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CITATIONS CORANIQUES
EXPLIQUÉES
Éditions Eyrolles
61, bd Saint-Germain
75240 Paris Cedex 05
www.editions-eyrolles.com
Introduction
Le Coran et les révélations antérieures
Dieu et Ses Attributs
La création de l’Homme
Les prophètes depuis Adam
Le Prophète Muhammad
La condition humaine
Adoration de Dieu et vie spirituelle
Les cinq piliers - La foi - La vertu parfaite
L’ici-bas et l’Au-delà
Le combat pour la foi et l’effort sur soi-même
Bibliographie
Index des versets cités
INTRODUCTION
1. À titre d’exemple, voir le verset : « Et Il est avec vous où que vous soyez. » (57, 4) et la manière
dont les théologiens d’une part et les mystiques d’autre part l’interprètent.
2. Les variantes quant à la coupe des versets ainsi que dans la prise en compte ou non de la basmala –
formule sacrée qui introduit toutes les sourates sauf la neuvième – expliquent pourquoi on trouve les
nombres suivants : 6346, 6616, 6666… Cependant, le nombre 6236 – celui de la lecture dite Hafs –
est aujourd’hui le plus courant.
3. Voir la bibliographie en fin d’ouvrage.
4. Muhammad ibn Jarîr al-Tabarî, mort en 923 à Bagdad.
5. Fakhr al-Dîn al-Râzî, mort à Hérat en 1209.
LE CORAN ET LES RÉVÉLATIONS
ANTÉRIEURES
Alif-Lâm-Mîm.
Dieu ! Point de divinité hormis Lui !
Il t’a révélé graduellement le Livre en toute Vérité pour confirmer les
Écritures antérieures, de même qu’avant cela Il a révélé la Thora et
l’Évangile pour servir de guidance aux hommes…
3, 1-4
La Face de Dieu est partout présente dans la Création car cette dernière ne
subsiste que par Elle. Mais ce qui apparaît, dans un premier temps, comme
une imperfection de la Création se révèle également être à l’origine d’une
perfection. En effet, si la Création ne subsiste que par le Soutien de Dieu,
le revers positif de l’impermanence du monde est l’omniprésence du divin.
La Face de Dieu se révèle « où que nous nous tournions ». La Création
voile et dévoile à la fois la Beauté du Créateur.
Toutefois, une telle perception n’est accessible qu’à un esprit contemplatif.
Il faut, pour ce faire, se départir de la volonté de posséder les choses
créées car la concupiscence est incompatible avec la contemplation. À ce
sujet, le célèbre maître spirituel algérien, Abû Madyan (m. 1198),
enseignait la nécessité du détachement radical afin de réaliser
l’omniprésence du divin : « Le signe de la sincérité (‘alâmat al-ikhlâs)
c’est la disparition du créé lors de la contemplation de la Réalité
divine6. »
Un hadith du Prophète affirme qu’avant la Création « Dieu était et rien
n’était avec Lui7 ». Or, les maîtres spirituels considérant que Dieu ne peut
être soumis à aucun changement ajoutent : « Il est maintenant tel qu’Il
était. »
Il est inaccessible aux regards, mais Lui pénètre les regards.
6, 103
L’homme est capable d’accomplir le Mal, mais plus que cela, il est capable
de l’aimer. C’est ce qui apparaît aux anges et les inquiète : l’harmonie sur
terre risque ainsi d’être réduite à néant. Mais l’homme est aussi capable de
vouloir le Bien et de tendre vers lui. La plénitude de l’intelligence – la
connaissance de la Vérité – confère à la volonté humaine son objet
véritable : choisir le Bien. Dans cette perspective l’Ignorance et le Mal se
nourrissent mutuellement. Dire que Dieu enseigna à Adam les noms de
tous les êtres revient à dire qu’Il lui montra « la nature des choses ». À ce
propos, on rapporte que le Prophète avait coutume d’implorer Dieu en ces
termes : « Ô mon Dieu, montre-nous la Vérité comme étant vérité et
montre-nous l’illusion comme étant illusion. »
Dans la suite du récit, il est dit que Dieu rassembla les anges et leur
demanda : « Faites-moi connaître les noms de tous ces êtres, pour prouver
que vous êtes plus méritants qu’Adam ! » Et les anges de répondre :
« Gloire à Toi ! Nous ne savons rien d’autre que ce que Tu nous as
enseigné ; Tu es, en vérité, l’Omniscient, le Sage. » Cette connaissance
plénière reçue par Adam est liée à sa fonction de « représentant de Dieu
sur terre » : « La raison d’être de la création de l’homme est la plénitude
de l’intellect et la connaissance de la réalité des choses. Quiconque utilise
l’ensemble de ses facultés en vue de la connaissance de la Vérité et de la
pratique du Bien peut être appelé “angélique” et même “seigneurial”
(rabbânî)3. »
Vint le jour où ton Seigneur dit aux anges : « Je vais créer un homme à
partir d’argile. Lorsque Je lui aurai donné sa forme et insufflé en lui de
Mon Esprit, vous vous jetterez prosternés devant lui. » Tous les anges,
sans exception, se prosternèrent hormis Iblîs qui s’enfla d’orgueil et qui
devint ainsi rebelle.
38, 71-74
Ayant refusé d’obéir à l’ordre de Dieu par orgueil, Iblîs est rejeté du
Paradis et porte la malédiction divine jusqu’à la fin des temps. Il demanda
cependant un sursis afin de pouvoir tenter toutes les générations
d’hommes. Ce sursis accordé, il reconnut lui-même les limites de son
influence : il ne saurait égarer les serviteurs élus de Dieu (‘ibâd Allâh al-
mukhlasun).
Qui sont ces serviteurs élus et quelle est leur spiritualité ? C’est à cette
double question que tente de répondre Ghazâlî : « Sois certain que Satan
fait partie de ceux qui ont reçu un délai de la part de Dieu et qu’il ne
s’humiliera pas devant toi en laissant repousser ses suggestions [même si
la lutte devait se prolonger] jusqu’au Jour du Jugement, sauf si toutes tes
préoccupations s’effacent au profit d’une seule : que ton cœur soit
entièrement absorbé par le souvenir de Dieu, l’Unique. Le Maudit n’aura
plus aucune emprise sur toi et tu feras partie des serviteurs élus de Dieu,
ceux qui échappent à la domination du Diable… Satan ne saurait avoir
d’emprise sur un être libéré des passions6. »
Ghazâlî – comme de nombreux auteurs – identifie les serviteurs élus aux
« invocateurs », ceux qui sont habités par le souvenir de Dieu grâce à
l’invocation abondante, laquelle est prescrite par plusieurs versets du
Coran. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette pratique essentielle en
islam.
Votre création et votre résurrection sont pour Lui comme celle d’un seul
être.
31, 28
Les aspects négatifs que l’on peut percevoir dans la nature humaine ne
sauraient remettre en cause définitivement la noblesse de l’homme. Les
défauts de l’âme sont présents en l’homme mais ne peuvent annihiler
l’essence de sa nature originelle (fitra).
Selon Râzî, ce verset « fait allusion à ce par quoi l’homme est supérieur à
toutes les autres créatures ». Cette supériorité, ajoute-t-il, est liée au don de
l’intelligence, laquelle est « capable de saisir les réalités telles qu’elles
sont ».
Commentant ce verset, l’émir Abd el-Kader compare la noblesse de l’ange
et celle de l’homme : « Les fils d’Adam ont été ennoblis de plusieurs
façons. Tout d’abord, Dieu a créé Adam par Ses deux Mains16. Puis, Il a
fait d’Adam l’instructeur des anges17. Dieu donna alors aux hommes la
possibilité d’atteindre les plus hauts degrés de la réalisation spirituelle en
passant d’une station à une autre, ce qui n’est pas possible aux anges qui
occupent un degré sans pouvoir le quitter18. »
Dans une perspective où la plénitude de l’intelligence est la raison d’être
de l’homme, celle-ci est considérée comme centrale dans le cheminement
spirituel : « Le fondement de l’ascension spirituelle, c’est que Dieu est pur
Esprit, et que l’homme lui ressemble fondamentalement par l’intelligence ;
l’homme va vers Dieu moyennant ce qui, en lui-même, est le plus
conforme à Dieu, à savoir l’intellect, qui est à la fois pénétration et
contemplation et dont le contenu “surnaturellement naturel” est l’Absolu,
qui illumine et qui libère19. »
1. Voir Michel Chodkiewicz, Un océan sans rivage, op. cit., p. 154-155.
2. Kitâb al-mawâqif, III, p. 1298-1299.
3. Ghazâlî, Mîzân al-‘amal, Beyrouth, 1989, p. 31.
4. Muslim, Sahîh, ch. 1 ; 39, n° 147.
5. Ihyâ’, VI, p. 491-492.
6. Ihyâ’, VII, p. 254-256.
7. Cité par Ibn ‘Ajîba, al-Bahr al-madîd, IV, p. 378-379.
8. Voir Coran : 7, 20-22.
9. Henry Corbin, Histoire de la philosophie islamique, Paris, coll. « Folio essais », Gallimard, 1986,
p. 16.
10. Abd el-Kader, Écrits spirituels, op. cit., p. 50.
11. Bukhârî, Sahîh, n° 6081.
12. Voir Récits d’un pèlerin russe, Paris, Seuil, 1978.
13. Le Réel (al-Haqq) est un des quatre-vingt-dix-neuf Noms de Dieu.
14. Al-Bahr al-madîd, VI, p. 261.
15. Tirmidhî, Sunan, n° 2012.
16. Voir Coran : 38, 75.
17. « Dieu enseigna à Adam les noms de tous les êtres. Il présenta ensuite ces êtres aux anges et leur
demanda : “Faites-Moi connaître les noms de tous ces êtres si vous en êtes capables !” » (2, 31)
18. Kitâb al-mawâqif, III, p. 1143.
19. Frithjof Schuon, Comprendre l’islam, Paris, Seuil, 1976, p. 42.
LES PROPHÈTES DEPUIS ADAM
Nous t’avons accordé une révélation comme Nous le fîmes à Noé et aux
prophètes après lui. De même, Nous avons accordé une révélation à
Abraham, à Ismaël, à Isaac, à Jacob, aux Tribus, à Jésus, à Job, à
Jonas, à Aaron et à Salomon, et Nous avons donné les Psaumes à David.
