par l’essor
des solutions décentralisées en Afrique subsaha-
rienne comme ailleurs.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 135

7DX[Gł«OHFWULŦFDWLRQGHVFDPSDJQHVIUDQ©DLVHVSDUG«SDUWHPHQWVHQ

ōb

(QWUHbHWb

(QWUHbHWb

(QWUHbHWb

ŌbbGHODSRSXODWLRQ

6RXUFHb Arnaud Berthonnet, « L’électrification rurale, ou le développement de la “fée électricité” au coeur des campagnes françaises
dans le premier XXe siècle », Histoire & Sociétés Rurales 19, no 1 (2003).

L’électrification du territoire français 30 000  communes) étaient déjà électrifiées par


s’est opérée via des concessions des entreprises ou des régies d’électricité dans
communales accordées le cadre de concessions communales (voir carte).
à des entreprises privées. C’est ainsi que s’est effectuée, par exemple,
L’électrification de la France s’est effectuée dans l’électrification du département du Lot, peut-être
sa grande majorité avant la nationalisation du un peu plus pauvre que la moyenne des départe-
secteur électrique, en 1946. Au moment de la ments français mais globalement représentatif de
création de la société publique Electricité de la France rurale (voir encadré).
France (EDF), 90 % des localités du pays (plus de

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136 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

/HG«SDUWHPHQWGX/RWbXQH[HPSOH
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«H

/ł«OHFWULŦFDWLRQGHFHG«SDUWHPHQWUXUDODFRQQXGHX[JUDQGHVSKDVHVDYDQWODQDWLRQDOLVDWLRQ
GXVHFWHXUGHOł«OHFWULFLW«HQ
3+$6(bODUHQFRQWUHHQWUHODGHPDQGHGHVKDELWDQWVmbG«FLG«V¢Vł«FODLUHUGDQVOHVSOXVEUHIV
G«ODLVb}portée par leurs conseils municipaux, et les propositions faites par des entreprises
Gł«OHFWULŦFDWLRQOHSOXVVRXYHQWGHSHWLWHWDLOOH
$SUªVHQTX¬WHSXEOLTXHHWFRQWU¶OHGHVVHUYLFHVWHFKQLTXHVOHVFRPPXQHVDFFRUGHQWGHV
FRQFHVVLRQVH[FOXVLYHV¢FHVHQWUHSULVHVSRXUXQHGXU«HGHTXDUDQWHDQVDSSURXY«HVSDU
OHSU«IHW3RXUSOXVGHbGHVFRPPXQHVOłRS«UDWLRQGł«OHFWULŦFDWLRQVłHIIHFWXHVXUODEDVH
GłLQYHVWLVVHPHQWVHWGłXQHJHVWLRQWRWDOHPHQWSULY«VbFHUWDLQVFRQFHVVLRQQDLUHVUH©RLYHQWGHV
VXEYHQWLRQVGHVFRPPXQHVHOOHVP¬PHV/HU¶OHGHOł(WDWHVWDORUVGHG«ŦQLUGHVU«JOHPHQWDWLRQV
G«WDLOO«HVGHVWLQ«HVDX[PD°WUHVGłRXYUDJHHWDX[RS«UDWHXUVSULY«VUHODWLYHVDX[FDUDFW«ULVWLTXHV
WHFKQLTXHVDX[UªJOHVGHV«FXULW«HWDX[QLYHDX[PD[LPDGHWDULIV3DUH[HPSOHGDQVFHUWDLQHV
FRPPXQHVmbOł«FODLUDJHHVWGLVSRQLEOHMXVTXł¢KHXUHVVDXIOHVDPHGLGLPDQFKHHWMRXUVGHIRLUH
R»LOHVWSURORQJ«XQTXDUWGłKHXUHDXGHO¢GHOłKHXUHO«JDOHGHVFDI«Vb}/HVOLWLJHVHQWUHFRPPXQHV
HWHQWUHSULVHVVRQWU«VROXVORFDOHPHQWRXDXQLYHDXGHODSU«IHFWXUH
3+$6(bOHUDWWDFKHPHQW¢GHVV\QGLFDWVLQWHUFRPPXQDX[Gł«OHFWULŦFDWLRQD\DQWSRXU
objet la construction et l’exploitation via un opérateur privé d’un réseau de distribution
dans les communes.
&łHVWODSKDVHGłLQYHVWLVVHPHQWVGHVFROOHFWLYLW«VORFDOHVHWGHJHVWLRQSULY«H$LQVLOH6\QGLFDW
GXQRUGGX/RWŦQDQFHOHVPRQWDQWVGHVWUDYDX[JU¤FH¢GHVSU¬WVGHOD&DLVVHGHVG«S¶WV
HWFRQVLJQDWLRQV¢ODFRQGLWLRQTXHOHVFRPPXQHVJDUDQWLVVHQWOHPRQWDQWGHVWUDYDX[TXL
OHXUFRUUHVSRQGHQW/HV\QGLFDWVHUHPERXUVH¢WUDYHUVODWDULŦFDWLRQGHVVHUYLFHV«OHFWULTXHV
HQYLURQbGHODWDULŦFDWLRQOXLUHYLHQQHQWHWbYRQW¢OłRS«UDWHXU HWFłHVWVHXOHPHQW
HQFDVGHG«IDLOODQFHTXHOHVFRPPXQHVVRQWFKDUJ«HVGHVXSSO«HUHQOHYDQWOłLPS¶W&HUWDLQHV
SHWLWHVFRPPXQHVVłHQJDJHQWDLQVL¢JDUDQWLUGHVPRQWDQWVTXLSHXYHQWUHSU«VHQWHUXQULVTXH
ŦQDQFLHU¢KDXWHXUGHSUHVTXHbGHOHXUEXGJHW$YDQWOD6HFRQGH*XHUUHPRQGLDOHHWSRXU
HQYLURQKDELWDQWVOHVHFWHXU«OHFWULTXHGX/RWFRPSWHRQ]HV\QGLFDWVLQWHUFRPPXQDX[
HWXQV\QGLFDWFRPPXQDOWURLVHQWUHSULVHVGłH[SORLWDWLRQSULQFLSDOHVGHX[SOXVSHWLWHVHWQHXI
H[SORLWDQWVSDUWLFXOLHUVDLQVLTXłXQHVHXOHU«JLHPXQLFLSDOH3OXVGHbGHVORFDOLW«VHWbGH
ODSRSXODWLRQRQWDFFªVDXVHUYLFH«OHFWULTXH
,OIDXGUDDWWHQGUHOHVDQQ«HVSRXUTXHOHVGHUQLªUHVFRPPXQHVGX/RWVRLHQW«OHFWULŦ«HVSDU
XQV\QGLFDWTXLMXVTXł¢DXMRXUGłKXLUHVWHSURSUL«WDLUHGXU«VHDXPDLVHQDFRQŦ«OłH[SORLWDWLRQ
¢OłHQWUHSULVHQDWLRQDOH(')TXLmbQłDIDLWTXHFRPSO«WHUPRGHUQLVHUHWJ«UHUOHV\VWªPHH[LVWDQW
VDQVDXFXQGRXWHDYHFSURIHVVLRQQDOLVPHHWVXFFªVb}

6RXUFHb Michel Matly, « L’électrification du monde commence à Labastide-Murat », Revue de l’Energie, no 523 (2001).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 137

L’exemple du département du Lot met en évi-


dence les quatre fondements qui ont permis, mb&HWWHYRORQW«Qł«PDQDLWSDV
avant la nationalisation, d’atteindre en France un GłXQIRQFWLRQQDLUHXUEDLQDVVLV
meilleur niveau d’électrification rurale que dans la GDQVXQEXUHDX«OHFWULŦ«PDLVGH
plupart des pays européens à la même époque : FRPPXQDXW«VUXUDOHVG«VLUHXVHV
çNC XQNQPVª FGU EQNNGEVKXKVªU NQECNGU PQVCOOGPV GHYRLUOHXUTXDOLW«GHYLHFKDQJHUJU¤FH
des communes ; ¢OłDUULY«HGXVHUYLFH(WFHWWHYRORQW«
çNGRCTVGPCTKCVCXGEWPGGPVTGRTKUGFàªNGEVTKEKVªa D«W«XQGHVPRWHXUVSULQFLSDX[
çWPECFTGNªIKUNCVKHGVTªINGOGPVCKTGCRRTQRTKªa GXG«YHORSSHPHQWGHOł«OHFWULFLW«b}
çWPCEE©UHCEKNKVªCWZăPCPEGOGPVU
Michel Matly, « L’électrification du monde
L’électrification repose d’abord commence à Labastide-Murat », Revue de
sur le volontarisme des collectivités l’Energie, no 523 (2001).
locales, notamment des communes.
La responsabilité de l’électrification a été délé-
guée aux communes par la loi dès le début du
XXe siècle, alors même que leurs compétences avec une entreprise d’électricité, pour fournir,
étaient peu développées, les budgets municipaux mettre en place et exploiter les équipements
souvent dérisoires et leurs populations encore d’électrification, soit en direct, soit via un syndicat
partiellement illettrées. intercommunal.

Une grande majorité des communes ont provo- Peu des communes ont choisi d’assurer elles-
qué l’arrivée de l’électricité et exercé pleinement mêmes la gestion de leur distribution électrique.
leur responsabilité de maître d’ouvrage* : S’il y a eu au moins une régie dans le Lot et s’il en
çRQWTOGVVTGGPRNCEGEGVVGKPPQXCVKQPGNNGUQPVKFGP- existe encore actuellement en France, la plupart
tifié des entreprises d’électricité auxquelles elles des communes et des syndicats ont opté pour
ont accordé des concessions de longue durée ; une exploitation privée plutôt que communale.
çGNNGU QPV ªICNGOGPV F¼ CESWªTKT FGU EQORª Ce sont les sociétés d’électricité, souvent exté-
tences en interne pour en assurer le contrôle rieures au territoire, qui démarchent en premier
technique ou le déléguer aux services de l’Etat ; lieu les collectivités (par exemple, avant 1925, la
çRCTNCUWKVGGNNGUQPVGW¡EJQKUKTNGWTU[PFKECVKP- commune de Labastide-Murat a été contactée
tercommunal puis à accepter ou non d’en garan- par une entreprise parisienne pour développer
tir les emprunts. son éclairage public).

La mise en œuvre effective Cependant, la mise en place progressive des syn-


de l’électrification s’appuie sur dicats intercommunaux d’électrification a ensuite
un partenariat entre collectivité locale entraîné la création de regroupements locaux
et entreprise d’électricité. d’entreprises. Les entreprises privées se sont
La volonté des communes est une condition prêtées au jeu, notamment des propriétaires de
nécessaire mais non suffisante  : elle doit se moulins, des petites entreprises ou des particu-
concrétiser dans un partenariat (concession) liers, sans espoir de gains importants, mais avec la

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


138 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

sécurité conférée par la concession. Elles ont in-


Le cas de vesti là où un niveau de demande acceptable ren-
Labastide-Murat dait l’électrification viable, parfois à des échelles
/RW)UDQFH b très restreintes (cf. encadré).
un projet viable
Cette expérience prouve qu’il est possible de trou-
malgré un volume ver l’équilibre économique sur des périmètres ter-
WUªVIDLEOHGH ritoriaux réduits présentant des consommations
consommation. faibles. Mais cette réussite repose aussi sur le
cadre institutionnel et réglementaire propice dont
mb$UULY«HVVDQVVXEYHQWLRQOHVVRFL«W«V elle a bénéficié : c’est le deuxième enseignement à
Gł«OHFWULFLW«IRQWODSUHXYHTXłXQHDFWLYLW« tirer du cas de l’électrification rurale française.
Gł«OHFWULŦFDWLRQHVWUHQWDEOHMXVTXHGDQV
GHVVLWXDWLRQVUHODWLYHPHQWOLPLWHVbGDQV L’électrification doit être encadrée
OHFDVGH/DEDVWLGH0XUDWLODVXIŦGH par des règles appropriées en matière
bFOLHQWVGHODORFDOLW«SULQFLSDOHGHV de sécurité, d’environnement et de
FRQVRPPDWHXUVPLFURVFRSLTXHVSRXUOD tarification.
SOXSDUW¢N:KSDUPRLVb} La loi avait délégué aux communes la respon-
sabilité de l’électrification, les communes avaient
6RXUFHb Michel Matly, « L’électrification du monde
commence à Labastide-Murat », Revue de l’Energie,
la volonté de l’exercer et les entreprises privées
no 523 (2001). celle de répondre à leur demande. Mais c’est bien
le cadre réglementaire mis en place par la puis-
sance publique qui a permis la concrétisation de
cette dynamique.

Pour pallier le manque de compétences initial, les


services de l’Etat ont en effet élaboré et communi-
qué aux communes un panel complet d’outils pour
mettre en œuvre les différentes étapes légales
d’un projet d’électrification :
çOQFCNKVªU FàªVWFG GV FàCVVTKDWVKQP FGU EQPEGU-
sions d’électrification ;
çECJKGT FGU EJCTIGU VGEJPKSWGU
CURGEVU FG
sécurité, conflits éventuels avec les réseaux
téléphoniques) ;
çOQF©NGV[RGFGFQUUKGTFGFGOCPFGFàCWVQTKUCVKQP
cahier des charges définissant les modalités de fi-
nancement et d’exécution du contrôle ;
çOQF©NG V[RG FG FªNªICVKQP FW EQPVTµNG FG NC
commune à l’Etat ;

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 139

çECFTGFGFQEWOGPVUVCVKUVKSWGV[RG¡HQWTPKTRCT
l’entreprise d’électricité à la municipalité et aux mb&łHVWODFRQVWLWXWLRQSDUIRUFHGłXQ
pouvoirs publics ; SDWULPRLQHSXEOLFDX[PDLQVGHV
çOQFCNKVªUV[RGUFGTªXKUKQPVCTKHCKTGa V\QGLFDWVSDUFHTXHOłLQYHVWLVVHPHQW
çOQF©NGU FG FªNKDªTCVKQPU OWPKEKRCNGU RQTVCPV SULY«QłLUDSDVSOXVORLQ(WFHOD
décision et de lettres de la commune pour la IRQFWLRQQHbOłLQWHUFRQQH[LRQSHUPHW
transmission des dossiers. GHQLYHOHUOHVFR½WVOHVQRXYHDX[FOLHQWV
VXLYDQWVHWOHVJDUDQWLHVFRPPXQDOHV
Enfin, en France, aucun projet n’a été réalisé sans UHVWHURQWYLUWXHOV'DQVVDJOREDOLW«
l’autorisation de l’Etat, amené à se prononcer sur OHVHFWHXUSXEOLFHVWJDJQDQWbDYHF
les compétences de l’entreprise ainsi que sur les XQHFRQWULEXWLRQŦQDQFLªUHLQLWLDOH
données techniques et les tarifs, garantissant ainsi PRGHVWHLOYDIRUWHPHQWFDSLWDOLVHU
une cohérence de l’ensemble à l’échelle nationale. /HVHQWUHSULVHVSULY«HVTXDQW¢HOOHV
Si le soutien technique de l’Etat a été fort, son ap- UHVWHQWRPQLSU«VHQWHVHWDVVXUHQW
pui financier, en revanche, n’a été que ponctuel. OłH[SORLWDWLRQGHVU«VHDX[(OOHV
VHOLYUHQWXQHFRQFXUUHQFHDFKDUQ«H
L’électrification décentralisée requiert SRXUVHWDLOOHUGHSHWLWVHPSLUHVHW
un accès facilité à certains instruments DXPRPHQWGHOHXU«OHFWULŦFDWLRQ
financiers (garantie bancaire, taux OHVQRXYHOOHVFRPPXQHVRQWVRXYHQW
bonifiés, etc.). OHFKRL[HQWUHSOXVLHXUVV\QGLFDWV
Plus de 60 % de l’électrification française s’est ef- HWSOXVLHXUVH[SORLWDQWVb}
fectuée sans aucune aide publique. Initialement (à
partir de 1925 et pendant un peu plus d’une dizaine Michel Matly, « L’électrification du monde
d’années), l’Etat n’avait pas les moyens d’investir commence à Labastide-Murat », Revue de
dans les projets, ni même d’aider le développe- l’Energie, no 523 (2001).
ment du secteur électrique par des subventions.
Les communes ont parfois organisé des collectes
ou dégagé un budget, mais l’électrification n’a, le
plus souvent, rien coûté à la collectivité.
Cependant, les petites communes, les hameaux
et les ménages isolés, qui ne représentaient pas
un marché viable, restaient exclus du service
électrique. Dans un deuxième temps, pour pour-
suivre l’électrification, la puissance publique est
donc intervenue en encourageant la création de
syndicats intercommunaux, qui ont pu lever de la
dette grâce à la garantie des communes et à l’aide
de l’Etat. Ce dernier intervient parfois par subven-
tion, mais surtout consent des prêts bonifiés, dont
le remboursement est assuré par les usagers.

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140 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

©National Archives and Records Administration


©National Archives and Records Administration

Ancienne publicité de laRural Electrifica-


Électriciens de la Rural Electrification Administration batissant un réseau dans les tion Administration pour l’électrification
années 1930. de l’agriculture aux Etats-Unis

Aux Etats-Unis, la création de sociétés avorte : la REA juge les tarifs qu’elles dé-
coopératives rurales d’électricité finissent pour la vente de l’électricité incompati-
a permis une électrification tardive bles avec le pouvoir d’achat des fermiers.
mais rapide du territoire. La REA reprend alors le modèle des coopératives
Au milieu des années 30, l’électrification rurale n’a agricoles, autogérées par les fermiers et jouissant
pas encore véritablement commencé aux Etats- de la confiance des populations. En acceptant
Unis. Seulement 13 % des familles rurales disposent la responsabilité de la construction des réseaux
de l’électricité fournie par le réseau, alors qu’elles électriques et de leur gestion, et en s’imposant de
sont déjà 90  % en France, en Allemagne et au servir leurs membres à prix coûtant, ces nouvelles
Japon, 85 % au Danemark, 65 % en Suède et près coopératives électriques deviennent les parte-
de 100 % aux Pays-Bas. A cette époque, les socié- naires essentiels de l’électrification rurale aux
tés privées du secteur électrique ne souhaitent pas Etats-Unis. Fin 1936, une centaine de coopéra-
investir dans l’électrification rurale au prétexte que tives ont déjà signé une convention de prêt avec la
les perspectives de profits y sont trop faibles. Plus REA dans vingt-six Etats.
de trente années d’efforts seront nécessaires pour Invitées à produire, transporter et vendre
que les fermes américaines rattrapent ce retard. l’électricité produite aux coopératives (qui en as-
surent la distribution aux usagers), les entreprises
La Rural Electrification Administration électriques privées font de la résistance. Le gou-
(REA), créée en 1935 pour gérer un vernement fédéral crée alors progressivement
fonds d’électrification rurale, s’appuie cinq power marketing administrations qui ven-
sur le modèle coopératif. dent l’électricité produite par des grands barrages
Dans un premier temps, des fonds sont propo- aux régies électriques nationales ou municipales
sés aux sociétés privées, les seules à disposer et aux coopératives d’électrification rurale à des
du savoir-faire technologique et des techniciens conditions préférentielles.
qualifiés. Mais le partenariat envisagé avec ces

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 141

Dans le face-à-face qui les oppose au membres un appui dans tous les domaines  :
secteur privé, les coopératives rurales service juridique, lobbying, assurance, forma-
d’électricité unissent leurs forces. tion, consultation technique, relations publiques
Face à cette nouvelle concurrence, les entre- et campagnes de promotion, programmes de
prises électriques privées revoient finalement à recherches, etc. La NRECA est toujours en ac-
la baisse leurs tarifs pour les coopératives, mais tivité et dispose d’un service d’assistance aux
elles multiplient aussi les recours judiciaires à leur programmes d’électrification rurale des pays en
encontre et tentent d’empêcher la création de développement.
nouvelles coopératives.
Les résultats sont éloquents : en 1946, à peine dix
Dans les années 40, les coopératives réagis- ans après la création de la REA, 50 % des fermes
sent d’abord en se regroupant en «  super-coo- américaines sont électrifiées (leur nombre a qua-
pératives  », capables de construire et d’exploiter druplé) et les Etats-Unis ont presque rattrapé leur
leurs propres unités de production et leurs pro- retard sur les pays européens. L’électrification
pres réseaux de transport. Puis, elles créent des zones rurales sera achevée au début des an-
en 1942 la National Rural Electric Coopera- nées 70, comme cela a été le cas en France.
tive Association (NRECA), qui apporte à ses

$X[(WDWV8QLVOD15(&$UHSU«VHQWHDXMRXUGłKXLHQYLURQFRRS«UDWLYHV
desservant 42 millions d’Américains

833 coopératives de distribution


et 62 coopératives de production
et de transport alimentent

b
du territoire
américain.

6RXUFHb NRECA, « America’s Electric Cooperatives: 2017 Fact Sheet » (Arlington, 2017).

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142 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Aujourd’hui, on assiste au retour


de la production au plus près de
l’usager, inspirée de ces initiatives
originelles d’électrification.
Héritage de l’électrification décentralisée, on re-
cense au début des années 2000 environ 1 500
producteurs privés en France. Ce chiffre a été
largement dépassé depuis, avec notamment la
multiplication des installations photovoltaïques
privées intégrées aux bâtiments injectant leur
production sur le réseau. Les syndicats intercom-
munaux ont gardé la compétence d’autorité or-
ganisatrice de la distribution, et des entreprises
locales de distribution desservent actuellement
5 % des points de livraison en France, soit environ
3 millions d’habitants dans 2 500 communes.
En Europe, à de nouveaux choix de production
(énergies renouvelables et surtout cogénération)
correspond une nouvelle organisation du secteur.
Ces évolutions tendent à battre en brèche des
concepts jugés jusqu’ici incontournables (comme
les monopoles naturels) et induisent une satelli-
sation des acteurs du secteur électrique. Les
évolutions numériques et le développement des
compteurs intelligents changent la donne1 ; ils in-
citent les collectivités, mais aussi les citoyens, à
repenser leur vision de l’électricité, à reprendre
progressivement en main leurs systèmes élec-
triques et à tendre vers l’autonomie énergétique
locale, en développant des moyens de production
décentralisés sur leurs territoires.
Produire son énergie au plus près des besoins ap-
paraît ainsi comme un point de repère constant,
une logique qui, parce qu’elle répond sans doute
à un besoin fondamental des groupes humains,
transcende les années et les géographies. }

1. Ils permettent de suivre en temps quasi réel la production et les


consommations, et d’organiser des circuits courts de l’électricité. La loi
autorise aujourd’hui les producteurs d’électricité et les consommateurs reliés
à un même poste de transformation BT à créer une personne morale pour
« commercialiser » entre eux l’électricité produite par les producteurs sur la
base des données fournies par les compteurs intelligents.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 143

©FondationÉnergies pour le Monde


©FondationÉnergies pour le Monde
©FondationÉnergies pour le Monde

Quelques exemples de projets pionnier de l’ERD : PPER au Maroc et au Pakistan

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144 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.2.2.
L’électrification rurale décentralisée par énergie
renouvelable bénéficie de plus de quarante ans
d’expérimentations.
L’ERD par énergie renouvelable en Afrique
subsaharienne n’est pas une invention du Téléviseurs scolaires
XXIe siècle. Le principe en est testé avant les DX1LJHU
indépendances (notamment par hydroélectri-
cité). Il se diffuse dans les années 1970, avant $X1LJHUGªVODPLVHHQSODFHGłXQ
de connaître une phase d’extension dans le programme national d’éducation en
courant des années 1980 et 1990, puis, avec zone rurale a été l’occasion de concevoir
les ruptures technologiques et la formula- GHVV\VWªPHVLQW«JU«VFRPSUHQDQWXQ
tion d’un objectif d’accès universel à l’énergie W«O«YLVHXUHWVRQV\VWªPHGł«QHUJLH
par la communauté internationale, une phase 'XIDLWGXQRPEUHGHVLWHV¢«TXLSHUHWGH
d’accélération et de diversification des projets. OHXUGLVSHUVLRQVXUOłHQVHPEOHGXWHUULWRLUH
OHVHQMHX[GłLQYHVWLVVHPHQWHWGHŦDELOLW«
Les premières expérimentations RQWFRQGXLW¢FRQFHYRLUGHVV\VWªPHV
naissent au lendemain des QRYDWHXUVEDV«VVXUOłRSWLPLVDWLRQGHOD
indépendances avec l’aide GHPDQGH«QHUJ«WLTXHb
de la coopération internationale. ʼnFKRL[GHW«O«YLVHXUV¢IDLEOH
Dans les pays en développement, les premières FRQVRPPDWLRQ«OHFWULTXH
expérimentations faisant appel aux énergies so- GHOłRUGUHGH: b
laire et éolienne datent des années 1970, dans la ʼnDOLPHQWDWLRQVRODLUHSDUJ«Q«UDWHXU
foulée du premier choc pétrolier de 1973. Forte GH:FFRQVWLWX«GHPRGXOHVGH
de ses coopérations en Afrique et de l’expérience :FXQHEDWWHULHGH$K9HWXQ
acquise dans les territoires d’outre-mer, riche U«JXODWHXUGHFKDUJHb
d’acteurs industriels1, la France a été l’un des pre- ʼnFRQFHSWLRQPRGXODLUHSRXUXQ
miers pays à installer des systèmes décentralisés UHPSODFHPHQWIDFLOHGHVSLªFHV
renouvelables en Afrique subsaharienne. G«IHFWXHXVHV
Deux types d’usages sont couverts par ces pre- (QOHSUL[GXV\VWªPHVRODLUHLQVWDOO«
mières initiatives  : les ouvrages communautaires VXUVLWHDYRLVLQDLWOHVb)) VRLW
et les applications professionnelles : ŏHQYLURQ &HPRQWDQW«OHY«SRXU
çl’électrification vise surtout des usages collec- XQSDUWLFXOLHUUHVWHDFFHVVLEOHSRXUXQ
tifs, souvent inscrits dans des programmes de XVDJHFROOHFWLIHWFHWWHVROXWLRQDSHUPLV
développement : exhaure de l’eau, électrification ODGLIIXVLRQPDVVLYHGHSURJUDPPHV
Gł«GXFDWLRQYLOODJHRLVHGDQVGHV]RQHV
KRUVU«VHDX

1. Notamment Sofretes pour le solaire thermodynamique, Radio technique


6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.
compelec et Pompes Guinard pour le photovoltaïque, Aérowatt pour l’éolien.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 145

(OHFWULŦFDWLRQSDUV\VWªPHVRODLUH
GHOłK¶SLWDOGH6DQDX0DOL

/łK¶SLWDOGH6DQGDQVODU«JLRQGH6«JRXDX0DOLD«W«HQOłXQGHVSUHPLHUV«WDEOLVVHPHQWV
KRVSLWDOLHUV«OHFWULŦ«VSDUXQJ«Q«UDWHXUVRODLUHSKRWRYROWD±TXHVRXVOłLPSXOVLRQGH
OłDVVRFLDWLRQ0DOLDTXDYLYDHWGXSªUH9HUVSLHUHQ

$XUHJDUGGHVDFRQVRPPDWLRQ«OHFWULTXHGłHQYLURQN:KSDUMRXUFRUUHVSRQGDQW
¢FHOOHGHOł«FODLUDJHGHODYHQWLODWLRQHWGHVDSSDUHLOVP«GLFDX[XQJ«Q«UDWHXUGHbN:FFRQVWLWX«
GHPRGXOHVELYHUUHGH:FFKDFXQDVVRFL«¢XQEDQFGHEDWWHULHVGH$KVRXVYROWVHW¢
XQFRQYHUWLVVHXU'&$&GHN9$SHUPHWWDLWGłDOLPHQWHUOłK¶SLWDOHQ«OHFWULFLW«8QHSRPSHVRODLUH
GH:FDVVXUDLWOłDSSURYLVLRQQHPHQWHQHDXGHOł«WDEOLVVHPHQWKRVSLWDOLHUVRLWP3MRXUSRXU
XQHKDXWHXUPDQRP«WULTXHGHPªWUHV6LOHFR½WGXN:K«WDLWDORUVUHODWLYHPHQW«OHY«FHWWH
LQVWDOODWLRQSLORWHDSHUPLVGłDSSU«KHQGHUOłXVDJHGHV\VWªPHV39G«GL«V¢Oł«OHFWULŦFDWLRQGHSHWLWV
FHQWUHVGHVDQW«mbKRUVU«VHDXb}ORFDOLV«VHQ]RQHVWURSLFDOHV

$XMRXUGłKXLOHVV\VWªPHVVRODLUHV39DOLPHQWHQWGHQRPEUHX[
GLVSHQVDLUHVHWSHWLWVK¶SLWDX[GDQVGHVFHQWUHVVHFRQGDLUHVSRXU
GHVFR½WVGłH[SORLWDWLRQOLPLW«V
HWXQHŦDELOLW«GHIRQFWLRQQHPHQWLQ«JDO«H/HVTXHVWLRQV
GHŦQDQFHPHQWGHOł«TXLSHPHQWHWGHSULVHHQFKDUJH
GHVDPDLQWHQDQFHUHVWHQWFHSHQGDQWGHVSRLQWVVHQVLEOHV
GHOł«OHFWULŦFDWLRQG«FHQWUDOLV«HGDQVOHVHFWHXUGHODVDQW«

Générateur solaire de l’hôpital de San 6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

(Mali) - 10 kWc.

de centres de santé ou écoles, irrigation de péri- place par le Bureau Yves Houssin et la Société
mètres maraîchers, abreuvage de troupeaux… nationale de télécommunication et télédiffusion
Financées grâce à l’aide au développement, ces (SNTT) au Niger, navigation aérienne (balises)  ;
petites infrastructures électriques innovantes autre exemple, l’éolien se développe dans le ba-
ont également bénéficié de l’appui des réseaux lisage maritime.
d’assistants techniques pour leur exploitation et
leur maintenance ; Ces premiers tests ont validé la pertinence de la
çEQPEQOKVCOOGPV FGU KPFWUVTKGNU UG NCP- technologie photovoltaïque (plus adaptée que le
EGPVFCPUFGUCRRNKECVKQPURTQHGUUKQPPGNNGUa solaire thermodynamique), malgré les questions
alimentations solaires pour répéteurs de télé- posées par la pérennité des équipements (cf. cha-
communications développées par Sahel (filiale pitre 2.4.3.). Les projets de petit éolien mettent
de Thomson), réseaux de télédiffusion mis en quant à eux en exergue la problématique de l’usure

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


146 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

des pièces en mouvement (roulements à billes, pa- premier changement d’échelle  ; certains projets
liers), de leur graissage régulier et de leur corrosion. impliquent fortement le secteur privé et préfi-
A la charnière des années 1970 et 1980, plusieurs gurent les ruptures qui traversent actuellement le
acteurs industriels français se lancent alors dans domaine de l’ERD.
l’aventure du photovoltaïque “grand public”1 .
Certaines initiatives, emblématiques,
Dans les années 1980, jettent les bases de l’organisation
les projets changent d’échelle. des programmes actuels d’accès à
A cette époque, confiants dans la technologie, les l’électricité.
fabricants de matériels et leurs installateurs sur En France, l’Agence française de la maîtrise de
place, plusieurs bailleurs de fonds permettent un l’énergie (AFME ; cf. encadré) élabore les premiers
concepts d’une électrification décentralisée par
des programmes de préélectrification par lampes
portables et petits systèmes solaires autonomes.
$)0(
Elle soutient notamment le Programme pilote
d’électrification rurale marocain (cf. encadré), qui
&U««HHQOł$JHQFHIUDQ©DLVHSRXU vise l’accès à l’électricité de douars isolés par des
ODPD°WULVHGHOł«QHUJLH $)0( HVWXQ systèmes solaires individuels et des microcen-
«WDEOLVVHPHQWSXEOLFD\DQWSRXUPLVVLRQ trales hydrauliques, avec une forte implication des
GHVXVFLWHUGłDQLPHUGHFRRUGRQQHU collectivités locales.
GHIDFLOLWHURXGHU«DOLVHUGHVRS«UDWLRQV
YLVDQWODPD°WULVHGHOł«QHUJLH(OOH La Commission européenne, elle, lance deux
U«VXOWHGHODIXVLRQGHOł$JHQFHSRXU programmes importants de développement in-
OHV«FRQRPLHVGł«QHUJLH $(( OH cluant des équipements solaires (à une époque
&RPPLVVDULDW¢Oł«QHUJLHVRODLUH &20(6  où l’accès à l’électricité ne figure pas en tant
OH&RPLW«J«RWKHUPLHOD0LVVLRQQDWLRQDOH que tel parmi les thématiques de l’aide publique
SRXUODYDORULVDWLRQGHODFKDOHXUHWOH au développement). Le premier, en 1983, vise
VHUYLFH«FRQRPLHGHPDWLªUHVSUHPLªUHV l’électrification de 850 centres de santé au Zaïre ;
GXPLQLVWªUHGHOł,QGXVWULH le second, déployé entre 1991 et 1997, procède
à l’installation de près de 1 000 pompes solaires
/ł$)0(DIXVLRQQ«HQ dans les neuf pays du Sahel.
DYHFOł$JHQFHQDWLRQDOHSRXU Ces initiatives proposent de nouvelles approches
ODU«FXS«UDWLRQHWOł«OLPLQDWLRQGHV en matière de validation des équipements (tests
G«FKHWV $15(' HWOł$JHQFHSRXUOD de performances et de robustesse en laboratoires
TXDOLW«GHOłDLU $4$ SRXUIRUPHUOł$JHQFH européens agréés) et d’implication d’acteurs
GHOłHQYLURQQHPHQWHW
GHODPD°WULVHGHOł«QHUJLH $'(0( 

1. Notamment Photowatt et Leroy-Somer, (par ses filiales France Photon dans


la fabrication de cellules et modules, et Solarforce dans celle de systèmes
photovoltaïques) ELF, Total Energie et Solelec/Apex comme ensembliers de
systèmes.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 147

3URJUDPPHSLORWHGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHDX0DURF

)LQOD)UDQFHHWOH0DURFFRQYLHQQHQWGXPRQWDJHGX33(5SRXUFRQWULEXHU¢U«SRQGUH¢OD
GHPDQGHHQ«OHFWULFLW«GHV]RQHVUXUDOHVGX5R\DXPHFK«ULŦHQ)RUWVGHVSURMHWVG«M¢PHQ«VDX
0DURFHWDXGHO¢GHVIURQWLªUHVOHSURJUDPPHHVWFRQVWUXLWVXUSLOLHUV
ʼn8QHSULVHHQFRPSWHGHODGHPDQGHGHVIXWXUVXVDJHUVHWGHVFRQWUDLQWHVEXGJ«WDLUHV
ʼn'HVU«SRQVHVWHFKQRORJLTXHVDGDSW«HVHWOLEUHVGHWRXWFKRL[WHFKQRORJLTXHSU«DODEOH
ʼn8QHSU«RFFXSDWLRQTXDQWDX[YROHWVLQVWLWXWLRQQHOVHWRUJDQLVDWLRQQHOVFRQGXLVDQW¢OłLPSOLFDWLRQ
GHSULQFLSDOHVSDUWLHVODGLUHFWLRQJ«Q«UDOHGHVFROOHFWLYLW«VORFDOHVOHPLQLVWªUHGHOł«QHUJLH
PDURFDLQOHPLQLVWªUHIUDQ©DLVGHV$IIDLUHV«WUDQJªUHVDVVLVW«GHOł$JHQFH)UDQ©DLVHGH
'«YHORSSHPHQWHWOł$JHQFHIUDQ©DLVHGHOłHQYLURQQHPHQWHWGHODPD°WULVHGHOł«QHUJLH

/DSUHPLªUHU«DOLVDWLRQ FRXYUDQWODS«ULRGHĿHWYLOODJHV D«W«XQY«ULWDEOH


laboratoire et ses enseignements dans les champs économiques, sociologiques,
organisationnels et techniques.
$XQLYHDXWHFKQLTXH/DŧH[LELOLW«GHVV\VWªPHVGł«QHUJLHDSHUPLVGHOHVDGDSWHU¢Oł«YROXWLRQGH
ODGHPDQGHHQ«QHUJLH¢ODVDWLVIDFWLRQGHVDERQQ«V6LOHVV\VWªPHVGHU«JXODWLRQGHVV\VWªPHV
VRODLUHVRQWELHQIRQFWLRQQ«ODGXU«HGHYLHOLPLW«HGHVEDWWHULHVLQI«ULHXUH¢DQVDUHTXLVGHV
UHPSODFHPHQWVFRPSOH[HV¢PHWWUHHQāXYUHFRPSWHWHQXGHOł«ORLJQHPHQWGHVXVDJHUV
$XQLYHDX«FRQRPLTXH$XVHLQGHVIR\HUVOłXWLOLVDWLRQGHV\VWªPHV«OHFWULTXHVDU«GXLWOHEXGJHW
(QHUJLHGHOłRUGUHGH¢VHORQOHVXVDJHVHWOHVV\VWªPHVSRXUXQHTXDOLW«GHVHUYLFHELHQ
VXS«ULHXUH
$XQLYHDXRUJDQLVDWLRQQHO/HVDVVRFLDWLRQVGłXVDJHUVRQWMRX«XQU¶OHPDMHXUGDQVOłH[«FXWLRQ
GXSURJUDPPHSHUPHWWDQWGHGLVSRVHUGłXQLQWHUORFXWHXUXQLTXHGDQVFKDTXHYLOODJHHWGH
IDFLOLWHUOHVRS«UDWLRQVGHUHPSODFHPHQWGHFRPSRVDQWV(OOHVRQWDXVVL«W«GHVYHFWHXUVGH
G«YHORSSHPHQWORFDO(QUHYDQFKHSULQFLSDOKDQGLFDSGXSURJUDPPHDXFXQH[SORLWDQWQłD
«W«FRQWUDFW«GDQVODGXU«HDVVXUDQWOHOLHQHQWUHOHVIRXUQLVVHXUVHWOHVXVDJHUVHWDVVXUDQWOH
UHFRXYUHPHQWGHPDQLªUHS«UHQQH6HXOHPHQWGHVDVVRFLDWLRQVGłXVDJHUVRQWSXŦQDOHPHQW
DWWHLQGUHXQHDXWRQRPLHŦQDQFLªUHDQVDSUªVOHXUFU«DWLRQ
$XQLYHDXVRFLRORJLTXH$ORUVTXHOHSURJUDPPHYLVDLWXQHG\QDPLTXHFROOHFWLYHDYHFGHV
FHQWUDOHVGHUHFKDUJHGHEDWWHULHVDXSUªVGHVTXHOOHVOHVXVDJHUVYHQDLHQWG«SRVHUOHXUEDWWHULHOHV
FRQWUDLQWHVOL«HV¢OHXUWUDQVSRUWOHVHQRQWUDSLGHPHQWGLVVXDG«V/HVFHQWUDOHVGHUHFKDUJHRQW
«W«G«PRQW«HVSRXUFU«HUDXWDQWGHNLWVVRODLUHVTXHGHPRGXOHV

$LQVLOH33(5DFRQWULEX«¢«ODERUHUOHVFRQWRXUVGX3URJUDPPHGł(OHFWULŦFDWLRQJOREDOH 3(5* 
GXSD\VTXLDSHUPLVSDUH[WHQVLRQGHU«VHDXFRPSO«W«HSDUXQH«OHFWULŦFDWLRQG«FHQWUDOLV«H
SKRWRYROWD±TXHGł«OHFWULŦHUYLOODJHVVRLWHQYLURQPLOOLRQGHIR\HUV

6RXUFH Fondation Energies pour le Monde

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


148 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Programme régional solaire au Sahel

&RQWH[WHbPLHX[U«SRQGUH¢ODGHPDQGHHQHDX
(QOHVFKHIVGł(WDWGHVSD\VPHPEUHVGX&RPLW«LQWHU(WDWVFRQWUHODV«FKHUHVVHDX6DKHO
&,/66 ODQFHQWDYHFOłDSSXLGHOł8QLRQHXURS«HQQHOH3URJUDPPHU«JLRQDOVRODLUH 356 DSUªVTXH
OHXUV(WDWVDLHQWVXELODV«FKHUHVVHGHODG«FHQQLHHWGHVG«EXWVGHVDQQ«HV3DUDOOªOHPHQWOHV
ORFDOLW«VJUDQGLVVHQWVRXVOłHIIHWGHODFURLVVDQFHG«PRJUDSKLTXHHWOHVSRPSHV¢PDLQVHU«YªOHQW
LQVXIŦVDQWHVSRXUU«SRQGUH¢ODGHPDQGHHQHDX

2EMHFWLIbOXWWHUFRQWUHODG«VHUWLŦFDWLRQJU¤FHDXSRPSDJHGHOłHDXSDUb
ʼnOłDP«OLRUDWLRQGHOłDFFHVVLELOLW«GHOłHDXHQTXDQWLW«HWHQTXDOLW«b
ʼnOłDP«OLRUDWLRQGHVFRQGLWLRQV«FRQRPLTXHVGHVYLOODJHRLVSDUOHG«YHORSSHPHQW
GXPDUD°FKDJHFU«DQWGHVUHVVRXUFHVFRPSO«PHQWDLUHVb
ʼnODU«GXFWLRQGXWHPSVSDVV«SDUOHVIHPPHVHWOHVHQIDQWVGDQVOłDSSURYLVLRQQHPHQWHQHDX
5«DOLVDWLRQVbGH¢V\VWªPHVGHSRPSDJHVRODLUHRQW«W«LQVWDOO«VGDQV
OHVQHXISD\VGHODEDQGHVDK«OLHQQHSRXUXQHSXLVVDQFHLQVWDOO«HGHbN:FbGHSOXV
J«Q«UDWHXUVVRODLUHVRQW«TXLS«GHVE¤WLPHQWVFRPPXQDXWDLUHV DYHFGHVSRVWHV
GHUHFKDUJHGHEDWWHULHVGHVU«IULJ«UDWHXUVHWGHV«FODLUDJHVFROOHFWLIV 

3OXVLHXUVHQVHLJQHPHQWVRQW«W«WLU«VGHFHWDPELWLHX[SURJUDPPHb
ʼnOHSKRWRYROWD±TXHHVWXQHWHFKQRORJLHDSSURSUL«HSRXUXQHODUJHGLIIXVLRQDX6DKHOb
ʼnLOVHU«YªOH¬WUHXQHVROXWLRQSHUWLQHQWHSRXUOłDSSURYLVLRQQHPHQWHQHDXSRWDEOHGªVTXH
OłDG«TXDWLRQHQWUHWDLOOHGXYLOODJHHWGLPHQVLRQQHPHQWGHODSRPSHVRODLUHHVWRSWLPLV«Hb
ʼnOłXVDJHGHVSRPSHVVRODLUHVSRXUGXPDUD°FKDJHUHTXLHUWXQHPRGDOLW«GłLQWHUYHQWLRQDGDSW«H
DX[DFWHXUVGXPDUD°FKDJHH[SORLWDQWVLQGLYLGXHOVRXJURXSHPHQWVGHSURGXFWHXUVSULY«Vb
ʼnOłXWLOLVDWLRQGXSKRWRYROWD±TXHSRXUGHVXVDJHVFRPPXQDXWDLUHVHVWSHUWLQHQWHVLWRXWHIRLVGHV
P«FDQLVPHVS«UHQQHVGHSDLHPHQWGXVHUYLFHVRQWPLVHQSODFHFHTXLVłDYªUHGLIŦFLOHb
ʼnOHSDUWLSULVGHODTXDOLW«GHVFRPSRVDQWVWHFKQLTXHVHWGXVHUYLFHHVWSD\DQWbĿOHVWDX[GHSDQQHV
VRQWIDLEOHVHWOHVHUYLFHHVWGHTXDOLW«b
ʼnOłLPSOLFDWLRQGHVFRPPXQDXW«VUXUDOHVGDQVOHFKRL[GHVFRQŦJXUDWLRQVGHSRPSHVVłDYªUH
FDSLWDOHSRXUOłDSSURSULDWLRQGHVV\VWªPHVHWOHSDLHPHQWGHOłHDX

Le PRS a été le programme d’envergure régionale qui a véritablement lancé le solaire


SKRWRYROWD±TXHHQ$IULTXHVDK«OLHQQH$XMRXUGłKXLGHVPLOOLHUVGHSRPSHVVRODLUHV\VRQW
installées pour l’approvisionnement en eau potable, l’irrigation de cultures ou l’abreuvage de
bétails.

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 149

locaux (pour la fabrication de réfrigérateurs à très connaissons aujourd’hui : la vente directe de kits
basse consommation par exemple, le paiement solaires et la mise en concession de territoires.
du service et un SAV garanti sur une durée de cinq Ainsi, au Kenya, avec le soutien de la Banque mon-
ans). Ces procédures et ces mécanismes parti- diale et à la faveur de la mise sur le marché de mod-
cipent à la maturation du secteur. ules en silicium amorphe (de rendement et de coût
Des projets d’expérimentation en éolien et micro- plus bas que le silicium cristallin), de petits systèmes
hydraulique sont également menés au Sénégal et solaires familiaux très bon marché sont commercial-
au Maroc, de plus petite envergure, et sans mise isés par des revendeurs locaux pour accompagner
en place de mécanismes de maintenance. la mise en place d’un programme national de télédif-
fusion desservant les milieux ruraux.
Parallèlement, principalement en Asie, les pre- Au Mali et en Afrique du Sud, EDF et Nuon (société
miers miniréseaux alimentés par générateurs d’électricité hollandaise aujourd’hui fusionnée avec
solaires voient le jour, grâce à des financements Vattenfall) se lancent dans de vastes programmes
français, européens ou des Nations unies (UNDP), d’électrification régionale dans le cadre de con-
dans le cadre de partenariats avec les directions cessions négociées avec les Etats. En échange
générales de l’énergie ou les sociétés natio- du paiement d’une redevance collectée auprès
nales d’électricité. Parfois en concurrence avec des clients, elles installent puis exploitent plusieurs
l’extension de réseau, et affichant un coût prohibi- dizaines de milliers de systèmes solaires individu-
tif (30 €/Wc installés), ce type de centrales so- els. Ces programmes font suite à la mise en place
laires n’a pas été répliqué à grande échelle. des agences d’électrification rurale,qui apparais-
sent à la fin des années 1990.
D’autres initiatives, impliquant de
manière plus forte le secteur privé, Au bilan, ces projets permettent
voient le jour au cours des années de pointer les atouts mais aussi
2000. les limites de l’électrification
Ces projets préfigurent les deux grands modes par systèmes autonomes alimentés par
organisationnels de l’accès à l’électricité par éner- énergie solaire.
gie renouvelable, principalement solaire, que nous Les problématiques identifiées à l’issue de ces
programmes d’envergure et d’applications di-
verses sont bien connues et, pour la plupart, tou-
jours d’actualité.
Au niveau des équipements :
çNGUOQFWNGUQPVHCKVRTGWXGF©UNGURTGOK©TGU
©Fondation Energies pour le Monde

fabrications, d’une excellente fiabilité1. La plu-


part sont toujours fonctionnels aujourd’hui ;
çNGU ªSWKRGOGPVU ªNGEVTQPKSWGU FG NC EJC¯PG
VGEJPKSWG CEEWUGPV WPG EGTVCKPG HCKDNGUUG

1. Comme le montrent lesexemples de BPX 47, de France Photon, ou de Sahel,


Centrale solaire de Kankoy (Pakistan) - 70 kWc. filiale de Thomson.

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150 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

(régulateurs, onduleurs, récepteurs) compte tenu


Les quatre étapes- d’une fabrication en faible quantité, d’une inadap-
clés de l’histoire tation aux conditions d’usage sur le terrain (con-
de l’ERD traintes environnementales fortes, usagers inex-
périmentés), d’un service après-vente déficient ;
$YDQW çNGU DCVVGTKGU UQPV NG VCNQP Fà#EJKNNG FGU U[U-
ʼn3UHPLªUHVH[S«ULPHQWDWLRQV V©OGUa de durée de vie limitée (deux à dix ans),
Gł«OHFWULŦFDWLRQFROOHFWLYHŦQDQF«HV elles requièrent une attention particulière et le
SDUODFRRS«UDWLRQLQWHUQDWLRQDOH strict respect des conditions d’utilisation. Tout
ʼn$SSOLFDWLRQVSURIHVVLRQQHOOHV usage excessif leur est fatal.
G«YHORSS«HVSDUOHVLQGXVWULHOV
Au niveau organisationnel :
 çNGU RTQLGVU FG RGVKVG VCKNNG UQWĂTGPV FàWP
ʼn'«YHORSSHPHQWGHVVROXWLRQV OCPSWGFGXKCDKNKVªa le coût de mise en place des
SKRWRYROWD±TXHVDXWRQRPHVHWGHV mécanismes nécessaires à la pérennité du ser-
SUHPLHUVPLQLU«VHDX[SDUJ«Q«UDWHXUV vice requiert une dimension minimale de projet ;
VRODLUHV çNàCRRTQRTKCVKQP FGU FKURQUKVKHU GV FG NGWT WVKNK-
ʼn&KDQJHPHQWGł«FKHOOHDYHFOHODQFHPHQW UCVKQP RCT NGU WUCIGTU GUV RTKOQTFKCNG RQWT
GHSURJUDPPHVGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH NC RªTGPPKVª FW UGTXKEGa  la compréhension de
QDWLRQDX[ l’énergie disponible, en quantité finie, requiert
ʼn&U«DWLRQGHVSUHPLªUHVDJHQFHV une sensibilisation, voire une formation idoine ;
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH çNG TµNG FG NC OC¯VTKUG FàQWXTCIG GUV ECRKVCNa 
en dépendent l’acceptation du caractère inno-
2001-2010 vant du dispositif par les parties prenantes lo-
,PSOLFDWLRQSOXVIRUWHGXVHFWHXUSULY«HQ cales, la bonne estimation des consommations
WDQWTXłRS«UDWHXU électriques et in fine le paiement du service de
l’électricité. En pratique, c’est la qualité du mon-
Depuis 2010 > Cf. chapitre 2.3.1. teur de projet (qu’il agisse dans le cadre d’une
ʼn5«YROXWLRQGHVm'}'LJLWDOLVDWLRQ maîtrise d’ouvrage déléguée ou d’une maîtrise
'«FDUERQDWLRQ '«FHQWUDOLVDWLRQ d’œuvre) qui fait le succès d’un projet ;
ʼn'LIIXVLRQPDVVLYHGHVV\VWªPHV çKNGUVKPFKURGPUCDNGFGOGVVTGGPRNCEGWPUGT-
SKRWRYROWD±TXHVLQGLYLGXHOV XKEG FG OCKPVGPCPEG FQWDNª FàWPG EJC¯PG
ʼn'«YHORSSHPHQWUDSLGHGHVVROXWLRQV3D\ FàCRRTQXKUKQPPGOGPV dont le coût récurrent
DV\RXJR doit être couvert par la vente de l’électricité, mal-
gré la difficulté que cela peut représenter ;
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde. çKNGUVPªEGUUCKTGFàªNCDQTGTFGHCKTGCEEGRVGT
GVFGOGVVTGGPRNCEGWPOªECPKUOGFGRCKG-
OGPVFWUGTXKEGFGNàªNGEVTKEKVª même si la gra-
tuité de l’utilisation des gisements a été mise en
valeur ; « le soleil n’envoie pas de facture » est une
antienne trop souvent entendue.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 151

Ce bilan a conduit à améliorer la fiabilité


et la maintenance des équipements.
Certains maîtres d’ouvrage ont tenté de mettre
en place des structures institutionnelles spé-
cialisées dans la maintenance des équipements,
comme la cellule technique de la Direction natio-
nale de l’hydraulique et de l’énergie du Mali, pour
l’entretien du parc de pompes solaires.
Les constructeurs ont amélioré la fiabilité des équi-
pements. C’est notamment le cas des pompes,
qui ont bénéficié des progrès de l’électronique,
permettant l’utilisation de moteurs immergés1. En
ce qui concerne les équipements de régulation
et de conversion d’énergie, l’utilisation des semi-
conducteurs ou de microprocesseurs a permis
d’améliorer la fiabilité des systèmes.
Cependant, la rencontre entre des équipements
sophistiqués et des utilisateurs sans connais-
sances particulières sur le sujet, souvent illettrés,
a été la source de beaucoup de déficiences tech-
niques, la notion d’énergie disponible quotidienne
étant difficile à appréhender.

La capitalisation sur ces expériences


a aussi contribué à faire de l’accès
à l’électricité une priorité de l’aide
au développement.
Suite à ces retours d’expérience et grâce à la
prise de conscience qu’ils suscitent, sont lancées
les premières initiatives politiques en faveur de
l’électrification des pays du Sud, et en particulier
celle organisée par le G8 à Gênes en juillet 2001,
puis le Sommet pour un développement durable
à Johannesburg, où l’accès à l’énergie est enfin
considéré comme composante indispensable à
l’atteinte des objectifs du millénaire pour le dével-
oppement, puis identifiée comme priorité des
grands bailleurs de fonds internationaux (cf. chap-
itre 1.1.1.). }

1. Solutions développées par le danois Grundfos puis par Total Energie.

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152 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.3.
L’électrification rurale,
en pleine mutation,
manque toujours de
financements adaptés
aux enjeux.
L’ERD vit actuellement une mutation à la fois prometteuse et
risquée. De nouvelles solutions techniques, rendues possibles
par une conjonction d’innovations ou d’avancées techniques
favorables, permettent d’imaginer un changement d’échelle,
tout en donnant naissance à de nouvelles visions de l’accès à
l’électricité hors réseau, plutôt marchandes, souvent à rebours de
celles de ses pionniers (2.3.1.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 153

Le monde de
l’énergie est entré
Quant aux moyens financiers GDQVXQHªUHGH
disponibles, certes, la prise profonde mutation
marquée par la
de conscience d’une urgence U«YROXWLRQGHVbm'}b
climatique s’accompagne d’une décarbonation,
mobilisation plus large des décentralisation
acteurs et des financements. et digitalisation.
Force est néanmoins de
constater que ces derniers ne &HUWDLQVSDUOHQWGHODU«YROXWLRQmbGHV
b'b}bODG«FDUERQDWLRQDPRUF«H¢OD
couvrent pas encore l’ensemble VXLWHGXSURWRFROHGH.\RWRHWDPSOLŦ«H
des besoins, dans une situation DYHFOł$FFRUGGH3DULVbODG«FHQWUDOLVDWLRQ

où les capitaux extérieurs HQWUD°Q«HSDUODEDLVVHGHVSUL[GHV


«QHUJLHVUHQRXYHODEOHVHWODGLJLWDOLVDWLRQ
restent nécessaires pour pallier TXLVHG«YHORSSHDYHFODGLIIXVLRQGH
l’incapacité des Etats à financer FRPSWHXUVmbLQWHOOLJHQWVb}bHWOłDYªQHPHQW
GHFRQVRPPDWHXUVSURGXFWHXUV
les services de base par les &HPRXYHPHQWG«M¢ODUJHPHQWHQ
recettes fiscales (2.3.2.). PDUFKHGDQVOHVSD\VGHOł2&'(WRXFKH
PDLQWHQDQWOHVSD\VGX6XGHQSDUWLFXOLHU
DIULFDLQV

6RXUFHb Christian de Gromard et Stéphane His.


« Évolutions, révolutions et inerties dans l’énergie »,
Afrique Contemporaine 1-2, no 261-262 (2017).

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154 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.3.1.
Depuis dix ans, de multiples évolutions
viennent élargir le champ des possibles
pour l’électrification rurale décentralisée.

Dans les pays du Sud, l’ERD a longtemps été proposant des offres de services énergétiques
l’apanage d’industriels pionniers et de quelques suivant des schémas commerciaux originaux,
ONG, dans le cadre d’initiatives soutenues finan- sur un marché qui leur est d’autant plus favor-
cièrement par la communauté internationale (cf. able qu’il est peu régulé.
chapitre 2.2.2.). C’est ainsi toute la chaîne de valeur de l’accès
à l’électricité qui se trouve modifiée  : produc-
Mais dans la dernière décennie, une conjonction tion et stockage, distribution et pilotage, usage…
de phénomènes a contribué à un intérêt renou- Les développements qui suivent présentent de
velé des acteurs du secteur électrique en Afrique, manière synthétique les différentes dimensions
y compris celui des grands bailleurs de fonds in- de cette mutation profonde que traverse le do-
ternationaux, déçus par les résultats des aides maine, et qui se poursuit, sans qu’il soit possible
apportées aux sociétés nationales pour dévelop- d’en restituer pleinement les effets à l’heure où cet
per l’accès à l’électricité par extension de réseau. ouvrage est écrit.
Trois sources de rupture, convergentes, inter-
dépendantes et simultanées, ont impulsé une dy- L’urgence de la lutte contre le
namique nouvelle pour l’électrification rurale dans changement climatique accélère
les pays du Sud, ouvrant une voie prometteuse la mise en œuvre des politiques
pour changer d’échelle : de décarbonation.
çNCRTKUGFGEQPUEKGPEGINQDCNGFGNàWTIGPEGFG L’alerte environnementale lancée dans les
NC NWVVG EQPVTG NG EJCPIGOGPV ENKOCVKSWG qui années 1960 et 1970 avait été entendue des
favorise les énergies renouvelables et les poli- pionniers de l’accès à l’électricité, qui ont déve-
tiques de maîtrise des consommations ; loppé des solutions décentralisées s’appuyant
çNG EJCPIGOGPV FG RCTCFKIOG VGEJPQNQIKSWG sur les énergies renouvelables. Aujourd’hui, leur
TGRQUCPVUWTSWCVTGRKNKGTUa cercle s’est élargi. Bien que les rapports succes-
- la révolution numérique, sifs du Groupe d’experts intergouvernemental sur
- la baisse du coût des équipements PV, l’évolution du climat (GIEC) démontrent globale-
- la diffusion des récepteurs basse consommation, ment une incapacité des acteurs économiques et
- les progrès faits en matière de stockage. des pouvoirs publics à prendre des mesures à la
Ces deux phénomènes, en créant de nouvelles hauteur des enjeux, il est indéniable que la révolu-
opportunités d’affaires, donnent naissance à un tion énergétique est en marche, grâce à une me-
troisième : nace qui se matérialise (cf. graphe).
çNC TªXQNWVKQP FG NC FKUVTKDWVKQP qui se traduit
par l’arrivée de multiples acteurs privés

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 155

'HVLQQRYDWLRQVmbPDGHLQ$IULFDb}SRXUG«YHORSSHU
OłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«SRXUWRXV
3RXUG«YHORSSHUOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«SRXUWRXVVXUOHFRQWLQHQWGHQRPEUHXVHVLQLWLDWLYHV
DIULFDLQHVYRLHQWOHMRXUHWWHQWHQWGHUHOHYHUOHG«Ŧ
%ODFN6WDU(QHUJ\VRFL«W«JKDQ«HQQHGHVROXWLRQVGHSURGXFWLRQ«OHFWULTXHKRUVU«VHDXH[SORLWH
G«M¢XQHTXLQ]DLQHGHPLQLU«VHDX[(OOHDGłDLOOHXUV«W«U«FRPSHQV«HSDUOHSUL[(')3XOVH$IULFD
/DVWDUWXS-DFLJUHHQIRQG«HSDUOD1LJ«ULHQQH0DULDPD0DPDQHDG«YHORSS«XQHVROXWLRQ
¢GRXEOHE«Q«ŦFHTXLG«SROOXHOHŧHXYH1LJHUWRXWHQSURGXLVDQWHQJUDLVHW«OHFWULFLW«/HV
MDFLQWKHVGłHDXQXLVLEOHVSRXUODELRGLYHUVLW«VRQWXWLOLV«HVSRXUSURGXLUHGXELRJD]SRXYDQW¬WUH
WUDQVIRUP«HQVXLWHHQ«QHUJLH«OHFWULTXH

3DUDLOOHXUVDŦQGHVWLPXOHUFHWWHG\QDPLTXHGHVFHQWUHVGłDFFRPSDJQHPHQW
¢OłHQWUHSUHQHXULDWHW¢OłLQQRYDWLRQGDQVOHGRPDLQHGHOł«QHUJLHŧHXULVVHQW«JDOHPHQW
sur le continent.
/łDVVRFLDWLRQ(QHUJ\*HQHUDWLRQFU««HSDUOD)UDQFR&RQJRODLVH$VWULD)DWDNLHWEDV«H¢/RP«
DFFRPSDJQHGHSXLVGHVSRUWHXUVGHSURMHWVDŦQGHOHVVRXWHQLUGDQVOHG«YHORSSHPHQWGH
VROXWLRQV«QHUJ«WLTXHVLQQRYDQWHVDERUGDEOHVHWGLIIXVDEOHV¢JUDQGH«FKHOOH'HVmbSURPRWLRQVb}
Gł«WXGLDQWVHQWUHSUHQHXUVYHQXVGX&DPHURXQGH0DGDJDVFDUGł(WKLRSLHHWGłDXWUHVSD\VGX
FRQWLQHQWRQW«PHUJ«GHVVROXWLRQVWHOOHVTXH+\GUR3RZHUXQJURXSH«OHFWURJªQHIRQFWLRQQDQW
¢OłK\GURJªQHRX+DQG&UDQN3RZHUXQJ«Q«UDWHXU¢PDQLYHOOHUHFKDUJHDEOHVDQV«OHFWULFLW«

6RXUFHVb
Rémy Nsabimana, « Jacigreen : la dépollueuse du fleuve Niger », BBC News Afrique (en ligne), 2017.
« 4 projets innovants récompensés par le Prix EDF Pulse Africa 2018 », Le Monde de l’Énergie, 2018, https://www.
lemondedelenergie.com/innovations-prix-edf-pulse-africa-2018/2018/12/27/.
« Energy Generation », https://www.energy-generation.org/.

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156 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Dix-sept des dix-huit années les plus chaudes jamais


enregistrées appartiennent au XXIeVLªFOH
HVWOłDQQ«HODSOXVFKDXGHMDPDLVREVHUY«HGHSXLVOHVSUHPLHUVUHOHY«V«WDEOLVHQ
/DWHPS«UDWXUH¢ODVXUIDFHGHVWHUUHVD«W«GHr&VXS«ULHXUH¢ODPR\HQQHGXXXHVLªFOH
WDQGLVTXHODWHPS«UDWXUH¢ODVXUIDFHGHVRF«DQVD«W«GHr&VXS«ULHXUH

6XLYHQWH[¨TXROHVDQQ«HVHW r&HQPR\HQQH /łDQQ«HD«W«ODTXDWULªPH


DQQ«HODSOXVFKDXGHDYHFXQHWHPS«UDWXUHPR\HQQHGXJOREHGHr&

6RXUFHb NOAA, « Annual checkup for the planet » (Washington, D.C, 2017).

Nombre de jours de chaleur extrême au niveau mondial

jours au-dessus
du 90e percentile

80

70

60

50

40

30

20

10

0
51

58

65

72

79

86

93

00

07

14
19

19

19

19

19

19

19

20

20

20

6RXUFHb NOAA, « State of the Climate Report » (Washington, D.C, 2018).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 157

Electrification rurale décentralisée l’efficacité énergétique est entrée dans les mœurs
et efficacité énergétique sont liées. dans les pays industrialisés. Elle est stricto sensu
Née du premier choc pétrolier, longtemps consi- le rapport entre la quantité d’énergie récupérée et
dérée comme incompatible avec la croissance, l’énergie consommée (valeur comprise entre 0 et

(IŦFDFLW««QHUJ«WLTXH

/łHIŦFDFLW««QHUJ«WLTXHU«VXOWHGHOłDSSOLFDWLRQFRPELQ«HGHSOXVLHXUVSULQFLSHVb
ʼnRSWLPLVDWLRQGHVFRQVRPPDWLRQV UHFKHUFKHGHODPRLQGUHLQWHQVLW««QHUJ«WLTXH¢VHUYLFH«JDO b
ʼnXVDJHUDWLRQQHOGHOł«QHUJLH JU¤FH¢GHVSURFHVVXVHWRXWLOVSOXVHIŦFDFHV b
ʼnUHFKHUFKHGł«FRQRPLHVGł«QHUJLH U«GXFWLRQGHVJDVSLOODJHVHWGHVFRQVRPPDWLRQVLQXWLOHV 
/HVE«Q«ŦFHVDWWHQGXVVRQWPXOWLSOHVb
ʼnU«GXLUHOłHPSUHLQWH«FRORJLTXH HQGLPLQXDQWOłHPSUHLQWH«QHUJ«WLTXHHWSDUIRLVOłHPSUHLQWH
FDUERQH b
ʼnDXJPHQWHUODV«FXULW««QHUJ«WLTXHHQIDYRULVDQWOłDGDSWDWLRQDXFKDQJHPHQWFOLPDWLTXHHWOD
OXWWHFRQWUHOHV«PLVVLRQVGHJD]¢HIIHWGHVHUUH

Maîtrise de la demande énergétique

RÉDUIRE LES BESOINS

SOBRIÉTÉ &KDQJHPHQWGH
FRPSRUWHPHQWHW
GłRUJDQLVDWLRQGHODVRFL«W«

N CE
NDA RÉDUIRE L’ÉNERGIE
TE

()),&$&,7‹ 1«FHVVDLUHDX[EHVRLQV
WHFKQRORJLHHWSURF«G«V
FRQVWUXFWLIV

NÉ PRODUIRE DE L’ÉNERGIE
GA
WA
TT
5(1289(/$%/(6 3URSUHHWLQ«SXLVDEOH
VROHLO PLOOLDUGV
GłDQQ«HV¢YLYUH

6RXUFHb « Association négaWatt. La démarche négaWatt ». https://negawatt.org/La-demarche-negaWatt

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


158 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

100 %). Mais le champ de signification de cette ex- désenclavement de l’Afrique et de son dével-
pression s’est élargi pour devenir un principe fon- oppement agricole, elles renouvellent l’intérêt
damental de la transition énergétique : l’efficacité porté par les bailleurs de fonds internationaux à
énergétique vise à réduire les coûts (directs et in- la question de l’électrification rurale de l’Afrique
directs) écologiques, économiques et sociaux in- subsaharienne et à la généralisation de l’utilisation
duits par la production, le transport et la consom- des énergies renouvelables.
mation d’énergie (cf. encadré).
Jusqu’en 2015, la très grande majorité des finance-
L’accélération de la mise en œuvre de politiques ments de l’accès à l’électricité étaient orientés vers
de décarbonation est favorable au développe- l’extension des réseaux de distribution électrique.
ment de l’ERD, qui ne peut s’affranchir de mesures Désormais, la part des projets d’ERD par énergie
d’efficacité énergétique, décisives pour la perfor- renouvelable (en cours ou en montage) augmente
mance environnementale, ni de la qualité de service dans les financements (cf. chapitre 2.3.2.), malgré
du système installé. L’usage rationnel de l’électricité les contraintes opérationnelles qui restent en par-
est une thématique essentielle des campagnes de tie inchangées (cf. chapitre 2.4.).
sensibilisation qui accompagnent le déploiement Les stratégies des bailleurs de fonds sont
d’un projet d’ERD (cf. chapitre 2.4.2.). multiples, allant de la subvention au prêt conces-
Par ailleurs, énergies renouvelables et efficacité sionnel ou privé, jusqu’à la couverture de risques
énergétique sont « économiquement » liées : bien (cf. chapitre 2.3.2.).
que les prix du PV aient drastiquement baissé,
le Wh produit par les petites centrales PV coûte Le changement de paradigme
cher et la production journalière est limitée ; moins technologique rend possible une
les récepteurs consomment d’énergie, plus les accélération de l’électrification
abonnés peuvent être nombreux. Pour ces rai- rurale par énergie solaire.
sons, le développement du PV a toujours été ac- Plusieurs avancées technologiques, déjà gé-
compagné de la recherche de solutions «  basse néralisées ou encore en cours d’expérimentation,
consommation  » pour les usages de l’électricité concourent à révolutionner la conception des so-
(d’abord tubes fluorescents puis ampoules LED lutions d’électrification décentralisées par éner-
et appareils à courant continu). gies renouvelables :
A noter que certains analystes, comme Jeremy çNCTªXQNWVKQPPWOªTKSWGa
Rifkin, vont encore plus loin, faisant de la généralisa- çNC DCKUUG FW EQ¼V FGU ªSWKRGOGPVU
tion des solutions décentralisées l’unique chance de photovoltaïques ;
réussir la transition écologique nécessaire1.

Cela induit-il pour autant plus


1. Jeremy Rifkin appelle de ses vœux une troisième révolution industrielle
de financement disponible pour notamment fondée sur une production d’électricité décentralisée et une
énergie circulant dans un réseau dit « intelligent », à l’instar de l’information sur
les projets d’accès à l’électricité ? Internet. Le second pilier de cette troisième révolution industrielle consiste à
transformer chaque bâtiment en minicentrale intelligente capable d’injecter
Les ambitions de lutte contre le changement cli- dans le réseau son excédent de production et de prélever de l’énergie
matique ont été concrétisées par l’accord de additionnelle dans le réseau quand son système autonome n’en produit pas
suffisamment.
Paris adopté par les 195 délégations en décem-
Pour aller plus loin : Jeremy Rifkin, La troisième révolution industrielle.
bre 2015. Jointes aux injonctions en faveur du Comment le pouvoir latéral va transformer (Paris: Les Liens qui Libèrent, 2012).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 159

Les limites de l’automatisation en ERD

En Guyane, XQSURJUDPPHGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«HD«W«ODQF«LO\DSOXVGHGL[DQV
SRXUOłDOLPHQWDWLRQHQ«OHFWULFLW«GHTXDWUHYLOODJHVVXUOH+DXW0DURQLGRQWOHF«OªEUHYLOODJH
Gł$QW«FXP3DWD/DPD°WULVHGłRXYUDJHHVWDVVXU«HSDUOD&RPPXQDXW«GHFRPPXQHVGHOł2XHVW
JX\DQDLVOHVFHQWUDOHVGHYDQW¬WUHSULVHVHQH[SORLWDWLRQSDU(')6(,

,OVłDJLWGHFRQVWUXLUHGHVFHQWUDOHVK\EULGHV 39HWGLHVHO HWGHVPLQLU«VHDX[«OHFWULTXHVSRXU


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HVWDVVXU«SDU(')6(,GHSXLVOHFHQWUHGHFRQWU¶OHGH&D\HQQHJU¤FH¢XQPRQLWRULQJG«YHORSS«
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FKDUJHRQGXOHXUVJURXSH«OHFWURJªQHU«VHUYHGHŦRXOFLUFXLWŦRXOHQWHUU«Ŋ YLDXQHOLDLVRQVDWHOOLWH
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LPSRV«¢OłHQVHPEOHGXPDW«ULHOODYRORQW«GHSLORWHU¢GLVWDQFHVDQVUHODLKXPDLQVXUSODFH
RQWFRQVLG«UDEOHPHQWIUHLQ«ODPLVHHQVHUYLFHGHFHVFHQWUDOHVSXLVUHQGXWUªVFRPSOH[HOHXU
H[SORLWDWLRQ

6XUOHSULQFLSHFHVFHQWUDOHVK\EULGHVFRUUHVSRQGHQW¢XQVDYRLUIDLUHDFTXLVGHORQJXHGDWH
&łHVWODFRPSOH[LW«GXV\VWªPHGHSLORWDJH¢GLVWDQFHHWGHOłDXWRPDWLVPHHQWUHOHFLUFXLWŦRXOOH
JURXSH«OHFWURJªQHHWODFHQWUDOH39TXLIUDJLOLVHODJHVWLRQGHFHVFHQWUDOHVIDLWHmb¢OłDYHXJOHb}DX
G«WULPHQWGRQFGXVHUYLFHUHQGXDX[SRSXODWLRQV

2UVXUGHWHOVWHUULWRLUHVHWFRPPHFHODD«W«ODUJHPHQWG«YHORSS«HQ$IULTXHGHSXLVGHVGL]DLQHV
GłDQQ«HVLOHVWLQGLVSHQVDEOHGHWUDYDLOOHUDYHFGHVV\VWªPHVVLPSOHV HWGRQFUREXVWHV TXL
G«OLYUHQWOHVHUYLFHDWWHQGXHWVXUWRXWGHVłDSSX\HUVXUOHVSRSXODWLRQVORFDOHVDŦQGHGLVSRVHU
GHUHVVRXUFHVHWGHFRPS«WHQFHVELHQSOXVHIŦFDFHVSRXUOHSLORWDJHGHVFHQWUDOHVDXTXRWLGLHQ
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UHODLVXUVLWHSRXUGHVV\VWªPHVSOXVŦDEOHVHWXQIRQFWLRQQHPHQWHQERQQHLQWHOOLJHQFHDYHFOHV
KDELWDQWVFRQVRPPDWHXUV

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


160 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

çNGURTQIT©UHCKVUGPOCVK©TGFGUVQEMCIGa collecte des paiements est coûteuse, notamment


çNCFKĂWUKQPFGUTªEGRVGWTUDCUUGEQPUQOOCVKQP si elle comporte de nombreuses opérations de
Cette conjonction place l’utilisation de l’énergie recouvrement.
solaire au cœur du développement de l’ERD,
dont elle vient également renforcer la viabilité Avec le prépaiement, c’est-à-dire l’achat d’un
économique. Dans la très grande majorité des crédit d’électricité (un volume de kWh, une durée
sites, le photovoltaïque devient la solution d’accès d’utilisation), chaque client paye sa consommation
à l’électricité la moins chère si l’on considère le d’électricité à venir à la mesure de sa capacité fi-
coût global actualisé sur vingt ans  ; certains ex- nancière. Ce système assure à l’exploitant un paie-
perts prédisent sa très large généralisation dans ment de l’électricité consommée et limite les frais
les prochaines décennies. Selon l’AIE, la puis- de recouvrement (en revanche, le volume d’énergie
sance totale solaire installée représentera 16  % consommée dépend des revenus des usagers).
en 2030, contre 2 % en 20161 (tous types de solu- Cette innovation applicable aux systèmes so-
tions confondus, centralisées ou décentralisées). laires individuels (cf. chapitre 3.2.2. sur le PAYG),
mais aussi aux services délivrés par les kiosques
La révolution numérique simplifie énergie (cf. chapitre 3.4.1.) ou par les miniréseaux
le suivi des consommations locaux (cf. chapitre 3.5.), permet de dématéri-
et le paiement de l’électricité. aliser une grande partie du processus de vente
L’équipement rapide des zones rurales en télé- et de gestion  : les codes de recharge peuvent
phonie mobile (cf. chapitre 1.3.2.), associé aux être envoyés par SMS aux usagers et l’utilisation
applicatifs de transaction (mobile money), per- peut être contrôlée à distance (dépassement des
met de généraliser des modalités de paiement de seuils de puissance ou d’énergie, branchement
l’électricité plus conviviales et mieux adaptées au d’appareils non autorisés).
contexte africain, quel que soit le schéma de pro-
duction. Inspiré par le système de carte prépayée, Le pilotage à distance réduit les besoins en res-
massivement utilisé pour l’achat de crédits té- sources humaines et allège d’autant les coûts
léphoniques sur le continent, le prépaiement ou d’investissement. Néanmoins, ces solutions
pay-as-you-go (PAYG) de l’électricité devient induisent des dépenses additionnelles pour
possible, même pour de faibles sommes. l’opérateur, qui ne doivent pas être sous-estimées
En milieu rural, le rythme de l’économie est journalier, au moment de l’élaboration d’un business plan*  :
ou saisonnier pour les agriculteurs aptes à vendre par exemple, les coûts d’exploitation spécifiques
leur production dès la fin des récoltes. Hormis pour (abonnement, achats de codes) ou les dépenses
les fonctionnaires percevant un traitement fixe en fin liées à la fragilité technologique des compteurs
de mois, les revenus futurs peuvent difficilement être intelligents et à la gestion informatique (complexe
anticipés ; seul le disponible est certain. en milieu rural enclavé).

Aussi, le mécanisme de facturation mensu-


elle basée sur la consommation réelle est-il
peu adapté. L’usager qui ne dispose pas de la
trésorerie suffisante risque la coupure du ser- 1. Agence Internationale de l’Énergie, « Energy Access Outlook 2017, From
vice en cas d’impayé. Du côté de l’opérateur, la Poverty to Prosperity » (Paris, 2017).

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 161

(YROXWLRQGHODSXLVVDQFHSKRWRYROWD±TXHLQVWDOO«H

Puisance
installée (GW)

300

250 France
Europe
Monde
200

150

100

50

0
6

07

10

11

12

13

14

15

16
0

0
0

20

20

20

20

20
20

20
20
20

20
20

6RXUFHb RTE.

La baisse du coût des composants Le transfert des fabrications vers l’Asie (princi-
photovoltaïques autorise une large palement la Chine) et l’augmentation de la de-
démocratisation des solutions solaires mande ont favorisé une baisse très significative
décentralisées. du prix des modules, véritables cœurs des sys-
Porté par la lutte contre le changement clima- tèmes photovoltaïques (cf. chapitre 3.1.2.). Selon
tique, le développement des énergies renou- l’IRENA, depuis 2009, le prix des modules PV a
velables s’est accéléré à partir de 2002 grâce à baissé de 80 %, tandis que le coût de l’énergie so-
la mise en place en Europe, aux Etats-Unis et au laire PV a baissé de 73 % entre 2010 et 20171.
Japon de politiques incitatives visant à permettre Le prix «  sortie d’usine  » d’un module photo-
à chacun de devenir producteur, autoconsomma- voltaïque* était de 20 €/watt-crête en 1993, il est
teur et vendeur d’électricité. de 0,30 €/Wc en 2018, soit une baisse de près de
100 % en euros constants, et cette tendance va se
Ce développement s’est accompagné de deux poursuivre2. Le budget d’investissement dans une
conséquences techniques dont la conjonction
fait baisser le coût d’une infrastructure solaire et
1. Agence internationale pour les énergies renouvelables, « Off grid renewable
rend l’ERD par énergie solaire très compétitive : energy solutions to expand electricity access : An opportunity not to be
çNCDCKUUGEQPVKPWGFWEQ¼VWPKVCKTGFGUOQFWNGUa missed » (Abu Dhabi, 2019).
2. Daniel Lincot, « Où en est la conversion photovoltaïque de l’énergie solaire ? »,
çNàCWIOGPVCVKQPRTQITGUUKXGFGNGWTTGPFGOGPV Photoniques, no 93 (2018).

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162 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

(YROXWLRQGHVUHQGHPHQWVGHVFHOOXOHVSKRWRYROWD±TXHVVHORQOHVWHFKQRORJLHV

Efficacité
des cellules
photovoltaïques (%)

30
Silicium amorphe
Silicium monocristallin
25 Silicium polycristallin

20

15

10

0
70

80

90

10

20
0

20

20
19

19
19

20

6RXUFHb « NREL, Transforming Energy », https://www.nrel.gov/.

&RXUEHGłH[S«ULHQFHGHVSUL[GHVPRGXOHVSKRWRYROWD±TXHV

6RXUFHb AIE, « Energy Access Outlook 2017, From Poverty to Prosperity » (Paris, 2017).

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 163

infrastructure solaire a donc, pour un même vo- coûts d’une infrastructure (ou, pour un même bud-
lume de Wc requis, fondu depuis les années 1990. get, permet d’en augmenter la capacité).
Cette baisse se double de l’amélioration régulière
des performances de ces mêmes modules. Le ren- Au-delà des seuls modules, l’augmentation du nom-
dement de conversion photovoltaïque est passé bre d’installations a permis, par économie d’échelle,
de moins de 14  % dans les années 1980 à 20  % de réduire significativement le prix des autres élé-
aujourd’hui, et il atteindra demain sans doute 30 %1. ments d’un système solaire (composants, char-
L’amélioration du rendement diminue la surface pentes de fixation, régulateurs et convertisseurs
de capteurs requise pour délivrer la même quan-
tité d’énergie. Cela fait mécaniquement baisser les 1. Source : « Institut photovoltaïque d’Île-de-France», https://www.ipvf.fr/.

4XHOOHHVWODGLII«UHQFHHQWUHV\VWªPHV39
FRQQHFW«VDXU«VHDXHWV\VWªPHV39DXWRQRPHV
décentralisés ?

/HVV\VWªPHV39FRQQHFW«VDXU«VHDXIRQFWLRQQHQWHQJ«Q«UDWHXUVGHFRXUDQWLOVLQMHFWHQWDXŦO
GXVROHLOOł«OHFWULFLW«SURGXLWHVDQVVWRFNDJH6LOHU«VHDXHVWVWDEOHHWSU«VHQWSUªVGHbGH
Oł«OHFWULFLW«VRODLUHSHXW¬WUHYDORULV«HDYHFGHVV\VWªPHVVLPSOHVHWUREXVWHV
&HVFHQWUDOHV39UDFFRUG«HVDXU«VHDXGRQWOHVSXLVVDQFHVXQLWDLUHVDWWHLJQHQWDXMRXUGłKXL
SOXVLHXUVGL]DLQHVGH0:FE«Q«ŦFLHQWGłXQHIIHWGł«FKHOOHHWGHWUªVERQQHVSHUIRUPDQFHV
SHUPHWWDQWGłRSWLPLVHUOHVG«SHQVHVGłLQYHVWLVVHPHQW &$3(; HWGłH[SORLWDWLRQ 23(; 
(Q$IULTXHVXEVDKDULHQQHOHVFHQWUDOHV39UDFFRUG«HVDXU«VHDXDXGHO¢GX0:FVHG«SORLHQW
SRXUGHVFR½WVXQLWDLUHVGH¢ŏ:FDWWHLJQDQWGHVFR½WVGHSURGXFWLRQGł«OHFWULFLW«
DFWXDOLV«VVXUYLQJW¢WUHQWHDQVGH¢FŏN:K

/HVV\VWªPHV39DXWRQRPHV FIFKDSLWUH VRQWGHFRQFHSWLRQSOXVFRPSOH[HHWSOXVRQ«UHXVH


FHTXLHVWHQJUDQGHSDUWLHG½DX[EDWWHULHVHW«TXLSHPHQWVDVVRFL«V FKDUJHXUVSURWHFWLRQV
«OHFWULTXHVVS«FLŦTXHV 'HSOXVOHVUHQGHPHQWVVRQWPRLQVERQVbSHUWHVVLJQLŦFDWLYHVGDQVOHV
EDWWHULHVYDORULVDWLRQLUU«JXOLªUHGXSURGXFWLEOHVRODLUH
,OHQU«VXOWHGHVFR½WVGłLQVWDOODWLRQGH¢ŏ:FHWGHVFR½WVGXN:KUHVWLWX«VXUXQHDQDO\VH
«FRQRPLTXH¢YLQJWDQV LQFOXDQWGHIDLWSOXVLHXUVUHQRXYHOOHPHQWVRQ«UHX[ SURFKHVGHŏN:K

&HVGHX[DSSOLFDWLRQVGHOł«QHUJLHSKRWRYROWD±TXHVRQWŦQDOHPHQWWUªV«ORLJQ«HVbHOOHVQłRQWGH
SRLQWFRPPXQTXHOHFKDPSGHFDSWHXUVSKRWRYROWD±TXHV,OHVWLPSRUWDQWGHQHSDVFRQIRQGUH
OHVPRGHVGHIRQFWLRQQHPHQWHWOHVDVSHFWV«FRQRPLTXHV

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


164 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

d’énergie). Le prix global d’une infrastructure ainsi que par l’absence de batteries de stockage
RJQVQXQNVC°SWGFàªNGEVTKăECVKQPTWTCNGKPENWCPV dans le premier cas.
production, régulation et stockage pour une
puissance de l’ordre de 30  kWc installée sur Une révolution des technologies
UKVGCªVªFKXKUªRCTRNWUFGVTQKUFGRWKUNGOKNKGW de stockage se profile à l’horizon.
des années 80 : il est d’environ de 8 €/Wc en 2018, Absolument nécessaire quand on fait appel aux
alors qu’il avoisinait les 30 € en 19851. énergies renouvelables, par essence intermit-
Il faut cependant souligner que le coût d’une infra- tentes et variables, le stockage d’électricité reste
structure d’ERD est significativement supérieur à le maillon faible des systèmes décentralisés
celui d’une centrale solaire connectée au réseau. (cf.  chapitre 3.1.2.). Cependant, les efforts de re-
La différence du prix du Wc installé entre systèmes cherche engagés pour répondre aux besoins de
centralisés et décentralisés est significative : la mobilité verte et de la décarbonation du secteur
ç¡GWTQURCT9ERQWTNGUU[UV©OGU28EQPPGE- électrique ouvrent d’intéressantes perspectives.
tés au réseau (de puissance d’environ 1 MW) ; La technologie de stockage dite «  au plomb  »,
ç¡GWTQU9ERQWTNGUU[UV©OGUFªEGPVTCNKUªU qui équipe la très grande majorité des systèmes
(de puissance inférieure à 100 kWc).
Elle s’explique notamment par l’effet de taille et
les conditions d’acheminement et d’installation, 1. Source : Fondation Energies pour le Monde.

© Fondation Énergies pour le Monde

Technologies de stockage Les batteries d’une minicentrale solaire de Madagascar

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 165

YV
comparatif technique de deux installations

&RPSDURQVOHVDUFKLWHFWXUHVWHFKQLTXHVGłXQV\VWªPHSKRWRYROWD±TXHDXWRQRPHFRQ©XHWLQVWDOO«
HQHWGłXQV\VWªPHFRQ©XHWLQVWDOO«HQOHVGHX[GHYDQWU«SRQGUH
¢ODP¬PHGHPDQGHHQ«OHFWULFLW«GłHQYLURQN:KMRXU

 

ʼnPRGXOHVSKRWRYROWD±TXHV MODULES ʼnPRGXOHVSKRWRYROWD±TXHV


GHb:F GHbN:F
ʼn5HQGHPHQWPR\HQGHb ʼn5HQGHPHQWPR\HQGHb
VRLWXQHVXUIDFHSKRWRYROWD±TXH VRLWXQHVXUIDFHGHP2
GłHQYLURQP2
ʼn8QFR½WIRLVLQI«ULHXU

ʼn3OXVLHXUVU«JXODWHXUV30: RÉGULATEUR ʼn8QU«JXODWHXUXQLTXH0337¢KDXW


HQSDUDOOªOH UHQGHPHQWSOXVSHUIRUPDQWHWPRLQV
RQ«UHX[

ʼn8QRQGXOHXUVLPSOH ONDULEUR ʼn8QFRQYHUWLVVHXUELGLUHFWLRQQHO


LQWHOOLJHQWSRXYDQWUHFHYRLUXQHVRXUFH
GłK\EULGDWLRQ
U«VHDXJURXSH«OHFWURJªQH
ʼn*DLQHQSHUIRUPDQFHHWHQ«YROXWLYLW«
SRXUXQFR½W«TXLYDOHQW

68,9, ʼn8QGLVSRVLWLIGHW«O«PRQLWRULQJ*356
SRXUOHVXLYL¢GLVWDQFHSRXUXQFR½W
DGGLWLRQQHOG«ULVRLUH

ʼn%DWWHULHDXSORPEGXW\SH PARC ʼn%DWWHULHVO«JªUHPHQWSOXVSHUIRUPDQWHV


2S=V BATTERIES SRXUXQFR½WIDLEOHPHQWVXS«ULHXU

$XELODQbOłHQVHPEOHGHOł«FRV\VWªPHWHFKQRORJLTXHHQWRXUDQWXQGLVSRVLWLI
Gł«OHFWULŦFDWLRQDXWRQRPHSKRWRYROWD±TXHDIRUWHPHQW«YROX«ŊVDXIOH
dispositif de stockage.

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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166 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

photovoltaïques actuellement en service en zone miniréseaux solaires hybrides (cf. chapitre 3.5.1.) ;
rurale, présente plusieurs inconvénients, qui mo- çNGU RGVKVU U[UV©OGU FàªNGEVTKăECVKQP TWTC-
tivent la recherche de solutions de stockage al- le décentralisée ont déjà adopté ces nou-
ternatives de la part des développeurs de projets XGNNGUVGEJPQNQIKGUa on trouve notamment des
d’électrification décentralisée. batteries au lithium-ion ou nickel-métal hydrure
D’une part, cette technologie a atteint sa maturité. dans une grande partie des systèmes individuels
Dépendant donc des cours du plomb plutôt que solaires en PAYG (cf. chapitre 3.2.2.) et dans les
de gains industriels, le prix des batteries au plomb lampadaires solaires (cf. chapitre 3.3.3.) ;
baisse légèrement tandis que le coût des autres çles baisses de prix annoncées laissent pré-
équipements a, lui, fortement chuté. Les dé- UCIGTWPGªXQNWVKQPTCRKFGFGUU[UV©OGURNWU
penses de stockage pèsent donc de plus en plus KORQTVCPVU
dans le budget des projets : CNQTUSWàGPNG
EQ¼VFGNCDCVVGTKGFàWPU[UV©OG28CWVQPQOG La révolution de l’efficacité énergétique
TGRTªUGPVCKV GPXKTQP a  FG NàKPXGUVKUUGOGPV se poursuit, avec des récepteurs
global, il atteint aujourd’hui 30 à 40 %. toujours plus performants et plus
accessibles aux populations du Sud.
D’autre part, la durée de vie limitée des batteries Au Nord, la chasse au gaspillage énergétique a
au plomb, de deux à dix ans dans le contexte cli- conduit la recherche et l’industrie à réaliser des
matique particulier de l’Afrique rurale, induit un gains de performance très significatifs pour la
renouvellement fréquent de matériel. C’est une plupart des récepteurs électriques courants  :
contrainte économique dont se passeraient éclairage, électroménager, multimédia. En dix
volontiers les concepteurs de systèmes et les ans, l’éclairage électrique moderne est passé de
usagers (comment financer ce renouvellement ?), l’ampoule à incandescence à la LED, après un dé-
et qui fait donc obstacle à la pérennité des instal- tour par les équipements fluorescents.
lations. Elle pose enfin le problème du recyclage Aujourd’hui, NGU EQPUQOOCVKQPU FGU CRRCTGKNU
des équipements en fin de vie (cf. chapitre 2.4.3.). ªNGEVTKSWGUFQOGUVKSWGUUQPVFCPUNàGPUGODNG
La recherche, lancée à la fin des années 1990, a FG a  KPHªTKGWTGU ¡ EG SWàGNNGU ªVCKGPV KN [
permis de tester une dizaine de technologies de a vingt ans1. En conséquence, alors qu’il fallait
stockage d’électricité stationnaire autres que 400 Wh chaque jour pour éclairer correctement
le plomb. De nouveaux couples électrolytiques, un foyer en 2005, on obtient aujourd’hui le même
lithium-ion ou nickel-métal hydrure par exemple, service pour 40 Wh, avec un éclairage plus ho-
peuvent répondre aux besoins de l’électrification mogène et plus durable.
décentralisée : Le développement de ces récepteurs à haute ef-
çles industriels européens ont déjà pris le vi- ficacité énergétique favorise l’accès à l’électricité
TCIGa  l’essentiel des gammes de produits pro- des populations économiquement vulnérables
posés par les fabricants de systèmes PV (régu- au Sud  : la réduction de la consommation des
lateurs, chargeurs, convertisseurs bidirection- équipements allège le budget énergétique des
nels) est compatible avec ces différents types ménages. Ces gains d’efficacité énergétique se
de batteries ; les leaders de l’énergie testent des
solutions containerisées équipées de batter-
ies de nouvelle génération pour alimenter des 1. Fondation Energies pour le Monde.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 167

Les risques d’approvisionnement de certains


composants des batteries

/HV«O«PHQWVSU«VHQW«VGDQVFHWHQFDUWVRQWSULQFLSDOHPHQWLVVXVGłXQHQRWHU«FHQWH
GX&RPLW«GHVP«WDX[VWUDW«JLTXHV1

La demande mondiale de batteries est en forte croissance,SRUW«HSDUOHG«YHORSSHPHQWUDSLGH


GHODSURGXFWLRQGł«OHFWULFLW«SDU«QHUJLHVUHQRXYHODEOHVHWVXUWRXWFHOXLGHODPRELOLW««OHFWULTXH
'HVHVWLPDWLRQVGRQQHQWOHVYHQWHVDQQXHOOHVGHEDWWHULHVPXOWLSOL«HVSDUGłLFLHW¢
GłLFL2VDQVSUHQGUHHQFRPSWHOHERRPGHVREMHWVFRQQHFW«VHWDXWUHVSURGXLWVKLJKWHFK

Ces prévisions interrogent sur les risques liés à l’approvisionnement à moyen-long terme des
PDWLªUHVSUHPLªUHVTXLUHSU«VHQWHQW¢bGXFR½WGHVEDWWHULHV/DFURLVVDQFH
GXPDUFK«YDQRWDPPHQWIRUWHPHQWLPSDFWHUODGHPDQGHHQFREDOWHWOLWKLXPXWLOLV«VGDQVOHV
W\SHVGHEDWWHULHVTXLUHPSODFHQWSURJUHVVLYHPHQWOHVEDWWHULHVDXSORPE3

/Hcobalt,SU«VHQWGDQVODSOXSDUWGHVWHFKQRORJLHVGHEDWWHULHVHVWLGHQWLŦ«FRPPHODVXEVWDQFH
ODSOXVFULWLTXHFRPSWHWHQXGHODFRQFHQWUDWLRQGHODSURGXFWLRQPLQLªUHHQ5«SXEOLTXH
G«PRFUDWLTXHGX&RQJR 5'& U«JLRQGHSOXVHQSOXVG«ODLVV«HSDUOHVVRFL«W«VPLQLªUHV
RFFLGHQWDOHVHQUDLVRQQRWDPPHQWGHFRQWUDLQWHV«WKLTXHV
/HlithiumSRXUUDLW¬WUHVRXPLV¢GHVWHQVLRQVQRWDPPHQWVLOHVKDELWXGHVGHFRQVRPPDWLRQ
Qł«YROXHQWSDVYHUVXQPRGªOHSOXVVREUH(Q(XURSHDXMRXUGłKXLVHXOHPHQWbGHVEDWWHULHVDX
OLWKLXPVRQWUHF\FO«HV4'HVUHFKHUFKHVVRQWHQFRXUVSRXUVDVXEVWLWXWLRQSDUOHVRGLXPPRLQV
SHUIRUPDQWPDLVEHDXFRXSSOXVGLVSRQLEOH
3DUDLOOHXUVOHlanthaneWHUUHUDUHXWLOLV«HGDQVOHVEDWWHULHVQLFNHOP«WDOK\EULGH 1L0+ HVWFODVV«
SDUOH%XUHDXGHUHFKHUFKHVJ«RORJLTXHVHWPLQLªUHV¢ULVTXHVIRUWVVXUOHVDSSURYLVLRQQHPHQWV

6RXUFHVb
1. Comité des réseaux stratégiques. « Métaux de la transition énergétique » (2017).
2. Bloomberg New Energy Finance, « New Energy Outlook 2017 » (Washington, D.C, 2017).
3. « Epuisement des ressources naturelles », Encyclo-ecolo, https://www.encyclo-ecolo.com/Epuisement_des_ressources_
naturelles#La_disparition_du_plomb .
4. Clément Fournier, « Les batteries de voitures électriques : notre prochaine catastrophe environnementale ? » e-RSE, 2017,
https://e-rse.net/batteries-voitures-electriques-impact-environnement-27293/.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


168 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

constatent sur de nombreux autres récepteurs


électriques courants (téléviseur, équipement in- L’ADEME
formatique, production de froid), qui deviennent HWOHPLQLVWªUH
également accessibles aux populations rurales de la Transition
disposant d’électricité par système décentralisé. écologique
Cette accessibilité a un effet «  rebond  » et solidaire
(cf.  encadré) qui peut annuler l’effet d’économie  :
accompagnent
avec une démultiplication du nombre d’appareils
électriques présents dans les familles, la facture
l’innovation
énergétique globale reste à peu près stable.
(QSDUH[HPSOHOHPLQLVWªUH
Pour conclure, cette révolution technologique en GHOD7UDQVLWLRQ«FRORJLTXHHWVROLGDLUH
cours qui s’appuie sur le photovoltaïque (reléguant HWOł$'(0(RQWODQF«XQDSSHO¢SURMHWV
au moins temporairement à l’arrière-plan d’autres VXUOHVmbVROXWLRQVLQQRYDQWHVGłDFFªV
options, comme le petit éolien) a des retombées ¢Oł«QHUJLHUHQRXYHODEOHSRXUOHV
rapides en Afrique. Mais elle laisse une question SRSXODWLRQVKRUVU«VHDXb}/łREMHFWLI«WDLW
en suspens :EQOOGPVHCKTGGPUQTVGSWGEGUTG- GHVRXWHQLUOł«PHUJHQFHHWOHODQFHPHQW
VQODªGUUQKGPVDKGPCUUQEKªGU¡WPVTCPUHGTVFG GHSURMHWVGłDFFªV¢Oł«QHUJLHSRUW«VSDU
EQORªVGPEGUGVFGVGEJPQNQIKGU!%CTEGVTCPU- GHVHQWUHSULVHV21*HWRXFROOHFWLYLW«V
fert est seul garant de la pérennité des ouvrages IUDQ©DLVHVHQFRRS«UDWLRQDYHFGHVDFWHXUV
GV FQPE FàWP RQUUKDNG KORCEV FG NàCTTKXªG FG ORFDX[1HXISURMHWVLQQRYDQWVRQW«W«
l’électricité sur un territoire, objectif ultime vers UHWHQXVVXUOHVGRVVLHUVSU«VHQW«V
lequel tend tout projet d’accès à l’électricité. C’est ,OVVRQWPLVHQāXYUHHQ$IULTXH
une question essentielle, à laquelle l’ouvrage tente %«QLQ%XUNLQD)DVR&DS9HUW
des réponses concrètes, d’abord en mettant en 0DGDJDVFDU0DXULWDQLH2XJDQGD
exergue les bonnes pratiques pour les porteurs de HW7RJR HWRQW«W«U«FRPSHQV«V
projets (cf. chapitres 2.4.1. à 2.4.4.), ensuite en émet- SRXUOHXUFDUDFWªUHLQQRYDQW
tant des préconisations pour les différents acteurs WHFKQRORJLTXH SURGXFWLRQGł«QHUJLH
sectoriels (cf. partie 4). VWRFNDJHWHFKQRORJLHVGłXVDJH
GHOł«QHUJLH HWRXRUJDQLVDWLRQQHO
P«FDQLVPHVGHŦQDQFHPHQWGH
SDLHPHQWPRGªOHVGłDIIDLUHVPRGHV
GHJRXYHUQDQFHHWF 

3RXUHQVDYRLUSOXVVXUOHVSURMHWVVRXWHQXVb
Bubacar Diallo et al., « Solutions innovantes
pour l’accès à l’énergie hors réseaux »
(Angers : ADEME, 2018), https://www.ademe.fr/
solutions-innovantes-lacces-a-lenergie-hors-reseaux.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 169

Profitant de l’ouverture d’un véritable Pour conclure, les ruptures technologiques que
marché, le secteur privé est proactif, connaît depuis dix ans l’industrie photovoltaïque,
apportant de nouvelles solutions. favorisée par la nécessité d’une révolution
L’évolution favorable du photovoltaïque, ainsi énergétique verte, créent un véritable marché
que les perspectives d’engagement de plusieurs qui se matérialise aujourd’hui par la multiplicité
dizaines de milliards d’euros en faveur de l’accès des offres de service. Pour autant, cet essor est-
à l’électricité en Afrique (cf. chapitre 2.3.2.) crée- il synonyme d’accès universel à l’horion 2030 ?
nt un marché que le secteur privé scrute avec un S’accompagne-t-il de financements adaptés,
intérêt grandissant. Certains acteurs reviennent disponibles et suffisants ? Dans un domaine où
après une période de retrait, d’autres arrivent. les investissements matériels et immatériels
Quand bien même les modèles d’affaires ne sont sont significatifs et déterminants, c’est évidem-
pas encore stabilisés, de nouveaux acteurs appa- ment une problématique décisive. }
raissent dans les pays industrialisés, émergents
et en Afrique (promoteurs, bureaux d’études,
fabricants, ensembliers, opérateurs…), les pro-
grammes financés par les agences de coopéra-
tion et les banques de développement servant de mb6DQVXQHSRSXODWLRQ«GXTX«H
tremplin à leur développement1. FDSDEOHGHWLUHUSURŦWGHOłDFFªV¢
Oł«QHUJLHOłHIŦFDFLW««FRQRPLTXHGHVRQ
L’arrivée des acteurs privés, capables de lever XWLOLVDWLRQSURPHWGł¬WUHWUªVG«FHYDQWH
eux-mêmes des fonds auprès d’investisseurs mb/łHIIHWUHERQGb}HVWFHSK«QRPªQH
privés, se double d’une grande variété de proposi- SDUOHTXHOVRXYHQWOHVSRSXODWLRQV
tions de valeur, essentiellement axées sur les sys- GLODSLGHQWOHVJDLQV«FRQRPLTXHV
tèmes solaires individuels et notamment testées LQGXLWVSDUOłDFFURLVVHPHQWGH
sur le territoire subsaharien ; un foisonnement qui OłHIŦFDFLW««QHUJ«WLTXHHQDXJPHQWDQW
concourt à faire de la région un « laboratoire » de OHXUFRQVRPPDWLRQGł«QHUJLHb}
l’ERD (cf. partie 3).
Gaël Giraud, « Les défis énergétiques
Si les acteurs français, initialement très présents pour un développement durable :
sur le secteur de l’accès à l’électricité, l’ont dé- comment éviter l’effondrement ? »,
laissé au cours des années 2000 compte tenu Revue d’économie du développement 23,
de l’étroitesse du marché d’alors, des nouveaux, no 3 (2015).
présents ou non sur le marché national français des
énergies renouvelables, se lancent sur ce secteur.

