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01 JUIN 2018

DÉVELOPPEMENT, MILIEU, CULTURE


LPSP1213

CLAIRE MARCHAL
UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DE LOUVAIN
0. Introduction.
Vidéo. En tant que psychologue culturellement informé, qu’est-ce qui retient notre attention dans cette vidéo ?

- Choc dans une rencontre entre 2 cultures ; valeurs et coutumes différentes.


- Points communs ; comportements qui pourraient être universaux.

 Qu’est-ce qui est universel et culturel dans les valeurs, comportements et attitudes ?

• Valeur : c’est tellement internalisé que ce n’est pas facile de les formuler.
• Scripts comportementaux : comportements déterminés par la culture.

Intérêt du psychologue :

- Savoir ce qui est universel et ce qui est culturel.


- On est dans un monde universalisé : plein de personnes issues de l’immigration sont en Belgique.

 En tant que psychologue, être culturellement informé afin de prendre le patient en compte dans
sa globalité.

Concernant le cours :

- But : contextualiser le développement dans le contexte culturel. Pourquoi est-ce que dans certaines
cultures les enfants se mettent plus vite debout (Afrique) ? Pourquoi dans certains pays les enfants posent
plus de questions « pourquoi » ?
- Il y a des exercices qui comptent pour 2 points de l’examen sur Moodle. On est évalué sur notre travail
et sur notre capacité d’évaluateur.
- Examen :
➢ QCM au début « évident » (pas de points négatifs) sur 5 points. Si on n’a pas au moins 3,5, ils ne
regardent pas les QO.
➢ Une QO sur 13 points.
➢ Pas beaucoup de choses à retenir sur les cultures en tant que telles (pas besoin de savoir à quel âge
on marche au Kenya). Important : être culturellement informé. Avoir les réflexes d’observer des
choses-clé, comprendre et jongler avec les concepts (les définir et les reconnaitre).
➢ Ne pas connaitre le nom de chaque tribu mais savoir dire de quel continent elles viennent.

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1. Modèles et concepts
fondamentaux.
1.1 Définitions.

1.1.1 Psychologie du développement.


• PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT : étude scientifique des phénomènes de changement et de continuité
qui marquent la vie d’un individu, et des facteurs qui influent sur ces phénomènes.

Etude qui observe tout ce qui va changer et va continuer dans la vie d’un individu et ce qui va influencer ces
phénomènes : des FACTEURS INTERNES (maturation biologique) et des FACTEURS EXTERNES (environnement ;
besoin d’interactions sociales pour apprendre à parler).

Domaines : physique, cognitif, social, personnalité.

1.1.2 Milieu.
• MILIEU / ENVIRONNEMENT : ensemble de toutes les conditions externes dans lesquelles un organisme se
développe. Le milieu est influencé par la culture.

Depuis l’Antiquité, il y a un débat entre NATURE et CULTURE (NURTURE). En réalité, c’est l’un ET l’autre ;
perspective interactionniste. Les deux ont de l’influence, et l’un peut avoir de l’influence sur l’autre et
réciproquement.

- . Gènes → environnement. Les gères peuvent influencer l’environnement. On a longtemps pensé que
les autistes sont autistes car leur mère est froide. La mère aurait rendu l’enfant autiste. Mais en fait,
l’autisme c’est une base neurobiologique et, comme l’enfant est très peu dans l’interaction avec sa mère,
celle-ci se referme.

- Environnement → gènes. Impact de l’environnement sur les gènes. Il y a un impact phylogénétique


sur l’évolution de l’espèce humaine (sélection naturelle : l’environnement sélectionne certains gènes
qui permettent notre survie), mais aussi à l’échelle d’une vie humaine. L’environnement ne modifie pas
les gènes mais l’expression des gènes ; épigénétique. Expérience avec des rats : on sépare le petit de sa
mère → stress. Quand très grand stress, un petit groupe de molécules se mettent sur certaines parties de
l’ADN qui empêchent l’expression de certains gènes qui aideront plus tard à réguler le stress.

- PÉRIODE CRITIQUE / SENSIBLE.

➢ CRITIQUE : cette période ou rien.


➢ SENSIBLE : période plus favorable.

- VULNÉRABILITÉ vs RÉSILIENCE.

➢ Vulnérabilité : de base, la personne est plus vulnérable à certaines choses de l’environnement.


Fragilité par rapport à certains environnements.

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1.1.3 Culture.
• CULTURE : ensemble de normes, d’idées, valeurs, conventions, comportements, représentations
symboliques à propos de la vie qui sont largement partagés. Persiste à travers le temps. Guide et régule
la vie quotidienne. Détermine quelles sont les compétences qui sont valorisées au sein de la culture
(chez nous : autodétermination, autonomie). Communiquée aux nouveaux membres du groupe ;
importance des parents. A l’extérieur (something outside there) et à l’intérieur (something inside the
head ; on internalise sa culture). Fonctionne par TRUISMES : vérité non exprimable tellement c’est
évident.

1.2 Psychologie développementale culturelle.


Historiquement, la psychologie est très occidentale car :

- Les chercheurs sont occidentaux.


- La psychologie a le souhait d’être scientifique → expériences → sujets. Les échantillons sont très
occidentaux, entre 18 et 20 ans, et souvent féminins. Problème !
- Audience occidentale.

 Fausse impression d’universalité.

A quoi sert la psychologie développementale culturelle ?

- Distinguer ce qui est normal de ce qui est pathologique. On distingue beaucoup de schizophrénie chez
les personnes issues d’Afrique (voient des esprits, ancêtres). DSM-V : trouble psychotique. Mais dans leur
culture, c’est normal de parler de leurs ancêtres et esprits. C’est culturellement valide.

- Intéressant pour les politiques de changement. Impression, en Australie, que les enfants libanais avaient
un retard psychomoteur ; volonté de mettre en place une intervention PMS. Mais en fait, au Liban, on
valorise beaucoup moins le fait de se débrouiller tout seul. Les mamans libanaises en Australie insistaient
beaucoup moins sur l’autonomie.

- Différence nature – nurture.

- Comprendre comment se produit le processus d’enculturation, comment l’enfant s’imprègne de sa


culture. Se complète avec la psychologie interculturelle.

- Permet de comprendre les homeless concepts. Certains concepts sont propres à une culture, n’ont pas
de traduction dans une autre. Il faut aller s’intéresser à la culture pour comprendre ce que l’autre veut
dire.

 Cette psychologie n’est pas juste de l’exotisme.

NB : il y a beaucoup de diversité à l’intérieur d’une culture, on fait beaucoup de généralisation (// courbe de
Gauss).

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1.3 La part d’universaux et la part de culture.

1.3.1 La part d’universaux.


1.3.1.1 La question des universaux.
Question des universaux ; entre nature et culture.

Au départ, débat dichotomique : absolutisme vs relativisme.

- ABSOLUTISME : l’homme se développe quel que soit son environnement.


- RELATIVISME : l’homme arrive comme un tableau blanc et se développe en fonction de son
environnement.

Entre ces 2 approches : UNIVERSALISME : il y a certains mécanismes universels au développement humain mais
ils vont être modulés par l’environnement, par la culture.

1.3.1.2 Les types d’universaux.

Universaux

Corrélationnels Descriptifs De processus

Systématiquement Observables variants Catégories


Observables présents et avec invariance d'observables liés à
identiques partiellement formelle de une dimension de
invariants fonctionnement l'observation

Quand on observe d’autres cultures, on peut décrire certains universaux :

• UNIVERSAUX DESCRIPTIFS (observables) : similarités au niveau des observables ou de leur analyse :

- UNIVERSAUX OBSERVABLES IDENTIQUES : même comportement au même moment du développement.


On observe exactement la même chose dans d’autres cultures. Au niveau émotionnel, il y a des
manifestations d’expressions qui sont semblables au début de la vie (froncer les sourcils, serrer les dents
quand on est énervé).

- OBSERVABLES SYSTÉMATIQUEMENT PRÉSENTS ET PARTIELLEMENT INVARIANTS : les mêmes séquences sont


observées mais il peut se produire des décalages dans le temps. Développement moteur.

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- OBSERVABLES VARIANTS (on ne fait pas la même observation), AVEC INVARIANCE FORMELLE DE
FONCTIONNEMENT : les observables peuvent différer si l’activité porte sur les objets différents et
culturellement marqués, mais les comportements sont cependant assimilables. Ça a la même fonction
mais ça semble différent quand on observe. Mettre à la bouche mais avec des objets culturellement
déterminés. Objets Montessori vs petits bouts de bois. Au niveau du fonctionnement, ils font la même
chose.

- CATÉGORIES D’OBSERVABLES LIÉS À UNE DIMENSION DE L’OBSERVATION : ce type se réfère non plus aux
observables mais à la dimension de l’observation. Ce sont des catégories d’observables qui sont
universelles, même si les observables changent fortement d’une culture à l’autre. Les observables ne
sont plus identiques mais, si on y réfléchit, sur une certaine dimension ça remplit une fonction
semblable. Accueillir quelqu’un chez soi ; le Syrien qui a beaucoup d’attentes, le Papou qui ne veut pas
vexer. Dimension : accueil, observables : différents. Dans certaines cultures, on favorise la propreté, dans
d’autres l’abondance de nourritures, … Autre exemple : réduire les pleurs d’un enfant : cajoler vs nourrir.
Beaucoup plus général.

• UNIVERSAUX CORRÉLATIONNELS : liens de causalité universels. Liens de causalité systématiques entre


des catégories d’observables. Liens qu’on observe à chaque fois ensemble. On a envie de déduire un
lien de causalité. Au fur et à mesure que l’enfant vieillit, il développe un langage plus complexe. Corrélation
universelle entre âge et langage. Il est possible qu’il y a une 3ème variable qui explique la causalité. Au fur
et à mesure que l’enfant évolue au niveau des exercices piagétiens, on voit qu’il devient meilleur sur la
théorie de l’esprit. Mais cause possible : maturation du cortex.

• UNIVERSAUX DE PROCESSUS : lois développementales qui s’observent partout. Assimilation,


accommodation, équilibration, interactions gènes-environnement, conflit cognitif.

1.3.2 La part de culture.


La reconnaissance d’universaux et de la part de culture sont des démarches complémentaires. La culture
détermine ce qui est, selon elle, un bon développement ; un DEVLOPMENTAL ENDPOINT.

• DEVLOPMENTAL ENDPOINT : point idéal vers lequel on veut amener les enfants.

C’est une démarche qui cherche les différences culturelles. Elle est faite par les anthropologues vs
psychologues qui cherchent les universaux.

1.3.3 Emique et étique.


Ça vient de phonétique et phonémique. Dichotomie commode mais limitée.

• Phonétique : description internationale de phonèmes. Perspective transversale à travers toutes les


langues.

➢ APPROCHE ÉTIQUE : investigue un phénomène ou un comportement en se référant à des concepts


universels. Recherche la part d’universel.

• Phonémique : intérêt aux spécificités de chaque langue. Deux phonèmes différents rendent des mots
différents. /r/ et /l/ sont différents chez nous. Mais en Chine, /r/ et /l/ n’entraînent pas de différence de
signification.

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➢ APPROCHE ÉMIQUE : souligne l’unicité de toute culture du point de vue des comportements, des
valeurs et des normes. Anthropologique. Recherche la part de culturel. Psychologie indigène : on ne
peut pas comprendre une culture si on n’utilise pas les concepts propres à cette culture.

1.4 Méthodologie en psychologie du


développement culturel.
Les études développementales doivent répondre à 3 critères :

- Être multi-âge, afin de voir une certaine dynamique développementale.


- Être multiméthode. Est-ce que cette culture est habituée à ce genre de test ? S’intéresser à la culture
en question, rencontrer des chercheurs locaux pour voir si notre questionnaire est adapté.
- Être multiculturelle.

Dans la mesure du possible, il faut faire en sorte qu’il n’y ait que le culturel qui change.

Exemple : interaction des enfants belges avec leurs pairs. Comparaison avec des enfants mexicains dans un
bidonville ; différence observée. Différence culturelle (Belgique vs Mexique) ou différence école aisée vs bidonville ?
Comparer des groupes ayant un niveau socioéconomique semblable.

 Idéalement plus de 2 (sous)cultures pertinentes.

Difficultés de la méthodologie : il faut s’assurer qu’il y ait une :

- Équivalence conceptuelle. Dans certaines cultures, il n’existe pas le concept d’estime de soi. →
Importance de passer d’abord par une approche émique pour être sûr d’avoir bien compris la culture.

- Équivalence métrique :

➢ Utiliser des tests culture-free dans une approche étique.


➢ Utiliser des tests culture-fair dans une approche émique. Ce ne sont pas exactement les mêmes
tests car il n’est pas possible de faire des tests culture-free. On adapte les tests.

- Équivalence éthique. On teste l’attraction amoureuse. On provoque un stress et on leur fait rencontrer
ensuite une personne de l’autre sexe. Est-ce que la personne se sent plus amoureuse ? Il y a des cultures où
c’est plus compliqué de faire ça ; pour certaines c’est honteux et déshonorant d’être seul avec une personne
du sexe opposé dans une pièce.

- Applicabilité de la prise d’information : en fonction de ce que représente un psychologue il peut


parfois être difficile de prendre des informations. « Est-ce que parfois il vous arrive de frapper votre
enfant » ? Dans certaines cultures, pas de souci, mais dans d’autres on évite de répondre par peur que le
psychologue n’appelle les services sociaux. Questions gênantes, honteuses ; l’honneur est très favorisé
dans certaines cultures.

- Pairage des sujets : âge, SES (socio-economique status).

- Equivalence de représentativité : s’assurer que chacun des échantillons représente la population.

 Nécessité d’avoir des connaissances sur le milieu / la culture.

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1.5 Concepts.

1.5.1 Nota bene : le concept de culture.


- La culture est en évolution constante. Elle évolue tout le temps.
- (Sous)culture : dans le monde, il y a la culture occidentale et d’autres, mais au niveau occidental on ne se
sent pas comme les Allemands, on ne se sent pas comme les Bruxellois, etc. On peut découper une culture
en plusieurs petits morceaux. On peut quand même généraliser car on retrouve une certaine
cohérence.
- Diversité intra-groupe parfois plus grande que la diversité inter-groupe.

On utilise quand même ces études en psychologie développementale culturelle car possibilité de relever dans
des groupes donnés :

- Des valeurs hégémoniques / dominantes,


- Une certaine définition de la normalité,
- Une idée de bon citoyen.

1.5.2 Les valeurs.


Exemple : Sadia Sheik ; jeune fille d’origine pakistanaise. Elle a grandi en Belgique. Un jour, son père lui a dit qu’elle
devait épouser une personne de sa culture et de même origine. Elle refuse et s’installe en concubinage sans l’accord
de ses parents avec un jeune belge. Un jour, elle décide de se réconcilier avec ses parents, mais elle se fait tuer par
son frère. Sa sœur l’avait tenue pour que son frère lui tire dedans. Le juge a estimé que les parents avaient demandé
à leurs enfants de tuer la fille qui a déshonoré la famille.

 Choc des cultures ; culture de l’honneur (fille obéissante à son père, épouse un concitoyen et
coreligionnaire) vs culture de l’égalité et de l’autodétermination.

 Jugement sévère car propre à notre culture. Le fils a pris 15 ans, les parents 20 et 25 ans. Circonstance
atténuante pour la mère car cause culturelle.

 Ce qui a été puni, c’est une valeur. Le respect de la famille passe avant la vie humaine. Ça a été jugé
plus durement que le fait de tuer.

• VALEURS : ont plusieurs caractéristiques :

- CROYANCE : cognition liée aux affects, aux émotions ; très souvent, on réagit fort quand une valeur n’est
pas respectée.
- TRUISME : évidence en soi, inexplicable.
- Donnent des buts : repères abstraits qui nous aident à nous orienter. Choix politiques selon notre valeur
d’égalité.
- Transcendent les situations. Ne se traduisent pas toujours de la même façon. Respect de la vie
humaine ; certains sont OK pour l’avortement (par rapport à la mère), d’autres pas (par rapport à
l’embryon).
- Se traduisent en normes standards. Jugements entre cultures différentes, juger l’autre culture à partir
de mes standards : ETHNOCENTRISME.

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- S’organisent en systèmes cohérents hiérarchisés ; même si on prend les crimes d’honneur (tuer car on
estime avoir été déshonoré ; interdit ici), est-ce qu’on se fiche de la vie humaine dans les pays où c’est
autorisé ? Non, mais l’honneur passe avant.
- L’importance relative guide les choix.
- Propres à une société / à des individus.

1.5.2.1 Limites de l’étude des valeurs.


- Valeurs → comportement. Postulat que les valeurs déterminent les comportements.
- Comportement → valeur. Mais parfois, le comportement détermine la valeur. On change la valeur
pour légitimer son comportement.
- Désirabilité sociale ; on dit avoir une valeur qu’on n’a pas.
- Manifestations différentes d’une même valeur.
- Conflit de valeurs en fonction des situations.
- Valeurs difficilement accessibles par questionnaire.
- Ce n’est pas parce qu’on parle de valeur sociétale que tout le monde a cette valeur.

Comment on arrive à un niveau social ? Quand les personnes d’une certaine culture, en cherchant à répondre à
certaines questions fondamentales (quel rapport entre les hommes ? Quel rapport entre la nature et l’humain ?
Quel rapport avec le temps ?), en déduisent des croyances. En fonction des réponses, on obtient un continuum
entre des extrêmes. La personne « moyenne » n’existe pas.

1.5.2.2 Modèle des valeurs de Hofstede.


Il a distribué des questionnaires à des entreprises pour voir comment les gens
répondent aux questionnaires. Est-ce qu’ils ont des valeurs différentes ? Il a
trouvé quelques grandes réponses, via des analyses factorielles. Différentes
valorisations des valeurs au niveau sociétaire.

Résultats : axe individualisme / collectivisme. C’est un continuum. Comme il est


binaire, il peut être réducteur, mais il permet de comprendre des différences
entre des cultures.

Pays occidentaux : plus d’individualisme.

 Dimension qui nous intéresse ! En fonction du fait qu’on est plus ou moins vers l’un des deux pôles,
il y a des différences :

➢ Sur le soi : SOI INDÉPENDANT vs SOI INTERDÉPENDANT. Est-ce qu’on se considère comme une
personne indépendante, qui peut s’autodéterminer et qui ne doit rien à personne ou comme une
personne interdépendante issue d’une famille / lignée / d’un village ?

➢ Sur les objectifs : OBJECTIFS PERSONNELS vs OBJECTIFS DU GROUPE. Société individualiste : on


encourage d’avoir des objectifs personnels (dès l’enfance, on fait faire des choix aux enfants ; tu veux
quel hochet ?). Société collectiviste : objectifs de groupe (faire attention à sa famille avant de faire
attention à soi).

➢ ÉCHANGES vs COMMUNAUTÉ. Société individualiste : on choisit les personnes à partir de ce qu’elles


nous donnent. Société collectiviste : selon l’endroit où l’on est, la caste que l’on a, les amis sont
ceux qui sont là aussi.

➢ Comportements : ATTITUDES PERSONNELLES vs RESPECT DES NORMES.

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Il y a une surutilisation de ce modèle.

- « Modèle unique ».
- Aspect binaire, attention !
- Parfois c’est attribué à des populations sans vérification.

1.6 Individualisme vs collectivisme.


Dimension la plus importante utilisée en psychologie interculturelle. Intérêt indéniable de cette dimension, mais
elle est assez réductrice.

INDIVIDUALISME COLLECTIVISME
Identité choisie Identité déterminée
Solitude existentielle Centration sur la famille
Frontières physiques et psychologiques Hiérarchie
Modification familiale Rituels et purifications
Cognitivisme Emotionnalisme

• INDIVIDUALISME.

- Identité choisie. Chez nous, on favorise le fait de se chercher à l’adolescence. On valorise la personne
qui a tout essayé et qui finit par s’engager, qui n’a pas accepter tout ce qui était choisi par la famille.
- Solitude existentielle : comme on a le choix de s’autodéterminer, si notre vie ne ressemble pas à ce
que l’on veut, tentation de dire que c’est de notre faute. L’incertitude des sociétés individualistes
amène beaucoup de stress.
- Frontières physiques et psychologiques maintenues chez nous.
- Modification familiale par rapport à ce qui est plus traditionnel ; on choisit avec qui on veut être, on
choisit ce qu’on veut faire (partenaire : s’il ne nous plait plus, on divorce. On fait les fêtes de famille ou
pas).
- Valorisation du cognitivisme ; tout ce qui a traits à la cognition, à la réflexion. Être intelligent c’est le
plus important. On planifie tout, on cadre tout, agenda etc.

• COLLECTIVISME.

- Identité déterminée.
- Centration sur la famille : respect de la famille très marqué dans les comportements et dans les choix.
- Hiérarchie beaucoup plus forte ; on ne remet pas son patron en question, son père, … Alors que chez
nous on valorise le fait de poser des questions et on suscite la remise en question des hiérarchies.
- Davantage de rituels et purifications ; valeur de ce qui est pur, de ce qui est propre. Est-ce qu’on s’est
bien comporté aujourd’hui ? Est-ce qu’on a côtoyé des personnes de castes inférieures ?
- Emotionnalisme : on accepte davantage de montrer ses émotions. Chez nous, on favorise le fait d’être
digne en cas d’enterrement tandis que dans certaines cultures on paie des pleureuses pour un enterrement.

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1.7 La transmission culturelle.
Vidéo. On a un cerveau incroyable qui permet une enculturation.

Comment la culture se perpétue au cours du temps ? Si on met juste dans des livres et qu’ils ne sont pas lus, la
culture se perd. Il faut un processus qui passe par la relation humaine.

• TRANSMISSION CULTURELLE : processus par lequel un groupe culturel perpétue ses caractéristiques
comportementales au fil des générations, grâce à des mécanismes d’enseignement et
d’apprentissage.

- VERTICALE : ça vient des parents. Ils nous apprennent à tenir fourchettes et couteaux plutôt que baguettes.
- HORIZONTALE : ça vient des pairs. Sens de la mode.
- OBLIQUE : ça vient de la génération des parents. Professeur, oncle, tante.

Par enculturation ou socialisation :

- ENCULTURATION : imprégnation de la culture par auto-apprentissage, par imitation, sans qu’il n’y ait eu
d’enseignement à ce propos. Relations sociales.

- SOCIALISATION : processus beaucoup plus explicite, institutionnalisé. « Mange la bouche fermée ».


Choses très culturelles. École.

La transmission culturelle est fonctionnelle car elle maximise l’adaptation de l’individu à son environnement. On
prépare l’individu à être un bon citoyen.

Selon VYGOTSKY :

• TRANSMISSION CULTURELLE : activité médiée socialement, dans laquelle l’enfant acquière (internalise)
graduellement des connaissances et de nouveaux comportements, à travers des coopérations
interactives avec des membres de la société qui sont plus compétents que lui.

Le développement se fait un peu tout seul grâce à une maturation cognitive prévue génétiquement, donc c’est
universel (// Piaget). Le développement c’est le fait que l’enfant acquière au fur et à mesure des outils transmis
par la culture. L’enfant développe la capacité de dévisser une bouteille grâce à un truc culturel (on montre). Des
individus plus avancés lui montrent comment faire. Au fur et à mesure on lui donne des outils plus complexes.
C’est grâce à la culture qu’on a le mot bouteille ; c’est un mot qu’on partage parce que quelqu’un nous a appris.
Développement : transmettre des outils pour nous comprendre. Chaque culture a des outils appropriés ; une
culture sans bouteille n’a pas ce mot. On se développe en fonction de ce qui est utile dans la société.

 Outils culturels → développement cognitif.

Validation partielle :

➢ Les aborigènes sont meilleurs que les américains pour la reconnaissance spatiale ; ils grandissent
dans des populations où la chasse est importante ; il faut suivre le gibier, il faut savoir s’y retrouver.
Ils aident leurs petits à se retrouver dès leur plus jeune âge. Outil culturellement important.
➢ Enfant africain : meilleure mémoire pour les histoires. Il y a beaucoup de répétitions dans les contes
africains car tradition orale. On a surentraîné chez eux cette capacité à retenir des informations
orales.

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1.8 Modélisations courantes.

1.8.1 Modèle écologique de BRONFENBRENNER.


• ECOLOGIE : étude de l’habitat comme milieu, c’est-à-dire un ensemble de variables s’influençant les
unes les autres.

C’est un concept biologique ; comment un arbre grandit par rapport à son milieu (soleil, espace, nutriments) et
comment il influence ce qu’il y a autour de lui. Observation des interactions dans un milieu.

Pour Bronfenbrenner, on ne peut comprendre l’humain que de façon écologique. Milieu de l’enfant : parents,
crèche, école, ... Le milieu influence l’individu, et celui-ci influence aussi son milieu.

Il a dit que, trop souvent, on base la psychologie sur des expériences en laboratoire. Ça manque de validité
écologique. Les conclusions des expériences ne sont valides que si ça aide à comprendre le réel. On doit
observer l’enfant dans sa vraie vie, pas juste dans le laboratoire. In vivo vs en laboratoire.

Nécessité de prendre en compte le contexte et la perception subjective de ce contexte.

• ÉCOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT1 : l’étude scientifique de l’adaptation réciproque (interaction) entre


un être humain actif, en cours de développement, et les propriétés changeantes des milieux
immédiats dans lesquels il vit, compte tenu que ce processus est affecté par les relations qui
existent entre eux et par les contextes plus généraux dont ces milieux font partie.

1.8.1.1 Les couches systémiques de BRONFENBRENNER.


On doit comprendre l’enfant comme étant l’ONTOSYSTÈME :
caractéristiques de l’individu.

Autour de cet enfant il y a le MICROSYSTÈME : systèmes et personnes


assidûment fréquentés par l’individu (maison, crèche, école). C’est le
milieu le plus proche des enfants ; il a l’influence la plus directe et a un
effet de tampon ou un effet accentueur par rapport aux autres
systèmes. Il est influencé par les autres systèmes.

MÉSOSYSTÈME : liens, interrelations entre tous les microsystèmes.


Comment ça se passe entre la maison et la crèche (ex : promotion du coca
à la crèche mais de l’eau à la maison → conflit → retombées sur l’enfant).

EXOSYSTÈME : environnements avec lesquels l’individu n’a pas d’interactions directes mais dont les perturbations
peuvent néanmoins l’affecter. Ce à quoi l’enfant n’est pas directement en contact mais qui peut l’influencer.
Voisins, services légaux, politique d’accompagnement, … (ONE dit à la crèche qu’il ne faut pas faire boire du coca →
modification du microsystème → influence sur l’enfant, décret qui dit ce qu’il faut dire à l’école → modification de
l’enseignement à l’école → influence sur l’enfant).

MACROSYSTÈME : ensemble des croyances, valeurs et idéologies partagés par une communauté → culture.

CHRONOSYSTÈME. C’est l’évolution de tous ces systèmes à travers le temps.

1
Elle ne demande pas de retaper les grosses définitions mais de comprendre les étapes

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La culture persiste au fil du temps mais ça change, ça évolue. Il y a 100 ans on se souciait peu du recyclage car il
n’y avait pas de problème de pollution. Quand les hommes rencontrent des problèmes, il faut trouver des
solutions qu’ils intègrent dans leur culture et dans les lois → microsystème → individu.

Chaque système influence les autres et est influencé. Microsystème → exosystème : groupe de personnes qui se
battent pour un projet légal.

1.8.1.2 Application pratique.


On reçoit une maman d’origine étrangère car son fils de 4 ans ne parle pas encore, ce qui inquiète l’enseignant
qui lui a demandé de consulter avant de laisser passer l’enfant en 2ème maternelle.

Par quelles questions pouvez-vous prendre connaissances des différentes couches écosystémiques dans
lesquelles cet enfant se développe ?

Il faut rendre concret et compréhensible. Ne pas être trop vague, ne pas employer du vocabulaire compliqué
(microsystème n’est pas compréhensible par une personne non-initiée).

- Ontosystème : est-ce qu’il va vers les autres, est-ce qu’il a des amis, est-ce qu’il se dispute souvent ?
Rendre concret. Est-ce qu’il réagit au bruit ? Est-ce qu’il se retourne si on l’appelle ? Pourriez-vous me
décrire votre enfant ?
- Microsystème : quelle est la langue qu’il parle à la maison ? Vérifier qu’il discute ou pas dans différents
microsystèmes. Est-ce que vous pourriez me décrire une journée / semaine-type (technique de
l’agenda / du journal) ?
- Mésosystème : une fois qu’on a eu la journée type, on a accès aux différents microsystèmes, et on peut
tester par combinaisons successives les mésosystèmes.
- Exosystème : travail des parents (licenciement dans société du papa → dispute avec maman → stress
à la maison → influence sur l’enfant), augmentation du prix du loyer, lois de l’ancien pays (ex : Suède :
si on donne une fessée, on perd la garde de l’enfant).
- Macrosystème : est-ce que dans votre culture il y a beaucoup d’enfants qui ne parlent pas à 4 ans ? Il
faut savoir que les femmes qui immigrent ont tendance à beaucoup téléphoner à leur maman restée
au pays. Qu’est-ce que votre maman (restée au pays) pense du mutisme de votre enfant ?
- Chronosystème : y a-t-il eu de multiples déménagements ? Multiples changements de travail ?

Ensuite, on fait des tests2.

- Microsystème : lire des livres à l’enfant (si rituel du soir = bain + câlin sans livre).
- Exosystème : parler de l’exosystème : bibliothèques gratuites en Belgique. Renseigner le professeur sur
les résultats du test (si dysphasie, méthode des pictogrammes).
- Mésosystème : travailler sur des quiproquos : médiation, se déplacer pour discuter avec la maman et le
professeur pour diminuer les quiproquos.
- Exosystème : renseigner la maman sur tous les systèmes existants : ONE, …
- Macrosystème : dans le cadre d’une consultation, on peut informer sur notre culture, nos intentions et
objectifs quand on envoie un enfant en remédiation → réussir à l’école → aller loin dans les études car
peu de métiers manuels dans notre culture.

2
Examen : je fais telle intervention, sur quelle couche je travaille ?

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1.8.2 La niche de développement.
Champ théorique et environnement en tant que tel.

Intérêt au microsystème.

• Champ théorique qui étudie la régulation culturelle du micro-environnement de l’enfant et qui veut
décrire l’environnement de celui-ci dans le but de comprendre les processus de développement et
l’acquisition de la culture.

• Environnements ou milieux de développement culturellement organisés et successivement


proposés à l’enfant. Au début, enfant à la maison avec plein d’objets (Occident), ensuite crèche car
apprentissage de la collectivité, et puis maternelle avec chacun son cartable et son portemanteau pour
apprendre l’individualité, et enfin université. Réflexion au niveau culturel : si on veut avoir des membres
culturellement compétents, on a intérêt à avoir des personnes qui ont compris l’importance d’apprendre
(car peu de métiers manuels ici), donc niches de développement qui insistent dessus (sur la lecture, sur des
métiers demandant des compétences intellectuelles, …).

