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Université Paris Ouest Nanterre-La Défense

Licence 2 « Droit et Economie » - semestre 1, année 2014-2015


« Microéconomie C : Concurrence imparfaite »
Cours de MM. Bertrand Chopard, Eric Langlais et Yves Oytana

TD No 3
Théorie des oligopoles
VRAI, FAUX, INCERTAIN

Les propositions suivantes vous paraissent-elles vraies, fausses ou incertaines ? Justifiez votre
réponse :

1) Le pouvoir d’une entreprise qui évolue sur un marché d’oligopole est d’autant plus
grand que sa demande de marché est élastique aux changements de prix.
2) Sur un marché d’oligopole, les entreprises ont toujours intérêt à s’entendre.
3) Les stratégies des entreprises en concurrence en quantités c'est-à-dire « à la Cournot »
sont des substituts stratégiques.
4) Le leader de Stackelberg produit autant qu’à l’équilibre du jeu simultané.

EXERCICE 1 – DUOPOLE ET EQUILIBRE DE COURNOT

On considère un marché de duopole caractérisé par la fonction de demande q = 200 − 2p où p


est le prix du bien et q la quantité totale demandée.
Les fonctions de coût des deux entreprises sont les suivantes:
• pour l’entreprise 1: C1 (q1) = 5q1
• pour l’entreprise 2: C2 (q2) = 0,5 q22
1) A partir des équations de profit, déterminer les fonctions de réaction (de meilleure
réponse) des deux entreprises et les représenter graphiquement.
2) Déterminer l’équilibre de Cournot de ce marché en duopole.

EXERCICE 2 – DUOPOLE ET CARTEL

Deux entreprises sont implantées sur un marché où la demande (inverse) est donnée par : p =
A – BY, p étant le prix de marché, Y la quantité totale demandée. La première firme a un
output noté y1 et un coût marginal de production égal à : c ; l’output de la seconde est noté y2
et a le même coût marginal. Les deux firmes se font concurrence en quantité.

1) Déterminez la fonction de réaction de chaque firme. Expliquez.


2) Déterminez l’équilibre du marché. Comparez à la solution concurrentielle.
3) Quel est le profit de chaque firme ? AN : A = B = 1, c = 0.
4) Etudiez la solution du cartel.

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EXERCICE 3 – DUOPOLE ET EQUILIBRE DE STACKELBERG

Soit un marché en duopole où la fonction de demande est notée q = 4 − p où p est le prix du


bien supposé homogène et q désigne la quantité totale demandée. Les fonctions de coût des
deux entreprises sont les suivantes:
• pour l’entreprise 1: C1 (q1) = q1
• pour l’entreprise 2: C2 (q2) = 0,5 q22
L’entreprise 2 est en position de Leader sur le marché: elle choisit la quantité produite la
première. La firme 1 (Follower) observe cette quantité et choisit sa production après la firme
2.

1) Déterminer l’équilibre de ce duopole avec leader de Stackelberg.


2) Même question que précédemment mais en considérant que C1 (q1) = 3q1.
Commenter.

EXERCICE 4 – DUOPOLE ET COLLUSION

On considère le marché d’un bien homogène produit par 2 entreprises (duopole). Le coût
unitaire de production de chacune des entreprises est égal à 0. Ces entreprises font face à une
fonction de demande D(p) = 4 − p où p est le prix de vente du bien. On note pM le prix de
monopole et qM la quantité de monopole.

1) Si les entreprises formaient un cartel pour se partager le profit de monopole à parts


égales, quel serait le profit de chacune ?

On cherche maintenant à savoir si, en situation de concurrence répétée, les deux entreprises
peuvent parvenir aux gains correspondant à la solution du cartel, et ce de manière non-
coopérative. On suppose donc que la concurrence entre les deux firmes n’est pas statique
mais le résultat d’un jeu dynamique à nombre infini de périodes.
Chaque entreprise maximise la somme actualisée de ses profits courants, notés П1,t et П2,t , et
à donc comme objectif sur un horizon infini:
+∞
Πi = ∑δ
t =0
t
Π i ,t , ∀ i = 1, 2

où 0<δ<1 est le facteur d’actualisation.