4, 163
Ce verset se retrouve deux fois dans le Coran1. Selon Ibn ‘Arabî, il s’agit
d’un « verset totalisant tous les autres2 ». Il exprime clairement
l’universalisme du Coran en ce sens qu’il invite le croyant à percevoir ce
qui rassemble les divers messagers du Ciel, plutôt que les différences
touchant certains aspects de leurs enseignements.
Comment avoir un esprit universaliste sans verser dans le syncrétisme ?
Ce dernier est, en effet, une négation de la raison d’être de chaque religion.
Les particularités des religions ne sont pas niées dans le Coran, mais elles
ne concernent que des aspects secondaires et sont souvent liées à des
circonstances de temps et de lieu. Ainsi, le Coran affirme que si la mission
de Jésus fut fondée sur une confirmation de la Thora, il leva certaines
interdictions du judaïsme3. Un rituel institué par un prophète peut donc
être abrogé par un autre. Or l’esprit ritualiste a tendance à absolutiser les
particularismes des religions et par là même à « faire des différences »
entre leurs fondateurs. C’est au niveau de l’enseignement spirituel que se
révèle l’unité des religions abrahamiques. Cette spiritualité – dont nous
avons donné les aspects essentiels dans le commentaire du verset
précédent – est intemporelle et universelle car, au-delà de la diversité
humaine dans l’espace et le temps, l’homme demeure l’homme.
Il y a des prophètes dont Nous t’avons précédemment narré le récit, et
d’autres sur lesquels Nous ne t’avons rien dit.
40, 78
Ce dialogue est celui d’Abraham et de son fils. Celui-ci n’est pas identifié
dans le Coran et si Tabarî pense qu’il s’agit d’Isaac (Ishâq), la plupart des
exégètes identifient le fils du sacrifice à Ismaël, aîné des deux et ancêtre
des Arabes.
Lorsque Abraham, pleinement soumis à l’ordre divin, s’apprêta à sacrifier
son fils consentant, Dieu intervint pour arrêter son geste fatal. Un bélier
fut alors substitué pour le sacrifice demandé par Dieu. C’est cette
substitution miséricordieuse qui est commémorée chaque année par les
musulmans lors de la fête religieuse de l’Aïd qui a lieu le 10 du mois de
Dhû l-hijja, le mois du grand pèlerinage à La Mecque : « “Abraham, tu as
certes été sincère envers la vision que tu as reçue.” C’est ainsi que Nous
rétribuons les vertueux. Ce fut une épreuve très révélatrice ! Nous avons
racheté son sacrifice par une offrande de grande valeur et Nous fîmes
perdurer sa renommée à travers les générations ultérieures. Que la paix
soit sur Abraham ! » (37, 104-109)
Les exégètes soulignent que ce sacrifice rappelle aux croyants qu’ils
doivent être en mesure de tout sacrifier à la Volonté de Dieu. Les
mystiques donnent un sens universel au sacrifice demandé à Abraham et le
considèrent comme une invitation à sacrifier entièrement l’ego lequel doit
s’éteindre complètement face à la Volonté divine. C’est ce que l’on appelle
« l’abandon de la volonté propre » (tark al-tadbîr) : « Sache qu’il est une
catégorie de serviteurs de Dieu qui ont renoncé à toute autonomie en Sa
Présence… leurs connaissances et leurs secrets ont fait voler en éclats les
“montagnes” de leur volonté propre5. »
Abraham constituait à lui seul une communauté ; soumis à Dieu en pur
monothéiste, il n’était pas d’entre les associateurs !
16, 120
Moïse est, de loin, le prophète le plus cité dans le Coran – son nom
apparaît à cent trente-six reprises –, ce qui en fait une figure essentielle de
la mission prophétique. Une des raisons de cette forte présence dans le
Livre est probablement le parallèle que l’on peut faire entre les
événements vécus par Moïse et par le Prophète Muhammad. Tous deux
furent rejetés par les leurs et durent s’exiler. Tous deux durent constituer
une communauté sur des bases nouvelles et eurent à lutter contre des
dissensions internes. Tous deux s’opposèrent à un pouvoir tyrannique :
Pharaon d’un côté, riches Mecquois de l’autre.
Dès sa naissance, Moïse fut brutalement séparé de sa mère. Celle-ci fut
inspirée par Dieu afin de sauver son enfant d’une mort certaine, tous les
nouveau-nés mâles juifs devant être tués sur ordre du Pharaon. Mais la
douleur de la séparation est atténuée par une double promesse divine :
celle de retrouver son enfant en tant que nourrice et celle qu’il deviendra le
prophète qui libérera son peuple de l’esclavage en Égypte et le guidera
vers la foi monothéiste.
Le sacrifice que fit la mère de Moïse en abandonnant son rôle naturel pour
devenir sa nourrice est interprété par les maîtres spirituels comme la
nécessité d’abandonner les attachements terrestres pour retrouver toute
chose « en Dieu ». Comme pour Abraham et Job, nous voyons ici la
nécessaire inversion du rapport profane aux choses afin d’établir un
rapport spirituel au monde, qui ne soit pas un voile posé sur la Réalité
mais au contraire une voie d’accès au Réel. Cette inversion est la fonction
spirituelle essentielle du sacrifice.
Les magiciens se prosternèrent au sol en disant : « Nous croyons au
Seigneur d’Aaron et de Moïse ! » Pharaon s’exclama : « Quoi ! Vous
avez rejoint Moïse sans prendre mon accord ? C’est sans doute lui votre
chef qui vous enseigne la magie. Je vais vous faire couper les mains et
les pieds en ordre croisé et vous faire crucifier sur des troncs de
palmier... »
20, 70-71
Lorsque Moïse fut devenu prophète après avoir entendu Dieu à travers le
Buisson ardent, il reçut la mission de faire sortir son peuple d’Égypte.
Pharaon refusa de laisser partir les juifs et s’entêta. Moïse dut se
confronter aux grands prêtres égyptiens qui pratiquaient la magie. Pour
prouver son autorité spirituelle, Moïse, accompagné de son frère Aaron,
accepta de défier les grands prêtres sur leur propre terrain : « Moïse,
dirent-ils, jetteras-tu ton bâton ? Ou bien serons-nous les premiers à jeter
les nôtres ? – Jetez-les donc les premiers, leur dit-il. Ils les lancèrent
alors, et aussitôt, sous le charme de leur sorcellerie, Moïse s’imagina voir
ramper leurs cordes et leurs bâtons. En son for intérieur, Moïse en
éprouva de la crainte. Ne crains rien, lui dîmes-Nous, c’est toi qui seras le
vainqueur. Lance donc que ce que tu tiens dans ta dextre, il avalera tout ce
qu’ils ont élaboré et qui n’est qu’artifice de magicien. Or les magiciens
échouent où qu’ils se rendent. » (20, 65-69) Les grands prêtres se rendirent
compte que le pouvoir de Moïse ne relevait pas de la magie mais d’une
puissance d’un ordre supérieur. Convaincus qu’il était un messager du
Ciel, ils devinrent croyants et préférèrent mourir plutôt que d’abandonner
leur foi nouvelle.
La confusion entre magie et miracle apparaîtra dans la vie du Prophète
Muhammad qui sera également accusé par certains de ses contemporains
de n’être qu’un magicien.
Souviens-toi aussi de David et de Salomon quand ils eurent à rendre un
jugement au sujet d’un champ cultivé que des ovins avaient saccagé de
nuit. Nous avons été Témoin de leur jugement, et Nous fîmes
comprendre à Salomon comment résoudre le litige. Nous les avions
dotés tous deux d’autorité et de science...
21, 78-79
La mère de Marie (Maryam) n’est pas nommée dans le Coran mais les
exégètes l’identifient à Anne (Hanna), l’épouse de Joachim (‘Imrân).
Marie est la seule femme dont le Coran mentionne le nom, ce qui souligne
la place particulière qui lui est accordée par la Révélation. Sont ainsi
évoquées dans le Coran son élection par Dieu et sa consécration entière à
Lui : « Ô Marie, Dieu t’a choisie et purifiée ; Il t’a élue parmi les femmes
de l’Univers. Ô Marie, invoque ton Seigneur avec ferveur, prosterne-toi et
incline-toi avec ceux qui s’inclinent en prière. » (3, 42-43)
La mère de Marie avait fait le vœu de consacrer son enfant au service du
Temple de Jérusalem. Or seuls les garçons pouvaient accomplir cette
tâche, ce qui explique la déception d’Anne à la naissance d’une fille. Dieu
rassura alors Anne et confia à Zacharie le soin de veiller sur Marie dans le
Temple : « … ce fut Zacharie qui la prit à sa charge. Chaque fois qu’il
pénétrait chez elle dans l’oratoire, il trouvait des vivres : “Ô Marie, d’où
cela te vient-il ?” lui demandait-il. Elle répondait : “Cela me vient de
Dieu, car Dieu prodigue sans compter Ses bienfaits à qui Il veut.” » (3,
37)
Une des particularités spirituelles de Marie est que Satan n’eut aucun
accès à son âme. Un hadith affirme que Jésus reçut la même grâce9. Ils
représentent donc tous deux le modèle des « serviteurs élus » sur lesquels
Satan n’a aucune emprise, serviteurs évoqués aux versets 38, 77-83 que
nous avons déjà commentés.
Et lorsque les anges lui dirent : « Ô Marie, Dieu t’annonce la naissance
d’un Verbe émanant de Lui. Il sera appelé le Messie, Jésus fils de Marie.
Il jouira d’une grande considération en ce monde et dans l’Au-delà. Il
sera au nombre des Rapprochés. »
3, 45
Le début de cette sourate fait référence à un événement qui eut lieu alors
que le Prophète était encore enfant. Bien des années plus tard, il relata cet
événement à ses Compagnons : « Deux hommes vinrent à ma rencontre ;
ils étaient vêtus de blanc et tenaient un bassin d’or rempli de neige.
