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Les événements post-panafricains dans le Hoggar et la plateforme saharienne.

H. Haddoum*, D. Kettouche* et A. Khaldi.**

*FSTGAT/USTHB, Alger, haddoum_hamid@yahoo.fr

*Kettouche D. FSTGAT/USTHB, Alger.

**Khaldi A.COMENA/CRND, Alger.

Préambule : Comme pour le document intitulé « Monographie sur le Hoggar occidental »


paru sur ResearchGate, et mis à la disposition du grand public, ce document est le fruit de
longs travaux de terrain dans le Sahara algérien et en partie nigérien qu’il est dommage de ne
pas partager avec le public. Les observations et les interprétations susciteront, nous l’espérons
une autre façon d’étudier la géologie du Sahara algérien notamment, et en particulier le
Hoggar, et le sortiront des sentiers battus et des travaux très théoriques basées sur les mêmes
schémas répétés et invérifiables sur le terrain. Le lecteur est averti que ces deux documents ne
sont que des travaux préliminaires que nous avons décidé de mettre à la disposition du public,
pour lui permettre d’avoir une autre vision de la géologie du Hoggar dont l’histoire reste figée
à la période précambrienne. De ce fait, la bibliographie citée dans ces deux textes n’est pas
exhaustive, et constitue le fil d’Ariane pour ceux qui s’intéressent à la géologie de ces
contrées, et ne constitue, en aucun cas un ostracisme vis-à-vis des très nombreux auteurs, qui
m’ont précédé et qui n’ont pas été cités.

Résumé:

Dans le Hoggar, les informations concernant l’histoire géologique sont presqu’entièrement


confinées à la période précambrienne, et dans une moindre mesure, à la période méso-
cénozoïque (volcanisme). Par ailleurs, dans la «plateforme saharienne» entourant le bouclier
du Hoggar, les formations paléozoïques ont subi une déformation parfois intense, en relation
avec l’orogenèse hercynienne (Moscovien, Carbonifère terminal ; Haddoum et al. 2001,
Haddoum, 2009), matérialisée notamment par la réactivation des grandes failles du
substratum précambrien; ces failles sont issues des événements précambriens, plus
particulièrement panafricains. Si dans la plateforme saharienne il est aisé de retracer les
différentes étapes de l’histoire géologique paléozoïque et méso-cénozoïque, dans le Hoggar la
rareté des dépôts post-panafricains, rareté liée au soulèvement du bouclier amorcée au moins
dés le Crétacé, complique l’étude de son histoire post-panafricaine et la recherche
d’arguments probants concernant notamment l’histoire tectonique.

Le Paléozoïque et le Crétacé se seraient déposés sur tout le Hoggar dans des bassins hérités
de l’histoire panafricaine. Les failles sub-méridiennes ont influencé les aires de dépôts; des
reliques sont encore visibles dans le Hoggar, notamment au SO de Timgaouine (Tin Rherhor
et Timissao, Hoggar occidental) pour le Paléozoïque ; dans le Hoggar central Sérouanout) et
le Tanezrouft (Hoggar occidental) pour le Crétacé. Une grande partie des dépôts paléozoïques
et méso-cénozoïques de la plateforme saharienne proviennent de l’érosion et de la
cratonisation du domaine targui limitrophe. Il est évident que l’architecture héritée de
l’événement panafricain influencera grandement l’histoire géodynamique à partir du
Paléozoïque par la formation, grâce aux rejeux successifs des failles lithosphériques, de
bassins sédimentaires subsidents (graben) et de zones hautes (horst). Il en est ainsi des bassins
et des môles sahariens algériens qui entourent le Hoggar, séparés les uns des autres par les
continuités vers le Nord des failles panafricaines du Hoggar (bassins de l’Ahnet, du Mouydir,
d’Illizi, de Tin Séririne, de Tafassasset, môle d’Idjerane-M’zab, môle d’Amguid…).
L’histoire paléozoïque de ces môles et bassins porte l’empreinte de l’événement hercynien
(Moscovien, Haddoum et al. 2001, Haddoum 2009), lequel événement a été à l’origine de
l’édification de la chaîne des Appalaches-Mauritanides, et dont les effets se font ressentir
jusque dans l’Est saharien notamment dans le plateau de Tin Séririne (SE du Hoggar), à
Djanet et dans le NE du Niger. Il est clair que durant cet événement, les failles héritées de
l’histoire panafricaine ont été réactivées, et que les minéralisations encaissées, notamment
uranifères, ont été reconcentrées.

