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Financement relationnel bancaire et risque de

non-remboursement de crédit en zone CEMAC:


comment comprendre les fondements de l’inefficacité
du contrôle bancaire de l’entreprise ?

Pierre Claude MBAMA1

Résumé

1
Enseignant-Chercheur en Sciences de Gestion, Université de
Yaoundé II (Cameroun), E-mail: mbamaclaude@yahoo.fr
L'objet de cet article est de déterminer les causes de
l’inefficacité du contrôle bancaire de l’entité dans une relation de
financement dans la Communauté Économique et Monétaire de
l'Afrique Centrale (CEMAC), pour la période allant de 2010 à 2018.
L’analyse économétrique des données secondaires obtenues dans les
rapports COBAC, nous révèle que la responsabilité de l’inefficacité de
contrôle bancaire dans une relation de financement est partagée entre
la banque et l’entité où chaque partie choisie de privilégier son intérêt
et préfère adopter l’opportunisme. La réflexion proposée invite les
deux parties à privilégier plutôt l’intérêt de la relation de financement,
qui permet de sauvegarder les intérêts de chacun.

Mots clés : relation de financement-contrôle bancaire-banque-


entité- opportunisme

Classification JEL: G224, G332

Introduction
La zone CEMAC est une sous-région africaine richement dotée
de ressources naturelles telles que le pétrole, l'or, l'étain, la bauxite,
l'uranium, le bois et le minerai de fer etc. Malgré cette vaste
possession de ressources naturelles, elle connait un ralentissement de
sa croissance économique, ce qui a pour conséquence, l’accroissement
de la pauvreté, une très faible augmentation des revenus par habitant,
des tensions sociales ainsi que des crises sécuritaires internes pour les
pays membres. En dépit des efforts fournis par les gouvernements de
ces pays membres dans le sens de la relance économique (facilitation
de l’entrepreneuriat; construction des infrastructures énergétiques et
routières.), les économies de la zone CEMAC tardent toujours à
connaitre une croissance économique à deux chiffres pouvant

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permettre de résoudre les problèmes de pauvreté et de chômage des
populations. Dans le but de sortir de cette situation défavorable, le
secteur privé a été libéralisé par les Etats qui ont mis les moyens en
jeu pour favoriser l’entrepreneuriat privé. L’entité privée qui est au
centre de cette politique est un agent économique indispensable dans
une économie, car, c’est elle qui génère les richesses et réduit le
chômage (Mbama 2021b). Mais pour qu’elle puisse atteindre ses
objectifs, elle doit obtenir des financements nécessitent pour ses
investissements.

Généralement, lorsqu’une entité est dans l’incapacité de se


financer elle-même, elle va requérir un financement transactionnel
auprès de la banque. Malheureusement, ce mode de financement est
très préjudiciable non seulement pour la banque qui octroie du crédit à
l’entité, mais aussi pour le système bancaire voire même pour
l’économie toute entière (Mbama et Kono abe, 2020). Le problème
qui rend ce mode de financement dangereux est celui de l’asymétrie
de l’information qui amène généralement la banque à subir les risques
de sélection adverse et d’aléa moral de la part de l’entité, ce qui
conduit généralement à son opportunisme (Gardès et Maque 2012).

Ce problème d’opportunisme existe depuis toujours car, les


Hommes ont généralement tendance à prioriser leurs propres intérêts
au détriment de ceux collectifs. La finance bancaire connaît autant ce
problème, d’où la théorie positive d’agence émise par Jensen et
Meckling en 1976, où l’écart informationnel existe entre le principal
et l’agent. Cette inaptitude de la banque à observer l’attitude de
l’entité, lui donne la possibilité de tricher en optant pour les attitudes

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opportunistes néfastes pour la banque, avec l’accroissement du risque
de non-remboursement de crédit dans un financement à l’acte.

Pour Sharpe (1990), le financement relationnel bancaire est la


solution efficace à l’opportunisme qui se manifeste par les risques de
sélection adverse et d’aléa moral dans un financement à l’acte car, la
banque et l’entité nouent une relation authentique de collaboration de
long terme qui permet de diluer l’écart informationnel.

Selon les travaux de Mbama (2021b), la banque réussi à diluer


l’écart informationnel ex ante dans une relation de financement, mais
elle est pour l’instant incapable de diluer efficacement l’écart
informationnel ex post des entités en zone CEMAC. Ce qui permet de
constater l’accroissement du risque de non-remboursement de crédit
qui entraine la diminution de la quantité de crédit accordée aux entités
dans le futur.

Pour certains auteurs (Mbama, 2021a; Sharpe, 1990; Mbama et


Kono abe, 2020 et Rajan, 1992), cette inefficacité du contrôle bancaire
de l’entité dans un contexte de financement relationnel peut
s’expliquer par sa volonté à l’exproprier en adoptant l’opportunisme.
Manove et al. (2001), quant à eux imputent aux banques leur
inaptitude à constituer l’information sur l’entité après octroi du crédit,
ce qui accroit l’asymétrie informationnelle ex post. Mais nous
pouvons également souligner le problème du choix du type et de la
fréquence de contrôle que la banque adopte dans un financement
relationnel. Ce choix peut aboutir à l’inefficacité de contrôle bancaire
de l’entité et occasionner le risque de non-remboursement de crédit.

3
Au regard des idées développées, la problématique est la
suivante : l’inefficacité de contrôle bancaire de l’entité est-elle
volontaire ou involontaire dans un contexte de financement
relationnel en zone CEMAC ?

Dans le but d’apporter des éléments de réponse à notre


questionnement, une étude empirique est réalisée en zone CEMAC.
Dans la première partie de cet article, nous présentons le cadre
théorique et conceptuel de la recherche. L’approche méthodologique
est présentée en deuxième partie alors que la présentation et la
discussion des résultats obtenus interviennent dans la troisième partie.

