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Ce que ça coûte

Ce que ça rapporte

Référencement: « Titre », prenom Nom, Journal, Date.

Vidéo:
https://www.lemonde.fr/societe/video/2022/03/06/presidentielle-2022-faut-il-legaliser-le-cann
abis-en-france_6116362_3224.html

Article 1: Lien
« CBD : le gouvernement essaye-t-il d’abattre la liberté économique ? », Sébastien Laye,
Capital, 03/01/2022.
Publié le 03/01/2022 à 16h34 & mis à jour le 03/01/2022 à 22h38

Un arrêté publié au Journal officiel le 31 décembre acte l’interdiction de la vente et de la


consommation de fleurs et de feuilles de chanvre en France. Une prise de position qui
s’oppose aux intérêts économiques de notre pays, regrette notre chroniqueur Sébastien
Laye, entrepreneur dans l’immobilier et économiste à l’Institut Thomas More.
Par Sébastien Laye

La liberté économique est au fondement de la croissance : condition sine qua non de l’esprit
entrepreneurial pour Schumpeter, elle est aussi une protection du petit indépendant face aux
Etats et aux grandes corporations. C’est ainsi qu’il faut voir son importance dans la
littérature économique, mais aussi dans la plupart des textes constitutionnels et européens
(la liberté de circulation des marchandises est le pilier du marché unique européen : sans
elle, il n’y a pas d’Europe au sens de l’Acte unique). La France n’a pas toujours été aussi
exigeante que les autres pays européens avec la liberté économique, d’où la constitution
récurrente de situations monopolistiques ou oligopolistiques, mais aussi la rémanence de
destructions de nouvelles industries qui pourraient concurrencer les existantes ou encore
contrecarrer un agenda particulier des gouvernants à l’instant t. L’exemple d’un arrêté passé
le 31 Décembre (!) 2021 par le gouvernement sur l’industrie du chanvre est à cet égard une
parfaite illustration.

Le conflit n’est ici pas nouveau et traîne depuis quelques années ; en effet les pouvoirs
publics ont assisté à la montée en puissance d’une nouvelle industrie du bien-être, celle du
chanvre. Si le cannabis a pu être légalisé dans certains pays et Etats américains, de partout
dans le monde (sans forcément cette légalisation) a émergé une industrie du CBD ou
cannabidiol, la molécule non psychotrope du cannabis. Les vertus thérapeutiques du
cannabis étant connues de longue date, c’est toute une industrie du CBD, autour de produits
relaxants (huiles, baumes, tisanes, fleurs, produits dérivés - type chocolat - parfumés de très
faibles teneurs en CBD) ou de lutte contre les addictions (tabac notamment) principalement,
qui a émergé : plus confidentielle mais plus importante économiquement que l’industrie du
cannabis thérapeutique, cette branche a essaimé aussi en France, avec plusieurs concepts
de boutiques, comme Purple Store, Green House, CBD Shop. Ce marché représente déjà
dur3,6 milliards de dollars annuels aux USA avec une croissance de 21% par an attendue
durant la décennie pour atteindre 34 milliards en 2030 ; si on prend une conception plus
large de l’industrie (avec les sous-traitants), nous en sommes déjà à un marché de 7
milliards annuels aux USA. L’objectif de 30 milliards annuels de ventes pour les seuls USA
en 2030 sera atteint au niveau mondial en 2025. L’Europe devrait à terme représenter un
tiers du marché mondial, les USA 50%.

La légalisation en France de cette molécule issue du cannabis, grâce à l'arrêté européen de


novembre 2020, a lancé un nouveau marché. Il est d’ores et déjà estimé à 300 millions
d’euros et devrait atteindre 1,5 milliard par an bien avant la fin de la décennie, avec au
moins 10.000 personnes employées dans cette industrie. La France a vu l’ouverture de 400
boutiques, et le potentiel est énorme : nous ne sommes que numéro 3 ou 4 en Europe en
termes de consommation, alors qu’au niveau agricole, nous sommes le plus gros producteur
européen de chanvre et le troisième mondial après la Chine et le Canada (qui fournit
l’énorme marché américain). Un hectare de chanvre cultivé génère 2.500 euros de revenus
pour un agriculteur français, soit 8 fois le rendement financier du blé !

Malgré ces chiffres, un arrêté du ministère de la Santé, publié vendredi 31 décembre, tente
de prohiber toute détention et cession brute de la plante contenant du cannabidiol, dont
l’usage est désormais restreint à la “production industrielle d’extraits de chanvre” destinée à
l’alimentation ou aux cosmétiques. Cet arrêté a été notifié par les autorités françaises à la
Commission européenne. Il faisait suite au fameux arrêt de la Cour de justice de l’Union
européenne daté du mois de novembre 2020 qui avait en fait véritablement lancé cette
industrie en France, il y a 14 mois. La justice européenne avait alors rejeté l’interdiction en
France de ce “cannabis light”, aussi appelé “chanvre bien-être” en France, en soulignant
l’innocuité de cette molécule, et qu’elle ne peut donc être considérée comme un stupéfiant ni
un médicament. Sans préjuger ici du débat juridique entre un gouvernement qui veut flatter
un électorat conservateur ou défendre les positions d’acteurs établis sur le marché de la
relaxation, et une Europe qui a exclu le CBD de la liste des stupéfiants ou médicaments, le
dommage fait à l’esprit d’entreprise, à la liberté du consommateur et aux entrepreneurs est
indéniable. Les autorités françaises semblent changer les règles du jeu au gré des élections,
et nul investisseur ne peut parier son argent dans un tel contexte : aujourd’hui le chanvre,
demain le Bitcoin (déjà très menacé en France), l’e-commerce, la parapharmacie, les
protéines sportives, quels secteurs nos politiciens vont-ils tenter de détruire ?

L’année dernière, une mission parlementaire présidée par Robin Reda préconisait
globalement un assouplissement et un encadrement des normes autour de la production et
la commercialisation du chanvre en France puisque la politique ultra-répressive de la France
profite à nos voisins. Le mouvement citoyen Quatre Piliers défend ces jours-ci une pétition
sur le sujet. La CJUE, l’ONU et même la cour de Cassation ne se sont pas opposées à la
commercialisation du CBD, qui n’est ni considéré comme stupéfiant, ni comme dopant. Des
actions en justice sont en cours auprès du Conseil d’Etat notamment, pour faire respecter
les droits des pourvoyeurs d’emplois concernés par ses mesures. Le bras de fer ne fait
probablement que commencer entre les acteurs de l’industrie du chanvre et les défenseurs
de la liberté économique, d’un côté, et les pouvoirs publics de l’autre !
Article 2: Lien
« Légaliser le cannabis pour relancer l’économie ? », La rédaction du journal Confluences,
20/04/2021.
La Rédaction Posté le 20 avril 2021

Légaliser le commerce de marijuana pourrait donner un coup de fouet à la croissance et


renflouer les caisses de l’État. Les français semblent, qui plus est, y être majoritairement
favorables.

Fin mars, le ministre de la santé Olivier Véran annonçait le lancement des premières
expérimentations relatives au cannabis en France. Dans les deux années à venir, 3000
patients seront ainsi suivis pour évaluer « la pertinence et la faisabilité de la mise à
disposition du cannabis à usage médical en France », selon l’Agence nationale de sécurité
du médicament et des produits de santé.

Ce dispositif n’est pas sans contradictions à l’heure où la consommation et la vente de


marijuana demeurent illégales en France. Les entreprises françaises n’ont donc pas été
retenues par l’appel d’offres déterminant les fournisseurs de cannabis thérapeutique de
cette expérimentation ; ce sont des multinationales étrangères qui vont approvisionner les
centres de soins en médicaments à base de cannabis.

LE MARCHÉ FRANÇAIS À CONQUÉRIR


Le développement d’une filière française de marijuana est donc encore ralenti. Et en
attendant, les entreprises françaises accumulent un retard significatif par rapport aux
multinationales étrangères – canadiennes, australiennes ou encore israéliennes – prêtes à
conquérir le marché français dès la légalisation, celle-ci étant a priori inévitable à long terme.

D’après l’Expert Market Research, le cannabis médical pèse environ 13 milliards d’euros
dans l’économie mondiale en 2020. Un chiffre qui devrait augmenter de 23% d’ici 2026….

L’initiative française reste cependant une bonne nouvelle. Elle est le signe que les lignes
commencent sérieusement à bouger. La légalisation à des fins récréatives se heurte elle
encore à de solides résistances chez les élus, mais en 2019, le Conseil d’analyse
économique (CAE), en charge de conseiller le Premier Ministre, relançait les débats en
préconisant clairement une légalisation récréative et encadrée par l’État.

UNE AUBAINE ÉCONOMIQUE


Il faut dire que la vente de cannabis représente une aubaine économique. La France est l’un
de ses plus gros consommateurs en Europe avec ses 17 millions d’expérimentateurs et 5
millions d’usagers. Le marché noir représenterait ainsi pas moins de 810 millions et 1,4
milliard d’euros. Et en 2014, le cercle de réflexion Terra Nova estimait le montant des
recettes fiscales engendrées par une légalisation à 1,3 milliards dans le cadre d’un
monopole public. Dans un cadre concurrentiel, elles pourraient s’élever à 1,7milliard d’euros.

