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Dossier scientifique

Les déficits de la chaîne respiratoire :


démarche diagnostique des cytopathies
mitochondriales
Pauline Gaignard*, Pierre-Hadrien Becker, Elise Lebigot, Patrice Thérond, Abdelhamid Slama
Service de Biochimie, CHU Bicêtre, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Université Paris-Sud, 78 rue du Général Leclerc,
94275 Le Kremlin-Bicêtre, France.
*Auteur correspondant : pauline.gaignard@aphp.fr (P. Gaignard).

RÉSUMÉ
La mitochondrie, « centrale énergétique » de la cellule, est au carrefour du métabolisme glucidique, lipidique et protéique
dont la finalité essentielle est la synthèse d’ATP. Cette synthèse est couplée à la consommation d’oxygène par le processus
de phosphorylation oxydative réalisée par la chaîne respiratoire (CR). Les défauts héréditaires de la CR en elle-même ou
de tous les mécanismes nécessaires à son fonctionnement sont regroupés sous le terme de « cytopathies mitochondriales ».
Ces pathologies sont de transmission maternelle (mutation de l’ADN mitochondrial) ou de transmission mendélienne
(mutation sur un des nombreux gènes nucléaires impliqués dans le fonctionnement énergétique mitochondrial). La pré-
sentation clinique de ces maladies est très variée et de nombreux diagnostics différentiels sont à évoquer. La démarche
diagnostique consiste donc en la recherche d’arguments biochimiques pour guider ou étayer les analyses moléculaires.
Un bilan d’orientation global recherchera d’abord des signes de blocage du métabolisme énergétique (hyper-lactacidémie,
cétonémie paradoxale…). Les analyses fonctionnelles spécifiques de la CR telles que l’étude des activités enzymatiques
et de la consommation d’oxygène ainsi que l’analyse de l’intégrité de l’ADN mitochondrial dans différents tissus apporte-
ront ensuite des preuves plus directes. Le diagnostic formel de cytopathie mitochondriale ne pourra cependant être posé
qu’après identification par biologie moléculaire d’un variant prouvé comme délétère.

ABSTRACT
Respiratory chain dysfunctions : diagnostic strategy of mito-
chondrial disorder
Mitochondria, the “powerhouse” of the cell, are at the crossroads of carbohydrate,
MOTS CLÉS lipid and protein metabolisms. The respiratory chain (RC) plays a central role by
◗ activités enzymatiques performing oxidative phosphorylation that is oxygen consumption coupled with ATP
◗ ADN mitochondrial synthesis. The inherited defects of RC itself or of all the processes involved in its
◗ chaîne respiratoire functioning are called “mitochondrial disorders”.  These diseases can be inherited
◗ consommation d’oxygène maternally (mitochondrial DNA mutation) or by mendelian patterns (mutation on
◗ cytopathie mitochondriale one of the many nuclear genes involved in mitochondrial bioenergetics). The clinical
presentation of the mitochondrial disorders is highly various and numerous diffe-
KEY WORDS rential diagnoses must be considered. The diagnostic approach therefore looks for
◗ enzymatic activities biochemical arguments to direct or support molecular analysis. Signs of blockage
◗ mitochondrial disorders of energetic metabolism (hyper-lactacidemia, paradoxical ketonemia...) will be first
◗ mitochondrial DNA sought by global screening tests. Specific functional studies of RC (enzymatic acti-
◗ oxygen consumption vities and oxygen consumption in particular) and analysis of the integrity and the
◗ respiratory chain quantity of mitochondrial DNA in different tissues will then provide more direct
evidence.The diagnosis of mitochondrial disorder, however, can only be confirmed
© 2018 – Elsevier Masson SAS by the identification of a proven deleterious variant.
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Cytopathies mitochondriales

La synthèse énergétique Figure 1. Le métabolisme énergétique mitochondrial.


par la mitochondrie
Place de la chaîne
respiratoire mitochondriale
dans le métabolisme
énergétique
La synthèse d’ATP par la chaîne respiratoire
(CR) mitochondriale se situe au carrefour du
métabolisme des glucides, des lipides et des pro-
téines. La glycolyse cytoplasmique aboutit à la
formation de pyruvate qui pénètre dans la mito-
chondrie où il est décarboxylé en acétyl-coA (un
substrat du cycle de Krebs) par le complexe de
la pyruvate-déshydrogénase (PDH). Les acides
gras libérés lors de la lipolyse sont métabolisés
par la ␤-oxydation mitochondriale pour fournir

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également de l’acétyl-coA. Cet acétyl-coA peut
être « stocké » sous forme de corps cétoniques
lors de la cétogenèse hépatique pour être de
nouveau libéré par cétolyse dans les tissus péri-
phériques ne réalisant pas la ␤-oxydation. Enfin,
le catabolisme des acides aminés produit de
nombreux substrats pour le cycle de Krebs. Par
la suite, les réactions d’oxydoréduction du cycle
Le métabolisme des glucides, lipides et protéines aboutit à des substrats du cycle
de Krebs fournissent des coenzymes réduites de Krebs. Le NADH et le FADH2 produits par le cycle de Krebs sont oxydés par
(NADH et FADH2) qui sont utilisées par les les complexes de la chaîne respiratoire et la force protomotrice générée permet la
complexes de la CR pour la synthèse d’ATP en synthèse d’ATP.
condition aérobie grâce au système de phospho- CoQ : ubiquinone ; Cyt c : cytochrome c ; PDH : pyruvate-déshydrogénase.
rylation oxydative (figure 1) [1].