1. Selon Aaron Leopold, de l’association des développeurs de


miniréseaux africains, les investissements d’électrification rurale
des entreprises membres de l’African Minigrid Developers
Association ont bénéficié de 14 % se soutien public, 86 % venant
du privé.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


170 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.3.2.
Nerf de la guerre, le financement reste
problématique pour la plupart des projets
d’électrification rurale.

Si les avancées technologiques permettent (pas de carburant, des charges de personnel


de lever la plupart des obstacles à une gé- limitées) ;
néralisation des solutions décentralisées, çNGU UQNWVKQPU EQPXGPVKQPPGNNGU
VJGTOKSWGU  UG
la question du financement des opéra- caractérisent à l’inverse par un CAPEX limité et
tions reste épineuse. Elle est pourtant dé- un OPEX (carburant notamment, payé comptant
terminante pour réussir l’accès universel à par l’exploitant) élevé et aléatoire. Cette incer-
l’électricité sur le continent africain. titude pèse sur la viabilité : les usagers peuvent

L’électrification rurale présente


un profil de risque peu attractif pour
23(;&$3(;
les investisseurs.
Quoique l’accès à l’électrification décentralisée
par énergies renouvelables soit l’option la plus CAPEX ou dépenses d’investissement
pertinente et la moins onéreuse dans un nombre FDSLWDOH[SHQGLWXUH bG«VLJQHOHVFR½WVGH
croissant de cas en Afrique subsaharienne rurale G«YHORSSHPHQWHWIRXUQLWXUHGHVSLªFHV
(notamment par rapport à l’extension du réseau QRQFRQVRPPDEOHVSRXUXQSURGXLWXQH
national ; cf. chapitre 2.1.2.), il n’en reste pas moins HQWUHSULVHXQV\VWªPH'DQVOHFDVGłXQ
qu’elle est entachée des mêmes contraintes que V\VWªPH«OHFWULTXHbU«DOLVDWLRQGHV«WXGHV
l’électrification conventionnelle : SU«DODEOHVDFTXLVLWLRQGHVFRPSRVDQWV
çGNNGGUVVT©UECRKVCNKUVKSWG alors qu’elle s’adresse GXV\VWªPHDVVLVWDQFHWHFKQLTXH¢
à des usagers financièrement très contraints ; OłLQVWDOODWLRQHWF
çUC OKUG GP ÈWXTG EQORQTVG FGU TKUSWGU
élevés compte tenu des contextes nationaux et OPEX ou dépenses d’exploitation
locaux alors que le retour sur investissement est RSHUDWLRQDOH[SHQGLWXUH bG«VLJQHOHV
souvent long. FKDUJHVFRXUDQWHVSRXUH[SORLWHUXQ
SURGXLWXQHHQWUHSULVHRXXQV\VWªPH
Le besoin en capital d’une solution d’ERD, quelle 'DQVOHFDVGłXQV\VWªPH«OHFWULTXHb
qu’elle soit, varie selon qu’on utilise ou non les G«SHQVHVGHSHUVRQQHOH[SORLWDQWIUDLVGH
énergies renouvelables (cf. tableau) : PDLQWHQDQFHLQWUDQWVGHIRQFWLRQQHPHQW
çNGU UQNWVKQPU FªEGPVTCNKUªGU RCT ªPGTIKGU TG- FRPEXVWLEOHSDUH[HPSOH SLªFHV
nouvelables se caractérisent par un coût GHUHFKDQJHG«SODFHPHQWVIUDLVGH
d’investissement initial, ou CAPEX, élevé et un FRPPXQLFDWLRQŊ
coût d’exploitation, ou OPEX, relativement faible

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 171

Minicentrale solaire vsJURXSH«OHFWURJªQH SRXUXQHFHQWDLQH


GłDERQQ«VHWXQHFRQVRPPDWLRQGłHQYLURQN:KDQ

Groupe électrogène %GPVTCNGUQNCKTG

Puissance installée N9D bN:F

Coûts d’investissement
5 000 € ŏ¢ŏ
(hors réseau)

Coûts d’exploitation
(hors coûts de personnel et hors coûts
de renouvellement des composants ŏDQ ŏDQ
(onduleurs, batteries) pendant
la durée de vie de l’installation)

Les coûts de personnel sont comparables.

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

peiner à s’acquitter de leur contribution dans le


cas où le prix du carburant augmente plus vite
que leurs revenus (cf. l’histoire des miniréseaux
Chiffres-clé
diesels en chapitre 3.2.5.) ;
çNC DCKUUG FW RTKZ FGU EQORQUCPVU 28 C TGPFW
les solutions décentralisées par énergie solaire $XMRXUGłKXLOHSUL[SD\«PHQVXHOOHPHQW
économiquement avantageuses sur le long terme. SDUXQXVDJHUGHPLQLU«VHDXHQ$IULTXH
VXEVDKDULHQQHVHVLWXHGDQVXQH
.G VGORU FG TGVQWT UWT KPXGUVKUUGOGPV (re- IRXUFKHWWHde 5 à 10 euros, pour une
turn on investment, ROI) est intimement lié aux consommation de 500 Wh par jour et
produits (consommations payées par les usag- XQWDULIGH)&)$SDUbN:KVRLW
ers). Il sera d’autant plus long que leurs capacités centimes d’euro WDX[GHFKDQJHDSSOLTX«
de paiement et leurs consommations électriques DXVHSWHPEUH 
seront faibles (cf. encadré) et aléatoires. C’est ain-
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde, études
si que s’explique la durée des concessions accor- Noria.
dées aux opérateurs d’électricité, généralement
longue (vingt à trente ans).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


172 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

L’ERD est très dépendante des On constate aujourd’hui en effet que les finance-
financements internationaux, ments sont souvent disponibles via les coopéra-
qui restent largement insuffisants tions institutionnelles, mais que ces apports ne
L’électrification rurale, comme de nombreux ser- sont pas tous utilisés  : les projets concrets et
vices de base, souffre du manque de ressources recevables aux conditions des bailleurs de fonds
fiscales (cf. encadré), dans un contexte où les ont du mal à émerger (taille insuffisante ou niveau
Etats sont confrontés à d’immenses besoins so- de risque trop élevé).
ciaux alors même que leurs économies reposent Or, un appui financier à l’électrification du monde
encore largement sur le secteur informel*1. rural est quoi qu’il en soit justifié au regard des
bénéfices sociaux et économiques de l’accès à
La situation des sociétés nationales d’électricité, l’électricité (cf. chapitre 1.1.1.).
souvent lourdement déficitaires, ralentit l’élec- Le défi est donc de trouver des solutions de fi-
trification périurbaine et ne permet pas de ré- nancement permettant une électrification de
aliser l’électrification rurale par extension du base, à moindre coût, durable, et de maximiser
réseau national. Dès lors, comme beaucoup les ressources publiques et privées mobilisables
d’infrastructures de service public dans les pays à tous les niveaux pour développer à grande
en développement, NàCEE©U ¡ NàªNGEVTKEKVª GP OK- échelle des projets d’accès à l’électricité décen-
NKGW TWTCN HCKV CRRGN FG OCPK©TG UKIPKăECVKXG ¡ tralisée faisant appel aux sources renouvelables
FGUUQWTEGUKPVGTPCVKQPCNGUFGăPCPEGOGPV d’énergie.
Jusqu’à présent, ces bailleurs internationaux ont
permis de lancer : Il existe deux grandes approches de
çGUUGPVKGNNGOGPV FGU RTQLGVU FàGZVGPUKQP l’accès à l’électricité hors réseau par
du réseau dans les zones les plus favorables énergies renouvelables, induisant
(cf. chapitre 1.2.1.) ; deux logiques de financement.
çRQPEVWGNNGOGPV FGU RTQLGVU Fà'4& (cf. cha- Pour la mise en œuvre des projets, deux logiques
pitre 2.2.2.), notamment selon les deux modes complémentaires cohabitent à l’heure où cet
principaux actuels de service  : le PAYG et le ouvrage est écrit :
miniréseau. çWPGCRRTQEJGNKDªTCNGacette approche récente
Mais cette contribution est largement en deçà est fondée sur un échange marchand entre un
des besoins de financement. Seulement 5 mil- acteur privé et un client pour l’acquisition d’un
liards USD par an ont été alloués aux projets bien ou d’un service électrique, contre un paie-
d’électrification en Afrique subsaharienne au ment cash ou à tempérament (crédit et paie-
cours de la décennie actuelle, selon l’AIE, ce qui ment en plusieurs fois). Elle est particulièrement
ne couvre que 10  % des besoins. Et peut-être adaptée au développement de l’accès indivi-
même moins, dans un contexte où la population duel à l’électricité pour des usages domestiques
subsaharienne va doubler d’ici 2050. (lampe portable, système solaire individuel  ;
L’AIE prévoit la mobilisation de 52 milliards USD
d’investissements nécessaires pour permettre un
1. Voir notamment le rapport du Fonds monétaire international, « Perspectives
accès à l’électricité pour tous d’ici 20302 (cf. cha- économiques régionales en Afrique subsaharienne : Faire redémarrer la
croissance » (Washington, D.C, 2017).
pitre 1.1.1.). On peut néanmoins se demander
2. Agence Internationale de l’Énergie. « Energy Access Outlook 2017, From
quelle est la capacité d’absorption de ce montant. Poverty to Prosperity ». Paris : Agence Internationale de l’Énergie, 2017.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 173

/DSUREO«PDWLTXHGHVUHVVRXUFHVŦVFDOHV
HWGXŦQDQFHPHQWGHVVHUYLFHVSXEOLFV

/łDP«OLRUDWLRQGHODPRELOLVDWLRQGHVUHVVRXUFHVŦVFDOHVFRQVWLWXHXQHQMHXGHG«YHORSSHPHQW
PDMHXUSRXUOHV(WDWVGł$IULTXHVXEVDKDULHQQH/HVUHFHWWHVŦVFDOHVVRQWHQHIIHWSULPRUGLDOHVSRXUOHV
(WDWVFDUHOOHVOHXUDSSRUWHQWOHVUHVVRXUFHVQ«FHVVDLUHV¢OłLQYHVWLVVHPHQWGDQVOHG«YHORSSHPHQWOD
IRXUQLWXUHGHVHUYLFHVSXEOLFVRXODU«GXFWLRQGHODSDXYUHW«
&HWWHPRELOLVDWLRQHVWHQFRQVWDQWHSURJUHVVLRQJU¤FH¢XQHFURLVVDQFH«FRQRPLTXHHWXQH
DP«OLRUDWLRQGHVFDSDFLW«V¢WD[HUHOOHUHSU«VHQWHbGX3,%GXFRQWLQHQWHQPDLVFHWWH
PR\HQQHGHPHXUHLQI«ULHXUH¢FHOOHGłDXWUHVU«JLRQVGXPRQGH $P«ULTXHODWLQHbbb2&'(b
b 

&HWWHGLII«UHQFHVłH[SOLTXHSDUSOXVLHXUVIDFWHXUVb
ʼnOHUDSSRUW¢OłLPS¶WGHVFRQWULEXDEOHVDIULFDLQVHPSUHLQWGHVK«ULWDJHVFRORQLDX[HWWRXMRXUV
SHU©XQ«JDWLYHPHQWS«QDOLVHOłDGPLQLVWUDWLRQŦVFDOHSRXUSURF«GHUDXUHFRXYUHPHQWGHV
FRQWULEXWLRQVb
ʼnOłLQDG«TXDWLRQGHVUHVVRXUFHVGHVDGPLQLVWUDWLRQVŦVFDOHV KXPDLQHVWHFKQLTXHV b
ʼnOHVmbFDGHDX[ŦVFDX[b}FRQVHQWLV¢FHUWDLQVRS«UDWHXUV«FRQRPLTXHV
ʼnODFRUUXSWLRQ

'HVU«IRUPHVŦVFDOHVIDYRUDEOHVQRWDPPHQWDXG«YHORSSHPHQWGXVHFWHXUSULY«¢OłLQW«JUDWLRQ
GłLPSRUWDQWHVHQWLW«VLQIRUPHOOHVHWDXUHQIRUFHPHQWGHVFDSDFLW«VGHVDGPLQLVWUDWLRQVŦVFDOHV
VRQWDSSHO«HVSDUOHVSURIHVVLRQQHOVGXVHFWHXU&HUWDLQVSD\VRQWG«M¢FRPPHQF«¢PHWWUH
HQSODFHGHQRXYHDX[V\VWªPHV$X*KDQDOHIRQFWLRQQHPHQWGHODFROOHFWHGHVLPS¶WVHVWHQ
SDVVHGł¬WUHWUDQVIRUP«DŦQGłLQW«JUHUOHVVRFL«W«VGXVHFWHXULQIRUPHObOH5ZDQGDD«JDOHPHQW
G«YHORSS«XQHSROLWLTXHYRORQWDULVWHHQODPDWLªUH

6RXUFHVb
OCDE, « Statistiques des recettes publiques en Afrique » (Paris, 2017).
Salif Yonab, « Le recouvrement des recettes publiques dans les États Africains : un état des lieux préoccupant », Revue
française d’administration publique 144, n° 4 (2012).
Foly Ananou, « Et si la fiscalité africaine était déséquilibrée », Le Point (en ligne), 2018, https://www.lepoint.fr/economie/et-si-
la-fiscalite-africaine-etait-desequilibree-27-02-2018-2198250_28.php.
Sylvain Vidzraku, « Ghana : un nouveau système de collecte des impôts intégrant les sociétés du secteur informel », La Tribune
(en ligne), 2018, https://afrique.latribune.fr/afrique-de-l-ouest/ghana/2018-03-11/ghana-un-nouveau-systeme-de-collecte-des-
impots-integrant-les-societes-du-secteur-informel-771411.html.
Sabine Cessou, « Le poids du secteur informel », Le Monde diplomatique (en ligne), 2015, https://www.monde-diplomatique.fr/
mav/143/CESSOU/53893.
Nergis Gülasan et Gail Hurley, « Financer le développement avec des ressources nationales », ID4D, 2015, https://
ideas4development.org/financer-le-developpement-par-une-meilleure-mobilisation-des-ressources-nationales/.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


174 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

cf.  chapitre 3.2.), en complément des solutions çOCKUUWTVQWVEàGUVEGVVGCRRTQEJGSWKUQWĂTG


collectives (cf. chapitres 3.4. et sq.) ; CWLQWTFàJWK FàWP OCPSWG FG ăPCPEGOGPVU
çWPGCRRTQEJGKPVGTXGPVKQPPKUVG a cette approche CFCRVªUCNQTUO«OGSWàGNNGGUVPªEGUUCKTG¡
historique est fondée sur la coordination institution- la réalisation de l’objectif d’accès universel à
nelle et l’implication de la société civile pour la mise l’électricité.
en œuvre d’une solution collective d’électrification Là où l’approche libérale, par définition, vise à
selon une logique de gestion de projet. développer une activité commerciale et trouve
Complexe dans sa mise en œuvre, cette dernière soit des clients pour payer cash (vente directe de
favorise la prise en compte de l’ensemble des systèmes), soit des investisseurs intéressés par
usages de l’électricité et l’inclusion la plus large sa rentabilité (PAYG), l’approche interventionniste
possible des populations locales (notamment via vise à développer un service de base rarement
l’installation d’un miniréseau ; cf. chapitre 3.5.). Elle rentable. Les contraintes liées à la mise en place,
peut aussi se concentrer sur un usage collectif notamment l’ingénierie sociale*, puis l’exploitation
(pompage solaire, éclairage public, électrification de ce service pèsent sur le modèle économique,
des ouvrages publics… cf. chapitre 3.4.). qui requiert des subventions et une continuité des
investissements dans le temps.
Détaillées plus loin dans leurs implications or-
ganisationnelles (cf. chapitre 2.4.1.), les deux ap- 3WQKSWG NGU FGWZ CRRTQEJGU TGN©XGPV FG
proches sont corrélées à des circuits de finance- NQIKSWGUFGFKUVTKDWVKQPGVFGăPCPEGOGPVFKH-
ment différents. Deux types de solution, embléma- HªTGPVGU GNNGU PG UQPV RCU KPEQORCVKDNGU GV
tiques de ces deux circuits, dominent aujourd’hui UQPV O«OG EQORNªOGPVCKTGU pour la réalisa-
le paysage de l’accès à l’électricité hors réseau : tion de l’objectif d’accès à l’électricité pour tous.
çNG pay as you goQW2#;) (approche libérale) : Elles peuvent ainsi cohabiter de manière efficace
distribution d’un bien d’équipement durable par au sein d’un même espace  ; certains projets de
des opérateurs privés en intégrant des facilités miniréseau prévoient par exemple d’équiper en
de financement (location-vente) ; lampes solaires portables ou en kits individuels
çNGOKPKTªUGCW(approche interventionniste) : dis- les ménages isolés pour lesquels le raccorde-
tribution d’un service durable à des usagers par ment pas envisageable.
des opérateurs publics ou privés intervenant Dans un souci d’équité, cette complémentarité
dans le cadre d’une délégation d’un service pub- devrait même être systématiquement recher-
lic marchand ou d’un partenariat public-privé. chée par les monteurs de projets de miniréseaux,
Si le développement de ces modèles dominants qui peuvent, en phase de mise en œuvre, réaliser
requiert dans les deux cas des financements, directement ou accompagner les initiatives per-
leurs logiques de levée de fonds diffèrent. mettant l’équipement en systèmes individuels des
Après avoir scruté le cas particulier du PAYG, le reste populations non raccordées.
du chapitre se concentre délibérément sur l’approche
interventionniste, et cela pour deux raisons : Le pay as you go se finance comme
çNàCRRTQEJG KPVGTXGPVKQPPKUVG DªPªăEKG tout service purement marchand.
d’un retour d’expérience plus nourri que Cette modalité requiert des financements pour ses
l’approche libérale, dont l’essor est encore récent différentes phases : lancement de l’activité, montée
(cf. chapitre 2.2.2.) ; en puissance puis enfin changement d’échelle.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 175

Reposant sur la distribution d’un équipement in-


dividuel électrique par un opérateur privé en busi- Les investisseurs
ness-to-customer dans le cadre d’une location- s’enthousiasment
vente (cf. chapitre 3.2.2.), elle vise principalement pour le PAYG
une clientèle périurbaine ou rurale plutôt aisée,
concentrée dans un périmètre délimité, disposant
de revenus stables et de moyens de paiement /H3$<*DDWWLU«bGHVLQYHVWLVVHPHQWV
sécurisés. GDQVOłRIIJULGVRODLUHHQWUHHW
Les risques étant circonscrits, les opérateurs du SRXUXQPRQWDQWGHPLOOLRQVGH
PAYG ont pu compter sur des investisseurs pour : GROODUVGRQWbVRQWDOO«V¢VHXOHPHQW
çCUUWTGT NG RTªăPCPEGOGPV FGU ªSWKRGOGPVU TXDWUHVRFL«W«V
et des équipes commerciales nécessaires au
6RXUFHbBanque mondiale, « Off grid solar market
lancement de l’activité ; trends report », 2018.
çRWKU ăPCPEGT NC ETQKUUCPEG GV ªNCTIKT RTQITGU-
sivement leur marché. Plus de 210 milliards de dollars en
Les montants injectés dans les sociétés du PAYG dette et en capital investissement ont
ont ainsi décuplé entre 2013 et 2016 (cf. encadré). été accordés au secteur marchand de
Ils font majoritairement appel à des sources privées OłRIIJULGVRODLUH3$<*HQFRQWUH
de financement, donc le détail et l’affectation des 20 millions en 2013.$TXHOTXHVUDUHV
montants reçus sont difficilement identifiables. H[FHSWLRQVOłLPPHQVHPDMRULW«GHFHV
LQYHVWLVVHPHQWVRQW«W«U«DOLV«VHQ$IULTXH
Pour autant, l’histoire, même courte, des leaders GHOł(VW
du PAYG, montre leur capacité à susciter l’intérêt
6RXUFHb Bloomberg New Energy Finance, « New
d’un large panel d’acteurs. Energy Outlook 2017 » (Washington, D.C, 2017).
Ils parviennent d’abord à mobiliser toute la gamme
des OªECPKUOGUFGăPCPEGOGPVRTKXª au fil des
différentes phases de leur développement :
çNCRJCUGFGETªCVKQPQWFGRTªNCPEGOGPV qui start-up1  : leurs interventions sur le moyen/long
inclut la recherche et développement en équipe- terme se concrétisent par des entrées minori-
ments, logiciels et moyens de communication taires au capital, de la dette, et ponctuellement des
adaptés aux systèmes solaires individuels mais dons pour des montants de plusieurs centaines
aussi les analyses préalables et la construction de milliers de dollars ;
du business plan, a retenu l’attention des fon- çGPăP NC RJCUG WNVªTKGWTG FG RCUUCIG ¡
dations d’entreprises, comme la Shell Foun- l’échelle fait plutôt appel à des fonds
dation (4 millions de dollars pour M-Kopa, par d’investissement indépendants capables
exemple1) ; d’accompagner toutes les étapes de la crois-
çNCRJCUGFàCOQT¨CIG fait plutôt appel à des fonds sance, par des entrées au capital et de la dette
d’investissements sociaux d’entreprises comme à taux bonifié.
ceux de Schneider Electric (Electric Energy Ac-
cess) ou d’Engie (Rassembleurs d’énergies), qui 1. Grégoire Jacquot, « L’émergence du pico-solaire dans les initiatives
ont tous deux des engagements dans plusieurs d’électrification rurale » (Paris : Agence française de développement, 2015).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


176 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Le leader mondial M-Kopa a ainsi su faire ap- En approche interventionniste,


pel aux fonds américains Gray Ghost Ventures le financement des projets relève
et Acumen, entre autres. En décembre 2018, le d’une mécanique complexe
groupe japonais Sumitomo Corporation a acquis qui peine à trouver sa maturité.
une participation minoritaire dans le capital de la Plus complexe que l’approche libérale car in-
start-up est-africaine2. tégrant un volet étoffé d’ingénierie sociale,
Son plus proche challenger, BBOXX, a obtenu l’approche interventionniste est susceptible de
début 2019 un financement de 31 millions de dol- répondre à la palette complète des usages so-
lars auprès du gestionnaire de fonds Africa In- ciaux, domestiques et économiques, dans une
frastructure Investment Managers3  ; il a égale- dynamique visant un service public de l’électricité.
ment levé 6 millions d’euros via une opération de Cette efficacité a une contrepartie : les schémas
financement participatif (cf. chapitre 2.3.2.). sont gourmands en dons et en aides.

D’autre part, les opérateurs du PAYG ont béné- La répartition des dépenses de CAPEX
ficié des engagements des agences de déve- est marquée par le poids significatif des
NQRRGOGPV notamment anglo-saxonnes (DFID, dépenses d’études, d’assistance et de
DEG, USAID, Banque asiatique de développe- renforcement de capacités.
ment). Ces agences ont financé les programmes Partons de l’exemple des miniréseaux par éner-
d’assistance technique, leurs subventions pou- gies renouvelables. L’information disponible sur le
vant atteindre plusieurs millions de dollars, majori- financement de ce schéma d’électrification – dont
tairement fondées sur une préférence nationale. l’histoire est plus ancienne que le PAYG et la mise
Ainsi, l’on peut noter le soutien de la DEG à Mo- en œuvre repose sur des projets dont les résultats
bisol, entreprise allemande, celui d’USAID à PEG sont plus souvent publics – est logiquement plus
Ghana, créée par deux Américains, ou encore les abondante que pour le PAYG.
subventions de la DFID à M-Kopa, dont l’un des
fondateurs est britannique4.
Le dynamisme du PAYG témoigne de l’attractivité
de ce modèle. Principalement déployé en Afrique
1. Promotion et Participation pour la Coopération économique,
de l’Est, il essaime depuis peu en Afrique de « Financer les start-up pour construire les économies de demain
l’Ouest, grâce à des start-up africaines et fran- en Afrique », Revue secteur privé et développement, no 29 (2018).
2. Chamberline Moko, « La firme kenyane M-Kopa lève des fonds
çaises ainsi que des d’initiatives d’envergure auprès du japonais Sumitomo Corporation », Agence Ecofin, 2019,
menées par Orange5, Engie6 et EDF7. https://www.agenceecofin.com/solaire/0801-63041-la-firme-
kenyane-m-kopa-leve-des-fonds-aupres-du-japonais-sumitomo-
Cela dit, il est encore trop tôt pour confirmer la corporation.
rentabilité du PAYG sur le long terme ; le passage 3. « BBOXX lands USD 31 million deal with AIIM », BBOXX, 2019,
à l’échelle de cette solution pose de nombreux https://www.bboxx.co.uk/bboxx-lands-usd-31-million-deal-africa-
infrastructure-investment-managers/ .
défis (cf. chapitre 3.2.2.). Certains investisseurs 4. Grégoire Jacquot, « L’émergence du pico-solaire dans les
s’inquiètent même d’une décorrélation entre initiatives d’électrification rurale » (Paris : Agence française de
développement, 2015).
l’engouement que le modèle suscite et la capacité
5. Depuis 2017 au Sénégal, au Mali, au Burkina Faso et au Cameroun.
réelle de profitabilité des entreprises (cf. encadré). 6. Après avoir racheté la société Fenix.
En mai 2019, un des pionniers du PAYG, Mobisol, a 7. A partir de 2016 en Côte d’Ivoire puis au Ghana.
fait publiquement part de ses difficultés en 20198. 8. Avant d’être racheté par Engie début septembre 2019.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 177

Un enthousiasme immodéré ?

,O\DSHXW¬WUHWURSGłHQJRXHPHQWSRXUFHVHFWHXUTXLQłDSDVHQFRUHU«VROXOłHQMHXPDMHXUGH
G«ŦQLWLRQGXPRGªOHGłHQWUHSULVHHWSHXWDYRLUGXPDO¢IDLUHIDFHDX[DWWHQWHVGHIRUWHFURLVVDQFH
HWDX[LQFLWDWLRQVPDODOLJQ«HVGHQRPEUHX[LQYHVWLVVHXUVHQFDSLWDOULVTXH$LPHULRQVQRXVYRLU
XQFDSLWDOELHQDOLJQ«ELHQG«SOR\«GDQVOHVHFWHXU"$EVROXPHQW3HQVRQVQRXVTXłLOH[LVWHGHV
HQWUHSULVHVGHFKRL[IRFDOLV«HVVXUODUHQWDELOLW«HWOłHIŦFDFLW«GXFDSLWDOTXLP«ULWHQWFHFDSLWDO"
&HUWDLQHPHQW1«DQPRLQVGHPDQLªUHJ«Q«UDOHQRXVFUDLJQRQVGHQRXVGLULJHUYHUVXQK\SH
F\FOH1GRQWODWUDMHFWRLUHQHQRXVSOD°WSDVEHDXFRXS

6RXUFHb Diane Isenberg, Greg Neichin et Mary Roach, « An Impact Investor Urges Caution on the ‘Energy Access Hype Cycle’»,
Next Billion Blog, 2017, https://nextbillion.net/an-impact-investor-urges-caution-on-the-energy-access-hype-cycle/.
1. lancement de la technologie (prototypes, tests),
2. hype (engouement exagéré des médias et des financiers, création de multiples startups pour développer et commercialiser) ;
3. anti-hype (éclatement de la bulle, parfois associé à un krach boursier)
4. création de produits deuxième génération avec développement progressif et solide du marché (fondé sur une appréciation
réaliste de l’étendue et de la valeur des applications concrètes de la technologie) ;
5. plateau de productivité (technologie rodée permettant le développement de produits de troisième génération).

Quel que soit le mécanisme d’exploitation (délé- Plus de la moitié des investissements
gation de gestion de service public, partenariat concernent les équipements
public-privé), le maître d’ouvrage cherche à mo-
Evaluation,
biliser des fonds pour couvrir l’investissement et mesure d’impacts,
pallier le manque de financements locaux. communication
Les besoins en financement pour la réalisation 4%
Accompagnement
des différentes phases d’un projet de miniréseau Etudes préalables
2%
(cf.  schéma) sont d’autant plus importants que le 11 %
programme a de l’envergure – ce qui est souhaitable,
Assistance
notamment une amplitude régionale, afin de créer technique
un effet d’échelle et de favoriser une dynamique 22 %
d’aménagement du territoire (cf. les préconisations
en ce sens dans la partie 4 de l’ouvrage). Maîtrise
d’œuvre
5%
A titre d’exemple, pour un programme régional
d’électrification d’une centaine de localités ru-
Equipements
rales de 3000 à 5000 habitants chacune,
58 %
l’investissement est de l’ordre de 150  millions
d’euros et se répartit de la manière suivante1 :
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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178 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Les étapes d’un projet d’ERD

ÉTUDE DE CONTEXTE AVANT-PROJET

$UELWUDJHGHVS«ULPªWUHVGł«OHFWULŦFDWLRQ
9DOLGDWLRQGXSURMHW
DYHFOHVLQVWLWXWLRQV $QDO\VHGHODGHPDQGHHQ«OHFWULFLW«

,GHQWLŦFDWLRQGHVSDUWHQDLUHVORFDX[ 'LPHQVLRQQHPHQWGHVRXYUDJHV

(QTX¬WHVVRFLR«FRQRPLTXHV $QDO\VH«FRQRPLTXHHWŦQDQFLªUH
WDULŦFDWLRQ
/RFDOLVDWLRQGHVSRLQWVGHIRUWHGHPDQGH
HQ«OHFWULFLW« &RQFHSWLRQWHFKQLTXH
GHVLQIUDVWUXFWXUHV

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 179

CONCEPTION / MISE EN SUIVI


RÉALISATION EXPLOITATION D’EXPLOITATION

9DOLGDWLRQGHODWDULŦFDWLRQ 3URPRWLRQGHVXVDJHV
SDUOHVDXWRULW«VGHU«JXODWLRQ GHOł«OHFWULFLW«
0LVHHQSODFHGHV
$FTXLVLWLRQGHVPDW«ULHOV SURF«GXUHVGłH[SORLWDWLRQ 5DSSRUWDJHDXSUªV
GHVLQVWLWXWLRQQHOV
7UDYDX[GłLQVWDOODWLRQ )RUPDWLRQGHVXVDJHUV
6XLYLGHV«YROXWLRQV
9DOLGDWLRQWHFKQLTXH $FFRPSDJQHPHQW GHODGHPDQGH
SDUOHVDXWRULW«VSXEOLTXHV GHVXVDJHVSURGXFWLIV
(YHQWXHODMXVWHPHQWGH
7HVWVHWPLVHHQVHUYLFH OłLQIUDVWUXFWXUH«OHFWULTXH

Sensibilisation des populations

Sélection et accompagnement de l’exploitant

Dialogue avec les parties prenantes (à tous niveaux), y compris les populations

Partage d’expériences
Capitalisation technique
et organisationnelle

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180 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Les équipements matériels de production (hard- limitant les capacités d’accès à l’électricité et
ware) représentent un peu plus de 50 % du bud- pénalisant la pertinence du projet.
get, ce qui signifie que RT©UFGNCOQKVKªFGUEQ¼VU C’est un point essentiel d’amélioration des dis-
sont liés à des activités d’analyse, d’assistance positifs de financement, qui couvrent trop im-
GVFGTGPHQTEGOGPVFGUECRCEKVªU. parfaitement les dépenses autres que celles
d’équipement (cf. les préconisations adressées
Ce constat n’est pas valable que pour le mini- aux bailleurs de fonds en partie 4).
réseau. Essentielles pour la réussite d’un pro-
gramme en approche interventionniste, quelle Il est nécessaire de promouvoir
que soit son envergure, ces prestations intellec- une logique de financement mixte
tuelles (software) ne doivent en aucun cas être pour répondre au caractère mixte des
sous-estimées : projets.
çNGU ªVWFGU RTªCNCDNGU sont nécessaires à En approche interventionniste, l’ERD n’est,
l’élaboration de l’avant-projet sommaire puis de CW ăPCN PK RWTGOGPV OCTEJCPFG PK RWTGOGPV
l’avant-projet détaillé, qui permettent de dimen- sociale. Elle cherche son équilibre économique.
sionner le miniréseau. Cette recherche se traduit par la complexité des
Elles sont coûteuses car le terrain d’étude ru- montages financiers.
ral est difficile d’approche  : les déplacements Sources et mécanismes de financement suivent le
sont longs et parfois hasardeux, les sources rythme du changement d’échelle de l’électrification
d’information, peu nombreuses et peu fiables, doi- rurale, de l’évolution des techniques mises en
vent être recoupées, et les parties prenantes sont œuvre et de l’appréciation des risques. Une large
nombreuses ; palette d’acteurs très divers (donateurs individu-
çNàCUUKUVCPEG VGEJPKSWG CWRT©U FG NC OC¯VTKUG els, ONG, collectivités, philanthropes, bailleurs de
d’ouvrage est indispensable, compte tenu du fonds internationaux) a permis la réalisation des
caractère innovant du secteur et de la diversité premières initiatives d’ERD, grâce à des dons et/ou
de l’écosystème de parties prenantes qu’elle doit des prêts aux conditions avantageuses.
rassembler (cf. chapitre 2.4.1.) ;
çNC RTªUGPEG FàWP OC¯VTG FàÈWXTG est néces- .G UEJªOC FG ăPCPEGOGPV NG RNWU RGTVKPGPV
saire, compte tenu des aspects techniques des EQPUKUVG ¡ CUUQEKGT RT«VU GV UWDXGPVKQPU
infrastructures électriques ; Ce mix permet d’alléger au maximum le coût
çNGU OGUWTGU FàCEEQORCIPGOGPV et notam- d’investissement pour le promoteur et d’ajuster
ment les actions de sensibilisation et de for- le tarif payé par l’usager. Les acteurs recourent
mation déployées auprès des usagers et de notamment aux prêts dits « concessionnels », qui
l’exploitant, sont essentielles, compte tenu sont adaptés aux projets à externalités sociales et
du public ciblé et de l’importance de la qualité économiques élevées, comme les projets d’ERD :
de l’exploitation des infrastructures installées
(cf. chapitres 2.4.2. et 3.5.3.).

Lorsqu’il est pris en charge par les promoteurs de 1. Source : Fondation Energies pour le Monde.
projets sans subvention, le coût de ces différentes 2. A noter qu’un programme régional comprenant plusieurs miniréseaux
nécessite plus d’assistance à maîtrise d’ouvrage que des projets plus
interventions est répercuté sur la tarification, localisés.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 181

çNGURT«VUUQPVlaEQPEGUUKQPPGNUa|ECTCEEQTFªU¡ Les financements accessibles


un taux très avantageux pour l’emprunteur ; aux acteurs publics.
çKNU RGWXGPV «VTG la UQWXGTCKPUa |
CEEQTFª ¡ WP Les dons et subventions ont répondu aux mul-
Etat ou ses émanations) ou «  non souverains  » tiples demandes émanant du terrain, notamment
(cf. présentation plus détaillée infra). des ONG, des associations locales, des collectivités
ou des Etats pour satisfaire aux besoins en finance-
Reste que l’ERD n’est pas sans poser des prob- ment d’usages sociaux. Le résultat est mitigé :
lèmes d’organisation interne aux organismes de çEGU OªECPKUOGU QPV RGTOKU CWZ RKQPPKGTU FG
financement et aux Etats : l’ERD d’expérimenter les premières installations
çUCPCVWTGJ[DTKFGGPVTGFªXGNQRRGOGPVTWTCN faisant appel aux énergies renouvelables, d’en
GV ªNGEVTKăECVKQP NGWT GUV RGW HCOKNK©TG et se justifier la pertinence et de les améliorer ;
prête mal au partage habituel des compétences çCUUQEKªU ¡ FGU CEVKQPU FG UWKXK KNU TªRQPFGPV ¡
et à l’échange d’informations entre les services des besoins sociaux spécifiques des popula-
de ces organismes ; tions rurales : amélioration de la santé grâce à la
çEJCSWG RTQLGV TGN©XG FàWPG EQPEGRVKQP la UWT conservation de vaccins, approvisionnement en
OGUWTGa | et nécessite de collecter un grand eau grâce au pompage solaire, etc. ;
nombre de données, pas toujours disponibles, çNàGZRªTKGPEG OQPVTG SWG EGU CKFGU RTGPCPV GP
sur le terrain ; charge la totalité de certains investissements
çEJCSWG RTQLGV FGOCPFG WP VGORU UKIPKăECVKH sont sources de vulnérabilité : si les charges de
pour couvrir des coûts d’études et de prépara- maintenance à long terme ne sont pas correcte-
tion qui sont proportionnellement plus élevés ment prises en compte par la collectivité, le sys-
que pour l’électrification urbaine et industrielle ; tème est souvent délaissé à la première panne
çNGU CURGEVU ăPCPEKGTU UQPV TGNCVKXGOGPV ou au moment du renouvellement du composant
EQORNGZGU même pour les projets modestes, le plus fragile ;
notamment parce qu’une part importante de çO«OG UàKNU HQPV RCTVKG FG NC UQNWVKQP EGU Oª-
l’investissement est amortie sur le long terme, ce canismes, seuls, sont impuissants à faire face à
qui augmente les risques et les rend plus difficile- l’urgence et à l’envergure de la demande.
ment appréciables (alors même que certaines
données d’expérience, utiles, sont gardées con- La mobilisation d’autres financements a donc
fidentielles par les opérateurs privés). été nécessaire pour démultiplier les capacités
d’intervention des Etats ou des collectivités pub-
Malgré ces difficultés, plusieurs outils de finance- liques et pour mener des programmes de grande
ment propres aux projets d’intérêt général sont échelle sans pour autant sacrifier à l’objectif
aujourd’hui mobilisables par les acteurs privés d’intérêt général.
ou publics en soutien d’un programme d’ERD en
logique interventionniste. .GU RT«VU EQPEGUUKQPPGNU UQWXGTCKPU bénéfi-
cient aux Etats et leurs émanations (ministères,
sociétés nationales). Ces entités sont en mesure
de mobiliser des fonds auprès de banques de
développement multilatérales (Banque mon-
diale, Banque africaine de développement, par

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182 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

exemple) ou bilatérales (AFD, KFW…) :


Aide à la demande çRTQRQUCPV WP VCWZ FàKPVªT«V DCU XQKTG VT©U DCU
et aide à l’offre les prêts concessionnels ont en général des ma-
turités longues, supérieures à vingt ans, assor-
/DP«FDQLTXHGHVXEYHQWLRQV ties d’années de grâce (franchise totale) ;
ORQJWHPSVVROOLFLW«HSRXUU«SRQGUHDX[ çNC FKĂªTGPEG FG EQPFKVKQPU FàGORTWPV GPVTG WP
EHVRLQVH[SULP«VVXUOHWHUUDLQVłLQVFULW prêt concessionnel et un prêt commercial est
DFWXHOOHPHQWGDQVXQHG\QDPLTXH alors appelée « l’élément don ».
QRXYHOOHHWFRQWHVWDEOHbGHQRPEUHX[
SD\VLQGXVWULDOLV«VXWLOLVHQWFHWRXWLO .àGORTWPVGWT doit réunir deux conditions pour se
ŦQDQFLHUSRXUDFFRPSDJQHUOłRIIUH voir accorder ce type de prêt, liées aux risques in-
GHOHXUVLQGXVWULHOVQDWLRQDX[ hérents aux pays en développement (cf. infra) :
ç«VTGTQFª¡EGV[RGFàQWVKNUăPCPEKGTUGVECRCDNG
/HV«TXLSHPHQWVVRQWSDUIRLVOLYU«V d’en maîtriser la gestion ;
JUDFLHXVHPHQWSRXUG«PRQWUHU çQDVGPKTWPGICTCPVKGFà'VCVFKVGUQWXGTCKPG
laWP
ODTXDOLW«GXPDW«ULHOVRXYHQWVDQV Etat ne peut faire défaut »).
TXHOHVFRQGLWLRQVQ«FHVVDLUHV¢OHXU En pratique, dans le secteur électrique des pays du
DSSURSULDWLRQVRLHQWY«ULŦ«HV'ªVORUV Sud, seules les sociétés d’électricité peuvent obte-
FHWWHPRGDOLW«GHŦQDQFHPHQWTXLSDUD°W nir une garantie souveraine, par le ministère des Fi-
DSULRULDGDSW«HDXUHJDUGGHODVLWXDWLRQ nances. Situées en dehors du secteur convention-
ŦQDQFLªUHGHVSD\VE«Q«ŦFLDLUHVSU«VHQWH nel de l’électricité, insuffisamment structurées et
HQU«DOLW«GHV«ULHXVHVOLPLWHVb inexpérimentées en gestion financière, les agences
ʼnODUHVSRQVDELOLVDWLRQGHVSDUWLHV de l’électrification rurale ne sont pas considérées
SUHQDQWHVORFDOHVHWHQSDUWLFXOLHU comme présentant les mêmes conditions de fiabilité
GHODPD°WULVHGłRXYUDJHHWGHVXVDJHUV et de solvabilité que les sociétés nationales.
ŦQDX[HVWIDLEOHSXLVTXłLOVQłRQW Il faut également avoir à l’esprit que les règles
SDVSDUWLFLS«ŦQDQFLªUHPHQW relatives à l’endettement des pays peuvent faire
¢OłDFTXLVLWLRQGHV«TXLSHPHQWVb obstacle à la mise en place de ces mécanismes
ʼnOHP«FDQLVPHGHSDLHPHQWGXVHUYLFHGH de prêts souverains.
Oł«OHFWULFLW«HVWSHU©XFRPPHLQFRK«UHQW
SXLVTXHOHV«TXLSHPHQWVVRQWJUDWXLWV  %QPEGTPCPV NG RT«VGWT il est important de sou-
ODLVVDQWSU«VDJHUGHJUDQGHVGLIŦFXOW«V ligner deux choses :
ORUVGXUHQRXYHOOHPHQWGHFRPSRVDQWV çNGU RC[U OGODTGU FG Nà1%&' UQPV EQPVTCKPVU
HQSUHPLHUOLHXFHOXLGHODEDWWHULHDSUªV de respecter des conditions strictes, dites du
GHX[¢GL[DQVGHIRQFWLRQQHPHQWRXHQ consensus, dans l’octroi de leurs prêts conces-
FDVGHG«IDLOODQFHGłXQ«TXLSHPHQW sionnels, pour justifier du taux très favorable ac-
cordé (cf. encadré). Ce n’est pas le cas des pays
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.
non membres de l’OCDE, devenus des acteurs
incontournables de l’aide au développement, li-
bres de leurs conditions d’octroi (Chine, Inde) ;
çNGU RT«VU EQPEGUUKQPPGNU UQWXGTCKPU UQPV

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 183

assortis de conditions de préférence nationale. Les agences publiques de développement, qui ont
A titre d’exemple, les prêts concessionnels du soutenu traditionnellement les Etats (prêts, dons)
Trésor français prévoient l’achat en France de et les associations (dons), ont diversifié leurs parte-
biens et services pour au moins 70 % du mon- nariats. Elles ont élaboré de nouveaux schémas
tant total du prêt. innovants qui permettent de soutenir un nouveau
type d’acteurs sur la base d’un double constat :
Les financements publics accessibles çCW 5WF NGU 'VCVU QPV OQPVTª NGWTU NKOKVGU GP
au secteur privé matière d’élaboration, de montage, d’exploitation
Différents types d’acteurs financiers sont sus- et de gestion de projets d’infrastructure pub-
ceptibles de soutenir les projets d’ERD en logique lique, et notamment en matière d’électrification
interventionniste portés par des acteurs privés. rurale ;
Souvent trop peu attractifs ou trop risqués pour ç¡NCHCXGWTFWFªUGPICIGOGPVFGUDCKNNGWTURWD-
les marchés financiers classiques, ces projets lics dans les années 80, le secteur privé a pris le
sont notamment soutenus par des bailleurs de relais, parfois avec succès (comme Bouygues
fonds publics. en Côte d’Ivoire), grâce à la compétence de ses
équipes et à sa flexibilité.

&RQGLWLRQVGHFRQVHQVXV2&'(b
l’exception de l’intérêt général

$SDUWLUGHFHUWDLQVSD\VGHOł2&'(RQWHQWDP«GHVGLVFXVVLRQVDŦQGHFRRUGRQQHUOHXUV
SROLWLTXHVHQPDWLªUHGHFU«GLWV¢OłH[SRUWDWLRQ'DQVOHSURORQJHPHQWGHFHmbFRQVHQVXVb}
Oł$UUDQJHPHQWVXUOHVFU«GLWV¢OłH[SRUWDWLRQE«Q«ŦFLDQWGłXQVRXWLHQSXEOLF
D«W««ODERU«DYDQWGłHQWUHUHQDSSOLFDWLRQHQDYULOb
&RQYHQWLRQQRQFRQWUDLJQDQWHFHJHQWOHPHQłVDJUHHPHQWDSRXUREMHFWLIGłHQFDGUHUOłLQWHUYHQWLRQ
SXEOLTXHHWGłDVVXUHUODWUDQVSDUHQFHDŦQGHPDLQWHQLUGHVUªJOHVGXMHXXQLIRUPHVHWGHV
FRQGLWLRQVGHFRQFXUUHQFHOR\DOH/DFRQFXUUHQFHHQWUHH[SRUWDWHXUVGRLWDLQVL¬WUHIRQG«HVXUOD
TXDOLW«HWOHSUL[GHVELHQVHWVHUYLFHVH[SRUW«VSOXW¶WTXHVXUOHVFRQGLWLRQVŦQDQFLªUHVOHVSOXV
IDYRUDEOHVTXHSHXYHQWRIIULUOHVPHPEUHV/łDFFRUGG«WHUPLQHOHVFRQGLWLRQVHWPRGDOLW«VGHV
FU«GLWV¢OłH[SRUWDWLRQ WDX[GłLQW«U¬WGXU«HGHFU«GLWSULPHVGHULVTXHV 'L[SDUWLFLSDQWVVRQW
OL«VSDUFHWDFFRUGbOł$XVWUDOLHOH&DQDGDOł8QLRQHXURS«HQQH HWVHV(WDWVPHPEUHV OH-DSRQOD
&RU«HGX6XGOD1RXYHOOH=«ODQGHOD1RUYªJHOD6XLVVHOD7XUTXLHHWOHV(WDWV8QLV
%LHQTXHQHFRQVWLWXDQWSDVXQDFWHGHOł2&'(FHWDUUDQJHPHQWYRORQWDLUHHVWWRXMRXUV
HQYLJXHXUDXMRXUGłKXL

6RXUFHb OCDE , « Arrangement sur les crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public » (Paris, 2018).

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184 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Les banques de développement, notamment


la Banque mondiale, ont ainsi élargi les critères Les acteurs privés
d’éligibilité de leurs prêts et dons aux acteurs ca- représentent
pables de créer un effet de levier sur les finance- HQYLURQb
ments publics. Elles acceptent ainsi de financer des engagements
un opérateur privé : GH
çUàKNUàGPICIG¡OWNVKRNKGTGV¡GZRNQKVGTNGUKPHTC-
structures installées ;
l’Agence française
ç¡ VTCXGTU NGU KPUVTWOGPVU ăPCPEKGTU ENCUUKSWGUa  de développement,
RT«VU EQPEGUUKQPPGNU PQP UQWXGTCKPU OCKU
CWUUK FG RNWU GP RNWU HTªSWGOOGPV FQPU TXLDDQQRQF«TXHFHWWHSDUW
(cf. encadré). «WDLWDPHQ«H¢FUR°WUH

Cette évolution récente, qui permet de concevoir


de nouvelles modalités de financement de projets
d’infrastructures publiques en général, bénéficie à
l’ERD par énergies renouvelables (principalement
5«SDUWLWLRQSDURXWLOVŦQDQFLHUV
solaire, hydraulique ou hybride). GHVHQJDJHPHQWVGXJURXSH$)'
Avec ce soutien additionnel, les opérateurs privés sur l’énergie en Afrique sur la
sont plus à même de concevoir des montages fi- S«ULRGH WRWDOb0Gŏ
nanciers équilibrés qui leur permettent à la fois :
çFG FªNKXTGT FGU UGTXKEGU ªNGEVTKSWGU adaptés
au milieu rural ; Subventions
Prêts non
çGV FG TGPHQTEGT NC XKCDKNKVª ªEQPQOKSWG de 7% souverains
leurs activités. 29 %
La rentabilité d’un système électrique étant faible
(capacité contributive des usagers très limitée),
et le retour sur investissement long (durée des
concessions de vingt ans), l’analyse du finance-
ment et le montage financier des projets sont
déterminants et les ressources utilisées doivent
Prêts
être adaptées à ce type d’opérations (crédits long souverains
terme, éléments dons). 52 % PROPARCO
12 %
Pour dégager une rentabilité, plusieurs conditions
doivent être réunies :
6RXUFHb AFD, « Accélérer la transition énergétique en
çNCVCKNNGFGUWPKVªUFGRTQFWEVKQP doit être dé- Afrique » (Paris, 2016), 3.

terminée en considérant la capacité des abon-


nés, c’est-à-dire leur capacité contributive ob-
jective mais aussi leur volonté de payer leurs
consommations selon la tarification convenue ;

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 185

([HPSOHGHGRQD\DQWE«Q«ŦFL«¢XQRS«UDWHXU
SULY«bOD)DFLOLW«Gł«QHUJLHSURSUHKRUVU«VHDX
2II*ULG&OHDQ(QHUJ\)DFLOLW\2&() DX%«QLQ
/D)DFLOLW«Gł«QHUJLHSURSUHKRUVU«VHDX 2&() PLVHHQSODFHGDQVOHFDGUHGłXQDFFRUGGHGRQ
VLJQ«HQHQWUHOHVJRXYHUQHPHQWVGHV(WDWV8QLVHWGX%«QLQHVWXQmécanisme d’appui
ŦQDQFLHUSDUDSSHO¢FRQFXUUHQFHGHVWLQ«DX[SURPRWHXUVGHSURMHWVGł«OHFWULŦFDWLRQKRUV
réseau.
/ł2&()YLVH¢DFFUR°WUHOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«SRXUODPDMRULW«GHODSRSXODWLRQDFWXHOOHPHQWQRQ
GHVVHUYLHGDQVOHV]RQHVUXUDOHVHWS«ULXUEDLQHVHQU«GXLVDQWOHVFR½WVLQLWLDX[GHUDFFRUGHPHQW
HWOHVREVWDFOHV¢OłLQYHVWLVVHPHQWGDQVOHVHFWHXUGHOł«QHUJLH«OHFWULTXH(OOHUHFKHUFKHXQHIIHW
PXOWLSOLFDWHXUJU¤FH¢GHVSDUWHQDULDWVDYHFGHVHQWUHSULVHVSULY«HVGHV21*GHVFRPPXQDXW«V
HWDXWUHVVWUXFWXUHVTXLSURSRVHQWGHVVROXWLRQV FRPPHUFLDOHPHQW YLDEOHVKRUVU«VHDXHWGHV
DOWHUQDWLYHV«QHUJ«WLTXHVSURSUHVDGDSW«HV¢ODU«DOLW«GX%«QLQ

/DFRQWULEXWLRQŦQDQFLªUHIRXUQLHSDUOł2&()HVWXQFRLQYHVWLVVHPHQWTXLVHUW¢DXJPHQWHU
ODUHQWDELOLW«GHOłDFWLYLW«¢XQQLYHDXDFFHSWDEOHSRXUOłLQYHVWLVVHXUHWSRXUOł2&()&KDTXH
GHPDQGHVRXPLVHHVWMXJ«HVXUVRQSODQGłDIIDLUHVHWVRQSODQŦQDQFLHU/HVRXPLVVLRQQDLUH
GRLWDSSRUWHUXQHFRQWULEXWLRQPLQLPXPGHbGHVLQYHVWLVVHPHQWVWRWDX[GXSURMHW&HWWH
FRQWULEXWLRQSHXW¬WUHFRQVWLWX«HGHIRQGVSURSUHVGHFRQWULEXWLRQVŦQDQFLªUHVGłXQSDUWHQDLUH
RXGłXQDXWUHEDLOOHXUGHIRQGVGłXQFU«GLWEDQFDLUHHWRXGłXQHYDORULVDWLRQGłDSSRUWHQQDWXUH
,OHVWUHFRPPDQG«TXHOHVHQWLW«VFRPPHUFLDOHVFLEOHQWXQHFRQWULEXWLRQSURSUHGłDXPRLQVb

/łHQYHORSSHGLVSRQLEOHSRXUOHGHUQLHUDSSHO¢SURMHWVGDWDQWGHQRYHPEUH«WDLW
GHPLOOLRQVGHGROODUV86

çNCVCTKăECVKQPFWUGTXKEG doit inclure les charges d’atteindre un nombre suffisant d’usagers allant,
récurrentes de gestion et de maintenance, le re- selon les leçons de l’expérience, de 10 000 à
nouvellement des équipements à durée de vie 30 000 raccordements ;
moyenne (les batteries, régulateurs et groupe çNàGZRNQKVCVKQP doit être assurée par un ou plu-
électrogène) ainsi que l’amortissement des sieurs opérateurs dotés d’une autonomie de
équipements et du réseau, le coût des couver- gestion adaptée au caractère rural des projets
tures de risques et assurances, le coût des rem- (enclavement, satellisation des unités de pro-
boursements d’emprunts, du capital et la marge ; duction, etc.).
çNG RJCUCIG FGU QRªTCVKQPU doit idéalement Cependant, peu d’acteurs locaux sont capa-
s’inscrire dans une programmation et viser à bles aujourd’hui de cette autonomie : très rares
terme une couverture géographique permettant sont ceux qui ont l’expérience de terrain requise

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186 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

(exploitation de plusieurs systèmes ruraux en Le plan d’affaires, document


parallèle). Ce qui amène certains opérateurs à de référence pour la décision
tenter des solutions sans intervention humaine et de financement.
déplaçables en cas d’extension du réseau inter- Il inclut une analyse précise des événements
connecté ou d’échec dans une localité (solutions qui peuvent survenir pendant la durée du rem-
containerisées). boursement (calée sur celle des infrastructures
et prévue généralement sur quinze à trente ans),
Ces conditions étant connues, c’est à partir d’un plan et une étude de sensibilité qui montre sa robus-
d’affaires, ou business plan, qu’un dossier de finance- tesse (cf. encadré).
ment pourra être élaboré et soumis aux différents Fondé sur les résultats des études réalisées en
partenaires financiers pressentis pour le projet. amont du projet pour collecter des informations
détaillées et quantifiées sur tous les aspects de
ce dernier, le plan d’affaires permet :
çFGOGVVTGGPEQJªTGPEGVQWUNGUªNªOGPVUEQPU
titutifs d’un projet ;
çFàKFGPVKăGTNGUHCEVGWTUFGTKUSWGGVNGUOGUWTGU
adaptées de maîtrise ;
çFG FªVGTOKPGT NGU KPFKECVGWTU ¡ UWKXTG RQWT
évaluer la performance après la mise en œuvre
du projet.

En électrification rurale, et plus particulière-


ment dans sa modalité décentralisée, élaborer
un plan d’affaires équilibré, voire dégageant un
autofinancement après paiement de toutes les
charges et couverture des risques inhérents à ce
secteur, est un exercice indispensable, mais par-
ticulièrement difficile.
© Fondation Energies pour le Monde

L’équipe exploitante et comptable, élément clé


de la gestion des installations.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 187

/ł«WXGHGHVHQVLELOLW«bWHVWHUODUREXVWHVVH
du business plan

/łDQDO\VHŦQDQFLªUHHVWLQFRQWRXUQDEOHbVRQLQVXIŦVDQFHHVWVRXYHQWODFDXVHGHOł«FKHFGHV
SURMHWV(OOHHVWWUDGXLWHGDQVXQRXWLOOHSODQGłDIIDLUHV RXEXVLQHVVSODQ HWVHVGLII«UHQWHV
FRPSRVDQWHVWHOOHVTXHOHV«WXGHVGHVHQVLELOLW«HWOłDQDO\VHGHULVTXHV

8QHIRLVTXHOHSODQGłDIIDLUHVHVW«WDEOLHQWHQDQWFRPSWHGHVREMHFWLIVGHVGLII«UHQWV
SURWDJRQLVWHVLOGRLW¬WUHVRXPLV¢XQHV«ULHGHWHVWVRXmb«WXGHGHVHQVLELOLW«b}SRUWDQWVXU
FHUWDLQVIDFWHXUVGLIŦFLOHPHQWSU«YLVLEOHVFRPPHOHQRPEUHGłXVDJHUVOHWDULIDFFHSWDEOH
ODGXU«HGHODPRQW«HHQSXLVVDQFHGXSURMHWODGXU«HGHYLHGHVSULQFLSDX[FRPSRVDQWV

/ł«WXGHGHVHQVLELOLW«SHUPHWGHG«ŦQLUOHV«YHQWXHOVSDOOLDWLIVSRXUFRQIRUWHUODS«UHQQLW«
GXSURMHWHWVDUHQWDELOLW«DLQVLTXHGłDIŦQHUOHVLQGLFDWHXUVGHVXLYLGHSHUIRUPDQFH ULVTXHV
RSSRUWXQLW«V¢VXUYHLOOHU 

Les risques pesant sur la viabilité çNGDQPHQPEVKQPPGOGPVFGUªSWKRGOGPVU dont


économique des projets d’accès il est prouvé qu’une panne affecte significative-
à l’électricité en milieu rural. ment la confiance des abonnés dans la fiabilité
Plusieurs facteurs ont un rôle prépondérant dans du système.
la constitution d’un plan d’affaires, et les études de Sur les charges :
sensibilité montrent, comme l’indiquent les sché- çNGTGURGEVFGUEQ¼VUFàGZRNQKVCVKQP et en par-
mas suivants, combien leurs variations sur les ticulier de celui des déplacements (par exemple :
produits comme sur les charges peuvent en af- coût de réparation des véhicules) ;
fecter les résultats. çNCVGPWGFGURGTHQTOCPEGUFGUDCVVGTKGU telles
qu’escomptées  : ces équipements représen-
Sur les produits : tent approximativement la moitié du montant
çNàCVVGKPVG FW VCWZ FG FGUUGTVG escompté, d’investissement du poste production.
au fur et à mesure des années, aura un im-
pact décisif sur la participation des abonnés à C’est donc dans la maîtrise de ces facteurs, intime-
l’investissement des interfaces et sur la quantité ment liée à la connaissance du contexte local, de
d’électricité vendue ; son histoire, de l’économie locale et des rapports hu-
çNGRCKGOGPVGĂGEVKHFGNCSWCPVKVªFàªNGEVTKEKVª mains, qu’un plan d’affaires réaliste peut s’élaborer.
vendue ou, en cas de prépaiement, la propension
à payer la quantité d’électricité escomptée, aura un
impact sur le volume des produits collectés ;

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188 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

6WUXFWXUHGHVFR½WVGłH[SORLWDWLRQGłXQV\VWªPH«OHFWULTXH

8'06'&'M9J

&RQVRPPDWLRQ
9DOHXUDMRXW«H
LQWHUP«GLDLUH

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7D[HV ([F«GHQWEUXWGłH[SORLWDWLRQ
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SRXUULVTXHV

,PS¶WVVXU 5«VXOWDWV
OHVVRFL«W«V QHWV

'LYLGHQGHV

* Comprend entre autres la maintenance préventive


des installations et le remplacement des
5«VHUYHV
composants défectueux ou arrivés en fin de vie.
DXWRŦQDQFHPHQW

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

Les projets d’ERD présentent souvent des çNGUTKUSWGURQNKVKSWGUa: non-respect, rupture ou


niveaux de risque susceptibles de faire renoncer application tendancieuse du contrat de conces-
nombre d’investisseurs et d’opérateurs. Les prin- sion (fait du prince), mobilisation insuffisante des
cipaux risques sont les suivants : ressources financières aux différents niveaux
çNGU TKUSWGU EQOOGTEKCWZa  surestimation du territoriaux (Etats, provinces, municipalités),
marché en volume ou en vitesse de croissance, non-paiement des usagers publics (écoles, cen-
surestimation de la capacité contributive ou de tres de santé, etc.), évolution réglementaire dé-
la volonté de payer des usagers équipés, sous- favorable sur les transferts de fonds à l’extérieur
estimation des coûts d’exploitation ; du pays ou la convertibilité des devises locales,

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 189

risques de guerre et troubles civils ; Les mécanismes traditionnels de


çNGU TKUSWGU VGEJPKSWGUa  rythme d’installation financement ont atteint leurs limites.
non respecté, erreur d’appréciation des prob- Les interventions des bailleurs de fonds telles
abilités de défaillance technique sur le parc que décrites précédemment ne permettent pas
d’équipements, mauvaise utilisation des équipe- de réaliser le changement d’échelle susceptible
ments par les usagers, vol ou vandalisme, dété- de satisfaire aux objectifs fixés dans le cadre des
rioration des matériels liée à un événement na- ODD ou de l’initiative SE4ALL des Nations unies.
turel ou accidentel (incendie) ; Entre 2000 et 2015, la Banque mondiale a financé
çNGU TKUSWGU UQEKQªEQPQOKSWGU GV EWNVWTGNUa  des programmes de grande envergure (Sénégal,
contestation ou remise en cause des modalités Mali) qui n’ont pu être réalisés dans leur intégralité
proposées par les usagers, crise économique au rythme prévu, montrant ainsi les limites de ce
régionale affectant gravement les capacités de type de stratégie.
paiement et/ou induisant des départs en nombre. En parallèle, les programmes de plus petite en-
vergure (300 000 à 1 million d’euros selon la taille
L’opérateur peut recourir à quelques mécanismes des localités et la morphologie sociospatiale du
de transfert ou de couverture de certains de ces territoire) souffrent d’un manque de financement.
risques. Cependant, assurances et garanties in- Et cela pour plusieurs raisons (dont la plupart ont
duisent des charges d’exploitation qui pénalisent déjà été évoquées mais qu’il est sans doute utile
la rentabilité de l’activité. de rassembler ici) :
çNGU RTQLGVU FàCEE©U ¡ NàªNGEVTKEKVª GP OQFG Fª-
Ces facteurs de complexité, de renchérissement centralisé d’une localité sont de taille réduite,
et de vulnérabilité des projets sont indissociables au regard des montants que les agences de
du contexte dans lequel l’ERD s’insère. Les bail- développement ont l’habitude de manier. Ils
leurs en prennent acte, pour permettre la réalisa- engendrent donc pour elles des coûts fixes pro-
tion des bénéfices sociaux et environnementaux portionnellement lourds ;
liés à l’électrification d’un territoire.
Le tableau infra dresse un inventaire non exhaustif
des bailleurs et agences de développement impli-
qués dans des projets d’accès à l’électricité en mi- /łHQMHXSULQFLSDOGHVDFWHXUVŦQDQFLHUV
lieu rural, ainsi que leurs modalités d’intervention : HVWGł«YDOXHUOHQLYHDXGHULVTXHGH
OHXUVLQYHVWLVVHPHQWVDXYXGHVDO«DV
Peut-on financer le changement J«RSROLWLTXHVHQFRUHWUªVLPSRUWDQWV
d’échelle qui est nécessaire ? GDQVGHQRPEUHXVHVU«JLRQV3DU
Comme évoqué en introduction de cet ouvrage DLOOHXUVOHVSRVVLELOLW«VGHU«GXLUHOHXU
et rappelé au début de ce chapitre, le développe- ULVTXHHQGLYHUVLŦDQWOHXUVDFWLIVVRQW
ment de l’Afrique subsaharienne passe par son DXMRXUGłKXLOLPLW«HVSDUOHQRPEUH
développement rural inclusif, et donc par une ac- UHVWUHLQWGHSURMHWV
tion ambitieuse d’électrification des territoires ru-
raux, bien plus ambitieuse que l’action actuelle. Institut Choiseul, « Afrique, les acteurs clés
de l’énergie » (Paris, 2017).

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190 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

$TXLVłDGUHVVHUSRXUŦQDQFHUXQSURMHWGł(5'"
/HVEDLOOHXUVHWOHXUVRIIUHVŦQDQFLªUHVPRELOLVDEOHVVXUOł«OHFWULŦFDWLRQ

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%LODW«UDX[ SURSRV«V

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QRQVRXYHUDLQVFRQFHVVLRQQHOV
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6XEYHQWLRQVGłDSSXL
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GXPDUFK«
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3DUWLFLSDWLRQV HTXLWLHV

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%DQTXHVRXIRQGVSULY«V ,QWHUQDWLRQDOHV
GXPDUFK«
GłLQYHVWLVVHPHQW /RFDOHV
3DUWLFLSDWLRQV HTXLWLHV

6RXUFHb Fondation Énergies pour le Monde

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 191

Le soutien de l’Agence française de développement


¢Oł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH

/ł(5'GHYLHQWVLJQLŦFDWLYHHQPRQWDQWVGłRFWURLV¢SDUWLUGHDYHFHQPR\HQQH0ŏDQ
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SURJUHVVLRQVHQVLEOHGHOł(5' ¢SURMHWVHQPR\HQQHSDUDQ 
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3ULRULW«VGłLQWHUYHQWLRQGDQVOł(5'
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ʼn $FFHQWPLVVXUOHKRUVU«VHDXDUWLFXO«DYHFOHU«VHDXLQWHUFRQQHFW«HWODFRQVWUXFWLRQGH
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ʼn 3URJUDPPHVGł«TXLSHPHQWV39LQGLYLGXHOVHQSD\DV\RXJR
ʼn 7UDQVIRUPDWLRQG«SORLHPHQWGHVPLQLU«VHDX[ 39QRWDPPHQW
ʼn 3URJUDPPHPXOWLPRGDX[Gł«OHFWULŦFDWLRQDYHFDVVLVWDQFHLQVWLWXWLRQQHOOHHWWHFKQLTXH
HWDSSXLmSROLWLTXHSXEOLTXH} SURJUDPPDWLRQVRS«UDWLRQQHOOHV«WXGHVWDULIDLUHVFDGUHV
U«JOHPHQWDLUHVHWF

/HVLQVWUXPHQWVGLVSRQLEOHV
&RPELQDLVRQGHVRXWLOVŦQDQFLHUVVHORQODGHPDQGHSU¬WVGLUHFWV VRXYHUDLQVQRQVRXYHUDLQV
SULY«V OLJQHVG«GL«HVVXEYHQWLRQVGłDVVLVWDQFHWHFKQLTXHRXHQVRXWLHQ¢OłLQQRYDWLRQHWF

6RXUFHb Christian de Gromard, « Structuration des investissements et outils de financement de l’accès à l’énergie »
(Conférence, 22 mai 2018).

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192 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

çNGWTU EQ¼VU FG VTCPUCEVKQP EàGUV¡FKTG auraient pourtant, par leur proximité avec les
d’instruction puis de suivi des dossiers, ne per- acteurs locaux et leur connaissance du contexte,
mettent pas aux bailleurs de s’engager dans un rôle privilégié à jouer dans la banalisation de
de tels projets à des conditions qu’ils jugent l’accès à l’électricité en milieu rural2.
favorables ;
çNC UVCPFCTFKUCVKQP FGU RTQLGVU PªEGUUCKTG RQWT Alors, qui d’autre pour financer des
pouvoir les agréger au sein d’un seul programme programmes d’ERD ayant l’envergure
au montant compatible avec les critères des nécessaire ?
bailleurs, s’avère à ce jour impossible au regard Au même titre que les dons et subventions ont an-
de la diversité des contextes et du manque ticipé l’intervention des organismes financiers de
d’harmonisation des critères au niveau des l’aide au développement, de nouvelles formes de fi-
financeurs ; nancement et/ou de nouveaux acteurs émergent à
çNG EQPVGZVG FGU RC[U Fà#HTKSWG UWDUCJCTKGPPG leur tour. Les spécificités et les externalités positives
marqué par des crises récurrentes, est porteur de l’ERD favorisent de nouvelles formes de finance-
de risques importants qu’aucun mécanisme de ment. Sans contribuer à la totalité d’un investisse-
garantie ne permet encore de couvrir1. ment, elles viennent y participer, selon leur taille et
leurs caractéristiques, de façon significative.
Dans cette situation, entre des Etats aux ressources
limitées, des agences de développement frileuses La coopération décentralisée fait particulière-
et des opérateurs privés liés par des critères de ment sens pour la mise en œuvre de projets d’ERD :
rentabilité, la majorité des populations rurales sub- l’impulsion de la collectivité du Sud est accompa-
sahariennes ne peut espérer disposer d’un service gnée par les moyens de la collectivité du Nord. Les
d’électrification dans un avenir proche. politiques internationales des grandes collectivités
Pour des raisons d’appropriation pérenne et françaises (régions notamment) sont également des
de logique de gestion, le financement de l’ERD tremplins pour l’accompagnement des entreprises
devrait idéalement prioriser la mobilisation de res- locales du secteur énergétique à l’export. Les initia-
sources nationales, avant de recourir aux fonds tives lancées en 2019 par les régions Nouvelle-Aqui-
internationaux, devenus auxiliaires. Mais cette taine et Hauts-de-France en sont deux exemples.
perspective semble peu réaliste :
çOCNITª NàGZKUVGPEG FG EGTVCKPU OªECPKUOGU FG
taxation sur les consommations, les ressourc-
es propres restent très limitées dans les pays
concernés (cf. encadrés) ;
çNGU DCPSWGU EQOOGTEKCNGU FGU RC[U FàKPVGT
vention ont été interpellées. Mais, encore peu
expérimentées dans un domaine innovant et
complexe, elles ne sont pas aujourd’hui à même 1. Nergis Gülasan et Gail Hurley, « Financer le développement
avec des ressources nationales », ID4D, 2015, https://
de proposer des solutions adéquates ; elles sont ideas4development.org/financer-le-developpement-par-une-
sans doute pourtant les mieux placées pour ap- meilleure-mobilisation-des-ressources-nationales/.
2. C’est le sens du projet de la Banque Attijari cité par Lionel Zinsou
préhender les contextes et les risques locaux. en avant-propos de cet ouvrage et dont les résulats apporteront
Adossées à des partenaires internationaux, elles sans doute des éléments de capitalisation interéssants

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 193

Parole de professionnel
Olivier Oriol
Quels sont les obstacles que vous rencontrez pour pénétrer le vaste marché africain
de l’électrification rurale, actuellement en pleine mutation ?

mb/HPDQTXHGłXQLIRUPLVDWLRQGHOł«OHFWULILFDWLRQUXUDOHHVWOłXQHGHVSOXVJURVVHVGLIILFXOW«V
DXMRXUGłKXL/HIDLWTXHFKDTXHSD\VRXFKDTXHEDLOOHXUGHIRQGVLPSRVHVHVSURSUHV
VS«FLILFDWLRQVWHFKQLTXHVVXUFKDTXHSURMHWQHQRXVGRQQHSDVGHYLVLELOLW«SRXUG«YHORSSHU
GHVSURGXLWVU«SRQGDQW¢XQEHVRLQKRPRJªQH'HSOXVFHUWDLQVILQDQFHPHQWVQHQRXV
GRQQHQWSDVODSRVVLELOLW«GHSDUWLFLSHU¢GHVSURMHWVFHTXLOLPLWHQRWUHFKDPSGłDFWLRQb}

Olivier Oriol, spécialiste des pays en développement depuis dix ans, travaille actuellement sur les
thématiques de l’accès à l’énergie en milieu rural en Afrique ;
il est responsable Afrique chez Michaud Export.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

Difficile cependant de lire l’avenir de la coopération .GU HQPFU FàKORCEV (impact investment funds)
décentralisée à la française en matière d’ERD. Ce s’intéressent de plus en plus près aux initiatives
mécanisme en est encore à ses prémisses (exem- d’accès à l’énergie, au-delà de celles qui relèvent
ple : dispositif FICOL supervisé par l’AFD, dont les d’une approche libérale. Les externalités posi-
premiers projets démarrent à l’heure où l’ouvrage tives sociales, économiques et environnemen-
est écrit). tales liées aux projets d’électrification rurale hors
réseau favorisent l’intervention d’une nouvelle
.GU ăPCPEGOGPVU GPXKTQPPGOGPVCWZ consti- génération d’investisseurs. A l’inverse des bail-
tuent un potentiel relais des financements dédiés à leurs conventionnels, les investisseurs d’impact
l’accès à l’électricité. Le faible impact des infrastruc- soutiennent les projets au-delà du simple finance-
tures d’ERD sur l’environnement grâce à la promo- ment, en vue de leur aboutissement, jusqu’à la vé-
tion des énergies renouvelables et de l’efficacité rification des impacts.
énergétique favorise une intervention des organ- Il n’en reste pas moins que les projets
ismes impliqués dans la réduction des émissions de d’électrification décentralisée, pour lesquels les
gaz à effet de serre. A titre d’exemple, le Fonds pour études d’impact sont rares, se plient difficilement
l’environnement mondial (FEM) et le Fonds français à une évaluation quantitative (cf. encadré), ce qui
pour l’environnement mondial (FFEM) peuvent ac- risque de limiter la capacité d’intervention de ces
corder des subventions en complément d’autres investisseurs.
sources financières (cf. encadré). Ces fonds ne sont
pas spécifiquement dédiés à l’accès à l’électricité.

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194 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

/HVRXWLHQGX)RQGVIUDQ©DLVSRXUOłHQYLURQQHPHQW
PRQGLDO ))(0
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HQYLURQQHPHQWDX[PRQGLDX[GDQVOHVSD\VHQG«YHORSSHPHQWDLQVLTXHGHWHVWHUGHVVROXWLRQVHW
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/HVLQVWUXPHQWVGLVSRQLEOHVb
ʼnOH))(0FRQWULEXHDX[SURMHWVSDUGHVVXEYHQWLRQVRXFRQWULEXWLRQVHQQDWXUH/HVWDX[GH
FRŦQDQFHPHQWPD[LPXPVRQWGHb bSRXUOHVSURMHWVWUªVLQQRYDQWV SRXUGHVPRQWDQWV

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 195

VLWX«VHQWUHHWPLOOLRQVGłHXURVb
DSSHOV¢SURMHWV
SURJUDPPHGHSHWLWHVLQLWLDWLYHV 33, bVWUXFWXUDWLRQGHQRXYHDX[DFWHXUVGHODVRFL«W«FLYLOHGX
6XG GHSXLVSURMHWVVRXWHQXV b
ʼnVRXWLHQDXVHFWHXUSULY«b
)DFLOLW«GłLQQRYDWLRQSRXUOHVHFWHXUSULY« ),63 bFRQWULEXWLRQSDUOłLQWHUP«GLDLUHGHGRQVRX
GłDYDQFHVUHPERXUVDEOHV

6RXUFHVb ))(0, « Stratégie 2019-2022 » (Paris : Fonds français pour l’environnement mondial, 2019).

))(0, « Rapport annuel 2017 » (Paris : Fonds français pour l’environnement mondial, 2018).

Par ailleurs, le ROI attendu par ces derniers n’est Les diasporas s’inscrivent souvent dans une dy-
pas nécessairement aligné sur le temps long qui namique de développement local et pallient les
est nécessaire pour mesurer les effets de l’arrivée déficiences de l’Etat, en finançant l’accès à l’eau,
de l’électricité sur le développement local en à l’éducation ou à la santé. A ce titre, l’ERD est en
milieu rural. mesure d’impliquer les ressortissants des locali-
tés à électrifier installés hors du pays.
Les entreprises sont également sensibles à ces Leurs membres peuvent contribuer, en numéraire,
externalités positives. Elles sont la clé de participa- mais aussi en assistance, au montage des dossiers
tions diverses issues de mécénats ou de fonda- pour faciliter une électrification locale. Au cours de
tions que les entreprises créent dans le cadre de l’année 2017, la contribution de la diaspora africaine
leur politique de  RSE  (responsabilité sociétale des a représenté 65 milliards de dollars (58 Mds €), soit
entreprises) ou d’« engagement sociétal ». Une des plus du double de l’aide publique au développement,
pistes consiste notamment à développer des inter- qui s’élevait à 29 milliards de dollars (26 Mds €)1. Les
ventions conjointes avec les ONG pour développer deux tiers de ces fonds sont utilisés comme filet de
les usages productifs dans les communautés ac- sécurité sociale et contribuent à pallier les besoins
cueillant leurs opérations et renforcer les chaînes de quotidiens de financement. Dans certains pays, tels
valeur liées à leurs activités grâce à l’électrification. la Gambie et les Comores, la contribution de la dias-
Les secteurs de l’agroalimentaire, de l’industrie pora peut s’élever à hauteur de 20 % du PIB national2.
pharmaceutique, des réseaux et de la réalisation
d’infrastructures sont directement concernés. Le
secteur financier, et notamment les assureurs et
réassureurs, qui font face à des risques financiers
majeurs en cas d’insuffisance de la lutte contre les
changements climatiques, ont également intérêt à 1. African Institute for Remittances, « Progress report on the African
soutenir la massification de l’électrification par éner- Institute for Remittances » (Nairobi, 2018),
2. Banque mondiale, « Migration and Remittances: Recent
gies renouvelables dans les pays émergents et en Developments and Outlook - Transit Migration » (Washington, D.C,
développement. 2018), 24.

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196 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

'PăP NG ăPCPEGOGPV RCTVKEKRCVKH ne peut être


totalement écarté du panorama des nouvelles
Peut-on évaluer
formes de financement. Il semble possible même les impacts de
pour des projets d’envergure, bien au-delà du Oł«OHFWULŦFDWLRQVXU
spectre habituel des opérations de crowdfunding, le développement
qui permettent à des associations de faire ap- local ?
pel à la générosité du public pour des montants
modestes. L’opérateur BBOXX a ainsi récemment /DU«SRQVH¢FHWWHTXHVWLRQHVVHQWLHOOH
levé 6 millions d’euros3 dans le cadre d’une opéra- QłHVWSDVDLV«HFDUOHV«WXGHVGłLPSDFWV
tion de crowdlending. Dans ce cas spécifique, le QHVRQWSDVO«JLRQVDXISRXUOHV
dispositif mis en place ressemble à une tournée SLFRVROXWLRQVSOXVIDFLOHV¢MDXJHU
d’investisseurs classique  ; par ailleurs, on peut /ł«YDOXDWLRQGHVDFWLRQVGHWHUUDLQU«YªOHOH
s’interroger sur la compatibilité de la rémunéra- SOXVVRXYHQWGHVU«VXOWDWVmbJOREDOHPHQW
tion servie aux prêteurs (jusqu’à 11 %) avec le statut HQFRXUDJHDQWVb}SRXUODPDMRULW«GHV
d’entreprise sociale affiché par cet acteur du PAYG. VROXWLRQVSLFRPLFURPLQLP¬PHVLOHV
LQIRUPDWLRQVUHVWHQWVRXYHQWTXDOLWDWLYHV
Ce panorama succint du financement de l’accès à /DTXDQWLŦFDWLRQGHVUHWRPE«HVUHTXLHUW
l’électricité par solutions renouvelables et décen- WRXMRXUVEHDXFRXSGHSU«FDXWLRQV
tralisées montre qu’il reste plusieurs obstacles
à surmonter pour réussir un réel changement %HDXFRXSGłH[WHUQDOLW«VVRQWLQGLUHFWHV
d’échelle. LQWDQJLEOHVHW¢ORQJWHUPH&LWRQVHQ
Depuis les années 90, de multiples travaux ciblés FHUWDLQHVLQGLUHFWHVLGHQWLŦ«HVORUVGH
sur des approches innovantes de financement GLYHUVHVHQTX¬WHV+\VWUD  bGHV
ont déjà été entrepris (principalement à l’initiative «FRQRPLHVHIIHFWX«HVVXUOHVDFKDWVGH
de l’Union européenne et de la Banque mondiale), FRPEXVWLEOHV TXLSHXYHQWDWWHLQGUHb
sans résultats tangibles rapides. GXUHYHQXDQQXHO GHVFRPSO«PHQWVGH
Si les évolutions technologiques ont fourni un UHYHQXVDSSRUW«VSDUOHWUDYDLOQRFWXUQH
terreau favorable, l’urgence politique favorisera XQJDLQGłXQHKHXUHVXSSO«PHQWDLUH
peut-être la levée des derniers verrous du fi- GHGHYRLUVVFRODLUHVSDUMRXUHQŦQ
nancement d’une électrification de l’Afrique rurale OłDP«OLRUDWLRQGHODVRFLDOLVDWLRQHWGX
qui soit réellement inclusive et pensée pour une ELHQ¬WUHJ«Q«UDO
communauté et non pour des individus.
6RXUFHPierre Jacquemot et Marie-Noëlle Reboulet,
« Options technologiques et modèles d’organisation
de l’électrification rurale en Afrique », Afrique
Contemporaine 1-2, n° 261-262 (2017) : 179.

3. « BBOXX receives largest crowd-funded debt raise », BBOXX,


2019, https://www.bboxx.co.uk/bboxx-receives-largest-crowd-
funded-debt-raise-history-solar-africa/.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 197

Parole de professionnel
Guilhem Dupuy

6HORQYRXVHVWLOSRVVLEOHGHG«YHORSSHUGHVSURMHWVGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
économiquement viables sans renoncer à l’impact social ?

,OGRLW\DYRLUXQYUDLG«EDWSKLORVRSKLTXH1XOOHSDUWOł«OHFWULŦFDWLRQGHVSOXVSDXYUHVQH
VłHVWIDLWHSDUODVHXOHFRQWULEXWLRQGHVSRSXODWLRQVORFDOHV,OIDXWTXłLO\DLWGHVSURJUDPPHV
VXEYHQWLRQQ«V/DUHQWDELOLW«GHFRXUWWHUPHQłHVWSDVOHERQDQJOHGłDQDO\VHSRXU
Oł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH

/łLPSDFWVRFLDOGHVRS«UDWLRQVU«DOLV«HVSDUODSOXSDUWGHVHQWUHSULVHVSULY«HVFRQVLVWDQW
¢GLVWULEXHUGHV66,HVWLQVXIŦVDQW&HUWDLQVHQWUHSUHQHXUVGXVRODLUHD\DQWGHVDFWLYLW«V
UHQWDEOHVHQ]RQHXUEDLQHS«ULXUEDLQHXWLOLVHQWXQHSDUWLHGHOHXUVE«Q«ŦFHVSRXUŦQDQFHUGHV
RS«UDWLRQVHQPLOLHXUXUDO¢WLWUHVRFLDOVDQVG«JDJHUGHPDUJHYRLUHHQ\SHUGDQWXQSHX

A votre avis, les ONG peuvent-elles aider le secteur privé à trouver le point d’équilibre ?

/DFRPPXQDXW«GHVLPSDFWLQYHVWRUVVHSRVHODTXHVWLRQGHVXVDJHVSURGXFWLIVGHSXLV
SOXVLHXUVDQQ«HVFDUODGLVWULEXWLRQGHVV\VWªPHVGRLWSHUPHWWUHOłDP«OLRUDWLRQGHVUHYHQXV
GHVSRSXODWLRQVODFU«DWLRQGłHPSORLV0DLVOHVXMHWHVWFRPSOH[HLOIDXWSURSRVHUGHV
V\VWªPHVSOXVJURV GRQFSOXVFKHUV¢OłLQYHVWLVVHPHQW LQWHUDJLUDYHFOHVSURIHVVLRQV
H[SOLTXHUOHVDWRXWVGXVRODLUHSURSRVHUOHV«TXLSHPHQWVGłXVDJH SRPSDJHPRXOLQVHWF 
DSSRUWHUXQ6$9GHTXDOLW«SRXUXQHU«SDUDWLRQUDSLGHVXUOłHQVHPEOHGXV\VWªPHJDUGHU
XQHIRUWHUHODWLRQDXFOLHQWŊ

'ªVORUVOHUHWRXUGłH[S«ULHQFHGHV21*VXUOłLQJ«QLHULHVRFLDOHHVWHVVHQWLHOQRWDPPHQW
SRXUIRUPHUGHVXWLOLVDWHXUV¢ODWUDQVIRUPDWLRQGHVSURGXFWLRQVDJULFROHVRXVWUXFWXUHU
XQHŦOLªUHDYHFXQHFRPSRVDQWH«QHUJ«WLTXHP¬PHVLFHUWDLQHVFKD°QHVGHYDOHXUVRQW
FRPSOH[HV ELRPDVVH ,OIDXWGRQFFRQVWUXLUHGHVPRGªOHVGłDFWLRQFRRUGRQQ«HHQWUH
HQWUHSULVHVHW21*VXUOHVXVDJHVSURGXFWLIV/HVHQWUHSULVHV\RQWXQLQW«U¬W«FRQRPLTXH

Guilhem DUPUY,DQVDQFLHQ«OªYHGHOł(FROH1RUPDOH6XS«ULHXUHGLSO¶P«HQ
économie, statistiques et sociologie, occupe les fonctions de directeur d’investissement
FKH]*DLD,PSDFW)XQG,ODWUDYDLOO«SRXU(FRŦHWDX&U«GLW&RRS«UDWLIR»LODFRQWULEX«¢
ODVWUXFWXUDWLRQGXVHFWHXUGHODŦQDQFHGłLPSDFW

5HWURXYH]OłLQWHUYLHZLQW«JUDOHVXUODSDJHZHEGHOłRXYUDJHbKWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

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198 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

En conclusion, l’ensemble des ruptures qui tra-


Parole de versent le secteur de l’ERD élargissent la palette
professionnel d’outils techniques propices au changement
Rodolphe Rosier d’échelle. Par ailleurs, la tendance générale per-
met d’être optimiste quant à la capacité à financer
Pensez-vous que la diaspora peut être ce changement d’échelle, même si les financeurs
une cible commerciale importante doivent rapidement trouver des solutions plus
SRXUOHG«SORLHPHQWGHYRVV\VWªPHV" adaptées aux projets de taille intermédiaire.
Cela ne doit néanmoins pas faire oublier certaines
mb2XLLOH[LVWHGHIRUWHVDWWHQWHV contraintes opérationnelles, qui sont structurelles
GHVSHUVRQQHVLVVXHVGHODGLDVSRUD de l’ERD et doivent être prises en compte, quels
HWYLYDQWHQ)UDQFHSRXUDLGHUOHV que soient les projets. }
PHPEUHVGHOHXUIDPLOOHUHVW«VDX
SD\VHQ$IULTXH1RXVDYRQVODQF«
PLMXLOOHWXQHSUHPLªUHRIIUHDXWRXUGH
ŏSDUPRLVVXUXQHGXU«HGHWURLV
DQV(OOHYLVDLW¢SDOOLHUXQPDQTXH
VXUOHPDUFK«HWHOOHDFRQQXXQERQ
G«PDUUDJH1«DQPRLQVQRWUHD[H
SULQFLSDOGHG«YHORSSHPHQWUHVWH
ODFRPPHUFLDOLVDWLRQGHQRV6+6
GLUHFWHPHQWHQ$IULTXHGHOł2XHVWR»
QRVSDUWHQDLUHVQRXVIRQWE«Q«ILFLHUGH
OHXULPSODQWDWLRQHWGHOHXUVU«VHDX[b}

Rodolphe Rosier, ingénieur et docteur en


management de formation, a travaillé
dans le secteur de l’énergie pendant
quinze ans ; il a fondé la start-up OniriQ
en décembre 2016 avec Mohamed Sarr et
Michael Hernandez.

Retrouvez l’interview intégrale sur la page


web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHPRQJ
HOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 199

mb6LOłDUJHQWHWOHŦQDQFHPHQWQH
VRQWSDVGLVSRQLEOHVLOQRXVVHUDWUªV
GLIŦFLOHGHWLUHUSDUWLGHVPXOWLSOHV
DYDQWDJHVRIIHUWVSDUOHVPLQLU«VHDX[
/DU«DOLVDWLRQGHOł2''ĿOłDFFªV
XQLYHUVHO¢Oł«OHFWULFLW«GłLFLĿ
G«SHQGSULQFLSDOHPHQWGHODFDSDFLW«
¢G«EORTXHUGHVŧX[GHFDSLWDX[
¢GHV«FKHOOHVSOXVLPSRUWDQWHVGDQV
FHVHFWHXU1RXVQHSRXUURQVSDV
\DUULYHUVDQVU«VRXGUHOHG«ŦSRV«SDU
ODŦQDQFHb}

Alexia Kelly, experte en finance climatique


et coprésidente du groupe de travail
Finance du partenariat mondial pour les
stratégies de développement à faibles
émissions (LEDS GP)1.

1. Citée par Charlie Zajicek, « How solar mini-grids can bring cheap,
green electricity to rural Africa », Overseas Development Institute,
2019, https://www.odi.org/blogs/10730-how-solar-mini-grids-can-
bring-cheap-green-electricity-rural-africa.

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200 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.4.
Les facteurs-clés de succès
d’un projet d’électrification
rurale décentralisée
demeurent inchangés.
Au-delà des évolutions techniques et des incertitudes qui viennent
d’être évoquées, l’objectif fondamental de l’ERD reste de fournir
un service électrique durable et accessible au plus grand nombre.
C’est le cap. Mais sur un plan plus opérationnel, quels sont les
points de repère méthodologiques utiles pour les praticiens ?
L’Afrique subsaharienne est un ensemble de 49 pays extrême-
ment différents par leur histoire, leur culture, leur géographie, mais
aussi par leurs structures institutionnelles et administratives. Pour-
tant, les expériences qui y sont menées depuis près de cinquante
ans permettent de circonscrire des points communs déterminants
pour réussir la mise en œuvre d’un projet d’ERD.

Toutes se rejoignent dans un même constat : le facteur humain


est décisif. La pérennité du service est très dépendante de son
acceptation puis de son appropriation par la population et les
autorités locales. Or, cette appropriation est la condition sine
qua non de l’impact social et économique positif de l’arrivée de
l’électricité.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 201

L’expérience recense quatre types de contraintes, qui


transcendent les géographies et les évolutions techniques, et
donc quatre champs déterminants de compétences pour les
porteurs de projets d’ERD (à tout le moins ceux qui veulent servir
l’accès à l’électricité à long terme, et non seulement exploiter une
opportunité de marché à court terme) :
çRCTEGSWGNCOKUGGPÈWXTGFGRTQLGVUFà'4&UGECTCEVªTKUG
d’abord par des schémas d’acteurs plus ou moins complexes
suivant le type de schéma d’électrification, la réussite d’un
projet dépend aussi de la qualité de l’orchestration des parties
prenantes (2.4.1.) ;
çRCTEGSWGNàCEE©U¡NàªNGEVTKEKVªGUVNQKPFà«VTGUGWNGOGPVWPG
question technologique, les retours d’expérience conduisent
ensuite à privilégier une approche sociologique patiente et la
mise en place de budgets spécifiques pour pouvoir assurer
l’ensemble des activités de sensibilisation, d’accompagnement
de médiation nécessaires avant, pendant et après la mise en
place du service (2.4.2.) ;
çRCTEGSWGNGUGEVGWTHCKVHCEG¡RNWUKGWTURTQDNªOCVKSWGU
persistantes de qualité des produits et de capacité d’entretien et
de maintenance des installations, le projet doit anticiper, dès sa
conception, les facteurs de déshérence des équipements après
installation (2.4.3.) ;
çRCTEGSWGSWGNNGSWGUQKVNCUQNWVKQPNàªNGEVTKEKVªUWRRQUGFGU
investissements de la part de l’opérateur et une contribution de
l’usager pour accéder à un service pérenne, la tarification est
un élément-clé du modèle économique d’un service électrique
(2.4.4.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


202 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.4.1.
Construire un écosystème d’acteurs qui devienne
in fine autonome n’est pas si simple.

Aujourd’hui, grâce à l’utilisation des énergies Quel que soit le système installé, il faut égale-
renouvelables, les conditions de développe- ment assurer la mise en place d’un écosys-
ment de l’électrification rurale décentralisée tème d’acteurs qui fasse durablement fonc-
sont réunies sur les plans technique et envi- tionner le service sur le territoire.
ronnemental. Mais ce n’est pas suffisant.

6FK«PDGHVDFWHXUVGHOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHbRS«UDWHXUVXVDJHUVEDLOOHXUV
entités publiques et porteurs de projets

%$,//(85 6 ENTITÉ
ACTIONNAIRES
SXEOLFVHWRXSULY«V
Donneur PUBLIQUE TUTELLES
et prêteur chargée de l’ER

‹TXLSHPHQW&DSLWDO¢ORQJXH
durée de vie PRGXOH39OLJQH Services Energétiques
SRVWHU«JXODWHXUVŊ ʼn2QGHVHWVLJQDX[
‹TXLSHPHQW¢UHQRXYHOHU&DSLWDO OXPLªUHFRPPXQLFDWLRQ
)OX[UHQRXYHODEOHV circulant EDWWHULHVJURXSHV QXP«ULTXHŊ 
HWRX fossiles «OHFWURJªQHVODPSHVPRWHXUVŊ ʼn)RUFHP«FDQLTXH
Personnel LQVWDOODWLRQ  PRWULFLW«HWPRELOLW«
H[SORLWDWLRQFRPPHUFLDOLVDWLRQ
ʼn&KDOHXU
FXLVVRQHDXFKDXGHŊ

'HVFDVKŧRZV
DFFªVXVDJHVGHVVHUYLFHV 

23‹5$7(85 6
ACTIONNAIRES SXEOLFVHWRXSULY«V Usagers Propriétaires
SXEOLFVHWRXSULY«V des équipements
Régisseur, fermier des services
ou concessionnaire

6RXUFHb Christian de Gromard.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 203

© Fondation Energies pour le Monde

Exemple de réunion avec les institutionnels et les acteurs de terrain.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


204 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

&U«HUXQ«FRV\VWªPHDXWRQRPHJU¤FH
au renforcement des capacités des différentes parties
prenantes, à tous les niveaux

/HUHQIRUFHPHQWGHVFDSDFLW«VHVWG«ŦQLGHPDQLªUHUHODWLYHPHQWFRQVHQVXHOOHGDQVOHGRPDLQH
GXG«YHORSSHPHQWLQWHUQDWLRQDOFRPPHOHprocessus par lequel les individus, les organisations
HWODFROOHFWLYLW«GDQVVRQHQVHPEOHOLEªUHQWFU«HQWUHQIRUFHQWDGDSWHQWHWSU«VHUYHQWDX
ŦOGHVDQVOHXUVFDSDFLW«VFłHVW¢GLUHOHXUDSWLWXGH¢J«UHUOHXUVDIIDLUHVDYHFVXFFªV 2&'(
b318' &łHVWXQSURFHVVXVTXLHQJOREHXQHPXOWLWXGHGłDFWLRQVHWGHE«Q«ŦFLDLUHV
GRQWOłHQMHXHVWGłDYRLUXQLPSDFWVXUWURLVQLYHDX[LQWHUG«SHQGDQWV LQGLYLGXHORUJDQLVDWLRQQHO
HQYLURQQHPHQWJOREDO DŦQGHSHUPHWWUH
¢WHUPHOłDXWRQRPLVDWLRQFRPSOªWHGHOł«FRV\VWªPHORFDO FIVFK«PD 
)DFHDXFRQVWDWGł«FKHFSRV«SDUOHVDFWHXUVGHODFRRS«UDWLRQLQWHUQDWLRQDOHGDQV
OHVDQQ«HV1FHWWHQRWLRQHVWGHYHQXHXQHSULRULW«PDMHXUHGDQVOHVSROLWLTXHV
GHG«YHORSSHPHQWbOHVEDLOOHXUVGHIRQGVSULYLO«JLHQWXQHY«ULWDEOHLPSOLFDWLRQHWOD
UHVSRQVDELOLVDWLRQGHVDFWHXUVORFDX[GDQVODFRQFHSWLRQHWODPLVHHQāXYUHGHVSURMHWV
TXLGRLYHQWDOOHUELHQDXGHO¢GXVLPSOHUHQIRUFHPHQWGHFRPS«WHQFHVmbWHFKQLTXHVb}

4XHOTXHVERQQHVSUDWLTXHVGłLQWHUYHQWLRQb
DSSURIRQGLUHQDPRQWGXSURMHWOHVEHVRLQVHQUHQIRUFHPHQWGHVFDSDFLW«VDYHFOHVGLII«UHQWV
DFWHXUVORFDX[b
«ODERUHUDYHFOHVSDUWHQDLUHVORFDX[XQHVWUDW«JLHGHUHQIRUFHPHQWGHVFDSDFLW«Vb
GLYHUVLŦHUOHVDSSURFKHVGHUHQIRUFHPHQWGHVFDSDFLW«VbIRUPDWLRQWHFKQLTXHJHVWLRQ
DGPLQLVWUDWLYHHWŦQDQFLªUHPLVHHQU«VHDXGHVDFWHXUVDSSXLFRQVHLOb
G«ŦQLUGHVREMHFWLIVVS«FLŦTXHVSRXUFKDTXHW\SHGłDFWHXUV¢GLII«UHQWHV«FKHOOHV
GHWHPSV FRXUWPR\HQHWORQJWHUPHV DYHFGHVLQGLFDWHXUVGHVXLYLSU«FLVb
DOORXHUXQEXGJHWHWGHVUHVVRXUFHVVS«FLŦTXHVSRXUODPLVHHQāXYUHOHVXLYL
HWOł«YDOXDWLRQGHODVWUDW«JLH

Le développement de l’électrification décentrali- L’approche interventionniste


sée repose sur une multiplicité de solutions tech- place la logique de coopération
niques. En Afrique subsaharienne, on retrouve der- institutionnelle au cœur de
rière cette diversité les deux approches déjà évo- la construction de la solution
quées (interventionniste, libérale), qui présentent technique.
chacune des schémas opérationnels et donc des Avec l’approche interventionniste, qui suppose
univers de contraintes spécifiques dépendant de la l’intervention des pouvoirs publics (notamment
nature et du nombre d’intérêts en présence. l’Etat) à plusieurs niveaux, l’électrification rurale

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 205

6RXUFHb FAO, « Module d’apprentissage. Renforcement des capacités – Principe de base » (Rome, 2010).