S’étant saisis de moi, ils me fendirent la poitrine, en sortirent le cœur
qu’ils ouvrirent à son tour pour en extraire un caillot noir qu’ils jetèrent
au loin. Puis ils me lavèrent le cœur et la poitrine avec la neige1. »
Par la suite, le Prophète expliqua que ce caillot noir est la conséquence de
l’empreinte que laisse Satan en visitant chaque homme à sa naissance :
« Satan touche tous les fils d’Adam le jour où leur mère les met au monde,
à l’exception de Marie et de son fils2. »
Pour le croyant, la purification par un « élargissement de la poitrine » se
produit progressivement par l’acquisition des vertus et la lutte contre les
tendances de l’ego. En ce domaine, la sourate insiste particulièrement sur
la patience dans l’épreuve (Certes l’aisance accompagne l’adversité…), le
refus de la passivité (Dès que tu as terminé une tâche, attelle-toi à une
autre…) et l’orientation du cœur vers Dieu (Et dirige ton désir vers ton
Seigneur).
Lis ! Au Nom de ton Seigneur qui a créé ! Il a créé l’homme d’une
adhérence. Lis ! Car ton Seigneur est le Très-Généreux qui a instruit
l’homme au moyen du calame et lui a enseigné ce qu’il ignorait.
96, 1-5
Le voyage dont il est question ici est celui que le Prophète fit
miraculeusement la nuit du 27 Rajab de l’année chrétienne 620. Alors
qu’il dormait dans la maison de sa cousine Umm Hânî, le Prophète fut
réveillé par l’ange Gabriel qui lui amena une monture extraordinaire
nommée al-Burâq. Mystérieuse et rapide comme l’éclair, cette monture
l’amena à Jérusalem. La Tradition rapporte qu’avant d’arriver à
destination, l’ange Gabriel fit arrêter al-Burâq au mont Sinaï (Moïse), à
Bethléem (Jésus) et à Hébron (Abraham). Arrivé à destination, le Prophète
retrouva l’ensemble des prophètes pour une prière collective qu’il dirigea.
Le « Voyage nocturne » (isrâ’), déjà miraculeux, fut suivi par
« l’Ascension » (mi‘râj) qui emmena le Prophète de Jérusalem jusqu’au
plus haut des sept cieux, jusqu’au « Lotus de la Limite » (sidrat al-
muntahâ) qui symbolise la limite entre les états créaturels et les états
seigneuriaux, entre le créé et l’Incréé. Un autre passage du Coran se fait
l’écho du caractère ineffable du terme de l’Ascension : « Alors qu’il se
trouvait à l’horizon suprême, il se laissa glisser et s’approcha jusqu’à ce
qu’il ne fût qu’à une distance de deux portées d’arc ou moins encore.
C’est alors que Dieu révéla à Son serviteur ce qu’Il voulait lui révéler. »
(53, 8-10)
Le Voyage nocturne et l’Ascension eurent lieu peu de temps après des
épreuves subies par le Prophète : la mort de son oncle et protecteur à La
Mecque ; celle de son épouse Khadija ; la lapidation par les habitants de
Taïf alors qu’il voulait leur présenter son message. L’Ascension fut une
réponse à l’imploration qu’il fit alors : « Je cherche refuge dans la
Lumière de Ta Face qui éclaire toutes ténèbres. »
Dieu a certes accordé un don inestimable aux croyants en leur envoyant
un prophète issu d’eux-mêmes : il leur récite Ses versets, les purifie et
leur enseigne le Livre et la Sagesse, alors qu’ils étaient auparavant dans
un égarement manifeste.
3, 164
Nous avons vu, dans les commentaires des deux derniers versets,
l’importance de la dimension communautaire en islam. Ce verset insiste
sur la primauté de l’intériorité sur l’organisation extérieure. Le destin
d’une communauté est avant tout lié aux attitudes intérieures des membres
qui la composent. Toute réforme communautaire doit donc être précédée
par une réforme des cœurs et des consciences.
Commentant ce verset, Ghazâlî insiste sur la Justice divine qui est à
l’œuvre aussi bien dans le destin des individus que dans celui des
communautés : « Les Maîtres spirituels perçoivent par dévoilement
initiatique que le pardon accordé à un serviteur l’est toujours pour un
motif, connu ou non. De même la colère divine ne s’abat jamais sur un
serviteur sans raison. S’il n’en était pas ainsi, ni la colère de Dieu ni Son
pardon ne seraient une conséquence des actions et des attitudes de
l’homme, et Dieu ne serait pas juste. Mais si Dieu n’était pas juste, ces
paroles révélées n’auraient pas de sens : “Et ton seigneur n’est pas injuste
envers Ses serviteurs”, “Dieu ne lèse en rien, pas même du poids d’un
atome”4. »
Ghazâlî poursuit en soulignant la relation de cause à effet existant entre les
actes humains et la réaction de Dieu : « L’homme ne reçoit que ce qu’il
s’efforce d’obtenir, et cet effort l’amène tôt ou tard à ce qu’il recherche
intérieurement… Lorsque les hommes changent ce qui se trouve en eux-
mêmes, Dieu change leur situation conformément à ce verset : “En vérité,
Dieu ne modifie pas la condition d’un peuple tant que les gens qui le
composent ne changent pas ce qui se trouve en eux-mêmes.” »
Il y a sur terre de nombreux signes pour ceux qui ont atteint la certitude.
Cela est vrai également en vous-mêmes. Ne voyez-vous donc pas ?
51, 20-21
Ceux qui ont atteint la certitude (al-mûqinûn) sont ceux chez qui il
n’existe pas de dualité entre la foi et la connaissance. L’une vient éclairer
l’autre, si bien que tout phénomène de la nature devient l’occasion non
seulement d’un savoir mais également d’une méditation sur le sens de la
vie. Tabarî explicite ainsi ce verset : « Il y a dans les phénomènes
terrestres des enseignements (‘ibar) et des exhortations (wa‘azât) pour les
gens de la certitude, ceux qui cherchent à percevoir la réalité des
choses. »
La mention de signes extérieurs et intérieurs dans le Coran a influencé de
nombreux développements sur le parallélisme entre le macrocosme et le
microcosme : tout ce qui existe dans le monde qui nous entoure se
retrouve, sous une forme ou une autre, en nous-mêmes. Dans cette
perspective, Ghazâlî donne une liste de correspondances en plusieurs
endroits de son œuvre écrite : « Ton corps est donc ta “terre personnelle”,
tes os sont tes “montagnes”, ta tête est le “ciel” de ton corps, ton cœur en
est le “soleil”, ton ouïe, ta vue et l’ensemble de tes particularités sont les
“étoiles de ton ciel”, ce qui coule dans tes veines est la “mer” de ton
corps, tes poils en sont les “plantes”, tes membres les “arbres”... Il en est
ainsi pour l’ensemble de tes organes5. »
Ce parallélisme entre le macrocosme et le microcosme n’est pas une fin en
soi mais une incitation à l’intériorité et à la connaissance de soi. C’est ce
qu’expriment admirablement ces vers très souvent cités :
Ô toi qui erres dans un désert, ayant perdu ton secret,
Regarde ! Tu trouveras en toi l’existence entière.
Ce n’est pas pour Nous divertir que Nous avons créé les Cieux, la Terre
et ce qu’ils contiennent. Nous ne les avons créés que selon la Vérité,
mais la plupart des hommes sont dans l’ignorance.
44, 38-39
Nous avons déjà évoqué le thème des signes de Dieu dans la Création. S’il
y a « sur terre de nombreux signes pour ceux qui ont atteint la certitude »,
c’est parce que les Cieux et la Terre furent créés « selon la Vérité ». Cette
dernière expression traduit l’arabe bi-l-Haqq et signifie littéralement « par
la Vérité ». Si le monde est éphémère, il n’en témoigne pas moins des
perfections éternelles du Créateur. Seule l’ignorance fait du monde un
voile opaque empêchant de remonter à la source de l’être. En réalité, le
monde créé peut et doit être le point de départ d’une contemplation. Chez
les grands mystiques, la contemplation du Réel à travers le monde
l’emporte même sur toute autre perception : « Les sages, après s’être
élevés jusqu’au ciel de la Vérité, sont d’accord sur le fait qu’ils n’ont vu
dans l’Existence que l’Unique, le Réel (al-Haqq)… La multiplicité est
alors, pour ces derniers, entièrement supprimée et ils sont abîmés dans la
pure unicité (fardâniyya)… Il n’y a en eux que Dieu, et ils sont dans un
état d’ivresse (sukr) qui réduit leur raison à l’impuissance. Quand
l’ivresse s’atténue et qu’ils retombent sous le pouvoir de la raison qui est
la “balance” établie par Dieu sur la Terre, ils savent bien que ça n’était
pas une véritable identification (ittihâd)… Un tel état, relativement à celui
qui s’y trouve plongé, n’est appelé “identification” que par abus de
langage, alors que son véritable nom est réduction à l’Unité (Tawhîd)6. »
Certes, ceux qui sont soumis à Dieu et celles qui Lui sont soumises, les
croyants et les croyantes, les hommes pieux et les femmes pieuses, les
hommes sincères et les femmes sincères, les hommes patients et les
femmes patientes, les hommes et les femmes qui savent se recueillir, les
hommes et les femmes qui donnent l’aumône, les hommes et les femmes
qui jeûnent, les hommes et les femmes chastes, les hommes et les
femmes qui invoquent abondamment Dieu : Voilà ceux auxquels Dieu a
préparé un pardon et une récompense sans limites.
33, 35
Ce verset contient les deux commandements les plus importants dans les
deux domaines du spirituel et du relationnel. Pour le premier domaine, le
commandement suprême est de ne vouer un culte qu’à l’Unique. Dans le
domaine relationnel, la piété filiale est essentielle. Interrogé par un croyant
sur ses devoirs, le Prophète répondit : « La personne qui a le plus le droit
à tes égards est ta mère ! Ensuite ? demanda l’homme. Ta mère… Et
ensuite ? Ta mère… Et ensuite ? Ton père12. »
La façon de traiter ses parents avec la vertu parfaite (ihsân) est évoquée
dans ce verset en relation avec la vieillesse. C’est souvent lorsqu’ils
deviennent une charge pour leurs enfants que ces derniers perdent
patience. Ils se détournent d’eux ou, pire encore, les maltraitent. S’ils
peuvent être une charge matérielle, les parents sont avant tout une source
de bénédictions pour leurs enfants. Selon un hadith : « La bénédiction est
avec les personnes âgées13. »
« La vieillesse, dans laquelle les passions se sont tues, rapproche de
nouveau de l’enfance et du Paradis, dans les conditions spirituelles
normales tout au moins. Il faut combiner l’innocence et la confiance des
tout petits avec le détachement et la résignation des tout vieux ; les deux
âges se rencontrent dans la contemplativité, puis dans la proximité de
Dieu : l’enfance est “encore” proche de Lui, et la vieillesse l’est
“déjà”14. »
Toute âme goûtera la mort. Nous vous éprouvons par le mal et par le
bien à titre de tentation, et c’est à Nous que vous ferez retour.
