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Note du traducteur

En Anglais, le terme "futtock" du vieil anglais "foot-hook" (crochet de


pied) désigne une allonge. Le terme technique Français signifiant genou n'a pas
de correspondance directe.

Dans certains cas le genou est simplement dénommé " first futtock", dans
d'autres, il est nommé "naval timber" (madrier naval). Dans certaines phrases,
"naval timber" désigne une allonge basse, que l'on retrouve aussi dans le texte
original sous la forme "low futtock". Il devient donc très difficile parfois
d'effectuer la traduction de manière simple, lorsque l'auteur emploi des phrases
où il parle des "low futtocks" qui peuvent être où comprendre le genou et la
première allonge où les allonges basses, où bien quand il emploi l'expression
"naval timbers" qui correspond au mot genou et parfois aux allonges inférieures.
Le "top timber" correspondant à l'allonge de sommet.

Dans un but de clarté et de simplification, le terme genou sauf exception,


n'a pas été employé dans la version française du texte. Les éléments qui
composent la membrure sont dénommés en utilisant une traduction littérale,
c'est-à-dire en respectant la dénomination anglaise. Ce procédé simple permet
de ne pas créer de mauvaise interprétation.

La numérotation des pages située en haut et à droite de celles-ci


correspond à la numérotation utilisée par l'auteur de la thèse. Les bas de pages
correspondent au présent document.
H.Sasso

Texte Anglais Texte Français Désignation usuelle française


Futtock Allonge Allonge
Genou, allonge de varangue où de
First Futtock Première allonge
fond
Second Futtock Deuxième allonge Première allonge
Third Futtock Troisième allonge Deuxième allonge
Lower Futtock Allonge inférieure Genou où allonge inférieure
STRUCTURE DES VAISSEAUX DE GUERRE
AU XVII SIÈCLE EN ANGLETERRE ET DANS LES PAYS DE
L'EUROPE DU NORD

Une Thèse
de
KROUM NICKOLAEV BATCHVAROV

Université Texas A&M

MASTER OF ARTS

Mai 2002

Major Subject : Anthropology

-2-
THE FRAMING OF SEVENTHEENTH-CENTURY MEN-OF-WAR IN
ENGLAND AND OTHER NOTHERN EUROPEAN COUNTRIES

A Thesis
by
KROUM NICKOLAEV BATCHVAROV

Submitted to the Office of Graduate Studies of


Texas A&M University
in partial fulfillment of the requirements for the degree of

MASTER OF ARTS

Mai 2002

Major Subject : Anthropology

-3-
III
RÉSUMÉ

Les membrures des navires de guerre du XVIIème


en Angleterre et dans les Pays de L'Europe du Nord. (Mai 2002)

Kroum Nickolaev Batchvarov, B.A., Park Collège

Chair of advisory committee : Dr. Kevin Crisman

L'archéologie sous-marine a énormément enrichi notre connaissance de la


construction des navires, mais jusqu'ici la plupart des études ont été consacrées à
des épaves antiques. Le XVIIème siècle n'a attiré que très peu d'attention. Aucune
étude détaillée de la charpente des navires de cette époque n'a été publiée. Quand le
sujet est mentionné, il s'agit généralement d'une vue d'ensemble superficielle,
souvent imprécise et manquant toujours de détails.
Cependant, il existe une documentation importante se présentant sous forme de
traités de charpente navale, de devis, de correspondances, de modèles (maquettes),
de peintures, de gravures, de plans et de vestiges archéologiques. Un certain
nombre de tentatives récentes tentent de décrire les membrures du navire du
XVIIème siècle, mais personne n'a consacré d'étude sur ce sujet. Le livre le plus
important est probablement le travail de Peter Goodwin, Charpente of the English
man-of-war 1650-1850. Brian Lavery parle de construction navale dans ses livres
Ship of the line, volume II, et Susan Constant et il décrit la reconstitution du
Résolution, lancé en 1667, dans Deane's doctrine of navale architecture. Lavery
penche pour une charpente "multi-allonges", soutenant le point de vue que les
membrures n'étaient pas séparées par des espaces vides. Goodwin propose un
modèle très semblable, mais avec des membrures doubles et un assemblage de
pièces par écarts et non par raboutage. Cependant, les modèles et certains
documents explicatifs montrent différentes structures de membrures et de jonctions
des varangues et des allonges.

-4-
IV

Pour la plus grande partie de cette période, toutes les sources contemporaines
admettent qu'un maximum de deux allonges ont été utilisées.

Les pages suivantes essayent de systématiser les témoignages disponibles et,


sans revendiquer le fait d'avoir le dernier mot sur le sujet ou d'en avoir épuisé
toutes les sources, montrent le développement des membrures dans les navires de
guerre durant le XVIIème. L'accent sera mis sur les vaisseaux de guerre anglais, car
les documents à leur sujet sont plus facilement accessibles et parce que les navires
anglais du XVIIème, à la différence de ceux du XVIIIème siècle, ont été bien conçus.*

NDT : * Par cette phrase, l'auteur entend (je cite) : "La conception des navires anglais au XVIII est généralement
considérée comme étant pauvre - unités trop petites et trop lentes - par rapport aux navires français. Ceci est sensé
être du partiellement au conservatisme. Au XVII, la construction navale anglaise était beaucoup plus dynamique.
Charles II était intéressé par sa flotte. Il avait compris lui-même comment dessiner un navire et savait ce qu'il pouvait
en attendre. Il a conseillé personnellement ses constructeurs et les a soutenus dans les nouvelles expérimentations."

-5-
V

En mémoire de mon père, Nikolaïev Batchvarov.

-6-
VI
REMERCIEMENTS

Mon défunt père est à l'origine de mon intérêt pour les navires du XVIIème siècle. Il
fut mon tout premier instructeur pour la pratique de la charpente navale et a réussi à
me faire prendre conscience de la notion des qualités de marin. Ma dette envers lui
est énorme.

J'ai eu la grande chance d'étudier sous la directive du Dr. Fred Hocker et le


remercie de ce qu'il m'a appris. Le Dr. Kevin Crisman a été une source importante
d'encouragement. S'il y a quelque valeur dans ce travail c'est à ces conseils que je le
dois. Il a été un pilier dans ce travail de recherche.

M. Jon Adams a consacré beaucoup de son temps à commenter mon travail et


à m'expliquer la conception de la structure des navires du XVIIème siècle. Il m'a
désigné l'origine probable des cales d'écarts et m'a encouragé à chercher d'autres
explications en plus de la théorie traditionnelle sur la disponibilité de la matière
première pour les changements de membrure qui a eu lieu au cours du XVIIème.

Je tiens à remercier M. Brian Lavery du Musée Maritime national de Greenwich


pour avoir trouvé le temps de me recevoir deux fois et pour avoir pris avec
bienveillance des dispositions me permettant de voir certaines des maquettes de
réserve. Ses conseils m'ont été très profitables.

-7-
VII

M. Peter Goodwin, le Conservateur du HMS Victory, a été très aimable de


m'incorporer dans son emploi du temps très chargé suite à une demande
honteusement tardive. Il a pris le temps de discuter de mes théories et de me
conseiller. Sa connaissance encyclopédique fut une inspiration. L'information qu'il
m'a donnée a conforté mon sentiment sur le fait que les raisons des changements de
structure à la fin du XVIIème doivent être trouvées dans la recherche des
performances. Sa gentillesse et ses encouragements ont été très appréciés. Son
intérêt pour mon travail est des plus flatteur.

Je voudrais remercier le Dr. Peter Le Fevre pour ses réponses bienveillantes


à mes questions sur la liste d'échantillonnage du programme de 30-navires.

-8-
VIII

TABLE DES MATIÈRES Page

RESUME III

DEDICACE V

REMERCIEMENTS VI

TABLE DES MATIERES VIII

TABLE DES DESSINS X

LISTE DES TABLEAUX XII

CHAPITRES

I Introduction 1

II Charpente des navale dans la première moitié du XVII ème 13

III Charpente des navale dans la deuxième moitié du XVII ème 27

IV Ebauches et dessins 64

V Maquettes marines 77

VI Témoignage archéologique des épaves du XVIIème siècle 91

VII Charpente navale hollandaise 106

VIII Charpente française danoise et suédoise 123

IX Manque de bois de construction et membrure double 147

-9-
IX

CHAPITRES Page

X Conclusions 157

Notes 161

Références 168

Curriculum Vitae 174

- 10 -
X
LISTE DES DESSINS

DESSIN Page

1 les Parties d'une membrure où couple de charpente 5

2 Le pas de couple, maille (Room & space) 7

3 Cale d'écart 10

4 Interprétation du texte de Smith 16

5 Interprétation alternative du texte de Smith 18

6 Membrures à allonge unique 21

7 Membrures du Prince Royal 24

8 Membrures avec deux allonges et "madriers navals séparés" 26

9 Membrures avec une allonge 31

10 Membrures à deux allonges 33

11 Membrure d'après Peter Pett 35

12 Espaces entres membrures 38

13 Membrures double raboutées et recouvrement par écarts 48

14 Membrures doubles avec cales 51

- 11 -
Xl

DESSIN Page

15 Section d'un troisième rang 65

16 "Mailles" sur l'un des sixièmes rang de Keltridge 68

17 Section d'un sixième rang d'après Keltridge 72

18 Section du Mortar de 1693 76

19 Maquette non-bordée d'un troisième rang de Parlementaire 81

20 La méthode de charpente de Norderkvartier 111

21 La méthode de charpente navale de Maaskant 119

22 Un trois-ponts français de L 'Album de Colbert 125

23 Dannebroge de 1691 142

24 Un navire sur les tins à Stockholm 146

- 12 -
XII
LISTE DE TABLEAUX

TABLEAUX Page

1 Sections de William Keltridge 41

2 Sections des troisièmes rangs 45

3 Sections des quatrièmes rangs de 60-canons 49

4 Sections des quatrièmes rangs de 50-canons 52

5 Comparaison des sections des quatrièmes rangs 53

6 Sections des sixièmes rangs 53

7 Sections de brûlots 55

8 Comparaison des sixièmes rangs et des brûlots 56

- 13 -
1

CHAPITRE I

INTRODUCTION

L'archéologie sous-marine a énormément enrichi nos connaissances sur la


construction des navires depuis les premiers jours jusqu'à présent. Pour l'instant,
beaucoup d'études d'épaves de navires antiques ont été faites, mais les navires
médiévaux ont été étudiés en nombre insuffisant pour nous donner une idée de
leurs principaux développements. La charpente navale post-médiévale a aussi été
beaucoup étudiée. Le baleinier Basque San Juan, les épaves du Cattewater et du
Mary Rose nous apportent une connaissance précise, sur les réalités de la charpente
elle-même et aussi une compréhension sur la conception de ces navires. Le
XVIIIème siècle est raisonnablement bien documenté, tant pour la construction des
navires que pour leur conception. Pour beaucoup d'épaves, les dessins originaux
sont toujours préservés. Il y a même des exemples de vaisseaux de guerre du
XVIIIème siècle toujours existants : HMS Victory et USS Constitution.

Le XVIIème siècle est la période qui a le moins suscité d'études.1 Il est


ironique de constater que grâce aux travaux d'archéologie sous-marine, nous
connaissons plus la charpente navale romaine, que cette période plus récente.
Quelques chercheurs ont fait des études et ont fait carrière dans la restauration des
navires2. Une étude du développement du 50 canons de quatrième rang dans la
marine anglaise possède quelques chapitres consacrés au XVIIème siècle3 .

__________________________________
Cette thèse suit la maquette du Miroir du Marin.

- 14 -
2

Depuis que la construction de ces navires a commencé, aucune étude comparative


n'a été publiée. Quand les navires sont mentionnés, c'est au plus, une vue
d'ensemble superficielle, souvent très imprécise. D'autres sources de documents
assez vastes subsistent et peuvent nous éclairer sur le sujet. L'étudiant ayant accès
au plus de documents sera peut-être celui qui prendra pour thème la marine
anglaise, mais même sur ce sujet il devra saisir les maigres avantages des
manuscrits disponibles. D'Angleterre nous sont parvenus au moins quatre traités de
charpente navale, quelques traités de gréement, des devis, des autobiographies, des
correspondances personnelles, des modèles, des peintures et des gravures, des
dessins et comme derniers témoins, mais non des moindre, des vestiges
archéologiques. Tous ces documents doivent être rassemblés et étudiés en détail.

Il y a, cependant certaines limites. Les textes ne sont pas toujours très clairs
et il y a plusieurs façons de les interpréter. Les lignes d'eau ne sont pas toujours
parfaitement définies, non plus. Les modèles "d'arsenal" de navires identifiés
semblent refléter les pratiques de charpente de la période, mais il a été dit plusieurs
fois qu'elles ont été simplement construites avec certaines conventions, qui
n'avaient pas de liens avec la réalité. Elles ne peuvent donc être acceptées comme
des témoignages absolus4. Enfin, le grand potentiel que représente l'archéologie
navale doit encore être entièrement analysé.

Les pages suivantes essayent de rationaliser les témoignages disponibles et,


sans revendiquer le fait d'avoir le dernier mot sur le sujet ou d'en avoir épuisé
toutes les sources, montrent le développement des structures des membrures dans
les navires de guerre durant le XVIIème siècle.

- 15 -
3

L'accent sera mis sur les vaisseaux de guerre anglais, car les documents à
leur sujet sont plus facilement accessibles et parce que les navires anglais du
XVIIème, à la différence de ceux du XVIIIème siècle, ont été bien conçu*. Entre
1660 et 1688 la charpente navale s'est développée rapidement avec le soutien du roi
Charles II et du Duc d'York, qui devint le roi James II. Pendant les règnes des
deux frères Anglais, la conception et la construction des navires furent un champ
d'innovations, sans aucun souci de conservatisme5.

La nation anglaise a eu au XVIIèmesiècle les rois qui ont rendu des services
plus grands à la flotte qu'Henry VIII et Elisabeth I au XVIème siècle. Ce fut
Charles Ier (1624-1649) qui ordonna la construction du premier véritable trois-
ponts du monde. À l'époque tous les professionnels ont prétendu qu'un tel navire
était non seulement peu pratique, mais aussi impossible à construire et certainement
inutile une fois terminé. Les guerres anglo-hollandaises devaient prouver aux
incrédules leur erreur et démontrer la vision juste du roi. Sous Charles II (1660-
1685) "l'île nation" a peut être eu son monarque le plus intelligent et le plus
capable. Sa tolérance religieuse envers les catholiques a certainement fait qu'il ne
serait jamais reconnu comme il mériterait de l'être. Mais sous ses conseils
intelligents la flotte est devenue une institution nationale. C'était grâce à lui et à
James, le Duc d'York, que la marine est devenue l'armée la plus puissante de
l'Angleterre, comme l'infanterie l'était pour les Français. Sans aucun doute, pour
l'aristocratie, l'attrait du service en mer était dû au Duc lui-même, qui a commandé
la flotte dans les batailles. Si ce n'était lui, c'était un autre membre de la famille
royal des Stuart - le prince Rupert du Palatinat, un des commandants et des marins
les plus expérimentés de son temps. On devrait donner beaucoup de crédit au roi,
qui fut le pouvoir dirigeant de l'expansion et du professionnalisme croissant de la
NDT * voir page IV

- 16 -
4

marine. Ce que l'on a par habitude entièrement accordé au "Clerk of the Acts", plus
tard secrétaire de l'amirauté, Samuel Pepys. Ces dernières années les chercheurs
ont finalement commencé à réévaluer les rôles de Pepys et de Charles II au
détriment du premier et au crédit du second.

La contribution de Charles II au renforcement de sa marine aurait été tout à


fait suffisante même s'il s'était limité à un simple soutien et à l'intérêt qu'il porta au
corps des officiers. Sa capacité exceptionnelle en tant que marin, sa compréhension
technique profonde de la charpente navale et de la conception de celle-ci l'a fait
s'immiscer souvent en faveur de constructions de navires plus grands et plus
puissants. Même un ennemi des Stuarts comme l'Évêque Whig William Burn ne
pourrait trouver de plus grand défaut à Charles II que de dire "qu'il comprenait le
travail du constructeur de navires mieux que ne pouvait le faire un prince"7.

Avant d'essayer de déterminer comment les navires ont été construits au


XVIIème siècle, il est nécessaire de définir quelques termes de charpente navale. Au
cours des temps, certains termes ont changé de signification, d'autres ont
complètement disparu. Dans ce texte ils seront définis et employés avec le sens en
usage au XVIIème. La lecture des documents d'époque permet de développer une
idée claire de la signification des termes usités. De plus, quelques auteurs de
donnent eux-mêmes certaines définitions.

- 17 -
5

Figure 1. Les différentes parties d'une membrure

Légende : 1- Varangue 2- Allonge 3- Allonge de revers


4- Tête de varangue 5- " Creux au maître-couple"

La courbure donnée aux membrures détermine la forme d'un navire. Elles


s'étendent de la quille du navire aux sommets des côtés de la coque. Il est clair que
l'on ne peut trouver aucune pièce de bois d'un seul tenant qui pourrait convenir pour
la longueur entière de ces courbes composées. Les membrures ont donc dû être
créés par assemblage d'éléments différents. En commençant par la quille, la
membrure est constituée d'une varangue, d'un certain nombre d'allonges qui
forment les flancs du navire au-dessous de la ligne de flottaison et d'allonges de
sommet (où de revers), qui s'étendent au dessus jusqu' aux sommets des côtés.

- 18 -
6

L'ensemble des pièces de bois formant une membrure est parfois appelé couple (un
couple est une membrure avec deux couches de bois en continu, d'où son nom -
figure 1). La position et le nombre des éléments de charpente qui forment une
membrure ont subi de grands changements pendant le XVIIème siècle et concernent
le sujet de cette étude.

Le nombre de couples assemblés sur un navire dépend du pas de pose. Le pas


(room & space) étant égal à la distance du flanc d'un couple au flanc identique du
couple suivant. Habituellement cette mesure était effectuée de la face d'une
varangue, à la même face de la varangue suivante le long de la quille (figure 2). La
"pièce(room)" est la partie occupée par le bois de charpente et "l'espace(space)" est
la partie vide entre deux bois de charpente. Le pas se compose d'une varangue,
d'une allonge et de n'importe quel espace (vide). Les documents de l'époque ne sont
pas cohérents dans l'utilisation du terme. Certains devis de construction de navires
y font référence en tant que "la pièce et l'espace," d'autres comme "la pièce de bois
de charpente et l'espace." Il est probable que la deuxième version est correcte, mais,
ici, comme dans la plupart des documents originaux, l'expression "la pièce et
l'espace" (room&space) ou "pas de couple" sera utilisée. Dans la traduction
française, il sera noté : pièce(room), maille et pas.

Les varangues sont des madriers fixés sur la quille formant un angle droit
avec celle-ci. Leurs extrémités montent vers les côtés du navire. Les extrémités
relevées ont été appelées, en anglais "wrongheads". Il n'y a pas de grande
cohérence dans l'utilisation des désignations ainsi que dans l'emploi d'autres termes
utiles à la description de la structure des navires à cette époque. D'autres
dénominations anglaises utilisées au XVIIème sont "wrungheads" ou "wrungs", ou
"rungs" et "rungheads", ce qui signifie : tête de varangue, accotar ou encore clé
(runghead filling) selon le cas. Les varangues ont été aussi appelées madriers de
fonds ou de sol.

- 19 -
7

Les allonges sont les éléments de structure qui s'étirent de la tête de la


varangue au point de largeur maximum de la coque.

A ce point les allonges sont connectées avec les allonges supérieures (allonges de
sommet ou de revers), lesquelles forment les flancs supérieurs du navire. Les
allonges étaient souvent appelées "crochets de pied" (foot-hooks en vieil anglais
d’où futtocks : allonges).

Figure 2. Remplissages et vides

Légende : 1- Quille 2- Varangue 3- Allonge 4- Pas : "Pièce et maille" (Pas de couple)

On nommait écarts les recouvrements partiels de ces allonges composant la


membrure. Le mot avait plusieurs significations même au XVIIème siècle. Dans la
structure de la coque, le terme est utilisé dans le sens d'un madrier lié le long d'un
autre. La longueur des écarts correspond à la longueur de ce chevauchement.

- 20 -
8

Un élément de charpente est dit "to give scarph", c'est-à-dire donnant l'écart (clef
d'assemblage) quand celui-ci participe à l'assemblage de deux autres éléments qui
s'encastrent. Le mot est souvent orthographié de deux façons différentes. Il peut
être écrit soit "scarph", soit "scarf". Dans les sources du XVIIème siècle il est plus
généralement noté "scarph" mais parfois dans le même document, ou même, dans
la même phrase, il peut être orthographié des deux manières8.

Les clefs d'empâture commencent à apparaître dans les devis vers les années
1690. Sutherland les décrit comme "un petit morceau de bois de charpente adapté
à un plus grand pour établir la matière nécessaire"9, et nomme aussi : " écarts
d'empâture où taquets d'empâture" (actuellement : Butt-chocks) celles qui se situes
en partie à la tête et en partie au talon de deux éléments jointifs. Ces clés sont
utilisées de manière à unir les deux parties et à renforcer la jonction des madriers;
lesquels apparaîtront plus loin, quand le bordé sera posé, et chevillé à travers le
bois de charpente et la clef10. Les clés d'empâture étaient des cales en coin, ou des
blocs de bois utilisés pour le remplissage des jonctions entre les éléments de la
membrure. Ici le terme sera utilisé dans la description d'un raccordement d'éléments
de membrure disposés bout à bout. La moitié du bois sur le côté intérieur d'une
jonction était découpée et enlevée. L'espace vide résultant était rempli par une cale,
qui était alors clouée aux deux éléments de la structure. Ce type de jonction est
souvent appelé cale d'écart ou cale de jonction, de temps en temps aussi appelé
"jonction d'ancrage" (Figure 3).

Il a été dit que la membrure d'un navire est constituée de sa partie basse
(varangues), des côtés (allonges) et des éléments supérieurs sur les flancs (allonges
de sommet ou de revers). Le point où la varangue rejoint le côté a été appelé le
"bombement"(bulge). De nos jours le terme utilisé est le bouchain (bilge). Le côté
est devenu allonges de sommet dans sa partie supérieure, au dessus du point de

- 21 -
9

largeur maximale du couple. La dénomination Anglaise "height of breadth"


(textuellement : hauteur de largeur) où creux au maître-couple était le point au-
dessus de la quille où la membrure atteignait sa largeur maximale. Ce point
correspondait grossièrement avec le niveau du pont principal. Au cours du XVIIème
siècle, il se situait environ à la hauteur de la ligne de flottaison (Figure 1).

Il existe plusieurs descriptions récentes concernant les membrures des


navires du XVIIème siècle, mais personne n'a consacré d'étude spécifique à ce sujet.
Le livre le plus influent est celui de Peter Goodwin : "Charpente of the English
men-of-war 1650-1850". Brian Lavery parle de construction dans "Ship of the
line", volume II, et dans Susan Constant. Il explique sa reconstitution du
Résolution de 1667, dans "Deane's doctrine of naval architecture". Le sujet est
mentionné dans le livre de John S. Steven : "An account of the construction and
embellishment of old time ships".

Lavery favorise l'idée d'une structure "multi-allonges", soutenant le point de


vue que les membrures n'étaient pas séparées d'espaces vides11. Dans Susan
Constant il indique trois allonges par côté dès la première décennie du siècle pour
un navire de 100 tonnes12. Pour le Résolution il donne trois allonges et une allonge
de sommet, déclarant s'être basé sur les grandeurs de Deane et les dessins de 1680
de l'expert Edouard Dummer 13.

- 22 -
10

Figure 3. Cale d'écart.

Légende : 1- Elément de membrure 2- Elément de membrure 3- Cale

- 23 -
11

Goodwin propose essentiellement le même modèle que Lavery introduisant


en plus la notion de couples de remplissage14. Dans sa proposition, les allonges
sont liées à l'aide d'un écart à la tête de la pièce précédente comme cela était
pratiqué au XVIIIème siècle.15 Les écarts, comme l'indique Goodwin, ne sont pas
mentionnés jusqu'aux années 1690. Les membrures de remplissage ne sont pas
mentionnées par les sources contemporaines, non plus. Il est utile de noter que tant
Lavery que Goodwin sont incontestablement des références au niveau de la
construction des vaisseaux de guerre Anglais du XVIIIème siècle. Les méthodes
qu'ils exposent étaient les pratiques courantes de cette époque.

Les schémas proposés n'ont rien de commun avec les maquettes encore
intactes de cette période. Les maquettes ont-elles été représentatives des pratiques
réelles où étaient-elles seulement des objets de décoration stylisés? Tous les
documents d'époque, particulièrement les devis, peuvent offrir des réponses à ces
questions.

L'archéologie sous-marine n'a pas encore commencé à prendre en compte le


potentiel des informations sur les membrures du XVIIème siècle. Très peu d'épaves
ont été excavées et très peu d'entre elles ont été analysées. Beaucoup d'épaves
découvertes sont devenues les victimes des chasseurs de trésor et par conséquent
aucun archivage des structures de coques n'a été effectué. Un assez grand nombre
de navires de la compagnie Hollandaise des Indes ont été découverts et fouillés,
mais dans très peu de cas, les structures en bois ont survécu. Un exemple triste est
celui de la frégate portugaise Santo Antonio de Tanna, perdue en 1697 à
Mombassa, au Kenya. Elle a été partiellement excavée à la fin des années 1970,
mais le gouvernement kenyan a interrompu les fouilles. Les vestiges de la coque
étaient importants et auraient pu, sur un flanc être sauvés jusqu'à la hauteur du pont
inférieur I6.

- 24 -
12

Son gréement et son armement ont été étudiés et les résultats ont été correctement
analysés. Malheureusement, la coque n'a pas reçue le même soin. L'épave du
Dartmouth, perdu en 1690, a longtemps été retenue comme étant l'épave de
référence pour la période du XVIIèmesiècle.17 Hélas, aucun compte rendu final n'a
été publié sur ce navire. Parmi ce potentiel, le plus mal utilisé est l'épave du
vaisseau royal Suédois Wasa. Quarante ans après son sauvetage, le navire est
magnifiquement reconstitué, mais pratiquement rien n'a été publié sur sa charpente.
En somme, à ce niveau, l'archéologie marine est peut-être la source d'information
la moins utile pour la compréhension de la charpente des navires du XVIIème siècle
- une chose triste à souligner pour un candidat à l'archéologie navale.

- 25 -
13
CHAPITRE II

STRUCTURE DES NAVIRES

DANS LA PREMIÈRE MOITIÉ DU XVIIÈME SIECLE

Un certain nombre d'écrits qui nous sont parvenus contiennent les


informations intéressant les pratiques de la construction des charpentes navales
dans la première partie du XVIIèmesiècle. Parmi celles-ci, l'autobiographie de
Phineas Pett, les travaux de Sir Henry Manwayring, ceux du Capitaine John
Smith et deux traités de construction navale.

Smith a écrit sa "Sea-grammar"en 1627 et a consacré un chapitre entier à la


charpente des navires. Ce chapitre donne la définition d'un certain nombre de
termes qui concernent la question relative à cette étude. "The seaman's
dictionnary" de Sir Henry Manwayring a été à l'origine publié en 1622, mais
réimprimé en 1644, 1666 et 1670. Les éditions postérieures confirment non
seulement la popularité du travail, mais aussi sa pertinence. Il est peu probable qu'il
aurait été réimprimé juste pour le plaisir bibliophile si son contenu avait été
démodé. Une lecture du dictionnaire révèle une similitude remarquable avec les
définitions trouvées dans "Sea-grammar" du Capitaine Smith. Comme le
"dictionnary" a été publié plus tôt, il est probable qu'il fut la source du chapitre sur
la construction navale dans "Sea-grammar".

Aucun travail ne donne une description détaillée du montage d'une


membrure où de la courbure d’une allonge, cependant beaucoup de choses peuvent
être déduites des définitions. Smith décrit la construction d'un navire, commençant
par la quille, l'étambot et l'étrave.

- 26 -
14

Il propose alors de mettre la "traverse, appelée, madrier de sol où de terre (la


varangue), en travers de la quille."18 Le premier passage significatif est le suivant :
"Rungheads, ... and doth direct the sweep or moulde of the foot-hookes and navall timbers, for
there doth begin the compasse and bearing of the ship ... those next the keel are called the ground
foot-hooks, the other the upper foot-hooks .... "

…Les têtes de varangues,.. et ce point donne le galbe ou la forme des allonges et des
madriers navals; à cet endroit commence l'enveloppe et l'assise du navire... celles près de
la quille sont appelées allonges de sol (ou de fond), les autres, allonges supérieures ... 19

Manwayring nous donne une information quelque peu semblable, mais avec
quelques détails significatifs manquant dans le Sea-grammar :
.…Rungheads are the heads, or ends of the rung, which are made a little compassing; and to lead
or direct as it were the sweep and mould of the futtocks; for in these rungheads the lines which
give the compasse and bearing of the ship doe begin: also more generally, the outward ends of
the hookes, which are in the same manner compassing, are called rung heads, is also Bolted into
these, and they say, it is bolted fore and aft to the rung heads.

…"Rungheads" sont les têtes, ou extrémités des madriers qui font le "tour"; et guident ou
dirigent l'orientation le galbe et la forme des allonges; car dans ces "rungheads" (têtes de
varangues) commencent les lignes qui donnent l'enveloppe et l'assise du navire : aussi
plus généralement, les bouts extérieurs des "crochets", qui sont formés de la même
manière, sont appelés rung heads, et sont aussi chevuillés dans ceux-ci et l'on dit, chevillé
à l'avant et à l'arrière des rung heads.20

Concernant les allonges, Manwayring indique :

... are those compassing timbers, which give the breadth and bearing of the ship, which are
écarted to the ground timbers; and because no timbers that compasse can be found long enough
to go up through the all the side of the ship, these compassing timbers are écarted one into the
other and those next the keel, are called the lower or ground futtocks, the others are called the
upper Futtocks ....

... sont ces madriers formant l'enveloppe (de la coque), donnant la largeur et l'assise du
navire, qui sont assemblés par des écarts aux madriers de "sol"; et parce que l'on ne peut
trouver aucun madrier assez long pour remonter tout le flanc du navire, ces madriers
faisant le "tour" et assemblés par des écarts les uns dans les autres à partir de la quille,
se nomment les allonges inférieures ou allonges de "sol", les autres sont appelés allonges
21
supérieures...

- 27 -
15

A partir des extraits de textes cités ici, il est évident que le fond du navire est
principalement plat avec les extrémités recourbées – les "wrongheads" ou
"rungheads" selon la source. Smith écrit que ces extrémités sont assemblées aux
allonges par des écarts et Manwayring ajoute que les premières allonges sont
chevillées à l'avant et à l'arrière dans les têtes de varangues. Cela pourrait être un
argument en faveur d’un pré-assemblage. Manwayring parle d'allonges basses et
supérieures, tandis que Smith décrit des allonges et des "madriers navals" (naval
timbers) et indique aussi qu'il y a des allonges de "sol" (ou varangues) et des
allonges supérieures. En même temps, Smith note que la tête de varangue oriente la
courbure des allonges et les "madriers navals". Manwayring ne s'exprime pas sur
les "madriers navals" (naval timbers). Comment ces extraits doivent-ils être
interprétés ?

Smith est un peu plus sophistiqué. Dans son texte, il dit que les têtes de
varangues orientent la forme tant pour les "madriers navals" (naval timbers) que
pour les allonges. Il suggère aussi que les deux soient, d'une façon ou d'une autre
assemblés par des écarts dans les varangues ("ground timbers" dans le texte). Il y a
deux dispositions possibles pour celles-ci. La première, a les allonges raboutées
dans les têtes de varangues, formant ainsi une partie de la forme ou courbure de la
coque. Les "madriers navals" (naval timbers) sont couchés entre les varangues et
servent d'écart aux varangues et aux allonges (figure 4). La seconde disposition est
possible en commutant les positions des allonges et des "madriers navals" (naval
timbers). La chose évidente qui autorise une telle proposition est que l'allonge
inférieure, aussi appelée allonge de sol et l'on peut raisonnablement s'attendre à ce
qu'elle touche le bas du navire. En pesant le pour et le contre, cela semble être
l'interprétation correcte (figure 5).

- 28 -
16
Figure 4. Interprétation du texte de Smith.

Légende : 1- Quille 2- Varangue 3- "Madrier naval"


4- allonge 5- allonge de sommet

- 29 -
17

Nous trouvons un témoignage complémentaire dans l'écrit anonyme : Treatise on


shipbulding around 1625 .22 les définitions suivantes sont prises là :

"….Futtocks or ribs of the ship are certain round pieces of compass timber swept out accordjng to the
mould of every bend, écarted to the wronghe~d below and to the navall timbers aloft. In great ships they
are framed into parts called upper and lower futtocks. The naval timbers are properly that part of the bend
which is seldom framed apart, but moulded into the upper part of the futtock and into the lower part of the
2233
toptimbers ...." 23

"…Les allonges ou les nervures du navire sont certaines pièces de bois


"d'enveloppe" galbées en accord avec le gabarit de chaque couple,
assemblées par écart aux têtes de varangues en dessous et aux bois de
charpente naval en haut. Dans les grands navires ils sont assemblés dans des
parties appelées allonges supérieures et allonges inférieures. Les allonges
sont exactement cette partie de la courbure qui est rarement montée à part,
mais formée dans la partie supérieure de l'allonge et dans la partie inférieure
de l'allonge de sommet". 222333

Les allonges de sommet (non mentionnées par Smith et Manwayring)


s'étendent du point de largeur maximum au plat-bord du navire selon "The
treatise". Le point significatif est ici que les "madriers navals" (naval timbers) sont
par définition placés de l'extrémité supérieure de la première allonge, jusqu'à la
largeur maximale de la charpente.

L'extrémité inférieure du "madrier naval" (naval timber) serait alors


déterminée par la courbure des têtes de varangues, de la même manière que
l'allonge inférieure. La partie supérieure du "madrier naval" s'étendrait jusqu'à la
largeur maximum de la charpente, où il serait assemblé par écart avec les allonges
de sommet mentionnées dans "The treatise".

- 30 -
18

Figure 5. Interprétation alternative du texte de Smith.

Légende : 1- Quille 2- Varangue 3- Allonge inférieure


4- "Madrier naval" 5- Allonge de sommet

Certaines informations complémentaires sur les membrures sont contenues dans un


manuscrit copié par Sir Isaac Newton et publié par Richard Barker. Le manuscrit
date environ de 1600.24 Le contenu de l'ouvrage montre que l'auteur était soit
constructeur de navires, soit "un observateur très bien informé."25

- 31 -
19
Dans le premier paragraphe on peut lire : "..[par] ma propre expérience et
pratique j'ai constaté que le plus convenable .." 26, Cela semble prouver que l'auteur
était un constructeur de navires en activité. Cette supposition est renforcée par sa
description théorique du développement de la forme d'un navire, mais aussi par des
questions de construction pratiques comme le cintrage des bois de charpente (leur
équarrissage à la ligne médiane du navire). A cause de la présence de tels éléments
pratiques, le traité mérite une grande attention.

Il n'est pas aisé de concilier les différentes sources d'informations. Toutes, (à


l'exception du Manuscrit de Newton, qui pourrait être antérieur) datent de la
troisième décennie du siècle. Néanmoins, ni le nombre total d'éléments, ni les
nomenclatures ne sont cohérents. Trois des quatre sources ne mentionnent pas
d'allonges intermédiaires ou déclarent qu'elles sont rarement employées. Il n'y a que
Smith qui insiste sur leur fonction comme faisant partie intégrale de la charpente.
Cela laisse deux niveaux d'allonges - supérieur et inférieur - mentionnés dans trois
des quatre sources. Cette fois la source qui diverge est le manuscrit de Newton. Les
allonges de sommet sont mentionnées dans les deux traités.

Le capitaine Smith était un gentleman-aventurier qui était aussi à l'aise sur


terre que sur l'eau. Il est douteux qu'il eu été un grand marin. Il n'était certainement
pas constructeur de navires et bien qu'il possédait un savoir sur le sujet, sa culture
était une culture de l'observation. Sir Henry Manwayring était un marin
expérimenté, qui avait navigué et qui avait été à la tête de navires. Il n'était pas
constructeur de navires, non plus, mais il est certainement plus fiable que Smith.
"The treatise de 1625" a été probablement écrit par John Wells, magasinier à
Deptford Yard.