1. CDE, 1991 ; PNUD, 1993 ; ECDPM, 1992.

décentralisée est perçue comme contributrice au nombre d’intervenants très divers afin de garantir
développement économique et social d’un territoire. l’amélioration des conditions de vie de la popula-
Cette logique se traduit majoritairement (mais pas tion et la viabilité du service de l’électricité :
uniquement) par l’installation de miniréseaux locaux çRQTVGWTUFGRTQLGVa
alimentés par leurs propres moyens de production çWUCIGTUa
renouvelable et proposant une tarification inclusive. çEQNNGEVKXKVªUNQECNGUGVVGTTKVQTKCNGUNGUTGRTªUGPVCPVa
Le déploiement de ce type de projets sup- çQRªTCVGWTU SWK GZRNQKVGPV NGU KPHTCUVTWEVWTGU
pose de mobiliser et de fédérer un grand électriques ;

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206 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

çHQWTPKUUGWTUFàªSWKRGOGPVUa
çKPUVKVWVKQPU RWDNKSWGU SWK QTICPKUGPV NG UGEVGWT 7DX[GłDFFªV
de l’électricité et le régulent ;
çRCTVGPCKTGUăPCPEKGTU 5DSSRUWHQWUHOHQRPEUHWRWDOGłKDELWDQWV
RXGHIR\HUV VXUXQWHUULWRLUHHWOHQRPEUH
Le niveau très différent de compréhension et de GłXVDJHUV RXGHIR\HUVUDFFRUG«V GX
connaissance de la problématique du secteur VHUYLFH«OHFWULTXH
électrique et des usages de l’électricité de ces
différents acteurs, ainsi que leurs intérêts parfois
divergents constituent des contraintes fortes
pour développer les projets d’électrification rurale les utilisations de plus forte valeur d’usage : télé-
décentralisée. communication, éclairage, télédiffusion, activités
économiques.
Les porteurs de projets
Jusqu’à la création des agences d’électrification Les usagers et leurs représentants
rurale, les porteurs de projets (ONG, collectivi- Destinataires de l’électrification, qui doit répondre
tés locales, entreprises) apportaient les initia- au mieux à leurs divers besoins et attentes, c’est
tives d’ERD dans les territoires. Désormais, si de leur comportement que dépendent la viabi-
ces organisations peuvent, en dehors des appels lité et la pérennité des systèmes d’électrification
d’offres ou des appels à projets, prendre elles- installés  : le volume et la régularité de leurs
mêmes l’initiative de concevoir et développer consommations électriques et de leurs paie-
un projet d’électrification sur un territoire de leur ments sont les clés de la réussite.
choix, elles répondent majoritairement à des ap- Quelle que soit la catégorie d’usagers de
pels d’offres lancés par ces agences. l’électricité ou l’infinité de profils à l’intérieur de
Ces agences définissent les périmètres à électri- chacune d’elles, une attention toute particulière
fier et les objectifs de taux d’accès, et sélection- doit être apportée à leur sensibilisation et à leur
nent les projets sur la base de plusieurs critères : information sur les utilisations possibles et les ris-
çPQODTGFàWUCIGTUªNGEVTKăªUa ques de l’électricité, et sur la contribution à payer
çECNGPFTKGTFGTªCNKUCVKQPa pour disposer du service (cf. chapitre 2.4.2.).
çITKNNGVCTKHCKTGGVUGUOQFCNKVªUFàKPFGZCVKQPa
çEJQKZVGEJPQNQIKSWGUa .GUOªPCIGU constituent la catégorie d’usagers
çRNCPFàCĂCKTGUa potentiels la plus nombreuse de l’ERD  ; elle se
çRNCPFGăPCPEGOGPV caractérise par :
çFG HCKDNGU EQPUQOOCVKQPU
NàQTFTG FG  ¡
Initialement, les ministères de l’énergie, au travers 24 kWh/mois, pour la plupart inférieures à
de leurs directions de l’énergie, et les ONG spé- 10 kWh /mois1) en raison d’un usage limité  :
cialisées dans le secteur étaient les deux princi- un à trois points lumineux et la recharge d’un
paux types de porteurs de projets. Leur attention
se fixait principalement sur les usages sociaux
de l’électricité. Aujourd’hui, les acteurs privés
1. Par comparaison, la consommation mensuelle moyenne d’un foyer français
les ont rejoints, ciblant, quel que soit le modèle, était de 412 kWh en 2017 (sources : RTE et CRE) soit entre 16 à 80 fois plus.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 207

téléphone mobile, parfois des points lumineux .GUCEVGWTUªEQPQOKSWGU souhaitant s’électrifier


supplémentaires, des appareils audiovisuels et/ sont aujourd’hui relativement peu nombreux dans
ou de ventilation et, pour les plus aisés, des réfri- les zones rurales d’Afrique subsaharienne, souvent
gérateurs et/ou des congélateurs ; à cause de la méconnaissance des opportunités
çFGUV[RGUFàJCDKVCVVT©UFKXGTUCNNCPVFGNCECUG associées et/ou du manque de capacité financière
en torchis et toit de chaume aux maisons en pour s’équiper et/ou du défaut d’infrastructures
parpaings et toit de tôle ondulée, et présent- complémentaires (transports, accès à l’eau).
ant chacun des contraintes spécifiques en
matière d’installation électrique intérieure et Or, la présence active de ces entrepreneurs est es-
de raccordement à un éventuel miniréseau de sentielle pour la viabilité économique d’un projet :
distribution ; çKNUEQPUVKVWGPVWPXQNGVKORQTVCPVFGNCFGOCPFG
çFGU EQPPCKUUCPEGU GV WPG EQORTªJGPUKQP GP d’électricité en milieu rural, notamment pour
matière d’usages de l’électricité et des appareils l’exhaure de l’eau et l’irrigation, la transformation
électriques souvent très faibles, limitées à leurs et la conservation des produits agricoles ou du
représentations lors de déplacements dans les bois ;
localités électrifiées les plus proches. çCWFGN¡ FGU WUCIGU NKªU ¡ NàCEVKXKVª CITKEQNG QW
forestière, il faut considérer le potentiel de déve-
loppement d’activités commerciales et artisana-
les que l’accès à l’électricité peut favoriser (com-
merces de proximité, ateliers de réparation, sou-
deurs, menuisiers, tailleurs, salons de coiffure,
garages, etc.).
Pourtant, l’expérience montre que la transition
vers l’usage de l’électricité n’est pas évidente : elle
requiert sensibilisation mais aussi accompagne-
ment pour exploiter toutes les externalités posi-
tives liées à l’arrivée de cette énergie.

Les représentants des usagers jouent un rôle es-


sentiel, dans la mesure où la réussite des projets
est aussi fondée sur la bonne compréhension des
avantages et des limites du service et sur l’adhésion
© Fondation Energies pour le Monde

collective. L’implication des structures collectives


ou des élus est indispensable, et le porteur de pro-
jet doit les fédérer et s’appuyer sur eux :
çNGU ªFKNGU GV NGU EJGĂGTKGU VTCFKVKQPPGNNGU UQPV
l’un des vecteurs de transmission d’une informa-
tion commune et partagée, d’une acceptation
d’une électrification différente ;
Usage économique de l’électricité au Sénégal (Basse- çNGU 10) NQECNGU
C[CPV FªL¡ EQPVTKDWª ¡
Casamance) : conservation-vente de produits frais. l’appropriation d’innovations, dans les domaines

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208 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

de la santé, de l’éducation, par exemple) savent et structures sont complétées ou relayées par
faire passer les messages utiles sur les évo- d’autres instances et institutions au niveau des
lutions qu’introduit l’électricité, pour éviter les collectivités territoriales.
tensions et favoriser le décollage du nombre
d’abonnés et des consommations. .GOKPKUV©TGGPEJCTIGFGNàªPGTIKG autorité de
tutelle du secteur de l’électricité, définit la poli-
Les collectivités territoriales, qui peuvent tique nationale d’électrification, y compris rurale
aussi être usagers du service dans le cas de décentralisée, ainsi que les réglementations et
l’électrification des ouvrages publics, jouent un rôle standards techniques. Selon les pays, il valide les
à géométrie variable, mais toujours très important : programmes nationaux d’ERD, et délivre les auto-
çGNNGU UQPV NGU RNWU ¡ O«OG FàCRRTªEKGT UQW- risations ou concessions d’électrification rurale. Il
vent après sensibilisation, les impacts socio- s’assure si besoin auprès de la société d’électricité
économiques de la disponibilité d’électricité et de l’absence de plans d’extension de réseau sur la
sa contribution à l’aménagement du territoire et zone à échéance de cinq à dix ans.
à leur développement économique ;
çGP HQPEVKQP FGU EQORªVGPEGU SWK NGWT QPV LG OKPKUV©TG FGU (KPCPEGU GV FW $WFIGV valide
été effectivement transférées en matière la politique de financement et la politique fiscale
d’électrification, leur engagement peut couvrir le en matière d’électrification, budgétise les finance-
portage de projets jusqu’à leur maîtrise d’ouvrage ments publics alloués à l’électrification rurale dé-
complète, avec des entreprises d’électrification centralisée, recherche des financements auprès
ou en créant des coopératives ou des régies des bailleurs de fonds internationaux. Il peut aussi
d’électricité. mettre en place des parafiscalités pour contribuer
Si l’implication de ces acteurs (usagers do- au financement des structures techniques et des
mestiques et économiques, élus et édiles, projets. Des taxes sur les factures d’électricité
ONG locales, collectivités territoriales) permet sont par exemple instaurées au Sénégal, à Mada-
d’apprécier les demandes en électricité à court gascar ou au Burkina Faso. Dans ce dernier pays,
et moyen termes, elle ne peut se manifester sans le Fonds de développement de l’électrification
l’aval préalable des institutions nationales en rurale (FDE) en faveur des localités rurales est
charge du secteur électrique. alimenté par une taxe de 2 FCFA sur chaque kWh
vendu par la société nationale d’électricité1. Ces
Les institutions publiques nationales taxes viennent abonder, encore de façon très mi-
Plusieurs structures publiques interviennent dans noritaire, les fonds d’électrification rurale.
les choix politiques et stratégiques, l’organisation, Afin de favoriser la coordination interministé-
ainsi que la régulation du domaine de l’ERD. Si les rielle et le développement des usages sociaux de
schémas institutionnels varient d’un pays à l’autre, l’électricité, certains pays ont mis en place un co-
ils comprennent généralement : mité élargi de supervision de l’électrification rura-
çFGUKPUVCPEGURQNKVKSWGUa le, composé de représentants des ministères en
çWPGCWVQTKVªFGTªIWNCVKQPaGV charge de l’énergie, des finances et du budget, et
çFGUUVTWEVWTGUVGEJPKSWGUGVăPCPEK©TGU
Selon les transferts de compétences issus des 1. Pierre Jacquemot et Marie-Noëlle Reboulet, « Options technologiques
processus de décentralisation, ces instances et modèles d’organisation de l’électrification rurale en Afrique », Afrique
Contemporaine 1-2, n° 261-262 (2017) : 175-176.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 209

d’autres ministères tels que santé, éducation, ag- conventions de financement établies pour chaque
riculture ou industrie. Eclairage public, électrifica- programme ou projet. Il peut être géré par une ins-
tion des bâtiments administratifs, des établisse- titution fiduciaire sous convention avec l’agence
ments de formation, des salles communautaires, d’électrification rurale.
des centres de santé… L’accès à l’électricité est un
facteur indispensable d’amélioration des services L’ensemble de ces structures, généralement ba-
rendus à la population. sées dans la capitale du pays, sont rarement re-
layées dans les régions par des services décon-
L’autorité de régulation du secteur de centrés, ce qui limite les moyens d’intervention
l’électricité a pour principale mission de valider sur le terrain, pénalise la mise en œuvre effective
les procédures de sélection concurrentielle des de la politique nationale et le respect des régle-
entreprises d’électrification, les contrats corres- mentations, des procédures et des engagements
pondants, et les tarifs de vente aux usagers prati- des protagonistes au niveau local. Sur le sujet, voir
qués par les entreprises de fourniture de services les préconisations émises en partie 4.
électriques et leurs modalités d’indexation. En cas
d’interconnexion d’un miniréseau d’électrification Les professionnels du secteur
rurale décentralisée à un autre réseau, l’autorité électrique
de régulation est chargée de valider le tarif Si la présence des acteurs précités est néces-
d’achat-vente d’électricité en gros à la société ex- saire lors de l’élaboration et du suivi-contrôle de la
ploitant ce réseau. mise en œuvre et de l’exploitation d’un programme
d’ERD, ce sont les professionnels du secteur qui
.GUUVTWEVWTGUVGEJPKSWGUGVăPCPEK©TGU varient concrétisent l’installation du système.
selon les pays. Elles peuvent se réduire à une di-
rection ou un service chargé de l’électrification Sous la supervision du maître d’ouvrage* (com-
rurale au sein du ministère en charge de l’énergie, manditaire du projet, qui remet l’équipement à
ou à une agence d’électrification rurale, établisse- l’exploitant après mise en service industrielle), la
ment public généralement sous tutelle du réalisation d’une opération d’accès à l’électricité
ministère de l’Energie, complétée dans certains d’envergure requiert au moins quatre types
cas par un fonds pour l’électrification rurale. d’interventions techniques :
L’agence d’électrification rurale a pour missions de : çun bureau d’étude chargé de la maîtrise
çRTQOQWXQKTGVKPHQTOGTa d’œuvre et doté d’une composante locale ma-
çFªXGNQRRGTNGUQĂTGUFGUGTXKEGUGVNGUECRCEK- joritaire (y compris sous-traitants) conçoit
tés locales ; l’infrastructure électrique, de la production au
çCUUKUVGT CW OQPVCIG GV ¡ NC OKUG GP ÈWXTG FGU raccordement usager, sans oublier les sys-
programmes et projets ; tèmes de branchement, de comptage et de
çEQPVTKDWGT ¡ OQDKNKUGT NGU ăPCPEGOGPVU GV NGU prépaiement. Il assure également l’assistance
administrer ; technique, la formation des parties prenantes
çUWKXTGGVEQPVTµNGTNGDQPFªTQWNGOGPVFGUCEVKXK- locales (exploitant, abonnés, édiles), la récep-
tés d’électrification rurale dans le pays. tion des travaux, ainsi que, la plupart du temps,
Le fonds pour l’électrification rurale, lorsqu’il l’accompagnement de l’exploitant pendant la
existe, a pour mission de mettre en œuvre les période d’apprentissage nécessaire ;

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210 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Parole de professionnel
Mamadou Saidou Diallo
&RPPHQWOł$JHQFHJXLQ«HQQHGł«OHFWULILFDWLRQUXUDOH $*(5 DFFRPSDJQHWHOOH
les opérateurs de miniréseaux dans la mise en œuvre de leurs projets ?

mb1RXVOHVHQFDGURQVGDQVOHPRQWDJHGHOHXUGRVVLHUGHGHPDQGHGHILQDQFHPHQW
HWGHFRQFHVVLRQQRWDPPHQWHQPHWWDQW¢OHXUGLVSRVLWLRQGHVRXWLOVbFDQHYDVGł«WXGH
GHIDLVDELOLW«HWGHSODQGłDIIDLUHVPRGªOHVGHFRQWUDWVGHFRQFHVVLRQ1RXVOHVDLGRQV
HQVXLWHWRXWDXORQJGXFLUFXLWGłDSSUREDWLRQDGPLQLVWUDWLYHGHFHVGRVVLHUV
1RXVOHVDVVLVWRQVVXUOHVTXHVWLRQVUHODWLYHVDX[H[RQ«UDWLRQVGRXDQLªUHVHWILVFDOHV
RX¢ODSDVVDWLRQGHVPDUFK«VGłDFTXLVLWLRQVHWGHWUDYDX[
1RXVOHVDSSX\RQVHQILQVXUOHWHUUDLQGDQVOHVXLYLHWOHFRQWU¶OHGHVWUDYDX[ODIRUPDWLRQ
GHVRS«UDWHXUVHWGHOHXUV«TXLSHVGHJHVWLRQDLQVLTXHOłLQIRUPDWLRQHWODVHQVLELOLVDWLRQ
GHVSRSXODWLRQVVXUOHVFRQWUDLQWHVOL«HV¢ODIRXUQLWXUHGXUDEOHGłXQVHUYLFH«OHFWULTXHb}

Mamadou Saidou Diallo, ingénieur électro-énergéticien de formation, travaille depuis quinze ans
dans le domaine du développement de l’électrification rurale en Guinée ; il est directeur général
adjoint de l’Agence guinéenne d’électrification rurale (AGER).
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

çun ou plusieurs fournisseurs assurent ou à la suite d’un appel à candidatures, il sera le ga-
l’approvisionnement, l’installation et le démar- rant d’un bon fonctionnement de l’infrastructure
rage des équipements électriques et électromé- électrique après avoir obtenu le droit de l’exploiter
caniques de production (générateurs énergies par la signature d’une autorisation ou concession
renouvelables – avec ou sans hybridation par auprès du ministère de l’Energie.
groupe électrogène  –, stockage, régulation et
conversion d’énergie), de distribution basse ten- Ces différentes fonctions peuvent être assurées
sion et de gestion (comptage, prépaiements) ; par un seul et même prestataire, ce qui renforce la
çdes entrepreneurs de travaux de divers corps cohérence entre la conception, le choix et la four-
FG OªVKGTU (génie civil, électricité, construction niture des équipements et leur exploitation (dont
métallique, menuiserie…) assurent la réalisation de la maintenance), mais peut conduire à des dimen-
l’infrastructure selon les plans du maître d’œuvre ; sionnements et des enveloppes budgétaires ex-
çl’exploitant est considéré comme la pièce maî- cessives. Dans tous les cas, de la juste apprécia-
tresse de la pérennité du service électrique tion par les différents intervenants du contexte et
(notamment pour un miniréseau  ; cf.  chap- de son évolution dépendront :
itre 3.5.3). Sélectionné dès le montage d’un projet

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 211

Étude de cas - Projet BOREALE


(QOHVWDX[GHFRXYHUWXUHQDWLRQDOHHQ«OHFWULFLW«HWGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH¢0DGDJDVFDU
«WDLHQWUHVSHFWLYHPHQWGHHWFHGHUQLHUWDX[QHG«SDVVDQWSDVGDQVOHVU«JLRQV
GHOł$QGUR\HWGHOł$QRV\R»YLYHQWPLOOLRQGH0DOJDFKHV/łXVDJHGHVJURXSHV«OHFWURJªQHV
\«WDLWU«SDQGXVROXWLRQPDODGDSW«HDX[IDLEOHVFDSDFLW«VGHSDLHPHQWGHVP«QDJHVUXUDX[¢
Oł«ORLJQHPHQWGHVVLWHVHWDX[H[LJHQFHVHQYLURQQHPHQWDOHV

&łHVWGDQVFHFRQWH[WHTXHOD)RQGHPD«ODERU«OHSURMHW%25($/(  XQSURJUDPPH


Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«H (5' SDU«QHUJLHVUHQRXYHODEOHV (Q5 U«DOLV«HQSDUWHQDULDW
DYHFOł21*ORFDOH.LRPED::)OD'LUHFWLRQJ«Q«UDOHGHOł‹QHUJLHOł$'(5HWOł2IŦFHGH5«JXODWLRQ
GHOł‹OHFWULFLW«/łREMHFWLIGDQVOHFDGUHGHODVWUDW«JLH«QHUJ«WLTXHQDWLRQDOHYLVDQW¢YDORULVHUOH
IRUWSRWHQWLHO«QHUJ«WLTXHUHQRXYHODEOHGRQWGLVSRVHOHSD\VmPRQWUHUODYRLH}GDQVGHVU«JLRQV
DXFRQWH[WHVRFLR«FRQRPLTXHGLIŦFLOHHWGDQVOHVTXHOOHVOHVU«DOLVDWLRQVGł«OHFWULŦFDWLRQSDU(Q5
QRQFRQQHFW«HVDXU«VHDX«WDLHQWUDUHV

&HSURMHWDPELWLHX[GHFKDQJHPHQWGł«FKHOOHFRQVWUXLW¢SDUWLUGHVUHWRXUVGłH[S«ULHQFHGH
SU«F«GHQWVSURJUDPPHVFRPPH5(6287+ «OHFWULŦFDWLRQGHORFDOLW«VPDOJDFKHV FRPSUHQDLW
YROHWV
- ‹QHUJLHHWLQIUDVWUXFWXUHVLQVWDOODWLRQGHFHQWUDOHVVRODLUHVHWU«VHDX[GHGLVWULEXWLRQDVVRFL«V
G«OLYUDQWXQVHUYLFHKHWGRQWOłXVDJHDE«Q«ŦFL«GLUHFWHPHQW¢SOXVGHSHUVRQQHV
GDQVOHVORFDOLW«VFLEO«HV U«JLRQVGHOł$QGUR\HWOł$QRV\ 
- ([SORLWDWLRQV«OHFWLRQIRUPDWLRQHWDFFRPSDJQHPHQWGHRS«UDWHXUVMXVTXł¢XQDQDSUªVODŦQ
GXSURMHWDŦQGłDWWHLQGUHOHXUDXWRQRPLHFRPSOªWH
- 8VDJHVGHOł«OHFWULFLW«HWG«YHORSSHPHQWGłDFWLYLW«VVRFLR«FRQRPLTXHVG«YHORSSHPHQWGłXQH
WUHQWDLQHGłDFWLYLW«V«FRQRPLTXHV FRXWXUHVRXGXUHF\EHUFDI«FLQ«YLG«RHWF FU«DWLRQRX
UHQIRUFHPHQWGłXQHGL]DLQHGłDFWHXUVFRPPXQDXWDLUHV PDLULHV«FROHVFHQWUHVGHVDQW«HWF 
DP«OLRUDWLRQGHVVHUYLFHVGłXQHGL]DLQHGłLQIUDVWUXFWXUHVFRPPXQDXWDLUHV «FROHVFHQWUHVGH
VDQW«PDLULHVHWF 

%LHQTXHOHSURMHWDLWUHQFRQWU«GHVGLIŦFXOW«V «YROXWLRQGHVUDFFRUGHPHQWVDXQU\WKPH
SOXVIDLEOHTXHSU«YXVWUXFWXUHVGłH[SORLWDWLRQIUDJLOHV LOHQGHPHXUHQ«DQPRLQVXQUHWRXU
GłH[S«ULHQFHFUXFLDOVXUOHTXHOOHVSURMHWVGł(5'IXWXUVVłDSSXLHURQWSRXU«ODERUHUOHXUSODQ
GłDFWLRQHWDVVXUHUOHXUERQG«URXOHPHQW

3RXUDOOHUSOXVORLQUHWURXYH]Oł«WXGHGHFDVLQW«JUDOHVXUODSDJHZHEGHOłRXYUDJH

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212 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Deux exemples de schéma opérationnel sous tutelle publique


pour un projet d’infrastucture

MONTAGE CONVENTIONNEL, SOLUTION « MAÎTRE D’ŒUVRE »

$8725,7‹38%/,48(
PARTENAIRES
!0D°WUHGłRXYUDJH
),1$1&,(56
3XEOLFVSULY«V
0DQGDWVRXFRQWUDWV
GHPLVVLRQVQRUPDOLV«V

0$75('łĀ895(
INGENIEUR
SXEOLFRXVRXVFRQWU¶OHSXEOLF
CONSEIL
PD°WUHGłRXYUDJHG«O«JX«

&RQWUDWVGHWUDYDX[
HWIRXUQLWXUH
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G

SOCIÉTÉ
EXPLOITANTE
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

çNGDQPFKOGPUKQPPGOGPVFGUKPHTCUVTWEVWTGUa de fonds internationaux, ils assurent le finance-


çNCDQPPGSWCNKVªFGNCEQPUVTWEVKQPa ment de l’investissement sous de multiples formes
çNCUCVKUHCEVKQPFGUWUCIGTUa (cf. chapitre 2.3.2.).
çGVNCUCPVªăPCPEK©TGFGNàGZRNQKVCPV La baisse du prix des composants électriques
(modules solaires particulièrement) et la focalisa-
Les partenaires financiers tion vers les clients solvables laissent présager
et les investisseurs une possible intervention de nouveaux acteurs  :
En leur absence, aucun projet d’ERD ne saurait établissements financiers de la place, banques
se concrétiser. Sous forme de dons ou de prêts publiques et commerciales, services financiers
concessionnels apportés par les grands bailleurs décentralisés (organisations de microcrédit,

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 213

MONTAGE EN CONCESSION

$8725,7‹38%/,48(
PARTENAIRES
!0D°WUHGłRXYUDJHSDUWLHO
),1$1&,(56
!&RQWU¶OHPD°WULVHGłāXYUH
3XEOLFVSULY«V

&RQWUDWGHFRQFHVVLRQ

&21&(66,211$,5(
INGÉNIEUR
!0D°WULVHGłRXYUDJHSDUWLHOOH CONSEIL
!0D°WULVHGłāXYUH
!5«DOLVDWLRQGHVWUDYDX[
!([SORLWDWLRQ

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opérateurs de téléphonie mobile, etc.) et investis- lampes portables solaires aux systèmes solaires
seurs qui aujourd’hui s’intéressent à l’ERD. individuels. Les quantités d’énergie en jeu sont
donc faibles (cf. chapitre 3.2.). On assiste à un fort
Le modèle libéral repose sur un développement des solutions fondées sur cette
schéma opérationnel beaucoup plus approche, rendues possibles par une conjonction
simple et rapide à mettre en œuvre. de facteurs favorables à l’ouverture d’un marché
Dans le modèle libéral, sans intervention ni soutien (cf. chapitre 2.3.1.).
financier de l’Etat, les intervenants sont beaucoup Ces initiatives, basées sur un processus stan-
moins nombreux, facilitant la mise en œuvre des dardisé de commercialisation en vente directe
équipements qui à ce jour couvrent la gamme des de systèmes solaires, d’installation chez les

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214 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Schéma opérationnel pour


renforçant la viabilité de l’exploitation grâce à la
un projet privé de type PAYG
maîtrise du recouvrement (prépaiement).

%$148(66(59,&(6),1$1&,(56
Interventionniste ou libérale,
'‹&(175$/,6‹6,19(67,66(856 chacune des deux approches
présente des limites.
Souvent structurels, tous les obstacles ne sont pas
(175(35,6(623‹5$7(856 23‹5$7(856
susceptibles d’être levés à court terme, ni même
'ł‹/(&75,),&$7,21585$/( 7‹/‹&206 à moyen terme. Mais certains d’entre eux ne sont
pas des fatalités  : c’est pourquoi ils font l’objet de
préconisations en partie 4, qui sont organisées
86$*(56'(66(59,&(6 selon la partie prenante à laquelle elles s’adressent.
DE L’ÉLECTRICITÉ

Les principales limites du modèle


6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.
interventionniste
Dans le cadre d’un projet visant à installer un sys-
tème d’électrification pour le plus grand nombre,
usagers, de service après-vente, de factura- il est d’abord difficile d’identifier et d’évaluer les
tion et de recouvrement, font appel à un nombre DGUQKPU GP UGTXKEGU ªNGEVTKSWGU FGU WUCIGTU
restreint d’acteurs : potentiels, compte tenu de :
çNGRTQOQVGWTqui, distributeur et exploitant, pro- çNCFKXGTUKVªFGUWUCIGTUGVNGWTOªEQPPCKUUCPEG
pose des kits solaires standardisés payés par le des usages de l’électricité et des appareils élec-
client au fur et à mesure de sa consommation ; triques (même si dans une zone homogène
çNG
U  RCTVGPCKTG
U  ăPCPEKGT
U , appelé(s) par géographiquement et sociologiquement, les
le promoteur, qui intervien(nen)t en participation populations, leurs représentants, les entrepre-
au capital ou en dette, depuis l’incubation jusqu’à neurs et les professionnels apprennent progres-
l’atteinte d’une rentabilité satisfaisante ; sivement, par « capillarité ») ;
çNàQRªTCVGWT FG VªNªEQOOWPKECVKQP partenaire çNC FKąEWNVª FG TªCNKUGT FGU ªVWFGU UQEKQ
essentiel du promoteur, assure la mise en place des économiques préalables sérieuses sur la capa-
moyens de paiement par mobile et le télé-monitor- cité et la propension à payer le service dans des
ing des informations principales du système ; localités situées à grande distance de la capitale.
çNGHQWTPKUUGWTFGOCVªTKGN qui produit les équi- Souvent, les moyens et le temps manquent pour
pements, du module solaire aux applications établir des données fiables sur la demande po-
très basse consommation (LED et télévision tentielle d’électricité et sa courbe de charge, alors
principalement) ; que ces informations sont indispensables pour
çGPăPNGENKGPVqui paie le service, incluant sou- concevoir un projet d’ERD, particulièrement con-
vent la location-vente du système dont il devient, sommateur de capitaux.
à terme, propriétaire.
#WVTG FKąEWNVª NGU UEJªOCU KPUVKVWVKQPPGNU
Dans sa déclinaison PAYG, l’approche libérale sont souvent inopérants faute de décentrali-
a l’avantage de s’appuyer sur des techniques sation, de ressources humaines et de moyens

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 215

financiers suffisants pour un réel changement les disqualifient pour contribuer aux projets
d’échelle (cf. chapitre 1.2.2.). Les équipes tech- d’envergure.
niques et les services financiers ne peuvent faire
face à la complexité et à la lourdeur des procé- Les principales limites du modèle libéral
dures nécessaires à la sélection des projets, à Si les progrès technologiques ont permis à ce
l’obtention des financements, à la contractuali- modèle pertinent de naître il y a une quinzaine
sation des prestataires, ou encore au suivi et au d’années et de se développer rapidement, son dé-
contrôle de la conformité des installations aux ploiement révèle au moins deux points de faiblesse.
règles et normes en vigueur. D’une part, alors qu’il devait viser toute la popula-
Les exigences et conditions différentes, voire tion rurale de la base de la pyramide, il s’adresse
divergentes, des bailleurs de fonds créent une CWLQWTFàJWK OCLQTKVCKTGOGPV ¡ WPG ENKGPV©NG
EQPVTCKPVGUWRRNªOGPVCKTG Elles ne facilitent ni TGNCVKXGOGPV CKUªG GV WTDCKPG QW RªTKWTDCKPG
le respect des schémas institutionnels en place, RQWT FGU DGUQKPU FQOGUVKSWGU Par ailleurs,
ni des approches technologiques innovantes, ni le l’approche libérale ne permet pas, à ce jour,
respect des règles de marché public. Ce manque l’émergence d’activités économiques de manière
de cohérence crée des situations de confusion large, malgré les tests réalisés par les promoteurs
voire de concurrence entre les régions et au sein de kiosques énergétiques (cf. chapitre 3.3.).
d’un même territoire (taux de subvention, niveaux D’autre part, NG OQF©NG ªEQPQOKSWG TGUVG HTC
de rémunération, etc.). gile. Encore déficitaires, de nombreux opérateurs
1PEQPUVCVGªICNGOGPVWPGCDUGPEGFGVTCPU- sont régulièrement en recherche d’investisseurs,
HGTVQWWPVTCPUHGTVRCTVKGNGVCODKIWFGNCEQO- laissant présager des déficiences d’entreprises
pétence énergie vers les collectivités territoria- (comme on en a déjà constaté, principalement en
les, qui sont pourtant un relais indispensable pour Afrique de l’Est, là où elles sont le plus nombreus-
l’efficacité de l’électrification rurale décentralisée. es). Dans le cas de certains opérateurs PAYG,
Cette situation présente deux défauts majeurs qui l’absence de lien de proximité entre le client du
freinent le développement des projets : service et son fournisseur, due à la dématérialisa-
çNCFKąEWNVªFGNCEQQTFKPCVKQPXQKTGNGTKUSWGFG tion du paiement, suscite également une certaine
conflit sur un projet, avec les structures centrali- défiance  ; les opérateurs conquièrent de nou-
sées ou déconcentrées du ministère en charge veaux clients, mais leur fidélisation est difficile.
de l’énergie ; Aucun des deux modèles, interventionniste ou
çNG OCPSWG FG OQ[GPU JWOCKPU GV ăPCPEKGTU GV libéral, ne répond donc globalement au défi de
de compétences en matière énergétique au sein l’électrification de l’Afrique rurale. Le débat d’une
des collectivités ou au niveau local (élus locaux, électricité « service public » ou « bien marchand »
chefferies, notables religieux). est lancé.
.C RTQDNªOCVKSWG FG NC EQORªVGPEG GV FGU En attendant, la pratique de l’ERD doit trouver sa
OQ[GPU PG EQPEGTPG RCU SWG NG UGEVGWT RWD- voie sur le terrain. Elle passe par une recherche
lic et touche aussi les entreprises locales de complémentarité entre les solutions, toutes
d’électricité. Alors qu’elles sont indispensables, approches confondues. Elle passe aussi par le
elles ne disposent le plus souvent ni d’une expé- développement, à côté d’une compétence en in-
rience en électrification rurale décentralisée ni génierie technique* indispensable, d’une capacité
d’une surface financière suffisante. Ces handicaps d’ingénierie sociale non moins experte. }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


216 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.4.2.
Pour garantir l’adhésion de la communauté rurale,
l’ingénierie sociale est essentielle, à toutes les
étapes d’un projet.

L’accélération de l’accès à l’électricité en mi- possibilités d’électrification. Ces paramètres se re-


lieu rural et périurbain a été rendue possible nouvellent à chaque projet, selon le contexte.
par la diffusion des lampes solaires portables L’approche sociologique s’inscrit donc dans la du-
ou systèmes solaires individuels. Peut-on en rée : il ne s’agit pas d’une analyse ponctuelle mais
conclure qu’une électrification « numérisée » à d’une posture, d’une sensibilité, qui irrigue toutes
moindre coût de fonctionnement et sans inter- les étapes du projet. Elle repose notamment sur :
vention humaine a un avenir ? çNàªEQWVGGVNàQDUGTXCVKQPFGUEQOOWPCWVªUa
çNCEQORTªJGPUKQPFGNCSWCNKVªFGNGWTUTCRRQTVUa
Les récents échanges entre acteurs (au sein de çNC UGPUKDKNKUCVKQP GV NàCEEQORCIPGOGPV FGU HW-
Gogla, l’association des acteurs de l’industrie du turs usagers ;
off-grid), confirmés par les retours d’expérience çNCOªFKCVKQPGPVTGNGURCTVKGURTGPCPVGUNQECNGU
issus des projets d’ERD conventionnels, mon-
trent au contraire que, pour se développer dura-
blement et satisfaire le plus grand nombre, l’accès
à l’électricité en milieu rural en mode décentralisé
nécessite un important travail de sensibilisation et (QOłDEVHQFHGłDSSURSULDWLRQU«HOOH
d’accompagnement des communautés rurales et GXSURMHWSDUODFRPPXQDXW«RXSDU
des instances locales et régionales. VHVUHSU«VHQWDQWVOHVLQVWDOODWLRQV
QHVRQWSDVHQWUHWHQXHVHWGHYLHQQHQW
Ce travail vise notamment à : UDSLGHPHQWQRQIRQFWLRQQHOOHV/D
çOKGWZEGTPGTNGUDGUQKPU des futurs usagers et GXUDELOLW«GXSURMHWHVWGDQVFHFDV
de la communauté desservie ; RXYHUWHPHQWFRPSURPLVHHWOHV
çOKGWZ CPVKEKRGT NGU TKUSWGU liés à l’arrivée de «TXLSHPHQWVHQWUHURQWELHQW¶WGDQVOH
l’électricité susceptibles d’affecter le bon déroule- mbFLPHWLªUHGHOłDLGHb}G«M¢ELHQRFFXS«
ment du projet ou d’affaiblir ses bénéfices ;
çRQWT in fine garantir la bonne appropriation Pierre Jacquemot et Marie-Noëlle Reboulet,
du service électrique installé par les acteurs lo- « Options technologiques et modèles
caux, laquelle est une condition sine qua non de d’organisation de l’électrification rurale
la pérennité de ce service. en Afrique », Afrique Contemporaine 1-2,
n° 261-262 (2017) : 175-176.
Les cadres socioculturels, économiques, géo-
graphiques, politiques et démographiques influent
sur la compréhension du tissu énergétique et des

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 217

5HWRXUGHWHUUDLQb*X\DQH0DURQL

8QSURJUDPPHGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHD«W«ODQF«LO\DSOXVGHGL[DQVSRXUOłDOLPHQWDWLRQHQ
électricité de quatre villages du Haut-Maroni, dont le village d’Antécum-Pata.&HWHUULWRLUHVLWX«
¢SOXVLHXUVKHXUHVGHSLURJXHHWGłDYLRQGH&D\HQQHDEULWHHQYLURQXQPLOOLHUGłKDELWDQWVQRQ
GHVVHUYLVSDUOHU«VHDX«OHFWULTXH

Ce projet d’un montant de 12 millions d’euros a pour objectif l’installation de centrales hybrides
SKRWRYROWD±TXHVHWGLHVHOVDLQVLTXHGHPLQLU«VHDX[«OHFWULTXHV,OHVWSRUW«SDUODFRPPXQDXW«
GHFRPPXQHVGHOł2XHVWJX\DQDLVTXLDVVXUHODPD°WULVHGłRXYUDJHHW(')6(,HQFKDUJHGH
OłH[SORLWDWLRQ&HWWHGHUQLªUHDVVXUH«JDOHPHQWOHSLORWDJHGHVLQIUDVWUXFWXUHV¢GLVWDQFHGHSXLV
&D\HQQHJU¤FH¢XQV\VWªPHGHPRQLWRULQJG«YHORSS«VS«FLDOHPHQWSRXUWUDQVI«UHUĿYLDXQH
OLDLVRQVDWHOOLWHPLVHHQSODFHVXUFKDTXHVLWHWRWDOHPHQWLVRO«ĿOłHQVHPEOHGHVGRQQ«HVPHVXU«HV
VXUVLWHDLQVLTXHOHV«WDWVGHIRQFWLRQQHPHQWGHVFRPSRVDQWVGHODFHQWUDOH
3RXUWDQWWUªVDWWHQGXHSDUOHVSRSXODWLRQVGHFHVYLOODJHVODPLVHHQVHUYLFHGHVFHQWUDOHVD
HXOLHXDXSUHPLHUWULPHVWUHDYHFSOXVGHGHX[DQVGHUHWDUG/łLVROHPHQWJ«RJUDSKLTXH
GHFHVVLWHVFRPELQ«DXVWUHVVFOLPDWLTXHLPSRV«¢OłHQVHPEOHGXPDW«ULHOHW¢ODYRORQW«GH
SLORWHU¢GLVWDQFHVDQVUHODLVKXPDLQVXUSODFHDFRQVLG«UDEOHPHQWIUHLQ«ODPLVHHQVHUYLFHGHFHV
FHQWUDOHVSXLVUHQGXWUªVFRPSOH[HOHXUH[SORLWDWLRQ

$XMRXUGłKXLOłHQVHPEOHGHVE¤WLPHQWVFRPPXQDXWDLUHVGLVSRVHGłXQDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«PDLV
OHVFHQWUDOHVWRXUQHQWTXDVLPHQWmb¢YLGHb}IDXWHGHUDFFRUGHPHQWVGRPHVWLTXHV'DQVFHWWH
U«JLRQR»OHVUHVVRXUFHVGRQWGLVSRVHQWOHVIDPLOOHVVRQWIDLEOHV
OHUDFFRUGHPHQWDXU«VHDXUHSU«VHQWHHQHIIHWXQY«ULWDEOHREVWDFOHŦQDQFLHU

6RXUFHb un représentant de la société Sunzil, intervenant sur les projets.

Cette approche sociologique n’est pas neutre L’accès à l’électricité déstabilise


économiquement : les pratiques et induit des risques
çFàWP EµVª GNNG PªEGUUKVG FW VGORU GV GNNG C qu’il est nécessaire d’anticiper.
un coût  ; autant de paramètres à intégrer dès D’abord, l’arrivée de l’électricité bouleverse. Elle
la conception dans le planning et le budget de induit une rupture, parfois radicale, pour les usa-
l’opération ; gers, quelle que soit leur expérience antérieure de
çFGNàCWVTGGNNGRGTOGVFàªXKVGTFGUUWTEQ¼VUQW l’électricité :
FGUOCPSWGU¡ICIPGT pour le concepteur du çGNNG GUV U[PQP[OG FàCOªNKQTCVKQP FGU EQPFK-
projet, l’opérateur et les usagers. tions de vie sur un territoire, et, si le projet prévoit

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


218 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

un accompagnement des activités productives,


de développement économique ;
Parole de
çOCKU NàGZRªTKGPEG OQPVTG ªICNGOGPV SWàGNNG GUV
comme toute innovation, porteuse d’effets
professionnelle
pervers. Marie-Christine
Elle ne vient pas seulement modifier les com- Zélem
portements énergétiques préexistants  : en ap-
portant la réfrigération, la télévision ou l’éclairage, mbElectrifier un territoire rural ne se
elle influence de nombreux comportements indi- réduit pas à apporter de l’électricité.
viduels et collectifs (les habitudes alimentaires, &HODVłDFFRPSDJQHGłXQHV«ULHGH
les modes de socialisation et de communica- FKDQJHPHQWVSURIRQGVTXLSHXYHQW
tion…). Cette mutation dans les modes de vie peut VHWUDGXLUHSDUGHVERXOHYHUVHPHQWV
«  défaire  » un collectif (cf. encadré), ou, à tout le LPSRUWDQWVTXLID©RQQHQWODYLH
moins, le fragiliser. Or, la cohésion de la commu- TXRWLGLHQQHbG«VRUJDQLVDWLRQVRFLDOH
nauté locale autour du projet à mener puis du FRQIOLWVSROLWLTXHVGLVSDULWLRQGH
système installé est nécessaire pour garantir de VDYRLUIDLUHPRGLILFDWLRQGXU«JLPH
bonnes conditions d’exploitation et assurer la DOLPHQWDLUHŊ
pérennité du service.
Electrifier un territoire suppose
2CTCKNNGWTUNàªNGEVTKEKVªUQWXGPVVT©UCVVGPFWG donc de prendre un certain nombre
FCPUWPXKNNCIGGUVCWUUKWPGlaKFªGa|GPVQWTªG de précautions,GłDERUGHQDPRQW
FG PQODTGWZ HCPVCUOGU Les contraintes pro- ILQDQFHPHQWVIRUPDWLRQLQIRUPDWLRQ
pres à l’installation et à l’utilisation d’un service élec- SDUWLFLSDWLRQŊ PDLVDXVVLHQDYDO
trique sont ignorées. Et l’utilisation des gisements HWWRXWDXORQJGHODPLVHHQāXYUHb
d’énergie locaux (et non celle, mieux connue, d’un VHQVLELOLVDWLRQDX[HQMHX[HWDX[
groupe électrogène) introduit une technologie SLªJHVGHOł«OHFWULFLW««GXFDWLRQ
nouvelle avec laquelle il faut se familiariser, ce qui DOLPHQWDLUHIRQFWLRQQHOOHHWVDQLWDLUH
est un facteur de déstabilisation supplémentaire. PLVH¢GLVSRVLWLRQGHVDSSDUHLOVHW
Or, la bonne compréhension du fonctionnement «TXLSHPHQWVFRPSDWLEOHV ODPSHV
du service, ce qu’on appelle son «  appropriation  », EDVVHFRQVRPPDWLRQDSSDUHLOV
est nécessaire pour garantir sa bonne utilisation, sa «FRQRPHV 6$9Ŋ
bonne exploitation et donc sa disponibilité pérenne :
çPGRCUVGPKTEQORVGFGEGUFKĂªTGPVUHCEVGWTU Marie-Christine Zélem est professeur de
FG TKUSWG CORWVG NGU EJCPEGU FG UWEE©U sociologie à l’université de Toulouse Jean-
du projet d’électrification, dont on attend Jaurès et coresponsable du pôle politiques
qu’il soit pérenne et porteur d’impact social et environnementales et pratiques sociales
économique positif pour le territoire électrifié ; au CERTOP-CNRS.
çNCDQPPGCPVKEKRCVKQPFGUTKUSWGUGVWPGCEVKQP
Retrouvez l’article intégral sur la page web de l’ouvrage :
CFCRVªG
KPHQTOCVKQP HQTOCVKQP  UQPV FQPE C
KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH
contrario indispensables (cf. encadré)  ; encore
faut-il prendre le temps de les débusquer, eux qui

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 219

sont souvent imperceptibles à la première analyse. des populations locales se retrouve d’ailleurs dans
Cette approche sociologique est particulière- de nombreuses offres de service portées par des
ment importante en logique interventionniste acteurs privés (cf. partie 3).
(électrification d’ouvrages publics ou mise en
place d’un réseau local, par exemple), qui néces- S’ils ne sont pas exhaustifs, les constats et sug-
site une adhésion profonde des populations, aux gestions qui suivent, tous issus de l’expérience de
niveaux individuel et collectif. terrain, soulignent :
çNàKORQTVCPEG FG la NàKPIªPKGTKG UQEKCNGa | à tous
Néanmoins, même dans une approche libérale (da- les stades de déploiement d’un projet ; et
vantage guidée par le pragmatisme économique çNCPªEGUUKVªFGFKURQUGTRQWTEGNCFàWPGªSWK-
que par la recherche d’impact social), l’analyse de pe pluridisciplinaire, dont plusieurs des mem-
risques a tout intérêt à inclure la dimension socio- bres ont acquis la confiance des populations
culturelle  : des risques mal anticipés ou mal maî- locales. Les actions d’accompagnement de la
trisés fragilisent le modèle économique. Cette population et de ses représentants ne peuvent
dimension de pédagogie et d’accompagnement être menées par les seuls ingénieurs techniques.

© Fondation Energies pour le Monde

Palabres, Guinée.

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220 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Pendant la phase d’élaboration Le choix de la localité : la « neutralité


du projet d’électrification, l’écoute politique » du territoire est un facteur de
et la coconstruction permettent pérennité du service.
d’assurer la pertinence du projet Dans le cadre d’une logique interventionniste,
et son acceptation. notamment l’installation d’un réseau local, le choix
Différentes bonnes pratiques sont à observer d’une localité à électrifier procède d’un double
pendant la phase amont de l’électrification d’un processus objectif :
territoire rural afin d’assurer l’acceptation du pro- çNCXªTKăECVKQPSWGNCNQECNKVªPàGUVRCUKPUETKVG
jet par les communautés concernées. FCPUWPGRTQITCOOCVKQPFàªNGEVTKăECVKQPRCT
Choix de la localité, entretiens collectifs et indi- extension de réseau auprès du ministère de
viduels, définition du périmètre d’électrification… l’Energie et de la société d’électricité ;
chaque étape de l’élaboration d’un projet çUCRNCEGFCPUNCJKªTCTEJKGFGUNQECNKVªU¡ªNGE-
d’électrification rurale doit prendre en considéra- trifier, établie en fonction de critères objectifs
tion la dimension « non technique » de l’opération, RTªCNCDNGOGPV ªVCDNKU (cf. chapitre 3.5.3. sur
à savoir un ensemble de faits sociologiques, les retours d’expérience relatifs à la planification
culturels et politiques qui caractérisent la zone et dans le cas des miniréseaux).
qui varient suivant le territoire concerné.

© Fondation Energies pour le Monde

Réunion villageoise en Guinée dans le cadre de l’élaboration d’un projet d’ERD.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 221

3ODQLŦFDWLRQbTXHOTXHVH[HPSOHVGłRXWLOV

$ORUVTXHODGHPDQGHGłXQDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«HVWIRUWHPDLVTXHOHVPR\HQVŦQDQFLHUVSRXU\
U«SRQGUHVRQWIDLEOHVXQHSODQLŦFDWLRQGHOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«HHVWQ«FHVVDLUH

)RXUQLVVDQWGHVLQIRUPDWLRQVVXUODRXOHVFRPPXQHVYLV«HVHWOHXUHQYLURQQHPHQWHOOHSHUPHWGH
KL«UDUFKLVHUOHVFRPPXQHV¢«OHFWULŦHUVHORQSOXVLHXUVFULWªUHVDYHFOłREMHFWLIGHPD[LPLVHUOHV
LPSDFWVGHOł«OHFWULŦFDWLRQHQWHUPHVGHG«YHORSSHPHQWVKXPDLQ
HW«FRQRPLTXHGHlimiter les risques d’échec,PDLVDXVVLGHG«ŦQLUOHVPRGDOLW«V
de réalisationGHVSURMHWVTXłHOOHVVRLHQWWHFKQLTXHVŦQDQFLªUHVRXRUJDQLVDWLRQQHOOHV

$X[F¶W«VGHORJLFLHOVGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHLQW«JUDQWXQHFRPSRVDQWHG«FHQWUDOLV«H
/DSHUHW(OYLUDSDU(')HW*«RVLPSDU,(' SOXVLHXUVRXWLOVGHSODQLŦFDWLRQGł«OHFWULŦFDWLRQ
UXUDOHG«FHQWUDOLV«HRQW«W«G«YHORSS«V/D)RQGHPDDLQVLFRQ©XOHORJLFLHO1RULD/HQRPEUH
GHFRPPXQHV¢«WXGLHUDOODQWFURLVVDQWil devient nécessaire d’automatiser les traitements
d’enquêtes,FRPPHOHSHUPHWOłRXWLO2FWDYHG«YHORSS«SDUOD)RQGHP

Cette démarche contribue à éviter les projets gui- du projet. Autorités locales, chefferies tradition-
dés par des considérations strictement politiques, nelles, usagers… Pour mener à bien les entretiens
dont l’expérience montre qu’ils sont rarement avec l’ensemble des interlocuteurs sur le terrain,
viables. Dans la plupart des cas, le personnage poli- il faut disposer au sein de l’équipe du projet sur le
tique originaire de la localité (et par extension ses terrain :
proches) est tenté de s’arroger des passe-droits une çFG RGTUQPPGU EQPPCKUUCPV DKGP NG VGTTKVQKTG  :
fois le service installé, mettant à mal les principes de maîtrisant le dialecte local, connaissant les
maîtrise des consommations électriques et de paie- règles de bienséance, le sens des positionne-
ment de l’électricité. Aucune règle ni contrainte ne ments, des silences…
peut alors s’appliquer, ce qui provoque des tensions çFàGPSW«VTKEGUa  elles seront plus aptes à dialo-
et conduit in fine à un arrêt du service. guer avec des femmes, qui jouent un rôle majeur
dans la maîtrise de l’usage d’un système élec-
Les entretiens, une étape-clé qui trique domestique, dans sa valorisation au sein
détermine la composition de l’équipe du foyer et dans la gestion du budget nécessaire
réunie par le concepteur au paiement régulier de l’électricité (cf. encadré).
du projet.
Une fois la localité retenue, s’ouvre une période
plus ou moins longue d’enquêtes initiales déter-
minantes pour la réussite des phases ultérieures

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


222 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

MINIDOSSIER

L’approche de genre* dans les projets


d’électrification rurale
La conférence de Pékin en 1995, suivie par çªVCPV GP EJCTIG FG NC RNWRCTV FGU CEVKXK-
les Objectifs du millénaire pour le développe- tés domestiques nécessitant de l’énergie,
ment et les Objectifs de développement du- les femmes sont ainsi les premières affec-
rable, marque une rupture dans l’agenda tées par le manque d’énergie, et peuvent
international en qualifiant l’égalité femmes- suppléer à ce manque en augmentant leur
hommes de fondamentale pour réduire la temps de travail ;
pauvreté. Parallèlement, les forums succes-
sifs de Paris (2005), Accra (2008) et Busan
(2011) l’ont également identifiée comme un
enjeu prioritaire de l’efficacité de l’aide.
Partant de cette prise de conscience grandis-
sante, s’est opérée une évolution majeure des
pratiques du développement. A l’approche
« femmes et développement » initiée dans les
années 70-80, ciblant les femmes par des ac-
tions isolées dans les projets ou programmes,
a succédé NàCRRTQEJGlaIGPTGGVFªXGNQRRG-
OGPV1 | , qui, dans l’objectif d’atteindre l’égalité
des droits et son application, suppose de
EQPUKFªTGTFKUVKPEVGOGPVNGUQRRQTVWPKVªU
QĂGTVGUCWZHGOOGUGVCWZJQOOGUNGWTU
TµNGUFCPUNCUQEKªVªCăPFàCIKTUWTFGUUK
tuations d’inégalités. © Fondation Energies pour le Monde

Pourquoi adopter une approche de genre


dans les projets d’accès à l’électricité en mi-
lieu rural ?
L’accès à l’énergie est un enjeu fondamental
pour le développement des femmes et des
hommes. Néanmoins, femmes et hommes
n’expérimentent pas de la même manière le
manque d’accès à l’énergie ou la situation Une commerçante à Ambondro, Madagascar, qui bénéficie
de pauvreté énergétique. Leurs attentes et d’un frigo.
leurs besoins diffèrent :

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 223

çNàCEE©U CWZ ETªFKVU QW CWZ CEVKXKVªU FG HQT-


mation professionnelles est généralement mb/HVIHPPHVGRLYHQW¬WUHLQFOXVHVGDQV
plus difficile pour les femmes. Par ailleurs, OHVVWUXFWXUHVGHJRXYHUQDQFHHWGH
les décisions familiales (investissements, SULVHGHG«FLVLRQ8QHVHQVLELOLVDWLRQ
etc.) sont le plus souvent prises par les GRLW«JDOHPHQW¬WUHHIIHFWX«H¢WRXVOHV
hommes ; QLYHDX[/DSOXSDUWGXWHPSVTXDQGOHV
çFàCWVTGU KPªICNKVªU UVTWEVWTGNNGU EQOOG JHQVYRQWVHQVLELOLVHUOHVFRPPXQDXW«V
l’analphabétisme, les privent parfois d’être LOVVHFRQFHQWUHQWXQLTXHPHQWVXUOHV
bénéficiaires de certains projets. KRPPHV&HTXHQRXVGLVRQVFłHVW
FRQFHQWUH]YRXV«JDOHPHQWVXUOHV
Ainsi, les choix techniques liés à un projet d’ERD IHPPHVĿHOOHVVRQWOHVXWLOLVDWULFHV
ne sont pas neutres en matière de genre. Pré- ŦQDOHV/RUVTXHYRXVGRQQH]OHSRXYRLU
férer une source de production d’énergie par- ¢XQHIHPPHYRXVOHGRQQH]
ticulière peut par exemple favoriser les activi- ¢WRXWHXQHQDWLRQb}
tés des hommes plutôt que celles des femmes
et induire un renforcement des inégalités. Rhoda Mando, directrice adjointe
du développement des entreprises
Certaines études soulignent que la prise et de l’intégration du genre à l’Agence
en compte du genre permet, entre autres, nigériane d’électrification rurale.
i) de réduire la pauvreté plus efficacement,
ii)  d’améliorer les raccordements au réseau 6RXUFHb Charlie Zajicek, « How solar mini-grids can
bring cheap, green electricity to rural Africa », Overseas
par le rôle actif de prescriptrices que jouent Development Institute, 2019, https://www.odi.org/
blogs/10730-how-solar-mini-grids-can-bring-cheap-
les femmes, iii) de favoriser l’égalité professi- green-electricity-rural-africa.
onnelle et d’améliorer la gestion de la chaîne
d’approvisionnement de l’énergie (Dutta et al.,
2018).

Le nexus genre, énergie, développement


L’accès à l’énergie a de multiples impacts
positifs, en particulier pour les femmes et les
enfants. Des études d’impacts et des retours
1. Le concept de genre désigne les rapports, les devoirs, les rôles
d’expérience de projets de terrain mon- socialement et culturellement construits des femmes et des hommes.
Il s’agit d’une construction politique et sociale qui se différencie de
trent que l’accès à l’énergie et aux services la notion de sexe, recouvrant les caractéristiques biologiques des
individus.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


224 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

énergétiques permet de : çTGEQWTU ¡ FGU FQPPªGU GV KPFKECVGWTU


çFKOKPWGTNGVGORUGVNàªPGTIKGEQPUCETªU sexo-spécifiques et analyse de résultats :
CWZ VTCXCWZ FQOGUVKSWGU Au Burkina - analyse de la demande en énergie, de la
Faso, la mise en place de plateformes multi- volonté et de la capacité à payer et des
fonctionnelles a permis un gain de temps usages de l’électricité des femmes ;
d’environ six heures par semaine pour les çRCTVGPCTKCVU GV CEVKQPU CXGE FGU KORCEVU
femmes (Beguerie, 2015) ; positifs dans la réduction des inégalités
çTªFWKTG NàWVKNKUCVKQP FG UQWTEGU FàªPGTIKG entre hommes et femmes :
RQNNWCPVGU
NGMªTQU©PGRCTGZGORNG a - mise en place de subventions ou d’un ac-
ç QWXTKT FGU QRRQTVWPKVªU FàGORNQKU QW FG cès facilité aux crédits ciblant les ména-
création d’activités génératrices de reve- ges dirigés par des femmes (Energy 4 Im-
PWU
#)4  Dans des localités d’Afrique du pact Sénégal),
Sud, l’emploi des femmes a augmenté de - appui au développement de l’entreprena-
13,5 M après électrification (Dinkelman, 2011). riat féminin (wPower),
- création d’AGR dans les secteurs formels,
Les revenus supplémentaires issus de ces plus lucratifs,
activités permettent une modification des - promotion de l’emploi des femmes dans la
rapports dans le foyer, augmentant le pouvoir chaîne d’approvisionnement de l’énergie
de décision et de négociation des femmes (Programme WE d’énergie, 2014-2017),
(Haves, 2012). Cela nécessite : - sensibilisation des ménages pour veiller à
çFàCOªNKQTGT NàªFWECVKQP GV NC UCPVª FGU ce que la libération du temps domestique
HGOOGUGVFGUăNNGUVQWVGPEQPVTKDWCPV ne se matérialise pas par une augmenta-
¡NGWTCWVQPQOKUCVKQPRTQITGUUKXGa tion conséquente du temps de travail des
çFG HCXQTKUGT NàCEE©U ¡ FGU UQWTEGU femmes dans leurs activités productives
FàKPHQTOCVKQPGVFGFKXGTVKUUGOGPV (Cecelski, 2004),
- amélioration de l’éducation des jeunes
Quelques bonnes pratiques méthodolo- filles, en sensibilisant les ménages pour
giques1 : leur permettre d’étudier le soir ;
çCPCN[UG FW EQPVGZVG KPVªITCPV NàCRRTQEJG çRCTVKEKRCVKQP FGU DªPªăEKCKTGU FKTGEVU GV
genre : indirects, femmes et hommes :
- analyse distincte des impacts négatifs - organisation de consultations séparées si
subis par les femmes et de ceux subis les femmes sont généralement absentes
par les hommes, définition de mesures des prises de décisions,
d’atténuation, - intégration des femmes dans les forma-
- prise en compte des différences de be- tions techniques aux métiers de l’énergie.
soins et d’intérêts des femmes et des
hommes relatifs à l’accès à l’énergie ; 1. Issues des outils méthodologiques AFD, Coordination Sud, ainsi que
des documents Energia (2017).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 225

Pour approfondir : Rao, Narasimha D, et Shonali Pachauri. « Gender impacts and deter-
minants of energy poverty: are we asking the right questions? » Cur-
Genre et énergie rent Opinion in Environmental Sustainability 5, no 2 (2013) : 205-15.

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ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


226 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

L’entretien préliminaire Les entretiens individuels avec


avec les autorités locales les futurs usagers
Le concepteur du projet commence par la Organisant un échange d’informations récip-
tenue, dans le respect des coutumes locales, roque entre les usagers et interlocuteurs de con-
de réunions avec ceux qui auront ensuite à por- fiance, mandatés par le concepteur du projet, les
ter le message auprès des populations et dont le entretiens individuels se déroulent en présence
soutien est donc essentiel, à savoir : des responsables et des usagers directs (parents,
çNGUªNWUFGNCNQECNKVªa médecins, infirmiers, matrones, responsables et
çNGUEJGHUVTCFKVKQPPGNUGVQWTGNKIKGWZTªWPKUFCPU enseignants, entrepreneurs et apprentis, etc.).
le conseil des sages.

C’est une étape préalable nécessaire avant d’aller


à la rencontre de l’ensemble de la population,
au-delà des seules personnes à l’aise avec la pa- mb5XFKL6RQLUHVSRQVDEOHGHOłDFFªV
role devant des étrangers. Ces entretiens pré- ¢Oł«QHUJLH¢OD)RQGDWLRQGHV
liminaires avec les autorités publiques et morales 1DWLRQVXQLHVPłDH[SOLTX«SRXUTXRL
locales visent à clarifier et partager des informa- OłHQJDJHPHQWFRPPXQDXWDLUHHVW
tions fondamentales : VLLPSRUWDQWb
çăZGTNGECFTGIªPªTCNGVNGUITCPFGUªVCRGU de /łHQJDJHPHQWFRPPXQDXWDLUHHVW
réalisation du projet ; HVVHQWLHODXSURFHVVXV>GłLQVWDOODWLRQ
çRTªEKUGT NGU EQPFKVKQPU FG UC TªCNKUCVKQP (in- GHVPLQLU«VHDX[@/HVHFWHXUSULY«
certaine tant que le montage financier n’est pas GRLWVłHQJDJHUDXTXRWLGLHQDYHF
bouclé) ; OHVFRPPXQDXW«VHWOHVORFDX[SRXU
çFªăPKT NàKORNKECVKQP TGSWKUG FGU CWVQTKVªU au FRPSUHQGUHOHXUVEHVRLQVOHVUDLVRQV
cours des différentes étapes du projet. SRXUOHVTXHOOHVLOVVRXKDLWHQWGHV
Il est impératif de s’assurer de la bonne com- PLQLU«VHDX[GDQVXQSUHPLHUWHPSV
préhension de ces informations par chacun des HWFRPPHQWLOVHQWHQGHQWXWLOLVHUOHXUV
participants, afin de réduire les risques d’une DSSOLFDWLRQVGDQVXQVHFRQG}
transmission déformée auprès de la popula-
tion (qui ne peuvent cependant pas être totale- Charlie Zajicek, « How solar mini-grids
ment circonscrits). Au sein de communautés can bring cheap, green electricity to rural
où l’engagement oral prime sur l’écrit, les pa- Africa », Overseas Development Institute,
roles prononcées lors d’un premier rendez-vous 2019, https://www.odi.org/blogs/10730-
revêtent une importance capitale. Toute modifi- how-solar-mini-grids-can-bring-cheap-
cation ultérieure des modalités énoncées orale- green-electricity-rural-africa.
ment nécessitera de longues explications avant
d’être acceptée.
Si la présence naturelle de femmes est très rare,
il est important de la susciter et d’en expliquer
l’intérêt.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 227

D’une durée suffisamment longue (une à deux heu-


res) pour établir un climat de confiance, ils visent à : mb/ł«OHFWULFLW«LQFLWHWUªVYLWHOHVIDPLOOHV
çRTªEKUGT NGU DGUQKPU GP ªNGEVTKEKVª tels qu’ils ¢Vł«TXLSHUHQW«O«YLVLRQ&HOOHFLYLHQW
sont exprimés par les usagers potentiels ; HQFRQFXUUHQFHDYHFODSRVVLELOLW«
çGZRNKSWGT le fonctionnement du service élec- GHOLUHRX«FULUH¢GHVŦQVVFRODLUHV
trique envisagé, ses bénéfices et ses limites. &HODHVWGłDXWDQWSOXVYUDLORUVTXHOHV
Et par là, à : IDPLOOHVYLYHQWGDQVXQHVHXOHHWP¬PH
çOGUWTGT NàªECTV GPVTG NGU CVVGPVGU GV NGU EQP- SLªFH$LQVLOHVIDPLOOHVGLVSRVDQW
traintes, entre la représentation de l’usage de GHSOXVLHXUVSLªFHVRXHVSDFHVGDQV
l’électricité (souvent forgée par les expériences OHXUKDELWDWLRQRQWSOXVGHFKDQFHGH
vécues dans des localités déjà électrifiées) et les YRLUOHXUVHQIDQWVVHFRQVDFUHU¢OHXUV
facteurs de réalité qui viendront limiter cet usage DFWLYLW«VVFRODLUHVTXHFHOOHVTXLYLYHQW
(limitation de la puissance ou de la disponibilité, GDQVSOXVGHSURPLVFXLW«b}
coût pour l’usager…) ;
çKFGPVKăGT NGU TKUSWGU NKªU ¡ NàCTTKXªG FG Marie-Christine Zélem est professeur de
l’électricité et les impacts négatifs possibles, sociologie à l’université de Toulouse-Jean-
comme le creusement de certaines fractures Jaurès et coresponsable du pôle politiques
sociales (cf. encadré). environnementales et pratiques sociales
au CERTOP-CNRS.
S’ils sont bien menés, les entretiens permettent
d’emporter l’adhésion au projet et de créer les Retrouvez l’article intégral sur la page web de l’ouvrage :
KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH
conditions d’une appropriation du service avec
la mise en service. Leur rôle est crucial. Dans cer-
tains cas, comme celui de l’installation d’un miniré-
seau, l’exercice est délicat. Les questions touchant
à la tarification, au paiement de l’électricité et au
budget à y consacrer doivent être abordées ; or, le
projet n’étant pas encore validé par l’organisme de
régulation du secteur électrique, le business plan
n’est pas finalisé et aucune information précise ne
peut être délivrée à ce stade.
L’ensemble des équipes impliquées dans le pro-
cessus d’enquêtes et de visites de terrain doit
veiller à porter un message cohérent. En effet, la
parole circule et se déforme vite sur un projet in-
novant comme l’électrification, quel que soit le
type de solution retenue ; l’inconnu provoque des
sentiments forts et mêlés, entre enthousiasme,
scepticisme et inquiétude, selon la personnalité
et le positionnement social ou les aléas qui en-
tourent la réalisation du projet.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


228 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

La définition du périmètre Ce tracé exclut de facto une partie plus ou moins


d’électrification importante de la population :
Dans le cadre de l’installation d’un réseau local, çNGUHQ[GTUUKVWªUGPRªTKRJªTKGFGNCNQECNKVªFQPVNG
la détermination du périmètre à électrifier est raccordement n’est pas économiquement viable ;
une autre étape importante ; elle requiert la com- çNGUHCOKNNGURNWUKPFKIGPVGUFQPVNGUTGUUQWTEGU
préhension et l’adhésion des édiles de la localité. sont insuffisantes pour assumer le coût du rac-
Le tracé du réseau est établi grâce notamment à cordement et des consommations.
deux types de contraintes :
çNGURTªKPUETKRVKQPUFGUHWVWTUCDQPPªUa Ne pas être raccordé exacerbe le sentiment
çNC NQECNKUCVKQP FGU RTKPEKRCNGU \QPGU FàCEVKXKVª d’exclusion et d’injustice. Des solutions alterna-
économique. tives adaptées à chaque contexte et pouvoir
Ces dernières sont privilégiées car susceptibles d’achat peuvent être proposées à ceux qui se
d’être de plus fortes consommatrices d’électricité retrouvent hors du périmètre du réseau  : lampes
que les ménages  ; leur bonne prise en compte portables, systèmes solaires individuels, voire
permet de favoriser leur développement grâce à kiosque énergie. A condition d’être bien expli-
l’usage d’appareils électriques (meilleure produc- quées, elles permettent d’éviter que l’électrification
tivité, augmentation de leur zone de chalandise). n’aggrave une fracture sociale préexistante ou ne
crée une discrimination nouvelle. La validation du
périmètre fait en effet souvent l’objet de tensions,
voire de confrontations entre le promoteur du
projet et l’« exclu du réseau ».
Le soutien du maire, de ses adjoints et des chefs
traditionnels est majeur pour :
çXCNKFGTNGVTCEªTGVGPWa
çGZRNKSWGTNGUTCKUQPUFGUGUNKOKVGUaGV
çHCEKNKVGT NàCEEGRVCVKQP FGU UQNWVKQPU CNVGTPC-
tives par les foyers qui se trouvent hors de son
périmètre.

La sensibilisation des populations


aux avantages et aux contraintes
du service électrique.
Il est nécessaire de conduire des actions de sen-
© Fondation Energies pour le Monde

sibilisation auprès des parties prenantes locales,


et de leur donner une information régulière tout
au long des différentes étapes du projet  ; cela
permet d’assurer l’adhésion au projet, préalable
à l’appropriation du service électrique, elle-même
condition de la pérennité des équipements et
donc des bénéfices de l’électrification.
Couturier burkinabais bénéficiant de l’électricité.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 229

© Fondation Energies pour le Monde

Madagascar, projet Boréale.

Plus le projet est complexe, plus ce travail péda-


gogique de renforcement des capacités des
mb$XMRXUGłKXLLOIDXWVHG«SODFHU¢ usagers et de leurs représentants est essen-
NPSRXUDYRLUDFFªVDX[PDFKLQHV tiel et ardu. Devenir usager d’un miniréseau, dont
Q«FHVVDLUHVSRXUWUDYDLOOHUOHERLV8QH l’installation est pourtant attendue, voire fantas-
IRLVTXHOł«OHFWULFLW«VHUDO¢LOQł\DXUD mée, n’est pas un choix simple pour une famille
SOXVEHVRLQGHIDLUHFHWUDMHWFHVHUDXQ rurale. L’équipe portant le projet doit expliquer et
JURVJDLQGHWHPSV2QSRXUUDWUDYDLOOHU convaincre. Faire œuvre de conviction est d’autant
HQFROODERUDWLRQDYHFOHVDXWUHV plus important que la décision de se raccorder ou
PHQXLVLHUVDFKHWHUOHVPDFKLQHV non au réseau électrique exerce une influence
HQFRPPXQb} importante sur la décision d’un ménage voisin de
faire de même.
Le menuisier de Kouramangui Les actions de sensibilisation visent avant tout à
(localité de Guinée électrifiée en 2019 par s’assurer de la bonne compréhension par les futurs
la Fondation Energies pour le Monde). usagers des atouts et limites d’une électrification
décentralisée par énergies renouvelables ; elles por-
tent notamment sur deux contraintes élémentaires :

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


230 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

çNCPªEGUUKVªFàWPWUCIGTCVKQPPGNFGNàªPGTIKG
Le primat selon les principes d’efficacité énergétique* ;
des activités çNC PªEGUUKVª FàWP RCKGOGPV FG NàªNGEVTKEKVª
économiques dans même si sa source est gratuite et inépuisable.
ODG«ŦQLWLRQGX
Concrètement, ces sessions de sensibilisation
tracé du réseau et ces actions d’information peuvent se décliner
ORFDObXQDFFªV sous différentes formes :
discriminant çQTCNGOGPV GP ITQWRG GV KPFKXKFWGNNGOGPV RQWT
à l’électricité ? s’assurer que des instructions identiques sont
communiquées à tous, puis expliquées à chacun
$ORUVTXHOHVSUHPLªUHVU«DOLVDWLRQV si nécessaire ;
GHOł(5'LQVFULWHVGDQVODG\QDPLTXHGH çRCT WP UWRRQTV KOCIª CăP FG ICTFGT WPG VTCEG
OłDLGHDXG«YHORSSHPHQWGHVDQQ«HV des échanges oraux et un éventuel support en
¢Vł«WDLHQWIRFDOLV«HVVXUOHVXVDJHV cas de doute ;
GłDERUGFROOHFWLIVSXLVGRPHVWLTXHVOHV çGPăP FGU ECORCIPGU FG EQOOWPKECVKQP RCT
XVDJHV«FRQRPLTXHVIRQWDXMRXUGłKXL une radio locale permettent de rappeler, régu-
OłREMHWGłXQHDWWHQWLRQDFFUXHGHV lièrement et uniformément, les messages les
SDUWHQDLUHVŦQDQFLHUVHWGHVLQYHVWLVVHXUV plus importants.
&HVDFWHXUV«FRQRPLTXHVVRQWFU«DWHXUV
GHYDOHXUHWGłHPSORLLOVFRQVRPPHQWGH Par ailleurs, le tracé du réseau comporte une di-
Oł«OHFWULFLW«SULQFLSDOHPHQWHQMRXUQ«H mension à ne pas sous-estimer  : les questions
DXPRPHQWR»QHQ«FHVVLWDQWSDVGH relatives au foncier. Elles revêtent, quels que
VWRFNDJHHOOHHVWODPRLQVFKªUH soient le pays ou la culture, une importance par-
ticulière. La problématique de l’emplacement des
3RXUWDQWOHVFLEOHUH[FOXVLYHPHQWFłHVW infrastructures de production, et principalement
FU«HUOHVFRQGLWLRQVGłXQHQRXYHOOH des modules solaires (qui requièrent des superfi-
IUDFWXUHVRFLDOHDORUVTXHODPDMRULW«GH cies significatives à proximité des localités), doit
ODSRSXODWLRQUXUDOHYLWGHOłDJULFXOWXUHGH être abordée rapidement afin de connaître la dis-
VXEVLVWDQFHDXU\WKPHGHVVDLVRQV ponibilité des terrains pour l’obtention de droits
d’usage ou de bail.

Créer, dès la phase de conception d’un miniré-


seau, une association d’usagers faisant une place
de choix aux femmes peut être initialement perçu
comme la création d’un contre-pouvoir par les
élus et les anciens, mais présente plusieurs avan-
tages pour garantir la bonne gestion du système :
çNC VTCPUOKUUKQP FGU KPHQTOCVKQPU RGTVKPGPVGU
sur les usages de l’électricité, leurs bénéfices et
leurs risques ;

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 231

çNàCRRTªJGPUKQP FGU SWGUVKQPU QW FGU KPSWKª- Pendant et après la phase de mise
tudes manifestées et la possession d’un canal en service, il est indispensable
pour y répondre ; de poursuivre la coopération pour
çNG ECU ªEJªCPV NC NKOKVCVKQP FW ENKGPVªNKUOG garantir la bonne appropriation
RQNKVKSWG que crée fréquemment la mise en du service par les usagers,
place d’un service de l’électricité. et sa pérennité.
Avant la mise en service, le travail réalisé avec
Enfin, l’expérience montre que la diaspora vivant les acteurs locaux vise à créer une acceptation
en milieu urbain électrifié doit être également du projet et à favoriser l’adhésion à sa mise en
ciblée. Lui diffuser des messages clairs sur les mo- œuvre. Une fois les travaux lancés, le défi consiste
dalités d’électrification de leur localité d’origine, et à créer l’appropriation, ce sentiment de respon-
particulièrement sur l’usage rationnel de l’énergie, sabilité vis-à-vis du service et des équipements,
permet d’éviter qu’elle n’envoie des appareils de d’adhésion aux logiques associées à la présence
seconde main énergivores aux familles restées de l’électricité. Le susciter et le faire perdurer est
au village. loin d’être une évidence (cf. encadré).

Coconstruction des outils de sensibilisation


et d’information
mbSur le plan de la communication, un acteur local est le mieux placé pour savoir quels
PRWVXWLOLVHUDXSUªVGHVSRSXODWLRQVHWGHVXVDJHUVSRXUG«VLJQHUWHOFRQFHSW ODPLVH
DX[QRUPHVSDUH[HPSOHŊ WHOPRW NLORZDWW RXWHOOHH[SUHVVLRQ «FRQRPLVHUOł«QHUJLH 
FRPPHQWH[SOLTXHUOHVULVTXHVGł«OHFWURFXWLRQOHVSRVVLELOLW«VGHVXUFRQVRPPHURX
Gł¬WUHHQLPSD\«VGł«QHUJLHŊ

De même, lorsqu’il s’agit de concevoir des supports d’informationVXUOH


IRQFWLRQQHPHQWGłXQU«IULJ«UDWHXUVXUOHVLQW«U¬WVHWSDUWLFXODULW«VGHVV\VWªPHV
Gł«FODLUDJHRXELHQVXUOHVGDQJHUVGHOł«OHFWULFLW«XQWUDYDLOGHFR«ODERUDWLRQDSSDUD°W
HVVHQWLHO WUDGXFWLRQGDQVOD
RXOHVODQJXHVORFDOHVFRQFHSWLRQGHGHVVLQVŦJXUDWLIVŊ b}

Marie-Christine Zélem est professeur de sociologie à l’université de Toulouse-Jean-Jaurès et


coresponsable du pôle politiques environnementales et pratiques sociales
au CERTOP-CNRS. Retrouvez l’intégralité des articles sur la page web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHP
RQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


232 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Pendant les travaux, jusqu’à la mise évoquées :


sous tension. çGP HCKUCPV RCTVKEKRGT NC EQOOWPCWVª ¡ NC
L’installation d’une infrastructure électrique au TªCNKUCVKQPFGUVTCXCWZFàKPUVCNNCVKQPa solliciter
sein d’une localité est toujours un événement ma- une main-d’œuvre locale pour la réalisation des
jeur, une révolution annoncée… et une source de travaux de génie civil (creusement de tranchées,
tentation. Dans le cas d’un miniréseau, les équipe- déchargement ou transport de matériel au sein
ments viennent généralement de la capitale, au de la localité) permet également, dans le meilleur
même titre que l’équipe de monteurs. Ils représen- des cas, d’identifier un possible technicien pour
tent un investissement dont le montant, même in- la gestion des équipements ;
connu des habitants, est perçu par eux, à juste çCWOQOGPVFGNCOKUGGPUGTXKEGGPQWXTCPV
titre, comme très supérieur au revenu d’une vie, CWZJCDKVCPVUNGURQTVGUFGNàKPUVCNNCVKQPa une
même pour le plus chanceux d’entre eux. visite guidée des locaux techniques permet de
S’assurer de l’adhésion de la population pour faire comprendre aux usagers comment on passe
réduire les risques de vol et créer le sentiment de la radiation naturelle offerte par le soleil au cou-
d’appropriation implique d’aller au-delà des sen- rant délivré jusqu’à une habitation ou un ouvrage,
sibilisations et des informations préalables déjà d’expliquer la fonction de chaque composant,

$SSURSULDWLRQGHVLQVWDOODWLRQVb
les biais des approches du développement
$XGHO¢GHODSURSUL«W«GHVLQIUDVWUXFWXUHVHWGHV«TXLSHPHQWVOłDSSURSULDWLRQG«SHQGGX
SDUDGLJPHGHG«YHORSSHPHQWTXLDSU«YDOXORUVGHODFRQFHSWLRQHWGXSRUWDJHGXSURMHW
Gł«OHFWULŦFDWLRQ

Les limites du don et de la gratuité


/HVPRGªOHVGHG«YHORSSHPHQWUHSRVHQWVXUFHTXLHVWVRXYHQWSHU©XFRPPHXQHIRUPHGHGRQb
OHVmbH[SHUWVb}LQVWDOOHQWJUDFLHXVHPHQWGHVWHFKQRORJLHVFHTXLQHSHUPHWSDVGłHQFRQQD°WUHOD
YDOHXUHWPRLQVHQFRUHGł\DFFRUGHUGHODYDOHXU&HWWHSHUFHSWLRQTXHOOHTXHVRLWODWHFKQRORJLH
VHWUDGXLWSDUGHVGLIŦFXOW«V¢VHOłDSSURSULHU/DJUDWXLW«GXVHUYLFHUHQGXUHQIRUFHFHWWH
QRWLRQGHmbG½b}&KDTXHSUREOªPHFKDTXHSDQQHGRQQHOLHX¢XQVHQWLPHQWGłDWWHQWLVPHRX
GłH[DVS«UDWLRQVDQVTXHOłRQVDFKHQRQSOXVFHTXłLOIDOODLWIDLUHQLYHUVTXLVHWRXUQHU
3DUH[HPSOHORUVGHOŁLQVWDOODWLRQGHSXLWVK\GUDXOLTXHV¢0DGDJDVFDUOHVYLOODJHRLVGł$PEHULYHULTXL
QłDYDLHQWSDV«W«DVVRFL«VDXSURMHWQHVłDXWRULVDLHQWSDV¢J«UHUOHVSXLWVTXłLOVQHG«VLJQDLHQWSDV
SDUXQSURQRPSRVVHVVLIbmbQRVSXLWVb}PDLVSDUXQVLPSOHDUWLFOHbmbOHVSXLWVb}&HODWUDGXLWOłDEVHQFH
GłDSSURSULDWLRQFRQGXLVDQW¢XQHDEVHQFHGHJHVWLRQHWGHPDLQWHQDQFH¢GHVIRUPHVGHVDERWDJH
HW¢GHUDSLGHVG\VIRQFWLRQQHPHQWVMDPDLVU«VROXV

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 233

/HPRGªOHSDUWLFLSDWLIHWVHVDPELJX±W«V
3ULYLO«JLDQWOHVLQGLYLGXVSOXVDQWKURSRFHQWU«FHPRGªOHIDLW«JDOHPHQWIDFH¢GHVU«VLVWDQFHV
ORFDOHV&RQVLVWDQW¢SUHQGUHHQFRPSWHOHVFXOWXUHVHWOHVDVSHFWVVRFLRSROLWLTXHVSRXUJ«UHUGHV
LGHQWLW«VWHUULWRULDOHVLOSURSRVHXQVFK«PDGłRUJDQLVDWLRQLVVXGłXQHSHQV«HRFFLGHQWDOHHWmbPHW
OHVLQGLYLGXVńVRXVFRQWUDWŅGLVWULEXDQWOHVGURLWVHWOHVGHYRLUVGHFKDFXQ\FRPSULVFHOXLGHOD
VDQFWLRQb} :LQWHU ¢WUDYHUVXQHVRUWHGHJRXYHUQDQFHXQLYHUVHOOHG«FU«W«HHQOLHXHWSODFH
GHVPRGHVGHJRXYHUQDQFHFRXWXPLHUV&HWWHmbG«PRFUDWLVDWLRQb}LQFDUQ«HSDUOHVmbFRPLW«V
GłXVDJHUVb}G«FLG«VDGKRFHVWVXVFHSWLEOHGHJ«Q«UHUGHVFRQŧLWVGDQVOHVYLOODJHVHQWUHOHVFODQV
HQWUHOHVIDPLOOHVHQWUHOHVYLOODJHRLVHWOHVUHSU«VHQWDQWVKDELWXHOVGHOłDXWRULW«
'DQVOHFDGUHGXSURMHW$OL]«V«OHFWULTXHVHQ0DXULWDQLHOHVFRPLW«VGHJHVWLRQGRXEODLHQWOHV
RUJDQLVDWLRQVVRFLDOHVHWSROLWLTXHVH[LVWDQWHVVDQVWHQLUFRPSWHGHVFOLYDJHVTXLOHVWUDYHUVDLHQW
FU«DQWXQVHFRQGOLHXG«FLVLRQQHOTXLQHUHFRXSDLWSDVWRXMRXUVH[DFWHPHQW
OHSUHPLHUJ«Q«UDOHPHQWSOXV«WURLWHWGHVXUFUR°WKL«UDUFKLV« &DUDWLQL 

/DmbWUDJ«GLHGHVELHQVFRPPXQVb}
&HWWHQRWLRQXWLOLV«HSRXUG«FULUHOHVHIIHWVQ«JDWLIVGHODPLVH¢GLVSRVLWLRQGłXQFROOHFWLIGH
SHUVRQQHV TXDUWLHUYLOODJHFRPPXQDXW«Ŋ GłXQHUHVVRXUFHGłXQELHQRXGłXQ«TXLSHPHQW¢
SDUWDJHU HDXDLUIRQFLHUŊ QłHVWSDV«WUDQJªUH¢Oł(5'0¬PHVL¢OłRULJLQHHOOHFRQFHUQDLWOHVELHQV
JUDWXLWVHOOHVłDSSOLTXHGDQVOHFDVGłXQV\VWªPHFRPPXQGHSURGXFWLRQGł«QHUJLHDX[XVDJHV
LQGLYLGXDOLV«V'ªVORUVTXHOHVXVDJHUVGLVSRVHQWGłXQFRPSWHXULQGLYLGXHOP¬PHVłLOVSDLHQW¢
KDXWHXUGHFHTXłLOVFRQVRPPHQW FDUWHSU«SD\«HIDFWXUHŊ OHVVXUFRQVRPPDWLRQVGHTXHOTXHVXQV
SHXYHQWLPSDFWHUOHV\VWªPHHWOHG«W«ULRUHU PXOWLSOLFDWLRQGHSDQQHV 
/łH[S«ULHQFHGHV$P«ULQGLHQV3DOLNXUVVXUOł2\DSRFNHVWVLPLODLUH¢EHDXFRXSGłDXWUHVHQ$IULTXH
VXEVDKDULHQQH&HX[TXLGLVSRVHQWGłXQFRPSWHXULQGLYLGXHOYHQGHQWSDUIRLVGHOł«OHFWULFLW«DX[
YRLVLQVTXLQłRQWSDVHXOHVPR\HQVŦQDQFLHUVGHE«Q«ŦFLHUGHOłLQVWDOODWLRQ«OHFWULTXH2QREVHUYH
SDUIRLVSOXVGHTXLQ]HEUDQFKHPHQWVmbLUU«JXOLHUVb}VXUXQP¬PHFRPSWHXU&HODVHWUDGXLW
U«JXOLªUHPHQWSDUGHVDUU¬WVGHVFHQWUDOHVVROOLFLW«HVDXGHO¢GHOHXUVFDSDFLW«VGHSURGXFWLRQ
&HVG\VIRQFWLRQQHPHQWVU«VXOWHQW¢ODIRLVGłXQVRXVGLPHQVLRQQHPHQWGHVLQIUDVWUXFWXUHV
«OHFWULTXHVGRQWOHVFDXVHVSHXYHQW¬WUHPXOWLSOHV FRQWUDLQWHVŦQDQFLªUHV«WXGHGHVEHVRLQV
WURSVXFFLQFWHWDULŦFDWLRQLQDGDSW«H HWGłXQHP«FRQQDLVVDQFHJ«Q«UDOHGXIRQFWLRQQHPHQW
GHFHVWHFKQRORJLHV'ªVTXłLOVGLVSRVHQWGłXQEUDQFKHPHQWIRQFWLRQQHOFHUWDLQVXWLOLVDWHXUVVH
FRPSRUWHQWHQIUHHULGHUVHWVłDXWRULVHQWGHVSUDWLTXHV UHYHQWHSRXUOHVXQVYROVSRXUOHVDXWUHV 
ORJLTXHVPDLVLQDGDSW«HVH[FOXHVGHVVF«QDULRVGHVSURPRWHXUVGXSURMHWGł«OHFWULŦFDWLRQ

Marie-Christine Zélem est professeur de sociologie à l’université de Toulouse-Jean-Jaurès


et coresponsable du pôle politiques environnementales et pratiques sociales au CERTOP-
CNRS. Retrouvez l’intégralité des articles sur la page web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHPRQJ
HOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


234 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

schémas illustrés à l’appui, de montrer le disposi- FGU UWTEQPUQOOCVKQPU ªPGTIªVKSWGUa  réfri-


tif de stockage pour la nuit ou les jours sans soleil, gérateur laissé ouvert grâce à un morceau de
les actions de maintenance à réaliser, etc. bois, conservateur à vaccins accueillant aussi
des denrées alimentaires, lumière laissée allu-
Après la mise sous tension du réseau. mée toute la nuit pour protéger la maison des
Les premiers moments d’accès à l’électricité sont mauvais esprits…
particulièrement importants. Il est nécessaire
de veiller à ce que les habitudes des usages de Ces usages détournés de leur fonction initiale mon-
l’électricité qui s’installent ne créent pas d’effet trent combien les notions de maîtrise de l’énergie
pervers qui soit déceptif. et d’usage rationnel de l’énergie, intimement liées
Servante de la société moderne et de ses mani- à tout recours aux énergies renouvelables, deman-
festations tangibles (télévision, Internet), l’arrivée dent sensibilisation et formation, alors même que
de l’électricité s’accompagne souvent de la mul- l’utilisation de l’électricité est innovante :
tiplication des récepteurs électriques dans les çNGU TªEGRVGWTU WVKNKUªU O«OG EQTTGEVGOGPV
foyers. Or, cette situation comporte deux risques : UQPVFGSWCNKVªOªFKQETGGVVT©UªPGTIKXQTGUa
çNGUTªEGRVGWTUDCUUGEQPUQOOCVKQPQWPQP hormis les ampoules LED, largement répandues,
UQPVOCNWVKNKUªUGVNGWTWUCIGKPCFCRVªKPFWKV les appareils électriques à basse consommation
© Fondation Energies pour le Monde

Branchements multiples.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 235

ne sont pas nécessairement disponibles, le coût opérateur est libre de la tarification, à la condition
de transport et la faiblesse du pouvoir d’achat d’une validation par l’organisme de régulation du
des clients potentiels ne favorisant pas la mise secteur électrique ;
en place d’un marché pour ce type de produits. çRTªXQKT NG UGTXKEG CRT©UXGPVG
5#8 , c’est-à-
Même dans le périmètre du réseau national, où dire un dispositif d’entretien/réparation des ré-
les tarifs sociaux de l’électricité issue du réseau cepteurs basse consommation.
ne pénalisent pas l’utilisation d’appareils bas de Au-delà de ces mécanismes incitatifs, le dialogue
gamme, ces récepteurs restent chers. doit se poursuivre avec l’ensemble des usagers et
Le consommateur se contente souvent de ma- de leurs représentants :
tériel de seconde main ou dont le prix attractif çFGU TªWPKQPU TªIWNK©TGU regroupant représen-
s’explique par des défauts de conception (inter- tants des abonnés, opérateur, maire, chefs tra-
rupteurs mal placés, fil cassé…). ditionnels, sont des occasions d’échanges et de
Or, en mode décentralisé, imposer des ré- discussions ;
cepteurs à haute efficacité énergétique ou inciter çNàCUUQEKCVKQP FàWUCIGTU est le canal privilégié
à leur utilisation est indispensable. Les usages dé- pour la diffusion d’informations, la connaissance
tournés ou l’utilisation de récepteurs inadaptés des insatisfactions et le dialogue ;
se traduisent par une facture d’électricité très su- ç&GU OªFKCVGWTU bien choisis peuvent être des
périeure aux prévisions et par une insatisfaction alliés efficaces pour régler certains conflits qui,
communicative des usagers. Premiers affectés, tôt ou tard, surgiront sur la qualité du service
les plus gros consommateurs sont souvent des électrique (principalement en période de très
notables écoutés et respectés  ; leurs griefs sont faible gisement), la grille tarifaire et son évolu-
connus et répétés, parfois jusqu’à créer un conflit tion, les nouveaux raccordements… }
avec l’opérateur local (même si la grille tarifaire a
été validée par l’organe national de régulation du
secteur électrique). Les pouvoirs publics régio-
naux ou nationaux, trop distants, ne peuvent rap-
peler leurs engagements aux parties prenantes.

Tout projet peut et doit donc se préoccuper de la


maîtrise de la demande en électricité et de la bonne
compréhension par les usagers de ses contraintes. mb7RXWHUHVVRXUFHńFRPPXQHŅWHQG¢
Plusieurs leviers peuvent être activés : ¬WUHVXUH[SORLW«HFDUQXOQłDOHSRXYRLU
çHQWTPKTFWOCVªTKGNTªRQPFCPVCWZDGUQKPUFGU GłHQOLPLWHUOłXVDJHHWFKDFXQVłHIIRUFH
RQRWNCVKQPUCEEQORCIPªFGOQFGUFàGORNQK GłHQE«Q«ŦFLHUOHSOXVSRVVLEOHb}
EQORTªJGPUKDNGURCTNGUWVKNKUCVGWTUa les nou-
velles modalités d’électrification individuelles Hardin, 1968, cité par Marie-Christine
(par exemple le PAYG  ; cf. chapitre 3.2.2.) com- Zélem.
portent souvent des récepteurs exclusifs de tout
autre matériel ;
çRTªXQKT WPG KPEKVCVKQP VCTKHCKTG ¡ NàWVKNKUCVKQP
FG TªEGRVGWTU DCUUG EQPUQOOCVKQPa  chaque

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


236 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Un étiage bien négocié à Madagascar

/DPLFURFHQWUDOHK\GUDXOLTXHGHN:LQVWDOO«H¢$QWHWH]DPEDWRDXFHQWUHGH0DGDJDVFDU
IRQFWLRQQHGHSXLVG«FHPEUH/ł«WLDJHGXFRXUVGłHDXTXLOłDOLPHQWHGXUHGHTXLQ]HMRXUV¢
WURLVVHPDLQHVSDUDQS«ULRGHSHQGDQWODTXHOOHODSURGXFWLRQ«OHFWULTXHHVWLQWHUURPSXH&HWWH
SUREO«PDWLTXHD«W«DQWLFLS«HHWDYDQWP¬PHODPLVHHQHDXGHODFHQWUDOHun accord a été négocié
GPVTGNàGZRNQKVCPVNGUCDQPPªUGVNGUCITKEWNVGWTURTQEJGUaNàGCWFWTCPVEGVVGRªTKQFGGUVGPVK©TGOGPVCĂGEVªG
à l’agriculture.
'HSXLVGL[VHSWDQVSHQGDQWOHVS«ULRGHVGł«WLDJHOHVXVDJHUVGHODFHQWUDOHUHYLHQQHQW
¢OHXUVDQFLHQQHVKDELWXGHV«QHUJ«WLTXHVVDQVTXHFHODQHJ«QªUHOHPRLQGUHFRQŧLW
© Fondation Energies pour le Monde

Microcentrale hydraulique d’Antetezambato (Madagascar) - 42 kW.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 237

2.4.3.
Un des principaux défis consiste à assurer
la présence durable du service de l’électricité
alors que le secteur local est encore balbutiant.

Afin de garantir à leurs usagers un accès dura- modules solaires photovoltaïques, les structures
ble à l’électricité, les infrastructures et les équi- associées ou les câbles.
pements, quelles que soient les technologies Pourtant, la qualité médiocre et la faible lon-
mises en œuvre, doivent idéalement répondre gévité de certains équipements disponibles sur
aux quatre conditions suivantes : le marché sont une préoccupation récurrente,
çTGRQUGTUWTFGUOCVªTKGNU¡NCHQKUFGDQPPG particulièrement en Afrique subsaharienne, où
qualité et à durée de vie longue ; normes et contrôles de qualité sont inexistants ou
çDªPªăEKGT FàWP UGTXKEG CRT©UXGPVG GąECEG défaillants.
et d’un réapprovisionnement fiable en pièces
détachées ; Le sujet se pose avant tout dans
çHCKTG NàQDLGV FàWPG EQNNGEVG GV FàWP TGE[ENCIG le cadre des petits équipements
des composants en fin de vie ; domestiques diffusés en vente directe.
çHCKTG NàQDLGV FàWPG TªGNNG CRRTQRTKCVKQP RCT Il est possible de se procurer des lampes solaires
leurs exploitants et leurs utilisateurs. portables ou des systèmes individuels (de 30 à
plus de 200 Wc) sur les marchés ou dans les ma-
Cette dernière condition repose en partie dans les gasins d’électroménager. Les composants, ven-
mains des acteurs locaux, sous l’égide du porteur dus sans attention à leur assemblage, ne répon-
de projet et de l’équipe qui assure l’information dent souvent à aucune norme et ne sont soumis à
et la sensibilisation locales. Pour ce qui est des aucun contrôle, ni en douane ni sur les lieux de leur
trois autres conditions, qui dépendent de la struc- commercialisation. De plus, les revendeurs man-
turation du marché régional ou national, malgré quent de personnel qualifié capable d’effectuer un
quelques progrès significatifs, elles sont, en pra- minimum d’autocontrôle.
tique, rarement réunies. Concernant les lampes solaires portables :
çUWT WP O«OG OCTEJª FGU FK\CKPGU FG OQF©NGU
La qualité et la durée de vie des différents sont disponibles, pour des prix allant
équipements ne sont plus un du simple au quintuple  ; si le service rendu
obstacle à la diffusion de l’ERD, s’affiche comme équivalent, la différence de prix
mais l’absence de normes empêche traduit une différence de robustesse, considéra-
l’apurement du marché. tion que l’économie d’un ménage rural permet
En principe, la durée de vie des principaux com- rarement ;
posants d’un système électrique par énergies re- çDGCWEQWR FG EGU NCORGU RTQFWKVGU OCUUKXG-
nouvelables est élevée  : plus de trente ans pour ment, souvent en Asie, sont «  jetables  » car
les unités de production hydroélectriques, les non réparables, et sont sources d’importantes

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238 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

pollutions nouvelles (plastique, électronique,


piles et batteries).
/DQRQŦDELOLW«GHV
valeurs annoncées
Concernant les systèmes solaires individuels : VXUOHVPRGXOHV39
çNGURNCSWGUUKIPCNªVKSWGUFGUOQFWNGUKPFKSWGPV
souvent de fausses informations sur le nom du /RUVGłXQHIRUPDWLRQVXUOHSKRWRYROWD±TXH
fabricant et les caractéristiques techniques DX%«QLQHQ¢GHVWLQDWLRQGHV
(cf. encadré), tandis qu’aucune indication ne per- SURIHVVLRQQHOVGHOł«QHUJLHOHIRUPDWHXU
met de référencer les régulateurs, les onduleurs DGHPDQG«DX[SDUWLFLSDQWVHX[P¬PHV
ou les batteries ; UHYHQGHXUVHWLQVWDOODWHXUVGł«TXLSHPHQWV
çEGU U[UV©OGU TªUWNVCPV FG NàCUUGODNCIG FKURC- 39GłDSSRUWHUXQRXSOXVLHXUVPRGXOHV
rate de composants mal adaptés affichent des SRXUGHVWUDYDX[SUDWLTXHV
durées de vie de six mois à trois ans, contre cinq
à dix ans pour des équipements similaires mieux 3HQGDQWOłH[HUFLFHOHVSDUWLFLSDQWVRQW
conçus et mieux installés ; U«DOLV«GHVPHVXUHVHQFRQGLWLRQVU«HOOHV
ç¡EGUEQORQUCPVURGWRGTHQTOCPVUFGOCTSWG VXUKXLWPRGXOHV39QHXIVGLVSRQLEOHVVXU
inconnue, s’ajoute parfois le manque de compé- OHPDUFK«ORFDO¢SUL[DWWUDFWLI
tences des installateurs ;
çUGNQP NGU GUVKOCVKQPU FàGZRGTVU a  ¡ a  /HU«VXOWDWGHVPHVXUHVHVWVDQVDSSHOb
des installations de ce type sont hors service en OHVSHUIRUPDQFHVU«HOOHVVRQWLQI«ULHXUHV
Afrique. GH¢b¢FHOOHVDQQRQF«HVVXUOD
ŦFKHVLJQDO«WLTXHGXSURGXLWHWDXFXQ
Voilà pour les constats. La bonne nouvelle, c’est GHVPRGXOHVQłHVWFRQIRUPHDXPLQLPXP
que la situation observée n’est pas irréversible. GłH[LJHQFHQRUPDWLYHGHVSURGXLWV
GLVSRQLEOHVHQ(XURSH
Les logiques de projet ou de location-
6RXUFHb Étienne Sauvage, HACSE.
vente tirent la qualité
des produits vers le haut.
Le caractère capitalistique des énergies renou-
velables, qui pose problème pour le financement
des installations par les usagers eux-mêmes,
devrait à terme favoriser l’amélioration de la quali-
té des produits. En effet, que le service électrique
procède d’une approche interventionniste ou
libérale (cf. chapitre 2.4.1.), financeurs et investis-
seurs requièrent des produits robustes et fiables :
çNGU RTQLGVU OKU GP ÈWXTG FCPU NG ECFTG FG RTQ-
grammes d’électrification validés par les insti-
tutions publiques doivent UG EQPHQTOGT ¡ NC
TªINGOGPVCVKQP GV CWZ PQTOGU VGEJPKSWGU
destinées à garantir la qualité, la performance, la

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 239

sécurité et la longévité des installations ; fonctionnement et identifier les éventuels ris-


çRQWTTGPVCDKNKUGTNGWTURTQRTGUKPXGUVKUUGOGPVU ques de panne, mais il faut aussi et surtout des
et satisfaire leurs investisseurs, les exploitants prestataires de services après-vente disponibles
d’un service de location-vente de type pay as you et compétents, ainsi que la présence de filières
go (cf. chapitre 3.3.), qui visent une large diffusion d’approvisionnement et de distribution des pièces
de leurs solutions, ont tout intérêt à utiliser des détachées.
composants fiables et durables, qui respectent les
normes en vigueur quand elles existent. Le suivi préventif requiert des personnes ré-
Dans les deux cas, l’approvisionnement en férentes formées et disponibles à proximité des
produits de qualité est un des piliers du modèle systèmes d’électrification pour appliquer des
économique et bénéficie des récents progrès protocoles appropriés permettant d’identifier les
réalisés par les industriels : anomalies de fonctionnement et les risques de
çNGU EQPVTµNGU U[UVªOCVKSWGU GV EGTVKăECVKQPU panne. Ce suivi préventif réduit les déplacements
associées à la production en grande série des de techniciens spécialisés et les besoins en
équipements de régulation et de conversion pièces détachées, et donc le coût d’exploitation.
d’énergie ont permis de lever les obstacles ini- Ce n’est ni l’identification ni la formation de ces per-
tialement rencontrés ; sonnes référentes qui pose le plus souvent problè-
çNGU DCVVGTKGU RQWTXW SWàGNNGU UQKGPV DKGP UªNGE- me, mais leur turn-over, une fois formées, particu-
tionnées selon l’usage prévu, apportent les garan- lièrement lorsqu’il s’agit de territoires reculés. La
ties suffisantes pour un service de deux à dix ans sélection d’une personne d’âge mûr, faisant auto-
selon les technologies aujourd’hui disponibles. rité et vivant dans la localité, est une des parades.
Si, dans le cadre de programmes structurés ou Par ailleurs, en milieu rural, les prestataires de
de location-vente, la qualité des composants d’un services après-vente sont en nombre insuf-
système décentralisé n’est plus un obstacle à la fisant. Ils manquent de personnel qualifié (tech-
pérennité du service électrique, il n’en est pas en- niciens spécialisés) et ne disposent pas de ré-
core de même de la capacité de réparation in situ. seaux déployés sur l’ensemble des territoires ru-
raux électrifiés. Il en est de même pour les filières
En milieu rural, le service après- d’approvisionnement et de distribution des pièces
vente et l’approvisionnement en détachées.
pièces détachées souffrent encore Souvent, ces insuffisances ne permettent pas
de nombreuses défaillances. d’effectuer correctement la maintenance préven-
Les premières pannes, dès qu’elles durent plus de tive ni d’intervenir rapidement pour le dépannage
quelques heures, sont souvent marquées par des des systèmes d’électrification, nuisant à l’adhésion
signes de désaffectation, voire par des refus de des usagers et donc à la pérennité du service.
payer l’électricité. L’efficacité du service après-vente En conséquence, pour la réussite d’un projet, un
et la disponibilité des pièces de rechange dans des effort important doit être porté sur les deux points
délais raisonnables sont donc deux conditions sine suivants :
qua non du fonctionnement pérenne des systèmes çNC HCEKNKVCVKQP FG NàKORQTVCVKQP GV FG NC NKXTCK-
d’électrification et de leur viabilité économique. son sur site de pièces de rechange, dans une
Concrètement, cela nécessite un suivi préventif logique d’anticipation et d’approvisionnement au
régulier des installations pour en vérifier le bon coût minimum ;

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


240 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

çNàªNCDQTCVKQP FGU OªECPKUOGU FG OWVWCNKUC- La prise en charge des équipements


tion assurant de mettre à disposition des exploi- en fin de vie reste le maillon faible de
tants, à partir de lieux de stockage sécurisés, la chaîne logistique.
des composants susceptibles de faire défaut. Quelles que soient les précautions prises pour as-
Des questions similaires sont à résoudre pour surer leur fonctionnement (suivi préventif, entretien
l’entretien et la maintenance des récepteurs élec- et maintenance, disponibilité de pièces détachées),
triques pour lesquels les vendeurs ne peuvent les composants des systèmes d’électrification ont
aujourd’hui apporter une assistance après-vente. des durées de vie plus ou moins longues mais,
dans tous les cas, limitées. Si rien n’est fait pour
les prendre en charge en fin de vie, ils représen-
tent une nouvelle source de pollution (plastique,
électronique, piles et batteries). C’est aussi le cas
d’équipements d’électrification encore réparables
mais abandonnés par leurs utilisateurs.

mb/HVSURGXLWVVRODLUHV/DJD]HOVRQWIDEULTX«VORFDOHPHQWHQ$IULTXHSDUGHVWHFKQLFLHQV
IRUP«V¢FHWHIIHW/HSUHPLHUDWHOLHURS«UDWLRQQHOGHSXLVVHSWHPEUHDX%XUNLQD)DVR
DIDEULTX«SUªVGHODPSHVVRODLUHVHQGHX[DQV&HWWHDSSURFKHLQQRYDQWHSHUPHW¢
/DJD]HOGHJDUDQWLUODGXUDELOLW«VRFLDOHHWHQYLURQQHPHQWDOHGHODFKD°QHGHYDOHXUFRPPH
XQ6$9GHSUR[LPLW«GDQVOHVSD\VR»QRXVDYRQVGHVDWHOLHUV'łXQHSDUWFHODGRQQH
FRQŦDQFHDXFOLHQWTXLLQYHVWLWGDQVXQ«TXLSHPHQWVRODLUHbGłDXWUHSDUWODSRVVLELOLW«GH
U«SDUHUXQFRPSRVDQWGłXQHODPSHSOXW¶WTXHGHUHPSODFHUODODPSH¢OłLGHQWLTXHDOORQJH
ODGXU«HGHYLHGXSURGXLWHWU«GXLWOHYROXPHGHG«FKHWV
/DJD]HOHVWDFFRPSDJQ«SDUOH)RQGVIUDQ©DLVSRXUOłHQYLURQQHPHQWPRQGLDOGHOł$JHQFH
IUDQ©DLVHGHG«YHORSSHPHQWSRXUDFF«O«UHUODU«SOLFDWLRQGHVDWHOLHUVGHIDEULFDWLRQ
VXUOHFRQWLQHQWDIULFDLQ/łREMHFWLIbFLQTDWHOLHUVGHIDEULFDWLRQDFWLIVGłLFLSHUPHWWDQW
ODFU«DWLRQGłXQHFHQWDLQHGłHPSORLVORFDX[b}

Arnaud Chabanne, ingénieur en énergies renouvelables et sensible aux problématiques d’accès à


l’énergie, travaille depuis 2004 dans le secteur solaire au Burkina Faso ; il a fondé /DJD]HO en 2015
avec son frère Maxence, avec pour objectif d’industrialiser la fabrication de lampes solaires de
qualité sur le continent Africain.