La culture installe des niches développementales.

Les composantes de la niche, au sein d’un milieu écologique, sont en interaction.

L’objectif de la niche est de permettre à l’enfant de se développer de manière à


devenir un membre « compétent » au sein de la société. Elle lui permet
d’intérioriser les valeurs, visions du monde et scripts comportementaux de la
culture.

• SCRIPTS COMPORTEMENTAUX : schèmes ; représentation.

• SCRIPTS ou EVENT SCHEMAS : représentation des patterns comportementaux appropriés dans un


contexte social et culturel donné. Représentation au niveau des événements, sur comment les choses
vont se passer. Auditoire chez nous : il n’y a que le prof qui parle. Les scripts sont culturellement
marqués ; les étudiants anglais posent beaucoup de questions en auditoire. Ce sont des conventions
sociales internalisées. Enculturation.

❖ Efficace et pratique dans les relations sociales.


❖ Atout pour ceux qui maîtrisent les scripts de la culture.
❖ Difficulté pour les autres.

1.8.2.1 Composantes de la niche.


Trois composantes de la niche :

1. Environnement physique et social. Où est l’enfant : intérieur ou dehors ? Dans une poussette ou pas ?
Avec qui : personnes payées pour le garder, parents, fratrie ? Avec quels objets ? Quand ?

2. Pratiques éducatives de ceux qui prennent soin de l’enfant (donneurs de soin / care givers) : qu’est-ce
qui est habituel et qu’est-ce qui est vu comme normal dans la société ?

3. Psychologie de ceux qui prennent soin de l’enfant : valeurs, croyances, ethnothéories. Qu’est-ce qui
est valorisé pour les personnes ? Respecter les ainés ? Qu’est-ce qui est important pour l’enfant à leurs
yeux ? Stimuler au niveau moteur ou cognitif ? Faire en sorte qu’il parle le plus tôt ou qu’il obéisse ?

CLAIRE MARCHAL 13
• ETHNOTHÉORIE : toutes les croyances qu’ont les parents sur le développement de l’enfant qui sont
influencées par la culture.

Difficile d’avoir directement accès aux ethnothéories des parents ; c’est via l’observation de
l’environnement et des pratiques éducatives que l’on peut comprendre leurs ethnothéories.

Au fur et à mesure du développement de l’enfant on fait évoluer l’environnement physique en faisant évoluer
les objets.

1.8.2.2 Application pratique.


Vidéo : reconnaitre la part de culturel et la part d’universel ;

Culturel :

- Environnement : dehors, nudité, beaucoup d’adultes présents, peu d’objets industriels prévus pour les
enfants ; objets protecteurs, tissus, dort dans le lit parental.
- Pratiques : enfumage, raser les cheveux au couteau, mettre des colliers pour dormir, outils près des
enfants, ne pas donner de nom, veiller sur l’enfant qui dort, tailler les vieux vêtements de la famille.
- Ethnothéories : éloigner les esprits, protéger l’enfant des esprits, lui apprendre tôt le rôle social qui lui
est assigné, peur du décès, moins de risque de mort subite, importance de la famille.

Colliers : donnent une impression aux donneurs de soin d’avoir le contrôle de la situation ; diminue le
stress.

Universel :

- Observable identique : importance de toucher le bébé (car ça offre un meilleur développement


cérébral).
- Observable systématiquement présent et partiellement invariant : mettre l’enfant en présence de plein
d’autres personnes.
- Observables variant, avec invariance formelle de fonctionnement : bercement.
- Catégories d’observables liés à une dimension d’observation : protection de l’enfant

Illustration de la niche : mère qui parle à son bébé.

- Environnement : la mère.
- Pratiques : l’enfant est mis face à la maman qui dialogue.
- Psychologie : l’enfant a besoin d’interactions ce qui permet le développement du cerveau. Objectifs
finaux : lire, école, diplôme.

CLAIRE MARCHAL 14
2. La parentalité comme
vecteur d’enculturation.
2.1 Introduction.

2.1.1 Mise en situation.


Tiger Mom : comment éduquer ses enfants pour qu’ils soient brillants ?

- Ne pas dormir à l’extérieur.


- Pas de télé ni de jeux sur internet.
- Pas d’amis.
- Pas de choix dans les activités extra scolaires.
- N’avoir que des 9 sur 10 au minimum.
- Être le premier élève de la classe.
- Ne jouer que du piano et du violon.

C’est l’éducation à la chinoise, mais éducation extrême à nos yeux car ça laisse peu de place à l’individualité. Ça
gêne le public que ses enfants soient brillants alors que c’est un style parental qui nous semble mauvais.

2.1.2 Styles de parentalité.


Il y a 3 styles de parentalité :

• AUTORITAIRE : les parents mettent énormément de règles, sont très sévères et peu chaleureux.

• AUTORITATIF : beaucoup d’attentes mais beaucoup de chaleur, les parents aident l’enfant à
performer et à devenir autonome.

• PERMISSIF : chaleureux mais avec très peu de limites et d’attentes vis-à-vis de l’enfant. « Laxiste ».

C’est une typologie très occidentale. En général, le style le meilleur (qui a les meilleures conséquences
développementales) est le style autoritaire. Il a the best devlopmental outcomes. Est-ce un universel
corrélationnel ? Il faut voir si dans chaque pays ce style a les meilleures conséquences.

Tiger mom : style autoritatif, et on voit que les enfants sont ultra performants et bien développés. Ils arrivent à
quelque chose de très valorisé dans la culture.

En fait, ces 3 styles parentaux sont limitants. Si on va dans les autres pays, on voit d’autres styles. En Chine, ça
ressemble au style autoritatif, sauf que l’affection se manifeste d’une autre façon ; les parents ne sont pas froids
(alors que nous les jugeons comme tel). Tiger mom est très présente avec ses filles et dans leur éducation. Dans
ce type d’éducation, il y a cependant très peu d’exigences avant la petite école.

Si on regarde juste les résultats scolaires, on ne parle pas du ressenti des enfants. Mais qu’en disent les enfants
chinois ? Comment l’enfant perçoit les pratiques du micro-environnement ? S’il perçoit ça comme une marque
d’amour car c’est le mieux pour le développement, alors il aura un ressenti positif. Quels sont leur but de
socialisation ? Chez nous, bonheur = plaisir, mais peut-être que chez eux c’est d’être respectable. Ces enfants,
sur des échelles de bien-être, sont moins heureux. Mais ce sont nos échelles, avec notre vocabulaire !

CLAIRE MARCHAL 15
2.1.3 Existe-t-il un instinct maternel / parental ?
Est-ce qu’il y a un instinct maternel, qui fait qu’on va se comporter pareil ? Qu’est-ce qu’il fait qu’à un moment
donné il y a des différences entre des familles ?

Il y a des universaux au niveau des pratiques parentales.

Les parents sont comme des agents de la culture3. Ils sont des vecteurs, des moyens pour que l’enfant intègre la
culture. C’est la mission assignée par la culture aux donneurs de soin, à travers des niches développementales
qui sont structurellement organisées.

Fonction parentale universelle et prioritaire : survie de l’enfant. Ensuite, si l’occasion se présente, stimulation et
enfin la transmission des valeurs (qui passe par la socialisation, par des histoires).

Transmission
Survie Stimulation
de valeurs

2.1.4 Altricialité.
Pourquoi est-ce que c’est important que les parents remplissent cette tâche de faire survivre l’enfant ? C’est
parce que l’enfant arrive au monde en étant altriciant.

• ALTRICIALITÉ : période du développement durant laquelle un organisme est en extrême état


d’impuissance et de dépendance. Etat d’extrême dépendance par rapport à son milieu, par
rapport à autrui.

On n’arrive pas mature sur terre à cause d’un dilemme obstétrical. Deux hypothèses :

➢ L’enfant doit être suffisamment développé pour sortir mais pas trop, sinon il ne sait plus sortir.
➢ Ou alors, comme il consomme beaucoup d’énergie, il mettrait la mère en danger en continuant à
grandir dans le ventre.

En conséquence, impact important des expériences précoces ! C’est pratique pour la culture.

Peut-être que l’homme arrive inachevé parce que ça permet de mieux survivre. On a pu s’affranchir des
prédateurs grâce aux outils, remparts, etc. Il a fallu qu’on puisse transmettre ces trouvailles à notre progéniture.
C’est pour ça qu’il faut qu’elle ait un cerveau capable d’apprendre beaucoup. D’où l’importance du langage ; on
doit pouvoir expliquer. La culture permet la survie. Le cerveau est préparé culturellement, il est fait pour
accueillir la culture.

 L’homme est biologiquement culturel.

2.1.5 Altricialité et plasticité cérébrale.


Le cerveau est plastique tout au long de la vie mais surtout au début. On a pu montrer ça avec des gens qui ont
eu des AVC et qui ont pu retrouver certaines choses en créant des nouvelles connexions.

3
Examen : savoir donner un exemple en quoi est-ce que la culture assigne aux donneurs de soin la tâche
d’enculturer l’enfant via des niches développementales.

CLAIRE MARCHAL 16
• CONSTRUCTIVISME NEURAL : Approche selon laquelle les représentations cognitives sont construites à
partir de l’interaction dynamique entre les mécanismes de maturation neurologique et l’activité
neuronale liée à l’interaction avec le milieu.

Il y a plus de continuité que de discontinuité : on va toujours garder une certaine plasticité cérébrale mais ça va
être plus difficile de changer. C’est plus difficile d’apprendre une autre langue que de continuer dans la langue qu’on
a déjà appris.

Importance des premières expériences, qui se déroulent avec les parents…

2.1.6 La parentalité ou « parenting ».


• PARENTALITÉ : ensemble d’activités qui incluent beaucoup de comportements C’est tout ce que les
parents mettent en place pour leur enfant pour influencer la façon dont l’enfant va grandir, pour
influencer les child outcomes.

La façon dont on va être parent dépend de plein de choses : notre tempérament, niveau socioéconomique,
culture (de notre pays et qu’on choisit), l’âge où on est parent, …

• CAREGIVER : donneurs de soins.

La parentalité comprend l’enculturation, tâche assignée par la culture. La culture s’intègre au début grâce aux
parents. Le parent est un vecteur d’enculturation. Les contes permettent de faire passer des valeurs culturelles.
Exemple : Cendrillon qui est domestique et qui devient princesse ; valeur culturelle en Occident = partir de rien pour
arriver très haut (self-made man).

2.1.7 Plasticité cérébrale et parentalité.


L’enfant naît totalement altriciant et fragile. Son cerveau doit se développer de manière extra-utérine. Les
premières expériences ont un impact à très long terme. A la naissance, il est important de :

- Beaucoup stimuler.
- Répéter ces stimulations.

Conséquences à long terme des expériences précoces et répétées :

- Impact du toucher → 20% de la masse cérébrale. Si manque de stimulation (caresses, bercement,


toucher), le bébé peut avoir une masse cérébrale jusqu’à 20% inférieure.
- Stimulation verbale → langage. Si manque de stimulation, difficultés de langage, de lecture, …
- Expériences aversives → psychopathologie (dépression, anxiété, violence). Les enfants qui n’ont pas
eu assez de soins de leur maman ont plus de risque de développer une psychopathologie. On a
remarqué au niveau cérébral que, chez les enfants ayant vécu une maltraitance, la zone cérébrale
concernant l’empathie est moins développée, elle a moins de connexions → ce n’est pas une question
d’imitation.

Au fur et à mesure, l’enfant développe une certaine façon d’interpréter le monde, car ses parents vont au fur et
à mesure l’exposer à ce qui est important pour sa culture.

CLAIRE MARCHAL 17
2.1.8 Bébé biologiquement interactif ?
Pour que la culture puisse passer, nous sommes biologiquement interactifs.

La première tâche développementale du bébé est d’essayer d’avoir une relation avec un donneur de soin. Pour
ça, il a intérêt à être super mignon (il est fait pour être mignon et on est fait pour le trouver mignon ; patrimoine
génétique favorisant l’interaction avec le bébé et donc sa survie). Ainsi, un bébé qui n’a pas ce patrimoine aura
moins de chance de survie ; il y a une action de la sélection naturelle.

Quelles sont les prédispositions qu’il possède pour motiver le caregiver à se soucier de lui ?

- BABYNESS : les traits caractéristiques des bébés. Grand front, grands yeux, petit nez, petite bouche. En
Occident, c’est un canon de beauté : le babyness favorisé chez les femmes (manga). Suscite quelque
chose de positif : envie de protéger et de s’attacher.

- Préférence pour les visages : ça donne du plaisir à la maman → interactions. Etude :


Préférence pour les visages en termes de temps de fixation.

- Préférence pour la voix de la mère, qu’il va essayer de reproduire. Quand il fait « areuh », il comprend
que sa maman répond et donc recommence. Les adultes sont programmés pour répondre.

- Imitation faciale et gestuelle dès la naissance : surtout les 2 premiers mois car après ce n’est plus
nécessaire. Ici, c’est pour motiver l’adulte ; il ressent qu’il y a une relation symbiotique avec son bébé.

- Dès le 2ème mois, myélinisation du cortex occipital (traitement des stimuli visuels) : le bébé comprend
mieux les visages et commence à entrer, à 3 mois, dans de vraies interactions. Il n’y a plus besoin de
savoir imiter systématiquement.

Il y a des différences interindividuelles, mais la biologie fait que ça se mette en route.

Si l’enfant n’a pas de renforcement positif, ne tente plus d’interaction.

3 mois : étape clé dans plusieurs cultures. Début de la crèche en Occident et du fait de dormir tout seul. Autres
cultures : présenter le bébé à la lune et au soleil (Inde), à un groupe plus large, …

2.1.9 Parent biologiquement interactif ?


Exemple du chat Potté (Shrek) : il utilise le concept de babyness avec sa petite tête adorable.

La plupart de nos comportements instinctifs sont fonctionnels.

Comportements universels :

- BABYTALK : zone proximale de développement. Comportement instinctif → marqué biologiquement et


sélectionné.

- Appréciation et protection du babyness.

- Contingence très rapide dans le face à face : le parent répond dans un délai entre 200 et 800 ms. Très
rapide : pas le temps d’être médié par le cortex préfrontal. Heureusement, car les petits n’ont pas la
capacité d’établir des liens de cause à effet quand les événements se passent à plus d’une seconde
d’intervalle.

CLAIRE MARCHAL 18
- Sensibilité parentale : programmation biologique. Être capable de répondre adéquatement aux
besoins de son enfant. Adéquatement, rapidement (RESPONSIVENESS), de façon constante.

- Nourrissage : lorsqu’une mère allaite, une hormone l’aide à s’endormir vite et à se réveiller rapidement.
Si le bébé est dans la même pièce, elle a du mal à dormir.

Il y a une série de comportements universels, mais il y a aussi des comportements culturels.

- Variabilité culturelle en lien avec les exigences adaptatives du milieu.

2.2 Les travaux de Keller.


Une chercheuse, KELLER, s’est demandé ce qui était universel et ce qui variait culturellement dans les
comportements des parents. Elle a essayé d’établir un comportement universel qui se met en place dans les
premiers mois de la vie. Elle retrouve 6 grands types de comportements qui se retrouvent dans toutes les
cultures, mais peut-être que la façon avec laquelle ils s’expriment va être modulée par l’environnement. Toutes
les mamans nourrissent leur enfant, mais peut-être que dans certaines cultures on le nourrit plus. En considérant
par exemple que dès qu’il est triste il faut le nourrir, ou pas. Contact corporel : toutes les mamans le font, mais
différence d’intensité / d’endroit selon certaines cultures.

Elle a été voir plusieurs familles dans plusieurs cultures, a fait du multiméthode et a observé des dyades mère-
bébé.

2.2.1 Component model of parenting.


Quels sont les soins universels ?

2.2.1.1 Soins primaires.


• SOINS PRIMAIRES : nourrissage, soins, abri.

Première tâche des parents : s’assurer de la survie de son enfant. En cas de situation d’extrême pauvreté /
détresse (réfugié sur la route), c’est le seul système qui reste.

Fonction principale : réduire la détresse et permettre à l’enfant d’avoir l’émergence d’un sentiment de sécurité.
Je crie → maman vient réduire ma détresse. Ça crée la sensation que le monde est sécurisé, prédictible, et qu’on
ne doit pas faire tout le temps attention pour sa vie.

 Fonctions : réduire la détresse, émergence de sentiment de sécurité et de notion de « soi ».

2.2.1.2 Contact corporel.


• CONTACT CORPOREL : contact, portage, cosleeping.

La quantité de temps que l’enfant est avec sa maman varie selon les cultures collectivistes – individualistes ; des
tribus en Afrique gardent leur enfant 8h contre le corps de la mère (93% du temps d’éveil de l’enfant).

Toucher : important pour le développement cérébral et sert à la sensation de confiance. Je suis en sécurité avec
ma maman, je suis protégé, chaleur émotionnelle, cohésion sociale et sentiment d’appartenance. Est-ce que la
vie doit se faire seul ?

CLAIRE MARCHAL 19
Chez nous, on met vite l’enfant seul dans sa chambre pour qu’il apprenne à être indépendant. Dans d’autres
sociétés, c’est vu comme de la maltraitance. Changement selon les cultures. Plus on est en contact avec les
parents, plus on a tendance à internaliser respect de la hiérarchie et soumission aux parents.

 Fonctions : sensation de confiance, chaleur émotionnelle, cohésion sociale, sentiment


d’appartenance, soumission aux valeurs parentales, respect de la hiérarchie.

2.2.1.3 Stimulation corporelle.


• STIMULATION CORPORELLE : toucher, mouvement, jeux corporels.

Observé partout mais variabilité. Les papas apparaissent plus que dans les 2 premières conditions. Ils sont
davantage présents.

Fonctionnel : dans certains pays on peut s’attendre à ce que l’enfant aide très tôt. Exemple : bébé namibien :
marche très vite et est entrainé par ses parents à tenir quelque chose sur sa tête. Ethnothéorie : l’enfant doit aider
aux tâches ménagères. Environnement : être dans la nature, boite de conserve.

 Fonctions : perception de son corps, développement moteur et découverte de l’efficience motrice.

2.2.1.4 Stimulation par l’objet.


• STIMULATION PAR L’OBJET : montrer des objets.

Aider l’enfant à connaître le monde extérieur qui l’entoure. Fonction : développement cognitif. Dans les pays
individualistes : se désengager de la dépendance sociale. Quand un bébé nait, on lui offre un doudou ;
ethnothéorie : besoin d’un objet transitionnel pour l’enfant.

• OBJET TRANSITIONNEL : objet qui aide l’enfant à gérer son angoisse quand il est séparé de sa figure
d’attachement.
 Fonctions : développement cognitif et désengagement de la dépendance sociale.

2.2.1.5 Face-à-face.
• FACE-À-FACE : on donne une attention exclusive à l’enfant avec contact oculaire.

Universel qui varie dans la quantité de temps passée en face à face avec son bébé.

Début d’émergence du dialogue, important pour le développement des interactions sociales et pour la
régulation des émotions. « Olalah, je vois que tu es fâché, là tu as l’air content, là tu n’aimes pas ». Son cortex
préfrontal n’est pas encore développé pour la régulation des émotions ; celle-ci est donc externe.

L’enfant développe très vite la notion d’AGENTIVITÉ : notion de causalité qui commence à se créer qui fait que le
bébé se rend compte qu’il est capable de faire des choses. Sensation d’être un acteur causal dans ce qui
l’entoure. 9 mois : jette des objets au sol, encore et encore. Joie procurée grâce au sentiment d’agentivité. De
la notion d’agentivité découle le SENTIMENT D’UNICITÉ : je suis un être à part entière, je ne fais pas tout comme
ma maman. SELF-EFFICACY : sentiment de compétence ; je suis un être qui sait faire des choses. On en devient
conscient grâce à la contingence ; c’est parce que la maman répond très vite que le lien de causalité se fait.

 Fonctions : émergence du dialogue, régulation émotionnelle, sentiment d’unicité et de self-efficacy


car contingence.

CLAIRE MARCHAL 20
2.2.1.6 Enveloppe narrative.
• ENVELOPPE NARRATIVE : ce que le caregiver raconte.

C’est un universel dont le contenu est culturellement marqué. C’est par l’enveloppe narrative qu’on fait passer
notre culture.

Société individualiste : insistance sur augmenter l’estime de soi de l’enfant, qui doit se sentir unique et fort
(USA : tu es le plus grand garçon du monde ! Regarde comme tu es grand et musclé). Dans une société collectiviste :
faire attention à ce que l’enfant ne se sente pas supérieur aux autres personnes (Niu Niu est si petite. Secoue tes
petites jambes, oh, les petites jambes).

 Fonctions : transmission des significations, modèles et valeurs culturelles sur le monde et sur soi.

2.2.2 Preuves empiriques pour ces systèmes.

Société individualiste Société collectiviste


Contact corporel Peu important. Important.
Stimulation corporelle Peu importante, car la motricité Important.
finira bien par venir.
Stimulation par l’objet Plus importante que dans les Peu d’importance.
sociétés individualistes. Objets fait
pour la stimulation.
Face-à-face Important ; importance du langage. Moins d’importance. L’enfant est un co-
De plus, on insiste pour que l’enfant agent ; il est partout avec sa maman, qui
comprenne qu’il est un agent fait un tas de choses, sur son dos. Il peut
causal. parfois se prendre pour sa maman.

Dans les sociétés où l’on fait beaucoup de contact corporel et de stimulation corporelle, on insiste plus sur le
développement corporel que sur le développement cognitif.

CLAIRE MARCHAL 21
2.2.3 Mécanismes interactifs.
Ce qui change aussi entre les cultures, c’est la façon dont les parents répondent aux enfants, interagissent avec
eux. Ce sont des mécanismes indépendants du répertoire universel, ils sont supposés moduler ce répertoire dans
son expression. Ainsi, modération (en partie culturelle) de ce répertoire → modération de l’impact
psychologique.

Modération selon 3 mécanismes, se référant à la façon dont les mères répondent aux signaux positifs ou négatifs
de l’enfant : attention, chaleur, contingence.

2.2.3.1 Attention.
Société occidentale : attention dyadique exclusive. L’attention de la maman n’est que sur son enfant.
Attention exclusive pour développer son self, pour qu’il se sente comme un agent indépendant, quelqu’un à part
entière qui mérite d’être regardé. Risque : enfant roi.

Autre forme possible : attention partagée extra dyadique : on ne donne pas toute l’attention à l’enfant ; il est
là aussi pour travailler etc. Surtout dans les contextes de co-occuring caregiving : donner des soins en même
temps qu’autre chose. Les mamans n’ont pas 3 mois de congé de maternité et doivent travailler. Le
macrosystème dépend de conditions plus larges, comme des conditions économiques (est-ce qu’on peut payer
un congé maternité aux mamans ?). Le fait que l’enfant soit coagent va développer le sens de la loyauté et du
respect de sa place (castes en Inde).

Ces 2 formes sont considérées comme adéquates culturellement.

2.2.3.2 Chaleur.
• CHALEUR : expression de l’affection, sourire, empathie, … Ne s’exprime pas toujours de la même façon.

Aide l’enfant à développer des compétences sociales et émotionnelles, altruisme, imitation, acceptation des
valeurs.

Les études sont cependant moins claires car en tout cas, elles ne permettent pas de comparaison binaire
« Occident – autre ».

2.2.3.3 Contingence (responsiveness).


• CONTINGENCE = RESPONSIVENESS : pattern temporel entre 2 événements qui fait penser à une causalité.
Rapidité de réponse.

En général, on réagit moins rapidement aux signaux négatifs plutôt qu’aux positifs :

- 5 à 7 secondes pour les signaux négatifs.


- 0,2 à 0,8 secondes pour les signaux positifs.

C’est peut-être quelque chose de fonctionnel ; ça renforce les réactions positives. On répond vite à l’enfant pour
qu’il ait envie de refaire.

La contingence aide au fait que l’enfant ait un sentiment de compétence (fait bouger sa maman), son sentiment
de self-efficacy, son sens de soi.

Les études montrent que les mères occidentales sont plus rapides mais c’est observé en journée…

CLAIRE MARCHAL 22
2.2.4 Modèles interdépendant – indépendant.
Comment les gens considèrent leur self, leur moi ?

• INDÉPENDANT : être séparé des autres qui choisit ce qu’il fait et qui devient ce qu’il veut.
• INTERDÉPENDANT : être fondamentalement relié aux autres, qui ne décide pas vraiment de ce qu’il veut.
Son avenir dépend aussi des autres.

Deux grandes façons de voir qui nous sommes, qui sont très proches des notions d’individualisme et de
collectivisme. Souvent, les individus dans une société individualiste sont indépendants et c’est l’inverse pour les
sociétés collectivistes.

Postulat de KAGITCIBASI, repris par KELLER : l’environnement détermine la culture. Environnement physique (s’il
fait chaud, important d’apprendre à son enfant d’aller chercher de l’eau. Chez nous, robinet ; apprendre tôt la
motricité fine pour tourner le robinet), démographique (nombre de frères et sœurs influence l’attention que la
maman donne, mortalité infantile), socioéconomique.

Selon les changements de ces environnements, la culture change car les conditions sont différentes.

Exemple de niche :

- Environnement : nudité, plante, beaucoup de femmes présentes.


- Pratique : enfumage.
- Ethnothéorie : protéger de l’attirance des démons.

C’est fonctionnel pour eux, mais à nos yeux aussi ; c’est une société où ils n’ont rien pour stériliser, donc ça permet
de tuer des germes.

Intérêt pour 2 extrêmes :

- Aller voir dans une communauté pauvre, rurale, peu éduquée avec un taux de mortalité infantile élevé.
- Et aller voir dans une grande ville anonyme, aisée, éducation élevée et taux de mortalité infantile faible,
afin de contraster les extrêmes (objectif avoué).

En fonction de ces extrêmes, il va être plus ou moins fonctionnel de développer un type ou un autre de sensation
de soi, un modèle de soi. Modèle :

• INTERDÉPENDANT : on va faire en sorte que l’enfant internalise l’hétéronomie et le relatedness.


➢ HÉTÉRONOMIE : placer ma destinée et mes choix aussi en extérieur de moi-même. Je suis psy parce
que dans ma famille tout le monde l’est.
➢ RELATEDNESS : inclure en soi des choses qui viennent de l’extérieur. Je fais ça parce que je suis issue
d’une famille de psy et ça fait donc partie de moi.

• INDÉPENDANT : on va faire en sorte que l’enfant internalise l’autonomie et le separateness.


➢ AUTONOMIE : prise de décision par soi-même parce que je le veux.
➢ SEPARATENESS : je suis un agent qui est vraiment séparé des autres, je ne me définis pas par mon
nom de famille / clan / village / ma religion.

Indépendance Interdépendance
Autonomie Hétéronomie
Separateness Relatedness

CLAIRE MARCHAL 23
Comparaison d’une communauté indienne avec des familles occidentales.

Les niches où on inclut les enfants dépendent de plein de variables contextuelles (si difficulté de survie, apprendre
à être débrouillard, si pas, apprendre créativité). En fonction de ça, l’enfant se développe avec des compétences
qui sont culturellement valorisées.

2.2.4.1 Différents patterns parentaux.


Il y a différents patterns parentaux :

- DISTAL (culture indépendante) : beaucoup de face à face et de stimulation par l’objet, ce qui met une
certaine distance entre soi et les autres. Peu de stimulation et de contacts corporels.

- PROXIMAL (culture interdépendante) : contraire.

2.2.4.2 Différentes ethnothéories parentales.


Indépendance Interdépendance
Importance de la stimulation par les objets → Stimulation corporelle (massage, tenir debout)
valorisation du développement cognitif + apprendre importante pour la fortification et pour le
à s’occuper seul. développement.
Conversation : importance de prendre en compte les Le langage n’est pas la priorité.
initiatives de l’enfant.
Contact corporel et face-à-face → individualité. Contact corporel → sécurité.
Focalisation sur les signaux positifs → maintien de la Focalisation sur les signaux de détresse → survie.
conversation.

2.2.4.3 Différents buts de socialisation (socialization


goals).
Où est-ce que je veux amener mon enfant ?

• BUTS DE SOCIALISATION : idéaux définissant la façon d’être optimale, ou l’aboutissement


développemental désirable, déterminés par des groupes culturels 4 en raison de leur environnement
spécifique.

4
GROUPES CULTURELS : au sein d’une même société il y a aussi des différences, des sous-groupes culturels.

CLAIRE MARCHAL 24
- Modèle interdépendant : devenir un membre respectant son rôle dans l’harmonie social, related (relié),
coopérant.
- Modèle indépendant : devenir un individu indépendant, autonome, ayant confiance en lui.

En fonction du but de socialisation qu’on détermine se produit de la PSYCHIATRIE DÉVELOPPEMENTALE


PRESCRIPTIVE. On pathologise un comportement qui dans d’autres cultures peut être vu comme excellent.

SI on n’est pas conscient de notre ethnocentrisme, le risque est de juger en pathologisant d’autres
comportements qui, dans la logique de l’autre, ne sont pas pathologiques et sont fonctionnels.

Ethnocentrisme : juger les choses à partir de ses repères culturels.

2.2.4.4 Différents donneurs de soin.


Dans toutes les cultures, la mère est universellement le premier donneur de soin, mais il peut y avoir des
nuances :

- Modèle interdépendant : plein de caregivers différents ; oncle, tante, amis, fratrie. Le bébé n’est jamais
seul.
- Modèle indépendant : le donneur de soin est quasi-exclusivement la mère dans les premiers mois, mais
il y a peu de contacts corporels (environ 40%).

2.2.4.5 Différentes pratiques de sommeil.


- Modèle indépendant : l’enfant a son propre lit (divorce : le fait d’avoir une chambre uniquement pour
l’enfant motive la décision du juge). On déconseille le cosleeping (lit ouvert à côté ou dormir avec lui
dans le lit) pour une question de sécurité. L’enfant a des jouets et doudous avec lui, il est important qu’il
ait son propre espace.
- Modèle interdépendant : cosleeping, qui a fonction de sécurité. Parfois pour toute la famille.

2.2.5 Conclusion des travaux de Keller.


- Modèle indépendant : échanges égalitaires, modèle centré sur l’enfant, qui est un acteur individuel.
Beaucoup de variabilité intraculturelle observée, car importance du choix.
- Modèle interdépendant : rôles sociaux prédéfinis et hiérarchisés, modèle centré sur l’adulte. L’enfant
est un membre de la communauté. Peu de variabilité intraculturelle.

CLAIRE MARCHAL 25
Attention, ce sont des simplifications, il faut nuancer ;

- Les sociétés se retrouvent sur un continuum.


