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Analyse des pesticides dans

l’eau
1ère partie : Prélèvement
L’analyse de pesticides dans les différentes matrices de l’environnement
nécessite l’utilisation de techniques et de méthodologies d’analyse variées et
puissantes, pour trois raisons primordiales :

- Les produits phytosanitaires appartiennent à des classes chimiques très


diverses (larges gammes de propriétés physico-chimiques) ;
- Les produits phytosanitaires sont présents à l’état de traces dans des matrices
complexes ;
- Les produits phytosanitaires sont soumis à des limitations de plus en plus
strictes qui nécessitent des méthodologies de traitement des échantillons de plus
en plus sensibles.

L’analyse des résidus de pesticides dans les eaux comprend différentes étapes
dont chacune a une incidence déterminante sur le résultat. Chacune des étapes
doit faire l’objet d’attentions particulières s’exprimant sous formes de
procédures et consignes spécifiques

Ces étapes sont les suivantes :

• L’échantillonnage ;
• Le stockage et le transport des échantillons d’eau ;
• L’extraction des substances contenues dans l’eau ;
• La concentration des extraits avant analyse ;
• La purification des extraits concentrés ;
• Les analyses des extraits par méthodes séparatives associées à des
techniques de détection ;
• L’identification et la quantification des substances détectées

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I. Echantillonnage :
L’eau est souvent considérée comme un milieu simple. C’est en fait le
lieu d’échanges complexes. Il faut donc, dès le prélèvement sur le terrain
et jusqu’au laboratoire d’analyses, respecter des règles strictes de
conditionnement, conservation, stockage et transport afin de limiter toute
évolution de l’échantillon. Cette étape d’échantillonnage doit être
considérée comme une étape fondamentale de l’analyse car de la qualité
de cette opération dépendent la représentativité et la fiabilité du résultat
final.

Il faut prendre également en considération :

✓ La sélection des lieux de prélèvement (positionnement


géographique dans un bassin, position amont/aval d’un exutoire...),
✓ La fréquence et les périodes d’échantillonnage,
✓ La finalisation des protocoles d’échantillonnage représentent des
conditions préalables à la mise en place d’une stratégie de
surveillance
✓ Le choix des points de prélèvement, les heures de prélèvement, les
facteurs environnementaux (évènement pluvieux, température,
ensoleillement....)
✓ Le conditionnement des échantillons.

Dans le cas des analyses de pesticides, les résultats seront très différents
selon que l’on procèdera dans le cas des eaux superficielles notamment,
au prélèvement :

• Du film de surface (les concentrations de certaines substances


peuvent être plus élevées d’un facteur 10000 dans ce film) ;
• En profondeur : ce mode d’échantillonnage est approprié à l’étude
des interfaces sédiment/eau ;
• En mode lié au débit ;
• De façon aléatoire ;
• En automatique avec choix de la fréquence des prélèvements et des
volumes échantillonnés.

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Toutes les eaux, notamment les eaux superficielles, résiduaires et
souterraines, sont susceptibles de se modifier par suite de réactions
physiques, chimiques ou biologiques, ayant lieu entre l’instant de
prélèvement et le début de l’analyse. Ces réactions sont de nature
d’intensité telle que si des précautions ne sont pas prises pendant
l’échantillonnage, le transport et le stockage (pour des éléments
spécifiques), les concentrations déterminées peuvent être différentes de ce
qu’elles étaient au moment du prélèvement.
L’importance de ces modifications dépend de la nature chimique et
biologique de l’échantillon, de sa température, de son exposition à la
lumière, de la nature du récipient qui le contient, du temps entre le
prélèvement et le début de l’analyse et des conditions auquel il est soumis
(agitation par exemple).

Les principaux risques d'erreur sont liés aux facteurs suivants :

✓ Le matériel de prélèvement et le flaconnage (nature des matériaux,


entretien) ;
✓ le mode d’échantillonnage (choix du mode d’échantillonnage) ;
✓ la formation du personnel affecté aux prélèvements ;
✓ les prétraitements de l’échantillon (filtration, ajout de
conservateurs, ajout de solvants...).
De l’examen de l’ensemble de ces faits, on doit considérer que l’analyse
commence dès le prélèvement, opération unique et non renouvelable.

1. Échantillonnage ponctuel :
Un échantillonnage ponctuel ou un échantillonnage empirique est un
échantillonnage qui n’utilise pas les techniques statistiques pour prendre une
décision sur le lot contrôlé.

a. Flaconnage:

Compte tenu de la multiplicité des phénomènes qui peuvent affecter le résultat


dès la mise en flacon de l’échantillon (adsorption, hydrolyse, photolyse,
volatilisation biodégradation) outre le matériel de prélèvement, une attention
particulière devra être portée à la nature du flaconnage et à sa propreté, aux
opérations de prétraitement, au temps et aux conditions de son transport.
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Le flaconnage utilisé pour l’échantillonnage doit être impérativement fourni par
le laboratoire d’analyses qui aura procède aux nettoyages préalables des flacons
et au contrôle de la qualité de ce nettoyage selon des procédures particulières,
évitant ainsi tout risque de contamination.