1- Cadre théorique et conceptuel de la recherche


La banque garantit un financement efficace et à moindre coût
aux entités dans un financement relationnel (Bharath et al, 2011). Ce
qui n’est pas toujours vérifié car, il n’est pas exclu de constater des
dérives de la part des cocontractants, qui accroissent le risque de non-
remboursement de crédits.

1.1. Inefficacité de contrôle de l’entité et risque de non-


remboursement de crédit: une situation qui traduit
l’opportunisme de la banque

Selon Mbama (2021a), le fait pour la banque de détenir de


fortes garanties dans un financement relationnel ne l’encourage plus à
contrôler l’entité. Cette situation d’inefficacité de contrôle se justifie
par la volonté d’exproprier l’entité ou de minimiser les coûts de
contrôle.

1.1.1. L’expropriation de l’entité: un facteur d’inefficacité de


contrôle bancaire

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Dans un financement relationnel, il est souvent reproché aux
banques leur incapacité à « produire » de l’information sur l’entité
avant et après la signature du contrat de prêt. Certains auteurs
(Mbama, 2021a; Sharpe, 1990; Mbama et Kono abe, 2020 et Rajan,
1992), considèrent que l’information privée récoltée par la banque lui
donne l’opportunité de l’exproprier. Pour Longhofer et Santos, (2000),
ces informations privées, l’entraine à exiger des garanties matérielles
et des taux d’intérêt très élevés.

Cette attitude que l’on dénomme par « Hold-up problem », est


qualifiée dans la théorie financière de capture informationnelle des
entités. Pour Anglini et al (1998), les banques ont pour habitude
d’accroitre les quantités de garanties matérielles exigées ainsi que les
coûts de crédit au fur et à mesure que leur relation évolue dans le
temps. Cela est observé par le fait que la banque offre des conditions
abordables à l’entité les premières années de la relation dans le but de
l’attirer. Selon Longhofer et Santos (2000), les garanties matérielles
élevées ainsi que la priorité associée au crédit bancaire sont des
facteurs détenus par la banque et indispensables à la bonne marche des
relations avec l’entité. Au regard de ceux-ci, Longhofer et Santos
(2000), dévoilent que ces attributs du contrat de crédit peuvent
encourager des comportements opportunistes où les banques trichent
en fixant des conditions de financement coûteuses aux entités.

Or le financement relationnel est présenté dans la littérature


financière comme parfait, non seulement pour l’entité qui bénéficie
d’un financement efficace et à moindre coût mais aussi pour la banque
qui réduit les risques auxquels elle est exposée. C’est pour cette raison
que Diamond, (1984), affirme que les banques sont des surveillants
professionnels auxquels les ménages mandatent les fonds car elles

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sont notamment compétentes dans l’allocation et la surveillance des
crédits.

Toutefois, le constat fait est contraire à cette vision de la


banque. Dans un financement relationnel, elle a continuellement
tendance à exproprier l’entité qui se trouve dans une situation de
dépendance. D’habitude, sa possession des garanties matérielles
élevées dans un financement relationnel ne lui donne pas la motivation
de contrôler l’entité. Cela est souvent observé par opportunisme car, la
banque sait qu’elle a une position privilégiée dans le remboursement
des créanciers en cas de faillite de l’entité.

Cette situation est beaucoup plus observée en Afrique, car, le


financement relationnel n’est pas encore bien maitrisé par les
différents acteurs. La confiance ne règne pas encore entre banque et
entité. Lorsque la banque sait qu’elle est en possession des garanties
matérielles importantes, elle n’est plus encouragée à mettre l’accent
sur le contrôle de l’entité à qui elle a octroyé du crédit. Tout
simplement parce qu’elle sait qu’elle occupe une position prioritaire
en cas de sa liquidation. Ce comportement qui est qualifié
d’opportunisme de la part de la banque, fait accroitre le risque de non-
remboursement de crédit et a une conséquence néfaste sur le
financement de l’entité dans le futur (Mbama 2021a). Au regard de
ces idées développées, nous formulons la première hypothèse qui est
la suivante :

H1: Plus une banque est opportuniste dans un financement


relationnel, moins elle est efficace dans le contrôle l’entité

Si le problème d’expropriation de l’entité a pour conséquence


l’accroissement du risque de non-remboursement de crédits, celui-ci

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n’est quand même pas le seul responsable de l’inefficacité de contrôle
de la banque. Nous pouvons également soulever celui de la
maximisation de son profit grâce à la minimisation des coûts de
contrôle de l’entité.

1.1.1. L’inefficacité de contrôle de l’entité: une volonté pour la banque de


minimiser les coûts de contrôle

Les banques sont aujourd'hui les plus grandes institutions


financières, avec des succursales et filiales à travers le monde. Elles
proposent différents produits et services aux États; aux particuliers
mais surtout aux entités. Malgré le rôle important qu’elles jouent dans
le bon fonctionnement d’une économie, il est important de souligner
que leurs opérations intermédiaires sont assez risquées. Elles sont
exposées à divers risques parmi eux; le risque de taux d'intérêt, le
risque de change, le risque politique, le risque de marché, le risque de
liquidité, le risque opérationnel et le risque de crédit. La création de
crédit étant la principale activité génératrice de revenus des banques
(Kargi, 2011), celle-ci cause d’énormes problèmes aux ménages, aux
banques elles-mêmes, à l’État ainsi qu’aux autres parties prenantes. La
mission première des banques est donc de gérer ces défis, en
particulier l'aspect crédit car, il est l'un des risques importants de par la
nature de leurs activités.

Agu et Ogbuagu (2015), définissent le risque de crédit comme


les pertes résultant du refus ou de l'incapacité des clients de crédit de
payer ce qui est dû en totalité et à temps. Les principales sources de
risque de crédit sont: des politiques de crédit inappropriées, des taux
d'intérêt volatils, des garanties matérielles élevées, les lois, les faibles
niveaux de capital et de liquidité, les prêts dirigés, les licences
massives des banques, les prêts imprudents, la mauvaise évaluation du

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crédit, le laxisme dans l'évaluation du crédit, l’ingérence du
gouvernement, la supervision inadéquate de la banque centrale, la
mauvaise gestion des crédits qui se traduit par une inefficacité dans le
contrôle des clients.