La phosphorylation oxydative rence de concentration de protons générée entre la


matrice et l’espace transmembranaire est à l’origine de
La phosphorylation oxydative est le processus associant
la phosphorylation de l’ADP à l’oxydation du NADH et la force protomotrice qui fournit l’énergie nécessaire à
du FADH2. Elle aboutit à la réduction de l’O2 en H2O la phosphorylation de l’ADP par le complexe V (ou ATP
(« respiration ») et constitue la source principale d’ATP synthase) (figure 1) [1].
dans les organismes aérobies.
Le transfert d’électrons des molécules de faible poten- La double origine génétique
tiel d’oxydo-réduction NAD/NADH et FAD/FADH2 des composants de la chaîne
vers l’O2, molécule de haut potentiel, est assuré par respiratoire
quatre complexes et deux transporteurs solubles. Le
Les mitochondries sont les seuls organites cellulaires qui
complexe I (ou NADH-ubiquinone-réductase) catalyse
possèdent leur propre ADN, différent de l’ADN géno-
le transfert d’électrons du NADH sur l’ubiquinone et
mique (ADNg). L’ADN mitochondrial (ADNmt) est
permet le passage de protons de la matrice mitochon-
driale vers l’espace inter-membranaire. Le complexe II polyploïde, le nombre moyen de copies par cellule varie
(ou succinate-déshydrogénase) ne participe pas à l’éla- de 1000 à 5000 selon les tissus. L’ADNmt représente
boration du gradient de protons mais permet, comme 0,5 à 1 % de l’ADN total d’une cellule. C’est une molé-
le complexe I, la réduction de l’ubiquinone en ubiquinol cule double-brin, circulaire, de 16 569 paires de bases
par transfert des électrons du FADH2. Le complexe III avec une D-loop triple-brin qui contient des éléments
(ou ubiquinol-cytochrome c-réductase) catalyse l’oxy- de régulation. L’ADNmt porte 37 gènes, 13 codent des
dation de l’ubiquinol et la réduction du cytochrome c protéines de la CR, 22 des ARN de transfert (ARNt) et
et participe également à l’élaboration du gradient de 2 des ARN ribosomiques (ARNr). Les 37 gènes mito-
protons. Enfin, le complexe IV (ou cytochrome c oxy- chondriaux sont contigus, sans introns, certains même
dase) réalise l’oxydation du cytochrome c réduit et la se superposent. La séquence complète du génome mito-
réduction de l’O2 en deux molécules d’H2O. La diffé- chondrial humain a été publiée en 1981 [2].

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Les cinq complexes de la CR sont composés d’une C’est une pathologie évolutive qui peut survenir à tout
centaine de protéines dont seulement 13 sont codées âge de la vie. Il n’existe actuellement pas de traite-
par l’ADNmt, les autres étant codées par l’ADNg. Les ment spécifique des cytopathies mitochondriales, mais
sous-unités des complexes I, III, IV et V ont ainsi une les nombreux essais thérapeutiques en cours seront
double origine génétique (mitochondriale et nucléaire), peut-être prometteurs [3].
tandis que le complexe II est d’origine exclusivement
génomique. Il est cependant admis que plus de 1 500 Classification génétique
protéines sont aussi impliquées dans le métabolisme des cytopathies mitochondriales
mitochondrial et donc, plus ou moins directement, dans
le fonctionnement de la CR. Ces protéines sont notam- Cytopathies mitochondriales
ment impliquées dans la maintenance de l’ADNmt ou dues à une mutation de l’ADNmt
à la synthèse des protéines codées par l’ADNmt ; dans Les premières mutations pathogéniques de l’ADNmt
l’assemblage des complexes, la synthèse de co-facteurs, ont été identifiées il y a une trentaine d’années. La géné-
le transport de substrat ; dans la biogenèse (fusion/fission tique mitochondriale a trois particularités :
des mitochondries), la dynamique du réseau ◗ la transmission est exclusivement maternelle ;
mitochondrial, la formation des mem- ◗ les copies de génome mitochondrial sont
branes mitochondriales… [3]. généralement toutes identiques (homo-
Il n’existe plasmie) mais, en cas de mutation, des
Les cytopathies copies sauvages et mutées peuvent
actuellement pas de être présentes (hétéroplasmie) ;
mitochondriales traitement spécifique ◗ la ségrégation mitotique de

