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Atlas des champignons toxiques


P.-A. Moreau, P. Saviuc

Après un rappel de la classification des champignons et des principales causes d’intoxications, 32 espèces
toxiques parmi les plus fréquentes, les plus connues ou les plus potentiellement dangereuses en Europe,
sont illustrées et commentées. Chaque espèce est décrite brièvement, et les confusions potentielles avec
des espèces voisines ou semblables sont évoquées.
© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Intoxications ; Fungi ; Mycétismes ; Mycologie ; toxicologie

Plan  Introduction
■ Introduction 1 Les intoxications par les champignons trouvent leur origine
■ Caractères morphologiques à observer en priorité 2 dans la tradition alimentaire et gastronomique, mais aussi dans
Hyménophore 2 la méconnaissance, voire l’insouciance, des ramasseurs tant occa-
Voile général 2 sionnels qu’expérimentés vis-à-vis de la diversité et de la difficulté
Voile partiel 2 de la reconnaissance des champignons.
Sporée 2 Parmi les quelques 30 000 espèces de champignons dits supé-
Consistance de la chair 2 rieurs recensées en France, seules quelques centaines méritent

l’attention du consommateur, et environ 200 sont toxiques,
Nomenclature 2
dont une trentaine peut être mortelle. Les circonstances des
■ Notices sur les espèces 3 intoxications sont souvent comparables et peuvent être sériées
Agaricus xanthoderma Genev. 3 ainsi :
Amanita muscaria (L. : Fr.) Pers. 3 • les confusions : des ressemblances superficielles entre espèces
Amanita pantherina (DC. : Fr.) Fr. 3 ou la récolte de spécimens mal développés ou altérés ne pré-
Amanita phalloides (Fr. : Fr.) Link 4 sentant pas les caractères de reconnaissance essentiels, restent
Amanita proxima Dumée 4 les principales sources de confusion, dont les conséquences
Amanita virosa (L. : Fr.) Lam. 4 peuvent être dramatiques. Parmi ces raisons, la méconnaissance
Boletus satanas Lenz 5 des caractères importants d’identification est presque toujours
Clitocybe amoenolens Malençon 5 en cause. Rappelons à cet égard que les caractères les plus appa-
Clitocybe dealbata (Pers. : Fr.) Kummer 5 rents : la couleur du chapeau, la croissance sur bois, en touffes,
Coprinopsis atramentaria (Bull. : Fr.) Redhead et al. ou la présence d’un anneau sur le pied, ne donnent aucune
(Coprinus atramentarius) 6 indication de comestibilité et sont sources de confusions inévi-
Cortinarius orellanus Fr. 6 tables. En revanche, les caractères indispensables à la bonne
Entoloma lividum (Bull.) Quélet 7 détermination des espèces sont moins visibles et méconnus du
Galerina marginata (Batsch : Fr.) Kühner 7 public :
Gyromitra esculenta (Pers. : Fr.) Fr. 7 ◦ la présence d’un voile général (volve en sac à la base du pied
Hapalopilus rutilans(Pers. : Fr.) P. Karsten 8 ou flocons labiles sur le chapeau), caractérisant en particulier
Inocybe geophylla (Sow. : Fr.) Kummer 8 les Amanita,
Inocybe patouillardii Bres. (Inocybe erubescens Blytt) 8 ◦ la couleur des spores, que traduit plus ou moins la couleur des
Lactarius torminosus (Schaeff. : Fr.) Pers. 9 lames des champignons adultes (le plus sûr est de rechercher
Lepiota brunneoincarnata Chodat & C.E. Martin 9 des traces de dépôts de spores sur le haut du pied, ou de pra-
Lepiota josserandii Bon & Boiffard 9 tiquer soi-même une sporée en posant le champignon, pied
Morchella esculenta (L. : Fr.) Pers. 10 coupé, sur un papier ou un verre et en attendant plusieurs
Mycena pura (Pers. : Fr.) Kummer 10 heures),
Omphalotus olearius (DC : Fr.) Fayod 10 ◦ l’insertion des lames sur le pied, que l’on classe grossièrement
Paxillus involutus (Batsch : Fr.) Fr. 11 en : libres (n’atteignant pas le pied et laissant un espace libre
Pleurocybella porrigens (Pers. : Fr.) Singer 11 avant le pied), adnées (atteignant le pied perpendiculaire-
Psilocybe semilanceata (Fr.) Kummer 11 ment) et décurrentes (descendant le long de pied), avec de
Ramaria pallida (J.C. Sch.) Ricken 12 nombreux cas intermédiaires entre ces principaux types,
Russula emetica (J.C.Sch. : Fr.) Pers. 12 ◦ la présence d’un voile partiel en haut du pied (cortine ou
Russula olivacea Pers. 12 anneau), moins importante pour la classification des espèces
Tricholoma auratum (L. : Fr.) Gillet 13 que pour éviter certaines confusions ;
Tricholoma josserandii Bon 13 • l’aspect socioculturel : l’attrait pour cette ressource naturelle,
Tricholoma pardinum (Pers.) Quélet 13 gratuite et parfois abondante, jouissant d’une image très