21, 35
Chaque être humain sait qu’il mourra un jour, pourquoi donc le lui
rappeler ?
Parce qu’entre savoir une chose et la réaliser, il y a un véritable fossé. En
prenant réellement conscience de sa mort inéluctable, le croyant est amené
à méditer sur le sens de la vie et à distinguer entre l’essentiel et le
secondaire. En particulier, il est amené à remettre en cause l’attachement
qu’il peut porter aux choses éphémères. Un hadith invite ainsi à se défaire
de cet attachement : « Multipliez les occasions de vous souvenir de celle
qui met fin aux plaisirs éphémères : la mort15. »
La diversité des destins humains, avec ce qu’ils contiennent d’agréable ou
de difficile, doit être considérée à la lumière de nos fins dernières : le bien
et le mal existent dans nos vies « à titre de tentation », afin que nous
puissions montrer à travers nos choix et nos attitudes ce que nous sommes
intérieurement.
Sur ce sujet, Ghazâlî écrit : « Sache que l’homme absorbé par les
distractions du bas monde, qui se laisse ainsi illusionner et prend goût aux
plaisirs concupiscents (shahawât), ne peut qu’avoir un cœur exempt de
tout rappel de la mort : lorsqu’on la lui rappelle, il se crispe et s’éloigne.
De ce genre de personnes, Dieu a dit : “Dis : Certes, la mort que vous
fuyez vous rattrapera puis vous serez ramenés devant Celui qui connaît
parfaitement le caché et l’apparent. Il vous informera alors de ce que vous
faisiez.”16 »17
Nous avons rendu tout homme responsable de sa destinée et, le Jour de
la Résurrection, Nous lui présenterons un livre qui sera, sous ses yeux,
déployé. « Lis ton livre ! En ce Jour, ton âme suffit pour te juger ! »
17, 13-14
Les hommes et les djinns sont appelés en islam al-thaqalayn, les deux
groupes doués de pesanteur. Intuitivement, la notion de pesanteur laisse
entendre qu’ils sont attirés vers le bas. Seuls échappent à cette attraction
inexorable ceux qui se tournent vers leur Créateur. Lorsqu’on interrogeait
Ibn ‘Abbâs1 sur le sens de ce verset, il répondait : « “Afin qu’ils
M’adorent” signifie : “Afin qu’ils Me connaissent”. »
La plus haute forme d’adoration est donc la connaissance de l’Unicité
divine. Mais celle-ci doit être « réalisée » et non simplement admise
mentalement. La connaissance de Dieu et de Sa Seigneurie (rubûbiyya)
n’est réelle que si elle s’accompagne de la connaissance de soi – du néant
ontologique de l’ego – et donc de l’état de servitude (‘ubûdiyya) qui
caractérise l’homme.
À ce sujet, Ghazâlî écrit : « L’ensemble des prescriptions religieuses vise à
amener les créatures à la proximité de Dieu, le Très-Haut, et au bonheur
de la rencontre avec Lui. Or cela ne peut se réaliser que par la
connaissance de Dieu, de Ses Attributs, de Ses révélations et de Ses
envoyés, et c’est à cela que fait allusion cette parole : “Je n’ai créé les
djinns et les hommes qu’afin qu’ils M’adorent.” »
Il conclut alors sur le rôle essentiel de la connaissance de soi : « Or nul
n’est véritablement serviteur s’il ne connaît pas la Seigneurie de Dieu et
l’état de servitude qui caractérise son âme. Il est donc absolument
nécessaire de se connaître soi-même et de connaître son Seigneur. C’est là
la visée ultime de l’envoi des prophètes2. »
Par l’âme et par Celui qui l’a formée en lui inspirant sa part de
perversité comme sa part de piété ! A d’ores et déjà réussi celui qui a
purifié son âme, tandis que celui qui l’a enfouie dans le mal a
assurément échoué.
91, 7-10
Les premiers versets révélés du Coran furent reçus dans la grotte de Hirâ’.
Cette expérience fut éprouvante et déstabilisa fortement le Prophète qui ne
s’y attendait pas le moins du monde. Soutenu par son épouse, Khadîja, le
Prophète finit par accepter la mission que le Ciel lui imposait. Or les
premières révélations furent suivies d’une période de silence qui se
prolongea à tel point que le Prophète se mit à craindre d’avoir été
abandonné par Dieu. Selon les divers témoignages, cette période dura
entre dix et quarante jours. Le lourd silence fut enfin rompu et les versets
précités vinrent réconforter le Prophète.
L’attitude spirituelle qui est attendue du Prophète est ici l’ascèse ou le
détachement du monde (zuhd) et l’orientation du cœur vers l’Au-delà. À
cela s’ajoutent la confiance en Dieu et la conscience de Sa Générosité. On
comprend pourquoi le détachement était un des thèmes de prédilection de
l’enseignement spirituel du Prophète : « Détache-toi du monde, Dieu
t’aimera ; détache-toi de ce qui se trouve chez les autres, ils t’aimeront4. »
Toutefois, l’ascèse ne représente qu’une première étape du cheminement
spirituel. Contrecarrer les désirs égocentriques n’est qu’une façon
d’apprendre à se situer au-dessus d’eux : « Chercher à se détacher du
monde, c’est malgré tout être occupé par lui et être distrait de Dieu ! En
réalité, rien ne te sépare de Dieu : Il est plus proche de toi que ta veine
jugulaire5… »
En vérité Moi, c’est Moi Dieu ! Il n’est de divinité que Moi. Adore-Moi
donc et accomplis la prière pour te souvenir de Moi.
20, 14
Cette affirmation de l’Unicité de Dieu est celle que prononce Dieu Lui-
même lorsque Moïse se trouve face au Buisson ardent. Les versets
précédents rapportent ce face-à-face totalement inattendu pour Moïse :
« Ayant aperçu un feu, [Moïse] dit à sa famille : “Restez ici ! J’aperçois
au loin un feu. Peut-être vous en rapporterai-je un tison ou trouverai-je, à
l’aide de ce feu, quelques indications pour me guider dans ma route.” Et
lorsqu’il s’en approcha, une voix l’interpella : “Ô Moïse ! En vérité, Je
suis ton Seigneur. Ôte tes sandales, car tu es dans la vallée sacrée de
Tuwâ ! Je t’ai élu. Écoute donc ce qui te sera révélé…” » (20, 10-13)
L’expression Innanî anâ Allâh que nous avons traduit par « En vérité Moi,
c’est Moi Dieu » est à rapprocher du célèbre « Je suis Celui qui suis » tiré
de la version biblique du même récit6. Selon Ibn ‘Arabî, cette affirmation
de l’Unicité est celle de l’Ipséité (tawhîd al-Inâya). Il distingue cette
dernière de l’affirmation « En vérité, Je suis ton Seigneur » car celle-ci
n’envisage Dieu qu’en relation avec la Création : il n’y a pas de seigneur
sans serviteur. Au contraire, l’Ipséité est en elle-même pure Réalité. Face à
l’Absolu, le serviteur n’est en aucune manière. Seul l’Absolu possède
réellement l’être. C’est dans la relation à son Seigneur que le serviteur
pourra s’approcher de l’Absolu, mais sans pour autant pouvoir
L’atteindre7 ! C’est pourquoi Ibn ‘Arabî cite cette anecdote : « Abû Yazîd
demanda : “Seigneur comment puis-je me rapprocher de Toi ?” “Par ce
que Je ne possède pas.” “Seigneur, que ne possèdes-Tu pas ?” “La
petitesse et la pauvreté !”8 »
Sache qu’il n’est de divinité que Dieu et demande le pardon de tes
péchés ainsi que pour les croyants et les croyantes.
47, 19
Toute chose créée est susceptible d’être une nuisance pour l’homme parce
que, n’étant pas Dieu, elle peut le détourner du but ultime de son
existence. Selon Tabarî, tout ce qui n’est pas Lui (mâ siwâhu) est concerné
par l’expression « le mal présent dans ce qu’Il a créé ».
Selon un hadith, le Prophète fut victime d’un sortilège qui lui fut lancé par
Labîb ibn al-A‘sam. Sorcier d’une tribu juive de Médine, il fut payé pour
lancer un sort aussi mortel que possible contre le Prophète. S’étant procuré
quelques cheveux du Prophète, il y fit onze nœuds et ses filles soufflèrent
des imprécations sur chaque nœud. Le Prophète commença à avoir des
pertes de mémoire et à se sentir faible physiquement. Après quelque
temps, il vit deux anges en rêve lui décrire l’origine du mal dont il
souffrait. L’ange Gabriel lui apporta ensuite deux sourates, la 113 et la
114. Le Prophète envoya ‘Alî au puits où ses cheveux furent cachés et lui
demanda de réciter les onze versets de ces deux sourates, ce qui eut pour
effet de dénouer les onze nœuds dans ses cheveux. Le Prophète fit venir
Labîd qui avoua son acte. Face aux Compagnons qui voulaient se venger
de lui, le Prophète pardonna et dit : « Dieu m’a guéri et je déteste faire
souffrir les autres23. »
Le « mal du jaloux » est appelé en islam « le mauvais œil ». Le regard du
jaloux projette une sorte de malédiction qui poursuit la personne qui en est
victime. La récitation de la sourate 113 est donc considérée comme une
protection contre cette nuisance.
