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Atlas de l’empire
• Une analyse fine et contrastée du projet politique de Napoléon,
officiellement inspiré des Lumières mais bâti sur la conquête
et le contrôle autoritaire des populations.
1799-1815
• Les dynamiques démographiques, sociales, économiques
et culturelles : un état des lieux des grands bouleversements
napoléonien
de l’époque.
• Un héritage pérenne : création du Code civil, développement
des voies de communication, réformes de l’administration,
modernisation des villes, essor de Paris en capitale impériale…
9:HSMASA=W\[^UW:
dans son bureau des Tuileries (détail),
huile sur toile, 1812, National Gallery of Art,
Washington
www.autrement.com © Bridgeman Images. TROISIÈME ÉDITION
Préfacier
Jean-Paul Bertaud (1935-2015) a écrit une vingtaine d’ou-
vrages sur la Révolution et l’Empire, dont l’un couronné par
l’Académie française : Les Amis du roi (Perrin, 1984). Son livre
sur Les royalistes et Napoléon (Flammarion, 2009) a reçu le
prix Premier Empire de la Fondation Napoléon en 2009. Son
dernier ouvrage, Napoléon et les Français, est paru en 2014
Remerciements
chez Armand Colin. Les auteurs dédient cet ouvrage à la mémoire de
Jean-Paul Bertaud, disparu le 21 novembre 2015.
ISBN : 978-2-0802-7692-6
© Autrement, un département de Flammarion, 2022
87, quai Panhard et Levassor, 75647 Paris Cedex 13
Crédits
www.autrement.com
Pages 8-9. Carte de l’Empire français en 1805,
Dépôt légal : mars 2022 Archives de l’armée de terre (cote L.3.234)
Dépôt légal des précédentes éditions : © Éditions Autrement, © SHD.
2008, 2015 Page 67. Extraits de La topographie de Paris ou plan
Imprimé et relié en janvier 2022 par l’imprimerie Pollina, France détaillé de la ville de Paris et de ses faubourgs,
publié par Maire en 1808 (impression 1816)
Tous droits réservés. Aucun élément de cet ouvrage ne peut © A. Taride éditeur, Paris.
être reproduit, sous quelque forme que ce soit, sans l’autori- Page 69. Extrait du plan cadastral, 1809
sation expresse de l’éditeur et du propriétaire, les Éditions © Archives municipales de La Roche-sur-Yon.
Autrement.
Troisième édition
Autrement
collection Atlas/Mémoires
Atlas de l’empire
napoléonien
1799-1815
79 L’Europe du refus
80 Insurrections et zones de résistance
en Europe
82 Insoumission et désertion
84 Les lieux de l’opposition
86 L’Europe du congrès de Vienne
88 Traces d’Empire
Préface
INTRODUCTION
De la « politique de civilisation »
à la domestication des peuples
D es débats préparant le sénatus-consulte du 18 mai 1804
au sacre de Bonaparte en décembre, la notion d’Empire
envahit l’espace des discours politiques et, plus largement
En Hollande, en Italie, en Westphalie, puis en Espagne,
les souverains sont ainsi appelés à appliquer le « Code
du siècle », mais aussi à détruire les anciens abus, à
encore, le champ des productions intellectuelles et introduire les nouvelles impositions et la conscription,
artistiques. La mythologie construite autour du personnage à créer des départements et des préfectures, à aliéner les
de Napoléon Bonaparte se renforce et se transforme : le biens du clergé, à imposer le divorce, à rétablir les finances
« sauveur » et « héros » passe du statut d’imperator, c’est- et à réformer la justice. Nombreux ont été ceux qui,
à-dire de chef de guerre victorieux, à celui d’empereur, anciens patriotes bataves ou italiens, ont applaudi à cette
chef suprême de l’État. Outre le renforcement du pouvoir entreprise et ont accueilli les armées et les fonctionnaires
personnel en France, ces années se caractérisent aussi par français à bras ouverts, l’Empire apparaissant comme
la domination sur des peuples étrangers, provoquant des un rempart face à la contre-révolution et comme une
bouleversements complets qui marqueront durablement promesse d’émancipation. Or, l’introduction du Code civil,
leur histoire et leur mémoire. la francisation des élites et des pratiques administratives,
les dispositions économiques provoquent progressivement
S’écartant des aspects strictement militaires, cet ouvrage l’hostilité puis les résistances.
entend faire le point sur les nombreuses et diverses
conséquences de cette extension territoriale de l’Empire De l’unité à l’uniformité, de la volonté de civiliser à celle de
et sur le projet politique auquel elle a donné corps. Mais domestiquer les peuples, le rêve impérial se transforme
est-ce bien un réel projet ou un rêve impérial ? C’est a en entreprise de domination des peuples au bénéfice des
posteriori, dans les divers écrits et confessions de Sainte- intérêts français, les populations des États sous contrôle
Hélène, que, vaincu, Napoléon Bonaparte cherchera à subissant les mêmes formes de pouvoir et de contraintes
conférer une unité à son aventure européenne en revendi- que celles qui pèsent, en France, sur les catégories
quant un héritage des Lumières et une continuité avec la populaires. Progressivement, les agents chargés de
Révolution dont il semble pourtant se détacher en France. mettre en place le nouvel ordre cristallisent l’hostilité des
Durant les Cent-Jours, il revient sur cette idée de continuité élites et des populations qui se lèvent contre ce nouvel
et rappelle que son objectif était d’organiser « un grand impérialisme français. Les insurrections espagnoles,
système européen, […] conforme à l’esprit du siècle et calabraise et tyrolienne témoignent de cette hostilité qui se
favorable aux progrès de la civilisation ». traduit aussi, chez certains intellectuels, par une invention
des traditions, un passé censé conférer aux nations des
C’est sans doute, comme y invitent les auteurs, en fondements solides pour résister à l’Empire français.
décentrant le regard porté sur les territoires européens
et en croisant les échelles d’analyse qu’il est possible de L’antipathie pour la France impérialiste née de la Révolution
revisiter ce projet impérial dont le caractère pragmatique est-elle pour autant à l’origine de l’éveil des nationalités ?
ne doit pas être minoré. Entre système fédératif et Empire- Il faut être prudent face à ces oppositions hétérogènes
nation, une logique de construction territoriale semble dues tout autant aux mesures fiscales et militaires qu’aux
en effet particulièrement délicate à trouver. Ce projet est attachements séculaires à l’Église ou aux dynasties
largement appuyé sur l’armée et l’administration issue des traditionnelles. Les questions restent encore nombreuses
transformations révolutionnaires. Au-delà de la politique de sur la réception en France et en Europe d’un régime qui
modernisation des voies de communication, qui renforce se prétend héritier de la Révolution, sur la construction
la mobilité des informations, des hommes et des produits, des identités individuelles ou nationales à l’œuvre dans les
l’entreprise de statistique départementale ou la mobilisa- processus de refus ou d’adhésion. Cet ouvrage entend
tion de la géographie participent d’une certaine modernité apporter un éclairage original sur ces aspects.
d’un État dont les serviteurs, répartis dans les différentes
parties d’un espace de plus en plus étendu, cherchent à Jean-Luc Chappey
unifier les territoires et à détruire les particularismes. Érigée Bernard Gainot
en capitale européenne, foyer de la civilisation, Paris devait
favoriser la fusion des élites et des peuples européens,
pour former les différentes parties d’un même corps.
L’EMPIRE EN 1805
Territoire,
territoires
À partir du moment où la présence permanente des armées
françaises se manifestait bien au-delà des frontières naturelles
qui avaient matérialisé les limites de la République jusqu’en
1802, un changement de régime devait correspondre
à ce changement d’échelle. La notion d’Empire renvoie,
à l’époque, à des réalités extrêmement diversifiées, reposant
sur trois caractéristiques majeures : l’espace administré,
le gouvernement des populations et la domination. Tandis que
les républiques sont considérées comme le régime adapté
à un territoire peu étendu et à des populations socialement
et culturellement homogènes − ce qui favorise la participation
démocratique −, l’Empire regroupe des populations
hétérogènes par les mœurs et par l’histoire, sur un vaste
territoire dont l’unité réside principalement dans la soumission
commune à une instance unificatrice. La recomposition de la
notion de souveraineté induite par l’expérience révolutionnaire
française doit en outre s’accommoder de la tradition impériale
romaine qui combine la conquête militaire (l’imperium)
et l’intégration citoyenne. L’universalité de la construction
impériale tient aussi au fait de sa globalisation effective par
les territoires coloniaux demeurés dans l’orbite métropolitaine
après 1804, et par la rivalité permanente avec l’Empire
britannique, les deux impérialismes rivaux se structurant
parallèlement par la lutte implacable qu’ils se livrent.
De la « Grande Nation » le cadre d’un processus de marche des dirigeants français, le vecteur essentiel
à l’Empire peuples vers le progrès universel, d’un de cette « régénération » des peuples
À l’époque du Directoire (1795-1799), il rôle de libération par le renversement était l’armée, et la victoire était le signe
était fréquent dans les discours de dési- des tyrannies féodales et cléricales, et de la justesse de la cause. Les différents
gner la France républicaine comme la d’un rôle pédagogique en apportant le agents de la diplomatie républicaine
« Grande Nation ». Héritière du messia- cadre national comme modèle de réfé- envoyés dans les territoires occupés
nisme révolutionnaire de 1792, la pre- rence pour l’apprentissage d’institutions avaient pour « mission », aux côtés des
mière République se voit investie, dans politiques représentatives. Pour les militaires et des patriotes locaux, d’ac-
compagner le processus de civilisation
des peuples, qui justifiait les spoliations
L’EUROPE APRÈS LA PAIX D’AMIENS (25 MARS 1802)
des œuvres d’art, des bibliothèques et
des collections. Le Directoire considé-
SUÈDE rait en effet qu’il était normal que les
Mer
Mer Baltique peuples « libérés » manifestent leur gra-
du DANEMARK
Nord titude envers leurs « libérateurs » en ver-
RUSSIE sant des contributions de tous ordres,
Hanovre/ (Suède)
matérielles (transferts de richesses) et
Oldenbourg symboliques (allégeances politiques et
ROYAUME-
UNI
Rép. PRUSSE diplomatiques).
batave
Dès le Consulat (1799-1804), les dimen-
OCÉA N
TERRITOIRES
sions politique (les institutions représen-
Source : P. G. Dwyer, Napoleon and Europe, Longmann, 2001.
01-96-AtlasEmpireNapoleon-Maq3-NE
Pages 12-13 :2022-BAT3.indd 12la
L’Europe après paix d’Amiens (25 mars 1802) 14/01/2022 08:56
TERRITOIRE, TERRITOIRES • 13
CON DU RH
médiateur, de la République italienne OCÉAN SAXE Terr. allemands
FÉD IN
en dehors
recomposée. À Bruxelles comme à FRANCE de la Confédération
ÉRA
ATL ANTIQUE
Bayreuth
Milan, la déjà longue expérience d’in-
TIO
Confédération
tégration dans l’empire des Habsbourg helvétique Salzbourg (2)
N
Neuchâtel AUTRICHE
Le grand Empire
en 1811
Face aux difficultés rencontrées par les napoléonides,
la centralisation s’impose. Il s’agit notamment de renforcer
le blocus continental économique et d’étendre la conscription.
Le modèle administratif départemental se généralise,
tandis que Paris aspire à devenir la grande capitale financière
et religieuse de l’Europe.
un échelon intermédiaire entre les pré- l’Empire russe en champion de la chré- GIRONDE LOT-ET-
fets et Napoléon apparaît avec le lieu- tienté. Peut-il y avoir deux empires en GARONN
tenant général. Ce type d’administra- Europe continentale ? LANDES Agen E
tion est étendu aux territoires placés Maintenir l’unité de cet ensemble Mont-de-Marsan Mo
GERS
sous régime militaire : les marches conduit Napoléon à juxtaposer
Auch
slaves des Provinces illyriennes, la des formes de légitimité qui ne se BASSES- Pau H
Catalogne, la Toscane. Le gouverneur recoupent qu’imparfaitement, au PYRÉNÉES Tarbes GA
militaire est relayé par des intendants à risque de la déstabilisation, sous le HAUTES-
PYRÉNÉES
la tête de provinces, qui occupent les feu des critiques des contemporains :
mêmes fonctions que les préfets. providentielle, personnelle, consti-
Restent les bribes de l’ancien sys- tutionnelle, populaire, chrétienne,
tème fédéral, au centre de l’Europe : le monarchique et militaire. Ce cumul
duché de Varsovie, organisé le 22 juil- des références permet d’accroître les
let 1807, le grand-duché de Berg et le prérogatives de Napoléon, quitte à tra-
royaume de Westphalie, qui sont voués hir son statut incertain de « fils de la 100 km
à servir de modèles pour les pays de la Révolution ».
Territoires constituant
EMS- l’Empire français
M e r d u N o r d ORIENTAL Hambourg
BOUCHES- Départements français
Groningue Aurich BOUCHES- DE-L’ELBE
DU-WESER
Leeuwarden Brême Ancienne République batave
EMS-
FRISE OCCIDENTAL
Départements réunis
EMS-
SUPÉRIEUR Rhénanie
Zwolle
Amsterdam BOUCHES- Départements piémontais
ZUYDERZEE YSSEL- DE-L’YSSEL Osnabrück
Départements ligures
La Haye SUPÉRIEUR Münster
Arnhem Départements toscans
BOUCHES-DE-LA-MEUSE LIPPE
Bois-
BOUCHES-DE-L’ESCAUT le-Duc Départements romains
Middelbourg DEUX- BOUCHES-
NÈTHES DU-RHIN Provinces illyriennes
Bruges ESCAUT Anvers MEUSE- Frontières de l’Empire français
ROER
INFÉRIEURE
LYS Gand DYLE Limites de département
Maastricht Aix-
Bruxelles la-Chapelle
Lille Liège
JEMMAPES OURTHE
PAS-DE-CALAIS Mons Coblence
Dans la péninsule italienne rêve unitaire du Triennio, voulaient en une entité politique unique, potentielle
La géopolitique de l’Italie napoléo- découdre avec les monarchies tradi- rivale de la France. On trouve plusieurs
nienne est un héritage du Triennio jaco- tionnelles, les Bourbons de Naples et la départements et deux royaumes. Les
bin (1796-1799). La deuxième cam- papauté. Ces dernières deviennent des modifications de frontières ont surtout
pagne d’Italie et la victoire de Marengo alliées contraintes de la France. concerné le royaume d’Italie.
(juin 1800) installent de nouveau Il en va tout autrement après le traité
Bonaparte en arbitre des destinées de Presbourg de 1806 ; Ferdinand de En territoire polonais
italiennes. Une deuxième République Naples ayant rejoint la troisième coali- La Pologne historique a été démem-
cisalpine se reconstitue dans le nord, tion, les Bourbons s’exilent en Sicile, brée par la Russie, la Prusse et l’Au-
autour de Milan. Elle se transforme en sous protection anglaise. Le royaume triche. C’est après Iéna (octobre 1806)
République italienne en janvier 1802, d’Italie récupère la Vénétie. En 1808, que Napoléon eut l’intuition de jouer
après la consulte de Lyon qui avait les réticences du pape Pie VII à appli- la carte polonaise contre la Prusse.
appelé les principaux protagonistes à quer le blocus continental entraînent Il appelle la population polonaise en
un débat institutionnel, puis en royaume l’annexion des territoires pontificaux. territoire prussien à se soulever, en
d’Italie en mai 1804. Bonaparte freine L’Italie est alors théoriquement uni- novembre 1806. Mais il n’a aucun
les ardeurs de certains officiers français fiée, mais Napoléon maintient des plan établi, ni sur l’entité politique à
et des patriotes italiens, qui, fidèles au souverainetés distinctes, car il craint construire ni sur son étendue.
AGOGNA
da
ALTO PADO
dans la diplomatie de la seconde République
MINCIO TRONTO
ia
Pavie Crémone Pô
Source : S. Jarry, Jacobinisme et frontière
Pô n BASSA PADO
Parme Pa Adriatique
Source : F. de Dainville, J. Tulard,
Reggio Modène
Ravenne
français, Droz, Genève, 1973.
Atlas administratif de l’Empire
PANARO Bologne
Forli
Se c c hia
o
RENO
Ren
CROSTOLO
Gênes RUBICONE Mer
Méditerranée
La Spezia
Mer Li gu r i en n e Florence 50 km 100 km
Elbe
Le duché de Varsovie est placé sous HANOVRE
DE Berlin
la souveraineté nominale du roi de WESTPHALIE
W
Saxe, ce qui permet son intégration Salm e
Lippe- ser
à la Confédération du Rhin. Le 22 juil- Em Detmold
s
let 1807, un statut constitutionnel de Duché
d’Anhalt
89 articles est octroyé. Le servage est ROYAUME
Grand- Waldeck DE
aboli mais la noblesse conserve ses duché SAXE
privilèges ; la liberté religieuse est éta- de Berg
Grand-d
Duchés
blie mais le catholicisme reste religion de Saxe
d’État. Le pays est divisé en six dépar-
uché de
Duché Isenburg
tements. Le Code civil est introduit. de Nassau Gd-duché
Grand-duché de
La réalité du pouvoir appartient au
Hesse
de Wurtzbourg Ma
in
résident français bien plus qu’à un Francfort EMPIRE
D’AUTRICHE
roi lointain ou à une diète (Sénat et
EMPIRE Neustadt
Chambre des nonces) sans réelle auto- FRANÇAIS
Rhin
ROYAUME
contingent de soldats et contributions DE
de
WURTEMBERG Danube
hé
ROYAUME
Gra
Varsovie
Kalisz Le royaume de Westphalie est formé L’unification du marché, par la sup-
Radom Lublin en juillet 1807 à partir de territoires ori- pression des péages et la monnaie
ginellement encore plus hétéroclites, unique, doit parachever cette tentative
EMPIRE
D’AUTRICHE avec Jérôme Bonaparte pour roi. Il est de génération assistée d’une nation
200 kkm
Ville libre conçu comme une marche militaire westphalienne qui se heurte à de fortes
Grand-duché en 1807 de Dantzig contre la Prusse ; pourvoyeur de sol- réticences de la noblesse et du petit
Agrandissement de 1809 (1807-1814)
dats, il verse des indemnités de guerre peuple.
Le contrôle des
communications
La maîtrise des voies de communication est essentielle pour garantir le contrôle administratif
des populations et l’unification économique des territoires. En dépit d’importantes découvertes,
les innovations dans les transports restent rares et les techniques traditionnelles. Néanmoins,
grâce à une administration efficace, un effort considérable est accompli pour améliorer
les infrastructures et accélérer les relations entre les différents points de l’Empire.
Le service aux armées le service des postes, s’appuyant sur les le territoire de l’Empire, et entretiennent
Essentielles pour la transmission des nombreux relais qui assurent l’entretien plus de 16 000 chevaux.
décisions du pouvoir central, les routes des chevaux nécessaires. Pour pallier les problèmes liés à la
ont également un rôle majeur dans Dès 1805, une organisation d’ache- lenteur et à l’espionnage, le directeur
l’organisation des armées. Alors que le minement postal strictement militaire, général des Postes, Lavalette, organise
temps de parcours a été divisé par deux jusqu’alors déficient, est mise en place. un système d’estafettes qui assure la
entre 1800 et 1815, cartographes et Le monopole des maîtres de poste est confidentialité des dépêches de cabi-
géographes sont mis à contribution pour rétabli au profit de la Société des mes- net. Chaque postillon transmet à la
fournir à l’état-major des cartes pré- sageries impériales, qui s’occupe en station suivante un livret où le nom de
cises. Le réseau dense des villes étapes priorité de la correspondance militaire chaque poste, l’heure de son arrivée
situées sur les grands axes doit pou- et officielle. Les particuliers peuvent et de son départ, sont inscrits. Ce ser-
voir accueillir un nombre important de progressivement profiter de ce ser- vice, plus rapide et plus fiable, permet
soldats. Pour garantir l’acheminement vice de malle. Au total, les maîtres de de recevoir en huit jours les lettres de
rapide des ordres, l’Empereur réorganise poste sont plus de 1 400, répartis sur Milan et en quinze celles de Naples.
vers
SAÔNE-ET -LOIRE concentre l’attention
et ordonne l’extension de la ligne de Moulins des autorités.