des cytopathies l’ADNmt est apparemment aléa-


Définition toire, la proportion d’ADN muté
des cytopathies mitochondriales, mais ou sauvage varie donc au cours
mitochondriales de nombreux essais des divisions cellulaires.
Les cytopathies mitochondriales Les mutations de l’ADNmt peuvent
thérapeutiques sont affecter soit un gène codant une
peuvent être définies comme des
anomalies du fonctionnement de la en cours protéine spécifique de la CR, ce qui se
CR mitochondriale d’origine héréditaire traduira par un déficit isolé en un com-
et ayant comme mécanisme physiopatho- plexe ; soit un ARNr ou un ARNt, ce qui affec-
logique commun le déficit en ATP. Cependant, la tera la synthèse de toutes les protéines codées
découverte croissante d’interrelations entre de nom- par l’ADNmt et se traduira par un déficit multiple en
breux mécanismes cellulaires et la synthèse énergé- complexes de la CR. Le déficit fonctionnel de la CR
tique mitochondriale élargit de plus en plus le champ n’apparaît cependant qu’au-delà d’une certaine propor-
des « cytopathies mitochondriales » et en donner une tion d’ADNmt muté dans la cellule (effet seuil). Le taux
définition stricte est difficile. De plus, la carence énergé- d’hétéroplasmie étant différent pour chaque cellule,
tique ne semble pas pouvoir expliquer à elle seule toute chaque tissu n’exprime pas le déficit de la même façon.
la physiopathologie des cytopathies mitochondriales. Ceci explique en partie la grande variabilité clinique et
Le stress oxydatif et le déséquilibre entre métabolites le caractère évolutif de ces maladies. Il est rapporté que
notamment participent aussi probablement au dévelop- les mutations de l’ADNmt sont responsables d’environ
pement de la maladie [4]. 80 % des cytopathies mitochondriales chez l’adulte et
La prévalence estimée des cytopathies mitochondriales 20 % de celles chez l’enfant [8,9].
est d’environ 10 à 20 cas pour 100 000 personnes
(adultes et enfants), ce qui en fait la cause la plus fré- Cytopathies mitochondriales
quente de neuropathies héréditaires chez l’adulte [5,6]. dues à une mutation de l’ADNg
Les cytopathies mitochondriales se caractérisent par Des mutations dans différents gènes portés par l’ADNg
une atteinte clinique très hétérogène et de sévérité sont retrouvées dans un nombre croissant de cytopa-
variable. Les mitochondries étant des organites ubiqui- thies mitochondriales. La transmission est le plus sou-
taires, tous les organes peuvent être concernés, mais les vent autosomique récessive mais peut être également
plus vulnérables sont ceux hautement dépendants du récessive liée à l’X ou autosomique dominante.
métabolisme oxydatif, principalement les systèmes ner- Les mutations de l’ADNg peuvent affecter un gène
veux et musculaire. Une cytopathie mitochondriale est codant une des sous-unités de la CR ou une des pro-
souvent évoquée devant une association inexpliquée de téines accessoires jouant un rôle dans l’assemblage des
symptômes, neuromusculaires ou non, qui impliquent complexes, entraînant ainsi un déficit fonctionnel de ce
des organes apparemment sans relation physiolo- complexe. Les mutations nucléaires peuvent également
gique ou embryologique (association « illégitime ») [7]. avoir un impact sur l’ADNmt lui-même si elles affectent

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Cytopathies mitochondriales
les enzymes impliquées dans la réplication et Figure 2. Le déséquilibre RedOx (NADH/NAD)
la traduction de l’ADNmt ou les voies de syn-
en cas de déficit de la chaîne respiratoire.
thèses du pool de nucléotides mitochondriaux.
À terme, ces déficits enzymatiques sont à l’ori-
gine d’altérations qualitatives et/ou quantitatives
de l’ADNmt et donc de déficit en plusieurs
complexes de la CR. L’expression clinique de
ces cytopathies mitochondriales, bien que d’ori-
gine nucléaire, est alors également influencée
par le taux d’hétéroplasmie et la ségrégation
mitotique aléatoire. Enfin, les mutations affec-
tant des gènes codant les nombreuses protéines
impliquées dans le fonctionnement énergétique
mitochondrial, au sens large, ont des répercus-
sions variables sur l’activité des complexes de
la CR et la stabilité de l’ADNmt [3].