Or, à travers la gestion efficace de l'exposition au risque de


crédit, les banques soutiennent non seulement la viabilité et la
rentabilité de leur propre entité mais contribuent également à la
stabilité systémique et à une allocation du capital dans l'économie
(Psillaki, Tsolas et Margaritis, 2010).

Étant donné que le financement bancaire à l’acte est présenté


dans la littérature financière comme un mode de financement qui
expose plus la banque au risque de crédit, le financement relationnel
quant à lui est proposé comme solution à ce problème. Il permet non
seulement de satisfaire les besoins des entités et à moindre coût mais
encore, elle permet aux banques de réduire divers risques, surtout le
risque de crédit. C’est pour cette raison que nous pouvons relever que
depuis 1984 grâce à Diamond, la théorie de l’intermédiation financière
estime que les intermédiaires financiers et surtout les banques, sont
des surveillants professionnels auxquels les ménages mandatent la
surveillance des crédits. Les différentes activités de contrôle visent
alors à vérifier le niveau du taux de retour annoncé de manière à
s’assurer de l’absence de comportements opportunistes de la part de
l’entité et, le cas échéant, à récupérer le montant requis ou engager
une procédure de mise en liquidation. Cependant, cette façon de voir
les choses n’est pas toujours partagée dans toutes les zones monétaires
ainsi que dans toutes les relations de financement avec les entités.

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Les banques ont fréquemment tendance à mettre en priorité, la
minimisation des coûts qu’elles supportent pour contrôler les entités
surtout si celles-ci sont des PME, tout simplement parce que le
contrôle vaut amplement une fortune. Or, nous savons que les
quantités de crédit accordées à ce type d’entités sont faibles. Ainsi, la
banque préfère minimiser les coûts de contrôle dans l’optique de
maximiser le profit qu’elle peut en tirer dans le crédit qu’elle a
accordée. Il est important de souligner que la banque se comporte
ainsi lorsqu’elle sait qu’elle a en sa possession des garanties
matérielles suffisantes car, elle sait que si l’entité tombe en faillite,
elle est la première à être remboursée. Ce qui l’amène à minimiser son
contrôle qui peut aboutir à l’accroissement du risque de non-
remboursement de crédit, très néfaste pour l’économie toute entière.
Au regard de ces idées, nous formulons notre deuxième hypothèse qui
est la suivante :

H2: la minimisation des coûts de contrôle par la banque


influence négativement son efficacité

Bien qu’il soit important de souligner que ce problème


d’inefficacité de contrôle peut également survenir indépendamment de
la volonté de la banque.

1.2. L’insuffisance de contrôle de l’entité: Une situation qui expose les


faiblesses de la banque

Le financement relationnel est proposé comme solution quant à


l’amélioration des rapports entre banque et entité. Pourtant, la banque
fait toujours face à plusieurs imperfections qui aboutissent à un
accroissement du risque de non remboursement de crédit.

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1.2.1. L’opacité informationnelle de l’entité: un facteur explicatif de
l’inefficacité de contrôle de la banque

D’habitude, lorsque l’entité obtient du crédit de la part de la


banque, elle n’honore pas les accords du contrat car elle sait que la
banque est dans l’incapacité d’observer sur le terrain toutes les actions
qu’elle entreprend. Dans ce cas, elle décide ainsi de dissimuler les
fonds qui proviennent des investissements ou alors elle convient de
financer les projets plus risqués que ceux déterminés conjointement
avec la banque. L’écart informationnel ex post est souvent la cause de
cette situation.

Cette dissymétrie informationnelle ex post est une circonstance


où l’entité choisit un comportement opportunisme du fait de
l’avantage informationnel dont elle détient. Dans ce cas, elle est
incitée à publier un résultat différent de celui effectif, de manière à
minimiser le montant de ses acquittements et donc d’accroitre le
risque de perte pour la banque. Une fois le prêt alloué, son
acquittement dépend de l’action, du comportement et du sacrifice
fourni par l’entité. Le banque endure dans ce cas un risque de
commutation des actifs encore appelé aléa moral (Thakor, 2005;
Stiglitz et Weiss, 1981).

Ce comportement opportuniste qui est observé chez l’entité est


souvent décidé par le degré d’asymétrie de l’information ex post qui
existe entre elle et la banque. Ces développements conduisent à la
troisième hypothèse:

H3: Plus l’asymétrie informationnelle ex post de l’entité est


élevée, moins le contrôle bancaire de l’entité est efficace

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L’incertitude sur les conditions qui priment durant l’exécution
du contrat ainsi que la grande complexité des tâches à réaliser qui
rend irréalisable la résolution de tous les cas éventuels au sein d’un
contrat, peuvent également donner lieu à des attitudes opportunistes.
Or cette incertitude est en partie fille de l’absence de confiance entre
banque et entité. Elle est traitée dans la théorie économique standard
par Williamson et étudiée en sciences sociales par l'économiste
Kenneth Arrow (1974). Elle apparait comme un facteur
d’accroissement de l’asymétrie informationnelle ex post, cause d’aléa
moral.

Face à cette situation d’asymétrie d’information dans une


relation de financement, le risque de non-remboursement de crédit va
s’accroitre jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée.

Dans cette situation, la banque décide de recourir au taux


d’intérêt pour combattre l’opportunisme de l’entité. De ce fait, elle
peut observer ce taux d’intérêt comme un moyen indirect de contrôle
de l’attitude du débiteur. Selon Stiglitz et Weiss, (1981), il est pour
l’entité, une condition de décision d’investissement car elle choisira
des projets d’autant plus risqués que le taux d’intérêt est élevé. Ce qui
devrait être de même pour le niveau de garanties matérielles exigées
aux entités dans un financement relationnel. Même s’il est aussi
important de souligner que les techniques de contrôle que la banque
met sur pied peuvent également influencer négativement l’efficacité
de contrôle de l’entité.

