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Droite, extrême-droite,

les amitiés particulières


LE LIVRE NOIR
1998 - 2001

Droite, extrême-droite,
les amitiés particulières

M JS

MOUVEMENT DES JEUNES SOCIALISTES


Avant-Propos

N o t re génération a vécu la montée du Fro n t


National comme un péril, qu’elle a combattu de
toutes ses forces, et le Mouvement des Jeunes
Socialistes a toujours fait de la lutte contre l’extrê-
me droite une de ses priorités, avec une stratégie
politique claire face au FN. Nous étions présents
en 1995 dans les villes prises par le FN, présents
face à la droite et au FN quand ils ont conclu des
accords pour conserver des Conseils régionaux, et
nous avons mené campagne contre ces alliances.

Notre ligne de conduite n’a jamais varié. Contre


l’extrême-droite, une seule stratégie : celle du cli-
vage droite-gauche. Aucune concession à la xéno-
phobie, aucun relâchement dans le combat pour
l’égalité des droits, aucun front républicain décidé
a priori : nous n’avons jamais considéré que l’al-
liance avec la droite était un recours face au FN.
Au contraire, la droite “ classique ” a souvent mon-
tré qu’elle était prête à payer du prix de ses prin-
cipes une victoire électorale, en faisant, au moins
localement, alliance avec l’extrême-droite, ou en
reprenant ses thèmes de propagande.

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La dislocation du Front National a changé la
nature du problème. La menace est moins visible,
l’extrême droite a disparu de la scène médiatique.
Pourtant, les militants et surtout les élus du FN
sont toujours là. A l’approche d’échéances locales
décisives, ils sont prêts à tout pour conserver les
places acquises. Quant à la droite, la visibilité du
FN et du MNR s’étant réduite, elle court moins de
risques politiques à proposer accords et compro-
mis. Les élections municipales sont l’occasion INTRODUCTION
rêvée pour recycler les anciens élus FN dans la
droite classique sans attirer l’attention.

C’est pour cela que nous avons pris la décision


d ’ e n t re p re n d re la rédaction de ce « livre noir ».
Nous voulons ainsi donner l’alerte, alors que la
vigilance des militants s’est parfois affaiblie. Nous
avons également tenu à recenser les endroits où
des alliances entre droite et extrême droite sont
possibles ou ont déjà eu lieu, pour proposer un
document pratique à l’attention du plus grand
nombre.

Sans doute n’avons nous pas été exhaustifs. Il


appartiendra à tous ceux qui auront ce “ l i v re
noir ” entre les mains de nous permettre de le com-
pléter pour en faire un outil militant toujours d’ac-
tualité, sur lequel s’appuyer lors des échéances à
venir. La lutte contre l’extrême-droite, contre ses
idées, contre ceux qui les propagent, ne s’achève-
ra pas de si tôt. À nous d’être prêts.

Gwenegan Bui

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En un peu moins d’une année, entre mars 1998
et janvier 1999, le paysage politique français s’est
profondément transformé, assombri et paradoxa-
lement clarifié. Neuf mois se sont en effet écoulés
e n t re l’élection de cinq présidents de Région de
droite avec l’appui de l’extrême droite et l’implo-
sion du Front National. Ces deux événements poli-
tiques majeurs produisent toujours leurs eff e t s
qu’il s’agisse de la régression du vote frontiste ou
de l’approfondissement des compromissions au
travers de transferts de l’extrême droite vers la
droite classique. De l’Auvergne à la région Poitou-
Charentes en passant par la Bourgogne, la Picardie,
le Languedoc-Roussillon et les 17 autres régions
métropolitaines, ce livret noir tente de dresser un
bilan quasi-exhaustif des relations troubles entre
la droite et l’extrême droite depuis trois ans. À
quelques semaines des élections municipales et
bientôt des législatives, les hommes composant la
droite dite républicaine se révèlent souvent oppor-
tunistes et volontiers extrémistes.

“ La droite issue de la Résistance a vécu ” titrait avec


justesse Libération le 21 mars 1998, au lendemain

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d’un “ vendredi noir ” qui avait vu l’accession à la La fausse rengaine des 40 ou 70 triangulaire s
présidence de région de cinq hommes politiques “ gagnées par la gauche grâce au FN ” est un air
de droite avec le soutien du Front National. composé et interprété par les brûlés vifs de la dis-
Laurent Joffrin enfonçait le clou en expliquant que solution chiraquienne. Pour ces derniers, les élec-
“ pour la pre m i è re fois depuis la guerre, la règle non tions régionales font figure de revanche et de lot
écrite qui maintenait hors les murs de toute alliance les de consolation, quand il ne s'agit pas de simples
successeurs de la collaboration est transgressée. Le tout pensions alimentaires. Au printemps 1998, la droi-
en parfaite connaissance de cause. Briscards de la poli - te aux abois préfère une alliance discrète avec l'ex-
tique, les Millon, les Mancel, les Blanc ou les Madelin trême droite à une seconde capitulation devant la
savent parfaitement que leurs nouveaux amis théorisent Gauche plurielle. Le Monde explique ainsi, le 10
l’inégalité des races, prônent la discrimination ethnique janvier 1999, ce dilemme : “ Une fois encore la ques -
et fricotent avec le négationnisme quand ils ne le pro - tion posée par le comportement de l’opposition parle -
pagent pas ”. Les accords locaux semblent avoir pris mentaire vis-à-vis du Front National est de savoir si elle
de court les états-majors nationaux, même si c o n s i d è re ce dernier comme faisant partie du même
l’exemple de Jean-François Mancel, ex-secrétaire camp qu’elle ou si, au contraire, elle voit en lui non pas
général du RPR et instigateur en Picardie d’accords un concurrent mais un ennemi ”. Le FN ne cherche
avec le Front National, sème le doute. pas alors à s’intégrer à la droite classique, mais vise
avant tout à la remplacer. Une partie de la droite
Recroquevillée, meurtrie, la droite de 1998 soigne ne veut pas ou refuse de croire à cette logique et
les plaies de la dissolution manquée de Jacques pense que son salut viendra d’une alliance avec
Chirac. Le traumatisme est fort pour les dizaines l’extrême droite.
de députés brutalement débarqués au petit matin
du 1er juin 1997. Un choc à la hauteur de leur ran- Si la droite s'entête à ne rien voir, le FN a com-
cœur à l’égard des “ a p p a reils parisiens ”, cou- pris très vite les bénéfices qu’il pouvait tirer d’ac-
pables à leurs yeux d’avoir précipité leur chute. c o rds ponctuels. En évitant ainsi le re p roche de
Pour eux, la stratégie de refus du FN - portée offi- faire le jeu de la gauche, l’extrême droite plaçait un
ciellement par Alain Juppé, Gilles de Robien et coin au cœur même des troupes RPR-UDF et
François Léotard - a montré ses limites. On consta- retrouvait une certaine légitimité, avant de songer
te par exemple depuis 1998 une tendance de plus à une éventuelle recomposition de la droite où le
en plus marquée des médias proches de l'extrême- FN jouerait un rôle moteur. Selon Bruno Mégret,
droite à s'ouvrir aux élus de la droite dite républi- qui a théorisé depuis longtemps cette recomposi-
caine, largement illustrée dans le présent ouvrage. tion, la conquête du pouvoir est un but à pour-
s u i v re méthodiquement et suppose un change-

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ment des mentalités passant par la dédiabolisation À droite, les esprits sont prêts. Ainsi, dans
du Front National. Une fois remisée la “ préféren- L i b é r a t i o n, le 20 mars 1998, Michel Poniatowski
ce nationale ”, le programme minimum du FN pro- (UDF) prévient que “ la droite sera l’otage de la
posé le 16 mars 1998 en échange de son soutien à gauche si elle remet le pouvoir des régions à la gauche.
une droite exsangue, se veut populiste, consensuel Et c’est pire d’être l’otage des communistes que celui du
et surtout fréquentable : refus de toute hausse Front National ”. L’analyse de Poniatowski n’est pas
d’impôts, “ priorité à la sécurité, “ défense de l’identi - neuve. Dès 1991, alors étiqueté UDF-PR, il s’était
té culturelle et régionale, défense de l’emploi par le déve - déclaré pour des accords de gestion avec le FN et
loppement de l’apprentissage et amélioration des poli - dénonçait même dans National Hebdo, le 8 février
tiques de formation professionnelle, fonctionnement de 1992, “ les lobbies ethniques ”. L'exemple de Jean-
l’assemblée régionale selon le principe de la représenta - Marc Nesme (UDF) est aussi symptomatique d’une
tion proportionnelle ”. droite traumatisée par la défaite de 1997. Député
du Charolais, le secrétaire général du groupuscu-
Le slogan tant matraqué “Ni droite, ni gauche: laire Parti Populaire pour la Démocratie Française
français !”, inspiré du fasciste Jacques Doriot, a bel (PPDF) d’Hervé de Charette, courant giscardien de
et bien vécu. Dès lors, la stratégie de la main ten- l ’ U D F, s’imaginait volontiers au ministère de
due s’impose sans contestation ou presque dans l’Agriculture. Las, battu d’une courte majorité en
l’appareil lepéniste. Bruno Mégret lui a donné une juin 1997, il ne lui restait guère que les élections
forme doctrinale, Jean-Marie Le Pen l’a entérinée régionales de l’année suivante pour survivre poli-
et Bruno Gollnisch orchestre son application dans tiquement.
les régions. Ce dernier précise alors dans l’édition
du Figaro du 12 novembre 1998 : “ Notre stratégie De Charles Baur (ex-UDF), Elisabeth Lévy écrit
régionale n’a jamais été entre nous l’objet d’une quel - dans Marianne en août 1998, qu’“ il est presque trop
conque divergence. Au contraire, elle a été adoptée très facile de brocarder le personnage, incarnation jusqu’à
facilement. Nous avons choisi cette politique de la main la caricature de ces petits roitelets produits par la décen -
tendue. Non pas par un quelconque machiavélisme pour tralisation, et qui oublient un peu vite qu’on ne les a
couler le RPR et l’UDF qui se coulent très bien tout pas élus pour frapper monnaie ou lever des armées, mais
seuls. Mais pour prendre au mot Messieurs Séguin et pour entretenir des lycées et subventionner des
Bayrou qui prétendaient que le FN n’existait que pour théâtres ”.
sauver le pouvoir de la gauche dans les régions. Nous
avons dit : tope-la !, nous vous proposons de vous sau - Charles Millon (ex-UDF), décrit par Philippe
ver vous-mêmes à des conditions très raisonnables ”. Alexandre dans L’événement du 7 janvier 1999, ne
vaut guère mieux : “ Peut-être a-t-il alors été repris

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en main par son épouse, Chantal, qui appartient à la Blanc au sein de son parti, Alain Madelin avoue
très bourgeoise et archi-catholique dynastie lyonnaise que “ le but de l’accueil de Blanc était de donner un
des Delsol. Elle pouvait faire de lui un maire de Lyon, signal aux électeurs du FN, de leur montrer qu’on ne
lui forger un destin national. Tout s’est effondré le jour les stigmatise pas ” (Libération, 9 septembre 1998).
où il lui a fallu quitter le ministère, les aides de camp et Par ailleurs, les suspensions ou les exclusions
l’apparat militaire lié à sa fonction. Tout à coup il n’était furent plutôt rares. Au RPR, mieux vaut pactiser
plus rien qu’un député lambda, maire d’une commune, avec le FN qu’être candidat dissident.
Belley, d’à peine 4.000 éleveurs. La région lui a servi de
lot de consolation, lui a donné un titre, des honneurs, À gauche, la résistance s’organise. Lucie Aubrac,
des collaborateurs ”. le réalisateur Costa-Gavras, ou encore Claude
Lanzmann, Philippe Meirieu, Serge Moati et beau-
Le 20 mars 1998, cinq présidents de région accep- coup d’autres lancent un appel à la démission des
tent ainsi les voix de l’extrême droite. Trois d’entre cinq présidents : “ Nous savons tous qu’accepter que
eux, Jean-Pierre Soisson en Bourgogne, Charles cette alliance dure un jour de plus, c’est prépar e r
Baur en Picardie et Jacques Blanc en Languedoc- d’autres unions, à d’autres élections, c’est légitimer la
Roussillon sont toujours en place au début de l'an- résistible ascension du Front National ”. Le Comité
née 2001. Dès lors, selon Bruno Gollnisch, l’objec- National de Vigilance contre l’extrême droite se
tif commun de la droite et du FN “ d’éviter que la mobilise également tandis que dans l’éducation
gauche socialo-communiste minoritaire ne dirige les nationale, la FSU (Fédération syndicale unitaire) et
régions ” (La Croix, 14 novembre 1998), est en par- la FEN (Fédération de l’éducation nationale)
tie atteint. Ces alliances, si elles sont souhaitées par s ’ a d ressent aux présidents de région pour leur
une frange radicale de la droite, restent mal per- demander de ne pas envoyer de représentants du
çues par l’ensemble des Français. 74% d’entre eux FN dans les lycées.
estiment en effet que les élus RPR-UDF “ n’au -
raient pas dû accepter une entente avec le FN pour gar - Après les premiers mois de résistance qui voient
der la présidence de la région ” (sondage SOFRES du la stratégie de l’opposition systématique faire long
8 avril 1998) tandis que 18% sont d’avis contraire. feu, la gauche plurielle se dit prête à chercher une
Pour l’avenir, 76% des Français souhaitent que la solution républicaine et laisser la présidence à un
d roite prennent ses distances avec le FN, contre élu de droite non compromis. “ L’arc républicain ”
16%. se met en place avec difficulté au cours de l’été
1998. Devant le bureau politique du RPR, son pré-
La droite est loin d’avoir tiré les enseignements sident Philippe Séguin recommande aux respon-
de ce sondage. Ainsi, après avoir accueilli Jacques sables gaullistes de ne pas “ tomber dans le piège de

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ceux qui nous invitent à nous rallier à la stratégie d’arc sélection des étudiants.
républicain, c’est-à-dire à nous allier aux socialistes. Il - “ Il faut abolir le ministère de la Culture car il ne
ne s’agit pas de substituer une confusion par une autre. sert à rien. Nous nous battrons pour une culture libre
Il ne s’agit pas de brouiller les cartes, pour le plus grand (...), pour une reprise des valeurs éternelles de l’esprit :
bonheur du FN, qui rêve de nous voir accréditer l’idée Dieu, la famille, la patrie, le travail ”. Un quarté qui
que majorité et opposition, c’est blanc bonnet et bonnet reprend à son compte, dans le désordre et avec une
blanc ” (Libération, 27 novembre 1998). Le message touche religieuse, la trinité pétainiste.
de François Bayrou à ses troupes est plus alambi-
qué : “ Ne pas voter les budgets mais ne pas remplacer Le FN Bruno Gollnisch, à l'adresse de la droite
une ambiguïté par une autre. Cela donnerait trop de modérée, disait déjà dans l’organe FN F r a n ç a i s
grain à moudre au FN et à Charles Millon que de s’al - d'abord du 16 juin 1997 : "Nous sauverons notre pays
lier à la gauche ” (Libération, 27 novembre 1998). À avec eux s'ils le souhaitent, sans eux ou contre eux s'il
l’Université d’été du Parti Socialiste à la Rochelle, le faut". Et le Front National ne manque pas de
en août 1998, François Hollande défend la straté- réclamer très rapidement son dû. Lors de la
gie du “ cordon sanitaire ”, et précise que les socia- réunion des conseillers régionaux FN de
listes “ refusent toute banalisation. Nous refuserons Languedoc-Roussillon, Picardie, Bourgogne et
toujours de donner une légitimité à ces quatre prési - Rhône-Alpes le samedi 14 novembre 1998 à Lyon,
dents de région ”. la décision est prise de suspendre la poursuite d’un
soutien à l’application de l’ensemble des six condi-
D e r r i è re une image lisse, le programme mini- tions préalablement définies. Bruno Gollnisch
mum du FN ne masque que faiblement la véritable menace que “ ceux qui crachent à la figure des élus et
nature d’un parti extrémiste. En voici pour mémoi- électeurs du FN n’auront pas un centime ” (Présent, le
re quelques extraits que détaille Bernard Antony, 17 novembre 1998). Le FN exige des présidents
pilier du FN, et responsable du groupe catholique auxquels il apporte son soutien qu'ils cessent de
intégriste Chrétienté-Solidarité (interview accor- subventionner les institutions culturelles qui se
dée dans Présent le 3 septembre 1996) : sont transformées en “ machines politiques ”
- “ Protéger l’école des méfaits de l’immigration ”, en contre le FN et l’alliance de la droite avec lui. “ Les
établissant la discrimination raciale lors des ins- cultureux nous ont déclaré la guerre. Nous sommes en
criptions. état de légitime défense et nous nous défendrons. On ne
- Révision des manuels scolaires, notamment en peut pas impunément mordre la main qui vous nour -
histoire et en philosophie. rit ” a menacé Alain Jamet, président du groupe en
- Créer des universités indépendantes avec auto- Languedoc-Roussillon.
nomie dans le re c rutement des enseignants et

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Au-delà des trois régions encore dirigées aujour-
d’hui grâce à une alliance entre la droite et l'extrê-
me droite, le problème des transfuges d’anciens
élus FN vers la droite classique concerne toute la
France. Le mardi 25 avril 2000, un communiqué
désapprouvait “ le fait que Jean-Marie Le Pen puisse
être déchu de son mandat de député au terme d’une pro -
cédure où à aucun moment n’est intervenu la levée ” de
son immunité parlementaire. Les trois signataires,
tous députés RPF au Parlement européen, Paul- LES RÉGIONS
Marie Coûteaux, ancienne plume de MM. Pasqua
et Séguin, Thierry de la Perrière, un intime de
Philippe de Villiers, et Jean-Charles Marc h i a n i ,
proche de Charles Pasqua “ exigent ” de la prési-
dente un débat en séance plénière (P o l i t i s, 5mai
2000).

Les municipales de mars prochain risquent


d ' i l l u s t rer cette nouvelle donne à dro i t e . Déjà
au printemps dernier, Elisabeth Guigou (PS), alors
Garde des Sceaux, avait prévenu que “ les partis de
d roite qui se battent pour recycler les transfuges
du Front National, comme le RPF sont le vrai
danger ”

Franck Heurtrey

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Alsace

La région avant 1998


Suite au décès de Marcel Rudlof en avril 1996,
Adrien Zeller, ancien ministre et maire UDF-FD de
Saverne, préside une région largement dominée
par la droite. Avec 21 sièges (11 UDF, 8 RPR, 1 MPF
1 DVD), la droite n’a en face d’elle, pour l’en-
semble de la mandature 1992-1998, que 10 élus de
gauche (7 PS, 3 Verts). Le nombre d’élus d’extrême
d roite (4) ou du FN (6) est porté à 10 sur l’en-
semble de la mandature.

Les élections régionales de mars 1998


Malgré ses divisions internes, la droite re s t e
m a j o r i t a i re au scrutin régional de 1998, mais le
Président, Adrien Zeller (UDF) ne peut s’appuyer
que sur une majorité relative. Avec 19 conseillers
sur 47 (9 UDF, 7 RPR, 3 div. d.), la droite compte le
plus grand nombre d’élus, la gauche ne rempor-
tant que 9 sièges (8 PS et 1 Vert). Mais, malgré ses
divisions, l’extrême droite est particulière m e n t
forte en Alsace et réalise encore de bons scores aux
élections partielles. D’obédience mégrétiste, les
extrémistes locaux se font entendre dans l’encein-
te du conseil régional où le FN (avec l’idéologue

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Yvan Blot notamment) compte 13 élus auxquels véritable “ miroir aux alouettes ” de la gauche pluriel -
viennent se gre ffer deux élus d’extrême droite : le et multiculturelle (...). J’appelle à faire barrage au
“ Poursuivant sa politique de soutien à des projets cul - représentant de la gauche socialiste qui a voté à
turels enracinés, le groupe frontiste a bataillé ferme pour l’Assemblée Nationale une loi pour accorder le droit de
tirer à la baisse un certain nombre de subventions à des vote aux étrangers, non ressortissant de l’UE ” (L e s
projets d’inspiration mondialiste ” (National Hebdo, le Dernières Nouvelles d’Alsace, le 20 juin 2000).
25 juin 1998).
Il s'est exprimé dans Minute
Marlène Heng, conseillère régionale, a quitté le François Loos, député UDF du Bas-Rhin, prési-
FN pour re j o i n d re le Mouvement régionaliste dent du Parti Radical Valoisien (petite composan-
d’Alsace (ex-“ Alsace d’abord ”, avec l’élu Jacques te de l’UDF) et conseiller régional d’Alsace, le 8
Cordonnier) qui vient d’établir un partenariat avec janvier 2000.
La Droite de Millon. Elle re p roche au FN son
“ jacobinisme ” et la “ soumission au chef et à l’auto - En attendant mars 2001
rité unique et centralisée ”. Le groupe FN passe alors La candidate UDF à la mairie de Strasbourg ,
de 13 à 12. Fabienne Keller - soutenue par le RPR Robert
Grossmann -, a entamé une campagne principale-
Au moment de la scission du parti lepéniste, le ment axée sur les thèmes favoris de l’extrême droi-
groupe MNR comptera 7 élus. Le FN, 3. Mais, le 8 te, où l’insécurité prime. Elle n’a de cesse de cher-
mai 2000, René Becker, conseiller régional FN, quit- cher à séduire l’électorat frontiste.
te le parti, tout en continuant de siéger comme
apparenté avec les deux autres anciens FN restants. L’ancien député FN Robert Spieler, président du
Mouvement Régionaliste d’Alsace, noue de son
Tous les élus FN et ex-FN, où qu’ils soient à pré- côté une alliance avec le MPF de de Villiers.
sent (MNR, Mouvement régionaliste…) siègent,
grâce au président Zeller, dans des commissions…

Lors d’une récente législative partielle, le 18 juin


2000, dans la sixième circonscription du Bas-Rhin,
le candidat mégrétiste, qui réalise un bon score ,
appelle à voter pour la droite. Gérard Fre u l e t
(MNR) déclare à la suite du premier tour : " P a s
d’abstention, pas une voix à Spiegel (le candidat PS),

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Gauthier. “ Sur le terrain, nos électeurs ne compren -
nent pas que nous ne passions pas d’accord avec le
F N ”, confie Jean-Jacques de Peretti, ancien
m i n i s t re RPR et proche d’Alain Juppé, maire de
Bordeaux.
Aquitaine
Durant l’élection du 20 mars 1998, deux élus
UDF-DL des listes Valade - Jean-Pierre Bébéar
( f r è re de Claude Bébéar, le président d’AXA) et
La région avant 1998 Claude Espied - vont voir Jacques Colombier, chef
Depuis 1992, une coalition UDF (17), RPR (14) et de file lepéniste dans la région.
chasseurs (9 CPNT) assurait la majorité au
Président de la région, le sénateur et ancien La Gauche seule est minoritaire d’une voix dans
m i n i s t re, Jacques Valade. La gauche compre n d la Commission permanente. Alain Rousset, prési-
alors 31 conseillers régionaux (6 PC, 20 PS, 2 PRG dent de la région (PS), doit donc souvent compo-
et 3 Verts) et les extrémistes 10 élus (dont 8 FN). ser avec le groupe de 8 chasseurs de CPNT.

Les élections régionales de mars 1998 En attendant mars 2001


Alors qu’elle se présente en ordre dispersé dans Lors d’un meeting à Paris au Palais des Sports,
les cinq départements de la région, la gauche plu- le 29 mai 1997, quelques jours avant les élections
rielle détient, avec 8 élus PC, 1 MDC, 28 PS et 3 législatives, Jean-Marie Le Pen invite ses militants
Verts, une majorité relative confortable au conseil à soutenir certains candidats de droite. Parmi eux,
régional d’Aquitaine. Alors que le FN gagne un Jean Valleix, 73 ans, député RPR depuis 1967 et
siège par rapport au scrutin de 1992, la droite perd maire du Bouscat (Gironde). Déjà en 1989 et 1995,
trois sièges. Jean Valleix accueille sur sa liste des candidats du
F ront National (3 élus en 1989, 4 en 1995). Au
Jacques Valade (RPR) est tenté jusqu’au bout de moment des élections régionales de 1998, il décla-
s’allier avec le FN pour conserver son siège de pré- re que les présidents élus avec les voix du FN sont
sident. Toute la semaine précédant le vote, ses sur la bonne voie pour sauver la droite. Jean
conseillers et les élus militent en faveur d’un geste Valleix reste bien membre du RPR et demeure un
de conciliation envers le FN. “ Nous ne relèverons des bras droits d’Alain Juppé au sein de la
pas les empreintes digitales sur les bulletins ” dit le Communauté Urbaine de Bordeaux (CUB).
d i recteur du cabinet de Valade, Yv e s - B e r n a rd

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Alain Juppé, également député de la Gironde, a
rendu le 25 novembre 2000 dans le Figaro-Magazine
un hommage à Jacques Bainville, historien du
début du siècle lié à l’Action Française : il le voit
“ auteur visionnaire ”. Ce qui réjouit le quotidien
Présent dans son édition du 28 novembre 2000. Auvergne

À Bordeaux, Charles Pasqua compte présenter


en mars 2001 une liste RPF avec Simone Noailles
(72 ans) comme présidente du comité de soutien, La région avant 1998
première adjointe de feu Jacques Chaban-Delmas Présidée par l’ancien Président la République
(RPR) quand il effectuait son ultime mandat de Valéry Giscard d’Estaing (UDF), la région
maire de Bordeaux, entre 1989 et 1995. A u v e rgne, entre 1992 et 1998, compte 25 élus de
droite (1 CNPT, 11 UDF, 10 RPR, 3 div. d.), 18 élus
de gauche (4 PC, 8 PS, 1 DVG et 5 Verts) et 4
conseillers FN.

Les élections régionales de mars 1998


Suite au scrutin de mars 1998, Valéry Giscard
d’Estaing conserve la majorité relative du conseil
régional d’Auvergne puisque si la droite dispose
de 22 élus (8 UDF, 8 RPR, 1 MPF, 4 DVD., 1 GE), la
gauche en compte 21 (6 PC, 11 PS, 1 DVG., 3
VERTS) et le FN 4 .

Avec, Valéry Giscard d’Estaing, la droite vote


pour des candidats du FN. “ VGE ménage le FN en
A u v e rg n e ” ( t i t re du M o n d e du 8 avril 1998). La
d roite octroit aux élus du FN 37 délégations au
sein des organismes extérieurs. Le porte-parole de
la droite (UDF-RPR), Jean Proriol (UDF) s’ex-
plique : “ Le groupe de la majorité respecte les minori -
tés, quelles qu’elles soient, et nous devons respecter la

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p roportionnelle ” ou encore “ Les élus du Fr o n t
National sont des élus comme les autres ”.

Résistances
Le 6 avril 1998, la droite régionale accorde 37
délégations au FN, dont 19 dans des établisse- Bourgogne
ments scolaires, universitaires ou de formation.
Déjà de 1986 à 1997, la droite leur accorde discrè-
tement quelques délégations. Une délégation cor-
respond à la représentation de la région par un élu La région avant 1998
dans les institutions et organismes au sein duquel Depuis sa création en 1972, le conseil régional est
est impliqué le Conseil régional. Dans les com- présidé par la droite, à l’exception d’un court épi-
missions, même compromission : Claude Jaffrès est sode de 1979 à 1983. Il s’agit là d’une droite tradi-
ainsi secrétaire de la Commission culturelle et tionnelle, avec une solide assise notable et rurale,
Jacques Mayadoux (Allier), vice-président de celle rassemblée depuis 1974 au sein de l’UAB (Union
chargée du développement économique. pour l’Avenir de la Bourgogne), composée de
l’UDF, du RPR et de non-inscrits. Elle domine dans
En juin 1998, le Comité unitaire départemental les départements de l’Yonne et de la Côte d’Or. Le
de Vigilance contre l’extrême-droite, re g ro u p a n t groupe “ France unie ” marque cependant une cer-
plus de 40 organisations associatives, culturelles, taine originalité locale, son animateur Jean-Pierre
politiques et syndicales, publie un document Soisson utilisant son étiquette de ministre “ d’ou-
contre les délégations FN en Auvergne. “ Il s’agit v e r t u re ” des gouvernements Rocard et Cre s s o n
de combattre un discours de banalisation et de respec - pour élargir sa base électorale centriste, faible et
tabilité à l’égard du FN , il s’agit de combattre locale - disparate.
ment et concrètement l’enracinement comme l’influen -
ce du Front National dans les structures gérants des En 1992, le président sortant du conseil régional,
domaines importants pour notre vie quotidienne ”. Raymond Janot (UAB) refuse de se re p r é s e n t e r.
La course aux prétendants est ouverte à droite
sans que personne ne se dégage véritablement :
Dominique Perben (RPR) recueille les soutiens
timorés du RPR et de l’UAB face à Marcel Lucotte
et Jean-Pierre Soisson (qui laisse vivoter son petit
parti, le Mouvement des Réformateurs – MDR).

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Le 22 mars 1992, avec 24 élus, l’UAB sort vain- tien. Mais les jeux semblent d’ores et déjà faits : le
queur du scrutin face aux 3 élus de Soisson et aux FN choisit Jean-Pierre Soisson et tout porte à croi-
14 conseillers de la gauche. Cependant aucun bloc re qu’un accord de gestion est établi bien avant les
n’obtient la majorité absolue (29 élus). Le principe élections du 15 mars : Pierre Jaboulet-Ve rc h e r re ,
d’une alliance avec le FN est rejeté - en théorie - riche négociant en vins et chef de file du parti de
par Perben et Soisson. Les deux premiers tours de Jean-Marie Le Pen en Bourgogne (passé par le RPR
l’élection du président de région ne donnent rien. qu’il jugea “ trop mou face au socialo-communisme ”
Au troisième tour, l’UAB fait une nouvelle fois le Le Point 8 août 1998), voit en Soisson “ un président
plein des voix (24) ainsi que le candidat commu- de haut vol ” (Le Monde, le 20 mars 1998). Le RPR
niste. Soisson obtient quant à lui 25 voix issues de Jean-François Bazin l’a compris et tente, en jouant
la gauche, de son propre mouvement et du Front son va-tout, d’adopter une posture sans compro-
National. Soisson ne tient qu’une année dans cette mission, tout en entretenant l’ambiguïté, au cas où
position et l’UAB, avec une majorité relative, élit le FN changerait d’avis : “ Pas de cogestion ” avec le
ensuite Jean-François Bazin. FN, mais, s’empresse-t-il de préciser, “ je ne récuse
pas les voix du Front National, j’entends garder, en tant
Les élections régionales de mars 1998 que président, ma pleine indépendance ” (Le Monde , le
La campagne électorale est empoisonnée par le 20 mars 1998).
soupçon qui pèse sur une partie de la droite, prête
à passer alliance avec les lepénistes. Pierre Jaboulet-Vercherre affiche ses ambitions et
menace d’appeler à voter pour la gauche aux can-
Le 15 mars 1998, la gauche obtient la majorité tonales si la région ne reste pas à droite. Jean-Marc
relative en voix et en siège à l’assemblée régiona- Nesme, élu UDF proche d'Hervé de Charette, s’in-
le. Avec 24 élus, la liste de la Gauche plurielle terroge : “ Comment répondre aux attentes des 15% de
devance celle de l’UAB (20 conseillers), les divers la population ? ”. L’alliance entre droite et extrême
droite (2), les chasseurs (2) et le FN (9). Jean-Pierre droite est en marche. Pour preuve, Soisson gagne
Soisson est devancé chez lui, dans l’Yonne, par la les primaires à droite, organisées pour le départa-
liste de Gauche plurielle tandis que Jean-François ger avec Bazin.
Bazin, son rival à droite pour la présidence de
région, arrive en tête en Côte D’or avec 7 élus. Le jour du scrutin, Eugène Teisseire (PS) se pré-
sente pour la gauche plurielle. Il recueille à tous les
L’élection du président de région tours de scrutin les 24 voix de la gauche. Soisson
Le Front National sème le doute avant le scrutin recueille 29 voix au troisième tour, bénéficiant de
du 20 mars, de façon à monnayer un éventuel sou- l’appui complet des 9 conseillers FN. Eugène

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Teisseire regrette “ les valeurs républicaines sacrifiées de la nouvelle élection du président, n’est qu’une
sur l’autel des intérêts particuliers ” (Le Monde, le 21 répétition du 20 mars. La stratégie mise en place le
mars 1998). 7 avril est seulement plus élaborée. Soisson n’est
pas présent aux deux premiers tours du scru t i n ,
L’accord est solidement entré dans les esprits et c o n t r a i rement à Eugène Te i s s e i re qui recueille à
les faits à tous les échelons de la région. Dans chaque tour les 24 voix unies de la Gauche plu-
l ’ Yonne, le retrait d’Yves Capdevielle, candidat rielle. Le stratagème éclate au troisième et dernier
divers droite dans la canton de Sens-Sud-Est, pour tour de l’élection : Soisson se porte candidat tan-
favoriser Pierre Péres, candidat FN arrivé en troi- dis que les 9 conseillers Front National répartissent
sième position, est imposé par Henri de Raincourt, leurs voix sur lui et le candidat socialiste. Ils espè-
sénateur et président (DL) du Conseil général. rent ainsi mettre les deux candidats à égalité,
S’estimant devenu “ monnaie d’échange pour per - auquel cas Soisson l’emporterait au bénéfice de
mettre l’élection de Jean-Pierre Soisson à la présidence l’âge. Malheureusement pour les lepénistes, Jean-
de la région ”, Yves Capdevielle dénonce “ la mafia Pierre Soisson recueille 27 voix contre 26 à Eugène
politique ” de l’Yonne. Pour Henri de Raincourt, il Teisseire qui hérite de deux voix d’extrême-droite.
s’agit “ simplement d’une sage solution afin d’éviter Un conseiller FN n’a pas voté ou un conseiller de
l’élection d’un conseiller communiste ”. droite a mal voté. Reste que sans connaître le résul-
tat, Soisson annonce qu’il est élu au bénéfice de
Alors que dans le même temps le candidat d’ex- l’âge.
trême droite à Pont-sur-Yonne, Gille Roth, se reti-
re du combat au profit de Guy Languillat (RPR). Voici la liste des élus de droite qui ont mêlé leurs
“ Cet arrangement n’est pas étranger à la bataille voix à celles du FN pour faire élire Soisson, ou qui
conduite par la droite pour la présidence de la ont laissé faire: Jean-François Bazin, Anne Boutier,
Bourgogne ” notent les journalistes du M o n d e ( 2 0 J e a n - P i e r re Bouvet, Hubert Brigand, Bernard
mars 1998). Chevalier, Maurice Chufon, Claude Dassie, Rémi
Delatte, Michel Delprat, Marie-Louise Fort, Fabien
Mais l’élection du 20 mars est trop visible et l’en- Genet, Jean-Louis Hussonois, Anne-Catherine
semble de la droite, décrédibilisée, est mal à l’aise. L o i s i e r, Jean-Jacques Lété, Madeleine Mazière s ,
Soisson n’est pas dupe. Il sait que l’effet média- Philippe Morel, Simone Rignault, Alain Suguenot,
tique retombera très vite et cherche à gagner du Louis Trébuchet.
temps pour calmer les esprits. En direct au 20
heures de TF1, Soisson annonce sa démission du Bettina Laville, conseillère régionale PS de
poste de président de Région. Le 7 avril 1998, date B o u rgogne, en mai 1998 : “ Les dérives de la cam -

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pagne étaient annonciatrices du complot : on ne manie préfet ne se décommande et que les élus de gauche
pas impunément chez notre peuple, sensible au verbe et ne boycottent les inaugurations. Arnaud
à l’Histoire, les mots “ Travail, Famille, Patrie ” : lors - Montebourg, député PS de Saône-et-Loire organi-
qu’on se les approprie, comme l’ont fait de nombreux se des “ contre-inaugurations ” pour “ éviter d’avoir
candidats RPR et UDF pendant la campagne, on trans - à serrer la main de Jean-Pierre Soisson ” (Le Figaro du
gresse l’interdit sourd qui règne en France, au moment 13 octobre 1998). Jean-Pierre Soisson se défausse
même où s’achève, avec l’affaire Papon, la sombre psy - ainsi lors de l’inauguration d’une antenne du
chanalyse de l’Occupation (...) M. Soisson a vendu la conseil régional à Sens (Yonne), en septembre 1998.
B o u rgogne à sa dérisoire carrière, se réclamant de
manière assez scandaleuse, d’un souhait du Président Depuis la rentrée 1998, les séances du Conseil
de la République. Jusqu’où ira-t-on en forfaiture s d’Administration de l’université de Dijon sont per-
diverses ? Il est triste que la droite de Saône-et-Loire ait turbées. Le comité de vigilance refuse la présence
été la meilleure alliée de M. Soisson : on peut com - de la représentante (RPR) du conseil régional, et
prendre que Dominique Perben trahisse aujourd’hui les celle “ d’élus de la droite qui travaillent sans états
orientations de la direction politique à laquelle il appar - d’âme avec un parti propageant des thèses racistes,
tient, en ne condamnant pas Jean-Pierre Soisson, et en xénophobes, sexistes et négationnistes ” (Le Monde, le
élaborant une théorie misérable qui peut se résumer 18 novembre 1998). Dans les lycées également, la
ainsi “ Combattons le FN en nous mettant d’accord résistance s’organise pour empêcher à des repré-
avec lui ”. On reconnaît son hypocrisie aux récents pro - sentants frontistes de la majorité du Conseil régio-
pos tenus au récent dîner soi-disant républicain : le chi - nal de siéger dans leurs conseils d’administration.
raquien Perben condamne le FN, mais pas ceux qui s’al - Au lycée Henri Parriat de Montceau-les-Mines, le
lient avec lui. Nesme avait déjà explicité cette théorie lepéniste Launay est régulièrement mis en échec
indigne dans le Journal de Saône-et-Loire. Ces mes - par un collectif lycéen, qui réussit alors à mobili-
sieurs avancent masqués mais les masques sont trans - ser la quasi-totalité des élèves en une manifesta-
parents. Comment comprendre qu’une femme comme tion silencieuse en octobre 1998. Une manifestation
Mme Mazières, presque au seuil de sa soixante dixième a lieu au Creusot en juin 1998 contre les alliances,
année, accepte de perdre son honneur en se faisant élire sur l’initiative du Mouvement des Jeunes
pareillement Première Vice-présidente ? Comme femme, Socialistes local.
comme élue femme, j’ai de la peine ”.
L’élection de Soisson a déchaîné une vague de
Deux ans d’alliance p rotestations dans le monde de la culture, et les
Le président de région ne prévient qu’à la der- responsables des grandes scènes de Bourg o g n e
nière minute de sa venue, pour éviter que le sous- refusent désormais de le re n c o n t re r. Pourtant,

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Soisson joue la carte de la séduction avec un milieu Il s’est exprimé dans Minute
où il ne risque pas d’interférer avec le FN : hausse Philippe Auberger, député RPR, vice-président
du budget, aides aux petites structures (moins sus- du conseil général de l’Yonne et maire de Joigny,
ceptibles de lui demander des comptes politiques), le 29 novembre 2000.
création d’un comité de sages. “ Soisson sait que la
culture est un domaine politiquement sensible ” affir-
me Jean-Yves Le Corre, responsable de la DRAC.
Un collectif culture citoyenne est mis en place en
réponse à cette politique.