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Volume 8 > n◦ 2 > avril 2013
http://dx.doi.org/10.1016/S1877-7856(12)58252-8
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positive dans les cultures latines et slaves, incite de plus en lorsque celui-ci grandit. Lorsqu’il est membraneux il reste à la base
plus de personnes n’ayant pas le bagage naturaliste nécessaire du pied et forme une volve en sac ; lorsqu’il est friable il s’effrite
à ramasser des champignons, aussi bien dans les forêts que en flocons à la surface du chapeau (il existe divers cas intermé-
dans les jardins urbains. La reconnaissance approximative ou diaires). Ce voile caractérise essentiellement les amanites et les
l’attrait pour des champignons simplement appétissants, non volvaires.
confirmée auprès de professionnels ou d’amateurs compétents,
provoquent régulièrement des intoxications graves ;
• des connaissances émergentes : le recensement et la compré- Voile partiel
hension des effets néfastes des champignons progressent grâce
aux intoxications, aux études épidémiologiques et biochi- Il ne protège que l’hyménophore avant ouverture du chapeau,
miques de plus en plus précises, mais ces connaissances ne se en reliant le bord du chapeau au haut du pied ; il se déchire lorsque
diffusent que très lentement auprès de la population. Elles sont le chapeau s’ouvre et forme alors un anneau (membrane) ou une
d’autant plus difficiles à faire accepter au public lorsqu’elles cortine (fines fibres en « toile d’araignée ») qui peut persister en
révèlent la toxicité occasionnelle d’espèces consommées tradi- haut du pied, ou plus rarement au bord du chapeau.
tionnellement, telles que les gyromitres, les paxilles, ou plus
récemment le « bidaou » (tricholome doré) ;
• la « consommation » accidentelle de champignons par des Sporée
enfants, dans les cours d’école ou les jardins, est relativement
Les spores sont trop petites pour être observables isolément
fréquente (l’enfant est surpris en train de toucher un cham-
(environ de 5 à 20 micromètres de longueur), mais leur couleur
pignon ou de le porter à la bouche) et généralement sans
en masse sur une surface est l’une des bases essentielles de la clas-
conséquence, mais doit toujours être prise au sérieux en cas
sification. Elle peut être observable par dépôt naturel en haut du
d’ingestion supposée.
pied (les spores retenues lors de leur chute par un voile partiel),
sur des chapeaux ou des débris voisins. Lorsqu’elle est colorée,
elle donne à l’hyménophore sa couleur à maturité (attention : les
 Caractères morphologiques lames ou les tubes jeunes peuvent avoir leur propre couleur indé-
pendante de celle de la sporée !). Enfin, un chapeau posé, pied
à observer en priorité coupé, sur papier ou lame transparente après la récolte, permet
d’obtenir après quelques heures une belle sporée.
Hyménophore
C’est la partie fertile du champignon, où les spores sont pro-
duites. Il peut être : Consistance de la chair
• à pores : les pores vus par l’observateur sont les extrémités de
tubes parallèles, qui peuvent être séparables de la chair du cha- Certains champignons à lames (les russules et les lactaires) ont
peau (bolets) ou soudés à elle (polypores) ; la particularité de posséder dans leur chair de nombreuses cel-
• à aiguillons : les spores sont formées à la surface de petites lules rondes, qui leur confèrent une structure dite grenue, qui
« dents » pendantes, caractéristique des hydnes (dont le célèbre s’oppose à la structure filamenteuse des autres champignons. Cas-
pied-de-mouton : Hydnum repandum) ; ser le pied du champignon (après en avoir bien observé les autres
• à lames : les spores se forment à la surface de lames rayon- caractères !) permet de distinguer facilement ces deux textures. Les
nantes. Chez presque toutes ces espèces on distingue les lames lactaires possèdent de plus un latex (ou lait), blanc ou coloré, qui
(qui vont du bord du chapeau au haut du pied) des lamellules s’écoule des blessures, en particulier dans les lames et au bord du
(qui s’intercalent aux lames depuis le bord du chapeau mais chapeau.
n’atteignent pas le pied). Les lamellules ne manquent que chez
certaines amanites et russules ;
• à plis : les rides plus ou moins marquées de la surface inférieure  Nomenclature
du chapeau peuvent évoquer des lames (surtout chez les chan-
terelles, dont la girolle : Cantharellus cibarius). On notera qu’il La nomenclature botanique, qui concerne également les
n’existe alors jamais de lamellules mais des bifurcations irrégu- champignons, a été définie par Linné (1753, Species Plantarum).
lières, qui les distinguent des champignons à lames ; Chaque espèce est pourvue d’un nom latin binomial, le premier
• lisse : parmi les nombreuses formes possibles, parfois inso- terme étant le nom de genre (par exemple Amanita), le second
lites, on distinguera entre autres les clavaires (à ramifications une épithète spécifique (phalloides). Ce binôme est suivi du
dressées, sans chapeau) et les pézizes, gyromitres, helvelles et nom de l’auteur (parfois des auteurs) qui a décrit et publié
morilles (à surface fertile orientée vers le haut, plus ou moins cette espèce, abrégé d’après une convention internationale (http :
contournée ou alvéolée) ; //www.indexfungorum.org/Names/AuthorsOfFungalNames.htm)
• interne : chez les vesses-de-loup ou les truffes, c’est le volume du et selon les symboles définis par le Code international de nomen-
champignon, et non sa surface, qui est consacré à la production clature botanique. Soit pour l’exemple choisi : Amanita phalloides
de spores. (Fr. : Fr.) Link. Mais que signifie (Fr. : Fr.) Link ?
Depuis les débuts de la nomenclature (Linné, 1753), de nom-
Insertion de l’hyménophore sur le pied breux ouvrages ont décrit les champignons, il a donc été décidé de
considérer (dans l’exemple présent) comme ouvrage de référence
Il est parfois nécessaire de couper le champignon en deux dans
le travail de synthèse réalisé par le mycologue E.M. Fries (Systema
le sens de la hauteur pour bien observer certains cas ambigus.
Fungorum, 1821–1832). Parfois, le binôme latin a pu être modi-
L’hyménophore peut être :
fié, par exemple par un changement de genre. Le nom de l’auteur
• libre : il ne touche pas le pied. Caractère associé : le pied est
d’origine est alors mis entre parenthèses et suivi de celui qui a
constitué d’un tissu différent de celui du chapeau et peut être
proposé cette modification.
déboîté net ;
On comprend ainsi l’histoire du nom Amanita phalloides : le
• adné : il fait un angle droit avec le pied ;
binôme a été créé initialement par Fries en 1821 (abrégé en « Fr. »),
• décurrent : il descend plus ou moins loin le long du pied (les
qui a nommé l’espèce Agaricus phalloides (à l’époque tous les cham-
lames ont parfois seulement un profil concave).
pignons à lames étaient des Agaricus). Il est cité dans l’ouvrage
de référence ; ainsi, le nom sélectionné par Fries est-il conservé
Voile général et le symbole « : Fr » figure-t-il à la suite du premier auteur dans
l’abréviation (Fr. : Fr.). Puis, le mycologue J.H.K. Link a été le pre-
Il s’agit d’une membrane (lisse ou granuleuse) entourant la tota- mier, en 1833, à proposer de placer cette espèce dans le genre
lité du sporophore lorsqu’il émerge du substrat et se déchirant Amanita, d’où : Amanita phalloides (Fr. : Fr.) Link.

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 Notices sur les espèces


Agaricus xanthoderma Genev. (Fig. 1)
Noms français : agaric jaunissant ou psalliote jaunissante.
Syndrome : gastro-intestinal (résinoïdien).
Caractères : espèce de taille moyenne à grande, 7 à 20 cm de
haut, 4 à 30 cm de diamètre ; base du pied terminée en bulbe
brusquement aplati, fortement jaunissant au grattage ; anneau
au sommet du pied, descendant en jupette ample, généralement
bien visible même chez l’adulte ; pied blanc pur à la cueillette,
devenant jaune sale depuis la base par altération après plusieurs
heures. Forme du chapeau des jeunes spécimens encore fermés
caractéristique : partie centrale aplanie-tronquée (profil trapézoï-
dal) ; surface très variable, blanc pur et lisse à plus ou moins
Figure 2. Amanita muscaria (L. : Fr.) Pers. (cliché P.-A. Moreau).
grise (variété griseus), jusqu’à gris sombre et fortement dissociée
en écailles retroussées (variété lepiotoides, rare) ; lames rose clair
chez les jeunes, devenant noirâtres après ouverture. Odeur forte
de phénol (d’encre) dans la base du pied, plus faible ailleurs mais
se renforçant à la cuisson. Sporée noire.
Habitat : prairies pâturées et littorales, jardins, parcs, haies, buis-
sons, souvent en groupes, de juin à décembre.
Contexte : risque élevé de confusion avec d’autres Agaricus à
chapeau blanc, comestibles réputés, en particulier Agaricus arven-
sis (agaric des jachères, boule-de-neige), très semblable, à chair
également jaunissante, mais à l’odeur anisée à la base du pied
et aux lames gris pâle avant de noircir (seuls caractères distinc-
tifs fiables sur spécimens frais). Agaricus campestris (rosé-des-prés)
s’en distingue plus facilement par un anneau fragile, un pied non
bulbeux et une absence d’odeur et de jaunissement. Les formes
grises écailleuses, ou des espèces proches à chapeau moucheté de
gris (Aagaricus moelleri, agaric pintade), pourraient passer pour des
lépiotes comestibles (Macrolepiota procera ou coulemelle, à lames
toujours blanches). En cas d’intoxication présumée, l’odeur désa-
gréable lors de la cuisson est un indice décisif.

Amanita muscaria (L. : Fr.) Pers. (Fig. 2)


Nom français : amanite tue-mouches.
Syndrome : panthérinien.
Caractères : espèce de taille moyenne à grande, 5 à 25 cm de
haut, 5 à 25 cm de diamètre ; à la base du pied, un bulbe arrondi
souvent verruqueux ; lames blanches ; chapeau hémisphérique,
convexe, puis plat chez les vieux spécimens, strié au bord chez
les adultes, rouge vif à orangé, couvert de verrues blanches (par-
fois jaunâtres ou grisées) qui le couvrent entièrement chez les très
Figure 3. Amanita pantherina (DC. : Fr.) Fr. (cliché P.-A. Moreau).
jeunes et se dispersent plus ou moins régulièrement lorsque le cha-
peau s’ouvre jusqu’à pouvoir disparaître entièrement ; anneau sur
la partie supérieure du pied, descendant en jupette, parfois plaqué Habitat : associé à de nombreux arbres, en particulier bouleaux,
sur le pied et moins visible chez les adultes ; pas d’odeur notable. épicéas, chênes, hêtres, dans les forêts, parcs et friches industrielles
Sporée blanche. boisées (terrils etc.) ; rare en Méditerranée, une forme à flocons gris
est associée aux cistes dans les maquis.
Contexte : les confusions avec d’autres espèces sont rares.
L’oronge ou amanite des Césars (Amanita caesarea), espèce plu-
tôt méridionale et comestible réputé, peut être confondue avec
des amanites tue-mouches ayant perdu les verrues blanches du
chapeau, mais s’en distingue aisément par les lames, le pied et la
chair jaune d’œuf. Les très jeunes spécimens entièrement couverts
de verrues peuvent être pris pour des vesses-de-loup (Lycoperdon
spp.). Son esthétique, exploitée dans de nombreux dessins animés,
est susceptible d’attiser la curiosité des enfants.