- 32 -
20
Ce fut un ami proche et l'héritier de Matthew Baker. Il n'était pas charpentier de
marine, mais mathématicien. Néanmoins, Baker l'a suffisamment respecté pour lui
27
léguer son carnet de notes . Il est de notoriété reconnue que Wells a vraiment
travaillé avec Baker, au moins sur les aspects théoriques de la conception des
navires. Dans l'ensemble c'est probablement une source fiable, bien que William
Salisbury pense qu'il n'a jamais réellement vu ses méthodes mises en pratique. 28

Le manuscrit copié par Sir Isaac Newton a été daté du début du siècle, mais
Baker déclare que le texte principal peut avoir été écrit beaucoup plus tard.29 A
cause de son opposition aux grands navires, il ne date probablement pas d'avant la
deuxième décennie, et il est même certainement encore plus tardif, car auparavant
il n'y avait eu aucun très grand navire comme le Prince Royal de 1610. Ainsi il date
d'une époque similaire aux autres sources et peut être considéré comme appartenant
au même groupe. Son intérêt se situe dans les instructions précises et détaillées
pour solutionner les problèmes pratiques de construction. Il donne des détails sur
les extrémités des varangues, sur le transfert des gabarits aux madriers, sur le
placement des varangues aux endroits voulus, sur les chanfreins des membrures et
sur la disposition des allonges par rapport à leurs varangues respectives. L'auteur
était très certainement un constructeur de navires en activité. Cela donne une valeur
particulière à ce manuscrit.

En revenant aux éléments composant les membrures, conformément à nos


sources, il est curieux de noter que seuls les deux traités mentionnent les allonges
de sommet. En fait, si nous ignorons les madriers navals (naval timbers), il apparaît
que les deux traités décrivent les mêmes éléments. Le manuscrit de Newton parle
seulement d'une allonge et d'une allonge de sommet. "The treatise" fait mention de
deux allonges, mais dit que c'est en raison de l'impossibilité d'obtenir des madriers

- 33 -
21

de longueur suffisante. Autrement dit, dans un monde idéal il n'y aurait qu'une
allonge (figure 6). Ainsi le manuscrit et le traité nous donnent les mêmes éléments
de base sur les éléments constituant une membrure.

Légende : 1- Varangue 2- Allonge 3- Allonge de sommet

Figure 6. Membrure simple allonge.

- 34 -
22

Smith et Manwayring ne disent rien des allonges de sommet. Les allonges de


sommet avaient non seulement une fonction dans la structure, mais aussi dans la
conception du navire. Aussi, pourquoi ont-elles été omises ? La réponse la plus
probable est que l'on n'a pas considéré les éléments supérieurs du navire comme
faisant partie intégrante des membrures, car c'était l'ensemble le plus fréquemment
endommagé de la coque. Par conséquent, elles subissaient beaucoup de réparations
et étaient souvent remplacées. Les allonges de sommet devaient aussi être installées
de telle façon qu'elles n'interfèrent pas avec les sabords. Cela signifie que certains
des madriers devaient être coupés et des pièces "de remplissage" incorporées dans
les structures supérieures des flancs de la coque. Il n'y avait aucun système pour
décrire les travaux d'assemblage dans les parties supérieures du navire. Le sujet
final de discussion est l'ordre de fabrication, comme nous pouvons le trouver dans
les pratiques d'époque. Manwayring parle du chevillage des allonges sur les têtes
de varangues. Cela implique un pré-assemblage de la membrure. Phineas Pett,
maître charpentier, dans son autobiographie, relate des détails de la construction
des navires à la fin de la première décennie. En décrivant l'enquête sur la
construction de son Prince Royal, lancé en 1610 et l'inspection du navire sur les
tins du chantier par le roi, il écrit que les varangues et les premières allonges étaient
déjà installées ainsi que certaines des secondes allonges (figure 7).30 Ce passage est
la preuve évidente qui contredit l'hypothèse du pré-assemblage des membrures.
Comme Salisbury le signal correctement, nous pouvons être certain que la
construction du navire a été faite de manière conventionnelle.31 s'il en avait été
autrement, les ennemis de Pett auraient sans aucun doute utilisé cet argument
comme accusation contre lui. Le traité "The treatise of 1625" affirmait que les
allonges étaient tenues en place par des courbes de contre lisses et remplissaient les
espaces entre les varangues, en commençant à une courte distance de la quille.
Autrement dit, les connexions latérales aux têtes de varangues (et aucun pré-
assemblage) étaient la pratique normale.

- 35 -
23

Il est possible que des attaches latérales aient été employées entre les allonges, les
varangues, la préceinte principale et quelques membrures complémentaires autour
desquelles une lisse d'exécution aurait pu être tendue pour soutenir le reste des
allonges tandis que la pose du bordage progressait. Cette solution correspond bien à
la description de Pett qui dit que seulement certaines des deuxièmes allonges,
étaient installées.

Une déclaration intéressante enregistrée par Pett au sujet du Prince Royal


était celle du roi qui avait dit : "…si le navire avait été composé d'un tiers de bois
en moins, sa structure aurait été toujours aussi solide…".32 Qu'avait donc à l'esprit
James Ier? Nous n'avons aucune preuve qu'il possédait une quelconque expérience,
ni le niveau d'expertise de son petit-fils, Charles II. Cette déclaration ne peut être
prise qu'avec réserve. Etant certain, cependant, que le roi possédait quelques
connaissances sur le sujet, nous devons considérer ses commentaires comme
plausibles. Une explication est que le navire avait trop de membrures. Salisbury
suggère que le Prince Royal aurait pu être construit de la manière dont les Français
ont assemblé leurs trois-ponts plus tard - les nombreuses pièces de bois de la
structure, ne laissant pratiquement aucun espace non rempli. La signification de la
déclaration du roi serait, alors que même si tous les espaces n'avaient été remplis :
le navire aurait toujours été suffisamment solide. Bien que cette explication semble
possible, elle ne parait pas évidente. Quand le roi inspecta le navire, toutes les
deuxièmes allonges n'avaient pas été installées, donc l'avis de James Ier était
probablement dicté par rapport aux éléments qui étaient déjà en place, comme

- 36 -
24

Figure 7. Membrure du Prince Royal.


Légende : 1- Varangue 2- Première allonge 3- Deuxième allonge

l'étaient les varangues et les premières allonges. Puisque le nombre et


l'échantillonnage des varangues avaient été déterminés selon les règles, il est
probable qu'ils n'aient pas varié sur un si grand navire. Je crois que le roi suggérait
qu'il n'y avait aucun besoin de deux allonges : une seule allonge assemblée par

- 37 -
25

écart à la varangue et à l'allonge d'extrémité aurait été suffisante pour assurer la


solidité du navire. Avec les premières allonges ripées entre les varangues et
donnant les écarts à une deuxième rangée, l'alignement continu de madriers se
serait prolongé au-dessus de la courbe du bouchain, plus haut qu'avec une simple
allonge. Cela aurait ramené le nombre d’allonges aux deux tiers sans apparemment
mettre en danger l'intégrité de la structure du navire. Cela semblerait soutenir la
conclusion dérivée des autres sources, que les membrures pourraient être
construites avec une ou deux allonges et que cela ne dépendait pas nécessairement
de la taille du navire.

Lors de la première moitié du XVIIème siècle, il semble que la pratique de


construction navale était de fixer les varangues à la quille en premier lieu, ensuite
de glisser les premières allonges entre elles. L'allonge étant maintenue en place par
des traverses (vaigres de fond) et le bordé. Pett écrit que le Prince Royal était
bordé simultanément avec la levée des madriers de membrure. La phase suivante
consistait à ériger les secondes allonges entre les têtes des premières, dans le cas où
deux allonges devaient être employées. Alors le bordé était posé en continu
jusqu'au niveau des préceintes et, pour assurer l'ensemble, les serres bauquières
étaient ajoutées pour soutenir les baux. Il y avait deux options pour sécuriser les
allonges de sommet. La première était de les assembler par écarts aux allonges
supérieures en les recouvrant partiellement. La deuxième option était d'utiliser des
allonges (naval timbers) séparées (figure 8). Il semble logique de s'attendre à ce
que les allonges navales (naval timbers) soient employées avec deux allonges. Ce
système a du probablement être utilisé sur de grands navires. Il est possible que ce
choix n'ait aucun rapport avec la taille, mais, qu’il ait découlé des préférences du
constructeur, du prix de revient et de la disponibilité du bois.

- 38 -
26

Figure 8. Membrure avec deux allonges et allonges séparés


Légende : 1- Quille 2- Varangue 3- Première allonge 4- Deuxième allonge
5- "madrier naval" 6- Allonge de sommet

- 39 -
27
CHAPITRE III

STRUCTURE DES NAVIRES


À LA SECONDE MOITIÉ
DU XVIIème SIECLE

De grands changements dans la conception des navires et dans leurs modes


de construction ont eu lieu à partir de la deuxième moitié du XVIIème siècle. Il a été
reconnu que la puissance d'une flotte est en relation avec la puissance de ses canons
ainsi qu'avec la capacité de ses navires à résister aux dégâts et à demeurer dans la
zone de combat. Pour répondre à ces besoins, la taille des navires de la flotte et leur
puissance de feu se sont accrues. La " restoration Navy " transporta un poids de
métal largement plus élevé que ce qui fut usuel ensuite.33 Par exemple, le Royal
Sovereign de 1637 a été armé de canons de 42 livres sur le pont inférieur. Le
vaisseau amiral de Nelson à Trafalgar, HMS Victory de 1759, a été armé de canons
de 32. Une lourde artillerie était nécessaire à cette période, car la marine Royale
était confrontée à l'adversaire le plus dangereux auquel elle ait eu à faire face : la
Hollande. La Hollande dominait sur les mers et était tactiquement meilleure, mais
l'Angleterre qui avait de lourds canons et des navires plus grands et plus solides
gagnait de jour en jour, ou parvenait à empêcher des désastres.

L'expérience opérationnelle de la Royale Navy acquise dans les guerres


contre les Provinces Unies des Pays-Bas devait procurer un avantage immense pour
les conflits à venir. Ce qui est souvent moins reconnu est que la construction navale
en a profité aussi. Les batailles en Mer du Nord ont confirmé la confiance anglaise
dans leurs trois-ponts, car les Hollandais n’avaient rien à opposer à ces vaisseaux.

- 40 -
28

En plus de la concentration énorme de la puissance de feu, les trois-ponts ont


offert une meilleure résistance à la torsion et au travail de la coque en mer. Après
l'échec des troisièmes rangs à deux ponts dotés de 80 canons, dans la Guerre de la
Ligue d'Augsbourg (16891697), le maître charpentier William Lee a suggéré de
rajouter un troisième pont à ces navires. La plupart des maîtres charpentier furent
d'accord avec lui et les navires à 80 canons trois-ponts qui ont eu une immense
réputation au siècle suivant étaient nés.34 Ils étaient le fruit de l'expérience et pour
le XVIIème siècle, ce choix s'est avéré être la bonne solution. L'adoption de cette
solution est un exemple de la capacité d'adaptation des constructeurs de cette
période. Au XVIIIème siècle, cependant, des circonstances nouvelles conduiront à
leur abandon en faveur, de nouveaux grands deux ponts.

Grâce aux expériences acquises au cours des guerres de la fin du XVIIème


siècle, les formes et les dimensions des navires ont évolué, ainsi que leurs
charpentes. Dans les pages suivantes une tentative est faite pour déterminer la
nature et les dates approximatives de ces changements.

Heureusement, pour le chercheur s'occupant de la construction des navires de


cette période passionnante, un ensemble substantiel d'informations a survécu sous
forme des devis de constructeurs. Leur nature détaillée, nous donne une occasion
excellente de voir de quels éléments se composait la coque et nous permet de
déterminer leurs dimensions. Une certaine quantité d'informations peut aussi être
trouvée dans les lettres et courriers d’époque. Un document très important de cette
période est le manuscrit connu sous le nom de : "Deane 's doctrine of naval
architecture".

- 41 -
29

En 1650 Jonas Shish a lancé une des premières frégates du Commonwealth,


Foresight (la Prévoyance), au Deptford yard. Le vaisseau était un navire de
quatrième rang armé de 48 canons construit dans une période où les nouveaux
dirigeants d'Angleterre ont dû faire face à une attaque des "corsaires royalistes" de
l'escadre du Prince Rupert et des corsaires opérant d'Ostende et de Dunkerque. La
qualité la plus importante des nouveaux navires commandés par le Commonwealth
était la vitesse. R.C.Anderson a identifié le devis du Foresight parmi une collection
de documents du National Maritime Museum de Greenwich.35

Le devis est tout à fait détaillé et contient beaucoup d'informations de valeur,


mais pour cette étude nous nous limiterons, ici aux devis en relation, avec les
membrures. Pour le Foresight, le pas des couples, était de 26 pouces (66.0 cm). On
ne donne pas les dimensions des madriers, mais, conformément à d'autres devis, il
était probablement d'environ la moitié du pas, soit, 13 pouces (33.0 cm). Les
allonges (naval timbers) devaient avoir un écart d'au moins 5.5 à 6 pieds (1.7 - 1.8
mètres) et remplir la pièce(room), bien que leur emplacement exact ne soit pas
spécifié. Les allonges au dessus du premier pont "vers le haut du pont d'artillerie"
(upwards of the gundeck) devaient avoir 8 pouces (20.3 cm) sur l'extérieur et
posséder un écart de longueur semblable à celui des allonges (naval timbers). La
pièce(room) au niveau du pont d'artillerie devait être remplie de madriers. La
spécification, donc, implique que les bois de charpente navals (naval timbers) ont
été placés au fond du navire, entre les varangues. Cela contredit "The treatise of
1625", mais semble être confirmé par la plupart des devis de la deuxième moitié de
XVIIème siècle (voir ci-dessous). Aucune allonge n'est mentionnée et les allonges au
dessus du premier pont (timbers upwards of the gundeck) est une description qui
reste ouverte à au moins deux interprétations.

- 42 -
30
D'abord, les "madriers navals" ont été représentés par les seules allonges
inférieures dans l'assemblage du couple et se sont étendus depuis la tête de
varangues au creux du maître-couple.36 Les bois de charpente "vers le haut du pont
d'artillerie" étaient les allonges de revers et ils couvraient la distance de la préceinte
principale au plat-bord. Le second écart correspond au chevauchement entre eux et
les allonges (naval timbers). Le fait que la pièce(room) soit remplie du bois de
construction peut donc signifier que les flancs des allonges doivent former une
bande continue de bois au niveau du creux du maître-couple (figure 9).

La deuxième interprétation est que les bois de construction (naval timbers)


correspondaient simplement à la première allonge (inférieure) et les éléments de
membrure du pont d’artillerie représentaient la seconde allonge; et l'expression vers
le haut (upwards) signifie qu'ils s'étendaient au-dessus du pont d'artillerie et
formaient donc la bande de bois continue caractéristique. Les pièces(rooms)
devaient être remplies par les allonges de sommet, non mentionnées dans le texte.
Les écarts étaient réalisés entre les bois (naval timbers) et les varangues et aussi
entre les bois (naval timbers) et les secondes allonges - les deux de 5.5 à 6 pieds
(1.7 à 1.8 m) de longueur. Les troisièmes écarts se situaient entre les deuxièmes
allonges et les allonges de revers. Les deux interprétations semblent possibles,
mais si l'on tient compte des devis postérieurs, c'est la deuxième qui est la plus
probable (figure 10).

Lavery croit qu'un devis daté de décembre 1664 a été à l'origine préparé pour
le Speaker de 1649 (l'Orateur, rebaptisé Mary en 1660).37 Il fut le premier des
nouveaux troisièmes rangs et rendit un long et distingué service en tant que
transporteur. Le devis original est conservé dans les Archives publiques de Kew, à
Londres.38

- 43 -
31

Légende : 1- Varangue 2- Tête de varangue 3- Allonge ("Madrier naval")


4- " Creux du maître-couple " 5- Allonge de revers

Figure 9. Membrure avec une allonge.

- 44 -
32

Le devis donne le pas de couple comme faisant 2 pieds, 4 pouces (71 cm). La
varangue avait 14 pouces d'épaisseur (35.6 cm) et l'allonge inférieure (ou première)
devaient remplir la pièce(room). Autrement dit, les allonges inférieures devaient
avoir la même largeur que les varangues. L'écart de l’allonge inférieure devait être
de 6 à 7 pieds (1.8 - 2.1 mètres). Le second écart devait être de 6 pieds (1.8 mètre)
et devait probablement être identique entre les allonges de revers et "l'autre rangée"
d'allonges. La seule autre dimension donnée est la section des "madriers navals" :
"... et les bois de charpente navals (naval timbers) étaient de 10 pouces à l'intérieur
et à l'extérieur au niveau du creux du maître-couple."

L'expression "l'autre rangée d’allonges" prouve qu'il devait y avoir deux


allonges et donc les termes "madrier naval" (naval timber) ne peuvent pas
correspondre aux premières allonges se prolongeant au niveau du creux du maître-
couple, où le devis les situe. Ces deux termes, "autre rangée" d'allonges et "madrier
naval" (naval timber) sont mentionnés et impliquent que les "madriers navals"
(naval timber) n'étaient pas des éléments de charpente séparés. D'après "The
treatise de 1625", les madriers navals (naval timbers) désignent simplement la
partie supérieure de la seconde allonge et la partie inférieure des allonges de revers
(Figure 10). Les informations pour cette interprétation doivent être reprises dans
une lettre que Peter Pett a écrite en 1664 en réponse à une enquête de Samuel
Pepys. On a demandé à Pett de faire des remarques sur un dessin et une liste de
sections pour une frégate de troisième rang. La conception, inconnue de Pett, était
due à Anthony Deane, un protégé de Pepys. La proposition a rencontré
l'approbation de Pett expérimenté, mais il a suggéré que : " ... seulement vos
allonges doivent avoir au moins sept pieds et demi, sinon huit pieds d'écart vers le
haut car il est possible que les extrémités supérieures d'entre elles puissent être
interceptées par les courbes horizontales qui maintiennent les baux du pont
d'artillerie (main orlop).39

- 45 -
33

Figure 10. Membrure à deux allonges

Légende : 1- Quille 2- Varangue 3- Première allonge


4- Seconde allonge 5- Allonge de revers

- 46 -
34

Par "main orlop" Pett se référait évidemment au pont d'artillerie. Au début


du siècle, aussi bien Smith que Manwayring le dénomme orlop. L'écart proposé est
certainement celui qui se situe entre les secondes allonges et les allonges de revers.
Afin que les extrémités supérieures des allonges puissent être raccordées aux
courbes du pont principal, Pett devait avoir en tête les courbes horizontales, plutôt
que les courbes verticales. Autrement, seules quelques allonges auraient été en
contact avec elles. Si les courbes horizontales étaient concernées afin de laisser une
longueur suffisante les allonges supérieures (ou secondes) devaient interpénétrer les
courbes et, en fait, pouvaient s'étendre au dessus d'elles (figure 11).

Chronologiquement, la source importante suivante pour notre étude est "The


Doctrine" de Sir Anthony Deane. Il a été chargé de la construction de 25 navires
sur une période de neuf ans, entre 1666 et 1675. Ce travail incluait trois premiers
rangs et quatre troisièmes rangs. Il semble que Deane ait été très influent dans la
définition des spécifications pour le programme de fabrication des trente navires à
la fin des années 1670.40

Deane n'était pas si supérieur aux autres constructeurs que Pepys a voulu le
faire croire. Deane avait certainement des capacités incontestables. Beaucoup de
ses navires avaient très bonne réputation, les troisièmes rangs le Rupert, la
Résolution et le Harwich étaient réputés pour être rapides et avoir une bonne tenue
en mer; le Greyhound (le levrier), un sixième rang, est passé pour être un des
navires les plus rapides à flot.

Le Fan Fan, construit pour le Prince Rupert, se fit connaître par ses exploits
pareils à nul autre dans l'histoire navale : un navire à deux canons attaquant un 80
canons (De Ruyter de Zeven Provincien) et servant plus tard de vaisseau amiral à
Sir Robert Holmes.

- 47 -
35

Figure 11. Membrures après Peter Pett.

Légende : 1- Varangue 2- Première allonge 3- Allonge supérieure


4- Allonge de sommet 5- bau 6- Courbe horizontale

- 48 -
36

Les honneurs gagnés au combat par ses navires montrent que Deane était un
constructeur capable et ses avis sur la construction navale étaient influents. Sa
Doctrine n'était l'idée personnelle d'aucun théoricien. Pour le sujet présent, la liste
des tables de sections qu'il produisit pour tous les rangs est la chose la plus
importante.

Pour un troisième rang, Deane spécifie une pièce(room) et une maille de 2


pieds, 4 pouces (71.1 cm) de même que dans le devis de 1664. Les dimensions des
flancs pour les varangues sont les mêmes dans les deux sources : 14 pouces (35.6
cm). Pour l'allonge inférieure, Deane spécifie 13.5 pouces (34.3 cm) comme
dimension de flanc, par opposition à la clause "..remplissent la maille." dans le
devis. Les sections de côté de l'allonge supérieure diminuent de plus à 12 pouces
(30.5 cm), la dimension de gabarit au creux du maître-couple (à la préceinte
principale) est 9.5 pouces (24 .1 cm), ce qui est raisonnablement près des 10 pouces
(25.4 cm) du devis. Les allonges de sommets sont spécifiquement décrites, avec les
dimensions des côtés diminuant de 12 à 8 pouces (30.5 cm à 20.3 cm). Les
madriers navals (naval timbers) et les écarts ne sont pas mentionnés.

C'est le premier document qui spécifie explicitement deux allonges et une


allonge de sommet. Clairement, les allonges devaient être placées au-dessous de la
préceinte principale. Le manque de bois de construction dans la liste suggère que
Deane les ait taillées dans les allonges supérieures et dans les allonges de sommet
(toptimbers). Aucune mention n'est faite des écarts, probablement, en raison du
format dans lequel les données sont présentées - Deane donne ses sections sous
forme de tableaux, à la différence des devis qui sont descriptifs.

- 49 -
37

Ainsi, Deane ne fait aucune mention de chevilles et d'autres attaches, tandis


que les devis spécifient tant leurs tailles que leurs utilisations. La diminution
graduelle de la largeur des flancs des bois de construction est remarquable. Ceci
n'apparaît pas dans les devis et ne peut avoir été mis en pratique, aux tolérances
étroites données dans "The Doctrine". Pour une spécification semblable (bien que
la source soit identifiée seulement comme "un manuscrit de 1676") à celle de
Deane, Anderson a soutenu qu'elle implique des membrures doublées et aucune
bande continue de bois du niveau du bouchain au niveau du creux du maître-
couple.41 William Baker a pris les différences de 0.25 et 0.5 pouces (0.6 cm à 1.3
cm) pour des tolérances de fabrication, considérant les techniques dont disposaient
les charpentiers de marine à cette époque.42 Il a cru que de telles petites différences
signifiaient certainement des bandes ininterrompues de bois de charpente. Dans les
tables de Deane, les dimensions du côté des membrures à la préceinte principale
sont de 4 pouces (10.2 cm), plus petites qu'à la tournure du bouchain. La différence
de quatre pouces devrait être prise comme la différence totale dans le pas de
couple, mais ne signifie pas qu'elle ait été concentrée uniquement dans la
pièce(room) où dans la maille. Il y avait probablement environ 2 pouces (5.1 cm)
de maille, ou de pièce(room), entre les allonges de sommet et les allonges. Ainsi la
distribution des bois de charpente au niveau du creux du maître-couple serait :
madrier - pièce(room) - madrier - pièce(room), " (timber-room-timber-room) "
(figure 12).

Cette interprétation est confortée par les données pour les navires de rangs
inférieurs, particulièrement des unités des cinquièmes et sixièmes rangs. Pour les
cinquièmes rangs, avec une pièce(room) et une maille de 26 pouces (66 cm), des
allonges supérieures de 10 pouces (25.4 cm) et des allonges de revers (toptimbers)
de 8.5 pouces (21.6 cm), la pièce(room) non remplie au niveau du creux du maître-
couple serait 7.5 pouces (19 cm).

- 50 -
38

La pièce(room) entre des bois de charpente adjacents serait large de 3.75 pouces
(9.5 cm) – pouvant être arrondis à 4 pouces (10.2 cm), ou 3 pouces (7.62 cm). A la
courbure du bouchain la distance entre les varangues et les allonges serait de
environ 1 pouce (2.5 cm), ce qui est remarquablement proche de ce qui a été trouvé

Légende : 1- Varangue 2- Première allonge


3- Deuxième allonge 4- Allonge de sommet

Figure 12. Espaces entre madriers de membrures.

- 51 -
39

sur le Dartmouth, un cinquième rang construit en 1655.43 Au sujet des sixièmes


rangs, pour être conforme aux dimensions de Deane, la pièce(room) entre les bois
de charpente au creux du maître-couple aurait été de 5 pouces (12.7 cm). Pour les
troisièmes rangs, la distance totale entre les bois de charpente serait de 2 pouces, et
de 3 pouces (7.6 cm) pour les quatrièmes rangs.

En 1673 Sir Edouard Spragge et la Couronne passèrent un contrat pour la


construction de quatre frégates en Irlande. Spragge a été tué à la Bataille de Texel
en servant en tant qu'officier de pavillon aux ordres du Prince Rupert et le contrat
a été par la suite abandonné. Cependant, les mêmes spécifications peuvent avoir été
utilisées pour la construction de l'Oxford, un quatrième rang, en 1674.44 Le devis
pour les quatre frégates est assez semblable à celui du Foresight (la Prévoyance). 45
La maille est la même, soit 26 pouces (66 cm). Dans le devis de Spragge on donne
aux varangues la valeur de 13 pouces (33 cm) et les bois de construction (allonges
inférieures) doivent remplir la pièce(room), mais ne doivent pas avoir une cote
inférieure à 12 pouces (30.5 cm) de largeur. Les bois de construction au dessus du
premier pont (upwards at the gundeck)" doivent avoir 10 pouces de large (25.4 cm)
et la pièce(room) doit être remplie du bois de construction. Les allonges de sommet
doivent "être de la même proportion que les varangues." Cela fait probablement
référence à une valeur de rentrement, ainsi que cela était calculé, en pourcentage de
la longueur des varangues. La mention spécifique faite des allonges ne permet pas
de les inclure dans la catégorie "des bois de construction au dessus du premier pont
(timbers upwards gundeck)." Donc, les navires devaient être assemblés avec deux
allonges et une allonge de sommet. La pièce(room) devait être remplie du bois de
charpente, ce qui signifie que les allonges de sommet (toptimbers) devaient
recouvrir partiellement les allonges, mais ne formaient probablement pas une bande
complète continue de bois. La dimension du flanc des allonges devait être comprise
entre 10 et 12 pouces (25.4 et 30.5 cm).

- 52 -
40

Logiquement, il semble probable que leur largeur était égale à celle des allonges
supérieures. Ceci laissait un espace de 3 pouces (7.6 cm) entre les bois de charpente
dans la pièce et la maille(room&space), cote qui est exactement celle que Deane
recommande.

Un document important au Musée Maritime National de Greenwich est un


petit calepin manuscrit intitulé : "William Keltridge His Book 24th 1675 (William
Keltridge Son Livre 24 avril 1675)".46 Le calepin contient "des notes de cours" de
l'apprentissage du propriétaire, comme constructeur de navires. Parmi les sujets
couverts apparaissent les dimensions pour les navires, les cabestans, le gréage, les
mâts, des instructions mathématiques et géométriques et en premier lieu, les tables
de sections pour un sixième rang. Le tableau 1 est tiré des informations contenues
dans le calepin de Keltridge. L'agencement des tableaux dans le calepin est très
semblable à celui du Deane's doctrine, soutenant l'idée que William Keltridge était
un étudiant de Sir Anthony Deane.47 L'observation du contenu suggère que le livre
a été utilisé durant un certain nombre d'années et que des informations ont été
ajoutées aux données de base. La liste des navires de la marine en est la preuve la
plus claire. Les navires qui faisaient partie de la marine autour de 1675 ont été
inscrits avec de l'encre très sombre et avec soin. Au-dessous de ces entrées sont
ajoutés les noms des 30 navires du programme de construction de 1677; quelques
uns d'entre eux n'ont pas été lancés avant 1685, y compris le deuxième rang le
Coronation (Le Couronnement). L'encre est beaucoup plus légère dans la nuance et
l'écriture, qui, bien que nettement la même, a subi quelques changements. Le soin
extrême pris pour les écrits des entrées précédentes n'est pas évident dans les
entrées postérieures. Les tableaux de sections ont un intérêt de la plus grande valeur
pour cette étude. Il est difficile de déterminer à quelle date les tableaux ont été
compilés, mais cela doit probablement daté de l'époque où la commission
d'amirauté essayait d'établir les sections de charpente pour les "30 navires".48

- 53 -
41

Tableau 1. Sections selon William Keltridge. Deuxième moitié des années 1670.
1èr 2ème 3ème 4ème 5ème 6ème
Largeur de flanc ▼
RANG RANG RANG RANG RANG RANG
Pièce et maille (Room&Space) 28.75" 28" 27" 25" 22" 18.75"

Varangue 14.25" 14" 13.25" 12.5 " 11 " 9.5 "

Allonge inférieure BAS 14 " 13.75" 13.25" 12.25" 10 " 8"

Allonge inférieure HAUT 14 " 13.75" 13.25" 12.25" 10 " 8"

Deuxième allonge BAS 13.5 " 13.25" 13 " 12 " 9.5 " 7.75"

Deuxième allonge HAUT 13.25" 13 " 12.75" 12 " 9.25" 7.25"

Troisième allonge BAS 13.75" 13 " 12.75" 12 " 9.5 " 0

Troisème allonge HAUT 13 " 12.75" 11.75" 11.25" 8.75" 0

Quatrième allonge BAS 13 " 12.75" 0 0 0 0

Quatrième allonge HAUT 12.75" 12.5 " 0 0 0 0

Allonge de sommet BAS 12.75" 12.5 " 11.5 " 10.5 " 8" 6.5 "

Allonge de sommet HAUT 8.25" 8" 7.75" 6.75" 5.5 " 4"

Deux points méritent une attention spéciale. D'abord, la pièce(room), la


maille et les sections sont plus petites que celles indiquées dans "The Deane's
doctrine", à l'exception de la seconde allonge qui était plus légère d'après Deane
que d'après Keltridge. Deuxièmement, William Keltridge inscrit trois allonges pour
les navires du troisième au cinquième rang, deux pour ceux de sixième rang et
quatre pour les premiers et deuxièmes rangs trois-ponts. Hélas, aucun devis ne
semble nous être parvenu pour ces trois-ponts, sans doute parce que tous ont été

- 54 -
42

construits dans des chantiers navals royaux et qu'une grande confiance existait
envers ces constructeurs, qui exécutaient le travail sans instructions spécifiques. Il
est probable qu'une quantité d'informations suffisantes soient préservées dans la
correspondance officielle et dans les comptes rendus de construction du premier
rang le Britannia, lancé en 1682, ainsi que dans ceux des deuxièmes rangs. Ces
informations permettant de déterminer si quatre allonges ont été utilisées dans les
membrures et de quelle manière elles étaient distribuées49. Environ la moitié des
troisièmes rangs, conformément au programme de 1677, ont été construits par des
arsenaux privés. Cependant je n'ai pas de trouvé de trace montrant qu'un devis ait
existé pour eux. On peut voir la preuve qu'ils ont en effet été assemblés avec trois
allonges dans un dessin d'un troisième rang (voir Chapitre IV).

En 1686, Edouard Battine a compilé un petit livre manuscrit avec le titre :


Proportions for ships with directions for drawing and deleniating ships bodies
(sic).50 Le livre est essentiellement une répétition du calepin précurseur de
Keltridge. Le format des tableaux de présentation des données est ici utilisé de
nouveau comme chez Deane et Keltridge. Il y a quelques faiblesses du travail de
Battine qui sont absentes dans les autres calepins. Il ne fournit pas les dimensions
de la pièce(room) ni de la maille; et, pour les allonges, ne donne pas les dimensions
des côtés sauf aux extrémités. Les sections des bois des membrures sont plus
proches de celles inscrites par Keltridge que de celles données par Deane. Battine
confirme que les deux-ponts ont été assemblés avec trois allonges et les trois-ponts
avec quatre. Peut-être le trait caractéristique le plus surprenant de son tableau est
que l'on donne aux sixièmes rangs simple pont, trois allonges, tandis que Keltridge
en spécifie seulement deux. Des devis postérieurs pour la construction des frégates
de sixième rang confirment que seulement deux allonges ont été utilisées (voir ci-
dessous). En somme, le livre de Battine est intéressant, mais moins fiable que les

- 55 -
43

les autres sources. M. Samuel Pepys, secrétaire de l'amirauté à cette époque, n'a pas
été impressionné par le travail et était avare de compliments dans sa
correspondance avec l'auteur. 51

Après le succès des "galères-frégates" de quatrième rang Charles Galley et


James Galley de 1675, John Deane, le fils de Sir Anthony Deane, a entrepris la
construction d'une autre unité semblable à la James. Le devis a été signé le 31
juillet 1686 et le navire, nommé Marie Galley après avoir été baptisé Reine Marie
de Modena, a été lancé en 1687.52 Le nouveau navire était un quatrième rang et la
maille devait être de 2 pieds 2 pouces (66 cm), avec des varangues de 10 pouces de
côté (25,4 cm). Les cinq premières allonges au milieu du navire devaient avoir les
mêmes sections que celles des varangues, tandis que les allonges avants et arrières
de part et d'autre de la partie centrale du navire devaient avoir 9 pouces de largeur
(22.9 cm). Deux écarts sont inscrits pour les allonges inférieures et pour les bois de
charpente au "dessus du pont d'artillerie". Les deux devait être de 5 pieds (1.5 m).
La seule mention faite au sujet des allonges de revers était qu'elles devaient être
dans la proportion des varangues. Comme dans le devis de Spragge, je crois que
cela signifie que leur rentrement devait être en relation avec les proportions de la
longueur des allonges. Le devis fait mention de seulement deux allonges il est
probable que le Marie Galley n'avait pas d'allonges médiane. Seulement deux
écarts étaient donnés pour la membrure en comparaison des devis qui se réfèrent
aux navires avec trois allonges (voir ci-dessous), lesquels indiquent trois écarts. Le
Marie Galley avait une profondeur de cale plus petite que la plupart des quatrième
rang contemporains : 11 pieds (3.4 mètres) comparés à une moyenne de 13 pieds 6
pouces (4.05 mètres).53 La coque peu profonde et le nombre d'écarts sont des
arguments en faveur de membrures composées de deux allonges.

- 56 -
44

Après le coup d’état qui mit William le Hollandais sur le trône en 1688,
l'Angleterre repris la guerre contre la France. Un programme de construction
important devint nécessaire et il fut commandé un grand nombre de navires.
Beaucoup de devis nous sont parvenus de cette période.54 La priorité fut donnée
aux deux-ponts de troisième rang de plus de 80 canons et aux quatrièmes rangs de
50 et 60 canons. Un nombre important de sixièmes rangs, des brûlots et des ketchs
furent aussi construits. Dans la guerre de la Ligue d'Augsburg (1689-1697), les
navires de quatrième rang furent considérés comme essentiels et formèrent l’épine
dorsale de la flotte.55 Une lecture détaillée des devis a révélé qu'ils s’agissait de
textes standardisés avec seulement pour différences les dates et l'écriture. Pour les
troisièmes rangs, beaucoup de devis étaient identiques sans différences notables
tant au niveau des sections, que des autres spécifications. L'information est donnée
dans le tableau 2. Essentiellement, la maille, les sections de bois de charpente et le
nombre d’allonges sont identiques à ce qui est inscrit dans le livre de notes de
William Keltridge. Ceci donnant un argument de poids à l’hypothèse que la
fabrication des navires des années 1690 était basée sur le programme de
construction des "trente navires".