Toutes les structures tectoniques hercyniennes décrites dans les bassins paléozoïques
sahariens qui ceinturent le Hoggar témoignent d’une déformation transpressive due à une
poussée globalement E-O ; elles correspondent à une déformation intra-continentale
(Haddoum et al. 2001 ; Haddoum, 2009), qui est la répercussion lointaine de l’édification de
la chaîne de montagne hercynienne beaucoup plus à l’Ouest (Mauritanides-Appalaches). Ces
structures sont le plus souvent concentrées aux abords des grandes failles subméridiennes
elles-mêmes réactivées ; elles semblent être le produit de déplacements de blocs au cours de la
poussée E-O ; ces blocs sont les mêmes que ceux qui ont été crées et mobilisés au cours de
l’orogenèse panafricaine, pratiquement suivant la même direction de compression. Nous
avons donc ici, et probablement dans tout le Hoggar et son pourtour, un bel exemple de
permanence de la direction de déformation, les compartiments se séparant et s’affrontant
selon les mêmes directions durant les événements panafricain, hercynien et probablement
alpin, mais avec des intensités de déformation différentes.

Les effets de la dislocation des grandes plaques amorcées dés le Trias-Jurassique, et de la


séparation de l’Afrique du reste des futurs continents, ont eu des conséquences directes dans
le Hoggar, de façon moins spectaculaire en terme de tectonique, mais beaucoup plus marqués
du point de vue magmatique.

Il reste à déterminer si les failles, généralement E-O et subméridiennes (qui sont réactivées
dans la couverture méso-cénozoïque), observées tout autour du Hoggar, sont la conséquence
du soulèvement (failles compensatrices), ou alors, du fait de leur antériorité (failles
panafricaines, ou probablement plus anciennes), auraient facilité le soulèvement (failles
profondes).

1- Histoire paléozoïque.

Pour bien illustrer l’histoire paléozoïque du Hoggar, notamment le rôle de l’événement


hercynien, nous allons nous concentrer beaucoup plus sur le Hoggar oriental, car, c’est dans
cette partie que les formations du Paléozoïque et du Méso-Cénozoïque affleurent le plus.
En effet, cet événement se manifeste par le déplacement de grands panneaux passifs le long
des grandes failles subméridiennes panafricaines, provoquant des déformations souvent
limitées à ces failles. Dans le bassin paléozoïque de Tin Séririne, dont la genèse et l’histoire
sédimentaire seraient liées au fonctionnement de ces failles qui le bordent, la déformation se
répercute à l’intérieur du bassin, témoignant d’un serrage relativement important : ce bassin
est pris en écharpe entre deux grands domaines rigides et cratonisés, le compartiment de
Laouni à l’Ouest et le môle d’Issalane-Aïr à l’Est.
Ces failles ont continué à assumer un rôle déterminant dans le contrôle de la sédimentation
dans le bassin paléozoïque de Tin Séririne, dont certaines le traversent en son milieu ; elles
seront par ailleurs réactivées au cours de l’événement hercynien, notamment en décro-
chevauchement résultant d’un serrage du bassin. Les histoires complexes panafricaines et
dans une moindre mesure hercynienne de cette partie du Hoggar centro-oriental témoignent
du caractère particulier de cette région, probablement prise en tenaille entre deux grands
compartiments, un compartiment que Liégeois appelle le LATEA à l’Ouest (Liégeois et al.,
2003), et un autre compartiment à l’Est constitué par le môle d’Issalane-Aïr (poinçonnement).