Les transfuges
Le groupe FN du conseil régional, composé
initialement de neuf membres, éclate après la scis-
sion de l’extrême-droite. Les mégrétistes sont trois,
les lepénistes également et les trois derniers siègent
d’abord chez les non-inscrits avant de trouver une
place parmi la droite dite “ républicaine ”. Pierre
Péres et Liliane Floiras font ainsi ce parcours ini-
tiatique de la repentance, transfuge discret qui
annonce encore quelques recyclages avant les
municipales et les cantonales de mars 2001.

P i e r re Jaboulet-Ve rc h e r re (FN) explique au


Figaro-Magazine le 31 décembre 1999 que “ Pierre
Péres et Liliane Floiras ont été exclus du Front National
le 19 février 1999 pour avoir rejoint les rangs du MNR,
la double appartenance n’étant pas admise par les sta -
tuts du Front national (…) Le groupe FN au conseil
régional de Bourgogne compte toujours cinq membres
et, même s’il apporte toujours à Jean-Pierre Soisson un
soutien sans participation, il n’a pas la moindre inten -
tion de rejoindre la “majorité” régionale ”.

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décembre 1998).

Le 21 mai 1998, à Brest, deux mille manifestants


empêchent Olivier Morize (FN) de re n t rer au
conseil d'administration du lycée pro f e s s i o n n e l
Bretagne Lanroze. Le 29 mai 1998, un millier de personnes
manifestent dans les rues de Rennes contre la pré-
sence d’élus FN dans les conseils d’établissements.

La région avant 1998 Josselin de Rohan est cité en exemple dans


La région est présidée par Yvon Bourges (RPR) National Hebdo (9 juillet 1998) : il dénonce “ u n e
qui ne se représente pas en 1998. L’ancien ministre campagne orchestrée par les mouvements trotskystes et
et sénateur s’appuye sur une majorité relative (41 l’ultragauche pour faire diversion sur le social ”.
élus contre 27 à gauche). Christian Bonnet, sénateur centriste du Morbihan
et ancien ministre, parle de “ déplorables manifesta -
Les élections régionales en 1998 tions d’intolérance ” à l’égard des pr o t e s t a t i o n s
Composition du Conseil régional : 39 conseillers contre les élus FN siégeant dans les lycées.
de droite (17 UDF, 15 RPR, 1 CPNT, 5 Div. droite,
1 GE), 37 de Gauche (25 PS, 6 PC, 3 Verts et 3 Il s’est exprimé dans Minute
conseillers d’extrême-gauche), 7 FN. La gauche François Goulard, député DL du Morbihan
progresse et manque de se retrouver à égalité avec (proche de Alain Madelin) - candidat à Vannes aux
une droite emmenée par le sénateur chiraquien municipales de 2001 - , le 5 avril 2000.
Josselin de Rohan.
Il s’est exprimé dans L’Hebdo du Quotidien
Au deuxième tour, 5 conseillers FN décident de Alphonse Arzel, sénateur Union Centriste du
voter avec les 39 RPR-UDF-indépendants. Josselin Finistère, le 23 août 2000.
de Rohan, président du groupe RPR au Sénat
(proche de Chirac), élu avec les voix FN dont il n’a
pourtant pas besoin pour l’emporter, accepte que
les élus lepénistes siègent dans les lycées, refusant
l ’ a c c o rd que la gauche lui proposait. “ Ils ont été
normalement élus et leur parti n’est pas interdit. Au
nom de quoi devrait-on les exclure ? ” (La Croix, le 4

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( L o i ret) pour l’UDF, sans oublier l’UDF-Forc e
Démocrate Marie-Thérèse Allain (Loiret). Patrick
Serpeau, dissident RPR, parle d’un simple “ accord
interne de fonctionnement avec le FN pour éviter que
cette région ne passe à gauche ” (Le Monde, le 20 mars
Centre 1998). Au lendemain du 15 mars, seuls deux
conseillers de droite refusent les voix du FN :
Renaud Donnedieu de Va b res UDF et François
Bordry UDF-FD. Le premier refuse toute compro-
La région avant 1998 mission avec un parti “ xénophobe ” . Bordry “ mani -
Le maire UDF-DL de Lutz-en-Dunois, Maurice festera même dans les rues de Tours avec le Parti com -
Dousset, préside la Région de 1992 à 1998 à la tête muniste ” (Le Figaro, le 6 avril 1998).
d’une majorité de 35 élus (16 UDF, 17 RPR, 2
DVD), la gauche ne disposant que de 30 sièges (8 L’élection du président de région
PC, 16 PS, 2 PRG, 4 Verts), et le FN de 11 élus. C’est P remier acte, le 20 mars, Michel Sapin (tre n t e
Renaud Donnedieu de Va b res (UDF) et non trois voix) est battu par Bernard Harang qui, s’il ne
Maurice Dousset qui mène la coalition RPR-UDF fait pas le plein des voix de son camp (sept RPR et
pendant la campagne des élections régionales de UDF refusent de voter pour lui), gagne grâce à
1998. l’appui du FN (treize élus).

Les élections régionales de mars 1998 Cinq mille personnes manifestent dans les rues
Composition du Conseil : 1 LO, 33 Gauche plu- d’Orléans le 25 mars pour demander sa démission.
rielle (9 PCF, 20 PS, 1 PRG, 3 Verts), 1 CPNT, 28 Suspendu de l’UDF, il démissionne le 27 mars.
RPR-UDF (14 UDF, 14 RPR), 1 DVD, 13 FN. Dans l’incapacité de faire élire son exécutif,
Bernard Harang se trouve confronté à une situa-
Face aux seuls résistants que sont Renaud tion politique intenable. Plein d’amertume et ne
Donnedieu de Vabres et François Bordry(UDF), la regrettant pas son alliance avec l’extrême droite,
droite décide de passer alliance avec le FN. Le can- c’est contraint et forcé que Bernard Harang se reti-
didat à la présidence ne peut se trouver que parmi re : “ J’entends déjà les commentaires sur la victoire de
les quatre “ ambassadeurs ” auprès du FN : Annick la démocratie contre une tentative de coup de force. La
Courtat (Loiret) et Michel Marchais (Indre-et-Loire) vérité est toute contraire, tristement contraire, et le prêt
pour le RPR, tête de liste dans leurs départements à penser n’y changera rien ”. Marie-France Stirbois
respectifs, Alain Tanton (Cher) et Bernard Harang (FN) “ il a voulu garder la région à la droite. Nous

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étions sans grande exigence, nous ne demandions pas La veille de l’élection régionale, Yves Fromion,
de vice-présidence. Avoir une présidence de commission, député RPR du Cher, Etienne de Saporta, candidat
celle de la formation par exemple, cela nous paraissait UDF aux cantonales et le comte Jean d’Ogny, diri-
logique, mais nous n’en sommes même pas venus jus - geant monarchiste FN du Cher se retrouvent chez
qu’à cela ”. le marquis de Maupas pour un “ cocktail amical
dans leur château ” (Le Monde, le 9 juin 1998). “ Tous
Voici la liste des élus de droite qui ont mêlé leurs nos amis disent qu’il faut une droite plurielle, assure
voix à celles du FN pour faire élire Harang, ou qui Mme de Maupas. Et ici, le Front National fait moins
ont laissé faire : André Advenier, Marie-Thérèse peur que le communisme. Ce ne sont pas des pestiférés,
Allain, Marc Andrieu, Monique Bevière, Claude n’est-ce pas ? ”.
Chanal, Colette Chauvigne Bourlaud, Jean-Jacques
Descamps, Jean-Pierre Door, Colette Girard, Daniel F romion a reçu, le mardi suivant l’élection,
G u e ret, Jean-Louis Hay, Michel Hubault, Paul Marie-France Stirbois et Jean Verdon, délégués par
Martinet, Joel Pelicot, Barbara Romieux, Guy le FN pour négocier avec la droite l’élection du
Vasseur, Alain Venot, Philippe Vigier. président de la région Centre. Quatre autre s
“ a m b a s s a d e u r s ” - Annick Courtat et Michel
Deuxième acte, le 6 avril. Lors des trois tours, M a rchais pour le RPR, Alain Tanton et Bernard
Michel Sapin fait le plein des voix de gauche (tren- Harang pour l’UDF - envisagent ensuite avec
te trois). La droite affiche sa désunion dès M.Verdon un “ accord interne de fonctionnement pour
le deuxième tour : les quatorze élus RPR votent que la Région ne passe pas à la gauche ”. “ Tout le
pour leur président, Guy Vasselage, non-candidat, monde nous disait : la droite est majoritaire. Et nous,
et quatre conseillers DL sur les quatorze UDF nous connaissions ces types, que l’on disait fascistes et
dont Bernard Harang, ne prennent pas part au nazis, depuis deux mandats à la région. Quand il a fallu
vote. Jean Verdon (FN) se présente au deux tours : les rencontrer, nous n’avons pas vu où était le problè -
“ La droite RPR-UDF n’ayant plus le courage de m e ” a ffirme Marie-Thérèse Allain, conseillère
présenter un candidat, je le suis au nom des 55% régional UDF et soutien de Harang.
de Français qui ont voté pour que cette région retour -
ne à droite ” (A F P). Michel Sapin, finalement Le FN est fortement implanté dans la région,
élu au troisième tour, quitte rapidement l’hémi- “ populaire et musclé dans les environs de Dreux, nota -
cycle sous les insultes et les injures d’un public bilisé et policé au cœur de la Touraine ”. “ En provin -
essentiellement composé de militants de droite : ce, le FN fait moins peur parce qu’on le pratique ” résu-
“ socialiste fasciste ”. me André Merlin, gouverneur du Rotary Club
dans la région. “ Cela fait douze ans que l’on discute

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avec le FN à la région, renchérit Yves Fromion. Tous pas sur la couleur de peau ou l’origine, mais sur la
les mois, après la réunion de la commission permanen - nationalité. "
te au conseil régional, nous déjeunions tous ensemble
dans une ambiance de parfaite convivialité ”. L’ancien
m a i re d’Orléans, Jacques Douffiagues, autre f o i s
m e m b re de “ la bande à Léo ” écrit à Harang :
“ Ton choix était le bon, quoi qu’en disent les bien-pen -
sants ”. Jean-Jacques Descamps, partisan jusqu’au
bout de “ conserver la région à la droite ” affirme :
“ Nos électeurs se disent que si on n’ose pas accepter les
voix du Front National, c’est qu’on cédera toujours aux
médias et à la gauche, et qu’on n’osera pas dire ce qu’on
pense et faire ce qu’on dit ”.

Bernard Harang lui-même explique : “ Le FN est


raciste et xénophobe. Mais on est d’accord sur l’immi -
gration, sur la sécurité et sur la famille. Ce qu’à fait
Millon est une des voies de la recomposition ”.

Il s'est exprimé dans Minute


Renaud Donnedieu de Va b res, député UDF
d’Indre-et-Loire, le 22 novembre 2000.

Ils se sont exprimés dans L’Hebdo du Quotidien


Maurice Leroy, député UDF du Loir-et-Cher, le
15 mars 2000).
G é r a rd Hamel, député RPR d’Eure - e t - L o i r, et
maire de Dreux, le 10 mai 2000 : " Je suis opposé au
droit de vote des immigrés aux élections municipales.
(…) Il n’y a pas de problèmes d‘immigrés ou de rejet des
étrangers mais de là à leur donner la possibilité de déci -
der de notre sort, même sur le plan local, personnelle -
ment je n’ai pas franchi cette étape. (…) Je ne m’appuie

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l’élection de représentants du FN dans les établis-
sements hospitaliers (L’Humanité Hebdo, le 24 sep-
tembre 1998). Si pour le Conseil d’administration
du centre hospitalier de Langres, la gauche vote
pour la droite afin de barrer la route du FN, la
Champagne-Ardennes droite vote pour le FN pour le CA du centre hos-
pitalier de Troyes contre le communiste Pierre
Mathieu. “ Les parrains du conseiller FN ” sont le
secrétaire départemental RPR de l’Aube, l’élu chas-
La région avant 1998 seur, et deux adjoints de François Baroin, proche
Jean Kaltenbach (RPR) dirige la région de Jacques Chirac, dont il fut le porte-parole.
C h a m p a g n e - A rdennes de 1992 à 1998 avec une
courte majorité. L’ancien président et maire Au moment de l’élection d’Anne-Marie
d’Eurville-Bienville s’appuye sur 24 élus de droite Comparini (UDF), le député RPR de Haute-Marne
(13 UDF, 9 RPR et 2 Divers) et sur deux élus chas- François Cornut-Gentille estime que le “ mauvais
seurs (CPNT) face à 15 conseillers de gauche (3 PC, procès fait à Philippe Séguin est déplacé et indigne ”. Il
9 PS et 3 écologistes). Le FN comptait alors 8 ajoute : “ L’UDF n’a rien à gagner à jouer contre son
conseillers. camp pour exister ”.

Les élections régionales de 1998 Ils se sont exprimés dans L’Hebdo du Quotidien
En dépit d’une progression de 3 ou 4 points, le Philippe Martin, député RPR de la Marne et
FN n’obtient qu’un siège supplémentaire en 1998 m a i re de Cumières, le 14 juin 2000 : “ Je souhaite
(9 élus). Les candidats de droite n’obtiennent que qu’un minimum vital soit instauré en faveur de l’en -
17 sièges (10 RPR et 7 UDF), soit autant que la trepreneur individuel en cas de saisie ”.
gauche plurielle (12 PS, 3 PC, 1 Verts, 1 MDC) qui Jean-Luc Warsmann, député RPR, conseiller
progresse de cinq sièges. Mais avec trois conseillers général des Ardennes et maire de Douzy, le 19
de droite élus sur des listes dissidentes et un élu avril 2000 : " A mes yeux, le RPF fait évidemment par -
chasseur, le RPR et l’UDF conservent une majorité tie de l’opposition et grand nombre de personnes qui
relative. Jean-Claude Etienne (RPR) est élu prési- sont au RPF ont été, avec l’ensemble des élus de l’op -
dent du conseil régional. position, dans un grand nombre de combats dans les
années passées".
Député de la Marne, le nouveau président noue
une alliance avec l’extrême droite pour favoriser

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dans L'Est Républicain du 19 mars d'offrir “ deux ou
trois suffrages ” venus de l'extrême droite pour per-
mettre l'élection de Jean-François Humbert au pre-
mier tour. Ce dernier refuse cette hypothèse. Pierre
Moscovici, ministre PS, pour sa part, est favorable
Franche-Comté à une “ cogestion totale, négociée pour six ans, afin que
la région puisse être gouvernée sans devenir l'otage du
FN ”.

La région avant 1998 L'élection du président est, comme dans la


Le conseil régional est présidé par Pierre B o u rgogne voisine, l'occasion d'un subterfuge :
Chantelat (UDF-DL), qui s’appuie sur une majori- tandis que Jean-Marc Brissaud est candidat pour
té relative de 23 RPR-UDF-DVD. et 2 écologistes le FN, la totalité des neufs voix d'extrême droite se
face à 13 élus de gauche (7 PS, 2 MDC, 1 DVG, 1 porte sur le candidat de la droite, Jean-François
Vert, 2 écolos) et 1 d’extrême-gauche. Humbert. Le nouveau président n'est pas dupe et,
courageusement, se retire: “ Comme je me dois d'être
Les élections régionales de mars 1998 en parfaite harmonie avec mes convictions et les propos
Ces élections placent droite et gauche à égalité que j'ai tenus antérieurement, à l'heure qu'il est, je
en nombre de siéges (17). Le PS obtient 9 élus, les démissionne de la présidence de la région Franche-
Verts 3, le MDC 2 et le PC 1. UDF et RPR sont à Comté ” (Le Monde, le 22 mars 1998). Humbert n'en
égalité avec 8 conseillers chacun, face à 9 élus fron- est pas à son premier coup d'éclat. Ainsi, il avait
tistes (plus 5 par rapport à 1992). déjà démissionné de la présidence du gro u p e
régional de l’UDF suite à des accords passés entre
La droite comportant dans ses rangs les tro i s la droite et le Front National pour les cantonales
conseillers les plus âgés, elle espère garder la pré- (La Cr oix, le 22 mars 1998). Sa décision ne fait pas
sidence de la région au bénéfice de l'âge. l'unanimité au sein de la droite régionale. Gérard
Cependant, le candidat de la gauche, Christian Bailly, président (RPR) du conseil général du Jura,
P roust (MDC) aff ronte le 20 mars Jean-François prévient : “ Je ne voterai pas pour un démissionnaire "
Humbert (UDF-PPDF). Nombreuses sont les voix (Le Monde, le 22 mars 1998).
qui s'élèvent à droite pour accepter un accord avec
l'extrême droite. René Mars, élu chasseur et ancien À l'ancien ministre des Affaires étrangères, Hervé
du FN, “ ami de Jean-Marie Le Pen ” comme il aime de Charette, revient sans nul doute la palme de
à le préciser (Le Monde, le 20 mars 1998), propose l'hypocrisie : s'il félicite son ami Humbert, issu du

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même groupuscule que lui (le PPDF), d'avoir reje- Bernard Simonnot, secrétaire départemental UDF
té les voix d'extrême droite, il refuse de condam- de Haute-Saône, explique que l’on doit “ accepter
ner son secrétaire général, Jean-Marc Nesme, qui les voix dans le secret des urnes, d’où qu’elles vien -
soutient Soisson et ses amis du FN en Bourgogne. nent ” (Le Monde, le 22 mars 1998). Gérard Bailly,
président RPR du conseil général du Jura, est sur
Jean-François Humbert demeure cependant can- la même ligne.
didat pour les nouvelles élections organisées le 3
avril 1998. Tandis qu'à gauche, Christian Pro u s t L’accord connait quelques ratés, notamment sur
(MDC) milite pour une alternance négociée - trois les emplois-jeunes dès l’été 1998. Le bilan re s t e
ans sous sa présidence, trois ans sous celle de Jean- cependant positif et permet d’écarter l’extrême
François Humbert - Pierre Moscovici (ministre PS, droite de la scène régionale, même si une partie de
Doubs) souhaite mettre en place un “ code de bonne la droite reste tentée par des alliances ponctuelles.
conduite ” entre droite et gauche. Le 5 décembre 2000, Jacques Chirac, plus oppor-
tuniste que jamais, profite d’une cérémonie pour
Le 3 avril, les élus socialistes, communistes, Verts saluer Jean-François Humbert (“ la morale paye ”
et de la CAP ne prennent pas part au vote au troi- dira-t-il) pour son refus d’une alliance avec le FN.
sième tour, permettant l’élection de Jean-François On attend toujours qu’il dénonce ceux qui, nom-
Humbert. Le candidat MDC, Christian Proust, ne breux dans tous les partis de la droite, ont bel et
recueille que 3 voix. “ Nous avons fait le choix de faire bien conclu des pactes avec l’extrême droite.
sortir la Franche-Comté par le haut de cette impasse ”
déclare Pierre Moscovici.

L’ a c c o rd politique entre la droite et la gauche


prévoit la création d’une commission mixte de
concertation excluant le FN, un accord program-
matique a minima (préservant notamment les
emplois jeunes) et l’exclusion des élus frontistes
des lycées. Un “code de bonne conduite” est mis en
place entre la gauche conduite par le ministre (PS)
P i e r re Moscovici et la droite de Jean-François
Humbert (UDF-PPDF, aussi sénateur du Doubs).

Tous à droite ne soutiennent pas cette démarche :

52 53
didate pour la droite, après qu'Edouard Balladur
se soit défaussé. Cette désignation a coupé court
aux espoirs de certains élus de droite de conserver
la région à tout prix. Sa candidature est entérinée
par l’intergroupe UDF-RPR moins quatre absten-
Ile-de-France tions. Dans sa déclaration écrite, Dominique
Versini répudie “ par avance la tentation des extrêmes
xénophobes, racistes et antisémites ”. Ce texte, note
l’édition du Monde du 25 mars 1998, irrite une par-
La région avant 1998 tie de la droite, qui ne donne à sa candidate que 62
L’ancien ministre RPR Michel Giraud préside le voix sur 84 possibles. Sur 19 bulletins blancs ou
conseil régional d’Ile-de-France de 1992 à 1998 à la nuls, 15 portent le nom de Didier Julia, député
tête d’une large majorité de droite : alors que la (RPR) de Seine-et-Marne, clairement favorable à
gauche compte 68 conseillers régionaux (16 PC, 1 une alliance. Au deuxième tour, ayant compris la
apparenté PC, 2 MDC, 29 PS, 16 Verts), la droite en leçon, elle raye les termes d’ “ extrêmes xénophobes,
rassemble en effet 87, tandis que le FN bénéficie racistes et antisémites ” au profit de “ faire échec à la
déjà de 37 élus. gauche socialo-communiste et à tous les extrêmes ”. Elle
obtient au deuxième tour 66 voix. Le RPR et l’UDF
L’élection régionale de 1998 décident finalement de ne pas présenter de candi-
Édouard Balladur (RPR) échoue face aux listes dat au troisième tour.
de la gauche plurielle qui obtiennent la majorité
relative au conseil régional avec 86 élus sur 209, Le socialiste Jean-Paul Huchon – ancien directeur
c o n t re 84 élus de droite. 23 PC, 4 MDC, 44 PS et de cabinet de Michel Rocard quand celui-ci était
PRG, 15 Verts eyt 3 LO ; 48 RPR, 31 UDF-DL, 5 Premier Ministre -, à l’image de Michel Vauzelle,
DVD et 36 FN. Les élus Front National de 1998 est élu sans difficulté. Mais le nouveau président
sont aujourd’hui divisés, au Conseil Régional, s’aperçoit très vite de sa position délicate face à
e n t re les mégrétistes, re g roupés autour de Jean- une droite dure unie.
Yves Le Gallou (19 élus), et lepénistes, autour de
Martine Lehideux, vice-présidente du FN (17). Deux ans de compromission
Le 10 avril 1998, sous le titre “ Pr emière conver -
L’élection du président de la Région gence RPR-UDF-FN ”, Le Figaro note : “ Sur propo -
Dominique Versini (RPR), directrice du SAMU sition de Patrick Stéfanini (RPR), (ancien conseiller
social de Paris, est finalement choisie comme can- d’Alain Juppé et orfèvre pour ces manœuvres), une

54 55
commission Sécurité a été créée. La proposition de la chaines années. Ce vote est qualifié par Jean-Paul
gauche d’instaure r, en contrepartie, une commission Huchon ” d'événement d’une exceptionnelle gravité ”.
Citoyenneté, a été rejetée. Les voix du FN se sont mêlées B e r n a rd Lehideux, président du groupe UDF,
à celle du RPR et de l’UDF ”. Jean-Paul Huchon confirme que son groupe est prêt à “ ne re f u s e r
exprime un certain malaise à gauche : “ On consta - aucune voix ” pour obtenir ce vote. Roger
te une certaine nervosité à droite. Ils ne se remettent pas Karoutchi, séguiniste, président du groupe RPR,
d’avoir perdu le magot. On a pourtant du mal à imagi - a s s u re n’avoir sollicité “ aucune voix ”. Personne
ner qu’un homme comme Wiltzer signe avec Le n’en a rien cru. Dans le contexte, il est édifiant de
Gallou ” (FN). Le député de l’Essonne Pierre-André rappeler, comme le journaliste Renaud Dely le fait
Wiltzer est le responsable national des “ Adhérents dans Libération le 13 mars 1998 (personne, à droi-
Directs ” de l’UDF. te, ne doit ouvrir ce quotidien), en plein dans la
période traitée ici, que Le Pen, Jean-Yves Le Gallou
Chef de file de l’extrême droite, Jean-Yves Le et une centaine de militants sont allé le 12 mars se
Gallou explique “ qu'il peut y avoir une majorité recueillir, au cimetière de Montmartre à Paris, sur
alternative UDF-RPR-FN à l’exécutif actuel, qui est la tombe du négationniste (et antisémite virulent)
éclaté et minoritaire. Nous devons rechercher des majo - François Duprat (mort en 1978), en lui rendant un
rités d’idées de droite, comme lors du vote du règlement hommage ému…
intérieur où les élus RPR-UDF et FN ont voté ensemble
pour définir la taille des groupes et la création d’une Jean-Paul Huchon utilise finalement le vote du
commission de la sécurité ”. Le FN propose “ u n e 49-3 régional pour faire voter son budget : “ Nous
majorité d’idées ” à la droite (Le Monde, le 25 avril avons tout tenté pour ramener nos adversaires RPR et
1998). UDF dans un chemin républicain ” (Le Figaro du 2
mai 1998). Faute de majorité, Jean-Paul Huchon a
Le lundi 27 avril 1998, le PS Jean-Paul Huchon préféré retirer le dossier emplois-jeunes plutôt que
est mis en minorité sur un des points essentiels de d’essuyer une mise en minorité par la conjonction
son programme : la rénovation des lycées de la d’un vote négatif de la droite et du Front National
région (leur bon entretien est une des principales (Libération, le 26 juin 1998).
missions des régions). En ajoutant leurs voix à
celles du RPR et de l’UDF, les élus du FN permet- Le FN cherche à habituer les conseillers régio-
tent en effet l’adoption d’un amendement qui naux de droite à voter avec lui (Le Monde, le 25 juin
réduit de près de 2 milliards de francs, sur 5,3 mil- 1998). À chaque veille de réunion, Jean-Yves Le
liards, le financement du dispositif destiné à réno- Gallou annonce ses intentions. La tactique, dans
ver 175 établissements franciliens dans les 6 pro- un premier temps, est d’amener conseillers RPR et

56 57
UDF à s’opposer à des dossiers chers à la gauche. ration de dix millions de francs pour le maintien à
Elle se double également d’une volonté de voir ces domicile des personnes âgées dépendantes. Motif :
derniers se prononcer sur la “ préférence nationa- “ Dossier mal ficelé, pas assez élaboré ”. Idem pour le
le ”, un des thèmes les plus chers du FN, relancé “ passeport spectacle ” réservé aux 500000 lycéens et
sans gêne ni complexe le 14 juin 1998 par le RPR apprentis de la région. “ Trop coûteux ” selon l’op-
Edouard Balladur lui-même. Le groupe FN dépo- position. Le projet de transformation de bureaux
se en effet plusieurs amendements relatifs à la en logements sociaux est repoussé à la suite d’une
“ préférence nationale ”, afin de tester la cohésion motion du FN qui recueille une partie des suf-
de la droite républicaine et Balladur se prononce frages de la droite. Le vice-président chargé du
pour un débat public sur la question. Déjà quand Logement, Jean-Luc Laurent (MDC) déplore que
il était Premier ministre, il avait, le premier, reçu le “ la droite ait, en catimini, mêlé ses voix à celles du FN
FN à Matignon. pour repousser un dispositif qui correspondait aux
besoins des Franciliens ”. Une partie de la dro i t e
Concernant le logement social, le président du UDF-DL ne partageant pas l’attitude du gro u p e
g roupe frontiste, Jean-Yves Le Gallou, pro p o s e sur la question des logements, son président
d’ajouter au texte de l’exécutif de gauche un article Lehideux a décidé de voter contre le projet pour
ainsi rédigé : “ L’aide régionale en faveur du logement éviter d’afficher publiquement ces dissensions. Il
des plus démunis est subordonnée à la qualité de entraîne le RPR avec lui. Résultat : trente millions
citoyens français ou de ressortissants de l’Union euro - de francs échappent à la Ville de Paris. Deux des
péenne des futurs occupants de logements ”. “ Nous ne principaux adjoints de Jean Tibéri, Jean-François
pouvons qu’approuver l’ancien Premier ministre, lors - Legaret (RPR) chargé des finances, et Michel Bulté
qu’il demande si nous devons être le seul pays au monde (RPR), chargé du logement, qui sont aussi
à ne pouvoir débattre de ce sujet ”. conseillers régionaux, votent sans sourciller le rejet
de ces subventions.
Bertrand Lehideux, président du groupe UDF,
a ff i r m e : “ Je ne considère pas qu’il y ait des sujets L’absence de ligne claire des dirigeants natio-
tabous. Si nous refusons de parler de certaines choses, naux à droite pousse des élus déboussolés dans les
nous créerons des poches d’extrémisme. Même sur les bras du FN. Les partis veulent imposer une ligne
écrits abominables des négationnistes, il faut qu’il y ait ” d’opposition systématique ” face à l’exécutif de
débat, faute de quoi ces idées progresseront par capilla - gauche, ligne fortement contestée par les élus
rité, sans qu’on puisse les combattre ”. municipaux chargés des dossiers concrets. Jean-
Paul Huchon critique “ l’état de délabrement ” d’une
Le 1er octobre 1998, la droite rejette une délibé- opposition “ imprévisible ”. Il espère la “ cristallisa -

58 59
tion ” des groupes RPR et UDF-DL sur une ligne Parisien, le 5 novembre 1996) : ce serait “ du com -
“ d’une opposition constructive ” (Le Monde , le 10 munisme de droite ” et “ Ce n’est pas parce que Le Pen
octobre 1998). dit qu’il y a trop d’étrangers que je dois dire qu’il n’y
en a pas assez ”. D’ailleurs, quand la FN Marie-
Les partis de droite, associés au Front National, France Stirbois a l’idée de lui remettre en public,
repoussent un projet de création de centre d’art en mai 1996, une copie de la carte qu’il aurait prise
contemporain dans le XIXème arrondissement de au FN en 1976, il pâlit… avant de démentir mal-
Paris (Le Monde, le 13 juin 2000). Roger Madec, adroitement.
m a i re PS du XIXème, dénonce en Michel Bulté, Sa définition de l’électeur FN ? “ Je serais tenté de
“ fraîchement reconverti dans le séguinisme, l’instiga - dire : Un brave type qui en a marre de se faire prendre
teur de la main tendue vers l’extrême droite pour tor - pour un pauvre type ” (Le Figaro, le 20 juin 1996). Le
piller un projet culturel exemplaire dans l’arrondisse - M o n d e du 3 novembre 1996 titre son édito ainsi
ment où il s’apprête à être à nouveau candidat ”. Par “ Les dérapages de M.Raoult ”, jugeant qu’ils étaient
ailleurs, le petit-fils du Général De Gaulle, Charles répétés (mise en question du RMI qui tiendrait
De Gaulle, rallie en 1999 les rangs du FN pour les d’une “ culture de l’inactivité ”, déplacements des
Européennes, après avoir été élu sur une liste De familles de délinquants, plan Vigi-Casseurs et
Villiers (MPF) en 1994, où il figurait comme numé- pseudo-Plan Marshall pour les banlieues, compa-
ro trois. Il est en 2001 le chef de file FN à Paris raison entre banlieues et Intifida…) et entrait dans
XVème pour les élections municipales. La démons- un “ discours de guerre civile ”. Raoult ne renie pas
tration de la porosité entre les idées et les amis de son passé dans le très droitier syndicat étudiant
Pasqua et De Villiers et l’extrême droite est-elle UNI, et ne rejette pas non plus son amitié envers
e n c o re à faire ? Elle est, certes, en grande partie Roger Holeindre, grognard et partisan de la ligne
due à la décomposition, à l’archaïsme (positions d u re du FN, auprès duquel il siégea au conseil
sur la contraception, l’IVG, la parité, le PACS…) régional d’Ile-de-France.
aux querelles intestines et à la cruelle absence
d’idées porteuses et constructives dans les partis Durant l’été 1996, le suppléant du même Eric
de la droite classique… Raoult, Pierre Bernard, maire de Montfermeil et
député de Seine-Saint-Denis, s’est rendu aux
Appels du pied obsèques de Paul Touvier, ancien chef milicien et
Éric Raoult, ancien ministre, est depuis 1999 le nostalgique du régime de Vi c h y. Raoult s’en est
directeur des affaires politiques à la direction du alors démarqué, mais pouvait-il vraiment ignorer
RPR, sous la houlette de la présidente Michèle que celui-ci était “ proche des thèses lepénistes ”
Alliot-Marie. Lorsqu’il parle du FN, c’est ainsi (Le (L’Express, le 27 juillet 1995) ? On retrouvera ce tris-

60 61
te sire, qui est toujours maire, devisant devant le qu’il essaie “ d’attirer l’attention sur une proposition
Club de l’Horloge - passerelle entre droite et extrê- de loi (…) cosignée par 150 parlementaires et qui a été
me droite ayant pignon sur rue - en juin 2000, où a p p rouvée par plus de 26.000 Français et Françaises
il était “ très attendu ” (Présent, le 16 juin 2000), sous la forme d’une pétition (…) Nous souhaitons que
notamment pour développer, “ moment fort ”, les les députés issus de la fonction publique ne puissent
thèses de son ouvrage “ Le maire face à l’immigra - plus cumuler à la fois leur statut très avantageux de
tion ”… haut fonctionnaire et leur statut de parlementaire " .