Les sommes, considérables, représentent un vrai gâchis financier si on part du principe que
la consommation de cannabis ne pourra jamais être enrayée, que la vente illégale engorge
les tribunaux et entretient les inégalités. Les condamnations liées au cannabis touchent en
effet davantage les populations pauvres et racisés.

Alors que le gouvernement tente de relancer l’économie dans un contexte de crise sanitaire
et cherche à capter de nouvelles recettes, la prohibition du cannabis semble ainsi
imprudente, d’autant plus que la majorité des français sont en faveur d’une légalisation
totale. Orchestrée au début de l’année par l’Assemblée nationale, une consultation
citoyenne a été engagée à ce sujet et a souligné que près de 80% des interrogés étaient en
faveur d’une dépénalisation récréative.

DES RECETTES FISCALES CONSÉQUENTES


Aujourd’hui, cependant, les pays autorisant la vente de cannabis restent minoritaires.
L’Allemagne, la Turquie, la Grèce, l’Ukraine ou encore l’Argentine autorisent seulement un
usage thérapeutique. L’Uruguay est le premier pays à légaliser la vente et la consommation
récréative d’herbe en 2013. Il est suivi par le Canada en 2018, et par plusieurs États
américains comme le Dakota du Sud, le Colorado, le New Jersey, d’Arizona et, cette année,
l’État de New York.

Spécialiste du commerce du cannabis, Kris Krane soutient dans Forbes que la légalisation
du cannabis sur tout le territoire étasunien serait « la clé de la reprise économique, tout
comme la fin de la prohibition de l’alcool » a aidé son pays « à sortir de la grande dépression
». En plus de faire baisser la criminalité, la violence et les disparités sociales, l’ouverture de
ce nouveau marché génèrerait en effet forcément, soutient-il, une augmentation des recettes
fiscales, de nouvelles opportunités d’investissement et une croissance de l’emploi.

Dans les États ayant autorisé le commerce d’herbe, l’impact économique fut en effet non
négligeable. L’État de Washington a légalisé la marijuana à des fins récréatives en 2012 et a
déclaré 395,5 millions de dollars de recettes en 2019, soit 172 millions de dollars de plus
que les ventes d’alcool. En Californie, l’industrie du cannabis a rapporté un total de 845,3
millions de dollars de recettes fiscales au troisième trimestre 2019.

UN MARCHÉ BALBUTIANT
Les revenus provenant du commerce du cannabis permettent aux États de financer de
nouveaux programmes : infrastructures scolaires, santé, protection de l’environnement….
L’État de Washington a par exemple utilisé ses 314,8 millions d’euros de recettes afin de
fournir une assurance maladie à ses résidents les plus pauvres.

Aujourd’hui, la vielle garde anti-cannabis ne manque pas de souligner le prétendu « échec


de la légalisation » dans les pays concernés. En effet, les recettes fiscales escomptées n’ont
pas parfois pas été à la hauteur des prévisions même si elles demeurent extrêmement
importantes. Une bulle financière s’est par ailleurs formée autour de ce nouveau marché.
Les investisseurs ont eu les yeux plus gros que le ventre en planifiant sur une hausse de la
consommation qui ne s’est pas produite. Le marché est en réalité en phase d’adaptation et
la stagnation de la consommation est plutôt une bonne nouvelle… et un argument de plus
pour la légalisation. Au Canada, le nombre de consommateurs quotidien de cannabis est en
effet à peu près le même, avant et après légalisation (6%).

Article 3: Lien
« Légalisation du cannabis : les 5 chiffres-clés du débat », Hugo BAUDINO, La tribune,
05/10/2016.
Hugo Baudino
05 Oct 2016, 13:29

Légalisation du cannabis : les 5 chiffres-clés du débat

Des recettes fiscales qui explosent, une baisse du coût de la répression, la possibilité de
réguler le marché et éviter que la consommation continue à se généraliser, etc. Sur le
papier, les arguments en faveur d'une légalisation du cannabis ont de quoi faire rêver...
Hugo Baudino

Mixer le modèle de libéralisation des jeux en ligne avec la lutte anti-tabac pour obtenir le
modèle idéal de la légalisation du cannabis en France. Voici en quelques mots la proposition
faite par le think tank Terra Nova dans son étude intitulée "Contrôler le marché légalisé du
cannabis en France - l'exemple fondateur de l'ARJEL" publiée le 4 octobre 2016. L'Arjel
(Autorité de régulation des jeux en ligne) a été créée par la loi du 12 mai 2010 relative à
l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en
ligne.

Terra Nova veut donc s'inspirer de la libéralisation réussie de ce marché, auparavant


l'apanage de la Française des jeux, pour penser un nouveau modèle pour la légalisation du
cannabis en France, qui se baserait sur une autorité de régulation baptisée Arca (Autorité de
régulation du Cannabis en France). Si Terra Nova utilise l'exemple des jeux d'argent en
ligne, c'est en raison des similitudes que présente la pratique avec la consommation du
cannabis, notamment en matière d'accoutumance.

Le think tank avait déjà milité dans le sens d'une légalisation de la consommation et de la
vente de cannabis en 2014, préconisant à l'époque un monopole de l'état sur le marché.
Cette nouvelle étude est l'occasion de se pencher sur les chiffres clés de ce (long) débat sur
la légalisation du cannabis.

1,4 million
C'est le nombre de Français de 11 à 75 ans qui consomment régulièrement (au moins dix
joints par mois) du cannabis, selon les chiffres du Baromètre santé de l'INPES de 2014. Les
consommateurs quotidiens sont eux 700.000 (en hausse de 17% par rapport à 2010), et 4,6
millions de Français ont consommé du cannabis au moins une fois dans l'année en 2014.
Ces chiffres "placent la France en tête des classements européens en matière d'usage de
cannabis" rappelle Terra Nova. La consommation de cannabis grimpe à 54% chez les 18-25
ans et à 59% chez les 26-34 ans !

+100%
Les interpellations pour usage de cannabis en 2010 étaient en légère baisse par rapport à
2009 mais restaient aux alentours des 120.000. Ce chiffre reste quoiqu'il en soit proche du
double du niveau qui était constaté en 2006 (+100%). Terra Nova y voit le signe de
"l'instauration d'une politique de chiffre" qui n'a en rien été efficace pour lutter contre la
croissance du nombre de consommateurs.

17,4%
C'est le taux de concentration en THC (Delta-9-tétrahydrocannabinol) constaté dans les
résines de cannabis saisies en 2013, selon les chiffres de L'institut national de la police
scientifique (INPS). Cet organisme a même détecté un taux de 40% dans une de ses saisies
! La teneur moyenne constatée dans les saisies d'herbe était de 12,6% en 2013. Ces deux
niveaux sont en forte augmentation depuis le début du siècle : le taux moyen en 2000 était
de 6,5% pour la résine et de 4,7% pour l'herbe. Problématique en matière de santé publique,
cette montée du taux de THC serait un argument supplémentaire pour la légalisation selon
Terra Nova, car une production française contrôlée permettrait de limiter le dosage en THC
des différents produits.

70 millions
C'est, en dollars, le montant des recettes fiscales perçues par l'état américain du Colorado
grâce à la vente de cannabis entre le 1er juillet 2014 et le 30 juin 2015, selon le Colorado
Department of Revenue. Cet état, premier à avoir légalisé le cannabis à usage
thérapeutique, a fixé à 30% le montant de la taxe prélevée sur chaque vente réalisée dans
chacun des 350 magasins accrédités. Terra Nova préconise cependant de séparer
administration fiscale et marché du cannabis grâce à son autorité de régulation, afin d'éviter
"une potentielle accoutumance des pouvoirs publics aux rentrées fiscales cannabiques".

81,37%
Le pourcentage prélevé par l'Etat sur chaque paquet de cigarettes vendu. Si ce niveau
paraît élevé, plusieurs pays européens font encore plus fort : les taxes sur les paquets
s'élèvent à 85,01% en Pologne et 85,69% au Royaume-Uni ! Terra Nova met en relation la
hausse des taxes avec la chute des ventes de cigarettes sur les quinze dernières années,
celles-ci flirtant avec les 4.000 tonnes par trimestre en 2015, alors qu'elles dépassaient
régulièrement les 7.000 tonnes par trimestre en début de siècle. Terra Nova relève que
l'OMS "reconnaît que l'un des outils les plus efficaces pour lutter contre la consommation de
tabac est l'augmentation des taxes". Appliquer ce principe au cannabis permettrait donc à
l'Etat de reprendre le contrôle du marché si le besoin s'en faisait ressentir.

Duel : pour ou contre une légalisation du cannabis ?


