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• Séance N° 1
• Contenu du Cours :
1. Introduction.
2. De la restauration des monuments à la question des centres
historiques.
A. la tutelle et la sauvegarde des biens historiques:
• Chronologie historique.
B. Les différentes écoles de pensées.
- La théorie de Viollet Le Duc en France.(1814- 1879).
- La théorie de John Ruskin en grande Bretagne.(1819- 1900).
- Les percepts de Gustavo Giovannoni en Italie (1873- 1947).
3. Les différentes chartes de restauration.
• (rappel de quelques notions de base).
4. Conclusion.
5. Bibliographie indicative.
1. Introduction :
Prés de deux siècles se sont écoulés depuis l'émergence du nouvel intérêt au patrimoine
architectural. Il convient de faire le point sur les évolutions qu'ont connues notre doctrine et
nos pratiques dans le domaine de la sauvegarde et mise en valeur des monuments
historiques.
En ce qui concerne la protection tout d'abord, le fait marquant étant sans doute la
diversification et l'élargissement de la notion du patrimoine même de monument historique :
Œuvre d'art, architecture « Majeure » / architecture « Mineure », ensemble historique, ...
L'attention, autrefois concentrée sur les édifices les plus prestigieux, se porte de plus en plus
aujourd'hui vers des aspects nouveaux de notre patrimoine : bâtiments ruraux ou industriels.
On protège aujourd'hui les œuvres contemporaines de Perret et de Le Corbusier.
La renaissance allait introduire une nouvelle pratique avec la réinterprétation des œuvres du
passé. Dans son traité « De Re Aedificatoria » , refonte de Vitruve , Alberti soutient qu’on
peut améliorer certains bâtiments en leur donnant une application magistrale (par un
enrobage). L’exemple de l’église de San Francesco de Rimini (1447) : Il fit revêtir cette
église gothique de marbre pour lui donner un aspect d’un temple antique. Ces pratiques
peuvent s’observer jusqu’au 15e siècle.
Cette attitude continuait jusqu'au 15ème siècle. Il fallait attendre l'année 1624 pour assister à
la diffusion d'une réglementation prévisionnelle décrétée par le Cardinal ALDO
BRANDINI, qui obligeait la prédisposition d'une permis de construction dans le cas où on
utiliserait ces deux matériaux: le marbre et le métal.
Partant d'une vision conservatrice des antiquités archéologiques au 18ème siècle, le Cardinal
SPINOLA ALBANI aboutit à une réglementation nouvelle, régissant toute forme de
conservation et sauvegarde des édifices antiques. Ces interventions devaient être soumises
au contrôle permanent d'un commissaire des Beaux-arts. Cette réglementation avait subi
plusieurs remaniements conceptuels au courant du 19ème siècle, afin d'arriver à une
formulation réglementaire définitive en 1902, contenant une quarantaine de lois encadrant et
limitant la liberté des initiatives individuelles.
En France, ce fut à la suite d’un long processus de dégradation des édifices civils et
religieux ; correspondant aux destructions de la révolution de 1789 et au vandalisme des
premières décennies du 19e siècle, que le concept de restauration va connaître son évolution
la plus rapide. Déjà, une convention fut proclamée sur le principe de l’intervention sur les
monuments par l’état, ce qui avait nécessité la mise en place d’un appareil administratif au
service de la conservation. Il revenait à la monarchie de juillet de réaliser ce programme, en
s’appuyant sur le mouvement d’opinion, favorable à l’histoire nationale et à l’art médiéval.
On peut en fait dater du début du 19ème siècle l'apparition d'une nouvelle façon
de considérer les monuments, et presque en même temps celle des problèmes liés à leur
restauration. Nous pouvons donner des exemples de l'une et des autres en exposant
quelques faits particuliers, observés à Rome à cette époque.
En premier lieu, les fouilles entreprises en 1802 autour de l'Arc de Septime Sévère dans la
zone du Forum Romain. Ces fouilles ressemblent à beaucoup d'autres: il s'agit de dégager
l'une des bases de l'Arc pour en vérifier les mesures. Une fois les relevés effectués, le
monument sera ré enterré.
Il venait à ceux qui surveillaient les fouilles l'idée que le monument dégagé pour toujours de
la terre qui le recouvrait pouvait être installé au milieu d'un fossé où les visiteurs descendront
pour en apprécier les formes dans leur intégrité. Cette épisode montre la naissance d'une
idée: la mise en valeur de la construction monumentale, non plus considérée comme une
sorte de vestiges romantiques mais réintégrée dans la ville vivante et active. A l'idée de la
mise en valeur vient s'ajouter le problème de la restauration; en effet, sur de nombreux
monuments, une intervention s'impose, de consolidation lorsqu'ils sont instables, ou de
dégagement lorsqu'ils sont à peine visibles sous la stratification des transformations
successives.
« Ce problème affecte, durant les premières décennies du siècle, tout le bassin
méditerranéen où l'on va travailler sur les restes de la période classique » (1).
Le choix d'un deuxième exemple de consolidation des monuments antiques a porté sur le
Colisée, où à l'instabilité de ses arcades croulantes, une urgente intervention est venue
remédier en deux temps:
1) La première fut dirigée par Raffaele STERN en 1807. Elle consistait à opposer à la
poussée des arcades par un contrefort de haut en bas. Cet éperon se distinguait par ses
matériaux, différents du contexte antique.
2) La deuxième intervention attribuée à Giuseppe VALADIER en 1826 est venue remédier
à cette instabilité des arcades par la reconstruction de ces derniers, pour compléter la ligne
manquante du monument, qui formera elle-même un éperon. (2). Cette maçonnerie fut
réalisée en briques qui reproduisait l’architecture existante, mais qui ne permettait pas de
discerner le nouveau de l’authentique, puisqu’elle fut enduite d’une couche de d’enduit
coloré, reproduisant la patine d’antan.
"En comparant les deux interventions, on peut aisément reconnaître la dialectique entre la
restauration de consolidation pure et simple, où l'on se préoccupe d'altérer le moins
possible l'authenticité du monument, et la restauration qui altère en partie son objet en
reprenant les lignes interrompues et en insistant sur l'effet visuel général du monument". (3).
D'ici on déduit que le projet de restauration, au début du 19ème siècle, fut une opération du
type archéologique.
Il faut donc éviter de restaurer, car l'édifice court le risque de sortir falsifié. Pour RUSKIN, la
valeur des monuments réside surtout dans leur authenticité, que l'on ne peut pas séparer de
l'état de décadence dans laquelle se trouve la matière de l'édifice à cause des injures du
temps. Ses interventions de maintenance n'écartaient donc pas l'évolution du monument
dans son ère.
Cependant l'époque qui a suivi dura jusqu'aux années 1920-1930. Cette période se
caractérisa par une production éclectique et historiciste qui n'a pas travaillé à vraie dire le
bien culturel, puisqu'il y avait cette prédominance d'une époque historique sur l'autre.
A cet effet, il fallait attendre le 20 Juin 1909 pour décréter la loi n. 364 sur les principes
fondamentaux sur lesquels se basent les normes actuelles de la conservation du patrimoine
historique.
En 1931, la charte d'Athènes a eu un grand mérite aux monuments historiques isolés, par la
reconsidération de toutes leurs valeurs, tout type confondu, de l'oeuvre monumentale à
l'édifice mineur; pris comme témoignages d'une civilisation.
La charte d'Athènes incitait à la conservation de l'objet unitaire dans le but de sa
revalorisation dans son contexte global.
La charte suivante de restauration de Venise, en 1964, avait élaboré pour la première fois un
cadre institutionnel régissant internationalement la pratique de la conservation et de la
restauration.
Afin de décrire d'une manière globale l'évolution des concepts qui inspirent la pratique de la
conservation des monuments et sites historiques, on a décidé de les ramener ici
schématiquement en ces quelques points: (4).
1) L'histoire de la conservation en Europe, à partir du 19ème siècle, commença par
l'introduction progressive des lois et règlements de sauvegarde et la création d'organismes à
diverses échelles, qui veillaient au recensement et à la restauration de ces biens historiques.
2) La tutelle de la ville historique en Italie, dans son ensemble, se fait jour peu à peu à l'issue
des activités de Gustavo GIOVANNONI (1873-1947) où quelques cas d'expériences
s'opèrent dans les années 30, par exemple la réhabilitation de quelques quartiers dans la ville
de Sienne et de Bergame. Ils instaurèrent une nouvelle tradition.
Cours de Base :
«Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Chargé de Programme :
Dr Youcef CHENNAOUI
Maître de conférences classe A
Chercheur à l’ENSA (ex Epau)
d’Alger.
• Séance N° 2
La problématique de patrimonialisation :
définitions, principes et méthodologies.
Contenu du Cours : (Texte dans sa version provisoire).
INTRODUCTION.
Le concept actuel du patrimoine culturel est un résultat du processus lié au développement de
la société contemporaine, de ses valeurs et de ses conditions. La tendance doit aujourd'hui
comprendre le patrimoine culturel physique dans son plus large sens en tant que contenant de
tous les signes qui documentent les activités et les accomplissements du temps et de la
société.
Le terme « Patrimoine » en latin « Patrimonium », désignait à l’origine cet héritage familial
immobilier ou mobilier qu’on transmettait de père en fils.
Dés le début des années 1970, on avait retenu tout d’abord le terme de « patrimoine
historique », pour désigner cet ensemble de l’héritage artistique de l’humanité.[1]
Par la suite, F. Choay est partie définir le patrimoine comme étant :
« L’expression qui désigne un fond destiné à la jouissance d’une communauté élargie aux
dimensions planétaire et constitue par l’accumulation continue d’une diversité d’objets qui
rassemble leur commune appartenance au passé : œuvres et chefs d’œuvres des beaux arts et
des arts appliqués, travaux et produits de tous les savoirs faire des humains ».[2]
Prés de deux siècles se sont écoulés depuis l’émergence du nouvel intérêt au patrimoine
architectural. Il convient aujourd’hui, de faire le point sur les évolutions qu’ont connues les
diverses doctrines et les pratiques développées dans le domaine de la sauvegarde et mise en
valeur du patrimoine historique.
L’attention, autrefois accordée seulement aux monuments les plus prestigieux en tant
qu’œuvres d’art, s’est portée ensuite vers les ensembles historiques jusqu’à un passé récent
vers les paysages culturels en tant que biens de l’environnement.
1
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories »
Dr Youcef CHENNAOUI. Maître de conférences, classe A à l’ENSA d’Alger.
Dés lors, le patrimoine culturel se compose de différents types de propriétés qui se relient à
une variété d'arrangements, et inclut les oeuvres d'art importantes, des monuments et des
lieux, mais également de grands secteurs et paysages historiques. Par conséquent, les
concepts liés à leur définition, qualités et valeurs, et la politique appropriée du traitement, sont
toujours d’actualité et devraient être clairement définis. Les recommandations de l'UNESCO
et quelques autres organismes internationaux, peuvent être prises comme référence de base
pour une telle définition. L’Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la
culture (l'UNESCO) définit les paysages culturels comme : oeuvres combinées de la nature et
de l'homme. Ils demeurent l'illustration de l'évolution du temps et de la société. Sous
l'influence des contraintes physiques et/ou des forces sociales, économiques et culturelles
successives- indogenes ou exogènes- ces derniers requièrent des valeurs d’héritages
spécifiques[2] .
[1] Op cit : Office international des musées (1933) : « La Charte d’Athènes sur la
conservation des monuments d’art et d’histoire. Athènes 1931 ». Introduction, P1.
En effet, cette charte recommande le respect de l’œuvre historique, l’entretien permanent et
régulier de l’édifice, après avoir donné une première forme aux deux principes
fondamentaux de la conservation des monuments historiques.
Il s’agissait en l’occurrence, de :
L’authenticité : Qui signifie que la restauration doit se subordonner à la vérité archéologique
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Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories »
Dr Youcef CHENNAOUI. Maître de conférences, classe A à l’ENSA d’Alger.
[1] Centre national de documentation pédagogique (1980) : «La restauration des édifices ».
Edition Diathéque ART, Rouen.
L’année 1962, constitue un prélude dans le domaine de la sauvegarde des beautés et
caractères des paysages et des sites historiques. Nous citons dans ce cadre la série de
recommandations publiée par l’UNESCO le 11-12- 1962, relatives à la sauvegarde des
beautés des paysages ; en attirant l’attention sur la valeur esthétique, ludique et écologique des
paysages, constituant ainsi une des conditions positives de la qualité de vie des populations.
Notons, qu’en cette même année, André Malraux promulgue une loi relative à la conservation
et l’aménagement des zones urbaines historiques, incluant le site classé et ses abords, appelé :
Secteurs sauvegardés.[1]
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Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories »
Dr Youcef CHENNAOUI. Maître de conférences, classe A à l’ENSA d’Alger.
[1] Op. cit ICOMOS (1965) : « Charte internationale sur la conservation et la restauration des
monuments et des sites ». Venise, 1964, Actes du congrès international des architectes et des
techniciens des monuments historiques.
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Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories »
Dr Youcef CHENNAOUI. Maître de conférences, classe A à l’ENSA d’Alger.
[1] La charte de Toremolinos a été adoptée en Espagne, le 02 Mai 1983. Celle –ci constitue un
texte fondamental qui avait défini pour la première fois sur le plan européen les grands
objectifs qui devraient orienter les politiques d’aménagement du territoire, l’amélioration du
cadre de vie des citoyens , ainsi que l’organisation des activités anthropiques sur le socle de
l’espace physique.