1.2.2. L’inefficacité de contrôle peut aussi provenir des mauvaises


techniques de contrôle bancaire de l’entité

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La mutation des banques commerciales au cours de cette
dernière décennie, l’analyse de divers problèmes dont elles font face,
voire même les faillites pour certaines, relèvent la valeur du contrôle
interne au sein de ces banques (Weirich, 1991). Ces mutations
prouvent que le contrôle interne doit jouer un rôle préventif qui
permet aux banques d’assurer l’exécution de leurs activités de manière
sûre et saine. Le contrôle interne n’est pas une politique appliquée à
un certain moment ou une simple procédure, ni même une simple
fonction d’audit, mais un système qui fonctionne en continu à tous les
niveaux de la banque. Pour le Comité de Bâle (sur le contrôle
bancaire, 2010), les activités de contrôle consistent à s'assurer que les
limites d'approbation sont observées, minimisant les conflits d'intérêts
et assurant la séparation des tâches.

Pour ce qui est du contrôle de l’entité, Yan (1996), affirme


qu’en cas de défaut, celui-ci est aléatoire. Il n'intervient que si la
différence entre le paiement requis et celui obtenu est supérieure au
coût du contrôle, la banque peut dans le cas contraire, accepter une
remise de dette. Le risque de contrôle n'apparaît cependant crédible
que si les coûts de litige encourus par la banque sont faibles. Au total,
face au risque d’aléa moral, le contrôle n'intervient finalement que
lorsque la banque enregistre le défaut de paiement effectif de l’entité.
Pourtant, les différentes activités de contrôle visent à vérifier le niveau
du taux de retour annoncé de manière à s’assurer de l’absence de
comportements opportunistes de la part de l’entité et le cas échéant, à
récupérer le montant requis ou engager une procédure de mise en
liquidation. Au regard de ces développements, nous émettons la
deuxième hypothèse:

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H4: Plus le contrôle bancaire de l’entité est permanent,
moins il est inefficace

La littérature relative au paradigme principal-agent (Harris et


Raviv, 1979 et Holmström, 1979), montre en quoi le caractère
observable du résultat par le premier est propre à amoindrir le risque
d’aléa moral. Gale et Hellwig (1985), présentent que le contrat de
dette standard avec éventualité de banqueroute et de contrôle forme un
mécanisme incitatif efficace au coût réduit. Quand le revenu est
visible par la banque grâce à un monitoring parfait et à coût constant,
un contrôle méthodique du résultat est trop coûteux. Elle n’est donc
accomplie que quand l'entité se déclare illiquide. Si la banqueroute est
indispensable au contrôle, alors une politique organisée de mise en
banqueroute en cas de défaut de paiement est obligatoire à la viabilité
de la relation financière à l’aide de la maitrise du profit accompli
qu’elle implique.

Cette vision du contrôle, surtout dans un financement


relationnel a pour objectif de laisser développer le risque de non-
remboursement de crédit de l’entité. Williamson (1986, 1987), affirme
que les actions en monitoring qui prennent la forme d’un audit, sont
réalisées de façon non aléatoire lorsque le défaut de paiement se
révèle effectif. Les contrats de crédit envisagés par Diamond
n'envisagent pas la possibilité que le profit engendré par
l’investissement soit observé, même moyennant un coût. Tang et al.
(2015), constatent que la faible importante du contrôle interne
augmente le risque de crédit des entités. Les auteurs établissent une
certaine relation entre les contrôles internes et le risque de crédit.

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Ce qui montre que dans un financement relationnel, si la
banque ne met pas l’accent sur le contrôle permanent de l’entité, elle
occasionne l’accroissement du risque de non-remboursement de
crédit. La confiance est sensée exister entre elles mais si celle-ci est
absente, le contrôle interne non aléatoire est l’une des solutions qui
permet de réduire l’opportunisme post contractuel de l’entité. La
fonction du contrôle interne doit concerner plus la prévention que la
répression. Le but du contrôle de l’entité n’est pas de découvrir les
fraudes et les erreurs, mais d’avoir un système durable qui offre une
assurance logique de sécurité.

En réalité, les contrôles internes sont capables de déterminer le


risque de crédit. Les travaux d'Ashbaugh-Skaife et al. (2007), trouvent
une association entre contrôles internes et plusieurs mesures de risque
comme les risques idiosyncratique et systématique plus élevés.

Il a été rapporté par Chen et al. (2013), qu’un système de


contrôle interne efficace garantit de bons rapports financiers et
augmente la confiance des investisseurs sur le marché des capitaux.
L'accent mis sur des contrôles internes efficaces a été trouvé par Ellul
et Yerramilli (2013), qui a rapporté que les institutions financières
dotées de solides contrôles internes des risques survivent à une crise
financière.

L’exposition de la littérature sur les causes de l’inefficacité de


contrôle interne de l’entité terminée, il est judicieux de présenter à
présent une étude empirique dans le cadre de la zone CEMAC. Pour y
parvenir, il est question de commencer par l’exposition de la méthode
utilisée.
2. Approche méthodologique

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Elle concerne la démarche utilisée partant de la stratégie de
recherche puis de la description des travaux opératoires qui passe par
la présentation des caractéristiques de la population, de l’obtention
ainsi que du traitement des données de l’étude.

2.1. La stratégie de recherche


La stratégie de recherche adoptée dans cet article est une
approche positiviste. Elle repose sur une interprétation objective et
réelle des données dont un chercheur possède. Celle-ci paraît
pertinente car, elle permet de vérifier empiriquement les différentes
hypothèses émises grâce aux résultats obtenus à l’aide des données
secondaires. Sur le plan épistémologique, nous optons pour une
méthodologie quantitative pour la collecte des données car, nous nous
basons sur la nature causale de la problématique. Des tests d’analyses
statistiques sont effectués sur la base des données obtenues ainsi
qu’une étude économétrique, en appliquant la régression des données
de panel par la méthode des moments généralisés (GMM), où les tests
des hypothèses sont faits grâce au modèle dynamique.