- Il y a des variations au sein même de la culture.
- Évolution temporelle : on manque de recule parce que la psychologie du développement est jeune.
Mais dans certains pays qui s’enrichissent, on peut voir que la culture va peut-être changer grâce au
changement de l’environnement socioéconomique.

Modèle indépendant Modèle interdépendant


Caractéristiques Autonomie Hétéronomie
principales Separateness Relatedness
Patterns parentaux Distal (face à face, stimulation par Proximal (stimulation corporelle,
objet) contacts corporels)
Ethnothéories Stimulation par l’objet → Stimulation corporelle (massage,
parentales développement cognitif + apprendre à maintien debout) → fortification et
s’occuper seul. développement

Conversation : prendre en compte Le langage n’est pas la priorité


l’initiative de l’enfant.
Contacts corporels et face-à-face → Contact corporel → sécurité
individualité
Focalisation sur les signaux positifs → Focalisation sur les signaux de détresse
maintien de la conversation → survie
Buts de socialisation Devenir un individu indépendant, Devenir un membre respectant son rôle
autonome, ayant confiance en lui dans l’harmonie sociale, related,
coopérant
Caregivers Mère Mère et d’autres personnes
Pratiques du sommeil L’enfant a son propre lit, pas de Cosleeping
cosleeping
Conclusion Echanges égalitaires, modèle centré Rôles sociaux prédéfinis et hiérarchisés,
sur l’enfant qui est un acteur individuel. modèle centré sur l’adulte. Enfant =
Beaucoup de variabilité intraculturelle membre de la communauté. Peu de
car importance du choix variabilité intraculturelle.

2.3 Parents comme vecteur d’enculturation.


Extraits : repérer certaines notions liées à la parentalité.

- Environnement nomade : pratique = garder l’enfant avec soi. Justification : il risque de partir, les esprits
risquent de le reprendre s’il n’est pas chouchouté. Fonctionnel : il y a des animaux, il est important de
garder l’enfant contre ça.

- Dire que la maman est impure et l’isoler avec l’enfant ; fonctionnel car pas de choses désinfectantes.
C’est bien de les garder à l’écart car ils sont immunitairement fragiles.

• CULTURE : ensemble de normes, d’idées, valeurs, conventions, comportements, représentations


symboliques à propos de la vie qui sont largement partagés. Persiste à travers le temps. Guide et régule
la vie quotidienne. Détermine quelles sont les compétences qui sont valorisées au sein de la culture
(chez nous : autodétermination, autonomie). Elle détermine ce qui est bon, normatif, acceptable.
Communiquée aux nouveaux membres du groupe ; importance des parents. Ceux-ci sont en première
loge.

CLAIRE MARCHAL 26
Impact de la culture sur les 3 composantes de la niche développementale :

a. Environnement physique : où, avec qui, quand ?


b. Ethnothéories parentales : croyances culturellement ancrées concernant :
➢ Les étapes développementales (quand l’enfant doit-il marcher ?).
➢ La façon font l’enfant est perçu (ange, démon ?).
➢ L’endpoint visé (buts de développement).
➢ Attribution causale des comportements (est-ce que l’enfant est difficile parce qu’il y a une mauvaise
ambiance, parce que sa mère est mauvaise ou à cause de sa personnalité ?).
➢ Croyances sur les pratiques éducatives (fessée ou pas ?).
c. Pratiques éducatives.

• THÉMATICITÉ : le fait qu’il y ait beaucoup de liens entre les composantes de la niche parentale.

2.3.1 Conséquences développementales ?


On a parlé de beaucoup de différences en termes de pratiques éducatives. En quoi ça nous intéresse ?

- Il y a parfois des conséquences développementales. Étude sur le fait d’apprendre à inhiber


comportementalement ou pas. Au Canada, le fait d’être trop inhibé comportementalement est vu
comme négatif. La maman pousse l’enfant à explorer et à socialiser. Chez nous, être timide est vu
comme un défaut. En Chine, c’est assez bien vu d’être inhibé comportementalement. Les enfants au
départ inhibé au Canada réussissent moins bien à l’école et sont moins bien appréciés par leurs pairs
(mère ne valorisant pas). En Chine, c’est le contraire car valorisation de ce trait de caractère.

- A nuancer quand même ;

➢ Certaines pratiques parentales ont des conséquences universelles. Universel corrélationnel.


Exemple : des parents qui font du chantage et de la menace avec leurs enfants est lié à plus de
psychopathologie. On observe ça dans plein de cultures.
➢ D’autres pratiques parentales ont des conséquences différentes en fonction du contexte culturel,
comme la fessée. Pourquoi ? Modération d’un effet principal par sa normativité culturelle.

2.3.2 Normativité culturelle.


Exemple : punitions physiques. L’effet principal que l’on a entre le fait de frapper et la conséquence
développementale est modéré par la normativité culturelle.

• EFFET PRINCIPAL : quelque chose qu’on observe dans toutes les cultures.

Le fait de punir physiquement son enfant augmente son agressivité, mais en fonction de la normativité culturelle,
ce lien va être plus ou moins fort. Pourquoi ?

Si un enfant se fait frapper par un parent dans une société où tout le monde le fait, il ne va pas se dire que c’est lié à
moins d’acceptation de ses parents. Dans une société où c’est mal vu, le parent se retient jusqu’à exploser de colère
et frapper ; il s’excusera par la suite. L’enfant va se dire qu’il a fait quelque chose de très mal, il ne va pas se sentir
aimer et il y aura un phénomène de relecture ; les autres lui diront que c’est horrible d’avoir été frappé etc.

CLAIRE MARCHAL 27
2.3.3 Pratique parentale et signification culturelle.
Divers cas possibles :

- 1 pratique → 1 signification. Une pratique a toujours la même signification. Exemple : babytalk.


- 1 pratique → plusieurs significations. Parfois, une pratique observée partout n’a pas la même
signification selon la culture. Exemple : regarder la personne ; honnêteté ou agressivité.
- Plusieurs pratiques → 1 signification. Plusieurs pratiques différentes ont une signification. Exemple :
montrer son amour.

 Nécessité de comprendre les ethnothéories et les significations culturelles des pratiques pour en
comprendre l’impact développemental. Pour savoir la signification culturelle derrière des pratiques
parentales, il faut interroger les parents.

Vidéo.

Exemple de pratique parentale : en Occident, on porte beaucoup d’attention à l’enfant. Au Kenya, les mamans
détournent les yeux quand leur enfant les regarde → conséquences développementales.

- Environnement : la maman ne peut pas se permettre de donner trop d’attention à l’enfant.


- Pratique parentale : détourner le regard.
- Ethnothéorie : si je regarde trop mon enfant, il va toujours chercher mon attention en pleurant etc.

 Il y a une thématicité, un lien conceptuel qui peut se faire entre chaque élément.

2.4 Exemples d’études.

2.4.1 Etude ISPCS (Super & Harkness).


Souhait d’accéder aux ethnothéories.

• ETHNOTHÉORIES : filtre entre la culture et les pratiques parentales. Peu accessibles car implicites,
générales et abstraites. Elles sont cependant reliées aux 2 autres composantes : l’environnement
et les pratiques.

On y accède par les 2 autres composantes de la niche. On va essayer d’observer comment ça se passe
concrètement. On laisse agir les gens normalement. Quand on voit une certaine récurrence (maman fait
plusieurs fois et plusieurs familles dans la culture), on pose des questions.

Etude faite sur plusieurs pays Occidentaux.

- Objectif : voir comment les croyances culturelles impactent les pratiques éducatives.
- Design multiméthodes : pas que du quantitatif. Si on ne fait que ça, problème : c’est rarement culture-
free. Pour être le plus culture-fair possible, faire du qualitatif ; journal intime et descriptions libres.

CLAIRE MARCHAL 28
2.4.1.1 Special time vs family time.
Exemple : concept de SPECIAL TIME aux USA. Concept particulier propre à la
culture. C’est un moment où se consacre particulièrement à son enfant. Ils
pensent qu’il est important pour le bon développement de l’enfant qu’il ait du
temps tout seul avec son parent. C’est plus qu’une croyance, ça se traduit en
pratique parentale. 3x plus de temps avec leur enfant que les Hollandais, qui eux
ont 3x plus de temps de famille (FAMILY TIME). Mais comment les parents
américains font pour accorder de l’attention à leur enfant s’ils en ont d’autres ?
Comment s’organiser ?

Obésité chez l’enfant : regarder la niche de développement. On ne favorise pas


les repas de famille et on mange devant la télévision, …

Chaque culture a des concepts propres à elle, il faut avoir un traducteur pour comprendre.

2.4.1.2 Temps de sommeil.


Il y a de fortes divergences entre cultures. Un couple interculturel peut avoir de réelles difficultés de couple au
moment d’éduquer les enfants. C’est le moment où tous les truismes sortent et entrent en conflit avec ceux de
l’autre.

Les chercheurs ont essayé de modéliser la façon dont les choix sont faits différemment selon les cultures.

CLAIRE MARCHAL 29
Explication du modèle5.

Au-dessus : on a des modèles culturels implicites sur plein de choses ; bon parent, famille, … En fonction de ça,
il y a une série de croyances pour des domaines spécifiques de comportement qui apparaissent.

- Pays-Bas :
➢ Croyance =l’enfant a besoin de sommeil pour grandir, il doit avoir un rythme régulier. C’est
implicite.
➢ Idée explicite à propos des pratiques appropriées : les trois R des Hollandais ; calme, régularité
et propreté. Pour qu’un enfant s’endorme bien, il faut que ces 3 conditions soient remplies. L’ONE
a fait des fortes campagnes pour ça.
➢ Idée à propos des outcomes (on n’a pas la croyance sans raison) : si jamais on applique les 3 R,
l’enfant va bien grandir.
➢ Facteurs intervenants : le tempérament n’est pas important. Les parents ont des horaires
favorables au fait d’avoir une régularité chez les enfants.
➢ Actual practices (qu’est-ce que les parents font réellement ?) : les parents font un horaire régulier
pour le sommeil et pour les siestes.
➢ Actual outcomes : le bébé dort plus (à 6 mois : jusqu’à 2h de plus qu’un bébé américain) et est
plus calme, détendu, peu agité.

- USA :
➢ Croyance = le besoin de sommeil dépend des enfants, de leur âge et de leur tempérament. Les
américains essaient beaucoup de s’ajuster aux envies et besoins de leur enfant.
➢ Idée explicite : Peut-être que dormir tôt ce n’est pas son truc, il ne faut pas le forcer. Pas de
certitude, pas de campagnes claires. Certains pédiatres disent qu’il faut dormir tôt, mais pour les
parents c’est plus compliqué car ils regardent leur expérience d’enfant. Il y a une incertitude causée
par le possible conflit entre les avis des experts et par l’expérience personnelle (fatigabilité du
parent).
➢ Idée à propos des outcomes : stress des parents, mais l’enfant va être normal, mature.
➢ Facteurs intervenants : le tempérament joue un rôle important. Les parents ont un emploi du
temps stressant. Il y a un conflit culturel entre indépendance, amour et responsiveness (→ on ne
frustre pas son enfant afin de prouver son amour et on favorise son indépendance).
➢ Actual pratices : moins d’horaires réguliers et « pratiques pour faire face aux marches nocturnes ».
➢ Actual outcomes : le bébé dort moins mais est plus énergique / excité et actif.

Que tirer comme conclusion de ce genre d’étude ? Aller voir les ethnothéories plutôt que de tenir des contre-
arguments. Remonter le plus haut possible dans les modèles pour les rendre plus explicites. Expliquer à ses amis
étrangers comment on fait en Belgique et pourquoi !

Réexplication du modèle :

a. Modèles culturels implicites.


b. Une croyance spécifique en découle. Elle est spécifique car on entre dans le domaine de la parentalité.
c. Idées explicites par rapport aux pratiques appropriées.
d. Idée à propos des outcomes : faire un enfant socialement compétent.
e. Facteurs intervenants.
f. Pratique réelle.
g. Outcome réel : impact sur le développement de l’enfant.

5
Il faut savoir le redessiner.

CLAIRE MARCHAL 30
Application de ce modèle au problème des jeunes filles musulmanes dans une culture occidentale qui ne peuvent pas
aller à la piscine :

a. Macrosystème : les hommes et femmes sont fondamentalement différents dans leurs rôles sociaux. Il faut
protéger la pureté de la fille.
b. Il faut séparer les garçons et filles dès l’enfance.
c. Apprendre à la fille à rester à sa place, séparer les enfants dès l’école.
d. Avoir une fille socialement compétence (et non pas débauchée).
e. Dans cette situation d’immigration, un des facteurs est le désaccord de la nouvelle culture (à l’école, les
filles doivent aller avec les garçons à la piscine).
f. On décide de ne pas mettre la fille à la piscine.
g. La fille ne saura pas nager.

2.4.1.3 Le tempérament.
Voir comment les parents décrivent leur enfant et éduquent selon le tempérament qu’ils perçoivent de leur
enfant.

• TEMPÉRAMENT : tendance innée de l’enfant à se comporter d’une façon ou d’une autre (tendance à
être craintif, sociable, …).

On demande aux parents de décrire librement leur enfant : sociable, actif, volontaire, aimant, …

En Belgique, on décrit son enfant avec le terme « en avance » ; c’est quelque chose qui est attendu et valorisé
par la société.

Il y a des choses en commun parmi ces cultures mais il y a aussi des modèles culturels.

CLAIRE MARCHAL 31
- Dans certains pays, le fait d’être heureux est important. Si l’enfant fait une colère, on l’aide à se calmer.
- En Italie, on insiste sur l’ÉQUILIBRE ; le fait que l’enfant arrive à tempérer ses émotions. Importance qu’il
se régularise. Si colère, on lui dit de se calmer.
- Pays-bas : bonne attention et régulier. Dans plein de pays, ce n’est pas important et valorisable.
Thématicité sur l’importance d’avoir une bonne attention, un calme, une régularité.
- USA : intelligent, pose des questions. Dans les sociétés individualistes, on apprend l’enfant à poser des
questions. Parce que les choses changent vite, entre autres. Mais aussi dans les pays collectivistes…
Mais c’est moins prégnant dans tous les pays.
Il est intéressant de voir comment les cultures évoluent avec l’arrivée de classes moyennes, technologies,
richesse.

2.4.2 Etude sur la communauté maya.


Comparaison d’une ethnie avec la même ethnie 30 ans plus tard → étude interculturelle.

On regarde les jeunes femmes qui tissent. Comment apprennent-elles à leur petite fille à tisser ?

- Années 60 : on ne dit rien. On prend les filles à côté d’elles, installent un petit métier à tisser et prennent
les mains de l’enfant pour tisser. Il doit juste imiter la maman. Transmission de façon non-verbale avec
très peu de changement (toujours les mêmes motifs).
- Années 90 : il y a eu pas mal d’évolution dont une industrialisation qui permet de faire des textiles
rapidement par des machines. Face à ça, acheter le vieux tissu avec les symboles habituels devient
moins attirant. Au niveau commercial, les mayas ont dû innover pour pouvoir faire concurrence. Les
innovations ont amené un changement au niveau des pratiques parentales. On ne fait plus juste imiter
l’enfant, il y a une transmission verbale et puis on le laisse chercher. Ainsi, il va se tromper et trouver
par lui-même. Changement qui vient d’un macrosystème (culture) et qui change le microsystème.
Parfois, ça induit des changements sur l’ontosystème ; impact sur le développement de sa créativité,
de son développement moteur, de son autonomie, …

Un des rôles des parents assignés par la culture est de rendre son enfant compétent dans sa culture. Tous les
parents ne sont pas égaux par rapport à ça à cause de différences d’accès aux informations.

 Environnement → culture → adaptation des pratiques parentales pour rendre l’enfant compétent dans
sa culture.

2.4.3 Etude sur le cosleeping.


COSLEEPING : dormir avec son enfant.

Hommes préhistoriques : dorment avec enfant. Maintenant, chez nous : campagnes pour dire que c’est
dangereux. Au début on doit allaiter tout le temps ; c’est plus pratique de dormir avec le bébé (certaines ouvrent
même leurs vêtements pour le laisser boire seul comme ça elle ne se réveille pas). Maintenant, chez nous, on a
des co-lits.

Les chercheurs ont été prendre des gens de cultures différentes qui font partie d’un même pays (blancs US,
latinos US, afro-américains US) ; ça permettrait de comparer juste la culture. Vérifier que même niveau socio-
économique. Si ce n’est pas le cas, ils ont alors contrôlé les effets.

CLAIRE MARCHAL 32
- Les blancs laissent l’enfant dormir seul, éventuellement avec le
frère et seul.
- Chez les latinos, l’enfant dort surtout avec les parents. Les latinos
vivent à plusieurs générations, tandis que nous on isole (personne
âgée dans un home, ce qui dans certaines cultures est considéré
comme une trahison), on n’a pas l’habitude de rester ensemble.
- Afro-américains : l’enfant dort avec ses frères et sœurs. Aux US,
beaucoup de responsabilités sont données aux grands frères car
beaucoup de gangs dans la ville. Mais on peut se poser d’autres
questions : peut-être que les blancs sont plus riches et ont la
possibilité d’avoir une chambre pour les parents et une chambre par enfant.

Qu’est-ce qui fait que les gens font ou non du cosleeping :

- Raisons pratiques : manque de chambre, environnement (animaux sauvages qui circulent), fonctionnel
(allaiter rend moins fertile), …
- Ethnothéories parentales : cultures indépendantes ; pour la sécurité on ne dort pas avec. Cultures
interdépendantes : pour la sécurité de l’enfant on dort avec.
➢ Occident : dormir seul, avoir son propre espace ; essentiel pour développer son autonomie.
➢ Cultures interdépendantes : cohésion sociale, contraception, allaitement.

Etude sur les raisons pratiques du cosleeping. On demande aux participants d’organiser une maison 3 chambres
pour y faire vivre 2 parents et 5 enfants et on regarde quels sont les arrangements trouvés.

- Indien : le couple parental dort avec la petite fille de 3 ans (il faut prendre soin d’elle), et puis on met
ensemble une fille de 14 ans avec le garçon le plus jeune (pour éviter l’inceste). Ce qu’on évite, c’est de
mettre un fils pubère avec une femme.
- US : parents ensembles, 2 filles ensemble, 3 fils ensemble.
 Ce n’est pas qu’une question de chambre, il y a des modèles culturels.

Etude sur les risques du cosleeping. Le cosleeping n’augmente pas le risque de mort subite. Il le diminuerait
même ; en étant contre la mère, l’enfant est stimulé par la chaleur et par la respiration de la mère, ce qui
l’empêche de faire une apnée.

Au Japon, il y a plus de 50% de mères qui font du cosleeping. Or, ce pays a le taux de mort subite le plus faible
au monde (<0.2/1000).

 Le cosleeping pourrait sauver des vies dans certaines conditions.

Chez nous, on en a peur car ça ne se fait pas dans des conditions optimales ; maman qui a pris des médocs, de
l’alcool, matelas spéciaux trop mous, trop de cousins, … Parce que la culture ne nous fait pas comprendre
comment bien faire le cosleeping, il est mal fait chez nous.

CLAIRE MARCHAL 33
2.4.4 Etude : quelle routine avant de dormir ?
Quelles sont les routines faites avant de dormir ? Comment peut-on observer les modèles culturels qui se jouent
là ?

- Il y a des universaux observables identiques en eux-mêmes ; besoins liés à la physiologie (faire ses
besoins).
- On observe d’autres similarités : faire un câlin, jouer, parler, chanter, dire des prières, …
- Différences culturellement marquées :
➢ Europe : objet confort (doudou) pour pallier l’absence de la mère, lecture d’une histoire. De
manière générale, il y a plus de routines chez les Européens.
➢ Latinos : biberon avant d’aller au lit ou dans le lit (nous on ne le fait pas car on pense que l’enfant
doit être régulier dans ses repas. Mais eux ont un rapport différent à l’obésité).
➢ Afro-américains : plus de bains (en Afrique, la stimulation motrice est très importante ; ça pourrait
faire partie de cette stimulation car c’est suivi de massages).

Tout ça est important pour comprendre la façon dont les petits enfants en maternelle sont sécurisés ou non.
Certains ont besoin d’avoir un biberon en arrivant (sensibiliser les institutrices).

2.4.5 Etude chez les !Kung.


Etude chez les !Kung : on voit que les mamans sont très permissives par rapport à l’agressivité de leur enfant.
Ce n’est pas du laxisme. Les enfants crient et frappent les animaux, il y a très peu d’intervention maternelle.
Quelle est la fonction de ce comportement ? En quoi a-t-il du sens dans son environnement ? C’est une tribu qui
se nourrit de chasse ; l’agressivité envers les animaux est vue comme positif puisqu’à un moment donné il faudra
bien les poursuivre et les tuer. La mère n’intervient pas.

Chez nous, la pratique parentale serait vue comme laxiste. Au début, un enfant qui brutalise les animaux travaille
le fait d’être un agent de causalité (motricité fine en arrachant les ailes d’une mouche). Ceux qui continueraient
à un âge avancé avec de gros animaux inquiètent les parents car on retrouve ça dans les personnalités
antisociales (psychopathes, perverses).

 On en arrive à la notion de PSYCHIATRIE DÉVELOPPEMENTALE PRESCRIPTIVE : on observe les enfants avec


ce qu’on pense être un bon développement.

CLAIRE MARCHAL 34
3. Le développement
moteur.

Ligne : ça commence au plus tôt à cet âge-là, et pour tel âge le comportement doit être développé. Distribution
en courbe de Gauss. Si apparition au-delà de la ligne : problèmes développementaux.

Marcher seul : de 11 à 16 mois.

3.1 Historique.
Début du 20ème siècle : beaucoup de tests de QI pour savoir le QI des enfants. Pourquoi ce genre de chose a été
motivée ? Industrialisation → les agriculteurs perdent leur travail. Plus grande diversité e travail ; les plus malins
vont dans des métiers plus intellectuels (avocats, médecin) et les autres dans des métiers plus manuels, ce qui a
motivé le gouvernement à demander aux psychologues de faire des tests de développement et des QI. On a
commencé à décrire tout un tas de choses.

3.1.1 GESELL.
GESELL : un des premiers auteurs qui a décrit le développement moteur, en 1928. Il a testé une série d’enfant. A
partir de là, il y a eu une échelle de Gesell qui a été très utilisée dans le monde et qui a inspiré d’autres échelles
de développement, comme l’échelle de BAYLEY. Cependant, Gesell n’a observé que 51 enfants (venants du
même endroit et ayant le même niveau socioéconomique), et de là il a tiré des conclusions universelles. A partir
des études descriptives, on tire des normes prescriptives.

Il a posé le postulat d’une séquence développementale universelle. Les stades se suivent les uns après les autres,
chaque stade englobe le stade précédent et il n’y a pas de régression possible.

CLAIRE MARCHAL 35
3.1.2 Enfant culture-free ?
Des auteurs ont remis en question cette séquence universelle. Des anthropologues, en 1950, avaient décri une
précocité incroyable en Ouganda :

- Assis : 4-6 mois.


- Debout : 7-11 mois.
- Marche : 10-12 mois.
- Course : 14-18 mois.

Hypothèses innéistes : les Africains sont différents. Couleur de peau différente ; gènes différents au niveau de
la peau. Peut-être des gènes différents pour ce qui concerne la motricité.

Résultats répliqués avec des études plus rigoureuse (plus d’observations), et confirmation des décalages →
déclenchement de nombreux débats. Années 50 : racisme. Si on est d’accord de dire que la cause est différente
au niveau génétique pour le développement moteur, alors c’est la même chose au niveau du développement
cognitif.

On fait des réplications méthodologiquement plus faibles (années 80). Ce qui est intéressant, c’est que dans des
pays d’Afrique, certains enfants (nouveau-nés zambiens et ougandais) sont comparables à certains enfants
américains. Ça dépendrait alors du niveau socioéconomique des populations choisies, de leurs habitudes de vie.
Quand on étudie les Afro-américains, il y a une ghettoïsation (les familles afro-américaines se marient avec
d’autres familles afro-américaines) et donc on peut se dire qu’au niveau génétique il y a quelque chose qui reste,
mais ils ont une éducation américaine. Pourtant, ils ne sont pas capables de courir à 14 mois. Perte de la
« précocité africaine » en cas d’éducation occidentale.

 Les différences sont plutôt non-liées à la génétique.

3.1.3 Quelques différences.


On a vu un décalage au niveau du CRAWLING ; mouvement entre ramper et marcher à 4 pattes.

Stade-clé selon GESELL. Problème ! Si on est dans une logique de stade piagétien, si l’enfant ne sait pas faire ça,
il ne sait pas faire le reste.

- En Afrique, ce mouvement est rare et apparait tardivement. Qu’est-ce que l’enfant fait alors pour se
déplacer ? Quand il est assis, il sautille sur ses fesses pour se déplacer. Ou encore, il est sur le ventre,
s’oriente vers sa cible et roule.
- En Jamaïque, 30% des enfants le font, et c’est relativement tardif.
- Aux Royaume-Unis : 83% des enfants le font.
 Ordre variable des compétences motrices.

 Différences remettant en question la notion de séquence développementale.

3.1.4 Points communs.


Même si les grandes fonctions (marcher, attraper, s’asseoir) apparaissent à des âges différents, elles finissent
par apparaitre quand même.

 EQUIFINALITÉ GÉNÉRALE pour les grandes fonctions mais avec des trajectoires différentes.

CLAIRE MARCHAL 36
On observe aussi des DÉCALAGES HORIZONTAUX : à un même stade, l’enfant a un certain âge chronologique et a
un âge développemental. Au niveau moteur, on peut voir éventuellement qu’il est censé avoir 24 mois en âge
de développement mais on voit des décalages ; il est plus doué ou moins doué pour certaines choses.

Les enfants, à partir d’un certain âge, sont capables de classer des objets du plus petit au plus grand mais pas pour
tout (hauteur mais pas volume). Un enfant peut faire des choses en motricité fine mais ne sait pas faire des choses
qu’il est censé savoir faire au niveau de la motricité globale à ce même âge.

• DÉCALAGES HORIZONTAUX : à l’intérieur d’un même stade développemental, il y a une non-


généralisation des performances.

Un enfant a 2 ans au niveau de la parole, motricité globale et relation sociale, mais pour certaines compétences il
est en retard ou en avance (2,5 ans au niveau de la préhension fine). On observe ça régulièrement.

 Mais ça peut être lié à la culture, au fait qu’elle sur-stimule ou sous-stimule certaines compétences.

Hypothèse de la psychologie interculturelle : outre les enfants qui ont des problèmes d’apprentissage, tous
les autres qui ont de l’avance ou de retard, c’est parce que c’est valorisé ou pas par leur culture.

 CULTURE FIT HYPOTHESIS (hypothèse de l’ajustement culturel) vs hypothèse du retard / précocité.

Dans certaines cultures, il est important de marcher tôt et donc on stimule ça.

3.2 Culture et pratiques parentales.


Vidéos : qu’est-ce que je vois de fonctionnel ? Universaux : prendre soin de l’enfant.

Afrique : pas de lange → selles partout → bactéries → maladies → lavement pour contrôler quand il va déféquer
et quand les bactéries seront dans la bassine, comme ça on jette en-dehors du village. Sinon, trop de risque
d’attraper des maladies.

Inde :

- Macrosystème : plus honorable d’avoir un nez fin.


- Exosystème : histoires racontées (le voisin, qui avait un beau nez, était très populaire et aimé des
femmes).
- Microsystème : la maman pince le bébé de l’enfant.

Occident : manipulation de l’enfant comme s’il était fragile. Pratique différente ! Afrique : on tient le bébé par la
tête, on le secoue par les pieds.

Sociétés individualistes : on a externalisé tous les conseils concernant la façon de s’occuper d’un bébé. On a
moins l’opportunité de voir comment nos proches le font. Quand on devient parent, on a tendance à aller
chercher de l’information ailleurs (livre, internet). Problème : grande diversité dans les informations.

Sociétés collectivistes : on a l’opportunité de le voir car on vit ensemble, donc on fait les mêmes comportements.

Vidéo : il est intéressant de voir les limites corporelles de la maman par rapport au bébé. Elle met de l’eau dans
la bouche de l’enfant et souffle dans sa narine. Nous, on a des objets manufacturés, stérilisés et spécialisés qu’on
utilise dans le rapport qu’on a avec le bébé dès le départ. Là-bas, la maman utilise son corps pour prendre soin
de son bébé. Développement social : la limite du soi est très différente dans les sociétés collectivistes.

CLAIRE MARCHAL 37
Le développement moteur dépend de la maturation biologique mais va être avancé ou reculé par ce qui est
favorisé par la culture (compétences socialement désirables). On va renforcer ou non certaines compétences
en fonction de la façon dont on se comporte avec nos enfants.

Renforcement (ou non) des priorités motrices en fonction de leur valeur adaptative → développement optimal.

 Culture → ethnothéories → pratiques parentales → développement.

Le développement moteur est modifié par des pratiques formelles et informelles.

3.2.1 Pratiques formelles.


• PRATIQUES FORMELLES : visent le développement moteur de l’enfant ; stimulation volontaire du
développement moteur.

Objectif : atteindre le plus vite ce qui est socialement désirable.

Exemple : vérifier le tonus → permet de voir si enfant malade ou pas.

Composantes environnementales de ces pratiques :

- Occident : on externalise les pratiques formelles du développement moteur (Little gym, ostéopathe,
psychomotricité, …).

- Ailleurs : dans la vie quotidienne.

Exemple de pratiques formelles : massages et élongations (tirer sur les muscles).

- Inde, Jamaïque, Afrique : beaucoup utilisés pour stimuler le développement moteur.


- Occident : objectif relationnel. Chez nous, les massages reviennent à la mode mais c’est externalisé :
l’ONE donne des cours de massages aux parents. Pour nous, l’objectif n’est pas de stimuler le
développement mais de renforcer la relation. Pour qu’il y ait un impact sur le développement moteur,
il faut que ça soit plusieurs fois par semaine pendant au moins 10 minutes.

Adaptation des pratiques à la maturation de l’enfant.

Les pratiques formelles changent en fonction des ethnothéories concernant les âges d’acquisition ; stimulation
en fonction des ethnothéories sur l’âge d’acquisition. Par exemple, dans plusieurs villages en Jamaïque, il y a la
croyance que l’enfant doit marcher à un an. Si l’enfant ne marche pas à un an, on creuse un petit trou dans le sable
près de la mer, on met ses pieds et on remet du sable. On laisse la marée monter ; il doit partir. La marche est un
enjeu social important là-bas.

3.2.2 Pratiques informelles.


• PRATIQUES INFORMELLES : stimulation incidente du développement moteur. Exemple : maman
indienne masse son bébé ; stimule son tonus mais veut le rendre rebondi (socialement désirable).