La Pacaudière Les ingénieurs des
Lille vers Bruxelles. En août 1803, ALLI ER
Charlieu Belmont Ponts et Chaussées
l’ordre est donné de créer un embran- St-Haon-
Source : P. Chambon, La Loire et l’Aigle. Les Foréziens face
sont chargés
le-Châtel
chement pour relier Lille à Boulogne Perreux RH ÔNE d’aménager les rives,
Roanne d’assurer la sécurité
et de construire deux machines télé- St-Symphorien- et d’améliorer la
Loire
Moscou
Borodino
Mer Mer
Baltique Vitebsk
du
Tilsit Kaunas Smolensk
Nord Königsberg
Dantzig Friedland Vilnius
Eylau
Stettin
PRUSSE Thorn E M P I R E R U S S E
Magdebourg
Berlin Poznan Varsovie
CONFÉDÉRATION En Italie et au Portugal
Boulogne Waterloo DU RHIN GRAND DUCHÉ
Leipzig DE VARSOVIE (août 1799-mars 1802)
Francfort Erfurt Iéna
Amiens Mayence Pause à Auxerre
Reims (1802-1803)
Paris Wurtzbourg
Brünn De Boulogne à Austerlitz
Le Mans Metz Ratisbonne Austerlitz
(avril 1803-début 1806)
OCÉAN Tours Orléans Auxerre Strasbourg Vienne Aspern
Dijon
Ulm Linz En Prusse et en Pologne
ATL ANTIQUE EMPIRE (septembre 1806-août 1807)
Bourges SUISSE D ’A U T R I C H E Pause à Paris
Limoges
Bordeaux Lyon Chambéry Brescia (été 1807-octobre 1808)
Milan Vicence En Espagne et en Autriche
EMPIRE FRANÇAIS
Bayonne Turin Vérone (octobre 1808-novembre 1809)
Toulouse Marengo ROYAUME
Burgos Pause à Paris
Vitoria D’ITALIE (décembre 1809-avril 1812)
Campagne de Russie
Salamanque
(avril 1812-avril 1814)
Madrid Pause à Auxerre, en demi-
Mer solde (avril 1814-mars 1815,
Méditerranée première Restauration)
ROYAUME
D’ESPAGNE À Waterloo
(avril-juillet 1815, les Cent-Jours)
Retraite à Auxerre
Source : Les cahiers du capitaine Coignet, Arléa, Paris, 2001. 250 km (à partir de 1815)
Turin
Bordeaux Valence
La priorité donnée aux grands tra- 10 Gênes,
24 8 Florence
vaux et à l’aménagement des routes 11 Cahors
qui relient à Paris justifie sans doute Mont-de-Marsan Agen
23
Millau
8
la moindre attention portée aux routes Draguignan
Auch Aix-en-Provence Nice
Bayonne Toulouse
intérieures (à l’exception notable de la Tarbes Marseille 9
Vendée). En 1811, la plupart des routes Foix Narbonne Toulon
de deuxième niveau sont rétrogradées Madrid
Perpignan
Mer Méditerranée
et, de ce fait, leur entretien est progres- Barcelone
200 km
sivement délaissé.
Dominique Vivant Denon couronnement de l’Empereur, faire assure ne pas « dépouiller les villes de
(1747-1825) quelques incursions en Autriche et en tous les tableaux qu’elles possèdent »,
Nommé directeur du Louvre par Allemagne, souvent comme espion. ses visites suscitent souvent des
Bonaparte en novembre 1801, Denon Pages 20-21
Il visite systématiquement : Les routes
les galeries, impériales en 1811
mécontentements. Lors de sa mission
est déjà un voyageur averti. Son pre- couvents et bibliothèques des villes en Italie en 1811, il lance de grandes
mier périple le voit successivement conquises et fait répertorier les pièces entreprises archéologiques autant pour
ordonner les cérémonies funèbres à expédier à Paris pour rejoindre trouver de nouveaux trésors que pour
en l’honneur de Desaix au Grand- les collections du musée Napoléon fournir du travail à la « classe pauvre et
Saint
-Bernard, assister à Milan au ou décorer les palais impériaux. S’il oisive » de Rome.
Cassel Pise o
Mer Ligurienne Arn
re
HESSE Weimar
Volterra Pérouse Assise
E M PIRE Francfort
Mer
FRANÇ AIS M é dite rra né e Foligno
Bamberg EMP IRE D ’AUTR I C HE Spolète
Wurtzbourg ROYAUME
DE BAVIÈRE Vienne Nepi
Paris Munich Mer
Corse Tyrrhénienne Rome
Source : B. Savoy, Patrimoine annexé. Les biens culturels saisis par la France 200 km Novembre
en Allemagne autour de 1800, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2003. 100 km
L’organisation institutionnelle
« Le pouvoir vient d’en haut, la confiance vient d’en bas. » Les rédacteurs de la Constitution
de l’an VIII résumaient ainsi l’esprit de la république plébiscitaire. Le 19 brumaire an VIII,
une commission législative réduite est chargée de rédiger une nouvelle Constitution. Tout au long
des quinze ans de régime napoléonien, elle connaîtra des aménagements, le plus important
étant l’établissement de l’Empire, mais ses principes resteront intangibles.
Un État très centralisé législative est le Conseil d’État, qui (Sieyès, Ducos) sont rapidement écar-
Les artisans du coup d’État, derrière prépare les textes de loi et les règle- tées, le texte constitutionnel consacre
Sieyès (les révisionnistes), avaient ments administratifs. Il est également l’installation d’un régime personnel,
prévu un dispositif législatif com- un tribunal du contentieux administratif voulu par le Premier consul, intervenu
plexe dont le but était de laisser le et un recours pour les abus de pou- personnellement pour en simplifier les
pouvoir exécutif maître de la déci- voir. Bonaparte nomme les membres dispositions.
sion. Le Tribunat débat sur les textes des deux assemblées qui contrôlent le Le Premier consul nomme et révoque
de loi qui lui sont proposés, mais ne pouvoir législatif, les conseillers d’État les hauts fonctionnaires, désigne les
vote pas. Le Corps législatif approuve, et une première liste de sénateurs, magistrats (à l’exception des juges de
ou non, mais ne débat pas. Le Sénat à charge pour eux de coopter leurs paix et des juges de cassation). Il mène
juge de la conformité des textes avec collègues. la politique extérieure (avec approba-
la Constitution et autorise, au besoin, Loin de se limiter au renforcement du tion du Corps législatif). Les ministres
Bonaparte à en rectifier la formula- pouvoir exécutif voulu par les révi- ne sont que des agents d’exécution.
tion. Le véritable pouvoir en matière sionnistes, dont les figures majeures
De la représentation
L’ORGANISATION GÉNÉRALE DE L’EMPIRE (CONSTITUTION DE L’AN XII, 18 MAI 1804) à l’expertise
Pièce maîtresse du dispositif, le
Pouvoir exécutif Pouvoir législatif Conseil d’État symbolise l’effacement
Sénat progressif du régime représentatif au
Décide de la constitutionnalité des lois. bénéfice du pouvoir des experts. Au
Conseil d’État À partir de 1802, les sénateurs service de l’exécutif, il doit préparer
Rédige les lois. sont choisis par le Premier consul.
Empereur Membres choisis À partir de 1804, les princes les décrets et les projets de loi et légi-
par l’Empereur. et les grands dignitaires de l’Empereur timer les décisions devant les assem-
sont membres d’office.
Environ 140 sénateurs en 1814. blées. Celles-ci sont dédoublées entre
un Tribunat de 100 membres chargés,
sans pouvoir d’amendement, de l’exa-
Ministres Tribunat Corps législatif men des projets de loi (les velléités
Choisis par l’Empereur Discute les lois. Vote les lois.
et responsables 100 membres 300 membres de résistance de certains d’entre eux
devant lui. choisis par le Sénat choisis par le Sénat se sont soldées par son épuration en
dans la liste nationale. dans la liste nationale.
1802) et le Corps législatif, comptant
Aboli en 1807.
300 membres privés de tout pouvoir de
Collèges électoraux délibération, qui adopte ou rejette les
Préfets Sous-préfets
Processus électoral
Les notables nationale de six mille notables, produit C’est le préfet qui décide, en dernière
Le projet d’une recomposition des de cooptations à partir des listes dres- instance. Au départ, le régime consu-
élites dirigeantes autour du groupe des sées aux divers échelons administra- laire avait accordé le choix des notabi-
notables, qui se substituerait à celui de tifs, communal, puis départemental. lités communales aux citoyens actifs.
la noblesse, prend forme avec les phy- Ces listes de notables, qui dessinent Il n’en reste plus rien en 1812 lorsque,
siocrates, entre 1750 et 1770. Il s’agit les contours du corps politique, au terme d’une alchimie mêlant les
d’asseoir le pouvoir politique non plus recoupent les listes « des six cents niveaux politique et social, le préfet
sur le privilège mais sur la propriété ; contribuables les plus imposés » et établit une liste de synthèse dite « des
les notables sont les propriétaires, « des soixante propriétaires les plus personnes les plus marquantes du
quel que soit par ailleurs leur milieu distingués et par leur fortune et par département », ou « grands notables ».
d’origine, noble ou roturier. La nature leurs vertus publiques », constituées au
du pouvoir politique devait également niveau départemental à partir de 1805. La nouvelle noblesse
évoluer à travers l’instauration d’un Ainsi, la notabilité napoléonienne En dépit de la disparition de nom-
système représentatif qui associe- n’est pas mécaniquement définie par breuses fortunes dans les différents
rait ces propriétaires à la gestion des l’activité économique et le niveau de départements, le portrait de groupe
affaires du pays. Une ébauche de ce richesse. La « vertu publique », clé de la des notables fait apparaître une perma-
système apparaît en 1787 avec l’As- confiance, est fonction de la réputation, nence des anciens nobles à la tête des
semblée des notables. Concrètement, celle-ci tenant essentiellement au rôle élites promues par le régime. Obsédé
c’est bien ce programme de gouverne- que tel individu a pu jouer dans les évé- par la crainte que son œuvre civile
ment des propriétaires que les brumai- nements de la Révolution. Un riche pro- ne s’inscrive pas dans la durée, pro-
riens remettent au goût du jour : l’ad- priétaire peut être écarté de la notabilité fondément marqué par les valeurs de
mission aux assemblées législatives parce qu’il a des convictions, généra- son milieu d’origine, la petite noblesse
est soumise à l’inscription sur une liste lement républicaines, trop marquées. militaire, dont la fonction est le service
20
150 Bonneville
Source : N. Petiteau, Élites et mobilités : la noblesse d’Empire
30
au XIXe siècle (1808-1814), La Boutique de l’Histoire, 1997.
Arv
50 300
Annecy
e
Chambéry
Rhône
MO NT - BL AN C 48,8
La Tour-
du-Pin 22-25,3
Vienne I S È R E
Moutiers 17-21,9
14-16,9
re
Ar
Isè
11-13,9
c
St-Marcellin St-Jean
Grenoble 8-10,9
RHMC, 1970.
5-7,9
2-4,9
25 km données manquantes 200 km
Les élections
Le bonapartisme est défini comme un régime plébiscitaire, du fait du recours au suffrage universel
masculin pour chaque tournant majeur du régime (1800, 1802, 1804, 1815). Si les taux
d’approbation sont souvent massifs, les chiffres sont parfois manipulés, comme en 1800
par Lucien Bonaparte. Les citoyens continuent à se réunir en assemblées primaires cantonales,
avec un taux de participation de 20 à 25 % et des enjeux purement locaux.
Une « comédie électorale » ? devenue pour autant une dictature. constituent le véritable corps électoral.
Il serait abusif de réduire les consulta- À la base, le corps électoral est large ; À partir de 1802, l’assemblée primaire
tions électorales sous le Consulat et on peut parler de suffrage universel des citoyens, réunie au chef-lieu du
l’Empire à la fraude et au vote auto- masculin. L’ensemble des citoyens fut canton, choisit les membres des col-
matique. Certes, le système représen- consulté lors des quatre plébiscites du lèges électoraux, d’arrondissement,
tatif fut liquidé avec la Constitution régime et fut appelé à choisir les listes puis de département. Mais les assem-
de l’an III, mais la France n’est pas de notabilités au niveau communal qui blées primaires et les collèges électo-
raux ne sont pas convoqués simultané-
LA PARTICIPATION AUX ASSEMBLÉES PRIMAIRES DE CANTON (1803-1812) ment, le régime craignant, par-dessus
Participation
tout, les troubles qu’avait connus le
(en %) NB : 1805 et 1806 ne sont représentées par aucun département. Directoire par suite des majorités poli-
Inférieure
Orientales
Meuse-
tiques aléatoires.
Pyrénées-
Sèvres
Sarre
Moselle
Deux-
Rhin-et-
Moselle
Marne
Rhin-et-
Var
Sarre
50
Meuse-Inférieure
Marengo
Pyrénées-Orientales
Stura
Deux-Sèvres
Bouches-de-l’Yssel
Escaut
Aube
Stura
Var
fonctionnaires).
Escaut
Marne
Dyle
20
Vendée
Lys
Seine
Rhin-et-Moselle
Deux-Sèvres
Marengo
Sésia
80
Pyrénées-Orientales
Meuse-Inférieure
Marengo
Dyle
Yonne
24,6
Nord
Nord
Sésia
23,6
22,0 22,6 23,1
Deux-Sèvres
70
Dyle
21,2
Marne
20
Landes
Vendée
60
Lys
Var
15,8
Lys
50 15
40 10
30 5
20 0
C d
ar rd
M e
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u-R al
es
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Se
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-N
os
10
Y
fé
-du
tes
he
pe
Cô
en
uc
Al
0
ar
Bo
Ch
1804 1805 1806 1807 1808 1809 1810 1811 1812 Source : J.-Y. Coppolani, Les Élections en France à
Source : M. Crook, J. Dunne, L’apport des données électorales à la popularité du régime napoléonien, mars 2007. l’époque napoléonienne, Éditions Albatros, Paris, 1980.
LES PROFESSIONS DES ÉLECTEURS DANS LES COLLÈGES ÉLECTORAUX DE SIX DÉPARTEMENTS
Source : J.-Y. Coppolani, Les élections en France à l’époque napoléonienne, Éditions Albatros, Paris, 1980.
6,4 0,8
7,1 9,7
8,8
4,4
1,1
1,3
0,2
9,2 6,7 12,5
8,8
17,6
33,2 0,5
13,7 22,3
10,9
9,7 14,9
22,3 11,1 7,6 21,8
6,3
4,0 15,0 8,5
des candidats, pour « guider » le choix à tel point qu’on a pu le définir comme dans les mêmes formes qu’en 1800,
des sénateurs. « démocratie plébiscitaire ». Les résul- c’est-à-dire par inscription sur des
tats du plébiscite sur la Constitution de registres et non par un vote en assem-
Les plébiscites l’an VIII furent proclamés après que le blée, comme sous la Révolution. Le
Le plébiscite, ou « vote populaire » sur texte constitutionnel eut été promul- plébiscite de 1804 se prononçait
l’acceptation d’un texte constitutionnel, gué, et on sait qu’ils furent largement sur le rétablissement de l’Empire.
avait déjà été expérimenté en26-27
Pages 1793 : et « corrigés » des
Les professions par électeurs
le ministre les collèges L’approbation
de l’Intérieur
dans électoraux fut aussi massive que
en 1795. Le régime bonapartiste y a Lucien Bonaparte. lors des deux précédentes consul-
recours plus systématiquement en sol- Le plébiscite de 1802 portait sur l’ac- tations. L’Ouest et les grandes villes
licitant le suffrage universel masculin, ceptation du Consulat à vie. Il eut lieu restent toutefois rétifs.
Le vote sur la Constitution Le vote sur le Consulat à vie Le vote sur l’Empire héréditaire
(1800-an VIII) (1802-an X) (1804-an XII)
Taux de participation de 80 à 100 de 40 à 60 de 0 à 20 Source : M. Crook, J. Dunne, L’apport des données électorales
200 km (en %) de 60 à 80 de 20 à 40 à la popularité du régime napoléonien, mars 2007.
Le contrôle du territoire
Pour contrôler le territoire et les populations, Napoléon hérite des rouages du Directoire.
Il accentue la lutte contre le brigandage, s’appuyant sur une force militarisée et territorialisée :
la gendarmerie. La justice ordinaire est réorganisée et les professions juridiques se reconstituent.
Toutefois, des juridictions d’exception s’installent provisoirement dans les départements troublés.
La gendarmerie, une institution 26 légions territoriales (chaque légion militaire par l’origine et l’expérience
inexportable regroupe quatre compagnies, soit des hommes qui la composent, s’ex-
La gendarmerie nationale n’est pas une compagnie par département) et plique par son efficacité dans la lutte
une création consulaire. Le Directoire une légion d’élite. De 1802 à 1811, le contre les troubles localisés et son
en avait posé les fondements avec nombre de légions fut porté à 34, pour caractère de relais du système admi-
la loi du 28 germinal an VI (17 avril couvrir l’ensemble des départements nistratif et juridique de l’État moderne.
1798). Des aménagements importants de l’Empire. Des divisions furent en Le gendarme incarne auprès des com-
complétèrent celle-ci : une inspection outre organisées en Espagne, en Illyrie, munautés locales l’impersonnalité de
générale fut créée, sous la triple auto- dans le royaume de Naples, dans le la loi. Il offre une alternative au régime
rité des ministres de la Guerre, de la royaume d’Italie, en Wurtemberg et en seigneurial, encore appuyé dans de
Police générale et de la Justice, pour Bavière. nombreux pays européens par des
la surveillance de 2 500 brigades, soit Le choix d’une force publique mixte, polices locales, soldées par les féo-
15 000 gendarmes, réparties entre civile comme auxiliaire de justice, daux ou les oligarchies. Du moins est-
ce la théorie, le pandore s’étant bien
LA GENDARMERIE souvent substitué au sbire auprès des
populations locales.
Hambourg
Mer
Groningue La police, un rouage essentiel
du Nord
33
34 du régime
Chef de légion
La police fut érigée en ministère en jan-
Amsterdam Chef d’escadron
32 vier 1796. Le ministre de la Police peut
Capitaine requérir la force publique, notamment
17 1 N° de légion la gendarmerie, pour les arrestations,
16
Liège la lutte contre le vagabondage, les
Atlas administratif de l’Empire français,
Arras Bruxelles
25 Mayence transferts de prisonniers, les escortes
Source : F. de Dainville, J. Tulard,
Manche 15
18 de voitures, les atteintes à la sûreté des
Droz, Genève, 1973.
2 1
Caen Paris Metz personnes et des biens.
Nancy Avec Fouché, désigné en 1799, la
3 19
4 Alençon Troyes
Rennes 14
fonction prend une ampleur telle
qu’elle suscite méfiances et inquié-
Angers Tours Dijon Besançon
21 20
tudes jusqu’au plus haut niveau de
5 6 13
Moulins l’État, l’Empereur lui-même. Le minis-
Genève
OCÉA N
31 tère fut supprimé entre 1802 et 1804.
ATL ANT IQU E Lyon
12
La France était divisée en trois arron-
8 Turin
Grenoble 27 dissements de police : Nord et Ouest
Bordeaux Périgueux 28
11 22 Florence d’un côté, Midi de l’autre, avec un
7 Gênes
Rodez 23 arrondissement spécial pour Paris. À
24
29 la tête de chaque arrondissement, un
Toulouse Draguignan 30
Carcassonne conseiller d’État, auquel sont subor-
9 Marseille
10 26 données des directions générales.
Rome
Mer Ajaccio M er À côté du préfet, un commissaire géné-
Méditerranée
Tyr r h én i en n e ral, puis de simples commissaires dans
200 km
les villes. La tâche essentielle des
Mer
du Nord Hambourg Nombre de crimes et délits insérés
au bulletin de police du mois de janvier
Cour impériale 300
Amsterdam Cour d’assises
Cour de première
instance
250
Bruxelles
Source : F. de Dainville, J. Tulard,
Douai
Atlas administratif de l’Empire
Liège
Manche Amiens Assassinats
Trèves
Rouen
Caen 200
Metz
Paris
Nancy Vols
Rennes
Orléans Colmar
150
OCÉA N Poitiers
Riom 100
AT L ANT IQU E Lyon
Limoges Grenoble Alexandrie Attaques de
Turin particuliers
Bordeaux Évasions
Florence 50
Agen Gênes Incendies Attaques
Toulouse Nîmes par de courriers Fausse
malveillance et diligences monnaie
Montpellier Aix-en-Provence
Pau
0
Rome 1806 1807 1808 1809
Mer Ajaccio
M er Infanticides Parricides Empoisonnements
Méditerranée
Tyr r h én i en n e Source : T. Lentz, Nouvelle histoire du premier Empire,
200 km Fayard, Paris, 2007.
L’Empire d’outre-mer
Lors de la paix d’Amiens (1802), influencé par le lobby colonial et esclavagiste, Napoléon,
convaincu que le retour de la prospérité passe par le rétablissement de l’esclavage, juge qu’il faut
restaurer l’ancien ordre colonial. Cette tentative est anéantie, d’abord par l’insurrection des
populations de couleur de Saint-Domingue, victorieuse en 1804, puis par la marine britannique
qui fait tomber un à un les établissements français d’outre-mer en 1809 et 1810.
La « restauration coloniale » gouvernement tricéphale est installé : ce dernier dans la guerre renaissante
L’ancienne partie française de Saint- un capitaine général pour les affaires avec l’Angleterre.
Domingue devenue indépendante sous militaires, un préfet colonial pour les Dans l’océan Indien, le capitaine géné-
le nom de Haïti (1804), il ne reste plus affaires civiles, un commissaire pour ral Decaen, installé à l’île de France,
comme colonies que la Guadeloupe, la justice. L’esclavage est maintenu rétablit la tutelle métropolitaine et redé-
la Martinique, la partie orientale de en Martinique, rétabli par la suite à la finit l’ordre colonial aux Mascareignes.