Un devis de 1690 conservé dans les archives publiques donne une


description du navire de troisième rang, le Yarmouth de 70 canons, lancé en
1695.56 Les sections là aussi sont identiques à celles donnés par Keltridge.

- 57 -
45

Tableau 2. Sections de 3èmes rangs. (Toutes les dimensions sont en pouces anglais.)

2EME ALLONGE SUPERIEURE

3EME ALLONGE SUPERIEURE


1ERE ALLONGE SUPERIEURE

2EME ALLONGE INFERIEURE


1ERE ALLONGE INFERIEURE

3EMEALLONGE INFERIEURE

ALLONGE DE SOMMET
NUMERO DE RANG
SOURCES

PAS DE COUPLE
▼▼

VARANGUE

ÉCART
DATE

DEVIS 1664 3 28 14 14? N/D N/D N/D 0 0 N/D OUI

DEANE 1670 3 28 14 13.5 1.5 12 12 0 0 12 N/D

KELTRIDGE 1675 3 27 13.25 13.25 13.25 13 12.75 12.75 11.75 12 N/D

BATTINE 1686 3 N/D 13 N/D 13 N/D 13 N/D 13 7.5 N/D

CORNWALL 1690 3 27 13.25 N/D N/D N/D N/D N/D 12 12 OUI

NORFOLKE 1691 3 27 13.25 N/D N/D N/D N/D N/D 12 12 OUI

NEWARKE 1693 3 27 13.25 N/D N/D N/D N/D N/D 12 12 OUI


N/D = Non Disponible.

La maille fait 27 pouces (68.6 cm) et les dimensions de largeur des varangues et
"des madriers navals" sont les mêmes que pour la première allonge : 13.5 pouces
(34.3 cm). Les madriers au niveau du pont d'artillerie et les allonges supérieures
auraient eu 3 pouces (7.6 cm) d'espace entre eux au lieu de 4 pouces (10.2 cm)
selon Deane. Parmi les navires construits dans les années 1690 il y eu quelques
troisièmes rangs de 80 canons. Le premier devis pour un navire de 80 canons fut
celui du Devonshire 57. Il est remarquable que les sections de celui-ci soient très
semblables à celles données par Deane pour un quatrième rang. Ceci est important
pour deux raisons : les navires à deux ponts armés de 80 canons se sont avérés être
très fragiles et le constructeur de navires Maître William Lee pensait qu’ils auraient
été plus performants si un troisième pont avait été ajouté pour le même nombre de
canons. 58 Les petites sections des éléments de membrure peuvent expliquer la
fragilité inhérente à ces navires. D'autre part, le fait que les dimensions aient été
diminuées en comparaison des troisièmes rangs précédents, suggère que les
constructeurs de navires avaient une raison d'espérer que quelque chose dans leur

- 58 -
46

charpente - probablement l’ajout d'une troisième allonge - les rendrait


suffisamment solides. Une croyance erronée, au moins pour les grands navires,
comme cela fut démontré.

Un nouveau développement à cette époque fut l'introduction d'une troisième


allonge nommée dans le devis "allonge du milieu", pour laquelle seulement l'écart
est donné. L’allonge du milieu ou seconde allonge est présente dans les tables de
dimensions de Keltridge et dans celles de Battine, mais ces devis sont les plus
anciens préservés à en faire spécifiquement mention. À l'exception de la troisième
allonge, rien ne diffère significativement des exemples précédents. Les charpentiers
voyaient toujours la résistance de la structure - dans les chevauchements, où dans
les assemblages entre les éléments de charpente. John Franklin pense que les
sections des membrures ont été arrangées pour que les madriers au niveau du pont
d’artillerie aient renforcé l’about entre les allonges de sommet (toptimbers) et les
allonges de milieu. La base de sa proposition, qui prend en compte la longueur
d'écart, est la brèche visible dans le boisage sur des maquettes d'époque.59 Les
sections d’un quatrième et d’un sixième rang de Keltridge ne montrent pas ces
espaces ouverts.60 Il est probable, donc, que les devis pour les troisièmes rangs de
ce groupe soient parmi les premiers exemples a avoir existé, spécifiant une double
membrure sans espaces le long des allonges (Figure 13).

Le deuxième groupe de devis concerne la charpente de vaisseaux de


quatrième rang de 60 canons61. Ils étaient plus longs, plus larges et plus hauts que
les navires de 50 canons, mais les sections et même la maille étaient les mêmes.
Les données sur les quatrièmes rangs de 60 canons sont présentées dans le tableau
3.62 Un devis de 1693 passe pour être celui du Pembroke, un navire de quatrième
rang de 60 canons.63 la pièce(room) et l'espace (space) sont les mêmes que ceux des
navires précédents de ce rang.

- 59 -
47

Rien ne diffère dans les spécifications pour les allonges inférieures où pour les
allonges "navales"(naval futtocks), non plus. Trois allonges sont spécifiées et de
nouveau rien, excepté l'écart précisé pour chacune d'elles. Aucune précision non
plus n’est donnée quant aux allonges supérieures. La seule information
complémentaire que nous pouvons glaner dans les documents du navire à 60
canons concerne la charpente au niveau du pont d’artillerie. Tandis que dans les
exemples précédents ils ont été nommés "madriers de charpente vers le haut du
pont d'artillerie" (timbers upwards the gundeck), dans ce cas ils sont désignés "au
pont d'artillerie" (at the gundeck). Ils devaient faire 11 pouces (27.9 cm) de large, la
même valeur que pour les allonges de sommet. Les madriers de la charpente au
niveau du pont d'artillerie (timbers at the gundeck) devaient aussi avoir un écart
d'au moins 6 pieds (1.8 m) dans la longueur. La spécification déclare aussi que la
cote de 1.5 pouces (3.8 cm) devrait être laissée entre les bois de charpente pour
l'aération. Cela donne un vide total de 3 pouces (7.6 cm), le même qu'inscrit par
Deane. Cela peut signifier que, soit les allonges de sommet étaient toujours
séparées de la membrure, et que les couples étaient à 1.5 pouces (3.8 cm) les uns
des autres, soit que ce n'était pas une vraie membrure double et que les éléments
n'étaient pas toujours attachés ensembles. Keltridge, cependant, montre
l'emplacement des couples sur la quille et les décrit comme étant doublés. La
charpente du quatrième rang à 60 canons, décrite dans le devis ne diffère pas de
celle du troisième rang, sauf dans les dimensions et les sections.

- 60 -
48

Figure 13. Membrure double avec joints raboutés


et écarts de recouvrement.

Légende : 1- Quille 2-Varangue 3- Première allonge


4- Deuxième allonge 5-Troisième 6- Allonge de revers

- 61 -
49

Tableau 3. Sections des 4èmes rangs de 60 canons. (Dimensions en pouces anglais).

2EME ALLONGE SUPERIEURE

3EME ALLONGE SUPERIEURE


1ERE ALLONGE SUPERIEURE

2EME ALLONGE INFERIEURE


1ERE ALLONGE INFERIEURE

3EMEALLONGE INFERIEURE

ALLONGE DE SOMMET
SOURCES
NUMERO DE RANG

▼▼
PAS DE COUPLE

VARANGUE

ECART
DATE

60 CANONS 1693 4 26 13 12/FILL N/D N/D N/D N/D 11 11 OUI


SUNDERLAND 1693 4 26 13 12/FILL N/D N/D N/D N/D 11 11 OUI
60 CANONS 1694 4 26 13 12/FILL N/D N/D N/D N/D 11 11 OUI
N/D = Non Disponible.

Les spécifications pour les navires de quatrième rang de 50 canons offrent quelques
nouveaux éléments qui ne sont pas disponibles pour les plus grands navires. Le
devis du Norwich, signé le 5 août 1692 spécifie le même pas de 26 pouces (66 cm),
le côté de la varangue de 13 pouces (33 cm) et exige que l'allonge inférieure
remplisse la pièce(room).64 Ceci est suivi de précisions n'étant jamais apparues dans
les devis antérieurs : "l’allonge inférieure doit avoir une longueur d'au moins 12
pieds (3.7 m) " pour être engagée en bas de 20 pouces (50.8 cm) dans la quille. "
Les cales étaient des blocs angulaires ou des coins utilisés pour remplir l'espace
entre les madriers.65 Ils ont été utilisés aussi pour renforcer la jonction entre les
abouts des allonges (Figure 14). Pour être assemblées, les allonges étaient coupées
à un angle précis et les cales étaient taillées dans le volume triangulaire résultant.
La valeur de 20 pouces de distance à la quille est très proche des 18 pouces (45.7
cm) spécifiés dans "The treatise de 1625". Si les allonges inférieures venaient sur
les deux côtés à 20 pouces (50.8 cm) de la quille et possédaient une clé d'empâture
en bas, il est probable que leurs talons ont été connectés les uns aux autres par les
cales, qui auraient traversé la quille. C'est un dispositif de charpente typique des
navires du XVIIIème siècle, mais qui n'a pas été utilisé au XVIIème siècle.66 Le devis
ne mentionne pas d'écarts.

- 62 -
50

Les devis pour le Severn et le Burlington de 1695, des quatrièmes rangs


armés de 50 canons, ne mentionnent seulement que les allonges inférieures et
supérieures.67 On suppose que les têtes des allonges supérieures atteignaient les
sabords inférieurs, et que les allonges inférieures devaient être engagées en bas à 20
pouces (50.8 cm) de la quille. Ainsi, le devis est pratiquement identique à celui du
Norwich et des autres navires de 50 canons. Les données pour cette classe de
navires sont inscrites dans le tableau 4. Le tableau 5 contient des données
comparatives du quatrième rang à la deuxième moitié du XVIIème siècle. Rien ne
suggère la présence d'une allonge de milieu (la seconde allonge), mais, cependant,
il est probable qu'elles ont été utilisées, comme sur les navires précédents. L'allonge
inférieure devait être engagée en bas. Est-ce une coïncidence que les cales
apparaissent dans les devis qui ne mentionnent pas de longueurs d'écarts ?

Les spécifications pour deux frégates du sixième rang des années 1690,
montrent que des navires plus petits ont continué à être construits avec deux
allonges.68 Des valeurs comparatives pour les navires de sixième rang sont données
dans le tableau 6. Le Biddeford, lancé en 1695, devait avoir un pas de couple de 22
pouces (5-5.9 cm) et des varangues de 9 pouces (22.9 cm) au milieu du navire et le
reste 8.5 pouces (21.6 cm) de dimension latérale.69 Les allonges inférieures
devaient avoir les mêmes dimensions que les varangues, - 11.5 pieds de long (3.5
m) - et devaient être assemblées avec une clé d'empâture à 18 pouces (45.7 cm) de
la quille. Les secondes allonges sont données dans le devis comme ayant 8 pouces
(20.3 cm) de côté au niveau de leurs talons et 7 pouces (17.8 cm) à leurs têtes, ou
au creux du maître-couple. La formulation dans le devis est "la deuxième, ou
allonge supérieure" et celle-ci devaient dépasser la limite supérieure de l'encrage
des baux. Les allonges de sommet (toptimbers) devaient avoir une cote de 7.5
pouces (19,1 cm) au talon. Les talons des allonges de sommet devaient être
positionnés "debout sur les têtes des allonges inférieures."

- 63 -
51
Figure 14. Membrure double avec cales.

Légende : 1- Quille 2- Varangue 3- Première allonge 4- Cale d'écart


5- Deuxième allonge 6- Troisième allonge 7- Allonges de sommet

- 64 -
52

Tableau 4. Sections des 4èmes rangs 50-canons. (Toutes dimensions en pouces anglais.)

2EME ALLONGE SUPERIEURE

3EME ALLONGE SUPERIEURE


2EME ALLONGE INFERIEURE
1ERE ALLONGE INFERIEURE

3EMEALLONGE INFERIEURE
1ERE ALLONGE SUPERIEUR

ALLONGE DE SOMMET

CLEF D'EMPATURE
PAS DE COUPLE
SOURCES ▼▼

VARANGUE
RANG
DATE

NORWICH 1692 4 26 13 FILL N/D N/D N/D N/D 10 N/D OUI


COLCHESTER
1693 4 26 13 FILL N/D N/D N/D N/D 10 ? 10 OUI
ROMNEY
HARDWICH
1694 4 26 13 13 ? N/D N/D N/D N/D 10 10 ? OUI
PENDENNIS
50 CANONS 4r 1696 4 23 12 12/FIL N/D N/D N/D N/D N/D 10 OUI

Tableau 5. Comparaison de sections des 4èmes rangs (Dimensions en pouces anglais.)

2EME ALLONGE SUPERIEURE

3EME ALLONGE SUPERIEURE


1ERE ALLONGE SUPERIEURE

2EME ALLONGE INFERIEURE


1ERE ALLONGE INFERIEURE

3EMEALLONGE INFERIEURE

ALLONGE DE SOMMET
NUMERO DE RANG

SOURCES
PAS DE COUPLE

▼▼
VARANGUE

LIAISON
DATE

FORESIGHT 1650 4 26 13 ? 13 ? N/D N/D N/D 0 0 N/D EC


DEANE 1670 4 27 13 12.5 12.5 11 11 0 0 10 N/D
KELTRDIGE 1675 4 25 12.5 12.25 12.25 12 12 12 11.3 11 N/D
BATTINE 1686 4 N/D 11 N/D 12 N/D 12 N/D 12 6 N/D
MARY 1686 4 26 10 10(9) N/D 0 8 N/D 8 N/D EC
NORWICH 1692 4 26 13 FILL N/D N/D N/D N/D 10 N/D CE
60 CANONS 4r 1693 4 26 13 12/FIL N/D N/D N/D N/D 11 11 EC
GOLDCHESTER 1693 4 26 13 FILL N/D N/D N/D N/D 10 ? 10 CE
SUNDERLAND 1693 4 26 13 12/FIL N/D N/D N/D N/D 11 11 EC
60 CANONS 4r 1694 4 26 13 12/FIL N/D N/D N/D N/D 11 11 EC
HARWICH 1694 4 26 13 13 ? N/D N/D N/D N/D 10 10 ? CE
50 CANON 4r 1696 4 26 12.5 12/FIL N/D N/D N/D N/D N/D 10 CE
CE = Clef d'Empature. EC = Ecart. N/D = Non Disponible.

- 65 -
53

De plus "ye whole frame to be well chocked with good sound timber" : "- la
membrure entière doit être bien calée (accorée) avec des accores de qualité."
Comme pour les devis des quatrièmes rangs de 50 canons, les devis des sixièmes
rangs spécifient que quatre des plus lourdes vaigres de fond étaient "…lye upon ye
chocking of ye floor head and the foot of ye upper futtock" : "…couchées sur les
taquets des têtes de varangues et les pieds des allonges supérieures". Si les
allonges de sommet étaient dressées sur les allonges inférieures et les allonges
supérieures sur les têtes de varangues, alors, il n'y avait aucun espace pour une
allonge médiane. Donc, les sixièmes rangs avaient des membrures composées de
seulement deux allonges par côté et non trois, comme l’indiquent Keltridge et
Battine dans leurs tableaux de sections. Si la membrure entière était bien assemblée
par cales et les allonges de sommet placées sur les têtes des allonges inférieures, il
est certain que la membrure entière était assemblée avec des cales d'écart, un détail
qui n'est pas visible sur les dessins d’époque70. Les autres devis préservés traitant
du sixième rang ne montrent aucune structure telle que celle du Biddeford.71

Tableau 6. Sections des navires de sixième rang. (Toutes dimensions en pouces anglais).

2EME ALLONGE SUPERIEURE

3EME ALLONGE SUPERIEURE


1ERE ALLONGE SUPERIEURE

2EME ALLONGE INFERIEURE


1ERE ALLONGE INFERIEURE

3EMEALLONGE INFERIEURE

ALLONGE DE SOMMET
NUMERO DE RANG

SOURCES
PAS DE COUPLE

▼▼
VARANGUE
DATE

DEANE 1670 6 24 10 8.5 8.5 7 7 0 0 7 CLEF


N/D

KELTRDIGE 1675 6 18.75 9.5 8 8 7.75 7.25 0 0 6.5 N/D

BATTINE 1686 6 N/D 9 N/D 8 N/D 7 N/D 7 4 N/D

BIDDEFORD 1694 6 22 9 9 N/D 8 7 0 0 7.5 OUI

FAULCON 1694 6 22 9 9 N/D 8 7 0 0 7.5 OUI

SEAHORSE 1694 6 22 9(8.5) 9(8.5) N/D 8 7 0 0 7.5 OUI

SWAN 1694 6 22 9 9 N/D 8 7 0 0 7.5 OUI

- 66 -
54

Au début de la Guerre de la Ligue d'Augsburg la marine a commandé la


construction de brûlots. Leurs dimensions et leurs tonnages étaient presque
identiques aux navires de sixième rang de la même époque, cependant leurs
membrures étaient différentes. Le tableau 7 présente les données tirées des devis
tandis que dans le tableau 8, les brûlots et les sixièmes rangs sont comparés.72
Comme les autres navires des années 1690, les brûlots ont été construits avec les
mêmes spécifications. Le pas de 22 pouces (55.9 cm) était la même que pour les
sixièmes rangs. Les varangues devaient faire 10 pouces (25.4 cm) de côté.
L'allonge inférieure devait faire 10 pouces (25.4 cm) au maître-couple ainsi que
dans les quatre membrures avant et arrière de part et d'autre. Les membrures
restantes devaient faire seulement 8 pouces (20.3 cm) de côté et toutes devaient
s'effiler à 7 pouces (17.8 cm) au niveau du creux du maître-couple. Les têtes des
allonges supérieures devaient monter de 1 pied (30 cm) au-dessus du pont inférieur.
Aucune information n'est donnée pour les allonges, mais en comparant ces navires
avec les navires de sixième rang, on peut en déduire que probablement elles
faisaient environ 7 pouces (17.8cm) aux extrémités inférieures. La longueur des
écarts devait être d'au moins 4 pieds (1.2 m), mais le devis ne mentionne pas de
cales. L'explication probable est que, dû au surcroît de travail, les cales coûtaient
plus chers à encastrer que de simples écarts, et, qu'un navire plus léger destiné à
une carrière relativement courte n’avait pas besoin de devoir résister aux coups des
canons.

- 67 -
55

Tableau 7. Sections des brûlots. (Toutes les dimensions sont en pouces anglais).

2EME ALLONGE SUPERIEURE

3EME ALLONGE SUPERIEURE


1ERE ALLONGE SUPERIEURE

2EME ALLONGE INFERIEURE


1ERE ALLONGE INFERIEURE

3EMEALLONGE INFERIEURE

ALLONGE DE SOMMET
NUMERO DE RANG

SOURCES PAS DE COUPLE


▼▼

VARANGUE

ECART
DATE

FOX 1689 B 22 10 10 7 N/D 7 N/D N/D N/D OUI

GRIFFIN 1689 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D OUI

PHAETON 1690 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D OUI

VULCAN 1690 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D OUI

PHENIX 1693 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D OUI

N/D = Non Disponible. B = Brûlot.

Un devis pour un sixième rang de 1699 avait le même pas de couple que le
Biddeford, mais ses sections differaient.73 Les varangues et les premières allonges
au milieu du navire devaient avoir 10 pouces (25.4 cm.) de côté. Les allonges des
quatre membrures de part et d'autre du maître-couple devaient diminuer jusqu'à 8
pouces (20.3 cm.) de côté à l'extrémité inférieure et jusqu'à 7 pouces (17.8 cm.) sur
le côté opposé. L'allonge supérieure devait monter un pied au-dessus du pont
inférieur. Selon l’habitude pour ce type de devis on ne donne pas d'information sur
les allonges de sommet. Si les devis précédents sont une référence, il est probable
que les allonges de sommet avaient la même dimension de côté que celle des autres
allonges. Les données contenues dans ce document permettent d’affirmer que le
devis était bien celui d’un brûlot, et démontre que les devis de 1689 étaient encore
l'utilisés en 1699.

- 68 -
56

Tableau 8. Comparaison de 6emes rangs et brûlots. (Dimensions en pouces anglais.)

2EME ALLONGE SUPERIEURE

3EME ALLONGE SUPERIEURE


1ERE ALLONGE SUPERIEURE

2EME ALLONGE INFERIEURE


1ERE ALLONGE INFERIEURE

3EMEALLONGE INFERIEURE

ALLONGE DE SOMMET
SOURCES NUMERO DE RANG

PAS DE COUPLE
▼▼

VARANGUE

JOINCTION
DATE

DEANE 1670 6 24 10 8.5 8.5 7 7 0 0 7 CE


KELTRDIGE 1675 6 18.75 9.5 8 8 7.75 7.25 0 0 6.5 CE
BATTINE 1686 6 N/D 9 N/D 8 N/D 7 N/D 7 4 CE
BIDDEFORD 1694 6 22 9 9 N/D 8 7 0 0 7.5 CE
FAULCON 1694 6 22 9 9 N/D 8 7 0 0 7.5 CE
SEAHORSE 1694 6 22 9(8.5) 9(8.5) N/D 8 7 0 0 7.5 CE
SWAN 1694 6 22 9 9 N/D 8 7 0 0 7.5 CE
FOX 1689 B 22 10 10 7? N/D 7 N/D N/D N/D EC
GRIFFIN 1689 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D EC
PHAETON 1690 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D EC
VULCAN 1690 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D EC
PHENIX 1693 B 22 10 10 7 N/D 7 0 0 N/D EC
CE = Clef d'Empature. EC = Ecart. N/D = Non Disponible.

Les navires de la marine Royale non catalogués reçoivent rarement


d'intérêts.74 Cela n'est pas justifié, car une information suffisante existe pour les
étudier. Les archives publiques contiennent des devis sur des ketchs commandés
pendant la guerre de la Ligue d'Augsburg.75 Avec un pas de couple de 20 pouces
(50 cm), les varangues de ces petits navires devaient avoir 9 pouces (22.9 cm) de
côté. Comme sur les brûlots, la première allonge au maître-couple et les quatre
suivantes de part et d'autre devaient avoir les mêmes sections que les varangues; le
reste devait avoir seulement 7 pouces (17.8 cm) de côté. Au creux du maître-
couple, la cote des flancs des allonges se réduisaient jusqu'à 6.5 pouces (16.5 cm).
Aucune mention n'est faite de seconde allonge où d'allonge supérieure et la seule
suggestion qu'elles aient été utilisées en fait est que l'allonge décrite est mentionnée
comme allonge "la plus basse". Les allonges de sommet devait avoir 5 pouces (12.7
cm) de côté.

- 69 -
57

Le devis précise que les écarts ne devaient pas faire moins de 4 pieds (1.2 m).
Aucune clé n'a été utilisée. Ces navires ont été construits avec des allonges simples.
Leur taille plus petite semblerait autoriser une telle interprétation. De plus, si on
regarde attentivement, il est notable que le rapport de la circonférence du navire sur
la longueur d'un couple, est égal à la profondeur de la cale. Pour des ketchs cette
valeur devait être de 9 pieds (2.7 m) en comparaison avec les brûlots qui avaient
une profondeur de cale de 9 pieds 8 pouces (3 m). La différence est si petite qu'elle
peut être ignorée. Puisque l'allonge est spécifiquement mentionnée comme "la plus
basse", je favorise l'hypothèse que les ketchs ont été construits avec deux allonges.

En 1701, le Warspight a été reconstruit pour partie dans le programme de


réparation que l'amirauté a lancé après la signature de la paix en septembre 1697.76
Si les spécifications de 1664 ont été en effet utilisées pour la charpente de ce
navire, après sa reconstruction il devait avoir seulement le nom en commun avec
son prédécesseur. Il sortit du chantier naval avec des sections complètement
nouvelles. Même la maille fut modifiée. Ces valeurs sont devenues la norme pour
les navires de troisième rang après le milieu des années 1670. La structure aussi
était différente, puisque il possédait maintenant trois allonges, mais conservait
toujours les écarts, ce qui est évident d'après le devis de reconstruction 77

En 1702, avec la reconduction imminente de la guerre avec la France,


l'amirauté anglaise a commandé de nouveaux navires. Les devis pour deux navires
de cinquième rang de 40 canons et pour deux navires de quatrième rang armés de
50 canons sont pratiquement identiques.78 Aucun devis ne mentionne la présence
d'écarts, mais les deux spécifient des cales d'empâture.

- 70 -
58

La phrase la plus intéressante dans le devis sur les cinquièmes rangs précise que
"the whole frame to be well chocked with good sound timber"- la membrure entière doit être
bien calée (accorée) avec des accores de qualité." Dans le devis des navires de 50
canons, il y a aussi une phrase importante : "Footwaling the six inche shifte to lye upon the
chocking of the floor head"- les vaigres de fond de six pouces changent de position
pour se coucher sur le calage des têtes de varangues."

Durant les trois quarts du XVIIème siècle les navires étaient construits de la
même manière qu'au début de ce siècle. Le planning de construction est décrit
brièvement par Phineas Pett dans son autobiographie. Comme décrit dans le
chapitre précédent, après l'assemblage des varangues, le montage du bordage et des
membrures progressait presque simultanément. Comment la construction navale a-
t-elle été modifiée après l'introduction de la troisième allonge à la fin du XVIIème
siècle? Cela aurait pu dépendre du fait que les allonges aient été ou non fixées
latéralement entre elles. Depuis, les devis ne décrivent pas d'attaches latérales.
L'aide de l'archéologie navale sera indispensable pour apporter une réponse à cette
question. Le travail de Sutherland de 1711 indique que les membrures ont été
latéralement attachées. Il note que les éléments de charpente des petits navires ont
été attachés et levés entiers avec les allonges, tandis que pour de grands navires,
seulement les couples jusqu'à la plus grande largeur de la charpente ont été attachés
ensemble avant d'être levés. Une question qui nécessite une réponse, avant
d'accepter les indications de Sutherland comme une règle, si la transposition des
pratiques, de 1711 à la dernière décennie du XVIIème siècle est possible. Dans une
certaine mesure, Sutherland lui-même, répond à cette question :

- 71 -
59

"…Autrefois la méthode consistait à positionner et à réunir les éléments


inférieurs, ainsi que les varangues et les allonges inférieures, ensembles; mais
il fut observé que cela pouvait causer une putréfaction et un préjudice pour
les navire de sections supérieures et cela fut abandonné79 "

Apparemment les devis décrivent la méthode précédente qui fut abandonnée.


Sutherland n'indique pas quand la méthode a été abandonnée, mais l'époque
probable doit être la période entre la fin de la Guerre de la League d'Augsburg en
1697 et le début de la Guerre de la Succession de l'Espagne en 1703, quand la
plupart des unités de la marine ont été reconstruites et réparées.

La nouvelle méthode de construction a laissé plus d'espace entre les


membrures composant la charpente. Sutherland écrit : ". j'entends par espacement,
que selon la taille du navire, il y est une réserve faite pour deux des premières
varangues à côté d'un vide entre elles pour l'air ...."80 Le remplissage des espaces a
été définitivement abandonné. Plus loin, Sutherland continue "... à la tête et au
pieds de chaque élément de charpente, la moitié est coupée..."81 La taille des bois
de charpente à la tête et aux talons est exécutée afin de loger les cales pour les
écarts. La même source nous informe qu'il était nécessaire pour "... les allonges
d'avoir un écart symétrique, le milieu d'une allonge étant dans l'alignement de la
tête et du talon des autres...."82 Essentiellement, cela signifie que le chevauchement
de l'écart n'a pas été complètement abandonné, mais plutôt qu'une cale d'écart a été
ajoutée. L'avantage de la cale d'écart consistait en ce qu'elle ait aidé à former une
allonge continue, d'un seul tenant sur le flanc du navire, parce que "... avec une
pièce, elle serait beaucoup plus résistante que composées de beaucoup d'éléments
...."83 les membrures décrites ici sont de vrais membrures doubles.

- 72 -
60

La preuve et le planning de construction de base viennent d'une autre section


du travail cité. Sutherland conseille aux constructeurs "de monter d'abord les –
frametimbers - bois de charpente des membrures, qui dans quelques navire sont les
quatrièmes et dans certains les troisièmes; mais dans le croisement des varangues,
chaque autre Bois de charpente est généralement mis dessus....,84 Ce qu'il entend
par" Frametimbers " (n'est pas exactement ce que nous entendons aujourd'hui) est
défini dans le passage suivant :

"…La façon de faire est de dresser chaque troisième, ou chaque quatrième


madrier de charpente, c'est-à-dire d'adapter ou de joindre toutes les allonges
et les éléments de charpente supérieurs ensembles, dans le cadre d'un petit
navire; mais si c'est un grand, alors toutes les allonges, qui atteignent la
hauteur de la lisse d'exécution la plus large; et observez pour assembler les
éléments de membrure (frametimbers) très exactement, et le plus
conformément au gabarit…." 85

Pour Sutherland, "frame-timbers", les éléments de charpente constituant la


membrure étaient pré-assemblés, les membrures doubles étaient assemblées, ou
formées au gabarit sur les dessins. Les autres, celles qui étaient dites des
membrures de remplissage étaient érigées pièce par pièce avec les lisses
d'exécution profilées, utilisées pour assurer que le bouchain et la largeur
correspondaient bien au plan. Il est remarquable que les membrures étaient
seulement partiellement pré-assemblées. Les varangues étaient déjà chevillées sur
la quille, avant que les allonges soient sécurisées sur elles. L'espace nécessaire
n'aurait pas été disponible pour pouvoir cheviller les allonges aux varangues de
l'avant à l'arrière - avec les membrures inférieures, ou avec les membrures de
remplissage. Il était possible, cependant, d'assembler les membrures mais
seulement avec l'introduction de cales d'écarts.

Sutherland décrit le planning de construction d'un navire qui a été introduit


probablement au début des années 1690 et qui est devenu la façon dominante de
construire des navires à partir de 1711. Après que la quille soit fixée, les varangues
gabariées sont posées transversalement. Les lisses d'exécution sont passées autour

- 73 -
61

des têtes de varangues pour les maintenir avec un bon profil. Le reste des varangues
est rempli, suivi par les massifs de l'avant et de l'arrière. Les allonges assemblées
d'avance sont montées sur leurs varangues respectives et une lisse d'exécution est
positionnée de chaque côté pour l'appui et le guidage. Alors les bois de remplissage
et les demie-membrures sont ajoutés suivi par le bordage. Les techniques de
construction des membrures et de charpente ont atteint un niveau qui durera
jusqu'aux changements introduits à la fin des guerres Napoléoniennes.

Pour conclure, on peut retenir le modèle de développement suivant pour les


membrures des navires de guerre anglais dans la seconde moitié du XVIIème siècle.
Les batailles des guerres anglo-hollandaises ont démontré la supériorité accablante
des navires anglais lourdement boisés et armés. La vitesse était de seconde
importance, car les Hollandais était trop heureux de s'engager. Les navires de
cinquième et sixième rangs plus petits, cependant, n'étaient pas à même de joindre
la ligne de bataille, mais ils ont été utilisés comme des navires d'appui. Les tâches
qu'ils ont dû exécuter ont exigé qu'ils soient rapides et légers. Elles se sont reflétées
dans la structure de leurs charpentes.

En réponse à l'acquis de l'expérience en guerre, entre 1673 et 1677 les


constructeurs de navires ont incorporé la troisième allonge dans leurs navire.
Cependant les "galères-frégates", ainsi que les sixièmes rangs, ont continué à être
assemblés avec deux allonges. Pour tous les navires, la vitesse était le souci majeur
et leurs coques peu profondes n'exigeaient pas de grandes quantités de bois de
construction. Pour de plus grands navires le complément d'une troisième allonge
peut avoir permis la diminution des dimensions du pas de couple ainsi que les
dimensions des bois de construction, mais n'aurait pas diminué les quantités
d'approvisionnement, problème dramatique.

- 74 -
62

A l'opposé, maintenant, deux éléments de charpente complémentaires par


membrure ont dû être fournis. La troisième allonge additionnelle a éliminé les
espaces vides dans la membrure, illustré par les maquettes du conseil naval. Cela a
diminué la longueur de bordage non soutenue par les éléments des membrures. En
outre, cela doit avoir augmenté la rigidité et la solidité de la coque. Des coques plus
rigides sont moins prédisposées aux torsions et flexions dans les conditions de mer
et résistent mieux à l'expulsion du calfat du bordage. Cela augmente la navigabilité
d'un navire et allonge les périodes de service entre les réparations - un progrès
important augmentant les capacités de déploiement géographique d'une marine.

Des devis du XVII ème siècle apportent la preuve que les navire n'ont pas été
construits simplement en ajustant les sections et les dimensions des navires de 50
canons de quatrième rang et de sixième rang. Le devis de 1702 pour les navires de
cinquième rang montre que ceux de la dernière décennie du XVIIème siècles ont été
assemblés comme les navires de 50 canons et ceux de sixième rang. Pour ces trois
types de navires la caractéristique importante était la vitesse sous voile. Les navires
de quatrième rang de ce groupe étaient aussi prévus pour l'approvisionnement en
ligne lors de bataille. Les missions que ces navires avaient à accomplir, exigeaient
la solidité et la légèreté. L'introduction des cales d'écart a peut-être permis de
construire ces navires avec des matériaux de caractéristiques inférieures. Le bois de
construction le plus difficile à trouver aurait été les madriers pour les varangues
avec une longueur suffisante et une courbure aux deux extrémités jusqu'aux têtes de
varangue. L'introduction de cales aurait résolu ce problème logistique. Un autre
avantage aurait été la rigidité complémentaire d'une bande continue et solide de
bois de joignant le fond du navire au creux du maître-couple. Cela réduisait la
masse et les sections sans mettre en péril la résistance.

- 75 -
63

Les brûlots, par contraste, avaient des carrières courtes, mais ils devaient
néanmoins avoir des capacités de navigation suffisantes pour se maintenir au
niveau de la flotte, ils avaient de lourdes sections au milieu et étaient
significativement plus légers aux extrémités. Il n'y avait pas de nécessité de rigidité
et aucune cale n'a été utilisée. Les grands vaisseaux de quatrième et troisième
rangs n'ont pas utilisé de clés d'écart, mais ont tiré leur solidité du chevauchement
des écarts. Les bandes presque continues de bois aux bouchains et au creux du
maître-couple contribuaient à la résistance des coques aux tirs. Il est probable
qu'aux cours du début du XVIIIème siècle, les constructeurs de navires ont incorporé
l'écart sur des navires plus grands, aussi. Dans les plus grands navires l'utilisation
d'écarts à permis d'accroire la résistance en maintenant l'aération des espaces vides
entre les madriers de charpente.

En résumé, sur les navires de tous rangs le système à deux allonges a régné en
maître absolu, des premières années du XVIIème jusqu'aux environs de 1675, quand
la troisième allonge a été ajoutée et utilisée largement dans la membrure des quatre
rangs les plus grands. Le processus de conversion doit avoir été achevé au début
des années 1700, lorsque les écarts de chevauchement disparaissent des devis et
que les cales d'écarts leur sont substituées.

- 76 -
64

CHAPITRE IV

PLANS ET DESSINS

Quelques plans de navires anglais de la deuxième moitié du XVIIème existent


encore. Certains de ces plans issus des archives danoises ont été publiés par Brian
Lavery.86 Il est très probable que Lavery a utilisé ces documents dans sa
reconstitution de Deane's Résolution, de 1667. Le dessin dépeint un troisième rang
de 70 canons qui pourrait être l'un des vingt navires faisant partie du programme de
construction de 1677. Si c'est le cas, le navire est pour l'instant non identifié.
L'intérêt de ce travail est la section médiane du navire montrée dans la partie
supérieure du dessin. Il est presque certain qu'il décrit trois allonges et, une allonge
supérieure (figure 15). Lavery associe les devis des années 1690 avec ce dessin,
prétendant que les navires postérieurs ont été construits après ceux du programme
de 1677.87 Le plan semble être le premier à présenter de manière évidente une
membrure à trois allonges. En 1670, Sir Anthony Deane parle de seulement deux
allonges.