Aux législatives de 1997, le candidat RPR Raoul Patrick Stéfanini, conseiller régional RPR d’Ile-
Béteille (Seine-Saint-Denis), ne pouvant se main- de-France, est devenu à l’automne 2000 le direc-
t e n i r, appelle à faire battre au second tour la teur de campagne de Philippe Séguin pour le
gauche en soutenant implicitement François- XVIIIème arrondissement de Paris. Il faut rappeler
Xavier Sidos, candidat FN, réputé très dur (ancien que Patrick Stéfanini fut un très proche collabora-
membre du cabinet de Le Pen, ancien rédacteur en teur (chargé de mission puis directeur de cabinet)
chef adjoint de La Lettre de Jean-Marie Le Pen, il fut d'Alain Juppé quand celui-ci dirigeait le secréta-
un merc e n a i re utilisé par Bob Denard aux riat général du RPR (1991-94), tout en travaillant,
Comores, selon le quotidien La Cr oix, le 7 octobre ou plutôt en émargeant (cela lui a causé quelque
1995). souci et soupçons judiciaires quant à la réalité de
l’emploi occupé…), à la Mairie de Paris. Il fut
Jean-Claude Mignon, député RPR de Seine-et- ensuite directeur de la campagne de Jacques
Marne et maire de Dammarie-les-Lys (L’Hebdo du Chirac pour les présidentielles de 1995 : Un CV qui
Quotidien du 24 mai 2000) : “ on assiste à un afflux le met au cœur du système Chirac-RPR-Paris et qui
de nouvelles populations immigrées que l’on a beaucoup donne à ses paroles un écho particulier. Au lende-
de mal à contrôler (…) Les préfectures attribuent à nou - main de son échec personnel dans le XVIIIème
veau un très grand nombre de logements à une nouvel - a r rondissement aux législatives de juin 1997,
le population d’immigrés (…) Je r e m a rque qu’il y sonné, il évoque la nécessité d’une recomposition
aujourd’hui une sensation de ras-le-bol. Ce n’est pas du de la droite, avec l’appoint du FN. Il est ensuite
racisme, mais de l’exaspération. Je suis même obligé de pressenti comme candidat à Nice, ville qui, il est
mesurer mes propos (…) Nos concitoyens (…) n’ont pas vrai, invite en général la droite à des penchants
l’impression d’être traités sur un pied d’égalité vis-à- politiques douteux…
vis d’un certain nombre de nos concitoyens immigrés ”.
Quelle partie de cette diarrhée verbale renierait-on Pierre Lellouche, député RPR de Paris et chef de
au FN ? Dans un autre re g i s t re, il déclare aussi file de Philippe Séguin en 2001 dans le IXème

62 63
a r rondissement, sévit très régulièrement dans Natation (prévus à partir du 21 avril), du fait de
l’hebdo Valeurs Actuelles, que dirige Olivier son refus d’un soi-disant “ communautarisme ”.
Dassault pour sa famille, qui sous couvert de Mal lui en prend : cette compétition est ouverte à
conseils boursiers fait toujours œuvre d’idéologie tous les nageurs et toutes les nageuses licenciés,
très dro i t i è re. On a pu aussi croiser dans ces quelle que soit leur sexualité (plusieurs clubs
colonnes maintes fois Chantal Delsol, femme et “ h é t é ros ” en sont), puisqu’elle est homologuée
muse politico-réligieuse de Charles Millon. par la Fédération Française de Natation (et sous le
haut patronage du Ministère de la Jeunesse et des
En novembre 2000, le député-maire RPR René Sports). Soucieux de jouer au “ plus républicain
Galy-Dejean (habituel relais du lobby industrio- que moi tu meurs ” et de faire parler de lui dès que
militariste), qui a soutenu Philippe Séguin contre possible, il s’est déjà illustré par son combat viru-
Édouard Balladur dans les primaires internes au lent contre l’implantation d’un centre associatif
RPR (avant d’en payer le prix : être dépossédé de d’accueil, d’aide et de soins aux toxicomanes dans
la tête de liste Séguin) - croit bon de se radicaliser le Xème arrondissement, qui a pour objet de faire
pour exister, et d’écrire dans son journal électoral, de la prévention (hygiène, insertion, lutte contre le
sa farouche opposition au PACS en des termes très sida…) : il voit là un moyen d’accroître sa notorié-
choisis : “ Protection de la famille - En ces périodes où té dans cet arrondissement qu’il veut conquérir en
une certaine presse croit utile de mettre en exergue "le mars 2001 pour Séguin. Manque de chance, son
succès du PACS" et où la course électorale aux voix des m a î t re à penser vosgien le déplace au dernier
gays et des lesbiennes bat son plein, le député de Paris moment, sans ménagement, comme candidat
René Galy-Dejean croit utile de rappeler deux choses. bouche-trou dans le Ier arrondissement.
D'une part, il a voté contre le PACS à l'Assemblée
nationale. Par ailleurs, que notre société, telle qu'elle Le maire de Paris et candidat à sa pro p re suc-
est, soit conduite à admettre certains comportements cession aux municipales de mars 2001 Jean Tibéri
personnels, comment faire autrement. Mais aucune s'exprime, le 18 novembre 2000 à Paris, lors du
campagne électorale ne doit à ses yeux conduire à conseil national du Centre National des
conforter de tels comportements. C'est la famille qu'il Indépendants (CNI). Ce mouvement, à l’issue de
faut défendre et renforcer par tous les moyens ”. cette rencontre, apporte officiellement son soutien
au maire sortant, dénonçant au passage le “ com -
Florent Longuépée, élu régional d’Ile-de-France portement des partis politiques de droite ”, dont le RPR
et fervent soutien de Philipe Séguin, est proche des qui a exclu ledit Tibéri. Ce dernier prend la parole
idées souverainistes. Il fait capoter début 2000 les devant les dirigeants du CNI en leur lançant qu’il
Championnats du Monde Gays & Lesbiens de ferait “ gagner la droite avec vous ”, ce qui indique

64 65
qu’il prendra des CNI sur ses listes, comme le RPR maire FN de Toulon. Dans le même registre, le lea-
l’a déjà fait (Jean-Antoine Giansily est un ancien der DL à Paris pour 2001 – allié à Philippe Séguin
Président du CNI, il demeure conseiller de Paris et et co-auteur de ses propositions programmatiques
adjoint au maire, élu sur la liste RPR-UDF dans le - le sénateur Bernard Plasait a un “ passé d’extrême
XVème arrondissement de Paris). droite ” , selon le jeune DL dissident Thierry Ragu
(Le Parisien, le 1er décembre 2000). Cela explique
Candidat annoncé comme chef de file dans le sans doute sa verve ultra-sécuritaire.
IVème arrondissement de Paris en 2001, le député
DL du Centre de Paris, Laurent Dominati, que Xavier Chinaud, délégué aux élections de
Philipe Séguin a écarté en novembre 2000 de ses Démocratie Libérale, candidat sur les listes de
listes parce qu’il a été mis en examen, déclare le 13 Philippe Séguin en mars 2001 à Paris estime
novembre 2000 (il est alors numéro deux du parti meilleurs les reports de voix de l’extrême dro i t e
d'Alain Madelin !) au sujet des municipales : “ À sur la droite dans les élections partielles depuis la
Lyon si Michel Mercier (UDF) ne passe pas un accord rupture entre le FN et le MNR : selon lui 80% des
avec Charles Millon, Lyon sera perdue ”. Preuve s'il voix FN et MNR vont sur le candidat de droite au
en est que DL, au plus haut niveau, est corrompue second tour "avant la rupture, on en était plutôt au
éthiquement par ces idées d'alliances qu'elle assu- système des trois tiers (un tiers se reportant à gauche,
me et désire... Il appelle clairement en octobre 2000 un tiers à droite, un tiers s’abstenant)" (le Figaro, le 17
lors d’un meeting à l’Espace des Blancs-Manteaux juillet 2000).
(dans son arrondissement), à soutenir la maire sor-
tante du IIème arrondissement de Paris, Benoîte Claude Goasguen (DL), un des rédacteurs du
Taffin (ex UDF), dont les idées, le comportement, p rojet de Philippe Séguin (révélé par eux le 22
les collaborateurs, les déclarations et les rappro- novembre 2000) à Paris en 2001 juge, en 1997 que
chements sont très à droite (populisme, déclara- l'opinion attend de la droite un durcissement de
tions anti-logement social,anti-fiscalisme, via son discours, qui doit être "ferme et sans ambiguïté
notamment son association Contribuables sur la quotidienneté souvent mal vécue de l’immigra -
Associés, voir le chapitre qui lui est consacré). Il tion ou de la sécurité (...) Le moment est venu, enfin, de
faut aussi rappeler que, au temps de la splendeur sortir de l'impasse de la diabolisation du Front natio -
de Jacques Dominati, qui dirigea le Conseil de nal, au profit d'une réflexion sereine et constructive (...)
Paris avant Chirac, un certain Jean-Marie Le Sortir de l'anathème, c'est aussi suivre attentivement
Chevallier fut son proche collaborateur, à tel point les tensions internes au FN. On sent bien le malaise
qu’il en fit le parrain de son fils Laurent… Des qu'il y a pour beaucoup d'électeurs ou même de mili -
liens qui demeurent vivants entre les libéraux et le tants du Front d'être devenus les fourriers du Parti

66 67
socialiste et du Parti communiste en marginalisant la Varaut a aussi plaidé pour le merc e n a i re Bob
droite. S'il devait se produire des évolutions du type de D e n a rd, Jacques Médecin (ancien maire de Nice
celles que l'on a vues en Italie, se traduisant par des RPR mais proche de l’extrême droite), Xavier
départs et des scissions, alors il faudrait en tirer les Dugoin (ancien président RPR du conseil général
conséquences politiques et ouvrir le dialogue. Le préa - de l’Essonne, le fameux commanditaire du rapport
lable restant bien sûr d'en finir avec les thèses racistes bidon à 200.000F de Xavière Tibéri) ou encore
soutenues par le Front national". Il suffit donc que Xavier Dousseau (directeur d’hôpital de
les transfuges du FN ou les troupes les plus dures Valenciennes s’opposant à l’avortement).
du RPF se drapent dans un “ on n’est pas des A l e x a n d re Varaut est déjà candidat étiqueté
racistes ”, Goasguen les remettra à sa table comme “ de Villiers ” aux législatives de 1997 à Paris. Il fait
au bon vieux temps. tout, en vain, pour figurer sur la liste d'Edouard
Balladur lors des régionales de 1998, et il atterrit
Alain Robert, extrémiste emblématique des en quatorzième place sur la liste Pasqua-de Villiers
années 60 et 70, il participe à la fondation aux élections européennes de 1999. Si, les villié-
d’Occident en 1964 (dissous par les autorités en ristes doivent avoir un chef de file à Paris en 2001,
1968) du GUD et d’Ordre Nouveau en 1969, avant il est tout trouvé.
d’aller en 1975 au Parti des Forces Nouvelles (PFN)
qui lui succéda. Il réussit, après son passage au Transfuges
CNI, à obtenir un poste de directeur de publication Mai 2000, Didier Bougeard, responsable du RPF
de L’élu local (publication du Mouvement National dans la huitième circonscription du Val-de-Marne,
des Élus Locaux - MNEL) et prend finalement des signe un tract en commun contre le vote des étran-
responsabilités au Conseil National du RPR, en gers non européen avec un conseiller régional du
1987, en vue des présidentielles de 1988, toujours MNR, Philippe Olivier, à Charenton-le-Pont. Le
soutenu par des amis de Pasqua auprès duquel il tract comporte côte à côte les photographies des
travailla aussi quand il était ministre. Il est désigné deux hommes autour du slogan : “ Union de la droi -
leader du RPF tendance Pasqua à Paris pour 2001. te nationale ” (AFP).

Le jeune avocat Alexandre Varaut est avant tout 18 mai 2000, Pascal Delmas, conseiller municipal
le fils de son père Jean-Marc, et son assistant. de Viry-Châtillon (Essonne) et vice-président du
Varaut père est un célèbre plaideur qui, à droite, a g roupe mégrétiste au conseil régional quitte le
partout ses entrées, de l’UDF au RPF, ayant MNR pour siéger parmi les non-inscrits.
conseillé juridiquement nombre d’élus. Rendu
célèbre pour avoir défendu Maurice Papon, le duo

68 69
Ils se sont exprimés dans Minute
Nicolas Dupont-Aignan, député RPR de
l’Essonne et maire de Yerres, le 5 juillet 2000 : “ J’en
ai assez de voir les lois non appliquées ! ”.
Laurent Dominati, député DL de Paris, le 7 juin
2000. Languedoc-Roussillon
P i e r re Lellouche, député RPR et candidat de
Philippe Seguin à Paris (IXème arrondissement), le
31 mai 2000.
Christine Boutin, député apparentée UDF des Le Languedoc-Roussillon, c’est Jacques Blanc.
Yvelines, le 17 mai 2000. C’est le seul président de région, élu avec les voix
Jacques Myard, député RPF des Yvelines et maire lepénistes à assumer complètement ce choix et à ne
de Maisons-Laffitte, le 19 juillet 2000. s’en être jamais caché. S’engageant à plein, et sans
fard, dans sa politique de compromission avec l’ex-
Ils se sont exprimés dans L’Hebdo du Quotidien trême droite, Jacques Blanc fait des émules sur les
Nicolas Dupont-Aignan, encore et toujours, b o rds de la Méditerranée. En guerre contre ses
après sa démission du secrétariat général du RPF, opposants, il sait préserver de solides amitiés dans
le 9 août 2000. les états-majors parisiens comme en témoigne son
Jean-Claude Mignon, député RPR de Seine-et- intégration récente, et d’une “ évidence ” déstabi-
Marne et maire de Dammarie-les-Lys, le 24 mai lisante, en tant que député au groupe Démocratie
2000 : “ On assiste à un afflux de nouvelles popula - Libérale de l’Assemblée Nationale.
tions ”.
Didier Julia, député RPR de Seine-et-Marne, le La région avant 1998
12 juillet 2000. Président du Conseil Régional sortant, député
(UDF - DL) de Lozère, l’ancien secrétaire d’Etat
sous le septennat de Valéry Giscard d’Estaing, a
déjà conçu, avec l’extrême droite, un accord de ges-
tion régionale entre 1986 et 1992. Puis pendant le
mandat suivant, il a su trouver des alliés écolo-
gistes pour tenir sa majorité

Les élections régionales de mars 1998


La gauche plurielle compte 31 élus au conseil

70 71
régional en 1998 (8 PC, 1 MDC, 20 PS et 2 PRG), la la main mise du maire de Montpellier. Ce n’est pas nous
droite 22 élus (10 UDF, 11 RPR, 1 DVD.,) 1 CPNT qui avons pactisé avec le Front. C’est le Front qui a
et le FN 13 élus. voulu que ses élus nous apportent leur voix ”. Alain
Madalle, élu RPR de l’Aude, surenchérit : “ J’ai
Aux élections cantonales, si la gauche est majo- beaucoup hésité, mais ce qui l’a emporté, c’est qu’au
ritaire, la poussée du FN est impressionante. Dans fond de moi je me suis dit “ tu n’es pas né socialiste" et
le Gard, il est en mesure de se maintenir dans seize je ne pouvais pas voter Frêche ”. Sans commentaire !
cantons, et de contribuer à faire perd re la dro i t e
dans quatre d’entre eux. Dans les Pyrénées-Orientales, les militants et
sympathisants de droite soutiennent leurs quatre
L’élection du Président du Conseil régional conseillers régionaux, qui ont voté pour Jacques
Dès le premier tour de scrutin, Jacques Blanc, le Blanc. “ Pour un qui nous engueulait, au moins
candidat sortant et officiel RPR-UDF, est réélu pré- soixante nous encourageaient à ne pas laisser la région
sident de la région Languedoc-Roussillon grâce à la gauche ” , témoigne l’ancien député Claude
aux voix du FN. Il obtient 35 voix, soit l’ensemble Barate (RPR) dont l’épouse est l’une des quatre
des voix de la droite classique (22 voix) et de l’ex- élus. “ Pour trois lettres de critiques, j’en ai eu quatre
trême droite (13 voix), contre 31 pour Georg e s cents de soutien ”, confirme Arlette Franco, maire
Frêche, maire socialiste de Montpellier et candidat (RPR) de Canet-en-Roussillon. De plus, les mili-
de gauche plurielle et 1 pour le candidat CNPT. tants “ veulent un accord avec le Front National ”
Tous les élus de droite votent donc avec le FN confirme François Calvet, secrétaire fédéral de
sans sour c i l l e r : Françoise Barate, Alphonse Démocratie libérale et conseiller régional (L e
Cacciaguerra, François Calvet, Mireille Cellier, Monde, le 9 juin 1998).
Isabelle Chesa, Raymond Courd e rc, Jean-Paul
F o u r n i e r, Arlette Franco, Pierre Hugon, Yv a n Une alliance de fait
Lachaud, Alain Madalle, Georges Meissonnier, Lors de la campagne électorale des régionales
Michel Moynier, Jean-Christophe Ozil, Marc e l puis préalablement à l’élection du président de la
Roques, Stéphan Rossignol, Max Roustan, André région, Jacques Blanc affirme publiquement qu’il
Savonne, Pierrette Soulas, Roger Toreilles, Michel ne signera aucun accord ni aucune alliance avec le
Vaillat. FN, mais qu’il ne récusera aucune voix, d’où
qu’elles viennent, sauf si elles le plaçaient dans une
Stéphan Rossignol, secrétaire du RPR dans position de dépendance. Or, le 20 mars 1998, sa
l’Hérault, explique (Le Monde, le 22 mars 1998) : déclaration de candidature comprend précisément
“ Nous avons un combat commun. Celui de dire non à les 6 conditions posées par le FN en échange de

72 73
son soutien dont, entre autres, la lutte pour la sécu- tration des lycées ou lors de l’élection de la com-
rité dans les lycées, le refus de la “ dictature cultu - mission permanente. Fait unique en France, cette
relle ” de la gauche, la réduction de 2% de la fisca- Commission permanente comprend tous les
lité… Jacques Blanc, président réélu, est donc bien conseillers régionaux, sans exception. Jacques
devenu l’otage consentant du Front National. Pour Blanc se préserve ainsi une majorité identique aux
nier toute collusion entre la droite et l’extrême équilibres du conseil régional.
droite, Jacques Blanc laisse entendre que les fron-
tistes n’ont pas voté pour lui mais contre Frêche, On apprendra plus tard, de la bouche de certains
“ pour l’empêcher de prendre en main cette région ”. élus d’extrême droite et même du RPR ou de
D’ailleurs, ajoute-t-il, le FN n’entend pas partici- l ’ U D F, que ces décisions font parties de l’accord
per à l’exécutif de la région. En effet, les extré- que Blanc à conclu secrètement avec le FN.
mistes ne présentent pas de candidats aux prési-
dences des commissions lors de leurs désignations Deux ans de résistance : la Gauche plurielle
le 18 mai 1998, mais exigent des vice-présidences La stratégie des élus socialistes est l’opposition
sans affectation pour la commission exécutive. systématique à tous les projets présentés par
Non content de les obtenir, ils parviennent à impo- Jacques Blanc et l’extrême droite. Ils misent sur la
ser à la droite une représentation dans la commis- dissidence d’élus de droite pour obtenir un chan-
sion d’appel d’offre, ainsi que leur présence dans gement de majorité. Jusqu’à ce jour, seul Jean-
les conseils d’administration des lycées. P i e r re Grand, maire RPR de Castelnau-le-Lez
(Hérault) s’est opposé ouvertement à la politique
Les élus RPR-UDF élisent également comme un du Président de la Région. Les socialistes mènent,
seul homme des candidats FN à trois vice-prési- dès lors, la bataille sur le plan juridique et tentent
dences de commissions : celles des sports, du tou- de faire annuler certaines décisions prises par le
risme, et de l’enseignement et de la recherche. Sans Président de Région. Ils s’appuient sur la non
oublier les représentants lepénistes dans tre n t e modification du nombre de membres de la com-
cinq lycées. Le Conseil régional continue de fonc- mission permanente préalablement au vote sur sa
tionner comme un parfait laboratoire des alliances composition. Las, Jacques Blanc s’en sort par
entre la droite et l'extrême droite. quelques subterfuges administratifs dont il a le
secret.
Afin de représenter les élus frontistes dans toutes
les instances dans lesquelles la région se trouve, Les socialistes emploient également d’autre s
Jacques Blanc institue la représentation pro p o r- moyens plus symboliques pour manifester leur
tionnelle. Que ce soit dans les Conseils adminis- désapprobation à l’égard de Jacques Blanc. Ils refu-

74 75
sent ainsi de lui serrer la main, retournent leurs Le “ dû culturel ”
tasses en signe de protestation lors des déjeuners Le FN ne tarde pas à exiger la contrepartie du
de travail… L’opposition de principe préconisée soutien offert à Jacques Blanc le 20 mars 1998. À ce
par le PS a plusieurs fois abouti à des votes contra- sujet, le contrôle des milieux culturels semble revê-
dictoires. Et les communistes refusent désormais tir un caractère prioritaire pour le FN. Dès le 27
cette stratégie. Ils défendent la conception d’une mars 1998, les lepénistes réclament leur “ dû cul-
opposition constructive selon lesquelles il faut turel ” : Alain Jamet, président du groupe FN à la
voter pour tout projet qui va dans le sens de l’in- région, vient rappeler que l’abandon de la “ dicta-
térêt général. Ils estiment que laisser faire Blanc et t u re culture l l e ” de la gauche en Languedoc-
le FN en votant contre toutes leurs propositions est Roussillon fait partie des engagements pris par
le plus grand service qu’on puisse leur re n d re . Jacques Blanc. Il profite de cette mise en gard e
C’est pourquoi, ils ont suivi le Président de la pour s’en prendre aux associations qui ont soute-
Région pour la relance de la ligne ferroviaire Paris- nu Georges Frêche lors de sa campagne. Sont nom-
Béziers. mément visés : Jean-Claude Fall, directeur du
Théâtre des Treize Vents, Mathilde Monnier, direc-
Cette ligne de conduite plus souple a surtout trice du Centre Chorégraphique de Montpellier,
l’avantage pour le PC d’éviter de voir le PS re n- René Koering, directeur de l’Orc h e s t re Philar-
forcer sa position dans la région. Et d’ailleurs si les monique de Montpellier et Jean-Paul Montanari,
communistes s’opposent à Jacques Blanc c’est non directeur du Festival de Danse de Montpellier.
pas pour le remplacer par Georges Frêche mais
pour faire plier la droite. Cependant, peut-on dire Opportuniste, Jacques Blanc fait savoir qu’il
que les subventions si généreusement accordées à entend respecter les créateurs et les acteurs de la
certains élus locaux communistes sont une contre- culture, comme il l’a fait depuis 12 ans de prési-
partie à leur soutien occasionnel ? Au printemps dence : “ je n’ai pas changé, je ne changerai pas ”. Or,
1999, le Conseil Régional achete et paye rubis sur dès août, il fait sienne la liste noire des “ amis ”
l’ongle des espaces publicitaires dans L’Humanité d’Alain Jamet en décidant de ne pas renouveler les
(il est vrai très mal en point financièrement) et le aides de ceux qui “ insultent ” le FN. Avant même
Travailleur Catalan, l’organe de la fédération com- les élections, il décide que certaines subventions
muniste des Pyrénées-Orientales. Cela se re p ro- ne seront pas attribuées, notamment celles du
duit, comme le 18 novembre 2000 : deux pleines Festival de Danse, du Festival de cinéma méditer-
pages couleur dans l’Humanité Hebdo. ranéen et d’Action Chanson Montpellier-Hérault
en raison du soutien de leurs responsables à
G e o rges Frêche. Cette décision est confortée par

76 77
leur appartenance au “ collectif du 20 mars ” qui tout comme le FN, Jacques Blanc désire museler les
dénonce l’entente entre Blanc et le FN. En associations, et étouffer toutes celles qui ne re n-
novembre 1998, lors du débat d’orientation bud- trent pas dans le rang.
gétaire, Jacques Blanc affirme ainsi que les “ asso -
ciations culturelles ne peuvent pas se transformer en En réponse au Président de la Région, le 23 mars
tribune politique ” et que si elles le font, elles 1999, les associations culturelles se mobilisent au
d e v ront “ assumer leurs actes ”. En décembre, il T h é â t re de l’Odéon, dans le sixième arro n d i s s e-
déclare qu’il n’est “ pas question de subventionner des ment de Paris, pour que soit mis un terme à la poli-
associations qui se comportent comme des institutions tique de censure et de menace exercée par le
politiques ”. Le Festival du cinéma méditerranéen Conseil Régional. Catherine Trautmann, alors
p e rd ainsi 100 000 F de la région et le festival ministre la culture, condamne les agissements de
Montpellier Danse 500 000 F. Le 19 mars 1999, les la droite languedocienne en menaçant de ne pas
conseillers régionaux rejetent les subventions faire valoir le volet culturel dans le prochain plan
accordées à certaines associations culturelles. Le Etat-Région (2000-2006) si les financements concer-
FN obtient ce qu’il veut : la tête des trois artistes nant ces stru c t u res ne sont pas rétablis par la
(Fall, Monnier et Koering) accusés de faire régner région. Cela peut représenter pour celle-ci une
“ une dictature de la gauche ” sur la culture. perte de 75 millions de Francs.

Les élus de la gauche plurielle, pour leur part, Face à la pression exercée par les milieux cultu-
votent contre ces subventions, à la demande des rels, Jacques Blanc fait volte-face puisque, fin avril
associations culturelles, pour une toute autre rai- 1999, un nouveau texte est soumis au vote des élus
son : ils estiment que la convention de partenariat du Conseil Régional. Il stipule que la région doit
proposée par Blanc pose des conditions drastiques respecter “ la liberté totale des acteurs culturels dans
inacceptables en demandant aux artistes de “ s’abs - leurs actes de créations comme dans leur vie citoyen -
tenir de porter atteinte à l’institution régionale ”. Ils le ne ”. Le FN signe cette convention, estimant que “
font également pour demeurer solidaires des asso- si la lettre changeait, l’esprit demeurait le même ”. Les
ciations afin qu’elles évitent de faire allégeance à socialistes, méfiants, votent contre. Depuis
la région. Jacques Blanc se prononce pour le ver- quelques mois, le FN ne semble plus faire du vote
sement des deux tiers des crédits attribués en 1998, des subventions culturelles un motif de ru p t u re
mais il assortit le paiement du tiers restant à la avec la droite classique. Il faut dire que le Conseil
signature d’une convention par laquelle les asso- Régional lui offre une base logistique bureaux, télé-
ciations s’engagent à “ respecter les principes de laï - phones, voitures, assistants - dont il ne peut plus
cité et de neutralité républicaine ”. Autrement dit, se priver aujourd’hui.

78 79
Deux ans de résistances : les associations culturelles L’étincelle lycéenne met le feu aux poudres
Au lendemain de l’élection de Jacques Blanc à la Lycéens, parents d’élèves, syndicats d’ensei-
présidence de la région grâce aux voix du Fro n t gnants et partis politiques de gauche s’organisent
National, les artistes languedociens partent en eux aussi pour s’opposer à la présence d’élus FN
guerre contre la droite et l’extrême droite. Un col- au conseil d’administration de douze lycées de la
lectif “ Appel du 20 mars ” est alors créé. Il regrou- région. Aucun des conseils ne peut fonctionner, en
pe des syndicalistes, des universitaires, des parents raison des heurts violents qui opposent élus du FN
d’élèves et la quasi-totalité des stru c t u res cultu- et lycéens. En novembre 1998, plus de 200 lycéens
relles de la région, soit plus de 300 artistes. Tous manifestent contre la présence de Serge Martinez,
demandent la démission du président de région et élu FN, au conseil d’administration du lycée
appellent les élus de la droite républicaine à Dhuoda. Au LEP de l’Etincelle, ils sont plus de 400
prendre position publiquement. Le 28 mars 1998, jeunes à chahuter Max Janin, l’élu FN. Au lycée
le collectif organise une manifestation à Montpel- Gaston Darboux, Elisabeth Pascal, élu FN, est
lier qui rassemble plus de 15 000 personnes. Le 18 bousculée lors du conseil d’administration.
avril, il mobilise de nouveau les opposants de Philippe Darbelet, proviseur de ce même lycée,
Jacques Blanc devant la préfecture de l’Hérault. Il menace de démissionner car il n’accepte pas la pré-
appelle surtout à la résistance au quotidien : les sence dans son CA d’un mouvement politique en
artistes doivent, soir après soir, continuer à lire au totale contradiction avec les principes de la
public des salles de spectacle de la région un mes- République. Depuis la fin 1998, l’opposition
sage condamnant l’alliance de Blanc avec le FN. s’étend aux élus de droite qui soutiennent le FN.
À Alès, le maire Max Roustan (DL) est pris à par-
En juin 1999, les acteurs du milieux de la danse tie parcequ’il a un suppléant FN au CA d’un lycée
entrent en résistance. Ils réussissent à organiser 144 et parce qu’il est lui-même suppléant d’un élu FN
manifestations, investissent 49 lieux, invitent 37 dans un autre établissement.
compagnies et totalisent 32 000 spectateurs alors
que ce milieux culturel n’a reçu aucune subvention A Carcassonne, des élèves bloquent l’entrée du
de la région. En octobre 1999, différentes associa- Conseil d’administration du lycée Charlemagne à
tions culturelles et notamment les cibles récur- la représentante de la région, Isabelle Chésa, éga-
rentes du FN refusent de signer une convention lement conseillère municipale de la commune,
instaurant des chèques-culture pour les lycéens les ainsi qu’à son père, Raymond Chésa, le maire de
liant au Conseil Régional. la ville qui a toujours apporté son soutien à Jacques
Blanc et à son alliance avec l’extrême droite et qui
est un adepte des relations ambigues avec le FN

80 81
lors de municipales. Les chauffeurs font le coup de Les votes des budgets 1999 et 2000 apportent des
poing afin de permettre l’accés au lycée pour les p reuves supplémentaires de l’alliance : lors des
élus. Ces manifestations d’hostilité se produisent deux votes, le budget présenté par Jacques Blanc
même dans le fief électoral de Jacques Blanc est adopté par l’ensemble des élus de la droite et
devant le lycée de La Canourgue, en Lozère. Là de l’extrême droite. Systématiquement, les repré-
aussi, des jeunes font barrage aux élus de droite et sentants de la gauche plurielle font bloc et votent
du FN siégeant au conseil d’admininistration de contre. Certes, ces budgets ne laissent apparaître
leur lycée. aucune concession majeure aux fro n t i s t e s .
Cependant, ils leur permettent de s’y re t ro u v e r
Tous ces actes reçoivent la bienveillance, voire le puisque sont abordés des sujets chers à leurs yeux,
soutien de nombreux proviseurs de la région. Les comme l’aide aux projets locaux de développe-
élus de gauche se gardent d’intervenir, même s’ils ment, la lutte contre la “ dictature culturelle ” de
sont présents sur les lieux, afin de ne pas donner la gauche, la baisse de la fiscalité, l’aide financière
une image de récupération de ces mouvements pour améliorer la sécurité dans les lycées.
spontanés et légitimes.
Même dépendant du FN dans les faits, Jacques
Excédé, Serge Martinez réplique et dénonce les Blanc (DL) demeure le maître du jeu car il sait
atteintes portées à la démocratie. Il menace : ses composer avec des majorités de circonstance. En
militants pourraient “ perdre les pédales si les choses effet, depuis que les communistes ont pris part aux
continuaient ainsi ”. Marie-Josée Cros, élue FN, ne débats et aux votes, c’est-à-dire depuis juin 1998,
peut se rendre aux CA des établissements scolaires il n’a plus nécessairement besoin du FN. À deux
de Bagnols-sur-Cèze (lycée Gérard Philippe) les 5 reprises, le PC vient à son secours alors que les
et 17 novembre 1998, et d’Uzès le 10 novembre frontistes se braquent sur un dossier (mise en place
1998, grâce aux manifestations de vigilance. Au de l’Euro et subvention attribuée au Secours popu-
sujet de ces manifestations devant les lycées, laire, association caritative proche du PCF).
Françoise Monestier, “journaliste” de N a t i o n a l
Hebdo, écrit, le 2 décembre 1998 : “ Même si certains
proviseurs réagissent de façon tout à fait saine, on ne
peut que déplorer l’installation d’un climat délétère qui
rappelle finalement que le Gard est bel et bien le dépar -
tement de ceux qui avaient la gâchette facile en 1944 ou
qui ont organisé de graves émeutes au moment des
grandes grèves de 1947 ”.

82 83
Limousin Lorraine

La région avant 1998 La région avant 1998


Le Limousin est la seule région déjà détenue par Le conseil régional sortant : 3 PC, 8 PS, 1 PRG,
les socialistes avant 1998. Robert Savy (PS) la pré- 4DVG, 4 Verts, 3 écolos, 1 GE, 16 UDF, 17 RPR, 9
side avec l’appui de 12 élus PS, 4 PC, 1 PRG et 1 DVD et 7 FN. Gérard Longuet préside la région de
Vert (et l’appoint de trois élus des Alternatifs de la 1992 à 1998 après la démission contrainte de Jean-
CAP) face à 16 RPR-UDF et 1 FN. Marie Rausch, le FN lui ayant apporté ses voix
“ contre son grè ”.
Les élections régionales en 1998
Le parti socialiste gagne trois sièges et la gauche Les élections régionales de mars 1998
plurielle conforte sa majorité (24 élus). Le nouveau conseil régional : 1 LO, 4 PC, 18 PS,
1 PRG, 1 DVG, 1 Vert, 1 CPNT, 7 UDF, 11 RPR, 15
Francis Ducreux, conseiller régional mégrétiste, DVD, 13 FN.
leader départemental en Corrèze, affirme : le MNR
“ a recruté des gens nouveaux venus de la droite clas - La gauche a espéré, un moment, devancer la
sique qui étaient hostiles à Le Pen ” (La Montagne, le d roite d’un ou deux sièges et obtenir ainsi une
27 juin 2000). majorité relative. Las, en dépit de ses pro f o n d e s
divisions la droite reste aux commandes et réélit
L’écrivain-éditeur Denis Tillinac (Éditions de La Gérard Longuet à la présidence.
Table Ronde), ami intime de Chirac, rallie en 1999
les positions des amis de Charles Pasqua pour un François Guillaume, ancien Président du syndi-
re f e rendum concernant la ratification du traité cat agricole FNSEA, député apparenté RPR de
d ’ A m s t e rdam. Il a édité sous les couleurs de La Meurthe-et-Moselle, affirme le 20 mai 1998 dans
Table Ronde, à la rentrée 2000, un essai de Minute ” qu'il faudra bien passer des accords locaux
Madame Millon, Chantal Delsol... avec le FN si l’on veut éviter que la gauche, qui est

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minoritaire dans le pays, continue à gouverner pendant
des décennies ”. Il est également interviewé le 26
avril 2000 dans L’Hebdo du Quotidien.

Appels du pied
Bien connu localement, Jean Kiffer, maire divers Midi-Pyrénées
droite d'Amneville-les-Thermes et conseiller géné-
ral de Moselle, qui fut aussi député apparenté RPR
jusqu'en 1997, s'est toujours présenté comme
proche de Pasqua dans ses idées. Forte personna- La région avant 1998
lité de droite, à son retour d’un voyage en Afrique Longtemps marquée par le radical-socialisme, la
du Sud dans les années 80, il déclare qu'il n'a pas région Midi-Pyrénées est dirigée pendant 12 ans,
vu d'Apartheid ! de 1986 à 1998, par une coalition de centre-droit.
La droite, longtemps dominée par la personnalité
En 1992 et en 1998, il mena des listes aux de Dominique Baudis, maire UDF de Toulouse, a
Régionales. Leur titre évocateur : Moselle Debout. en effet remporté la majorité des sièges du conseil
régional en 1986, dans une région considérée par
François Vanson, député RPR des Vosges, dans la gauche comme un véritable fief historique. Si
Minute le 15 novembre 2000 : “ il est dangereux de Baudis laisse la présidence de la région à Marc
concentrer des populations à risque dans des ghettos car Censi, maire UDF de Rodez, en 1988, les électeurs
cela crée une dynamique de la violence ”. continuent toutefois, au-delà de la seule person-
nalité du président sortant, d’apporter leur préfé-
Gérard Longuet, ancien Président de la Lorraine rence à la coalition de droite. Le conseil régional
et toujours élu régional de Démocratie Libérale formé suite aux élections de 1992 comprend ainsi
appelle, dans Le Monde du 7 avril 1991, à la signa- 46 élus de droite (3 CNPT, 22 UDF, 14 RPR,
ture d’accords électoraux avec le FN, renouant là 7 DVD.), 35 élus de gauche (5 PC, 22 PS, 5 PRG, 3
avec son sulfureux passé d’extrémiste ardent où il Verts) et 6 FN.
o e u v re en compagnie de son fidèle ami Alain
Madelin. Les élections régionales de 1998
Composition du Conseil : 2 LCR, 41 Gauche plu-
rielle (9 PCF, 21 PS, 9 PRG, 2 Verts), 2 CPNT, 32
RPR-UDF (17 UDF et 15 RPR), 6 DVD, 8 FN.

