Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Par
Denise Bellefleur
Faculté de théologie
J u i n 1997
National Libmry Bibliotkque nationale
du Canada
Acquisitions and Acquisitions et
Bibliographie Services services bibliographiques
395 WeiiÏngtm Street 395. me Wellington
OttawaON K I A û N 4 OttawaON K I A W
Canada Canada
The author has granted a non- L'auteur a accordé une licence non
exclusive licence allowing the exclusive permettant à la
National Library of Canada to Bibliothèque nationale du Canada de
reproduce, loau, distniute or sell reproduire, prêter, distribuer ou
copies of this thesis in microform, vendre des copies de cette thèse sous
paper or electronic fomaîs. la fome de microfiche/film, de
reproduction sur papier ou sur format
électronique.
Université d e Montréal
Faculté des é t u d e s supérieures
preserit&e par :
Uenise Bellefleur
Bibliothèque
iii
Sommaire de la thèse
Pour une spiritualité chrétienne de la vie en plein monde
ajustée au mitan de la vie. Interprétation théologique et
praxéo-andragogique.
Nous proposons en£in des pis tes d ' accompagnement et d ' &ducation
centrées sur le souci des personnes, de leur autonomie, de leur
maturation spirituelle, de leur point de départ et de la
diversité de leurs cheminements. Les implications majeures de
cette recherche invitent à s'ouvrir à une vision de la
spiritualité à même l'ordinaire de la vie en plein monde
entrecroisé avec llEvangile, A se soucier des défis spirituels
liés à l'avancée en âge et à intervenir en restant d'abord
branché sur les personnes et leur liberté, sur la corrélation
entre leur savoir expérientiel et les sources de la foi-
Table des matières
page
INTRODUCTION .......................................... 1
8. L'accompagnementobservé................................ 56
Conclusions ...............................................328
1 Nous ferons appel plus loin à la pensée de Madeleine Delbrêl sur ce sujet
dans Nous autres, gens des rues. Seuil, Paris, 1966, p. 121.
La m é t ~ i o d o l o g i e et la pédagogie schémas
employées, les
d'entrevue individuelle et de groupe de même que la méthode
d'analyse de contenu sont expliqués dans le volume-synthèse de
7
la recherche-action". Reprenons-en brièvement les données les
plus importantes pour la compréhension de cette thèse.
. Le bonheur
La souffrance, la mort
L'avenir
Les rapports quotidiens, vie sociale, engagements
Les débats autour de Ia sexualité
L'argent
La morale
La politique
Vos convictions profondes
Qu'est-ce qui est sacré pour vous?
Le spirituel dans votre vie?
L'éducation religieuse que vous avez reçue?
C'est quoi la reliqion pour vous?
Et l'au-delà?
Dieu. . . votre id&. . . votrc expérience'?
La B i b l e . . . llEvangile, Ca vous dit quoi*?
Jésus Christ, qui est-i 1 pour vous?
L'~glise? Comment la voyez-vous? Quels sont tes rapports
avec el le?
La prière?
La foi, c'est quoi pour vous? Vous croyez à quoi, à qui?
Est-ce que vous partagez ça avec d'autres?
Est-ce q u e ça inspire votre vie'? Est-ce que ça la transforme?
Démarche 4: si possible
"Dieu n'a pas de visage, on n'a pas une photo de Jésus. Dieu
est l'être suprême au-dessus de tout. 11 a toutes les qualités.
Il n'est pas une personne mais un esprit". (homme, 45 ans)
Ir
J'ai une croyance, je sais qu' il y a un être supérieur mais des
fois-là, en voyant tout ça, c'est bien beau les épreuves, les
barrières, les coups dans les jambes. . . , moi je bannirais les
épreuves. I I m e semble qu'on n'a pas besoin de ça pour être
convaincue". (femme, 43 ans)
Parmi ces gens qui manifestent une vie spirituelle en lien avec
un horizon divin, beaucoup réfèrent aux valeurs chrétiennes de
temps en temps et demandent des services occasionnels à
1'Eglise catholique pour les rites de passage que sont la
naissance et la mort de même que pour les sacrements de
1 ' initiation chrétienne pour leurs enf a n d . Ils gardent de
leur héritage chrétien une sélection de valeurs et de rites en
lien avec des besoins personnels passagers et ponctuels qu'ils
consomment sans participer à la foi qui leur est inhérente. Ou
d'autres interviewés refusent toutes médiations symboliques
communautaires et sacramentelles disant qu'ils n'en ont pas
besoin "pour rentrer en-dedans" et être en contact avec un être
suprême qui se charge d'envoyer des &preuves pour vbrifier leur
attention a lui. Ou encore d'autres interviewés font un choix
serein de vivre détachées de la religion en référant
"C'est pas quand le train roule à 100 milles à l'heure que les
gens sont capables d'embarquer dedans ... ça ralentit un peu,
tu en ramasses un peu. Tu ralentis encore davantage, tu en
ramasses davantage, puis quand le train commence à être bien
équipé, l à tu pars en grande vitesse". (femme, 44 ans)
2. DIVERSES COMPOSANTES
5.2 D e s crises
spirituel et religieux1.
l'autoritarisme de llEglise
le respect de sa hiérarchie plus que de ses membres
sa foi dogmatique qui apparaxt comme un savoir théorique vide
d'une relation à Dieu vivante et inscrite dans le réel
ses changements intempestifs, ex. liturgie bruyante ou
monotone, serrage de mains ...
son ingérence dans Les consciences et dans les choix moraux
personnels
son absence de modèles attrayants pour la v i e actuelle
sa connivence avec des régimes totalitaires, e x . Chili
certains aspects de sa doctrine, ex. sexualité, mariage
sa rigidité concernant le mariage des prêtres
sa fermeture vis-à-vis la place des femmes
l'insistance unilatérale sur la pratique dominicale et donc
le rétrécissement du sens d e la pratique religieuse
peu d'enseignement organisé et suivi de la Bible comme chez
les baptistes
peu de fraternité et d'appartenance dans 1'Eglise
peu de place pour les personnes assistées sociales qui se
reconnaissent difficilement dans llEglise
peu de respect du cheminement spirituel propre des personnes,
peu d'aide en ce sens, peu d'offre signifiante
peu de respect de l a liberté individuelle.