Publié le 01/09/2021 17:01
https://www.francetvinfo.fr/sante/drogue-addictions/cannabis/video-duel-pour-ou-contre-une-l
egalisation-du-cannabis_4756275.html
Article 4: Lien
« Légaliser le cannabis, c’est risquer une catastrophe sanitaire! », Jean-Pierre PUJOL, Le
Figaro, 10/07/2019.
«Légaliser le cannabis, c’est risquer une catastrophe sanitaire!»
Par Jean-Pierre Pujol
Publié le 10/07/2019 à 18:21, mis à jour le 10/07/2019 à 18:21

La France détient le record de consommation de cannabis parmi les pays européens.


Sébastien SORIANO/Le Figaro
FIGAROVOX/TRIBUNE - Alors que la France est le plus grand pays consommateur de
cannabis de l’Union européenne, le professeur de biochimie Jean-Pierre Pujol pointe du
doigt les dangers que représenterait la légalisation de cette drogue.

Jean-Pierre Pujol est professeur émérite de biochimie à l’université de Caen. Il est membre
du Centre national de Prévention, d’Études et de Recherches sur les Toxicomanies
(CNPERT).l

Nous assistons actuellement à une pression redoublée des partisans de la légalisation du


cannabis qui s’exerce sur tous les médias. Les lobbyistes qui mènent cette campagne à
grande échelle sont d’une part des capitalistes avides d’exploiter le marché très prometteur
du cannabis (la firme Leviathan Cannabis a vu sa côte à la bourse de Toronto augmenter de
13 900 % en un an!), mais aussi quelques députés qui prétendent que la répression n’a pas
donné de résultats dans notre pays et que la légalisation permettrait de mieux contrôler
l’usage de cette drogue. Selon eux, cette démarche permettrait également de démanteler le
trafic maffieux et de fournir des recettes fiscales qui soutiendraient des campagnes de
prévention. S’ajoutent à ces lobbies quelques médecins qui voient en cette drogue des
vertus thérapeutiques qui soulageraient entre autres les patients souffrant de douleurs
chroniques.

La consommation de cannabis conduit souvent vers des drogues plus dures.


Face à cette campagne effrénée, il convient de rappeler ce qu’est le cannabis et quels
ravages il provoque sur la santé de nos concitoyens, tout particulièrement chez les
adolescents. En effet, la France est malheureusement en tête des vingt-huit États
européens pour la consommation de cette drogue (1,6 million de consommateurs). Les
enfants de 12 à 15 ans ayant déjà expérimenté cette drogue sont au nombre de 300 000.
Chez ces jeunes, dont le cerveau est en cours de maturation, le cannabis produit des effets
particulièrement néfastes, souvent irréversibles. De nombreux troubles physiques et
psychiques sont observés, pouvant mener à la schizophrénie. Le mécanisme d’action du
cannabis est bien connu: la substance psychotrope, le tétrahydrocannabinol (THC) est très
soluble dans les lipides et, de ce fait se fixe aux membranes cellulaires. Il franchit aisément
la barrière hémato-encéphalique et s’accumule dans le cerveau. Il y persiste très longtemps:
le THC d’un seul joint demeure plus d’une semaine dans cet organe. Son élimination dans
les urines dure huit semaines. Après plusieurs joints, cela peut durer au moins deux mois.
Au niveau du cerveau, il provoque de nombreux troubles: perturbation de la mémoire,
défocalisation de l’attention, incoordination motrice, désinhinbition conduisant à des prises
de risques, potentialisation des effets ébriants ou hallucinogènes, schizophrénie, anxiété et
dépression. Les enseignants constatent que les élèves ont des difficultés à ordonner leurs
pensées et manquent d’attention pendant les cours. La situation s’est encore aggravée avec
l’augmentation constante de la concentration en THC dans les cannabis vendus
actuellement: il y a cinquante ans, le joint contenait 2 à 3 % de THC alors qu’aujourd’hui le
taux peut atteindre 40 % et devient plus puissant qu’un rail de cocaïne. Un des dangers du
cannabis est que son addiction conduit souvent vers la recherche de drogues plus dures,
comme la cocaïne. On estime que 10 à 20 % des patients passent à une consommation
plus forte et deviennent accros au crack. Le cannabis seul est responsable de 300 morts de
la route et les risques d’accidents mortels sont 14 fois plus élevés lorsque l’alcool est
associé.

Un des arguments des partisans de la légalisation est de prétendre qu’un contrôle pourra
être exercé sur la qualité du cannabis produit légalement, en particulier sa teneur en THC.
Ainsi, le marché noir serait appelé à disparaître, faute d’acheteurs. Autrement dit, cela
mettrait fin au trafic maffieux. Qui peut croire que les trafiquants vont s’avouer vaincus et
vont prendre leur retraite! L’exemple du Colorado démontre le contraire: malgré la
légalisation du cannabis dans cet État, il existe toujours un marché noir et le taux de THC
n’a pas diminué. Mieux encore, les trafiquants achètent le cannabis produit légalement dans
le Colorado et le revendent au prix fort dans les États voisins où il est toujours interdit!

Un autre argument invoqué est l’inefficacité de la répression, telle qu’elle est pratiquée en
France. En vérité, ceci n’est pas fondé. En effet, d’après le rapport de 2017 de
l’Observatoire européen des Drogues et Toxicomanies (OEDT), la loi française semble
répressive mais elle n’est pas réellement appliquée, tant pour l’usage simple que pour le
trafic. De plus, son application a été encore assouplie par la loi Tubiana et ses décrets
d’application. En France, souvent l’aménagement conduit au paiement immédiat d’une
amende et éteint l’action publique. La loi de 1970, déjà pas appliquée pour l’usage simple de
cannabis, est devenue définitivement inopérante par la loi de 2014 et son décret de 2015.

Enfin, certains justifient cette campagne pour la légalisation par la présence de vertus
thérapeutiques chez le cannabis et n’hésitent pas à parler de «médicament». Or, en l’état
actuel, le cannabis ne répond pas à la définition d’un médicament. À ce stade, il convient de
rappeler ce qu’est un médicament et les étapes successives qu’il doit traverser avant d’être
mis sur le marché. D’après le Code de la Santé Publique, il s’agit d’une molécule pure
possédant des propriétés préventives ou curatives à l’égard des maladies humaines et
animales, susceptible de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions organiques. De la
découverte de la molécule à l’autorisation à l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), un
médicament doit franchir avec succès différentes phases, s’étalant sur environ dix ans:
phase de recherche et développement, étude de toxicologie, recherche clinique - cette
dernière comprenant elle-même une phase 1 (étude de la tolérance), une phase 2 (étude de
l’efficacité), une phase 3 (essai comparatif), et une phase 4 (administrative). La mise au
point d’une nouvelle spécialité coûte environ 800 millions d’euros. Enfin, pour que le
médicament obtienne l’AMM, il doit présenter un bon rapport bénéfices/risques.

Aucun individu responsable ne devrait utiliser l’argument du médicament pour justifier la


légalisation du cannabis.
Environ 75 types de cannabinoïdes ont été identifiés dans la plante, parmi lesquels le THC
(Térahydrocannabinol) et le CBD (Cannabidiol) sont les plus documentés. À ce jour, aucun
de ces composés d’origine végétale n’a fait l’objet d’un protocole d’étude en vue d’une AMM
et donc aucun ne peut être qualifié de médicament. Néanmoins, se basant sur les effets
biologiques évidents du THC, certains prétendent utiliser la plante cannabis elle-même. Or,
la composition en THC et autres composés est extrêmement variable suivant le plant. Cette
variabilité s’oppose à la conception que l’on a d’un médicament, qui doit être une substance
pure, agissant à des doses déterminées. De plus, jusqu’à présent, étant donné l’insolubilité
du THC, traiter des patients en leur faisant fumer soit la plante elle-même, soit sa résine,
reste une méthode peu contrôlable, tant le passage des principes à l’organisme est
aléatoire. Enfin, le THC étant essentiellement soluble dans les lipides, sa rémanence et son
élimination sont des paramètres difficiles à appréhender: encore une difficulté qui s’oppose à
la notion de médicament.

Sauver nos enfants du cannabis

Comme on le voit, seule une substance issue du cannabis et ayant obtenu une AMM
pourrait être qualifiée de «médicament», comme ce fut le cas pour bon nombre de
molécules d’origine végétale présentes aujourd’hui dans notre pharmacopée. Ceci n’exclut
pas que les recherches puissent se poursuivre pour mieux connaître les mécanismes
d’action du cannabis. Pour autant, nul individu responsable ne devrait en conscience utiliser
l’argument du «médicament» pour justifier sa légalisation.

Légaliser le cannabis serait synonyme de catastrophe sanitaire.


