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Canadian Journal of Behavioural Science © 2010 Canadian Psychological Association

2010, Vol. 42, No. 4, 212–221 0008-400X/10/$12.00 DOI: 10.1037/a0017071

Violence conjugale et qualité de la relation mère-enfant :


effet médiateur ou modérateur de la santé des mères ?

Édith de la Sablonnière et Andrée Fortin


Université de Montréal

La santé des mères et la qualité de la relation mère-enfant sont souvent retenus comme facteurs pouvant
prédire l’adaptation de l’enfant exposé à la violence conjugale, mais les relations entres ces variables sont
mal connues. Cette étude vérifie si la santé des mères exerce un effet médiateur ou modérateur dans le
lien entre la violence conjugale et la qualité de la relation mère-enfant. Au total, 111 mères victimes
de violence conjugale et leur enfant ont participé à l’étude. Deux indices de la santé des mères ont été
retenus, soit l’état de santé physique et le niveau de détresse psychologique. La relation mère-enfant a été
évaluée selon le point de vue de la mère et celui de l’enfant. Les résultats montrent l’absence d’effet
médiateur et révèlent plutôt la présence d’effets modérateurs des deux indices de santé, mais seulement
lorsque la qualité de la relation mère-enfant est évaluée par l’enfant. La discussion souligne l’importance
de la santé des mères comme facteur de protection pour la relation mère-enfant et l’incidence de ce
résultat pour l’intervention. L’intérêt de diversifier les informateurs est aussi souligné.

Mots clés : violence conjugale, santé de la mère, qualité de la relation mère-enfant, effet médiateur, effet
modérateur

De nombreuses études confirment que l’exposition des enfants à seraient touchés par cette violence. Aux États-Unis, Carlson
la violence conjugale a des effets néfastes sur leur adaptation. Les (1984) évalue à 3,3 millions le nombre d’enfants qui auraient été
répercussions de cette violence n’ont pas toujours un effet direct exposés à la violence des parents au moins une fois au cours de la
sur l’enfant. L’effet pourrait également être indirect en raison de la dernière année, mais une étude récente estime plutôt ce chiffre à 15
présence de variables intermédiaires, telles la santé des mères et la millions (McDonald, Jouriles, Ramisetty-Mikler, Caetano &
qualité de la relation mère-enfant. Jusqu’ici, ces variables inter- Green, 2006). L’exposition des enfants à la violence conjugale
médiaires ont été étudiées de manière indépendante, mais des liens n’est pas sans répercussion sur ces derniers. De récentes méta-
sont souvent évoqués entre la santé physique ou mentale des mères analyses indiquent que ces enfants sont plus à risque de développer
et la qualité de la relation mère-enfant. Le but de la présente des troubles extériorisés (agressivité, troubles de comportement) et
recherche était précisément de clarifier le rôle de ces variables intériorisés (anxiété, dépression) (Kitzmann, Gaylord, Holt &
dans un contexte de violence conjugale. De façon spécifique, Kenny, 2003; Wolfe, Crooks, Lee, McIntyre-Smith & Jaffe, 2003).
l’étude voulait vérifier si la santé des mères exerce un effet Ils manifestent davantage de difficultés sur le plan des habiletés
médiateur ou, plutôt, un effet modérateur dans le lien entre la verbales (Huth-Bocks, Levendosky & Semel, 2001) et sont plus
violence conjugale et la qualité de la relation mère-enfant. susceptibles de développer le syndrome de stress post-traumatique
La violence conjugale est un problème social majeur auquel sont (Graham-Bermann & Levendosky, 1998). Plus la violence conju-
exposés de nombreux enfants. Au Canada, on estime à 1,2 million gale est fréquente dans le couple, plus les problèmes d’adaptation
le nombre d’hommes et de femmes à avoir été agressés par leur chez les enfants augmentent en nombre et en importance (Jouriles,
conjoint (Statistique Canada, 2001). À partir de cette enquête, le Norwood, McDonald, Vincent & Mahoney, 1996; O’Keefe, 1994).
nombre d’enfants exposés à une telle violence serait estimé à un
demi-million. Certains auteurs (Jaffe & Poisson, 2000) jugent ce
chiffre modeste et suggèrent plutôt que 800 000 enfants canadiens Violence conjugale, santé de la mère et
adaptation de l’enfant

La violence conjugale a aussi un impact sur la santé des mères


Édith de la Sablonnière et Andrée Fortin, Département de psychologie, (Kerouac, Taggart, Lescop & Fortin, 1986; Nixon, Resick &
Centre de recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la vio- Nishith, 2004; Rinfret-Raynor & Cantin, 1994). Les recherches
lence faite aux femmes, Université de Montréal. montrent que les femmes violentées présentent des problèmes de
Cette étude a été réalisée dans le cadre d’une exigence partielle pour santé physique, tels que l’insomnie, la fatigue, l’anémie, l’asthme,
l’obtention d’une maı̂trise en psychologie par la première auteure de
les allergies, les maux de tête et l’arthrite (Kerouac et al., 1986;
l’article. Sa réalisation a été rendue possible grâce à une subvention du
Conseil québécois de la recherche sociale (CQRS).
Rinfret-Raynor & Cantin, 1994). De plus, 50 % des femmes
Toute correspondance concernant le présent article doit être adressée à victimes de violence conjugale auront un diagnostic de dépression,
Andrée Fortin, Ph.D., professeure de psychologie, Université de Montréal, comparativement à 7 % chez les femmes n’étant pas victimes
C. P. 6128, succursale Centre-Ville, Montréal (Québec) H3C 3J7, Canada. d’abus de la part de leur conjoint (Giles-Sims, 1998). L’état de
Courriel : andree.fortin@umontreal.ca stress post-traumatique est souvent présent, le taux de prévalence