86 87
Suite aux élections législatives de 1997, conseil régional pour pratiquer une politique de droite.
médiocres pour la droite dans toute la région, Marc Je considère personnellement que si le Front National
Censi, candidat sortant à la présidence, ne peut est un parti légal, on peut discuter avec lui. On ne peut
empêcher que ne se forment des dissidences dans pas rester dans l’opposition toute notre vie ”.
son propre camp dans trois départements sur huit.
Dans le Tarn et dans le Lot, ces divisions lui coû- L’ancien député Bernard Carayon, maire de
tent à chaque fois un siège, et les chasseurs du L a v a u r, conseiller général RPR du Tarn et
C N P T, en perdant un élu par rapport à 1992, ne conseiller régional, est à suivre : il fut conseiller de
peuvent plus prétendre jouer un rôle charnière Chirac à la mairie de Paris entre 1984 et 1986, puis
dans la droite régionale. m e m b re du cabinet du ministre RPR Robert
Pandraud, il aussi été un dirigeant de la populiste
Les élections une fois terminées, se forme donc Ligue des Contribuables. Auparavant, il fut un res-
au conseil régional, outre les groupes dits clas- ponsable du GUD (en 1977), violent groupuscule
siques, un groupe de dix élus, essentiellement des étudiant, puis directeur de la revue Va i n c re et
UDF - Force démocrate, sous la houlette d’André passa aussi par le petit mouvement extrémiste PFN
Trigano, maire divers droite de Pamiers dans (ex-Ordre Nouveau).
l’Ariège, qui se réclame de “ la grande famille radi-
cale ” et refuse tout rapprochement avec l’extrême Les élection cantonales de 1998
d roite (Le Monde, le 23 mai 1998). Marc Censi Dans le Tarn Jacques Limouzy, ancien ministre
(UDF), après être élu le 23 mars 1998, avec les voix de droite, appelle à voter pour le candidat FN qui
du FN, démissionne une première fois, avant de reste seul au deuxième tour face au candidat socia-
démissionner à nouveau, suite à une nouvelle élec- liste dans le canton de Castres-Ouest. A l'inverse,
tion permise grâce aux voix du FN. Le socialiste dans le canton de Graulhet, le candidat FN se reti-
Martin Malvy, député-maire de Figeac, est élu à la re au profit du candidat RPR.
majorité relative (44 voix sur 91) au troisième tour
de scrutin, le 7 avril 1998. Face à lui, André Trigano Dans le canton de Moissac II (Tarn-et-Garonne),
obtient trente huit voix et Bernard Antony (FN), le candidat du FN s’est désisté en faveur du can-
neuf voix. didat RPR.

Chantal Dounot-Sobraquès (RPR) : conseillère Ils se sont exprimé dans Minute


régionale, adjointe au maire de Toulouse et pro- Jacques Godfrain (député-maire RPR de Millau,
fesseur de droit constitutionnel : “ La droite est dans l’Aveyron et ancien ministre de Chirac-Juppé
majoritaire dans la région, et les électeurs ont élu un en 1995-97) déclare dans Minute (20 août 1997) sur

88 89
le projet d'un parti rassemblant RPR, UDF, CNI et
MPF : "Je n'ai aucun état d'âme vis-à-vis de tous ceux
qui combattent le socialisme (...) Je dis bien tous, à
condition qu'il n'y ait pas d'alliance objective avec les
socialistes. On se comprend ?" Oui ! Minute a ensui-
te lancé une campagne pour l’annulation de la Nord-Pas-de-Calais
“ c i rc u l a i re Chevènement ” (alors ministre de
l’Intérieur) sur les régularisations des sans-papiers,
jugée bien trop généreuse.
La région avant 1998
Présidée par Marie-Christine Blandin (Verts), la
région Nord-Pas-de-Calais est la seule avec le
Limousin sauvée par la Gauche en 1992. Avec 24
conseillers PS, 15 PC, 2 MDC, 1 PRG et 8 Verts, la
gauche domine la droite et ses 47 conseillers régio-
naux.

Les élections régionales de 1998


Ces élections confortent la gauche plurielle qui
gagne la majorité avec 58 sièges contre 37 pour la
droite et 18 au FN. Aucune alliance entre la droite
et l’extrême droite n’est donc en mesure de faire
basculer la région.

A l’heure actuelle, 12 demeurent au sein du


g roupe Front National et 6 appartiennent au
regroupement des non-inscrits, n’ayant pu main-
tenir un groupe après le départ de deux d’entre
eux du MNR (5 élus sont nécessaires pour consti-
tuer un groupe politique).

Philippe Vasseur (ex-député et ancien vice-pré-


sident de DL, passé dans la banque en 2000) a, au

90 91
nom de son groupe, défendu avec beaucoup d’in-
sistance la participation des élus du FN aux
Conseils d’Administration des Lycées, ceci en
cohérence avec ses déclarations de campagne élec-
torale, où il n’excluait pas de devenir Président de
la région grâce à l’appui de l’extrême droite. Pour Basse-Normandie
Philippe Vasseur, le Front National n’ayant pas été
i n t e rdit, est légal et ses élus “ égaux devant la loi
comme devant les électeurs ”.
La région avant 1998
Président de la région Basse-Normandie depuis
1992, René Garrec est battu au moment des légis-
latives anticipées en 1997 dans la sixième circons-
cription du Calvados. Le conseil régional est alors
composé de 23 conseillers de droite contre 12 élus
de la gauche plurielle.

Les élections régionales de 1998


La droite profite des dissensions de la gauche
pour se maintenir et conserver la présidence de la
région. Avec 24 conseillers, la droite obtient une
majorité relative face à 17 conseillers de la gauche
plurielle (2 PC, 12 PS, 2 PRG, 1 Verts). Le FN
obtient 6 conseillers (plus 1 par rapport à 1992).
René Garrec (DL) est réélu.

À Caen (Calvados), capitale de la Basse-


Normandie, le maire sortant - en place pendant
trente ans – est Jean-Marie Girault (UDF). À 74 ans,
il décide de ne pas se représenter : C’est une lutte
au couteau qui s’ouvre à droite à la fin de l’été 2000
pour sa succession. L’UDF Luc Duncombe veut
g a rder la ville à sa formation alors que le RPR

92 93
pousse les feux de Brigitte Le Breton, très conser-
vatrice et autoritaire. Le MPF de de Villiers, en
n o v e m b re 2000, affiche clairement son soutien à
cette dernière contre la promesse de places sur sa
liste pour sa formation…
Haute-Normandie
Il s’est exprimé dans L’Hebdo du Quotidien
Jean-Claude Lemoine, maire de Tessy-sur-Vire et
député RPR de la Manche, le 19 juillet 2000.
La région avant 1998
Antoine Rufenacht (RPR) préside la région de
1992 à 1998 avec une majorité relative de 21
conseillers de droite sur 55 élus. Le conseil régio-
nal sortant est composé de : 5 PC, 13 PS, 1 PRG, 3
Verts, 1 CPNT, 11 UDF, 8 RPR, 1 MPF et 8 FN. A
l’époque, le bras droit de Laurent Fabius, Alain Le
Vern manque son élection de justesse, la droite et
la gauche sont en effet au coude à coude. Antoine
Rufenacht ne doit son accession au fauteuil de pré-
sident qu’au soutien des élus frontiste. Laure n t
Fabius, alors conseiller régional, interpelle le pré-
sident, lui indiquant qu’il ne reconnaît pas son
élection eu égard au vote à bulletin ouvert de cer-
tains conseillers et aux voix du FN que Rufenacht
vient d’accepter.

Les élections régionales de mars 1998


Après ces élections, le Conseil régional se com-
pose de 23 conseillers de la Gauche plurielle (20
PS-PCF-PRG, 3 Verts), 2 LO, 8 RPR, 8 UDF, 1 MPF,
2 DVD, 1 CPNT, 10 FN. La gauche est donc passée
devant la droite, mais l'écart demeure faible. Le
groupe FN s'est scindé en deux, 8 conseillers régio-

94 95
naux siégeant sous l'étiquette MNR. cule formation polonaise antisémite).

L'élection du Président de Région Une heure après avoir été élu, et après avoir
Les élus de droite font durer le plaisir pour que remercié ceux qui y avaient contribué, Jean-Paul
le quorum ne soit pas atteint le 20 mars. Le 23 Gauzès démissionne sous la pression entre autres
mars, enfin, ils présentent Jean-Paul Gauzès (RPR), d’Antoine Rufenacht, maire RPR du Havre. Alain
maire de Saint-Agathe-d’Aliermont qui est élu au Le Vern (PS) est finalement élu. Quatre des six
t roisième tour, les élus du FN, qui présentent la commissions thématiques sont attribuées à des
candidature de Dominique Chaboche décident de élus de droite qui bénéficient des voix des
reporter leur voix sur l’élu RPR. conseillers FN.

Dominique Chaboche (FN) : “ Dans la mesure où L’ancien ministre de Raymond Barre, président
M. Gauzès a très clairement demandé nos voix, nous les du conseil régional sortant et maire RPR du Havre,
lui avons accordées ”. Antoine Rufenacht est battu au vu des résultats du
15 mars dans les deux départements de Haute-
La commission permanente est composée de 18 Normandie. Rufenacht, élu en 1992 grâce aux voix
membres, avec 3 élus FN. Droite et extrême droite du FN et de deux élus communistes cède sa place
se retrouvent majoritaires. Pour l’élection du troi- à Gauzès après que Bernard Blois s’est déclaré prêt
sième vice-président, Dominique Chaboche est élu à accepter les voix FN. L’UDF Bernard Blois se dit
contre un communiste, Patrick Dupray, maire de publiquement prêt “ à accepter les voix du FN pour
Grand-Couronne, grâce aux 18 élus RPR-UDF qui f a i re barrage à la gauche ” (L i b é r a t i o n, le 25 mars
votent pour lui. 1998).

Dominique Chaboche est un vieux soldat de l’ex- Jean-Louis Debré, ancien ministre à dérapages
trême droite, fidèle de Le Pen, cofondateur du FN contrôlés, est le président du groupe RPR à
en 1972, secrétaire général du FN de 1973 à 1975. l’Assemblée nationale. Il est candidat RPR décla-
En 1986, il est député, député européen et ré à la mairie d’Évreux (Eure) contre la gauche
conseiller régional. En charge des relations inter- plurielle sortante. Il a, début décembre 2000, mar-
nationales au FN, il est chargé de nouer de nou- qué “ son intention d’ouvrir sa liste à des hommes et
velles alliances avec les partis d’extrême dro i t e des femmes indépendamment de leur itinéraire poli -
européen, comme le Miep (parti hongrois violem- t i q u e ”, ce à quoi les mégrétistes locaux ont vite
ment anti-tsigane), l’Alliance pour l’unité espa- répondu par des appels du pied en conférence de
gnole (franquiste) ou Prawicka Norodwa (minus- presse ( L’Humanité, le 4 décembre 2000).

96 97
Il s’est exprimé dans L’Hebdo du Quotidien :
Patrick Gelard, conseiller municipal et général
du Havre, sénateur RPR de Seine-Maritime, le 26
juillet 2000.

Pays-de-la-Loire

La région avant 1998


Le conseil sortant : 12 PS, 10 DVG, 1 MDC, 4
Verts, 5 écolos, 2 MEI, 2 GE, 1 CPNT, 21 UDF, 21
RPR, 6 DVD, 8 FN. Depuis la naissance de l’insti-
tution régionale, Olivier Guichard la préside. Son
âge aidant, il ne se représente pas en 1998.

Les élections régionales de mars 1998


Le nouveau conseil régional : 1 LO, 5 PC, 1 MDC,
15 PS, 1 PRG, 5 DVG, 5 Verts, 3 CPNT, 17 RPR, 17
UDF, 5 MPF, 1 CNI, 10 DVD, 7 FN. La gauche n’ob-
tient pas la position de force qu’elle espérait. Elle
ne remporte que cinq conseillers supplémentaires.
Cette région est l’une des rares à offrir une majo-
rité absolue à la droite. François Fillon est élu pré-
sident.

Samuel Maréchal, président du groupe FN, et


g e n d re de Le Pen, propose la création d’un
O b s e r v a t o i re sur l’insécurité dans les établisse-
ments scolaires. Avec l’appui de Roselyne
Bachelot, vice-présidente du groupe RPR et dépu-
tée, la Commission permanente adopte la propo-
sition FN à l’unanimité (Présent, le 21 mai 1998).

98 99
Lors des élections cantonales de 1998, Samuel
Maréchal appelle les électeurs lepénistes du pre-
mier tour à reporter leurs voix sur Annick Denis-
Maréchal, candidate RPR à Nantes-5, au second
tour, après que celle-ci a repris à son compte, par
écrit, la “ préférence nationale ” si chère au FN. Picardie

Il s'est exprimé dans Minute


M a rc Laff i n e u r, maire d’Avrillé, député DL et
vice-président du conseil général de Maine-et- La Picardie se distingue rapidement en 1998
L o i re, le 6 septembre 2000 : “ Il faudrait diminuer comme une région pionnière dans l’institution des
d’au moins un franc le prix du litre de l’essence ”. alliances entre la droite et l'extrême droite. Jean-
François Mancel, ancien secrétaire général du RPR,
Et dans L’Hebdo du Quotidien : en est l’architecte principal au moment des
Marc Laffineur, le 16 février 2000 : “ La fiscalité cantonales, avant que Charles Baur ne prenne le
est devenue intolérable pour les Français ”. relais à la Région. Étouffée par le Front National,
m a rquée par la croissance du vote chasseur, la
droite picarde s’engage sans état d’âme dans une
collaboration locale poussée et durable avec l’ex-
trême droite. Quitte à invoquer une impro b a b l e
“ exception picarde ”.

La région avant 1998


En 1986, Charles Baur est déjà élu, mais sans
tapage, avec les voix du FN. À cette époque, les
quatre conseillers extrémistes n’effrayent person-
ne. Cependant, au cours de cette mandature
“ expérimentale ”, Charles Baur cède déjà à la pres-
sion de ses alliés qui obtiennent, entre autres, le
retrait de subventions à une pièce de théâtre jugée
contraire aux bonnes mœurs. “ En quinze ans de col -
laboration, je ne l’ai jamais entendu dire quelque chose
d’intéressant, résume Roger Mézin (RPR). Et je n’ai

100 101
jamais vu qui que ce soit lui vouer une vraie estime ”. leurre puisque les 11 voix du FN se portent aussi
sur Baur, permettant, grâce à ce stratagème, son
Devenu député européen, Charles Baur est éga- élection surprise. Les élus de droite dont les noms
lement élu député en 1993. Il subit, comme beau- suivent se sont prêtés à ce jeu : Pierre André,
coup d’autres partisans des alliances avec le Front Dominique Antoine, Stéphane Demilly, Philippe
National, une défaite traumatisante suite à la dis- Douchain, Annick Garin, François-Michel Gonnot,
solution de 1997. Claude du Grandut, Thérèse Hart, Jacques
Larangot, Isabelle Loeung, France Mathieu, Jean-
Les élections régionales de mars 1998 Pierre Vienot, Eric Woerth.
Ces élections donnent une majorité relative à la
gauche plurielle avec 23 élus (13 PS, 7 PCF, 2 MDC, “ Nous avons pris nos responsabilités pour éviter de
1 Vert) contre 20 pour la Droite (10 RPR, 9 UDF et l i v rer la Picardie aux communistes et à leurs alliés
1 CPNT) 11 pour le FN, qui se scindent par la suite trotskistes auxquels ils avaient promis une vice-prési -
entre le FN (8) et le MNR (3) et 3 pour LO. d e n c e ” justifie Eric Woerth, patron du RPR en
P i c a rdie, ancien conseiller d’Alain Juppé à
L'élection du Présient de Région Matignon et maire de Chantilly. La même stratégie
Le 20 mars, Charles Baur est élu avec les 11 voix est reconduite pour l’élection des vice-présidents.
du Front National. “ Un homme extrêmement cour - Les 4 élus le sont chacun au troisième tour de scru-
tois, qui n’a jamais attaqué le FN ” applaudit Pierre tin, par 27 voix (11 FN, 15 RPR-UDF, 1 CPNT)
Descaves. François-Michel Gonnot, secrétaire géné- c o n t re 23 à gauche : Patrice Fontaine (ex-RPR,
ral adjoint de DL, applaudit aussi. Face aux réti- ancien secrétaire départemental de l’Oise, proche
cences de certains conseillers de droite qui ne sou- de Mancel, passé depuis à La Droite de Millon) qui
haitent pas mélanger leurs voix avec celles de devient premier vice-président, Thérèse Hart (en
l’extrême droite. Une stratégie de contournement congé du RPR), Jacques Larangot (UDF-Adhérents
est mise en place. Quatre conseillers de dro i t e Directs) et Michel Blondin (CPNT).
d é c l a rent en effet être prêts, s’il le faut, à voter
blanc au troisième tour : Alain Gest, Brigitte Fouré, Éric Woerth écrit (Le Figaro, le 31 août 1998) :
Roger Mézin (UDF) et Bertrand Labarre (RPR). Le “ Nous avions délibérément voté pour Baur avec un seul
président du groupe FN, Pierre Descaves, se pré- objectif : éviter que cette région ne soit donné au Parti
sente au deuxième tour, en clamant haut et fort communiste ” . D’après les accords nationaux signés
qu’il n’a pu s’entendre avec Baur. Les quatre au sein de la Gauche plurielle, la présidence de
conseillers hostiles votent Baur en toute quiétude. cette région doit revenir à un élu communiste.
Mais la candidature Descaves est en réalité un L’ a rgument de “l’exception picarde” sert d’alibi

102 103
idéologique à l’alliance de fait et c’est sans com- quitte également, et non sans éclat, Démocratie
plexe que Charles Baur conclu avec l’extrême Libérale pour protester contre l’intégration de
droite. Jacques Blanc au sein du groupe DL à l’Assemblée
Nationale, acceptée par son ambitieux président
La gauche choisit, comme dans les trois autres Alain Madelin, membre fondateur du goupe
régions, de mener une politique d’opposition sys- Occident avec Gérard Longuet (ex-UDF) et Patrick
tématique. Mais en Picardie, elle se trouve renfor- Devedjian, aujourd’hui porte-parole de RPR et
cée par la dissidence de quelques opposants réso- Claude Goasguen (DL). À l’automne 1998 s’ou-
lus à Charles Baur et à toute alliance avec le FN. vrent des discussions sur un éventuel “ accord de
Ainsi, Alain Gest (UDF-DL), proche de Gilles de gestion ” associant la Gauche plurielle et les trois
Robien (UDF-DL), n’hésite pas à voter plusieurs conseillers de droite “ c o n t e s t a t a i res ” (Gest,
fois, courant juillet, avec la gauche contre le prési- Fouré, Mézin). Le dialogue achoppe car ces der-
dent Baur, et particulièrement le 17 juillet 1998 niers refusent avant tout l’élection d’un président
pour éviter que des conseillers FN ne représentent communiste. “ Ils sont passés à côté d’une opportu -
la région dans les organismes extérieurs. nité ” affirme Alain Gest qui se dit prêt à accepter
une présidence socialiste. “ Si l’hypothèque d’un
Alain Gest toujours résume la réalité des candidat communiste est levée, il n’y aura plus
alliances en Picardie (Le Figaro, le 11 septembre d’exception picarde ” résume Gest (L i b é r a t i o n, le 9
1998) : “ Voilà bientôt six mois que Charles Baur a déci - s e p t e m b re 1998) qui assortit son accord à trois
dé de conserver la présidence du conseil régional de c o n d i t i o n s : poursuite des politiques d’aide aux
Picardie grâce aux élus du Front National. Six mois entreprises, baisse sensible des impôts et maintien
sans représentant de l’Etat, qui ont déserté les sessions des subventions aux établissements scolaires pri-
de l’assemblée régionale. Six mois sans pouvoir procé - vés. “ Cela revenait à faire le jeu de la droite, qui aurait
der à la moindre inauguration, au risque de provoquer démontré qu’elle était en mesure d’arbitrer parmi les
le désordre. Six mois sans majorité. Le Front National, candidatures de la gauche ” rétorque le président du
privé de toute fonction et de toute représentation, a choi - groupe socialiste Claude Gewerc.
si de rejeter les dossiers importants pour la région,
concernant l’Université et les grandes écoles, les aides Le vote du budget de 1999
à la création d’emplois, la formation des jeunes (...) En En janvier 1999, la droite se trouve divisée en
c l a i r, il décide de la politique régionale ”. Le même trois groupes : les sept inconditionnels du prési-
j o u r, Alain Gest démissionne de Démocratie dent qui siègent au sein du groupe UPP (Union
Libérale dont il était le président départemental. pour la Picardie), 3 conseillers RPR et UDF, Alain
Gilles de Robien, député-maire UDF-DL d’Amiens, Gest et Brigitte Fouré (UDF) et Roger Mézin (RPR)

104 105
qui ne comptent pas voter pour le budget d’un Payet, conseiller régional et directeur administra-
exécutif dont ils contestent la légitimité, l’inter- tif de National Hebdo (L i b é r a t i o n, le 22 septembre
groupe de l’Alliance RPR-UDF (10 élus) qui s’in- 1998). Il confie à ce dernier : “ E n t re gens intelli -
terroge. Le RPR Eric Woerth, président de l’inter- gents, on peut toujours s’entendre ”. Ce qui n’em-
groupe, se satisfait de cette situation : “ Nous avons pêche pas Labarre d’être battu ensuite à l’élection
voté pour lui, nous n’allons pas faire un putsch ”. cantonale de Noyon en 1997.

Baur menace de démissionner pour mettre la Les élections cantonales de 1998


p ression sur l’interg roupe RPR-UDF et prévenir Jean-François Mancel, ancien numéro deux
toute tentative de rébellion. Cette pression ne national du RPR, président du conseil général de
dérange ni Eric Woerth (RPR), ni Stéphane Demilly l’Oise, reste tristement célèbre : il fut en effet le pre-
(UDF) qui déjeunent le jour même avec Baur et qui mier exclu de la droite républicaine en raison de
refusent une nouvelle élection du président de ses relations sulfureuses avec l’extrême droite. Il
région (Le Figaro , le 15 janvier 1999). avait notamment déclaré “ ne pas voir de raison de
refuser le concours des élus FN ”. Il s’est lancé de
Le budget est finalement rejeté le vendredi 15 longue date dans des tractations avec le FN qui se
janvier en ne recueillant que 23 voix (7 UPP, 8 lepé- sont traduites par des désistements aux cantonales
nistes, 8 élus de l’Alliance RPR-UDF). Les tro i s au profit du RPR. Aujourd’hui, Jean-François
conseillers de droite (2 UDF et 1 RPR) s’abstien- Mancel, dont on ne compte plus les déboires judi-
nent pour le vote du budget, ainsi que Dominique c i a i res relatifs à son train de vie aux dépens des
Antoine (UDF), Bertrand Labarre (RPR) de l’inter- contribuables, plaide pour que le FN “ devienne une
groupe Alliance RPR-UDF et les trois mégrétistes partie de la droite de demain ”. Soulignons qu’il est
du groupe Front National Renouveau. La gauche battu le 1er juin 1997 aux législatives de Beauvais-
vote contre (26). Explication de vote de l’UDF sud à l’issue d’une triangulaire serrée.
Stéphane Demilly, qui approuve le budget : “ Nous
ne voulons pas prendre le risque d’ouvrir une crise poli - Jacques Néhorai (RPR), pour sa part, appelle à
tique importante en Picardie ni, de quelque manière que voter pour le candidat FN Laurent Isoré à Beauvais
ce soit, favoriser l’accession au pouvoir de la gauche N o rd-Est. Dans un magazine de la mouvance
plurielle ” (Le Monde, le 17 janvier 1999). Bernard “ n a t i o n a l i s t e - r é v o l u t i o n n a i re ”, ce dernier écrit
Labarre mène un jeu trouble : parfois proche des que la “ jeunesse de France ” doit “ r é p o n d re aux
trois conseillers de droite anti-Baur, il sait aussi se coups lâches des politicards vaseux et fétides ” et aban-
faire des amis au sein de l’extrême droite comme donner “ son âme servile ” pour échapper aux
en témoignent ses relations avec le lepéniste Lionel “ entrailles de la décadence ”. Le tout avec un “ rêve :

106 107
redevenir des seigneurs ! ”, rien de moins.

Tout comme Jacques Néhorai (RPR), exclu le 18


mars 1998, Philippe Callens (RPR) obtient, pour les
élections cantonales, le soutien explicite du Front
National dont le candidat s’efface à Crépy-en- Poitou-Charentes
Valois. En échange, Mancel donne l’ordre à deux
candidats de droite devancés par le FN de se désis-
ter en leur faveur. Ils refusent de se soumettre et le
FN doit se contenter d’un appel du sénateur-maire La région avant 1998
RPR de Compiègne, Philippe Marini, à “ faire bar - Le conseil sortant : 3 PC, 12 PS, 1 DVG, 3 Verts,
rage au parti communiste dans l’Oise et en Picardie ”. 4 GE, 2 CPNT, 13 UDF, 11 RPR, 1 DVD, 5 FN. Jean-
Pierre Raffarin préside la région depuis 1992 grâce
Pour les législatives de 1997, le CNI a appelé à à une majorité absolue regroupant la droite et les
voter pour deux candidats FN dans l’Oise, Michel élus CPNT et GE.
Guiniot et Olivier François.
Les élections régionales de mars 1998
Il s’est exprimé dans Présent Le nouveau conseil régional : 4 PC, 15 PS, 1 PRG,
Patrice Marchand, maire DL de Gouvieux (Oise), 1 DVG, 3 Verts, 2 CPNT, 9 UDF, 11 RPR, 1 MPF, 3
conseiller général de Chantilly, conseiller national DVD et 5 FN.
DL et vice-président de ce parti dans l’Oise a, fait
rarissime, signé une tribune dans ce quotidien très Le FN reste stable dans cette région. La gauche
spécial... p ro g resse légèrement et paye le prix de ses divi-
sions puisque deux sièges lui échappent. Les deux
Il s’est exprimé dans L’Hebdo du Quotidien ancien ministres candidats à la présidence ont
Arthur Dehaine, député RPR de l’Oise et maire annoncé qu’ils ne pactiserait pas avec le FN. Jean-
de Senlis, le 21 juin 2000. Pierre Raffarin est finalement élu contre Philippe
M a rchand. Au cas où, le doyen d’âge de
l’Assemblée est élu sur la liste Raffarin.

Jean-Pierre Raffarin (DL, ex UDF), président de


la région et sénateur : “ Jacques Blanc n’est pas
Jospin, il ne dirige pas la France, on ne va pas passer

108 109
notre vie à parler de lui ”.

Raffarin ne doit son élection à la présidence de


la région qu’au soutien d’un élu de l’ex-MPF de de
Villiers, candidature qu’il a lui-même org a n i s é ,
ainsi que des élus du CPNT, dont un est candidat Provence-Alpes-Côte-d’Azur
o fficiel de la droite à la mairie de Niort. Plus
machiavélique, Raffarin n’hésite à se servir des
élus du FN pour empêcher la gauche de présenter
un candidat à l’élection du président de région. On L’écrivain René Merle explique dans Libération
ne sait pas quelle aurait été son attitude face à un du 14 avril 1998, au sujet des alliances : “ Il ne s’agit
vote FN en sa faveur… Rappelons qu'il est le prin- pas seulement de manoeuvres d’appareils en quête de
cipal animateur du club Dialogue et Initiative, majorité, mais de l’expression de tendances lourdes qui
une des boîtes à idée de Jacques Chirac. agissent dans la société civile au-delà de la sphère direc -
tement acquise au FN ”. La précocité de l’enracine-
Sous prétexte de refuser à l’extrême droite de ment de l’extrême droite en PACA est un phéno-
siéger dans les Conseils d’administration des mène unique en France, dû en partie à une vieille
lycées, il le refuse à toute la gauche, entendant tradition de droite extrême, régionaliste, royaliste,
ainsi régner sans partage avec une caution morale pétainiste et maurrassienne, ajouté depuis à un
douteuse. socle fort “ Algérie française ”: Pas étonnant, dès
lors, que le Front National soit en 1998, avant sa
J e a n - P i e r re Raffarin, qui est aussi interviewé scission, la première force électorale de la Région.
dans M i n u t e, répond à L i b é r a t i o n (16 septembre
1998): “ Je ne savais pas que Minute était proche du La région avant 1998
FN. Je pensais que tout le monde y parlait ”. On retrouve cette vieille tradition locale de col-
laboration active dès les premières élections régio-
nales de 1986, où Jean-Claude Gaudin (alors UDF)
est élu président et applique une alliance en bonne
et due forme avec le FN, et ce jusqu’en 1992. Il
donne à un élu frontiste, Max Baeza, la fonction de
premier vice-président et la présidence de la com-
mission foncière. Jean-Claude Gaudin est recon-
duit en 1992, la droite ayant obtenu une majorité

110 111
relative. La droite compte en effet 46 élus en 1992 francilienne.
(29 UDF, 17 RPR) contre 40 pour la gauche (10 PC, Le vendredi 20 mars ne débouche que sur une
18 PS et 12 DVG). Avec 30 élus FN, l’arrivée de Le l a rge division de la droite, partagée entre deux
Pen comme tête de liste dans la Région marq u e l o g i q u e s : une attitude républicaine, derrière
cependant une rupture dans la collaboration acti- François Léotard et un véritable accord avec Le
ve avec la droite. La gauche choisit alors de soute- Pen, derrière le RPR Christian Estrosi. L’élection
nir ponctuellement Jean-Claude Gaudin sur les du président est repoussée au lundi après deux
principaux dossiers, en votant pour ou en s’abste- tours où chaque camp se compte : 49 pour la
nant. gauche, 37 pour la droite et 37 pour le FN. Michel
Samson, journaliste au M o n d e, décrit l’état de la
Les élections régionales de mars 1998 droite locale (édition du 22 mars 1998) : “ Réunie
Avec 49 élus, la gauche plurielle progresse de 9 dans une ambiance “surréaliste”, selon un participant,
sièges et se trouve en position de majorité relative. la droite tente, alors, de sortir de la tenaille. M.Léotard
Le Front National reste cependant le véritable estimant avoir accompli son devoir, la discussion porte
vainqueur du scrutin. Dans le Var, le Vaucluse et sur ce que devrait faire un président éventuellement élu
les Bouches-du-Rhône, il recueille plus du quart avec les voix du FN.
des suffrages exprimés et arrive en seconde posi- L’idée de suspendre la séance jusqu’au lundi apparaît
tion derrière la gauche. Premier parti politique de comme une porte de sortie miraculeuse. Dans la confu -
la région avec 37 élus (plus 7 par rapport à 1992), sion on vote: les partisans de l’alliance gagnent cette
le FN fait alors jeu égal avec la droite (37 élus, fois la partie, avec 21 voix contre 16 (...) Tous les
moins 11). François Léotard, tête de liste, est quant conseillers régionaux se retrouvent à 17h30, Christian
à lui le grand perdant du scrutin. Estrosi demande au doyen, un élu FN, de suspendre la
L’UDF Jean-Louis Tixier, premier candidat non séance “jusqu’à lundi”. “Je vous l’accorde, la séance est
élu de la liste de Jean-François Mattéi (DL), dépo- levée”, répond immédiatement le président d’âge, qui ne
se un recours devant le Conseil d’Etat pour annu- prend pas la peine, cette fois, de consulter du regard Le
ler les élections régionales dans les Bouches-du- Pen. Il abandonne son perchoir dans la seconde. Le
Rhône (49 élus). groupe FN se lève. M. Léotard, dans une rage froide,
jette à Christian Estrosi : “Sors avec tes amis”. Restent
L’élection du président de région alors dans l’hémicycle la gauche plurielle et la droite
Le Pen, après l’élection de cinq présidents de ennemie de l’accord avec le FN, une quinzaine de
d roite grâce aux voix FN, entend pre n d re lui- conseillers désemparés.
même la présidence de PACA. Il est prêt en échan- À l’extérieur, des colistiers d’hier du patron de l’UDF
ge à accorder les voix FN au candidat de la droite fulminent. Daniel Spagnou, RPR des Alpes de Hautes-

112 113
Provence et maire de Sisteron, peste contre la trahison l’UDF et le FN ” (L’Humanité, le 21 décembre 1998),
de François Léotard, qu’Ivane Eymieu, UDF des après le refus par la droite et son extrême de voter
Bouches-du-Rhône, traite à mi-voix de salaud”. un dispositif d’aide et de soutien aux chômeurs
des Bouches-du-Rhône. Selon Sylvie Andrieux
La droite est éclatée : François Léotard maintient (PS), en “ refusant la prise en compte par la région des
sa candidature et sa détermination à ne pas s’allier situations dramatiques des chômeurs de longue durée,
avec l’extrême droite. Gilbert Stellardo, également la droite a préféré privilégier ses intérêts partisans en
candidat, représente ces élus de droite favorable à donnant des gages au Front National ”.
un accord avec Le Pen : il obtient 9 voix, Léotard
19, tandis que 9 élus de droite refusent de choisir. E s t rosi a choisi une stratégie claire et simple :
L’hommage du socialiste Michel Vauzelle, une fois faire grossir les rangs RPR avec le transfuge d’an-
élu à la présidence, à “ Messieurs. Léotard, Mattéi et ciens FN en ru p t u re de ban pour espérer mettre
Gaudin pour leur attitude républicaine ” a c h è v e r a Michel Vauzelle en minorité. Comble de l’hypo-
d’agacer les “ alliancistes ”. crisie, il oblige les anciens élus lepénistes et mégré-
tistes qui souhaitent rallier ses rangs à signer une
S’il n’y a pas eu d’alliance effective, ce n’est pas déclaration refusant toute alliance avec le FN. Le
faute de bonnes volontés de la part de la dro i t e groupe RPR passe ainsi de 17 à 21 membres avec
dure de Provence. La forte médiatisation aura sans les ralliements discrets de Jean-Christian Tarelli,
doute permis d’éviter le pire. Après avoir soutenu, Robert Crépin, Jean-Pierre Gost et Rémi François,
avec l’approbation de Jacques Peyrat (sénateur- devançant par la même occasion le groupe UDF
m a i re RPR de Nice), de Lionnel Luca (député- (20 élus). La droite peut également compter sur les
m a i re RPR de Villeneuve-Loubet) et de Maurice t rois nouveaux non-inscrits (tous ex-FN) au
Delauney (maire de Cannes) une pétition prônant Conseil régional : Stéphane Durbec, Cendrine Le
une alliance au conseil régional avec l’extrême Chevallier, femme du Maire FN de Toulon, et Sid
droite, Christian Estrosi, député RPR des Alpes- Hamed Yahiaoui. Cette nouvelle donne a permis à
Maritimes, négocie pourtant jusqu’au dernier Estrosi, farouche partisan d’une large majorité de
moment l’accord les instances parisiennes de son droite, de prendre à Léotard, opposé à toute allian-
parti. Michel Vauzelle l’emporte finalement. ce, la tête de l’opposition à la région. Désormais,
la droite emmenée par Estrosi s’allie ouvertement
Deux ans de compromissions avec le FN et le MNR pour bloquer les dossiers de
Ces deux années et demi d’alliance tacite ont per- la majorité : budget 1999, mesures nouvelles pour
mis une clarification des positions. La gauche la formation professionnelle, conseil régional des
dénonce une “ collusion idéologique entre le RPR, jeunes, actions en faveur des chômeurs, subven-

114 115
tions aux associations d’éducation populaire et les amis d’Estrosi et l’extrême droite est on ne plus mar -
autres organismes d’insertion, etc. Le mercredi 15 quée et pourrait, si l’on n’y prend garde, déboucher,
décembre 1999, l’assemblée rejette le passage aux peut-être après les élections municipales de 2001, sur
35 heures pour le personnel du Conseil régional une situation à l’autrichienne ” (13 mars 2000).
par 60 voix contre (droite et FN), 48 pour et 8 abs- Michel Vauzelle: “ On ne peut que se réjouir de
tentions (MNR). Au printemps dernier, Michel l’éclatement de l’extrême droite, mais je déplore que le
Vauzelle demande aux élus de condamner la situa- RPR intègre des gens qui ont été élus sur des idéaux
tion autrichienne au travers d’une déclaration de fascisants sans que ceux-ci changent de discours. C’est
principe. L’extrême droite vote contre et la droite le phénomène Jacques Peyrat. Ce qui m’ennuie c’est que
n’est pas venue voter. Pour son budget 1999, le cela se fasse dans la discrétion ”.
président socialiste a eu recours au 49-3. Son pro-
jet de budget est en effet rejeté par les 37 élus de la Avec 48 élus sur 122, la gauche plurielle est fra-
droite RPR-UDF-DL et les 37 membres des deux gilisée. De 37 en 1992, la droite est passée à 41. Le
groupes FN et MNR. FN dispose encore de 25 sièges et le MNR de 8,
moins que les dix nécessaires pour constituer un
Le “ glissement de terrain ” (dixit Michel groupe.
Vauzelle) des élus lepénistes vers la droite passe
immanquablement par le moribond RPF. Dans une Appels du pied
région marquée par le transfert de Jacques Peyrat Jacques Peyrat : Il est passé du Rassemblement
du FN au RPR, les exemples ne manquent pas. Dès du Peuple Français (RPF) de De Gaulle au CNI
le mois de décembre 1998, Michel Vauzelle pré- puis au RI (futur UDF) de Giscard et enfin au FN.
vient: “ Si cet éclatement de l’extrême droite permet à Il a aujourd’hui sa carte au RPR (même si en juin
des gens du Front National ou de l’ex-Front National - 1995 l’UDF Alain Madelin lui fit des appels du
je ne sais pas ce qu’on pourra dire dans quelques jours pied très nets), à qui il apporte en dot conséquen-
- de se mettre un faux nez ” et de s’allier avec la droi- te la ville de Nice qui lui échoit après la doulou-
te républicaine “ alors qu’ils ont toujours les mêmes reuse fin de règne du populiste RPR Jacques
idées, il y aura là un processus sur lequel il faudra être Médecin. Sa démission du FN se veut avant tout
extrêmement vigilant. Il faut qu’on médite sur les réac - pragmatique : “ J’en ai assez que nous jouions les éter -
tions que certaines personnalités de droite ont en ce nels poulidors. Il n’y a pas d’autres solutions pour
moment ”. emporter la mairie de Nice que de mettre son étiquette
FN dans sa poche. J’espère que Le Pen compre n d r a
G é r a rd Piel, président communiste de la com- qu’en proposant aujourd’hui une autre forme d’action
mission transports, explique que “ la collusion entre politique au niveau local, je ne fais que tracer le chemin

116 117
qui nous permettra à terme de n’être plus diabolisés. (c’est un ancien proche de Le Pen), a d’abord suivi
L’efficacité doit primer sur tout le reste... ”. Pas aussi B runo Mégret, puis a rejoint en 1999 le RPF
regardant qu’il aime à le faire croire avec sa voix quelques jours, avant d’être accueilli à bras ouverts
de stentor, Philippe Séguin, alors Président du comme apparenté par le groupe RPR le 26 octobre
RPR, lui a offert une place paisible pour être élu 1999… Crépin convoite, dans les Alpes-Maritimes,
sénateur en 1998… le fauteuil du maire divers-droite de Vallauris.