La propreté des parois du flaconnage doit être garantie par un lavage rigoureux,
le matériau des bouchons qui sera au contact du solvant d’extraction doit être
choisi avec soin car de sa nature peuvent surgir des problèmes de contamination
des extraits pour analyses pouvant générer ainsi des erreurs importantes.

D’une façon générale, le flaconnage en verre, de préférence inactinique pour


éviter les phénomènes de photolyse, est utilisé. Une exception connue pour les
herbicides tels diquat, paraquat, glyphosate, AMPA (métabolite du glyphosate),
glufosinate, aminotriazole pour lesquels soit le PVC, soit le verre désactive par
silanisation est prescrit, ceci en raison de l’adsorption irréversible de ces
composés sur les groupes silanols du verre.

b. Conservation :

Modifications possibles de l'échantillon : Le fait de prélever un échantillon d'eau


et de le séparer de son milieu naturel entraîne des modifications plus ou moins
importantes selon les paramètres. Certains peuvent être considérés comme
stables à l'échelle de temps à laquelle on travaille, mais d'autres varient très
rapidement : la température, la conductivité, le pH et les gaz dissous, enfin les
nitrates et les sulfates.

Chaque espèce ionique participe à la conductivité totale d'une solution. Aussi,


toute modification des équilibres chimiques, donc des proportions relatives des
éléments dissous, entraîne un changement de conductivité.

Exemple : Le CO2 en solution tend d'autant plus à s'échapper quand la


température de l'eau est plus élevée. Un départ de CO2 peut provoquer la
précipitation de carbonate, qui à son tour modifie le pH. Les nitrates et les
sulfates peuvent être réduits par l'activité bactérienne.

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Durant le stockage des échantillons, diverses réactions chimiques peuvent
se développer, engendrant des pertes ou transformations de certaines
substances.

On peut citer par exemple les phénomènes suivants :

✓ Les réactions d’oxydation : une réaction chimique au cours de


laquelle se produit un transfert d'électrons (exp oxydation du 4,6-
dinitro-ortho-crésol (pesticide) par des agents oxydants (agents de
désinfection des eaux)).
✓ L’hydrolyse : réaction chimique au cours de laquelle il y a rupture
de liaison d'une molécule par l'eau. (exp : hydrolyse des pesticides
organophosphorés, des carbamates)
✓ la photolyse : réaction chimique dans laquelle un composé
chimique est décomposé par la lumière (exp des carbamates :
transformation du carbofuran en 1-Naphtol).
✓ les réactions de précipitation avec des sels métalliques ;
✓ la volatilisation des substances à bas point d’ébullition ;
✓ l’adsorption de certaines substances sur les matières en suspension
ou sur les parois du verre du flaconnage ;
✓ la biodégradation en cas de charge bactérienne importante et
acclimatée : pesticides organophosphorés.

Une variation de température entraîne une modification des constantes


d'équilibres des éléments en suspension. Toutefois, une température basse
(environ 4°C) bloque l'évolution des réactions.

La mise en contact avec l'air et la décompression sont également responsable de


changements au sein de la solution.

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c. Mesures in situ
La température, le pH, la conductivité, l'alcalinité et l'oxygène dissous doivent
être mesurés in situ. En effet, ces paramètres sont très sensibles aux conditions
de milieu et susceptible de varier dans des proportions importantes s'ils ne sont
pas mesurés sur site.

L'idéal est d'effectuer les mesures en continu (sauf l'alcalinité qui se mesure par
titration), en plein courant s'il s'agit d'une rivière, ou dans un seau placé au
refoulement de la pompe s'il s'agit d'eau souterraine. Il faut veiller à ne pas aérer
l'eau (risque de précipitation d'éléments en solution, oxygénation).

d. Identification

Les échantillons prélevés doivent être clairement identifiés. Chaque flacon doit
porter une étiquette indiquant :

• Nom de l’opérateur qui a effectué les prélèvements ;


• Site du prélèvement ;
• Lieu et la nature ;
• Mode de prélèvement (ponctuel ou moyen 24 heures, proportionnel au débit
ou au temps) ;
• Date et heure (du début de prélèvement) et durée ;
• Des informations sur une éventuelle technique de conservation de
l’échantillon.

Émettre un bulletin d’accompagnement de ces échantillons pour préciser les


analyses à réaliser par le laboratoire. Y noter le volume (un débit, un nombre de
bennes…) ayant transité sur la station durant la période de prélèvement.

e. Le stockage et le transport des échantillons d’eau :


Une simple réfrigération de l’échantillon et un stockage à l’abri de la
lumière suffisent, dans la plupart des cas à préserver l’échantillon durant
son transport au laboratoire. Il convient de maintenir l’échantillon à une
température inférieure à celle observée lors du prélèvement. Le stockage à
une température inférieure à -20°C permet d’augmenter la durée de
conservation.

