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Les voyages mouvementés de l'Oléastre et de l'Olivier : Une Oléacée


baladeuse.

Conference Paper · June 2019

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1 author:

Catherine Marie Breton


Université de Montpellier
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LES PLANTESv o yage !
EN VOYAGE !
jeudi 6 juin
2019
• MONTP
EL L I E R•
Informatio
n et inscri
jce.montp ption
ellier@snh
f.org

Organisé par : la SHHNH et la SNHF


Lieu : Salle des rencontres, Mairie,
1 Place Georges Frêche, 34267 Montpellier
Plus d’info : jce.montpellier@snhf.org
01 44 39 78 78 / www.snhf.org ACTES
• Journée de conférences et d’échanges 2019 •
MONTPELLIER

Société Nationale d’Horticulture de France


jeudi 6 juin
2019
• MONTP
EL L I ER •
Infor matio
n et inscrip
j ce . m o nt p tion
ellier@snh
f.org

Actes de la journée de conférences et d’échanges


de la Société Nationale d’Horticulture de France (SNHF)

LES PLANTES EN VOYAGE !


MONTPELLIER, LE 6 JUIN 2019

Journée de conférences et d’échanges sur les Plantes en voyage est organisée par la Société Nationale d’Horticulture de France (SNHF), la Société
d’Horticulture et d’Histoire Naturelle de l’Hérault (SHHNH) en partenariat avec la ville de Montpellier et OC’nat.
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LES VOYAGES MOUVEMENTÉS DE


L’OLÉASTRE ET DE L’OLIVIER : UNE
OLÉACÉE BALADEUSE
CATHERINE MARIE BRETON,
Bioversity International, c.breton@cgiar.org, Bioversity International France Parc Scientifique Agropolis II
34397 Montpellier Cedex 5 - France

L’espèce Olea europaea a un succès mondial non égalé,


du fait de la culture de l’olivier : il est présent sur tous
les continents. Arbre emblématique, il a su déjouer
tous les pièges de dame nature et a aussi su apprivoiser
l’humain afin de s’en servir de vecteur de diffusion à
travers le monde. D’origine tropicale sur le continent
Gondwana, Olea s’est déplacé avec les mouvements
des plaques tectoniques et s’est adapté aux nouvelles
conditions climatiques plus froides. Olea europaea né en
Afrique de l’Est s’est répandu jusqu’en méditerranée où
durant des millions d’années d’évolution, il a pu diffuser Figure 1A : Encadré représentant la fragmentation du continent Gondwana, entrainant la
sur tous les continents pour aboutir à l’oléastre puis à diversification des populations du genre Olea, , figure tirée de la thèse de C.Breton 2006.

sa forme domestiquée, l’olivier. Ce voyage est un voyage


aussi bien temporel que géographique.
dépourvus d’écailles pour protéger les bourgeons ce qui
les rend sensibles aux froids, notamment pour l’oléastre et
AUX ORIGINES D’UN FABULEUX DESTIN... l’olivier, les formes les plus septentrionales. En revanche la
sous-espèce cuspidata supporte des froids intenses en Iran et
dans l’Himalaya, ce qui sous-entend une adaptation au froid
Les périples transcontinentaux des Oleaceae dans ces régions. La taxonomie actuelle de Olea synthétise
celles faites par les italiens, anglais et français pour l’Afrique
Les Oleaceae sont apparues il y a environ 60 millions d’années de l’ouest (Green 2004). La richesse en espèces est maximale
(Ma). La dispersion actuelle naturelle des 30 genres indique à Madagascar, dans les îles Mascareignes, et en Afrique du
que cette famille est apparue sur le continent Gondwana : la sud, figure 1B.
fragmentation de Gondwana associée à la dérive des conti-
nents a dispersé les différents taxons présents, expliquant
ainsi les déplacements d’ Olea avec les fragments qui devien-
dront l’Afrique, Madagascar, l’Inde, l’Australie – Des Olea
endémiques sont présents sur ces continents, pourtant Olea
était absent du fragment qui deviendra l’Amérique du sud,
déjà séparé des autres continents, figure 1A.