Il nous faut sauver nos enfants du cannabis avant qu’il ne soit trop tard. Pour cela il faut que
les pouvoirs publics prennent conscience qu’il est indispensable d’appliquer réellement notre
arsenal répressif, mais également de mettre en place un plan de prévention destiné à
informer nos jeunes élèves, dès l’école primaire, sur les dangers de cette drogue.
Inspirons-nous de la Suède, dont la politique affichée en matière de toxicomanie a porté ses
fruits. Depuis 1968, le gouvernement suédois a organisé une campagne antidrogue massive
dans les écoles et les médias, de sorte qu’une génération a déjà grandi parmi les messages
fondés sur la théorie de la drogue d’introduction. La création d’un poste de coordonnateur
national antidrogue a permis de coopérer avec les autorités, les conseils municipaux, les
conseils de comté, les ONG, etc… et d’influer sur l’opinion publique. La plupart des
municipalités ont nommé une personne chargée d’organiser la prévention, auprès des
écoliers et des parents. Les programmes commencent dès l’école élémentaire et figurent à
tous les niveaux scolaires. Cette politique a l’appui de tous les partis politiques et de 95 %
des citoyens (on croit rêver, quand on pense à l’attitude de certains de nos politiciens).
Certes cette politique coûte entre 0.2 et 0.4 % du PIB suédois alors que la France n’y
consacre que 0.1 % de son PIB.

En conclusion, l’expérience vécue par les pays ou les états américains qui ont légalisé le
cannabis doit nous inciter à refuser cette éventualité dans notre pays. La logique financière
et économique ne doit plus primer sur la santé de notre société. Introduire la légalisation du
cannabis serait synonyme d’une catastrophe sanitaire dont nos pouvoirs publics porteraient
une lourde responsabilité devant l’histoire et nos générations futures.

Article 5: Lien
«Cannabis : pourquoi la légalisation n'est pas la solution », Alexandre DEVECCHIO, Le
Figaro, 30/07/2014.
Cannabis : pourquoi la légalisation n'est pas la solution
Par Alexandre Devecchio
Publié le 30/07/2014 à 11:59, mis à jour le 14/08/2014 à 17:10

Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a déclaré qu'il était «favorable au plus large
débat» sur le cannabis en France. Une erreur, selon Serge Lebigot, pour qui une légalisation
serait irresponsable et dangereuse.

Serge Lebigot est le président de l'association Parents contre la drogue. Il a notamment écrit
Cannabis: Ce que les parents doivent savoir, et Le Dossier noir du cannabis.

Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve s'est déclaré favorable à un large débat sur le
cannabis, tandis que le grand quotidien américain New-York Times a plaidé dans un édito le
30 juillet pour la légalisation du cannabis, comparant son interdiction à la Prohibition.
L'argument invoqué par le journal est que le cannabis serait moins dangereux pour la santé
que l'alcool. Est-ce vrai?

Serge LEBIGOT: Le cannabis et l'alcool ne fonctionnent pas de la même façon.

Le cannabis fumé envahit les poumons, puis passe très rapidement du sang aux graisses du
cerveau où il se fixe durablement. Aucune barrière ne l'arrête.

L'alcool est ingéré. Dans le système digestif il existe un filtre, le foie, barrière qui n'existe pas
dans le système respiratoire.

Pour le NIDA (National Institute on Drug Abuse), organe gouvernemental américain,


l'utilisation du cannabis chez les adolescents fait quelque chose que l'alcool ne fait pas. Il
cause des dommages permanents au cerveau, notamment l'abaissement du QI.

Le haut responsable de l'Official National Drug Control Strategy R. Gil Kerlikowske répertorie
le cannabis comme l'une des quatre principales drogues (cocaïne, héroïne, cannabis et
méthamphétamine).

L'utilisation du cannabis chez les adolescents fait quelque chose que l'alcool ne fait pas. Il
cause des dommages permanents au cerveau, notamment l'abaissement du QI.
Pourquoi ne pourrait-on pas envisager un usage réglementé du cannabis, comme c'est le
cas pour l'alcool et le tabac? Y-a-t-il une différence de nature ou de degré entre le cannabis
et l'alcool et le tabac qui peuvent aussi être considérées comme des substances addictives?

Le tabac, bien qu'il cause une dépendance, n'entrave pas les fonctions cérébrales. On peut
en dire autant de l'alcool s'il est consommé avec modération. Il n'existe pas de
consommation sans risques des drogues illicites, pas même du cannabis. Celui-ci perturbe
les fonctions cérébrales, réduit le jugement, la concentration et la mémoire à court terme
ainsi que la capacité d'accomplir des tâches routinières. De plus, la fumée du cannabis
attaque les poumons, plus que celle du tabac.

De plus, pensez-vous que l'alcool soit le modèle que nous devrions utiliser pour le
cannabis? Environ 45 000 personnes meurent chaque année des conséquences de l'alcool
en France. Quant au tabac, est-ce que sa vente libre le rend moins dangereux pour les
fumeurs? Le tabac tue environ 60 000 personnes par an en France.

Voulons-nous vraiment faire les mêmes erreurs avec le cannabis que celles que nous avons
faites avec l'alcool et le tabac?

Notre but ne doit-il pas être de réduire l'usage et les dommages conséquents associés à
toutes les drogues.

Un des arguments invoqué par le NYT est le coût «immense» pour la société de l'interdiction
du cannabis. Est-ce une réalité? L'Etat ne pourrait-il pas au contraire remplir ses caisses en
taxant la consommation de cannabis légale comme il le fait pour l'alcool et le tabac?

Le NYT pense t-il que l'état collectera suffisamment de taxes pour compenser les coûts
sociaux et économiques (santé, traitement, prévention, application de nouvelles lois,
l'administration, etc) qu'entraîneront la hausse marquée de l'usage et de l'abus du cannabis?

Comment fera t-il pour que cela soit différent de ce qui se passe maintenant avec l'alcool et
le tabac. Les taxes générées par l'alcool et le tabac sont loin de couvrir les dépenses de
santé et moins encore le coût humain.

L'interdiction du cannabis crée toute une économie parallèle et soumet des quartiers entiers,
notamment en France, à l'empire des dealers et de leur violence. Légaliser le cannabis ne
permettrait-il pas de lutter efficacement contre cette délinquance?

Il faut vraiment être naïf pour croire que les groupes criminels vont se laisser si facilement
enlever les gains immenses du trafic de cannabis.
Pensez-vous qu'en légalisant on empêchera les dealers de vendre du cannabis?

Cette affirmation ne tient pas compte de la souplesse dont peut faire preuve le crime
organisé dans le choix de ses modes de production afin de générer une nouvelle demande
et de nouvelles sources de revenu.

Il faut vraiment être naïf pour croire que les groupes criminels vont se laisser si facilement
enlever les gains immenses du trafic de cannabis. L'exemple de la prohibition de l'alcool aux
Etats-Unis le démontre parfaitement. Est-ce que le crime organisé est parti lorsque l'alcool a
été légalisé? Non seulement la mafia ne s'est pas écroulée, après la levée de l'interdiction
en 1933, mais au contraire, elle a agrandi ses réseaux. De plus la consommation d'alcool,
qui avait fortement baissé pendant la prohibition, a repris considérablement, ce qui a
provoqué une augmentation des problèmes de santé.

Dans le monde entier, le commerce de la drogue se trouve entre les mains du crime
organisé. Il fait de gros bénéfices lorsqu'il écoule beaucoup de marchandises. A chaque
levée de prohibition des stupéfiants, il y a davantage de personnes qui prennent de la
drogue et ceux qui sont déjà toxicomanes en consomment de plus grandes quantités. Cela a
été le cas avec l'opium en Chine, au XIXème siècle. Une légalisation accroît donc de façon
vertigineuse les profits du crime organisé. En légalisant le cannabis, l'Etat deviendra le
partenaire commercial des groupes criminels. Ainsi, le commerce du cannabis et le
blanchiment de l'argent ne pourront plus être combattus efficacement. Ce sont les réseaux
criminels organisés au niveau international qui en seront les grands profiteurs, les
consommateurs et leur famille devront en supporter les conséquences.

Même si, en cas de légalisation, les prix de vente seraient maintenus très bas, le crime
organisé gagnera donc toujours des sommes colossales. De plus, il le fera en toute légalité.

Et après que faudra-t-il faire pour les autres drogues que le crime organisé vend (héroïne,
cocaïne, ecstasy, etc.). Faudra-t-il les légaliser également?

Comme vous pouvez le constater, non seulement on ne se débarrassera pas du crime


organisé, mais au contraire, c'est légalement que les trafiquants de drogue continueront leur
commerce, au moins aussi bien, sans être dérangés. Et les problèmes resterons les mêmes
que maintenant.

Que faudra-t-il faire pour les autres drogues que le crime organisé vend (héroïne, cocaïne,
ecstasy). Faudra-t-il les légaliser également ?
Prenons l'exemple de la Suède qui avait précédemment une politique de drogue libérale.
Maintenant, elle a le niveau le plus bas d'utilisation de drogue parmi les pays de l'OCDE. La
Suède a fortement réussi sa politique restrictive de la drogue. À la différence d'une approche
de tolérance zéro qui pousse juste les gens dans les prisons, elle a tout axé sur la
prévention de l'utilisation de drogue. Cette politique a l'appui de 95 % de ses citoyens.