Il est très difficile dans cette ville, sur place, de Jean-Pierre Gost, ancien numéro un de la fédé-
d i ff é rencier droite classique et extrême dro i t e . ration FN des Alpes-Maritimes, tête de liste FN à
Reste à voir si l’UDF aura le courage de ses petits Nice, puis conseiller régional mégrétiste, quitte le
effets d’annonce, comme, par exemple, de présen- MNR pour le groupe des “ nationaux indépen-
ter aux municipales de mars 2001 un candidat d a n t s ” avant un rapprochement avec la dro i t e
“ modéré ”, Rudy Salles, contre les idées de peyratiste. Il est apparenté depuis au groupe RPR.
Jacques Peyrat. La police municipale de Nice est Gérard Nirascou (RPR) accepte d’ailleurs sa pro-
évidemment manœuvrée par son maire Jacques curation de vote : “ Il n’est pas choquant que des gens
Peyrat. Elle n’hésite pas, depuis 1997 et encore en raisonnables, élus un temps de l’extrême droite mais qui
2000, à faire signer aux policiers des appels ou péti- reviennent à la réalité, rentrent au bercail de la droite
tions contre le projet du gouvernement Jospin après être passés par un sas de décontamination ”.
visant à interdire les armes à feu pour les polices
municipales. En septembre 2000, il est au centre Max Baeza : l’ancien vice-président FN de
d’un scandale après des propos racistes contre les Gaudin (de 1986 à 1992) a sans doute le parcours
Musulmans. Il écrit notamment : “ Les Mosquées, le plus varié. Fidèle de Le Pen et sur la liste FN de
qui sont un lieu de culte, ne peuvent se concevoir dans Peyrat en 1989, Baeza passe un temps au RPR
une République laïque ”. Puis refusant une opération avant de visiter La Droite de Millon et de finir au
de solidarité au bénéfice des réfugiés du Kosovo, RPF de Pasqua.
il écrit que ce combat est “ une bêtise innommable ”,
avant de conclure : “ J’ai suffisamment ma dose de Jean-Christian Tarelli (Marignane), élu mégrétis-
peuplade musulmane en France, sans souhaiter l’aug - te des Bouches-du-Rhône, quitte son groupe fin
menter ”. juillet 1999 et est aujourd’hui responsable du RPF
à Marignane et apparenté au groupe RPR depuis
Robert Crépin, conseiller municipal de Vallauris, le 28 janvier 2000 avec Rémy François (Vaucluse),
conseiller régional originellement FN, après un ex-FN aussi.
long parcours sur la Côte d’Azur avec ce parti Stéphane Durbec, lepéniste né en 1971 siège

118 119
a u j o u rd’hui dans le clan des non-inscrits. To u t e des Forces Nouvelles (PFN) jusqu’en 1978 - quali-
une carrière de jeune recyclé à droite s’offre à lui : fie l’élection d’Anne-Marie Comparini à la prési-
“ Le RPF peut très bien jouer le rôle de sas de déconta - dence de Rhône-Alpes “ d'erreur stratégique et poli -
mination car il est fréquentable ” a déclaré le député tique”.
marseillais Jean-François Mattéi, élu président du
g roupe DL à l’Assemblée Nationale à la re n t r é e les élections cantonales de 1998
2000 en remplacement de José Rossi. Jean-Pierre Schenardi, membre du bureau poli-
tique du FN, félicite, mercredi 18 mars 1998, Félix
Gilbert Stallardo : premier adjoint à Nice, élu Lerebour (RPR) d’avoir demandé par écrit le retrait
régional de Démocratie Libérale, il a été la cheville à son profit du candidat lepéniste, dans le canton
o u v r i è re de l’alliance droite-FN à la Région. En de Saint-Va l l i e r-de-Thiey (Alpes-Maritimes), en
qualité d’ancien président de la CCI des Alpes- s’engageant, en échange, à défendre des “ recom-
Maritimes, il avait déjà apporté à Peyrat le soutien mandations ” du Front National.
d’une partie des milieux socio-économiques niçois.
Candidat avec le FN pour diriger la région PACA : En attendant mars 2001
“ Ayant été boy-scout durant toute mon enfance, j’ai les La dilution des cadres d’extrême droite dans la
capacités à proposer une gestion acceptable par tous ”. d roite classique vise à reconquérir un électorat
“ p l u r i e l ” en vue de des municipales de 2001.
Bernard Asso, professeur de droit, est élu muni- Ainsi à Grasse, où le maire, M. Leuleu, est villié-
cipal à Nice (liste de Jacques Peyrat en 1995), passe riste (MPF), le responsable local du FN s’est mis en
aujourd’hui pour un RPR bon teint. Il fut directeur congé de ce mouvement pour créer “ Grasse 2001 ”.
de la très démago Ligue des Contribuables, consul- Signe d’une prochaine alliance pour mars 2001 ?
té par Robert Pandraud (1986-86) au sujet des
polices municipales, membre du Club de l’Horloge Le cas de Marignane mérite d’être souligné.
(voir ce chapitre) et a appartenu aussi au comité de Avant le succès de Daniel Simonpiéri, passé du FN
rédaction de “ Nouvelle École ”, lié aux extrémistes au MNR, cette ville des Bouches-du-Rhône (35000
du GRECE. habitants) était gérée depuis 50 ans par
LaurentsDeleuil, véritable opportuniste, allié aux
Christian Estrosi, en pleine séance du Conseil : communistes comme à la droite dans les années 70.
“ Vous ne méritez pas d’être français ! " à l’attention Il bascula officieusement vers le FN en 1985,
du socialiste Gérard Gouzes. Marignane devenant alors la première ville fron-
Le député DL des Bouches-du-Rhône Guy tiste. Deleuil reçu ainsi Le Pen dans sa ville en vue
Teissier ancien responsable du très droitier Parti de négocier sa place aux législatives de 1986.

120 121
Soutenu par le FN, il est réélu à la mairie en 1989. droite...
À Marignane toujours, Guy Martin (UDF) se
re t rouva dès 1989 sur la liste FN aux côtés de Charles Pasqua déclare le 17 novembre 2000 à
Pignaudel et Simonpiéri. Le même Guy Martin est Nice-Matin qu’il n’y aurait pas de candidat RPF à
aujourd’hui le candidat officiel de la droite contre Nice en mars 2001 contre le maire sortant, Jacques
le FN et le MNR. Aux cantonales de 1998, Deleuil Peyrat : “ Nice est une ville de droite, elle le restera (…)
se présente et se maintien afin de permettre à les idées de Jacques Peyrat ne sont pas très éloignées de
Simonpiéri de gagner les élections au second tour celles du RPF ”. Il déclare dans la même interview
avec 63% des voix. que Jean-Charles Marchiani a son “ soutien le plus
total ” pour conquérir Toulon en 2001 comme can-
Le maire de Marignane, Daniel Simonpiéri, se didat RPF.
rend le 9 décembre 1999 à une fête organisée par
le parti d'Alain Madelin, Démocratie Libérale, célé- Ils se sont exprimés dans Minute
brant les dix ans de la chute du Mur de Berlin à la Bernard Deflesselles, député et conseiller RPR du
Mutualité. Il souligne qu’on ne doit voir là “ aucun Vaucluse (et adjoint au maire de Carpentras), le 12
signe de ralliement ” mais qu’il est simplement “ un juillet 2000. Le brave homme, nous apprend l’heb-
anti-communiste primaire ”. Faute d’un ralliement, domadaire d’extrême droite, “ intervient régulière -
cette visite amicale n’est pas non plus de défiance ! ment à l’Assemblée pour défendre les commerçants et
Ce genre d’accointances n’est pas nouveau pour les artisans face à la grande distribution ”.
Madelin, puisque son petit club Idées-Actions Christian Estrosi, député RPR des Alpes-
accueillit quelque temps sans gêne le néo-fasciste Maritimes, le 14 juin 2000 : “ La tolérance zéro est
Jean-Gilles Malliarakis (Mouvement Nationaliste aujourd’hui la seule voie possible ”.
Révolutionnaire) qui œuvre tous les 15 jours sur la Renaud Muselier, député RPR des Bouches-du-
très spéciale Radio Courtoisie (voir le chapitre Rhône et 1er adjoint du maire de Marseille, Jean-
“ Passerelles ”). Claude Gaudin (DL), Minute du 10 mai 2000 :“ Je
ne pense pas que ce soit une bonne chose que de
Le 7 octobre 2000, le maire DL de Marseille, Jean- condamner quelqu’un qui a fait une faute profession -
Claude Gaudin, fait re n t rer dans l’exécutif de la nelle en le traitant de raciste. C’est un mélange des
Communauté Urbaine de Marseille le maire genres, c’est injuste et cela ne traite pas le fond du pro -
mégrétiste de Marignane, Daniel Simonpiéri, en blème. J’invite les médias à plus de mesure ”
tant que vice-président. Malgré les vives protesta- (Rappellons qu’à Lille, un policier avait tué peu
tions de la gauche, Gaudin ne veut revenir sur sa avant par balle un jeune d’origine immigrée).
décision validée par l’essentiel des responsables de Le multirécidiviste Thierry Mariani, député RPR

122 123
du Vaucluse et maire de Valréas (le 22 mars 2000) :
“ le constat des élus de terrain est que l’immigration Corse
dérape complètement ! Il ne fait pas s’étonner ensuite
si nous assistons à des problèmes de racisme ” et il José Rossi, président de l'assemblée territoriale,
“ s’insurge contre les résultats (de statistiques) sur la et alors également président du groupe DL à
montée du racisme en France ”. l’Assemblée, prend la décision d’inscrire en 1998
Jean-Charles Marchiani, député européen RPF (le Jacques Blanc (Président de Languedoc-Roussillon
26 avril 2000) : “ en Italie, Silvio Berlusconi a eu l’in - élu grâce au FN et assumé comme tel) sans vote
telligence de faire une campagne de rassemblement sans des députés libéraux, mais avec l’aval de son pré-
exclusive, en intégrant la droite dure du MSI et de la sident Alain Madelin.
Ligue du Nord, sans renier ses valeurs, et il a gagné.
C’est la démonstration de ce que le Rassemblement Pour Il convient ici de souligner que le FN est tradi-
la France veut faire et va réussir en particulier dans le tionnellement faible en Corse, certains nationa-
Var et dans le Sud de la France (…) Nous ne fero n s listes corses tenant des propos délibérément et suf-
jamais la politique du pire, car ne nous trompons pas fisamment hostiles au sujet de l’État français, de
d’adversaire, et il est hors de question d’avoir des enne - l’administration, des immigrés et même des “ allo-
mis à droite ”. Au moins, pour ce policier de choc, gènes ” que constituent les Français du continent
c’est clair, plutôt l’alliance avec l’extrême dro i t e pour cristalliser sur leurs noms la “ clientèle ”
que la gauche ! extrémiste.

Ils se sont exprimés dans L’Hebdo du Quotidien


Lionel Luca, député RPF (ex RPR) des Alpes-
Maritimes, le 12 août 2000.
Christian Estrosi, député RPR des Alpes-
Maritimes, le 8 mars 2000.
Thyerri Mariani encore le 19 janvier 2000 :“ C’est
extrêmement difficile à Valréas car nous avons une très
forte immigration et nous avons des jeunes qui posent
des vrais problèmes ”. Et encore le 5 avril et le 19
août 2000 dans L’Hebdo du Quotidien. Nous avons
donc là un des meilleurs clients de la presse d’ex-
trême droite.

124 125
L'élection du Président de Région
Ces résultats n’empêchent pas Millon de soute-
nir que la droite a conservé la majorité en Rhône-
Alpes. La droite n’est en effet majoritaire qu’à
condition d’intégrer les voix de l’élu chasseur et
Rhône-Alpes surtout frontistes. La droite comptant aussi dans
ses rangs le doyen d’âge, Pierre Gascon (alors
UDF), elle est assurée de l’emporter au troisième
tour en cas d’égalité. Pourtant, Millon s’accroche à
La région avant 1998 son siège et décide de s’allier au FN. Il est ainsi élu
Avant les élections régionales de mars 1998, c’est au deuxième tour le 20 mars 1998 grâce aux 35 élus
Charles Millon, chiraquien parmi les centristes et lepénistes. Alain Roure, seul élu CPNT, donne,
fervent catholique, qui assure la présidence de la avec son vote, l’égalité des voix entre la droite (et
région. Charles Millon est un des rares UDF, avec FN) et la gauche, et donc contribue aussi à la vic-
Alain Madelin, à rallier pour sa campagne prési- t o i re à Millon contre le candidat PS Jean-Jack
dentielle Chirac en 1994-95 (95% des UDF sont Queyranne. Seuls trois conseillers régionaux de
derrière Balladur), ce qui lui vaut le portefeuille d roite refusent de voter pour Millon : Thierry
de la Défense dans le gouvernement Juppé. Cornillet et Fabienne Lévy (UDF), et Marie-Thérèse
Ancien ministre et maire de Belley, Il peut comp- Geoffroy (seule RPR non impliquée). C’est le tollé.
t e r, pendant la mandature précédente, sur une
majorité composée de 72 élus (30 UDF, 30 RPR, 12 Seule consolation pour Millon, président élu
DVD), la gauche ne comptant que 52 élus (12 PC, avec le concours du FN après tractations, il reçoit
1 MDC, 31 PS, 2 PRG, 6 DVG) et le FN 28 (et un un coup de fil de félicitations de… Alain Madelin.
dissident). En revanche, François Bayrou lui suggère de
démissionner. Voici les élus de droite qui ont par-
Les élections régionales de mars 1998 ticipé à l'élection de Millon, et qui ne s'en sont pas
La droite et la gauche obtiennent le même désolidarisé : Michel Amoudry, Gérard Armand,
nombre de sièges, 60 chacun (12 PC, 1 MDC, 31 PS, Gabriel Banchieri, Jean-François Barnier, Etienne
2 PRG, 6 DVG, 8 Verts, 1 ind., 1 CNP), (26 UDF, 27 Blanc, Anna Bret, Marie Burkhardt, Jean-Pierre
RPR, 1 MPF, 6 DVD), mais la gauche plurielle Calvel, Jean-Claude Carle, Dino Cinieri,
devance légèrement les listes RPR/UDF (13.428 Dominique Chambon, Matthieu Chamussy, Jean-
voix de plus). Les élus FN sont au nombre de 35. François Chossy, Gérard Ducarre, Xavier Dullin,
Claude Faure, Jean-Loup Fleuret, Jean-Claude

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Flory, Eric Fournier, Marc Fraysse, Pierre Gascon, dévoiler l’accord qui les lie : “ S’il (Millon) persis -
Pierre Gimel, Jean-Pierre Girard, Bernard Gloriot, tait à déclare r, contre l’évidence et la vérité, qu’il ne
Jacques Gobet, Christophe Guilleteau, Emmanuel s’est rien passé entre nous, alors il existe un moyen très
Hamelin, Jacques Jond, Florence Kuntz, Patrick simple de sortir de cette ambiguïté : c’est de remettre en
Labaune, Philippe Langenieux-Vi l l a rd, Jean- jeu son mandat de président en précisant qu’il ne sou -
Claude Léger, Patrick Louis, Philippe Macke, haite pas disposer des voix du Front National, car il est
Renée Magnin, Hervé Mariton, Alain Mérieux, clair que ceux qui ne les souhaitent pas ne les obtien -
Jean Merle, Estelle Mosnier, Amaury Nard o n e , dront pas ” (Libération, le 25 mars 1998). Une preu-
Charles Personnaz, Nicole Peycelon, Louis v e : le mégrétiste Pierre Vial, négationniste
Prévond, Guylaine Riondel-Besson, Jacques convaincu, est chargé par la majorité des affaires
Remiller, Léone Retord, Christian Rochette, Pascal c u l t u relles au conseil régional. Entre - t e m p s ,
R o n z i è res, Marie-Christine Ta rd y, Michel Charles Millon, qui reste maire de Belley (Ain),
T h i o l l i è re, François Tu rcas, Michel Vate, Max continue ses déclarations douteuses et sa danse du
Vincent, Christian Vulliez. v e n t re devant les thèses extrémistes. Il déclare
ainsi en novembre 1998, alors qu’il réunit son
Chantal Delsol : l’amante religieuse mouvement, que la droite, “ la vraie ”, n’était pas
Ultra-catholique - à ce titre férocement anti-IVG au pouvoir depuis… 1945 !
et anti-PACS - et pseudo philosophe, c’est l’inspi-
ratrice politico-religieuse majeure de son époux En novembre 1998, Millon, n’a pas encore un vrai
Charles Millon (qui a appellé son parti : la Droite parti politique, La Droite étant un mouvement
Libérale et Chrétienne). Madame Millon enseigne associatif : il n’y a pas eu d’élection avec cette éti-
à l’université de Marne-La-Vallée et a publié à la quette. Faute de pouvoir se rattacher à un parti, il
rentrée 2000 un essai aux Éditions de La Ta b l e risque de perdre la dotation publique attribuée à
Ronde, dirigées par le très corrézo-chiraquien chaque parlementaire au titre de la loi sur le finan-
Denis Tillinac. Elle fait régulièrement des tribunes cement politique. C’est là que le petit CNI, parti
dans Le Figaro, Valeurs Actuelles ou La Croix, sans droitier croupion, lui sert de bouée en recueillant
bien sûr jamais rappeler son " appartenance " idéo- en son nom cet argent. Début 1999, une alliance
logique ou conjugale… CNI-La Droite est très sérieusement envisagée
mais Millon préfére, en 1999, transformer La Droite
Neuf mois d’alliance effective en parti “ neuf ” : la Droite Libérale et Chrétienne
En mars 1998, il s’évertue, malgré la simple arith- (DLC). Le congrès fondateur de La Droite, les 7 et
métique, à nier toute alliance avec l’extrême droi- 8 novembre 1998 à Paris, est un demi-échec : Il n'a
te. Bruno Gollnisch (FN) se charge à sa place de su séduire aucune vraie “ pointure ”.

128 129
Philippe de Villiers (alors vice-Président du RPF réunie plus de 300 personnes contre la venue de
de Pasqua) a annoncé dès janvier 2000 qu’il sou- Millon, le 10 septembre 1998.
tiendrait une éventuelle candidature de Charles
Millon pour la mairie de Lyon en 2001, en lui pro- La stratégie de l’opposition systématique
posant aussi de rapprocher son parti du RPF. Étendue à toutes les régions touchées par les
alliances c’est sans doute en Rhône-Alpes qu’elle
La résistance s’organise provoque les conséquences les plus lourdes à sup-
Le 7 mai 1998, le Conseil d’administration de porter pour les élus de gauche. La pre m i è re
l’Université Louis-Lumière (Lyon II) adopte à réunion de la Commission permanente, le 20 mai
l’unanimité une motion rappelant les principes de 1998, voit 18 dossiers rejetés, dont l’octroi de
“ l’éthique universitaire (...), incompatibles avec les bourses de formation pour les étudiants partant à
options idéologiques du FN ”, et invite tous les éta- l’étranger, d’un montant de 58,7 millions de francs.
blissements à “ développer une vigilance accrue quant Symbole de cette stratégie, l’affaire des bourses de
à toute dérive de la politique culturelle, d’enseignement la région provoque un fort émoi médiatique, mais
et de recherche ” du conseil régional et à “ ne s’en - réussit à attirer les projecteurs sur Rhône-Alpes.
gager dans aucune collaboration ou projet qui porterait Chaque année, la Région finance le départ de 3500
atteinte aux principes fondamentaux de l’Université ” de ses étudiants vers l’étranger par des bourses
(Le Monde, le 31 mai 1998). d’étude. La gauche fait ici preuve de courage et de
pédagogie sur cette question difficile. Devant l’in-
À Izieu, dans l’Ain, Charles Millon est conspué compéhension, les conseillers régionaux ne ména-
le dimanche 19 juillet, devant la stèle qui symboli- gent pas leur peine pour expliquer leur position
se le calvaire de 44 enfants et 7 adultes juifs raflés dont le seul but est de mettre un terme à cette
dans ce village et morts pour la plupart en 1944 à alliance régionale. Leur vote démontre ainsi à quel
Auschwitz. La présidente régionale de l’Amicale point la position de Millon est précaire pour autant
des déportés d’Auschwitz, Simone Lagrange, que chacun prenne ses responsabilités.“ Le plus dur
déportée à treize ans, demande publiquement à a été de tenir, reconnaît l’élu socialiste Bernard
M.Millon de quitter les lieux. Celui-ci ne part qu’à Soulage (Le Point, le 6 février 1999). Il y avait une
la fin de la cérémonie, bafouant ainsi la mémoire incompréhension des élus locaux et des acteurs de ter -
des disparus, des survivants et de leurs familles. rain ” .
Fin novembre, il est exclu de l'association du
musée-mémorial des enfants d'Izieu. Le FN entend monnayer son soutien à Millon et
pour bien se faire comprendre, vote contre certains
À Sévrier, en Haute-Savoie, une manifestation projets présentés par le groupe du président, Oui

130 131
à Rhône-Alpes (ORA). Ainsi des dossiers culturels l’extrême droite ”. La stratégie de l’arc républicain
et sociaux pâtissent du chantage exercé par le FN. est en place, mais ne satisfait pas tout le monde à
À gauche, le Parti socialiste et la plupart de ses gauche. Les communistes s’obstinent : “ Si nous
alliés s’opposent systématiquement à tous les dos- parvenons à faire capoter l’alliance Millon-Gollnisch,
siers pour ne pas cautionner la stratégie d’alliance la gauche, qui a recueilli plus de voix que la droite aux
réversible prônée par Millon. “ Résultat : il suffit que élections régionales, a la légitimité de revendiquer la
le FN soit hostile à un projet pour que celui-ci soit reje - présidence de la région ” explique Roland Jacquet,
té. On connaît ses bêtes noires: les institutions cultu - coordinateur des élus PCF en Rhône-Alpes.
relles, la politique de la ville, le soutien aux associations
artistiques ou sportives dans les quartiers difficiles ” L’annulation de l’élection de Millon
(Le Monde, le 21 juillet 1998). À ce sujet, les Le 9 décembre 1998, l’élection de Charles Millon
exemples ne manquent pas : dans la banlieue de à la présidence de la région Rhône-Alpes est inva-
G renoble, à Saint-Martin-d’Hères, le Centre des lidée par le Conseil d’Etat, assailli de recours. Il a
arts du récit qui développe avec succès des ateliers donné raison à Etienne Tête, conseiller régional
et un festival de contes est directement touché. La Vert, qui avait déposé un recours dès mars 1998
subvention destinée aux ateliers pour enfants dans c o n t re les conditions d’élection du président de
quinze quartiers difficiles de l’Isère et aux conteurs région, jugeant irrégulier le débat qui eut lieu entre
qui interviennent dans les centres sociaux est sup- le lepéniste Gollnisch et Charles Millon avant le
primée. La Biennale de Danse de 1998, sur le deuxième tour de scrutin.
thème, forcément déplaisant pour le FN et le MNR,
de la “ Méditerranée ” a vu fondre ses crédits. Les La gauche qui peut compter sur 60 élus, contre
refus sélectifs du FN heurtent aussi de plein fouet 15 au groupe UDF RPR, est alors tentée de pré-
les projets des missions locales pour l’emploi des senter un candidat, le socialiste Jean-Jack
jeunes à Givors et Villeurbanne. Millon remet au Queyranne, aux trois tours de scrutin. Le risque est
FN la politique culturelle et sociale de sa région. cependant trop grand de perdre une nouvelle fois
Face au malaise croissant devant la politique la région au profit d’une alliance droite extrême
d’opposition systématique, le Parti Socialiste droite. Anne-Marie Comparini est choisie comme
reprend l’initiative. Bernard Soulage, porte-parole candidate des “ Républicains de droite ” face à
du groupe PS, affirme que la gauche est prête “ à Millon, candidat à sa succession avec l’appui des
soutenir un nouvel exécutif républicain, mais sans y seuls lepénistes et de son groupe. Amaury
participer ”. Marie-Thérèse Geoffroy (RPR) : “ C’est N a rdone (DL et délégué national à la
le moment de se décider. On ne peut pas, à la fois, se Communication de DLC-Millon), plus rustre que
réclamer du gaullisme et cautionner une alliance avec galant, propose plusieurs fois de “ mettre des

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claques ” à Marie-Thérèse Geffroy, seule RPR à refu- PS) y côtoie Etienne Tête (Les Verts). Les socialistes
ser de mêler ses voix à celles du FN le 20 mars évoquent le maintien de Jean-Jack Queyranne aux
1998, lorsqu’elle prend la parole en séance… t rois tours de scrutin, mais l’UDF Anne-Marie
Comparini, en accord avec François Bayrou, réaf-
Dans un premier temps favorable à une “ solu- firme qu’elle postulera elle-même à la présidence
tion Comparini ”, le RPR parisien change d’avis au de Région, en se présentant aux trois tours du scru-
dernier moment. Entre le premier et le deuxième tin. Bernard Soulage confirme alors que le PS la
tour de scrutin, Nicolas Sarkozy (N°2 du RPR) soutiendra : “ Nous ferons tout pour faire barrage à
convainc assez facilement le président du RPR, M i l l o n ”. Le RPR Philippe Langenieux-Vi l l a rd
Philippe Séguin, de soutenir le candidat madelino- approuve, ayant reçu un appel et le communiqué,
milloniste, Pierre Gascon, contre Anne-Marie t a rdif autant que lourd d’amertume : Séguin
Comparini, car Millon, minoritaire, doit se retirer demande aux élus gaullistes de “se conformer aux
de la course. Un nouveau fax de Séguin tombe orientations arrêtées par le chef de file UDF”. Mais au
dans la nuit, quelques heures avant l’ultime tour. moment du vote, la volte-face de Séguin montra
Lâchée par le RPR, Comparini pense alors aban- que rien n’était joué…
donner. Elle reçoit pourtant vers 2h30, dans la nuit
du vendredi au samedi, les 60 voix de la gauche En annonçant au dernier moment que le RPR,
plurielle qui ont fait bloc contre Millon et les lepé- malgré son communiqué du 6 janvier 1999 appe-
nistes. À 3h05 elle s’asseoit dans le fauteuil de la lant à rallier la candidature d'Anne-Marie
présidence, déserté par l’ancien ministre UDF de Comparini, soutiend Pierre Gascon (DL, pro -
la Défense de Juppé et Chirac, grâce à 15 voix de Millon) lequel a déjà reçu le soutien des lepénistes,
droite… Et 60 de gauche ! Séguin perd la bataille de l’honneur, lui qui a fait
preuve d’une certaine fermeté en mars 1998, tout
Avant l'élection du nouveau président de la en ayant gardé au RPR le Maire de Nice, Jacques
région Rhône-Alpes, le 6 janvier 1999, c'est le Peyrat, transfuge du FN. L’attitude de Séguin est
déjeuner des dernières discussions, à Bourg o i n - indigne à Charbonnière, preuve aussi de l’avancée
Jallieu (Isère). Huit invités : deux socialistes, deux des idées pro-alliance au sein de la droite dite clas-
RPR, deux UDF et deux écologistes. Anne-Marie sique, voire même gaulliste. Refusant les alliances
Comparini - choisie comme candidate UDF à la avec l’extrême droite et tout accord avec la gauche,
succession de Charles Millon (et contre lui) au nom les dirigeants de droite ménagent les “ partisans du
des “ Républicains de dro i t e ” - est à côté de compromis avec l’inacceptable ” (Le Monde ).
Philippe Langenieux-Villard, (président du grou-
pe RPR), Bernard Soulage (président du gro u p e

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Le scrutin P i e r re Gascon, candidat commun de Charles
1er tour, jeudi 7 janvier 1999, 157 votants Millon, de Philippe Séguin, président du RPR et
Jean-Jack Queyranne (PS) 60 du frontiste Bruno Gollnisch. Seule la formation de
Charles Millon (ORA) 38 l ' a rc républicain permet d'évincer de l'exécutif
Denis de Bouteiller (Mégret) 22 régional tous les ami(e)s de Millon ainsi que les
Anne-Marie Comparini (UDF) 19 élus FN (rapporteur du budget, vice-présidence
Bruno Gollnisch (FN) 13 des commissions). Après presque 10 mois de com-
Patrice Abeille (Savoie) 3 bat courageux des élus de gauche, l'éviction de
Blancs/nuls 2 Charles Millon est enfin réalisée.

2e tour, vendredi 8 janvier 1999, 157 votants La présidence Comparini


Jean-Jack Queyranne (PS) 60 Charles Personnaz (UDF) est élu premier vice-
Pierre Gascon (ORA) 45 président le 11 janvier 1999. Anne-Marie
Denis de Bouteiller (Mégret) 22 Comparini décide que tous les conseillers siégeront
Anne-Marie Comparini (UDF) 17 à la Commission permanente, seule solution pour
Bruno Gollnisch (FN) Absent faire élire ses vice-présidents. Résistant de la pre-
Patrice Abeille (Savoie) 2 mière heure, Thierry Cornillet entre dans l’exécu-
Blancs/nuls 2 tif tout comme Dominique Chambon qui préside
depuis le 20 mars 1998 le groupe UDF et fut parti-
3e tour, samedi 9 janvier 1999, 135 votants san d’un “ accord républicain ” contre l’intrusion
Anne-Marie Comparini (UDF) 75 du FN. François Hollande (PS) estime alors que la
Pierre Gascon (ORA) 56 gauche a pris “ une décision de circonstance ” pour
Patrice Abeille (Savoie) 1 “ éviter le pire ”. Anne-Marie Comparini récuse la
Blancs/nuls 3 notion “ d’arc républicain ” et préfère celle de “ ras -
semblement d’élus ” opposés à toute “ compromission
Après trois tours de scrutin et 48 heures de négo- avec un parti extrémiste ”. Elle répète : “ Je suis l’ota -
ciations occultes entre Charles Millon et l’extrême ge de mes convictions républicaines, qui sont mes
droite (candidat à sa propre succession, le maire de guides ”.
Belley n’a plus que l’appui des lepénistes et de son
g roupe), l’UDF Anne-Marie Comparini est élue, Les millonistes rejettent par la suite les appels au
samedi 9 janvier 1999, présidente de la deuxième dialogue de la nouvelle présidente. Etienne Blanc
région de France, grâce aux voix des conseillers de persiste en février 1999 en rejetant le budget au
gauche. Contre elle se présentait le madeliniste nom des partisans de Millon et dénonce un bud-

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get “ sans ambition ” qui risque d’amener la région présidente par un candidat bénéficiant des voix des
à “ vivoter ” en suivant les idées des “ adversaires ” anciens du FN restent vivaces ” écrit Va n e s s a
socialistes. Certains millonistes se disent prêts à Schneider dans Libération le 31 janvier 2000.
voter pour des candidats FN à la présidence des
commissions. Millon, devenu quasi-autiste et en Portraits de quelques millonistes
charge d’une “ mission ”, choisit de voter avec le Pierre Gascon (DL) : ancien premier adjoint du
FN contre certains dossiers qu’il avait pourtant RPR Alain Carignon à Grenoble, doyen d’âge (77
défendu, comme l’insertion des jeunes en difficul- ans), membre du groupe Millon (ORA) au Conseil,
té ou les bourses d’études à l’étranger quand il pré- donc caution de l’alliance avec le FN, il est
sidait le conseil régional. condamné en novembre 1998 pour création d’em-
plois fictifs.
La position d’Anne-Marie Comparini reste déli- Etienne Blanc : Vice-président dans l’exécutif
cate : elle ne dispose en effet que de 11 voix sûres invalidé, fils politique de Millon. Maire de
dans une assemblée de 157 membres. Le 14 mars Divonne-les-Bains.
1999, son budget primitif est rejeté par 39 voix (PC, Jean-Claude Carle : sénateur DL de Haute-
FN et MNR) contre 23 (UDF et RPR) et elle doit uti- Savoie, vice-président du conseil régional depuis
liser le 49-3 régional. 94 élus (PS, Verts et Millon) 1992, conseiller général depuis 1994. Pour lui,
choisissent l’abstention. Comparini est la candidate de “ la gauche déguisée ”.
Gérard Ducarre : président (RPR, Loire) du grou-
A u j o u rd’hui, l’ancien groupe FN est divisé en pe ORA à la Région, le groupe milloniste.
trois groupes : entre lepénistes, mégrétistes et dis- Marc Fraysse : exclu du RPR en 1997, il a tenté
sidents mégrétistes. Denis de Bouteiller, ancien tré- de s’implanter à Villeurbanne puis à Lyon. Il fut
sorier national du MNR, a, en effet, rompu avec l’active cheville ouvrière de La Droite, avant de
B runo Mégret. Il préside dorénavant un gro u p e p a r t i r, écœuré… Pour devenir délégué départe-
divers droite composé de Richard Morati, Alain mental du RPF de Pasqua. Il est convenu de placer
B reuil, Frédéric Granjon et Georges Ract. La ses amis sur les listes d’un des candidats de droi-
gauche continue à soutenir la présidente UDF tan- te pour la mairie de Lyon, Michel Mercier (UDF).
dis que le groupe Millon n’a guère baissé en effec- Estelle Mosnier : conseillère régionale (Ain), 28
tif et compte toujours une trentaine de membres, ans, elle dit de Millon qu’ “il a gardé ses vraies
bien décidés à en découdre, notamment au valeurs”.
moment des élections municipales de mars 2001. Anna Bret : tête de liste dans l’Isère choisie par
Les millonistes attendent dans la perspective des Millon.
municipales : “ Les tentations à droite de remplacer la Jean Merle : conseiller régional depuis 1986,