Amanita pantherina (DC. : Fr.) Fr. (Fig. 3)


Nom français : amanite panthère.
Syndrome : panthérinien.
Caractères : espèce de taille moyenne, 4 à 10 cm de haut,
3 à 9 cm de diamètre ; à la base du pied, petit bulbe délimité par un
bourrelet (bulbe marginé), généralement surmonté d’un ou deux
petits bracelets ; chapeau hémisphérique très vite étalé, de brun
ocre clair à brun chocolat, parsemé de petites verrues pointues
Figure 1. Agaricus xanthoderma Genev. (cliché J.-M. Moingeon).
blanc pur, strié au bord ; anneau vers le milieu du pied, étroit,

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Figure 5. Amanita proxima Dumée (cliché P.-A. Moreau).

anneau et à chapeau visqueux. Les très jeunes spécimens encore


enfermés dans leur volve (« en boule ») peuvent être pris pour
des jeunes vesses-de-loup (Lycoperdon spp.), comestibles médiocres
Figure 4. Amanita phalloides (Fr. : Fr.) Link (cliché P.-A. Moreau). mais parfois ramassés, dont l’intérieur est blanc, très homogène,
tandis que dans l’« œuf » d’amanite, le chapeau et les lames
sont déjà différenciés. La confusion fréquente avec l’amanite
jamais strié, parfois difficile à voir chez les adultes ; lames et pied citrine (Amanita citrina), qui n’est pas comestible, ne porte pas à
blanc pur. Pas d’odeur. Sporée blanche. conséquence.
Habitat : surtout sous feuillus, en particulier chênes, mais aussi
sous résineux jusqu’en haute montagne, dans les lisières, chemins
forestiers et parcs ; commun ou rare selon les régions, de mai à
Amanita proxima Dumée (Fig. 5)
décembre. Nom français : amanite à volve rousse.
Contexte : confusions classiques avec deux amanites comes- Syndrome : proximien.
tibles : l’amanite rougissante ou golmotte (Amanita rubescens) et Caractères : grande espèce, 10 à 25 cm de haut, 8 à 18 cm
l’amanite épaisse (Amanita excelsa variété spissa), toutes deux à de diamètre ; chapeau sphérique puis étalé avec l’âge, blanc de
chapeau non strié et à anneau strié sur la face supérieure (ce der- lait, parfois couvert de lambeaux de voile roux ; lames blanches,
nier caractère étant le plus sûr pour éviter les confusions). Amanita libres (ne touchant pas le pied), molles ; pied blanc, chaussé
abietum est une autre espèce toxique proche d’A. pantherina, plus d’une volve jaune-roux membraneuse résistante, et présentant
robuste, à flocons plus étalés et grisés, et à anneau plus ample, un anneau membraneux descendant en jupette au sommet ;
encore plus facile à confondre avec l’amanite épaisse. chair blanche, à odeur faible (de crustacé par altération). Sporée
L’amanite jonquille (A. junquillea), proche d’A. pantherina, à cha- blanche.
peau jaune d’œuf dans ses formes typiques (jusqu’à gris-ocre Habitat : typiquement sur les plateaux calcaires des régions
parfois), possède également un bulbe marginé et un chapeau à chaudes de la France, sous pins mêlés ou non de chênes, août
bord strié ; l’anneau très fragile et souvent disparu peut la faire à décembre.
méconnaître. Elle apparaît surtout entre novembre et juin ; sa Contexte : les intoxications proviennent toujours d’une confu-
toxicité (syndrome panthérinien) semble inconstante. sion avec l’amanite ovoïde (ou « boulet blanc », « oronge
blanche », Amanita ovoidea), consommée traditionnellement dans
le Midi, strictement liée aux chênes mais poussant très sou-
Amanita phalloides (Fr. : Fr.) Link (Fig. 4) vent en mélange avec A. proxima dans les pinèdes mêlées.
La distinction des deux espèces est délicate et ne peut
Nom français : amanite phalloïde. se faire avec fiabilité que sur l’anneau : membraneux chez
Syndrome : phalloïdien. A. proxima, cotonneux-crémeux chez A. ovoidea. De répartition
Caractères : espèce de taille moyenne, 5 à 15 cm de haut, 3 à méditerranéo-atlantique, A. proxima a récemment été signalée en
12 cm de diamètre ; à la base du pied, volve membraneuse nette Picardie.
autour d’un bulbe arrondi ; lames toujours blanches ; chapeau
hémisphérique ou plat, typiquement vert d’eau mais aussi jaune
clair, jaune-vert, vert d’herbe, vert bronze, brun-jaune, voire blanc Amanita virosa (L. : Fr.) Lam. (Fig. 6)
pur (variété alba), parfois couvert de gros lambeaux de voile blanc
(par temps sec), non strié au bord ; anneau haut sur le pied, des- Nom français : amanite vireuse.
cendant en jupette, assez fragile ; odeur nulle, de rose fanée sur les Syndrome : phalloïdien.
vieux spécimens. Sporée blanche. Caractères : espèce assez grande et élancée, 8 à 25 cm de haut,
Habitat : forêts feuillues variées jusqu’à 1200 m d’altitude, mais 3 à 9 cm de diamètre, fragile ; à la base du pied, volve mem-
aussi près des résineux dans les parcs, et dans le sable des dunes braneuse appliquée sur le pied (peu visible) autour d’un bulbe
boisées ou non, de juin à décembre. volumineux ; lames toujours blanches ; chapeau blanc pur, coni-
Contexte : du fait de la méconnaissance de cette espèce de cou- que ou bossu ; pied vite coudé après la récolte ; anneau ample, peu
leur très variable, risque de confusion avec des espèces comestibles résistant, souvent disparu chez les adultes ; pas d’odeur notable.
jaunes ou verdâtres sans anneau ni volve (russules, tricholomes), Sporée blanche.
avec des amanites comestibles sans anneau (Amanita vaginata et Habitat : forêts de résineux (très rare sous feuillus) sur sol très
autres Amanitopsis, à chapeau très strié sur les bords) ou avec acide jusqu’à 1500 m d’altitude pour la variété-type, à pied couvert
la volvaire gluante (Volvariella gloiocephala), à volve mais sans de peluches (août–octobre) ; la variété laevipes Neville & Poumarat,

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Figure 6. Amanita virosa (L. : Fr.) Lam. (cliché P.-A. Moreau).


Figure 8. Clitocybe amoenolens Malençon (cliché P.-A. Moreau).

Habitat : dans les parcs et les lisières, rarement en pleine forêt,


sur les sols calcaires, sous gros chênes ou hêtres, de juillet à
octobre, souvent après les périodes sèches. Rare dans de nom-
breuses régions, apparaissant de façon sporadique mais parfois en
abondance, avec d’autres bolets bleuissants.
Contexte : les bolets à chair bleuissante sont généralement
craints du grand public en raison de ce changement de couleur
rapide et parfois spectaculaire ; ils sont tous toxiques crus, mais
certains comme le bolet à pied rouge (Boletus erythropus) sont de
bons comestibles une fois cuits. Le bolet Satan reste fortement
purgatif après cuisson ; contrairement à certains préjugés il est
l’un des moins bleuissants et se reconnaît facilement à la cou-
leur blanchâtre du chapeau. Néanmoins, il reste peu connu et
les spécimens jeunes, souvent remarquables par leur robustesse,
peuvent attirer l’attention des ramasseurs de « bolets ». Le bolet à
beau pied (Boletus calopus), commun dans les forêts de tous types
sur sol acide, présente le même chapeau blanchâtre mais son pied
Figure 7. Boletus satanas Lenz (cliché J.-M. Moingeon). est cylindrique, non renflé, ses pores sont jaune vif et sa chair est
très amère et donc immangeable.