Lors des activités quotidiennes ou ayant un autre objectif que le développement moteur.

CLAIRE MARCHAL 38
Exemple : façon de donner le bain. Chez nous, on manipule l’enfant comme si c’était un vase chinois, alors
qu’ailleurs pas.

 Impacts sur le développement moteur.

Dans nos bornes développementales, notre développement moteur est en retard car on sous-stimule l’enfant.

Stimulation vestibulaire, visuelle et proprioceptive.

Exemple : façon dont l’enfant est porté. Chez nous, on l’assoit beaucoup. Il existe des séries d’ustensiles
différents pour garder l’enfant assis. Dans plein d’autres pays, ils sont « debout » (portés sur le dos d’un parent).
Niveau stimulation vestibulo-oculaire, ça a d’autres conséquences ; enfant porté = adaptation constante quand
son parent marche. En plus, il voit d’autres personnes (vs enfant couché dans poussette).

• PROPRIOCEPTION : sensation de la position de notre corps et de nos muscles.

Les bébés portés ont un avancement et un renforcement musculaire par l’ajustement du corps.

!Kung : stimulation globale par le portage et motricité fine grâce aux bijoux de la maman. Les mamans ont des
colliers et portent les enfants. Ils vont toucher, faire bouger les perles etc. Au niveau de la motricité fine, ils sont
plus en avance.

3.2.3 Pratiques et développement.


Les pratiques parentales ont un impact sur le développement.

- Seules les compétences sur-exercées car survalorisées seront en décalage (avance) → décalage
horizontal.
- Seules les compétences sous-exercées car sous-valorisées seront en décalage (retard) → décalage
horizontal.

Les décalages sont plutôt en défaveur des Occidentaux.

3.3 Incidences culturelles et décalages.


Différents types d’études pour observer les décalages :

- In situ : sur le site, ce qui offre une meilleure validité écologique.


- Immigration.
- Laboratoire.
- Déprivation.

3.3.1 Etudes in situ.


• VALIDITÉ ÉCOLOGIQUE : ce qu’on voit c’est quelque chose qui se passe réellement sur le terrain, ça
nous apprend quelque chose sur les vrais gens.

Inconvénient de ce genre d’étude : on a du mal à séparer la culture des autres facteurs. Exemple : bébés africains
en avance. Génétique ou culture ? On a du mal à départager les facteurs causaux.

CLAIRE MARCHAL 39
Intéressant à faire avec ce type d’étude : observer des cultures géographiquement proches, niveau socio-
économique (SES) équivalent mais cultures différentes.

3.3.1.1 Crawling.
Afrique : observation de 2 tribus proches (l’une vit de chasse et de cueillette, l’autre d’agriculture et d’élevage).

- L’une pratique la stimulation formelle → crawling à 5,5 mois.


- L’autre ne le fait pas → crawling à 8 mois s’il apparait.

3.3.1.2 Sandbags.
En Chine du Nord (région où il y a peu d’eau), on laisse l’enfant déféquer et uriner dans un sac de sable. Le sable
absorbe, on retire le sable sale et on remet le bébé (pas la possibilité de le laver). Les mamans ont beaucoup
d’enfants (car pas de moyens de contraception), c’est un moyen de le mettre dans un endroit sans qu’il ne bouge
et aille se mettre en danger. De 12 à 24 mois : mouvements restreins jusqu’à 16h par jour.

Décalage ; les enfants se mettent assis et à marcher avec environ 2 mois d’écart.

3.3.1.3 Emmaillotage.
Emmaillotage : permet de maintenir la température corporelle stable. Permet d’avoir des bébés qui dorment
mieux, pleurent moins et ont moins de coliques.

Pas de retard de développement : l’enfant a la possibilité de pousser et de s’étirer dans la couverture →


CONTRACTION ISOMÉTRIQUE ; on contracte le muscle sans changer sa longueur.

Autre raison du fait qu’il n’y ait pas de décalage horizontal : désenmaillotage de l’enfant de temps en temps car
adaptation à l’évolution de l’enfant.

3.3.1.4 Sécurité.
Sécurité = motivation générale qui vient souvent dans les pratiques parentales.

Paraguay : une tribu fait beaucoup de marches en forêt (forêt dangereuse ; insecte, animaux). Donc les mamans
minimisent les mouvements des enfants en-dessous de 2 ans. Pas de stimulation au niveau moteur, afin de les
garder près d’elles. Les enfants se mettent à marcher vers 2 ans. Ce retard est utile car ils n’ont pas de conscience
du danger avant. Là, ils commencent à avoir une meilleure perception (« je me rappelle être tombé là, je vais
faire attention »). Grâce aux capacités cognitives de l’enfant, la maman se met à stimuler l’enfant sur le plan
moteur pour qu’il marche.

L’enfant a 17 mois de retard en âge de développement par rapport à l’âge chronologique à 3-4 ans. A 5 ans, stade
cognitif de raisonnement (début), la maman commence à leur dire d’explorer. A 8-10 ans, ils savent faire plus de
choses que les occidentaux ; peuvent monter dans des arbres d’une hauteur de 7 mètres.

 Le développement moteur est plus plastique que ce qu’on pensait.

Perspective piagétienne : bornes développementales strictes, succession linéaire, absence de régression et


besoin de stimuler à la période sensible sinon c’est fichu.

CLAIRE MARCHAL 40
Sécurité : aussi en Occident. Plutôt que de restreindre l’enfant dans ses mouvement (on valorise l’autonomie),
on valorise des objets de sécurité (resserrer les armoires, plastique arrondi sur le coin de la table, …).

Sécurité : mort subite (SIDS) ; pendant tout un temps, on a dit en Occident qu’il fallait mettre les bébés sur le
ventre. Plus tard, on a dit qu’il fallait les mettre sur le dos. Et puis sur le côté. Les gens ont pensé que finalement
personne ne sait.

- Sur le ventre : l’enfant dort mieux, digère mieux, dort plus profondément. Mais, en dormant plus
profondément, il y a plus de risque de mort subite. A un moment donné (1994), campagne « back to
sleep » ; des recherches ont montré le lien entre dormir sur le ventre et mort subite.

Colonnes = nombre de morts pour 1000 enfants par mort subite. On voit que le nombre a clairement diminué.
Ça va corréler avec la « back to sleep campaign ». AAP ; recommandation par pédiatres. Il y a un temps pour que
le microsystème s’adapte.

Ça a eu des conséquences sur le développement moteur :

- A 4 mois, 75% des enfants passent moins de 20 minutes éveillés sur le ventre.
- 6 mois : 50%.

Ça a des conséquences en termes d’exploration et de tonicité. Sans parler du phénomène du crâne plat (pas que
déformation, ça peut avoir des conséquences au niveau cervical sur toute la chaîne du dos → problèmes au dos
plus tard).

Quand on teste les enfants occidentaux, la plupart sont en retard (22% des bébés de 6 mois). Pourquoi ? Quand
on utilise un test, pour que l’enfant ait un score moyen, il doit être comme l’enfant moyen (on a fait des tests
dans la population générale et on a obtenu une courbe de Gauss). Les tests sont vieux ; si on continue à prendre
les vieux repères, on voit que nos enfants sont en retard. Importance de faire un réétalonnage des tests avec la
population actuelle !

Chez nous, le crawling et la station debout sont plus tardifs.

3.3.2 Etudes liées à l’immigration.


Etude sur des mères Jamaïcaines au Royaume-Unis.

- Si pratiques traditionnelles de massage : l’enfant a un port de tête parfait à 1 mois. Position assise et
marche plus tôt.
- Mais si abandonne ses pratiques (puisqu’on lui dit à la maternité qu’il ne faut pas), même
développement que des enfants britanniques (port de tête à 3 mois).

CLAIRE MARCHAL 41
NB : importance de la pression sociale de la société d’accueil.

3.3.3 Etudes expérimentales.


McGraw, 1935 : a essayé de beaucoup stimuler des jumeaux. Résultats : nage à 9 mois, rollers à 12 mois, savent
monter un plan incliné à 70° à 21 mois.

Zelazo, 2006 : l’enfant à 12-16 mois peut faire une nage qui ressemble davantage à celle de l’adulte.

On peut faire avancer l’âge.

3.3.4 Etudes de la déprivation précoce.


Mais est-ce qu’on peut faire régresser un enfant, retarder son âge ? Oui, mais on peut rattraper, s’ajuster.

Mais si sous-stimulation vraiment trop importante ? Si famille dysfonctionnelle (négligence, toxicomanie, …),
enfants placés dans orphelinat (pas de maman présente, pas de regard ni de contact).

Etude au Liban avec des bébés dans orphelinat ; sont seuls dans leur lit, rideau entre chaque lit. Nourriture :
biberon calé sur le côté du lit. Pas de jouet ni de visite (sauf pour langer) ; infirmières pressées → pas
d’attachement.

On teste les enfants avec nos échelles : ils ont un score de 63 aux échelles de développement. 2,5 % d’enfants
les moins développés ; ils sont en retard profond ou sévère.

Même observation dans des orphelinats en Iran : 15% des enfants marchent à 3 ans.

 Ces choses sont beaucoup plus irréversibles, ils ont été privés précocement de façon structurelle des
soins dont ils ont besoin.

Les enfants qui se retrouvent en orphelinat ne sont pas non plus n’importe quels enfants (sauf en cas de guerre) ;
les parents peuvent avoir une situation de vie compliquée, être toxicomanes, porteurs de troubles
psychiatriques, ... Les enfants sont alors sans doute porteurs de certains gènes. Peut-être qu’ils ont été
abandonnés parce qu’ils avaient l’air handicapés dès le début (impact de l’alcool sur son cerveau) → sous-
stimulation.

Années 30 : qu’est-ce que ça donnerait de priver un enfant de stimulation ? Ont pris des enfants qui semblaient
se développer normalement et les ont volontairement sous-stimulés. Résultats :

- Préhension à 8 mois.
- Position assise à 10 mois.
- Station debout à 12 mois.
- Marche à 17-26 mois.

Il y a un retard, mais il a pu être rattrapé. On n’est pas dans les mêmes chiffres qu’au Liban.

 Décalage au niveau des bornes développementales mais endpoint général identique.

CLAIRE MARCHAL 42
3.4 Incidences culturelles sur les trajectoires
développementales.
Trajectoires d’acquisition sont différentes.

Si on prend le réflexe de la marche, c’est quelque chose de testé très tôt chez nous à la maternité. Ce qu’on a
tenu pour acquis pendant longtemps, c’est que l’enfant a ça dans les premières semaines de vie, le perd (2 mois)
puis le redécouvre ; forme en U d’une série de réflexes moteurs.

En Afrique, ils se servent de ce réflexe pour entrainer, pour essayer que l’enfant marche plus tôt. Pratiques
formelles de stimulation de la marche. Conséquence : le réflexe ne se perd pas et les enfants marchent plus tôt
(8-9 mois vs 14 mois chez nous).

La culture va fournir des attentes (ethnothéories → pratiques) et la


courbe de développement sur le plan des compétences en fonction de
ce qui est attendu. Chez nous, les enfants sont peu stimulés pour la
marche, mais vers 12-13 mois on s’attend à ce que l’enfant commence
à marcher ; le donneur de soin va se mettre à stimuler. Une fois que
l’enfant marche, l’attente sociale est rencontrée (sauf si retard), donc
moins de stimulation, ça stagne. Le moment où ça va beaucoup
augmenter est l’entrée en maternelle, où on s’attend à ce que l’enfant
coure dans des cerceaux, saute, … donc on restimule.

On ne va pas avoir nécessairement la même chose dans d’autres


cultures. C’est beaucoup moins en palier.

• PÉRIODES D’INTERMITTENCE : un enfant ne se décide pas en


un jour de marcher. Il va essayer un jour, arrêter l’autre,
reprendre etc. Période sensible : si on donne une
stimulation à cette période, ça a un impact beaucoup plus
grand.

Compression des périodes d’intermittence par pratiques parentales, en raison des attentes sociales /
adaptation.

La position assise en Afrique est surentraînée. Interprétation des chercheurs : il y a beaucoup de moments de
rassemblement avec chants et danses. Pour être un membre actif de la communauté, c’est important d’y être
présent et donc de savoir s’asseoir.

Augmenter le contrôle sphinctérien en Occident : chercher à réduire la durée d’intermittence pour le contrôle
sphinctérien. Une fois que l’enfant n’a plus déféquer pendant la nuit, on va le stimuler en le grondant s’il refait,
… Des pratiques qui vont réduire.

CLAIRE MARCHAL 43
3.5 Incidences culturelles sur l’endpoint.
Qu’est-ce que tout ça change au niveau de l’âge adulte ?

• ENDPOINT : niveau ultime de développement d’une performance liée à une compétence particulière
(cognitive, motrice, sociale, …) et niveau ultime tel que désiré par une population pour un individu
moyen ; ce qui est attendu de l’individu moyen dans la société. C’est lié au but de socialisation
(attendu de chasser ou rester calme sur une chaise devant l’ordinateur ?). Selon ça, on ne stimule
pas les mêmes choses.

Au nord du Mexique, une tribu court sur des distances allant de 150 à 300 km en 48h, avec des sandales. C’est
très valorisé car il faut être capable de faire beaucoup de km (chercher de l’eau, fuir les bêtes, trouver la moindre
ressource). Jeunes enfants : il faut beaucoup les motiver. Les enfants de moins de 10 ans sont capables de faire
40-50 km sur la journée. Ils savent le faire à l’âge adulte car très entraînés.

 Pas possible chez nous car on n’y a pas été entrainés.

Kenya : l’enfant est entrainé très tôt à marcher avec un poids qui fait jusqu’à 20% de sa masse corporelle. Les
femmes africaines sont capables de le faire sans dépense énergétique supplémentaire. Le corps va se
réorganiser ; port très droit. Quand poids sur la tête, mouvement réflexe du corps qui met la colonne vertébrale
droite. Influence sur la musculature. Finalement, elles peuvent transporter jusqu’à 70% de leur masse.

 Douleurs chez nous car on n’a pas entrainé ça quand on était petit.

Des retards sont possibles, avec une moins bonne performance. Endpoint avec de moins grandes performances.

Tribu en Turquie. Sur les 19 membres du clan, 5 adultes marchent comme des ours, à 4 pattes. Qu’est-ce qui fait
qu’ils marchent comme ça ? Au niveau cérébral, il y a quelque chose de particulier. Petit clan : gènes partagés.
Un morceau du cortex est manquant ; peut-être que la motricité est compliquée pour eux. Manque de
stimulation de l’environnement aussi. Pas de stimulation, on les a laissé fonctionner à 4 pattes. Après l’étude,
des kinésithérapeutes sont allés aider (on sait que des gens sans cervelet sont capables de marcher). Ils ont fait
un entraînement régulier et intensif, et ont réussi à les faire marcher à des âges avancés → plasticité incroyable
du développement moteur.

3.6 Incidences culturelles sur la forme des


mouvements.
On sait tous marcher s’asseoir etc. Au niveau de la forme des mouvements, il y a des différences. Lien assez fort
avec nos stéréotypes. Il y a toute une enculturation. Grâce aux neurones miroirs.

Italien vs Américain : est-ce qu’ils ont des gestes différents ? Oui. Les gestes italiens sont ronds, larges et
symétriques les gestes américains sont droits, saccadés et anguleux.

C’est le genre de chose qui peut intéresser des conseillers en communication. Si on veut se lancer en politique,
être persuasif, … Il est important de connaitre les codes de la société pour ne pas être inadapté.

Il y a une série de choses implicites et explicites qui font qu’on se tienne d’une façon ou d’une autre.

CLAIRE MARCHAL 44
3.6.1 Culture et forme des mouvements.
3.6.1.1 Position assise.
Par exemple, la plupart des femmes ne se tiennent pas avec les jambes écartées dans un fauteuil. Série de choses
passant par l’implicite et par l’explicite (« mais enfin, on ne se tient pas comme ça »). Il y a une série de codes
sociaux qui sont différents en fonction de la situation où l’on se trouve (se redresser quand les beaux-parents
entrent).

 Développement modifié par la socialisation → codes → attentes sociales.

3.6.1.2 Exemple d’influence explicite : les pieds en lotus.


Façon explicite dont le microenvironnement a changé l’ontosystème : les pieds en lotus. Modifier la forme des
pieds pour modifier la forme du corps. A 5 ans, quand l’enfant est capable de marcher et de comprendre, on lui
fait comprendre qu’on doit empêcher ses pieds de grandir pour correspondre à un canon de beauté. Mais la
femme ne sait pas travailler dans les champs et 10% des filles meurent de cette pratique ; ongles incarnés →
infections mal soignées → gangrènes → septicémie.

Pourquoi la culture a valorisé ça ? Parce qu’elle estimait que ça allait permettre une meilleure reproduction car :

- Il y a une réorganisation des mouvements.


- Elles marchent les jambes tendues et font des tout petits pas. C’est assez mignon, joli. La tête reste à
une hauteur égale ; les femmes semblaient flotter. Impression de femme délicate, comme une fleur
(donc pure) → bonne à marier.
- En plus, ça transfère l’effort dans les cuisses et dans les fesses (le mouvement part de plus haut), donc
elles sont plus larges ; meilleur rapport taille / hanche→ grossesse OK.

Besoin d’un changement dans l’exosystème : des lois ont empêché ça (interdiction de le faire et interdiction
d’épouser une femme qui a ça).

3.6.2 Culture et patterns moteurs spécialisés.


3.6.2.1 Motricité fine.
Changements au niveau de la motricité fine ; il est plus facile de tenir des couverts que des baguettes, au point
où c’est une fierté de dire au Japon « mon enfant sait déjà tenir ses baguettes » (intelligence sensori-motrice). A
4 ans, l’enfant sait manger avec des baguettes.

Il y a des attentes sociales liées à la maitrise des outils ; il faut manger proprement, tenir correctement ses
couverts, … Il ne faut pas rendre son enfant ridicule en cas de repas important.

 Les outils culturellement marqués ont une influence sur la motricité fine.

3.6.2.2 Motricité globale.


- Chez nous : important de savoir skier, vélo, trottinette, … Développer des patterns moteurs pour se
déplacer.
- Autres cultures : être capable de maitriser les mouvements globaux qui permettent la survie. Mali :
entraîner à marteler quand petit, car conséquences au niveau du dos (on soulève et rabaisse un bois

CLAIRE MARCHAL 45
avec le dos tendu). Les adultes font 1 à 2 heures de martelage par jour. On apprend donc aux enfants,
dès 3 ans, à marteler. Vers 5-6 ans, ils le font comme les adultes. Instruction par travail synchrone.
- Mexique : on donne des petits métiers à tisser aux enfants dès 3 ans car importance économique et
culturelle. Entre 5 et 9 ans, premiers vêtements. Coordination très spécifique.

3.6.2.3 Aires cérébrales motrices.


Les compétences sont marquées au niveau cérébral.

Violoniste : plus de place accordée à la main gauche dans le cortex moteur.

3.7 Conclusion.
Il ne pas trop d’inquiéter, puisque équifinalité générale pour de nombreuses compétences motrices
universellement adaptatives.

Il y a quand même des influences de la culture sur le développement moteur :

- Âge d’acquisition (bornes développementales).


- Trajectoires : la façon avec laquelle ça va être atteint.
- Endpoint : à quoi on arrive finalement (on est tous capables de marcher, mais différences en termes de
distance, port, …).
- Au niveau des mouvements fins et globaux, il y a des différences qui se voient au niveau cérébral, en
fonction des exigences du milieu.
 Adaptation liée aux exigences du milieu.

Implications sur notre connaissance du développement moteur :

- Le développement moteur est moins linéaire que ce qu’on pense ; il y a beaucoup de variabilité et
plasticité.
- Questions spécifiques. On peut relativiser certaines choses qu’on pensait évidentes : dormir sur le dos
ou ventre, cododo. Est-ce qu’on ne devrait pas plus stimuler nos enfants ? Oui. Beaucoup de problèmes
de sédentarité, obésité, maux de dos, … Voir comment instaurer de manière plus précoce au niveau
développemental plus de sport.

Implications cliniques : contextualiser les retards, et conscience que rééducation prometteuse !

CLAIRE MARCHAL 46
4. Le développement cognitif.
4.1 Culture et développement cognitif.

4.1.1 Le développement piagétien remis en


question.
4.1.1.1 L’objectif de Piaget.
PIAGET : pionnier du développement cognitif de l’enfant. Il a développé son modèle théorique à partir d’une
dizaine d’enfants suisses de classes aisées.

 WEIRD POPULATION : western educated industrialized rich and democratic ; personne scolarisée venant
d’une population aisée.

Intérêt principal : construire de la connaissance, construire un modèle pour comprendre le développement de


l’enfant. Intérêt pour la construction de la connaissance.

La séquence qu’il a vraiment décrite est-elle vraiment universelle ou est-elle liée à cette weird population ? Peut-
on l’appliquer à d’autres weird sociétés, à des tribus africaines etc. ?

Réponse difficile car :

- Échantillon très réduit → difficile de définir des stades universels et biais dans la sélection de
l’échantillon.
- Phénomène de familiarité avec la tâche (les enfants sont déjà préparés dans la société avec ce type de
test). Est-ce qu’on mesure une connaissance / aptitude ou une performance (habitude) sur une tâche ?

Que disent les études cross-culturelles ? Elles ont testé ce modèle piagétien dans différentes cultures.

4.1.1.2 Rappel : les stades cognitifs du modèle de Piaget.


Classe d’âge Description du stade Étapes majeures
De la Sensori-moteur • Permanence des objets (fin
naissance à Contacts avec le monde par l’intermédiaire des du stade)
presque 2 ans sens et des actions (regarder, toucher, porter à la • Angoisse de l’étranger
bouche et saisir)
De 2 à 6 - 7 Préopératoire • Capacité à faire semblant
ans Représentation des choses avec des mots ou des • Égocentrisme
images : utilise l’intuition plutôt que le • Développement du langage
raisonnement logique
De 7 à 11 ans Opérations concrètes • Conservation des quantités
Pensées logiques à propos d’événements • Transformations
concrets ; compréhension d’analogies concrètes et mathématiques
capacité à exécuter des opérations arithmétiques
De 12 ans à Opérations formelles • Logique abstraite
l’âge adulte Raisonnement abstrait • Capacité d’un raisonnement
moral mature

CLAIRE MARCHAL 47
Stade des Stade des
Stade Stade
opérations opérations
sensorimoteur préopératoire
concrètes formelles

4.1.1.3 Rappel : les stades sensorimoteurs de Piaget.


Stade Âge Nom donné Caractéristiques de ce stade
par Piaget
1 0 à 1 Exercice des Le bébé exerce ses réflexes innés (succion, observation). Ceux-ci sont
mois réflexes progressivement modifiés (accommodés) par l’expérience.
Le bébé est incapable d’imiter ou de combiner des informations perçues
par plusieurs sens.
Aucune permanence de l’objet.
2 1 à 4 Réactions Nouvelles accommodations des schèmes de base que le bébé répète
mois circulaires sans relâche (préhension, observation, succion).
primaires Début de la coordination entre des schèmes provenant des différents
sens.
Le bébé observe quand il entend.
Le bébé porte à sa bouche tout ce qu’il peut trouver.
Il n’établit pas de lien entre es actions et leurs effets à l’extérieur de son
corps.
Aucune permanence de l’objet.
Début de l’intégration intersensorielle.
3 4 à 8 Réactions Le bébé devient de plus en plus conscient des événements qui se
mois circulaires déroulent à l’extérieur de son corps et les provoque même de manière
secondaires répétitive, dans une sorte d’apprentissage par essais et erreurs.
La compréhension du lien de cause à effet n’est pas encore évidente.
Le bébé commence à imiter, mais seulement lorsque les schèmes
figurent dans son répertoire.
Le concept d’objet commence à se développer.
Permanence d’un objet partiellement caché.
4 8 à 12 Coordination Les comportements intentionnels apparaissent.
mois des schèmes L’enfant ne se contente pas de chercher à obtenir ce qu’il veut ; il
secondaires combine des gestes pour y parvenir.
Il imite de nouveaux comportements.
Il transfère l’information d’un sens à l’autre ; transfert intermodal.
Permanence de l’objet mais sans déplacement visible.
5 12 à 18 Réactions L’expérimentation commence : il expérimente de nouvelles façons de
mois circulaires jouer ou de manipuler les objets.
tertiaires Il entreprend des explorations volontaires très actives en recherchant
les différents effets que produisent ces variations.
Permanence de l’objet avec déplacement visible.
6 18 à Représentation Le bébé commence à utiliser des symboles pour représenter les objets
24 symbolique ou les événements. Il comprend que le symbole est distinct de l’objet.
mois Acquisition définitive de la permanence de l’objet.
Début de l’imitation différée, car elle nécessite la capacité de se
représenter mentalement un événement absent.

Réactions Réactions Coordination Réactions


Exercice des Représentation
circulaires circulaires des schèmes criculaires
réflexes symbolique
primaires secondaires secondaires tertiaires

CLAIRE MARCHAL 48
4.1.1.4 Petite enfance et stade sensori-moteur.
Il y a 6 stades sensorimoteurs, et une succession de ces 6 stades. Dans les études de Piaget, on voit cette
succession.

Etudes cross-culturelles : est-ce qu’on retrouve ces différents stades ? Il y a eu diverses études cross-culturelles.
Ce qui ressort de ces études, c’est que la succession de ces 6 stades se retrouve. Il semblerait qu’il y ait une
certaine universalité, du moins dans le principe de succession.

Pas mal d’échelles ont été mises en place par différents auteurs dont une échelle qui provoque un consensus et
qui a été administrée dans divers pays, et qui montre qu’il y a une succession des différents stades.

 Le développement dans le stade sensorimoteur semble être universel.

Cependant, ce n’est pas aussi beau qu’on pourrait le croire ; même si la succession est la même, il y a quand
même des décalages temporels selon les cultures (certaines en avance, d’autres en retard).

➔ Spécificité culturelle.

Pourquoi ? Ce n’est pas une question de maturation cérébrale. C’est une question des composantes du
caregiving (manière dont les parents s’occupent de l’enfant). Ça influence énormément le moment d’apparition
de ces différents stades. Impact de certaines composantes du caregiving :

- Impact sur les stimulations vestibulo-kinesthésiques (mouvement, bercement, balancement).


- Sensibilité maternelle : impact important sur le développement sensori-moteur.
- Influence de la richesse de l’environnement ; au plus richesse de stimulations, au mieux l’enfant se
développe.

 Il y a une universalité mais aussi des différences, surtout d’ordre temporel.

4.1.1.5 Du stade préopératoire au stade des opérations


concrètes.
Conservation des quantités (conservation des liquides) : épreuves phares pour
vérifier si l’enfant sait passer au stade des opérations concrètes. La principale
barrière pour l’enfant, pour arriver à cette étape de conservation des liquides,
c’est le problème de centration. Il est fort centré sur lui-même et ne prend en
compte qu’un seul aspect dans son raisonnement (taille du verre ou largeur du
verre, mais pas les 2). Centration sur un seul aspect.

Image A : 2 contenants qui ont la même forme et le même niveau de liquide ;


l’enfant s’en rend compte. Quand on prend le même niveau de liquide et qu’on
le verse dans un récipient plus petit, l’enfant n’est influencé que par un seul
aspect de la situation (hauteur).

 Centration sur un seul aspect.

Présentation de ce test aux aborigènes. On retrouve la même séquence : ils se trompent et puis réussissent. Ils
passent aussi par ce stade des opérations concrètes. Il y a cependant un énorme décalage temporel.

- Enfant de Genève : 6-7 ans.


- Aborigènes : 10-13 ans.

CLAIRE MARCHAL 49
On a remarqué que certains adultes aborigènes ne réussissent pas ce test ; ils seraient « coincés » au stade
préopératoire.

On a plusieurs tests utilisés pour voir le passage du stade préopératoire au stade des opérations concrètes, dont
le test de la montagne. Celui-ci regarde l’égocentrisme de l’individu. On présente à l’enfant une maquette avec
3 montagnes (une plus haute, une petite, une plus large). L’enfant a devant lui la grande montagne et derrière
la petite montagne. Test pour voir s’il sait dépasser l’égocentrisme préopératoire : on met une poupée près de
la petite montagne et on demande à l’enfant ce que la poupée voit. Si pas de passage au stade des opérations
concrètes, il répond ce qu’il voit. Résultats :

- Épreuve difficile pour les enfants américains.


- Épreuve facile pour les enfants aborigènes.

 Il y a donc un décalage horizontal car non-généralisation du stade des opérations concrètes chez les
aborigènes.

Explication culturelle assez simple : la notion de conservation des liquides n’est pas utile pour les aborigènes.
Dans leur langage, d’ailleurs, ils comptent de 1 à 5 et au-delà c’est « beaucoup ». Les opérations arithmétiques
etc. ne sont pas utiles. Ils n’ont pas de commerce : pas besoin de quantifier. Cependant, la localisation dans
l’espace est hyper importante pour eux.

Occidentaux : important de compter ; société qui s’est développée dans le commerce. Important d’avoir les
notions de quantité pour être adapté à notre culture. Se repérer dans l’environnement est moins important
(d’ailleurs, on a un GPS, des cartes, …).

 Le niveau de développement pour un domaine donné dépend de la culture et surtout de la valeur


adaptative de ce domaine.

Il ne faut pas uniquement évaluer le développement cognitif en référence à ces stades piagétiens, il faut aussi
prendre en compte à quel point les marqueurs de ces différents stades, donc les différents domaines de ces
différents stades, ont une valeur adaptative dans une culture donnée.

4.1.1.6 Le stade des opérations formelles.


C’est le stade ultime du développement cognitif selon Piaget.

Ralle : opérations abstraites, hypothèses, raisonnement expérimental et hypothético-déductif, raisonnement


systématique, …

 Stade de la pensée pure, de la pensée abstraite, sans action ni objet concret.

Piaget reconnaît que ce stade n’est pas universel. Selon lui, l’atteinte de ce stade dépend vraiment du milieu
culturel. C’est un stade très peu présent chez les personnes peu ou pas scolarisées.

➔ Est-ce que c’est un stade qui rencontre une évolution cognitive ou est-ce que c’est le produit de nos
écoles secondaires, axées sur le raisonnement abstrait ?

Quand on teste le stade formel selon les outils de Piaget, on voit que beaucoup d’adultes au travers des cultures
ne sont pas à ce stade-là.

 Ce n’est pas un problème d’intelligence mais de définition de ce stade et du testing.

Côte d’Ivoire : les individus ne sont pas capables de répondre aux tests mais ils sont capables d’un raisonnement
global, inductif, symbolique, abstrait.

CLAIRE MARCHAL 50
C’est vraiment une question de définition de ce stade et de la définition de l’intelligence.