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Démarche diagnostique
des cytopathies
mitochondriales
Devant des symptômes évocateurs de cytopa-
thie mitochondriale (atteintes neurologiques,
musculaires, multi-systémiques ; hypoglycémie ;
Le blocage de la chaîne respiratoire induit un excès de NADH qui favorise la
acidose lactique), la démarche diagnostique clas- production de lactate (équilibre RedOx cytoplasmique) et de ␤-hydroxybutyrate
sique est la réalisation de bilans métaboliques de (équilibre RedOx mitochondrial).
screening permettant une première orientation ␤-DH : ␤-hydroxy-butyrate-déshydrogénase ; CoQ : ubiquinone ; Cyt c : cytochrome
puis l’étude spécifique de la CR et de l’intégrité c ; LDH : lactate-déshydrogénase ; PC : pyruvate-carboxylase ; PDH : pyruvate-
de l’ADNmt qui servent à orienter ensuite les déshydrogénase.
analyses moléculaires. Depuis quelques années
cependant, la place croissante du séquençage haut débit Les déficits de la CR ont pour conséquence l’accu-
(Next Generation Sequencing, NGS) tend à systématiser mulation en amont de NADH produit par le cycle de
les analyses moléculaires en première intention. Krebs et un défaut de consommation d’oxygène, ce qui
pourra être suspecté devant une élévation persistante
Bilans d’orientation et marquée du lactate dans le sang (> à 3 mmol/L) [11],
Equilibre RedOx associée généralement à un rapport lactate/pyru-
Le bilan RedOx consiste au dosage simultané des vate élevé (> 15). La persistance de corps cétoniques
concentrations sanguines de lactate et de pyruvate, (acétoacétate et ␤-hydroxybutyrate) en période post-
d’acétoacétate et de ␤-hydroxybutyrate dans dif- prandiale (ou cétonémie paradoxale) avec une pré-
férentes conditions métaboliques (à jeun, en pré- et dominance de ␤-hydroxybutyrate est un autre signe
post-prandial). Le rapport lactate/pyruvate reflète indi- de l’accumulation de NADH et du blocage du cycle
rectement le potentiel RedOx (NADH/NAD) cytoplas- de Krebs. Une élévation du lactate et du rapport lac-
mique et le rapport ␤-hydroxybutyrate/acétoacétate, le tate/pyruvate doit aussi être recherchée dans le LCR
potentiel RedOx mitochondrial (figure 2). Des dosages devant des signes neurologiques évocateurs. Néan-
plasmatiques de glucose, d’acides gras libres et d’ammo- moins, une augmentation du lactate n’est pas spéci-
niémie sont aussi réalisés de façon concomitante. fique des anomalies mitochondriales et les variations
Les paramètres du bilan RedOx sont peu stables (en observées doivent être distinguées des autres causes
particulier le pyruvate et l’acétoacétate) et exigent que d’hyper-lactatémies pathologiques (hypo-perfusion tis-
le prélèvement soit effectué selon des conditions pré- sulaire, maladies systémiques, erreurs innées du méta-
analytiques strictes. Le prélèvement veineux doit être bolisme,…) ou artéfactuelles (prélèvements difficiles)
réalisé de manière non traumatique et sans garrot. Le pouvant fausser l’interprétation du bilan RedOx [12].
sang recueilli doit être déprotéinisé immédiatement Il est important de noter qu’un bilan RedOx normal
dans l’acide (pour inhiber les réactions enzymatiques) ne permet pas d’exclure le diagnostic de cytopathie
puis placé dans la glace et acheminé rapidement au mitochondriale, notamment si l’atteinte est conscrite
laboratoire [10]. à un tissu. Si les arguments cliniques et paracliniques

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sont pertinents, il convient donc de poursuivre les Études spécifiques