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exclu du RPR pour avoir accepté une vice-prési- présidées par ce membre virulent de La Dro i t e
dence à la Région. (Charles Millon).
Jacques Jond : maire (UDF) de Flumet en Savoie Gérard Pélisson : partisan de Chirac et président
et président de la Fédération autonome générale richissime du conseil du surveillance du géant
de l’industrie hôtelière touristique. français de l’hôtellerie Accor a annoncé en
Jacques Remiller : vice-président du conseil novembre 2000 qu’il soutiendrait la candidature
général de l’Isère et conseiller régional depuis municipale de Millon à Lyon.
1998. Il soutient activement Millon et voit dans l’al- Olivier Foll : ancien inspecteur général de la poli-
liance avec l’extrême droite une alternative pos- ce, s’était déjà illustré pas ses réticences à effectuer
sible contre la gauche plurielle à l’approche des la perquisition au domicile des époux Tibéri pour
municipales de 2001. le juge Halphen, il a rejoint à la mi-2000 Millon
Gérard Dezempte : exclu du RPR pour liste dis- comme “ Monsieur Sécurité ”. Dans V S D du 5
sidente, il soutient Millon. Ses propos contre l’is- o c t o b re 2000, il déclarait : “ Dès lors que, dans la
lam lui ont valu d’être condamné en décembre famille de droite, les gens vont dans le même sens, ils
pour “ incitation à la haine raciale et religieuse ”. réalisent mon souhait le plus profond ”.
Jean-François Chossy : député UDF, il a rendu sa Claude Reichman : vice-président de la Dro i t e
carte 1992 de Force démocrate (UDF) après l’élec- Libérale-Chrétienne et leader du Parti Pour la
tion de Millon. Pour lui, Millon a eu “ le mérite de Liberté (PPL), c’est un ultra-libéral convaincu qui
réveiller la droite ”. anime fréquemment une émission sur la très extrê-
Jean-François Barnier : profil bas pour le sup- me Radio Courtoisie. Il est le fer de lance des libé-
pléant de Michel Bouvard, député RPR de Savoie. raux durs chez Millon, et défend par exemple
Il est adjoint au maire de Saint-Rémy-de- ardemment la mise en concurrence de la Sécurité
Maurienne. Sociale avec les assureurs privés.
Hervé Mariton (UDF, vice-président de Millon).
Michel Thiollère : maire UDF de St Etienne, a Un drôle de climat
longtemps hésité avant de quitter Millon en Ancien conseiller municipal et ancien conseiller
octobre 1998 et de rejoindre les non-inscrits puis régional RPR (Bourg - e n - B resse, Ain), Christian
de nouveau l’UDF. Diehl, né en 1954, édite anonymement, le 16 jan-
P i e r re-Patrick Kaltenbach : à la manifestation vier 2000, un tract hallucinant de racisme et de
anti-PACS de Christine Boutin du 31 janvier 1999, haine, torchon que le FN n’aurait pas renié : il attri-
on croisait les traditionalistes des Associations bue sans preuve des incendies de voitures à “ une
Familiales Catholiques (AFC), mais aussi les moins jeune poignée de délinquants bougnoules ”, attaque les
célèbres Associations Familiales Protestantes (AFP) autorités locales qu’il juge complices et silencieuses

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sur l’insécurité et conclue par un “ tous ensemble cords, de relations, de transfuges entre l’extrême
nous nettoierons le chancre ” ! De la prose du plus bel d roite et la droite pullulent dans l’est lyonnais,
e ffet pour ce notable RPR ! Il est condamné en p a r t i c u l i è rement touché en cette veille de cam-
n o v e m b re 2000 à 4 mois de prison avec sursis, pagne électorale. Les fro n t i è res s’estompent, les
10000 francs d’amende et est déclaré inéligible droites pactisent et fusionnent parfois. Les états-
pour trois ans. Il est aussi condamné pour diffa- majors de l’UDF, du RPR et bien sûr de DL obser-
mation contre le député-maire PS de Bourg - e n - vent et laissent faire. L’échec des municipales de
B resse, André Godin, qui est aussi visé dans ce 1995 est vécu comme un traumatisme : L’UDF et
tract immonde. RPR se sont alors retrouvés avec 6 élus à Rillieux,
3 à St Priest, 3 à Vaulx, 5 à Villeurbanne, etc.
Pascal Clément, Président du Conseil général,
député DL de la Loire et ancien ministre, à propos À Rillieux-la-Pape justement, l’UDF-Radical
du débat sur le projet de loi des étrangers Alain Duperré est battu en 1995. Il se fait cepen-
(L’Événement du Jeudi en décembre 1997) : “ Alors dant élire à la Communauté urbaine avec les voix
que nous cherchons l’intérêt général, vous défendez l’in - du FN. Puis il fusionne, son groupe “ Unir ”, deve-
térêt des étrangers ”. Il défend depuis début 2000 nant “ Réunir ” avec l’arrivée des anciens FN. “ On
une stratégie d’alliance avec la droite extrême, a affaire à des hommes. L’étiquette Front National, je
comme avec Charles Millon et les siens pour Lyon p r é f è re l’oublier ” indique Myrtho Santucci,
en 2001. Dans l’édition du Figaro du 25 novembre conseillère sans étiquette et proviseur d’un lycée
2000, il prône la fusion pure et simple des partis, à p rofessionnel. Jean-Pierre Calvel : “ Il y a des
droite. Avec Pasqua et Millon, sans doute, si on se moments en politique où des fenêtres se présentent, il
réfère aux accords locaux qu’il souhaite. faut savoir les ouvrir. Rillieux peut être repris à la
gauche ”. Un journal de campagne vient de sortir à
Dans la Drôme, en avril 1999, dans le canton de Rillieux-la-Pape: “ Rillieux-au-coeur ”. “ Il ras -
B o u rg-de-Péage, le candidat UDF sortant Henri semble la droite locale. Vraiment toute la droite. L’UDF
Durand se désiste en faveur du candidat FN qui et le RPR ont participé à sa réalisation mais son rédac -
est resté seul en lice face au candidat de gauche teur en chef s’appelle Denis de Bouteiller, ancien tréso -
Didier Guillaume. rier du MNR de Mégret ” (Libération, le 30 juin 2000).
Jean-Louis Vazette (UDF) accepte avec Alain
En attendant mars 2001 Duperré d’avoir pour colistier Denis de Bouteiller.
Depuis l’échec de Millon et la scission du FN, le “ Je ne suis pas un enfant de choeur en politique, ça
département du Rhône est le théâtre d’une vaste n’est pas une alliance de circonstance, on y travaille
recomposition de la droite. Les exemples d’ac- depuis un an et demi ” précise Vazette. Rebaptisé

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“divers droite” au sein du conseil municipal de t rouve refuge au RPF, sera en tête de liste, avec
Rillieux, le groupe des 5 anciens FN emmené par Joseph Ferrari (ancien du RPR), Laurent Giro t
de Bouteiller (MNR) a décidé de rejoindre le grou- (RPF) et Pascal Testa (DLC) comme colistiers.
pe UDF-RPR qui ne bronche pas...
À Villeurbanne, ancien fief de Charles Hernu,
Les Européennes et le succès du RPF laissent Gilbert Chabroux, l’ancien maire socialiste
aussi des traces. À Vaulx-en-Velin, RPR et UDF se condamné à un an d’inéligibilité en 1997, souhaite
retrouvent en huitième et neuvième position, avec retrouver son fauteuil. A l’occasion de la munici-
moins de 10% des voix à eux deux. Le RPF veut pale partielle du 15 mars 1998, organisée suite à la
réussir là où Mégret a échoué : la politique de la démission de la majorité municipale emmenée par
main tendue. Laurent Clamaron vient également son successeur, Raymond Te r r a c h e r, le candidat
de passer du RPR au RPF. socialiste se re t rouve opposé notamment à une
liste estampillée Droite unie par les états-majors
À Saint-Priest, la droite se rassemble au sein parisiens conduite par Daniel Rendu (RPR) et une
d’une association, le Rassemblement pour Saint- liste FN menée par le paganiste-racialiste Pierre
Priest avec, pêle-mêle, le responsable cantonal du Vial. Au premier tour, la gauche obtient 48,38%, la
RPR, la Droite Libérale-Chrétienne de Millon droite 14,61% et le FN 21,58%. Au second tour la
(DLC), d’anciens FN devenus RPF ou divers droi- liste de gauche est élu avec 59,19% des suffrages
te. Alain Breuil, après douze ans au FN, y joue un contre 17,71% à la droite et 23,1% au FN. Réunie
rôle central. Celui-ci avoue : “ J’ai passé une douzai - pour contrer un FN fort sur la quatrième ville du
ne d’années au FN et je ne le regrette pas. Ses grands Rhône, la droite se trouve confrontée à un cru e l
thèmes sont tout à fait justes, je n’ai rien à renier. J’ai dilemme avant le renouvellemnet de 2001, dans la
seulement quitté ce parti parce qu’il était devenu une m e s u re où les élus RPF, pourtant membres du
machine à faire gagner la gauche ”. Dans le même groupe RPR-RPF, n’hésitent pas à voter régulière-
esprit, Serge Voyant, ancien militant du RPR, puis ment avec les amis de Pierre Vial aujourd’hui au
du FN en 1983, passé du MNR au RPF il y a peu, MNR.
se veut le promoteur du “ rassemblement de toute la
droite ” . Alain Breuil, proche de Mégret, constitue Le journaliste du Journal du Dimanche, Bernard
une liste à la rentrée 2000 avec Pierre Favre (DLC- F romentin, précise que des municipalités de
Charles Millon), Michel Collet (ex-RPR), et Pascal gauche élues en 1995 à la faveur de triangulaires
Merle (RPF). “ pourraient être balayées par des alliances à l’autri -
chienne entre droite et extrême droite. Avec dans le rôle
À Vénissieux, Richard Morati, ancien FN qui fédérateur, le RPF ”.

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sure donc 32 voix de la Région ”. Valla conteste cette
En octobre 2000, pour la naissance du Parc lettre pendant qu'Anne-Marie Comparini dépêche
Naturel Régional des Monts de l’Ardèche – l’abou- Dominique Chambon (UDF) comme médiateur.
tissement d’un projet qui a demandé huit années Alain Roure qui donne déjà, par son seul vote,
de travail - le président du syndicat mixte chargé la victoire à Millon - contre le PS Jean-Jack
de le gérer, le conseiller général (DL) Michel Valla, Queyranne en 1998 agit en fait autant par affinités
qui est aussi maire de Saint-Pierreville et candidat politiques larges que pour son combat pro-chasse :
à Privas en 2001, bénéficie du vote du FN pour il est opposé de longue date au projet de Parc
atterrir à cette place. Avant le vote incriminé, le PS, N a t u rel Régional, qui limite l’accès au col
par la voix de Pierre Jouvencel, prie pourtant les d’Aubenas où les chasseurs tirent chaque année
deux candidats (l’autre étant le PS Bernard Bonin) des pigeons ramiers.
de prendre position vis-à-vis des élus FN et MNR :
Michel Valla reste flou et ne rejete pas a priori leurs Dans Le Parisien-Aujourd’hui du 11 novembre
voix. Il niera l’évidence arithmétique du soutien 2000, on apprend que le sénateur UDF Michel
extrémiste en sa faveur en arguant du vote à bul- Mercier, qui est aussi président du conseil général
letin secret… La gauche dénonce, depuis lors, à cor du Rhône et sera tête de liste RPR-UDF-DL à Lyon
et à cri cet accord dans le but de faire démission- en 2001, a fort discrètement conclu avec Charles
ner Michel Valla et pour éviter un blocage dans la Millon un accord de “ désistement réciproque ”.
gestion du Parc naturel régional... Cet accord est expliqué devant le bureau national
de l’UDF en présence de François Bayrou et
En coulisse et en amont, un discret personnage- Philippe Douste-Blazy où le feu vert aurait été
clé, Alain Roure (seul élu CPNT à la Région qui donné. Le pemier adjoint de Raymond Barr e ,
a par ailleurs été condamné en décembre 1999 à Christian Philip, avalise lui aussi ce principe. En
six mois de prison avec sursis et à 15.000F d’amen- somme, seule la présidente de Région Anne-Marie
de par le tribunal correctionnel de Privas pour Comparini reste en conformité avec ses engage-
“ outrage et provocation à la rébellion ” lorsqu’il s’est ments initiaux et hostile à tout arrangement porté
opposé à des gardes-chasses) mene cette opération et formulé par son camp !
en trompe-l’oeil : dans une lettre (dénichée par le
PS et publiée par Le Monde le 17 octobre 2000) Le député RPR Jean-Michel Dubernard, (ancien
a d ressée à Michel Valla par l’élu chasseur, il adjoint de Michel Noir) déjà adjoint aux finances
indique avoir “ obtenu le pouvoir ” du milloniste du maire sortant de Lyon, décide le 14 novembre
Amaury Nardone (DL) et déclare avoir convaincu 2000 de rallier le camp du candidat UDF Michel
le MNR et le FN de prendre part au vote, “ je t’as - Mercier (qui détient aussi le poste stratégique de

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trésorier national de son parti). À l’annonce offi- Charles Millon capte les voix de droite. Il faut reprendre
cielle de sa candidature, Mercier lance une phrase cette captation (…) Et nous n'avons plus les moyens
dont chacun, dans le contexte lyonnais et rhonal- comme dans le passé lorsque la droite locale avait 15 ou
pin, peut mesurer l’ambiguïté : “ Mon choix est poli - 20 points d'avance, d’énoncer des principes, la main sur
tique, c’est celui de l’union la plus large ” (Le Figaro, le cœur, la lèvre tremblante, de nous voiler la face et de
le 22 novembre 2000). Dans Les Échos du 15 faire de grandes déclarations sur l'honneur (…) Nous
novembre 2000 on lisait “ à la direction parisienne du avons un électorat qui attend de voir la gauche battue ”.
mouvement (UDF) on ne cachait pas hier qu’il ne pou - (L i b é r a t i o n, Le Monde et dépêches d’agences,
vait y avoir d’autres solutions qu’un rappro c h e m e n t novembre 2000). Jusque-là, Charles Millon est offi-
avec l’ancien président du Conseil Régional de Rhône- ciellement considéré par le RPR et l'UDF comme
Alpes (…) qui avait été réélu grâce aux voix du Front s'étant placé lui-même hors-jeu de la droite répu-
National ”. Charles Millon répondit à ces avances blicaine. Le soir même, Michel Forien, Président
“ Je suis prêt à fusionner mes listes avec d’autres, mais départemental du RPR du Rhône, fulmine : “ Il n’a
il ne faut pas qu’ils continuent à m’insulter ” (L e jamais été question d’une alliance avec Charles Millon.
Figaro, le 22 novembre 2000). Pour la prude UDF C’est une erreur d’interprétation ou une erreur de jeu -
aussi, la grande solderie de la repentance et du nesse de sa part. Il va faire un démenti, je vous le pro -
recyclage nauséabond est bien entamée ! mets ”. Il faut redire au RPR qu’il n’en avait pas été
non plus question en 1998 !
Le 16 novembre 2000, une dépêche Reuters tombe
en titrant “ Le RPR n'exclut plus de s'allier avec À peine se fait-il remonter les bretelles par ledit
Millon à Lyon ”. Le jeune secrétaire départemental Michel Forien, que le même secrétaire départe-
RPR du Rhône, Eric Pelet, déclare au cours d’une mental, Eric Pelet, tente de rectifier le tir : les
c o n f é rence de presse que la droite pourrait faire témoins et journalistes présents devaient tous être
alliance avec Charles Millon au second tour des stupides ou ivres de Beaujolais nouveau car sa
élections municipales de mars 2001 pour faire bar- pensée aurait été mal comprise… Il déclare donc
rage à la gauche : “ Nous n'avons pas envie de voir la que les propos rapportés ont donné lieu à une
gauche, avec Gérard Collomb (PS) et Étienne Tête interprétation non conforme à sa “ pensée (…) au
(Verts), se pavaner à la mairie (…) De toute façon, quel contraire, nous avons la responsabilité de faire en sorte
que soit le score de Charles Millon, s'il fait 10, 12, 13 que notre campagne, par ses réponses aux attentes des
ou 14% au premier tour, il faudra s'allier avec lui pour Lyonnais, ne permette pas à Monsieur Millon de négo -
battre la gauche ”. Pour Eric Pelet, le RPR lyonnais cier ”. Si on lit bien, plusieurs hypothèses peuvent
doit revenir “ au principe de réalité ” car “ l’art de la en découler : en répondant “ aux attentes ” des
politique c’est l’art de la réalité (…) Aujourd’hui, électeurs de Lyon il espère capter ses supporters,

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y compris sans doute en usant des mêmes thèmes novembre 2000 le “coup de poignard” donné à la
et ambiguïtés. Et écrire que le but de la campagne d roite lyonnaise par Anne-Marie Comparini qui
RPR est de ne pas permettre à “ Millon de négo- refuse toute alliance de second tour avec Charles
cier ” contient en soi cette possibilité si, au final, Millon et les siens, la jugeant alliée de la gauche et
au soir du premier tour, il se trouve avec un score “ assise entre deux chaises, elle va bientôt tomber par
probant. Dans la foulée le RPR Henry Chabert s’est terre ” et ajoute, pour bien clarifier ses intentions,
senti obligé d’ajouter “ J’ai dit très clairement qu’il que la droite ne “ saurait refuser les voix qui se por -
n’y aurait pas d’alliance avec Charles Millon. Je le redis. teraient au premier tour sur Millon» (Marianne 1 3
S’il devait y en avoir, elle se ferait sans moi ” novembre 2000). Gollnisch conclut son communi-
(L i b é r a t i o n, le 18 novembre 2000). Finalement, le qué en disant que Pascal Clément “ a raison de
secrétaire local du RPR est relevé de ses fonctions considérer que l’UDF fait en réalité la politique de la
par Adrien Gouteyron, secrétaire général du parti, gauche ” Pascal Clément annonce le 11 novembre
le 20 novembre 2000, non pas pour son cafouilla- que “ la Loire est ainsi le premier département dans
ge pro-Millon mais au motif qu’il soutient le can- lequel l’union de l’opposition sera la règle dans tous les
didat-député RPR Henry Chabert dans sa volonté cantons et dans toutes les villes ”. Avec sans doute
de postuler en solo à la mairie de Lyon, contre le des accords allant loin vers la droite dure et les
candidat UDF investi. recyclés, “ millonistes ” et extrémistes... Une semai-
ne après, le 15 novembre 2000, le même Pascal
La campagne de M.Mercier a été lancée le 28 Clément est reçu comme si de rien n’était à déjeu-
novembre, annonçant les 9 têtes de listes des arron- ner avec une poignée d’autres élus, par Jacques
dissements lyonnais pour janvier 2001, candidats Chirac à l’Elysée…
répartis entre UDF, DL, RPR et sans doute RPF, le
parti de Charles Pasqua ayant d’ores et déjà appor- Alors numéro deux de DL, le député de Paris
té son soutien à ces listes pour la troisième ville de Laurent Dominati, ami proche d’ Alain Madelin,
France... À cette occasion, Michel Mercier joue déclare le 13 novembre 2000 au sujet des munici-
encore de son ambiguïté à propos des listes initiées pales à Lyon : “ à Lyon si Michel Mercier (UDF) ne
par Millon et ses amis : “ Il appartiendra aux autres passe pas un accord avec Charles Millon, Lyon sera per -
listes de choisir de nous faire perdre ou de nous faire due ”. Preuve s'il en est que DL, au plus haut
gagner ” (dépêche AFP du 28 novembre 2000). niveau, est corrompue par ces idées d'alliances
noires qu'elle assume et désire...
Le délégué général du FN, Bruno Gollnisch, dans
un communiqué du 9 novembre 2000, appro u v e En attendant, certains jouent sur l’ambiguïté, ou
les propos de Pascal Clément qui dénonçait le 8 gardent “ plusieurs fers au feu ”, puisqu’on lit par

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exemple dans Le Journal du Dimanche du 19 ment La Droite, devenue en octobre 1999 Dro i t e
novembre 2000 : “ Invité par Raymond Barre à recon - Libérale Chrétienne le 14 juin 2000. Il est candidat
quérir son électorat républicain, Millon s’y emploie en à la mairie de Lyon pour mars 2001.
parcourant les quartiers ”. Il ajoute dès que possible, Bernard Accoyer, député RPR de Haute-Savoie,
à la même période, comme gage de sa bonne fidèle de Jacques Chirac et secrétaire national aux
volonté de fusionner avec ceux qui sont toujours élections du RPR (donc stratège en chef avec
ses amis, RPR, UDF ou DL, qu’il “ ne ferait rien qui Michèle Alliot-Marie, Présidente du RPR, pour les
puisse faire gagner la gauche ! ” (F r a n c e - S o i r, le 29 désignations des candidats), dans M i n u t e du 12
n o v e m b re 2000). Enfin, cerise sur le gâteau du avril 2000 : “ aujourd’hui le choix est clair : l’union de
recyclage-blanchiment en cours pour Millon, il est la droite doit favoriser l’alternance en 2002 afin d’em -
accepté - comme une évidence, comme si de rien pêcher le basculement, largement entamé, de la société
n’était – en tant que parlementaire (et comme française vers une société collectivisée ”.
“ non inscrit ”, n’étant pas encore intégré dans les Dominique Dord, député DL et vice-président
groupes RPR, UDF ou DL, mais ca ne saurait tar- du conseil général de Savoie le 19 avril 2000 “ le
der trop…) signataire de l’appel à l’union de(s) la PACS a manqué sa cible ! ”.
droite(s) lancé en novembre 2000 dans Le Figaro à
l’initiative de Dominique Baudis signé par près de Ils se sont exprimés dans L’Hebdo du Quotidien
400 parlementaires de droite, Jean-Pierre Soisson Michel Terrot, député RPR du Rhône : “ La délin -
lui aussi y a officiellement apposé son seing, quance m’apparaît comme de plus en plus violente au
comme élu de DL. Le moins que l’on puisse dire fil des mois (…) la machine à intégrer n’intègre plus, et
c’est que la droite part confuse à la bataille et que nous trouvons des jeunes issus de l’immigration, en
certains sont prêts à tout pour garder la ville à grand nombre, dans ces comportements qui rendent la
droite, y compris à rejouer mars 1998... vie impossible aux honnêtes citoyens ”.
Bernard Perrut, député DL du Rhône, adjoint au
Ils se sont exprimés dans Minute maire de Villefranche-sur-Saône, le 5 juillet 2000.
J e a n - M a rc Chavanne, député RPR de Haute- Yves Nicolin, député DL de la Loire le 17 mai
Savoie, conseiller général et maire de Saint-Jeoire, 2 0 0 0 : “ il suffit d’aller voir dans une banlieue pour
le 23 août 2000. savoir que les plus âgés se servent des plus petits pour
Michel Bouvard, député RPR de Savoie, le 30 commettre des délits, parce qu’ils savent bien qu’ils ne
août 2000. seront pas poursuivis! ”.
Henri Chabert, député RPR du Rhône et maire- Charles Millon, le 26 janvier 2000.
adjoint de Lyon, le 26 août 2000. Bernard Accoyer, le 3 mai 2000 : “ 2002 : Union de
Charles Millon, ex-UDF, fondateur du mouve- la droite ou société collectivisée ”

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Les élus des groupes socialistes et appare n t é s
appellent les citoyens et les élus se réclamant des
valeurs républicaines à les soutenir et à maintenir
Déclaration commune des Groupes Socialistes et une mobilisation citoyenne.
apparentés des Conseils régionaux de Bourgogne,
Languedoc-Roussillon, Picardie et Rhône-Alpes Ils appellent enfin solennellement les partis de
droite - quelle qu’en soit la future configuration -
à lever toute ambiguïté vis-à-vis du Front National
Les présidents des Conseils régionaux de afin que se dégagent, dans les Assemblées régio-
B o u rgogne, Languedoc-Roussillon, Picardie et nales, des majorités pour faire démissionner ces
Rhône-Alpes se sont alliés au Front National pour présidents de Région.
se faire élire. Ce faisant, ils ont pris la lourde res-
ponsabilité de conférer une “respectabilité” au C’est ensemble que nous ferons barrage à l’ex-
Front National. Ce parti nie l’égalité des hommes trême droite en France.
e n t re eux. Il est raciste et xénophobe selon les
termes employés par le Président de la République juin 1998
lui-même. Il profite de la souffrance sociale pour
p ro s p é re r, et ne propose aucun remède sérieux
pour la combattre.

Afin d’empêcher la banalisation du Fro n t


National, les élus des groupes socialistes et appa-
rentés des quatre Régions concernées re f u s e ro n t
toute compromission avec leurs exécutifs devenus,
à leurs yeux, illégitimes.

Ils s’opposeront aux politiques que ces prési-


dents seront contraints de mener pour obtenir le
soutien du Front National : elles ne pourront que
conduire à des décisions réactionnaires en matière
d’enseignement, de formation, d’insertion, d’ur-
banisme, de culture, etc.

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LES PASSERELLES

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Les médias

L’hebdomadaire National Hebdo est domicilié au


siège du FN à Saint-Cloud, qui en est l’actionnai-
re le plus important. À ce titre, il pourfend évide-
ment les “ traîtres ” du MNR. Le Pen, le FN et,
dans une bien moindre mesure ses lieutenants,
y sont glorifiés à longueur de colonnes.
R é g u l i è rement, cet hebdo salue ses “ a m i s ” du
quotidien intégriste P r é s e n t. Le FN a d’autre s
publications, comme Français d’abord !, mais elles
sont en diffusion très restreinte, à destination des
militants et cadres FN.

M i n u t e, hebdomadaire se voulant décalé et


“ politiquement incorrect ”, a failli s'éteindre il y a
quelques mois. Jean-Marie Molitor (via la Société
d’Exploitation Multimédia (SE2M) et l’Association
de Soutien à Minute - ASM) l’a remis à flots.
Depuis sa reprise (le populiste Nicolas Miguet
ayant échoué dans son rachat, se contente d’une
pâle et brouillonne copie de l’ancienne formule
avec L’Hebdo du Quotidien), il semble bénéficier de
moyens, soigne sa présentation et bénéficie sou-
vent d’indiscrétions venant d’informateurs appa-
remment bien placés. Cet hebdo exploite les obses-

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sions récurrentes de l’extrême droite : l’insécurité l’ancienne formule de M i n u t e dont il utilise tou-
amalgamée à l’immigration, les francs-maçons, jours ce titre pour un serveur Minitel et dont il
l’infiltration des “ gauchistes ” à tous les niveaux copia la maquette dans un premier temps.
de la société… M i n u t e se garde bien de trancher
e n t re FN et MNR. Le souci de “faire pro p re” est Le quotidien Présent, dirigé par Jean Madiran et
manifeste : dès qu’il le peut, Minute o u v re ses Jeanne Smits, est le porte-voix des catholiques tra-
colonnes aux représentants de la “droite clas- ditionalistes ou intégristes. Il compte parmi ses
sique”, qui ne se font pas prier. fondateurs Bernard Antony, pillier du FN. Il subit
une diffusion chaotique et, faute d’argent, se trou-
L’Hebdo du Quotidien : journal “satirique” de droi- ve en grande difficulté financière. Il est maintenant
te extrême et populiste (à la parution chaotique - réduit à un quatre pages sans grand intérêt, avec
sous-titre à la Une : “ une bonne droite pour 15F ”). une maquette assez malaisée, voire ésotérique
Nicolas Miguet, tête de liste aux Européennes en pour ceux qui s’aventurent dans cette ru b r i q u e
1999 sous le nom “Moins d’impôts maintenant” e t régulière, en pleine page : “ Dieu premier servi ”! Il
toujours à la tête du Rassemblement des ne prend pas vraiment partie pour Le Pen (ce der-
Contribuables Français, est directeur de la lettre nier leur en a d’ailleurs beaucoup voulu et n’a pas
confidentielle Le Quotidien de Paris (marque rache- vraiment oeuvré pour les aider) ou pour Mégret.,
tée à monsieur et madame Philippe Tesson quand Le quotidien veille donc à parler des deux partis
a cessé la parution normale), qu’il a relancé en 1995 frères ennemis, mais semble tout de même a priori
avec le soutien du Front National. Proche de l’ex- plus proche du FN, le MNR ayant emporté avec lui
trême droite(Le Monde du 11 juin 1999), “ ce spécia - les troupes “ païennes ” de Pierre Vial. L’IVG, les
liste de la bourse et des astuces fiscales ” a été condam- immigré(e)s, la gauche, le monde de la culture et
né en janvier 1999 à huit mois d’emprisonnement de la création, les homosexuel(le)s, les couples non
avec sursis et une amende de 150000 francs pour mariés, les divorcés, les moeurs et produits anglo-
“ banqueroute, escroquerie et faux en écritures ”. Les saxons, la “ décadence omniprésente ” et les non-
comptes de sa campagne furent également rejetés catholiques, cette liste n'étant pas exhaustive, sont
par la Commission des Comptes de Campagne, vomis à chaque parution de Présent. Le quotidien
fait aussi rare que grave pour un candidat se vou- préféré de la paroisse “ s q u a t t é e ” de Saint-
lant “ propre ”. Nicolas Miguet est aussi le direc- N i c o l a s - d u - C h a rdonnet (Paris Vème) a en
teur de L’Hebdo du Quotidien (via sa société GNM revanche rarement manqué une occasion de
S.A.), où de nombreux élus de droite ont tro u v é défendre Pie XII. Présent salue également souvent
refuge le temps d’une interview. Nicolas Miguet a les positions de de Villiers et de Millon, mais aussi
lancé ce titre en tentant de récupérer les cendres de celles de Christine Boutin.

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Dans un style plus policé, l’hebdo Va l e u r s avril 1996). Il définit Jean-Marie Le Pen comme
A c t u e l l e s est possédé par la famille Dassault, “ l’héritier de Maurras ” et juge qu’une conversation
Olivier Dassault étant aux manettes. Sous couvert avec lui est toujours un “ formidable dispensateur
d’infos sur des placements financiers, ce qui lui d’énergie ” . Sur cette antenne sévissent régulière-
permet, ciblant a priori les fameuses “ CSP+ ”, de ment l'extrémiste Jean-Gilles Malliarakis et le doc-
vendre assez cher ses pages de publicité y compris teur Claude Reichman.
à de grandes sociétés très respectables, voire
publiques, cet hebdo colle littéralement à tous les
combats idéologiques de la frange la plus réac-
t i o n n a i re de la droite : anti-IVG, anti-immigrés,
sécuritaire, anti-homosexuels… Valeurs actuelles va
même jusqu’à sous-entendre que Philippe Séguin
ne serait pas spécialement “ de droite ” (1er
décembre 2000 : “ l’intéressé serait, dit-on, le candi -
dat officiel de la droite pour Paris ”) ! On y retrouve
Philippe Tesson, Catherine Nay et le responsable
de la rédaction, ancien militant d’extrême droite,
François d’Orcival, devenu un notable re s p e c t é
sans vraiment renier ses idées. On y trouve aussi
r é g u l i è rement la prose de Chantal Delsol (Mme
Millon), de Paul-Marie Coûteaux (ex-plume RPR
de Séguin, député européen du RPF) et de Pierre
Lellouche (RPR).

Radio Courtoisie est leur média audiovisuel de


prédilection, faute de mieux, depuis 1986-87. La
virulence des propos qui y sont parfois tenus est
e ffarante. Serge de Beketch, royaliste légitimiste
comme il se définit lui-même, tient fermement la
ligne de cette maison très “ vieille France ” qui
entend “ mener un combat de civilisation ” et pense
que le FN est “ l’ancre – la seule – qui empêche la déri -
ve du bateau ” qu’est la France (National Hebdo, le 11

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Te r re u r ”! Toujours lors de ces re n c o n t res, le
Professeur Lucien Israël, militant anti-IVG (salué
par Présent le 6 novembre 1999) et fidèle soutien de
Philippe de Villiers, a, à son tour, déploré que la
France subisse “ une législation dite anti-raciste qui
Le club de l’Horloge bafoue la liberté d’expression (...) “, ledit médecin
appelant en conséquence “ à la révolte contre ce nou -
veau totalitarisme ”.

Henry de Lesquen en est l’inamovible président. Lors du IXème séminaire politique du Club, le 7
Depuis des années, il est de bon ton, pour certains juin 2000, son Président Henry de Lesquen, qui
responsables de droite, de fréquenter ce club, où dirige aussi le Mouvement Associatif pour l’Union
s ’ a t t a rdent plusieurs “ penseurs ” de l’extrême de la Droite (MAUD), clôtura les travaux par un
droite tels Bernard Asso, Yvan Blot, Bruno Mégret. discours intitulé “ La droite et les municipales : com -
La droite vient là comme on s’encanaille en douce. ment faire l’union à la base ” où il réclama des “ listes
Sauf qu’ici il s’agit bien de fréquenter de près les nationales, libérales et populaires ” rassemblant six
hommes et les idées de l’extrême droite. Pas ques- tendances de la droite UDF, DL, RPR, RPF, FN et
tion de s’apostropher, l’ambiance est au “ respect ” MNR. En plein dans le sujet ! Il s’est déjà claire-
des opinions de chacun... Pas question, surtout, ment opposé à l’IVG, dans divers comités ou mani-
e n t re ces murs, de diaboliser le FN ou le MNR. festations où il s’est trouvé en compagnie de
Selon National Hebdo (28 octobre 1999), la “ doctri - Xavier Dor (SOS Tout-Petits).
ne pro p re ” du club se résume à “ un libéralisme
quelque peu dogmatique, corrigé par un nationalisme Il sera très intéressant de voir qui va se ranger
de bon aloi ”. C’est en effet un lieu où il fait bon d e r r i è re la candidature du meneur du Club de
dénoncer “l’étatisme” et “le mondialisme”, thèmes l’Horloge, Henry de Lesquen, pour les municipales
que l'on retrouve souvent - quelles qu’en soient les de 2001. Et de voir, en outre, si des alliances se
formulations - dans les franges du FN, du MNR nouent. Il veut en effet aff ronter à Ve r s a i l l e s
mais aussi dans la droite populiste sous toutes ses (Yvelines) Étienne Pinte, député-maire RPR sortant
formes... En octobre 1999, lors de son université (très proche de Séguin). Son thème de prédilection
annuelle, Henry de Lesquen a aussi dénoncé les annoncé sera, bien entendu, l’insécurité grandis-
“ lois dites anti-racistes ” qui, de la loi Pleven 1972 sante dont la ville souffrirait...
à la loi Gayssot de 1990, seraient “ monstrueuses ”
car mettant la nation hors-la-loi et instaurant “ la Pour sa XVIème université annuelle - du 20 au

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22 octobre 2000 à Aix-en-Provence - le Club de
l'Horloge se réunissait sur le thème : “ Le renouveau
de la France : Comment sortir du déclin ” .
Vocabulaire : “ symptômes de la crise (…) la France
une société malade (…) les facteurs de la décadence ”.
Invités-vedettes de cette manifestation : le démo- Le Centre National des Indépendants
graphe nataliste Jacques Dupâquier (membre de
l'Institut), l'historien François-Georges Dre y f u s ,
Jean-Paul Gourévitch, François-Bernard Huyghe,
Jacques Paternot, et le député européen RPF Le Centre National des Indépendants et Paysans
Georges Berthu. (CNI ou CNIP) est le parti de droite le plus ancien
puisqu’il a été fondé en 1948 par les représentants
de la droite libérale modérée soutenant De Gaulle.
Il a connu alors un succès certain et eu de nom-
breux députés.

En 1962, les partis de droite non gaullistes sont


en conflit avec De Gaulle et le CNI, divisé, échoue
alors très gravement aux élections législatives.
C’est ce qui décide une partie de ses membr e s
menée par Valéry Giscard d’Estaing de monter leur
p ro p re boutique qui deviendra les Républicains
Indépendants puis se muera en 1977 en Parti
Républicain, ancêtre de Démocratie Libérale.
Joseph Laniel (Président du Conseil en 1953), René
Coty (Président de la République en 1954), mais
aussi Jean-Marie Le Pen, alors député, furent aussi
membres de ce parti. Après 1981, des anciens du
sulfureux Parti des Forces Nouvelles (PFN, issu du
g roupe “ Ord re Nouveau ”, dissout), dont le
proche de Madelin, Hervé Novelli, décidèrent de
s’investir dans le CNI dirigé alors par Philippe
Malaud. En 1997, celui-ci appellera “ l'ensemble de

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ses électeurs gaullistes et indépendants à porter leurs En novembre 1998, Millon a déjà fondé son mou-
suffrages au deuxième tour sur Bruno Gollnisch. Il en vement La Droite. Trop récent pour avoir eu des
va de même dans la quatorzième circonscription en candidats sous cette étiquette, ce mouvement
faveur de M.Morati auquel aucune voix ne doit man - risque de perdre la dotation publique attribuée à
quer puisqu'il sera seul en lice contre le candidat du chaque parlementaire. Il doit trouver une solution
Parti communiste ". en se rattachant à une organisation reconnue : le
CNI sert alors avec joie de boîte aux lettres pour
La présidence d’Yvon Briant ne fut pas flam- cet argent versé au titre de la loi sur le financement
boyante. Il radicalisa encore son parti, vers un politique. Ce fut un premier geste d’amitié entre
vague populisme très conservateur et rural, au eux. Le samedi 30 janvier 1999, à Auxerre (Yonne),
point d’en faire un groupement marginal à la droi- le Congrès du Cinquantenaire du CNI s’est tenu
te de la droite, aux frontières idéologiques du RPR en présence d’un “ invité d’honneur ” : Charles
et du FN. Il déclare, par exemple : “ le CNI a déjà Millon (Libération, le 12 avril 1999). Certains prési-
été le réceptacle naturel des déçus du FN. Aujourd’hui, dents départementaux du CNI sont aussi délégués
des contacts existent avec des conseillers régionaux du mouvement de Millon, selon vice-président du
frontistes. Mais je ne peux me situer dans d’autres pers - CNI, Jean-François Touzé, soucieux de “ faire émer -
pectives que celle du ralliement autour de Charles ger une droite de conviction, sans complexe, qui pèse
Millon. La porte est ouverte à ceux qui voudraient nous sur l’échiquier politique ” (Le Point, le 20 février
rejoindre. À condition, bien sûr, qu’ils aient renoncé à 1999). Ce Monsieur Touzé, qui est lui-même un
ce qu’Alain Madelin a appelé le cercle de l’inaccep - ancien militant FN, a estimé le 11 mars 1999 qu’il
t a b l e ”. Le CNI n’a cessé, depuis cette ancienne ” n’existe en réalité que peu de différence entre l’Europe
séparation, de décliner. En 1992, Jean-Antoine des Nations de Philippe de Villiers et l’Europe politique
Giansily (conseiller de Paris élu sur la liste RPR- de droite de Charles Millon ”. Il a pointé que certains,
UDF dans le XVème arrondissement, et actuel dont la secrétaire générale du CNI, Annick du
adjoint au maire de Paris chargé du contrôle des Roscoät, élue présidente un an plus tard, ne cher-
sociétés d’économies mixte) en prend la présiden- chaient “ qu’à défendre à tout prix les privilèges de leur
ce, sans éclat ni frémissement. Michel Junot, pré- mandat d’élus locaux obtenus grâce au bon vouloir du
fet honoraire et ancien élu de Paris, dont il fut RPR et de l’UDF ”. L’hommage du vice à la vertu ?
député, était aussi un membre actif du CNI. Il a conclu en disant que, a contrario, la majorité
du mouvement aspirerait plutôt à “ un grand ras -
Pour les législatives de 1997, le CNI avait appe- semblement de la droite de conviction autour de Charles
lé à voter pour deux candidats FN dans l’Oise : Millon ”. On est alors passé très près d’une vraie
Michel Guiniot et Olivier François. alliance CNI-La Droite.