- Chez nous : personne qui a un bon QI (test utilisant des jeux auxquelles on est familiarisés depuis
longtemps). Intelligent = qui réussit bien dans sa vie (bonne position grâce à bonne position aux tests),
élève bien ses enfants, …
- Mais INTELLIGENCE = être adapté le mieux possible à son environnement en vue de survivre.

Côte d’Ivoire : pas besoin d’être bon au test pour répondre aux besoins de sa famille. Important : être en lien
avec les autres, cohésions avec les différents membres de sa tribu ; importance de la qualité de la relation pour
la survie. Attribution d’intelligence liée à un souci pour autrui.

Quand on a demandé à des parents de Côte d’Ivoire de noter l’intelligence de leur enfant et qu’on a ensuite testé
ces enfants en utilisant les tests du modèle piagétien, on se rend compte qu’il y a une totale non-
correspondance.

➔ Non-corrélation entre rating parental et test piagétien.

4.1.1.7 Conclusion : le modèle piagétien face aux études


cross-culturelles.
D’un côté, le modèle piagétien résiste relativement bien, surtout quand on s’intéresse aux premiers sous-stades
du développement cognitif. La séquentialité est respectée, au passage du stade préopératoire au stade des
opérations concrètes (on ne parle pas du dernier stade).

Sans doute que la structure cognitive évolue de manière universelle mais l’application de cette cognition, dans
les différents domaines, dépend de l’UTILITÉ ÉCOLOGIQUE de ce domaine.

A quel point bien réussir et maitriser un domaine permet d’être un être culturellement adapté. D’où l’intérêt
parfois des approches émiques (intra-culturelles), où on se base sur une culture et où on n’utiliserait pas les
mêmes outils pour mesurer un stade dans un culture et dans une autre (tests culture-free, développés dans des
milieux occidentaux) ; on utiliserait des tests, parfois en tout cas, uniques pour une culture, qui ont une vraie
valeur adaptative pour cette culture. Mais il y a le problème de la comparaison. Avec ces approches émiques, on
ne peut pas comparer les cultures entre elles.

4.1.2 Décalages et résilience.


Ce qui est intéressant quand on observe des décalages temporels dans le développement cognitif des enfants
en fonction des cultures, c’est de prendre en compte le contexte culturel. Quand on observe un décalage, le
réflexe d’un psychologue classique est de dire retard ou précocité de développement. Mais on ne peut pas
employer ces termes sans avoir vraiment pris en compte le contexte culturel et le milieu, même économique,
familial, … (il y a des sous-cultures au sein d’une culture !).

Etude réalisée au Guatemala à San Marcos. On a observé, dans un certain environnement particulier (petit
village rural, peu d’interactions avec l’extérieur), des enfants. Les enfants sont dans un environnement de
stimulations pauvres. La mère interagit peu avec l’enfant, il est laissé seul très longtemps, il n’est pas encouragé
à explorer et découvrir. Si on évalue ces bébés, en lumière avec le modèle de Piaget, on parlerait de bébés
apathiques (n’interagissent pas, ne cherchent pas le regard, pas de vocalisation, … // Hospitalisme). Est-ce que
pour autant il faut parler de maltraitance maternelle, d’indifférence des adultes dans ce contexte culturel là ?
Non. La mère agit selon ses propres ethnothéories maternelles. Dans ses propres théories culturelles, un bébé
ne marche pas avant 18 mois ; il n’y a aucune raison d’entraîner le bébé avant. Il parle à 36 mois ; aucune raison
de le stimuler avant.

CLAIRE MARCHAL 51
 Ces enfants semblent en retard et en déficit de développement cognitif pour nous, mais des études ont
montré que le développement cognitif, tel qu’il est évalué à 18 mois, n’a aucune valeur prédictive avec
l’intellect ou le stade cognitif à 11 ans.

Quelles sont les conséquences développementales quand on observe le développement durant le stade sensori-
moteur de ces enfants-là ?

- Peu de babillages et vocalisations entre 6 et 16 mois.


- Langage signifiant à 2,5 ans.
- Déficit d’attention.
- Problèmes pour acquérir la permanence de l’objet.

Test de l’attention : on a mesuré, à différentes périodes dans le temps, la capacité


attentionnelle des enfants (fixer leur attention / regard sur un objet). Lignes du bas
= Guatemala (fille et garçon) et du haut = américains. De 5 à 11 mois, déficit de
l’attention pour le Guatemala ; les enfants guatémaltèques fixent moins longtemps
les objets.

Test de la permanence de l’objet : aucun enfant du Guatemala, entre 8 et 16 mois, ne va chercher l’objet caché
→ retard de 4 mois sur la permanence de l’objet de Piaget.

Le développement cognitif de ces enfants a évolué jusque 12 ans.

- À partir de 15 mois, les enfants rattrapent leur retard ; résilience de l’enfant. Même s’il n’a pas été
stimulé par son environnement de la même manière, il rattrape son retard. L’enfant sort de son
marasme, de sa prostration à 15 mois et cherche le contact, babille, essaie d’attraper des objets, …
Exploration spontanée.

 Ça correspond à la période où l’environnement les stimule (ethnothéories). Notion de prophétie auto-


réalisatrice : on pense que l’enfant fait telle chose à 16 mois et il le fera, car on le stimulera à ce
moment-là pour qu’il le fasse.

Nouvelles études sur ces enfants ayant de 5 à 12 ans : pas de différence avec les enfants américains.

Test de l’inférence perceptive ; on voit à quel moment l’enfant est capable


d’inférieur ce qu’est l’objet. On est surentraîné en Occident (dessins avec
des pointillés à finir). Enfants américains vs guatémaltèque : on mesure le
nombre de réponses correctes. On voit un décalage à 5-6 ans, mais il
s’amenuise à 11-12 ans ; le retard est rattrapé. Les différences restantes
sont sans doute dues à la familiarité du test.

CLAIRE MARCHAL 52
4.1.3 La familiarité des tests.
La familiarité des tests est quelque chose de déterminant, elle provoque plus que d’autres choses cette
différence cross-culturelle. Il faut en être conscient et y faire ultra attention.

Attention à la familiarité avec :

- Principe de testing : de base, c’est plus familier pour les occidentaux. On est plus familiers avec la
présence d’un expérimentateur. Les jeunes enfants ont l’habitude d’être évalués car ils ont été
beaucoup testés.
- Contenu des tests : les enfants occidentaux sont plus familiers avec le contenu des tests, avec les jeux
présentés dans les tests. Ceux-ci se sont inspirés des jeux pour enfant, et vice-versa.

 Est-ce qu’on mesure une compétence ou une performance (maitrise du test) à un test donné ?

Peut-on entraîner cette familiarité, et amener des sujets d’une autre culture à un même degré de familiarisation
avec un test ? Dans une perspective interculturelle, il est intéressant d’amener les sujets à un même niveau de
familiarité.

Etude sur les capacités d’apprentissage, les capacités de familiarisation avec un test donné. 3 échantillons :

- Population rurale d’Afrique du Sud.


- Population universitaire d’Afrique du Sud.
- Populations néerlandaises universitaires.

Les chercheurs ont entrainé ces 3 populations à se familiariser avec 5 tâches différentes.

- Tâches 1 et 2 : toucher le distracteur (l’intru). Tâches variant selon leur complexité.


- Tâche 3 : mémoriser différentes configurations. Écran présenté plus tard : toucher une configuration
qui n’a pas été montrée.
- Tâche 4 : toucher la figure complémentaire à la figure présentée au centre.
- Tâche 5 : toucher l’intru à la formation d’un carré blanc parfait.

Les groupes ont été entrainés pendant 3 jours. Pour chaque tâche, 80 essais. 12 sessions par jour. But : résoudre
chaque tâche le plus vite possible.

 On attend un effet de complexité (au plus c’est dur, au moins on est rapide) et un effet d’entraînement
(au plus on s’exercé, au plus on est rapide).

Résultats :

- L’échantillon néerlandais en moyenne a un temps de


réponse plus court ; premier effet de familiarité.
- La tâche 5 est la plus complexe.
- Premier point = jour 1, deuxième = jour 2, troisième = jour 3.
Avec l’entraînement, on observe une diminution. Courbe
similaire entre les 3 échantillons. Effet de familiarité mais
toujours effet de complexité.

Avantage de familiarité pour les néerlandais, mais tous les groupes sont capables d’apprendre de la même
manière ; s’ils avaient été exposés de manière chronique à ce type d’épreuves, ils auraient tous eu le même
résultat.

 Performance n’est pas compétence. Ce n’est pas une question de compétences cognitives mais de
familiarité.

CLAIRE MARCHAL 53
D’autres études donnent des résultats similaires. Aboutissent à la conclusion qu’on peut entrainer la
familiarisation. Par exemple, pour la conversion des liquides, si on entraine les aborigènes, ils deviennent
meilleurs et donnent de plus en plus de bonnes réponses au fur et à mesure qu’ils sont familiarisés avec cette
tâche.

 Est-ce qu’il faut avoir des tâches cognitives qui sont les mêmes pour toutes les cultures, auquel cas il
faut entrainer de la même manière les populations à ces tâches – mais il y a toujours un petit avantage
pour les sociétés occidentales, on ne peut pas rattraper des années d’enculturation, on ne peut pas
rattraper l’avantage donné par la culture à ces tests, mais on peut entrainer et amenuiser ? Ou utiliser
des tâches culture-fair ? Mais le problème, c’est la comparaison ; comment être sûr qu’on compare la
même chose ? Alors, il faut créer des tâches spécifiques pour un groupe culturel donné.

Tribu africaine très performante pour se représenter dans l’espace : on a utilisé un autre test pour mesurer les
performances cognitives (car ils sont jugés comme peu intelligent par les autres tests), comme un labyrinthe ;
comme ils sont surentrainés à se repérer dans l’environnement, ils ont de très bonnes performances.

4.1.4 Modèle de la déficience / différence.


Deux modèles d’interprétation qui coexistent pour rendre compte de ces différences cross-culturelles.

• MODÈLE DE LA DÉFICIENCE : le fait qu’un environnement culturel donné est pauvre (déprivation
culturelle, l’enfant n’est pas sollicité) amène à une déficience du développement cognitif individuel.
Les différences de performances cognitives sont expliquées par la pauvreté du groupe culturel.
Pauvreté pas spécialement monétaire, en stimulation en tout cas.
Ça donne une justification d’intervention (colonialisme, stimulation précoce, éducation
compensatoire). Point de vue très paternaliste quand on regarde ce qu’est un développement
optimal pour nous. Parmi les psychologues culturels, ce modèle est vite devenu désuet.

• MODÈLE DE LA DIFFÉRENCE : implique que les différences cross-culturelles sont exagérées à cause des
artéfacts méthodologiques. Valorise une approche non-évaluative du développement cognitif dans
différentes cultures, mais toujours à prendre en référence avec la culture à laquelle on s’intéresse, à
la valeur adaptative des différents domaines de cognition qu’on évalue. Mettre les différences en
lumière avec le contexte culturel et avec la valeur adaptative. Ne pas parler de retard ou de précocité
trop vite.
Critique face à l’éthique de cette culture dominante. Remise en question du point de vue de notre
approche de ce qu’est le développement cognitif.

Il n’empêche que dans le monde actuel, on est de plus en plus dominé par une culture, la culture occidentale. De
plus en plus, les gens de différentes cultures se font juger avec des critères de la culture occidentale.

 Dans un monde dominé par une culture, cette différence peut parfois s’avérer être une déficience.

4.1.5 Impact de la culture sur le développement


cognitif.
4.1.5.1 La culture : inside and / or outside.
• CULTURE : pattern très distinctif de normes, d’idées, de valeurs, de conventions, de symboles, de
comportements et de représentations du monde qui sont partagées assez largement par un groupe
donné. Transmission culturelle de générations en générations. C’est une manière d’être au monde.

CLAIRE MARCHAL 54
La culture est :

- À l’intérieur de la personne : elle guide la manière dont l’individu voit le monde (« filtre »), elle influence
la perception, la compréhension du monde.
- À l’extérieur de la personne : elle est autour de la personne, dans le monde social. On arrive dans un
groupe / environnement donné qui partage les mêmes normes, codes, comportements, valeurs, …

Il ne faut pas y voir une dichotomie, c’est interrelié en constant échange. Constamment on reçoit, on perçoit la
culture à l’extérieur et on la retranscrit. Nos pensées et actes sont guidés par la culture, ils vont à l’extérieur de
nous, on agit la culture, on la met à l’extérieur, et on la reçoit aussi à chaque interaction. Les éléments culturels
extérieurs sont intégrés dans la pensée. C’est une articulation de cette dichotomie inside / outside qui fait la
culture.

4.1.5.2 Les artéfacts culturels.


• ARTÉFACT : aspect du monde matériel qui a été modifié au cours de l’histoire et intégré dans des
actions à visée humaine (bol, silex, tambour, livre). Ce sont des outils / objets qui sont porteurs de
culture, qui ont été modifiés, qui ont été transmis de générations en générations et qui portent en
eux toute l’évolution culturelle. Ce sont les produits des sociétés humaines au sens large ; ça peut
être un narratif (histoire qui se transmet de génération en génération), des outils, des events
schemas, ... Les valeurs sont imbriquées dans les artéfacts culturels.

Ces artéfacts ont été légués par les générations précédentes comme des solutions pour être au monde, pour
résoudre des problèmes dans un environnement culturel spécifique (berceau différent selon l’environnement ;
chaleur, prédateur). Les outils sont façonnés au cours des générations pour répondre à des problématiques
environnementales. Parfois c’est moins concret / tangible ; ça peut être pour répondre à la symbolique d’un
groupe (collier, bijoux, idée du sacré). Peu importe la tangibilité, ce sont des solutions pour être au monde, pour
être un être culturellement adapté à son environnement.

Le nouveau-né arrive dans un monde culturellement préparé. Il arrive dans un monde chargé de culture. Il arrive
dans un monde où il y a déjà des outils, des artefacts, des visions du monde (des narratifs) qui ont été laissés par
les générations précédentes. Les personnes qui prennent soin de cet enfant vont organiser son monde en
fonction de ces artéfacts culturels → l’enfant va intégrer ces artéfacts culturels, ces normes, ces valeurs pour en
faire un membre compétent de la culture, de son groupe, de son environnement.

Au niveau cognitif, les personnes qui prennent soin de l’enfant interagissent avec l’enfant à partir d’un répertoire
d’outils (pour penser, pour agir dans le monde). Répertoire d’outils pour penser et agir. Ce sont des outils fournis
par la culture et qui sont efficaces dans un contexte donné. Ça a un impact énorme sur ce que va vivre le bébé
dans sa culture ; il va être bercé d’histoires concernant le sens de la vie, l’existence, l’origine du monde, ce qui va
façonner la manière dont il va penser le monde et ça va aussi façonner ses métacognitions ; la façon dont il
réfléchit à propos de ses propres actions mentales (surtout en Occident, où on doit être très autonome et où on
veut que l’enfant réfléchisse sur lui).

4.1.5.3 Développement cognitif et culturel.


Il y a une coévolution du cerveau (maturation biologique du cerveau) et de la culture. Aussi bien au niveau
phylogénétique (au niveau de l’espèce ; toute l’évolution du cerveau, du singe à maintenant, a coexisté avec la
culture. On retrouve des traces de culture chez l’Homo Sapiens – le silex est un artéfact culturel) qu’au niveau
ontogénétique (au niveau de l’individu ; son cerveau mature en même temps qu’il intègre la culture).

CLAIRE MARCHAL 55
Ce ne sont pas deux choses séparées qui évoluent de leur côté, distinctement l’une de l’autre, il y a une
coévolution, une collaboration entre la culture et le développement biologique dans le développement de l’être
humain. Au niveau de l’espèce, par exemple, l’individu qui va survivre (et qui donc va être sélectionné
naturellement et va faire évoluer l’espèce) et celui qui est bien enculturé car la culture permet d’avoir les
réponses adaptées à l’environnement.

 Difficile de distinguer le développement cognitif (maturation du cerveau) de l’évolution de la culture.

On parle de l’approche CONSTRUCTIVISTE BIO-CULTURELLE. La culture n’est pas un ajout, elle est nécessaire au
développement de la cognition, à l’évolution du cerveau. Un enfant sans groupe culturel ne présentera pas de
développement cognitif.

Le cerveau de l’enfant est fait pour apprendre, pour accueillir de la culture. On se rend compte, vu les capacités
d’apprentissage très précoces de l’enfant, qu’il est vraiment fait pour accueillir les objets culturels, qu’il est fait
pour interagir avec les artéfacts culturels. Dès les premiers jours, son développement cognitif se met en place
et il interagit avec les artéfacts culturels, que ce soit par conditionnement classique (apprendre la bonne position
pour bien téter), par conditionnement opérant (comment provoquer la réponse de sa maman). Dès un an, il
commence à imiter les actes qu’il observe des êtres culturels autour de lui, et ainsi de suite. Le cerveau de
l’enfant est fait pour acquérir les objets culturels.

Il y a deux grands modèles qui tentent de rendre compte de l’impact de la culture sur la cognition :

- PARADIGME DES STYLES COGNITIFS.


- PARADIGME DE L’IMPACT DES PRATIQUES CULTURELLES.

4.1.5.3.1 Paradigme des styles cognitifs.


Psychologie éco-culturelle : l’environnement impacte la culture et au final les différents styles cognitifs.
Exemple : beaucoup de riz présent → culture collectiviste (besoin d’être nombreux). Beaucoup de blé → culture
individualiste (facile à semer).

• STYLE COGNITIF : type préférentiel de traitement de l’information. Conditionne la manière dont on


perçoit le monde, dont on perçoit un stimulus, et la manière dont on va l’interpréter.

 Grand impact sur la perception, l’attention, le raisonnement, le concept de soi, …

On décrit les styles cognitifs sur divers continuums ; pensée :

- Analytique – holistique (préférence de la Pr. Vraiment style cognitif).


- Indépendante – interdépendante (surtout concept de soi, relation sociale).
- Individualiste – collectiviste.
- Indépendante du contexte – dépendante du contexte.

• STYLE ANALYTIQUE : c’est percevoir, porter plus d’attention aux éléments. On voit les éléments
séparément, on catégorise. C’est ce qu’on fait beaucoup en Occident. Ça amène à voir la personne
comme un élément séparé, et donc ça amène à l’indépendance.
• STYLE HOLISTIQUE : faire attention aux touts avant de faire attention aux parties. On est plus influencé
par le contexte. On voit plus les relations, la collectivité que les individus séparés.
• COGNITION HOLISTIQUE : cognition contexte-dépendante. Les personnes sont plus influencées par le
contexte dans lequel on présente un stimulus. Elles font plus attention au tout qu’aux parties qui
constituent un élément (photo). Les personnes asiatiques, quand on présente un tableau avec un
poisson au centre et qu’on va leur demander de se rappeler de ce qu’ils ont vus, ils se rappelleront du

CLAIRE MARCHAL 56
contexte, des relations qui existent mais peu de l’objet principal. Vs personne occidentale, qui vont
décrire le poisson (couleur, taille, …).

A. Rod and Frame test : la corde et le cadre.


Test pour mesurer la dépendance au contexte.

On présente un cadre et une petite corde. On demande à la personne


de mettre la corde de manière verticale (le plus possible). On peut être
influencé par le cadre, qui peut être oblique.

Au plus on est influencé par le contexte, au moins on parviendra à


mettre cette corde de manière verticale.

 Le degré d’erreur est une mesure de la dépendance au contexte.

Ce test a été réalisé dans 18 populations différentes (Afrique, Occident, …). Les personnes de culture
collectiviste montraient plus de difficultés à faire abstraction du cadre et à mettre la corde de manière verticale,
contrairement aux cultures plus individualistes.

Les résultats sont en faveur de l’hypothèse des styles cognitifs, avec une correspondance du continuum
individualisme – collectivisme.

B. Test de la figure imbriquée.


Test pour mesurer la dépendance au contexte.

On présente une figure soit sur un fond blanc, soit sur un contexte (décor derrière). On a présenté ça à des sujets
asiatiques et européens / américains en leur demandant de reconnaitre l’objet tout en mesurant le temps qu’ils
prennent pour la reconnaissance.

Les sujets asiatiques mettent plus de temps à dire que c’est un vase quand il est présenté avec le contexte
derrière alors que pour les européens, le décor (blanc ou peinture) a peu d’impact.

 Les sociétés collectivistes ont plus de mal à faire abstraction du contexte.

Ça été confirmé par analyse d’eye-tracking (analyse d’où le regarde se porte). On se rend compte que les
asiatiques font plus de mouvements saccadés, regardent partout et mettent plus de temps pour arriver au
centre, contrairement aux personnes occidentales qui arrivent à atteindre directement le centre et à fixer le vase
rapidement.

 La culture a un impact sur la perception ; on n’utilise pas nos yeux de la même manière, on ne voit pas
l’objet de la même façon.

C. Procédure d’encodage.
Impact de la culture qui se retrouve même au niveau des études qui utilisent l’imagerie.

Les procédures d’encodage d’information et du traitement de l’information sont influencées par la culture.

Des adultes chinois et américains ont fait une tâche de mémorisation de patterns géométriques. On leur a
demandé ensuite de s’en rappeler, et on regarde dans quelle mesure ils s’en rappellent correctement.

CLAIRE MARCHAL 57
Les performances sont assez similaires → pas de différence dans la performance d’encodage.

Mais quand on regarde ce qu’il se passe dans le cerveau pendant l’encodage de l’information, on observe des
différences d’activation de zones cérébrales différentes.

En début d’apprentissage, on voit que les zones sombres (zones activées) sont différentes. Les processus
d’encodage sont différents au départ.

- Chez les Chinois, les aires activées sont les aires frontales et pariétales (aires liées à l’analyse spatiale).
- Chez les Américains, les aires activées sont les aires postérieures ventrales (aires liées à l’identification
d’objets).

A la fin, les zones finissent par être similaires car on est tous capables d’utiliser toutes les aires de notre cerveau
mais on a a des préférences ; certaines zones s’activent en premier par défaut, mais on est capable de changer
ce mode au final → Il y a une flexibilité du cerveau, mais il y a quand même un mode de traitement préférentiel
par défaut.

En résumé : utilisation de nos zones préférées → utilisation de l’ensemble des aires cérébrales (flexibilité du
cerveau) → retour à notre mode de traitement préférentiel/par défaut.

D. Mémoire autobiographique.
• MÉMOIRE AUTOBIOGRAPHIQUE : mémoire des expériences personnelles et de la connaissance de soi
car l’identité est liée à l’accumulation des souvenirs sur soi.

Ce qu’on met en mémoire dépend du focus et de notre attention. //holistique ou analytique.

• FOCUS INDÉPENDANT : l’individu se focalise sur lui, ses attributs, motivations et buts personnels. C’est
ce qu’il met en mémoire à propos de lui-même et c’est ce qui constitue ce qu’il est. Société
individualiste.
• FOCUS INTERDÉPENDANT : l’individu se focalise sur les relations (hiérarchie, relation familiale). Les
relations entretenues constituent ses souvenirs, constituent ce qu’il est. Société collectiviste.

Phénomène particulier dans la mémoire autobiographique : RÉMINISCENCE BUMP. Il se produit entre 20 et 35 ans
(âge adulte). On est capable à ce moment-là de se constituer une mémoire autobiographique un peu plus
organisée. Période de l’âge adulte où on commence vraiment à savoir qui on est, ce qu’on veut.

CLAIRE MARCHAL 58
Dans la mémoire et la constitution de la mémoire autobiographique, il y a différents stades.

- Période d’amnésie infantile. Brouillard concernant l’enfance ou la petite enfance.


- Beaucoup plus de souvenirs vers 10 et 30 ans. Ils s’organisent vers 20-30 ans pour former une identité
intégrée. Ces souvenirs forment la mémoire autobiographique de base, ce qu’on est.
- 30-35 ans : chute de la quantité de souvenirs.
- Âge avancé : période de récence. Augmentation de l’effet de récence. On se souvient surtout des
souvenirs de réminiscence bump car ils constituent ce qu’on est.

Ce phénomène est-il vraiment universel ? Ou est-ce que c’est un effet des sociétés occidentales ? Dans la société
occidentale indépendante, la formation d’un self autonome, séparé est très important. Peut-être que cette
période de réminiscence bump où l’individu se construit vraiment est moins valorisée ailleurs. Et si elle existe,
peut-être que le contenu des souvenirs est différent ?

Recherche : on demande à des personnes de différents pays de retranscrire le maximum de souvenirs dont ils
peuvent se souvenir pendant une heure.

Résultat : la forme reste relativement la même, et on observe toujours un pic de souvenirs entre 15 et 30 ans.

 Pas d’impact culturel énorme, en tout cas sur la forme de la courbe.

Il y des similarités entre les 5 cultures. S’agit-il bien d’un mécanisme universel ? Est-ce que c’est dû à la
maturation du système cognitif, ou à un phénomène d’émondage ?

On peut conclure que les phases d’encodage de mémoire autobiographique est similaire entre les cultures. Quid
du contenu ?

E. Contenus autobiographiques.
Analyse du type de souvenirs de personnes américaines et chinoises. Ils ont été classés en 3 thèmes :

• SOUVENIRS PERSONNELS : sur les succès de l’individu, ses peurs, frustrations, envies, motivations, ce
qui touche à l’individu.

CLAIRE MARCHAL 59
• SOUVENIRS SOCIAUX : concernent les relations (familiales, amis, couples, hiérarchique).
• SOUVENIRS HISTORIQUES : concerne la période de temps où l’on a vécu (candidats politiques,
catastrophes naturelles, ce qui marque notre temps historiquement parlant).

Souvenirs
Personnels

Sociaux

Historiques

- Les Américains évoquent beaucoup plus de souvenirs personnels.


- Les Chinois évoquent beaucoup plus de souvenirs historiques et sociaux.

 Ça correspond vraiment au style cognitif indépendant vs interdépendant.

Analyse de la spécificité : voir dans quelle mesure le souvenir est très spécifique (documenté, agrémenté de
détails, avec des aspects sensoriels perceptifs) ou général.

- Américain : plus de détails, plus de souvenirs spécifiques.


- Chinois : plus de souvenirs généraux.

La culture n’influence pas forcément la courbe de la mémoire autobiographique mais elle influence le type
d’encodage, le type de souvenir qu’on met en mémoire autobiographique. Cet encodage autobiographique
correspond aux styles cognitifs vus plus tôt.

 Ce qui constitue un individu, le self, ce qui constitue son identité, est vraiment influencé par son style
cognitif.

F. Conclusion.
Ce modèle de l’influence des styles cognitifs pour modéliser l’impact de la culture sur le développement cognitif
a eu un grand succès, surtout dans les années 70. Un peu après les années 70, scepticisme grandissant car trop
simpliste, binaire. Années 2000 : grand regain d’intérêt. Tout un tas d’études apportent des preuves empiriques
grâce à la neuroimagerie.

Grâce à ce modèle, on se rend compte que la culture peut vraiment influencer de manière préférentielle
l’utilisation de certains réseaux neuronaux qui correspondent aux styles cognitifs holistique et analytique.

4.1.5.3.2 Modèle d’intégration des pratiques culturelles.


On s’est dit que les différences entre culture n’étaient pas uniquement dues à ces styles cognitifs majeurs mais
peut-être à l’intégration de différentes pratiques culturelles spécifiques, qui vont finalement entraîner une
expertise dans certains domaines. Par la force d’entraînement d’une pratique culturelle, les individus vont
devenir experts dans certaines stratégies cognitives.

A. Les abaques japonais.


Exemple : les abaques japonais. Les Japonais ont des classes où on leur apprend à faire des calculs mentaux
grâce à des abaques. Ils deviennent très tôt experts dans l’utilisation de ces abaques. Au fur et à mesure de

CLAIRE MARCHAL 60
l’entraînement, ils deviennent capables de calculer sans en faisant des calculs complexes rapides. A force, ils
sont capables de visualiser l’abaque. Compétences de haut niveau en MDT. Il y avait même des changements
neuronaux chez ces individus. On compare l’activité cérébrale d’individus japonais non-experts vs d’individus
japonais experts. On s’est rendu compte que les activations d’aires cérébrales étaient différentes chez ces sujets
quand on leur demande de faire des calculs mentaux.

- Experts : aires visuospatiales de la MDT.


- Non-experts : aires verbales de la MDT.

Japon : pression sociale assez forte pour ces classes. Les parents inscrivent préférentiellement leurs enfants là-
bas pour qu’ils développent des compétences ; ethnothéorie.

B. Le tissage maya.
Autre étude sur l’impact des pratiques culturelles qui peut être visible dans la communauté Maya : transmission
du tissage. Le changement chez les mères pour le type d’apprentissage va avoir un impact important sur la
manière dont les jeunes filles abordent le tissage et vont tisser.

1960 : transmission non-verbale par imitation. Ensuite est arrivé des changements d’environnement. 1990 :
transmission verbale avec créativité. Ces enfants-là sont devenus plus capables de créer de nouveaux motifs que
leurs propres mères au même âge.

C. La lecture chez les Vai.


Autre exemple de comment les pratiques culturelles spécifiques peuvent impacter le développement cognitif :
étude sur la lecture dans une tribu : intérêt pour l’impact cognitif de l’apprentissage de la lecture.

3 types de pratiques culturelles :

- Lecture de la langue maternelle, apprise par la communauté.


- Lecture de l’arabe, appris via le Coran.
- Lecture de l’anglais, appris à l’école.

Ensuite, test de compétences métalinguistiques : test sur la compréhension de textes, émettre des jugements
sur la grammaire d’une langue, jouer avec les mots et syllabes.

Résultat :

- Les enfants qui ont appris à lire leur langue maternelle sont plus forts pour les jeux de description
(nécessitent une décontraction) → logique puisque apprentissage dans un contexte communautaire.
- Ces enfants sont aussi plus forts pour la grammaire.
- Apprentissage de l’arabe par le Coran : plus forts pour les rappels incrémentaux (ajout d’un élément
l’un après l’autre).
- Anglais : plus forts pour les métacognitions. Ça peut s’expliquer car ils ont été à l’école (plus l’habitude
de répondre à des questions).

CLAIRE MARCHAL 61
Explications culturelles :

- Echanges épistolaires.
- Questions régulières « phrase Vai ou non-Vai ? ».
- Style d’apprentissage du Coran.
- Habitude de se justifier à l’école.

Les différentes pratiques culturelles utilisées pour apprendre la lecture de ces différentes langues ont un impact
sur le système cognitif.

D. Conclusion sur les pratiques culturelles.


Conclusion sur la modélisation selon les pratiques culturelles : on ne parle pas de différences de styles cognitifs
générales mais de différences spécifiques en fonction de certaines pratiques culturelles, de certains domaines.