212
VIOLENCE CONJUGALE ET QUALITÉ DE LA RELATION MÈRE-ENFANT 213

variant entre 45 % à 84 % (Herman, 1992; Houskamp & Foy, violence conjugale engendre des problèmes de santé physique et
1991; Vitanza, Vogel & Marshall, 1995). Des études rapportent mentale chez la mère, ce qui contribue à diminuer ses capacités
que plus les mères présentent des troubles psychologiques, plus parentales et affecte la qualité de sa relation avec son enfant et,
leurs enfants sont susceptibles de manifester des problèmes conséquemment, le niveau d’adaptation de ce dernier.
d’ordre comportemental ou des problèmes de compétence sociale À notre connaissance, aucune étude n’a évalué l’effet médiateur
(Clarke et al., 2007; Eth & Pynoos, 1985; Wolfe, 1985). Enfin, de de la santé des mères sur la qualité de la relation mère-enfant en
récentes études (Clarke et al., 2007; English, Marshall & Stewart, contexte de violence conjugale. Toutefois, certaines données em-
2003) confirment l’effet médiateur de la santé mentale de la mère piriques pourraient appuyer l’hypothèse d’un effet médiateur. Rap-
violentée sur l’adaptation de l’enfant. La fréquence et la sévérité pelons que la violence conjugale est source de grande détresse et
des épisodes de violence conjugale sont liées à une augmentation de dépression chez une forte proportion de femmes qui en sont
des symptômes dépressifs ou de la détresse psychologique de la victimes (Campbell, Kub, Belknap & Templin, 1997; Giles-Sims,
mère, ce qui en retour a un impact négatif sur l’adaptation de 1998). Or, les études menées auprès de diverses populations ont
l’enfant (problèmes de santé physique ou psychologique et trou- clairement montré que les mères ayant une santé mentale précaire
bles de conduite). présentent généralement une plus faible qualité relationnelle avec
leur enfant que les mères en bonne santé (Bayer, Sanson &
Violence conjugale, qualité de la relation mère-enfant Hemphill, 2006; Downey & Coyne, 1990; Robila & Krishnaku-
et adaptation de l’enfant mar, 2006). Néanmoins, d’autres résultats conduiraient plutôt à
mettre en doute l’effet médiateur postulé et à s’interroger sur un
Le lien entre la violence conjugale et la qualité de la relation effet modérateur potentiel de la santé des mères. C’est le cas pour
mère-enfant a aussi été étudié. Certains auteurs rapportent que les les données empiriques contradictoires rapportées plus haut con-
mères abusées par leur conjoint adoptent davantage de conduites cernant le lien entre la violence conjugale et la relation mère-
de contrôle (McCloskey, Figueredo & Koss, 1995), sont moins enfant. En effet, il est possible que ce soit l’état de santé psy-
cohérentes dans leurs pratiques éducatives (Holden, Stein, Ritchie, chologique ou physique de la mère qui puisse expliquer, du moins
Harris & Jouriles, 1998) et montrent moins de chaleur et en partie, le fait que la violence conjugale soit vue comme ayant
d’affection (McCloskey et al., 1995) envers leur enfant que les sur la relation mère-enfant tantôt un effet négatif, tantôt un effet
mères non violentées. Les résultats d’une méta-analyse de Erel et positif, ou encore qu’elle soit vue comme n’ayant aucun effet. Une
Burman (1995) révèlent également que les abus physiques et telle inconsistance pourrait signifier que la violence conjugale
psychologiques du conjoint envers la mère affectent négativement n’aurait pas le même impact sur la qualité de la relation mère-
les comportements parentaux. En revanche, certaines études con- enfant selon que la mère parvient ou non à maintenir un bon état
tredisent ces résultats et indiquent que les femmes violentées ne se de santé.
démarquent pas, dans leurs conduites parentales, des femmes non Le but de la présente étude était justement de clarifier le rôle de
violentées (Holden et al., 1998). Finalement, les résultats d’une la santé de la mère victime de violence conjugale dans la qualité de
étude qualitative reflètent des liens parfois négatifs, parfois positifs la relation mère-enfant. En accord avec les travaux antérieurs, il
entre la violence conjugale et la relation mère-enfant (Levendosky, avait été prédit que la santé de la mère joue un rôle médiateur ou
Lynch & Graham-Bermann, 2000). modérateur dans le lien entre, d’une part, la violence conjugale et,
L’analyse des liens entre la qualité de la relation mère-enfant et d’autre part, la qualité de la relation mère-enfant. Deux indices de
l’adaptation de l’enfant au sein des familles où il y a de la violence la santé de la mère ont été retenus, soit la santé physique et la
conjugale conduit aussi à des résultats contradictoires. Ainsi, des détresse psychologique. La qualité de la relation mère-enfant a été
auteurs (Gomulak-Cavicchio, Davies & Cummings, 2006; Harper, évaluée selon à la fois le point de vue de la mère et celui de
Arias & House, 2003; Levendosky & Graham-Bermann, 1998) l’enfant.
observent que la qualité de la relation mère-enfant a un effet
modérateur sur l’adaptation de l’enfant, alors que d’autres
(Bourassa, 2003; Hipwell, Murray, Ducournau & Stein, 2005; Méthode
Levendosky, Huth-Bocks, Shapiro & Semel, 2003; Margolin,
Christensen & John, 1996) notent plutôt un effet médiateur. Participants

