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"Tu mets un ou deux n à enivrer", glisse une dame aux cheveux gris à sa jeune voisine. Quelques
décennies séparent les participants à cet après-midi d'échange, parfois plus d'un demi-siècle mais la
roublardise n'a pas d'âge pour aller
chercher le zéro faute. C'est que l'on
a sa fierté. "Chut", lance la
maîtresse d'un jour, Danielle Satta,
responsable du pôle culturel à Istres
temps libre évasion, organisateur de
l'événement dans le cadre du
printemps des retraités. Et la dictée
reprend.
Au moment de la correction, l'effervescence gagne les disciples de Bernard Pivot. Les jeunes sont
décontractés, les plus anciens gèrent moins bien le stress, même s'il n'y a pas de notes à la clé. "Je
ne me suis pas trop mal débrouillée, se félicite Claire, octogénaire, avec cinq fautes. C'est une
bonne expérience, je voulais voir si je n'avais pas trop perdu." Diane, 14ans, en a fait plus: "Dix.
Mais beaucoup de bêtes... Ce que je retiens surtout c'est de partager un tel moment avec nos
aînés."Tous les autres participants relèvent aussi ce bonheur d'échanger. On est loin du quotidien de
la dictée en classe à la Joseph Pagnol. "Ça prépare pour le brevet, on en a fait une dizaine cette
année", explique Théo, assis au fond de la salle des rencontres. "Moi, je trouve qu'ils n'en font pas
assez, ronchonne Olive. En 3e, ils parlent en SMS, en abrégé... Je suis dépassée et ce n'est pas bon
pour eux!" Suzanne n'en est pas à ces considérations: "Je peste d'avoir mis deux n à enivrer.
Pourtant, je joue au Scrabble..."
Les plus vieux râlent et, pourtant, ils ont souvent moins de fautes que ceux qui pourraient être au
moins leurs petits-enfants. Ces derniers prennent ça avec le sourire: "On est plus habitué à faire des
fautes qu'eux..."Monique, une octogénaire, confirme:"Pensez donc ma dernière dictée, j'ai dû la
faire vers 1940."
Par Nicolas Bernard