Olea est donc à l’origine d’un genre tropical qui s’est adapté
en fonction des changements géologiques et climatiques,
à des climats moins chauds et plus secs comme le climat
méditerranéen, mais aussi en Australie, Chine et Inde (sous
genre Paniculata) et en climat tropical au Vietnam (sous
genre Tetrapilus). Adaptés aux climats tropicaux, les Olea sont Figure 1B : Répartition mondiale de la section Olea, figure tirée de la thèse de C.Breton 2006.
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Les multiples facettes de Olea europaea... ainsi une épopée formidable dans la conquête des milieux, il
n’est qu’au début d’un long voyage semé d’embûches.
L’Olea europaea a colonisé les plaines de l’Afrique et il s’est
ensuite sédentarisé aux îles Canaries (subsp. guanchica), à La génétique moléculaire, et maintenant la bio-informatique
Madère (subsp. cerasiformis), au sud du Maroc (subsp. maro- viennent à notre aide pour comprendre cette fabuleuse épo-
canna). Puis son aire s’est restreinte avec l’asséchement et le pée et permettent d’analyser ces situations modélisées et
refroidissement du climat. Actuellement il occupe les mon- largement étudiées pour de nombreuses espèces végétales.
tagnes du Sahara (Hoggar, Aïr), (subsp. laperrinei)  ; l’Afrique Pour ce faire, un échantillonnage d’oléastres (et d’olivier) a
(Éthiopie, Kenya, Côte d’Ivoire), et l’Afrique du sud (subsp. cus- été réalisé tout autour du bassin méditerranéen, avec plus ou
pidata). L’oléastre présent dans le bassin méditerranéen (BM) moins d’échantillons selon les situations géopolitiques des
provient de taxons indéterminés - qui ont survécu aux chan- états : l’est de la méditerranée n’a pu donner autant d’échan-
gements climatiques profonds en zone méditerranéenne. Le tillons que l’ouest, néanmoins, leur nombre fut suffisant.
climat était tropical – on connaît la présence de dinosaures
vivants sous des climats tropicaux à Mèze – mais les végé-
taux n’ont pas laissé de fossiles permettant d’identifier une Voyage au cœur du génome : la diversité des
espèce. Les voyages depuis la zone d’origine du genre ont été individus et des populations...
très lents, figure 1C.
Les différences entre séquences homologues (les séquences
sont allèles) de l’ADN nucléaire permettent
1) d’estimer le régime de reproduction des individus
d’une population ;
2) de calculer les relations de parenté entre les d’indivi-
dus de populations différentes
et 3) de mesurer les échanges entre les populations
(appelés flux de gènes).

Comme chez les animaux les Oleaceae possèdent un ADN


mitochondrial qui n’est transmis que par la mère. Deux indi-
vidus qui présentent les mêmes polymorphismes de l’ADN
mitochondrial, même s’ils sont situés à 1000 km de distance
ont un ancêtre maternel commun, et donc il faut déterminer
s’ils ont pu être déplacés (c’est l’homme qui les déplace) ou
s’ils ont pu migrer naturellement. L’ADN mitochondrial évolue
avec le temps par mutation, mais il reste un bon marqueur
des déplacements qui ont moins de 1 Ma. Les Oléacées pos-
Figure 1C : Digramme représentant le complexe d’espèce de la famille Oleaceae, figure tirée sèdent aussi de l’ADN dans le chloroplaste qui est aussi hérité
de la thèse de C.Breton 2006. par voie maternelle, néanmoins il évolue plus lentement et
permet dons de dater des déplacements entre 2 et 15 Ma.