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Le richissime industriel Gérard Bourgoin, vice- Le CNI s’est donc doté d’une nouvelle présiden-
président du conseil général de l’Yonne et maire ce en 2000 : Annick du Roscoät, conseillère régio-
de Chailley, prend la suite de l’invisible Jean Perrin nale des Pays-de-la-Loire (le RPR séguiniste
à la tête du CNI en avril 1999. Il ne cache pas qu’il François Fillon, qui préside la Région est très cor-
aurait voulu constituer une liste aux élections euro- dial avec elle et lui confia en 1998 une vice-prési-
péennes de juin, mais il a trouvé le discours de dence de commission), conseillère générale et
Pasqua et de Villiers - auxquels il aurait voulu municipale de Nantes. Elle fut longtemps secré-
arracher une place en position éligible - “ plus déca - t a i re générale de ce petit mouvement où elle est
pant que les autres ” (Le Figaro , le 21 août 1999). entrée en 1984 après être passée au RPR. Elle est
p roche de Raymond Bourgine, ancien patron de
En mars 2000, Gérard Bourgoin quitte précipi- “ Valeurs Actuelles ”.Elle veut redynamiser son
tamment la présidence du parti, qu’il occupa donc parti qui ne compte plus qu’un seul parlementai-
à peine un an, en souhaitant rester “ militant de re, un sénateur - qui est celui “ de la liberté d’entre -
base ”, parmi les 3.000 militants revendiqués alors p re n d re, de la famille, d’une France forte dans une
(“ dont 100 patrons français recrutés en 3 semaines ” - Europe indépendante ” et n’a de cesse de pourfendre
Le Figaro, le 21 août 1999). En fait, après les “ l’assistanat ” des politiques sociales. Tout porte
d é b o i res financiers de son groupe BSA, l' ultra- à penser que, dans la droite ligne des voeux répé-
libéral “ roi du poulet ” doit davantage se consa- tés de ses responsables passés, le CNI va plaider
c rer à ses aff a i res. “ Anti-communiste primaire ” pour une stratégie d’union de toute la droite, y
revendiqué, il entend se battre pour “ ceux qui se compris avec le FN et du MNR… De son côté,
lèvent tôt, artisans, commerçants, entrepreneurs ” (Le Michèle Alliot-Marie s'est prononcé en faveur d'ac-
P o i n t, le 17 avril 1999), mais il est tout de même cords électoraux avec le CNI.
ami et associé dans le pétrole avec Fidel Castro !
On l’a vu également soutenir très activement
Jacques Chirac en 1995, puis Alain Madelin (au tra-
vers d’Idées-Action puis de DL), à la suite de son
entrée en politique en 1993. Il cultive aussi des
amitiés politiques très diverses, mêlant affaires et
football. Il est en effet élu en 2000, dans des condi-
tions controversées, président de la Ligue
Nationale de Football. En juin 1997, il s’est pré-
senté en solo dans l’Yonne contre le RPR Philippe
Auberger : ce fut la déroute...

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sieurs fois depuis. Extraits : “ Contribuables Associés
est rigoureusement indépendante de toute organisation,
qu'elle soit politique, professionnelle, syndicale ou autre
(…) L'association est indépendante des partis et politi -
quement neutre (…) L'association s'interdit de recevoir
Un petit paradis anti-fiscal toutes subventions publiques ”.

Ancienne présidente des adhérents de l’UDF-


Paris, ex-élue UDF, Benoîte Taffin préside aux des-
Nous nous trouvons là devant une nébuleuse de tinées de la mairie du IIème arrondissement de
petits mouvements, d’associations, de gro u p u s- Paris depuis 1989, et se veut “ sans étiquette ”. Elle
cules aux dirigeants ultra-libéraux, aux convictions fait beaucoup plus parler d’elle en tant que prési-
et idées interchangeables et cultivant le secret et dente de l’association Contribuables Associés.
l’opacité. La perméabilité entre ces organisations Benoîte Taffin a donné une interview dans la jour-
qui oeuvrent aux rapprochements entre la droite nal de Nicolas Miguet (voir le chapitre qui lui est
et l'extrême droite au quotidien, mais de manière consacré) L’Hebdo du Quotidien du 20 septembre
souterraine, mériterait à elle seule une investiga- 2000, elle n’avait pas manqué par ailleurs de saluer
tion poussée. Nous nous contenterons d’un por- le score, aux européennes de juin 1999, de sa liste
trait global suffisamment explicite pour justifier sa anti-impôts.
présence ici.
Contribuables Associés est une association fon-
Sur le site web de Contribuables Associés, on dée en 1990. A cette époque Alain Dumait est pré-
t rouve cet organigramme : Benoîte Ta ff i n sident, Zimmern est trésorier, Laarman Secrétaire
(Présidente de Contribuables Associés et “ Maire général et Legrand assesseur.
du IIe arrondissement de Paris, sans étiquette poli-
tique ”), Alain Dumait (Président fondateur de Entre-temps, les statuts de l’association ont évo-
l’association et “ ancien journaliste ”), Bemard lué, notamment en février 1999, pour “ régulari-
Zimmern (trésorier et dirigeant d’une entreprise - ser ” la situation de Benoîte Ta ffin et d'Alain
secteur “ mécanique ”) et Bernard Legrand (secré- Dumait qui la dirigeaient en prenant de la sorte
taire de l’association et “ chef d'entreprise ”). quelques libertés avec les statuts ! Dumait a aussi,
en 1996-97, créé son parti politique, le Parti Pour
Les statuts de l'association ont été publiés au la Liberté (PPL). Heureusement les statuts de
Journal Officiel le 7 mars 1990, et modifiés plu- Contribuables Associés avaient opportunément

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aussi été modifiés en ce sens : on pouvait en être objectif n’était pas de rassembler les foules mais bien de
m e m b re tout en étant également dans un parti ! marquer les esprits en organisant un événement spec -
taculaire ”.
Le Monde du 24 novembre 1999 titrait “ La croisa -
de de Benoîte Taffin contre les impôts ” au sujet des Benoîte Ta ffin, qui croit voir un énorme gas-
Assises de Contribuables Associés et ce journal pillage partout, s’est déjà illustrée à maintes
constatait que l’essentiel des troupes était du troi- reprises par son rejet du logement social, alors
sième et du quatrième âge ! Le sous-titre de l’ar- même que son arrondissement en est très dépour-
ticle : “ Démagogie ”. vu… Le 15 décembre 1998, on lisait dans
Libération : “ Benoîte Taffin (divers droite), qui affiche
L’association revendique environ 130000 adhé- un grand mépris pour le logement social. Dans son
rents, ce qui serait considérable (les Verts en affi- journal municipal, l'élue affirme qu'avec les réquisi -
chent moins de 9000, le PS environ 119000, DL tions la collectivité encourage la violence sociale ”.
33000 et le RPR 80000 !)... Mais sont considérés
comme “ adhérents ” des gens qui ont simplement Démagogue, populiste, et d'un poujadisme
répondu à ses questionnaires ou lui ont demandé même, cette organisation extrême dispose de
des informations, sans nécessairement payer d’ad- moyens conséquents et ne recule devant rien pour
hésion ! Il s'agit là un fichier formidable pour ses avancer ses pions, tout en cachant sa vraie natu-
responsables et une redoutable machine à collec- re… Le 23 mars 1996, Le Point écrit “ (…) ces drôles
ter des “ dons ” : les comptes de l’année 1998 en d’indépendants qui tiennent la mairie du IIème arron -
révélaient plus de 19 millions ! Une cagnotte à dissement n’ont cessé de se rapprocher du Fro n t
toutes fins utiles ? Dans Le Parisien du 17 juillet National. Dans un premier temps ils ont cherché à créer
1999, on apprenait ainsi que parmi les maigres 200 un groupe FN au Conseil de Paris. Puis aux sénato -
manifestants âgés protestant devant le Ministère riales de septembre, Dumait a conduit une liste où figu -
des Finances, des dizaines de jeunes grimés en rait en douzième position un représentant du mouve -
contribuables-forçats ou costumés en bagnards de ment de Jean-Marie Le Pen. Le résultat obtenu –
l’impôt avec boulets (cornaqués par une femme Dumait n’a échoué que de 5 voix – a conforté Benoîte
déguisée en Marianne) étaient “ en fait de jeunes Taffin et son adjoint sur le bien-fondé de leur démarche.
comédiens intérimaires payés 600F chacun pour leur Dénonçant dans leur journal de quartier -En Direct-
p re s t a t i o n ! ” . Explication embarrassée devant la “ l’immigration pauvre et paresseuse ” et les “ popula -
révélation de sa supercherie médiatico-militante, tions allogènes difficilement assimilables ”, ils s’inter -
Contribuables Associés se défend par la voix de rogent : “ Le Pen n’aurait pas toujours tort. Est-ce pos -
son délégué général, Christophe Lekieffre : “ Notre sible ? ”. (…) Dumait répondait à la question en tenant

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meeting commun avec les dirigeants lepenistes. La puscule paranoïde ”, de manipulation, d’embriga-
gauche locale, conduite par un des lieutenants de Jospin, dement même face à des personnes fragiles, et des
Pierre Schapira, ne manque aucune occasion de dénon - techniques d’entrisme et de dissimulation, voire de
cer cette “ mairie sous influence ”. L’ancien président négation de l’idéologie politique qui sous-tend
des Républicains Indépendants de Paris lui répond par toutes leurs actions.
le mépris, persuadé “ qu’un espace politique existe
aujourd’hui entre la majorité gouvernementale et le Alain Dumait, né le 19 février 1944, est le
Front National ”. L’article conclu : “ le IIème arron - Président fondateur en 1990 de Contribuables
dissement est un laboratoire ”. Qui avait précédé les Associés. Il est un des 5 administrateurs de l’asso-
régions du printemps 1998 et qui perdure… ciation. Il fut le président des Républicains et
Indépendants (qui a débouché sur le Parti
C’est en effet avec ces personnes que Philippe Républicain-PR de François Léotard puis
Séguin voulait s’entendre dans le centre de Paris : Démocratie Libérale-DL de Alain Madelin, ex-
Benoîte Taffin révéla en novembre 2000, sans être composante de l’UDF), ce qui explique qu’il
contredite par quiconque, que Philippe Séguin lui connaisse bien certains élus et responsables de
proposait, à trois jours de la présentation officiel- d roite à Paris, dont les Dominati. Il est maire -
le de ses têtes de listes dans chacun des arrondis- adjoint de Benoîte Ta ffin et conseiller de Paris.
sements de Paris pour mars 2001, une alliance dans Dumait préside aussi un Comité pour l'entente à
le IIème : il fallait juste que le numéro deux sur la droite dont l’objet réel est à lui seul le résumé des
liste Ta ffin soit un RPR choisit par Séguin. alliances soulignées dans ce Livre Noir... Il publie
L’ancien président du RPR ne fut donc pas tro p les 4 vérités - hebdo et se définit parfois comme
regardant sur les idées et pratiques de cette drôle “ pionnier du mouvement libertarien ”, des ultra-
de maire dont il ne pouvait ignorer les penchants libéraux américains. “ Alain Dumait a, depuis, fait
idéologiques et les méthodes, à moins de paraître plusieurs apparitions aux côtés de Jean-Marie Le Pen,
comme gravement ignorant... Il eut beau jeu, fina- dont la dernière au Cercle National des préretraités et
lement, de présenter comme du courage, faute de retraités, un satellite du FN ” (M a r i a n n e, février
pointure ou de candidats implantés, que d’envoyer 1998). L’association est devenue très procédurière
au combat un jeune RPR inconnu Franck mais n’avait semble-t-il pas réagit aux informa-
Giovannucci contre celle qui n’avait pas donné tions contenues dans cette article.
suite à ses avances...
Conseiller de Paris, il fut aussi adjoint au maire
Sous couvert de lutte contre le gaspillage de l’ar- de Paris et Maire du IIème sous le règne de Jacques
gent public, on constate des méthodes de “ grou- Chirac (1983-89), et demeure adjoint au maire

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(depuis 1989) du IIème arrondissement. Il se pré- thèses de complot, de silence et de mensonges,
sente aussi comme ayant été aussi journaliste à p a reilles à celles que Le Pen développe. Alain
Antenne 2 , à L’Express, à Valeurs actuelles (1970-73), Dumait précise :“ Nous avons déjà plus de 10000
à France-Soir (1973-76), et au Figaro (1976-77). abonnés. Nous ne sommes liés à aucun parti politique,
à aucun groupe financier et nous n'acceptons aucune
Créé en 1996, le PPL est, selon lui-même, un publicité ” Il ment ici effrontément : il a bien fondé
“ mouvement authentiquement libéral, créé à l’initiati - et pilote toujours le PPL !
ve d’Alain Dumait et Claude Reichman, afin de faire
e n t e n d re la voix des libéraux refusant toute compro - Cette revue offre un article le 12 juin 1999, inti-
mission avec les marxistes et les socio-démocrates. Ce tulé “ Pourquoi je vais voter Pasqua ” (…) et poursuit
cadre étant fixé, le PPL appelle en France à l’union des plus loin : “ au nom du multiculturalisme, ce sont
f o rces de la droite réelle ” . En fait, cela apparait aussi des frontières ouvertes comme des passoires, la for -
comme une des excroissances des ultra-libéraux mation de bandes ethniques violentes dans nos ban -
p roche de l’extrême droite qui la rejoint notam- lieues, et moins de sécurité pour nos personnes et nos
ment sur “ le refus du fiscalisme ”. Son adresse pos- biens. Nous militons pour l'entente à droite, de toute la
tale se trouve aussi dans le IIème arrondissement. droite, c'est-à-dire de tous ceux qui se disent eux-mêmes
Dans le très volumineux et officiel rapport de la de droite. Ce qui concerne un ensemble qui devrait théo -
Commission Nationale des Comptes des partis et riquement aller de Jean-Marie Le Pen à Édouard
groupements politiques paru au Journal Officiel le B a l l a d u r. Ceux qui refusent le clivage droite gauche
9 novembre 2000, on lit au sujet du PPL que le s'excluent de cette entente à droite. Et ceux qui pro -
principal dirigeant est Claude Reichman et le tré- noncent des exclusives, en particulier à l'égard du FN
sorier, un certain… Jean-Pol Taffin ! Quel heureux s'en excluent également. (…) la bonne stratégie, pour
hasard, il doit réjouir “ l’indépendante ” Benoîte la droite, consisterait à faire l'inverse de ce qu'elle a fait
Taffin ! depuis quinze ans : à s'entendre avec le Front national
(qui y est prêt), sur la base d'un programme commun
Voici un texte présentant son point de vue : “ Les de la droite (qui serait facile à élaborer). C'est d'ailleurs
politiciens professionnels nous mentent, effrontément. la seule stratégie gagnante pour la droite pour les pro -
Quotidiennement. Aussi bien aujourd'hui ceux de la chaines élections municipales. (…) Sans une entente à
gauche (socialiste) qu'hier ceux de la fausse droite (diri - droite, en particulier à Paris, beaucoup de mairies pas -
giste). Les médias leur servent la soupe, servilement. seront à gauche, alors que l'électorat sera resté à droi -
(...) Je suis bien placé pour affirmer que la presse fran - te, comme en mars 1998 pour la région Île-de-France et
çaise n'est pas vraiment indépendante, qu'elle est sub - quelques autres. J'ai eu l'occasion de le dire souvent
ventionnée, contrôlée et asservie ”. Il utilise là des depuis cinq ans : j'apprécie le discours libéral d'Alain

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Madelin. j'ai applaudi le courage de Millon et j'ai voté tout ce qui ressemble à l’État... Reichman est aussi
pour Pasqua le 13 juin, afin de donner une nouvelle animateur, un mardi sur deux, d'une émission sur
leçon à Chirac. Mais aussi longtemps que l'un ou Radio-Courtoisie. Il mena en outr une liste divers
l'autre de ces responsables ne prend pas l'initiative de droite aux régionales de 1998 dans les Hauts-de-
rompre le cercle de la diabolisation construit par le poli - Seine. Depuis 1999, il est vice-président de la
tiquement correct médiatique autour du Front national, Droite Libérale-Chrétienne (DLC) de Millon. Avec
de ses idées et de ses électeurs, aucune rénovation le professeur en retraite et élu RPR de Paris (chi-
durable de la droite et de la vie publique française ne raquien et tibériste) Christian Cabrol, il a écrit en
pourra avoir lieu. C'est dans cette voie que nous mili - 1999 Une histoire de cœur (éditions Les Belles
tons, comme éditeur d'un journal d'opinion, comme élu Lettres), ouvrage vanté sur le site web national du
indépendant à Paris et comme responsable politique RPR, dans la partie bibliographie, fin 2000.
l i b re de toute allégeance. ” Le 21 octobre 2000, la
chronique d’Alain Dumait titrait : “ Inéligible, déchu Le Parti Pour la Liberté écrivait le 12 juin 1998 :
de ses mandats, Le Pen a été persécuté ! ” “ Le PPL publiera, dans les prochaines semaines, son
programme. (…) Cette contribution permettra de véri -
Sur le site web www.les4verites.com, on trouve fier si les regroupements en cours peuvent se faire sur
un lien hypertexte direct, avec logo, vers le site de une base solide. A cet égard, nous suivrons avec atten -
National Hebdo, un lien-pub avec “ Radio Courtoisie tion l'attitude de Charles Millon. Prenant la parole à
la radio libre du pays réel et de la Francophonie ” où notre convention du 6 juin 1998, l'animateur de “La
officie aussi régulièrement le virulent Jean-Gilles Droite” s'en est tenu aux idées générales qui, pour sym -
Malliarakis. pathiques qu'elles soient, ne nous permettent pas de
savoir si l'ancien ministre de la Défense de Jacques
Docteur en chiru rgie dentaire, favorable au Chirac est décidé à rompre non pas seulement avec la
démantèlement de la Sécurité Sociale et à la mise diabolisation du Front national, mais aussi avec le demi-
en concurrence sauvage des hôpitaux publics, siècle de collectivisme qui a conduit à la grave crise que
Claude Reichman est le Président du Mouvement connût actuellement la démocratie française ”.
pour la liberté de la protection sociale (MLPS). Il a
notamment commis “ Sécurité sociale: le vrai mal On notera avec amusement que le PPL - alors
français ”, et reste rédacteur en chef du mensuel même que ses membres et amis déplorent souvent
Courrier de la Liberté (Edition Santé - Liberté Média les subventions - a accepté le financement par l’ar-
Plus SARL) – publication proche du PPL dirigée gent public puisqu’il a reçu plus de 142000 francs
par Patrice Planté - il mène le combat contre des en 1999 !
“ monopoles ” comme la Sécurité sociale, EDF et

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à la quarante deuxième et dernière place (place
symbolique censée “ pousser ” une liste) de la liste
RPR-UDF de Edouard Balladur en Ile-de-France
pour les élections régionales de 1998 (à cette
époque Séguin et Bayrou dirigent les deux partis
La droite judiciaire concernés), soit quelques petits mois avant qu’il
n’écrive cette phrase nauséabonde. Dans le passé,
Alain Terrail s’était aussi illustré dans une inter-
view au journal Choc du mois, publication fasci-
Fin 1998, dans le n° 10 de la revue de sante de nostalgiques de Pétain où off i c i a i t
l’Association Professionnelle des Magistrats François Brigneau, aujourd’hui pilier de la rédac-
(APM), Enjeu Justice, paraît un court article intitu- tion de National Hebdo, organe proche du FN. On
lé “ Mœurs judiciaires ”, signé par Alain Terrail, lui- a, à droite, les soutiens et les colistiers qu’on méri-
même avocat général près la Cour de Cassation, te, en effet…
ancien Président de l’APM et Président honoraire
à cette date. Quelques extraits visant le substitut Georges Fenech, Président de l’APM qui, suite à
du procureur de la République, Albert Lévy (qui a ces remous, avait décidé de démissionner, affirmait
travaillé notamment contre les pratiques mafieuses le 10 décembre 1998 qu’il voulait “ débarrasser ”
et la corruption dans cette région, sur l’assassinat cette organisation “ une fois pour toutes de son soup -
mystérieux en 1994 de l’ex-députée UDF et ex-FN çon d’extrémisme ”. Les résultats ne furent pas pro-
Yann Piat et sur la sulfureuse disparition, en 1995, bants… Il avait aussi, en 1998, accompagné au
du bras droit du maire de la plus grosse des villes Gabon une délégation d’avocats très proches du
détenues par le FN lui-même, à savoir Jean-Marie RPR en tant qu’observateurs pour l’élection prési-
Le Chevallier à Toulon) étaient clairement antisé- dentielle, mais ils étaient dépêchés par le président
mites : “ Tant va Lévy au four qu’à la fin, il se brûle ”. sortant Omar Bongo lui-même, ce qui bien sûr
C’est le tollé. Malgré sa pénible et peu crédible n’était pas le meilleur gage d’impartialité pour
défense sur le thème - on a coupé ma phrase à l’im- cette délégation. Peut-être de bonne foi, il ne pou-
primerie -, il sera bel et bien condamné à 40000 vait toutefois ignorer les pensées nauséabondes de
francs d’amende par le Tribunal Correctionnel le ses troupes et aurait pu en tirer les conséquences
10 novembre 2000 pour ces injures publiques à plus tôt… Fenech est aujourd’hui président du
caractère antisémite. Syndicat Indépendant des Magistrats créé après le
scandale Terrail.
Il faut souligner ici que Alain Terrail était présent

182 183
Dominique-Henri Matagrin, ancien secrétaire dépénalisation de l’homosexualité…). C’est “ l e
général de l’APM, fut nommé en 1995, après l’élec- plus à droite des syndicats de magistrats ” s e l o n
tion de Chirac à la Présidence de la République, au M i n u t e du 9 décembre 1998, même s’il se veut
cabinet de Jacques Toubon à la Justice (et des héli- “ apolitique ” selon une technique très rodée de
c o p t è res à rotors hymalayesques). Il n’avait pas l’extrême droite consistant à se définir de la sorte
hésité, plus tôt, à livrer sa pensée sur la justice ou à se dire “ ni à droite, ni à gauche ” selon l’ex-
dans la revue extrémiste Action Française Hebdo. De pression attribuée à Doriot, comme des slogans du
même, sans complexe aucun, il est intervenu, lors FN l’ont également montré.
de la XVème Université annuelle du Club de
l’Horloge (vieille passerelle droite extrême droite, Ce syndicat effraie même le syndicat USM
voir ce chapitre), sur les thèmes de la violence et (Union Syndicale des Magistrats, droite modérée)
de l’insécurité... Il y a été présenté comme “ prési- et est régulièrement dénoncé par le Syndicat de la
dent de l’APM ”. Dans sa démonstration, selon M a g i s t r a t u re (SM, gauche)... Plusieurs de ses
P r é s e n t et National Hebdo qui ne manquent sous membres ont figuré dans des cabinets de ministres
aucun prétexte ces agapes, il a stigmatisé au pas- de droite (ou été valorisés par eux : par exemple,
sage les Droits de l’Homme qui seraient devenus Jacques Toubon, ministre de la Justice d'Alain
prééminents sur le Droit. On voit bien à quel genre Juppé et Jacques Chirac, avait promu des membres
de personnages on a affaire. actifs de l’APM) et ont même été propulsés à
l’Ecole Nationale de la Magistrature. En 1993,
A l e x a n d re Benmakhlouf, nommé pro c u re u r l’APM a soutenu publiquement le Garde des
général près la Cour d’Appel de Paris par Alain Sceaux d'Edouard Balladur (Premier Ministre ) ,
Juppé en 1996, était le conseiller Justice de Jacques Pierre Méhaignerie (UDF).
Chirac quand il fut Premier Ministre entre 1986 et
1988. Benmakhlouf fut un membre important de La “ droite judiciaire ” reste plus musclée, plus
l’APM. C’est l’Elysée qui l’a voulu au poste déci- réactionnaire et plus à droite encore que la droite
sif qu’il occupe à présent dont il a finalement parlementaire “ classique ”, comme le montre aussi
démissionné le 8 décembre 2000. l’implantation persistante du GUD (Group Union-
Défense) - ou de ses ersatz - dans certaines facs de
L’Association Professionnelle des Magistrats d roit. Reste que l’étanchéité entre droite parle-
(APM), est un syndicat de magistrats fondé dès mentaire et droite judiciaire n’est pas du tout évi-
1981, en réaction à la victoire de la gauche et contre dente encore aujourd’hui. Rien de très rassurant.
la politique du ministre socialiste de la Justice,
Robert Badinter ( abolition de la peine de mort,

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gays et savait brandir un discours sécuritaire, avec
des résultats assez peu probants, rassemblant au
profit de Chirac les troupes les plus à droite. Il a
toujours su parler avec une extrême dureté des
immigrés, envoyant avec constance des signaux
Charles Pasqua aux sympathisants et membres du FN, qui l’ap-
précient souvent. Si sa furtive escapade avec
Philippe de Villiers en juin 1999 reposait sur une
vision de l’Europe différente de sa famille politique
Né le 18 avril 1927. Ancien du très musclé SAC d’origine, elle est aussi assumée comme un moyen
(Service d'Action Civique, l'ancien service de sécu- de récupérer une partie de l’électorat perdu par la
rité et de renseignement clandestin du parti gaul- droite classique au profit du FN et du MNR. Sans
liste), il est cofondateur du RPR en 1976 avec compter que les pasquaïens - c’est là une nette
Jacques Chirac. Il devient sénateur dès 1977. Son ligne de fracture avec les partisans de de Villiers -
“ ami ” Nicolas Sarkozy lui souffle la très chic mai- ont toujours espéré, non sans résultat, récupérer
rie de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine). Après pour ses combats les “souverainistes de gauche”.
un charcutage territorial mené à la hussarde pour Charles Pasqua s’est exprimé dans M i n u t e le 10
Chirac, ce très fin connaisseur de la carte électora- mai 2000.
le digère mal l’échec de Chirac en 1988. La même
année, il déclara partager des valeurs avec Le FN. Le bras droit du Président du RPF est Jean-
Il le trahira en 1995 pour soutenir Édouard Jacques Guillet, qui mena la vie dure au vicomte
Balladur, pourtant réputé bien plus “ libéral ” qu’“ de Villiers lors de leur brève cohabitation de 1999
étatique ”, alors que Pasqua a souvent manifesté à 2000. Il est député des Hauts-de-Seine (ex-RPR),
un certain anti-libéralisme. On connaît ses légen- élu local de Sèvres, ville chic qui ignore sans doute
d a i res coups de gueule, ses déclarations à l’em- qu’il milita à Occident où il se lia avec Madelin
porte-pièce, son ton de stentor et sa faconde pro- (qu’il côtoya plus tard dans le petit club libéral
vençale un rien forcée, quasi clownesque même. Idées-Actions), puis aux Jeunesse Patriotes et
Sauf que Pasqua, corse d’origine qui règne en Sociales.
maître sur son fief des Hauts-de-Seine (il est pré-
sident du Conseil Général depuis 1973), voulait en Pour Pasqua, la rupture avec Chirac n’est sans
1986-88, déjà ministre de l’Intérieur (l’imagine-t- doute qu’apparente puisque, à sa demande, il a
on ailleurs ?) “ terroriser les terroristes ”, exhiber déjeuné en avril 2000 avec lui à l’Elysée. Début de
avec eff roi un “ Musée des horreurs ” de médias réconciliation ? En tout cas, il n’a pas manqué,

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entre deux dénonciations des gestes et paroles de c o n f é rence de presse que, dans cette aff a i re, les
Chirac, d’esquisser publiquement en octobre 2000 pouvoirs publics auraient confondus inéligibilité,
un possible ralliement désistement au profit du “ qui ressort du droit national ”, et immunité parle-
fondateur du RPR pour les prochaines présiden- mentaire. Il a ensuite démenti tout rapprochement
tielles, pour lesquelles il s’est lui-même le premier avec le FN…
annoncé candidat. En somme, Charles Pasqua
risque de finir sa carrière politique (il est né en Il s’est exprimé dans L’Hebdo du Quotidien
1927 !) dans le rôle qu’il tient depuis bientôt vingt Paul-Marie Coûteaux (ex-RPR, ex-séguiniste)
cinq ans : rabatteur des voix, voire des élus, d’ex- député européen souverainiste, apparenté RPF-
trême droite. Pasqua (L’Hebdo du Quotidien du 31 août 2000).

Trois députés européens du RPF de Pasqua,


Paul-Marie Coûteaux, Thierry de la Perrière -
proche de de Villiers - et du fameux Jean-Charles
Marchiani, ex-préfet et candidat à Toulon se sont
illustré le mardi 25 avril 2000 par un soutien
apporté à Jean-Marie Le Pen, Président du FN ;
alors que la levée de son immunité parlementaire
était demandée : dans un communiqué, ils avaient
estimé qu’il revenait au Parlement Européen tout
entier de se prononcer sur la levée de cette immu-
nité avant que le gouvernement français ne le
prive, par décret, de son mandat. Paul-Marie
Coûteaux, ex-plume et proche de Philippe Séguin
a déclaré dans Le Monde du 28 avril 2000 qu’il avait
signé ce communiqué à la demande de Charles
Pasqua lui-même qui aurait rencontré le FN Jean-
Claude Martinez à ce sujet quelques jours aupara-
vant… Le dimanche 30 avril, en marge du Congrès
du FN, les noms de ces trois députés ont été
applaudis par les militants, à la demande de l’eu-
ro-député FN Jean-Claude Martinez ! Mardi 2 mai
2000, Charles Pasqua a déclaré au cours d’une

188 189
issue du financement public, qui lui est alloué du
fait de ses résultats électoraux passés alors que le
R P F, tout neuf, n’y a pas droit. La ru p t u re inter-
vient avec fracas à la mi-2000, après moultes
démarches judiciaires, Pasqua gardant l’étiquette
Philippe de Villiers RPF et de Villiers se repliant sur son MPF et
dénonçant l’opacité de la gestion du RPF qui a
accusé un grave déficit.

Le vicomte Philippe de Villiers, né le 25 mars Il préside le conseil général de Vendée, son fief,
1949, s’est toujours vu un très grand destin. où sa principale réalisation demeure la fameuse
Énarque et fervent catholique, il est très fier de ses cinéscénie du Puy-du-Fou, qui date de 1977 et qui
nombreux enfants. Il a été un secrétaire d’État sans lui vaut un surnom jubilatoire créé par Le Canard
éclat de 1986 à 1988, privatisant TF1 avec son supé- Enchaîné : “l’agité du bocage”. En 1995, son échec
r i e u r, François Léotard, alors compère au PR est patent au premier tour des présidentielles, et le
(UDF), lorsqu’ils étaient ministres de Jacques MPF ne doit sa survie qu’à un gentil chèque du
Chirac, Premier Ministre de la première cohabita- RPR, de Villiers appelant opportunément à voter
tion. Il a fondé le Mouvement Pour la France pour Chirac entre les deux tours… Après cet échec
(MPF) en 1994, il est donc l’inamovible président cuisant, il tente à grand peine d’apparaître moins
de ce groupuscule de fans anti-européens, ultra- basiquement ultra-conservateur, moins “ collier de
catholiques et en général très âgés. Après des mois perles à la sortie de la messe ” comme il le dit lui-
de drague et de “ tu veux ou tu veux pas ” avec même (Le Figaro, le 14 juin 2000). Il mise tout sur
Charles Pasqua, alors encore au RPR, ils scellent des “valeurs”, mais axe ses critiques virulentes et
une liste “ souverainiste ” commune pour les outrancières souvent, quelles que soient ces cibles,
européennes de juin 1999 avec des “ gens neufs ” sur Chirac, président insipide et insignifiant selon
comme Marie-France Garaud (née en 1934, ancien- lui. Il trace un projet sur l’autorité de l’État et la
ne porte-flingue en 1974 du président Georg e s souveraineté de la France, dans la droite ligne de
Pompidou et son équipe contre feu Jacques son combat passé contre le Traité de Maastricht, où
Chaban-Delmas au profit de Jacques Chirac qu’el- il copine avec les idées de Philippe Séguin, lui-
le conseillera ensuite) : de leur bon score découle même, alors, allié de Charles Pasqua. De Villiers
la création du Rassemblement Pour la France ne manquait pas, dès janvier 2000, d’annoncer qu’il
(RPF), mais, paranoïaque, jamais de Villiers n’ac- soutiendrait la candidature de Charles Millon à
cepte d’amener en dot son MPF et sa “ cagnotte ” Lyon, aux municipales en mars 2001, l’appelant

190 191
dans le même temps à rapprocher son petit parti,
DLC, du RPF. En octobre 2000, l’ancien spécialiste
des élections et de la carte électorale du CNI,
B runo Georges, est nommé secrétaire général
adjoint du MPF. Pour clore le portait, ajoutons que
lorsque deux généraux, Jacques Massu et Paul Christine Boutin
A u s s a resses - principaux chefs militaires de la
bataille de 1957 - se décident à avouer des exécu-
tions sommaires et des actes de torture pendant la
guerre d’Algérie (Le Monde daté du 23 novembre Le quotidien d’extrême droite P r é s e n t écrit en
2000), de Villiers pris le jour même sa plume acide juin 2000 qu’elle “ i n c a r n e (…) une aspiration, un
et pseudo-patriote pour écrire au président Chirac sursaut contre l’abandon et la destruction de tout ce qui
qu’il exècre pourtant, sa pleine opposition à “ toute a fait la France. Un courant d’inspiration catholique et
repentance officielle sur ce sujet ”, dénonçant les nationale qui ne passe pas inaperçu lorsqu’il rassemble
“ anciens porteurs de valises FLN ” (dépêche AFP), 100000 personnes dans la rue contre le PACS. Une
expression chérie par la presse frontiste. demande qui va d’un certain électorat UDF à un cer -
tain électorat MNR en passant par le RPF et le FN. Un
courant, un espoir, une lueur d’espérance ”. Rappelons
que lors de sa manifestation anti-PACS et homo-
phobe du 31 janvier 1999 à Paris, on croisa de nom-
b reux militants du MNR et du FN, aux côtés de
m e m b res de l’ensemble des partis de la dro i t e .
Madame Boutin - présidente de l’Alliance pour les
droits de la vie, groupe anti-IVG - manifesta par
ailleurs son soutien à Charles Millon dès 1998, en
assistant notamment à des réunions off i c i e l l e s ,
comme elle avait déjà discrètement soutenu
Philippe de Villiers en 1995 pour les élections pré-
sidentielles.

