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Chapitre 4 : Le métabolisme de

l’alcool
L’alcool éthylique, ou éthanol, est un nutriment non indispensable, et toxique pour
l’organisme.
Les conséquences de sa consommation varient selon son importance et ses modalités
d’usage (excessif ou non, aigu ou chronique) et dépendent de nombreux facteurs
environnementaux et individuels.
Alors que les aliments et les boissons non alcooliques sont modifiés par les enzymes
sécrétées par les glandes digestives, il n’en est pas de même pour l’alcool éthylique.
Il passe dans le sang pour être diffusé dans tout l’organisme, principalement dans les
organes pourvus de nombreux vaisseaux, comme le foie et le cerveau.
Dans une faible proportion, moins de 10 %, l’alcool est éliminé par les poumons via l’air expiré,
par les reins via l’urine, et par les glandes sudoripares via la sueur.
Tout l’éthanol restant dans l’organisme est métabolisé par oxydation pour être éliminé.

ABSORPTION ET DIFFUSION DE L’ALCOOL


L’éthanol (CH₃,CH₂OH) est un composé aliphatique de faible poids moléculaire, légèrement
soluble dans les lipides, et très miscible à l’eau.
Grâce à ses propriétés, Il est rapidement absorbé par simple diffusion.
Lente au niveau gastrique, cette absorption s’effectue essentiellement (environ 75 %) au
niveau de l’intestin (duodénum et Jéjunum).
La concentration plasmatique en éthanol est maximale en 45 minutes si le sujet est à jeun,
et en 90 minutes lorsque l’alcool est ingéré au cours d’un repas.
La distribution de l’éthanol après absorption se fait en quelques minutes vers les organes
très vascularisés comme le cerveau, les poumons et le foie.
L’éthanol est éliminé selon deux mécanismes :
Il est excrété tel quel, ou métabolisé par oxydation. L’élimination est sous forme inchangée,
qui concerne moins de 10 % de l’éthanol ingéré, s’effectue par l’air expiré, les urines et la
sueur.
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L’essentiel du métabolisme de l’éthanol a lieu dans le foie, mais d’autres tissus (notamment
la muqueuse gastrique) peuvent participer à son oxydation.
L’éthanol subit un effet dit de « premier passage », c’est-à-dire qu’une fraction est
métabolisée avant d’atteindre la circulation générale.
Ce premier métabolisme intervient au niveau de la muqueuse digestive et du foie.
L’effet de premier passage concernerait au maximum 20% de la dose d’éthanol ingérée.
Plus de 80 % de l’alcool ingéré pénètrent donc dans la circulation générale sous forme
d’éthanol et sont ensuite métabolisés au niveau hépatique.
Le foie permet donc la détoxification de l’alcool.

II. Biochimie métabolique / Chapitre 4 : Le métabolisme de l’alcool 1.


LE MÉTABOLISME DE L’ALCOOL
Métabolisme oxydatif de l’alcool
L’éthanol est toxique, et doit donc être dégradé et éliminé en priorité. Presque tout l’alcool est
métabolisé par oxydation dans le foie.
Il existe trois systèmes enzymatiques métabolisant l’éthanol : celui de l’ADH, alcool
déshydrogénase, le MEOS, « microsomal ethanol oxydizing system «, et la catalase.

+ La voie principale, la voie de l’alcool déshydrogénase, voie de l’ADH


La voie de l’alcool déshydrogénase a lieu dans le cytosol des hépatocytes, et à moindre
degré dans les cellules de la muqueuse gastrique et rénale.
Cette voie est celle qui est la plus utilisée, elle oxyde environ 75 % de l’éthanol absorbé.
Avec l’aide d’une enzyme, l’alcool déshydrogénase, l’ADH, métalloprotéine à zinc, ainsi
qu’avec le cofacteur MAD⁺, s’effectue la réaction d’oxydation de l’éthanol en acétaldéhyde :

NAD+ NADH, H+
CH3CH2OH CH3CHO
éthanol alcool déshydrogénase acétaldéhyde

Les ADH sont des enzymes ubiquitaires ayant de multiples substrats endogènes et
exogènes : elles catalysent l’oxydation de différents alcools (éthanol, glycérol, rétinol,
alcoolsstéroïdes).
Cette voie est contrôlée par la disponibilité en NAD⁺.
Ce système n’est pas adaptable, c’est-à-dire qu’il ne peut pas accroître son activité (en
moyenne 1,6 g d’éthanol oxydé par kilogramme de poids corporel en 24 heures, soit environ
1,4 I de vin pour un homme de 70 kg).