Violence conjugale, santé de la mère et Les données de cette étude étaient issues d’une recherche prin-
cipale sur les facteurs de protection des enfants témoins de vio-
relation mère-enfant
lence conjugale (Fortin, Cyr & Lachance, 2000). Au total, 111
Les études qui ont analysé les liens entre la violence conjugale, mères et leur enfant, vivant en situation de violence conjugale, ont
la qualité de la relation mère-enfant et l’adaptation de l’enfant participé à l’étude. Les mères avaient une moyenne d’âge de 35,37
n’ont pas pris en compte l’état de santé de la mère, ce qui pourrait ans (É.-T. ⫽ 5,89). La plupart d’entres elles étaient nées au
expliquer la présence de résultats contradictoires. Certains modèles Québec, et leur langue maternelle était le français. Le revenu
théoriques évoquent en effet l’importance de cette variable. Parmi familial annuel moyen des mères étaient de 19 352 $ (É.-T. ⫽ 16
ceux-ci se trouve l’hypothèse de la dysfonction familiale (family 957) et celles-ci avaient, pour la majorité, deux enfants. Pour les
disruption hypothesis) de Jaffe et ses collaborateurs (Jaffe, Wolfe, fins de l’étude, seulement un enfant par famille a été retenu. Les
& Wilson, 1990). Ce modèle d’analyse global s’inspire à la fois enfants étaient répartis également selon le sexe (57 garçons et 54
de la théorie de l’apprentissage social (Bandura, 1977) et du filles), et leur âge allait de 6 à 12 ans, pour une moyenne de 8,71
modèle systémique de la famille (Emery, 1989). Il propose que la ans (É.-T. ⫽ 1,91). Aucune différence entre les garçons et les filles
214 DE LA SABLONNIÈRE ET FORTIN