Au sujet des pratiques utilisées pour la réalisation des membrures dans les
années l680, il existe un recueil de dessins exécutés par William Keltridge, un
constructeur qui peut avoir été un étudiant de Deane.88 Ce recueil est composé de
travaux sur quatre navires de sixième rang, un navire de cinquième rang et deux
navires de quatrième rang.89

- 77 -
65

Figure 15. Section d'un troisième rang. Celui-ci fait probablement parti du
programme des trente navires. Redessiné à partir de d'original publié par Lavery.
Légende : 1- Quille 2- Varangue 3- Première allonge 4- Seconde allonge 5-
Troisième allonge 6- Allonge de sommet

Deux des dessins montrent des sections médianes de navire. L'un pour un vaisseau
de quatrième rang, l'autre pour un sixième rang. La section du navire de quatrième
rang semble fournir la preuve la plus ancienne attestant de l'utilisation de doubles
membrures, à l'exception de deux modèles présentés dans le chapitre suivant.

- 78 -
66

La section montre les abouts et les repères de positionnement. Chaque élément est
repéré, afin d'éliminer les risques de mauvaises interprétations. La membrure est
constituée d'une varangue, d'une allonge inférieure, d'une seconde allonge, d'une
allonge supérieure et d'une allonge de sommet. Keltridge distingue les deux navires
de quatrième rang par des descriptions courtes. Le premier est dit être "...near ye
dimensions of ye adventure…" c'est-à-dire " près des dimensions de l'Aventure..."
Pour l'autre, le constructeur de navires déclare simplement que c'est un quatrième
rang de "... ye largest dimensions…"," de plus grandes dimensions..." . La section
semble appartenir au deuxième exemple. Elle est dessinée à une échelle de 3/8 de
pouce par pied, plutôt que d'un pouce 1/4 par pied utilisée pour l'épure, le plan et
les vues d'ensemble. Cela peut être significatif, et correspondre à une tentative de
mise en évidence d'un aspect peu commun. En plus des détails de charpente, le
dessin contient la silhouette d'une section plus étroite avec une varangue plus
longue, qui possède une grande ressemblance avec la section produite par la
méthode de Deane. En fait, la varangue présentée sur le plan, est plus étroite d'un
pied par rapport aux dimensions données par Deane. Le contour plus large
correspond vraiment à ses spécifications.

Dans les dessins de Keltridge, les navires de sixième rang présentent un intérêt
particulier. Ils sont groupés par paires sur deux planches et il est évident qu'ils
proviennent de deux époques différentes. Deux dessins présentent les initiales IR
de James II et ont probablement été dessinés après l'accession au trône de ce
monarque au début de 1685. Ainsi, ils peuvent être considérés comme de bonnes
représentations de petits navires des années 1680. L'autre planche montre deux
navires dessinés à une échelle plus petite (1/8 de pouce par pied) que les exemples
précédents. Le navire en bas de page est décrit comme "... un sixième rang
ancienne méthode," l'autre - "... de plus grandes dimensions...." Ils peuvent être
grossièrement datés des années 1660 (ou peut-être encore plus tôt) pour le premier
et des années 1670 pour le deuxième exemple.

- 79 -
67

La datation est basée sur la décoration et plus précisément sur la forme de la proue.
L'élancement de l'étrave a subi de vastes changements pendant la période appelée
restauration. Au début, l'étrave avait la forme d'un arc avec un rayon constant,
tangentiel à la quille. Les années 1670 ont vu s'imposer l'intérêt de quilles plus
longues au détriment de l'élancement de l'étrave de plus en plus court. La forme de
l'étrave était tirée de deux arcs, ou d'un arc et une ligne droite. L'arc inférieur était
toujours tangentiel à la quille, mais avec le rayon significativement plus petit. Dans
les années 1680 l'étrave, toujours dessinée par un segment de cercle, a été
positionnée verticalement avec un angle de presque 90 degrés par rapport à la
quille. Pendant les années 1690 l'élancement de l'étrave a été de nouveau
légèrement augmenté.90

Le dessin des navires précédents présente une section au pas de trois. La


distance entre les sections est de 5 pieds (1.5 m), ce qui donne 20 pouces (50.8 cm)
de pas de couple. Dans son calepin, Keltridge donne la valeur du pas pour les
sixièmes rangs comme étant de 18.75 pouces (47.6 cm). Ces cas de figure sont les
mêmes pour les navires des années 1660 et 1670. Sur le dessin du dernier, à la
coupe au maître-couple sur la section longitudinale, Keltridge a dessiné un petit
rectangle qui est partagé en deux par la ligne de section (figure 16). L'échelle est
trop petite pour donner une précision meilleure qu'un pouce ou deux, mais elle est
suffisante pour évaluer la taille du rectangle à 20 pouces (50.8 cm), ou légèrement
moins. Probablement que ce rectangle représente le pas de la membrure sur le flanc
de la quille. Il donne seulement la dimension du flanc de l'ensemble
varangue/allonges et doit avoir été dessiné là pour montrer la distribution des
membrures partout sur la longueur de la quille. Keltridge ne fournit pas de sections
réelles sur le dessin, mais dans ces notes les deux sont inscrites, varangue et
première allonge. Sur le dessin, une silhouette proche permet d'évaluer la
dimension totale de leur largeur à 17.5 pouces (44.5 cm).

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68

Pour la comparaison nous pouvons nous tourner vers le document de Deane et


vérifier qu'il est en parfait accord avec Keltridge. Ce document donne de l'avant à
l'arrière la dimension pour les varangues comme étant de 10 pouces (25.4 cm) et
pour l'allonge inférieure de 8.5 pouces (21.6 cm). Le total de 18.5 pouces (47 cm)
est raisonnablement près des 20 pouces (50.8 cm) du pas du couple. Il est clair que
la bande de bois continue au niveau de la tournure du bouchain était pratiquement
ininterrompue. Cela pourrait être un argument en faveur d'une première allonge
glissant à côté de la varangue et liée par un écart à la seconde allonge, qui est
raboutée dans la tête de varangue, si nous acceptons la spécification de Deane pour
deux allonges (voir figure 10).

Figure 16. "Empreinte du pas de couple" sur l'un des sixièmes rangs de Keltridge.

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69

Il est probable que Keltridge montre une membrure avec chevauchement


concernant un navire plus vieux. Bien que les sections de varangue et d'allonge
inférieure soient pratiquement identiques, le pas de couple diffère significativement
dans les tableaux de Deane, cependant, il est près de ces valeurs sur ses propres
tables datant des années 1670. Deane indique les navires de sixième rang comme
ayant un pas de 24 pouces (61 cm) par opposition à Keltridge, qui spécifie une
valeur de 18.75 pouces (47.6 cm). Cela laisse un vide de 5.5 pouces (14 cm) dans le
premier cas et 1.25 pouces (3.2 cm) dans le deuxième, entre les madriers de
charpente au niveau du bouchain. Cela signifie que le navire de Deane n'avait
aucune ligne continue boisée au niveau des bouchains et les dimensions des flancs
des allonges supérieures et des allonges de côté diminuant graduellement, faisaient
qu'il n'avait certainement aucune ligne de bois continue au niveau de la largeur non
plus. Probablement, les madriers ont été distribués avec des vides entre eux comme
dans la figure 12. Il semble que les espaces vides auraient été compris entre 2 à
2.25 pouces (5.1-5.7 cm) de large, ce qui est comparable avec les valeurs trouvées
sur le Dartmouth.91 Le sixième rang proposé par Keltridge a des espaces beaucoup
plus petits entre les éléments de charpente - environ la moitié de ce qui est donné
comme valeur par Deane. Les sections des madriers entre les deux navires ne
diffèrent pas de beaucoup, avec celles de Keltridge donnant des dimensions de
flancs plus petites. Les différences sont d'environ 0.5 pouce (1.3 cm) et sont
compensées par le pas de couple, qui, à son tour, aboutit à une bande presque
continue de bois de charpente. Ainsi construit, cela aurait été un navire plus
lourdement boisé que celui de Deane. Puisque Deane est bien connu pour son
intérêt dans les navires à voiles rapides, sa distribution proposée de bois de
charpente aurait privilégié le plus léger et par conséquent le navire plus rapide.92
Les sections de la liste de Deane ne montre pas le même modèle de madriers pour
les rangs plus grands. Les différences se situent dans des valeurs de 1 à 1.5 pouces
(2.5-3.8 cm) dans les limites dictées dans les devis.

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70

Depuis ces navires ont été conçus pour résister aux lourdes charges émergées de
leurs propres canons aussi bien qu'aux coups répétés tirés par l'ennemi.

Ayant établi cela, Deane a favorisé une structure des membrures plus
largement espacées pour ses petits navires; il est intéressant d'examiner quelles
dimensions de charpente Keltridge donne pour ses deux navires de sixième rang
plus récents. Son plan est de plus très utile, car il présente aussi un dessin de
charpente à l'axe du navire, semblable à son plan de quatrième rang.

Les deux navires sont dessinés à l'échelle plus habituelle de 1 pouce 1/4 par
pied. Ils diffèrent dans leurs dimensions et quelque peu dans leurs formes. Le plus
important en fait est qu'ils diffèrent aussi dans le pas de couple. L'un a un
espacement des membrures de 22 pouces (55.9 cm), tandis que pour l'autre il n'est
que de 20 pouces (50.8 cm). Les deux possèdent le rectangle représentant
"l'empreinte de pas" sur la quille et, de nouveau la ligne de section le partage en
deux. Dans ces exemples Keltridge a dessiné chaque section, au lieu de n'en
représenter qu'une sur trois. Les bois de construction ont une dimension de côté
combinée de 13 pouces (33 cm) dans les deux cas, laissant un vide de 9 pouces
(22.9 cm) et de 7 pouces (17.8 cm) respectivement, entre les couples. Il est notable
que les sections portées dans le calepin de Keltridge ne correspondent pas à ses
plans. Les dessins sont imprécis ou, un beau jour, entre les années 1670 et le milieu
des années 1680, Keltridge a changé d'avis sur la disposition des membrures. Il
existe un deuxième calepin de cotes qu'il a compilées dans les années 1680 qui
devrait pouvoir clarifier la question, mais il na pas été impossible d'étudier ce
document lors de l'exécution de ce travail.93 Il faut cependant remarquer que
Keltridge donne au pas de couple la plus petite valeur de toutes les sources. Les
vides sont plus grands que ceux recommandés par Deane et les bois de la charpente

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71

ont des sections significativement plus petites. Le résultat est que les vaisseaux de
Keltridge auraient été plus légers que ceux proposés par Deane. La conception des
membrures plus légères peut avoir découlée de l'expérience gagnée dans les guerres
Algerines de cette période, dans laquelle des navire anglais se sont montrés
inférieurs dans leurs aptitudes à la navigation, par rapports à celles des vaisseaux
pirates. Des sections plus légères auraient donné des navires à voiles plus rapides,
mais les plans montrent un armement principal composé de lourds canons demi-
culverins (capable de tirer un boulet 9 livres), un armement quelque peu commun,
comme le montre la liste des sixièmes rang de 1685, indiquant, seulement deux
navires sur huit, de sixième rang en service à cette époque portant des demi-
culverins (Saudadoes et Two Lions), les autres ayant un armement plus léger.94

Sur la section des deux navires de sixième rang du règne du roi James II,
Keltridge semble illustrer les parties différentes d'une membrure sur les côtés
gauche et droit de l'axe médian (figure 17). Sur la gauche est visible un repère de
positionnement au niveau de la préceinte principale, tandis qu'à droite il y a
seulement une ligne droite signifiant la fin d'un madrier. L'examen minutieux du
dessin, révèle que la membrure est constituée d'une varangue, d'une allonge basse
et supérieure et d'une allonge de sommet. La membrure est presque certainement
double. La découpe des divers éléments de structure a été faite en accord avec les
différentes interprétations possibles. Le seul modèle satisfaisant les données semble
être le modèle proposé. Au premier regard, on peut croire avoir à faire à une
membrure avec chevauchements. Le repère de positionnement au milieu du champ
de l'allonge, cependant, suggère que la membrure est double. L'analyse de la
distribution des membrures sur la quille le confirme. Tant Keltridge que Battine
sont unanimes pour attribuer une troisième allonge aux navires de sixième rang.
Cependant, les devis de 1690 pour ces navires, les contredisent tout deux. En effet,
il ne semble pas y avoir de bonne raison pour utiliser trois allonges sur de tels petits

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72

navires. Encore que, des exemples de navires encore plus petits construits avec
trois allonges existent vraiment. La barque longue Française, la Belle de 1684,
possède trois allonges, attachées latéralement les unes aux autres. 95

Figure 17. Section d'un sixième rang selon Keltridge.

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73

Le vaisseau de cinquième rang de Keltridge est présenté de manière


intéressante. Sur la vue en plan, la moitié supérieure montre les lignes, mais la
moitié inférieure décrit les courbes et les sections des membrures. Comme dans la
plupart des dessins de Keltridge, toutes les sections sont données. Le pas fait a peu
près 24 pouces (61 cm). Malheureusement, la même incohérence notée sur les
autres dessins est aussi visible ici et le pas varie, le chiffre cité étant la valeur
moyenne. Ce dessin donne une vision peu commune de la structure du pont d'un
navire de guerre, pour lequel je crois qu'il n'y a aucun parallèle provenant de cette
période.

Il est notable qu'à la poupe, le pont d'artillerie est en dessous du creux du


maître-couple, et suit grossièrement les préceintes inférieure et supérieure. La
structure du pont d'artillerie montre en détail : les baux, traversins, barottins, et les
courbes verticales et horizontales sont clairement définis. Les éléments liés au mât,
ouvertures d'écoutille, guirlande, lisse principale et ses courbes horizontales
montrent que le dessinateur a été particulièrement au courant de la technique de
construction navale. Cependant, le détail le plus intéressant du dessin est constitué
par les sections passant à travers les couples vus dans le plan du pont. Le dessin
inclut des quadrilatères noirs et blancs s'alternant, dépeignant des bois de charpente
et des espaces. Dimensionnellement ils varient significativement d'environ 6
pouces (15.2 cm) à environ 9 pouces (22.9 cm), ou même 10 pouces (25.4 cm).
L'espace varie entre 3 (7.6 cm) et 5 pouces (12.7 cm). Deux quadrilatères blancs et
deux quadrilatères noirs sont placés entre les lignes de sections traçant le pas de
couple. Dans son calepin Keltridge enregistre le pas comme faisant 22 pouces (55.9
cm), avec les madriers des deuxième, troisième allonges et les allonges de sommet
(toptimbers) variant entre 8 et 9.5 pouces (20.3 cm à 24.1 cm). Une comparaison
avec les sections inscrites par Deane révèle que le cinquième rang de Keltridge est
boisé plus légèrement que le navire proposé par Deane.

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74

Le pont est montré au niveau où les allonges de sommets devraient être


assemblées avec écarts aux allonges. Si le navire avait les trois allonges comme
montré sur les autres navires dessinés par Keltridge, la section au niveau du pont
aurait du présenter un schéma madrier-maille (timber-space) entre les lignes de
section, plutôt que le schéma madrier-maille-madrier-maille (timber-space-timber-
space). Les petites dimensions des madriers montrent, peu probablement une
membrure double, mais deux membrures, séparées et placées entre les lignes de
section adjacentes. Comme la différence dans les sections ne correspond pas à un
schéma, il est peu probable qu'une membrure double et une membrure de
remplissage ne soit décrites, non plus. Aucune explication particulièrement
satisfaisante ne vient à l'esprit, cependant le plus probable est que les quadrilatères
montrent des couples simples qui ne sont pas assemblés dans une membrure
double. Autrement dit, le cinquième rang est assemblé à l'ancienne façon avec un
chevauchement des allonges. Les quadrilatères entre les lignes de section
correspondent à la partie haute d'une allonge et à la partie basse d'une allonge
supérieure, avec des pièces(room) entre elles et les suivantes. Les petite
pièces(room) - habituellement autour de trois pouces - font probablement que si on
apercevait cette membrure sur une maquette, une ligne de bois massif et continu
serait visible au niveau du creux du maître-couple. Une distribution similaire des
éléments de charpente de l'épave du Dartmouth nous est connue. Il n'y pas de
certitude sur le nombre d'allonges composant ses membrures. Keltridge enregistre
trois allonges dans son calepin et il est probable que le dessin de son navire inclut
aussi trois allonges. Encore, est-il possible qu'il n'ait seulement que deux allonges.
Le Marie Galley lancé en 1687 avait seulement deux allonges, comme indiqué
selon le devis.

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75

Si les navires de cinquième rang avaient trois allonges - Keltridge donne trois
allonges même à ses sixièmes rangs - il est à noter que les allonges n'étaient pas
fixées latéralement l'une à l'autre dans la membrure. Il s'agissait essentiellement
donc, du vieux style d'assemblage par chevauchement avec une troisième allonge
supplémentaire ajoutée.

Le porte mortier anglais le Mortar a été lancé en 1693, et le dessin toujours


existant du navire du constructeur Edmond Dummer inclut une section au maître-
couple (figure 18). À l'époque les navires "bombe" ont été classés comme des
navires de cinquième rang et étaient aux commandes de "post-captains". Quand ils
n'étaient pas équipés de mortiers, ils étaient conventionnellement armés, gréés
comme les frégates et servaient en tant que telles.96 Donc, la membrure de ces
navires peut être retenue comme typique pour les petites frégates. Les différences
avec des navires conventionnels apparaîtraient dans les sections et dans la structure
d'appui complémentaire pour les lits de mortier, mais pas dans les sections des
membrures. Le dessin de la section du Mortar, aussi clairement que les dessins de
Keltridge, montre une membrure avec trois allonges.

Pour conclure, il peut être dit que les documents explicatifs - Keltridge en
particulier - soutiennent étroitement l'information fournie par les textes
contemporains présentés dans le Chapitre III.

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Figure 18. Section du Mortar de 1693.


Redessiné d'après l'original par Edmond Dummer.

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77

CHAPITRE V

LA MARINE PAR LES MAQUETTES

Il est heureux que le XVIIème siècle représente le sommet de l'art maritime


hollandais. Le thème ici n'est pas de décrire ni de glorifier les travaux des maîtres
Hendrick Vroom, Reinier Zeeman, Ludolf Backhuizen ou le père et le fils Willem
Van de Velde. Il suffira de se rappeler de la précision de leur travail et de leurs
connaissances minutieuses sur le sujet. Les travaux de ces maîtres sont
inestimables. Grâce à eux nous savons a quoi ressemblaient les navires, mais nous
pouvons aussi suivre la trace des changements survenus depuis l'apparition du
galion jusqu'aux vaisseaux de premier rang. Malheureusement, aucune source
comparable n'existe pour déterminer qu'elle était la disposition des structures
intérieures de ces navires.

On pourrait s'attendre au fait que les maquettes très détaillées du conseil


Naval, ou que les modèles du type "amirauté", fournissent des informations sur les
aspects des charpentes. Hélas, leur fiabilité comme source des diverses pratiques de
constructions de l'époque a été mise en doute. Pour les maquettes représentant les
navires du XVIIIème siècle le matériel préservé, les plans originaux dans beaucoup
de cas, prouvent qu'au-delà des grandes lignes, les maquettes ne montrent pas
quelles étaient les pratiques réelles de réalisation des membrures. Un homme
éminent tel que R.C. Anderson, probablement un des plus grand spécialiste des
navires anglais du XVIIème siècle, a exprimé l'avis que le seul point sur lequel on
pouvait avoir une certitude avec ces maquettes était limité au pas des couples.

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78

Il appui sa conclusion avec l'information provenant d'un manuscrit daté de 1676.97


La source n'est pas nommée, mais il s'agit probablement du calepin de Keltridge,
car ce travail est parvenu au musée par la collection du Dr. Anderson. Il a pris un
deuxième rang comme exemple et a utilisé les sections pour une varangue, quatre
allonges par côté et les allonge de sommets. Chacune des allonges successives
étaient un peu plus étroite que la précédente et chacune d'elle diminuait aussi de
section sur sa longueur respective. La différence entre le talon et la tête de chaque
allonge était d'environ 0.25 pouce.

William Baker, le dessinateur du Mayflower " réplique du" Mayflower II


est en désaccord avec Anderson.98 Il cite Manwayring avec la définition des jours99
et présente cela comme la preuve évidente de l'existence d'espaces entre les
différents éléments de membrure, comme on peut le montrer sur les maquettes. Il
note que la seconde allonge recouvre partiellement la première de la même manière
que la première allonge chevauche la varangue. Avec le temps, il semble, que les
jours devinrent de plus en plus petits jusqu'à ce qu'ils disparaissent complètement.
C'est devenu évident pour Baker suite à des dessins d'un trois-ponts Français parus
dans L'Album de Colbert.100 Pour reproduire les membrures du navire réel, Baker
suggère que les maquettistes ont uni la première et troisième allonges et ont ignoré
la deuxième, puisque cette dernière aurait empêché l'observation de l'intérieur du
modèle. Pour l'allonge supérieure (c'est-à-dire, la quatrième), elles n'était pas
représentée car elles était recouverte par le bordage. Ainsi, Baker suggère que les
maquettes furent des expressions "stylisées" des pratiques de charpentes réelles.101

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79

Salisbury accepte aussi que le couple "simple élément" dans les maquettes
n'ait aucun rapport avec la réalité, sauf probablement dans les navires les plus
petits. En même temps, il prend en compte les deux ceintures de bois
ininterrompues au niveau du bouchain et de la plus grande largeur comme des
éléments réels. Son explication à propos de l'allonge simple est que la membrure
était écarvée avec au moins deux pièces. Il interprète l'écart comme deux pièces de
bois liées dans une autre, pour former un seul morceau. Dans un tel cas, le
modéliste pourrait d'une manière justifiée ignorer les écarts et construire les
membrures avec seulement une paire d'allonges. Au milieu du XVIIème, cependant,
Salisbury suggère qu'il soit devenu nécessaire pour les grands navires de rapporter
un écart avec un autre élément de charpente, ce qui a mené à l'introduction
d'allonges supplémentaires.102

Les plus anciennes maquettes nous étant parvenues, datent des dernières
années de l'interrègne, ou Commonwealth. A cette époque, la tradition de
construire des modèles de navires à l'échelle existait bien. Les premiers modèles
sont construits par divers artisans et leurs caractéristiques légèrement différentes.
Pepys parle dans son journal de grand nombre de modèles déjà existants vers la fin
de l'interrègne.104 Dans son autobiographie, Phenias Pett décrit des modèles qu'il a
construit au début du XVIIème siècle et donne ensuite deux références plus précises
et plus importantes. Durant l'année 1608 il a construit un modèle très détaillé,
exactement de la manière dont un navire réel est construit, pour le roi James Ier.
C'était une offre pour le Prince Royal, un navire d'une taille jamais construite
auparavant. Pett lui-même nous donne une réponse à la question de savoir si les
modèles étaient vraiment des représentations précises des pratiques réelles.

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80

Le roi, approuvant la charpente du Léviathan, demandât à Pett qu'il compare


soigneusement le modèle avec le navire réel.105

L'enquête menée par les ennemis de Pett (non le moindre, le constructeur de


navires Matthieu Baker) n'a pas besoin d'être racontée de nouveau en détail ici,
mais quelques points doivent être passés en revue, car ils ont un rapport direct sur
la question. Une des charges était que les bois utilisés lors de la construction
avaient de mauvaises qualités et n'étaient pas de longueur suffisante. Pour
déterminer la véracité de l'accusation le roi lui-même visita la structure du navire en
construction.106 Si elle avait différé en quelque détail que ce soit de la maquette,
James Ier l'aurait sûrement remarqué et, comme Pett n'était pas à la hauteur de sa
popularité, sans aucun doute, la chose aurait été mentionnée au détriment du
constructeur.

Une autre circonstance quelque peu semblable a eu lieu sous Charles Ier,
quand il ordonna la mise en chantier du Sovereign of the seas. De nouveau, Pett a
construit une maquette détaillée du futur navire pour l'approbation royale.107 Ce
navire, aussi, était fortement controversé dans l'opinion public pour sa taille et pour
son coût. N'importe quelles différences entre la maquette proposée et le navire réel
auraient été notées. Il semble raisonnable de conclure, donc, que les maquettes de
Pett devaient réellement représenter les pratiques de construction de charpente de
l'époque. Il est dommage qu'aucune maquette ne nous soit parvenue. Salisbury
exprime l'avis que dans ces deux modèles réduits, les origines des modèles
d'amirauté doivent être trouvées. Il pense que leur style a été largement copié par
d'autres constructeurs car "rien n'apporte le succès comme le succès". 108

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81

Les exemples les plus anciens de modèles montrent un système d'allonges simples
et une alternance varangue-allonge-allonge de sommet (Figure 19).

Figure 19. Modèle d'un troisième rang de "Parlementaire". Dessin exécuté à partir
d'une photographie.

A partir de la deuxième moitié du XVIIème, apparemment un grand nombre


de maquettes existaient déjà. En plus des modèles du Sovereign of the seas et du
Prince Royal, qui probablement étaient toujours existant, il y avait les modèles du
Richard, 1658, rebaptisé plus tard Royal James, le Speaker, rebaptisé Mary et
d'autres. Le bureaucrate doué M. Pepys, à qui souvent était donné le crédit des
succès de restauration de la marine et qui a toujours été excusé pour ses échecs par
les historiens, a laissé un séduisant, mais, incomplet enregistrement des modèles.
La première référence date du 6 juin 1662. Dans un coffre laissé dans son bureau

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82

du temps de l'interrègne, il a trouvé une maquette de vaisseau non identifié qu'il


s'est approprié. Des références postérieures dans son journal suggèrent que le
modèle ait été gréé. Le fait qu'il ait été construit de la manière que nous nommons
aujourd'hui, "modélisme d'arsenal" où "style amirauté", est suggéré par
l'introduction suivante :

"….30 juillet 1662. Très tôt, au bureau où Cooper était venu me


voir, il commença par me faire un exposé sur la coque d'un navire, en
rapport avec une maquette que je possédais au bureau et qui était
d'une grande utilité pour moi…."109

Cooper était un maître naviguant pour qui Pepys plus tard trouva un navire.
Si l'employé de bureau lisait un exposé à Pepys sur la coque d'un navire, et si la
maquette était utile à cet exposé, on peut conclure que la maquette illustrait la
pratique réelle de construction. Pepys n'était pas le phoenix pour lequel la plupart
des historiens le font passer, mais il était certainement intelligent et était très
intéressé par son travail (il est allé si loin qu'il a même appris la façon de mesurer le
bois de charpente). Il n'aurait pas été satisfait par un modèle qui n'aurait montré que
des formes stylisées de charpente, car il ne considérait pas les maquettes
simplement pour des décorations juste plaisantes, mais pour des outils d'étude
importants.

L'intérêt de M. Pepys pour les maquettes persista durant sa vie entière. Il a


amassé une collection énorme qui a malheureusement été soit détruite soit
dispersée. Le premier modèle qui lui a été présenté venait d'Anthony Deane, le 29
septembre 1662 et ce cadeau s'est avéré être un investissement excellent de la part
du jeune constructeur de navires.110 Comme la maquette avait été promis à Pepys
le 11 août, il est peu probable que Deane l'avait construite spécifiquement pour lui;
c'était presque certainement un navire plus ancien, construit ou réparé à Woolwich,
où Deane était un assistant du constructeur de navires. John Franklin pense qu'il
est possible que ce fût

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83

celui du Speaker (l'Orateur) ou celui du Swiftsure.111 Avec un chantier naval


important comme source probable d'information, le modèle était sûrement une
représentation fidèle des pratiques de constructions contemporaines. Comme Pepys
suggère qu'il n'y avait pas de différences entre celui-ci et les autres modèles qu'il
avait vus, ou qu'il s'était approprié, il est probable que ces modèles étaient tous du
même type de fabrication. De ce fait, on peut raisonnablement estimer qu'au moins
à partir du milieu du XVIIème siècle les modèles de type "modélisme d'arsenal" ont
été construits selon les pratiques de charpente réelle.

Ayant conclu que les maquettes ont probablement montré les pratiques de
construction de l'époque, ou vraisemblablement quelque chose de très proche, il est
nécessaire de donner une description brève de ce que ces modèles présentent en
réalité. En général, ils peuvent être classés en quatre catégories. Dans la première
catégorie, se trouve le modèle standard, dont les membrures sont constituées d'une
varangue, de deux allonges et deux allonges de sommets. De loin, la grande
majorité. Des modèles existants entrent dans cette catégorie.112 Quelques variations
sont néanmoins visibles dans ces maquettes. Il y a un modèle du Circa datant des
environs de 1655 qui ne possède aucun bordage (Figure 19), mais la plupart des
modèles sont bordés au-dessus de la préceinte principale. Dans cette catégorie
devrait être aussi inclus un modèle excellent de la collection de Rogers dans lequel
l'allonge s'étend sur le côté entier du navire et se termine au niveau de la muraille.
Ainsi, les ouvrages supérieurs sont constitués des bois de la structure continue, sans
être bordés.1l3

Une deuxième catégorie, qui semble être plutôt une catégorie inférieure par
rapport à la première, est limitée à seulement quelques exemples. Ici, les
membrures sont de même fabrication que précédemment, mais seulement chaque
couple est représenté et les allonges sont jointives sur le sommet de la quille. C'est
extrêmement rare pour les maquettes du XVIIème siècle et ne représente pas la
réalité.

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84

Les maquettes du Boyne et du St. Alban sont probablement les deux seuls
exemples connus ayant ces caractéristiques. Il peut être significatif que le maître
constructeur de navires Fisher Harding de Deptford a construit les deux navires.114

La troisième catégorie est constituée d'un seul exemple et, qui à proprement
parler, se situe à une époque différente de celle concernée par cette étude. En fait,
puisqu'il montre une conception des membrures intéressante et semblable à ce que
les devis des années 1660 et 1670 impliquent, il a été inclus ici. Il est constitué
d'une varangue, d'une première allonge qui remplit la pièce(room), d'une seconde
allonge qui est raboutée dans la tête de varangue, d'une allonge de sommet qui est
raboutée dans la seconde allonge et d'une troisième allonge complémentaire qui
donne écart à la limite de l'allonge de sommet (figure 10). Le seul modèle connu
pour être construit de cette manière est celui d'un troisième rang daté de 1705.115

La dernière catégorie est composée de modèles à doubles membrures. A


celle-ci, appartiennent la maquette du trois-ponts le Loyal London de 1665 et un
petit cinquième rang. Aucune membrure de remplissage n'est visible. Chaque
membrure est composée de deux allonges, et des allonges de sommets
indépendantes sont placées entre les couples et tenues en place seulement par des
attaches à travers les préceintes. Comme Franklin le précise, cela ne semble pas
avoir été une pratique normale pour cette période, mais suggère que des
constructions alternatives aient été possibles.116 Il doit être souligné qu'avant le
Circa de 1715117 aucun des modèles ne montre une trace de couples dévoyés.

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85

Les maquettes avec charpente n'ont probablement pas été construites


simplement à des fins d'ornements, sacrifiant l'exactitude pour les apparences et,
donc, une plus grande attention doit leur être portée. En plus du Loyal London,
deux autres maquettes non bordées doivent être mentionnées. La première est un
modèle publié par Franklin. Sa date est incertaine, mais il peut dater certainement
de la fin des années 1640, avant le meurtre légalisé du roi Charles Ier. Ses
dimensions à l'échelle habituelle du 1/48 sont proches d'un certain nombre de
frégates "parlementaires" de troisième rang du début des années 1650, la plus
proche étant l'Antilope de 1651. Le maquette peut avoir été une proposition de
projet qui a été réalisée après que le roi ait été executé.118 La coque est dans un état
excellent de conservation, avec pratiquement aucun dégât. Il est admis que c'est le
modèle d'amirauté existant le plus ancien que l'on possède. Les membrures sont
composées de varangues se chevauchant, d'allonges simples et d'allonges de revers.
Les allonges de sommet encadrent les sabords et pour les ajustements, elles sont
coupées en place. D'après mes observations personnelles et d'après la description de
Franklin, le modèle n'a pas d'allonges de sommet libres ou des irrégularités de
membrures. La première allonge est liée à la quille, formant ainsi une bande
ininterrompue de madriers de charpente au bouchain. Franklin donne le pas de
couple pour ce modèle comme étant égal à 2 pieds, 5 pouces (73.7 cm).

L'autre modèle est conservé à Stockholm. Il est associé au constructeur de


navires anglais Francis Sheldon, qui a immigré en Suède en 1658. En Angleterre il
a été impliqué dans la construction des bâtiments Naseby en 1655 et London en
1656. Ce modèle représente un trois-ponts traditionnellement considéré comme
étant le Naseby. Il est presque certain maintenant que ce ne sont ni les dimensions,
ni la disposition des sabords qui permettent une telle identification.

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86

En 1661, Sheldon a lancé à Goetborg un navire de 84 à 90 canons : le Riks-Applet.


Cette maquette est maintenant perçue comme étant le Riks-Applet, conçu sous
l'influence forte de l'association précédente de Sheldon avec le London et le
Naseby.1l9 La structure de la charpente montre des allonges simples formant des
bandes ininterrompues de bois, de la sentine jusqu'au niveau de la préceinte
principale où elles recouvrent partiellement les allonges. La structure de la
préceinte supérieure n'est pas différente de celle du Loyal London. Les allonges de
revers forment les côtés des sabords et pour s'accommoder de leurs espacements,
ont été coupées et doublées sur place selon les besoins. Des allonges de revers
indépendantes, sont aussi visibles sur les photographies.120 Cette caractéristique
commune avec le Loyal London, fait que peu probablement les allonges de sommet
indépendantes sur le London sont associées au remplissage des membrures. Aucun
pas de couple n'est donné pour ce modèle.

Le Boyne de 1692 et le St. Albans ne présentent seulement que peu


d'intérêts, car ils ne montrent rien de considérablement différent des modèles
précédemment décrits. Le St. Albans, un quatrième rang de 1687, est l'un des
quelques modèles d'arsenal dont les lignes ont été prises. Le seul autre exemple qui
vient à l'esprit est le Prince de 1670. Tant sur le Boyne que sur le St.Alban la
section du maître-couple est très facilement perceptible, car le maquettiste a
dépassé la difficulté de basculer de chaque côté du maître-couple les positions des
allonges par rapport à leur varangues.121

Le modèle d'un troisième rang de 70 canons présente de grands intérêts en


raison des membrures de sa coque. C'est une des maquettes les plus anciennes
possédant son gréement original complet. C'est probablement le premier modèle

- 99 -
87

pour lequel on connaît les raisons de la fabrication, le propriétaire original et le


constructeur de la maquette. Franklin fait grand cas du fait que la maquette est
celle de la Résolution de 1705, construit par William Lee.122 La maquette a, à
l'origine été considérée pour avoir simplement un très long écart et a presque
échappé à l'attention qu'elle mérite. Brièvement, le modèle à deux allonges, la plus
basse, ou première allonge glissée entre les têtes de varangues, la seconde allonge
raboutée à celles-ci et s'étendant à la hauteur de la préceinte. Franklin assimile la
première allonge à des madriers navals (naval timbers), comme on le trouve dans la
plupart des devis.123 Les allonges supérieures de la maquette sont bordées, et si les
membrures existent, elles ne sont pas visibles. Cela peut être dû à un simple
recouvrement entre la seconde allonge et l'allonge de revers, ou bien, l'allonge de
sommet peut être considérée comme raboutée dans l'allonge et un élément de
charpente complémentaire peut caler l'écart.124 Ces éléments de charpente sont
d'habitude mentionnés comme les "bois de charpente de la largeur", ou bois de
charpente du pont d'artillerie. C'est peut-être le modèle le plus intéressant parmi le
groupe, car il illustre la membrure décrite dans des devis du début de la deuxième
moitié du XVIIème siècle. Il est un peu surprenant de voir ce système de membrures
sur un modèle qui appartient probablement aux premières années du siècle suivant.
Pour cette raison, cela suggère qu'au moins trois allonges ont été employées et qu'il
n'y avait plus d'espaces libres dans la membrure, avec des bandes ininterrompues
de bois de charpente continue à la largeur et au niveau du bouchain125 Franklin
suggère que l'utilisation de trois allonges n'est pas contradictoire avec des espaces
ouverts.126 Il doit être noté, cependant, que les dessins de Keltridge ne viennent pas
étayer son point de vue. 127

Le Loyal London de 1666 et une autre maquette semblant dater de la fin des
années 1650, où du début des années 1660 sont complètement hors de cette
tradition, puisqu'elles présentent une membrure double.