Dis : « Je prends refuge auprès du Seigneur des hommes, le Roi des
hommes, le Dieu des hommes contre le mal du tentateur furtif, celui qui
insuffle ses suggestions dans la poitrine des hommes, qu’il soit d’entre
les djinns ou les hommes. »
114, 1-6
La langue arabe possède plus de soixante mots pour dire l’amour, désigner
ses modalités essentielles, faire assentir ses aspects inépuisables32.
Dans les hadiths, le Prophète est surnommé « l’Aimé de Dieu » (Habîb
Allâh). Cela suggère, conjointement avec les versets du Coran, toute
l’importance de l’amour dans la relation à Dieu en islam. Certains
Compagnons étaient connus pour l’amour qu’ils portaient à Dieu. Ainsi,
Tabarî rapporte qu’Abû Bakr et ses disciples se trouvaient parmi ceux qui
avaient réalisé l’amour divin.
Les mystiques de l’islam exprimeront en prose ou en poésie l’amour
brûlant qu’ils éprouvent pour Dieu. Une des grandes représentantes de
cette mystique est Râbi‘a al-‘Adawiyya (m. 801). Le poème qu’elle
composa pour chanter l’amour de Dieu est l’un des plus souvent cités dans
les textes religieux musulmans :
Je t’aime de deux amours : amour visant mon propre bonheur, et amour
vraiment digne de Toi.
Quant à cet amour de mon bonheur, c’est que je m’occupe à ne penser
qu’à Toi et à nul autre.
Et quant à cet amour digne de Toi, c’est que Tes voiles tombent et que je
Te vois.
Nulle gloire pour moi, ni en l’un ni en l’autre, mais gloire à Toi, pour
celui-ci et pour celui-là33.
Il est des hommes qui donnent des égaux à Dieu : ils les aiment comme
ils devraient aimer Dieu. Mais ceux qui ont la foi vouent à Dieu un plus
grand amour encore.
2, 165
Ce verset est considéré par les exégètes comme une condamnation de toute
idolâtrie, qu’elle prenne la forme du paganisme ou qu’elle soit plus subtile
comme l’amour du pouvoir, des richesses matérielles, etc.
Le Prophète insista souvent sur l’amour qu’il faut porter à Dieu et donna
entre autres recommandations pour nourrir cet amour de se rappeler les
bienfaits dont l’homme jouit quotidiennement : « Aimez Dieu pour les
bienfaits qu’Il vous accorde ; aimez-moi pour l’amour de Dieu envers moi
et aimez les gens de ma Maison pour l’amour que je leur porte34. »
Cependant, cette conscience des bienfaits ne fait pas naître à elle seule
l’amour : elle n’est qu’un point de départ pour connaître Dieu à travers ses
Attributs de générosité, de bonté, de pardon, etc. Ainsi, il existe des liens
étroits entre l’amour et la connaissance. Ce sont ces liens que veut mettre
en lumière Ghazâlî lorsqu’il traite de l’amour de Dieu : « Aimer un autre
que Dieu, sans que cet amour soit en Dieu, ne peut être que le fait de
l’ignorance et de l’incapacité où l’on est de connaître Dieu. […] L’amour
procède de la connaissance. Supprimez la connaissance et vous supprimez
l’amour. Affaiblissez la connaissance et vous affaiblissez l’amour.
Renforcez la connaissance et vous renforcez l’amour. C’est dans ce sens
que Hasan al-Basrî35 a dit : “Connaître Dieu, c’est L’aimer. Connaître le
monde, c’est y renoncer.”36 »
En vérité, n’eussent été la grâce du Seigneur et Sa Miséricorde, vous
auriez tous, à de rares exceptions, été entraînés par Satan.
4, 83
La guidée est une grâce (fadl) : si sa recherche fervente est une des
conditions de son obtention, l’initiative humaine n’est cependant pas
suffisante. La guidée n’est donc pas imputable au mérite du croyant. Elle
est un pur effet de la Générosité de Dieu. Les exégètes du Coran se sont
interrogés sur les rares êtres qui, par le discernement (istinbât) octroyé par
Dieu, possèdent une nature imperméable aux suggestions sataniques. Ce
discernement est évoqué dans le début du verset : « Lorsque les croyants
reçoivent une nouvelle, rassurante ou alarmante, ils s’empressent de la
diffuser, alors qu’ils auraient dû, avant tout, en référer à l’Envoyé de Dieu
et à leurs chefs qui, possédant le discernement, savent en apprécier la
portée… » Dans son commentaire, Tabarî se fait l’écho des divers avis en
la matière. Pour certains, l’exception évoquée par le verset n’est qu’une
figure de style puisque le discernement est lui-même une grâce. Pour
d’autres, le discernement est une faculté de connaître intuitivement la
nature des choses. Ils s’appuient sur le sens de la racine du terme istinbât
laquelle désigne le jaillissement de l’eau à partir d’une source cachée.
Le discernement est donc ce que l’on peut appeler une « grâce
immanente » présente dans l’intellect lorsque celui-ci n’est voilé par
aucune passion et qu’il retrouve sa pleine envergure. Selon un hadith :
« Certes, l’homme peut atteindre par l’acquisition des vertus le degré de
celui qui jeûne la journée et veille la nuit en adoration. Or, les vertus ne
sauraient être parfaites que si l’intellect l’est. Alors, la foi d’un tel homme
sera parfaite, il obéira à son Seigneur et désobéira à son ennemi
Satan37. »
Ô vous qui croyez ! Faites preuve de piété et recherchez le moyen
d’accès à Dieu. Faites des efforts pour Sa cause, peut-être réussirez-
vous !
5, 35
LA FOI (AL-ÎMÂN)
La prière est le seul acte d’adoration que le Prophète ne reçut pas par
inspiration ou révélation. Second pilier de l’islam, elle lui fut imposée lors
de son ascension (mi‘râj) alors qu’il était « à une distance de deux arcs ou
plus près encore2 » de Dieu. Ce mode exceptionnel d’enseignement et
cette proximité de Dieu font dire aux exégètes du Coran que la prière
(salât) est ce qui relie (sila) le serviteur et son Seigneur. C’est pourquoi
elle est appelée en islam « la colonne centrale de la religion » (‘imâd al-
dîn).
Toutefois, c’est sur terre que furent montrés au Prophète les cinq
intervalles de temps durant lesquels doivent être accomplies les prières
quotidiennes. L’ange Gabriel vint voir le Prophète un premier jour pour lui
montrer à quel moment de la course du soleil dans le ciel commençait
chaque intervalle de temps, et un second jour pour lui indiquer la fin de
ces intervalles : aube, zénith, mi-hauteur dans le ciel, crépuscule, nuit
complète. Ainsi, en plus du lien avec son Seigneur, le croyant se trouve
ainsi mis en harmonie avec les cycles du jour et de la nuit.
En présence de ses Compagnons, le Prophète insista sur le rôle
purificateur de la prière par le fait qu’elle relie toujours à nouveau
l’homme à sa Source : « Si l’un d’entre vous possédait une rivière passant
près de chez lui et qu’il puisse s’y baigner cinq fois par jour, pensez-vous
qu’il demeurerait sur son corps la moindre salissure ? Eh bien, ainsi en
est-il des cinq prières quotidiennes : par elles, Dieu efface les péchés3. »
Au nom de Dieu, le Tout-Miséricordieux le Très-Miséricordieux.
Louange à Dieu, Seigneur de l’univers, le Tout-Miséricordieux le Très-
Miséricordieux, Souverain du Jour du Jugement dernier !
C’est Toi que nous adorons ! C’est de Toi dont nous implorons le
secours !
Guide-nous dans la Voie droite ; la Voie de ceux que tu as comblés de
bienfaits, non celle de ceux qui ont mérité Ta colère ni celle des égarés !
1, 1-7
Le terme arabe zakât que l’on traduit souvent par « aumône légale »
possède le double sens de purification et d’accroissement. C’est ainsi que
le Prophète affirmait : « Les aumônes ne font pas diminuer les biens
matériels que l’on possède13 ! »
Pourtant ce n’est pas ce terme qui est utilisé dans ce verset mais celui de
sadaqa, parfois réservé à l’aumône libre et non obligatoire.
Ce terme provient de la même racine que sidq, désignant la sincérité.
Donner l’aumône légale, outre son utilité pour les nécessiteux, est une
preuve que pour le croyant l’accumulation des richesses matérielles n’est
pas une fin en soi et que le souci d’autrui fait partie intégrante de sa foi. À
ce sujet, le Prophète disait : « Nul d’entre vous n’a la foi tant qu’il ne
souhaite pas pour les autres ce qu’il souhaite pour lui-même14. »
L’aumône légale, troisième pilier de l’islam, montre clairement le lien
entre la foi et la générosité envers autrui. On aurait tort de n’y voir qu’un
impôt légal visant à consolider les liens communautaires à Médine.
L’insistance sur la charité comme composante de la foi est présente dès les
premières révélations à La Mecque :
« As-tu vu celui qui traite la religion de mensonge. C’est celui-là même
qui repousse l’orphelin et n’incite pas à nourrir le pauvre. » (107, 1-3)
« Alors l’orphelin, ne le brime jamais ! L’homme dans le besoin, ne le
repousse jamais ! » (93, 9-10)
Ô vous qui avez la foi ! Le jeûne vous a été prescrit comme il a été
prescrit aux peuples qui vous ont précédés ; peut-être atteindrez-vous la
piété.
2, 183
Le cinquième pilier de l’islam n’est une obligation que pour ceux qui ont
la possibilité physique et matérielle de l’accomplir.