L'une des clés du succès du modèle suédois est la réadaptation obligatoire pour ceux
accros aux drogues. L'éducation scolaire suédoise ne suppose pas, comme le font trop
souvent un certain nombre d'associations en France, que l'utilisation de drogues illicites est
normale ou devrait être socialement acceptée.

Article 6: Lien
« La légalisation du cannabis serait un contresens historique », François-Xavier BELLAMY
et Othman NASROU, Marianne, 21/05/2021.
"La légalisation du cannabis serait un contresens historique"
Ils ne pensent pas (forcément) comme nous
Par François-Xavier Bellamy et Othman Nasrou
Publié le 21/05/2021 à 15:45

Othman Nasrou, premier vice-président du Conseil régional d'Île-de-France et élu


d'opposition à Trappes, ainsi que François-Xavier Bellamy, député au Parlement européen
et président de la délégation française du groupe PPE (Parti populaire européen),
s'opposent tous les deux à la légalisation du cannabis, produit qu'ils jugent dangereux.
Pendant que des milliers de policiers et gendarmes tentent de faire respecter la loi contre la
puissance mortifère des trafics – le brigadier Eric Masson l’a payé de sa vie le 5 mai face
aux dealers à Avignon - des élus irresponsables jouent la transgression adolescente jusque
dans l’hémicycle. Il y a quelques jours, un député a sorti un joint en séance à l’Assemblée
nationale.

Cette provocation médiocre a de quoi désespérer tous ceux qui, professeurs, éducateurs,
médecins et personnels de médecine scolaire, agents des forces de l’ordre et de la justice,
font des efforts immenses pour dissuader les jeunes de laisser partir leur avenir en fumée.
L’apologie du shit revendiquée par un élu, voilà qui éclaire l’irresponsabilité de certains
arguments évoqués parfois en faveur de la légalisation du cannabis. Et la première de ces
thèses, entendue mille fois : puisque l’interdiction n’a jamais mis fin à l’usage, autant y
renoncer pour pouvoir mieux encadrer les filières d’approvisionnement et les modes de
consommation.

RISQUES SANITAIRES
Cette analyse est absurde, à plusieurs titres. D’abord parce qu’elle fait l’impasse sur la
nocivité intrinsèque du cannabis. Il ne suffira pas de légaliser une substance dangereuse
pour qu’elle devienne sûre. Qui pense que mettre un poison en vente libre diminue sa
létalité ? En l’occurrence, le cannabis est un poison, en particulier pour les jeunes. Nos
expériences d’élu et d’enseignant confirment malheureusement ce que montrent les études
médicales : le cannabis a des effets toxiques immédiats sur le cerveau, en particulier dans la
phase de son développement. Il provoque des troubles de l’attention et de la mémoire, des
phases d’anxiété, une fatigue chronique – il figure d’ailleurs parmi les premières causes
d’échec scolaire.

« La consommation de cannabis ne peut qu’être nocive, comme toute consommation de


drogue »
Malgré son image festive et sociale, l’addiction qu’il suscite conduit souvent ses victimes à
s’isoler, à se refermer sur elles-mêmes, à développer des symptômes dépressifs. Le lien est
désormais établi par de nombreuses études entre la consommation de cannabis et des
troubles psychotiques, le développement de schizophrénies ou de délires paranoïaques. On
accordera que ces conséquences sont d’une particulière gravité – et il y a quelque chose
d’étonnant à voir, dans cette période où nous aurons tant sacrifié au risque zéro sanitaire,
que certains sont prêts à nier l’évidence du problème majeur de santé publique que
représente le cannabis.
RIEN À VOIR AVEC L'ALCOOL ET LE TABAC
Certains répondront que l’alcool et le tabac posent aussi des problèmes de santé, sans être
pourtant interdits. Mais la comparaison est absurde : ces produits ne s’accompagnent pas
des mêmes pratiques, et n’engendrent pas les mêmes conséquences. L’alcoolisme est un
drame absolu. Mais on peut boire de l’alcool sans être du tout alcoolique. En France tout
particulièrement, le vin est un élément de la gastronomie. Il se goûte et on le savoure pour
lui-même, non pas essentiellement pour ses effets secondaires, que seul un usage excessif
peut réellement entraîner.

On ne fume un joint en revanche que pour ses effets psychotropes – rien à voir, là aussi,
avec le tabac : le cannabis est bien une drogue. À l’évidence, beaucoup d’autres choses que
des drogues peuvent être mauvaises pour la santé, parmi lesquelles bien des aliments
ordinaires ou des pratiques sportives en elles-mêmes parfaitement saines. Mais il faudrait
beaucoup de mauvaise foi pour tout confondre dans un relativisme abscons. La
consommation de cannabis ne peut qu’être nocive, comme toute consommation de drogue –
et il n’est pas étonnant que les études épidémiologiques démontrent ce lien. Pour les
consommateurs d’héroïne ou de cocaïne, le cannabis a souvent été un premier pas.

ASSÉCHER LES TRAFICS ?


Quel bénéfice pourrait-on dès lors espérer de sa légalisation ? Renoncer à l’interdire
permettrait de mener des campagnes de prévention, nous dit-on. Mais rien n’interdit de le
faire aujourd’hui, et il est temps en effet d’investir massivement dans la pédagogie
indispensable pour susciter une prise de conscience. À l’inverse, il serait parfaitement
incohérent de prétendre qu’on dissuadera mieux en autorisant. Les expériences connues
sont éloquentes sur ce point. L’État du Colorado, après avoir légalisé le cannabis en 2012, a
connu une augmentation de 45 % de la consommation chez les adultes de plus de 25 ans,
un record parmi les États américains. Alors que l’usage du cannabis a tendance à décroître
depuis quelques années chez les jeunes Français – contrairement à ce que certains de
leurs aînés rêveraient de nous faire croire, la légalisation serait un contresens historique.

Ceux qui la revendiquent affirment également que cela permettrait d’assécher les trafics.
Mais qui peut croire cette fable ? On ne devient pas dealer par passion pour le cannabis –
ceux qui le vendent sont souvent les premiers à en connaître assez les méfaits pour ne pas
y toucher eux-mêmes. S’ils ont choisi cette activité, c’est parce qu’un business illicite est
plus lucratif, et leur permet de financer bien des activités parallèles, qui peuvent aller parfois
jusqu’au financement de filières terroristes.

DÉMISSION POLITIQUE
Qui peut sérieusement croire que ces réseaux criminels déclareront leurs revenus et
paieront la TVA dès que le cannabis sera légal ? Ils se reconvertiront bien sûr dans d’autres
trafics illicites. Les exemples de l’Uruguay ou du Canada ont montré que les marchés noirs
peuvent même augmenter après la légalisation du cannabis. Ceux qui militent pour cela
nous demanderont-ils demain de légaliser l’héroïne, au motif que de toute façon la
répression ne marche pas ?

« On n’encadre pas l’injustice, on la combat »


En réalité, derrière cette logique, il y a une démission politique absolue. Le législateur doit-il
renoncer à interdire quoi que ce soit, au motif que toute interdiction sera un jour violée ? Il y
a des milliers d’excès de vitesse chaque jour : on n’abolit pas pour autant le code de la
route. Parce qu’il protège nos déplacements, l’État se donne les moyens de le faire
respecter. Baisser les bras devant une industrie illégale qui détruit des vies, ce serait
renoncer à la responsabilité politique.

Personne ne songe à légaliser l’activité des cambrioleurs au motif que, puisque la propriété
privée n’est pas toujours respectée, il vaut mieux que leur activité soit encadrée dans de
bonnes conditions. On n’encadre pas l’injustice, on la combat. On ne légalise pas un poison,
on combat ceux qui empoisonnent. Légaliser le cannabis serait pour le législateur une
abdication démagogique de sa responsabilité première. Et cela n’a rien de théorique : quand
des milliers de vies sont en jeu, il ne faut jamais renoncer – quoiqu’il en coûte.

Article 7: Lien
« La légalisation du cannabis est une chimère mortifère », François JOLIVET, Le Figaro,
04/06/2021.

«La légalisation du cannabis est une chimère mortifère»


Par François Jolivet
Publié le 04/06/2021 à 13:10
Une quarantaine de personnes ont manifesté samedi 29 mai à Paris pour réclamer la
légalisation du cannabis. Des manifestants se sont rassemblés le 29 mai à Paris pour
réclamer une légalisation du cannabis, mesure préconisée par un rapport parlementaire
récent. Pour le député François Jolivet, une telle disposition nuirait à l'ordre républicain et à
la santé des Français.

François Jolivet est député LREM de l'Indre.

Légaliser ou non le cannabis, le débat mérite d'être ouvert. Il est d'ailleurs un vieux serpent
de mer et s'invite régulièrement en période électorale. Certains parlent plutôt de
«dépénaliser» la consommation, mais il convient de reconnaître objectivement qu'il ne s'agit
que d'un pur débat sémantique.