explorations, même si le bilan RedOx est apparem- de la chaîne respiratoire
ment normal.
Choix du tissu
Bilan de screening métabolique Dans l’idéal, le tissu à étudier est celui cliniquement
Un bilan métabolique complet (chromatographie des atteint, mais il n’est pas toujours accessible, notam-
acides aminés plasmatiques CAAp, chromatographie des ment en cas d’atteinte neurologique centrale. Le choix
acides organiques urinaires CAOu, profil des acylcar- se base alors à la fois sur le caractère plus ou moins
nitines plasmatiques ACCARp) est généralement réa- invasif du prélèvement et sur l’apport diagnostique
lisé lors d’une suspicion de cytopathie mitochondriale, attendu. Le muscle squelettique, obtenu par biopsie
dans un but de diagnostic différentiel le plus souvent. du deltoïde, est un des tissus qui exprime le mieux
La CAAp peut montrer une augmentation de l’alanine et les déficits de la CR, même si ce n’est pas systéma-
de la proline plasmatiques traduisant une hyper-lactaté- tique. Un échantillon de 100-200 mg permet de faire
mie. Sur la CAOu, la présence en quantité anormale des toutes les analyses fonctionnelles avec les techniques
intermédiaires du cycle de Krebs peut être un classiques. Cependant, la sédation parfois néces-
indice d’un blocage de la CR mais peut être saire pour réaliser ce prélèvement chez l’en-
aussi simplement liée à une immaturité fant peut être un facteur limitant à son
rénale chez les jeunes enfants. Une exécution. Le foie peut être un tissu
acidurie dicarboxylique traduisant informatif dans certaines formes
une inhibition secondaire de la à expression hépatique, mais le
L’étude de plusieurs hasard de l’échantillonnage entre
␤-oxydation des acides gras peut
aussi être observée (le profil des tissus, si elle est des parties atteintes, en régéné-
ration ou saines peut entraîner
ACCARp montrera alors une possible, est en théorie des interprétations erronées.
diminution de la carnitine libre au
profit des acylcarnitines). Enfin, la la plus à même d’être L’étude sur lymphocytes, obte-
nus par isolement de 10-15 mL
présence d’acide éthylmalonique informative de sang recueilli sur EDTA, a
ou d’acide 3-méthylglutaconique
est assez fréquemment rapportée l’avantage d’être peu invasive mais
dans les atteintes mitochondriales. seuls les déficits très profonds seront
Toutes ces augmentations de métabo- visibles. Enfin, les fibroblastes, obtenus
lites ne sont cependant pas spécifiques mais par biopsie de peau sous anesthésie locale,
constituent des arguments indirects pour rechercher n’expriment pas systématiquement tous les défi-
une cytopathie mitochondriale [12]. cits mais constituent un matériel très utile pour des
De nouveaux biomarqueurs sériques, le fibroblast growth analyses ultérieures (analyses moléculaires, autres
factor 21 (FGF21), et le growth differentiation factor 15 études fonctionnelles…) [17]. Il est à noter que les
(GDF15) semblent plus sensibles et spécifiques que les fibroblastes doivent être cultivés en présence d’uri-
marqueurs actuels mais ne sont pas encore utilisés en dine et de pyruvate pour éviter la sélection négative
routine [13,14]. des cellules déficitaires [18]. En conclusion, l’étude de
plusieurs tissus, si elle est possible, est en théorie la
plus à même d’être informative.
Imagerie cérébrale
L’IRM cérébrale est essentielle dans l’évaluation des
atteintes neuro-métaboliques et des anomalies caracté- Études fonctionnelles
ristiques ont été décrites dans quelques types de cyto- Études spectrophotométriques enzymatiques
pathies mitochondriales [15]. Néanmoins, il n’existe pas La mesure des activités des complexes est réalisée
de profil spécifique commun à toutes les cytopathies sur tissus frais (conservé dans un tampon adéquat)
mitochondriales. Le couplage entre IRM et spectros- ou congelés dans l’azote liquide extemporanément
copie par résonnance magnétique (MRS), qui permet la après biopsie. Les échantillons fixés pour étude ana-
détection de métabolites in vivo, est devenu un outil très tomo-pathologique ne sont pas utilisables. Une étude
utile d’orientation. La présence d’un double pic carac- enzymatique complète de tous les complexes néces-
téristique du lactate est le reflet d’un déficit du méta- site une quantité de prélèvement relativement faible
bolisme oxydatif cérébral. Cet examen n’est cependant et est réalisable sur homogénat tissulaire (à partir de
pas spécifique d’une cytopathie mitochondriale mais il muscle ou de foie), sur cellules entières (fibroblastes,
est plus sensible que la recherche d’une hyper-lacta- lymphocytes) ou sur une fraction enrichie en mito-
torrachie [16]. Une diminution du rapport N-acétyl-L- chondries obtenue après centrifugation différentielle.
aspartate/créatine a aussi été rapportée dans certaines Les activités enzymatiques sont mesurées par spec-
cohortes de patients atteints de cytopathies mitochon- trophotométrie en vitesse maximale et en présence
driales [12]. des substrats du complexe étudié, d’éventuels inhi-

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Cytopathies mitochondriales

Figure 3. Principe du dosage enzymatique de l’activité des complexes


de la chaîne respiratoire, exemple du complexe III.

© service de Biochimie CHU Bicêtre


La vitesse de réduction du cytochrome c en présence de décyl-ubiquinol par le complexe III est mesurée par spectrophotométrie à 550
nm à 37 °C. L’inhibition du complexe IV par le KCN évite la ré-oxydation du cytochrome c. En fin de réaction, l’ajout d’antimycine, un
inhibiteur spécifique du complexe III, permet de déterminer la proportion d’activité aspécifique.
C : complexe ; Inh° : inhibition.