2.2. Description des travaux opératoires


Il est indispensable dans cette sous-section de faire la
présentions la population de l’étude en premier temps, avant de
présenter les outils de l’étude sur données primaires

2.2.1. Les caractéristiques de la population


La sous-région de la CEMAC est constituée de six pays à
savoir : Cameroun; République Centrafricaine ; Guinée Équatoriale ;
Congo et Gabon. Les systèmes bancaires de ces pays constituent la
population de l’étude. Au 31 décembre 2018, le système bancaire de

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la CEMAC comptait déjà 55 banques en activité réparties comme
suit : quinze (16) au Cameroun, quatre (4) en Centrafrique, onze (11)
au Congo, dix (10) au Gabon, cinq (5) en Guinée Équatoriale et neuf
(9) au Tchad.
L’étude que nous menons en zone CEMAC concerne
uniquement les informations des rapports COBAC, de 2010 jusqu’en
2018, ce qui fait un total de 09 ans.

2.2.2. Exposition des variables de l’étude

Le but ici est d’observer l’évolution des différentes variables


de la recherche déterminées sur la base des quatre différentes
hypothèses émises. Ces distinctes variables sont non seulement une
variable à expliquer mais aussi les variables explicatives.
Pour ce qui est de la variable dépendante, nous avons choisi
la variable de créances douteuses pour observer l’efficacité de
contrôle bancaire de l’entité. Ainsi, l’évolution de cette variable nous
permet ici d’observer l’efficacité ou non du contrôle bancaire de
l’entité dans la relation de financement en zone CEMAC durant la
période déterminée. Cette variable est symbolisée par CREANDOUT,
et représente les créances douteuses enregistrées par les banques de la
zone CEMAC dans le financement relationnel.

Le tableau suivant fait la synthèse des différentes variables à tester

Tableau 1: Synthèse des variables à tester

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Au terme de cette présentation, il est intéressant de passer à la
présentation des résultats.

3. Les résultats de la recherche


Déterminer les causes de l’inefficacité du contrôle bancaire de
l’entité dans une relation de financement, nécessite de faire d’une part,
la présentation de la perspective des statistiques descriptives des
différentes variables et d’autre part, de faire une étude économétrique
de données collectées.

3.1. Analyse descriptive des données de la recherche

Le but est d’observer les statistiques descriptives des


différentes variables de l’étude. Celles-ci nous permettent de mieux
comprendre l’évolution de chaque variable ainsi que les corrélations
qui existent entre variable dépendante et les variables explicatives.

3.1.1. Les statistiques descriptives des variables de l’étude

Les statistiques descriptives nous aident à observer l’évolution


des différentes variables de la recherche mais également de mieux
comprendre les variables que nous avons présentés. Ce qui nous

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permet de donner une explication à l’évolution de chacune des
variables.

Tableau 2: Statistiques descriptives des variables analysées


Statistique CREANDOUT COUTCR GARANT CRED MT ENGAGDO DEGCOVRI PNB VOLRESB FPNREG PROV
ED UT SQ ANC
Nb. d'observations 54 54 54 54 54 54 54 54 54 54

Nb. de valeurs manquantes 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

Minimum 2146,000 7,980 81,300 41838,000 0,060 -38,900 6397,000 0,430 10498,000 252,000

Maximum 715693,000 16,500 3161732,000 8193292,000 811627,00 50,300 198586,000 0,970 233003,00 65998,000
0 0
Eff. du minimum 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

Eff. du maximum 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

Amplitude 75447,000 8,520 3161723,700 888454,000 81626,940 89,200 192189,000 0,540 222505,00 65746,000
0
Médiane 81445,500 11,765 411598,000 1152193,500 5034,000 16,250 51726,500 0,800 80989,500 6953,500

Moyenne 115600,722 11,776 70094,701 2156411,111 14553,163 17,093 61172,241 0,795 89243,611 13154,444

Ecart-type (n) 118197,670 1,736 83629,674 257640,353 23405,603 15,273 48397,957 0,117 61160,845 15782,445

Coefficient de variation 1,166 0,147 1,193 1,005 1,608 0,894 0,791 0,147 0,685 1,200

Ecart-type de la moyenne 2499,642 0,238 11487,419 35389,624 3215,007 2,098 6647,971 0,016 8401,088 2167,885

Borne inf. de la moyenne 10587,075 11,298 47053,856 185428,514 8104,676 12,885 47838,100 0,763 72393,162 8806,217
(95%)
Borne sup. de la moyenne 20614,370 12,254 93135,546 327393,708 21001,650 21,300 74506,381 0,827 106094,06 17502,672
(95%) 0
Ecart-type de la variance 65543032,97 0,596 1384253912, 13137802356 108426291 46,166 463605958, 0,003 740358231 49299611,84
6 595 ,330 ,792 974 ,147 4
Erreur standard (Asymétrie 0,325 0,325 0,325 0,325 0,325 0,325 0,325 0,325 0,325 0,325
(Fisher))
Moyenne géométrique 8238,917 11,646 19790,596 129353,668 2027,332 41837,518 0,786 64285,448 7113,657

Ecart-type géométrique 3,478 1,163 12,044 3,833 21,445 2,575 1,175 2,467 3,254

Moyenne harmonique 3301,370 11,514 238,828 51112,189 3,032 22,024 27136,918 0,775 42235,436 3267,135

Source : l’auteur sur la base des données secondaires

En observant ce tableau ci-dessus, il est intéressant d’apporter


quelques commentaires qui permettent de faciliter sa compréhension:

Relativement à la variable dépendante qui est la variable de


créances douteuses (CREANDOUT), nous constatons que sa variation
se situe entre (2146 et 715 693) Milliards de FCFA en zone CEMAC.
Cela veut simplement dire que parmi les six secteurs bancaires de la
zone CEMAC, ceux qui enregistrent moins de créances douteuses ont
au moins 2146 Milliards durant la période observée et ceux qui qui
sont les plus exposés au risque de non remboursement enregistrent au-
delà de 715 693 Milliards de FCFA.