Saint-Domingue, la Guyane et les Guadeloupe et en Guyane ; logique- Esclavagistes et polygénistes. Plutôt
Mascareignes (île de France et Réunion). ment, la traite négrière est aussi réta- silencieux sous le Directoire, les théori-
Si le transfert de souveraineté s’effectue blie. Une législation raciale complète le ciens de la hiérarchie naturelle et intan-
sans gros problèmes en Martinique, les régime juridique : des dispositions par- gible des races humaines refont surface
Anglais ayant préservé tout au long de ticulières interdisent l’entrée des popu- avec force sous le Consulat et l’Empire.
leur occupation le régime juridique de lations de couleur en métropole, ainsi Derrière un Louis-Narcisse Baudry des
l’esclavage, les choses évoluent tragi- que les mariages mixtes. Lozières, auteur des Égarements du
quement à la Guadeloupe. Les autorités Les difficultés militaires, la montée nigrophilisme (1803), ils soutiennent
françaises doivent affronter une rébellion des tensions avec l’Angleterre, auront l’idée de l’infériorité de la race noire,
alimentée tant par l’humiliation des offi- eu raison de l’autre volet du grand réactualisant de vieux stéréotypes issus
ciers de couleur révoqués que par la « rêve colonial » : la souveraineté sur la de la « théorie des climats », légitimant
révolte des cultivateurs qui ne veulent Louisiane, qui aurait permis le retour ainsi les discours en faveur de l’escla-
pas revenir à la condition servile. La de la France tout au long de la vallée vage. Défendant au contraire la possi-
répression est très dure. du Mississippi. Retour qui ne dura que bilité de perfectibilité chez les popula-
Le régime des colonies découle de la deux mois, entre la rétrocession de la tions africaines, Henri Grégoire dans
loi du 20 mai 1802 ; les territoires sont colonie par l’Espagne (mars 1803) et sa son De la littérature des nègres (1807)
placés en dehors de la Constitution, vente au gouvernement des États-Unis prend courageusement position contre
à la discrétion du gouvernement. Un (mai 1803), pour prix de la neutralité de ces thèses outrancières.
Les leçons d’un échec France en brèche sur le terrain où cette à toutes les garnisons françaises de
À la fin de 1810, il n’y a plus de colo- dernière s’était placée dans la décen- se replier sur la capitale, qui est sou-
nies françaises qu’en Insulinde, les nie révolutionnaire, celui de l’appel à mise à un sévère embargo britannique
Français y ayant pris le relais des la libération des peuples. À l’excep- et bientôt assiégée par les troupes de
Hollandais en 1810. Batavia Pages 30-31tion
reste : La chute dede
de l’Ile la France
colonie française de Saint-Domingue
et de quelques Sanchez Ramirez (janvier 1809).
(7 novembre 1808-7 juillet 1809)
nominalement française jusqu’en sep- Petites Antilles, l’Angleterre rétrocède à Le 27 juin 1809, le commandant
tembre 1811. La perte des colonies la France toutes ses possessions colo- anglais Carmichael débarque avec
n’est pas seulement une conséquence niales au congrès de Vienne. Mais, sur- 1 800 hommes près de Santo Domingo.
de l’absolue maîtrise des mers par la tout, l’abolition de la traite négrière fait Le 7 juillet 1809, la garnison française
Navy britannique. En 1794-1795, c’est entrer le monde colonial dans une nou- capitule.
en faisant appel aux « nègres guer- velle étape, qui préfigure la deuxième Entre-temps, les Portugais du Brésil,
riers » que les commissaires et les abolition de l’esclavage. En dépit d’un avec lesquels existait un très vieux
généraux révolutionnaires avaient pu large essor de la contrebande négrière, contentieux sur la délimitation de la
résister victorieusement aux Anglais. il devient beaucoup plus difficile de frontière avec la Guyane, le long du
En 1808-1810, le climat international renouveler la main-d’œuvre. fleuve Oyapock, débarquent un corps
est en train de changer ; la longue lutte Le ministre de la Marine et des colonies expéditionnaire, avec le soutien de la
des abolitionnistes anglais a conduit de la Restauration, Malouet, souhaitait flotte britannique (décembre 1808). Ils
en 1807 à l’abolition de la traite par la en 1814 le retour à la situation qui pré- appellent les Noirs des plantations à se
Grande-Bretagne. Désormais, la coali- valait antérieurement à la Révolution. soulever pour obtenir la liberté géné-
tion contre l’empire napoléonien bat la Ce rêve est devenu irréalisable. rale, ce qui désorganise entièrement
les lignes de défense, hâtivement pré-
L’ADMINISTRATION Comment finit un empire parées par le gouverneur de Cayenne,
COLONIALE (1802-1810) Le blocus anglais se durcit à partir Victor Hugues. Ce dernier capitule le
de 1806. Mais c’est surtout à partir 12 janvier 1809.
de mai 1808 et du déclenchement de Le 30 janvier 1809, c’est l’amiral
Capitaine général la guerre d’Espagne que les événe- anglais Cochrane qui s’empare de
Défense ments se précipitent. Une rébellion se la Martinique. Un an plus tard, la
Attributions militaires développe à Saint-Domingue, dans la Guadeloupe capitule à son tour.
région du Seibo. L’insurrection est diri- Dans l’océan Indien, la situation n’est
Préfet colonial gée par Juan Sanchez Ramirez, qui se guère meilleure pour la France. Les
Administration civile proclame général en chef de l’armée Anglais organisent le blocus des
Ordre public
espagnole au nom de Ferdinand VII Mascareignes : l’île de La Réunion est
(novembre 1808). Le capitaine général occupée en juillet 1810. Decaen orga-
Commissaire Commissaire Ferrand subit une déroute cuisante et nise la résistance à l’île de France,
ordonnateur de justice met fin à ses jours. parvient à mettre en échec une ten-
Finances Justice
Un autre foyer d’insurrection se déve- tative anglaise de débarquement à
NB : Les domaines d’attribution sont séparés, loppe à l’ouest, dans la région fronta- Grand-Port en août 1810, mais, aban-
néanmoins l’ordre ci-dessus reflète la hiérarchie lière de Haïti (Val d’Azua). Le nouveau donné à lui-même, il doit capituler le
des pouvoirs les uns par rapport aux autres. capitaine général, Barquier, demande 2 décembre suivant.
EN CONCLUSION
Territoire, territoires
L’expérience impériale est une
construction éminemment pragmatique,
réunissant une grande pluralité de
peuples, avec des adaptations locales
fortes qui justifient de composer avec
les acteurs locaux. Elle s’accompagne
d’un apprentissage de l’altérité, d’une
redéfinition des relations de l’individu
à l’État et d’une réflexion imposée sur
les fondements de la société civile.
Les dynamiques
démographiques
La période impériale n’est qu’une parenthèse dans des cycles
de longue durée. Sans les contrarier, ou mieux les inverser,
elle peut cependant les corriger ou les infléchir.
Ainsi, la France napoléonienne est-elle entrée, comme
l’ensemble de l’Europe occidentale, dans la transition
démographique ; recul de la mortalité, confirmé par les progrès
indéniables de la médecine, et ralentissement de la natalité,
notamment en France avec le relâchement de l’encadrement
clérical en matière de mentalités et de pratiques sexuelles.
Ce dernier phénomène est également accentué par la guerre
qui propulse les soldats aux quatre coins de l’Europe ;
ils diffuseront les méthodes contraceptives apprises auprès des
prostituées lors de leur retour au pays. En outre, le Code civil
motive la restriction des naissances au sein de la paysannerie
par le partage égal des héritages qui incite les chefs de famille
à ne pas trop morceler leur patrimoine. Malgré ces inflexions
démographiques, les conditions de vie évoluent peu, de même
que les mentalités. La famille reste le pivot de la société,
fort peu entamée par l’individualisme révolutionnaire.
Elle véhicule son lot de solidarités et d’inégalités. La décennie
révolutionnaire n’a guère changé la condition ouvrière ;
en détruisant le cadre corporatif, ce sont les dispositifs
protecteurs de la tradition qui ont été démantelés. Le retour de
la philanthropie n’est qu’un faible palliatif à la misère populaire.
La population en Europe
Pour des raisons autant militaires qu’économiques, la statistique s’impose au premier rang
des savoirs d’État et, dès 1806, se voit dotée de moyens supplémentaires que lui assure
l’administration centrale et départementale. Même si ce souci ne signifie pas que les enquêtes
et les états obtenus soient pleinement exploitables, les conquêtes napoléoniennes étendent
les enquêtes statistiques en Italie, en Hollande et en Allemagne.
Les recensements impériaux sorte que les départements « français » zones de fortes densités forment des
Le « dénombrement » de la popula- de l’Empire dépassent les 30 millions taches signalant les cuvettes (région
tion est organisé périodiquement, à d’habitants en 1811. lyonnaise, région napolitaine) et les
l’époque révolutionnaire, par tous les La France reste bien le pays le plus vallées (Rhénanie, vallées du Rhône et
régimes (1791, 1794, 1797). Le minis- peuplé d’Europe, confirmant une vita- du Pô).
tère de l’Intérieur donne une impulsion lité démographique dans laquelle on a L’équilibre est parfois au bord de la
par l’envoi de formulaires normalisés, pu voir la base de son expansion révo- rupture, lorsque la croissance démo-
à charge pour les administrations lutionnaire et impériale : importante graphique s’accentue. Des zones de
départementales de remplir les cadres. proportion de jeunes et réservoir de densité moyenne peuvent connaître
Cette entreprise resta lacunaire : elle se soldats. une surcharge génératrice de misère :
heurta à l’incompréhension des admi- Les autres pays européens sont iné- moyennes montagnes, ouest de
nistrateurs, aux déficiences des agents galement entrés dans cet « âge d’or la France, Calabre, campagnes de
communaux et au manque de temps, de la statistique ». Le premier dénom- l’Allemagne centrale. Les structures
le régime suivant remettant en chan- brement dans la République batave agraires renforcent les effets du chan-
tier avec des exigences nouvelles ce est entrepris en 1795 ; il estime la gement de régime démographique ; la
qui n’a pas pu être mené à bien par le population à un peu plus de 2 mil- pression sur les terres devient énorme
régime précédent. lions de Néerlandais. En 1815, ils sont dans les régions de grande propriété
La circulaire de Lucien Bonaparte du estimés à un peu plus de 2,2 millions (Pouilles, Sicile, centre de la France)
16 mai 1800 est conforme aux dénom- d’habitants, tandis que les anciens comme dans les régions de morcel-
brements de ses devanciers, faisant départements belges en comptent lement extrême (vallées allemandes,
cette fois reposer la tâche sur les pré- 3,5 millions (1,5 pour la Wallonie et sud du Massif central, Apennins
fets. Le dénombrement de 1801 se 2 pour la Flandre). ligures). Ce sont des régions de forte
heurte donc aux mêmes difficultés Les territoires italiens, comme les terri- émigration, de misère et de banditisme
et se contente souvent de reprendre toires allemands, appartiennent égale- chronique.
les registres antérieurs, de telle ment à « l’Europe pleine ». L’Allemagne Vers l’est de l’Europe, le régime démo-
sorte que la population française est compte environ 18 millions d’habitants graphique est traditionnel (une forte
sous-estimée. en 1800 (dans le cadre des frontières natalité combinée à une très forte
Chaptal va mener en 1805 une entre- actuelles), ce qui est aussi approxima- mortalité), tout comme les structures
prise beaucoup plus fiable, demandant tivement la population de l’Italie. Mais agraires (prédominance de la grande
à chaque commune d’enregistrer tous les entreprises de dénombrement sont propriété). Les densités sont faibles ;
les citoyens résidents, qu’ils soient variables d’un État à un autre. ce sont souvent des terres de coloni-
ou non présents lors des opérations. sation pour les populations faméliques
Cet enregistrement fait ensuite l’ob- Des contrastes qui viennent de l’Ouest.
jet d’un traitement par le Bureau de démographiques Les individus jugés dangereux sont
la statistique, dont le mathématicien L’analyse des résultats des dénombre- fichés par les autorités. À l’inverse,
genevois spécialiste des statistiques ments, département par département, une statistique personnelle s’attache
financières, Emmanuel Duvillard, est le fait apparaître des réalités contrastées. à recenser les personnalités mar-
véritable maître d’œuvre. La population Les très fortes densités de l’Europe du quantes d’un département, la carrière
des départements français est alors Nord-Ouest (des moyennes de plus de des enfants ou leur itinéraire politique
estimée en 1806 autour de 29,5 mil- 160 habitants au kilomètre carré dans pendant la Révolution.
lions d’habitants, soit une croissance les Flandres ou les provinces bataves) Des centaines de tableaux livrent ainsi
moyenne de 1 % par an. La croissance se prolongent dans les départements un condensé de savoir sur les hommes
double ensuite, entre 1806 et 1811, de du nord de la France. Ailleurs, les à surveiller ou, à l’opposé, à rallier.
Mer Deux-
du Nord Densité de population
Escaut Nèthes Meuse- Roer (en hab./km2)
Lys Inférieure
Dyle de 13,1 à 29,9
Pas- Ourthe
Jemmapes Rhin- de 30 à 39,9
de-Calais Sambre-
Nord et-
M a n c h e
et-Meuse Moselle de 40 à 49,9
Somme Forêts de 50 à 59,9
Seine- Sarre Mont-
Inférieure Aisne Ardennes
Tonnerre de 60 à 69,9
Oise
Moselle de 70 à 99,9
Manche Calvados Meuse
Eure Marne
Seine Bas- de 100 à 1 250
Meurthe
Orne Seine- Seine- Rhin
Données non
Finistère Côtes-du-Nord Eure- et-Oise et-Marne disponibles
Ille-et- et-Loir Aube Vosges
Haute-
Vilaine Mayenne Marne
Frontières de
Morbihan Sarthe Loiret Haut- l’Empire français
Yonne Haute- Rhin
Loir- Saône en 1804
Loire- Maine-
et-Loire Indre- et-Cher Côte-d’Or
Inférieure et-Loire Doubs
Cher Nièvre
de 25 à 50 000
Wese
de 30 à 49,9 Prague
P rague
La statistica del regno di Napoli nel 1811,
de Tarente
Source : Academia nazionale dei Lincei,
CALABRE- Francfort
de 50 à 69,9
Source : H. Möller, Fürstenstaat oder
CITÉRIEURE
ain
de 70 à 89,9 M Nuremberg
Die Deutschen und ihre Nation,
Mer Cosenza
Population des TTyrrhénienne Dan
W. J. Siedler, Berlin, 1989.
ube
capitales d’intendance
n
Rhi
01-96-AtlasEmpireNapoleon-Maq3-NE 2022-BAT3.indd 35
Pages 34-35 : La répartition de la population Pages 34-35 : La répartition de la population14/01/2022 08:58
36
devant être certifiée par une autorité) LES VILLES FRANÇAISES EN 1809
et il ne peut quitter une commune sans Dunkerque
le visa du maire ou de la gendarmerie, Boulogne-sur-Mer Lille
St-Omer Douai
avec indication de sa destination. Tout Lens
Arras Valenciennes
Abbeville
voyageur doit en outre posséder un Dieppe Amiens Cambrai
passeport en règle, obligatoire à partir Cherbourg Le Havre Rouen St-Quentin Sedan
Beauvais
de 1810. Caen
Paris Reims Bar-
le-Duc
Metz
Strasbourg
Évreux Châlons
Brest Versailles Lunéville
Le poids des campagnes Alençon Chartres Nancy
Dans une France caractérisée par Rennes Fontainebleau
Troyes
Colmar
le poids écrasant des communes Lorient
Laval Le Mans Auxerre
Orléans
rurales, même Paris demeure le chef- Angers Blois
Nantes Dijon Besançon
lieu d’un département où la viticulture, Bourges Nevers
Tours
les cultures maraîchères, les arbres Chalon-
Poitiers Moulins sur-Saône
fruitiers côtoient les terres de grande
La Rochelle Niort Annecy
culture. Rochefort Limoges Riom
Dans les campagnes, le nombre des Clermont Lyon
St-Étienne
Angoulême
propriétaires a beaucoup augmenté, Grenoble
mais les inégalités sociales restent Le Puy
Bordeaux Aurillac
importantes et l’émiettement de la Cahors
Population des villes
propriété paysanne constitue un fac- (en hab.) Agen Avignon
Albi Nîmes
teur de fragilité sociale. de 5 à 10 000
Montauban Montpellier Aix-en-Provence Nice
Bayonne
Du côté des salariés, les journaliers de 10 à 20 000 Pau Castres Arles
Toulouse
restent à la fois exploitants parcel- de 20 à 50 000 Béziers Marseille
Carcassonne Toulon
laires, saisonniers agricoles et travail- de 50 à 100 000 Perpignan
leurs dans le textile. À l’autre bout de de 100 à 110 000
l’échelle, le gros fermier, le « coq de 200 km
580 000
village », enrichi par la guerre et l’ac- Source : J. Dupâquier, Histoire de la population française,
tome 3 (de 1789 à 1914), PUF, Paris, 1995.
quisition des biens nationaux, calque
parfois son mode de vie sur celui des
citadins et envoie son fils au lycée. LES MIGRATIONS SAISONNIÈRES
Dans les villages, il est un employeur
important, notamment lors des travaux
agricoles, employant paysans sans
terre, « brassiers » et ouvriers agricoles,
qui regardent de plus en plus vers les Pages 36-37 : Les villes françaises en 1809
villes. C’est encore parmi ces pay-
sans fortunés que le préfet choisit les
maires des petites communes avant de
se tourner vers les anciens nobles, très
présents dans les campagnes.
La condition juridique des paysans a
connu de profondes mutations du fait
de l’abolition des droits seigneuriaux,
de la suppression de la dîme et de la
réforme fiscale qui a allégé les poids
de l’impôt. Néanmoins, l’obtention de Émigration forte
à très forte (deux
l’égalité civile ne modifie pas encore fois supérieure
les habitudes, les modes de vie et de à l’immigration)
domination qui organisent toujours le Émigration
prédominante
monde paysan. Producteurs et ven-
Bilan
deurs, propriétaires exploitants et migratoire
grands fermiers profitant de la hausse équilibré
des prix agricoles et des mutations Immigration
prédominante
foncières, sont les grands gagnants de 200 km
Immigration forte à très forte
la période, ouvrant un cycle d’expres- (deux fois supérieure à l’émigration) Source : R. Béteille, « Les migrations saisonnières
sion des mécontentements de la petite Données non disponibles
en France sous le premier Empire », Revue d’Histoire
moderne et contemporaine, tome XVII, juil.-sept. 1970.
paysannerie tout au long du XIXe siècle.
Nombre Nombre
de mariages de naissances
(pour 1 000 personnes) (pour 1 000 personnes)
4,3 6,3 7,1 7,6 10,0 21,5 28,9 31,3 33,5 41,0
Moyenne : 7,1 Données manquantes Moyenne : 31,3 Données manquantes
Nombre
Nombre de naissances
de décès illégitimes
(pour 1 000 personnes) (pour 1 000 naissances)
17,6 23,2 25,8 29,9 41,6 1,8 3,5 4,7 5,8 35,9 Source : Atlas de la Révolution française,
vol. 8, « Population », S. Bonin, C. Langlois
Moyenne : 26,8 Données manquantes 200 km Moyenne : 6,1 (dir.), Éditions de l’EHESS, Paris, 1995.
Pages 38-39 : Les décès en 1806 Pages 38-39 : Les naissances illégitimes en 1811
01-96-AtlasEmpireNapoleon-Maq3-NE 2022-BAT3.indd 38 14/01/2022 08:58
LES DYNAMIQUES DÉMOGRAPHIQUES • 39
Ordre et désordre des familles MARIAGES ET PRIX DU FROMENT LES SUICIDES À PARIS (1800-1813)
En dépit des pertes militaires (1,3 mil-
lion pour la période 1789-1815), la Nombre de suicides
LA DOMESTICITÉ EN ITALIE
Bologne 40 40
Domesticité Florence
(en % de la 13 %
population totale) 30 30
Hommes
Femmes 20 20
8,8 %
Hommes
et femmes 6,8 % 10 10
Rome
confondus
Neuf
dination. « Titre IX : De la puissance Invalides Cité Fidélité
Théâtre- Arsenal VIIIe Montreuil
paternelle. C’est par la petite patrie, Français Fraternité
IXe
qui est la famille, que l’on s’attache à Ouest Ste-
XIe
Geneviève
la grande : ce sont les bons pères, les Jardin Quinze-Vingts
bons maris, les bons fils qui font les des Plantes
Luxembourg
bons citoyens. » Femmes
secourues* XIIe
Même les femmes des milieux aisés
Se
Ouvrières fileuses
in
sont cantonnées aux devoirs mater-
e
Femmes en couches
nels. Exclues des différents établisse-
Femmes des deux catégories Ier N° d’arrondissement
ments pédagogiques secondaires et Limite
* Les couleurs reportées indiquent
supérieurs, elles ne peuvent prétendre les divisions où les effectifs secourus
d’arrondissement
par catégorie dépassent la moyenne 1 km Limite de division
qu’à une instruction très sommaire. La
Maison de la Légion d’honneur, dirigée
par madame Campan, devient un lieu
L’ENSEIGNEMENT FÉMININ DANS LES POUILLES (1809)
de formation des bonnes maîtresses
de maison ravalées aux petits travaux
Nombre
d’entretien et à la cuisine. de communes 60
ayant répondu à
Indigentes et dames l’enquête sans préciser 50
Pages 40-41 : L’indigence féminine à Paris (1802)Mer
le type d’école
patronnesses 40
Adriatique
Dans les campagnes comme dans Rome Capitanate
Lucera Bari
les villes, l’habitat populaire est tou- ayant des écoles 30
pour garçons et filles Naples Terre
jours sordide et l’hygiène rudimen- de Bari
taire en dépit des campagnes lancées 20 Mer
Tyrrhénienne
par les médecins réformateurs. Les ayant seulement des 10
veuves sans ressources, chargées écoles pour garçons 200 km
d’enfants, sont nombreuses dans les ayant seulement des 0 Source : M.-P. Donato, D. Armando et alii (dir.),
écoles pour filles Terre Capitanate Atlante storico dell’Italia rivoluzionaria e
villes. Les naissances illégitimes aug-
de Bari napoleonica, École française de Rome, 2013.
mentent en nombre sous l’Empire, et
les « filles-mères », souvent privées
de tout moyen d’existence, aban- particulièrement encouragé dans les philanthropique et de la Société de
donnent massivement leurs enfants. écoles-ateliers. charité maternelle se recrutent au sein
Parallèlement, la prostitution s’accroît Les femmes des milieux aisés se mobi- des familles de notables (Béthune,
dans les grandes villes, phénomène lisent, les pratiques de bienfaisance Montmorency, Pastoret, Cochin,
qui fait l’objet d’un contrôle policier et étant un moyen d’affirmer l’apparte- Delessert, Dupont de Nemours). Cette
d’une réglementation administrative nance aux notables. Félicité de Genlis mobilisation ne suffit pas à enrayer le
de plus en plus pointilleuse. Pages
s’engage parmi les40-41
dames: L’enseignement féminindes
inspectrices reflux dans les Pouilles enet1809
souscriptions participa-
Selon les catégories de pensée de chargées depuis mai 1810 par la pré- tions aux œuvres philanthropiques
l’époque, le combat contre la pau- fecture de Paris de veiller au bon fonc- qui, après l’effervescence consu-
vreté féminine est conçu comme une tionnement des écoles primaires des- laire, caractérise la période impériale.
lutte contre les mauvaises mœurs. tinées aux filles. Il s’agit, là encore, de La volonté du régime d’accroître le
Il faut ainsi apprendre aux filles et « fournir des bonnes épouses et mères contrôle et les réglementations sur les
aux femmes indigentes à bien se à l’État et aux familles ». À Paris, les institutions de charité contribue aussi à
comporter, le travail manuel étant militantes réunies autour de la Société leur marasme.