On observe quand même une cohérence thématique entre ces différents domaines d’expertise ; possibilité de
patterns cohérents de pratiques culturelles (indépendant → pratiques culturelles variées). Ça n’empêche pas
d’observer une certaine thématicité, un certain lien entre différents domaines d’expertises. On n’évoque pas
une structure d’ensemble due à des styles cognitifs généraux, mais accumulation de pratiques culturelles
différentes qui donne une accumulation d’expertises culturelles différentes, et d’expertises cognitives
différentes.

Enjeu pour les chercheurs : repérer les patterns de pratiques culturelles cohérentes et de mesurer leurs
conséquences sur les expertises dans les différents domaines.

4.1.6 Conclusion générale.


Il existe bel et bien des différences au niveau du développement cognitif en fonction des culturels.

Le développement selon Piaget est partiellement retrouvé de manière interculturelle.

- Mêmes stades qualitatifs.


- Même séquence.
- Décalages :
➢ Différences dans l’âge d’acquisition.
➢ Dans le type de mode de raisonnement au sein de certains stades (décalages horizontaux).
- Endpoints différents.

Questions de recherche que l’on peut se poser :

- Est-ce que ces différences sont dues à des styles cognitifs différents ? Modèle top-down.
- Y a-t-il une cohérence thématique entre les expertises ? Modèle bottom-up.

4.2 Culture et langage.


Il existe plus de 7000 langues. Les études dont on dispose ne sont faites que sur 70 à 80 langues. Les langues
sont très variées, elles diffèrent aussi bien de l’écriture et de sa logique que du point de vue phonétique,
syntaxique, phonologique, morphologique, … Il y a énormément de différences. Celles-ci sont liées à des
manières de penser culturelles différentes. Comme elles sont différentes, les stratégies cognitives d’acquisition
de ces langues vont varier.

CLAIRE MARCHAL 62
4.2.1 Séquence universelle.
Il y a quand même une séquence d’apprentissage de la langue qui semble universelle, puisque le prérequis est la
maturation de la mécanique articulatoire.

Âge Caractéristiques
Nouveau-né Communication réflexe (pleurs, mouvements, mimiques).
Dès leur naissance, les bébés s’expriment par des pleurs, par des gazouillis, des sourires et
des regards qui constituent les bases du langage et de la communication.
Vers 2 mois Divers sons significatifs (gazouillis, gémissements, pleurs, rires).
Entre 3 et6 Nouveaux sons (couinements, grognements, trilles, voyelles).
mois Les gazouillis, gloussements et autres bruits de gorge s’intensifient. Les bébés arrivent à
imiter certaines vocalises simples.
Entre 6 et 10 Lallation (répétition de syllabes formées de consonnes et de voyelles).
mois A partir de 6 mois, les bébés commencent à former des syllabes simples ou doubles. Au
début, les syllabes n’ont pas de sens précis.
Entre 10 et 12 Compréhension de mots simples : gestes précis destinés à la communication (montrer du
mois doigt).
Vers 10 mois, les bébés commencent à comprendre des phrases simples.
Vers 13 mois Prononciation des premiers mots appartenant distinctement à la langue maternelle
(articulation plus ou moins bonne).
Entre 13 et 18 Holophrases et lente augmentation du vocabulaire (jusqu’à 50 mots).
mois
Vers 8 mois Explosion lexicale (apprentissage de 3 mots ou plus par semaine).
Les enfants sont plus curieux et désignent des objets qu’ils veulent qu’on leur nomme.

De la naissance jusque 18 mois, les compétences que le bébé acquiert sont en vue d’articuler la langue
maternelle. Il y a quand même une influence de la culture, de la langue maternelle sur le type de babillage, mais
ça reste le même processus, ça reste un babillage.

Il y a une liste de compétences précoces des nouveau-nés qui semble universelle et qui est nécessaire à
l’acquisition d’un langage articulé.

- Biais pour le langage vs les sons non-langagiers. Les bébés sont plus attirés par du langage que par du
bruit (sons aléatoires). Accordent plus d’attention quand quelqu’un parle que quand la personne émet
juste des sons.
- Préférence pour la voix de la mère. In utero, l’enfant est déjà exposé continuellement à la voix de sa
maman, d’où la préférence. Fœtus.
- Préférence pour la langue maternelle, dès 4 jours.
➢ Expérience où le bébé tète : quand on lui met un enregistrement dans sa langue maternelle, il tète
plus longtemps, vs autre langue où il s’arrête vite de téter.
- Développement de la coordination audiovisuelle : il se rend compte que les mouvements de la bouche
correspondent à un son. 2 à 4 mois.
- Discrimine les phonèmes pertinents dans sa langue. Décrypte les unités d’intérêt. 10 mois.
- Mémorisation des mots entendus. 6 à 10 mois.

Apprentissage des noms communs puis des verbes (car les noms sont plus tangibles).

 Répertoire de connaissances précoces universelles, qui préparent le bébé à acquérir sa langue


maternelle.

CLAIRE MARCHAL 63
4.2.2 Pratiques parentales.
Les facteurs de développement de la langue varient selon les cultures.

Langage des donneurs de soins


Composantes universelles Composantes culturelles
Phrases courtes Prosodie
Répétitions Type de donneur de soins :
Pauses ➢ Occident : donneur de soins privilégié
Début phrases OK (phrases complètes) ➢ Cultures interdépendantes : beaucoup
d’interlocuteurs
Climat
➢ Chaud : enfant à l’extérieur → plus
d’occasions d’expériences sociales →
plus d’interlocuteurs
Ethnothéories parentales (Guatemala, Papouasie
Nouvelle-Guinée, Samoa)

- Guatemala : les bébés apprennent leur langue maternelle non pas par les parents mais avec le contact
avec les pairs, assez tard (2 ans). Ethnothéorie : l’enfant commence à parler à 2 ans.
- Papouasie Nouvelle-Guinée : les mères parlent très peu avec leur enfant car elles pensent qu’il faut
éviter les babillages. Ceux-ci sont vus comme un reflet de la proximité avec l’animalité. Les adultes
parlent à l’enfant quand celui-ci est capable de leur parler.
- Samoa : société hiérarchisée. On ne s’ajuste pas au type de communication du bébé. L’adulte ne doit
pas s’abaisser à la condition du bébé. Le bébé apprend la langue grâce aux enfants plus âgés, qui sont
de la même condition sociale.

Les ethnothéories parentales incarnent une grande partie de l’influence des pratiques culturelles sur
l’acquisition du langage.

Quelles sont les conséquences de ces ethnothéories et des différences de langage entre les caregivers ?

- L’âge où l’enfant commence à parler.


- Lien important entre la quantité et la complexité du langage utilisé et la
proportion de phrases complexes que l’enfant va être capable de produire
(relation positive).

Etude aux Etats-Unis sur des enfants de 4 ans. Il y a très peu d’études systématiques
sur la manière dont le langage du donneur de soin et les ethnothéories influencent
les compétences et l’acquisition du langage des enfants.

4.2.3 Quelques études.


4.2.3.1 L’âge des questions « pourquoi, comment ».
Ces questions sont très valorisées en Occident, où on valorise et encourage la curiosité de l’enfant. On a comme
théorie en Occident que ces questionnements contribuent de manière active au développement cognitif de
l’enfant.

Mais comment ça se passe ailleurs ? Etudes faites ailleurs sur l’apparition de ces questions. Piaget pensait que
c’était un phénomène universel, car ce processus de questionnement sert à l’enfant à réduire l’écart entre ce
qu’il ne connait pas et ce qu’il y a à connaitre, mais est-ce que c’est vraiment universel ?

CLAIRE MARCHAL 64
Etude sur les enfants de 3 à 5 ans dans divers milieux : Samoa, Bélize,
Kenya, Népal. Ils ont recueilli toutes les questions de ces enfants et les ont
codées en 12 catégories de questions. Ils ont comparé le type de questions
et la fréquence d’apparition de ces questions.

Résultats : il y a certaines similarités avec les Etats-Unis, mais il y a aussi des grosses différences.

- Les personnes-cibles de ces questions ne sont pas toujours les parents, vs USA.
- Le type de question est plus ou moins identique avec ce qu’on a retrouvé aux USA concernant les
activités et la localisation d’un objet ou d’une personne.
- Différence dans la fréquence. En général, il y a 5 fois moins de questions dans les cultures collectivistes.

 Les questionnements de l’enfant ne sont pas encouragés dans toutes les cultures. Pas un processus
tout à fait universel.

Dans les sociétés traditionnelles, qui comptent plus sur l’autorité, la hiérarchie et la collectivité, c’est plus difficile
de promouvoir le questionnement individuel.

4.2.3.2 Lecture de livres.


• LECTURE : pratique parentale qui sert à apprendre le langage. La lecture de livre apprend vraiment
aux enfants le pattern de communication approprié dans la culture. C’est un exemple de ce qui est
culturellement approprié.

On a comparé la manière dont les mères péruviennes et américaines lisent des histoires à leur enfant. Il y a des
grosses différences :

- Pérou : style didactique. Les mères donnent beaucoup d’informations sur tout ce qu’on voit et puis
posent des questions dont les réponses se trouvent dans le livre. Manière de raconter succincte,
répétitive. La narration n’est pas longue ni compliquée.

- Etats-Unis : narration longue et détaillée, surtout très personnalisée, axée sur la personnalité et
l’imagination. Les mères demandent à l’enfant de coopérer à la lecture du livre. Elles montrent image
et demandent à l’enfant de raconter l’histoire et de faire des liens avec sa propre vie (personnaliser
l’histoire).

Culture individualiste : l’enfant est mis au centre des préoccupations des parents. On le pousse vite à
l’autonomie. Style axé sur l’individu et son indépendance.

Culture interdépendante : l’enfant doit apprendre de son environnement, il doit se fondre dans son
environnement.

 Il faut faire attention dans l’utilisation de tests projectifs avec les enfants de différentes cultures. Si on
montre une image et qu’on demande de raconter une histoire, on doit faire attention aux manières de
raconter différentes selon les cultures, et qui ne sont pas signes d’une pathologique mais d’une
enculturation particulière.

CLAIRE MARCHAL 65
Etude sur la lecture aux enfants de 20 mois. Les mamans anglaises utilisent plus de noms communs, ont
tendance à regarder les éléments séparément sur une image. Les mères chinoises utilisent plus de verbes et se
focalisent sur les relations entre les éléments.

 Ressemblance aux styles cognitifs. Attention analytique vs attention holistique.

CLAIRE MARCHAL 66
5. Le développement
socio-affectif.
5.1 L’attachement.

5.1.1 Rappels : BOWLBY.


Les théories de l’attachement ont été développées par BOWLBY. Avant celles-ci, idée que l’enfant est dépendant
de sa mère pour satisfaire un besoin de nourriture. L’attachement serait un renforcement secondaire ou une
recherche d’assouvissement de pulsions / besoins liés à la nourriture (psychanalytique). Ce qui a influencé
Bowlby dans son développement des théories de l’attachement, ce sont 3 différents chercheurs :

- SPITZ : HOSPITALISME. L’enfant a plus de besoins que juste la satisfaction simple de ses besoins
primaires. A l’hôpital, des jeunes enfants ont reçu satisfaction pour leurs besoins primaires mais ne
recevaient pas autre chose (contact émotionnel). Conséquences dramatiques : 30% de ces enfants sont
décédés avant l’âge d’un an. L’enfant a besoin de contact.

- LORENZ : éthologue. Etude sur l’EMPREINTE maternelle. Expérience avec des canetons où il s’est
substitué à la mère. Très tôt, au-delà de la nourriture, les canetons mémorisent un objet mouvant et
l’identifient comme la personne à suivre, même si cet objet ne donne pas de nourriture.

- HARLOW : éthologue. Singe rhésus : choix entre mère fer (nourriture) ou mère laine (pas nourriture).
Préférence pour mère laine.

 Il y a un avantage évolutif de l’attachement. Rechercher la proximité avec la mère permet de se sentir


plus en sécurité → permet une meilleure survie. Valeur adaptative de l’attachement.

Pour Bowlby, l’attachement est un besoin essentiel.

Il a défini le concept de système d’attachement.

• SYSTÈME D’ATTACHEMENT : ensemble des comportements de l’enfant destinés à assurer une


proximité avec la figure d’attachement. Comportements émis pour favoriser la proximité. Besoin
inné de proximité. C’est instinctif ! Provoque des réponses instinctives chez la mère → soin maternel.
Besoin de sécurité → stimuli instinctifs de l’enfant (pleurs, rapprochement, …) → réponses
instinctives de la mère (soins) → proximité mère-enfant → sécurité assurée.
Résultat : attachement (lien).

Système complémentaire (soins de la mère) et antagoniste (exploration). Activation système attachement →


pas d’exploration. Quand le bébé sait que la mère est là → exploration, pas besoin d’activer son système
d’attachement.

CLAIRE MARCHAL 67
5.1.2 Les styles d’attachement : rappels.
AINSWORTH a commencé son modèle en Ouganda en 1950 puis a été aux USA. Elle a défini 4 styles
d’attachement. Elle a mis en place la STRANGE SITUATION PROCEDURE.

Types d’attachement :

• INSECURE INHIBÉ / ÉVITANT : les enfants réagissent peu, évitent leur mère. Ils ne distinguent pas son
comportement avec un étranger du comportement qu’il a avec sa mère. Seuil d’anxiété très élevé et
suractivé. Mère rigides, perfectionnistes, … 15%
• SECURE : activation du système d’attachement comme attendu. Mères attentives, répondantes, …
62%
• INSECURE HYPERACTIVÉ / AMBIVALENT : activation extrême du système d’attachement, attitude
ambivalente. Mères trop présentes, ou pas assez répondantes, … 9%
• INSECURE DÉSORGANISÉ : aucune stratégie comportementale claire. Mères effrayées, effrayantes, …
15%

Les pourcentages donnés viennent des Etats-Unis.

Quelques limites à la SSP :

- Elle ne peut être utilisée qu’avec des enfants de 12-18 mois.


- Elle induit un stress important pour l’enfant ; considérations éthiques.
- Catégories strictes auxquelles il est parfois difficile de faire correspondre des enfants.

Pour répondre aux limites, nouvelle méthode : Q-SORT. On demande aux individus qui scorent l’enfant (parents,
professionnels, …) de comparer le comportement de l’enfant (on leur demande de le décrire) avec des
descriptions types qui existent déjà. Profil composite de l’enfant.

5.1.3 4 hypothèses d’universalité.


BOWLBY, quand il a fait sa théorie de l’attachement, a supposé que 4 postulats sont universels.

Universalité de l'attachement

Normativité du style secure

Sensibilité

Compétence

CLAIRE MARCHAL 68
5.1.3.1 Universalité du système d’attachement.
Partout dans le monde :

- Face à un stress, le bébé recherche la proximité avec sa figure d’attachement.


- Une bonne figure lui donne une base de sécurité qui lui permet d’explorer.
- L’enfant active des signaux de détresse en cas de séparation.
- Hiérarchie entre les figures d’attachement : figure d’attachement primaire (souvent mère) et figures
secondaires. En cas de grand stress, privilégie la figure d’attachement primaire.

5.1.3.2 Normativité du style secure.


Le style secure (normal, normatif, optimal) est supposé être normatif partout ailleurs, dans toutes les cultures.

Environ 60% en Occident (exception en Allemagne du Nord, où il y a moins de secure et plus d’insecure). C’est
le style d’attachement qui prévaut le plus.

 Avantage évolutif du style secure.

5.1.3.3 Sensibilité de la figure d’attachement.


On pense que de manière universelle, une sensibilité maternelle adaptée est liée à un style d’attachement
secure. La sensibilité maternelle, la manière avec laquelle la figure d’attachement va répondre aux sollicitations
de l’enfant va prédéterminer le style d’attachement que l’enfant va développer.

C’est un universel corrélationnel.

5.1.3.4 Compétence.
On pense que, au travers de toutes les cultures, il y a une corrélation entre le style d’attachement (surtout
secure) et les compétences socio-émotionnelles de l’enfant.

Corrélation sécurité et compétence :

- Régulation des émotions négatives.


- Relations positives.
- Capacités cognitives.

C’est un universel corrélationnel.

Il faut regarder dans d’autres niches culturelles si ces postulats tiennent le coup.

5.1.4 Etudes cross-culturelles.


5.1.4.1 Mali.
Etude sur une tribu au Mali. 26 dyades mère-enfant analysées. Dans cette tribu, les pères ont plusieurs femmes.
Première année de vie : soins donnés par mère biologique puis l’enfant est confié à la fratrie et aux autres
femmes. Garçon premier né : figure primordiale d’attachement = grand-mère paternelle. Mortalité infantile :
25%. Le sevrage maternel intervient vers 2 ans.

CLAIRE MARCHAL 69
Les enfants ont été filmé en SSP. On a observé comment la mère et l’enfant réagissent pendant la procédure.
Ensuite, on a observé dans une situation un peu stressante mais plus naturelle ; le WEIGHT-IN. On regarde
comment l’enfant et sa maman réagit quand il se fait peser.

- SSP : donne une idée du type d’attachement.


- Weight-in : donne une idée du style de communication entre la mère et le bébé.

Hypothèse : lien entre le style d’attachement et le type de communication entre la mère et l’enfant.

Résultat :

- 69% secure.
- 0% évitant.
- 8% résistant / ambivalent.
- 23% désorganisé.

 Vérification de l’hypothèse d’universalité. Tous les enfants ont mis en place un système
d’attachement.

 Vérification de l’hypothèse de normativité du style secure.

 Lien entre type d’attachement et communication mère-enfant ; un bébé qui a un profil ambivalent, la
communication de la mère pendant le weight-in n’est pas optimale, elle ne répond pas tellement aux
signaux du bébé.

 La sensibilité maternelle semble liée au type d’attachement qu’on observe chez l’enfant. L’universalité
de l’impact de la sensibilité maternelle sur le type d’attachement est partiellement rencontrée.

5.1.4.2 Chine.
Autre étude sur dyade-mère enfant en Chine. On demande aux mamans d’évaluer quel était leur enfant idéal et
d’évaluer leur enfant réel en utilisant la méthode du Q-sort. Choix parmi les descriptions du profil idéal et du
profil de leur enfant. On demande aussi à des experts de le faire. Enfant idéal en lien avec attachement secure ?
Oui.

 L’enfant idéal est très proche du profil secure, comme en Occident.

5.1.4.3 Etude dans les kibboutz.


Années 85 : étude sur une population d’Israël. Dans celle-ci, ils pratiquent le collective sleeping. Les enfants
dorment tous ensemble dans une maison d’enfants où il n’y a pas de parents qui dorment (gardienne de nuit).
Ça entraine une proximité faible avec les figures d’attachement (mère, père).

Etude sur 36 dyades où on fait la SSP.

Résultat : la mère est la figure d’attachement primaire. Mais le profil de type secure est peu normatif, car moins
représenté. Ailleurs en Israël, il est à 75%.

 Soutien l’hypothèse de l’universalité de la sensibilité maternelle. Si la mère est peu présente, elle ne
peut pas répondre aussi rapidement et tout le temps aux signaux de son enfant → sensibilité
inconsistante de la maman. Style ambivalent sur-représenté.

CLAIRE MARCHAL 70
De manière générale, il y a plus d’ambivalent en Israël mais histoire, contexte culturel : insécurité, menace
sécuritaire, qui peut expliquer.

Ethnothéories : grand impact.

- Occident : beaucoup d’inhibant. On en voit peu dans d’autres cultures. En Occident, on a beaucoup
d’ethnothéories comme quoi on doit laisser le bébé pleurer, … Les injonctions d’autonomie baissent la
sensibilité maternelle

Distribution des patterns dans différents pays :

- Le style secure est le plus prévalent

 Supporte postulat de normativité universel.

- Style évitant / inhibé : prévalent dans les cultures indépendantes.


- Style ambivalent : dur à interpréter.

Faire attention quand on regarde des pourcentages d’attachement selon les cultures : la SSP a dû être adaptée
aux autres pays et varie parfois beaucoup. Ça devient dur de comparer.

CLAIRE MARCHAL 71
Tableau qui reprend ces différents postulats : on essaie de voir si ça tient ou pas dans les différents pays.

- + : preuves empiriques en faveur d’une universalité.


- 0 : pas assez d’étude pour faire des affirmations.
- (+) : preuves mixtes. Normativité : preuves. Universalité : preuve. Sensibilité maternelle : un peu moins
clair mais pas mal de +. Compétence : manque d’étude.

5.1.5 Résumé : 4 hypothèses d’universalité.


- Universalité ? Oui, même dans les cultures avec plusieurs donneurs de soins.
- Normativité ? Oui, même s’il y a des spécificités culturelles dans les proportions.
- Sensibilité ? C’est moins clair. Problème statistique ? Méthodologique ?
- Compétence ? Il n’y a pas d’étude systématique. Hypothèse que c’est plus spécifique. La compétence
change selon les cultures. On s’attend donc à des variations.

Sensibilité :

- Universelle ; réponse rapide et appropriée.


- Culturellement spécifique ; la manière de répondre aux signaux d’attachement de l’enfant.

Etude qui compare 2 cultures sur le type de réponses données par la mère après un signal d’attachement.

Etats-Unis Japon
Sensibilité en réaction Sensibilité anticipative
Encourage l’enfant à exprimer ses émotions Faire taire l’émotion et l’inconfort avant qu’ils ne
soient exprimés
Plus de contacts oculaires Contact physique, ce qui n’encourage pas une
perception de séparation entre le donneur de soin et
l’enfant
Essaie de focaliser l’attention du bébé sur un objet La mère porte l’attention du bébé sur elle
 Renforcement de l’exploration et de  Renforcement de la proximité émotionnelle
l’autonomie et de la fusion avec le caregiver

Tous ces styles de réponse renforcent des compétences sociales valorisées dans la culture.

 Promotion de compétences sociales valorisées dans la culture.

5.1.6 Conclusion sur l’attachement et la culture.


L’attachement est un processus universel. Le système d’attachement existe dans toutes les cultures et est
nécessaire au bon développement de l’individu.

La manière dont le donneur de soin répond aux signaux d’attachement, la manifestation de la sensibilité est
fonction de la culture et des buts de socialisation de cette culture, pour donner un enfant culturellement
compétent.

CLAIRE MARCHAL 72
5.2 Développement de l’identité.

5.2.1 Emergence du concept de soi.


Pour mesurer le concept de soi, on fait le test du miroir. On met un enfant devant un miroir. On lui met une
tache de couleur sur le front et on le met en face. On regarde s’il se rend compte que c’est son reflet.

- Si oui, il essaie d’effacer la tache sur son front.


- Si non, il cherche à aller derrière le miroir pour voir qui se cache, il est figé, …

Les études cross-culturelles ont remarqué un décalage horizontal important entre les sociétés indépendantes
et interdépendantes ; le concept de soi intervient plus tardivement dans les sociétés interdépendantes.

- Sociétés indépendantes : plus de contingence, plus de contacts oculaires, plus d’observations du


monde, … On traite l’enfant comme un agent, ce qui l’encourage à se percevoir comme un sujet
séparé. Emergence du concept de soi entre 18 et 24 mois en Occident.
- Sociétés interdépendantes : moins d’emphase sur l’individu et ses désirs. Ce qui prime, c’est la cohésion
et l’harmonie sociale. La conscience de soi intervient plus tard.

Est-ce un problème de familiarité ?

- En Occident, on met souvent l’enfant devant le miroir.


- Tribu africaine ; pas de miroir.

Familiarité donc ? Non → étude : on entraine des sujets Nso à cette tâche. Petite amélioration des résultats,
mais significativement ce n’est pas meilleur.

5.2.1.1 Le concept de soi au Kenya.


Etude menée au Kenya sur le concept de soi. 82 enfants entre 18 mois et 5 ans. Test du miroir.

Seulement 2 ont des comportements qu’on peut interpréter comme une reconnaissance de soi. Un seul a touché
la tache et l’autre a essayé de l’effacer. Ceux-ci ont plus de 4 ans.

Les 80 autres enfants sont restés figés devant le miroir. Est-ce que c’est dû au fait qu’ils n’ont pas acquis le
concept de soi ? Les auteurs en doutent. Est-ce que le concept de soi apparaît si tardivement ? Douteux.

 Ces enfants, en fait, ne savaient pas quoi faire. Ils n’ont jamais été confronté à cette situation, ils n’ont
pas de scripts comportementaux sur ce qu’il faut faire devant un miroir.

Ils viennent d’une société avec des comportements clairs à suivre (compliance sociale valorisée), l’enfant n’a
pas de script clair à suivre donc la meilleure façon pour lui de faire, sans faire de chose déplacée, est de ne rien
faire.

 C’est le paradoxe kenyan. L’enfant se fige, non pas par manque de concept de soi, mais par manque
de conduite comportementale claire à adopter.

CLAIRE MARCHAL 73
5.2.1.2 Le concept de soi (6 cultures).
On retrouve le même problème dans d’autres cultures interdépendantes.

Etude sur 6 cultures, avec 2 occidentales (Canada, USA). 133 participants, faible échantillon pour certains pays.
Enfants entre 3 ans et 55 mois. Test du miroir. On regarde les comportements qu’ils ont fait.

- Sur les 133 enfants, 80 ont des comportements qui montrent qu’ils ont un concept de soi, mais ¾ de ces
enfants sont aux Etats-Unis.
- Aucun enfant aux Fidji n’a montré de comportement de ce type.
- Aux Etats-Unis et au Canada, un seul enfant a montré le comportement de figement.

 Ça confirme le paradoxe kenyan ; les enfants qui viennent de cultures interdépendantes ont davantage
tendance à se figer devant un miroir.
 Il y a donc plus de figement là où la compliance sociale est plus forte.

5.2.1.3 Concept de soi : interprétation.


Il y a différentes manières d’interpréter ces résultats :

- Délai développemental ? Non.

- Effet de la familiarité de la tâche ? Probablement en partie. Les Occidentaux sont beaucoup plus
exposés aux miroirs, mais ça n’explique pas l’entièreté de la différence.

- Dû à une différence de parenting ? Probablement, oui. La manière dont les donneurs de soin se
comportent avec le bébé est en accord avec certains buts de socialisation sur la culture, et ça a une
influence énorme sur les comportements et le développement (notamment du concept de soi) de
l’enfant.

➢ Culture interdépendante : le développement d’un self autonome et séparé n’est pas une priorité.
C’est normal que cette conscience apparaisse un peu plus tard.

- Il y a un grand manque d’expressivité valorisé dans les cultures interdépendantes. Ça peut expliquer le
pourcentage élevé d’enfants qui se figent.

- La compliance sociale peut jouer 2 rôles :

➢ Pas de directive claire à adopter → figement.


➢ Durant le test, l’adulte pose le miroir et fait la marque sur le front ; qui est-il, l’enfant, pour aller
toucher à ça ?

CLAIRE MARCHAL 74
Implications :

- Veiller à la modalité de l’évaluation.

➢ Un enfant qui se fige et qui s’inhibe doit avoir une conscience de soi, il sait ce qu’il doit faire, qu’il
doit réguler son propre comportement. En plus, ils ne regardent pas derrière pour voir s’il y a un
autre enfant.
➢ En Occident, ce qui montre un concept de soi, c’est d’essayer d’effacer la tache etc.

 Pour une même modalité, deux comportements peuvent montrer un même concept.

- Veiller à la conceptualisation du concept utilisé dans une étude cross-culturelle. La self-regulation est
aussi une conscience de soi !

5.2.2 Représentation graphique de soi.


Les dessins de l’enfant sont une fenêtre sur le monde intérieur de l’enfant, sur la manière dont il se représente
et dont il représente le monde.

5.2.2.1 Etude Nso – Allemagne.


Etude sur des enfants de maternelle allemands et Nso. On demande à l’enfant de se dessiner.

Hypothèse : la culture régule le focus attentionnel sur le self ou sur les autres.

- Cultures indépendantes : accent sur le self. Via une pratique parentale, l’enfant intègre ça.

- Cultures interdépendantes : accent sur le groupe, pas sur le self. Les enfants sont entraînés à être à leur
place, à faire attention à leurs relations et à l’harmonie sociale, …

Ça devrait avoir un impact sur la manière dont l’enfant se dessine.

A. Développement graphique.
D’abord, ils ont regardé les compétences graphiques de l’enfant : elles sont assez similaires.

Même séquence de développement : gribouillis, préfiguratif, figuratif. Le développement des compétences


graphiques est similaire.

Gribouillis Préfiguratif Figuratif

Au départ, ils avaient un échantillon de 257 enfants Nso et 313 Allemands. Les chercheurs ont exclu de leur
échantillon les enfants qui ne sont pas au stade figuratif. Finalement, ils ont un échantillon de 70 sujets appariés
en âge, entre 4 et 5 ans.

 Même compétences graphiques, même développement du dessin, même schème d’évolution du


bonhomme.

Au début, têtard (tête), aspect transitionnel avec quelques membres (tête et petit corps), stade conventionnel
(une tête, deux jambes, deux bras, un corps, proportions). Même séquence mais petit décalage horizontal (les
enfants allemands arrivent plus tôt).

CLAIRE MARCHAL 75
Têtard Transitionnel Conventionnel

 Universalité dans la trajectoire du développement du dessin.

B. Spécificités culturelles du dessin.


Taille du corps et de la tête :

- Nso : plus petit bonhomme.


➢ Révélateur de la place de l’individu dans le monde.
- Allemand : tête plus grande.
➢ Ça serait lié à l’emphase sur l’importance des performances cognitives en Occident ? En tout cas,
ça reflète une importance du soi.

Se dessiner avec les autres : regarder la taille du soi par rapport aux parents.

- Nso : l’enfant est beaucoup plus petit que ses parents.


- Allemand : l’enfant s’oriente comme aussi grand que ses parents.
- Nso : L’enfant se perçoit comme moins séparé des donneurs de soin et des autres, il se représente plus
proche, plus petit.
- Allemand : espace personnel plus grand. L’enfant se représente plus loin des autres personnes de son
dessin.

5.2.2.2 Etude Nso – Allemagne – Turquie.


Matériel utilisé : dessin de la famille. L’échantillon turc est davantage proche d’un point de vue socioéconomique
de l’échantillon allemand.

Les compétences graphiques sont semblables.

Différences :

- Présence des personnes non-familières, dans le cas des Nso. Ils représentent un grand nombre de
personnes qui ne font pas partie du noyau familial car ils sont confrontés à plus de donneurs de soin.

- Position de l’enfant par rapport aux parents :

➢ Nso : l’enfant n’est pas spécialement placé à côté des parents, il peut être à côté d’un autre donneur
de soin non-parent.
➢ Allemagne et Turquie : que des membres de la famille représentés.

- Positionnement du soi dans le dessin.

➢ Nso : représentation de l’enfant perdue au milieu d’un amas composé de ses frères et sœurs.