à pied lisse, connue depuis une vingtaine d’années, semble en


expansion rapide dans l’ouest de la France, sous chênes, dans les
Clitocybe amoenolens Malençon (Fig. 8)
parcs et campings, mais aussi en forêt (septembre–novembre). Nom français : clitocybe à bonne odeur.
Contexte : confusion avec les agarics comestibles (Agaricus Syndrome : acromélalgien (érythermalgie).
arvensis, Agaricus silvicola, ou « boules-de-neige »), à lames rosées Caractères : espèce de taille petite à moyenne, 3 à 7 cm de haut,
puis noires avec l’âge et à l’odeur anisée ; les intoxications sont 2,5 à 8 cm de diamètre ; lames nettement décurrentes ; couleur
rares, mais la variété laevipes est beaucoup plus facile à confondre d’ensemble ocre clair, ocre rosé sur les jeunes spécimens frais, le
avec les agarics en plaine et devrait faire l’objet d’une surveillance chapeau se tachant de jaune rouillé depuis le centre, les spécimens
spécifique en Pays-de-Loire. adultes ou vieillissants étant entièrement roux orangés ; chapeau
Espèces voisines : Amanita verna (amanite printanière), même convexe chez les jeunes, devenant légèrement concave chez les
toxicité, apparition localisée sous chênes sur sol calcaire d’avril à adultes ; base du pied agglomérant la litière ; odeur caractéristique,
juin, surtout au sud de la France. Risques de confusion possibles forte et persistante, rappelant l’eau de fleur d’oranger, entêtante à
avec d’autres amanites précoces comestibles mais non ramassées la longue. Sporée blanche.
en France (Amanita curtipes et Amanita ponderosa, à pied pelu- Habitat : dans la litière épaisse des résineux (pins, mélèzes,
cheux, sans anneau). cèdres), dans les montagnes à climat sec ; en France, localisé aux
vallées du Sud des Alpes jusqu’en Maurienne, où il est localement
abondant d’août à octobre. Également signalé dans les Pyrénées
Boletus satanas Lenz (Fig. 7) espagnoles, les Abruzzes (Italie) et au Moyen Atlas (Maroc).
Nom français : bolet Satan. Contexte : malgré l’odeur caractéristique, cette espèce peut être
Syndrome : résinoïdien. confondue avec des espèces réputées comestibles ayant la même
Caractères : espèce robuste et massive, chapeau 5 à 30 cm de dia- silhouette et des couleurs ocres ou orangées comparables, pouvant
mètre, blanc mastic, très convexe, mou au toucher chez les vieux même pousser en mélange : clitocybe renversé (Lepista inversa) et
spécimens ; pied très gonflé, rouge orangé à rouge vif, 3 à 10 cm clitocybe en entonnoir (Clitocybe gibba).
de diamètre à mi-hauteur ; pores à la face inférieure du chapeau
rouge sang chez les très jeunes spécimens, décolorant très tôt en Clitocybe dealbata (Pers. : Fr.) Kummer (Fig. 9)
orangé, voire en jaune depuis le bord du chapeau, entièrement
jaune terne chez les spécimens âgés, peu bleuissants au toucher ; Nom français : clitocybe blanc des pelouses.
chair blanche, devenant bleu clair léger à la coupe, à odeur vite Syndrome : muscarinien.
nauséeuse (de vieux champignon de Paris) quelques heures après Caractères : espèce de petite taille, 2 à 5 cm de haut, 1 à 4 cm
la récolte. Sporée brun olive. de diamètre, entièrement blanche sur le frais, sans trace de voile ;

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Figure 10. Coprinopsis atramentaria (Bull. : Fr.) Redhead et al. (Coprinus


atramentarius) (cliché P.-A. Moreau).
Figure 9. Clitocybe dealbata (Pers. : Fr.) Kummer (cliché P.-A. Moreau).

lames horizontales à légèrement décurrentes ; pied grêle, fibreux


résistant à la torsion ; chapeau plat ou légèrement concave, blanc
lisse d’un aspect « glacé au sucre-glace » laissant voir la couleur
sous-jacente un peu rosée lorsqu’on le frotte du doigt, parfois
cocardé de zones plus grises vers le centre, plus rosâtre après une
pluie ; odeur d’herbe fraîche, de petit pois. Sporée blanche.
Habitat : dans les gazons urbains, prairies pâturées et pelouses
sableuses, assez courant de juin à décembre.
Contexte : les intoxications dues à cette espèce surviennent sou-
vent lorsqu’elle croît sur les mêmes sites que le marasme des
Oréades (Marasmius oreades ou faux mousseron), avec lesquels elle
est récoltée par inadvertance. Elle est également facile à confon-
dre avec le meunier (Clitopilus prunulus), espèce comestible très
semblable et croissant aussi bien en prairie qu’en forêt : cette
espèce à sporée rose (mais à lames longtemps blanches) se carac-
térise par une chair particulièrement friable, dégageant une forte
odeur de farine fraîche. D’autres espèces de même toxicité sont fré-
quentes en forêt : Clitocybe phyllophila (clitocybe blanc des feuilles)
sous feuillus, et Clitocybe cerussata (clitocybe blanc des aiguilles)
sous résineux, de plus grande taille et dont le pied agglomère
la litière, et peuvent être confondues hâtivement avec d’autres Figure 11. Cortinarius orellanus Fr. (cliché P.-A. Moreau).
espèces à chapeau blanc, telles Lyophyllum connatum (clitocybe en
touffes), croissant en grandes troupes sur les talus en montagne,
qui n’est pas consommable et présenterait une toxicité à long
terme. L’aspect givré du chapeau, disparaissant au frottement, est Cortinarius orellanus Fr. (Fig. 11)
un caractère commun à toutes ces espèces toxiques. Nom français : cortinaire couleur de rocou (ou improprement :
cortinaire des montagnes).
Syndrome : orellanien.
Coprinopsis atramentaria (Bull. : Fr.) Redhead Caractères : espèce de taille moyenne, 4 à 9 cm de haut, 3 à 9 cm
et al. (Coprinus atramentarius) (Fig. 10) de diamètre ; chapeau sec, à surface finement feutrée, brun-fauve
à brun-rouge chaud ; lames épaisses, adnées, brun orangé rouillé
Nom français : coprin noir d’encre. vif ; pied brun-jaune, fibreux-strié, à base appointie blanche, sans
Syndrome : coprinien. trace de cortine nette chez les adultes ; chair jaune sale ; odeur
Caractères : espèce de taille moyenne à grande, 6 à 30 cm de forte de radis ou de tabac froid. Sporée brun rouillé.
hauteur, à chapeau ovale ou conique étroit, gris clair argenté avant Habitat : à terre dans les forêts mêlées, souvent sous les hêtres, de
ouverture, glabre (sans écailles) et rugueux au toucher, devenant la plaine à 1500 m d’altitude sur les sols acides, parfois en cercles,
noir et salissant après ouverture ; lames invisibles avant ouverture, de juillet à novembre.
extrêmement serrées et déliquescentes (se liquéfiant en « encre » Contexte : espèce assez rare mais attirant l’attention par ses cou-
noire) dès l’ouverture à partir du bord du chapeau ; pied blanc, leurs chaudes et vives, qui évoquent grossièrement les girolles
déboîtable du chapeau, pourvu d’un petit bourrelet circulaire au (Cantharellus cibarius), dont la surface inférieure du chapeau est
point d’attache du bord du chapeau ; odeur de champignon peu marquée de plis très décurrents et non de lames adnées, larges et
prononcée. Sporée noire. espacées. Une espèce voisine : Cortinarius speciosissimus (cortinaire
Habitat : commun dans tous les milieux riches en azote : bords superbe), de même toxicité, est abondante sur les sols acides des
de route, talus, jardins, champs, remblais, allées forestières etc., tourbières et des plantations de résineux et se reconnaît à son
toute l’année. chapeau pointu et ses bandelettes jaunes sur le pied. D’autres
Contexte : intoxications survenant en cas de consommation variantes et espèces voisines (Cortinarius orellanoides, Cortinarius
d’alcool, concomitante ou espacée jusqu’à 2 à 3 jours (effet anta- henrici), toxiques, s’en distinguent par de menus caractères micro-
buse). Il s’agit généralement de confusion avec le coprin chevelu scopiques ou écologiques. La détermination des cortinaires étant
(Coprinus comatus), comestible réputé, à chapeau couvert de très délicate, il est prudent de déconseiller la consommation de
peluches blanches à l’état jeune. tous les champignons à lames ou spores brunes.

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Atlas des champignons toxiques  16-075-A-10

Figure 12. Entoloma lividum (Bull.) Quélet (cliché P.-A. Moreau). Figure 14. Gyromitra esculenta (Pers. : Fr.) Fr. (cliché P.-A. Moreau).