Retrouvez l’intégralité de l’interview sur la page web de l’ouvrage :


KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 241

Au problème des composants des systèmes de


production d’électricité, s’ajoute celui des ré-
cepteurs électriques, notamment les déchets Un exemple
électroménagers. Ils posent des questions d’initiative
spécifiques de gestion des déchets, en raison de recyclage
des effets induits par les fluides (pollution des de batteries
eaux, des sols, points noirs paysagers, déchar–
ges sauvages, largage de puissants gaz à effet $WWHQWLI¢ODSU«VHUYDWLRQGH
de serre, etc.). OłHQYLURQQHPHQW0.DEU«GLUHFWHXUGH
ODVRFL«W«%HWDLQVWDOO«H¢.RXS«OD¢OłHVW
Prendre en charge les composants et les ré- GH2XDJDGRXJRXDIDLWGHODFROOHFWH
cepteurs en fin de vie ou abandonnés requiert GHVFRPSRVDQWVSKRWRYROWD±TXHVVRQ
l’existence de filières de récupération et de recy- SULQFLSDOFRPEDW&KDTXHDQQ«HLOYHQG
clage, ainsi que de stockage pour des produits HQYLURQbODPSHVHWV\VWªPHVVRODLUHV
dangereux. Si de telles filières sont encore balbu- LQGLYLGXHOVSDUGHVFDQDX[GHGLVWULEXWLRQ
tiantes en Afrique subsaharienne, l’expérience en LQIRUPHOOH
la matière est grandissante. L’exemple de la socié-
té burkinabé Beta fait la preuve de cette prise de /HVDFFXPXODWHXUVUHFKDUJHDEOHVGHV
conscience (cf. encadré). ODPSHVVRODLUHVHWOHVEDWWHULHV«WDQFKHV
TXLVRQWUHPSODF«VVRQWFROOHFW«VHW
L’appropriation des infrastructures VWRFN«V'ªVTXHODFDSDFLW«GHWUDQVSRUW
et des équipements reste la GXY«KLFXOHXWLOLWDLUHHVWDWWHLQWHLOVVRQW
meilleure garantie de leur pérennité. OLYU«V¢ODVRFL«W«%HGD\DEDV«HGDQVOD
La bonne compréhension du fonctionnement FDSLWDOH&RQWUHXQHVRPPHGH¢
des infrastructures et des équipements par leurs )&)$ b¢ŏ SDUEDWWHULHGH
utilisateurs (maître d’ouvrage, exploitant, usa- $Kb9%HWDOHVYHQG¢%HGD\DTXL
gers) et l’adhésion au service rendu de ces der- OHVLQWªJUHGDQVVRQFLUFXLWGHFROOHFWH
niers sont des conditions nécessaires à la péren- GHVEDWWHULHVGHYRLWXUH/LYU«VŦQDOHPHQW
nité du service. Réussir à faire naître le sentiment ¢$FFUDDX*KDQDDFFXPXODWHXUVHW
de responsabilité vis-à-vis du service et des ou- EDWWHULHVVRQWH[S«GL«VHQ,QGHSRXUOHXU
tils le délivrant est une des phases les plus déli- UHF\FODJH
cates des opérations d’électrification rurale dé-
centralisée (cf. chapitre 2.4.2.).

Cette appropriation est d’autant plus néces-


saire qu’il y a de parties prenantes différentes et rodés au montage de programmes d’accès à
interdépendantes. Elle est ainsi primordiale en l’électricité, associant maîtrise de la méthodolo-
logique interventionniste, dans le cas d’un pro- gie, connaissance du terrain et capacité de dia-
jet d’électrification par miniréseau par exemple logue entre les différentes parties prenantes,
(cf.  chapitre 3.5.3.). Les constats de terrain mon- qu’elles soient étrangères ou locales, financières
trent l’importance d’une implication d’acteurs ou techniques (cf. chapitre 2.4.1.). }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


242 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

2.4.4.
Les enjeux liés à la tarification et au paiement de
l’électricité doivent être soigneusement anticipés
pour assurer la viabilité et la pérennité du service.

La pérennité d’un système d’électrification grand nombre à un prix acceptable ;


dépend en grande partie de la viabilité de son çNGUWUCIGTU cherchent à réduire autant que pos-
exploitation, et donc de la politique tarifaire sible leur budget énergétique.
adoptée pour la vente du service, ainsi que des
modalités de paiement associées. A ces trois intérêts, dont la convergence ressem-
Quelle que soit la logique sous-jacente, interven- ble à la quadrature du cercle, correspondent les
tionniste ou libérale, définir un tarif pour un service trois grandes fonctions d’une tarification : couvrir
relève d’un arbitrage de faisabilité entre contrain- les coûts, assurer une redistribution équitable et
tes d’exploitation et opportunités commerciales. influencer les usages.
La grille tarifaire et le dispositif de recouvrement
mis en place doivent ainsi relever un double défi : La fonction de couverture des coûts.
çIªPªTGT FGU TGEGVVGU UWąUCPVGU RQWT FªICIGT Couvrir les coûts engendrés par le système mis
des résultats d’exploitation compatibles avec en place pour assurer l’offre du service en ques-
l’impératif de viabilité économique, voire de tion est déterminant pour l’équilibre durable des
rentabilité du service, si possible excédentaires comptes d’exploitation du système, et donc la via-
(l’excédent permettant notamment d’investir bilité de ce dernier.
dans de nouveaux raccordements ou d’anticiper Dans le cas idéal, les tarifs du service doi-
le renouvellement de matériel) ; vent permettre de couvrir tous les coûts liés à
ç«VTG EQORCVKDNGU CXGE NC XQNQPVª GV NC ECRCEKVª l’exploitation :
réelle de paiement des usagers, ce qui, en milieu çNàCOQTVKUUGOGPVFGUKPHTCUVTWEVWTGUa
rural, est complexe étant donné la faiblesse et la çNG OCKPVKGP FGU KPHTCUVTWEVWTGU
OCKPVGPCPEG
saisonnalité des revenus. préventive et remplacement des composants) ;
çNGUHTCKUFGHQPEVKQPPGOGPVGVNGUHTCKUIªPªTCWZ
La tarification répond à trois de gestion du service ;
grandes fonctions. çNGUTKUSWGUFàGZRNQKVCVKQP
CUUWTCPEGU a
Pour un miniréseau, définir la tarification relève çNGFªXGNQRRGOGPVFGUKPHTCUVTWEVWTGUa
d’une triple équation  ; en effet, dans ce cas, trois çNCTªOWPªTCVKQPFGUKPXGUVKUUGWTUa
types d’intérêts, parfois contradictoires, se çNCOCTIGDªPªăEKCKTGFGNàQRªTCVGWT
juxtaposent :
çNGU GPVTGRTKUGU GZRNQKVCPVGU cherchent à ac- La réalisation de cet objectif de couverture
croître leurs recettes ; des coûts est parfois entravée par des choix
çNGU RQWXQKTU RWDNKEU notamment l’Etat, cher- économiques et sociaux qui échappent au con-
chent à étendre le service de l’électricité au plus cepteur ou, après lui, à l’exploitant du système.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 243

La fonction redistributive. tarifaire selon sa stratégie commerciale. Si la poli-


Les pouvoirs publics peuvent décider de mettre tique du nombre est nécessaire pour attirer de
en place des mécanismes de transfert de revenus nouveaux investisseurs, celle de la sécurité d’un
entre différentes catégories d’usagers, notam- paiement régulier est tout aussi pertinente pour
ment dans un souci d’accessibilité au service confirmer les prévisions d’un plan d’affaires.
aux familles ou de développement de certains
secteurs d’activité économique. La fonction de signal.
L’instauration de tarifs dits «  sociaux  », qui ne re- Outre les fonctions d’équilibre économique et
flètent pas la réalité des coûts, repose le plus sou- de redistribution, la tarification constitue un mé-
vent sur l’existence d’un mécanisme de péréqua- canisme déterminant d’orientation des choix
tion tarifaire  : un seul et même tarif s’applique à économiques de l’usager d’un service électrique.
deux usagers présentant le même profil de con- Le tarif est en effet l’une des principales informa-
sommation, quelle que soit leur localisation sur le tions considérées par l’usager pour choisir ou
territoire. Cette solidarité entre population urba- non d’adopter le service, ou pour choisir entre dif-
ine et population rurale est mise en œuvre dans la férents niveaux de service.
quasi-totalité des services publics dont la desserte .GlaUKIPCNVCTKHCKTGa|GUVCKPUKWVKNKUªRQWTKPĄW-
est organisée en réseau. Lorsqu’elle n’affecte pas la GPEGT NG EQORQTVGOGPV FGU WUCIGTU FCPU NG
faisabilité d’un projet d’ERD, la péréquation favorise DWVFGHCKTGEQ°PEKFGTNGWTEJQKZCXGENàQRVKOWO
l’accessibilité du service au plus grand nombre ; en ªEQPQOKSWG FW UGTXKEG Par exemple, on dis-
ce sens, elle est souhaitable, à condition de repos- tingue l’usage nocturne, faisant appel au stock-
er sur un périmètre territorial adapté (cf. les pré- age sur batteries, de l’usage diurne, faisant appel
conisations formulées en partie 4). à la seule production solaire1 : le tarif, variable, va
L’Etat peut chercher à favoriser certains inciter les usagers à consommer l’électricité en
UGEVGWTU QW EGTVCKPGU CEVKXKVªU ªEQPQOKSWGU dehors des heures nocturnes, qui correspondent
afin de stimuler leur développement, en les fai- à des coûts de production plus élevés.
sant bénéficier de tarifs particulièrement bas. Ces Ce qui est vrai pour l’usager l’est symétriquement
derniers renforcent les externalités positives en- pour un opérateur développant ses ventes dans
gendrées par l’usage de l’électricité mais ne per- un contexte de tarifs régulés : si le tarif associé à un
mettent pas de couvrir la totalité des coûts  : une usage (domestique, par exemple) lui garantit une
sous-tarification du service est donc nécessaire- marge moindre que celui associé à un autre type
ment corrélée à un mécanisme de subvention (di- d’usage (productif, par exemple), il axera ses efforts
recte ou indirecte) à l’opérateur. de promotion vers le second. La tarification permet
Dans la majorité des pays en développement, les ainsi d’orienter les décisions d’investissement vers
systèmes de tarification des sociétés électriques des zones ou des secteurs particuliers.
font apparaître cette redistribution et distinguent
généralement plusieurs catégories de tarifs : social,
petit artisanat, industrie, éclairage public, pompage,
etc. Dans la mesure du possible, un projet d’ERD met
1. De nombreux usages peuvent être concentrés durant les périodes production
également en place ce type de segmentation. (milieu de journée pour le solaire, hautes eaux pour l’hydraulique) : les activités
industrielles et artisanales, les usages thermiques pour le froid et le chaud
En approche libérale, au contraire, la tarification fortement stockables, les usages agricoles liés aux dates de récoltes ou de
transformation.
est libre : le promoteur peut optimiser sa politique

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


244 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Prendre en compte l’équité est un Ce facteur de charge plus faible s’explique par
défi difficile à relever. deux phénomènes (cf. graphe) :
La viabilité économique de l’électrification rurale est çWPG EQPUQOOCVKQP FQOGUVKSWG HCKDNG EQPEGP-
pénalisée par des investissements et des charges trée aux périodes de pointe sur des usages très
d’exploitation (notamment de personnel) par usag- limités (éclairage, audiovisuel) ;
er qui sont plus élevés qu’en zone urbaine. En con- çNG HCKV SWG EGVVG HCKDNGUUG PàGUV RCU EQORGPUªG
séquence, alors même que les populations rurales par la consommation des activités économiques,
subsahariennes sont économiquement plus fragiles, communautaires et administratives, plutôt con-
le coût d’accès à l’électricité pour elles est plus élevé. centrée en dehors des périodes de pointe.

A priori, l’iniquité tarifaire devrait être la A cela, s’ajoute un facteur supplémentaire de va-
règle. riabilité du tarif pour les populations rurales  : le
Trois facteurs, déjà évoqués (cf. chapitre 2.1.2.), se contexte géographique. Le tarif, pour une même ca-
cumulent pour expliquer la différence de coûts qui tégorie d’usagers, diffère d’une zone rurale à l’autre
s’opère au détriment du milieu rural  : un nombre en fonction du type d’activités possibles sur le terri-
d’abonnés plus réduit, une grande dispersion de la toire, de son niveau d’enclavement, etc. Avec cet ef-
clientèle, et un facteur de charge* nettement plus fet paradoxal du point de vue du développement hu-
faible, de l’ordre de 25-30 % en milieu rural contre main, et éthiquement inacceptable : plus le territoire
60-70 % en milieu urbain. est enclavé et pauvre, plus l’électricité y est chère.

$SSHOGHSXLVVDQFH bODFRQVRPPDWLRQVHFRQFHQWUHHQVRLU«H
&RXUEHSU«YLVLRQQHOOHSRXUOHYLOODJHGH6DPEDLORHQ*XLQ«H

Puissance
moyenne
en kW
20
Economiques
Communautaires
15 Domestiques

10

0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24

Heures pour une journée type

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 245

Dans le cadre d’un miniréseau rural, la prise en urbain sont faibles, et le montant des redevances
compte de la variabilité des coûts peut conduire est aléatoire.
à adopter deux types de démarche de tarification Par ailleurs, la mise en place d’un mécanisme de
opposés : péréquation tarifaire efficace se heurte à la diver-
çWPG VCTKăECVKQP CF JQE FªăPKG GP HQPEVKQP sité des projets et des situations en milieu rural.
FW EQPVGZVG NQECNa  ce fut longtemps le cas en Cette hétérogénéité accentue la difficulté  : com-
France, et c’est l’approche retenue par les orga- ment choisir une échelle territoriale pertinente et
nes de régulation du secteur électrique dans les concevoir un mécanisme unique adapté ?
pays d’Afrique subsaharienne ; La péréquation locale, fondée sur la solidarité en-
çWPOªECPKUOGFGRªTªSWCVKQPVCTKHCKTGail ga- tre classes d’abonnés, est une solution pour faci-
rantit aux usagers un approvisionnement en liter l’accès à l’électricité de la partie de la popula-
électricité à des tarifs de vente réglementés aux tion la plus défavorisée. Plus simple à mettre en
mêmes conditions économiques pour tous, au ti- œuvre que la péréquation nationale, son instaura-
tre du « service public de l’énergie ». tion fait face à deux obstacles :
çNC TGFKUVTKDWVKQP SWàGNNG QTICPKUG CW DªPªăEG
La péréquation tarifaire locale des plus vulnérables peut susciter de fortes ré-
est une solution intéressante ticences des familles influentes sur un territoire ;
mais complexe à mettre en œuvre. çNGUEQORªVGPEGUGVECRCEKVªUăPCPEK©TGUFGU
Le principe de péréquation tarifaire signifie que GPVTGRTKUGUFà'4&UQPVTCTGOGPVEQORCVKDNGU
FGWZ EQPUQOOCVGWTU C[CPV NG O«OG RTQăN FG avec la gestion d’un mécanisme de péréquation,
EQPUQOOCVKQPUGXQKGPVHCEVWTGTNGO«OGVCTKH même simple et localisé.
SWGNNG SWG UQKV NGWT NQECNKUCVKQP IªQITCRJKSWG Ainsi, le sujet de la tarification électrique est
sur le territoire. Il peut être opéré au niveau na- polémique par nature, sur deux aspects au moins :
tional ou local, à l’échelle d’une portion de terri- le niveau des tarifs et le choix entre tarification
toire (région par exemple). unique et tarification différenciée. Tout dépend de
Souhaitée par les populations rurales, promise la position qu’adoptent les différents intervenants
par les leaders politiques, la péréquation natio- (usagers, entreprises d’électrification et acteurs
nale, étudiée au Sénégal dans le cadre d’une har- publics nationaux et régionaux).
monisation des tarifs de l’électricité, se heurte
à des obstacles tels que sa mise en place est Le choix de la tarification : des
reportée. positions difficilement conciliables.
Un tel mécanisme ne peut fonctionner qu’à deux Dans le cas d’un système électrique individuel
conditions : distribué selon une logique purement marchande
çNGRQWTEGPVCIGFàCDQPPªUWTDCKPUGUVPGVVGOGPV (cf. chapitre 3.2.), la difficulté de la tarification
supérieur à celui d’abonnés ruraux ; est de facto réduite  : de nombreux facteurs ex-
çNGU EQPUQOOCVKQPU FGU CDQPPªU WTDCKPU GV ternes entrent en ligne de compte (attentes des
les ressources financières issues de leurs re- consommateurs, offres concurrentes, taille du
devances sont élevées. marché, normes à respecter…), mais le prestataire
Or, dans la plupart des pays d’Afrique subsaha- fixe le prix de son service de manière autonome,
rienne, la population est encore majoritairement à l’issue d’un arbitrage essentiellement guidé par
rurale, les consommations électriques en milieu l’objectif de rentabilité. Par ailleurs, en l’absence

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


246 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

d’interdépendance entre usagers, la défaillance Le point de vue des abonnés :


de paiement de l’un d’entre eux ne pénalise pas le juste prix.
l’accès au service du reste de la communauté. Les abonnés urbains, sensibles à leur pouvoir
En revanche, dès lors que le projet relève d’une d’achat, souhaitent des tarifs les plus modérés
logique institutionnelle et pluriacteurs (approche possible ; toute hausse est mal vécue et suscep-
interventionniste) et que l’accès au service est tible de provoquer des réactions violentes (pro-
conditionné par une discipline collective des testations, manifestations).
usagers, l’instauration d’une juste tarification ac- Les ruraux qui n’ont pas encore accès à l’électricité
ceptée et respectée par tous est nécessaire. Ce sont, eux, généralement disposés à payer net-
qui n’est pas évident. Le concepteur d’un miniré- tement plus que le tarif urbain, compte tenu des
seau doit en effet prendre en considération les économies réalisées grâce à l’électricité et de sa
points de vue parfois divergents des différentes valeur d’usage (télécommunications et éclairage
parties prenantes. notamment). De nombreuses enquêtes l’ont mon-
tré (cf. encadré).

Des tarifs élevés et pourtant sous-évalués

En zone urbaine…
/HVWDULIVGHQRPEUHX[SD\VGł$IULTXHVXEVDKDULHQQHVRQWSDUPLOHVSOXV«OHY«VGHVSD\VHQYRLH
GHG«YHORSSHPHQW8QHDXJPHQWDWLRQGHVWDULIVHVWLPSRSXODLUHGłXQSRLQWGHYXHSROLWLTXH
\FRPSULVORUVTXHOHVP«QDJHVFRQVHQWHQW¢SD\HUSRXUGHVVHUYLFHVGł«OHFWULFLW«GHPHLOOHXUH
TXDOLW«3DUH[HPSOH7ZHUHIRXSURIHVVHXUGł«FRQRPLH¢Oł8QLYHUVLW«GX*KDQD  HVWLPHTXH
OHVP«QDJHVGX*KDQD«WDLHQWGLVSRV«V¢SD\HUHQYLURQ86SDUN:KHQPR\HQQHSRXUGHV
VHUYLFHVGł«OHFWULFLW«GHPHLOOHXUHTXDOLW«VRLWHQYLURQbGHVWDULIVDSSOLTX«VDXPRPHQWGH
Oł«WXGH'HP¬PH2VHQL  HVWLPHTXHOHVP«QDJHVQLJ«ULDQVVHUDLHQWSU¬WV¢SD\HUMXVTXł¢
bGHSOXVTXHOHWDULIDFWXHOSRXUGHVVHUYLFHVGHPHLOOHXUHTXDOLW«3RXUWDQWODVRXVWDULŦFDWLRQ
SHUVLVWHGDQVOHVGHX[SD\V

6RXUFHb Banque mondiale, « Africa’s Pulse : une analyse des enjeux façonnant l’avenir économique de l’Afrique » (Washington,
D.C, 2018).

… comme en zone rurale.


/łHQTX¬WHPHQ«HHQGDQVOHFDGUHGHODSU«SDUDWLRQGXSODQGLUHFWHXUGHOł«OHFWULŦFDWLRQ
UXUDOHDX&DPHURXQDXSUªVGHXVDJHUVSRWHQWLHOV UHSU«VHQWDQWFKDFXQXQHXQLW«IDPLOLDOH
GHOłRUGUHGHSHUVRQQHVHQPR\HQQH PRQWUHTXHOHVFRQVRPPDWHXUVUXUDX[SHWLWVHWPR\HQV
VRQWprêts à payer deux à trois fois plus que les usagers urbains.

6RXUFHb Plan directeur d’électrification rurale du Cameroun, 2001

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PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 247

la volonté de paiement des usagers, et qu’une


augmentation mal ajustée ou mal comprise aug-
Chiffres-clé
mente leur risque. L’optimisation de la tarifica-
tion, jointe à l’obtention d’éventuelles subventions
6HORQOHVFDW«JRULHVVRFLDOHV¢ŏ d’investissement (cf.  paragraphe suivant), est
VRQWFRQVDFU«V¢OłDFKDWGHERXJLHVGH l’une des clés de cette rentabilité.
S«WUROHODPSDQWRXGHSLOHV«OHFWULTXHV
UHSU«VHQWDQWGH¢bGXEXGJHW
mensuel familial.

6RXUFHVb Etudes Noria, Fondation Energies pour le


Monde.
La subvention n’est
pas indispensable
mais elle favorise
XQH«OHFWULŦFDWLRQ
Néanmoins, si les ménages ruraux sont disposés
à payer cher l’électricité (plutôt que de ne pas y
de qualité.
avoir accès), ils connaissent le prix payé par les
familles raccordées au réseau électrique dans 'DQVFHUWDLQHVORFDOLW«VDIULFDLQHVGHV
d’autres localités. S’ils doivent payer nettement VHUYLFHVVHVRQWG«YHORSS«VGHID©RQ
plus cher qu’elles pour un même service, il fau- DXWRQRPHVDQVDXFXQW\SHGHVXEYHQWLRQ
dra leur expliquer pourquoi. Pour que le niveau de /ł«OHFWULFLW«HVWYHQGXH¢XQQR\DX
tarif soit accepté et que le service soit respecté, UDSSURFK«GHFRQVRPPDWHXUV¢GHVSUL[
la transparence des coûts est de rigueur et sup- WUªV«OHY«VGHOłRUGUHGHb)&)$ VRLW
pose, de la part du concepteur, avec le soutien ŏ SDUSRLQWOXPLQHX[HWSDUPRLVHW
des autorités locales, une argumentation étayée OHVXVDJHUVVRQWVDWLVIDLWV
et compréhensible par les usagers.
0DLVOHVLQVWDOODWLRQVVRQWWUªVVRPPDLUHV
Le point de vue des exploitants : QHU«SRQGHQW¢DXFXQHQRUPHGH
la rentabilité. V«FXULW«HWOHV\VWªPHHVW¢ODPHUFLGHV
Pour les opérateurs, concessionnaires ou fer- SUHPLªUHVSDQQHV8QH«OHFWULŦFDWLRQ
miers, la rentabilité guide leurs investisse- DYHFGHVVWDQGDUGVSURIHVVLRQQHOVQHSHXW
ments. Compte tenu des autres opportunités JXªUH¬WUHHQYLVDJ«HGDQVFHVFRQGLWLRQV
d’investissement, ces sociétés attendent : ŦQDQFLªUHV
çWP VCWZ FG TGPVCDKNKVª KPVGTPG
64+  ăPCPEKGT FG
l’ordre de 15 % ; et/ou
çWP TGVQWT UWT KPXGUVKUUGOGPV
41+  KPHªTKGWT ¡
quinze ans, compte tenu des risques propres
aux pays de l’Afrique subsaharienne.
Les entreprises sont conscientes que les tar-
ifs ne peuvent pas dépasser ni la capacité ni

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


248 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

La tarification, une affaire politique tarifs sont-ils acceptables pour les distributeurs
Les autorités publiques, soucieuses de défendre d’électricité et les abonnés en milieu rural ? Est-il
les usagers, influent sur les tarifs. Par la mise en admissible que les promoteurs de projets pro-
place de subventions ou d’allègements de la fis- posent leurs propres tarifs ? Comment juger que
calité, elles cherchent à favoriser les investisse- ces tarifs sont appropriés ? Pour répondre, les or-
ments privés dans l’ERD. ganismes de régulation du secteur électrique se
Le mécanisme de subvention, qui a pour autre basent sur l’analyse des business plans des inves-
avantage de tirer la qualité des projets vers le haut tisseurs et exploitants privés, qui semblent les sa-
(cf. encadré), peut cependant créer des concur- tisfaire. Mais force est de constater que la réponse
rences voire des conflits entre projets du fait de de la population (peu d’abonnés, faibles consom-
son hétérogénéité. En effet, les subventions peu- mations) est rarement à la hauteur des simulations.
vent couvrir de 30 à 80 % des investissements ini-
tiaux, en fonction du territoire considéré et de son Il faut souligner que l‘implication, encore récente,
potentiel de développement économique. d’acteurs privés dans un secteur traditionnelle-
ment public est dénigrée par certains leaders
Par ailleurs, les pouvoirs publics veillent, avec plus d’opinion, qui défendent la généralisation des
ou moins d’autorité selon les pays, au respect grilles tarifaires en vigueur en milieu urbain et ne
de certains principes de tarification. Différents tiennent compte ni des situations financières des

/DU«JXODWLRQGHODWDULŦFDWLRQGXVHUYLFHSRXUOHV
PLQLU«VHDX[bOłH[HPSOHGX1LJHULDHWGX5ZDQGD
/D&RPPLVVLRQGHU«JOHPHQWDWLRQGHOł«OHFWULFLW«GX1LJHULD 1(5& U«JOHPHQWHOHVWDULIVGHV
PLQLU«VHDX[FRQVWUXLWVSDUGHVFRPSDJQLHVLQG«SHQGDQWHVD\DQWXQHFDSDFLW«GHGLVWULEXWLRQ
VXS«ULHXUH¢N:/łREMHFWLIHVWGł«WDEOLUGHVWDULIVIRQG«VVXUOHVFR½WVFRPSWHWHQXGHVFLEOHV
SRXUOHVSHUWHVWHFKQLTXHVHWFRPPHUFLDOHV(QFHTXLFRQFHUQHOHVPLQLU«VHDX[D\DQWXQH
FDSDFLW«GHGLVWULEXWLRQLQI«ULHXUH¢N:OD&RPPLVVLRQDFFHSWHUDGHVWDULIVQ«JRFL«VDYHFOD
FRPPXQDXW«
$OłLQVWDUGX1LJHULDOH5ZDQGDUHTXLHUWGHVWDULIVUHŧ«WDQWOHVFR½WVSRXUOHVPLQLU«VHDX[
&HSHQGDQWXQSURPRWHXUGHPLQLU«VHDX[QHGRLWSDVREWHQLUOłDSSUREDWLRQGXU«JXODWHXUSRXU
FHVFDOFXOVGHFR½WDYDQWOłHQWU«HHQYLJXHXUGHVHVWDULIVGHG«WDLO/HVU«JOHPHQWDWLRQVLQGLTXHQW
FHTXłLOIDXWLQFOXUHGDQVOHFDOFXOGHVFR½WV/HU«JXODWHXUVHU«VHUYHOHGURLWGłH[DPLQHUOHVFDOFXOV
GHFR½WGXSURPRWHXU¢QłLPSRUWHTXHOPRPHQW

6RXUFHVb
Bernard Tenenbaum, Chris Greacen, et Dipti Vaghela, « Mini-Grids and Arrival of the Main Grid : Lessons from Cambodia, Sri
Lanka, and Indonesia » (Washington, D.C : Banque mondiale, 2018).
Banque mondiale, « Africa’s Pulse : une analyse des enjeux façonnant l’avenir économique de l’Afrique » (Washington, D.C,
2018).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 249

sociétés nationales d’électricité ni des soutiens


qu’elles reçoivent de l’Etat pour leur survie. En 0DOLbXQHJULOOH
conséquence, la plupart des responsables poli- tarifaire nationale
tiques d’envergure nationale soutiennent la mise qui s’impose à tous
en place de tarifs bas et la péréquation tarifaire
entre zones urbaines et rurales, position reprise $XFRXUVGHODSUHPLªUHG«FHQQLH
par leurs homologues régionaux et communaux des années 2000, le Mali a soutenu
(cf. encadré). le développement de projets
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«H
Cependant, la situation évolue à la faveur du mou- concédés sur appel d’offres à des
vement de décentralisation, qui s’opère lentement HQWUHSULVHVSULY«HVTXLŦ[DLHQWHOOHV
mais sûrement. Le transfert progressif de com- mêmes leur grille tarifaire.
pétences, l’émergence du concept de territoire
et l’accès à un service électrique de qualité cons- /HSD\VHVWUHYHQXVXUFHWWHDSSURFKH
tituent autant d’opportunités de développement HQVROOLFLWDQWODVRFL«W«SXEOLTXH
économique pour les collectivités territoriales. Gł«OHFWULFLW«(OHFWULFLW«GX0DOLSRXUTXłHOOH
Dès lors, un nouveau dialogue de proximité pour- UHSUHQQH¢VRQFRPSWHOłH[SORLWDWLRQGHV
rait s’engager entre maîtres d’ouvrage et exploi- LQIUDVWUXFWXUHV«OHFWULTXHVGHVFKHIVOLHX[
tants, qui permettrait des aménagements tari- GHFHUFOHVLQLWLDOHPHQWFRQF«G«HV¢GHV
faires consensuels. FRQFHVVLRQQDLUHVSULY«V'HSXLVORUVFłHVW
ODJULOOHWDULIDLUHGHODVRFL«W«QDWLRQDOHTXL
Le préfinancement des coûts de VłDSSOLTXH
raccordement fait tomber la barrière
à l’accès. /HVUDLVRQVGHFHFKDQJHPHQWGHVWUDW«JLH
En ERD, les coûts initiaux de raccordement VRQWGLYHUVHV&łHVWDYDQWWRXWXQFKRL[
représentent un obstacle majeur à l’accès à SROLWLTXHSHUPHWWDQWGHU«DOLVHUOD
l’électricité, quel que soit le service propo- S«U«TXDWLRQVXUOłHQVHPEOHGXWHUULWRLUHDX
sé. De 20  à 50 €/abonné1 selon les contrats WLWUHGXVHUYLFHSXEOLFXQHUHYHQGLFDWLRQ
d’abonnement, ils excluent une frange importante VRFLDOHIRUWHGHV0DOLHQV&łHVWDXVVLXQFKRL[
de la population, que la variété des contextes ne WHFKQLTXHbODVRFL«W«QDWLRQDOHSDUD°WSOXV
permet pas d’estimer précisément. HIŦFDFHSRXUIDLUHIRQFWLRQQHUFRUUHFWHPHQW
Raccordement au miniréseau ou installation HWGXUDEOHPHQWOHVV\VWªPHV(5'H[LVWDQWV
d’un système solaire individuel à l’intérieur de TXHOHVRS«UDWHXUVTXLOHVRQWFU««VHWTXL
l’habitation de l’usager peuvent être pris en charge ELHQVRXYHQWVRQWHQGLIŦFXOW«ŦQDQFLªUH
sur le budget du promoteur du projet. Ces frais de
raccordement sont ensuite fractionnés afin de les
rendre « indolores » pour l’usager et refacturés par
le biais d’une composante tarifaire périodique qui
tient compte, par exemple :

1. Source : Fondation Energies pour le Monde.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


250 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

Parole de professionnel
Mamadou Saidou Diallo

Selon vous, quelles sont les principales difficultés rencontrées par les développeurs
de miniréseaux dans le contexte guinéen ?

mb,OIDXWWRXWGłDERUGSU«FLVHUTXHOHP«WLHUGłRS«UDWHXUGHPLQLU«VHDX[HVWU«FHQWHWHQFRUH
LQVXIILVDPPHQWG«YHORSS«HQ*XLQ«H6HXOVTXHOTXHVRS«UDWHXUVH[HUFHQWDFWXHOOHPHQW
GDQVOHVLOODJHGHVSURMHWVGł(5'U«DOLV«VHQWUHHWDYHFOłDSSXLGX%XUHDX
Gł«OHFWULILFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«HGHYHQXGHSXLVOł$*(5/HG«YHORSSHPHQWGHV
PLQLU«VHDX[VHKHXUWH¢SOXVLHXUVGLIILFXOW«V
/HSUL[PR\HQWUªVEDVGHOł«OHFWULFLW«GXU«VHDXSXEOLFTXLYDULHHQWUHHWGROODU
N:KHQIRQFWLRQGXW\SHGHFOLHQWS«QDOLVHOłDSSOLFDWLRQGHVWDULIVGHVPLQLU«VHDX[
J«Q«UDOHPHQWGROODUN:KPLQ OHVXVDJHUVGł(5'D\DQWVRXYHQWWHQGDQFH¢FRPSDUHU
OHVWDULIVGHVGHX[V\VWªPHVb
Le manque de professionnalismeDFRQGXLWSOXVLHXUVRS«UDWHXUVVRXYHQWUHVVRUWLVVDQWV
GHVYLOODJHV¢SULYLO«JLHUOHFDUDFWªUHVRFLDOGXVHUYLFHVXUFHOXLEXVLQHVVSOXW¶WTXHGH
UHFKHUFKHUOHPHLOOHXU«TXLOLEUHHQWUHOHVGHX[
/DWUªVIDLEOHLPSOLFDWLRQDFWXHOOHGXVHFWHXUEDQFDLUHQHSHUPHWVRXYHQWSDVDX[RS«UDWHXUV
GłDFF«GHUDX[FU«GLWVGHILQDQFHPHQWGHVPLQLU«VHDX[Gł(5'GRQWLOVRQWEHVRLQb}

Mamadou Saidou Diallo, ingénieur électro-énergéticien de formation, travaille depuis quinze ans
dans le domaine du développement de l’électrification rurale en Guinée ;
il est girecteur général adjoint de l’Agence guinéenne d’électrification rurale (AGER).
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

çFGNCFKUVCPEGCWTªUGCWQWFWV[RGFGMKVUQNCKTG pérennité des installations intérieures ; les travaux


pour le raccordement ; et pris en charge par l’usager conduisent souvent à
çFW PQODTG FG RK©EGU FG RQKPVU NWOKPGWZ GV FG des installations électriques approximatives, met-
prises pour les installations intérieures. tant en danger personnes et biens, et un contrôle
Cette option de préfinancement des travaux sup- avant mise sous tension s’avère indispensable.
pose une avance de trésorerie et complexifie la
tarification, mais, pour l’opérateur, elle présente Les solutions numériques facilitent
un double avantage économique et opérationnel : le paiement des services électriques.
çGNNGªNCTIKVNCDCUGFàCDQPPªUIT£EG¡NàªNKOKPCVKQP A l’instar des mécanismes existants en Europe, le
de la barrière que constitue le paiement du coût post-paiement a longtemps été le principe de paie-
de raccordement ; ment des services électriques le plus répandu : les
çGNNG ICTCPVKV NC EQPHQTOKVª NC UªEWTKVª GV NC consommations sont calculées par l’opérateur et

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 251

réglées par l’usager sur la base d’une facturation technologies de comptage à distance et de
mensuelle. Quoique peu coûteux matériellement prépaiement par téléphone portable permettent
car limité à un simple compteur ordinaire, le post- de limiter les risques précités et favorisent un équili-
paiement s’avère économiquement mal adapté au bre, voire un excédent des comptes d’exploitation
contexte rural africain : des opérateurs. Ceux du PAYG, appliquant le
çNG EQNNGEVGWT FQKV GĂGEVWGT FG PQODTGWUGU prépaiement aux systèmes solaires individuels,
visites auprès des usagers, dont les taux ont montré la voie. Cette solution est en train de
d’impayés restent élevés ; se généraliser rapidement à l’ensemble des sché-
çNC OKUG GP RNCEG FàWP FKURQUKVKH FG RCKG- mas de fourniture de services électriques (cf. cha-
OGPVUSWQVKFKGPUQWJGDFQOCFCKTGUGUVVTQR pitre 2.3.1.), qu’ils relèvent d’une approche interven-
onéreuse au regard des sommes collectées. tionniste ou libérale. }
Cette situation n’est pas une fatalité. Les nouvelles

Parole de professionnel
Olivier Oriol

Le marché du comptage prépayé pour les miniréseaux ruraux est en pleine explosion.
Comment une société comme Michaud se positionne-t-elle étant donné son expérience
incontestée comme gestionnaire d’énergie ?

mb8QOREE\LQJWUªVIRUWD«W«U«DOLV«SRXULPSRVHUOHPRGªOHGXSU«SDLHPHQWSD\DV\RXJR
HQ$IULTXH&HV\VWªPHHVWSHUWLQHQWHQYLOOHPDLVSDVQ«FHVVDLUHPHQWDXSULPRDFF«GDQW
¢Oł«QHUJLHHQ]RQHUXUDOH'DQVGHVYRORQW«VGł«TXLW«SRXUOHVSRSXODWLRQVGłXQP¬PHSD\V
GHQRPEUHX[SD\VHQG«YHORSSHPHQWLPSRVHQWFHVFK«PDTXHOVTXHVRLHQWOHVPR\HQV
GHVDERQQ«VOHVPRGHVGHSURGXFWLRQGHOł«QHUJLHHWF0DLVFRPPHQRXVOHVDYRQVOHV
VFK«PDVXUEDLQVQHVRQWSDVWRXMRXUVWUDQVSRVDEOHVDXPRQGHUXUDO
&KH]0LFKDXGQRWUHSKLORVRSKLHHVWGHVHSRVLWLRQQHU¢ODIRLVGXF¶W«GHOłDERQQ«HWGHFHOXL
GHOłRS«UDWHXUDILQGHJDUDQWLU¢FHGHUQLHUXQEXVLQHVVSODQILDEOHHWFU«GLEOH1RXVDYRQV
FRQ©XOHJHVWLRQQDLUHGł«QHUJLHSRXUG«YHORSSHUOHSDLHPHQWHQIRUIDLWSU«SD\«&HV\VWªPH
HVWLG«DOSRXUOHVPLQLU«VHDX[RIIJULGFDULOJDUDQWLWXQHFRQVRPPDWLRQGł«QHUJLHFRQVWDQWH
WRXWHOłDQQ«HHWGHVUHYHQXVIL[HVHWU«JXOLHUVSRXUOłRS«UDWHXU&¶W«DERQQ«ODIDFWXUH
Gł«OHFWULFLW«PHQVXHOOHHVW«WDEOLHORUVGHOłDERQQHPHQWHWHOOHHVWODP¬PHWRXVOHVPRLV,OQł\
DGRQFSDVGHPDXYDLVHVVXUSULVHVRXGHG«FRQQH[LRQVLQWHPSHVWLYHV&HW\SHGHIDFWXUDWLRQ
HVWGLGDFWLTXHSRXUOHVQRXYHDX[DERQQ«VHWVLPSOH¢J«UHUSRXUOHVRS«UDWHXUVb}

Olivier Oriol, spécialiste des pays en développement depuis dix ans, travaille actuellement sur les
thématiques de l’accès à l’énergie en milieu rural en Afrique ;
il est responsable Afrique chez Michaud Export.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

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252 - PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX

[ Partie 2 ]
Conclusion
L’électrification rurale se fera par la généralisation des
solutions décentralisées, en relais de l’extension de réseau.
C’est ce qui s’est passé dans de nombreux pays industrialisés
au cours du XXe siècle et c’est le sens de l’histoire en Afrique
subsaharienne.

Les récentes révolutions dans les domaines du numérique et


du photovoltaïque, qui ne sont pas encore terminées, jointes à
l’impératif de transition écologique, permettent d’entrevoir une
décentralisation énergétique accélérée, à moindre coût et inclusive.
Mais cette accélération ne verra le jour qu’à plusieurs conditions
cumulatives : une évolution des modalités de financement des
projets, le maintien des aides à l’investissement, la mise en cohérence
des stratégies des bailleurs de fonds, une coordination intelligente
entre acteurs privés et publics et entre opérateurs à but lucratif et
organisations du développement, et, enfin, la mise en place d’une
réelle décentralisation dans chaque pays.

Pour relever le défi, les acteurs ne peuvent donc pas compter


sur le seul accélérateur technologique. Ils doivent également tirer
les leçons des expériences conduites depuis plus de cinquante
ans par les pionniers de l’électrification rurale décentralisée, qui se
rejoignent presque toutes en un commandement : ne pas négliger
le facteur humain.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 2 - ÉTAT DES LIEUX - 253

Gestion d’un écosystème aux multiples parties prenantes, nécessité


de l’approche sociologique, tarification sur mesure, casse-tête de la
fin de vie des équipements… Ces différentes contraintes, pour autant
qu’on cherche à ce que le service rendu soit accessible à tous et
couvre tous les usages utiles, rendent la standardisation technique
très difficile.

On constate d’ailleurs une grande diversité de solutions en présence


sur le sol subsaharien, véritable laboratoire de l’accès à l’électricité
hors réseau. La troisième partie de cet ouvrage est consacrée à une
présentation méthodique des principales solutions décentralisées
rencontrées sur le terrain et à l’évaluation de leur capacité à
contribuer à élargir l’accès à l’électricité en Afrique subsaharienne.

Des solutions aux contours juridiques encore flous, entre délivrance


d’un service de base et fourniture de biens d’équipements. Un
enjeu quasi philosophique, qui affleure nécessairement quand on
s’intéresse aux atouts et aux limites de chacune de ces solutions
pour réduire la fracture énergétique. La partie 3 de l’ouvrage dresse
justement ce panorama.

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254 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Info

Retour de terrain

'«ŦQLWLRQ

Chronologie

Chiffres clés

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 255

[ Partie 3 - Cahier technique ]

De la lampe portable au
miniréseau, le territoire
subsaharien est devenu
un laboratoire de
solutions décentralisées.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


256 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

mb/łK«ULWDJHKXPDQLVWHGHVSUHPLHUV
DFWHXUVGHOł«OHFWULILFDWLRQUXUDOH
FRQGXLWORJLTXHPHQW¢WUDLWHUOHV
WHFKQRORJLHVFRPPHGHVRXWLOV
&HSHQGDQWOHVWHFKQRORJLHVLPSRVHQW
SDUIRLVOHXUVFRQGLWLRQVFHTXLPRGLILH
OHVID©RQVGHSHQVHUHWREOLJH¢
HQFRPSUHQGUHHQSURIRQGHXUOHV
P«FDQLVPHVVS«FLILTXHVb}

Bernard Equer, ancien directeur


de recherche au CNRS, spécialiste
de l’énergie solaire

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 257

Introduction
Sur les plans technique et opérationnel, force est de constater
que le domaine de l’accès à l’électricité hors réseau est
innovant et dynamique, mais qu’il est aussi fragmenté
et désorganisé. C’est sans doute le propre des secteurs
en mutation.

Encouragés par des circonstances technologiques, politiques,


sociales et économiques favorables, des acteurs de plus en plus
nombreux investissent le champ de l’électrification rurale en ordre
dispersé, notamment avec des solutions reposant sur la technologie
photovoltaïque (3.1.). Derrière la multiplicité de ces solutions se
cachent, selon leurs promoteurs, des logiques économiques et des
approches sociales parfois antagonistes.

Les chapitres suivants tentent d’en restituer la diversité, en


regroupant différents schémas qui coexistent selon trois périmètres :
l’électrification individuelle domestique (3.2.), l’électrification des
infrastructures communautaires (3.3.) et l’électrification collective
(3.4. et 3.5.).

Les principales solutions d’électrification évoquées dans cette partie


figurent sur la planche dessinée panoramique située au centre
de l’ouvrage. Chacune de ces solutions fait également l’objet d’un
schéma détaillé en tête du chapitre concerné.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


258 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.1.
En l’absence de politique
sectorielle, de multiples
solutions coexistent,
reposant notamment
sur le photovoltaïque.
On l’a déjà évoqué, des acteurs, notamment venus du secteur
privé, ajoutent de nouvelles pièces au puzzle de l’électrification
hors réseau, qui s’est considérablement densifié en quelques
années.

Dans des pays où les politiques d’électrification rurale sont peu


effectives, et en l’absence de stratégie internationale ou panafricaine,
aucune des parties en présence ne peut développer de vision
holistique « intelligente » de l’ensemble des opérations réalisées sur
un territoire. Tous les services électriques mis en œuvre permettent
à une partie de la population rurale d’améliorer ses conditions de
vie, mais leur impact est évidemment moindre que si leurs porteurs
joignaient leurs forces pour penser l’électrification d’un territoire et
combiner leurs solutions de manière coordonnée et planifiée (3.1.1.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 259

Un point commun se dégage malgré tout de cet ensemble


hétéroclite de solutions : l’omniprésence de la technologie solaire,
avantagée par sa simplicité et son accessibilité,
dont quelques fondamentaux techniques sont rappelés
dans ce chapitre (3.1.2).

© Fondation Energies pour le Monde

En zone rurale, on trouve des solutions hétéroclites dans un même village.

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260 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.1.1.
Le panorama des solutions d’électrification
rurale décentralisée est très diversifié.
De la lampe solaire portable au réseau intercon- çNGU RQNKVKSWGU PCVKQPCNGU FàªNGEVTKăECVKQP GV
necté, la palette de solutions d’électrification NGWTU QTICPGU KPUVKVWVKQPPGNU RQTVªU RCT NGU
rurale est très large  ; et le champ d’action, en KPUVKVWVKQPU ăPCPEK©TGU KPVGTPCVKQPCNGU PG
l’absence de régulation et de coordination, est UCXGPV RCU EQPXCKPETG après beaucoup de
presque complètement ouvert. promesses non tenues (cf. chapitre 1.2). De nom-
Ces solutions, qu’elles soient disponibles sur breux acteurs, au premier chef desquels les popu-
le marché ou mises en œuvre dans un cadre lations non desservies, n’attendent plus grand-
institutionnel, répondent à la plupart des be- chose de ces institutions et se tournent logique-
soins des populations. Mais leur juxtaposition ment vers les offres présentes sur le terrain ;
aléatoire sur un même territoire, sans vision ni çNGU TªEGPVGU ªXQNWVKQPU VGEJPQNQIKSWGU QPV
cohérence d’ensemble, produit parfois des ef- TGPFW RQUUKDNG NàªOGTIGPEG FG PQWXGCWZ
fets pervers. OQF©NGUVGEJPKSWGUGVªEQPQOKSWGU (cf. cha-
pitre  2.3.1.) permettant à l’électricité d’atteindre
Toutes les conditions sont réunies des zones rurales jusque-là inaccessibles, grâce
pour favoriser un foisonnement de à des systèmes simples et abordables. L’offre est
solutions sur le « marché » de l’accès là, elle rencontre la demande ;
à l’électricité hors réseau. çNGU OCLQTU FG NàKPFWUVTKG FG NàªPGTIKG GV NGU
Plusieurs paramètres, déjà évoqués, se combi- UVCTVWR FW PWOªTKSWG UG UQPV GORCTªGU FW
nent pour expliquer la multiplication des solutions FQOCKPG faisant de fait de l’électrification rurale
décentralisées par énergies renouvelables sur les décentralisée une opportunité marchande (cer-
territoires, et notamment celles portées par des tains parlent même de champ de bataille1). Elles
acteurs non institutionnels : ont pour elles leur puissance économique, leur
çNC FGOCPFG GP ªNGEVTKEKVª FW EQPVKPGPV CH- capacité d’investissement et d’innovation, leur
TKECKPGUVGPEQPUVCPVGRTQITGUUKQP et il sera agilité, et entraînent dans leur sillage des inves-
très difficile d’y répondre ; en cause, une crois- tisseurs dont l’attention était jusqu’alors inac-
sance démographique bien supérieure à la vi- cessible. La diffusion massive des solutions s’en
tesse de développement des infrastructures trouve facilitée ;
électriques (cf. chapitre 1.1.1.) et des besoins qui çGPăP NGU RQNKVKSWGU FàCKFG KPVGTPCVKQPCNG
suivent la courbe exponentielle de la diffusion UQWVKGPPGPV NàCEE©U ¡ WPG ªNGEVTKEKVª la OQF-
de la téléphonie mobile et des solutions numéri- GTPG FWTCDNG GV CDQTFCDNGa | (selon la for-
ques liées (cf. chapitre  1.1.3.). Tandis que cer- mule consacrée par les ODD)  : elles donnent la
tains s’inquiètent du creusement des inégalités
sociales qu’induit cette demande inassouvie,
d’autres y voient une formidable opportunité 1. Aurélien Bernier, « Batailles commerciales pour éclairer l’Afrique: un
marché de l’électricité qui suscite bien des convoitises », Le Monde
de marché ; diplomatique, 2018.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 261

priorité aux énergies renouvelables, accordant Manque d’harmonisation, absence de planification


une attention et des moyens de plus en plus et faiblesse de la concertation ont une autre con-
conséquents aux solutions dites « innovantes », séquence : les usagers, rarement considérés dans
souvent portées par des acteurs privés, sou- toutes leurs dimensions (c’est-à-dire leurs besoins
vent synonymes d’investissements privés. Les exprimés mais aussi leur environnement), peinent
banquiers du développement sont évidemment à trouver des repères. Dès lors, les messages que
sensibles aux discours de ceux qui affirment portent certains acteurs, notamment les ONG (sur
que l’électrification rurale peut être viable sans la notion de service électrique, sur les droits des
subvention. consommateurs ou sur les obligations des fournis-
seurs de solutions) sont difficilement audibles.
La dynamique actuelle se
déploie largement hors du cadre Les solutions présentées ci-
institutionnel. après sont classées en fonction
La multiplication des acteurs privés proposant du périmètre d’usage du service
des schémas d’électrification rurale hors réseau électrique.
semble échapper au contrôle institutionnel. En ef- Les chapitres qui suivent décrivent les principaux
fet, ces nouveaux acteurs interviennent souvent modèles d’électrification hors réseau observés
sans concertation avec les pouvoirs publics, dans sur le terrain. Etant donné leur nombre et la plura-
un contexte où les cadres réglementaires sont lité des usages, le panorama est non exhaustif et il
encore en gestation. Par ailleurs, certains d’entre procède d’un choix de classification nécessaire-
eux, prioritairement guidés par les perspectives ment imparfait.
de profit, sont indifférents aux principes qui sous- Analysés sous différents angles, besoins cou-
tendent un projet d’accès à l’électricité au service verts, promoteurs des solutions, modèles
du développement humain. Ainsi, de nouveaux économiques sous-jacents, cadre institutionnel,
concepts, qui, certes, répondent à une certaine forces et limites…, les solutions recensées sont
partie de la demande, se généralisent sans garde- présentées en trois catégories de schémas, tous
fous sur le territoire rural africain. susceptibles d’avoir plusieurs déclinaisons ou
combinaisons entre eux :
Certains voient dans la multiplicité des schémas çNGU UEJªOCU FàªNGEVTKăECVKQP KPFKXKFWGNU FQ-
d’accès à l’électricité une conjugaison utile de OGUVKSWGUa  systèmes photovoltaïques auto-
réponses adaptées à des contextes différents. En nomes domestiques, équipements solaires por-
réalité, cette complémentarité reste le plus sou- tables, systèmes solaires individuels pay as you
vent théorique, dans la mesure où les acteurs en go (PAYG) ;
présence ne partagent pas un même diagnostic
territorial, ni ne se coordonnent dans l’exécution
de leurs projets respectifs. Comme le montre
l’exemple en encadré, plusieurs schémas dispa- 2. A noter que cette situation de cohabitation de solutions diverses
a été celle du développement de l’ERD en milieu rural français.
rates, voire contradictoires, d’électrification peu- Par exemple, dans le département du Lot, il y avait avant 1940 plus
vent coexister sur un même territoire2. d’une centaine d’entreprises d’électrification avec des solutions
techniques et des tarifs différents. Cette cohabitation des
technologies et des tarifs est probablement un passage obligé du
développement de l’électrification : on apprend en marchant.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


262 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

© Fondation Energies pour le Monde

Vue aérienne de Kouramangui en Guinée, on peut y voir :des kits solaires, des lampadaires solaires et un miniréseau

çNG ECU URªEKăSWG FG NàªNGEVTKăECVKQP FGU KP- %GVVG RTªUGPVCVKQP PQP GZJCWUVKXG UG XGWV
HTCUVTWEVWTGU RWDNKSWGUa  bâtiments et ouvra- HCEVWGNNG GV UCPU JKªTCTEJKG CPCN[VKSWG Il-
ges publics tels que mairies, écoles, centres de lustré d’exemples, de retours d’expérience et
santé, locaux communautaires, etc., principale- d’entretiens, l’exercice ne vise pas à mettre en lu-
ment électrifiés par système solaire autonome mière telle solution ou tel acteur, mais à brosser
ou microréseau, dans des gammes de puis- le portrait vivant d’un secteur en pleine efferves-
sance plus importantes que celles des disposi- cence, à reconstituer la mosaïque de services aux
tifs individuels ; philosophies souvent différentes, et à refléter ain-
çNGU UEJªOCU FàªNGEVTKăECVKQP EQNNGEVKXGa  sys- si une réalité aux facettes multiples.
tèmes de production d’électricité, et éventuel- En préalable, un rappel technique des principaux
lement de distribution, qui bénéficient totale- ordres de grandeur, terminologies et principes de
ment ou partiellement à un ensemble d’usagers, fonctionnement des systèmes photovoltaïques
comme les plateformes multifonctionnelles, les autonomes est proposé au chapitre suivant. }
kiosques énergie, les nanoréseaux et, bien sûr,
les miniréseaux, dont la complexité justifie un
chapitre dédié.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 263

8QH[HPSOHGHPRVD±TXHGHVROXWLRQV
sur un même territoire

$XVXGGH0DGDJDVFDUGDQVODU«JLRQGHOł$WVLPR$QGUHIDQDOł«OHFWULFLW«HVWSURSRV«HVHORQWURLV
VFK«PDVGLII«UHQWVVXUXQP¬PHWHUULWRLUHUXUDOb
ʼnXQRS«UDWHXUSULY«GLVWULEXHGHOł«OHFWULFLW«SDUminiréseau solaireDXSUL[GHbŏN:KGDQVXQH
FRPPXQHUXUDOHGHTXHOTXHVPLOOLHUVGłKDELWDQWVb
ʼn¢TXHOTXHVNLORPªWUHVSOXVLHXUVKDPHDX[HQFODY«VVł«TXLSHQWSURJUHVVLYHPHQWHQsystèmes
solaires individuels avec PAYGGLVWULEX«VSDUXQHVRFL«W«ORFDOHb
ʼn¢SUR[LPLW«XQHDXWUHORFDOLW«DE«Q«ŦFL«GłXQmbNLRVTXH«QHUJLHb}DYHFOłDSSXLGłXQH21*
LQWHUQDWLRQDOHSURSRVDQWGHVVHUYLFHV«OHFWULTXHV¢YRFDWLRQVRFLDOH¢WUªVEDVFR½W

&HWWHPRVD±TXHORLQGł¬WUHXQFDVLVRO«VHWURXYH¢XQHWUHQWDLQHGHNLORPªWUHVGHODVRXV
SU«IHFWXUH«OHFWULŦ«HSDUOHU«VHDXGHODVRFL«W«QDWLRQDOHGł«OHFWULFLW«TXLRIIUHXQVHUYLFHFHUWHV
G«JUDG«PDLV¢XQWDULImbVRFLDOb} GHOłRUGUHGHbŏN:K ORLQGHUHSU«VHQWHUVRQFR½WU«HOGH
SURGXFWLRQ
(QFRQV«TXHQFHDXFXQXVDJHUQłHVWVDWLVIDLWHWOHVVROXWLRQVLQGLYLGXHOOHVVHPXOWLSOLHQW
HQUHPSODFHPHQWRXHQFRPSO«PHQWGHVU«VHDX[H[LVWDQWVb
ʼnOHVXVDJHUVGXPLQLU«VHDXVHSODLJQHQWGHSD\HUXQH«OHFWULFLW«GL[IRLVSOXVRQ«UHXVHTXHGDQVOD
VRXVSU«IHFWXUHb
ʼnOHVXVDJHUVGHVV\VWªPHVVRODLUHVLQGLYLGXHOV3$<*U«FODPHQWGHSRXYRLUXWLOLVHUGłDXWUHV
DSSDUHLOVFRPPH¢ODYLOOHRXVXUOHPLQLU«VHDXYRLVLQb
ʼnOHVODPSHVVRODLUHVSRUWDEOHVSURSRV«HV¢XQSUL[PRGLTXHSDUOHmbNLRVTXHb}VHUHWURXYHQWGDQV
OłHQVHPEOHGXWHUULWRLUH\FRPSULVGDQVOHV]RQHV«OHFWULŦ«HV

&RPPHQWXQP«QDJHQRQ«OHFWULŦ«SHXWLOVHIRUJHUXQHFXOWXUH«QHUJ«WLTXHHWGHVSRLQWV
GHUHSªUHMXVWHVWHFKQLTXHPHQWHW«FRQRPLTXHPHQWb"&RPPHQWOłDJHQFHGł«OHFWULŦFDWLRQ
UXUDOHSHXWHOOHDJLUSRXUKDUPRQLVHUOHVUªJOHVb"&RPPHQWOłDXWRULW«GHU«JXODWLRQGXVHFWHXU
«OHFWULTXHSHXWHOOHIDLUHUHVSHFWHUOHVGURLWVHWOHVGHYRLUVGHVGLII«UHQWVDFWHXUVb"

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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264 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.1.2.
Les systèmes photovoltaïques autonomes :
notions techniques de base.
Le panorama des solutions recensées sur le sol, et communément orientées vers l’équateur ;
terrain fait la part belle au photovoltaïque, la çNG RCTE FàCEEWOWNCVGWTU ªNGEVTQEJKOKSWGU
technologie solaire étant, pour des raisons
UVQEMCIG  composé d’une ou plusieurs batte-
techniques et économiques déjà explicitées, ries, permet de restituer l’électricité stockée en
la plus simple à mettre en œuvre en milieu journée pendant la nuit et les périodes de faible
rural, du moins depuis une dizaine d’années ensoleillement. Chaque jour, la batterie subit un
(cf. chapitre 1.1.2.). cycle de charge et décharge plus ou moins pro-
fond. Sa durée de vie dépendra du nombre de
Le rappel technique qui suit vise à donner au cycles et de leurs profondeurs.
lecteur non averti les clés nécessaires à la com- Aujourd’hui, la majorité des batteries vendues
préhension de la technologie sous-jacente aux individuellement sont issues de la technologie
solutions présentées plus loin dans l’ouvrage. plomb/acide, bien que de nouveaux alliages ar-
rivent sur le marché de l’électrification autonome
Rappel de quelques notions (lithium, nickel-hydrure métallique, etc.).
techniques sur les générateurs Les batteries sont le talon d’Achille des généra-
solaires photovoltaïques teurs solaires et l’une des principales causes
autonomes. de défaillance prématurée des générateurs PV
(cf. chapitre 2.3.1.). Elles exigent une attention par-
Le fonctionnement d’un générateur ticulière au moment du dimensionnement, leurs
solaire photovoltaïque autonome. conditions d’utilisation (température, qualité de
Un générateur solaire photovoltaïque est un sys- la régulation, entretien, etc.) devant être connues
tème de production d’électricité fonctionnant à pour apprécier au mieux leur durée de vie :
partir d’un ou plusieurs modules photovoltaïques çNGEQPVTµNGWTFGEJCTIGGVQWFªEJCTIG
TªIW-
(PV) qui convertissent instantanément l’énergie NCVKQP  constitué de composants électroniques,
du rayonnement solaire en électricité. Stockée contrôle les flux d’électricité au sein du généra-
dans un ensemble de batteries électrochimiques, teur. Son rôle principal est de protéger les batteries
cette électricité peut être restituée à l’utilisateur la contre les surcharges et les décharges profondes,
nuit et en période de faible ensoleillement. deux phénomènes qui affectent fortement leur du-
Un générateur photovoltaïque comprend quatre rée de vie. Les systèmes récents offrent par ailleurs
composantes : la production, le stockage, la régu- des fonctionnalités d’affichage et d’alarme pour
lation et la distribution : améliorer la compréhension et la gestion des sys-
çNG EJCOR RJQVQXQNVC°SWG
RTQFWEVKQP  com- tèmes par leurs propres usagers ;
posé d’un ou plusieurs modules qui produisent çNàQPFWNGWT
FKUVTKDWVKQP transforme si néces-
de l’électricité au «  fil du soleil  », est installé sur saire l’électricité produite en courant continu (gé-
des structures fixes ou mobiles en toiture ou au néralement 12, 24 ou 48 V) en courant alternatif*

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 265

(généralement 220 V / 50 Hz). L’électricité sous Les différents types de générateurs so-
forme alternative est celle distribuée par les laires autonomes.
réseaux urbains, les récepteurs électriques Aujourd’hui, il existe une large gamme de généra-
courants et/ou de forte puissance sont con- teurs solaires  : de quelques watts-crêtes (Wc  ;
çus pour fonctionner avec du courant alterna- cf.  encadré) pour les lampes solaires –  on parle
tif. Généralement utilisé dans les générateurs parfois de « nano PV » – à plusieurs centaines de
photovoltaïques de taille significative (à partir kilowatts-crêtes pour certaines centrales solaires
de quelques kWc), l’onduleur permet d’alimenter alimentant des miniréseaux.
des récepteurs conçus pour être raccordés aux Les domaines d’application des générateurs so-
réseaux électriques traditionnels. laires autonomes sont très vastes et peuvent répon-
Pour les petits systèmes, l’électricité est délivrée dre à des besoins en électricité de toute nature. }
en courant continu (cf. encadré), ce qui évite les
pertes de conversion.

6FK«PDGHSULQFLSHGłXQV\VWªPH39DXWRQRPHDYHFVWRFNDJH

6RXUFHb Gérard Moine

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266 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Le watt-crête
'DQVOHGRPDLQHGXSKRWRYROWD±TXHOHZDWWFU¬WH :F HVWOłXQLW«GHU«I«UHQFH,OFRUUHVSRQG¢
XQHVRUWHGHSXLVVDQFH«OHFWULTXHmbQRPLQDOHb}GłXQPRGXOHSKRWRYROWD±TXH(QSUDWLTXHcette
YDOHXUQRUPDOLV«HSHUPHWGHFRPSDUHUOHVFRPSRVDQWVHWGłHIIHFWXHUOHVGLPHQVLRQQHPHQWV
«QHUJ«WLTXHVbXQPRGXOHGH:FUHVWLWXHUDGHX[IRLVPRLQVGł«QHUJLHMRXUQDOLªUHTXłXQPRGXOH
GH:FGDQVGHVFRQGLWLRQVFOLPDWLTXHVLGHQWLTXHV

'HP¬PHTXłXQPRWHXUGHYRLWXUHGHFKHYDX[VHUDHQPHVXUHGHIRXUQLUFHWWHSXLVVDQFH
XQLTXHPHQWVLXQHQVHPEOHGHFRQGLWLRQVWK«RULTXHVVRQWU«XQLHV WHPS«UDWXUHPRWHXUTXDOLW«
GXOXEULŦDQWTXDOLW«GXFDUEXUDQWWHPS«UDWXUHGHOłDLUHWF XQPRGXOH39QHSHXWG«OLYUHU
VDSXLVVDQFHFU¬WHTXHGDQVFHUWDLQHVFRQGLWLRQVRSWLPDOHV(QODERUDWRLUHODQRWLRQGH:F
HVWHVVHQWLHOOHSRXUFDUDFW«ULVHUOHVFHOOXOHVHWOHVPRGXOHVSKRWRYROWD±TXHV(OOHFRUUHVSRQG¢
ODSXLVVDQFH«OHFWULTXHG«OLYU«HSDUXQPRGXOH39GDQVGHVFRQGLWLRQVGłHQVROHLOOHPHQWHWGH
WHPS«UDWXUHQRUPDOLV«HVVXUOHSODQLQWHUQDWLRQDOb
ʼnXQHYDOHXUGHODSXLVVDQFHGXUD\RQQHPHQWVRODLUHGHb:P2b
ʼnXQHWHPS«UDWXUHGHFHOOXOHGHbr&b
ʼnXQVSHFWUHGł«PLVVLRQVRODLUHFRUUHVSRQGDQW¢ODWUDYHUV«HGłXQHFRXFKHHWGHPLHGł«SDLVVHXU
GłDWPRVSKªUHVDQVQXDJH TXHOłRQDSSHOOHOHVSHFWUH$0 

3RXUTXRLFHVYDOHXUVSRXUHQIDLUHXQFDGUHQRUPDWLIb"/HVYDOHXUVTXLRQWFRQVWUXLWODQRUPHGHOD
PHVXUHGHODSXLVVDQFHFU¬WHFRUUHVSRQGHQWGDYDQWDJH¢OłHQYLURQQHPHQWFOLPDWLTXHGHVSD\VGX
1RUGTXł¢FHOXLGHVSD\VGX6XG
8QHSXLVVDQFHGXUD\RQQHPHQWVRODLUHGHb:P2HVWODYDOHXUFRPPXQ«PHQWPHVXU«HVL
OłRQREVHUYHOHVROHLODXPLGLVRODLUHVRXVGHVODWLWXGHVPR\HQQHVGH¢rHQS«ULRGHHVWLYDOH
2QSRXUUDLWGRQFGLUHTXłLOVłDJLUDLWGłXQHSXLVVDQFHVRODLUHmbPD[LPDOHb}REVHUYDEOH&łHVWVRXV
FHVP¬PHVODWLWXGHVTXłXQVSHFWUHVRODLUH$0FRUUHVSRQG¢ODSRVLWLRQGXVROHLOGDQVOHFLHOHQ
MRXUQ«HHWTXłXQHWHPS«UDWXUHGHFHOOXOHGHbr&SHXWVłREVHUYHUSDUWHPSVIURLGHWHQVROHLOO«

([HPSOHb
8QPRGXOHSKRWRYROWD±TXHGH:FLQVWDOO«HQKDXWHPRQWDJQHUHFHYUDU«JXOLªUHPHQWGHV
SXLVVDQFHVGłHQVROHLOOHPHQWGH¢b:P2HWVHUDH[SRV«¢GHVWHPS«UDWXUHVIRUWHPHQW
Q«JDWLYHV,OG«OLYUHUDDLQVLWUªVVRXYHQWGHVSXLVVDQFHV«OHFWULTXHVVXS«ULHXUHV
¢b:DORUVTXHVDSXLVVDQFHFU¬WHHVWGH:F
&HP¬PHPRGXOHLQVWDOO«DX6DKHOHWH[SRV«¢XQIRUWHQVROHLOOHPHQW ¢b:P2
DXPLGLVRODLUH YHUUDVDWHPS«UDWXUHGHVXUIDFHDWWHLQGUHWUªVVRXYHQW¢br&,OUHVWLWXHUDXQH
SXLVVDQFH«OHFWULTXHVRXYHQWOLPLW«H¢b:DORUVTXHVDSXLVVDQFHFU¬WHDIŦFK«HHVWGH:F

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 267

([HPSOHVGHW\SHVGHJ«Q«UDWHXUV39HWK\EULGHV

5«FHSWHXUV Besoins moyens 3XLVVDQFH39 6WRFNDJH Puissance


7\SHGłXVDJH
électriques SDUMRXU K\EULGH EDWWHULH onduleur

Ménage de (FODLUDJH bN:KMRXU :F $K DC


VL[SHUVRQQHV W«O«SKRQH #9GF XQLTXHPHQW
UDGLR79

Boutique (FODLUDJH bN:KMRXU :F $K DC


W«O«SKRQH #9GF XQLTXHPHQW
KLŦIURLG

&\EHUFDI« 9LG«RP«GLD bN:KMRXU :F $K 9$


vidéo KLŦ,QWHUQHW #9GF PRQRSKDV«

'LVSHQVDLUH (FODLUDJHIURLG bN:KMRXU :F $K 9$


de santé W«O«SKRQH #9GF PRQRSKDV«

/DPSDGDLUH (FODLUDJH bN:KMRXU :F $K DC


SXEOLF #9GF XQLTXHPHQW
RX/LLRQ
1LPK

Ecolodge dix (TXLSHPHQWV bN:KMRXU :F $K 9$


EXQJDORZV GRPHVWLTXHV JURXSH #9GF PRQRSKDV«
«OHFWURP«QDJHU GłDSSRLQWN9$

Relais %76V«FXULVDWLRQ bN:KMRXU :F $K DC


télécoms «FODLUDJH JURXSHGH #9GF XQLTXHPHQW
FRPPXQLFDWLRQ VHFRXUVGHN9$

Miniréseau 'LYHUV bN:KMRXU N:FJURXSH $K N9$


de cent GRPHVWLTXH GłDSSRLQWN9$ #9GF WULSKDV«
cinquante FRPPXQDXWDLUH
ménages $*5

+¶SLWDOHQ (TXLSHPHQW bN:KMRXU N:FJURXSH $K N9$


]RQHXUEDLQH VS«FLŦTXH GłDSSRLQW #9GF WULSKDV«
KRVSLWDOLHU N9$

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268 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.2.
Les schémas d’électrification
individuelle démocratisent
l’accès à l’électricité,
sans résoudre l’équation
de la diversité des besoins.
La technologie photovoltaïque permet, à l’inverse des sources
d’électricité conventionnelles, de produire des petites quantités
d’électricité de façon durable, quel que soit le contexte
géographique et climatique.
C’est la particularité qu’exploite un schéma d’électrification visant
les systèmes à usage familial. En pratique, on parle indifféremment
de « kit solaire », de « système solaire individuel » ou de « système
photovoltaïque autonome », en anglais, « solar home system »
(SHS). La dénomination « système solaire individuel » (SSI) sera
retenue.

Ce schéma, qui se diffuse très rapidement, est proposé selon trois


modalités de commercialisation : en vente directe auprès d’un
détaillant (3.2.1.), en abonnement auprès d’un opérateur de pay as
you go (3.2.2.), ou enfin dans le cadre d’un projet concerté (3.2.3.).

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 269

MINIDOSSIER

Quelques éléments clés sur les systèmes


solaires individuels
'ZGORNGUGVQTFTGU mesure de tout type de puissance. Plus les us-
FGITCPFGWTFGU55+ ages sont divers et nombreux, plus une con-
Les observations de terrain suggèrent une clas- ception au cas par cas est nécessaire.
sification en trois groupes de systèmes, selon la Le tableau ci-dessus propose quelques
puissance du ou des modules PV utilisés. ordres de grandeurs (non exhaustifs)
Néanmoins, il faut garder à l’esprit que des d’équipements photovoltaïques disponibles
assemblages de modules PV et de batteries localement en acquisition directe, reprenant
permettent de concevoir des systèmes sur les appellations locales.

([HPSOHVGHV\VWªPHVVRODLUHVYHQGXVGDQVOHVERXWLTXHV
QRQVS«FLDOLV«HV¢0DGDJDVFDU

3HWLWSDQQHDX 0R\HQSDQQHDX *UDQGSDQQHDX

3XLVVDQFH39 ¢:F ¢:F ¢:F

&DSDFLW«GHODEDWWHULH ¢$K 9 ¢$K 9 ¢$K 9

(FODLUDJH/(' (FODLUDJH/('
(FODLUDJH
7\SHGHU«FHSWHXUV UHFKDUJHW«O«SKRQH UHFKDUJHW«O«SKRQH
/('UHFKDUJH
et de services UDGLRSHWLWH79 UDGLR79G«FRGHXU
W«O«SKRQH
OHFWHXUYLG«R VDWHOOLWHPXOWLP«GLD

Service électrique
moyen équivalent
¢b:KMRXU ¢b:KMRXU ¢b:KMRXU
sous ensoleillement
¢bN:KP2MRXU

3UL[GłDFTXLVLWLRQPR\HQ
HQ$IULTXHGHOł2XHVW ¢bŏ ¢bŏ ¢bŏ
PDW«ULHODVLDWLTXH

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270 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

2TKPEKRGFGHQPEVKQPPGOGPV 'PVTGVKGPGVFWTªG
FàWP55+ FGXKGFàWP55+
En sortie d’un SSI correctement Fonctionnant avec peu d’entretien, le SSI
dimensionné, installé et utilisé, l’électricité présente un point de faiblesse principal  : la
est disponible 24  heures sur 24 et 7 jours batterie. Alors que les marques et modèles
sur 7. La quantité d’électricité utilisable se comptent par centaines, la qualité des bat-
chaque jour est logiquement corrélée à la teries vendues sur le marché africain est ex-
quantité d’électricité produite par le champ trêmement variable. Dans la plupart des cas,
photovoltaïque. Plus celui-ci est grand, plus il est impossible pour l’acheteur de vérifier les
la journée est ensoleillée, plus la quantité performances annoncées  : aucune garan-
d’électricité disponible sera importante, du tie n’est proposée par le vendeur, ni aucune
moins si cet excédent a été correctement norme imposée par le régulateur.
stocké dans la batterie d’accumulateur. Dépendant non seulement de la qualité de
Un système solaire individuel doit donc être fabrication du produit mais aussi des condi-
conçu et dimensionné en intégrant les trois tions de stockage et d’utilisation, la durée de
paramètres suivants : vie des batteries de ce type de système peut
çNGU DGUQKPU SWQVKFKGPU FG NàWUCIGT FG n’être que de quelques mois et n’excède que
électricité (qui se traduisent graphiquement très rarement trois ans.
par une « courbe de charge journalière ») ; La Banque mondiale estime que 90  mil-
çNàGPUQNGKNNGOGPV FW UKVG [ EQORTKU UC lions de SSI étaient en service à l’échelle
saisonnalité ; mondiale en 20171. Sur le terrain, coexis-
çWP UVQEMCIG UWąUCPV RQWT EQWXTKT NGU DG- tent majoritairement trois types de solu-
soins en soirée et dans les périodes de tions d’électrification par SSI, proposant une
mauvais temps prolongé. couverture variable des usages, et procé-
dant de logiques d’acquisition et de distribu-
tion différentes :
çNGU ªSWKRGOGPVU CESWKU FKTGEVGOGPV RCT
3RXUDOOHUSOXVORLQ
l’usager auprès d’un revendeur local, éven-
/łRXYUDJHGH-HDQ3DXO/RXLQHDX tuellement installés par ce dernier (cf.
*XLGHSUDWLTXHGXVRODLUHSKRWRYROWD±TXH chapitre 3.2.1.) ;
¢OłXVDJHGHVWHFKQLFLHQQHVHWWHFKQLFLHQV çNGUMKVU2#;)
RC[CU[QWIQ RTQEªFCPVFàWPG
'LPHQVLRQQHPHQWLQVWDOODWLRQHW logique commerciale plus complexe de loca-
PDLQWHQDQFHSU«VHQWHGHPDQLªUH tion-vente ou crédit-bail portée par un opéra-
H[WU¬PHPHQWS«GDJRJLTXHHWLOOXVWU«HOH teur privé (cf. chapitre 3.2.2.) ; et enfin
SULQFLSHGHIRQFWLRQQHPHQWGłLQVWDOODWLRQ çNàªNGEVTKăECVKQPRCTMKVUUQNCKTGUFCPUNGECF-
HWGłH[SORLWDWLRQGłXQ66, re d’un projet intégré (cf. chapitre 3.2.3.). }

6RXUFHEdition Observ’ER, 2017.

1. Lighting Global et GOGLA, « Off-Grid Solar Market Trends Report »


(Washington, D.C, 2018).

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 271

3.2.1.
L’acquisition directe d’un système solaire individuel.
En Afrique subsaharienne, se procurer un
SSI par ses propres moyens auprès d’un dé-
taillant local n’est lié à aucun mécanisme
d’électrification régulée sur un territoire. Pour
autant, ce schéma d’électrification fait partie
des voies d’accès à l’électricité les plus répan-
dues en zone rurale non desservie par le réseau.

Le marché des systèmes solaires individuels


(lampes, kits) est extrêmement dynamique. En-
tre 2011 et 2015, en seulement quatre ans, les ven-
tes mondiales sont passées de 500 000 à 11,3 mil-
lions d’unités, portées essentiellement par la dif-
fusion des solutions portables (cf. graphique).
Les experts annoncent que les revenus liés à

)RQFWLRQQHPHQWGłXQV\VWªPHVRODLUHLQGLYLGXHO39

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272 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3RSXODWLRQE«Q«ŦFLDQWGHVROXWLRQVUHQRXYHODEOHVKRUVU«VHDXHQ$IULTXH

Population
desservie
(millions)

60 lampes solaires
kits solaires
miniréseaux solaires
50
miniréseaux hydrauliques
miniréseaux biogaz
40

30

20

10

0
07

08

09

10

11

12

13

14

15

16
20

20

20

20

20

20

20

20

20

20
6RXUFHb IRENA, « Off-Grid renewable energy solutions, Global and Regional Status and Trends » (Abu Dhabi, 2018).

ces ventes vont doubler tous les deux ans, pour A la fin des années 1990, on dénombrait en Afrique
passer de 700  millions USD en 2015 à plus de de l’Ouest quelques dizaines d’entreprises spécia-
3 milliards USD en 20201. lisées dans la vente et l’installation de systèmes PV,
souvent adossées à des groupes internationaux et
Bien qu’elle soit en plein essor, il faut cependant orientées vers des marchés dédiés (télécoms, ap-
garder à l’esprit que cette solution est surtout ac- plications sociales et militaires, pompage).
cessible aux catégories aisées de la population Autour de ces pionniers (parfois encore actifs, sou-
rurale. Par ailleurs, cette croissance soudaine, vent reconnus pour leur expérience et leur savoir-
non encadrée, se fait souvent au détriment de la faire), le décor s’est métamorphosé en moins de
qualité des équipements. deux décennies. Il est devenu impossible de re-
censer les vendeurs de petits SSI sur le continent
De quoi parle-t-on ? africain, qui sont sans doute plusieurs dizaines de
Le principe du système solaire individuel est milliers. Il est possible de se procurer quasiment
simple et sa diffusion relève d’un processus mar-
chand pur : la vente directe de matériels et acces- 1. Lighting Global et Bloomberg New Energy Finance, « Off-Grid Solar
soires photovoltaïques par un acteur économique Market Trends Report » (Washington, D.C, 2016), cité par Simon Lamy,
« Solutions off-grid : quelles perspectives en Afrique ? » (Casablanca :
local à son utilisateur final. PricewaterhouseCoopers, 2017).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 273

partout un SSI complet auprès d’un commerce


s’affichant comme spécialisé ou d’une quincaillerie
ambulante sur un marché hebdomadaire. Parole de
Dans certaines localités peu enclavées, ces sys- SURIHVVLRQQHO
tèmes «  locaux  » peuvent équiper plus de 50  % %RXEDFDU6RZ
des habitations (cf. l’encadré sur le cas de Koura-
mangui en chapitre 1.3.), même si, pour les ména- 'łXQHPDQLªUHJ«Q«UDOHGLULH]YRXV
ges les plus modestes, le capital nécessaire pour TXHODTXDOLW«GHVU«DOLVDWLRQV39DX
s’équiper est tel que l’acquisition d’un SSI est dif- 6«Q«JDOVłHVWDP«OLRU«HDXFRXUVGHV
ficilement envisageable. GHUQLªUHVDQQ«HVb"
Contrepartie de cette banalisation des SSI en de-
hors de toute régulation, on trouve sur le marché des mb2XLPDOJU«TXHOTXHVSUREOªPHVDX
produits de qualité très inégale, malgré les multiples G«EXWGHODG«FHQQLHGXV¢OłDUULY«H
initiatives portant sur la définition de standards tech- PDVVLYHGHQRXYHDX[DFWHXUVDWWLU«V
niques et de renforcement des compétences. SDUXQVHFWHXUSU«VHQW«SDUWRXV
Les modules PV et les batteries vendus affichent OHVSROLWLTXHVFRPPHXQHVROXWLRQ
des performances souvent mensongères et sont PLUDFOHSRXUU«SRQGUHDX[EHVRLQV
de qualité médiocre, au détriment du service ren- Gł«OHFWULFLW«GXSD\V/łDP«OLRUDWLRQ
du et de la durée de vie des systèmes. HVWYHQXHGHVPXOWLSOHVSURJUDPPHV
GHIRUPDWLRQILQDQF«VSDUOD
Qui sont les principaux promoteurs ? FRRS«UDWLRQLQWHUQDWLRQDOHPDLVDXVVL
Appartenant à la famille des solutions distribuées GHOłH[S«ULHQFHDFTXLVHORUVGHOD
selon un modèle libéral (cf. chapitre  2.4.1.), la diffu- FRQVWUXFWLRQGHSOXVLHXUVFHQWUDOHV
sion des SSI s’appuie sur un circuit « business to cus- GHJUDQGHSXLVVDQFHHWGHOłH[«FXWLRQ
tomer ». La chaîne d’acteurs est assez réduite : des GHSURMHWVLPSRUWDQWVGł«OHFWULILFDWLRQ
fabricants (pour la plupart asiatiques), des importa- UXUDOHGDQVOHSD\Vb}
teurs, des distributeurs et des revendeurs locaux.
Dans les principales villes, des entreprises spé- %RXEDFDU6RZingénieur électrotechnicien,
cialisées et expérimentées proposent des équi- directeur général de l’entreprise SOLENE
pements PV de qualité, accompagnés d’un ser- (Sénégal), travaille dans le solaire off-grid
vice d’installation et de maintenance adapté. Mais depuis plus de dix ans.

Sur le site web de l’ouvrage (http://www.fondem.ong/


electrifier-lafrique-rurale/), retrouvez l’intégralité de
l’interview de Boubacar Sow ainsi que celle de Tanga

$YLVGłH[SHUW Boureima Kabre, socioéconomiste de formation, spécialisé


dans l’économie solidaire, cofondateur de Beta, qui a
développé une expertise depuis plus de vingt-trois ans
dans le domaine de l’accès à l’énergie par les ENR.
/HVSURIHVVLRQQHOVGXVHFWHXUHVWLPHQW
TXHSOXVGHLQVWDOODWLRQVVRODLUHV
GRPHVWLTXHVVXUHQ$IULTXHQHVRQWSDV
U«DOLV«HVVHORQOHVUªJOHVGHOłDUW

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


274 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

elles touchent rarement le marché domestique ce que le système devienne inopérant ou néces-
des zones rurales, qui, pour des raisons de coûts site un renouvellement (celui de la batterie sur-
et de proximité, se tourne vers des commerçants venant généralement en premier).
locaux. Ces derniers, peu formés, vendent des
composants (du module aux récepteurs) sou- Durée de vie
&RPSRVDQW
vent de mauvaise qualité, laissant au client le soin moyenne
de les assembler et de les installer. Trop peu de
%DWWHULHV ¢DQV
conseils et de service après-vente sont proposés.
2QGXOHXUVHW ¢DQV
A quels services accèdent FRQYHUWLVVHXUV
les usagers1 ? &RQWU¶OHXUVGHFKDUJH ¢DQV
Les SSI diffusés en Afrique subsaharienne per- G«FKDUJH
mettent d’alimenter principalement des ré-
&¤EOHVHWDFFHVVRLUHV ¢DQV
cepteurs de faible puissance  : éclairage, radio,
TV, recharge de lampes et de téléphones ; ce qui 0RGXOHV39 ¢DQV
laisse par exemple de côté les petits équipements
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.
de production de froid. Seules quelques activi-
tés économiques peuvent être envisagées : petit
commerce alimentaire, couture, coiffure, cyber- Du côté des entreprises
café et éventuellement services informatiques. Du côté des vendeurs de matériel, le secteur de-
L’électricité fournie par un système solaire individuel vient de plus en plus concurrentiel au regard de la
est limitée en puissance et en quantité d’électricité croissance du nombre d’entreprises du « solaire »
journalière. Bien qu’elle paraisse disponible chaque en Afrique. La chaîne de distribution est com-
jour gratuitement, la quantité d’électricité disponible plète, de l’importateur aux détaillants, aujourd’hui
limitée contraint les usagers à adopter des pratiques présents jusque dans les marchés des zones les
de maîtrise de leur consommation. Aussi, une sensi- plus enclavées.
bilisation est-elle toujours nécessaire pour en faire Toutefois, de nouveaux modèles de distribution
comprendre les raisons et les effets. apportant une meilleure qualité de service vien-
nent attaquer ce modèle de vente directe. Face à
Quel est le modèle économique ? la concurrence des opérateurs du pay as you go
(cf. chapitre suivant), les vendeurs de SSI déga-
Du côté des usagers gent des marges si faibles qu’ils sont contraints,
Pour l’usager, le coût de l’électricité produite par pour faire du volume, à mener une course aux prix
un SSI se déduit du montant d’investissement ini- bas, souvent au détriment de la qualité.
tial et des éventuelles dépenses liées au renou-
vellement de composants défaillants. Cela revient Quel est le cadre institutionnel ?
à acheter, en une seule fois, une quantité finie de L’électrification par acquisition directe de systèmes
kWh pour une durée de quelques années, jusqu’à solaires individuels répond à une logique mar-
chande et, jusqu’à présent, ne s’inscrit dans aucun
cadre institutionnel propre au domaine de l’accès
1. Plutôt que d’« usagers », il faudrait ici plutôt parler de « clients », les SSI étant
distribués selon un modèle marchand. à l’électricité, dans la plupart des pays d’Afrique

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 275

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
$UQDXG&KDEDQQH

/łDFTXLVLWLRQGłXQHODPSH39SHUPHWHOOHGHV«FRQRPLHVSRXUOHVP«QDJHVb"

mb$X%XUNLQD)DVRXQH«WXGHFRPPDQGLW«HSDU/LJKWLQJ$IULFD1HQD«YDOX«¢b)&)$
bŏ ODG«SHQVHPHQVXHOOHGł«FODLUDJHMXVTXł¢bGXEXGJHWGłXQP«QDJH/HV
ODPSHVVRODLUHV/DJD]HOFRPPHUFLDOLV«HVHQ$IULTXHGHOł2XHVWHQWUHbŏHWbŏVRQW
GRQFUHQWDELOLV«HVHQTXDWUH¢KXLWPRLV6XUODGXU«HGHYLHGXSURGXLWOHV«FRQRPLHVVRQW
HVWLP«HV¢bŏVDQVFRPSWHUTXHOH6$9DSSRUW«SDU/DJD]HOSHUPHWGHGRXEOHUODGXU«H
GHYLHGHODODPSHJU¤FH¢XQVLPSOHUHPSODFHPHQWGHEDWWHULH7RXWHIRLVOHVP«QDJHV«WDQW
KDELWX«V¢GHVG«SHQVHVSOXVIDLEOHVPDLVU«FXUUHQWHVLOHVWQ«FHVVDLUHGłDFFRPSDJQHUOD
SURPRWLRQGHVODPSHVGłDFWLRQVGHVHQVLELOLVDWLRQHWGHVHUYLFHVILQDQFLHUV FRPPHOH
PLFURFU«GLW SHUPHWWDQWDX[P«QDJHVGHOHYHUOłREVWDFOHGHOłLQYHVWLVVHPHQWLQLWLDOb}

$UQDXG&KDEDQQHingénieur en énergies renouvelables et sensible aux problématiques d’accès


à l’énergie, travaille depuis 2004 dans le secteur solaire au Burkina Faso, où il a créé l’entreprise
CB Energie. En 2015, il fonde Lagazel avec son frère Maxence, avec pour objectif d’industrialiser la
fabrication de lampes solaires de qualité sur le continent Africain. Retrouvez l’interview intégrale sur la
page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale

1. Voir chapitre 1.1.1.

subsaharienne. L’absence de normes techniques La multiplication des fabricants, l’affichage de


et de contrôle des équipements distribués porte fausses performances, la distribution non régulée
un fort préjudice aux utilisateurs de SSI. et l’absence de standards techniques minimum
déstabilisent le marché des petits équipements
Quelles sont les forces et limites photovoltaïques pour usages domestiques. Con-
du modèle ? trepartie positive de cette perte de crédibilité de
En l’absence de programme d’extension des ré- la technologie PV au niveau local, elle fait prendre
seaux de distribution d’électricité ou de modèle conscience qu’un minium de qualité est néces-
de commercialisation de systèmes solaires in- saire. Sur le moyen terme, les produits les moins
dividuels plus aboutis, les populations rurales et performants seront probablement éliminés, ou-
périurbaines ont naturellement recours à cette vrant plus largement la voie aux modalités de ven-
préélectrification en apprenant par elles-mêmes, te plus pérennes déjà disponibles. A court terme
et souvent à leurs dépens, les moyens et les outils néanmoins, en l’absence de programme struc-
de sa mise en œuvre. turant, les populations ont naturellement recours

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


276 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
2OLYLHU5DVROGLHU

3HQVH]YRXVTXHODSURIHVVLRQDXUDLWEHVRLQGłXQFDGUHQRUPDWLISOXVVWULFWSRXUXQH
PHLOOHXUHTXDOLW«GHVU«DOLVDWLRQVQRWDPPHQW¢0DGDJDVFDU"

mb&łHVWH[DFWHQWK«RULHPDLVGLIILFLOHPHQWDSSOLFDEOHVXUOHWHUUDLQ/łHQYLURQQHPHQWGHV
DIIDLUHVQHVł\SU¬WHSDVGXWRXW'łDXWDQWTXHOHVXWLOLVDWHXUVQłH[SULPHQWSDVGłDWWHQWHV
IRUWHVHQODPDWLªUH/DSURIHVVLRQVHG«YHORSSH¢SOXVLHXUVYLWHVVHVb
ʼnOH“zéro norme”bFHX[TXLSURSRVHQWGXPDW«ULHOTXLQHUHVSHFWHDXFXQFULWªUHGHTXDOLW«
H[SRVDQWOHSD\V¢GHVGDQJHUVHQYLURQQHPHQWDX[LPSRUWDQWV ¢FDXVHGHVG«FKHWV
LQGXVWULHOVFRPPHOHVP«WDX[ORXUGV b
ʼnOł“intermédiaire”bFHX[TXLDVVXUHQWXQHGXU«HGHYLHDFFHSWDEOHVDQVJDUDQWLHb
ʼnOH“haut de gamme”bFHX[TXLLQWHUYLHQQHQWDYHFGHVFHUWLILFDWVGHTXDOLW«HWGRQWOHV
LQVWDOODWLRQVVXLYHQWOHVSURF«GXUHVSURIHVVLRQQHOOHVGHV«FXULW«HWGHTXDOLW«b}

2OLYLHU5DVROGLHUdocteur ingénieur dans la conception de machines, s’est spécialisé depuis 1987


dans les ENR. Il est gérant propriétaire de la société Energie Technologie depuis 1994. Retrouvez
l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

à des produits de qualité médiocre pour couvrir


quelques besoins basiques, en se procurant « ce
qu’elles trouvent ».

Par ailleurs, si la présence de SSI peut être consi-


dérée comme une préélectrification précédant
le déploiement d’un réseau, elle peut être para-
doxale. La présence massive de systèmes so-
laires individuels sur un territoire est en effet à
© Fondation Energies pour le Monde

double tranchant. D’un côté, elle caractérise une


habitude des populations à utiliser l’électricité et
confirme l’existence d’une capacité de paiement,
toutes deux favorables à l’utilisation du service en
cas d’extension du réseau ou d’installation d’un
miniréseau. De l’autre, les usagers propriétaires
de SSI adhérant au principe de renouvellement
Une boutique solaire rurale fonctionnant grâce à un kit de batterie (tous les dix-huit mois en moyenne)
solaire. ne seront pas nécessairement favorables au

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 277

paiement régulier d’un service électrique dont ils sanitaires qui pourraient s’avérer catastrophiques
n’ont ni le contrôle ni la propriété, dans l’hypothèse à moyen terme. Malgré quelques initiatives, NCTª-
du déploiement d’un réseau. ĄGZKQPCWVQWTFGNCăNK©TGFGTGE[ENCIGGUVVTQR
VKOKFGa  GNNG FQKV CDUQNWOGPV «VTG RQTVªG CXGE
Enfin, l’un des risques majeurs, à peine émergent, WPG CODKVKQP SWK UQKV ¡ NC OGUWTG FG NàCORNGWT
repose sur la diffusion massive de composants FG NC FKĂWUKQP FGU U[UV©OGU FàªNGEVTKăECVKQP
polluants non recyclés  : les batteries (quelle que CWVQPQOGU
soit la technologie). Des milliers de batteries « usa-
gées » sont dispersées dans la nature chaque jour, En conclusion, malgré leurs limites d’usage, les
avec des conséquences environnementales et SSI peuvent répondre de manière pérenne aux
besoins de base en électricité en l’absence de
solution collective (souvent longue et complexe à
mettre en œuvre). Néanmoins, leur essor devrait
/łDFTXLVLWLRQGH s’accompagner d’un renforcement des compé-
systèmes solaires tences des acteurs locaux de la filière et d’un
LQGLYLGXHOVSDU minimum d’exigence normative sur la qualité des
les ménages les produits importés. Si le secteur gagne en profes-
SOXVPRGHVWHVQH sionnalisme, il sera alors pertinent, d’étendre le
cercle des usagers de SSI au-delà des couches
SHXWVHIDLUHVDQV
les plus aisées de la population rurale grâce aux
VXEYHQWLRQ mécaniques d’aide, qui restent indispensables
(cf. encadré). Enfin, l’acquisition d’un SSI en vente
mb0¬PHFHVP«WKRGHV¢SHWLWH«FKHOOH directe présente un autre avantage (également
YLVDQW¢DP«OLRUHUOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW« observé en logique de PAYG)  : elle induit une re-
SHXYHQWQ«FHVVLWHUXQHIRUPHGH lation directe entre production et consommation
VXEYHQWLRQSRXUOHVP«QDJHVOHVSOXV d’électricité et favorise une appropriation immé-
PRGHVWHVb} diate des questions énergétiques, notamment
d’efficacité énergétique. }
*ULPPHW3HWHUV  FRQVWDWHQW
TXHOHQLYHDXGHG«SHQVHTXHOHV
P«QDJHVVHUDLHQWGLVSRV«V¢HQJDJHU
SRXUOł«QHUJLHVRODLUHKRUVU«VHDXGDQV
SOXVLHXUVSD\VGł$IULTXHVXEVDKDULHQQH
HVWJ«Q«UDOHPHQWLQI«ULHXUDXFR½WGH
ODWHFKQRORJLHHQFHTXLFRQFHUQHOHV
P«QDJHVDSSDUWHQDQWDX[VWUDWHV¢IDLEOH
UHYHQX

6RXUFHb Banque mondiale, « Africa’s Pulse : une analyse


des enjeux façonnant l’avenir économique de l’Afrique »
(Washington, D.C, 2018).

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278 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.2.2.
Les systèmes solaires individuels pay as you go.
Depuis 2010, les SSI se diffusent encore plus
rapidement grâce à de nouvelles modalités
de commercialisation ayant pour point com-
mun de fournir des services électriques via
un mécanisme de location de matériel (avec Pay as you go
ou sans option d’achat). Ces dispositifs sont 3$<*
communément désignés sous le terme gé-
nérique de pay as you go (PAYG), qui évoque /HSD\DV\RXJRG«VLJQHOHV\VWªPH
une de leurs caractéristiques fondamentales, GHSDLHPHQWDQWLFLS«GłXQVHUYLFHVHORQ
le prépaiement. XQPRQWDQWŦ[«HQIRQFWLRQGHOłXVDJH
SU«YLVLRQQHOTXLVHUDIDLWGHFHVHUYLFH
,QLWLDOHPHQWPLVHHQSODFHSDUOHV
RS«UDWHXUVGHW«O«SKRQLHPRELOH FDUWHV
SU«SD\«HV FHWWHPRGDOLW«GłDFFHVVLRQ¢
XQVHUYLFHHVWSURJUHVVLYHPHQWWUDQVSRV«H
¢GłDXWUHVVHFWHXUVFRPPHOł«QHUJLHRXOHV
DVVXUDQFHV H[HPSOHSD\DV\RXGULYH 

Ce chapitre propose une explication simple de


cette solution et une première approche de ses
avantages et limites, tels qu’ils se dessinent à
l’aube de son déploiement. Car, malgré son suc-
Ce phénomène récent figure en bonne place au cès, la prudence s’impose  : on manque de recul
sein des réflexions conduites sur l’électrification pour tirer des conclusions solides quant à l’impact
hors réseau et des mécanismes de financement et la pérennité des dispositifs PAYG existants.
associés, pour deux raisons :
çFàWPG RCTV NG 2#;) KPV©ITG NàKPPQXCVKQP FKIKVCNG De quoi parle-t-on ?
qui concentre l’attention de la plupart des obser- Le service offert par les systèmes PAYG est simi-
vateurs et financeurs ; laire à celui délivré par les SSI classiques  : il vise
çFàCWVTG RCTV NG OQF©NG QRªTCVKQPPGN FW 2#;) à satisfaire les besoins en électricité à forte va-
devait permettre de lever les deux obstacles leur d’usage à partir d’un système photovoltaïque
caractérisant l’offre de SSI en vente directe  : simple et de petite taille (5 à 100 Wc). Cependant,
ses faiblesses techniques et son manque des différences notables distinguent le secteur de
d’accessibilité (coût réservé à une clientèle aisée). la vente directe de celui du PAYG.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 279

Sur le plan commercial, le PAYG aucune garantie n’est exigée. La simple présenta-
s’appuie sur un système d’abonnement tion d’une pièce d’identité et d’un compte mobile
à durée limitée, souvent dans le cadre money valide suffit pour souscrire l’offre1.
d’une location-vente.
Différents systèmes coexistent et reposent sur le Le remboursement est de facto «  garanti  » par le
prépaiement du service électrique, avec ou sans op- mécanisme de prépaiement. Les SSI connectés
tion d’acquisition du matériel par l’usager. sont activés pendant une période donnée (un jour,
Dans la plupart des cas, après le versement d’un une semaine, un mois), moyennant l’acquittement
acompte de 10 à 20 % du prix du matériel, le client préalable d’une somme forfaitaire  ; en cas de non-
rembourse son équipement sur une période de paiement du service, celui-ci est interrompu auto-
douze à trente-six mois, à l’issue de laquelle il matiquement à distance par l’opérateur. Les deux
devient le plus souvent propriétaire du système. parties sont donc engagées  : l’une à effectuer le
Le mécanisme est ainsi celui d’un «  microcrédit- paiement du service, l’autre à assurer sa disponibilité.
bail  » simplifié. Car, par rapport à un microcrédit,
les formalités sont allégées  ; par exemple, chez
M-Kopa, l’un des acteurs historiques du PAYG 1. Séverine Leboucher, « Le pay-as-you-go sur les terres du microcrédit », Revue
(250 000 ventes enregistrées au Kenya en 2017), Banque, n°811 (2017).

