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Une salle de classe comme tant d'autres.

Sauf qu'hier, à la salle des rencontres du CEC, les élèves


avaient de 13 à plus de 80ans. Un bel échange entre le collège Savary et Istres temps libre évasion.
Un mot qui pose problème et voilà les élèves qui commencent à chuchoter et s'exciter. Voilà une
scène que tout le monde a plus ou moins connu lors d'une dictée à l'école ou collège. Sauf que là,
sur la soixantaine de participants, outre des 3e du collège Savary, des seniors participent à ce joyeux
brouhaha.

"Tu mets un ou deux n à enivrer", glisse une dame aux cheveux gris à sa jeune voisine. Quelques
décennies séparent les participants à cet après-midi d'échange, parfois plus d'un demi-siècle mais la
roublardise n'a pas d'âge pour aller
chercher le zéro faute. C'est que l'on
a sa fierté. "Chut", lance la
maîtresse d'un jour, Danielle Satta,
responsable du pôle culturel à Istres
temps libre évasion, organisateur de
l'événement dans le cadre du
printemps des retraités. Et la dictée
reprend.

Les élèves empoignent alors le


stylo, parfois en soufflant. Les
chausse-trappes se glissent au fil du
récit: « enivrer » donc mais aussi
« bêlement », « l'aboi » ou encore
les « grelots »... Le texte d'Henri
Bosco, "Le retour du troupeau", ne
fait pas que des heureux. Certains vont même lancer un petit coup d'œil sur la copie du voisin. On
ne veut pas moucharder mais ce sont plutôt les seniors qui se sont prêtés à ce jeu-là. "C'était la
dictée du certificat d'études en 1954", lance Danielle Satta. "Ce n'est pas un texte très dur mais on
fait des fautes bêtes", soupire Olive, une habituée de l'atelier mémoire du lundi matin d'ITLE où elle
prend aussi la dictée.

Au moment de la correction, l'effervescence gagne les disciples de Bernard Pivot. Les jeunes sont
décontractés, les plus anciens gèrent moins bien le stress, même s'il n'y a pas de notes à la clé. "Je
ne me suis pas trop mal débrouillée, se félicite Claire, octogénaire, avec cinq fautes. C'est une
bonne expérience, je voulais voir si je n'avais pas trop perdu." Diane, 14ans, en a fait plus: "Dix.
Mais beaucoup de bêtes... Ce que je retiens surtout c'est de partager un tel moment avec nos
aînés."Tous les autres participants relèvent aussi ce bonheur d'échanger. On est loin du quotidien de
la dictée en classe à la Joseph Pagnol. "Ça prépare pour le brevet, on en a fait une dizaine cette
année", explique Théo, assis au fond de la salle des rencontres. "Moi, je trouve qu'ils n'en font pas
assez, ronchonne Olive. En 3e, ils parlent en SMS, en abrégé... Je suis dépassée et ce n'est pas bon
pour eux!" Suzanne n'en est pas à ces considérations: "Je peste d'avoir mis deux n à enivrer.
Pourtant, je joue au Scrabble..."

Les plus vieux râlent et, pourtant, ils ont souvent moins de fautes que ceux qui pourraient être au
moins leurs petits-enfants. Ces derniers prennent ça avec le sourire: "On est plus habitué à faire des
fautes qu'eux..."Monique, une octogénaire, confirme:"Pensez donc ma dernière dictée, j'ai dû la
faire vers 1940."
Par Nicolas Bernard

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