- Taille des bonshommes plus importante en Allemagne et en Turquie que chez les Nso.

- En moyenne, distance plus importante entre les bonshommes, plus grand espace interpersonnel dans
les contextes occidentaux.

CLAIRE MARCHAL 76
- Très grosse singularité des bonshommes chez les Occidentaux. On reconnaît le papa, la maman, … Ils
ont des caractéristiques différentes. Ça reflète le besoin de spécificité, d’être un individu séparé avec
ses propres caractéristiques.

- Nso : la taille de la mère est toujours plus grande que celle du père.

- Nso : très peu d’expressions faciales représentées par rapport aux Occidentaux. Ça reflète la norme
d’expression des émotions, qui est différente selon les cultures.

5.2.2.3 Conclusion sur les études sur les dessins.


Il y a de grandes différences interculturelles. Même si les représentations graphiques sont les mêmes, il y a de
nombreuses spécificités culturelles sur la manière de se représenter avec sa famille.

- Présence de personnes non-familières chez les Nso.


- Taille des bonshommes et de l’espace entre les bonshommes varie et est plus importante dans les
cultures occidentales, car plus grande importante attribuée au sujet.
- La taille de l’espace entre les bonshommes varie et est plus importante dans les cultures occidentales,
car plus grande importance attribuée au sujet.
- Orientation des bonshommes dans le dessin : linéaire chez les Occidentaux, de biais ou d’un côté chez
les Nso. Peut-être un effet de familiarité sur le fait de dessiner sur une feuille A4 ?
- Variation en termes de détails du visage.
- Différence sur des détails personnalisés, qui différencient un bonhomme d’un autre. Plus d’attributs
différenciés dans les cultures occidentale.
- Cultures occidentales : plus d’émotions exprimées sur les visages.
- Nso : taille plus importante de la mère par rapport au père.

Est-ce que le dessin est vraiment révélateur du concept de soi ? Il semblerait que le dessin soit quand même un
outil assez fiable d’accès dans les représentations internes de l’enfant. Mais est-ce que c’est vraiment révélateur
du concept de soi ?

Est-ce qu’il s’agit juste d’une représentation culturelle ? Est-ce qu’il s’agit juste d’une manière dont on a appris à
dessiner culturellement, et donc on retransmet cette manière-là ?

Quoi qu’il en soit, les auteurs sont d’accord sur le fait que le dessin révèle l’enculturation, comment l’enfant
voit son monde culturel et comment il s’y représente.

5.2.3 Mémoire autobiographique : rappel.


Rappel sur la mémoire autobiographique : ce qui fait l’identité de l’individu, ce sont ses souvenirs dans sa
mémoire autobiographique. Ceux-ci sont influencés par la culture.

Ce qui est retenu, ce qui est dans la mémoire est marqué par la culture. USA : plus de choses par rapport au self.
Chine : plus de thèmes sociaux.

CLAIRE MARCHAL 77
5.3 Culture et émotions.

5.3.1 Emotions : une part d’universel et une part


de culturel ?
Comment la culture impacte-t-elle le développement émotionnel ?

Il est communément admis qu’il y a une grande part d’universel dans les émotions. Celles-ci sont présentes dans
toutes les cultures. Les émotions ont une valeur adaptative (peur → fuite du danger, joie → créer du lien social en
vue de coopérer pour survivre), ce qui en fait un phénomène universel.

Il y a 5 émotions de base, reconnaissables par toutes les cultures : peur, joie, colère, tristesse, dégoût.

Il y a quand même un impact assez important de la culture sur les émotions. De différentes manières :

- Conceptualisation de ce qu’est une émotion.

➢ Occident : ce sont des états internes, personnels.


➢ Société interdépendante : elles sont pratiques.
➢ Les mots qu’on met sur les émotions varient, …

- Signification donnée au fait de ressentir telle émotion.


- Quelle est la situation qui crée une émotion ? Cette situation est culturellement marquée.
- Valeur accordée à une émotion, sa désirabilité. Dans quelle mesure c’est désirable, approprié de
montrer telle émotion ?
- Manière dont on régule les émotions. Manière dont on va supprimer l’expression d’une émotion,
augmenter cette expression, …

5.3.2 Tempérament.
Dans l’étude des émotions, on s’intéresse d’abord au tempérament.

• TEMPÉRAMENT : vulnérabilité d’ordre génétique liée à certaines sensations et émotions.


➢ Ce tempérament est appréhendé, passé au filtre de la culture.
➢ Ce tempérament et ce filtre culturel donnent lieu à un certain éventail prédéfini d’émotions.
➢ Il y a des différences interindividuelles. Tempérament actif, triste, …

Appréhension
Vulénarabilité
cognitive Emotion et
à certaines
culturellement personnalité
sensations
déterminée

Une étude faite en Occident montre que les individus qui, bébés, sont

- Hautement réactifs (beaucoup de signaux, réagissent facilement) ont plus de chance d’être anxieux
(par rapport à leurs relations sociales, à leur futur, …).
- Faiblement réactifs ont plus de chance d’être audacieux par la suite.

Pourquoi ? La manière d’interpréter ou de filtrer la réactivité d’un bébé se fait selon le filtre de la culture.

CLAIRE MARCHAL 78
- Hautement réactif en Occident : peur des situations nouvelles. On interprète ça comme une anxiété
sociale. Le bébé apprend à lire cette réactivité, à la base physiologique, en tant qu’anxiété sociale.

- Hautement réactif dans d’autre culture : lecture différente de cette réactivité, associée à d’autres
causes ou d’autres éléments dans la culture, ce qui donne par la suite un profil différent.
➢ Dans certains pays, on attribue une haute réactivité du bébé à une possession d’un démon. Ça a un
impact énorme sur le développement de la vie émotionnelle du bébé.
➢ Interprétation comme une punition divine.
➢ L’enfant a ce comportement car on n’a pas respecté son corps, ses besoins physiques, …

On peut faire tout un tas de lecture à propos du même tempérament, de la même vulnérabilité à certaines
sensations.

5.3.2.1 Tempérament et différences culturelles.


Certains chercheurs se sont intéressés à savoir s’il y a des différences culturelles en termes de tempérament.

Certaines études montrent qu’il y a des différences de tempérament, surtout entre des populations qui ont été
séparées depuis longtemps (plusieurs milliers d’années), où il n’y a pas de possibilité de reproduction entre 2
populations.

- Les caucasiens américains sourient plus que les Chinois.


- Les bébés caucasiens américains sont plus vite excités ou irrités par un stimulus que les bébés Chinois.

➢ Physiologie : différence génétique de réabsorption de sérotonine entre les Caucasiens américains


et les Chinois.

Les différences au niveau du tempérament sont quand même minimes, et sont insuffisantes pour expliquer
toutes les différences.

 La réponse est peut-être à chercher dans la valorisation culturelle, dans le renforcement de certains
types d’émotions et de comportements.
- Asie : renforcement des états émotionnels de type calme et sérénité.
- Occident : renforcement de l’excitation.

Ça explique les différences de tempérament (à travers l’évolution).

 Là où on trouve la source de différence, c’est dans la valorisation culturelle, dans les buts de
socialisation.

5.3.3 Emotion en mots.


Premiers pas sur qu’est-ce qu’une émotion : la manière dont on nomme les émotions. Quelle est l’étiquette
verbale donnée à un panel de sensations, qui deviennent une émotion avec un mot ?

 La conceptualisation des émotions varie selon les cultures.

- Etats-Unis : le prototype de l’amour est l’amour maternel. C’est très différent de l’amour qu’on a pour
Dieu ; c’est une autre expérience émotionnelle.

- Etude sur ce que ça veut dire d’être heureux :


➢ Etats-Unis : être stimulé, excité, … Haute activation physiologique.

CLAIRE MARCHAL 79
➢ Japon : être calme, serein, ne pas ressentir trop d’émotions négatives.

- Il y a des mots qui correspondent à une expérience émotionnelle qui ne sont pas traduisibles dans
d’autres cultures.
➢ Grec : beaucoup de mots pour amour, qui décrivent une expérience différente.
▪ Agape : amour divin, désintéressé.
▪ Euros : amour sensuel.
▪ Philia : amour filial.
▪ Storge : amour amical.
➢ Self-esteem : pas traduisible en tibétain.
➢ Fago : état émotionnel que l’on ressent quand on perd un proche.

Il faut vraiment faire attention, quand on compare les émotions à travers les cultures via des études cross-
culturelles, aux mots qu’on utilise. Il faut les expliciter.

5.3.4 Socialisation et régulation émotionnelle.


Ce qui est à l’origine des différences qu’on retrouve au niveau émotionnel dans différentes cultures, ce sont les
pratiques parentales, qui sont elles-mêmes motivées par des buts de socialisation qui varient selon les
cultures. Ces buts de socialisation (ce que le parent projette de ce qu’est l’enfant idéal émotionnellement)
influencent les pratiques parentales, en vue que cet enfant exprime correctement les émotions qui sont
culturellement valorisées.

Ces buts de socialisation se traduisent par les pratiques parentales, croyances, ethnothéories et ça donne lieu à
des comportements parentaux différenciés ce qui donne lieu à des différences entre cultures au niveau de
l’expression des émotions.

Buts de Pratiques Expression


socialisation parentales des émotions

Y a-t-il des différences entre les cultures indépendantes et les cultures interdépendantes ?

5.3.4.1 Etude Nso – Allemagne.


Etude sur des enfants Nso et allemands. 81 Nso et 83 Allemands.

- Nso : communauté rurale familiale, importance de la hiérarchie.


- Allemagne : culture indépendante, valeur de liberté, d’autodétermination, d’expression de soi, …

A. Différents buts de socialisation.


Les buts sont très différents. Par extension, les buts Nso sont très importants dans les cultures
interdépendantes.

Idée très différente de ce qu’est un enfant idéal et de ce qu’il doit développer comme compétence. Ça donne
lieu à des comportements différent !

CLAIRE MARCHAL 80
B. Différentes ethnothéories parentales liées à l’âge
d’émergence des émotions.

Les parents Nso attendent les émotions plus tard en âge que les parents allemands. Sauf pour 2 émotions :
honte et culpabilité. Pour ces 2 émotions, les Nso pensent que leurs enfants devraient les exprimer plus tôt.
C’est logique, car ce sont des émotions qui favorisent l’harmonie sociale. Ressentir de la honte et de la culpabilité
permet d’éviter de dévier de l’ordre social établi. Ça permet de réajuster son comportement pour revenir dans
l’ordre social.

De manière plus générale, on voit que les cultures interdépendantes favorisent les émotions sociales. Ce sont
les émotions que l’on ressent par rapport à ce que l’on a fait à quelqu’un d’autre, contrairement à la joie et à la
fierté qui sont des émotions personnelles qui peuvent nous faire sortir de l’harmonie sociale (ce qui compte,
c’est nous et nos réussites, plutôt que le souci de maintenir l’harmonie du groupe).

Il semblerait que dans les cultures interdépendantes il y a une tendance à ne pas exprimer, mais tout dépend
des émotions.

C. Différentes ethnothéories liées à l’enfant idéal d’un point de


vue émotionnel.
Ethnothéorie sur le bon enfant Nso : il n’exprime pas ses émotions (surtout les négatives). Il est calme et
inexpressif.

CLAIRE MARCHAL 81
Mise en parallèle avec le contexte social où il doit évoluer : il doit rester avec différents donneurs de soin quand
la mère part et doit donc rester calme, ne doit pas se plaindre. Il doit beaucoup réguler ses expressions
émotionnelles. La manière dont la mère se comporte va être en adéquation avec ça.

Une étude a analysé les conversations que la mère a avec son bébé de 3 mois, surtout au moment où il exprime
des émotions négatives. Quel est le langage employé ? Directives très claires, parfois menaces. La mère emploie
l’allaitement comme stratégie de régulation émotionnelle. Injonctions, directives, mises en garde claires.

 Pour la maman Nso, contrôler ses émotions négatives est la conduite à adopter pour promouvoir un
bébé sain et adapté.

Même étude auprès de mamans allemandes.

Ethnothéorie sur le bon enfant allemand : il doit être capable d’exprimer ses désirs et émotions. Réprimer ses
émotions en Occident est vu comme une source de maladie. Il y a donc une pression à exprimer ses émotions,
mais exprimer ses émotions positives. On est censé être un individu autonome, fort et indépendant ; on doit
être heureux et ne pas exprimer ses émotions négatives.

Analyse des conversations que la mère a avec son enfant de 3 mois : la maman aide à la verbalisation, recherche
la coopération. « Pourquoi est-ce que tu pleures ? ». Elle cherche avec le bébé une solution à cette expression
d’émotions négatives. La mère cherche l’échange émotionnel, le contact oculaire, fait appel aux états internes
du bébé. Elle l’incite et le félicite à adopter un autre comportement : prémisses d’une négociation. 90% du
temps : interactions en face à face. Avant de mettre au sein, échange avec l’enfant, cherche la cause des pleurs,
l’invite à exprimer son malaise.

 La stratégie de régulation émotionnelle varie selon les ethnothéories.

D. Différentes pratiques de régulation émotionnelle.


Etude sur les pratiques de régulation émotionnelle chez les Nso. Méthode : Strange Situation Procedure. On a
adapté la SSP, car être seul dans une pièce avec uniquement un individu là-bas, ça n’arrive jamais. → Une
étrangère arrive dans le noyau familial (T1) et repart dans le village avec l’enfant (T2).

On mesure le taux de cortisol et on le compare aux données occidentales :

- Secure : le niveau augmente un peu mais descend assez rapidement.


- Insecure (les 2) : le niveau est très élevé. L’enfant ressent un stress très élevé.

Est-ce qu’on retrouve le même profil chez les Nso ?

L’étude a montré que non, ce n’est pas tout à fait la même chose. On a retrouvé 3 patterns au niveau du cortisol
dans la salive, qui correspondent à trois profils / réactions durant la SSP.

CLAIRE MARCHAL 82
- Enfants qui n’expriment pas d’émotion : assez bonne régulation du stress ; le taux de cortisol diminue
entre le T1 et le T2. Étonnant ; les enfants sans expressions corrèlent avec les insecure inhibés
occidentaux. Mais le profil de cortisol semble être plus adaptatif chez les Nso.

- Enfants calmes avant l’arrivée et qui montrent plus d’émotions négatives quand ils repartent avec
l’étrangère :

➢ Montée importante du niveau de cortisol après le T1. Ils n’arrivent pas à réguler leur stress.
Pourtant, ils ont le profil d’attachement secure, car ils différencient leurs émotions quand leur
parent est là ou pas.
➢ Occident : niveau de cortisol plus bas avec profil secure.

- Enfants qui présentent des émotions négatives tout au long :

➢ Ils ont tout le temps un niveau de cortisol très élevé.


➢ Ils correspondent aux ambivalents.
➢ Ça correspond à ce qu’on a trouvé en Occident.

 Il semblerait que le profil inhibé, chez les Nso, aie des meilleures conséquences au niveau physiologique
sur le cortisol et donc sur le stress. Il serait donc plus adaptatif d’être inexpressif chez les Nso, et ça ne
serait pas un signe d’insécurité, d’attachement insecure.

5.3.5 Conclusion.
Les différences de pratiques et de comportements sont liées à l’expression émotionnelle.

- Indépendant : on encourage à exprimer ses émotions, à verbaliser ses états internes, à s’auto-affirmer
en tant qu’individu séparé qui a ses émotions et sa vie interne.
- Interdépendant : on encourage à maîtriser ses émotions, on doit maitriser ce qu’on renvoie de ses états
internes pour ne pas perturber l’ordre social (trop heureux → jalousie. En colère → rompt l’harmonie
sociale). Etat de neutralité émotionnelle.
➢ Mais ça dépend de quelles émotions ! La honte et la culpabilité sont encouragées, car elles
favorisent l’ordre social.

La non-expression de ses émotions n’est pas égale à une pathologie. Chez les Nso, il est plus adaptatif de ne pas
être expressif (taux de cortisol moins cher).

 Un enfant sera en bonne santé, moins stressé, si son comportement est en accord avec ce qui est
favorisé dans sa culture, avec les buts de socialisation recherchés. Comportement normatif et
adaptatif.

Implication pour l’évaluation de ce qu’est un bon développement social (attachement, identité, émotions) chez
l’enfant. Toujours mettre en abime le développement socio-affectif avec la culture. Ne pas parler de décalage
ni de retard tant qu’on n’a pas pris en considération le développement culturel.

CLAIRE MARCHAL 83
6. Psychopathologie.
6.1 Santé et psychopathologie.
• SANTÉ : selon l’OMS, c’est un état de bien-être physique, mental et social et pas simplement
l’absence de maladie ou d’infirmité.

Psychopathologie : concept difficile à définir. Parfois défini comme une déviance par rapport à un état de
normalité (comment définir la normalité ?), définie selon un mal-être ou d’inadaptation sociale.

• PSYCHOPATHOLOGIE : a les caractéristiques d’un comportement ou d’une expérience individuelle


considérés comme « maladie » ou « trouble » et jugés comme étranges ou bizarres par les personnes
extérieures avec lesquelles l’individu interagit.

Notion de référence : la notion de société, de groupe culturel. La maladie est donc culturellement déterminée
puisque ce qui est jugé comme inadapté, étrange ou bizarre peut varier entre les cultures.

Différentes cultures auront une approche totalement différente de la définition de la maladie ou du traitement
de la maladie.

- Occident : modèle biomédical. On recherche une cause spécifique, souvent organique, un


dysfonctionnement ; On est souvent traité par antidépresseur, par traitement chimique.
- Médecine chinoise : conception différente : déséquilibre d’énergie, on ne cherche pas la cause au
niveau organique et on traite différemment.

La définition du trouble mental n’inclut pas :

- Ce qui relève d’une réponse acceptable culturellement à un stress (tristesse après un deuil).
- Des comportements socialement déviants (politique : quelqu’un qui a des idées avant-gardistes,
contraire au courant dominant. Religion : affiliation religieuse contraire à ce qui est culturellement ancré)
ou ce qui relève d’un conflit entre individu et société (révolte, anarchie).

6.2 Santé, psychopathologie et société.


Quand on parle de psychopathologie de troubles mentaux, on se réfère à un comportement observé. En
passant par le filtre culturel, on peut distinguer si le comportement est normatif et adapté ou s’il s’agit d’un
symptôme.

• FILTRE CULTUREL : permet de distinguer ce qui est normatif et ce qui est pathologique.

CLAIRE MARCHAL 84
6.3 Classification CIM.
Classification internationale des maladies. Dans celle-ci, il y a une catégorie sur les troubles mentaux, qui
regroupe les troubles mentaux et les troubles du comportement.

- Troubles mentaux organiques : Alzheimer.


- Troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de substances psychoactives.
- Schizophrénie, trouble schizotypique et troubles délirants : hallucination, paranoïa.
- Troubles de l’humeur : troubles maniques et dépressif.
- Troubles névrotiques : phobies, anxiétés.
- Syndromes comportementaux associés à des perturbations physiologiques et à des facteurs
physiques : anorexie, boulimie.
- Troubles de la personnalité et du comportement chez l’adulte : déviances sexuelles, personnalité
dépendante, voyeurisme.
- Retard mental. Troubles du développement psychologique : autisme.
- Troubles du comportement et émotionnels apparaissant durant l’enfance et l’adolescence : TIC.

Ce type de classification, cette division en différentes catégories de troubles mentaux se retrouve dans
beaucoup d’autres classifications.

6.4 Psychopathologie : universelle ou culturelle ?

6.4.1 Universalité de la psychopathologie ?


Tendance des classifications (DSM-V, ICD-10, CCMD-3, …) à vouloir prétendre à l’universalité.

Bien que le CCMD (Chinese Classification of Mental Disorders) contienne des notions propres à la culture
chinoise (énergie).

En-dehors du CCMD, les classifications ont une visée universaliste et se réfèrent à un modèle biomécanique de
la santé mentale. Tous les êtres humains partagent à peu près la même biologie, c’est un mécanisme universel.
Déficit en sérotonine → dépression, peu importe l’endroit.

Et pourtant, il y a des cas limites. Même quand on compare ces diverses classifications, il y a des catégories qui
ne regroupent pas la même chose. Exemples :

- Neurasthénie : pas dans le DSM.


- Homosexualité : a été présente avant, n’est plus reprise maintenant.
- Addiction à internet : elle n’est pas reprise actuellement dans les catégories des troubles mentaux, mais
il y a maintenant un débat sur son introduction dans le DSM-V.

6.4.2 Psychopathologie culturellement spécifique ?


A côté de ces différents systèmes de classification, on a à l’extrême inverse le relativisme culturel.

• RELATIVISME CULTUREL : une maladie mentale ne peut pas être comprise en-dehors de son contexte
culturel, elle est toujours spécifique à celui-ci. Les maladies sont intrinsèquement culturelles, elles
ne peuvent être comprises qu’à travers leurs cultures.

CLAIRE MARCHAL 85
En support à ça, on retrouve des troubles mentaux « culture-bound syndroms » : pas de catégorie où les
retrouver dans les classifications. Le DSM-IV les reprend en annexe.

Exemples :

- Syndrome amok (Asie du Sud) : crise de démence très agressive et très limitée dans le temps.
- Latah (Malaisie) : implique des comportements imitatifs chez les femmes. Elles semblent être
conscientes mais elles recopient les paroles et mouvements des autres personnes. Elles font souvent
preuve d’une extrême obéissance et peuvent faire des choses qui ne sont pas dans leur répertoire de
comportements habituels.
- Syndrome du Koro (Chine, Japon) : peur que le pénis se rétracte dans le corps, ce qui mène à la mort du
sujet.

On n’a jamais rencontré ces syndromes dans d’autres contextes culturels.

6.4.3 Universalisme modéré de psychopathologie ?


Il y a donc deux extrêmes : universalisme exagéré biologisant et relativisme culturel. Il faut prendre la position
médiane : universalisme modéré.

Relativisme culturel Universalisme modéré Universalisme biomécanique

• UNIVERSALISME MODÉRÉ : cette position considère que les phénomènes psychopathologiques sont
tous présents sous une forme ou sous une autre, dans toutes les cultures, mais que certains des
aspects de ces psychopathologies vont être sujets à des différences culturelles (fréquence, mode
d’apparition, mode d’expression – les symptômes associés peuvent varier –, …).

OMS, 2001 : montre que différentes maladies semblent être présentes dans différents contextes culturels, mais
que ce qui change c’est la fréquence. La proportion de ces maladies n’est pas la même.

Cependant, c’est une étude faite avec des outils diagnostiques occidentaux → la catégorisation de ces différents
troubles utilise des critères occidentaux donc on n’est pas sûr que ça corresponde vraiment à la réalité des autres
cultures.

Selon cette approche de l’universalisme modéré, on considère que pour un trouble donné il y a des symptômes
centraux, un noyau dur universel auquel s’ajoutent des symptômes culturellement spécifiques.

Exemple : dépression ; les symptômes centraux sont l’anxiété, le retrait du monde, le manque d’énergie et le
manque d’estime de soi. Symptômes culturels spécifiques :

- Chine : plus de plaintes somatiques. Les symptômes axés sur le corps.


- Occident : symptômes axés sur les états internes du patient.

Explication des différences : dans les cultures interdépendantes, l’accent est moins mis sur les sujets et sur ses
états internes.

CLAIRE MARCHAL 86
DSM-V : privilégie l’approche de l’universalisme modéré. Il donne un glossaire des plaintes culturelles de
détresse (Glossary of Cultural Concepts of Distress) ; des façons de manifester sa détresse qui reviennent
souvent dans chaque culture. C’est un glossaire qui permet de mieux comprendre et d’appréhender les plaintes
liées à la détresse émotionnelle dans chaque culture.

6.4.4 DSM-V : nouvelle sensibilité culturelle.


Nouvelle sensibilité culturelle du DSM-V :

- Maintenant, il ne donne plus une liste de syndromes, il en fait une description → approche descriptive.
- Ajout de critères de variation culturelle.
- Ajout d’une discussion sur ce qu’est la souffrance selon les différentes cultures → donne une aide à
l’évaluation diagnostique, en donnant un entretien de formulation culturelle qui permet de mieux
approcher les personnes de différentes cultures pour donner un diagnostic de psychopathologie.

Exemples :

- « Pleurs incontrôlés et maux de tête sont des symptômes d’une attaque de panique dans certaines
cultures, mais dans d’autres c’est une difficulté à respirer ».
- Ajout d’un critère qui permet de diagnostiquer une anxiété sociale : « peur d’offenser les autres »
(surtout en lien avec le contexte japonais et le respect de l’harmonie sociale).

Il a donc un apport de trois notions nouvelles notions dans le DMS-V, qui marquent cette sensibilité culturelle :

- Syndrome culturel : ensemble de symptômes qui apparaissent dans une culture donnée et qui ne
constituent pas un trouble dans un autre contexte.

- Glossaire d’expressions culturelles de détresse : les éditeurs ont regroupé des mots, phrases et
expressions employées dans certaines cultures pour marquer la détresse mentale. Le clinicien peut
donc lire le mal-être dans le discours du patient qui vient d’un contexte différent.

- Explication culturelle : les éditeurs ont mis en lumière le fait que certains modèles culturels peuvent
expliquer des troubles par leur cause. On ne peut pas déterminer les causes d’un trouble sans connaître
le contexte culturel.

Trouble en Inde où la personne ressent une grande angoisse par rapport à la perte de sperme →
explication culturelle : le sperme est une substance d’importance primordiale pour l’être humain.

Exemple de ce qu’on peut lire dans le DSM-V : « il est important de distinguer les symptômes d’un trouble
psychotique bref de modes réactionnels admis culturellement ».

 On retrouve le filtre culturel ; ce qui est important c’est ce que le groupe culturel lit comme
pathologique.

CLAIRE MARCHAL 87
7. Psychothérapie.
7.1 Définition.
• PSYCHOTHÉRAPIE : toute pratique sociale qui implique un patient et un soignant dans une relation
interpersonnelle dont le but est de traiter la souffrance du patient liée à un trouble d’ordre
psychologique.

Dans cette notion, il y a une triangulation entre le soignant, le patient et le groupe social (au sens large, la
société).

Patient

Groupe
Soignant
social

Les pratiques et croyances d’une certaine culture (groupe social) participent à la compréhension qui existe entre
le patient et le thérapeute. Le groupe social dicte ce qui est pathologique ou non. Le groupe social est impliqué
dans la notion de protection ; si le patient représente un danger pour le groupe social, il faut le traiter pour le
réinsérer au sein du groupe social.

7.2 Thérapies indigènes.


• THÉRAPIE INDIGÈNE : le thérapeute, le patient et le groupe social ont tous la même culture de
référence.

Psychothérapie occidentale : relation duelle, evidence-based psychotherapy (on est axé sur les résultats,
scientifiquement prouvés), thérapie cognitivo-comportementale de plus en plus utilisée. Chez nous, le
thérapeute et le patient font partie du même groupe culturel.

Autres cultures hors-Occident : thérapies médico-religieuses.

- Haïti : cérémonie vaudou.


- Méditation.
- Guérir par les esprits, posséder le patient par un esprit guérisseur.

7.2.1 Naikan.
Naikan : nai = intérieur, kan = regard. Thérapie au Japon. C’est un procédé thérapeutique conseillé dans divers
cas (indications multiples) :

- En cas de conflit interpersonnel.

CLAIRE MARCHAL 88
- En cas de problème d’estime de soi.
- En cas de dépression ou d’addiction, …

Méthode : isolement. Le patient est invité à rester assis pendant plusieurs heures (entre 5h30 et 21h) pendant 7
jours. Il doit rester au calme sans être interrompu. Il est invité à réfléchir sur lui-même.

But de la thérapie : découvrir sa propre culpabilité intérieure et personnelle. Adopter une attitude plus positive
de gratitude pour ce qui est arrivé de positif dans la vie du patient.

 But introspectif.

Cette grande introspection est interrompue toutes les 90 minutes par un superviseur d’introspection. Il pose des
questions au patient sur divers domaines :

- Soins et biens reçus : tout ce que le patient a reçu de positif des autres.
- Soins et biens donnés en retour : tout ce qu’il a fait de bien aux autres.
- Torts qu’il a causés aux autres.

De ça doit venir naturellement une discussion sur les torts qu’il pense avoir subi.

Fin de la thérapie : le patient est capable de relativiser, de comprendre ce qu’il a fait de mal, de comprendre sa
culpabilité. Il ressent du positif par rapport à ce qu’il a reçu et sait faire abstraction des torts causés.

C’est cohérent avec les valeurs japonaises d’interdépendance et d’humilité : on se remet en question, on se
réajuste aux autres en remettant en perspective :

- Ce que nous avons fait de mal et de bien.


- Ce que les autres nous ont fait de mal et de bien.

Pour essayer de rétablir des relations interdépendantes harmonieuses.

Résumé : c’est une invitation à se remettre en question, à remettre les choses en perspective, à diminuer son
sujet (relativiser, se mettre au second plan). Cohérent avec les valeurs japonaises d’humilité et
d’interdépendance.

7.2.2 Vaudou haïtien.


Les rites vaudous contribuent à donner un vrai sentiment d’identité aux haïtiens.

C’est une synthèse de croyances africaines et catholiques, ainsi que des croyances plus locales et des pratiques
religieuses très populaires.

 Lien entre religion et médecine.

Rituel de transe : rituel durant lequel différents esprits vont posséder le plus souvent le guérisseur et parfois le
patient, afin d’aider le malade qui est vu comme possédé par un esprit maléfique (la cause des troubles), ou la
victime d’un sort, …

 Causes mystico-religieuses.

Le thérapeute est possédé de sains, d’esprits guérisseurs, d’ancêtres, … (variation selon les croyances locales).
De manière générale, un prêtre vaudou est toujours aidé par les esprits, qui sont ses outils, qui l’assistent dans
le cheminement diagnostique et dans le traitement ; ce sont des outils thérapeutiques.

CLAIRE MARCHAL 89
Le patient est croyant. Le thérapeute est prêtre. Ça forme un système médico-religieux.

Vidéo : on voit bien que le prêtre vaudou a 2 casquettes : guérisseur et guide religieux.

Le patient est pris de crise délirante, ce n’est pas un épisode psychotique. Les ¾ des maladies mentales à Haïti
sont exprimées par ce symptôme de crise délirante (due à une possession), c’est culturel. Ça peut également être
une dépression, aussi exprimée par ce symptôme culturellement marqué.

7.2.3 Efficacité des thérapies indigènes ?


Est-ce que les thérapies indigènes sont vraiment efficaces ? Il y a très peu d’études empiriques à large échelle,
mais globalement ça semble efficace.

Syndrome de Dhat : impression de se vider de sa substance vitale car l’individu perd trop de sperme. Sentiment
de fatigue, de faiblesse dans le corps, douleurs physiques, état mental de dépression et d’anxiété lié à cette
perte de substance vitale.