La vente de cannabis alimente le chiffre d'affaires des réseaux de criminalité organisée, où


se mélangent trafic humain et terrorisme. Les sommes financières en jeu sont faramineuses.
Ces trafics verrouillent certains territoires, pourrissent la vie des habitants et gangrènent une
partie de la jeunesse. L'autorité de l'État est défiée au quotidien par les dealers qui utilisent
désormais tous les moyens pour protéger leur business. Armés, ils se livrent à une guerre
des cartels pour garder ou conquérir leur marché.

Face au constat de la violence liée à ce trafic, certains voient la légalisation du cannabis


comme le remède à tous les maux. Les trafics disparaîtraient, la violence aussi, et la France
se porterait mieux. Si seulement c'était vrai…

Cet objectif pavé de bonnes intentions est une erreur d'appréciation. Outre que cela acterait
l'aveu d'impuissance de l'État, le signal serait effroyable. Finalement, il n'y aurait qu'à
légaliser tout ce qui est interdit pour obtenir la paix.
Les enjeux financiers sont tellement importants que ceux qui en profitent actuellement
n'accepteront jamais de tout perdre. Les trafiquants reviendront et, comme leurs produits, ils
seront plus forts.

François Jolivet
Et finalement, aurions-nous la paix ? L'exemple des Pays-Bas est équivoque. Le «service
public du cannabis» s'est imposé au bout de deux années et les consommateurs se sont
tournés vers lui. La légalisation du cannabis a déstructuré le marché et les trafiquants y ont
perdu des parts importantes. Au bout de la troisième année, ces mêmes trafiquants se sont
lancés dans une stratégie de reconquête en vendant du cannabis à un prix inférieur. Ces
criminels, pour asseoir leur positionnement, ont également augmenté le taux de THC
(cannabinoïde agissant sur le psychisme en modifiant le rythme cérébral) des produits qu'ils
vendent. Si bien que leurs clients sont devenus accros. Les produits du «service public du
cannabis» ne se vendent plus, simplement parce qu'ils ne plaisent plus. L'État est en
concurrence.

L'exemple du Canada est également révélateur. Alors que le marché du cannabis a été
légalisé en 2018, 42 % des Canadiens continuent à acheter illégalement du cannabis selon
une étude du gouvernement. Depuis cette légalisation, et les nouvelles sanctions pénales
prévues contre le marché noir, les trafiquants se diversifient pour inonder les rues d'autres
drogues. C'est également le cas en Espagne, où la consommation de cocaïne et d'héroïne a
progressé chez les moins de 15 ans. Faudra-t-il également légaliser ces substances ? La
boîte de pandore est ouverte.

Est-il besoin de rappeler les effets délétères du cannabis sur la santé? L'Institut national de
prévention et d'éducation à la santé liste les conséquences de ses principes actifs sur les
consommateurs: altération de la perception, de l'attention et de la mémoire immédiate,
troubles relationnels, risques de dépendance, de révélation ou d'aggravation de troubles
mentaux, dégâts pulmonaires… Le cannabis détruit la santé, handicape et tue.

Ne reculons plus d'un millimètre sur l'ordre républicain, et sur la santé des Français. Chaque
renoncement est tout autant un droit au désordre et préserve à terme les acteurs de la
criminalité organisée.

François Jolivet
Qui souhaite sincèrement appliquer ce modèle en France? La légalisation du cannabis ne
court-circuiterait qu'en partie les réseaux des trafiquants. Pire, elle créerait des réseaux
encore plus puissants, et donc plus violents.

Notre Pays ne doit pas devenir un narco-État.

L'année 2020 a été marquée par d'importantes saisies: 96 tonnes de cannabis, 13 tonnes de
cocaïne, 1 tonne d'héroïne et 1,2 million de comprimés d'ecstasy. 450 points de deal ont été
démantelés. Ces chiffres démontrent la réussite de l'intensification de la pression sur les
filières. Poursuivons dans cette voie. Ne reculons plus d'un millimètre sur l'ordre républicain,
et sur la santé des Français. Chaque renoncement est tout autant un droit au désordre et
préserve à terme les acteurs de la criminalité organisée.
Pour mener la lutte, il faut continuer à doter les policiers et les gendarmes d'effectifs et
d'équipements à la hauteur de cette ambition. Il faut une Justice suffisamment efficace et
dissuasive, animée par la volonté de participer à la sécurité de tous. Mais derrière, il faut
aussi du courage politique. Les forces de l'ordre, en première ligne, doivent pouvoir travailler
sur des bases solides et compter sur un pouvoir qui ne se soumet pas.

La légalisation du cannabis est une chimère mortifère.

Article 8: Lien
«Le labo de la présidentielle» : pourrait-on vraiment légaliser le cannabis ? », Lucile
DESCAMPS, Le Parisien, 08/03/2022.
«Le labo de la présidentielle» : pourrait-on vraiment légaliser le cannabis ?
Par Lucile Descamps
Le 8 mars 2022 à 15h00

De quoi s’agit-il ?
Il s’agit de légaliser la consommation de cannabis, qu’elle soit médicale ou récréative, dans
un « cadre posé par l’État ». C’est différent de la dépénalisation, qui consiste simplement à
supprimer « les sanctions pénales jusqu’alors encourues pour certains actes », selon le site
service-public.fr. À l’heure actuelle - et depuis une décision provisoire du Conseil d’État du
24 janvier - seule la vente de CBD, un dérivé du cannabis, est autorisée.

D’après les derniers chiffres disponibles sur le sujet, la France est le pays européen qui
compte le plus de consommateurs de cette drogue douce proportionnellement à sa
population. 44,8 % des personnes (âgées de 15 à 64 ans) en ont fait usage au moins une
fois dans leur vie. Par comparaison, la moyenne européenne est à 29 %. Selon ces mêmes
données, c’est aussi en France que l’on compte le plus de personnes ayant consommé du
cannabis « au cours de la dernière année » avec 11 % de personnes concernées.

Quels en sont les coûts et les bénéfices ?


Selon une note du conseil d’analyse économique, datant de juin 2019, « la légalisation du
cannabis récréatif, strictement encadrée, permet (…) de développer un secteur économique,
créateur d’emplois et de recettes fiscales », notamment grâce aux impôts. Car, à l’heure
actuelle, tout l’argent du trafic de cannabis - dont le chiffre d’affaires était estimé à plus d’un
milliard d’euros par an par l’Insee - échappe tant à la fiscalité qu’aux cotisations sociales.

Toujours selon le conseil d’analyse économique, les coûts liés à la répression policière (la
lutte contre les infractions sur les stupéfiants représenterait un million d’heures de travail de
la police) et à la justice sont plus élevés que les coûts liés à l’encadrement du marché en
cas de légalisation, même si on y ajoute les potentiels coûts sanitaires. En clair, « la
légalisation du cannabis génère un important dividende budgétaire », résume le document.

Au-delà des avantages économiques, les défenseurs de la légalisation du cannabis mettent


généralement en avant la baisse de la criminalité, qui s’explique notamment par le fait que
les réseaux sont privés d’une partie de leurs recettes. Certes, « on dispose de peu de recul,
car la légalisation a été mise en place récemment », pose Marie Jauffret-Roustide,
sociologue et chercheure à l’Inserm. Mais au Canada, « le marché noir a automatiquement
diminué » avec l’offre légale du cannabis, même s’il « n’a pas été complètement éradiqué ».

Une légalisation encadrée pourrait également permettre de réduire la consommation chez


les mineurs, selon des données récoltées dans deux États américains ayant franchi le cap.
Par ailleurs, elle permet une meilleure prévention. « Quand la société est marquée par la
prohibition, c’est compliqué de parler des drogues, car c’est interdit, c’est donc difficile
d’avoir une prévention efficace », constate Marie Jauffret-Roustide. Autre argument, mis en
avant par le projet de loi visant à légaliser le cannabis en France : le « lien de causalité entre
la prohibition et la dangerosité des produits consommés ». Alors qu’à l’inverse, la
légalisation permet d’encadrer tant la quantité de THC que la qualité du cannabis.

Est-ce faisable ?
C’est facilement applicable : il suffirait qu’un projet de loi soit adopté par le Parlement. Mais,
pour l’heure, ce n’est pas l’orientation que semblent prendre les députés, qui ont rejeté,
mi-janvier, un texte visant à légaliser la production, la vente et la consommation du
cannabis, défendu par des Insoumis, mais aussi des élus de Libertés et territoires, de la
Gauche démocrate et républicaine, de LREM et un socialiste.

À lire aussi
Présidentielle : la légalisation du cannabis s’invite dans la campagne
Si les parlementaires ne semblent pas convaincus, l’opinion publique, elle, pourrait bien déjà
être acquise à la cause. Selon un sondage Ifop réalisé en mai 2021, 51 % des interrogés
sont favorables à une dépénalisation du cannabis. Plus de 60 % des sondés estiment même
que la commercialisation du cannabis sous contrôle des pouvoirs publics serait plus efficace
pour lutter contre le trafic de drogue que l’interdiction actuelle.

Qu’en est-il à l’étranger ?