n’a été observée quant aux caractéristiques sociodémographiques niers jours (Kovess, Murphy, Tousignant & Fournier, 1985). Les
des familles. items sont cotés sur une échelle de type Likert en quatre points
(0 : jamais; 3 : très souvent). Tel que le recommandent Préville et
al. (1992), le score total est reporté sur 100, et varie entre 0 et 100.
Instruments de mesure
Le pourcentage des mères qui présentent un résultat supérieur au
Expérience de violence conjugale de la mère. L’évaluation 80e percentile révèle un seuil clinique de détresse psychologique.
de la violence conjugale vécue par la mère a été mesurée à l’aide Le coefficient de consistance interne de l’IDPESQ-29 de la version
d’une version française du Conflict Tactics Scales-II (CTS-II) de française est de 0,89, et la fidélité test-retest indique des corréla-
Straus, Hamby Boney-McCoy et Sugarman (1996), dont la traduc- tions allant de 0,76 à 0,94, selon les échelles. L’indice de cohé-
tion a été réalisée par Cyr, Fortin et Chénier (1997). Cet instrument rence interne pour la présente étude était de 0,95.
contient 78 items mesurant la fréquence d’utilisation de 39 strat- Qualité de la relation mère-enfant selon le point de vue de la
égies par chacun des deux conjoints lors des conflits conjugaux mère. Les attitudes et les comportements parentaux ont été
survenus au cours des 12 derniers mois. Tous les items sont mesurés auprès de la mère par le Parental Dimensions Inventory
répartis en cinq échelles, soit Négociation, Violence psy- (PDI), de Slater et Power (1987). Une version française a été
chologique, Assaut physique, Coercition sexuelle et Blessures. Les validée par Hodgins (1995) et revue par Fortin et al. (2000). Pour
items sont cotés sur une échelle de type Likert en sept points (1 : les fins de la recherche, deux des trois grandes dimensions de
jamais; 7 : plus de 20 fois). Le nombre total d’utilisations de l’instrument ont été conservées, soit celles qui évaluent les atti-
stratégies est associé à la valeur médiane de chaque point de tudes et les comportements maternels positifs. La première dimen-
l’échelle, à l’exception du dernier qui, par convention, se voit sion réfère aux attitudes et aux comportements de soutien (prendre
attribuer une valeur de 25 (Straus & Gelles, 1990). soin, sensibilité et attitudes non restrictives), tandis que la deux-
Pour les besoins de cette étude, seuls les résultats aux échelles ième renvoie à la structure des attitudes et des comportements
Violence psychologique et Assauts physiques reflétant la victimi- (consistance dans la discipline, organisation). Les 30 énoncés de la
sation de la mère ont été pris en compte selon un score global version abrégée sont cotés sur une échelle de type Likert en six
cumulant les résultats à l’ensemble des items des deux échelles. points (0 : ne correspond pas du tout à moi; 5 : correspond tout à
Cette décision a été dictée par la présence de multicolinéarité entre fait à moi). Le score total peut varier entre 0 et 150; un résultat
les résultats aux deux échelles, r(105) ⫽ 0,57, p ⱕ 0,001, et par la élevé indique la présence plus marquée d’attitudes et de compor-
concomitance des deux formes de violence chez l’ensemble des tements maternels positifs. La validation de l’instrument original a
mères de l’échantillon. Des corrélations élevées et significatives été effectuée auprès de plusieurs populations de parents d’enfants
ont été observées entre la nouvelle variable Violence conjugale et âgés entre 6 et 14 ans. Dans sa version française, les indices de
les deux échelles Violence psychologique, r(105) ⫽ 0,87, p ⱕ cohérence interne pour chaque échelle varient entre 0,53 et 0,75
0,001, et Assauts physiques, r(105) ⫽ 0,90, p ⱕ 0,001. Le CTS-II (prendre soin : 0,75; sensibilité : 0,53; attitudes non restrictives :
comporte de bonnes qualités psychométriques. Les indices de 0,75; consistance : 0,68; organisation : 0,63), ce qui est supérieur
cohérence interne pour les échelles Violence psychologique et à ceux obtenus pour la version d’origine (alpha variant entre 0,41
Assauts physiques sont respectivement de 0,79 et de 0,86 pour la et 0,79). L’indice de cohérence interne de l’échelle globale de cet
version américaine et, pour cette étude, de 0,86 et de 0,93. L’alpha instrument est de 0,76.
de Cronbach pour les deux échelles combinées est de 0,91. Qualité de la relation mère-enfant selon le point de vue de
Santé physique de la mère. L’état de santé physique a été l’enfant. La perception de l’enfant des conduites parentales a été
mesuré à l’aide de questions utilisées dans le cadre de l’Enquête évaluée à l’aide du Parent Perception Inventory (PPI; Hazzard,
Santé Québec (Préville, Boyer, Potvin, Perrault & Légaré, 1992). Christensen & Margolin, 1983). L’outil a été traduit au Québec par
La mère devait répondre à quatre questions concernant son état de Fortin, Cyr et Chénier (1997). S’adressant aux enfants âgés de 5 à
santé physique générale au cours de la dernière année. Ces ques- 13 ans, le PPI décrit 18 comportements parentaux, dont 9 sont
tions ont permis de préciser dans quelle mesure l’état de santé qualifiés de positifs (par ex., renforcement positif, soutien,
physique de la mère l’a obligé à restreindre ses activités à la chaleur) et 9, de négatifs (par ex., retrait de privilège, critique,
maison, au travail ou dans les loisirs. La mère devait aussi indiquer menace, apparente indifférence). Il est demandé à l’enfant d’é-
si elle avait souffert de l’un des 17 problèmes de santé énumérés valuer dans quelle mesure chacun des comportements correspond
(anémie, allergies, sérieux maux de dos, obésité, ulcères à celui de sa mère. Les items sont cotés sur une échelle de type
d’estomac, migraines, etc.) ou consommé des médicaments (cal- Likert en cinq points (0 : jamais; 4 : très souvent) pour indiquer la
mants, antidépresseurs, anxiolytiques ou lithium). Un indice gé- fréquence d’utilisation du comportement. Pour les plus jeunes, une
néral de santé physique a été obtenu par la somme des réponses échelle de dessins de flocons plus ou moins remplis de liquide tient
positives. Il pouvait varier de 0 à 22, un résultat élevé traduisant lieu d’échelle Likert. Un résultat positif et un résultat négatif sont
une présence plus accentuée de problèmes de santé physique. obtenus, chacun variant de 0 à 36. Le PPI présente de bonnes
Détresse psychologique de la mère. L’état de détresse psy- qualités métrologiques. Les indices de cohérence interne de la
chologique de la mère a été évalué à l’aide de l’Indice de détresse version originale varient entre 0,78 et 0,84. Dans la présente étude,
émotionnelle (IDPESQ-29). Cet instrument est la version française l’alpha de l’échelle de conduites maternelles d’affection et de
du Psychiatric Symptoms Index (PSI) élaboré par Ilfeld (1978) et soutien était de 0,74, tandis que celui de l’échelle de conduites
validé dans l’Enquête Santé Québec (Préville et al., 1992). maternelles de contrôle était de 0,78.
L’IDPESQ-29 comprend 29 items évaluant, par la mesure des Caractéristiques familiales. Un questionnaire sociodé-
symptômes de dépression, d’anxiété, d’agressivité et de problèmes mographique rempli par les mères a permis d’évaluer les carac-
cognitifs, la détresse psychologique vécue au cours des sept der- téristiques de la famille, dont le revenu, le type de famille, le
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nombre d’années de scolarité de la mère, l’âge et le sexe de données révèlent que les mères de l’étude ont été victimes
l’enfant. d’épisodes de violence conjugale fréquentes et sévères, en
moyenne 10 fois par mois. Leur état de santé physique général
Déroulement est relativement bon. Toutefois, elles présentent des niveaux
élevés de détresse psychologique. En prenant appui sur les
Le recrutement des mères et de leur enfant a été possible grâce
résultats normatifs de l’Enquête Santé Québec (Boyer, Préville,
à la collaboration de plusieurs CLSC de la région de Montréal et
Légaré & Valois, 1993) pour le groupe de femmes âgées entre
du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, et
24 et 44 ans, l’indice de détresse des femmes de l’étude est près
avec l’aide de petites annonces dans les grands quotidiens mont-
de deux fois et demi supérieur à celui de la population québé-
réalais et dans les journaux locaux. Les mères devaient répondre
coise. De plus, deux tiers des mères de l’échantillon atteignent
aux critères de sélection suivants : avoir un enfant âgé entre 6 et 12
un seuil correspondant au 80e percentile de la distribution de la
ans, vivre ou avoir vécu des problèmes de violence conjugale au
cours des 12 derniers mois, vivre avec un conjoint ou en être population du Québec, lequel est associé à des niveaux de
séparé depuis moins de 18 mois, et ne pas résider dans un centre détresse psychologique sévère. Enfin, notons que la qualité de
d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale au la relation mère-enfant, qu’elle soit évaluée par la mère ou par
moment de l’étude. Les mères devaient signer un formulaire de l’enfant, est généralement bonne.
consentement pour elles-mêmes et pour leur enfant. On a aussi L’examen de la matrice de corrélations indique la présence de
demandé l’assentiment verbal des enfants. Les mères et leur enfant liens entre la violence conjugale et les deux indicateurs de santé de
ont été rencontrés au même moment, mais séparément, soit à leur la mère, soit r(111) ⫽ 0,17, p ⱕ 0,10 pour la santé physique, et
domicile, soit dans les locaux du CLSC ou de l’Université de r(111) ⫽ 0,37, p ⱕ 0,001 pour la détresse psychologique. La
Montréal. La rencontre était dirigée par une des membres de direction des liens indique que plus la violence subie par la mère
l’équipe de recherche, chacune détenant une maı̂trise en psycholo- est fréquente et sévère, plus celle-ci présente des troubles de santé
gie. La durée des entrevues était d’environ deux heures pour la physique ou un niveau élevé de détresse psychologique. Les deux
mère et de une heure pour l’enfant. À la fin de ces rencontres, les indicateurs de santé de la mère sont par ailleurs fortement reliés
mères recevaient 20 $ et les enfants, une collation en guise de entre eux, r(111) ⫽ 0,44, p ⱕ 0,001, mais seule la détresse
remerciement pour leur participation. psychologique est, de façon marginale, corrélée négativement avec
la qualité de la relation mère-enfant évaluée par la mère, r(111) ⫽
Résultats ⫺0,17, p ⱕ 0,10. Enfin, notons que la corrélation entre l’évalua-
tion des conduites maternelles positives faites par la mère et celle
Les analyses finales ont été conduites sur les réponses de 111 faite par l’enfant est faible et non significative, r(111) ⫽ 0,10, ns,
mères et de 111 enfants, 4 dyades mère-enfant ayant été éliminées alors que la corrélation entre la perception de l’enfant des con-
parce qu’elles comportaient trop de valeurs manquantes (plus de
duites maternelles positives et négatives s’avère forte et significa-
15 % par échelle). Pour les autres participants, les valeurs man-
tive, r(111) ⫽ ⫺0,35, p ⱕ 0,001.
quantes ont été remplacées par la moyenne du sujet à l’échelle
Par ailleurs, l’examen des intercorrélations entre les caractéris-
correspondante. Des analyses préliminaires ont révélé une absence
tiques sociodémographiques (âge et sexe de l’enfant, rang de
de valeur extrême de même qu’une distribution normale des don-
l’enfant au sein de la famille, âge et lieu de naissance de la mère,
nées pour chacune des échelles de mesure, sauf pour l’échelle
revenu familial) et la qualité de la relation mère-enfant (selon le
Violence conjugale, dont les données ont fait l’objet d’une trans-
point de vue de la mère et celui de l’enfant) amène à privilégier
formation par la racine carrée.
l’inclusion du sexe de l’enfant dans l’ensemble des analyses, cette
variable étant significativement reliée à la qualité de la relation
Statistiques descriptives
mère-enfant. De façon plus précise, les garçons perçoivent davan-
Le Tableau 1 présente les résultats aux échelles de mesure tage de comportements négatifs chez leur mère comparativement
ainsi que les coefficients de corrélation entre les variables. Les aux filles de l’échantillon, r(111) ⫽ 0,28, p ⱕ 0,01.