Dans le terrane de Djanet, à l’extrémité nord orientale du Hoggar on observe une succession
de horsts, formés d’un socle panafricain et post-panafricain, et de grabens à couverture
sédimentaire paléozoïque, orientés NNO-SSE. Ces structures ont été acquises au cours d’un
épisode distensif postérieur à l’Ordovicien et antérieur à l’événement hercynien (Carbonifère
terminal= Moscovien, Haddoum et al. 2001), au cours duquel les grandes failles ductiles
NNO-SSE panafricaines ont été réactivées en failles normales. Plus tard, les failles délimitant
les horsts et les grabens rejouent souvent en failles inverses à vergence SO, provoquant le
chevauchement du socle sur sa couverture cambro-ordovicienne. L’histoire tectono-
sédimentaire post-panafricaine peut être résumée comme suit :

-- Une couverture paléozoïque se dépose en discordance sur les granites et les séries
panafricaines ; elle est représentée par des dépôts continentaux du Cambro-Ordovicien, et
elle est formée presque essentiellement de grès blanchâtres et ocres, mais également de
conglomérats et de micro-conglomérats, avec des passées très rares d’argiles gréseuses. Les
formations paléozoïques postérieures au Cambro-Ordovicien n’ont pas été décrites dans la
région, il faut se déplacer plus au sud, dans le bassin de Tin Sérinrine pour les observer.

Ces formations ont subi les effets de l’orogenèse hercynienne qui se manifeste de façon
spectaculaire :

- Dans le bassin paléozoïque de Tin Séririne et dans le bassin panafricain de Sérouanout,


plus au Nord, les structures tectoniques observées caractérisent une transpression ; ces
structures se concentrent surtout au niveau des failles panafricaines réactivées, mais
également, dans une moindre mesure, à l’intérieur du bassin de Tin Séririne, qui est
parfois le siège de plissements ouverts et de décollements ;
- des lenticulations à toutes les échelles (parfois de l’ordre de la dizaine de kilomètres),
touchant aussi bien le socle panafricain et post-panafricain, que la couverture
paléozoïque ; dans cette dernière, les failles et les diaclases à l’intérieur des lentilles sont
sigmoïdales ;
- des failles inverses dans les zones les plus contractées, notamment dans les queues des
lenticulations, et sur leurs bordures (lentilles de granites), entraînant souvent le
chevauchement du socle panafricain sur sa couverture paléozoïque (Tissalatine, Djanet) ;
- des glissements « bancs sur bancs » de grande ampleur, notamment entre les pélites et les
quartzites des séries panafricaines, et qui donnent des jeux en failles inverses (Adrar
Edjédjé, Djanet) ;
- des failles à composante décrochante importante se terminant très souvent en « queue de
cheval ».
- Dans le Hoggar occidental, le Paléozoïque de Timissao est complètement dilacéré par le
rejeu de la faille d’Adrar, qui sépare le terrane d’Iskel de celui de Tirek.

2- Histoire méso-cénozoïque
Dans le Hoggar et au pourtour, dans la couverture paléozoïque et méso-cénozoïque, le Crétacé
est marqué par des manifestations hydrothermales, des failles normales dans la région de
l’Ahnet (plateforme saharienne occidentale, au nord du Hoggar) et surtout par un grand
linéament NE-SO (parallèle à celui de l’Oued Amded, qui sépare les plateaux du Tidikelt et
de Tadmaït des Tassilis (Haddoum et al, 2001 ; Haddoum, 2009). Dans l’Ahnet, les grandes
failles subméridiennes panafricaines montrent des rejeux modestes en failles normales (faille
de Ers Oum Ellil, Haddoum, 2009) ; elles s’accompagnent de manifestations hydrothermales
riches en minéralisations, notamment en hydroxydes de fer. Toujours dans la région de
l’Ahnet, des failles normales E-O affectent le Tertiaire, dont la plus spectaculaire est située à
Gour Bou Khreis (Haddoum, 2009).

Pour mieux caractériser l’histoire méso-cénozoïque du Hoggar, la région de Sérouanout-


Tirhitine est la plus appropriée, car c’est la seule région qui « conserve » encore des reliques,
parfois importantes, de formations méso-cénozoïques.

