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Les trois offices du Christ

Depuis CALVIN, les protestants et catholiques exposent l’œuvre de Jésus-Christ selon le sché-
ma des « trois offices ». C’est-à-dire d’onction (le chrisma), semble symboliser le Saint-Es-
prit avec les qualifications qu’il confère. Comme Prophète, le Christ lève les ténèbres et
l’aveuglement ; prêtre, il efface la souillure ; roi, il abat l’adversaire et libère les captifs. L’Écri-
ture n’unit nulle part le thème des trois offices en un seul homme, mais les trois sont pré-
sents ensemble dans plusieurs passages. L’ordre habituel est : office prophétique - sacerdo-
tal - royal.
I. L’office prophétique
Il est marqué par l’onction, le rite matériel du prophète n’est mentionnée que pour Élisée.
Le prophète serait le porte-parole de Dieu, sa bouche, comme Aaron pour Moïse. En grec le
préfixe pro de prophètès n’a pas le sens temporel, mais local, indiquant la parole publique.
Presque tous les hommes de Dieu dans la Bible sont considérés prophètes (bénéficiaires de
la révélation), dans le NT les apôtres et tous les fidèles, selon le vœu de Moïse. Prophètes,
surtout, est en spécial les porte-paroles bibliques ; ils mettent en cause « existentielle-
ment » leurs auditeurs (censure, appel, encouragement) : Les hommes hic et nunc, avec
une triple association, résumée en prodige, prière et persécution.
a) Nombreux sont des thaumaturges (faiseurs de miracles), il se faisait nécessaire à fin
d’authentifier la parole adressée par Dieu.
b) Par le sens inverse, le porte-parole du Seigneur, prend le rôle d’intercesseur, comme sen-
tinelle à coté de ses frères.
c) Appelé à souffrir, comme Jérémie, par exemple, il porte le fer à l’endroit névralgique.
Le Christ Jésus, prophète
a ) L’attribution de l’office prophétique à Jésus
Les foules, l’opinion publique tiennent Jésus pour un prophète, parfois pour Jean, Élie ou Jéré-
mie : déclaré par ses disciples et accepté par lui-même. C’est un prédicateur populaire, dis-
cours riche en interpellation, miracles, intercession, souffrance ; Il se considère « docteur »
itinérant. Il est le prophète attendu. La voix céleste dit : « Écoutez-le ! ».
b ) Les temps de l’œuvre prophétique du Christ
Il est l’inspiration de toute l’Écriture ; sa venue et vie terrestre parlaient de ses actes prophéti-
ques ; à travers ses disciples. Le Ressuscité envoie ses disciples comme le Père l’envoyé. Il
est « immédiatement » actif en conduisant ses ministres. L’Écriture tout entière est le pro-
duit de son ministère prophétique.
c ) Traits saillants de l’œuvre prophétique du Christ
Jésus interprète et défend la Loi ancienne, selon l’exigence, mais aussi expose sa version finale.
Les foules étaient frappées (par l’autorité) de Jésus et son langage parabolique et la variété de
genres oratoires. La référence à sa propre personne est aussi unique : non pas « Ainsi parle
l'Éternel » mais « Moi, je vous dis ».
Le Christ Jésus, plus que prophète
a ) Le Fils
L’autorité de Jésus « naturellement » s’explique par son statut de Fils. Il est au-dessus de Moïse,
par qualité et miracle, la filiation divine fait de sa parole « témoignage » unique du ciel.
b ) Le Verbe
Après les porte-parole (voix), la Parole (Verbe). Il se prêcher lui-même par sa sagesse hypostati-
que. Le Logos créateur est le principe de la révélation générale, médiateur de toute connais-
sance de Dieu.
c ) Dieu au-dessus de tous
En lui, habite corporellement toute la plénitude divinité (Col 2,9).
d ) Commentaire
La certitude résumée en Jésus et de son ministère prophétique : seul Dieu peut nous faire con-
naître Dieu.