Tableau 1
Matrice d’intercorrélations entre les variables de l’étude et résultats aux échelles (N ⫽ 111)

Variable 1 2 3 4 5 6

1. Violence conjugale —
2. Santé physique 0,17† —
3. Détresse psychologique 0,37ⴱⴱⴱ 0,44ⴱⴱⴱ —
4. Relation mère-enfant (point de vue de la mère) ⫺0,03 ⫺0,10 ⫺,17† —
Relation mère-enfant (point de vue de l’enfant)
5. Affection et soutien ⫺0,13 ⫺0,04 ⫺0,12 0,10 —
6. Contrôle 0,14 0,08 0,03 ⫺0,14 ⫺0,35ⴱⴱⴱ —
M 120,08 3,50 37,84 99,81 26,69 12,40
É.-T. 84,35 3,21 22,00 15,15 5,70 6,54
ⴱⴱⴱ

p ⱕ 0,10. p ⱕ 0,001.
216 DE LA SABLONNIÈRE ET FORTIN

Analyse de l’effet médiateur de la santé de la mère perception de l’enfant des conduites maternelles d’affection et de
soutien varie selon l’état de santé de la mère. Lorsque la mère
Une série d’analyses de régression a permis de vérifier l’effet présente peu ou pas de problèmes de santé physique, plus la
médiateur postulé au départ. Cet effet a été vérifié selon les violence conjugale devient fréquente et sévère, plus l’enfant rap-
recommandations de Baron et Kenny (1986). Pour conclure à un porte que la mère manifeste des conduites maternelles d’affection
effet médiateur, trois conditions doivent être respectées : 1) la et de soutien. Par contre, si la mère présente des problèmes de
variable indépendante devait être liée significativement avec la santé physique importants, le phénomène inverse est observé. Plus
variable dépendante et le médiateur; 2) le médiateur devait prédire la violence conjugale devient fréquente et sévère, moins l’enfant
la variable dépendante; 3) la relation entre la variable indépendante rapporte que la mère manifeste des conduites d’affection et de
et la variable dépendante devait être non significative (médiation soutien. Un résultat similaire est observé lorsque l’indice de santé
complète) ou diminuer significativement (médiation partielle) lors- retenu est la détresse psychologique, ␤ ⫽ ⫺0,27, t(106) ⫽ ⫺2,74
que le médiateur était pris en compte dans l’équation. Les ana- p ⱕ 0,01 (voir la Figure 1b). Un effet modérateur de la santé
lyses ont indiqué que la première condition à la médiation n’était physique est aussi constaté quand les conduites maternelles de
pas respectée pour la prédiction de deux des trois indicateurs de la contrôle sont évaluées par l’enfant, ␤ ⫽ 0,20, t(106) ⫽ 2,17, p ⱕ
qualité de la relation mère-enfant. Ainsi, la violence conjugale 0,05 (voir la Figure 1c). L’effet de la violence conjugale sur les
permet de prédire la santé physique (␤ ⫽ 0,19, p ⱕ 0,05) ainsi que conduites maternelles de contrôle perçues par l’enfant varie selon
la détresse psychologique de la mère (␤ ⫽ 0,36, p ⱕ 0,001), mais les problèmes de santé physique de la mère. Lorsque la mère
n’est pas associée à la qualité de la relation mère-enfant quand présente peu ou pas de problèmes de santé physique, plus la
celle-ci est évaluée au moyen des comportements maternels violence conjugale devient fréquente et sévère, moins l’enfant
positifs rapportées par la mère (␤ ⫽ ⫺0,04, ns) ou l’enfant (␤ ⫽ rapporte que la mère manifeste des conduites de contrôle. Par
⫺0,15, ns). Par ailleurs, la violence conjugale prédit les conduites contre, si la mère présente des problèmes de santé physique im-
maternelles de contrôle rapportées par l’enfant (␤ ⫽ 0,19, p ⱕ portants, le phénomène inverse est observé. Plus la violence con-
0,05), mais la seconde condition à la médiation n’est alors pas jugale devient fréquente et sévère, plus l’enfant rapporte que la
respectée, la santé physique (␤ ⫽ 0,06, ns) et la détresse psy- mère adopte des conduites de contrôle. Des liens analogues sont
chologique (␤ ⫽ ⫺0,08, ns) de la mère ne contribuant pas de façon notés lorsque c’est l’indice de santé de la détresse psychologique
significative à la prédiction de cette variable. L’ensemble des qui est pris en compte, ␤ ⫽ 0,19, t(106) ⫽ 2,00 p ⱕ 0,05 (voir la
résultats permet de conclure à l’absence d’effet médiateur. Figure 1d).