2-1- Le Crétacé de Sérouanout

Cette région est caractérisée par la présence d’une série volcano-sédimentaire panafricaine,
de caractère flyschoïde, encore appelée « Pharusien », conservée dans des résidus de bassins
délimités par des failles généralement sub-méridiennes (d’où le nom de « bassin de
Sérouanout pour la région) ; elle est également marquée par la présence de granito-gneiss
éburnéens (2000 ma). Ce bassin est par ailleurs le siège d’une très forte densité de fractures
notamment sub-méridiennes, issues de la diverticulations (« queue de cheval ») des grandes
failles qui individualisent le bassin paléozoïque de Tin Séririne, plus au Sud (les failles du
6°15’, du 7° et du 7°30’).
Sur un socle précambrien complètement arasé, se déposent des sédiments essentiellement
gréseux à stratifications obliques (dépôts fluviatiles), avec des passées argilo-gréseuses et de
rares niveaux de carbonates ; ces formations ont été attribuées au continental intercalaire
(Crétacé inférieur) par Bordet (1955), et au passage Jurassique-Crétacé par Lefranc et Guiraud
(1990). Le Paléozoïque est absent, et les coulées volcaniques scellent les dépôts du Crétacé.

Photos montrant les affleurements de grès du Crétacé, et détail montrant les stratifications
obliques.

Ces formations sédimentaires mésozoïques ont été affectées par une tectonique cassante
omniprésente, dominée par des failles à composante horizontale dominante (décrochements),
parfois par des failles inverses et des décollements, notamment par rapport au substratum
précambrien. Cette tectonique, que l’on attribue aux effets lointains de l’orogenèse alpine qui
opère dans le Nord de l’Afrique, réactive les grands décrochements issus de l’orogenèse
panafricaine (Précambrien terminal), eux-mêmes réactivés au cours de l’événement hercynien
dans le bassin de Tin Séririne plus au Sud (Haddoum et al. 2013) ; ces failles servent
également de conduits pour le magmatisme basaltique cénozoïque à actuel, très présent dans
la région.

Les formations sédimentaires du Mésozoïque de Sérouanout ont été affectées par une
multitude de fractures dont les directions dominantes sont N-S, ENE-OSO et NO-SE. Ces
failles, notamment celles orientées à N170°, correspondent à des réactivations des failles
panafricaines ou plus anciennes. Ces dernières sont systématiquement décalées en dextre par
les failles orientées N070°, qui sont elles-mêmes recoupées en dextre par les failles orientées
à N130°.

a- Les failles sub-méridiennes

Elles forment un « chevelu » de failles courbes qui se connectent à la faille lithosphérique


panafricaine du 7°30’, lequel sépare le bassin de Tin Séririne du terrane d’Isalane plus à l’Est.
Là où le Mésozoïque est présent, ces failles le recoupent systématiquement, accompagnées de
silicifications qui transforme les grès en quartzites, et de minéralisations riches en hydroxydes
de fer. Le jeu dextre de ces failles est attesté par des marqueurs tectoniques variés
(lenticulations, sigmoïdes, crochons, cannelures et stries sur les plans de failles). Comme pour
les autres directions de failles, les appareils volcaniques sont alignés suivant cette direction.

Photo montrant une faille inverse (à gauche) et une faille normale (à droite) ; vue vers le
Nord.
Au niveau du point GPS 007°26’11.38 E-24°12’54.21 N, une faille orientée à N170 recoupe
le Crétacé et le décale en sénestre ; son miroir de plusieurs mètres de hauteur, porte des stries
et des cannelures (F ; 170-85 W pitch 10N). Cette faille, dans son prolongement sud, est
soulignée par un alignement de cônes volcaniques.

Photos montrant un miroir de faille orienté N.170, et son prolongement vers le Sud marqué
par un alignement de cônes volcaniques.

b-Les failles sub-latitudinales


Les failles orientées ENE-OSO, parallèles au grand linéament de l’oued Amded-Tekouiat-
Tamanrasset, forment un réseau parfois dense. Lorsque les miroirs sont apparents, ils sont
tapissés de quartz portant des stries déterminant un jeu à forte composante verticale (point
GPS 007°23’12.28 E- 24°20’19.45 N). L’une des failles de cette station a pour coordonnées :
N110-75N pitch 70W, la stratification a pour coordonnées 025-10W. Cette faille montre un
jeu en faille inverse compatible avec une poussée N-S.