La sacralité de la Kaaba et de ses alentours à La Mecque est marquée par
l’appellation « Demeure de Dieu » (Bayt Allâh). La plupart des rites que
comporte le pèlerinage témoignent de ce qu’il est un voyage vers Dieu. La
formule rituelle que répète inlassablement le pèlerin, la talbiyya, en rend
compte : « Me voici ô mon Dieu ! Me voici ! [Tu es l’Unique] qui n’a
point d’associé… »
Dans cette perspective, les tournées rituelles (tawâf) autour de la Kaaba
sont le symbole de la Présence divine dans le cœur : « Sache que les
tournées rituelles sont en réalité celles du cœur autour de la Présence
seigneuriale. Le Temple de la Kaaba est un symbole, dans le monde
sensible (mulk), de cette Présence que l’œil ne peut percevoir et qui
appartient au monde céleste (malakût). De la même façon, le corps est le
symbole visible du cœur qui relève du monde de la réalité occultée (‘âlam
al-ghayb). »
Ghazâlî poursuit son propos et affirme qu’il existe une « analogie » entre
l’adoration des hommes et celle des anges : « En vertu de l’analogie entre
le plan terrestre et le plan spirituel, la Kaaba correspond au “Temple
fréquenté” qui se situe dans les cieux. Les tournées rituelles que font les
anges autour de ce temple sont l’archétype de celles que font les hommes
autour de la Kaaba18. »
Les bédouins ont affirmé : « Nous avons la foi ! » Disleur : « Vous
n’avez pas encore la foi. » Dites plutôt : « Nous nous sommes soumis car
la foi n’a pas encore pénétré vos cœurs. »
49, 14
Commentant ce verset, Ibn ‘Abbâs caractérisait « ce qui est le plus beau en
bonté » par les attitudes suivantes : « Il s’agit de faire preuve de patience
plutôt que de céder à la colère ; être magnanime face à celui qui agit avec
ignorance ; pardonner à ceux qui nous nuisent. »
La bonté capable de transformer un ennemi en ami chaleureux est
conditionnée, dans ce verset, à la patience en tant que grâce de Dieu.
Cependant, précise Râzî, cette grâce ne peut être reçue que par ceux qui
possèdent certaines dispositions intérieures liées à la connaissance et à la
sagesse. Il distingue trois types de savants ou de « connaissants »
(‘ulamâ’) : Ceux qui connaissent Dieu en son Être (al-‘ulamâ’ bi-Llâh) ;
ceux qui connaissent Ses Attributs (al-‘ulamâ’ bi-sifâti Llâh) ; ceux qui
connaissent Ses commandements (al-‘ulamâ’ bi-ahkâmi Llâh). Râzî
ajoutent que les premiers sont les sages auxquels fait allusion ce verset :
« Dieu accorde la sagesse à qui Il veut, et celui qui s’est vu accorder la
sagesse, en vérité, a reçu un bien immense. Mais seuls les gens doués
d’intelligence se remémorent cela ! » (2, 269)
Ces sages sont donc à même de repousser le mal par le bien et d’aider
autrui à sortir de la prison de la haine et du poison du désir de vengeance.
D’autres versets insistent également sur cette noble attitude : « Repousse le
mal par la plus belle bonté. » (23, 96) Évoquant « la plus belle bonté », ce
verset utilise le terme ahsan qui est proche du vocable ihsân, la vertu
parfaite, dont nous avons déjà traité et sur laquelle nous reviendrons.
Dieu accorde la sagesse à qui Il veut, et celui qui s’est vu accorder la
sagesse, en vérité, a reçu un bien immense. Mais seuls les gens doués
d’intelligence se remémorent cela !
2, 269
Le terme arabe dhikr que nous avons rendu en français par « invocation »
peut aussi être traduit par « souvenir », « rappel » ou « mention ». Pour
respecter cette polysémie, on peut proposer la périphrase suivante : Rappel
de Dieu par la répétition d’une formule sacrée.
L’obstacle majeur à la paix intérieure est constitué par les pensées qui
s’imposent par leur force, quelle qu’en soit l’origine, craintes ou désirs. La
nature agitée du mental est une prison dont on doit apprendre à sortir. La
répétition abondante d’une formule sacrée permet de concentrer la pensée
du croyant sur le contenu spirituel de cette formule. Par ce biais, l’amour
de Dieu s’empare progressivement du cœur et y infuse la paix et la
sérénité. En d’autres termes, l’invocation persévérante de Dieu dissout le
mental dans la bienheureuse Lumière divine qui embrasse toute chose.
Dans son commentaire, Râzî qualifie l’invocation de Dieu de « pierre
philosophale capable de transformer radicalement le cœur ». Pour sa part,
le cheikh Darqâwî insiste sur la joie indéfectible du croyant dont le cœur
est imprégné par l’invocation de Dieu : « Il est dit que par l’invocation de
Dieu le croyant atteint une telle paix de l’âme que la grande terreur au
Jour de la Résurrection ne peut l’attrister ; combien moins pourrait-il être
troublé par ce qui lui arrive d’épreuves et de revers dans l’ici-bas. Tiens-
toi donc fermement à l’invocation de ton Seigneur, mon frère, comme nous
te l’avons dit, et tu verras merveille. Que Dieu nous comble de Sa
grâce24. »
Dans des sanctuaires que Dieu a permis d’édifier et dans lesquels Il a
autorisé que l’on invoque Son Nom, il est des hommes que ni le négoce
ni les ventes ne distraient du souvenir de Dieu, de l’accomplissement de
la prière et de l’acquittement de l’aumône prescrite. Ils glorifient Dieu à
l’aube et au crépuscule.
24, 36-37
Ce verset suit celui de la Lumière (24, 35) et fut, comme lui, révélé vers
l’an 5 de l’Hégire, à une époque où la communauté de Médine s’était
structurée et où un certain nombre de mosquées avait vu le jour. Il rappelle
l’importance qu’avait la pratique de l’invocation du Nom chez les
Compagnons dont la foi était la mieux ancrée. Leur état spirituel est décrit
comme un souvenir perpétuel de la Présence de Dieu. Parmi les diverses
formes d’invocation, certaines peuvent être pratiquées par tout musulman,
d’autres doivent être transmises par une initiation. C’est le cas de la forme
d’invocation dont traitent les deux extraits suivants :« Sache que par Son
Nom Dieu illumine celui qu’Il choisit, et lui communique ainsi inspiration
et compréhension. Le motif spirituel pour lequel Dieu invite à invoquer
abondamment Son Nom de préférence à toute autre invocation n’est autre
que de permettre de méditer sur les significations intelligibles des secrets
du Nom. C’est ainsi que les soleils des lumières se lèvent sur les
cœurs25… »
« Le Nom est à la fois la voie d’accès à la Connaissance et la
Connaissance elle-même… Par ce mystère intérieur de l’union du Nom et
du Nommé, de Dieu et de son Nom béni, l’accès à la forme sacrée est
accès à l’Informel car vivre constamment dans le Nom divin c’est vivre en
Dieu et voir toutes choses en Lui, telles qu’elles sont26. »
Dis : Allâh ! Puis laisse-les ensuite à leurs vains discours.
6, 91
Dans le Coran, le cœur (qalb) est cité cent trente-deux fois et l’emploi de
ce terme se fait de plus en plus fréquent au fur et à mesure de la mission
du Prophète. Étymologiquement, le terme qalb dérive de la racine q.l.b.,
laquelle désigne essentiellement l’idée de retournement. Ainsi, un hadith
affirme ceci : « Le cœur de chaque créature est entre les deux doigts du
Tout-Miséricordieux ; lorsqu’Il veut retourner le cœur d’un serviteur, Il le
fait9. »
La Révélation revient donc souvent sur le caractère central du cœur dans
la vie spirituelle. C’est d’ailleurs à « ceux qui possèdent un cœur et sont
capables d’entendre10 » qu’elle s’adresse expressément. Dans cette vie
comme dans l’Au-delà, l’état du cœur est décisif. Qu’est-ce qu’un cœur
sain ? Râzî donne trois réponses possibles à cette question : être libéré de
l’ignorance ; être purifié des défauts de caractère ; être gouverné par la
piété.
Le cœur est une réalité pluridimensionnelle car il est un élément subtil
divin et spirituel (latîfa rabbâniyya rûhiyya) s’accordant avec le cœur
physique, selon Ghazâlî. Dans cette perspective, le cœur est considéré
comme un miroir capable de refléter le monde divin : « Sache que le siège
de la véritable connaissance est le cœur, c’est-à-dire l’élément subtil qui
dirige l’ensemble des organes d’action et à qui l’ensemble du corps est
soumis. Le cœur est, à l’égard des choses connues, ce qu’est le miroir pour
les images qui s’y reflètent. De même qu’à tout objet correspond une
image pouvant se refléter dans un miroir, toute chose connue par le cœur
renvoie à une réalité essentielle11. »
Quiconque aura fait le poids d’un atome de bien le verra, et quiconque
aura fait le poids d’un atome de mal le verra.
99, 7-8
Souligner que l’homme ne possède qu’un seul cœur revient à rappeler les
dangers de la division intérieure dont est capable l’âme humaine.
L’unification de l’être n’est pas spontanée : elle est, au contraire, le résultat
d’un cheminement intérieur. Livré à lui-même et sans enseignement
spirituel, l’homme a plutôt tendance à se disperser et à être tiraillé par des
motivations contradictoires, par exemple être à la fois religieux et esclave
des plaisirs terrestres.
Le Prophète mettait en garde contre la dispersion intérieure et l’absence de
cohérence spirituelle : « Celui qui unifie toutes ses préoccupations pour
n’en garder qu’une seule sera préservé par Dieu de tous les soucis du bas
monde et de l’Au-delà. Quant à celui qui se laisse disperser par les
préoccupations, Dieu ne se soucie guère de la manière dont il périra17 ! »
Les maîtres spirituels enseignent que la purification du cœur passe souvent
par une phase d’ascèse (zuhd) où le disciple doit orienter son cœur
exclusivement vers la foi. Dans un second temps, il pourra redécouvrir la
beauté de la Création avec un nouveau regard, non concupiscent. Voici en
quels termes Ghazâlî conseille un jeune disciple : « Mon fils ! Je t’assure
que si tu parcours la Voie spirituelle tu verras des merveilles à chaque
étape. Sache faire des sacrifices, car l’essentiel de la Voie est dans le
sacrifice, comme l’a dit Dhû l-Nûn al-Misrî à l’un de ses disciples : “Si tu
peux sacrifier tout ce qui enchaîne ton esprit alors viens ! Sinon ne
t’occupe pas avec un soufisme futile.”18 »
Ne vont-ils donc pas méditer le Coran ? Ou bien des verrous sont-ils
apposés sur leurs cœurs ?
47, 24
La méditation des versets du Coran, comme celle des signes de Dieu dans
la Création, suppose une ouverture du cœur. Dans les deux cas, c’est cette
ouverture qui rend possible la méditation. Du reste, le vocable arabe
employé pour « versets » et « signes » est le même : âyât. Selon Râzî, les
« verrous » désignent ici l’incroyance (kufr) et l’obstination (‘inâd).