18
La valeur médiane nous renseigne qu’au moins 50% des
systèmes bancaire de la zone CEMAC enregistrent 81445,500 de
Milliards de FCFA au court de la période observée. Pour ce qui est de
la moyenne, ce tableau nous informe que 115 600,722 Milliards de
FCFA sont enregistrés en moyenne comme créances douteuses de
2010 à 2018 par les banques. L’écart-type de ces créances douteuses
est de 118197,670 Milliards de FCFA en zone CEMAC et montre le
degré de dispersion de toutes les valeurs de créances douteuses.

Comme cette variable nous permet d’observer l’efficacité du


contrôle bancaire de l’entité dans un financement relationnel, il est
donc question de déduire que les banques de la zone CEMAC font
face au problème d’efficacité du contrôle interne de l’entité au regard
de l’enregistrement des créances douteuses.

Quant aux variables explicatives, nous constatons que: les


coûts de crédit présentent une variation qui se situe entre (7,980 et
16,500). Cela veut tout simplement dire que certains des secteurs
bancaires voient leurs banques accorder les crédits à moyen terme à
un coût de 7,9% quand c’est plus bas tandis que les secteurs bancaires
où le financement relationnel est plus cher accordent les crédits à
moyen terme au taux de 16,5% durant la période observée.

La valeur médiane de ces coûts montre que plus de la moitié


des secteurs bancaire de la zone CEMAC, a un niveau de coûts de
crédit inférieur à 11,765% durant la période observée. Cela nous
permet de visualiser le niveau du coût de crédits dans le financement
relationnel bancaire des entités de la zone CEMAC. Quant à la
moyenne des coûts de crédit à moyen terme accordés par ces six

19
secteurs bancaires de la zone CEMAC, elle est de 11,776% tout au
long des neuf années observées.

La lecture de l’écart type, montre qu’il est de 1,736% et expose


le degré de dispersion de chacun de ces coûts de crédit non seulement
de chaque secteur par rapport à la moyenne mais aussi de toutes les
valeurs des coûts de crédit des différents secteurs bancaires par
rapport toujours à la moyenne, durant la période observée. Cela
permet de visualiser le niveau du coût de crédits dans le financement
relationnel des entités de la zone et de déterminer son influence sur le
niveau de créances douteuses.

Quant à la variable de garanties, nous remarquons qu’elle


présente une variation qui se situe entre (81,300 et 3161732) Milliards
de FCFA. Cela veut tout simplement dire que durant la période
observée, le secteur bancaire qui a demandé moyen de garanties a
exigé 81,3 Milliards de FCFA pour les garanties dans le financement
relationnel et les secteurs qui ont demandés plus l’ont fait à hauteur
d’au plus de 3161 732 Milliards de FCFA. Sa valeur médiane est de
411 598 Milliards de FCFA et sa valeur moyenne est de 710 094,701
Milliards de FCFA et représente ce que chaque système bancaire
exigeait en garanties matérielles. Son écart types est de 813 629,674
Milliards de FCFA et il présente le degré de dispersion des valeurs de
garanties de chaque système bancaire par rapport à la moyenne.

Pour ce qui est des crédits à moyen terme, le tableau nous


montre que ceux-ci présentent une variation qui se situe entre (4 1838
et 8193 292) milliards de FCFA. La valeur médiane montre que plus
de la moitié des systèmes bancaire de la zone CEMAC, a une valeur
de crédits à moyen terme supérieure à 1152 193,500 milliards de

20
FCFA durant la période observée. Ce qui montre l’intensité en volume
du financement relationnel bancaire de la zone CEMAC. Quant à la
moyenne de crédits à moyen terme accordés par ces six secteurs
bancaires, elle se situe à 2156 411,111 milliards de FCFA tout au long
des neuf années observées.

Relativement à l’écart type, il est de 2157 640,353 milliards de


FCFA et montre le degré de variabilité de toutes les valeurs de crédits
à moyen terme des différents systèmes bancaires mais aussi de
chacune de ces valeurs par rapport à la moyenne.

Au terme de la présentation de ces statistiques descriptives, il


est intéressant de comprendre les corrélations qui existent entre elles.

3.1.2. Les corrélations entre variable dépendante et les


variables explicatives

Tableau 3 : Matrice de corrélation des variables étudiées

Variables CREANDOUT COUTCRED GARANT CRED MT ENGAGDOUT DEGCOVRISQ PNB VOLRESBANC FPNREG PROV
CREANDOUT 1 -0,28 0,503 0,585 0,773 -0,163 0,702 -0,279 0,635 0,865
COUTCRED -0,28 1 -0,428 -0,562 -0,21 -0,067 -0,527 0,002 -0,473 -0,296
GARANT 0,503 -0,428 1 0,67 0,685 -0,124 0,657 -0,337 0,625 0,446
CRED MT 0,585 -0,562 0,67 1 0,417 -0,168 0,942 -0,525 0,862 0,631
ENGAGDOUT 0,773 -0,21 0,685 0,417 1 -0,102 0,509 -0,234 0,514 0,696
DEGCOVRISQ -0,163 -0,067 -0,124 -0,168 -0,102 1 -0,201 0,127 0,117 -0,165
PNB 0,702 -0,527 0,657 0,942 0,509 -0,201 1 -0,387 0,895 0,761
VOLRESBANC -0,279 0,002 -0,337 0,525 -0,234 0,127 -0,387 1 -0,391 -0,251
FPNREG 0,635 -0,473 0,625 0,862 0,514 0,117 0,895 -0,391 1 0,666
PROV 0,865 -0,296 0,446 0,631 0,696 -0,165 0,761 -0,251 0,666 1

Les valeurs en gras sont différentes de 0 à un niveau de signification alpha=0,05