Analyse de l’effet modérateur de la santé de la mère Discussion


Une série d’analyses de régression hiérarchique a servi à vérifier Cette recherche avait pour objectif de vérifier l’effet médiateur
l’effet modérateur de la santé de la mère sur la qualité de la relation et modérateur de la santé physique et de la détresse psychologique
mère-enfant. Chacune des analyses comportait trois blocs de vari- de la mère victime de violence conjugale sur la qualité de la
ables. Le premier bloc incluait l’effet principal du sexe de l’enfant; relation mère-enfant. Les résultats reflètent l’absence d’un effet
un deuxième bloc était composé de l’effet principal de la violence médiateur, mais confirment la présence d’un effet modérateur des
conjugale et de la santé de la mère; enfin, un dernier bloc incluait deux indices de la santé sur les conduites maternelles de soutien ou
le terme d’interaction Violence conjugale X Santé de la mère. d’affection et de contrôle rapportées par l’enfant. Ainsi, quand la
Selon les recommandations de Aiken et West (1991), chaque mère présente peu ou pas de problèmes de santé physique, ou peu
variable indépendante a été centrée avant de construire les termes ou pas de détresse psychologique, plus la violence conjugale
d’interaction afin d’éviter les problèmes de colinéarité. Dans le but devient fréquente et sévère, plus elle manifeste des conduites
de faciliter l’interprétation des effets modérateurs, les résultats ont maternelles d’affection ou de soutien et moins elle adopte des
été exposés sous une forme graphique. Le calcul des courbes a été conduites de contrôle. En revanche, quand les problèmes de santé
réalisé par le biais des coefficients de régression non standardisés physique et les niveaux de détresse psychologique sont élevés, le
de l’équation (Aiken & West, 1991; Frazier, Tix & Barron, 2004; phénomène inverse est observé. Ces résultats sont contraires à ce
Holmbeck, 1997). Pour l’ensemble des graphiques présentés, la que suggérait l’hypothèse de la dysfonction familiale (family dis-
violence conjugale et les indices de santé de la mère sont repré- ruption hypothesis) (Jaffe et al., 1990), qui prévoyait que plus la
sentés sous leur forme centrée, soit 0 correspondant à la moyenne violence conjugale est fréquente ou sévère, plus la santé des mères
de l’échantillon. se détériore, ce qui en retour a un impact négatif sur la qualité de
Les résultats des analyses vérifiant l’effet modérateur de la santé la relation mère-enfant et, conséquemment, sur le niveau
de la mère sur la qualité de la relation mère-enfant ne révèlent d’adaptation de l’enfant.
aucun effet tant pour la santé physique, ␤ ⫽ 0,09, t(106) ⫽ 0,91, De tels résultats permettent toutefois de mieux rendre compte
ns, que pour la détresse psychologique, ␤ ⫽ 0,09, t(106) ⫽ 0,88, des données empiriques contradictoires concernant le lien entre la
ns, lorsque c’est la mère qui évalue cette relation. violence conjugale et la qualité de la relation mère-enfant. Rappe-
Toutefois, lorsque la qualité de la relation est évaluée par lons que certains auteurs rapportent que la violence conjugale
l’enfant, l’effet modérateur des deux indices de santé se révèle affecte négativement les comportements parentaux, alors que
significatif (voir le Tableau 2). Tel que l’illustre la Figure 1a, d’autres soutiennent qu’elle n’a pas d’impact sur la relation mère-
l’effet d’interaction entre les problèmes de santé physique de la enfant ou encore qu’elle l’affecte positivement (Erel & Burman,
mère et la qualité de la relation mère-enfant, ␤ ⫽ ⫺0,17, t(106) ⫽ 1995; Holden & Ritchie, 1991; Holden et al., 1998; Levendosky et
⫺1,77 p ⱕ 0,10, montre que l’effet de la violence conjugale sur la al., 2000; McCloskey et al., 1995; Sullivan et al., 1997). Il est
VIOLENCE CONJUGALE ET QUALITÉ DE LA RELATION MÈRE-ENFANT 217