en couronne depuis le centre en devenant jaune d’or, jaune canari,


entièrement jaune doré quelques heures après récolte ; lames hori-
zontales ou un peu prolongées sur le pied, beige à brun rouillé ;
pied mince et rigide, avec un petit anneau toujours décelable vers
1 cm sous le sommet, brun sombre dans la partie inférieure au
grattage ; odeur très légère de farine ou de radis. Sporée brun fer-
rugineux.
Habitat : troncs et branches moussues de résineux mais aussi
de feuillus (hêtres, saules), où elle apparaît en petites troupes, en
lignes, voire en petites touffes de trois à six spécimens ; écorces
de pins dans les plates-bandes d’ornement, tas de sciures ou de
broyats ; Galerina autumnalis, décrite en Amérique du Nord, est
très voisine et peut-être identique. Des espèces voisines (proba-
blement de même toxicité : Galerina moelleri, Galerina pratensis,
Galerina pseudomycenopsis, Galerina unicolor, Galerina walleyniana)
croissent dans les pelouses urbaines et les terrains herbeux mous-
Figure 13. Galerina marginata (Batsch : Fr.) Kühner (cliché P.-A.
sus, en relation avec les mousses qui adhèrent à la base du
Moreau).
pied.
Contexte : la confusion principale reste avec son sosie comesti-
ble Kuehneromyces mutabilis (pholiote changeante), heureusement
Entoloma lividum (Bull.) Quélet (Fig. 12) peu consommé en France, qui ne s’en distingue de visu que par
sa croissance en grandes touffes et les petites écailles retroussées
Nom français : entolome livide. sur la surface du pied sous l’anneau (vite disparues à la manipula-
Syndrome : gastro-intestinal sévère. tion). La microscopie est nécessaire pour distinguer les spécimens
Caractères : grande espèce, 7 à 20 cm de hauteur, 5 à 20 cm de vétustes ou à pied incomplet ; pour cette raison la consommation
diamètre, sans voile, à chapeau charnu muni d’une large bosse de la pholiote est à déconseiller formellement. Les petites formes,
centrale ; lames horizontales, jaune pâle puis rose clair à maturité ; poussant à terre ou sur les mousses, sont peu susceptibles d’attirer
pied blanc, lisse, n’agglomérant pas la litière à la base ; chapeau gris l’attention des ramasseurs.
clair ou pâle, couvert de fines rayures donnant un aspect argenté
rayonnant au centre sur les spécimens frais. Odeur agréable de
farine fraîche, surtout à la coupe ou à l’écrasement. Gyromitra esculenta (Pers. : Fr.) Fr. (Fig. 14)
Habitat : localisé aux forêts de chênes sur sol argileux ou cal- Nom français : gyromitre (ou fausse-morille).
caire, mais localement abondant, parfois en cercles, de juillet à Syndrome : gyromitrien.
novembre. Caractères : espèce de taille moyenne, 4 à 12 cm de hauteur,
Contexte : le principal risque lié à cette espèce réside dans 3 à 9 cm de diamètre, pourvue d’un chapeau brun-rouge plissé
son aspect engageant, bien qu’elle ne ressemble à aucune comme une cervelle, porté par un pied blanc ou un peu rosé, lisse,
espèce comestible particulière. Elle a pu être confondue avec plus ou moins allongé ; à la coupe le pied est plein ; odeur légère
le clitocybe nébuleux (Clitocybe nebularis), lui-même responsable de champignon.
d’intoxications occasionnelles, très commun dans tous types de Habitat : sur la terre plutôt sableuse, acide, souvent mêlée à des
forêts en septembre à décembre ; ce dernier s’en distingue cepen- débris de bois, le plus souvent sous pins ou épicéas mais aussi sous
dant par des lames décurrentes et par une odeur forte, vite feuillus, de la plaine jusqu’à l’étage montagnard, de mars à mai
écœurante, ainsi que par la base du pied renflée, adhérant aux (juin en altitude) ; localement abondant et fidèle à ses stations.
débris de litière. Contexte : espèce longtemps considérée comme comestible
et autrefois commercialisée sèche sous le nom trompeur de
Galerina marginata (Batsch : Fr.) Kühner (Fig. 13) « morillon » ou de « morille » (un décret interdit cette désignation),
elle est encore consommée traditionnellement dans le Jura, les
Nom français : galère marginée. Préalpes et le Massif central où se produisent encore des accidents
Syndrome : phalloïdien. ponctuels. Les confusions avec les morilles (à chapeau alvéolé
Caractères : espèce petite, 3 à 6 cm de haut, 1 à 5 cm de dia- d’aspect différent, et pied creux) sont sans doute très rares.
mètre, à chapeau hémisphérique puis étalé ; surface du chapeau Deux autres espèces sont également en cause, associées aux rési-
lisse, luisante chez les spécimens frais, jaune miel, se desséchant neux : la gyromitre géante (Gyromitra gigas), plus montagnarde, de

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16-075-A-10  Atlas des champignons toxiques

Figure 15. Hapalopilus rutilans (Pers. : Fr.) P. Karsten (cliché P.-A. Figure 16. Inocybe geophylla (Sow. : Fr.) Kummer (cliché P.-A. Moreau).
Moreau).

couleur ocre et atteignant des tailles impressionnantes (jusqu’à


30 cm de diamètre), et la gyromitre en turban (Gyromitra infula),
automnale (août-octobre), à chapeau trilobé à lobes pointus, assez
rare et sans doute rarement récoltée.

Hapalopilus rutilans (Pers. : Fr.) P. Karsten


(Fig. 15)

Nom français : polypore rutilant.


Syndrome : encéphalopathie et atteinte d’autres organes.
Caractères : en « langue » fixée latéralement sur le support, 2 à
10 cm de diamètre, 1 à 1,5 cm d’épaisseur, de consistante typi-
quement souple-spongieuse ; face inférieure porée, à pores mous
crissant sous les doigts sur le frais, brun-rouge à ferrugineux ; face
supérieure rugueuse, souvent bossue à la base, jaune cuir, deve-
nant brun-rouge par humidité ; très facile à détacher du support ;
chair jaunâtre uniforme ; odeur de bois humide.
Habitat : sur branches mortes de feuillus, surtout chêne et hêtre,
peu abondant mais fréquent de la plaine à la montagne, de juin à
Figure 17. Inocybe patouillardii Bres. (Inocybe erubescens Blytt) (cliché
novembre.
P.-A. Moreau).
Contexte : plusieurs intoxications récentes incitent à présen-
ter ce champignon peu connu, confondu par les ramasseurs de
« langues-de-bœuf » (Fistulina hepatica), champignon de même doivent être considérés avec attention. La variété violacea est
forme mais à chair gélatineuse à veines rouges et blanches et plus facile à confondre avec Laccaria amethystina (laccaire amé-
à surface supérieure étrangement papillée comme une langue, thyste), comestible, entièrement violet (y compris les lames) et
commun dans certaines régions à la base des chênes et des châ- sans mamelon.
taigniers vivants. Le polypore rutilant se colore en violet vif au Les inocybes sont nombreux et très diversifiés, la plupart
contact des bases (potasse, ammoniaque, etc.), couleur que l’on induisent un syndrome muscarinien. Ils doivent inciter à se méfier
retrouve dans l’urine des intoxiqués. des petites espèces à lames grises poussant près des arbres des
jardins.
Inocybe geophylla (Sow. : Fr.) Kummer (Fig. 16)
Nom français : inocybe à lames terreuses. Inocybe patouillardii Bres. (Inocybe erubescens
Syndrome : muscarinien. Blytt) (Fig. 17)
Caractères : petite espèce, 3 à 6 cm de haut, 1 à 4 cm de dia-
mètre, possédant comme la plupart des inocybes un chapeau Nom français : inocybe de Patouillard.
conique pointu et des lames initialement grises, devenant gris- Syndrome : muscarinen.
brun avec l’âge ; pas de voile visible, seulement une légère cortine Caractères : espèce moyenne, 4 à 9 cm de hauteur, 3 à 8 cm de
(« toile d’araignée » attachant le bord du chapeau au haut du pied diamètre, assez robuste ; entièrement blanc mastic lorsqu’il est
chez les très jeunes spécimens) ; chez cette espèce le chapeau est jeune, puis se tachant de brun-rouge sale avec l’âge et devenant
soit blanc pur (forme typique) soit violacé (variété violacea, violet ondulé en s’ouvrant ; lames d’abord blanches puis gris-brun après
sombre à centre jaune, et variété lilacina, entièrement violacée) ; ouverture ; pied cylindrique droit, très fibreux ; odeur faible sur les
odeur nette de sperme à la coupe ou à l’écrasement. Sporée brun jeunes spécimens blancs, devenant forte, fruitée, résineuse (ou de
terne. moisi) sur les spécimens rougis. Sporée brun terne.
Habitat : espèce associée à de nombreux arbres, tant en forêt Habitat : le long des haies et dans les parcs boisés, souvent
que sous les arbres isolés des parcs et jardins, où il peut pousser en charmes ou tilleuls, sur sols calcaires, d’avril à juin (exception-
abondance de mai à décembre. nellement en automne) ; rare dans de nombreuses régions, mais
Contexte : confusions classiques avec M. oreades (marasme des localement abondant et fidèle à ses stations.
Oréades, faux-mousseron) lorsque ceux-ci poussent en mélange Contexte : en raison de la saison d’apparition, les seules confu-
dans les jardins boisés ; le chapeau pointu et les lames grises sions possibles sont avec le tricholome de la Saint-Georges

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Atlas des champignons toxiques  16-075-A-10

Figure 18. Lactarius torminosus (Schaeff. : Fr.) Pers. (cliché P.-A.