Les voyages temporels depuis les dernières Pour donner une bonne information sur les individus et sur
glaciations... l’évolution des populations, les polymorphismes ou les diffé-
rences doivent être répartis sur tout le génome et suffisam-
Le dernier épisode glaciaire – de -22 000 à -12 400 BP (Before ment abondants pour qu’ils marquent le plus de traits de
Present)– a éliminé la plupart des espèces végétales arbores- vie des individus analysés. L’analyse de la diversité actuelle
centes, pourtant, elles ont survécu dans des zones restreintes permet de remonter le temps et de relier les flux de gènes et
épargnées par les froids – ou zones refuges – dans lesquelles les déplacements liés aux évènements historiques bien datés
elles ont survécu. La répartition des espèces régresse pour – migrations des peuples, colonisation, invasions, grands
aboutir à une représentation végétale en forme de patch, où froids, évènements géologiques… afin de reconstituer l’his-
les espèces survivent. Seuls quelques individus par espèce toire évolutive de l’espèce.
ont survécu, ce qui a entraîné une forte érosion génétique
appelée – dérive génétique –. Par la suite, la période de
réchauffement climatique général entraîna, la diffusion, ou Voyage autour de la méditerranée, la diversité
la recolonisation des milieux correspondant à des zones structurée de l’oléastre...
d’anciennes toundras à partir de la zone refuge attenante.
Cette recolonisation est progressive, les espèces pionnières Dans la moitié Est du BM les individus de l’oléastre présentent
diffusant très vite et adaptées à des milieux hostiles pré- un profil de l’ADN mitochondrial et un profil de l’ADN chloro-
parent ainsi le sol, pour ensuite laisser place à des espèces plastique, on les a nommés Me1 et Ce1 (M pour mitochondrie, C
plus pérennes. L’enjeu est crucial pour les végétaux : il s’agit pour chloroplaste, e pour Est). Néanmoins, à Chypre quelques
de se reproduire le plus, ce qui occasionne la colonisation des individus présentent des modifications, on a nommé leurs pro-
milieux, l’occupation de l’espace et donc la survie de l’espèce. fils Me2 et Ce2. Les variétés d’olivier des pays à l’Est présentent
Olea fait partie de cette intense compétition, et commence les deux mêmes profils mitochondrial et chloroplastique.
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Dans la moitié Ouest les profils sont plus variés : pour l’ADN
mitochondrial le profil est totalement différent soit Mom (M
pour mitochondrie, om pour ouest de la méditerranée) soit
McK (trouvé en Kabylie). Néanmoins des individus apparem-
ment sauvages portent le profil Me1 décrit précédemment.
Pour l’ADN chloroplastique les profils sont très différents
(Com et dérivés, Com1, Com2, …), et un chlorotype très par-
ticulier associé à Mck que l’on a appelé Cck. Néanmoins des
individus apparemment sauvages portent le profil Ce1.

© Photo C.Breton.
Au centre de la Méditerranée en Tunisie et Corse la diversité
est très marquée avec encore plus d’individus avec les pro-
fils (Com et Mom, et Mck et Cck) y compris pour les variétés
Corses. En Tunisie les variétés présentent surtout les profils
Figure 3 : 3A Oléastres bien accrochés aux falaises de l’anti Atlas au Maroc ; 3B, Oléastres
Me1 et Ce1.
pluri-centenaire de Roquebrune Cap Martin, Alpes de Hautes Provences, France

Les variétés d’olivier des pays de l’Ouest et du Centre pré-


sentent surtout (80 %) le mitotype Me1 et le chlorotype Ce1,
les profils Mom et Com se trouvent dans 11  % des variétés A LA CONQUÊTE DU MONDE,
de l’ouest, Mck et Cck pour 6 % et Me2 et Ce2 pour 3 %. Cette LES ROUTES DE L’OLIVIER.
complexité des types prouve que l’olivier à l’ouest est bien
naturel.
L’exploration maritime : les produits embarqués
Pour la première fois à grande échelle je me suis intéressée
à la diversité des populations de l’oléastre et j’ai utilisé des Les explorateurs qui embarquaient pour des mois, parfois
programmes statistiques d’inférences d’analyse génétique des années emportaient des conserves, et il est bien établi
qui m’ont permis de reconstituer la structure des populations (le nom du fournisseur d’olive et la quantité emportée sont
ancestrales - donc celle qui a existé dans chaque zone refuge renseignés) que les olives en conserves au sel était l’une
– et à l’origine de la diversité actuelle. J’ai révélé une douzaine des ressources inestimables, car elles ne pourrissaient pas.
de zones refuges,  trois à l’Est, cinq au Centre, et quatre à Dès les premières découvertes des nouvelles terres les
l’Ouest. J’ai ensuite proposé des routes de déplacement des nouveaux colons ont voulu y introduire les cultures de chez
populations d’oléastres (figure 2) qui se sont répandus dans eux. L’Espagne a colonisé des terres qui avaient un climat
le BM. Les mêmes programmes statistiques appliqués à la semblable au climat méditerranéen, alors que le Portugal a
diversité des variétés permettent de situer leur lieu d’origine, colonisé des terres à climat tropical où l’olivier ne peut pro-
et a permis de situer plusieurs évènements de domestica- duire de fruit car il ne peut fleurir par manque de froid. Les
tion. L’Homme n’a pas réalisé d’amélioration consciente de Franciscains ont joué un rôle majeur puisque dès 1520 – juste
l’olivier avant le XIXe siècle, en revanche, il a de tout temps, après la conquête du Mexique par Cortès (1519), ils ont intro-
fortement sélectionné les types de fruits qui apparaissaient, duit l’olivier au Mexique (en altitude). Ils l’ont introduit au
et ainsi façonner le paysage oléicole. Pérou depuis le Mexique, puis au Chili (un plant volé au Pérou
importé au Chili).