.
ce Moi interpersonnel entre peu à peu dans un autre Moi qui
fait un examen critique des valeurs, des symboles, des
croyances héritées de son groupe d'appartenance et il devient
plus autonome; alors l'autorité du Je domine celle des autres
et du groupe, et le Moi orchestre les rôles et les relations
sans s'identifier à aucun (comme la personne qui quitte
l'adolescence et entre dans le début de l'âge adulte). C'est
ce niveau de développement du Moi qui est le plus fréquent dans
les récits de vie et qui supporte la foi devenant critique et
personnelle,
-
subir l'autorité des autres (parents et religion) au lieu
d ' agir selon sa conscience, être incapable de dissidence
intérieure pour s'assumer, ressentir le besoin d'être
confirmé(e) dans ses choix: "J'ai toujours subi, Je n'ai pas
assumé mes responsabilités. J 'ai fait ce qu'on attendait que
je fasse. J'ai la certitude que si j'avais agi selon ma
conscience, de très bonnes choses me seraient arrivées bien
avant.. , " (femme, 45 ans);
8. L'ACCOMPAGNEMENT OBSERVE
D'autres ont fait allusion à des groupes dont ils ont fait
partie, qui ont fonctionné un certain temps dans leur vie et
qui les ont soutenus durant ce laps de temps: les Alcooliques
Anonymes viennent en tête de liste comme groupe de support,
d'aide à la reconstruction de soi et d'ouverture sur le
spirituel; le Centre de la famille de Saint-Jérôme est aussi
souvent mentionné comme très aidant et valorisant surtout pour
des personnes assistées sociales; d'autres rapportent des
mouvements paroissiaux comme les Cursillistes, des groupes
d'échange sur la foi, des équipes paroissiales de catéchètes
pour la préparation aux sacrements des enfants; enfin une
session Renouement conjugal est mentionnée comme problématique
plus qu'aidante pour l'évolution du couple et sa spiritualité.
CHACUN SON
1 Les prénoms employés dans ce chapitre sont fictifs, ils ont été changés
pour préserver l'anonymat des six personnes interviewées.
travers leur engagement social, familial, professionnel et
ecclésial, comme si tout allait de soi.
"Les gens qui vont juger (les suicidés et leurs proches) et qui
vont vous le dire, qu'on leur dise - Qui es-tu pour juger
devant Dieu? - Qui sommes-nous pour juger?" (Maurice, 46 ans)
"Tu vis ta spiritualité, elle est là, elle est pas ailleurs ...
Souvent les gens ne la connaissent pas leur spiritualité si tu
leur en par les comme ça. . . Pour beaucoup que je rencontre, i 1s
ont beaucoup de difficulté à fonctionner. Pour eux
l'important, c'est survivre chaque jour. C'est juste ça. Les
gens abusés sont contrôlés totalement par leurs abuseurs ...
Ils ont pas d'amis, ils ont pas le droit de sortir, ils ont pas
le droit de recevoir et quand il y a des gens autour d'eux,
1 ' image que les abuseurs donnent, c ' est de ne pas être des
abuseurs. Et ils se font dire - Tu sais, personne va te
croire, les autres ne m'ont jamais vu comme ça.- C'est le
cycle de l'abuseur. Mais les gens qui sont abusés, c'est de
survivre, ils ont pas le temps de regarder, ils ont pas le
temps de penser à leur spiritualité, de la voir mais ils
l'ont . - . Donne-leur le temps, donne-leur d'autres moyens,
donne-leur une situation différente puis ça va être de tout
autres personnes. Cela, on l'a vu".
"La spiritualité même si le monde savent pas qu' ils L 'ont leur
spiritualité, tout le monde l'a, d'après moi ... C'est l'âme-
C'est l'âme qui te fait bouger. On n'est pas élevé de la même
façon mais i l y a quelque chose à 1 ' intérieur, tu p e u appeler
ça la spiritualité, tu peux appeler ça l'âme aussi". (Nathalie,
52 ans)
"La thérapie m'a aidé d'une certaine façon voir que ce qui
arrive autour de nous, c'est pour une raison, c'est mon
interprétation. . . Je crois comme quoi que si j ' ai passé une
certaine épreuve, je me suis fait amener dans ce chemin-là pour
voir si j'étais capable de supporter ou non. Si je suis
capable de supporter, il y a une raison pourquoi, c'est pour
accueillir une certaine force, peut-être à l'intérieur une
certaine sagesse, je le sais pas. Peut-être que dans mon
cheminement de vie, je vais être capable d'aider quelqu'un
d'autre à passer à travers de quelque chose ou de guider
quelqu'un d'autre ... La thérapie, je pense que ça m'a aidé,
ça m'a guidé dans une certaine voie que je ne voyais pas, ça
m'a aidé à atteindre la force, à dire on va se dresser un peu,
on va essayer de continuer. C'était pas facile. C'était ben
plus facile de dire: je lâche tout, je vais m'arranger. Tu
sais à un moment donné, je me suis dit, il y a plus que ça dans
la vie- J'avais tout matériellement mais spirituellement puis
émotivement, j'étais un zombie, j'avais rien, absolument rien".
"Je suis comme une éponge, j'en ramasse beaucoup de choses ...
Cela m'arrive même ici à la maison, tu sais, mon fils, c'est
un adolescent, je vois une certaine croisée qu'il est en train
de vivre, tout ça, c'est bien difficile pour moi mais il sait
que moi, quand j'ai besoin de mon espace, j'ai besoin de mon
espace, pas parce que je l'aime moins.. . Quand j 'ai besoin de
mon espace, j 'ai besoin de mon espace, c 'est tout. 11 faut que
j'aie mon petit monde tranquille pour me retrouver. Je suis
trop fragile. J'essaie de mettre tout en ma faveur, ça c'est
certain. C'est certain parce que, je le sais, je suis trop
fragile. Je sais que je peux me laisser aller là, je suis bien
trop fragile".
"La seule affaire que moi je peux dire, c'est que je joue pas
un jeu. . . je parle direct comme je le pense parce que j ' ai joué
une vie de manipulateur, puis de plastique (de fausseté), puis
j'ai berné les gens autour de moi, a l 1 my Iife. Ca m'a jamais
rapporté rien. Maintenant je dis exactement ce qui arrive
whatever" . (John, 44 ans)
"J'ai eu mon premier fils ... puis là quand je l'ai perdu, j'ai
dit en moi-même pourquoi, tu sais là , pourquoi tout à coup. . .
C'est de là que je suis parti pour un autre t r i p , si tu veux,
un autre bord de la vie voir cette affaire. Puis comme je te
dis je suis ben, ben remerciant de la force autour de moi qui
m'a donné ma deuxième chance de vivre. Parce que moi je suis
complètement convaincu que si je suis là à soir, c'est parce
que j'ai une deuxième chance de vivre ... C'est une chance que
je me suis donnée mais ça m'a pris une force pour m'aider à
faire ça. C'est officiel".
"Je comprends pas, j'arrive pas à saisir les gens qui ont peur
de vieillir.. Ma crise, qu'on dit la crise du mitan de la vie,
les gens la vivent à 40 ans, j 'ai comme 1 ' impression de l 'avoir
vécue moi autour de 33-34 ans. C e vide immense a commencé à
m'habiter peut-être vers 32 ans. Il a été comblé vers 37 ans.
Fait que 40 ans, j'avais hâte ... Je le sais pas pourquoi, je
dis je le sais pas, mais à quelque part, j e le sais, parce que
ce que je veux vraiment faire, c'est de l'accompagnement à
plein temps. Puis je me suis mis ça à 50 ans. C'est ça, c'est
comme si je me rapprochais de ça. . Je voudrais jamais reculer
parce que le bonheur est de plus en plus intense à mesure que
je vieillis ... même si je suis très éprouvée". (Laurence, 42
ans )
L e s buts des E - V - C .
Selon cet animateur, les E.V.C. ne sont pas des cours qu'on
suit, ce n'est pas quelque chose qu'on vient apprendre avec sa
tête. C'est plutôt vivre une expérience, donc quelque chose
qui va se construire en chacun avec sa vie. Cette experience
comporte deux éléments majeurs.