Moreau).
Figure 19. Lepiota brunneoincarnata Chodat & C.E. Martin (cliché P.-A.
Moreau).
(Calocybe gambosa ou mousseron vrai), à lames blanches très ser-
rées et odeur typique de concombre, qui peut apparaître sur les
mêmes stations.

Lactarius torminosus (Schaeff. : Fr.) Pers. (Fig. 18)


Nom français : lactaire à toison.
Syndrome : gastro-intestinal.
Caractères : espèce de taille moyenne, chapeau de 3 à 15 cm de
diamètre, pied de 2 à 8 cm de hauteur ; chapeau sec et rugueux
au toucher, creusé au centre, rose briqueté (blanc chez Lactarius
pubescens Fr.), généralement cocardé de zones plus sombres, à bord
enroulé couvert de poils laineux denses surtout chez les jeunes ;
pied cylindrique, creux, lisse sans trace de voile ; lames très ser-
rées, blanches à rose pâle. Chair blanche, typiquement cassante
(comme tous les lactaires), laissant couler un peu de latex (lait)
blanc à la cassure ; odeur de champignon, acidulée ; saveur très
âcre (cru). Sporée blanche.
Habitat : sous les bouleaux, très commun dans toute l’Europe
tant en forêt que dans les jardins et friches industrielles, de juin à
novembre. Figure 20. Lepiota josserandii Bon & Boiffard (cliché P.-A. Moreau).
Contexte : les lactaires à chair blanche, souvent âcres (il en
existe de nombreuses espèces), sont traditionnellement consom-
més en Europe de l’Est et en Scandinavie après préparation cera, à anneau très épais sur le pied) ; les spécimens très vieux à
spéciale en saumure. Une cuisson simple à la poêle ou même lames noircies peuvent être confondus avec des agarics bruns (Aga-
un blanchiment ne suffit pas à neutraliser les substances irri- ricus bisporus : champignon de couche, ou Agaricus silvaticus, agaric
tantes et peut provoquer des irritations gastro-intestinales sévères. des bois), à chair rougissante, celle des lépiotes restant blanche
Le lactaire à toison et sa variante blanche, le lactaire pubescent dans le pied).
(L. pubescens), sont parmi les plus agressifs et sont de plus fréquents Espèces voisines : Lepiota brunneolilacea (lépiote brun lilacin),
en milieu urbain. D’autres espèces, de couleur jaune ou orange, commune dans les sables du bord de mer sur la côte atlantique
peuvent être confondues avec des girolles, malgré la présence du d’octobre à décembre, est une réplique littorale de L. brunneoincar-
lait et la chair non fibreuse. nata à pied plus long et voile moins marqué ; le sable peut éroder
la surface du chapeau qui apparaît blanc et l’espèce a ainsi pu être
confondue avec des lépiotes comestibles à chapeau lisse (Leucoa-
Lepiota brunneoincarnata Chodat & C.E. garicus leucothites ou lépiote pudique) ou de jeunes agarics, tous
Martin (Fig. 19) devant présenter un anneau membraneux en haut du pied.
D’autres lépiotes contenant des amanitines citées dans la litté-
Nom français : lépiote brun incarnat. rature sont très rares et moins susceptibles d’être consommées :
Syndrome : phalloïdien. Lepiota helveola, Lepiota helveoloides, Lepiota subincarnata.
Caractères : espèce petite à moyenne, 3 à 7 cm de haut, 3 à
8 cm de diamètre, à chapeau convexe puis plat ou à bords redres-
sés chez les vieux spécimens ; surface du chapeau à très petites Lepiota josserandii Bon & Boiffard (Fig. 20)
écailles brun sombre sur fond blanc ou rose clair ; lames libres,
blanc pur chez les jeunes, devenant tachées de pourpre-noir en Nom français : lépiote incarnate.
vieillissant, complètement noirâtres chez les vieux spécimens ; Syndrome : phalloïdien.
pied blanchâtre à rosé, à petites écailles noires éparses dans la moi- Caractères : petite espèce, 3 à 6 cm de haut, 1,5 à 4 cm de dia-
tié inférieure, sans anneau distinct ; pas d’odeur notable. Sporée mètre, à chapeau hémisphérique puis plat chez l’adulte ; surface
blanche. de chapeau à petites écailles pelucheuses plaquées, rose tendre à
Habitat : pelouses urbaines, pelouses sèches ou sableuses, dans rose jambon, rendue lisse et blanche par la pluie ; lames blanc
toute la France, de juin à décembre. pur, libres ; pied fragile, rose clair, chaussé de peluches blanches
Contexte : les jeunes spécimens particulièrement développés (armille) vite disparues au toucher. Odeur légère de peau de man-
peuvent être pris pour des petites coulemelles (Macrolepiota pro- darine. Sporée blanche.

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16-075-A-10  Atlas des champignons toxiques

Figure 22. Mycena pura (Pers. : Fr.) Kummer (cliché P.-A. Moreau).
Figure 21. Morchella esculenta (L. : Fr.) Pers. (cliché P.-A. Moreau).

Habitat : pelouses urbaines, pâtures, lisières herbeuses et prairies


littorales, dans toute la France, de juin à décembre.
Contexte : confusion habituelle avec les mousserons
(M. oreades), avec lequel il pousse parfois en mélange, lorsque le
ramassage est inattentif. La croissance parfois abondante dans
les pelouses domestiques lors d’automnes pluvieux est un facteur
de risque important. Le pied cassant facilement est un caractère
distinctif important avec M. oreades, à pied rigide et résistant à la
torsion.

Morchella esculenta (L. : Fr.) Pers. (Fig. 21)


Nom français : morille commune.
Syndrome : de type cérébelleux.
Caractères : espèce moyenne, 4 à 15 cm de hauteur (jusqu’à
25 cm), 3 à 10 cm de diamètre (jusqu’à 15 cm), formant un cha-
peau alvéolé (aspect d’éponge), creux, ovale ou arrondi, porté par
un pied blanc fixé à la base du chapeau, souvent bulbeux à la base ;
odeur discrète sur le frais, devenant aromatique en séchant. Figure 23. Omphalotus olearius (DC : Fr.) Fayod (cliché P.-A. Moreau).
Habitat : varié, en particulier sous les frênes, les ormes et les
arbres fruitiers sur les sols argileux plus ou moins calcaires, de
mars à juin. de hêtre, ne ressemble pas à une espèce comestible particulière
Contexte : il existe de nombreuses espèces de morilles, de mais peut attirer l’attention des novices par son abondance et sa
couleur variée (grises, blondes, brunes, noires, etc.), arrondies taille plus importante (jusqu’à 8 cm de diamètre). Tous ces petits
ou coniques et d’habitat plus ou moins spécifique. Toutes champignons peuvent être confondus avec les faux-mousserons
sont toxiques crues (syndrome gastro-intestinal), ainsi que les (M. oreades), qui ne poussent pas en forêt et n’ont pas d’odeur de
morillons (Morchella gigas [Mitrophora hybrida]), à chapeau non radis.
attaché au bord. Un syndrome neurologique est néanmoins
signalé après consommation de grandes quantités de morilles
cuites, qui représente de nombreux cas en France. Omphalotus olearius (DC : Fr.) Fayod (Fig. 23)
Nom français : clitocybe de l’olivier.
Mycena pura (Pers. : Fr.) Kummer (Fig. 22) Syndrome : gastro-intestinal sévère.
Caractères : espèce moyenne à grande, 5 à 25 cm de hauteur, 3
Nom français : mycène pure. à 15 cm de diamètre, généralement en touffes (soudées par la base
Syndrome : muscarinien. du pied) ; chapeau creusé au centre, rouge orangé, parfois noir vers
Caractères : espèce petite ou à peine moyenne, 3 à 5 cm de hau- le centre, lisse et luisant sur le frais ; lames descendant longuement
teur, 2 à 6 cm de diamètre, à lames blanches et odeur typique de sur le pied (décurrentes), très serrées, avec de nombreuses lamel-
radis ou de pomme de terre crue ; chapeau strié, généralement lules (n’atteignant pas le pied) ; pied très fibreux, orangé, pointu
avec un mamelon au centre, typiquement lilas mais aussi blanc, à la base, sans anneau ; odeur de champignon, un peu acidulée.
jaune-vert, ou rose bonbon (Mycena rosea) ; pied blanc ou bleuté, Sporée blanche.
creux et fragile. Habitat : à la base des souches d’arbres vivants ou morts, plus
Habitat : commun dans de nombreux milieux, en particulier rarement sur racines (et paraissant terrestre), par touffes de trois ou
dans la litière de feuilles ou d’aiguilles des forêts denses, mais aussi quatre à plus d’une trentaine de spécimens ; abondant dans toute
dans les allées herbeuses, landes, garrigues, pâturages alpins, etc. la zone méditerranéenne, sur toutes sortes d’arbres (pin d’Alep,
toute l’année. chêne vert, chêne liège, arbousier, vieil olivier, etc.), de septembre
Contexte : cette petite espèce est facile à confondre avec les à avril mais surtout lors d’automnes humides.
petits champignons comestibles du genre Laccaria, en particu- Contexte : ce beau champignon attire toujours l’attention
lier Laccaria amethystina (laqué améthyste), commun dans les lorsqu’il croît au bord des routes ou des sentiers ; le public non
forêts feuillues, à pied typiquement fibreux, coriace (résistant averti le confond avec les girolles (Cantharellus spp.), qui ont
à la torsion), lames violettes et odeur nulle. Mycena rosea, une une couleur comparable, mais dont la surface fertile est consti-
variante de M. pura à chapeau rose, très commune dans la litière tuée de plis fourchus et non de lames serrées à nombreuses

10 EMC - Pathologie professionnelle et de l’environnement


Atlas des champignons toxiques  16-075-A-10

Figure 25. Pleurocybella porrigens (Pers. : Fr.) Singer (cliché J.-M.