Les voyages pouvaient être si longs et la cargaison empor-


tée si limitée que pour propager la culture, les jeunes plants
étaient forcément trop onéreux, les colonisateurs ont donc
aussi emporté des noyaux pour faire les semis sur place.
Aujourd’hui la structure génétique des premiers vergers
plantés a été étudiée et on a déterminé, même si le document
historique fait défaut, le nom de la variété des plants intro-
duits (c’est généralement ‘Araucau’ de la région de Séville),
s’ils ont introduit des noyaux, tous les arbres sont différents
entre eux et la structure du verger n’est plus un clone (quand
tous les individus sont identiques entre eux) (Soleri et al.
2010). ‘Araucau’ devait être une variété phare à l’époque, car
si elle existe encore de nos jours, elle n’est guère cultivée.
La plantation de plants issus de noyaux exige une longue
période -propre à chaque plant - pour attendre la perte des
Figure 2 : Hypothèse des migrations post-glaciaire des populations d’oléastres dans le bassin
méditerranéen établi à partir des inférences statistiques. caractères de juvénilité et que l’individu entre en production.
Dès la fin du XVIe siècle les producteurs d’olive d’Espagne
de Séville ont mal vécu la concurrence des colonies et ont
manœuvré pour que le roi Philippe II arrête les exportations
de plants. Ils ont bien réussi et Philippe III a maintenu l’inter-
diction. De fait les exportations n’ont repris qu’après 1800,
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quand les colonies étaient suffisamment structurées pour des variétés de France et d’Espagne. La présence de O. cuspi-
organiser un plan de plantation ou avait trouvé des inves- data est endémique, et des hybridations spontanées autour
tisseurs puissants pour des investissements risqués (Angles des vergers ont été signalées. Aucune suite n’a été donnée
2000). aux hybrides pour le moment !

Voyages de l’olivier vers l’Amérique du Sud 


Voyages de l’olivier vers l’Australie
La Reprise de la diffusion se fait dès 1800 avec les émigrés
d’Italie et d’Espagne vers l’Argentine (plants d’Espagne géné- Olea. paniculata est naturel en Australie. En 1812, 80 varié-
ralement ‘Arbequina’ et d’Italie ‘Frantoio’) vers Mar del Plata, tés de France (dont celles de l’Hérault) ont été importées en
où le climat assez doux, très tempéré permet à l’olivier de Australie (région d’Adélaïde). En 1950  : l’olivier est devenu
pousser sans irrigation. envahissant – notamment dans l’île Kangoroo, parc National,
aucun prédateur n’est présent, il s’est développé au détri-
Au XXe siècle, le développement de haies fruitières (plusieurs ment des espèces locales. De plus, il a colonisé des milliers
milliers d’ha), au sud de Mendoza exige des investissements d’ha et donc il a été déclaré espèce à détruire – détruit au
énormes pour l’aménagement du sol et l’installation de l’irri- lance-flamme et aux désherbants. Dès les années 2000 la
gation depuis les Andes. La production de fruits n’a jamais sélection de nouvelles variétés à partir des meilleurs arbres
été à la hauteur des prévisions, si bien que dès 2010 la sélec- envahissants a été lancée et les sujets retenus ont été clonés
tion de nouvelles variétés mieux adaptées à cette façon de pour diffusion localement. On peut penser que les variétés
cultiver a commencé. obtenues à partir des arbres féraux (échappés de cultures
pouvant se croiser entre eux ou avec les formes sauvages
oléastres) seront mieux adaptées que celles importées.
Voyages de l’olivier en Amérique du Nord