Tableau 2
Analyse de régression hiérarchique évaluant l’effet modérateur de la santé physique et de la détresse psychologique sur la qualité de
la relation mère-enfant selon le point de vue de l’enfant

Affection-soutien Contrôle

Variables B ET B ␤ T B ET B ␤ T

Santé physique
Étape 1
Constance 26,69 0,54 49,33ⴱⴱⴱ 12,42 0,61 20,45ⴱⴱⴱ
Sexe ⫺0,99 1,08 ⫺0,09 ⫺0,92 2,94 1,22 0,23ⴱⴱ 2,42ⴱⴱ
Étape 2
Constance 26,69 0,54 49,39ⴱⴱⴱ 12,42 0,60 20,65ⴱⴱⴱ
Sexe ⫺1,3 1,11 ⫺0,12 ⫺1,18 3,36 1,23 0,26ⴱⴱ 2,73ⴱⴱ
Violence ⫺0,23 0,15 ⫺0,15 ⫺1,47 0,33 0,17 0,18† 1,89†
Santé physique ⫺0,02 0,17 0,32 ⫺0,11 0,06 0,19 0,03 0,33
Étape 3
Constance 26,86 0,54 49,40ⴱⴱⴱ 12,19 0,6 20,28ⴱⴱⴱ
Sexe ⫺1,47 1,10 ⫺0,13 ⫺1,34 3,59 1,22 0,28ⴱⴱ 2,96ⴱⴱ
Violence ⫺0,25 0,15 ⫺0,16 ⫺1,62 0,35 0,17 0,20ⴱ 2,09ⴱ
Santé physique 0,05 0,17 0,03 0,26 ⫺0,02 0,19 ⫺0,01 ⫺0,11
Violence ⫻ Santé physique ⫺0,09 0,05 ⫺0,17† ⫺1,77† 0,12 0,06 0,20ⴱ 2,17ⴱ

Détresse psychologique
Étape 1
Constance 26,69 0,54 49,33ⴱⴱⴱ 12,42 0,61 20,45ⴱⴱⴱ
Sexe ⫺0,99 1,08 ⫺0,09 ⫺0,92 2,94 1,22 0,23ⴱⴱ 2,42ⴱⴱ
Étape 2
Constance 26,69 0,54 49,58ⴱⴱⴱ 12,42 0,60 20,66ⴱⴱⴱ
Sexe ⫺1,35 1,10 ⫺0,12 ⫺1,23 3,37 1,23 0,26ⴱⴱ 2,75ⴱⴱ
Violence ⫺0,18 0,16 0,11 ⫺1,10 0,37 0,18 0,21ⴱ 2,05ⴱ
Détresse psychologique ⫺0,02 0,03 ⫺0,09 ⫺0,90 ⫺0,02 0,03 ⫺0,05 ⫺0,52
Étape 3
Constance 27,14 0,55 49,51ⴱⴱⴱ 12,06 0,62 19,37ⴱⴱⴱ
Sexe ⫺1,66 1,07 ⫺0,15 ⫺1,55 3,62 1,23 0,28ⴱⴱ 2,97ⴱⴱ
Violence ⫺0,10 0,16 ⫺0,07 ⫺0,65 0,31 0,18 0,17† 1,71†
Détresse psychologique ⫺0,01 0,03 ⫺0,04 ⫺0,38 ⫺0,03 0,03 ⫺0,09 ⫺0,89
Violence ⫻ Détresse psychologique ⫺0,02 0,01 ⫺0,27ⴱⴱ ⫺2,74ⴱⴱ 0,01 0,01 0,19ⴱ 2,00ⴱ
ⴱ ⴱⴱ ⴱⴱⴱ

p ⱕ 0,10. p ⱕ 0,05. p ⱕ 0,01. p ⱕ 0,001.

possible que l’incohérence de ces résultats soit attribuable au fait un contexte où la mère éprouve divers problèmes de santé, celle-ci
que les indices de santé de la mère n’ont pas été pris en compte n’a pas forcément les ressources personnelles nécessaires pour
dans ces études. donner de l’affection ou du soutien à l’enfant. Son état peut
Les résultats de la présente recherche suggèrent que lorsque la favoriser également chez elle le recours plus fréquent à des con-
violence conjugale s’intensifie, la mère en bonne santé pourrait duites coercitives à l’endroit de l’enfant. Certains auteurs ont déjà
recourir à des mécanismes compensatoires, tels qu’adopter davan- rapporté des observations semblables, notant que l’expérience de
tage de conduites d’affection et de soutien envers son enfant violence conjugale affecte négativement la qualité de la relation
(jouer, consoler ou écouter) ou diminuer ses conduites de contrôle mère-enfant (Erel & Burman, 1995; Graham-Bermann &
(menacer, critiquer ou ignorer). La mère tenterait ainsi de neu- Levendosky, 1998; Levendosky & Graham-Bermann, 2001;
traliser les effets néfastes de la violence sur l’enfant. Dans leur McCloskey et al., 1995). L’usage de conduites coercitives pourrait
étude qualitative auprès de mères victimes de violence conjugale, être vue comme une reproduction auprès de l’enfant de la violence
Levendosky et ses collaborateurs (2000) ont observé que certaines dont les mères sont elles-mêmes victimes.
mères, contrairement à d’autres, semblent adopter des stratégies La présente étude montre des divergences quant au rôle de la
actives dans le but de veiller à ce que leurs enfants souffrent le santé des mères selon que l’évaluation de la qualité de la relation
moins possible des effets de la violence. Selon les auteurs, la mère-enfant est évaluée par la mère ou par l’enfant. Le lien entre
violence vécue par les mères aurait comme effet d’augmenter leur les deux évaluations est faible, r(111) ⫽ 0,10, ns. Un résultat
sensibilité à l’égard de l’enfant, leur sentiment d’empathie ainsi semblable a été rapporté dans de nombreux contextes de recher-
que leur besoin de le soutenir et d’en prendre soin. La violence ches. Dans les études auprès des enfants exposés à la violence
accentuerait le sentiment de compétence générale de la mère, qui conjugale, les chercheurs ont noté des divergences dans l’évalua-
dirige alors son attention sur le besoin de protéger l’enfant. tion de la relation parent-enfant ou celle de l’adaptation de l’enfant
La violence conjugale peut aussi ternir la relation avec l’enfant. selon l’informateur, qu’il s’agisse de l’enfant lui-même, du parent
C’est ce qui a été observé ici lorsque la mère présente un mauvais ou de l’enseignant (Fortin et al., 2000; Sternberg, Lamb & Dawud-
état de santé physique ou une grande détresse psychologique. Dans Noursi, 1998; Sternberg, Lamb, Guterman & Abbott, 2006).
218 DE LA SABLONNIÈRE ET FORTIN

