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LE MAGAZINE PRATIQUE DE L’AÉRONAUTIQUE

Prise en main ULM


282 km/h : Shark,
les dents du ciel p. 45
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Dossier Vol à voile


Classes FAI,
comment
s’y retrouver ? p. 27
LE MAGAZINE PRATIQUE DE L’AÉRONAUTIQUE -

Dossier

!
p. 19

Cet été,
objectif Espace aérien :
mode d’emploi,

sud-ouest
aérotourisme,
bons plans,
circuits...
Toulouse - Muret - Agen - Auch - La Montagne Noire...

Sécurité Théorie Nous avons testé Fiche occasion


Cône d’hélice, Longueur de Préparer sa Chipmunk,
la beauté piste, ce qu’il navigation avec agile comme
du diable ! p. 14 faut savoir p. 10 Flymap Win p. 44 un écureuil ! p. 39

L 13158 - 171 - F: 5,50 


N u m é r o 1 7 1 - j u i l l e t 2 0 1 2 - 5 , 5 0 e u r o s
Belg. - GDL : 6,50  - Suisse : 12,20 CHF - Antilles, Guyane, Réunion : 6,70  - Maroc : 65 MA - Port. Cont. : 7,40 
Prise en main
Le descriptif détaillé par Miguel Horville d’un aéronef qui mérite votre attention.

Ulm biplaCe CompoSite

Shark : les dents du ciel !


Avec un record FAI de 282 km/h sur circuit fermé de 100 km, l’aéronef slovaque a fait une entrée fracassante
sur le marché ULM. Le Shark est-il un gros poisson exclusivement réservé aux pilotes d’exception ?

En plus d’une esthétique


réussie, le Shark bénéficie
Contact de performances de haute
eUrl barberini-aViation volée ; en témoigne ce
Chemin de Chantelly, record du monde en circuit
83170 Brignoles fermé de 100 km validé par
Eric Barberin de Barberini la FAI : 282 km/h !
06 61 95 29 61
eric.debarberin@gmail.com
www.barberini-aviation.fr

L
e Shark est l’œuvre de l’ingénieur tchèque Jaro un vérin pour la roue avant et un autre pour le train
Dostal. C’est en Slovaquie, chez Shark-Aero, que principal ; des trappes de compartiments accompa-
l’engin est construit. Côté distribution, c’est Éric gnent leur escamotage.
Barberin de Barberini qui en a la charge pour la Sous le capot trône un Rotax 912 de 100 ch monté
France. Basé dans le Var, cet ancien pilote militaire se sur un bâti maison sans interface annulaire. Le mon-
déplace volontiers pour les démonstrations. tage est sans originalité, à l’exception d’un volet de
Remerciements à… ventilation réglable en vol. Pour la France, seule l’hé-
herVé de brUS pour la Le concept impose le design. Esthé- lice Duc tripale Swirl Inconel est proposée.
réalisation de la photo de tiquement, le Shark est une réussite incontestable ; Le parachute est monté derrière la cloison pare-
couverture de ce numéro. équilibre des volumes, courbes élégantes… Avec des feu, chaque occupant disposant d’une poignée d’ex-
aérateurs du capot inférieur rappelant les ouïes d’un traction facilement accessible. Le Shark d’essai est
squale et une dérive à la forme suggestive, le design équipé d’une radio, d’un transpondeur ø57 mm, et
de l’aéronef est en parfaite adéquation avec sa déno- d’un GPS qui portent sa masse déclarée à 305 kg (avec
mination commerciale. De plus, le soin porté à sa parachute). Caractéristiques
fabrication ne peut être à aucun endroit remis en SharK-aero SharK 912 UlS
question, jusque dans la décoration, à la fois sobre et Un cockpit de chasseur. La verrière Données constructeur
distinguée, offrant un état de surface parfait. s’ouvre latéralement à droite ; elle est retenue par un Envergure (m) : 7,90
L’aéronef est entièrement réalisé en composite vérin hydraulique puissant et reçoit un pontet de Longueur (m) : 6,70
carbone avec une cellule de survie renforcée en fibres rigidification en son centre. On monte sur l’aile Hauteur (m) : 2,20
aramides. Les ailes et l’empennage sont rapidement gauche afin d’accéder aux emplacements du tan- Masse à vide
démontables. Les ailerons s’étendent jusqu’aux extré- dem. Dès lors, on découvre un cockpit élégant, (sans parachute, kg) : 280
Aérateurs en guise d’ouïes, mités et comportent un bec d’équilibrage. Les volets large de 700 mm et faisant la part belle aux com- Masse maxi (kg) : 472,50
dérive suggestive, ailes fowler à commande électrique couvrent 60 % de l’en- posites bruts. Les baquets sont adroitement garnis Surface alaire (m2) : 9,50
semi-elliptiques… Le Shark vergure ; leur déploiement est incrémental (0°, 20°, d’une sellerie bi-ton. Une fois en place, on règle Réservoir (l) : 2 x 50
porte bien son nom ! 30° et 40°). On apprécie la propreté aérodynamique l’assise au moyen d’un bouton agissant sur un
poussée (commandes de vérin à gaz à la manière des fauteuils de bureau.
gouvernes carénées, ajus- De part et d’autre, les accoudoirs coordonnés dis-
tements, affleurements…). simulent de petites boîtes à gants. Le pilote profite
Chaque aile intègre un en supplément d’un logement dans la planche de
réservoir structurel de 50 l. bord. Un coffre pouvant recevoir 25 kg de bagages
Les trains sont rentrants : est situé dans le dos du siège arrière. Il est acces-