En l’an 2000, une autre convention fut adoptée à Florence [1], en Italie sur la
protection des paysages, insistant en outre sur les mesures d’intégration de l’aménagement
paysager dans l’aménagement du territoire, que dans les politiques sectorielles ; sur la
nécessité des activités de vulgarisation et de dissémination du public aux paysages culturels,
en vue d’une meilleure socialisation[2].
[1] Cette convention fut adoptée le 20 octobre 2000, à Florence, dite « La convention
européenne des paysages ».
[2] Op.cit ibid. supra : « Le paysage résulte de la conjonction de multiples facteurs, tant
naturels que culturels, qui ont évolué dans l’espace et dans le temps, qui se poursuivent par
des processus dynamiques perçus par l’homme de façon variée.
En Europe, il forme un tout, incluant tout autant l’image des activités socio-économiques ou
culturelles que celles des espaces vitaux et de leurs composantes naturelles telles que la faune
et la flore ».
La notion du patrimoine prend de l’ampleur. Est considéré patrimoine; les paysages, les
centres urbains et historiques et tout élément spirituel ou matériel ayant un caractère
historique. Ces années de 1980, en ce qui concerne les vestiges archéologiques, sont
marquées par un développement très important des « fouilles préventives » et par une
sensibilisation accrue aux problèmes de leur conservation.
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Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories »
Dr Youcef CHENNAOUI. Maître de conférences, classe A à l’ENSA d’Alger.
o Patrimoine et éducation.
[1] Les participants de cette conférence sont des personnalités politiques issues des
communautés et des régions, des spécialistes et des responsables du patrimoine et de
l’éducation, des administrateurs et gestionnaires culturels, des éducateurs, des opérateurs
touristiques, des responsables régionaux de l’Europe, de la région méditerranéenne, d’Afrique
et d’Amérique, intéressés dans le potentiel économique, éducatif et culturel des nouvelles
technologies de présentation et d’interprétation du patrimoine local comme moyen de
développement permanent et de valorisation de l’identité communautaire. L’avant projet de
cette charte est en Annexe 03.
En cette même année 2002, une charte euro- méditerranéenne sur la valorisation intégrée du
patrimoine culturel, a été adoptée à Rome en Italie lors de la conférence finale[1] du projet
PISA (Programmation Intégrée dans les Sites Archéologiques).
Elle stipule dans son article 04 qu’ : « Afin de soutenir le développement local fondé sur la
valorisation du patrimoine culturel, il est nécessaire de définir une nouvelle stratégie de
gestion du patrimoine culturel en utilisant l’outil de la programmation intégrée ».[2]
La recherche action PISA a démarré de la thèse selon laquelle les opportunités de
développement local durable basé sur la valorisation intégrée du patrimoine archéologique en
adéquation avec la réalité socioculturelle, économique et politique du territoire de référence,
existent mais ne sont pas exploitées.
[1] Conférence finale du projet Euromed Héritage, MEDA1 : PISA (Programmation intégrée
dans les sites archéologiques), Rome du 28 Février au 1er Mars 2002.
[2] Op.cit Art 04, P1, Charte Euro- méditerranéenne sur la valorisation intégrée du patrimoine
culturel. Version préliminaire.
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Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories »
Dr Youcef CHENNAOUI. Maître de conférences, classe A à l’ENSA d’Alger.
CONCLUSION.
[1] Le « monument historique » lui même n’est pas clairement et rigoureusement défini par la
charte, et y est présenté comme une « œuvre artistique et historique ». C’est un « chef
d’œuvre dans lequel la civilisation s’est exprimée au plus haut degré ».
[2] Article 1 : La notion de monument historique comprend la création architecturale isolée
aussi bien que le site urbain ou rural qui porte témoignage d'une civilisation particulière, d'une
évolution significative ou d'un événement historique. Elle s'étend non seulement aux grandes
créations mais aussi aux oeuvres modestes qui ont acquis avec le temps une signification
culturelle.
7
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
Cours de Base :
«Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Chargé de Programme :
Dr Youcef CHENNAOUI
Maître de conférences
Classe A, Chercheur à
l’EPAU d’Alger.
• Séance N° 3
L’usage de la « Culture » dans le processus de patrimonialisation d’un
héritage national.
1. La Nature de la Culture :
Amos Rapoport soutient l’idée que la « Culture », n’est pas un « Objet », mais une idée, un
concept, une construction : « Un label pour beaucoup d’objets auxquels les gens y pensent, y
croient ». 1
Partant chercher, une origine au terme « Culture », Rapoport signale qu’en effet son
apparition dans les dictionnaires anglais est assez récente et ne date que du début des années
1920, mais qui intégrait le langage pour désigner certains produits du terroir, certaines
personnes cultivés aux goûts raffinés,…
Or, il nous livre celle de l’anthropologue E.B. Taylor (1871) qui stipule que la culture est :
« l’ensemble du complexe, incluant la connaissance, la croyance, l’art, le droit, la morale, les
coutumes, aussi d’autres capacités et habitudes acquises par l’individu en tant que membre
de la société ».
Le terme demeurait encombré par l’histoire polysémique des diverses définitions que le mot
culture évoque dès qu’il apparaît soit dans le discours quotidien, soit dans les écrits savants.
Kroeber et Kluckhohn, dès 1952, ont dressé l’inventaire des multiples manières d’utiliser le
terme « culture » depuis le XVIIIe siècle au cours duquel il a commencé à être appliqué aux
sociétés humaines.
Deux types de définitions2 peuvent être retenus de leur recensement : une définition restreinte,
restrictive même, qui utilise le terme de culture pour la description de l’organisation
symbolique d’un groupe, de la transmission de cette organisation et de l’ensemble des valeurs
étayant la représentation que le groupe se fait de lui-même, de ses rapports avec les autres
groupes et de ses rapports avec l’univers naturel.
1
Op. Cit Ibid note 1 supra, P 131.
2
C.F © 2003, Encyclopædia Universalis France S.A. Tous droits de propriété industrielle et
intellectuelle réservés.
Dr Youcef CHENNAOUI. 1
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
Une définition plus large, reprenant en partie celle de Taylor – mais qui n’est pas
contradictoire avec la première – utilise le terme de culture aussi bien pour décrire les
coutumes, les croyances, la langue, les idées, les goûts esthétiques et la connaissance
technique que l’organisation de l’environnement total de l’homme, c’est-à-dire la culture
matérielle, les outils, l’habitat et plus généralement tout l’ensemble technologique
transmissible régulant les rapports et les comportements d’un groupe social avec
l’environnement.
« Cette constellation sinon cette saturation de sens du terme culture peut s’expliquer à partir
de l’analyse de ce qu’il y a de commun dans un prélèvement sur la somme des utilisations de
ce mot »3.
De cette question : « Qu’est ce la culture ? », Rapoport. A (2003)4 est parti reconnaître trois
types de définitions :
- La première catégorie de définitions : décrit la culture comme étant le mode de vie
d’une société, intégrant leur idéaux, normes, règles, comportements habituels,…
- La seconde catégorie : la définie comme un système de conceptions des choses,
transmis symboliquement à travers les différentes générations, par le biais d’une
acculturation des immigrants, ou d’une socialisation des enfants. Cette transmission
s’effectue à travers le langage par exemple, mais aussi à travers l’environnement bâti
et ses appropriations.
- La troisième catégorie : définit la culture comme étant l’ensemble des significations
des diverses adaptations écologiques, l’usage des ressources, c'est-à-dire l’exploitation
des divers eco-systémes pour le bien être des habitants.
Les raisons de la culture sont de fournir une ossature qui donnerait une signification aux
objets –particuliers mis en relation entre eux au sein de cette ossature guide.
A cet effet, l’auteur attire l’attention sur le fait d’existence d’une multitude de définitions aux
terme « Culture », relevant du domaine de plusieurs disciplines. Or, les définitions données en
amont ne sont guère contradictoires, mais au contraire elles demeurent complémentaires.
Rapoport. A plaide dans tout son discours sur la non-universalité de la culture. Le début du
21e siècle s’affiche à consonance de globalisation dont son processus tend à neutraliser les
effets des frontières délimitant les territoires respectifs des différents pays du monde, pour
rendre possible, une plus libre et performante mobilité économique, financière et culturelle.
Les effets pervers d’un tel processus sur le développement culturel que génèrent l’accès aux
technologies des communications et à la « pensée universelle », seraient l’émergence de
phénomènes de contradictions socioculturelles et d’anonymat identitaire.
Devant les conflits armés, on s’efforce de détruire le patrimoine de l’ennemi qui constitue
« Une cible toute désignée » (Audrerie 2003). En effet, en détruisant ce symbole de l’identité
d’autrui, on essaye d’effacer sa mémoire, de nier son existence et c’est pour cela que, pour
faire revivre le souvenir d’un peuple, les pays sortant d’une guerre, surtout lorsqu’ils ont été
vaincus, procédant à la reconstruction de leur patrimoine, On agissant de cette manière, on
cristallise la mémoire, image de l’identité que l’on protège en préservant les lieux de cette
3
Ibidem note 3 supra.
4
Ibidem note 1 supra.
Dr Youcef CHENNAOUI. 2
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
Cette solidarité se traduit le plus souvent par une action collective pour la sauvegarde du
patrimoine, exemples: colloques, séminaires, études à améliorer l’identification et le savoir
faire pour la sauvegarde du patrimoine. Nous assistons donc à une prise de conscience qui se
manifeste par l’action des différentes institutions, associations culturelles, et universités les
sociétés savantes et la coopération entre elles.
Avant d’examiner si le patrimoine en tant que bien matériel peut être porteur de valeurs
morales abstraites, il nous faut donner quelques précisions sur la notion de « Valeur » pour
tenter de conclure si les valeurs morales sont universelles ou bien relatives à une société
déterminée.
• Exemples:
L’Egypte est à la fois pharaonique et arabe. Le patrimoine égyptien constitue dans sa totalité
la fiereté des égyptiens. Le patrimoine prend donc une dimension les dimensions qui divisent,
une dimension qui regroupe les peuples autour de valeurs unificatrices.
D’autre part, le rôle du coté artistique du patrimoine est lui aussi unificateur à travers les ages
et les régions. Le génie de l’homme et le savoir faire.
Nous pouvons revenir sur trois problèmes récurrents que nous avons consulté par le biais de
cet essai de définition des concepts inhérents au jugement de valeur.
1. Peut-on considérer les valeurs comme reposant sur des propriétés indépendantes de
nous ?
2. Les valeurs sont-elles relatives à des cultures incomparables entre elles ?
3. Existe-t-il une rationalité des valeurs, une rationalité axiologique qui soit parente mais
différente de la rationalité instrumentale – celle qui se borne à ajuster les moyens aux
fins ?
Trois réponses positives ne seraient pas incompatibles entre elles, qui poseraient toujours
certaines zones d’ombres.
La réponse à la première question, examinée dans ce texte, sera rapide.
Peut-on considérer les valeurs comme reposant sur des propriétés indépendantes de nous ?
Puisque nous nous révélons à nous-mêmes nos valeurs en confrontant nos attentes aux
révisions que peut leur infliger la réalité, et en retenant comme vraies valeurs celles qui
peuvent être maintenues une fois ces révisions accomplies, il existe probablement des valeurs
qui survivront à toute révision, et qui ont donc un statut comparable aux vérités
mathématiques.
Si l’on est réaliste concernant ces vérités, on le sera concernant les valeurs, et si on est
intuitionniste, c’est-à-dire si on ne croit pas à une vérité indépendante de la définition de la
manière dont les sujets peuvent y avoir accès. Il n’y aura alors de vérité que si elle est
accessible, ici par révision.
Or, dans ce cas de figure, les valeurs auraient un statut un peu paradoxal ; ce seraient des
données accessibles qui justement ne le seraient pas forcément : rien ne dit que les processus
effectifs de révision que nous engageons nous permettront d’accéder à ces valeurs résistantes.
Il se pourrait que nos attentes effectives de valeurs soient tellement mal construites qu’aucune
d’entre elles ne puisse résister indéfiniment.
Dr Youcef CHENNAOUI. 3
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
La seconde question : Les valeurs sont-elles relatives à des cultures incomparables entre
elles ?
Cette interrogation nous renvoie au débat sur le relativisme, et aussi au retour de la notion de
vertu dans le débat moral.
Si les valeurs sont des attentes résistantes aux révisions cognitives, alors il doit être possible
de passer des valeurs d’une culture à celles d’une autre, mais par révision. Cela suppose qu’on
change la structure des attentes.
Or rien ne dit qu’il soit aisé ensuite de parcourir le chemin inverse. Une comparabilité des
valeurs au sens fort exigerait que l’on puisse aller d’une culture à l’autre et réciproquement
sans difficulté. Une comparabilité au sens faible exige seulement la possibilité du changement
dans un sens, mais pas celle du retour. Cependant, s’il y a des valeurs qui résistent aux
révisions, alors on pourrait les retrouver d’une culture à l’autre. Ainsi la non comparabilité
des cultures n’est nullement une nécessité, même si elle est fréquente.
Si on ne peut avoir d’expérience de valeur sans avoir aussi la capacité de ressentir certaines
émotions, la sensibilité aux valeurs est donc liée à la manière dont nos dispositions affectives
évoluent dans le temps, en liaison avec nos révisions cognitives.