La clientèle
Le fonctionnement
Les contemplations
LIEvangile est utilisé dans les E.V.C. comme une lunette pour
voir et mieux voir, pour se laisser habiter par Dieu et pour
L'accompagnement individuel
1 Cet animateur suit de beaucoup plus près Cusson, Gilles, Conduis-moi sur
un chemin d'éternité. Les Exercices dans la vie courante. Editions
Bellarmin, Montréal, 1973 et Pédagogie de 1 'expérience spirituelle. Bible
et Exercices spirituels. Bellarmin, 36 tirage, Montréal, 1986.
2 Boisvert, Michel, "Fiches d'expérience spirituelle pour l'accompagnement
des Exercices faite dans la vie courante*'. Supplément à C - S . 1 . 9-10
(1982).
1 a lui-même rédige une synthèse detaillée de la démarche
globale des E . V , C - 1-
Le fonctionnement
Les fiches
- REFLECHIR consis te
- en des textes à lire, à comprendre, à utiliser pour faire
la lecture de sa foi, de ses attitudes, de sa vie concrète,
par exemple une réflexion sur 1'Etre Sauveur du Christ a la
fiche 18, les sortes d'humilité à la fiche 23, et sur
l'élection à la fiche 24.
La forme individuelle
L'accompagnement individuel
Ces entrevues réalisées ont porté sur les points qui suivent
et dont les résultats sont présentés en synthèse:
L'accompagnement
1. Une r é d u c t i o n de la religion
3 . L'imbrication de la v i e et de la f o i
4. La réference à s o i p r i o r i t a i r e
INTERPRETATION THEOLOGIQUE
INTRODUCTION A LA DEUXIEME PARTIE
. Devenir T o m m e f e m m e disciple d e J é s u s
1 . if. Marshall a j o u t ? :
"E. Laland thinks that the story was used in the earlg church
to givs instructions to wornen eritertaining travelling
missionaries; they must show ho spi ta lit^, but not to excess.
For a Jewish audience i l would be of g r ~ a tsignificance that a
place xas cjiven to womon by Jesus not simpl- to do domestic
d u l i e s ici the c h u ~ r t ibut. to Listen and learn" f .
Jésus ne sol 1 ici te pas de Marthe de lui montrer tous ses talents
de ménagère accomplie, Jésus désire entretenir Marthe du règne
de Dieu qui vient. I l l'invite, comme Marie, à devenir
disciple. Jesus ne cantonne pas les femmes dans un rôle second,
i 1 a t t e n d l e u r témoignage pour le monde. Ce n'est pas un hasard
si les femmes sont les premières au tombeau"2 .
II -
"( ...)1,'expression "s'asseoir aux pieds de" signifie en fait
etre disciple de". C ' e s t ainsi que Paul parlera de sa
formation "reçue aux pieds de ~amaliel" ( A c . 22,3).
Plus t6t dans son texte, Luc a nommé un certain nombre de femmes
qui suivaient Jésus avec les douze (Lc 8, 1-3). 11 nous
#
Cet.te meprise rie 1-tarthe sur son rôle se répercute sur son
i n t e l 1 igetico tliéolugique, Jesus n'est pas d'abord un visiteur .
I l est Le Messie. Un service exctusivement matériel ne donne
pas actes au reg i s t re prophétique. Marthe, comme les
accornpagriatrices, fête l e Jésus charnel. Elle veille à sa
subsista tic^. tvlais le WCPS du Christ ri'eçt - i l pas déjà
sacrifié à sa mission? Sa personne importe en tant qu'elle
livre la parole de Dieu. Celui qui sert Jésus sert d'abord sa
parale et non ce corps physique dont peu après i l fera
L 'offrande. Marie?, eii délaissant le service, a compris
" l ' u n i q u e nekessaire".
. E l u c i d e r le premier commandement
Both Luke and John were, as authors of the early church, well-
disposed to women. As Greek Christians they were fami liar wi th
the involvernent of women in the society of the time and were in
sympathy with it-( . . . )
( . . . ) " ~ o r d ,i f you had been here, rny brother need not have
diedu.(..-) For Martha, however, this remark is a springboard,
the introduction to a passionate conversation about faith.
Martha is not "a woman" who "keeps silence" in the community.
She does not Leave theology io theologians. She carries on a
vigorous debate. She does not cry, she does not cast herself
at es us' feet, s h e does not give in. She struggles with God
as Job did. She charges Jesus with failure. She does not give
up, just as Jacob did not give up at the Jabbok, when he was
wrestling with God. In her mind, she knows well enough that
t-heoLogicalLy resurrectiori t a k e s place only at the Last Day, pet
she hopes that Jesus can h e l p now.
Pour traiter le texte de Luc, 10, 38-42, nous procédons par des
lectures successives du texte 1. lecture de sens 2 . lecture
d'identité 3. lecture morale 4. lecture religieuse 5-
lecture politique ou ecclésiale1.
Marthe n'est pas seule. Elle a une soeur, Marie, avec qui elle
partage non seulement sa maison mais aussi le lien profond qui
1 'unit B Jésus. Marie s 'assoit aux pieds de Jésus et écoute sa
Parole en disciple qui veut apprendre. Pour elle,
l'hospitalité, c'est davantage l'attention à la personne, à son
être, ii son besoin d'aimer et d'être aimée, à son besoin de
communiquer, d e se dire, d'être écoutée, de se relier à des
personnes ouvertes à elle et à son projet. Marie, en amie e t
en disciple, se fait proche et écoute avec son corps, avec son
coeur, avec tout son être. Marthe, d a n s son souci d'être une
excellente hôtesse, les laisse ensemble et "s'affaire à un
service compliqué". L ' expression "service compliqué" laisse
entendre que Marthe ne se contente pas de peu, elle veut offrir
à 1 ' invité quelque chose de très bien mais, ce faisant, elle se
complique la vie . L ' hospitalité, c' est dérangeant, il faut
faire plus et autrement que d'habitude, être aux antipodes d'un
service simple et ordinaire. Marthe travaille fort pour les
deux autres. Mais elle prend conscience qu'elle seule
Marthe
Marie
Jésus
Pour Jésus qui veut faire connaître Dieu, son Père, annoncer
1 'avènement du règne de Dieu et commencer à le bâtir, il se
promène d e village en village, de maison en maison. Il utilise
les lieux et édifices publics pour parler aux foules et poser
des gestes de salut. Il utilise aussi les lieux privés pour le
faire. Ainsi le voit-on souvent profiter des repas pour
refaire l'amitié, pour réintégrer les pécheurs, pour répondre
à ceux qui veulent le mettre en contradiction. Jésus utilisera
la réalité du repas la veille d e sa mort, pour symboliser par
avance, par le partage du pain, le don de sa vie à tous; il
demandera que ce repas soit refait en sa mémoire pour
actualiser de façon permanente les fruits du don de sa vie à
son Père pour nous,
Les dewr facettes présentes dans ce texte sont "le faire pour"
ou le service des autres dans la vie concrète et ''l'être avec"
ou l'intimité avec Dieu, avec sa Parole. Or les dewr y sont
vécues de façon excessive et unilatérale. "Le faire pour" s'y
vit sous le mode de l'exagération, de l'inquiétude, de
l'agitation et du regret de ne pas pouvoir être plus en
intimité avec D i e u et sa Parole. "L'être a v e c " , la communion
intime avec Dieu et sa Parole se vit sous le mode de l'absence
de sollicitude pour les besoins primaires des personnes et dans
l'évasion des contingences nécessaires de la vie concrète.