Ces failles sont également marquées par une suite de lentilles métriques de grès silicifiés, très
durs ; dans le prolongement de ces failles se trouve une succession de cônes volcaniques
(point GPS 007°23’05’’ E- 24°31’00.86N).
Une autre faille orientée à N070 à jeu inverse est accompagnée par une faille de même
direction, mais normale, elle semble compenser le jeu de la faille inverse (point GPS
007°26’56.28 E-24°23’13.43 N).

Photos montrant des lenticulations dans les grès du Crétacé (orientées à 070) ; lentilles
découpées par un réseau de fractures à N130.

b- Failles de direction NO-SE

Les formations gréseuses sont également recoupées par des failles de direction N130 ; ces
grès sont transformés en quartzites rougeâtre et blanchâtre. A cet endroit, ces failles sont
décalées par un autre réseau orienté à N070 (points GPS 24°38’68 E- 007°21’98 N et
007°35’11.02 E-24°35’27.03). Ce réseau de failles semble être le plus tardif, car il recoupe les
autres réseaux, généralement en dextre. Au niveau du point GPS 007°32’04.29 E-
24°38’53.45 N, la stratification dans le Crétacé est redressée, parfois verticalisée.

c- Les décollements

Là où les alternances grès-argiles gréseuses sont présentes, les interlits peuvent être utilisés
comme surface de décollement (glissements bancs sur bancs) vers le Sud. Ces discontinuités
sont souvent empruntées par des circulations hydrothermales, notamment associées au
volcanisme cénozoïque et actuel, matérialisées par des « placages » de produits sulfureux. Ces
décollements peuvent être également soulignés par des lenticulations (point GPS 007°21’.15.5
E- 24°38’53 N).

Au niveau
Photos du point
montrant GPS 007°37’49.53
un décollement E- banc,
à la base d’un 24°42’13.14N, les formations
et le décollement gréseuses
du Crétacé sur du Crétacé
le socle (Pr4).
montrent un décollement par rapport au socle granito-gneissique éburnéen (photo) ; ce
décollement a été induit par la faille N170 qui limite le Crétacé à l’Est, et qui l’entraine sur
plusieurs mètres (crochons) (faire coupe carnet).
2-2 -L’Oligo-Miocène de Tirhitine :

La région de Tirhitine (Idelès-Tazrouk, Hoggar cetral) est constituée de formations d’âges et


de lithologies variés , allant du Protérozoïque moyen et supérieur (Pr2 et Pr3), avec des gneiss
des amphibolites des migmatites et des marbres, déformés et métamorphisés dans le faciès des
amphibolites, aux séries volcano-sédimentaires très faiblement métamorphisées du
Protérozoïque terminal (Pr4). Ces dernières sont « coincées » dans une lanière limitée par
deux grandes failles NNO-SSE qui aboutissent toutes les deux dans la région d’Idelès ; ces
failles ont été réactivées, elles sont soulignées par des brèches consolidées qui reprennent les
mylonites panafricaines ductiles, suggérant ainsi des rejeux hercyniens. L’une de ces failles
montre un rejeu en faille inverse (point GPS 023° 24’44.75 N – 006° 07’34.44 E).

Photo montrant une zone de


fractures cataclasiques affectant les
formations gneissiques du Pr2 (route
de Tazrouk).

Dans la région au SO d’Idelès, sur la route de Tazrouk, des formations rapportées à l’Oligo-
Miocène (Rognon, 1967) surmontent les ensembles appartenant au Précambrien, notamment
des granites ; elles débutent par des conglomérats remaniant en particulier des granites, elles
passent aux arkoses et à des alternances argiles gréseuses-grès à stratifications obliques (point
GPS 006° 02’ 02.43 E – 023° 30’ 46.45 N, altitude 2025 m) ; elles sont épaisses d’environ 50
mètres. Les formations oligo-miocènes sont elles-mêmes surmontées par les coulées
basaltiques. La région traversée par le grand linéament de l’Oued Amded-Tekouiat-
Tamanrasset est caractérisée par un grand développement de dykes, notamment rhyolitiques,
appartenant vraisemblablement au cycle panafricain ; ils montrent deux directions : NE-SO et
NO-SE, montrant le caractère ancien de cette grande dislocation.

Vue vers le Nord montrant un massif


de granite de type « Taourirt »
recoupant les formations
métamorphiques écaillées du Pr2
(région de Mertoutek).