Différentes règles sont en place à l’étranger. Aux Pays-Bas, l’usage du cannabis n’est pas
légal à proprement parler mais, depuis 1976, il est possible d’en acheter et d’en consommer
dans les coffee-shops. En Uruguay, depuis 2013, il est légal de produire, distribuer et
consommer du cannabis. Au Canada, depuis 2018, chaque foyer peut avoir jusqu’à quatre
plants et chacun peut posséder 30 g. Aux États-Unis, si la consommation de cannabis reste
interdite par la loi fédérale, plusieurs États et même des villes ont décidé de l’autoriser, en
rendant notamment légale sa possession, dans une certaine mesure. En Espagne, il est
autorisé de produire du cannabis pour sa consommation personnelle, qui est cependant
interdite dans les lieux publics.

Actuellement, le sujet est en discussion en Allemagne, où le nouveau gouvernement de


coalition veut rendre légale la vente et la consommation dans des magasins spécialisés. Par
ailleurs, plusieurs autres pays autorisent le cannabis thérapeutique ou médicinal, à l’instar
de l’Argentine, du Chili, de la Colombie, du Pérou, du Liban…

Qu’en disent les candidats ?


Yannick Jadot est l’un des candidats défendant le plus ardemment la légalisation. « C’est
une position pragmatique. On est le pays qui a la législation la plus stricte et le pays où la
consommation est la plus forte, donc le système ne marche pas », commentait notamment
l’un de ses conseillers auprès du Parisien pour un précédent article. Jean-Luc Mélenchon
est lui aussi favorable à la légalisation du cannabis. Une position qu’il défendait déjà en
2017 puisque, pour lui, « la prohibition n’a rien donné ».

Toujours à gauche, le communiste Fabien Roussel y est opposé - même s’il est ouvert au
débat - et Anne Hidalgo ne s’est pas clairement exprimée sur le sujet. À droite, le contre
l’emporte chez Valérie Pécresse, Marine Le Pen, ainsi que chez Éric Zemmour, même si ce
dernier a fait part à plusieurs reprises de ses hésitations sur le sujet face à l’inefficacité de la
répression. Quant à Emmanuel Macron, sa position a changé sur le sujet. Avant d’être élu, il
avait défendu une dépénalisation, puis avancé l’idée de simples contraventions pour les
petites quantités. Depuis qu’il est au pouvoir, il semble avoir totalement balayé ces idées, et
annonçait même, au Figaro en avril 2021, vouloir « aller encore plus loin » dans la lutte
contre le cannabis.

En résumé
Un projet de loi sur le sujet a été retoqué par l’Assemblée nationale mi-janvier. Pourtant,
l’opinion publique semble plutôt favorable à la légalisation du cannabis. Selon ses
défenseurs, cette mesure permettrait non seulement de réduire la criminalité, mais aussi de
mieux contrôler la consommation des mineurs. Elle permettrait, en plus, une réduction des
dépenses.
Quels sont les coûts et bénéfices que pourraient engendrer la légalisation du canabis
en France ?

BENOIT Aurelien
COGNIARD Pierre-Urbain
E2

Introduction :

Depuis le 31 décembre 1970, la détention et la consommation de cannabis sont interdites en


France. Cette loi est de plus en plus remise en question, en particulier en période électorale.
On différencie alors la dépénalisation, qui consiste à ne plus sanctionner les
consommateurs, et la légalisation, qui consiste à créer une filière spécifique, et à remettre
en cause tout le système de prévention. Face à un trafic illégal du cannabis estimé entre
810 millions et 1,4 milliard d’euros en France [11], il est légitime de se questionner sur les
recettes que pourrait engendrer la légalisation du cannabis.

Plusieurs questionnements en découlent. Ces mesures seraient-elles suffisantes pour


mettre fin au trafic ? Quels pourraient être les gains pour l'État français ? Quelles seraient
les conséquences sanitaires et sociales ?

Notre réflexion s’articulera autour de la problématique suivante : quels sont les coûts et les
bénéfices que pourrait engendrer la légalisation du cannabis en France ?

Nous présenterons dans un premier temps les avantages économiques que peut impliquer
la légalisation du cannabis, puis nous présenterons dans un second temps ses limites.
I. Les avantages économique de la légalisation du caannabis

La France a depuis très longtemps eu l’une des politiques les plus répressives face
au cannabis et cette politique a toujours été un échec ainsi qu’un énorme gachi financier, en
effet chaque année c’est “568 millions d’euros qui sont investis dans la lutte contre le
cannabis chaque année” [1]. Sans jamais parvenir à enrayer le phénomène. Les français
sont actuellement les plus gros consommateurs de drogues en Europe, en effet “44,8% des
Français de 15-64 ans ont déjà fumé un joint de cannabis, soit environ 18 millions. Un
pourcentage très élevé par rapport à nos voisins européens”[2]. La France se hisse donc au
5ème rang mondial pour la consommation de cannabis.
Le fait de légaliser le cannabis permettrait à l’état de superviser son trafic ainsi il pourrait par
exemple limiter la consommation par les mineurs, même si il est probable que cette
interdiction de la consommation de cannabis avant 18 ans ne soit pas respecté par tous les
mineurs, “compliqué l’accès aux plus jeunes au cannabis permettra une lente initiation à la
consommation”[3] et donc de les empêcher de tomber dans l’addiction. “Les
consommateurs n’auraient plus à se tourner vers des personnes peu recommandables pour
s’en procurer, cela empêchera que des personnes en produisent pour leurs propre
consommation mettant ainsi leurs vies en danger”[4] mais au contraire celui qu’ils prendront
sera de meilleure qualité et donc moins dangereux.
Si l’état autorise la libre concurrence de la vente de consommation de cannabis, le marché
légal deviendra très compétitif par rapport au marché illégal alors cela entraînera une
énorme baisse de celui-ci, cette approche a été employée au Colorado et “a entraîné une
quasi éradication du trafic illégale”[1].

L’un des plus gros avantages à cette légalisation est les recettes fiscales que cela
pourrait procurer à l’état.
La légalisation du cannabis pourrait également apporter d’énorme recettes à l’état
car jusqu’à maintenant le marché illégale échappait tant aux impôts qu’aux cotisations
sociales, en effet , “en supposant que la consommation annuelle se situe entre 500 et 700
tonnes, cela représenterait entre 2 et 2,8 milliards d’euros”[5], en effet les etats qui ont
légalisé le cannabis ne l’ont pas regretté, “cela rapporte entre 200 et 300 millions d’euros
aux etats américains du Colorado et de Washington.”[1] “L'état de Washington a même
utiliser cet argent afin de fournir une assurance maladie à ses résidents les plus pauvres”[6].
Le nouveaux marché ainsi créé pourrait créer entre 30 000 et 80 000 emplois et permettrait
également la création de nombreuses entreprises.
Mais il existe déjà un marché lié au chanvre, celui du CBD un composant du chanvre non
intoxicant. “La légalisation de cette molécule grâce à l'arrêté européen de novembre 2020, a
lancé un nouveau marché, déjà estimé à 300 millions qui devrait atteindre 1,5 milliard bien
avant la fin de la décennie" avec l’apparition de plus de 10 000 emplois. La France a vu
l’ouverture de 400 boutiques et le potentiel pour la France est énorme. La France est le
troisième producteur mondial de chanvre après la Chine et le Canada .Un hectare de
chanvre cultivé génère 2.500 euros de revenus pour un agriculteur français, soit 8 fois le
rendement financier du blé ! “[7]
Le cannabis possède également de nombreux bienfaits ,tout d’abord le cannabis est naturel,
certains anthropologues estiment qu’il pourrait s’agir de l’une des plantes les plus anciennes
que l’humanité cultive. “Les Pen Ts'ao (Bencao gangmu), publiés au 16ème siècle et censés
être les pharmacopées les plus anciennes au monde, recommandent le cannabis pour la
constipation, la douleur, la malaria et autres troubles.”[8]
La recherche menée sur les humains montre que certaines maladies, comme la douleur
chronique résultant de lésions nerveuses, seraient sensibles à l’action du cannabis, sous
forme fumée ou vaporisée, de même qu’à un médicament à base de THC autorisé par la
FDA, le dronabinol.
“Le cannabis thérapeutique est déjà légal dans beaucoup de pays en Europe et dans le
monde tel que les Pays-Bas, l'Allemagne, le Royaume-Uni, le Canada, etc..
Cette pratique est actuellement en expérimentation sur plus de 3000 personnes depuis le 26
mars 2021.”[9].
Le CBD, composant non intoxicant du chanvre, lui aussi possède des vertus médicales.
“Aujourd’hui, des preuves concrètes montrent que le CBD que l’on retrouve dans le
cannabis et le chanvre, peut aider à réduire les crises liées aux syndromes de Dravet ou de
Lennox-Gastaut.”[8] De plus “Consommer ces compléments constitue une manière de
profiter de ses propriétés antalgiques, anti-inflammatoires, antioxydantes et anxiolytiques. Ils
sont issus d’extraits ou de l’huile de CBD, et proposés sous forme de gélules ou de
capsules, à avaler.”[10]

II. Les limites de la légalisation du cannabis

Cependant, la légalisation du cannabis pourrait être un gouffre sanitaire, social et


économique.