La création par des Franciscains de la première mission est Les tribulations de l’olivier perturbées par la
datée de 1769. Les plants sont multipliés localement et envi- crise des années 30, et les grands froids
ron trente missions sont établies. Cent ans plus tard, à Santa
Barbara (1786) un Français riche armateur introduit la culture La mévente due à la crise industrielle fait qu’en Afrique du
en utilisant des noyaux. De nos jours, une nouvelle variété Nord la culture de l’olivier stagne. Pour tenter de dynami-
qui n’existe pas en Europe a été baptisée ‘Mission’. À Santa- ser la vente, les colons du Maroc créent une dénomination
Cruz Island (près de Cuba) en 1886, l’introduction de plants commerciale ‘Picholine Marocaine’ (Sigoise d’Algérie et varié-
‘Arbequina’ (variété d’origine catalane), et noyaux divers, a tés locales). Cette variété n’a rien à voir avec la Picholine,
créé des vergers qui perdurent aujourd’hui. En Floride, près mais bénéficie de la renommée du nom. Les fruits sont à
de Daytonia Beach, New Smyrna est un village oléicole créé double usage, huile et conserve. Actuellement c’est la variété
par des Grecs émigrés. Lucques qui est copiée au Maroc !

L’olivier a régressé durant les grands froids de 1750 à 1956 :


Olea en Asie disparu en Dauphiné, Il a laissé la place à la vigne en Pyrénées-
orientales. En prévision du réchauffement climatique il est
O. cuspidata est naturel en Inde au Tibet (Himalaya) au introduit en Angleterre (avant le Brexit), mais le refroidisse-
Yunnan, et dans les hauteurs du Sichuan. L’olivier a été intro- ment des relations laisse encore de beaux jours aux expor-
duit en Chine centrale (Sichuan) - Chengdu est jumelé avec tations. En Crimée la présence de l’olivier de Bohême, ou le
Montpellier, il y est cultivé en altitude car à 1500 m la pluvio- ‘chalef’ Russian olive ou Brown olive = (Elaeagnus angustifo-
sité le permet. L’introduction s’est faite à partir de variétés lia), est source de confusion. Un autre exemple relatant cette
d’Italie, mais aussi de France. Au Japon l’introduction de l’oli- résistance au froid, l’hybridation O europaea x O cuspidata a
vier est anecdotique. été réalisée à Montpellier en 1984, et de beaux sujets sont
conservés, cultivés à Montpellier, pourtant, actuellement ils
ne sont pas exploités.
L’olivier en Afrique

Afrique du Nord  : l’étude des collections montre qu’avant Olea un voyageur infatigable…
la colonisation les échanges ont été nombreux. En Tunisie,
Maroc et Algérie l’olivier local a été maintenu voire déve- L’olivier a un carnet de voyage bien rempli dans le bassin médi-
loppé et les ressources génétiques recensées jusqu’à la fin terranéen, mais de nos jours ce sont les huiles qui voyagent :
de la colonisation. Ensuite d’étroites collaborations se sont les trafics son variés, beaucoup de mélanges avec tournesol,
établies pour les études agronomiques et pour la recherche. noisette, colza, mais aussi des fraudes sur les appellations.
Introduit au Kenya, l’olivier ne fleurit pas par manque de
froid, sauf en altitude, mais alors le climat est trop humide L’Espagne a eu et, a un rôle majeur – du fait des ex-colonies en
en été et les fruits n’arrivent pas à maturité. L’introduction en zone à climat Méditerranéen, alors que le Portugal a et a eu
Afrique du sud (Stellenbosch city créé en 1769) s’est faite avec un rôle très mineur car ses ex colonies sont en zone à climat
22