Ailleurs dans le Coran, les obstacles empêchant de méditer les versets du
Livre et les signes dans le monde sont symbolisés par la rouille :
« Lorsqu’on leur lit Nos versets, ils commentent : “Légendes de
primitifs !” Oh que non ! Mais les œuvres qu’ils ont acquises ont déposé
un voile de rouille sur leurs cœurs. » (83, 13-14)
Traitant de la méditation des versets du Coran, Ghazâlî expose les voies
permettant de se « défaire des obstacles à la compréhension » (al-takhallî
‘an mawâni‘ al-fahm). Ces obstacles sont essentiellement constitués par
l’influence du Diable sur le cœur des hommes : « La plupart des hommes
sont privés de la compréhension du Coran à cause des voiles que le
Diable a disposés sur leur cœur. C’est ainsi que les cœurs deviennent
aveugles aux merveilles des secrets du Coran. Le Prophète a dit : “Sans
les démons qui entourent leurs cœurs, les fils d’Adam pourraient voir le
Monde spirituel (malakût).” » Ghazâlî poursuit en soulignant que les
significations du Coran relèvent elles-mêmes du Monde spirituel. Il insiste
alors sur la nécessaire purification du cœur en vue de favoriser la
méditation des versets du Livre saint19.
Aucun malheur ne vous touche sans la permission de Dieu. Et
quiconque croit en Dieu verra son cœur guidé par Dieu. Il est
parfaitement Omniscient.
64, 11
Ces versets font partie des premières révélations que reçut le Prophète à
La Mecque. Comme d’autres versets de cette époque, ils font de la charité
une conséquence naturelle de la foi.
L’islam fut considéré par les puissants de La Mecque comme une menace
pour leur position privilégiée et leurs richesses : ils comprirent très vite le
danger que pouvaient représenter pour eux les idées de générosité et de
partage prônées par le Prophète.
Râzî rapporte l’avis selon lequel ces versets furent révélés pour condamner
le comportement d’Abû Sufyân lequel sacrifia deux chameaux – comme il
avait l’habitude de le faire chaque semaine –, mais refusa de nourrir un
jeune orphelin qui vint lui demander un peu de viande.
Peu avant la révélation de ces versets, d’autres étaient venus souligner
l’emprise que les biens matériels ont sur le cœur de l’homme :
« Oh que non ! Vous n’êtes pas généreux avec l’orphelin et vous
n’encouragez pas à nourrir l’homme dans le besoin. Vous spoliez les
héritiers de leurs biens et vous vouez à la richesse un amour sans
bornes ! » (89, 17-20)
« En vérité, l’homme est bien ingrat envers son Seigneur ! Ingratitude
dont il se rend bien compte ! De plus, il témoigne d’une formidable
cupidité pour les biens de ce monde. Ignore-t-il que lorsque les tombes
seront retournées et le secret des cœurs dévoilé, leur Seigneur sera, ce
jour-là, de tous leurs actes parfaitement renseigné ? » (100, 6-11)
C’est Nous qui avons créé l’homme et Nous savons ce que son ego lui
suggère. Et Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire.
50, 16
Les exégètes comme Tabarî et Râzî ne disent que peu de choses sur ce
verset. Ils se contentent de souligner que Dieu connaît le contenu des
cœurs et que Sa proximité de l’homme est le fait de Sa Science parfaite.
Pour sa part, Rûzbihân Baqlî relève une allusion subtile : l’ego (nafs) n’est
pas la réalité de l’homme et Dieu est plus proche de cette réalité que ne
l’est l’ego. Il cite à ce propos une sentence célèbre qu’il considère comme
un hadith : « Qui connaît son âme, connaît son Seigneur. » Il justifie cette
position par l’insufflation de l’Esprit de Dieu en l’homme lors de la
création.
Tel qu’il est construit, ce verset introduit en effet une distinction entre ce
qui fait la réalité profonde de l’homme – mais qui n’est pas nommé – et
son ego. Le cheminement intérieur du croyant doit l’amener à ne plus faire
corps avec les tendances, les désirs et les craintes de l’ego. Il doit au
contraire considérer l’ego comme un corps étranger en lui.
La nature humaine est duelle : réalité spirituelle et identification avec
l’ego. Tout le propos du cheminement initiatique est de renouer avec la
première et de perdre la seconde. Ce cheminement initiatique est décrit par
Ghazâlî comme le rayonnement de l’Esprit en l’homme, rayonnement
faisant disparaître l’identification à l’ego dont la racine est l’ignorance de
soi : « Celui qui connaît le mystère de l’Esprit (sirr al-Rûh) se connaît soi-
même [ou connaît son âme] ; et qui se connaît, connaît son Seigneur, et
sait qu’il est une réalité seigneuriale (amr rabbânî) dans sa nature et son
origine, et que dans le monde corporel il est un étranger21. »
Je ne cherche pas à disculper mon ego. En vérité, l’ego incite au mal
sauf chez celui qui est l’objet de la miséricorde de mon Seigneur. Certes,
mon Seigneur est Pardonneur et Miséricordieux.
12, 53
La foi, au sens le plus élevé du terme, est une lumière accordée par Dieu
suite à la mort de l’ego. Cette lumière provoque alors une renaissance
spirituelle pour l’être qui la reçoit et transforme radicalement sa perception
des choses. Les mystiques distinguent la mort physique inévitable et la
« mort spirituelle » : « C’est cette seconde mort qui nous est prescrite dans
la parole de l’Envoyé d’Allâh : “Mourez avant de mourir.” Celui qui
meurt de cette mort volontaire, la résurrection pour lui est accomplie...
Ainsi que l’a dit le Prophète – sur lui la grâce et la paix – selon une
tradition mentionnée par Tabarânî : “Vous ne verrez pas votre Seigneur
avant d’être mort” ; et cela parce que, dans la contemplation de ce mort-
ressuscité, toutes les créatures se sont anéanties, et que pour lui ne
subsiste qu’une seule chose, une seule Réalité22. »
L’être né à nouveau est une bénédiction pour tous ceux qui l’entourent car
la lumière divine dont il est le porteur suscite chez les autres la volonté de
lutter contre leur propre ego et de se parfaire. C’est la raison pour laquelle
le Prophète donna en exemple Abû Bakr et poussa les autres Compagnons
à tirer profit de sa compagnie : « Un hadith affirme : “Que celui qui
souhaite voir un mort marcher sur terre regarde Abû Bakr.” Le Prophète
qualifia Abû Bakr de “mort” parce que la volonté individuelle de ce
dernier s’était éteinte face à la Volonté de Dieu… Parcours la Voie, toi
aussi mon frère, sous la direction d’un guide spirituel afin de vivre cette
“mort” symbolique23. »
Bienheureux celui dont Dieu a élargi la poitrine afin qu’il se soumette à
Lui et qui détient ainsi une lumière venant de son Seigneur.
39, 22
Aucun reproche concernant l’islam n’est aussi récurrent de nos jours que
celui de violence. L’usage aveugle de la force armée contre les infidèles
serait encouragé par le Coran, à en croire un discours aisément relayé dans
les médias. Aussi le terme « djihâd » – invariablement traduit par « guerre
sainte » – est-il devenu le symbole même de la sanctification de cette
violence.
La guerre au sens propre du terme est souvent désignée dans le Coran par
le vocable harb. Non seulement Dieu ne souhaite pas la guerre, mais bien
souvent « Il éteint les conflits » afin qu’elle n’ait pas lieu : « Chaque fois
que les ennemis du Prophète1 allument le feu de la guerre (harb), Dieu
l’éteint… » (5, 64) Loin de sanctifier la guerre, le Coran s’oppose à toute
cruauté gratuite envers les ennemis et pose les fondements du traitement
respectueux des prisonniers : « Lorsque vous êtes en guerre (harb) contre
les ennemis, frappez-les durement jusqu’à leur reddition. Faites-les
prisonniers : vous les libérerez ensuite gracieusement ou contre une
rançon quand la guerre aura pris fin. » (47, 4) Il arriva que la rançon
demandée ne fût pas matérielle, tel le fait d’enseigner à lire à dix illettrés.
Le bon traitement des prisonniers est aussi important que la charité envers
les pauvres et les orphelins : « Bien qu’étant dans le besoin, ils nourrissent
le pauvre, l’orphelin et le prisonnier : “Nous vous nourrissons par amour
de Dieu et n’attendons ni compensation, ni remerciement.” » (76, 31)
Lorsque le Coran évoque « ceux qui luttent en Nous » le terme « djihâd »
alors employé possède toujours – en contexte de guerre comme en temps
de paix – une signification intérieure : la lutte contre son propre ego afin
de tendre vers la vertu parfaite (ihsân).
Invite les hommes à la voie de ton Seigneur par la sagesse et la belle
exhortation : dialogue avec eux de la meilleure manière ! Certes ton
Seigneur connaît parfaitement ceux qui se sont écartés de Sa Voie
comme ceux qui sont bien guidés.
16, 125
Ce verset fut révélé suite à la bataille d’Uhud qui eut lieu en l’an 3 de
l’Hégire et durant laquelle Hamza, l’oncle du Prophète, fut tué puis
mutilé : son ventre avait été ouvert afin d’en extraire le foie à la demande
de Hind qui avait juré de l’obtenir et de mordre dedans. Son nez et ses
oreilles furent également arrachés.
Face à tant de barbarie, le Coran invite le Prophète et les croyants à ne pas
céder à la tentation de répondre par la haine ni à se laisser ronger par la
soif de vengeance. C’est au contraire la sagesse qui doit vaincre la folie
meurtrière. La fonction de la bonne exhortation est de montrer à ceux qui
se sont laissé aller à des actes ignobles qu’ils doivent sortir des ténèbres
dans lesquelles ils se trouvent. Il s’agit de toucher leurs cœurs et d’éveiller
leur conscience, dans la mesure du possible. La sagesse et la bonne
exhortation évoquées par le verset correspondent, selon Râzî, aux diverses
ressources de l’argumentation et du sentiment propres à faire comprendre
aux ennemis que la Voie à laquelle ils sont appelés est celle de leur propre
avantage, en cette vie et dans l’Au-delà.