+ La voie MEOS, « microsomal ethanol oxydizing system »


Lorsque la voie principale de l’ADH est saturée, en général pour une alcoolémie
(concentration d’éthanol sanguin) supérieure à 0,5 g/L, une voie accessoire, la voie MEOS, se
met également en route.
Cette voie est en fait inductible par une consommation importante d’alcool.
La voie du MEOS a lieu dans le réticulum endoplasmique lisse des hépatocytes, et à moindre
degré dans les cellules nerveuses.
Comme pour la voie de l’ADH, elle produit de l’acétaldéhyde par oxydation de l’éthanol,
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grâce à des hydroxylases de la famille des cytochromes p450, dont la plus importante
dans ce système est la CYP2E1 (c’est l’activité de cette enzyme qui est inductible par une
consommation Importante d’éthanol).
Elle utilise le MADPH, H⁺ comme cofacteur :

NADPH, N+ NADP+
CH3CH2OH + O2 CH3CHO + 2 H2O
éthanol MEOS acétaldéhyde

II. Biochimie métabolique / Chapitre 4 : Le métabolisme de l’alcool 2.


Cette voie permet, en moyenne, l’oxydation de 2 g d’éthanol par kilogramme de poids
corporel en 24 heures, soit environ 1,8 I de vin pour un homme de 70 kg.
Au-delà de cette quantité, on se trouve dans le cas d’une consommation excessive d’alcool,
considérée comme chronique.

+ La voie de la catalase
Si l’alcoolisation est vraiment trop forte (cas du buveur excessif et de l’alcoolisme chronique),
et donc, que les voies de l’ADH et du MEOS sont saturées, la voie d’oxydation par la catalase
entre en jeu.
La catalase est une enzyme qui est présente dans de nombreux tissus, mais surtout dans le
foie. On la trouve au niveau des peroxysomes.
Cette voie est dépendante de la disponibilité en eau hydrogénée (H₂O₂), qui provient
du métabolisme intermédiaire comme la dégradation des bases puriques, de la
transformation de l’hypoxanthine en xanthine ou lors de l’oxydation des groupements thiols
(SH) de la cystéine en glutathion.
Comme les 2 voies précédentes, elle permet l’oxydation de l’éthanol en acétaldéhyde :

CH3CH2OH + H2O 2 CH3CHO + 2 H2O


Catalase
éthanol acétaldéhyde

+ Devenir de l'acétaldéhyde
C'est sous cette forme métabolique intermédiaire que l'alcool est le plus dangereux pour
l'organisme.
En effet, l'acétaldéhyde est très toxique pour l'organisme : altérations cellulaires,
métaboliques et membranaires.
C'est pour cette raison que l'organisme le métabolise au plus vite, quelle que soit la voie par
laquelle il a été formé, en acétate.
L'oxydation de l'acétaldéhyde en acétate est catalysée par l'acétaldéhyde déshydrogénase,
l'ALDH, qui est présente dans le cytosol des cellules hépatiques.
Cette enzyme utilise le MAD⁺ comme cofacteur :

NAD+ NADH, H+
CH3CHO + H2O CH3COOH
acétaldéhyde acétal
acétaldéhyde déshydrogénase
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L’acétate va alors subir une dernière réaction, dans le cytosol des hépatocytes, qui produira
de l’acétylCoA, et consommera un ATP, grâce à l’acétate thiokinase :

CH3COOH + CoA-SH + ATP CH3CO-SCoA + ADP + Pi


acétate acétate thiokinase acétylCoA

II. Biochimie métabolique / Chapitre 4 : Le métabolisme de l’alcool 3.


+ Conséquences sur le métabolisme énergétique
L’acétylCoA produit peut ensuite entrer dans le cycle de Krebs.
Le bilan de son oxydation montre que la molécule d’éthanol produit 18 liaisons riches en
énergie sous forme d’ATP, ce qui en fait un excellent rendement énergétique.
Mais ce métabolisme, principalement hépatique, ne possède pas de régulation spécifique,
et il se traduit par une élévation du rapport NADH, H⁺ / HAD⁺, qui perturbe toutes les autres
voies métaboliques en équilibre avec ce coenzyme.
De sorte que l’ingestion massive aiguë ou chronique d’alcool se manifeste par une toxicité
élevée.
Les voies métaboliques concernées par les effets métaboliques de l’alcool sont
nombreuses :
+ Ralentissement de la β-oxydation et du cycle de Krebs
+ Activation de la lipogenèse
+ Activation de la synthèse du cholestérol
+ Ralentissement de la néoglucogenèse

Métabolisme non oxydatif de l’alcool


Le métabolisme non oxydatif de l’éthanol est très minime dans l’organisme, mais il peut
avoir des incidences sur le plan pathologique en cas d’alcoolisme chronique.

+ Formation d’esters éthyliques d’acides gras


L’éthanol est capable de réagir avec les acides gras à longues chaînes pour former des
esters éthyliques, ou FAEE (« Fatty acyl ethyl ester »), que l’on peut retrouver, et qui persistent
assez longtemps, dans le sérum ou les cheveux.
Cette réaction d’estérification est catalysée par la FAEE synthétase.
Ces esters éthyliques vont alors provoquer des dégâts tissulaires.

+ Formation de phosphatidyl éthanol


La seconde voie métabolique non oxydative aboutit à la formation de phosphatidyl
éthanol, qui est très faiblement métabolisé, et peut s’accumuler dans l’organisme en cas
d’alcoolisme chronique.
Cette réaction est catalysée par la phospholipase D, et perturbe donc les signaux lipidiques
membranaires sous sa dépendance.
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II. Biochimie métabolique / Chapitre 4 : Le métabolisme de l’alcool 4.

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