Non loin du village historique de Mertoutek, au lieu dit Dehine, un massif de granite de type
Taourirt (post-panafricain, environ 520 ma) recoupe les unités métamorphiques charriées du
Protérozoïque moyen-supérieur ; ces deux ensembles sont recouverts par une épaisse série
sédimentaire gréseuse (environ 30 mètres) notée formations superficielles sur les cartes des
auteurs précédents ; cette série se trouve « perchée » à plus de 1240 mètres d’altitude (point
GPS 005° 35’ 40.22 E – 024° 17’ 26.27 N). Aussi bien les formations rapportées à l’Oligo-
Miocène, que celles appelées superficielles, nécessitent une étude sédimentologique détaillée
pour connaitre leur origine et leurs milieux de dépôt : se sont-elles déposées dans des lacs de
montagnes, sont elles les résidus de bassins érodés et soulevés ?

Le « bassin » dans lequel affleure l’Oligo-Miocène est encaissé dans une zone entourée de
coulées volcaniques et semble orienté selon la direction N080 (point GPS 006° 03’ 44.09 E-
023° 30’ 39.77 N). Le pendage de la stratification dans les alternances argilo-gréseuses est
d’environ 10°, par endroits il va jusqu’à 20° (110°-20°SO) ; ces formations ont subi un
basculement assez important, probablement dû au volcanisme ( ?) ; il s’accompagne de
glissement bancs-sur-bancs, entre les grès et les argiles ; on observe également des micro-
failles normales subhorizontales, mais également l’omniprésence de diaclases orientées à
N060.
Sur la route de Tazrouk, vue vers le
Sud montrant les affleurements
d’Oligo-Miocène ; ils reposent en
discordance sur le socle
protérozoïque et sont recouverts
par les laves basaltiques.

Détail montrant les « dragées »


de quartz et les « obliques »
dans la partie basale arkosique
et conglomératique du Crétacé.

Dans la partie axiale du bassin, une faille normale de direction N080 et de plusieurs centaines
de mètres de longueur, montre un rejet estimé à au moins deux mètres faisant basculer la
partie sud-ouest (point GPS 006° 03’54.73 E – 023° 30’ 34.65 N) ; des failles de taille
relativement plus petite ont été décrite dans l’Oligo-Miocène, certaines portant des stries sur
des plans de miroirs (failles normales 080°-60°NO ; pitch70°NO ; point GPS 006° 04’ 44.70
E – 023° 30’ 35.31 N).
Photo montrant les argiles
varvées du Crétacé affectées
d’un réseau de micro-failles
normales orientées à 060.

Détail montrant des stries de


failles normales (060°-60° NO-
pitch 70°NO).

I- Les laves basaltiques.

Les conditions d’affleurement des roches volcaniques rendent l’accès difficile, nécessitant
plus de temps pour pouvoir y accéder à pied.
Photo montrant les colonnes et les
coussins de basaltes.

Néanmoins, un réseau régulier de fractures a été décrit, il est orienté à N.140° ; par contre, les
appareils volcaniques observés sont presque systématiquement situés sur des failles ou
intersections de failles panafricaines ; ils peuvent être également centrés sur des dykes de
rhyolites ou autres (toujours appartenant au cycle panafricain), notamment orientés selon NE-
SO et NO-SE. Il ne nous a pas été possible d’observer la moindre preuve de la réactivation
des grandes failles panafricaines dans les trapps basaltiques.

Vue vers l’Ouest montrant un réseau


régulier de fractures orientées N.140°
affectant les laves basaltiques.

3- Discussion-interprétation
Dans le Hoggar central (Sérouanout et Tirhitine), les différentes étapes ayant marqué cette
période depuis la fin du Panafricain (Cambrien basal) peuvent être résumées comme suit :