Tout d’abord, Jean Pierre Pujol, professeur de biochimie à l’université de Caen alerte
sur les dangers du cannabis. La consommation de cette substance n’est pas anodine pour
notre organisme, « le THC d’un seul joint demeure plus d’une semaine dans le cerveau »
[12], et les dangers sont multiples « perturbation de la mémoire, défocalisation de l’attention,
incoordination motrice, désinhibition conduisant à des prises de risques, potentialisation des
effets ébriants ou hallucinogènes, schizophrénie, anxiété et dépression. [12]. Les effets sont
« particulièrement néfastes et souvent irréversibles » [12] chez les enfants. Et
malheureusement la France n’est pas en reste, selon ses dires « Les enfants de 12 à 15 ans
ayant déjà expérimenté cette drogue sont au nombre de 300 000.»[12]. Jean Pierre Pujol
conclu que la légalisation du cannabis serait « synonyme de catastrophe sanitaire » [12].
ces propos sont complétés par ceux de François-Xavier BELLAMY et Othman NASROU, qui
s’insurgent que l’on détourne le débat de la « nocivité intrinsèque du cannabis » [14]. Ils
alertent sur le parallèle qui est trop souvent effectué avec l’alcool et le tabac. Tandis qu’on
peut apprécier l’alcool en le goutant et en le savourant, « on ne fume un joint en revanche
que pour ses effets psychotropes »[14]. Tous s’accordent ainsi à dire que « la consommation
de cannabis ne peut qu’être nocive, comme toute consommation de drogue » [14].

Pourquoi la légalisation du cannabis ne serait-elle alors pas restreinte au cannabis


thérapeutique ? Jean Pierre Pujol, condamne cet amalgame récurrent : « En l’état actuel, le
cannabis ne répond pas à la définition d’un médicament. […] De la découverte de la
molécule à l’autorisation à l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), un médicament doit
franchir avec succès différentes phases, s’étalant sur environ dix ans : phase de recherche
et développement, étude de toxicologie, recherche clinique. » [12]. Ainsi, l’avènement de
cette nouvelle filière est à considérer avec rigueur et modestie. Avant que celle-ci ne
devienne rentable, il faudra au moins investir selon lui 800 millions d’euros de recherche et
de développement.

De plus, cette réforme pose un problème de sécurité majeur. « Le cannabis seul est
responsable de 300 morts de la route et les risques d’accidents mortels » [12]. Des contrôles
routiers conséquents seraient donc nécessaires. Une charge supplémentaire qu’il faudra
assumer. Un dernier aspect concerne la prévention. Un argument fondamental des partisans
de la légalisation du cannabis est que ce nouveau marché pourrait permettre de financer la
prévention. François-Xavier BELLAMY et Othman NASROU répondent « On n’encadre pas
l’injustice, on la combat » [14]. Ainsi, le risque est de voir une augmentation générale de la
consommation de cannabis, comme l’illustre l’exemple de l’État du Colorado, qui, « après
avoir légalisé le cannabis en 2012, a connu une augmentation de 45 % de la consommation
chez les adultes de plus de 25 ans, un record parmi les États américains. » [14].

En soit, quand bien même la légalisation du cannabis mettrait fin aux trafics et aux
problèmes sociaux, elle resterait éthiquement contestable. Bien qu’elle permette un
encadrement plus strict des consommateurs, et le financement de campagne de prévention
massive, elle facilite l’accès à une substance qui ne profitera pas toujours à nos organismes.
Le cannabis présente bien trop de danger pour être banalisé au même titre que l’alcool ou le
tabac. C’est un enjeu de santé publique, qui, de fait, devient un enjeu économique.

D’autre part, la légalisation du cannabis implique un problème social conséquent. Le


premier questionnement concerne l’avenir du marché noir. Sur ce point, Alexandre
Develcchio et François Jolivet s’accordent à dire qu’« Il faut vraiment être naïf pour croire
que les groupes criminels vont se laisser si facilement enlever les gains immenses du trafic
de cannabis. » [13]. Pour preuve, à la fin de la prohibition aux États-Unis, le marché noir n’a
cessé de s’amplifier en se diversifiant sur les stupéfiants, les armes et le banditisme. Cela
implique deux problèmes majeurs.

Les trafiquants seront capables de « générer une nouvelle demande et de nouvelles


sources de revenus » [13] en s’orientant vers les drogues dures comme la cocaïne,
l’héroïne, le cannabis et les méthamphétamines. Il faudra donc continuer de les combattre
en maintenant un cout de sécurité similaire. Les économies promises par les partisans de
cette réforme ne seront donc pas au rendez-vous. Et les consommateurs ne se contenteront
pas pour autant du cannabis. Car, comme l’estime Jean Pierre Pujol, « 10 à 20 % des
patients passent à une consommation plus forte et deviennent accros au crack » [12]. Le
risque en légalisant le cannabis est donc de déporter le problème sur d’autres substances
illicites pour lesquelles il conviendra également de se questionner sur la légitimité de leur
légalisation. La boite de Pandore est ouverte.

Quand bien même les trafiquants se contenteraient du cannabis, François Jolivet


alerte sur le fait que l’état pourrait se retrouver en concurrence avec les dealers. Car, pour
des questions évidentes, le taux de THC vendu dans les officines, et la quantité de cannabis
en circulation devront être régulés. Ce taux ne conviendra assurément pas aux
consommateurs les plus aguerris. Le trafic continuera, à des prix défiants toute concurrence
et à un taux supérieur à celui autorisé. François Jolivet présente alors une étude menée par
le gouvernement canadien : « Alors que le marché a été légalisé en 2018, 42 % des
Canadiens continuent à acheter illégalement du cannabis » [15]. Il conclut sur des mots forts
: « La légalisation du cannabis est une chimère mortifère. » [15].

On comprend alors que les bénéfices engendrés par ces mesures sont difficilement
estimables. Légaliser le cannabis annihilerait probablement le trafic, mais ne le supprimerait
pas pour autant. On autorise ainsi une nouvelle filière, de nous nouveaux consommateurs,
et surtout de nouveaux besoins pour les individus et pour l’État.

Conclusion :

En conclusion, on constate que même si la légalisation du cannabis pourrait apporter


beaucoup de bienfaits à la société française et qu’elle trouve de nombreux partisans, mais
malgré tout ça elle pourrait être responsable d’autres problèmes tels qu’une explosion de la
dépendance chez les consommateurs, elle est donc encore loin de faire l’unanimité et est
l’objet d’un débat qui dure depuis des décennies.
Malgré tout, les mentalités changent et les politiques liées à la consommation de cannabis
sont de plus en plus progressistes, tel que la légalisation du CBD ou l'expérimentation du
cannabis thérapeutique.
Le débat durera probablement encore longtemps mais on peut supposer que les décisions
politiques vont être de moins en moins répressives envers les cannabis et au final finir par
légaliser la consommation du cannabis.
Références:

[1] Légalisation du cannabis en France : une idée qui rapporte ?, Sébastian Seibt,
France24.com, 20/06/2019

[2] Les Français, toujours les plus gros consommateurs de cannabis en Europe, B.H.,
leprogrès.fr , 21/09/2021

[3] Légalisation du cannabis : quels avantages et quelles limites ?, Malek Ben Amar,
larotonde.ca ,4/03/2022

[4] Légalisation et/ou dépénalisation du cannabis : avantages et inconvénients, Jasmin,


buzzwebzine.fr , 3/05/2021

[5] La légalisation du cannabis récréatif pourrait rapporter 2,8 milliards d'euros selon des
économistes, auteur inconnu, ouest-france.fr, 20/06/2019

[6] Légaliser le cannabis pour relancer l’économie ? , La rédaction du journal Confluences,


20/04/2021.

[7] CBD : le gouvernement essaye-t-il d’abattre la liberté économique ? , Sébastien Laye,


Capital, 03/01/2022.

[8] Cannabis médical : 10 bienfaits et inconvénients de la marijuana médicale, Luke Sholl,


royalqueenseeds.fr, 19/06/2020

[9] Bienfaits et risques du cannabis : ce que dit la science, Steven Kinsy et Divya Ramesh,
theconversation.com , 11/01/2017

[10] Les bienfaits et vertus du cannabis thérapeutique, cbd-dundees.com

[11] «Légaliser le cannabis pour relancer l’économie ? », La rédaction du journal


Confluences, 20/04/2021.

[12] « Légaliser le cannabis, c’est risquer une catastrophe sanitaire! », Jean-Pierre PUJOL,
Le Figaro, 10/07/2019.

[13] «Cannabis : pourquoi la légalisation n'est pas la solution », Alexandre DEVECCHIO, Le


Figaro, 30/07/2014.

[14] «La légalisation du cannabis serait un contresens historique », François-Xavier


BELLAMY et Othman NASROU, Marianne, 21/05/2021.

[15] « La légalisation du cannabis est une chimère mortifère », François JOLIVET, Le Figaro,
04/06/2021.

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