Moingeon).
Figure 24. Paxillus involutus (Batsch : Fr.) Fr. (cliché P.-A. Moreau).

lamellules. L’intoxication par « girolles » provenant de la zone


méditerranéenne et poussant en touffes doit aussitôt orienter vers
le clitocybe de l’olivier. Une espèce voisine, le clitocybe trompeur
(Omphalotus illudens), plus septentrionale, croît sur les souches
de chênes et de châtaigniers lors des étés chauds et présente des
chapeaux plus petits et plus nombreux.

Paxillus involutus (Batsch : Fr.) Fr. (Fig. 24)


Nom français : paxille enroulé.
Syndrome : paxillien.
Caractères : espèce moyenne à grande, 4 à 12 cm de hauteur,
3 à 18 cm de diamètre (jusqu’à 25 cm), à lames jaunâtres à brun
rouillé, décurrentes (descendant le long du pied), typiquement
molles, se liquéfiant sous les doigts et devenant aussitôt brun sale
dans les endroits lésés ; chapeau beige mastic à brun ferrugineux,
visqueux, baveux sur le frais, à bords enroulés sur les lames ; pied
plutôt cassant ; chair brun-jaune, odeur de champignon, acidulée.
Sporée brun-ocre. Figure 26. Psilocybe semilanceata (Fr.) Kummer (cliché P.-A. Moreau).
Habitat : très commun sur les sols acides ou minéraux des
forêts (souvent en lisière), terrils et friches industrielles, parcs,
toute l’année ; sur sols argileux ou calcaires, il est remplacé par Contexte : cette espèce a été responsable d’accidents mortels au
d’autres espèces de paxilles très semblables mais à sporée brun-rose Japon, mais n’est pas consommée en Europe, où il n’existe pas de
(Paxillus ammoniavirescens et Paxillus obscurosporus), généralement champignon comestible ressemblant. Tout au plus des récolteurs
confondues et de toxicité inconnue. peu avertis pourraient-ils prendre cette espèce, et de nombreux
Contexte : cette espèce est parfois confondue avec les girolles autres champignons de morphologie comparable, pour des pleu-
(Cantharellus spp.), qui ont une forme comparable (à chapeau rotes comestibles (qui ont un chapeau gris et un pied net).
creusé et lames décurrentes) mais des couleurs bien plus vives et
des plis fourchus à la place des lames serrées et molles. Mais le
paxille enroulé est récolté comme tel dans les régions minières du Psilocybe semilanceata (Fr.) Kummer (Fig. 26)
nord et de l’est de la France, par les populations émigrées d’Europe
de l’est qui le consomment traditionnellement et s’exposent par- Nom français : psilocybe fer-de-lance.
ticulièrement à ce syndrome de déclenchement imprévisible. Syndrome : psilocybien.
On ignore la toxicité des espèces voisines, récemment distin- Caractères : petite espèce, 3 à 8 cm de hauteur, 0,8 à 2 cm de
guées et pour lesquelles aucune analyse toxicologique n’a été diamètre, à chapeau convexe typiquement surmonté d’une petite
conduite. papille aiguë ; pied très grêle, ne dépassant pas 2 mm de diamètre,
blanchâtre, parfois bleuté à la base ; lames gris clair puis gris vio-
lacé chez les adultes ; chapeau ocre-jaune strié sur le frais, gris pâle
Pleurocybella porrigens (Pers. : Fr.) Singer opaque une fois sec ; odeur faible de champignon. Sporée brun
(Fig. 25) violacé.
Habitat : dans les prairies pâturées et les lisières forestières
Nom français : pleurote étalé. herbeuses sur sol acide ; de la plaine à l’étage subalpin, juin à
Syndrome : encéphalopathie. novembre.
Caractères : sporophore en forme de spatule ou de pétale, de Contexte : intoxications volontaires à vocation « récréative » ;
2 à 7 cm de projection, fixé latéralement, sans pied, entièrement il s’agit d’une des seules espèces européennes indigènes
blanc pur, mat, lisse ; lames très serrées, descendant jusqu’au point contenant de la psilocybine, responsable de troubles psychodys-
d’insertion sur le support ; chair blanche, mince, souple et un peu leptiques ; diverses espèces psychotropes de Psilocybe et Copelandia
élastique. Odeur herbacée légère. Sporée blanche. (Panaeolus) sont importées d’Amérique centrale ou cultivées et
Habitat : sur les souches moussues pourrissantes de sapin, à commercialisées illégalement en Europe (souvent vendues via
l’étage montagnard ; rare. Internet) ; elles sont morphologiquement très différentes de

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16-075-A-10  Atlas des champignons toxiques

Figure 27. Ramaria pallida (J.C. Sch.) Ricken (cliché P.-A. Moreau). Figure 28. Russula emetica (J.C.Sch. : Fr.) Pers. (cliché J.-M. Moingeon).

P. semilanceata. Contrairement à des rumeurs, le psilocybe fer-


de-lance ne pousse pas sur bouses ; par méconnaissance, il peut
être facilement confondu avec diverses espèces inoffensives de
Mycena ou Psathyrella, mais aussi avec des espèces de toxicité
gastro-intestinale ou inconnue telles que des Panaeolus, Stropharia
ou autres Psilocybe. D’autres champignons moins connus et non
recherchés contiennent de la psilocybine, dont la présence se tra-
duit souvent par des teintes bleues sur le chapeau ou à la base du
pied : Inocybe, Pholiotina, Pluteus etc.

Ramaria pallida (J.C. Sch.) Ricken (Fig. 27)