Sur Christine Boutin, il est bon de rappeler


qu’elle est entrée en politique à la fin des années
70, grâce au très fort soutien, contre beaucoup de

192 193
personnes de son camp, de Raymond Barre (UDF).
Elle siège depuis plusieurs années dans des ins-
tances officielles de relais et de conseil au Vatican.
Le 14 mai 1998, dans National Hebdo, qui “ l u i
( o u v re) bien volontiers (ses) colonnes ”, Christine
Boutin, sur une pleine page, s’explique. Elle note Jean-Pierre Soisson
avec acidité que “ Valéry Giscard d’Estaing a reçu,
pour les élections municipales de 1995 (…) le soutien
personnel de Jean-Marie Le Pen ”. Elle poursuit avec
audace : “ Rien ne prouve, en fait, que les candidats et Jean-Pierre Soisson n’a jamais caché son appétit
les électeurs du Front National soient plus racistes que de pouvoir. Énarque, conseiller à la Cour des
quiconque ”. En rappelant au sujet de “ C h a r l e s Comptes, il entre en politique par le cabinet d’un
Millon et d’autres présidents de région, que j’ai soute - ministre du Général De Gaulle, Edgar Faure. Dès
nus dès leur élection ”, elle ajoute “ il est impossible 1967, la carrière de ce dernier s’avère déjà promet-
de rejeter les électeurs et les élus du FN ”. La messe teuse. Il est vrai que l’homme aligne beaucoup de
est dite ! qualités : compétent, intelligent et plus spécifi-
quement doué pour tisser des liens personnels. Il
À la lumière de ses prises de positions et de l’at- jouera souvent dans ce registre. Sa citation favori-
titude, à son égard, des médias d’extrême droite, te est de René Char : “ Impose ta chance, sacre ton
on voit le rôle de passerelle, voire de fédératrice, bonheur et va vers ton risque. À te regarder ils s’habi -
qu’elle pourra jouer. tueront ”.

Député de l’Yonne (UDF), puis bientôt maire


d’Auxerre, il entretient habilement son fief bour-
guignon. En collectionnant les mandats locaux, en
réduisant les désaccords gênants, il assume son
cynisme politique. Peu importe l’étiquette tant
qu’on a le mandat. Il se fond dans le paysage poli-
tique local, pour mieux le séduire et mieux le
d o m i n e r. La droite tient les clefs de l’Yonne ?
Soisson s’affiche ici de droite. Toujours. Ce qui
n’exclut pas les relations de bon voisinage avec la
gauche bourguignonne. Mais tenir la Bourgogne

194 195
ne suffit pas. Son ambition nationale se montre
précocement. Les ficelles politiques sont diff é-
rentes. Entre compromis et calcul, son positionne-
ment général est celui d’un centriste. Un centrisme
pragmatique, reposant “ sur un centre de gravité
oscillant sans arrêt de droite à gauche et vice-versa ” Yvan Blot
(Le Monde, le 27 mars 1998). “ Je suis un homme de
la rencontre ”, explique-t-il dès 1977. Il sait s’accor-
der les faveurs des gouvernants, tantôt giscardien
modernisant, tantôt ministre d’ouverture. Mais ces Ancien énarque, Yvan Blot, après son passage
arrangements sont parfois trop voyants. En 1992, par le mouvement extrémiste GRECE, a été l’un
Edith Cresson, Premier ministre PS, le renvoie du des fondateurs et animateurs du Club de l’Horloge
gouvernement, suite aux premiers flirts frontistes avec Jean-Yves Le Gallou et Henry de Lesquen : un
pour garder à lui la Bourgogne, région qu’il per- club de “ réflexion ”, où quelques hauts fonction-
dra l’année suivante. n a i res et pseudo-experts devisent, et qui se pré-
sente comme une passerelle entre la droite et l’ex-
Depuis ces régionales, il entend “ reconquérir les trême droite. Au siège du RPR, dirigé par Chirac,
électeurs perdus ” et “ reconstituer une majorité de il fut directeur de cabinet du numéro deux de 1978
droite ” (Le Figaro, avril 1998). Dès juillet 1997, Jean- à 1984 et fut un député RPR proche de Pasqua
Pierre Soisson appelle à une alliance de toutes les entre 1986 et 1988, où il côtoyait dans l’hémicycle
d roites, estimant suicidaire l’exclusion du FN. des députés FN élus à la proportionnelle. Il passe-
D’ailleurs, selon Jaboulet-Vercherre, leader du FN ra finalement en 1989 au FN qui lui permet notam-
en Bourgogne, Soisson est un “ homme courtois, ment d’être élu député européen. Il déclare dans
intelligent et habile ”. Dans l’appel à l’union de la National Hebdo du 12 juin 1997 : “ Dans tous les cas
droite, lancé fin novembre 2000 dans Le Figaro par de figure, avec ou sans le RPR, le FN continuera sa pro -
l’UDF Dominique Baudis (maire sortant de gression dans l'opinion et il sera amené à prendre des
Toulouse et à ce moment-là tout frais dirigeant de responsabilités gouvernementales. Il appartient aux res -
ce journal, qui a centralisé lesdites signature s ) ponsables du RPR d'en être conscients et d'abandonner
signé par près de 400 parlementaires de dro i t e , une stratégie désastreuse sur le plan pratique et absur -
Jean-Pierre Soisson apparaît tout à fait officielle- de sur le plan des idées ” . Après avoir quitté avec fra-
ment comme membre de DL. cas Le Pen pour suivre Mégret au MNR, il revien-
dra au FN quelques mois plus tard, avant les
élections européennes de juin 1999, constatant les

196 197
moyens limités de son nouveau parti et jugeant
son horizon personnel bouché. Mais le chef du FN
n’absout pas si vite les félons, même repentis : Blot
ne figurera pas sur sa liste en juin 1999. Il est
a u j o u rd’hui conseiller municipal de Strasbourg .
Colloquons, la “ vérité ” très à droite

le 6 novembre 2000 se tenait à Paris un colloque


intitulé “ Rouages et méfaits de la désinformation ”,
organisé au Sénat sous la houlette de son président
RPR Christian Poncelet et par André Dulait (séna-
teur des Deux-Sèvres). La presse d’extrême-droite
y prêta une attention toute particulière, allez savoir
p o u rquoi… Ce colloque était animé par le très
droitier Gilles-William Goldnadel, avocat, et coor-
donné par une mystérieuse Ligue Internationale
c o n t re la désinformation. Le ton fut très libéral
(pour le système ferroviaire anglais, contre nos ser-
vices publics…) pour des intervenants, souvent
frustrés ( “ censurés ” d’après eux), voyant partout,
dans notre pays, des “ s o c i a l o - m a r x i s t e s ” ou de
“ savants anesthésistes formés à l’école du marxisme ”...
On y entendit aussi le douteux Alain Dumait,
Président d’honneur de Contribuables Associés
(voir le chapitre le concernant). Il devisa avec véhé-
mence sur la complaisance et les mensonges de nos
médias ne donnant la parole qu’à des “ groupus -
cules autoproclamés ” au sujet de la situation poli-
tique en Autriche (l'alliance gouvernementale entre
la droite et l'extrême-droite). Rien d’étonnant dans
sa bouche : ce laboratoire politique bleu-brun au

198 199
coeur de l’Europe a tout pour lui plaire… Sans sur- chiffres de l’immigration ? Parce que le gouvernement
prise, se trouvait là le rédacteur en chef adjoint du a peur de la vérité : Les trois quarts des Français adhé -
Figaro-Magazine - Jean Sévillia - qui, avec une ori- reraient au Front National ! Que penser de l’attitude
ginalité folle, osa dire qu’on “ l’empêchait de parler des responsables de France-Inter qui, il y a quelques
de La Famille ” et “ de traiter des vrais problèmes d’im - années, ont sanctionné Fabrice Le Quintrec dont le seul
migration et de sécurité ” (sic). Registre connu et tort était d’avoir cité Présent et National Hebdo dans
amalgame fréquent au FN. Pour celles et ceux qui une revue de presse ? ”. En somme un plaidoyer
parcourent son hebdomadaire, on sait ce qu’il en méthodique pour les thèses - martelées en perma-
est : ces sujets sont omniprésents, voire obsession- nence par le FN - de “ complot médiatique ” et de
nels. Selon lui cinquante personne oriente irrésis- “ politiquement correct étouffant ”. Il n’oublia pas de
tiblement tous les médias, voire l’opinion – forcé- dénoncer l’idée que les Français seraient favorables
ment décervelée – avec Le Monde, repaire présumé au droit de vote pour les étrangers qui ne se base-
de gauchistes recyclés et de soixante-huitards de raient que sur un seul sondage alambiqué…
tout poil, comme premier coupable. Plus curieuse
fut la présence et la prise de parole de deux colla- Zaïr Kedadouche est un français d’origine algé-
borateurs de l’hebdomadaire Marianne, Dominique rienne comme il aime à le dire lui-même en pré-
Jamet et Elisabeth Lévy. Et Alexandre Adler ambule. Ancien footballeur, ancien conseiller
(Courrier International) convenait plus sobrement régional Génération écologie (Brice Lalonde) d'Ile
qu’il “ suffit d’un consensus entre un tout petit nombre de France, ancien proche conseiller d'Eric Raoult
de journalistes pour donner le la ” sur un sujet, sans alors qu’il était ministre de l'intégration entre 1995
heureusement aller vers les thèses paranoïaques et 1997. Il a aussi été chargé de mission à l'inspec-
développées. tion générale des affaires sociales (IGAS). Il prési-
de l’association Intégration France et a écrit 2 livres
Zaïr Kedadouche, après avoir introduit son pro- La droite et l’immigration et Zaïr le Gaulois. On
pos en lançant à la salle, en guise de garantie se trouve aussi M.Kedadouche dans l’association des
voulant non-raciste“ j’ai un avantage sur vous : je amis de Jacques Chirac, présidée par Bernard Pons
suis de race arabe ” a également pris la parole pen- où, dans le groupe La France pour Tous (slogan de
dant ce colloque pour déclarer entre autre : 1995 de Chirac) il anime le secteur “ I d e n t i t é
“ Pourquoi tente-t-on de cacher l’origine ethnique des Nationale ”.
auteurs des violences antisémites consécutives au conflit
israélo-palestinien ? Pourquoi ne dit-on pas combien il
y a de musulmans en France ? Combien il y a de
Français d’origine étrangère ? Quels sont les VRAIS

200 201
INDEX

202 203
CNI : Centre national des indépendants
CPNT: Chasse, pêche, nature et traditions
DL : Démocratie libérale
DLC: La Droite libérale et libérale (Millon)
DVD : divers droite
DVG : divers gauche
FN : Front national
MDC : Mouvement des Citoyens
MNR : Mouvement national républicain
MPF: Mouvement pour la France
PC : Parti Communiste
PS : Parti Socialiste
RPR : Rassemblement pour la République
UDF : Union pour la Démocratie française
* transfuge du Front national

A
Abeille Patrice (rég.), 136
Accoyer Bernard (RPR), 153
Adler Alexandre, 200
Advenier André (UDF), 44
Alexandre Philippe, 15
Allain Marie-Thérèse (UDF), 43-45
Alliot-Marie Michèle (RPR), 60, 153, 171
Amoudry Michel (UDF), 127
André Pierre (RPR), 103
Andrieu Marc, 44
Andrieux Sylvie (PS), 115
Antoine Dominique (UDF), 106
Antony Bernard (FN), 18, 88, 161
Armand Gérard (RPR), 127
Arzel Alphonse (UDF), 41
Asso Bernard (RPR), 120, 164

204 205
Auberger Philippe (RPR), 39, 170 Blandin Marie-Christine (Verts), 91
Aubrac Lucie, 17 Blois Bernard (UDF), 97
Aussaresses Paul, 192 Blondin Michel (CPNT), 103
Blot Yvan (DVD)*, 24, 164, 197, 198
B Bongo Omar, 183
Bachelot Roselyne (RPR), 99 Bonin Bernard (PS), 146
Baeza Max (RPF)*, 111, 119 Bonnet Christian (centr.), 41
Badinter Robert (PS), 184 Bordry François (UDF), 42, 43
Bailly Gérard (RPR), 51, 53 Bougeard Didier (RPF)*, 69
Bainville Jacques, 28 Bourges Yvon (RPR), 40
Balladur Edouard (RPR), 54, 55, 58, 64, 69, 126, 179, Bourgine Raymond, 171
183, 185, 186 Bourgoin Gérard (CNI), 170
Banchieri Gabriel (RPR), 127 Bouteiller Denis (de) (DVD)*, 136, 138, 143, 144
Barate Claude (RPR), 73 Boutier Anne (DL), 35
Barate Françoise (RPR), 72 Boutin Christine (app. UDF), 70, 140, 161, 193, 194
Barnier Jean-François (UDF), 127, 140 Bouvard Michel (RPR), 140, 152
Baroin François (RPR), 49 Bouvet Jean-Pierre (RPR), 35
Barre Raymond (app. UDF), 97, 147, 152, 194 Breuil Alain (DVD)*, 138, 144
Baudis Dominique (UDF), 87, 152, 196 Bret Anna (UDF), 127, 139
Baur Charles (ex-UDF), 15, 16, 101-104, 106 Briant Yvon (CNI), 168
Bayrou François (UDF), 14, 18, 127, 135, 147, 183 Brigand Hubert (UDF), 35
Bazin Jean-François (RPR), 32, 33, 35 Brigneau François, 183
Bébéar Claude, 27 Brissaud Jean-Marc (FN), 51
Bébéar Jean-Pierre (DL), 27 Bulté Michel (RPR), 59, 60
Beketch Serge (de), 162 Burkhardt Marie (UDF), 127
Benmakhlouf Alexandre, 184
Berlusconi Silvio, 124 C
Bernard Pierre (RPR), 61 Cabrol Christian (RPR), 181
Berthu Georges (RPF), 166 Cacciaguerra Alphonse (RPR), 72
Béteille Raoul (RPR), 62 Callens Philippe (RPR), 108
Bevière Monique, 44 Calvel Jean-Pierre (UDF), 127, 143
Blanc Etienne (UDF),127, 137, 139 Calvet François (DL), 72, 73
Blanc Jacques (DL), 12, 16, 17, 66, 71-83, 104, 109, 125 Capdevielle Yves (PS), 34

206 207
Carayon Bernard (RPR), 89 Comparini Anne-Marie (UDF), 49, 121, 133-139, 147,
Carignon Alain (RPR), 139 151
Carle Jean-Claude (DL),127, 139 Cordonnier Jacques (ext. dr.), 24
Castro Fidel, 170 Cornillet Thierry (UDF), 127, 137
Cellier Mireille (UDF), 72 Cornut-Gentille François (RPR), 49
Censi Marc (UDF), 87, 88 Costa-Gavras Constantin, 17
Chaban-Delmas Jacques (RPR), 28, 190 Coty René, 167
Chabert Henri (RPR), 150, 152 Couderc Raymond (UDF), 72
Chaboche Dominique (FN), 96 Coûteaux Paul-Marie (RPF), 20, 162, 188, 189
Chabroux Gilbert (PS), 145 Courtat Annick (RPR), 42, 45
Chambon Dominique (UDF), 127, 137, 147 Cresson Edith (PS), 31, 196
Chamussi Matthieu (RPR), 127 Crépin Robert (RPR)*, 115, 118, 119
Chanal Claude, 44 Cros Marie-Josée (FN), 82
Chantelat Pierre (DL), 50
Charette Hervé (de) (UDF), 15, 33, 51 D
Chauvigne Bourlaud Colette, 44 Darbelet Philippe, 81
Chavanne Jean-Marc (RPR), 152 Dassault Olivier, 64, 162
Chésa Isabelle, 72, 81 Dassie Claude (MPF), 35
Chésa Raymond, 81 Debré Jean-Louis (RPR), 97
Chevalier Bernard, 35 Deflesselles Bernard (DL), 123
Chevènement Jean-Pierre (MDC), 90 Dehaine Arthur (RPR), 108
Chinaud Xavier (DL), 67 Delatte Rémi (UDF), 35
Chirac Jacques (RPR), 12, 40, 49, 53, 63, 66, 84, 89, Delauney Maurice, 114
110, 126, 134, 141, 151, 153, 170, 177, 180, 181, 184- Deleuil Laurens (FN), 121, 122
188, 190-192, 197, 201 Delmas Pascal (Div.)*, 69
Chossy Jean-François (UDF), 127, 140 Delprat Michel, 35
Chufon Maurice, 35 Delsol Chantal, 16, 64, 84, 128, 162
Cinieri Dino (RPR), 127 Dely Renaud, 57
Clamaron Laurent (RPF), 144 Demilly Stéphane (UDF), 106
Clément Pascal (DL), 140, 150, 151 Denard Bob, 63, 69
Collomb Gérard (PS), 148 Denis-Maréchal Annick (RPR), 100
Colombier Jacques (FN), 27 Descamps Jean-Jacques, 44, 46
Collet Michel (ex-RPR), 144 Descaves Pierre (FN), 102

208 209
Devedjian Patrick (RPR), 105 E
Dezempte Gérard (ex-RPR), 140 Espied Claude (DL), 27
Dominati Jacques (UDF), 66, 177 Estrosi Christian (RPR), 113-115, 117, 120, 123, 124
Dominati Laurent (ex-DL), 66, 70, 151, 177 Etienne Jean-Claude (RPR), 48
Donnedieu de Vabres Renaud (UDF), 42, 43, 46 Eymieu Ivane (UDF), 114
Door Jean-Pierre, 44
Dor Xavier, 165 F
Dord Dominique (DL), 153 Fabius Laurent (PS), 95
Doriot Jacques, 14, 185 Fall Jean-Claude, 77, 78
Douchin Philippe (RPR), 103 Faure Claude (RPR), 127
Douffiagues Jacques (DVD), 46 Favre Pierre (DLC), 144
Dounot-Sobraquès Chantal (RPR), 88 Fenech Georges, 183
Dousseau Xavier, 69 Ferrari Joseph (ex-RPR), 145
Dousset Maurice (DL), 42 Fillon François (RPR), 99, 171
Douste-Blazy Philippe (UDF), 147 Fleuret Jean-Loup (UDF), 127
Dreyfus François-Georges, 166 Floiras Liliane (app. RPR)*, 38
Dubernard Jean-Michel (RPR), 147 Flory Jean-Claude (RPR), 128
Ducarre Gérard (RPR), 127, 139 Foll Olivier (DLC), 141
Ducreux Francis (MNR), 84 Fontaine Patrice (ex-RPR), 103
Dugoin Xavier (RPR), 69 Forien Michel (RPR), 149
Dulait André (UDF), 199 Fort Marie-Louise, 35
Dullin Xavier (UDF), 127 Fouré Brigitte (UDF), 102, 105
Dumait Alain, 172, 173, 175, 177-180, 199 Fournier Eric (UDF), 128
Duncombe Luc (UDF), 93 Fournier Jean-Paul (RPR), 72
Dupâquier Jacques, 166 Franco Arlette (RPR), 72, 73
Duperré Alain (UDF), 143 François Rémi (RPR)*, 115, 119
Dupont-Aignan Nicolas (ex-RPF), 70 François Olivier (FN), 108, 168
Duprat François, 57 Fraysse Marc (ex-RPR), 128, 139
Dupray Patrick (PC), 96 Frêche Georges (PS), 72-74, 76, 77
Durand Henri (UDF), 142 Freulet Gérard (MNR), 24
Durbec Stéphane (ex-FN), 115, 119 Fromentin Bernard, 145
Fromion Yves (RPR), 45, 46

210 211
G 150, 151, 168
Galy-Dejean René (RPR), 64 Gonnot François-Michel (DL), 102, 103
Garaud Marie-France, 190 Gost Jean-Pierre (RPR)*, 115, 119
Garin Annick (RPR), 103 Goulard François (DL), 41
Garrec René (DL), 93 Gourévitch Jean-Paul, 166
Gascon Pierre (DL), 127, 128, 134-137, 139 Gouteyron Adrien (RPR), 150
Gaudin Jean-Claude (UDF), 111, 112, 114, 119, 122, 123 Gouzes Gérard (PS), 120
Gaulle Charles (de) (Général), 60, 117, 167, 195 Grand Jean-Pierre (RPR), 75, 96
Gaulle Charles (de) (FN), 60 Grandu Claude du (UDF), 103
Gauthier Yves-Bernard, 27 Granjon Frédéric (DVD)*, 138
Gauzès Jean-Paul (RPR), 96, 97 Grossmann Robert (UDF), 25
Gelard Patrick (RPR), 98 Gueret Daniel, 44
Genet Fabien (UDF), 35 Guichard Olivier (RPR), 99
Geoffroy Marie-Thérèse (RPR), 127, 132 Guigou Elisabeth (PS), 20
Georges Bruno (MPF), 192 Guillet Jean-Jacques (RPF), 187
Gest Alain (UDF), 102-105 Guilloteau Christophe (RPR), 128
Gewerc Claude (PS), 105 Guillaume Didier (PS), 142
Giansily Jean-Antoine (CNI), 66, 168 Guillaume François (app. RPR), 85
Gimel Pierre (RPR), 128 Guiniot Michel (FN), 108, 168
Giovannucci Franck, (RPR), 176
Girard Colette, 44 H
Girard Jean-Pierre (UDF), 128 Hamel Gérard (RPR), 46
Giraud Michel (RPR), 54 Hamelin Emmanuel (RPR), 128
Girault Jean-Marie (UDF), 93 Harang Bernard (UDF), 42-46
Girot Laurent (RPF), 145 Hart Thérèse (ex-RPR), 103
Giscard d’Estaing Valéry (UDF), 29, 71, 117, 167, 194 Hay Jean-Louis RPR), 44
Gloriot Bernard (UDF), 128 Heng Marlène (rég.), 24
Goasguen Claude (DL), 67, 68, 105 Hernu Charles (PS), 145
Gobet Jacques (RPR), 128 Holeindre Roger (FN), 61
Godfrain Jacques (RPR), 89 Hollande François (PS), 18, 137
Godin André (PS), 142 Hubault Michel (RPR), 44
Goldnadel Gilles-William, 199 Huchon Jean-Paul (PS), 55-57, 59
Gollnisch Bruno (FN), 14, 16, 19, 128, 133, 136, 137, Hugon Pierre (UDF), 72

212 213
Humbert Jean-François (UDF), 50-53 Kuntz Florence (RPF), 128
Hussonois Jean-Louis (UDF), 35
Huyghe François-Bernard, 166 L
Labarre Bertrand (RPR), 102, 106, 107
I Labaune Patrick (RPR), 128
Isoré Laurent (FN), 107 Lachaud Yvan (UDF), 72
Israël Lucien, 165 Laffineur Marc (DL), 100
Lagrange Simone, 130
J Lalonde Brice (GE), 201
Jaboulet-Vercherre Pierre (FN), 33, 38, 196 Langenieux-Villard Philippe (RPR), 128, 134, 135
Jacquet Roland (PC), 133 Languillat Guy (RPR), 34
Jaffrès Claude (UDF), 30 Laniel Joseph, 167
Janin Max (FN), 81 Lanzmann Claude, 17
Janot Raymond (RPR), 31 Larangot Jacques (UDF), 103
Jamet Alain (FN), 19, 77 Laurent Jean-Luc (MDC), 59
Jamet Dominique, 200 Laville Bettina (PS), 35
Joffrin Laurent, 12 Le Breton Brigitte (RPR), 94
Jond Jacques (UDF), 128, 140 Le Chevallier Jean-Marie (ex-FN), 66, 182
Jospin Lionel (PS), 109, 118, 176 Le Chevallier Cendrine (ex-FN), 115
Jouvencel Pierre (PS), 146 Le Corre Jean-Yves, 38
Julia Didier (RPR), 55, 70 Le Gallou Jean-Yves (MNR), 54, 56-58, 197
Junot Michel (CNI), 168 Legaret Jean-François (RPR), 59
Juppé Alain (RPR), 12, 27, 28, 55, 63, 89, 103, 126, Leger Jean-Claude (RPR), 128
134, 184, 185 Legrand Bernard, 172, 173
Lehideux Bernard (UDF), 57, 58
K Lehideux Martine (FN), 54
Kaltenbach Jean (RPR), 48 Lekieffre Christophe, 174
Kaltenbach Pierre-Patrick (DLC), 140 Lellouche Pierre (RPR), 63, 70, 162
Karoutchi Roger (RPR), 57 Lemoine Jean-Claude (RPR), 94
Kedadouche Zaïr, 200 Léotard François (UDF), 12, 112-115, 177, 190
Keller Fabienne (UDF), 25 Le Pen Jean-Marie (FN), 14, 20, 27, 33, 50, 57, 61, 62,
Kiffer Jean, (DVD), 86 84, 96, 99, 112-114, 117, 119, 121, 159, 161, 163, 167,
Koering René, 77, 78 171, 175, 177, 180, 188, 194, 197

214 215
Le Quintrec Fabrice, 201 Marchand Patrice (DL), 108
Lerebour Félix (RPR), 121 Marchand Philippe (PS), 109
Leroy Maurice (UDF), 46 Marchiani Jean-Charles (RPF), 20, 123, 124, 188
Lesquen Henry (de), 164, 165, 197 Mariani Thierry (RPR), 123, 124
Lété Jean-Jacques, 35 Marini Philippe (RPR), 108
Le Vern Alain (PS), 95, 97 Mariton Hervé (UDF), 128, 140
Lévy Albert, 182 Mars René (CPNT), 50
Lévy Elisabeth, 15, 200 Martin Guy (UDF), 122
Lévy Fabienne (UDF), 127 Martin Philippe (RPR), 49
Limouzy Jacques, 89 Martinet Paul (DVD), 44
Loeng Isabelle (RPR), 103 Martinez Jean-Claude (FN), 188
Loisier Anne-Catherine (RPR), 35 Martinez Serge (MNR), 81, 82
Longuépée Florent (RPR), 64 Massu Jacques, 192
Longuet Gérard (DL), 85, 86, 105 Matagrin Dominique-Henri, 184
Loos François (UDF), 25 Mathieu France (UDF), 103
Louis Patrick (DVD), 128 Mathieu Pierre (PC), 49
Luca Lionnel (RPF), 114, 124 Mattéi Jean-François (DL), 112, 114, 120
Lucotte Marcel (UDF), 31 Maupas (marquis de), 45
Mayadoux Jacques, 30
M Mazière Madeleine (RPR), 35, 36
Macke Philippe (RPR), 128 Médecin Jacques (ex-RPR), 69, 117
Madalle Alain (RPR), 72, 73 Mégret Bruno (MNR), 13, 14, 119, 136, 138, 143, 144,
Madiran Jean, 161 161, 164, 197
Madec Roger (PS), 60 Méhaignerie Pierre (UDF), 185
Madelin Alain (DL), 12, 17, 41, 66, 86, 105, 117, 122, Meirieu Philippe, 17
125-127, 151, 167, 168, 170, 177, 180, 187 Meissonier Georges (RPR), 72
Magnin Renée (DVD), 128 Mercier Michel (UDF), 66, 139, 147, 148, 150, 151
Malaud Philippe, 167 Mérieux Alain (RPR), 128
Malliarakis Jean-Gilles, 122, 163, 180 Merle Jean (ex-RPR), 128, 139
Malvy Martin (PS), 88 Merle Pascal (RPF), 144
Mancel Jean-François (ex-RPR), 12,, 101, 103, 107, 108 Merle René, 111
Maréchal Samuel (FN), 99, 100 Merlin André, 45
Marchais Michel (RPR), 42, 45 Mézin Roger (UDF), 101, 102, 105

216 217
Mignon Jean-Claude (RPR), 62, 70 Olivier Philippe (MNR), 69
Miguet Nicolas, 159, 160, 173 Orcival François (d’), 162
Millon Charles (DLC), 12, 15, 18, 24, 46, 64, 66, 84, Ozil Jean-Christophe (RPR), 72
103, 119, 126-142, 144, 147-153, 161, 162, 168, 169,
180, 181, 191, 193, 194 P
Moati Serge, 17 Pandraud Robert (RPR), 89, 120
Molitor Jean-Marie, 159 Papon Maurice, 36, 68
Monestier Françoise, 82 Pascal Elisabeth (FN), 81
Monnier Mathilde, 77, 78 Pasqua Charles (RPF), 20, 28, 60, 68, 69, 84, 86, 119,
Montanari Jean-Paul, 77 123, 130, 139, 142, 150, 170, 179, 180, 186-191, 187
Montebourg Arnaud (PS), 37 Paternot Jacques, 166
Morati Richard (Div.)*, 138, 144, 168 Payet Lionel, 107
Morel Philippe (UDF), 35 Pelet Eric (RPR), 148, 149
Morize Olivier (FN), 41 Pelicot Joël, 44
Moscovici Pierre (PS), 51, 52 Pélisson Gérard, 141
Mosnier Estelle (UDF), 128, 139 Perben Dominique (RPR), 31, 32, 36
Moynier Michel (DVD), 72 Peretti Jean-Jacques (de) (RPR), 27
Muselier Renaud (RPR), 123 Péres Pierre (app. RPR)*, 34, 38
Myard Jacques (RPF), 70 Perrière Thierry (de la) (RPF), 20, 188
Perrut Bernard (DL), 153
N Personnaz Charles (UDF), 128, 137
Nardone Amaury (DL), 128, 132, 146 Pétain Philippe, 183
Nay Catherine, 162 Peycelon Nicole (RPR), 128
Néhorai Jacques (ex-RPR), 107, 108 Peyrat Jacques (RPR), 114, 116-120, 123, 135
Nesme Jean-Marc (UDF), 15, 33, 36, 52 Piat Yann (UDF)*, 182
Nicolin Yves (DL), 153 Piel Gérard (PC), 116
Nirascou Gérard (RPR), 119 Pinte Etienne (RPR), 165
Noailles Simone (RPF), 28 Philip Christian (UDF), 147
Noir Michel (ex-RPR), 147, 177 Planté Patrice (PPL), 180
Novelli Hervé, 167 Plasait Bernard (DL), 67
Pompidou Georges, 190
O Poncelet Christian (RPR), 199
Ogny Jean (d’) (FN), 45 Poniatowski Michel (UDF), 15

218 219
Pons Bernard (RPR), 201 Rousset Alain (PS), 27
Prévond Louis (RPR), 128 Roustan Max (DL), 72, 81
Proriol Jean (UDF), 29 Rudlof Marcel (UDF), 23
Proust Christian (MDC), 50, 52 Rufenacht Antoine (RPR), 95, 97

Q S
Queyranne Jean-Jack (PS), 127, 133, 135, 136, 147 Salles Rudy (UDF), 118
Samson Michel, 113
R Santucci Myrtho (Div.), 143
Ract Georges (Div.)*, 138 Sapin Michel (PS), 43, 44
Raffarin Jean-Pierre (DL), 109, 110 Saporta Etienne (de) (UDF), 45
Ragu Thierry (DL), 67 Sarkozy Nicolas (RPR), 134, 186
Raincourt Henri (de) (DL), 34 Savonne André (RPR), 72
Raoult Eric (RPR), 60, 61, 201 Savy Robert (PS), 84
Rausch Jean-Marie (DVD), 85 Schapira Pierre, 176
Reichman Claude (DLC), 141, 163, 178, 180, 181 Schenardi Jean-Pierre (FN), 121
Remiller Jacques, 128, 140 Schneider Vanessa, 139
Rendu Daniel (RPR), 68, 145 Séguin Philippe (RPR), 14, 17, 20, 47, 63-67, 118, 134,
Retord Léonne (RPR), 128 135, 137, 162, 165, 176, 183, 188, 191
Rignault Simone (RPR), 35 Serpeau Patrick (diss. RPR), 43
Riondel-Pesson Guylaine (UDF), 128 Sévillia Jean, 200
Robert Alain (RPF), 68 Sidos François-Xavier (FN), 62
Robien Gilles (de) (UDF), 12, 104 Simonnot Bernard (UDF), 53
Rocard Michel (PS), 31, 55 Simonpiéri Daniel (MNR), 121, 122
Rochette Christian (RPR), 128 Smits Jeanne, 161
Rohan Josselin (de) (RPR), 40, 41 Soisson Jean-Pierre (DL), 16, 31-38, 52, 152, 195, 196
Romieux Barbara, 44 Soulage Bernard (PS), 131, 132, 134, 135
Ronzière Pascal (UDF), 128 Soulas Pierrette (RPR), 72
Roscoät Annick (du) (CNI), 169, 171 Spagnou Daniel (RPR), 113
Rossi José (DL), 120, 125 Spieler Robert (FN), 25
Rossignol Stéphan (RPR), 72 Stellardo Gilbert (DL), 114, 120
Roth Gilles (FN), 34 Stefanini Patrick (RPR), 55, 63
Roure Alain (CPNT), 127, 146, 148 Stirbois Marie-France (FN), 43, 45, 61

220 221
Suguenot Alain (RPR), 35 Valla Michel (DL), 146, 147
Valleix Jean (RPR), 27
T Vannson François (RPR), 86
Taffin Benoîte (ex-UDF), 66, 172-176, 178 Varaut Alexandre, 68, 69
Taffin Jean-Pol, 178 Varaut Jean-Marc, 68, 69
Tanton Alain (UDF), 42, 45 Vasselage Guy (RPR), 44
Tardy Marie-Christine (RPR), 128 Vasseur Guy, 44
Tarelli Jean-Christian (RPR)*, 115, 119 Vasseur Philippe (ex-DL), 91, 92
Teisseire Eugène (PS), 33-35 Vate Michel (RPR), 128
Teissier Guy (DL), 120 Vauzelle Michel (PS), 55, 114-117
Terracher Raymond (PS), 145 Vazette Jean-Louis (UDF), 142
Terrail Alain, 182, 183 Venot Alain (RPR), 44
Terrot Michel (RPR), 153 Verdon Jean (FN), 44, 45
Tesson Philippe, 160, 162 Versini Dominique (RPR), 54, 55
Testa Pascal (DLC), 145 Vial Pierre (MNR), 129, 145, 161
Tête Etienne (Verts), 133, 135, 148 Vienot Jean-Pierre (RPR), 103
Tibéri Jean (ex-RPR), 59, 65, 69, 141 Vigier Philippe, 44
Villiers Philippe (de) (MPF), 20, 25, 60, 69, 94, 110,
Tibéri Xavière, 69, 141
130, 161, 165, 169, 170, 187, 188, 190-193
Tillinac Denis, 84, 128
Vincent Max (UDF), 128
Tixier Jean-Louis (UDF), 112
Voyant Serge (RPF)*, 144
Thiollière Michel (UDF), 140
Vulliez Christian (RPR), 128
Toreilles Roger (UDF), 72
Toubon Jacques (RPR), 184, 185
W
Touvier Paul, 61 Warsmann Jean-Luc (RPR), 49
Touzé Jean-François (CNI)*, 169 Wiltzer Pierre-André (UDF), 56
Trautmann Catherine (PS), 79 Woerth Eric (RPR), 103, 106
Trébuchet Louis (UDF), 35
Trigano André (UDF), 88 Y
Turcat François (RPR), 128 Yahiaoui Sid Hamed (ex-FN), 115

V Z
Vaillat Michel (UDF), 72 Zeller Adrien (UDF), 23, 24
Valade Jacques (RPR), 26, 27 Zimmern Bernard, 172, 173

222 223
Provence-Alpes-Côte-d’Azur
Corse
Rhône-Alpes

Les passerelles
Sommaire Les médias
Le club de l’Horloge
Le Centre National des Indépendants
Un petit paradis anti-fiscal
Avant-Propos La droite judiciaire
Charles Pasqua
Introduction Philippe de Villiers
Christine Boutin
Les régions Jean-Pierre Soisson
Alsace Yvan Blot
Aquitaine
Auvergne Index
Bourgogne
Bretagne
Centre
Champagne-Ardennes
Franche-Comté
Ile-de-France
Languedoc-Rousillon
Limousin
Lorraine
Midi-Pyrénées
Nord-Pas-de-Calais
Basse-Normandie
Haute-Normandie
Pays-de-la-Loire
Picardie
Poitou-Charentes

224 225
Ce livre a été réalisé à l'initiative de Franck Heurtrey,
membre du Bureau national du Mouvement des Jeunes
Socialistes (MJS).

R é d a c t i o n : François Cabaton, Jérome Pacaud et


Philippe Lasnier, merci aussi à Charlotte Brun, Claude
Bosom, Mathieu Grimbert et Julien Bobot.

Remerciements chaleureux à Marianne Delmaire et


au service documentation du Parti Socialiste.

Conception graphique : Julien Bobot

Coordination : Gwenegan Bui, Président du MJS

Mouvement des Jeunes Socialistes


10 rue de Solférino, 75007 PARIS
Tél : 01.45.56.79.99
e-mail : livrenoir@mjsfrance org
Web : www.mjsfrance.org

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