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88

Le Loyal London est construit avec membrures et il est donc probable que le
constructeur s'est appliqué pour le faire le plus exactement possible. C'est une
maquette de ce type que Pett a construit pour James Ier et Charles Ier. Le navire a
été construit à la demande des marchands de Londres pour remplacer un navire qui
a accidentellement explosé au début de la seconde guerre anglo-hollandaise.128 Il a
été construit dans un chantier naval royal, mais en accord entre le constructeur et
les marchands et sa réalisation peut avoir répondu à plus de pratiques de
construction des navires marchands que d'architecture navale de guerre, comme
Salisbury le suggère.129 Il n'est cependant pas établi, si les techniques de fabrication
des navires marchands différaient beaucoup de celles des navires militaires (par
opposition à la conception), sauf probablement dans les sections. Le travail
d'Edmond Bushnell semble aussi décrire le même type de charpente suggéré sur
les devis pour les vaisseaux de guerre de cette période. Un autre argument à
l'encontre de l'avis de Salisbury est que le navire a été construit dans un chantier
naval royal.130

La deuxième maquette n'est pas encore identifiée et ne le sera probablement


jamais. Sur son château est inscrit le nom Sheerness, mais il n'y a aucun
enregistrement d'un cinquième rang de ce nom appartenant à la marine avant les
années 1690. Les détails de la maquette, selon Franklin, date des années 1660,
mais quelques dispositifs, comme la forme du château, le repoussent plus loin dans
le passé, à la période du Commonwealth, quand un certain nombre de quatrièmes
rangs de taille similaire ont été construits. Franklin suggère que le navire puisse
avoir été construit après le Adventure de 1646, car il avait la réputation d'avoir des
dimensions idéales.131 La maquette présente des saborts ronds en forme de gerbes
et d'après le "Deane's doctrine" on sait qu'ils ont fait leur apparition dans les
années 1670. Le cabestan visible par l'absence des caillebotis manquants en avant
de la cloison du gaillard d'arrière est aussi d'un type plus ancien, remplacé par les
cabestans à chapeau dans les années 1680.

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89

Donc, la maquette date probablement du début des années 1670, ou fin 1660.132 les
dimensions prises à l'échelle probable du 1/48 la rapproche d'un certain nombre de
navires construits à ce moment-là. À la différence du Loyal London, cette maquette
est bordée au-dessus de la muraille. La répartition des allonges de sommet est
remarquable. La membrure est construite en détail - tous les éléments raboutés les
uns aux autres - de la manière proposée par Anderson.133 Cela consiste en une
varangue, deux allonges et une simple allonge de sommet de chaque côté. Des
allonges de sommet complémentaires sont glissées entre les membrures, se
terminant avec le bord supérieur de la préceinte inférieure principale. Elles
semblent être distribuées selon le besoin, souvent sans relation avec les membrures,
avec seulement les préceintes les tenant en place. Cela suggère deux choses : soit,
les allonges de revers indépendantes participent au remplissage des membrures ou,
plus probablement, elles étaient effectivement indépendantes. En fait, Franklin
note que les membrures des sommets des flancs ne correspondent pas avec les
positions des sabords. Donc, Les allonges de revers étaient souvent assemblées
avec écarts, taillées, où simplement ajoutées pour former les côtés des saborts.134 Il
doit être rappelé que dans un certain nombre de devis de construction navale les
allonges de revers ne sont même pas mentionnées, suggérant qu'elles peuvent avoir
été placées selon les besoins. La maquette possède 28 membrures.135

La comparaison des membrures de maquettes différentes avec les


témoignages écrits montre, qu'une maquette donne en effet la pratique de la
construction réelle de la deuxième moitié du XVIIème. Des témoignages écrits
démontrent qu'au moins quelques maquettes ont été construites selon une
représentation des pratiques réelles. Les principales maquettes de ce type sont
celles exécutées par Phineas Pett. Le plus grand nombre de maquettes de navires
rescapées montre un schéma de structure qui diffère de ce que nous savons,

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90

pour avoir été celle utilisée sur le Prince Royal. Des problèmes supplémentaires
sont posés par les deux exemples qui ont des membrures doubles.

A l'exception de ces deux exemples, toutes les autres maquettes ont une
chose en commun : elles ont des bandes de bois continues au niveau des bouchains
et du creux du maître-couple. C'était un dispositif existant dans les navires réels,
ainsi que présenté dans le Chapitre III. Il semble, donc, que les constructeurs
essayaient de donner plus une image des navires, plutôt que de faire une description
de la charpente réelle. Que les deux schémas soient difficiles à distinguer est
confirmé par l'histoire de la maquette de William Lee décrite ci-dessus. Pour le
moment, cela semble être l'explication la plus raisonnable, quoique ce ne soit
seulement qu'une hypothèse de travail et qu'une recherche plus approfondie dans
ces monuments magnifiques du XVIIème réfutera ou confirmera.

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CHAPITRE VI

TEMOIGNAGES ARCHÉOLOGIQUES
DES EPAVES DU XVIIÈME SIECLE

L'archéologie devrait nous avoir apporté un témoignage définitif sur la


construction des navires du XVIIème siècle, mais le potentiel énorme existant a été
maigrement utilisé. On connaît un nombre suffisant de naufrages importants, mais
peu ont été étudiés dans le détail. L'information qui a été extraite de ceux-ci semble
jusqu'à présent soutenir les autres témoignages disponibles.

Au milieu du dix-neuvième siècle on a découvert l'épave d'un vieux navire


près de Cape Cod. Les vestiges subsistent toujours, mais n'ont pas encore attiré
l'attention d'archéologues navals. Le navire a été provisoirement identifié comme le
Sparrowhawk (l'Épervier) de 1626.136 L'identification et la datation en sont
extrêmement incertains, mais certains des dispositifs de charpente semblent
confirmer, ou ne pas contredire du moins cette date.137 Les varangues recouvrent
partiellement ce qui reste des allonges. Après que les restes de la coque furent
récupérés, des charpentiers de marine les ont rassemblé et en ont donné une
description détaillée. Les lignes ont aussi été produites, mais elles sont très
imprécises et la reconstruction est entachée d'erreurs. Pour le sujet présent il est
plus pertinent de parler des vestiges subsistants, plutôt que de remontage de la
charpente.

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92

La structure subsistante de la coque inclue près de la longueur entière de la


quille, une partie de l'étambot, la courbe d'étambot, une partie de la carlingue, les
varangues et un grand nombre des parties inférieures des premières allonges.138 les
varangues recouvrent partiellement les allonges, comme décrit par les personnes
qui les ré-assemblent. Ils sont certains que les allonges n'ont pas été chevillées aux
têtes de varangues, mais remplissaient presque l'espace entre les varangues.
L'allonge est décrite pour être tenue en position par des cales positionnées entre elle
et la varangue suivante. Aucune seconde allonge n'a été récupérée, mais l'équipe
chargée du remontage pense qu'elles avaient été assemblées de la même manière
que les premières allonges et les varangues. Le dessin du remontage de la charpente
suggère les restes des secondes allonges. En fait, cela contredit ce qui est visible sur
les photographies, et la description des restes. Le dessin doit être ignoré.

Cette description brève des vestiges de ce navire devrait être comparée avec
l'information extraite des documents écrits. Les deux sont remarquablement en
accord, mais cela ne signifie pas toujours que la datation et que l'identification de
l'épave soient correctes. Le chevauchement, ou les écarts, des éléments de
charpente sont soutenu par le bordage. Les cales ont été utilisées seulement pour
tenir les éléments de charpente en position tandis que la pose du bordage
progressait. Le dessin de section des vestiges montre un ensemble lié au niveau de
la tournure du bouchain (dans le secteur de chevauchement), tandis qu'il n'indique
pas d'attaches ailleurs excepté pour le bordage. C'est probablement parce que le
dessinateur a indiqué seulement les ensembles reliés par des attaches, pour
souligner les madriers pris en sandwich entre les vaigres de fond et le bordage
extérieur. Sans doute qu'une étude détaillée des vestiges par des archéologues
clarifierait la situation. Pour le moment cela ne doit rester que des hypothèses,
étayées par ce que nous connaissons pour avoir été la pratique de l'époque.

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93

En considérant la taille du navire, la suggestion que celui-ci aurait pu avoir une


seconde allonge devrait être écartée. Il peut avoir eu des allonges de revers qui
recouvraient les allonges de la même manière que les premières allonges
recouvraient partiellement les varangues.

Pour récapituler, le navire était assez petit, probablement du début du


ème
XVII siècle, construit avec de simples allonges conformément aux descriptions
du "Treatise of 1625" et à d'autres documents décrits ici.

Une autre épave du début du XVIIème siècle, fouillée par Jonathan Adams
dans les Bermudes, a été identifiée avec une certitude raisonnable comme étant le
Sea venture (l'Entreprise de Mer), qui a coulé en 1609. Sur le côté le mieux
préservé les varangues subsistent à leurs longueurs originales et les extrémités
inférieures des allonges sont aussi préservées. Certaines des planches de vaigrage
sont toujours en place, rendant les investigations des têtes de varangues difficiles.
A la publication du rapport préliminaire, elles n'avaient pas encore été enlevées. La
description suivante est faite à partir rapport de Jonathan Adams et toutes les
conclusions sont basées dessus, ainsi que la mosaïque de photos et le plan du site.
Les premières allonges sont positionnées entre les têtes de varangues et remplissent
la maille. Il est établi qu'elles donnaient l'écart aux secondes allonges et aux
varangues. Elles n'étaient attachées entre elles ni à l'avant ni à l'arrière. 139 Les
courbes de contre-lisse ou les vaigres de fond, ont été verrouillées aux bois de
charpente dans la zone de chevauchement. A l'extérieur de l'épave ont été trouvé
sous forme de concrétions des chevilles métalliques qui ont probablement tenu les
serres d'empâture aux membrures. Les gournables ont été utilisées largement, la
plupart d'entre elles non coincées. Aucun schéma n'est perceptible dans
l'organisation de leur implantation.140

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94

Il y a seulement un élément qui peut être interprété comme étant une seconde
allonge. Il se trouve entre les allonges des varangues 11 et 12, rabouté
probablement à la varangue 12. Les chevilles concrétés trouvés autour du site du
naufrage peuvent provenir des attaches et des préceintes, lesquelles enserraient les
pièces au niveau de leur chevauchement entre les allonges de revers et les secondes
allonges ou, plus probablement, entre les bois de charpente navals (naval timbers),
les secondes allonges et les allonges de revers. Ceci serait assez compatible avec
les sources écrites. Si l'interprétation est correcte, ceci est un exemple
archéologique de modèle proposé pour le schéma des membrures du Prince Royal,
un contemporain du Sea Venture (l'Entreprise de Mer).

Les témoignages apportés par les textes et l'archéologie nous mènent à la


conclusion que deux modèles très proches de membrures ont coexisté durant la
première moitié du XVIIème siècle, avec des différences seulement mineures. Le
premier incorporait une simple allonge qui recouvrait partiellement la tête de
varangue en dessous et l'allonge de revers à la largeur. Ce modèle a été utilisé sur
des navires de petites et moyennes tailles et probablement sur les plus grands
navires, quand les approvisionnements en bois le permettaient. Le second modèle,
appelé à deux allonges, la première placée entre les varangues et faisant un écart
avec la seconde, qui se raboutait dans la tête de varangue. Les allonges de revers
étaient raboutées dans la seconde allonge, tandis que des bois de charpente navals
(naval timbers) leur donnaient l'écart, ou recouvraient partiellement les secondes
allonges. Le système a été probablement utilisé pour des navires de taille moyenne
et pour les plus grands. L'avantage consistait à donner au navire des fonds plus
solides et a permis l'utilisation d'allonges plus courtes.

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95

Un grand nombre d'épaves du XVIIèmesiècle ont été trouvées et identifiées,


mais malheureusement peu ont en réalité été étudiées et décemment publiées. Dans
l'ordre chronologique celles-ci sont le Prince Royal de 1610,141 Swan (le Cygne) de
1643,142 le Mary de 1649, le Dartmouth de 1655,143 l'Edgar de 1668, les
Restoration, Northumberland, le Sterling castle, le Sapphire de 1675, Anne de
1678, le Coronation (le Couronnement) de 1685. Du groupe entier, seul le
Dartmouth a bénéficié d'une grande attention. Le Swan (le cygne) est un site très
prometteur, mais il ne semble qu'aucun plan de fouilles ne soit programmé dans un
proche avenir. L'identification des épaves du Mary et du Northumberland est
incertaine et les vestiges retrouvés peuvent être des éléments du Restoration. Rien
ne semble avoir été prévu pour des recherches et des enregistrements des vestiges
du cinquième rang le Sapphire. Les Coronation et Anne ont été examinés, mais
incomplètement étudiés. Actuellement, rien, ou très peu de choses ont été publiées
jusqu'ici. L' Edgar, découvert dans le Solent, ne semble pas avoir été le sujet d'une
étude et je n'ai pas été capable de trouver d'informations détaillées à son sujet. Les
vestiges de navires ont été perdus dans les Goodwin sands et les sables mouvants
posent un problème sérieux pour leur étude.

L'épave du Swan (le Cygne) a été étudiée en 1990 et a été identifiée par
l'unité de plongée archéologique de l'université de St. Andrew. Le navire a eu une
carrière intéressante, commençant la guerre civile anglaise du côté du roi en tant
que pinnace Swan. Il fut capturé par les forces parlementaires et la suite de sa
carrière fut à leur service. La pinnace a été perdu en 1651 à Duart point dans la
passe de Sound of Mull, l'Ecosse essayant de subjuguer le clan Maclean, partisan
de Charles II.144 Jusqu'à présent, le site

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96

a seulement été contrôlé et la zone du naufrage préparée. L'épave laisse présager


des trouvailles intéressantes durant les fouilles. L'existence d'éléments décoratifs en
bois, comme l'insigne de l'héritier présomptif, des chérubins, la boiserie, etc, fait
penser que la conservation organique sur le site est correcte. Le plan du site publié
ne montre pas assez de détails pour faire des remarques sur les membrures
éventuelles du navire. Des éléments de charpente visibles peuvent représenter le
chevauchement entre les varangues et les allonges inférieures et les allonges et les
allonges de sommet.145 Une photographie montre un plongeur enregistrant les
éléments de la charpente qui peuvent être des membrures.146 Martin ne donne pas
de dimensions concernant ces éléments, mais en se référant à son plan du site, il est
évident qu'ils sont un peu plus petits que les mailles. Il reste à espérer que le site
sera finalement excavé et publié complètement.

Le Mary, l'ex-Speaker (orateur), un troisième rang de 1649 a été perdu sur


les côtes du sud-est de l'Angleterre sur les sables Goodwin dans la grande tempête
de 1703. Ses fouilles apporteraient des données significatives à notre connaissance
des charpentes de cette période. Des tertres de débris trouvés aux alentours où le
Restoration (1679) a coulé peuvent appartenir au Mary ou au Northumberland
(1679), ou peut être même au Restoration lui-même. Tandis que ces vestiges
forment surtout des monticules, une certaine structure logique du navire a survécu
et peut être identifiée comme une charpente de membrures.147 Aucune dimension
ou croquis n'ont été publiés.

Le cinquième rang Dartmouth, construit dans 1655 par John Tippets, a eu


une carrière active qui a inclus le service à la flotte et des tournées d'inspection
dans les Caraïbes et la Méditerranée. Cette frégate du cinquième rang a subi une
réparation importante, changement de quille inclus, en 1678, et a été finalement

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97

perdue dans le Sound of Mull en 1690. Le site a été entièrement fouillé par Colin
Martin et certains des vestiges ont été levés pour l'enregistrement et la
conservation. Les parties de coque existantes ne s'étendent pas au-delà de l'arrondi
du bouchain. La charpente du navire, révélée par les vestiges de la coque, est
embarrassante et ne représente probablement pas les pratiques de construction
navale en usage à cette période.

Pendant les réparations, le Dartmouth a reçu une nouvelle quille car


l'ancienne était pourrie et avait subi des dégâts dus aux vers. Il est parfaitement
possible, et en fait probable, que les varangues et les parties inférieures des allonges
ont aussi subi des dégâts importants et des solutions drastiques ont dû être prises
pour ne pas avoir à exécuter la reconstruction de la charpente au complet ou pour
ne pas condamner la coque. La date du changement de quille - 1678 - est aussi un
argument qui va dans le sens de cette conclusion, car, cela se passait pendant la
mobilisation rapide et courte financée par la marine pour une guerre avec la France
qui ne s'est jamais réalisée. Le manque de fonds suffisants pour une remise en état
complète de la charpente peut avoir provoqué une déviation de la pratique normale.

Le massif arrière décrit par Colin Martin présente un intérêt important ainsi
que ses attaches aux membrures. Les allonges 1 à 4 sont raboutées dans le bord
supérieur du massif arrière, tandis que les allonges 5 à 9 sont agrafées avec des
cales effilées dans la diminution de sa section à sa face inférieure. Seulement à une
courte distance vers l'arrière du maître-couple, les membrures ne sont pas
continues, mais apparemment agrafées avec des cales. Martin pense que ceci était
vrai sur la longueur entière du navire, comme sur la membrure 11, la membrure la
plus en avant ayant survécue, et qui n'est pas continue. Il admet que les cales
viennent très près l'une de l'autre. 148 A cause de la contre quille, l'hypothèse que le

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98

navire ne puisse pas avoir eu besoin de contre quille conventionnelle a été


proposée. Martin reconnaît que les membrures sont "des paires complémentaires
alternant avec des jeux de chevilles pour la résitance," mais les voit comme des
cales d'écarts, un élément perçu pour avoir été introduit par l'amirauté autour
1714.149 Il fait une remarque particulière sur le manque de connexions latérales
entre les pièces des membrures comme quelque chose de surprenant, et
apparemment ici, comme l'observation d'une première version de membrure
double. 150

Pour appuyer son idée Martin se réfère au dessin du cinquième rang de


Keltridge, daté de 1684. Comme Martin le note, le dessin montre vraiment un
espacement de 2 pieds entre les lignes de sections comme sur le Dartmouth, mais
les sections ne correspondent pas. Tandis que les sections décrites par Martin se
situent dans les limites auxquelles on peut s'attendre - 10 pouces de côté (25.4 cm)
par opposition à 12 pouces, valeur donnée par Deane (30.5 cm) - Les sections de
Keltridge varient largement, mais ne semblent pas faire plus de 6 pouces (15.2 cm).
Ces sections sont plus petites que celles utilisées sur les sixièmes rangs! Il est
dommage que William Keltridge n'ait pas montré "l'empreinte de pas" des bois de
charpente sur la quille de la façon dont il l'a fait pour les autres rangs. Les bois de
charpente étant montrés dans la vue en plan au niveau du pont d'artillerie.
Finalement, dans la distance entre deux sections, on montre deux bois de charpente
et deux mailles. Cela correspond à ce qui a été trouvé sur le Dartmouth, à
l'exception du plan de Keltridge sur lequel, le pas est aussi large que le bois de
charpente lui-même. Sur le Dartmouth, la maille est égale à 1/5ème de la largeur du
bois de charpente soit 2 pouces. La différence sur le plan peut être due à la
diminution des dimensions de côté à la largeur du maître-couple en comparaison
avec le bouchain. Les tableaux de Deane donnent l'effilement des sections, mais
elles ne correspondent pas à ces dimensions.

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99

Colin Martin est certain que le massif arrière et que les cales d'écarts sont les
éléments de la charpente originelle du navire. Pour appuyer ce point de vue il note
l'espacement irrégulier des chevilles sur les trois premières virures, qui ont été
remplacées lors de la révision de 1678. L'explication est que le schéma de
disposition de ceux-ci a été changé pour éviter de tomber dans les ouvertures
exécutées pour les attaches précédentes. Si de telles modifications vastes et
coûteuses ont été effectuées, elles devraient sûrement être mentionnées dans les
comptes de la réparation.151 Dans le Dartmouth, Martin voit un exemple précoce
de membrure avec cales écarvées.

Les conclusions sont quelque peu douteuses. Cette implantation des chevilles
n'est pas unique à cette épave, car Adams rapporte l'absence d'une implantation
régulière de celles-ci sur le Sea Venture (l'Entreprise de Mer), aussi. Dans le
rapport archéologique aucune mention n'est faite d'anciens trous d'attaches,
inutilisés sur le bois du massif arrière. Il est fort peu probable que le constructeur
de navires (la frégate a été re-quillée dans le dock du Capitain Castle' dock sur la
Tamise) ait laissé des trous sous les planches sans les remplir. En outre, la
substitution du massif pour les varangues délabrées et pour les allonges inférieures
aurait été significativement moins coûteuse tant pour le travail que pour les
matériaux, qu'une remise en état conventionnelle de la charpente. Des débris, il
n'est plus possible de faire la différence entre les varangues et les allonges
inférieures puisque aucun des bois de charpente ne traverse maintenant la quille.
On sait que les premières allonges se terminaient normalement près de la quille,
aussi, si le cinquième rang avait été "conventionnellement" assemblé, les vestiges
sur le fond auraient été orientés dans la même direction - indépendamment du fait
que le massif arrière soit une réparation ou un original. Les cales et le manque de
description de la réparation apparemment peu conventionnelle sont probablement
les preuves les plus fortes en faveur de l'hypothèse de Martin. Un document signé

- 112 -
100

par Edward Dummer et William Lee, constructeurs de navires, le 16 novembre


1691 et intitulé : Explanation of the terms of distinction commonly used in the
navy, of ordinary repairs, extra repairs, and rebuilding (Explication des termes de
différence généralement utilisés dans la marine, des réparations ordinaires,
réparations supplémentaires et reconstruction), fournit une explication très claire.
L'importance du document rend nécessaire de citer un passage en entier :

"….une réparation importante doit être faite par rapport à une telle malfaçon externe d'un
navire due au temps, que leurs membrures ne peuvent être préservées, ni le navire remis
en état convenable pour aucun service en mer par une réparation ordinaire, sans
déshabiller de tels matériels délabrés du bordage extérieur et des préceintes; aussi les
travaux internes des cloisons et les côtés du navire qui sont atteints par le temps; avec
l'insertion de cales courtes et des pièces dans certaines parties des éléments des
membrures comme dans cette ouverture et faire apparaître ce qui est vraiment délabré
pour réparer le même "comme à neuf" : et plusieurs fois chasser toutes les chevilles de fer
dans la membrure au dessus et en dessous de l'eau, plaçant sur les ponts et les côtés un
complément d'éléments standart, ou de cavaliers, ou les deux, qui n'existaient pas là
auparavant, pour un meilleur renforcement la membrure d'un navire dans une telle
réparation." 152

Pour le texte, il est évident que la pratique de réparations des madriers pourris, ou
délabrés, des membrures avec des cales était courante, et donc la présence de cales
dans les vestiges d'un vieux navire usé comme le Dartmouth ne signifie pas
qu'elles aient été adaptées à l'origine. La régularité avec laquelle les cales ont été
employées dans la réparation de vieux navires a rendu inutile de les inscrire
spécifiquement dans les rapports de réparation. Le massif arrière lui-même peut
être assimilé à une cale géante, comme c'est certainement le rôle qu'il a joué. En
outre, il doit avoir été presque impossible d'enlever et de remplacer la quille sans
fendre la carlingue et au moins certaines des varangues boulonnées dessus, même si
elles avaient été épargnées par la pourriture et le ravage des vers. A la lumière du
document cité et à la localisation des cales il semble certain que les irrégularités qui
ont été observées sur les vestiges du Dartmouth

- 113 -
101

l'étaient en raison des réparations et non du fait de la fabrication originelle de la


charpente. Donc, il est certain que le navire a été construit de manière standard
avec des varangues se chevauchant, des allonges et des allonges de sommet. Les
espaces entre les bois de charpente sont compatibles avec les tables préparées par
Deane et ainsi l'épave du Dartmouth nous aide à déterminer comment les éléments
des couples ont été réparti le long de la quille, avec la pièce(room) et la maille, le
pas (figure12).

En plus des vestiges de ces vaisseaux de guerre il y a quelques témoignages


d'épaves en cour de fouilles dans les Caraïbes. L'une d'entre elles est actuellement
en fouille en République Dominicaine par l'Institut Panaméricain d'Archéologie
Maritime (PIMA) sous la direction du docteur Jérôme Hall.153 La question de
l'identité des navires est toujours ouverte, mais l'un d'eux peut avoir des origines
anglaises. Les échantillons de bois soumis au Dutch Dendrochronological Center
font penser que le bois utilisé pour la charpente a été coupé en 1642-43,
probablement en Angleterre, car il ne correspond pas aux chronologies
continentales.154 Il est probable que le navire était un navire marchand, donc son
intégration dans une enquête sur les navires de guerre peut être mise en question.
On sait cependant, que jusqu'au milieu du XVIIème siècle, les navires marchands ont
été loués comme vaisseaux de combat en temps de guerre, particulièrement les
grands navires puissamment armés de la compagnie des Indes anglaises de l'est et
de l'ouest (East and West Indiamen).155 Ils étaient rarement des vaisseaux de
guerre satisfaisants en raison de leur vitesse inférieure et de leur résistance
inadaptée, mais ne semblent pas avoir été très différent dans la structure de leur
charpente.156 Il est donc possible d'inclure les épaves de navires marchand de cette
période, dans ce débat..

- 114 -
102

Quinze varangues et treize premières allonges ont été découvertes et


enregistrées par la PIMA.157 La plupart de celles-ci ont été fortement érodées, au
point qu'aucune varangue ne croise la quille actuellement. La première allonge, la
mieux conservée était à une distance de la quille de 14 à 16 pouces (35.6-40.6 cm),
ce qui est compatible avec l'information fournie par "The Treatise de 1625" et les
dictionnaires divers, quoique d'habitude la valeur soit de 18 pouces (45.7 cm) .158
Les sections des membrures varient de 7 à 10.6 pouces (17.8 et 26.9 cm) pour le
côté et de 5.7 à 8 pouces (14.5 à 20.3 cm) pour les dimensions travaillées. L'allonge
inférieure a été positionnée entre les varangues et n'avait aucune connexion latérale
avec elles. L'évidence a mené Hall à conclure que les allonges inférieures ont été
ajoutées alors que les varangues étaient déjà en place. 159

L'espacement des membrures d'axe à axe était de 21.25 pouces (54.0 cm).
Les varangues étaient espacées tous les 7 à 12.25 pouces (17.8 à 31.1 cm), avec une
moyenne de 10.5 pouces (26.7 cm) .160 Le plan du site montre une implantation
plutôt irrégulière des attaches et une certain nombre d'espaces entre les membrures.
Il est dommage que les grandes concrétions recouvrant l'épave ne peuvent être
enlevées et donc que les pièces des membrures ne puissent être enregistrés et
dessinés. Le plan résultant correspondrait sans doute à celui du Dartmouth. Il ne
reste pas assez d'éléments de la coque de Monte Chriti Bay pour être exactement
certain du système de membrures qui la composait, mais quelques vestiges sont
compatibles avec ce que l'on peut glaner des sources écrites. Il avait des membrures
constituées de varangues avec l'allonge inférieure couchée sur leurs flancs. Il est
possible que le navire ait eu des secondes allonges qui raboutaient les têtes de
varangues, mais elles n'ont pas survécu.

- 115 -
103

Pendant les fouilles de La Jamaïque, à Port Royal, une ville qui a été inondée
par un tremblement de terre en 1692, les vestiges d'un navire ont été trouvés.161 En
plus des 74 pieds (22.6 m) de la partie de la quille qui a échappée aux déprédations
des vers (teredo navalis), les éléments de 33 membrures ont été aussi préservés. Les
membrures ont été numérotées de 1 à 33, en commençant par la proue. Il a été
déterminé que l'extrémité orientale de l'épave était la poupe basée sur deux
encroûtements qui se sont avérés être des tourillons.162

Les membrures ont survécu seulement sur tribord de l'épave et avaient subi
une importante abrasion ainsi que des dégâts des vers, donc leurs dimensions
taillées n'étaient pas sûres 163 Pour le rapport elles ont varié de 8 pouces (20.3 cm) à
la quille et de 2 à 4 pouces (5.1-10.2 cm) aux extrémités extérieures. Clifford donne
la moyenne des dimensions de côté des membrures comme étant de 9 pouces (22.9
cm). Son image 29 montre de grandes variations entre les quelques débris de bois
de la charpente récupérés. Sur le même schéma il est clair que les premières
allonges (rien ne reste des secondes allonges) ont été destinées à "remplir la
pièce(room)," encore que, elles ne sont pas appliquées fermement contre leurs
varangues associées. Les talons des allonges inférieures étaient à une distance
d'environ 20 pouces (50.8 cm) du bord de la quille l64 Les allonges inférieures et les
varangues n'ont pas été latéralement connectées, et dans la partie récupérée de la
coque l'allonge était en avant des varangues.165 D'après les concrétions des chevilles
sur la quille on peut conclure que les varangues étaient espacées de 2 pieds (61.0
cm) de centre à centre.166

Clifford suppose que cette épave est celle du Swan (le Cygne), un sixième
rang, stationné à Port Royal quand le tremblement de terre a englouti la ville. Basé
sur des informations des mémoires d' Edward Barlow,

- 116 -
104

Clifford croit qu'elle est une prise de guerre hollandaise capturée en 1672. Les
recherches dans les archives montrent que le Swan (le Cygne) (encore un autre
vaisseau de guerre du même nom) a été acheté à un capitaine Young en 1673.167
Cela diminue quelque peu la probabilité que le navire soit une frégate hollandaise
capturée, à moins qu'elle ne fut capturée par un corsaire. Je n'ai pas pu trouver de
références de petites frégates capturées à titre privé pour être achetées par la marine
royale. De plus, la quille est faite "d'orme glissant", une espèce nord Américaine de
bois de construction.168 L'approvisionnement en bois de construction pour les Pays-
Bas, venait principalement des régions Baltiques et le chêne était le bois de
charpente préféré pour la structure de la coque.169 D'autre part, les côtés irréguliers
des sections des membrures font penser à une origine hollandaise où marchande
pour le Swan (le Cygne). 170

Le mauvais état de conservation de la coque nous empêche de déterminer


avec certitude si une seconde allonge a été utilisée. Les vestiges, cependant nous
montrent que le modèle de membrure est compatible avec la description tirée des
devis du XVIIèmesiècle : chevauchement d'abord, allonges et varangues, sans
connexions latérales entre elles.

De cet ensemble d'épaves fouillées datant du XVIIèmesiècle, le témoignage


archéologique confirme les conclusions faites sur la base des sources écrites, des
devis, des dessins et des maquettes. Durant la majeure partie de ce siècle, les
navires ont été construits avec un recouvrement partiel des membrures qui a formé
des bandes presque continues de bois du fond de cale au creux du maître-couple.

- 117 -
105

L'enregistrement de la distribution des bois de charpente sur les quilles des épaves
telles que celle du Dartmouth, par exemple, explique la différence entre le pas de
couple et les sections inscrites dans les documents de Deane.

- 118 -
106
CHAPITRE VII

L'ARCHITECTURE NAVALE HOLLANDAISE

En comparant les témoignages iconographiques du XVIIème siècle, il apparaît


que les différences entre les navires des diverses nationalités ont été plus marquées
dans les périodes postérieures.171 Ce qui n'est pas évident, c'est la mesure dans
laquelle les pratiques de constructions navales ont différé. Le chapitre présent
explorera cette question.

Durant le XVIIème siècle, la Hollande opposa la concurrence la plus


formidable à l'Angleterre dans les affaires navales. Les arsenaux hollandais ont
montré qu'ils étaient assez puissants dans les années de la deuxième guerre anglo-
hollandaise pour produire six navires de guerre pour l'expansion rapide de la flotte
française tandis que simultanément, ils étaient contraints à la réalisation d'un
programme de production de 40 navires pour leur propre usage.172

Les témoignages sur la construction navale hollandaise proviennent de


sources semblables aux sources anglaises. Nous possédons des devis ou des
spécifications, quelques iconographies limitées, des maquettes et deux traités
contemporains sur la charpente navale hollandaise, Aeoloude en Hedendaegse
Scheepsbouwen Bestier de Nicolaes Witsen (1671) et Nederlandse
Scheepbouwkonst Opengesteld de Comelisz Van Yk (1697).

- 119 -
107

Les maquettes hollandaises, quoique étant de splendides exemples des


capacités des maquettistes, ont probablement été moins utilisées que dans la marine
anglaise, car elles sont complètement bordées. Quelques un de ces modèles existent
toujours. Les plans présents dans les archives anglaises sont inexistants pour les
Hollandais, car ils ne les ont pas utilisé pour la construction de leurs navires.173
Ceci ne nous laisse que les travaux de Witsen et de Van Yk comme sources
d'information importantes.

La marine hollandaise si riche de tradition n'a que récemment attiré fait


l'objet de recherches. Une des précurseur fut Rolf Hoeckel dans Risse von Schiffen
des 16 und 17 Jahrhunderts. Un travail que l'on suppose fait pour montrer la
tradition navale hollandaise, même si beaucoup de dessins sont ceux des navires de
la flotte de Brandenburg174. Un examen du document montre que l'ouvrage a été
probablement développées en utilisant The treatise de 1625, et n'a certainement
aucun rapport avec la tradition hollandaise. Les tentatives de Richard Unger et de
Björn Landström sont significativement insuffisantes.175

Le livre de Herman Keting sur le Prins Willem traite du modèle


contemporain intact d'un navire de la East Indiaman (Compagnie des Indes de
l'Est) 176 C'est un travail de valeur, mais des recherches postérieures ont amené
certaines questions sur ses écrits177 Un travail d'étude excellent, mais de nouveau
limité à un modèle unique constitue l'ouvrage de Heinrich Winter, Der
Hollaendischer Zweidecker von 1660/1670.178 G.C.Dik a tenter une magnifique
reconstruction du célèbre vaisseau amiral l'Amiral de Ruyter, De Zeven
Provincien, lancé en 1665.179 le travail est basé presque exclusivement sur Van Yk.

- 120 -
108

Le travail le plus important a été fait par Albert Hoving. Avec de


nombreuses publications sur les méthodes et les pratiques de construction
hollandaise, il a apporté une contribution énorme à l'état de nos connaissances. Son
interprétation du livre de Witsen présente un intérêt particulier.l80 Ce chapitre doit
beaucoup au travail de Hoving.

A la lecture des travaux de Witsen et de Van Yk, il est certain que les
constructeurs de navires hollandais du XVIIèmesiècle n'ont pas fait les choses de la
même manière que leurs homologues Anglais. Tandis qu'en Angleterre la pratique
était de développer un plan avant la fixation de la quille et des membrures, les
constructeurs de navires hollandais n'ont rien fait de la sorte. Ils ont travaillé
complètement sans dessins. Le constructeur anglais et l'architecte naval était
toujours une même et unique personne à cette époque. Mais la possibilité théorique
d'une personne développant les plans et une autre construisant le navire a partir des
dessins a existé. Cette possibilité n'a pas été possible aux Pays-Bas, car les dessins
n'ont pas été utilisés jusqu'en 1724. Ils l'ont été ensuite, seulement sous l'influence
des constructeurs anglais.l8l

Witsen et Van Yk parlent de deux traditions différentes de construction des


navires : la méthode du nord et la méthode du sud. La frontière entre les deux a
existé grossièrement le long de la Meuse ou Maaskant. Les plus grands centres de
construction navale de chaque tradition étaient Rotterdam pour le sud et
Amsterdam pour le nord. Pour Van Yk la méthode du nord était la plus ancienne.l82
Elle a probablement survécu jusqu'à l'introduction de pratiques anglaises en 1724,
bien qu'un dessin de Ludolf Backhuyzen montrant l'exposition du chantier naval
d'amirauté dans Amsterdam autour de la fin du XVIIème siècle expose déjà la
technique de construction du sud.

- 121 -
109

Pour présenter le système hollandais de construction des membrures il est


nécessaire de suivre la fabrication des charpentes et les méthodes de conception
qu'ils ont utilisé. Comme la méthode du nord était la plus ancienne il est logique de
commencer par celle-ci.