On note ПC le profit de collusion, qui est réalisé par chacune des firmes quand elles fixent un
prix égal au prix de monopole pM ou lorsqu’elles vendent une quantité égale à qM/2.
De même, on note ПD le profit de déviation que peut réaliser une entreprise en s’écartant de la
solution de collusion. On suppose qu’une telle déviation, effectuée à la date t0, est
immédiatement détectée, et qu’à partir de t0+1, les deux firmes jouent de manière non-
coopérative et obtiennent un profit de « punition » noté ПP.

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2) Déterminer ПC d’une part et ПD et ПP d’autre part selon le mode de concurrence
retenu (en prix ou en quantités). Commenter.
3) Montrer que la collusion est soutenable dès que :
Π D − ΠC
δ≥
ΠD − ΠP
Commenter.

TEXTE DE REFLEXION :

Frédéric Jenny, président du Comité du droit et de la politique de la concurrence à


l'OCDE « Les cartels doivent être poursuivis sans faiblesse » (Le Monde, 26/09/2000)

« Les Européens s'étaient montrés plus tolérants que les Américains vis-à-vis des cartels
dans le passé. Certains cartels ont encore été autorisés au début des années 90 pour
permettre aux entreprises de mieux surmonter la crise économique. Existe-t-il encore
aujourd'hui des différences d'appréciation sur les cartels de part et d'autre de l'Atlantique

Je ne crois pas que les positions divergent entre l'Europe et les Etats-Unis. La législation est
différente, mais les textes européens et français qui interdisent les cartels et le Sherman Act
[NDLR : texte qui réglemente la concurrence aux Etats-Unis] ont le même objet. Des deux
côtés de l'Atlantique, nous estimons que les cartels doivent être réprimés et cela a été une
politique constante. La concurrence est analysée selon la même grille économique. Tous les
pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont adopté
une recommandation visant à intensifier la lutte contre les cartels internationaux. La
différence est qu'aux Etats-Unis la participation à un cartel est considérée comme une
infraction pénale, alors qu'en Europe les sanctions sont administratives. En France, une
disposition permet néanmoins de transférer le dossier au pénal s'il peut être prouvé qu'une
personne physique a joué un rôle déterminant, personnel et frauduleux. Mais cette disposition
est très difficile à mettre en oeuvre. Les conditions d'exemption, c'est-à-dire celles qui
permettent d'autoriser certains cartels, sont aussi légèrement différentes. En Europe, dans des
cas particuliers, si une entente horizontale [NDLR : une entente entre concurrents] a un effet
bénéfique pour l'économie, elle peut être tolérée. Par exemple, pour les cartels de crise, c'est-
à-dire ceux mis en oeuvre en cas de crise économique particulièrement grave, pour éliminer
des surcapacités de production sans mettre en péril la survie de toutes les entreprises. Ces
exemptions s'appliquent aussi quand les acteurs peuvent justifier que leur entente favorise un
certain progrès économique. Mais elles sont, cependant, très rarement accordées pour les
ententes horizontales. » Aux Etats-Unis, on tolère plus facilement qu'en Europe les ententes
verticales, c'est-à- dire celles qui mettent en relation fournisseurs et distributeurs. Dans
l'Union européenne, nous étions trop rigides vis-à-vis des ententes verticales. La Commission
européenne a d'ailleurs proposé des réformes pour en autoriser davantage.