Le monde du travail
Très hétérogène, le monde des travailleurs trouve son unité dans les conditions de vie très difficiles,
surtout pour les femmes et les enfants. Si le pouvoir, s’appuyant sur la peur des élites face aux
populations laborieuses, parvient à prévenir les révoltes, le mécontentement populaire reste
important. La répression et une législation favorable à l’individualisation des contrats de travail
contribuent également à la précarité générale.
L’hétérogénéité du monde profitent du déclin de l’industrie du lin très difficiles et pour des salaires
du salariat pour réutiliser la main-d’œuvre dispo- médiocres. Pour les assister et les
Dans les villes, les ouvriers des petits nible. Des contremaîtres, chargés de encadrer, l’Empereur encourage les
ateliers, à la qualification poussée, fournir la matière première, surveillent dames de la Société de charité mater-
côtoient des ouvriers d’usine et des le travail, ce qui rapproche les rythmes nelle qui échangent leurs secours
petits employés. Une enquête de 1811 du travail à domicile de ceux des contre la garantie d’une « bonne
fournit un ordre de grandeur de la manufactures. Néanmoins, la hausse conduite ». Nombreuses sont les
population ouvrière : 82 000 entreprises du salaire réel, l’amélioration relative veuves sans ressources et chargées
emploient près de 1,8 million d’ouvriers de l’alimentation et du logement valent d’enfants. Pour ces femmes, l’exode
(femmes et enfants non compris) dis- à l’Empire d’être considéré comme en ville et la prostitution temporaire
persés dans les manufactures, par- une période favorable aux travailleurs ou définitive restent souvent les seuls
ticulièrement dans le secteur textile. salariés. recours.
De très grandes filatures de coton Le textile dévore les enfants. Dans
sont ainsi établies dans les régions de Le travail des femmes les filatures, leur agilité, leur sou-
pointe comme la Normandie, le Nord et des enfants plesse, leur petite taille sont utilisées,
ou la région de Mulhouse. La concen- Si le mariage et la procréation sont par exemple, pour attacher les fils
tration touche aussi l’industrie dra- les tâches essentielles assignées aux brisés sous les métiers à tisser en
pière. Dans la sidérurgie, le développe- femmes, les plus pauvres doivent en marche, nettoyer les bobines encras-
ment est plus restreint ; on dénombre plus travailler dans des conditions sées, ramasser les fils de coton. Dans
néanmoins près de 60 000 ouvriers
travaillant dans des établissements
LE NOMBRE D’OUVRIERS À PARIS PAR SECTEUR EN 1815
métallurgiques (particulièrement des
forges rurales). Secteur d’activité
Aux côtés des manufactures, les asso-
Petite
ciations de métiers ou « corporations » métallurgie 2 000
Ardennes
Manche Moselle
Calvados Paris Meuse
Paris Côtes- Marne Meurthe
certaines clouteries des Ardennes, Population laborieuse Même si ses conditions de vie se
les enfants de 10 ans travaillaient de et dangereuse sont améliorées, surtout dans les pre-
3 heures du matin à 21 heures. Les La différence est infime entre l’ouvrier mières années de l’Empire, l’ouvrier,
enfants sont aussi chargés de surveiller de manufacture urbaine et un paysan traité en mineur, n’a pas la possibilité
les machines (ils doivent rester jusqu’à qui travaille en plus dans un atelier de se défendre devant les conseils de
seize heures debout), de travailler à la rural. Dans les villes, le petit patron prud’hommes (26 créés entre 1806
machine à dévider (ils sont assis sur travaille, mange, dort sous le même et 1813). L’artisanat et le monde de
des tabourets trop hauts pour eux toit que son compagnon. L’unité se l’échoppe et de la boutique, frappés
afin de les empêcher de Pages
relâcher42-43
leur :forge
Origine
dans des ouvriers des
la pénibilité migrants saisonniers
conditions à Paris par des mesures de répression
effort). Les mines et les usinesdans
métal- les de
secteurs
travail,de l’artisanat
surtout et secteur
dans le des services
de successives, font l’objet d’une surveil-
lurgiques accueillent également des la métallurgie ou dans les forges, le lance accrue. Le régime tente de cal-
enfants : manœuvres, ils descendent départ pour l’armée étant parfois un mer les mécontentements en favorisant
dans les galeries plus étroites où ils refuge. La difficulté de la vie en usine la distribution de farine à bas prix ou en
peuvent se tenir debout et pousser se retrouve dans l’industrie textile ou lançant une politique de grands travaux
des chariots. À la campagne, dès sa chimique. Anciens couvents ou établis- pour donner du travail aux ouvriers du
huitième année, l’enfant est considéré sements religieux, les bâtiments sont bâtiment menacés par la crise de 1805-
comme un adulte. Les métiers se sont peu adaptés : manque de lumière, froid 1806. Les grèves, nombreuses, s’ac-
diversifiés et les séjours dans les ate- et humidité, bruit. La discipline est compagnent de revendications tou-
liers alternent avec d’autres activités extrêmement dure : journée de qua- chant au temps de travail ou au salaire.
pénibles par la durée et la difficulté des torze heures, amendes pour retards ou En 1810, les coalitions d’ouvriers sont
tâches à accomplir. absences. interdites par le Code pénal.
Part de la main-d'œuvre féminine (%) Part des femmes par métier (%)
100,0
47,5 100
98,8
Ouvrières
40 80 88,5
35,7
30,0
30 60
20 40
28,7
Journalières 22,8
10 20
Graveuses 6,3
4,2 2,8
0 0
1805 1806 1807 1808 1809 1810 1811 1812 1805 1806 1807 1808 1809 1810 1811 1812
Source : Y. Gaulupeau, A. Dewerpe, La fabrique des prolétaires, Les ouvriers de la manufacture d’Oberkampf à Jouy-en-Josas (1760-1815), Presses de l’École normale supérieure, Paris, 1990.
La conscription
Soumises à des procédures mal maîtrisées et changeantes, les premières levées de conscrits
furent particulièrement difficiles. Les réquisitions d’hommes rappellent aux communautés rurales
la milice abhorrée. Progressivement pourtant, la « machine conscriptionnelle » se rode, le régime
faisant alterner coercition et flexibilité (comme le tirage au sort et le remplacement), et déplaçant
une partie de la charge sur les pays annexés et départementalisés.
I, 1998.
la Seine-Inférieure,
non pas exclusif (le volontariat subsiste), Dieppe
Arrondissement de Rouen 0,4
(en %) 34,8
I, 1998.
deSeine-Inférieure,
Le Havre de Yvetot
Dieppe
Arrondissement Rouen 0,4
mais principal de recrutement. 30 34,8 0,3 0,38
I, 1998.
Neufchâtel
deSeine-Inférieure,
La Conscription
Le Havre
Dieppe Yvetot
Rouen
Paris
0,38
Les procédures initiales de la conscrip- 30 22,5 Moyenne
Le Havre départementale
Neufchâtel Yvetot 0,3
La Conscription
22,5
ParisParis
0,38
université
30 Moyenne départementale
22,5 Neufchâtel 0,3
tion reposent largement sur les auto-
La Conscription
22,5 Manche
20 0,2
université
22,5 22,5 Moyenne départementale
rités locales, maire et conseil munici- Dieppe
Manche
la
20 0,2
université
20,4
le département
DieppeNeufchâtel
Manche
thèse,
K. Seigan,
de la
pal, qui déterminent le contingent et 20
20,4 Yvetot 0,2
le département
DieppeNeufchâtel
SEINE-
thèse,
K. :Seigan,
10 Le Havre INFÉRIEURE 0,1 0,17
organisent les procédures de tirage au 20,4 Yvetot 0,13
département
VI-1815),
Neufchâtel
SEINE-
thèse,
: K. :Seigan,
10 Le Havre INFÉRIEURE
Rouen 0,1 0,17
Yvetot 0,13
VI-1815),
sort et de remplacement. Le pouvoir 10 SEINE-
Le Havre INFÉRIEURE
Rouen 0,1 0,17
Source
0,13
VI-1815),
0 0
ledans
leur impute les dysfonctionnements, Rouen
(an
Source
0 1800 1806 1814 0 1800 1806 1814
dansdans
les accusant de corruption et d’incom-
Source
(an (an
0 1800 1806 1814 0 1800 1806 1814
44-45 : Le contingent
pétence.en Toscane
À partir(1808-1814)
de 1804, le rouage 1800 1806 1814
LES LEVÉES EN TOSCANE (1808-1814) 1800 1806 1814
44-45 : Le contingent en Toscane (1808-1814) Contingent annuel Contingent annuel
essentiel est le conseil
44-45 : Le contingent en Toscane (1808-1814)de révision, ins-
Contingent annuel Contingent annuel
tallé au chef-lieu d’arrondissement. Le
française
2 330
Contingent annuel MÉDITERRANÉE 4 524
Contingent annuel
2 000 ARNO
4 000
française
2 330 4 524
sous-préfet est le maître d’œuvre des 2 000
MÉDITERRANÉE ARNO
12476 4 000
française
330 MÉDITERRANÉE 4 524
ARNO
opérations. Une routine bureaucratique
IV, 1992.
l’armée
2 000 1 476 4 000
1 045 997
IV, 1992.
1 000
l’armée
s’instaure à partir de 1806. 1 476 1 045 997
ARNO
Florence
3 000 2 910
1992.
l’armée
1 000 490 LivourneARNO
dans
3 000 2 910
Dans les premières années, les départs 400 1 045 997 425
IV,Paris
1 000 490 Florence
Sienne
Livourne
ARNO 2 241
dansdans
400 425 MÉDITERRANÉE 3 000 2 910
ParisParis
effectifs sont inférieurs aux quotas Florence
Italiens
0 490 Livourne Sienne 2 241 2 003
université
425 OMBRONE 2 000
400 MÉDITERRANÉE
fixés par les préfets. Napoléon orga- 0 1808 1809 1810 1811 1812 1813 1814 Sienne 2 241 2 003 Italiens
université
OMBRONE 2 000
Contingent annuel MÉDITERRANÉE
0 1808 1809 1810 1811 1812 1813 1814
Italiens
Les
OMBRONE 2 000 2 003 université
nise des réserves départementales Contingent 164 11811
1808 1809annuel
11810 215 1812 1813 1814
OMBRONE
thèse,
Les Les
: F. Frasca,
1Contingent
000 annuel
1 164 1 215 OMBRONE 1 000 927 900 811
pour encadrer cette marge. À partir de
thèse,
: F. Frasca,
1810, les contingents de réservistes 1 000 293 200 587 503 220 1 000 927 900 811
1796-1814,
Source
0 1808
293 1809 1810 1811 1812 1813 1814 01808 1809 1810 1811 1812 1813 1814
Source
200 220
« levées supplémentaires » incluant 0 1808 1809 1810 1811 1812 1813 1814
Source
Clermont
I, 1998.
777
Paris
ParisParis
600 445
de l’Oise
575
dede
257 150
départements composant l’ancienne 128 200
Conscription
299
de l’Oise
29
mémoire
318 9
ledans
238 48 52 43
4
Source
48 52 43
Source
LA TAILLE DES CONSCRITS Sont ensuite distribués des certificats contributions sont moindres qu’à l’est.
(1782-1829) de « fin de dépôt » qui placent leurs Les départements annexés de Belgique
titulaires en fin de liste : orphelins, et du Piémont ont payé un lourd tribut.
Taille moyenne des conscrits (en mètres) aînés avec charge de famille, frères de Par département, la charge est inégale
conscrits incorporés. Mais c’est sur- selon les cantons. Les villes contribuent
1,67
tout le mariage qui déclenche l’exemp- davantage que les campagnes, à l’ex-
1,66
tion automatique après le tirage au ception notable de Paris.
1,65 sort ; ce qui provoque une véritable Individuellement, le conscrit mobilisé
1,64 course aux mariages arrangés, surtout peut, après être passé en conseil de
1,63 dans les dernières années de l’Empire. révision, demander à un suppléant,
1,62 moyennant finance, de rejoindre le régi-
1,61 Une charge inégale ment à sa place. Il passe alors devant
1,60 Alsace rurale En 1804, à la demande de l’Empereur, notaire un contrat dit de remplacement.
Brie
1,59
Limousin
Antoine-Audet Hargenvilliers établit un La proportion des remplaçants dans les
1,58 Compte général de la conscription, à levées de 1806 à 1810 est de 4,5 % en
1800 1805 1810 1815 1820 1825 1830
l’unité près, pour la période 1799-1804. moyenne et s’élève ensuite, alors que
Source : L. Heyberger, La Révolution des corps, L’analyse de ces chiffres montre que les le prix du remplaçant est multiplié par
Presses Universitaires de Strasbourg, 2005.
résistances ne sont pas moins fortes huit. La charge est socialement iné-
sous le Consulat que sous le Directoire. gale : la paysannerie propriétaire eut
Confédération du Rhin), fixés par des Toutefois, ces résistances ne sont pas massivement recours aux contrats de
conventions qui rappellent les « capi- générales ; certaines régions s’accom- remplacement. Comme les familles
tulations » de l’Ancien Régime, levés modent aisément de l’institution. Enfin, aisées bénéficiaient fréquemment des
selon des modalités qui incluent bien le prélèvement des jeunes hommes exemptions médicales, la légitimité de
Pages 44-45souvent
: La taille
la des conscrits dans trois régionspar
conscription. (1800-1829)
rapport à la population départe- la ponction par l’invocation de son uni-
mentale n’est pas uniforme ; à l’ouest versalité se lézarde dans les dernières
Les exemptés d’une ligne Amiens-Narbonne, les années du régime.
Les maires établissent les listes des
jeunes gens de 20 à 25 ans, pro- LES CONSCRITS PAR DÉPARTEMENT (MOYENNE 1800-1804)
cèdent au tirage au sort, conduisent
les conscrits au conseil de révision de
Mer
la sous-préfecture. Là, le sous-pré- du Nord
Deux-
fet écarte ceux qui n’ont pas la taille Escaut NèthesMeuse- Roer
Lys
suffisante, critère variable selon les Dyle Inférieure
Pas- Jemmapes Ourthe Rhin-
régions et les effectifs requis. La taille de-Calais
Nord
Sambre- et-
M a n c h e et-Meuse Moselle
moyenne du conscrit français était de Somme Forêts
Seine- Sarre Mont-
Aisne Ardennes
Soigner la société :
santé et populations marginales
Soigner les maladies physiques, morales et sociales est l’un des mots d’ordre autour duquel
se réunissent les élites. Cette médicalisation de la société ouvre la voie à une approche
philanthropique qui permet de masquer les véritables causes des inégalités sociales.
À partir de 1810, cette thérapie ne suffit plus à prévenir les effets de la crise économique,
du poids des impôts et des levées d’hommes sur les populations.
Les progrès de la médecine indéniables (entre 1811 et 1815, près médicalisation de la société participe à
Les progrès de la médecine, liés autant de la moitié des enfants sont vacci- la remise en ordre sociale et politique.
à l’hôpital qu’à la médecine militaire, se nés). Les efforts portent également sur
doublent d’un meilleur encadrement l’amélioration de la salubrité urbaine : Le contrôle des indigents
médical rendu possible par la réforme le déplacement des cimetières hors La crise économique de 1811-1812 est
de mars 1803 qui distingue les méde- les murs des villes, les premiers tra- marquée par un retour de véritables
cins des officiers de santé. On estime à vaux d’aménagement et d’assainisse- armées de mendiants vagabonds, qui
15 000 le nombre de médecins, chirur- ment des rues témoignent autant d’un font l’objet d’une répression renfor-
giens et officiers de santé, soit un peu souci hygiéniste que d’une volonté de cée de la part du préfet et de la gen-
plus de 5 pour 10 000 habitants, les contrôler le tissu urbain. De la méde- darmerie. Mais dans le Bassin parisien
campagnes étant néanmoins moins cine criminelle à l’intérêt porté à l’hys- ou en Normandie, ces bandes dépas-
bien loties que les villes. Parallèlement, térie féminine en passant par les tra- sant parfois plus d’un millier d’hommes
l’encadrement hospitalier se développe vaux sur l’hygiène publique, cette échappent à tout contrôle. Le manque
grâce, en particulier, à la reconstitu-
tion du réseau des congrégations reli- TAUX DE MÉDICALISATION PAR ARRONDISSEMENT (1805)
gieuses (près de 540 sœurs des Filles
de la sagesse sont présentes dans
87 maisons en 1808) et des dispen-
saires où de jeunes médecins soignent
gratuitement. Seine- Somme
Inférieure Aisne Ardennes
Si les découvertes médicales
Manche Calvados Moselle
demeurent limitées (en dépit des Meuse
Seine Seine- Marne Bas-
Meurthe Rhin
réformes, l’hôpital reste mortifère), le Seine- et-Marne
Côtes-du-Nord
régime mobilise son administration et-Oise Aube
Ille-et- Mayenne Haute- Vosges
autour de grands chantiers dans le Morbihan Vilaine Sarthe Loiret Marne Haute- Haut-
Yonne Rhin
domaine de la santé. Ainsi, la vaccina- Maine-
Loir- Saône
Loire- Indre- et-Cher Côte-d’Or
tion jennérienne contre la variole (qui Inférieure et-Loire et-Loire Doubs
Cher
pouvait, avant 1789, provoquer 10 %
Vendée Deux- Indre Saône- Jura
de décès annuels) devient dès 1804 Sèvres Vienne et-Loire
Allier
une priorité du pouvoir qui encourage Creuse Ain
Charente- Haute- Rhône
la création de comités de vaccine Inférieure Vienne Loire
Charente
dans les départements : après avoir Corrèze Isère
fait vacciner tous ses soldats en 1805, Dordogne Cantal Haute-
Loire
Part des membres Ardèche Hautes-
Bonaparte fait vacciner le roi de Rome. du corps médical Drôme Alpes
Lot Lozère
En dépit des ravages provoqués par (médecins, chirurgiens, Lot-et-
Garonne Aveyron Basses-
officiers de santé) Vaucluse Alpes
le typhus dans les rangs de l’armée dans la population Landes
Tarn
en 1813, la crainte de l’épidémie (la totale (pour 10 000 Bouches-
habitants) du-Rhône Var
dysenterie encore présente) disparaît
de 0,1 à 2,9 Aude
progressivement. Ariège
de 3,0 à 4,4
Aux côtés des médecins, les préfets
de 4,5 à 5,9
et les curés font campagne en faveur 200 km
Liamone
de 6,0 à 20,2 Source : Atlas de la Révolution
d’une vaccination, inégale selon les française,vol. 8, « Population », S. Bonin,
Données non disponibles
départements mais aux résultats C. Langlois (dir.), Éditions de l’EHESS, Paris, 1995.
Se
55
in
e
65 Fer-à-Moulin 1 km
13,0
85 Fourneau permanent
de la Société 38,0 % Pourcentage d'indigents
107 philanthropique en 1812
Total de soupes par secteur par rapport
Données manquantes 200 km distribuées : 4 342 569 Fourneau supplémentaire à l'ensemble de Paris
EN CONCLUSION
Les dynamiques
démographiques
À la recherche de l’unité impériale,
l’Empire, multiethnique, vise à transcender
les différences entre les populations. Mais
derrière l’unité de façade et malgré les
efforts de la propagande officielle, il reste
un conglomérat de peuples hétérogène.
Les défaites des années 1814-1815
ne feront que rendre plus évidente
cette réalité lorsque, dans la cohue des
batailles, les officiers des différents
régiments se heurteront à la grande
diversité des langues.
Les dynamiques
économiques
En comparant les niveaux de développement dans ces deux
États pilotes de l’Europe occidentale, le Royaume-Uni et la
France, de nombreux historiens relèvent que, partant d’indices
sensiblement équivalents dans les années 1780, la France
accuse un retard prononcé cinquante ans plus tard.
Certains portent une condamnation sans appel des désordres
révolutionnaires (inflation, désinvestissements, ruine du
grand commerce), d’autres de la dictature napoléonienne
(guerre permanente, protectionnisme outrancier, archaïsme
technologique), voire d’un cumul catastrophique des
deux symptômes du mal français !