Figure 4 : L’olivier cultivé en France, dans différents environnements, 4A : Oliviers cultivés en terrasses abandonnées sur le chemin du cirque de Navacelle dans l’Hérault France, 4B : vergers d’oliviers
aux Baux de Provences, Bouches du Rhône, France ; 4C : Olivier pluri-centenaire au Cap Bon, nord-est de la Tunisie. © Photo C.Breton.

tropical. La France a et a eu un rôle non négligeable aux USA


– en Australie et en Afrique du Sud. Maintenant la sélection Références
locale sur plusieurs continents, limite considérablement les
exportations de plants. Et l’olivier a de belles années devant • Anglès S., 2000. L’olivier à la conquête du Nouveau
lui, car l’huile est toujours considérée comme incomparable. Monde. Les Cahiers d’Outre-Mer. Bordeaux.
Depuis la domestication il n’a fait au maximum que 150 géné- • Breton C., Reconstruction de l’histoire de l’olivier (Olea
rations, on peut donc le considérer comme pré-domestiqué europaea subsp. europaea) et de son processus de
(C Breton 2006), avec un système de reproduction encore domestication en région méditerranéenne, étudiés sur
mal connu (Breton 2012). L’huile produite par pressage est des bases moléculaires, pp 210. Thèse Doctorat Biologie
techniquement un jus de fruit, c’est un cas unique parmi les des populations et Écologie, Université Paul Cézanne,
différentes huiles. Sa culture autour du pourtour méditerra- 2006, France. 2006.
néen, ainsi que dans les autres parties du monde marque le • Catherine Breton, André Bervillé. New hypothesis elu-
paysage par son feuillage, parfois d’un vert gris, ou d’un vert cidates self-incompatibility in the olive tree regarding
très soutenu très caractéristique (figure 4). Le voyage mou- S-alleles dominance relationships as in the sporophytic
vementé et audacieux de l’olivier est de nouveau mis en péril model. 2012 Comptes rendus biologies 335, 563-572.
par la bactérie Xyllela fastidiosa, transmise et véhiculées par • Green P S., 2004. A revision of Olea L Kew Bulletin 571:
des insectes vecteurs, s’attaque à un très large spectre de 91-140.
végétaux et notamment l’olivier. • Soleri D. Koehmstedt A. Aradhya M. K., Polito V., & Pinney
K. 2008. Comparing the historic olive trees (Olea euro-
paea L.) of Santa Cruz Island with contemporaneous
Remerciements : Merci à Stéphane Anglès pour les nombreux trees in the Santa Barbara, CA area: a case study of diver-
textes historiques et sur la géographie de l’espèce. sity and structure in an introduced agricultural species
conserved in situ Genet Resour Crop Evol DOI 10.1007/
s10722-010-9537-9
49

Fig. 4 : fruits et fleurs de citronnier Eureka (aquarelle et encre de chine © F. Curk)
Les plantes en voyage !

Les continents voyagent à une vitesse infime et emportent les


plantes dont la reproduction s’accompagne d’une dissémination
et d’une dispersion dans l’espace. Celle-ci peut être organisée
par l’Homme ou non intentionnelle. Au terme de leur périple,
les végétaux atteignent des terres nouvelles, plus ou moins
éloignées de leur lieu d’origine. Ce ‘voyage’ permet aussi une
diversification, et l’apparition de nouveaux taxons. Ces processus
souvent imperceptibles à l’échelle de l’existence humaine, mais
parfois révélés, intéressent les praticiens, les botanistes, les
agronomes, les écologues, les biologistes, les archéologues, les
historiens…, d’autant plus que la connaissance des origines et de
la diversité permet l’amélioration les plantes cultivées.

Retrouvez dans les actes de cette journée de conférences et


d’échanges de la SNHF, co-organisé avec la Société d’Horticulture
et d’Histoire Naturelle de l’Hérault (SHHNH) à Montpellier, les
données techniques des experts.

ÉDITION 2019
ISBN : 978-2-913793-43-9

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