biteurs d’autres complexes pour éviter les réactions fraction enrichie en mitochondries. Les techniques sur
parasites et d’un agent perméabilisant [19,20]. À la oxygraphe classique requièrent une quantité relative-
fin de la réaction, l’ajout d’un inhibiteur spécifique du ment importante de prélèvement, ce qui peut parfois
complexe étudié permet de soustraire l’activité aspé- être limitant. Des nouvelles méthodes d’oxymétrie à
cifique (figure 3). Une étude multicentrique a mon- haute résolution sont développées depuis quelques
tré que les coefficients de variations moyens pour années et permettent de diminuer considérablement
les analyses enzymatiques dans les échantillons de la quantité d’échantillon nécessaire et d’améliorer la
muscle sont d’environ 15 % [21]. Les résultats sont
sensibilité [22].
ensuite exprimés par minute et par milligramme de
La consommation d’oxygène est mesurée en présence
protéines et les activités des complexes sont norma-
lisées par rapport à l’activité de la citrate-synthase, d’ADP pour stimuler la respiration puis en présence
enzyme marqueur de la quantité de mitochondries. d’un agent protonophore, appelé découplant, qui dis-
Ce point est essentiel car la quantité de mitochon- sipe chimiquement le gradient de protons entraînant
dries peut être très variable d’un patient à l’autre alors une dissociation entre oxydation et phospho-
(dans le muscle, elle dépend par exemple du degré rylation et une forte accélération de la consom-
d’entraînement physique) [21]. Le calcul des rapports mation d’oxygène. La consommation d’oxygène en
entre les activités est aussi utile pour détecter des présence de pyruvate et d’un agent découplant est
déficits multiples ou peu profonds. ainsi le reflet des activités enzymatiques de la PDH,
des enzymes du cycle de Krebs et des complexes I,
Études polarographiques III et IV de la CR. L’ajout de malate et de glutamate
La polarographie consiste en la mesure par une élec- permet ensuite de court-circuiter le complexe PDH.
trode de Clark de la vitesse de consommation de L’utilisation de succinate permet d’évaluer les acti-
l’oxygène (« respiration ») contenu dans le milieu vités des complexes II à IV ; celle de duroquinol (un
réactionnel en présence de différents substrats et analogue de l’ubiquinol), l’activités des complexes III
inhibiteurs de la CR [20]. L’analyse par polarographie et IV ; celle de TMPD (N,N,N’,N’’-tétraméthyl-p-phény-
nécessite évidemment des mitochondries intactes et lènediamine, un substrat artificiel du complexe IV) et
donc du tissu frais (non congelé). L’analyse est réali- d’ascorbate (un antioxydant), l’activité du complexe IV
sable sur cellules entières perméabilisées ou sur une isolément. L’ajout d’inhibiteur sélectif de chaque

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Figure 4. Principe de l’étude polarographique.

A : Consommation d’oxygène en présence de pyruvate et de malate + glutamate. © service de Biochimie CHU Bicêtre

B : Consommation d’oxygène en présence de succinate et de duroquinol.


La vitesse de diminution de la concentration de l’oxygène contenu dans une enceinte fermée est mesurée par polarographie à 37 °C. En
début de réaction, l’ajout d’ADP active la phosphorylation oxydative. L’activité du complexe V est ensuite inhibée par l’oligomycine et la
consommation d’oxygène résiduelle est alors le reflet de l’intégrité membranaire. Dans un troisième temps, le gradient de protons est
dissipé par un agent découplant, la vitesse de consommation d’oxygène dépend alors uniquement des vitesses d’oxydation. Ces mesures
sont réalisées en présence de différents substrats et inhibiteurs spécifiques de chaque complexe.
C : complexe ; CoQ : ubiquinone ; Cyt c : cytochrome c ; Inh° : inhibition ; PDH : pyruvate-déshydrogénase.

complexe permet de vérifier la spécificité de chaque Études protéiques


réaction. Les résultats sont exprimés en nanomoles La technique de Blue-Native PolyAcrylamide Gel Electro-
d’oxygène consommées par minute et par milligramme phoresis (BN-PAGE) a été développée il y a une vingtaine
de protéines (figure 4). d’années suite à la mise au point de colorants permettant
L’étude polarographique a lieu dans des conditions la migration des complexes en conditions non dénatu-
plus « physiologiques » que les analyses enzymatiques rantes. L’association d’une séparation électrophorétique
isolées et a pour intérêt de donner une vision globale par BN-PAGE et d’un marquage immunologique permet
du flux de transfert d’électrons et donc de l’efficacité de détecter spécifiquement chaque complexe à l’état
de la CR. natif avec des tailles de 200 à 1 000 kDa.