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sible depuis le cockpit ou courtes) ne permet pas d’exploiter le potentiel


par une trappe situé sur moteur, lequel entre en sur-régime dès qu’on
le côté gauche du fuse- ouvre les gaz en grand. Reste que franchir la barre
lage. Chaque place est des 250 km/h en un temps aussi bref est déjà
équipée de deux buses saisissant ! Le triple record du monde de vitesse
d’aération et d’une fenê- établi en décembre 2011 et validé par la FAI, avec
tre coulissante de type notamment 282 km/h sur circuit fermé de 100 km,
planeur. Seule la place montre que les performances sont bien au rendez-
avant bénéficie de l’inté- vous.
Ambiance « F1 » avec gralité des commandes. Des afficheurs Dynon Avec 104 dB à 4 000 tr/ mn et 107 dB à Le renfort de verrière est
les baquets carbone extra Skyview (EFIS+EMS+MFD) équipent les deux 5 000 tr/ mn relevés à hauteur d’oreille, et en dépit placé trop près du passager
ICON A5 tableaux de bord. À droite, deux joysticks latéraux
« slim ». Les garnitures sont de résonances persistantes, le confort acoustique et risque de causer des
minces, mais toutefois ergonomiques s’opposent aux commandes de gaz. est jugé acceptable. Ce qui l’est moins, c’est la forte blessures en cas d’accident.
confortables et d’une rare On nage en pleine ambiance Top Gun avec l’envie odeur de gaz (mal) brûlés, phénomène que L’usine travaille sur sa
élégance. Le cockpit brut d’activer la post-combustion d’un geste résolu et connaissent bien les propriétaires de 912 (égale- ré-implantation.
de carbone-aramide offre d’en découdre… ment de Jabiru). Un tra-
une finition sans défaut. Une fois installés à bord, les occupants bénéfi- vail sur ce point est néces-
cient d’un espace confortable, le passager jouissant saire.
d’une bonne « hauteur sous plafond », bien qu’étant
assis en léger surplomb. S’ensuit une excellente Pour s’amuser ?
visibilité vers l’extérieur. Petite critique concernant En vol, le joystick latéral
le pontet de la verrière, trop proche du passager. s’apparente à une manette
En cas de crash, cette proximité pourrait causer de jeu vidéo. Si d’aven-
des lésions à la face et au corps. L’usine travaille ture vous le lâchez en
à son repositionnement. virage, le retour au neutre
est instantané, entraînant
Record de vitesse ! Durant la chauffe du le Shark dans un ballotement de diablotin sur res-
moteur, l’émission sonore s’ajoute à quelques vibra- sort. D’abord surprenant, ce comportement devient
tions. Nous verrons en vol que les cloisons creuses carrément jouissif dès lors qu’on a compris les
font caisse de résonance, notamment dans la version possibilités de cet ULM qui n’est pas du genre
ULM dépourvue de garnitures. engourdi. Outre le plaisir de piloter une machine La planche de bord (en
Le roulage ne pose aucun problème : les palon- aussi nerveuse et dynamique, on jouit également place avant) est
niers sont doux et les freins puissants. On vire sur de sa stabilité. Paradoxe ? Non, parfait équilibre. principalement occupée par
l’aire d’attente en moins de deux envergures. Décol- Je me prends donc au jeu et enchaîne des manœu- un afficheur livrant les
lage : volets au premier cran, le Shark effectue sa vres rapides avec délice, bien sûr dans la limite de paramètres de vol. L’espace
rotation vers 85 km/h et quitte le sol d’Étampes en la Va. Autre caractéristique, le Shark se guide au est toutefois suffisant pour
200 m environ. Immédiatement, l’impression de puis- millimètre sans comportement induit indésirable. conserver une boîte à cartes
sance prédomine à bord. L’hélice Duc réglée petit Ainsi, on conjugue les axes aux palonniers jusqu’à et des instruments de
pas nous entraîne dans une montée initiale à 150-160 km/h, après quoi la coordination se fait secours. Radio 8,33 et
Une porte fermant à clé 1 000 ft/mn à 160 km/h pour 5 000 tr/mn affichés d’elle-même. Plus la vitesse augmente, plus les transpondeur mode-S sont
donne accès au coffre à (en lisse et trains rentrés). Augmentant davantage la commandes durcissent, ce qui évite les mouve- montés de série.
bagages. Il est également pente, la Vz passe à 900 ft/mn pour 130 km/h. Cette
possible d’y accéder par phase de pilotage nécessite une forte compensation
l’intérieur du cockpit. aux palonniers. Les conditions du jour font état d’une
La masse maximale est température de 24°C, accompagnée de turbulences
fixée à 15 kg en duo et et vent de travers de 10-15 kt.
25 kg en solo. Vient le temps de vérifier l’étalonnage du
badin : à 185 km/h indiqués pour 3 800 tr/mn, le
GPS donne 173 km/h. Pour 222 km/h (4 500 tr/mn),
le GPS indique 210 km/h. Quand l’instrument de
bord marque 240 km/h à 5 000 tr, le chrono répond
231. À 5 500 tr/ mn, le premier instrument indique
268 que le GPS ramène à 253 km/h. Ce sera notre
vitesse max du jour, sachant que les conditions ne
se prêtent pas à une prise d’élan suffisante à l’éta-
blissement d’une Vmax absolue, et surtout que le
réglage de l’hélice (choisi pour s’extraire de pistes