Dans la tradition navale hollandaise, les charpentiers ont utilisé des formules
pour toutes les dimensions des navires qu'ils construisaient. Le chantier
commençait avec le devis dans lequel les dimensions principales du navire étaient
déterminées. A partir de là, c'était surtout l'expérience du constructeur et la
fonctionnalité du navire qui déterminaient le reste. Au nord, la quille était posée au
sommet de tins, de même que dans les arsenaux anglais. Les navires étaient
construits sur chantiers. En Angleterre, jusqu'au dernier quart du XVIIème siècle, la
mesure principale était la longueur de quille, puis ensuite, ce fut la longueur du
pont. Aux Pays-Bas, la longueur était mesurée entre des perpendiculaires abaissées
des extrêmes de l'étrave et de l'étambot.183 L'élancement des deux était déterminé
par le devis, et dépendait des caractéristiques du navire. De là, la longueur de la
quille et la largeur du navire (habituellement le quart de la longueur) étaient
déduites. Ce n'était pas plus que des directives et il était possible pour le
constructeur de navires de faire varier les paramètres.184 Ainsi que Witsen le notait,
"deux navires construits par deux charpentiers différents, mais avec la même
charte où le même devis ne seraient pas les mêmes".185 Une fois que les sections de
l'étrave étaient figées, la dimension de sa face arrière devenait une mesure très
importante, toutes les autres sections étant dérivées de celle-ci.186 Tout était basé
sur la longueur du vaisseau : pour chaque dix pieds d'Amsterdam (2,83m) de long,

- 122 -
110

l'épaisseur était de 1 pouce (2,5 cm) .187 L'étape suivante était semblable à la
pratique Anglaise : L'étrave et l'étambot étaient érigés avec la barre d'hourdi et ses
pièces façonnées. Un dispositif des navires hollandais que les Anglais n'avaient
plus était les écussons carrés, ou des barres d'arcasse planes. Une corde était tendue
entre l'étrave et l'étambot pour servir de ligne médiane. A partir de ce point, les
deux traditions divergeaient complètement. A cette étape, en Angleterre les
varangues étaient mises en place et ensuite le bordage était posé. Les Hollandais
utilisaient une autre procédure : le charpentier, après l'étape précédente, adaptait
ensuite la virure de gabord. Elle était habituellement positionnée en formant un
angle avec le plan du fond. Le reste du fond était posé à l'aide de grandes
"tenailles" – (boeitangen) - qui empêchaient les planches de se déplacer dans le
plan horizontal. Pour les tenir serrées le charpentier utilisait le hel, un système de
chaînes et de poteaux qui forçait les planches en butée l'une contre l'autre. Des
attaches provisoires pouvaient être clouées pour tenir le tout aligné.188

Une fois que le fond avait atteint la largeur nécessaire (d'habitude les deux
tiers du rayon) le premier plancher était installé au tiers de la longueur avant de
l'étrave (figure 20). Les têtes de varangues étaient forées latéralement sur chaque
côté pour attacher les sitters, ou premières allonges (qui correspondent aux first
futtocks en anglais), aux varangues. Alors le bordage de la cale était ajouté. La
formation de la coque à cet emplacement critique donnait une tournure pointue et
prononcée à la coque au niveau du fond de la cale 189

- 123 -
111

Le dessin publié dans le livre de Hoving, Nicolaes Witsens suggère que les
allonges et les allonges de revers aient été aussi attachées l'une à l'autre de la même
manière que l'étaient les varangues et les premières allonges.190 J''ai été incapable
d'y trouver la référence dans le livre de Witsen. Au contraire, Witsen lui-même
écrit que l'oplang (seconde allonge) a été clouée à une attache connectée à un
madrier transversal positionné entre les premières allonges.191 l'attache est placée
sur l'extérieur de l'allonge de manière provisoire.

Figure 20. Norderkvartier méthode de construction.


Tirée du livre de Hoving, Nicolaes Witsen.

- 124 -
112

Cela signifie que la seconde allonge est tenue en place plus tard par le bordage, des
attaches et les préceintes, ou scheerstrook.

Une fois que les éléments de charpente étaient érigés, une structure d'appui
de pieux dans la terre, sur l'extérieur du navire était dressée. Comme les membrures
étaient posées, le scheerstrook (une virure correspondant au creux du maître-couple
et dans un but pratique, coïncidant avec la préceinte principale) était monté et
soutenu par des poteaux. Son importance était énorme, car le scheerstrook réglait
la forme du navire. Après que le scheerstrook ait été mis en place, les varangues
restantes et les sitters, les allonges et les membrures naissantes étaient installées.192
Le texte original donne l'impression que le scheerstrook était dressé avec
seulement un jeu de secondes allonges érigées au milieu du navire. Hoving montre
quelques membrures complètes érigées avant que le scheerstrook soit mis en place
Cela semble plus probable, mais il dit lui-même dans un article que le scheerstrook
est d'abord attaché à la structure d'appui.194 Dans tous les cas, le reste des éléments
des membrures est monté postérieurement à la mise en place du scheerstrook 195.
La construction continue avec le bordage des sentines, et l'installation des
bauquières, ou avec les attaches et les baux eux-mêmes.

Witsen décrit toute la procédure de construction, mais pour cette étude, la


membrure seule sera prise en considération. Partout, la dimension importante pour
les pièces de membrure est l'épaisseur façonnée. La cote du flanc, quand elle est
donnée, semble être un résultat "après coup". De même Witsen donne la proportion
pour calculer les dimensions façonnées, mais pas celle du côté. Les varangues
devaient être profilées aux trois-quarts de la quille du côté avant de l'étrave.

- 125 -
113

Les première allonges devaient être de la moitié de l'épaisseur de l'étrave au bord


supérieur du fond de cale (d'habitude environ un tiers de la profondeur de la cale).
Au scheerstrook, les secondes allonges étaient de la moitié de l'épaisseur de
l'étrave et de deux cinquièmes au sommet du côté.196 De cette liste il apparaît que
les premières et les deuxièmes allonges sont de la même épaisseur. La raison en est
qu'elles se chevauchent et que les planches de vaigrage devaient être posées dessus.

La seule mention que Witsen fait de la dimension du côté, (qui était si


importante dans tous les devis anglais,) se trouve dans sa spécification pour une
pinaas de 134 pieds.197 Là, il inscrit les sections pour presque chaque élément de la
charpente. En donnant l'épaisseur des secondes allonges et des allonges de revers, il
enregistre aussi qu'elles sont larges (zyn breedt) et qu'elles sont éloignées les unes
des autres (en staan le Van elkander) de 9 pouces hollandais (22.9 cm). Les
varangues sont séparées par un espace de 9.5 pouces (24.1 cm) et ont la même
largeur (dimensions de flancs) que les secondes allonges.198 Cela laisse la moitié
d'un pouce de pièce(room) entre les varangues et les allonges inférieures.
Autrement dit, la tolérance technique est la même que sur les navires Anglais. Il est
logique de penser, ensuite, que le schéma était semblable à la pratique Anglaise :
les allonges remplissent la pièce(room) entre les varangues. Pour les allonges
supérieures et les allonges de sommet, il est dit "qu'elles se calent les unes aux
autres à une distance équivalente à leur largeur". Les membrures des extrémités de
la coque sont supposées être plus petites, plus légères et plus fines.199 Le
chevauchement entre les allonges de sommet et les secondes allonges ainsi qu'entre
les deuxièmes et les premières, forme presque certainement des ceintures
ininterrompues de bois de charpente.

- 126 -
114

Witsen présente la méthode de construction du nord par l'exemple du pinaas.


Est-ce que les méthodes étaient applicables pour des vaisseaux de guerre? La
réponse rapide est oui. La différence entrerait dans les dimensions, comme il note
que "le fond d'un navire marchand devra être plus large que celui d'une frégate". A
part ce point, rien ne semble différent. Même les sections sont identiques.

En étudiant les devis de construction Hollandais, il doit être gardé à l'esprit


que la caractéristique de détermination des navires – navires marchand et navires
de guerre de la même façon – était la longueur entre les perpendiculaires. Les
Hollandais n'avait pas l'équivalent des rangs anglais, mais, au lieu de cela ont
utilisé des descriptions générales comme, des vaisseaux de guerre, des frégates et
des war-yachts. Même les canons n'étaient pas toujours mentionnés, car leurs
quantités ont varié beaucoup plus que dans la marine anglaise. On sait que pendant
la deuxième guerre anglo-hollandaise l'armement des navires, et non le nombre,
était le problème principal que les Pays-Bas avaient à résoudre.200

Dans son livre, Witsen inscrit les spécifications pour trois vaisseaux de
guerre. Le premier navire n'est pas identifié, mais c'est un navire de 150 pieds
d'Amsterdam (137,5 pieds anglais, ou 41,1 m).201 Le devis diffère tout à fait
significativement des devis anglais de l'époque. Les dimensions des membrures ne
sont inscrites nulle part, mais leur quantité est précisée. Il est dit que 80 varangues,
180 premières allonges, 180 secondes allonges et 200 allonges de sommet doivent
être utilisées dans la charpente du navire. Une très grande attention est donnée à la
description du fond : il devait être composé de 6 virures de chaque côté de la quille,
de trois planches et demie chacun.

- 127 -
115

Une planche était une longueur standard. En tout, le fond devait être construit de 42
planches. Les sentines devaient avoir 5 virures chacune et contenir un total de 44
planches; c'est-à-dire que chaque virure devait contenir 4 à 5 planches.

Le devis ne décrit pas l'élancement de l'étrave ni de l'étambot, bien que cela


soit d'habitude spécifié en Hollande et dans la plupart des exemples que Witsen
donne. L'explication la plus probable est que l'on pourrait les représenter d'après la
longueur complète de la coque, la longueur du fond et le nombre de varangues,
d'allonges inférieures et d'allonges de revers qui devaient être adaptées dans cette
longueur.

La deuxième spécification est pour le De Vreede de 1667.202 Le devis ne


fournit pas d'information sur le nombre de canons qu'il a porté. Ce document est
beaucoup plus proche des devis anglais, sauf que de nouveau, aucune valeur n'est
donnée pour les dimensions des côtés des membrures. Le document donne les
dimensions profilées pour les varangues, les secondes allonges et les allonges de
revers, mais les dimensions sont omises pour les sitters, ou premières allonges.
Cela montre que les varangues et les secondes allonges ont "piloté" les sitters. Le
De Vreede était un navire long de 170 pieds hollandais (48,1 m), plus long que le
vaisseau amiral des Provinces Unies le De Zeven Provincien, cependant, le De
Vreede était plus petit qu'un deuxième rang anglais. C'est même plus visible en
comparant les sections. Il devait avoir une varangue de 14 pouces hollandais (36,2
cm) de cote de gabarit et les bois de construction d'une largeur de seulement 10
pouces hollandais (25,7 cm) gabariés. D'après les devis, les deuxièmes rangs
anglais avaient des varangues de 17 pouces anglais (43.2cm) les madriers avaient
pratiquement la même taille de 10 pouces Anglais (25.4 cm) au maître-couple.203

- 128 -
116

Un troisième exemple de Witsen est une description d'un vaisseau de guerre


construit en 1669.204 C'était un navire de160 pieds hollandais de long (145 pieds
anglais ou 44.1 m) de la taille d'un troisième rang dans le service anglais. Pour le
service hollandais ce grand navire était au-dessus de la moyenne. La longueur après
déduction de l'élancement et de la quête était de : 134 pieds d'Amsterdam (122
pieds anglais, ou 37.1 m). Les varangues devaient être gabariées à 13 pouces
hollandais (33.4 cm) sur la quille, les allonges (les secondes allonges, de nouveau)
les mêmes que pour le De Vreede. Comme à l'habitude, les dimensions de côté ne
sont pas inscrites. Les chiffres correspondants pour un troisième rang anglais
seraient : 120 pieds anglais (36.6 mètres) pour la longueur de quille, des varangues
de 16.5 pouces anglais (41.9 cm) gabariées sur la quille et de 9.25 pouces anglais
(23.5 cm) à la largeur.

Cornelisz Van Yk était un constructeur de navires lui-même et son livre a


toujours été reconnu comme un guide pratique à la construction des navires. A la
différence du travail de Witsen, le sien est plutôt direct à suivre, avec beaucoup
moins de détails externes. Il fournit au lecteur l'information logiquement disposée
suivant la construction d'un navire. Van Yk et Witsen décrivent des méthodes
complètement différentes de construction. En fait, Witsen note lui-même que dans
le Noorderkwartier, ou le nord du pays, les navires ont été construits différemment.
Du texte il peut être déduit que la méthode du sud était la plus récente

- 129 -
117

Au sud, ou au Maaskant, le constructeur de navires commençait la


construction à peu près de la même manière que cela était fait au nord : la longueur
du navire était mesurée entre les bords extérieurs de l'étrave et de l'étambot.206 La
quille était posée sur des tins de six pieds d'Amsterdam (1.7 m) de haut.207 La
construction de l'étrave, de l'étambot et de la barre d'arcasse ne différait pas
matériellement entre les deux traditions. La première différence notable se situait
dans le stuurlast, le rétrécissement et l'approfondissement de l'étrave pour faciliter
la conduite du navire. Il devait être d'un pied hollandais (28.3 cm) pour chaque
cinquante pieds (14.15 m) de la longueur du navire. Autrement dit, il était le "trim
de bas d'étrave" du navire. 208 Dans la méthode du sud ceci était inclus dans la
conception et n'était pas seulement une question de ballast une fois que le navire
était à flot. Dans Witsen l'ouvrage, il n'y a aucun équivalent de cela.

Une fois que l'étrave et l'étambot ont été levés le charpentier adaptait les
virures de gabord. Van Yk dit qu'à l'étambot, ou dans le stuurlast, les planches sont
presque parallèles l'une a l'autre; au maître-couple, le bord extérieur de la planche
devait être perpendiculaire au bord extérieur de la râblure ou, autrement dit, le plat
de la planche devait être parallèle à la face supérieure de la quille. A la proue, les
planches dépendaient de l'élancement.209 À la différence de Witsen, Van Yk ne
calcule pas l'épaisseur de planche du bord en avant de l'étambot, mais donne
simplement des gammes de la proportion ramenée à la longueur de navire. Les
largeurs de planche qui ont été utilisées peuvent sembler étonnantes : 18, 20, ou
même 22 pouces hollandais (46.3, 51.4, ou 56.5 cm) .210

A cette étape de la construction, les charpentiers du Maaskant et du


Norderkwartier ont divergé dans leur travail. Le constructeur du sud installait
ensuite deux membrures complètes au niveau du maître-bau.

- 130 -
118

La distance entre elles dépendait de la longueur du navire. La membrure précédant


le maître-couple était placée en ajoutant l'élancement de l'étrave à la longueur du
navire, et en divisant ensuite le résultat par 2. Le résultat final était la distance à
l'étambot. La plus en avant des deux était placée à un quart de la distance à l'étrave
et en avant de la membrure précédant le maître-couple. La distance réelle entre les
deux devait être telle que l'on puisse adapter les varangues. Les deux membrures et
toutes celle placées entre elles avaient la même forme.211 Dans le Maaskant deux
membrures étaient levées à l'avant à l'arrière des membrures du maître-couple
(figure 21). Pour la membrure avant, la hauteur au-dessus de la quille était
déterminée par le stuurlast.212 Ayant ainsi établi la forme générale de la coque, le
constructeur de navires attachait huit à onze lisses d'exécution.213

Les varangues devaient être ensuite placées et elles devaient être espacées de
14 pouces à 15 pouces hollandais (36 à 38.6cm), le chiffre exact dépendait du
constructeur de navires.214 Comme au nord, la dimension importante pour les bois
de construction des membrures est l'épaisseur. Elle est déterminée par des formules
données dans le texte, mais rien n'est enregistré pour les dimensions de côté. Van
Yk dit que pour chaque trois pieds d'Amsterdam (84.9 cm) de bau, la varangue
devrait avoir un pouce d'Amsterdam (2.57 cm) d'épaisseur. 215

Le paragraphe suivant présente plus d'intérêt. Il indique que chaque varangue


a deux allonges (oplangen) qui raboutent dans ses têtes. On donne de nouveau
l'épaisseur tandis que les dimensions de côté ne sont pas spécifiquement inscrites.
Les membrures étaient grossièrement placées.216

- 131 -
119

Figure 21. La méthode Maaskant de construction navale.


D'après Hoving, de Nicolaes Witsen.

Pour connecter les varangues (leggers) et les allonges (oplangen), les premières
allonges (buikstukken) sont mises en place. Leur épaisseur doit être la même que
celle des bois de charpente adjacents et leurs dimensions de côté doit remplir
l'espace disponible. Van Yk ne parle pas des attaches de l'avant et de l'arrière entre
les membrures et ce n'est pas surprenant, car il aurait été tout à fait impossible
d'adapter les membrures à l'intérieur des lisses d'exécution si elles avaient été pré-
assemblées d'avance. Au-dessus des premières allonges ou buikstukken se situaient
les allonges de revers.217

- 132 -
120

Witsen fournit des spécifications pour des vaisseaux de guerre, mais


consacre un chapitre entier aux spécifications de Van Yk, et n'en mentionne aucune
particulièrement. Avec les valeurs des longueurs des navires, cependant, il est
évident que certains d'entre eux pourraient être des vaisseaux de guerre car ils
correspondent à des chartes émises par les États et les dates correspondent avec les
programmes de construction de la deuxième guerre anglo-hollandaise. Bien que,
rien à part la longueur n'indique spécifiquement un vaisseau de guerre. Dans
presque tous les navires mentionnés les dimensions de côté des membrures ne sont
pas données. Une exception est une spécification pour un 154 pieds hollandais
(43.6 m) un navire construit en 1667.218 Van Yk n'indique pas si c'est un vaisseau
de guerre ou un grand navire marchand. Les dimensions de gabarit et de côté sont
données aux varangues : 11 pouces hollandais (28.3 cm) et sur la quille, 10 pouces
hollandais (25.7 cm) respectivement. Sont inscrit aussi les première allonges
(buikstukken) : 10 pouces hollandais (25.7 cm) gabariées et 7, 8, ou 9 pouces
hollandais (18, 20.6, ou 23.1 cm) de côté. La dimension gabariée est équivalente à
ce que les varangues devraient avoir comme cote au niveau des têtes. Les listes
différentes pour les dimensions de côté suggèrent que la taille n'ait pas importé
significativement. Pour la seconde allonge (oplangen) comme d'habitude, on donne
seulement la dimension gabariée au creux du maître-couple.219

Le deuxième exemple de Van Yk est celui d'une frégate (Fregat-Schip), une


désignation qui ne signifie pas obligatoirement qu'il s'agit d'un vaisseau de guerre
220
Néanmoins c'est une possibilité. Elle devait avoir 148 pieds hollandais de long
(41.9 m) et le document donne des varangues (leggers) gabariées de : 1 pied, 1
pouce (30.8 cm) et 10 pouces de côté (25.7 cm). Les allonges sont données
seulement dans la dimension gabariée. La partie la plus intéressante de cette
spécification datée de 1670, est que la première allonge soit appelée un sitter,

- 133 -
121

au lieu d'utiliser le terme du sud buikstuk. Il est possible que le devis soit parvenu à
Van Yk depuis le Norderkwartier.

Trois choses doivent être notées. Les termes désignant les parties de la
membrure entre le nord et le sud ont différé. Parfois les mêmes mots avaient des
significations différentes. Par exemple, buikstukken désignait une varangue au
Norderkwartier, ou une première allonge au Maaskant. Hoving a probablement
raison quand dans son témoignage, il dit que la tradition du sud a été importée et
qu'elle n'était pas une évolution de celle du nord 221 Deuxièmement, la forme du
fond aurait différé quelque peu entre les deux régions. Van Yk lui-même dit que les
navires du nord avaient un bord pointu défini au tiers de leurs sentines.222
Troisièmement, malgré les approches différentes sur la façon de tirer les sections
des bois de construction du navire, les résultats sont matériellement les mêmes tant
dans les livres de Van Yk que pour Witsen.

Tandis que les différences sont notables entre les deux traditions, il est
évident que les membrures d'un navire du nord ou du sud ont en réalité été très
semblables. Pour utiliser les termes anglais, les deux avaient une varangue, une
première, une seconde allonge, et une allonge de sommet, assemblées de la même
manière que sur un navire anglais. Dans un rapport archéologique, un navire
construit en Hollande doit probablement posséder des membrures aux dimensions
de côtés irrégulières. Un fait intéressant et peut-être surprenant est que ni Witsen, ni
le constructeur expérimenté Cornelis Van Yk n'augmentèrent les sections pour les
navires de guerre.223 Ils suggèrent vraiment quelques différences de proportions
pour la forme la coque, comme mentionné, mais pas des sections. Les deux types
de navires ont été construits en utilisant des sections similaires de bois.

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122

Un dessin de profil d'un 136 pieds hollandais (38.5 m) de 46 canons est


préservé aux Pays-Bas, au Scheepvartmuseum à Amsterdam. Il a été dessiné par
Johannes Sturckenburgh environ au milieu du XVIIème siècle et montre le navire
avec la membrure, avec quelques une des premières virures à côté du gabord déjà
en place. Le reste de la membrure est ouverte, seules les préceintes étant en place.

Les hauts des côtés du navire sont très légèrement construits et cela explique
nettement les lourdes pertes que les Hollandais subirent en comparaison de
l'Anglais lourdement boisé. Les sections de leurs vaisseaux de guerre seules
expliquent leurs défaites, particulièrement dans la première guerre anglo-
hollandaise. La coque au-dessous de la préceinte montre une allonge simple ce qui
peut être vu sur une maquette de la marine anglaise. Les bois de la charpente du
navire entier sont de dimensions irrégulières, le côté seulement étant visible, bien
sûr. Cela confirme l'impression déjà perçue sur la base des documents écrits. En
nous déplaçant plus bas, nous atteignons l'aspect le plus intéressant de la coque
pour cette étude : la membrure du fond de cale. Malheureusement, le peu de
bordage des virures masque exactement l'arrondi du bouchain. Donc, il n'est pas
possible de déterminer si l'allonge est raboutée dans la tête de varangue, ou si elle
la recouvre partiellement. Le dessin correspond généralement au témoignage du
texte et donc le plus probable est que le navire possédait deux allonges, ainsi que
Van Yk et Witsen le décrivent.

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123

CHAPITRE VIII

CHARPENTE NAVALE FRANÇAISE,

DANOISE ET SUÉDOISE

Avec l'accession de William Hollandais au trône anglais durant la révolution


glorieuse de 1688, le schéma de guerre navale des décennies précédentes a changé.
Les Hollandais et les Anglais sont maintenant alliés contre les Français et Louis
XIV avait besoin de faire évoluer sa flotte. Les Anglais étaient familiarisés avec la
flotte française, car ils avaient été alliés dans la troisième guerre anglo-hollandaise.

Deux fois au XVIIème siècle les Français ont essayé de construire une flotte.
La première fois dans les années 1620 sous le Duc de Richelieu et la suivante
quand Jean Baptiste Colbert est devenu le premier ministre de Louis XIV en 1661.
L'intérêt que porta Colbert pour la marine marchande de la France a été important.
Il a compris la nécessité d'avoir une marine de guerre forte pour la protéger. Ses
premières années en fonction ont été consacrées au montage de la structure d'appui
des arsenaux et la plupart des vaisseaux de guerre ont été achetés à l'étranger. Les
plus grands fournisseurs étaient les Hollandais, qui comme on la déjà vu, malgré un
programme de construction intense de leur propre flotte ont été capable de
construire dix navires pour le service français. Un autre vaisseau de guerre a été
acheté au Danemark.

La marine française mérite une étude détaillée mais en l'absence d'espace, ici
seuls quelques commentaires généraux seront traités. La documentation qui nous
est parvenue

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124

n'est pas aussi abondante qu'elle l'est pour la marine anglaise, mais un certain
nombre de documents importants existe, dont seulement deux seront mentionnés
dans cette étude.

Un document des plus importants est un jeu remarquable de gravures


montrant la construction d'un trois-ponts de 70 à 80 canons. Le recueil porte les
armes du fils de Colbert. Il est assez précis dans la description des pratiques de
construction navale. Les planches ne sont pas datées, mais elles doivent être d'avant
l'année 1677, car le bâtiment des étuves de l'arsenal de Toulon est dépeint sur la
planche 1 et avait brûlé cette année là.224 Quatre trois-ponts ont été construits dans
le port de Toulon entre 1663 et 1670 : le st. Philippe en 1663, le Lys en 1669 et le
Sceptre ainsi que le Royal Therese, en 1670. Le navire montré sur les planches ne
correspond probablement à aucun d'eux, mais représente plutôt un trois-ponts
générique qui doit avoir quelque chose de commun avec tous les navires nommés.
En tout cas, ce navire est en relation étroite avec les règlements de 1670, confirmé
en 1671 et 1673. Ils déclarent que les navires de plus de 70 canons devaient être des
trois-ponts sans gaillard d'avant. Les deux seules exceptions étaient les vaisseaux
amiraux le Soleil Royal et le Royal Louis, les deux ayant reçu l'autorisation d'avoir
un gaillard d'avant.225

Pour les besoins de cette étude, les planches intéressantes sont celles qui
montrent les éléments des membrures. La quille, l'étrave et l'étambot sont déjà
levés et les varangues suivent l'enveloppe du gabarit. Deux varangues sont déjà
montées au niveau du maître-couple, une en avant et une en arrière. Les premières
allonges chevauchent les têtes de varangues. Les lisses d'exécution sont attachées et
aident à donner sa forme au navire. Les planches 5 à 7 montrent la coque complétée

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125

lors de l'étape de pose des accessoires de toutes les premières allonges. La planche
9 dépeint le montage des secondes allonges placées entre les têtes des premières
allonges, mais l'espace est laissé entre les têtes des varangues et leurs talons.
Quelques troisièmes allonges ont été aussi installées, de nouveau avec la
pièce(room) entre les bois de charpente et une lisse d'exécution au creux du maître-
couple est montée (figure 22). La très petite tonture de ce navire est notable.
L'avancement de la construction continu sur les planches 10 et 11 avec les
accessoires du bordage du vaigrage. Jusqu'à présent les seules planches extérieures
installées sont les virures de gabord qui chevauche l'étambot, plutôt que de s'y
encastrer dans une râblure.

Figure 22. Trois-ponts Français de L'Album de Colbert.

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126

La planche 12 montre le navire achevé, et les membrures utilisées jusqu' à la


largeur des lisses d'exécution. Quelques planches extérieures sont aussi installées,
notamment celles au sommet du bouchain - à environ un tiers de la profondeur de
la cale. Les espaces libres entre les varangues et les secondes allonges et entre les
premières et troisièmes allonges sont clairement visibles. Dans la planche numéro
13, les charpentiers de marine ont installé les porques sur le vaigrage.

Les planches suivantes traitent de la construction des espaces intérieurs du


navire et la suivante exposant la membrure est la planche numéro 21. Un peu de
fond du bordage est attaché, des éléments de construction des membrures
complémentaires sont installés et une lisse d'exécution a été tendue autour d'elles
pour former les hauts. Ces bois de charpente sont trop courts pour être des allonges,
car ils n'atteignent pas ce qui serait le pont supérieur, donc il est probable qu'ils sont
les quatrièmes allonges. La planche numéro 26 présente la structure terminée : les
allonges sont installées et le bordage des extérieurs est achevé au niveau des
sabords du pont inférieur. Sur la planche 29 le navire est lancé, la proue d'abord,
sans le bordage, celui-ci n'étant achevé qu'au-dessus du deuxième pont. Au niveau
du pont d'artillerie et du deuxième pont les côtés du navire sont formés d'une
membrure continue. Cela doit avoir significativement renforcé la structure et
apporté de la résistance aux effets de recul des canons.

Le premier rang représenté fait environ 148 pieds français (48.1 m, mesurés
entre l'étambot et l'étrave, à la manière hollandaise), a un bau de 40 pieds français
(13 m) et une profondeur de cale d'environ 20 pieds (6.5 m). Les planches ne
peuvent pas être perçues comme des plans de construction dans l'esprit des dessins
de Keltridge, mais néanmoins le graveur a donné les échelles sur chacune d'entre
elles.

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127

Ainsi, il est possible de mesurer la longueur des allonges. Toutes sont assez
courtes, moins de 13 pieds français (4.2 m), réduisant ainsi le besoin des tailles des
éléments de construction au minimum. Sur le côté de débit, les pièces assez
courtes, non attachées latéralement l'une à l'autre, ont du créer une faiblesse dans la
structure, la charge reposant plus sur un bordage continu et sur les préceintes, ce
qui serait le cas avec un système à deux allonges.

Dans les notes accompagnant l'édition moderne de l'Album de Colbert une


déclaration très emphatique précise que la décoration du navire ne montre pas
d'influence étrangère, et surtout pas hollandaise.226 Sur ce sujet, l'auteur des notes
est tout à fait correct. Néanmoins, pour la charpente spécifiquement, l'influence
semble être précisément hollandaise, probablement originaire du Maaskant. Les
premières allonges installées le sont plus ou moins aux emplacements indiqués par
Van Yk. Une différence mineure existe. Tandis que le constructeur hollandais laisse
une distance significative entre les deux axes de varangues, le Français les met
l'une à côté de l'autre et élimine ainsi une partie "en faut plat" de la coque. Cela
peut bien avoir été nuisible à la stabilité du navire. On sait que au niveau de la
conception, les Français du XVIIème siècle étaient très loin de la réputation qu'ils
ont acquise au XVIIIeme. Un des amiraux français les plus expérimentés, Duquesne,
a refusé de prendre le Royal Louis à la mer à cause de son manque de stabilité
jusqu'à ce que l'ordre lui en soit directement commandé par Louis XIV. Un certain
nombre d'autres navires français, y compris La Superbe (beaucoup admiré par les
Anglais) avait des vies très courtes.227 La cause peut bien en avoir été les allonges
courtes.

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Des arguments complémentaires en faveur de l'influence hollandaise dans la


construction navale française peuvent être perçus dans l'organisation du bordage
(qui correspond à ce qui à été montré par Witsen et Van Yk) et dans le lancement
du navire avant que les hauts n'aient été finis afin de faire de la place sur le
chantier, ainsi que dans l'attachement des virures de gabord à travers l'étambot.
Tous ces dispositifs sont visibles dans la charpente navale hollandaise. Le montage
des éléments de charpente entre les lisses d'exécutions plutôt que la construction du
fond d'abord, signifie que les origines de l'influence devraient être cherchées autour
du Maaskant. Les différences, cependant, montrent une interprétation Française,
locale des pratiques hollandaise. D'après les planches de l'Album de Colbert, les
éléments de construction de la membrure se recouvraient, donnant écart les uns les
autres, ne ressemblant pas à la membrure reconnaissable des maquettes de conseil
naval. La différence vient de l'utilisation d'un nombre d'allonges supérieur à deux.

Un autre document intéressant qui montre le même concept de membrures


(recouvrement partiel des bois de construction) à une époque assez récente, alors
que les Anglais avaient déjà introduit la membrure double, concerne les
spécifications pour une petite frégate de 14 canons, datées du 5 août 1679 et
signées par les constructeurs français Hubac, Levasseur et Laurent .228

Le document entier utilise les spécifications hollandaises. Par exemple, la


longueur du navire mesurée entre les perpendiculaires de l'avant, de l'arrière. A
l'intérieur, l'épaisseur de l'étrave est donnée. Tout ceci est similaire à beaucoup de
sections qui dérivent de la technique hollandaise. Le listing du nombre de
varangues, d'allonges et d'allonges de sommet est aussi comparable aux
spécifications hollandaises. Un complément intéressant est la spécification des

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129

longueurs des éléments de charpente. En examinant les sections, il est notable que
seulement les côtes de gabarit sont données. Les varangues font 9 pouces français
(24.4 cm) au niveau de la quille et diminuent ensuite a 7 à 8 pouces français (19 -
21.7 cm). Les premières allonges (120 au total) devaient avoir 8 pieds (2.6 m) de
long et 6 à 8 pouces (16.3 - 21.7 cm) de section carrée. Les secondes allonges
(120 au total aussi) devaient avoir 8 à 10 pieds français (2.6 - 3.3 m) de long et 6 à
7.5 pouces français (16.3 à 20.3 cm) d'épaisseur. Les allonges de sommet (100)
devaient avoir 8 pieds français (2.6 m) de longueur et une section de 6.5 pouces
français de côté (de 17.6 cm).

A partir de la liste des dimensions il est évident que la première allonge


atteignait un peu plus qu'un tiers de la profondeur de la coque, spécifiée à 9.5 pieds
français (3.1 m). Il est probable que l'utilisation de deux allonges étaient
nécessaires pour le système de charpente, probablement une dérivée de la méthode
hollandaise. En relation avec cela, il peut être significatif que le document soit
originaire de Brest sur la côte atlantique française, qui se trouve "relativement" près
des Pays-Bas.

Deux exemples archéologiques de charpente navale française au XVIIème


siècle ont été fouillés récemment. Le plus ancien des deux est l'épave de la barque
longue du Sieur de La Salle, La Belle, construite en 1684 et perdue en 1686. Le
site a été creusé tout à fait récemment par la Texas Historical Commission et les
détails de charpente de la coque doivent encore être publiés. Néanmoins, les
photographies des fouilles et l'enregistrement de la coque font apparaître le type de
membrures. Pour l'instant, les sections ne sont pas disponibles. Cependant, cette
information est suffisante pour faire quelques observations générales.

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Le navire montre un début de construction avec des pratiques décrites dans la


section précédente. La Belle possède trois allonges par côté, latéralement
connectées et les membrures sont doubles, ainsi qu'on peut le voir sur le dessin de
Keltridge. Entre les membrures doubles se trouvent des espaces libres visibles. Les
allonges de la membrure sont raboutées les unes dans les autres. 229 Les vestiges de
La Belle sont parmi les tout premiers à avoir été érigés d'une manière qui exige
l'assemblage complet des membrures avant leur élévation sur la quille.

D'autres détails sont disponibles pour un second vaisseau de guerre Français,


le troisième rang Hazardous. Quand il fut perdu en 1706 le navire était entre les
mains anglaises, ayant été capturé en 1703. Il avait été construit en 1698 comme
troisième rang et baptisé Le Hazardeux.230 L'épave possède une vaste structure de
coque relativement bien conservée, certainement assez pour permettre l'analyse de
sa charpente. Les membrures sont assemblées par paires et espacées de 10 à 12.5
centimètres les unes des autres. Le chercheur, Normand Owen, note que
l'espacement était très cohérent partout dans l'épave, quoiqu'il décrive seulement la
section identifiée comme l'étrave. Les membrures elles-mêmes montrent aussi une
cohérence remarquable : 48 à 53 centimètres de côté et 40 centimètres gabariés 231

L'équipe qui a entrepris l'enregistrement de l'épave est retournée pour


effectuer des fouilles sur le site plus tard. 232 Il a été établi que les membrures au
niveau de l'étrave du navire ont été attachées latéralement avec des chevilles de fer.
La moyenne de la dimension de côté d'une paire a été enregistrée avec une valeur
de 52 centimètres. Et la maille est la même que celui enregistré à l'origine. Les
membrures sont constituées d'allonges d'environ 4 mètres de long.