INTRODUCTION DELBREL
1 Delbrêl, Madeleine, Nous autres, gens des rues. Seuil, Paris, 1966, p.
314. Toutes les citations qui suivent dans le chapitre V proviennent de ce
volume sauf isdication contraire.
le travail exemplaire et acharné de ses militants. Elle dira
avoir vécu une deuxième conversion en choisissant de participer
à la même lutte que les communistes pour la justice humaine
mais en refusant de vivre sans Dieu, en gardant et en disant
ses références: la Parole de Dieu. A rebours, on peut penser
que son expérience de jeunesse lui a permis de comprendre les
incroyants qu'elle a rencontrés par la suite.
"Témoigner par toute une attitude de vie, par des options, par
des actes qui supposent Quelqu'un, invisible mais vivant,
intouchable mais agissantw1.
Ils aiment leur porte qui s'ouvre sur la rue, comme leurs frères
invisibles au monde aiment la porte qui s'est refermée
définitivement sur eux.
c'est parce que notre coeur est dépourvu d'attente que les puits
nos journées nous refusent 1 ' eau
de sol i tude dont sont parsei~~ées
vive dont ils débordent. Nous avons la superstition du temps.
Si notre amour demande du temps, 1' amour de Dieu se joue des
heures et une âme disponible peut être bouleversée par lui en
un instant. "Je te conduirai dans la solitude et je parlerai
à ton coeur". Si nos solitudes sont pour nous mauvais s
adductrices de la Parole, c'est que notre coeur est absent 'fi .
1 Op. c i t . , p . 84-85.
de laisser les choses à la place que les autres leur donnent.
La vie devient une sorte de grand film au ralenti. Elle ne nous
donne pas le vertige. Elle ne nous essouffle pas. Elle ronge
petit à petit, fibre par fibre, l a trame du vieil homme, qui
n'est pas raccommodable et qu'il faut totalement renouveler.
Quand nous nous sommes accoutumés à livrer ainsi notre volonté
au gré de tant de minuscules choses, nous ne pouvons pas trouver
difficile, quand l'occasion s'en présente, de faire la volonté
de notre chef de service, de notre mari ou de nos parents.
Et nous espérons bien que la mort même sera facile. Elle ne
sera pas une grande chose, mais une sui te de petites souffrances
ordinaires l 'une après 1 ' autre consenties"'.
1 Op. cit., p. 7 0 - 7 2 .
livrer sa vie à la notion de Dieu, c'est bondir dans une région
où nous sommes faits solitaires. C'est la hauteur qui fait la
solitude des montagnes et non le lieu où sont posées leurs
bases.
Si le jaillissement de la présence de Dieu en nous s'exhausse
dans le silence et la solitude, elle nous Laisse posés, mêlés,
radicalement unis à tous les hommes qui sont faits de la même
terre que nousw1-
"C'est le rencontrer partout qui fait notre solitude. Etre
vraiment seul, c'est, pour nous, participer à la solitude de
Dieu. 11 est si grand qut i l ne laisse place à nul autre, sinon
en lui. Le monde entier nous est comme un face à face avec lui
dont nous ne pouvons nous évader.
Rencontre de sa causalité vivante dans ces carrefours trépidants
de mouvements.
Rencontre de son empreinte sur la terre.
Rencontre de sa Providence dans les lois scientifiques.
Rencontre du Christ dans tous ces "petits qui sont à lui": ceux
qui souffrent dans leurs corps, ceux qui s'ennuient, ceux qui
s'inquiètent, ceux qui manquent de quelque chose.
Rencontre du Christ rejeté, dans le péché aux mille
visages. ( . . . )
Solitude de Dieu dans la charité fraternelle: le Christ servant
F
le Christ; le hrist dans celui qui sert, le Christ dans celui
qui est servi" .
1 Qp. c i t . , p . 83-84.
2 Op. c i t . , p . 68.
saisira le livre mais lui-même sera saisi par les paroles qui
sont esprit. Elles pénétreront en lui comme le grain dans la
terre, comme le levain dans la pâte, comme l'arbre dans l'air,
et lui s'il y consent, pourra devenir simplement comme une
expression nouvelle de ces paroles. Là est le grand mystère
caché dans le livre de 1 'Evangile.( . . .)
1 Op. c i t . , p . 79-80.
vie. ( . . . )
C'est dans notre vie que, du matin au soir, coule entre les
rives de notre maison, de nos rues ( . .. ) la parole où Dieu veut
rés i der.
C'est dans notre esprit qui nous fait nous-mêmes à travers les
actes de notre travail, de nos peines, de nos joies, de nos
amours, que la parole de Dieu veut demeurer.
La phrase du Seigneur que nous avons arrachée à 1'Evangile dans
une messe du matin ou dans une course de métro, ou entre deux
travaux de ménage, ou le soir dans notre lit, elle ne doit plus
nous quitter, pas plus que ne nous quitte notre vie ou notre
esprit.
Si notre vie est si bourrée par nos devoirs que les pauses y
soient impossibles, si nos enfants, un mari, la maison, le
travail envahissent presque tout, elle veut que nous croyons
assez en elle, que nous la respections assez pour savoir que sa
force divine lui fera toujours de la place. Alors nous la
verrons luire pendant que nous marchons dans la rue, pendant que
nous façonnons notre travail, pendant que nous épluchons nos
légumes, que nous attendons la communication téléphonique, que
nous balayons nos parquets, nous la verrons luire entre deux
phrases de notre prochain, entre deux lettres à écrire, quand
nous nous réveillons et quand nous nous endormons. C'est
'
qu'elle aura trouvé sa place, un coeur d'homme pauvre et chaud
pour la recevoir " .
1 Op. c i t . , p . 81-83.
2.9 Missionnaires sans bateaux dans son milieu
Le Christ dont il vit ne lui fournit pas des ailes pour une
évasion vers le ciel, mais un poids qui l'entraîne vers le plus
profond de la terre. Cette vocation au monde qui semble ëtre
spécifiquement l'essentiel de la vocation missionnaire n'est que
la conséquence de la saisie de nous-mêmes par le Christ.
Amoindrir notre soudure au Christ et à 1'Eglise c'est, malgré
toutes les apparences, diminuer ce qui, en nous, pèse vers le
monde et nous permet de nous y enfoncer. C'est la condition
d'un amour u monde qui ne soit pas une identification à lui
mais un don" . 4
"L'évangélisation du monde et son salut est le métier même de
1'Eglise. Elle est sans cesse en tension vers le monde comme
la flamme tend au chaume.( . . . ) Plus le monde où
l'on va est sans Eglise, plus i l faut y être liEglise. C'est
en elle qu'est 1aMission. Il faut qu'elle passe à travers nous.