Source : l’auteur à parti r des données col lectées et tra itées s ous XL STAT

En consultant le tableau ci-dessus, nous constatons qu’il y a


une forte corrélation de valeur négative entre créances douteuses

21
(CREANDOUT) et les coûts de crédit (COUTCRED) qui est de -
0,280, et entre les créances douteuses et la volatilité des ressources
bancaires (VOLRESBANC) qui est de -0,279. Cette corrélation
négative entre ces variables et celle de créances douteuses traduit
l’évolution en sens inverse de ces variables indépendantes et celle de
créances douteuses. Ce qui montre que, plus les coûts de crédit
diminuent dans le financement relationnel en zone CEMAC, plus le
risque de non-remboursement de crédit s’accroit. Ce résultat fait voir
l’incapacité des entités à réduire l’asymétrie d’information ex post des
entités de la zone CEMAC du fait de la réduction des coûts de crédit,
d’où l’incapacité de la banque à assurer un contrôle efficace de
l’entité. Ce résultat nous permet d’affirmer l’hypothèse H3: Plus
l’asymétrie informationnelle ex post de l’entité est élevée, moins le
contrôle bancaire de l’entité est efficace

Par contre, d’autres variables explicatives ont une forte


corrélation positive avec la variable de créances douteuses. Le tableau
de corrélation nous révèle que plus la banque fait accroitre la demande
des garanties dans un financement relationnel (0,503), plus les
créances douteuses augmentent aussi. Cela nous permet de valider
également l’hypothèse H1 (Plus une banque est opportuniste dans
un financement relationnel, moins elle est efficace dans le contrôle
l’entité), car la banque néglige le contrôle de l’entité par
opportunisme du fait du niveau élevé des garanties.

Le produit net bancaire (0,702), évolue également dans le


même sens que les créances douteuses. Ce résultat nous montre
simplement que lorsque la banque cherche à maximiser son profit
dans un financement relationnel en cherchant seulement à réaliser de
bons résultats, cela l’amène à minimiser les coûts de contrôle de

22
l’entité, ce qui a pour conséquence l’accroissement du risque de non-
remboursement de crédit. Au regard de ce résultat, l’hypothèse H2 (la
minimisation des coûts de contrôle par la banque influence
négativement son efficacité), est validée.

La variable nommée «provisions», avec un coefficient positif


(0,865), évolue également dans le même sens que les créances
douteuses. Ces provisions montrent ici l’inefficacité des systèmes
informatiques des banques à pouvoir contrôler les créances douteuses.
Cela peut être dû à un caractère non permanent du contrôle de l’entité.
Cette corrélation nous permet de valider H4 (Plus le contrôle
bancaire de l’entité est permanent, moins il est inefficace).

Les autres variables sont: les crédits à moyen terme (0,585) ;


les engagements douteux(0,773) et enfin les fonds propres net
réglementaires (0,635). Toutes ces variables évoluent autant dans le
même sens que la variable créances douteuses.

Les variables explicatives en corrélation avec la variable


dépendante sont celles-là qui sont ainsi susceptibles de l’influencer.
Une étude économétrique est ainsi nécessaire afin de pouvoir vérifier
cela.

3.2. Analyse économétrique des données de la recherche

Le tableau ci-dessous nous permet de présenter les résultats de


l’étude économétrique :

Tableau 4: Les différentes variables analysées en zone


CEMAC

23
Source: l’auteur à partir des différentes variables déduites de la
littérature financière

Au regard du tableau ci-dessus, il est intéressant de faire


ressortir celles qui expliquent significativement les créances douteuses
au cours de la période étudiée. Il est nécessaire pour nous de présenter
celui-ci sous forme de tableau:

Tableau 5: Les déterminants de la valeur des créances


douteuses en zone CEMAC

24
Les résultats observés dans cette analyse économétrique nous
révèlent que, le fait pour la banque d’être trop exigeante dans la
demande des garanties conduit à l’accroissement du risque de non-
remboursement de crédit des entités. Celui-ci se manifeste par la
progression des créances douteuses qui ont une relation positive
(0.0983), avec les garanties. Or selon, Longhofer et Santos, (2000), les
informations privées obtenues par la banque dans le cadre de la
relation de financement, l’incite à exiger des garanties matérielles à
l’entité. Ces auteurs dévoilent que les attributs du contrat de crédit
peuvent encourager des comportements opportunistes où les banques
trichent en fixant des conditions de financement coûteuses aux entités.
Et dans cette situation, la banque néglige le contrôle de l’entité par
opportunisme du fait du niveau élevé de ces garanties. Au regard de
ce résultat nous pouvons ainsi valider l’hypothèse H1 (Plus une
banque est opportuniste dans un financement relationnel, moins
elle est efficace dans le contrôle l’entité).

La lecture du tableau ci-dessus nous emmène également à


observer que le «Produit net bancaire», évolue dans le même sens que
les créances douteuses avec un coefficient positif qui est de (0,488).
Ce résultat nous montre simplement que lorsque la banque cherche à
maximiser son profit dans un financement relationnel en cherchant
uniquement à réaliser de bons résultats, cela l’amène à minimiser les
coûts de contrôle de l’entité. Ce qui a pour conséquence
l’accroissement du risque de non-remboursement de crédit qui se
traduit par l’augmentation des créances douteuses. Or selon Psillaki,
Tsolas et Margaritis (2010), à travers la gestion efficace de
l'exposition au risque de crédit, les banques soutiennent non seulement
la viabilité et la rentabilité de leur propre entité mais contribuent

25
également à la stabilité systémique et à une allocation du capital dans
l'économie. Au regard de ce résultat, l’hypothèse H2 qui stipule que:
«la minimisation des coûts de contrôle par la banque influence
négativement son efficacité», est également validée.