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ments brusques L’exception (presque) accessible.


amplifiés par les G. Le Le Shark est exceptionnel… J’avais employé le Performances
trim, qu’on trouve sur même qualificatif à propos du Prime l’an passé, SharK-aero SharK 912 UlS
les deux manches, est mais pas pour les mêmes raisons (lire note de Données constructeur
très précis. Finale- marge). Cette fois, l’exceptionnel réside dans la Vno (km/h) : 250
ment, après seule- maîtrise du domaine de vol. En effet, ce cham- Vs0
ment quelques minu- pion de vitesse tient correctement les allures bas- (à 472,5 kg, km/h) : 650
tes à ses commandes, ses et sort des phases critiques avec brio. Excep- Vne (km/h) : 330
une conclusion s’im- tionnel également par son dynamisme, sa Va (km/h) : 160
pose : le Shark est maniabilité, sa précision, sa stabilité et sa neutra- Fact. de charge (G) : +4/-2
facile à piloter. N’en- lité : toutes les caractéristiques qu’on recherche Passage des 15 m (m) : 250
tendez pas « donné à pour piloter finement sans se crisper au manche. Vent de travers
tout le monde », car L’ergonomie du poste de pilotage et la visibilité démontré (km/h) : 36
certaines phases de y participent activement, y compris en place
pilotage nécessiteront arrière, et même pour gérer l’atterrissage. Excep- Ci-dessous : le train
Le Shark fait preuve un peu d’habitude, si ce n’est de formation, comme tionnel par son design – bien que ce critère sub- principal se referme vers
d’excellentes l’aire de décélération peu commune dans le monde jectif est toujours sujet à débat –, le Shark l’est le centre du Shark ;
caractéristiques de vol : ULM ; comprenez plutôt « sans difficulté aussi par son autonomie, puisqu’en configuration le déploiement prend une
maniabilité, stabilité et majeure ». « normale », il croise à 250 km/h, dans la limite douzaine de secondes.
dynamisme. Même aux L’exploration des basses vitesses va encore de la Vno, à environ 5 000 tr/mn (selon réglage En bas : la fourche
basses vitesses, il continue donner lieu à de bonnes ondes… D’abord en lisse d’hélice), soit une distance franchissable de plus rétractable assure un
d’étonner par sa neutralité. et tout réduit, le badin descend à 90 km/h, manche ou moins 1 300 km. À condition, bien sûr, de guidage correct et permet
Une réussite ! mollissant. Puis à 86 km/h, l’avertisseur de décro- partir avec les pleins, ce qui ne semble pas léga- le demi-tour en moins de
chage retentit. On continue manche en arrière. lement possible en duo. deux envergures.
Vers 75 km/h, le Shark est pris d’un léger buffeting Il reste selon moi
annonçant une abattée franche et symétrique. Avec quelques défauts à
Shark vs BS Prime les volets, le décrochage a lieu vers 70 km/h. gommer pour aboutir
Pour avoir eu le privilège de « Hors norme », direz-vous ? C’est sans compter sur à l’ULM ultime qu’on
les essayer, j’ai pu comparer la botte secrète d’Éric, qui m’enjoint de remettre est en droit d’atten-