II. L’office sacerdotal
L’onction marquait l’introduction dans le sacerdoce, sens principal de la consécration. Il
est ministre du culte, doit enseigner la loi au peuple. Dans le cadre du culte, ils doivent élimi-
ner les obstacles à la communion entre l’homme et Dieu. Il s’agit de régler par le sacrifice la
question du péché. L’AT sépare strictement le sacerdoce et la royauté. Leur union se voit dans le
Ps 110 qui présente le Messie comme prêtre à toujours selon l’ordre de Melkisédec, qui est prê-
tre et roi. En Zacharie : Josué, le grand-prêtre, est couronné symboliquement, il prédit que le
Germe « sera prêtre sur son trône ».
Le Christ Jésus, grand-prêtre
a ) L’attribution de l’office sacerdotal à Jésus
L’application du Ps 110 lu jusqu’au 4 laisse supposer que Jésus avait conscience de son sa-
cerdoce. Par sa « prière sacerdotale » en Jn 17 se voit la tonalité. L’épître aux Hébreux est cen-
trale dans le thème, l’oracle du Ps 110 ; Dieu l’a appelé et proclamé pour l’accomplisse-
ment de sa mission, Jésus est pris parmi les hommes à fin de les représenter.
b ) Le sacrifice offert par Jésus
Tout grand-prêtre (comme sacrificateur) doit offrir quelque chose comme sacrifice. Jésus s’offre
lui-même. Le sacerdoce de Jésus est exclusif : les sacrifices antérieurs n’ont pas opéré d’ex-
piation ; le sang des bêtes ne peut enlever les péchés ; après le sien, aucun sacrifice pour
les péchés n’est plus agréé. Son sacrifice est la plénitude de tous les sacrifices.
c ) L’intercession sacerdotale de Jésus-Christ
La présentation du sang dans le sanctuaire est en même temps intercession propitiatoire en
faveur des tribus. L’ascension marque le début de son service liturgique dans le ciel. Jésus est
vivant pour toujours pour intercéder, car son sang versé une fois pour toutes était agrée pour
Dieu : nous attendons sa réapparition.
2. Le Christ Jésus, grand-prêtre selon l’ordre de Melkisédec
a) Sacerdoce royal
Melkisédec, seul roi-prêtre approuvé de l’AT (Jésus est prêtre à sa manière.) Cullmann
compare les deux réponses de Jésus face aux autorités terrestres : il affirme que sa souve-
raineté n’est pas de ce monde et son sacerdoce n’est pas d’avantage de ce monde.
b) Sacerdoce éternel
L’éternité du sacerdoce intéresse l’auteur aux Hébreux, basé sur les concepts du Ps 110, le
témoignage qu’il est vivant, l’absence de toute mention de commencement ou de fin.
L’éternité du sacerdoce de Jésus est liée à l’éphapax, règlement définitif du péché. Son sa-
cerdoce est éternel comme céleste. Le sacerdoce lévitique est charnel temporaire, pourtant
Melkisédec était un fort exemple de sacerdoce « spirituel ».
c ) Sacerdoce d’offrande de soi
Il était le sujet et l’objet de son acte de sacerdotal. La présentation sacerdotal permet de
mieux comprendre les trois offices dans ces ordres. Seul le Fils pouvait être notre sacrifi-
ce/prêtre absolument pur. Dieu s’engage en notre faveur par serment.
III. L’office royal
L’onction par excellence est associée au roi en signifiant l’autorité, du pouvoir et de l’honneur,
Le masiah = christos est un monarque dans l’AT. Le roi, conducteur de son armée, sauve son
peuple des ennemis, il succède le juge à fin de exercer la justice. Le roi reçoit du Seigneur le
statut de « fils » après l’alliance avec David. L’effervescence du messianisme du 1er siècle
le plus « orthodoxe » a favorisé son sens royal très terrestre, dans un temps difficile.