Les études réalisées à partir de données objectives offrent
un bilan plus nuancé. Si la comparaison France-Angleterre
s’impose, il faut bien souligner qu’il ne s’agit pas d’une
compétition entre un pôle dirigiste et un pôle libéral. Dans les
deux Empires, les considérations de puissance le disputent aux
considérations de croissance, et les réflexes protectionnistes
contrarient les aspirations libérales. Les retards sectoriels
en matière d’innovations technologiques ou de structures
agricoles sont bien antérieurs, mais ils ne sont pas comblés.
Pour les pays sous tutelle, la domination française n’est pas
partout synonyme de ruine et de chômage. Des axes européens
de développement se dessinent durablement autour des pays
rhénans et des vallées de l’Europe centrale.
HAUTE-
MORBIHAN SARTHE LOIRET MARNE HAUT-
Lorient LOIR- HAUTE- RHIN
ET-CHER SAÔNE
CÔTE-D’OR
Nantes NIÈVRE
Indret INDRE-
DOUBS
OCÉAN ET-LOIRE
Guérigny Auxonne
ATL ANTIQUE Nevers
DEUX- Le Creusot
SÈVRES JURA
INDRE
Sidérurgie VIENNE
Densité de forges LÉMAN
moyenne à forte Rochefort
Ro HAUTE- AIN
CHARENTE- VIENNE*
INFÉRIEURE CHARENTE DOIRE
Fabrications de guerre Ruelle MONT- SÉSIA
St-Étienne BLANC
Manufacture de fusils ISÈRE
Tulle HAUTE-LOIRE
Manufacture d’armes Turin
blanches DORDOGNE Grenoble
Bordeaux
B St-Gervais Gênes
Fonderie de canons HAUTES-
ARDÈCHE DRÔME
ALPES
Arsenal de terre
LOZÈRE La Spezia,
Arsenal de marine TARN- Livourne
ET-GARONNE AVEYRON VAUCLUSE
Forges de la marine GARD
BASSES-
ALPES
Métiers à tisser (bonneterie
exclue, nombre par Toulouse TARN* HÉRAULT
arrondissement) Bayonne VAR
HAUTE-
7 500 HAUTES- GARONNE
PYRÉNÉES AUDE
4 000 ARIÈGE
PYRÉNÉES-
1 000 ORIENTALES
1 M e r M é d i t e r r a n é e
(*) Données par département
pour le Tarn et la Haute-Vienne
Absence de cercle = absence Source : Atlas de la Révolution française,
de métiers à tisser ou données G. Béaur, P. Minard (dir.), vol. 10, « Économie »,
manquantes 100 km
Éditions de l’EHESS, Paris, 1997.
Pages 50
01-96-AtlasEmpireNapoleon-Maq3-NE 2022-BAT3.indd 50-51 : Nouvelle géographie de l’industrie française (1810-1811) 14/01/2022 08:59
LES DYNAMIQUES ÉCONOMIQUES • 51
Secteurs et acteurs
de l’industrie française
Les années 1800-1810 se caractérisent par une croissance industrielle inégale selon les régions
et les secteurs, mais qui préfigure la révolution industrielle. Elle concerne particulièrement
les industries cotonnières et chimiques. L’argent circule librement, il sert à l’impôt et à l’achat
de produits manufacturés, surtout textiles. Si le paysage industriel reste marqué par les petits
ateliers, les fabriques et les usines se multiplient.
Les capitaines d’industrie grande se tient à Paris en mai 1806). les couleurs qu’on y avait appliquées.
Le développement industriel s’ap- Oberkampf fabrique, à Jouy-en- L’établissement de Jouy s’étend pro-
puie sur de véritables « capitaines Josas, des cotonnades imprimées, les gressivement : en 1805, Oberkampf
d’industrie ». « toiles de Jouy ». Bavarois d’origine, emploie 1 322 personnes, imprime
Richard Lenoir, par exemple, fabrique, il s’était installé en France dès avant 1 725 000 aunes de tissu et fait des
à Paris et en Normandie, du coton filé, la Révolution, pour fonder en 1760 la bénéfices dépassant 1 650 000 francs.
des calicots, des basins et des piqués. première manufacture française de L’établissement est à son apogée
Faisant travailler plusieurs milliers d’ou- toiles peintes. Dans cet établisse- lorsque Napoléon lui rend visite, le
vriers, il dispose d’un capital de 6 mil- ment, un prisonnier de guerre anglais, 20 juin 1806. Les progrès techniques
lions de francs. Il fait partie du Conseil Robert Hendry, découvrit avec Widmer tels que l’assortiment à carder et à filer
général du commerce et participe aux le moyen de remplacer la traditionnelle que fournit l’ingénieur anglais Douglas
expositions de produits industriels teinture « à la réserve » par l’emploi de suscitent des résistances et ne peuvent
qu’organise le gouvernement (la plus rongeants qui enlevaient sur les tissus masquer les difficultés d’une branche
Freland La Chaudeau
Passavant Les forges exploitées par les enfants
Pont- La Branleure
du-Bois de Jean-François Rochet, de Grandvelle
Aillevillers
Varigney
Dem andre Claude-François Rochet aîné
Betaucourt
Le Beuchot
Adrien Rochet, de Raze
Lure
Jean-Jean Rochet, d’Héricourt
Conflandey Magny-Vernois
Mailleroncourt Alexandre Rochet, de Granville
Chagey
Vauconcourt Scey-sur-Saône Claude-Pierre Dornier
Prai l eu r
Renaucourt Vesoul St-Georges NB : les ronds concernent la propriété
Trécourt Roc h e t de bois ou de domaines.
Villersexel
La Barbe Vy-le-Ferroux
D ornier Vellexon Baignes
Bonnal Fallon La Branleure
Le Crochot La Romaine Pont-du-Bois
Bley Dampierre
Millerand Estravaux Aubertans
Lœuilley Vereux Maizières
Falatieu Lure
B ureau Autrey Montureux Grandvelle Loulans
Échalonge Breurey
Gray Larians
Vauconcourt Scey-sur-Saône Chagey
Valay
Pesmes 20 km Renaucourt Vesoul Étupes
Chariez Villersexel
La Barbe Boursières
Dasle
Baignes La Petite-
Les usines et les principaux exploitants Le Crochot
Hollande
en l’an IX (1801) La Romaine Audincourt
Dampierre
Bezouotte Grandvelle Bourguignon
Atelier de grosse forge
Breurey Pont-de-Roide
Haut-fourneau Gray
Principaux exploitants, Valay
Dornier
avec leur nom Pesmes 20 km
Route principale Source : F. Lassus, « Sidérurgie haut-saônoise
Montrambert à l’époque du Consulat », G.-J. Michel (dir.),
Le Consulat en Franche-Comté 1799-1804,
Fraisans Salsa, Vesoul, 2000.
L’organisation industrielle
de l’Empire
Les autorités impériales sont fortement interventionnistes en matière industrielle. Le blocus
continental mis en place entre 1806 et 1810 est certes dirigé contre l’Angleterre, mais va surtout
jouer en faveur de l’économie française. À cause de cette ambiguïté, la politique économique
impériale, qui accentue des déséquilibres antérieurs, suscite des mécontentements et échoue
finalement. Ses effets sont donc contrastés et sujets à controverses.
Le creusement des écarts de L’institutionnalisation d’un corps d’in- interrégionaux. Elle accélère, plutôt
développement en Italie génieurs des eaux et routes, calqué sur qu’elle n’interrompt, l’essor des activi-
La thèse ancienne mettant l’accent sur le Corps français des ingénieurs des tés industrielles (textiles et métaux) de la
l’exploitation quasi coloniale de l’Italie Ponts-et-Chaussées, a accompagné région située entre Gênes, Milan et Turin
par les Français (mainmise sur la pro- cette réorientation. Dans le Piémont, commencé dès le milieu du XVIIIe siècle.
duction italienne de soie grège, etc.) les industries extractives et la métallur- Dans le Véronais (soie et laine), le
doit être nuancée. À la ruine des acti- gie connaissent une croissance conti- Vicentin (laine et soie), le Bergamasque
vités portuaires s’oppose l’essor des nue liée aux réformes et à la demande (soie, laine et métaux), le Comasque
industries textiles et métallurgiques de guerre, palliant souvent les effets (laine et soie), le Brescian (chanvre et
avec le soutien de l’État (commandes de la crise dans l’industrie textile, en lin, soie et métaux), le Novarais (soie et
publiques, barrières douanières). 1807-1809 particulièrement. laine), le Milanais (chanvre et lin, coton
L’insécurité des parcours maritimes, Il faut se garder de toute vision méca- et soie), le Biellese (laine), les foyers
conséquence du blocus, a été com- niste, qui voudrait absolument faire les plus dynamiques des rares régions
pensée par la réorientation du tra- coïncider bouleversement politique d’industrie rurale s’organisent autour de
fic vers les routes terrestres, comme et développement économique. Au quelques pôles urbains, reliant l’ancien
en témoigne l’ouverture en 1810 des total, la domination française a surtout espace artisanal des villes et le nouvel
cols du Simplon et du Mont-Cenis. accentué le creusement des écarts espace productif rural.
Brescia
Mer et de Bergame en
sur la proto-industrialisation en Italie du Nord (1800-1880),
Magdebourg
NIEDERL AUSITZ
Wittenberg
Dessau
vers Brunswick, KURKREIS
Hanovre, Brême
Torgau
Halle
Leipzig
THÜRINGER OBERL AUSITZ
KREIS Elb Grossenhain
vers Cassel, e
Amsterdam Grimma MEISSNER Görlitz
LEIPZIGER KREIS vers Varsovie
Naumbourg
KREIS
Zeitz Dresde
Zittau
vers Cologne, Iéna Gera
Francfort,
Strasbourg ERZGEBIRGISC HER
NEUSTÄDTER Chemnitz KREIS vers Prague,
KREIS Zwickau Vienne
HENNEBERG
Plauen
Les contrastes septentrionaux du Nord ou de Paris, favorisés par les s’émancipant des règlements corpo-
Certaines zones ont profité de leur canaux qui ouvrent le marché parisien ratifs pour réduire les coûts du travail
intégration à l’Empire. C’est le cas des via Saint-Quentin et l’Oise, font de et de la production.
départements belges et allemands, grosses dépenses d’équipement. En Les activités industrielles débordent
particulièrement ceux de Jemmapes, 1813
Pages 54-55 : Laencore, Jemmapes,
proto-industrie du lin,ladu
Sambre- largement
coton et de la laine hors des enceintes urbaines.
de l’Ourthe et de la Roer,etdu
les Borinage
industries extractives
et-Meuse,etl’Ourthe
métallurgiques en Saxepro-
et les Forêts au début du XIXe siècle
Principaux réservoirs d’emplois et
au bloc Liège-Aix-la-Chapelle, pesant duisent un quart du fer de l’Empire. de consommateurs, les campagnes
d’un poids fort lourd dans l’ensemble La manufacture d’armes légères de accueillent les industries, en parti-
de l’appareil de production industrielle Charleville passe sous le contrôle culier le textile organisé selon le sys-
de l’Empire et tirant de leur annexion de l’entrepreneur de celle de Liège. tème de la fabrique : un fabricant four-
une rente qu’ils regretteront après le Il ne faut pas oublier les industries nit à domicile la matière première aux
morcellement territorial de 1814. sucrières dynamiques dans le Nord et ouvriers chargés de la transformer.
En Flandre, l’essor de l’industrie coton- le Bas-Rhin, secteurs où l’on retrouve Alors que les villes accueillent les der-
nière gantoise, intégrée dans le réseau des investisseurs importants comme nières innovations techniques, le travail
français, a eu pour effet une conquête Delessert, propriétaire de sucreries à dans les campagnes reste peu méca-
du marché des pays belges. En dépit Paris et à Nantes. nisé, entraînant une division du travail
de son succès et de son implantation Comme pour la péninsule italienne, ce (filateurs et maîtres tisserands dans les
parisienne, Liévin Bauwens reste lar- développement est déséquilibré et se campagnes, imprimeurs à Rouen pour
gement tourné vers le marché belge. fait au détriment des régions périphé- la filature du coton en Normandie).
En revanche, les mines, la sidérurgie riques, et surtout des villes hanséa- Ce type d’organisation concerne éga-
et les draps de la Wallonie suivent tiques du nord (Brême, Hambourg) qui lement la petite métallurgie (cloute-
une logique conquérante. En 1813, souffrent du blocus continental. rie) ou la tannerie. Ces activités four-
Jemmapes, l’Ourthe et la Sambre-et- nissent des compléments de revenus
Meuse produisent la moitié en valeur « L’industrie aux champs » et freinent l’exode rural. Très forts à
du charbon de l’Empire. Le développement industriel reste l’origine, les liens avec le milieu rural se
Les charbonnages du Hainaut, encore fortement marqué par la proto- distendent progressivement avec l’es-
appuyés par des capitaux français industrialisation, les entrepreneurs sor d’une culture ouvrière spécifique.
L’encadrement
du commerce intérieur
L’accroissement de la consommation populaire et l’augmentation de la production industrielle
entraînent un essor des échanges intérieurs. Les grandes foires maintiennent leur rôle traditionnel
et l’administration réorganise leur tenue. Le Code de commerce (1807) témoigne de la volonté
du régime d’intervenir dans le secteur commercial en réorganisant les tribunaux de commerce,
des postes et messageries, et en soutenant la création des écoles commerciales.
doit recourir à la corvée (en Côte-d’Or LES MOUVEMENTS DE GRAINS À LA FIN DU PREMIER EMPIRE
en 1807) et de nombreux ponts, mal
entretenus, tombent en ruine. Belgique
Grande-Bretagne et Hollande
Si le désenclavement de certaines
Lille Rhénanie
régions est réel, la constitution d’un Mont-
véritable marché continu et natio- Tonnerre
nal est encore en chantier. Le faible
Rouen
accroissement des échanges des
produits manufacturés est lié à leur Paris
St-Robert
Allassac
la destination de leurs achats ; ils ne Ste-Féréole
St-Martial-de-Gimel Soursac
Laguenne
peuvent donc ni stocker ni spéculer. Ayen Donzenac
Chameyrat Lagarde-
La Roche-
Canillac
St-Hilaire-Peyroux Enval
Sur les marchés, seuls les habitants et Aubazine St-Martin-la-Méanne
C AN TAL
Brive-la-Gaillarde
Éditions de l'EHESS, Paris, 1988.
St-Bonnet-Elvert
les boulangers de la localité peuvent St-Chamant St-Privat
Larche Noailles Beynat
s’approvisionner. Le régime rétablit Hte-Brousse
Lissac-sur-Couze Argentat
Source : D. Margairaz,
Le système continental Les droits de douane servent à exclure l’annexion à l’Empire des territoires
Dès 1805, la France fait appliquer la de France les produits industriels de allemands des rivages de la mer du
politique d’union douanière en Hollande ses voisins, même alliés ou dépar- Nord (1810), Napoléon exige que tout
puis en Allemagne, suscitant le mécon- tementalisés. Napoléon impose des le commerce qui se faisait par voie de
tentement de la population privée de rapports entre Paris et Milan à peu terre entre les ports hanséatiques de
certaines denrées. Selon la doctrine près de la même nature que ceux éta- Brême, Hambourg et Lübeck, désor-
exprimée en 1806 par Montgaillard, l’un blis entre l’Angleterre et l’Irlande au mais français, se fasse par la route de
des conseillers de Napoléon, la France, sein de la Grande-Bretagne par l’acte Wesel, c’est-à-dire à travers des pays
privée de ses colonies d’outre-mer, a d’union de 1800. Le royaume d’Italie qui sont en son pouvoir, et abandonne
le droit de se constituer des « colonies est réduit de facto au rôle de fournis- la route de l’Allemagne. Napoléon fait
continentales ». Elle s’y procure des seur agricole pour la France et se voit encore révoquer les traités passés
matières premières au meilleur compte privé de la soie brute du Piémont, réser- par le royaume d’Italie avec Berg et la
et y exporte des produits manufacturés. vée à la soierie lyonnaise. Peu après Bavière.
Face au blocus continental, se déve-
CHAMBRES ET BOURSES DE COMMERCE DANS L’EMPIRE loppent des circuits commerciaux de
contournement. Les décrets de Saint-
Hambourg Cloud et de Fontainebleau (1810)
Mer Emden permettent à des ports d’obtenir des
du Nord
Brême
Chambre
de commerce licences autorisant les négociants à
Amsterdam Osnabrück Bourse exporter certains produits vers l’Angle-
Middelbourg Rotterdam de commerce terre à condition de payer des taxes
Flessingue Zierikzee
Bruges
Gand
Conseil importantes. Les négociants qui spé-
Ostende Crevel de prud’hommes
Dunkerque Anvers
Roubaix Bruxelles Aix- culaient sur les produits coloniaux se
Boulogne la-Chapelle
Atlas administratif de l’Empire français,
St-Omer Lille
Arras
Tournai
Liège trouvent en difficulté. Par une réaction
Source : F. de Dainville, J. Tulard,
Manche Mons
Dieppe Valenciennes en chaîne, les banques créancières
Cherbourg Le Havre Rouen AmiensDouai Sedan
Droz, Genève, 1973.
Bayeux
subissent les contrecoups et la chute
Louviers Reims Metz
Caen de la maison Rodde de Lübeck entraîne
Morlaix St-Malo Honfleur Paris
Vire Strasbourg
Brest Troyes
des faillites à la fin de l’année 1810, à
Rennes Orléans
Mulhouse Paris comme à Lyon. Au début de
Lorient Vannes
Tours
Blois 1813, les ouvriers de Berg, réduits au
Nantes Nevers chômage, se mettent en grève.
Châtellerault
110 Hauts
60
50
les activités s’élargissent à la gestion
d’une raffinerie à Passy pour traiter le
40 sucre de canne (méthode qu’il nomme
Bonmatin). Il se fait remarquer de
30
l’Empereur après avoir mis au point un
20 procédé permettant de transformer la
betteravedes
Pages 58-59 : Répartition en actionnaires
sucre. de la Banque de France en 18
10 Maire du IIIe arrondissement de Paris
(1800), il est élu au conseil de régence
0
1806 1807 1808 1809 1810 1811 1812 1813 1814 1815 1816 1817 de la Banque de France le 12 octobre
(1) États de la Confédération du Rhin, formée le 12 juillet 1806. 1802. Membre de l’ordre de la Légion
(2) Royaume d’Étrurie (jusqu’en 1809), royaume de Naples (et de Sicile après 1815), royaume de Sardaigne, États de Rome…
d’honneur (janvier 1812) puis baron
(septembre 1812), il devient une des
et 1812 et finissent par assurer le Né à Lyon le 14 février 1773, il passe personnalités les plus actives des
tiers des rentrées fiscales de l’État. La une partie de sa jeunesse en Angleterre cercles de la philanthropie parisienne
masse monétaire en circulation reste avant d’entrer à l’école d’artillerie de et est l’un des fondateurs de la Société
limitée et la Banque de France n’est Meulan en 1793. Officier, il participe d’encouragement pour l’industrie
pasPages en mesure58-59 : d’accroître
Principales destinations
sensible- des à laexportations
conquête françaises
de la Belgique(1806-1817) diri- nationale. Représentant l’industrie de
ment les moyens de paiement. gée par le général Pichegru et à plu- la Seine à la Chambre des Cent-Jours,
Dans ce contexte, seules trois banques sieurs campagnes militaires. En 1796, il est élu comme député de la Seine et
(Pérégaux-Laffitte et Cie, Vassal et Cie, il abandonne la carrière militaire pour de Saumur sous la Restauration.
Périer et Cie) voient leur capital dépas- rejoindre la banque installée depuis À sa mort, le 1er mars 1847, il laisse une
ser les 2 millions de francs. Créée 1786 à Paris (rue Coq-Héron) et une fortune évaluée à 11 millions de francs
dès son arrivée au pouvoir en 1800, filature de coton dont s’occupent son et une des plus grandes collections de
la Caisse d’amortissement permet à père et ses frères. À partir de 1801, botanique et de minéralogie.
Napoléon de pratiquer une véritable
politique d’émission de papier-mon- LE COMMERCE EXTÉRIEUR EN 1816
naie : 444 millions de bons de 1806 Importations•Exportations Balance
à 1814. Face aux prévisions d’un déficit Produits industriels
Produits
important en 1813, Napoléon impose manufacturés
G. Béaur, P. Minard (dir.), vol. 10, « Économie »,
Fibres textiles
Un régent de la Banque de
Éditions de l’EHESS, Paris, 1997.
Produits coloniaux
France : Benjamin Delessert
Coton
Banquier et naturaliste, membre d’une
grande dynastie d’hommes d’affaires Laine
La nouvelle distribution
des terres
Sous l’Empire, la terre reste la base de l’organisation sociale. Tous les paysans ont le souci
de conserver leur bien acquis en héritage, fût-il minime. Depuis l’inflation, posséder une terre
paraît plus qu’avant apporter la sécurité. La propriété foncière est une des pièces maîtresses
de la stabilisation politique et sociale recherchée par Bonaparte. Les rédacteurs du Code civil
lui accordent une place essentielle.