La lecture du même tableau, nous fait constater par la même


occasion qu’il y a une forte relation négative entre les coûts de crédit
(COUTCRED) et les créances douteuses (CREANDOUT). Ce
coefficient négatif est de (- 1,566) et traduit l’évolution en sens
inverse des deux variables. Cela s’interprète par le fait que plus les
coûts de crédit diminue dans une relation de financement en zone
CEMAC, plus nous observons l’accroissement des créances
douteuses. Ce résultat montre l’incapacité des entités à réduire
l’asymétrie d’information ex post des entités de la zone CEMAC, d’où
l’incapacité de la banque à assurer un contrôle efficace de l’entité.
C’est en allant dans le même sens que Manove et al. (2001), imputent
aux banques leur inaptitude à constituer l’information sur l’entité dans
un financement relationnel. Or, Uchida et al (2012), pensent plutôt le
contraire. Pour eux, le financement relationnel permet à la banque de
produire une information qualitative spécifique qui l’aide non
seulement à mieux évaluer l’entité mais aussi à diluer l’asymétrie
informationnelle. Ce résultat nous permet de valider l’hypothèse H3:
Plus l’asymétrie informationnelle ex post de l’entité est élevée,
moins le contrôle bancaire de l’entité est efficace

Le tableau N°5 nous permet enfin d’observer que la variable


«Créances douteuses de la période t-1» (CREANDOUT t-1), a un
coefficient positif et dont évolue dans le même sens que la variable
dépendante, «créances douteuses de la période t». Son coefficient
positif est (0,671), et celui-ci nous permet d’affirmer que plus les

26
créances douteuses de l’année n-1 s’accroissent, plus celles de l’année
n vont également suivre la même tendance.
Cette évolution peut s’expliquer par le fait que dans un
financement relationnel, la banque ne puisse pas mettre en place une
politique de contrôle interne de l’entité permanente et efficace. Elle
préfère engager la procédure de contrôle que lorsque l’entité est en
difficultés. Tang et al. (2015), constatent que la faible importante du
contrôle interne augmente le risque de crédit des entités. Les auteurs
établissent une certaine relation entre les contrôles internes et le risque
de crédit. Ce résultat nous permet de valider H4 (Plus le contrôle
bancaire de l’entité est permanent, moins il est inefficace).
Il est également intéressant de souligner qu’en cas de défaut de
l’entité, son contrôle est en conséquence aléatoire. Ce résultat va dans
le même sens que celui de Yan (1996), qui affirme que le contrôle
interne de la firme est aléatoire en cas de défaut. Il n'intervient que si
la différence entre le paiement requis et celui obtenu est supérieure au
coût du contrôle.
Conclusion

Le marché des capitaux étant embryonnaire en zone CEMAC,


le financement bancaire, restent le principal moyen de financement
des entités (Hicks, 1974; Fouda, 2009). Malheureusement, le système
bancaire fait face à divers problèmes dont celui du non-
remboursement de crédit. Il est donc intéressant de rechercher son
efficacité dans le financement des entités de la CEMAC. Le
financement relationnel est proposé comme solution à l’écart
informationnel dont font face les banques dans le financement
transactionnel. Si l’écart informationnel ex ante de l’entité est résolue
avant l’allocation de crédit, celui ex post quant à lui, entraine encore

27
l’inefficacité du financement relationnel en zone CEMAC, d’où
l’accroissement du risque d’aléa moral (Mbama, 2021b). Cette
situation est due à une inefficacité de contrôle par la banque après
allocation du crédit.

L'objectif de cet article était d'analyser les causes de


l’inefficacité de contrôle bancaire de l’entité dans un contexte de
financement relationnel en zone CEMAC.

Une revue de la littérature a été présentée à cet effet, où nous


avons présenté l’inefficacité de contrôle de l’entité comme une
situation qui entraine l’accroissement du risque de non-
remboursement de crédit. À cet effet, nous avons présenté
l’expropriation de l’entité comme une sorte d’opportunisme de la
banque qui est un facteur d’inefficacité de contrôle bancaire. En allant
dans le même sens, il était important de dévoiler que l’inefficacité de
contrôle de l’entité est également une volonté pour la banque de
minimiser les coûts qu’elle supporte pour contrôler l’entité.

Une fois la présentation de l’opportunisme bancaire comme


cause de l’inefficacité de contrôle bancaire terminée, il a été question
de présenter aussi les faiblesses de la banque dans le management de
la relation de financement comme facteur d’inefficacité de contrôle.
Ainsi, nous avons exposé l’opacité informationnelle de l’entité comme
un facteur explicatif de l’inefficacité de contrôle de la banque. Cet
écart informationnel ex post est une circonstance où l’entité choisit un
comportement opportunisme du fait de l’avantage informationnel dont
il détient. La banque étant dans l’incapacité de réduire celui-ci, subit
simplement ses conséquences néfastes dont l’accroissement du risque
d’aléa moral est la principale. Par la suite, nous avons montré que

28
cette inefficacité de contrôle peut tout de même provenir des
mauvaises techniques de contrôle mises en place par la banque. Dans
l’optique de déterminer les causes de cette inefficacité de contrôle
bancaire, nous avons mené une étude empirique sur données
secondaires en zone CEMAC de 2010 à 2018.

Les résultats obtenus nous ont fait conclure que l’opportunisme


bancaire conduit la banque à négliger le contrôle de l’entité dans un
financement relationnel. Mais également, il était nécessaire de
souligner que l’entité à son tour profite non seulement de l’asymétrie
informationnelle ex post qui existe entre elle et la banque mais aussi
des failles dans le processus de contrôle afin adopter à son tour son
opportunisme.

Cette situation néfaste pour les deux parties devrait être


améliorée non seulement du côté de la banque mais aussi du côté de
l’entité. Pour la banque, elle devrait réduire son opportunisme vis-à-
vis de l’entité en mettant en place une stratégie de contrôle efficace et
permanent. L’entité à son tour devrait privilégier la transparence dans
la relation afin de bénéficier de plus de financement et des coûts
abordables. Les deux parties devraient mettre en pratique une relation
sociale bien solide basée sur la confiance mutuelle afin de garantir une
relation de financement efficace et profitable pour tous et pour
l’économie de la zone CEMAC.

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