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Les matières en suspension, les sédiments, les algues et autres micro-
organismes peuvent être éliminés soit au moment du prélèvement soit
immédiatement après, par filtration des échantillons sur membrane
filtrante. La filtration n’est pas applicable si la membrane est susceptible
de retenir des composés d’intérêt ou si l’analyse doit être faire sur la
totalité de l’échantillon d’eaux (phase dissoute et phase particulaire).

Quelques exemples de mode de conditionnement des échantillons pour


analyse de phytosanitaires avec des informations sur les durées de
conservation sont présentés dans le tableau 2 (selon NF EN ISO 5667-3,
juin 2004).

Le Tableau suivant montre la nature des flaconnages, méthodes et temps de


conservation pour les analyses de substances phytosanitaires.

Pour les prélèvements en milieu naturel, il faut respecter un certain nombre de


précautions :
• eau de rivière : éviter les zones mortes sur le bord ; prélever en pleine
eau, dans le courant, en utilisant tous moyens appropriés (bottes, bateau,
pont…) ; prendre si possible des échantillons à différents moments de
l’année pour tenir compte des variations saisonnières (crues, étiages…) ;

• eau de lac (naturel ou artificiel) : utiliser des flacons lestés spéciaux pour
prélèvements en profondeur ; en cas de tour de prise d’eau à entrées
multiples, prélever à différents niveaux pour établir le profil physico-
chimique et algologique du lac ou de la retenue et guider l’exploitant dans

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le choix du niveau de prise ; renouveler là aussi les campagnes de
prélèvements à différentes saisons pour mettre en évidence les périodes de
stratification ou de mise en circulation, les tendances vers
l’eutrophisation… ;

• eau souterraine (puits ou forage) : Un prélèvement effectué sur une eau


ayant longtemps stagné n'est pas représentatif de la nappe. En effet, l'eau a
subi l'influence du matériau de tubage et des éléments extérieurs
(pollution, pluie..). Pour obtenir un échantillon moyen de l'horizon capté,
il est nécessaire de pomper suffisamment longtemps pour renouveler l'eau
contenue dans le tubage / cuvelage.

• robinet (forage, usine, réseau) : laisser couler l’eau jusqu’à


renouvellement complet du volume du piquage et stabilisation de la
qualité de l’eau ; un robinet d’échantillonnage d’eau brute ou d’eau en
cours de traitement doit si possible couler en continu.

2. Échantillonnage passif ou intégratif

Contrairement à l’échantillonnage ponctuel, l’échantillonnage passif va


être déployé sur une période de temps de quelques jours à quelques mois.
L’échantillonneur est constitué d’une phase réceptrice sur laquelle vont
s’accumuler les composés. C’est un outil intégratif a été développé afin de
pouvoir détecter des concentrations plus faibles dans le milieu pour
surveiller le milieu et évaluer les risques.
L’échantillonneur est introduit dans le milieu naturel (rivière, lac …) et le
flux de composés du milieu vers le support récepteur est libre.
À l’issue de la période d’accumulation dans le milieu naturel,
l’échantillonneur est retiré du milieu et envoyé au laboratoire où il devra
subir une phase d’extraction puis d’analyse pour pouvoir quantifier les
composés.
L’échantillonnage « passif » est une technique basée sur les mécanismes
de diffusion des polluants du milieu aquatique vers la phase réceptrice du
dispositif. Cette phase réceptrice peut être un liquide comme dans les
(SPMD) semipermeable membrane devices ou un adsorbant microporeux
(POCIS) Polar Organic Compounds Integrative Samplers.

Les échantillonneurs passifs adaptés à l’analyse des pesticides dans les


milieux aqueux sont les POCIS, CHEMCATCHER et SPMD:
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➢ POCIS (Polar organic Compound Integrative Sampler) concentre les
pesticides hydrophiles, il est constitué d’une membrane solide réceptrice
entre deux membranes microporeuses protectrices qui laissent passer les
composés chimiques. L'échantillonneur POCIS imite l'exposition respiratoire
d'organismes vivant dans le milieu aquatique et peut permettre de
comprendre les contaminants biodisponibles présents dans le système.

➢ SPMD (Semi Permeable Membrane Dispersion) un dispositif de


prélèvement passif utilisé pour surveiller les traces de composés organiques
avec un log Kow > 3. Il est constitué d’une membrane tubulaire remplie d’un
lipide, la trioléine (lipide existant chez les organismes aquatiques).

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➢ CHEMCATCHER : est utilisé pour mesurer les concentrations moyennes
pondérées dans le temps (TWA) ou d'équilibre d'une large gamme de
polluants dans l'eau. Cela permet à l'utilisateur final d'obtenir une image plus
représentative des produits chimiques pouvant être présents dans
l'environnement aquatique. Il est constitué d’une membrane solide réceptrice
et d’une membrane de diffusion. Il existe un modèle pour les composés
apolaires et un modèle pour les composés polaires selon le type de
membrane.

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