6FK«PDGHIRQFWLRQQHPHQWGłXQNLW39HQ3$<*

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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280 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

MINIDOSSIER

Kit PAYG, télécoms, mobile money


et compteur à prépaiement connecté…
Comment ça marche ?
Les solutions PAYG, comme les miniré- 2GPFCPV NàWVKNKUCVKQP FG UQP ETªFKV
seaux, utilisent quasiment toutes un sys- FàªNGEVTKEKVªNGU[UV©OGEQPVKPWGFGEQO-
tème de prépaiement adossé à la tech- OWPKSWGTCXGENàQRªTCVGWTGVNàWVKNKUCVGWT
nologie du mobile money. Les données techniques (profil de consom-
Les kits PAYG sont équipés d’un micropro- mation précis, état des batteries), analysées
cesseur simple et d’une puce GSM commu- et archivées dans le cloud de l’opérateur,
nicante (GPRS, 2 à 5 G), ou via des informa- permettent d’affiner la connaissance de
tions transmises par SMS dans les zones l’utilisation de l’électricité en zone rurale et
les plus reculées (réseau GSM simple, sans d’anticiper les évolutions de comportement.
data). Les frais relatifs au transit des données L’opérateur peut ainsi émettre des informa-
sont payés par l’opérateur PAYG, qui assure tions pertinentes vers l’utilisateur, l’aidant à
la continuité du service. mieux maîtriser sa consommation, ainsi que
des alertes sur le solde d’électricité restant
'P WVKNKUCPV UQKV WPG KPVGTHCEG 55&& UQKV (lorsque le solde est épuisé, le système est
WPG CRRNKECVKQP UOCTVRJQPG FªFKªG NàWVK coupé automatiquement).
NKUCVGWTUGEQPPGEVGXKCUQPVªNªRJQPG¡NC
RNCVGHQTOGFGNàQRªTCVGWT2#;) L’utilisateur reçoit également des offres pro-
Etape 1 : l’utilisateur procède à une demande motionnelles de l’opérateur qui l’incitent à :
d’achat de crédit d’énergie (crédit temps çEQPUQOOGTGPLQWTPªGCXGEWPVCTKHTªFWKV
de quelques jours, ou crédit électricité de dans le cas des SSI, pour éviter le transit
quelques kWh dans le cas des miniréseaux). d’électricité dans les batteries ;
Etape 2 : il paie avec son compte mobile mon- çEQPUQOOGT NGU YGGMGPFU UWT NGU OKPKTª-
ey : l’argent est directement versé de manière seaux solaires, lorsque l’absence d’acteurs
dématérialisée sur le compte mobile money économiques en activité engendre un sur-
de l’opérateur. plus d’électricité au sein de la centrale ;
Etape 3  : après validation du paiement, un çTªFWKTG NGU EQPUQOOCVKQPU GP RªTKQFG
signal numérique est envoyé par les ré- d’hivernage, saison des pluies ou période
seaux télécoms à la puce équipant le kit ou cyclonique, quel que soit le dispositif (SSI,
le compteur connecté, qui s’active alors au- miniréseaux).
tomatiquement pour la durée et/ou la quan-
tité d’énergie achetée.
Etape 4  : l’utilisateur reçoit un message de
confirmation.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 281

© Upowa

Une boutique de PAYG en zone rurale.

Enfin, l’utilisateur et l’opérateur peuvent faire L’association du numérique avec les télé-
évoluer certains facteurs limitants. Dans le coms et les applications du big data laisse
cas des miniréseaux (où plusieurs forfaits entrevoir des possibilités presque illimit-
peuvent être proposés à des tarifs différents ; ées d’évolution vers des modèles de ges-
cf.  chapitre  3.4.), les compteurs connectés tion technique et commerciale totalement
permettent de faire évoluer à distance un dématérialisés. L’avenir confirmera si un tel
abonnement. Un utilisateur peut ainsi passer dispositif, qui fait peu de place au facteur hu-
d’un forfait basique (par exemple, limité à main et repose sur la fiabilité de composants
100 W et 0,5 kWh/jour) à un forfait plus élevé électroniques très dispersés géographique-
(500 W et 2 kWh/jour). Le paramétrage des ment, est réellement adapté aux territoires
limiteurs de puissance et d’énergie peut être ruraux subsahariens.
piloté à distance.

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282 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Le fonctionnement du PAYG

/HFOLHQWVRXVFULW /HFOLHQWSU«SDLH /HFOLHQWHQWUHOH /HFOLHQWSURŦWH


XQFRQWUDW SRXUGHOł«QHUJLH FRGHOHSURGXLWVH GHVHUYLFHV
8QWHFKQLFLHQ MRXUQDOLªUHYLD G«EORTXHSRXUOH «QHUJ«WLTXHV
LQVWDOOHOHV\VWªPH PRELOHPRQH\ WHPSVSU«SD\« SU«SD\«VHWŦDEOHV
VRODLUHFKH]OHFOLHQW ,OUH©RLWXQFRGH
¢XVDJHXQLTXH
SDU606

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde

D’un point de vue technique, le PAYG opérateurs d’Afrique de l’Est et en pleine crois-
s’appuie sur la qualité des composants sance en Afrique de l’Ouest (voir chapitre  1.3.2.).
des SSI et sur l’utilisation du numérique. La présence d’un opérateur physique fournissant
Les opérateurs soignent la conception et le choix codes et recharges est remplacée par une plate-
des produits pour fournir un équipement fiable et forme interactive d’échange et de paiement ac-
un service de qualité, garants de la satisfaction du cessible sur téléphone mobile.
client et de la régularité des paiements. Les SSI connectés offrent de nouveaux services
Les batteries li-ion viennent ainsi remplacer les au client et de nouvelles capacités à l’opérateur,
accumulateurs au plomb, confirmant la per- en plus de faciliter le paiement  : transmission
tinence de cette nouvelle technologie pour à l’usager d’informations sur sa consomma-
l’électrification rurale, du moins pour les systèmes tion, possibilité d’évolution des seuils de puis-
de petite capacité. sance et d’énergie pour s’adapter au client, col-
Le numérique occupe une place importante. Les lecte d’informations sur les comportements
premiers kits PAYG étaient préprogrammés avec énergétiques et le fonctionnement des systèmes
une série de codes que l’usager achetait auprès (cf. minidossier).
de l’opérateur pour activer le système pendant
une période donnée. Cette modalité, robuste mais Le PAYG ne vend pas des kWh,
peu évolutive, a fait place aux «  SSI connectés  » mais des services énergétiques.
via les réseaux télécoms  : les systèmes sont ac- Par souci de maîtrise des consommations élec-
tivés ou désactivés à distance par l’opérateur en triques et de qualité du service rendu, les sys-
fonction des paiements reçus. tèmes solaires individuels PAYG sont fournis avec
La dématérialisation se poursuit avec l’utilisation des récepteurs électriques de très basse con-
du mobile money, quasi généralisée chez les sommation  : ampoule(s) LED de quelques watts,

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 283

8QH[HPSOHGHNLW3$<*IUDQ©DLVbOHNLW8S2ZD

6RXUFHb UpOwa (https://www.upowa.energy)

téléviseur d’une quinzaine de watts, prise exclu- au Kenya, vers 2010, à la faveur de la libéralisation
sivement dédiée à la recharge de téléphones. des secteurs de l’énergie, de la finance et des télé-
L’usager ne peut pas utiliser d’autres récepteurs communications. Parmi les pionniers du secteur,
de même nature ni d’autres types de récepteurs M-Kopa et Mobisol (aujourd’hui Engie) faisaient
que ceux fournis. valoir plus de 600 000 foyers électrifiés chacun
L’usager achète ainsi «  à crédit  » des services à fin 2017.
à forte valeur d’usage (éclairage de très bonne
qualité, recharge du téléphone mobile, télévision) L’Afrique francophone ne découvre que depuis
à travers l’acquisition d’un SSI complet précâblé, quelques années le PAYG. Elle représentait 12  %
équipé de récepteurs dont le nombre et la nature des ventes cumulées de systèmes PAYG sur la
dépendent de l’offre choisie. période 2013-2017 (contre 86 % pour l’Afrique de
l’Est). Son retard est encore significatif, mais elle
Ce modèle d’électrification prend offre un potentiel de marché considérable, du fait
une ampleur spectaculaire. du dynamisme du secteur de la téléphonie mobile
Il a pénétré l’Afrique par sa côte Est, en Tanzanie et et du développement du mobile money sur son sol.

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284 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

&RPSDUDLVRQGHTXDWUHRIIUHVIUDQ©DLVHV
4RWWR8SRZD2QLULT2UDQJH

(QWUHSULVH Services Tarifs

Kit le plus demandé :


ʼnFRQWU¶OHXUGHFKDUJHFRQQHFW«
ʼn:FGHSDQQHDX[VRODLUHV$KGHEDWWHULH
ʼn/('
bHXURSDUMRXU
Qotto ʼn79/('SRXFHV
SHQGDQWWURLVDQV
ʼnF¤EOHV
ʼnGRXLOOHV
ʼnLQWHUUXSWHXUV
ʼnPDLQWHQDQFHJUDWXLWHGXUDQWWURLVDQV

Kit de 5 à 10 W :
ʼnODPSHVHWFKDUJHXUV
ʼn,QVWDOODWLRQ $YDQFHGH¢bHXURV
8SRZD ʼnPDLQWHQDQFH SXLVGH¢bHXURVSDU
ʼnWRUFKH PRLV
ʼnUDGLR
ʼnSURSUL«WDLUHDSUªVGL[KXLWPRLV¢WURLVDQV

ʼn3DQQHDXVRODLUHSRO\FULVWDOOLQ:F
ʼnER[DYHF«FUDQGLJLWDO SRUWV86%SULVHV9
'&EDWWHULHSORPE 
ʼnODPSHVVXVSHQVLRQOXPHQV
3UL[GHYHQWH
ʼnFRPSDWLEOH3$<*2UDQJH0RQH\
GHbHXURV+7
2QLULT ʼn79+'
FRPPDQGHPLQLPXP
ʼnKRWVSRWZLŦ
GHXQLW«V
ʼnbKHXUHVGł«FODLUDJHSDUMRXU
ʼnbKHXUHVGH79
ʼnUHFKDUJHVGHW«O«SKRQH
ʼnJDUDQWLHXQDQ

)UDLVGHVRXVFULSWLRQb
.LWVRODLUH9«HQHP%DVLFb bHXURV
ʼnEDWWHULH 3UL[PHQVXHOb
2UDQJH ʼnDPSRXOHV/(' bHXURV
ʼnSDQQHDXVRODLUH
ʼnF¤EOHV 3UL[YDODEOHV
DX%XUNLQD)DVR

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 285

(QGL[DQVOH3$<*VłHVWGLIIXV«GDQVSUªVGHODPRLWL«GHVSD\VGXPRQGH

5
PAYS
92 PAYS

6RXUFHb « The symbiotic relationship between PAYG Solar and Mobile Money ecosystems ». Climatescope, http://2017.global-
climatescope.org/en/blog/2017/06/26/GSMA/ .

© Qotto

Installation d’un kit solaire Qotto chez un particulier.

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286 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

/HVLQYHVWLVVHPHQWVGDQVOHVHQWUHSULVHV protagonistes des systèmes PAYG  : des équipes


faisant du solaire en PAYG sont en de recherche et développement aux Etats-Unis,
FURLVVDQFH HQPLOOLRQVGHGROODUV en Europe ou en Chine pour une innovation perma-
nente, des fabricants de solutions intégrées majori-
300 tairement asiatiques, des vendeurs-installateurs
257 sur le terrain, une équipe de gestion dématériali-
250 sée, des investisseurs sur les places financières.

200
A quelle électricité accèdent
150
147 les clients ?
L’électricité produite par un SSI de type PAYG
100 souffre des mêmes limites que celle d’un SSI tra-
77
ditionnel  : puissance disponible faible et quantité
50 d’énergie journalière limitée. Pour le moment, ce
21
4 dispositif ne permet que rarement de satisfaire les
0
besoins des activités productives1.
12

13

14

15

16

Néanmoins, la perception de l’utilisateur d’un sys-


20

20

20

20
20

tème PAYG est différente. En effet, contre le paie-


6RXUFHb Bloomberg New Energy Finance, « New Energy Outlook
2017 » (Washington, D.C, 2017). ment d’un forfait périodique, le client acquiert
moins un générateur électrique que des « services
énergétiques », matérialisés par un ou plusieurs ré-
cepteurs (lampes LED, TV, chargeurs), avec une
Qui sont les principaux promoteurs ? durée de fonctionnement garantie (quelques heu-
Basés sur un modèle capitalistique avec des visées res par jour).
de ventes massives, les promoteurs du PAYG sont
de plus en plus nombreux. Industriels de l’énergie, Quel est le modèle économique ?
start-up et entreprises locales se partagent un ter-
rain de jeu qui attire de nombreux partenaires finan- Du côté des utilisateurs.
ciers (cf. chapitre 2.3.2.). Les clients des systèmes solaires individuels PAYG
La viabilité du modèle n’est toutefois pas acquise. voient dans cette nouvelle solution un moyen simple
Elle repose sur de nombreux métiers et sur un et rapide d’accéder à un service électrique basique
équilibre complexe  : une présence commerciale de qualité. L’apport initial relativement faible rend
forte sur le terrain, une offre adaptée et modulaire, le produit accessible à davantage de foyers ruraux
un marketing attractif, des équipements de bonne que l’acquisition directe. Car le montant à payer est,
qualité, des partenariats solides avec les opéra- en théorie, équivalent aux dépenses énergétiques
teurs télécoms, une gestion dématérialisée per- du ménage avant l’acquisition du système (achats
formante, une stratégie de diffusion de masse et un de bougies, piles et/ou pétrole lampant).
apport permanent en capitaux pour réaliser les in- Ces arguments, souvent mis en avant par les
vestissements nécessaires à la croissance. opérateurs du PAYG, doivent être relativisés  : les
Cette palette de compétences se traduit par tarifs pratiqués (cf. tableau comparatif des offres
une cartographie diversifiée et mondialisée des françaises supra) restent inaccessibles pour les

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 287

foyers les plus modestes, et l’entrée dans une mé- à potentiel  : ressources économiques stables ou
canique de paiement régulier n’est envisageable croissantes, faible enclavement et forte densité
que pour une partie de la population, celle qui est de population. De facto, comme le relèvent cer-
relativement stabilisée sur le plan économique. Le tains investisseurs d’impact, ils sont même parfois
calcul du « coût équivalent du kWh » restitué sur ce conduits, pour rester profitables, à se détourner du
type de système donne des résultats qui peuvent segment rural et à s’éloigner de leur promesse so-
interpeller  : de 5 à 15  €/kWh (contre 0,1 à 0,50  €/ ciale initiale2.
kWh pour les réseaux urbains, 0,5 à 1 € kWh pour
les miniréseaux)4. Quelle contribution du PAYG
à l’objectif d’accès universel
Du côté des opérateurs à l’électricité ?
Le montant prépayé par le client couvre le coût des Si cette nouvelle modalité d’électrification semble
équipements (générateur et récepteurs), la main- répondre efficacement à la demande d’une partie
tenance du système, ainsi que les frais et marges importante de la population non ou mal desservie
de l’opérateur. par le réseau national, elle présente toutefois trois
Si les acteurs du PAYG gardent leurs plans d’affaires limites importantes :
confidentiels, les principaux éléments de leur stra- çGNNG PàGUV RCU CWUUK TWTCNG SWG RTªXWa  alors
tégie sont aujourd’hui connus, parmi lesquels qu’elle visait l’accès à l’électricité des zones ru-
l’ambition de “réduire la pauvreté”. Quoique mise rales vulnérables, elle satisfait aujourd’hui princi-
en avant par leur communication, elle apparaît né- palement la demande exprimée dans les zones
anmoins secondaire. La rentabilité est de facto périphériques des grandes villes, là où la densité
l’objectif premier des opérateurs PAYG, dont le de la population et les capacités de paiement
modèle recherche sa viabilité sans le soutien de répondent aux exigences de rentabilité ;
subventions et exige l’implication d’investisseurs. çUGWNUUQPVEQWXGTVUNGUDGUQKPUFQOGUVKSWGU
Ces derniers, souvent éloignés des probléma- ¡HQTVGXCNGWTFàWUCIGa répondre à d’autres ap-
tiques sociétales des populations rurales afri- plications, et notamment mieux couvrir les be-
caines, exigent un retour sur investissement plus soins des activités économiques, nécessite le
ou moins rapide. développement de récepteurs spécifiques à
Malgré les perspectives de croissance et les chif- faible consommation et de kits solaires plus com-
fres annoncés par les acteurs du PAYG, une minori- plexes ; certains opérateurs y travaillent3 ;
té seulement d’opérateurs atteint le volume critique çGNNG TKUSWG FG UQWĂTKT FG NàCDUGPEG FG TGNC-
permettant de trouver l’équilibre financier et de sat- VKQPU KPVGTRGTUQPPGNNGU GPVTG NGU ENKGPVU GV
isfaire les investisseurs. Toujours en recherche de
fonds de roulement ou de capitaux d’investissement, 1. L’éclairage permet de poursuivre le travail en période nocturne.
parfois destinataires de dons dans le cadre de pro- Les SSI les plus puissants (jusqu’à 200 Wc), comme ceux proposés par la
société QOTTO, permettent une activité de service (exemples : vidéoclubs,
jets d’accès à l’énergie (les bailleurs institutionnels recharge de portable, coiffure).

ouvrant de plus en plus largement les mécanismes 2. Diane Isenberg, Greg Neichin et Mary Roach, « An Impact Investor Urges
Caution on the ‘Energy Access Hype Cycle’», Next Billion Blog, 2017, https://
au secteur privé), les opérateurs PAYG sont, en nextbillion.net/an-impact-investor-urges-caution-on-the-energy-access-
hype-cycle/.
quelque sorte, « subventionnés ». 3. Cf. interview intégrale de Jean-Baptiste Lenoir sur la page Internet de
Dans ce contexte, les opérateurs PAYG ciblent l’ouvrage  : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/
4. ce calcul reste approximatif et peut être discuté dans la mesure où on
stratégiquement les zones périurbaines ou rurales compare des services différents

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288 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

mb$XMRXUGłKXLHQSURSRVDQWXQV\VWªPHGHOHDVLQJOHVHQWUHSULVHVGX3$<*MRXHQWGHIDFWR
XQU¶OHGłLQVWLWXWLRQILQDQFLªUHVDQVSRXUDXWDQWHQDYRLUOHP«WLHUQL¬WUHVRXPLVHVDX[
UªJOHVGXVHFWHXU VDXI0NRSDTXLDFKRLVLGHVHG«FODUHUFRPPHLQVWLWXWLRQILQDQFLªUH 
2UHOOHVSHUGHQWGHOłDUJHQWVXUFHWWHIRQFWLRQGHmbFU«GLWb}/DSOXSDUWGHVDFWHXUVGX3$<*
QłRQWSDVOHIRQGVGHURXOHPHQWSRXUILQDQFHUOHVVWRFNVGł«TXLSHPHQWVHWQł«YDOXHQWSDV
FRUUHFWHPHQWOHULVTXHGHFU«GLW6HORQPRLOHVPRGªOHVDFWXHOVQHVRQWSDVS«UHQQHV

'ªVORUVOłDOOLDQFHDYHFGHVLQVWLWXWLRQVGHPLFURILQDQFH ,0) FDSDEOHVGHG«OLYUHUGHV


VHUYLFHVGLJLWDX[VHPEOHORJLTXHbHOOHVVDYHQW«YDOXHUOHULVTXHGHFU«GLWHWGLVSRVHQWGHV
IRQGVQ«FHVVDLUHV¢OłDFKDWGHV«TXLSHPHQWVJU¤FH¢OHXUDFWLYLW«GHFROOHFWHGł«SDUJQH

8QWHOUDSSURFKHPHQWQłHVWFHSHQGDQWSDV«YLGHQW/ł,0)SHU©RLWVRXYHQWOłRS«UDWHXU3$<*
FRPPHXQFRQFXUUHQW3DUH[S«ULHQFHLOIDXWWUDYDLOOHUORQJXHPHQW¢G«YHORSSHUOHVERQV
DUJXPHQWDLUHVHWLQFHQWLYHUOHVYHQWHV(TXLSHUOHSHUVRQQHOGHOł,0) OHSUHPLHUFOLHQWFłHVW
OHYHQGHXU HWPHWWUH¢OHXUGLVSRVLWLRQGHVNLWVGHG«PRQVWUDWLRQHVWSULPRUGLDOb}

Renée Chao-Beroff, directrice générale de Pamiga et de Pamiga Finance SA, un véhicule


d’investissement pour la microfinance rurale en Afrique subsaharienne.

NGU CIGPVU FG NàQRªTCVGWTa  s’il semble facile çEQOOGPV ªNGEVTKăGT NGU D£VKOGPVU RWDNKEU NGU
d’acquérir de nouveaux clients, les garder de- écoles, les centres de santé et développer
mande plus d’efforts qu’escompté ; la déperson- l’éclairage public dans ces territoires ruraux ? ;
nalisation de la vente semble aujourd’hui porter çSWGN FªXGNQRRGOGPV ªEQPQOKSWG GUV RQUUKDNG
préjudice à la pérennité du modèle. avec le seul PAYG tant que cette solution n’est pas
Certes, les investisseurs que savent attirer les promo- adaptée aux usages productifs ? ;
teurs du PAYG devraient leur donner les moyens de le- çEQOOGPV CTVKEWNGT NGU UQNWVKQPU 2#;) CXGE NGU
ver certains de ces obstacles. Mais il est vraisemblable miniréseaux, qui, eux, permettent de desser-
que cette modalité d’électrification laissera sans vir davantage d’usages et de segments de la
réponse quelques questions sociétales essentielles : population ?
çSWàGP GUVKN FG NàCEE©U ¡ NàªNGEVTKEKVª FGU EQWEJGU Comme le relève un des professionnels du PAYG
les plus défavorisées de la population, notamment (cf. témoignage infra), « le PAYG n’est pas la solution
en zone rurale ? ; unique à tous les problèmes d’électrification ».

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 289

3DUROHGHSURIHVVLRQQHOOH
Caroline Frontigny

'łDSUªVYRWUHH[S«ULHQFHTXHOVRQWOHVEHVRLQVHQ«OHFWULFLW«OHVSOXVH[SULP«VSDUOHV
SRSXODWLRQVUXUDOHVFDPHURXQDLV"
/DW«O«YLVLRQ/łHQYLHGHVHGLYHUWLU QRWDPPHQWVXLYUHOHVPDWFKVGHIRRW HWGłDYRLUDFFªV
DXPRQGHHVWWUªVIRUWH9LHQWHQVXLWHODUHFKDUJHGXW«O«SKRQHFHTXLHVWFRPSOLTX«GDQV
OHV]RQHVVDQV«OHFWULFLW«HWUHSU«VHQWHXQHFRQWUDLQWHTXRWLGLHQQHFR½WHXVH(QILQLO\DOHV
EHVRLQVGRPHVWLTXHVODOXPLªUHSRXUODTXDOLW«GHYLHHWOHV«WXGHVGHVHQIDQWVXQIULJR
SRXUFRQVHUYHUODQRXUULWXUHXQIHU¢UHSDVVHUHWF

4XHOOHVVRQWOHVSULQFLSDOHVGLIILFXOW«VUHQFRQWU«HV¢G«SOR\HUYRWUHRIIUHVXUOHWHUUDLQ"
/HVGLIILFXOW«VVRQWQRPEUHXVHV/łDFFªVDX[]RQHVUXUDOHVHVWFRPSOH[HOHVURXWHVVRQW
SHXSUDWLFDEOHVHWVRXYHQWEORTX«HVHQVDLVRQGHVSOXLHVOHVFOLHQWVWUDYDLOOHQWDX[FKDPSV
GDQVGHV]RQHVPDOFRXYHUWHVSDUOHU«VHDXW«O«SKRQLTXH'HSOXVOłXWLOLVDWLRQGłXQNLW
VRODLUHHWGXSDLHPHQWSDUPRELOHPRQH\HVWVRXYHQWQRXYHDXSRXUQRVFOLHQWV/DJHVWLRQ
GłXQU«VHDXGłDJHQWVHVWDXVVLXQYUDLG«ILGłRUJDQLVDWLRQ1RXVLQYHVWLVVRQVDXVVLEHDXFRXS
VXUOHXUIRUPDWLRQDILQTXłLOVSXLVVHQWDFFRPSDJQHUQRVFOLHQWVHWOHXURIIULUXQVHUYLFHGH
SUR[LPLW«HWGHTXDOLW«

2QUHSURFKHDX[RS«UDWHXUVGHNLW3$<*GHQHSDVFLEOHUOHV]RQHVSDXYUHVHWHQFODY«HV
TXHOHVWYRWUHSRLQWGHYXH"
/HXUG«YHORSSHPHQWDSHUPLVGł«OHFWULILHUXQQRPEUHFRQVLG«UDEOHGHSHUVRQQHVHQ
XQWHPSVUHFRUG&HSHQGDQWOH3$<*QłHVWSDVODVROXWLRQXQLTXH¢WRXVOHVSUREOªPHV
Gł«OHFWULILFDWLRQGDQVOHV]RQHVWUªVSHXGHQVHVHWHQFODY«HVLOHVWLPSRVVLEOHGHVHUYLUOHV
SRSXODWLRQV¢XQWDULIDERUGDEOHV6HORQPRLOH3$<*SRUW«SDUGHVHQWUHSULVHVHVWXQRXWLO
IRUPLGDEOHPDLVLOIDXGUDXQHFROODERUDWLRQHQWUHHQWUHSULVHV«WDWVLQVWLWXWLRQVHW21*
SRXUDUULYHU¢«OHFWULILHUWRXWHVOHV]RQHVHQFRUHSORQJ«HVGDQVOHQRLU

4XHOW\SHGHOLHQSURIHVVLRQQHOHQWUHWHQH]YRXVDYHFOHVLQVWLWXWLRQQHOVGHOł«QHUJLHDX
&DPHURXQ"
1RXVUHQGRQVFRPSWHU«JXOLªUHPHQWGXG«SORLHPHQWGHQRVDFWLYLW«VDX[LQVWLWXWLRQV
FDPHURXQDLVHVQRWDPPHQWOH0LQLVWªUHGHOł(DXHWGHOł(QHUJLHHWOł$JHQFHGH
5ªJOHPHQWDWLRQGX6HFWHXUGHOł(OHFWULFLW«'HPDQLªUHJ«Q«UDOHOHVLQVWLWXWLRQV
FDPHURXQDLVHVRQWWUªVELHQDFFXHLOOLQRWUHDFWLYLW«FDUWRXWHVOHVVROXWLRQVSRXUDSSRUWHU
UDSLGHPHQWHWGXUDEOHPHQWOł«OHFWULFLW«VRQWELHQYHQXHV

Ingénieure de formation, Caroline Frontigny a travaillé cinq ans à la Banque mondiale sur
les problématiques d’accès à l’électricité. Elle est cofondatrice de la société Upowa, basée
au Cameroun. Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/
electrifier-lafrique-rurale/

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


290 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

© Upowa
Sensibilisation des utilisateurs du PAYG.

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
-HDQ%DSWLVWH/HQRLU

4XHOOHLPSRUWDQFHDFFRUGH]YRXV¢ODVHQVLELOLVDWLRQHW¢ODIRUPDWLRQGHVXWLOLVDWHXUVb"

mb8QHLPSRUWDQFHFUXFLDOH3RXUOłDGRSWLRQGHODWHFKQRORJLHSRXUOłDFFHSWDWLRQGHV
SURGXLWVQRXVSDVVRQVEHDXFRXSGHWHPSV¢SU«VHQWHUQRVV\VWªPHV¢QRVIXWXUVFOLHQWV
1RV«TXLSHVIRQWGHVG«PRQVWUDWLRQVGDQVOHVYLOODJHVVXUOHVSODFHVDX[FDUUHIRXUV'XUDQW
WRXWHXQHVRLU«HOHVJHQVSHXYHQWYHQLUUHJDUGHUOHV«TXLSHPHQWVOHVWRXFKHUOHVXWLOLVHU
SRVHUGHVTXHVWLRQV/RUVGHOłLQVWDOODWLRQGXV\VWªPHQRWUH«TXLSHGHWHFKQLFLHQVHQ
H[SOLTXHOHIRQFWLRQQHPHQW1RXVDVVXURQV«JDOHPHQWOH6$9HWQRWUHFHQWUHGłDSSHOVHVW
RXYHUWMRXUVVXUSRXUU«SRQGUHDX[TXHVWLRQVGHVFOLHQWVHWOHVDLGHUVLEHVRLQb}

-HDQ%DSWLVWH/HQRLUingénieur de formation, après une carrière de quinze ans dans les


télécommunications, a consacré deux ans à Action Contre la Faim ; sa vision de l’industrie au
service du plus grand nombre et sa connaissance des nouvelles technologies l’ont conduit à créer
Qotto pour concevoir, distribuer et opérer des SSI
en PAYG, en Afrique de l’Ouest. Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.
fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 291

Une absence de cadre institutionnel ? Pour conclure, si certains considèrent l’électrification


A ce jour, comme l’électrification individuelle par ac- domestique par systèmes solaires individuels PAYG
quisition directe de matériel photovoltaïque, le PAYG comme LA solution, ses limites actuelles ne font
ne s’inscrit dans aucun cadre institutionnel propre et d’elle qu’UNE des modalités de l’électrification ef-
se déploie dans un environnement concurrentiel dé- fective d’un territoire rural. Evoluant jusqu’à présent
structuré. Bien que certains observateurs interna- en dehors de toute régulation concernant la qua-
tionaux intègrent les usagers dans leurs statistiques lité du service, l’équité sociale ou la tarification,
et leurs scénarios macroscopiques d’électrification, touchant essentiellement les zones proches des
la régulation technique et tarifaire de cette activité villes ou d’habitat plutôt dense, une généralisation
est quasi inexistante. telle quelle de ce nouveau modèle risque à terme
Zones desservies, niveau de qualité de service, d’exclure les plus fragiles de l’accès à l’électricité.
tarifications, droits et devoirs des parties  : l’accès D’où l’importance des initiatives qui recherchent une
au service est régi par un contrat privé entre un démocratisation des SSI. }
opérateur et un utilisateur, et guidé, de manière dis-
symétrique, davantage par la stratégie du premier
que par les intérêts du second.
Certes, Lighting Africa1 s’est institué en autorité
de validation qualitative. Mais en matière de SSI,
le marché est relativement libre et peu réglemen-
té lorsque la clientèle est un consommateur final.
Comme il ne s’agit pas d’une vente d’électricité
mais d’une vente d’équipements, la réglementation
applicable est celle des biens d’équipements. La
contrainte essentielle vient de la réglementation sur
l’importation des biens.
Devant l’ampleur de l’essor des systèmes PAYG,
le régulateur aurait intérêt à contraindre certains
acteurs à une démarche plus cohérente, au bé-
néfice de l’ensemble de la population. Il faut créer
le «  chaînon juridique manquant  » entre vente de
biens d’équipement et vente d’électricité ou fourni-
ture d’un service public.

Concernant les actions à mettre en œuvre, voir les


préconisations présentées en partie 4.

1. Voir chapitre 1.1.1.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


292 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.2.3.
L’électrification par système solaire individuel
au sein d’un projet intégré.
Comme on l’a évoqué précédemment, la ma- des composants, l’utilisateur payant une re-
jorité des SSI sont installés dans un cadre devance (généralement mensuelle). Des obli-
dérégulé de vente d’équipement acquis di- gations contractuelles lient la SSD à l’usager et
rectement auprès d’un fournisseur de matériel au ministère de tutelle, principalement celui en
ou d’une société proposant une offre PAYG. charge de l’énergie.
Les agences nationales de régulation du secteur
Plus rares mais loin d’être inefficaces, certains électrique veillent au respect d’un cahier des
schémas d’électrification concertés, mis en charges : qualité technique du service, tarification
œuvre dans un cadre institutionnel et portés adaptée, taux de couverture pour les ménages les
par des organisations non lucratives et/ou plus modestes. Une attention particulière est por-
des opérateurs privés dans des mécaniques tée sur la qualité des matériels et la sensibilisation
de concessions, contribuent à développer des usagers.
l’électrification rurale par SSI. Ce schéma semble, en théorie, répondre aux ob-
jectifs d’une électrification concertée, adaptée
L’exemple des sociétés de services et équitable. Cependant, en pratique, le besoin
décentralisées (SSD) en subventions à l’investissement (et parfois à
De nombreux territoires d’Afrique australe (Af- l’exploitation, lors des renouvellements simul-
rique du Sud, Namibie, Botswana), mais aussi tanés de batteries ou autres composants ma-
quelques régions d’Afrique de l’Ouest ont recours jeurs) limite leur déploiement et rend complexe
aux sociétés privées de services décentralisés leur mise en œuvre.
ou « SSD », auxquelles est confiée la gestion d’un Marginalisé par l’arrivée des opérateurs du PAYG,
parc de systèmes solaires individuels. qui se positionnent en relais, ce schéma démontre
Les concessions sont accordées à un opérateur qu’une électrification par SSI accessible au plus
pour une durée de dix à vingt ans. L’opérateur grand nombre et couvrant tous les usages peut
bénéficie de subventions à l’investissement pour voir le jour à deux conditions :
déployer un parc de systèmes solaires individu- çWPUQWVKGPăPCPEKGTaGV
els (de quelques centaines à plusieurs milliers) çNC RTªUGPEG FàWP ECFTG TªINGOGPVCKTG OKPKOCN
visant à desservir un maximum de bénéficiaires fixant les droits et obligations de chaque partie
et d’usages (domestiques, communautaires et prenante.
économiques). Les SSI sont dimensionnés pour Dans ce cas, l’électricité décentralisée est con-
répondre aux besoins spécifiques de la zone, y sidérée comme un service géré par un opéra-
compris aux activités économiques potentielles teur privé censé dégager des bénéfices, et non
et aux usages sociaux. comme un bien marchand, se rapprochant ainsi
Les équipements restent propriété de l’opérateur, de la modalité de délégation de service public.
qui assure leur maintenance et le renouvellement

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 293

© Fondation Energies pour le Monde

Equipe de la SSD Yelen Koura, basée au Mali.

Un projet peut associer exploitant territoire, et d’élargir la base d’usagers auxquels le


privé et institution de microfinance. dispositif de microcrédit est accessible.
On l’a dit, l’acquisition directe de SSI par autofi- Ce circuit de financement est notamment utile
nancement n’est possible qu’aux catégories les pour couvrir des besoins productifs  : le recours
plus aisées des populations rurales. Elle peut au microcrédit permet aux microentrepreneurs
aussi être financée par recours au microcrédit, d’acquérir le système utile pour développer leur
mais les taux pratiqués par les institutions de mi- activité (mécanisation ou production de froid, par
crofinance (IMF) sont élevés : le microcrédit n’est exemple).
pas non plus nécessairement accessible à tous. Certes, le changement d’échelle de ce type
Certains projets, notamment pilotés par des ONG, d’opération n’est pas évident. Certes, l’existence
font le pari d’une implication différente du secteur d’un mécanisme de subvention, nécessaire pour
financier en organisant la distribution d’une offre pouvoir conjuguer qualité du matériel et acces-
de SSI « clé en main » via une IMF. sibilité au plus grand nombre, est une contrainte.
Le soutien d’un financeur du développement, Mais le projet Micresol (voir encadré) démontre
sous la forme de subvention, permet de couvrir qu’il est possible de déployer des programmes
les dépenses d’assistance technique (accompa- ambitieux d’électrification par SSI en coopération
gnement de l’IMF) et de subventionner une partie avec le secteur financier local, en dehors d’une
des équipements et, in fine, de sécuriser la qualité logique purement commerciale. }
des équipements acquis via le microcrédit sur un

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


294 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

/HSURMHW0LFUHVRO
0LVHQāXYUHSDUOD)RQGDWLRQ(QHUJLHVSRXU
Schéma organisationnel du mécanisme OH0RQGHHQWUHbHWbXQGLVSRVLWLI
de crédit énergie GłDFTXLVLWLRQGH66,RULJLQDODE«Q«ŦFL«¢
IR\HUVDX%XUNLQD)DVR6LPSOHGDQV
OHSULQFLSHPDLVDVVH]FRPSOH[HGDQVOD
2UJDQLVPHŦQDQFLHU
PLVHHQāXYUHFHP«FDQLVPHDDVVRFL«
Délivre un crédit
et recouvre les )RXUQLVVHXU GHVRS«UDWHXUVSULY«VORFDX[ IRXUQLVVHXUV
remboursements Fournit, installe GHV\VWªPHVLQVWDOODWHXUV OHVSRXYRLUV
et entretient
les systèmes SXEOLFVXQHFDLVVHGHPLFURŦQDQFHORFDOH
photovoltaîques HWOD)RQGDWLRQ&HWWHGHUQLªUH«WDLWFKDUJ«H
HQWUHDXWUHVGHG«ŦQLUXQHJDPPHGH66,HW
GHVłDVVXUHUGHODTXDOLW«GHVFRPSRVDQWVGH
6WUXFWXUH
GHVHQVLEL OłLQVWDOODWLRQHWGXVHUYLFHDSUªVYHQWH
OLVDWLRQ
Informe les
populations /łDFTXLVLWLRQGHV«TXLSHPHQWVHVWSURSRV«H
rurales et les SDUOłLQVWLWXWLRQGHPLFURŦQDQFH¢VHV
accompagne
dans leurs DGK«UHQWV&HOOHODGLVSRVHGHP«WKRGHV
démarches HWGłRXWLOVSRXUFRQFHYRLUXQHRIIUHDGDSW«H
%«QHŦFLDLUHV
GXSURMHW DX[GLII«UHQWHVFDW«JRULHVGHSRSXODWLRQHW
Familles rurales «YDOXHUOHVULVTXHVSRXUFKDTXHHPSUXQWHXU
qui contractent 8QHIRLVOHFU«GLWDFFRUG«OHV\VWªPHHVW
en emprunt
LQVWDOO«HWHQWUHWHQXSHQGDQWXQHGXU«H
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde. GHWURLVDQV FRUUHVSRQGDQW¢ODGXU«HGH
UHPERXUVHPHQWGXPLFURFU«GLW SDUOH
SDUWHQDLUHWHFKQLTXHORFDO6LOłDFKDWHWOD
IRXUQLWXUHGHVPDW«ULHOVRQW«W«HQSDUWLHVXEYHQWLRQQ«VOłLQVWDOODWLRQODPDLQWHQDQFHOHVFKDUJHV
ŦQDQFLªUHVHWOHVDXWUHVG«SHQVHVGHJHVWLRQRQW«W«FRXYHUWHVSDUOHSDLHPHQWGHVPHQVXDOLW«V

$OłLVVXHGXUHPERXUVHPHQWXQOLHQIRUWVłHVWFU««HQWUHOłXVDJHUHWOHSDUWHQDLUHWHFKQLTXHTXL
SURSRVHVHVVHUYLFHVGHPDLQWHQDQFHSRXUODFRQWLQXLW«GXVHUYLFH/łRS«UDWLRQDFRQQXXQYUDL
VXFFªVQRWDPPHQWJU¤FH¢ODSURSRVLWLRQGHSOXVLHXUVNLWV¢GHVWLQDWLRQGłDFWHXUV«FRQRPLTXHV
GRQWXQV\VWªPHGH:FIRXUQLDYHFXQU«IULJ«UDWHXUGHOLWUHV

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 295

© Fondation Energies pour le Monde

Caisse de microcrédit au Burkina Faso (projet Micresol).

3DUROHGHSURIHVVLRQQHOOH
Sarah Holt
4XDWUHDQVDSUªVODILQGXSURMHW0LFUHVROOHV«TXLSHPHQWVVRQWLOVHQFRUHRS«UDWLRQQHOVb"

mb,PSOLTX«GªVODFRQFHSWLRQGXSURMHWXQRS«UDWHXUORFDOOłHQWUHSULVH%HWD EDV«HDXFāXU
GHOD]RQHGłLQWHUYHQWLRQ DDVVXU«OłLQVWDOODWLRQHWODPDLQWHQDQFHGHV«TXLSHPHQWVVRODLUHV
&HVHUYLFH«WDQWLQW«JUDOHPHQWILQDQF«SDUOHPLFURFU«GLWSHQGDQWVDGXU«H WURLVDQV 
FHUWDLQVXWLOLVDWHXUVHQE«Q«ILFLHQWHQFRUH OHVGHUQLHUVPLFURFU«GLWVRQW«W«DFFRUG«VILQ
HWG«EXW /HVE«Q«ILFLDLUHVTXLOHVRXKDLWHQWSHXYHQWSRXUVXLYUHDYHF%HWDSRXU
OłHQWUHWLHQGHOHXUNLWXQHIRLVTXłLOHVWSD\«HWTXłLOVHQVRQWSURSUL«WDLUHV
0DOKHXUHXVHPHQWPDOJU«FHGLVSRVLWLILOHVWGLIILFLOHGHVXLYUHOHV«TXLSHPHQWVXQHIRLV
OHFU«GLWUHPERXUV«HWOHVSULQFLSDX[DFWHXUVG«OL«VGHOHXUHQJDJHPHQWFRQWUDFWXHO
&HPDQTXHGłDFFRPSDJQHPHQWGDQVODGXU«HUHVWHVHORQPRLXQGHVG«ILVPDMHXUVGHV
SURMHWVGł«OHFWULILFDWLRQG«FHQWUDOLV«HHQ$IULTXHb}

Sarah Holt,VRFLR«FRQRPLVWHGHOł«QHUJLHDWUDYDLOO«DYHFOł$'(0(OD*,=OD)RQGDWLRQ(QHUJLHVSRXUOH
0RQGHHWDXMRXUGłKXLDYHF,('bHOOHLQWHUYLHQWGHSXLVXQHGRX]DLQHGłDQQ«HVGDQVOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«
GDQVSOXVLHXUVSD\VGł$IULTXH
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

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296 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

© Mycmain

Association de femmes posant avec leur épargne au Malawi

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 297

3DPLJDbOłDFFªV¢Oł«QHUJLHSDUODPLFURŦQDQFH
SDUWLFLSDWLYH

21*LQWHUQDWLRQDOHFU««HHQ3DPLJD JURXSHGHPLFURŦQDQFHSDUWLFLSDWLYHSRXUOł$IULTXH 
G«YHORSSHGHVU«VHDX[GłLQVWLWXWLRQVGHPLFURŦQDQFH ,0) GDQVGL[SD\VGł$IULTXHVXEVDKDULHQQH
GDQVOłREMHFWLIGHFRQWULEXHUDXG«YHORSSHPHQWGXSRWHQWLHO«FRQRPLTXHGXFRQWLQHQW

(QRXWUHGHSXLVHOOHDLGHOHVLQVWLWXWLRQVŦQDQFLªUHVUXUDOHV ,0) ¢G«YHORSSHUGHV


SURGXLWVŦQDQFLHUVDGDSW«VDŦQGHIDYRULVHUOłDFFªV¢Oł«QHUJLHGHVSRSXODWLRQVHQ]RQHUXUDOH
/HPRGªOH3DPLJDUHSRVHVXUXQHDSSURFKHSDUWHQDULDOH WZRKDQGPRGHO HQWUHXQHLQVWLWXWLRQ
ŦQDQFLªUHHWXQRXSOXVLHXUVIRXUQLVVHXU V GHVROXWLRQVVRODLUHVTXLIDFLOLWHQWSRXUOHVSRSXODWLRQV
UXUDOHVOłDFFªV¢OłLQYHVWLVVHPHQWŦQDQFLHUHW¢GHVVROXWLRQVVRODLUHV
GHTXDOLW«

/H&U«GLWVRODLUHSURGXLWŦQDQFLHUVS«FLŦTXHGHVWLQ«¢ŦQDQFHUOłDFFªV¢Oł«QHUJLHHWDGDSW«
DX[SURF«GXUHVH[LVWDQWHVGHV,0)D«W«FRG«YHORSS«DŦQGłDWW«QXHUOHVULVTXHVOL«VDX[FU«GLWV
«QHUJLH(JDOHPHQWOHV,0)SHXYHQWJU¤FH¢FHWWHORJLTXHSDUWHQDULDOHG«FDLVVHUGLUHFWHPHQW
OłDUJHQWDXIRXUQLVVHXUTXLOLYUHHQVXLWHODVROXWLRQVRODLUHDX[FOLHQWVUHFHYDQWDLQVLOH&U«GLW
VRODLUHmbHQQDWXUHb}

'HSXLVŦQFHPRGªOHHVWWHVW«DX&DPHURXQ NLWVVRODLUHV HQ(WKLRSLH NLWV HW


DX.HQ\D NLWV 0DOJU«XQG«SORLHPHQWHQGH©¢GHVDWWHQWHVLQLWLDOHVOHVSUHPLHUVLPSDFWV
PHQWLRQQ«VSDUOHVFOLHQWV DFFªVIDFLOLW«¢GHVVROXWLRQVVRODLUHVGHTXDOLW«U«GXFWLRQGHV
G«SHQVHV«QHUJ«WLTXHVGLPLQXWLRQGHVSUREOªPHVGHVDQW«OL«V¢OłXWLOLVDWLRQGXN«URVªQH VRQW
SRVLWLIV

3DPLJDDFFRPSDJQHDFWXHOOHPHQWVHV,0)SDUWHQDLUHVDXFKDQJHPHQWGł«FKHOOHHQG«SOR\DQWOHV
&U«GLWVVRODLUHVGDQVOłHQVHPEOHGHVU«VHDX[GłDJHQFHVUXUDOHVGHVWURLVSD\VHWHQGLYHUVLŦDQWOHXU
RIIUHGHVROXWLRQVVRODLUHV&HPRGªOHDSDUDLOOHXUV«W«U«SOLTX«HQ$IULTXHGHOł2XHVWDX%«QLQHW
DX6«Q«JDO

6RXUFHb Nicolas Renard, David Ojcius, Dinah Louda, et Monique Fourdrignier, « Électrification décentralisée et
développement » FACTS Report, de l’Institut Veolia, (2016) : 128-137.

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298 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.3.
L’électrification des
infrastructures publiques 
reste problématique.
Dans les pays subsahariens les moins avancés, souvent
dépourvus de ressources fiscales stables et suffisantes, les
services publics souffrent d’un manque de moyens pour réaliser
leurs missions dans des conditions minimales d’équipement.
En milieu rural, les infrastructures éducatives, sanitaires, cultuelles
ou culturelles, lieux essentiels où se jouent la cohésion sociale
et le développement, ne font pas exception. C’est ce qui explique
que leur électrification a constitué l’un des premiers chantiers
des acteurs de l’accès à l’électricité.

Intervenant là encore en ordre dispersé, ces acteurs n’ont,


pour la plupart, pas suffisamment anticipé les contraintes liées
à l’exploitation et à la gestion des ouvrages, d’où un manque
de pérennité du service rendu.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 299

© Fondation Energies pour le Monde

Centre de santé électrifié au Burkina Faso.

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300 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.3.1.
Electrifier les infrastructures publiques :
l’évidence sociale à l’épreuve de la réalité.
Les infrastructures dites « publiques » regrou- Ces lieux, indispensables à la
pent l’ensemble des bâtiments et ouvrages à cohésion d’une communauté rurale,
l’usage du public d’une localité rurale : ont une faible capacité contributive.
çGPUGKIPGOGPVªFWECVKQPa  les écoles pri- En Afrique subsaharienne, notamment franco-
maires, les collèges et parfois les lycées, qu’ils phone, la gestion de ces infrastructures est, en
soient sous gestion privée (souvent rattachés à théorie, assurée localement selon le modèle de
un culte) ou publique ; décentralisation «  à la française  ». En pratique,
çUCPVªa  toutes les infrastructures de santé, l’expérience montre que cette gestion locale est
de la case de santé à l’hôpital secondaire, la défaillante, en raison du manque de moyens fi-
plupart ayant la capacité de pratiquer des nanciers alloués par les organismes de tutelle
accouchements ; (ministères de la Décentralisation, de la Santé,
çKPUVKVWVKQPUa  les mairies et bâtiments adminis- de l’Education) ou par les associations d’usagers
tratifs rattachés, présents dans les chefs-lieux (comités de parents d’élèves, comités de gestion
de communes, non loin des lieux publics ou des de dispensaire, etc.).
espaces dédiés aux marchés et aux manifesta- Dans le cadre d’un programme d’électrification, il faut
tions locales ; clarifier en amont si des dépenses de maintenance
çD£VKOGPVU¡XQECVKQPUQEKCNGGVEWNVWTGNNGa les et de remplacement sont à provisionner ; il faut im-
foyers de jeunes ou de femmes, les marchés pliquer les institutions pertinentes dès la phase
couverts, les locaux de coopératives, les mai- préparatoire, et anticiper les obstacles qui pour-
sons des associations, les foyers culturels, sou- raient affecter l’exploitation, et de fait la pérennité.
vent bâtis à l’initiative d’ONG ;
çªFKăEGUTGNKIKGWZa les lieux de culte entretenus
et animés par des représentants des confes-
sions, lieux actifs de la vie et de l’équilibre des
communautés.
Ce sont là autant d’espaces assurant un minimum
de service public, de lieux de rencontres impor-
tants dans les sociétés traditionnelles où la trans-
mission orale reste essentielle. Selon les cultures,
la hiérarchie sociale s’y affirme ou s’y efface.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 301

(OHFWULŦFDWLRQGHVE¤WLPHQWVFRPPXQDXWDLUHV

5«FHSWHXUFRXUDQWDOWHUQDWLI

Modules
solaires Régulateur 2QGXOHXU

Batteries

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

Leurs besoins en électricité Leur électrification nécessite généralement des


restent souvent limités. systèmes photovoltaïques relativement simples,
Globalement, les besoins en électricité de ces ou- de quelques centaines de Wc à quelques kWc.
vrages sont souvent faibles et facilement quanti- Cette simplicité, jointe au fort impact social de
fiables. Hormis les centres de santé, qui, selon l’investissement, explique que les premiers pro-
leur importance, peuvent être équipés de conser- jets d’électrification rurale décentralisée aient
vateurs à vaccins ou d’autres équipements spéci- visé ce type d’infrastructures.
fiques (Scialytique, stérilisateur, etc.), les bâti-
ments publics sont relativement peu énergivores : Leur fonctionnement essentiellement diurne les
éclairage, équipement informatique, recharge de rend tout à fait compatibles avec des systèmes
téléphones, sonorisation, éventuellement pro- solaires individuels : le stockage batterie sera peu
duction de froid. sollicité et peut donc être réduit. }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


302 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.3.2.
L’électrification des infrastructures publiques :
un problème de méthode ?
Le problème a déjà été évoqué  : le manque Les initiatives d’électrification
de vision holistique des différents acteurs de impulsées par les pays du Nord,
l’aide au développement, leurs interventions nombreuses mais insuffisamment
atomisées pénalisent l’efficacité de leur ac- coordonnées, sont rarement pérennes.
tion. Ce constat est particulièrement aigu en Une multitude d’organisations du Nord –  asso-
ce qui concerne l’accès à l’électricité. ciations, communes jumelées, groupements de
la diaspora  – contribuent à équiper les ouvrages
Le cas des ouvrages publics – dont l’électrification publics en systèmes solaires photovoltaïques.
est indéniablement la source de nombreux béné- Procédant d’une volonté généreuse, soucieuses
fices éducatifs, sanitaires et sociaux sur un terri- d’impact social, ces initiatives sont souvent
toire – vient l’illustrer de manière concrète : nombre conduites par des acteurs novices, peu éprou-
d’installations ne sont plus opérationnelles. vés aux problématiques techniques et organ-
L’attention portée aux besoins réels des utilisa- isationnelles de l’accès à l’électricité spécifiques
teurs des équipements et l’arbitrage judicieux des à la région.
investissements, afin de satisfaire leurs attentes Pour l’électrification des bâtiments publics, seuls
prioritaires, sont les meilleures garanties d’une les programmes d’envergure nationale portés
bonne utilisation et d’une pérennité du service. par les organisations disposant des moyens pour
mettre en place un encadrement présentent un
bilan satisfaisant.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 303

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
Hervé Gouyet

'HVFHQWDLQHVGł«FROHVRQW«W««OHFWULŦ«HVSDUYRWUH21*$YH]YRXVSXU«HOOHPHQW
TXDQWLŦHUOHVUHWRPE«HVSRXUOHVE«Q«ŦFLDLUHV"
/łDEVHQFHGł«OHFWULFLW«QXLWIRUWHPHQW¢ODTXDOLW«GHOłHQVHLJQHPHQWSRXUPLOOLRQV
Gł«FROLHUV*U¤FH¢QRVRXWLOVGHVXLYLHWGł«YDOXDWLRQHW¢QRWUHEDVHGHGRQQ«HVQRXVSRXYRQV
HVWLPHUGHPDQLªUHDJU«J«HOłLPSDFWGHWRXWHVQRVDFWLRQV/HVLQIRUPDWLRQVVRQWUHFXHLOOLHV
U«JXOLªUHPHQW¢GLVWDQFHRXVXUOHWHUUDLQ/HV«YDOXDWLRQVH[WHUQHVTXHQRXVFRPPDQGLWRQV
G«PRQWUHQWOłDP«OLRUDWLRQGHVU«VXOWDWVVFRODLUHV

,OHVWIU«TXHQWGHUHQFRQWUHUGHVV\VWªPHV39FRPPXQDXWDLUHKRUVVHUYLFH&RPPHQW
DERUGH]YRXVFHWWHTXHVWLRQGHODS«UHQQLW«"
/HV21*RQWOHXUSDUWGHUHVSRQVDELOLW«3OXVGHPLOOLRQVGHSHUVRQQHVYLYHQWHQFRUH
VRXVOHVHXLOGHSDXYUHW«,OSDUD°WFRPSU«KHQVLEOHTXłHOOHVSU«IªUHQWVDWLVIDLUHOHXUVEHVRLQV
LPP«GLDWVSOXW¶WTXHGł«SDUJQHUSRXUUHPSODFHUGHV«TXLSHPHQWV«OHFWULTXHV/łH[S«ULHQFH
FURLV«HGHV21*GXVHFWHXUPRQWUHTXłLOHVWUDUHPHQWSRVVLEOHSRXUOHVFRPPXQHVUXUDOHV
LVRO«HVGHPDLQWHQLUOHV«TXLSHPHQWVFRPPXQDXWDLUHVVDQVVXEYHQWLRQ1RWUH21*PªQH
DLQVLXQHSROLWLTXHYRORQWDULVWHGHVXLYLORQJWHUPHGHVHVSURMHWVTXLYLVH¢JDUDQWLUOH
IRQFWLRQQHPHQWGHVLQVWDOODWLRQVVXUXQHGXU«HGHDQVJU¤FH¢XQIRQGVGHS«UHQQLVDWLRQ
PLVHQSODFHSRXUŦQDQFHUGHVU«SDUDWLRQVHQFDVGłDO«D'łR»DXVVLQRWUHFRQFHSW&DI«
/XPLªUHOłHQWUHWLHQGHV«TXLSHPHQWVGHVVHUYLFHVFROOHFWLIVHVWŦQDQF«JU¤FH¢ODJ«Q«UDWLRQ
GłDFWLYLW«V«FRQRPLTXHVHW¢XQGLVSRVLWLILQQRYDQWGHJHVWLRQSXEOLFSULY«(QŦQHOOHDSXEOL«
XQ*XLGHYLVDQW¢SDUWDJHUVHVUHWRXUVGłH[S«ULHQFHV

'DQVOHPRQWDJHHWODFRQGXLWHGHYRVSURMHWVGł«OHFWULŦFDWLRQFRPPXQDXWDLUHVTXHOV
VRQWYRVOLHQVDYHFOHVLQVWLWXWLRQQHOVORFDX[GXVHFWHXU"
(QSKDVHGłLGHQWLŦFDWLRQOHVLQVWLWXWLRQVORFDOHVVRQWV\VW«PDWLTXHPHQWLPSOLTX«HVOD
FRPPXQHODU«JLRQSURYLQFHHWSRXUOHVSURJUDPPHVGHJUDQGHDPSOHXUOHVPLQLVWªUHV
GHWXWHOOH/HVFRPSDJQLHVQDWLRQDOHVGł«OHFWULŦFDWLRQHWOHVDXWRULW«VGHU«JXODWLRQVRQW
«JDOHPHQWFRQVXOW«HVDŦQGHVłDVVXUHUGHODFRK«UHQFHGHVDFWLRQVSU«YXHVGDQVOD]RQHDYHF
OHVSURJUDPPHVH[LVWDQWV(QFRPSO«PHQWQRXVSDUWLFLSRQV¢GHVDFWLRQVGHFRRS«UDWLRQ
G«FHQWUDOLV«HLPSOLTXDQWGHVFROOHFWLYLW«VORFDOHVLFLHWO¢EDVDŦQGHU«DOLVHUGHVSURMHWV
LQVFULWVGDQVODGXU«HHWODFRQŦDQFH

Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/.

1. Benjamin Sovacool, et Ivan Vera, « Electricity and education:


The benefits, barriers, and recommendations for achieving the
Hervé Gouyet, 57 ans, ingénieur de formation, electrification of primary and secondary schools » (Département
salarié du secteur de l’électricité,préside des affaires économiques et sociales des Nations unies, 2014).

Electriciens sans frontières depuis 10 ans. 2. Julien Carlier, et Véronique de Geoffroy, « Guide de bonnes
pratiques » (Électriciens Sans Frontières et le Groupe URD, 2015).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


304 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

De nombreuses installations sont çCPCN[UGFªăEKGPVGFGUDGUQKPUa


à l’abandon, faute d’anticipation çEQPEGRVKQPKPUWąUCPVGFGNàKPUVCNNCVKQPa
des problématiques d’utilisation çOCKU UWTVQWV CDUGPEG FàGPVTGVKGP FGU ªSWKRG-
et d’entretien. ments et/ou de formation adéquate de leurs
En Afrique subsaharienne, être face à des équipe- utilisateurs.
ments solaires hors d’état de fonctionnement est
fréquent. Pompe solaire hors service, systèmes Quand une école primaire enclavée ou un foyer de
photovoltaïques à l’abandon… l’électrification jeunes reçoit en don un système solaire autonome
rurale décentralisée a sa pierre au cimetière avec les récepteurs associés (éclairage, multimé-
des éléphants blancs (white elephants) du dia) sans que les bénéficiaires aient les moyens de
développement. les entretenir ou de les renouveler, qui en a eu l’idée
originelle  ? Est-ce réellement une demande qui
Bien qu’on ne puisse pas généraliser ce constat répond à un besoin collectif et prioritaire ?
à tous les projets, les conditions techniques des
réalisations s’améliorent. Cependant, les causes, Ce constat met en lumière l’importance de la di-
qui procèdent le plus souvent d’un manque mension socioculturelle dans la stabilité d’un pro-
d’expérience de l’association qui pilote l’opération, jet d’électrification (cf. chapitre 2.4.2.). De la prise
sont bien identifiées :

© Fondation Energies pour le Monde

Système solaire à l’abandon.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 305

© Fondation Energies pour le Monde

Ecole électrifiée à Madagascar.

en compte du facteur humain dépend la pérennité Le jugement de «  l’impliquant  » étant générale-


d’une installation. ment influencé par ce que veut lui montrer
Les acteurs de la coopération bilatérale, prin- «  l’impliqué  » (qui a pour objectif que le projet se
cipaux financeurs de l’électrification des infra- réalise), il faut aller au-delà d’une première ap-
structures publiques, redoublent d’efforts pour proche (cf. chapitre 2.4.2.).
réussir « l’implication des bénéficiaires ». Derrière Dans le cas de l’électrification des infrastruc-
cette terminologie générique, sans réelle unifor- tures publiques, il faut admettre que l’exercice
mité méthodologique, se cache une nécessité se heurte à l’absence de moyens des collectivi-
opérationnelle : prendre le temps de développer tés rurales  ; les résultats sur le long terme sont
une connaissance fine des enjeux socioculturels rarement positifs, quels que soient les efforts
sur le territoire. d’implication réalisés.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


306 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Pourtant, l’électrification des ‹OHFWULŦFDWLRQJURXS«HGłXQGLVSHQVDLUH


infrastructures publiques peut avoir GłXQORJHPHQWGHIRQFWLRQHWGłXQH
des retombées très positives. SRPSH
Pour la collectivité, les impacts bénéfiques di-
rects de l’arrivée de l’électricité sont manifestes.
L’électrification d’une école primaire engendre
l’amélioration des résultats scolaires, conduisant
fréquemment à la construction d’un établisse-
ment d’enseignement général. Celle d’un centre
de santé incite les femmes à venir y accoucher,
entraînant une réduction de la mortalité périnatale.

L’électrification contribue aussi à lever une des lim-


ites des services publics des communes enclavées,
celle de la présence effective du personnel sur le ter-
rain : écoles sans enseignants, centres de santé oc-
cupés sporadiquement par une infirmière vivant dans
la ville la plus proche, élus absents… .àªNGEVTKăECVKQP
6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.
FWNQIGOGPVFWRGTUQPPGN l’incite à demeurer sur
son lieu de travail, car il se sent davantage considéré.

Toutes ces précautions, qui complexifient le


montage du projet, contribuent à en accroître
les impacts, à court et long termes. Les retours
de terrain le confirment (cf. encadré) : l’opération
d’électrification fait pleinement sens et la péren-
nité des équipements est plus probable. }
© Lumièrepourtous, soutenue par Synergie solaire

mb4XDQGOł«OHFWULFLW«HVWDUULY«HGDQVOD
FRPPXQHGł$ERQGUREHDXFRXSGH
FKRVHVRQWFKDQJ«6XUOHSODQVRFLDO
OHVHQIDQWVRQWHXGHVUHWRPE«HV
GLUHFWHV1RXVDYRQVFRQVWDW«XQHQHWWH
DP«OLRUDWLRQGHVU«VXOWDWVVFRODLUHV
QRWDPPHQWGXWDX[GHU«XVVLWHDX%(3&b}

)LWDKLD7DWDQDPELQD ancien maire de la


commune d’Ambondro, Madagascar.
Une classe électrifiée.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 307

Parole de /ł«OHFWULŦFDWLRQ
SURIHVVLRQQHO des logements
Jean-Pierre Bresson GHVDJHQWVSXEOLFV

&RPPHQWLPSOLTXH]YRXV $%HORVXU0HUYLOODJHGHS¬FKHXUV
OHVE«Q«ILFLDLUHVORFDX[b" GHODF¶WH2XHVWGH0DGDJDVFDU
OłDVVRFLDWLRQ1DPDQD /HVDPLVGH
mb&łHVWXQSRLQWSUREO«PDWLTXHSRXU %HOR PRELOLVHGHVIRQGVGHSXLV
ODS«UHQQLW«GHVLQVWDOODWLRQVbOHV SRXUOłDFFRPSDJQHPHQWGXFHQWUHGH
LQILUPLHUVHWOHVSURIHVVHXUVFKDQJHQW VDQW«&HOXLFLDUH©XGHV«TXLSHPHQWV
VRXYHQW WRXVOHVGHX[¢WURLVDQV (Q GHVP«GLFDPHQWVDLQVLTXHGHVYLVLWHV
U«SRQVHODVROXWLRQHVWGHSU«YRLUXQH SRQFWXHOOHVGHP«GHFLQVHXURS«HQVHW
YLVLWHGXV\VWªPH39FKDTXHDQQ«HSDU OHE¤WLPHQWD«W«U«QRY«HWUHFRQVWUXLW
XQ«OHFWULFLHQORFDOSDUIDLWHPHQWIRUP« SOXVLHXUVIRLV¢ODVXLWHGHVF\FORQHV
HWSRVV«GDQWXQVWRFNGHSLªFHVGH &RQV«TXHQFHGHFHWWHDLGHOHVDXWRULW«V
UHFKDQJHb} U«JLRQDOHVHQFKDUJHGHODJHVWLRQGH
OłK¶SLWDOVHVRQWG«VLQW«UHVV«HVGHVRQVRUW
Jean-Pierre Bresson, électricien retraité, a 0DOJU«XQRXWLOGHWUDYDLOFRQWLQXHOOHPHQW
trente ans d’expérience dans l’installation U«QRY«HWDP«OLRU«OHSUREOªPHGH
de petits systèmes PV sur sites isolés OłDEVHQFHGłXQH«TXLSHP«GLFDOHORFDOH
ou couplés au réseau ; depuis dix ans, SHUPDQHQWHVXUSODFHUHVWDLWQRQU«VROX
il installe avec des électriciens locaux /RUVGXSURMHWGł«OHFWULŦFDWLRQSDU
(artisans) des systèmes PV sur des écoles V\VWªPHVVRODLUHVU«DOLV«HQSDU
et des dispensaires pour des associations OłDVVRFLDWLRQXQHDWWHQWLRQSDUWLFXOLªUH
africaines et européennes. D«W«SRUW«HDX[EHVRLQVGXORJHPHQW
GHIRQFWLRQPLWR\HQGHOłK¶SLWDO/HV
Retrouvez l’interview intégrale sur la page GLVFXVVLRQVRQWSHUPLVGł«WDEOLUTXłXQ
web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/ PLQLPXPGHFRQIRUWGRPHVWLTXHVHUDLW
electrifier-lafrique-rurale/. XQDUJXPHQWHVVHQWLHOSRXUUHWHQLUXQ
P«GHFLQ$XMRXUGłKXLSUªVGHbGH
Oł«OHFWULFLW«SURGXLWHSDUOHJ«Q«UDWHXU
GH:FDOLPHQWHOHORJHPHQWGX
SHUVRQQHOb79G«FRGHXUU«IULJ«UDWHXUV
«FODLUDJHRUGLQDWHXUVRQRULVDWLRQ/D
SU«VHQFHGłXQP«GHFLQGDQVODORFDOLW«HVW
SDVV«HGHGHX[¢FLQTMRXUVSDUVHPDLQH
HQPR\HQQH

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


308 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.3.3.
Pompage solaire et éclairage public :
d’autres exemples d’électrification
d’infrastructures publiques

Le pompage solaire et l’éclairage public de milliers de pompes solaires ont été installées
ne doivent pas être exclus du périmètre de sur le continent, bien avant les premières initia-
l’électrification d’une localité rurale. Equiper tives structurées d’électrification rurale par sys-
un puits public d’une pompe solaire ou installer tème photovoltaïque autonome.
des lampadaires le long d’un axe de circulation
s’inscrit dans les processus d’électrification Si les pompes solaires de quelques kWc per-
d’un ouvrage communautaire, en apportant à mettent d’assurer les besoins en eau potable de
la collectivité un service spécifique. plusieurs milliers de personnes, elles offrent aussi
des gains de productivité dans le secteur agricole
Pompage solaire : eau et électricité grâce à l’irrigation des cultures et à l’abreuvage
peuvent faire bon ménage. du bétail.
C’est par son application au pompage que
l’énergie photovoltaïque est apparue en Afrique au Sans rentrer dans les détails, il faut rappeler les
cours des années 1970. Aujourd’hui, des dizaines avantages de cette technologie, qui depuis près de

6FK«PDGHSULQFLSHGłXQV\VWªPH39DXWRQRPHVDQVVWRFNDJH
SRPSDJHDXŦOGXVROHLO

Générateur Réservoir
Convertisseur
SKRWRYROWD±TXH
'&$&
0RWRSRPSH

6RXUFHb Gérard Moine.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 309

© Fondation Energies pour le Monde


Système d’irrigation goutte à goutte installé au Sénégal dans le cadre du projet Panenca (Basse-Casamance, 2018).

quarante ans ne cesse de progresser en perfor- convertisseurs  ; il est ainsi fréquent de croiser
mance, en fiabilité, en disponibilité et en accessibilité : des pompes solaires encore en fonctionnement
çUQPRTKPEKRCNCVQWVTªUKFGFCPUUCăCDKNKVª.CRTQ- plus de vingt ans après leur mise en service.
duction d’électricité est statique : sans pièces en Les principales faiblesses des installations de
mouvement, pas d’usure. Elle ne nécessite pas pompage solaire ne résident pas dans des prob-
de carburant ; lèmes techniques propres aux équipements. Elles
çRCT CKNNGWTU IT£EG ¡ NC OQFWNCTKVª GV ¡ NC UKORNK résident souvent dans une analyse trop impré-
cité des générateurs solaires, une pompe so- cise des conditions de leur utilisation (ressource
laire peut être installée partout, quelle que soit sa en eau, état des forages ou puits) ou du manque
puissance ; d’entretien du réseau de distribution d’eau. Il
çFGRNWUNGWTHQPEVKQPPGOGPVCWVQPQOGlaCWăNFW s’agit donc soit de problèmes essentiellement
soleil », avec un stockage de l’eau dans un réser- hydrauliques et hydrogéologiques en amont de
voir, permet aux pompes solaires de s’affranchir l’installation, soit de soucis de distribution d’eau,
des batteries, maillon faible des systèmes PV ; en aval.
çGPăP NC VGEJPQNQIKG GUV UWąUCOOGPV OCVWTG Comme pour toute autre installation solaire, un
pour que des détaillants disposent de la com- paiement du service, ici de l’eau, doit être mis en
pétence et des pièces de rechange nécessaires place pour anticiper les visites régulières de petit
au remplacement des moteurs, pompes ou entretien et les dépenses de renouvellement.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


310 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

L’éclairage public : une Installés massivement dans les capitales afri-


préélectrification pertinente caines le long des axes routiers, ils se déploient
Dans le sillage des avancées technologiques progressivement dans le monde rural grâce à
dont bénéficient les secteurs de l’éclairage (tech- des solutions techniques adaptées à ce nouveau
nologie LED), du photovoltaïque et du stockage contexte : éclairage modulable et dédié aux espa-
(cf. chapitre  2.3.1.), les lampadaires solaires au- ces publics, fonctionnement sans maintenance,
tonomes simplifient l’éclairage public et connais- durée de vie garantie de cinq à dix ans. Dans un
sent depuis quelques années un développement environnement de plus en plus concurrentiel,
spectaculaire. quelques fabricants français tentent de se démar-
quer par des produits à haute valeur qualitative.

© Fondation Energies pour le Monde

Pompe solaire dans un périmètre maraîcher au Sénégal, projet Essen 2.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 311

6FK«PDGHSULQFLSHGłXQVLWHDYHF«FODLUDJHSXEOLFSDUODPSDGDLUHVRODLUH

-285 NUIT

Panneau
solaire

Contrôleur

Batterie

6RXUFHb Epsolar, https://www.epsolarpv.com/.

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
6W«SKDQH5HGRQ

/ł«FODLUDJHSXEOLFVRODLUHVHG«SORLHPDVVLYHPHQWVXUOHVFLQTFRQWLQHQWV
&RPPHQWGLVWLQJXHUXQSURGXLWGHTXDOLW«DXVHLQGłXQHRIIUHSO«WKRULTXHb"

mb'XSRLQWGHYXHSXUHPHQWWHFKQLTXHXQSURGXLWGł«FODLUDJHSXEOLFGHTXDOLW«VHUHFRQQD°W
GłDERUG¢VRQERQGLPHQVLRQQHPHQWJU¤FH¢GHVFRQQDLVVDQFHVVROLGHVHQ«FODLUDJLVPH
HWHQVRODLUHbRQSHXWDLQVLJDUDQWLUDX[XWLOLVDWHXUVXQVHUYLFHFRQIRUPH¢OHXUVEHVRLQV
QLYHDXGł«FODLUDJH HWGXUDEOH WDX[GHGLVSRQLELOLW« (QVXLWHOHVFRPSRVDQWVLQWULQVªTXHV
GRLYHQWSU«VHQWHUXQHGXU«HGHYLHPLQLPDOHGHGL[DQVHQWHQDQWFRPSWHGHVFRQGLWLRQV
HQYLURQQHPHQWDOHVGłXWLOLVDWLRQ H[HPSOHbWHPS«UDWXUHSRXUOHVEDWWHULHVTXLUHVWHQWOH
FRPSRVDQWOHSOXVVHQVLEOHHWOHSOXVFKHU b}

6W«SKDQH5HGRQ ingénieur de formation, accompagne depuis plus de vingt ans des industriels
spécialisés du secteur photovoltaïque dans la réalisation de nombreux projets dans les pays
émergents (Afrique, Moyen-Orient, Asie).
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/.

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312 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Lieu de vie avec éclairage public à Madagascar

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 313

Afin de faciliter la mise en œuvre d’un programme


d’éclairage public par lampadaires autonomes
solaires, l’Alliance solaire internationale a réalisé
un guide pratique à l’usage des promoteurs avec
l’Institut national de l’énergie solaire (INES)1.

En zone rurale, l’éclairage public autonome


répond à plusieurs besoins :
çKNCOªNKQTGUGPUKDNGOGPVNGUEQPFKVKQPUFGUª-
EWTKVªFGUDKGPUGVFGURGTUQPPGU le long des
axes routiers, mais également dans certains ter-
ritoires exposés ;
çKN ªNCTIKV NGU QEECUKQPU FàCEVKXKVªU UQEKCNGU en
facilitant les discussions en soirée entre habi-
tants et les opportunités d’échanges commer-
ciaux par la présence de vendeurs ;
çKNRGTOGVCWZHCOKNNGUNGURNWUOQFGUVGUFGDª-
PªăEKGT ITCEKGWUGOGPV FG UQWTEGU NWOKPGW-
UGUFGSWCNKVªa il est fréquent de voir les enfants
étudier sous un lampadaire de la place publique
du village.

Au-delà de ces schémas « classiques », plusieurs


solutions ont été développées pour couvrir les
besoins collectifs, et notamment ceux liés aux ac-
tivités économiques. }
© Fondation Energies pour le Monde

1. Institut National de l’Énergie Solaire, « Practical Guide Book - Solar


streetlights » (Le Bourget-du-Lac, 2019).
Le guide est téléchargeable sur le site de l’INES, en français (http://www.
ines-solaire.org/wp-content/uploads/2019/02/guideisa_lampadaires-v-web.
pdf) et en anglais (http://www.ines-solaire.org/wp-content/uploads/2019/02/
guideisa_streetlights-feb2019.pdf).

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314 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.4.
De nouveaux schémas
d’électrification collective
sont apparus récemment.
Plusieurs schémas peuvent couvrir une pluralité d’usages
domestiques et/ou productifs sur un territoire rural non desservi
par le réseau électrique national.
Certaines solutions récentes se focalisent sur les usages
productifs : plateforme multifonctionnelle, zone d’activité
économique (GERES), kiosque énergie. D’autres rendent un service
« universel » plus proche du réseau conventionnel : nanoréseau,
miniréseau.
Parce que ce schéma est celui qui bénéficie du plus grand nombre
de retours d’expérience et qui s’affiche aujourd’hui au cœur des
stratégies d’électrification, le miniréseau est traité dans un chapitre
dédié.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 315

© GERES / Fertil Ink

Vue aérienne de la ZAE de Konséguala

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316 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.4.1.
Les solutions collectives dédiées aux usages
productifs : modèle pertinent ou innovation
sans lendemain ?

L’analyse du tissu économique fait partie in-


tégrante d’un exercice de planification de
l’électrification d’un territoire rural. Il apparaît
logique qu’une bonne prise en compte des
besoins liés aux usages productifs maximise
les chances de voir l’arrivée de l’électricité
concourir au développement économique
du territoire, sous réserve de mettre en place
les mesures idoines d’accompagnement des
acteurs locaux.

Partant de cette hypothèse, plusieurs con- La plateforme multifonctionnelle peut être pen-
cepts d’électrification rurale se concentrent sée comme l’ancêtre des solutions collectives
sur les usages productifs et proposent un ac- actuelles dédiées aux usages productifs qui com-
cès à l’électricité par système collectif pour les mencent à modeler le paysage énergétique rural
acteurs économiques d’une zone, sous une africain. Les leçons tirées de cette expérience et
forme plus ou moins intégrative. Ils viennent la banalisation de la technologie PV ont en effet
ainsi en complément des solutions individuelles conduit à revoir le concept et à donner naissance
(lampes, kits PV) et des installations couvrant les à celui de « kiosque énergie ».
seules infrastructures publiques, pour répondre
aux besoins des activités agricoles, artisanales, Le principe des PTMF.
commerciales ou tertiaires sur le territoire. Il s’agit de centraliser une production d’énergie
et/ou d’électricité dans une localité pour pro-
La plateforme multifonctionnelle : poser des services « productifs » au bénéfice des
un modèle pionnier de services acteurs économiques de la zone (agriculteurs,
énergétiques mutualisés pour les artisans). Atelier mécanique, machine de trans-
acteurs économiques. formation agricole, le champ d’application poten-
Initié en 2006 par le PNUD, le concept de plate- tiel est vaste et le regroupement fait théorique-
forme multifonctionnelle (PTMF) repose sur une ment sens sur tous les plans  : financièrement,
mutualisation sur un site unique de services élec- économiquement et socialement.
triques à destination des acteurs économiques Concernant le volet technique, les premières PTMF
d’une communauté villageoise. étaient équipées d’un moteur thermique d’environ
20  CV (15  kW) alimenté au diesel, permettant

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 317

l’utilisation de diverses machines tournantes (broy- d’une machine thermique (notamment l’achat de
eur, décortiqueuse), mais aussi d’un alternateur carburant), certaines PTMF ont été abandon-
générant de l’électricité pour divers types de ré- nées, alors que d’autres ont su durer plusieurs an-
cepteurs : outillage électroportatif, poste à souder, nées. A titre d’exemple, certaines PTMF installées
production de froid, recharge de batteries, etc. dans des zones à faible dynamisme économique
La gestion de la plateforme est assurée par les n’ont pas stimulé la création de nouvelles activi-
usagers groupés en comité, en association ou en tés et ont été rapidement victimes du manque de
coopérative. Chaque utilisation est payante au moyens pour la gestion et l’entretien.
prorata de la consommation énergétique corres- Autre enseignement à tirer de cette expérience, la
pondant à la demande, calculée au réel (selon af- cohésion sociale de la zone d’implantation est un
fichage du compteur) ou sur base forfaitaire (cal- facteur-clé de réussite : la présence « naturelle »
cul d’équivalence préétabli). L’achat de carburant, en amont du projet de groupements profession-
l’entretien et la gestion globale de la PTMF sont au- nels, notamment la préexistence de groupements
tofinancés grâce aux recettes générées par la ven- de femmes, facilite nettement l’adhésion à cette
te des « services énergétiques » de la plateforme. nouvelle mécanique collective.

Les premiers retours d’expérience Le modèle a évolué pour prendre


témoignent du lien complexe entre en compte les nouveaux besoins.
électricité et activités économiques. Bien que le PNUD continue de déployer des
Le modèle originel des PTMF prouve que la mu- PTMF solaires et hybrides dans différents pays
tualisation d’activités n’est pas suffisante pour ga- d’Afrique, les plateformes sont portées davan-
rantir la pérennité d’une installation commune. tage par des acteurs privés que par des orga-
Rapidement affaiblies par les difficultés tech- nisations communautaires. Par ailleurs, l’énergie
niques et financières liées au fonctionnement solaire a rapidement remplacé les groupes
© PNUD

Plateforme multifonctionnelle du PNUD au Burkina Faso.

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318 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

électrogènes et autres moteurs thermiques. En- mutualisée, que l’on peut génériquement dénom-
fin, les services (à l’origine mécaniques et agri- mer le « kiosque énergie ».
coles) se sont logiquement diversifiés et adap- Derrière cette appellation se cache une diversité de
tés aux évolutions sociétales pour devenir des formats (que cet ouvrage ne recense pas in exten-
services marchands «  immatériels  »  : recharge so), qui reposent tous sur un concept commun : KPU
de téléphone, vente et recharge de lampes por- VCNNGTCWEGPVTGFàWPGNQECNKVªTWTCNG
ªNGEVTKăªG
tables, service informatique, point de relais d’un QW PQP  WPG UQWTEG FG RTQFWEVKQP FàªNGEVTKEKVª
opérateur du PAYG, etc. UKIPKăECVKXG CUUQEKªG ¡ NC XGPVG FG UGTXKEGU
NàGPUGODNGªVCPVIªTªRCTWPQRªTCVGWTNQECN
Les kiosques énergie : une
électrification collective axée De quoi parle-t-on ?
sur la proposition de services. La source de production d’électricité est essen-
Depuis quelques années, différents porteurs de tiellement solaire, avec éventuellement un groupe
projets (ONG, opérateurs privés, institutionnels) électrogène en appoint. Les générateurs de
développent un nouveau type de plateforme quelques kWc permettent de fournir une quantité

3ULQFLSHGHIRQFWLRQQHPHQWGXNLRVTXH«QHUJLH

Services rendus

Modules
Kiosque
solaires
énergie

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 319

d’électricité significative et d’alimenter une large Comme évoqué, le concept repose surtout sur
palette d’équipements, bien au-delà des capaci- une offre de services. Les usagers ne viennent
tés limitées des systèmes solaires individuels pas brancher un récepteur et utiliser l’électricité
domestiques. disponible, mais acheter un service associé

© HERI
© Benoo Energies

Exemples de deux modèles de kiosques solaires : Heri à Madagascar et Benoo Energies au Togo.

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320 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Du froid en
OLEUHVHUYLFHDX[
ERLVVRQVIUD°FKHV
8QNLRVTXHVRODLUHLQVWDOO«DX&DPHURXQ
SURSRVHHQWUHDXWUHVXQVHUYLFHGH
SURGXFWLRQGHIURLGSD\DQW/HNLRVTXH
HVW«TXLS«GHSOXVLHXUVU«IULJ«UDWHXUVbOHV
XVDJHUVSHXYHQWSD\HUSRXU\FRQVHUYHU
OHXUVSURGXLWVDJULFROHV/HPRQWDQW
G«SHQGGXSRLGVGHVSURGXLWVVWRFN«V
à l’électricité disponible grâce au kiosque (re- HWGHODGXU«HGHVWRFNDJH6XUOHSDSLHU
charge de téléphones, service multimédia, froid, OHFRQFHSWHVWV«GXLVDQWHWU«SRQG¢OD
recharge de lampes portables, etc.). Les dizaines FRGLŦFDWLRQHW¢ODPHVXUHGHVLPSDFWV
d’opérateurs aujourd’hui présents sur le continent WHOVTXHSHQV«VSDUOHVRUJDQLVDWLRQV
africain se démarquent par des designs et des LQWHUQDWLRQDOHVGHG«YHORSSHPHQW
modèles économiques différents, mais leurs of-
fres sont, dans la plupart des cas, assez proches. $SUªVTXHOTXHVPRLVVXUOHWHUUDLQSOXV
Souvent, il arrive que les services qui assurent la DXFXQVHUYLFHGHIURLGQłHVWYHQGX¢OD
rentabilité du kiosque s’éloignent des services SRSXODWLRQHWOłRS«UDWHXUDG«YHORSS«XQH
originels imaginés par les concepteurs et suivent ERXWLTXHGHYHQWHGHERLVVRQVIUD°FKHVTXL
l’asymptote logique des besoins exprimés par les DVVXUHbGHVRQFKLIIUHGłDIIDLUHV
populations : recharge de téléphones, audiovisuel
et éclairage. En zone électrifiée, les kiosques peu-
vent également répondre à plusieurs besoins  :
service minimum pour les ménages non raccor-
dés, continuité d’un service électrique en cas de Les systèmes sont, pour la plupart, connectés
défaillance du réseau. pour un monitoring technique à distance, mais la
gestion est déléguée à un opérateur local, choisi
Quels sont les acteurs ? pour son profil commercial et entrepreneurial, ain-
S’il existe différents modèles, la tendance actuelle si que pour sa bonne implantation préalable dans
de ces schémas d’électrification est portée par la localité. Si les gérants locaux assurent princi-
les opérateurs privés, souvent start-up et PME palement la vente des services et l’entretien cou-
locales, qui proposent des kiosques solaires per- rant du système, certains débordent d’imagination
formants, peu coûteux et au design attractif, bien pour faire croître leur chiffre d’affaires et les
conçus et installés dans des localités rigoureuse- kiosques évoluent en fonction des besoins  : bar,
ment sélectionnées. cybercafé, vidéoclub, boutique alimentaire, etc.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 321

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
Samy Chalier

&RPPHQWFKRLVLVVH]YRXVOHVORFDOLW«VSRXUOłLPSODQWDWLRQGHYRVNLRVTXHV«QHUJ«WLTXHVb"

mb1RXVSU«V«OHFWLRQQRQVGHVVLWHVVXUODEDVHGHVGRQQ«HVVRFLR«FRQRPLTXHVGH
Oł,QVWLWXWQDWLRQDOGHVVWDWLVWLTXHVSXLVQRXVQRXVUHQGRQVVXUSODFHSRXUFRQILUPHUOHV
LQIRUPDWLRQVHWUHQFRQWUHUOHVDXWRULW«VHWOHVSRSXODWLRQVORFDOHV1RXVDYRQVSOXVLHXUV
FULWªUHVbP«QDJHVPLQLPXPGDQVOD]RQHGHFKDODQGLVHGXNLRVTXHDFFHVVLELOLW«HQ
VDLVRQGHVSOXLHVFRXYHUWXUHSDUXQU«VHDXW«O«SKRQLTXHDGK«VLRQDXSURMHWGHVDFWHXUV
ORFDX[V«FXULW«SU«VHQFHGłDFWHXUV«FRQRPLTXHV LQVWLWXWLRQGHPLFURILQDQFH«SLFHULH
FRRS«UDWLYH /HVVLWHVG«M¢«OHFWULIL«VSU«VHQWHQWXQERQSRWHQWLHOFDULOVVHVLWXHQWVRXYHQW
VXUOHVSULQFLSDX[D[HVURXWLHUVDYHFXQHIRUWHGHQVLW«GHSRSXODWLRQHWXQSRXYRLUGłDFKDW
SOXV«OHY«TXHGDQVOHV]RQHVLVRO«HVb}

Samy Chalier, diplômé d’un MBA, travaille depuis plus de dix ans à l’international et vit
à Madagascar depuis plusieurs années, où il dirige la société Heri Madagascar.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
9LQFHQW5HQDXG

4XHOPRGªOHWHFKQLFR«FRQRPLTXHHVWPLVHQSODFHSRXUODPDLQWHQDQFHHWSOXV
SDUWLFXOLªUHPHQWSRXUOHUHQRXYHOOHPHQWGHVFRPSRVDQWVFULWLTXHVb"

mb1RXVIRUPRQVOHVJHVWLRQQDLUHVGHVDJHQFHV¢ODPDLQWHQDQFHGHSUHPLHUQLYHDX/HV
DJHQFHVVRQWLQVWDOO«HVSDUGHVSUHVWDWDLUHVTXLDVVXUHQWODPDLQWHQDQFHGHGHX[LªPH
QLYHDX3RXUSHUPHWWUHXQHDVVLVWDQFHHIILFDFHQRXVGLVSRVRQVGłXQDJHQWWHFKQLFR
FRPPHUFLDOTXLIDLWOHOLHQHQWUHOHVJHVWLRQQDLUHVGłDJHQFHHWOHVSUHVWDWDLUHVYLDXQ
QXP«URGHW«O«SKRQHLQVFULWGDQVOłDSSOLFDWLRQGHJHVWLRQGHVDJHQFHV&HWWHDVVLVWDQFHIDLW
SDUWLHGHOłRIIUHGHVHUYLFHTXHQRXVDSSRUWRQVDX[HQWUHSUHQHXUVb}

9LQFHQW5HQDXG a vingt-cinq ans d’expérience dans la gestion de projets ruraux en Afrique ;


il est cofondateur de Benoo Energies, où il a plus particulièrement en charge le développement
de partenariats avec des entrepreneurs du développement rural et de la mesure de l’impact social.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

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322 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

%GTVCKPGU10)KPUVCNNGPVªICNGOGPVFGURNCVG- De principe similaire mais d’envergure nettement


HQTOGU ªPGTIªVKSWGU OWNVKUGTXKEGU C’est le plus conséquente, les zones d’activité économique
cas du Gret, en Mauritanie, qui a déployé plus de (ZAE), conçues et déployées au Mali par le GERES,
40  plateformes solaires, ou d’Electriciens Sans rassemblent plusieurs acteurs économiques autour
Frontières, qui expérimente à Madagascar le con- d’un même point de production d’électricité (centrale
cept de « Café lumière », espace géré par un en- solaire autonome). Un des points forts et originaux
trepreneur privé. de ce concept intéressant consiste à s’appuyer sur
Le programme Café lumière fait l’objet d’une étude des mécaniques de financement local.
de cas à retrouver sur la page web de l’ouvrage  : La ZAE fait l’objet d’une étude de cas disponible sur
http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/. le site web de l’ouvrage .

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
Grégoire Gailly

/HPRGªOHGHFHQWUHGHVHUYLFHGł«OHFWULFLW«G«FHQWUDOLV«VHG«FOLQHG«VRUPDLVHQGLII«UHQWVFRQFHSWV
=$(SODWHIRUPHNLRVTXHVŊ6HORQYRXVHVWLODVVH]YLDEOH«FRQRPLTXHPHQWSRXUVXVFLWHUXQ
LQYHVWLVVHPHQWPDVVLIGXVHFWHXUSULY«"
,OQłHVWSDVHQFRUHPDWXUH/HVIXWXUHV=$(SHUPHWWURQWGHFRQILUPHUOHELHQIRQG«GXPRGªOH
«FRQRPLTXHGHVWDQGDUGLVHUSDUWLHOOHPHQWOHGLVSRVLWLIRUJDQLVDWLRQQHOHWGHGLVSRVHUGHSOXVGH
GRQQ«HVSRXUFRQYDLQFUHGHVLQYHVWLVVHXUV3OXVLHXUVIDFWHXUVSHXYHQWOHVV«GXLUHXQHFOLHQWªOHGH73(
VROYDEOHVOHXUUHJURXSHPHQWVXUXQP¬PHVLWHHWOHGLVSRVLWLIGłDFFRPSDJQHPHQWGHFHV73(8QSODQ
GłDIIDLUHVHVW¢Oł«WXGHSRXUFU«HUXQHHQWUHSULVHGHJHVWLRQGHV=$(TXLUHJURXSHUDLWGHVVLWHVSHWLWVHW
LVRO«VDYHFGHVFR½WVGHWUDQVDFWLRQPRLQGUHVGHVLQYHVWLVVHXUVRQWG«M¢PDQLIHVW«OHXULQW«U¬W

/łDGK«VLRQFRPPXQDXWDLUHHWODFRPSU«KHQVLRQILQHGHVEHVRLQVUHVWHQWHVVHQWLHOOHVSRXUXQSURMHW
U«XVVL/HU¶OHGHV21*HVWLOLQGLVSHQVDEOH"
/ł21*SHXWMRXHUSOXVLHXUVU¶OHVU¶OHGH5 'SRXUODPLVHHQSODFHGHSURMHWVSLORWHVHWODSURGXFWLRQ
GHGRQQ«HVWHFKQLFR«FRQRPLTXHVU¶OHGłLQWHUP«GLDWLRQHWGłDQLPDWLRQSRXUODFRQFHUWDWLRQHQWUH
DFWHXUVGłXQWHUULWRLUHDILQGłLGHQWLILHUGHVVROXWLRQVDGDSW«HVU¶OHGłDSSXLFRQVHLOSRXUVWUXFWXUHUXQ
GLVSRVLWLIGHUHQIRUFHPHQWGHFDSDFLW«VHQJHVWLRQGHVHQWUHSUHQHXUVVXUOD]RQHGłDFWLYLW«

4XHHVWVHORQYRXVOHSULQFLSDOSRLQWGHIUDJLOLW«GXPRGªOH=$(H[S«ULPHQW«SDUOH*(5(6DX0DOL"
/HJHVWLRQQDLUHGXVLWH%LHQTXłLODLWFU««XQH6$5/SRXUFRQWUDFWXDOLVHUDYHFOłDVVRFLDWLRQGH
G«YHORSSHPHQWORFDOG«O«JX«HSDUODFRPPXQHSRXUJ«UHUOD=$(LOQłDSDVOXLP¬PHLQYHVWLGDQV
OłLQIUDVWUXFWXUH6łLOTXLWWHVRQSRVWHRXVHWURXYHGDQVOłLQFDSDFLW«GHWUDYDLOOHULOVHUDGLIILFLOHGHOH
UHPSODFHUGDQVXQG«ODLUDLVRQQDEOHFHTXLSHXWDIIHFWHUOHVHUYLFHYRLUHODS«UHQQLW«GHOłLQIUDVWUXFWXUH
/DJHVWLRQPXWXDOLV«HGHV=$(SHUPHWWUDLWMXVWHPHQWGłDVVXUHUFHWWHFRQWLQXLW«HQFDVGHFRXSGXUVXU
XQVLWH

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 323

$ORUVTXHOłRQUHSURFKHDX[RS«UDWHXUV3$<*GHFRXYULUOHVVHXOVEHVRLQVGRPHVWLTXHVOHPRGªOH
=$(FLEOHOHVDFWHXUV«FRQRPLTXHV&HVVFK«PDVGł«OHFWULILFDWLRQVRQWLOVFRPSO«PHQWDLUHVGDQV
XQHP¬PH]RQH"
(QHIIHWQRXVHQYLVDJHRQVODPLVHHQSODFHGłXQFLUFXLWGHGLIIXVLRQGł«TXLSHPHQWVVRODLUHVDGRVV«DX[
=$(SRXUYDORULVHUODSU«VHQFHSHUPDQHQWHGłXQHFRPS«WHQFHWHFKQLFRFRPPHUFLDOHHQ]RQHUXUDOH
LVRO«H/HJHVWLRQQDLUHGHOD=$(HVWFDSDEOHGHSURSRVHUXQGLPHQVLRQQHPHQWSHUVRQQDOLV«HWXQH
LQVWDOODWLRQGHTXDOLW«¢XQSUL[DERUGDEOHSDUGHVWHFKQLFLHQVIRUP«V&HWWHDFWLYLW«UHQIRUFHUDDXVVLOD
YLDELOLW«GXPRGªOH«FRQRPLTXHGHOD=$(

Grégoire Gailly est agronome, spécialiste du développement local. Il travaille pour des ONG de
développement local depuis 2001 et est directeur Afrique de l’Ouest du GERES depuis 2014.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage KWWSZZZIRQGHPRQJHOHFWULŦHUODIULTXHUXUDOH

Quel modèle économique ? Quel cadre institutionnel ?


Il ne semble pas exister de modèle économique L’installation d’un kiosque énergie dans un village
unique pour ces nouveaux concepts, encore en est plus intrusive que la diffusion de systèmes indi-
phase exploratoire. Les démarches des principaux viduels. D’une part, elle nécessite l’intervention des
opérateurs convergent néanmoins sur plusieurs autorités locales (maires, notables) pour l’obtention
points : la recherche d’un minimum de subventions d’un terrain dédié. D’autre part, le versement de
à l’investissement et de recettes générées par la taxes communales peut être imposé à l’opérateur,
vente des services au niveau du kiosque. de même qu’un droit d’acquisition du terrain dédié
La personne localement en charge du kiosque à l’installation du système. Sur le plan national, la
peut être salariée, délégataire, franchisée ou seule vente de services, et non d’électricité, per-
travailleuse indépendante taxée sur son chiffre met d’échapper à la régulation des autorités com-
d’affaires  ; le kiosque reste généralement la pro- pétentes en matière de vente d’électricité. Offre et
priété de l’opérateur privé. Ce dernier a tout inté- demande se partagent les arbitrages.
rêt à mettre le maximum d’outils, de compétences
et de flexibilité au service de ses opérateurs de Atouts et fragilités du modèle.
terrain, afin de faire germer des initiatives  : le ki- Le modèle du kiosque énergie répond à des be-
osque n’est pas un concept « figé ». soins domestiques et économiques par une ap-
proche mutualisée qui semble financièrement
Cet accompagnement n’éradique pas les ris- plus cohérente que la diffusion de systèmes in-
ques associés à toute gestion locale  ; même si les dividuels pour les ménages modestes  : la loca-
kiosques connectés permettent de suivre les con- tion de lampe solaire portable et rechargeable
sommations d’électricité à distance, l’économie in- au kiosque, incluant la recharge d’un ou plusieurs
formelle et ses déviances restent un écueil à éviter. téléphones, est moins onéreuse pour l’usager, qui

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


324 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

‹WXGHGHFDV=RQHGł$FWLYLW«V(OHFWULŦ«HDX6XG0DOL

$SUªVFRQVWDWTXHVHXOHVGHV]RQHVUXUDOHVPDOLHQQHVDYDLHQWDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«HWTXH
ODVRXUFHGł«QHUJLHSULPDLUHSURYHQDLWGXJDVRLODXSUL[FURLVVDQWVłHVWHQYLVDJ«HODVROXWLRQGH
FU«HUXQH=RQHGł$FWLYLW«V(OHFWULŦ«H =$( DOLPHQW«HWRWDOHPHQWSDUGHV(Q5SDQQHDX[VRODLUHV
SKRWRYROWD±TXHVHW+XLOH9«J«WDOH3XUH +39 GHMDWURSKD

&HWWHVROXWLRQD«W«SHQV«HSDUOHVKDELWDQWVHQSDUWHQDULDWDYHFOH*(5(6HWODFRPPXQHGH
.RQV«JX«OD/łREMHFWLI«WDQWGHUDSSURFKHUGHVHQWUHSULVHVVXUXQP¬PHVLWHGłDERUGSRXU
G«SDVVHUOHVFRQWUDLQWHVWHFKQLTXHVUHQFRQWU«HVDYHFXQPLQLU«VHDX PRQW«HVHQFKDUJH
FKXWHVGHWHQVLRQ HQVXLWHSRXUFRXYULUGHPDQLªUHRSWLPDOHOHXUVEHVRLQVHQ«OHFWULFLW«¢XQ
WDULIDERUGDEOHGDQVOHVTXDQWLW«VHWDYHFODTXDOLW«UHTXLVHVSRXUOHXUVDFWLYLW«V)RQFWLRQQDQW
VXUOHPRGªOHGłXQLQFXEDWHXUGłHQWUHSULVHVUXUDOHVFHWWH=$(SURSRVHXQDFFRPSDJQHPHQW
LQGLYLGXDOLV«GXUDQWOHVGHX[SUHPLªUHVDQQ«HVGłLPSODQWDWLRQDLQVLTXHGHVIRUPDWLRQVHWXQH
PLVHHQUHODWLRQGHVWUªVSHWLWHVHQWUHSULVHVORFDOHV 73( DYHFOHVLQVWLWXWLRQVGHPLFURŦQDQFH

$LQVLOD=$(IRXUQLWGHOł«OHFWULFLW«¢73( ERXODQJHULHVPHQXLVHULHVUDGLRFRPPXQDXWDLUH
HWF GDQVGHVE¤WLPHQWVELRFOLPDWLTXHV8QVHUYLFHGłH[WUDFWLRQGł+39GHMDWURSKDD«JDOHPHQW
«W«LQVWDOO«DŦQGłDSSURYLVLRQQHUOHJURXSH«OHFWURJªQHGHOD=$(HWOHVHQWUHSULVHVGHVORFDOLW«V
DOHQWRXUV/DSURGXFWLRQGł«OHFWULFLW«GHOłHQVHPEOHGHOD=$(HVWHIIHFWX«HSDUOHVSDQQHDX[
VRODLUHVSKRWRYROWD±TXHV

/HVU«VXOWDWVGHFHSURMHWVRQWPXOWLSOHVHWWUªVSRVLWLIV/HVSHUWHVDJULFROHVVRQWU«GXLWHV
OHVDOLPHQWVVRQWPLHX[FRQVHUY«VHWSRVVªGHQWGHPHLOOHXUHVTXDOLW«VQXWULWLYHV/DUDGLR
FRPPXQDXWDLUHVHQVLELOLVHHWLQIRUPHODSRSXODWLRQG«YHORSSDQWDLQVLGHQRXYHOOHVDFWLYLW«V
VRFLDOHV/HVHQWUHSUHQHXUVSOXVSURGXFWLIVVRQWSOXVDSWHV¢J«Q«UHUGHVE«Q«ŦFHVHWOłHPSORLHVW
IDYRULV«HPSORLVGLUHFWVVRQWFU««VHWHPSORLVLQGLUHFWVRQW«W«FRQVROLG«V(QŦQODSOXV
JUDQGHDWWUDFWLYLW«GXWHUULWRLUHIDYRULVHOłLPSODQWDWLRQGHQRXYHOOHVHQWUHSULVHV

&HWWHU«XVVLWHHVWXQHSRUWHRXYHUWH¢Oł«ODERUDWLRQGHSURMHWVVLPLODLUHVGDQVGłDXWUHV]RQHVGX
0DOLHWDLOOHXUV/łHQMHXGXSDVVDJH¢XQQRPEUHGH=$(VLJQLŦFDWLISRXUU«SRQGUHDX[EHVRLQVGHV
]RQHVQRQ«OHFWULŦ«HVVHUDGłHQFRQIRUWHUODJRXYHUQDQFHHWOHPRGªOH«FRQRPLTXH

6RXUFH Résumé réalisé à partir du site internet du GERES https://www.geres.eu/fr/actions/zone-dactivites-electrifiee-au-mali-zae/


Retrouvez l’étude de cas intégrale sur la page web de l’ouvrage

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 325

&DI«OXPLªUHXQHVROXWLRQGXSOLFDEOH
SRXUOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«H
Contexte
/HSURMHW&DI«/XPLªUH  HQWHQGU«SRQGUHDXIDLEOHDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«HQ]RQHUXUDOH
DYHFXQGLVSRVLWLIGł«OHFWULŦFDWLRQE«Q«ŦFLDQW¢ODIRLVDX[VHUYLFHVFROOHFWLIVDX[PLFURHQWUHSULVHV
HWDX[IR\HUV,OVłHVWLPSODQW«GDQVVL[FRPPXQHVUXUDOHVGHODU«JLRQGH9DNLQDQNDUDWUD¢
0DGDJDVFDUXQSD\VGDQVOHTXHOGHVKDELWDQWVYLYHQWVDQVDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«/HVJURXSHV
«OHFWURJªQHVRXOHVVROXWLRQVVRODLUHVLQGLYLGXHOVPLVHQSODFHMXVTXłDORUVSRXUSDOOLHUFHSUREOªPH
SU«VHQWDLHQWGHQRPEUHX[LQFRQY«QLHQWVOHVSUHPLHUVVRQWU«VHUY«VDX[P«QDJHVULFKHVHW
OHVVHFRQGHVQHU«VROYHQWSDVOHVEHVRLQVGHSXLVVDQFH«OHFWULTXHLPSRUWDQWHQ«FHVVDLUHDX
G«YHORSSHPHQWGłDFWLYLW«V«FRQRPLTXHV

Solution
&łHVWGDQVFHFRQWH[WHTXHOł21*(OHFWULFLHQVVDQVIURQWLªUHVDSURSRV«XQHVROXWLRQTXLVHVLWXH
HQWUHOHU«VHDXHWOHNLWLQGLYLGXHOVL[SODWHIRUPHV«QHUJ«WLTXHVPXOWLVHUYLFHVK\EULGHVDOLPHQW«HV
SULQFLSDOHPHQWSDUOł«QHUJLHVRODLUH(WDEOLVXUODEDVHGłXQSDUWHQDULDWSXEOLFSULY«DYHF
OłLPSOLFDWLRQGHVFROOHFWLYLW«VORFDOHVHWGHOł(WDWHWODSDUWLFLSDWLRQGłXQRS«UDWHXUSULY«(262/OH
SURMHWDSRXUREMHFWLIGH
IRXUQLU¢E«Q«ŦFLDLUHVXQERXTXHWGHVHUYLFHV«QHUJ«WLTXHVDSUªV«WXGHGHOHXU
FRQVHQWHPHQW¢SD\HU
G«YHORSSHUGHVDFWLYLW«V«FRQRPLTXHVGDQVFHVYLOODJHV
DP«OLRUHUODGLVSRQLELOLW«GHVVHUYLFHVSXEOLFVSULRULWDLUHV «FROHVFHQWUHVGHVDQW«PDLULH JU¤FH¢
Oł«OHFWULFLW«

/HSURMHWDSRXUYLV«HGł¬WUHU«SOLFDEOHGDQVGHVFRQWH[WHVORFDX[YDUL«VHWHVVDLPHG«M¢DX%«QLQ
R»TXDWUH&DI«V/XPLªUHVHURQWLPSODQW«VGłLFL

6XLYLGXSURMHW
8QGLVSRVLWLIGHVXLYLHVWG«SOR\«GHSXLVOHG«EXWSURMHWSRXUY«ULŦHUOłDWWHLQWHGHVU«VXOWDWVHW
OłLPSDFWGHOłDFWLRQVXUODSRSXODWLRQ&HOXLFLVHEDVHVXU ODG«ŦQLWLRQGDQVODSKDVHGHFDGUDJH
GXSURMHWGłLQGLFDWHXUVFO«VGHVXLYLHQFRQFHUWDWLRQDYHFOł$)' GHVHQTX¬WHVSU«DODEOHV
TXDQWLWDWLYHVHWTXDOLWDWLYHVSHUPHWWDQWGłDQDO\VHUOHVFRQGLWLRQVGHYLHGHVSRSXODWLRQVHWOH
PDUFK«SRXUFKDTXHVHUYLFH ODU«DOLVDWLRQGHGHX[«YDOXDWLRQVH[WHUQHVLQWHUP«GLDLUHHWŦQDOH
SRXUPHVXUHUOHVU«VXOWDWVGXSURMHWHWVRQLPSDFWVXUOHVSRSXODWLRQV

6RXUFHRésumé réalisé à partir du site internet Electriciens Sans Frontières, https://www.electriciens-sans-frontieres.org/


projet/district-dantsirabe-cafe-lumiere-plateformes-energetiques-multiservices-dans-la-region-du-vakinankaratra/
Retrouvez l’étude de cas intégrale sur la page web de l’ouvrage

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326 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

se tourne vers un kiosque au lieu de s’équiper d’un Il n’en reste pas moins que les kiosques com-
système solaire individuel. plètent utilement la gamme des services dé-
livrés par les SSI en l’élargissant aux activités
Par ailleurs, par les services qu’ils peuvent pro- économiques. N’excluant pas le développement
curer, l’utilité sociale des kiosques est indubita- d’initiatives plus concertées, ils ont leur place
ble  : ils créent un nouveau lieu de vie, font entrer dans la mosaïque des solutions d’électrification
l’innovation et la distraction, développent la con- rurale décentralisée. }
nectivité, offrent différents niveaux de service
sans exclure les ménages les plus modestes.
Le concept multiservice, le design attractif de
ces projets et le « ticket d’entrée » modéré (entre
10 000  et 20 000 € pour l’acquisition et la mise
en œuvre du kiosque complet sur site) attirent fa-
cilement les subventions, qui couvrent souvent
le coût d’investissement. Les opérateurs mettent
également en avant le bilan positif des premières
opérations.