- Pensez-vous que les Européens finiront aussi par punir pénalement les participants à un
cartel ? Et pensez-vous que cela soit souhaitable ?
- Aux Etats-Unis, certains participants à un cartel sont punis de peines de prison. En Europe,
ce n'est pas le cas, mais cela finira par évoluer. Il faudrait une plus grande prise de conscience
générale des dommages causés par les cartels qui pénalisent gravement les consommateurs et
les privent d'une partie de leur revenu. En ce sens, ils sont assimilables, dans leurs effets, à un

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vol. » Par ailleurs, des différences existent aussi en matière de dommages et intérêts. En
France, les victimes peuvent toujours demander réparation des dommages subis. Aux Etats-
Unis, les montants demandés peuvent atteindre le triple du dommage.

- Pensez-vous que la globalisation et la dérégulation conduisent à la création de cartels ?

- En général, au fur et à mesure que la mondialisation et la dérégulation se développent, la


pression concurrentielle augmente, donc la tentation pour les entreprises de s'entendre
augmente, ce qui nécessite aussi une intensification de la lutte contre les cartels.

- Que pensez-vous des incitations à la délation en oeuvre aux Etats-Unis ?

- Aux Etats-Unis, si une entreprise qui a participé à une entente vient se dénoncer elle- même
(et qu'elle est la première à le faire) en donnant les éléments nécessaires pour condamner
l'entente anticoncurrentielle, elle est dispensée de toute sanction pénale. Ces programmes de
clémence sont des moyens très puissants pour démasquer les cartels. Comme je pense que
ceux-ci sont néfastes, je suis pour une répression forte. La Commission européenne a déjà
adopté un programme de clémence ; des dispositions du même type pourraient s'appliquer en
France dans le cadre de la loi sur les nouvelles régulations. Il faut créer une insécurité entre
les membres des cartels.

- Existe-t-il des études économiques permettant d'étayer la thèse selon laquelle les cartels
sont vraiment néfastes ?

- Il n'existe que des études globales. Celle que j'ai réalisée au début des années 80 suggérait
que l'ensemble des atteintes à la concurrence coûtait au pays environ 5 % à 7 % du produit
national brut. Si on s'intéresse uniquement aux cartels, on peut regarder quelles augmentations
de prix ils ont provoquées. Dans des cas comme le cartel de la lysine ou des vitamines, les
prix ont parfois presque doublé. Il n'est pas rare du tout que les augmentations se situent dans
la frange des + 10 % à + 15%. Dans le cas des banques sanctionnées la semaine dernière, on
peut estimer que sur les 600 milliards de francs de crédits immobiliers qui auraient pu être
renégociés entre 1993 et 1994, seulement 36 milliards l'ont été, ce qui a permis aux ménages
qui ont réussi à obtenir une renégociation de gagner 3 milliards de francs sur dix ans, soit
effectivement environ 10% des sommes en jeu. On peut estimer à plusieurs dizaines de
milliards de francs le manque à gagner potentiel pour les consommateurs. Dans le cas du
cartel des entreprises de BTP sanctionnées en 1995 pour s'être entendue afin de se partager
les marchés du TGV Sud-Est, les firmes sanctionnées avaient essayé d'exclure une entreprise
italienne en la soudoyant ; le montant proposé pour qu'elle renonce à concourir représentait
environ 8 % à 10 % du marché visé.

- Certains historiens de l'économie estiment néanmoins que les cartels peuvent conduire à des
optima économiques ; dans le domaine de l'énergie en particulier, où ils estiment préférable
que des producteurs d'électricité se partagent le territoire plutôt que de chasser sur les terres
du voisin. Qu'en pensez-vous ?

- Je ne vais pas me prononcer sur une question que je n'ai pas étudiée. Comme je l'ai dit, il
peut y avoir des cas rares, dans lesquels la concurrence est néfaste, et il existe des dispositions
particulières pour les traiter. Mais dans la très grande majorité, les cartels sont néfastes à la
collectivité et ils doivent être poursuivis sans faiblesse. »

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PROPOS RECUEILLIS PAR ANNIE KAHN

Questions :

1) Pourquoi combattre les cartels ?

2) Quels sont les marchés touchés par cette pratique ? Tous les marchés peuvent ils être
atteints?

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