A B Problème de
Problème de
santé physique santé physique
30 16

28 14

ffection et soutien
Problème de

Contrôle
santé
26 12

Affection
élevé
X1 Hi
faible
X1 Lo
24 10

22 8
Violence conjugale Violence conjugale

C Détresse D Détresse
psychologique psychologique
30 16

28 14
Affection et soutien

Contrôle
26 12

24 10

22 8
Violence conjugale Violence conjugale

Figure 1. Effets d’interaction entre la violence conjugale et la santé de la mère sur les conduites maternelles
d’affection et de soutien ou de contrôle rapportées par l’enfant.

Lorsqu’il y a présence de violence familiale, Sternberg et ses aussi s’expliquer par le fait que la mère associe davantage son fils
collaborateurs (2006) recommandent de diversifier les informa- au conjoint violent. Cela pourrait résulter en une augmentation de
teurs. Selon eux, non seulement il y a peu de cohérence entre les frustration et de conduites négatives de la part de la mère à
différents points de vue, mais le niveau des problèmes rapportés l’endroit du garçon.
varie selon la personne qui fait l’évaluation et selon l’histoire de
victimisation personnelle de chacun (Sternberg et al., 2006). Cette Portée et limites de la recherche
constatation invite à la prudence dans l’interprétation des résultats
et, surtout, confirme l’intérêt de multiplier les sources L’étude montre que la violence conjugale n’affecte pas systém-
d’information. En ce qui concerne plus particulièrement l’évalua- atiquement la qualité de la relation mère-enfant. Cette affirmation
tion de la qualité de la relation mère-enfant, la présence de plu- est vraie seulement pour les mères qui vivent des problèmes de
sieurs informateurs semble d’autant plus importante que la mère santé. Ainsi, le bien-être physique et psychologique des mères
victime de violence conjugale peut être biaisée dans son évaluation agirait comme un facteur de protection pour la qualité de la
(Kerouac et al., 1986). À ce sujet, Levendosky et Graham- relation mère-enfant en contexte de violence conjugale. Un tel
Bermann (2001) notent que les mères les plus dépressives ou résultat a une incidence importante pour l’intervention. En effet,
traumatisées par la violence à leur endroit semblent répondre aux plusieurs programmes d’aide destinés aux enfants exposés à la
questionnaires selon un style de réponse dépressif. violence conjugale considèrent le soutien à la relation mère-enfant
Par ailleurs, les résultats indiquent que les garçons perçoivent comme une cible à privilégier (Davies, 1991; Fortin, 2005; Fortin,
davantage de conduites de contrôle chez leur mère que les filles. Côté, Rousseau & Dubé, 2007; Lieberman, Van Horn, Grandison
Des résultats semblables ont été rapportés par d’autres auteurs & Pekarksy, 1997; Van Meyel, 1999). Or, il se pourrait que
(Hazzard et al., 1983; Durning & Fortin, 2000) auprès d’enfants soutenir la relation mère-enfant sans l’apport d’une aide concrète
d’âge scolaire. Ces derniers ont observé que les mères critiquent, à la mère sur le plan personnel aurait moins de chance de réussite.
menacent ou retirent davantage de privilèges à leur garçon qu’à Les présents résultats incitent à poursuivre l’analyse en
leur fille. Durning et Fortin (2000) suggèrent que cette divergence s’interrogeant cette fois sur l’importance relative de la santé des
serait attribuable au fait que les garçons sont plus fréquemment mères et de la qualité de la relation mère-enfant pour l’adaptation
l’objet de pratiques parentales de contrôle, et en particulier de de l’enfant. Les résultats invitent aussi à déterminer si d’autres
punitions corporelles, que ne le sont les filles. En contexte de facteurs peuvent moduler l’effet de la violence conjugale sur la
violence conjugale, l’écart entre les garçons et les filles pourrait qualité de la relation mère-enfant. À ce propos, il conviendrait de
VIOLENCE CONJUGALE ET QUALITÉ DE LA RELATION MÈRE-ENFANT 219

vérifier si la violence a un effet différent sur la relation mère- Résultats normatifs de l’Enquête Santé Québec. Revue canadienne de
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caractère corrélationnel de l’étude empêchent de reconnaı̂tre la Cyr, M., Fortin, A., & Chénier, N. (1997). Questionnaire sur la résolution
nature causale des relations observées. Un devis de recherche de conflits conjugaux (traduction française de Strauss, M. A., Hamby,
longitudinal permettrait de combler cette lacune. Une telle dé- S. L., Boney-McCoy, S., & Sugarman, D. B. (1996), Conflict Tactics
marche favoriserait également une meilleure compréhension des Scale-II). Montréal : Université de Montréal.
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