Cependant, le retour d’expérience est encore trop


limité pour analyser la robustesse du modèle au re-
gard des problèmes techniques qui ne manqueront
pas de se poser : entretien courant des ouvrages,
gestion des pannes lourdes, renouvellement des
batteries, évolution et volatilité de la demande.

Comme pour d’autres installations, le risque


d’abandon des kiosques n’est pas négligeable,
du fait de la complexité des engagements liés au
système de franchise et de l’accompagnement
qui peut s’avérer insuffisant quand l’opérateur est
davantage motivé par l’augmentation du nombre
des franchisés que par leur réussite individuelle.
On peut également craindre que le tropisme ac-
tuel des investisseurs et des bailleurs, qui fait
pencher l’accès à l’électrification hors réseau du
côté de la course à l’innovation et de l’atomisation
des actions, conduise à leur faire préférer
l’investissement dans de nouvelles expérimenta-
tions plutôt que dans la pérennisation des installa-
tions déjà en place.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 327

3.4.2.
Les nanoréseaux : le concept est encore
en exploration.
Les initiatives mettant en place un nanoréseau une source de production solaire collective
sont encore peu nombreuses. Elles s’appuient pour un usage essentiellement domestique,
sur un concept évolutif, à l’interstice de deux grâce à un réseau électrique de quelques
schémas  : celui, relativement figé, du miniré- dizaines de mètres. La description analytique
seau (cf. chapitre 3.5.) et celui, encore en ges- de ce nouveau schéma d’électrification pro-
tation, des SSI (cf. chapitre 3.2.). gressive par nanoréseaux interconnectés sera
Cette solution hybride consiste à raccorder succincte, par manque de modèle comparatif,
physiquement un groupement d’abonnés à d’une part, et de retour d’expérience significa-
tif, d’autre part.

6FK«PDGHSULQFLSHGłXQQDQRU«VHDX

5«FHSWHXUV
courant continu

Modules solaires

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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328 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

ainsi que le foisonnement des consommations


permet d’atteindre un optimum technique et
économique : à service équivalent, un nanoréseau
distribuant par exemple cinq ménages sera moins
onéreux que cinq systèmes solaires individuels.
Mais surtout, l’ambition du modèle ne se limite
pas à une simple mutualisation. Son évolutivité
fait son originalité et sa valeur ajoutée : plusieurs
nanoréseaux peuvent se raccorder entre eux
pour constituer un microréseau, lui-même pou-
vant s’agréger à d’autres pour tendre vers un mini-
réseau, pour atteindre l’échelle d’un réseau péri-
urbain, l’ensemble pouvant même à terme être
connecté au réseau national.
De quoi parle-t-on ? La production d’électricité reste répartie mais se
En pratique, un système photovoltaïque auto- mutualise au fur et à mesure des interconnexions ;
nome de 50 à 200 Wc est installé au sein d’une grâce à cette densification, le système peut alors
habitation, à partir de laquelle les trois à cinq habi- alimenter des services productifs à forte demande
tations voisines peuvent être raccordées par un ou des services publics tels que déjà évoqués.
système de câbles et de poteaux : le nanoréseau.
Le numérique apporte, dans ce modèle comme
Les services proposés à ce petit groupe dans les précédents, une grande souplesse
d’abonnés sont similaires à ceux délivrés par les d’utilisation, grâce au pilotage à distance des
systèmes solaires individuels. Mais la mutualisa- nanoréseaux et au prépaiement des consomma-
tion de la source de production et de stockage tions via une application de mobile money.

/DORJLTXHGHGHQVLŦFDWLRQGHVQDQRU«VHDX[

Nanoréseau Microréseau Miniréseau Réseau

ʼnbXVDJHUV ʼnbXVDJHUV ʼnbXVDJHUV ʼn!bXVDJHUV


ʼnbbN: ʼnbbN: ʼnbb0: ʼn!bb0:
ʼn7UªVEDVVHWHQVLRQ ʼn%DVVHWHQVLRQ ʼn0R\HQQHWHQVLRQ ʼn+DXWHWHQVLRQ

6RXUFHb Nanoé, https://www.nanoe.net.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 329

3DUROHGHSURIHVVLRQQHO
Nicolas Saincy

&RPPHQWMXVWLILH]YRXVODSODFHGXFRQFHSWGXQDQRU«VHDXHQWUHOHVsolar home system


HWOHVPLQLU«VHDX[b"

mb/HFRQFHSWGł«OHFWULILFDWLRQSURJUHVVLYHSDUQDQRU«VHDX[LQWHUFRQQHFWDEOHVSHXWU«SRQGUH
¢ODIRLVDX[EHVRLQVGHFRXUWWHUPHHWGHORQJWHUPHGHPDQLªUHSOXVHIILFDFHTXHOHV
GHX[DXWUHVW\SHVGHVROXWLRQVDFWXHOOHPHQWG«SOR\«HVGDQVOHV]RQHVUXUDOHVDIULFDLQHV/H
PRGªOHGł«OHFWULILFDWLRQSDUFRQVWUXFWLRQHWH[SORLWDWLRQGHPLQLU«VHDX[FODVVLTXHVPDOJU«
VRQLPSDFWLPSRUWDQWVXUOHG«YHORSSHPHQWSHLQH¢VHG«SOR\HUGHSXLVSOXVLHXUVGL]DLQHV
GłDQQ«HVHQUDLVRQGHFR½WVGłLQYHVWLVVHPHQW«OHY«VHWGłXQSRWHQWLHOGHG«YHORSSHPHQW
OLPLW«DX[]RQHVUHODWLYHPHQWGHQVHV4XDQWDXPRGªOHGł«OHFWULILFDWLRQSDUIDEULFDWLRQHW
GLVWULEXWLRQGHV\VWªPHVLQGLYLGXHOV 6+6 TXLVHIRFDOLVHVXUOHVEHVRLQVGRPHVWLTXHVGH
EDVHLOVłHVWGLIIXV«¢XQHYLWHVVHVSHFWDFXODLUHDXFRXUVGHODGHUQLªUHG«FHQQLHPDLVLOQH
SHXWGLVVLPXOHUVRQLQFDSDFLW«¢VRXWHQLUGXUDEOHPHQWOHG«YHORSSHPHQWORFDO
/łDYDQWDJHGXQDQRU«VHDXUHSRVHVXUODFRPELQDLVRQGHVVROXWLRQVWHFKQLTXHV¢OD
IURQWLªUHGHV6+6HWGHVU«VHDX[HWVXUXQHDSSURFKHLQQRYDQWH¢ODIURQWLªUHGHVORJLTXHV
PDUFKDQGHVHWGHVVHUYLFHVSXEOLFV*U¤FHDXUHJURXSHPHQWGHFOLHQWªOH¢SHWLWH«FKHOOHLO
DXWRULVHXQPRGªOHGł«OHFWULILFDWLRQ¢ODIRLVSOXVUDSLGHSOXVIOH[LEOHSOXVPRGHUQHHWSOXV
DERUGDEOHTXHOHVV\VWªPHVLQGLYLGXHOVRXTXHOHVU«VHDX[FODVVLTXHVSRXUU«SRQGUHDX[
EHVRLQVFURLVVDQWVGHVWHUULWRLUHVHWDFFRPSDJQHUOHXUG«YHORSSHPHQWb}

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GłLQGXVWULDOLVDWLRQ0¬PHVLVHVIRQGDPHQWDX[WHFKQLTXHVVRFLDX[HW«FRQRPLTXHVRQW
«W«YDOLG«VSDUOłH[S«ULHQFHLOUHVWHGHQRPEUHX[G«ILVRS«UDWLRQQHOV¢UHOHYHUSRXUTXłLO
FRQVWLWXHXQHDOWHUQDWLYHWRWDOHPHQWFU«GLEOHDX[GHX[PRGªOHVGRPLQDQWV
(QSDUWLFXOLHUQRXVGHYRQVPHQHUXQLPSRUWDQWWUDYDLOGHIRUPDWLRQGłRUJDQLVDWLRQ
HWGHG«YHORSSHPHQWRS«UDWLRQQHOSRXUPHWWUHHQSODFHGHVILOLªUHVG«FHQWUDOLV«HVGH
FRQVWUXFWLRQHWGłH[SORLWDWLRQGHQDQRU«VHDX[¢JUDQGH«FKHOOHb}

&RPPHQWU«SRQGH]YRXV¢ODGHPDQGHHQ«OHFWULFLW«GHVDFWHXUV«FRQRPLTXHVTXLRQW
GHVEHVRLQVHQSXLVVDQFHHWHQ«QHUJLHSOXVVLJQLILFDWLIVb"

mb(QRIIUDQWXQVHUYLFH«OHFWULTXHFRXYUDQWOł«FODLUDJH SXEOLFRXSULY« ODUHFKDUJHGH


W«O«SKRQHOHPXOWLP«GLDHWODU«IULJ«UDWLRQOHVQDQRU«VHDX[SHUPHWWHQWGHFRXYULU
OHVEHVRLQV«QHUJ«WLTXHVGHSOXVGHbGHVDFWHXUV«FRQRPLTXHVUXUDX[&HVHUYLFH

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330 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

SHXW¬WUHSURJUHVVLYHPHQWHW«FRQRPLTXHPHQW«WHQGXDX[EHVRLQVGHSRPSDJHHW
GHIRUFHPRWULFHJU¤FH¢OłLQWHUFRQQH[LRQGHSOXVLHXUVQDQRU«VHDX[HQWUHHX[ DXVHLQ
GłXQPLFURU«VHDX ,QILQHLOHVWP¬PHHQYLVDJHDEOHGHVDWLVIDLUHOłHQVHPEOHGHVEHVRLQV
«QHUJ«WLTXHVLQGXVWULHOVGłXQWHUULWRLUHJU¤FH¢XQH«WDSHGłDJU«JDWLRQVXSSO«PHQWDLUH
LQWHUFRQQH[LRQGHSOXVLHXUVPLFURU«VHDX[ b}

Nicolas Saincy, 33 ans, est ingénieur en électricité. Après 10 ans dans le conseil aux acteurs africains
de l’énergie, il co-fonde Nanoé en 2016 et s’installe à Madagascar pour y expérimenter un nouveau
modèle d’électrification rurale baptisée «Electrification latérale ». Retrouvez l’interview intégrale sur la
page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

Qui sont les principaux promoteurs ? Le raccordement de plusieurs nanoréseaux et


Les nanoréseaux sont encore anecdotiques dans d’éventuelles sources de production addition-
le paysage de l’électrification rurale. On compte nelles permet d’envisager un service mixte cou-
une poignée de promoteurs privés, associés à vrant à la fois les usagers domestiques et des
des partenaires locaux, des opérateurs de télé- acteurs économiques pour des demandes plus
communications et des fournisseurs de solutions significatives (production de froid, outillage élec-
de mobile money. trique simple).
La start-up française Nanoé, qui opère à Madagas- Le maillage progressif en dizaines de nanoré-
car depuis début 2017, en est l’un des pionniers. Son seaux interconnectés offrirait les capacités élec-
modèle, annoncé comme en voie d’industrialisation triques d’un réseau traditionnel répondant à tout
(cf. interview), encourage les entrepreneurs locaux type d’usage, mais cette possibilité reste encore à
à devenir développeurs et opérateurs de nanoré- démontrer sur le terrain.
seaux. Hybride, le modèle développé n’est pas sans
rappeler à la fois celui du PAYG et celui des kiosques Quel modèle économique ?
énergie gérés sous franchise. Les protagonistes sont encore trop peu nom-
breux et les données trop confidentielles pour
Quelle électricité pour les usagers ? évoquer un modèle économique standardisé.
Les services électriques pour les usagers domes- Des besoins récurrents en fonds propres se-
tiques, payés au forfait selon deux à trois niveaux ront vraisemblablement nécessaires pour les in-
de service, en fonction du nombre d’ampoules vestissements de production  : systèmes photo-
et de récepteurs autorisés, sont limités et com- voltaïques autonomes, accessoires de réseau,
parables aux SSI. Le nombre et la nature des ré- équipements de gestion et supervision. La vente
cepteurs sont limités (points d’éclairage, recharge d’électricité sous différentes formes (forfait, achat
de téléphone, éventuellement téléviseur). de kWh) permettra la couverture des charges
d’exploitation, le remboursement des investisse-
ments, et, dans l’idéal, financera les installations
des nanoréseaux suivants.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 331

Si les expérimentations semblent positives, le Un regard attentif doit donc être porté à ce modèle
modèle actuel intègre, comme tous les autres atypique, susceptible de profiter des résultats de
modèles encadrés, des subventions. recherche sur les réseaux intelligents, mais aussi
de se confronter rapidement aux limites des
Quel cadre institutionnel ? modèles traditionnels. }
Proche des activités des sociétés d’électricité, celle
des opérateurs de nanoréseaux est en théorie sou-
mise à la réglementation du secteur de l’électricité.

Aussi, les nanoréseaux se déploient-ils de


manière concertée avec les autorités locales et
en cohérence avec les éventuelles planifications
d’extension des réseaux électriques. Ils doivent
respecter un référentiel technique relatif à la sé-
curité des personnes et des biens, et la tarification
de leurs services est soumise à validation des or-
ganes de régulation. Pourtant, dans la pratique, le
manque de moyens des organismes de régulation
et des agences d’électrification rurale, conjugué
au caractère innovant du modèle, peut conduire à
un traitement dérogatoire.

Atouts et faiblesses
Le principal atout du modèle réside dans son ca-
ractère évolutif et sa capacité de déploiement rela-
tivement rapide et flexible. Les services électriques
proposés, essentiellement domestiques, sem-
blent pouvoir s’étendre à la demande des acteurs
économiques par agrégation de plusieurs unités.

Quoiqu’elle s’accompagne d’une complexité tech-


nique significative, la construction progressive d’un
ou de plusieurs nanoréseaux de forte capacité est
une idée novatrice et séduisante. A l’inverse d’un
miniréseau alimenté par une source unique, un
nanoréseau fait simultanément appel à de multiples
sources de production interdépendantes (cf. sché-
ma du nanoréseau supra). Mais ce facteur de com-
plexité est aussi un gage de sécurité  : les lieux de
production peuvent se relayer entre eux.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


332 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.5.
Le miniréseau, schéma
d’électrification collective
historique, est en pleine
mutation
Pour apporter l’électricité simultanément à tous les membres
d’une communauté rurale et couvrir la diversité de leurs besoins,
domestiques, productifs ou publics, le miniréseau apparaît
aujourd’hui comme la solution la plus satisfaisante.
Parce que ce schéma se veut global et polyvalent, l’équation
qu’il tente de résoudre est néanmoins complexe. Soumis à de
nombreux facteurs et faisant appel à plusieurs types d’acteurs, il
se déploie selon différents modèles organisationnels, techniques
et économiques, dont aucun ne fait l’unanimité. Ce sous-secteur
essentiel de l’ERD, souvent porté par la recherche d’un modèle
électrique rural aussi proche que possible du modèle électrique
urbain, est en effervescence. Après un bref rappel historique et
contextuel (3.5.1.), ce chapitre présente les différentes modalités et
les fondamentaux techniques des miniréseaux , avec leurs atouts
et leurs limites (3.5.2.), avant de restituer l’essentiel des leçons tirées
de vingt ans de mise en œuvre de miniréseaux ruraux sur le sol
subsaharien (3.5.3.).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 333

L’ouvrage propose volontairement un focus sur les miniréseaux


alimentés par centrale photovoltaïque et/ou hybride, qui
représentent la majorité des miniréseaux en service, et sont au
centre des multiples réflexions et des mutations technologiques
en cours et à venir.

Zoom sur le miniréseau solaire.

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334 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.5.1.
Malgré de nombreux échecs et des postulats
économiques complexes, les miniréseaux ruraux
séduisent de nouveaux acteurs.
Depuis la fin des années 1980, la réplication
en Afrique du modèle d’électrification connu
dans les pays industrialisés a donné lieu à
l’installation de milliers de miniréseaux ruraux
conçus pour délivrer une électricité « comme
à la ville  ». La première génération de miniré-
seaux ruraux, fondée sur l’utilisation de gé- 0LQLU«VHDX[b
nérateurs thermiques, a connu de multiples OłH[HPSOH
difficultés d’exploitation. La microhydroélec- du Sénégal
tricité a confirmé sa pertinence pour des puis-
sances significatives (100 kW à 1 MW), lorsque 5«DOLV«FHVYLQJWGHUQLªUHVDQQ«HVb
le gisement est abondant et proche des lieux YLOODJHV«OHFWULŦ«VSDU66,
de consommation. Mais la généralisation des bN:F HWPLQLU«VHDX[ bN:F 
solutions photovoltaïques, les nouvelles tech-
nologies de stockage et le numérique renou- (QSURMHWGłLFLb760 nouveaux
vellent le genre. villages avec centrale solaire,DYHFXQH
SXLVVDQFHFU¬WHSURMHW«H¢bN:F
La lecture de la plupart des stratégies et des
6RXUFHb Malick GAYE de l’ASER (Assemblée générale
politiques nationales d’électrification confirme du Club ER, décembre 2018).
la place prépondérante des miniréseaux dans
les objectifs et planifications d’électrification des
zones rurales, notamment en Afrique de l’Ouest.

Selon l’étude réalisée par le Club ER (Association


Africaine pour l’Électrification Rurale), près de
1 900 miniréseaux ruraux sont installés sur le ter-
ritoire subsaharien (ce qui ne veut pas dire qu’ils
sont opérationnels), pour environ 35 MW, avec de
fortes disparités territoriales (cf. minidossier).

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 335

3URMHW7UDQVLQGRbXQPLQLU«VHDXK\EULGHLQWHOOLJHQW
bIUDQ©DLVLQVWDOO«LO\DYLQJWDQV

,O\DSUHVTXHYLQJWDQVOHSURMHW7UDQVLQGRIXWOłXQGHVSUHPLHUVSURJUDPPHVGł«OHFWULŦFDWLRQ
SDUPLQLU«VHDXVRODLUHK\EULGHDYHFSRXUREMHFWLIGł«WDEOLUXQU«VHDX«OHFWULTXHŦDEOHSHX
FR½WHX[HWLVVXGł«QHUJLHVSURSUHVGDQVGHVYLOODJHVGHV°OHV&«OªEHVHW%RUQ«RHQ,QGRQ«VLH
&HV°OHVSHXSHXSO«HVRQW«W«PLVHVHQDYDQWORUVTXHOHJRXYHUQHPHQWLQGRQ«VLHQDYRXOX
GLPLQXHUODSRSXODWLRQVDWXU«HGHV°OHVGH6XPDWUDHW-DYD0DLVOHVQRXYHDX[DUULYDQWV
DYDLHQWUHFRXUV¢GHVJURXSHV«OHFWURJªQHVSROOXDQWVSHXŦDEOHVHWFKHUV&HTXLDFRQGXLWOH
JRXYHUQHPHQW¢FKHUFKHUXQHVROXWLRQGXUDEOHGłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«GDQVFHV]RQHVUHFXO«HV SOXV
GHGL[KXLWbKHXUHVSDUEDWHDX 
(QSDUWHQDULDWDYHFOHJURXSHPHQW3KRWRZDWWHWOHPLQLVWªUHGHOD7UDQVPLJUDWLRQLQGRQ«VLHQHW
DYHFXQŦQDQFHPHQWVRXVSURWRFROHIUDQFRLQGRQ«VLHQOłLQLWLDWLYHVHWUDQVIRUPHHQSURMHW$YHF
GXPDW«ULHOFRQ©XHWG«YHORSS«HQ)UDQFHHWXQHPD°WULVHGłāXYUHDVVXU«HSDU7UDQV«QHUJLHune
FHQWUDOHK\EULGHGHbN:FFRXSO«H¢XQSDUFEDWWHULHVHWXQJURXSH«OHFWURJªQHD«W«LQVWDOO«H
8QPLQLU«VHDXD«W«PLVHQSODFHSRXUDOLPHQWHUHQ«OHFWULFLW«SUªVGHIR\HUV

'«M¢LO\DYLQJWDQVOHVUDFFRUGHPHQWVGHV
XVDJHUVRQW«W«U«DOLV«VDYHFGHVOLPLWHXUV
GHSXLVVDQFHGł«QHUJLHHWXQV\VWªPH
© Fondation Energies pour le Monde

GHSU«SDLHPHQW(WDQWGRQQ«OHIRUW
GHJU«GłLQQRYDWLRQOłDFFHQWD«W«PLVVXU
OłDFFRPSDJQHPHQWGHVDFWHXUVLPSOLTX«V
\FRPSULVOHVXVDJHUVDYHFGHVFDPSDJQHV
U«JXOLªUHVGHVHQVLELOLVDWLRQ¢OłXWLOLVDWLRQ
UDWLRQQHOOHGHOł«OHFWULFLW«

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336 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

MINIDOSSIER

Miniréseaux en Afrique subsaharienne :


les résultats du recensement mené
par le Club ER
0ª FàWPG KPKVKCVKXG FG Nà#IGPEG FG réseau alimenté en permanence par source
NàGPXKTQPPGOGPVGVFGNCOC¯VTKUGFGNàªPGTIKG thermique. On retrouve ces systèmes dans

#&'/'  GV Fà+PPQXCVKQP 'PGTIKG &ªXGN- des localités secondaires électrifiées de
QRRGOGPV
+'& NG%NWD'4TªWPKVNGUCIGPE- longue date par centrale thermique, pour
GU GV UVTWEVWTGU PCVKQPCNGU CHTKECKPGU GP lesquelles l’opérateur souhaite réduire ses
EJCTIG FG NàªNGEVTKăECVKQP TWTCNG En 2019, il dépenses en carburant (en pratique de 10
a piloté une vaste campagne de recensement à 30 % selon le taux de pénétration du so-
des miniréseaux installés au sein de ses pays laire). Ces schémas ne sont pas abordés
membres. dans le présent ouvrage ;
L’analyse des données, avec un degré de çNàJ[FTQªNGEVTKEKVª TGUVG VT©U RTªUGPVG GP
précision parfois mitigé, permet d’extraire #HTKSWG EGPVTCNG avec plus de 400 mini-
quelques tendances sur les réalisations de réseaux recensés, pour des puissances
ces vingt dernières années : moyennes de quelques centaines de kW ;
çSWGNSWGU RC[U
/CNK 5ªPªICN $WTMK- çNG RTQLGV FªPQODTG WPG UQKZCPVCKPG FG
PC (CUQ /CWTKVCPKG -GP[C  QPV WPG OKPKTªUGCWZ CNKOGPVªU RCT NC DKQOCUUG
CXCPEG EGTVCKPG GP VGTOGU FG TGVQWT GUUGPVKGNNGOGPV GP #HTKSWG FG Nà'UV (Jat-
FàGZRªTKGPEG UWT NGU OKPKTªUGCWZ es- ropha, digesteur biogaz, biocarburants
sentiellement diesels, solaires et hybrides divers), dans des gammes de puissance
solaire/diesel avec stockage. Les puis- comparables à celles des miniréseaux
sances moyennes des miniréseaux sont de solaires/hybrides.
quelques dizaines de kWc ;
çUWT NàGPUGODNG FW VGTTKVQKTG ªVWFKª NCVGEJ- Un important travail de visualisation car-
PQNQIKG RJQVQXQNVC°SWG
J[DTKFªG QW tographique a été réalisé à partir des infor-
PQP TGRTªUGPVGRNWUFGaFGUOKPKTª- mations collectées. Il montre la répartition
UGCWZ KFGPVKăªU OCKU OQKPU FG a  FG par zone et propose une classification par
NCRWKUUCPEGEWOWNªGKPUVCNNªG On trouve technologie.
quelques réseaux hybrides solaire/diesel
sans stockage de quelques MW, essenti- Source : Retrouvez toutes les informations
cartographiques sur :
ellement au Mali. Ils consistent à connect- https://thexs-mapping.firebaseapp.com/mapping.
er du solaire « raccordé au réseau » sur un html?fid=1H1VmQh6HDe_cx5-4-YYumWUVs2IfpiHb

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 337

&DUWRJUDSKLHGHVPLQLU«VHDX[HQ$IULTXHWRXWHVWHFKQRORJLHVFRQIRQGXHV

6RXUFHb Club ER, 2019, https://www.club-er.org.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


338 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

5«VHDXXUEDLQvsPLQLU«VHDXGLHVHOb
GHVGLII«UHQFHVVLJQLŦFDWLYHV

'XF¶W«GHODSURGXFWLRQ
!b3URGXLUHGHOł«OHFWULFLW«YLDXQHmbFHQWUDOHb}WKHUPLTXHGHSOXVLHXUVP«JDZDWWVDOLPHQW«HSDU
FRPEXVWLEOHIRVVLOHHVWXQHGLVFLSOLQHLQGXVWULHOOHPDWXUH3OXVLHXUVPDFKLQHVWUDYDLOOHQWHQ
SDUDOOªOHFRRUGRQQ«HVSRXUIRQFWLRQQHU¢GHVU«JLPHVVS«FLŦTXHVHWDGDSW«VYLDGHVFRXUEHV
GHVWDWLVPHRSWLPLV«HVFRQ©XHVHWHQWUHWHQXHVSRXUGHVGXU«HVGHYLHFRQQXHVHWPD°WULV«HV
b¢KHXUHV SHUPHWWDQWGHJDUDQWLUOHVHUYLFHSHQGDQWOHVS«ULRGHVGHPDLQWHQDQFH
SURORQJ«H/łHIIHWGł«FKHOOHDXWRULVHXQSHUVRQQHOWHFKQLTXHSHUPDQHQWG«GL«FRPS«WHQW
HQFDGU«SDUODFRPSDJQLHQDWLRQDOHGł«OHFWULFLW«TXLDXQDFFªVIDFLOLW«DXVRXWLHQGHVEDLOOHXUV
GHIRQGVLQWHUQDWLRQDX[
!b8QPLQLU«VHDXUXUDOGLHVHOHVWXQHSHWLWHXQLW«WKHUPLTXHGHSXLVVDQFH¢bIRLV
LQI«ULHXUH¢FHOOHGłXQHFHQWUDOHXUEDLQH ¢bN: /DFHQWUDOHHVWVRXYHQWFRPSRV«HGłXQH
PDFKLQHXQLTXH JURXSH«OHFWURJªQH TXLHQFDLVVHVHXOHGHVFRXUEHVGHFKDUJHVYDULDEOHV SHX
GHGHPDQGHHQMRXUQ«HSRLQWHLPSRUWDQWHHQVRLU«H HWWRXVOHVDSSHOVGHSXLVVDQFHbHOOHRSªUH
DLQVLGDQVGHVFRQGLWLRQVWHFKQLTXHVG«JUDG«HV/DPRLQGUHSDQQHSHXWGRQFSORQJHUXQYLOODJH
GDQVOHQRLUSHQGDQWSOXVLHXUVMRXUV2UFRQ©XVSRXUXQIRQFWLRQQHPHQWLQWHUPLWWHQW FHW\SHGH
PDW«ULHOHVWXWLOLV«HQVHFRXUVSDUOHVHFWHXUWHUWLDLUHORUVGHVG«OHVWDJHVXUEDLQV FHVJURXSHVGH
IDLEOHSXLVVDQFHVRQWGHIDLWPRLQVUREXVWHVTXHOHVPDFKLQHVGHVFHQWUDOHVGXU«VHDXQDWLRQDO
(WOHXUFRQVRPPDWLRQVS«FLŦTXHHQOLWUHN:KHVWVXS«ULHXUH¢FHOOHGHVFHQWUDOHVXUEDLQHV

&¶W«WUDQVSRUWHWGLVWULEXWLRQ
7DQGLVTXłRQWURXYHUDV\VW«PDWLTXHPHQWGHODPR\HQQHWHQVLRQ bN9bN9bN9 VXUOHVOLJQHV
GHWUDQVSRUWGHVU«VHDX[XUEDLQV GHIDLWSOXVFRPSOH[HVGHFRQFHSWLRQ OHVPLQLU«VHDX[UXUDX[VRQW
HVVHQWLHOOHPHQWGLVWULEX«VHQEDVVHWHQVLRQ bN9 SRVVLEOHPHQWDSSX\«VSDUTXHOTXHVOLJQHV07
¢bN9 GXIDLWGHVSOXVIDLEOHVGLVWDQFHVHWGHODPRLQGUHFDSDFLW«GHSXLVVDQFH¢WUDQVLWHU/D
GLII«UHQFHHVWOL«HGłXQHSDUW¢ODGHQVLW«GHSXLVVDQFH IRQFWLRQGHODGHQVLW«GHFRQVRPPDWHXUV
UDFFRUG«VHW¢ODQDWXUHGHVFRQVRPPDWHXUV HWGłDXWUHSDUW¢ODTXDQWLW«Gł«QHUJLHWUDQVLW«HSDU
XQLW«GHORQJXHXUGHU«VHDXb
!bHQ]RQHXUEDLQHbNPGHOLJQHEDVVHWHQVLRQSHXWGHVVHUYLUMXVTXł¢XVDJHUVHWIDLUHWUDQVLWHU
MXVTXł¢bN:KSDUMRXUb
!bHQ]RQHUXUDOHRQFRQVWDWHXQHPR\HQQHGłHQYLURQXVDJHUVSDUNPGHOLJQHODTXHOOHIDLW
WUDQVLWHU¢SHLQHbN:KSDUMRXU

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 339

La construction d’un miniréseau


constitue-t-elle une étape de celle
&¶W«H[SORLWDWLRQHWWDULŦFDWLRQ d’un réseau national ?
!b(QYLOOHOHVXVDJHUVSD\HQWXQH La mise en œuvre des projets d’accès universel à
électricité qui est à la fois techniquement l’électricité repose historiquement sur un axiome
PRLQVRQ«UHXVHHWSOXVIRUWHPHQW hérité de l’électrification des pays industrialisés  :
VXEYHQWLRQQ«HTXłHQ]RQHUXUDOH/HV «  c’est par l’agrégation de multiples miniréseaux
U«VHDX[XUEDLQVHQPDMRULW«H[SORLW«VSDU qu’on peut construire le réseau interconnecté dont
OHVFRPSDJQLHVQDWLRQDOHVGł«OHFWULFLW« les populations ont besoin.  » Or, en l’état actuel, il
FIFKDSLWUHb E«Q«ŦFLHQWGłXQH paraît difficilement envisageable de réaliser cette
PXWXDOLVDWLRQGHVDFKDWVHWGHODJHVWLRQ extension des réseaux urbains vers les zones ru-
'HSOXVP¬PHVłLOVDVSLUHQW¢GHVPRGªOHV rales puis leur interconnexion (cf. chapitres 1.2.1. et
«FRQRPLTXHVDXWRQRPHVHWUHQWDEOHVOHV 2.1.2.), du moins à moyen terme.
EDLOOHXUVGHIRQGVSRXUVXLYHQWOHXUVRXWLHQ Par ailleurs, ce n’est pas non plus par les pro-
DX[JRXYHUQHPHQWVVRXFLHX[GHPDLQWHQLU grammes d’interconnexion de réseaux entre pays
ODSDL[VRFLDOH&HWHQYLURQQHPHQWDXWRULVH
SDUIRLVGHVP«FDQLTXHVGHS«U«TXDWLRQ
WDULIDLUHHQWUHOHVSULQFLSDOHVORFDOLW«V
GXSD\VRXHQFRUHODPLVHHQSODFHGH
WDULŦFDWLRQVVRFLDOHV HQGHVVRXVGłXQ
FHUWDLQVHXLOGHFRQVRPPDWLRQPHQVXHOOH

© Fondation Energies pour le Monde


FR½WGXN:KHVWPLQRU« 
!b(Q]RQHUXUDOHUHFRXYUHUOHFR½WGH
SURGXFWLRQU«HOGłXQN:KHQWUD°QHXQSUL[
GHYHQWHGXN:KTXLHVWGHX[¢WURLVIRLV
VXS«ULHXU¢FHOXLSD\«HQYLOOH6LODSOXSDUW
GHVPLQLU«VHDX[GLHVHOVUXUDX[RQW
E«Q«ŦFL«GłLPSRUWDQWHVVXEYHQWLRQV¢
OłLQYHVWLVVHPHQWLOVVHVRQWUDSLGHPHQW Miniréseau basse tension en Guinée.
UHWURXY«VVDQVVRXWLHQŦQDQFLHUHQSKDVH
GłH[SORLWDWLRQDYHF
XQHWDULŦFDWLRQQRQVXEYHQWLRQQ«H
© Fondation Energies pour le Monde

LQDGDSW«HDX[PR\HQVŦQDQFLHUVGHV
SRSXODWLRQVUXUDOHV3DUDLOOHXUVODJHVWLRQ
HVWVRXYHQWFRQŦ«H¢XQRS«UDWHXU
GRQWOłLQW«JULW«HWODPRWLYDWLRQLQŧXHQW
IRUWHPHQWVXUODS«UHQQLW«GHOłLQVWDOODWLRQ
SRLQWGHIUDJLOLW«GHFHW\SHGHVFK«PD

Réseau urbain.

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340 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

mutualisant des sources de production de forte ca- çVTCPURQTVGVFKUVTKDWVKQPRCTWPGPUGODNGFGRQ-


pacité (telles les centrales hydroélectriques de plu- teaux et de câbles ;
sieurs GW) que les zones rurales seront progres- çTCEEQTFGOGPVFGUEQPUQOOCVGWTUa
sivement électrifiées. Déployer un réseau national çEQORVCIGGVHCEVWTCVKQPFGUM9JXGPFWU
nécessite d’acheminer l’électricité jusqu’à l’usager Pourtant, un miniréseau diesel rural présente des
et de la vendre. Faire descendre l’électricité d’une différences significatives liées au contexte du mi-
ligne très haute tension de 400 000 volts vers une lieu rural africain, tant au niveau de la production
communauté présentant un habitat dispersé et de qu’au niveau de la distribution ou de l’exploitation,
faibles revenus nécessite la conjonction de deux avec une conséquence fondamentale : NGEQ¼VFG
raretés  : une volonté politique forte et une bonne RTQFWEVKQPFàWPM9JªNGEVTKSWGGUVPGVVGOGPV
mécanique de subventions. RNWUªNGXªUWTWPlaOKPKTªUGCWFKGUGNa|SWGUWT
WPTªUGCWWTDCKP (cf. encadré).
Un miniréseau n’est pas seulement
un réseau de moindre puissance Donner quelques ordres de grandeur relatifs à
En première analyse, il existe des similitudes entre la consommation permet de mieux saisir la dif-
le réseau dit « national » et un miniréseau rural die- férence de poids économique entre un réseau ur-
sel (technologie initialement utilisée par les pro- bain et un miniréseau rural.
moteurs de miniréseaux isolés) :
çRTQFWEVKQPRCTITQWRGªNGEVTQI©PGa

&RQVRPPDWLRQ«OHFWULTXHHQ]RQHXUEDLQHHWHQ]RQHUXUDOHb
quelques ordres de grandeur

URBAIN RURAL

x3
bN:KDQ bN:KDQ
&RQVRPPDWLRQPR\HQQHGłXQIR\HU &RQVRPPDWLRQPR\HQQH
«OHFWULŦ«HQYLOOH GłXQIR\HUUXUDO1

bN:KDQ

=
&RQVRPPDWLRQGłXQK¶WHOGHVWDQGLQJ Consommation de
PR\HQHQFHQWUHYLOOHGłXQHFDSLWDOH IR\HUVUXUDX[SDUDQ
DIULFDLQH

=
1 usine de textileHQS«ULSK«ULHGłXQH Consommation de
FDSLWDOHDIULFDLQH 500 villages ruraux

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

1. Elle est d’environ 4 000 kWh en France, le double aux Etats-Unis.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 341

&RXUEHGHFKDUJH

*UDSKLTXHUHSU«VHQWDQWODSXLVVDQFH«OHFWULTXHDSSHO«HSDUXQVLWH¢Oł«FKHOOHGłXQHMRXUQ«H
/łLQW«JUDOHGHODFRXUEHGHFKDUJH VXUIDFHVLWX«HHQWUHOłD[HGHVDEVFLVVHHWODFRXUEH UHQVHLJQHOD
FRQVRPPDWLRQGł«QHUJLH«OHFWULTXHMRXUQDOLªUH

([HPSOHGłXQHFRXUEHGHFKDUJHH[SULP«HHQSXLVVDQFHDFWLYH N: 
FłHVW¢GLUHHQSXLVVDQFHU«HOOHPHQWFRQVRPP«HSDUOHVDSSDUHLOV«OHFWULTXHV
utilisés sur le miniréseau

puissance
active (kW)
5

0
in

ir
id

so
at

m
m

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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342 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

$SSHOGHSXLVVDQFH

/HG«PDUUDJHGłXQPRWHXU«OHFWULTXHJ«QªUHGHVDSSHOVGłLQWHQVLW«MXVTXł¢GL[IRLVODYDOHXU
GHOłLQWHQVLW«GHIRQFWLRQQHPHQWQRPLQDO¢IDFWHXUGHFKDUJHWUªVG«JUDG«SHQGDQWTXHOTXHV
VHFRQGHV

([HPSOHGłXQHFRXUEHGHFKDUJHH[SULP«HHQSXLVVDQFHDFWLYH N: 
HWHQSXLVVDQFHDSSDUHQWH N9$ LOOXVWUDQWOHVDSSHOVGHFRXUDQWHWOHVIDFWHXUV
GHSXLVVDQFHGHVDSSDUHLOV«OHFWULTXHVXWLOLV«VVXUOHPLQLU«VHDX

puissance active (kW)


puissance apparente(kVA)

puissance active
5
puissance apparente

0
in

ir
id

so
at

m
m

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 343

Accessibilité des énergies technique (système par ENR vs système ther-


renouvelables et révolution mique) a occulté des étapes essentielles à la
numérique font évoluer le modèle survie d’un miniréseau rural dans le temps  :
des miniréseaux. l’identification de la demande, l’appropriation par
Dès les années 2000, ces deux évolutions tech- les bénéficiaires, le choix et l’accompagnement
nologiques (cf. chapitre  2.3.1.) ont conduit à la de l’exploitant, l’encadrement institutionnel et le
conception et à la mise en œuvre de systèmes de suivi dans la durée.
production d’électricité de source renouvelable Autant de points qui seront abordés dans le cha-
en substitution des groupes thermiques. pitre 3.5.3., traitant des retours d’expérience.
Si l’adoption de ces technologies renouvelle le
genre, elle ne permet pas de lever tous les obsta- La dématérialisation progressive
cles. Elle met en exergue l’importance de la bonne de la gestion pose également
prise en compte du facteur humain dans la réus- la question de l’appropriation locale.
site d’un projet. Autre évolution influençant l’exploitation tech-
nique des miniréseaux, le numérique offre un pa-
La ruée vers les énergies nel de solutions qui ne sont pas réservées aux SSI.
renouvelables : un virage technologique Les compteurs à prépaiement communiquants,
qui pose le problème de la compétence ayant la même logique fonctionnelle que la ges-
locale. tion dématérialisée des kits PAYG exposée plus
Comme si les difficultés étaient d’abord liées à la haut, se généralisent à grande vitesse au sein des
source de production, les concepteurs se sont réso- miniréseaux. Les besoins en main-d’œuvre sont
lument tournés vers les ressources renouvelables réduits, l’exploitation des centrales est facilitée
pour développer des miniréseaux, notamment so- grâce au télémonitoring, l’apprentissage des habi-
laires ou hydroélectriques, souvent « hybrides ». tudes d’usage de l’électricité mûrit rapidement.
Or, cette évolution de la production fait surgir Corollaire évident de cette dématérialisation,
deux nouvelles problématiques : l’humain s’efface, non sans effet pervers sur le
çNGWT ăPCPEGOGPVa  quand elles sont de bonne montage et la conduite des projets. La sensibilisa-
fabrication, ces installations exigent un mon- tion des usagers et l’implication des autorités lo-
tant d’investissements cinq à dix fois supérieur cales – qui, ayant fait leurs preuves, occupent une
au coût d’un groupe électrogène simple, malgré place centrale dans les interventions des ONG (cf.
des coûts en baisse constante ; chapitre 2.4.2.) – sont parfois sacrifiées aux con-
çNGWTOCKPVGPCPEGasi un groupe électrogène est traintes du plan d’affaires et à une vision à court
réparable à peu près partout en Afrique, ce n’est terme, non sans risques.
pas le cas d’un onduleur solaire…
Concernant les miniréseaux solaires, avec le Les modèles initiés par les
recul de l’expérience, il apparaît que la focalisation pionniers, notamment les ONG,
sur la production a conduit à des investissements laissent place à ceux portés par
de fonds publics significatifs dans des ouvra- un secteur privé ambitieux.
ges souvent surdimensionnés et trop complexes La révolution technique qui traverse le secteur
au regard du service demandé et des capacités de l’ERD s’accompagne d’une diversification des
d’appropriation locale. Cette vision strictement modèles et des acteurs (cf. chapitre  2.3.). Ce

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


344 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

renouvellement n’épargne évidemment pas le


monde des miniréseaux.
Parole de Il induit un certain effacement des objectifs hu-
SURIHVVLRQQHO manistes portés par ses pionniers. Malgré un
Yann Chauvelin plaidoyer fondé sur l’expérience, les ONG et leurs
soutiens, aujourd’hui largement minoritaires dans
9R\H]YRXVXQULVTXH¢G«SOR\HU les programmes en cours, ont souvent du mal à
GHVVROXWLRQVbQXP«ULTXHVHW justifier leurs projets socialement ambitieux, face
FRQQHFW«HVHQPLQLPLVDQWODSU«VHQFH à un secteur privé innovant et mieux armé en
GłXQH«TXLSHGłH[SORLWDQWVVXUOH termes marketings et financiers.
WHUUDLQb"
Le modèle originel, fondé sur un
mb/HVVROXWLRQVQXP«ULTXHVHW ancrage institutionnel fort, repose sur
FRQQHFW«HVSHUPHWWHQWGHPLHX[ l’action conjointe des acteurs publics
J«UHUODSURGXFWLRQODGLVWULEXWLRQ et associatifs.
HWOHSDLHPHQWGHVDERQQ«V(OOHV Comme pour d’autres schémas d’ERD, les mini-
IDYRULVHQWHWV«FXULVHQWOHVRS«UDWLRQV réseaux ont longtemps été conçus à l’initiative
HWODPDLQWHQDQFHJU¤FH¢GHVFHQWUHV de collectivités publiques avec le soutien de
PXWXDOLV«VSRVV«GDQWXQHPHLOOHXUH la coopération internationale et l’appui tech-
H[SHUWLVHFRPPHFłHVWOHFDVFKH]OHV nique d’ONG ou de bureaux d’études du secteur.
RS«UDWHXUVGHODW«O«FRPPXQLFDWLRQ Les plateformes multifonctionnelles du PNUD
(OOHVQHGLVSHQVHQWSDVGłXQHSU«VHQFH (sorte de miniréseau à usage productif  ; cf. cha-
VXUOHWHUUDLQGDQVWRXVOHVYLOODJHV pitre 3.4.1.) ou les Facilités énergie de l’UE en sont
WDQWSRXUVłRFFXSHUGHODSDUWLH des exemples concrets. Le modèle historique du
FRPPHUFLDOHTXHSRXUDFFRPSDJQHU miniréseau repose ainsi sur :
OHVSRSXODWLRQVGDQVOłXWLOLVDWLRQGH çFGU KPXGUVKUUGOGPVU FG HQPFU RWDNKEU
DCKNNGWTU
Oł«OHFWULFLW«HWOHG«YHORSSHPHQWGHVRQ internationaux) ;
XVDJHb} çWP GPECFTGOGPV KPUVKVWVKQPPGN UVTWEVWTª
RQW-
voirs publics nationaux, régionaux, locaux) ;
Yann Chauvelin, ingénieur de formation, çWPGOªECPKSWGFàCRRGNU¡RTQLGVUGVFGRCTVGPC
mène depuis plus de vingt ans des projets riats public/privé ;
en Afrique pour les télécom et l’énergie ; çNC RTªUGPEG HQTVG Fà10) LQWCPV WP TµNG FG Fª-
il est en charge du business development fricheurs et de garde-fous.
pour l’électrification rurale au sein de
Sagemcom Energie et Telecom. C’est grâce à ce combo –  pas toujours har-
Retrouvez l’interview intégrale sur la page monieux  – d’acteurs publics, institutionnels, asso-
web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/ ciatifs et privés placés sous la bannière de l’accès
electrifier-lafrique-rurale/ à l’électricité, qu’ont pu se multiplier les projets « pi-
lotes  » et être ainsi testés divers schémas opéra-
tionnels de miniréseaux (cf. chapitre 2.4.2.). Malgré
un taux de pérennité de long terme objectivement

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 345

faible, ces opérations ont développé plusieurs Lassés des divergences de point de vue entre
bonnes pratiques, souvent suivies par les porteurs praticiens de l’ERD et des délais supplémentaires
de projet de miniréseaux actuels. Entre plusieurs induits par les approches sociales et institution-
échecs assumés, les ONG de l’électrification rurale nelles des projets portés par la société civile, les
ont pris le temps de démontrer par l’expérience les bailleurs de fonds et les ministères se tournent
invariants techniques, sociologiques et institution- désormais volontiers vers un secteur privé pro-
nels d’un programme d’électrification par miniré- posant des solutions plus rapides et apparem-
seau (cf. chapitre 3.5.4.). ment aussi efficientes.

Mais ces projets collaboratifs Les ruptures technologiques et


complexes découragent plus l’évolution des cadres institutionnels
d’un acteur. ouvrent un large champ d’action au
Nombre d’opérateurs privés ou d’entrepreneurs secteur privé.
locaux, pourtant solidement implantés et sou- Sans attendre les campagnes de subventions ca-
cieux du développement local, renoncent à déve- dencées par le système des appels à projets, les
lopper ou pérenniser un projet de miniréseau face opérateurs internationaux privés de miniréseaux
aux promesses non tenues des politiques natio- sont entrés depuis 2015 sur le marché rural sub-
nales ou aux délais administratifs qui mettent en saharien, avec le soutien d’investisseurs privés, et
péril un plan d’affaires fragile. représentent aujourd’hui la majorité des fianceurs.
Autre problème  : les mécaniques de subventions
octroyées par les agences d’électrification rurale Parfois hors de toute référence aux planifications
à ces acteurs s’essoufflent. S’inscrivant dans un et aux politiques nationales, ces opérateurs inter-
cadre proche de la «  délégation de service pub- viennent le plus souvent de manière autonome :
lic », elles préservent pourtant l’opérateur d’un as- çKNU O©PGPV NGWTU RTQRTGU ªVWFGU FCPU NGU \QPGU
sujettissement à une logique de rentabilité souvent qu’ils identifient comme stratégiques ;
incompatible avec la réalité du terrain, en l’aidant çNGWTU RTQLGVU UQPV EQP¨WU FCPU NG ECFTG FàWPG
simplement à trouver l’équilibre économique. concertation restreinte et rapide avec les au-
torités locales, visant essentiellement à obte-
De leur côté, les ONG ont de plus en plus de mal nir les autorisations nécessaires et une analyse
à obtenir les financements nécessaires pour dé- souvent sommaire de la situation énergétique et
ployer des projets soucieux d’appropriation lo- sociologique ;
cale et de transfert de compétences. Le bilan çNC VCTKăECVKQP GV NGU UGTXKEGU RTQRQUªU CWZ
global de leurs opérations fait apparaître une «  clients  » sont fondés sur des plans d’affaires
fragilité financière difficilement contestable  ; les gardés confidentiels, ou formulés de telle sorte
mesures d’accompagnement mises en place ne que les agences de régulation peinent à les
peuvent pas tout ; elles restent impuissantes pour challenger ;
répondre aux chimères du changement d’échelle. çNGUUQNWVKQPUVGEJPKSWGUFªRNQ[ªGUUQPVUQWXGPV
Cela questionne aussi la pertinence des plans trop innovantes pour pouvoir être appréciées
d’exploitation trop figés que développent cer- sur le long terme par les autorités compétentes.
taines ONG : la modélisation est souvent mise en
déroute par la réalité.

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346 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3DUROHGHSURIHVVLRQQHOOH
Camille André-Bataille

4XHOOHVVRQWOHVSULQFLSDOHV«WDSHVHWOHVG«ODLVPR\HQVGHPLVHHQāXYUH
GłXQPLQLU«VHDXGHOłLGHQWLILFDWLRQGXVLWH¢ODPLVHHQVHUYLFHGHVRXYUDJHVb"

mb/RQJXHIDVWLGLHXVHODPLVHHQSODFHGłXQPLQLU«VHDXHVWSRQFWX«HGł«WDSHVFO«VTXL
G«SHQGHQWHQSDUWLHGHOłDFWLRQGHVVHUYLFHVDGPLQLVWUDWLIV1RXVFRPPHQ©RQVSDUGHV
HQTX¬WHVGHWHUUDLQDXSUªVGHVSDUWLHVSUHQDQWHVORFDOHV P«QDJHVXVDJHUVSURGXFWLIV
VHUYLFHVSXEOLFVDXWRULW«VORFDOHVHWF DILQGł«YDOXHUODGHPDQGH«QHUJ«WLTXHHWOHSRWHQWLHO
GHG«YHORSSHPHQWVRFLR«FRQRPLTXH

9LHQWHQVXLWHODV«FXULVDWLRQIRQFLªUH(OOHSHXWSUHQGUHSOXVLHXUVPRLVHQIRQFWLRQGHODYRORQW«
GHVDFWHXUVORFDX[GHVłHQJDJHUHWGHODGXU«HGHV«WDSHVWHFKQLTXHV ERUQDJHSODQV HW
DGPLQLVWUDWLYHV FHUWLILFDWVGHVLWXDWLRQMXULGLTXHFRQYHQWLRQFRPPXQDOHGHPLVH¢GLVSRVLWLRQ 
(QSUDWLTXHFHVG«PDUFKHVTXLGHYUDLHQW¬WUHHIIHFWX«HVSDUOHVORFDOLW«VE«Q«ILFLDLUHVDYHF
OłDSSXLGHOł$'(5VRQWVRXYHQWDVVXP«HVSDUOHSURPRWHXUGXSURMHW Ŋ 8QHIRLVOHGRVVLHU
ILQDOLV«LOHVWG«SRV«¢Oł$'(5SRXUYLVDWHFKQLTXHSXLVDXU«JXODWHXUSXLVDXPLQLVWªUHSRXU
VLJQDWXUHGHVDXWRULVDWLRQVHWFRQFHVVLRQV FHTXLSHXWSUHQGUHGHX[¢KXLWPRLV b}

Camille Andre-Bataille, ingénieur et économiste de l’énergie et des projets bas carbone, elle œuvre
depuis cinq ans pour l’ERD et l’émergence de communautés rurales fortes à Madagascar et en
Afrique.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

Au final, l’usager n’a pas plus Sans volonté politique d’établir un service pub-
d’assurance sur la pérennité du service lic de l’électricité régulé et une péréquation tari-
et a moins de garanties sur son équité. faire a minima territoriale, les nouveaux modèles
Alors qu’un projet de miniréseau porté par les d’électrification 100  % privés ne bénéficieront
pouvoirs publics compétents et accompagné par donc pas directement aux plus modestes. Sur ces
des acteurs de la société civile veillera à l’équité du projets, l’avenir parlera, mais les premiers constats
service et à l’électrification de tous, un opérateur de terrain laissent entrevoir des méthodes et des
privé visera logiquement des zones à fort potentiel impacts assez éloignés d’une conception huma-
de développement économique. Il déploiera ses niste d’un droit à l’électricité.
réseaux électriques autour des principaux pôles L’électrification d’une zone rurale, quelle que
de consommation, pour une sélection d’usagers soit la solution, souligne, parfois même ren-
susceptibles de payer le service à un tarif inté- force, les inégalités sociales existantes (voir le
grant la rentabilité attendue des investisseurs. chapitre  2.4.1.). Mais ce n’est pas une fatalité  :

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 347

l’électrification des pays du Nord et de certains


pays du Sud a pu se faire en équité, parfois tardive-
ment (en France, après la nationalisation de 1947, Parole de
par exemple), grâce à la péréquation tarifaire. SURIHVVLRQQHO
Yann Chauvelin
Comment réussir cette péréquation en Afrique
subsaharienne, a minima à l’échelle d’une région ? 3HQVH]YRXVTXłXQWUDYDLOFRQMRLQW
Peut-être justement en jouant la complémentarité HQWUHVHFWHXUSULY«HWVHFWHXU
des logiques interventionniste et libérale ; cela re- DVVRFLDWLISHXW¬WUHE«Q«ILTXH¢
quiert un cadre institutionnel et financier adapté, OłHQVHPEOHGHVSDUWLHVSUHQDQWHVb"
une vraie vision politique et sociale, ainsi que des
moyens dont l’électrification rurale ne dispose mb/HV21*RQWXQHWUªVERQQH
pas aujourd’hui (voir les préconisations formulées FRQQDLVVDQFHGHVSUREO«PDWLTXHVGH
en partie 4). Les ONG, fortes de leur implantation Oł«OHFWULILFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«H
et de leur intervention soucieuse du terrain, doi- QRQVHXOHPHQWGDQVOłLGHQWLILFDWLRQHW
vent savoir évoluer pour un dialogue constructif ODTXDQWLILFDWLRQGHODGHPDQGHPDLV
avec des opérateurs privés, dont les contraintes DXVVLGDQVOłDFFRPSDJQHPHQWGHV
découlent aussi de la pratique. Cette complémen- SRSXODWLRQVSRXUG«YHORSSHUOłXVDJH
tarité doit s’imposer, au bénéfice de tous, mais GHOł«OHFWULFLW«6XUFHVSRLQWVXQH
surtout des populations locales. FROODERUDWLRQDYHFOHVG«YHORSSHXUVGX
VHFWHXUSULY«SHXW¬WUHFRPSO«PHQWDLUH
L’équation économique HWE«Q«ILTXHSRXUWRXWHVOHVSDUWLHV
est complexe, et aucun modèle SUHQDQWHVHWVXUWRXWSRXUOHV
ne semble réellement démontrer SRSXODWLRQVb}
sa pertinence.
Nerf de la guerre, toujours traitée mais souvent Yann Chauvelin, ingénieur de formation,
sous-estimée par les ONG pionnières, la question mène depuis plus de vingt ans des projets
économique est légitimement replacée au cœur en Afrique pour les télécoms et l’énergie ;
des projets par les nouvelles initiatives privées. il est en charge du business development
pour l’électrification rurale au sein
Quel que soit le schéma opérationnel, le miniré- de Sagemcom Energie et Télécom.
seau par ENR est très consommateur de capi- Retrouvez l’interview intégrale sur la page web
taux, ce qui explique que le modèle économique de l’ouvrage  : http://www.fondem.ong/
focalise toutes les attentions. electrifier-lafrique-rurale/
Les outils d’élaboration de plan d’affaires se mul-
tiplient, et certaines aides sont octroyées sous
réserve de prévisions de flux de trésorerie posi-
tifs à vingt ans (ce qui relève en pratique de la
divination…). L’arbitrage entre CAPEX (dépen-
ses d’investissement) et OPEX (dépenses
d’exploitation) reste au centre des débats, pour

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


348 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

(YROXWLRQGXQRPEUHGHFOLHQWVHWGHODFRQVRPPDWLRQGł«OHFWULFLW«DXFRXUV
GXWHPSV

500

Besoins totaux en énergie


Nombre d’abonnés
400

300

200

100
1

10

13

15
ée

ée
ée

ée

ée
ée
nn

nn
nn

nn

nn
nn
A

A
A

A
A

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

(YROXWLRQGHODWU«VRUHULHDXFRXUVGHOłH[SORLWDWLRQ

Trésorerie (€)

100 000

80 000

60 000

40 000

20 000

0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Années

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 349

la définition entre autres du taux d’hybridation par retour sur investissement cohérent à court terme
groupe électrogène, et la prise en compte des re- (idéalement cinq ans dans le contexte africain), et
nouvellements de matériel. des gains significatifs à moyen terme (les modèles
économiques sont élaborés avec des horizons de
Le modèle économique peut paraître simple  : quinze à vingt-cinq ans) ?
il s’agit d’investir dans un outil de production
et de distribution d’électricité avec des coûts La réponse est évidemment bien plus com-
d’exploitation minimes (d’où l’essor des ENR), et plexe que la question, car un projet est soumis
de compenser l’investissement en vendant de à de multiples facteurs d’incertitude. Le cha-
l’électricité à des consommateurs. Mais, en pra- pitre  3.5.3. évoque de manière synthétique les
tique, plusieurs modèles coexistent, avec ou sans éléments qui fondent le ciment fragile du modèle
subventions, selon des logiques économiques d’électrification rurale par miniréseau et de son
traduisant des schémas opérationnels divers déploiement opérationnel dans le contexte actuel.
et des philosophies d’intervention parfois Préalablement, les fondamentaux techniques
opposées : sont repris dans un chapitre que les profession-
çEGTVCKPU RGVKVU QRªTCVGWTU NQECWZ GV KPFªRGP- nels du secteur de l’énergie pourront passer, mais
dants présents sur le terrain depuis des années qui permettra aux autres lecteurs de mieux com-
et proches de leurs clients affichent une rentabi- prendre quels sont les sous-jacents de la mise en
lité minime mais suffisante grâce à quelques sub- place et de l’exploitation d’un miniréseau. }
ventions à l’investissement1 ;
çFàCWVTGU CEVGWTU FG NàªPGTIKG FàGPXGTIWTG RCT-
fois internationale2, se lancent dans le mé-
tier d’opérateur en visant plusieurs centaines
de villages à fort potentiel pour mutualiser les
coûts  ; ils optent le plus souvent pour des solu-
tions «  containérisées  » et/ou «  connectées  »
permettant une gestion à distance ou avec une
présence locale minime ;
çFG NGWT EµVª NGU 10) EQPVKPWGPV FG RNCKFGT GP
faveur d’un droit à l’électricité pour tous (d’autant
plus si elle est de source renouvelable et lo-
cale), de promouvoir une gestion privée locale
et incarnée et de démontrer la nécessité de sub-
ventionner a minima l’investissement, et parfois
aussi l’exploitation (comme le renouvellement,
les extensions).

La question posée par les développeurs à la 1. Comme la société EOSOL, qui opère à Madagascar - (cf. Interview
recherche d’un modèle économique viable de Camille Bataille sur la page web de l’ouvrage : http://www.
fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/ )
sans subvention est simple et essentielle  : inve-
2. Comme les groupes français Orange, EDF, Engie, Schneider
stir aujourd’hui dans un miniréseau offre-t-il un Electric ou Sagemcom.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


350 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.5.2.
Miniréseaux : rappel des fondamentaux techniques

Concevoir une centrale de production


d’électricité pour alimenter un miniréseau de-
mande plusieurs corps d’ingénierie complé-

© Fondation Energies pour le Monde


mentaires (le cas de l’hydroélectricité ayant
ses propres spécificités additionnelles) : géo-
logie et génie civil, électronique de puissance
et automates, électromécanique, transport et
distribution d’électricité.

Ce chapitre s’oriente volontairement vers les mini-


réseaux alimentés par centrale solaire et/ou hy- Miniréseau basse tension à Madagascar.
brides. Le cas fort intéressant de l’hydroélectricité
exige un contexte initial spécifique. Sur le sujet,
on peut se référer au document de capitalisation Actuellement la production
publié en janvier 2019 par le GRET, « Des turbines est marquée par la domination
et des hommes1    », qui présente un excellent re- du solaire.
tour d’expérience du déploiement de miniréseaux Même si d’autres sources d’énergie renouve-
hydroélectriques à Madagascar. lable sont envisageables pour la production
Sur le plan technique, un miniréseau repose ainsi d’électricité par miniréseau, le solaire photovol-
classiquement sur trois piliers : taïque prédomine, du moins pour l’heure. Au-delà
çWPU[UV©OGFGRTQFWEVKQPRCTWPGUQWTEGQWRNW- d’une baisse des coûts expliquant sa rapide bana-
sieurs sources combinées d’électricité, incluant lisation, le photovoltaïque bénéficie d’un gisement
la régulation et le stockage ; relativement constant et abondant sur l’année, et
çWPGKPHTCUVTWEVWTGFGFKUVTKDWVKQPFGNàªNGEVTKEKVªa particulièrement en Afrique de l’Ouest (cf. cha-
çWP TCEEQTFGOGPV ETªCPV WPG KPVGTHCEG CXGE pitre  1.1.2.). Le générateur est parfois associé à
l’utilisateur final, incluant le compteur électrique. un groupe électrogène d’appoint, lorsque néces-
saire, pour en faire un système hybride.
Les paragraphes qui suivent visent à décrire le
fonctionnement d’un miniréseau dans ces diffé-
rentes dimensions techniques et à en évoquer les
principales problématiques.

1. Julien Cerqueira, Juliette Darlu, Rija Randrianarivony et


Théo Grondin, “Des turbines et des hommes, quelles coalitions
d’acteurs pour l’électrification rurale à Madagascar ? Retour
d’expériences du projet Rhyviere” (Paris : Éditions du Gret, 2019). 
Une synthèse sous forme d’étude de cas est également
disponible  sur le site web de l’ouvrage.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 351

3ULQFLSHGłXQPLQLU«VHDXVRODLUH

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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352 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

© Fondation Energies pour le Monde


Préparation des interfaces pour le raccordement des usagers

Les deux particularités de la production


par source solaire.
© Fondation Energies pour le Monde

Si le principe de fonctionnement d’un générateur


solaire est le même que celui des petits systèmes
(cf. chapitre 3.1.), deux points spécifiques au mini-
réseau méritent d’être soulignés :
çNàªNGEVTQPKSWG FG TªIWNCVKQP GV FG EQPXGTUKQP GUV
plus complexe, car elle doit répondre à des problé-
matiques différentes du fait de la diversité des ré-
cepteurs électriques connectés au miniréseau ;
Les batteries sont vérifiées quotidiennement par l’équipe çEQPEGTPCPV NGU DCVVGTKGU NGU CEEWOWNCVGWTU CW
exploitante de la centrale plomb restent les plus utilisés, mais le lithium, aux
côtés d’autres technologies innovantes, prend
progressivement une place qui devrait, à terme,
être prépondérante, particulièrement pour les
solutions containérisées.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 353

([HPSOHGHVŧX[GHSXLVVDQFHVXUXQPLQLU«VHDXGHN:FMRXUQ«HW\SHGHbKHXUHV

puissance (kW)

10

puissance in/out batterie


8
puissance de charge solaire

puissance appelée
par le miniréseau
6

-2

-4

0.00 2.00 4.00 6.00 8.00 10.00 12.00 14.00 16.00 18.00 20.00 22.00 0.00

heures de la journée

Source : Fondation Energies pour le Monde.

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354 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Les systèmes hybrides : la voie étroite en effet sur l’évaluation de la demande prévisi-
d’une certaine souplesse onnelle actuelle et future, elle-même fortement
S’il est relativement simple d’estimer les besoins dépendante de plusieurs éléments, plus ou moins
en électricité d’un ménage pour dimensionner un maîtrisables par les concepteurs du projet :
SSI domestique, modéliser la demande en élec- çNCRQNKVKSWGVCTKHCKTGGPXKUCIªGa
tricité d’une communauté rurale et anticiper son çNGU NKOKVCVKQPU VGEJPKSWGU KORQUªGU CWZ
évolution n’est pas évident. consommateurs (la qualité du gisement local et
la puissance du système de production installé
Combien de ménages se raccorderont au miniré- limitent la quantité d’électricité disponible pour
seau  ? De nouvelles activités économiques con- les usagers ; cf. encadré) ;
sommatrices d’électricité vont-elles apparaître  ? çNGU RQUUKDKNKVªU FG FªXGNQRRGOGPV ªEQPQOKSWG
Quelle sera l’évolution de la demande dans le de la zone.
temps  ? Ces questions doivent être impérative-
ment posées en amont de la conception d’un En revanche, certains facteurs techniques, cli-
miniréseau. Le dimensionnement correct d’une matiques, sociologiques ou politiques sont plus
centrale solaire alimentant un miniréseau s’appuie évanescents. Dans un contexte rural où on ne

6\VWªPHK\EULGHDYHFFRQYHUWLVVHXUPXOWLIRQFWLRQQHOPRQRSKDV«

Relais
de transfert

*URXSH«OHFWURJªQH
Eclairage

Convertisseur
multifonctionnel

Audiovisuel
2QGXOHXU
ELGLUHFWLRQQHO

Bus DC
Informatique
Régulateur
Générateur
SKRWRYROWD±TXH

Courant continu Batterie


Réfrigérateur
Courant alternatif

6RXUFHb Gérard Madon.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 355

%LHQFRPSUHQGUHOHVOLPLWHV«QHUJ«WLTXHVGłXQH
FHQWUDOHVRODLUH RX«ROLHQQH SDUUDSSRUW¢XQH
FHQWUDOHWKHUPLTXH DOLPHQW«HSDUJURXSH«OHFWURJªQH

8QJURXSH«OHFWURJªQHGHN9$ bN: LQVWDOO«SRXUDOLPHQWHUXQPLQLU«VHDXGLVSRVHGłXQH


FDSDFLW«HQSXLVVDQFHLQVWDQWDQ«HGHN9$HQWK«RULHWRXWHODMRXUQ«HVRLWXQHTXDQWLW«
Gł«QHUJLH«OHFWULTXHUHVWLWXDEOHSURFKHGHbN:KFKDTXHMRXU(QSUDWLTXHOHJURXSHWRXUQHUD
GHb¢bGHVDSXLVVDQFHPD[LPDOHHQIRQFWLRQGHODFRXUEHGHFKDUJHGXYLOODJHTXL
GLVSRVHDLQVLGłXQHU«VHUYH«QHUJ«WLTXHLPSRUWDQWH6LOHVEHVRLQVHQ«OHFWULFLW«HQMRXUQ«HVRQW
DPHQ«V¢GRXEOHUOHJURXSHVXLYUDHWFRQVRPPHUDGHX[IRLVSOXVGHFDUEXUDQW

8QHcentrale solaireGHN:FSRXUUD«JDOHPHQWVLOHVRQGXOHXUVOHSHUPHWWHQW
GLVSRVHUGłXQHFDSDFLW«GHSXLVVDQFHLQVWDQWDQ«HGHN9$PDLVQHSRXUUDUHVWLWXHU
VXUXQHMRXUQ«HHQVROHLOO«HTXH¢bN:KHWIRLVPRLQVSDUWHPSVSOXYLHX[
&HV\VWªPHQHGLVSRVDQWSDVGHU«VHUYHOHVEHVRLQVMRXUQDOLHUVHQ«OHFWULFLW«GXVLWH
¢DOLPHQWHUGRLYHQWUHVWHUHQGH©¢GHVFDSDFLW«VGHSURGXFWLRQTXRWLGLHQQHVTXLVRQWŦJ«HV6LOH
V\VWªPHHVWVROOLFLW«SRXUSOXVGł«QHUJLHLOVHPHWWUDHQV«FXULW«HWVłDUU¬WHUDDXWRPDWLTXHPHQW

dispose que rarement de statistiques fiables, il l’investissement initial et les charges d’exploitation
est difficile d’écarter l’incertitude de l’équation du (renouvellement).
dimensionnement. Mais cette flexibilité a un prix : chaque kWh addi-
tionnel produit par le groupe électrogène coûte
L’hybridation, association d’un groupe élec- plus cher à l’opérateur que les kWh solaires… et
trogène à une centrale solaire autonome, per- émet des gaz à effet de serre, pénalisant le bilan
met justement de pallier en partie la variation de environnemental de l’ensemble.
la demande en électricité. Le groupe électrogène
prendra le relais de la centrale solaire : D’autres hybridations, associant plusieurs
çGP ECU FG HQTVG FGOCPFG RQPEVWGNNG XQKTG FG sources différentes, éolien/solaire, hydro/solaire
manière plus systématique si la demande a pro- sont possibles. Très stimulants pour les ingé-
gressé au-delà des prévisions ; nieurs et les développeurs de logiciels de concep-
çRGPFCPV WPG RªTKQFG FàCDUGPEG RTQNQPIªG FG tion, ces systèmes se heurtent à leur cherté et à
soleil ; une forte complexité opérationnelle, qu’il est
çGP ECU FG FªHCKNNCPEGU FGU ªSWKRGOGPVU nécessaire d’anticiper.
photovoltaïques.
Sa présence permet également de réduire le
parc d’accumulateurs (le groupe électrogène
peut être activé le soir pour préserver les bat-
teries), dont le coût pèse significativement sur

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


356 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

.GU RQVGCWZ GP DQKU les plus utilisés en milieu


3RXUHQVDYRLUSOXV rural subsaharien, doivent recevoir un traite-
sur les systèmes ment antipourrissement de leur partie enterrée,
K\EULGHV qui n’est pas toujours synonyme de durée de vie
satisfaisante. Il faut s’assurer de la provenance
,OH[LVWHSUªVGłXQHGL]DLQHGłDUFKLWHFWXUHV des poteaux (forêt correctement gérée) mais
«OHFWULTXHVGHFRXSODJHGHSXLVVDQFHHW aussi de la qualité de leur traitement, opération
GHJHVWLRQGLII«UHQWHVSRXUOHVV\VWªPHV parfois complexe lorsqu’ils sont fabriqués locale-
K\EULGHV ment. Pour limiter les risques, les concepteurs re-
/łRXYUDJHGH*«UDUG0RLQH courent de plus en plus aux poteaux normalisés
/ł(OHFWULŦFDWLRQVRODLUHSKRWRYROWD±TXH en provenance d’Europe ou d’Afrique du Sud.
U«VXPHWUªVELHQOHVGLII«UHQWHVPRGDOLW«V
WHFKQLTXHVGHFRQFHSWLRQHWGH .GU RQVGCWZ GP DªVQP CTOª majoritaires dans
IRQFWLRQQHPHQWGHVFHQWUDOHVK\EULGHV les pays industrialisés, sont plus onéreux mais
HQSOXVGł¬WUHOłRXYUDJHGHU«I«UHQFH ont l’avantage de pouvoir être fabriqués sur site
WHFKQLTXHVXUWRXVOHVDVSHFWVGH lorsque l’acheminement de matériel est difficile.
FRQFHSWLRQHWGłH[SORLWDWLRQGHVV\VWªPHV La qualité des matériaux et la provenance du sa-
SKRWRYROWD±TXHVDXWRQRPHV ble et des fers utilisés doivent être attentivement
vérifiées.
5HWURXYH]WRXVOHVGRFXPHQWVXWLOHVGDQV
ODELEOLRJUDSKLHHQŦQGłRXYUDJH .GU RQVGCWZ GP CEKGT ICNXCPKUª plus onéreux,
offrent une très bonne robustesse et une flexi-
bilité d’usage. Moins ancrés dans les pratiques
de l’ERD que les solutions traditionnelles, ils sont
La distribution de l’électricité repose pourtant adaptés aux caractéristiques des mini-
sur les mêmes fondamentaux réseaux ruraux (faibles hauteurs, conducteurs de
techniques qu’un réseau classique. faible section au poids compatible avec la capaci-
Physiquement, un miniréseau est composé té de résistance mécanique des poteaux).
d’un ensemble de supports (poteaux) et de
conducteurs (câbles) permettant de distribuer La complexité principale de conception d’un mini-
l’électricité de la source de production aux réseau ne réside pas dans le choix des matériaux
points de consommation. D’une longueur com- ou le dimensionnement des lignes. De nombreux
prise entre 1 et 10 km en moyenne, un miniréseau outils de calcul normalisés, inspirés de ceux utili-
basse tension (BT) rural ne présente pas de dif- sés pour dessiner les réseaux urbains, apportent
férences significatives avec une antenne BT d’un des réponses précises.
réseau urbain. Le parcours d’implantation au sein d’une localité
Pourtant, les contraintes techniques et finan- est en revanche un exercice subtil, et capital pour
cières du milieu rural rendent certains choix plus l’acceptation du projet par les populations. Il lais-
difficiles ; ainsi pour les supports, pour lesquels il sera nécessairement des habitations non desser-
faut arbitrer entre longévité et prix : vies, qu’une solution d’électrification complémen-
taire devra satisfaire.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 357

L’interface avec le client final, créée Un miniréseau solaire, conçu pour délivrer quo-
par le raccordement, constitue tidiennement une quantité d’énergie électrique
un point névralgique du dispositif finie, doit être en mesure de maîtriser les consom-
d’exploitation. mations de chaque usager. Même si une tarifica-
Le dernier maillon technique d’un miniréseau tion dissuasive peut servir de régulateur naturel,
est le raccordement des d’utilisateurs –  que la un miniréseau solaire conçu pour alimenter une
pratique a décidé de classer en trois catégories dizaine d’acteurs économiques «  productifs  » ne
(domestiques, économiques, communautaires). pourra pas techniquement satisfaire la demande
Cette interface entre le miniréseau et l’utilisateur d’une dizaine d’activités supplémentaires.
est essentielle à l’équilibre social, économique et
fonctionnel de l’ouvrage.
© Fondation Energies pour le Monde

© Fondation Energies pour le Monde

Poteau dont le bois est pourri. Poteau en béton.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


358 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

L’interface avec le client joue plusieurs


rôles essentiels. /LPLWHUODSXLVVDQFH
C’est via le boîtier fixé chez l’abonné, princi- XWLOLVDEOHb
pal outil de communication entre l’opérateur et ménage vs acteur
l’usager, que s’organise la maîtrise de la puissance
économique
d’utilisation et de la quantité d’énergie consom-
mée. Au-delà de l’échange d’informations sur la 2QSRXUUDOLPLWHUODSXLVVDQFHXWLOLVDEOH
consommation, les dispositifs qu’il inclut garan- GłXQP«QDJH¢b:«YLWDQWDLQVLTXłLO
tissent le respect des clauses contractuelles de XWLOLVHGHVDSSDUHLOV«OHFWURP«QDJHUVHW
l’abonnement et protègent l’installation électrique, FDOLEUHUFHP¬PHOLPLWHXU¢b:SRXU
et donc les biens et les personnes. XQDWHOLHUGHPHQXLVHULH

2QWT NKOKVGT NC RWKUUCPEG FàWVKNKUCVKQP on peut


installer des fusibles ou des disjoncteurs clas-
siques, mais leurs seuils de déclenchement ne
sont pas précis, et leur temps de réaction est Limiter la quantité
Gł«QHUJLH
FRQVRPP«Hb
ménage vs acteur
économique
2QSRXUUDSODIRQQHUFHWWHYDOHXU¢bN:K
SRXUXQP«QDJHSHX«TXLS« DYHFXQH
SXLVVDQFHPD[LPXPGHb: HQOXL
DWWULEXDQWHQUHWRXUXQWDULIGXN:KEDV
HWFDOLEUHUOHP¬PHGLVSRVLWLI¢bN:KSDU
MRXUSRXUXQDFWHXU«FRQRPLTXH DYHFXQH
SXLVVDQFHPD[LPXPGHb: DYHFXQ
WDULIGXN:KGLII«UHQW

souvent supérieur à celui des onduleurs de pro-


duction (déclenchement électronique). Il ex-
iste de plus en plus de limiteurs électroniques
de puissance performants, rapides, réglables
et abordables (quelques dizaines d’euros), qui
permettent d’équilibrer la charge au regard de
© Michaud

la capacité de production des centrales. Ils se


déclenchent chez l’usager si celui-ci utilise un ré-
Limiteur. cepteur inadapté.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 359

.C SWCPVKVª FàªPGTIKG ªNGEVTKSWG EQPUQOOªG matinée et l’après-midi, pendant la période de fort
RCT LQWT FQKV GNNG CWUUK «VTG EKTEQPUETKVG car ensoleillement.
elle est limitée par la source elle-même. Certains
limiteurs de puissance disposent de limiteurs L’interface client doit également rassembler les
d’énergie : sur une base de 24 heures, ils « laissent dispositifs de protection des personnes et des
passer » une quantité finie de kWh chez l’usager. biens  : l’électricité distribuée par un miniréseau
D’autres équipements, comme les interrupteurs solaire de quelques kW est tout aussi mortelle
horaires, permettent de limiter le fonctionnement que celle distribuée en ville. On retrouvera ainsi
du service à certaines plages seulement et un minimum de dispositifs de protection  : dis-
d’optimiser la capacité de production par rap- joncteurs, protection différentielle le cas éché-
port aux besoins des usagers. Il est ainsi possible ant. Enfin, le dispositif doit être compréhensible
d’accroître le nombre d’acteurs économiques par l’utilisateur. Il est important de diffuser une
à forte demande raccordés au miniréseau en notice illustrée sur le fonctionnement du service,
répartissant leur utilisation du service entre la ses limites et ses risques, en plus des campagnes

© Fondation Energies pour le Monde

Interface client installée dans le cadre du projet Pehgui, en Guinée.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


360 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

/HSUREOªPHGHVGLVMRQFWHXUVVXUOHVPLQLU«VHDX[
autonomes

3DUKDELWXGHOHVLQWHUIDFHVFOLHQWVGHQRPEUHX[PLQLU«VHDX[VRQW«TXLS«HVGHGLVMRQFWHXUV
FODVVLTXHV FRPPHHQYLOOHŊ GRQWODIRQFWLRQHVWGHG«FRQQHFWHUODFKDUJHHQFDVGHVXULQWHQVLW«
XWLOLVDWLRQGłXQDSSDUHLOWURSSXLVVDQW RXGHFRXUWFLUFXLWIUDQF U«FHSWHXU«OHFWULTXHHQG«IDXW 
GDQVXQHKDELWDWLRQ&HSHQGDQWOHVWHPSVGHU«SRQVHGHFHVGLVSRVLWLIVGHFRXSXUHFRQ©XVSRXU
OHVU«VHDX[XUEDLQVVRQWODSOXSDUWGXWHPSVSOXVORQJVTXHODFRXSXUHGHSURWHFWLRQ«OHFWURQLTXH
DXVHLQGHVRQGXOHXUVGHODFHQWUDOH

3DUFRQV«TXHQWHQFDVGHG«IDXWIUDQFFKH]XQXVDJHUFHQłHVWSDVOHGLVMRQFWHXUTXLRXYUHPDLV
WRXWHODFHQWUDOHTXLVHPHWHQG«IDXWb(OOHQHSRXUUDUHG«PDUUHUTXłXQHIRLVOHG«IDXWFRUULJ«
0DLVFRPPHQWWURXYHUOłRULJLQHGXFRXUWFLUFXLWSDUPLSOXVLHXUVFHQWDLQHVGłXVDJHUVUDFFRUG«Vb"
/łH[HUFLFHSHXWSUHQGUHSOXVLHXUVKHXUHVVLWRXWHIRLVXQRS«UDWHXUWHFKQLTXHFRPS«WHQWHVW
LPP«GLDWHPHQWPRELOLVDEOHORFDOHPHQW

&HWH[HPSOHSDUPLWDQWGłDXWUHVGRLWIDLUHU«ŧ«FKLUOHVFRQFHSWHXUVTXLVHUDLHQWWHQW«V
GHUHVWUHLQGUHDXPD[LPXPODSU«VHQFHGłXQRS«UDWHXUWHFKQLTXHFRPS«WHQWVXUVLWH

de sensibilisation. Pour prévenir la fraude, notam- Au-delà des problématiques de recouvrement (cf.
ment s’il n’y a pas d’opérateur physique sur site, chapitres  2.4.4.), ce dispositif, toujours répandu,
on peut envisager le plombage ou tout autre dis- tend à être rapidement remplacé par les systèmes
positif de protection posé sur le boîtier. La sensi- de prépaiement, dont les récents progrès per-
bilisation et l’exemplarité de certains consomma- mettent la diffusion au sein des miniréseaux ruraux.
teurs sont également des facteurs de cohésion et
d’adhésion aux règles du jeu (cf. chapitre 3.5.3.). Simple et ergonomique, le prépaiement
se diffuse largement.
Le comptage de l’énergie électrique Répondant aux habitudes de consommation pay
reste la clé de voûte de la facturation as you go qui se sont ancrées avec l’essor de la té-
et de l’équilibre économique d’un léphonie mobile en Afrique, le prépaiement du ser-
miniréseau. vice électrique est d’un principe simple : un crédit
Les premiers miniréseaux ont été équipés de de kWh est acheté à l’avance puis consommé.
compteurs électromécaniques classiques, à Très répandu dans de nombreuses capitales
l’instar des réseaux urbains. Robustes et normali- africaines, ce système limite théoriquement la
sés, ils assurent un comptage précis de l’électricité fraude et assure le paiement de l’électricité effec-
consommée par le client et permettent une factura- tivement consommée :
tion au réel : en pratique, l’usager paie a posteriori les çFCPU NGU U[UV©OGU UKORNGU NàWVKNKUCVGWT FW OKPK-
kWh qu’il a consommés sur la période passée. réseau se procure un code (qui correspond à un

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 361

3DUROHGHSURIHVVLRQQHOOH
Camille André-Bataille

(RVROG«YHORSSHHWH[SORLWHGHVPLQLU«VHDX[VRODLUHV¢0DGDJDVFDUHQXWLOLVDQW
GHVV\VWªPHVGHSU«SDLHPHQWFRQQHFW«V$XGHO¢GXUHFRXYUHPHQWGHVSDLHPHQWV
TXHOVVRQWOHVDYDQWDJHVGHFHVV\VWªPHVQXP«ULTXHVb"

mb/łXWLOLVDWLRQGłXQHVROXWLRQGHFRPSWDJHHWGHPRQLWRULQJLQWHOOLJHQWHHWDFFHVVLEOH
¢GLVWDQFHHVWXQDWRXWLQG«QLDEOHbHOOHFRQVWLWXH¢ODIRLVXQRXWLOGHVXLYLHWGłDQDO\VH
HWXQRXWLOGłDLGH¢ODSULVHGHG«FLVLRQ&HVV\VWªPHVSHUPHWWHQWGHSURSRVHUSOXVLHXUV
WDULILFDWLRQVHWGHVPRGDOLW«VGHSDLHPHQWPRGHUQHVHWDGDSW«HVDXFRQWH[WHUXUDO
SU«SDLHPHQWSRVWSDLHPHQW«FK«DQFLHU PDLVVXUWRXWGłHIIHFWXHUXQVXLYLHWXQHDQDO\VH
GHODFRQVRPPDWLRQHQWHPSVU«HOHWHQFXPXO« VHORQSOXVLHXUVLQGLFDWHXUVFRPPHOHW\SH
GłXVDJHUOHW\SHGHFRQQH[LRQODS«ULRGHODIU«TXHQFHHWF 1RXVSRXYRQVDLQVLDQWLFLSHU
OHVEHVRLQVWHFKQLTXHV H[WHQVLRQ RXFRPPHUFLDX[ DFWLRQRXVHQVLELOLVDWLRQFLEO«HRIIUH
LQFLWDWLYH«Y«QHPHQWVPDUNHWLQJHWF /łREMHFWLIHVWGHIRXUQLUGHVVHUYLFHVGHTXDOLW«WRXW
HQDVVXUDQWODSHUIRUPDQFH«FRQRPLTXHGXPRGªOHb}

Camille André-Bataille, ingénieur et économiste de l’énergie et des projets bas carbone, œuvre
depuis cinq ans pour l’ERD et l’émergence de communautés rurales fortes
à Madagascar et en Afrique.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

crédit de kWh ou à un crédit de temps) et le saisit les récepteurs. Ce point de détail, souvent né-
sur son compteur. Ce dernier s’active, il informera gligé, peut perturber l’équilibre énergétique du
l’usager lorsque la fin de son crédit sera proche, miniréseau dans son ensemble ;
afin qu’il se procure une nouvelle recharge ; çUQP WVKNKUCVKQP UàCX©TG EQ¼VGWUG RQWT NGU RGVKVU
çFCPU NGU OKPKTªUGCWZ TªEGPVU GV GP EQWTU FG exploitants  : la mise en place d’un dispositif de
développement, plus sophistiqués, la codifica- prépaiement à l’électronique complexe, plus fra-
tion n’est plus manuelle mais pilotée à distance gile que celle d’un compteur traditionnel, exige la
grâce aux compteurs intelligents, déjà utilisés présence sur site de matériel informatique, d’une
par les opérateurs PAYG (cf. chapitre 3.2.2.). connexion Internet, de personnel compétent et,
Mais dans la réalité, l’application de cette innova- souvent, du paiement d’une licence annuelle. En-
tion aux miniréseaux n’est pas si simple : visageables pour un opérateur gérant plusieurs
çNCOKUGGPRNCEGFWFKURQUKVKHGUVRCTHQKUCDUWTFGa miniréseaux et des milliers d’usagers, ces inves-
certains ménages ruraux consommant moins de tissements connexes sont économiquement im-
0,1 kWh/jour, il arrive que le compteur intelligent possibles pour une installation isolée de quelques
soit le premier poste de consommation, devant centaines de clients.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


362 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Cela dit, le prépaiement restant la solution tech-


nique la plus robuste pour pallier le problème de
recouvrement et renforcer l’équilibre économique

© DR Mamourou Sonomou
des exploitants, des industriels ont développé des
solutions intégrées de comptage intelligent spé-
cialement conçues pour les miniréseaux ruraux.

Peu coûteuses et peu consommatrices, elles


offrent plusieurs options cohérentes avec les
Exemple de compteur utilisé pour le prépaiement de l’électricité contraintes du terrain  : limitation de puissance et
d’énergie, prépaiement, compteurs connectés, ta-
rification selon plusieurs plages horaires, factura-
tion au nombre de kWh ou au forfait temps, etc.
([HPSOHGHFRPSWHXULQWHOOLJHQW Fonctionnant avec des logiciels dits «  proprié-
DGDSW«DX[PLQLU«VHDX[UXUDX[ taires », souvent soumis à un abonnement et à un
système de gestion spécifique, elles empêchent
cependant l’opérateur d’évoluer vers une autre
9HUVODOLJQH«OHFWULTXH solution, contrairement à la codification STS, plus
évolutive et ouverte à de multiples compteurs cer-
tifiés (cf. encadré).

)L[HU¢XQSRWHDX
A ce jour, la solution technique idéale pour la ges-
RX¢XQE¤WLPHQW tion d’un miniréseau n’existe pas. Il serait judicieux
de partager collectivement les retours des diver-
ses expériences conduites, afin d’orienter la pro-
fession vers une standardisation des interfaces.
Mais la percée de plusieurs dizaines de nouveaux
acteurs, sans concertation ni régulation, semble
écarter une telle perspective à court terme.
9HUVOHF¤EODJHGRPHVWLTXH
En revanche, il est d’ores et déjà possible de tirer
de nombreuses leçons des projets de miniré-
seaux conduits depuis plusieurs décennies par
6RXUFHb Spark Meter, https://www.sparkmeter.io/.
les acteurs historiques de l’ERD. }

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 363

3U«SDLHPHQWbODFRGLŦFDWLRQ6WDQGDUG7UDQVIHU
6SHFLŦFDWLRQ 676

/DQRUPH676G«ŦQLWOHFDGUHWHFKQLTXHGłXQV\VWªPHV«FXULV«GHWUDQVIHUWGłLQIRUPDWLRQHQWUH
XQSRLQWGHYHQWHHWXQFRPSWHXUGł«OHFWULFLW«
(OOHHVWDGPLQLVWU«HSDUOłDVVRFLDWLRQLQWHUQDWLRQDOH676EDV«HHQ$IULTXHGX6XGHWFRIRQG«H
SDUSOXVLHXUVFRQVWUXFWHXUVGHFRPSWHXUV«OHFWULTXHVTXLHVWJDUDQWHGHVOLFHQFHV676DFFRUG«HV
DX[IDEULFDQWVSRXUGHVFRPSWHXUVWHVW«VHWYDOLG«VHQODERUDWRLUH(OOHU«I«UHQFH«JDOHPHQWOHV
RS«UDWHXUVXWLOLVDQWFHVPDW«ULHOVHWOHXUIRXUQLWOHVFO«VGHFU\SWDJHVS«FLŦTXHPHQWFRQ©XHVSRXU
FKDFXQ

/HV\VWªPH676JDUDQWLWGłDERUGOłLQWHURS«UDELOLW«HQWUHOHVFRPSRVDQWVGHVV\VWªPHVSURGXLWV
SDUGLYHUVIDEULFDQWVGHFRPSWHXUVSU«SD\«VHWGHVV\VWªPHVGHYHQWHFRQIRUPHVDX[QRUPHV
676'HFHWWHID©RQOłRS«UDWHXUQłHVWSDVWULEXWDLUHGłXQVHXOIDEULFDQWbHQFDVGHG«IDLOODQFHGH
PDW«ULHOGłLQWHUUXSWLRQGHSURGXFWLRQRXGHWDULIGHYHQXSURKLELWLILOSHXWVHWRXUQHUYHUVXQDXWUH
IRXUQLVVHXUWLWXODLUHGłXQHOLFHQFH676VDQVPRGLŦHUVRQLQIUDVWUXFWXUHDFWXHOOH

/HGHX[LªPHDWRXWGHODOLFHQFH676HVWGHUHQGUHLPSRVVLEOHODIUDXGHHWOHPDUFK«QRLUGHFU«GLWV
Gł«QHUJLH&KDTXHMHWRQJ«Q«U«SDUOłRS«UDWHXU¢ODGHPDQGHGHOłDERQQ«VHUDYDODEOHXQLTXHPHQW
VXUOHFRPSWHXUGHFHWDERQQ«HWHQFRG«GHPDQLªUH¢FHTXłLOVRLWLQIDOVLŦDEOH LPSRVVLELOLW«GH
PRGLŦHUOHVLQIRUPDWLRQVFRPPHOHPRQWDQWDOORX«RXOHVSDUDPªWUHVGHU«JODJHGXFRPSWHXU (Q
RXWUHHQFDVGHYROGHWLFNHWGHFRPSWHXURXGHVVHUYHXUVHWER°WLHUVGHFU\SWDJHOHVMHWRQVJ«Q«U«V
QHVRQWXWLOLVDEOHVQLVXUGłDXWUHVFRPSWHXUVQLFKH]XQDXWUHRS«UDWHXU

&HVVHUYLFHVSD\DQWVGRLYHQW¬WUHSULVHQFRPSWHGDQVOHSODQGłDIIDLUHVGHOłRS«UDWHXU
&HGHUQLHUGRLWVłDFTXLWWHUGHOłDFKDWPLQLPDOFKDTXHDQQ«HGHMHWRQVSRXUXQSUL[GH86'

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


364 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

3.5.3.
Les miniréseaux ruraux par EnR : retour
d’expériences et pistes de réflexion.
Du ciblage territorial à l’entretien des infrastruc- des opérateurs locaux à en assurer une exploi-
tures électriques, de la tarification à la sélection tation pérenne ou encore la capacité des entités
de l’exploitant (ou opérateur), ce chapitre ex- institutionnelles à en garantir une supervision ré-
plore, de manière synthétique et sans prétendre gulée. Selon cette conception, l’option des mini-
à l’exhaustivité, les différents facteurs à prendre réseaux doit être retenue lorsque les conditions
en considération pour réussir la conception, suivantes sont réunies :
la réalisation et l’exploitation d’un ou plusieurs çWPG RQRWNCVKQP UKIPKăECVKXG GV WPG FGPUKVª FG
miniréseaux concertés. l’habitat élevée ;
çWP RQVGPVKGN FG ETQKUUCPEG ªEQPQOKSWG UKIPK-
Illustré d’exemples et de retours de terrain con- ficatif (agriculture de transformation, tourisme,
crets, il vise à valoriser les pratiques susceptibles pêche) ;
de pallier les défaillances des modèles existants çWPGlaTKEJGUUGNQECNGa|U[PQP[OGFGECRCEKVª¡
et à partager les multiples questions que soulève payer le service électrique.
un schéma d’électrification qui n’est pas encore
pleinement mature. Or les praticiens et les observateurs de terrain
décrivent une réalité bien différente  : la corréla-
Les raccourcis de la planification : tion entre la capacité théorique d’un territoire à
quels critères pour déployer un se doter d’un miniréseau et la pérennité effective
miniréseau ? de l’ouvrage n’est pas démontrée. Cette pérennité
Les premières études de planification procède d’un équilibre plus complexe.
d’électrification de grande ampleur réalisées
en Afrique datent du début des années 2000, Faire le choix de déployer un miniréseau sur un
lorsque le déploiement de miniréseaux diesels territoire exige une approche fine, multidimen-
s’est opéré sous l’égide de la Banque mondiale, sionnelle, patiente. Le porteur du projet doit
avec la contribution des agences d’électrification prendre le temps nécessaire pour se forger des
rurale nouvellement créées. Procédant parfois convictions sur les points suivants :
d’analyses trop macroscopiques ou trop rapides, çNGPKXGCWTªGNFàCEEGRVCVKQPFGUHWVWTUCDQPPªU
ces études envisageaient plusieurs «  schémas  » au-delà du «  oui  » apparemment unanime que
d’électrification rurale pour un territoire, mêlant suscite l’annonce d’un projet d’électrification ;
plusieurs types de solution  : SSI pour l’habitat çNCPCVWTGFGNCFGOCPFGGPªNGEVTKEKVªGVNGURQU-
dispersé, extension de réseau pour les localités sibilités de sa progression ;
proches des villes électrifiées, miniréseaux pour çNGUECRCEKVªUTªGNNGUFàCRRTQRTKCVKQPNQECNGa
les localités rurales à forte densité. çNGUECRCEKVªUGVNCRTQRGPUKQP¡RC[GTNGUGTXKEG
Aujourd’hui encore, certains rapports d’étude de de l’électricité ;
planification tiennent pour acquises la solidité çNGU KORCEVU UQEKQNQIKSWGU GV ªEQPQOKSWGU FG
technique des solutions envisagées, la capacité l’arrivée de l’électricité.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 365

La sélection d’un territoire : un


processus long, complexe et parfois Retour de terrain
décourageant pour les populations.
Depuis plusieurs générations, les communautés En Guinée,ORUVGHOł«OHFWULŦFDWLRQGłXQ
rurales d’Afrique subsaharienne voient défiler les YLOODJHSDUFHQWUDOHVRODLUHK\EULGHSUªVGH
ONG, les bailleurs de fonds institutionnels et les GHX[DQVGł«WXGHVSU«DODEOHVRQWGRQQ«
sociétés étrangères, qui formulent des promesses OLHX¢OłLGHQWLŦFDWLRQGłXQWHUUDLQSRXUOD
d’infrastructures dans des secteurs divers (santé, FRQVWUXFWLRQGHODFHQWUDOHHW¢XQWUDF«GX
éducation, agriculture, eau…), rarement tenues. U«VHDXSU«YR\DQWGHVSRWHDX[LPSODQW«VVXU
GHVSURSUL«W«VSULY«HV
Or, mettre en œuvre un miniréseau prend du
temps  : deux à cinq ans s’écoulent en moyenne 1łDFFRUGDQWTXHSHXGHFRQŦDQFHDX
entre l’identification d’un site, les premières SRUWHXUGXSURMHWOHVSRSXODWLRQVHWOHV
études et la mise sous tension du réseau. Incom- DXWRULW«VORFDOHVDYDLHQWDWWULEX«SRXU
préhensibles par des populations locales, ces dé- OXLGRQQHUVDWLVIDFWLRQGHVSDUFHOOHVGH
lais pénalisent la crédibilité des porteurs de projet WHUUDLQFHQV«HVDSSDUWHQLU¢ODFRPPXQH
et des autorités nationales, et ils découragent les 3OXVLHXUVPRLVDSUªVORUVTXHOłHQWUHSULVH
futurs usagers (à qui l’on demande souvent une GHJ«QLHFLYLOHVWDUULY«HGDQVODORFDOLW«
contribution comme preuve de leur intérêt ou de SRXUG«PDUUHUOHVWUDYDX[OłHQVHPEOHGHV
leur engagement à se raccorder ultérieurement). WHUUDLQVFRQF«G«VD«W«UHPLVHQTXHVWLRQ
HWSOXVLHXUVMRXUQ«HVGHGLVFXVVLRQRQW
La méfiance, parfois, s’installe. Enquêtes so- «W«Q«FHVVDLUHVSRXUWURXYHUGHQRXYHDX[
cio-économiques, études d’emplacement des DFFRUGV
ouvrages, plans de réseau… il est fréquent que
l’implication des communautés locales dans ces
travaux préalables, indispensable à la réussite du
projet, s’avère insuffisante. Souvent, les études
sont à reprendre une fois que les populations ont la
preuve tangible que leur localité va être électrifiée.
Entre les premières enquêtes socio-économiques
et la mise en service d’un miniréseau, le contexte
local a également évolué  : des ménages se sont
© Fondation Energies pour le Monde

équipés de SSI, des acteurs économiques à fort


potentiel ont changé d’emplacement ou d’activité
ou une échéance électorale a modifié l’adhésion
des autorités au projet.
La solidité des liens tissés durant cette longue
période de maturation ne se révèle généralement
qu’une fois les premiers poteaux dressés.