- Sur un socle précambrien complètement arasé, se déposent des sédiments


essentiellement gréseux, continentaux, avec des passées argileuses et des carbonates
(rare) ???;
- Le Paléozoïque est absent, car probablement décapé avant le dépôt du Méso-
Cénozoïque ;
- Les dépôts du Mésozoïque de Sérouanout sont conservés dans les « résidus » d’un
bassin contrôlé par des failles panafricaines, probablement réactivées en failles
normales au début du Mésozoïque ;
- Le bassin de Sérouanout se trouve dans le prolongement du bassin paléozoïque de Tin
Séririne et de celui du Tanezrouft (contrôlé par le grand linéament de l’oued Amded-
Tekouiat-Tamanrasset) ;
- Nous pouvons suggérer l’existence de grands sillons N-S et ENE-OSO contrôlés par
des failles (subsidentes), dont le « croisement » serait situé dans la région de
Sérouanout ;
- Ces sillons n’ont pas eu de relation avec les mers téthysienne et atlantique qui
entouraient le bouclier targui à cette époque ;
- L’influence alpine se matérialise surtout par le rejeu des différentes familles de failles,
notamment celles orientées NNO-SSE (N170), qui sont généralement dextres : la
compression serait dirigée suivant la direction NNE-SSO ; ces failles recoupent les
dépôts du Mésozoïque ;

- Elles sont accompagnées de circulations hydrothermales qui provoquent une


silicification très importante et la mise en place des hydroxydes ;
- Cette étape provoque également la formation d’ondulations d’axe E-O, à grand rayon
de courbure dans les dépôts du Mésozoïque ;
- Dans l’étape suivante, la direction de compression alpine aurait subi une réorientation
vers le NNO-SSE, dont la conséquence serait le rejeu et la création de failles NE-SO
(linéament de l’oued Amded-Tekouiat-Tamanrasset) ;
- Ces failles décalent en dextre les accidents sub-méridiens réactivés au cours de la
première étape ; comme pour ces dernières, elles sont accompagnées d’une
silicification intense et de minéralisations hydroxydées ;
- La dernière étape voit l’apparition et la réactivation des failles orientées NO-SE, qui
décalent les deux réseaux précédents, elles sont également dextres ;
- A Tirhitine (Ideles et Tazrouk), plus à l’Ouest, les dépôts molassiques et argilo-
gréseux rapportés à l’Oligo-Miocène (Bordet et al. 1955) se mettent en place sur le
socle précambrien : le Mésozoïque est absent dans cette région : a-t-il été décapé ? non
dépôt ?

D’autre part, le volcanisme, dans le bassin de Sérouanout, scelle les dépôts du


Mésozoïque, et recouvre souvent ceux de l’Oligo-Miocèce de Tirhitine ; dans le bassin de
Sérouanout, les contacts entre les dépôts du Mésozoïque et les roches magmatique se font
souvent par failles.

Photo montrant les grès du Crétacé recoupés par les épanchements volcaniques (vue
vers le Nord).

Ailleurs, dans le bassin de Tafassasset et le Ténéré (Niger), le Crétacé est caractérisé par
une distension, qui a permis aux mers thétysienne et atlantique de « s’engouffrer » très
profondément à l’intérieur de l’Afrique, et tout autour du bouclier targui. Cette période se
matérialise par une très forte accumulation de sédiments (plusieurs milliers de mètres).

D’autre part, la mise en place du magmatisme a généré une anomalie géothermique locale
et la circulation de fluides hydrothermaux ; les séries sédimentaires du Mésozoïque ont été
localement affectées par l’augmentation de la température, ce qui a provoqué une
silicification très importante.

Par ailleurs, Dautria et Lesquer (1989) ont été les premiers à retracer une évolution
géodynamique finie crétacée à post-crétacée pour cette partie du Hoggar; ainsi, pour ces
auteurs, la fin du Mésozoïque est marquée par la réactivation des failles panafricaines N-S
et NO-SE, dans un contexte distensif lié à l’ouverture de l’Atlantique sud. Ceci a eu pour
effet la création d’un système de graben orienté NNO-SSE, prolongement du bassin du
Ténéré. D’autre part, l’anomalie positive à l’aplomb du bassin de Sérouanout, siège d’un
amincissement crustal, aurait provoqué un « effondrement » de cette même croûte, d’où
les fortes épaisseurs de Méso-Cénozoïque, et leur conservation.
Tous ces faits (notamment l’ouverture de bassins) qui se sont déroulés tout autour du Hoggar
ne peuvent pas ne pas toucher le reste du Hoggar, notamment la région étudiée, les traces
ayant été effacées ou presque par le soulèvement du Hoggar. Ce soulèvement, ou du moins la
cratonisation, a probablement opéré bien avant le Crétacé, permettant à ce dernier d’être en
contact direct sur les formations magmatiques et métamorphiques du Protérozoïque.