Comme l’analyse des valeurs et des émotions tourne autour des concepts d’habituation et
d’attente, elle renvoie tôt ou tard à la notion de caractère, qui désigne un ensemble
relativement cohérent de dispositions et d’habitudes de réaction et d’action. On retrouve alors
la notion de vertu aristotélicienne, qui désigne un ensemble de dispositions appris par
habituation et propre à un domaine de pratiques.
Ce type de sensibilité est contextuel, puisqu’il dépend de domaines de pratiques, de modes de
vie, de règles qu’on ne peut pas expliciter de manière indépendante des pratiques.
5
C.f Boudon. R (1973) : « L’inégalité des chances. La mobilité sociale dans les sociétés industrielles ». In :
Polycopié : Faculté centrale d’Alger. S.d.
Dr Youcef CHENNAOUI. 4
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
G. Olsson (2000)7 esquisse à travers ses graphiques présentés ci- dessous un premier schéma
qui contient deux implications, toutes les deux relèvent du discours sur le paysage culturel. Ils
regardent le rapport entre signifiant et signe et le rapport entre signe et signifié.
Dés lors, il définit :
- Signe et réalité territoriale : Le rapport entre signe et réalité (signifié), qui investit le
rapport entre niveau ontologique et niveau de la sémiotique du territoire, est un
élément nodal de la discussion. Il démontre à travers la première figure comment est
ce que le rapport entre le signe et l’objet (ici, la réalité territoriale) consiste en une
séquence d’une métaphore disposée le long d’une trajectoire temporelle.
- Signe et signifié : dans ce présent cas, le rapport entre les deux éléments , celui de la
représentation (signe) et celui de l’idéologie ou de la méta narration (signifié), est la
clé de la discussion. Selon Olsson, le signifié peut être considéré comme une séquence
de métonymiques8 de signifiés attribués aux signes et disposés le long d’une
trajectoire temporelle.
Par voie de conséquence, le triangle de discussion sur le paysage culturel induit à considérer
contextuellement deux séquences, une métaphore et une métonymique.
6
C.F © 2003, Encyclopædia Universalis France S.A. Tous droits de propriété industrielle et intellectuelle
réservés.
7
C.f Olsson.G (2000) : « Mappa Mundi Universalis. A commentary on the power of cartographic reason ». In:
Uppsala International contemporary Art Biennale”. Uppsala, Suede.
8
La métonymie, selon le Larousse 1998 : « est la figure de rhétorique par laquelle on désigne la cause pour
l’effet, l’effet pour la cause, le contenant pour le contenu, la partie pour le tout, etc. »
Dr Youcef CHENNAOUI. 5
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
Signifié
Niveau épistémologique
Motivation idéologique de l’intervention.
Meta narration de l’espace.
PAYSAGE
Signe. Signifiant.
Représentation de la réalité. Réalité territoriale.
Référentiel de la représentation.
Sources : Mazzino.F et Ghersi .A (2003) : « Per un atlante dei paesaggi italiani ». Edit
Alinea editore, Florence. P 98.
Partant, plus loin dans sa réflexion, Olsson. G nous livre une interprétation du paysage
culturel, selon une connaissance qui allie science, art et religion. Il stipule que :
- La connaissance scientifique : En assimilant la réalité à A, la représentation de la
réalité à B et la connaissance scientifique reposant sur la relation A = B.
Dr Youcef CHENNAOUI. 6
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
Art :
Construction de la connaissance : A
Signe : Identifié en soi – Ombre de la réalité.
Instruments de représentation : Symboles.
Représentation
Religion Science
Construction de la connaissance : A = A Construction de la connaissance : A = B
Signe : identifié dans le signifiant – Signe : Métaphore du signifiant –
tautologie de la réalité. description ordinaire de la réalité.
Instruments de représentation : Icône. Instruments de représentation : Indice.
Sources : Mazzino.F et Ghersi .A (2003) : « Per un atlante dei paesaggi italiani ». Edit
Alinea editore, Florence. P 124.
Selon Olsson, l’instrument de la représentation ici est l’indice, repris comme un ordre ou une
norme qui nous informe comme une clé d’interprétation rationnelle du paysage.
Du moment qu’à travers la connaissance scientifique, le signe devient une histoire
métaphorique d’une réalité, ce type de connaissance s’exhibe toujours en représentations
diverses (en mythes par exemple), ce qui impliquerait des transformations ontologiques
continuelles au paysage.
De l’autre coté du triangle, Olsson définit le rapport entre la religion et l’art par une ligne de
communication ici, constituée par un réseau de métaphore que l’art s’approprie dans ses
divers modes d’expressions graphiques. Le signe devient par convention ici une icône dans la
religion, ou symboles dans les arts picturaux.
- La connaissance de l’Art : C’est une connaissance qui n’est guerre rationnelle mais
plutôt intuitive, dont l’expression n’a pas toujours de référentiel à l’instar de l’icône
pour la religion. Cette connaissance se manifeste à travers des symboles, à savoir des
signes ayant la fonction de nous conduire vers un signifié prédéterminé, mais plutôt
vers un réseau de signifiants indéterminés. Ce qui leur octroient dans l’art le caractère
de signes ambiguës, car ils restent l’apanage d’un public averti.
Dr Youcef CHENNAOUI. 7
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours N° 3.
« Patrimoine culturel et Naturel : Histoire et théories ».
Notons ici que le rapport science/ art est repris par une discipline qu’est l’histoire de
l’art qui tente de codifier les symboles utilisés par l’art en indice de connaissance
rationnels.
Or, J.C Wieber (1987)9, pensait que les images perçues des paysages sont résultat : « des
archétypes médiatisés ou mythiques ».
Par ailleurs, on avait déjà su qu’avec le développement du tourisme culturel dés le début des
années 1970, que certains paysages « grand public »sont médiatisés et vulgarisés aux moyens
des supports de dissémination très diversifiés, en vue du seul profit économique. C’est ce
qu’affirme M. Ronai (1976)10, dés cette époque, en déclarant que certains paysages très
connus et convoités ne sont que l’œuvre orchestrés: « des manipulations économiques ou
politiques volontaristes : consommations, politiques de promotions, spots publicitaires,... »
• Bibliographie indicative :
9
C.f Wieber. J.C : “Le paysage. Questions pour un bilan”. Bull. A.G.F, 2. Pp 146-155.
10
C.f Ronai. M (1976) : « Paysages (1) ». In : Hérodote, N°1, Paris. Pp 125- 159.
Dr Youcef CHENNAOUI. 8
Maître de conférences- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours PCN : Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories.
Cours N°4. Le monument dans une approche multiculturelle. Pour quels critères d’évaluation ?
Cours de Base :
«Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Chargé de Programme :
Dr Youcef CHENNAOUI
Maître de conférences classe A,
Chercheur à l’EPAU d’Alger.
• Séance N° 4.
Le monument historique » dans une approche multiculturelle.
Au cours d'une histoire plusieurs fois millénaire, l’Algérie a été à la fois l'horizon commun
d'innombrables cultures indigènes, le lieu de rencontre entre les civilisations de l'Orient et de
l'Occident, de l'Europe et de l'Afrique, province de grands empires, l'espace conflictuel où
s'affrontaient des ambitions politiques ou des certitudes religieuses, le but inaccessible des
expansionnismes continentaux.
Dr Youcef CHENNAOUI. 1
Maître de conférences, classe A- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours PCN : Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories.
Cours N°4. Le monument dans une approche multiculturelle. Pour quels critères d’évaluation ?
Pour figurer sur la Liste du patrimoine mondial, les sites doivent avoir une valeur universelle
exceptionnelle et satisfaire à au moins un des dix critères de sélection. Ces critères sont
expliqués dans les Orientations devant guider la mise en œuvre de la Convention du
patrimoine mondial qui est, avec le texte de la Convention, le principal outil de travail pour
tout ce qui concerne le patrimoine mondial. Les critères sont régulièrement révisés par le
Comité pour rester en phase avec l’évolution du concept même de patrimoine mondial.
Jusqu’à la fin de 2004, les sites du patrimoine mondial étaient sélectionnés sur la base de six
critères culturels et quatre critères naturels. Avec l’adoption de la version révisée des
Orientations, il n’existe plus qu’un ensemble unique de dix critères.
La protection, la gestion, l'authenticité et l'intégrité des biens sont également des
considérations importantes.
Depuis 1992, les interactions majeures entre les hommes et le milieu naturel sont reconnues
comme constituant des paysages culturels.
Dr Youcef CHENNAOUI. 2
Maître de conférences, classe A- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours PCN : Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories.
Cours N°4. Le monument dans une approche multiculturelle. Pour quels critères d’évaluation ?
Conclusion Générale
Ainsi, nous pouvons regrouper ces critères en quatre catégories essentielles:
1) Soit illustrer une des grandes civilisations humaines
2) Soit avoir exercé, pendant une période déterminée, une grande influence sur le
développement de l'architecture et des arts dans une région précise du monde.
3) Soit avoir joué un rôle majeur dans l'histoire des relations trans-territoriales
(entre l'Occident et l'Orient, entre l'Europe et l'Afrique, etc.) ;
4) Soit témoigner d'une culture autochtone, mais propre à un espace territorial.
Nous devons tout d’abord dresser un état des lieux général faisant allusion à ces aspects :
Le manque d’adaptation de la discipline de l’identification du patrimoine culturel face à
l’opposition des philosophies universelles promulguées à travers les différentes conventions et
chartes internationales. (Contenus génériques des critères d’évaluations usités en général).
L’absence de nouvelles connaissances et de nouvelles méthodes interdisciplinaires en réponse
aux nouvelles valeurs pouvant être spécifiques.
Proposer une gamme de valeurs plus variée en expliquant leurs contenus respectifs. A titre
indicatif, nous proposons ceux-ci :
Les quatre valeurs d’appréciation usuelles du patrimoine historique sont :
1. La valeur historique : Le respect des apports successifs du temps, nous conduit à conserver
les marques de la diversité historique en tant que témoignages de la vie du monument ou d’un
site qu'il convient de préserver.
2. La valeur architecturale : Le caractère d’un monument historique, englobant plusieurs
références historiques, culturelles et architecturales, devient un répertoire à récits pluriels. Il
demeure par conséquent, un des témoignages historiques et culturels que la société devra se
réapproprier, et une référence pour l’illustration artistique d’un savoir-faire d’une
communauté.
3. La valeur esthétique : L’attention, autrefois concentrée sur les édifices les plus prestigieux,
se porte de plus en plus aujourd'hui vers des aspects nouveaux de notre patrimoine : bâtiments
ruraux ou industriels. On protège aujourd'hui même les œuvres contemporaines d’illustres
architectes. La description du style architectural du bien historique tend vers une
reconnaissance des codes architecturaux de l’objet inhérents à une époque esthétique,
émanant d’une société donnée à une période historique donnée. Cette valeur d’appréciation
demeure un moyen de reconnaissance des caractères formels, matériels et ornementaux,
caractéristiques d’un âge ou d’une période de développement historique.
4. La valeur d’usage : La pérennité des fonctions d’origine dans certains monuments ou le
maintien des modes sociaux dans certains sites historique témoigne du maintien du caractère
du lieu et de sa vocation malgré les injures de l’action de la modernité sur eux.
Le réinvestissement des valeurs des patrimoines culturels se justifie aujourd’hui sur plusieurs
niveaux :
Dr Youcef CHENNAOUI. 3
Maître de conférences, classe A- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
Cours PCN : Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories.
Cours N°4. Le monument dans une approche multiculturelle. Pour quels critères d’évaluation ?
Dr Youcef CHENNAOUI. 4
Maître de conférences, classe A- Chercheur à l’EPAU d’Alger.
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Cours PG : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
Cours de Base :
«Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Chargé de Programme :
Dr Youcef CHENNAOUI
Maître de conférences classe A,
Chercheur à l’ENSA (ex
EPAU) d’Alger.
• Séance N° 6
La problématique de patrimonialisation :
définitions, principes et méthodologies.
Le paradigme philosophique de base :
Patrimoine matériel/ Patrimoine immatériel.
Le patrimoine et la patrimonialisation
En général, le terme patrimoine désigne ''les biens matériels qu'un individu tient, par
Héritage, de ses ascendants et qu'il transmet à ses descendants. Par extension, cet
Héritage peut être commun aux membres d'un groupe social, par exemple une nation ''1
Il existe différentes définitions du patrimoine, tant le concept de patrimoine est large. Nous
retenons ici celle énoncée par J. Gadrey :''Le patrimoine d'une collectivité est un ensemble
''d'objets et de produits ''auxquels cette collectivité, ou une proportion suffisante de ses
membres, attache des valeurs, parce qu'il s'agit de réalités qui témoignent de l'identité de
cette collectivité en établissant un lien temporel entre le passé de cette collectivité et son
présent (témoignage du passé), et/ou entre son présent et ce qu'elle imagine de son avenir
(témoignage projeté) '' 2
Les sites ou monuments possédant une valeur culturelle ou naturelle, d'intérêt local ou
national, sont répertoriés, évalués et ensuite classés. On appelle ce processus la
patrimonialisation. A partir de cette reconnaissance, ces ensembles deviennent propriétés du
pays (et de l'humanité dans le cas des patrimoines mondiaux), suscitant la fierté nationale et
demandent une protection à laquelle doivent participer tout le pays entier.
