Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Les projets de décret adoptés au Conseil des ministres du 14 octobre 2016 n’ont
absolument rien à voir ni avec la Loi n°2016-013 du 10 mai 2016 portant modification
du Code des collectivités territoriales, ni avec son décret d’application. Il ne s’agit en
réalité de décrets d’application de l’Entente du gouvernement avec la Plateforme et
la CMA. Une simple comparaison suffit largement à l’attester, rien qu’en se fondant
seulement sur les trois points qui suivant.
Les raisons pouvant motiver la mise en place d’une autorité intérimaire : Selon
la loi, la mise en place des autorités intérimaires est soumise à certaines conditions
qui doivent être préalablement remplies. L’Entente au contraire institue d’office les
autorités intérimaires. Par ailleurs selon la loi, les autorités intérimaires peuvent être
instituées partout sur le territoire national alors que l’Entente ne prévoit les autorités
intérimaires que pour les cinq régions du Nord (Gao, Tombouctou, Kidal, Taoudénit
et Menaka).
Par ailleurs si l’Entente, la loi et le décret prévoient de les choisir parmi les agents
des services déconcentrés de l’Etat, la société civile et les conseillers sortants, il
existe une spécificité en ce qui concerne l’Entente qui, contrairement à la loi et
décret, n’exclut pas de manière expresse les conseillers sortants des conseils
dissout ou démissionnaires.
Les compétences des autorités intérimaires : Alors que dans la loi, les compétences
des autorités intérimaires ne vont pas au-delà et sont même ne deçà de celles
qu’exercent habituellement les organes statutaires élus, l’Entente attribue toute une
gamme de compétences nouvelles de portée significative aux autorités intérimaires.
L’on sait parfaitement que l’Accord d’Alger, par rapport notamment à ses dispositions
contraires à la Constitution du Mali comme celles relatives aux autorités intérimaires
qu’elle prévoit uniquement pour les régions du Nord, n’est pas reconnu par
l’ordonnancement juridique national du Mali.
Même l’Arrêt n°2016-05/CC du 5 mai 2016 de la Cour constitutionnelle n’a pas osé
directement franchir ce pas, comme on peut le constater à travers l’énumération
pléthorique de la vingtaine de textes juridiques et autres documents qu’elle vise où il
n’y a aucune référence à l’Accord d’Alger.
Ce recours anticonstitutionnel à une législation parallèle pour les régions du Nord qui
est dérogatoire au droit commun est organisé par une sorte de parlement de facto
constitué du Gouvernement, de la CMA et de la Plateforme, engagé dans un vaste
programme de modification-tripatouillage de la législation nationale du Mali, portant
notamment sur le Code des collectivités territoriales, la Loi sur la libre administration
des collectivités territoriales et la Loi portant principes fondamentaux de
l’organisation administrative du territoire.
L’Entente met en place un nouveau cadre juridique et institutionnel dans les régions
du Nord dont chacun perçoit clairement qu’il n’aura rien de temporaire ou provisoire.
Ce hold-up juridico-institutionnel étant consommé, le statut autonome de l’Azawad se
met en place.
Dr Brahima FOMBA