le Shark et le BlackShape les gaz sans rendre la main… ce qui a pour consé- dre au regard du prix
Prime, deux ULM de quence d’envoyer le variomètre dans l’arc positif de vente fixé à
caractère. (toujours badin en berne), et de propulser le Shark 140 000  (mai 2012) :
• Le premier prend et son équipage dans les hautes sphères ! Petit pas, déport du renfort de
l’avantage en terme de certes, mais quand même ! verrière, élimination
vivacité (notamment en des gaz d’échappe-
roulis), de précision et de Atterrissage d’un ULM « normal ». ment dans l’habitacle,
stabilité aux basses vitesses. Capable d’un taux de chute de -750 ft/mn en lisse amélioration de l’iso-
Le décrochage est à 120 km/h (rappelons qu’il s’agit d’une vitesse lation acoustique, mise en place d’un avertisseur
nettement mieux géré. Les d’équilibre stabilisée), le Shark montre un couple de trains rentrés…
phases de transition à la piqueur lors de la sortie des volets. Avec deux Reste à répondre à la question : faut-il être un
rotation et au posé des crans et le train sorti, ce taux passe alors à - 800 ft/ pilote d’exception pour prendre les commandes
roues sont également plus mn pour 110 km/h. Une glissade réalisée à d’un tel appareil ? En toute objectivité : non, pas
franches avec le Shark. 170 km/h me permet d’accrocher - 1 800 ft/mn ; d’exception. Certes, il n’est pas à la portée d’un
• Le BlackShape m’a paru des valeurs inutiles pour accéder aux pistes encla- pilote débutant, ni d’un moustachu jamais sorti
plus confortable, moins vées, mais qui peuvent s’avérer utiles pour viser de son Skyranger ! Il faut une culture aéronauti-
bruyant, avec plus d’espace des trous entre les nuages (ce genre d’aéronef que plus complète, avoir tenu de nombreux man-
à bord, et m’a semblé offrir évolue souvent on-top). ches, avoir pratiqué l’avion afin de gérer ses para-
une meilleure visibilité Le retour vers la piste se déroule de façon aca- mètres à l’instinct et s’affranchir des particularités
extérieure. démique, avec sortie du train et volets au premier inhérentes aux performances. Il semble qu’une
La différence de prix est à cran. En finale à 105 km/h (le vent de travers n’a certaine sagesse, teintée d’humilité, habite les
l’avantage du Shark, mais pas faibli), je réduis à 95 km/h en courte avec deux amateurs qui connaissent intuitivement leur
ce dernier ne possède pas crans, décrabe et arrondis à 80 km/h pour un niveau et celui des machines qu’ils convoitent. Je
certains équipements hauts contact vers 70 km/h. Éric me confie que la sortie ne suis donc pas inquiet
de gamme promis sur son complète des volets n’est envisagée que dans des sur ce point : le Shark Les plus Les moins
concurrent. cas particuliers, notamment pour les pistes courtes. saura trouver son public, •Performances ! •Masse ULM limite
Les suspensions sont efficaces, effaçant une éven- et le public saura si le •Facilité •Pontet de verrière
•Fabrication
tuelle erreur d’appréciation lors du posé. Shark lui convient…

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