Le règne des inégalités Révolution. Le nombre des proprié- Dans les pays annexés, les ventes
La très grande majorité des paysans taires ruraux s’est élevé de 4 millions des biens nationaux ont des effets
français possèdent une parcelle de en 1789 à 7 millions en 1810, mais près identiques à ceux que la France
terre. Garanties lors du sacre, les de 80 % des paysans sont des petits avait connus dans les débuts de
ventes des biens nationaux ne sont propriétaires qui ne peuvent vivre du la Révolution. En Rhénanie et en
pas remises en cause : près de 10 % seul travail de la terre, ce qui ne les Piémont, les ventes ne commencent
de la surface utile ont changé de empêche pas d’être très attachés à la qu’en 1804. Les modalités des ventes
mains en dix ans. D’un côté, les plus propriété. En interdisant les partages écartent les paysans les plus modestes
riches se sont enrichis : la bourgeoisie des communaux mis à disposition au profit des bourgeois. En Italie, les
s’est assurée de la moitié des terres, des communes pour renflouer leurs ventes accentuent le déséquilibre entre
notamment les meilleures, en tout finances, le régime met fin à l’espoir le nord et le sud. Dans les pays du
cas les plus accessibles depuis les des paysans de récupérer quelques centre et de l’est de l’Europe, pas plus
chefs-lieux de district puis de dépar- terres. qu’en Italie, ne se forme une couche
tement où avaient lieu les enchères.
De l’autre, les paysans ont gagné 35 LA VENTE DES BIENS
à 40 % des terres et, parmi eux, se DU CLERGÉ EN 1808
remarquent quelque 600 000 primo-
accédants. Cette classe des acqué-
reurs, dont le régime espère l’appui,
n’a guère d’unité et n’est soudée que
par la crainte d’une dépossession des
acheteurs.
Si elles ne profitent pas principalement
aux paysans, à l’exception du Nord et
dans les zones éloignées des villes,
les ventes continuent mais avec moins
d’ampleur, les lots restants étant des
terres médiocres, procurant un faible
revenu.
Du coup, des acquéreurs modestes
les achètent : l’Empire correspond à
un accroissement du nombre des pro-
priétaires de moins d’un hectare. Cette
diminution des ventes est aussi liée à
un retour des émigrés, qui récupèrent
leurs biens qui n’ont pas été vendus.
Biens du clergé
Si les autorités ont fait échouer les ten- (biens de première
tatives des émigrés de reprendre leurs origine, en % de la
surface du district)
biens par la voie judiciaire, les acqué-
moins de 5 200 km
reurs revendent ces biens, réalisant
de 5 à 10
souvent des bénéfices importants. En Source : B. Bodinier, É. Teyssier, L’Événement le plus important
plus de 10 de la Révolution :la vente des biens nationaux en France
1810, la noblesse a retrouvé près du et dans les territoires annexés 1789-1867, Société des études
données non disponibles
quart du patrimoine perdu pendant la robespierristes, Éditions du CTHS, 2000.
Le sacre de la propriété
Le Code civil uniformise les règles DIEPPE
CANY NEUFCHÂTEL
de transmission du patrimoine.
Une grande place est accordée aux
contrats de mariage et aux problèmes
de partage des successions. Les inté-
MONTIVILLIERS CAUDEBEC
rêts des enfants légitimes l’emportent GOURNAY
sur ceux des enfants naturels. Le
Code civil, en permettant aux héritiers
de sortir de l’indivision, a contribué à
accroître le morcellement de la pro- Biens achetés par ROUEN
priété. L’Empereur ne satisfait pas là des Rouennais PONT-AUDEMER
officielle.
Limite de district VERNEUIL
La défense de la propriété et la figure
Source : B. Bodinier, É. Teyssier, L’Événement
du « propriétaire » sont des socles de la le plus important de la Révolution : la vente
cohésion sociale et de la consolidation des biens nationaux en France et dans les territoires
annexés 1789-1867, Société des études 20 km
du régime. Dans certaines régions, la robespierristes, Éditions du CTHS, 2000.
suppression du droit d’aînesse au pro-
fit d’un partage à parts égales remet
en cause des traditions bien ancrées et LA VENTE DES BIENS NATIONAUX EN
aboutit à une réorganisation profonde ALLEMAGNE SOUS LE PREMIER EMPIRE
de la structure foncière. Si la solidarité Mer Baltique
familiale sort profondément renforcée
par le Code civil, le texte durcit l’ex- Mer Pages 60-61 : Les achats de biens en Haute-Normandie
du par les Rouennais et les Parisiens en 1808
Source : B. Bodinier, É. Teyssier, L’Événement le plus important
clusion des marginaux, filles-mères Nord
LA PROPRIÉTÉ Brême
Cassel Dresde
Cologne
Francfort
Vente de biens nationaux
plus de 10 % du sol cultivable
L’économie agricole
entre innovations et fragilités
Les campagnes connaissent une croissance économique, qui relève davantage d’un rattrapage
que d’une réelle « révolution » agricole. En dépit des transformations liées à l’économie de guerre,
le système agricole reste encore largement dans les cadres de l’Ancien Régime (assolement,
vaine pâture, jachère, etc.) alors que les campagnes doivent nourrir des populations urbaines
et des soldats toujours plus nombreux.
Une agriculture 1809) et par le pic de 1812. La hausse La vigne connaît un essor certain,
traditionnelle des fermages se poursuit également. fondé sur la hausse du prix de l’hec-
La culture du blé l’emporte toujours La culture de la pomme de terre est tare et l’accroissement de la consom-
sur la prairie artificielle et l’élevage, venue s’insérer dans les assolements mation intérieure et des exportations.
d’autant que le prix du blé n’a cessé traditionnels depuis la période révolu- En Côte-d’Or, Beaune, grand mar-
de monter entre 1800 et 1812. La spé- tionnaire. Elle est présente sur 8 % des ché national et international des vins
cialisation de certaines régions dans terres labourables en Moselle, 5 à 6 en de crus, achemine par roulage des
des productions destinées au mar- Savoie, 2 à 3 en Creuse et en Haute- quantités de vins vers la Rhénanie et
ché urbain s’intensifie : c’est le cas du Vienne. L’usage du pain « blanc » res- les pays mosellans. Même les vins du
pays d’Auge ou du Charolais pour la tant la norme, l’extension de la pomme Sud-Ouest, qui auraient pu souffrir du
production de viande destinée à Lyon de terre est plutôt due à l’apparition blocus maritime, trouvent des débou-
ou Paris. La période est caractérisée d’une surcharge démographique, chés dans les parties septentrionales
par une hausse lente et graduelle des voire d’une paupérisation au sein de la de l’Empire et l’Europe du Nord.
prix, marquée par des creux (1804 et société rurale.
Les limites de l’innovation
Les innovations sont réelles mais limi-
L’ÉLEVAGE DE MÉRINOS EN 1813 tées dans l’espace. Les cultures indus-
trielles connaissent des succès specta-
culaires : oléagineux en Normandie et
en Picardie ; ailleurs, le colza se répand
dans la plaine de Caen et dans le pays
de Caux pour pallier l’absence d’huile
* de baleine comme d’huile d’olive, au
risque d’aggraver par son extension les
effets de la disette de 1812. La politique
volontariste est marquée par le décret
du 25 mars 1811 qui introduit la bette-
rave sucrière dans l’Empire, prévoyant
Nombre de mérinos l’interdiction pour le 1er janvier 1813
10 du sucre de canne et prescrivant pour
100 1811 l’ensemencement de 32 000 hec-
1 000 tares dans certains départements choi-
6 500 sis par les autorités. En dépit de réelles
réussites (le Bas-Rhin avec 3 500 hec-
(*) Seine-et-Oise : 57 000 tares et ses 500 000 kilos de sucre
Part des mérinos produits par 14 sucreries en 1813),
et ovins améliorés
dans le total l’expérience ne dure que quatre ans.
des ovins (en %) En général, les cultures nouvelles
moins de 0,25 (industrielles) sont encore admises
de 0,25 à 1
200 km
avec méfiance par le monde paysan.
de 1 à 10 Dans la continuité des initiatives prises
plus de 10 par Louis XVI qui achète dès 1786
Source : Atlas de la Révolution française, G. Béaur, P. Minard (dir.),
données non disponibles vol. 10, « Économie », Éditions de l’EHESS, Paris, 1997. des mérinos espagnols à son cousin
EN CONCLUSION
Les dynamiques
économiques
La domination européenne de
l’économie française (dans le domaine
de l’industrie du luxe ou du textile)
s’est développée grâce à l’expansion
territoriale et au déplacement des
frontières, qui ont favorisé les exportations
et l’approvisionnement des industries
françaises en matières premières venues
des territoires conquis, même si elles ont
aussi pu faire naître des conflits d’intérêts
entre négociants.
Dynamiques
culturelles
et résistances
Par de nombreux aspects, le régime napoléonien est un héritier
des Lumières. L’urbanisme des métropoles européennes
prolonge les perspectives de la « ville moderne », plus
fonctionnelle, plus grandiose, plus saine. Savants et artistes
sont mobilisés autour de ces projets, qui portent la marque
d’une véritable ambition de civilisation, sur le modèle de
la romanisation antique. Celle-ci témoigne aussi d’une forte
centralisation : Napoléon apparaît comme le dernier avatar
des « despotes éclairés ». Si les sciences et les arts sont
encouragés, les institutions intellectuelles sont placées sous
surveillance, avec la volonté d’en faire de véritables appareils
idéologiques d’État. Si des endroits comme les sociétés
de lecture ou les loges maçonniques prolongent la sociabilité
des Lumières, le libre débat y est proscrit. La centralisation
renforce le poids de Paris, capitale de l’Empire, réserve
l’éducation à une élite étroite liée à l’appareil d’État et confond
« civilisation » et « francisation ». Finalement, l’Empire n’a guère
les moyens de son ambition, ni financiers, ni humains (du fait
de la désaffection d’une bonne partie des élites qu’il avait
cherché à rallier). C’est dans l’opposition que se construisent
les sensibilités intellectuelles nouvelles et que se manifeste
le renouveau du sentiment religieux.
La « nouvelle Rome » Les autorités s’attaquent particulière- l’essentiel relève de la police munici-
Paris, ville de 622 000 habitants, est ment aux rues tortueuses et aux mai- pale, au sens traditionnel du terme :
la capitale du Grand Empire, la pre- sons entassées qui sont potentielle- privilégier les aménagements utilitaires,
mière place financière du continent, le ment des vecteurs d’épidémies. Les ordonner les flux urbains. La priorité va
baromètre des modes et des divertis- efforts pour éclairer les rues visent à à l’eau et aux fontaines, à l’alimentation
sements. Après la relégation du pape, lutter contre la criminalité. Comme (marchés et passages commerciaux au
Napoléon a même songé à en faire la l’illustrent les chantiers ouverts dans centre, abattoirs en périphérie), à la voi-
nouvelle métropole de la catholicité. Paris à l’occasion du mariage de 1810, rie (numérotation uniforme et pavage
L’administration est confiée à deux l’urbanisme est mis au service de la des rues, réverbères, ponts) et à la
préfets, le préfet de la Seine et le préfet propagande impériale. salubrité (éloignement des cimetières
de police. C’est toutefois le ministère Si de grands chantiers monumentaux dans les faubourgs). La spécialisation
de l’Intérieur qui coordonne la politique sont lancés (les arcs de triomphe, des espaces urbains s’accentue : pro-
de la ville. la Madeleine, la place Vendôme), menades, commerces, résidences.
Abattoirs Aqueduc
de l’Ourcq
Abattoirs
Conservatoire
1 2 de musique 5
Bourse et 3
Arc de triomphe Temple de la Gloire tribunal Marché St-Martin
de l’Étoile (Madeleine) de commerce
Opéra
Colonne d’Austerlitz Abattoirs
(place Vendôme)
Marché Halle 6
des Jacobins au blé
Rue de Rivoli Marché des Enfants-
Projet de palais (St-Honoré) Rouges (Temple)
du Roi de Rome Arc de triomphe Marché
Quai des Innocents
(colline Chaillot) des Invalides Palais du Carrousel 4 Archives impériales
du Corps Fontaine Fontaine
Pont d’Iéna législatif Pont des Arts du Châtelet
7 de la place
Obélisque du Pont-Neuf Fontaine Desaix des Vosges
(place Dauphine)
Abattoirs 10 Quai et pont St-Michel Fontaine
9
Marché St-Germain
de la Bastille 8
Quai de Montebello
Marché de la Vallée 11
Rue de Tournon Église
Ste-Geneviève
Perspective Halle aux vins
du Luxembourg Rue d’Ulm
Monuments publics Muséum
d’Histoire
Aménagements naturelle
de la Seine 12
Voirie Abattoirs
Approvisionnement Limite d’arrondissement
Se
alimentaire
in
1 N° d’arrondissement
e
Approvisionnement
en eau Limite de quartier 1 km
L’aménagement des embellissement des places du Tibre et napoléonienne a peu recouru aux
métropoles européennes du Panthéon. Sont encore dégagés et expropriations. Les réalisations consti-
Napoléon construit dans toutes les mis en valeur le Colisée, le Capitole, tuent une infime partie des grandioses
villes du Grand Empire, à Mayence, à la fontaine de Trevi. Des perspectives plans d’ensemble. Des fonds extraor-
Karlsruhe, à Düsseldorf, à Amsterdam. vastes sont dessinées pour l’accès au dinaires prévus pour les grands tra-
À Anvers, pièce centrale du dispositif Forum ou à la colline du Pincio. Un peu vaux sont généralement absorbés par
militaire français dans le nord de l’Eu- partout, les dégagements de perspec- les dépenses courantes, la voirie et
rope, les aménagements portuaires tives urbaines, percées de boulevards l’éclairage public en représentant une
prolongent ceux de la fin du Moyen ou la mise en valeur des monuments part significative.
Âge et orientent ce que sera le déve- sont facilités par la sécularisation des
loppement de la ville au XIXe siècle. immenses biens ecclésiastiques. Créations et restaurations
Autour des bassins, le nouvel arse- Contrairement aux opérations ulté- Napoléon fut un créateur de villes,
nal est englobé dans les fortifica- rieures d’urbanisme, l’administration auxquelles son nom a généralement
tions urbaines. Napoléon envisage la
construction d’une ville nouvelle, éga- MILAN, CAPITALE CULTURELLE
lement fortifiée, sur la rive gauche de
l’Escaut.
Mais c’est certainement dans la pénin- Porta Porta
Orientale Romana
sule italienne que les grands chantiers
urbains sont les plus nombreux. Milan,
qui tient une place particulière dans
l’épopée napoléonienne, se voit dotée
d’une grande place circulaire autour Ospedale
de la citadelle, le Forum Napoléon, Monte Maggiore
Napoleone
où convergent des boulevards pro-
Porta
menades qui aèrent une ville d’aspect Nuova Duomo
encore très médiéval. Une semblable Teatro Palazzo
alla Scala Reale
place circulaire est réalisée à Naples, Porta
devant le Palais royal. Comasina
En 1809, l’administration de Rome
annexée est confiée à un jeune pré-
fet, Camille de Tournon. Il s’attache à Castello
Sforzesco
la régénération de la Ville éternelle par Porta
Ticinese
des travaux d’« utilité publique » dont
la finalité est de restaurer sa gran- Foro Buonaparte Sant’Ambrogio
deur antique, tout en la dotant d’équi-
pements publics dignes d’une ville
moderne. Le décret de Saint-Cloud du
27 juillet 1811 fixe le plan des travaux,
alimentés par un fonds spécial d’un
million par an : fouilles archéologiques, Source : M. Roberti, Milano, Capitale napoleonica.
La formazione di uno Stato moderno, 1796-1814, Porta
perfectionnement de la navigation du Fondazione Treccani degli Alfieri per la Storia Vercellina 500 m
Tibre, achèvement du pont de Sixte et di Milano, Milan, 1946.
1 Préfecture
Pages 68-69 : Les agrandissements d’Anvers
2 L’Auberge
5 3 Grandes casernes
4 Manutention
5 Hôpital militaire et civil
6 Petites casernes
7 Quartier des fonctionnaires
6 (maisons en pisé)
4
3
Le projet d’unification
intellectuelle et artistique
Face aux désordres que la Révolution aurait fait subir au monde culturel et intellectuel,
l’Empereur cherche à encadrer les activités des artistes, savants et écrivains pour les orienter
vers une glorification de son action. Il s’immisce dans les affaires littéraires, restructure les
institutions culturelles nationales. Mais, en France comme en Europe, « l’empire des Muses »
se montre rétif à cette domestication et engendre de nombreuses résistances.
3 000 20
2 000
10
1 000
0 0
1810 1813 1816 1819 1822 1825 1828 Arrond. Ier IIe IIIe IVe Ve VIe VIIe VIIIe IXe Xe XIe XIIe
LES ABONNÉS À LA PRESSE LOCALE (1811-1812) Napoléon restreint à partir de 1806 leur
liberté, rétablit la censure et fait fermer
plusieurs salles à Paris (on passe de
Mer
20 salles en 1803 à 8 en 1807) et en
Mer Baltique province. La répartition quasi sociolo-
Pages 70-71 : La productiondde livres (1810-1829)
u Nord gique instaurée (l’opéra est réservé au
« beau
Pages 70-71 : Les imprimeurs monde
à Paris ») n’empêche pas l’es-
(1805-1811)
sor de divertissements populaires de
Journaux politiques « contournement ».
Feuilles d’annonces Napoléon intervient encore en 1810
Source : A. Cabanis, La Presse sous le Consulat et l’Empire, Société des Études, Paris, 1975.
2 000
Une organisation impériale
des sciences
3 000
Après la réorganisation, en janvier
1803, de l’Institut national des arts,
4 000 sciences et lettres, les autorités favo-
risent la mise en place d’une nou-
OCÉA N
velle organisation institutionnelle des
AT L ANT IQU E M er
A d r i a t i qu e
sciences promouvant la spécialisation
autour de véritables « patrons ».
Sous l’Empire, Georges Cuvier, qui
contrôle les collections du Muséum
d’histoire naturelle, incarne cette nou-
Mer Méditerranée
200 km velle figure du savant impérial. Aux
côtés de l’anatomie comparée, la sta-
à un « grand siècle » mais la disparition, davantage leurs conseils. Les artistes tistique, la météorologie et la science
en 1807, de la Décade philosophique sont nombreux à répondre aux com- des mines fournissent les outils théo-
et du Mercure de France témoignent mandes, à exposer aux salons et à riques et matériels au gouvernement
des difficultés rencontrées par le pou- recevoir des prix, même si leur mis- des hommes et des territoires.
voir pour domestiquer les lettres. En sion est de représenter les prouesses Alors que les mesures des crânes ou
Pages 70-71
France comme : Les abonnés
en Allemagne, à la presse
la géné- locale (1811-1812)
de l’Empereur, dont la politique de des forces musculaires permettent de
ration de Chateaubriand et de l’écrivain mécénat mérite d’être nuancée : par- légitimer de nouvelles formes de hié-
« sacré » accepte mal la subordination cimonieux, il lésine sur les sommes à rarchies sexuelles ou raciales, l’idéal de
des lettres au pouvoir politique. dépenser et son amour pour les arts régénération porté par la République
Dans le domaine des arts, Fontaine en n’est pas esthétique mais ostentatoire. tend à s’effacer au profit de l’affirma-
architecture et Denon pour les beaux- Conscient du rôle joué par les théâtres tion d’un ordre politique et social fixe
arts assistent l’Empereur qui accepte dans la politisation des esprits, et stable.
Institutions et enseignement
Les réformes réalisées depuis le Consulat ont pour effet d’organiser un système de formation
et de reproduction d’élites destinées au service de l’État. Le régime napoléonien contribue
à modifier le système pédagogique et l’organisation de la recherche en France. En limitant l’accès
de l’enseignement secondaire aux enfants d’une élite restreinte et choisie, Napoléon abandonne
les idéaux révolutionnaires de démocratisation par l’école.
La fabrication des élites formés par l’École des arts et métiers. pour dénoncer le pouvoir des « pro-
Dès 1803, l’Institut national des Du Muséum d’histoire naturelle à la fesseurs » et en appeler à un retour de
sciences, arts et lettres perd son rang Bibliothèque impériale en passant l’idéal encyclopédique.
de lieu central des savoirs au profit des par l’École des langues orientales,
grandes institutions pédagogiques. ces grandes institutions, dirigées par La mise au pas de l’Université
La réforme progressive du concours de véritables « patrons » qui prennent Entre 1806 et 1811, une série de lois
d’entrée de l’École polytechnique le contrôle des instruments de dif- organisent l’Université impériale, qui
favorise le recrutement des enfants fusion des savoirs, donnent corps à instaure le monopole de l’État en
des élites sociales et transforme cet la rencontre entre un enseignement matière d’instruction et d’éducation
établissement en un laboratoire de la et une recherche de haut niveau qui publiques. Le chef de l’Université est
technocratie d’où devront sortir des renforcent le statut de Paris comme un grand maître (Fontanes), assisté
serviteurs de l’État, qui se distinguent capitale scientifique en Europe. À par- d’un Conseil, ayant sous ses ordres
progressivement des ingénieurs tir de 1810, des voix se font entendre les inspecteurs généraux.
Administration générale
du Nord Groningue
Siège d’académie
en 1808 Grand maître de l’université
Leyden Münster Nouvelle académie Chancelier Conseil
créée par la suite de l’université de l’université
10 conseillers
Trésorier à vie
Source : F. de Dainville, J. Tulard, Atlas administratif
Douai ordinaires
Manche Mayence Inspecteurs généraux
Amiens de l’université
Rouen
Metz
Caen
Recteurs des académies
Académies
Paris Strasbourg
Nancy
Inspecteurs Conseils
Rennes des académies académiques
Orléans Dijon 10 membres
Angers
Bourges Besançon
Facultés
Établissements d’enseignement
Poitiers doyens/professeurs
OCÉA N Genève
Limoges Lycées
AT L ANT IQU E Lyon
Riom proviseurs/censeurs/professeurs
Napoléon et les bibliothèques de leur fonds. Néanmoins, en décen- devienne la « plus riche du monde ».