1
NAPOLI Jocelyne, 2002. Tourisme et valorisation du patrimoine. Tourisme No 11 – Patrimoine III. Toulouse,
ERITH, p. 42.
2
GADREY J., 1994, “Patrimoine et qualité de vie éléments pour une approche socio-économique”
in BESSIERE J., 2000, La construction sociale du patrimoine gastronomique l’émergence de
terroirs de valorisation, ERITH, Toulouse.
1
Cours PG : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
De nos jours, la notion de patrimoine est de plus en plus utilisée pour nommer les biens non
seulement matériels, mais aussi culturels, littéraires, musicaux, relevant de la mode, ainsi que
les savoir-faire. Il s’agit du patrimoine immatériel, plus difficile à reconnaître et à conserver.
Pour A. Bourdin (1984, p. 23), l'engouement pour le patrimoine découle 'une crise de la
Modernité 'Les idéologies du progrès nous ont menés, elles vacillent. Le monde se
désenchante, se sécularise (...) aucune valeur ne pose comme assurément »
L’accélération de l'histoire, pour reprendre P. Nora (1997, tome 1, p. 25), rend le passé
obsolète avant d’avoir pu le déchiffrer. Il fait alors le diagnostic d’une substitution de la
mémoire par l’Histoire :
"La mémoire est la vie, toujours portée par des groupes vivants et à ce titre elle est en
évolution permanente, ouverte à la dialectique du souvenir et de ’amnésie (...). L’histoire est
la reconstruction toujours problématique et incomplète de ce qui n’est plus".
3
Lamy Yvon, Introduction in L'alchimie du patrimoine : Discours et, politique, op. cité p1 6.
4
BOURDIN A., 1984 - Le patrimoine réinventé. PUF, coll. Espace et liberté, 239 p.
2
Cours PG : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
o Le passé n'est plus vécu (ou reconstruit comme guide d'action au présent) mais évalué.
o Le présent est lui-même mis en archive pour en garder l’exacte trace, avant qu'il ne
devienne déjà du passé.
o La mise en patrimoine doit, quant à elle, prémunir contre les incertitudes de 'avenir.
Il y a autant de patrimoine que d’enjeux.
Ainsi, le patrimoine n’existe pas a priori il devient un objet d’étude à partir du moment où l'on
s'intéresse aux discours de ceux qui le font exister.
Comme le note Alain Bourdin 6 , le patrimoine devient un marché, un jeu de ’offre et la
demande, où l’on assiste à une prolifération des patrimoines, et donc de processus de
patrimonialisation"
Selon Michel Rautenberg C'est ce processus de patrimonialisation, plutôt ’objet déjà
transformé en patrimoine » 7 qu'il faut analyser.
En général, les processus d'évaluation utilisés pour des fins de patrimonialisation, tendent le
plus souvent à déterminer d’une part, ce qui doit être considéré beau ou laid, valable ou sans
valeur ; d’autre part, ce qui est ou n’est pas une composante de notre héritage, ce qui devrait
être sauvegardé de ce qui pourrait être débarrassé.
Dés lors, les questions auxquelles nous tenterons de répondre à travers la définition des
concepts de base inhérents à cette notion de patrimonialisation seraient :
5
Chantal Somm : «Ethnologie du patrimoine : Pour une ethnologie du présent » in « L ‘ARA » n°43 p21,
1998.
6
BOURDIN Alain, Patrimoine et demande sociale in Le patrimoine, atout du développement, NEYRET Régis
(Dir), Lyon, PUL, 1992, 156 p.
7
In « Patrimoine et modernité » D.Poulot (éd), ouvrage collectif, L’Harmattan, Janvier 1998, 31 1 p.
3
Cours PG : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
o De quelles manières les valeurs et les normes instillées par un fond culturel,
peuvent-elles déterminer la perception et l’évaluation des patrimoines pour des
fins de patrimonialisation ?
8
C.f. AMOUGOU (E) (2004) : « La question patrimoniale : de la patrimonialisation à l’examen des situations
concrètes », Paris- Budapest-Torino, l’Harmattan.
C.f COLLECTIF, (2004) : « Le patrimoine culturel immatériel : les enjeux, les problématiques, les pratiques ».
Actes du colloque organisé par la Fondation du Forum d’Assilah et la Maison des cultures du monde, Paris,
Maison des cultures du monde et Arles, Actes Sud.
C.f. SOUAMI Mohamed Adel (2007) : « Ville et Patrimoine : Nouveaux regards ». In : « Regards croisés sur la
Médina » du 18 au 24 octobre à Tunis, organisées par le laboratoire du patrimoine de la faculté des lettres de la
manouba Tunis, en association avec l’université du Québec, l’université de Porto et de l’université d’Avignon.
C.f NORA (P), (1988), « Patrimoine et mémoire ». In : « Patrimoine et société contemporaine ». Cité des
Sciences et de l’Industrie de Paris-La Villette, Octobre 1987, Actes des Colloques de la Direction du Patrimoine,
Paris.
4
Dr Youcef CHENNAOUI
« Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Cours de Base :
«Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Chargé de Programme :
Dr Youcef CHENNAOUI
Maître de conférences classe A
Chercheur à l’ENSA d’Alger.
• Séance N° 7
- 1. Chronologie historique.
- Apparition et développement de la notion de Patrimoine Urbain Historique.
La notion de patrimoine urbain est apparue après l'ère industrielle qui nécessita la destruction
des quartiers anciens pour des raisons fonctionnelles. Durant cette période, quelques théoriciens et «
décideurs » prônaient cette destruction pour des raisons d'esthétique et d'hygiène. Cette attitude était
déplorée par des penseurs romantiques parce qu'elle entraînait pour eux, la disparition de tout le
charme présent dans ces quartiers anciens dont la destruction effacerait à jamais une partie de la
mémoire de la ville. Mais là il ne s'agissait pas d'une prise en compte de patrimoine urbain ou même
d'une émergence de cette notion, car les quartiers anciens n'étaient pas considérés par ses penseurs
comme des monuments historiques mais seulement comme des endroits « romantiques » ayant une
valeur affective et suscitant des émotions.
Quant à la notion de patrimoine urbain historique, Françoise Choay la fait remonter à l'époque
d'Haussmann. Elle lie à plusieurs facteurs la raison d'existence de quatre cents ans d'écarts entre
l'apparition des deux notions, celle du monument historique et celle du patrimoine urbain fortement
liée à la première.
D'abord, l'échelle de la ville, sa complexité et la mentalité qui assimilait la ville à un nom ou une
généalogie et non à des espaces. D'autre part, l'inexistence de documents fiables ou de cadastres rendait
l'espace absent dans les études faites avant le XIXeme siècle. Tout ceci a conduit à ce que l'espace urbain
de l'ère préindustrielle ne soit pris en considération que par un effet de « contraste » ; suite à la
transformation des villes occidentales en villes industrielles. Ce phénomène a d'abord été étudié
par les fondateurs de l'urbanisme. Ces premiers urbanistes, qu'ils soient «progressistes » ou
« culturalistes », considéraient les ensembles anciens comme un obstacle à l'aménagement de
l'espace et c'est pour cette raison qu'ils ont été les premiers intéressés par le problème du
patrimoine urbain : « L'histoire des doctrines de l'urbanisme et de leurs applications concrètes
ne se confond nullement avec l'invention du patrimoine urbain historique et de sa protection.
Cependant, les deux aventures sont solidaires. » CHOAY, (F), / 'urbanisme, utopies et réalités ; CHOAY, (F),
l'allégorie du patrimoine
Dr Youcef CHENNAOUI
« Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
En effet, beaucoup de villes étudiées par ces urbanistes avaient pris naissance dans une cité qui, à
travers son histoire, a perdu son sens originel et ne répond plus aux exigences d'une ville
contemporaine avec ses réalités sociales et économiques.
Le résultat de cette loi se résume par l'arrêt de la démolition des centres anciens et le début de
la prise en compte de l'identité culturelle locale. En outre, Durant une première période de
l'application de cette loi, la restauration stricte qui permit de sauver plusieurs quartiers, causa le
transfert des habitants vers des logements neufs créant une fois de plus, des problèmes sociaux.
Pour les projets dans le secteur sauvegardé il est obligatoire de demander une autorisation
spéciale délivrée par l'architecte des Bâtiments de France. Ce dernier a le choix entre donner un avis
conforme, ou un sursis à statuer dans l'attente de la publication du PSMV. L'objectif de cette
obligation est d'assurer la protection des immeubles durant la période d'élaboration du PSMV.
Le projet final est soumis au conseil municipal pour qu'il donne son accord. Le PSMV est
rendu public par un arrêté du préfet. Les observations du public sont communiquées à la
commission qui propose ses modifications. Le conseil municipal est consulté sur l'ensemble de
l'affaire. Le dossier est alors transmis devant la commission nationale des secteurs sauvegardés.
L'Etat approuve par décret en conseil d'Etat. Enfin, le décret est publié dans le journal officiel et
dans deux journaux locaux.
Le PSMV détermine les principes d'organisation urbaine et les règles qui assurent la protection du
patrimoine. Il comporte des dispositions spécifiques pour imposer des règles aux immeubles et aux
espaces. Il contient aussi des documents graphiques indiquant les immeubles à conserver, les
immeubles pouvant être démolis ou modifiés pour des raisons urbanistiques, les espaces soumis à
une protection particulière et les sous-secteurs dans lesquels ne sont admises que des opérations
globales.
Le rapport de présentation expose aussi bien les caractéristiques architecturales,
urbanistiques, économiques et démographiques du secteur, que les objectifs qui ont conduit à la
protection.
Après la loi Malraux, l'intérêt pour le patrimoine s'est élargit. L'espace patrimonial s'organise
comme un lieu pédagogique et la conservation des quartiers historiques relève aussi de la qualité de
vie. Comme le monument, la ville ancienne devient une référence, sa présence nous situe mieux
dans l'espace contemporain.
Mais au delà du témoignage historique perpétré par le patrimoine bâti s'ajoutent les effets de
l'environnement. On prendra désormais plus en compte les abords des monuments tant en restaurant
les édifices qui entourent ce monument qu'en préservant les espaces naturels voisins. Cette unité
entre les espaces naturels et bâtis accentue la valeur pittoresque du lieu et marque les nouvelles
politiques patrimoniales qui tendent à unifier dans les textes des directives et des lois, les notions de
patrimoines architectural, urbain et paysager.
«Créées par la loi du 7 janvier 1983, les ZPPAUP ont vu leur intitulé complété par «paysager» par
la loi du 8 janvier 1993. Cette adjonction confirme et renforce la vocation de cette procédure à
prendre en compte l'ensemble des éléments patrimoniaux dans leur diversité et leur pluralité,
pratique qui prévalait dans le traitement des abords de monuments historiques qu'elle devait
améliorer. Elle conforte également la capacité de cet instrument à intervenir sur des espaces à
protéger et à mettre en valeur indépendamment de l'existence d'un monument historique. »
L'un des effets les plus importants des ZPPAUP se traduit par l'implication efficace des
collectivités territoriales dans le processus de la protection et d'aménagement. La décision de mise
en œuvre d'une ZPPAUP est en effet prise par le conseil municipal d'une ou de plusieurs communes
concernées. Mais si le projet peut être intercommunal, l'application montre une grande difficulté de
mener à terme une telle ambition. Et malgré la décentralisation, l'Architecte des Bâtiments de
France assiste les maires concernés dans la phase d'étude.
collectivité, qu'il s'agisse tant de monuments ou d'édifices présentant un intérêt patrimonial, que de
quartiers ou d'espaces publics et d'espaces paysagers liés à un ensemble bâti. Le périmètre de la
ZPPAUP déterminé au cours de l'étude est adapté aux caractéristiques du patrimoine et du paysage
surtout aux abords des monuments. Ce périmètre peut donc être formé de plusieurs parties distinctes
sur l'ensemble du territoire communal
La ZPPAUP suspend les effets des sites inscrits et de la servitude de protection des abords des
monuments historiques quand ces sites et ces abords sont situés dans son périmètre. A l'intérieur de
ce périmètre, aucune modification de l'aspect des immeubles n'est permise sans l'autorisation de
l'Architecte de Bâtiments de France qui vérifie la conformité du projet avec les dispositions de la
ZPPAUP.
A l'instar des effets des PSMV, ceux des ZPPAUP visent à développer l'image de marque du site et
à exprimer son identité synchronisant ainsi l'animation culturelle du lieu avec son attraction
économique. Les sites ainsi protégés du danger que présente leurs propriétaires courent un autre
risque, celui de la surexploitation touristique.
Ce risque affecte tant les zones patrimoniales qu'archéologiques qui nécessitent un entretien spécial
et permanent. Il est à noter qu'au niveau juridique, la France s’est doté de lois protégeant les sites
archéologiques et classant les sites les plus importants comme monuments historiques. D'autre part,
la loi impose des obligations légales aux aménageurs comme celles de la déclaration des
découvertes susceptibles de présenter un intérêt archéologique, le contrôle de l'Etat sur les fouilles
ou les sondages à but archéologique et la prise en compte de la protection du patrimoine
archéologique dans les procédures d'urbanisme.
Le façadisme s’est développé de façon inquiétante et massive dans certaines villes depuis les
années 1970. Il peut se définir ainsi : une intervention sur le bâti ancien qui ne conserve de
celui-ci que les façades au mépris de l’espace intérieur, démolir intégralement pour faire place
à une nouvelle construction neuve répondant aux impératifs du programme architectural
contemporain.