1 @p. c i t . , p. 73-76.
1 Op. c i t . , p . 150-151.
On peut dès lors mettre cette vie e n opposition avec celle "des
gens que Dieu prend et met à part" c'est-à-dire ceux qui, par
vocation monastique, choisissent de se retirer totalement du
monde, ou par vocation sacerdotale ou religieuse, d'y vivre
partiellement. Ces gens referment ou entrebaillent la porte
sur l e monde plutôt que de l'ouvrir toute grande car l e u r v i e
est d'abord et avant tout une vocation à Dieu et non "au
monde". Ce choix ne veut pas dire qu'ils deviennent
imperméables ou indifférents aux besoins matériels et
spirituels du monde, non ils peuvent les porter très fortement
en eux ou travailler à un défi séculier particulier. Mais ils
ne sont pas d'abord des chercheurs de Dieu dans et par la vie
ordinaire en plein monde; cette dernière avec ses soucis et
ses responsabilités comme individu, comme membre d ' un couple et
d ' une famille, comme membre d'un coIlectivité économique,
culturelle e t politique n'est pas pour eux le chemin tracé pour
leur sainteté. Ce chemin est ailleurs et autrement.
"(Si) Madeleine fut une contemplative, elle appartenait à la
catégorie des "spirituels" pour qui il p a premièrement Dieu
(car il l'ont rencontré comme le Tout, l'Ami, le Bien-aimé).
Et il p a ce dessein de l'amour manifesté en Jésus-Christ qui
tend à rassembler en Lui toute l'humanité comme les membres de
son Corps. Et parce qu'il s'agit de son dessein à Lui ils sont
disponibles pour tout ce qu ' i 1 veut ou voudra pour que son règne
arrive.
Mais cette v i e contemplative ce n'est pas dans un cloître
qu'elle l'a menée (comme sa soeur Thérèse de l'Enfant Jésus) ni
en ermite vivant séparé des hommes, mais intimement mêlée à la
vie de ses contemporains, participant aux soucis, aux
responsabilités de ceux qui expriment de la manière la plus
authentique les aspirations du monde moderne"'.
INTRODUCTION
2 Ibidem, p. 122.
3 Ibidem, p. 124.
Abraham, pour devenir pleinement la personne qu'il est appelé
ili être, doit quitter, selon le texte de Genèse 12, 1 "sa terre,
son enfantement et la maison de son père". Abraham a quitté,
sortant de Ur, sa terre et le lieu de son enfantement, il lui
reste à qultter la maison de son père pour parvenir à lui-même,
pour sortir du pére qui l'enveloppe, et inconsciemment, le
possède. Il a à aller vers lui, à renaître à lui-
Aller vers soi n'est pas le seul but donné dans les paroles de
YHWK, il dit "va vers toi.. . vers la terre que je te ferai
voir". C ' est la terre, dit Balmary, "du JE-TU" c'est-à-dire la
terre oh la personne cherchant 8 parvenir à être soi pourra
devenir sujet devant un autre sujet. Cet autre sujet est celui
qui est présent à ce que l'autre advient, c'est la parole de
celui qui sauve, de Yeshoua (Dieu sauve), d'Emmanuel (Dieu avec
nous ) . Abraham est le symbole de 1 ' homme qui va vers lui-même
et, écoutant les voies du coeur, rencontre Dieu avec nous. Cet
homme qui accède à lui-même est béni de Dieu. Cet itinéraire
d'Abraham est semblable à celui de bien d'autres figures de
notre héritage biblique tel Jonas, Jacob, Nicodème, Pierre,
Paul. . . Partir vers la totalité de soi-même, en se
réappropriant des morceaux de soi laissés en friche, est
souvent renaissance d'en-haut.
Faire son bilan de vie, relire sa vie, lui donner une première
interprétation, avant l'interprétation plus englobante que peut
mieux réaliser l'âge avancé, peut faire remonter l'histoire
personnelle endormie. Des expériences peuvent jaillir de
l'inconscient. Tous les événements qui ont constitué le
déploiement de sa vie, les événements conscients comme
inconscients, demandent à être intégrés et leur sens caché,
mystérieux, trouvé. Cela n ' empêche pas la montée de sentiments
vrais et peut-être refoulés tels la colère, la peine, le
regret.. . , cela n'empêche pas la saisie plus claire des
paradoxes, des ambiguïtés de sa vie tels ses forces de vie et
celles de mort, ses éléments lumineux et ses éléments obscurs,
les morceaux de soi aimés et détestés . . .
INTRODUCTION
Un a u t e u r comme E. H. ~ r i k s o n *a t t r i b u e a u m i t a n de la v i e la
tâche d e résoudre un conflit majeur: celui q u i e x i s t e e n t r e les
forces de stagnation, d'ennui, de vide, de r e p l i s u r soi e t l e s
forces de générativité comprenant la procréativité, la
productivité et la créativité de l a personne envers ce d o n t
elle est responsable: la génération d'êtres, d e produits,
d'idées, d'entreprises, de biens ...
1 Ibidem, p. 91.
2 Ibidem, p. 91-92.
3 Ibidem, p. 74-75.
"Cette étrange association de la sollicitude et du détachement
conduit à un dépassement de soi qui est caractéristique de la
générativité mature. "Ce qu'on a généré doit être éduqué,
gardé, préservé", note Erikson, mais il faut en définitive le
libérer et même éventuellement le dépasser". Grâce a u
ressources psychologiques développées au cours du milieu de la
vie, je peux permettre à une vie nouvelle de suivre son propre
chemin, voire l'y encourager, même en dehors de mon propre
contrôle et de mon influence personnelle. La sollicitude
générative est capable de lâcher prise, de libérer sans amertume
ce wi a été engendré. Et cela s'applique non seulement aux
enfants et autres oeuvres de nos mains, mais aussi à ce sens de
nous-mêmes que nous avons construit dans les décades
précédentes. Les personnes valent mieux que ce qu'elles font,
plus que la somme de ce qu'elles ont fait (. . . ) Puisque le
développement de la générativité mature implique l'altruisme et
le détachement à l'égard de preoccupations plus égocentriques,
il entraîne par le fait même un détachement à l'égard des forces
et des faiblesses de nos propres réalisations"'.
Dans cet exercice, on peut prendre pour acquis que les autres
sont entre nos mains, en notre pouvoir, qu'ils sont sous notre
emprise physiquement (comme le parent âgé affaibli qu'on
contraint 8 fermer maison et à être placé en m a i s o n
d'hébergement contre son désir et qu'on ne visite à peu près
pas parce qu'on a de la difficulté à tolérer la maladie - comme
le jeune homme qui est mis a la rue parce qu'il ne v i t pas
selon les valeurs de ses parents - comme le travailleur qui a
des conditions de travail épuisantes qui ruinent précocement sa
santé). Ils peuvent être sous notre emprise mentalement (le
patron qui rappelle au travailleur à statut précaire, à la
moindre peccadille, que beaucoup d'autres peuvent l e remplacer
- l'ami qui menace d e révéler un aspect peu reluisant de son
passé: alcoolisme, infidelit6 conjugale, vol a l'étalage ... si
- -
Une tendance généralisée est d'aimer qui nous aime, d'aimer qui
2 Ibidem, p . 100.
3 Ibidem, p . 101.
245
1 Ibidem, p. 101.
2 Ibidem, p. 102.
3 Ibidem, p. 102.
4 Ibidem, p. 102.
5 Ibidem, p. 102.
la justice. Cette vision éthique de la personne renvoie à un
élargissement de l'amour des autres semblables, égaux ou
inégaux en savoir, en expérience, en capacités, etc. et 1 ' amour
du chacun c'est-&-dire le souci d'une répartition sociale plus
juste des biens, des droits, des responsabilités, des
avantages, des désavantages en privilégiant la "maximisation de
la part du faible" au lieu de celle du plus fort ou de
l'avantage pour le plus grand nombre.