Une vaste entreprise de réorganisa- tralisant le budget de fonctionnement L’arrivée de Barbier comme biblio-
tion des bibliothèques municipales est de ces institutions aux municipalités, thécaire en 1811 constitue une étape
menée à partir de l’arrêté du 26 jan- l’État participe à l’atonie de ces biblio- importante. Dès 1805, un crédit spécial
vier 1803 confiant aux municipalités la thèques municipales. est destiné à permettre l’acquisition des
gestion des livres des écoles centrales Le pouvoir s’intéresse à la Bibliothèque meilleurs ouvrages, des manuscrits ou
qui viennent enrichir les bibliothèques impériale, dont le déménagement au des chartes rares. Les manques sont
créées depuis janvier 1794 dans la palais du Louvre reste un projet inac- ainsi palliés par achat, réquisition ou
plupart des villes. Le 22 septembre compli, en raison de la médiocrité du confiscation aux dépens des biblio-
1806, un arrêté impose l’envoi d’un budget. Napoléon nourrit des projets thèques françaises ou étrangères.
rapport annuel sur leur fonctionne- particulièrement ambitieux pour une Comme Denon pour les arts, Chardon
ment et la confection d’un catalogue bibliothèque dont il espère qu’elle de La Rochette ou le docteur Prunelle
Anvers
Calais Bruxelles Maastricht
Boulogne-sur-Mer Lille
Liège
Douai Valenciennes
Manche Abbeville Cambrai Avesnes
IIe IIIe
Amiens Mézières Trèves Ve
Cherbourg Rouen Beauvais
Luxembourg Bibliothèque Opéra
Caen Soissons Ier impériale
St-Lô Metz IIIe Ve VIe
Évreux Paris Châlons Conservatoire
Strasbourg
St-Brieuc Versailles Meaux Bar-sur-Ornain des Arts
Melun Nancy Sei
Dinan Alençon n e Louvre et Métiers
Quimper Troyes IVe Palais VIIe
Chaumont des Beaux-Arts VIIIe
Le Mans
Lorient Orléans
Vesoul
Vannes Tours Blois
Dijon Xe
Nantes Angers Bourges Nevers Besançon IXe
Rue de l’École
Châteauroux Autun Lons- de Médecine
Collège
Poitiers le-Saunier de France
Moulins Mâcon
Niort Châteaumeillant Montluçon Genève
La Rochelle Bourg- XIe
Rochefort Guéret Villefranche en-Bresse
Limoges XIIe Muséum
Montbrison
Saintes
Angoulême Lyon Chambéry Ivrée d’Histoire
OCÉA N Ambert Observatoire naturelle
ATL ANT IQU E Périgueux Tulle Grenoble
Le Puy Turin
Valence Meudon Alfort
Bordeaux Privas
1 km
Gap Arcueil
Rodez Académies
Agen Montauban Orange Digne et sociétés Centres d’enseignement
Mont-de-Marsan savantes et bibliothèques
Albi Nîmes Carpentras
Avignon Draguignan
Auch Montpellier Aix scientifiques et techniques
100 km Toulouse
Tarbes Marseille littéraires et artistiques
Carcassonne Bastia
Société d’agriculture Foix Mer Toulon encyclopédiques
Société savante Perpignan Méditerranée 1 2 3-4 Nombre 1 2
Société d’agriculture Sources : F. de Dainville, J. Tulard, Atlas administratif
de l’Empire français, Droz, Genève, 1973. J.-P. Chaline, Sociabilité
Source : Atlas de la Révolution française,
et société savante É. Ducoudray, R. Monnier, D. Roche (dir.),
et érudition, les sociétés savantes en France (XIXe et XXe siècles), CTHS, 1995. vol. 11, « Paris », Éditions de l’EHESS, Paris, 2000.
Le réveil de la franc-maçonnerie qui n’empêche pas les tensions entre contrôle des collections est l’objet
Après un moment d’essoufflement le pouvoir et le mouvement maçon- de luttes particulièrement vives entre
sous la Révolution, le mouvement nique à la fin de l’Empire. Signe du rai- les professeurs. Ces derniers rejoin-
maçonnique renaît à la fin du Directoire. dissement du régime à leur égard, cer- dront les serviteurs de l’Empereur qui,
Pages 74-75 : La franc-maçonnerie en Normandie (1803-1815)
En Normandie, où la maçonnerie s’était taines loges prennent leurs distances en retour, les intégrera dans les élites
implantée dès 1740 et avait réuni envi- dès 1808. Dans les régions annexées, sociales et administratives. Certains,
ron 2 000 membres jusqu’en 1789, la maçonnerie française (le Grand comme Georges Cuvier, utiliseront
17 loges anciennes sont recréées, aux- Orient) prend en charge les loges exis- leur position d’autorité pour tenter de
quelles s’ajoutent 18 ateliers fondés tantes et en crée de nouvelles. En Italie réduire au silence leurs adversaires
entre 1800 et 1813 (dont 13 entre 1805 ou en Allemagne, où des établisse- qui, tel Lamarck, parviendront néan-
et 1813). ments pouvaient rivaliser par la qualité moins à faire émerger certaines résis-
Moins nombreuses que sous l’Ancien de leurs membres avec les organisa- tances contre cette nouvelle organisa-
Régime et surtout concentrées dans tions françaises, les loges se tournent tion des savoirs.
les villes grandes et moyennes, ces contre l’hégémonie de la France. En En province, la période est marquée
loges restent attrayantes : près de 2 145 Normandie, les loges reconquièrent par l’essor de nombreuses socié-
Normands ont été initiés entre 1800 et leur autonomie, marquée par l’essor tés savantes (près d’une centaine en
1815, mais le recrutement est devenu des membres issus de la bourgeoisie 1810). Encadrées par l’État, elles réu-
plus homogène et exclusif. Là comme moyenne aux dépens des notables. nissent les nouvelles élites impériales
ailleurs, les loges sont prises en main autour des travaux sur l’Antiquité et
par un petit groupe de notables choi- L’essor des sociétés savantes les « trésors » locaux. La création de
sis. La disparition des femmes des La réorganisation de 1803 de l’Institut l’Académie celtique en 1805 souligne
listes du personnel est un des signes national des sciences, des arts et des la volonté de l’Empereur d’asseoir la
de ce resserrement sociologique qui lettres rend désormais caduc le pro- supériorité de la nation française sur
se traduit encore par la marginalisation jet des Idéologues de construire une les origines celtes. L’État encourage par
progressive du monde de l’échoppe et « science générale de l’homme » fondée ailleurs des sociétés dont les travaux
de la boutique. Domine donc le monde sur l’unité des savoirs. Le modèle des s’inscrivent dans les préoccupations
de la bourgeoisie constituée des institutions encyclopédiques tend pro- du régime : la Société d’agriculture de
représentants de l’État (préfets, sous- gressivement à s’effacer pour laisser la Seine et la Société d’encouragement
préfets, maires, etc.), fonctionnaires, la place à des sociétés savantes rat- pour l’industrie nationale deviennent
« propriétaires », professions libérales, tachées à une grande institution péda- ainsi des lieux de rencontre entre les
marchands et officiers. Signe de cette gogique. À partir de 1807, la Société personnalités scientifiques, les admi-
proximité de la franc-maçonnerie avec d’Arcueil, organisée autour de Laplace nistrateurs et les industriels. Les débats
l’État, près de 47 % des maçons sur et de Berthollet, s’impose comme une politiques y sont toujours proscrits mais
l’ensemble du territoire sont membres succursale de l’École polytechnique. on y discute de l’état de l’opinion, de la
du corps préfectoral. Ce mouvement de polarisation des situation militaire ou politique. Est-ce la
À Paris, les loges les plus presti- lieux de savoir renforce le statut de raison pour laquelle le Code pénal de
gieuses apparaissent comme les suc- capitale scientifique de Paris. 1810 renforce la surveillance sur ces
cursales des cabinets ministériels, ce Au Muséum d’histoire naturelle, le sociétés savantes et littéraires ?
Nombres d’élèves
Source : F. de Dainville, J. Tulard,
ecclésiastiques
français, Droz, Genève, 1973.
Atlas administratif de l’Empire
EN CONCLUSION
Dynamiques
culturelles
et résistances
Mettre les arts, les sciences et les
lettres au service de sa grandeur
personnelle, voilà l’ambition du mécène
Napoléon Bonaparte. Des représentations
iconographiques aux monuments,
il s’agit de valoriser la figure du héros
et de l’imperator. Plus encore que la
peinture et la sculpture, l’architecture
donne à l’Empereur l’occasion de
formuler une esthétique. Par le biais des
académies et des pensions distribuées
par son administration, il intervient
souvent directement dans les choix
esthétiques. Mais sa soif de grandeur
et de majesté bute souvent sur les
exigences d’économie et les résistances
des artistes et écrivains, souvent rétifs à
la commande. Reste que Paris s’impose
comme la grande capitale de la civilisation
européenne, attirant, par ses musées et
ses institutions scientifiques, des visiteurs
de plus en plus nombreux.
L’Europe du refus
Les oppositions au pouvoir napoléonien se renforcent à partir
de 1808. Aux traditionnels courants souterrains du refus de
la dérive autoritaire du pouvoir personnel chez les républicains
intransigeants, ou de la contestation de l’usurpation dynastique
chez les fidèles de la cause bourbonienne, s’ajoutent
les mécontents qui se multiplient par suite des difficultés
économiques, du poids croissant des taxes sur les produits
de consommation, ou de l’impôt du sang qui arrache en masse
les jeunes conscrits à leurs familles.
Ce mécontentement, sensible dans les régions ruinées
par le blocus continental, est bien souvent attisé par un clergé
majoritairement hostile depuis l’arrestation du pape en 1809.
Mais c’est l’insurrection espagnole de 1808 qui cristallise
toutes ces oppositions diffuses. Pour les uns, c’est le
témoignage de l’invincibilité de l’alliance du trône et de l’autel.
Pour les autres, c’est la vitalité du sentiment national
et l’indice que la liberté des peuples a changé de camp.
Tous se retrouvent provisoirement autour d’une aspiration
à la paix et à la monarchie constitutionnelle, telle que
la Constitution de Cadix de 1812 semble l’esquisser.
Tournant le dos à ces aspirations, renforçant les aspects
les plus policiers de son régime, Napoléon repousse
vers l’immense Russie les limites de ses forces
et de son ambition, renforçant chez ses sujets le sentiment
que la guerre est désormais sans fin.
Insurrections et zones
de résistance en Europe
Les oppositions à Napoléon furent diverses. À partir de mai 1808, l’insurrection espagnole
et l’enlisement des troupes françaises dans la péninsule marquent un tournant. Le sentiment
national se retourne contre les héritiers de la Grande Nation. Il y a d’autres soulèvements locaux :
la Calabre de 1806 à 1808, le Tyrol en 1809. Les frustrations nationales redoublent
le mécontentement envers le blocus continental, en témoigne une intense contrebande.
P
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L’EUROPE DU REFUS • 81
tard, la révolte est sévèrement répri- le tabac dans le département de la confins de langue allemande où le peu
mée, du fait de la brutale reconquête Moselle cristallise de vifs ressenti- d’ouverture, l’étroite soumission au
par les troupes de Lefebvre, mais ments en ce qu’il s’attaque à une clergé et l’absence de contact avec
aussi de l’abandon des insurgés par tradition culturelle bien enracinée en d’autres façons de penser rendent sou-
l’Autriche. Lorraine allemande. Dans la Roër, ce vent les habitants méfiants et peu aptes
L’Allemagne. En Allemagne, c’est sont les cantons reculés de Monschau à accepter le message de la nouveauté.
une agitation diffuse qui se produit, et de Gemünd qui enregistrent annuel- Pour certains administrateurs, « l’empa-
appuyée en sous-main par le ministère lement le plus grand nombre de délits thie germanique » constituerait ainsi un
prussien, relayée par les associations forestiers, autre forme d’expression de frein à la diffusion de la vaccination.
urbaines du Tugendbund. Les motifs mécontentements. Des révoltes sporadiques éclatent en
de révoltes sont souvent alimentés par La Westphalie et le Wurtemberg. Westphalie et dans le Wurtemberg ;
les traditions frondeuses de certaines Les innovations françaises en matière l’étudiant Staps prépare un attentat
populations : la décision du minis- administrative ou économique ne sont contre Napoléon, qui fournit le prétexte
tère des Finances en 1811 d’interdire pas toujours bien accueillies dans les à la dissolution du Tugendbund.
ROYAUME
Mer DE SUÈDE
Mer
du ROYAUME
Copenhague Baltique
ROYAU M E -UN I DE DANEMARK Tilsit Kaunas
Nord
Niémen
Friedland
Héligoland Dantzig Eylau
Lübeck
Hambourg R OYAU M E D E P R U S S E
Brême Elb EMPIRE
Weser
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Amsterdam Berlin tul
Londres
e GRAND DE
Walcheren Magdebourg Varsovie
CONFÉDÉRATION Od DUCHÉ RUSSIE
Manche Bruxelles Erfurt er
Iéna Auerstedt DE VARSOVIE
Rhin
D’ITALIE
Rhôn
ME Somosierra
re
Saragosse
Sofia
Adriatique
Madrid ROYAUME EMPIRE
Barcelone Rome
Tage ROYAUME OTTOMAN
D’ESPAGNE
DE NAPLES
Valence Naples
Cordoue ROYAUME
Baléares DE SARDAIGNE Mer
Bailén Calabre Corfou
Tyrrhénienne
Carthagène Mer Maida
Athènes
ar Palerme
ROYAUME
DE SICILE
Médit er ranée
Malte
Insoumission et désertion
Au cours de l’année 1813, la légende de l’« ogre de Corse », venu de son île pour dévorer
des jeunes gens, se répand dans les campagnes. Les difficultés militaires et le rappel de conscrits
toujours plus jeunes grippent les rouages de la machine. Les effets immédiats sont des taux
massifs de désertion, mais il y a des variables chronologiques et régionales. La légende
de l’« ogre » est entretenue par les pertes militaires, dans des guerres incertaines et lointaines.
Une insoumission récurrente taux est beaucoup plus élevé dans les à la crainte des jeunes Italiens de mou-
mais inégale départements de l’Est. rir sans sacrements sur le champ de
La désertion (abandon de son régiment Dans les territoires non français, l’in- bataille, on crée un corps d’aumôniers
par le soldat après son incorporation) troduction de la conscription provoque militaires en 1804, mais cela provoque
est inséparable de la vie militaire. un fort taux d’insoumission. Dans les la colère des jacobins.
L’insoumission est un phénomène départements italiens, le contingent Dans les départements rhénans, à
davantage lié aux exigences nouvelles est deux fois plus élevé qu’en France l’inverse, la charge est moins lourde et
du service militaire ; c’est le refus (on et les levées militaires entraînent des l’insoumission plus faible. La désertion
parle aussi de réfractaires) de répondre révoltes dans le royaume. Raisons éco- est en revanche élevée, mais elle est
à l’appel. Les insoumis n’ont jamais été nomiques, raisons politiques (partisans motivée par le dénuement de la troupe
incorporés, ils sont toutefois compta- de l’Ancien Régime) et raisons reli- et concerne des groupes qui ont l’habi-
bilisés dans les quotas de la conscrip- gieuses se conjuguent. Pour répondre tude de passer d’une armée à l’autre.
tion, à la différence des déserteurs.
Les moyens d’échapper à l’incorpora-
tion sont multiples, de la fuite dans les LES DÉSERTEURS (1799-1805)
bois à la mutilation volontaire. Les infir-
Escaut Deux-
mités, la surdité, le rachitisme, la folie Lys Nèthes Meuse-
Roer
Dyle Inférieure
et le défaut de taille (moins de 1,48 m) Pas- Ourthe
de-Calais Jemmapes Rhin-
sont des motifs fréquents d’exemption, Nord Sambre- et-
M a n c h e et-Meuse Moselle
et il n’est pas toujours facile de débus- Seine-
Somme Forêts Sarre
Mont-
Inférieure Aisne Ardennes
quer le falsificateur. Les réfractaires Tonnerre
Pô
bataille (6 %), mais les batailles sont (faisait partie du Grand-duché de Toscane, Plaisance
réuni à la France en 1802) TARO Parme
de plus en plus meurtrières, tandis GÊNES
G U R I E
que les hôpitaux restent des « anti- Nombre d’hommes LI Chiavari
portés sur les tableaux : 922, Savone Gênes APENNINS
chambres de la mort ». Une attention MONTENOTTE Florence
ainsi répartis (pour 1806-1810)
Mer o
croissante est portée à la médecine Dispensés Ligurienne Livourne Arn
Réformés
militaire par un corps d’officiers de de service (119) Mer
(557)
santé, mis en place au moment de la 12,9 % Méditerranée Portoferraio
60,4 %
Révolution, qui compte des personna- Corse
Île d’Elbe
lités remarquables comme Larrey ou 50 km
Desgenettes : ramassage des blessés Déserteurs,
insoumis, Incorporés
par les ambulanciers, prévention des réfractaires (177) Source : F. Frasca, Les Italiens dans l’armée française
1796-1814 : recrutement et encadrement,
épidémies par aération et fumigation (68) 19,2 % thèse de doctorat, université Paris IV,
7,5 % A. Corvisier (dir.), 1992.
des locaux, cautérisation des plaies.
Une répression au succès inégal Pour lutter contre l’insoumission, l’État bureaucratique et des mesures coer-
Vers 1810-1811, le rendement de la fait pression sur les familles en impo- citives. À partir de 1813, les difficultés
conscription atteint son maximum. Il sant le logement de garnisaires, ou anéantissent ces efforts : l’insoumis-
reste toutefois un taux incompressible en taxant les notables qui profitent de sion devient massive, de même que la
de 4 à 6 % de déserteurs. Les condam- la situation pour :employer
Pages 82-83 une des
La répartition main- désertion
conscrits dansrégions
dans trois les territoires
d’Italierattachés.
(1806)
nations lourdes (galères, peine de mort) d’œuvre bon marché. De temps à De véritables petites armées d’insou-
contre les déserteurs étant souvent autre, il a recours aux colonnes mobiles mis se forment, entretenant un brigan-
inefficaces, on a recours aux amnis- qui traquent les fugitifs. dage endémique dans les régions à
ties périodiques et aux regroupements La conscription reste impopu- l’écart des grands axes de communi-
dans des régiments disciplinaires où laire mais son meilleur rendement cation, désorganisant les arrières des
ils rejoignent d’autres réfractaires. reflète la pression cumulée de l’action lignes françaises à proximité du front.
3 000 Acquittés
(5 275)
57,1 %
2 000
1 000 Au boulet
(695)
Condamnation À mort 7,5 %
0 (nombre d’hommes) (262)
mois 04 05 06 07 08 09 10 11 12 01 02 04 06 08 10 11 12 01 2,8 %
année 1811 1812 1813 Source : R. Choron, Les Régiments de réfractaires
Source : R. Choron, Les régiments de réfractaires et la répression de la désertion et la répression de la désertion dans l’armée impériale
dans l’armée impériale (1808-1814), maîtrise, Université Paris I, 1998. (1808-1814), maîtrise, Université Paris I, 1998.
Loges militaires et Pour autant, certains piliers du régime surveillée. Là, il cherche à réaliser une
conspirations politiques ne sont pas très contents de son évo- convergence des oppositions, roya-
Lorsque Bonaparte prend le pouvoir, lution, qui lui fait tourner le dos à ses listes et jacobins, contre l’Empire auto-
les néojacobins paraissent les adver- origines. Ces militaires restés fidèles ritaire. Une tentative de coup d’État
saires les plus dangereux pour le nou- aux idéaux jacobins, comme le général se produit en octobre 1812. Pendant
veau régime. Le thème du « tyranni- Malet, se regroupent dans des struc- quelques heures, les autorités pari-
cide » est largement répandu dans tures clandestines inspirées des loges siennes hésitent ou sont neutralisées.
leurs cercles clandestins. L’affaire de maçonniques, dont Charles Nodier Si Malet et ses complices sont finale-
la « machine infernale », un attentat reconstruit l’histoire en 1815 sous le ment fusillés, cette tentative a mis en
terroriste organisé par les royalistes, nom de Philadelphes. Des sénateurs évidence la faiblesse du régime et sa
en décembre 1800, va être l’occasion cherchent une alternative à une trop trop forte personnalisation. Les conspi-
pour la police d’imputer cette tentative forte personnalisation du régime, dans rateurs ont pu faire croire à la mort de
d’assassinat de Bonaparte aux jaco- l’entourage de Sieyès, Fouché ou Napoléon en Russie et les dignitaires
bins, et de se débarrasser de leurs Servan. Une conjonction entre ces deux impériaux ont été traversés de doutes
principaux dirigeants par la déportation courants se produit en mai 1808, impli- sur sa légitimité. Aucun n’a mis en avant
ou l’intimidation. quant Malet, qui est placé en résidence la régence au profit du roi de Rome.
Hôtel
nco
Minimes
Pav ue
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Caserne
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idSaints-Pdes
de Mars
du ministre de la Force Dubuisson pendant trois heures,
de la Police Notre-Dame Place révélant l’étroite
i
Préfecture de la Bastille
e-M
physique de
du
de guerre
e
son chef.