Le travail sur la façade était une opération de rajeunissement pour tenter de conformer
l’aspect extérieur d’un bâtiment à la sensibilité d’une époque. Le phénomène auquel on
assiste aujourd’hui est presque inverse : le façadisme apparaît comme une volonté de fixer le
passé au moyen du maintien de l’apparence extérieure du bâtiment tout en réalisant en ce qui
concerne les dispositions intérieures un changement complet, une adaptation au goût du jour
des usages et de leur décor.
Il y a plusieurs types de Façadisme à distinguer dans l’histoire :
1. Aux 17eme et 18eme siècles il reflétait une volonté d’embellissement des villes ; cet
effort de composition et de hiérarchie se prolongeait à l’intérieur dans le second œuvre
et le décor. L’Hausmannisation du 19eme siècle est resté fidèle à cette logique. La
façade est alors un enjeu en soi.
2. Les opérations de reconstruction après la guerre constituaient une « relecture de la
ville » afin d’en conserver les traces, les ruines à des fins démonstratives et de
construction identitaire (par exemple la conservation des vestiges des immeubles
détruits à Berlin pour montrer ce que les guerres détruisent).
3. Un Façadisme non urbain a aussi existé qui a été peu observé : celui de la résidence
secondaire dans l’habitat rural. Il s’est développé en France à partir des années 1960,
Dr Youcef CHENNAOUI
« Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Le Façadisme fut identifié dans son acception spéculative comme échec dans la manière de
gérer la ville.
Il est par ailleurs important de différencier l’intervention sur le patrimoine monument
exceptionnel, de celle qui touche le tissu urbain ordinaire car les finalités sont différentes : le
Façadisme appliqué au patrimoine monumental a une finalité avant tout symbolique, de
restitution d’une histoire.
Les façades des édifices historiques expriment et dissimulent en eux même tous les
changements intervenus dans leur existence, et les événements en rapport avec eux. Elles sont
aussi complexes, elles traduisent différentes phases dans la vie du bâtiment, des changements
d’usage, des modifications dans le goût et les styles, au cours des âges. Ainsi elles nous
permettent de lire les marques de toutes les identités.
Le Façadisme est une opération qui consiste à vider les structures intérieures d’un immeuble
pour ne garder qu’une ou plusieurs façades extérieures. Ces interventions ne sont pas
conformes à la déontologie de la conservation. Il est aujourd’hui largement admis que la
valeur culturelle d’un bâtiment est tributaire du maintien de son intégrité physique et de la
relation organique entre intérieur et extérieur. Il constitue une pratique peu satisfaisante aussi
du point de vue de la création architecturale contemporaine. Il ne permet pas de conférer une
identité visuelle aux structures mises en place. Il provoque un décalage entre l’organisation
distributive et la structure constructive d’une part et l’expression en façade d’autre part. À
relever enfin le coût élevé et les difficultés de l’évidage qui impliquent des suspensions de la
façade ou de sa dépose et la reconstitution pierre par pierre.
Réduits à une simple enveloppe, les immeubles conservent toutefois un rôle évocateur. Là où
le volume d’origine est maintenu, ils préservent la morphologie et l’image urbaine, importante
pour le caractère du lieu et l’identification des habitants à leur environnement.
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
Cours de Base :
«Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Chargé de Programme :
Dr Youcef CHENNAOUI
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d’Alger.
• Séance N° 9
La valorisation du patrimoine culturel et le développement local.
(Recueil de textes. Version provisoire).
• Contenu du Cours :
1. Le patrimoine, élément moteur de développement durable.
2. La globalité de la démarche d’intégration.
3. La situation française et le cas de Bibracte. (Étude de cas).
De multiples actions peuvent être menées dans le cadre d’une politique de développement
local : l’agriculture, le tourisme, les équipements publics, les communications… sont autant
de facteurs de développement. Le souci de contrôler l’utilisation des ressources du sol et de
l’environnement a d’abord conduit à inscrire la protection du patrimoine naturel comme une
priorité des initiatives de développement durable.
Ainsi, en France, la création des Parcs naturels régionaux, dès la fin des années 1960, procède
de cette préoccupation. La prise en compte du patrimoine culturel relève, il y a quelques
années, un renversement de perspective : non seulement les projets de développement durable
prennent mieux en compte le patrimoine, mais on commence à élaborer des projets de
valorisation du patrimoine qui intègrent d’autres facteurs qui participent au développement
durable.
Jusqu’à ces toutes dernières années, la définition du patrimoine culturel était restrictive :
• Sites, édifices et objets prestigieux,
• Patrimoine vernaculaire disséminé dans les campagnes considéré plutôt comme une partie
intégrante d’un paysage.
Aujourd’hui, nous en avons une acception plus large dans la mesure où sont également pris en
compte les éléments matériels ou immatériels qui témoignent des relations particulières
qu’une communauté humaine a instaurées au cours de l’Histoire avec son territoire :
• Des paysages marqués par l’empreinte des activités humaines,
• Des techniques et des savoir-faire qui ont par exemple donné une touche particulière aux
paysages
• Des parlers locaux, des musiques, une littérature orale issus de traditions non écrites,
• Certaines coutumes, traditions particulières (processions religieuses par exemple).
1
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
Même reconnue comme richesse, la diversité des domaines concernés par le patrimoine ne
suffit pas à en faire ipso-facto un support de développement. La ressource n’est que
potentielle. Pour qu’elle s’intègre à une démarche de développement durable, trois conditions
s’avèrent nécessaires :
• La première, évidente, est que ce patrimoine ne disparaisse pas (nécessité de la
conservation),
• La seconde est qu’un usage approprié lui soit trouvé pour le faire vivre, pour qu’il devienne
facteur de développement (quelle valeur veut-on lui donner ?),
• La troisième est que sa valorisation s’intègre dans un processus global et qu’il devienne
ainsi moteur de développement.
Pour satisfaire ces trois conditions, la démarche nécessite une approche sous des angles
multiples : économique, environnemental, sociétal, culturel. L’importance donnée à chacun de
ces pôles de développement – la pondération des objectifs évoquée précédemment – est un
préalable à toute élaboration de projet.
Des domaines de compétence dévolus à une grande variété d’acteurs du développement sont
ainsi amenés à se recouper et non plus à être disjoints comme les expériences passées le
démontraient trop souvent. Elus, représentants d’administrations, membres d’associations,
techniciens, professionnels bâtissent alors une synergie d’actions dans la mise en oeuvre de
projets.
Un projet de valorisation du patrimoine qui n’aurait qu’une finalité économique à travers son
attrait touristique risquerait, à plus ou moins long terme, d’apparaître étranger sur son propre
territoire car il occulterait la dimension essentielle de l’ancrage au territoire à travers
l’utilisation des ressources locales, la préservation de l’environnement, la reconnaissance des
habitants, le développement de l’emploi. Le développement du tourisme culturel, en
particulier, doit se soucier des différents pôles du développement durable. Ceux-ci sont
désormais explicitement pris en compte dans les démarches de gestion de la qualité en matière
touristique.
2
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
rurale. Il s’agit donc de donner au début un aperçu sur le concept de développement pour aboutir
après au fameux concept développement local.
La question générale qui sous-tend ce travail est de comprendre dans quelle mesure
l’organisation des acteurs locaux par valorisation du patrimoine peut effectivement contribuer au
développement de l’activité économique des zones rurales en déclin. Elle se situe donc plutôt dans
la conception « efficacité » du développement rural, mais élargie à d’autres ressources
territoriales que le sol (ou la main d’oeuvre captive peu qualifiée), selon les principes du
développement local.
Un premier processus qualifié de « traditionnel » ou d'« artisanal » se différencie par une logique
d'action et de mobilisation locales centrée sur l'émergence de multiples initiatives à dominante
individuelle, dispersées et à faible densité. Le rattachement à un même héritage collectif territorial
structure une offre patrimoniale de terroir dont la logique à dominante qualitative privilégie la
reproduction des savoir-faire transmis. Un second processus qualifié d' « industriel » se
caractérise, à l'opposé, par la valorisation intensive d'une seule production patrimoniale
(essentiellement l’artisanat local à caractère commercial). Le troisième type de valorisation
patrimoniale renvoie à une pluralité d'offres de qualités spécifiques et différenciées à vocation
touristique. Composé d' « entreprises rurales » tournées vers le tourisme, ce système territorial de
patrimonialisation s'avère représentatif d'une nouvelle logique d'adaptation agricole et de
recomposition des sociétés rurales. Entre pratiques de conservation et d'adaptation, la valorisation
patrimoniale ici observée démontre une logique de fructification ou de stimulation du patrimoine.
Ce processus s'exprime dans un collectif structurant identifiant une nouvelle logique d'interaction
entre acteurs fondée sur la prééminence d'actions résillaires.
3
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
Les deux méthodes ADEP et nombre de fréquentation nous paraissent les plus adéquats à utiliser
dans ce cadre de site patrimonial archéologique et dans un contexte de pays en voie de
développement.
1. La Méthode d’analyse de la Dimension Economique du Patrimoine
La méthode ADEP nous semble intéressante à appliquer afin d’analyser la valeur économique de
notre site archéologique en question. Cela nous permettra de mesurer les retombées économiques
d’une valorisation (privée ou étatique) de ces sites : le coûts et les avantages (directs et indirects)
d’un investissement dans le domaine du patrimoine.
2. Exercice de coût de déplacement et analyse de la fréquentation sur le site
Cette analyse nous permettra de mieux connaître le touriste qui fréquente ces sites ainsi que son
avis sur aussi bien les problèmes qui menacent un tel site que la possibilité de le valoriser
davantage. Un questionnaire fréquentation du site va donc âtre élaboré.
Cette méthode est basée essentiellement sur l’observation du comportement des individus et la
révélation de leurs préférences.
En deuxième lieu on tentera de traiter cette évaluation tout en ayant comme méthodologie
l’estimation d’une fonction de demande sur le site à partir des enquêtes menées au près des
visiteurs sur le nombre de visites qu’ils effectuent en fonction des coûts qu’ils dépensent pour y
accéder, le revenu mensuel de chaque visiteur, et ceci en fonction des zones classées par ordre de
distance moyenne d’accès. Et là on essayera d’établir les effets relatifs des différents facteurs
explicatifs sur la demande de visite (effet coût, effet revenu, effet niveau d’instruction, effet
zone...)
3. Le consentement à payer CAP des usagers de ce patrimoine :
Les individus qui fréquentent le site patrimonial dans un but essentiellement de découverte et
récréatif tout comme les professionnels sont, selon nous, considérés comme des usagers
présentant une certaine familiarité avec notre bien à évaluer. On a donc jugé essentiel de mener
des enquêtes auprès des usagers de ce patrimoine. Un questionnaire catégories professionnelle
sera adressé aux personnes qui tirent profit de ce patrimoine : agences de voyages et guides,
personnes privés, sociétés de tourismes, artisans, hôtels restaurants….. C’est la perception des
droits et devoirs envers ce patrimoine. Il s’agit de mettre en évidence que les processus de
valorisation de ce patrimoine sont le résultat direct des jeux des différents acteurs sur ce milieu.
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Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
La ville antique est bien connue de la communauté scientifique grâce aux importantes fouilles
archéologiques qui y ont été conduites au XIXe siècle. Pourtant, l’oubli a rapidement succédé
à l’interruption des fouilles à la veille de la première guerre mondiale.
La ville n’a été tirée de cet oubli que dans les années 1980, grâce à la convergence de deux
démarches :
• Un nouvel intérêt pour l’archéologie gauloise au sein de la communauté scientifique et de
nouveaux moyen accordés aux recherches, notamment au sein du CNRS ;
• L’affichage de la mise en valeur de Bibracte au rang des priorités du Parc naturel régional
du Morvan.
En outre, un président de la République autrefois élu du Morvan, François Mitterrand, fut
sensible à la beauté et à la force de ce lieu qui pouvait être associé à des événements
fondateurs de l’histoire nationale.
Le ministère de la Culture décide de lancer de nouvelles fouilles en 1984. L’année suivante,
Bibracte est proclamé site national par F. Mitterrand. En 1989, la mise en valeur du site
rejoint la liste des Grands Travaux de l’Etat. On crée le Centre archéologique européen du
Mont Beuvray, chargé par l’Etat d’un programme d’acquisitions foncières et de constructions
(un musée, un centre de recherche, en centre d’hébergement) puis de l’exploitation des
équipements (accueil de chercheurs, d’étudiants et du grand public).
En 2000, le site de Bibracte accueille environ 80 000 visiteurs dont la moitié visite le musée.
Il accueille des archéologues pour un total de 5 000 journées ouvrées annuelles et emploie une
trentaine de salariés.
5
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
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Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
l’élaboration de leurs chartes. Elle mène également une réflexion commune avec tous les
autres intervenants du domaine touristique et culturel (avec la ville d’Autun par exemple).
L’avenir : les moyens mis en oeuvre par Bibracte pour s’insérer dans les
politiques de développement local.
UN PROJET QUI A LE SOUCI DE S’IMPLIQUER DANS LE DÉVELOPPEMENT
LOCAL.
L’équipe dirigeante de Bibracte s’est fixé trois axes prioritaires d’action pour les prochaines
années :
• poursuivre son programme de recherches en archéologie celtique en consolidant son
envergure internationale,
• développer des actions de formation aux métiers de l’archéologie et du patrimoine,
• réaffirmer l’importance de l’offre culturelle et touristique de Bibracte, lui donner une image
lisible dans ses trois dimensions (archéologique, civilisation celtique, nature).