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Cytopathies mitochondriales
Cette technique, très informative, permet de confirmer Dosage de l’ubiquinone
un déficit quantitatif en un complexe (bande de faible ou coenzyme Q10
intensité ou absente) mais aussi de détecter des ano- L’ubiquinone ou coenzyme Q10 (CoQ10) a un rôle
malies d’assemblage des complexes, qui se présenteront essentiel dans le fonctionnement énergétique mito-
alors sous la forme de bandes de taille inférieure à celle chondrial comme transporteur mobile d’électrons
attendue [23]. Dans certaines conditions analytiques, et comme antioxydant. Des déficits primaires dans la
l’analyse par BN-PAGE permet aussi de visualiser les voie de biosynthèse du CoQ10 ont été identifiés il y
super-complexes, c’est-à-dire les formes multimériques a une dizaine d’années et entraînent des phénotypes
des complexes de la CR. Trois principaux assemblages bien caractérisés. Ces déficits restent une cause
ont ainsi été décrits (super-complexes III2-IV1-2, I-III2 exceptionnelle de cytopathies mitochondriales mais
et I-III2-IV1-4) et il a été proposé qu’une perturbation il est essentiel de les rechercher lorsque la clinique
de la formation des super-complexes ou de la pro- est évocatrice car ils constituent un des très rares
portion entre les complexes isolés et ceux assemblés cas de cytopathies mitochondriales « traitables ». Le
en super-complexes pourrait avoir des conséquences dosage est réalisable par LC/MS/MS (chromatogra-
pathologiques [24]. phie liquide couplée à la spectrométrie de masse
en tandem) dans différents types d’échantillon bio-
Études histologiques logique [25]. Le muscle semble le tissu le plus adapté
Outre une plus grande probabilité d’observer un défi- pour rechercher initialement un déficit primaire en
cit fonctionnel par rapport à d’autres tissus, l’obten- CoQ10, tout en sachant que des déficits secondaires
tion d’un échantillon musculaire permet de réaliser une en CoQ10 sont observables dans d’autres patholo-
étude histologique qui peut se révéler très informative. gies. Le suivi de la supplémentation orale par CoQ10
La présence de fibres rouges déchiquetées (red ragged peut ensuite être réalisé par simple dosage plasma-
fibers, RRF) est un signe fréquent chez l’adulte, mais plus tique [26].
rare chez l’enfant, de myopathies mitochondriales. Les
RRF sont mises en évidence par coloration au trichome Interprétation
de Gomori modifié et correspondent à une accumula- Les études spécifiques de la CR sont très informa-
tion de mitochondries à la périphérie des fibres. Il est tives et permettent d’orienter ou de confirmer le
réalisé également le marquage immuno-histo-enzymolo- diagnostic moléculaire. Cependant, il faut toujours
gique de l’activité des complexes II (SDH) et IV (COX) garder à l’esprit que ces altérations de la CR peuvent
pour la recherche de fibres SDH- et/ou COX-négatives. être secondaires. En effet, le fonctionnement mito-
Ces anomalies histologiques ne sont pas pathognomo- chondrial étant au cœur du métabolisme cellulaire,
niques mais constituent une preuve supplémentaire toute perturbation de celui-ci est susceptible de
pour investiguer une myopathie mitochondriale [12] modifier les activités de la CR. Ainsi des anomalies
(figure 5). fonctionnelles de la CR ont été décrites dans d’autres

Figure 5. Anomalies histologiques typiques des myopathies mitochondriales.


© service de Biochimie CHU Bicêtre

A : Fibres rouges déchiquetées (RRF, red ragged fibers).


B : Fibres négatives pour le marquage immuno-histo-enzymologique de la cytochrome c oxydase (ou COX, complexe IV).

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pathologies, neuromusculaires mais aussi hépatiques Interprétation


[27,28]. Par conséquent, tant que l’étude moléculaire Tout comme les études fonctionnelles, l’analyse de
n’a pas retrouvé de variant pathogène expliquant le la quantité et de la qualité de l’ADNmt est indis-
déficit fonctionnel observé, le diagnostic formel de pensable à l’étude des cytopathies mitochondriales
cytopathie mitochondriale ne doit pas être posé. mais se heurte aux mêmes écueils. Une déplétion de
À l’inverse, une étude fonctionnelle ne retrouvant l’ADNmt doit faire rechercher des mutations dans
pas d’anomalies ne doit pas faire exclure d’em- les gènes nucléaires impliqués dans la biosynthèse de
blée l’hypothèse d’une cytopathie mitochondriale, l’ADNmt mais peut aussi être secondaire à d’autres
celle-ci pouvant s’exprimer différemment selon les pathologies [27,28]. Si la présence d’une délétion
tissus. Selon le contexte clinique, la poursuite d’in- unique de grande taille oriente facilement vers cer-
vestigations fonctionnelles sur d’autres tissus ou tains syndromes mitochondriaux, l’interprétation de
d’études moléculaires peut être alors parfaitement la présence de délétions multiples est plus délicate.
justifiée. Enfin, comme pour de nombreux paramètres Un défaut dans les gènes codant pour la maintenance
biologiques, de mauvaises conditions pré-analytiques de l’ADNmt est alors à rechercher, tout en sachant
(notamment un délai dans la congélation des que l’accumulation de délétions de l’ADNmt
biopsies) peuvent induire des déficits est aussi une caractéristique du vieillisse-
artéfactuels. ment musculaire normal [31].