Négociations pour le terrain, à Kouramangui (Guinée).

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


366 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

([HPSOHGHFRXUEHGHFKDUJHbVF«QDULRPD[LPXPvsVF«QDULRSRQG«U«

6&‹1$5,2b&211(&7‹6$11‹(
&285%('(&+$5*(m02<(11(}5(&2167,78‹(
Puissance
moyenne
en kW

25

Économiques
20 Communautaires
Ménages
15

10

0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
Heures pour une journée type

6&‹1$5,2321'‹5‹$11‹(
&285%('(&+$5*(m02<(11(}5(&2167,78‹(

Puissance
moyenne
en kW

25

Économiques
20 Communautaires
Ménages
15

10

0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
Heures pour une journée type

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 367

L’analyse de la demande, incidence démographique  ? Va-t-elle vraiment


un exercice complexe. stimuler l’emploi ? ;
Les composants d’une centrale solaire, figés çNGU CEVGWTU ªEQPQOKSWGU PQVCOOGPV EGWZ ¡
pour environ dix ans, déterminent la quantité forts besoins énergétiques (artisanat, transfor-
d’énergie disponible quotidiennement. Dès lors, mation agricole), assurent une part majoritaire
comment prévoir la nature de la demande en de la consommation électrique, et leur présence
électricité d’une localité rurale de plusieurs mil- justifie parfois la mise en place du miniréseau.
liers d’habitants n’ayant aucun usage préalable S’ils sont déjà équipés d’un groupe électrogène
de l’électricité  ? Comment estimer l’évolution de ou d’une machine thermique, deviendront-ils
cette demande à horizon dix ans ? L’exercice, qui clients d’un service électrique distribué  ? Com-
paraît impossible, est pourtant indispensable. ment s’en assurer ?

Enquêtes socio-économiques détaillées, utili-


sation de ratios standards basés sur les retours
d’expérience, approche macroscopique et statis-
tique… il est intéressant de constater que ces dif- ,PSDFW«FRQRPLTXH
férentes méthodes aboutissent, si elles sont bien GłXQPLQLU«VHDXb
conduites, à des résultats globalement cohérents, attention au mirage
matérialisés par la courbe de charge d’un village.
2QSU«VXSSRVHVRXYHQWTXHODSU«VHQFH
Mais cette courbe seule ne fournit qu’une informa- Gł«OHFWULFLW«SDUPLQLU«VHDXHQWUD°QH
tion partielle et insuffisante à l’évaluation de la de- QDWXUHOOHPHQWODFU«DWLRQGHQRXYHOOHV
mande. Quelques questions simples permettent DFWLYLW«V«FRQRPLTXHV¢IRUWHYDOHXU
de comprendre à quel point l’incertitude est grande, DMRXW«H/HVUHWRXUVGłH[S«ULHQFH
en Afrique subsaharienne comme ailleurs : G«PRQWUHQWTXHFHQłHVWPDMRULWDLUHPHQW
çSWGN UGTC NG PQWXGCW EQORQTVGOGPV ªPGTIª- SDVOHFDV
tique des ménages  ? Leur adhésion au service
électrique rendu par le miniréseau dépendra-t- 3OXW¶WTXHGłLPDJLQHUODFU«DWLRQGHWHOOH
elle de son tarif (non défini à ce stade du projet) ? RXWHOOHDFWLYLW«LOYDXWPLHX[REVHUYHU
Vont-ils réellement renoncer à l’utilisation des OHVDFWLYLW«V«FRQRPLTXHVGHVYLOOHV
lampes solaires ou des bougies ? ; DYRLVLQDQWHVG«M¢«OHFWULŦ«HV
çNGU HQ[GTU UàªSWKRGPV OCUUKXGOGPV FG 55+ EQP-
nectés ou non. Quelle sera leur attitude en
présence d’un miniréseau ? ;
çKN[CFKZCPUSWKCWTCKVRWRTªFKTGSWGNàQPRQWT-
rait éclairer correctement avec quelques watts
électriques ? Quelle sera la consommation élec-
trique des éclairages et équipements multimé-
dias du futur proche ? ;
çNàCTTKXªG FG NàªNGEVTKEKVª FCPU WP XKNNCIG KUQNª HCKV
évoluer les comportements. Aura-t-elle une

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368 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Retour de terrain, Mauritanie

8QYLOODJHGH0DXULWDQLH«OHFWULŦ«SDUPLQLU«VHDXGLHVHOGHSXLVK\EULG«HQSDUXQSDUF
SKRWRYROWD±TXHHWGHV«O«PHQWVGHVWRFNDJHDOLPHQWHXQHORFDOLW«GłHQYLURQbSHUVRQQHVDYHF
HQYLURQFOLHQWVUDFFRUG«V

/HQRPEUHGHUDFFRUGHPHQWVGHX[DQVDSUªVODPLVHHQVHUYLFHHVWUHVW«VWDEOHODFRQVRPPDWLRQ
Gł«OHFWULFLW«DEDLVV«GHb FRQVWDWU«DOLV«SDUOłRS«UDWHXU HQWUHbHWbSRXUDWWHLQGUH
HQYLURQbN:KFOLHQWVMRXUWRXVVHFWHXUVFRQIRQGXV

Retour de terrain, Madagascar


$0DGDJDVFDUDORUVTXłXQPLQLU«VHDXVRODLUHK\EULGHHVWLQVWDOO«GDQVXQHORFDOLW«UXUDOH¢IRUWH
DFWLYLW«UL]LFROHOHVSURSUL«WDLUHVGHVWURLVG«FRUWLTXHXVHVGHUL]H[LVWDQWHV bN:FKDFXQH RQW
G«FLG«GHQHSDVVHUDFFRUGHUDXU«VHDX

/HVUDLVRQV«YRTX«HV«WDLHQWWRXW¢IDLW
FRPSU«KHQVLEOHV
'XSRLQWGHYXHGHOłXWLOLVDWHXUb
L bG«FRUWLTXHXVH¢PRWHXUWKHUPLTXHG«M¢
LQYHVWLHŦDEOHHWUREXVWH LL SDVHQYLH
GłH[WHUQDOLVHUOłDSSURYLVLRQQHPHQW«QHUJ«WLTXH
GHOłDFWLYLW«4XHVHSDVVHWLOVLODFHQWUDOH
HVWHQSDQQHOHMRXUR»OłRQGRLWG«FRUWLTXHU
SUHVTXHbKHXUHVVXUb"
© Fondation Energies pour le Monde

,GHPGXSRLQWGHYXHGHOłRS«UDWHXUGX
PLQLU«VHDXbFRQFHYRLUXQHFHQWUDOHSRXYDQW
DFFXHLOOLUTXHOTXHVPRLVSDUDQXQHRX
SOXVLHXUVG«FRUWLTXHXVHVFRQVRPPDQW¢HOOHV
VHXOHVHQXQHMRXUQ«HOł«TXLYDOHQWGHVEHVRLQV
HQ«OHFWULFLW«GHWRXWOHYLOODJHH[LJHUDLWXQ
EHVRLQGHVXUFDSDFLW«GHSURGXFWLRQTXL
UHVWHUDLWQRQXWLOLV«OHUHVWHGHOłDQQ«H
Décortiqueuse.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 369

Ainsi, ce sont davantage l’expérience du por- Définir un périmètre réseau est donc un exercice
teur de projet, sa connaissance fine des facteurs délicat, nécessitant diplomatie et flexibilité : entre
socio-économiques locaux, l’analyse des retours les premières études de dimensionnement et la
d’expérience menés à proximité du site et la re- pose des équipements, des modifications signifi-
connaissance d’une marge d’incertitude qui doi- catives sont inévitables.
vent guider la conception d’un système décen-
tralisé d’électrification.

La définition du périmètre réseau,


entre pragmatisme et contingences
politiques.
La notion de « périmètre réseau » s’entend comme
la zone de couverture, le territoire au sein duquel
tout bâtiment pourra être raccordé au futur ré-
seau de distribution. Comment le définir précisé-

© Fondation Energies pour le Monde


ment, compte tenu des intérêts divergents des
parties en présence ?

ç&WRQKPVFGXWGFGNàKPXGUVKUUGWTQRªTCVGWTale
pragmatisme commande de tirer des lignes en
fonction des seuls points de consommation co-
hérents (lieux d’activités économiques, zones à
forte densité d’habitations ou situées le long des
principaux axes de circulation). Exemple de traçage de réseau.
ç&WRQKPVFGXWGFWTªIWNCVGWTa rien ne vient a Rouge : réseau primaire
priori justifier l’exclusion de certaines habitations Orange : réseau secondaire
Bleu : réseau tertiaire
ou de bâtiments publics du périmètre réseau,
même s’ils sont de très faibles consommateurs
et de mauvais payeurs (cf. encadré).
ç&W RQKPV FG XWG FGU RQRWNCVKQPU NQECNGUa  le
périmètre doit être le plus large possible et te-
© Fondation Energies pour le Monde

nir compte des hiérarchies locales, passer par


certains foyers « stratégiques » (notables, chefs
traditionnels ou religieux, élus ou anciens élus,
proches de politiciens engagés au niveau na-
tional, membres importants de la diaspora, etc.),
afin d’assurer la stabilité et la cohésion sociale
de l’opération. Le pouvoir des hiérarques n’est
pas sans influence sur le respect des règles et
l’équilibre économique de l’opération. Installation d’un miniréseau à Madagascar.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


370 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

Comment concevoir les organes


Infrastructures de production ?
SXEOLTXHVb Première étape de la conception des organes de
in or outb" production, l’analyse énergétique des ouvrages
permet de dimensionner les caractéristiques en
'DQVOHFDGUHGłXQSURMHWGł«OHFWULŦFDWLRQ puissance et en énergie des principaux éléments
SDUPLQLU«VHDXGłXQHORFDOLW«UXUDOHLO de la centrale. Le dimensionnement énergétique
SDUD°WORJLTXHSRXUGHVUDLVRQVVRFLDOHV est basé sur les scénarios d’analyse de la demande,
GłLQW«JUHUOHVE¤WLPHQWVSXEOLFV «FROHV avec les incertitudes évoquées précédemment.
FHQWUHVGHVDQW««GLŦFHVUHOLJLHX[Ŋ DX
S«ULPªWUHGł«OHFWULŦFDWLRQ .G FKOGPUKQPPGOGPV FGU RTKPEKRCWZ QTIC-
PGU FG NC EGPVTCNG GUV FªăPK GP EQPHTQPVCPV NC
(QSUDWLTXHODVLWXDWLRQHVWSOXVG«OLFDWH FKURQPKDKNKVª FG NC TGUUQWTEG ªPGTIªVKSWG CWZ
HWOHVRS«UDWHXUVSULY«VVRQWFRQIURQW«V¢ DGUQKPU GP ªNGEVTKEKVª GZRTKOªUa  RWKUUCPEG
SOXVLHXUVSUREOªPHVFODLUHPHQWLGHQWLŦ«V ET«VG 28
QW PQOKPCNG FàWPG CWVTG UQWTEG 
'łDERUGOHVRXYUDJHVVRQWVRXYHQW RWKUUCPEG FGU QPFWNGWTU ECRCEKVª FW RCTE
KRUVGXFHQWUHGHODORFDOLW«GRQFOHXU FàCEEWOWNCVGWTU RWKUUCPEG FW ITQWRG ªNGE-
UDFFRUGHPHQWHVWRQ«UHX[3DUDLOOHXUV VTQI©PGRQWTNGUU[UV©OGUJ[DTKFGU
P¬PHVLOHXUGHPDQGHHQ«OHFWULFLW« Aux incertitudes liées à l’évaluation des besoins
SU«YLVLRQQHOOHHVWIDLEOHLOVQHGLVSRVHQW viennent s’ajouter les aléas liés à la source :
SDVGłXQEXGJHWGHIRQFWLRQQHPHQW çFQKVQP RTªXQKT FGU RªTKQFGU RTQNQPIªGU UCPU
SHUPHWWDQWOHSDLHPHQWU«JXOLHUGH vent ou sans soleil, des périodes d’étiage du
IDFWXUHVGł«OHFWULFLW« cours d’eau ? ;
çFQKVQPCUUWTGTWPUGTXKEGEQPVKPWVQWVGNàCPPªG
,OHQU«VXOWHXQGLIŦFLOHDUELWUDJHHQWUH ou peut-on s’autoriser une adaptation de la du-
SDL[VRFLDOHHWUHQWDELOLW«TXLQłHVWSDV rée de service journalier en fonction de la res-
WRXMRXUVHQIDYHXUGHVLQIUDVWUXFWXUHV source renouvelable ? ;
SXEOLTXHV(QSUDWLTXHFHUWDLQVE¤WLPHQWV çNàJ[DTKFCVKQPFWU[UV©OGGUVGNNGRTªXWGRQWTWP
¢YRFDWLRQFRPPXQDXWDLUHQHVRQWLQŦQH appoint quotidien ou pour des conditions excep-
SDV«OHFWULŦ«V tionnelles (forte période pluvieuse, demande en
électricité exceptionnelle) ? ;
çSWGNUGTCNGIKUGOGPVFWUKVGFCPUNGUFKZ¡XKPIV
prochaines années  ? Des évolutions notables
sont-elles à prévoir  ? Comment anticiper les
effets du changement climatique, notamment
sur le débit des cours d’eau ?

%GU CTDKVTCIGU TªUWNVCPV FW DKNCP ªPGTIªVKSWG


UQPV FªNKECVU OCKU CWUUK FªVGTOKPCPVUa  ils influ-
ent autant sur la qualité du service électrique que
sur l’équilibre CAPEX/OPEX de l’opération. A partir

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 371

d’une même courbe de charge pour un site donné, appoint quotidien, ce qui complexifie technique-
il y aura autant de dimensionnements et d’équilibres ment et économiquement l’exploitation. En effet,
CAPEX/OPEX qu’il y a d’ingénieurs, de méthodes le parc batteries est alors à renouveler plus régu-
d’analyse des contraintes ou de valeurs : lièrement. D’où des exigences de rentabilité plus
çWPG10)CUUWTCPVNàGUUGPVKGNFGNàKPXGUVKUUGOGPV fortes afin de pouvoir réinvestir des sommes
grâce à une subvention concevra un système so- conséquentes dans le nouveau matériel.
laire avec un parc batteries conséquent (CAPEX
élevé) pour limiter les OPEX tout en maximis- Comment construire les miniréseaux ?
ant la durée de vie de l’installation. Cela lui per- A partir des arbitrages énergétiques et du di-
met d’assurer un tarif de l’électricité abordable mensionnement de l’unité de production et du
à tous les usagers, calculé sur la base des coûts miniréseau associé, le maître d’œuvre conçoit
d’exploitation uniquement ; l’architecture globale du système électrique.
ç¡ NàKPXGTUG WP QRªTCVGWT RTKXª TªCNKUCPV NGU KP- A cette étape, il s’agit encore de trouver l’équilibre
vestissements cherchera à réduire la taille du entre l’exigence de qualité (performance et du-
parc batteries et des infrastructures en général rée de vie) et la cohérence économique (coûts
pour limiter le CAPEX et le risque en capital  ; le d’investissement ajustés).
groupe électrogène devient alors rapidement un Si de nombreuses approches sont possibles, deux

© Fondation Energies pour le Monde

Installation d’une minicentrale solaire au sud de Madagascar.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


372 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

dominent actuellement :
Solutions çNC RTGOK©TG FCPU WPG FªOCTEJG ªRTQWXªG
FRQWDLQHULV«HVb GPEQWTCIG WP NCTIG VTCPUHGTV FG EQORªVGP
TXHOOHS«UHQQLW«b" EGU XGTU NGU CEVGWTU NQECWZ l’appropriation
des technologies par les exploitants, le recours
0RLQVFR½WHXVHVHWSOXVVLPSOHVPDLV aux entreprises locales pour la construction,
DXVVLPRLQVGRFXPHQW«HVFHVVROXWLRQV privilégiant les matériels et les composants dis-
VRQWWURSU«FHQWHVSRXUTXłRQSXLVVH ponibles et maîtrisés dans la région ;
WLUHUGHVFRQFOXVLRQVVXUOHXUDGRSWLRQ çNC UGEQPFG RNWU KPPQXCPVG UWT NG RNCP VGEJ-
SDUOHVSRSXODWLRQVRXVXUOHUHVSHFWGHV PQNQIKSWG UàQTKGPVG XGTU FGU UQNWVKQPU
HQJDJHPHQWVFRQWUDFWXHOVHQPDWLªUHGH la EQPVCKPªTKUªGUa |  : des centrales de produc-
JDUDQWLHHWGHVXLYLGHV«TXLSHPHQWVSDU tion sont conçues, assemblées et câblées dans
OHFRQVWUXFWHXU les locaux du fournisseur (souvent européen),
1«DQPRLQVOHVV\VWªPHVFRQWDLQ«ULV«V puis sont livrées «  prêtes à l’emploi  » sur le ter-
FRQQHFW«VUHSRVHQWDSULRULVXUXQH rain. Monitorées à distance, les infrastructures
ORJLTXHPDUFKDQGHSOXW¶W«ORLJQ«HGHV électriques ne nécessitent aucune mainte-
IRQGDPHQWDX[GHG«YHORSSHPHQWKXPDLQ nance et n’exigent, à l’exception d’un gardien et
VXUOHVTXHOVVłHVWFRQVWLWX«HOł(5'HWGHV d’un éventuel représentant commercial pour les
ERQQHVKDELWXGHVPLVHVHQDYDQWSDUOHV premières connexions, pas de personnel local
SUDWLFLHQV permanent. La gestion, grâce au prépaiement
&HUWDLQVSD\VGł$IULTXHGHOł2XHVWYRLHQW par mobile money, est entièrement dématériali-
VHFRQVWUXLUHGHQRPEUHX[PLQLU«VHDX[ sée. Eloigné de la réappropriation citoyenne du
VHORQGHVS«ULPªWUHVG«ŦQLV¢SDUWLUGłXQH bien commun énergétique, et encore au stade
SKRWRVDWHOOLWHOLYU«VVXUSODFHmbFO«VHQ expérimental, ce modèle doit prouver sa perti-
PDLQb}VDQVSU«VHQFHGłRS«UDWHXUVXU nence dans le temps (cf. encadré).
VLWHQLSHUVRQQHOGHPDLQWHQDQFHVDQV
VHQVLELOLVDWLRQSU«DODEOHGHVXVDJHUVVDQV L’opérateur : un acteur essentiel,
WUDQVIHUWGHFRPS«WHQFHVYHUVOHVDFWHXUV dont la qualité est déterminante
ORFDX[ pour la pérennité d’un miniréseau.
'ªVORUVGLIŦFLOHGHYRLUGDQVFHVV\VWªPHV Il n’existe pas de définition de référence d’un
XQHVROXWLRQGłDYHQLUHQWRXWFDVWHOVTXłLOV «  opérateur  » d’un miniréseau. Intervenant selon
VHG«SORLHQWDXMRXUGłKXL,QW«JUHUXQH diverses modalités, il joue un rôle central à toutes
ORJLTXHGłDSSURSULDWLRQORFDOHREOLJHUDLW¢ les phases du projet :
UHYRLUOHXUPRGªOH«FRQRPLTXH LQW«JUHU çFG PCVWTG KPUVKVWVKQPPGNNG CUUQEKCVKXG QW RTKXªG
GHVFR½WVGłDFFRPSDJQHPHQW HWRX¢ cadré ou non par un contrat d’autorisation, de
RUJDQLVHUGLII«UHPPHQWOHXUSURGXFWLRQ concession ou d’affermage (il est alors délé-
DVVHPEODJHU«DOLV«DX6XGHWQRQSOXVDX gataire de service public), l’opérateur est char-
1RUG  gé d’exploiter les ouvrages d’électrification en
place. Il est ainsi également désigné sous le
terme d’« exploitant » ;
çSWàKN UQKV QW PQP NàWP FGU KPXGUVKUUGWTU FGU

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 373

3DUROHGHSURIHVVLRQQHOOH
Elodie Hestin

9RXVSURSRVH]GHVVROXWLRQVGLWHVmbFRQWDLQ«ULV«HVb}DYHFGHVEDWWHULHVOLLRQ%HDXFRXS
GłH[SHUWVVRQWVFHSWLTXHVVXUODYLDELOLW«GHFHVV\VWªPHVGDQVGHVHQYLURQQHPHQWV
FOLPDWLTXHPHQWUXGHVHWWUªVHQFODY«V4XHOOHHVWYRWUHSRVLWLRQb"

mb$XVHLQGHOD%8(QHUJ\6WRUDJHQRXVDYRQVPLVHQSODFHXQH«TXLSHWHFKQLTXH
HQWLªUHPHQWG«GL«H¢GHVSURMHWVńFO«HQPDLQŅ&HWWH«TXLSHHVWFRPSRV«HGHVS«FLDOLVWHV
TXLSDUWLFLSHQWDX[VS«FLILFDWLRQVGHVROXWLRQVFRQWDLQ«ULV«HVXQLTXHV$LQVLHQEDVDQW
OHVVROXWLRQVVXUXQHRIIUHVWDQGDUGFRQQXHHWWHVW«HDLQVLTXłHQFDSLWDOLVDQWVXUQRWUH
H[S«ULHQFHDYHFOHVVROXWLRQV836 8QLQWHUUXSWLEOH3RZHU6XSSO\ OHV«TXLSHVSUHQQHQW
HQFRQVLG«UDWLRQOHVVS«FLILFLW«VQRWDPPHQWHQYLURQQHPHQWDOHVGHFKDTXHSURMHWDILQGH
G«ILQLUGHVFOLPDWLVDWLRQVGHVSHLQWXUHVGHV«TXLSHPHQWVGHV«FXULW«LQFHQGLHŊDGDSW«V
'HSOXV«WDQWHQUHODWLRQU«JXOLªUHDYHFOHVOHDGHUVPRQGLDX[GHIDEULFDWLRQGHEDWWHULHV
QRXVUHVWRQVLQIRUP«VGHV«YROXWLRQVHQWHUPHVGHPHVXUHVGHV«FXULW«'HFHWWHPDQLªUH
QRXVJDUGRQVODPD°WULVHGHODVROXWLRQIRXUQLHHWQRXVQRXVDVVXURQVGHVDYLDELOLW«b}

Elodie Hestin a une formation d’ingénieur ainsi qu’un master en management


de l’innovation. Elle a rejoint Socomec en 2008 en tant que responsable produits
de la gamme inverseurs de sources, puis en 2016 elle a intégré l’équipe Energy Storage Solutions.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

infrastructures dont il a l’usage et/ou la propriété, il doit participer aux campagnes de sensibilisa-
l’opérateur est garant de la production, de la dis- tion et d’information, et veiller à l’acceptation
tribution et de la fourniture de l’électricité et des et à l’appropriation des modalités du projet par
services associés dans sa zone d’intervention. les autorités locales, qu’elles soient élues ou
traditionnelles.
En amont de l’exploitation Pendant les travaux, grâce à sa présence sur
du miniréseau, il facilite l’adhésion le site, l’opérateur doit s’assurer du respect des
au projet et sa concrétisation. droits coutumiers et d’éventuelles contraintes
S’il est déjà désigné, l’exploitant se doit de partici- foncières non identifiées en phase d’étude. Il doit
per aux études initiales d’analyse de la demande enfin être un participant actif aux formations des
et de dimensionnement des ouvrages ou, a mini- fournisseurs d’équipements et aux réceptions sur
ma, d’en valider les résultats. Son point de vue doit site des ouvrages.
être pris en compte lors des arbitrages relatifs à
la définition du périmètre d’électrification. En tant
qu’interlocuteur privilégié des futurs abonnés,

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


374 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

En phase d’exploitation, il porte une çKN CPVKEKRG RCT WPG ªRCTIPG TCKUQPPªG NGU
responsabilité opérationnelle étendue. dépenses liées aux renouvellements des com-
.àQRªTCVGWTGUVFàCDQTFICTCPVFWTGURGEVFGU posants en fin de durée de vie.
GPICIGOGPVU TªEKRTQSWGU GPVTG HQWTPKUUGWT
FWUGTXKEGGVWUCIGTFWUGTXKEGPour cela, il doit .àQRªTCVGWTGUVªICNGOGPVICTFKGPFWTGURGEV
établir un lien fort avec les usagers : FGU T©INGU FG EQPHQTOKVª GV FGU KPHQTOCVKQPU
çKNUàCUUWTGFGNCDQPPGEQORTªJGPUKQPFGNCHCE- KPFKURGPUCDNGURQWTGPXKUCIGTWPGGZVGPUKQP
turation par les usagers, quel que soit le schéma QWWPTGPHQTEGOGPVFGECRCEKVªa
envisagé (post-paiement, prépaiement, forfait, çKN VKGPV FGU TGIKUVTGU ENKGPVU GV WPG EQORVCDKNKVª
abonnement) ; stricte, à disposition des autorités du secteur
çKN XGKNNG ¡ NàGZGORNCTKVª FGU PQVCDNGU GV CEVGWTU mais aussi des partenaires financiers ;
publics de la localité quant au respect des çKNTGPFFGUEQORVGUTªIWNKGTUCWOC¯VTGFàQWXTCIG
consignes (les limitations en puissance et en aux investisseurs, et paie les taxes et redevan-
énergie, la non-utilisation des appareils pros- ces convenues dans son contrat d’exploitation.
crits) et au paiement effectif du service ;
çKN GPEQWTCIG NGU WVKNKUCVGWTU ¡ UG TGITQWRGT GP Quels critères pour sélectionner un bon
comité d’usagers pour disposer d’un interlocu- opérateur ?
teur représentatif des abonnés, maintenir un dia- Au regard des multiples tâches qui incombent à
logue permanent et constructif, rester à l’écoute l’opérateur, sa sélection ne relève pas uniquement
d’éventuelles insatisfactions, et être en mesure d’une expertise d’énergéticien :
d’ajuster l’offre si besoin (facilités de paiement çNàQRªTCVGWT FQKV FKURQUGT FGU EQORªVGPEGU
en période de soudure, offre commerciale inno- VGEJPKSWGU PªEGUUCKTGU pour comprendre le
vante, etc.) ; fonctionnement de la centrale, pour l’exploiter
çKNFKURQUGFGURQWXQKTUGVFGNàCWVQTKVªUWąUCPVU quotidiennement et assurer sa maintenance
pour déconnecter des utilisateurs ne respectant préventive. Il doit également disposer des relais
pas les engagements contractuels ou fraudant, techniques nécessaires pour gérer rapidement
ce qui est gage d’exemplarité ; des pannes ou le remplacement de pièces dé-
çVGEJPKSWGOGPV KN FQKV CPVKEKRGT GV EQORTGPFTG fectueuses. Au cours du temps, l’opérateur doit
les flux énergétiques de la centrale pour adapter assurer le raccordement des nouveaux abonnés
le service et gérer les différentes sources de pro- à mesure que la demande croît ;
duction (« responsabilité d’équilibre »). çOCKU NàQRªTCVGWT FQKV CWUUK «VTG EQPPW NQ-
ECNGOGPV CRRTªEKª GV TGURGEVªa  son activité
.C SWCNKVª FG UGTXKEG ¡ NCSWGNNG RCTVKEKRGPV doit être comprise par la communauté comme
NC OC¯VTKUG FG NC EQPUQOOCVKQP GV NC ăCDKNK- procédant d’une logique de développement à
Vª FGU ªSWKRGOGPVU GUV WP RQKPV ENª FG UQP long terme et non d’une logique opportuniste,
KPVGTXGPVKQPa au risque qu’il soit rapidement décrédibilisé au-
çNàQRªTCVGWT EQPVTKDWG ¡ NC OC¯VTKUG FG NàªPGTIKG près des usagers. Le degré de respect qu’inspire
consommée par les abonnés en proposant l’opérateur à ses interlocuteurs fait partie des
des services et produits adaptés  : conseils critères clés de sélection.
d’utilisation, ampoules LED, téléviseurs et réfri- L’opérateur réunissant toutes ces compétences
gérateurs basse consommation ; et ces qualités est une perle rare, sans laquelle

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 375

il est impossible de parier sur la pérennité d’un çNGU CWVQTKVªU TªIKQPCNGUa  souvent dotées de
miniréseau. moyens limités mais encouragées à assumer la
décentralisation, elles doivent être informées dès
.GU TGVQWTU FàGZRªTKGPEG UGODNGPV EQPăT les premières études préalables à l’installation
OGT SWG NàGZRNQKVCVKQP GUV FCXCPVCIG RªTGPPG d’un miniréseau et tout au long des étapes de sa
NQTUSWG NàQRªTCVGWT RCTVKEKRG CWZ KPXGUVKUUG- réalisation. Leur soutien peut s’avérer essentiel
OGPVU dans les ouvrages de production et/ou de pour prévenir ou dénouer des blocages relation-
distribution (modèle classique de mise en conces- nels ou politiques, identifier des risques cachés
sion porté par les agences d’électrification rurale). et informer sur les programmes d’infrastructures
L’appropriation des équipements et leur entretien passés ou prévus dans la zone ;
seront d’autant plus rigoureux que l’opérateur çNGUªNWUNQECWZapremiers interlocuteurs de ter-
en assume la propriété, voire qu’il est à l’origine rain pendant toutes les phases d’un projet, ils
des travaux de réalisation. Ceci confirme claire- doivent en avoir parfaitement appréhendé et ac-
ment l’approche très capitalistique des modèles cepté les règles et les enjeux ; ils informent leurs
d’électrification : un opérateur d’électrification ru- administrés et doivent susciter leur adhésion aux
rale doit présenter un double profil d’investisseur modalités d’exécution du projet. L’implication du
et d’entrepreneur social, tout en respectant les maire et de ses proches conseillers dans les
règles d’un délégataire de service public. différentes étapes est un excellent indicateur
de cohésion locale, garante de la réussite de
L’implication des autorités locales l’opération ;
et de la société civile : un pari çNGU CWVQTKVªU KPHQTOGNNGUa  qu’elles soient re-
coûteux mais payant. ligieuses ou coutumières, elles sont, par leur
«  Implication de la population  », «  renforcement influence, un relais puissant auprès des futurs us-
des capacités des parties prenantes locales  »… agers. Souvent d’approche difficile ou peu enclins
ces termes se retrouvent dans toutes les publica- à la conversation, les notables n’apparaissent que
tions des acteurs du développement et de l’accès dans un deuxième temps mais doivent être rap-
à l’électricité. Banalisée, parfois dévoyée, la par- idement identifiés, car leur influence peut s’avérer
ticipation active des autorités locales et de la so- décisive, particulièrement au sein des popula-
ciété civile reste déterminante pour la réussite tions très enclavées. Un notable qui paie régu-
d’un projet de miniréseau rural à court, moyen et lièrement l’électricité servira de modèle et sera
long termes. Elle relève autant d’une approche an- gage d’autorité en appui à l’opérateur ;
thropologique et sociologique structurée que du çNGUEQOKVªUQWCUUQEKCVKQPUNQECWZa ces struc-
simple respect de l’autre et d’une bonne capacité tures clés du développement communautaire
d’observation et d’écoute (cf. chapitre 2.4.2.). permettent de sensibiliser les usagers potentiels
puis de mobiliser rapidement les volontaires au
L’arrivée d’un miniréseau dans une localité ne peut raccordement. Habituées à traduire les concepts
s’envisager sans une concertation étroite avec économiques et commerciaux du Nord pour les
l’ensemble des parties prenantes. Les informa- populations rurales, elles relaient de manière adap-
tions qu’elles communiquent sont précieuses et tée les éléments clés du projet  : calendrier, lim-
leur influence est déterminante pour la pérennité ites du service (puissance et énergie), tarification,
du service de l’électricité : modalités de paiement, coûts de raccordement,

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


376 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

responsabilités de chacun, etc. Par ailleurs, une as- limitation d’usage, un service plus ou moins fiable,
sociation d’usagers de l’électricité est un excellent une facturation « abordable », voire inexistante.
relais pour asseoir un dialogue constructif avec Deux éléments sont essentiels dans le cas d’un
l’opérateur, tout en conservant aux autorités lo- miniréseau :
cales et aux élus leur rôle d’observateurs. çNGRTKZala viabilité du modèle économique d’un
miniréseau, avec ou sans subvention, exige un
Ces démarches doivent s’inscrire dans la tem- tarif de vente du kWh plus élevé qu’en ville, pour
poralité propre au milieu rural. Elles génèrent les raisons déjà évoquées (cf. chapitre 3.5.1.) ;
des besoins de financements additionnels mais çNG UGTXKEGa  généralement rendu 24  heures sur
leur impact positif sur la pérennité du modèle 24, 7 jours sur 7 et de qualité, il sera limité indivi-
économique et la maîtrise des risques est duellement en puissance, et parfois en quantité
indéniable. d’énergie journalière utilisable. Certains appa-
Ne pas réaliser ce type de travaux préalables ris- reils énergivores ne pourront pas être utilisés,
que, à l’inverse, de coûter cher aux promoteurs de parfois l’opérateur imposera la vente de ré-
projets, lorsqu’il est trop tard pour une action ajus- cepteurs (ampoules LED, téléviseurs à basse
tée et efficace. consommation).
Pour garantir l’acceptation des règles particu-
Elément central du modèle lières au miniréseau, il est donc indispensable de
économique, la tarification doit être transmettre un minimum de culture énergétique
adaptée et comprise par tous. aux usagers  : comprendre qu’une ampoule LED
La bonne compréhension du service électrique consomme dix fois moins qu’une ampoule à in-
et de la tarification associée est cruciale pour la candescence, que l’utilisation d’un poste à souder
réussite d’un projet de miniréseau. Elle n’est pour- requiert un abonnement spécifique, etc.
tant pas aisée (cf. chapitre 2.4.4.). En effet, les fu- Le temps consacré à cette sensibilisation en
turs usagers se réfèrent spontanément aux ser- amont de l’installation du système est autant
vices et conditions des réseaux urbains  : pas de de temps épargné à corriger les problèmes de

3DUROHGHSURIHVVLRQQHOOH
Juliette Darlu

/HVHFWHXUSULY«G«SORLHGłLPSRUWDQWVPR\HQVSURVSHFWLIVGDQVOHVHFWHXUGHV
PLQLU«VHDX['łDSUªVYRWUHH[S«ULHQFHOHXUDFWLRQPHQDFHWHOOHODGLPHQVLRQKXPDLQH
GHOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«"

/HVHFWHXUSULY«QłHVWSDVPDXYDLVSDUQDWXUH,OVDLWLQQRYHUHWIDLUH«PHUJHUGHSHWLWV
RS«UDWHXUVSULY«VGDQVOHFDGUHGH333&HODGLWFHUWDLQHVLQLWLDWLYHVU«FHQWHVFKHUFKHQW
XQLTXHPHQWODUHQWDELOLW« TXLHVWQ«FHVVDLUH HWQHVHVRXFLHQWQLGHU«GXLUHODSDXYUHW«HW
OHVLQ«JDOLW«VQLGHFU«HUGHYDOHXUDMRXW«HORFDOH HPSORLVFRPS«WHQFHV QLGHPD°WULVHU
OHVH[WHUQDOLW«VHQYLURQQHPHQWDOHV G«FKHWVSROOXWLRQUHF\FODJH /HU¶OHGHOł(WDWHVW

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 377

GRQFSULPRUGLDOSRXUHQFDGUHUOHVDFWLRQVHWVłDVVXUHUGHODUHGLVWULEXWLRQGHVE«Q«ILFHVDX
FROOHFWLI(WOHV21*GRLYHQWJDUGHUOHXUU¶OHGHVHQWLQHOOHHWGHSODLGR\HU

/DG«ILQLWLRQHWODFRPSU«KHQVLRQGHODWDULILFDWLRQSDUOHVXVDJHUVMRXHQWHOOHVXQU¶OHFO«
GDQVODU«XVVLWHGłXQSURMHWGHPLQLU«VHDX"

&RPSUHQGUHODWDULILFDWLRQFłHVWFRPSUHQGUHOHPRQWDQWGHVDIDFWXUHVDYRLUFRPPHQW
PD°WULVHUVDFRQVRPPDWLRQHWGRQF¬WUHHQPHVXUHGHFRQVRPPHUHWSD\HUHQIRQFWLRQ
GHVHVPR\HQV&łHVWDXVVLVDYRLUTXłXQHSDUWLHGHVVRPPHVYDE«Q«ILFLHUDXFROOHFWLI
FRPPXQHFRRS«UDWLYHHWF &RPSUHQGUHVRQFRQWUDWFłHVWFRQQDLWUHOHVGURLWVHWGHYRLUV
GHFKDTXHSDUWLHHW¬WUHHQPHVXUHGHOHVIDLUHUHVSHFWHU3RXUWRXWHVFHVUDLVRQVOD
VHQVLELOLVDWLRQGHVIXWXUVXVDJHUVVXUOHVWDULIVHVWJDJHGHS«UHQQLW«GHOłH[SORLWDWLRQ

4XHOOHVVHUDLHQWYRVUHFRPPDQGDWLRQVVXUOłLPSOLFDWLRQGHODVRFL«W«FLYLOHGHVDXWRULW«V
ORFDOHVHWWUDGLWLRQQHOOHVGXWLVVXLQVWLWXWLRQQHOQDWLRQDO"

/DVRFL«W«FLYLOHHWOHVDXWRULW«VORFDOHVSHXYHQWDVVXUHUXQVXLYLGHSUR[LPLW«GH
OłH[SORLWDWLRQVXVFLWHUHWDFFRPSDJQHUOHG«YHORSSHPHQW«FRQRPLTXHHWH[HUFHUXQFRQWUH
SRXYRLUIDFHDXGXRIRUP«SDUOHVSRXYRLUVSXEOLFVQDWLRQDX[HWOłRS«UDWHXUSULY«'ªVOH
G«EXWGXSURMHWHOOHVGRLYHQW¬WUHLPSOLTX«HVGDQVODFRQVWUXFWLRQGHODJRXYHUQDQFHGX
VFK«PDGł«OHFWULILFDWLRQ HWQRQVLPSOHPHQWLQIRUP«HVRXVHQVLELOLV«HV HWSODF«HVDXFāXU
GXGLVSRVLWLI/HV21*SDUOHXUQHXWUDOLW«SHXYHQWDSSX\HUOł«PHUJHQFHGHFHVDFFRUGV
ORFDX[HWGHVUªJOHVSXEOLTXHVRXFRQWUDFWXHOOHV

3HQVH]YRXVTXHOHVHFWHXUGRLW¬WUHGDYDQWDJHRUJDQLV«"/HVFRPS«WHQFHVHWOHVPR\HQV
GHVRUJDQHVHWGHVDJHQFHVGHU«JXODWLRQVRQWLOVVXIILVDQWV"

$XQLYHDXQDWLRQDOOHVSU«URJDWLYHVGHVGLII«UHQWHVLQVWLWXWLRQVVRQWVRXYHQWIORXHVHWRX
VHUHFRXSHQWHQWUHXUEDLQHWUXUDOFHTXLHVWFRQWUHSURGXFWLISRXUPHWWUHHQSODFHXQH
SROLWLTXHGł«OHFWULILFDWLRQIRUWHOHVFRPS«WHQFHVP«ULWHUDLHQWGł¬WUHPLHX[G«ILQLHVHW
U«RUJDQLV«HV,OSDUDLWDXVVL«YLGHQWTXHOHVPR\HQVGHFHVLQVWLWXWLRQVGRLYHQW¬WUHUHQIRUF«V
SRXUTXłHOOHVSXLVVHQWUHPSOLUSOHLQHPHQWOHXUU¶OH

Ingénieur agronome, Juliette Darlu s’est spécialisée dans la gestion de projets d’accès
à l’énergie. Elle est responsable du programme énergie au GRET.
Retrouvez l’interview intégrale sur la page web de l’ouvrage : http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rurale/

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


378 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

'LII«UHQWVPRGªOHVGHWDULŦFDWLRQFRQVWDW«V
sur le terrain
$ERQQHPHQWHWYHQWHGHN:KHQmbSRVWSDLHPHQWb},QVSLU«VGHVPRGªOHVXUEDLQVWUDGLWLRQQHOV
GHQRPEUHX[PLQLU«VHDX[SURSRVHQWXQVHUYLFH«OHFWULTXHFRQVWLWX«GłXQHSDUWŦ[H DERQQHPHQW
PHQVXHORXDQQXHO HWGłXQHSDUWYDULDEOH IDFWXUDWLRQPHQVXHOOH DXN:KFRQVRPP«
&HUWDLQVVFK«PDVSHXYHQWPHWWUHHQSODFHGLII«UHQWVFR½WVGXN:KHQIRQFWLRQGHVVHXLOVGH
FRQVRPPDWLRQbXQFR½WEDVSRXUOHVSUHPLHUVN:KPHQVXHOVSXLVSOXV«OHY«SRXUOHVDXWUHVRX
HQFRUHXQFR½WDYDQWDJHX[SRXUOHVDFWHXUV«FRQRPLTXHV¢IRUWVEHVRLQV
)RUIDLWSRXUOHVSHWLWVFRQVRPPDWHXUV$YHFGHVLQWHUIDFHVFOLHQWV«TXLS«HVGHOLPLWHXUVGH
SXLVVDQFHHWGł«QHUJLHU«JODEOHVLOHVWSRVVLEOHGHPHWWUHHQSODFHGHVPRGªOHVGHSDLHPHQWDX
IRUIDLWLQG«SHQGDPPHQWGHODFRQVRPPDWLRQU«HOOH/HIRUIDLWFRQVLVWH¢SD\HUHQDYDQFHSRXU
XQHGXU«HOLPLW«HGłXWLOLVDWLRQ SDUH[HPSOHXQMRXUXQHVHPDLQH 3OXVLHXUVW\SHVGHIRUIDLW
SRXUGLII«UHQWVW\SHVGHFRQVRPPDWHXUSHXYHQW¬WUHHQYLVDJ«VDGDSW«V¢OHXUFRQVRPPDWLRQ
Gł«OHFWULFLW«PR\HQQHHIIHFWLYH
3U«SDLHPHQW/HVGLVSRVLWLIVGHSU«SDLHPHQWPDOJU«OHVFRQWUDLQWHV«YRTX«HVHQG«EXWGH
FKDSLWUHVRQWTXDVLPHQWJ«Q«UDOLV«VGDQVOHVQRXYHOOHVRS«UDWLRQV3HUPHWWDQWGHU«GXLUHOD
SU«VHQFHGHSHUVRQQHOORFDOHWRIIUDQWGHVSRVVLELOLW«VGHJHVWLRQG«PDW«ULDOLV«HOHSU«SDLHPHQW
UHVWHOHPHLOOHXUJDUDQWGłXQWDX[GHUHFRXYUHPHQWRSWLPDOGHVN:KFRQVRPP«V1HUHSRVDQW
SDVVXUXQV\VWªPHGłDERQQHPHQWU«JXOLHUFHPRGªOHJ«QªUHFHSHQGDQWGHVŧX[GHWU«VRUHULH
LUU«JXOLHUVTXHOłRS«UDWHXUGHYUDVDYRLUDQWLFLSHU

Chiffre clé

/HVFR½WVGXN:KSURGXLWVSDUOHVPLQLJULGV
© Fondation Energies pour le Monde

YDULHQWGH¢N:KD\DQWGHV
IDFWHXUVGHFKDUJHPR\HQVGH8Q
REMHFWLIGHN:KVHUDLWDWWHLJQDEOH
GłLFL&HVFR½WVSHXYHQW¬WUHFRPSDU«V
DX[FR½WVGHVFRPSDJQLHVQDWLRQDOHV
Gł«OHFWULFLW«GHU«VHDXHQ$IULTXHTXLHX[
VRQWIRUWHPHQWVXEYHQWLRQQ«V

Abonnée payant ses factures, Madagascar. 6RXUFHselon une enquête de la Banque Mondiale
réalisée auprès auprès d’une cinquantaine de
miniréseaux en Asie et en Afrique (PV et hybride PV
/ diesel).

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 379

([HPSOHHQLPDJHb/HerQLYHDXGHWDULŦFDWLRQ
GH.RXUDPDQJXLHQ*XLQ«H 

SERVICE 1 N’DAYGOU
Usagers domestiques ou communautaires
à faible demande en électricité
Service destiné aux ménages et infrastructures communautaires désireuses de
bénéficier des services de base de l’électricité, avec un tarif réduit.
Coût de 150 000 GNF + coût de la distribution intérieure (si non
raccordement existante ou non conforme)
Coût de
3 000 GNF / kWh
consommation

Durée de fourniture 24h/24, 7j/7

 
Appareils   

autorisés


   
 %!


  
  
!
Appareils
interdits

   &


     

- Puissance appelée limitée à 100 W


- Energie limitée à 0,5 kWh/jour
Données techniques
- 230 V alternatif monophasé
- Compteur électronique à prépaiement

6RXUFHb Fondation Energies pour le Monde.

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380 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

compréhension surgissant au cours des premiers par les abonnés, la tarification doit la prendre en
mois d’exploitation. considération et son anticipation est indispensable.
Si les composants électroniques nécessaires à la
Le renouvellement des composants régulation et à la conversion des flux d’électricité
d’un miniréseau renouvelable : ont acquis une grande fiabilité, il n’en reste pas
l’autre incertitude du modèle moins que le changement de quelques com-
économique. posants est souvent nécessaire après une dizaine
Les centrales solaires et éoliennes1, hybridées ou d’années de fonctionnement. Là encore, anticiper
non, alimentant les miniréseaux sont équipées la charge financière afférente est nécessaire.
d’un parc d’accumulateurs électrochimiques : les
batteries, dont la durée de vie, comme déjà évo- Un plan d’affaires de miniréseau doit ainsi prévoir :
qué, est limitée, de l’ordre d’une dizaine d’années çWP TGPQWXGNNGOGPV EQORNGV FW RCTE FG DCVVG
(cf. encadré). TKGUCRT©UWPGEGTVCKPGFWTªGFGUGTXKEG (deux
à dix ans pour les batteries au plomb), calculé en
Représentant jusqu’à 40  % du coût fonction du dimensionnement initial et des condi-
d’investissement de l’unité de production, le coût tions d’utilisation, notamment les fortes chaleurs ;
de renouvellement du parc de batteries est loin çWP TGPQWXGNNGOGPV FG NàªNGEVTQPKSWG FG
d’être négligeable. Cette dépense pouvant peser RWKUUCPEG soumise à des contraintes fortes
jusqu’à 50 % du prix de vente de l’électricité payé d’utilisation susceptibles de provoquer des

(QYLURQQHPHQWFRQGLWLRQVGłXWLOLVDWLRQ
HWGXU«HGHYLHGHVEDWWHULHV
/HQRPEUHGHF\FOHVGHFKDUJHG«FKDUJHTXHSRXUUDIRXUQLUXQHEDWWHULHTXHOOHTXHVRLWOD
WHFKQRORJLHG«SHQGUDHQWUHDXWUHVGHODSURIRQGHXUGHG«FKDUJH/HVEDWWHULHVDXSORPEWUªV
PDMRULWDLUHPHQWXWLOLV«HV\VRQWSDUWLFXOLªUHPHQWVHQVLEOHV
/HVDFFXPXODWHXUVDXSORPE¢«OHFWURO\WHOLTXLGHVXSSRUWHQWPDOOHVUHFKDUJHVSDUWLHOOHV
/DFHQWUDOHGHYUDSHUPHWWUHXQHUHFKDUJHFRPSOªWHFKDTXHMRXUHQIRXUQLVVDQWXQH«QHUJLH
DGGLWLRQQHOOHGH¢bG«GL«H¢FHWWHFKDUJHGLWHGHG«VWUDWLŦFDWLRQ
/DWHPS«UDWXUHHVWXQSDUDPªWUHFUXFLDObDORUVTXHFHUWDLQHVEDWWHULHVDXOLWKLXPULVTXHQWXQH
G«JUDGDWLRQLUU«YHUVLEOHDXGHO¢GHbr&OHVEDWWHULHVDXSORPESHUGHQWbGHOHXUFDSDFLW«GH
F\FODJHFKDTXHbr&Gł«O«YDWLRQGHWHPS«UDWXUH
/HYLHLOOLVVHPHQWQDWXUHOGHOł«OHFWURFKLPLHGHVDFFXPXODWHXUVODTXDOLW«GHOłHQWUHWLHQGHOD
U«JXODWLRQGHVFRXUDQWVHWGHODWHQVLRQGHFKDUJHG«FKDUJHVRQW«JDOHPHQWGHVSDUDPªWUHV
WHFKQLTXHVLQŧXDQWVXUODGXU«HGHYLHGHVPDW«ULHOV
&HWWHFRPSOH[LW«WHFKQRORJLTXHFRQIURQW«H¢ODU«DOLW«GXWHUUDLQUHQGTXDVLLPSRVVLEOHGłHVWLPHU
SU«FLV«PHQWODGXU«HGHYLHGłXQSDUFGHEDWWHULHVTXHOOHTXłHQVRLWODWHFKQRORJLH

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 381

pannes soudaines après plusieurs années de


bon fonctionnement.

Au-delà de la difficile prévision de la date du re-


nouvellement, plusieurs questions vont ainsi na-
turellement se poser :
çEQOOGPV RTGPFTG GP EQORVG NGU ªXQNWVKQPU
VGEJPQNQIKSWGUa ! Quelle sera la technologie
optimale lors du renouvellement des batteries
et/ou de l’électronique de puissance du mini-
réseau  ? Quelle sera la compatibilité entre des
composants « anciens » et d’autres de « nouvelle
génération  »  ? Un remplacement complet de la
centrale ne sera-t-il pas économiquement et
techniquement plus pertinent ? ;
çSWGNU CWVTGU DGUQKPU FàKPXGUVKUUGOGPV RQWT-
TCKGPV XGPKT EQPEWTTGPEGT NG TGPQWXGNNGOGPV
FG OCVªTKGNa ! Extension de réseau, renforce-
ment des capacités de production, moderni-
sation des interfaces client  ? Quelles subven-
tions seront disponibles auprès des agences
d’électrification ?
Cette problématique de renouvellement et de
modernisation des miniréseaux, ponctuelle
aujourd’hui, va devenir prégnante dans les années
à venir, suite à la multiplication des miniréseaux so-
laires. Les décideurs, les agences, les ministères
et les bailleurs de fonds doivent l’anticiper, en éla-
borant dès aujourd’hui les mécanismes de soutien
technique et financier nécessaires pour éviter de
futures avaries porteuses de mécontentement
social. Ils ne doivent pas non plus oublier le néces-
saire recyclage des éléments de batterie, à fort
pouvoir nocif pour la santé et les écosystèmes. }

1. Le cas de l’hydroélectricité ne sera pas traité, car les charges techniques


d’exploitation sont mieux maîtrisées (entretien courant, remplacement de
quelques pièces d’usure).

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382 - PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE

[ Partie 3 ]
Conclusion
De ce panorama des modèles d’électrification rurale
décentralisée déployés en Afrique subsaharienne,
qui se révèle d’une grande diversité, on peut tirer trois grands
enseignements.

Il apparaît d’abord que les différents modèles ont tous leurs


avantages et leurs inconvénients et qu’aucun ne peut prétendre à
réaliser seul l’accès universel à l’électricité en milieu rural. Idéalement,
il faudrait que ces solutions se déploient simultanément sur un
même territoire. Mais l’expérience montre que la diversité des
contraintes liées à chaque solution, et donc des modes de gestion,
rendent leur combinaison opérationnellement complexe. Certes,
les miniréseaux s’imposent dans les politiques programmatiques
d’électrification comme la solution la plus proche de l’électrification
urbaine, et offrant la possibilité de couvrir très largement la palette
d’usages de l’électricité en zone rurale. L’équilibre économique et
la pérennité des matériels demeurent cependant deux points de
fragilité de ce modèle actuellement dominant.

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PARTIE 3 - CAHIER TECHNIQUE - 383

Par ailleurs, si les énergies renouvelables s’imposent de manière


naturelle grâce aux gisements, à la technologie et à la maturité
industrielle liée à la baisse des coûts, ce changement de paradigme
comporte un risque : celui que l’Afrique devienne un territoire
d’expérimentations des départements de R&D des acteurs des
énergies renouvelables (et notamment ceux du stockage), sans
considération pour une problématique environnementale majeure :
le recyclage des équipements, au premier chef celui des batteries.

Enfin, la percée du numérique simplifie considérablement


l’exploitation, tant sur le plan technique que financier. Mais elle incite
les opérateurs à délaisser la proximité de terrain, que l’expérience
a pourtant validée comme un facteur clé de pérennité des
infrastructures.

Au-delà de ces constats, il apparaît que l’essor de l’électrification


rurale décentralisée ne se fera pas par la seule addition de projets
mieux conçus et mieux gérés. Il nécessite des actions qui excèdent
le périmètre des « bonnes pratiques » et l’échelle du « projet » ; il passe
par des changements sectoriels, pour garantir la pérennité des
systèmes. Quelles évolutions, mises en œuvre par quels acteurs ?
Telle est la question à laquelle la quatrième et dernière partie de
l’ouvrage tente d’apporter des éléments de réponse.

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384 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

Info

Retour de terrain

'«ŦQLWLRQ

Chronologie

Chiffres clés

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 385

[ Partie 4 - Préconisations ]

Réaliser l’accès à
l’électricité pour tous
nécessite une coalition
d’acteurs mieux
coordonnés,
aux méthodes et aux
moyens mieux adaptés.

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386 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 387

Introduction
Faisant état des forces et des faiblesses des politiques et
des actions d’électrification rurale telles qu’elles se déploient
en Afrique subsaharienne depuis près de cinquante ans, cet
ouvrage ne serait pas complet s’il ne tirait de ces constats des
préconisations pour le secteur. C’est ce qui vient justifier cette
ultime partie.

Au moment de formuler ces préconisations, plusieurs questions ont


surgi, auxquelles il a fallu répondre pour apporter une contribution
pertinente. Avons-nous des conseils à émettre qui soient différents
de ceux déjà formulés à de nombreuses reprises par les experts ?
Les évolutions techniques récentes amènent-elles à reconsidérer
les besoins de transformation sous un nouvel angle ? Quelles sont
les priorités que devraient se fixer les acteurs de l’ERD pour faire
progresser l’accès à l’électricité en Afrique subsaharienne ? Quelles
sont les actions concrètes à mettre en œuvre par chacun d’eux pour
atteindre ces priorités ?

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388 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

Les bouleversements technologiques et à la Commission du développement durable des


commerciaux qui secouent l’électrification Nations unies et aux acteurs des programmes de
rurale ouvrent de nouveaux champs de ré- développement.
flexion  : en permettant la diversification des
services distribués et des acteurs présents, Quoique nos constats recoupent en grande par-
les évolutions techniques créent de nou- tie ceux qui fondent ces recommandations et que
velles opportunités, et, par là même, de nous pourrions faire nôtres, réitérer ces conseils à
nouveaux risques. De notre point de vue, l’identique présente peu d’intérêt.
l’effervescence qui accompagne ces boule- Les tableaux infra présentent succinctement
versements doit être l’occasion de relancer la deux documents de recommandations datant
dynamique de réforme du secteur, sans pour de 1995 et de 2016 qui nous semblent embléma-
autant en masquer les failles structurelles. tiques. Vous pouvez retrouver ces documents
dans leur intégralité sur la page web de l’ouvrage
Car, pour l’essentiel, ces évolutions n’apportent (http://www.fondem.ong/electrifier-lafrique-rura-
pas de résolution aux nombreux points de le/), ainsi que de nombreux autres.
faiblesse sectoriels constatés, dans la mesure
où ces derniers ne relèvent pas du domaine tech- Forts d’une expérience de terrain et de dialogue
nique mais de la gouvernance, de l’organisation, avec l’ensemble des parties prenantes, nous
de l’encadrement réglementaire et du finance- avons plutôt choisi d’identifier les actions qui nous
ment des actions, à tous les niveaux. semblent essentielles pour accélérer l’accès à
l’électricité des populations rurales subsaha-
Ces sujets complexes perdurent malgré l’arrivée riennes, sans ambition d’exhaustivité.
du numérique et l’implication de plus en plus
forte des acteurs privés. Le manque de vo- Parce que toutes les batailles ne peuvent être
lonté politique et la multiplication des strates menées de front, la formulation des préconi-
décisionnelles, la défaillance de la fiscalité et la sations a été guidée par les quatre principes
dépendance aux financements internationaux, suivants :
l’insuffisance du cadre juridique et de la planifica- çêtre concret, c’est-à-dire formuler des proposi-
tion nationale, le manque de coordination entre tions d’action précises ;
bailleurs internationaux et de compréhension çinterpeller, c’est-à-dire adresser les préconisa-
entre secteurs financier et non financier… Tous tions à ceux qui peuvent les mettre en œuvre ou
ces sujets préexistaient à la diffusion des solu- en débattre. Elles ne sont donc pas présentées
tions d’électrification les plus récentes qui, pour par thématique, mais adressées dans cet ordre :
la plupart, on l’a évoqué, ne permettent pas de ga- - aux pouvoirs publics dans les pays du Sud, aux
rantir des services électriques pour tous sur un niveaux national, régional et local (4.1.),
territoire donné. - aux organisations internationales et régionales
(4.2.),
C’est un fait  : de nombreux points de diagnostic - aux bailleurs de fonds et au secteur financier
relevés par cet ouvrage ne sont pas récents et ont (4.3.),
donné lieu à l’émission de plusieurs salves de re- - aux monteurs de projets et leurs partenaires di-
commandations, depuis celles remises en 1995 rects sur le terrain (4.4.) ;

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 389

çêtre cohérent, c’est-à-dire articuler les pro-


positions de manière rationnelle entre les dif- Recommandations du
férents acteurs, en prenant en compte les liens think tank (Re)sources :
d’interdépendance entre leurs interventions ; Reconnaitre et garantir
çprioriser, c’est-à-dire cibler les préconisa- le droit à l’électricité
tions autour de quelques points que nous pen-
sons névralgiques pour assurer la pérennité ʼn/HGURLW¢Oł«OHFWULFLW«GRLW¬WUH
des systèmes, dans le respect des populations UHFRQQXDXP¬PHWLWUHTXHOHGURLW
bénéficiaires : ¢OłHDXHW¢OłDVVDLQLVVHPHQWFRPPH
- faire de l’électrification rurale décentralisée une GURLWKXPDLQIRQGDPHQWDO'DQV
question de niveau interministériel, pour une FHWREMHFWLILOFRQYLHQWGłHVWLPHUOHV
meilleure coordination stratégique, EHVRLQVSD\VSDUSD\VHWGHGUHVVHU
- renforcer la décentralisation et la déconcentra- OłLQYHQWDLUHGHV«O«PHQWVFRQVWLWXWLIVGH
tion pour une mise en œuvre de proximité plus FHTXHUHFRXYUHUDLWFHGURLWĿTXDOLW«
efficace, GLVSRQLELOLW«DFFHVVLELOLW«FRQWLQXLW«
- encadrer l’action des acteurs privés, pour garan- UHFRXYUHPHQWGHVFR½WVFRPPHFHODD
tir la qualité et le professionnalisme, «W«IDLWSRXUOHGURLW¢OłHDX
- respecter le principe d’équité entre usagers à
l’échelle d’un territoire. ʼn,OFRQYLHQW«JDOHPHQWGłHQLGHQWLŦHUOHV
G«ELWHXUVFłHVW¢GLUHFHX[TXLIHURQWHQ
Il nous semble que ces priorités devraient être VRUWHTXHFHGURLWVHPDW«ULDOLVHHWTXłLO
embrassées par l’ensemble des acteurs dans les QHUHVWHSDVLQFDQWDWRLUH
pays concernés et que leur mise en œuvre devrait
Source : « Droit à l’énergie », (Re)sources, http://www.
être soutenue par la communauté internationale thinktank-resources.com/fr/thematiques/acces-a-l-
et par les bailleurs. energie/droit-a-l-energie .

En étant sélectifs dans nos préconisations et


en interpellant directement les principales par-
ties prenantes, nous espérons susciter un débat
concret entre elles et in fine favoriser la mise en
commun de leurs moyens, pour des opérations
mieux coordonnées, avec des financements
mieux orientés. Ces préconisations sont notam-
ment axées sur le développement des solutions
d’électrification collective, qui, couplées aux so-
lutions individuelles, nous semblent essentielles
pour réaliser l’accès universel à l’électricité, et qui
devraient donc être au cœur des stratégies. }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


390 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

5HFRPPDQGDWLRQVLVVXHVGXV«PLQDLUHGH0DUUDNHFKQRYHPEUHb

ʼn6«PLQDLUHELODW«UDORUJDQLV«HQQRYHPEUHbSDUla France et
le MarocVRXWHQXSDUOH3URJUDPPHGHV1DWLRQVXQLHVSRXUOH
G«YHORSSHPHQW(PNUD)HWODCommission européenne
Cadre et contexte ʼn9RORQW«GHFKDQJHUl’échelle et le rythmeGXSURFHVVXV
Gł«OHFWULŦFDWLRQG«FHQWUDOLV«HGDQVOHV]RQHVUXUDOHV
ʼn&RQWULEXWLRQDX[WUDYDX[GHODVHVVLRQGHOD&RPPLVVLRQSRXUOH
G«YHORSSHPHQWGXUDEOHGHV1DWLRQVXQLHV

ʼn5HFRPPDQGDWLRQVVXUODformation, le suivi et l’éducationGHV


SRSXODWLRQVHWGHVLQVWDQFHVORFDOHVU«JLRQDOHVFRPS«WHQWHVHQ
«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«H
ʼn5HFRPPDQGDWLRQVVXUODrelation entre les secteurs privé et public
Thèmes clés HWOHXUFROODERUDWLRQSRXUOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHG«FHQWUDOLV«H
ʼn5HFRPPDQGDWLRQVSRXUHQFRXUDJHUOłXWLOLVDWLRQGHVénergies
renouvelables
ʼn5HFRPPDQGDWLRQVVXUODFROODERUDWLRQHQWUHOHVGLII«UHQWHV«FKHOOHV
DGPLQLVWUDWLYHVblocale, provinciale, nationale et internationale

ʼn&KDQJHPHQWSURIRQGGXVHFWHXUGHOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
G«FHQWUDOLV«HHQSDVVDQWd’une logique de projet à une logique
de programme.
Changements profonds ʼn$SSU«KHQVLRQGHsolutions de démultiplication SRXUSOXVLHXUV
recommandés PLOOLHUVGHYLOODJHVGLII«UHQWV 
ʼn&RQVLG«UDWLRQGHVDFWHXUVLQWHUQDWLRQDX[ 21*FRRS«UDWLRQ
ŦQDQFHPHQWVH[WHUQHVŊ FRPPHGHVfoyers d’échangeHW
SURPRWLRQGHVefforts concertés.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 

5HFRPPDQGDWLRQVGXIRUXP$OOLDQFHIRU5XUDO(OHFWULŦFDWLRQ $5( 5HQHZDEOH(QHUJ\


&RRSHUDWLRQ3URJUDP 5(&3 $PVWHUGDPDYULOb

ʼn/HPHHWLQJ$5(5(&3Gł$PVWHUGDPHVWSLORW«SDU6($//
initiative lancée par le secrétariat des Nations unies.

Cadre et contexte ʼn/HVUHFRPPDQGDWLRQV«PLVHVFRQFHUQHQWQRWDPPHQWl’installation


de miniréseaux/HVWUDYDX[VHFRQFHQWUHQWVXUOHVSULQFLSDX[
REVWDFOHVHWDFWLRQV¢PHQHUSRXUG«YHORSSHUOHVPLQLU«VHDX[SDU
«QHUJLHVSURSUHV

ʼn5HFRPPDQGDWLRQVVXUODWDULŦFDWLRQODU«JXODWLRQHWOD
VLPSOLŦFDWLRQGHVG«PDUFKHVFRQFHUQDQWOHVPLQLU«VHDX[
ʼn5HFRPPDQGDWLRQVVXUODlocalisationGHOłLQVWDOODWLRQGHV
PLQLU«VHDX[HQHQG«WHUPLQDQWOHVHQGURLWVFO«V
Thèmes clés ʼn5HFRPPDQGDWLRQVVXUODcoordinationGHVSURMHWVbQRWDPPHQW
ODmise en communGHVGRQQ«HVUHODWLYHVDX[SURMHWV
ʼn5HFRPPDQGDWLRQVVXUOHbusiness modelHWOHŦQDQFHPHQW
GXSURMHWbUHWRXUVGłH[S«ULHQFHVGHVSURMHWVU«XVVLV %DQTXH
PRQGLDOH 

ʼn‹YROXWLRQGXU¶OHGHOł(WDWbLOGRLW«WDEOLUGHPDQLªUHFROODERUDWLYH
GHVSROLWLTXHVGHJHVWLRQGXU«VHDX«OHFWULTXHQDWLRQDOHW«WDEOLU
TXHOOHVVRQWOHV]RQHVSULRULWDLUHVSRXUOłLQVWDOODWLRQGHPLQLU«VHDX[
Changements profonds ʼn&U«DWLRQGłXQHplateformeSRXUFROOHFWHUOHVGRQQ«HVHWOHVPHWWUH
recommandés HQFRPPXQ
ʼn$WWHQWLRQSRUW«H¢ODQDWXUHGHVLQYHVWLVVHPHQWVbFHX[FLSHXYHQW
¬WUHYDUL«VHWOHVLQYHVWLVVHXUVGRLYHQW¬WUHVHQVLELOLV«V¢FHWWH
YDUL«W«

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


392 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

4.1.
Préconisations aux pouvoirs
publics nationaux, régionaux
et locaux des pays du Sud.
Dans les pays d’Afrique subsaharienne, il nous semble important
que la définition des stratégies et la mise en œuvre des projets
d’ERD soient portées au niveau adéquat :
çCWPKXGCWKPVGTOKPKUVªTKGNRQWTNàKORWNUKQPRQNKVKSWGGV
l’encadrement réglementaire (4.1.1.);
çCWPKXGCWFGUTªIKQPU
QWFGUEQNNGEVKXKVªUKPVGTOªFKCKTGUFGV[RG
« district » ou « province ») pour la coordination des opérations
sur un territoire (4.1.2.). Ce niveau régional nous paraît le plus
approprié pour assurer une vision d’ensemble territoriale
cohérente, adaptée aux besoins spécifiques des populations,
limitant les risques de clientélisme et de conflit d’intérêts (que l’on
retrouve davantage au niveau local, où les représentants, maire et
élus, sont également utilisateurs du système) ;
çCWPKXGCWNQECN
EQOOWPGUEQOOWPCWVªUFGEQOOWPGU RQWT
appuyer l’action régionale et préparer le terrain en amont de la
définition d’un schéma d’électrification (4.1.3.).
Il s’agirait alors, dans la plupart des pays, de faire évoluer les
pratiques et d’engager des réformes qui assureraient une mise
en œuvre de proximité des projets d’ERD, dans une dynamique

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 393

nationale forte, impulsée depuis le sommet de l’Etat et irriguant


tous les niveaux de décision :
çRTKQTKUCVKQPFWUWLGVCWPKXGCWIQWXGTPGOGPVCNa
çTGPHQTEGOGPVFGUOQ[GPUCNNQWªUCWPKXGCWFGUVGTTKVQKTGU
en activant les deux leviers que sont la décentralisation et la
déconcentration ;
çTGURGEVFWRTKPEKRGFGUQNKFCTKVªGPVTGVGTTKVQKTGUa
çKPXGUVKUUGOGPVFCPUNCRTQHGUUKQPPCNKUCVKQPGVNàGPECFTGOGPV
du secteur.

© Rémy Delacloche

L’électrification permet de dynamiser les activités économiques locales.

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394 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

4.1.1.
Préconisations aux pouvoirs publics nationaux.
Les stratégies nationales d’électrification rura-
le peinent à s’opérationnaliser, notamment du mb/HSRUWDJHLQVWLWXWLRQQHOHVW
fait du manque de volonté et de moyens, de la IRQGDPHQWDO/HVULJLGLW«VKLVWRULTXHV
satellisation des acteurs étatiques (plusieurs GXVHFWHXUVRQWWHOOHVTXHODYRORQW«
ministères, plusieurs agences…) et d’une dé- SROLWLTXHHWXQHQJDJHPHQWIRUWU«VROX
centralisation parfois inachevée. HWG«WHUPLQ«GHVGLULJHDQWVSROLWLTXHV
DXSOXVKDXWVRPPHWGHODKL«UDUFKLH
Selon nous, il est donc essentiel de placer VRQWFDSLWDX[SRXUODSURPRWLRQGH
l’électrification rurale dans le champ de compé- SROLWLTXHVDOWHUQDWLYHVGDQVOHVHFWHXU
tence directe du chef du gouvernement. Agissant VWUDW«JLTXHGHOł«QHUJLHb}
dans le giron d’une cellule interministérielle char-
gée du cadrage stratégique et réglementaire, Abdou Fall, ancien ministre d’Etat,
l’agence nationale d’électrification rurale pour- président du Conseil patronal des énergies
rait alors se concentrer sur l’outillage des acteurs renouvelables du Sénégal (COPERES).
et le suivi opérationnel en territoire, auprès des
acteurs régionaux notamment.

Incarner le volontarisme en faveur


de l’électrification rurale par C’est, de notre point de vue, le moyen le plus sûr
une mission interministérielle dotée d’assurer une bonne coordination des actions
des moyens de son action. entre les différents agences et ministères con-
Assurer un accès à l’électricité sur l’ensemble cernés, ainsi que d’orchestrer de manière efficace
d’un territoire nécessiterait d’ériger les enjeux de les différents dossiers (réglementaires, orga-
l’électrification rurale au rang de priorité auprès nisationnels) que suppose la mise en œuvre d’une
des plus hautes instances étatiques. L’exemple stratégie nationale d’ERD.
du Maroc montre, en effet, qu’il s’agirait d’une En pratique, cela signifie de :
condition sine qua non d’une action efficace çETªGTWPGEGNNWNGKPVGTOKPKUVªTKGNNG
(cf. chapitre 2.2.2.). çTCVVCEJªGCWRT©UFWEJGHFGNàGZªEWVKH
En conséquence, nous préconisons que la stra- çSWKEQQTFQPPGPQVCOOGPVNGUOKPKUV©TGU
ªPGT-
tégie d’accès à l’électricité soit pilotée au niveau gie, finances, décentralisation) et les services de
interministériel, sous l’autorité du chef du gouver- l’Etat (agences)
nement (Premier ministre en régime parlemen- çGVNCFQVGTFGOQ[GPU
taire), par décision du chef de l’Etat, faisant ainsi, Elle aurait vocation à impulser et à assu-
de manière symbolique, de l’accès à l’électricité rer la mise en œuvre effective de la stratégie
une orientation majeure de sa politique générale. d’électrification rurale, laquelle devrait idéalement
être une composante de la politique de déve-
loppement rural, elle-même placée au cœur des

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 395

priorités gouvernementales et portée au niveau çRQWTNGUQRªTCVGWTUaGZQPªTCVKQPFàKORµVUFKXGTU


interministériel. (par exemple d’impôts sur le bénéfice pendant
A ce titre, la mission/cellule interministérielle se- une période donnée), allongement des durées
rait d’abord en charge de clarifier les objectifs de concession (les infrastructures sont consom-
et les rôles des différents acteurs publics, et de matrices de capitaux).
veiller à ce que chacun d’eux ait les moyens de La mission/cellule aurait également pour objec-
son action : tif de jeter les bases d’un système de tarifica-
çFªăPKTENCKTGOGPVNGUTµNGUGPVTGNGUUQEKªVªUPC- tion équitable visant l’harmonisation tarifaire et
tionales d’électricité et les agences nationales les compensations requises, et de le construire
(électrification, énergies renouvelables, efficaci- progressivement :
té énergétique…) et évaluer l’efficacité de leurs çETªCVKQP GV RKNQVCIG FàWP ITQWRG FG VTCXCKN RNWTK
interventions ; acteur ayant pour mandat de définir les princi-
çFªăPKT GV FKĂWUGT FG OCPK©TG VTCPURCTGPVG NC pes du système d’harmonisation et les modalités
planification des infrastructures énergétiques de leur application au niveau national  ; ce sys-
(raccordement des localités au réseau national) tème peut prévoir que le tarif de référence ne
à l’horizon de cinq à dix ans ; soit pas unique et puisse être défini à un niveau
çQTICPKUGT NC FªEGPVTCNKUCVKQP CW PKXGCW TªIKQPCN infranational ;
de sorte que les régions soient dotées des com- çOKUGGPRNCEGGVIGUVKQPFàWPHQPFUFGEQORGP-
pétences et des moyens nécessaires à la mise en sation pour dédommager les exploitants ruraux
œuvre des actions au niveau décentralisé ; cette qui ne peuvent assurer la viabilité de leur exploi-
décentralisation ajustée viserait à permettre aux tation sur la base du tarif de référence applicable.
régions de définir des stratégies adaptées ;
çHCKTGXCNQKTNCRQNKVKSWGFàªNGEVTKăECVKQPTWTCNGRQT- Permettre aux équipes de l’agence
tée par le gouvernement auprès des partenaires fi- nationale d’électrification rurale
nanciers, notamment les bailleurs internationaux ; d’être plus actives auprès
çFªăPKT GV FªHGPFTG NG DWFIGV CNNQWª ¡ des collectivités territoriales.
l’électrification rurale auprès des organes légis- L’agence nationale d’électrification rurale devrait
latifs nationaux et des instances internationales. être placée sous l’autorité de la mission interminis-
térielle, dont elle deviendrait le bras armé expert.
La mission/cellule interministérielle coordon- Pour renforcer la capacité d’action de l’agence et
nerait également la mise en place de la fiscalité, permettre son efficacité sur le terrain, dans un jeu
des procédures et des cadres législatifs et ré- où les acteurs sont de plus en plus nombreux et
glementaires permettant aux monteurs de pro- divers, nous préconisons de :
jets et aux investisseurs d’agir au sein d’un envi- çEQPăGTUCFKTGEVKQP¡WPGRGTUQPPCNKVªC[CPVWP
ronnement de risques maîtrisable. tempérament entrepreneurial, connaissant non
Par exemple : seulement le secteur public mais également le
çRQWTNGUKORQTVCVGWTUaGZQPªTCVKQPFGFTQKVUFG secteur marchand, et donc capable de parler
douane pour des composants ; aussi bien le langage du secteur public que celui
çRQWT NGU KPXGUVKUUGWTUa  GZQPªTCVKQP FàKORµVU du secteur privé ;
sur les bénéfices pendant les premières années çFªEQPEGPVTGT NC UVTWEVWTG FG NàCIGPEG GP TG-
pour les aider à atteindre la rentabilité ; déployant une partie des équipes sur le terrain,

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396 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

© Fondation Energies pour le Monde


En zone rurale en Afrique, l’électrification reste largement informelle.

au plus près de l’action, en créant un réseau çEQPEGXQKT GV OGVVTG GP RNCEG FGU QWVKNU RQWT NC
d’agents ERD au niveau régional. sensibilisation des populations rurales diffusés
C’est en effet aux régions (ou aux collectivités de par des ONG locales préalablement formées ;
niveau intermédiaire) que nous conseillons de çEQPEGXQKT GV OGVVTG GP RNCEG WP QWVKN FG HQTOC-
confier la mise en œuvre des projets (voir infra). tion pour les opérateurs et les professionnels de
L’agence aurait alors pour mission de concevoir l’électricité ;
les outils utiles pour les acteurs publics et privés çOGVVTG ¡ FKURQUKVKQP FGU TªIKQPU NGU QWVKNU FG
de l’ERD, d’accompagner le déploiement de passation d’appels d’offres pour l’attribution des
ces outils sur le terrain (notamment auprès des différents types de marchés (prestations, fourni-
acteurs régionaux) et d’évaluer les effets de la ture, délégation de service public) ;
politique nationale d’électrification rurale. çFªăPKTFGUKPFKECVGWTUFGUWKXKFGNCRGTHQTOCPEG
Elle serait ainsi chargée de : de la stratégie nationale d’ERD ;
çOC¯VTKUGTWPQWVKNFGRNCPKăECVKQPGVFGRTQITCO- çFªăPKT FGU KPFKECVGWTU FàKORCEV ªEQPQOKSWG
mation régionale d’ERD pour une utilisation plus environnemental et social des systèmes
efficace ; d’électrification mis en place.
çFªăPKTFGUPQTOGUFGSWCNKVªOKPKOCNGU
CFCRVC- L’ensemble de ces chantiers structurants requiert
tion de normes internationales parfois trop res- des investissements et des compétences  ; dans
trictives), ainsi que le circuit de certification et les la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, ces
processus de contrôle afférents (le respect de efforts ne pourraient être mis en œuvre sans le
ces normes doit conditionner l’éligibilité aux ap- soutien technique et financier des pays et des col-
pels d’offres publics) ; lectivités du Nord (voir chapitre 4.2. et 4.3.).
çOGVVTGGPRNCEGFGUOQFWNGUFGHQTOCVKQPRQWT Enfin, il apparaît là encore que toutes ces mesures
les collectivités territoriales pour maîtriser les as- organisationnelles auraient peu d’efficacité sans
pects organisationnels et techniques de l’ERD ; volontarisme fort au plus haut niveau de l’Etat. }

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 397

4.1.2.
Préconisations aux pouvoirs publics régionaux.
En soutien de la politique nationale de déve- Les pouvoirs publics régionaux auraient égale-
loppement rural, l’échelon intermédiaire ment un rôle de sensibilisation et de formation à
opérationnel qu’est la région (ou la province, jouer vis-à-vis des collectivités présentes sur le
le district…) aurait pour mission de décliner territoire :
de façon opérationnelle la politique nationale çKPEKVGTNGUOWPKEKRCNKVªU¡UGTGITQWRGTGPEQO-
d’électrification rurale sur son territoire : munautés de communes, pour faciliter la mise en
çGP FªăPKUUCPV WPG UVTCVªIKG TªIKQPCNG1  : la ré- place de schémas mutualisés d’accès aux ser-
gion devrait pouvoir penser l’électrification ru- vices électriques sur leurs territoires, permettant
rale en combinant différentes solutions selon les ainsi des économies d’échelle et favorisant une
contraintes et opportunités réelles sur son terri- harmonisation tarifaire ;
toire ; et çHQTOGT NGU RGTUQPPGNU FGU EQNNGEVKXKVªU VGTTKVQ
çGP RKNQVCPV NàKPUVCNNCVKQP FGU UEJªOCU riales (maires et adjoints), mais aussi les chefs
d’électrification collective correspondants  : la traditionnels et les leaders d’opinion sur leur
maîtrise d’ouvrage devrait être confiée au niveau territoire.
régional pour des raisons d’échelle et de co-
hérence territoriales, mais aussi de maîtrise des Ces missions de la région (notamment la collecte
risques (conflits d’intérêts et clientélisme plus de données sur le territoire régional et le recrute-
forts au niveau local, manque de proximité et ment et la formation de personnel compétent)
d’adaptabilité au terrain au niveau national). pourraient être utilement réalisées avec le soutien
Il faut ajouter le fait que la région peut associer financier et/ou technique de collectivités du Nord,
électrification, aménagement du territoire, déve- dans le cadre de la coopération décentralisée.
loppement économique et création d’emplois lo-
caux. Pour cela, elle devrait être compétente et Dernière préconisation  : les maîtres d‘ouvrage,
dotée des moyens nécessaires par l’Etat afin de : nationaux ou régionaux, devraient veiller à ne pas
çTCUUGODNGTNGUDGUQKPUFGUNQECNKVªURQWTFªăPKT sacrifier le transfert de compétences et la qualité
une programmation régionale d’électrification des installations à la rapidité d’exécution et aux
rurale (zones vierges de l’extension de réseau), facilités de financement accordées par des pays
dans le respect de la planification nationale, en non liés aux règles de l’OCDE. Des équipements
lien avec la cellule déconcentrée de l’agence na- peu pérennes installés dans des communautés
tionale d’électrification rurale et en intégrant la mal formées desservent vraissemblablement la
possibilité d’initiatives locales ; cause de l’accès à l’électricité. }
çUG FQVGT FG RGTUQPPGN EQORªVGPV GP '4& CăP
d’être en mesure d’assurer la maîtrise d’ouvrage
à chaque étape – de la conception au suivi des
installations –, avec le soutien des experts de
1. Dans la suite des développements, le terme « régional » est utilisé par
la cellule déconcentrée de l’agence nationale commodité pour désigner le niveau territorial intermédiaire entre le local et le
d’électrification rurale. national.

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398 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

© Fondation Ensemble
L’éclairage améliore les conditions d’éducation.

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 399

4.1.3.
Préconisations aux pouvoirs publics locaux.
Dans un schéma de décentralisation tel que
nous le préconisons, les maires ruraux jouent
un rôle important pour appuyer l’action régio- mb'DQVODG\QDPLTXHGHVU«IRUPHV
nale et préparer le terrain en amont de la défini- YLVDQW¢GRQQHUGDYDQWDJHGHPDUJH
tion d’un schéma d’électrification qui bénéficie GłRS«UDWLRQDX[DFWHXUVSULY«VHW¢OD
à leurs administrés. VRFL«W«FLYLOHGDQVOHVSROLWLTXHVGłDFFªV
¢Oł«QHUJLHLO\DOLHXGłHQYLVDJHUWUªV
A ce titre, ils auraient pour mission de : V«ULHXVHPHQWGHSODFHUOHV«OXVDX
çEQNNGEVGTNàKPHQTOCVKQPNQECNG
FQPPªGUFGDCUG  FāXUGHODG«FLVLRQSROLWLTXHGDQVOD
auprès des populations pour alimenter les analy- SURGXFWLRQHWODIRXUQLWXUHGł«QHUJLH
ses de planification et de programmation d’ERD DX[FRPPXQDXW«VTXłLOVDGPLQLVWUHQW
réalisées au niveau régional ;
çKPVªITGT NàªNGEVTKăECVKQP FCPU NGWT RNCP FG FªXG /ł«QHUJLHUHQRXYHODEOH«WDQWSDU
loppement local ; G«ŦQLWLRQXQH«QHUJLHG«FHQWUDOLV«HOD
çKORWNUGTFGURTQLGVUFàKPKVKCVKXGNQECNGa responsabilisation de pouvoirs locaux
çUG TGITQWRGT GP EQOOWPCWVªU FG EQOOWPGU dans ce domaine doit constituer
pour mutualiser les moyens et, ainsi, favoriser les un axe majeur de réforme,GłDXWDQW
économies d’échelle ; TXHOHVWHFKQRORJLHVOHVRODLUHHWOH
çXGKNNGT ¡ FKURQUGT FàWP RGTUQPPGN NQECN EQORª- QXP«ULTXHQRWDPPHQWSHXYHQW
tent (dont la formation est assurée par le niveau GRQQHUOLHX¢XQHY«ULWDEOHU«YROXWLRQ
régional) ; «QHUJ«WLTXHSRUW«HSDUOHVFLWR\HQVHW
çUGPUKDKNKUGT NGWTU CFOKPKUVTªU CWZ CVQWVU CWZ NK OHVSURGXFWHXUVVXUOHWHUULWRLUHb}
mites et aux contraintes liés à l’électrification  ;
une attention particulière devrait être accor- Abdou Fall, ancien ministre d’Etat,
dée aux usagers économiques (entrepreneurs président du Conseil patronal des énergies
individuels, petits producteurs, coopératives, renouvelables du Sénégal (COPERES).
groupements d’intérêt économique, groupe-
ments de femmes…).
Ils pourraient bénéficier de l’appui des ONG lo-
cales de développement économique (préalable-
ment formées par les ONG du secteur ERD sur le
volet électricité).
Associer les institutions de microfinance locales à
la réflexion leur permettrait d’accéder plus facile-
ment au financement de leurs activités à court ou
moyen termes.

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400 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

Quels principes essentiels appliquer pour guider


OHFKRL[GHVSURMHWVGł(5'b"
(Rappel de principes déjà mentionnés et dont la liste n’est pas exhaustive.)

ʼn(TXLW«WHUULWRULDOHEDV«HVXUXQG«FRXSDJHHQ]RQHVGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHWHUULWRULDOHPHQW
G«OLPLW«HVHWRXG«ŦQLHVSDUXQHOLVWHGHORFDOLW«VUHSU«VHQWDQWFKDFXQHGHVTXDQWLW«VGHFOLHQWV
SRWHQWLHOVHWGHVQLYHDX[GłLQYHVWLVVHPHQWLQFLWDWLIVSRXUOHVRS«UDWHXUVGł«OHFWULŦFDWLRQ
ʼn3URJUDPPDWLRQFRQFHUW«H¢YLV«HPXOWLVHFWRULHOOHLQFOXDQWGHX[W\SHVGHSURMHWV
FRPSO«PHQWDLUHVbOHVSURMHWVSODQLŦ«V¢SDUWLUGł«WXGHVSU«DODEOHVHWFRXYUDQWHQWRWDOLW«RXHQ
SDUWLHXQH]RQHGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHHWOHVprojets d’initiative localeHQWUHSULVSDUGHVSRUWHXUV
SXEOLFVSULY«VRXGHV21*FRXYUDQWXQHRXSOXVLHXUVORFDOLW«VRXXQS«ULPªWUHUXUDO&HVGHX[
W\SHVGHSURMHWVVRQWPLVHQāXYUHVLPXOWDQ«PHQWGDQVOHFDGUHGHSURJUDPPHVDQQXHOVRX
SOXULDQQXHOVDGRSW«VSDUXQRUJDQHLQWHUPLQLVW«ULHORXYHUW¢WRXWHVOHVSDUWLHVSUHQDQWHVGRQW
OHVEDLOOHXUVGHIRQGV
ʼn1HXWUDOLW«WHFKQRORJLTXHEDV«HVXUOHPRLQGUHFR½WHQFRPSDUDQWOHVLQYHVWLVVHPHQWVHW
OHVFKDUJHVGłH[SORLWDWLRQDVVRFL«VDX[GLII«UHQWHVRSWLRQVHQYLVDJHDEOHVGł«OHFWULŦFDWLRQ
G«FHQWUDOLV«HG«FULWHVHQSDUWLHbDLQVLTXł¢OłH[WHQVLRQGXU«VHDXH[LVWDQW
ʼn9LDELOLW«HWUHQWDELOLW«ŦQDQFLªUHVVXIŦVDQWHVSRXUDVVXUHUODGXUDELOLW«GXSURMHWHWDWWLUHUOHV
RS«UDWHXUVGł«OHFWULŦFDWLRQ&HODLPSOLTXHGłXQHSDUWTXHOHVFR½WVGłLQYHVWLVVHPHQWGRLYHQW
¬WUHFRXYHUWVSDUOHVŦQDQFHPHQWVPRELOLVDEOHV IRQGVSURSUHVSU¬WVEDQFDLUHVVXEYHQWLRQV
HWF HWOHVFKDUJHVGłH[SORLWDWLRQSDUOHVUHFHWWHVGłH[SORLWDWLRQ YHQWHGł«OHFWULFLW«DERQQHPHQW
EUDQFKHPHQWHWF bGłDXWUHSDUWTXHOHWDX[GHUHQWDELOLW«LQWHUQHŦQDQFLHUHWOHWHPSVGHUHWRXU
VXUFDSLWDOGXSURMHWVRQWVXIŦVDPPHQWDWWUDFWLIV
ʼn7DULIVFRPSDWLEOHVDYHFODYRORQW«HWODFDSDFLW«GHSDLHPHQWGHVXVDJHUVHWDYHFODSROLWLTXH
tarifaire en vigueur,WRXWHQJ«Q«UDQWGHVUHFHWWHVVXIŦVDQWHVSRXUG«JDJHUGHVU«VXOWDWV
GłH[SORLWDWLRQU«SRQGDQW¢OłLPS«UDWLIGHYLDELOLW«HWGHUHQWDELOLW«
ʼn9LDELOLW«HQYLURQQHPHQWDOHDVVXU«HSDUGHVPHVXUHVFRUUHFWLYHVHWRXGłDWW«QXDWLRQ
HWGHVXLYLSRXU«OLPLQHUOHVLPSDFWVQ«JDWLIVRXOHVU«GXLUH¢GHVQLYHDX[DFFHSWDEOHV
HQFRQIRUPLW«DYHFODU«JOHPHQWDWLRQHQYLJXHXU
ʼn9LDELOLW«VRFLDOHDVVXU«HSDUGHVGLVSRVLWLRQVDSSURSUL«HVGHUHFDVHPHQWHWGłLQGHPQLVDWLRQ
SRXUU«GXLUHHWFRPSHQVHUOłLPSDFWGHVG«SODFHPHQWVGHVSRSXODWLRQVGDQVOHUHVSHFWGHVORLV
HWUªJOHPHQWVHWGHFHTXLHVWDFFHSWDEOHSDUOHVEDLOOHXUVGHIRQGVFRQFHUQ«V
ʼn6«OHFWLRQFRQFXUUHQWLHOOHHWWUDQVSDUHQWHGHVRS«UDWHXUVGł«OHFWULŦFDWLRQ SURMHWVSODQLŦ«V 
et des projets d’initiatives locales,DXPR\HQGłDSSHOV¢FDQGLGDWXUHVHWGHGHPDQGHVGH
SURSRVLWLRQVEDV«VVXUGHVFDKLHUVGHVFKDUJHVFODLUVHWVXUGHVFULWªUHVGHV«OHFWLRQWUDQVSDUHQWV
HWDQQRQF«VGłDYDQFH

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 

Ces chantiers, parfois lourds pour une collectivité Enfin, dernière préconisation, les responsables
rurale du Sud, pourraient utilement être menés locaux devraient être exemplaires après la mise
avec les soutiens financiers et techniques de col- en service d’un système électrique collectif, en
lectivités locales du Nord, dans le cadre de la coo- payant dans les règles leur facture personnelle
pération décentralisée. d’électricité et celle des ouvrages communau-
taires municipaux. Sans cette exemplarité, c’est
l’équilibre économique du dispositif, et donc la
pérennité du service, qui est remis en cause. }

© Rémy Delacloche

Les services communautaires électrifiés bénéficient à toute la population.

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402 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

4.2.
Préconisations à la
communauté internationale.
Que les pays du Sud s’emparent du sujet de l’accès à l’énergie
en zones rurales nous paraît essentiel. Sans volonté de leurs
dirigeants de donner accès à l’électricité au plus grand nombre
et, plus largement, de soutenir le développement rural, les
communautés les plus enclavées resteront privées des services
essentiels.

Cependant, tant qu’ils ne disposeront pas des ressources fiscales


suffisantes pour financer les infrastructures à un rythme soutenu
(celui de la croissance démographique et économique), ces
pays ne pourront vraisemblablement pas réussir sans l’aide de la
communauté internationale.

Afin de garantir la mise en place d’un soutien ciblé et coordonné


aux actions des pays du Sud, cette communauté devrait selon
nous prioritairement soutenir les changements de gouvernance
et d’organisation de l’ERD, ainsi que la professionnalisation du
secteur, en continuant de s’appuyer sur l’expérience des acteurs
les plus expérimentés, notamment les ONG spécialisées.

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 403

Elle devrait également s’interroger sur des mécanismes de


solidarité renouvelés entre pays du Nord et du Sud ; c’est pourquoi
nous proposons ci-après une piste de réflexion permettant de
faire particier les citoyens à l’effort d’accélération de l’accès à
l’électricité.

© Rémy Delacloche

Les femmes sont des actrices essentielles des projets d’ERD.

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404 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

Encourager les réformes et soutenir nationales d’électrification rurale  : soutien au


les actions conduites par les acteurs renforcement de la décentralisation, à la mise
publics dans les pays du Sud. en place de services déconcentrés de l’agence
En premier lieu, la communauté internationale et d’électrification rurale, au recrutement et la mon-
ses instances devraient continuer à proposer un tée en compétences des personnels des ser-
cadre de sensibilisation active des décideurs poli- vices et collectivités publics, à la promotion de la
tiques au plus haut niveau sur le nouveau para- coordination des actions ;
digme de l’électrification (énergies renouvelables, çNGU TªHQTOGU TªINGOGPVCKTGU PªEGUUCKTGU RQWT
solutions décentralisées) : garantir la sécurité juridique et réduire le risque
çRCTNGWTUKPUVCPEGUGVNGWTUªXªPGOGPVUGNNGUQH- pour les porteurs de projet et les investisseurs,
frent de nombreuses occasions pour partager pour assainir le marché et assurer l’équité entre
des analyses et des argumentaires, auxquelles usagers : règles fiscales, cadre d’harmonisation
les acteurs portant la fonction d’assistance à tarifaire, minima qualitatifs pour les produits…
maîtrise d’ouvrage (notamment les ONG de ter-
rain spécialisées) devraient être conviés pour Enfin, les institutions de coopération multilaté-
partager les retours d’expérience ; rale (telle l’Union européenne) ou bilatérale (telle
çUWTEGUWLGVNCEQOOWPCWVªKPVGTPCVKQPCNGFGXTCKV l’Agence française de développement) devraient
poursuivre sa conversion au pragmatisme, lais- également renforcer l’appui à la structuration
sant de côté le dogme du « tout raccordé au ré- d’une filière ERD dans les pays du Sud, à tra-
seau  » encore prôné par certains consultants vers des programmes spécifiques d’assistance
(qui incitent les gouvernants à mettre en place technique (formation, méthodologie notamment)
des modèles ressemblant à ceux des pays du dédiés à :
Nord, alors même que les conditions opératoires çNCETªCVKQPGVNCIGUVKQPFàGPVTGRTKUGU
HQWTPKVWTG
ne le permettent pas) ; et maintenance d’équipements, exploitation) au
çNCEQOOWPCWVªKPVGTPCVKQPCNGFGXTCKVªICNGOGPV Sud ;
écouter avec plus de recul les sirènes du « tout- çNCRTQHGUUKQPPCNKUCVKQPFGUEQNNGEVKXKVªUFW5WFa
innovation » : il s’agit d’encourager et d’alimenter çNCEGTVKăECVKQPFGURTQFWKVUFKUVTKDWªUCW5WF
la réflexion collective sur des schémas qui ont
fait leurs preuves, de ne pas perdre de vue la fi- Favoriser la compréhension entre
nalité de l’accès universel, et, enfin, de s’assurer acteurs financiers et non financiers
que la technologie ne demeure qu’un moyen en sur les projets d’accès à l’électricité
vue d’un objectif final. en milieu rural.
Il nous paraît en effet indispensable de trouver des
Ensuite, les institutions internationales, ain- solutions au déficit d’investissement dans les so-
si que les organisations régionales du Nord et lutions collectives d’électrification rurale comme
du Sud, devraient prioritairement orienter leur les miniréseaux.
soutien méthodologique vers des actions fa- Par exemple, au sein de l’initiative Sustainable
cilitant la mise en place des réformes évoquées Energy for All (SE4All  ; cf. chapitre  1.1.1.), il serait
précédemment (voir chapitre 4.1.), à savoir : ainsi utile de créer un think tank, un groupe de
çNGU TªHQTOGU QTICPKUCVKQPPGNNGU PªEGUUCKTGU ¡ travail ou une plateforme rassemblant acteurs
un déploiement effectif et efficace des stratégies du secteur de l’ERD (collectivités du Sud, ONG,

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 405

industriels, chercheurs) et acteurs du secteur fi- çWP RTªN©XGOGPV FG a  UWT NGU HCEVWTGU
nancier (bailleurs et banques de développement, d’électricité des consommateurs de l’UE28 cou-
investisseurs, banques primaires, assureurs et ré- vrirait l’équivalent de la facture annuelle en élec-
assureurs, actuaires, chercheurs) du Nord et du tricité d’environ 100 millions d’Africains ;
Sud. çNGU HQPFU EQNNGEVªU FGXTCKGPV «VTG FKTKIªU
Ce groupe aurait pour objectifs de : vers le financement de nouveaux schémas
çRGTOGVVTG ¡ EJCSWG CEVGWT FG OKGWZ EQPPC¯VTG d’électrification ou la pérennisation des schémas
les contraintes et les méthodes opératoires de existants ;
tous les autres ; çRTªCNCDNGOGPV ¡ NC OKUG GP RNCEG FàWP VGN Oª-
çENCTKăGT NGU TKUSWGU GV NGU QRRQTVWPKVªU canisme, il serait indispensable de sensibiliser
économiques et financières liés aux différents la société civile du Nord aux enjeux de l’ERD, par
types de projets ; exemple par la mise en place d’un programme
çEQORTGPFTG EQOOGPV NGU KPUVTWOGPVU ăPCP- spécifique d’éducation au développement axé
ciers (equity, dette, dons/subventions) peuvent sur l’accès à l’électricité. }
s’articuler pour financer les différentes solutions
concourant à l’électrification de l’Afrique sub-
saharienne rurale ;
çFªăPKTFGUUEJªOCUFGăPCPEGOGPVCFCRVªUCW
développement des solutions décentralisées, in-
cluant tous les mécanismes, y compris de dons
et de subventions et les solutions mixtes (blen-
ded finance) et la finance décentralisée (alimen-
tation de lignes de crédit locales par des fonds
internationaux) ;
çRTKQTKUGT PQVCOOGPV NGU SWGUVKQPU FG ăPCPEG-
ment des projets intermédiaires (de type mini-
réseaux), entre 0,50 M€ et 10 M€, qui peinent à
trouver des financements.

Créer un fonds de la solidarité


Nord-Sud.
Nous préconisons de réfléchir à la mise en place
d’un mécanisme de solidarité Nord-Sud qui faci-
literait le financement de l’électrification rurale. Il
s’agirait d’un «  1  % accès à l’électricité  », consis-
tant à prélever une contribution sur la consom-
mation des usagers des pays industrialisés (selon
des modalités qui ne pénalisent pas les ménages
précaires) pour aider à la mise en place des in-
frastructures électriques par ENR en milieu rural
dans les pays du Sud :

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406 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

4.3.
Préconisations aux financeurs
des projets.
Les projets d’infrastructures d’électrification rurale décentralisée
sont consommateurs de capitaux, et les montages financiers
associés revêtent autant de formes qu’il y a de projets
(cf. chapitre 2.3.2.). Récemment, la gamme disponible de
financements s’est enrichie ; des bailleurs de fonds internationaux
comme la Banque mondiale acceptent désormais l’idée de
syndiquer des ressources privées avec des subventions, par
exemple.

Néanmoins, comme évoqué dans les chapitres de diagnostic,


certaines solutions peinent à trouver des financements. De
ce point de vue, si l’existence d’une instance de dialogue et de
coconstruction de dispositifs de financements adaptés telle que
préconisée (cf. 4.2.) serait utile, elle resterait insuffisante. Les
bailleurs institutionnels pourraient améliorer les mécanismes
existants, en se coordonnant davantage, en orientant leur soutien
différemment et en ajustant leurs processus d’attribution de fonds.
Par ailleurs, les investisseurs internationaux, tout comme les
institutions financières locales, chacun à leur échelle, auraient
également un rôle à jouer et devraient adapter leur pratique.

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 407

© Rémy Delacloche

Les soutiens aux activités économiques assurent l’essor et la pérennité des services en zones rurale.