La suite du verset invite ceux d’entre les croyants qui en sont capables à
pardonner les coupables et à faire preuve d’une compassion universelle.
Selon un hadith : « L’homme n’atteint la réalité de la foi que lorsqu’il
désire pour tous les hommes le bien, tel qu’il l’aime pour lui-même2. »
Nous verrons avec la citation suivante dans quelle mesure le pardon est
désigné comme un idéal à réaliser.
Si vous devez exercer des représailles, que cela soit à la mesure du
préjudice subi ; mais si vous supportez les offenses avec patience, cela
est bien meilleur pour ceux qui en sont capables. Fais preuve de
patience ! Mais tu n’y parviendras qu’avec l’aide de Dieu.
16, 126-127
Les versets que nous avons présentés dans ce chapitre montrent clairement
que l’islam ne considère pas l’utilisation de la force comme une démarche
nécessairement injuste. Toutefois, si le Coran dépeint avec beaucoup de
lucidité l’humanité comme étant divisée contre elle-même et dans laquelle
l’amour des autres et de la paix sont constamment mis à mal, il n’en invite
pas moins chaque croyant à être « bon et équitable » envers les non-
croyants dès lors que ces derniers ne sont pas animés d’intentions
belliqueuses. Ainsi, le Coran condamne par principe l’usage de la violence
aveugle car la vie humaine est sacrée, chaque être humain portant
l’humanité entière en lui : « Quiconque tue un être humain non coupable
de meurtre ou de sédition sur la Terre est considéré comme le meurtrier de
l’humanité tout entière. Quiconque sauve la vie d’un seul être humain est
considéré comme ayant sauvé la vie de l’humanité tout entière ! » (5, 32)
Ce verset d’époque médinoise montre l’inanité de la thèse selon laquelle
l’islam fut spirituel et pacifique à La Mecque, puis belliqueux et violent à
Médine. L’idée sous-jacente à cette thèse étant, bien entendu, que le
Prophète fut pacifique à La Mecque parce qu’il était en situation de
faiblesse, et qu’il fut violent à Médine parce qu’à la tête d’une cité
puissante, il en avait enfin les moyens…
La bonté dont doivent faire preuve les croyants envers les non-croyants est
désignée par le verbe barra. Terme désignant la douceur avec laquelle il
convient de traiter ses propres parents7. D’ailleurs, le Prophète cita ce
verset à Asma’, la fille d’Abû Bakr, pour l’amener à renouer avec sa mère
qui était incroyante.
Ô vous qui avez la foi ! Inclinez-vous devant Dieu ! Prosternez-vous !
Adorez votre Seigneur et faites-le bien, dans l’espoir d’atteindre le
salut ! Que votre lutte soit en Dieu, comme doit l’être la lutte véritable.
C’est Lui qui vous a élus. Il ne vous a imposé, en matière de religion,
aucune gêne. C’est la Tradition de votre père Abraham lequel vous a lui-
même désignés comme « soumis à la Volonté de Dieu »…
22, 77-78
Traductions du Coran
Berque Jacques, Le Coran, 2e éd., Paris, Albin Michel, 1995.
Chiadmi Mohammed, Le Noble Coran, Lyon, éditions Tawhid, 2006.
Hamidullah Muhammad, Le Saint Coran, avec la collaboration de Michel
Léturmy, Paris, Club français du livre, 1959.
Masson Denise, Le Coran, 2 vol., Paris, Gallimard, 1980.
Penot Abd Allâh, Le Coran, Lyon, éditions Alif, 2007.
Études
Abd el-Kader, Écrits spirituels, traduction et présentation par Michel
Chodkiewicz, Paris, Seuil, 1982.
Chouiref Tayeb, Les Enseignements spirituels du Prophète, 2 vol.,
Wattrelos, éditions Tasnîm, 2008.
Dousse Michel, Marie la musulmane, Paris, Albin Michel, 2005.
Gazâlî (al-), Lire et comprendre le Coran, texte arabe et traduction
française présentée et annotée par Tayeb Chouiref, Wattrelos, éditions
Tasnîm, 2013.
Gloton Maurice, Une approche du Coran par la grammaire et le lexique,
Beyrouth, Albouraq, 2002.
Lings Martin, Le Prophète Muhammad. Sa vie d’après les sources les plus
anciennes, Paris, Seuil, 1986.
Lory Pierre, Les Commentaires ésotériques du Coran, Paris, Deux Océans,
1980.
Monneret Jean-Luc, Les Grands Thèmes du Coran, Paris, Dervy, 2003.
Nasr Seyyed Hossein, Islam. Perspectives et réalités, Paris, Buchet-
Chastel, 1991.
Nwyia Paul, Exégèse coranique et langage mystique, Beyrouth, Dar el-
Machreq, 1991.
Schimmel Annemarie, L’Islam au féminin, Paris, Albin Michel, 2000.
Schuon Frithjof, Comprendre l’islam, Paris, Seuil, 1976 (1re éd. 1961).
INDEX DES VERSETS CITÉS
1, 1-7 129
2, 26 14
2, 30 44
2, 31 54
2, 35-37 50
2, 45-46 68, 133
2, 62 171
2, 87 20
2, 115 32
2, 135 113
2, 136 58
2, 143 88
2, 152 148
2, 153 38
2, 165 119
2, 183 135
2, 186 39
2, 187 95
2, 213 87
2, 216 122
2, 217 (in globo) 178
2, 222 131
2, 228 93
2, 233 (in globo) 93
2, 253 20
2, 255 35
2, 256 184
2, 269 141, 142
2, 282 117
3, 1-4 13
3, 7 18
3, 17 108
3, 18 127
3, 33-34 67
3, 36 69
3, 37 69
3, 42-43 69
3, 45 70
3, 50 (in globo) 58
3, 84 58
3, 96 137
3, 97 138
3, 118-119 179
3, 134 140
3, 164 77
3, 194 171
4, 1 49
4, 19 93
4, 34 93, 94
4, 40 158
4, 64 82
4, 83 120
4, 103 128
4, 163 57
4, 171 20, 70
5, 6 130, 131
5, 28 181
5, 32 182
5, 35 121
5, 45 177
5, 51 179
5, 54 118
5, 64 175
5, 110 20
6, 12 27
6, 38 19
6, 57 (in globo) 158
6, 74-75 61
6, 91 146
6, 103 33
6, 122 168
6, 125 169
7, 20-22 (in globo) 50
7, 23 82
7, 27 49
7, 31-32 37
7, 156 27
7, 172 51
7, 180 28
8, 2 143
8, 60 181
8, 61 179
9, 29 180
9, 60 134, 180
10, 37-38 23
10, 47 59
10, 62 112
10, 99 185
11, 23 156
11, 120 59
12, 53 159, 167
13, 7 59
13, 11 89
13, 28 144
13, 39 (in globo) 17
14, 24-25 149
14, 34 172
14, 36 63
15, 9 (in globo) 13
15, 28-29 20
16, 102 20
16, 120 63
16, 125 176
16, 126-127 177
17, 1 76
17, 8 148
17, 13-14 98
17, 23 96
17, 70 54
17, 81 161
17, 82 15
17, 85 20, 22
17, 89 16
18, 28 147
18, 54 16
18, 58 (in globo) 158
18, 109 19
18, 110 75
19, 5-6 68
19, 14 (in globo) 182
19, 30-33 70
19, 32 (in globo) 182
20, 10-13 106
20, 14 106, 132
20, 25-28 169
20, 46 38
20, 65-69 66
20, 70-71 66
20, 114 53
20, 115 50
21, 5 (in globo) 23
21, 30 (in globo) 130
21, 35 97
21, 37 53
21, 78-79 67
21, 89-90 68
21, 91 20
21, 107 80
22, 27 137
22, 34-35 143
22, 39-40 178
22, 46 99
22, 54 (in globo) 156
22, 77-78 183
22, 78 57
23, 96 141
24, 21 167
24, 35 34, 145
24, 36-37 145
24, 39 155
25, 7 75
26, 69-74 61
26, 88-89 157
26, 192-195 21
28, 7 65
29, 45 132
29, 46 179
29, 69 175
30, 21 49, 93
30, 30 113
30, 58 16
31, 28 48
32, 15-16 68
33, 4 162
33, 21 83
33, 35 92
33, 40 (in globo) 13
33, 45-46 78
33, 56 109
35, 5 155
35, 15 148
36, 12 (in globo) 17
36, 69 (in globo) 23
37, 102 62
37, 104-109 62
38, 29 14
38, 41-42 64
38, 44 64, 94
38, 71-74 45
38, 75-76 46
38, 77-83 47, 69
39, 21 31
39, 22 169
39, 27 16
39, 41 185
40, 78 59
41, 34-35 141
42, 13 60
42, 37-40 140
43, 2-4 17
44, 38-39 91
45, 23 123
47, 4 175
47, 7 148
47, 19 107
47, 24 163
48, 10 84
48, 18 84
49, 2 81
49, 13 87
49, 14 139
50, 16 38, 166
50, 37 (in globo) 157
51, 20-21 90
51, 49 95
51, 56 103
52, 34 23
53, 8-10 76
55, 26-27 31
56, 10-11 111
56, 77-78 (in globo) 17
57, 3 30
57, 4 38, 39
57, 20 154
59, 21 16
59, 22-24 29
60, 8 182
64, 11 164
67, 1-2 164
68, 4 79
70, 19 53
70, 19-23 52
71, 1 60
71, 7 60
71, 26-27 60
73, 8-10 170
75, 2 (in globo) 159
75, 13-15 98
75, 16-19 53
76, 1-2 43
76, 31 175
83, 13-14 163
86, 9-10 98
87, 16-19 57
88, 21-22 185
89, 17-20 165
89, 27-30 159
91, 7-10 104
93, 1-5 105
93, 9-10 134
94, 1-8 73
95, 4-5 (in globo) 113
96, 1-5 74
96, 19 110
97, 1-5 136
99, 7-8 158
100, 6-11 165
102, 1-3 153
102, 5 116
105, 1-5 160
107, 1-3 134, 165
110, 1-3 139
112, 1-4 36
113, 1-5 114
114, 1-6 115
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