Étude de l’intégrité L’analyse de la Places respectives


de l’ADN des analyses
mitochondrial quantité et de la biochimiques
qualité de l’ADNmt est et moléculaires
L’étude de l’intégrité de l’ADNmt
comprend la recherche d’ano- indispensable à l’étude Avant l’utilisation récente en rou-
malies quantitatives (déplétion) tine des méthodes de séquen-
et qualitatives (grandes délétions)
des cytopathies çage nouvelle génération (NGS),
qui sont le signe d’un défaut dans mitochondriales les places respectives des études
les fonctions de biosynthèse et de biochimiques et moléculaires dans
maintenance de l’ADNmt. la démarche diagnostique des cyto-
pathies mitochondriales étaient assez
Recherche de déplétion claires. Schématiquement, devant des signes
La recherche de déplétion (diminution du nombre cliniques orientant vers un syndrome connu, la
de copies d’ADNmt) est réalisée par PCR quantitative recherche directe de l’origine moléculaire (mutations
(qPCR) avec un couple d’amorces situées sur l’ADNmt ponctuelles ou grande délétion de l’ADNmt ; séquen-
et un couple d’amorces situées sur l’ADNg pour nor- çage par technique Sanger d’un gène nucléaire ciblé)
maliser au nombre de cellules [29]. La déplétion est était totalement justifiée. En l’absence d’association
définie par une quantité résiduelle d’ADNmt inférieure syndromique évidente, la réalisation des études fonc-
à 30-40 % de la normale [30]. La recherche de déplé- tionnelles permettait d’identifier le ou les complexes
tion est plus informative sur des tissus à renouvelle- atteints. Ainsi, en cas de déficit isolé d’un complexe, des
ment relativement lent (muscle, foie) que sur ceux à mutations étaient recherchées dans les gènes nucléaires
renouvellement rapide (lymphocytes, culture primaire ou mitochondriaux les plus fréquemment mutés pour
de fibroblastes). ce complexe. En cas de déficit multiple, l’ADNmt était
séquencé, notamment à la recherche de mutations sur
les gènes codants les ARNt et les ARNr et surtout
Recherche de délétions lorsqu’une transmission maternelle était suspectée.
La recherche de délétions de grandes tailles de
Enfin, la présence de délétions multiples ou de déplé-
l’ADNmt est effectuée par une technique de PCR
tion de l’ADNmt orientait vers les gènes nucléaires
long range. Cette technique utilise une polymérase
impliqués dans la réplication de l’ADNmt (principale-
spécifique permettant l’élongation sur des frag-
ment POLG, POLG2, TWNK) ou la régulation du pool
ments de plusieurs milliers de bases. L’association
de nucléotides (principalement DGUOK, TK2, RRM2B,
de deux couples d’amorce permet d’amplifier la
SUCLA2, MPV17) [32].
totalité des 16 569 bases de l’ADNmt. La présence
de produits de PCR de tailles inférieures à celles La généralisation du NGS a considérablement fait évoluer
attendues est le signe d’une délétion de l’ADNmt. les pratiques et l’extension des analyses d’exome à
La délétion peut être unique ou multiple (plusieurs but diagnostique va encore les bouleverser. À l’heure
bandes) et n’est pas nécessairement présente dans actuelle, la recherche moléculaire ciblée lors de cas
tous les tissus, ce qui n’oriente pas vers les mêmes syndromiques est encore une stratégie efficace, rapide et
causes moléculaires. peu coûteuse, même si de nouvelles causes moléculaires

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Cytopathies mitochondriales

sont régulièrement décrites. Dans les autres cas, la Points à retenir


recherche de mutations causales se porte d’abord sur
l’ADNmt (séquençage de la totalité de l’ADNmt par ◗tLes cytopathies mitochondriales sont dues à des
NGS) puis sur les gènes nucléaires responsables de mutations de l’ADN mitochondrial ou de l’ADN
cytopathies mitochondriales dont la liste ne cesse de génomique.
◗tUn bilan RedOx (lactate, pyruvate, corps cétoniques)
s’étendre. En France, les panels les plus élargis comptent normal ne doit pas faire exclure l’hypothèse d’une
jusqu’à 300 gènes actuellement. Les études fonctionnelles cytopathie mitochondriale.
ne se situent donc plus nécessairement en amont des ◗tLes déficits de la chaîne respiratoire s’expriment
études moléculaires mais plutôt en parallèle, soit pour différemment selon chaque tissu.
◗tLes déplétions (diminutions de la quantité) ou les
déterminer si une analyse moléculaire plus approfondie délétions multiples de l’ADN mitochondrial sont dues à
est justifiée, soit pour valider la pathogénicité des variants des mutations dans les gènes nucléaires impliqués dans la
de signification inconnue identifiés par NGS. QQ maintenance de l’ADN mitochondrial.
◗tSeule l’identification d’une mutation à la pathogénicité
prouvée permet d’affirmer le diagnostic de cytopathie
mitochondriale, de nombreuses pathologies pouvant
Liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens causer des déficits secondaires de la chaîne respiratoire.
d’intérêts.

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