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408 - PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

4.3.1.
Préconisations aux bailleurs de fonds
internationaux.

Selon nous, les banques de développement et çăPCPEGT NGU CEVKQPU FàCEEQORCIPGOGPV GV FG
les bailleurs de fonds institutionnels (multila- sensibilisation, de suivi et d’études (préalables,
téraux et bilatéraux) devraient faire prévaloir d’impact), qui peuvent être complexes et lourdes
quelques grands principes de financement en milieu rural enclavé ;
pour garantir des projets d’ERD territoriale- çCKFGTNGU'VCVU¡UVTWEVWTGTNCPQWXGNNGQTICPKUC-
ment et économiquement plus pertinents et tion institutionnelle (pilotage national au niveau
plus pérennes. interministériel, renforcement de la décentrali-
sation et de la déconcentration des agences
ç#ăPFàªXKVGTNCOWNVKRNKECVKQPFGURTQLGVUGPQTFTG d’électrification rurale).
dispersé, les bailleurs devraient développer la
coordination effective des interventions, dans Concernant les procédures de financement, il se-
le cadre de stratégies territoriales. Il existe de rait nécessaire, selon nous, de :
nombreux exemples d’une telle coordination  : çOGVVTGGPRNCEGFGUFªNªICVKQPURQWTNGVTCKVGOGPV
à Madagascar, au Cameroun, au Bénin, en Gui- des dossiers de projets inférieurs à un certain mon-
née, au Mali, en RDC ou encore au Sénégal, les tant, ce qui réduirait les coûts de transaction, ren-
acteurs de l’accès à l’énergie se réunissent pé- forcerait la proximité avec le terrain (exemple : délé-
riodiquement pour s’assurer de la cohérence de gations nationales UE, antennes locales AFD, ser-
leurs actions. vices économiques des ambassades, représenta-
ç%GU DCKNNGWTU PQVCOOGPV RCT FGU OªECPKUOGU tions économiques) et permettrait l’émergence de
de dons, pourraient aussi financer l’électrification projets de plus petite ampleur (de 300 k€ à 1 M€) ; il
rurale là où les investisseurs privés s’y refusent serait utile de mettre en place des facilités dédiées
ou s’en trouvent incapables (là où les capacités à ce type de projets dans lesquels les ONG pour-
contributives des abonnés ne permettent pas de raient jouer un rôle particulier.
couvrir la totalité d’une grille tarifaire rentable). Cette décentralisation au niveau des organisations
ç.àCKFG FGXTCKV ªICNGOGPV RTQăVGT CWZ CEVGWTU GV du Nord justifierait l’élargissement des finance-
aux entreprises locales du Sud, ainsi qu’à ceux ments directs aux collectivités territoriales du Sud
du pays donateur  : dans une dynamique parte- (agissant en tant que maîtres d’ouvrage) en :
nariale, nous préconisons de délier l’aide inter- çCNNQPIGCPV NC FWTªG FW UQWVKGP CWZ RTQLGVU
nationale au bénéfice des acteurs du Sud et d’électrification collective, pour la plupart longs
d’accorder, en miroir, une part aux entreprises du et complexes ;
pays d’intervention. çHQPFCPV VQWVGU NGU OªECPKSWGU FG ăPCPEGOGPV
sur une appréciation de la triple performance du
Sur le fond des projets soutenus, il nous paraîtrait projet (économique, sociale, environnementale)
essentiel de prioriser certains sujets : dans une optique de «  blended finance  » (dia-
logue avec les investisseurs d’impact) ;

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 409

çCOªNKQTCPVNCEQWXGTVWTGFGUTKUSWGUFGUKPXGU- çEQPFKVKQPPCPVNàCVVTKDWVKQP¡WPQRªTCVGWTRTKXªFG
tisseurs (en relais des garanties souveraines), dons, subventions ou prêts avantageux à sa par-
par exemple par la mise en place de fonds de ticipation active aux activités de partage de don-
garantie dédiés accessibles au secteur financier nées et d’expérience (au sein d’une plateforme
local ; internationale, cf. la proposition supra en 4.2.). }

© Rémy Delacloche

L’électrification des zones rurales contribue à les rendre attractives.

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

Quels principes essentiels appliquer en matière


GHŦQDQFHPHQWGHVSURMHWVGł(5'b"
(Rappel de principes déjà mentionnés et dont la liste n’est pas exhaustive.)

ʼn5HJURXSHPHQWHWGXUDELOLW«GHVUHVVRXUFHVŦQDQFLªUHVFRQFHUQDQWOHVLQYHVWLVVHPHQWV
Q«FHVVDLUHVDXG«YHORSSHPHQWHW¢ODU«DOLVDWLRQGHVSURMHWVGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH/HVUHVVRXUFHV
GHVEDLOOHXUVGHIRQGVG«GL«HV¢FHW\SHGHSURMHWVGRLYHQW¬WUHI«G«U«HVGDQVXQIRQGVRXXQH
IDFLOLW«PXOWLEDLOOHXUVGRQWOHVSURF«GXUHVGłDWWULEXWLRQGHVRXWLHQŦQDQFLHUVłDSSOLTXHQW¢WRXV
OHVSURMHWVPLVHQāXYUHGDQVOHFDGUHGHODSROLWLTXHQDWLRQDOHGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
ʼn'RWDWLRQGHUHVVRXUFHVŦQDQFLªUHVSXEOLTXHVVXIŦVDQWHVSRXUDVVXUHUOHIRQFWLRQQHPHQW
GHVLQVWDQFHVDGPLQLVWUDWLYHVHQFKDUJHGHOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHHWIRXUQLUOHVFRQWUHSDUWLHV
Q«FHVVDLUHVDX[ŦQDQFHPHQWVGHVEDLOOHXUVGHIRQGV/DGRWDWLRQGRLW¬WUHDOLPHQW«HSDUXQH
SDUDŦVFDOLW«VXUODYHQWHGHOł«OHFWULFLW«SHUPHWWDQWSURJUHVVLYHPHQWGłDFFUR°WUHOHFRŦQDQFHPHQW
SXEOLFHWYLVDQW¢WHUPHOłDXWRŦQDQFHPHQWGHVSURMHWVGł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
ʼn6XEYHQWLRQSDUWLHOOH¢OłLQYHVWLVVHPHQWLQLWLDO G«YHORSSHPHQWFRQVWUXFWLRQLQVWDOODWLRQGHV
LQIUDVWUXFWXUHVHW«TXLSHPHQWV DVVXUDQWODYLDELOLW«HWOłDWWUDFWLYLW«ŦQDQFLªUHVGHVSURMHWV
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH3DUFRQWUHSDVGHVXEYHQWLRQDXIRQFWLRQQHPHQWQLDX[H[WHQVLRQV
XOW«ULHXUHV
ʼn3DLHPHQWVGHODVXEYHQWLRQEDV«VVXUOHVU«VXOWDWVVHORQOHVVS«FLŦFDWLRQVWHFKQLTXHVSU«FLV«HV
GDQVODFRQYHQWLRQGHVXEYHQWLRQDVVRFL«HDXSURMHWTXLG«ŦQLVVHQWOHEXWUHFKHUFK«HWOHV
U«VXOWDWVTXLVHURQWPHVXU«V\FRPSULVODPDQLªUHGRQWLOVVHURQWPHVXU«VHQIRQFWLRQGHODPLVH
HQāXYUHGXSODQGłDIIDLUHVGHOłRS«UDWHXUGł«OHFWULŦFDWLRQDQQH[«¢ODFRQYHQWLRQ/HVSDLHPHQWV
SHXYHQWIDLUHOłREMHWGHU«IDFWLRQRXGHSULPHVHORQODTXDOLW«GHVU«VXOWDWVSDUUDSSRUWDXQLYHDX
UHTXLV
ʼn&RŦQDQFHPHQWSDUOHVRS«UDWHXUVGł«OHFWULŦFDWLRQGHVLQYHVWLVVHPHQWVLQLWLDX[GH
G«YHORSSHPHQWHWGHFRQVWUXFWLRQLQVWDOODWLRQGHVLQIUDVWUXFWXUHVHW«TXLSHPHQWVVXUIRQGV
SURSUHVFRPSO«W«VVLQ«FHVVDLUHSDUGHVSU¬WVEDQFDLUHV
ʼn(QJDJHPHQWGHVRS«UDWHXUVGł«OHFWULŦFDWLRQ¢DVVXUHUHWŦQDQFHUOłH[SORLWDWLRQHWOD
maintenance des installations et équipements,\FRPSULVOHXUH[WHQVLRQHWOHUHQRXYHOOHPHQW
GHVFRPSRVDQWVHQWHPSVYRXOX
ʼn$XGLWS«ULRGLTXHWHFKQLTXHHWŦQDQFLHUGXIRQGVRXGHODIDFLOLW«PXOWLEDLOOHXUVHIIHFWX«SDUXQ
RUJDQLVPHLQG«SHQGDQWSRXUVłDVVXUHUGHODERQQHJHVWLRQHWGHODWUDQVSDUHQFHWDQWVXUOHSODQ
GHVSURF«GXUHVDGPLQLVWUDWLYHVTXHGHVP«WKRGRORJLHVHWGHVP«FDQLVPHVXWLOLV«VSRXUODSULVH
GHG«FLVLRQODU«DOLVDWLRQGHVSURMHWVHWOHVXLYLFRQWU¶OH

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 

4.3.2.
Préconisations aux investisseurs internationaux.

Il nous semble important de partager les re- ainsi travailler avec l’ensemble des acteurs de
tours d’expérience entre acteurs financiers l’ERD, dans une logique d’écoute et de péda-
et non financiers. gogie, pour mieux évaluer les opportunités
d’investissement dans l’électrification rurale
Au sein de la plateforme de dialogue évo- décentralisée et développer cette activité en
quée plus haut, les investisseurs (fonds clas- coordination avec les monteurs de projets. }
siques ou ISR, impact investors…) pourraient

4.3.3.
Préconisations au secteur financier
dans les pays du Sud.

Pour appuyer le développement de l’ERD, çGNNGU RQWTTCKGPV RCTVKEKRGT CWZ ªEJCPIGU GV CWZ
les institutions financières, notamment les sensibilisations organisées à l’échelle régionale
banques primaires, pourraient utilement inter- afin de mieux évaluer les opportunités et les
naliser une expertise en ERD, par exemple au risques ;
sein de leurs équipes dédiées au développe- çGNNGU RQWTTCKGPV TªRGTEWVGT UWT NG VCWZ FàKPVªT«V
ment rural. pratiqué la baisse du risque de crédit liée aux
mesures d’accompagnement et aux garan-
A l’échelle d’un territoire, les institutions finan- ties de qualité des équipements dont bénéficie
cières locales, notamment les institutions de l’emprunteur (deux points sur lesquels les ONG
microfinance, pourraient soutenir les micro- sont vigilantes lorsqu’elles portent un projet). }
entrepreneurs dans le développement de leurs
activités économiques (achat d’équipement, de
récepteurs) ou les opérateurs locaux pour en-
tretenir l’outil de production (achat de matériel de
remplacement) :

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

4.4.
Préconisations aux monteurs
de projets et à leurs partenaires
directs sur le terrain.
Le changement d’échelle dont l’Afrique subsaharienne a besoin
pose un problème méthodologique : peut-on à la fois faire
du « sur-mesure » pour chaque territoire et « massifier » l’ERD ?
Cela ressemble à la quadrature du cercle…
Pour y parvenir, les monteurs de projets devraient selon nous
privilégier une double approche méthodologique :
çVTCXCKNNGTGPlaFGOKOGUWTGa|QWGPlaUVCPFCTFKUCVKQP
intermédiaire » : définir des morphotypes de sites, chacun
associé à une combinaison de solutions d’électrification
adaptées ;
çUWTWPGO«OG\QPGCIKT¡NCTIGªEJGNNGGPWVKNKUCPVNàGĂGVFG
mutualisation et de compensation entre villages, avec un seul
opérateur et une seule équipe de pilotage de projet.

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 

Trois autres principes d’action devraient guider çKN PQWU UGODNG ªICNGOGPV SWàGNNGU FGXTCKGPV
le montage d’un projet de systèmes d’ERD, quel garder un rôle opérationnel central dans la mise
qu’en soit le porteur : en œuvre de solutions décentralisées dans deux
çs’adresser aux structures régionales pour cas : (1) pour assurer l’électrification de sites où
couvrir un bassin d’au moins 10 000 abonnés ; les investisseurs ne veulent ou ne peuvent pas
çs’obliger à couvrir les populations les plus intervenir, et (2) pour conduire des projets pion-
vulnérables, en recourant à la palette de solu- niers et accompagner la mise en œuvre sur le
tions disponibles (cf. partie  3.) en complément terrain des innovations technologiques ;
de la solution principale développée ; çFCPU NGU CWVTGU ECU NGWT OKUUKQP PQWTTKG FG
çs’associer avec des ONG du Nord spécialisées leur longue expérience de terrain, serait plutôt
en ERD et des ONG locales de développement celle d’un appui technique, en ingénierie sociale
rural. notamment, aux monteurs publics de projets
(collectivités du Nord dans le cadre de la coo-
Cette coopération d’acteurs apparaît notam- pération décentralisée, par exemple) ou privés.
ment indispensable pour évaluer correctement Elles pourraient ainsi jouer un rôle essentiel pour
les risques économiques, sociaux et financiers, former et professionnaliser les acteurs locaux, et
démarche qui peut prendre un temps significatif pour sélectionner des opérateurs et exploitants
et qu’il ne faut, selon nous, en aucun cas sacri- ayant à la fois la fibre entrepreneuriale et sociale,
fier. En garantissant un travail d’accompagnement en lien avec les fournisseurs de solutions.
des populations et des entrepreneurs locaux, elle
permettrait aussi de ne pas perdre de vue que En effet, les fournisseurs de solutions auraient
l’électrification n’est qu’un moyen, que l’objectif aussi leur rôle à jouer pour maximiser les exter-
réside dans les usages finaux de l’électricité, et nalités positives des systèmes installés :
notamment les usages productifs. çGPECFTGTNàGZRªTKOGPVCVKQPFGUQNWVKQPUFGRTQ-
duction, distribution ou stockage  : identifier un
De plus, les ONG du Sud devraient aider les po- territoire mature, diffuser une information pré-
pulations locales à manifester leur volonté, à dire cise sur les risques liés à l’expérimentation ;
«  non  » aux projets qui ne correspondent pas à çCUUWTGT NC HQTOCVKQP GV NG VTCPUHGTV FG EQORª-
leurs attentes, et favoriser leur implication dans tences vers le secteur privé local pour mettre en
les projets auxquels elles disent « oui ». place des filières d’approvisionnement en pièces
de rechange ;
De leur côté, les ONG du secteur du Nord pour- çUVTWEVWTGTNCăNK©TGFGTGE[ENCIGFGUOCVªTKGNU}
raient sans doute mieux prendre en compte les
bouleversements en cours dans le domaine de
l’ERD, et notamment la privatisation du secteur, en
faisant évoluer leur rôle :
çICTFKGPPGU PCVWTGNNGU FG NàCEE©U WPKXGTUGN ¡
l’électricité et du respect de ce droit pour les
populations les plus vulnérables, elles ont une
vocation de plaidoyer, et devraient davantage
faire entendre leur voix ;

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

MINIDOSSIER

Comment préparer un dossier de projet d’ERD ?


La préparation d’un dossier de projet d’ERD fonds, banques, etc.) pouvant compléter les
nécessite du temps et des moyens qu’il ne fonds propres.
faut pas sous-estimer. Elle dépend de nom- Dans le cas d’un consortium, chaque parte-
breux facteurs, notamment du pays concerné, naire doit fournir les mêmes pièces justifi-
du porteur du projet, du type de projet dont il catives que le porteur, un mémorandum de
s’agit et des sources de financement envis- partenariat doit être signé par tous, de même
ageables. Nous nous limitons ici à lister les qu’un ou des mandats pour représenter le
principales préconisations applicables dans consortium.
la plupart des cas.
Pertinence du projet, cohérence
Eligibilité administrative, avec le contexte et les réalités
technique et financière. locales.
Le porteur de projet doit avant tout véri- Pour être viable et durable, le projet envisagé
fier son éligibilité au statut d’opérateur doit être en cohérence avec les politiques et
d’électrification, aux éventuels avantages fis- stratégies nationales, régionales et locales
caux et aux financements disponibles. Cette d’électrification rurale et, plus généralement,
vérification porte sur trois domaines, chacun de développement socio-économique (ser-
étant une cause possible d’inéligibilité : vices publics, santé, éducation, activités
çCFOKPKUVTCVKHa fournir les actes certifiant la économiques), et pouvoir contribuer à leur
forme juridique de la structure porteuse du mise en œuvre.
projet, sa date de création, son objet social, A cet effet, le porteur du projet doit préciser
son capital, les noms des associés et leurs les informations de base et les hypothèses
parts respectives, ainsi que ses statuts ; de travail sur lesquelles le projet est conçu,
çVGEJPKSWGa  présenter les principales ré- et justifier sa pertinence :
férences du porteur pour des projets çKPHQTOCVKQPU FG DCUGa  collecter les don-
similaires ou montrant qu’il dispose de nées disponibles et réaliser les investiga-
l’expertise technique requise (une expé- tions et enquêtes de terrain nécessaires
rience consistante d’exploitation et de ges- auprès des collectivités locales, des ser-
tion de clientèle de miniréseaux peut être vices publics, des ménages et des acteurs
un atout majeur) ; fournir un organigramme économiques, portant sur :
et les curriculum vitae des principaux inter- - données démographiques et so-
venants envisagés ; cio-économiques, potentialités de
çăPCPEKGTa  fournir les données ban- développement,
caires, les trois derniers bilans certifiés de - attentes et motivation des élus, des
l’entreprise ainsi que toutes les preuves responsables locaux et des autorités
d’apports financiers externes (bailleurs de coutumières,

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PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 

- programmes et projets en cours, et pré- Cadre logique.


vus à court et moyen termes, Vient ensuite l’établissement du cadre
- sources d’énergie et dépenses actuelles logique, étape incontournable et détermi-
pour l’éclairage, la charge des batte- nante. C’est en effet la référence qui ex-
ries (téléphones mobiles), l’audiovisuel, plicite les objectifs et résultats attendus du
l’électroménager, les activités artisana- projet, son déroulement, les indicateurs qui
les, etc., vont permettre de mesurer sa réalisation et
- études de marché (capacité et volo- les hypothèses et les risques associés. Il se
nté de payer) auprès des ménages et décline de la façon suivante :
autres clients potentiels pour l’accès à çªPQPEªFWRTQDN©OGa décrire le problème
l’électricité, et typologie de consomma- principal à résoudre en mettant l’accent sur
tion (catégories de consommateurs, les défis rencontrés par les principaux bé-
consommations moyennes par catégo- néficiaires, en particulier les groupes les
rie, demandes de pointe, saisonnalité, plus vulnérables ;
courbes de charge, etc.), çQDLGEVKHU FW RTQLGVa  proposer un exposé
- types et densités d’habitat, distances en- concis de l’objectif global et des objectifs
tre les villages, typologie de terrain et tra- spécifiques du projet, en cohérence avec
cés possibles pour des miniréseaux ; les politiques et stratégies locales et les
çRGTVKPGPEGFWRTQLGVa éventuels appels à propositions ;
- décrire la pertinence au regard des ob- çTªUWNVCVU CVVGPFWU GV RQWT EJCSWG
jectifs et des priorités locaux, notamment TªUWNVCVa
par rapport aux zones identifiées comme - les indicateurs objectivement vérifiables,
propices à l’électrification hors réseau, et quantitatifs et qualitatifs, permettant de
par rapport à tout autre besoin, comme mesurer les biens et services fournis par
les opportunités de développement le projet,
économique, les aspects environnemen- - la source de vérification, la partie respon-
taux et de santé, etc., sable et la fréquence de la collecte,
- démontrer la pertinence par rapport aux - les hypothèses et les risques concernant
besoins et contraintes des bénéficiaires l’atteinte du résultat attendu,
finaux potentiels, - les principales activités prévues pour
- estimer le nombre de bénéficiaires po- atteindre le résultat, sans omettre d’in-
tentiels directs et indirects, tégrer des activités d’accompagnement
- montrer comment sont pris en compte comme la promotion d’applications pro-
les aspects environnementaux, la san- ductives et les éventuelles mesures
té, l’intégration sociale et l’inclusion du d’atténuation des risques sociaux et
genre. environnementaux.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS

© Rémy Delacloche

La téléphonie mobile,moteur de l’électrification des zones rurales.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE 4 - PRÉCONISATIONS - 

Plan de travail. çJ[RQVJ©UGUFGVTCXCKNaprévision de la de-


Le cadre logique doit être complété par mande (kWh/an) par catégorie d’usagers
un plan de travail mettant en évidence les sur la durée du projet ; proposition de sys-
étapes clés de la mise en œuvre du projet. Le tème tarifaire pour les différentes catégo-
plan doit concerner toute la période de mise ries d’usagers (souvent jusqu’à cinq) ; esti-
en œuvre. Les étapes doivent être réalistes mation des ventes annuelles ;
et réalisables, détaillées, par exemple sur çRNCP FàKPXGUVKUUGOGPV précisant pour
une base trimestrielle, et présentées sous chaque poste de dépense le coût unitaire,
forme de tableau. la quantité, sa priodicité et sa justification
Le porteur devra notamment s’assurer de la (description, nécessité pour le projet, jus-
cohérence chronologique : tification du calcul, coûts réels et infor-
- les études de la demande et les enquêtes mations sur le fournisseur et l’origine des
précèdent le dimensionnement ; équipements) :
- l’obtention de la licence/agrément - achat et installation des équipements  :
d’exploitation précède la mise en service ; acquisition, transport, installation, forma-
- la durée prévue pour l’importation des tion, remplacement, autres,
équipements est suffisante ; - exploitation  : opération et maintenance,
- la durée prévue pour l’obtention de la li- réparations, facturation, autres coûts,
cence/agrément d’exploitation, de pro- - facilitation des activités locales  : forma-
duction et distribution est suffisante et tion, gestion et suivi du projet, communi-
réaliste. cation, autres,
Dans le cas d’une sollicitation de subvention, - distribution et management  : dépenses
le cadre logique et le plan de travail peuvent de distribution, personnel support,
être inclus dans l’accord de subvention, et la dépenses administratives, équipements,
réalisation des étapes clés peut condition- contrôle de gestion, autres,
ner le décaissement des fonds. - coûts des terrains et des bâtiments,
autres ;
Plan d’affaires. çUQWTEGU FG ăPCPEGOGPV (montant, taux
Le plan d’affaires est l’élément clé de la d’intérêt, durée)  : fonds propres, participa-
préparation du projet, mais aussi de son tion et apport de partenaires et d’autres tiers,
évaluation par les partenaires institution- prêts bancaires, prêts concessionnels, va-
nels et financiers. Il accompagne et justifie lorisation d’apport en nature, subventions ;
les dossiers de demande d’agrément (li- çRNCP FG FªECKUUGOGPV sur la période de
cences d’exploitation, de production, de dis- subvention ;
tribution) et/ou de financement (subvention, çRNCP FàCĂCKTGU UWT XKPIV CPU résultats
prêt bancaire). Il est présenté généralement d’exploitation, cash-flow et taux de rentabi-
sous forme de tableur comprenant plusieurs lité interne avec et sans subvention.
onglets :

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


418 - PARTIE CONCLUSIVE

Conclusion
S’il y a une leçon, et une seule, à tirer de cinquante développement rural inclusif. Une infrastructure
ans d’électrification rurale décentralisée par én- énergétique n’est qu’une infrastructure parmi
ergies renouvelables, laquelle choisir ? d’autres, que seule une dynamique structurée
d’aménagement du territoire peut mettre en va-
Peut-être que cette électrification est d’abord af- leur. Pas de développement régional sans route
faire de subsidiarité, du national au local. Du gé- carrossable ou sans valorisation des filières, pas
néral au particulier, de la politique nationale au ser- de développement local sans dispensaire médical
vice auprès d’usagers en milieu rural : le territoire ou sans école, sans système d’assainissement,
et les hommes qui le peuplent, dans les régions et sans incitation entrepreneuriale.
les villages, doivent fonder l’analyse et l’action. Ce
constat porte au-delà des frontières de l’accès à Les mutations technologiques en cours favori-
l’électricité et des pays en développement. sent la conception de nouveaux modèles de ges-
tion des infrastructures électriques, plutôt favo-
Au Nord, on assiste, grâce à la récente valorisa- rables à cette territorialité et à cette proximité,
tion des énergies renouvelables, disponibles sur quand bien même elles reposent sur une déma-
le lieu même de leur utilisation, à la fragmentation térialisation déshumanisante. Ces tendances dis-
des acteurs et au retour à une maîtrise locale de la ruptives que les acteurs de l’accès à l’électricité
production, de la distribution et de la consomma- mettent en œuvre localement ne peuvent être
tion d’électricité. C’est le sens des préconisations viables sans une régulation organisée par les
formulées plus haut dans cet ouvrage. pouvoirs publics. C’est par la juste implication des
trois niveaux de gouvernance (national, régional,
Si le territoire doit être la mesure de toute chose, local) que l’électrification décentralisée satisfera
alors cette leçon en contient une autre  : seule, le plus grand nombre. Il en est de même pour la
l’électrification est impuissante à réaliser un gestion de l’eau ou des déchets.

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


PARTIE CONCLUSIVE - 419

Cette conclusion est ainsi porteuse à la fois d’un


espoir et d’une crainte. mb/ł$IULTXHQłDSHXW¬WUHSDVLQYHQW«
L’espoir qu’émerge une action collective plus OłLG«HGHOłXQLYHUVHOPDLVHOOHD
pertinente, fondée sur une vision holistique du G«YHORSS«WRXWHVVRUWHVGHFRQFHSWLRQV
développement rural, organisant la mise en place GXńFRPPXQŅR»FHTXLFRPSWHHVWOD
coordonnée des infrastructures de base, au UHODWLRQHWQRQSDVOł¬WUHR»OHVRFLDO
nombre desquelles celles qui apportent à tous HWOłLQGLYLGXHOVHFRPSOªWHQW'HV
l’électricité. FRQFHSWLRQVTXLSRXUUDLHQWVHUYLUGH
EDVH¢ODFULWLTXHGXQ«ROLE«UDOLVPH
Et la crainte que ces biens communs, qu’il s’agisse UªJQHGXFKDFXQSRXUVRLb}
de l’eau ou de l’électricité, devenant services
marchands, échappent à une partie de la popu- Achille Mbembe, historien, philosophe
lation, la plus vulnérable, la moins rentable. Si et politologue camerounais
l’intervention croissante du secteur privé est (Le Monde, 2016).
porteuse de financements, d’innovations, de
compétences dont l’ERD a définitivement be-
soin, l’universalité de l’accès à l’électricité dans
le respect de l’équité entre les citoyens ne peut
s’abstenir sereinement d’un cadre régulé. Pas plus
au Sud qu’au Nord.

L’Afrique, qui dispose d’une culture du commun bien


plus forte que l’Europe, détient peut-être la clé. }

ÉLECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE : UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


420 - ANNEXES

Glossaire
Appel de puissance Courant alternatif
3XLVVDQFHUHTXLVHSRXUVDWLVIDLUHXQHGHPDQGH (QFRXUDQWDOWHUQDWLIOHV«OHFWURQVmbFLUFXOHQWb}
HQ«OHFWULFLW«&HWHUPHHVWVRXYHQWXWLOLV« GHPDQLªUHDOWHUQDWLYHGDQVOHVGHX[VHQVGX
SRXUG«VLJQHUOHSLFGHSXLVVDQFHDSSHO«H FLUFXLWVRXVOłHIIHWGHURWDWLRQGłXQDOWHUQDWHXU
VXUJLVVDQWORUVGłXQHGHPDQGHVRXGDLQHHW GDQVODSOXSDUWGHVFDVRXGłXQFRQYHUWLVVHXU
IRUWHGł«OHFWULFLW« «OHFWURQLTXHGDQVOHFDVGHVRQGXOHXUV
7RXWHVOHVVRXUFHVGHSURGXFWLRQGł«OHFWULFLW«
Approche interventionniste FODVVLTXHVGXEDUUDJH¢ODFHQWUDOHQXFO«DLUH
$SSURFKHKLVWRULTXHGł«OHFWULŦFDWLRQGHV HQSDVVDQWSDUODFHQWUDOH¢FKDUERQFRQVLVWHQW
WHUULWRLUHVIRQG«HVXUODFRRUGLQDWLRQ ¢IDLUHWRXUQHUXQDOWHUQDWHXU¢XQHYLWHVVH
LQVWLWXWLRQQHOOHHWOłLPSOLFDWLRQGHODVRFL«W« FRQWU¶O«H¢SDUWLUGłXQHVRXUFHGł«QHUJLH
FLYLOHSRXUODPLVHHQāXYUHGłXQHVROXWLRQ WKHUPLTXHRXP«FDQLTXH/HVU«FHSWHXUV
FROOHFWLYHGł«OHFWULŦFDWLRQ «OHFWULTXHVRQWGRQF«W«ORJLTXHPHQWFRQ©XV
SRXUIRQFWLRQQHUDYHFGXFRXUDQWDOWHUQDWLI
Approche libérale /HFRXUDQWDOWHUQDWLIHVW«JDOHPHQWXWLOLV«
$SSURFKHU«FHQWHGł«OHFWULŦFDWLRQGHV SRXUWUDQVSRUWHUOł«OHFWULFLW«VXUGHORQJXHV
WHUULWRLUHVIRQG«HVXUOłLQWHUYHQWLRQGłXQDFWHXU GLVWDQFHVFDULOOLPLWHOHVSHUWHVHQPRGXODQW
SULY«GDQVOHFDGUHGłXQ«FKDQJHPDUFKDQG LQWHQVLW«HWWHQVLRQSOXVIDFLOHPHQW
DYHFXQFOLHQWSRXUOłDFTXLVLWLRQGłXQELHQRX
GłXQVHUYLFH«OHFWULTXHFRQWUHXQSDLHPHQW Décarbonation
FRPSWDQWRX¢WHPS«UDPHQW  (QVHPEOHGHVPHVXUHVHWWHFKQLTXHVYLVDQW
¢U«GXLUHOHV«PLVVLRQVGHJD]¢HIIHWGHVHUUH
Cellule photovoltaïque HVVHQWLHOOHPHQWGLR[\GHGHFDUERQHPDLV
'LVSRVLWLISKRWRYROWD±TXHOHSOXV«O«PHQWDLUH «JDOHPHQWP«WKDQH VłLQVFULYDQWDLQVLGDQV
FRPSRV«GłXQPDW«ULDXVHPLFRQGXFWHXU XQSURMHWGHVRFL«W«VDQVXWLOLVDWLRQGł«QHUJLHV
SKRWRVHQVLEOHTXLJ«QªUHGHOł«QHUJLH IRVVLOHV
«OHFWULTXH FRXUDQWFRQWLQX SDUDEVRUSWLRQGH D’après Espace Mondial, L’Atlas, Sciences-Po
UD\RQQHPHQWOXPLQHX[
'łDSUªV*«UDUG0RLQH/ł«OHFWULŦFDWLRQVRODLUH Dépenses d’exploitation (OPEX)
photovoltaïque. Systèmes autonomes, systèmes '«SHQVHVOL«HV¢ODSURGXFWLRQGłXQELHQRX
hybrides, miniréseaux. (Langres : Observ’ER, 2016). GłXQVHUYLFHSDUXQHRUJDQLVDWLRQ'DQVOHFDV
GłXQV\VWªPH«OHFWULTXHLOVłDJLWSDUH[HPSOH
Courant continu GHG«SHQVHVGHSHUVRQQHOH[SORLWDQWIUDLV
/HFRXUDQWFRQWLQXHVWXQŧX[Gł«OHFWURQV GHPDLQWHQDQFHGHV«TXLSHPHQWVLQWUDQWV
mbFLUFXODQWb}GDQVXQVHXOVHQVGXS¶OHQ«JDWLI GHIRQFWLRQQHPHQW H[FRPEXVWLEOH 
YHUVOHS¶OHSRVLWLI7RXWFLUFXLWDOLPHQW«SDU SLªFHVGHUHFKDQJHG«SODFHPHQWVIUDLVGH
XQJ«Q«UDWHXUGHW\SHSLOHRXEDWWHULH ODPSH FRPPXQLFDWLRQ
GHSRFKHW«O«SKRQHŊ IRQFWLRQQHHQFRXUDQW
FRQWLQX/HFRXUDQWFRQWLQXHVWODVHXOHVRXUFH
Gł«OHFWULFLW«mbQDWXUHOOHb}

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 421

Dépenses d’investissement initial Ingénierie technique


(CAPEX) (QVHPEOHGHVDFWLYLW«VSHUPHWWDQWOD
'«SHQVHVOL«HVDXG«YHORSSHPHQWHW FRQFHSWLRQODFRQVWUXFWLRQHWODPLVHHQVHUYLFH
IRXUQLWXUHGHVSLªFHVQRQFRQVRPPDEOHV GłXQHLQVWDOODWLRQWHFKQLTXHRXLQGXVWULHOOH
SRXUXQSURGXLWXQHHQWUHSULVHXQV\VWªPH DOODQWGHV«WXGHVSU«DODEOHVDXFRQWU¶OHGH
'DQVOHFDVGłXQV\VWªPH«OHFWULTXHLOVłDJLW «TXLSHPHQWVLQVWDOO«VHQSDVVDQWSDUOH
SDUH[HPSOHGHODU«DOLVDWLRQGHV«WXGHV GLPHQVLRQQHPHQWOłDFKDWHWOHFRQWU¶OHGH
SU«DODEOHVGHOłDFTXLVLWLRQGHVFRPSRVDQWVGX IDEULFDWLRQGHV«TXLSHPHQWVODU«DOLVDWLRQGHV
V\VWªPHRXHQFRUHGHOłDVVLVWDQFHWHFKQLTXH¢ WUDYDX[HWODFRQGXLWHGHVWHVWVDYDQWPLVHHQ
OłLQVWDOODWLRQ VHUYLFH

Facteur de charge Maître d’ouvrage


5DWLRHQWUHOł«QHUJLHTXłXQHXQLW«GH &RPPDQGLWDLUHGXSURMHWTXLG«ŦQLWOHFDKLHU
SURGXFWLRQ«OHFWULTXHSURGXLWVXUXQHS«ULRGH GHVFKDUJHV EHVRLQVHWREMHFWLIVEXGJHW
GRQQ«HHWOł«QHUJLHTXłHOOHDXUDLWSURGXLWH FDOHQGULHUSU«YLVLRQQHO HQDPRQWGXSURMHW
GXUDQWFHWWHS«ULRGHVLHOOHDYDLWWRXMRXUV 8QHIRLVLQVWDOO«VLOGHYLHQWOHSURSUL«WDLUHGHV
IRQFWLRQQ«¢SXLVVDQFHPD[LPDOH «TXLSHPHQWV

Genre Maître d’œuvre


&RQFHSWTXLG«VLJQHOHVUDSSRUWVOHVGHYRLUV 3HUVRQQHRXRUJDQLVDWLRQHQFKDUJHGHOD
OHVU¶OHVVRFLDOHPHQWHWFXOWXUHOOHPHQW FRQFHSWLRQGHVSODQVGHOłRUJDQLVDWLRQHWGH
FRQVWUXLWVGHVIHPPHVHWGHVKRPPHV,OVłDJLW ODVXSHUYLVLRQGXSURMHW&KRLVLHSDUOHPD°WUH
GłXQHFRQVWUXFWLRQSROLWLTXHHWVRFLDOHTXLVH GłRXYUDJHHOOHFRRUGRQQHOHVSHUVRQQHV
GLII«UHQFLHGHODQRWLRQGHVH[HUHFRXYUDQWOHV WUDYDLOODQWVXUOHSURMHWHWOLYUHOHSURGXLWŦQL
FDUDFW«ULVWLTXHVELRORJLTXHVGHVLQGLYLGXV
Module photovoltaïque
Groupe électrogène 3OXVSHWLWHQVHPEOHGHFHOOXOHVVRODLUHV
'LVSRVLWLIDXWRQRPHFRQVWLWX«GłXQPRWHXU LQWHUFRQQHFW«HVFRPSOªWHPHQWSURW«J«FRQWUH
WKHUPLTXHDOLPHQW«SDUGLII«UHQWVW\SHVGH OłHQYLURQQHPHQW
FDUEXUDQWVTXLDFWLRQQHXQDOWHUQDWHXUFDSDEOH 'łDSUªV*«UDUG0RLQH/ł«OHFWULŦFDWLRQVRODLUH
GHSURGXLUHGHOł«OHFWULFLW« photovoltaïque. Systèmes autonomes, systèmes
hybrides, miniréseaux. (Langres : Observ’ER, 2016).
Ingénierie sociale
(QVHPEOHGHVDFWLYLW«VGł«FRXWHGłREVHUYDWLRQ
GHVHQVLELOLVDWLRQGHIRUPDWLRQHW
GłDFFRPSDJQHPHQWGHVSDUWLHVSUHQDQWHV
XQSURMHWVHORQXQHDSSURFKHFRRS«UDWLYH
G«PRFUDWLTXHHWSDUWLFLSDWLYHGHODJHVWLRQGH
SURMHW

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


422 - ANNEXES

Plan d’Affaires (ou Business Plan) Stockage


'RFXPHQWFRQVWLWXWLIGłXQGRVVLHUGHGHPDQGH 3URFHVVXVFRQVLVWDQW¢SU«VHUYHUXQHTXDQWLW«
GHŦQDQFHPHQWUDVVHPEODQWOHVLQIRUPDWLRQV Gł«QHUJLHSRXUXQHXWLOLVDWLRQXOW«ULHXUH/H
G«WDLOO«HVHWTXDQWLŦ«HVVXUOłHQVHPEOHGHV VWRFNDJH«OHFWURFKLPLTXH OłDLGHGHEDWWHULHV 
DVSHFWVGłXQSURMHW,OFRPSUHQGQRWDPPHQW HVWOHPRGHGHVWRFNDJHGł«OHFWULFLW«OHSOXV
XQHDQDO\VHSU«FLVHGHV«YªQHPHQWV U«SDQGX
VXVFHSWLEOHVGHVXUYHQLUSHQGDQWODGXU«HGX
ŦQDQFHPHQWHWGłDYRLUXQLPSDFWVXUOłDWWHLQWH
GHVREMHFWLIVGXSURMHW «WXGHGHVHQVLELOLW« 

Puissance
4XDQWLW«Gł«OHFWULFLW«SURGXLWHRXFRQVRPP«H¢
XQLQVWDQWGRQQ«(OOHHVWPHVXU«HHQ:DWW : 

Rendement de conversion
photovoltaïque
5DSSRUWHQWUHODSXLVVDQFH«OHFWULTXHG«OLYU«H
DX[ERUQHVGXGLVSRVLWLISKRWRYROWD±TXHHWOD
SXLVVDQFHOXPLQHXVHLQFLGHQWHPHVXU«HGDQV
OHVFRQGLWLRQVQRUPDOHVGłHVVDLV
'łDSUªV*«UDUG0RLQH/ł«OHFWULŦFDWLRQVRODLUH
photovoltaïque. Systèmes autonomes, systèmes
hybrides, miniréseaux. (Langres : Observ’ER, 2016).

Renforcement de capacités
3URFHVVXVSDUOHTXHOOHVLQGLYLGXVOHV
RUJDQLVDWLRQVHWODFROOHFWLYLW«GDQVVRQ
HQVHPEOHOLEªUHQWFU«HQWUHQIRUFHQWDGDSWHQW
HWSU«VHUYHQWDXŦOGHVDQVOHXUVFDSDFLW«VFłHVW
¢GLUHOHXUDSWLWXGH¢J«UHUOHXUVDIIDLUHVDYHF
VXFFªV,OU«VXOWHGłXQHPXOWLWXGHGłDFWLRQVHWGH
E«Q«ŦFLDLUHVGRQWOłHQMHXHVWGłDYRLUXQLPSDFW
VXUWURLVQLYHDX[LQWHUG«SHQGDQWV LQGLYLGXHO
RUJDQLVDWLRQQHOHQYLURQQHPHQWJOREDO DŦQGH
SHUPHWWUH¢WHUPHOłDXWRQRPLVDWLRQFRPSOªWH
GHOł«FRV\VWªPHORFDO

Secteur informel
(QVHPEOHGHVDFWLYLW«V«FRQRPLTXHV
«FKDSSDQWDXUHJDUGGHOł‹WDWHW¢ODO«JLVODWLRQ
S«QDOHVRFLDOHHWŦVFDOH

Solaire thermodynamique
7HFKQRORJLHFRQVLVWDQW¢FRQFHQWUHUOH
UD\RQQHPHQWVRODLUH¢OłDLGHGHFROOHFWHXUV
SRXUFKDXIIHUXQŧXLGH¢KDXWHWHPS«UDWXUHHW
SURGXLUHDLQVLGHOł«OHFWULFLW«RXDOLPHQWHUHQ
«QHUJLHGHVSURF«G«VLQGXVWULHOV

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 423

Index
A
Adhésion (des populations) 193, 204, 213, 214, 215, 219, 238,
YRLUDXVVL$FFHSWDWLRQ b207, 242, 243, 251, 273, 347, 419
$ERQQHPHQWb99, 160, 249, 251, 216-235, 239, 241, 317, 321, 322, SDUODGHPDQGHRXERWWRP
279, 281, 358, 362, 374, 378, 400 360, 365, 367, 373, 375 XS YRLUDXVVL'HPDQGH b
120131
Abonné(s) YRLUDXVVL8VDJHU b $IIHUPDJHb86, 87, 372
SDUOHVFR½WVb129
68, 123, 124, 128, 147, 158, 171, $JHQFH V b VRFLRORJLTXHb216 et sq.253
184,187, 208, 209, 228, 235, 236, Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHb89, 256345375
244, 246, 248-251, 327, 328, 344, 149, 150, 206, 209, 263, 331,
348, 358, 363, 364, 373, 374, 380, Appropriation YRLUDXVVL
345, 364, 375, 381, 394, 395, 397,
408, 413 $GK«VLRQ b120, 148, 150, 182,
404, 408
192, 200, 207, 216, 218, 227, 228,
Acceptation YRLUDXVVL GHG«YHORSSHPHQWb169, 176,
231-232, 237, 241, 277, 343, 345,
$GK«VLRQ b150, 207, 220, 228, 189, 192
364, 372, 373, 375,
231, 290, 356, 364, 373, 376 GHU«JXODWLRQbYRLU$XWRULW«V
$VVLVWDQFHWHFKQLTXHb46, 86,
$FFªV¢Oł«QHUJLHb44 et sq., $JULFXOWXUHb36, 40, 58, 60, 61,
87, 88, 91, 170, 176, 177, 180, 190,
88, 92, 122, 151, 168, 169, 193, 222, 102, 116, 121, 140, 145, 148, 197,
191, 209, 293, 344, 404, 413
287, 297, 399, 408 207, 209, 230, 236, 243, 308, 310,
316, 320, 364, 365, 367 Association(s) YRLUDXVVL21*
$FFHVVLELOLW«b70, 98, 112-114, 8VDJHU b92, 101, 120, 145, 155,
124, 127, 128, 144, 166, 168, 243, $LGH V bYRLU'RQV
157, 181, 183, 196, 296, 300, 302,
246, 272, 278, 286, 292, 293, 309, )LQDQFHPHQW)RQGV
304, 307, 317, 322, 344, 347, 363,
343, 389 6XEYHQWLRQV
372, 375
Accompagnement YRLUDXVVL Aide internationale au
Assurance YRLUDXVVL5LVTXHV b
6HQVLELOLVDWLRQ b92, 93, 124, 155, développement YRLUDXVVL
185, 189, 195, 242, 278, 405
159, 177, 179, 180, 192, 207, 209- &RRS«UDWLRQ b 145, 151, 182, 192,
211, 216 et sq, 275, 289, 293, 295, 230, 260, 302, 408, $XWRQRPLHb
316, 322 324, 326, 335, 343, 345, GHJHVWLRQHWŦQDQFLªUHb 147,
$P«QDJHPHQWGXWHUULWRLUHb
347, 372, 377, 408, 411, 413, 415 185, 211,
116, 177, 208, 397, 418
DXWRQRPLVDWLRQ YRLUDXVVL
Activités YRLUDXVVL8VDJHV Appareils électriques YRLU 5HQIRUFHPHQW b24, 91, 204,
DJULFROHVbYRLU$JULFXOWXUH DXVVL5«FHSWHXUV b45, 112, 113, 224
«FRQRPLTXHVSURGXFWLYHV 145, 158, 160, 166, 168, 207, 214,
YRLUDXVVL8VDJHV b 44, 51, 78, $XWRULVDWLRQb138, 208, 345,
218, 228, 231, 235, 263, 341, 342,
97,98, 101, 102, 124, 128, 206, 346, 372
358, 360, 374, 376, 379
207, 211, 215, 218, 224, 230, 243, Autorité (s) YRLUDXVVL
244, 274, 280, 286, 287, 292, $SSURFKHb
3RXYRLUVSXEOLFV
294, 303, 313, 316, 317, 321-323, GXG«YHORSSHPHQWb 232
GHU«JXODWLRQGXVHFWHXUb
325, 326, 329, 331, 354, 357, 359, JHQUHbYRLUFHWHUPH
208, 209, 211, 227, 235, 245,
365, 367, 369, 378, 411, 414, 415 LQWHUYHQWLRQQLVWHb 114, 174,
248, 263, 292, 303, 331, 345, 377
J«Q«UDWULFHVGHUHYHQXVb224 176, 180, 181, 183, 204, 214, 215,
ORFDOHVb72, 88, 226, 247, 323,
VRFLDOHVb98, 313, 324 219, 220, 238, 241, 242, 246,
341, 343, 345, 346, 365, 373, 375
251, 347
et sq.
OLE«UDOHb89, 114, 172, 174, 176,

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


424 - ANNEXES

C
WUDGLWLRQQHOOHV Commercialisation YRLUDXVVL
FRXWXPLªUHVb93, 207, 221, 'LVWULEXWLRQ9HQWH b118, 130,
226, 228, 235, 369, 373, 377, &DGUHU«JOHPHQWDLUHb 149, 154, 174, 175, 198, 213, 237,
398, 414 YRLU'URLW1RUPHV 262,268, 270, 274, 275, 278, 293,
5«JOHPHQWDWLRQ5«JXODWLRQ 329

B &DKLHUGHVFKDUJHVb138, 292, &RPPXQDXW«b


400 LQWHUQDWLRQDOH YRLUDXVVL
%DLOOHXUVGHIRQGVbYRLU)RQGV
Capacités contributives YRLU &RRS«UDWLRQ b22, 53, 86, 89,
%DQTXH V b 144, 154, 389, 402 et sq
DXVVL3DLHPHQW5HYHQXV b128,
GHG«YHORSSHPHQWb 169, 181,
129, 160, 171, 184, 188, 189, 207, ORFDOHb 126, 137, 148, 216, 218,
184, 190, 405, 408
211, 214, 224, 242, 273, 276, 287, 220, 223, 226, 232, 246, 248,
DXWUHVEDQTXHVb 190, 192, 212,
300, 364, 400, 408, 415 300, 316, 332, 346, 354, 365, 374
213, 214, 405
&$3(;bYRLU&R½WV Commune YRLUDXVVL$XWRULW«
%DVVHFRQVRPPDWLRQbYRLU
5«FHSWHXUV Capital/capitaux YRLUDXVVL 3RXYRLU b
,QYHVWLVVHPHQW)RQGV b52, 83, UXUDOHb72, 102, 103, 104, 124,
%¤WLPHQWVSXEOLFVbYRLU 177, 208, 263, 300, 303, 308,
86, 170, 175-177, 199, 202, 214,
,QIUDVWUXFWXUHV 318, 325, 364, 367, 368, 370
238, 286, 287, 347, 395
Batteries YRLUDXVVL FRPPXQDXW«GH
Capitalisation YRLUDXVVL FRPPXQHVb 159, 217, 392, 398,
6WRFNDJH b
([S«ULHQFH b37, 72, 149, 151, 179, 399
SORPEb166, 167, 284, 380
194, 225, 350
OLWKLXPb166, 264, 282, 352, &RPS«WHQFH V bYRLU
373, 380 &HUWLŦFDWLRQ YRLUDXVVL DXVVL )RUPDWLRQ
QLFNHOP«WDOK\GUXUHb166, 1RUPHV6WDQGDUGV b239, 362, 3URIHVVLRQQDOLVDWLRQ b
167, 264 396, 404 GXSHUVRQQHOGłH[SORLWDWLRQb
GXU«HGHYLHb 147, 150, 239, 91, 93, 237, 239, 338, 361, 397
Climat YRLUDXVVL
274, 380 et sq.
'«FDUERQDWLRQ b
SDUFEDWWHULHVb145, 165, 264, ORFDOH V b 120, 343
FKDQJHPHQWFOLPDWLTXHb 36,
301, 335, 371, 380 PDQTXHGHFRPS«WHQFHVb
41, 44, 47, 50, 51, 58, 60, 61, 66,
UHFKDUJHGHEDWWHULHVb 100- 93, 103, 138, 215, 238
127, 154, 157-159, 161, 166, 194,
102, 147, 148, 317, 415 WUDQVIHUWGHFRPS«WHQFHV
195, 199, 370
%LHQb FRQGLWLRQVFOLPDWLTXHVb217, YRLUDXVVL5HQIRUFHPHQW b 71,
FRPPXQ YRLUDXVVL,QW«U¬W 266, 268, 354, 373 120, 168, 208, 215, 249, 273, 277,
J«Q«UDO b29, 113-114, 233, 419 345, 372, 398, 413
&KDUJHVGłH[SORLWDWLRQbYRLU FRQŧLWGHFRPS«WHQFHVb23,
PDUFKDQGb 215, 292
&R½WV([SORLWDWLRQ 91
%LRPDVVHb22, 51, 62, 63, 66-67,
Collectivités YRLUDXVVL Comportement énergétique
74, 197, 336
$XWRULW«V3RXYRLUV YRLUDXVVL'HPDQGH8VDJHU b
%XGJHWb WHUULWRULDOHVb89, 90, 116, 120, 157, 206, 218, 243, 280, 282, 367
«QHUJ«WLTXHGHVP«QDJHVb 124, 134 et sq., 146, 147, 181, 205,
YRLU'«SHQVHV 206, 208, 215, 249, 303, 305, Composants YRLU
GHSURMHWbYRLU3URMHW 325, 395, 398, 401, 404, 408, DXVVL(TXLSHPHQWV
414 5HQRXYHOOHPHQW5HF\FODJH b
%XVLQHVV3ODQbYRLU3ODQ FR½WVb161 et sq.,
GX1RUGb 164, 180, 192, 396,
398, 413 EDLVVHGXSUL[b66, 98, 127,
153-154, 158, 161, 166, 171, 212,
343, 350, 383

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 425

SLªFHVGHUHFKDQJHb 26, 65, &RRS«UDWLYH V b71, 134, 140-141, Croissance


170, 237 et sq., 307, 309, 413 208, 300, 317, 321, 377, 399 «FRQRPLTXHb455158173
364402
&RPSWDJHb119, 142, 153, 160, Coordination GHVDFWHXUV b
G«PRJUDSKLTXHbYRLU
209, 210, 251, 281, 343, 340, 360 37, 89, 103, 174, 183, 197, 208,
'«PRJUDSKLH
et sq. 215, 252, 258, 260, 261, 302, 385
VREUHHQFDUERQHbYRLU
et sq.
&RQFHUWDWLRQb93, 261, 292, 322, '«FDUERQDWLRQ
325, 331, 345, 364, 375, 390, 400 &RXUEHGHFKDUJHb214, 244,
&URZGIXQGLQJbYRLU
270, 338, 341, 342, 355, 366, 367,
&RQFHVVLRQb86, 87, 135 et sq., )LQDQFHPHQW
371, 415
149, 171, 184, 188, 202, 208, 210,
&\FOHGHYLHbYRLU
212, 247, 249, 292, 346, 372, 375, Coût(s) YRLUDXVVL
(TXLSHPHQWV5HF\FODJH
395 7DULŦFDWLRQ b
GłH[SORLWDWLRQb67, 102, 114,
&RQFXUUHQFHb139, 183, 185, 209,
245, 274, 288, 291, 310, 400
126, 145, 160, 163, 170 et sq., 176,
185, 187-189, 239, 244, 263, 330,
D
Consommation (s) YRLUDXVVL 347, 349, 355, 370-371, 400, 417 '«FDUERQDWLRQb50, 58, 150,
&R½W0D°WULVH3LORWDJH b GłLQYHVWLVVHPHQW YRLUDXVVL 153, 154, 158, 164
Gł«OHFWULFLW«b 54, 56, 80, 81, 83, &DSLWDO)LQDQFHPHQW b68 Décentralisation YRLU
98, 123, 131, 144, 145, 160, 171, 160163170 et sq.176177 DXVVL&RRS«UDWLRQ
184, 188, 206, 208, 214, 244, 163274326329347370 '«FRQFHQWUDWLRQ b90-91, 120,
245, 248, 250, 277, 317, 339, 371380400417 124, 150, 153, 208, 214, 249, 252,
346, 348, 361, 368, 378, 415, 418 GHSURGXFWLRQb83114163 300, 375, 389, 393-395, 399, 404,
Gł«QHUJLHb 48, 64, 158, 169, 251, 164243339-340378 408
317, 328, 340, 341 GHUDFFRUGHPHQWb124185
OLHX[GHFRQVRPPDWLRQb 62, 228249375379 Déconcentration YRLUDXVVL
68, 334, 346, 356, 369 GHUHQRXYHOOHPHQWbYRLUFH '«FHQWUDOLVDWLRQ b91, 209, 215,
SURŦOGHFRQVRPPDWLRQb WHUPH 389, 393, 395, 397, 404, 408
243, 245, 280 GHWUDQVDFWLRQb192322408 Déconnexion YRLUDXVVL
VXUFRQVRPPDWLRQb233, 234 GHWUDQVSRUWb62122123235 6HUYLFH b251, 360, 374
DQDO\VHHWVXLYL150, 160, 282, 417
323, 358, 361, 367 EDLVVHGHVFR½WVbYRLU '«IDLOODQFHWHFKQLTXHbYRLU
&RPSRVDQWV (TXLSHPHQWV
Contrat YRLUDXVVL
U«HOVb808398243263417
(QJDJHPHQWV b86, 87, 120, 188, Délégation de service
209, 210, 212, 213 233, 249, 282, &U«GLW YRLUDXVVL3U¬W b public YRLUDXVVL$IIHUPDJH
291, 372, 364, 377, ¢OłH[SRUWDWLRQb183 &RQFHVVLRQ6HUYLFH b292, 345,
Gł«QHUJLHb160280360-363 372, 375, 396
&RQYHUWLVVHXUb145, 163, 165,
ORQJWHUPHb184
166, 274, 308, 309, 354 '«OHVWDJHVbYRLU6HUYLFH
DFFªVDXFU«GLWb223224250
&RRS«UDWLRQb37, 261 DFKDW¢FU«GLWb160172270 Demande YRLUDXVVL
G«FHQWUDOLV«Hb192, 303, 398, 283288 $SSURFKH b
401, 413 PLFURFU«GLWb89212275279 Gł«OHFWULFLW«b5896115116
LQVWLWXWLRQQHOOHb91, 172, 204 293 et sq. 118120128-130138147165
LQWHUQDWLRQDOH YRLUDXVVL ULVTXHGHFU«GLWb288294411 178179207208214260
$LGH&RPPXQDXW« b50, 86, 326328329330331338
88, 90, 144, 150, 168, 182, 204, «QHUJ«WLTXHb144157224
273, 305, 344, 390, 404 346347354355364367 et
sq.373374379415417

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


426 - ANNEXES

DLGH¢ODGHPDQGHb182 'LPHQVLRQQHPHQWb54, 118, (FODLUDJHb


RSWLPLVDWLRQb130144157 148, 178, 212, 213, 264, 270, 311, «FODLUDJHGRPHVWLTXHb45
359 323, 354 et sq., 369-371, 373, 380, 46485196-99121130134
417 136145158166206218231
Dématérialisation YRLUDXVVL
244246267269274275
1XP«ULTXH'LJLWDO b160, 280, 'LVSRVLWLIVSRUWDEOHVbYRLU
283284301304307320
281, 286, 343, 372, 378, 418 /DPSHV
329330354367415
'«PRJUDSKLHb42, 36, 56, 58, Distribution YRLUDXVVL «FODLUDJHSXEOLFb113137174
66, 84, 123, 148, 216, 260, 367, &RPPHUFLDOLVDWLRQ b58, 61, 65, 209243288308 et sq.
402, 414 78, 79, 83, 90, 114, 118, 119, 125,
(FRV\VWªPH V b
129, 136, 137, 140, 141, 142, 154,
Densité de population YRLU QDWXUHOVb6098381
158, 174, 207, 211, 264, 275, 311,
DXVVL+DELWDW b59, 78, 83, 116, GłDFWHXUVb66 180202 et sq.
275, 338, 340, 344, 350, 356 et
118, 122, 287, 289, 291, 321, 329, 253
sq., 369, 373, 375, 379, 413, 417,
338, 364, 369, 415
418 (GLOHVbYRLU1RWDEOHV
'«SHQVHVb
Dons YRLUDXVVL$LGHV (GXFDWLRQb44, 50, 51, 92, 97,
GłH[SORLWDWLRQbYRLU&R½W
)LQDQFHPHQW)RQGV b175, 176, 100, 113, 144, 145, 188, 195, 208,
GłLQYHVWLVVHPHQWbYRLU&R½W
180, 181, 183, 184, 192, 195, 210, 211, 218, 224, 262, 288, 300, 303,
«QHUJ«WLTXHVGHVP«QDJHVb
212, 287, 289, 321, 373, 405, 408, 306, 325, 365, 370, 390, 405, 414
486198147166168221
409
227242247275286297 (IIHWVSHUYHUVbYRLU,PSDFWV
415 Droit YRLUDXVVL&RQWUDW
(IŦFDFLW««QHUJ«WLTXHb48,
1RUPH5«JOHPHQWDWLRQ b
Desserte YRLUDXVVL7DX[ b23, 50, 53, 86, 92, 121, 130, 157-158,
¢Oł«OHFWULFLW«b113346349
80, 124, 125, 128, 243 162, 166, 169, 193, 194, 230, 235,
389413
277, 395
Dette YRLUDXVVL&DSLWDO b83, «JDOLW«GHVGURLWV YRLUDXVVL
86, 139, 175, 182, 214, 405 ,Q«JDOLW«V b222 Egalité des sexes YRLUDXVVL
)HPPHV*HQUH b50, 51, 222
'«YHORSSHPHQWb 'XU«HGHYLHbYRLU
et sq.
«FRQRPLTXHb417292117 (TXLSHPHQWV
205208218248249288 (OHFWURQLTXHb238, 240, 350,
316346354377397399
414415 E 358, 360, 379

(OXVORFDX[b120, 207, 208, 215,


KXPDLQb44 et sq.113244 Eau YRLUDXVVL3RPSDJH b 226, 230, 306, 369, 375-376, 392,
261372 DFFªV¢OłHDXb5192148195 399, 414
ORFDOb147195196322323 207389419
329345399418 H[KDXUHGHOłHDXb113144207 (PSORLb44, 50, 59, 120, 197,
UXUDOb3671181189321394 224, 230, 240, 324, 367, 376, 397
387402411413418419 (FKHOOHb
FKDQJHPHQWGł«FKHOOHb37 (PSUXQWbYRLU&U«GLW3U¬W
'LDVSRUDb103, 195, 198, 231, 302, 4772146149150152154 (QGHWWHPHQWbYRLU'HWWH
369 172174-176180181189 et sq.
196198211214293297329 ‹QHUJLHVIRVVLOHVb50, 51, 61, 80,
Digitalisation YRLU
345390412 202, 338
DXVVL1XP«ULTXH
'«PDW«ULDOLVDWLRQ b150, 153, «FRQRPLHVGł«FKHOOH YRLU (QHUJLHVUHQRXYHODEOHVbYRLU
278, 287 DXVVL0XWXDOLVDWLRQ b78118 %LRPDVVH(ROLHQ*«RWKHUPLH
163177338398399 +\GUR«OHFWULFLW«6RODLUH

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 427

Engagements Étiage YRLUDXVVL ([WHUQDOLW«VbYRLU,PSDFWV


FRQWUDFWXHOV YRLUDXVVL +\GUR«OHFWULFLW« 68, 74, 236,

F
&RQWUDW b209235292372 370
374
Étude(s)
ŦQDQFLHUVb5253175-176 Fabricants YRLUDXVVL
GłLPSDFWVb177193196223
184194 )RXUQLVVHXUV b65, 146, 166, 169,
408
Enquêtes YRLUDXVVL(WXGHV b SU«DODEOHVb6869170176- 238, 273, 275, 286, 310, 363
178, 196, 221, 227, 325, 346, 365, 177180-181186190-191214 )DFWHXUb
367, 414, 417 345365369373375400 GHFKDUJHb244342378
408417 GHULVTXHb186187218
(QWUHSUHQHXUVb102, 155, 197,
EXUHDX[Gł«WXGHVb169344 KXPDLQb200252 281305
207, 210, 214, 224, 226, 293, 320,
321, 322, 324, 330, 345, 375, 395, (YROXWLRQVWHFKQRORJLTXHVb 332343
399, 411, 413 96, 109, 132, 144, 150, 153 et sq., VRFLR«FRQRPLTXHVHW
168, 169, 170, 198, 200, 252, 260, FXOWXUHOVb189211216219
(QWUHSULVHVORFDOHVb86, 128, 220233304305321345
310, 343, 345, 381, 388
142, 192, 215, 286, 324, 372, 408 354369
([RGHUXUDOb36, 60
(ROLHQb63, 65-66, 68, 74, 92, 101, )DFWXUDWLRQb160, 208, 214, 233,
144, 145, 149, 168, 355, 380 Expérience YRLUDXVVL 235, 245, 249, 251, 360 et sq.,
&DSLWDOLVDWLRQ b 370, 374, 376-378, 401, 405, 417
Equilibre économique YRLU
UHWRXUGłH[S«ULHQFH YRLU
DXVVL9LDELOLW« b124, 138, 180, )HPPHVb51, 148, 221, 222 et
DXVVL&DSLWDOLVDWLRQ b3763
243, 287, 345, 360, 362, 369, 382, sq., 226, 230, 296, 300, 306, 317,
107151174185197201211
401 399, 403
216220223252262303
Équipements YRLUDXVVL 306314316317326327329 Financement(s) YRLUDXVVL
&RPSRVDQW,QIUDVWUXFWXUHV b 332336343350362364 et )RQGV,QYHVWLVVHPHQW
-¢OłDEDQGRQb201240241 sq.391404411 6XEYHQWLRQ b
304317326 H[S«ULPHQWDWLRQ YRLUDXVVL SDUWLFLSDWLIFURZGIXQGLQJb
EDLVVHGHVFR½WVbYRLU 7HVWV b2686 et sq.128144 176196
&RPSRVDQWV et sq.322326329331372 SULY«Vb71139169248261
G«IDLOODQFHWHFKQLTXHb54 383413 345408
151182189232264274355 SXEOLFVb7178183184208
Exploitation YRLUDXVVL
363 343344410
&RPS«WHQFH&RQWUDW&R½W
GXU«HGHYLHb96102147150 ŦQDQFHPHQWVLQWHUQDWLRQDX[
)RUPDWLRQ5HVSRQVDELOLW« b
166171 185187237-238240 YRLUDXVVL&RRS«UDWLRQ b69
H[SORLWDQWb136139147148
264270273-276310311338 93172 et sq.388
159160170179180209
356371374380 LQVWUXPHQWVŦQDQFLHUVb47
210212214236237239
ŦDELOLW«b144145149151159 88139168175180184190
240241242247248249
187238239281282309 191194278405408
293343344361372 et sq.
374380 PRQWDJHŦQDQFLHUb180184
395413
(TXLW«b109, 110, 121, 174, 242, U«VXOWDWGłH[SORLWDWLRQb242 206226405406 et sq.
244, 251, 291, 292, 346-347, 389, 400417 SDUWHQDLUHVŦQDQFLHUV
395, 400, 404, 419 VXLYLFRQWU¶OHGłH[SORLWDWLRQ YRLUDXVVL%DQTXH)RQGV
YRLUDXVVL0DLQWHQDQFH ,QYHVWLVVHXUV b206212230
(WDWbYRLU3RXYRLUVSXEOLFV 286374395
3LORWDJH
SHUVRQQHOGłH[SORLWDWLRQb VROXWLRQVPL[WHVEOHQGHG
YRLU&RPS«WHQFH&R½W ŦQDQFHb180405

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


428 - ANNEXES

G
Fiscalité +\GUR«OHFWULFLW«b58, 63, 68 et
LPS¶W YRLUDXVVL7D[HV b173 sq., 75, 92, 119, 126, 130, 144, 146,
188395 *DUDQWLHVb65, 86, 137, 139, 182, 149, 151, 184, 232, 236, 237, 272,
UHVVRXUFHVŦVFDOHVb36153 192, 212, 213, 270, 276, 284, 310, 309, 334, 336, 340, 343, 355, 381
172298402 372

I
V\VWªPHŦVFDOb122208 ? 210
248388404410 *D]b58, 64, 67, 119
¢HIIHWGHVHUUHb4660157
)RQFLHUb230, 233, 346, 373 Impacts GHOł«OHFWULŦFDWLRQ b
193241355
50, 51, 94, 180, 192, 193, 194, 207,
Fonds YRLUDXVVL ELRJD]b66155272336
208, 218, 221, 223, 227, 228, 243,
)LQDQFHPHQW,QYHVWLVVHPHQW Générateur YRLUDXVVL 260, 376, 400, 413
6XEYHQWLRQ 6RODLUH b102, 119, 144, 145, 148,
GHFRPSHQVDWLRQb395 ,PSOLFDWLRQb
149, 150, 155, 163, 210, 264 et sq.,
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHb91 GHVDFWHXUVORFDX[ YRLU
286, 287, 307, 308, 309, 318, 224,
140208209 DXVVL$SSURSULDWLRQ
350, 352, 354
GłLPSDFWLPSDFW 5HVSRQVDELOLW« b72146148
LQYHVWPHQW YRLUDXVVL Génie civil YRLUDXVVL 174204207208226300
,QYHVWLVVHXUV b88177193 7UDYDX[ b68, 69, 86, 87, 210, 305343325365375 et sq.
197287411 212, 123, 232, 350, 365 377413418
GłLQYHVWLVVHPHQWb17588 GHVDFWHXUVSULY«Vb150248
Genre (voir aussi Egalité,
SULY«VbYRLU)LQDQFHPHQW 250287293388
)HPPHV b222 et sq., 415
SXEOLFVbYRLU)LQDQFHPHQW Inégalités YRLUDXVVL(JDOLW« b
EDLOOHXUVGHIRQGVb717886 *«RWKHUPLHb70, 146
36, 48, 51, 92, 222-224, 260, 346,
8992146151154158172 376
*LVHPHQWb62 et sq., 120, 126,
180189204208215252
129, 150, 218, 235, 334, 350, 354,
338339345365381388 ,QIRUPDWLTXHb160, 274, 301,
370
400406408410 318, 354, 361
*RXYHUQDQFHb28, 72, 80, 128,
Formation YRLUDXVVL Infrastructures (voir aussi
223, 233, 324, 377, 388, 418
3URIHVVLRQQDOLVDWLRQ Equipement, Kiosque,
&RPS«WHQFHV b49, 91, 141, 150, *UDWXLW«b150, 230, 232, 274, Miniréseau, Schéma,
179, 180, 209, 210, 211, 218, 223, 284 6\VWªPH b
234, 273, 289, 290, 304, 329, 390, SXEOLTXHVb 184, 219, 262, 298
Groupe électrogène YRLU
396, 398, 399, 404, 413, 417 et sq., 370, 401
DXVVL+\EULGDWLRQ b67, 100,
DUFKLWHFWXUHWHFKQLTXH YRLU
Fourniture 101, 102, 118, 155, 159, 165, 171, 185,
DXVVL'LPHQVLRQQHPHQW b
IRXUQLVVHXUVGł«TXLSHPHQWVb 210, 211, 218, 318, 324, 325, 335,
165, 356, 371
147206210214215261292 338, 340, 343, 349, 350, 354, 355,
HPSODFHPHQW YRLUDXVVL6LWH
294297363372373374 367, 370, 371
3«ULPªWUH5«VHDX b230, 365
413417
,QJ«QLHULHb
IRXUQLWXUHGHVHUYLFHRXELHQ
«OHFWULTXHVb8689128137 H VRFLDOH YRLUDXVVL$SSURFKH
170209210212213235251 (WXGH)RUPDWLRQ
+DELWDWb103, 116, 122, 207, 291,
278282396404 6HQVLELOLVDWLRQ 174, 176, 197,
328, 340, 364, 369, 415
215, 216, 219, 413
Fracture +\EULGDWLRQb64, 65, 69, 70, WHFKQLTXH YRLUDXVVL
«QHUJ«WLTXHb23640 et sq. 101, 127, 159, 165, 166, 184, 210, 'LPHQVLRQQHPHQW(WXGH
8691108253 217, 267, 317, 325, 333, 335, 336, ,QIUDVWUXFWXUH7UDYDX[ 212,
VRFLDOHb227228230 343, 349, 350, 354-356, 365, 368, 213, 215, 350
370, 380

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 429

L
,QLWLDWLYHORFDOHb90, 134, 399, 0DUFK«VŦQDQFLHUVbYRLU
400 6HFWHXU

Innovation (voir aussi Lampadaires YRLUDXVVL 0LFURFU«GLWbYRLU&U«GLW


(YROXWLRQ b65, 67, 80, 96, 107, (FODLUDJH b98, 103, 166, 194, 0LFURŦQDQFH
137, 145, 152, 155, 160, 168, 180, 262, 308, 310 et sq.
0LFURŦQDQFHb88, 288, 293,
183, 191, 192, 194, 195, 196, 207, Lampe YRLUDXVVL(FODLUDJH b 294, 297, 321, 399, 411
215, 218, 234, 240, 257, 260, 261, 97, 100, 103, 119, 127, 129, 130,
278, 286, 303, 316, 326, 329, 331, 146, 172, 174, 213, 216, 228, 237, 0LQLU«VHDXbYRLUQRWDPPHQW
335, 336, 344, 345, 352, 372, 373, 261, 263, 271, 318, 320, 323 70, 121, 126, 171, 174, 176 et sq.,
404, 413, 419 242 et sq., 350 et sq.
/('/LJKW(PLWWLQJ'LRGH
,QVWDOODWLRQVbYRLU 96-98, 129, 130, 158, 166, 214, Ministères YRLUDXVVL
(TXLSHPHQWV,QIUDVWUXFWXUHV 235, 269, 282, 284, 286, 310, 374, '«FRQFHQWUDWLRQ3RXYRLUV
376, 379 6HUYLFH b124, 181, 209, 300, 303,
,QWHUFRQQH[LRQbYRLU5«VHDX
345, 346, 381
Intérêt général YRLUDXVVL Libéralisation YRLUDXVVL HQFKDUJHGHOł«QHUJLH9091
%LHQ6HUYLFH b181, 183 3ULYDWLVDWLRQ b89, 283 ? 206208210215220292
/RFDOLW«UXUDOHbYRLU GHVŦQDQFHVb182208
,QWHUIDFHb187, 280, 350, 352,
&RPPXQH QLYHDXLQWHUPLQLVW«ULHOb394
357, 358, 359, 360, 362, 378, 381
et sq.
,QWHUPLWWHQFHb64, 74, 75, 164, /RFDWLRQOHDVLQJbYRLU&U«GLW
0L[«QHUJ«WLTXHb48, 126
338 /RJLTXHLQWHUYHQWLRQQLVWHb
YRLU$SSURFKH 0RELOHPRQH\b99, 100, 160,
Investissement(s) YRLUDXVVL
279, 280, 282, 283, 285, 289,
&R½W)LQDQFHPHQW)RQGV b /RJLTXHOLE«UDOHbYRLU 328, 330, 372
FDSDFLW«GłLQYHVWLVVHPHQWb $SSURFKH
80122260 0RGªOH
LQYHVWLVVHXUVb8993169170 «FRQRPLTXHEXVLQHVV
174175177185193196212 M PRGHOb174201 ? 215219239
230242243248260286 274286322323324330
Maintenance YRLUDXVVL
287288322274391395 347349372376380
(TXLSHPHQW([SORLWDWLRQ b
404405408409411413 LQWHUYHQWLRQQLVWHbYRLU
68, 103, 115, 129, 145, 149-151, 170,
RSWLPLVDWLRQb118128163 $SSURFKH
181, 185, 188, 210, 232, 234, 239,
UHWRXUVXULQYHVWLVVHPHQW OLE«UDObYRLU$SSURFKH
240, 242, 270, 273, 284, 287, 292,
YRLUDXVVL5HQWDELOLW« b24 SDUWLFLSDWLIb120187224
294, 295, 300, 310, 321, 338, 343,
170171184247287349400 233375
344, 372, 404, 410, 417
Irrigation YRLUDXVVL 0RQLWRULQJbYRLU3LORWDJH
0D°WULVHb
3RPSDJH b121, 145, 148, 207,
GHOł«QHUJLHbYRLU(IŦFDFLW« 0XWXDOLVDWLRQb
308
«QHUJ«WLTXH GHODSURGXFWLRQbYRLUFH
GHVFRQVRPPDWLRQV YRLU WHUPH
K DXVVL8VDJHUDWLRQQHO b154 GHVPR\HQVHWGHVFR½WVb118
240339344349399412
157221274280282357
Kiosques YRLUHDXVVL 374377
3ODWHIRUPH b228, 263, 314, 316, GłRXYUDJHb72136137150
318 et sq. 151159177180182208209
212213217241249374397
398404408
GłāXYUHb177180209210
212213371

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


430 - ANNEXES

N
Outils 3«ULPªWUHGł«OHFWULŦFDWLRQ
GHSODQLŦFDWLRQbYRLUFH YRLUDXVVL'HVVHUW5«VHDX b
1DQRU«VHDXb262, 314, 327 et WHUPH 68, 118, 18, 138, 178, 206, 220,
sq. ŦQDQFLHUVbYRLU)LQDQFHPHQW 228, 235, 369 et sq., 373, 400

1DWLRQDOLVDWLRQb86, 135, 136, 2XYUDJHVbYRLU,QIUDVWUXFWXUHV 3«ULXUEDLQb46, 76, 78, 83, 97,


137, 347 116, 118, 124, 172, 175, 185, 197, 215,

P
216, 275, 287
1LFNHOP«WDOK\GUXUHbYRLU
%DWWHULHV 3HUWHVWHFKQLTXHVb80, 82, 124,
Paiement 125, 248
Normes YRLUDXVVL'URLW FDSDFLW«¢SD\HUbYRLU
5«JOHPHQWDWLRQ6WDQGDUGV b &DSDFLW« Photovoltaïque / PV YRLU
25, 52, 215, 231, 237, 238, 239, QRQSDLHPHQWb124188231 DXVVL6RODLUH b
245, 275, 363, 396 239251 J«Q«UDWHXUbYRLUFHWHUPH
PRGDOLW«VGHSDLHPHQWb160 PRGXOHVb144147161162
1RWDEOHVb207, 208, 209, 215, 163230238264266269
242361375
228, 235, 323, 369, 374, 375 273274301318327
SU«SDLHPHQWb251278279
Numérique YRLU 280282328335343360 et FKDPSSKRWRYROWD±TXHb159
DXVVL'LJLWDOLVDWLRQ sq.372374378379 163264270
'«PDW«ULDOLVDWLRQ b37, 96, 99, YRORQW«SURSHQVLRQ¢ EDLVVHGHVFR½WVbYRLU
142, 154, 158, 160, 194, 250, 252, SD\HUb131184187188214 &RPSRVDQW
260, 280 et sq., 328, 334, 343, 246364415 3LORWDJHPRQLWRULQJ119, 154,
344, 361, 383, 388, 399 UHFRXYUHPHQWb8083147 159, 160, 165, 217, 320, 328, 343,
160173214242339360-362, 361
378, 389
O 3DQQH V b61, 90, 148, 233, 239, Plan d’affaires / business
247, 326, 374, 381 SODQb72, 168, 169, 175, 185, 186,
Offre(s) YRLUDXVVL
187, 206, 210, 227, 243, 287, 322,
&RPPHUFLDOLVDWLRQ6FK«PDV Partenariats publics-privés 343, 345, 363, 380, 410, 417-418
9HQWH 333 b174, 177, 303, 325, 344,
DLGH¢OłRIIUHb182 376 3ODQLŦFDWLRQb89, 118, 220, 221,
DSSHOGłRIIUHVb206249396 261, 316, 331, 334, 345, 364, 388,
RIIUHGHVHUYLFHb23128198 3D\DV\RXJR 3$<* b150, 395, 397, 399
286289292293294297 160, 166, 172, 174-176, 191, 196,
214, 215? 235, 239, 251, 263n 270, Plateforme énergétique YRLU
311319323343
274, 277, 278 et sq., 292, 318, DXVVL.LRVTXH b224, 262, 316 et
Onduleur YRLUDXVVL 323, 330, 343, 361 sq., 318
6\VWªPH b150, 159, 165, 171, 238,
Péréquation YRLUDXVVL Politique(s)
264, 265, 267, 274, 301, 343, 354,
7DULŦFDWLRQ b128, 243, 245, 249, QDWLRQDOHVGł(5b868990
355, 358, 360, 377
339, 346, 347 258260334345377394
ONG YRLUDXVVL$VVRFLDWLRQ 395396404414
&RRS«UDWLRQ 27, 92, 154, 159, 3HUIRUPDQFH V b YRORQWDULVPHb44488993
195, 197, 206, 207, 208, 261, 303, KDXWHSHUIRUPDQFH 137340346388394396
343, 344, 345, 347, 349, 365, 377, «QHUJ«WLTXHbYRLU(IŦFDFLW«
5«FHSWHXUV 3ROOXWLRQb98, 155, 224, 238,
399, 404, 408, 411, 413
GHVPDW«ULHOVb146163165 240, 241, 277, 335, 376
2S«UDWHXUbYRLU([SORLWDQW 166187238239270273 Pompage YRLUDXVVL(DX
7«O«FRPV 275309371 ,UULJDWLRQ b51, 61, 102, 148, 174,
LQGLFDWHXUVGHSHUIRUPDQFHb 181, 197, 243, 272, 308 et sq.
23(;bYRLU&R½WV
186187204396415

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 431

3RSXODWLRQVORFDOHVbYRLU IDFWHXUVFO«VGHVXFFªVGłXQ 5HFRXYUHPHQWbYRLU3DLHPHQW


6RFL«W« SURMHWb200HWVT317364
5HF\FODJHb98, 166, 167, 241,
HWVT
3RXYRLUVSXEOLFVb89, 138, 139, 277, 376, 381, 383, 413
PRQWHXUVGHSURMHWVb150
154, 204, 243, 248, 261, 294, 344,
174388395411412HWVT 5HGLVWULEXWLRQb242, 243, 245,
346, 388, 418
SURMHWVSLORWHV YRLUDXVVL 377
ORFDX[ YRLUDXVVL$XWRULW«V b
([S«ULPHQWDWLRQ b133145
399HWVT Réfrigération YRLUDXVVL
146190322344
QDWLRQDX[FHQWUDX[b90 $SSDUHLOV5«FHSWHXUV 45, 49,
120235242377394HWVT 3URWHFWLRQbYRLU6\VWªPH 51, 113, 121, 129, 148, 168, 207, 218,
U«JLRQDX[b120122216235 231, 234, 243, 267, 274, 293, 301,
3XLVVDQFHSXEOLTXHbYRLU
307365375390397HWVT 307, 317, 320, 330, 354, 374, 379
3RXYRLUV
413
5«JLRQbYRLU3RXYRLUV$XWRULW«

Q
3U««OHFWULŦFDWLRQb116, 127, 130,
Réglementation YRLUDXVVi
146, 275, 276, 310
Droit, Normes,5«JXODWLRQ b
Prêts YRLUDXVVL)LQDQFHPHQW Qualité 71, 136, 138, 298, 209, 238, 266,
&U«GLW b136, 137, 139, 140, 158, GHVHUYLFHb80112147158 267, 291, 292, 331, 400
180 et sq., 188, 190, 191, 196, 202, 274291374
GHVPDW«ULHOVb201238239 5«JXODWLRQGXVHFWHXUb89,
212, 294, 400, 409, 410, 417
270272273276277282 104, 28, 260, 273, 291, 323, 391,
Privatisation YRLUDXVVL 294356398411 418
/LE«UDOLVDWLRQ b78, 86, 87, 413 FRQWU¶OHGHTXDOLW«b237239 5«JXODWLRQ«OHFWULTXHbYRLU
Production YRLUDXVVL&R½W 275396 6\VWªPH
*«Q«UDWHXU
5HPSODFHPHQWbYRLU
GHIURLGbYRLU5«IULJ«UDWLRQ
PXWXDOLV«Hb316-318322323
R 5HQRXYHOOHPHQW
328340398 Raccordement YRLUDXVVL Renforcement de
FDSDFLW«GHSURGXFWLRQb47 &R½WV b124, 174, 185, 191, 207, capacités YRLUDXVVL
576396124126127233 209, 211, 217, 223, 235, 242, 249- $FFRPSDJQHPHQW b47, 173,
340355358359381 250, 330, 335, 340, 350, 357, 368, 176, 180, 204 ? 209, 229, 374, 375
VRXUFH V GHSURGXFWLRQb58 370, 374-375, 379, 395
Renouvellement des
64130223318327328 ?
Récepteur(s) YRLUDXVVL composants YRLUDXVVL
330331340343374
$SSDUHLOV(FODLUDJH 0DLQWHQDQFH5HF\FODJH 68,
Professionnalisation 5«IULJ«UDWLRQ7«O«YLVLRQ b96, 103, 144, 147, 181, 184, 185, 188,
YRLUDXVVL&RPS«WHQFHV 119, 150, 158, 166, 235, 240, 241, 242, 274 et sq., 292, 300, 309,
)RUPDWLRQ b393, 402, 404 265, 267, 269, 274, 286, 287, 317, 321, 326, 349, 355, 374, 380 et
327, 352, 411 sq., 410, 411, 417
3URJUDPPDWLRQb185, 191, 220,
EDVVHFRQVRPPDWLRQb104
396, 397, 399, 400 Rentabilité YRLUDXVVL
129149154158160166214
,QYHVWLVVHPHQW b37, 86, 93,
Projets YRLUDXVVL5LVTXH 218234-235282287374
102, 174, 177, 184, 185, 187, 189,
)LQDQFHPHQW 376
192, 197, 214, 185, 187, 189, 192,
DSSHOV¢SURMHWVb195206 DXWRULV«Vb235283330376
197, 214, 242, 245, 247, 287, 320,
344345415 XVDJHLQDGDSW«b189234235
345, 346, 349, 370, 371, 376, 395,
DYDQWSURMHW YRLUDXVVL
5«FHSWLRQGHVWUDYDX[b209, 400, 417
(WXGHV b69178180
212-213, 373
EXGJHWb204210217249
GRVVLHUGHSURMHWb414

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


432 - ANNEXES

Réparation YRLUDXVVL W\SRORJLHGHVULVTXHVb 113-114122153172174277


(QWUHWLHQ3DQQH 188-189 329379402419
5HQRXYHOOHPHQW b187, 197, G«FHQWUDOLV«VbYRLU
5XSWXUHVWHFKQRORJLTXHVb
207, 235, 238, 239, 240, 303, 343, '«FHQWUDOLVDWLRQ
YRLU(YROXWLRQV
417 G«FRQFHQWU«VbYRLU
'«FRQFHQWUDWLRQ
S
5«VHDXb
ŦQDQFLHUV YRLUDXVVL
ORFDOb65118128129130132
)LQDQFHPHQW)RQGV
219220228230 6DQW«b44, 49, 50, 51, 61, 97, 98, 6HFWHXU0RELOHPRQH\ b100
QDWLRQDOb70717896102 113, 117, 145, 146, 181,188, 195, 208, 212214215
111112118120121124126 209, 211, 224, 262, 267, 288, 301, PDUFKDQGb114174274278
127128170172235287328 306, 325, 370, 381, 414, 415 292318329372419
338340395
6FK«PDVGł«OHFWULŦFDWLRQb SXEOLF V  YRLUDXVVL
XUEDLQb93122130265287
FROOHFWLYHb120150257262 '«O«JDWLRQ b78125172173
338339340356360376
314HWVT332389397408 174176177215243245244
LQWHUFRQQH[LRQb115134139
LQGLYLGXHOOH YRLUDXVVL 291292298300306325
186191260327328329
6\VWªPHV b89104235257 328329346414
330339
268HWVT DUU¬WGXVHUYLFHb616580
PLQLU«VHDXbYRLUFHWHUPH
9097112115118119160221
WUDF«GXU«VHDXb228230 6HFWHXUb 320338
365415 DVVRFLDWLIbYRLU$VVRFLDWLRQ FRQWLQXLW«b280294320
Responsabilité(s) 21* 322389
GHOł«OHFWULŦFDWLRQb137138 «OHFWULTXHb838689135136 PLVHHQVHUYLFHb65159179
140 139140142142154164182 209217227309346365
GHOłH[SORLWDQWOłRS«UDWHXUb 206208227235245263 368401417
374-375399 289292331 XQLYHUVDOLW«GXVHUYLFHb114
UHVSRQVDELOLVDWLRQ YRLUDXVVL GHOłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW« 120
$SSURSULDWLRQ GHVDFWHXUVb (5'b169198343390404
ŦQDQFLHU YRLUDXVVL%DQTXH 6LWH V b63, 65, 68, 72, 93, 130,
182204231241
)LQDQFHPHQW)RQGV 144, 159, 211, 217, 307, 321, 322,
56(b195
0LFURŦQDQFH b187195293 413
5HYHQXVb 388405409411HWVT Société civile YRLUDXVVL
GHVP«QDJHV YRLUDXVVL LQIRUPHOb172173 $VVRFLDWLRQ&RPPXQDXW«
%XGJHW$FWLYLW«V b444859 PDUFKDQGb118175245395 8VDJHU b159, 174, 195, 197, 219,
839298102116122123
6«FXULW«b239, 247, 250, 276, 321, 345, 346, 347, 365, 369, 375
160171175196197224232
321, 331, 373 et sq., 399, 405, 413
243277340
GHOłH[SORLWDQWb242317323 6HQVLELOLVDWLRQb124, 150, 158, Sociétés nationales
400 179, 180, 206, 208, 210, 216, 218, Gł«OHFWULFLW«b71, 76, 78, 79, 80,
223, 228 et sq., 274, 275, 290, 83, 86, 89, 90, 122, 124, 154, 172,
5«YROXWLRQWHFKQRORJLTXHb
292, 294, 335, 343, 360, 361, 372, 182, 191, 208, 249, 263, 303, 338,
YRLU(YROXWLRQ
373, 376, 377, 396, 398, 404, 411 339, 378, 395
Risque(s)
GHFU«GLWbYRLUFHWHUPH Service(s) YRLUDXVVL$FFªV
DQDO\VHGHULVTXHVb187219 2IIUH6FK«PDV
FRXYHUWXUHGHULVTXHV YRLU DSUªVYHQWH 6$9 b149150
DXVVL$VVXUDQFH*DUDQWLHV b 197214218235237-240274
93158185186189409 275290294
PD°WULVHGHVULVTXHVb376397 HVVHQWLHO V b364450101

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 433

Solaire YRLUDXVVL sq., 184, 190-194, 197, 215, 224, 113, 160, 213, 260, 278, 283, 360,
3KRWRYROWD±TXH b 261, 277, 294, 303, 340, 395, 376, 416
WKHUPRG\QDPLTXHb64144 381, 400, 405, 406, 409, 417
Télévision YRLUDXVVL
145 ¢OłLQYHVWLVVHPHQWb247248
$SSDUHLOV5«FHSWHXUV b101,
DSSOLFDWLRQV 292293323326339349
119, 121, 129, 144, 168, 214, 218,
SURIHVVLRQQHOOHVb144145150 371410
227, 234, 267, 269 ? 274, 283,
V\VWªPHVRODLUHDXWRQRPHb WDULIVVXEYHQWLRQQ«Vb80128
289, 330, 374, 376, 379
98118129146149163261 243339378
262264HWVT356 Tests YRLUDXVVL
Syndicat d’électricité YRLU
V\VWªPHVRODLUHLQGLYLGXHO ([S«ULPHQWDWLRQ b146, 179, 187
DXVVL&RRS«UDWLYH b136 et sq.,
66, b100101 ? 146149160
142 7KHUPLTXHb67, 69, 80, 101, 127,
169175213216228238241
170, 316, 317, 318, 334, 338, 343,
251261263269HWVT325 Système(s)
355, 367
328 GHSURWHFWLRQb163358359
360 7UDQVIHUWb
Solidarité YRLUDXVVL
GHU«JXODWLRQ YRLUDXVVL GHFRPS«WHQFHVbYRLU
&RRS«UDWLRQ3«U«TXDWLRQ b
2QGXOHXU b114119147151 &RPS«WHQFH)RUPDWLRQ
243, 245, 393, 403, 405
164210239264350352 5HQIRUFHPHQW
6ROXWLRQV YRLUDXVVL2IIUH b
380 GHWHFKQRORJLHb47161168
FRQWDLQHULV«HVb166186349
352372373 7UDQVSDUHQFHb183, 247, 395,
LQGLYLGXHOOHVbYRLU6FK«PD
6RODLUH
T 400, 410

7DULŦFDWLRQ YRLUDXVVL&R½W Transport Gł«OHFWULFLW« b78,


6WDQGDUGLVDWLRQb192, 213, 214, 3«U«TXDWLRQ b118, 125, 128, 136, 79, 80, 114, 119, 122, 123, 124, 125,
253, 322, 362, 373, 412 178-180, 184, 185, 205, 227, 233, 140, 141, 158, 338, 340, 350
Standards techniques YRLU 235, 242 et sq., 291, 292, 331, 345, Travaux YRLUDXVVL*«QLH b65,
DXVVL1RUPHV&HUWLŦFDWLRQ b 357, 361, 364, 375, 376 et sq., 69, 71, 179, 196, 209, 212-213, 231,
208, 247, 273, 275, 363 380, 391, 395 232, 250, 365, 373, 375, 376
Start-ups YRLUDXVVL 7DX[b Tutelle YRLUDXVVL0LQLVWªUH
,QQRYDWLRQ3$<* b89, 155, 175, GłDFFªV¢Oł«OHFWULFLW«b5657 3RXYRLUV b204, 208, 209, 212,
176, 177, 198, 260, 286, 320, 330 74114122206 292, 300n, 303
GHFRQQH[LRQb116125
Stockage YRLUDXVVL%DWWHULH b GHGHVVHUWHb124125187
64, 101, 114, 119, 154, 160, 163, 164,
165, 166, 168, 210, 230, 234, 240,
Gł«OHFWULŦFDWLRQb566378 U
85114-116135
241, 264, 265, 267, 270, 301, 308, Usage(s)
309, 310, 320, 328, 334, 336, 350, 7D[HVb173, 188, 208, 210, 323, FROOHFWLIV YRLUDXVVL
368, 383, 413 374, 395 6FK«PD b113144174
GRPHVWLTXHV YRLUDXVVL
Stratégies nationales Télécoms/
6FK«PD 113128172176
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOHbYRLU télécommunications YRLU
208215230243244275
3ROLWLTXHV DXVVL7«O«SKRQLHPRELOH
287, 289, 292, 323, 327, 329,
PRQH\ b
6WUXFWXUHVFRPPXQDXWDLUHVb 330, 379
RS«UDWHXUVb214286330344
YRLU$VVRFLDWLRQ&RPPXQDXW« UDWLRQQHOGHOł«QHUJLH YRLU
U«VHDX[b99145280-283
DXVVL0D°WULVH b157158230
Subventions YRLUDXVVL$LGHV VHFWHXUb272283
231234
'RQV)LQDQFHPHQW b118, 146, Téléphonie mobile YRLUDXVVL SURGXFWLIV YRLUDXVVL
138, 139, 158, 174, 176, 180, 181 et 0RELOHPRQH\8VDJH b96, 99, $FWLYLW«V b5892102128179

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


434 - ANNEXES

195197288316HWVT344
YDOHXUGłXVDJHb206246278
283287
XQLYHUVDOLW«GHVXVDJHVb112
127

Usager
FRPSRUWHPHQWGHVXVDJHUVb
YRLU&RPSRUWHPHQW
DVVRFLDWLRQVFRPLW«V
GłXVDJHUVb72147206-207
229233235317374

V
Vente
GLUHFWHb149174272HWVT
278
SRZHUSXUFKDVHDJUHHPHQW
33$ 78

Viabilité YRLUDXVVL0RGªOH
([SORLWDWLRQ b71, 109, 118, 128,
138, 139, 150, 160, 170, 184, 185,
187, 197, 205, 207, 214, 221, 228,
239, 242, 244, 250, 261, 286

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


ANNEXES - 435

Index des noms propres


A B F
$FFRUGGH3DULVb47, 153 Banque africaine de Facilité de dialogue et de
$GHPHb17, 18, 19, 21, 34, 37, 44, G«YHORSSHPHQW %$' b34, partenariat de l’initiative de
130, 146, 168, 295, 336 190 l’Union Européenne pour
%DQTXHPRQGLDOHb18, 45, 46, Oł(QHUJLH (XHL3GI b46, 88
$)0(b34, 130, 146
53, 54, 56, 57, 59, 70, 78, 80, 83, Food and Agriculture
African Minigrid Developers
85, 87, 89, 103, 114, 125, 128, 130, Organization of the United
$VVRFLDWLRQ $0'$ b169
175, 184, 189, 190, 195, 196, 225, 1DWLRQV )DR b34, 36, 40, 59,
$IULTXHb 246, 248, 270, 277, 289, 364, 378, 68, 117, 205
$
 XVWUDOHb59, 292 406 Fondation Energies Pour Le
&HQWUDOHb63, 336
%«QLQb56, 79, 85, 117, 168, 185, 0RQGHb16, 17, 18, 20, 51, 65, 67,
GHOł(VWb126, 215, 282, 336
194, 238, 297, 325, 408 81, 84, 92, 101, 102, 144, 145, 147,
GHOł2XHVWb63, 69, 83, 85, 99,
%XUNLQD)DVRb48, 77, 85, 95, 148, 150, 163, 164, 165, 166, 171,
198, 269, 275, 282, 290, 292,
168, 176, 194, 208, 225, 240, 275, 177, 178, 180, 182, 188, 190, 212,
297, 323, 334, 350, 372
284, 294, 295, 299, 317 214, 229, 244, 249, 263, 267, 269,
$IULTXH'X6XGb54, 56, 125, 271, 274, 279, 282, 294, 301, 306,
149, 356, 363 307, 318, 327, 340, 341, 342, 348,
Agence française de C 351, 353, 366, 379
G«YHORSSHPHQW $)' b53, 54, &DPERGJHb67 Fonds pour l’Environnement
78, 119, 123, 175, 182, 184, 190, 191, 0RQGLDOb34, 193
&DPHURXQ56, 155, 176, 246,
193, 224, 225, 325, 404, 408
289, 289, 297, 320, 408, 419 Fonds Français pour
Agence internationale de Oł(QYLURQQHPHQW0RQGLDOb34,
&DS9HUWb56, 168
Oł«QHUJLH $,( b18, 45, 52, 54, 193, 194, 195, 240
55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 82, 85, &KLQHb54, 56, 80, 81, 161, 182,
286 )UDQFHb36, 57, 58, 64, 81, 92, 116,
121, 122, 160, 162, 172
132, 134-139, 140, 141, 142, 144, 146,
Agence de développement &OXE(Ub334, 336, 337
147, 149, 161, 163, 183, 192, 198,
GHOł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH 245, 335, 340, 347, 390
$'(5 b34, 72, 211, 346
D
G
Agence sénégalaise
Department for International
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH
'HYHORSPHQW '),' b34, 176,
$6(5 b34, 334 *b46, 151
190
Agence guinéenne *(5(6b92, 314, 322, 323, 324
Gł«OHFWULŦFDWLRQUXUDOH Gesellschaft für
$*(5 b34, 121, 210, 250 E Internationale
Alliance Solaire Internationale (OHFWULFLHQVVDQVIURQWLªUHVb =XVDPPHQDUEHLW *,= b34,
,6$ b34, 47, 313 92, 303, 322, 325 190, 295
$VLHb53, 149, 161, 191, 194, 237, (WDWV8QLVb56, 60, 81, 132, 134, *KDQDb56, 79, 117, 124, 129, 173,
311, 378 140-141, 161, 183, 184, 286, 340 176, 241, 246
(XURSHb59, 60, 68, 80, 84, 108, Global Off-Grid Lighting
142, 161, 162, 238, 250, 286, 356, $VVRFLDWLRQ *2*/$ b34, 216,
419 270

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


436 - ANNEXES

N T
*UHWb72, 92, 322, 350, 377
Groupe d’experts
intergouvernemental sur National Rural Electric 7DQ]DQLHb56, 79, 82, 283
Oł«YROXWLRQGXFOLPDW *,(& b Cooperative Association 7RJRb56, 168, 319
34, 58, 59, 60, 61, 154 15(&$ b35, 141

U
*XLQ«Hb56, 64, 69, 85, 100, 103, 1DWLRQV8QLHVb35, 44, 46, 47,
121, 210, 219, 220, 229, 244, 250, 48, 68, 149, 189, 225, 226, 303,
262, 339, 359, 365, 379 388, 390, 391 United Nations International
1HJDZDWWb157 Children’s Emergency Fund
*X\DQHb159, 217
81,&() b35, 103

I O 8QLRQ(XURS«HQQHb35, 44, 72,


86, 88, 148, 183, 191, 196, 404
Initiative africaine pour Objectifs de développement United States Agency for
les énergies renouvelables GXUDEOH 2'' b35, 48, 50, 189, International Development
$5(, b47 199, 260 86$,' b35, 46, 176, 190
,QLWLDWLYHGHŦQDQFHPHQW Organisation de Coopération

Z
SRXUOł«OHFWULŦFDWLRQ et de Développement
(OHFWUL)L b88 (FRQRPLTXHV 2&'( b35, 82,
153, 173, 182, 183, 204, 398 =D±UHb146

K 2XJDQGDb56, 83, 168

P
.HQ\Db56, 79, 82, 149, 279, 283,
297, 336
3DPLJDb288, 297

L Programme des Nations


unies pour le Développement
/LJKWLQJ$IULFDb46, 48, 130, 318' b35, 44, 190, 204, 205,
275, 291 316, 317, 344, 390
3RZHU$IULFDb46
M
0DGDJDVFDUb56, 65, 68, 72, 79,
101, 102, 111, 155, 164, 168, 211, 222,
R
République Démocratique
229, 232, 236, 263, 269, 276, 305,
'X&RQJR 5'& b167, 408
306, 307, 312, 319, 321, 322, 325,
329, 330, 346, 349, 350, 361, 368, 5ZDQGDb56, 71, 79, 173, 248
369, 371, 378, 408
0DOLb56, 79, 85, 145, 149, 151,
176, 189, 194, 249, 293, 322, 324,
S
6DKHOb145, 146, 148, 149, 266
336, 408
6«Q«JDOb56, 79, 82, 85, 91, 149,
0DURFb130, 133, 143, 147, 149,
176, 189, 194, 207, 208, 224, 225,
390, 394
245, 273, 297, 309, 310, 334, 336,
0DXULWDQLHb56, 168, 233, 322, 394, 399, 408
336, 368
6H\FKHOOHVb56, 83
Sustainable Energy For All
6HDOO b35, 45, 48, 53, 56, 85,
88, 189, 391, 404

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ANNEXES - 437

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ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


448 - NOTES

ELECTRIFIER L’AFRIQUE RURALE UN DÉFI ÉCONOMIQUE, UN IMPÉRATIF HUMAIN


Electrifier l’Afrique rurale
Un défi économique, un impératif humain

Les plus pauvres du monde paient l’électricité la plus chère du monde.

Pourquoi ? Est-ce irréversible ? L’électrification rurale par énergies renou-


velables est riche de cinquante ans d’expériences, notamment menées
en Afrique subsaharienne. Il est aujourd’hui possible et utile d’en tirer des
leçons pour l’avenir, de poser un diagnostic et de formuler des préconisa-
tions d’action pour toutes les parties prenantes.
S’appuyant sur trente ans d’expertise de la Fondation Énergies pour le
Monde, cet ouvrage a été écrit par des praticiens soucieux de la demande
des populations rurales et de la pérennité des projets. Il bénéficie de leur
connaissance du rôle de maître d’ouvrage délégué, orchestrant toute la pa-
lette des acteurs, des usagers aux ministères, en passant par les bailleurs de
fonds, les opérateurs, les fournisseurs de matériel et les autorités locales.
Autant de voix qui témoignent dans l’ouvrage et sont appelées à travailler
davantage à l’unisson pour changer la donne.

Les auteurs :
Yves Maigne
Gérard Madon
Etienne Sauvage
Sarah Vignoles

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