Ru
Sainte-
Geneviève
Monument
in
e
son trône, tandis qu’Eugène résiste Napoléon en mars 1814 soudent les ROYAUME D’ESPAGNE
re
Sar
pendant quelques mois au nord. protagonistes autour du refus d’enta-
Madrid
L’Empire est réduit à la portion initiale mer des négociations avec le régime DU
Lisbonne Tage
du territoire, à la « Nation » dans ses impérial libéral. L’ambiance de mobili-
frontières de 1792. Comme à cette sation patriotique en France et le renou- PORTUGAL Va
Cordoue
époque, la guerre est patriotique, pour veau des symboles de 1793 mènent
la défense du territoire légué par l’His- les congressistes à une condamnation Séville
toire. Napoléon a repoussé, à la fin de sans appel de la Révolution et à la réaf- Carthag
1813, les offres de négociation des firmation du principe de légitimité. Il
coalisés sur la base des frontières telles s’agit d’un pacte de garantie mutuelle
qu’elles étaient établies en 1801. Il solli- des gouvernements installés, à condi- Rabat
cite l’appui des assemblées pour cette tion qu’ils ne soient pas le produit d’une
politique de salut public ; le Corps légis- insurrection populaire. Le document
250 km
latif rédige un rapport, très largement final est signé le 9 juin 1815.
Les Bourbons sont restaurés à Madrid, l’orbite russe. L’Angleterre fait pression présenté « dans le souhait de conso-
à Naples, à Paris. La France est rame- pour l’instauration du royaume unifié lider, en maintenant inviolée l’auto-
née à ses frontières de 1790. Les ter- de Belgique et des Pays-Bas. rité royale », entérine la disparition de
ritoires allemands sont partagés entre Le nouvel équilibre européen de l’Empire. La France perd, au profit de
la Prusse qui s’étend vers l’ouest en Vienne tourne le dos aux aspirations la Prusse et des Pays-Bas, Landau,
annexant la Westphalie, l’Autriche nationales et libérales qui s’expriment Sarrebruck et Sarrelouis, Bouillon,
qui rétablit son influence sur l’Ita- en Italie, en Allemagne, en Pologne, Philippeville et Mariembourg, ainsi que
lie du Nord, et une nébuleuse appe- en Espagne. L’Angleterre, la Russie, les conquêtes territoriales des armées
lée « Confédération germanique ». l’Autriche et la Prusse concluent en révolutionnaires entre 1790 et 1792. En
Le royaume de Piémont-Sardaigne, novembre 1815 un pacte d’alliance outre, elle doit payer 700 millions de
restauré, annexe la Ligurie. Le pape qui déclenche une action commune francs d’indemnités et entretenir une
Pie VII a retrouvé sa puissance tem- contre tout mouvement révolution- armée alliée d’occupation de 150 000
porelle avec les États pontificaux. La naire en France et en Europe. Signé le soldats sur les territoires frontaliers du
Pologne et la Finlande tombent dans 10 novembre 1815, le traité de Paris, pays pour une durée de cinq ans.
St-Pétersbourg
Christiana
NORVÈGE Stockholm
Volga
Moscou
Glasgow Mer ROYAUME
du DE SUÈDE
Mer Dvina
ROYAUME - UNI Nord ROYAUME
Copenhague Baltique
Dublin DE DANEMARK
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Weser
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Brême RUSSIE
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Berlin Poznan
Londres Varsovie
Provinces-
Unies ROYAUME
Manche Bruxelles Cologne Leipzig Kiev
Elb Od DU CONGRÈS
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ine GERMANIQUE Prague Cracovie
Paris
Da
Nantes Stuttgart nu
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FRANC E helvétique EMPIRE
Lyon D ’A U T R I C H E
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Bordeaux Milan Venise Zagreb
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Rhôn
Bucarest M e r
Toulouse Gênes Modène
Gênes Belgrade
E Mer No i re
Lucques Florence
Marseille Grand-duché Danube
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E
re
Traces d’Empire
Plus qu’une simple mémoire ou mythologie entretenue par les anciens combattants, la légende
impériale se forge durant tout le XIXe siècle par le biais de traces laissées par les différents
serviteurs du régime : des ingénieurs aux militaires, des artistes aux archivistes, tous sont porteurs
d’héritages divers, voire opposés, à l’image finalement du projet politique, complexe et souvent
paradoxal, incarné par Napoléon Bonaparte entre 1800 et 1815.
Inscriptions matérielles et dans leurs dépôts d’origine. En France, matérielles laissées par le travail des
spatiales de l’Empire ces collections ont en effet subi des bibliographes, des artistes et des archi-
À partir de 1815, une large partie des reclassements, des restaurations, des vistes au service de l’Empire. Ailleurs,
archives, des bibliothèques et des modifications qui, loin d’être immé- des ingénieurs, dans la continuité des
collections d’art confisquées par les diatement et totalement détruites par projets bonapartistes, sont à l’origine
armées et les administrateurs français leurs nouveaux propriétaires, consti- d’importants chantiers.
depuis le Directoire sont réinstallées tuent, après 1815, autant de traces Le projet de relier la mer Méditerranée
à la mer Rouge est repris lors de l’ex-
pédition d’Égypte. Plusieurs savants
UN NOUVEAU CHAMP DE BATAILLE : L’AMÉRIQUE LATINE
de l’Institut du Caire et ingénieurs
des Ponts et Chaussées sont chargés
Ligne du traité de 1819 Soulèvements de 1810-1814 d’étudier les possibilités de creuser
entre l’Espagne et les États-Unis
Juntes libérales
et autonomistes l’isthme de Suez. À partir de 1820, l’en-
ÉTATS-UNIS
Gouvernement treprise est portée par des membres
insurrectionnel du courant saint-simonien : un projet
Floride de Morelos (1813)
Golfe Tro piq ue
MEXIQUE
du Mexique du Ca nc er Restauration du régime de canal est présenté aux Égyptiens en
1821
HAÏTI SAINT-DOMINGUE espagnol (1815) 1833 par Prosper Enfantin, ingénieur
Honduras 1804 1821
Mexico brit. et économiste français, qui fonde la
Porto Rico (Esp.)
Acapulco HONDURAS Société d’études pour le canal de Suez
1821 Mer des Caraïbes
GUATEMALA Côte des Caracas 1810 en 1846. Au début des années 1860,
Mosquitos
SALVADOR OCÉAN
1821 NICARAGUA
(Brit.) Maracaibo avec le soutien des autorités égyp-
(1823) Angostura ATL A N TI QUE
COSTA RICA
1817 Guyanes tiennes et de Napoléon III, les travaux
Pantano de Vargas Carabobo (Brit.)
1819 Bogotá 1821 (Holl.) (Fr.)
d’aménagement du canal s’accélèrent.
Boyacá VENEZUELA Éq ua te ur
1822 Bomboná 1819 Le chantier devient alors un objet de
1822 Pichincha 1811
COLOMBIE tension entre les empires français et
1810 zone
Galapagos Quito 1813 Ama
Guayaquil ÉQUATEUR anglais.
Pernambuco
O CÉAN 1809 (Recife)
PACIFIQUE PÉROU
1821
Les vétérans, entre les prisons
Junín 1824 BRÉSIL russes et les croisades
Soulèvements de 1816-1824 Lima Ayacucho 1824 1822
Congrès
1821 libérales
La Paz
Soulèvement de 1817 BOLIVIE Favorisées par la fragilité du pouvoir
Victoires des insurgés 1825 de Joseph Bonaparte à Madrid, les
Campagne de San PARAGUAY Rio de Janeiro
guerres d’indépendance en Amérique
Martín (1817-1821) Tucumán 1811 Trop ique
1816 Asunción 1810 du Cap rico rne du Sud ont débuté avant la chute de
Campagne de Bolívar
(1817-1824) Chacabuco CHILI l’Empire en 1815. Dès les premiers
ná
1817 1818
Para
1821 Date d’indépendance Río URUGUAY combats, elles ont attiré plusieurs
de fait Valparaíso de la Plata 1828
centaines d’anciens officiers napo-
Champ d’Asile (1819) Santiago Maipú 1818 Montevideo
1810 Buenos Aires 1810 léoniens. Ce sont plus de mille cinq
Arrivée d’officiers ARGENTINE
napoléoniens 1816 cents vétérans de la Grande Armée
Grande Colombie qui ont participé aux combats de l’in-
ie
(1819-1830) Chiloé
on
et au Venezuela, 200 au Brésil, 400 au et un lopin de terre ; puis ce sont les comportèrent comme une élite tech-
Chili-Argentine-Pérou. artisans et ouvriers de métier qui se nicienne structurée par le service de
En rupture avec le régime de la voient offrir le même statut. Un quart l’État, quel que soit le poste occupé.
Restauration, ces derniers viennent des Français prisonniers deviennent
combattre en faveur de la liberté et ainsi sujets du tsar (20 000 environ). La mazurka de Dabrowski
rechercher de nouvelles opportuni- En 1837, 1 500 vétérans de la Grande « La Pologne n’a pas encore disparu, /
tés de carrière que ne peut plus leur Armée étaient installés à Moscou. Tant que nous vivons / Ce que l’étranger
offrir l’armée française, en très forte nous a pris de force, / Nous le repren-
réduction d’effectifs. Il faut donc tenir Les destins des élèves-officiers drons par le sabre. / Marche, marche
compte, tant des motivations poli- de l’École militaire de Modène Dombrowski, / De la terre italienne
tiques (la haine de l’Espagne et de Sur 171 élèves admis à l’École mili- vers la Pologne ; / Sous ta direction, /
l’absolutisme) que des considérations taire de Modène entre 1801 et 1814, Nous nous unirons avec la nation /
personnelles (la quête de la gloire et le 54 passent au service du duché de Nous passerons la Vistule, nous passe-
goût de l’aventure). Si certains d’entre Modène ou de l’Autriche après 1815 ; rons la Warta, / Nous serons polonais. /
eux rejoignent les États-Unis, d’autres 46 se retirent dans la vie privée (occu- Bonaparte nous a donné l’exemple, /
s’engagent directement aux côtés pant des emplois civils de techni- Comment nous devons vaincre. »
de libertadores. Ainsi, alors qu’en ciens), 2 refusent la pension accordée Composé par le poète Józef Wybicki
Nouvelle Grenade, Simon Bolivar par l’Autriche et 5 partent en exil. Les durant la campagne d’Italie en 1797,
connaît des revers importants, il peut autres n’ont pas fait une carrière mili- l’hymne national polonais est le seul
progressivement s’appuyer, à partir de taire, mais civile : ingénieurs, entrepre- à faire mention, aujourd’hui encore,
1815, sur une filière particulièrement neurs, enseignants. du nom de Bonaparte. Ce chant fut
efficace qui lui permet de recruter des La participation aux événements du d’abord intitulé « Chant des légions
soldats expérimentés, en particulier Risorgimento fut minoritaire : 3 prirent polonaises en Italie », en l’honneur
des Allemands licenciés du service part à la révolution libérale de 1821, des légions créées au lendemain du
français et regroupés sous les ordres 10 aux mouvements de 1830, 8 aux troisième partage de la Pologne en
du capitaine Georges Elsam. Intégrés journées révolutionnaires de 1848. 1795. Sous la conduite de Jan Henrik
dans les sociétés du sous-continent Deux vécurent suffisamment long- Dabrowski, nommé général en 1797
américain, ces hommes contribuent à temps pour connaître l’unité italienne après s’être distingué à la bataille de
la lutte en faveur de la cause patrio- de 1859. Novi, une des légions est intégrée à
tique et parviennent souvent à relancer Malgré ces engagements politiques l’armée d’Italie. Cette légion entre à
leur carrière dans leur pays d’accueil. divers, les anciens élèves-officiers se Rome en mai 1798 et à Naples en 1799.
À partir de 1823, l’Espagne devient le
champ de bataille entre les conser-
vateurs, mobilisés en faveur du réta- LA GRÈCE, REFUGE DES LIBÉRAUX POURCHASSÉS
blissement de Ferdinand VII dans ses Mer
Andrinople (Edirne) Noire
prérogatives, et de nombreux vétérans Arrivée des
philhellènes 1829 Constantinople
napoléoniens qui se rangent du côté
Combats Alexandroupolis Bosphore
des libéraux, formant le plus sou- Mer
Traité Salonique de Marmara
vent les cadres des régiments fran-
Congrès
çais qui prennent part aux combats
s
lle
ne
a
Lemnos
Da
Sámos
Péloponnès e Le Pirée
poursuivre leur combat politique. Mais Nauplie Épidaure
Mer
tous les vétérans ne participent pas à (1825) 1822
Ionienne Náxos
ces aventures. Navarin Kalamata
Cyclades
En Russie, le nombre des prisonniers 1827 1821
Source : W. Bruyères-Ostells,
Dodécanèse
de guerre oscille entre 150 000 et
Cythère
200 000. La moitié seulement survivra. Rhodes
EN CONCLUSION
L’Europe du refus
L’aventure militaire, de plus en plus
étendue, contribue à provoquer des
rencontres inattendues, supports
d’appréhensions, de craintes et de
fantasmes alimentés par les stéréotypes
construits de longue date sur les différents
peuples. Aux marges orientales et
méridionales de l’Europe, les soldats
français, hollandais, belges ou allemands
ont l’impression d’entrer dans des pays
pauvres, arriérés et dangereux, dont les
populations ne sauraient prétendre au
statut de civilisé. Confronté à la guérilla
espagnole, un soldat d’un régiment
westphalien n’aura ainsi de cesse dans
son journal de dénoncer les « barbares ».
Réintégrés dans la vie civile, de nombreux
vétérans prendront la plume autant
pour construire la mémoire glorieuse
de l’épopée militaire bonapartiste que
pour en rappeler les souffrances.
Conclusion
Chronologie de l’Europe
napoléonienne (1799-1815)
Si cet ouvrage porte sur la période impériale, les auteurs ont fait le choix de faire débuter
cette chronologie à la prise de pouvoir de Bonaparte et à la mise en place du Consulat,
mise en perspective nécessaire pour comprendre les diverses mutations de l’Empire.
2 août 1806 Abolition du régime féodal 4 décembre 1808 Napoléon à Madrid. 28 août 1811 Création d’un Conseil
dans le royaume de Naples. Suppression des droits féodaux et de des subsistances pour faire face
14 août 1806 Création des majorats. l’Inquisition, réduction du nombre de à la crise alimentaire.
couvents. 15 novembre 1811 Un petit séminaire
26 septembre 1806 Ouverture de
l’Exposition industrielle de Paris. 12 décembre 1808 Abolition du servage est autorisé par département.
et des corvées dans le grand-duché 2 mars 1812 Graves troubles
14 octobre 1806 Batailles de Iéna et
de Berg. de subsistances à Caen.
d’Auerstaedt.
21 novembre 1806 Décret de Berlin 18 mars 1812 Constitution libérale
1809-1812 de Cadix.
qui organise le blocus continental.
1er janvier 1809 Le Code civil est mis en 4-8 mai 1812 Décrets contre
10 décembre 1806 Réunion du Grand
vigueur dans le royaume de Naples. l’accaparement et le maximum
Sanhédrin pour l’adoption d’un statut
du prix du grain.
civil des juifs. 12 janvier 1809 Capitulation de Victor
Hugues à Cayenne. 24 juin 1812 Début de la campagne
2 mars 1807 Décret sur le statut des juifs.
de Russie.
22 juillet 1807 Création du grand-duché 30 janvier 1809 Prise de la Martinique
par les Anglais. L’exportation des fils 24 septembre 1812 De Stockholm,
de Varsovie.
de coton est autorisée en France. Mme de Staël appelle à une croisade
29 juillet 1807 Le nombre de théâtres du « monde libre » contre « l’ennemi
à Paris est réduit à huit. 9 avril 1809 Début de l’insurrection du genre humain ».
du Tyrol.
16 août 1807 Jérôme, roi de Westphalie. 22-23 octobre 1812 Coup d’État manqué
6 juillet 1809 Bataille de Wagram. du général Malet à Paris.
19 août 1807 Suppression du Tribunat.
Arrestation du pape.
11 septembre 1807 Publication du 18 décembre 1812 Napoléon est
7 juillet 1809 Capitulation de la garnison de retour à Paris.
Code du commerce.
française de Santo-Domingo.
15 septembre 1807 Création du cadastre
15 décembre 1809 Un sénatus-consulte 1813-1815
napoléonien.
prononce le divorce de Napoléon. 9 février 1813 L’armée russe occupe
16 septembre 1807 Création de la
Cour des comptes. 30 janvier 1810 Capitulation de la le duché de Varsovie.
garnison française de la Guadeloupe. 16 février 1813 La Prusse décrète
21 septembre 1807 Publication du Création du domaine extraordinaire. la mobilisation générale.
dernier volume de la Décade
philosophique. 5 février 1810 Décret sur l’organisation 3 avril 1813 Levées exceptionnelles de
de la librairie. conscrits et mobilisation des gardes
13 octobre 1807 Décret de Fontainebleau
17 février 1810 Annexion de Rome et des nationaux. Début de la campagne
qui durcit les dispositions du blocus
États pontificaux. d’Allemagne.
continental.
20 février 1810 Andreas Hofer, chef 21 juin 1813 Défaite française à Vitoria,
19 novembre 1807 Le corps dans le Pays basque, devant Wellington.
expéditionnaire de Junot envahit de l’insurrection du Tyrol, est fusillé
le Portugal. à Mantoue. 18 octobre 1813 Bataille des Nations
3 mars 1810 Décret rétablissant les à Leipzig.
1er janvier 1808 Entrée en vigueur prisons d’État. 15 novembre 1813 Rappel de 150 000
du Code de commerce.
30 mars 1810 Promulgation du statut conscrits des levées antérieures.
1er mars 1808 Sénatus-consulte qui de l’École normale supérieure. 25 janvier 1814 Début de la campagne
organise la noblesse impériale. de France.
2 avril 1810 Mariage de Napoléon
7 mars 1808 Fontanes grand maître et de Marie-Louise aux Tuileries. 2 avril 1814 Le Sénat proclame
de l’Université. la déchéance de Napoléon.
7 juin 1810 Inauguration d’un Conseil
17 mars 1808 Décret organisant des fabriques et des manufactures. 4 avril 1814 Abdication de Napoléon.
l’Université impériale. Décret organisant 3 mai 1814 Louis XVIII fait son entrée à
9 juillet 1810 Réunion de la Hollande
le culte juif. Paris. C’est la première Restauration.
à l’Empire.
2 mai 1808 Soulèvement populaire de 30 mai 1814 Le traité de Paris ramène
15 août 1810 Inauguration de la colonne
Madrid contre la garnison française. la France à ses limites de 1792.
Vendôme.
3 mai 1808 Féroce répression du 24 septembre 1810 Interdiction 1er novembre 1814 Ouverture du congrès
soulèvement. de De l’Allemagne et exil de Germaine de Vienne.
4 juin 1808 Joseph, roi d’Espagne. de Staël. 1er mars 1815 Napoléon débarque
9 juin 1808 Découverte de la première 2 décembre 1810 Decaen capitule à Golfe-Juan, près de Fréjus.
conspiration du général Malet. devant les Anglais à l’île de France. 13 mars 1815 Le congrès de Vienne met
20 juin 1808 Le Code civil est appliqué 1er janvier 1811 Mise en vigueur Napoléon au ban de l’Europe.
dans le royaume de Naples. du Code pénal. 22 avril 1815 Promulgation de l’Acte
5 juillet 1808 Décret généralisant 4 février 1811 Suppression de tous les additionnel aux constitutions de l’Empire,
les ateliers de charité. journaux parisiens, sauf quatre. qui fonde un Empire libéral.
22 juillet 1808 Défaite française de Bailén 20 mars 1811 Naissance du roi de Rome. 1er juin 1815 Résultats du plébiscite
devant les Espagnols. qui entérine l’Acte additionnel.
25 avril 1811 Convocation à Paris du
21 août 1808 Défaite de Junot à Vimeiro, concile national des évêques français 9 juin 1815 Clôture du congrès de Vienne.
près de Lisbonne, devant Wellesley. et italiens. 18 juin 1815 Bataille de Waterloo.
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Atlas mondial de l’eau Atlas des forêts Atlas de l’Amérique Atlas de l’islam
Défendre et protéger dans le monde précolombienne Lieux, pratiques et idéologie
notre bien commun Joël Boulier Sous la direction de Brigitte Anne-Laure Dupont
David Blanchon Laurent Simon Faugère et Nicolas Goepfert
Atlas des frontières Atlas historique Atlas des premières Atlas de la Shoah
Retour des fronts, des États-Unis colonisations La mise à mort
essor des murs Lauric Henneton XVe-début XIXe siècle : des Juifs d’Europe,
Hugo Billard des conquistadores 1939-1945
Frédéric Encel aux libérateurs Georges Bensoussan
Marcel Dorigny
Atlas de l’empire
• Une analyse fine et contrastée du projet politique de Napoléon,
officiellement inspiré des Lumières mais bâti sur la conquête
et le contrôle autoritaire des populations.
1799-1815
• Les dynamiques démographiques, sociales, économiques
et culturelles : un état des lieux des grands bouleversements
napoléonien
de l’époque.
• Un héritage pérenne : création du Code civil, développement
des voies de communication, réformes de l’administration,
modernisation des villes, essor de Paris en capitale impériale…
Illustration de couverture :
ISSN : 1272-0151 Jacques-Louis David, L’empereur Napoléon
dans son bureau des Tuileries (détail),
huile sur toile, 1812, National Gallery of Art,
Washington
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