D’autre part, dans l’Adriane, massif volcanique dominant la ville de Tamanrasset et dans le
trajet du linéament de l’Oued Amded, nous avons décrit des failles qui affectent les basaltes
(Benyahia et al. 2005). En effet, ces formations d’âge cénozoïque à quaternaire, surplombant
une grande zone de cisaillement panafricaine, sont recoupées par un réseau de failles orientées
à N045°-N050° ; des stries horizontales ont été décrites, le jeu semble être dextre.

Le soulèvement du Hoggar, amorcé dés le Crétacé inférieur, provoque une érosion intense qui
affecte notamment les formations du Paléozoïque, la mise à nu des terrains plus anciens, le
rejeu en distension des failles sub-méridiennes ; au même moment on note la création du fossé
du Tanezrouft dans le Hoggar occidental (Bourmatte, 1977) et celui de Ténéré-Tinhert
(Dautria et Lesquer, 1989) à remplissage de grès du Continental intercalaire (Crétacé moyen-
supérieur).

Guiraud et Maurin (1991) ont été les premiers à mettre en évidence deux étapes dans la
genèse des bassins et leurs relations avec les ouvertures péri-africaines. Mais avant cela, ces
mêmes auteurs citent les travaux effectués dans les années soixante par l’ORSTOM et des
compagnies pétrolières ; ces derniers sont les premiers à parler de rifts d’âge crétacé inférieur
dans les bassins de l’Afrique centrale et sur la marge de l’Atlantique sud (ref. in Guiraud et
Maurin, 1991). Ces mêmes auteurs ont démontré que ces rifts correspondaient en fait à des
fossés qui s’étendent depuis la Tunisie jusqu’au Kenya, et dont les ruptures se seraient
produites au niveau des grandes fractures panafricaines qui ont été réactivées par les
mouvements relatifs de séparation des futures plaques africaine et sud-américaine (Guiraud et
Maurin, 1992 ; Guiraud et al, 2005).

Le bassin du Niger oriental, par exemple, est constitué de fossés dont l’orientation varie
de NO-SE (fossé de Tefidet) à NNO-SSE (fossés du Ténéré) ; les épaisseurs des
sédiments crétacés varient de 2000 à 3000 mètres dans le Ténéré septentrional et Téfidet,
à plus de 7000 mètres dans le Ténéré méridional (Fairhead et al. 1989).
A ces fossés, que l’on peut classer dans la catégorie des rifts avortés, sont associés une
intense activité magmatique et un hydrothermalisme, le rifting continental actif ou passif
étant relié à un amincissement crustal et à une décompression, en relation avec les effets
lointains générés par les forces aux limites des plaques ou aux cellules de convection à la
base de la lithosphère (Schmeling, 2010). En effet, les rifts continentaux ont toujours
attiré l’attention durant plusieurs décennies, car ils sont souvent accompagnés d’un
magmatisme et par des occurrences en hydrocarbures. Les séries sédimentaires du
Crétacé ont été localement affectées par l’augmentation de la température ; cette
augmentation est un facteur important pour la maturation de la matière organique
éventuellement présente dans ces sédiments. En effet, la mise en place des roches
magmatiques par le biais de failles profondes accompagnées d’un flux thermique ainsi
que l’élévation du gradient géothermique ont pour conséquence l’accélération de la
maturation de la matière organique (Mattoussi Kort et al, 2009).

L’histoire de ces rifts est associée à celle de l’ouverture de l’Atlantique que résume le
tableau ci-dessous ; l’évolution des bassins de cette partie de l’Afrique s’est faite en
plusieurs étapes marquées par des environnements sédimentaires variés au cours du
Crétacé et du Cénozoïque.
En conclusion, les dépôts méso-cénozoïques de Sérouanout-Tirhitine font partie d’un
ensemble qui regroupe toute la partie centrale de l’Afrique, donc son histoire y est intimement
liée, et en relation avec l’ouverture de l’Atlantique sud et des effets lointains induits par
l’événement alpin.

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