Le Christ Jésus, Roi et Seigneur
a ) L’attribution de l’office royal à Jésus
La foule a salué en Jésus comme fils de David attendu. Jésus ne refuse pas le titre attribué (par
Nathanaël et Pierre), à ses disciple, il parle de son royaume (quelquefois). Son entrée triomphale
à Jérusalem accomplit Zacharie 9,9s. Son ascension et résurrection conduisent l’intronisation,
au travers de cela, il reçoit l’autorité universelle. Cullmann propose une distinction au titre ky-
rios, qui souligne sa souveraineté sur l’univers. Jésus est le berger et le Chef de toutes les
créatures visibles et invisibles, chef aussi de l’Église.
b ) Les titres de Jésus à la royauté
Il descend de David, ainsi à cause de sa généalogie Jésus hérite de la royauté. Cependant, il est
élevé souverainement à cause de son humiliation, les hommes rachetés pour si grand prix lui ap-
partiennent, Dieu s’en représente dans la chair.
c ) Caractères de la royauté de Jésus
Il établit un règne de justice et de paix, il reconstruit le Temple détruit, le nouveau Zoroba-
bel. Sa royauté est absolue : tout pouvoir lui a été remis. Gabriel déclare que son règne est éter-
nel, n’a pas de fin. Son royaume consiste en « justice, paix et joie dans le Saint-Esprit » (Rm
14). Jésus-Christ est un roi serviteur, qui refuse de la puissance dominatrice et de la supéri-
orité personnelle pour s’offrir sans se défendre.
L’instauration du règne du Christ
Les anciens dogmaticiens exposaient le règne du Christ d’une façon tripartie, mais ce que
nos intéresse est la « relation » du royaume en trois parties.
a ) Le règne du Christ et le règne de Dieu
Plusieurs passages identifient : un seul trône pour Dieu et l’Agneau. Ainsi, nous distin-
guons le règne A, la souveraineté inaliénable de Dieu, et le règne B, du Christ qui vient où
toutes les créatures seront soumises au désir de Dieu.
b ) Le règne du Christ et l’Église
L’entrée dans l’Église implique le transfert des croyants dans le Royaume du Fils. Mais
nous ne pouvons pas remplacer « Royaume » par « Église », car on ne peut « recevoir »
l’Église, d’en « hériter », de la « prêcher », etc. Bref, l’Église et le Royaume ne sont pas
identiques, plutôt une relation étroite sans identité.
c ) Le règne du Christ et le monde
Rien ne permet de réduire son règne à son ministère de Chef de l’Église (par l’Esprit). Il dirige
le devenir du monde. Son règne sur le monde est invisible (objet de notre foi) ; il n’anéantit
pas instantanément l’opposition de ses adversaires, mais laisse un sursis au vieux monde.
Se soumettre à l’État est se soumettre à Christ, car l’État fait partie du règne du Christ par
soumission.
IV Réflexion : les trois offices ensemble
1. Déséquilibres repérables dans l’Histoire
L’accent unilatéral sur un office pourrait engendrer déséquilibre dans l’ensemble.
a) Le libéralisme isole l’office prophétique ;
b) La réaction anti-libérale privilégie l’office royal ;
c) La tradition piétiste-révivaliste se concentre à l’excès sur l’office sacerdotal.
2. Disposition différenciée et compénétration
Le sacrifice de soi, l’œuvre sacerdotale du grand-prêtre a la place centrale. Mais la substitution
de Jésus comme victime présuppose le rapport organique (Chef - communauté) du Roi à son
peuple, duquel il paie la dette. Jésus est la Sagesse en personne, avec affinité à la prophétie,
mais plus encore royale. Avec quelques hésitations, nous pouvons approcher les trois offi-
ces à la trinité.
3. Notre assimilation au Christ
Le Christ fait participer les siens à l’onction et à chacun des trois offices : nous sommes prophè-
tes, porteurs de la Parole de vie ; « royaume » au sens de groupe de rois ; et prêtres. Mais nous
ne devenons pas le Seigneur, nous ne jouons pas comme tels, plutôt par sanctification nous som-
mes rendus semblables au Seigneur Christ, et viendra le jour de le voir tel qu’Il est.

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