C’est à travers ce troisième point que Bibracte souhaite mieux s’ancrer dans les politiques de
développement local
En guise de conclusion :
Eléments d’un bilan
Le projet culturel développé à Bibracte depuis 1984 est ambitieux. Les retombées escomptées
dès l’origine se déclinaient à plusieurs échelles. A l’échelle nationale et européenne, il
s’agissait de dynamiser la recherche archéologique sur la période celtique et de mettre en
valeur la civilisation celtique. A l’échelle régionale et locale, le projet a été immédiatement
7
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
vécu comme une opportunité exceptionnelle en matière touristique. L’entreprise s’est révélée
ardue.
Les objectifs ont été atteints en matière de recherche : Bibracte est sans doute devenue le plus
gros chantier de recherche archéologique programmée à l’échelle européenne et c’est
désormais un lieu incontournable pour qui s’intéresse à l’archéologie celtique. Cette activité
archéologique, étroitement contrôlée par l’équipe du Centre archéologique, se développe dans
le souci de préserver au mieux l’intégrité du site.
Les résultats sont nettement plus mitigés en ce qui concerne l’accueil du public, l’incidence
sur l’économie locale et l’appropriation du site par les habitants du Morvan.
Les difficultés étaient en effet nombreuses et importantes. Parmi les principales, rappelons :
• Le tissu social et économique déliquescent dans lequel s’est installé le projet : peu de public
potentiel, peu de compétences et d’esprit d’initiative.
• La faible notoriété du site auprès du grand public (au contraire de Gergovie et d’Alésia, dans
le même registre culturel) et la difficulté à mettre en scène des vestiges très peu spectaculaires
(architecture de terre et de bois…). ;
• La faiblesse des flux touristiques dans le Morvan ;
• Les modalités de genèse du projet, à savoir une initiative " parisienne " menée sans toute la
concertation qui aurait été nécessaire localement, alliées à une situation politique locale fort
complexe (deux départements concernés de couleurs politiques opposées, trois communes,
une demi-douzaine de structures intercommunales…
; cf. diagramme 2 supra).
Malgré ces difficultés, le musée de Bibracte a réussi à se hisser – et à demeurer – au
quatrième rang des sites patrimoniaux à entrée payante au niveau régional. Il contribue à
former des milliers d’écoliers chaque année. L’élaboration en cours des projets de pays
confirme l’intérêt que lui portent les élus locaux et la population dans son ensemble.
Jusqu’à ce jour, les actions de valorisation développées autour de Bibracte n’ont pu se faire
autrement qu’au moyen d’une concertation limitée et à court terme, pour des raisons diverses
qui tiennent pour l’essentiel à des motifs politiques.
Alors que la philosophie du développement durable s’installe fortement dans les esprits,
associée aux notions de solidarité et de programmation sur le long terme, il paraît aujourd’hui
concevable de mieux faire profiter la population locale du site et de ses équipements et
d’accueillir des visiteurs en plus grand nombre sans porter atteinte à son intégrité. Ce
développement passe par une concertation adéquate entre les gestionnaires du site et
l’ensemble des partenaires concernés par le devenir du territoire dans lequel il s’inscrit.
Bibliographie Indicative.
- AA. VV., Patrimoine, modéles de tourisme et développement local, l’Harmattan, Paris 1994
- BIANCHINI F. & PARKINSON M., Cultural Policy and urban regeneration. The West
European experience,
Manchester 1993
- COUNCIL OF EUROPE, In From the Margins. A contribution to the Debate on Culture
and Development, Strasbourg 1997
- D’ANGELO M. E VESPERTINI P., Cultural Policies in Europe: regions and cultural
decentralisation, Strasbourg 1999
- EUROPEAN COMMISSION, Commission Staff Working Paper, Culture, the cultural
industries and employment,JEC (98) 837, Brussels 1988
- Financing cultural/natural heritage and sustainable development. International Conference,
Dubrovnik, Croatia, May 28-31, 1996, Calame, Jonathan (ed), World Monument Funds, New
York 1996
8
Cours PG : « Patrimoine culturel et naturel. Histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
- GOODWIN H., KENT I., PARKER K., WALPOLE M., Tourism, Conservation and
Sustainable Development, International Institute for Enviroment and Development, London
1998
- Heritage Economics: challenges for heritage conservation and sustainable development in
the 21 st century, July 4th 2000, Canberra, Conference Proceedings, Australia Heritage
Commission, Canberra 2001
- Heritage and Tourism: ICOMOS European Conference, Canterbury, University of Kent,
March 27th-30th 1990, ICOMOS-UK, London, 1990
- ICOMOS, International Cultural Tourism Charter. Managing tourism at places of heritage
significance. Adopted at the 12th General Assembly, Mexico, October 1999
- ICOMOS charter for the protection and management of the archaeological heritage (1990)
- ICOMOS, Historic cities and sustainable tourism: the protection and promotion of the
world’s heritage, ICOMOS UK Conference, Bath, 4-6 October 1995, ICOMOS UK, London,
1995
- MTURI A.A., The planning and management of the conservation of historic town and their
integration with the social and economic planning and development process. Mozambique,
Somalia and Tanzania, in UNESCO, Seminar on conservation of Historic Towns and
Monuments along the Coast of Kenya, Mozambique, Somalia and Tanzania,
Bagamoyo,Tanzania, UNESCO, Paris1985, pp. 140-162
- PÉRIER-D’IETEREM C., Tourism and Conservation: Striking a Balance, in “Museum
International”, n.50, 1998
- ROBINSON M., EVANS N., CALLAGHAN P., (eds), Tourism and culture, towards the 21
st century. Managing cultural resources for the tourist. Conference proceedings, University
of Northumbria, Newcastle upon Tyne 1996
- SANDSTRÖM C., Cultural heritage as a part of development strategies in rural areas, in
ICOMOS 8the General Assembly and International Symposium, Old Cultures in New
Worlds, bCommittee, Washington 1987, pp. 1026-1032 Washington D.C., Oct. 10-15, 1987.
Symposium Papers, Vol. 2, ICOMOS United States
- UNESCO, The cultural dimension of development, Paris 1994
- UNESCO, Culture, tourism, development: crucial issues for the XXIst century. Proceedings
of a round table, Paris, 26-27 June 1996, Paris 1996
- WORLD BANK, Sustainable Tourism and Cultural Heritage.A Review of Development
Assistance and Its Potential to Promote Sustainability, 1999
- WORLD BANK’S MIDDLE EAST AND NORTH AFRICA REGION, Cultural heritage
and development: a framework for action in the Middle East and North Africa, World Bank,
Washington 2001.
9
Cours PCN : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
Cours de Base :
«Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories ».
Chargé de Programme :
Dr Youcef CHENNAOUI
Maître de conférences, classe A-
Chercheur à l’ENSA (ex EPAU)
d’Alger.
Séance N° 10
• Contenu du Cours :
o Introduction : L'enjeu touristique du patrimoine et ses retombées économiques
o le contenu du concept de « pôle » touristique relatif au potentiel patrimonial.
o Les stratégies de développement du tourisme culturel adoptées pour les pôles
d’excellences nationaux.
Le tourisme est donc le résultat de la vulgarisation du concept du patrimoine. Mais ce n'est pas
encore une vulgarisation totale puisque tout d'abord c'est le public instruit qui commence à
s'intéresser à un patrimoine protégé pour l'intérêt général. On assiste dès lors à la création des «
sociétés savantes » s'intéressant à l'étude et à la préservation du patrimoine. Ce phénomène va
continuer à prendre de l'ampleur jusqu'à l'apparition de la notion de vacances, période pendant
laquelle les gens en profitent pour visiter les monuments historiques.
C'est ainsi que l'idée du tourisme, qu'on qualifiera plus tard par « culturel », commence à
prendre forme, elle constitue aussi en quelque sorte une « consommation » patrimoniale.
Existe-t-il alors une certaine contradiction entre le tourisme et le patrimoine ? Le problème
serait donc d'examiner combien la « mise en tourisme du patrimoine » est conciliable avec la
notion de valorisation de ce dernier.
1
AUDRERIE, (D), Questions sur le patrimoine, Confluences, Mayennes, 2003.
Cours PCN : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
que la première se réalise souvent avec l'aide des spécialistes du tourisme tels l'Agence
Française d'Ingénierie Touristique (AFIT) et la Délégation Régionale du Tourisme (DRT), la
seconde s'effectue avec l'appui des spécialistes de la culture comme la Direction Régionale des
Affaires Culturelles (DRAC) et la Délégation Interministérielle à l'Aménagement et à la
Compétitivité des Territoires (DIACT)2. Mais ces démarches sont-elles réellement distinctes
l'une de l'autre ?
Il est aussi évident que même en France, quand il s'agit d'une démarche favorisant l'aspect
touristique du lieu, le côté culturel y est toujours présent puisqu'il constitue l'une des
caractéristiques du patrimoine. Cela renvoie à des questions sur ce qu'on attend de la
découverte du patrimoine. Est-ce un agrément, une curiosité ou une recherche de racines ?
La réponse est certes difficile. Il y a évidemment de tout cela ajouté à des raisons
inexplicables touchant aux rêves et à l'imaginaire, sans toutefois oublier le rôle important que
joue le patrimoine en présentant un outil matériel aux sciences humaines et sociales
notamment à l'histoire. L'exploration des biens patrimoniaux fournit donc tant à ceux-ci une
légitimité qu'aux gens un certain équilibre dont ils ont besoin dans cette période de
mondialisation sauvage. Mais aurait-on besoin d'un point de rattachement pour la réflexion
historique ?
L'homme a en effet besoin d'un point de repère matériel. Il est d'une part poussé par le gain
économique, et d'autre part, attiré par un besoin profond de comprendre l'histoire et les théories
abstraites en exerçant un empirisme qui faciliterait l'impulsion de la pensée.
La valeur de non-usage direct quant à elle, c'est la somme des profits obtenue par la mise en
valeur du patrimoine, elle peut se manifester par exemple, par des profits résultants de la
contribution d'un étranger à la sauvegarde d'un patrimoine qui n'est pas le sien.
Enfin, la valeur d'option représente la valeur obtenue par le report de la « consommation » qui
peut consister à détruire volontairement le bien pour être remplacé, ou involontairement par la
surexploitation touristique.
Cet intérêt des touristes pour le patrimoine peut en outre s'affaiblir quand les biens
patrimoniaux sont livrés à la destruction ou même à la dégradation. La réutilisation de ces
biens présente alors un double avantage. Le fait d'utiliser le monument ou le bâtiment pour
d'autres fonctions que la simple visite des touristes, aide aussi bien à l'optimisation de
l'utilisation d'investissements du passé, qu'à la préservation de l'histoire du pays.
Pour que la protection soit efficace, tout un dispositif est à établir, allant d'une législation
adaptée aux conditions locales, à une analyse économique des conséquences du classement, en
passant par toutes les études concernant l'histoire et la typologie du bien. Même dans le cas du
réemploi, des études doivent être prévues pour que le travail soit élaboré de manière à
empêcher l'altération de la structure et de l'aspect originel de l'édifice, sous risque de perdre à
jamais des valeurs touchant à son authenticité.
2
La DIACT a remplacé la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) depuis le 1er
Janvier 2006.
Cours PCN : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
La mise en valeur devient alors une locution très ambiguë. Bien que son but soit de faire
reconnaître les valeurs du patrimoine, nul ne peut nier l'existence de l'idée d'intérêt résultant de
l'attractivité que renforce cette mise en valeur. Il existe dès lors une « rivalité » entre deux
tendances, l'une privilégiant le respect de l'authenticité et l'autre préférant la rentabilité et le
prestige.
QUELQUES CHIFFRES
Cours PCN : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
CARTE D'IDENTITÉ
SON POSITIONNEMENT…
Le positionnement général du Pôle Partenariale : les démarches déjà initiées
Industries Culturelles et Patrimoines peut par les centres de recherche universitaires
être brièvement décrit au travers de d’Arles, d’Avignon, d’Aix en Provence, de
l’exposé succinct des trois dimensions Nîmes et de Marseille, par les centres de
essentielles constitutives de sa stratégie : Recherche & Développement privés (qui
associent étroitement technologies
• Territoriale : la Région PACA, avancées, culture et patrimoine), la
avec notamment les villes diversité des acteurs - entreprises,
d’Arles, d’Avignon, d’Aix en manifestations, fondations dont les
Provence, de Marseille, activités sont basées sur ces domaines,
de Nice et de Nîmes, recèle un ainsi que les formations (issues de
patrimoine historique et Supinfocom, de l’École nationale
culturel propice à la démarche Supérieure de la Photographie, de l’IUP
adoptée et constitue en AIC, de l’IUT d’Arles et par extension des
ce sens un zonage pertinent universités régionales qui lient intimement
s’appuyant sur des liens numérique et culture…) manifestent une
déjà existant entre les divers ressource dont la taille critique assurera
acteurs sollicités. l’amplification des collaborations déjà
existantes et des projets à venir.
• Sectorielle : cette candidature,
dont l’originalité reflète
le tissu des compétences du
territoire sur lequel
elle s’appuie, ambitionne de
valoriser une dynamique
Cours PCN : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
historiquement et informellement
existante, basée sur
les ressources patrimoniales
uniques du territoire concerné,
sur la diversité de ses cultures et
sur leur valorisation
économique, notamment par le
biais des technologies
numériques.