Si, alors qu'il m'a atteint à la joue droite, je tourne vers lui
non pas la seconde, la gauche, mais ll"autre" joue, je n'entre
dans aucun mimétisme avec lui: je ne fais pas ce qu'il fait, je
ne le touche pas là où il me touche et je ne le laisse pas me
toucher au même endroit . Je viens sur son terrain et là, je lui
présente l'altérité. Et il n'y a pas d'autre façon de la
présenter véritablement. Qu'on m'entende. Je ne dis pas que
ce texte condamne la légitime défense. Je lis, simplement: il
dit ce qu'il y a à faire si le but recherché est de rendre
possible la relation d'altérité à quelqu'un qui souffre et qui
fait souffrir ( . . . ) .
En face de celui qui peine et fait peine, lui qui se situe face
à toi, pour te frapper avec un objet ou avec une loi, sois
visage d'altérité, vêtement d'altérité, chemin d'altérité.( . . . )
La différence avec le masochisme est mince. De façon
remarquable, les différences les plus signifiantes sont minces.
Qui ne veut pas les voir peut aisément les manquer. Elles
prêtent à équivoque et en cela sont lieux de décision: perdition
ou guérison, les deux possibles.
"Ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le
semblablement pour eux.. Que si vous aimez ceux qui vous
aiment, quel gré vous en sera-t-on? Car même les pécheurs
aiment ceux qui les aiment. Et si vous faites du bien à ceux
qui vous en font, quel gré vous en sera-t-on? Même les pécheurs
en font autant. Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez
recevoir, quel gré vous en sera-t-on? Même des pécheurs prêtent
a des pécheurs pour en recevoir l'équivalent. Au contraire,
aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien attendre
en retour. Votre récompense alors sera grande et vous serez les
Fils du Très Haut, car i l est bon, Lui, pour les ingrats et les
méchants. Montrez-vous miséricordieux, comme votre Père est
miséricordieux". (Lc 6, 31-36)
INTRODUCTION
De son côté, le théologien Paul Tillich nous dit qu'un dieu est
une "préoccupation ultime", ce A quoi le c o e u r de quelqu'un
s'attache et ce sur quoi il compte pour orienter sa vie. Donc
une préoccupation ultime peut être n'importe qui: Dieu,
Bouddha, Allah, Moi, Vous-.. ou n'importe quoi: une valeur qui
devient un absolu dans sa vie comme la santé ou la justice.
La Bible, de son côté, nous dit que Yahweh peut être utilisé
pour manipuler ou opprimer, et que les idoles, quelles qu'elles
soient, sont f abriquees par des humains, qu ' elles remplacent
Dieu, qu'elles semblent être autres que ce qu'elles sont
réellement, donc qu'elles sont trompeuses et illusionnent:
"Les idoles des païens, or et a r g e n t ,
une oeuvre de mains d'homme;
elles ont une bouche et ne parlent pas,
elles ont des yeux et ne voient pas.
Elles ont des oreilles et n'entendent pas,
pas le moindre souffle en leur bouche". (Psaume 135)
2 Ibidem, p . 111.
l'erreur; en être séduit peut entraîner quelqu'un à consacrer
sa vie i défendre ou à légitimer cette erreur, donc à perdre en
elle sa liberté, à immoler des personnes ou à s'immoler pour
elle, et éventuellement, a s'en remettre à des processus
proches de la magie et d e la consolation.
1 La même pensée est plus longuement élaborée dans Beaudin, Michel, "Cette
idole qui nous gouverne. Le néo-lib6ralisme comme "religiont'et "théologie"
sacrificielles". Sciences religieuses 24/4 (1995) 395-413.
sacrificiel"'.
J'ai demandé à tous les deux s'ils étaient prêts à me faire une
place sur le marché du travail. Par exemple, travailler une
journée de moins par semaine avec, par conséquent une journée
de moins de salaire pour me faire une petite place, ne serait-ce
qu'à temps partiel. J e me dis que si chaque personne de la
génération de mes parents qui travaille et qui gagne très bien
sa vie faisait ce geste, nous serions beaucoup à travailler en
ce moment; même un emploi contractuel serait bienvenu.
Leur réponse: "Ce n'est pas sérieux"; "Nous ne voulons pas
perdre nos acquis gagnés à nous lever à 6h. tous les matins".
I l s m'ont aussi dit que si je suis bien nantie, c'est grâce à
ce travail. En effet, j'ai beaucoup matériellement: je vis sans
frais chez ma mère et au chaud, je dispose d e l'auto à volonté,
j'ai accès à l'ordinateur et au télécopieur de la maison.
Merveilleux!
1 Maitland, David J., Looking Both Ways. A theology for Mid-Life. John
Knox Press, Atlanta, 1985, chap. III, p . 49-83.
efforts pour rechercher une jeunesse qui dure, Cela s'observe
dans le soin d e son corps et de son apparence, dans le choix de
ses idées et de ses valeurs, dans la recherche du plaisir et du
bien-être, dans le désir de contrôler le monde e t plus
particulièrement sa vie.
2. CONSEQUENCES SPIRITUELLES
Le syteme dans lequel nous vivons fait aussi d e nous des gens
voués à la consommation t o t a l e .
"Non seulement le produit entier du travail est aussitôt
transformé en marchandises faites pour être utilisées sur-le-
champ, mais cette consommation redevient la principale, sinon
l'unique raison d'être du travail. On peut même dire qu'elle
le précède, dans le temps aussi bien qu'en principe: on acquiert
avant de payer, puis on travaille pour payer ce qu'on a acquis
et qui, une fois payé, sera déjà usé ou devenu inutile. C'est
la logique de ce qu'on appelle le crédit à la consommation.
Avant même qu'il soit gagné, rien ne demeure du revenu qui
puisse aller à d'autres fins que des fins déjà accomplies.
Cela veut dire enfin voir la vie, les êtres, le monde avec les
yeux de son Absolu, comme des images et des reflets de cet
Absolu, et donc lutter contre ce qui déshumanise ces images et
ces reflets et amène à sacrifier des personnes ou des éléments
d e la création au nom d'une illusion.
"A nous gens de la rue, i l semble que la solitude n'est pas
l'absence du monde mais la présence de Dieu.
C'est de le rencontrer partout qui fait notre solitude.
Etre vraiment seul, c'est pour nous, participer à la solitude
de Dieu.