On ne peut comprendre ce symptôme qu’en regard du contexte indien. Là-bas, le liquide séminal représente
l’essence de vie par excellence. Dans la culture hindoue, il faut 40 jours et 40 unités de nourriture pour faire une
unité de sang, 40 unités de sang pour faire de la chair, …, etc., jusqu’au liquide séminal. Il faut beaucoup de
temps et de ressources pour faire du liquide séminal. Se masturber revient donc à gaspiller.

Un médecin indien a traité un patient atteint de ce syndrome avec une thérapie et des antidépresseurs, mais ça
n’a pas marché. Un soignant hindou a prescrit yoga et méditation, ce qui a amélioré l’état du patient. Pourquoi ?
Les croyances liées au yoga et méditation (mettre à distance pulsions sexuelles, centration sur soi) prennent les
croyances du patient en compte.

 Les thérapies indigènes sont cohérentes avec le système de croyance et les valeurs du patient
(rappel : cadre où patient, thérapeute et société partagent les mêmes croyances).

Ces thérapies aident vraiment le patient car elles mobilisent des ressources internes du patient : il y croit, il y
adhère et donc il s’y engage. De plus, il y a une prise en charge reconnue par la société, et donc soutenue par
celle-ci. La famille va être plus proche et impliquée, ce qui va aider le patient.

7.3 Thérapies culturellement adaptées.

7.3.1 Aide pour l’adaptation culturelle.


Que se passe-t-il quand le patient et le thérapeute sont de différentes cultures ?

- Thérapie indigène pour le patient : impossible, puisque le thérapeute n’est pas de la même culture.
- Thérapie indigène pour le thérapeute : peu efficace. Donner des antidépresseurs à quelqu’un qui se croit
possédé est peu efficace.

Que faire ? Psychothérapie culturellement adaptée. Qu’est-ce que c’est ?

- Elle implique le fait d’utiliser des normes, valeurs et croyances en référence à la culture du patient. Le
thérapeute doit se sensibiliser là-dessus, les comprendre et les utiliser.

- Impliquer les autres membres de l’entourage.

CLAIRE MARCHAL 90
- Faire des groupes thérapeutiques de même ethnie.
➢ Culture interdépendante : importance du groupe social. Pour ces individus, il n’est pas imaginable
d’être soigné dans un contexte duel, ça peut provoquer de l’anxiété. Il faut donc faire des groupes
thérapeutiques de même ethnie.

- Si la personne ne maitrise pas la langue, trouver un interprète, maîtriser la langue de la personne.

- Dans le groupe thérapeutique, avoir un thérapeute du même groupe ethnique, afin d’avoir une grille
de lecture (pas toujours possible).

- Adapter nos pratiques thérapeutiques en fonction des pratiques thérapeutiques qui viennent de la
culture du patient ; prescrire des prières, …

7.3.2 DSM-V : entretien de formulation culturelle.


Le nouveau DSM a fait preuve de sensibilité culturelle et donne maintenant un entretien de formulation
culturelle. Il donne différentes guidelines qui permettent au thérapeute d’évaluer l’influence de la culture sur le
diagnostic qu’il va faire et sur le traitement à suivre.

Le DSM propose d’évaluer systématiquement quelle est


l’identité culturelle de l’individu, de quelle niche culturelle il
vient, qu’est-ce que ça implique pour sa construction de
l’identité, quel est le concept culturel de détresse, que signifie
le mal-être, comment est-il manifesté dans cette culture-là,
quels sont les facteurs de vulnérabilité culturelle, qu’est-ce
qui constitue un stresseur psychologique dans cette culture,
quels sont les facteurs de résilience, qu’est-ce qui permet au
patient d’aller mieux, quels sont les traits culturels entre un
patient et son thérapeute, quels sont les aspects culturels de cette relation (duel, groupe), …

 Approche plus culturellement sensible du patient, afin de mieux évaluer et de mieux poser un
diagnostic.

Plusieurs auteurs ont proposé d’améliorer ces


différents points auxquels il faut être attentif.
Ils ont donné des guidelines plus claires :

- Affectif : exprime ses émotions,


réprime, supprime, …
- Comportement : regarde dans les
yeux, cherche le contact visuel ou
pas ?
- Cognition : influencé par le contexte
ou pas ?
- …

Il nous aide à nous orienter vers quel type de culture le patient se trouve, et ce qui fait donc sens de faire.

Maintenant, le DSM-V fournit vraiment cet entretien de formulation culturelle, qui est un guide pour le clinicien
de différents types de question à poser, de comment les poser, de comment relancer. Il faut rester souple par
rapport à ça, mais c’est un outil qui aide vraiment.

CLAIRE MARCHAL 91
C’est un entretien de 16 questions. La base derrière cet entretien est que le contexte culturel est indispensable
pour comprendre la maladie, l’évaluer et poser un diagnostic.

Dans cet entretien, on propose une évaluation systématique de l’identité culturelle et de conceptualisation de
la détresse, comment est-ce que le patient exprime son mal-être.

7.3.3 Exemple de l’applicabilité culturelle des


TCC avec les personnes musulmanes.
Est-ce qu’on peut vraiment appliquer des modèles thérapeutiques occidentaux avec d’autres cultures ?

Etude sur l’applicabilité culturelle des TCC avec les personnes musulmanes. Etude de cas : cas de Khadija ; une
jeune femme musulmane de 23 ans, qui vit chez ses parents aux USA et est étudiante en soins infirmiers. Elle
est pratiquante mais pas dogmatique. Un jour, elle tombe amoureuse d’un jeune homme non-musulman. Elle
entame une relation platonique avec lui. Tout va bien jusqu’au jour où elle a des crises de panique → elle consulte
pour cette raison. Ses crises de panique ont débuté au moment où elle a parlé de son couple à ses parents (ils
ont mal réagi ; elle doit demander pardon à Dieu pour ses péchés etc.). En plus de ses crises de panique, elle est
sujette à une énorme culpabilité.

Diagnostic possible : conflit entre ses affects / désirs et des principes (familiaux, de l’islam, ses propres valeurs à
elles venant de sa culture). Ses attaques de panique seraient un symptôme de cette dissonance entre ses
croyances / valeurs et ses désirs. Cette dissonance est devenue apparente quand elle l’a mise en mot et que le
conflit est devenu apparent.

D’un premier abord, on peut se dire qu’il y a beaucoup d’incompatibilités entre la théorie des TCC et l’islam (le
fait d’être croyant et de suivre les principes musulmans).

Les différences philosophiques majeures entre l’islam et les TCC


Principes des TCC Principes de l’islam
Réalité La réalité objective n’existe pas. Les La réalité objective existe, mais elle est la
individus construisent activement leurs plupart du temps inaccessible pour les sens.
propres interprétations de la réalité Le Coran est la seule mesure tangible de la
réalité objective
Empirisme / Le patient et le thérapeute recueillent La science et l’empirisme peuvent être vus
science impartialement des preuves comme des extensions de la théologie, tant
(« empirisme collaboratif », evidence- qu’ils sont en accord avec des principes a
based) et font des conclusions a priori
posteriori
Source des Les individus sont les architectes de leurs Le bien et le mal viennent de Allah ou sont
malheurs de propres malheurs autorisés par Lui. Il peut utiliser la maladie
l’individu pour punir et / ou pour instruire Ses
créations
Changement Les changements de comportements et Les changements de comportements et
émotionnel / d’émotions désirés suivent d’émotions désirés ne suivent pas
comportemental nécessairement un changement dans la nécessairement un changement dans la
cognition cognition, mais le sont si Dieu le veut
Contrôle de soi Les individus sont libres et dès lors Les actions des individus ne sont pas
capables de contrôler leurs cognitions entièrement libres. Des entités
métaphysiques agissent au-dessus, et par
extension, contrôlent le comportement des
humains

CLAIRE MARCHAL 92
Droits de Le self est séparé et discernable des Le self n’est pas séparé des autres. Les droits
l’individu autres. Ainsi, les intérêts du self et les et intérêts de la communauté éclipsent ceux
droits de l’individu sont promus de l’individu

Grand désaccord, opposition des principes de la TCC avec les principes islamiques.

 Est-ce une pratique vraiment adaptable aux musulmans pratiquants ?

Il existe quand même des congruences, des approches semblables :

TCC Principes musulmans


Assignations, devoirs que le patient doit remplir hors Voue un attachement à l’action concrète : il y a des
thérapie règles concrètes à suivre dans l’islam afin d’être un
bon musulman
Style directif ; la relation thérapeute-patient Acceptation de la hiérarchie
équivaut à la relation maitre-apprenti retrouvée dans
l’islam
Style psychoéducatif : visée de former le patient Grande inclination pour le savoir ; il est bien vu d’être
pour qu’il puisse mettre en place des stratégies sage et de connaitre les Ecritures
quand il est confronté à ses symptômes
Concentration sur le présent et le futur des patients Non-attardement sur le passé

Ce n’est pas si conflictuel que ça, il y a un terrain d’entente entre les principes des TCC et les principes de l’islam.

Quelles sont les actions thérapeutiques possibles pour Khadija ?

1. Gestion comportementale de la crise, du symptôme pour lequel le patient vient consulter. On fait ça
si le patient ne veut pas travailler sur la dissonance de ses cognitions. Pour gérer la crise, utiliser des
techniques de relaxation, des thérapies d’exposition, … Traitement en surface des symptômes
d’anxiété. Ça dépend du but de Khadija (si elle veut juste une prise en charge comportementale ou pas).

2. Si volonté et accord du patient pour aller plus en profondeur pour aller dans les cognitions, on peut lui
proposer de trouver des interprétations alternatives du Coran (partie sur les relations avec les non-
musulmans) avec un thérapeute instruit ou un imam motivé.

3. Consultation familiale : faire venir toute la famille pour travailler sur le conflit entre les valeurs de la
famille et les désirs de Khadija. Toute la famille doit être d’accord.

Dans tous les cas, que ce soit pour les TCC ou autres pratiques, si on rencontre une personne d’une autre culture,
il est portant d’amener certaines adaptations, de garder une certaine ouverture d’esprit en tant que
thérapeute :

- Respecter la religion du patient ainsi que ses obligations religieuses (horaire de prière → ne pas donner
un rendez-vous au patient sur les heures de prière).

- Connaître les conventions liées au regard. Islam : le regard frontal n’est pas quelque chose de positif
(les musulmans doivent faire preuve d’humilité → ne pas regarder dans les yeux).

- Respecter les codes liés au genre.

➢ Patient masculin : thérapeute masculin.


➢ Patiente : idéalement, thérapeute femme. Sinon, le patient doit être accompagné par un membre
de sa famille.
➢ Éviter les contacts physiques vis-à-vis des femmes (surtout si thérapeute masculin).

CLAIRE MARCHAL 93
- Garder en tête l’importance de la famille. Islam : très grand respect dû aux parents (ne pas dire au
patient de s’émanciper). Culture interdépendante ; les parents et le groupe définissent une part
importante de l’individu.

- Comprendre la notion de self interdépendant. Importance de la collectivité.

Il faut toujours être conscient qu’il est important d’être au service du patient et de ses objectifs. Ne pas mener
la thérapie sur ses propres principes et sur ce qu’on pense être un bon objectif. Exemple : s’affranchir de l’autorité
parentale : promouvoir dans les cultures occidentales mais pas dans les cultures interdépendantes. Ne jamais
interpréter ce que le patient dit selon nos propres idées, valeurs et cognitions.

 Faire attention à l’ethnocentrisme.

7.3.4 Conclusion.
Il est important d’être un psychologue culturellement informé (surtout quand ont es face à des patients d’autres
cultures). Pour chaque culture, il est important de se renseigner. En dernier recours, il faut questionner le patient
sur la signification qu’il accorde à certains concepts.

Comportements
symptômes
Des symptômes
aux syndromes

Procédés
"thérapeutiques"

Culture

7.4 Ethnopsychiatrie.
Dans le monde des thérapies culturellement adaptées s’est créée une nouvelle discipline : l’ethnopsychiatrie ou
ethnopsychanalyse (selon le thérapeute : psychiatre ou psychologue).

Mouvement fondé par NATHAN.

• ETHNOPSYCHIATRIE : discipline clinique qui se donne pour objet l’analyse de tous les systèmes
thérapeutiques, envisagés comme systèmes d’objets ; tous les systèmes, sans exclusivité ni
hiérarchique, qu’ils se revendiquent savants ou qu’ils se présentent comme spécifiques à un collectif, à
une communauté – ethnique, religieuse ou sociale. L’ethnopsychiatrie se propose de les décrire, d’en
extraire la rationalité propre et surtout de mettre en valeur leur caractère nécessaire.

CLAIRE MARCHAL 94
Dans une thérapie comme ça, on peut retrouver différentes approches et différents signifiants.

Souvent une approche de consultation en groupe, en communauté car intervention sur des cultures
interdépendantes → le patient n’est pas habitué aux relations duelles. Le thérapeute est quand même celui qui
parle le plus.

Le thérapeute essaie de s’accompagner d’autres thérapeutes d’autres cultures, ou au moins d’un interprète
pour que le patient puisse être à l’aise et évoquer des concepts dans sa langue natale qu’il ne saurait pas traduire
dans la langue du thérapeute.

Film :

- Consultation en communauté.
- Utilisation à certains moments de la langue maternelle du patient.
- Co-thérapeutes très utiles. La thérapeute principale est le leader, mais elle demande aux autres
thérapeutes d’apporter certains concepts de leur culture, ce que ça leur évoque, ...

 Synthèse de différents systèmes thérapeutiques ; chacun amène sa culture.

- La thérapeute est dans un grand respect des différentes pratiques culturelles ; mise en valeur de la
sagesse des anciens, …
- La thérapeute arrête dès qu’il y a un blocage, un refus de communication.

CLAIRE MARCHAL 95
8. Immigration et
parentalité.
Modèle écosystémique par rapport au problème des musulmans immigrés et de la piscine :

- Macrosystème : conflit entre une famille qui a, dans son macrosystème, des références qui sont « ne pas
mélanger les garçons et filles, ne pas montrer la nudité des femmes ». Étant donné ces valeurs, il y a un
changement au niveau du microsystème.
- Microsystème : systèmes directement en contact avec l’enfant ; famille, école. On le met dans une niche
développementale pour le mettre en socialisation. Ça a un impact sur l’ontosystème.
- Ontosystème : en fonction de la culture que l’on a, la perception de soi est différente. Via les niches
développementales, l’enfant intègre le macrosystème («je ne veux pas être en maillot devant des
garçons »).

Quand c’est dans une seule culture, pas de souci. Mais ici, le problème est que les parents sont immigrés et sont dès
lors dans un nouveau macrosystème, où il est important de stimuler l’égalité homme-femme.

- Microsystème : on met l’enfant dans des niches développementales qui l’aident à intégrer ça. Crèche mixte,
jouets mixtes pour l’enfant, … On fait rentrer le macrosystème dans l’ontosystème. Les microsystèmes
sont des vecteurs d’enculturation via les niches développementales.

La situation d’immigration entraine donc un conflit au niveau du mésosystème ; il y a un conflit entre les divers
microsystèmes. Le parent et l’enseignant tiennent un discours différent. L’exosystème va s’en mêler ; la loi, le
système scolaire (Communauté Française de Belgique).

8.1 Parents comme agents de socialisation.


Les parents sont les premiers agents de socialisation de l’enfant, ils sont des vecteurs d’enculturation. Ses
premières expériences sont les plus prégnantes ; les informations qui suivent sont assimilées aux premiers
schèmes.

Les parents, dans un contexte d’immigration, ont un rôle ineffectif ; ils ont évidemment leurs compétences de
parents, mais en tant qu’agent de socialisation ils sont ineffectifs car la société veut une socialisation adaptée à
la culture où l’on est.

Exemple : mamans libanaises en Australie. Les enfants libanais y sont considérés comme insuffisamment
autonomes. Australie : pédagogie active, même en maternelle. C’est donc un souci qu’ils ne savent pas être
autonomes. Le problème est que ça a été interprété comme un retard mental, dû à un manque de stimulation de la
part de leurs mères. En discutant avec les mamans, on s’est rendu compte que les mamans libanaises valorisent le
fait d’être une bonne mère en faisant tout pour son enfant, donc l’enfant n’a pas pu développer son autonomie. C’est
un décalage horizontal ; ils ont un niveau intellectuel ok, mais leur autonomie est moindre.

Rôle de l’intervenant éducatif : compréhension du problème et intervention appropriée. Eviter


l’ethnocentrisme, donner des explications, … Il faut voir ce que vise l’école, quelle est sa vision de l’adulte
compétent et comment elle veut amener l’enfant à ça, et il faut voir ce que les parents valorisent. Il faut
comprendre la logique derrière les comportements des personnes.

CLAIRE MARCHAL 96
8.2 Ethnothéories et pratiques parentales.
De manière générale, les parents immigrés ont tendance à garder au départ les pratiques parentales de leur
propre culture.

Cette tendance diminue fortement à partir de la troisième génération ; l’enculturation se fait de toute façon. Il
y a tout un effet de traduction et d’habituation à faire.

A la troisième génération, on peut voir une sorte de résurgence identitaire ; en se sentant discriminé, l’individu
retourne aux pratiques culturelles de son pays d’origine.

Deux phénomènes :

- L’adoption de nouvelles pratiques plus rapide si elles sont proches des pratiques antérieures. L’individu
sait plus vite s’adapter car les ethnothéories ont des points communs.
- Le changement des pratiques parentales est plus rapide que le changement des ethnothéories.
➢ Exemple : mère jamaïcaine qui ne masse plus son bébé. Il ne marche donc pas aussi tôt que prévu. Elle
pense donc à un retard, car il ne rencontre pas les attentes dues à ses ethnothéories.

8.3 Psychologue : non-jugement des


pratiques parentales.
Attitude du psychologue : non-jugement des pratiques parentales, ou du moins de manière moins
systématique. Il faut avoir un regard culturellement informé sur les pratiques parentales.

- Question des universaux corrélationnels (frapper son enfant entraine des troubles). Risque : penser qu’il
y a une réprobation universelle.
- Question de la normativité culturelle ; l’impact est moindre si c’est normal dans la culture. Ça permet
de relativiser.
- Question de l’intégration dans une nouvelle culture : importance de l’adaptation.

Dans un contexte d’immigration, il faut se dire que la personne va grandir et vivre dans cette culture.
Les comportements appris par ses parents ne seront pas toujours adaptés.

 Le psychologue a un rôle d’interprète culturel : on dit aux parents, sans critiquer, que certaines
pratiques parentales sont moins adaptées ici. « Votre enfant m’a dit plusieurs fois que vous l’avez
frappé ; pourriez-vous m’expliquer quelle est votre motivation éducative derrière ? ».

➢ Essayer de rencontrer les ethnothéories.


➢ Expliquer comment ça se passe dans notre culture.
➢ Chercher un terrain d’entente, un objectif commun. On aide, en tant que médiateur, les parents à
trouver un accord avec l’école, la société, … Souvent, le terrain d’entente est le bonheur, le bien-
être et la réussite de l’enfant. « Vous pouvez l’aider avec la discipline que vous avez, mais si l’enfant
est agressif avec les autres, il sera sévèrement jugé ici et ça ne l’aidera pas ».
➢ Le dialogue change selon les contextes, cultures, …

CLAIRE MARCHAL 97
Il y a des cas limites qui demandent réflexion, qui sont plus complexes et où il est impossible de donner une
réponse uniforme pour tous les cas :

- Excision. Très désapprouvée en Europe mais valorisée dans d’autres cultures. Doit-on condamner
universellement ?
Il faut se demander « qu’est-ce que ça apporte plus tard » ? Chez nous, le plaisir sexuel est valorisé, donc
on est contre l’excision. En plus, risque de comportements sexuellement déviants. A court-terme,
risque de mortalité si mauvaise hygiène. Il faut regarder les ethnothéories (peur que la petite fille
devienne comme ces mannequins occidentaux qui sont presque nus sur les affiches) ; des
représentations font peur aux personnes et mettent en place des pratiques pour les contrer.
- Circoncision.
- Petites incisions faites par les parents pour marquer l’appartenance à la tribu. C’est important dans les
cultures collectivistes car on est défini par notre appartenance.
- Oreilles percées à la naissance.

Il faut sortir de son ethnocentrisme : qu’est-ce que je ferais si j’étais dans leur culture, quelles sont leurs
ethnothéories, …

Il faut avoir une réflexion multidisciplinaire ; demander à des médecins (qu’est-ce que ça change au niveau de
l’hygiène, du plaisir), des juristes, d’autres psychologues, … Cette réflexion doit être fait au cas par cas avec un
maximum d’éléments (impact à long-terme, signification pour la famille, intégration de l’enfant dans la société,
…). Il faut privilégier le respect des droits de l’enfant et prendre en compte la jurisprudence et la loi dans le pays
actuel.

8.4 Impact pour l’enfant.


L’enfant se retrouve dans des niches développementales différentes, qui ont des visions de l’adulte compétent
différentes.

 Ça peut amener du stress chez l’enfant, car il peut se sentir inadapté à la société d’accueil. D’où
l’importance de mettre l’enfant au plus tôt en contact avec la société d’accueil. En Belgique, l’école est
devenue obligatoire plus tôt (4 ans), pour éviter toutes les difficultés d’inadaptation.

Autre difficulté pour les enfants : ils deviennent parfois traducteur. Pourquoi maman dit ça à la prof, et vice-
versa. Traducteur culturel ou langagier. L’idéal est d’avoir des traducteurs langagiers adultes tiers, qui
permettent à l’institutrice et à la maman pour parler. Le psychologue peut être un traducteur culturel.

L’enfant peut avoir un conflit de loyauté ; envie de faire des activités valorisées dans la société d’accueil (classe
verte) mais les parents ne sont pas d’accord. Risque : ça peut devenir un conflit identitaire ; faire un choix entre
deux identités (identité d’origine et identité occidentale). On peut expliquer aux enfants que les personnes
issues de l’immigration qui s’en sortent le mieux en termes de bien-être psychologique sont celles qui peuvent
faire des combinaisons culturelles ; biculturalité. Mélange subtil des deux cultures, créé par l’individu lui-même.
Il ne faut pas être l’un ou l’autre.

CLAIRE MARCHAL 98
8.5 Implications générales pour le
psychologue.
Mieux comprendre les niches développementales mises en place par les parents permet de comprendre :

- Les leviers motivationnels (que veulent les gens) et où agir pour changer leurs pratiques.
- Le développement de l’enfant.
- Les pratiques.
- Les modes de communication.
- …

Le psychologue doit prendre indirectement des informations car les ethnothéories fonctionnent comme des
truismes. Leur demander de décrire un moment chouette avec l’enfant, une dispute récente, les activités faites avec
l’enfant, … Et leur demander pourquoi ils ont fait ces choix-là, afin d’arriver aux ethnothéories.

NB : il n’y a pas besoin d’être immigré pour être en conflit avec la culture scolaire. Les familles préparent plus ou
moins l’enfant à la culture de l’école6 ;

- Des familles valorisent le développement cognitif car elles ont compris et veulent rejoindre les attentes
de l’école. On met l’enfant, avant sa rentrée scolaire, dans une culture scolaire à la maison.
- Mais il peut y avoir des incompréhensions entre le parent et l’école sur le but de l’école et les
comportements du professeur. Celui-ci a une intention que l’enfant aille plus loin, mais les parents
peuvent interpréter ça comme de la méchanceté.

6
Tuyau

CLAIRE MARCHAL 99
9. L’enfant difficile.
9.1 Le tempérament de l’enfant.
De manière générale, quand on est psychologue, la première demande des individus n’est pas claire. Un des
travaux du psy est de comprendre ce qu’il y a derrière les mots des gens. Un individu se plaint que son enfant est
difficile ; qu’est-ce qu’il veut dire ?

Les enfants difficiles varient selon les cultures. La frontière entre le normal et le pathologique est influencée
par la culture. Variation des normes selon la culture. Le tempérament de l’enfant, tel que rapporté par ses
parents, varie en fonction des cultures.

- Hollande : régularité dans la vie de l’enfant → enfant calme.


- USA : l’enfant fait ce qu’il veut, on valorise son autonomie → enfant qui bouge est culturellement
accepté.

Courbe de Gauss : les gens autour de la moyenne sont considérés comme normaux.

- +/- 1 ET : supérieur/inférieur à la moyenne.


- +2 ET : pathologie, enfant vraiment compliqué.
- -2 ET : enfant très facile.

9.1.1 Trois explications à cette variation.


Il y a 3 explications possibles de cette variation culturelle :

- Les tempéraments varient en fonction des cultures. Ce ne serait pas dû à la culture mais à la
génétique.
➢ USA vs Chinois :
✓ USA : dès 3 mois, l’enfant est plus actif.
✓ Chine : valorisation du bonheur comme le pacifisme, la sagesse etc. → enfant calme.
✓ Peut-être qu’il y a une différence génétique qui est renforcée par la culture. Peut-être que
les USA sont plus facilement excités (génétique), et puisque c’est valorisé dans leur
culture, ce tempérament se développe.

➢ Microcultures : impact des pratiques culturelles pendant la grossesse de la maman sur le


tempérament de l’enfant. Quand le bébé a 24 heures, on doit lui faire une piqûre. Tous les enfants
ont une montée d’hormones de stress, mais on note des différences : les enfants qui ont eu une
mère stressée pendant la grossesse prendront plus de temps à réguler leur niveau de stress ; leur
boucle de rétroaction pour gérer le stress est moins efficace.

➔ Dans un pays qui a connu la guerre, il se peut que dans la génération suivante il y ait un climat biologique
différent qui fait que les enfants ont un tempérament plus difficile.

 Cette hypothèse explique juste une toute petite variance.

CLAIRE MARCHAL 100


- Variation des attentes des parents selon la culture→ évaluation différente des comportements.

➢ En Occident, on valorise le fait que l’enfant pose des questions (l’impertinence est valorisée car
dans une société individualiste, on doit savoir faire des choix et se positionner socialement).
➢ Dans d’autres cultures (collectivistes), le même enfant avec le même comportement sera
considéré comme difficile car il ne connaît pas sa place.

- Pratiques parentales différentes sur les cultures —> influence sur l’expression du tempérament.

➢ Hollande : les parents mettent la régularité haute dans leurs valeurs (macrosystème), et ça se
répercute dans le microsystème (ils mettent les enfants à des heures régulières au lit), et
l’ontosystème change.

On pense actuellement à un mélange des trois hypothèses.

9.1.2 Etude sur l’enfant difficile.


Etude multiculturelle, sur des pays occidentaux et individualistes : Australie, USA, Italie, Pays-Bas, Pologne,
Espagne, Suède.

Etude multimodale : questionnaire et interview. On fait passer des échelles de tempérament et on demande aux
parents si leur enfant est difficile.

Résultats :

Beaucoup de parents se plaignent d’avoir des enfants difficiles.

Un pays est plus bas : la Suède. Est-ce que leurs enfants sont vraiment plus faciles ou est-ce que les attentes des
parents suédois est moins haute ? Ils valorisent l’activité spontanée de l’enfant, donc peut-être qu’ils acceptent
plus que leurs enfants soient spontanés.

Le fait que plusieurs parents considèrent leur enfant comme difficile change en fonction des colonnes : l’enfant
est difficile quand il est de mauvaise humeur, quand il est agité, …

CLAIRE MARCHAL 101


On a calculé des corrélations entre le fait de trouver son enfant difficile et les autres dimensions. Dans tous les
pays, le fait qu’un enfant soit moins adapté et soit de mauvaise humeur fait qu’il est considéré comme difficile ;
c’est un universel dans les jugements des parents.

Il y a des patterns culturels. Exemple : Un enfant difficile en Hollande montre peu de persistance et une grande
distractibilité. Les parents favorisent le fait que l’enfant soit capable de porter son attention de manière
prolongée.

Interview : Je suis d’accord à propos de sa sociabilité, son indépendance et son obstination. Je suis d’accord à propos
de sa sociabilité, oui, mais il y a une chose qui ne nous convient pas : elle est « sélective » et c’est ce que je trouve
difficile. Je ne comprends pas vraiment, mais il semble qu’en réalité elle veut être sociable elle se sent sécurisée avec
des adultes, avec tous les adultes, même ceux qu’elle ne connait pas. Mais dans les relations avec d’autres enfants
elle n’est pas si facile… Par exemple, il y a deux semaines nous sommes allés à une fête d’anniversaire pour des
jumeaux qu’elle a connu depuis quelques temps et il y avait d’autres enfants qu’elle ne connaissait pas. Et elle est
restée à côté de moi pendant une demi-heure sans même se déplacer. Ainsi, elle a des ennuis à cause de cette
sélectivité.

➔ L’enfant est difficile car il ne va pas dans l’exploration, or c’est valorisé en Italie. Comment comprendre
ça ? Chez les Italiens, il est important d’être sociable et d’aller vers tout le monde. Mais l’enfant a 3 ans ;
ça nous semble normal à nous → attention à l’ethnocentrisme.

9.2 Conclusion.
- Le tempérament facile / difficile est culturellement déterminé, en fonction des buts de socialisation.
- Les parents font une sorte de goodness or fit : ils regardent comment est l’enfant maintenant par
rapport à l’enfant idéal imaginé. Le tempérament pose un problème s’il dévie fortement des exigences
du milieu.
- Ça a un impact sur la psychopathologie ultérieure.
➢ Tempérament → perception parentale → pratique parentale → conséquences
développementales.
➢ Les enfants canadiens extravertis ont de meilleurs résultats scolaires que les canadiens introvertis.
Ceux-ci sont blâmés par les parents. En Chine, c’est l’inverse.

CLAIRE MARCHAL 102


10. Conclusion générale
du cours.
L’objectif du cours n’est pas de donner un savoir encyclopédique sur toutes les cultures. Il y a 197 États reconnus
et 7000 dialectes, ça serait trop.

L’intention du cours est de donner des lunettes, avec quelques repères.

- Que veut dire ce parent quand il me dit que son enfant est difficile ?

- L’individu, en fonction de ce qu’il me dit, fait-il partie d’une culture individualiste ou collectiviste ?

- Quelle est l’adhésion de l’individu à sa culture et à la mienne ?

- A quoi puis-je m’attendre comme décalage développemental pour ce type de culture ?

- Quel est le but de socialisation de la mère pour l’enfant ?

- Comment tester cet enfant de façon juste (familiarité, freezing) ?

- Quels sont les caregivers de l’enfant ?

- Quelles sont les interventions que je peux faire sur les différentes couches écosystémiques ?

- Puis-je relativiser mes propres buts de socialisation ?

- Comment est organisée la journée de l’enfant, et pourquoi ? (Niche de développement).

- …

CLAIRE MARCHAL 103

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