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131

Cela s'approche des 12 pieds français et donc, est compatible avec les longueurs
déjà vues dans la spécification pour la frégate légère et dans L'Album de Colbert.
Les allonges sont rabouttées.233

Pour la section de la proue, Owen propose un modèle de membrures


différent. Il identifie trois " emplacements (groupes) de membrures," séparés par
quatre paires de membrures de remplissage. Les paires dans ce contexte,
évidemment, se réfèrent au tribord et au bâbord, les moitiés d'une membrure et ne
signifient pas une membrure double. Par "groupes de membrures " Owen veut
probablement parler des membrures doubles qui ont été gabariées et levées avant
que les membrures de remplissage n'aient été ajoutées dans les lisses d'exécution. Il
a conclu que ce type de construction, constitué de sections de membrures avec des
membrures de remplissage, "semble être Français." Pour appuyer cette conclusion,
il cite le Dartmouth .234 Owen compare aussi Le Hazardeux à la re-construction
du Duc de Duras/Bonhomme Richard, de 1769, de Jean Boudriot. Remarquant
que le deuxième navire, reconstruit, montre "des groupes de membrures" et "des
membrures de remplissage" entre eux, il conclut que c'était le style purement
français de construction, car il précise "il apparaîtrait que les vaisseaux de guerre
anglais de la même période ont été construits avec des membrures simples, plus
étroites, mais placées très proches les unes des autres comme dans la construction
du Dartmouth en 1690 ...." 235

Le schéma d'implantation des couples proposé n'a pas de sens, donc il est
probablement incorrect. Premièrement, il est extrêmement douteux que la proue et
les sections de l'étrave d'un navire soient dressées différemment et que dans la
partie suivante du navire, la pose "des groupes de membrures" et "des membrures
de remplissage" soit évidente. Deuxièmement, une re-construction n'est pas une
preuve.

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Troisièmement, Owen compare des navires espacés de la moitié d'un siècle l'un de
l'autre. Le Dartmouth n'a pas été construit en 1690 comme il l'indique, mais en
1655. Le Duc de Duras est encore plus récent que le Hazardeux, ayant été lancé en
1769. Il devrait aussi être noté que même Martin a quelques doutes à propos de la
la construction du Dartmouth et de sa représentativité au sujet de la construction
des navires de cette période. Il devrait aussi être gardé à l'esprit qu'il est dangereux
de faire des généralisations à partir d'un simple exemple. Les vestiges de La Belle
ont presque le même âge que Le Hazardeux et La Belle n'a aucune membrure de
remplissage. En fait, le système qu' Owen considère pour être typiquement français
est décrit par Sutherland comme la pratique anglaise autour de 1711.236

Sur la base des témoignages actuellement disponibles, il est raisonnable de


supposer que Le Hazardeux a été assemblé de la même manière que la La Belle.
L'explication du schéma différent des couples observés dans la proue est due à la
conservation extraordinaire des membrures. Une épave de la période Ottoman dans
la baie de Kiten, a été fouillée par un institut d'archéologie/centre nautique pour
l'archéologie sous-marine de Bulgarie. L'équipe en 2000, a exposé la même
capacité étonnante de conservation sur une durée aussi longue. Seulement après
que les vestiges de la charpente eurent été observés et enregistrés, il fut reconnu
que c'était une coïncidence et que les membrures étaient constituées d'éléments liés
par des écarts. 237

Sur la base des preuves actuelles, il est sûr de conclure, que jusqu'à la fin de
la construction des vaisseaux de guerre français dans les années 1670, ceux-ci ont
été construits avec des écarts assez courts qui n'ont pas été latéralement attachés. La
membrure double est probablement devenue largement utilisée à la fin des années
1670 et dans les premières années de la décennie suivante.

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133

Il est peu probable que le changement soit arrivé de manière soudaine, mais plutôt
que les deux systèmes ont coexisté pendant une courte période. La preuve
documentaire ou archéologique complémentaire peut définir la date exacte de ce
changement de manière plus précise. Comme il est alors à cette époque, relevé, il
semblerait que l'Angleterre soit devenue leader dans l'adoption de la membrure
double. La plupart des changements de construction, sont attribuables à la
disponibilité ou au manque, de matière première. Pour la charpente navale
française, cette explication est plutôt peu probable, car les longueurs des parties
composant les membrures n'ont pas changées sensiblement avec le nouveau
système. Rien n'a créé les conditions pour une limitation de l'approvisionnement en
matière première. Les bois de construction courts employés l'ont été, mais de
manière modeste de toutes façons. L'explication se trouve probablement dans le
besoin de capacités supplémentaires de résistance dans les vaisseaux de guerre.
L'expérience de la guerre hollandaise dans les années 1670 a probablement montré
que les navires français étaient moins résistants que cela avait été supposé. Le
changement peut aussi être dû à la modification des méthodes de développement
des lignes des navires.238

La flotte danoise n'a jamais été très grande, mais elle a possédé quelques
navires excellents, puissants, parfois construits par des étrangers, parfois par des
constructeurs d'origine danoise. La première moitié du XVIIème siècle s'est écoulée
pour le Danemark-Norvège, sous le règne du roi Christian IV (1588-1648), un
monarque qui a aimé la mer et qui était heureux de croiser avec sa flotte. 239 La
marine a beaucoup profité de l'intérêt royal. Comme Charles II d'Angleterre,
Christian IV était tout à fait techniquement compétent, et était capable de
communiquer directement avec ses constructeurs. Il a lui-même donné à son
constructeur de navires Peter Mychelsen, les spécifications pour le projet d'un
devis, dont la version finale a été signée le 28 décembre 1613.240

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134

Le navire devait être une frégate simple pont avec un lourd armement composé de
canons de 18 livres sur le pont d'artillerie. Le devis spécifie la longueur de la quille
à 90 pieds danois (28.3 m), le bau - 30 pieds danois (9.4 m) et la profondeur de cale
à 10 pieds danois (3.1 m) .241 Avec l'élancement de l'avant à l'arrière le navire
devait avoir 124 pieds danois (38.9 m). Dr. Anderson a traduit ce document et les
commentaires suivants sont basés sur cette traduction. Heureusement, on a aussi
donné les parties de la coque les plus importantes dans la langue originale dans des
notes en bas de page. Sur quelques détails mineurs ma traduction et la sienne ne
sont pas entièrement identiques.

Le devis inscrit les varangues comme faisant 1 pied danois d'épaisseur (31.4
cm), mais ne donne pas de dimensions de côté pour elles, vraisemblablement elles
devaient être carrées, ou presque. Les allonges (aujlangen, très proche du
hollandais oplangen), écrit Anderson, sont données de la tête de varangue au pont
pour avoir 9 pouces danois d'épaisseur (de 23.5 cm) .242 Il traduit le mot kymmen
par rungheads. Il donne la même interprétation du mot dans sa transcription d'une
spécification hollandaise de 1664, trouvé dans les archives suédoises.243 De sources
hollandaises déjà analysées, on sait que le mot signifie réellement le sommet du
bouchain (environ un tiers de profondeur de cale, habituellement) et correspond à
l'extrémité supérieure de la première allonge - les sitters (buickstukken dans le
Maaskant). L'auteur croit qu'ici, cela signifie la même chose qu'en néerlandais.
Interprété ainsi, le passage suivant a plus de sens qu'il n'en donne dans la version
écrite. Dans la traduction, Anderson parle d'une préceinte et d'une serre d'empâture
enserrant les têtes de varangues. Des chevilles lient les deux préceintes ensemble 244
On a montré dans les chapitres précédents que les vaigres de fond ont été placées
sur les

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135

têtes de varangues pour renforcer le chevauchement entre elles et les allonges. Plus
surprenante est la préceinte sur l'extérieur. Aucune référence ne suggère un élément
de charpente si saillant, placé pratiquement sur le fond du navire. Si nous donnons
à kymmen la signification de sommet de bouchain, cependant, la préceinte
extérieure semble plus probable, car il y a une preuve de l'existence d'une préceinte
placée très bas : le navire royal Wasa, construit par un charpentier hollandais245 Il
apparaîtrait que les deux préceintes renforcent le chevauchement entre les
premières allonges, non mentionnées dans le devis et les secondes allonges. Dans
beaucoup de spécifications hollandaises on ne donne pas les dimensions des sitters,
pour utiliser la terminologie Norderkwartier, et elles sont traitées de façon
désinvolte ce qui suggère qu'elles calent simplement des pièces à la jointure entre
les varangues et les allonges du navire et que leurs dimensions découlent des
varangues associées. Il se peut que ce soit identique dans ce cas pour le devis
danois.

En résumé, l'interprétation la plus probable est que cette frégate assez grande
avait deux allonges et qu'elle a été construite de façon semblable à la méthode
hollandaise. Comme la largeur du fond n'est pas précisée par le devis, la méthode
doit avoir été proche de celle employée au Maaskant. La similitude de
terminologie entre le hollandais et le danois ne peut pas être prise comme une
preuve évidente d'influence, mais c'est une possibilité. En même temps, il devrait
être rappelé que le constructeur de navires en chef du roi, David Balfour, était un
Ecossais et l'influence de son pays d'origine ne devrait pas être exclue, non plus.

A la fin des années 1990, le chantier de construction sur le site des magasins
B&W à Copenhague a amené la découverte d'un véritable cimetière des premiers
navires modernes, surtout de la fin du XVIIème siècle.

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136

Tous avaient subi des dégâts dus au travail du chantier des magasins, mais il en fut
sauvé suffisamment pour les classer comme la plus importante découverte
d'archéologie nautique jamais faite.

Les épaves 1 et 2 présentent un intérêt particulier. Toutes les deux ont été
lourdement endommagées par l'installation de réservoirs de stockage de pétrole
dans les années 1960. Néanmoins, leurs dimensions et leurs caractéristiques de
construction sont discernables. Ces deux navires ont été intentionnellement coulés
pour construire un ponton de carénage.

L'épave 1 fait environ 26 mètres de longueur et 6 mètres de large. Le fond est


presque complètement plat, suggérant un navire marchand et un bouchain pointu
très défini et très visible. Le plan, dessiné après que le vaigrage ait été enlevé,
montre les varangues, les premières allonges positionnées entre celles-ci ainsi que
les débris des secondes allonges.246 Une caractéristique surprenante est que le proue
et la poupe ont un double bordage, tandis que la section centrale du navire possède
un bordage simple. L'explication est qu'à un certain moment, dans sa vie, le navire
a été allongé de 7.70 mètres. Les membrures des sections complémentaires sont
placées de telle façon que les planches du vaigrage soient en continuité avec le
carénage. Les bois de charpente des membrures sont tourillonnés aussi bien à
l'extérieur qu'aux planches de vaigrage; très peu de clous ou de pointes ont été
utilisés. La serre d'empâture de bouchain a survécu et a été renforcée au niveau de
la section allongée par trois virures complémentaires. Une ouverture près de la
tournure du bouchain sur tribord a permis de loger la pompe : cet emplacement
pour la pompe est typique pour des navires à varangues plates. Les restes de
l'étambot montrent des dessins de marques de graduations en pieds d'Amsterdam.
L'analyse dendrochronologique des bois de charpente a montré que les arbres
avaient été abattus en 1584, probablement aux Pays-Bas. L'extension, cependant, a
été faite de madriers abattus autour de 1608 en Suède occidentale, un territoire qui

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137

faisait partie du Danemark-Norvège à l'époque. Il est probable que l'allongement ait


été effectué alors que le navire était déjà entre des mains danoises.247

Christian Lemee a publié les sections des épaves 1 et 2, ensembles avec les
plans des vestiges. Il a provisoirement identifié l'épave 1 par les archives des
comptes qui mentionnent un navire en voyage en Espagne qui a été appelé The
Long Dutchman (le Long Hollandais). Le plan des vestiges de navire suggère
vraiment un long navire et une analyse dendrochronologique a montré qu'il était de
fabrication hollandaise, soutenant ainsi la conclusion de Lemee.248 En somme, la
forme de l'épave 1 confirme assez certainement que ce soit un navire construit dans
le Norderkwartier hollandais.

L'épave 1 est inclue dans la section danoise, surtout parce que l'extension a
probablement due être exécutée au Danemark, comme il est éventuellement
possible qu'elle était entièrement construite au Danemark.

L'épave 2 est un navire de 25 à 30 mètres de longueur et d'environs 7.5


mètres de large, mais seulement environ 14 mètres en sont préservés. Le navire est
de construction robuste et montre un haut niveau d'art, que Lemee considère
comme caractéristiques d'un vaisseau de guerre. La coque "était à bordage double"
en chêne et gainée avec un bordage en pin. Le bordage le plus intérieur est fixé aux
membrures par des tourillons. La dendrochronologie a donné les dates de 1606
pour la partie principale du navire et 1622 pour la couche extérieure de planches de
chêne. Dans le fond du navire ont été trouvées deux coques de noix de coco. Cela
laisse supposer que le navire ait navigué jusqu'aux Indes orientales,

- 150 -
138

où une colonie danoise a été établie en 1620. Une entrée dans le journal de
Christian IV peut donner un indice sur l'identité de ce navire. Le roi a enregistré
en février 1624 que deux grands navires, qui ont fait le voyage en Indes orientales,
avaient été mis à l'échouage. C'étaient le David et l'Elefanten. Les rapports
montrent aussi que tous deux ont été préparés pour leur voyage par la pose d'une
seconde couche de planches de chêne.249

Lemee n'indique pas le lieu où le bois de construction a été abattu, mais


probablement que ce fut au Danemark, et les épaves montrent comment les navires
danois ont été construits au début du XVIIèmesiècle. Le plan de l'épave montre des
varangues avec les premières allonges disposées entre elles et les vestiges des
secondes allonges entre les têtes des premières – disposition pas précisément
inattendues.250 Les restes de petites chevilles en bois dans la première couche du
bordage présentent un intérêt particulier. Ces chevilles servaient au remplissage des
trous laissés après la suppression des taquets provisoires qui tenaient le bas du
bordage avant l'installation des varangues. De tels taquets et des chevilles de
remplissage (spijkerpennen) sont associés à la tradition de construction navale
hollandaise du nord et donnent des indications sur le début de la construction du
fond du navire. Ces indications devraient-elles être prises comme les preuves
démontrant que le navire est de construction hollandaise? Lemee ne donne pas
d'information complémentaire qui pourrait répondre à la question. Sa section de la
deuxième épave, cependant, ne montre pas clairement le bouchain pointu, sur la
première épave, ce qui est une caractéristique des navires construits dans la
tradition hollandaise du nord251 Il pourrait être argumenté que dans un vaisseau de
guerre, où la capacité de cargaison n'est pas la première importance, un certain
arrondi du bouchain peut être attendu. Encore que, le modèle de Hoving d'un yacht
de guerre, basé sur des données de Witsen, conserve toujours un bouchain
pointu252

- 151 -
139

Il est possible qu'une réponse peut être trouvée dans les archives, pour peut qu'il y
ait bien eu des enregistrements montrant les origines de l'Elefanten et du David.

L'épave 5 est celle du plus grand navire trouvé. Environ 28 mètres subsistent
de ce qui est évalué pour avoir été un navire de 35- 40 mètres. Une grande partie du
côté de tribord est existante au niveau du pont le plus bas. Lemee croit que "des
courbes et des lignes amples" sont les preuves d'une "conception géométrique
préméditée," et ainsi que le navire peut avoir été un des navires de Chrétien IV. Les
débris des bois de charpente incluent des varangues, des allonges et des genoux,
tous en chêne. Des marques dessinées, encore existantes sont exprimées en pieds
d'Amsterdam. L'analyse dendrochronologique donne pour l'abattage du bois, les
environ de 1640-1644. Cette date, cependant, est provisoire et l'origine du bois de
composant la charpente doit encore être établi. 253

Aucun dessin n'est publié pour l'épave 5, juste une photographie254 Il est
difficile d'avancer une analyse en se basant sur une simple photographie
(particulièrement un cliché exécuté avant que les planches de vaigrage aient été
enlevées). Le bouchain n'est pas aussi saillant que nous pourrions nous y attendre
d'un navire hollandais du nord. Le navire semble avoir été construit sur le pied
d'Amsterdam, mais son utilisation n'est pas la preuve formelle de son origine, car
Van Yk travaillait avec la même unité de mesure. Peu de choses sont visibles des
membrures sur la photographie, mais ce que l'on peut voir, suggère le même type
que celui observé sur les deux autres épaves.

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140

Basé sur ces épaves, il peut être dit qu'au Danemark la norme de construction
pour les membrures des navires était d'avoir deux allonges par côté. Le témoignage
archéologique soutient aussi l'interprétation du devis de 1613.

Lemee écrit que les plans n'ont pas été utilisés dans la construction navale au
Danemark jusqu'au début du XVIIIèmesiècle. Chose étonnante que la base de cette
déclaration, car les archives danoises contiennent des dessins tant danois que
d'origines étrangères, du XVIIèmesiècle. Parmi les dessins d'origines étrangères se
trouve le troisième rang à 70 canons déjà décrit et le plan du Mortar (le Mortier) de
1693. Pourquoi ces dessins ont-ils été rassemblés s'ils n'ont pas été utilisés dans la
construction navale? Les documents étrangers ont probablement servis pour des
comparaisons ou ont peut-être même été sujets d'inspiration. On trouve parmi les
premiers dessins danois ceux du Dannebroge de 1691. A mon avis enfin, la
présence de ce document laisse supposer l'utilisation de plans dans la construction
navale au moins dès les dernières décennies du XVIIèmesiècle.

Le Dannebroge était un grand deux-ponts de plus de 90 canons. Le dessin


montre que le navire était plutôt peu profond et largement rayonné. La section du
maître-couple est d'un intérêt extrême (figure 23). S'il y a des doutes sur le nombre
d'allonges dans la section d'un sixième rang de Keltridge, le navire à 70 canons et le
Mortar, ceci n'est pas possible pour le Dannebroge, car la membrure est clairement
décrite. Sur, le dessin on aperçoit les extrémités des bois de charpente cachés dans
la vue par des lignes pointillées. Il est facile de compter trois allonges et une
allonge de revers qui s'étend vers le bas jusqu'à la préceinte principale. La première
allonge est distante de la quille et la troisième allonge s'étend presque au pont
supérieur. Malheureusement, les dessins ne montrent pas

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141

les dimensions de côté de la membrure, et il est impossible de dire si un espace a


été laissé entre les couples sur la quille. En se référent aux pratiques ultérieures,
cependant, il est probable qu'un espacement existait. 256
.

Il semble que les Danois aient évolué vers l'utilisation de trois allonges et de
la membrure double approximativement à la même époque que le firent les autres
grandes puissances maritimes de l'Atlantique et du Nord. En regardant la
distribution du bois dans la membrure, il ne semble pas probable qu'un manque de
bois de construction de forme incurvée ait été la raison principale de cette
évolution. La plus complexe et par conséquent, la forme la plus dure à trouver est
celle de l'allonge; et dans le Dannebroge, cet élément de charpente est aussi le plus
long. L'explication doit être trouvée autre part.

Au début du XVIIème siècle, les rapports montrent que la plupart des


charpentiers employés dans les chantiers navals royaux suédois étaient des Suédois.
Aux environs de 1600, des noms hollandais commencent à apparaître, suggérant
que l'on a considéré la charpente navale hollandaise supérieure à la charpente
navale locale. Avant les années 1620, la réorganisation dans les chantiers navals a
mené deux constructeurs de navires hollandais à atteindre de hauts postes et ainsi a
influencer significativement la construction des bâtiments pour la couronne. 257 Le
plus connu parmi leurs réalisations est l'infortuné Wasa. Le renflouage, la
restauration et l'étude de ce navire pourraient avoir fourni une richesse
d'informations sur les techniques de construction des navires hollandais, mais
malheureusement 40 ans après son relevage le rapport final sur la charpente de la
coque n'a pas été encore publié.

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142

Figure 23. Dannebroge de 1691. Redessiné par Danske Orlogskibbe. Notez la différence dans les
demies largeurs, probablement dues à un "soufflage" du navire.

En général, il semble que les navires suédois de la première moitié du XVIIème


siècle aient eu des ressemblances marquées avec les unités navales de construction
hollandaise, mais aient différé dans leur décoration. 258 A la fin des années 1650 le
constructeur de navires anglais Francis Sheldon s'est déplacé en Suède et a
persuadé les autorités de ses capacités de construire de grands navires.259

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143

La maquette de son Riks Applet a déjà été décrite avec un certain détail. Il semble
probable que ce premier rang ait été dressé avec des bois de charpente se
chevauchant.

A la fin de la Guerre de Skane en 1679 les chantiers Suédois étaient


employés à un programme de construction massif pour compenser les pertes des
deux défaites désastreuses face aux Danois. Peu de choses sont connues de ces
navires, à part ce qui peut être appris de quelques maquettes d'époque. La
photographie de l'une d'entre elles peut être vue dans Great ships de Fox.260 C'est le
Victoria de 1683, un navire de 70 canons. Le modèle ne fait pas apparaître
l'ornementation des maquettes de la marine anglaise et il est peu probable qu'elle ait
été construite purement dans un but décoratif. La majeure partie de l'étambot n'est
pas terminée ou manque. La coque est bordée au-dessus de la préceinte, mais pas
au-dessous de celle-ci, donnant ainsi une vue dégagée des membrures. Il semble
probable que la maquette montre vraiment la pratique réelle, car la coque est
incontestablement construite avec des membrures doubles. Avec la photographie, il
est impossible de déterminer combien d'allonges ont été utilisées, mais cela pourrait
ne pas avoir été moins de trois sur le navire réel.

La maquette montre une très petite flèche à sa préceinte, quelque chose qui est
aussi visible sur les gravures dans l'Album de Colbert. On sait que certains des
plus grands navires du nouveau programme ont été construits et décorés à partir de
dessins préparés en France et les navires français étaient caractérisés par très peu de
flèche.261

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144

En 1691, Ake Classon Ralamb a publié son travail sur la charpente navale
suédoise, Skepps byggerij eller Adelig Oefrzings Tionde Tom. Une figure de grand
intérêt montre le travail sur un chantier naval ainsi qu'il est effectué à cette époque.
On montre sur les chantiers des navires en carène et à différents niveaux de
construction. Trois des navires sont dans un processus de montage des membrures
et méritent donc une attention spéciale. Dans le coin gauche supérieur du dessin se
trouve un navire avec seulement quelques membrures en place, mais le fond est
apparemment déjà construit. L'étambot permet d'identifier le navire comme étant
construit dans la tradition hollandaise. Pour certains types de navires l'influence des
Pays-Bas était toujours présente en Suède à la fin du siècle. Les deux autres navires
diffèrent dans la membrure. Le plus haut des deux a certaines allonges de sommet
en place et des lisses d'exécution attachées pour donner la forme au navire, mais
toutes les membrures n'ont pas encore été érigées. Il semble que l'artiste essayait de
présenter chaque troisième ou, à quelques endroits, chaque seconde bande de bois
de construction. Cela correspond bien avec ce que l'on voit généralement sur des
dessins anglais (Figure 24). Des poteaux verticaux implantés autour du navire,
après la largeur maximale à chaque membrure soutiennent la coque et les lisses
d'exécution. Un tel appui est typique du chantier naval hollandais du sud. 262 Trois
dispositifs intéressants rendent improbable le fait que l'influence hollandaise ait
joué un rôle dans la construction de ce navire. D'abord, le gabord n'est pas installé,
tandis qu'une grande proportion des varangues l'est déjà. L'étambot et son allonge
de soutien sont dépeints d'une manière qui laisse à penser que les planches de bordé
doivent être couchées dans une rainure et qu'elles ne recouvrent pas la partie
inférieure de l'étambot. Deuxièmement, l'étambot est attaché sur l'intérieur de la
barre d'hourdi et non sur l'extérieur comme indiqué par Witsen et Van Yk. Les bois
de charpente au-dessus de la barre d'hourdi forment un comptoir comme dans les
navires anglais et ne se prolongent pas en ligne avec le façonnage des pièces
comme sur les navires hollandais. Troisièmement, les talons inférieurs des pièces

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145

formées ne finissent pas sur l'étambot, mais forment un angle et semblent être
raboutés en avant dans la varangue suivante. Cette caractéristique est bien illustrée
sur les maquettes bordées de la marine anglaise et est associé avec des écussons
ronds, et non carrés.

Les membrures du navire sont à peine perceptibles (au moins dans les
reproductions du dessin auquel j'ai eu accès) et se trouvent à différentes étapes
d'achèvement. Les allonges chevauchants les varangues sont visibles partout sur la
longueur du navire. Mais il est difficile de dire combien d'allonges étaient utilisées.
Au maître-couple la membrure est certainement doublée ainsi que chaque seconde,
ou au maximum chaque troisième couple d'allonges. Le reste est rempli
apparemment de bois de construction. William Sutherland, actif au début du
XVIIIème siècle décrit cette façon de construire un navire. 263

Le navire dépeint est la preuve probable d'une forte influence anglaise sur la
construction navale suédoise. Ce n'est pas surprenant, car les deux des fils de
Sheldon avaient obtenu sur le chantier naval d'importantes positions.264 Cela
pourrait aussi être un exemple d'intégration et l'évolution des influences, car au
XVIIIème siècle on a admiré la conception suédoise des navires et leur construction.
Un exemple de ceci étant les navires du prolifique Frederick Hendrik af
Chapman. 265

Pendant le XVIIème siècle, la construction des vaisseaux de guerre suédois


semble avoir suivi les mêmes tendances déjà connues par d'autres nations. Du début
du siècle jusqu'aux environs de la fin des années 1670 ou au début des années 1680,
des navires ont été construits avec des éléments de charpente se chevauchant, le

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146

plus probablement de la façon habituelle, c'est-à-dire : deux allonges par couple et


par côté. Au début des années 1680 la membrure double devint dominante.

Figure 24. Un navire sur les tins à Stockholm, d'après Ralamb

Trois des puissances citées dans ce chapitre - la France, le Danemark-Norvège


et la Suède – employèrent l'expertise hollandaise dans la fabrication de la charpente
de leurs navires. Dans le cas de la Suède et pour certains cas s'étendant au
Danemark, l'influence des îles britanniques était probablement aussi en jeu. Ce n'est
pas surprenant, donc, de voir que le développement des charpentes de navires suit
généralement la pratique Anglaise ou Hollandaise.

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147

CHAPITRE IX

LE MANQUE DE BOIS DE CONSTRUCTION

ET LA MEMBRURE DOUBLE

L'adoption rapide du nouveau système de membrure par tant de nations


presque en même temps est un argument en faveur d'une condition commune qui l'a
nécessité. Les changements sont normalement attribués à la disponibilité (ou au
manque) de matériels et à leur coût. Il a été suggéré que les provisions anglaises de
chêne commençaient à diminuer avec les contraintes imposées par l'expansion
rapide de la flotte à l'époque de la restauration et de l'interrègne. Le problème
d'approvisionnement en bois n'a probablement pas frappé les autres nations avec la
même sévérité et au même moment qu'en Angleterre. La France avait une plus
grande provision de bois de charpente et, même pendant les guerres
napoléoniennes, n'a apparemment pas souffert des manques qui ont tourmenté la
Grande-Bretagne.

Les pays scandinaves étaient même plus aisés à cet égard, car ils étaient la
source principale d'importations de bois pour le reste de l'Europe. Finalement, si la
disponibilité de ce bois de charpente était la force agissante derrière le changement,
les Hollandais devraient avoir été les premiers à changer. Ils n'avaient pratiquement
aucune provision propre et le commerce du bois avec la Baltique était leur source
principale. En fait, ils sont ceux qui sont restés avec le plus ancien système le plus
longtemps. En outre, il devrait être noté que les dimensions des bois de charpente
de forme incurvée nécessaires n'ont pas diminué, ni les quantités requises. De
l'Album de Colbert nous connaissons la longueur des allonges employées dans la
charpente d'un trois-ponts.

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148

Le devis pour la frégate légère donne les longueurs de varangues, des allonges et
des allonges de sommet. Elles sont, assez curieusement, presque identiques. Les
longueurs des bois de charpente révélées par le Hazardeux sont aussi les mêmes.
Les spécifications de Sutherland pour la longueur des allonges et des varangues
sont remarquablement similaires aux dimensions françaises 266 Autrement dit, le
nouveau système n'a pas offert d'économies au niveau du bois consommé et, donc,
une autre explication à la raison du changement doit être avancée.

Il est intéressant d'examiner la question de l'approvisionnement de bois de


charpente en Angleterre. Le programme des "30 navires" créa une tension
logistique énorme sur le conseil naval et l'amirauté. Le Parlement a ajouté à la
difficulté en insistant pour que les navires soient achevés en deux ans et a ensuite
voté des fonds qui étaient drastiquement faibles par rapport aux exigences. Par
conséquent, le roi Charles II a dû couvrir beaucoup du fardeau financier avec sa
propre bourse.

Parmi les problèmes à résoudre en 1677, il existait la probabilité que le bois


pour les charpentes ne pourrait pas être pourvu pour l'ensemble des vingt troisièmes
rangs, neuf deuxièmes rangs et un premier rang. Sir Anthony Deane a cru qu'il n'y
avait pas assez de bois de construction de forme en Angleterre pour ces navires.
Cependant, il n'a pas prétendu qu'il y avait directement un manque sérieux de bois
267
.Ces propos concernant uniquement les madriers de forme incurvée était souvent
pris comme une conclusion définitive qu'un manque de bois important ait existé.
mais il est valable de l'examiner dans le détail.

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149

Le 2 juin 1677, Charles II, qui a suivi les réunions de l'amirauté plus
régulièrement qu'aucun autre, 268 a annoncé qu'un Colonel Norton lui avait offert
une grande provision de bois de charpente sans augmentation de prix.269 A la même
réunion, les officiers de la marine ont informé le roi que dans les chantiers navals, il
y avait le bois de charpente pour la maintenance régulière de la marine qui était
plus approprié pour de nouvelles charpentes que pour des réparations. Par
conséquent, on lui a demandé de permettre son utilisation pour les nouveaux
navires et de remplacer le stock de maintenance par les nouvelles provisions
attendues. Ce "manque" était assez clair dans les minutes de la réunion suivante,
quand le roi a ordonné de commencer les constructions sans attendre que tout le
bois de charpente soit fourni. Ainsi, la fabrication put démarrer rapidement. 270

Cependant, il y avait quelques risques que des manques d'approvisionnement


puissent être rencontrés. Il a été reconnu que cela pourrait arriver en raison "de
l'état d'esprit arriéré de gentlemen pour se séparer de leur bois au-delà de ce à
quoi ils auraient pu s'attendre," mais il n'était pas impossible que "le manque réel
de bois de certains types appropriés pour le travail, ne puissent être fourni dans la
nation".271 Il a été indiqué à la réunion que peut-être la suggestion du Prince
Rupert - le technicien toujours organisé, - devrait être suivie et que quelqu'un
devrait être envoyé en Allemagne pour chercher dans les forêts de chêne du bois
pour les charpentes. Les officiers de la marine ont décidé que ce n'était pas encore
nécessaire et que tous les gens concernés devraient attendre pour voir si des
manques apparaisaient.272 A la réunion suivante, quatre jours plus tard, la
suggestion a été faite que : "sa Majesté possède la bonne provision de bois de hêtre
et de planches" et que cela pourrait être utilisé pour soulager le manque de chêne,
par son utilisation dans la construction des parties submergées des navires. On a
considéré que la longévité du hêtre dans des conditions submergées était aussi
bonne que celle du chêne. A nouveau, les officiers de la marine décidèrent qu'il n'y

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150

avait aucun besoin de prendre de telles mesures extrêmes.273 De ces discussions, il


devint évident que bien que le souci de la disponibilité de bois de construction ait
existé, il n'était pas si accablant, car des sources alternatives ou d'autres voies
pouvaient être trouvées par rapport aux spécificités traditionnelles et pouvaient être
prises en considération.

Le bois de charpente devait toujours être importé, cependant. La décision


d'utiliser certains matériaux importés est venue avec beaucoup de critiques plus
tard, quand les "30 navires" se sont trouvés dans de pauvres conditions après
seulement quelques années de service. Samuel Pepys a écrit ses Memoirs of the
Royal navy (Mémoires de la Marine Royale) surtout comme une défense de sa
conduite. On a montré que ses commentaires devraient être lus avec un soupçon
extrême, car il était aussi, égoïste à l'extrême et n'avait eu aucun scrupule à se servir
des faits pour son but personnel. 274 Néanmoins, ses commentaires sur la situation
du bois de charpente au commencement du programme des "30 navires" sont de
valeur, ainsi que confirmés par les minutes de l'amirauté.

Pepys déclare que 500 charges des 30.000 nécessaires ont été importées du
pays de l'est (la région Baltique).275 Cela correspond à environ 1.6 pour cent de la
provision totale! Si ces données sont fiables il ne pouvait pas y avoir eu un manque
de bois très sévère en Angleterre à ce moment-là.

Cette conclusion est au moins partiellement confirmée par le journal de


l'amirauté. Le 3 août 1678, les minutes rapportent : "les officiers déclarent que le
bois de construction est vraiment tracé partout dans les arsenaux de sa Majesté
aussi rapidement qu'il est possible en cette saison".276

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151

Au mois d'avril suivant, les mêmes officiers étaient déjà concernés par l'usage des
restes et des chutes.277 La plus grande partie des témoignages suggèrent que le
manque de bois ne soit pas aussi aigu que nous sommes menés à le croire et a été
rapidement résolu d'une manière satisfaisante. Cela, cependant, rend nécessaire de
trouver une explication alternative au changement de méthode de construction. Le
manque de bois semble avoir été au maximum un facteur contribuant, mais
certainement pas le principal.

Le journal de l'amirauté peut aussi donner quelques indices sur cette


question. Les références au départ de la construction standard et de la conception
sont nombreuses et une quantité surprenante d'entre elles est attribuable au roi lui-
même. Dès le 3 juillet 1674 il est mentionné que "Sa Majesté a donné l'ordre au
commissaire (Deane) d'augmenter les sections et les dimensions pour plusieurs
éléments concernant les nouveaux navires récemment construits par Mr. Deane à
Harwich." 278 Le mot sections implique que les changements commençaient à être
faits dans les membrures, quoiqu'il ne puisse pas être affirmé sur la base de cette
citation que la fabrication des membrures ait déjà changée. Une autre innovation
proposée par le roi qui a eu un grand succès était l'introduction des galères-frégate
:" ..construction d'un navire de la conception récemment proposée par sa Majesté
pour répondre au service des deux, une frégate et une galère." 279

Que le roi ait fortement influencé la conception et la construction de sa flotte


est confirmé par le passage suivant dans le rapport avec les dimensions proposées
pour le programme de "30 navires". Le conseil naval, dirigé par Pepys, a présenté
au roi un tableau de port et de dimensions pour les navires des différents rangs,

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152

mais il ne l'a pas approuvé : " pour lesquelles Sa Majesté a pris des exceptions,
comme le fait de ne pas augmenter la longueur du pont d'artillerie et d'autres
mesures qu'il a jugées convenable que les navires devraient avoir." 280 les officiers
de la marine, surtout Pepys, se sont opposés au roi en déclarant que les dimensions
qu'ils avaient proposées étaient aussi près que possible de la proposition que Pepys
avait fait au parlement. Le roi de nouveau, écarta Pepys, exposant "son opinion que
les dimensions qu'il donnait maintenant étaient assez petites pour servir à faire des
navires répondants à toutes les épreuves de force et aux qualités que de tels navires
devaient avoir, retransmettant la table de dimensions mentionnée aux officiers de
la marine, leurs ordonnant d'en calculer à nouveau une autre, appropriée à ces
longueurs de ponts d'artillerie pour chaque rang qu'il leur avait maintenant
donné". 281

Le roi était responsable d'une autre innovation dans la conception des navires
et dans leur construction : l'étrave droite. Le 7 juillet 1677, les minutes de
l'amirauté enregistrent que Mr. Pett du chantier naval de Chatham "avec la
dernière proposition et la détermination de sa Majesté pour la construction de
navires avec des étraves droites il", mentionne Mr. Pett," a vraiment conçu
d'ajouter un autre grand changement dans la méthode de construction
généralement pratiquée à ce jour, en ramenant le tirant d'eau à 2 pieds de moins
pour les 2ème où 3ème rangs."282 Cette innovation spécifique n'a pas été présentée,
mais il est clair que l'esprit de changement était dans l'air et la force agissante
derrière cela était Charles II, non Pepys.

Deux semaines après Sir Anthony Deane et Sir John Tippets, les deux
constructeurs expérimentés, ont suggéré que les sections proposées devaient être
significativement augmentées.

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153

Ils ont eux-mêmes expliqué que l'augmentation proposée était au-delà de ce qu'on
pourrait raisonnablement attendre, mais qu'elle était bien justifiée néanmoins : "...
d'autres possédant moins de savoir, quand la masse d'un navire peut être perçue,
on peu critiquer [les sections des bois de charpente] comme trop grand." 283 Le "
possédant moins de savoir " peut très bien être une référence à Pepys lui-même, car
il s'est opposé à l'augmentation des dimensions avec ce qu'il avait lui-même
proposé. 284 Cette note dans les minutes donne un autre aperçu très séduisant, que
des changements ont été incorporés dans la construction des membrures de navires
à cette époque.