11 est si grand qu'il ne laisse place à nul autre, sinon en lui. Le
monde entier est comme un face à face avec lui dont nous ne pouvons
nous évader"1 .
1 Delbrêl, M., Nous autres, gens des rues. Seuil, Paris, 1966, p. 68.
renversement de centre de g r a v i t é , de préoccupation ultime dans
sa vie auquel Jésus invite "Cherchez d'abord le Royaume et sa
justice", (Mt 7 , 3 3 ) Il s'agit de passer de la centration sur
s o i et s e s b e s o i n s à la centration sur Lui et son Royaume.
CONCLUSION PARTIE
Puis les trois chapitres qui ont suivi ont identifie des traits
de la spiritualité de la vie en plein monde spécifiques au
mitan de la vie, Dans l'ordinaire de la vie des gens du mitan,
trois réalités inhérentes au développement humain les
rejoignent d'une façon ou de 1 'autre, à plus ou moins brève
échéance - 11 s ' agit du désir d' individuation (chapitre VI), de
la capacité de générativité (chapitre VII), de la prise de
conscience de la fragilité et de la brièveté d e la vie
(chapitre VIIZ). Ces trois réalités peuvent mener à trois
défis pour leur vie spirituelle 1) devenir qui ils sont
appelés à être en totalité 2) exercer leurs responsabilités
avec différents niveaux d'altruisme 3 ) se situer dans un
rapport conscient au mystère en le décapant de médiations
idôlatriques.
INTERPRETATION PRAXEO-ANDRAGOGIQUE
INTRODUCTION A LA TROISIEWE PARTIE
Dans quel processus faire entrer les adultes pour les amener a
changer leurs représentations et à désirer vivre selon elles?
L ' andragogie propose un processus de changement2 (parmi bien
d'autres) particulièrement attrayant parce que très respectueux
des quatre traits de l'adulte- Le processus est mis en oeuvre
1 C'est ce qu'a fait Giguère, Paul-André, dans Une foi d'adulte. Coll.
n croyant, Novalis, Ottawa, 1991, chap. 4 intitulé Passages et
~ ' ~ o r i z odu
transitions, p. 71-93.
En Luc 22, 31-34 nous voyons Jésus annoncer aux apôtres que
Satan 'est actif parmi eux, puis dire à Simon, alias Pierre,
qu'il priera pour lui afin que sa foi ne défaille pas et enfin
que sa tâche sera d'affermir ses frères quand i l ne sera plus
là. Or à Pierre qui lui dit impétueusement être prêt à aller
avec lui autant en prison qu'à la mort, Jésus annonce qu' il
niera le connaître le jour même avant que le coq n'ait chanté
trois fois. Pierre est plein d'illusions sur lui-même, sur la
fausse et apparente grandeur de son amour, sur la force du mal
en lui et il est plein de résistances a reconnaître sa
faiblesse potentielle.
E n f i n i l y a l'étape de la liberté.
C'est la fin de l'aridité
du désert, l'entrée et l'installation dans un pays donné par
Dieu en héritage, pays ruisselant de lait et de miel, pays
d'abondance de biens (Dt 26, 1-11). Des tâches attenantes h la
liberté des personnes correspondent à la vie dans ce nouveau
pays: apprendre à faire mémoire et A rendre grâces des dons de
la terre, des biens reçus de Dieu plutôt que de les idolâtrer
et apprendre B les utiliser avec justice entre tous plutôt que,
par eux, créer d'autres servitudes.
Justement cette liberté est une épreuve qu'Israël ne parviendra
pas toujours à dominer sans se créer des idoles et sans vivre
dans 1' injustice. L'histoire d'Israël comprendra d'autres
arrachements, d'autres déserts ou exils et d'autres libérations
grâce a Dieu et grâce au don de grandes figures au sein du
peuple. L'expérience spirituelle vécue par le peuple se
répétera pour renouveler constamment l'alliance avec Dieu. De
grandes figures revivront dans leur histoire personnelle ces
étapes du cheminement de l'homme vers Dieu. Pensons à ~braham'
dont nous avons déjà parlé qui s'arrache à son pays, à sa
terre, à sa famille, à ses biens, qui part en réponse à
l'invitation de Dieu: "Va pour toi". 11 demeurera nomade toute
sa vie en cherchant le sens et les conséquences de ce "pour
toi". Il va accepter de mourir au lien humain si fort qui le
liait à son fils donné par Dieu et ainsi apprendre que Dieu
veut la v i e et non la mort pour qui fait alliance avec lui.
CONCLUSIONS
- --
1 Ces données sont puisées dans Oser, F., Gmünder, P. Ridez, L., Ibidem, au
chapitre 5 , p . 219-267.
des transformations possibles . Les récits de vie de la
première partie de ce travail montrent beaucoup d'adultes à
l'étape 3, à celle de la séparation entre le domaine de
l'Ultime et celui du moi tout en acceptant 1 'existence d'une
divinité sans nom et sans visage et avec peu de souci
d'appartenir à une religion particulière ou de se référer à un
système dogmatique-
1 S t o k e s , K . , Ibidem, préface, p . v .
à celle de J. westherhoffl sur quatre styles de foi qui
rejoignent les stades de Fowler. Pour Westherhoff, la foi est
d'abord une "experienced faith" (stades de la foi intuitive-
projective et mythique-littérale de Fowler ) dans laquelle la
compréhension de la foi à l'enfance vient à travers les
expériences de vie significatives avec ses proches et ses
éducateurs. Puis la personne passe a une "affiliative faith"
(stade de la foi synthétique-conventionnelle de Fowler) où sa
compréhension de la foi et son expression s 'enracinent dans
l'appartenance à une communauté- Ensuite la personne arrive à
une " searching f a i th" (stade de la foi individualisée-reflexive
de Fowler)) où doutes, questionnements et critiques touchent la
compréhension antérieure de la foi, les valeurs et les
pratiques héritées de sa communauté d'appartenance. La
personne a alors 1'impression de perdre la foi, sa foi
individuelle et celle de son groupe, elle peut se retirer de la
communauté, remettre en question ou rejeter certaines données,
chercher ailleurs, La personne passe- ainsi de la foi des
autres, de la foi de sa communauté d'appartenance à la
recherche de sa foi propre. Enfin la personne parvient,
graduellement ou plus ou moins soudainement, à une "owned
faith" (stades de la foi conjonctive et de la foi
universalisante de Fowler), sa foi devient mature et
personnelle, elle peut comprendre et respecter la foi des
autres sans se sentir en danger, elle peut apprendre des autres
traditions, elle peut s'ouvrir a une certaine interdépendance
dans la foi. Westerhoff illustre ses quatre styles de foi par
un tronc d ' arbre où s ' ajoutent successivement trois anneaux
durant sa maturité, les anneaux déjà là restant présents dans
1 ' arbre,
1 Westerhoff, John, Wi11 Our Children Have Faith? The Seabury Press, New
York, 1976.
intérieure pour repenser et reconstruire une foi personnelle-
Ce sont des aspects importants et nécessaires du développement
de la foi, encore plus dans une société sécularisée et
permissive où l'interprétation religieuse du sens de la vie
n'est qu'une option facultative et qu'une parmi d'autres.