Nom français : clavaire pâle.
Syndrome : gastro-intestinal.
Caractères : espèce moyenne, 4 à 15 cm de hauteur, jusqu’à
25 cm de diamètre, formée de rameaux dressés « en corail », à base
Figure 29. Russula olivacea Pers. (cliché P.-A. Moreau).
large progressivement atténuée ; couleur générale blanc mastic sur
les spécimens frais, le sommet des rameaux étant typiquement
teinté de lilas, devenant uniformément jaunâtre sale avec l’âge ; facilement cassable, sans trace de voile ; chair blanche, à odeur aci-
odeur typique de céleri, surtout sensible à la base des spécimens dulée, fruitée (rappelant la pomme verte) ; saveur très âcre (cru).
âgés. Sporée ocre. Sporée blanche.
Habitat : dans les forêts moussues de résineux, surtout à l’étage Habitat : la russule émétique croît dans les forêts très humides
montagnard, où l’espèce est commune et croît en mélange avec de résineux, surtout en montagne ; mais plusieurs espèces très
d’autres espèces ; juillet à octobre. voisines se trouvent couramment dans d’autres milieux, en par-
Contexte : les grandes clavaires (genre Ramaria) regroupent une ticulier les hêtraies (Russula fageticola, à chapeau rose bonbon).
centaine d’espèces européennes, très difficiles à distinguer. La La saveur âcre, due à des composés irritants pour les muqueuses
seule espèce ne prêtant pas à confusion est la clavaire chou-fleur digestives, est un caractère commun à de nombreuses russules
(Ramaria botrytis), à base énorme et rameaux très courts et roses ; qu’il faut éviter de consommer. Les intoxications proviennent
toutes les autres espèces sont soit purgatives, soit susceptibles généralement de confusions avec les espèces comestibles comme
d’être confondues. La clavaire pâle, l’une des plus communes, la russule charbonnière (Russula cyanoxantha), de couleur variable
est plus pâle que la plupart des autres Ramaria mais les vieux (verte ou violacée) et souvent mal illustrée dans les guides. Toutes
spécimens acquièrent une couleur ocre qui la rend méconnais- les russules sont caractérisées par leur chair cassante (surtout le
sable ; la clavaire jolie (Ramaria formosa), tout aussi toxique, est pied), ne laissant pas couler de lait à la cassure ; elles sont généra-
typiquement tricolore : base blanche, rameaux jaunes et som- lement difficiles à identifier.
mets roses, mais ternit aussi avec l’âge. La consommation de
Ramaria en général est déconseillée ; les autres clavaires sont
généralement trop petites pour attirer l’attention des consomma- Russula olivacea Pers. (Fig. 29)
teurs.
Nom français : russule olivacée.
Syndrome : gastro-intestinal.
Russula emetica (J.C.Sch. : Fr.) Pers. (Fig. 28) Caractères : grande espèce, chapeau de 4 à 30 cm de diamètre,
pied de 2 à 15 cm de hauteur, chapeau arrondi chez les plus jeunes
Nom français : russule émétique. puis aplati au centre, plat ou largement creusé chez les adultes, de
Syndrome : gastro-intestinal. couleurs très variées (vert, rose, mauve, uni ou bariolé), caracté-
Caractères : espèce de taille petite à moyenne, chapeau de 2 à risé par l’aspect « gercé » de la surface vers les bords. Lames épaisses
6 cm de diamètre, pied de 3 à 8 cm de longueur ; chapeau hémi- et très cassantes, sans lamellules intercalées, blanchâtres chez les
sphérique puis plat ou un peu creusé au centre avec l’âge, rouge jeunes à chapeau encore fermé puis vite jaune orangé avec le bord
sombre à rose vif (rouge sang dans les formes typiques), uniforme, typiquement rose au moins vers le bord du chapeau. Pied large,
légèrement visqueux puis adhérent, la pellicule superficielle se creux mais charnu et robuste, rose au moins juste sous les lames,
détachant comme un film plastique ; lames blanc pur, horizon- blanc ou rose en dessous selon les spécimens. Chair blanche,
tales ; pied blanc pur, souple à la pression, comme rempli d’ouate, compacte, sans odeur ; saveur douce. Sporée jaune.

12 EMC - Pathologie professionnelle et de l’environnement


Atlas des champignons toxiques  16-075-A-10

Figure 30. Tricholoma auratum (L. : Fr.) Gillet (cliché R. Chalange).

Figure 31. Tricholoma josserandii Bon (cliché P.-A. Moreau).


Habitat : sous les hêtres et les épicéas, de la plaine (où il est
assez rare) jusqu’en haute montagne, avec une préférence pour la
hêtraie-sapinière sur sol acide où il peut former de vastes ronds de
sorcière.
Contexte : il s’agit de la seule russule européenne à saveur
douce reconnue comme toxique, d’autant plus méconnue que
les ouvrages mycologiques ne signalent généralement comme
toxiques que les russules à saveur âcre. Les intoxications,
relativement rares, vraisemblablement par défaut de cuisson, pro-
viennent de consommateurs de russules non avertis ; les espèces
comestibles ont toutes un pied blanc, tandis que R. olivacea est
caractérisée par la couleur rose de l’extrême haut du pied. Il est
préférable de dissuader les ramasseurs de consommer les russules
à lames jaunes et celles à pied rosé en général.

Tricholoma auratum (L. : Fr.) Gillet (Fig. 30)


Nom français : tricholome doré ; noms locaux : bidaou, canari,
chevalier.
Syndrome : rhabdomyolyse.
Caractères : espèce moyenne à grande, 5 à 20 cm de hauteur, Figure 32. Tricholoma pardinum (Pers.) Quélet. (cliché J.-M.
3 à 15 cm de diamètre, robuste, à lames serrées, jaune canari, hori- Moingeon).
zontales ; chapeau visqueux par temps humide, un peu écailleux
au centre par temps sec, souvent couvert de sable, jaune verdâtre
à roux orangé ; pied très fibreux, blanc à la base, sans voile ; chair
blanche, jaune clair sous les surfaces ; odeur légère de concombre
à la base, et forte odeur de farine ou de concombre ; chapeau sec
à la coupe. Sporée blanche.
mais un peu gras et rugueux au toucher, gris souris uniforme, lisse ;
Habitat : sous les pins, en particulier dans les dunes littorales
lames et pied blanc pur. Sporée blanche.
atlantiques où il abonde, mais aussi sur les sables et sols minéraux
Habitat : dans les forêts de pins, sèches et moussues, en parti-
de l’intérieur des terres, de septembre à décembre (janvier).
culier dans le Massif central et les Préalpes, peu commun mais
Contexte : la consommation de ce champignon est une tra-
localement abondant. Septembre à novembre.
dition séculaire en Aquitaine où il foisonne ; des intoxications
Contexte : cette espèce peu connue est particulièrement dan-
mortelles ont été constatées depuis 1993, associées à des consom-
gereuse par sa ressemblance avec le tricholome prétentieux
mations importantes sur plusieurs repas consécutifs. L’espèce est
(Tricholoma portentosum, ou « griset »), comestible réputé, qui croît
interdite à la vente et à l’importation depuis 2005 (décret no 2005-
dans les mêmes milieux et ne diffère de T. josserandii que par
1184 du 19 septembre 2005 ; NOR : ECOO0500092D).
l’odeur plus faible et la présence de teintes jaunes (parfois légères)
Deux espèces très semblables à chair jaune, Tricholoma equestre
dans le pied et les lames. Dans les régions où T. josserandii est pré-
(tricholome équestre) et Tricholoma frondosae (tricholome équestre
sent, la récolte de T. portentosum doit être déconseillée ou au moins
des peupliers), respectivement associées aux résineux de mon-
étroitement contrôlée.
tagne et aux peupliers trembles, sont moins consommées et on
ignore si elles ont la même toxicité que T. auratum. Le risque de
confusion classique avec ces tricholomes, en dehors de cette toxi-
cité, est avec l’amanite phalloïde, qui peut croître en mélange Tricholoma pardinum (Pers.) Quélet (Fig. 32)
et présenter la même couleur de chapeau ; les lames blanches de
Nom français : tricholome tigré.
l’amanite suffiraient à éviter cette confusion.
Syndrome : gastro-intestinal sévère.
Caractères : espèce moyenne, 5 à 20 cm de hauteur, 3 à 15 cm
Tricholoma josserandii Bon (Fig. 31) de diamètre, robuste ; chapeau convexe puis à bords ondulés avec
l’âge, parsemé d’écailles grises nettement délimitées et retroussées
Nom français : tricholome faux-prétentieux. au centre sur fond blanc (mais seulement feutré chez Tricholoma
Syndrome : gastro-intestinal sévère. filamentosum ; lames blanc crème (non blanc pur) ; pied blanc, très
Caractères : espèce moyenne, 3 à 10 cm de hauteur, 2 à 8 cm de fibreux, lisse ; odeur parfois faible mais typique de concombre,
diamètre, à pied longuement enfoui dans le sol, atténué en pointe plus nette à la coupe. Sporée blanche.

EMC - Pathologie professionnelle et de l’environnement 13


16-075-A-10  Atlas des champignons toxiques

Habitat : sous les sapins et les épicéas, surtout sur sols cal- rencontrer T. pardinum en mélange avec les espèces comestibles,
caires ou volcaniques en moyenne montagne, assez rare mais ces derniers de taille toujours inférieure (pied toujours inférieur
localement abondant et attirant l’attention des récolteurs ; août à 1,5 cm de diamètre). T. filamentosum (tricholome tigré filamen-
à octobre. teux) est une espèce très voisine, de même habitat, d’autant
Contexte : les récolteurs de tricholomes comestibles (« petits- plus dangereuse qu’elle n’offre pas les écailles caractéristiques de
gris », regroupant diverses espèces de Tricholoma à chapeau gris T. pardinum mais une surface feutrée uniforme gris pâle, incitant
écailleux) dans les régions de montagne sont susceptibles de moins à la prudence.

P.-A. Moreau.
Département des sciences végétales et fongiques, Faculté des sciences pharmaceutiques et biologiques, Université Lille 2, BP 83, 59006 Lille cedex, France.
P. Saviuc (psaviuc@chu-grenoble.fr).
Centre de toxicovigilance, CHU de Grenoble, BP 217, 38043 Grenoble cedex 09, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Moreau PA, Saviuc P. Atlas des champignons toxiques. EMC - Pathologie professionnelle et de
l’environnement 2013;8(2):1-14 [Article 16-075-A-10].

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