D'après des passages cités dans les minutes de l'amirauté, la marine, sous les
auspices d'un monarque intelligent et bien informé, était à un instant rare
"d'innovations" inspirées. Si de quelconques changements dans la membrure
devaient être faits, cela aurait été le bon moment. L'accroissement des dimensions
et des sections soutiennent l'idée que les membrures ont été différentes de ce qui
avait été fait jusqu'à cette époque. Cette évidence circonstancielle peut, donc,
indiquer le moment où le nouveau système de membrure a été largement introduit.
Cependant, elle n'explique pas ce qui, en premier lieu, a rendu le changement
nécessaire.

L'expérience de la dernière guerre hollandaise était tout à fait fraîche dans les
esprits des commissaires quand on a proposé les nouveaux navires. En plus de cela,
le Prince Rupert, l'homme qui y avait participé le plus directement, siégeait à la
commission de l'amirauté. A la différence de la deuxième guerre anglo-hollandaise,
la troisième, a eu un objectif stratégique qui n'était pas juste de balayer les flottes
des états ennemis des mers, mais de les détruire et de rendre le débarquement de
troupes possible. Cela a forcé les alliés à passer des périodes beaucoup plus vastes
sur la côte Hollandaise et à combattre avec moins de retraits pour réparer et
réapprovisionner.285

- 166 -
154

Un exemple est la campagne de 1673. Après les deux batailles de Schooneveld, la


flotte alliée sous les ordres du Prince Rupert a navigué vers la côte hollandaise. Là,
ils ont mouillé et enduré une série de tempêtes sévères et ont eu beaucoup de peine
à gérer le mauvais temps. La force du vent les a obligés à briser le hunier et les
vergues et à décrocher les flèches des mats. Le voyage dans les eaux peu profondes
doit avoir causé des contraintes de torsion aux coques, car des eaux peu profondes
génèrent des vagues fermes - la plus mauvaise condition possible pour des navires
en bois surchargés. Comme le temps s'est amélioré, le lourd combat à la bataille de
Texel suivit. Le 14 août, deux jours après la bataille, les alliés étaient de nouveau à
l'ancre. Une autre tempête sévère suivit qui doit avoir causé encore plus de dégâts
et de contraintes à la flotte de guerre meurtrie. En fait, ce n'est que le 24 août que
Rupert a finalement renoncé et est retourné à l'ancrage de Gunfleet. La flotte avait
passé un total de 39 jours loin de sa base, avait surmonté au moins trois assauts
sévères de tempête et avaient eu une lourde action de combat. Que Rupert n'ait pas
subit un désastre dans ces conditions défavorables lui donne beaucoup de crédit
comme commandant et comme marin. Ces conditions défavorables lui ont
certainement apporté quelque expérience grâce à l'observation de l'affaiblissement
des navires causés par les contraintes auxquelles ils ont été soumis.

La membrure traditionnelle avec allonges, varangues et allonges de sommet


sans attaches aurait été moins capable de résister aux contraintes, ainsi que des
madriers bougeant indépendamment auraient été incapables de transférer les
moments de torsion et de flexion au reste de la coque. Une membrure double,
d'autre part, forme un ensemble d'éléments de charpente latéralement attachés et est
ainsi capable de communiquer la rigidité à la structure et permet une bien meilleure

- 167 -
155

distribution des forces à la coque entière. En pratique, un navire plus rigide travaille
moins lors du service en mer et, donc, son calfatage, ses attaches et les éléments de
charpente sont soumis à moins d'usure. C'est ce qui a été compris à cette époque et
qui était évident pour William Sutherland l'assistant constructeur de navires :

"...que le bordage soit bien soutenu, que l'intervalle ne puisse pas causer de
"tambourinage", comme les charpentiers le nomment, qui causerait non
seulement une faiblesse là où la force est exigée, mais aussi le calfatage 'a
tambouriner', n'étant rien de si durable, ni de si sec, afin que la force
appropriée soit faite pour soutenir et renforcer le travail ".286

Un navire plus rigide est aussi une meilleure plate-forme de tir, car il résiste
aux contraintes du recul des canons plus efficacement. Un demi-canon tirant une
charge de 32 livres transmet 18 tonnes de traction sur les structures de charpente
auxquelles les bragues sont attachées.287 Il est maintenant reconnu que beaucoup de
navires de l'Armada espagnole de 1588 ont été finalement perdus en raison de
telles contraintes sur les coques pendant la bataille 288 Puisque les navires anglais
du XVIIème siècle étaient plus résistants que les urcas Méditerranéen qui
naviguaient avec l'Armada, leur faiblesse est devenue apparente que lors des
campagnes prolongées et des guerres hollandaises dans lesquelles la tactique de
bataille en ligne a été employée pour la première fois. Les batailles sont devenues
essentiellement des duels d'artillerie et, à la différence de la campagne de l'Armada,
quelques navires ont succombé aux boulets de canon. Le tir soutenu, la suprématie
des canons de la flotte anglaise et les terribles ouragans subis dans la campagne de
1673, tous cela doit avoir contribué à la prise de conscience que les navires
n'étaient pas suffisamment rigides. La membrure double était alors la réponse
proposée par les charpentiers de cette époque à un problème qui était la peste

- 168 -
156

des vaisseaux de guerre en bois, jusqu'aux innovations présentées par Sir Robert
Seppings à la fin des guerres napoléoniennes.

- 169 -
157

CHAPITRE X

CONCLUSIONS

Dans les pages précédentes une tentative a été faite pour systématiser les
témoignages disponibles et retracer le développement de la construction navale
pendant le XVIIèmesiècle. L'accent a été mis sur la pratique anglaise car une
documentation plus importante est plus aisément accessible que pour la plupart des
autres pays, et non pas parce que les traditions de ces derniers sont moins
significatives. Basé sur des mémoires, des traités, des devis, des dessins, des
maquettes et l'archéologie, un schéma général de développement a été établi qui,
sans surprise, semble avoir été suivi par toutes les traditions de l'Europe du nord
étudiées ici. Sans aucun doute les détails diffèrent, mais le schéma général est
successivement le même. Jusqu'à la fin des années 1670 les navires ont été
construits d'une façon qui a abouti à la réalisation de deux bandes distinctes de bois
continu au niveau de la tournure du bouchain et au niveau du creux du maître-
couple. Normalement, deux allonges par côté ont formé un couple, mais le nombre
pourrait varier conformément à la taille du navire comme illustré par l'Album de
Colbert. Les rapports archéologiques confirment les conclusions avancées. L'épave
du Dartmouth est la mieux publiée des navires dont le naufrage a été étudié et les
vestiges excavés. Pour cette raison, cela a longtemps été l'épave d'évaluation et de
référence pour le XVIIèmesiècle. Les témoignages présentés par celui-ci ont été mal
compris et, donc, ont mené à de fausses interprétations. Martin a supposé qu'il a été
construit avec la technique des cales d'écart. Cela, implique et suggère une
première version d'une membrure double et donc indiquerait que la pratique du
XVIIème siècle n'ait pas différée significativement de la pratique de XVIIIème siècle.

- 170 -
158

On a montré dans cette étude que l'utilisation de cales était une procédure standard
pour réparer les éléments délabrés des éléments de charpente. Les cales et le massif
arrière exclu, les vestiges du Dartmouth ne présentent pas une pratique de
construction spécifique. Les sections sont proches de ce que Deane a inscrit une
décennie et demie après sa construction, et les espaces vides entre ses membrures
sont compatibles avec ceux inscrits sur ses tableaux. Quand ces facteurs sont pris
en considération, il devient clair que dans les restes de la coque, nous avons devant
nous, le chevauchement typique entre des varangues et des allonges, toutes les
indications d'un navire conventionnel du XVIIèmesiècle.

Un jour, au cours de la troisième partie du XVIIèmesiècle, un changement


particulier a eu lieu. Une troisième allonge a été ajoutée (comme indiqué par
Keltridge) et les membrures sont devenues doubles, avec des éléments de charpente
positionnés presque face à face dans chaque couple. Il est tout à fait probable qu'à
cette époque les charpentiers commençaient leur travail en attachant latéralement
les bois de construction dans un couple. La membrure double peut avoir été
présente en Angleterre plus tôt que dans d'autres pays et les charpentiers hollandais
furent probablement les derniers à mettre en place cette technique.

Des navires hollandais ont aussi montré des membrures se chevauchant avec
deux allonges. En raison de leurs méthodes de conception et de construction, les
hollandais ont persisté, construisant des navires de cette façon jusqu'aux environs
de 1725. Pendant les trois premières décennies du XVIIèmesiècle, d'autres nations
occidentales et de l'Europe du nord ont eu des méthodes de construction très
semblables à celles employées aux Pays-Bas. C'est seulement parce que ces nations
achetaient des navires hollandais et parce qu'elles employaient des constructeurs de
Hollande dans leurs contrées respectives.

- 171 -
159

En même temps que l'Angleterre, mais peut-être quelques années plus tard, ils sont
tous passés à la nouvelle méthode de membrure double.

Le plan d'un navire de 70 canons qui dépeint censément un navire du


programme des "30 navires" peut être interprété comme montrant trois allonges
sans espaces libres dans la membrure. Si cela est correct, donc, l'évolution du
doublage des membrures doit avoir eu lieu au milieu des années 1670. La France a
apparemment suivi le progrès légèrement plus tard. Une spécification pour une
frégate légère datée de 1679 et signée par les principaux constructeurs français,
parle de deux allonges et donc de membrures se chevauchant, mais la Belle, perdue
en 1686 et construite deux ou trois ans plus tôt, avait déjà des membrures doubles
de trois allonges par côté. Le modèle du navire de guerre suédois Victoria, de 1683,
est construit avec des membrures doubles, aussi. Les dessins encore existants du
navire de 90 canons danois Dannebroge de 1691, décrivent trois allonges et aucun
espace libre dans les membrures. Seul les Hollandais sont apparemment resté
étrangers au nouveau système, car Van Yk en 1691 décrit toujours la membrure
deux-allonges avec chevauchement. Leur répugnance à accepter la nouvelle
méthode peut être du au fait de leur façon de construire les navires à partir de
proportions, plutôt que de dessins, car leur méthode de construction était la mieux
adaptée à leur méthode de conceptualisation de la forme de la coque.

Comme les Pays-Bas étaient la seule des grandes puissances entièrement


dépendante de l'importation de bois de construction et comme ils étaient ceux qui
persistèrent dans l'ancien "style" de membrure le plus longtemps, il est peu
probable que les manques de matière première aient forcé l'introduction des
membrures doubles. Le témoignage sur les difficultés d'approvisionnement des
ressources lors de la construction capitale des "30 navires" commencés

- 172 -
160

simultanément en Angleterre n'a pas présenté de problème sérieux et insurmontable


à cet égard. Par conséquent, une explication différente doit exister dans le besoin de
conception d'un nouveau modèle de membrure. Les années suivant 1674 étaient
une période d'innovation en Angleterre avec beaucoup de changements et
d'améliorations présentés, certains par le roi lui-même. Encore, que ce ne soit pas
en soi une explication. Même les petits changements comme l'introduction
d'étraves verticales, ont été freinés par les membres du conseil naval ou les officiers
de la marine. Un changement important de la construction aurait du avoir apporté
une résistance beaucoup plus vigoureuse. Les rapports subsistent probablement
dans ce but, mais le journal de l'amirauté ne les mentionne pas ouvertement. Les
changements ont été bien compris et tout le monde a reconnu qu'ils étaient
nécessaires (les seuls membres de la commission de l'amirauté desquels on peut
attendre une compréhension sur la question était le Roi Charles II, le Prince
Rupert, Sir Anthony Deane et Sir John Tippets) ou ils avaient été compris plus tôt
et n'ont pas provoqué l'opposition importante prévisible pour des choses
complètement nouvelles. On a la preuve évidente que ces changements auraient pu
avoir lieu bien plus tôt grâce à deux maquettes des années 1660 et des années 1670,
dont une n'existe plus.

Avant qu'une conclusion finale ne puisse être tirée quant à la raison de


l'introduction de la membrure double, une recherche plus approfondie dans les
archives, et l'examen archéologique de certaines des épaves d'époque ayant une
restauration connue est nécessaire. Cette étude a précisé la date d'apparition des
membrures doubles à la deuxième moitié des années 1670.

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161

NOTES

1 The earlier issues of Marriner's Mirror remain a treasure trove for all those who have interest in the period.
A huge debt is owed to Dr. R. C. Anderson for his contribution to the study of the 17111 century ship.
2 Frank Fox, Great Ships: The Battlejleet of King Charles 11 (London, 1980). For full listing of his works
see the bibliography section.
3 RiffWinfield, The 50-Gun Ship (London, 1997).
4 See the Chapter on Navy Board models for discussion of the models as evidence and the controversy
surrounding them.
5 The best evidence for this is to be found in the Admiralty minutes published in J. Tanner, Descriptive
Catalogue of Naval Documtents in the Pepysian Library, (Navy Records Society, 1903~1923), volume IV.
6 J. D. Davis, Tarpaulins and Gentlemen: The Officers and Men of the Restoration Navy (Oxford, 1991) and
"A Lover of the Sea and Skillful in Shipping": King Charles II and His Navy", Royal Stuart Society
(Huntingdon, 1992); Sari Homstein, Restoration Navy and English Foreign trade 1674~1688 (Aldershott,
1991)
7 Davies, "A Lover of the Sea and Skil/ful in Shipping", p. 1.
8 William Sutherland, The Shipbuilder's Assistant, (London, 1711), p. 40. 9 Ibid., p. 159.
10 William Sutherland, Shipbuilding Unveil 'd (London, 1717), p. 120.
II In a personal conversation on May 27, 2001, Mr. Lavery told me that if he were to do it again, he would not
use three futtocks and believes that she was framed with overlapping timbers. He did not s~cifY whether he
favors a one or two futtock frame.
J Brian Lavery, Susan Constant, 1605 (Annapolis, 1988), p. 68.
13 Brian Lavery, Deane's Doctrine of Naval Architecture, 1670 (London, 1981), p.125.
14 Peter Goodwin, The Charpente and Fitting of the English Man-oj-War, 1650-1850 (Annapolis, 1987), p. 14.
15 In a conversation that I had the pleasure of having with Mr. Goodwin in May 2001, he agreed that the
description I quote is probably inaccurate. He agrees that écart would not have meant letting one piece of
timber into the other, but overlapping it and that the third futtock was not used until the later years of the
century. In addition the copper bolts indeed are not mentioned in contemporary sources.
16 Robin Piercy, personal communication, August, 1999.
17 Colin Martin, "The Dartmouth, a British Frigate Wrecked off Mull, 1690," International Journal of
Nautical Archaeology 7, No. 1 (1978).
18 John Smith, A Sea~grammar, (London, 1627, Amsterdam, 1968 reprint), p.2. 19 Ibid, pp. 2~3.
20 Henry Manwayring, The Seaman's Dictionary (1644, London, 1972 Menston reprint), p.88 21 Ibid., p.44.
22 W. Salisbury, and R. C. Anderson,' ed., A Treatise on Shipbuilding and A Treatise on Rigging Written
About 1620-1625 (London, 1958).
23 Ibid., p. 8.
24 Richard Barker, "A Manuscript on Shipbuilding. circa 1600, Copied by Newton", Mariner's Mirror, vo!.
80, No. 1(1994), pp. 16~29.
25 Ibid, p. 16.
26 Ibid., p. 20.
27 Salisbury, Treatise, p. 2.
28 Ibid., p.2.

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162

29 Barker, A Manuscript, pp.16-17.


30 W. G. Perin, ed., Autobiography of Phineas Pett (London 1917), p. 60.
31 W. Salisbury, "Framing of Ship Models," Mariner's Mirror, vol. 40, (1954) p. 156. 32 Perin,
Autobiography, p. 61.
33 Frank Fox, Distant Storm: The Four Days Battle of 1666 (Rotherfield, 1997), p. 62.
34 RC. Anderson, "Eighty-Gun Three-Deckers," Mariner's Mirror, vol. 4 (1914), pp. 203-206.
35 RC. Anderson, "A Collection of Shipbuilding Contracts," Mariner's Mirror, vol. 41 (1955), pp. 4752.
36 NMM, SPB/8.
37 Lavery, Deane's Doctrine, p.116.
38 PRO, SP 46/136, f. 227. Here is used the version published by Lavery in Deane's Doctrine, p.116119.
39 Letter is given in fun in Frank Fox, "The English Nava] Shipbuilding Programme of ]664," Mariner's
Mirror, vol. 78 (1992), p. 287.
40 Lavery, Deane's Doctrine, p. 29.
41 R. C. Anderson, "The Framing of Models," The Mariner's Mirror, vol. 39 (1953), p. 139.
42 William Baker, "More on the Framing of Models," The Mariners' Mirror, vol. 40 (1954) pp. 80-81. 43 See
Chapter 6 for discussion of her remains.
44 Goodwin, The Charpente and Fitting, pp. 231-233. 45 The original contract is in PRO Adm. 106/3071.
46NMM, AND 31.
47 J. Richard Steffy, persona] communication, spring 1999.
48 Apparently the original scantlings list for these ships has been found in the Public Record Office by Mr.
Richard Endsor. I am indebted to Mr. Lavery for the news and to Dr. La Fevre for kindly confirming the
information in a letter dated July 8, 2001.
49 On Britannia alone more than 108 volumes of correspondence is surviving. In fact so much information has
been uncovered by Dr La Fevre and his colleagues from the Anne Trust that a book on the 30 ships is being
contemplated. I am indebted to Dr. La Fevre for sharing this information with me. 50 NMM, SPB/28.
51 I am obliged to Mr. Lavery for pointing this to me, personal communication, 29 May, 2001. 52 PRO, ADM
106/3070.
53 Winfie]d, 50-Gun Ship, pp. 19,20, 23, 24 for tables of dimensions for fourth rates from the 1660s to 1680s.
54 PRO, ADM 106/3070 and ADM 106/3071 contain a large number of contracts for third, fourth rates of 50
and 60 guns, sixth rates, firesh ips and even ketches. They date from 1689 to 1697.
55 Laird C]owes, History of the Royal Navy, vol. 2, (London, 1901): Battle of Bantry Bay, Barfleur, Beachy
Head orders of battle.
56 PRO, Adm. 106/3071. Excerpts from the contract are published by Lavery in volume IT of Ship Of the
Line (London, 1984).
57 PRO, ADM 106/3071 Devonshire.
58 Letter published in Anderson, "Eighty Gun Three-Deckers", pp. 204-205. 59 John Franklin, Navy Board
Ship Models 1650-1750 (London, 1989), p. 12. 60 For a discussion of Ke]tridge's draughts see next chapter.
61 PRO, ADM 106/3071, Sunderland.
62 PRO, ADM ] 06/3070; ADM 106/3071; NMM SPB/8. 63 NMM, SPB/8.
64 PRO, ADM 106/3071 Norwich.
65 J. Richard Steffy, Wooden Shipbuilding and the Interpretation of Shipwrecks (College Station, 1994),
p.269.
66 Goodwin, Charpente and Fittings, p. 13. 67 NMM, SPB/8.
68 PRO, ADM 106/3070, ADM 106/3071 and NMM, SPB/8.

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163

69 PRO, ADM 106/3071.


70 On contemporary draughts see Chapter IV. 71 PRO, ADM 106/3070 and 106/3071.
72 Ibid.
73 NMM, SPB/8.
74 Lavery, Line of Battle.
75 PRO, ADM 106/3070 and ADM 106/3071. 76 NMM, SPB/8.
77 Ibid
781bid
79 Sutherland, Shipbuilder's Assistant, p. 38. 80 Ibid., p.38.
81 Ibid., p. 40.
82 Ibid. p.44.
83 Ibid., p. 40.
84 Ibid., p. 26.
85 Ibid., p. 26.
86 Brian Lavery, The 30 Ships of 1677, Part Ill: The Two-Deckers, Model Shipwright 35, (1980) pp. 45-
46.
87 Ibid, p. 47.
88 Personal Communication with Mr. J. Richard Steffy. 89 National Maritime Museum Ship Draught Room.
90 Lavery, Ship of the Line, vot. 11.
91 For a more detailed study of her remains see the next chapter. 92 Lavery, Deane's Doctrine, p. 16.
93 A microfilm of the notebook is located at the NMM, but the library staff was unable to locate it in
three days in May, 2001.
94 Fox, Great Ships, p. 193. 95 Personal observations.
96 David Wray, Bomb Vessels: Their Development and Use, Part I, 1682-1700, Model Shipwright 19,
(1977), p. 243.
97 Anderson, "The Framing of Models," p. 139.
98 Baker, "More on the Framing of Models," pp. 80-81.
99 Manwayring, England, 1972 .
100 Anonymous, L 'Album de Colbert (Omega, 1988). 101 Baker, "More on the Framing," pp. 80-81.
102 W. Salisbury, "The Framing of Models," Mariner's Mirror vol. 40, (1954), pp. 156-157. 103 Ibid.
104 See below.
105 Perrin, The Autobiography, pp. 31-32. 106 Ibid., p. 60.
107 Ibid., p. 156.
108 Salisbury, "Framing of Models," pp. 156-157.
109 Robert Latham and Witliam Mathews, eds., The Diary of Samuel Pepys, vot. 3, (London, 1970-
1983),p.149.
110 Ibid., p. 208.
111 Franklin, p. 180. 112 Ibid., pp. 10-11.
113 Grant H. Walker, "The Rogers Collection: Collecting the Dockyard Models," Nautical Research Journal,
vol. 44, No. 2, (1999), p. 86, Plate 16.
114 Franklin, p. 11.
115 Ibid., pp. 143-147.

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164

116 Ibid., p. 70-71.


117 NMM, model number SLR 0405. 118 Franklin, p. 64.
119 Fox, Great Ships, p. 133. 120 Ibid.
121 Franklin, p. Ill. 122 Ibid., p. 143.
123 Ibid., p. 143.
124 Ibid., p. 11.
125 See Chapter III of this study. 126 Franklin, p.12, fig. 7.
127 See Chapter IV of this study. 128 Fox, Great Ships, p. 75-77.
129 Salisbury, "The Framing of Models," p. 157. 130 Fox, Great Ships, p. 76.
131 Franklin, p. 70.
132 For these notes on model SLR 0368 I am indebted to Mr. Lavery who not only kindly arranged for me to
view the model, but also shared with me his views on the dating. Here I have quoted him almost verbatim.
133 Anderson, "The Framing of Models," p. 139. 134 Franklin, p. 150.
13sHenry Culver, Vessels of the Seventeenth Century Ships (New York, 1926).
136 Hobart Holly, "Sparrow-Hawk A Seventeenth century Vessel in Twentieth-Century America," American
Neptune, vo!. 13, (1953), pp. 51- 64.
137 Mr. Jonathan Adams believes it likely that the vessel remains are indeed from the early seventeenth
century. Personal communication.
138 Holly, p. 56.
139 In conversation, Mr. Adams confirmed that no fastenings exist between the futtocks and the floors. 140
Jon Adams, Sea Venture: A Second Interim Report, International Journal of Nautical Archaeology vol. 11,
No. 4, (1985), pp. 333-347.
141 Fox, Distant Storm, p. 355.
142 Colin J. Martin, "The Cromwellian Shipwreck offDuart Point, Mull: an Interim Report", International
Journal of Nautical Archaeology vo!. 24, No. 1, (1995), pp. 15-32.
143 Martin, "The Dartmouth", pp. 29-57.
144 A. Eames, The King's Pinnace, The Swan, The Mariner's Mirror, vol. 47, (1961), pp. 49-55. 145 Colin
Martin, The Duart Point Wreck, Scotish Diver, March, (1995), pp. 36-37.
146 Valerie Fenwick, and Alison Gale, Historic Shipwrecks (Stroud, 1999).
147 Ibid., pp. 99-100.
148 Martin, The Dartmouth, p.46.
149 Ibid., In reality there is plenty of evidence to determine that chock écarts (or also called anchor chocks)
were used by 1689 at the latest. See Chapter III.
150 Ibid., p. 47.
151 Ibid., p. 53. <
152 Sir John Knox Laughton, ed., The Naval Miscellany (Navy Records Society vol. XL, repr. 1984),
~.147
53 Jerome Hall, A Seventeenth-Century Northern European Merchant Shipwreck in Monte Christi Bay,
Dominican Republic, Ph. D. Dissertation, (Texas A&M University, 1996).
154 Ibid., p. 63.
155 Frank Fox, Hired Men-of-War, 1664-1667, The Mariner's Mirror, vol. 84, (1998), p. 14.
156 Edward Bushnelle, The Complete Shipbuilder (London, 1669) In his work he describes the lofting of a
frame and is clear from his text that the frame was to have two futtocks and was to overlap.
157 Hall, p. 75.

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165

158 The tenn "first futtocks" are used in this work, simply because it was used by Hall. No trace of second
futtocks has actually survived on the seabed.
159 Hall, p. 75.
160 Ibid., p. 77.
161 Sheila A. Clifford, An Analysis of the Port Royal Shipwreck and its Role in the Maritime History of
Seventeenth-Century Port Royal, Jamaica, MA thesis, (Texas A&M University, 1993).
162 Clifford, p. 82.
163 Ibid., p. 89.
164 Ibid., p.90.
165 Ibid.. p.90.
166 Ibid., p. 90.
167 Ibid., p. 107.
168 Ibid., p. 97.
169 A. J. Hoving, Nicolaes Witsens Scheeps-bouw-konst Open Gestelt (Franeker, 1997), p. 44. 170 A. J.
Hoving, The Ships of Abel Tasman (Hilversum, 2000), p.56.
171 Fox, Great Ships, and Mirror of Empire, Praise of Ships and the Sea. m Fox, Distant Thunder, Four Days
Battle. p. 40.
I73 A. J. Hoving, "171b. century Dutch Shipbuilding," Model Shipwright vol. 58, p.
174 Rolfe Hoeckel, Risse von Schiffen des 16 und 17 Jahrhunderts (Bielefeld, 1977).
m Richard Unger, Dutch Shipbuilding before 1800 (Amsterdam, 1978). Bjom Landstrom, Regalskeppet Vasa
(Stockholm, 1980). For comments on these two works see Hoving "A 17th - century Dutch Pinas",
International Journal of Nautical Archaeology, vol. 17, No. 3 (1988), p. 217.
176 Hennan Keting, De Prins Willem (Bussum, 1979).
177 Hoving, The Ships, p. 102.
178 Heinrich Winter, Der Hallaendischer Zweidecker von 1660/1670 (Rostock, 1985). 179 G. C. Dik, De Zeven
Provincien (Franeker, 1993).
180 For a full list of Mr. Hoving's publications used in this study see the bibliography. 181 Hoving, "A 171b._
century Dutch 134-footpinas", Part 1, p. 216.
182 Comelisz van Yk., Nederlansche Scheepsbouwkonst Opengestelt (Amsterdam 1697), pp. 69-70.
183 Nicolaes Witsen, Architectura Navalis et Regimen Nauticum (Amsterdam, 1691), p. 110 and van Yk
~. 53.
84 Witsen, p. 104.
185 Ibid.,p. 94, The actual statement is that two ships built by two men would not be quite the same. 186 Ibid.,
p. 111.
187 Ibid., p. 105
)88 Ibid., p. 169.
)89 Ibid., p. 169 and associated plate.
190 Hoving, Nicolaes Witsens ... , pp. 102-103. ]91 Witsen, p. 170 and associated plate.
J92 .
Ibid., p. 170.
]93 Hoving,Nicolaes Witsens ... , pp. 102-103.
194 Hoving, "Away from the Draughting Board," Model Shpiwright, vol. 69 (1989), pp. 43-51.
195 Yet, see the photo sequences in Hoving's The Ships of A bel Tasman. The figures seem more logical.
pp·58-64.
196 Witsen, p. 106-107.
197 Ibid., p. I 12.
198/bid.
199 Ibid.,.
200 Fox., Distant Storm .... 201 Ibid., p. 135.
202 Ibid., p. 137.
203 Lavery, Deane's Doctrine, scantlings table.

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166

204 Ibid., p. 138.


205 Hoving, "A 17th -<:entury Dutch Pinas", p. 216 and also van Yk pp. 69-70. 206 van Yk, p. 53.
207 Ibid., p. 55.
208 Ibid., p. 60.
209 Ibid, p. 68.
210 Ibid, p. 68.
211 Ibid, p. 69.
212 Ibid., p. 76.
213 Ibid, p. 78.
214 Ibid, p. 78.
215 Ibid, p. 78.
216 Ibid., p. 78.
217 Ibid, p. 79.
218 Ibid., p. 147.
219 Ibid., p. 149.
220 Ibid., p. 153.
221 Hoving, "A 17th -<:entury Dutch Pinaas, " p. 216. 222 van Yk, p. 70.
223 Ibid, p. 73.
224 Anonymous, L 'Album de Colbert, notes, p. 1. 22S L 'Album de Colbert, notes p. 2.
226 L 'Album de Colbert, notes, p. 3.
227 Fox, Great Ships, p. 123
228 The document is transcribed in Jean Boudriot, The History o/the French Frigate (Rotherfield 1993), An
English translation., p. 57.
229 Personal observations at the Conservation Laboratory at Texas A&M University.
230 Norman C. Owen, "HMS Hazardous wrecked 1706. Pre-disturbance Survey Report 1987," International
Journal Nauitcal Archaeology 17 No. 4, (1988), p. 285.
231 Ibid, p. 291.
232 Nonnan C. Owen, "Hazardous 1990-1991 Interim Report," International Journal of Nautical
Archaeology 20, No. 4, (1991), pp. 325-334.
233 Ibid, p. 327.
234 Ibid, p. 327.
235 Ibid, p. 328.
236 Sutherland, The Ship-Builder's Assistant.
237 The pattern on the Kiten wreck was double frames with two singles in between. The length on which this
pattern was observed was more than 2 meters.
238 Personal communication with Taras Pevny. His work on the drawings of La Belle ha,> led him to believe
that diagonals were becoming important in the design process, moving away from the traditional arc-based
methods.
239 R. C. Anderson, "Danish Shipbuilding," Mariner's Mirror, vol. 18, (1932), p. 81.
240 Ibid ,
241 The Danish foot was about 10% longer than the English, so the described ship was a substantial vessel.
242 Anderson, "Danish Shipbuilding," p. 84.
243 Anderson, "Dutch Shipbuilding, 1664," Mariner's Mirror, Vol. 14, (1928), pp. 158-161. 244 Anderson,
"Danish Shipbuilding," p.85.
245 Carl OlofCederlund, "The Wasa as product of Dutch Shipbuilding" in Ame Bang-Andersen, Basil
Greenhill and Egil Harald Grude ed., The North Sea A Highway of Economic and Cultura, Exchange
(London, 1985).
246 Ibid, pp. 20-21, fig. 11.

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247 Christian Lemee, A Ship-Cemetery on the site of the B&W, p. 4, unpublished paper.
248 Christian Lemee, Renaessanceskibe pa Christianshavn (Saertyk fra Nationalmuseets Arbejdsmark 1997),
p. 16, fig. 6.
249 Lemee, A Ship-Cemetery, p. 4.
250 Lemee, Renaessanceskibe, pp. 20-21, fig. 11. 251 Ibid., p.16, fig. 6.
252 Hoving, The Ships of Abel Tasman, p. 58. 253 Lemee, A Ship-Cemetery, p. 5.
2541bid, p. 26, fig.16.
255 Lemee, A Ship-Cemetery et supra, p. 1. 256 Danske Orlogs/dbbe.
257 Cederlund, "The Wasa ... ", etc., p. 172. 258 Fox, Great Ships, p. 132.
259 Ibid
260 Ibid, p. 133. 261 Ibid, p. 133.
262 Hoving, "Away from the Drawing Board".
263 Sutherland, William, The Ship-Builder 's Assistant (London, 1711). 264 Fox, Frank, Great Ships, p. 133.
265 Frederick af Chapman, Architectura Navalis Mercatoria (Stockholm, 1769).
266 Sutherland, Ship-building Unveil' d, (London, 1717), scantlings tables, pp. 36-37.
267 Admiralty Journal, 5 May 1677. J. R. Tanner, ed., A Descriptive Catalog of the Naval Manuscripts in the
Pepysian Library at Magdalene College, Cambridge, vol. IV, (Navy Records Society, 1922,) p. 415. 268 Ibid.,
p. xii.
269 Ibid., p. 434.
270 Ibid., June 9, 1677, p. 442. 27l Ibid., July 10, 1677, p. 471. 272 Ibid., July 10, 1677, p. 472. 273 Ibid., July
14, 1677, p. 475.
274 Sarri Homstein, Restoration Navy and English Foreign Trade 1674-1688 (Alderschott, 1991),
chapter I.
275 Samuel Pepys, Memoirs of the Royal Navy (London, 1688), p. 61. 276 Tanner, August 3, 1678, p. 595.
277 Ibid., April 19, 1676, p. 662.
278 Ibid., July 3, 1674, p. 54,.
279 Ibid., February 6, 1675-76, p. 276. 280 Ibid., May 12, 1677, p. 422.
281 Ibid., May 12, 1677, p. 423.
282 Ibid., July 7, 1677, p. 468.
283. . Ibid., July 21, 1677, p. 481.
284 For the attempts to force the Royal will on the recalcitrant Pepys on this subject see pages 423,428,
430,463,487 in Tanner, Catalogue, vol. IV.
285 For a general overview of the Third Anglo-Dutch War see the introduction to R.C. Anderson ed., Journals
and Narratives of the Third Dutch War (Navy Records Society, 1946).
286 Sutherland, The Shipbuilders Assistant, p. 43.
287 Peter Goodwin, personal communication.
288 David Howard, The Voyage of the Armada (New York, 1982), p. 209.

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Cornwall, 3rd rate
Norfolke, 3rd rate
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Mary Galley, 4th rate
Penzance, 6th rate
Swan 6th rate
Faulcon, 6th rate
Griffin, fireship
Phaeton, fireship
Vulcan, fireship
Fox, fireship
Phenix, fireship
Unidentified, ketch
Scarborough and Harpe, ketches

ADM 106/3071, Contracts for:

Spragge's Contract for four frigates


Hind, ketch
Biddeford, 6th rate
Seahorse, 6th rate
Harwich and Pendennis, 4th rates
Sunderland, 4th rate
Unidentified 60-gun ship, 4th rate
Norwich, 4th rate

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3 unidentified 50-gun 4th rates


2 unidentified 60-gun 4th rates
Devonshire, 3rd rate

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VITA

NAME Kroum Nickolaev Batchvarov

ADDRESS 4200 Scotland #58


Houston, TX 77007
kroum@earthlink.net

EDUCATION

1997-2002 M.A. in Anthropology, Nautical Archaeology Program,


Texas A&M University, College Station, TX.
RA., Political Science, Park College, Parkville, MO
1990-1994

PROFESSIONAL EXPERIENCE

1999-present Project Director, Bulgarian Black Sea Project, Bulgaria:


Kiten Shipwreck Excavation

1999 Archaeologist, Tektas Burnu Shipwreck Excavation,


Turkey

1998 Archaeologist, Lake Champlain Maritime Museum,


Vermont. Projects include:
Barn Rock Harbour canal barge recording Pipe
Stove Wreck, survey and hull recording

PUBLICATIONS

An Archaeological trip to Bulgaria, INA Quarterly 26.3, 1999

The First Black Sea Shipwreck Excavation: Kiten, Bulgaria, INA Quarterly 28.1,2001

Тaйните на един потьнал кораб, Αзъукu, volume 9.3, 2001, pp. 22-23. Courrier du
Ministre de la Culture de Bulgarie. Avec Kalin Porozhanov et Kalin Dimitrov

"Урдовиза 2000" Съвместна Бълrapo-Aмериканска Подводна Археологическа


Ексneдиция, Archaeological Surveys and Excavations 1999-2000, Proceedings, of the XL
National Archaeological Conference, Sofia, 2001. Avec Kalin Porozhanov, Hristina Angelova
et Kalin Dimitrov

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