Vouloir aider une personne qui doute et se questionne a plus de
chances de réussir si un éducateur passe d'un modèle orienté
sur une transmission unilatérale dogmatique & un modèle oriente
sur la personne et ses besoins comme individu ou membre d'une
collectivité humaine. Beaucoup de problèmes personnels
rencontrés dans l'enquête venaient de mauvaises expériences
vécues relatives à ce modèle intransigeant de transmission où
l'autonomie de la personne et son image d'elle-même étaient
mises en cause- Douter et se questionner sont typiques,
d'après l'enquête, de l'entrée dans la vie adulte où l'on se
positionne par rapport à plein de choses, et du mitan de la
vie, où on se repositionne en cherchant une plus grande
authenticité avec soi-même, avec les autres et avec Dieu.
Stokes parle de ne pas avoir peur de s'identifier comme
"chrétien agnostique" c'est-à-dire comme quelqu'un qui a des
questions, qui veut chercher et trouver des réponses avant de
prendre une décision de foi, La communauté de foi a un rôle
important pour aider ces personnes à affronter leurs problèmes
réels, pour leur permettre de partager diverses interprétations
d e foi et pour favoriser l'expression individuelle de foi dans
ses phases de doute autant que dans ses phases de clarté
relative. Elle se doit toujours cependant d'interpréter
clairement les traditions et croyances de sa communauté tout en
se mettant au service de la liberté des personnes.
aspects suivants:
- celle de D. ~ e v i n s o nqui
~ déploie une alternance de periodes
de stabilité relative où se bâtissent des structures de vie
(famille, travail, amitiés, rêve de vie . . . ) et des périodes de
transition où ces dernières changent et se reconstruisent avec
ce qu'amène l'âge;
3 Levinson, Daniel J . , The Seasons of a Man 's Life. Knopf , New York, 1978.
353
NIVEAU COMMUNAUTE
1 Delbrêl, M., Nous autres, gens des rues. Seuil, Paris, 1966, p. 6 7 .
vécu psychologique et mondain des adultes du mitan, nous sommes
face à une piste pastorale importante tant pour les gens qui se
référent au Dieu de Jésus que pour ceux qui veulent s'adonner
une qualité de vie en croissance progressive.
GRACE A DEMANDER
BUT A ATTEINDRE
1. VIVRE
A- Application a la vie
B- Activité préparatoire
N'oublie pas de compléter ton poly-poster, aidé en cela par les grâces
reçues lors des contemplations en temps d'arrêt comme celles reçues au cours
de ta vie ordinaire.
Apporte ton poly-poster à la prochaine rencontre.
I I . VERIFIER
A. Annotations pratiques
B- Réflexion
L 'élection
IV. PRIER
A- Références bibliques
1. Principal es
- Jn 6, 22-71
- Jn 12
2. Autres
Enseignements
Discours
Prières
B- Prières
1. Litanie
Loué sois-tu
pour l'enchantement des syllabes,
la musiques des noms
et le tranchant des verbes.
Loué sois-tu
pour la secrète respiration des phrases
et l'infinie richesse de leurs agencements.
Loué sois-tu
pour l'intonation de la voix,
pour l'accent du terroir
et la couleur des mots qu'enfantent nos lèvres.
C- Texte de méditation
La banne nouvelle
Dans les décisions qui engagent définitivement la vie, comme est le choix
entre mariage et célibat consacré, le sondage des temps forts et faibles de
la vie spirituelle peut apporter beaucoup de lumière et il suffit
quelquefois à résoudre la question posée. Mais ce sondage est pratiquement
irréalisable sans le secours d'un guide expérimenté. On doit, en effet,
examiner les sentiments et les pensées qui se mouvaient en ces périodes,
Eh bien, oui! mieux vaut commencer par voir ce qui est raisonnable. Non
pas raisonnable aux yeux d'une prudence un peu terre à terre, mais
raisonnable aux yeux de la foi: tout étant bien pesé, quelle solution est
sage devant Dieu?
Quelle ligne suivre pour parvenir à cette sagesse, qui doit être perçue
devant Dieu? D'abord, marquer un temps d'arrêt pour me recueillir en sa
présence. Voir quel est le choix précis à faire. Me rappeler qu' il s'agit,
en fin de compte, d'aimer davantage le Dieu vivant et de le faire découvrir
aux autres. Pour ne pas imposer à Dieu mes préférences, m'efforcer de ne
vouloir pas plus une solution que l'autre, tant que je n'aurai pas vu celle
qui convient. Prier Dieu du fond de moi-même pour que se forment en moi une
vue claire des choses et un désir qui réponde au sien. Je m'arrêterai plus
ou moins à cette préparation, selon l'importance de la décision.
Puis, avantages et inconvénients étant bien pesés dans les deux hypothèses,
regarder de quel côté incline la sagesse, sans me laisser mouvoir par des
impressions- Tous comptes faits devant Dieu, quelle solution est
raisonnable? Dans l'exemple cité, le militant laïc jugeait déraisonnable
d'accepter.
Dans les cas où l'essai de confirmation ne donne rien, parce que nous sommes
spirituellement inertes, gardons-nous de forcer les "mouvements de l'âmet'
pour en obtenir à tout prix des lumières: elles seraient illusoires.
Prenons alors résolument la solution qui a été perçue comme plus sage. Elle
correspond aux lumières que Dieu nous donne pour le moment.
Quand nous disposons de quelque temps avant une décision importante, i l est
bon de revenir sur la question en des jours différents. La reprise à divers
moments permet de vérifier ce qu'il y a d'éphémère ou de solide dans nos
réactions. Elles en sortent décantées et plus sûres. Et nous savons que
" 1 ' expérience des consolations et désolations1'se révèle profitable, dans
la mesure où elle est devenue familière.
1904 (24 octobre) Naissance de Madeleine Delbrêl à Mussidan.
Enfance à Mussidan.
Adolescence à Paris. Etudes de philosophie.
Rencontre de Jean Maydieu qui deviendra Frère Jean-Augustin, o.p.
Rencontre de l'abbé Lorenzo qui sera jusqu'à sa mort confident et
confesseur de Madeleine.
1933 (15 octobre) Madeleine et deux compagnes s' installent à Ivry, au Centre
social, 207, route de Choisy, qui devient La Charité.
11 existe une
Association des Amis de Madeleine delbrêl:
il, rue Raspail - 94200 Ivry-sur-Seine.
ANWgXE III
. Des réflexions sur des problèmes rencontrés par 1'Eglise à son époque:
la situation des prêtres-ouvriers, le changement de pape, la venue du
Concile Vatican II, sa correspondance avec nombre de personnes en autorité
ou avec des amis, le décès de l'accompagnateur spirituel de La communauté,
le Père Lorenzo, le décès du cardinal Suhard de Paris, l'espoir marxiste et
l'espérance chrétienne, l'athéisme et l'évangélisation, etc.
Approches éducatives
S p i r i t u a l i t é et théologie
Culture contemporaine
APPLIED - IMAGE.lnc
-= -.-,Rochester,
--
1653 East Main Street
--
--
--
NY 14609 USA
-- Phone: 71ff482-0300
Fax: 716128&5989