• Patrimoine naturel
Le Pôle Industries Culturelles et Patrimoines
s’organise autour de trois axes de Ce groupe thématique recouvre la création de systèmes
développement : informatisés de repérage et de suivi des paysages, de
conceptions de nouveaux modes de réalisations des
• Patrimoines bâti et culturel digues et de tout type d’ouvrage ayant une fonction
• Patrimoine naturel particulière et devant s’intégrer dans un milieu naturel…
• Ingénierie et diffusion de la culture
• Ingénierie et la Diffusion de la Culture
Le Pôle se positionne à ces titres sur
l’ensemble des secteurs générateurs Ce dernier thème recouvre la création de nouveaux
d’emploi et de croissance économique tels systèmes informatisés de présentation des patrimoines
que le multimédia, le tourisme, la (monuments, oeuvres d’art …) alliant images 3d,
restauration et la rénovation, la renaturation, systèmes de repérages, et diffusion de contenus sur
toutes sortes de médias, création de processus assurant
Cours PCN : »Patrimoine culturel et naturel : histoire et théories ».
Dr Youcef CHENNAOUI.
La connexion entre ses trois groupes thématiques a permis l’élaboration de plusieurs projets de R&D,
eux-mêmes rattachés à des marchés divers.
L’ambition générale qui est celle du Pôle de compétitivité Industries Culturelles et Patrimoines se décline
en plusieurs objectifs opérationnels de moyen et long termes :
Pour concrétiser ces ambitions, le Pôle se fixe un certain nombre d’objectifs intermédiaires :
• Assurer une coopération efficiente, moteur des partenariats engagés, pour développer la
compétitivité des produits et pour accroître l’attractivité du territoire de la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur.
• Pérenniser les capacités d’innovation en fondant la chaîne des partenariats engagés sur les
filières de formation culturelles présentes en PACA.
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages généraux
• AUDRERIE (D) (2002), « Tourisme, culture, patrimoine », Actes du colloque organisé en octobre 2002
à Périgueux, Périgueux, Pilote 24.
• BAROU (J), (1997) « Nouveaux usages de la campagne et patrimoine », Paris : mission du patrimoine
ethnologique.
• COLLECTIF, (1984), « Tourisme urbain et patrimoine », Paris, Ed. ICOMOS, 1993. UNESCO, Un
Patrimoine pour tous : les principaux sites naturels, culturels et historiques dans le monde, Paris,
Unesco.
• CUVELIER (P), TORRES (Emmanuel) et GADREY (Jean), (dir.), (1994), « Patrimoine, modèles de
tourisme et développement local », Paris, L’Harmattan.
Contenu du cours :
- Rappel :
- L’Appréhension de la notion du « patrimoine culturel»
Pour aborder la notion de « patrimoine culturel », il convient d’abord de s’arrêter sur celle de
« patrimoine » en général. Cependant, il n’est bien sûr pas question de rentrer dans les détails de ses
problématiques. Il s’agira simplement ici de retracer brièvement, à grands traits, les points clefs de
l’évolution de cette notion.
En effet, ce concept de « patrimoine » est né objet particulier pour devenir partie intégrante d’un
ensemble souvent liée à un espace. Ainsi, la notion ne cesse de s’évoluer et s’élargir en accueillant de
nouvelles dimensions (historique, archéologique, environnementale, géographique et chronologique).
L’évolution de ce concept est intimement liée à l’évolution même de l’espèce humaine, son histoire, sa
culture, sa civilisation et aux rapports relationnels entre l’homme et la nature. On doit donc prendre en
considération qu’il n’existe pas de définition définitive du patrimoine. Si, sur le plan théorique, tout
peut être patrimonial, dans les faits, tout ne l’est pas. D’où l’importance de tenir compte des critères
d’évaluation et des niveaux de reconnaissance.
Par ailleurs, le tableau ci-dessus, établi par Tim COPELAND1, résume l’évolution de la notion du
patrimoine par des mots clefs.
A partir de 1840, avec les expéditions et les explorations scientifiques de l’Algérie, les français
développent des instruments et des outils pour cette discipline d’archéologie peu présente en Afrique
du nord. Les missions des deux architectes Amable Ravoisié et Edmond Duthoit entre 1840-1880
consistaient en un travail méthodique, systématique d’identification, de description et d’analyse des
vestiges de l’Algérie en privilégiant la state romaine au détriment des autres strates antérieures et
postérieures. Ils nous ont laissé un ensemble très riche de vues générales, de relevés comportant des
plans et des coupes , des restitutions et des restaurations réalisés avec des procédés techniques.
2
C.f Collectif « Figures de l’orientalisme en architecture », Oulebsir. N : « La découverte des monuments
d’Algérie. Les missions d’Amable Ravoisié et d’Edmond Duthoit, 1840-1880 ». In RMMM, n° 73/74. Edisud,
Aix en- Provence, Février 1996.
3
C.f. Ibn Hawkel: «Configuration de la terre», « Kitab surat el ard». Trad J.H Kramers et G. Wiet, Paris, 1964.
C.f. El Bekri. A.O. : « Description de l’Afrique septentrionale ». Ed et Trad De Slane, 1911.
C.f. El Idrissi. M. CH « Description de l’Afrique et de l’Espagne ». Ed et Trad Dozy et De Goeje, 1866.
4
Communication Y. CHENNAOUI : « la problématique de l’archéologie urbaine en Algérie. Pour une méthode
d’évaluation globale et de conservation intégrée ». In colloque international « Fabrication, gestion et pratiques
des territoires. Regards croisés et perspectives de coopération France- Maghreb dans les domaines de
l’architecture, de l’urbanisme et du paysage », université Paris Val de Seine, Décembre 2003.
Chronologie historique.
Quelques faits marquants: La période coloniale.
◼ Dés 1845, c’est Ludovic Vitet de la commission des monuments historiques qui suggère
l’utilisation des travaux de Ravoisié comme base pour un premier classement des monuments
de l’Algérie. Le classement fut alors le premier instrument de protection.
◼ Création du poste d’Architecte des Monuments Historiques.
◼ Première liste des monuments classés ; celle de 1900.
◼ S.Gsell (1911) : « Atlas archéologique de l’Algérie ». Fruit de prés de 20 ans de travail et
d’investigation.
◼ l’Algérie reconduit la législation Française métropolitaine en matière de protection des sites et
monuments historiques: la loi du 02 Mai 1930.
5 Recueil législatif
6
La loi 67--281– articles relatifs aux modes de protection en annexes.
(Paris du 17 au 21 Octobre 1972)
Cette convention a été ratifiée par l’Algérie. Son contenu :
✓ Identification du patrimoine culturel et naturel
✓ Protection nationale et internationale du patrimoine culturel et naturel
✓ Mise en place d’un comité intergouvernemental de la protection du patrimoine culturel et
naturel
✓ Mise en place d’un fonds pour la protection du patrimoine culturel et naturel de valeur
universelle exceptionnelle, dénommé « le Fonds du Patrimoine Mondial ».
2-Ordonnance N° 67-281 du 20 Décembre 1967
Relative aux fouilles et à la protection des sites et monuments historiques et naturels. Les
mesures préconisées par cet instrument législatif sont le classement définitif ou l’inscription sur
l’inventaire supplémentaire pour les biens ponctuels .Voir Articles 22 à 51 de l’Ordonnance de
1967.
7 Article 28 de la loi 98/04 définit les sites archéologiques : « Espaces bâtis ou non bâtis qui n’ont pas de
fonction active et qui témoignent des actions de l’homme ou des actions conjuguées de l’homme et de la
nature, y compris les sous-sols y afférents et qui ont une valeur historique, archéologique, religieuse,
artistique, scientifique, ethnologique ou anthropologique. Ils s’agit notamment des sites archéologiques, y
compris les réserves archéologiques et les parcs culturels»
1. L’inscription sur la liste de l’inventaire supplémentaire (article de 10 à15).
2. Le classement : Elle soumet les sites archéologiques au classement au même titre que les
monuments historiques. Ils sont protégés par le Plan de Protection, de Sauvegarde et de Mise
en Valeur des Sites Archéologiques (PPSMVSA) définit dans l’article 30 : « Il est établi un
plan de protection et de mise en valeur pour les sites archéologiques et leur zone de
protection. Le plan de protection et de mise en valeur fixe les règles générales d’organisation,
de construction, d’architecture, d’urbanisme, d’occupation s’il y’a lieu, ainsi que les
servitudes d’utilisation de sol, notamment celles relatives à la détermination des activités qui
peuvent y être exercées dans les limites du site classé et sa zone de protection.
La procédure d’élaboration, d’instruction, d’approbation et le contenu du plan de protection
et de mise en valeur sont précisés par voie réglementaire.» 8
3. La création de Secteur Sauvegardé : La loi réalise un véritable exploit en considérant les
ensembles urbains et ruraux entant que figure tutélaire gérée par un instrument spécifique qui
est « le secteur sauvegardé » doté d’un PPSMVSS tenant lieu du POS. (Article 41-45)
Parmi les éléments nouveaux consacrés par cette loi, en plus de la remarquable prise de conscience, on
note la création d’un fond d’aide au patrimoine culturel, un fond national pour le financement des
opérations de protection et de mise en valeur des biens culturels.
En fait, sur le plan conceptuel et juridique cette loi a marqué une évolution intéressante et les sites
archéologiques se trouvent renforcés par le dispositif législatif de protection et de sauvegarde
(PPMVSA). Cependant, sur le plan opérationnel, l’application sur terrain est malheureusement
presque inexistante faute d’indications pratiques sur les modalités d’application. Aussi, faute de
moyens financiers disponibles, les fouilles sont gelées depuis longtemps. Seuls des compagnes
d’entretien et de désherbage des sites sont entreprises par la commune qui emploie des jeunes non
spécialistes.
La nouvelle assise règlementaire de cette période :
1-Loi 90-29 du 1er Décembre 1990 ; loi 04-05 du 14 Août 2004, relative à l’aménagement et
à l’urbanisme, modifiant et complétant la Loi 90-29.
Relative à l’aménagement et à l’urbanisme
Dans le cadre de cette loi, le patrimoine culturel et historique est cité dans trois articles :
Article 1er / Préservation de l’environnement, des milieux naturel, des paysages et du patrimoine
historique et culturel.
Article 4 /Seules sont constructibles ,les parcelles :
Dans les limites compatibles avec la nécessité de sauvegarde des sites archéologiques et
culturels.
Article 6 /Dans les parties urbanisées de la commune ,la hauteur des constructions ne doit pas
être supérieure à la hauteur moyenne des constructions avoisinantes et ce dans le respect des
8
Article 30 de la loi 98/04.
dispositions prévues par la législation en vigueur,notamment pour ce qui est de la protection des
sites historiques.
2-Loi 98-04 du 15 Juin 1998
Relative à la protection du patrimoine culturel
Article 1er / La présente loi a pour objet de définir le patrimoine culturel de la nation, d’édicter les
règles générales de sa protection, sa sauvegarde et sa mise en valeur, et de fixer les conditions de
leur mise en œuvre.
3- Les 12 décrets exécutifs, notamment le Décret exécutif N°03-324 du 05 Octobre 2003
Portant modalités d’établissement du Plan Permanent de Sauvegarde et de Mise en Valeur des
Secteurs Sauvegardés PPSMVSS.
Cours de Base N° 12.
« Patrimoine culturel et naturel : Histoire et théories de prise en charge ».
Dr Youcef CHENNAOUI
Maître de conférences classe A, chercheur à l’EPAU.
Contenu du cours.
1. Le cadre législatif.
2. Le cadre normatif.
3. La préservation du patrimoine culturel et naturel au sein de l’optique du
développement durable en Algérie : Une adéquation à construire.
INTRODUCTION.
Le contenu de notre préambule invite à une meilleure perception et à une plus grande
clarification du concept même de l’Environnement.
Il s’agit de lever les ambiguïtés, les amalgames et confusions souvent véhiculés, si non
entretenus par différentes terminologies associées à ce thème, telles que : écologie, espaces
verts, protection de la nature, faune, flore...
Il est donc nécessaire de clarifier le concept et la démarche et de préciser certaines des
multiples réalités que recouvre l’environnement.
En effet :
- Pour les uns ce concept évoque l’hygiène, la santé, la nature, les paysages et l’écologie
- Pour les autres, il renvoie aux nuisances et pollutions, et à la dégradation du cadre de vie
- Pour d’autres encore, il se réfère à un mode de vie et de pensée.
Cet effort d’adaptation à la réalité nationale ne remet pas en cause les accords et conventions
ratifiés par l’Algérie, mais s’inscrit, plutôt, dans une logique rationnelle et cohérente
consistant à promouvoir notre développement de façon normative, pour faciliter son insertion
dans l’économie mondiale et prévenir toute forme de coercition ou de mesures imposées.
Ce qui est enjeu, c’est notamment :
- éradiquer les maux et fléaux, dont la réapparition inadmissible en soit, porte atteinte
à la santé et au cadre de vie du citoyen,
- sauver des millions d’hectares de terre à vocation agricole en mettant un terme à leur
occupation anarchique,
- préserver un littoral déjà en péril ,
- poursuivre les efforts entrepris en matière de lutte contre la désertification,
- sauvegarder la steppe et régénérer les forêts,
- protéger les écosystèmes fragiles
Les enjeux de la biodiversité :
Par définition la biodiversité couvre l’ensemble des êtres vivants de la planète, dans toute leur
diversité.
Notre pays présente des écosystèmes variés et de nombreuses espèces végétales et animales
dont la plasticité et le potentiel de production ont été largement perturbés par les pratiques
anarchiques défiant les lois de l’équilibre écologique.
L’état actuel de la biodiversité dans notre pays se distingue par:
- un appauvrissement de la flore : les plus récentes études portant sur la conservation
d’espèces végétales indiquent qu’environ 640 espèces végétales sont menacées d’extinction
- une régression du patrimoine génétique : sous l’effet d’industrialisation et de la production
agricole, l’extraordinaire patrimoine génétique dont l’Algérie disposait, il y a quelques années
a, sensiblement, régressé.
- une transformation des paysages : l’action humaine a pratiquement donné tout son sens au
paysage méditerranéen actuel. La déforestation, la dégradation de la steppe et la
désertification sont des fléaux qui affectent notre environnement depuis plus d’un siècle et les
phénomènes résultant des activités humaines réduisent sévèrement la biodiversité au sens le
plus large du terme :
1
Convention du patrimoine mondial culturel et naturel, UNESCO, Paris, 16 novembre 1972
Celle-ci avait dés lors, indiqué quelques critères généraux pour la définition des valeurs du
paysage culturel en tant qu’éléments significatifs de l’identité des lieux. (Voir Tableau N° 1
ci-dessous).
Dans ce cadre s’est défini une motivation pour les valeurs : historique, artistique, scientifique
ethnologique et anthropologique, et s’est défini un critère de classement d’importance des
valeurs, en l’occurrence celle universelle au niveau mondial.
D’autre part, cette convention sur le patrimoine mondial culturel et naturel de l’UNESCO,
offre au-delà de ça des indications utiles pour la détermination des impacts et des risques qui
peuvent constituer une menace de disparition des valeurs naturelles et socioculturelles en
distinguant les déterminants aux transformations dues aux agents naturels ou anthropiques. De
ces derniers, nous citons :
▪ Les altérations profondes dues aux causes connues.
▪ L’abandon pour causes de calamités, cataclysmes, grands incendies, tremblements de
terre, éruptions volcaniques, modification du niveau des eaux, inondations et marées
hautes.
▪ Les grands projets d’utilité publique.
▪ Le développement urbain ou touristique rapides.
▪ Les changements de propriété ou d’usage des sols.
Au-delà de ces considérations générales, se reconnaît au sein de cette convention la nécessité
d’identification des valeurs des paysages culturels, telles que :
1. L’importance des éléments paysagers qualificatifs de l’entité territoriale.
2. L’importance de la variété des caractères paysagers : géomorphologiques, historiques,
culturels et de végétations en tant que constituants des valeurs du paysage ; à ce titre,
on cite l’exemple des peintures rupestres dans leurs milieu naturel d’appartenance, les
complexes architecturaux et des jardins, les espèces animales et végétales endémiques.
3. La singularité des caractères paysagers particuliers dans leurs modalités
d’implantation et d’intégration au site.
4. L’état de conservation du patrimoine culturel et naturel inhérents aux caractères
physiques du paysage, à la pérennité de ses usages et de ses traditions de la culture
locale. L’intégrité du paysage ici serait tributaire du grade de permanence,
d’altération ou de disparition de ses éléments significatifs.
L'Algérie ne souffre pas d'une carence de lois ou d'institutions ayant des compétences dans le
domaine de l'environnement en général. A ce titre, un arsenal juridique de plus de 300 textes
fut enregistré durant les deux dernières décades. La loi relative à la protection de
l'environnement promulguée le 05 février 1983 constitue un texte basique et très important,
car on avait défini pour la première fois le principe de la prise en charge de l'impact de
l'environnement sur le processus de développement socio-économique.
L'environnement « aux coordonnées variables » fut tantôt inscrit dans les limites d'une
structure technique et opérationnelle, tantôt rattaché à un département ministériel. Le
réaménagement institutionnel intervenu depuis 1996, avec la création pour la première fois en
l'an 2000 d'un ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, s'est concrétisé
par l'élaboration d'un plan national pour l'environnement, l'adoption par le gouvernement de la
stratégie d'actions prioritaires, la création des inspections et des laboratoires de wilayas2.
Nous relevons que la protection des milieux naturels relève parfois de plusieurs départements
qui souvent agissent, hélas, en solo. Cette harmonisation et renforcement du cadre
institutionnel fut atteint lors de la création d'un ministère liant et mettent en rapport
2
C.f. Secrétariat d'état chargé de l'environnement (1997) : Action 21, Algérie. Edit ENAG, Alger.
l'aménagement du territoire à l'environnement dans l'optique d'une politique de
développement durable.
Parmi les institutions de concertation intersectorielle : Le Haut Conseil de l'Environnement et
du développement durable (le HCDEDD), crée par décret présidentiel N° 94-465 du 25
décembre 1994, présidé par le chef du gouvernement, comporte une commission juridique et
économique qui est chargée, entre autres, de :
1. «Réaliser des études prospectives en vue de définir des objectifs environnementaux
de développement durable ».
2. «Proposer des instruments tant normatifs qu'économiques et financiers à même de
permettre une meilleure protection de l'environnement ».
3. « Elaborer et proposer une stratégie de planification intégrée des établissements
humains »3.
Concernant le littoral
A lui seul, le littoral résume toute la problématique des agressions et de la dégradation de
l’environnement, du qu’il est le lieu de compétitions d’un grand nombre d’usager.
Notre façade maritime confère à notre pays un avantage naturel qu’illustre d’ailleurs son
histoire de carrefour civilisationnel.
3
Op.cit. Collectif (1999) : « Institutions, structures et missions du secteur de l'environnement ». In : Algérie,
Environnement. N° 01, 1999. Pp 16 et 19.
4
Op.cit. Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Rapport sur l'état et l'avenir de
l'environnement. Mai 2001. Pp. 104-114.
5
Ibid. Op. Cit note (4).
- de veiller au maintien des équilibres fondamentaux du milieu en agissant
particulièrement sur le développement socio-économique de certaines zones qu’il faudrait
impérativement corriger et amoindrir ainsi les disparités flagrantes.
- Interdire les rejets liquides non traités dans la mer et qui ont pour origine les activités
urbaines et industrielles qui génèrent de grandes quantités de polluants chimiques et
organiques et instaurer des sanctions dissuasives et efficaces à l’encontre de tout pollueur.
Les mêmes mesures seront étendues aux cours d’eau qui charrient des charges polluantes
considérables d’origine agricole, urbaine et industrielle.
A cela, il ne faut pas exclure de ces mesures, les navires qui accostent nos ports ou qui passent
le long de nos côtes et y effectuent des opérations de déballastage polluant nos eaux marines
et nos plages, et causant des préjudices aux activités touristiques et halieutiques.
LE CADRE NORMATIF :
Contraintes du système réglementaire ; Outils d'aménagement et de gestion du territoire.
6
Op. ; Cit. . Serradj. M (1997). : « L'environnement comme question urbaine ». In : Revue
des collectivités locales, N° 02, 1997. P 12.
D. Le Schéma de développement et d'aménagement du Littoral (SDAL).
Ce dernier répond parfaitement à la préoccupation grandissante de dégradation du littoral, car
malheureusement celui-ci devient le réceptacle de tous les déchets. Parmi ces objectifs
globaux, on cite :
▪ La définition des normes et des principes d'aménagement intégré du littoral.
▪ L'identification des sites les plus remarquables du patrimoine côtier.
▪ L'interdiction de l'extraction du sable des plages et des dunes côtières.
Une première zone pilote de Tipasa, d'Alger et de Boumerdes est concernée sur une longueur
de 200 Kms par un plan d'aménagement côtier spécifique, dit : PAC. Parmi les objectifs du
programme de cette recherche-action, on cite :
7
C.f. Collectif. Revue : Algérie, Environnement, N° 02, 1999. Edit Le secrétariat d'état de
l'environnement. Plan d'aménagement côtier, p09.
C .f Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Rapport sur l'état et
l'avenir de l'environnement, Mai 2001.
En guise de conclusion :
La préservation du patrimoine culturel au sein de l’optique du
développement durable en Algérie : Une adéquation à construire.
La notion de développement durable reposant sur une meilleure articulation des différentes
politiques sectorielles devrait être le point de mire de tout projet d'amélioration de cette loi-
cadre.
Compte tenu de la multiplicité et de la diversité des textes juridiques existants, la
portée des dispositions de protection de l'environnement sont examinés à travers
leur domaine de présence et de pertinence dans les différents plans
d'aménagement et de réglementation urbaine, à savoir la gestion de l'espace et
l'aménagement du territoire, la protection du patrimoine naturel, archéologique
et historique.
Dans le cadre du PDAU et du POS, la commune doit localiser les terres agricoles à préserver
en coordination avec le ministère de l'agriculture et avec la direction des forêts, en établissant
encore un plan d'aménagement de la forêt.
La conservation, la protection et l'utilisation rationnelle de l'espace sont mises en œuvre dans
le cadre de la politique nationale d'aménagement du territoire par l'état, la wilaya et
particulièrement la commune conformément à ses prérogatives.
8
Op. cit. Loi 2001- 01 relative à l’aménagement et le développement durable du territoire. Article 04.
9
Op.cit, Loi N° 2001-01, Art 38.
Ainsi, les actions préconisées par la commune pour protéger son environnement et réaliser
son aménagement, doivent être insérées dans les instruments d'urbanisme, qu'elle est tenue
d'adopter pour une meilleure affectation des sols ; pour rationaliser l'utilisation de l'espace ;
pour préserver son bassin agricole et protéger les périmètres sensibles, les sites et les
paysages.
« Les instruments d'urbanisme, le PDAU et le POS, sont établis à l'initiative et sous la
responsabilité du président de l'APC et adoptés par délibération de l'Assemblée Populaire
Communale. Ils doivent obligatoirement protéger et préserver le littoral, les territoires
présentant un caractère naturel, culturel ou historiques marqués et les terres agricoles à
potentialités élevées »10.
Parmi, les points faibles que nous reconnaissons dans les contenus des deux instruments de
réglementation urbaines, PDAU et POS, ceux-ci :
• Une carence des dits instruments actuels dans l'intervention sur les tissus urbains
historiques non classés , non concernés par un PPSMVSS, car celui-ci reste spécifique et non
encore généralisé.
• Une attitude sectorielle des problèmes, vu que l'élaboration de ces plans (PDAU et POS)
se fait encore dans la logique du Zoning.
• Une confusion entre le niveau de la planification urbaine et les techniques de mise en
valeur et gestion du territoire et de la ville.
• L'inadéquation de ces instruments dans les cas des sites à composante archéologique et
paysagère spécifiques. Ceci est dû à l'absence d'outils d'évaluation et de contrôle, nous les
instituons en tant que valeurs à promouvoir.
• Les options du POS sont souvent génériques, vagues et imprécises.
« L'apport possible du POS, comme instrument de qualification urbaine, est entravé par la
logique «descendante» de l'aménagement urbain : SNAT >SRAT >PAW >PDAU >POS ».
Bien qu'elle vise une cohérence de l'acte d'aménagement (chaque niveau doit être compatible
avec le niveau qui le précède), cette logique peut être une source d'appauvrissement d'une
démarche dans laquelle l'échelle de détail ne sera qu'un aboutissement négligeable. En
d'autre termes, le risque est grand d'accorder plus d'importance, dans les études, aux échelles
majeures (nationales et régionale) dont l'impact à l'échelle locale est peu important »11.
10
Op.cit Sefiane .A (1997) : « Les fondements juridiques de la participation de la commune à la protection de
l'environnement ». In : Revue des collectivités locales, N° 02, 1997. P 33.
11
Op. .cit. Saidouni. M (2000) :«Eléments d'introduction à l'urbanisme : histoire, méthodologie,
réglementation ». Edit Casbah, Alger. P 216.
12
Op.cit. Noui. A.(1997) : « Agir au lieu de réagi »r. In : Revue des collectivités locales : Environnement,
Enjeux, N° 02, 1997. P 05.
La commune- structure de gestion de proximité- devrait contribuer à la protection de
l'environnement, alors que cette prérogative demeure non encore explicite dans le présent
code communal. Ce dernier ne définit pas clairement les prérogatives de la commune en
matière de gestion rationnelle des ressources patrimoniales et naturelles, néanmoins, il lui
reconnaît des compétences pour protéger le cadre de vie - utile à la préservation de la santé du
citoyen et de son milieu- par la lutte contre les pollutions et les nuisances diverses13.
Il est tout à fait évident que le succès de la préservation du patrimoine culturel n'est réalisable
que si le secteur avec l'ensemble des acteurs fait preuve de cohérence dans leurs diverses
approches multisectorielles.
Le gage pour un tel succès pour nous, est de se prémunir d'instruments et de moyens adéquats
visant à mieux approcher l’environnement, en cernant ses diverses ressources patrimoniales.
13
Notons la transformation des bureaux d'hygiène communaux en services communaux de l'environnement et de
l'hygiène.
14
C.f Valentino.P, (2001) : L'approche intégrée aux sites archéologiques. Rapport régional d'analyse comparée.
Euromed Héritage Programme. PISA/ Imed, juin 2001. Cas d'étude : Cherchell, Algérie ; Equipe de recherche- action : M.
Richa. M et Chennaoui. Y, Chercheurs Seniors.